Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des...

39
Gestion stratégique des ressources humaines : Une analyse longitudinale< Revue internationale sur le travail et la société, Juillet Abdelwahab Aït Razouk 1 et Mohamed Bayad 2 Année : 2007 Volume : 5 Numéro : 2 Pages : 1-39 ISSN : 1705-6616 Sujets : GRH, performance, entreprise, approche configurationnelle Résumé Cette étude examine la durabilité de la relation entre la gestion des ressources humaines et la performance des entreprises. L’approche des ressources humaines qui a été adoptée pour vérifier l’effet prédictif des pratiques de GRH sur la performance est l’approche configurationnelle des ressources humaines. La notion de complémentarité (interne et externe) est mobilisée pour tester le maintien de l’avantage compétitif créé par les systèmes de GRH. Les résultats émanant d’une analyse longitudinale sur un panel de 962 établissements français soutiennent la durabilité des associations simultanées identifiées entre la GRH et les performances de ces établissements en termes de rentabilité, d’innovation et de productivité. Abstract This study examines the sustainability of the relation between the human resources management and the performance of the firms. This sustainability is tested by the configurational approach of human resources. The concept of complementarity (internal and external) is mobilized to test predictive effect of the systems of GRH on the performance. The results of the longitudinal analysis on a panel of 962 French establishments support the durability of simultaneous associations between the GRH and the several levels of performance of these establishments in terms of profitability, innovation and productivity. 1 Doctorant en sciences de la gestion, Laboratoire GREFIGE-CEREMO, Université de Nancy 2 2 Professeur des universités, Directeur de l’Institut de l’administration des entreprises, Université de Nancy 2

Transcript of Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des...

Page 1: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

Gestion stratégique des ressources humaines : Une analyse longitudinale< Revue internationale sur le travail et la société, Juillet Abdelwahab Aït Razouk1 et Mohamed Bayad2

Année : 2007

Volume : 5

Numéro : 2

Pages : 1-39

ISSN : 1705-6616

Sujets : GRH, performance, entreprise, approche configurationnelle

Résumé

Cette étude examine la durabilité de la relation entre la gestion des ressources humaines et la

performance des entreprises. L’approche des ressources humaines qui a été adoptée pour

vérifier l’effet prédictif des pratiques de GRH sur la performance est l’approche

configurationnelle des ressources humaines. La notion de complémentarité (interne et externe)

est mobilisée pour tester le maintien de l’avantage compétitif créé par les systèmes de GRH.

Les résultats émanant d’une analyse longitudinale sur un panel de 962 établissements français

soutiennent la durabilité des associations simultanées identifiées entre la GRH et les

performances de ces établissements en termes de rentabilité, d’innovation et de productivité.

Abstract

This study examines the sustainability of the relation between the human resources

management and the performance of the firms. This sustainability is tested by the

configurational approach of human resources. The concept of complementarity (internal and

external) is mobilized to test predictive effect of the systems of GRH on the performance. The

results of the longitudinal analysis on a panel of 962 French establishments support the

durability of simultaneous associations between the GRH and the several levels of

performance of these establishments in terms of profitability, innovation and productivity.

1 Doctorant en sciences de la gestion, Laboratoire GREFIGE-CEREMO, Université de Nancy 2 2 Professeur des universités, Directeur de l’Institut de l’administration des entreprises, Université de Nancy 2

Page 2: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

2

Introduction

L’intégration de la ressource humaine comme ressource centrale dans la prise de décisions

stratégiques semble raisonnablement indiscutable (Dyer, 1985 ; Devanna et al, 1981 ; Peretti,

2006 ; Tichy et al, 1982). Les chercheurs en gestion stratégique des ressources humaines

(GSRH) ont consacré un effort considérable pour démontrer que la manière dont les

ressources humaines sont gérées, en particulier par des pratiques de Gestion des Ressources

Humaines (GRH), a des apports empiriques forts en termes d'efficacité des organisations

(Delery et Doty, 1996; Huselid, 1995; MacDuffie, 1995). Des chercheurs comme Snell et al.

(1998) et Ulrich et al. (1990) ont lié cet apport à la contribution de la gestion des ressources

humaines à l'avantage compétitif. Pour illustrer, Ferris et al. (1999) ont argué que peu de

ressources traditionnelles offrent l'avantage concurrentiel, tandis que les ressources humaines

possèdent la valeur requise pour aider l'organisation à obtenir un avantage concurrentiel

durable.

Dans leur tentative d'explorer empiriquement le rapport GRH-performance, les chercheurs ont

identifié différentes pratiques de gestion des ressources humaines considérées comme

cruciales à l'avantage concurrentiel (Pfeffer et Veiga, 1999 ; Ferris et al., 1999). Cependant,

aucun consensus n'existe par rapport aux pratiques à utiliser (Ferris et al., 1999; Boxal et

Steeneveld, 1999). De plus, la méthodologie utilisée dans l'évaluation de l'effet de ces

pratiques sur la performance diffère entre l'utilisation de pratiques individuelles (Pfeffer,

1998) et de « bundles » ou « systèmes » de pratiques cohérentes (Becker et Huselid, 1998;

MacDuffie, 1995; Ichniowski et Shaw et Prennushi, 1997). Si la première méthodologie est

largement vérifiée dans la recherche malgré ses résultats contestés, les études relatives à la

deuxième sont plutôt rares. La raison de cette carence des contributions dans la recherche d'un

lien entre les systèmes de GRH et les résultats organisationnels est simplement la complexité

de l'approche. Néanmoins, un certain nombre d'études utilisant les systèmes de pratiques de

GRH a montré les effets positifs de ces systèmes sur la performance organisationnelle (Baron

et Kreps, 1999, Delery et Doty, 1996; Lepak et Snell, 1999, 2002), jugeant que ces effets

peuvent être beaucoup plus grands que lorsqu'une pratique est utilisée individuellement.

Le même contexte de recherche est observé en France. Les études dans la perspective

stratégique des ressources humaines se sont développées depuis une décennie, mais la

majorité de ces recherches ont adopté une approche « universaliste » des ressources humaines

Page 3: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

3

pour évaluer la performance des ressources humaines. On peut citer les études de Sire et

Henninger-Vacher sur les politiques de rémunération, celles de Laroche sur les négociations

syndicales et celles de D'Arcimoles sur le diagnostic financier des pratiques de GRH. Seule

exception, les travaux de Bayad et Liouville (2001) et Bayad et al (2004) soutiennent

l'hypothèse d'une approche « configurationnelle » des ressources humaines. Ces chercheurs

ont trouvé des liens significatifs entre les systèmes de GRH « administratif » et

« stratégique » et la performance des organisations.

Toutefois, malgré l'intérêt des résultats avancés par les études, la durabilité de l’association

entre les résultats organisationnels et les systèmes de GRH reste malheureusement absente

dans les écrits en gestion stratégique des ressources humaines. La majorité des recherches

dans ce domaine reste dans des logiques « cross-sectionnelles » ou simultanées (Becker et

Huselid, 1996; Rogers et Wright, 1998) et peu ont introduit la dimension temporelle pour

tester la robustesse des hypothèses liant la GRH à la performance (Guest et al, 2003 ; Wright

et al, 2005 ; sont l’exception). Trois questions majeures sont liées à la problématique de

durabilité : Quel est le pouvoir prédictif des stratégies de GRH adoptées par les entreprises ?

Quel est le délais nécessaire à la mise en œuvre d’une stratégie de GRH ? Enfin, quels sont les

signes d’une éventuelle causalité entre la GRH et la performance des organisations ?

Le but de ce papier est de vérifier à travers une étude longitudinale la durabilité de la

contribution des pratiques de GRH à l'amélioration des performances des entreprises.

L'approche théorique qui sera retenue pour cette fin est l'approche configurationnelle (Miller,

1987; Meyer et al, 1993). Cette étude concernera un panel de 962 établissements français

obtenu à partir de l'enquête REPONSE3 dans ces deux versions 1998-1999 et 2004-2005.

3 RElations PrOfessionnelles et NégociationS d’Entreprise : description détaillée dans la méthodologie

Page 4: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

4

1. Cadre conceptuel

1.1. Revue de littérature

L'importance stratégique des ressources humaines a été largement identifiée (Swiercz et

Spencer, 1992 ; Huselid, 1995 ; Pfeffer et Veiga, 1999). Plus spécifiquement, la GRH a été

liée à l'augmentation de la productivité (MacDuffie, 1995 ; Ichniowski et Shaw et Prennushi,

1997 ; Fox et al., 1999), au meilleur service à la clientèle (Fox et al., 1999), à l'amélioration

de l'efficacité (Becker et Gerhart, 1996), à l'accroissement de la valeur de la firme (Huselid,

1995), à une plus grande rentabilité ou des retours financiers (Delery et Doty, 1996 ; Becker

et al. 1996; Fox et al. 1999) et à la survie d'organisation (Welbourne et Andrews 1995).

Snell, Youndt, et Wright (1996) ont défini la gestion stratégique des RH comme « des

systèmes organisationnels conçus pour réaliser l'avantage concurrentiel par les individus». En

effet, l'avantage concurrentiel est perçu comme un ensemble de capacités ou de ressources

donnant à une organisation la possibilité de se distinguer par rapport à ces concurrents

(Wiggins et Ruefli, 2002 ; Porter, 1980, 1985). À cet égard, l'intérêt de la gestion stratégique

des RH semble être centré sur des combinaisons en matière de pratiques de GRH, par

lesquelles les organisations devraient créer l'avantage concurrentiel plutôt que de s'adapter

simplement au contexte (Snell, Youndt et Wright, 1996). Un examen de la littérature indique

trois approches soutenant la création de l'avantage compétitif par le développement des

ressources humaines.

Les ressources humaines et l'avantage compétitif

Premièrement, l'approche par les ressources « Resource-Based View » (Amit and

Schoemaker, 1993; Barney, 1986, 1991; Rumelt, 1984; Wernerfelt, 1984) focalise sur la

relation entre les ressources internes des organisations, leur rentabilité et leur capacité à

fournir un avantage compétitif durable (Delery, 1998; Ferris et al., 1999; Koch et McGrath

,1996; Gannon et al., 1999). Selon cette théorie, une ressource est considérée comme force

interne seulement si elle répond aux cinq critères de l'avantage concurrentiel initialement

définis par Barney (1991). Spécifiquement, une ressource doit (1) être immobile ; difficile à

imiter (2) ; (3) difficile à remplacer ; (4) rare ; et (5) créer de la valeur (Barney et al, 2005).

