Grand éolien - ADEME · Scénario normatif pour la capacité installée en Europe concernant...

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Feuille de Route Stratégique Grand éolien

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Feuille de Route Stratégique

Grand éolien

Grand éolien

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Sommaire

Préambule .........................................................................................................................................................................................4

1 Contexte .......................................................................................................................................................................................6

2 Périmètre de la feuille de route ......................................................................................................................................92.1 Champ thématique ..........................................................................................................................................................92.2 Périmètre géographique ............................................................................................................................................102.3 Horizons temporels .....................................................................................................................................................11

3 Défis et enjeux .......................................................................................................................................................................123.1 Enjeux de recherche et de formation ...............................................................................................................123.2 Enjeux structurels, juridiques et économiques .............................................................................................143.3 Enjeux environnementaux et sociétaux ...........................................................................................................15

4 Les paramètres clés .............................................................................................................................................................164.1 Participation de la production éolienne à la gestion de la charge ....................................................164.2 Degré de maturité de la filière éolienne ..........................................................................................................17

5 Les visions prospectives ...................................................................................................................................................195.1 La vision 2020 ..................................................................................................................................................................195.2 Les visions 2050 .............................................................................................................................................................20

6 Les verrous ...............................................................................................................................................................................236.1 Verrous technologiques ..............................................................................................................................................236.2 Verrous à caractère juridique, organisationnel, réglementaire et socio-économique .............25

7 Les priorités de recherche..............................................................................................................................................26

8 Les besoins de plates-formes technologiques, de démonstrateurs de recherche et industriels .............................................................................................................................................298.1 Démonstrateurs de recherche et industriels ................................................................................................298.2 Plates-formes technologiques, sites d’essai, de certification et de qualification .........................29

9 Aspects réglementaires et juridiques .......................................................................................................................31

Annexe - Benchmark international ................................................................................................................................32

PréambuleDepuis 2010, l’ADEME gère quatre programmes dans le cadre des investissements d’avenir1. Des groupes d’experts issus de la recherche dans les secteurs de l’industrie, des orga-nismes de recherche et des agences de financement et de programmation de la recherche, sont chargés, dans le cadre d’un travail collectif, de la réalisation de feuilles de route stratégiques. Celles-ci sont utilisées pour lancer les Appels à manifestations d’intérêt (AMI).

En ce qui concerne l’éolien, la feuille de route a pour objectif :

• D’éclairer les enjeux industriels, technologiques, environnementaux et sociétaux du développement du « grand éolien » ;

• D’élaborer des visions cohérentes et partagées des technologies ou des systèmes sociotechniques en question à moyen et long terme ;

• D’identifier les verrous technologiques, organisationnels, environnementaux et socio-économiques, et donc d’initier (ou de poursuivre) le développement de technologies performantes et économiquement viables ;

• De mettre en avant les besoins de recherche, de développement, de démonstra-tion, d’expérimentation et de plates-formes technologiques à déployer pour améliorer la compétitivité des offres et des entreprises dans ce secteur, permettre d’atteindre les objectifs ambitieux établis dans le cadre du Grenelle de l’environnement, favoriser et accompagner le développement d’une filière éolienne française. Ces besoins peuvent servir ensuite de base pour :

- la rédaction des AMI ; - la programmation de la recherche au sein de l’ADEME et d’autres institutions comme l’Agence nationale de la recherche (ANR), le Comité stratégique national sur la recherche énergie ou l’Alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie (ANCRE).

Ces priorités de recherche et d’expérimentation proviennent du croisement entre les visions et les verrous, mais prennent également en compte les capacités françaises dans les domaines de la recherche et de l’industrie.

La feuille de route inclura également une comparaison internationale se focalisant principalement sur les initiatives de politique publique ayant trait à la filière éolienne.

1. Les investissements d’avenir s’inscrivent dans la continuité des orientations du Fonds démonstrateurs de recherche géré par l’ADEME. Les quatre programmes concernés sont : Energie renouvelable, décarbonée et chimie verte (1,35 milliard d’euros), Véhicules du futur (1 milliard d’euros), Réseaux électriques intelligents (250 millions d’euros) et Economie circulaire (250 millions d’euros).

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Liste des membres du groupe d’experts

2. EDF EN : Électricité de France énergies nouvelles ; SER : Syndicat des énergies renouvelables ; RTE : Réseau de transport d’électricité.

Nature de l’organisme Nom Organisme d’appartenance2

Développeurs et exploitants de parcs

Pierre-Guy Thérond EDF EN

Alain Le Tirant GDF Suez

Industriels – Fabricants d’éoliennes et de composants

Marc Vergnet Vergnet

Sébastien Hita-Perona Areva Renouvelables

Thierry Bonnefond Astrium-EADS

Jean-Philippe Guignard Alstom

Jean-Philippe Roudil SER

Jean-Rémy Villageois STX

Jean-Paul Meyronneinc Union des transports frigorifiques

Xavier Hua ECR

Fabienne Herlaut SNCF Ecomobilité partner

Olivier Maurel IBM

Services

Rénald Boulnois Biotope

Dominique Lapeyre Météo France

Franck Mairet Bureau Veritas

Réseaux Marie-Pierre Bongrain RTE

Organismes de rechercheGeorges Kariniotakis Armines

Marc Rapin Onera

Le groupe d’experts a reçu l’appui d’un secré-tariat technique composé de Robert Bellini, Mila Galiano, Anne Varet et Nicolas Tonnet de l’ADEME.

1 ContexteLe plan de développement des énergies renouvelables de la France, issu du Grenelle de l’environnement, présenté le 17 novembre 2008, vise à augmenter de 20 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep) la production annuelle d’énergies renouvelables pour porter leur part à au moins 23 % de la consommation d’énergie finale d’ici à 2020.

Cet objectif a été inscrit dans la loi de pro-grammation pluriannuelle3 (2009-2020), dite loi Grenelle 1. Le plan de développement des énergies renouvelables à haute qualité environ-nementale4, présenté en novembre 2008, pré-voit l’installation de 10 500 mégawatts (MW) d’éolien terrestre et 1 000 MW d’éolien en mer d’ici à fin 2012. L’objectif à l’horizon 2020 est d’atteindre une capacité totale installée de 19 000 MW d’éolien terrestre (environ 12 000 éoliennes) et 6 000 MW d’éolien en mer (envi-ron 1 200 éoliennes), soit un investissement de l’ordre de 3 milliards €/an.

Fin 2011, la puissance installée en France, exclu-sivement terrestre, approche 6 640 MW, injec-tant 11,9 térawattheures (TWh) sur le réseau électrique français, soit 2,5 % de la consomma-tion électrique5. Au niveau européen et mondial, les capacités installées fin 2011 atteignent res-pectivement 94 gigawatts (GW) et 238 GW6. Les tableaux ci-dessous détaillent ces données et objectifs pour la France, l’Europe et le monde selon différentes sources et scénarios qui font référence.

3. Loi n° 2009-967 du 3 août 2009.4. Issu du Comité Opérationnel n°10 du Grenelle de l’environnement5. Source RTE.6. www.thewindpower.net7. European Wind Energy Association (EWEA), Baromètre éolien EUROBSERV’ER, février 2012.8. Source RTE.9. Source SER, 1er octobre 2010.10. Arrêté du 15 décembre 2009 relatif à la programmation pluriannuelle des investissements de production d’électricité 2009-2020.

TerrestreSites insulaires

et d’accès difficileEn mer

Capacité installée (MW)

Productible (TWh/an) / Taux de

pénétration

Capacité installée (MW)

Productible (TWh/an)

Capacité installée (MW)

Productible (TWh/an)

FRANCE 6 640 11,9 / 2,5 %8 849 / / /

EU-27 90 278 / / / 3 820 /

Capacité installée en 20117

FRANCE

TerrestreSites insulaires

et d’accès difficileEn mer

Capacité installée (MW)

Productible (TWh/an)

Capacité installée (MW)

Productible (TWh/an)

Capacité installée (MW)

Productible (TWh/an)

202010 19 000 42 / / 6 000 /

Objectifs et perspectives pour la capacité installée en France en 2020

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Fin 2010, le gouvernement a lancé un appel d’offres pour relancer la dynamique du dévelop-pement des installations éoliennes terrestres en Corse et en outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion et collectivités de Saint-Barthélemy et Saint-Martin) et faire émerger des technologies permettant de réduire l’im-pact des installations éoliennes sur le réseau électrique (voir encadrés ci-après). L’objectif est de rendre possible une augmentation signifi-

EUROPECapacité installée (GW) Productible

(TWh/an)Terrestre En mer

2010 81,4 2,9 181

2020 190 40 581

2030 250 150 1 155

2050 600 2 015

Scénario normatif pour la capacité installée en Europe concernant l’énergie éolienne terrestre et en mer11

11. EWEA, EU Energy Policy to 2050, March 2011.12. GWEC : Global Wind Energy Council.13. L’Agence internationale de l’énergie (AIE, IEA en anglais) a établi en 2008 des scénarios d’évolution du système énergétique mondial à l’horizon 2050, dits ETP (Energy Technology Perspectives), actualisés en 2010.14. France Energie Eolienne.

MONDE

Global Wind Energy Outlook 2010

(GWEC12, Moderate scenario)

ETP Blue Map scenario(IEA, 2010)13

Capacité installée (GW)

Productible (TWh/an)

Capacité installée (GW)Productible (TWh/an)

Terrestre En mer

201014 194,4 GW installée

2020 832 2 041 562 109 /

2030 1 778 4 360 830 194 2 700

2040 2 741 / 1 206 366 /

2050 3 702 9 729 1 364 652 4 916

Scénario normatif pour la capacité installée dans le monde

cative de la part des énergies renouvelables variables dans la production d’électricité de ces territoires, actuellement limitée à 30 %. L’appel d’offres porte sur l’installation d’une capacité maximale de 95 MW, répartie en cinq tranches. Il concerne la construction d’installations éo-liennes terrestres équipées de dispositifs de stockage d’énergie électrique et de moyens de prévision de la production.

Par ailleurs, le gouvernement français a lancé mi-juillet 2011 un appel d’offres pour construire des éoliennes en mer. À la suite de la concerta-tion menée par les préfets depuis début 2009 sur chaque façade maritime et des avis expri-més lors des débats publics organisés en 2010, le gouvernement a confirmé le potentiel maxi-mal de 3 000 MW de ce premier appel d’offres qui porte sur cinq zones :

• Le Tréport (Seine-Maritime, Somme) - 110 km2, pour une puissance maximale de 750 MW ;

• Fécamp (Seine-Maritime) - 88 km2, pour une puissance maximale de 500 MW ;

• Courseulles-sur-Mer (Calvados) - 77 km2, pour une puissance maximale de 500 MW ;

• Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor) - 180 km2, pour une puissance maximale de 500 MW ;

• Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) - 78 km2, pour une puissance maximale de 750 MW.

Un second appel d’offres devrait compléter cette première tranche et atteindre l’objectif des 6 000 MW installés en mer à l’horizon 2020.

Système et réseau électrique

Le système électrique comprend : les sites de production d’électricité (pro-duction centralisée : centrales nucléaires, thermiques, hydrauliques ou production décentralisée : éoliennes, modules pho-tovoltaïques, petite hydraulique, cogéné-ration, etc.), les lieux de consommation (communes, entreprises, etc.), mais éga-lement les infrastructures de transport, et les méthodes pour organiser tous ces moyens.

Le réseau électrique est donc une infrastructure du système ; il comprend un réseau public de transport, permet-tant de transporter des quantités impor-tantes d’électricité sur de longues dis-tances, et un réseau de distribution, qui prend le relais pour acheminer l’électri-cité sur les derniers kilomètres, à l’échelle locale, et desservir les usagers.»

Pallier la variabilité des énergies renouvelables

Il existe beaucoup de solutions pour faci-liter l’intégration des énergies renouve-lables dans le système électrique : outre le stockage, des outils de prévision de l’élec-tricité produite à court et moyen terme, les interconnexions entre parcs éoliens pourraient fortement participer à l’opti-misation de l’intégration de la produc-tion électrique éolienne dans le bouquet énergétique (proportion des différentes sources dans la production d’énergie) et permettre d’associer d’autres sources complémentaires. Cette intégration est fondamentale pour assurer l’équilibrage du système électrique, à savoir la capacité des parcs éoliens à fournir une électricité utile au réseau et à assurer l’équilibre entre l’offre et la demande.

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2 Périmètre de la feuille de route

2.1 Champ thématique

Cette feuille de route couvre les systèmes de production d’électricité du « grand éolien » (voir encadré ci-dessous). Elle cible indifférem-ment l’éolien terrestre (incluant l’exploitation des sites insulaires et ceux d’accès difficile) et l’éolien en mer, à l’exception des éoliennes flot-tantes, celles-ci ayant été traitées dans la feuille de route sur les énergies marines.

Trois marchés sont concernés, avec leurs spé-cificités, en particulier en termes de puissance :

• le marché éolien en mer avec, compte tenu du contexte français, principalement des éoliennes de très forte puissance (5 MW et plus) et la prise en compte des probléma-tiques spécifiques associées à l’environne-ment maritime (houle, vagues, niveaux de profondeur variés, difficultés d’accès pour la maintenance et la logistique, acceptabilité des différents usagers de la mer…) ;

• le marché terrestre avec des éoliennes d’une puissance de 2 à 3 MW, équipées de rotors (la partie constituée du moyeu et des pales) de grandes dimensions, adaptés à des vents « faibles » (voir encadré ci-après) dans le but d’ouvrir de nouveaux marchés en France mais aussi à l’export.

