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Gérard Roland, Economie Politique Chapitre 19 408 CHAPITRE 19 MONNAIE ET TAUX DE CHANGE Les échanges internationaux donnent lieu à des paiements internationaux qui nécessitent le recours à des devises, par le biais du taux de change et du marché des changes. Dans ce chapitre, nous allons parler des taux de change, du marché des changes et des différents régimes de change. Cela nous donnera l’occasion de voir, d’une part, la relation entre la balance des paiements et le taux de change et, d’autre part, la relation entre la monnaie et le taux de change. 1. LE MARCHÉ DES CHANGES 1.1. Définitions Le marché des changes est un marché sur lequel on achète et on vend des devises. S’il n’y a qu’une seule devise – la livre sterling (£) sur le marché des changes en Belgique, l’offre et la demande pour la £ proviennent des échanges entre le Royaume-Uni et la Belgique. Un euro (€) a un prix qu’on notera e, c’est-à-dire qu’un € vaut un certain nombre de £ le prix de la devise, également appelé le taux de change. Le taux de change est donc le prix de la devise nationale : 0,6 £ pour 1 €; du point de vue britanique, ce sera 1/0,6 1,6 € pour 1 £. La notion de taux de change recouvre les deux définitions. Pour éviter toute confusion, nous adopterons la convention suivante: lorsque nous parlerons de taux de change, cela voudra dire en général prix de la devise nationale. Dans ce sens, une appréciation du taux de change signifiera que les devises étrangères coûtent moins cher. Par contre, nous parlerons de dépréciation de la monnaie pour signifier que la monnaie nationale voit son cours augmenter à l’étranger. On peut cependant éviter toute confusion en adoptant la terminologie suivante: 0,6 £ pour 1 € représente le taux de change de l’€ en £ (le prix de l’€ en £) et 1,6 € pour 1 £ représente le taux de change de la £ en € (le prix de la £ en €). Lorsque le prix de l’€ diminue, cela signifie que l’on obtient moins de £ pour 1 € : il y a une dépréciation de l’€ par rapport au £. Plus e est faible, plus le € est bas par rapport au £.

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CHAPITRE 19

MONNAIE ET TAUX DE CHANGE

Les échanges internationaux donnent lieu à des paiements internationaux qui nécessitent

le recours à des devises, par le biais du taux de change et du marché des changes. Dans ce

chapitre, nous allons parler des taux de change, du marché des changes et des différents

régimes de change. Cela nous donnera l’occasion de voir, d’une part, la relation entre la

balance des paiements et le taux de change et, d’autre part, la relation entre la monnaie et

le taux de change.

1. LE MARCHÉ DES CHANGES

1.1. Définitions

Le marché des changes est un marché sur lequel on achète et on vend des devises.

S’il n’y a qu’une seule devise – la livre sterling (£) – sur le marché des changes en

Belgique, l’offre et la demande pour la £ proviennent des échanges entre le Royaume-Uni

et la Belgique. Un euro (€) a un prix qu’on notera e, c’est-à-dire qu’un € vaut un certain

nombre de £ le prix de la devise, également appelé le taux de change.

Le taux de change est donc le prix de la devise nationale : 0,6 £ pour 1 €; du point de vue

britanique, ce sera 1/0,6 ≈ 1,6 € pour 1 £. La notion de taux de change recouvre les deux

définitions. Pour éviter toute confusion, nous adopterons la convention suivante: lorsque

nous parlerons de taux de change, cela voudra dire en général prix de la devise nationale.

Dans ce sens, une appréciation du taux de change signifiera que les devises étrangères

coûtent moins cher. Par contre, nous parlerons de dépréciation de la monnaie pour

signifier que la monnaie nationale voit son cours augmenter à l’étranger. On peut

cependant éviter toute confusion en adoptant la terminologie suivante: 0,6 £ pour 1 €

représente le taux de change de l’€ en £ (le prix de l’€ en £) et 1,6 € pour 1 £ représente le

taux de change de la £ en € (le prix de la £ en €).

Lorsque le prix de l’€ diminue, cela signifie que l’on obtient moins de £ pour 1 € : il y a

une dépréciation de l’€ par rapport au £. Plus e est faible, plus le € est bas par rapport au

£.

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Le taux de change effectif d’une monnaie est un indice du taux de change tenant compte

de l’importance des relations commerciales avec les autres pays. Le taux de change

effectif est donc un panier de taux de change d’une monnaie par rapport à différentes

monnaies.

Prenons un exemple. Supposons que la Belgique a deux partenaires commerciaux

représentant chacun 50% de son commerce extérieur: le Royaume-Uni et la Suisse. Un €

vaut respectivement 0,6 £ et 1,5 francs suisses (CHF). Le taux de change effectif sera un

panier avec 1/2 £ et 1/2 CHF. L’indice correspondant vaudra 0,5x0,6 + 0,5x1,5 = 1,05.

Supposons que l’€ passe à 0,75 £, soit une appréciation de 25% par rapport au £. Le taux

de change effectif passera à 0,5x0,75 + 0,5x1,5 = 1,125, soit une appréciation du taux de

change effectif de 0,075/1,05 ≈ 7% représentant la diminution effective du coût des

devises pour la Belgique.

1.2. L’offre et la demande pour une devise

L’analyse du marché des changes va pouvoir être faite à partir d’un simple graphique

d’offre et de demande. Si nous étudions l’offre et la demande de £, nous porterons les

quantités de « £ » en abscisse et le prix de la « £ » en ordonnée, soit 1/e.

1.2.1. L’offre

Du point de vue de la balance des opérations courantes, l’offre est fournie principalement

par les exportateurs belges qui vendent des produits belges au Royaume-Uni. Ils

reçoivent en échange des £ qu’ils offrent ensuite sur le marché des changes. On suppose

que l’offre de £ augmente avec le prix de la £.

Pourquoi l’offre augmente-t-elle avec le prix de la devise?

Si la £ augmente par rapport à l’euro, les produits belges deviennent relativement moins

chers pour les Britaniques : un bien qui vaut 100 € aujourd’hui vaudra moins en £ si

celui-ci augmente. Les produits belges deviennent plus compétitifs. Donc, lorsque le prix

de la devise nationale diminue, les exportateurs sont plus compétitifs et exportent plus.

Ceci augmente leurs recettes d’exportation et ils offrent plus de £ sur le marché des

changes.

L’offre vient non seulement des exportateurs mais aussi des investisseurs directs

étrangers: si les Britaniques construisent une usine en Belgique, ils paient avec des £.

