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Chaire Francqui 22 Février 2018 Les dialogues de conseil en life design : une forme renouvelée d’accompagnement à l’orientation (2 ème partie) Jean Guichard ([email protected]) 1

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Chaire Francqui – 22 Février 2018

Les dialogues de conseil en

life design : une forme renouvelée

d’accompagnement à l’orientation (2ème

partie)

Jean Guichard

([email protected])

1

Introduction : Résumé de la première partie

Les interventions de conseil en life design ont été conçues en se référant à des

modèles constructivistes-constructionnistes. A la différence des approches

antérieures du développement humain qui mettaient l’accent sur la stabilité des

personnalités individuelles dans le temps et d’un contexte d’interactions et

d’interlocutions à un autre, ces approches :

- Décrivent le sujet humain comme pluriel, parlant avec des voix différentes,

comme combinant différentes positions « je », comme fonctionnant

différemment selon les contextes, etc.

- Montrent que ce sujet humain pluriel cherche à donner unité, cohérence et

sens à sa vie, notamment par l’élaboration de certains thèmes de vie et la

construction de récits de vie autour de certaines intrigues donnant un sens à

sa vie passée et présente du point de vue de certaines perspectives d'avenir.

- Soulignent le rôle médiateur des processus de construction de sens, de (ré)-

interprétation, de symbolisation, des dialogues et des divers modes de

rapports à soi et à ses expériences, dans la détermination des conceptions de

soi et des conduites individuelles (qui ne sont donc plus considérées comme

déterminées de manière immédiate par les expériences précoces ou passées

des individus). 2

Les dialogues de conseil en life design ont été élaborés en se référant à une

synthèse de travaux sur la construction de soi (le modèle « Se Faire soi »).

Parmi ces travaux, ceux du sociologue Claude Dubar.

L’un des concepts fondamentaux de Claude Dubar est celui « d’offre

identitaire ».

Il désigne l’ensemble des catégories caractérisant les personnes

individuelles et les groupes ou collectifs sociaux, ainsi que les formes

prototypiques de narration des vies individuelles, qui ont cours à un moment

donné, dans une société donnée.

Dubar décrit l’identité subjective comme un récit qui est le produit d’une

transaction biographique.

Celle-ci est un processus par lequel l’individu relie ses différents actes

d’appartenance (de reconnaissance de soi « ainsi »), de rejet ou

« d’accommodation » de certaines attributions « stigmatisantes » dans un

totalité temporellement orientée, unifiant son parcours de vie, lui donnant une

continuité et l’ouvrant vers un certain avenir.

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Le modèle de construction des identités individuelles de Dubar

présuppose que le monde social – notamment l’offre identitaire – donne

lieu à la construction de structures mentales et de processus mentaux de

traitement de l’information. La double hypothèse suivante peut être

retenue :

- La multitude des expériences et évènements marquant la vie de

l’individu dans les contextes sociaux qui sont les siens, le conduit

à construire en mémoire un système de cadres cognitifs

identitaires correspondant à l’organisation dans son esprit (une

organisation qui est fonction de ces expériences et évènements) un

système de catégories et catégorisations sociales – et de modes de

narration des vies individuelles – en vigueur dans ces contextes

sociaux.

- Dans ces mêmes contextes, l’individu construit dans son esprit un

système de cadres cognitifs identitaires subjectifs. Ce système

constitue le fondement cognitif (en mémoire) de ses perceptions

de soi et de ses conduites dans les différents contextes où il agit,

interagit et dialogue.

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Définition :

Un cadre cognitif identitaire subjectif est une vaste

structure en mémoire à long terme organisant la mémorisation

d’informations relatives à soi dans un certain contexte

d’interaction. Cette structure – inscrite dans le système des

cadres cognitifs identitaires de l’individu – est celle de

l’organisation en mémoire de schémas de soi, de scripts

d’action, d’images propres et sociales de soi, de sensations,

d’affects, d’émotions, de sentiments, de sois possibles, etc.,

dans le contexte considéré.