Petit et grand éolien

Le petit éolien se limite aux éoliennes dont la puissance atteint jusqu’à 36 kW. De manière générale, le grand éolien inclue les éoliennes dont la puissance est supérieure au mégawatt ; cependant, de par la spécificité des marchés (terrestre, en mer et insulaire), cette limite peut être revue à la hausse : par exemple, pour le marché en mer, le grand éolien cible des éoliennes d’une puissance su-périeure à 5 MW.

Les vents faibles

Classiquement, les grandes éoliennes nécessitent des vitesses de vent supé-rieures à 5 mètres par seconde (m/s) pour fonctionner et assurer une produc-tion électrique. L’appellation « vent faible » couvre des régimes de vent de faible vitesse de 2 à 4 m/s.

Les services système

On entend par là des services rendus, en général par les producteurs d’électricité, au système électrique pour en assurer la stabilité et l’efficacité. Ces services consistent à pouvoir moduler les puis-sances produites, afin de régler le réseau électrique en tension et en fréquence.

• le marché des zones insulaires et des zones difficiles d’accès avec des éoliennes d’une puissance de l’ordre de 1 à 2 MW.

L’objectif est de favoriser la conception et le développement de systèmes répondant aux différents besoins du marché : un gisement important d’innovation existe au niveau de la machine et des services (voir encadré ci-des-sous) : intégration et support aux systèmes électriques, maintenance…

Au-delà de la puissance nominale installée, la performance du service électrique proposé apparaît comme un élément clé des disposi-tifs éoliens. Bien qu’essentiel pour la valorisa-tion des dispositifs et la pertinence des projets, aucun seuil en termes de productible (énergie annuelle produite) ne sera introduit dans la dé-

finition de la filière « grand éolien » pour cette feuille de route. Le petit éolien et la probléma-tique de l’intégration au bâtiment sont exclus du cadre de cette feuille de route.

Le champ thématique de cette feuille de route englobe l’ensemble de la chaîne de valeur de la filière éolienne et les différents aspects structu-rels, réglementaires et environnementaux liés à son développement :

• Composants, machines, procédés de fabrication et ressource : seront abordés différents composants d’éoliennes (matériaux, chaîne mécanique et électrotech-nique, nacelles, mâts, pales, interfaces électro-niques) et procédés innovants de fabrication qui devraient concourir à augmenter la pro-ductivité, la durabilité, la fiabilité, la disponibili-té et la maintenance. En raison d’une produc-tion électrique variable selon les conditions climatiques, l’évaluation, la caractérisation, la prévision de la ressource et la prédictibilité de la production électrique éolienne constituent un pan à part entière.

• Intégration au système électrique : cela concerne les techniques, méthodes et dispositifs permettant d’optimiser l’intégra-tion des systèmes éoliens et l’injection de leur production dans le système électrique (com-posants internes aux structures éoliennes et dispositifs de raccordement aux systèmes électriques). De fait, au-delà de la simple pro-duction d’électricité, les parcs éoliens pour-raient à l’avenir contribuer au fonctionnement global du système électrique et, à ce titre, proposer et fournir des « services système » comme l’optimisation du programme de pro-duction ou de la qualité du courant, la réserve de puissance synchronisée ou arrêtée.

• Logistique et infrastructures : sont concernées les opérations (installation de câbles, d’éoliennes, entretien, maintenance des machines et des systèmes associés) et les infrastructures industrielles (ports, instal-lations côtières, lieux d’amarrage, bateaux innovants, centres d’opération et de gestion centralisée des parcs éoliens) inhérentes à la mise en place et à l’exploitation de parcs éoliens (terrestres ou en mer).

• Aspects économiques : cela porte aussi bien sur les coûts que sur l’économie locale et nationale de la filière. La diminution des coûts des machines, des services associés, des infras-tructures industrielles à mettre en place et plus globalement de l’électricité d’origine éolienne est considérée comme transverse. L’objec-tif est de favoriser la croissance de la filière, d’améliorer les retours sur investissement et la rentabilité économique des parcs éoliens.

• Réglementation et aspects envi-ronnementaux et juridiques : cela concerne l’adéquation entre réglementation et marché, et la mise au point de procédures de certification des installations (notamment sur la sécurité). Les questions environnemen-tales (recyclage, consommation de matières premières, analyse de cycle de vie, impacts sur les milieux naturels) et sociétales (accep-tabilité, concertation, régulation et participa-tion) sont également abordées, en lien avec la conception, la production, le déploiement, l’exploitation et la fin de vie des systèmes éo-liens. Concernant l’éolien en mer, son statut juridique et les assurances recommandées ou à développer pour assurer l’implantation de grands parcs éoliens seront traités.

2.2 Périmètre géographique

C’est celui du territoire national (métropole et DROM-COM). Les dimensions locale et natio-nale sont intégrées en vue du développement de la filière. Effectivement, certaines spécifici-tés du territoire (sites insulaires par exemple) peuvent influencer les besoins en production électrique d’origine éolienne et les technologies. Par ailleurs, le développement de la filière dans les DROM-COM offre une vision prospective : les limites d’intégration aux réseaux permettent de préfigurer le déploiement éventuel de l’éo-lien sur le reste du territoire et à l’export.

Néanmoins, dans un marché de forte compé-titivité internationale avec des acteurs français qui veulent se tourner vers l’export, les ré-flexions du groupe d’experts s’inscrivent égale-ment dans une perspective de déploiement de la filière à l’international et de positionnement sur le marché mondial auprès des grands don-

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neurs d’ordre. L’ensemble de la chaîne de va-leur (et notamment les composants) doit être considéré pour intégrer les marchés potentiels de développement.

Pour l’élaboration de visions prospectives, nous avons choisi des cibles, géographiques ou sec-torielles (machines adaptées à des conditions extrêmes par exemple), pour lesquelles les compétences et l’excellence françaises sont reconnues et/ou peuvent participer à la crois-sance du marché. Par ailleurs, le périmètre géo-graphique est également influencé par :

• le coût des installations et infrastructures, pour la filière en mer, à adapter pour des profondeurs d’eau variées (profondeurs, sols et sous-sols au large des côtes françaises très hétérogènes) et par la viabilité économique de tels projets ;

• la topologie des réseaux électriques et leur évolution. Bien que ce facteur soit considéré comme exogène à cette étude, les visions prospectives de déploiement du grand éolien ont été mises en regard d’autres feuilles de route concernant les réseaux, notamment le plan de développement décennal du réseau européen des gestionnaires de transport de l’électricité (European Network of Trans-mission System Operators for Electricity, ENTSO-E), qui est largement motivé par le renforcement des interconnexions et l’inté-gration des productions renouvelables.

Enfin, les stratégies françaises, les priorités de recherche et les besoins de démonstrateurs de recherche et préindustriels devront s’articu-ler avec les initiatives européennes en matière de recherche et de démonstration et notam-ment le NER 30015, le SET Plan16, les EERA17

et la plate-forme technologique européenne TPWind18 (voir Annexe) ; les travaux et initia-tives de l’association européenne de l’énergie éolienne (EWEA)19 sont également considérés dans cette étude du paysage européen pour la filière éolienne.

2.3 Horizons temporels

Les visions prospectives de développement de la filière visent l’horizon 2050, notamment pour être cohérentes avec l’objectif « facteur 4 »20. Elles sont aussi cohérentes à cet horizon avec la politique énergétique européenne21.

Atteindre ces objectifs suppose néanmoins de mettre en œuvre des efforts de recherche et d’innovation à court et moyen terme et d’iden-tifier des actions et des initiatives à mettre rapi-dement en place pour des premiers résultats en 2015 et une commercialisation en 2020. Pour cela, une vision à l’horizon 2020 est pro-posée conformément aux objectifs du Grenelle de l’environnement (23 % d’énergies renouve-lables dans la consommation d’énergie finale). Cela permet de mettre en exergue un cer-tain nombre de verrous, d’élaborer une phase à mi-parcours du déploiement de la filière et d’atteindre les jalons de développement de la technologie éolienne tels que prévus dans la feuille de route européenne sur l’éolien.

15. New Entrance Reserve, réserve de 300 millions de quotas d’émission de CO2, réservée aux nouveaux entrants du système d’échange de l’Union européenne.16. Strategic Energy Technology Plan, plan de la Commission européenne pour le développement de technologies à faible intensité carbonique.17. European Energy Research Alliance.18. European Wind Energy Technology Platform.19. European Wind Energy Association.20. Issu du programme d’orientation de la politique énergétique française de 2005, le facteur 4 vise à diviser par quatre les émissions françaises de gaz à effet de serre à l’horizon 2050 par rapport à leur niveau de 1990.21. EU Energy Policy – March 2011 – A report by the European Wind Energy Association.

22. On appelle « opération des parcs éoliens », leur installation, leur développement, leur logistique et leur exploitation.

3 Défis et enjeuxLes visions prospectives de déploiement de la filière grand éolien, les priorités de recherche et les besoins de démons-trateurs de recherche sont définis selon les enjeux définis ci-dessus : objectifs du Grenelle de l’environnement à l’horizon 2020 et facteur 4 à l’horizon 2050.

à court et moyen terme (de quelques heures à quelques jours) est un enjeu majeur pour la localisation des futurs parcs éoliens, pour la gestion de l’électricité d’origine éolienne ainsi que pour optimiser son insertion dans le système énergétique. La prédictibilité de la production électrique à long terme (de la saison à plusieurs années) pour optimiser la cogestion des ressources éolienne et hydrau-lique (stockage de l’eau dans les barrages pour fournir certains services système, voir encadré ci-dessous) est aussi un enjeu majeur dans la perspective d’une gestion optimale du réseau électrique national et international ;

• Machines et composants (améliora-tion des nouveaux composants et des géné-ratrices notamment, utilisation de nouveaux matériaux, fondations, pales) ; concernant le marché terrestre, le premier enjeu est de prendre en compte la problématique « vents faibles » avec, par exemple, le développement de rotors de grandes dimensions, adaptés à des vents moyens « faibles ». Des travaux de R&D dans les domaines de l’aérodyna-mique, l’aéroélasticité, l’acoustique, mais aussi le contrôle et la commande de l’éolienne, doivent être menés dans les années à venir pour proposer aux industriels des machines parfaitement adaptées au marché visé (et donc aux conditions climatiques) et augmen-ter la productivité ; la réduction des coûts et l’augmentation de la fiabilité sont des priori-tés majeures concernant les composants des machines (notamment pour les pales) ; enfin, la mise en place de « doublons » (au cœur des machines) est un enjeu important pour améliorer la fiabilité des machines ;

• Intégration au système électrique : la production d’électricité d’origine éolienne doit pouvoir être injectée de façon optimale dans les réseaux électriques. Cela risque de

Au-delà, trois enjeux critiques devront être considérés (sans présomption de leur ordre d’importance).

3.1 Enjeux de recherche et de for-mation

Le développement du grand éolien répond à différents aspects stratégiques, dont l’indé-pendance énergétique, le développement des ressources nationales, la sécurité des appro-visionnements et bien sûr la création d’em-plois. L’opération22 optimale des parcs dans l’ensemble du système électrique est donc un paramètre clé du succès de la pénétration de l’énergie éolienne.

De façon transversale, la création (ou la péren-nisation) d’une structure favorisant les échanges entre les organismes de recherche et les indus-triels (fabricants d’éoliens et composants, déve-loppeurs et exploitants de parcs) et proposant des cursus de formation initiale et continue est un enjeu majeur pour la filière. Les priorités de recherche doivent être en adéquation et ré-pondre aux besoins et attentes des industriels. La croissance de la filière dépend fortement de l’émergence de moyens et d’outils en vue de mutualiser les efforts de recherche et faciliter l’intégration de solutions innovantes dans des projets industriels. Ces besoins, en termes de recherche et développement (R&D) et d’in-frastructures de test et d’essai, sont un enjeu majeur de structuration de la filière, du réseau d’acteurs et de création de nouveaux outils col-laboratifs.

Les besoins en termes de recherche peuvent se décomposer selon différents secteurs :

• Ressource éolienne (évaluation, prédic-tibilité) ; l’évaluation de la ressource éolienne et la prédictibilité de la production électrique

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fortement impacter la filière et les technolo-gies à inventer et à intégrer dans les années à venir. Les exigences techniques fortes (puissance minimale, fourniture de réserves de puissance) et nécessaires en matière de gestion des systèmes, notamment les grid codes (normes auxquelles l’exploitant doit se conformer, qui couvrent tous les aspects techniques liés aux connections avec le réseau et qui spécifient toutes les données que doit mettre à disposition l’exploitant), vont ainsi stimuler et créer l’innovation. La connexion des fermes éoliennes au réseau de transport, l’électronique de puissance ou le contrôle commande sont autant de thé-matiques pour lesquelles des évolutions sont attendues pour faciliter ces interactions entre parcs éoliens et systèmes électriques ; pour le marché des zones insulaires, l’enjeu est de tenir compte des conditions spécifiques im-posées par les systèmes électriques insulaires (systèmes non interconnectés où la participa-tion des énergies renouvelables à l’équilibrage est fondamentale) ;

• Infrastructures et logistique : les in-frastructures industrielles doivent faire l’objet de travaux de R&D, notamment sur les outils de production et les procédés de fabrication pour proposer des solutions innovantes et performantes de fabrication et d’assemblage des composants ; la logistique inhérente à tout projet éolien, aussi bien terrestre qu’en mer (infrastructures, outils de production, moyens d’acheminement et opérations à conduire tout au long de la vie des parcs), est également à ce jour un gisement d’innovation pour faciliter les étapes de conception, d’ex-ploitation et de maintenance des machines et systèmes ;

• Acceptabilité et nouvelles fonc-tionnalités : la problématique des interfé-rences entre éoliennes et radars (voir encadré ci-contre) est aujourd’hui la cause de blocage du développement de nombreux parcs en France (plus de 3 000 MW fin 2010). C’est un enjeu important pour le développement attendu de la filière. Au-delà des conflits

d’usage, l’apport de technologies innovantes françaises dans ce domaine pourra per-mettre aux industriels français de prendre une part significative du marché terrestre français, voire également du marché en mer. Par ailleurs, les éoliennes, en tant qu’élément d’aménagement de l’espace, pourraient pro-poser des fonctionnalités au-delà de la simple production d’électricité telles que : la mesure de vent, le relevé de phénomènes météo-rologiques locaux, le suivi des populations d’oiseaux et de poissons ou la surveillance du territoire. Elles pourraient aussi devenir une base opérationnelle pour le développement de l’aquaculture, autant de fonctionnalités qui permettraient de créer des synergies entre secteurs d’application pour contribuer à la résolution de certains conflits d’usage (envi-ronnementaux et sociétaux).