Cela constitue une entrée de devises, d’où une augmentation de l’offre de devises. De

même, si des banques belges empruntent à des banques britaniques, cela constitue une

entrée de devises, poste au crédit de la balance des capitaux. Du point de vue de la

balance des capitaux, l’offre de devises ne varie pas nécessairement avec le prix de la

devise. On supposera que cette offre est totalement inélastique, nous l’avons noté Zk sur

le graphique 19.1. Elle vient donc s’ajouter simplement à l'offre de devises provenant des

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recettes d’exportation sans modifier la pente de la fonction d’offre qui, comme on vient

de le voir, est reliée à la compétitivité.

1.2.2. La demande

La demande est déterminée par les importations de produits britaniques : les importateurs

ont besoin de £ pour acheter au Royaume-Uni et donc ils vont demander des £. La

demande de £ diminue lorsque le prix du £ augmente : si le prix du £ augmente, un

produit britanique qui vaut 1 £ aujourd’hui (1 £ = 0,6 €) vaudra 1 £ demain où 1 £ = 0,75

€, donc le produit vaudra plus cher. Donc, lorsque le prix de la devise étrangère

augmente, la demande d’importation va diminuer et la demande de £, représentant la

demande de dépenses d’importations, diminuera également.

Du point de vue de la balance des capitaux, la demande de devises ne varie pas

nécessairement avec le prix de la devise. On supposera qu’une partie de cette demande

est totalement inélastique, nous l’avons noté Xk sur le graphique 19.1. Elle vient donc

s’ajouter simplement à la demande de devises provenant des importations sans modifier

la pente de la fonction de demande.

1.2.3. Les élasticités

Pour que les pentes soient telles qu’on les a décrites, il faut que les importations et les

exportations soient suffisamment élastiques par rapport aux prix. Voyons cela de plus

près.

L’offre de £ est constituée par les recettes d’exportation, autrement dit les quantités

exportées fois les prix à l’exportation. Si le prix de la £ diminue, les prix belges à

l’exportation augmentent et une diminution du volume des exportations va être observée.

Si les exportations diminuent, deux effets se manifestent: les prix à l’exportation

augmentent et les quantités exportées diminuent. Si la demande d’exportation est

inélastique par rapport au prix, une baisse de la £ augmente les prix belges à

l’exportation et les recettes à l’exportation. Dans ce cas, l’offre augmente lorsque le prix

de la £ diminue.

A l’inverse, si les exportations sont suffisamment élastiques par rapport aux prix, lorsque

la £ diminue, les prix à l’exportation augmentent, mais les quantités exportées diminuent

beaucoup plus. Les recettes à l’exportation diminuent ainsi que l’offre de £.

Un raisonnement analogue peut être appliqué aux importations: une baisse de la £ rend

l’achat de produits britaniques plus avantageux. Les prix à l’importation belges baissent

et les importations augmentent. Si les importations sont inélastiques par rapport aux prix,

suite à une diminution de la £ la demande de £ diminue. Le prix en £ reste le même et la

demande de dépenses d’importations reste constante. La demande de £ donc diminue.

Lorsque les importations sont élastiques par rapport aux prix, les dépenses à l’importation

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vont augmenter lorsque la £ baisse. Par conséquent, la demande de £ augmente.

La condition de Marshall-Lerner

Pour que la demande nette de £ (demande moins offre) diminue avec le £, il faut que la

somme des élasticités de la demande d’importations et d’exportations en volume soient

supérieures à 1. Ou encore, une dépréciation réelle de la monnaie n’améliore la balance

commerciale qu’à la condition que la somme des valeurs absolues des élasticité-prix de

l’offre d’exportation et de la demande d’importation soit supérieure à l’unité.

Ce qui revient à affirmer que l’effet-volume positif engendré par une dépréciation doit

être suffisamment intense pour compenser l’effet-prix négatif.

Cette condition porte le nom des deux économistes qui l’ont formulée : Alfred Marshall et

Abba Lerner.

1.2.4. Le taux de change d’équilibre

Dans la mesure où l’offre et la demande ont une pente différente, il existe un taux de

change d’équilibre : c’est le prix de la devise pour lequel la quantité offerte est égale à la

quantité demandée. Ce taux de change est e0 et il correspond à la quantité d’échange Q0.

Graphique 19.1: LE MARCHÉ DES CHANGES BELGE: € VS £

1/e (€/£)

1/e0

Q0

ZK XBOC

XK ZBOC

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Pour la clarté, les parties verticales de l’offre et de la demande de devises ne sont plus

reprises sur les graphiques suivants.

1.3. Les déplacements de l’équilibre

Quels sont les facteurs les plus importants influençant le taux de change d’équilibre?

1.3.1. L’évolution des goûts

Une campagne pour des produits britaniques qui remporte un grand succès va stimuler la

demande d’importation pour les produits britaniques. Par conséquent, à taux de change

identique – les prix restent inchangés – la demande de £ se déplace vers le droite en D£’.

Un nouvel équilibre s’établit en e1, ce qui correspond à une appréciation du £ par rapport

au € ou à une dépréciation du € par rapport au £.

Graphique 19.2: LE MARCHÉ DES CHANGES BELGE: AUGMENTATION AUTONOME DE LA DEMANDE DE £

1/e (€/£)

1/e0

Q0

D£’

Q1 Q0’

1/e1

De façon analogue, supposons qu’il y ait une vague d’engouement pour les produits

belges au Royaume-Uni. Cela entraînera une augmentation des exportations, donc une

augmentation de l’offre de devises, donc un déplacement de la fonction d’offre à droite et

vers le bas. Cela entraîne une baisse du taux de change d’équilibre du £ et donc une

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appréciation de l' € par rapport à ce dernier.

1.3.2. Les mouvements de capitaux

Supposons une augmentation des investissements directs belges au Royaume-Uni. Cette

augmentation des investissements directs représente une sortie de devises. Elle entraîne

donc un déplacement de la demande de £ vers D£’, ce qui augmente le taux de change

d’équilibre du £.

Les mouvements de capitaux influencent de plus en plus les taux de change. Au début des

années 80, il y eut une exportation importante de capitaux vers les USA, ce qui eut pour

effet une appréciation importante du dollar.

1.3.3. La spéculation

La spéculation joue également un rôle croissant dans la détermination des taux de change.

Supposons que les spéculateurs anticipent une appréciation du £ ou une dépréciation de l’

€. A ce moment, la demande de £ va augmenter. Celle-ci se déplace vers D£’ De fait, le

taux de change d’équilibre du £ va s’apprécier. C’est un exemple de prophétie

autoréalisatrice.

1.4. Arbitrage financier sur le marché des changes

Les spéculateurs, tout comme les autres opérateurs financiers sur les marchés financiers

sont à la recherche des placements les plus rémunérateurs et cherchent constamment à

faire des gains en capital sur les mouvements des devises.

