Gestion de patrimoine - Stratégie juridiques, fiscales et financières

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Tous les droits dauteur de cet ouvrage seront verss la Fondation de France.

Conseiller ditorial : Olivier Meier

Maquette de couverture : MATEO

Dunod, Paris, 2009 ISBN 978-2-10-053864-5

Les auteurs

Coordination :Docteur en Sciences de gestion, Arnaud Thauvron est Matre de confrences en nance lUniversit Paris 12, dont il dirige lInstitut dAdministration des Entreprises (IAE Gustave Eiffel). Il y est galement responsable du Master Gestion de patrimoine. Son domaine de spcialit est lvaluation dentreprise, thme sur lequel il a publi un ouvrage : valuation dentreprise, 2e dition, Economica, 2007.

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

Contributeurs :La plupart des contributeurs de cet ouvrage interviennent au sein du Master Gestion de patrimoine de lUniversit Paris 12 (IAE Gustave Eiffel). Serge Anouchian, expert-comptable et commissaire aux comptes, est titulaire dun DES de Gestion de patrimoine (Clermont-Ferrand) et dun DU de Gestion scale des entreprises (Dijon). Prsident-fondateur du Club Expert-Patrimoine, il est charg denseignement lAUREP et luniversit de Montpellier. Ses domaines de prdilection sont limmobilier dentreprise et la socit civile, ainsi que lISF. Il est lauteur dun livre intitul LISF et les biens professionnels, paru chez Gualino. Juriste de formation notariale, Catherine Bienvenu est Matre de confrences associe lUniversit Paris 12. Elle est, par ailleurs, responsable juridique du ser-

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GESTION DU PATRIMOINEvice des donations et legs des Petits Frres des Pauvres. Son domaine de spcialit est le droit de la famille. Diplme dune matrise de Finance de march et Gestion de lpargne puis du Master de Gestion de patrimoine de Clermont-Ferrand, Roseline Charasse Labat a dbut en 1999 en tant que Conseil en Gestion de patrimoine Paris au sein de BNP Paribas-Banque Prive, pour exercer ensuite la fonction dIngnieur Patrimonial Marseille dans le mme tablissement. Docteur en Sciences de Gestion, Pierre Chollet est Professeur agrg lIAE Gustave Eiffel de lUniversit Paris 12. Il est responsable du Master Recherche de Finance et coresponsable du Master dIngnierie Financire. Il dirige, par ailleurs, le ple de recherche en Finance et comptabilit de lInstitut de Recherche en Gestion (IRG). Ses sujets de recherche portent notamment sur les options, les produits drivs actions et lInvestissement Socialement Responsable. Aprs un dbut de carrire Paris en qualit dIngnieur patrimonial, Vincent Cornilleau conseille dsormais une clientle internationale Luxembourg. Il dveloppe cette clientle en sappuyant principalement sur les techniques destate planning, dassurance-vie et de constitution de socits. Il est aussi intervenant lISG Paris sur le thme du Diagnostic patrimonial, et y est responsable des sminaires Reprise et transmission dentreprises . Il est notamment coauteur de louvrage Pratique du dmembrement de proprit aux ditions Litec. Jean-Pierre Cossin est Conseiller matre la Cour des comptes, Professeur associ lUniversit de Paris 12, ancien secrtaire gnral du Conseil des impts et du Conseil des prlvements obligatoires, membre du conseil des prlvements obligatoires. Il est galement membre de diverses commissions scales et du jury de lexamen de Commissaire aux comptes. Il est lauteur dun rapport sur la scalit des petites et moyennes entreprises la demande du premier ministre (1991). Juriste de formation, Thierry Creux conseille des familles depuis 10 ans au sein dun cabinet de conseil en Gestion de patrimoine indpendant. Il intervient plus particulirement auprs des chefs dentreprise dans lorganisation patrimoniale, avant et aprs la cession de leur entreprise. Bruno Dalmas (DEA de droit de Paris II et DES Gestion de patrimoine de Clermont-Ferrand) est fondateur de Patrimoine Ofce, cabinet de conseil en stratgie patrimoniale et en investissement sadressant aux groupes familiaux et leurs actionnaires, dirigeants dentreprises et quipes dirigeantes, investisseurs en capital, cdants et acteurs du private equity. Il assure la formation de conseillers en Gestion de patrimoine depuis dix ans. Il est coauteur des ouvrages Pratique du dmembrement de proprit, Litec, 2007 et La socit civile, instrument majeur de la gestion de patrimoine, Gualino, 2006. Diplme dun DEA de scalit et nances publiques, Gwnalle Laize a travaill au sein du dpartement scalit personnelle et mobilit internationale du

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Les auteurscabinet davocats Landwell & Associs, o elle soccupait de la situation scale des salaris impatris et expatris, des problmatiques lies aux transferts internationaux et des stock-options. Plus rcemment, elle tait en charge des problmatiques juridiques et scales au sein du Ple Expertise Patrimoniale de la socit Cyrus Conseil avant de sinstaller aux tats-Unis. Sorti de lcole Nationale des Impts en 1995, Olivier Lejeune est inspecteur principal des impts. Son domaine de spcialit est le contrle scal des particuliers et la dtection des montages juridiques frauduleux. Expert-comptable stagiaire, Benoit Nowaczyk est diplm du DESS Droit des Affaires & Fiscalit, DJCE ainsi que du Master Comptabilit-Contrle-Audit de lUniversit Nancy 2. Il intervient galement au sein de lenseignement de droit scal du Master Droit de lentreprise de lUniversit Nancy 2. Notaire Taverny, Matre Frdric Petit est diplm du DES Gestion de patrimoine (Facult de Clermont-Ferrand). Il est galement membre du conseil dadministration de lInstitut Notarial du Patrimoine et de la Famille et charg denseignement lUniversit Paris 12 et lUniversit Jean Moulin (Lyon 3). Pascal Pineau est consultant et formateur, spcialiste en stratgie et communication comportementale au sein du cabinet MTISSE Formation. Son approche intgrative lui permet daborder en complment doutils oprationnels des dimensions motionnelles et non verbales, sources de conance et de rcurrence dans le monde des affaires. Il travaille tout particulirement auprs des mtiers de la Banque Finance. Diplm du Master de Gestion de patrimoine lUniversit Paris 12, Mario da Silva a pass 3 ans chez Cyrus Conseil en tant que Consultant patrimonial, o il a pu notamment dvelopper son expertise auprs de cadres de groupes internationaux bnciant de stocks options. Sortie de lcole Nationale des Impts en 1986, Emmanuelle Roy est inspectrice principale des impts. Son domaine de spcialit est le contrle scal des entreprises et la scalisation des particuliers (revenus distribus). Renaud Salomon est conseiller rfrendaire la Cour de cassation et professeur associ luniversit de Paris 12, o il enseigne le droit des marchs nanciers, le droit scal et le droit pnal des affaires. Directeur dune chronique mensuelle la revue Droit des socits, il est lauteur douvrages (Prcis de droit commercial aux PUF et Manuel de droit pnal des affaires chez Litec) et de publications dans ces branches du droit. Avocat et docteur en droit, Sabine Vacrate est spcialise en droit des socits et en gestion de patrimoine. Elle exerce au sein dun cabinet pluridisciplinaire Paris et intervient rgulirement en formation dans ces domaines pour le compte dorganismes tels que Francis Lefebvre Formation.

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Remerciements

C Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

e livre est le fruit dun long travail collectif, associant une grande partie du corps professoral actuel ou pass du Master Gestion de patrimoine de lInstitut dAdministration des Entreprise (IAE Gustave Eiffel) de lUniversit Paris 12. Je tiens ainsi remercier sincrement les diffrents contributeurs de cet ouvrage : Serge Anouchian, Catherine Bienvenu, Roseline Charasse-Labat, Pierre Chollet, Vincent Cornilleau, Jean-Pierre Cossin, Thierry Creux, Bruno Dalmas, Gwnalle Laize, Olivier Lejeune, Benot Nowaczyk, Frdric Petit, Pascal Pineau, Emmanuelle Roy-Spiridion, Renaud Salomon, Mario da Silva et Sabine Vacrate. Cet ouvrage est galement loccasion de remercier les autres intervenants du master : Frdric Aumont, Sylvain Cassel, Sandrine Colas-Jacomme, Fabrice Cossin, Maria Cruz Poveda, Matthieu Dhu, Jrme Dubreuil, Christophe Ducass, David Gandar, Maria Guibert, Daniel Guiroy, Pascal Rapallino, Jean-Philippe Sportouch et Brnice Tournafond. Gestion de patrimoine est un projet qui naurait pu voir le jour sans le travail de Genevive Curlier, assistante pdagogique du programme de Master. Jean-Pierre Rondeau (Megara Finance), par sa contribution la cration du Master Gestion de patrimoine en formation continue de lIAE, a ouvert ce dernier de nouveaux horizons.

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GESTION DU PATRIMOINEEnn, je tiens exprimer ici ma gratitude mon collgue Olivier Meier, lorigine de ce projet. Quils trouvent ici lexpression de mes sincres remerciements. Arnaud Thauvron

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Table des matires

Partie 1 Le conseil en gestion de patrimoine

1

Les professionnels de la gestion de patrimoineLes obligations des conseillers en gestion de patrimoine

7

Renaud SalomonSection 1 8 10

Section 2 La responsabilit des conseillers en gestion de patrimoine

2 Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

Le diagnostic patrimonialPrambule

15

Bruno Dalmas, Pascal Pineau et Vincent CornilleauSection 1 15 20 33 34

Section 2 Le recensement patrimonial Section 3 Lanalyse patrimoniale Section 4 La stratgie patrimoniale

3

La dimension motionnelle de la gestion de patrimoineLe nom patronymique, le premier titre de proprit

35

Pascal PineauSection 1 36 39

Section 2 De la proprit lutilit

XI

GESTION DE PATRIMOINE

Partie 2 La dimension juridique de la gestion de patrimoine

4

Les rgimes matrimoniauxLe rgime primaire

45

Catherine BienvenuSection 1 47 53 66

Section 2 Le rgime lgal de la communaut rduite aux acquts Section 3 Les rgimes conventionnels communautaires et sparatistes

5

Le divorceLes cas de divorce

72

Catherine BienvenuSection 1 72 74

Section 2 Les consquences patrimoniales du divorce

6

Les successionsLes hritiers dfaut de volont expresse du dfunt

82

Catherine BienvenuSection 1 83 90 100

Section 2 Les hritiers suivant la volont expresse du dfunt Section 3 Les rgles scales