Les cadres cognitifs identitaires subjectifs forment (sauf

cas pathologiques de « soi dissocié ou moi clivé ») un système

dans la mémoire à long terme de l’individu. Ce système est le

substrat en mémoire à long terme de son identité subjective (que l’on va définir comme son système de formes identitaires

subjectives).

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Cette hypothèse de l’existence en mémoire à long terme d’un système de cadres cognitifs identitaires subjectifs permet de rendre compte d’observations empiriques telles que celles de Michel Foucault :

« Le sujet n’est pas une substance. C’est une forme, et cette forme n’est pas partout, ni toujours, identique à elle-même. Vous n’avez pas à vous-même le même type de rapports lorsque vous vous constituez comme sujet politique qui va voter ou qui prend la parole dans une assemblée et lorsque vous cherchez à réaliser votre désir dans une relation sexuelle. Il y a sans doute des rapports et des interférences entre ces différentes formes du sujet, mais on n’est pas en présence du même type de sujet. Dans chaque cas, on joue, on établit à soi-même des formes de rapport différentes » (Foucault, 1984, repris dans Foucault, 1994, Vol. IV, pp. 718-719).

Pour qu’un individu puisse ainsi se rapporter à lui-même de manières différentes selon les moments et les contextes, il faut, d’abord, qu’il puisse s’appuyer sur différentes structures cognitives dont chacune est la mémoire d’une des formes dans lesquelles il se constitue. 6

Mais… il faut aussi que ces différentes structures soient reliées entre elles = qu’elles forment un système de cadres cognitifs identitaires subjectifs.

La mémoire à long terme d’un individu comprend un agencement de structures cognitives dont chacune est relative à lui-même dans l’un de ses domaines d’expériences actuels (« moi-ingénieur », « moi-père de famille », « moi-militant syndical », etc.), ou passés (« moi-étudiant… », « moi-fils de… », etc.), ou anticipés (« moi-retraité animant un gite rural en Lozère », etc.).

Mais, pour qu’un tel système soit unifié (=pour que l’individu ne vive pas l’expérience subjective d’un soi divisé, Laing, 1965) des liens cognitifs doivent exister, dans sa mémoire à long terme, entre ses différents cadres cognitifs identitaires subjectifs.

Ces relations entre CCIS se fondent sur certains attributs qui, dans un CCIS donné, renvoient à d’autres CCIS. Exemple : La mémoire à long terme d’une personne peut comprendre le CCIS « moi ingénieur ». Celui-ci peut inclure l’attribut « excellent professionnel » qui peut être cognitivement relié aux attributs suivants : « excellent professionnel au dépend du temps consacré à l’éducation de mes enfants » (lien avec le CCIS père de famille) et « excellent professionnel dont toutes les qualités ne sont pas reconnues dans l’entreprise compte tenu de mon engagement syndical » (lien avec le CCIS militant syndical).

Certains de ces liens cognitifs révèlent la structure à un moment donné du système des CCIS de la personne. Ainsi, l’attribut « excellent professionnel au dépend du temps consacré à l’éducation de mes enfants » tend à indiquer la centralité du CCIS « moi-ingénieur » et le caractère plus périphérique de « moi-père de famille ».

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Le système des cadres cognitifs identitaires est un substrat cognitif inféré visant à décrire des structures cognitives en mémoire à long terme. De telles structures sont inconscientes.

Le système des cadres cognitifs identitaires subjectifs d’une personne est le fondement cognitif – non conscient – de ce que l’on peut nommer son identité subjective : celle-ci, qui est toujours plus ou moins explicite aux yeux d’une personne, correspond à l’ensemble de ses manières d’être, d’agir, de percevoir (elle-même et autrui), de ressentir, etc., dans ses différents contextes de vie présents, passés ou anticipés. L’identité subjective d’une personne est ainsi définie comme son système dynamique de formes identitaires subjectives (dont les bribes narratives du langage intérieur de l’individu maintiennent la structure en tension) : un système dont la personne peut prendre une conscience plus ou moins vive selon les contextes et les moments de son existence en s’appuyant sur son système de cadres identitaires subjectifs en mémoire à long terme. 8

La relation entre une forme identitaire subjective et le cadre cognitif identitaire sous-jacent est celui d’une activation-actualisation.