Ces vingt dernières années, on a assisté à une globalisation de l’économie mondiale: les

marchés financiers nationaux sont devenus de plus en plus intégrés et se sont transformés

en un seul marché global où les capitaux voyagent sans cesse d’un pays à l’autre, 24 h sur

24 h. Cette évolution a débuté après le premier choc pétrolier (1973) au moment où le

surplus très important de la valeur des opérations courantes des pays producteurs de

pétrole a été compensé par une sortie de capitaux sous forme d’épargne placée sur les

différents marchés financiers du monde. Simultanément, les mouvements de capitaux

sont devenus de plus en plus libres dans le monde: les restrictions à la mobilité des

capitaux entre pays sont de moins en moins nombreuses. De facto, les capitaux sont de

plus en plus mobiles. Dans la mesure où la mobilité du capital est presque parfaite, le

capital va très rapidement se placer là où le return attendu est le plus élevé. Toute

information qui fait changer les anticipations de returns d’un pays à l’autre entraîne des

mouvements de capitaux d’une forte ampleur.

Ceci est lié à des mouvements spéculatifs, où les différents opérateurs sur les marchés

financiers mondiaux effectuent leurs placements de façon à maximiser les returns

attendus. Ils achètent des portefeuilles d’actifs dans l’espoir que le return total – ce qui

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correspond sur le marché des capitaux au revenu du capital (intérêts ou dividendes)

additionné aux plus-values attendues – soit supérieur au return que l’on peut obtenir sur

d’autres actifs ou portefeuilles d’actifs.

Dans ce contexte, les marchés des changes et le return extérieur – soit le taux d’intérêt

étranger (i*) moins la perte sur le taux de change (le taux de croissance de e noté ê) –

jouent un rôle très important.

Prenons un exemple : une somme de 100.000 € peut être placée en Belgique avec un taux

d’intérêt de 5 %. Le taux d’intérêt au Royaume-Uni est égal à 10%. Le taux de change est

de 0,6 £/€. Donc, placer 100.000 € au Royaume-Uni équivaut à un placement de 60.000

£. À l’échéance, on disposera de 66.000 £. Si l’euro monte à 0,75 £, ces 66.000 £

vaudront 88.000 €. Donc, au lieu d’obtenir 105.000 € – placement en Belgique – on

obtient 88.000 € en escomptant une appréciation de l’euro (perte de 12 %).

On peut établir une relation d’arbitrage très simple entre taux d’intérêt domestique i, taux

d’intérêt extérieur et anticipation du mouvement du taux de change, êe.

La formule réliant ces éléments est la suivante:

formule que l’on peut approximer par:

Cette relation d’arbitrage indique qu’il y a équilibre sur le marché des capitaux

internationaux, c’est à dire que les capitaux n’ont plus de raison de se déplacer, lorsque le

taux d’intérêt domestique est égal au taux d’intérêt étranger moins l’appréciation attendue

du taux de change national.

Cette relation est tout à fait fondamentale pour comprendre les mouvements de capitaux

entre pays. Elle permet d’expliquer pourquoi les taux d’intérêt peuvent varier entre pays,

même lorsque les mouvements de capitaux sont libres et qu’il y a mobilité parfaite des

capitaux. Si une dépréciation d’une monnaie est anticipée, une fuite des capitaux ne peut

être évitée que si le taux d’intérêt est relevé de façon à incorporer la dépréciation

attendue. Inversement, si une appréciation est attendue, le taux d’intérêt domestique peut

être plus bas que le taux d’intérêt étranger.

return extérieur = i* - ê

)ê1(

)i(1i)(1

e

*

i = i* - ê

e

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Les anticipations sont donc très importantes et les mouvements de capitaux sont

fortement influencés par les anticipations sur le futur. Les anticipations dépendent de

plusieurs choses. Elles dépendent, premièrement de ce qu’on appelle les fundamentals,

c’est à dire la situation macro-économique fondamentale d’un pays. Nous reviendrons

plus loin sur la relation entre taux de change et équilibre macro-économique et nous nous

contenterons d’évoquer ici certains éléments de base permettant de déterminer l’évolution

de la monnaie d’un pays.

Les anticipations sur l’évolution du taux de change nominal dépendent de l’évolution du

taux de change réel.

Le taux de change réel est le taux de change nominal, e, corrigé par le rapport des prix.

Regardons par exemple le taux de change réel de l’€ par rapport à la £: e est le prix de

l’€, p* l’indice des prix britaniques et p l’indice des prix pour la zone euro.

Prenons un exemple chiffré:

1 chemise britanique vaut 40 £; 1 chemise belge vaut 50 € ; le taux de change est de 0,6

£/€. Le taux de change réel est de 0,6x50/40 = 3/4. La chemise belge va donc se vendre

aux 3/4 du prix de la chemise britanique lorsque le taux de change nominal est de 0,6 £/€.

Le taux de change réel est une notion très proche des termes de l’échange (ratio des prix à

l’exportation sur les prix à l’importation). Il évolue essentiellement avec le différentiel

d’inflation, c’est à dire la différence entre l’inflation intérieure et extérieure.

Si le taux de change nominal e est constant et que les prix britaniques ont tendance à

baisser par rapport à l’€, les prix britaniques deviennent relativement moins chers sans

que le taux de change nominal n’ait bougé. Les prix britaniques sont plus compétitifs et le

prix réel de la £ a baissé. Le différentiel d’inflation entre la zone euro et le Royaume-Uni

cause donc une dépréciation réelle de la £ et une appréciation réelle de l’€. Pour évaluer

la compétitivité de la zone euro, le taux de change réel par rapport à l’étranger est donc

une mesure statistique importante. Si le taux de change réel de la £ a tendance à baisser,

cela signifie une baisse de compétitivité des produits belges. Une baisse durable de la

compétitivité causée par une inflation plus élevée qu’à l'étranger n’est pas tenable. Une

dépréciation de l'euro sera donc attendue.

Lorsqu’une monnaie a tendance à connaître une appréciation réelle à cause d’un

différentiel d’inflation, les marchés financiers anticipent une dépréciation nominale.

Inversement, lorsqu’une monnaie a tendance à connaître une dépréciation réelle parce

taux de change réel : e.*p

p

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que son inflation est plus faible qu’à l’étranger, les marchés financiers anticipent une

appréciation nominale. Les mouvements du taux de change réel donnent donc des

indications sur l’évolution future du taux de change nominal. Cela est basé sur le fait que

le taux de change réel est plus ou moins stable et ne change que suite à des chocs réels

(choc sur les termes de l’échange par exemple).

A quel niveau le taux de change réel va-t-il se stabiliser?