7

Les libralitsLa donation simple

106

Catherine BienvenuSection 1 107 107 109 112 112 113 115

Section 2 La donation-partage Section 3 Les clauses conventionnelles autorises Section 4 Le sort des donations au dcs du donateur Section 5 Lvaluation des biens donns Section 6 Le rgime scal des donations et le paiement des droits de donation Section 7 Le testament

XII

Table des matires

8

La protection du conjoint survivantLa protection du conjoint survivant par le rgime matrimonial

117

Frdric PetitSection 1 118

Section 2 La protection du conjoint survivant par les libralits et lors de la succession Section 3 La protection du conjoint survivant par lassurance-vie

123 133

9

La protection dun incapableLes mineurs

140

Catherine BienvenuSection 1 141 143 145 147 149

Section 2 Les majeurs Section 3 Les actes intressant la gestion de patrimoine Section 4 Le mandat de protection future Section 5 Cas particulier de ladulte handicap

10 Le dmembrement de propritBruno DalmasSection 1 Dnition du dmembrement de proprit Section 2 Lvaluation des droits dmembrs Section 3 La n du dmembrement Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

152

153 162 168 171

Section 4 La scalit du dmembrement

11

La socit civileLa socit civile : dnition et mode de fonctionnement

182

Serge AnouchianSection 1 184 199 206

Section 2 Une socit civile pour grer son patrimoine Section 3 La socit civile comme outil de transmission de son patrimoine

XIII

GESTION DE PATRIMOINE

Partie 3 La dimension scale de la gestion de patrimoine

12

Limpt sur le revenuChamp dapplication de limpt sur le revenu des personnes physiques (IRPP)

225

Benot NowaczykSection 1 227 229 242 247

Section 2 Dtermination du revenu brut global Section 3 Calcul de limpt sur le revenu Section 4 Dclaration et paiement de limpt sur le revenu

13

Limposition des revenus du patrimoine nancierLes revenus de capitaux mobiliers (RCM)

249

Emmanuelle Roy-SpiridionSection 1 250 255

Section 2 Les produits exonrs dimpt Section 3 Limposition des gains de cession de valeurs mobilires et de droits sociaux

256

14 Limposition des revenus des patrimoine immobilieret les produits de dscalisation immobilireLe rgime du micro-foncier 262

Olivier LejeuneSection 1 263 264 268 270

Section 2 Le rgime rel dimposition Section 3 Les rgimes drogatoires Section 4 Les rgimes spciques

15

Limpt de solidarit sur la fortune

276

Jean-Pierre CossinSection 1 Le champ dapplication de lISF : les personnes et les biens imposables 277 279

Section 2 Les biens exonrs dimpt sur la fortune

XIV

Table des matiresSection 3 Lexonration des biens professionnels Section 4 Lassiette et le calcul de limpt Section 5 La dclaration et le paiement de limpt 285 292 298

16 Le bouclier scalThierry CreuxSection 1 Le principe du bouclier scal Section 2 Quelques chiffres : qui prote le bouclier scal ?

300

300 304

Partie 4 La dimension nancire de la gestion de patrimoine

17

Les produits dpargne et de placement

309

Arnaud ThauvronSection 1 Les diffrents critres de choix des produits dpargne et de placement 310 311 315 317 333

Section 2 Les produits dpargne non risqus Section 3 Les produits dpargne risqus Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

Section 4 Les produits boursiers Section 5 Les produits dpargne collective

18 Lassurance-vie de la gestion de patrimoineRoseline Charasse LabatSection 1 Prsentation gnrale de lassurance-vie Section 2 Lassurance-vie comme outil de constitution dune pargne Section 3 Lassurance-vie comme outil de transmission dun capital

339

340 343 352

XV

GESTION DE PATRIMOINE

19 Gestion dun portefeuille titresPierre CholletSection 1 lments fondamentaux de la gestion de portefeuille Section 2 Acteurs, processus et types de gestion de portefeuille Section 3 Performance de portefeuille

362

363 373 380

20 Lpargne retraiteCatherine BienvenuSection 1 Les rgimes obligatoires Section 2 Les rgimes facultatifs : lpargne retraite collective ou individuelle

386

388 392

Partie 5 Le dirigeant dentreprise

21

Le rgime scal des rmunrations des dirigeantsLe rgime scal des rmunrations

401

Olivier LejeuneSection 1 402

Section 2 Le rgime scal des allocations, indemnits et remboursements de frais Section 3 Le rgime scal des avantages en nature

404 405

22 Les stock-optionsGwenalle Laiz et Mario da SilvaSection 1 Les stocks-options : environnement juridique et scal Section 2 Les pistes doptimisation

409

410 420

23 La protection du patrimoine du dirigeantSabine VacrateSection 1 Dangers et prcautions lis au statut dentrepreneur individuel Section 2 Dangers et prcautions lis au statut de dirigeant de socit Section 3 Responsabilit du chef dentreprise et procdures collectives

431

432 437 445

XVI

Table des matiresSection 4 Responsabilit scale et sociale Section 5 Les solutions doptimisation de la protection 448 449

24 La scalit de la transmission dentrepriseJean-Pierre CossinSection 1 La transmission titre onreux de lentreprise Section 2 La transmission titre gratuit de lentreprise

455

456 469

Partie 6 tudes de cas de stratgie patrimoniale

25 Stratgie patrimonialeVincent CornilleauSection 1 Le recensement patrimonial Section 2 Laudit patrimonial Section 3 Prconisations patrimoniales Section 4 Synthse de la prconisation Section 5 Le remploi des capitaux

483

484 486 490 495 497

26 Approche dynamique du rglement patrimoniald'une succession501

Frdric Petit Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

Section 1

Prsentation de la succession Clermontois

502

Section 2 Lanalyse des biens composant la succession et prconisations immdiates Section 3 Les stratgies post-successorales Section 4 Aprs la mise en uvre des stratgies : situation des hritiers

506 513 521

27 tude de cas SCISerge Anouchian

522

Index

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XVII

IntroductionArnaud Thauvron

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

a gestion de patrimoine peut se dnir comme lactivit qui permet doptimiser le patrimoine dune personne. Cette activit est, par nature, pluridisciplinaire car loptimisation peut sentendre du point de vue juridique, scal et/ou nancier. Plus prcisment, la gestion de patrimoine va avoir pour objet de faire fructier un patrimoine, tout en le protgeant des alas de la vie personnelle ou professionnelle et en limitant autant que faire se peut son imposition. Elle doit, par ailleurs, permettre sa transmission dans les meilleures conditions possibles. Cet ouvrage sorganise ainsi autour de six parties. La Partie 1 (Le conseil en gestion de patrimoine) dbute par une prsentation des diffrents acteurs de cette activit, et des rgles juridiques qui les encadrent (Les professionnels de la gestion de patrimoine). Puis est prsente la dmarche de diagnostic, pralable tout conseil (Le diagnostic patrimonial). Enn, elle se termine par une rexion sur le premier des actifs dont toute personne dispose, son nom de famille (Vers une gestion globale du patrimoine). La Partie 2 (La dimension juridique de la gestion de patrimoine) prsente en dtail les diffrentes rgles de droit quil est impratif de connatre. Cette partie dbute par trois chapitres que lon pourrait rsumer par tout va bien (Les rgimes matrimoniaux), tout va mal (Le divorce) et tout est ni (Les succes-

L

1

GESTION DU PATRIMOINEsions). Mais le droit nest pas une discipline statique, il se gre de faon dynamique. Lutilisation des rgles du droit peut permettre daider un proche (Les libralits), de protger son conjoint (La protection du conjoint survivant) ou son enfant incapable (La protection dun incapable). Enn, le droit peut tre utilis comme un outil doptimisation, que ce soit au travers du dmembrement (Le dmembrement de proprit) ou du recours une forme particulire de socit (La socit civile). La Partie 3 (La dimension scale de la gestion de patrimoine) traite dun sujet, combien sensible en France, limpt. Aprs une prsentation gnrale des grands principes de limpt sur le revenu (Limpt sur le revenu), sont dtailles deux des principales catgories de revenus patrimoniaux, ceux issus du patrimoine nancier (Limposition des revenus du patrimoine nancier) et ceux provenant du patrimoine immobilier (Limposition des revenus du patrimoine immobilier et les produits de dscalisation immobilire). Cette partie se termine par de longs dveloppements sur lISF (Limpt de solidarit sur la fortune), pour nir par une prsentation du bouclier scal (Le bouclier scal). La Partie 4 (La dimension nancire de la gestion de patrimoine) dbute par une prsentation des diffrents produits nanciers dans lesquels un particulier peut tre amen investir (Les produits dpargne et de placement). Puis lassurancevie, support dinvestissement prfr des Franais est explique en dtail (Lassurance-vie et les contrats de capitalisation). Une des rgles de base de la nance est que la rentabilit espre dun placement est proportionnelle au risque encouru. Ce principe et son utilisation sont ainsi dtaills (La gestion dun portefeuille titres). Enn, la constitution dune pargne en prvision de la retraite fait lobjet du dernier chapitre (Lpargne retraite). La Partie 5 (Le dirigeant dentreprise) se focalise sur une catgorie spcique de particuliers, les dirigeants. Aprs une prsentation des particularits scales auxquelles ils sont soumis (Le rgime scal des rmunrations des dirigeants), le systme des stock-options et les pistes de son optimisation sont traits (Les stockoptions). De par son activit, le dirigeant est amen prendre des risques. Il est alors important pour lui de mettre en place des outils de protection de son patrimoine priv (La protection du patrimoine du dirigeant). Enn, loccasion de la transmission de son entreprise, certaines impositions sont dues. An dviter que ces dernires soient pnalisantes pour lactivit conomique et la prennit des entreprises, le lgislateur est intervenu an den limiter les consquences (La scalit de la transmission dentreprise). Enn, la Partie 6 (tudes de cas de stratgie patrimoniale) conclut louvrage par trois tudes de cas dont lobjet est de montrer que le patrimoine des particuliers doit se grer de faon active et selon une approche pluridisciplinaire, faisant tout autant appel au droit, la scalit et la nance.

2

IntroductionPublic intress par louvrageGrce la rigueur de son contenu et son approche rsolument oprationnelle, cet ouvrage sadresse : aux tudiants des masters de gestion de patrimoine, de droit (scal ou notarial) et de nance, des universits et coles de commerce ; aux professionnels de la gestion de patrimoine, quils soient conseillers indpendants ou salaris des rseaux bancaires ; aux particuliers soucieux de grer de faon claire leur patrimoine.