La conduite d’une personne dans une certaine situation (ce qu’elle perçoit et ressent, son agir, etc.) est déterminée par une activation immédiate du cadre cognitif identitaire subjectif qui lui permet de décoder la situation (l’ingénieur « fonctionne » spontanément selon les dimensions de son cadre cognitif identitaire subjectif « moi-ingénieur » quand il est au travail).

L’activation d’un cadre cognitif est indissociable d’une certaine actualisation de ce cadre, car aucune situation actuelle ne correspond en tous points aux éléments qui, encodés dans la mémoire à long terme, permettent de s’y repérer et d’y agir.

Certaines situations impliquent une actualisation significative du cadre cognitif identitaire subjectif qu’elles sollicitent (exemple, pour l’ingénieur : le recrutement d’un nouveau supérieur hiérarchique).

En utilisant le vocabulaire de Jean Piaget, on peut dire que la construction et le fonctionnement de soi dans une certaine forme identitaire subjective à un moment donné conduisent à accommoder certains attributs du cadre cognitif identitaire subjectif en mémoire à long terme et que de telles accommodations sont ensuite assimilées par ce cadre cognitif qui s’en trouve de ce fait modifié.

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Le système des cadres cognitifs identitaires subjectifs d’une personne est le « conservatoire » de son identité subjective. Il se transforme relativement lentement. Il évolue :

- En fonction des actions, interactions, dialogues, émotions, sensations, etc., de la personne dans les différentes situations de sa vie quotidienne.

- En fonction des transformations de l’offre identitaire de la société où il interagit. C’est-à-dire, en se plaçant au point de vue des structures organisant la mémoire d’une personne : en fonction des transformations du système des cadres cognitifs identitaires de cette personne. Exemple : le général SS Otto Ohlendorf, dont le système des formes identitaires subjectives était organisé autour du projet d’être l’incarnation de la forme identitaire subjective « moi le nazi parfait » (cf. l’analyse sa biographie par Philippe Malrieu, 2003), ne pouvait se concevoir et se conduire en relation avec une telle forme identitaire avant les années 1920 et l’émergence du mouvement nazi (et donc de la catégorie sociale, puis du cadre cognitif identitaire correspondant).

- En fonction des caractéristiques de la mémoire de la personne : le système des cadres cognitifs identitaires subjectif d’une personne peut s’effacer complétement, comme on l’observe dans la phase terminale de certaines pathologies mentales affectant gravement la mémoire. 10

Le système des cadres cognitifs identitaires subjectifs d’une personne peut aussi être remanié à l’occasion d’interactions de conseil. Notamment : à l’occasion d’un dialogue de conseil en life design.

2.2 L’identité subjective comme système dynamique de formes

identitaires subjectives

Un dialogue de conseil en life design (DCLD) vise à aider un demandeur à formuler des perspectives à partir desquelles il peut donner sens à son identité subjective. Celle-ci étant conçue comme un « système dynamique de formes identitaires subjectives » (ancrées dans un système de cadres cognitifs identitaires subjectifs), l’élucidation de telles perspectives par le demandeur suppose un travail d’analyse de ses principales formes identitaires subjectives (c’est-à-dire : une prise de conscience de certains attributs essentiels constitutifs du cadre cognitif identitaire subjectif sous-jacent) et des relations que ces formes entretiennent entre elles, en vue d’y repérer certaines communautés d’attentes que le demandeur peut alors formuler.

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Le travail du demandeur lors d’un DCLD consiste en une réflexion sur son système de formes identitaires subjectives. Cette réflexion produit une activation-actualisation des différents cadres cognitifs identitaires subjectifs sous-jacents, constitutifs de son système de cadres cognitifs identitaires subjectifs.

Cette activation-actualisation peut produire des transformations de certains de ces cadres et – dans le cas où la réflexion du demandeur aboutit à la formulation de perspectives auxquelles il ne songeait pas au départ : de perspectives parfois constitutives d’une véritable conversion existentielle – à un remaniement profond de son système de cadres cognitifs identitaires subjectifs.