Une des réponses les plus connues à cette question est basée sur la théorie de la parité du

pouvoir d’achat (PPA). Cette théorie dit que le taux de change d’équilibre entre deux

monnaies doit nécessairement être le taux de change qui donne un pouvoir d’achat égal

pour les deux monnaies.

Le taux de change PPA est donc le taux de change nominal qui donne la parité du

pouvoir d’achat entre la chemise belge et britanique, soit e = 0,8. Dans l’exemple

précédent, la £ devrait se déprécier par rapport à l’euro ; autrement dit, l’euro devrait

s’apprécier de façon à se ramener à la parité du pouvoir d’achat. A ce niveau de taux de

change, la chemise belge (50 euros) est au même prix que la chemise britannique (40/0,8

euros).

L’évolution du taux de change nominal entre deux monnaies reflète le différentiel

d’inflation. En effet, si l’inflation au Royaume-Uni est moins élevée que dans la zone

euro, cela veut dire que les prix britaniques augmentent moins vite que les prix de la zone

euro : nécessairement, le prix du £ va devoir augmenter pour maintenir la parité du

pouvoir d’achat.

Exemple : après la Seconde Guerre mondiale, la France a eu systématiquement un taux

d’inflation supérieur à l’Allemagne, ce qui signifiait que le FF devait se déprécier par

rapport au DM de façon à maintenir une certaine parité du pouvoir d’achat.

Etant donné le caractère auto-réalisateur des anticipations, des bulles spéculatives

peuvent néanmoins apparaître conduisant à une appréciation ou dépréciation

anormalement forte d’une monnaie, déviant même durablement des “fundamentals” du

pays et s’écartant du taux de change qui serait prédit par la théorie de la parité du pouvoir

d’achat.

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2. LES DIFFÉRENTS RÉGIMES DE CHANGE

On opère une distinction fondamentale entre deux types de régimes: les taux de change

fixes et les taux de change flottants.

Lorsque le taux de change est déterminé uniquement par les forces du marché - soit la loi

de l’offre et la demande sur le marché des changes -, il s’agit d’un taux de change

flottant. Or, le marché des changes est un marché toujours en équilibre, c’est un marché

au jour le jour. Un régime de taux de change flottant reflète les déplacements de l’offre et

de la demande sur le marché des changes au travers des variations de ce taux.

Du point de vue terminologique, lorsqu’il y a un taux de change flottant, on utiliserà les

termes appréciation et dépréciation pour caractériser les variations du taux de change.

Lorsque le prix de la devise augmente, elle s’apprécie et, lorsque le prix de la devise

diminue, elle se déprécie. Bien entendu, une appréciation du £ induit une dépréciation du

€ par rapport au £.

Les taux de change entre les grandes monnaies internationales du moment - dollar, yen,

euro - sont des taux de change flottants.

Par contre, entre 1990 et l’introduction de l’euro, le taux de change entre le DM et le FB

était un taux de change fixe. Les deux pays s’étaient mis d’accord pour que FB et DM

soient convertis à un taux qui était fixe. Cet accord émanait de la Banque Centrale

allemande et de la Banque Centrale belge. Les deux monnaies étaient convertibles, c’est-

à-dire que les deux Banques Centrales s’engageaient à acheter et vendre autant de

devises que le marché l’exigeait. Si la demande de DM était supérieure à l’offre de DM

sur le marché des changes, la convertibilité de la monnaie impliquait que la Banque

Centrale belge intervienne et offre tous les DM nécessaires pour absorber la demande.

C'était une intervention de la banque centrale sur le marché des changes. Et donc, la

banque centrale belge vendait les DM dont le marché avait besoin au taux de change qui

avait été fixé. Pour pouvoir le faire, elle devait avoir des DM en réserve.

Dans un système de taux de change fixes, les banques centrales doivent avoir des

réserves en devises. La vente de DM par la banque centrale belge impliquait une baisse

de ses réserves en DM.

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Graphique 19.3: LE MARCHÉ DES CHANGES BELGE: INTERVENTION DE LA BANQUE CENTRALE (CHANGE FIXE)

QDM

1/e (FB/DM)

1/e0

Q0

DDM

ODM

DDM’

Q1 Qd’

1/e1

Qd’-Q0 = intervention de la Banque Centrale

(diminution des réserves)

dévaluation du FB

Si cette situation était momentanée, elle ne posait pas de problème. Mais, si elle

perdurait, la banque centrale belge devait continuer à vendre des DM sur le marché au

taux de change e0. Tant que le déséquilibre perdurait, la banque centrale devait vendre

une quantité égale à (Qd’- Q0). Si le déséquilibre durait trop, les réserves de devises de la

banque centrale s’épuisaient et cette situation n’était pas défendable trop longtemps. A

terme, une modification des parités en e1 était nécessaire, ce qui représentait une

réévaluation du DM par rapport au FB ou une dévaluation du franc belge.

Notons à ce stade une distinction importante entre régime de taux de changes fixes et

flottants. En régime de changes fixes, les interventions de la banque centrale influencent

le stock monétaire. Si l’offre de devises est inférieure à la demande de devises sur le

marché des changes, la banque centrale doit offrir les devises manquantes. En vendant les

devises, la Banque Centrale belge recevait des FB. Ceux-ci cessaient donc de circuler.

Une vente de devises entraîne donc une baisse du stock monétaire dans le pays en cas de

changes fixes. Inversement, un achat net de devises entraîne une hausse du stock

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monétaire. En taux de changes fixes, la banque centrale n’est donc pas vraiment libre de

fixer le stock monétaire dans l’économie puisque celui-ci variera en fonction des

déséquilibres sur le marché des changes. Elle peut néanmoins décider de stériliser les

effets du marché des changes sur le stock monétaire. Une stérilisation signifie que si une

vente de devises entraîne une baisse du stock monétaire, la banque centrale décide de

neutraliser cette baisse par une hausse concomitante (par exemple par une opération

d’open market).

En taux de changes flottant, le marché équilibre à tout moment l’offre et la demande de

devises. L’offre de monnaie n’est donc pas dépendante du marché des changes.

3. LE SYSTÈME MONÉTAIRE INTERNATIONAL

Les systèmes de paiements internationaux se distinguent non seulement par la distinction

entre le régime de taux de change fixes versus taux de change flottants, mais aussi par la

différence importante entre les règles versus la discrétion.

Règles : système comprenant des automatismes dans lesquels le gouvernement

n’intervient pas. Une série de règles déterminent des comportements d’ajustement sans

aucune intervention.

Discrétion : les gouvernements détiennent le pouvoir d’influencer le taux de change ou

les ajustements liés à des variations de taux de change. Le gouvernement a donc le

pouvoir d’intervention en fonction de ses objectifs et de son analyse du moment.