Page 5: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

5

Une deuxième approche pose quelques questions quant à l'efficacité de la théorie des

ressources dans un environnement dynamique (Lepak et Snell, 1999; Snell et al, 1996;

Barney, 2001). Cette approche est basée sur le fait que l'innovation et le changement

organisationnel deviennent des sources plus critiques d'avantage concurrentiel que des

ressources proposées par la RBV. Selon cette deuxième approche, la capacité des firmes à

apprendre plus rapidement que ses concurrents peut être le seul avantage concurrentiel

durable, parce que l'apprentissage organisationnel augmente la base des connaissances et sa

capacité d'adaptation. Les processus de l'apprentissage organisationnel qui mènent à

l'avantage concurrentiel durable sont la création, le transfert et la capitalisation de la

connaissance (Snell et autres. 1996).

Enfin, Lado et Wilson (1994) ont proposé l'approche basée sur les compétences

« competency-based model » pour soutenir l'avantage compétitif à travers la gestion des

ressources humaines. S'inspirant de la théorie des ressources, le modèle des compétences

cherche à comprendre la contribution des systèmes de GRH à faciliter ou à entraver le

développement des compétences organisationnels. Ces dernières sont identifiées en tant que

compétences managériales (capacité unique du gestionnaire à articuler une vision stratégique,

la communiquer dans toute l'organisation, autoriser sa réalisation), compétences basées sur les

entrées « inputs » (ressources physiques, connaissances, qualifications, ressources humaines

et capacités qui permettent aux processus transformationnels d'une entreprise de créer et livrer

des produits et des services qui sont évalués par des clients), compétences de transformation

(innovation, esprit d'entreprise, culture et apprentissage organisationnels) et compétences

basées sur les réalisations « output » (connaissances, capitaux stratégiques invisibles, comme

la réputation ou l'image de corporation, produit ou qualité de service, et fidélité de client).

Sur la base des trois approches ci-dessus, les chercheurs ont proposé un certain nombre de

pratiques ressources humaines, si elles sont stratégiquement utilisées, qui mènerait à

l'avantage concurrentiel durable (Delaney et al., 1989; Delery et Doty, 1996; Huselid, 1995;

Koch et McGrath, 1996; Pfeffer, 1994).

Cependant, aucune des trois approches ci-dessus ne s'est avérée mieux que les autres en

identifiant les pratiques de GRH qui sont les plus étroitement liées à la compétitivité des

organisations. Comme le notent Ferris et al (1999), toutes les approches sont sujettes à

plusieurs et mêmes limites et offrent peu de consensus notamment sur quelles pratiques

Page 6: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

6

choisir. En outre, des questions sont soulevées dans la littérature à savoir si ces pratiques sont

universelles ou doivent répondre au contexte, et si celles-ci sont appropriées pour réaliser

l'ajustement aux divers contextes étudiés (Ferris et al, 1999; Boxal et Steeneveld, 1999).

L'avantage compétitif et l'approche configurationnelle des ressources humaines

Pour répondre à certaines de ces limites, les auteurs de gestion stratégique des ressources

humaines ont déployé l'approche configurationnelle des RH (Miller, 1987; Meyer et al, 1993).

Le choix de cette approche se justifie par le souci d' « intégration » des ressources, pratiques

et possibilités organisationnelles qui peuvent mener à l'avantage concurrentiel durable. Pour

comprendre cette intégration, les chercheurs ont employé les notions de complémentarité

interne ou horizontale et de complémentarité externe ou verticale (Baird et Meshoulam, 1988;

Delery 1998 ; Ferris et al, 1999). Selon les adeptes de cette approche, la gestion des

ressources humaines doit être suffisamment cohérente pour faciliter l'apprentissage et

l'adaptation des organisations. En outre, une GRH cohérente en interne permet également

d'obtenir les comportements nécessaires à l'accomplissement de la stratégie globale des

organisations (Schuler et Jackson, 1987). La complémentarité interne est décrite comme une

nécessité de réaliser des synergies entre les pratiques de GRH seules susceptibles de brouiller

les pistes aux concurrents. En effet, cette cohérence offre un meilleur atout de distinction

nécessaire à l'amélioration des performances. Ichniowski et al. (1997) expliquent que lorsque

des pratiques de GRH sont combinées dans différentes formes, les effets sur la performance

sont beaucoup plus grands que lorsqu'elles sont utilisées individuellement. Dans le même

sens, Marchington et Grugulis (2000) soutiennent que les pratiques en matière de GRH ne

peuvent pas être mis en oeuvre efficacement en isolation et que c'est la combinaison de ces

pratiques dans un paquet logique qui importe. En outre, Perry-Smith et Blum (2000) ajoutent

parce que les comportements des employés sont inclus dans la routine, les systèmes ou

configurations de GRH régis par des interactions complexes et des synergies peuvent offrir

les capacités organisationnelles qui créent la valeur, sont difficilement imitables, rares et

immobiles.

D’autre part, si le principe de complémentarité interne s’avère une condition nécessaire à la

construction de l'hypothèse configurationnelle des RH, il n’en constitue toutefois pas une

condition suffisante (Dyer, Boudreau et Milkovich, 1999). A l'instar de la théorie de

contingence (Burns et Stalker, 1961; Chandler, 1962 ; Lawrence et Lorsch, 1967; Pettigrew,

Page 7: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

7

1985), la théorie configurationnelle postule que l'organisation n'agit pas toute seule, mais elle

opère dans un environnement de plus en plus instable auquel elle doit s'adapter. Par le biais de

la complémentarité externe, les partisans de l'approche configurationnelle appellent à aligner

les systèmes de GRH avec des facteurs de contingence qui peuvent être d’ordre

organisationnel (taille, structure, etc.), humain (caractéristiques de la main-d'œuvre c’est-à-

dire âge, diversité, compétences, etc.) et opérationnel (cycle de vie des produits et services,

systèmes d’information et contrôle, etc.). Selon Labelle (1983), ces contingentes guident le

choix des objectifs et pratiques de GRH.

Ces principes de complémentarité interne et externe sont d'ailleurs au coeur de plusieurs

importants modèles stratégiques. Parmi les modèles les plus cités par la littérature en GSRH,

notons ceux élaborés par Porter (1980, 1985) et par Miles et Snow (1978, 1984). Pour le

premier, trois positionnements stratégiques peuvent constituer un avantage compétitif. Il

s'agit, selon Porter, des stratégies de « différenciation », « coûts » et « focus ». Porter pense

qu'une entreprise qui poursuit une stratégie de « minimisation des coûts » proposera des

produits et des services de qualité en misant surtout sur l'innovation technologique, les

économies d'échelles et le contrôle des coûts de production. Le système de GRH à adopter par

définition doit reposer, par exemple comme l'avaient précisés Bayad et al, (2004), sur une

description précise des tâches, une politique de formation orientée à augmenter la

productivité, une évaluation centrée sur le rendement, une rémunération portée sur l'équité

interne, etc. Inversement, une entreprise qui opte pour la « différenciation » sera amenée à

proposer des nouveaux produits et services par l'intensification de l'innovation dans ce

domaine. Pour cet objectif, la GRH se verra plus proactive et flexible. Elle peut reposer sur

une large autonomie, une gestion des compétences, une rémunération liée aux objectifs

individuels, etc. Enfin, l'entreprise qui poursuit une stratégie de « focus » adoptera une

formule intermédiaire qui mélange les atouts des deux stratégies précédentes. Ce type

d'entreprise optera, comme l'avait proposé Walton (1985) pour un système de GRH plutôt

« hybride », qui puise à la fois dans les deux systèmes de GRH portés par les entreprises à

stratégies de différenciation et de coûts.

De leur côté Miles et Snow (1984) croient aussi aux avantages d'une complémentarité entre

les pratiques de GRH et les options stratégiques des entreprises. Selon ces auteurs, la stratégie

de GRH dépend de sa propension à suivre des stratégies de « prospecteur », de « défenseur »

et d'« analyste ». Les prospecteurs sont orientés vers l'innovation et le développement de

Page 8: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

8

nouveaux produits pour exploiter les opportunités du marché et réaliser la croissance

souhaitée. La gestion des ressources humaines est amenée à être plus souple, basée sur une

organisation de travail informelle, qui met l'accent sur la décentralisation des prises de

décisions et la communication latérale (Carroll, 1987). Les défenseurs, quant à eux, sont des

entreprises qui tablent sur le contrôle des coûts pour se différencier de leurs concurrents. Ces

derniers sont généralement moins agressifs que dans le cas des prospecteurs, puisque

l'entreprise type défenseur opère dans des environnements plutôt calmes. En effet, ce type

d'entreprise a besoin d'une organisation formelle et stable. Les enjeux de changement étant

faibles incitent ces entreprises à choisir des pratiques de GRH plutôt techniques (Youndt et al,

1996). Enfin, le type analyste forme un mixte entre les prospecteurs et les défenseurs (Miles

et Snow, 1984).

Par ailleurs, quelques chercheurs ont mené des analyses sur la pertinence de l'approche

configurationnelle des ressources humaines. Ils en ont testé les hypothèses principales, qui ont

fourni des résultats statistiquement significatifs. Par exemple, les études menées par Arthur

(1992, 1994) auprès de 29 petites aciéries américaines ont trouvé des liens significatifs entre

les systèmes de GRH de « contrôle » et d' « engagement » et les performances des

organisations en termes de productivité et d'efficience. Dans le même registre, MacDuffie

(1995) a réalisé une recherche à partir d'un échantillon international de 62 usines

d'assemblage dans le secteur d'automobile. Les résultats de cette étude soutiennent l'effet

positif d'une « grappe » de GRH d'engagement, que l'auteur a constitué en créant un indice

additif (alpha de Cronbach = 0.70), sur la productivité et la qualité. S'inspirant de ces travaux,

Bayad et al (2004) ont trouvé des résultats significatifs sur un échantillon de 46 coopératives

financières canadiennes.

La littérature académique comporte aussi certaines études qui tentent de valider la relation

entre la présence de certaines combinaisons de pratiques de GRH et la performance de la

firme. Bien que ces études n’aient pas explicitement validé l’hypothèse voulant qu’il existe

une complémentarité entre les pratiques de GRH, elles présentent tout de même des résultats

qui s’apparentent à ceux retrouvés dans les recherches énumérées précédemment. Que ce soit

la recherche de Kelley (1996) menée dans 973 entreprises du secteur américain de fabrication

de produits métalliques, celle de Dunlop et Weil (1996) réalisée auprès de 42 entreprises

américaines du secteur américain du vêtement ou celle effectuée par Youndt, Snell, Dean et

Lepak (1996) dans 97 entreprises du secteur manufacturier américain, toutes trois indiquent

Page 9: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

9

que la performance organisationnelle semble maximisée lorsqu’un regroupement de pratiques

mobilisatrices de GRH (les autres types de regroupements n’ayant peu ou pas d’effets sur le

niveau de performance organisationnelle) correspond à d’importants éléments contingents

comme la structure de production ou la stratégie d’affaires de la firme.