Des interférences

avec les radars

Les éoliennes interfèrent principalement avec l’opération des radars météo, mais aussi avec les radars militaires.

Deux problématiques ont clairement été identifiées :- la réflexion des ondes sur les éoliennes

(notamment sur les pales en mouve-ment) éblouit le radar récepteur ou crée de faux échos sur les écrans ra-dars, et perturbent par conséquent les systèmes de contrôle aérien ;

- lles éoliennes font obstacle à la propa-gation des ondes électromagnétiques et peuvent diminuer la sensibilité du radar pour la détection d’objets situés derrière les éoliennes (par rapport au radar).

Différentes solutions technologiques sont en cours de développement pour s’affranchir de ces faux échos et limiter le masquage des parcs d’éoliens.

jeu réside aujourd’hui dans des procédures et réglementations adaptées aux projets de parcs éoliens que l’on souhaite voir émerger ; il semble important de limiter les vides juridiques existants.

• Réglementation et normalisation

Cet enjeu s’articule notamment autour de l’évolution (à des horizons de temps variés) des cadres institutionnels et régulatoires23 pour favoriser et accompagner le déploiement de parcs d’éoliennes de forte puissance. L’adé-quation entre les différentes normes existantes (françaises et/ou européennes) et le niveau de standardisation et de réglementation en vi-gueur sont des enjeux déterminants de gestion de la filière, et notamment, à titre d’exemple, la modification de la signalétique des éoliennes (balisage, lumières, flashes nocturnes).

• Compétitivité et attractivité

L’objectif est de s’appuyer sur les effets d’échelle et les effets de série pour réduire les coûts de production des composants et systèmes et ainsi contribuer à la compétitivité de la filière éolienne (prix par rapport aux options alter-natives de production centralisée ou décentra-lisée d’électricité).

À la croisée des enjeux technologiques et éco-nomiques, il s’agira d’identifier le ou les modèles économiques qui serviront à la filière nationale et/ou européenne ; pour les éoliennes de de-main, un des enjeux est d’arbitrer ou de trou-ver un compromis entre machines d’une très grande technicité et machines robustes.

Les verrous à lever et les priorités de recherche associés à un déploiement majeur de la filière grand éolien seront détaillés par la suite.

3.2 Enjeux structurels, juridiques et économiques

Le développement actuel de la filière, unique-ment éolien terrestre, est insuffisant et il est nécessaire d’impulser rapidement une dyna-mique supplémentaire pour atteindre l’objectif que s’est fixé la France : une puissance installée de 25 GW à l’horizon 2020 (éolien terrestre et en mer posé).

• Industrialisation

Pour favoriser la croissance de la filière, il paraît indispensable d’accompagner le développe-ment d’infrastructures industrielles, de procédés d’industrialisation de la production d’éoliennes (des différents composants des machines, de sous-stations électriques et d’insertion de la production sur le réseau), de conception des aérogénérateurs et de leur assemblage ainsi que de la certification des composants et dis-positifs assemblés ou installés. Des synergies, notamment entre les différents acteurs de la filière (organismes de recherche, industriels et acteurs plus spécifiquement concernés par les réseaux et la météorologie), doivent se déve-lopper pour favoriser cette étape d’industria-lisation. Au-delà de cet aspect, et notamment pour l’éolien en mer, il s’agit de parvenir à une coordination entre acteurs et parties prenantes de différents métiers afin d’assurer l’aboutisse-ment de ces projets.

• Cadre juridique

Au cours des étapes préliminaires de concep-tion des projets, des procédures juridiques et des recours peuvent allonger les délais. L’en-

23. La notion « cadre régulatoire » doit être entendue comme l’ensemble des actions entreprises par les pouvoirs publics pour garantir une stabilité satisfaisante à un système économique et/ou social.

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Plus généralement, la diminution du coût de l’électricité d’origine éolienne, qui englobe les coûts d’investissement (machines et produits annexes, raccordement au réseau) et de fonc-tionnement (logistique, maintenance), per-mettrait à la filière de rester compétitive et attractive pour des industriels et investisseurs du secteur privé, comparativement à d’autres dispositifs de production d’électricité.

3.3 Enjeux environnementaux et sociétaux

L’acceptabilité sociale est un enjeu central pour la filière. Les conflits d’implantation de ces der-nières années ont mis en avant l’importance de la prise en compte des populations locales dans la conception et l’implantation des parcs éoliens. Ces populations peuvent soit être riveraines des installations, soit être consti-tuées d’autres groupes sociaux utilisateurs du territoire (notamment autour des activités de pêche dans le cas de l’éolien en mer). La question de l’opportunité du déploiement de la filière dans le contexte énergétique français et celle de ses impacts en termes de nuisances ou de risques (sur l’environnement, le paysage, l’économie, les autres usages du territoire…) ont fait l’objet de débats qui seront appelés à se répéter dans l’avenir. Les modalités de gou-vernance des projets éoliens et leur mise en adéquation avec le territoire (mise en place de processus de concertation, diffusion d’infor-mations, éolien citoyen ou participatif, portage public ou privé…) forment donc un enjeu es-sentiel pour les acteurs de la filière.

Concernant les impacts environnementaux, l’objectif est de les prendre en compte dès les phases de conception et jusqu’à la gestion de la fin de vie des projets éoliens. La récolte de données (en mer et en forêt notamment) pré et postimplantation des éoliennes, leur gestion et la modélisation sont des étapes indispen-sables pour l’évaluation précise des impacts environnementaux et l’intégration territoriale de ces dispositifs.

Au regard des crises actuelles sur certaines matières premières, il s’agira de concevoir, de produire et de déployer des éoliennes faible-ment consommatrices de matières premières critiques24 et/ou non renouvelables et limitant l’impact carbone de l’ensemble du système énergétique. De plus, l’introduction d’une démarche d’éco-conception des procédés de fabrication des composants et matériaux des aérogénérateurs permettrait d’assurer un développement durable de la filière. Dans ce cadre, les ACV et les bilans carbone25 (pour tous les composants du projet) permettront de quantifier précisément les impacts matière et énergie des projets éoliens.

24. La notion de criticité est définie dans le rapport de la Commission européenne : Critical raw materials for the EU (Ad-Hoc working group, Raw Materials Supply Group, 2010).25. L’analyse de cycle de vie (ACV) est un moyen d’évaluation des impacts environnementaux d’un produit, d’un service ou d’un procédé. Le bilan carbone d’un produit ou d’une entité humaine (individu, groupe, collectivité…) est un outil de comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre des produits et services.

4 Les paramètres clés Pour construire des visions à l’horizon 2050 ayant notam-ment vocation à éclairer les décideurs, le groupe d’experts a identifié deux paramètres clés, des variables qui seront de nature à infléchir significativement la forme et la nature de la filière à moyen et long terme.

Leur évolution contrastée aboutira à des vi-sions radicalement différentes du déploiement des systèmes éoliens.

Il est par ailleurs admis que la filière a la capacité (notamment grâce à des politiques publiques incitatives et pérennes) de déployer les moyens techniques suffisants pour atteindre les objec-tifs fixés (facteur 4 en 2050). En outre, pour la filière grand éolien, comme pour de nom-breuses autres filières d’énergie renouvelable, les aspects politiques, réglementaires et juri-diques conditionnent son développement, et peuvent donc limiter (voire suspendre) ou a contrario faciliter l’émergence de projets éoliens ; la réalisation de ces visions prospec-tives est donc fortement dépendante de la mise en cohérence de dispositifs de soutien, de réglementations et de textes juridiques adap-tés au marché visé avec les objectifs affichés. Ce besoin de cohérence, exogène à la filière, relève davantage d’un enjeu et d’une priorité pour accompagner et favoriser l’aboutissement et l’exploitation de parcs éoliens.

4.1 Participation de la production éolienne à la gestion de la charge

Le premier paramètre clé s’intéresse au niveau d’implication de l’éolien dans l’équilibre entre l’offre et la demande en puissance. Ce para-mètre comprend le poids de l’éolien dans le système électrique, c’est-à-dire le taux de pé-nétration, mais aussi la participation à l’équili-brage et l’adéquation des schémas financiers (rémunérations adaptées des producteurs éoliens selon les services système proposés).

L’augmentation du taux de pénétration sera faci-litée par le développement de moyens de ges-

tion de la demande et de stockage. Un autre fac-teur important pour l’insertion de la production éolienne est l’évolution des réseaux électriques. Ainsi, les réflexions à moyen et long terme sur la pertinence, l’utilité et l’éventuelle mise en place de nouvelles lignes (terrestres ou en mer, en courant continu26 notamment), pour dévelop-per et renforcer le réseau à large échelle, sont à intégrer dans ce premier paramètre.

D’autre part, les technologies à développer et les aspects financiers sont couplés. Ainsi le type de rémunération et la définition des responsa-bilités des producteurs orientent la façon dont ils gèrent leurs actifs de production à court terme et donc contribuent à l’adéquation entre l’offre et la demande.

Dans un scénario de pénétration modérée de la production éolienne dans le système élec-trique, les éoliennes ne participent pas à l’équi-librage du système ; l’objectif des producteurs est de maximiser le productible annuel moyen. D’autres dispositifs, notamment la gestion et la maîtrise de la demande dont le déploiement technologique est concomitant, facilitent la ges-tion de l’électricité éolienne.

Dans une vision où l’éolien pénètre plus pro-fondément le système, les parcs éoliens doivent venir en appui de la gestion du système élec-trique : la production éolienne participe ainsi à son équilibrage (dont les réserves tertiaires27). Pour atteindre ce fort taux de pénétration, l’émergence de parcs de très grande taille (aussi bien en nombre d’éoliennes qu’en productible annuel) est nécessaire à moyen terme : le mar-ché presque exclusif des parcs de grande taille serait principalement celui des éoliennes en mer. La filière éolienne pourrait profiter de la

26. En règle générale, l’électricité circule sur les réseaux en courant alternatif. Des progrès techniques récents redonnent un intérêt à l’utilisation du courant continu (haute tension) pour un transport longue distance qui limiterait les pertes en ligne.27. Réserves nécessaires pour assurer (en complément des réserves primaires et secondaires) à tout instant le réglage de la fréquence et de la tension des réseaux interconnectés de transport.

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mise en place de nouveaux réseaux électriques à courant continu (en mer ou sur terre) qui accentuerait la mutualisation au niveau euro-péen des dispositifs de production d’électricité, des réserves éoliennes et des services système qu’ils peuvent proposer. Ce type de scénario vise à maximiser le crédit de capacité éolienne.

4.2 Degré de maturité de la filière éolienne

En parallèle des aspects système, le déploiement des parcs éoliens dépend de la compétitivité de l’offre éolienne comparativement aux autres solutions de production d’électricité ; cette compétitivité est conditionnée par le degré de maturité de la filière et celui que les technolo-gies de production d’électricité éolienne auront atteint. La maturité se mesure par :

• la maîtrise de la chaîne de valeur de l’éolien ;

• des risques technologiques minimisés ;

• la maîtrise des impacts socio-économiques et environnementaux.

Par conséquent, la maturité de la filière se traduit par une minimisation des coûts unitaires de pro-duction et une analyse coûts/bénéfices maîtrisée.

La problématique des coûts est transversale et concerne l’ensemble des opérations de la chaîne de valeur :

- l’amélioration des technologies (des différents éléments des éoliennes) ;

- les matériaux de construction des mâts et des pales ;

- les fondations nécessaires à l’implantation des éoliennes (notamment pour la filière en mer) ;

- la logistique et la maintenance ;

- le remplacement ou le renouvellement des parcs en fin de vie.

Que ce soit pour la filière terrestre ou en mer, des concepts innovants peuvent émerger dans les secteurs de la conception, de l’exploitation et de la maintenance, et participer à une meil-leure maîtrise et/ou à la diminution des coûts inhérents au déploiement des parcs éoliens. Les infrastructures à développer, les innovations en termes de logistique, les partenariats et syner-gies à imaginer entre les parties prenantes sont autant de facteurs qui influeront sur la compéti-tivité de la filière et sur son attractivité pour des investisseurs publics et privés.

Sans être une condition nécessaire et suffisante, la création d’une véritable filière industrielle de production et de maintenance des installations sera déterminante dans les années à venir et pourrait contribuer à cette baisse des coûts par un effet de volume, d’échelle et d’apprentissage.

