GIG mag #1 - Spécial Musiques Volantes 18

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GIG est une revue gratuite fruit de la collaboration entre le blog Ground Control To Major Tom (groundcontroltomajortom.typepad.com) , l’Emission Electrophone (Radio Fajet 94.2fm) et le photographe Sébastien Grisey (sebastiengrisey.com)

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EditoLe petit succès du premier numéro de GIG sorti en juillet dernier nous a donné envie de poursuivre l’aventure mais nous attendions un évènement suffisamment passionnant pour y replonger notre énergie. « Musique Volantes », 18ème édition, était le candidat idéale. Une programmation pointue et variée, la possiblité de rencontrer Lee Ranaldo et la garantie pour l’équipe de GiG de «jouer à domicile» (ou presque) dans les meilleures conditions possibles. Les artistes se souviennent toujours de leur passage à Metz pour trois raisons principales: d’abord un lieu d’exception, l’ancien couvent des Trinitaires, son cloître, sa chapelle, son caveau... puis pour l’accueil de l’équipe du festivale et ses bénévoles, toujours aux petits soins, et pour finir, et non des moindres, pour son catering royale, entièrement cuisiné maison, des plats à ne plus savoir quoi choisir, à se reservir 4 fois, du gras, du veggie, des tartes et des tourtes...bref plus qu’il n’en faut... Bien sûr il y a aussi le public, toujours au rendez-vous, la scénographie extérieure du collectif Paradigme qui se renouvelle et surprend chaque année mais ne nous voilons pas la face, un artiste bien nourri est généralement un artiste heureux et ça Musiques Volantes l’a bien compris !

Nous avons rencontré pour vous certains des ces Artistes comblés, photographiés d’autres, écouté les disques d’autres encore. Tout est là, pour assouvir votre appétit d’information musicale, bonne lecture !

Photo Ground Control

Sébastien Grisey

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N°1 - Novembre 2013

GIG est une revue gratuite fruit de la collaboration entre le blog Ground Control To Major Tom (groundcontroltomajortom.typepad.com) , l’Emission Electrophone (Radio Fajet 94.2fm) et le photographe Sébastien Grisey (sebastiengrisey.com)

Infos & [email protected]

RédactionDamien Boyer, Olivier Bay, Sebastien Grisey

PhotosGround control, Olivier Bay, Sebastien Grisey

Photo EditoGround control

Mise en pageSébastien Grisey

Couverture et bande déssinée Gregory Wagenheim

RemerciementsMusiques Volantes, Les Trinitaires, Lise Walgenwitz, Patrick Perrin, Gregory Wagenheim, Maxime Jacob, Julie Andrjewski , les Inrockuptibles «grande époque» pour la mise en page.

La reproduction et la diffusion de ce magazine sont fortement conseillées.

L’utilisation non autorisée de son contenu (textes & photos)est elle interdite.

Patrick Perrin 4Lee Ranaldo 6MWTE 10King Dude 11Kompakt 14ZA! 17No Drum No Moog 18Camilla Sparksss 23ESB 24Matt Elliott 28Albums 30Soirée satellite - Nancy 36Zoom sur The Waters 38Orval Carlos Sibelius 40Playlists 43Portfolio 44

Sébastien Grisey

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Patrick PerrinInterview Ground ControlPhoto Julie Andrjewski

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Patrick Perrin, figure de la scène musicale méssine (Giant Metal, Cheapy Chips, Fantôme Fesse) fait partie du collectif de programmateurs du festival Musiques Volantes. Il nous livre quelques clés pour tenter de comprendre ce qui fait la spécificité et le succès de ce festival singulier.

Le festival des Musiques Volantes est dirigé par un collectif. Peux-tu nous présenter la genèse de ce collectif et quelles étaient ses ambitions au départ ?

En 2003, tout juste à la fin du festival, Thibault Lallemand, annonce son départ de l’association, cet événement était un véritable cataclysme au sein de la structure messine, puisque Thibault était non seulement programmateur du festival, mais aussi infographiste. Gilles Sornette a eu l’idée de faire appel à Jean-Pierre Boschetti, ex - programmateur du festival et du batofar. C’est donc sous son impulsion que s’est formé ce collectif qui pourrait se définir ainsi : un réseau de professionnels rêveurs et idéalistes, décidés à faire leur métier autrement et qui cherchent de nouvelles solutions pour prendre des risques artistiques aujourd’hui. En 18 éditions, le festival des Musiques Volantes s’est imposé comme un festival défricheur de nouvelles sonorités. Comment conjugue-t-on expérimentation, défrichement et ouverture au grand public ? Aujourd’hui, le collectif est composé de Jean-Sébastien Nicolet (Point Ephémère – Imperial, Paris), Fred Landier (Le Temps Machine, Tours), Marc Hauser (Exit 07, Luxembourg), Frédéric Sourice (Le Lieu Unique, Nantes),

Laurent Philippe (le Confort Moderne, Poitiers), Alain Brohard (L’Autre Canal, Nancy) Samuel Aubert (les Siestes Électroniques, Toulouse), Ambre Bresset (le 106, Rouen), Géraldine Celli (Centre Pompidou-Metz), Gaétan Nael (l’Antipode, Rennes), Emmanuel Skatchko (Association Roué – Montpellier), Jean-François Pichard et moi même. C’est le rôle du collectif de programmation, de part les différentes personnalités qui le compose, nous espérons, à notre petite échelle, réussir à parvenir à cette conjugaison. Certains sont plus à même d’apporter des propositions expérimentales, d’autres d’avoir des propositions plus électroniques ou plus indés, c’est ce que tout le monde apporte qui nous permet d’avoir cette marmite musicale si je peux me permettre l’expression. Il va de soi que nous avons tous des affinités et aussi une certaine amitié, ce qui est à mon sens la base du collectif.

Une programmation aussi défricheuse demande à être sans cesse sur le fil de l’actualité musicale. Comment travaille le collectif pour monter une telle affiche ?

Tous les membres du collectif sont programmateurs d’une salle, on pourrait dire que chacun possède son réseau, ses contacts et ses affinités pour découvrir de nouveaux groupes.Le collectif fonctionne en coup de cœur, pour avoir vu un

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groupe et vouloir à tout prix le proposer pour le festival ou alors pour que tout le monde se mobilise pour permettre de voir cet artiste se produire au festival (Atom Tm est le bon exemple pour cette année, ainsi que Lee Ranaldo).

Musiques Volantes n’est pas un festival de « tendances », les groupes proposés sont des coups de cœur par les membres du collectif, nous essayons justement de ne pas suivre l’actualité musicale. Comment fait-on pour se renouveler ? Comment choisis-tu un groupe plus qu’un autre ? Pour mettre en place la programmation du festival, nous nous réunissons en début d’année. A partir de ce moment, nous établissons une liste de groupes. Un premier tri se fait selon les débats que certains projets engendrent, les disponibilités des groupes, les avis partagées (positifs ou négatifs) des membres de cette belle équipe.C’est toujours un moment un peu magique, la construction du programme, nous échangeons énormément, et comme chacun apporte beaucoup de propositions, c’est aussi l’occasion pour les programmateurs de découvrir de nouveaux projets, nous apprenons beaucoup de chacun. 18 ans c’est l’âge de la maturité pour les Musiques Volantes ? As-tu l’impression de passer un cap avec cette édition ?

En effet, nous nous envolons vers la 19° édition qui sera aussi la dixième année du collectif de programmation, je ne sais pas si nous passons un cap, mais nous arrivons clairement à la fin d’un cycle. Nous réfléchissons pour trouver des moyens pour transformer le festival et lui donner une autre forme. Mais nous sommes très attachés à la dimension humaine du festival et aux Trinitaires.

Quel est le fil conducteur de cette 18 éme édition ?

De bons concerts, des groupes sympas, passer de bons moments, se prendre de grosses torgnoles par des groupes qui butent…

Dans le texte de présentation du festival qui se trouve dans le dossier de presse, deux mots à l’image très forte m’ont particulièrement sauté aux yeux : Résistance et Indépendance. C’est difficile aujourd’hui de monter un festival comme les Musiques Volantes à une époque où beaucoup de festivals ne rentrent pas dans leurs sous ?

Résistance, parce que nous défendons des projets artistiques forts et exigeants, Indépendance, car le festival ne pourrait pas exister sans la participation des bénévoles du festival ! Le festival existe aussi grâce à des subventions, mais cette année, certains de nos financeurs ont diminués leurs apports, nous avons du trouver des solutions alternatives pour pouvoir continuer à exister.

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Avec le temps, penses-tu que le Festival des Musiques Volantes est devenu une grosse machine ou plutôt une institution ?

Ni l’un ni l’autre. Nous sommes et restons une association.

A l’instar d’un festival comme les MIDI Festival, on a l’impression que le festival des Musiques Volantes cherche plus à faire découvrir des nouveaux groupes et ouvrir des nouveaux horizons aux festivaliers avec des affiches plus exigeantes, plutôt que de faire un gros coup avec des grosses têtes d’affiches. C’est ce que vous recherchez ?

Musiques Volantes est un festival qui privilégie une programmation qualitative à de gros coups sur des noms « qui rameutent », il faut envisager chaque soirée comme un tout, plutôt que de se baser sur un nom plus porteur, les soirées sont construites comme des voyages, je pense que pour beaucoup de gens qui viennent pour un groupe, ils seront finalement surpris par un autre. Le cadre des trinitaires se prête à cela pour se laisser emporter par les formations, les installations, que nous proposons. Qu’est ce qui, selon toi, différencient les Musiques Volantes des autres festivals ?

Le plaisir de se réunir alors que le thermomètre baisse… Quand un festival commence, as-tu l’impression que la programmation ne t’appartient plus ? De toute façon, la programmation ne m’appartient puisqu’elle est construite en groupe, par contre, attention au coup de blues quand le festival se termine…

Quelle est ta plus grande fierté en matière de groupe pour cette édition ? ATOM TM ! Est-ce que parfois tu n’as pas envie de redevenir un simple festivalier ?

En effet, j’aimerais pouvoir voir tous les concerts du festival, me perdre dans les trinitaires ou ailleurs, mais les moments forts que nous vivons avec tous les membres de l’équipe du festival, ne me font pas du tout regratter cela, nous avons la chance de pouvoir défendre des projets qui nous passionne. Ça pourrait être pire, non ?

musiques-volantes.orgwww.lestrinitaires.com

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Lee Ranaldo& the dust

Interview & photos Sébastien Grisey

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Fait rare, Lee Ranaldo, guitariste de Sonic Youth depuis 1985, nous a fait l’honneur de deux concerts consécutifs en terre messine. Un concert électrique dans la tradition noise pop de ses projets solos et, la veille, une session accoustique très exceptionelle dans un lieu qui ne l’est pas moins : les anciens greniers à blé moyenageux de la ville, aujourd’hui partie intégrante du musée de la Cour d’Or qui y expose une partie de sa collection d’Art religieux, principalement des sculptures. C’est donc dans un silence d’église que les quatre New Yorkais ont revisité plus d’une heure durant la discographie solo du bientôt sexagénaire qui ne cachait pas son plaisir. Six guitares acoustiques identiques toutes accordées diffrement pour Lee Ranaldo, une seule pour Alan Licht, une contrebasse pour Tim Luntzel et un Cajón accompagné de divers accessoires pour Steve Shelley, autre membre historique de SY qui fera preuve d’une maîtrise totale de ces instruments rudimentaires et inhabituels pour le batteur punk que nous connaissons. Les intonations de la voix triste de Lee Ranaldo rappellent instantanement des classiques de Sonic Youth comme Wish Fulfilment ou Karen Revisited. Ses nouveaux morceaux solo semblent parfaitement adapatés au format débranché et pour cause, tous ont été composés sur une six cordes accoustique, retour aux sources donc. On sera bluffé par la richesse des arrangements et l’impeccable qualité du set. A la question «faites-vous souvent ce genre de concert ?» il répondra qu’il a du en faire en tout et pour tout trois ou quatre et que pour cet album c’est la toute première fois. L’interview ci-dessous a été réalisée autour de deux verres de vin et une assiette de choucroute dans la décontraction la plus totale, ce soir là j’ai rencontré une légende, pas une star.