Le temps et l’approche configurationnelle des ressources humaines

Malgré l’importance des résultats de l’approche configurationnelle des ressources humaines,

la validation de ses hypothèses s’est limitée au court-terme. Les recherches effectuées jusqu’à

présent sur cette approche, et généralement sur le lien entre la gestion des RH et la

performance organisationnelle, sont restées muettes sur la durabilité de ce lien dans le temps

(Becker et Huselid, 2006). Néanmoins, la dimension temporelle a été considérée de manière

indirecte par les théories de la GSRH. Par exemple, la théorie basée sur les ressources nous a

apprit que l’avantage concurrentiel provenant des ressources humaines est plutôt de long-

terme.

Des auteurs comme Rogers et Wright (1998) et Guest et al (2003) se demandent, toutefois,

sur la capacité des pratiques de GRH à offrir des performances à long-terme au regard de la

dynamique de l’environnement et du raccourcissement des durées de vie des produits et tant

d’autres défis auxquels les organisations doivent faire face. En outre, comme le prétendent

Wright et al (2005), si un système de GRH, qui a comme conséquence l’avantage

concurrentiel, évolue avec le temps, il semble important d’indiquer le temps et les processus

par lesquels cette évolution se produit, si l’on veut comprendre profondément comment ces

systèmes ont comme conséquence le succès économique.

Dans ce domaine, certains chercheurs ont apporté des arguments empiriques relatifs à

l’importance du temps dans la validation du rôle des ressources humaines dans les

performances des organisations. Dans une étude internationale menée auprès de 70 directeurs

de GRH, Dyer et al (1999) se sont interrogés sur le laps de temps qu’il faut pour mettre en

oeuvre une politique de GRH. Ils ont demandé à ces directeurs de supposer qu’un changement

stratégique a eu lieu, et d’estimer (a) le temps nécessaire pour la conception d’une nouvelle

stratégie de GRH et (b) le temps nécessaire à la mise en application de cette stratégie RH. Ces

cadres ont fourni une évaluation moyenne de 9 à 10 mois pour la conception, et de 10 à 12

mois supplémentaires pour la mise en oeuvre de la stratégie de GRH.

Page 10: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

10

L’aspect temporel est également au cœur de la recherche de Wright et al (2005) dans un

questionnement sur la causalité, qu’on peut lier à la durabilité. Ces auteurs ont listé 67 études

empiriques qui se sont intéressées à l’étude du lien GRH-performance. Ils les ont réparti en

quatre catégories d’études distinctes : post-prédictives, rétrospectives, contemporaines et

prédictives. En lien avec la dimension temporelle, Wright et al ont remarqué qu’il y a

seulement 9 études parmi les 67 études qui avaient une caractéristique prédictive. Sur la base

de ce faible bilan, ils ont mené une étude sur un échantillon de 45 unités d’affaires d'une

grande société de service de traiteur représentée aux Etats-Unis et au Canada. Les données ont

été rassemblées sur deux exercices fiscaux (1998-2000). Ils ont testé la pertinence de chacune

des situations (post-prédictives, rétrospectives, contemporaines et prédictives) à consolider le

lien causal entre les pratiques de GRH et la performance. Leurs résultats soutiennent que les

pratiques de GRH sélectionnées sont liées à la performance financière actuelle et future. Ce

résultat leur a permis de conclure que les études prédictives peuvent être un éventuel

déterminant de la causalité.

Se référant à ces deux études, on peut dire que la chaîne causale utilisée par la majorité des

chercheurs est interpellée. Parce que, si la première partie de la chaîne, qui lie la stratégie à la

GRH, prend presque deux ans, il n’est pas improbable de s’attendre à un délai total de 3 à 4

ans avant qu’on observe l’effet sur la performance (Dyer et al, 1999). Clairement, les modèles

théoriques courants n’expliquent pas une telle longueur de temps.

Cela nous incite à être prudent dans l’interprétation des résultats des études instantanées

quand elles soutiennent l’effet positif de la GRH sur la performance. D’autant plus, ces études

peuvent contenir un biais de simultanéité qui fausse radicalement la fiabilité et la validité des

résultats (Becker et Huselid, 2006).

Notre étude répond au besoin d’approfondir la compréhension de la relation GRH-

performance prenant en compte la dimension temporelle.

1.2. Modèle et hypothèses de recherche

Systèmes de GRH théoriques

La première étape dans la validation des hypothèses de l'approche configurationnelle des

Page 11: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

11

ressources humaines, consiste à construire des systèmes de GRH théoriques. Cette méthode

est inspirée des travaux de Doty et al (1994) et de Bayad et al (2004). Celle-ci consiste à

identifier des modèles de GRH théoriquement validés pour guider le choix des systèmes de

GRH sur lesquels se fondera notre étude. Dans une large revue de la littérature en gestion

stratégique des ressources humaines, nous avons pu relevé trois systèmes qui sont largement

validés par les chercheurs (Arthur, 1994; Delery et doty, 1996; Walton, 1985; Youndt et al,

1996) avec quelques différences dans les appellations, mais aussi représentatifs des pratiques

de GRH retrouvés dans les entreprises françaises de l'enquête REPONSE.

Le premier système de GRH sera nommé «GRH stratégique». Ce système de GRH est

essentiellement composé d'activités de gestion des ressources humaines que la littérature

qualifie de «mobilisatrices». Le deuxième système de GRH sera appelé «GRH

administrative». Comme son nom l’indique, ce système regroupe un ensemble d'activités RH

qualifiées de traditionnelles par les théoriciens des sciences de gestion. Le troisième système

de GRH, que l’on nomme «GRH hybride», représentera, quant à lui, un système «mixte»

puisant à la fois dans les deux autres systèmes. Le tableau suivant (cf. tableau 1) démontre les

caractéristiques et l’importance relative des activités de GRH présentés dans chacun des deux

principaux systèmes RH antagonistes.

Tableau 1 Regroupement de pratiques de GRH associées à la configuration stratégique et à la configuration administrative GRH administrative GRH stratégique Organisation de travail Autonomie Accessoire important Description des tâches Accessoire important Contrôle Accessoire important Gestion des compétences Formation Accessoire important Entretien annuels Accessoire important Liens avec la formation Accessoire important Lien avec promotion Accessoire important Rémunération Augmentations collectives Important accessoire Augmentations individuelles Accessoire important

Page 12: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

12

Incitatifs Accessoire important Animation Participation Accessoire important Communication Accessoire important

Orientations stratégiques

Après avoir définit les systèmes de GRH pour répondre au premier principe de

complémentarité interne, la prochaine étape consiste à déterminer les stratégies sur lesquelles

nos systèmes de GRH doivent s'aligner pour prétendre à la complémentarité externe.

Le profil des stratégies retrouvé dans les établissements de l'enquête REPONSE, nous a

encouragé à faire le choix des orientations stratégiques fixées par la typologie de Porter

(1980, 1985). Utilisant la même appellation que Porter, il s'agit en premier de la stratégie

d'innovation et de qualité des produits et des services nommée « stratégie de différenciation »,

de la stratégie prix que l'on nomme « stratégie de coût » et enfin de la stratégie de «focus».

Comme nous l'avons vu précédemment, il devrait avoir une complémentarité entre une

stratégie de différenciation et un système de GRH basé sur l'engagement et la mobilisation des

salariés, en d'autres termes notre système de GRH stratégique. Nous devrions également

retrouver une complémentarité entre un système de GRH administrative et une stratégie axée

sur la baisse des coûts. Finalement, une complémentarité entre un système de GRH hybride et

une stratégie de focus devrait avoir lieu.

Par ailleurs, si les notions de complémentarité interne et externe sont des maillons fort de la

chaîne causale de notre modèle de recherche, la variable dépendante à mesurer, n'en ai pas la

moindre, doit également être explicitée. Notre variable dépendante étant la performance

nécessite un intérêt et un éclairage théorique avant de la mettre dans notre modèle.

Conceptualisation de la performance

Nombreuse est la littérature qui soutient le principe que la gestion des ressources humaines

conduit à l'amélioration des résultats des organisations, notamment des résultats financiers

Page 13: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

13

(Rogers et Wright, 1998). Cette préférence pour les mesures financières de la performance

est mentionnée par Wright (1998) et Rogers et Wright (1998) à partir de leur revue de la

littérature. Ils indiquent que parmi les 80 variables dépendantes utilisées par les études en

gestion stratégique des ressources humaines, les indicateurs financiers, tels que les retours sur

l'actif, les retours sur les capitaux propres, mesure des profits, prix des actions et Tobin’s Q

ont été employées dans plus de la moitié de la recherche. Bien que le lien dans la majorité des

études est fait entre les pratiques de GRH et les résultats en termes de performances

financières, le concept de performance reste dans l'ensemble ambigu et implicite (Becker et

Gerhart, 1996; Cook et Ferris, 1986; Devanna et al, 1984; Rogers et Wright, 1998; Tichy et

al, 1982).

Selon Becker et Gerhart (1996), la variable dépendante peut changer selon le niveau

d'analyse. La mesure de la productivité du personnel de la recherche et développement (R&D)

ou du taux de turnover est très importante pour des entreprises qui poursuivent une stratégie

de différenciation, tandis que la mesure de la productivité du personnel de l'unité de

production est beaucoup plus critique pour les entreprises qui sont accès sur la baisse des

coûts. En plus, le focalisation devrait être sur les variables qui ont la signification inhérente

pour un contexte particulier (Becker et Gerhart, 1996). Par exemple, les mesures financières

telles que le rendement de l'actif ou le retour sur des capitaux propres peuvent être plus

appropriées pour des firmes poursuivant des stratégies de réduction de coût dans la plupart de

leurs unités d'affaires tandis que la croissance de ventes (ratio) ou la croissance de revenu

(ratio) peut être plus appropriée pour des firmes poursuivant des stratégies de différentiation

de produit pour la majorité de leurs unités d'affaires. Ainsi, il peut être plus approprié que la

recherche en GSRH inclue des indicateurs multiples de performance.