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- Un système de formes identitaires subjectives L’identité subjective est décrite comme formant un « système dynamique

de formes identitaires subjectives ». Autrement dit, l’identité subjective est vue à la fois comme plurielle (faite de formes identitaires subjectives), unifiée (un système) et en évolution (dynamique). Une forme identitaire subjective (FIS) est définie comme étant à la fois:

- Un ensemble de manières d'être, d'agir, d'interagir et de dialoguer en lien avec un certain contexte,

- Un ensemble de perceptions et conceptions (liées à ce contexte) de soi, des autres et d’objets significatifs,

- Et un ensemble d’affects, de sensations, de sentiments, d’émotions, etc., éprouvés « ainsi » dans ce contexte.

Exemple: quand une jeune fille dit, ”moi, au lycée, ce qui m’intéresse, c’est de parler avec me copines”, elle commence à décrire sa FIS « moi-lycéenne ».

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Une FIS (parfois deux) a/ont généralement plus d’importance que les autres dans le système des FIS d’une personne à un moment donné de sa vie. Une FIS est centrale dans le système des FIS d’une personne, quand :

- Elle espère réaliser quelque chose d’éminemment significatif pour elle « en tant

que telle » : quand cette FIS correspond à un domaine de la vie où la personne

veut atteindre un certain état d’excellence donnant sens à sa vie.

- Elle éprouve des affects comptant beaucoup pour elle en tant que telle,

- D’autres FIS de son système de FIS trouvent (au moins partiellement) leur sens

par rapport à elle. Exemple : « je fais de la natation (FIS périphérique de nageur)

pour être en forme pour réussir mes examens (FIS centrale d’étudiant) ».

- Cette FIS correspond au projet d’atteindre un objectif futur qui importe pour la

personne. Cet objectif correspond à une FIS anticipée que cette personne espère

construire.

Exemple :

Quatre jeunes sportifs de haut niveau

s'entraînant intensément pour devenir des champions

dans leurs disciplines ont été interviewés (Szejnok,

2012).

Pour chacun d’eux, la figure du champion sur le

podium olympique était un constituant majeur d'une

FIS anticipée qui donnait cohérence et sens à leur

actuelle vie ascétique.

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Les FIS, qui comprennent de telles attentes de réalisation de soi, tiennent une

place centrale dans l’organisation du système dynamique des formes identitaires

subjectives d’une personne à un moment donné.

Ce système est alors organisé en fonction de cette perspective de réalisation de

soi qui donne sens à sa vie à ce moment-là. Dans de nombreux cas, cette FIS

centrale est reliée à une FIS passée qui joua un rôle important dans la vie de la

personne ou qui correspond à des attentes majeures, relatives à l’individu concerné,

de la part de personnes qui comptent pour cet individu. Par exemple :

La plupart des sportifs de haut niveau ont découvert leur sport (et la

compétition) par l’entremise d’un membre de leur famille (père, mère, oncle, etc.)

constituant une figure à laquelle ils s'identifiaient quand ils étaient enfants.

McColgan. Mère & fille.

Course à pied.

Prost. Père et fils.

Coureurs automobiles.

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La diapositive suivante présente une image idéale-typique de la vue que pourrait avoir un jeune homme de son système de Formes Identaires Subjectives à l’issue d’une série de dialogues d’accompagnement à l’orientation. C’est un exemple fictif construit à partir de différents cas décrits par des chercheurs en sciences humaines. Notamment :

Jellab, A. (2001). Scolarité et rapport aux savoirs en lycée professionnel. Paris : PUF.

Zéroulou, Z. (1988). La réussite scolaire des enfants

d’immigrés. L’apport d’une approche en termes de mobilisation. Revue Française de Sociologie, 29, 447-470.

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Le Système des Formes Identitaires

Subjectives de Hasni (un exemple

fictif fondé sur des cas réels)

Hasni, 17 ans, né en France, de

parents originaires du Maroc, est

élève en Bac professionnel systèmes

numériques.

