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Formation continue 1 er degré octobre 2013 Hélène de Canteloube E.S.P.E Pays de la Loire, site dAngers notes 1 GRAMMAIRE 1. L’ambiguïté liée à la polysémie du terme « Les polémiques nombreuses et récurrentes au sujet de l’enseignement de cette discipline proviennent en grande partie du manque de clarté, des confusions, qu’entraîne la polysémie de ce terme. […] La « grammaire » désigne à la fois l’objet d’étude et l’étude elle-même de cet objet. » Définition 1 : le système d’une langue → système de règles, de régularités, indispensables à la communication. En tant que système, grammaire de l’oral et grammaire de l’écrit. Dans une acception restreinte, le terme renvoie à un ensemble de règles → cette réduction à un point de vue normatif a créé de grandes confusions dans le domaine didactique ˃ Il existe une grammaire scolaire sous tutelle de l’orthographe (A.Chervel) Jules Ferry : 27 juillet 1891: circulaire « ayant pour but d'interdire l'abus des exigences grammaticales dans la dictée » Définition 2 : la description des faits de langue, donc de la grammaire au sens 1, « la grammaire de la grammaire ». « On utilise une certaine description des faits de langue (avec des notions, des catégories, des méthodes d’analyse, qui relèvent, implicitement ou explicitement, d’une approche particulière, qu’elle soit traditionnelle ou plus moderne), en désirant par là améliorer chez l’élève la maîtrise de la grammaire 1. Il est certain que la polysémie du terme ne facilite pas la réflexion sur le choix d’une méthode, ni même, d’une façon plus générale, sur la définition des objectifs d’enseignement. » La langue est construite sur une architecture qui se définit en plusieurs niveaux : - phonologique ; - morphologie ; - syntaxique ; - sémantique ; - (pragmatique). Les faits de langue qui sont décrits, souvent, ne concernent que la syntaxe et la morphologie et excluent le lexique et la conjugaison. Définition 3 : par métonymie, le livre de description de la langue , et l’activité pédagogique elle- même. Nous prendrons surtout en compte la définition 2 (càd la grammaire « raisonnée » (Dion, Serpereau)), sans exclure ni la grammaire d’usage comme « savoir inconscient » (Yaguello), ni la grammaire prescriptive, ni les supports et dispositifs pédagogiques. Il n’existe donc pas une grammaire, mais des grammaires. MAIS 2. Diversité des contenus grammaticaux et finalité de leur enseignement L’histoire de la grammaire n’est pas un long fleuve tranquille…en effet, Combettes rappelle que « les Grecs, puis les Latins, ont été parmi les premiers à mettre en place une description de la langue, qui donnera naissance à la tradition occidentale. Toutefois, […], l’Inde entretenait, dès 600 B.C, une solide tradition linguistique ». Chez les Grecs et les Romains, la grammaire « grammatikê » faisait partie intégrante de la philosophie, alors qu’elle relève de la philologie (l’étude des textes sacrés chez les Indiens). Puis, au XIIe siècle, la « grammaire » désigne le premier des arts libéraux (étude de langage correct et de littérature) : le sens de « grammaire » comme « étude de règles » devient dominant jusqu’au XIXe siècle. Mais le terme « grammaire » se spécialise très tôt dans le sens de « grammaire de la grammaire » (Grammaire générale, 1660 ; grammaire philosophique, XVIIIe siècle ; grammaire structurale, XXe siècle). Sans oublier, ce que André Chervel appelle, « l’invention de la grammaire scolaire » à partir du XIXe siècle, notamment à cause du statut que l’on donne aux compléments circonstanciels. Pourquoi ce rappel ? Pour deux raisons : - L’impression d’un millefeuille grammatical : cf. Combettes, 2006 ; André Chervel 1977 ˃ pas étonnant que la grammaire soit « la bête noire des enseignants ».