D'autre part, si la performance est différente selon le contexte d'analyse, elle peut l'être aussi

selon le nombre et le type d'acteurs. Il est en effet possible, en prolongeant la théorie des

Stakeholders (Freeman, 1984), d’interpréter la performance selon les enjeux des différents

acteurs qui composent l’organisation ou qui y détiennent un intérêt. Pour les uns, la dimension

financière ou comptable sera prédominante tandis que pour d’autres, la dimension

consommateur-produit, socio-politique ou encore celle de l’emploi sera prégnante (Le Louarn

et Wils, 2001). L'originalité de l'approche des stakeholders est qu'elle s'appuie sur les notions

de pouvoir et d'intérêts, nécessaires d'une part pour comprendre les rapports de force entre les

différents donneurs d'ordres, d'autre part permettent, contrairement à l'approche de

Page 14: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

14

Shareholder (actionnaires), de limiter la portée de cette dernière, qui est fondée sur une

logique purement financière veillant à satisfaire uniquement les attentes des seules

actionnaires. Plusieurs chercheurs en stratégie ont réclamé d'inclure le concept d'intérêts et

d'expliquer les multiples attentes des dépositaires d'ordres (Cowherd & Levine, 1992;

MacDuffie, 1995; Venkatraman & Ramanujam, 1986).

Récemment, Paauwe (2004) attire l'attention sur les notions de légitimité et d'équité comme

principes de mesure de la performance liée aux stakeholders. Selon l'auteur, la survie d'une

organisation dépend non seulement de la compétitivité financière, mais également de sa

capacité de légitimer son existence envers les dépositaires d'ordres de l'organisation (E.g.,

employés, clients, syndicats, gouvernement). La légitimité est un concept important pour la

pérennité organisationnelle, mais également le rôle de l'organisation vers l'employé et ses

valeurs morales est important : le concept de l'équité. Si le rapport entre l'employeur et

l'employé n'est pas équilibré - par exemple, dans le cas des pressions accrues de performance

sans salaire juste - les employés pourraient se sentir exploités, ce qui implique des niveaux

faibles en terme d'engagement vers l'organisation.

Dans la même veine, la performance devient multidimensionnelle plutôt

qu'unidimensionnelle. L'emploi de l'approche des stakeholders implique que certains auteurs

tels que Truss (2001) et Guest et Peccei(1994) sont partisans d'une mesure multiple de la

performance afin d'équilibrer le processus qui mènent à celle-ci sans créer des conflits entre

les différents acteurs internes et externes de l'organisation. Ainsi, d'une part il y a l'aspect plus

stratégique de la performance (basée sur la rationalité économique), ce qui souligne des

résultats tels que la productivité de travail, innovation, qualité, gains d'efficacité et flexibilité

(Boselie et autres, 2005) et d'autre part l'aspect plus social de la performance soulignant la

légitimité et l'équité (Paauwe, 2004). L'aspect social peut être évalué par des indicateurs

comme l'engagement, la confiance, la sécurité d'emploi et l'équité perçue.

Dans la même perspective, Dyer et Reeves (1995) ont noté différents types de mesures de la

performance qui sont les plus appropriés pour la recherche en GSRH. Ils ont proposé quatre

indicateurs :

1) les résultats ressource humaine tels que l'absentéisme, le turnover, la satisfaction au

travail et la performance de l'individu et du groupe ;

2) les résultats organisationnels tels que la productivité et la qualité des produits et des

Page 15: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

15

services;

3) les résultats financiers tels que le rendement de l'actif (RAO) et les retours sur

investissement ;

4) l'efficacité du marché (prix des actions ou Tobin’s Q).

A partir de cette revue de la littérature sur le concept de performance, nous penchons pour la

mesure multidimensionnelle de la performance. Ainsi, nous avons choisi d'évaluer la

performance organisationnelle à travers la productivité et l'innovation et la performance

économique à travers la rentabilité des entreprises (Bayad et al, 2001).

Après avoir détaillé les constituantes de notre modèle de recherche et les différents liens qui

peuvent les associer, la figure 1 ci-dessous en résume la proposition.

Figure 1. Proposition d'un modèle de recherche

Complémentarité et hypothèses de recherche

La perspective configurationnelle reconnaît que la GRH n’a de réelle capacité stratégique que

dans la mesure où elle parvient à constituer un regroupement cohérent de pratiques RH

capables de s’harmoniser aux principales caractéristiques de l’organisation. Bien que la

pertinence de la notion de complémentarité (interne et externe) à produire des résultats

simultanés est suffisamment reconnue par les chercheurs, celle-ci pourrait être remise en

question dans la durée. La résistance des associations entre des pratiques de GRH cohérentes

en interne entre elles et en externe avec la stratégie d’affaires et la performance des

Systèmes de GRH GRH stratégique GRH administrative GRH hybride

Performances Productivité Innovation Rentabilité

Stratégies d’affaires Coûts Différenciation

Focus

Page 16: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

16

organisations après introduction d’un décalage temporel pourrait être une étape fondamentale

dans la validation du pouvoir prédictif de la GRH configurationnelle.

En lien avec cette nouvelle définition de la complémentarité, nous proposons deux hypothèses

pour valider cette approche théorique (Doty et Glick, 1994).

La première hypothèse tentera de valider la logique associée à la complémentarité interne des

pratiques de GRH. Si les systèmes de GRH que nous avons dérivés de la littérature

constituent réellement des regroupements cohérents de pratiques RH capables d'accroître la

performance des organisations, alors:

Hypothèse 1. Plus grande sera la similarité dans le temps entre le système de GRH retrouvé

dans l’organisation et le système de GRH théorique, meilleure sera la performance.

La deuxième hypothèse propose, quant à elle, de compléter la précédente hypothèse en

considérant, cette fois-ci, la logique associée à la complémentarité externe. Si nos

regroupements théoriques sont vraisemblables, alors:

Hypothèse 2. Plus grande sera la similarité dans le temps entre le système de GRH retrouvé

dans l’organisation et le système de GRH théorique, et plus cette dernière sera liée à une

stratégie d’affaires correspondante, meilleure sera la performance.

2. Méthodologie

2.1. Description de l'échantillon

Pour la vérification de nos hypothèses, notre stratégie de recherche se base sur un échantillon

longitudinal. Cet échantillon résulte de l'enquête REPONSE (RElations PrOfessionnelles et

NégociationS d’Entreprise) conduite par la DARES (Direction d'Animation de la Recherche,

des études et des statistiques) et l’institut BVA pour les années 1998 et 2005. Cette enquête a

été menée sur un échantillon représentatif de 2978 établissements français en 1998 et de 2930

établissements en 2005 de plus de 20 salariés. Les enquêtes ont été menées sous formes

d'entretiens en face à face avec les responsables des établissements, une partie des salariés et

les représentants des salariés.

Page 17: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

17

L’interrogation en face à face a permis d’obtenir une grande quantité d’informations,

essentiellement de nature qualitative, sur la main-d’œuvre (sexe, qualifications, CDD, intérim,

temps partiel…), les relations professionnelles (syndicats, Comités d’Entreprise, négociations,

conflits…), la situation économique (demande, marchés, concurrence, compétitivité…),

l’organisation et les technologies (autonomie et contrôle, innovations organisationnelles et

technologiques, …), la gestion des ressources humaines (embauches et licenciements, gestion

des carrières et des salaires…).

Ces enquêtes disposent de plusieurs volets de déclarations. Un volet concernant les

déclarations des employeurs, un volet “représentants du personnel” consacré à l’implantation

et aux activités des instances de représentation collective et un volet “salarié”. Nous avons

utilisé uniquement le volet ”employeur” des deux enquêtes car nous pensons qu’il assure une

meilleure vision d’ensemble de l’organisation de l’entreprise et contient la majorité de nos

variables. Le volet salarié aurait pu en effet être pris en compte dans notre étude afin

d’enrichir notre compréhension des modes de gestion des ressources humaines à travers la

perception des salariés. Cependant, il ne fournit que le point de vue d’un petit nombre de

salariés sélectionné de manière aléatoire, ce qui pourrait alors introduire des problèmes

d'interprétation. Ainsi, pour éviter ces biais d'interprétation, nous avons opté uniquement pour

l’utilisation du volet employeur.

L’échantillon représente un panel de 962 établissements, tous ayant répondu aux deux

Enquêtes REPONSE 98 et REPONSE 05, bien représentatif des populations mères (voir

tableau 2). Ces établissements appartiennent à des entreprises de plus de 50 salariés.

Tableau 2 Représentativité de l'échantillon par rapport à la population mère Réponse 1998 Panel (%) Population mère (%) Moins de 50 salariés 21 24,24 De 50 à 99 salariés 17,26 18,60 De 100 à 199 salariés 20,69 19,58 De 200 à 499 salariés 24,12 23,81 De 500 à 999 salariés 11,64 9,57 1000 et plus 5,3 4,20

Page 18: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

18

Réponse 2005 Panel (%) Population mère (%) Moins de 50 salariés 17,98 22,56 De 50 à 99 salariés 18,50 15,09 De 100 à 199 salariés 20,58 18,23 De 200 à 499 salariés 24,64 18,50 De 500 à 999 salariés 11,33 16,42 1000 et plus 6,96 8,84

Les statistiques descriptives de cet échantillon (cf. annexe 3) montrent que les répondants aux

enquêtes REPONSE 98 et REPONSE 05 appartiennent à plus de 50 % à des établissements

de moyenne et grande taille. La majorité de ces établissements dépendent des entreprises

multi-établissements.

L'échantillon regroupe une majorité des établissements qui opèrent dans des marchés de

niveaux national et international (plus de la moitié des établissements du panel). Les

répondants aux deux enquêtes sont également engagés en bourse (près de 30 % pour les deux

enquêtes).

2.2 Mesure des variables sélectionnées

Variables indépendantes : Systèmes de GRH et stratégies d'affaires

Comme nous l'avons mentionné plus haut lors de la présentation de notre modèle de

recherche, la constitution des systèmes théoriques relatifs à la fois à la GRH et à la stratégie

de l'entreprise est une condition incontournable. Ces systèmes théoriques représentent les trois

systèmes stratégiques théoriques ainsi que les trois regroupements théoriques de GRH

discutés lors de la présentation du modèle. Rappelons que ces construits théoriques ne sont

pas uniquement des catégories d'entreprises, mais des idéals types. Pour les défendre, les

chercheurs insistent sur les effets dynamiques qui existent à l'intérieur des systèmes, qui

dépassent les simples effets additifs impliqués par l'interaction (Van de Ven et Drazin, 1984).

Afin de construire nos systèmes de GRH et de stratégie d'affaires, nous avons, en premier,

sélectionné les variables de GRH et de stratégie (cf. annexe 1) les plus citées par les

chercheurs. Ensuite, en raison de la densité des informations contenue par les variables

Page 19: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

19

initiales, une analyse factorielle a été réalisée à partir de ces variables pour extraire des axes

factoriels. Nous avons pu identifier, d’une part huit axes factoriels de GRH (cf. encadré 1)

représentant les activités d'organisation de travail, de gestion des compétences2, de

rémunération et d'animation. D’autre part, deux axes factoriels semblent représentés les

orientations stratégiques : un premier axe oppose les stratégies de prix et de qualité et un

deuxième axe rapporte l'information sur la stratégie d'innovation.