Dans un scénario évolutif, la filière atteint une phase de maturité, tirée par des améliorations technologiques conséquentes. L’électricité éolienne devient une énergie clé et compé-titive dans le paysage énergétique. Ces avan-cées technologiques permettent d’améliorer

Crédit de capacité éolienne

Le crédit de capacité s’exprime de diffé-rentes manières :- la capacité évitée en production

conventionnelle, c’est-à-dire le nombre de centrales thermiques auxquelles se substitue la production éolienne ;

- la production électrique garantie (en puissance et dans le temps, en géné-ral à 24 ou 48 heures). Pour les faibles taux de pénétration de l’éolien dans le système électrique, le crédit de ca-pacité est équivalent à la production éolienne moyenne, car il n’y a pas de problème de coordination entre l’offre et la demande. Pour de forts taux, le crédit de capacité aurait proportion-nellement tendance à baisser, d’où la nécessité de développer des services système (dont la mise à disposition de réserves, notamment tertiaires).

les rendements, la consommation de matières premières et les techniques d’assemblage, et d’aboutir à un coût du productible très compé-titif. Différents types de rémunération des pro-ducteurs sont possibles, ce qui permet d’opti-miser l’insertion de l’éolien dans les marchés électriques. Cette évolution s’accompagne de l’optimisation des infrastructures et de la logis-tique spécifique aux différents marchés visés par la filière éolienne (terrestre, en mer).

Dans un scénario opposé, l’électricité éolienne, notamment en mer, ne connaît pas de phase de croissance, voire ne dépasse pas la phase de lancement. Les risques d’exploitation, de marché ou socio-économiques et les conflits d’usage

ne sont pas maîtrisés. Le développement de la filière reste alors contraint et la rentabilité éco-nomique des projets éoliens difficile à atteindre ; les développeurs de parcs doivent toujours faire appel à des mécanismes de soutien pour renta-biliser leur opération, cette contrainte limitant la visibilité à long terme sur la pérennité de la filière et des marchés. Cependant, la situation de la filière est contrastée suivant les types de mar-chés (terrestre, en mer, sites insulaires). L’émer-gence d’infrastructures lourdes de conception, d’acheminement et de maintenance des parcs éoliens est plus lente et reste très sectorisée, selon les marchés considérés.

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5 Les visions prospectives Elles ont pour horizon 2050, avec un premier jalon en 2020. Elles ont vocation à décrire, parfois de manière caricaturale, les différentes modalités de déploiement des options techno-logiques, organisationnelles et socio-économiques.

Elles n’ont pas la prétention de décrire ce que sera la réalité à l’horizon 2050, mais plutôt de définir le champ des possibles pour ensuite en déduire un large ensemble de verrous, de prio-rités de recherche et de besoins de démonstra-teurs de recherche et de plates-formes techno-logiques. La réalité sera très probablement une combinaison de ces visions.

5.1 La vision 2020

À l’horizon 2020, le taux de pénétration de l’énergie éolienne est légèrement supérieur à 9 % de la consommation électrique. Pour la filière terrestre, de nombreux projets ont abouti et permettent d’atteindre l’objectif des 19 GW de capacité installée ; les délais d’ob-tention des permis et de mise en place des structures varient fortement selon les projets et selon les recours juridiques engagés et les contextes économiques et/ou sociétaux des zones d’implantation. Sur la période 2011-2020, la filière terrestre a majoritairement participé à la croissance du taux de pénétration de l’éolien dans la production globale d’électricité. La com-pétitivité de l’éolien terrestre est atteinte et les développeurs de parcs éoliens terrestres ne font majoritairement plus appel à des dispositifs de soutien prévus par la loi (obligation d’achat et appels d’offres).

Cependant, la problématique de la disponibilité de sites pour l’implantation de nouveaux parcs est critique. C’est une contrainte pour la crois-sance de la filière. À cet horizon, les premiers renouvellements sur des parcs terrestres ont lieu pour implanter des éoliennes innovantes et plus performantes sur ces sites.

Au niveau des DROM-COM, la filière participe pleinement au nouveau bouquet énergétique, à la gestion du système électrique (à travers les services système que les parcs peuvent fournir) et à son équilibrage.

La filière en mer souhaite continuer à être motrice pour le marché éolien sur la période

2020-2050, voire dépasser la filière terrestre. L’objectif des 6 GW de capacité installée est atteint grâce à des éoliennes d’une puissance unitaire de 5 à 10 MW (avec des diamètres de rotor de 100 à 200 mètres) : ces parcs éo-liens font principalement appel à des machines et des technologies éprouvées à l’échelle des pilotes expérimentaux et industriels. Des tra-vaux en cours de R&D, des sites d’essai et des démonstrateurs visent à faciliter la réduction des coûts et la compétitivité de l’éolien en mer à l’horizon 2030. À la suite des différents appels d’offres, les cinq zones identifiées au cours de la concertation de 2009-2010 sont étendues et de nouveaux sites préférentiels sont définis pour des projets de parcs éoliens.

Ces zones offrent la possibilité d’implanter des sites de test et d’essai pour des structures et des pales innovantes (augmentation de la puis-sance, nouveaux matériaux et nouveau design de pales…) et pour des études d’impact envi-ronnemental. Des infrastructures industrielles côtières se sont développées, de nouvelles infrastructures sont prévues pour assurer la conception, l’acheminement et la mise en place des éoliennes. Une filière se met progressive-ment en place pour garantir la logistique et la maintenance en mer de ces parcs éoliens. Cette filière énergétique reste pour le moment dépendante des dispositifs de soutien prévus par la loi.

Les objectifs fixés à l’horizon 2030-2050 demandent cependant une accélération des efforts de R&D visant l’amélioration des tech-nologies et la baisse des coûts. L’émergence de synergies entre les différents acteurs et parties prenantes reste un point majeur pour favoriser et accompagner l’aboutissement des projets éoliens aussi bien en mer que terrestre. Les délais de conception, d’obtention des conces-sions, d’installation et de lancement des parcs éoliens doivent encore être raccourcis pour tenir le rythme et atteindre les objectifs fixés à long terme.

A. Vision 1 : Les filières terrestres et insulaires en chef d’orchestre

Cette vision s’inscrit dans une évolution tendan-cielle de la situation actuelle avec une implan-tation territoriale qui s’est clarifiée et simplifiée (procédures adaptées et délais raccourcis, peu voire pas de contestation).

La compétitivité de l’offre éolienne en mer n’est toujours pas acquise, a contrario l’éolien terrestre offre des solutions de production d’électricité rentables.

Dans ce contexte, les marchés terrestres et insulaires sont les chefs de file de la filière éolienne ; le marché de l’éolien en mer reste conditionné à une volonté de développer les énergies renouvelables, de décarboner l’électri-cité produite et donc de soutenir ces nouveaux modes de production électrique renouvelable.

L’intérêt collectif a dépassé les oppositions locales pour permettre l’implantation de nom-breux parcs éoliens terrestres. Une majorité de territoires s’est ainsi impliquée dans le dévelop-pement de la filière terrestre et l’émergence de mécanismes participatifs a permis d’associer le maximum de parties prenantes dans le finan-cement de ces installations. Les collectivités se mobilisent, elles sont associées aux projets et

5.2 Les visions 2050

Le croisement des deux paramètres clés permet d’identifier quatre visions contrastées du déploie-ment des parcs éoliens et plus généralement de l’évolution de la filière.

Phase encore non mature, risques non maîtrisés

Bonne maturité sur l’ensemble de la chaîne

de valeur, maîtrise du partage coûts/bénéfices

Pas de participation de l’éolien à l’équilibrage

du système

Vision 1Les filières terrestres et insulaires en chef

d’orchestre

Vision 2L’éolien, une énergie diffuse et encore peu centralisée

Forte intégration de l’éolien au système électrique

Vision 3Des pôles de production

d’électricité éolienne soute-nus par les pouvoirs publics

Vision 4Les éoliennes fortement

implantées dans le système européen

Esquisse de visions de déploiement à long terme de la filière éolienne

Participation de la production éolienne à la gestion de la charge

Degré de maturité de la filière

éolienne

les favorisent. Pour certains territoires difficiles et/ou côtiers, il faut arbitrer entre une montée en puissance des éoliennes terrestres, avec d’éventuels risques de blocage et de contesta-tion qui sont difficiles à surmonter, et la mise en place de parcs éoliens en mer (à la condition d’avoir une bonne visibilité sur la pérennité du soutien public). Les infrastructures « support » de ces parcs (autrement dit les infrastructures, outils de production, de logistique et de main-tenance inhérents au déploiement des parcs) sont territorialisées : on assiste au développe-ment d’une filière éolienne locale et à un fort niveau de production décentralisée.

L’exportation des acteurs français se fait prin-cipalement sur des marchés bien ciblés avec le développement de machines innovantes et adaptables.

B. Vision 2 : L’éolien, une énergie diffuse et encore peu centralisée

Les récentes avancées aussi bien technolo-giques (pales, mâts, génératrices…) qu’orga-nisationnelles pour les étapes de conception, d’acheminement et de maintenance ont permis de rendre compétitive l’ensemble de la filière éolienne : cette baisse des coûts permet aux développeurs de ne plus faire appel aux méca-

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nismes de soutien et de positionner l’électricité éolienne comme un acteur crédible et durable du bouquet énergétique. La taille des parcs est très variable, sans pour autant voir émerger de très grands parcs, et dépend avant tout de questions de contexte sur le territoire d’implan-tation et de paramètres économiques (analyses coûts/bénéfices) : les marchés terrestres et en mer se développent sur l’ensemble du territoire dans une typologie d’implantation encore peu centralisée. Les éoliennes sont gérées sans par-ticipation à l’équilibrage du système électrique.

Des infrastructures potentiellement lourdes (no-tamment pour la filière en mer), nécessaires à l’exploitation, l’acheminement et la maintenance de ces unités de production d’électricité, se sont développées. Selon le marché visé, différents types d’infrastructures se sont mis en place :

• adaptation des zones côtières et portuaires, des bâtiments et des bateaux pour assurer les différentes étapes du cycle de vie des parcs éoliens en mer ;

• création de multiples sites pour assembler et assurer la logistique et la maintenance des différents sites d’implantation pour l’éolien terrestre ;

• mise en place, pour chaque site insulaire, d’une filière assurant la logistique et l’interac-tion avec les systèmes électriques.

La mise en place de ces infrastructures s’ac-compagne également d’efforts en termes de formation des nouveaux acteurs.

L’ancrage territorial de la filière se traduit par une cohabitation pérenne entre parties pre-nantes et l’implication d’acteurs territoriaux (particuliers, groupements, collectivités) dans la gestion, voire le financement des parcs éoliens (éolien citoyen et participatif). Le couplage de différentes activités (aquaculture et production d’électricité par exemple) et l’ajout de nou-velles fonctionnalités (mesure de vent, relevé des phénomènes météorologiques locaux, suivi des populations d’oiseaux et des chauves-sou-ris, surveillance du territoire) accompagnent et accentuent l’acceptabilité de ces projets. Ce-pendant, la croissance du marché intérieur de

l’éolien reste modérée, pour des questions juri-diques ou de choix de politique énergétique.

En parallèle, le marché à l’international est très dynamique et les acteurs français de la filière se tournent à l’export pour valoriser leurs pro-duits : c’est un marché très compétitif, l’inno-vation en termes de machines et d’outils de gestion et de maintenance y est très présente.

C. Vision 3 : Des pôles de production d’électricité éolienne soutenus par les pouvoirs publics

Dans un scénario volontariste de dénucléa-risation de l’électricité avec une taxe carbone élevée, la force publique incite et accompagne le développement des énergies renouvelables, notamment avec une politique de soutien durable. Les mégafermes éoliennes en mer (puissances installées au-delà de quelques GW) occupent une place prépondérante dans le paysage éolien français et participent active-ment à la gestion du système électrique et à son équilibrage. Cependant la diminution des coûts et l’amélioration des technologies n’ont pas été suffisantes pour rendre compétitive la filière de l’éolien en mer et pour que les exploi-tants de parcs ne fassent plus appel aux méca-nismes de soutien. Seules les filières éoliennes terrestre et insulaire proposent des solutions économiquement compétitives. Cette perspec-tive de développement d’un marché soutenu par un dispositif d’aide, bien que l’éolien ter-restre soit compétitif, peut s’expliquer par :

• la volonté de maximiser et d’optimiser une ressource éolienne en mer importante ;

• des contraintes terrestres trop fortes pour concevoir des parcs terrestres de grande taille ;

• le souhait ou la nécessité de maintenir une production électrique centralisée ;

• la mise en place possible de solutions de stockage hydraulique de forte capacité ou de réseaux électriques paneuropéens, qui confèrent aux parcs une forte intensité capi-talistique ;

• des réseaux sous-marins performants.

Comparativement, la production liée aux mar-chés terrestre et insulaire trouve sa place pour des marchés bien précis :

• pour les sites insulaires, la compétitivité de la technologie permet à la filière de se position-ner comme l’acteur principal de la baisse du taux de CO2 de l’électricité produite ; selon le contexte local, des sites de très grandes tailles peuvent voir le jour ;

• la filière terrestre est principalement condi-tionnée par des questions de contexte sur les sites visés : des volontés, à l’échelle territo-riale (locale ou régionale), de s’engager dans la filière permettent l’émergence de projets.