Chaque cercle représente une FIS

Les 4 cercles du niveau intermédiaire figurent des FIS

correspondant à des activités actuelles de Hasni

• Cercle central: FIS “moi, lycéen de Bac Pro systèmes

numériques s’anticipant comme futur étudiant”

• Cercle droit: FIS “moi, employé les week-ends dans une PME

d’assistance informatique à domicile”

• Cercle avant: FIS “moi, aimant Nathalie”

• Etc.

L’axe central représente le passé (bas), le présent (niveau

intermédiaire) et le futur (sommet)

• Cercle inférieur: FIS “moi, fils d’immigrés du Maroc,

attendant de la réussite scolaire de leurs enfants, intégration et

ascension sociales”

• Cercle immédiatement supérieur: FIS “mes expériences de

jeune dans ma cité et à l’école”

• Cercle sommet centre: FIS anticipée “moi, étudiant en BTS ou

IUT”

• Cercle sommet droit: FIS anticipation professionnelle:

technicien en informatique”

• Cercle sommet avant: FIS anticipée “moi, en couple avec des

enfants”

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L’exemple d’Hasni est fictif.

Les systèmes de formes identitaires subjectives que les demandeurs élucident au cours de dialogues de conseil en life design ne sont pas toujours aussi riches, cohérents et ordonnés autour d’une perspective articulant de manière aussi claire les expériences passées et présentes avec des anticipations aussi nettes et consonantes entre elles.

Mais ces systèmes peuvent s’en rapprocher.

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- Un système dynamique (de FIS) Contrairement à ce que le schéma précédent peut laisser croire, le système des FIS d’une personne n’est pas une structure immuable.

Deux catégories de facteurs en interaction jouent un rôle dans sa

transformation. Les premiers correspondent à une temporalité relativement lente : Le système

de FIS d’une personne évolue en fonction des changements de son système de cadres cognitifs identitaires, c’est-à-dire en fonction de l’évolution dans sa mémoire à long terme de l’organisation de ses informations relatives à l’offre identitaire des contextes sociétaux où il interagit.

Exemple : Otto Ohlendorf (évoqué précédemment) n’a pu se construire dans la forme identitaire subjective du « parfait nazi » avant que cette catégorie sociale ne se diffuse suffisamment (le mouvement nazi est créé en 1920) et avant qu’Ohlendorf ne l’assimile à sa manière dans son système de cadres cognitifs identitaires.

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Seconde catégorie de facteurs jouant un rôle dans la transformation du système des FIS d’une personne :

- Tous les changements et expériences qui marquent le cours de sa vie et,

- La manière dont cette personne les ressent et interprète (en relation avec l’évolution de son système de cadres cognitifs identitaires).

Le cours d’une vie est en effet marqué par toute une série d’apprentissages,

d’évènements, de changements (maturations, réussites, échecs, accidents, rencontres, vieillissement, etc.) formant les expériences de vie de la personne.

Ces expériences jouent un rôle fondamental dans les transformations du système des FIS d’une personne à la fois :

Directement (par exemple : à cause d’un accident une personne ne peut plus exercer son métier)

Et de manière indirecte, c’est-à-dire en fonction de la façon dont la personne se rapporte à l’expérience en question (la ressent et l’interprète), en relation avec la forme de réflexivité qu’elle privilégie alors.

Deux formes de réflexivité peuvent être distinguées : la réflexivité duelle et la réflexivité trine. La réflexivité duelle

L’exemple précédent des sportifs de haut niveau est une illustration du processus de réflexivité duelle. Elle a été décrite par de nombreux auteurs. Notamment par Jacques Lacan (sous le nom de stade du miroir) (1966), Erik Erikson (1959) et Michel Foucault (à propos de techniques de soi ; Foucault, 1982a, 1982b, 1983a, 1983b, 1984, 1988, 1994a, 1994b, 2008).

Il s’agit d’un mode de rapport de soi (comme sujet) à soi (comme objet pour soi) DU POINT DE VUE D’UN CERTAIN ÉTAT

DE PERFECTION OU D’UN CERTAIN IDÉAL

QUE LA PERSONNE VEUT ATTEINDRE. Ce mode de rapport à soi a pour conséquence que la personne définit et

met en œuvre certaines activités ou conduites en vue d’atteindre cet état de perfection.

