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Après des décennies de régime militaire, de troubles sociaux et d’instabilité politique, beaucoup de changements socio-économiques et politiques ont eu lieu au Libéria, surtout en ce qui concerne la reconstruction et la réhabilitation des institutions et des structures d’après-guerre. Aujourd’hui, à l’instar de nombreux autre pays de l’Afrique de l’Ouest, le Libéria est engagé dans un processus de révision de sa constitution, visant à s’assurer que les principes de cette dernière répondent aux besoins actuels de la phase post-conflit, et à consolider les règles sur la manière dont le Libéria doit être gouverné dans un contexte contemporain. En identifiant une occasion unique de participation des citoyens, le collectif Liberia Media for Democratic Initiatives (LMDI), qui se pose en mobilisateur des voix et de la participation des populations à la base dans les questions et les processus de prise de décision à l’échelle nationale, a mis en œuvre deux activités pour mobiliser le grand public autour de l’examen et de la dissémination d’informations concernant le processus de révision constitutionnelle. Au début du projet, LMDI a découvert qu’environ 98% des Libériens n’ont jamais vu une copie de la constitution, encore moins lu ou même discuté de ses différentes dispositions. Le projet était donc non GOUVERNANCE & RESPONSABILITE CHAPITRE I seulement nécessaire, mais constituait aussi le premier du genre dans le pays. Jusqu’ici, les résultats ont été remarquables. Six mois avant l’épidémie d’Ebola, LMDI a organisé une série de forums qui ont vu l’implication directe de plus de 10.000 personnes dans 31 localités. De manière indirecte, ces forums ont entrainé la participation de plus d’un million de personnes à l’échelle nationale, et ce par la diffusion d’émissions à travers 45 stations radios et chaînes de télévisions communautaires à l’échelle nationales et rurales. Grâce à ces forums interactifs et à la sensibilisation communautaire, y compris le feuilleton radiophonique entrecoupée de jingles informatifs intitulé “Chemin vers la Paix” (Way to Peace), les Libériens ont eu l’occasion d’être informé des questions à polémique concernant la révision de la constitution tout en ayant la possibilité de donner leurs points de vue et ainsi proposer des solutions. Des sujets auparavant tabous tels que la citoyenneté, la terre et la propriété des ressources, les mandats des élus et les questions de décentralisation ont tous été abordés et ont suscité de nombreux débats - en particulier au sein des populations rurales. « Dire que nous n’avons pas le droit aux ressources se trouvant sous la terre que nous possédons est un déni de notre droit conféré par Dieu. Nous devons donc modifier l’article 22b qui nous prive de toutes les ressources sur et sous nos terres », explique Robert Doe, un propriétaire foncier de Tuzon Town, dans le comté de Grand Gedeh. Peter Siawaye de l’ITI, dans le comté de Rivercess, s’est exprimé sur l’importance des droits des citoyens : « Lorsque des non-Noirs ou des Blancs sont autorisés à être des citoyens de notre comté, le niveau de pauvreté dans notre pays leur permet d’acheter toutes nos terres et nous allons devenir leurs esclaves. Nous voulons donc que notre gouvernement renforce nos moyens ; ensuite nous pourrons envisager d’étendre notre nationalité (aux étrangers). » La question de la limitation des mandats a également été un sujet controversé. Comme l’explique Sakajebo Sieh, « Nos sénateurs restent trop longtemps au pouvoir et font très peu pour nous. Nous ne disposons d’aucun moyen de nous débarrasser d’eux. Par conséquent, l’exercice de la révision constitutionnelle nous donnera la possibilité de réduire leur temps au pouvoir. Neuf ans, ça fait trop pour une seule personne qui se maintient au pouvoir et ne fait rien pour nous. » Bien que le pays a payé un lourd tribut à l’épidémie d’Ebola, les consultations publiques à travers le Comité de révision constitutionnelle ont repris. Les citoyens, la constitution et l’engagement collectif au Libéria Liberia Media for Democratic Initiatives (LMDI) Emission radiophonique dans le cadre des activités de LMDI. Talkshow public au Libéria dans le cadre des activités de LMDI. 3 4

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Après des décennies de régime militaire, de troubles sociaux et d’instabilité politique, beaucoup de changements socio-économiques et politiques ont eu lieu au Libéria, surtout en ce qui concerne la reconstruction et la réhabilitation des institutions et des structures d’après-guerre. Aujourd’hui, à l’instar de nombreux autre pays de l’Afrique de l’Ouest, le Libéria est engagé dans un processus de révision de sa constitution, visant à s’assurer que les principes de cette dernière répondent aux besoins actuels de la phase post-conflit, et à consolider les règles sur la manière dont le Libéria doit être gouverné dans un contexte contemporain.