Bien au-delà de la vision 2, les infrastructures inhérentes à la conception et à l’exploitation de ces parcs se sont majoritairement développées sur des zones portuaires qui sont devenues des points de passage obligés vers les parcs éoliens en mer : ces outils (bâtiments et bateaux) gèrent plus particulièrement la conception, l’achemi-nement et la maintenance des éoliennes en mer. Les zones portuaires sont principalement le fruit de partenariats entre industriels, déve-loppeurs, exploitants de parcs et autorités lo-cales et régionales. De plus, pour assurer le suivi et la maintenance optimale des machines, des « bases de vie », véritables plates-formes auto-nomes situées à longue distance des côtes, ont vu le jour dans les différentes zones d’implanta-tion et développent des synergies avec d’autres activités énergétiques (dont le stockage), pour la gestion et l’exploitation des ressources ha-lieutiques ou d’autres ressources marines.

Cette montée en puissance des parcs éoliens n’empêche cependant pas la présence d’inves-tisseurs publics au côté d’investisseurs privés et l’implication du territoire et de ses acteurs dans la conception et l’exploitation de ces parcs.

Les contraintes et les conflits d’usage pour les zones maritimes visées restent cependant présents et nécessitent la mise en place d’une réglementation adaptée et favorisant l’implan-tation de ces parcs : l’implantation éventuelle de parcs éoliens dans les zones économiques exclusives28 oblige la levée de certains vides juridiques et la mise en place de cadres régle-mentaires favorisant l’utilisation de ces zones.

Le développement de l’éolien terrestre est très hétérogène et reste conditionné à l’existence de sites disponibles (pour lesquels la cohabita-tion est envisageable) ou d’une volonté forte de la part d’un territoire de s’engager dans la création d’une filière industrielle, plus ou moins locale, portée par le marché de l’éolien.

D. Vision 4 : Les éoliennes forte-ment implantées dans le système européen

Bien au-delà du marché actuel (courant 2011) et des prévisions à court terme, cette vision s’inscrit dans un marché qui se tourne vers des parcs éoliens de très grandes tailles ou fortes puissances, et ce parallèlement à l’émergence de réseaux souterrains et sous-marins (notam-ment à courant continu) qui offrent une forte connotation collaborative : une dimension de coopération européenne encore plus forte qu’à l’heure actuelle, d’échange des ressources et de gestion mutualisée (dont la participa-tion à l’équilibrage) de l’ensemble du système électrique se met en place. La topologie des réseaux électriques impacte naturellement la typologie d’implantation des parcs et favorise l’émergence de mégafermes éoliennes.

De plus, à l’instar de la vision 2, l’ensemble des filières éoliennes (en mer, terrestre et sites insu-laires) sont compétitives et proposent un kilo-wattheure (kWh) au prix du marché.

Cette vision s’appuie sur un marché en mer très dynamique et moteur pour l’ensemble de la filière éolienne ; cela se traduit par la concep-tion de mégafermes éoliennes interconnectées.

28. La zone économique exclusive est un espace maritime sur lequel un État côtier exerce des droits souverains en matière d’exploration et d’usage des ressources. Elle s’étend de la mer territoriale de l’État (12 milles marins de ses côtes) à 200 milles marins.

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6 Les verrous Les verrous sont les éléments contextuels qui freinent l’atteinte des visions définies à moyen terme (2020) et long terme (2050).

Ils sont de nature politique, socio-économique, technologique, organisationnelle ou réglemen-taire et peuvent apparaître séparément ou conjointement. Leur identification résulte de l’analyse de l’environnement de la filière éo-lienne, caractérisé par les dimensions suivantes :

• politique énergétique : c’est l’élément moteur de cette feuille de route, avec des ob-jectifs pour 2020 et 2050 clairement définis,

• socioculturelle : en France, le contexte est de plus en plus favorable à l’éolien. Cependant un certain nombre de conflits d’usage doivent être pris en compte dans le déploiement territorial de l’énergie éolienne,

• économique : le secteur de l’éolien est en forte croissance en France et à l’interna-tional. Dans la plupart des pays, il bénéficie de mesures incitatives (voir encadré ci-contre) qui permettent de rendre viables les plans d’affaires et de favoriser le lancement de la filière. Le développement de grands outils de production peut être incité par la nécessité de reconversion de certaines industries et de renforcement du tissu industriel,

• technologique : en France, l’éolien est au début de sa courbe de cycle de vie, en phase de croissance. C’est le levier sur lequel joue-ront les appels à manifestations d’intérêt des investissements d’avenir, destinés à jouer le rôle d’accélérateurs de croissance,

• environnementale : le principal impact environnemental des éoliennes concerne la faune et la flore. Un autre facteur, qui n’est pas spécifique à l’éolien, est le suivi d’une démarche d’éco-conception et la recherche de matériaux de substitution aux matériaux rares ou sous pression d’utilisation, comme les terres rares utilisées pour les aimants per-manents.

• législative et réglementaire : le volet législatif est le facteur qui permet d’assurer un développement effectif de l’énergie éolienne sur le territoire national.

En conséquence, nous avons classé les ver-rous qui pourraient susciter des besoins de re-cherche, développement et démonstration, en verrous technologiques et non technologiques.

Les mesures incitatives

Pour favoriser et accompagner le déve-loppement de l’énergie éolienne, diffé-rentes mesures incitatives ont été mises en place à travers le monde ; elles per-mettent l’émergence de projets éoliens rentables à moyen ou long terme. Selon les pays ciblés, ces incitations peuvent différer avec des tarifs d’achat fixes, des tarifs d’achat dépendant du prix de mar-ché de l’électricité (premium) ou des sys-tèmes de certificats verts échangeables (Renewable Obligation Certificates ou ROC).

6.1 Verrous technologiques

Le terme « verrou » ne doit pas être vu comme limitant ; ces verrous déterminent avant tout des besoins d’améliorations et/ou de ruptures technologiques pour accompagner l’émer-gence de systèmes et composants innovants.

A. Ressource éolienne

• Manque de mesures complètes de bonne qualité à court, moyen et long terme, et besoin d’installation d’infrastructures comme des mâts de mesure, des systèmes de télédé-tection des vitesses de vent.

• Besoin d’une meilleure prévision de l’énergie éolienne (court terme) et d’une meilleure évaluation de la ressource (long terme) : maî-trise de l’incertitude de l’estimation de la res-source et de la production, amélioration de la prédictibilité (avoir accès à des capacités de calcul suffisantes).

• Besoin de modélisation pour mieux maîtri-ser les effets sillage (voir encadré ci-dessous) et mieux évaluer la diminution de productible.

B. Machines et composants

• Adaptabilité des machines aux différentes conditions (classes de vent des sites français).

• Besoin d’améliorer la fiabilité et l’adaptabilité des pales.

• Besoin d’améliorer les chaînes cinématiques (notamment nécessité de rupture techno-logique sur les génératrices et nouveaux concepts).

• Besoin de nouveaux matériaux pour les composants (diminution du poids des com-posants notamment).

• Besoin de monitoring (intégration de capteurs de déformation ou d’usure par exemple).

• Nécessité d’adapter les fonctionnalités de stockage et de répartition.

• Interaction avec les radars (diminuer les per-turbations et signatures radar des éoliennes)

• Besoin d’augmenter la durée de vie des éo-liennes et de diminuer les coûts de mainte-nance dans le temps.

C. Intégration système électrique

• Diminuer les coûts d’investissement des nou-veaux réseaux .

• Augmenter les fonctionnalités pour participer aux services système.

D. Infrastructures et logistique

• Nécessité d’adapter et de développer des zones et infrastructures portuaires pour ac-cueillir des unités de conception et d’assem-blage, et d’intégrer de nouvelles activités liées à l’éolien.

• Besoin de bateaux adaptés pour les dif-férentes étapes de la vie d’un parc éolien (acheminement des installations, mise en place, maintenance, démantèlement).

• Besoin d’une maintenance adaptée (notam-ment disponibilité des structures et des outils pour intervenir rapidement sur les parcs).

E. Ingénierie marine

• Besoin de supports pour les éoliennes (maté-riaux capables de résister aux diverses sollici-tations et contraintes), conception de fonda-tions et implantation.

• Etude et modélisation avec couplage fluide/structure.

F. Aspects environnementaux et so-ciétaux

• Améliorer l’utilisation des ressources maté-riaux : réduction des quantités utilisées, subs-titution, capacité de recyclage des éléments des machines et des fondations.

• Faible connaissance des impacts des éoliennes sur la faune (comportement et adaptation)

• Contraintes hygiène et sécurité pour la construction des futures éoliennes.

• Extension des zones d’implantation de parcs éoliens en mer (problèmes des mines et des épaves).

Effet sillage

En aval d’une éolienne, un sillage tourbil-lonnaire se développe. Ces turbulences ont un double effet sur l’environnement immédiat : une diminution de la vitesse du vent derrière l’éolienne entraînant notamment une baisse de production des éoliennes environnantes et une augmentation des charges de fatigue (et donc une diminution de la durée de vie des éoliennes). Pour limiter cet effet, dans le cas d’un parc éolien, on cherche à espacer les éoliennes autant que possible dans la direction des vents dominants.

Grand éolien

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6.2 Verrous à caractère juridique, organisationnel, réglementaire et socio-économique

• Complexité administrative et recours (les délais sont de trois ans en moyenne), vides juridiques qui peuvent freiner les investisse-ments dans des opérations éoliennes.

• Manque de fonds pour accompagner les entreprises qui prennent des risques dans la mise en œuvre de nouvelles technologies.

• Besoin d’un renforcement important de la structuration de la recherche, des capacités d’essai et de la formation (initiale ou conti-nue) en France : pas d’infrastructures de test et/ou de centres de recherche spécialisés et permettant des travaux de recherche à la fois par les chercheurs et par les industriels (avec des capacités de test, d’analyse et des person-nels disponibles).

• Manque d’échanges d’informations et de col-laborations entre les acteurs (gestionnaires de réseaux, distributeurs, acteurs industriels et organismes de recherche).

• Acceptabilité sociale des parcs éoliens ter-restres et en mer.

7 Les priorités de recherche La feuille de route n’étant pas destinée à orienter les seules actions de l’ADEME, les besoins de l’ensemble de la chaîne de développement sont répertoriés, qu’ils soient d’ordre technologique, scientifique, réglementaire ou sociétal.

mettre aux structures ou aux acteurs natio-naux de participer aux groupes de travail et aux projets collaboratifs européens et/ou inter-nationaux.

Les recommandations du groupe d’experts ont pour but d’orienter les travaux à conduire, la ventilation des priorités de R&D reprenant les grandes familles de verrous identifiées :

• Ire catégorie : Evaluation de la ressource et prédictibilité de la production électrique à court et moyen terme

L’ensemble des priorités de recherche doit viser la diminution de l’incertitude des pré-visions éoliennes et de l’estimation de la ressource. À titre d’exemple, la plate-forme TPWind propose dans son Strategic Research Agenda une « vision 3 % » ambitieuse à l’hori-zon 2030, qui se fixe comme objectif d’at-teindre une incertitude de moins de 3 % sur la production énergétique annuelle, les condi-tions de vent (liées au design des machines) et la prédiction court terme pour la produc-tion électrique éolienne, cela pour n’importe quel site géographique.

1.1 Réalisation de campagnes de mesure bien instrumentées sur des sites types et sur des temps assez longs (notamment pour calibrer les outils de conception des parcs), campagnes adaptées aux nouvelles machines (création de bases de données aux échelles nationale et internationale).

1.2 Développement de nouveaux outils et techniques de monitoring et d’évaluation de la ressource (mâts suffisamment instrumen-tés, monitoring à distance, techniques rapides et peu coûteuses d’évaluation à partir de plates-formes fixes ou flottantes, développe-ment de méthodes de détection satellitaire).

1.3 Développement de modèles avancés d’estimation de la ressource : prise en compte des différentes turbulences, notamment mise au point de méthodes spécifiques à l’environ-

Selon leur degré de maturité, les actions à mettre en œuvre pourront porter sur :

• la recherche amont : fondamentale et/ou exploratoire ;

• la recherche industrielle : finalisée, complétée par le développement expéri-mental de briques technologiques ;

• le développement préindustriel permettant, en conditions réelles, à échelle réduite ou réelle, la validation de techno-logies innovantes. Elles peuvent porter sur une brique technologique ou un ensemble de briques technologiques : c’est le rôle des démonstrateurs de recherche, de l’expéri-mentation et du prototypage préindustriels ;

• le déploiement commercial : dès la première unité de production. Cela suppose une faisabilité technico-économique, un plan d’affaires, des études d’impacts.

Au-delà des simples priorités de recherche, le groupe d’experts a souhaité souligner, de façon consensuelle, le manque d’infrastructures et d’une véritable stratégie coordonnée sur l’éo-lien. Ainsi, afin de garantir une masse critique et de stimuler la R&D, la création d’une struc-ture mutualisée, un centre de coor-dination des recherches sur l’éolien, semble opportune. Cela permettrait de définir, de coordonner et de mettre en œuvre une stratégie nationale et de rassembler les outils méthodologiques et les supports transverses. Il conviendrait alors de spécifier et mettre en place les mécanismes de fonctionnement : arti-culation avec les autres parties prenantes, ges-tion des infrastructures de test et d’étalonnage, transfert technologique pour les outils de test. Cette coordination scientifique doit se proje-ter au-delà des frontières nationales et per-mettre ainsi la création de liens (notamment dans le cadre des accords de mise en œuvre de l’Agence internationale de l’énergie ou des activités portées par l’Agence internationale des énergies renouvelables) pour favoriser les échanges entre les acteurs mondiaux et per-

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nement maritime (vagues, houles), profil du vent au-dessus de 100 mètres, mise en place d’outils de simulation des extrêmes et/ou des évolutions très probables.

1.4 Planification spatiale de la ressource : dé-veloppement d’un outil qui intègre les bases de données (nationales, européennes, mon-diales) d’évaluation de la ressource.