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Exemple : certains étudiants en sociologie français se définissaient, quand ils n’étaient encore qu’étudiants, comme « sociologues », alors que d’autres se disaient être « étudiants » ou « étudiants en sociologie » (Odile Piriou et Charles Gadéa, 1999).

Les premiers décrivaient le sociologue qu’ils considéraient déjà être à l’image des traits caractéristiques du « grand sociologue » Pierre Bourdieu. Ces étudiants se voyant « sociologues » réussissaient mieux dans leurs études (ils obtenaient leur Master) que les autres qui, eux, avaient tendance à les abandonner.

La réussite des premiers peut s’expliquer par un plus grand investissement personnel dans leurs études, qu’ils percevaient comme le travail du sociologue en devenir qu’ils considéraient être. L’idéal à atteindre peut correspondre à des récits de vies « exemplaires », faisant partie de l’offre identitaire : des récits qui précisent aussi les actes à accomplir et les conduites à adopter pour atteindre cet état de perfection.

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La réflexivité duelle est un facteur de stabilisation du système de FIS d’un individu qui, lorsqu’il la privilégie, oriente sa vie en vie en vue d’atteindre cet objectif.

Cette réflexivité peut rester dominante, alors que les évènements la démentent. La personne raisonne alors selon un processus que Bernadette Dumora (1988, 1990) a nommé une logique de l’illusion : la croyance qu’un évènement extraordinaire (une sorte de miracle) se produira qui lui permettra d’atteindre son objectif.

Le produit de cette réflexivité duelle peut aussi, à la suite de l’entrée en jeu de processus de réflexivité trine, être réinterprété et donner lieu à des considérations s’inscrivant dans un thème de vie de la personne.

Par exemple, certains des étudiants en sociologie qui se voyaient sociologues devinrent éducateurs spécialisés. Ils déclarèrent alors qu’ils exerçaient cette fonction « en sociologues » : c’est-à-dire en étant plus sensibles que leurs collègues aux facteurs et processus sociaux en jeu dans les conduites individuelles (Piriou & Gadéa, 1999).

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Seconde forme de réflexivité jouant un rôle dans l’évolution du système des FIS : La réflexivité trine Cette réflexivité a été nommée ”trine” (Charles S. Peirce. Cf. Colapietro, 1989 et Francis Jacques, 1982) car la réflexion y prend la forme d’un dialogue continué à trois positions au cours duquel « je » dit à « tu » et « tu » répond à « je », ou bien « je » et « tu » se réfèrent à « il / elle ».

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Le dialogue de la réflexivité trine peut être intra-individuel (la personne qui réfléchit à une question entre en dialogue avec elle-même) et/ou interindividuel. Dans les deux cas, le dialogue est organisé de cette façon :

- « Je » dit à « tu » (« quelque chose ») (tu = un autre ou lui-même), - « Tu » comprend « quelque chose » à propos du « quelque chose »

que « je » a énoncé. - Ce que « tu » comprend du « quelque chose » que « je » a énoncé a

été nommé par Peirce son « interprétant ». - En s'appuyant sur cet interprétant, « tu » répond « quelque chose »

à « je », - « Je » produit alors un nouvel interprétant : ce que « je » comprend

à propos du « quelque chose » que « tu » répondit. - Et ainsi de suite…

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Un dialogue interindividuel est toujours en même temps intra-individuel :

Quand « je » dit quelque chose à « tu », « je » (se plaçant au point de

vue du « tu » de l’interlocuteur) se demande si « tu » comprend exactement ce que « je » veut dire. Autrement dit : « je » considère ce qu’il dit du point de ses potentielles compréhensions par d’autres « tu » (dont celui de l’interlocuteur).

Tant dans les dialogues interindividuels qu’intra-individuels, à chaque tour de parole, un écart se produit, dans l'esprit de la personne qui dialogue, entre ce que « je » dit et ce que « je » entend qu’il/elle pourrait avoir dit du point de vue de divers « tu ».