Les distinctions entre régime fixe et flottant d’une part, et règles versus discrétion d’autre

part, permettent de saisir les différents systèmes monétaires internationaux ayant existé

jusqu’à présent.

Taux de change annuel 1$=e.FB

25

30

35

40

45

50

55

60

1948

1953

1958

1963

1968

1973

1978

1983

1988

1993

1998

2003

1947-1971: Bretton

Woods

1999:

EMU

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Gérard Roland, Economie Politique Chapitre 19

420

3.1. Le système de l’étalon-or

Ce système a été le principal système au cours du 19e siècle et jusqu’au début de la

Première Guerre Mondiale. Cette époque a été marquée par la domination sans partage et

le rôle très important de la Grande-Bretagne.

Le système de l’étalon-or est un régime de taux de change fixes qui comprend aussi des

règles. Il s’agit donc d’un système qui laisse très peu de place pour des interventions

discrétionnaires.

Les principales caractéristiques du système de l’étalon-or étaient les suivantes

1) Chaque pays fixe le prix de l’or dans sa monnaie nationale : en Belgique, le prix

de l’once d’or en FB, en Grande-Bretagne, le prix de l’once en £, etc.

2) La monnaie est convertible en or : le gouvernement ou les autorités monétaires

responsables s’engagent à acheter et à vendre autant d’or que le marché le désire à

la parité fixée.

3) La création de monnaie n’est pas à la discrétion du gouvernement mais évolue

selon une règle liée au stock d’or : cette règle est appelée le système de la

couverture-or. Chaque £ en circulation était couverte par une quantité d’or

définie. Si le public achetait de l’or, automatiquement le stock monétaire

diminuait ; par contre, si la banque centrale achetait de l’or ou si le public vendait

de l’or à la banque centrale, le stock monétaire augmentait automatiquement.

Donc, il n’y avait aucun moyen de faire marcher la planche à billets.

Le prix de l’or fixait automatiquement le taux de change entre deux devises. Par exemple,

si 1 $ = 1 once d’or et 1 £ = 2 onces d’or, 1 £ = 2 $. Ce système possédait des ajustements automatiques. Supposons que le dollar est

surévalué (1 $ = 1 £), 1 $ permet d’acheter 1 £; avec 1 £, on obtient 2 onces d’or. Ces

deux onces d’or autorisent l’achat de 2 $. 1 $ permet en fait d’obtenir 2 $. Tout le monde

va alors demander des livres et personne ne voudra de dollar. La situation n’est pas à

l’équilibre. Donc, il y a une offre excédentaire de dollars et le dollar devrait baisser pour

s’ajuster automatiquement. Dans l’exemple ci-dessus le dollar devra baisser jusqu’à 1 $ = 0,5 £.

Dans le système de l’étalon-or, les parités étaient fixées automatiquement par le prix de

l’or et ce prix ne bougeait pas et, de ce fait-là, il y avait des ajustements automatiques. Ce

système avait un grand avantage: il empêchait l’inflation parce que le stock de monnaie

n’était pas à la discrétion du gouvernement. Par contre, les ajustements

macroéconomiques devaient se faire par des mouvements des prix et des salaires - ce qui

peut prendre du temps étant donné la rigidité des salaires à la baisse et ces ajustements se

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faisaient par des récessions qui pouvaient durer plus ou moins longtemps.

Le système de l’étalon-or a été abandonné après la seconde guerre mondiale. Dans l’entre

deux guerres, la situation économique était caractérisée par une inflation élevée. Celle-ci

résultait du financement monétaire des dépenses militaires et des dépenses publiques

liées à la reconstruction. Ces dépenses ont été financées par de la création monétaire qui a

entrainé de l’inflation. Un cas extrême d’inflation à cette période est celui de

l’hyperinflation allemande. L’indice des prix y est passé de 262 en janvier 1919 à 126

160 000 000 000 en décembre 1923. Au cours de l’année 1923 les prix ont été multipliés

par 452 998 200, c'est-à-dire que les prix étaient multipliés par 5 entre le début du mois et

la fin du mois.

Suite au krach boursier américain de 1929, l’économie mondiale a connu la période de la

Grande Dépression Le krach boursier a été symbolisé par le jeudi noir (jeudi 24 octobre

1929), lundi noir (28 octobre) et mardi noir, où l’indice Dow Jones a perdu,

respectivement 22,6 %, 13% et 12% de sa valeur. La Grande Dépression qui en a résulté

a entrainé une baisse de la production industrielle américaine de moitié entre 1929 et

1933 et une hausse du taux de chômage jusqu’à 25% en 1933. La crise s’est étendue en

Europe et dans le reste du monde.

Certains pays ont tenté de retourner au système de l’étalon-or avec une dépréciation de

leur monnaie nationale pour améliorer leur compétitivité. Une telle mesure ayant pour

effet de détériorer la compétitivité des autres pays. Cependant comme plusieurs pays

menaient ce genre de politique, les dévaluations s’annulaient l’une l’autre. Des

restrictions aux échanges internationaux ont été mises en place pour limiter les

importations et améliorer le solde courant. Ces politiques protectionnistes ont également

constitué un frein à l’économie mondiale. Ce type de politique non coopérative, menées

sans concertation internationale est ce qu’on appelle une « beggar-thy-neighbor policy ».

Elles ont pour effet de reporter les difficultés économiques d’un pays sur les autres, et ont

engendré des politiques équivalentes de la part des autres pays en représailles.

En résumé, la période de l’entre deux guerres a été caractérisée par de l’instabilité

financière, une hausse spectaculaire de l’inflation et du chômage, des politiques

économiques plus autarciques et une désintégration de la coopération économique

internationale.

3.2. Le système de Bretton Woods

Le système de Bretton Woods est le système international qui a prévalu après la Seconde

Guerre Mondiale. Il a été négocié à la fin de la 2e Guerre Mondiale, dès 1944,

notamment par le grand économiste anglais Keynes.

Ce système est un système d’étalon-dollar. Chaque pays avait une parité par rapport au

dollar. C’est un système de convertibilité dollar. Les banques centrales s’engageaient à

acheter ou à vendre autant de dollars que désirait le marché à la parité fixée. Le dollar,

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lui-même était convertible en or, à un taux de 35$ l’once. La parité de chaque monnaie

étant fixée par rapport au dollar, elles sont également fixées entre elles. Les fluctuations

du taux de change autour de la parité ne pouvaient pas dépasser 1%.

Comme tout régime de changes fixes, le système impose des contraintes pour la politique

monétaire. Les Etats-Unis ne peuvent pas mener de politique monétaire autonome. En

effet, le stock d’or étant donné, le stock de $ ne peut pas varier sous peine de modifier la

parité $-or.