En identifiant une occasion unique de participation des citoyens, le collectif Liberia Media for Democratic Initiatives (LMDI), qui se pose en mobilisateur des voix et de la participation des populations à la base dans les questions et les processus de prise de décision à l’échelle nationale, a mis en œuvre deux activités pour mobiliser le grand public autour de l’examen et de la dissémination d’informations concernant le processus de révision constitutionnelle. Au début du projet, LMDI a découvert qu’environ 98% des Libériens n’ont jamais vu une copie de la constitution, encore moins lu ou même discuté de ses différentes dispositions. Le projet était donc non

GOUVERNANCE & RESPONSABILITE

CHAPITRE I seulement nécessaire, mais constituait aussi le premier du genre dans le pays. Jusqu’ici, les résultats ont été remarquables.

Six mois avant l’épidémie d’Ebola, LMDI a organisé une série de forums qui ont vu l’implication directe de plus de 10.000 personnes dans 31 localités. De manière indirecte, ces forums ont entrainé la participation de plus d’un million de personnes à l’échelle nationale, et ce par la diffusion d’émissions à travers 45 stations radios et chaînes de télévisions communautaires à l’échelle nationales et rurales.

Grâce à ces forums interactifs et à la sensibilisation communautaire, y compris le feuilleton radiophonique entrecoupée de jingles informatifs intitulé “Chemin vers la Paix” (Way to Peace), les Libériens ont eu l’occasion d’être informé des questions à polémique concernant la révision de la constitution tout en ayant la possibilité de donner leurs points de vue et ainsi proposer des solutions. Des sujets auparavant tabous tels que la citoyenneté, la terre et la propriété des ressources, les mandats des élus et les questions de décentralisation ont tous été abordés et ont suscité de nombreux débats - en particulier au sein des populations rurales.

« Dire que nous n’avons pas le droit aux ressources se trouvant sous la terre que nous possédons est un déni de

notre droit conféré par Dieu. Nous devons donc modifier l’article 22b qui nous prive de toutes les ressources sur et sous nos terres », explique Robert Doe, un propriétaire foncier de Tuzon Town, dans le comté de Grand Gedeh.

Peter Siawaye de l’ITI, dans le comté de Rivercess, s’est exprimé sur l’importance des droits des citoyens : « Lorsque des non-Noirs ou des Blancs sont autorisés à être des citoyens de notre comté, le niveau de pauvreté dans notre pays leur permet d’acheter toutes nos terres et nous allons devenir leurs esclaves. Nous voulons donc que notre gouvernement renforce nos moyens ; ensuite nous pourrons envisager d’étendre notre nationalité (aux étrangers). »

La question de la limitation des mandats a également été un sujet controversé. Comme l’explique Sakajebo Sieh, « Nos sénateurs restent trop longtemps au pouvoir et font très peu pour nous. Nous ne disposons d’aucun moyen de nous débarrasser d’eux. Par conséquent, l’exercice de la révision constitutionnelle nous donnera la possibilité de réduire leur temps au pouvoir. Neuf ans, ça fait trop pour une seule personne qui se maintient au pouvoir et ne fait rien pour nous. »

Bien que le pays a payé un lourd tribut à l’épidémie d’Ebola, les consultations publiques à travers le Comité de révision constitutionnelle ont repris.Les citoyens, la constitution et l’engagement collectif au Libéria

Liberia Media for Democratic Initiatives (LMDI)

Emission radiophonique dans le cadre des activités de LMDI.Talkshow public au Libéria dans le cadre des activités de LMDI.

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Si la richesse d’un pays se mesurait par ses ressources naturelles, la Guinée serait parmi les plus riches du monde. Malheureusement, cela est rarement le cas. Bien que le pays détienne un quart des réserves mondiales de bauxite - minerai utilisé pour produire de l’aluminium et des produits chimiques - ainsi que de vastes quantités de diamants, d’or et d’autres minéraux précieux, la Guinée figure parmi les dix derniers pays dans le classement suivant l’Indice de Développement Humain (IDH). Bien que la contribution des ressources minières au budget de l’État soit estimée à 30%, la pauvreté (en référence à ceux qui vivent avec moins d’un dollar par jour) continue d’augmenter, affectant plus de la moitié des 12 millions d’habitants du pays. Cette situation est en grande partie due à la corruption, à la mauvaise gestion des ressources par les responsables gouvernementaux et au manque de connaissance ou de compréhension au niveau local (y compris par les élus, les femmes et les jeunes).