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Formation continue 1er degré – octobre 2013 Hélène de Canteloube – E.S.P.E Pays de la Loire, site d’Angers – notes

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GRAMMAIRE

1. L’ambiguïté liée à la polysémie du terme « Les polémiques nombreuses et récurrentes au sujet de l’enseignement de cette discipline proviennent en grande partie du manque de clarté, des confusions, qu’entraîne la polysémie de ce terme. […] La « grammaire » désigne à la fois l’objet d’étude et l’étude elle-même de cet objet. » Définition 1 : le système d’une langue → système de règles, de régularités, indispensables à la communication. En tant que système, grammaire de l’oral et grammaire de l’écrit. Dans une acception restreinte, le terme renvoie à un ensemble de règles → cette réduction à un point de vue normatif a créé de grandes confusions dans le domaine didactique ˃ Il existe une grammaire scolaire sous tutelle de l’orthographe (A.Chervel) Jules Ferry : 27 juillet 1891: circulaire « ayant pour but d'interdire l'abus des exigences grammaticales dans la dictée » Définition 2 : la description des faits de langue, donc de la grammaire au sens 1, « la grammaire de la grammaire ». « On utilise une certaine description des faits de langue (avec des notions, des catégories, des méthodes d’analyse, qui relèvent, implicitement ou explicitement, d’une approche particulière, qu’elle soit traditionnelle ou plus moderne), en désirant par là améliorer chez l’élève la maîtrise de la grammaire 1. Il est certain que la polysémie du terme ne facilite pas la réflexion sur le choix d’une méthode, ni même, d’une façon plus générale, sur la définition des objectifs d’enseignement. » La langue est construite sur une architecture qui se définit en plusieurs niveaux :

- phonologique ; - morphologie ; - syntaxique ; - sémantique ; - (pragmatique).

Les faits de langue qui sont décrits, souvent, ne concernent que la syntaxe et la morphologie – et excluent le lexique et la conjugaison. Définition 3 : par métonymie, le livre de description de la langue, et l’activité pédagogique elle-même. Nous prendrons surtout en compte la définition 2 (càd la grammaire « raisonnée » (Dion, Serpereau)), sans exclure ni la grammaire d’usage comme « savoir inconscient » (Yaguello), ni la grammaire prescriptive, ni les supports et dispositifs pédagogiques. Il n’existe donc pas une grammaire, mais des grammaires. MAIS

2. Diversité des contenus grammaticaux et finalité de leur enseignement L’histoire de la grammaire n’est pas un long fleuve tranquille…en effet, Combettes rappelle que « les Grecs, puis les Latins, ont été parmi les premiers à mettre en place une description de la langue, qui donnera naissance à la tradition occidentale. Toutefois, […], l’Inde entretenait, dès 600 B.C, une solide tradition linguistique ». Chez les Grecs et les Romains, la grammaire « grammatikê » faisait partie intégrante de la philosophie, alors qu’elle relève de la philologie (l’étude des textes sacrés chez les Indiens). Puis, au XIIe siècle, la « grammaire » désigne le premier des arts libéraux (étude de langage correct et de littérature) : le sens de « grammaire » comme « étude de règles » devient dominant jusqu’au XIXe siècle. Mais le terme « grammaire » se spécialise très tôt dans le sens de « grammaire de la grammaire » (Grammaire générale, 1660 ; grammaire philosophique, XVIIIe siècle ; grammaire structurale, XXe siècle). Sans oublier, ce que André Chervel appelle, « l’invention de la grammaire scolaire » à partir du XIXe siècle, notamment à cause du statut que l’on donne aux compléments circonstanciels. Pourquoi ce rappel ? Pour deux raisons :

- L’impression d’un millefeuille grammatical : cf. Combettes, 2006 ; André Chervel 1977 ˃ pas étonnant que la grammaire soit « la bête noire des enseignants ».

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Si temps, exemple avec le passé composé, le futur antérieur, le plus-que-parfait : « composé » renvoie à la forme et non à la valeur, « antérieur » renvoie à la valeur et non à la forme, quant à « plus-que-parfait », il ne renvoie à rien.