Les problèmes potentiels d’un tel système sont, au moins, de deux ordres. Tout d’abord,

la crédibilité du système repose sur la crédibilité de la parité or-$. Celle-ci serait mise à

mal en cas de politique monétaire américaine autonome. Par exemple, une augmentation

du stock de dollar impliquerait une baisse du cours de l’or en dollar.

Un autre problème potentiel intervient en cas de déficit commercial persistant. Le stock

monétaire n’était pas lié aux réserves. Un pays qui connaissait un déficit de sa balance

commerciale entraînant une sortie de devises – donc une baisse du stock monétaire en

change fixe – avait la possibilité de stériliser cette baisse du stock monétaire par une

augmentation discrétionnaire du stock monétaire.

La discrétion du gouvernement sur le stock monétaire détruisait les ajustements

automatiques. Cela a conduit à des situations où des déficits de balance commerciale

persistaient sans être corrigés automatiquement. Et, dans ce cas, il ne reste plus qu’à

dévaluer. A noter que les parités étaient ajustables sauf pour les Etats-Unis.

La dévaluation est une mesure discrétionnaire qui va à l’encontre de la fixité du taux de

change. On essaie d’éviter la dévaluation et on laisse très souvent des crises se

développer avant d’envisager une dévaluation.

L’éventualité d’une dévaluation entraînait bien entendu la possibilité de spéculer. La

spéculation renforce encore le déficit. Cela rend très méfiant par rapport aux mouvements

de capitaux et, dans un système de taux de change fixes et de Bretton Woods en

particulier, toutes sortes d’obstacles à la mobilité des capitaux sont mis en œuvre pour

essayer de limiter au maximum les mouvements de capitaux.

D’autres problèmes étaient liés à la situation particulière américaine. Entre 1958 et 1965,

le déficit courant américain s’est creusé, ce qui a nécessité des interventions des autres

Banques Centrales (pour maintenir la parité). Ces interventions se sont traduites par une

augmentation des réserves en dollar et une expansion monétaire, génératrice d’inflation.

Dans le milieu des années 60, les Etats-Unis ont financé le déficit de leur balance des

paiements et leur déficit (du en à l’augmentation des dépenses militaires US, et des coûts

de la guerre du Vietnam) , en imprimant de la monnaie. Ceci a accru le stock de dollars

dans le monde (les dollars qui ne se trouvent pas aux USA sont appelés les

“eurodollars”). Les réserves de dollars ont fortement augmenté dans les autres pays, ce

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qui a favorisé l’inflation car l’inflation américaine a été exportée dans le reste du monde.

Ceci a aussi pour effet de miner la crédibilité de la parité or-$ et donc du système. Le

système de l’étalon-or empêchait cette situation car le stock de monnaie était fixe.

De 1968 à 1973, des attaques spéculatives sur le cours de l’or se sont succédées. En 1971,

suite à des nouvelles attaques spéculatives, les Etats-Unis demandent à dévaluer le dollar.

Ceci nécessitait l’accord de l’ensemble des pays membres du système de Bretton Woods.

N’ayant pu obtenir l’unanimité sur cette mesure, Nixon annonce la fin de la convertibilité

du $ en or en 1971. Les attaques spéculatives se sont poursuivies en 1971, 1972, 1973

jusqu’à l’abandon du système.

Le système de Bretton Woods a été supprimé en 1974 et le dollar a commencé à flotter

par rapport aux autres monnaies.

Différentes institutions internationales ont été crées dans le système de Bretton Woods

afin de promouvoir la coordination internationale.

Le Fonds Monétaire International (FMI) a été créé en 1944. Il a pour objectif de

promouvoir la coopération monétaire pour garantir la stabilité du système monétaire

international. Le but ultime est de favoriser le plein emploi, la stabilité des prix,

l’équilibre extérieur, le libre-échange et la stabilité des changes. Le FMI a pour but

d’établir un système multilatéral de paiements. Il prévoit aussi la possibilité

d’interventions en cas de crises de change ou de balance des paiements. Des facilités de

crédit (les Droits de Tirage Spéciaux) peuvent être utilisées pour financer un déficit

extérieur sans avoir recours aux réserves des Banques Centrales. En cas de recours

important aux facilités de crédit, ce qui révélerait des problèmes économiques plus

profonds, l’utilisation des facilités de crédit s’accompagne d’une supervision des

politiques macroéconomiques. La crise des dettes souveraines dans la zone euro en est un

exemple.

La Banque mondiale a été créée en 1945. Ses activités se concentrent sur la

reconstruction et le développement. Elle est donc essentiellement orientée vers les pays

en voie de développement. Elle assiste des projets en matière d’éducation, d’agriculture,

d’industrie, de santé,..., par des prêts à des taux préférentiels aux pays membres en

difficulté, en contrepartie de politiques d'ajustement structurel.

En matière d’échanges internationaux, le GATT (General Agreement on Tarrifs and

Trade) a été crée en 1948. L’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), crée en

(1955) lui a succédé. L’objectif est de promouvoir les échanges internationaux par une

réduction des barrières tarifaires et non tarifaires (telles que les quotas ou règlementations

techniques) aux échanges internationaux. Elle offre un cadre aux négociations

commerciales internationales. Elle comprend également un organe de règlement des

différends commerciaux. Elle examine les politiques commerciales nationales. Elle

fournit aussi une assistance technique et des programmes de formation dans le domaine

de la politique commerciale pour les pays en développement.

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Par ailleurs, les G7, G8 et G20 constituent des forum de discussion pour les grands

problèmes économiques mondiaux.

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3.3. Le système monétaire européen

Une première tentative de développer un système permettant de stabiliser les taux de

change en Europe a été la création du Serpent Monétaire Européen. Mais le système s’est

avéré trop instable.

Caractéristiques du Système Monétaire Européen (S.M.E.):

1) L’ECU (European Currency Unit) était un panier de devises : dans un Ecu, il y

avait des DM (30%), des FB (7%), etc.

2) 20% des réserves de chaque pays étaient transférées au FECOM (Fonds Européen

de Coopération Monétaire), pour lesquelles ils recevaient en échange des Ecus,

utilisés comme réserves pour intervenir sur le marché des changes européen.

3) Chaque pays avait un taux de change pivot par rapport à ses partenaires: chaque

monnaie avait une parité en Ecu, c’est-à-dire qu’il existait un prix en Ecus pour

chaque monnaie. Donc, la parité Ecu était définie – elle était équivalente à un taux

de change fixe – mais néanmoins chaque monnaie avait le droit de fluctuer de

plus ou moins 2,25 % par rapport à cette parité définie (les marges de fluctuations

étaient plus larges, 6%, pour l’Italie, l’Espagne et le Royaume-Uni). Dès qu’il y

avait un risque de dépasser cette marge, tous les participants au S.M.E.

s’engageaient à intervenir pour défendre la parité.