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Ma première question concerne la façon dont vous composez votre musique. Quelle différence y a-t-il dans le processus entre la composition d’un projet solo comme celui-ci et la composition au sein de Sonic Youth ?

Sonic Youth a toujours été à son meilleur niveau quand nous composions en commun. La plupart des morceaux ont été composés par nous quatre dans la même pièce. Chacun venait avec des idées, un début de morceau, un enchainement d’accords et on construisait le morceau ensemble. Dans ce projet solo ce sont plutôt des morceaux que j’apporte moi, que j’ai composé à la guitare acoustique et que j’apporte au groupe pour les finaliser. C’est un peu plus dictatoriale (rires). Le groupe a néanmoins une grande influence sur la façon dont les morceaux sonnent mais je peux rejouer tous les morceaux à la guitare acoustique parce que c’est de là qu’ils viennent. Avec Sonic Youth, personne n’est jamais arrivé en disant « voilà j’ai un morceau, il commence comme ça, puis fait ça et se termine comme ça ». C’était systématiquement un travail de construction collective.

Justement à propos du groupe qui vous accompagne aujourd’hui, qui sont-ils ?

Bon j’imagine que vous en savez déjà pas mal à propos de Steve (Steve Shelley, batteur de Sonic Youth depuis 1985). Alan Licht est un guitariste avec qui je joue depuis très longtemps mais jamais dans un vrai groupe auparavant, plutôt dans un contexte d’improvisation. Nous avons cette autre formation qui s’appelle « Text of lights » crée en 1999 avec laquelle nous jouons live sur des films américains d’avant-garde des années 50-60. Alan avait joué dans pas mal d’autres groupes de New York je savais d’expérience que c’était un bon guitariste et quand j’ai travaillé sur mon premier album solo (Between The Times and Tides - Matador Records - 2012) je lui ai demandé de participer. Tim Luntzel notre bassiste vît à Brooklyn, il joue avec toutes sortes de groupes, des connus, des obscures, avec des gens très différents et il a aussi joué sur quelques albums que j’ai produit, par exemple sur des morceaux pour la B.O du film sur Bob Dylan « I’m not there », on se connaissait donc un petit peu, Steve le connaissait un peu plus que moi et quand on s’est mis à chercher un nouveau bassiste nous avons tout de suite pensé à lui. Je tourne en solo depuis la sortie de Behind the Times and Tides en décembre 2011 mais à l’époque je ne pensais pas vraiment à avoir vraiment mon propre groupe, Sonic Youth était encore une réalité. Je ne pensais pas à autre

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chose que de faire juste un nouveau disque. Et puis on a découvert ce que vous savez au sein de Sonic Youth (NDR: Thurston Moore, [guitare, chant] et Kim Gordon [basse, chant], couple Rock’n Roll mythique dans la vie se sont séparés marquant la fin, espérons temporaire, de Sonic Youth) et j’ai du me mettre à sérieusement penser à constituer un groupe et à tourner. Sonic Youth était mon groupe principale, J’y ai passé tant d’années… ça prends du temps de réellement se sentir prêt à créer un autre groupe, trouver les bonnes personnes, qui jouent bien, avec qui on s’entend bien. Ca a pris presque un an pour se sentir vraiment bien ensemble et quand le temps est venu d’écrire ces nouvelles chanson j’étais convaincu que le groupe tenait la route.

Vous mentionnez le fait d’avoir passé de nombreuses années au sein de Sonic Youth et lorsqu’on regarde votre biographie plus en détail on y trouve tellement d’albums, de collaborations, de projets annexes, après toutes ces années qu’est-ce qui continue à vous motiver dans tout ça ?

C’est difficile à dire. Depuis mon plus jeune âge j’ai toujours été intéressé par les arts visuels, la musique et l’écriture et j’ai le sentiment d’avoir toujours continué à travailler dans ces trois domaines. Quand tu es jeune tu rêve de devenir un artiste ou tout du moins de devenir quelque chose. C’est difficile de s’imaginer vraiment réussir en tant qu’artiste ou musicien. Avec Sonic Youth quand les choses ont commencé à bien se passer c’était comme un cadeau, à chaque étape, le fait qu’on nous donne la possibilité de faire uniquement ce qu’on aime. Alors oui c’est quelque chose que j’aime d’une part mais je me sens aussi comme un étudiant, ce sont des domaines dans lesquels je fais des recherches, constamment. Si tu n’es plus intéressé tu arrêtes, ça arrive à beaucoup de gens mais pour ma part je reste très très intéressé, je continue exposer des dessins, à sortir des petit livres de poésie et jouer de la musique.

Justement vous êtes principalement connu en tant que musicien, mais votre activité artistique va bien au delà, vous êtes multidisciplinaire et cela vous affecte-t-il d’une certaine manière que vos autres pratiques artistiques soient moins connues ou reconnues ? …ou à l’opposé est-ce un atout qui offre plus de liberté parce que moins exposé ?

Quoi qu’il arrive je me sens libre ! Mais les gens qui vous connaissent pour une chose ont du mal à accepter que vous en fassiez une autre. C’est particulièrement

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vrai quand vous êtes musicien. Les musiciens qui essaient d’être acteur, écrivain, réalisateur sont regardés avec suspicion et pour moi la guitare a été un choix depuis mon tout jeune âge, j’ai vraiment une relation intime avec elle, j’y mets beaucoup d’énergie, je veux que le gens écoutent ma musique, j’ai crée un label, etc…mais pour mes autres activités c’est l’inverse, je les fais un point c’est tout, sans en attendre quoi que ce soit, des gens me proposent de publier des textes ou d’exposer mes dessins, très bien, mais je ne fais rien de spécial pour que cela se produise. Quand au terme multidisciplinaire je crois que c’est plus courant qu’on ne l’imagine, quasiment personne ne fait qu’une seule chose, en particulier quand vous êtes artiste. Dans tous les cas l’idée c’est de partager tes expériences, tes ressentis, que ce soit par une ou plusieurs disciplines peu importe. C’est assez naturel pour un artiste mais c’est plutôt le public qui a du mal avec ça.

Depuis de nombreuses années vous collaborez sur de nombreux projets avec votre épouse, Leah Singer, photographe et artiste Multimédia. Au vu des récents évènements au sein du couple Moore/Gordon avez-vous une réflexion sur ce qu’implique une connexion artistique au sein d’un couple, chose qui semble au départ presque magique ?

Oui en effet entre Thurston et Kim cela semblait vraiment magique, d’une certaine manière ils étaient parfaits, ils avaient une carrière à succès, un mariage qui fonctionnait mais ça peut être très difficile de travailler avec ton ou ta partenaire. C’est dur et très plaisant à la fois. Quand j’ai rencontré Leah nous étions deux jeunes artistes qui avaient chacun l’habitude de collaborer avec d’autres artistes, c’était donc naturel pour nous deux de monter des projets ensemble et globalement c’est plutôt bien parce que nous partageons beaucoup de choses sur notre travail qui lui-même est souvent lié au fait que nous sommes un couple et les expériences communes que nous vivons. Mais parfois cela rend les choses plus difficiles à causes des strates liées à notre relations qui viennent se superposer à celles du travail. C’est d’ailleurs quelque chose que Kim et Thuston ont toujours bien géré au sein du groupe, ils ne donnaient jamais le sentiment d’être en couple quand on travaillait sur quelque chose de Sonic Youth, ils gardaient ça à un autre niveau. Malheureusement je crois qu’à un moment donné si les choses vont mal dans ton couple ça fini par affecter ton travail aussi même si tu essaie de garder ça séparé.

Depuis la séparation de Kim et Thurston qui a sonnée comme la fin de Sonic Youth le site web du groupe et la page Facebook, sont restés actifs comme avant. La communication autour du groupe est restée la même, nous recevons toujours des informations sur les projets solo des quatre membres comme si rien n’avait changé. Comme cela a-t-il été possible ? Avez vous décidé ensemble que les choses devaient se passer comme ça ?

Non ça n’est pas réellement une décision qui a été véritablement discutée. Sonic Youth a maintenant 30 ans d’histoire et nous pensons avoir une sorte de dette envers les fans du groupe. Je ne sais pas si nous retravaillerons un jour ensemble mais nous avons une archive gigantesque et il y a des tas de choses dans ces réserves que nous avons prévu de sortir de longue date et ces projets continuent, comme le live « Smart Bar » qui date de 1985 mais que nous avons sorti il y a seulement quelques mois. C’est principalement Steve qui gère le site internet. Pour ma part je parle toujours à tout le monde dans le groupe, Thurston va ouvrir pour un de nos concerts le mois prochain. Le site est vraiment notre mémoire et il n’a jamais été question de l’arrêter. De la même manière notre studio (Sonic Youth Recording Studio) est toujours actif, même s’il n’est pas très utilisé en ce moment, j’y ai quand même fait mon album…bref toute cette histoire est encore très fraîche pour nous et on ne sait pas ce qui va se passer. Mais c’est quelque chose qui s’est passé hors du groupe au finale et au sein du groupe il y a encore beaucoup de choses que l’on souhaite faire.

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www.leeranaldo.comwww.sonicyouth.com

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MWTE Interview Ground Control Photo Sébastien Grisey

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L’EP Attraction To Light va bientôt sortir, j’ai l’impression que vous aimez prendre votre temps pour composer ?

Nico : en fait ce n’est pas tant qu’on compose lentement, plutôt qu’on prend notre temps pour finaliser les choses.

Alex : oui, on a été relativement vite pour composer ces deux morceaux mais comme il n’y a pas de monde impliqué dans ce disque ça a mis presqu’un an pour qu’il voit le jour. Les quatre remixeurs sont bien occupés avec leurs projets respectifs. On savait bien que ce ne serait pas fait en deux mois et on est vraiment contents du résultat alors peu importe le temps que ça ait pu mettre.

Nico : ceci dit, avec la perspective des lives, nous composons un peu différemment, peut-être plus rapidement aussi. On peut dire que le second EP sera vite en vue.

Après un EP chez Digital Kito Kat, c’est votre première sortie physique. Pourquoi avoir choisi le vinyle ?

Nico : parce que c’est joli, et que nous sommes amateurs de ces grands disques. Même si on le regrette à chaque déménagement.

Alex : personnellement je n’aime pas le CD. Je n’en achète pas et forcément ce n’est pas mon premier choix de support. Tout le monde n’a pas de platine alors ce n’est pas exclu qu’on fasse quelques CDs, mais le vinyle sera toujours notre premier choix.