1.5 Prédiction court terme (amélioration des prévisions météorologiques et des pré-visions de production d’électricité éolienne, prévision des phénomènes de décrochage des éoliennes).

1.6 Conception de méthodes d’optimisation de l’implantation d’éoliennes (aux échelles du parc et de la machine) en tenant compte des différentes contraintes (ressource, sillage, radar…).

1.7 Etude sur l’optimisation et la cogestion des ressources éolienne et hydraulique sur le réseau électrique.

• 2e catégorie : Priorités technolo-giques en lien avec les machines et composants utilisés

Ces priorités de recherche doivent être consi-dérées à travers leur impact potentiel sur le coût de l’énergie, l’efficience énergétique du système entier et la disponibilité (fiabilité, ac-cessibilité et durée de vie) des éoliennes.

2.1 Développement de rotors de plus grande taille : conception d’outils intégrant les phénomènes physiques importants (aéro-dynamique, aéroélasticité et acoustique) et les nouveaux composants (rotors, contrôle commande…).

2.2 Amélioration du niveau de performance et de la fiabilité des composants des aérogé-nérateurs, de la chaîne de transmission, des composants pour la conversion d’énergie, du contrôle commande, du système d’orienta-tion de la nacelle et des pales… ; optimisation de la balance performance/durée de vie.

2.3 Développement de composants inté-grés, amélioration de la fiabilité des systèmes intégrés.

2.4 Mise en œuvre d’innovations dans les méthodes, procédés et outils de fabrication, de manière à produire des composants en

grande série et à réduire les temps de fabri-cation (automatisation).

2.5 Développement de nouveaux matériaux pour les différents composants, réduction des quantités et du poids, substitution et capacité de recyclage des matériaux utilisés (terres rares…).

2.6 Prise en compte de la problématique « vents faibles » (développement de rotors de grandes dimensions adaptés à des vents moyens faibles, technique cut-in pour faciliter le démarrage des turbines).

2.7 Problématiques spécifiques associées à l’environnement maritime (houles, vagues, corrosion).

2.8 Développement d’une démarche d’éco-conception pour les différents procédés du cycle de vie des machines.

• 3e catégorie : Intégration système

Les priorités de recherche visent à favoriser la pénétration de l’éolienne dans le système énergétique à des coûts modérés tout en assurant le fonctionnement satisfaisant du système électrique.

3.1 Réduction des coûts d’installation des câbles et de leur raccordement au réseau.

3.2 Développement de composants pour optimiser l’interaction avec le système : développement de dispositifs garantissant la sécurité du réseau, lissage de production par stockage, développement de dispositifs d’électronique de puissance pour faciliter l’intégration au réseau des éoliennes, déve-loppement de nouveaux systèmes de stabi-lisation, de freinage et de liaison entre diffé-rents sous-ensembles, mise en œuvre d’outils de surveillance et de gestion des creux de tension.

3.3 Identification des grid codes nécessaires à un développement fiable des dispositifs éoliens, cohérence des codes avec des taux de pénétration élevés (réflexions à l’échelle européenne).

3.4 Extension et renforcement durable du réseau européen pour assurer des taux éle-vés de pénétration de l’énergie éolienne.

3.5 Développement d’outils opérationnels permettant l’interopérabilité.

• 4e catégorie : Infrastructures et logistique

4.1 Mise en œuvre d’innovations dans les méthodes, procédés et outils de fabrication, de manière à produire des composants en grande série et à réduire les temps de fabri-cation (automatisation).

4.2 Développement d’outils et d’infrastruc-tures pour les étapes de conception, de pré-assemblage, d’acheminement et d’installation, notamment des pièces de grande dimension.

4.3 Mise en œuvre d’innovations pour instal-ler des machines de très grandes puissances (en garantissant un haut niveau de sécurité des hommes et des biens) et pour réduire les coûts de démantèlement des installations.

4.4 Conception de solutions de mainte-nance adaptées aux problématiques des dif-férents types de parc (mise au point de plans de maintenance préventive, solutions de télé-surveillance des parcs).

• 5e catégorie : Ingénierie marine

5.1 Design, conception de supports et fon-dations adaptés pour les différents niveaux de profondeur.

5.2 Développement d’outils de modélisation tenant compte du couplage fluide/structure.

• 6e catégorie : Aspects environne-mentaux et sociétaux

6.1 Développement d’outils et de solutions limitant l’interaction avec les radars : pales d’éoliennes à signature radar réduite, déve-loppement de radars innovants, solutions in-tégrées à l’éolienne, synergies entre secteurs d’application…

6.2 Amélioration des connaissances sur la biodiversité environnante par la collecte d’informations sur : les différentes espèces et leurs activités, la sensibilité des zones identi-fiées, la réponse d’un milieu à l’implantation d’un parc, l’étude des impacts cumulatifs (court, moyen et long terme).

6.3 Caractérisation, développement d’outils et de méthodes pour améliorer et standar-diser le suivi des impacts environnementaux : systèmes d’acquisition (caméra thermique, ra-

dar, acoustique), innovations sur les machines (systèmes d’observation intégrés, systèmes de régulation adaptables, détecteurs de chocs, signalisation, peinture), modèles prédictifs (biostatistique) et d’analyse de risque.

6.4 Développement de produits ou solutions capables d’avoir des effets positifs sur les res-sources écologiques (protection de la faune et de la flore, équilibre environnemental des parcs grâce à la compensation des impacts).

6.5 Estimations du bilan carbone et de l’ana-lyse du cycle de vie des projets et systèmes éoliens (à partir de tous les éléments consti-tutifs du parc et pour toutes les phases du projet, de la construction au démantèlement).

6.6 Développement de méthodes inno-vantes pour améliorer l’acceptabilité des parcs éoliens : analyser et réduire la signa-ture acoustique des parcs (en fonction des fréquences, y compris infrasons), limiter les perturbations et conflits d’usage (balisage des parcs, concertation et engagement des par-ties prenantes, mesures de compensation…), mettre en œuvre des synergies (exploitation conjointe de la ressource énergétique et de la ressource halieutique par exemple).

• 7e catégorie : Priorités transver-sales

L’énergie éolienne possède des caractéris-tiques technico-économiques spécifiques. Afin de pouvoir définir une stratégie d’utili-sation optimale de l’éolien dans le bouquet énergétique, en accord avec les valeurs du développement durable telles que les inves-tissements raisonnés, la concertation avec la population et l’intégration dans l’environne-ment, il convient de développer des outils transverses.

7.1 Développement de modèles de coût pour identifier les points prioritaires de R&D, en termes d’optimisation du rapport coûts/bénéfices.

7.2 Conception de modèles d’affaires inno-vants pour favoriser la valorisation et amélio-rer la rentabilité économique des projets.

7.3 Conception d’outils favorisant l’éolien citoyen et participatif (actionnariat dans des projets éoliens par exemple).

Grand éolien

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8 Les besoins de plates-formes technologiques, de démonstra-teurs de recherche et industriels

Dans le cadre d’un plan d’action sur les priorités de R&D, des outils peuvent émerger et se mettre en place pour lever les principaux verrous technologiques et identifier éventuelle-ment de nouvelles priorités de recherche.

Les démonstrateurs de recherche et industriels et les plates-formes technologiques doivent suivre différents objectifs pour favoriser le dé-veloppement de la filière :

• diminuer le coût de l’électricité produite par les éoliennes de moyenne et grande puis-sance ;

• faciliter l’acceptation des projets éoliens ;

• minimiser les impacts environnementaux des parcs éoliens.

La taille choisie pour les démonstrateurs de recherche, les démonstrateurs préindustriels et les plates-formes technologiques, doit être ajustée pour que les options technologiques et économiques proposées puissent constituer de réelles preuves de faisabilité et de pertinence au regard de l’engagement d’un développement in-dustriel et commercial ultérieur. Pour l’éolien, la validation des technologies en condition d’usage réel passe nécessairement par la mise en place de démonstrateurs à l’échelle 1. Les installa-tions peuvent concerner des expérimentations de composants ou de systèmes complets, des unités de fabrication expérimentales, des plates-formes technologiques d’essai de matériels, l’ap-plication de méthodologies ou services.

Dans le cadre de la mise en place de ces outils de recherche et de développement préin-dustriel, une attention particulière doit être accordée aux bilans économiques, sociaux et environnementaux (notamment la réduction globale des émissions de gaz à effet de serre).

8.1 Démonstrateurs de recherche et industriels

Un démonstrateur doit permettre de lever des verrous technologiques liés à la taille d’un système ou à sa complexité née d’une intégra-tion de systèmes. C’est une étape du processus de recherche, développement et industrialisa-tion des technologies, qui se situe en aval de la recherche et en amont des phases d’indus-trialisation, et qui peut conduire à relancer des recherches appliquées et/ou fondamentales.

8.2 Plates-formes technologiques, sites d’essai, de certification et de qualification

L’objectif d’une plate-forme est d’assurer le transfert technologique entre le secteur de la recherche et le secteur industriel. Elle mutualise des moyens pour offrir des services, des pres-tations ou des ressources qui permettent à une communauté ouverte d’utilisateurs (publics et privés) de mener aussi bien des projets de recherche et de développement à long terme (caractérisation, prévision de la ressource, dé-veloppement de nouveaux composants et sys-tèmes, etc.) que des prestations à court terme (tests, essais, validation de prototypes, etc., à la demande d’industriels) avec une certaine ren-tabilité économique. Ces structures mutuali-sées sont la réponse à un certain nombre de besoins identifiés par les acteurs :

• sites d’accueil de prototypes pour phases de test ;

La flexibilité des installations pour tester tout ou partie de l’éolienne, l’accessibilité du site (temps d’attente, moyens logistiques, coûts), l’adéquation du site et des bancs d’essai avec l’évolution des technologies sont autant de paramètres à intégrer pour la mise en place de telles plates-formes technologiques.

Au regard du tissu industriel français de fournis-seurs, cet outil servirait d’accélérateur d’innova-tion pour les composants, services et sous-sys-tèmes et faciliterait les étapes de certification indispensables pour accompagner la croissance des acteurs sur les marchés français et interna-tionaux.

L’émergence de telles structures doit se faire en cohérence avec la mise en place des Insti-tuts d’excellence dans le domaine des énergies décarbonées (IEED29).

• instrumentation et essais d’endurance des prototypes (machines) ;

• caractérisation des composants, services et sous-systèmes ;

• collaboration entre acteurs (fournisseurs, laboratoires, constructeurs), meilleure articu-lation entre intégrateurs et sous-traitants ;

• phases de test dans des conditions de vent et de biodiversité représentatives des sites français ;

• certification des machines, composants, ser-vices et sous-systèmes ;

• qualification des fournisseurs ;

• proximité entre les acteurs et les infrastruc-tures.

À l’heure actuelle, aucun site de test éolien n’existe en France. D’autre part, les accrédita-tions des certificateurs ne concernent que les certifications de types ou de composants. Elles incluront à terme la certification de projets.

29. Plates-formes interdisciplinaires industrie et recherche publique dans le domaine des énergies décarbonées.

Grand éolien

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9 Aspects réglementaires et juridiques

Au cours des étapes préliminaires de concep-tion des projets, des procédures juridiques peuvent allonger les délais jusqu’à leur aboutis-sement. L’enjeu réside aujourd’hui dans l’adap-tation de ces procédures et réglementations pour faciliter le développement de la filière ; il semble également opportun de limiter les vides juridiques dans le but de proposer un cadre précis et spécifique aux opérations éoliennes (notamment en mer) pour limiter les délais d’instruction et éviter d’éventuels recours.

Ainsi, au-delà des priorités de R&D, procédures et réglementations sont à mettre en cohérence avec le développement des parcs éoliens pré-conisé dans les visions prospectives. Il s’avère nécessaire de :

• tenir compte de la notion d’évolution tech-nologique par la mise en place d’une pro-cédure sur les modifications éventuelles du dimensionnement des installations ;

• mettre en place et pérenniser un « guichet unique » pour l’obtention des autorisations administratives (étude d’impact unique in-cluant les demandes d’autorisation d’occupa-tion du domaine public maritime et d’auto-risation délivrée au titre de la loi sur l’eau) ;

• préciser le régime applicable en fin de conces-sion du domaine public maritime ;

• déterminer les procédures applicables dans les zones économiques exclusives françaises.

Annexe Benchmark international

Royaume-Uni, l’agence Carbon Trust se veut un accélérateur de technologies dont un des axes est l’éolien en mer. Des organismes de com-pétences techniques et scientifiques, le Risø National Laboratory au Danemark, le Cen-tro Nacional de Energias Renovables (Cener) en Espagne, le New and Renewable Energy Centre (NaREC) au Royaume-Uni (Blyth, Nor-thumberland), l’Institute for Wind Energy and Energy System Technology, (IWES) en Alle-magne, se sont développés pour favoriser les échanges entre la recherche publique et privée et accompagner une politique d’innovation pour la filière éolienne ; des consortiums entre différents laboratoires permettent une meil-leure coordination des travaux de recherche et une mutualisation des connaissances et des données techniques.

Dans la majorité de ces pays, une forte articula-tion existe entre recherche publique et privée, sachant que l’industrie éolienne tire et oriente la recherche de chacun de ces pays.

Cette feuille de route sur le grand éolien vise à éclairer les choix pour accompagner le déve-loppement de la filière, des structures et tech-nologies et assurer l’insertion de sa production électrique dans des systèmes énergétiques de plus en plus diversifiés.