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15%

Partie

1L

Le conseil en gestion de patrimoine

e conseil en gestion de patrimoine est une activit en plein essor. An de protger les pargnants, la Loi de Scurit Financire de 2003 a encadr lactivit de conseil en investissements nanciers et des associations professionnelles ont fait lobjet dun agrment par lAutorit des Marchs Financiers. Le chapitre 1, rdig par Renaud Salomon (Cour de Cassation et Universit Paris 12) prsente les cadres juridiques associs cette activit. Pralablement tout conseil, il est impratif de raliser un diagnostic, par le biais dun recensement patrimonial, avant de pouvoir aboutir une analyse puis la dnition dune stratgie patrimoniale. Ce thme, trs oprationnel, fait lobjet du chapitre 2, cocrit par Bruno Dalmas (conseiller en gestion de patrimoine indpendant), Pascal Pineau (Mtisse Formation) et Vincent Cornilleau (Natixis Private Banking Luxembourg). En matire de conseil en gestion de patrimoine, chaque cas est un cas particulier. Il est donc primordial, pour le conseiller en gestion de patrimoine, de tenir compte des spcicits de chaque client dans ses recommandations an dintgrer tout ce qui fait son patrimoine, y compris ce qui relve de limmatriel, quil sagisse de son nom de famille ou de ses valeurs. Cest ce thme qui est trait par Pascal Pineau au sein du chapitre 3.

6,5

Chapitre

1Ler

Les professionnels de la gestion de patrimoine

Renaud Salomon

a France compte quelque 3 000 conseillers en gestion de patrimoine, regroups en prs de 1 500 tablissements, tenus aux trois quarts dentre eux par des professionnels indpendants. Cette profession, longtemps dpourvue de statut, sest structure depuis la loi du 1 aot 2003 de scurit nancire. Ainsi, tout dabord, cette dernire a dni la profession de conseiller en investissement nancier (art. L. 541-1 du Code montaire et nancier), dont le primtre dactivit, qui recoupe partiellement celui du conseiller en gestion de patrimoine, est soumis la tutelle de lAutorit des marchs nanciers (AMF) et qui sest vu doter dun encadrement juridique destin moraliser la profession. Par ailleurs, la profession de conseiller en gestion de patrimoine se structure autour dorganisations professionnelles qui offrent leurs adhrents une assurance de responsabilit civile professionnelle, leur propose des formations ainsi que des guides de bonnes pratiques professionnelles uniformes. Le conseil en gestion de patrimoine, dont lactivit consiste orienter son client dans des choix de placement ainsi qu linformer des consquences juridiques et scales des orientations prises, reste cependant trs htroclite. Rvlateur cet gard sont les diverses professions qui participent cette activit de gestion de patrimoine : outre les conseillers indpendants, les banques, entreprises dinvestissement, assureurs, experts-comptables, grants de portefeuilles, commissairespriseurs, notaires

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINE dfaut de statut autonome du conseil en gestion de patrimoine, le droit nancier renvoie indirectement aux rgles concernant les prestataires de services dinvestissement ainsi que sont les conseillers en investissement nancier (CIF).Section 1 Section 2

Les obligations des conseillers en gestion de patrimoine La responsabilit des conseillers en gestion de patrimoine

Section

1

LES OBLIGATIONS DES CONSEILLERS EN GESTION DE PATRIMOINE

Il convient de distinguer les obligations propres au conseiller en investissement nancier de celles propres au prestataire de services dinvestissement.

1 Les obligations spciques du conseil en investissement nancier (CIF)Le CIF est soumis des obligations lies son activit de conseil, mais galement des obligations quant son organisation.1.1 Les obligations inhrentes lactivit de conseil Lobligation dinformation

Il sagit de lobligation minimale qui simpose au professionnel. Elle se caractrise par sa neutralit, dans la mesure o elle nimplique aucune impulsion agir mais porte sur des faits objectivement vriables1. Ainsi, tout dabord, le CIF doit remettre son client, ds son entre en relation avec celui-ci, un document comportant son statut de CIF et son numro dadhrent lassociation dont il dpend, lidentit des tablissements promoteurs de produits nanciers avec lesquels il entretient une relation signicative de nature capitalistique ou commerciale (art. 335-3 du Rglement gnral de lAMF). Par ailleurs, larticle 335-4 du Rglement gnral de lAMF prvoit que, avant de formuler un conseil, le CIF dlivre son client une lettre de mission, comprenant notamment la nature et les modalits de la prestation, les modalits de linformation due au client ainsi que les modalits de sa rmunration.1. S. Tandeau de Marsac, La responsabilit des conseils en gestion de patrimoine, Litec, 2006, n 374.

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Les professionnels de la gestion de patrimoine Lobligation de conseil

Dbordant largement la simple obligation dinformation, lobligation de conseil implique une vritable immixtion dans les affaires du client, une orientation positive de lactivit de lactivit du partenaire qui le conseil est d 1. Le CIF doit donc fournir un conseil adapt, en fonction tout la fois de la situation nancire du client, de son exprience en matire nancire et de ses objectifs en matire dinvestissements. cette n, la pratique du bilan patrimonial est le pralable indispensable la dlivrance dun conseil adapt. Enn, larticle 335-5 du rglement gnral de lAMF pose le principe de la ncessaire information du client sur les risques juridiques, scaux et nanciers que comportent les propositions de placement du CIF. Lobligation de discrtion

Comme tout professionnel, le CIF est soumis au secret professionnel, dans les conditions de droit commun, le cas chant, sous peine de sanctions pnales (art. 226-1 du Code pnal). En outre, larticle 335-7 du Rglement gnral de lAMF prvoit que, sauf accord exprs du client, le CIF doit sabstenir de communiquer et dexploiter, pour son propre compte ou pour le compte dautrui, les informations relatives au client quil dtient du fait de ses fonctions.1.2 Lobligation dorganisation

En application de larticle 335-8 du Rglement gnral de lAMF, le CIF doit disposer de moyens et de procdures adaptes lexercice de son activit et notamment de moyens techniques sufsants et doutils darchivage scuriss. Par ailleurs, selon larticle 335-9 du Rglement gnral de lAMF, lorsque le CIF emploie plusieurs personnes dans le cadre de son activit, il se dote de procdures crites lui permettant dexercer son activit en conformit avec les dispositions lgislatives, rglementaires et dontologiques en vigueur. Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

2 Les obligations spciques au prestataire de services dinvestissement (PSI)2.1 Les obligations inhrentes lactivit de conseil

Le prestataire de services dinvestissements doit constamment valuer les comptences de son client et doit, ce titre, se renseigner sur sa situation patrimoniale et connatre les objectifs de gestion avant de prciser les oprations ou les investisse1. S. Tandeau de Marsac, op. cit.

9

LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINEments conseills. linstar du CIF, le PSI doit informer le client des risques inhrents la nature des oprations envisages (risques nanciers, juridiques et scaux) et conseiller le client sur les aspects scaux et nanciers des produits proposs. Enn, en application de lobligation de coopration dans le contrat (art. 1134 al. 3 du Code civil), le PSI doit excuter avec loyaut ses obligations et privilgier lintrt de son client avant ses propres intrts.2.2 Les obligations dontologiques

Le dontologue a pour mission dassurer au sein de lentreprise de PSI le respect des rgles de bonne conduite (art. 332-26 332-32 du Rglement gnral de lAMF). Il incombe donc au dontologue dtablir un recueil de bonnes pratiques, notamment dviter la circulation dinformations privilgies au sein de lentreprise, par ldication de murailles de Chine entre front et back-ofce. Le dontologue sensibilisera tout particulirement les collaborateurs du PSI aux obligations pesant sur eux de secret professionnel et dabstention sur le march, ds lors quils dtiennent des informations de march condentielles.

Section

2

LA RESPONSABILIT DES CONSEILLERS EN GESTION DE PATRIMOINE

1 La responsabilit civileLa mise en cause de la responsabilit civile du conseiller suppose que soit tablie lencontre de ce dernier une faute (1.1) en relation causale (1.3) avec le dommage prouv (1.2).1.1 La faute

La faute, qui est de diffrents types, peut tre limite de diverses faons. Les divers types de faute

Le conseil en gestion de patrimoine doit tout dabord tablir le prol du client et ses objectifs an dtre en mesure deffectuer les choix les plus judicieux au prot de ce dernier. Par ailleurs, le conseil doit se renseigner sur la nature juridique, la scalit ainsi que les caractristiques nancires des produits quil est susceptible de conseiller. Pse ensuite sur le conseil une obligation dinformer les clients des

10

Les professionnels de la gestion de patrimoinerisques encourus par les oprations quil propose. En pratique, cest essentiellement en matire de dscalisation que se concentrent les principaux manquements de ce professionnel son obligation dinformation, en cas de redressement opr par ladministration scale. cet gard, si pse sur le conseil une obligation de rsultat en cas dinformation donne sur le contenu dune rgle scale dtermine, lobligation dinformation nest que de moyen en cas dincertitude sur lefcacit dun montage. Enn, le conseil en gestion de patrimoine est tenu une obligation de conseil qui, dbordant lobligation dinformation portant sur des faits objectivement vriables, consiste orienter les choix du client en fonction de ses objectifs et de ses besoins. Cest particulirement en matire dabus de droit (art. L. 64 du Livre des procdures scales) que se pose de faon cornlienne la responsabilit du conseil : si le conseil doit faire preuve doptimisation, voire dimagination scale, celles-ci ne doivent pas dgnrer en abus, sous peine dengager sa propre responsabilit. La limitation de la faute

La faute du conseil en gestion de patrimoine peut se trouver attnue lorsquil est en prsence dun client averti, soit parce quil possde une comptence propre, soit parce quil est conseill par ailleurs en matire juridique et scale. Mais cette limitation de responsabilit ne joue que pour lobligation dinformation, et non pour lobligation de conseil (Cass. civ. 1re, 13 dcembre 2005 propos dun notaire). Par ailleurs, le principe de libert contractuelle pos larticle 1134 du Code civil ninterdit pas linsertion de clauses de limitation de responsabilit contractuelle dans les contrats passs entre les conseils et leurs clients. La jurisprudence veille seulement ce que de telles clauses ne privent pas le contrat de cause en application de larticle 1131 du Code civil. Au demeurant, de telles clauses sont systmatiquement cartes par le juge en cas de dol ou de faute lourde du professionnel.1.2 Le prjudice Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

La victime dun manquement du conseil de gestion de patrimoine ses obligations professionnelles doit tablir le prjudice quelle a subi. Ce prjudice doit tre tout la fois rel, certain et direct. En vertu du droit la rparation intgrale, ce prjudice doit correspondre tant au gain manqu qu la perte subie (art. 1149 du Code civil). Mais, en marge des textes, la jurisprudence a admis le droit rparation du client en cas de perte de chance relle et srieuse de gain.1.3 Le lien de causalit

La victime doit enn tablir le lien de causalit ente la faute commise et le prjudice subi. En premier lieu, le professionnel de la gestion de patrimoine parviendra carter sa responsabilit sil tablit que le dommage rsulte non de sa faute, mais des

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINEchoix de gestion faits par la victime. De mme, la responsabilit de ce professionnel peut tre carte si ce dernier tablit un ala nancier ou encore une faute de la victime.