Exemple : si le DM avait tendance à beaucoup trop s’apprécier, il y avait une

intervention coordonnée pour vendre du DM de façon à faire baisser le

DM; si le FF avait tendance à se déprécier, les partenaires européens

s’engageaient à acheter du FF sur le marché des changes de façon à

soutenir le FF.

4) Les réajustements de parité se faisaient uniquement à l’unanimité : si la France

voulait dévaluer, elle ne pouvait le faire qu’avec l’accord de ses partenaires

européens. Le changement de parité était une décision qui se prenait toujours dans

le plus grand secret.

5) Un pays qui atteignait un seuil de divergence de 75 % par rapport à la limite de

2,25% devait lui-même prendre des mesures de politique économique pour

intervenir de façon à revenir à sa parité.

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Graphique 19.4: LE SYSTÈME MONÉTAIRE EUROPÉEN

e

+2,5% +15% depuis

août 1993

-2,5% -15% depuis août 1993

seuil de divergence (75% de la marge authorisée)

seuil de divergence (75% de la marge authorisée)

parité ECU

FF

FB

DM

Le système monétaire européen a été extrêmement efficace il a réussi à diminuer

l’inflation en Europe et il a réduit la volatilité à court terme. Son succès est tel que les

partenaires européens se sont engagés vers une monnaie européenne unique...

Depuis septembre 1992, le système monétaire européen a été fort secoué par des attaques

spéculatives. En 1992, la lire italienne, la peseta espagnole et la livre sterling ont été

dévaluées. La lire italienne et la livre sterling sont finalement sorties du SME pour se

remettre à flotter. Depuis août 93, les marges de fluctuations ont été élargies à 15%, suite

aux attaques spéculatives sur le FF et le FB.

Le SME a cédé la place depuis le premier janvier 1999 à un système de parités

irrévocables jusqu’à l’introduction physique de l’euro (troisième phase de l’Union

Monétaire Européenne).

3.4. L’euro

L’euro scriptural a été crée et utilisé dès 1999. L’euro fiduciaire a été mis en circulation

au 1er

janvier 2002. Les pays dont la monnaie est l’euro forment la zone euro. A l’origine,

11 pays en étaient membres : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, l’Espagne, la

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Finlande, la France, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas et le. Portugal. La

zone euro s’est élargie à la Grèce en 2001, la Slovénie en 2007, Chypre et Malte en 2008,

la Slovaquie en 2009 et l'Estonie en 2011. Un ensemble de pays membres de l’Union

Européenne ne font donc pas partie de la zone euro. Il s’agit de la Lituanie, la Lettonie, la

Bulgarie, la République tchèque, la Hongrie, la Roumanie, la Pologne, la Suède, le

Danemark, et le Royaume-Uni.

Les conditions d’accès à la monnaie unique ont été fixées dans le traité de Maastricht.

Ces conditions visent à éviter les déséquilibres trop importants entre pays membres et qui

rendraient le système ingérable ou sous optimal. Ces conditions sont les suivantes :

le déficit public ne doit pas excéder 3% du PIB ;

la dette publique doit être inférieure à 60 % du PIB;

l’inflation ne peut pas dépasser de 1,5% le taux d’inflation des trois pays membres

ayant les taux d’inflation les plus bas;

le taux d’intérêt à long terme ne peut pas être supérieur de 2% à celui des trois

pays membres ayant les plus faibles;

le pays ne doit pas avoir connu de dévaluation monétaire dans les deux années

précédant l’intégration à l’union monétaire.

Dans la zone euro, la politique monétaire est conduite par le Système européen de

banques centrales, composé de la Banque Centrale Européenne (BCE) et des banques

centrales nationales des pays membres de la zone euro. L’objectif principal est le

maintenir la stabilité des prix; l’objectif d’inflation est de 2%. Plus généralement, les

missions de l'Eurosystème concernent la politique monétaire de la zone euro, la politique

de change et la gestion des réserves de change des États membres, le bon fonctionnement

des systèmes de paiement et le contrôle prudentiel des établissements de crédit et la

stabilité du système financier. Cette dernière mission a été renforcée suite à la crise

financière et économique.

Alors que la politique monétaire devient unique, la politique budgétaire reste de

compétence nationale. Afin d’éviter les déficits publics excessifs, les conditions d’entrée

précitées sont complétées par un mécanisme de coordination des politiques budgétaires à

l’intérieur de la zone euro, appelé Pacte de stabilité et de croissance. Le principe est que

les Etats membres visent l’équilibre ou le surplus budgétaire à long terme. Le Pacte de

stabilité et de croissance prévoit la surveillance multilatérale du déficit public et des

politiques budgétaires, en particulier la présentation annuelle des objectifs budgétaires à

moyen terme. D’autre part, une procédure de déficits excessifs peut être mise en route

lorsque le déficit public d’un État membre dépasse 3 % de son PIB. Des sanctions

peuvent éventuellement être engagées sous la forme d’un dépôt que le pays doit effectuer

auprès de la BCE. Celui-ci peut même se transformer amende (de 0,2 à 0,5 % PIB de

l'État en question) si le déficit excessif n'est pas comblé. Ces mécanismes de surveillance

et de sanctions ont été durcis en 2011 suite à la crise des dettes souveraines. Entre autres,

l’analyse des situations économiques nationales repose à présent sur un plus grand

nombre d’indicateurs, dont des indicateurs de compétitivité tels que le solde de la balance

courante, le coût unitaire du travail (coût salarial par unité de production), taux de change

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réel effectif, la dette du secteur privé et celle des administrations publiques, ainsi que

l’évolution de l’indice des prix immobiliers.

La crise va également donner lieu à la création de nouveaux mécanismes de gestion des

crises dans la zone euro.

Le Fonds européen de stabilité financière (FESF) est crée en mai 2010 en

réaction à la crise grecque. Il s’agit d’un fonds de stabilisation de 750 milliards

d'euros (alimenté les États membres et le FMI), utilisé pour acheter de la dette des

pays menacés.

Le Mécanisme européen de stabilité (MES) a succédé au FESF. Il vise à aider

financièrement les Etats en difficulté budgétaire. Il peut octroyer des prêts ou

acheter de la dette aux Etats en difficulté mais solvables, moyennant des mesures.

Un pays insolvable doit renégocier avec ses créanciers et négocier un plan de

restructuration global avec la Commission européenne, le FMI et la BCE.