J’ai cru comprendre que votre morceau Dead & Gone connaissait actuellement un petit buzz soundcloud. C’est plutôt encourageant à la veille d’une sortie d’EP ?

Alex : Evidemment ça fait toujours extrêmement plaisir de voir que votre musique plait et qu’elle voyage pour être écoutée un peu partout...

Nico : et là c’est vrai que le morceau a été beaucoup partagé… et ce qui nous a également surpris, c’est en regardant ça un peu plus en détail: le morceau a été essentiellement écouté et partagé en Amérique du Nord. C’est la beauté des internets, quoi.

Comment s’est-il retrouvé sur une vidéo youtube retraçant les catastrophes climatiques de 2013 ?

Alex : On a tout simplement été contacté sur Soundcloud, en nous demandant si ça nous disait d’être sur la bande sonore de sa vidéo « 2013 is Strange ». Ce qui est drôle c’est que Dead and Gone parle d’un monde post-apocalyptique et sans le savoir on nous a demandé celle-là. Ca collait bien, il n’y avait pas de raisons de refuser...

Nico : on a aussi un peu regardé ce que le jeune homme en question, Sven, avait fait jusque-là, et il a toujours une sélection musicale impeccable pour illustrer ses vidéos.

Dans une récente chronique anglophone, il a même été comparé à du Trent Reznor (Nine Inch Nails) qui aimerait le monde. Attachez-vous de l’importance au fait que votre musique ne soit pas perçue comme quelque chose de sombre à écouter ?

Alex : Non, pas du tout. Comme évoqué plus haut, Dead and Gone par exemple n’est pas forcément très joyeuse, mais la manière dont elle sera perçue n’est plus de notre ressort.

Nico : même si, avec MWTE, on voulait un projet qui donne envie, à nous et aux gens qui l’écoutent, de bouger la tête de taper du pied et pas uniquement quelque chose de contemplatif, on ne se pose pas réellement ces questions au moment où l’on compose.

Alex : en tout cas, cette chronique nous a bien fait rire, il

Metz n’en fini plus de produire des groupes, du cru 2012 nous est venu MWTE. Trio initialement formé par Nicolas Tochet (Mélatonine, Zéro Degré), Julien Rueff (Tohu Bohu, Kaliayev,...) et Alexander Ogg (The sioux) et rejoint très récemment par la voix suave de Lucile Hentz (The Yokel), collaboration qui semblerait devoir se prolonger, qui s’en plaindrait ? Galop d’éssai, transformé, ce soir aux Trinitaires pour un tout premier «vrai» concert, trop court à mon goût, mais bigrement prometteur.

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fallait vraiment aller la chercher cette comparaison ! Ça montre que chacun s’approprie la musique à sa manière, et c’est parfait comme ça.

Vous aimez aussi imposer une dualité dans l’imagerie des titres qui composent vos EP. Dans L’Orée, il y a eu la ville (L’Asphalte) et la nature (La Forêt), dans le dernier EP il y a la lumière (Attraction To Light) et une connotation plus sombre (Dead & Gone). Pourquoi ce manichéisme dans le choix de vos tracklisting ?

Nico : eh bien figure toi que tu nous le fait remarquer. On l’a bien entendu fait exprès sur le premier (l’orée, qu’on peut voir comme un point de rencontre entre l’asphalte et la forêt). Mais sur Attraction To Light pas réellement… notre inconscient doit nous jouer des tours.

Alex : oui, si c’était voulu dans L’Orée, ça ne l’était pas pour Attraction to Light. Ce titre évoque en fait des insectes volant autour d’une lumière artificielle. Si dualité il y a, contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce morceau est la nuit et Dead and Gone l’aube d’un nouveau jour.

Plusieurs de vos morceaux ont déjà été remixés par Sun Glitters, Herr 2003, Armagnac ou encore Chapelier Fou notamment. Comment a été fait le choix des remixeurs et qu’ont-ils apporté personnellement à votre musique ?

Alex : On leur a demandé pour deux raisons, on aime beaucoup ce qu’ils font et c’est nos amis. C’est toujours un plaisir de partager des choses avec eux, et on voulait vraiment les voir bidouiller et s’approprier nos morceaux.

Nico : Victor (Sun Glitters) s’est impliqué tout particulièrement sur ce premier EP (en dehors du remix, il a également fait le mixage et même la pochette !) et ça nous fait très plaisir. Et l’on espère que ce n’est que le début d’un échange avec lui. Herr 2003 et Armagnac dans un registre plus house, font partie des « midnight marauders », avec qui on aimerait bien collaborer sur la durée, autour d’autres projets de remixes, de disques… Et, arrivé en dernier, le remix de Louis (Chapelier Fou) nous a tous tué sur place !Retrouvera-t-on les remixes sur le vinyle ?

Nico : Bien entendu ! C’est même le gros intérêt de ce vinyle : les remixes donnent à la Face A un côté

dancefloor, et une face B plus douce… et voilà, l’inconscient reprend le dessus ! :)

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soundcloud.com/wearemwtewearemwte.tumblr.comfacebook.com/wearemwte

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King DudePhoto Sébastien Grisey

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Kompakt Reinhard Voigt

Rush Hour, étaient des disquaires avant d’être des labels. Est-ce qu’avoir un disquaire comme base arrière du label n’est qu’une sécurité financière ou est-ce que tu penses qu’il y a un lien spécial et artistique entre ces deux activités ?

Oui, il y a très clairement un lien artistique entre les deux. On a ouvert le disquaire il y a très longtemps à Cologne, et une fois que les affaires se portaient bien, on a décidé d’ouvrir le label. Il y a une sorte de continuité entre le disquaire et le label. Ca te permet de t’ouvrir l’esprit, de vivre la musique au travers de différents angles. Ton disquaire te permet d’écouter beaucoup de choses différentes, ce qui est bon pour ton label et en même temps, tu peux distribuer ton label directement chez ton disquaire. Ca explique aussi notre longévité, pour revenir à la première question. On reste connecté à la musique de plein de manières différentes et on peut donc se renouveler et découvrir des choses. En tous cas, je pense que pour Kompakt, c’est très important de gérer à la fois le label et le disquaire, je ne voudrais pas qu’on puisse penser que l’un nous intéresse moins que l’autre. Les deux activités me tiennent

La plupart des Labels de Techno ou de House ont une durée de vie assez limitée. Tu as créé Kompakt en 1998 et vous êtes toujours en activité. Quel est votre secret ?

Je pense que, s’il y a un secret, c’est de toujours rechercher quelque chose de spécial dans la musique. Nous avons la chance de posséder un disquaire en plus du label, ce qui nous permet d’écouter beaucoup de musiques et de recevoir beaucoup de démos. Je crois aussi que beaucoup de gens talentueux travaillent avec moi dans Kompakt et que nous formons une bonne équipe. On s’entend bien quand il s’agit de faire la sélection parmis toutes les démos que nous recevons : savoir quoi garder et quoi éliminer. On arrive à faire ça depuis tellement d’années qu’on a réussi à se forger une sorte d’expérience. Trouver à chaque fois quelque chose de spécial dans la musique, quelque chose que les autres n’ont pas, c’est surement ça notre secret. Peu importe qu’un artiste soit Allemand, Français ou Japonais, il faut vraiment être ouvert à tout et écouter des musiques de toutes origines.

Beaucoup de grands labels, à l’image de Kompakt, Clone ou

Interview Maxime Jacob Photo Sébastien Grisey

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Il y a vingt ans tout rond, Reinhard Voigt, son frère Wolfgang, Jurgen Paape et Michael Mayer ouvraient un petit disquaire à Cologne, le «Delirium ». Spécialisée dans la techno, l’enseigne était vouée à un franc succès dans les années 1990. Elle a débouché sur la création, en 1998 du label Kompakt qui allait symboliser, jusqu’à aujourd’hui, le son spécifique de Cologne : la minimale. Ce style de techno auquel on aurait enlevé tout le superflu pour ne garder que ce qui fait son efficacité en club : le rythme binaire et les textures planantes des synthétiseurs. Pour fêter l’anniversaire du Delirium, le festival Musiques Volantes présente, à l’Arsenal de Metz, une soirée Kompakt : quatre performances live de Coma, Jorg Burger, Saschienne et de Reinhard Voigt, que nous avons rencontré. Retour avec lui sur l’aventure Kompakt et sur le monde de la musique électronique d’aujourd’hui.

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particulièrement à cœur.

Depuis quelques années maintenant, on voit des Djs revenir au vinyle en mettant de côté les mixs sur MP3. On voit aussi de plus en plus de club demander des dj set « only vinyl ». En tant que label, est-ce que ça change quoi que ce soit à la manière dont vous distribuez votre musique ?

Pour le moment ça ne change rien. J’apprécie vraiment que les gens se remettent au vinyle et que les clubs suivent ce phénomène, mais je pense que pour le moment c’est encore trop marginal. La plupart des gens sont encore portés sur le format digital. Pour un label qui emploie vingt personnes, c’est important d’être le plus rentable possible et il faut donc considérer comment la majorité de notre public va écouter notre musique. C’est pour l’instant le format digital qui l’emporte mais un retour du vinyle est possible. Il faut y aller étape par étape mais j’espère vraiment que les gens demanderont de plus en plus des sorties vinyles.

Sur internet, on voit partout que votre musique est décrite

comme de la « Microhouse ». Est-ce que vous êtes d’accord avec cette appellation ? Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

Très honnêtement, je n’ai jamais entendu ce mot « Microhouse » (rires). Maintenant, je pense que cela fait référence au son « minimal » qui a fait notre succès. On est très fier d’être considéré comme les pionniers de ce style musical, mais ça ne nous arrête pas dans nos choix musicaux. On s’intéresse vraiment à tous les styles de musiques, et on ne va pas écarter un artiste parce qu’il ne fait pas de la minimale. Par exemple en ce moment on produit un artiste (Skunk?) qui chante de façon très bizarre en allemand sur de la musique électronique, c’est vraiment génial mais du coup ça n’est pas vraiment de la minimale. L’important c’est de trouver des artistes qui ont quelque chose de spécial et de ne pas s’enfermer dans des styles. Si on trouve ça bien, on le produira peu importe que ça soit de la minimale ou non. On fonctionne pas mal par coup de cœur finalement.

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Est-ce que tu penses qu’il existe un son allemand aujourd’hui ? As-tu des exemples ?

L’Allemagne a une très grosse scène électronique, tout comme la France. On a Berlin qui est considérée comme la capitale de la musique électronique. On a de très gros labels, comme Kompakt ou bien Otsgut Ton sur Berlin. Mais je pense qu’on a plus un son européen qu’un son Allemand à proprement parler. Il a tellement d ‘échanges entre toutes les villes d’Europe qu’on ne peut pas parler de son allemand. Il y a un son européen dont la capitale est Berlin.

Ce soir à la soirée Kompakt, le line up ne présente que des performances live et pas de DJ set. En tant que producteur, est-ce que c’est important pour toi de créer un live ? Est-ce que tu penses que quand on fait de la Techno ou de la House, un live peut être aussi efficace en club qu’un dj set ?