2 La responsabilit pnaleCette responsabilit peut rsulter dinfractions de droit commun (2.1) et dinfractions boursires (2.2).2.1 Les infractions de droit commun

La lutte contre le blanchiment de largent sale passe par une rpression du conseil en gestion de patrimoine lorsque celui-ci facilite, par tous moyens, la justication mensongre de lorigine des biens ou des revenus de lauteur dun crime ou dun dlit ayant procur celui-ci un prot direct ou indirect ou (...) apporte un concours une opration de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect dun crime ou dun dlit (art. 324-1 du Code pnal). Par ailleurs, dans la mesure o le conseil en gestion de patrimoine se fait remettre des fonds loccasion de sa profession, lui est galement imputable le dlit dabus de conance en cas de dtournement au prjudice dautrui des fonds, des valeurs ou dun bien quelconque qui lui ont t remis et quelle a accept charge de les rendre, de les reprsenter ou den faire un usage dtermin (art. 314-1 du Code pnal).2.2 Les infractions boursires

Les infractions boursires prsentent en droit franais une double face. En effet, la France est un des rares pays connaissant une double dnition des actes illicites en matire boursire, tout la fois pnale et administrative. Dans le premier cas, il sagit des dlits, prvus et rprims par les articles L. 465-1 et L. 465-3 du Code montaire et nancier. Dans le second, il sagit des manquements administratifs au Rglement gnral de lAMF, ds lors que les pratiques boursires ont pour effet, de fausser le fonctionnement du march, procurer aux intresss un avantage injusti quils nauront pas obtenu dans le cadre normal du march, porter atteinte lgalit dinformation et de traitement des investisseurs ou leurs intrts, faire bncier les metteurs et les investisseurs des agissements dintermdiaires, contraires leurs obligations professionnelles. Cette rglementation duale vise des pratiques boursires diverses, notamment de la part des conseils en gestion de patrimoine. Ainsi, lutilisation et la communication dune information privilgie, avant que le public en ait connaissance, sont simultanment constitutives des dlits diniti et de communication dinformation privil-

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Les professionnels de la gestion de patrimoinegie, prvus larticle L. 465-1 alinas 1 et 2 du Code montaire et nancier, et du manquement diniti prvu aux articles 621-1 et suivants du Rglement gnral de lAMF. De mme, linobservation des rgles gnrales dinformation sur le march est constitutive tout la fois du dlit de fausse information de larticle L. 465-2 alina 2 du Code montaire et nancier et du manquement la bonne information du public prvu larticle 632-1 du Rglement gnral de lAMF. Enn, la manipulation de cours peut tre apprcie au regard, tant du dlit prvu larticle L. 465-2 alina 1er du Code montaire et nancier que des articles 631-1 631-4 du Rglement gnral de lAMF. Cette double rglementation des comportements boursiers est luvre de pouvoirs normatifs distincts. En effet, sil revient la loi, en vertu de larticle 34 de la Constitution de 1958, dincriminer et de sanctionner les dlits boursiers, cest lAutorit des marchs nanciers quincombe le soin de prendre, en application de larticle L. 621-6 du Code montaire et nancier, pour lexcution de ses missions un rglement gnral dnissant les contours des manquements boursiers. Coexistent donc le plus souvent une incrimination de nature pnale et un manquement administratif de nature para-pnale, pouvant respectivement donner lieu une condamnation pnale, prononce par la juridiction correctionnelle, et une sanction administrative, prononce par lAutorit des marchs nanciers.

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINE

Repres10 rue de la Ppinire 75008 PARIS Tlphone : 01 44 69 88 88 Tlcopie : 01 44 69 88 81

Liste des associations professionnelles agres

CHAMBRE DES INDPENDANTS DU PATRIMOINE (CIP)

ASSOCIATION DES ANALYSTES CONSEILLERS EN INVESTISSEMENTS FINANCIERS (AACIF) 24 rue de Penthivre 75008 Paris Tlphone : 01 56 43 43 10 Tlcopie : 01 45 63 00 58 COMPAGNIE DES CONSEILLERS EN INVESTISSEMENTS FINANCIERS (CCIF) 20, rue de lArcade 75008 Paris Tlphone : 01 44 94 27 70 Tlcopie : 01 44 94 14 89 CHAMBRE NATIONALE DES CONSEILLERS EN INVESTISSEMENTS FINANCIERS (CNCIF) 72, avenue Klber 75116 Paris Tlphone : 01 56 26 06 01 Tlcopie : 01 56 26 06 03 ASSOCIATION NATIONALE DES CONSEILS FINANCIERS-CIF (ANACOFI-CIF) 91 rue Saint Lazare 75009 Paris Tlphone : 01 42 81 92 72 Tlcopie : 01 42 82 91 10 ASSOCIATION FRANAISE DES CONSEILLERS EN INVESTISSEMENTS FINANCIERS, CONSEILS EN GESTION DE PATRIMOINE CERTIFIS (CIF CGPC) 5, rue Tronchet 75008 Paris Tlphone : 01 40 06 08 08 Tlcopie : 01 40 06 96 23

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Chapitre

2NSection

Le diagnostic patrimonial

Bruno Dalmas, Pascal Pineau et Vincent Cornilleau

ous venons de dcouvrir, dans les pages qui prcdent ce chapitre, que la gestion de patrimoine est une activit qui embrasse un champ vaste de matires aux frontires tendues1.Section 1 Section 2 Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

Prambule Le recensement patrimonial Lanalyse patrimoniale La stratgie patrimoniale

Section 3 Section 4

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PRAMBULE

Le diagnostic patrimonial contribue la ralisation dune mission. Avant daborder le contenu de cette mission, il convient den dnir le champ dintervention.1. S. Tandeau de Marsac, La responsabilit des conseils en gestion de patrimoine, Litec, 2006.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINE1 Dnition de la gestion de patrimoine Elle consiste promouvoir un ou plusieurs produits patrimoniaux en sappuyant sur une prescription justie par la situation patrimoniale de la personne conseille 1. Cette dnition xe deux domaines dintervention : la gestion des actifs nanciers ou immobiliers, et le conseil patrimonial. Le conseil patrimonial sattache dterminer les structures juridiques daccueil des biens du patrimoine, adaptes aux besoins du client. Le gestionnaire dactifs, quant lui, propose des produits correspondants aux attentes du client, quil sagisse, titre dexemple, de la valorisation dun capital ou de la recherche de revenus. Autrement prsent, le conseil patrimonial serait le contenant de la gestion de patrimoine et la gestion dactifs son contenu. Ses deux activits sont-elles complmentaires ou en opposition ? Compte tenu du mode de rmunration des conseils en gestion de patrimoine, les commissions verses provenant quasi exclusivement de la commercialisation des produits nanciers, deux coles semblent aujourdhui se distinguer. Il y a ceux qui considrent que lactivit de conseil patrimonial est exclusive de toute vente de produits nanciers an de garantir au client lobjectivit de la prconisation. Il se rmunre par des honoraires sur le conseil donn. Dautres, au contraire, estiment que ces deux domaines, conseil et vente dun produit, sont complmentaires. lappui de leur argumentation, ils font valoir que : Se limiter prconiser les axes dune stratgie sans accompagner le client dans sa mise en uvre revient le laisser au milieu du gu. Vouloir distinguer la vente du conseil comme garant de lobjectivit nest quun paravent dans un march inond par loffre de produits immobiliers ou nanciers. Uniquement dans le secteur nancier, ce sont prs de 25 000 OPCVM qui sont proposs en Europe dont 40 % en France. Comment tre assur de lobjectivit de celui qui prconise dans un choix aussi vaste ? Aura-t-il vritablement la facult de comparer efcacement toutes les offres ? Par ailleurs, les conditions de gestion comme des prlvements des frais sont aujourdhui largement standardiss, et les marchs voluent de la mme manire pour tous les acteurs. La diffrence ne tientelle pas nalement la qualit de lindividu, et au-del, du suivi de son client ?

2 La gestion dactifsSi lon met de ct le march particulier de lart, le choix des investisseurs se retrouve toujours face trois secteurs : le march nancier, le march montaire, et1. P.M. Guillon, La gestion de patrimoine, Economica, 1996.

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Le diagnostic patrimonialle march de limmobilier. Il est curieux que lassurance-vie soit systmatiquement prsente comme un secteur dinvestissement. Ce rexe conduit dailleurs la confusion des clients. Un conseil qui prconise lassurance-vie peut tre rapidement considr comme un vendeur dassurance . En outre, les uctuations de la valeur de rachat peuvent tre inacceptables venant dun produit dit d assurance . Il convient de rappeler avec force que lassurance-vie nest quun mode de dtention particulier dactifs qui peuvent tre nanciers, montaires ou immobiliers ; un cadre juridique qui, par ses caractristiques propres, recle des atouts certains. Quoi quen disent les reprsentants des plus belles maisons de gestion, les prvisions conomiques nengagent que ceux qui les annoncent. Force est de constater quun analyste sur deux se trompe. Cest la raison pour laquelle les principes qui gouvernent la gestion dactifs restent profondment ancrs sur des prceptes simples. Seule une diversication permet dobtenir une relative scurit dans la uctuation dun patrimoine en vue dobtenir une rentabilit acceptable. Quant aux meilleurs moments pour arbitrer, nul ne sachant le niveau le plus haut pour cder un actif, ni le plus bas pour lacheter, ici encore il est rgulirement fait rfrence aux adages classiques : Pierre qui roule namasse pas mousse , un tient vaut mieux que deux tu lauras , etc. Comme tout est question de mesure, ce seront le temprament dinvestisseur du client et les conditions de marchs qui viendront temprer ou amplier les comportements.

3 Le conseil patrimonialLactivit de conseil patrimonial structure comme elle lest aujourdhui, est rcente. On peut la dater de la n des annes 80. Jusqu alors, beaucoup de professions lies au conseil revendiquaient la pratique du conseil patrimonial. Mais bien peu avait un regard sur toutes les dimensions juridique, scale et conomique du patrimoine priv comme du patrimoine professionnel. Le conseiller patrimonial moderne, vritable point godsique du patrimoine global, doit dvelopper des comptences gnrales et spciques dans des matires aussi riches que diversies. On attend de lui quil afche des comptences dans les domaines du droit civil (droit de la famille, droit des libralits, droits des successions, droit des biens, droit des personnes), du droit social (droit de la protection sociale et droit du travail), du droit commercial (droit des socits), du droit scal (scalit de la personne physique et scalit dentreprise), et encore de la comptabilit et de la gestion. Cette ralit se retrouve dans le contenu des enseignements universitaires ddis rcemment la gestion de patrimoine. Il convient de noter que les champs du droit lis la gestion de patrimoine offrent un large espace de libert. Contrairement aux ides reues, les Franais disposent doutils efcaces, simples dutilisation, pourvu que lon en face un emploi raisonn. Charge aux conseillers de le leur faire dcouvrir1.1. Exemple : article 1387 du Code civil.