La Jeune Cellule pour le Développement (JCD), lancée par un groupe d’étudiants en 2006, travaille dans le domaine de la gouvernance démocratique et de la justice sociale. Au fil des années, la JCD a collaboré avec plusieurs partenaires, y compris l’Union Européenne et la National Endowment for Democracy, dans le cadre de la production de rapports sur les industries extractives, l’état des lieux de la société civile et les défis de la jeunesse en Guinée. Ses membres ont également formé des jeunes et des femmes sur les questions des droits de l’homme. En 2013, la JCD a lancé un projet visant à sensibiliser sur la redistribution des revenus générés par le secteur minier. Elle a travaillé dans 16 localités à la création de comités consultatifs comprenant les autorités, les sociétés minières, les OSC et les citoyens afin d’établir une collaboration permettant d’accroitre les connaissances et de faciliter le dialogue et l’accès

à l’information publique. Grâce à ce projet, le groupe a atteint un nombre de personnes estimé à 1475. La JCD a collaboré avec des fonctionnaires et des OSC locales dans trois localités à Faranah, où se trouvent de grands gisements de minerais de fer, et à Siguiri, où se pratique une extraction intensive de l’or, afin que ceux-ci puissent apprendre à évaluer les budgets et les contrats. Grâce à l’aboutissement de ces efforts, et à la compréhension des procédures et des taxes dues par les sociétés minières, les OSC ont réussi à convaincre Bellzone, un exploitant de minéraux en Guinée, de payer les impôts directement aux communautés touchées au lieu de les reverser à l’administration où les fonds peuvent ensuite se volatiliser. L’exploitant a versé près de 200.000 dollars américains. Cet argent a été utilisé pour construire des écoles, des marchés, des centres de santé, ainsi que pour rénover les bureaux du conseil municipal.

Le travail de JCD s’illustre également dans la manière dont il vient en complément aux efforts d’ADREMGUI, une autre OSC clé en Guinée qui se concentre sur l’amélioration de la gouvernance et de l’alphabétisation financière dans la région minière au sud du pays. Les deux organisations se sont réunies pour discuter de la façon dont elles peuvent améliorer les synergies dans leurs interventions.

En 2007, la Guinée a marqué son adhésion à l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE), la norme mondiale qui assure la transparence et la responsabilisation dans la gestion des ressources naturelles. Cependant, un an plus tard, après le coup d’Etat militaire de 2008, le pays a suspendu son adhésion, invoquant des défis socio-politiques qui avaient une incidence sur la communication régulière des paiements et des revenus du secteur minier.

Quatre ans plus tard, et près de deux ans après l’accession au pouvoir du président Alpha Condé, la Guinée a une fois de plus rejoint l’ITIE en Juillet 2012. En tant que pays conforme, le gouvernement de Condé doit, entre autres, produire des rapports ITIE annuels portant sur les données de l’année précédente. Cela nécessite une collaboration active entre les principales parties prenantes, telles que les parlementaires, la société civile et les médias, qui ont tous des rôles importants à jouer- en particulier en matière de ratification et d’adoption de lois, de suivi de l’exécution de contrats ou de l’action publique, et de dissémination des informations auprès du grand public. Malheureusement, le manque d’aptitudes de ces acteurs constitue l’un des principaux problèmes. L’Industrie Extractive est un secteur sensible, technique, élitiste et secret où l’opacité et la complexité abondent. Ce secteur tend rarement à impliquer les citoyens, encore moins à faciliter une compréhension claire et cohérente entre les principales parties prenantes.

En 2011, la Natural Resource Governance Institute (NRGI) alors connue sous le nom de Revenue Watch International (RWI) a lancé un projet pour aider à équiper trois principaux acteurs impliqués dans la gestion du secteur des ressources minérales en Guinée,

à savoir: les parlementaires (dont le Conseil national de transition), la société civile (y compris Publier Ce Que Vous Payez-Guinée) et les médias (les radios publiques et privées, la télévision et la presse écrite). Les médias et les parlementaires ont reçu une formation pratique à Conakry, tandis que les OSC ont participé à des séances de suivi de contrats à Kindia. Ces ateliers ont permis aux participants de mieux comprendre des processus, jusque-là, inaccessibles, tels que la façon d’analyser la législation minière relative aux contrats; la manière d’examiner les décrets sur la mise en œuvre du code minier; les moyens efficaces d’élaboration et de diffusion des rapports ITIE; et les moyens concrets pour contribuer à la rédaction des décrets.