Je pense que le live est plus limité que le DJ set. Ce soir, je vais jouer pendant une heure et les gens viendront me voir jouer ma propre musique. Le DJ a un spectre plus large. Il peut jouer plein de genre de musiques provenant des quatres coins du monde. Mais ce soir je pense que c’est très bien d’avoir l’opportunité de voir 4 live de Kompakt, ça sera très intéressant pour les gens de découvrir les artistes et de voir les différents styles de chacun et cela donnera un bon aperçu du son Kompakt, de notre son spécifique qui aurait été plus difficile à capter avec des DJ sets. Il y aura le son Indie de Coma, Saschienne et Jorg Burger qui apporteront un son plus électro et moi qui vais finir avec de la techno donc les gens pourront vraiment se faire une bonne idée de ce que l’on peut proposer comme musique.

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www.kompakt.fm

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ZA!Photo Sébastien Grisey

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No Drum No MoogL’inclassable premier album de No Drum No Moog, Monomur, est déjà sorti il y a pas mal de temps. Depuis, le groupe a fait beaucoup de concerts et le duo est devenu trio grâce à l’arrivée d’un second clavier. Nous avons profité de leur passage au festival des Musiques Volantes pour les rencontrer et tenter de comprendre leur style incomparable au travers d’une sélection de disques de leur choix. Entre madeleine de proust et disques à l’influence inconsciente, No Drum No Moog livre un selectorama inattendu et éclectique. Seul avec eux un dimanche après-midi chez le disquaire messin La Face Cachée (merci Flo, merci Médé), GIG vous propose de partager ce moment privilégié.

Interview Ground Control Photo Sébastien Grisey

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Kraftwerk - Technopop

J’ai découvert la musique électronique avec Jean Michel Jarre et Kraftwerk. L’envie d’en jouer est venue par la suite avec ces deux groupes. Je suis fils de cafetier et dans le bar de ma mère, il y avait un jukebox dans lequel se trouvait Autobahn en plus de la new wave de l’époque. A l’âge de 6 ans, c’est la première musique que j’ai écoutée pendant que les jeunes de mon âge écoutaient autre chose.

King Crimson – Red

Le choix de Red est dû à l’un des meilleurs titres de King Cimson qui se trouve dans cet album : Starless qui dure 12 minutes. J’ai écouté ce disque à l’adolescence. Le rapport avec No Drum No Moog est à trouver au niveau des variations dans les mélodies. Notre musique varie entre des moments limites noise et des instants plus mélodiques. On ne s’affirme pas aussi virtuose qu’eux mais il y a une empreinte réelle du groupe dans No Drum No Moog. Le reste du groupe ne pense peut-être pas la même chose que moi mais certaines phrases musicales me rappellent des passages de King Crimson.

Tu joues essentiellement du Moog dans le groupe. Comment King Crimson et Kraftwerk t’influencent-ils ?

Dans King Crimson il y a beaucoup d’effets. Robert Fripp en met tellement sur sa guitare que l’on ne sait même plus s’il joue de la guitare ou autre chose. Nous aussi, nous mettons beaucoup d’effets sur nos instruments. Il y a aussi le côté jazz / prog avec des titres qui traînent en longueur qui nous plaisent chez eux. Bien que l’on s’astreigne à jouer des titres avec un temps normal, on pourrait faire tourner nos titres un quart d’heure avec le même riff parce que ça tourne et que l’on aime bien.

Chez Kraftwerk, c’est plus le côté allemand, le côté carré de la chose qui me plaît. L’aspect synthétique aussi. Lorsque j’écoutais Kraftwerk, je m’imaginais des clips à l’univers post apocalyptique comme dans le film New York 1997.

Tu pourrais classer NDNM dans la musique progressive ?

On a du mal à se classer. Sur nos affiches de concerts à côté de NDNM c’est marqué Synth/Rock, d’autres mettent Kraut. On ne se retrouve pas dans le Krautrock. On se reconnaît plus dans rock synthétique. Notre musique a un aspect rock’n’roll grâce à la batterie. Olivier fait le travail d’une basse, et moi d’une guitare. On ressemble plus à un power trio dans le sens rock du terme.

David

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nodrumnomoog.bandcamp.comnodrumnomoog.tumblr.com

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The Police – Reggatta de Blanc

J’aurais pu prendre n’importe quel album de Police vu que je suis un grand fan. J’ai découvert Police à la radio avec le titre Message In A Bottle paru en 1979. On retrouve le vrai son de Police dans cet album. La particularité de Police c’est que c’est un trio classique guitare / basse / batterie qui utilisait des moog sur scène et surtout des moog Taurus comme celui que j’utilise dans NDNM. Sur scène Sting avait deux Taurus. Andy Summers aussi en avait un.

L’apport de Police dans NDNM on ne l’entend pas vraiment ?

Au niveau du style bien sûr. Mais ce sont eux qui m’ont fait découvrir le moog et le taurus à travers leur live en particulier. J’ai plus de 300 lives du groupe. Ils mettaient du moog partout et donc je me suis toujours dit que j’aurais un jour un moog et un taurus.

Chevreuil – Château Vallon

Ensuite j’ai ramené Chevreuil. Un duo math-rock/expérimental de Nantes composé d’une batterie et d’une guitare. Depuis l’album Capoeira, on retrouve un synthétiseur joué par Tony Chauvin. Je les ai découverts en 2006 avec Pilou lors d’un concert. C’est assez difficile d’accès mais une fois que l’on rentre dedans c’est vraiment formidable. Ils ne jouent jamais sur scène. Toujours au milieu du public. Le guitariste a quatre amplis et des boucleuses. Il balance tout et ça donne un effet quadriphonique au son. En live, on se retrouve au milieu d’un maelstrom sonore.

Le rapport avec NDNM, il n’y en a pas des masses. Le fait que Tony utilise des boucleuses, ça m’a donné envie d’en utiliser dans NDNM puisque au début on était que deux. Les boucleuses me permettaient d’enregistrer les basses pour pouvoir ensuite jouer des mélodies.

Chevreuil est issu d’une scène dans laquelle on retrouve Marvin, Papier Tigre. C’est une famille musicale dans laquelle vous pourriez vous identifier ?

Oui, bien sûr. C’était un peu notre souhait au départ d’intégrer cette scène indé française. Mais eux sont vraiment dans le math/rock alors que nous on est plus dans l’originalité groupe de rock avec des synthés.

Olivier

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OTO – Purge An Urge

C’est un groupe de Nancy, qui n’a pas connu le succès mérité. J’ai notamment joué avec le guitariste. Le disque est sorti en 1985. C’est un mélange de rock, new wave. Il y a un peu d’expérimentation. Ce sont des morceaux qui sont généralement dansants. Ca a super bien vieilli. Les groupes d’aujourd’hui recherchent le même son qu’eux dans les années 80.

OTO a nourri ce que tu joues aujourd’hui ?

Indirectement. Lorsque je joue dans un groupe, je n’ai jamais dit il faut que l’on fasse ci ou fasse ça. On fait de la musique et après on verra. Olivier a peut-être une idée plus précise de ce qu’il veut faire, moi non. L’idée pour moi, c’est plus de jouer et de dire après, tiens ça ce n’est pas mal et puis tu vas dans cette direction.

Jesus Lizard – Down

C’est vraiment un groupe incroyable. Le chanteur est un vrai showman, il finit à poil presque à chaque concert. Ce que j’aime dans ce groupe c’est que c‘est super bien vu. Il y a plein de bonnes idées. En effet, le chanteur est ingérable mais c’est avant tout des musiciens qui ont des groupes en parallèle de Jesus-Lizard. Ça joue super bien et ce sont des personnes ouvertes à plein d’autres styles. C’est une musique qui m’a beaucoup nourri à une époque.

Qu’est-ce que l’on pourrait retrouver chez eux que l’on pourrait retrouver chez NDNM ?

Si j’étais prétentieux je dirais que l’on essaie de jouer dans le même genre mais ce n’est pas vrai du tout. Ce sont des jeux de batteries avec beaucoup de toms et des mesures composées. Dans le style de batterie, je suis plus dans ce style-là. Assez rentre dedans.

Pilou

Dans le cadre des Musiques Volantes vous allez faire une KinderKlasse ? Comment avez-vous

adapté votre musique pour les enfants ?

C’est Patrick qui nous a proposé ce projet. L’idée était d’adapter notre concert pour les enfants. La première adaptation ça a été sur le volume sonore. Du coup, on a dû trouver des astuces pour baisser le son. Après, comme ça ne suffisait pas, on a aussi présenté nos instruments. Notamment les moogs qui ont quarante ans. Ensuite, on a fait un concert avec les enfants. Et on a fini par un ciné-concert de dix minutes sur un dessin animé en jouant nos morceaux. Le but était de faire un concert rock pour les enfants.

La suite de NDNM ?

On a commencé à enregistrer les batteries dans un studio à Nancy. Le reste on va l’enregistrer moitié en studio, moitié à la maison. Mais on ne s’est pas fixé de date de sortie pour l’album. Probablement au début de l’année prochaine. Jusqu’ici on était un peu pris par les Musiques Volantes. Normalement, il y a un titre qui sort bientôt sur une compilation chez Kito Kat. On va jouer à Bruxelles en janvier. Et avec Olivier, on joue aussi avec Twin Pricks.

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«...l’eau qui dort»Difficile de croire que la timide Barbara Lehnoff, bassiste du groupe art punk suisse canadien Peter Kernel, qui rougissait quand nous échangions trois mots dans l’après-midi et la furie Camilla Sparksss qui enflammait le caveau des Trinitaires le soir venu sont la même personne...et pourtant ! Elle n’a rien raté des concerts de la soirée, tantôt au premier rang, tantôt cachée dans sa capuche, seule ou accompagnée de sa brune amie avant d’envoyer un set explosif qui se terminera par une invitation à la rejoindre sur scène. Plus que jamais, comme le dit l’adage, « il faut se méfier de...»

Texte & Photo Sébastien Grisey

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camillasparksss.bandcamp.com

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ESB

et c’est parti.

Donc c’est un album que vous préparez ?

On ne sait pas encore. il y a déjà un 45 tours qui vient de sortir avec deux titres qui font partie du set qu’on va jouer ce soir. Il sort sur Thoré Single Club, c’est un label qui a été crée par des fans du Wedding Present, en hommage à la compilation Hit Parade. (NDR: Thoré Single Club ne sort que des 45 tours de groupes différents avec un système d’abonnement ou de vente à l’unité, l’album Hit Parade du groupe anglais The Wedding Present était inspiré du Rough Trade Single club, concept similaire au début des années 90).

Pour préparer cette interview j’ai fait quelques recherches sur ESB et j’ai eu beaucoup de mal à trouver de la matière, pouvez-vous commencer par me présenter le projet ?