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINE4 La combinaison des activits de conseil et de gestionComment utiliser les outils juridiques dans la ralisation dobjectifs nanciers ? Selon la rponse, lexercice du mtier de conseil en gestion de patrimoine aura une teinte plutt juridique ou plutt nancire. Deux positions saffrontent gnralement. Il y a ceux qui considrent le droit comme un outil au service du nancier1. Dans cette conception conomique de la gestion de patrimoine, on estime que le droit est un vhicule devant faciliter le mouvement des biens dans le temps et travers les gnrations. On peut remarquer que grand nombre des tudiants en master de gestion de patrimoine viennent de lires de gestion et non de droit. loppos, il y a les partisans du respect de lapplication classique de la rgle de droit ne devant pas saffranchir des principes de protection de la paix familiale. Outre les risques scaux que font peser certaines prconisations originales, il convient aussi de mettre en avant les risques humains de discordes. Certaines stratgies peuvent se rvler de vritables bombes retardement au sein des familles. La n conomique ne justie pas que lon ait recours nimporte quel moyen de droit dtourn de son objectif premier. La vrit est certainement entre ces deux positions. La gestion de patrimoine a pour objectif exclusif de mettre le patrimoine des individus leur service, en tenant compte des principes de modration qui gouvernent leurs relations. Au risque de dcevoir un grand nombre de conseils, la scalit nest pas un objectif patrimonial, mme si la recherche doptimisation reste le sport prfr des Franais . Rduire son assiette dimposition ou son impt passe par des choix dinvestissements comme des cadres juridiques dont les consquences vont bien au-del de lconomie scale. Dailleurs, nombreux sont les conseillers qui ont pu constater dans leur clientle les effets dvastateurs de cette qute quasi mystique.

5 Lexercice du conseil en gestion de patrimoineLa difcult lie ce mtier est double : elle tient, dabord, lintimit ncessaire de la relation entre le client et son conseiller. En Angleterre, on appelle les conseillers en gestion de patrimoine les moneys doctors. La qualit de la relation humaine est dterminante dans la russite de la mission. Cest ce que lon a dsign par relation commerciale. la diffrence dun mdecin qui na que des patients, le CGP a une activit marchande, quil propose un conseil juridique ou un produit nancier. Cet aspect commercial du mtier de gestion de patrimoine est encore trop souvent entach dune connotation pjorative, lie une1. Un des partisans de cet instrumentalisation du droit au service de la matire nancire est Jean Aulagnier.

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Le diagnostic patrimonialralit historique non contestable, qui ne tient pas compte de la difcult et des qualits requises pour offrir son interlocuteur une coute efcace ; elle tient, ensuite, la matire quelle touche : largent. Il est inutile de rappeler que la culture judo-chrtienne nourrie un rapport largent particulier que lon ne rencontre pas, par exemple, dans le protestantisme1. Le domaine dintervention du conseiller en gestion de patrimoine ainsi dni, reste xer les modalits selon lesquelles il va raliser sa mission.

6 Dnition du diagnostic patrimonialLe diagnostic patrimonial consiste collecter les informations pertinentes du client, les organiser et les traiter pour proposer des stratgies. La collecte. Derrire ce mot simple se trouve la plus grande des difcults. Il sagit, en effet, de capter des informations travers des changes matriels (de documents) et verbaux. Premire difcult : les mots renferment les valeurs de celui qui les prononce. Dans les discussions entre individus, le premier rexe est dentendre son interlocuteur avec ses propres croyances et valeurs. Le message enregistr a donc de fortes chances dtre fauss. La qualit de cette collecte repose sur la capacit dcoute du conseil. Les informations pertinentes. La qualication de la pertinence des informations va dpendre du CGP. Des ltres vont ncessairement apparatre en fonction de son historique propre, professionnel ou non. Selon son analyse, un tri sopre naturellement entre ce qui est important de ce qui ne lest pas pour le client. Lorganisation des informations. Le diagnostic patrimonial revt un aspect formel incontournable. En la matire chacun son style. Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

Traitement des informations. La mthode de traitement des informations est propre chacun. Il convient nanmoins dtre attentif au vocable employ. La perception par le client du travail accompli peut tre biaise. Il peut sagir : dun bilan, cest--dire dune photographie du pass immdiat ; dune tude : un ensemble de travaux qui prcdent lexcution dun projet ; ou encore dun audit : procdure de contrle pour vrier que lorganisation patrimoniale du client correspond ses objectifs.1. Voir sur cette approche sociologique notamment M. Weber, Lthique protestante et lesprit du capitalisme, Gallimard, 2004.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINESi, sur le fond, le traitement aboutit un mme rsultat, ces trois documents (bilan, tude et audit) semblent rpondre des attentes apparemment diffrentes. Le sentiment du client sur la qualit du travail ralis dans un bilan nest pas le mme sil attendait de son conseiller un document intitul tude. Partant, le CGP peut suivre une multitude de dmarches dans son approche avec le client. De manire gnrale, le diagnostic patrimonial se dcompose en trois phases : le recensement patrimonial, lanalyse, et la stratgie.

Section

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LE RECENSEMENT PATRIMONIAL

Au l du temps et des modes, de multiples techniques de communication ont t dveloppes. Leur utilisation excessive, parfois la limite de lagressivit, a fait la renomme des dmarcheurs nanciers bien malgr eux. Pourtant, utilises bon escient, il convient de reconnatre quelles facilitent lchange entre le professionnel et le profane. Aprs avoir prsent une mthode dapproche dans la prise de renseignements par le conseiller, nous nous arrterons sur le contenu mme du recensement patrimonial.

1 La prise de renseignements par le conseiller en gestion de patrimoineDeux points apparaissent essentiels : dune part, lidentication par le conseiller des attentes du client et, dautre part, la prsentation dune organisation particulire dans la prise de renseignements.1.1 Lidentication des attentes du client Prsentation

Utilisons une image : quoi peut bien servir une voiture de Formule 1 si lon doit faire le Paris-Dakar ? Inversement, un vhicule tout terrain serait bien ridicule au dpart dun grand prix. Quel que soit le contenu de son savoir ou de ses comptences, la premire de toutes les prcautions prendre est de les adapter aux attentes de son interlocuteur. Il est peut-tre inutile de raliser une tude en profondeur pour un client qui souhaite simplement mettre en place une pargne. La dmarche vise aussi viter une multi-

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Le diagnostic patrimonialtude dembarras au rang desquels on peut retrouver une question compltement trangre au domaine de comptence du conseiller. Si loffre de conseil nest pas en phase avec la demande du client, il est inutile de poursuivre la relation. Par ailleurs, renoncer rpondre une question en dehors de son champ dintervention nest pas une preuve dincomptence, mais au contraire une preuve de lucidit plutt rassurante pour le client. De manire schmatique, on retrouve deux types dattente chez le client : soit il souhaite une rponse une question bien dtermine ; soit il est dans lattente dune dmarche globale. Lapproche spcique

Lnonc dune question particulire nappelle pas, a priori, de longs dveloppements. Elle peut se dcliner soit dans le volet juridique et scal, soit dans le volet conomique. Les questions dordre patrimonial que lon rencontre sont, par exemple : la rdaction dune donation entre poux ; la rdaction dun engagement collectif de conservation de titres ; remplir une dclaration de revenus Au plan nancier, les questions semblent videntes : faire lacquisition dune rsidence principale ou secondaire ; anticiper le nancement des tudes de ses enfants ; valoriser un capital ces questions pratiques, le client attend une rponse de mme nature. Sans que cela prsume de la plus ou moins grande complexit de cette rponse. Pour faire face cette demande, le CGP aura besoin dun minimum de renseignements quil obtiendra par une valuation simple de la situation. Une grille de renseignements classique est gnralement utilise, au sein de laquelle seront dtermins les moyens, les motivations et les objectifs poursuivis. La rponse qui sen suit est gnralement rapide et oriente vers un produit nancier si la demande a un caractre conomique, ou vers la rdaction dun acte (ou lorientation vers le professionnel comptent le cas chant) sil sagit dun besoin patrimonial. Il convient de prciser que dans ce contexte, la prconisation dun produit nancier, mme rapide, nest pas choquante. une demande spcique, il est rpondu par un produit particulier adapt. En revanche, la relation entre le CGP et le client a de fortes chances dchouer si le conseiller propose son interlocuteur une dmarche en profondeur tant dun point de vue du recensement que de lanalyse. Elle est alors perue comme trop indiscrte, en tous les cas incongrue. Dans son travail de vrication le CGP, pourra nanmoins contrler que, derrire la question simple formule, ne se dissimule pas en ralit une problmatique globale mal exprime par le client. Profane, le client ne mesure

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINEpas la pertinence de tous les lments de sa rexion et ne livre, au moins dans les premiers instants de la relation, que quelques bribes. Lapproche globale

A contrario, toutes les fois o le client exprimera des besoins plus larges, une approche en profondeur simposera. On retrouve trs frquemment comme proccupations gnrales qui entrent dans ce type dapproche la protection du conjoint survivant, la prparation de la retraite, la transmission de son entreprise. Toutes ces questions embrassent en mme temps : la nature des relations entre les individus ; la rpartition des prrogatives, actuelle ou future, sur les biens entre le conjoint survivant et les enfants ; la scalit du patrimoine, des revenus, ou successorale ; la rpartition des actifs du patrimoine ; la perception de revenus complmentaires Le niveau de renseignements requis pour rpondre aux attentes du client est bien suprieur celui rclam pour une question spcique. Dans ce cadre, la mission du CGP est gnralement xe par convention pour limiter au mieux ltendue des travaux raliser. Ici, le CGP qui offrirait une solution produit simple ou labore, mme parfaitement adapte, serait indniablement peru comme un marchand. Dmarche spcique ou globale ?

Quel que soit le niveau de comptence du conseil, il y a des choses qui ne se devinent pas. Et le meilleur moyen de connatre les attentes de son interlocuteur, cest encore de les lui demander. Lexprience nous montre que mme si cela va sans le dire, cela va mieux en lcrivant. Cela se matrialise par des questions lmentaires.Exemples En quoi puis-je vous aider ? , Avez-vous une attente prcise pour laquelle vous voulez une rponse du mme ordre, ou souhaitez-vous, au contraire, une tude approfondie de votre situation pour vrier tous les paramtres qui pourraient inuer sur la prconisation ? , Souhaitez-vous que lon ralise un bilan global, ou les seuls lments que vous mavez cons doivent me sufre la construction dune solution ? , etc.