En ciblant ces trois groupes, le projet RWI a adopté une approche à plusieurs volets pour le renforcement des capacités, en veillant à ce que les connaissances ne soient pas uniquement confinées à un seul groupe. Cette approche a également eu des répercussions positives dans la construction de synergies, l’instauration de la confiance et l’amélioration de la collaboration entre ces trois secteurs.

En dehors de la formation, trois guides RWI ont été produits. A travers la formation PCQVP en particulier, les ateliers pratiques ont permis à la société civile de jouer un rôle actif dans l’élaboration et la diffusion des rapports de l’ITIE, ce qui a finalement contribué à l’accession de la Guinée au statut de pays conforme à l’ITIE en 2014. Ces guides RWI sont actuellement utilisés par les chercheurs et les étudiants intéressés par le secteur minier de la Guinée. RWI a, en outre, proposé d’introduire le guide dans le programme de l’université d’été régionale francophone du Cameroun.

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L’autonomisation des communautés minières locales en GuinéeJeune Cellule pour le Développement (JCD)

La gestion des ressources minérales de la GuinéeRevenue Watch International (RWI)

JCD a été lancée en Guinée par un groupe d’étudiants en 2006.

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En 1996, le gouvernement du Sénégal a prouvé son engagement à approfondir le processus de décentralisation en faisant passer la loi n ° 96-06 du 22 Mars 1996. Cette adoption a marqué une étape notable et positive dans le renforcement du processus de gouvernance locale. En 2013, sous l’impulsion du président Macky Sall, le Sénégal est allé plus loin en lançant une autre série de réformes de décentralisation appelée «Acte III». Cette loi, entre autres, harmoniserait la communalisation, aiderait à rééquilibrer les pouvoirs entre les autorités locales, contribuerait à la promotion du développement local par territoire et des dynamiques économiques régionales, accroîtrait la participation des citoyens dans les questions de gouvernance, et contribuerait à redéfinir les commissions administratives dans les 14 régions du Sénégal.

Bien qu’étant moins visible que les réformes économiques ou électorales, la décentralisation des pouvoirs d’une branche de l’exécutif a des répercussions profondes et variées sur l’ensemble du paysage social, politique et économique d’un pays. Tirer pleinement profit d’un processus législatif décentralisé peut également se révéler être un processus long et compliqué. Un tel processus revêt différents aspects d’ordre technique, administratif, fiscal et politique à prendre en compte. Pour parvenir à une gestion plus démocratique et responsable des ressources et services locaux, les autorités et les citoyens doivent avoir la capacité et les compétences locales nécessaires pour gérer efficacement leurs nouvelles structures autonomes.

En 2014, Le Collectif des Organisations de la Société Civile du Sénégal pour les Elections (COSCE), a sous l’égide de

l’ONG 3D, lancé un projet d’un an dédié au renforcement des pratiques de bonne gouvernance locale. Le collectif a impliqué la société civile et les citoyens locaux dans les réformes politiques et institutionnelles en cours dans les ministères et leurs circonscriptions respectives. Le COSCE a organisé une consultation nationale avec les OSC significatives travaillant sur la gouvernance politique et la décentralisation, afin d’inclure leur contribution au processus de réforme. Un document de recommandations a été produit et soumis au comité de réforme, tandis qu’une campagne de plaidoyer et médias a été menée pour en assurer l’application effective.

Dans le souci de contribuer à créer un environnement propice au dialogue et à la participation des citoyens au processus décisionnel, le COSCE a organisé trois activités principales au cours de l’année, à savoir des projets de lobbying et de réforme institutionnelle avec la société civile sous forme de «programme collectif» traduit dans les langues locales; la publication d’un guide pratique illustré pour promouvoir et vulgariser la réforme de l’acte III de la décentralisation en cours; et la contribution au renforcement des capacités des élus locaux.