Lionel : Le projet est très récent et du coup peu référencé. Pour ma part je joue avec Yann sur son projet solo depuis 3 ans et on faisait des synthés aux balances, à créer des morceaux comme ça un peu pour s’amuser. J’ai un pote en Italie qui a un festival de musique expérimentale, à Ancona et il nous a invité à jouer, ça a vraiment commencé comme ça et du coup avec Thomas on a monté un petit trio. C’était en 2012. Au début on ne faisait que des morceaux de Yann et puis on s’est décidé à composer des nouveaux morceaux ensemble. On s’est donc retrouvé dans un studio, page blanche, on branche les machine

Live report & photo live Ground control Interview & photo groupe Sébastien Grisey

Lorsque le trio ESB arrive sur scène, on ne sait pas trop à quoi s’attendre. Le groupe a beau être composé de visages connus de la scène indépendante française (Yann Tiersen, Lionel Laquerrière & Thomas Poli ) on ne sait presque rien sur cette nouvelle formation. Une vidéo et un titre sur leur page bandcamp sont les seuls éléments visibles de leur carte d’identité. Mais cette carte d’identité en dit déjà assez sur le pédigrée du groupe. En écoutant ce qu’il nous est donné d’ entendre, on pense tout de suite à Tangerine Dream, Neu ou Kraftwerk… Vous l’aurez compris, ESB aurait très bien pu naître de l’autre côté du Rhin et être produit par l’homme des bois, Conny Plank, dans une Allemagne de l’Est en pleine Guerre Froide. Partagé entre des instants cosmiques et planants (Electronic Meditation ?), ESB joue un krautrock minimal et synthétique avec uniquement des claviers analogiques. Les musiciens font corps avec leurs machines. Le rapprochement avec le concept instillé dans l’album «The Man Machine» par Kraftwerk vient en tête. On se demande quelle est la part d’improvisation dans ces quelques titres joués ce soir. Seuls quelques morceaux, facilement comptables sur les doigts d’une main sont joués. Mais étirés en longueur, ils deviennent de vraies pistes de décollage vers des instants stellaires. En aurait-il pu être autrement avec un Yann Tiersen toujours aussi sensible à ce qui touche aux voyages ? Rien de nouveau certes, mais la prestation donne une furieuse envie de parcourir les Autobhan à la recherche de la première centrale électrique désaffectée. Ce n’est certainement pas ce que fait une grande partie du public qui décide, au mieux, d’aller voir le rock satanique de Cobra programmé dans une autre salle, ou au pire, de repartir chez eux.Nous ne sommes donc plus qu’une poignée de privilégiés dans une Chapelle des Trinitaires plus religieuse que jamais pour profiter d’un set déjà bien en place sur une toute première date de tournée.

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Individuellement que vous apporte ce projet par rapport à vos projets solo respectifs ? C’est un espace de liberté ?

Yann : oui, c’est notre passion pour les machines analogiques qui est le vecteur commun, le simple plaisir de jouer tous les trois

Thomas : C’est le premier projet purement électronique que j’ai jamais eu et il offre pas mal de facettes à explorer, le côté robotique, assez groovy, dansant même si ça reste un son relativement froid de machines, voir ambient. C’est aussi une occasion de mélanger les influences de chacun et ça marche plutôt bien.

Lionel : C’est un projet live aussi, du fait qu’on ai enregistré tous les morceaux avec à peu près la même chose que ce qu’on a sur scène. La façon de travailler est très proche de ce que tu fais quand tu te retrouves en répèt avec guitare, basse, batterie. A l’enregistrement on a tout capté live et on a juste retravaillé un peu après sur les modulaires. On tenait à garder ce son, ces machines analogiques ont vraiment un timbre qu’aucune machine numérique ne peut reproduire. Ca donne aussi des possiblités d’impro, sur ces synthetiseurs il n’y a pas de presets donc il faut tout faire en live…il y a même parfois une part de hasard (rires)

D’où viennent les machines en question ?

Notre collection personnelle uniquement, pas d’achats spécifiques pour le projet.

J’avais rencontré il y a un an ou deux ici même Romain Turzi qui était venu jouer en solo avec son projet « Electronique expérience » et je me demandais si vous aviez des liens avec ces artistes de la scène Française qui se délecte du son des machines analogiques ?

Lionel : pas du tout, on ne l’a jamais rencontré, je me souviens juste d’une interview assez récente à St-Malo dans laquelle il disait qu’on marchait sur ses platebandes… (rires)

Yann : C’est qui Romain Turzi ???

... s’en suivront des discussions sur l’Orchestre Philarmonique de MS20 (projet messin), le test du tout nouveau mini MS20 par quelques sommités locales, la passion de Yann Tiersen pour le flan à la cerise, la qualité du vin de Moselle et quantité d’autres sujets de premier ordre dont je vous épargnerai ici les détails...

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thoresingleclub.bandcamp.com

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ATOMTM

« Uwe Schmidt est un musicien allemand et un producteur aux multiples identités : Atom, Erik Satin, Lisa Carbon, Señor Coconut, installé à Santiago du Chili. Il est célèbre pour sa relecture cha-cha, rumba ou merengue du répertoire de Kraftwerk et des tubes de Madonna, Michael Jackson ou encore Daft Punk. » - Wikipedia

J’avoue, je ne connaissais pas cet allemand chauve avant de le photographier dans les loges des Trinitaires et mes connaissances (ou plutôt leur abscence ) en musique éléctronique m’interdisaient jusqu’à aujourd’hui de la ramener sur le sujet. Une fois n’est pas coutume, je me permettrai donc de vous dire que le set de ce monsieur m’a stupéfait. La folle construction de ses morceaux (aucune reprise cha-cha à l’horizon), les visuels hypnotiques (fabriqués par Monsieur Schmidt en personne), la spacialisation absolument folle d’un son parfait dans une chapelle transcendée m’ont convaincu de penser que cet homme mérite bien mieux que la piètre et réductrice définition que wikipédia France a bien voulu lui accorder...rendons lui justice !

Texte & Photo Sébastien Grisey

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www.atom-tm.com

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Matt ElliottLive report & photo Ground control

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Silence les mouettes au fond de la salle. On se croirait dans une basse-cour. Et Matt Elliott n’est pas là pour faire le coq. Un concert du plus anglais des nancéiens doit ressembler à une messe silencieuse avec des agneaux bien sages. D’autant plus dans une salle comme la Chapelle des Trinitaires qui s’y prête à merveille.

De l’avis général (du moins ceux avec qui j’ai parlé), le concert livré ce soir par Matt Elliott a été sublime. Pourtant, dès son entrée, Matt Elliott annonce qu’il a le trac. Est-ce un aveu ou une blague ? Sans doute un peu des deux. Mais si c’est un aveu, alors le trac génère en cet homme une certaine maîtrise de son art. Matt Elliott est en osmose avec sa formation. Moi qui l’ai vu jouer seul avec sa guitare un soir d’été à La Pépinière de Nancy, autant dire que ça n’a rien à voir. De ce premier concert d’une tournée qui l’emmènera dans quelques pays d’Europe, se dégage une certaine poésie proche d’un Leonard Cohen (sans doute à cause de la voix) hispanophile (pour le jeu de guitare) costumé d’une classe proche des Tindersticks. Thomas Belhom, un autre artiste du label Ici D’ailleurs, n’est pas loin non plus.

Sous l’œil de Stéphane Grégoire, boss du label nancéien, Matt Elliott remplit la salle avec la facilité de ceux qui savent jouer avec les émotions. Lui qui auparavant avait une vision drum’n’bass et trip-hop de la musique au sein de Third Eye Foundation, il est depuis quelques albums déjà passé maître dans le phrasé acoustique. Que ceux qui ne sont pas encore convaincu écoutent son dernier album Only Myocardial Infarction Can Break Your Heart. Comme l’album, le live livré aux Trinitaires montre une nouvelle fois un homme profond, intelligent et sans faute de goût. L’homme se courbe sur sa guitare comme un homme brisé (The Broken Man). Il ne délivre aucune Failing Songs. C’est un artiste serein qu’il nous est donné de voir.

La reprise du classique «I Put A Spell On You» de Screamin’ Jay Hawkins illustre bien ce que Matt Elliott a fait de nous ce soir. Il nous a jeté un sort. Nous sommes désormais à lui et pour longtemps. N’en déplaise aux cancres du fond de la classe.

mattelliott.bandcamp.com

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Bajram BiliSequenced Fog

On ne compte plus les groupes se réclamant du Krautrock, rebondissant sur la vague comme un Ricochet (Tangerine Dream) sur l’un des derniers mouvements musicaux restant encore à défricher. A l’étranger, Beak > a réussi son coup pendant que Fujiya Miyagi s’étouffait avec la choucroute. En France, les quelques groupes qui se sont essayés au genre n’ont pas fait dans l’exercice de style. Du côté électrique, il y a Yeti Lane et Turzi. Pour la veine electro synthétique, c’est Etienne Jaumet et Cosmic Neman avec Zombie Zombie qui sont devenus les gardiens du temple. Dans cette seconde catégorie, il faut désormais compter sur Bajram Bili.Après avoir exploré l’electronica shoegazée le temps de l’EP fantomatique You’re Ghost In A Tipi, le Tourangeau Adrien Gachet s’offre un exil sur les Autobahn allemandes et les grandes étendues écossaises de Boards Of Canada. Sequenced Fog porte bien son nom. Paysage brumeux et boucles synthétiques nous enveloppent dans des nappes méditatives et répétitives (I’ll Be Your Owl) avant qu’XCVI part I excite les terminaisons nerveuses de l’auditeur comme a pu le faire Neu ! avec son Hallogallo.Attiré par les ambiances mélancoliques et les mélodies lysergiques, Barjam Bili est un nom qui évoque des paysages insoupçonnés. C’est surtout un nom à retenir.

Bill Callahan Dream River

A chaque nouvel album de Bill Callahan, la même question subsiste. Quand le songwriter américain connaîtra-t-il la consécration d’un

Leonard Cohen, d’un Johnny Cash ou encore d’un Kris Kristofferson ? Faut-il qu’il rencontre le même destin des regrettés Vic Chesnutt, Sparklehorse ou Jason Molina ? De cette injustice, l’ex-Smog en a probablement cure et mène depuis les années 90 une carrière qui n’a pas toujours été un long fleuve tranquille. Pourtant, le natif du Maryland n’a pas hésité à appeler son dernier album Dream River.La pochette d’Apocalypse (2011) offrait un détail d’une peinture avec en arrière-plan une montagne surmontée de deux pics en forme de cornes comme si elles représentaient les vieux démons rencontrés par Bill Callahan. Sur Dream River, une montagne est toujours présente sur la pochette mais on se situe au pied de celle-ci comme si l’Américain voulait dire qu’il se trouvait au pied d’un mur infranchissable et face à une vie sans perspective. Bill Callahan c’est le granit des montagnes. De celles qui ont vécu l’Histoire avec un grand H et peuvent en raconter des centaines. Comme celui de cet homme dans The Sing qui n’a pu dire au barmaid d’un hôtel que les seuls mots « Bière…Merci ». Comme d’habitude, l’heure n’est pas à la gaudriole avec Bill Callahan, et pourtant, de Dream River se dégage une profonde spiritualité et sensualité. Même une impression de légèreté planante s’affirme avec des titres comme Small Plane et Seagull, chantés par celui qui a intitulé un de ses albums I Wish We Were An Eagle. La voix habitée et sépulcrale accompagne un son toujours plus somptueux et mélodique dans la lignée d’Apocalypse et rappelle parfois la liberté jazzy de Happy Sad de Tim Buckley ou encore la soul de Gill Scott-Heron sur Summer Painter. Tout ici semble maitrisé, à sa place. Il n’y a rien d’autre à faire que de se laisser transporter par le magnétisme

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Albums

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mélancolique de Bill Callahan. Un proverbe dit qu’ «Un roi sans justice est une rivière sans eau ». Avec Dream River, Bill Callahan se rend justice lui-même et devient par la force des choses l’un des rois, en bonne place parmi ses pairs.