1.2 La mthode dapproche

La mthode prsente suit un parcours ordinaire mais irrductible. Elle se dcompose en quatre tapes : la situation prsente, les projets, les obstacles la russite du projet, et les ressources ncessaires au projet.

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Le diagnostic patrimonial Ltat prsent

Lcoute du client Le CGP entre dans la phase de dcouverte de son client. Il sagit de faire connaissance. En la matire, il existe une mthode universelle qui est celle du silence et de la reformulation des questions, pour faire prciser au maximum son interlocuteur. Elle conduit le client mieux dnir le sens de ses propos. Ce mode de communication tente dviter les a priori gnrs par les propres croyances et valeurs du CGP.Exemples Et donc ? Pouvez-vous prciser ? Vous tes satisfait ? Cela pose problme ? Quelles consquences ? Avant dentrer dans les diffrentes solutions que vous avez adoptes, daprs vous, sont-elles efcaces ?... Et sufsantes ?

Cette phase dcoute permet de vrier le niveau dautorisation octroy par le client au CGP dans le cadre dune approche spcique ou dans le cadre dune approche globale. Le client peut, en effet, au l des entretiens, exprimer des objectifs ambitieux en ayant livr peu dlments pour laborer une stratgie. Et limpossible, nul nest tenu. Il sufra ds lors de lui faire remarquer que son niveau dexigence est parfaitement inadapt la qualit des lments quil aura fourni. Elle offre aussi un regard sur le niveau de stress du client par rapport la problmatique quil soulve. Il peut avoir une vision confuse de sa situation patrimoniale alors quelle se rvle sans difcult. Cette coute permettra nalement de rassurer le client et de le conforter dans ses choix. Linventaire patrimonial Il correspond la partie chiffre de la phase de dcouverte du client. Dans la premire partie de lentretien, le CGP a d relever les informations relatives aux structures juridiques qui composent le patrimoine1. Si la connaissance qualitative de ces diffrentes composantes est essentielle, la connaissance quantitative va permettre de mieux apprhender les enjeux des questions souleves. Le CGP est-il face des enjeux nanciers signicatifs ou des questions de principe entre diffrents individus auxquels il peut rpondre seul ? Cette mesure est dimportance, car elle va permettre au CGP de vrier si les solutions envisageables ncessitent ou non lintervention dautres professionnels du conseil. Il pourra ainsi valider, soit un travail complmentaire raliser avec les partenaires actuels du client, soit proposer une offre de service globale avec ses propres partenaires.

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

1. Voir supra, section 2 point 2.6.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINE

Repres

Mthode de collecte des informations

Il est toujours craint que linterlocuteur ressente ngativement cet interrogatoire sur le contenu nancier du patrimoine. Il sagit, alors, de montrer que le quanta nest quun lment parmi tant d'autres. Pour y parvenir, diffrentes mthodes existent. Exemple : Vous dtenez quoi ? Depuis quand ? Vous lavez reu comment (achat, donation, succession) ? Combien ? (toujours la n !)

Les projets

Cette seconde phase vise dterminer ltat dsir dans lequel le client souhaiterait se retrouver une fois la stratgie mise en place. Il sagit de dnir les objectifs mais aussi les contraintes de gestion. Autrement dit, il y a ce que le client dsire, et la manire selon laquelle il va y parvenir. Le contrle est toujours prsent. Le CGP vrie en permanence la sincrit des informations dlivres par le client.Exemple de questions Idalement, quelles mesures sont ncessaires ? En quoi est-ce utile ? Est-ce simplement utile pour vous, ou galement pour dautres ? Pour quel objectif ? Comment saurez-vous que vous tes dans la bonne direction ? Comment saurez-vous que vous avez atteint votre objectif ? La dernire question donne un indice particulirement intressant pour le CGP. Il peut ainsi noter les critres de russite dnis par son client pour les constater le moment venu. Attention Comme cela a t rappel prcdemment, la scalit nest pas un objectif patrimonial.

Les obstacles la russite du projet

La volont nest pas tout. Des freins la russite existent, ils peuvent tre extrieurs ou propres soi. Les identier permet dvaluer les chances de russite, a priori, du projet. Il est vident que si le client exprime en mme temps des contre-indications rdhibitoires la mise en place de la stratgie, il y a peu attendre de son succs. Ici, on mesure aussi le niveau de motivation du client, car ne perdons pas de vue que choisir une stratgie, cest aussi renoncer autre chose. Par exemple, donner la nue-proprit dun bien, cest renoncer sa libre disposition. Il serait dommage dinscrire un client indcis dans une stratgie irrversible.

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Le diagnostic patrimonialExemple de questions Existe-t-il un aspect qui vous empche de raliser votre objectif ? Existe-t-il des inconvnients, pour vous ou pour dautres ? Et si jamais vous ny arrivez pas ? Que perdriez-vous ? Etc. Cette phase importante, sil en est, rvle les contraintes xes.

Les ressources ncessaires au projet

Cette phase identie les moyens concrets que le client est prt mobiliser pour parvenir son objectif.Exemple Le client souhaite obtenir un capital de 1 000 000 dans 10 ans. Pour cela, il est prt faire un effort dpargne annuel de 50 000 . Or, pour atteindre son objectif avec les ressources quil est prt y consacrer, il faudrait soit que le taux de rentabilit annuelle soit suprieur 14,5 %, soit pour un taux plus raisonnable de 5 % quil consente allonger le terme plus de 14 ans. Exemple de questions De quoi avez-vous besoin pour raliser votre objectif ? Que vous faut-il exactement pour russir ? Les avantages sont-ils plus importants que les inconvnients ? De quels moyens disposez-vous en termes de partenaires, dpargne, de capital ? De qui avez-vous besoin ? Que dcidez-vous ? Quand commencez-vous ?SYNTHSE TAT PRSENT Donnes non chiffres Inventaire patrimonial

PROJETS

FREINS Pourquoi le client ne ferait ou ny arriverait pas

RESSOURCES Comment il est prt faire

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

Figure 2.1

2 Le contenu du recensement patrimonialLoffre en logiciels pour faciliter le travail des CGP est aujourdhui consquente. Gnralement de bonne facture, on peut nanmoins leur faire un reproche li leur avantage : la standardisation des donnes. Pour les clients la surface nancire restreinte, ils conviennent parfaitement. En revanche, ils se prtent moins aux patrimoines plus tendus et complexes.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINEQuelle que soit la mthode employe, le recours un document de synthse simpose pour plusieurs raisons : il fournit au client un tat clair de sa situation, lui faire valider ; il matrialise aux yeux du client lemploi des donnes condentielles quil a fourni au CGP ; ce document dlivre un premier aperu des qualits intrinsques du CGP. Il montre au client sa capacit de synthse, sa clart, et son efcacit ; enn, il donne une indication supplmentaire au client sur la dmarche globale entreprise. Sauf cas particulier, si cette tape nest pas franchie, cela peut tre un signe que le CGP na pas ladhsion du client. Dans ce cas, il est prfrable de stopper la relation. Les lments prsents ci-aprs nont pas la prtention dtre exhaustifs. Ils sont une illustration de la dmarche propose tant sur le fond que sur la forme. Retenons toutefois que lon mesure la qualit dun conseil ses questions et non ses rponses.

2.1 La situation familiale

On entre ici dans lintimit du client. Il sagit de mler des prises dinformations basiques et plus techniques.

Represge/date de naissance des poux. Prnom des petits-enfants/ges.

tat civil

Prnom des enfants/ges/rgime matrimonial sils sont maris/profession. Nom/prnom/ge des parents du client.

Nature du rgime matrimonial. Il permet de connatre la rpartition de la proprit des biens entre les poux. Une dclaration dISF ne la prcise pas. Sils ont fait un contrat de mariage, il est important den avoir la copie. Il arrive frquemment que les clients ne souponnent pas le contenu ingnieux de leur convention. En prsence dun rgime de communaut, les rcompenses sont frquentes et peuvent crer un passif dans la succession. Il faut alors ventiler les biens en fonction de leur nature juridique :

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Le diagnostic patrimonial biens propres de Monsieur ; biens propres de Madame ; biens communs. En prsence dun rgime de sparation de biens, il convient de vrier la pertinence du rgime au jour de lanalyse : soit le rgime de la sparation de biens a t respect et lun des poux ou les deux ont constitu un patrimoine propre important grce une russite professionnelle ou un hritage. Dans cette hypothse, le rgime ne protge plus le patrimoine contre le risque conomique si cest celui qui dtient lintgralit du patrimoine du couple qui en supporte le risque ; soit le rgime de la sparation de biens a pu aboutir un dsquilibre des patrimoines entre Monsieur et Madame, ce qui peut tre un inconvnient pour la protection du conjoint survivant selon lordre des dcs ; soit le rgime na pas t respect et toutes les acquisitions ont t faites ensemble (indivision). Auquel cas, il conviendra de vrier si un rgime communautaire semble plus adapt.2.2 La situation sociale

Il sagit didentier le statut et le rgime social auxquels les clients sont soumis : profession de Monsieur, de Madame ; identier les diffrents mandats (grant, administrateur, prsident) ; selon le cas, demander si un chiffrage de la retraite a t ralis.Question Quel est le niveau de risque conomique qui pse sur lactivit ? Cette question anodine per met de vrier si une intervention ventuelle sur le rgime matrimonial est envisageable. Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

2.3 Les libralits antrieures

Dans cette tape, il sagit didentier les diffrentes mutations titre gratuit (donations et testaments) qui sont intervenues dans le champ familial au sens large : Un testament a-t-il t rdig ? Si oui, quel est son contenu ? Une donation entre poux a-t-elle t rdige ? Si oui, en relever la copie. Attention il nest pas rare que certains clients aient rdig sans le savoir des actes particuliers. titre dexemple, on trouve rgulirement des donations entre poux qui ne contiennent quune seule option : 100 % en usufruit. Jusqu la loi du 23 juin 20061, cette rdaction pouvait se rvler inadapte par rapport la capacit du1. La loi du 23 juin 2006 a modi la rgle dimputation pour viter cette consquence issue de la loi du 3 dcembre 2001.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINEconjoint survivant de revendiquer aussi le en pleine proprit de la dvolution lgale. ce stade de prise dinformations, lobjectif nest pas de commencer une analyse sur le vif du contenu des actes. Il sagit simplement de recueillir les lments qui permettront ensuite de rendre une analyse prcise de la situation juridique des clients.