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Ces différents « tu », dans l'esprit de cette personne peuvent être: « Tu » : ce que la personne qui dialogue croit que son interlocuteur pourrait comprendre », « Tu »: ce qu'une autre personne réelle de son entourage pourrait comprendre ou a déjà effectivement compris dans le passé, « Tu » : ce que la personne elle-même dans d'autres circonstances de sa vie pourrait comprendre, « Tu » : etc. Ce processus crée, dans l'esprit de la personne en dialogue, une polyphonie de résonances des différents « tu », faisant écho à ce que « je » a dit.

Ces résonances suscitent chez cette personne des affects (émotions, sentiments, etc.) qui varient en nature (fierté, honte, regret, remords, colère, joie, tristesse, etc.) et en intensité en fonction des « tu » par rapport auxquels elles résonnent : des affects qui jouent un rôle important dans le dynamisme du dialogue. 27

La réflexivité trine est mobilisée lorsqu’une personne s’interroge sur les perspectives futures qui pourraient donner sens à sa vie.

Notamment lorsque le discours intérieur, qui organise habituellement sa vie et ses rapports au monde (son système de formes identitaires subjectives), se révèle insuffisant pour faire face à une transition. La personne doit alors réécrire la grammaire de ce discours. A cette fin, elle s’engage dans des dialogues avec elles-mêmes, avec des proches ou avec un conseiller.

Ces dialogues la conduisent à narrer certaines expériences (événements, pensées, émotions, etc.) de sa vie passée, présente ou éventuellement future.

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La narration de chacune de ces expériences lors d’un dialogue :

- l’ouvre à une multiplicité de nouvelles significations potentielles et, - provoque des affects (plus ou moins variés et plus ou moins intenses)

chez la personne qui les narre. Ce double phénomène ouvre la voie :

- A la production de rapprochements entre expériences. (Par exemple quand la narration de deux expériences conduit la personne à se dire qu’elles ont de nombreux points communs ou bien quand cette narration provoque chez elle des affects semblables).

- Ou, inversement, à l’établissement de distinctions entre catégories d’expériences,

- Ou, parfois, à des prises de position du narrateur. (Par exemple quand il en vient à se dire qu’il doit transformer en fierté une honte ressentie lors de certaines expériences).

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Au cours de ce processus, chacune des expériences narrées est d’abord « désenchâssée » de certaines des circonstances de vie particulières où elle advint.

Ce désenchâssement l’ouvre à de nouvelles significations potentielles et

produit divers affects chez le narrateur. Ces nouvelles significations et ces affects sont à la base de possibles mises en

relation de l’expérience de vie narrée avec d'autres (« désenchâssées » de la même manière).

En utilisant la métaphore de la narration, on peut dire que l'histoire de chaque expérience est d'abord déconstruite (une conséquence de la polyphonie des résonances des différents « tu » et de la diversité des affects qu’elle provoque), puis reconstruite par des mises en relation avec d’autres expériences qui sont rendues possibles par les similarités des significations perçues et des affects alors éprouvés.

Les personnes élaborent ainsi certaines perspectives d’avenir potentielles susceptibles de donner sens à leur vie.

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2.3 « Primum relationis » : la dynamique d’un dialogue de conseil en life

design

Dans un dialogue de conseil, la « polyphonie de résonances des tu » prend une ampleur exceptionnelle, compte tenu de la particularité de la relation entre les deux interlocuteurs. Primum relationis (Francis Jacques, 1982) : dans tout dialogue, la relation est première : c’est elle qui institue certaines positions dans l’esprit des personnes qui dialoguent.

Conséquence : dans les dialogues de la vie quotidienne, nous dialoguons d’une manière relativement « prédéterminée ». Il s’agit, par exemple, d’un dialogue (effectif ou imaginaire) de ces deux époux, ou de celui de cet étudiant et de son professeur, etc. Et les « je », les « tu » et « il/elle » produits lors de ces dialogues portent la marque de cette détermination première : ce sont des « je-tu-il/elle » de ces dialogues habituels entre ces deux époux, ou bien ceux déterminés par les rôles d’étudiant et de professeur tels que les incarnent ces deux personnes, etc.