Dead Gaze Brain Holiday

Peu après la sortie de l’EP Fishing With Robert, à la question «Quelles influences mélanges-tu dans tes chansons» , Colin Furlow avait répondu «J’essaie de penser à ce que les autres voudraient entendre et je traduis cela en une chanson, à ma manière. Je me focalise sur le côté pop des choses.» C’est chose faite avec Brain Holiday. Révélés grâce à plusieurs EP sortis sur des structures plus respectables les unes que les autres (Atelier Ciseaux, Mirror Universe Tape, Clan Destine Records…), Cole Furlow et son double Dead Gaze reviennent avec un album qui leur permet de quitter leur chambre d’ado pour une chambre qui ressemble plus à celle d’un étudiant émancipé. Finis les bricolages et les expérimentations gazeuses inspirées par l’esprit lo-fi de R. Stevie Moore. Le natif du Mississippi s’est offert un enregistrement dans un vrai studio. Cela s’entend dès les entrées en matières Yuppies Are Flowers et Rowdy Jungle qui bouleversent un peu nos habitudes. Plus habitué à entendre des titres tout droit sortis d’un cerveau torturé, ce sont clairement des morceaux plus directs rappelant pour l’occasion Weezer ou encore les Pixies qui nous est donné d’écouter. A lui seul, le bien nommé «A Different Way» symbolise la mue spectaculaire de Dead Gaze. Tout en fuzz. Frontal mais jamais bas du front. Dead Gaze ressemble maintenant à un vrai groupe et non

plus à un projet solo. Reste à savoir si Colin Furlow n’a pas vendu son âme au diable en entrant dans ce studio. Choisir entre l’authenticité lo-fi des débuts et la clarté de ses nouveaux enregistrements, le choix est cornélien. Désormais, il y aura un Dead Gaze à écouter pour mettre son cerveau en vacances (Brain Holiday) et un autre pour le faire travailler (Tous les premiers EP).

Julia HolterLoud City Song

Depuis le début de sa carrière (déjà avec son premier projet connu The Remakable Thing About Swans), Julia Holter brouille les pistes comme pour mieux échapper aux classifications musicales. Il est difficile de cataloguer un artiste lorsque lui-même n’hésite pas à mettre dans sa musique des références à la musique sérielle, à des harmonies médiévales ou simplement à la pop. Avec la directrice du label Human Ear Music (Ariel Pink, Nite Jewel…), il faut toujours s’attendre à un mélange de musique érudite et de simplicité pop. Et c’est ce qui se passe une nouvelle fois avec Loud City Song son dernier album en date.Prolongement et approfondissement d’une vision artistique entamée depuis Tragedy et Ekstasis, c’est Gigi de Colette qui inspire cette fois-ci la divine Julia Holter pour son nouvel album après que les tragédies d’Hippolyte aient influencé Ekstasis. Un prisme qui permet à l’américaine d’explorer son rapport personnel à la ville de Los Angeles et à sa façon de vivre en général. Une exploration qui ne dit pas tout et garde assez de mystère pour mieux laisser l’auditeur se faire sa vision personnelle.On entre ici dans son monde (World) comme une bise soufflée par une voix remplie de délicatesse.

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Le temps est déjà suspendu après seulement quelques minutes. On sait que l’on se sentira bien dans cet univers attachant. Avec Julia Holter, on est toujours parti dans un envoutement sonore. Plus acoustique, voire même organique qu’Ekstasis, Loud City Song est une succession d’émotions vibrantes comme savent le faire partager, rien qu’avec le chant, des artistes comme Björk et Kate Bush. La musique avant-gardiste laisse place à des influences jazz et à une certaine forme de classique. Les cordes permettent des envolées, les cuivres accentuent une course haletante, les percussions marquent les moments tragiques… Tout ici est marqué par une osmose bouleversante et singulière entre le fond et la forme.

Julien GascCerf, Biche Et Faon

Déjà responsable des albums beaux et alambiqués avec ses comparses d’Aquaserge, l’auteur, compositeur, interprète, producteur et arrangeur Julien Gasc s’offre une parenthèse en solo avec un premier album intitulé Cerf, Biche Et Faon.Il y a quelques mois, sur le dernier album d’Aquaserge, en collaboration avec la ravissante April March, se trouvait bien placé en fin d’album le titre «How Was Your Day». Ce titre interrogateur était surtout annonciateur de ce que Julien Gasc pouvait nous offrir aujourd’hui avec cette échappée belle. Un titre plein d’émotion et de fragilité qui rappelle ce que Robert Wyatt a fait de mieux. C’est avec cette même fragilité que Julien Gasc entame Cerf, Biche Et Faon et inscrit les plus beaux moments de l’album («La Cuarenta», «Ensemble», «Tu m’as quitté, Hullo»). Mais cet amour pour le farfadet de Soft Machine n’est pas la seule obsession de cet artiste à la culture musicale que l’on imagine

facilement pléthorique. Il n’est donc pas étonnant de voir l’ex Stereolab s’essayer à des compositions que Laëtitia Sadier ne renierait pas («La Boucle»). Punk dans l’esprit, et surtout lo-fi dans l’attitude, Julien Gasc se libère avec un énorme «Fuck» avant de reprendre à son compte le thème de «Je suis inadaptée» de Brigitte Fontaine avec «Infoutu de». Sur les minis symphonies que sont «L’empruntant» et «Jouir», Julien Gasc s’essaie, comme beaucoup de songwriters de sa génération, à l’art wilsonnien et le réussit plutôt bien. Loin des albums surproduits et de l’omniprésence de certains artistes, Cerf, Biche et Faon ne fera malheureusement pas grand bruit cette année, mais fera à coups sûr partie des albums que l’on aimera chérir dans plusieurs années comme bons nombres de trésors oubliés.

MoodoïdMoodoïd EP

On aurait déjà pu s’en apercevoir en lisant le nom du groupe qui inspire une douce et secrète folie lunaire mais dès les premières notes de Je suis la Montagne, on se doute que les freaks qui sont à l’origine de cette musique ne sont pas «tout seul dans leur bocal». Lorsque l’on se penche un peu plus sur ce nouveau phénomène, on se rend très vite compte que Moodoïd est le projet mené par Pablo Padovani (fils du jazzman culte Jean-Marc Padovani et non pas d’Henry, le looser qui s’est fait virer de Police) déjà croisé comme guitariste au sein de Melody’s Echo Chamber. Des mélodies célestes de cette dernière, Pablo en a retenu le meilleur pour envoyer les siennes plus haut dans les sphères psychédéliques. Et qui dit Melody’s Echo Chamber, dit forcément Kevin Parker. C’est lui qui

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est au mixage de ce premier Ep haut perché paru sur le label Entreprise. Mais cet invité qui pourrait faire de l’ombre à un jeune groupe plus que prometteur est en fait un vrai gage de qualité car l’Australien n’est jamais aussi bon que lorsqu’il travaille pour les autres. Il ne faut pas plus de quatre titres pour traverser une faille spatio-temporelle en compagnie de Syd Barrett bloqué dans un trip interminable. Une certaine folie psychotropique règne sur cet incroyable EP et pas seulement sur le titre De Folie Pure, sorte de voyage initiatique vers Katmandou avec Amadou et Mariam. Les guitares cristallines presque byrdsiennes (Je sais ce que tu es) nous envoient 8 Miles High. On peut citer le tropicalisme d’Os Mutantes et la délicatesse de Connan Mockassin sans vraiment avoir peur de se tromper. Pablo et son groupe ont surement été un jour Sauvé par le Gong, pas par Zach et Slater, mais plutôt par Daevid Allen et son Camembert Electrique car tout carillonne superbement bien ici. Dernier né d’une grande liste de groupes voulant s’offrir les sixties comme une cerise sur un space-cake, Moodoïd fait partie des plus intéressants et des plus génialement fous.

Orval Carlos SibeliusSuper Forma

Album de l’année. A elle seule, cette phrase devrait suffire à convaincre les plus récalcitrants lorsqu’on nous demande notre avis sur Super Forma, dernier album en date d’Orval Carlos Sibelius. Mais voilà, l’exercice de la chronique se doit de justifier le pourquoi du comment. Même lorsqu’il suffit, comme ici, d’écouter ses dix nouveaux titres pour être totalement concquis.

Puisqu’il faut se justifier, on peut dire avec une certaine dose d’emphase que nous sommes en présence d’une épiphanie de psychédélisme moderne. Un peu comme l’étaient à leur époque S.F Sorrow des Pretty Things ou The Pipers At The Gates Of Dawn de Pink Floyd. Super Forma est de la même trempe et devient aussi essentiel que ses ainés. Rarement un album actuel a aussi bien représenté cette période de retromanie dans laquelle nous vivons. Album Huxleyien, Super Forma ouvre les portes derrière lesquelles se cache un monde en technicolor mis en son par un Magic Band. Album à tiroirs, pour ne pas dire labyrinthique, le successeur de Recovery Tapes (2011) est une expérience qui ne se vit que dans son intégralité. Les titres s’assemblent comme les pièces d’un puzzle et ont leur consistance que s’ils sont imbriqués ensemble. Que serait le tube Desintegração sans l’ouverture Beach Boysienne Sonho de Songes ? Idem pour les rythmes surf d’Asteroïd contrebalancés par les ambiances indiennes de Spinning Round et africaines de l’immense Burundi. D’une toute autre envergure que Recovery Tapes, Super Forma fait entrer Axel Monneau dans la cour des grands et, par la même occasion renvoie Jacco Gardner dans sa pouponnière.

SaroosReturn

On ne sait pour quelles raison, lorsque l’on veut évoquer Saroos, on se sent toujours obligé d’affilier le groupe avec The Notwist. Sans doute parce que l’un de ses membres est le guitariste scénique de l’autre groupe allemand mais aussi parce que le trio est toujours resté fidèle au label des frères Archer, Alien Tansistor.

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Dommage parce que Christoph Brandner, Florian Zimmer et Max Punktezahl n’ont pas besoin de cette comparaison pour affirmer leur singularité. Depuis 2006, Saroos est une entité à part entière et un laboratoire sonore encore plus poussé que ses compères bavarois.Trois ans après See Me Not, Saroos revient avec le bien nommé Return, un album d’un groupe puisant une fois de plus sa chaleur dans une musique electrorganique et instrumentale. «Return» poursuit les recherches vers une musique abstraite obligeant l’auditeur à s’enfermer dans un voile vaporeux et contemplatif. Même si des morceaux tels que «Henderson Island» et «Tsalal Nights» tentent de donner un peu de rythme à l’album, c’est plus vers des univers posés, pour ne pas dire stratosphériques, qu’il nous est donné d’entendre ici, rappelant en cela le travail de Dog Bless You du label Chez Kito Kat. Tout sur Return semble fait pour faire voyager l’auditeur et l’enfermer dans une capsule remplie de sérénité. Avec des ambiances exotiques soutenues par des percussions (tabla ?) (Spiaggia Di Pluto) ou des samples de chants indous (Morning Way), les allemands nous transposent dans des ambiances dignes des contes des Mille et une Nuit.L’album défile à la vitesse d’un paysage par la fenêtre d’un train. On est à peine parti pour un aller que le retour est annoncé. «Le voyage, c’est la part du rêve», Saroos offre une nouvelle fois sa plus belle part.