RepresPour viter de rpondre des questions alors que ce nest pas lobjet du rendez-vous, gnralement les conseillers diffrent leur rponse. Exemple : Je note que cette question vous intresse, nous y reviendrons lorsque je vous prsenterai le rsultat de mon analyse .

Si un parent est dcd, comment sest droule la succession ? Le dfunt avait-il consenti une donation entre poux au profit du survivant ? Le parent vivant a-t-il pris 100 % en usufruit ou une autre option ? Quel est ltat de la fortune des parents ? Ont-ils reu des donations de leurs parents ? Si oui, quoi, quand et combien ? Si cela parat significatif, ou sil y a un dmembrement, en demander lacte. Si sagit dune donation de parts de SCI, demander lacte.

RepresDans lacte de donation, en gnral au moins six informations sont intressantes : Date : pour le rappel scal. Qui reoit. Quoi et combien. Si dmembrement : y a-t-il une clause de rversion dusufruit ? Si donation de parts de SCI, quelle valeur a t retenue ? Y a-t-il une clause dexclusion de communaut ?

En prsence de plusieurs enfants, toutes les donations autres que les donations partages peuvent contenir un risque juridique. Il peut tre intressant de connatre les raisons pour lesquelles les clients ont procd de la sorte. Il convient de partir du principe que ces motivations ont toujours une source valable.Exemple Un client donne, en 1992, un appartement lun de ses enfants qui part faire ses tudes Paris. Valeur 1 MF, donation simple en avance dhoirie. En 2007, son deuxime enfant, son tour dbute des tudes suprieures Bordeaux. Il souhaite lui faire aussi la donation dun appartement dune valeur de 150 000 . Valeur de lappartement parisien : 400 000 .

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Le diagnostic patrimonialQuestion : A-t-il conscience des difcults juridiques que cette situation peut occasionner dans le temps ?

2.4 Les objectifs patrimoniaux

Les objectifs peuvent tre soit purement nanciers, soit purement patrimoniaux, soit la combinaison des deux. Chaque conseiller dveloppe un champ de comptence et dactivit qui lui est propre. Dnir au pralable avec prcision les attentes du client vitera pour les uns comme pour les autres de faire fausse route.Exemple Objectifs patrimoniaux : transmission, protection du conjoint survivant, protection dun enfant diminu, etc. Objectifs nanciers : construction, recherche de revenus complmentaires, constitution dun capital, nancement des tudes des enfants, la retraite, etc.

Une fois les objectifs dnis, il convient de les hirarchiser par ordre de priorit et selon la dure de linvestissement. Cette prcision est essentielle pour la construction dune stratgie et dun plan de travail adapt.2.5 Les contraintes de gestion

Aprs la dnition de lobjectif (quoi ?), il faut tablir la faon dont le client souhaite y parvenir (comment ?). Il xe son idal. Avantages : Cela vient de lui. Si ce nest pas atteignable, le CGP lidentie immdiatement. Il nest pas oblig de poursuivre la relation. Est-ce bien raisonnable de courir aprs un objectif quon ne pourra jamais atteindre1 ! Cela permet de vrier que ce que le client attend de son CGP entre bien dans le champ de ses comptences, et non pas celles de lavocat, du notaire ou de lexpert-comptable.Exemple Comment va-t-on arriver votre objectif ? Comment saura-t-on que nous y sommes parvenus.

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

2.6 La composition du patrimoine priv

Cest une photographie complte du contenu du patrimoine priv.

1. Voir infra, section 2.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINEParmi les questions poser Est-il sufsamment diversi selon vous ? Les liquidits sont-elles sufsantes ou surabondantes ? Y a-t-il un dsquilibre entre le patrimoine de Monsieur et celui de Madame ? La pression scale est-elle matrise ? Quel degr de risque est accept dans la gestion de ce patrimoine ? Etc. Tableau 2.1Monsieur Madame Communaut/ indivision Passif Total

March montaire :Compte sur livret Compte chques Assurance-vie Total

March nancier :PEA Comptes titres Assurance-vie Total

March immobilier :Rsidence princ. Rsidence sec. Locatif SCPI SCI Total

Total global

Renseignements relatifs aux socits civiles Comme cela a t prcis dans le chapitre relatif la socit civile, lorsque le capital social est faible et que le bien dtenu par la socit civile a t acquis crdit et dont le nancement est termin, alors des comptes courants dassocis sont prsents. Seule une comptabilit correctement tenue permet de les matrialiser. Si ce nest pas le cas, il y a de fortes probabilits pour que la dclaration dISF, sil y en a une, soit mal rdige. Elle ne peut faire apparatre ses comptes courants, et la valeur des parts sociales est gnralement estime pour la valeur du bien, ce qui est faux.Exemple

Associs : M : X %. Mme : Y %.

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Le diagnostic patrimonial Enfant 1 : W %. Etc. Capital : Valeur des biens : lachat. Aujourdhui. Financement : crdit ? En cours ou termin ? Revenus : Charges : Renseignements relatifs lassurance-vie Il sagit de collecter des donnes. Ce nest pas le moment de faire linventaire de tous les avantages de lassurance-vie, ou de critiquer la rdaction dune clause bnciaire, etc.Tableau 2.2Intitul du contrat/ souscripteur Date de souscription Date de versement des capitaux Clause bnciaire

Renseignements relatifs aux valeurs mobilires Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

Il sagit de connatre la faon dont sont grs ces actifs. La personne les gre-t-elle seule, ou par lintermdiaire dun professionnel ? Quelle stratgie de gestion ? Quelle rpartition gographique, sectorielle, etc. ?Exemple Sur la diversication sectorielle : services, banque assurance, distribution, btiment, ptrole, etc. Sur la diversication gographique : Amrique, Europe, Asie, etc. Sur le nombre de lignes : sil y en a beaucoup trop, si certaines sont insigniantes ou consquentes par rapport au capital, lignes en plus-values ou moins-values, etc. Sur la rpartition du couple rendement/risque : % risque, % scurit, % cot, % non cot, etc.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINESi le portefeuille est dmembr : qui de lusufruitier ou du nu-propritaire paie limpt plus-value ?2.7 La composition du patrimoine professionnel

Un schma vite bien des difcults de comprhension. Les informations comptables sont ncessaires pour apprhender la situation conomique de lentreprise, son mode fonctionnement et ses propres contraintes. Elles mettent aussi en lumire la mthode de gestion du chef dentreprise.SAS BIG Business SAS GENGRANGE 100 % A 51 % B 40 % C 33 % D

Figure 2.2 Exemples Avez-vous ralis un engagement collectif de conservation de titres : ISF/ transmission ? Existe-t-il un pacte dassocis ? Avez-vous song la transmission de votre entreprise, totalement ou partiellement ? Avez-vous des projets de dveloppement, de croissance interne ou de croissance externe ? Souhaitez-vous basculer une partie de votre richesse industrielle dans votre patrimoine priv ? Pour y parvenir, tes-vous prt intgrer un tiers au capital ? Etc.

2.8 La scalit Impt sur le revenu

Il convient de se munir des avis dimposition comme de la dclaration elle-mme. En effet, certaines informations essentielles napparaissent pas dans la premire (par exemple : ligne EE, les revenus soumis prlvement libratoire). Le contribuable a-t-il fait une demande en restitution sur le fondement du bouclier scal ? Les revenus fonciers : dclarations 2044/2072

Il peut tre intressant de dresser le tableau suivant an de mesurer la vritable rentabilit du patrimoine immobilier. Pour cela, encore faut-il prendre la valeur du bien pour son prix de march actuel.

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Le diagnostic patrimonialTableau 2.3Immeuble 1Revenus bruts avant charges Revenus bruts aprs charges Revenus nets aprs IR Valeur vnale (prix du march) Taux de rendement avant ISF Taux de rendement aprs ISF

Immeuble 2

Immeuble 3

Limpt sur le patrimoine : ISF

Assiette taxable/Tranche maximum/Montant. Vrication de loptimisation du plafonnement. Plus tard il sera toujours temps de comparer avec lutilisation du bouclier scal, la meilleure des deux parades pour rduire la pression de cet impt.2.9 Le bilan retraite

Selon lge du client et de ses proccupations, il peut tre ncessaire davoir une vision prcise de cette projection.

Section

3

LANALYSE PATRIMONIALE

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

partir du recensement patrimonial, il sagit de vrier si oui ou non ce qui a t ralis par le client est en adquation avec ses objectifs et ses contraintes de gestion. Lobjectivit de lanalyse est garantie parce quelle se fonde sur des informations incontestables, celles communiques par le client lui-mme. Cest dans cette phase que le CGP dvoile ses comptences techniques. Il peut tre confront un dilemme : comment annoncer les rsultats dun choix mal valu ? Mme si un conseiller na pas rechercher la popularit, il sait aussi ce quil advient du messager de mauvais augure. Il convient alors dadapter le fond la forme. Dans cette phase danalyse, ici encore, plusieurs formes de prsentation sont possibles. Elle doit tre adapte la situation patrimoniale du client. Certains distinguent laudit conomique de laudit juridique. Dautres auront plutt tendance suivre une mthode thmatique selon les objectifs noncs par le client.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINESection

4 LA STRATGIE PATRIMONIALE

Elle se dcline sous ses trois aspects juridiques, scaux et conomiques. Lordonnancement de ces attributs est dpendant des attentes du client. Il est difcile de prconiser une mthodologie particulire. Le CGP sadapte en permanence. Quelques prcautions de bon sens peuvent tre nanmoins nonces : Rpondre directement aux questions qui sont poses. Un client nattend pas de son conseil quil fasse un cours ou un livre sur sa problmatique. Dans ce sens, les documents de plusieurs dizaines de pages, sauf cas particuliers, sont proscrire. Ils ne rassurent et ne servent que ceux qui les rdigent. Adopter une dmarche pdagogique : le CGP est amen utiliser des notions familires pour lui mais chaque fois dcouverte par le client. Le principal reproche formul lencontre de certains conseils est le langage abscons usit. Ce nest pas un facteur positif qui incite le client sinscrire dans une stratgie, et ce quelle que soit sa pertinence. Les comparaisons de stratgie ventuellement proposes doivent sattacher prsenter les facteurs soumis la comparaison. Il sagit dviter de comparer des lments incomparables.