L’angle d’attaque choisi pour ce benchmark est donc celui des outils innovants de recherche, de démonstrations voire de préindustrialisation, des collaborations entre acteurs ainsi que des dispositifs de soutien (et des budgets) mis en œuvre pour appuyer et accompagner les tra-vaux de recherche et de démonstration.

La thématique éolienne est identifiée dans de nombreux pays comme prioritaire pour la recherche, la démonstration voire le déploie-ment industriel. Ces pays présentent des dispo-sitifs nationaux de recherche, développement et innovation scientifique et technologique organisés. Des programmes de recherche pré-cis et orientés sont en place pour rassembler les compétences nationales : par exemple au

Évolution des budgets de R&D pour l’énergie éolienne par pays, en millions d’euros, valeur 2009 (source : AIE)

USA UK Espagne Norvège Pays-Bas

Allemagne France Danemark Canada

0

5

10

15

20

25

30

35

40100

1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010

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La taille de l’aérogénérateur est un facteur dé-terminant pour la puissance de l’éolienne, l’éner-gie annuelle produite, le coût de fabrication de la machine et le coût final de l’énergie. Il a éga-lement un impact direct sur la conception et le design des pales. Dans une volonté de réduire le coût du kilowattheure produit, de gros efforts portent sur l’augmentation de la taille des pales pour accroître la puissance et l’énergie pro-duite par chaque éolienne. Les constructeurs travaillent sur des modèles d’éoliennes d’une puissance de 7 à 8 MW avec des tailles de pales d’environ 150 mètres (m). Il est d’ailleurs envi-sagé durant la décennie 2010-2020 le dévelop-pement d’éoliennes de 20 MW avec des pales de 250 m (cf. projet européen Upwind).

Le principal frein au développement de ces nouvelles machines est la disponibilité de sites et de moyens de test de ces pales de plus en plus grandes. Peu d’endroits dans le monde permettent de tester des pales de plus de 70 m. Le fabricant de pales d’éoliennes LM Glasfiber (Kolding, Danemark) a annoncé qu’il pouvait tester des pales de 80 m. Le Cener dispose de deux bancs d’essai pour des pales

allant jusqu’à 85 m (à Sarriguren en Navarre, Espagne). Actuellement, deux sites de test, pour des pales de 70 m existent : le Fraunhöfer IWES (Bremerhaven, Allemagne) et le NaREC (Blyth, Northumberland, Royaume-Uni). Le centre d’essais A/S (Blaest, Aalborg, Danemark) pro-pose un site de test pour des pales de 65 m.

Des installations de tests et d’essais sont en cours d’aménagement dans ces différents centres pour augmenter les capacités d’accueil et la taille des éoliennes à tester (longueur de pales jusqu’à 100 m).

1. États-Unis

Le département américain de l’énergie (De-partment of Energy, DOE) et l’office de l’effica-cité énergétique et des énergies renouvelables (Energy, Efficiency and Renewable Energy, EERE) a présenté la National Offshore Wind Strategy et les actions à mener pour accompagner le déve-loppement d’une industrie de l’éolien en mer aux États-Unis et le développement des mar-chés à l’export. Cette stratégie guide les efforts du DOE dans le cadre de l’initiative Offshore Wind Innovation and Demonstration (OSWInD).

Mise en perspective dépenses R&D énergie éolienne/toutes énergies confon-dues (source : AIE)

Energie éolienne Toutes énergies

0

5 000

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20 000

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0

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100

150

200

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USD

milli

on

USD

milli

on

1980

1981

1982

1983

1984

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Le département américain de l’Intérieur (De-partment of the Interior, DOI) est un partenaire crucial dans la mise en œuvre de cette stra-tégie : il examine et valide les projets éoliens en mer dans les eaux fédérales. Au cours de la période 2008-2009, le DOI a élaboré un cadre réglementaire pour les futurs projets éoliens en mer et a récemment lancé une initiative pour faciliter l’implantation, les investissements et la construction de nouveaux projets. Cette initia-tive illustre l’engagement du DOE et du DOI de travailler main dans la main et de stimuler le développement rapide et responsable de l’énergie éolienne en mer.

Dans ce scénario, les principaux challenges identifiés pour accompagner le développement de la technologie des éoliennes en mer portent sur le coût relativement élevé de l’énergie éo-lienne, les défis techniques liés à l’installation et à la connexion aux réseaux, le manque de don-nées pour les sites d’implantation et le manque d’expérience sur les processus réglementaires et juridiques pour la mise en place de projets dans les eaux nationales et intérieures (grands lacs notamment).

L’initiative OSWInD doit ainsi guider l’effort national pour atteindre un objectif de 54 GW de capacité installée pour la filière offshore, à l’horizon 2030, à un coût de 0,07 $/kWh (avec un scénario intermédiaire de 10 GW en 2020 à un coût de 0,10 $/kWh). Dans ce cadre, l’initiative doit poursuivre comme objec-tif la réduction du coût de l’énergie éolienne en mer et le raccourcissement du calendrier de déploiement de cette énergie. Trois domaines d’intervention sont visés : les développements de la technologie, les freins aux marchés (régle-mentaires, juridiques, sociétaux) et les projets de démonstrateurs, et ce à travers différentes activités : turbines innovantes, ingénierie des systèmes marins, outils de calcul et données de test, identification des ressources et prévision, installation et permis, infrastructures complé-mentaires et projets de démonstrateurs des technologies innovantes.

Par le biais d’e l’initiative OSWInD et la Smart de l’initiative Start (lancée début 2011 qui doit attirer les investissements des entreprises aux États-Unis), le DOE et le DOI travaillent conjointement à la réduction des délais de déploiement éolien offshore dans les eaux na-tionales (notamment sur la façade Atlantique). L’initiative OSWInD couvre également les eaux intérieures, comprenant les grands lacs, avec

une collaboration étroite entre le DOE, les agences fédérales et celles de chacun des Etats concernés, notamment sur les questions de res-ponsabilité juridique des installations. La mise en œuvre d’une stratégie coordonnée d’implanta-tion permet de limiter les conflits d’usage sur les sites visés, d’améliorer la gestion des ressources et des zones protégées et donc d’accompagner le développement des installations et infrastruc-tures associées au développement de l’éolien en mer. Cette stratégie sera compatible avec les différents principes et les politiques en cours sur la gestion des océans et des eaux intérieures (National Policy for the Stewardship of the Oceans, Our Coasts and Great Lakes « Executive Order 13547 », Framework for Coastal and Marine Spa-tial Planning).L’initiative OSWInD est financée à hauteur de 65 à 70 millions d’euros (90 à 100 millions de dollars) spécifiquement alloués pour des tra-vaux de recherche et d’essai sur l’éolien en mer à travers le plan de relance américain de 2009 (American Reinvestment and Recovery Act, ARRA) et des fonds du DOE.

2. Union européenneL’Union européenne, à travers ses programmes cadres de recherche et développement (PCRD) est un acteur incontournable de la recherche dans le domaine des énergies renou-velables. Elle a pour rôle d’orienter et coordon-ner la recherche sur les énergies renouvelables, dont l’éolien, à travers des financements attri-bués dans le cadre d’appels à projets annuels. Chaque année, plusieurs dizaines de millions d’euros sont alloués à la thématique généra-tion d’électricité renouvelable. Ces dépenses constituent un apport important au regard des montants engagés par chaque pays en R&D éolienne. Le 7e PCRD (2007-2013) a ciblé comme principaux objectifs de recherche les thématiques suivantes :• développement de composants et de sys-

tèmes pour turbines et fermes éoliennes ;• conditions externes, estimations et prévision

de la ressource éolienne ;• test des standards et certifications pour les

systèmes énergétiques éoliens ;• démonstrateurs de fermes éoliennes ter-

restres et en mer à grande échelle ;• intégration de l’énergie éolienne dans le ré-

seau éolien européen ;• cartographie du vent pour des applications

en mer ;• très grandes turbines en mer.

Grand éolien

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Le plan de la Commission européenne pour le développement de technologies à faible inten-sité carbonique (Strategic Energy Technology Plan, SET-Plan) sur la filière éolienne se décompose en plusieurs initiatives afin de créer des synergies et coordonner les activités de recherche :• European Industrial Initiatives (EIIs), qui asso-

cie les industriels, les chercheurs, les Etats membres et la Commission européenne sur l’évaluation et la gestion des risques, les partenariats publics-privés pour favoriser un développement rapide des technologies ; un investissement annuel (public et privé) de l’ordre de 600 millions d’euros (M€) est pré-vu sur la période 2010-2020 pour le finance-ment de ces initiatives ;

• European Energy Research Alliance (EERA) qui a pour objectif de mettre en cohérence les activités de recherche avec les priorités du SET-Plan et d’établir un programme conjoint de recherche à l’échelle européenne.

Pour la période 2010-2012, le budget total est de 1 433 M€ (avec l’apport du plan européen de relance économique de novembre 2008), financé à hauteur de 52 % par les acteurs du secteur privé, 31 % par des fonds européens et 17 % par les Etats membres.Par ailleurs, l’European Wind Energy Technology Platform (TPWind), réseau et forum de R&D composés de chercheurs et d’experts repré-sentant les principaux acteurs de la filière, est financée par la Commission européenne et coordonnée par l’European Wind Energy Asso-ciation (EWEA) : cette plate-forme a lancé, d’une part, l’European Wind Initiative (EWI), pour faire de l’éolien une source énergétique compétitive, avec des objectifs de taux de pénétration de l’énergie éolienne ambitieux (20 % en 2020, 33 % en 2030 et 50 % en 2050), et ,d’autre part, la Wind Energy Roadmap (WER) Imple-mentation Plan for 2010-2012. Pour atteindre les objectifs et les priorités de la plate-forme TPWind, l’EWI axe ses travaux selon quatre thématiques principales : les turbines et compo-sants innovants, la technologie offshore, l’inté-gration système et la ressource éolienne.

2.1 Royaume-UniL’éolien en mer britannique est l’un des plus importants projets industriels en Europe avec environ 100 Milliards d’euros (Md€) d’investis-sements d’ici à 2020. Avec 1,3 GW de puis-sance installée en 2010, le Royaume-Uni est le pays européen le plus avancé sur le marché des éoliennes en mer.

Cette politique, lancée en 2000 et privilégiant d’emblée la filière en mer, se décompose en trois phases : le Round 1 (travaux expérimentaux avec des parcs de 30 éoliennes au maximum et assez proches des côtes), qui a duré jusqu’en 2003 pour une puissance installée de 1 GW, le Round 2, en cours depuis 2003 et qui prévoit l’implanta-tion de 9,2 GW de capacité (fermes plus impor-tantes et plus éloignées des côtes pour limiter les oppositions, 175 turbines de 3,6 MW à 20 kilo-mètres au large pour le projet London Array par exemple), et le Round 3 (depuis janvier 2010), qui fixe des objectifs très ambitieux avec une capacité installée avant 2020 de 32,2 GW grâce à 7 000 éoliennes en mer (changement d’échelle avec des projets jusqu’à 9 GW).

Le Crown Estate, propriétaire des fonds marins, a attribué des licences à neuf groupements et prévoit de percevoir à terme 113 M€ (100 mil-lions de livres sterling) de redevance par an, en partie reversés au budget de l’Etat.

Actuellement, le montage des projets est à 100 % privé et les projets entièrement financés par les développeurs (principalement en capi-tal) qui se rémunèrent par la vente d’électricité et de certificats ROC (Renewable Obligation Certificates, créés en 2002 par le gouvernement pour favoriser une production moins carbonée d’électricité, certificats qui sont échangeables et dont le niveau dépend du type d’énergie). Le gouvernement a cependant lancé une réflexion pour revoir (pas avant 2013) le système de tarification pour passer à la vitesse supérieure en instaurant un prix plancher du carbone et d’éventuels tarifs d’achat.

Le centre de recherche sur les énergies renou-velables NaREC prévoit de mener et de finan-cer des travaux de recherche sur les pales et les aérogénérateurs et de mettre en place un site de test pour la filière éolienne en mer. Les fi-nancements allouées pour ces travaux sont de :• 18 M€ pour des travaux de recherche sur

des pales innovantes : la nouvelle installation (capable d’accueillir des pales de 100 m de long) sera en mesure de simuler la durée de vie d’une pale sur trois mois de test ; le site d’installation de cet appareillage compte également un site de test des systèmes d’an-crage ; l’objectif étant d’aider les industriels et développeurs pour le Round 3 et de pro-poser des machines fiables permettant d’at-teindre les objectifs fixés à l’horizon 2020 ;

• 12 M€ pour le développement d’outils et d’appareillages de test afin de réduire les

délais des phases d’essai en simulant, dans un environnement contrôlé, des conditions réelles d’utilisation pour les éoliennes en mer ;

• 22 M€ pour la mise en place d’une infras-tructure en mer spécifiquement dédiée aux travaux de R&D ; cette plate-forme, d’une superficie de 20 km², sera installée dans des profondeurs d’eau de 30 à 60 m et permettra de tester en conditions réelles 20 éoliennes d’une puissance de 5 à 10 MW.

Au-delà des aspects techniques, le centre NaREC a récemment ouvert une tour de 27 mètres, entièrement dédiée à la formation des personnes et professionnels de la filière. L’ob-jectif est de mettre en place un centre com-plet de formation accessible aux fournisseurs et doté des équipements et installations néces-saires pour des sessions de formation initiale ou continue : une collaboration avec les collèges est envisagée dans les années à venir.