Cette approche à plusieurs volets a permis au COSCE d’atteindre plusieurs groupes de personnes en même temps et d’encourager leur contribution au processus de réforme de la gouvernance locale, qui est toujours en cours. Ce projet a été remarquable dans la façon dont il a harmonisé et intégré les recommandations du comité de réforme dans le nouveau code de la décentralisation, et produit des guides simplifiés à l’intention des autorités locales nouvellement élues.

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Rendre la gouvernance locale inclusive au SénégalCollectif des Organisations de la Société Civile du Sénégal pour les Elections (COSCE)

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En 2012, après des inondations dévastatrices ayant affecté 27 des 36 Etats du Nigéria, plus de 300 personnes ont perdu la vie et plus de deux millions se sont déplacées. Les inondations ont détruit des terres agricoles, du bétail et d’autres sources de subsistance. L’incapacité du gouvernement à prévenir les inondations et sa mauvaise gestion de l’après-catastrophe est restée une source de préoccupation pour de nombreux Nigérians. La réponse inefficace apportée indique que ni le gouvernement fédéral ni les gouvernements étatiques ou locaux n’ont eu (ou n’ont) des plans d’urgence clairs pour faire face aux crises d’une telle ampleur. Des campements temporaires, une campagne nationale de financement d’urgence et des groupes du secteur privé ont été établis pour recueillir des fonds de soutien. Mais l’insuffisance du matériel de secours et des installations d’hébergement, couplé aux infractions et attaques criminelles dans les camps ont tous compromis les efforts visant à aider les victimes des inondations.

L’une des principales préoccupations parmi les plus récurrentes a été le manque de transparence et de reddition de comptes dans l’utilisation des fonds d’aide alloués par le gouvernement aux États touchés par les inondations. En Octobre 2012, plus de trois mois après le début des inondations, le président Goodluck Jonathan a décaissé 17,6 milliards de naira (109.100.000 USD) - tous les Etats dans la «catégorie A» devaient recevoir 500 millions de naira chacun; ceux de la “Catégorie B” 400 millions, 300 millions pour la «Catégorie C»; et 250 millions pour la «catégorie D». En dépit de l’existence d’un site internet (www.nigeriafloodrelief.org) élaboré par le comité de secours, il n’y a pratiquement pas d’informations sur l’utilisation des fonds.

Face à l’opacité entourant l’utilisation des fonds, le réseau Citizen Budget Information Technology Network (connu sous le nom de BudgIT) a lancé un projet, sur un an pour contrôler l’utilisation des fonds mobilisés et alloués dans le cadre du programme de secours et de réhabilitation (initié par le gouvernement fédéral) suite aux inondations. Le projet a travaillé avec les communautés affectées afin d’aider les citoyens à en savoir davantage sur le montant des dons et le financement du gouvernement, la manière dont ces fonds ont été décaissés et le montant effectivement perçu par les victimes des inondations.

Des cas de personnes directement touchées ont mis en lumière la mauvaise gestion des programmes de secours à travers de nombreux Etats, ainsi que les sommes dérisoires versées à des personnes ayant perdu leurs maisons et moyens de subsistance. Ces informations ont été largement diffusées sur les médias sociaux, le site internet du projet, puis publiées dans le rapport intitulé ‘Flood Relief and Rehabilitation Funds- A Case For Accountability’. Ce rapport a permis de réaliser une plus vaste sensibilisation du public sur la question. L’une des caractéristiques les plus remarquables de ce projet est, certainement, l’utilisation d’une plateforme innovante alimentée par info-technologie (www.followfloodmoney.org). Cet outil permet aux citoyens, en particulier ceux des communautés affectées par les inondations, de raconter leurs propres expériences et d’échanger avec des comités étatiques de secours et de réhabilitation ciblés.

Suite à ce projet (et au lancement du rapport), les organismes étatiques concernés ont recherché des interactions plus étroites avec BudgIT sur les

recommandations clés. Plus précisément, le Bureau du vérificateur général de la Fédération (OAGF) a mis sur pied le comité chargé de l’audit sur l’aide d’urgence relative aux inondations en 2012. Ce groupe procède à une vérification des fonds d’aide mobilisés à travers le comité présidentiel sur les secours liés aux inondations et la réhabilitation dirigé par Aliko Dangote. Le comité d’audit (OAGF) est en liaison étroite avec BudgIT et se fondera sur les histoires individuelles des personnes affectées (et d’autres résultats de recherche du rapport BudgIT) dans le cadre de son travail. Le travail du Comité d’audit devrait durer entre 6 et 9 mois.