Enfin, nous nous sommes appuyés sur ces axes factoriels pour effectuer une classification

2 En conformité avec notre problématique et en cohérence avec les travaux déjà effectués dans ce domaine (Colin et Grasser, 2003; Defelix, 2004), nous avons considéré la gestion des compétences sous sa forme la plus classique. C'est-à-dire comme une démarche instrumentale (Defelix, 2004) basée sur des pratiques d'évaluation annuelle et sur des pratiques de développement des compétences (dépenses de formation). Par rapport à l'évaluation, les entretiens entre le salarié et son supérieur hiérarchique semble être le point d'ajustement entre les compétences acquises (qualifications) et les compétences requises par l'entreprise. Ce rapprochement entre les deux niveaux de compétences constitue l'élément fondateur de la démarche compétence et son succès compte dans la réussite de la dynamique compétence. Le développement des compétences, source d'avantage compétitif, est également cruciale. Pour rendre les compétences plus accessibles et plus disponibles, les entreprises sont contraintes à créer et développer les savoirs et connaissances de leurs salariés à travers des programmes de formation. En plus, des liens doivent exister entre les entretiens effectués et la formation ainsi que la promotion en guise de reconnaissance d'un niveau de compétence supérieur (Brochier, 2002 ; Colin et Grasser, 2003). A l'instar des chercheurs précités, nous avons retenue pour la dimension gestion des compétences les variables suivantes (voir annexe 1) : entretiens réalisés par la hiérarchie pour l’ensemble des salariés, existence d’une véritable politique de formation (niveau des dépenses de formation significatif), lien entre le résultat de l’évaluation périodique du salarié et, sa formation d’une part, sa promotion d’autre part.

Encadré 1 : Variables actives ou axes factoriels A partir du volet « employeur » des deux Enquêtes 1998 et 2005, nous avons retenu

un nombre important de variables de GRH dites actives. Pour agréger l'information fournie par ces variables, une analyse factorielle par correspondances multiples (ACM) a été effectuée sur chacune des activités de GRH suivante : organisation de travail, gestion des compétences, rémunération et animation. Le résultat de ces ACM nous donne les huit axes factoriels ci- dessous : Organisation de travail Organisation de travail (Axe1) : fixation des tâches, nature du contrôle, en cas d'incident mineur Gestion des compétences Entretiens (Axe2) : entretien avec les salariés non cadres et cadres Liens (Axe3) : liens avec la formation et la promotion ; Rémunération Salaire (Axe4) : augmentations générales (cadres et non cadres) Incitatifs (Axe5) : augmentations individuelles, primes (cadres et non cadres) Animation Participation (Axe6) : action qualité, groupe de qualité Information (Axe7) : Diffusion informations sur la situation économique, sur l'évolution de l'emploi, sur la formation, sur la stratégie Communication (Axe8) Discussion collective, discussion d'information

Page 20: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

20

hiérarchique (CAH) à l’aide de la méthode Ward. Le choix de la classification est justifié par

un ensemble d’études ayant fait appel à des méthodes typologiques, notamment les études

d’Arthur (1992 ; 1994). Delery (1998) décrit l’analyse typologique comme « une procédure

statistique multivariée qui analyse une base de données contenant des informations sur des

entités et tente de les réorganiser dans des groupes homogènes » (traduction libre) .

Variable dépendante

Pour mesurer la performance des organisations, trois variables ont été sélectionnées : la

productivité, l'innovation et la rentabilité (cf. annexe 1). La productivité des employés a été

mesurée par l'indicateur suivant : productivité = variation du volume d'activité – variation

des effectifs. Cet indice prend des valeurs comprises entre -2 et 2. Lorsque la variation des

effectifs est supérieure à celle de l'activité, l'indicateur de productivité doit afficher une valeur

négative. L'inverse se produit lorsque la variation de l'activité dépasse celle des effectifs.

Enfin, la productivité est stable lorsque les deux variations sont identiques.

L'innovation est évaluée par un ensemble de variables qui sont inspirées des travaux de

Coutrot (2004). Ces variables ont été soumises à une analyse factorielle des correspondances

multiples (ACM) pour agréger les informations relatives à celles-ci. L'analyse factorielle a

permis d'identifier un seul axe appelé « innovation ».

Enfin, pour mesurer la rentabilité, les répondants devaient indiquer sur une échelle de Likert à

5 points le niveau de leur rentabilité par rapport à leurs concurrents (1 : très inférieur ; 5 : très

supérieur).

Variables de contrôle

Dans un effort d’exactitude statistique de nos procédures analytiques, nous avons contrôlé

l’effet des caractéristiques organisationnelles et environnementales. Nos variables

organisationnelles concernent la taille et la structure des établissements : la taille est

approchée par le nombre des salariés des établissements ; la structure est décrite par

l’appartenance de l’établissement à une entreprise mono ou multi-établissements. Les autres

variables environnementales concernent l’envergure du marché de l’établissement (régional,

national ou international) et la structure de propriété illustrée par la cotation de l’établissement

en bourse.

Page 21: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

21

2.3. Méthode d’analyse

Afin de vérifier nos hypothèses respectives, les analyses choisies portent sur la mesure de la

déviation par rapport aux systèmes théoriquement construits. Par conséquent, il ne s’agit pas

seulement de classifier les entreprises de l’échantillon dans des catégories, mais d’évaluer la

déviation entre les entreprises de l’échantillon et les idéals types (Doty et al. 1994). D’autres

approches d’analyse sont utilisées par les chercheurs, notamment la méthode des experts.

Dans notre étude, la méthode du continuum (Delery et Doty, 1996 ; Doty et al, 1993) est la

plus privilégiée (cf. annexe 2).

D’autre part, la problématique de la durabilité nous impose un protocole statistique rigoureux.

Nous le divisons en deux parties : analyse de la simultanéité et analyse prédictive. La

première partie va nous permettre de déterminer les associations synchrones entre la

complémentarité (interne et externe) et la performance de l’année 1998 ; avant de vérifier la

durabilité de ces associations par une analyse longitudinale en deuxième partie. L’analyse

longitudinale la plus rigoureuse consiste à arrêter les données de GRH et de stratégie à une

date t, pour repérer ensuite les associations avec les performances en termes de productivité,

d’innovation et de rentabilité des années (t+1) à (t+n). Conformément à cette règle, on

identifie les associations significatives entre les données de GRH et de stratégie de 1998 et les

données de performance de 2005. Le graphique suivant résume ces deux parties d’analyse :

Nous avons validé l’hypothèse de complémentarité des pratiques de GRH (hypothèse 1) en

mesurant, pour chacun des 962 établissements, la somme des écarts entre les valeurs RH

théoriques et les valeurs RH effectivement retrouvées dans les établissements étudiés. Par

hypothèse, moins grand sera l’écart entre les valeurs RH théoriques et les valeurs RH

Données GRH et stratégie 1998

Données performances 1998

Données performances 2005

Analyse cross-sectionnelle 1998

Analyse longitudinale 1998-2005

Page 22: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

22

organisationnelles, plus grand sera le niveau de la performance des organisations. La

technique utilisée pour mesurer cette similarité est la distance du poids euclidien (cf. annexe

2). L’hypothèse 2 se veut une simple extension de la première hypothèse. En plus de tenir

compte de la somme des écarts entre les valeurs RH théoriques et les valeurs RH

organisationnelles, nous tenons également compte de la somme des écarts entre les valeurs

stratégiques théoriques et les valeurs stratégiques retrouvées dans les 962 établissements

étudiés.

Pour mesurer les effets de la complémentarité (interne et externe) sur les performances des

organisations, nous avons choisi des analyses explicatives basées sur la méthode des

régressions linéaires.

3. Résultats

Performance et complémentarité : analyse simultanée

Cette partie est consacrée à l’identification des associations synchrones entre les

complémentarités (interne et externe) et les performances en termes de rentabilité,

d’innovation et de productivité.

Les résultats de cette analyse semblent soutenir les prémisses de l'approche

configurationnelle. En ce qui concerne la première hypothèse (cf. tableau 3), l'analyse en

transversale montrent que les établissements qui minimisent l'écart entre leurs systèmes de

GRH et les systèmes de GRH théoriques (idéals types) sont capables de maximiser leurs

performances. L'amélioration de la performance économique (rentabilité des établissements)

semble soutenue (β1998=0.37, p<0.01). Le même constat peut être fait par rapport à

l'innovation, qui semble être significativement liée à une complémentarité interne des

pratiques de GRH (β1998= 0.17, p<0.01). Cependant, il n’y a aucune association spontanée

entre la productivité des employés et la cohérence des pratiques de GRH. L’effet de la

déviation des établissements par rapport à leurs idéals types n’est pas significatif.

Tableau 3 Effet de la complémentarité sur la performance des établissements Synthèse de l'association simultanée Productivité Innovation Rentabilité

Page 23: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

23

1998

1998

1998

Complémentarité interne

n.s

0.17***

0.37***

Complémentarités interne et externe

0.06* 0.28*** n.s

Légende: *: p-value<0,10 **: p-value<0,05 ***: p-value<0,01

D’autre part, les associations simultanées entre la complémentarité externe et les trois

dimensions de la performance sont plutôt rares. Rappelons que le principe de

complémentarité externe consiste à minimiser la distance entre les systèmes de GRH

observés dans les établissements et les systèmes de GRH théoriques, tout en tenant compte de

la stratégie d'affaires correspondante adoptée par les organisations. Un meilleur alignement de

la GRH sur la stratégie contribuera à de meilleures performances.

Au regard des résultats relatifs à la deuxième hypothèse (cf. tableau 3), il paraît que le

modèle global (complémentarité interne et externe) n’a des effets significatifs que sur

l’innovation dans les établissements étudiés (β1998= 0.28, p<0.01). Une faible association

semble exister entre la productivité et la complémentarité externe (β1998= 0.06, p<0.10).

Aucun effet synchrone n’est observé par rapport à la rentabilité. La faiblesse des résultats

relatifs à la complémentarité externe est conforme à des résultats similaires retrouvés par des

auteurs comme Huselid (1995).

Malgré que les résultats simultanés confortent la complémentarité interne et soutiennent

faiblement la cohérence externe, certains effets peuvent être retardés ou disparaître. C’est

l’objectif de la deuxième partie de l’étude empirique qui sera consacrée à l’analyse

longitudinale.

Performance et complémentarité : analyse longitudinale

Le but de cette partie est d’approcher la dynamique des associations précédemment identifiées

entre la complémentarité et la performance des établissements français. Ainsi, les tests

statistiques tiendront ici compte du décalage temporel. Ce travail va permettre de tester la

durabilité des associations synchrones présentées dans la première partie, ainsi que

Page 24: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

24

l’éventuelle apparition de corrélations retardées. Ce travail pourrait, sans le démontrer,

témoigner de l’existence d’un lien de causalité entre la GRH et la performance.