- Combettes le rappelle : « une grammaire est conçue en fonction d’objectifs plus ou moins

explicites », et donc, dans une perspective didactique : « s’interroger sur les finalités de l’enseignement de la grammaire ». La grammaire doit-elle : a) « être destinée à l’expression (mais que convient-il de mettre sous cette

dénomination ?) », b) « à la lecture et à la compréhension des textes (le texte littéraire exige-t-il des catégories

d’analyse particuliers) », c) « ou bien encore à des activités de réflexion sur le langage, sur ses fonctions, sur son rôle

dans la société ? Autant d’objectifs qui ne sont pas du même ordre et qui nécessitent, pour être correctement abordés, des outils linguistiques spécifiques ».

Une première piste : partir des régularités plutôt que des cas particuliers…et je fais mienne l’affirmation de Marc Wilmet : « l’exception infirme la règle ».

3. Les grammaires (phrase, texte, discours)

Les niveaux de l’analyse linguistique (Marina Yaguello)

Niveau du texte (discours) ˃ grammaire de phrase

Niveau de phrase Niveau de la proposition

Niveau du groupe (syntagme) Niveau du mot

Niveau du morphème Niveau du phonème

« L’organisation des mots en syntagmes, des syntagmes en propositions et des propositions en phrase constitue la syntaxe proprement dite ». Exemple d’une phrase simple Ex : Le petit chat boit son lait dans la cuisine. Phrase : verbe + ses deux arguments (sujet et objet) + circonstant Syntagme : V+ objet = groupe verbal ; groupe sujet Chaque syntagme a un noyau : noyau ou verbe autour desquels gravitent les déterminants. Déterminants du nom : articles, adjectifs, pp, compléments déterminatifs, groupes prépositionnels, propositions relatives. Déterminants du verbe : marqueurs d’aspect, de temps, de modalité…et les compléments. Exemple d’une phrase complexe : « c’est l’expansion d’une phrase simple qui reste dans une relation d’homologie avec celle-ci. » Les propositions relatives : rôle de détermination au sein du GN Les complétives : même fonction qu’un groupe nominal : complément, attribut ou sujet (complétives ou infinitives) Les subordonnées circonstancielles : jouent le même rôle que les circonstants dans la phrase simple. DEFINITIONS

PELLAT Jean-Christophe (dir.) (2009), Quelle grammaire enseigner ?, Paris, Hatier, p.42-43 et p.178-179.

« Qu’est-ce que la grammaire de phrase ? La phrase est depuis longtemps le cadre et l’objet central de la description grammaticale.

Privilégiant la morphologie et la syntaxe, la grammaire de phrase vise traditionnellement à décrire et à inventorier les classes de mots et à

expliquer leurs variations morphologiques, pour servir de soubassement à l’apprentissage de l’orthographe grammaticale. »

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« Grammaire de texte et analyse du discours : des notions indispensables. La grammaire de phrase à elle seule ne suffit pas pour rendre

compte de tous les faits de langue. La phrase n’est plus l’unité ultime de la description grammaticale qui passe au niveau supérieur du texte et

du discours.

Le texte se définit comme un ensemble sémantiquement organisé de phrases. La grammaire de texte décrit certains phénomènes comme

l’emploi des temps et leur concordance, la référence des pronoms et des expressions nominales qui dépendent du contexte, l’organisation

et la progression d’information, les liaisons entre les phrases et les fragments de texte, etc…

Le discours se définit comme un texte mis en relation avec la situation d’énonciation. L’analyse du discours met en rapport la langue

avec ses conditions d’utilisation. Tout énoncé écrit et oral est produit dans une situation particulière, caractérisée par l’interaction d’un

ou de plusieurs interlocuteurs. Certaines expressions linguistiques dites déictiques, comme je, ne peuvent être interprétées que par

rapport à la situation d’énonciation.

[…]

Et, même si les programmes de 2008 donnent la priorité à la grammaire de phrase dans l’étude de la langue française, la grammaire de texte

et l’analyse du discours n’en restent pas moins nécessaires pour l’acquisition des compétences langagières.