4. TAUX DE CHANGE FIXES OU FLOTTANTS?

Le régime de taux de changes fixes est-il meilleur que le régime de taux de changes

flottants ou vice versa? Voyons les avantages et désavantages des deux régimes face à

différents chocs.

4.1. Réactions aux chocs nominaux et réels

Sous un régime de taux de change avec une fixité totale, un pays qui subit un choc

inflationniste (donc une augmentation des prix) voit sa compétitivité baisser et doit

s’ajuster.

Avec une fixité partielle, un choc inflationniste entraîne plus souvent la dévaluation, mais

si l’inflation est récurrente, les dévaluations deviennent trop fréquentes - et donc la fixité

n’a plus beaucoup de sens. De plus, elles s’accélèrent à cause des mouvements

spéculatifs. Donc, la fixité - et en particulier la fixité partielle - ne réagit pas

nécessairement bien face à des chocs nominaux.

Un choc réel est, par exemple, l’augmentation du prix du pétrole. Le choc de l’OPEP a

entraîné, du jour au lendemain, des déficits considérables de la balance commerciale dans

les pays industrialisés. Certains pays ont dû faire face à des déficits plus importants que

d’autres et chacun devait se réajuster par rapport à ce choc réel. Dans une telle situation,

la dévaluation n’est pas assez souple et les changes flottants sont beaucoup mieux adaptés

car ils permettent, grâce au marché des changes, de trouver le nouvel équilibre. Donc, la

fixité des taux de change est relativement rigide face à des chocs nominaux et réels.

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4.2. La volatilité

Mais, les taux de change flottants ont le grand désavantage d’être volatiles. A court

terme, les taux de change sont très volatiles car les taux d’intérêt et les taux de change

varient plus vite que les prix et les salaires. Les dépréciations et appréciations ont

tendance à être exagérées. La volatilité augmente l’incertitude, ce qui entraîne une baisse

de l’activité des échanges commerciaux. Dans une situation où il y a des chocs

importants dans l’économie mondiale, des réajustements d’équilibre sont nécessaires

mais il est difficile d’attribuer une incertitude au taux de change flottant plutôt qu’au choc

réel lui-même.

Dans un régime à taux de change fixes, les chocs entraînent un changement des taux de

change réels. Les changes fixes ne sont donc pas à l’abri de l’incertitude sur le taux de

change réel!

4.3. L’inflation

Le régime des taux de change flottants ne crée pas non plus un incitant à baisser

l’inflation. Cet argument souvent entendu en défaveur des taux de change flottants n’est

pas nécessairement convaincant: dans la lutte contre l’inflation, le taux de change flottant

ne change rien. Il faut plutôt essayer d’avoir une banque centrale indépendante et de voter

des lois sur l’équilibre budgétaire (par l’établissement de contraintes qui empêchent le

parlement de voter des déficits budgétaires).

Néanmoins, le taux de change fixe peut servir à réduire l’inflation. Un système de

changes fixes peut permettre à un pays à forte inflation de se “lier les mains” et de

convaincre les agents économiques de la détermination des responsables de politiques

économique de lutter contre l’inflation, car le différentiel d’inflation conduirait à une

appréciation réelle de la monnaie nuisible à la compétitivité.

4.4. La mobilité des capitaux

Un avantage important du système de change flottant est de permettre une très grande

mobilité des capitaux. Le système des taux de change fixes de Bretton Woods n’était pas

bien conçu puisque, dans la mesure où la fixité était partielle, les réajustements de parité

étaient possibles et, conjugués avec la liberté des mouvements de capitaux, ils pouvaient

entraîner facilement la spéculation. En taux de changes fixes, les spéculateurs ne prennent

pas de risque. Si on anticipe une dévaluation d’une monnaie dans une semaine, le seul

risque est qu’elle n’ait pas lieu. En taux de changes flottants, une fuite des capitaux

entraîne une hausse de la demande des devises et donc une hausse du prix de celles-ci,

c’est à dire une dépréciation de la monnaie, la cause initiale de la fuite. Le spéculateur

prend donc des risques en taux de changes flottants.

Beaucoup de restrictions aux mouvements des capitaux avaient été établies dans le

système de Bretton Woods et cela avait des effets négatifs sur l’allocation des ressources.

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5. COORDINATION INTERNATIONALE

Le problème de la coordination internationale réside dans l’aptitude à coopérer ou à se

faire concurrence. Cela ressemble au problème de la collusion en oligopole. Les

différents gouvernements prennent des décisions qui sont interdépendantes et l’argument

de base de la coopération est fondé sur l’existence d’externalités de politique

économique.

Un pays qui veut baisser son taux d’inflation peut le faire en appréciant sa monnaie.

L’appréciation de la monnaie entraîne une baisse des exportations et une hausse des

importations, donc elle augmente le déficit extérieur. Mais elle permet de lutter contre

l’inflation parce qu’elle diminue la demande intérieure - la demande se porte vers

l’extérieur. Cependant les pays qui veulent baisser l’inflation intérieure en appréciant leur

monnaie vont imposer une dépréciation aux autres monnaies. Cette dépréciation favorise

l’inflation dans les pays concernés et, par conséquent, un pays qui apprécie sa monnaie

“exporte” l’inflation vers les autres pays. De même, une politique de “dépréciation

compétitive” peut avoir lieu où les pays “exportent” leur chômage en recourant à la

dévaluation. Celle-ci stimule les exportations et décourage les importations. Elle stimule

donc la demande pour la production nationale au détriment de la production étrangère. Si

plusieurs pays font de la “dépréciation compétitive” en même temps, le seul effet sera

d’augmenter l’incertitude sur le taux de change, la dévaluation d’un pays annulant les

effets des dévaluations des autres pays.

Dans la mesure où les décisions prises dans un pays peuvent avoir des effets négatifs

ailleurs, la coopération est souhaitable. De plus en plus, au cours de ces dernières années,

différentes formes de coopération sont apparues sous diverses formes la coopération entre

les grandes autorités monétaires (Accords du Plaza, Accords du Louvre,...), le Système

Monétaire Européen puis la création de l’euro.

Ce qui signifie que, dans une situation de taux de change flottants avec overshooting, où

lutter contre l’inflation peut être très coûteux, on pourrait peut-être envisager un

flottement géré, autrement dit un régime de taux de change flottants avec interventions

des banques centrales pour amortir les fluctuations libres du marché.

Exemple: Lorsque le gouvernement américain combat l’inflation, il y a un risque

d’appréciation très forte du dollar et une intervention des banques centrales

pour vendre des dollars et freiner l’appréciation du dollar peut être

envisagée.

Une coordination des banques centrales mondiales peut freiner les mouvements de

capitaux spéculatifs sur les marchés des changes. Ce système de flottements gérés a été

poursuivi au cours des années ‘80.