Le rapport du projet OAGF a révélé que les fonds alloués n’ont pas été comptabilisés même si les gouverneurs ont reconnu avoir reçu de l’argent qu’ils auraient distribué aux victimes des inondations. Dans les cas où les victimes ont reçu des fonds, l’action a été tardive et non coordonnée. Le rapport a également révélé que les camps ont été mieux gérés par des organismes privés que par l’Etat. Un autre fait inquiétant souligné par le rapport est que du

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Cartographie et suivi des fonds d’aide et de réhabilitation suite aux inondations au Nigéria

Citizen Budget Information Technology Network (BudgIT) matériel de secours, tels que du matériel médical destiné aux victimes, aurait été détourné par des intermédiaires. Les personnes affectées avaient d’autres niveaux de plaintes relatives à l’insensibilité du gouvernement en dépit de la non-fourniture de secours pour les personnes touchées. Dans l’Etat d’Abia, par exemple, un résident nommé Kalu Uke a témoigné dans le cadre d’échanges avec BudgIT en Janvier 2014, qu’en dépit de n’avoir rien perçu de l’Etat, il était toujours tenu de s’acquitter d’un prélèvement de développement des infrastructures de 7000 naira ($ 35USD) imposé par le gouvernement.

L’engagement du projet de BudgIT avec l’OAGF, en particulier le Comité d’Audit sur l’aide d’urgence relative aux inondations en 2012, pourra avoir un impact sur la façon dont les fonds d’aide sont utilisés dans le pays. C’est la première fois que l’OAGF se lance dans l’audit des fonds d’aide d’urgence (dans ce cas pour les victimes d’inondations) décaissés, mobilisés et gérés par le gouvernement fédéral et le Comité présidentiel de secours et de réhabilitation.

Aide aux victimes des inondations au Nigeria en 2012.Projet de contrôle des fonds d’aide aux victimes des inondations.

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Depuis le retour du Nigeria à un régime démocratique en 1999, la société civile du pays a connu une croissance marquée par un rythme impressionnant. Elle joue un rôle important dans un certain nombre de défis relatifs à la gouvernance, dont la lutte contre la corruption et l’impunité. Son niveau d’engagement actif a été démontré en Janvier 2012 lors des fameuses protestations contre le retrait de la subvention sur le carburant. Les manifestations à l’échelle nationale ont été suscitées par la société civile du Nigéria, et des campagnes ont eu lieu, attirant des millions de personnes dans les rues et aboutissant finalement à l’abandon de l’augmentation du prix du carburant (PMS) annoncé plus tôt par le gouvernement.

Plus d’un an après les manifestations de Janvier 2012, la lutte contre la corruption, en particulier dans le secteur du pétrole et du gaz, n’a pas donné les résultats escomptés. À ce jour, la société nationale d’énergie (NNPC) elle-même n’a pas mené d’examen approfondi au sujet de sa complicité présumée de fraude. La présidence n’a également pas su afficher une volonté de faire face à la question de la corruption au sein du Gouvernement et chez les élus.

Au printemps 2013, une plate-forme d’activistes nigérians a créé la campagne Say No, un comité dédié à la lutte contre la corruption, l’impunité, la pauvreté, la violence et d’autres problèmes de gouvernance au Nigéria. Les militants exigent des changements administratifs, juridiques, politiques et législatifs qui permettront d’améliorer le paysage démocratique de leur pays, à travers l’organisation de campagnes nationales et infranationales, de conférences de presse, de missions

de plaidoyer, de campagnes médiatiques et même de manifestations dans les rues. Cette même année, Say No a lancé une campagne de 15 mois visant à mobiliser les Nigérians à l’échelle nationale afin d’adopter des formes non violentes de lutte et de protestation axées sur les personnes. Cette tâche n’est pas facile dans un pays de plus de 173 millions d’habitants.

Depuis son démarrage, la campagne Say No est lentement mais sûrement en voie d’atteindre ses objectifs. Elle dispose de divers projets, dont la mise en place de pôles de mobilisation répartis en quatre zones géopolitiques (Sud-Est, Centre-Nord, Nord-Ouest et Sud-Ouest). Ces centres ont attiré un niveau élevé de participation des citoyens, notamment dans des campagnes telles que celles appelant à la démission du ministre de l’Intérieur en raison du scandale sur les recrutements par la Nigerian Immigration Service (NIMS) ayant conduit à la mort de nombreux jeunes chômeurs à travers le pays. De même, il y a eu de nombreux appels au limogeage de la (désormais ex) ministre de l’aviation suite à son implication présumée dans des pratiques de corruption. Les deux actions démontrent la façon dont l’effort concerté des citoyens pour exercer une pression par des moyens non violents peut avoir un impact positif sur la réponse du gouvernement.