L’apprentissage de la lecture et de l’écriture met en jeu des phénomènes textuels et discursifs, qu’ils soient généraux dans la compréhension

des textes (« l’observation des traits distinctifs qui donnent au texte sa cohérence ») ou liés aux types de textes dans la rédaction (« Les élèves

apprennent à narrer des faits réels, à décrire, à expliquer une démarche, à justifier une réponse… ») (Programmes 2008, cycle des

approfondissements). »

4. Grammaire implicite, grammaire explicite (cf. Sautot, Lepoire-Duc) S’il s’agit de conquête de l’abstraction, alors on peut « aborder l’étude de la langue selon des démarches de résolution de pb ». Pour reprendre la typologie de pbs de Minder (La didactique fonctionnelle), on peut dégager 3 types de pbs :

- les pbs spontanés : le pb de langue qui surgit de manière inattendue. - Les pbs suscités : le questionnement provoqué par une intervention qui vise à susciter le

doute, amener à réfléchir : « qui saura me dire quel type de complément je viens d’écrire ? ». Une autre catégorie de ces pbs suscités correspond à des rituels langagiers, des jeux de langue…les pbs suscités comportent une dimension interdisciplinaire.

- Les pbs « construits (tout exprès pour les besoins de la cause). [L’enseignant] sait sur quel point grammatical précis il veut faire réfléchir les E. Il constitue alors un corpus : ce dernier prend la forme d’un texte ou d’une liste de phrases ou de mots choisis pour mettre en évidence la notion grammaticale abordée ». ˃ articuler pbs suscités et pbs construits dans une démarche de résolution de pbs : 1/ phase de contextualisation « comment repérer le verbe dans une phrase ? » : l’enseignant propose une situation de production ou de compréhension langagière qui déstabilise la compétence = grammaire implicite : manipulation du concept dans la situation de com en faisant varier ses différentes caractéristiques 2/phase de décontextualisation : la notion grammaticale est isolée, sortie de son contexte : manipuler le concept dans un corpus pour le décrire et nommer ses caractéristiques = grammaire de l’explicite (recherche et découverte de la solution ; formulation de la solution pour instituer un savoir et entraînement) 3/ phase de recontextualisation : amener l’E à se servir de la notion étudiée dans de nouveaux contextes de compréhension ou de production langagière. Par ex, après avoir travaillé la phrase complexe, une enseignante fait écrire des contes étiologiques en exigeant que les E utilisent 2 propositions relatives et 3 propositions conjonctives. → Les procédures de conceptualisation ou comment amener les E à s’approprier les notions grammaticales = travaux de Britt-Mary Barth (exemples-oui/ exemples-non) : activité de comparaison par contraste : « on va chercher une nouvelle classe de mots ». Autre démarche un réseau de concepts : un concept fait partie d’un réseau de concepts : là, l’enseignant demande aux E de classer des mots ou des listes de mots ou de phrases en construisant eux-mêmes leur tableau : par exemple le GN Démarche : 1/constitution d’un corpus (titres de livres) ; B/ 1ère classification individuelle ; C/analyse critique des 1ers classements. D/ 2nde classification (collectif) E/transfert et généralisation

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5. Typologies des activités - Activités ritualisées - Progression prédéfinie : « grammaire de la grammaire » (définition 2) cf. sur le sujet ORL - Situations complexes : écriture d’imitation (de paraphrase) cf. groupe d’Ecouen.

Démarche générale d’un chantier-poème. 1/ Rencontre du poème : découverte du poème et appropriation de celui-ci (lecture ou audition ou échanges) 2/ Questionnement sur le texte de référence : mise en évidence de la superstructure ; des particularités linguistiques du poème ; des diverses structures / inventaire des contraintes de production tirées du texte de référence / schéma des structures. 3/ Mise en texte : consignes de production à partir des outils que l’on vient de construire ; production d’un 1er jet/ 1ère évaluation par soi, les autres (pairs et/ou enseignant) / Réécriture : spatialisation, choix du support ; correction orthographique. 4/Evaluation à partir de critères définis par tous ; prise en compte du processus d’écriture. 5/ Présentation de la production finale et découverte de celle des autres au sein et hors de la classe. → Travailler à partir des textes / Limites : le texte peut être considéré comme un prétexte…

- Lecture / écriture (cf. diapo)