Street GnarShrine

Si un jour un documentaire devait sortir sur le très beau label Atelier Ciseaux, le sous-titre serait assurément celui-ci : «Le label qui te fait découvrir avant tout le monde

ce que les autres n’oseront jamais sortir». Après TOPS, Ela Orleans, Mount Eerie, Oupa les années précédentes puis Idiot Glee et Police des Mœurs cette année, la nouvelle signature Street Gnar marque encore une fois une prise de risque aventureuse de la part du label. Derrière Street Gnar se cache le jeune Américain de Lexington, Case Mahan, déjà croisé dans la sphère d’Idiot Glee, collaborateur de Dirty Beaches sur le single Lone Runner et auteur de plusieurs cassettes sorties sur Burger Records et Night People (Poking The World With A Stick et Study Wall). Rien d’autre sur la toile ne filtre sur ce nouveau prodige que l’on imagine fan de skate (normal avec un nom pareil) et amoureux de belles guitares (il joue sur une guitare Vox). Son prochain Ep, Shrine, qui sortira en vinyle à 300 exemplaires en septembre, laisse aussi entrevoir une personnalité adepte du slacking comme aimaient à le montrer Pavement et Beck dans les années 90. Mais derrière cette apparente nonchalance et sensation de légèreté se cache en fait un talent de songwriter capable de mêler l’esprit lo-fi des nineties avec des guitares lignes claires très eighties. Difficilement descriptibles, les sept morceaux de Shrine prouvent que Street Gnar est aussi à l’aise avec des pop song brillantes (sens propre) et lumineuses (sens figuré) (Lift Up) que sur des ondes reverbérées (Be Good or Be Gone). Street Gnar se paye même le culot de revisiter la surf-pop à grands coups de boîte à rythme minimaliste et guitare fuzzée (Take Aim) avant de se prendre pour Sonic Boom et son album Spectrum dans une face B sonique (Don’t Tell, String, Locked out). Une telle comparaison pourrait en effrayer plus d’un, mais lorsque l’on attend depuis des lustres un renouveau du genre, il y a des propos emphatiques que la raison ne peut

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pas contrôler.

Twin PricksThis Might Be The Last Time You’ll Ever Hear From Us

Avec le recul, il faut dire que l’on y croyait que moyennement à la fin de Twin Pricks annoncée il y a un an, peu avant ce qui devait être leur ultime concert : la première partie de The Pains of Being Pure at Heart. This Might Be The Last Time You’ll Ever Hear From Us. Le titre était déjà tout trouvé.Ils nous avaient ce soir-là gratifiés de quelques nouveaux morceaux qui laissaient un goût de pas assez. De manque. On en voulait plus. On ne sait pas ce qui les a fait changer d’avis, mais au détour d’un statut facebook, les membres de Twin Pricks annonçaient qu’ils étaient en plein enregistrement. Florian et Geoffrey sont comme ça. Ils marchent au coup de cœur. Ils font ce qu’ils veulent, quand ils le veulent. Sans pression et surtout sans calcul.C’est sans doute cette pression inexistante et l’abscence d’attente qui fait que ce premier album est tout simplement surprenant et fait l’effet d’une gifle en plein hiver. On a l’impression qu’ils ont voulu tout tester, tout essayer. This Might Be The Last Time You’ll Ever Hear From Us part dans tous les sens et surtout là où ne l’attend pas. Difficile de citer des influences tellement Twin Pricks surclasse toutes celles que l’on a pu déjà citer à propos de leurs deux premiers EP (Young At Heart et Songs About Flirting). Il y a toujours ce fondement indie 90’s, mais on retrouve des influences de la scène de Washington sur Let Go, une touche trip hop sur le titre qui a donné son nom à l’album et même une touche africaine sur les rythmes chaloupés de Dying To Live et Smile.Après les influences, il y a aussi cette

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Swordplay & Pierre the motionless Tap Water

Isaac Ramsey AKA Swordplay est un poète contemporain américain. Pierre the Motionless est un beatmaker clermontois. Leur rencontre s’est faite sur internet il y a 5 ans, «Tap water» est leur premier album.

Sombre et envoûtant, Tap Water fait partie de ces albums qui vous saisissent dès les premières mesures pour ne vous lâcher, je ne sais où, qu’une fois la dernière chanson terminée.

Empruntant aussi bien au rock qu’au hip hop, piochant dans l’electro ou la pop, on est dans une sorte de musique bicéphale, un hip hop hybride (hyb hop) inventif et déboussolant. Ici pas question de scratch ou de bling bling inutile, chaque beat, chaque mot, chaque ligne de basse semble être écrit sur papier millimétré.

Précis et justes les violons et autres arpèges de cordes associés aux interprétations à fleur de peau de Swordplay font des compositions de Tap Water un album à part. On apprécie tout particulièrement Wonderful Things, 64 bit remix, Song for the dead qui sont de véritables réussites, Stop lying to us nous a, quand à lui, carrément filé la chair de poule.

13 titres, 13 atmosphères, 13 fois la même envie d’appuyer sur la touche Replay ! Longue vie à Swordplay & Pierre the Motionless.

Ground Control

nouvelle maturité dans le son et les compositions. Pour s’en rendre compte, il suffit juste d’écouter la nouvelle version d’How To Fall In Love, titre déjà paru sur l’EP Songs About Flirting. Twin Pricks a fait un grand bond en avant. Probablement grâce à l’arrivée dans le processus créatif de deux membres de No Drum No Moog, cantonné jusque-là à faire le backing band pour le live. Impossible de ne pas penser qu’Olivier (basse clavier) n’ait pas proposé sa touche Moog sur le titre The Race.Alors fin du duo Twin Pricks ? Début du groupe (quatuor) Twin Pricks ?. L’avenir nous le dira. Celui-ci semble désormais radieux même si, les connaissant, cela doit être le cadet de leurs soucis.

Olivier Bay

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Live report & photos Olivier Bay

Vendredi 8 novembre, des trombes d’eau s’abattent sur Nancy. Ce soir, pour la deuxième année consécutive, les Musiques Volantes ont pris d’assaut l’Autre Canal pour une soirée satellite à l’affiche pointue et audacieuse. Au programme, les jeunes pousses de The Waters, le trip hop de Kelpe et l’electro de Bot’ox.

A peine arrivé sur les lieux, je me lance dans une course effrénée entre les gouttes pour atteindre l’entrée de la salle aux murs vermeils. La soirée se déroule au club, petite salle intime offrant une véritable proximité avec les artistes. Une fois à l’intérieur j’apprends que l’ouverture de la soirée est assurée par The waters, encore une histoire d’eau, coïncidence ou fatalité ?

Debout derrière leurs machines le duo, casquette pour l’un et chapeau pour l’autre, distille une musique à mi-chemin entre électro et hip hop. Fidèle à leur mélodie appliquée tout en finesse, le set est propre et met idéalement en place la soirée.

A peine le temps de prendre l’ambiance au bar que déjà Kelpe débute. L’anglais, caché derrière son laptop, est loin d’être expansif. Accompagné d’un batteur à la technique déstructurée mais toujours précis, la musique parfois abstract proposée par le duo emballe le club et ce dernier se retrouve transformé en moins de temps qu’il ne faut pour le dire en cours de récré où les plus timides y vont de leur petit hochement de tête alors que les plus extravertis dansent bras en l’air.

Il est 23h00 quand Bot’ox débute. La musique proposée par le quatuor est une sorte de disco éplorée. Des mélodies qui évoquent un retour de fête, une ballade au petit matin seul et en fin de cuite. Musicalement on est assez proche de Pony Hoax et après quelques minutes d’adaptation on succombe à la musique proposée par la clique de Cosmo Vitelli et [T]ékël. Véritable embuscade, on finira scotché par la mélancolie communicative au premier abord sans risque du groupe.

Minuit, les dernières mesures de Bot’ox meurent dans les murs d’enceintes du club. Il n’y aura pas de rappel. Aux bars les sourires prouvent que la soirée fut bonne. « Je ne regrette pas d’être venu » m’avouera un spectateur en quittant les lieux, ça tombe bien moi non plus !

Bot’Ox The WatersKelpe

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www.botoxmusic.comsoundcloud.com/thewaters-musicusicwww.kelpe.co.uk

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zoomThe Watersau titre Electric ! Wire ! Hustle ! Flower ! du rappeur de Chicago Common. On a voulu boucler la boucle en volant un titre à EWH qui eux même avaient piqués un titre à Common. » (Rires)

Coté influences, Travis avoue avoir un faible pour des labels hip hop tels que Stone throw record (Madlib, MF Doom…). Romain quant à lui est plus attiré par Brainfeeder (Flying Lotus), Ninja Tune ou encore Warp. Cependant, le duo s’attache à ne jamais se limiter à un style. « On va là où on a envie, et l’arrivée du live, nous a obligé à revoir notre musique afin d’assurer une certaine efficacité. D’ailleurs certaines transformations sont tellement importantes qu’aujourd’hui on pourrait renommer pas mal de nos morceaux »

Quant à l’avenir, à leur image de mecs décontractés et cools, les deux compères ont choisi de prendre leur temps.

« Le live aux musiques volantes sera notre dernier concert de l’année et on va commencer à travailler un EP un peu plus structuré et long que nos précédentes sorties. On n’est pas pressé, on est un groupe jeune et sortir un vrai album nécessiterait une dizaine de titres, une équipe et du financement qu’on n’a pas forcément. On souhaite également faire évoluer notre musique en y incorporant du chant. Les voix sont de réels atouts que ce soit dans le hip hop ou dans l’électro et on ne voit pas notre musique évoluer sans. Par contre on n’a pas forcément envie que des artistes chantent à notre place, notre musique nous appartient et on veut que ça continue comme ça ».

L’interview terminée chacun s’éclipse de son côté pour vaquer à ses occupations. The waters est comme ça, libre et c’est pas prêt de changer.

Depuis quelques mois maintenant le duo nancéen The Waters se fait de plus en plus présent sur la scène électronique de l’Est de la France allant jusqu’à assurer une première partie d’Herbaliser à Strasbourg. Toujours à la recherche de nouveautés Gig Mag est allé à leur rencontre afin d’en apprendre un peu plus sur eux.

Le rendez-vous a lieu dans un café discret de Nancy. A l’intérieur, Romain (RJ Henry) et son éternel chapeau vissé sur la tête déguste un Bagel en guise de petit déjeuner. La veille il m’apprend qu’il mixait pour la soirée mini BIM et que de ce fait il a très peu dormi. Le temps de nous faire servir un thé et Travis, la deuxième moitié du duo nous rejoint.

Le groupe est né il y a trois ans lors d’un atelier MAO mis en place par l’Autre Canal. Par affinité les deux compères se retrouvent à travailler ensemble. De là une discussion commence autour de la façon de régler la batterie et des influences musicales de chacun, il n’en faudra pas plus pour commencer des échanges de fichiers via Myspace. L’amitié s’accentuant par la suite via les réseaux sociaux.