En plus du soutien total accordé par la majorité des Nigérians, la campagne Say No travaille également avec des institutions crédibles et de grande envergure, tels que la Commission des crimes économiques et financiers (EFCC), et utilise les médias traditionnels et nouveaux pour accroître la sensibilisation des citoyens et leur intérêt pour les thèmes des campagnes.

Avec la découverte de pétrole au Ghana en 2007, les citoyens s’attendaient à ce que le pays soit propulsé vers l’avant et accède au Statut de pays en développement à revenu intermédiaire. Mais comme l’ont montré à maintes reprises les cas d’innombrables nations riches en ressources, la découverte des richesses naturelles augure souvent de périodes plus difficiles, et non d’une aubaine économique. La malédiction des ressources (des pays regorgeant de richesses naturelles sont plus sujets à des niveaux élevés de pauvreté, possèdent des économies moins diversifiées, et sont généralement plus fragiles qu’ils ne le seraient autrement) est bien connue en Afrique de l’Ouest. Dans le cas du Ghana, l’augmentation de la production commerciale de pétrole (qui a rapporté au gouvernement 1,3 milliards de dollars USD entre 2011 et 2013) a été accompagnée par de nombreux cas documentés de mauvaise gouvernance dans la production de recettes et de dépenses, ainsi que par de la corruption pure et simple.

Le Centre africain pour la politique énergétique (ACEP), www.acepghana.com, un think tank relativement nouveau se concentrant sur la gouvernance du secteur de l’énergie au Ghana, s’est complètement engagé depuis 2013 à l’élaboration d’un nouveau projet de loi sur le pétrole afin d’abroger l’ancienne loi PNDC 84, qui régit le secteur du pétrole et du gaz depuis 1984. Le nouveau projet de loi cherche à combler un certain nombre de lacunes du précédent. Il vise, plus particulièrement, à garantir des conditions fondamentales de transparence et de reddition de comptes, des processus de passation de marchés ouverts, une divulgation de la propriété effective, la responsabilité envers l’environnement et sa protection, l’examen des pouvoirs discrétionnaires de certaines institutions gouvernementales, ainsi que les taux et modalités fiscales améliorées.

L’ACEP a travaillé avec les parties prenantes concernées, y compris le Parlement, le Ministère du Pétrole (ancien Ministère de l’Énergie), les organisations de la société civile, les chefs traditionnels, les médias, les jeunes, les organismes religieux et la communauté diplomatique afin de sensibiliser sur les carences du projet de loi avant son adoption. Ces engagements ont été précédés par une analyse complète de la nouvelle loi, en s’inspirant des meilleures pratiques mondiales. L’ACEP a également présenté les défis liés au projet de loi à la communauté diplomatique à savoir les ambassadeurs, dans le processus de communication de leur soutien au contrat ouvert adressé au Président.

En outre, l’ACEP aborde un autre problème clé dans le secteur du pétrole et du gaz du Ghana : la corruption. Elle travaille à en réduire les motivations et à alourdir les sanctions contre les auteurs. Elle augmente la production de rapports sur la corruption liée au pétrole et au gaz, renforce les capacités des institutions de lutte contre la corruption (pour identifier, enquêter et ester en justice les cas de corruption dans l’industrie du pétrole et du gaz) et conduit des campagnes en vue de la mise en place de conditions-cadres favorisant le combat contre la corruption dans le secteur du pétrole et du gaz.

L’industrie du pétrole et du gaz du Ghana dispose d’un énorme potentiel à même de stimuler l’économie dans un sens positif. Mais cela ne se produira que si cette industrie émergente est pleinement intégrée dans l’économie locale et si la menace de la corruption est prise en charge de manière vigoureuse et holistique tout au long de la chaîne de valeur, en mettant davantage l’accent sur la génération de revenus, la gestion des recettes et un développement institutionnel efficace pour contrôler l’industrie.

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Adhésion au changement axé sur les populationsCampagne Say No

Veiller à ce que le pétrole et le gaz profitent aux GhanéensCentre africain pour la politique énergétique (ACEP)