Pour tester la durabilité de la complémentarité, nous avons, conformément à la démarche

longitudinale la plus rigoureuse, arrêté la situation des pratiques de GRH et de stratégie

d’affaires à l’année 1998 de l’enquête REPONSE. Les complémentarités (interne et externe)

de l’année 1998 seront ensuite régressées sur les performances de l’année 2005. Cette

démarche devrait également identifier le caractère prédictif de la complémentarité.

Tableau 4 Effet de la complémentarité sur la performance des établissements Synthèse de l'association longitudinale Productivité Innovation Rentabilité 2005

2005

2005

Complémentarité interne

0.13**

0.26***

0.30***

Complémentarités interne et externe

n.s 0.26*** 0.12*

Légende: *: p-value<0,10 **: p-value<0,05 ***: p-value<0,01

D’après les résultats du tableau 4, on remarque que plus un établissement est susceptible de

minimiser la distance entre l'idéal type de GRH et son système de GRH dans le temps, plus sa

performance en termes de rentabilité et d’innovation est meilleure (β2005=0.30, p<0.01 ;

β2005=0.26, p<0.01 respectivement). Contrairement aux résultats spontanés, un lien retardé

est constaté dans l’association des pratiques de GRH complémentaires et la productivité des

employés (β2005=0.13, p<0.05).

D’autre part, il est intéressant de noter que plus un établissement est susceptible de minimiser

la distance entre l'idéal type de GRH et son système de GRH, et plus cette distance

correspond à une stratégie cohérente (grande similarité entre la stratégie théorique et la

stratégie retrouvée dans l'établissement) dans le temps, plus la rentabilité de cet établissement

est grande (β2005=0.12, p<0.10). Cet effet retardé n’était pas possible à déceler avec l’unique

association simultanée. On remarque également la résistance de l’association simultanée entre

la complémentarité externe et l’innovation (β2005=0.26, p<0.01). Toutefois, il y a un

Page 25: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

25

effritement de la relation avec la productivité, qui devient non significative en 2005. Cette

brièveté de la corrélation entre la productivité et la complémentarité externe peut signifier que

l’alignement de la stratégie de GRH sur la stratégie d’affaires ne peut être à l’origine d’une

amélioration durable de la productivité des salariés.

4. Discussion et conclusion

Les résultats de l’analyse simultanée confortent ceux déjà trouvés par les chercheurs de la

complémentarité (Arthur, 1994 ; Bayad et al, 2004 ; Becker et Huselid, 2006 ; Huselid et al,

1997 ; MacDuffie, 1995 ; Youndt et al, 1996), avec un léger bémol concernant la

complémentarité externe, qui demeure extrêmement difficile à prouver. Ce dernier résultat

semble aller dans le sens des auteurs tels que Huselid (1995) et Delery et Doty (1996) qui

n’ont trouvé aucun lien entre l’alignement des pratiques de GRH sur la stratégie globale des

entreprises et leurs performances. Ceci pose la question de la réalité stratégique des ressources

humaines et de leur intégration dans la prise de décisions. Récemment, certains chercheurs

considèrent que le rôle des DRH (directions des ressources humaines) se limite uniquement à

exécuter les décisions émanant de la direction générale (Besseyre des Horts, 2004 ; Lawler et

Mohrmann, 2003).

Bien que cette conclusion puisse paraître valable dans une logique transversale de la relation

GRH-performance, les analyses longitudinales ont révélé des dynamiques intéressantes en

termes de robustesse de la complémentarité dans le temps. L’analyse temporelle nous a

permis, d’une part, de relever des associations durables entre la complémentarité (interne et

externe) et la performance et, d’autre part, d’identifier des associations retardées. Les relations

qui durent dans le temps peuvent signifier que la complémentarité a un pouvoir prédictif sur

les performances actuelles et futures ; alors que les effets retardés, ils sont probablement dus à

la durée nécessaire pour que la cohérence se fasse. Une autre explication peut être liée à

l’effet retardé concerne les retours sur l’investissement dans les pratiques de GRH. Cet

investissement qui a souvent un coût non négligeable pourrait réduire les retombés à court

terme. Du coup, la durée de rentabilisation peut prendre un certain temps. Dans notre étude

longitudinale, l’accomplissement de la cohérence interne pour produire un effet sur les

performances attendues en termes de rentabilité et de productivité a pris une durée de 5 ans.

Ce résultat est conforme à celui de Wright et al. (2005) et Dyer et al. (1999). Par exemple, ces

derniers considèrent que la durée nécessaire à la mise en œuvre d’une nouvelle stratégie de

Page 26: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

26

GRH est de 3 à 4 ans.

Apports de l'étude

Au niveau théorique, on peut distinguer deux apports. Premièrement, il semble que la

durabilité d'une performance meilleure par la complémentarité, soutenue par notre étude, soit

conforme aux hypothèses des fondements théoriques tels que la théorie des ressources. Cette

dernière stipule que des ressources humaines gérées de façon synergique peuvent conduire à

un avantage compétitif durable. Ce résultat appuie la robustesse de l'approche

configurationnelle dont les systèmes de GRH, conçus pour soutenir les RH, engendrent des

performances soutenues dans le long-terme.

Deuxiémement, la signification des résultats obtenus, nous permet de soutenir que l'utilisation

des systèmes de GRH complémentaires, dans des conditions adéquates, peut être bénéfique

aux entreprises plutôt que d'employer des pratiques de GRH isolées. Même si la comparaison

des résultats de systèmes de GRH avec ceux de pratiques individuelles n'est pas intégrée dans

ce travail, nous constatons qu'un grand nombre de chercheurs semblent soutenir l'idée des

systèmes de pratiques que des « meilleurs pratiques » (Lepak et Snell, 1999, 2002; Becker et

Huselid, 1998, 2006).

A côté de cet apport théorique, l’apport méthodologique se veut innovant. Si les principaux

résultats de cette recherche semblent correspondre aux études déjà engagées dans la défense

de l'approche configurationnelle des ressources humaines (Bayad et al, 2004; Delery et Doty,

1996; Huselid, 1995; MacDuffie, 1995; Youndt et al, 1996), l’approche méthodologique

employée dans cette recherche est plus complexe. Alors que les études antérieurs sont restées

restreintes à la mesure de l'interaction, notre méthodologie s'appuie sur les fondements des

théories typologiques (Doty et al, 1994; Van de Ven et Drazin, 1984). Le principal avantage

de la logique typologique est sans doute qu'elle s'appuie sur la construction des idéaux-types.

Ces derniers supposent des relations « holistiques » basées sur des effets synergiques

multivariés plutôt que sur des effets additifs supposés par l'interaction.

D’autre part, nos résultats constituent également un appui considérable aux résultats des

études antérieurs, notamment par leur caractère longitudinal. Cette dimension longitudinale

longtemps réclamée par les chercheurs (Delery et Doty, 1996; Huselid, 1995 ; Youndt et al,

Page 27: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

27

1996), constitue une étape importante dans la compréhension du lien entre les pratiques de

GRH et la performance organisationnelle. En outre, l'intégration de l'aspect temporel écarte

tout risque de spéculation et élimine le biais de simultanéité lié à la majorité des études

effectuées sur l'évaluation de la performance des RH.

Limites de l'étude et avenues de recherche

Cette étude n'est pas sans limites. D'abord, la subjectivité de l'unique répondant et les échelles

de mesure et le type des variables influencent la qualité des réponses et la validité des

résultats. A propos de la subjectivité de l’unique répondant, nous avons précédemment (cf.

description de l'échantillon) essayé d’avancer une justification de notre choix des dirigeants

comme source d’information. Nous rappelons que ces justifications sont d’ordres quantitatif

et qualitatif. D’un point de vue quantitatif, le volet « dirigeants » de l’enquête REPONSE

contient la majorité de nos variables, alors que les deux autres volets (salariés et représentants

des salariés) de l'enquête REPONSE, contiennent peu ou pas du tout nos variables de GRH et

de stratégie d’affaires, ces deux volets s'intéressent surtout à l'aspect représentation syndicale

dans les établissements français. Evidemment, la diversité des variables retrouvée dans le

questionnaire « représentants de la direction » influence sur la qualité des réponses, un aspect

qualitatif qu’on n’a pas trouvé dans les autres questionnaires. Malgré que notre justification

soit valable dans notre cas, nous pensons quand même que le croisement des visions et des

perceptions aurait de meilleurs résultats en terme de validité des réponses.

La question de la mesure est aussi une problématique de notre travail. Parce qu’on a pas établi

le questionnaire par nos propres soins, certaines approximations de mesure étaient

malheureusement inévitables.

D’autre part, même si nos résultats témoignent d’un lien causal entre la GRH et la

performance, notamment à travers le caractère prédictif de la complémentarité interne et

externe, la question de la causalité reste encore à éclaircir (Le Louarn et al, 2001). Comme

telle une performance organisationnelle peut libérer des ressources financières qui facilitent

l'élaboration et l'implantation de pratiques de GRH innovatrices. Ensuite, ces pratiques

peuvent contribuer à améliorer les performances des organisations engageant ainsi ces

dernières dans un cercle vertueux de succès (Schneider et al, 2003).

Cette recherche nécessite quelques prolongements qui nous paraissent intéressants. Des

Page 28: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

28

études post hoc sont à notre avis utiles dans la mesure où elles vont nous permettre d'évaluer

la pertinence de l'égalité des regroupements de GRH, comme l'ont noté Bayad et al (2004) et

Chênevert et Tremblay (2003). Ces chercheurs ont constaté dans leurs études que le principe

d'« équifinalité » soutenu par l'approche configurationnelle est à remettre en question.

Malgré la pertinence des résultats permis par la méthode des idéals types, il sera intéressant de

confronter les résultats de cette méthode à ceux de d'autres méthodes telles que le panel des

experts ou la méthode des grappes (MacDuffie, 1995). Dans une récente étude, Chênevert et

Tremblay (2003) n'avait pas trouvé de grands écarts entre les résultats des différentes

méthodologies (grappe, interaction, configuration) qu'ils avaient utilisé. Toutefois, ni la taille

de leur échantillon et le faible du taux de réponse ni les variables utilisées (rémunération et

empowerment) peuvent être représentatives et aident à interpréter et comprendre ce

phénomène complexe.