Trainant dans le milieu hip hop, la danse pour l’un le beatmaking pour l’autre, le duo profite du lancement de Noircity, collectif nancéen où s’entremêlent artistes, photographes et musiciens. Créé par Romaric, un ami, ce dernier les aide à monter The waters et à sortir Alpha, Beta et Delta, triptyque musical conceptuel de trois titres chacun sorti trimestriellement.

Derrière leur nom, il y a l’idée des eaux, d’un fleuve musical où se déversent des rivières d’influences d’horizons différents. « C’est ce qu’on aime faire, mélanger les styles pour ne faire plus qu’un» confie Romain avant que Travis ajoute « Waters est également un titre du premier album d’Electric Wire Hustle dont on aime beaucoup la musique. Selon nous ils ont pris leur nom

Texte & photo Olivier Bay

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noircity.bandcamp.comsoundcloud.com/thewaters-music

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The Waters

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Orval Carlos SibeliusInterview & photo live Ground Control

La curiosité est un vilain défaut dit le dicton. Et parfois, on se le prend en plein visage au détour d’une interview. Parmi les interviewés, il y a les aigris comme l’était le regretté feu Lou Reed. Il y a aussi ceux qui ne se prennent pas au sérieux et profitent de ce moment pour poindre quelques pointes d’humour. Sauf qu’avec eux, on n’apprend rien de leur génie. Un peu comme avec Orval Carlos Sibelius, le projet protéiforme d’Axel Monneau.

A l’occasion de son passage à Metz pour le festival des Musiques Volantes, on a voulu en savoir un peu plus sur les secrets de son dernier album Super Forma qui est sans doute l’un des meilleurs albums français entendu cette année (Si vous n’êtes pas encore convaincu, lisez la chronique en fin de magazine). Mais là, les réponses à l’interview sont assez haut perchées. On hésite à se demander ce qu’il y a derrière cet humour. Il parait que ses réponses lui ressemblent assez bien. Alors apprécions et rions avec lui.

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Tu vas jouer dans le cadre du Festival des Musiques Volantes ? Ce sont des termes qui pourraient qualifier ta musique non ?

Mais je suis aussi d’accord pour jouer au Festival des Musiques Rampantes, et en général tous les festivals de musiques impliquant des déplacements dans l’espace. J’ai une préférence bien sûr pour les styles qui s’enfoncent dans le sol afin d’y creuser des galeries et qui meurent dans des culs-de-sac, des impasses.

J’ai lu que Super Forma avait été entamé il y a trois ans et devait sortir fin 2010. Pourquoi avoir attendu tout ce temps ?

Fin 2010, l’époque n’était pas encore au revival psychédélique. Une gitane alcoolique m’avait prédit le succès de Super Forma en 2013, j’ai donc décidé d’attendre un peu pour arriver pile au bon moment. J’ai sorti le mini-album Recovery Tapes entre temps, sans succès évidemment.

Dans quelles conditions a-t-il été enregistré ?

J’étais excité mais en même temps parfaitement lucide, très concentré, très préparé sur le plan mental. Pendant l’enregistrement d’un solo de guitare je me suis écrasé la main droite avec la porte coulissante du studio car tout se passait un peu trop bien.

Par rapport à Recovery Tapes, ton précèdent album, tes ambitions étaient différentes en matière de reconnaissance, production… ?

Recovery Tapes a été fait à la maison juste après Super Forma. Je voulais revenir à une approche plus brute de ma musique, enregistrer sur magnéto 4 pistes à cassettes, dans l’urgence aussi. Mon boulot ne me laissait pas trop de temps, j’enregistrais la nuit mes solos de guitare mais cette fois sans porte coulissante à proximité.

Il y a quelques temps lorsque Julien (Boss du label Clapping Music) m’a présenté Super Forma, il m’a dit que par rapport à Recorvery Tapes, Super Forma avait une toute autre envergure ? Peux-tu nous expliquer ce qu’il entendait par-là ?

C’est un disque total : chansons, productions, instrumentation, j’étais déterminé à faire le meilleur disque possible.

As-tu l’impression que ta manière d’écrire des chansons a

changée depuis tes débuts ?

J’ai toujours les mêmes obsessions quand j’écris un morceau : trouver une jolie mélodie un peu trop longue, varier les rythmiques, incorporer des éléments inattendus. En fait je crois que c’est surtout l’écoute des albums pop de Brian Eno qui a déterminé mon approche musicale.

En écoutant Super Forma, j’ai eu l’impression d’entendre un album qui aurait pu sortir à la fin des sixties. Te sens-tu en adéquation dans l’époque à laquelle tu vis ou aurais-tu préféré vivre au temps de The Zombies, Tomorrow et des premiers albums de Pink Floyd ?

Si un jour le tourisme temporel devient une réalité, j’irais plutôt assister secrètement à l’un des quatre concerts de Nick Drake, j’apprendrais la guitare slide avec Blind Willie Johnson ou je rejoindrais un ensemble de gamelan javanais du XVIIIème siècle pour jouer du bonang. Mais traîner à Londres en 1967, prendre de l’acide et coucher avec des filles libérées, bof !

Même si Super Forma puise beaucoup dans le psychédélisme, il s’ouvre tout de même à d’autres horizons comme la musique orientaliste, indienne, brésilienne… Qu’est-ce qui t’attire dans cette musique que tu ne retrouves pas dans la musique occidentale ?

Aller à des soirées salsa, participer à des stages de danse orientale, acheter son encens dans des magasins du quartier indien, c’est surtout un bon moyen de rencontrer des filles un peu complexées. Après tu leur parles de la beauté authentique des musiques du monde, tu les emmènes voir un cracheur du feu dans la rue et c’est dans la poche ! Essaie d’obtenir le même résultat en les baratinant sur Stockhausen…

Ta musique est un peu une musique bourrée de tiroirs à l’image du rock progressif ?

On trouve des tiroirs, je l’admets, mais aussi des penderies, des malles en osier et des petites boîtes à babioles. Tout est plus ou moins bien rangé. La pop conventionnelle m’ennuie parfois. Cela dit sur ce disque j’ai vraiment voulu conserver les structures traditionnelles, couplet/refrain, c’était en quelque sorte un challenge personnel, après des années dans Centenaire à essayer de ne jamais répéter deux fois la même partie…

Puisque l’on parle de Centenaire, c’est un membre du

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groupe, Stéphane Laporte (Domotic, Karaocake…) qui a fait le mix. Comment a-t-il travaillé et qu’a-t-il apporté à Super Forma ?

Stephane est magicien, je crois qu’il sort la nuit pour acheter des produits exotiques à des Africains près du périph’. Ensuite il boit un thé, travaille sur une piste de piano mal enregistrée et ça sonne comme les Beatles.

Tu es seul dans ce projet. Quelle est ta manière de travailler pour écrire une musique aussi riche et fouillée ? Ce n’est pas difficile de rejouer les morceaux sur scène ?

J’ai amassé pas mal d’instruments au cours des années et je voulais qu’ils apparaissent tous sur le disque, que chacun apporte sa petite couleur, sa petite histoire. Je peux ainsi m’en séparer plus facilement, les revendre sur Ebay et faire place à d’autres instruments encombrants qui trouveront refuge sur un prochain disque. Pour les concerts je trouve assez excitant d’essayer de recréer cette matière harmonique avec un nombre plus limité d’instruments. Nous supprimons des parties, inventons de nouveaux développements, et ça sonne toujours comme du Orval Carlos Sibelius.

www.facebook.com/orvalcarlossibeliushttp://clappingmusic.bandcamp.com/album/super-forma

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Playlists Citez 5 titres que vous évoque l’expression «Musiques Volantes»

Orval Carlos Sibelius

Ricky HollywoodRelaxe toi

RienAutobahn LoveKidsaredeadShe loves me

Wilfried*Matrice

J&YNew Moon

The Waters

Flying LotusAuntie’s Lock/Infinitum feat Laura Darlington)

Kanye WestHold My LiquorMount Kimbie

MaybesWalter Mecca

PleasureElectric Wire Hustle

Waters

Samuel (1/3 Boss du label

Chez Kito Katet Dog Bless You)

Loscil Discographie complete

Pan American Discographie complète

Jan Jelinek (sous tous ses pseudos) Discographie complète

Marc Leclair Musique pour 3 femmes en-

ceintesNappe longue / accord arpé-

giateur / Delay à bande entre 125 et 135 BPM

(accompagné d’un kick binaire léger, et d’un charley non agressif)

No Drum No Moog

10 CCI’m not in Love

Pink FloydShine on You Crazy Diamond

(Part I-V)The Police

The Bed’s Too Big Without You(Bootleg Live in Beziers 1980)Brian Eno & David Byrne

RegimentRobert Fripp

Let The Power Fall

Florian(Twin Pricks/La Face Cachée)

Dead MeadowSleepy Silver Door

Ensemble EconomiqueForever Eyes

AlohaBalling Phase

YrselAsatIda

Turn Me On

MWTE

BjörkUnravelHood

Western Housing Concerns Aphex TwinVordhosbn

ArchiveFold

Boards of Canadal’intégrale !

Jérôme (Chroniqueur

à Froggy’s Delight)

Pink Floyd Atom Heart Mother (titre)

César Franck Symphonie en ré mineur

Nicolas Jaar Space is only Noise

Robert WyattCuckooland

King Crimson In the Court Of Tthe Crimson

King

Maxime (My Lovely Underground

et festivalier)

Spacemen 3 Walkin’ with Jesus

Joy Division Atmosphere et New Dawn fades

My bloody Valentine Come in AloneMerchandise

I Locked the Door Ride

Sennen

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Portfolio par Ground Control To Major Tom

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Atom TM

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Camilla Sparksss

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Föllakzoid

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Marvin

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No Drum No Moog

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Lee Ranaldo & the dust

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ZA!

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Les Trinitairesnovembre — decembre — janvier

www.lestrinitaires.com

NOVEMBRE—jeu. 21 ≈ 20:00 SOIRÉE JAZZOZMA 4TET

jeu 21 ≈ 20:00IS TROPICAL COLD GRAVITY

ven 22 ≈ 20:00FINALE RÉGIONALE BUZZBOOSTER MTB CREW, RUS-VI, MADMAX & OBY ONE

sam 23 ≈ 21:00HEYMOONSHAKERABSOLUTELY FREE

mar 26 ≈ 20:00KAKKMADDAFAKKAPORTLAND

jeu 28 ≈ 20:00RIKÉBASTIEN LANZA

deCEMBRE—mar 3 ≈ 20:00AN PIERLÉJO CIMATTI

mer 4 ≈ 20:00ÉLÉPHANTMINOU

sam 7 ≈ 20:00WOODEN SHJIPSDIRTY BEACHESF/LOR

mar 10 ≈ 20:00 MATHIEU BOOGAERTS

13 & 14 ≈ 20:00 Les inouïs du Printemps de Bourges 2014

sam 21, 21:00SOIRÉE PUISSANCEARTEMUS GORDONFULGEANCeTÉLÉMAQUE

JANVIER—jeu 16 ≈ 20:00SAULE

24 & 25 ≈ 20:00FESTIVAL HAUNTING THE CHAPEL 2

mer 29 ≈ 20:00 AS ANIMALS

ven 31 ≈ 20:00MO’FO’ 14JEFFREY LEWIS + GUEST

Release Party

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