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Chapitre

3Pascal Pineau

La dimension motionnelle de la gestion de patrimoine

arler dune gestion globale du patrimoine, cest prendre le risque dtre gnraliste et doublier la notion de spcicit de chaque cas. Cependant, ces deux approches, globale et spcique, sont indissociables. En quelque sorte, il sagit de travailler la louche et la loupe. Faire systmatiquement ce chemin de la louche la loupe, et inversement, est ncessaire pour valider, ou non, sa solution. Cest reconnatre que cette solution nest souvent quune bauche. Cest revenir sans cesse sur ce qui est commun et sur ce qui est diffrenciant. L se trouve la critique constructive de son propre travail en tant que conseiller en gestion de patrimoine. Cest ici que lon gre langle mort de toute prise de dcision. Cest ce petit dtail anodin, plus ou moins pris en compte, qui donne la prconisation juste et pas juste une prconisation. Le principe de prcaution nous demande donc de partir de notre plus petit dnominateur commun, de ce qui nous est universel, de ce qui reprsente la gense de notre patrimoine. Il nous ramne ainsi notre premire valeur, notre premier actif : notre nom patronymique.Section 1 Section 2

P

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

Le nom patronymique, le premier titre de proprit De la proprit lutilit

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINESection

1

LE NOM PATRONYMIQUE, LE PREMIER TITRE DE PROPRIT

Ce nom est porteur de lhistoire vcue par les ntres et parfois dj lourd dimpacts sur les dcisions futures prendre. Le conseiller en gestion de patrimoine se doit dintgrer cette donne. Cest dailleurs cette donne qui lui a permis dobtenir un rendez-vous (par recommandations, par prescription ou par tlphone) pour prsenter son activit et ses services. Cest le point de dpart de toute relation humaine, commerciale et contractuelle. Mais a-t-il fait le lien avec la gestion de patrimoine si globale et si ddie ?

1 De la familleDs notre conception, les ntres nous intgrent dj dans la ligne de la famille. Ils nous projettent dans lhistoire, imaginent un mtier, un positionnement, une qualit de vie Pour assurer ce scnario, ils nous quipent souvent de leurs propres valeurs de ce qui est bien et mal, de ce qui cote et de ce qui rapporte, du degr dautonomie ou de coopration dans un projet, des droits et devoirs et de toutes les drogations possibles pour parvenir ses ns. Et pour les plus chanceux, de moyens matriels, de biens et de capitaux. chacun de prendre ou de laisser ce cadeau. Cest avec leur nom patronymique que nous allons signer et engager notre vie. Ce nom, notre nom, recouvre de nombreuses ralits : notre rputation, notre image, notre origine familiale, nos rseaux relationnels induits, notre puissance nancire, nos entits structurelles et dj nos successions prvoir ! chacun selon sa famille. Mais dj, je possde ! Et mme sans aucun actif nancier, je peux grer un potentiel. Tout nest pas crit, bien entendu, et heureusement, mais en filagramme, lespoir des ntres vibre. partir de ce constat, nous pouvons dcider, quel que soit lge dailleurs, de ne pas suivre la voie trace et de renier ce nom. Ou de le garder et de se faire un prnom. Exister

2 De limpact de notre famille sur la qualit de notre signatureCe nom nous donne aussi la qualit de notre signature : ouvrir un compte en banque, investir, devenir propritaire de biens concrets, valider les critures des autres, protger les miens, tmoigner du pass, prouver mes droits et mes devoirs

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Vers une gestion globale du patrimoineJe suis qui je signe. Mon nom patronymique devient une valeur plus ou moins reconnue des autres, voire du march. Dans une approche patrimoniale digne de ce nom, il serait dommage que le conseiller en gestion de patrimoine ne prenne pas le temps de relever les effets induits de lhistoire de ce nom. En fait, qui signe ? Monsieur D. ou Monsieur D. investi dune mission de tradition familiale de la sienne et parfois de sa belle famille ! La qualit de ma signature peut-tre une ressource, un acclrateur, un crateur de droit comme une limite mes projets, ma conception dinvestissements on na jamais fait de telles oprations, a ne se fait pas, ce nest pas bien. Do viennent ces on, a, ce ?

3 Du poids de la tradition familiale sur la stratgie patrimonialeQuel est le service rel de cette liation dans un monde en perptuel mouvement avec de nouveaux outils nanciers et de nouveaux textes de lois ? Quelle est votre stratgie patrimoniale peut se rvler une question complexe. Traduisons-la par : Existe-t-il une ligne directrice personnelle quand vous prenez des dcisions quant votre patrimoine ? Souvent, cette ligne nest pas consciente. Il peut tre important de la dnir pour mieux comprendre la motivation du client, son motif daction. Les premiers actes patrimoniaux enclenchent sils sont russis une croyance positive du dispositif de prise de dcision. La validation des lments retenus, du mode de rexion et de calcul, des conseillers sollicits se fait par la validation des rsultats souhaits et obtenus. La n justie les moyens. Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

On ne change pas un processus qui fonctionne et qui apporte le rsultat escompt. On le valide comme vrai. Ma manire de voir lenvironnement, de grer les contraintes et les opportunits est la bonne, la meilleure ! Telle est ma croyance. Bien videmment, linverse est vrai : lchec dun montage, par un effet de gnralisation, carte un systme complet de prise en compte du problme et des facteurs qui lui sont associs : un produit, une scalit, un individu, un rythme de dcision, un environnement Rares sont ceux qui analysent squence par squence ce qui est garder et ce qui est remettre en cause. Le cerveau par un raccourci (trop) rapide dcide que cest dornavant ainsi que a marche ou que a ne marche jamais . Vous remarquerez que lhonntet du cerveau nest pas toujours une donne able.

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINEAinsi, il existe une vraie stratgie (et pas toujours la meilleure) qui nous anime. Nous avons tous remarqu que les scnarios dinvestissement de certains clients sont verrouills : Jai toujours achet mes investissements avec un apport personnel de 30 % en taux xe et amortissable, alors mme si cest mieux de faire un crdit in ne, je maintiens ma dcision. Et donc, dans certains cas, la solution nest pas optimise. La gestion de patrimoine est globale, elle prend en compte des donnes qualitatives de lhistoire de vie du client son scnario de vie, le conseiller peut essayer de les traiter, de les relativiser en montrant que le contexte et les objectifs ne sont plus les mmes. Il doit surtout ne pas oublier qui signe. Le respect de la relation humaine, pas toujours porteuse de la solution la plus optimale, est la base de cet intuitu personae.

4 De la personne et de son patrimoine mesurableCe patrimoine, obtenu par hritage ou par acquisition, est vivant. Il volue, uctue et le march lui donne loccasion dtre mesur, pes, arbitr. Son propritaire est sollicit pour laborer un bilan patrimonial notamment par son conseiller (ou la concurrence qui y voit une porte dentre en vue dune dstabilisation potentielle) an de constater la bonne sant des comptes, des acquis et des ux nanciers. Tel un vrai bilan, lide est de rpertorier son actif et son passif bien entendu, mais aussi daller jusqu la prise en compte des lments personnels et professionnels. Souvent, le hors-bilan est nglig : les assurances (hors capitalisation), les responsabilits, les cautionnements, le mode rel de dtention des biens, les hritages venir Ces donnes sont incontournables, et une fois de plus, cest par ces lments que le conseiller accde la gestion globale du patrimoine. Il sagit donc bien daller au-del de ce qui pse uniquement sur le plan comptable. Le simple vendeur de produits nanciers basiques, de solution one shot ne sintresse pas ou peu ces lments presque invisibles : il na pas besoin de les prendre en compte, il naura pas grer lhistoire de sa vente. Pour le client, cest un des marqueurs de crdibilit de son interlocuteur : qui vais-je coner la gestion de mes biens ?

5 Du pouvoir de disposer de son patrimoinePossder cest avoir du pouvoir. Notamment celui de choisir : larbitrage. Pour piloter son patrimoine, dans un souci de cohrence (cest le cas le plus souvent rencontr), son propritaire, nourrit de ses expriences, dnit donc une ligne

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Vers une gestion globale du patrimoinede conduite. Cest dailleurs une des premires dcisions quil va prendre et qui peut changer dans le temps : vais-je piloter seul ou mentourer ? Quel degr dautonomie vais-je laisser au professionnel de la gestion de patrimoine pour arbitrer mandat sous gestion, accord de principe par prise davis, ratication de chaque mouvement ? Et ce degr dautonomie accord nest pas toujours li au degr de comptence de lun comme de lautre dailleurs. Cette exprience de pouvoir dlgu voire transfr selon les rsultats obtenus et leurs prix payer (en temps, en nergie, en argent, en conits), sera dterminante lors de la prparation de la transmission du patrimoine avec les dbats dmembrement, indivision, mandataire, pacte familial Ne pas reproduire les sources checs ou valider les facteurs de succs dhier aux miens. La boucle est boucle

Section

2 DE LA PROPRIT LUTILIT

1 Du patrimoine global au service dune mission spciqueQuelle est la mission de ce patrimoine, quelle est son utilit aux yeux de son propritaire ? En effet, hormis ceux qui considrent (et il y en a) que le but est davoir plus, toujours plus, dautres pensent que leur patrimoine est un outil au service de quelque chose de plus noble : la protection des leurs, la vie sans souci lors de la retraite, la possibilit de changer le monde par la ralisation dun projet, dune cration, dune invention, lindpendance pour faire ce que lon souhaite Une solution patrimoniale qui ne rpondrait pas cet aspect (peu rvl par le client car trop souvent non recherch par son conseiller) ne saurait durer travers le temps. Le conseiller passerait ainsi du pourquoi (origine de la problmatique) au pour quoi (destination de la solution) : quel en est lenjeu ?

Dunod. La photocopie non autorise est un dlit.

2 De lobjectif un besoin de gestion spciqueQuelle gestion serait la plus adapte au prol de ce client compte tenu de son objectif et de la dure estime de ralisation ? La prise de risque est aussi une histoire de vie dans sa globalit rapporter linstant prsent : lenjeu rel de son objectif. Certains clients alors quils ont largement le temps et les liquidits de se positionner sur des contrats chance moyen-long terme boycottent des solutions de types assurance-vie ou investissements en valeurs

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LE CONSEIL EN GESTION DE PATRIMOINEmobilires. Une aberration pour les professionnels, une dcision invivable pour les propritaires. La rentabilit parfois obsdante pour certains clients et conseillers nest quune donne ( faible coefcient de pondration) pour dautres. Cest une fois de plus un tout quil faut grer, le tout du client. Le prolage des actifs de type Prudent, quilibr, Offensif est un dbut de rponse dont la loi a prcis les contours pour viter les abus. Cependant, mme contrle, et mme bien borde par les textes lgaux, la gestion patrimoniale est avant tout une gestion de croyances personnelles. Se positionner sur des taux variables pour lacquisition dun immobilier locatif (dans la mesure o objectivement cest le meilleur taux et la meilleure conguration compte tenu du march) peut-tre mal vcu par un client de typologie prudent. Son interprtation pourrait tre : jachte crdit avec une dette indexe sur la bourse !

3 De la gestion