Dans le cadre du plan européen de relance économique, l’Union européenne a proposé un financement de 40 M€ pour la construc-tion d’un centre européen de déploiement de l’éolien offshore (European Offshore Wind Deployment Centre, EOWDC) qui sera situé à Aberdeen (Écosse) ; ce site comptera 11 places disponibles pour des tests et essais d’éoliennes dans la baie d’Aberdeen.La subvention de l’Union européenne couvre les coûts d’investissement et de développement associés à l’EOWDC. Cette demande de sub-vention s’est faite de façon coordonnée avec la Segec (Scottish European Green Energy Centre).

2.2 EspagneLa Navarre abrite le centre de recherche sur l’énergie renouvelable (Cener), ouvert en 2002, pour conduire des recherches et fournir des prestations et des services pour les entreprises clientes. Les services peuvent comporter des tests sur les pales afin d’évaluer leur rendement, la cartographie des ressources éoliennes et des prévisions ; 30 % du financement provient de subventions d’administrations nationales et locales, le reste vient des services et des essais pour les entreprises clientes. Dans cet esprit d’anticipation des besoins des clients, au début de l’année 2008, le Cener a ouvert les portes de son nouveau centre de recherche éolien, le laboratoire d’essai d’aérogénérateurs (Labo-ratorio de Ensayo de Aerogeneradores, LEA), qui a représenté un investissement de 50 M€ du gouvernement central espagnol, du gouverne-ment de Navarre, du Ciemat (Centro de Investi-

gaciones Energéticas, Medioambientales y Tecno-logicas) et du Cener. Il accueille une soixantaine de chercheurs et comporte cinq infrastruc-tures : des laboratoires pour le test des pales et des génératrices jusqu’à 5 MW, un laboratoire matériaux, composites et procédés, un labora-toire de tests sur site, une soufflerie ainsi qu’un parc éolien expérimental.

Ce dernier est l’équipement le plus important. Situé à environ 30 kilomètres du siège de Pam-pelune, il permet aux chercheurs d’observer l’usure des pales, de tester les boîtes de vitesse, et les raccordements. Ils peuvent simuler un vieillissement des machines de vingt ans en seu-lement six mois. Le site comprend également un espace extérieur où les entreprises peuvent tester l’assemblage des éoliennes.

Lors de cette installation, les entreprises Game-sa et Ecotecnia se sont associées dans le projet Windlider 2015, qui vise à analyser les perfor-mances des pales et de différents composants sur les machines de pointe. Leurs objectifs sont les suivants : • réduire le temps de développement de nou-

velles turbines de près de la moitié ;• réduire de 30 % l’énergie nécessaire pour les

produire.

En 2009, les entreprises (développeurs d’éo-liennes), ne disposant pas de tels équipements sur place, ont testé sur ces sites des machines de 4,5 MW.

Par ailleurs, le Cener travaille sur les cinq conti-nents avec des marchés émergents tels que le Costa Rica, Panama et la République dominicaine, en aidant à la mise en place de réglementations visant à faciliter les investissements pour les parcs éoliens, puis en assistant leur développement.

2.3 AllemagneLa recherche sur l’éolien est fortement soute-nue par le ministère fédéral de l’Environnement (Bundesministerium für Umwelt, Naturschutz und Reaktorsicherheit, BMU). Elle est principalement menée dans certains pôles d’excellence autour de Brême et Bremerhaven, ainsi que dans la ré-gion entre le Rhin et la Ruhr (Kassel, Göttingen).

L’Institut pour l’énergie éolienne et les techno-logies de systèmes énergétiques (IWES), créé par la société Fraunhofer avec le soutien finan-cier de quatre Länder allemands et du BMU au 1er janvier 2009, intègre et coordonne les recherches des laboratoires existants (on compte plus d’une cinquantaine d’universités allemandes qui s’intéressent à l’énergie éo-

Grand éolien

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lienne, soit dans le domaine de la recherche, soit dans celui de l’enseignement).

Le BMU accorde à l’IWES un soutien de 25 M€ sur cinq ans. Le cluster de recherche ForWind, qui réunit plusieurs universités, accompagne les projets de recherche éoliens industriels et offre une formation continue sur la filière. Les axes prioritaires de R&D pour l’éolien sont les sui-vants :• diminution des coûts, augmentation des ren-

dements et de la disponibilité des aérogéné-rateurs ;

• développement de technologies innovantes pour l’éolien en mer et projets de R&D sur le site pilote Alpha Ventus ;

• évaluation des impacts environnementaux (éolien terrestre et en mer).

En 2008, sur 32 nouveaux projets de recherche dans le domaine éolien pour un budget accor-dé de 40,1 M€, 22 concernaient plus spécifi-quement l’éolien en mer (33,7 M€ accordés par le BMU).

Concernant l’évaluation des impacts environ-nementaux de l’éolien en mer, l’évaluation et la prévision de la ressource, le ministère cofi-nance principalement les plates-formes de re-cherche en mer du Nord et en mer Baltique : trois plates-formes baptisées Fino pour l’étude des impacts éventuels de l’éolien en mer sur la faune et la flore marine (mesures physiques, hydrologiques, chimiques et biologiques). Les données collectées enrichissent la base de don-nées de l’office fédéral de navigation maritime et d’hydrographie (Bundesamt für Seeschifffahrt und Hydrographie, BSH). La plate-forme Fino I, installée en 2003, appartient à l’Etat allemand, mais la coordination des travaux ainsi que la gestion de la plate-forme sont prises en charge par la société Germanischer Lloyd. La dernière plate-forme, Fino III, érigée courant 2009, a reçu un soutien financier du ministère fédéral de l’Environnement et du Land de Schleswig-Hols-tein (provenant en partie de fonds européens).

L’initiative Rave, lancée en 2008 et regroupant des études scientifiques et techniques menées sur le site pilote Alpha Ventus, est dotée d’un budget global de 50 M€ sur cinq ans alloué par le BMU. Elle est coordonnée par l’IWES : l’ob-jectif est de mettre en relation les porteurs de projets industriels et universitaires pour créer des synergies, coordonner les projets et assurer la communication des résultats de recherche. Les travaux de recherche se concentrent sur l’analyse des propriétés du vent, les contraintes

techniques auxquelles sont soumises les tur-bines et leurs fondations, l’intégration au réseau du courant produit, les impacts environnemen-taux et différents projets de mesures.

En parallèle, le BSH, responsable de l’octroi de permis de construire dans la zone maritime allemande, coordonne la recherche sur les im-pacts que l’éolien en mer a sur le milieu marin. Il est chargé de rédiger trois standards allemands sur les règles et techniques à respecter pour la construction de parcs éoliens en mer. Ceux-ci sont évalués et améliorés au regard des résul-tats obtenus sur les plates-formes. Enfin, le BSH coordonne l’ensemble des mesures nécessaires à l’exploitation et à la maintenance du site pi-lote Alpha Ventus.

2.4 SuèdeLe SVTC (Swedish Wind Power Technology Centre), fondé par l’Agence suédoise de l’Ener-gie, les industriels et Chalmers (université de Göteborg) vise à soutenir l’industrie éolienne suédoise en développant le savoir-faire sur la conception, le design des éoliennes et en for-mant de nouveaux ingénieurs. L’investissement d’environ 12 M€ doit permettre à la région de devenir un leader sur la technologie éolienne.

2.5 DanemarkLe Danemark comptait en 2010 près de 850 MW de puissance installée pour la filière en mer (machines de 3 à 4 MW). Il est l’un des lea-ders mondiaux pour la technologie de l’énergie éolienne, le pionner européen de cette filière, et a pour objectif d’atteindre 1,3 GW d’ici à 2020.

Le Risø National Laboratory est l’institut de recherche qui possède la plus ancienne expé-rience internationale dans le développement de la technologie des turbines et de l’évalua-tion des ressources éoliennes. Il a formé un consortium avec des instituts et universités du pays pour améliorer la coordination entre la recherche, la formation et l’industrie.

Pour rester en tête, le Danemark se lance sur des essais de nouvelles turbines. Le Risø conçoit un nouveau centre d’essai qui devrait être opé-rationnel courant 2011 et sera situé à Osterild (conditions de test : bois et campagne). L’objectif est d’avoir un site de test pour des éoliennes de très grandes tailles (200 à 250 m de diamètre pour le rotor ; environ 20 MW de puissance) et qui permette de les placer dans des conditions différentes. Ce site devrait accueillir sept éoliennes (chacune mesurant jusqu’à 250 m de diamètre).

Des instruments techniques innovants seront placés sur la plate-forme pour améliorer les tech-niques de prévision de la production d’électricité et travailler sur des synergies entre éoliennes et mesures de données météorologiques.Le Risø travaille également sur l’éventuelle construction d’une installation de connexion au réseau avec d’autres leaders de l’énergie éolienne.

2.6 NorvègeLe centre norvégien de recherche sur les tech-nologies en mer (Nowitech) a mis en place un programme pluriannuel pour la période 2009-2017. L’objectif de Nowitech est la recherche précompétitive qui permet de poser les bases pour la création d’une filière industrielle ren-table pour les parcs éoliens en mer. L’accent est mis sur la problématique « eaux profondes » (supérieures à 30 m) en tenant compte des éoliennes en mer et des flottantes.Le travail est axé sur les défis techniques liés au développement de la filière en mer :• outils numériques intégrés de conception de

nouveaux concepts pour l’énergie éolienne offshore ;

• systèmes de conversion de l’énergie en utili-sant de nouveaux matériaux pour les pales et les générateurs ;

• nouvelles structures (posées et flottantes) pour les éoliennes en mer ;

• raccordement au réseau et intégration aux sys-tèmes des grandes fermes éoliennes en mer ;

• technologies et stratégies pour optimiser les étapes d’exploitation et de maintenance ;

• évaluation des nouveaux concepts grâce à des outils numériques et des programmes expérimentaux.

Le budget total (2009-2017) est d’environ 38 M€ cofinancé par le Conseil norvégien de la re-cherche et les partenaires du centre Nowitech.

3. ChineSelon les chiffres publiés le 2 février par le Conseil mondial de l’énergie éolienne (Glo-bal Wind Energy Council, GWEC), la capacité éolienne mondiale a été accrue de 22,5 % en 2010. Elle est passée de 158,7 GW en 2009 à 194,4 GW fin 2010 : 35,8 GW d’énergie éo-lienne ont ainsi été installés l’an dernier, dont la moitié en Chine (16,5 GW). L’empire du Milieu a même détrôné le leader américain en termes de capacité de production éolienne passant de

25,8 GW en 2009 à 41,8 GW en 201030. Le « boom de l’éolien continue » en Chine, d’autant que le pays « est fermement engagé sur la voie des 200 GW de puissance éolienne installée pour 2020 », a souligné Li Junfeng, secrétaire géné-ral de l’Association chinoise de l’industrie des énergies renouvelables (Creia).

La région autonome ouïgoure du Xinjiang (nord-ouest de la Chine) projette d’investir 2,16 Md€ (20 milliards de yuans) cette année pour stimuler son industrie éolienne et construire la plus grande base de production d’énergie éo-lienne de la région à Hami (prévue fin 2015 pour une puissance installée de 10,8 GW). La Chine projette aussi de construire six autres fermes éoliennes d’une capacité de 10 GW d’ici à 2020. Les sept bases, en comprenant Hami, posséde-ront une capacité combinée de 90 GW en 2020.

Le 5 mars 2011, la Chine a rendu publiques les grandes lignes de son 12e plan quinquen-nal pour la période allant de 2011 à 2015. Il est intéressant de constater qu’en sus des tra-ditionnels objectifs économiques, industriels et commerciaux, un tiers des objectifs annoncés abordent des questions énergétiques et envi-ronnementales. La Chine projette d’atteindre en 2015 un niveau de consommation d’éner-gies non fossiles de 11,4 % par rapport à la consommation totale d’énergie (l’objectif est d’atteindre 15 % en 2020). Le pays propose d’ajouter une capacité totale de 235 GW en énergies renouvelables ou à émissions carbone réduites au cours des cinq prochaines années.

Toutefois, la Chine est confrontée à un impor-tant problème de connexion au réseau : plus de la moitié de l’électricité générée par les turbines est perdue. D’après le rapport de la Commission d’Etat de régulation de l’électricité, la part de l’électricité générée par les turbines mais inutilisée a représenté 2,8 milliards de kWh durant les six premiers mois de 2010, à cause d’une insuffisance des capacités de trans-mission et de connexion au réseau. Le réseau électrique d’Etat, le plus important distributeur du pays, prévoit d’investir plus de 55 Md€ pour moderniser le réseau au cours du 12e plan quinquennal. Il a déjà investi plus de 2 Md€ dans la mise en place de lignes UHV (Ultra High Voltage : courant alternatif pour une tension de l’ordre de 1 000 kilovolts ou courant continu pour une tension d’environ 800 kilovolts) entre 2006 et 2010.

30. Bulletin électronique Chine numéro 101 (3/03/2011) - Ambassade de France en Chine/ADIT.

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ADEME20, avenue du GrésilléBP 90406 49004 Angers Cedex 01

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L’ADEME en bref

L’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de

l’Energie (ADEME) participe à la mise en œuvre

des politiques publiques dans les domaines de

l’environnement, de l’énergie et du développe-

ment durable. Afin de leur permettre de pro-

gresser dans leur démarche environnementale,

l’agence met à disposition des entreprises, des

collectivités locales, des pouvoirs publics et du

grand public, ses capacités d’expertise et de

conseil. Elle aide en outre au financement de

projets, de la recherche à la mise en œuvre et

ce, dans les domaines suivants : la gestion des

déchets, la préservation des sols, l’efficacité

énergétique et les énergies renouvelables, la

qualité de l’air et la lutte contre le bruit.

L’ADEME est un établissement public sous la

tutelle du ministère de l’écologie, du dévelop-

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