Page 29: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

29

Liste des annexes Annexe 1 : Variables actives : pratiques de GRH et variables de stratégie sélectionnées dans les questionnaires « représentants de la direction » des enquêtes Réponse 1998 et Réponse 2005 Annexe 2 : Complémentarités interne et externe Annexe 3 : Statistiques descriptives de l’échantillon

Annexe 1 Variables actives : pratiques de GRH et variables de stratégie sélectionnées dans les questionnaires « représentants de la direction » des enquêtes Réponse 1998 et Réponse 2005

Activités Pratiques Libellés REPONSE 98 Organisation de travail

Ordre

travail à accomplir est-il défini plutôt par … Une description de tâches précises à exécuter La fixation d’objectifs globaux

Contrôle Le contrôle du travail s’exerce-t-il de façon … Permanente Intermittente Occasionnelle

Autonomie En cas d’incident mineur dans la production ou la marche du service... Encouragez-vous les salariés à régler d’abord eux-mêmes le problème ? Exigez-vous que les salariés en réfèrent avant tout à lahiérarchie ?

Gestion des compétences

Formation

Dépenses de formation

Evaluation Entretien évaluation non cadres Evaluation Entretien évaluation cadres Evaluation Lien évaluation et formation Evaluation Lien évaluation et promotion Rémunération

Salaires

Augmentation générale non cadres

Incitatifs Augmentation individualisée non cadre Salaires Augmentation générale cadres Incitatifs Augmentation individualisée cadres Incitatifs Primes de performance individuelle non

cadres

Page 30: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

30

Incitatifs Primes de performance collective non cadres Incitatifs Primes de performance individuelle cadres Incitatifs Primes de performance collective cadres Animation

Participation

Groupes de qualité

Salariés réunions régulières Groupes d’expression % salariés groupes qualités % salariés réunions régulières % salariés groupes d’expression Action qualité Boite à idées Journal d’entreprise communicatio

n Discussion changement individuel

Discussion changement unité travail Discussion changement collectif Discussion changement avec tous RP Discussion changement avec qq RP Discussion pour informer Stratégie

Stratégie d’affaires

Critères de stratégie

Rentabilité

Rentabilité

Niveau de rentabilité

Productivité

Croissance

Evolution activité

Evolution Effectifs

Evolution effectifs globaux

Innovation

Innovation organisationnelle

Changement organisationnel important

Innovation organisationnelle

Equipes autonomes

Innovation organisationnelle

Groupes de travail

Innovation organisationnelle

Juste à temps

Innovation Produit

Nouveau produit

Innovation technologique

Changement technologique important

Innovation technologique

Informatique individuelle

Innovation technologique

Réseau, Intranet

Page 31: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

31

Innovation technologique

Internet

Innovation technologique

Systèmes assistés par ordinateur

Innovation technologique

Robots

Annexe 2 Complémentarités interne et externe Pour la mesure des complémentarités interne et externe, nous avons choisi la méthodologie du continuum développée par Doty et Glick (1994), que nous reprenons dans ce travail. Cette méthode se résume en trois modèles mathématiques que nous utilisons pour évaluer l’indice de similarité, la complémentarité interne et enfin les complémentarités interne et externe. 1) Indice de similarité La technique utilisée par Doty et Glick (1994) pour mesurer la similarité entre les modèles de travail théoriques et les modèles de travail empiriques, est basée sur le calcul de la distance euclidienne représentée par la formule suivante :

2) Complémentarité interne Pour mesurer le niveau de complémentarité interne, nous utiliserons, cette fois-ci, une autre formule mathématique (Doty et Glick, 1994; Doty, Glick et Huber, 1993). La complémentarité interne (FitIT) constitue simplement l’inverse additif de l’écart entre le système de travail retrouvé dans l’organisation et le système de travail théorique ressemblant le plus à celui retrouvé dans la firme.

Page 32: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

32

3) Complémentarités interne et externe Pour mesurer le modèle complet, c’est-à-dire les complémentarités interne et externe, nous utiliserons une troisième équation mathématique. Ce modèle complet (FitCIT) représente l’inverse additif de l’écart entre le système de GRH retrouvé dans l’organisation et le système de GRH théorique en tenant compte, cette fois-ci, des écarts des systèmes stratégiques, c’est-à- dire théoriques et organisationnels.

Annexe 3 Statistiques descriptives de l’échantillon 0.5a: Nombre de salariés Fréquence Pourcent. SALETAB Fréquence Pourcentage cumulée cumulé

Page 33: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

33

ENTRE 20 ET 49 202 21.00 202 21.00 ENTRE 50 ET 99 166 17.26 368 38.25 ENTRE 100 ET 199 199 20.69 567 58.94 ENTRE 200 ET 499 232 24.12 799 83.06 ENTRE 500 ET 999 112 11.64 911 94.70 PLUS DE 1000 51 5.30 962 100.00 0.2a: Nombre de salariés dans l'établissement Fréquence Pourcent. SALETAB5 Fréquence Pourcentage cumulée cumulé Moins de 50 salariés 173 17.98 173 17.98 De 50 à 99 salariés 178 18.50 351 36.49 De 100 à 199 salariés 198 20.58 549 57.07 De 200 à 499 salariés 237 24.64 786 81.70 De 500 à 999 salariés 109 11.33 895 93.04 1 000 salariés et plus 67 6.96 962 100.00 0.7: Entreprise mono-étab MULTI Fréquence Pourcentage Un seul établissement (celui où nous sommes) 402 41.79 Plusieurs établissements 560 58.21 0.6: Entreprise mono-établissement multi5 Fréquence Pourcentage Un seul établissement (celui où nous sommes) 406 42.20 Plusieurs établissements 556 57.80 0.14: Côtée en bourse Fréquence Pourcent. BOURSE Fréquence Pourcentage cumulée cumulé OUI 305 31.70 305 31.70 NON 643 66.84 948 98.54 NSP 14 1.46 962 100.00

Page 34: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

34

0.10a: Cotation en bourse Fréquence Pourcent. bourse5 Fréquence Pourcentage cumulée cumulé Oui 335 34.82 335 34.82 Non 616 64.03 951 98.86 (NSP) 11 1.14 962 100.00 4.5: Niveau ouverture du marché Fréquence Pourcent. MARCHE Fréquence Pourcentage cumulée cumulé Local 247 25.68 247 25.68 Régional 182 18.92 429 44.59 National 169 17.57 598 62.16 Européen 149 15.49 747 77.65 Mondial 205 21.31 952 98.96 (NSP) 10 1.04 962 100.00 4.8: Niveau ouverture du marché Fréquence Pourcent. marche5 Fréquence Pourcentage cumulée cumulé Local 244 25.42 244 25.42 Régional 152 15.83 396 41.25 National 190 19.79 586 61.04 Européen 140 14.58 726 75.63 Mondial 231 24.06 957 99.69 (NSP) 3 0.31 962 100.00

Page 35: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

35

Bibliographie Arcimoles (d’) Ch-H, 1995, Diagnostic financier et gestion des ressources humaines : nécessité et pertinence du bilan social, Editions Economica. Barney J. et al., 2005 , INFORMATION TECHNOLOGY AND THE PERFORMANCE OF THE CUSTOMER SERVICE PROCESS: A RESOURCE-BASED ANALYSIS, MIS Quarterly, 29 (4). Barney, J. B. 1991, Firm Resources and sustained competitive advantage. Journal of Management, 17: 99-120. Barney, J. B. 2001, Is the resource-based ‘view’ a useful perspective for strategic management research? Yes. Academy of Management Review, 26: 41. Baron, J.N. and Kreps, D.M. 1999, Strategic human resources: Frameworks for general manager. New York: John Wiley. Bayad M. et al, 2004, SYSTEMES DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES ET PERFORMANCE ORGANISATIONNELLE Le cas des coopératives du secteur financier canadien , Annals of Public and Cooperative Economics, 75:3 2004 Bayad et Liouville, 1998. Human resource management and performances: Proposition and test of a causal model, Annals of Public and Cooperative Economics 17 (3). Becker et Huselid, 2006. Strategic Human Resources Management: Where Do We Go From Here?, Journal of Management, Vol. 32 No. 6, December 2006 898-925 Becker B. et Gerhart B. 1996, The impact of human resource management on organizational performance: Progress and prospects. Academy of Management Journal, 39: 779-802. Bernadin H. J et Russell J. 1993, Human resource management: An experiential approach. London: McGraw-Hill. Besseyre des Horts CH-H. 2004, La fonction RH, une fonction stratégique : discours ou réalité ? in Bournois F et Leclair P, Editions Economica, 2004 : gestion des ressources humaines : regards croisés en l’honneur de Bernard Galambaud. Boselie, P., Dietz, G. and Boon, C. 2005. Commonalities and contradictions in research on Human Resource Management and Performance. Human Resourcce Management Journal Boxall, P. et Steeneveld, M. (1999): Human resource strategy and competitive advantage: A longitudinal study of engineering consultancies. Journal of Management Studies, 36: 443-463. Blum, E. et Clegg, R. (2003): Percent plans: Admissions of failure. In: The Chronicle of Higher Education, 49: B10-B11 BURNS, T. et STALKER, G.M. 1961. The Management of Innovation. Tavistock, london Chandler, A.D. 1962. Strategy and Structure: chapters in the history of the industrial enterprise. MIT Press, Cambridge, Massachusetts. Chadwick, C., Hunter, L. W. et Walston, S. L. 2004, Effects of downsizing practices on the performance of hospitals. Strategic Management Journal, 25: 405-427. De Meuse, K. P., Bergmann, T. J., Vanderheiden, P. A. et Roraff, C. E., 2004 New evidence regarding organizational downsizing and a firm’s financial performance: A long-term analysis. Journal of Managerial Issues, 16: 155-79. Delery, J. E. 1998, Issues of fit in strategic human resource management: Implications for research. Human Resource Management Review, 8: 289-309. Delery, J. E et Doty, D. H. 1996, Modes of theorizing in strategic human resource management: Tests of universalistic, contingency, and configurational performance predictions. Academy of Management Journal, 39: 802-835. Delaney, J. T. et Huselid, M. A. 1996, The impact of human resource management practices on perceptions of organizational performance. Academy of Management Journal, 39: 949-970.

Page 36: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

36

Delaney, J,. Lewin, D.et Ichniowski, C. 1989, Human Resource Policies and Practices in American Firms. Washington, DC: U.S. Government Printing Office. Devanna, M,. Fombrum. C, & Tichy, N, 1981, Human Resources Management: A Strategic Perspective, Organizational Dynamics, Winter81, Vol. 9 Issue 3, p51-67 Down, J. W. , Mardis, W., Connolly, T. R. et Johnson, S. 1997, A strategic model. HR Focus, 74: 22- 24. DYER L. et SHAFER R.A., 1999, From Human Resource Strategy to Organizational Effectiveness: Lessons from Research on Organizational Agility, in P.M. Wright, L. Dyer, J.W. Boudreau et G.T. Milkovich, e. d., Research in Personnel and Human Resources Management: Strategic Human Resources Management in theTwenty- First Century, Supplement 4, Jai Press Inc., Stamford, CT, 145^154. DYER L. et REEVES T., 1995, ‘‘HR Strategies and Firm Performance: What do We Know and Where do We Need to Go?’’, International Journal of Human ResourceManagement,Vol.6, 656^670. Dyer, L. 1985, Strategic Human Resource Management and Planning, in Research in Personnel and Human Resource Management, Vol. 3, ed. K.R. Rowland and G.R. Ferris (Greenwich, CT: JAI Press, 1985). Ferris, G. R., Hochwarter, W. A., Buckley, M. N., Harrell-Cook, G. et Frink, D. D, 1999, Human resources management: Some new direction. Journal of Management, 25: 385-418. Fox, D., Byrne, V. et Rouault, F. 1999, Performance improvement: What to keep in mind. Training & Development, 53: 38. Gannon, M. J.,Flood, P. C. et Paauwe, J. 1999, Managing human resources in the third era: Economic perspectives. Business Horizons, 42: 41-48. Guest, D. E., Michie, J., Conway, N., & Sheehan, M. 2003. Human resource management and corporate performance in the UK. British Journal of Industrial Relations, 41(2): 291-314. Guest, D.E. and Peccei, R. 1994. The nature and causes of effective human resource Management. British Journal of Industrial Relations, 32: 219-241. Harris, L. C. et Ogbonna, E. 2001, Strategic Human resource management, market orientation, and organizational performance. Journal of Business Research, 51: 157-166. Henninger-Vacher M.C. 2000., Recherche d’une congruence entre stratégie de diversification et politique de rémunération appliquée aux cadres dirigeants, Thèse de doctorat Université des sciences sociales Toulouse I, 15 novembre 2000; 342p Huselid, M. A. 1995, The impact of human resource management practices on turnover, productivity, and corporate financial performance. Academy of Management Journal, 38: 635-672. Huselid, M. A. , Jackson, S. E. et Schuler, R. S. 1997, Technical and strategic human resource management effectiveness as determinants of firm performance. Academy of Management Journal, 40: 171-189. Ichniowski, C., Shaw, K. et Prennushi, G. 1997, The effects of human resource management practices on productivity: A study of steel finishing lines. American Economic Review, 87: 291-312. Jackson, S. E. et Schuler, R. S. 2000, Managing Human Resources: A Partnership Perspective. New York, NY: South-Western College Publishing. KELLEY M.R., 1996, ‘‘Participative Bureaucracy and Productivity in the Machined Products Sector’’, Industrial Relations, Vol.35, no3, 374–399. Koch, M. J. et McGrath, R. G. 1999, Improving labor productivity: Human resource management policies do mater. Strategic Management Journal, 17: 335-354.

Page 37: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

37

Lado, A. A. et Wilson, M. C. 1994, Human resource systems and sustained competitive advantage: A competency based perspective. Academy of Management Review, 19: 699-728. Laroche P, 2002, L'INFLUENCE DES ORGANISATIONS SYNDICALES DE SALARIES SUR LA PERFORMANCE ECONOMIQUE ET FINANCIERE DES ENTREPRISES : Proposition et test d'un modèle explicatif dans le contexte français, Thèse de doctorat, Université Nancy 2. Lawler et Mohrmann, 2003. Creating a strategic human resources organization, an assessment of trends and new directions. Stanford University Press. Lawrence, P. R., & Lorsch, J. W. 1973. Organization and environment: Managing differentiation and integration. Boston: Harvard Business School Press. Lepak, D. P. & Snell, S. A. 2002. Examining the human resource architecture: The relationship among human capital, employment, and human resource configurations, Journal of Management, 28: 517-543. Lepak D. P. & S. A. Snell, 1999. The human resources architecture: toward a theory of human capital allocation and development. Academy of management Review, 24, 1, 31-48. LENGNICK-HALL C.A. et LENGNICK-HALL M. 1988. Strategic Human Resources Management : A Review of the Literature and a Proposed Typology, Academy of Management Review, 13, 454-470. MacDuffie, J. P. (1995): Human resource bundles and manufacturing performance: Organizational logic and flexible production systems in the world auto industry. Industrial and Labor Relations Review, 48: 197-221. Marchington, M. et Grugulis, I. (2000): “Best Practice” human resource management: perfect opportunity or dangerous illusion? International Journal of Human Resource Management, 11: 1104-1124. Meyer, A. D., Tsui, A. S., and Hinings, C. R., 1993. Guest co-editors’ introduction: Configurational approaches to organizational analysis. Academy of Management Journal, 36 : 1175-1195. Miles, R., & Snow, C. C. 1984. Designing strategic human resource systems. Organizational Dynamics, 13: 36-52. Miles, R.E. & Snow, C.C. 1994. Fit, failure and the hall of fame. New York: The Free Press. Miller, E.L. (1.989). .Strategic HRM: What it is and what it isn.t.. Personnel Management, February. 46 - 52. Miller D. (1986) "Configurations of strategy and structure : towards a synthesis", Strategic Management Journal, vol.7, pp.233-249. Pettigrew A.M. 1985. The awakening giant. Continuity and change in imperial chemical industries, Oxford/New York, Blackwell,. Paauwe, J. and Boselie, P. 2003. Challenging 'strategic HRM' and the relevance of the institutional setting. Human Resource Management Journal, 13(3): 56-70. Paauwe, J. 2004. HRM and Performance: unique approaches for achieving long term viability. Oxford: Oxford University Press. Pearce, J., Robbins, D. K. et Robinson, R. B. ,1987, The impact of grand strategy and planning formality on financial performance. Strategic Management Journal, 8: 125-135 Peretti JM. 2006, Ressources humaines, Editions, Paris Vuibert. Perry-Smith, J. E. et Blum, T. C. 2000, Work-family human resource bundles and perceived organizational performance. Academy of Management Journal, 43: 1107-1117. Porter, M. 1996. What is strategy? Harvard Business Review, November-December: 61-78. Porter, M. 1991. Toward a dynamic theory of strategy, Strategic Management Journal, 12(2): 95-117. PORTER M.E. (1980), Competitive Strategy, Free Press, New York, NY.

Page 38: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

38

Porter, M. 1985. Competitive advantage: creating and sustaining superior performance. New York: Free Press Pfeffer, J. (1994): Competitive advantage through people: Unleashing the power of the workforce. Boston: Harvard Business School Press. Pfeffer, J. et Veiga, J. F. (1999): Putting people first for organizational success. Academy of Management Executive, 13: 37. ROGERS E.W. et WRIGHT M., 1998, ‘‘Measuring Organizational Performance in Strategic Human Resource Management: Problems, Prospects, and Performance Information Markets’’, Human Resource Management Review,Vol.8, no3, 311^331. SCHNEIDER, B., P.J. HANGES, D.B. SMITH et A.N. SALVAGGIO. 2003. WhichComes First : Employee Attitudes or Organizational Financial and Market Performance ? . Journal of Applied Psychology, vol. 88, no 5, 836–851. SCHULER, R. S. 1998. Strategic Human Resource Management : Linking People with the Strategic Needs of the Business. Organizational Dynamics, vol. 21, no 1, 18–31. SCHULER R.S. & JACKSON S.E., 1987. Linking competitive strategies with human resource management practices, Academy of Management Executive, 1, 207-219. Snell, S. A. , Youndt, M. A. et Wright, P. M. (1996): Establishing a framework for research in strategic human resource management: Merging resource theory and organization learning. Research in Personnel and Human Resources Management, 14: 61-90. Sparrow, P. R. et Hiltrop, J. M. 1997, Redefining the field of European human resource management: A battle between national mindsets and forces of business transition? Human Resource Management, 36: 201-219. Swiercz, P. M. et Spencer, B. A. (1992): HRM and sustainable competitive advantage: Lessons from Delta Air Lines. Human Resource Planning, 5: 35-47. Taylor, S., Beechler, S. et Napier, N. 1996, Toward an integrative model of strategic international human resource management. Academy of Management Review, 21: 959-986. Trevor, C. O., Gerhart, B. et Bourdeau, J. W. 1997, Voluntary turnover and job performance: Curvilinearity and the moderating influences of salary growth on promotion. Journal of Applied Psychology, 82: 44-62. Truss, C. 2001. Complexities and controversies in linking HRM with organizational outcomes. Journal of Management Studies, 38(8): 1121-1149. Tichy, Noel M.; Fombrun, Charles J.; Devanna, Mary Anne. 1982, Strategic human resource management, Sloan Management Review, Winter82, Vol. 23 Issue 2, p47-61, Ulrich, D. et Lake, D. 1990, Organizational Capability: Competing from the Inside out. New York, NY: Wiley. Venkatraman, N., & Ramanujam, V. (1986). Measurement of business performance in strategy research: A comparison of approaches. Academy of Management Review, 11(2), 801-814. WALTON R.A., 1985, ‘‘From Control to Commitment in the Workplace’’, Harvard Business Review, Vol.63, no2, 77–84. Welbourne, T. M. et Andrews, A. O. (1995): Predicting performance of initial public offerings: Should human resource management be in the equation? Academy of Management Journal, 39: 891-919. Wiggins, R. R. et Ruefli, T. W. (2002): Sustained competitive advantage: Temporal dynamics and the incidence and persistence of superior economic performance. Organization Science, 13: 82-108. Wright, P. M., Gardner, T. M., Moynihan, L. M., & Allen, M. R. 2005. The relationship between HR practices and firm performance: Examining causal order. Personnel Psychology, 58: 409-446.

Page 39: Gestion stratégique des ressources humaines : Une … · « stratégique » et la performance des organisations. ... et peu ont introduit la dimension ... cette approche, la gestion

39

Wright, P. M., Dunford, B. B. et Snell, S. A. 2001, Human resources and the resource based view of the firm. Journal of Management, 27: 701-722. Wright, P. M, 1998, Strategy -- HR Fit: Does It Really Matter?, Human Resource Planning, 1998, Vol. 21 Issue 4, p56-57 Wright, P. M. et Mc Mahan, G. C. (1992): Theoretical perspectives for strategic human resource management. Journal of Management, 18: 292-320. Wright, P. M. ,Mc Mahan, G. C., McGormick, B. et Sherman, S. (1998): Strategy, core competence and HR development as determinants of HR effectiveness and refinery performance. Human Resource Management, 37: 17-29. Youndt, M. A. , Scott, S. A., Dean, J. W. et Lepak, D. P. 1996, Human resource management, manufacturing strategy and firm performance. Academy of Management Journal, 39: 836-867.