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La situation est différente dans un dialogue de conseil en life design. L’alliance de travail y institue une relation entre une personne (devenant

par cette mise en relation : un demandeur) qui dialogue avec elle-même, grâce au soutien d’un dialogue avec un conseiller, c’est-à-dire avec une autre personne dont la seule détermination (de par la nature de cette relation) est d’être-là pour l’accompagner dans son dialogue avec elle-même.

Une telle relation donne la possibilité de créer des nouvelles relations « je–tu »

dans l’esprit du demandeur : il peut ainsi de sortir des sentiers battus des dialogues de sa vie de tous les jours en produisant de cette manière de nouveaux « je », qui sont d’abord des « je » à l’essai. Ce phénomène est l’une des sources majeures de l’efficacité de cette méthode d’accompagnement.

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Une illustration prototypique de la polyphonie de résonances des « tu » : Le dialogue de conseil en life design d’Hamza

Hamza était un lycéen de classe terminale scientifique (la filière de formation la plus

valorisée en France). Il s’adressa à la conseillère en lui demandant dans quelles filières d’études

supérieures courtes il pouvait s’inscrire, compte tenu de la médiocrité de ses résultats scolaires. Lesquelles pouvaient l’intéresser ? Quels étaient leurs débouchés ?

A l’occasion de la construction de l’alliance de travail, la conseillère lui proposa de s’engager dans un dialogue de conseil en life design. Il accepta.

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Le dialogue s’organisa d’une manière habituelle… Ce qui consiste demander d’abord au demandeur d’indiquer les domaines

d’activités, les expériences, les évènements, etc., qui tiennent une place importante dans sa vie d’aujourd’hui. Puis de renouveler ce questionnement pour sa vie passée et ses espérances et anticipations.

Quand les principales catégories d’expériences significatives ont été identifiées, le demandeur est invité à choisir l’une de celles qui importent particulièrement pour lui, puis de « parler de lui en tant que tel », c’est-à-dire de narrer au conseiller la manière dont il agit, interagit, perçoit, ressent, se rapporte à lui-même et aux autres, ses attentes, etc., dans ce domaine d’expériences. Cette narration est une description (produisant une prise de conscience) de la FIS correspondant à cette catégorie d’expériences.

Le travail se poursuit par des narrations semblables relatives à d’autres catégories d’expériences choisies par le demandeur. Comme on l’a indiqué, ces narrations le conduisent à éprouver certains affects et à faire des rapprochements, des comparaisons, des distinctions, etc. entre certains points de ses descriptions : des affects, rapprochements, comparaisons, distinctions, etc., qui forment le soubassement de perspectives d’avenir qui s’esquissent ainsi.

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En qui le concerne, Hamza (Gautier, 2012) expliqua que sa vie actuelle comprenait quatre principales sphères d’activités : lycéen de terminale scientifique, entraîneur de jeunes footballeurs, soutien scolaire pour des élèves en difficulté et se préparant au brevet de sauvetage en mer.

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Quand la conseillère lui suggéra de parler de lui en tant que lycéen, il déclara que ce qui donnait sens à sa vie au lycée, c’étaient les camarades auprès desquels il était très populaire, que les cours l’ennuyaient beaucoup, qu’il voyait peu d’intérêt dans la plupart des disciplines scolaires, qu’il ne travaillait pas de manière efficace et que, dans cette situation, il pouvait tout au plus espérer poursuivre des études supérieures courtes dans un domaine appliqué (IUT), sans bien voir lequel, et sans être attiré particulièrement par de telles études. Il précisa que cette attitude était l’objet de conflits avec ses parents. En résumé, au début des dialogues, la FIS « lycéen » de Hamza correspondait à des attentes très limitées relatives à son avenir.

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La situation était différente dans les trois autres catégories d’expériences qu’Hamza avait identifiées comme étant importantes dans sa vie actuelle (entraîneur de jeunes footballeurs, soutien scolaire pour des élèves en difficulté et se préparant au brevet de sauvetage en mer).

En analysant chacune d’elles en vue de formuler la FIS qui y correspondait, Hamza rapprocha les différentes activités dans lesquelles il s’investissait et produisit un concept interprétatif les englobant : un interprétant correspondant à une perspective d’avenir ayant un sens pour lui.

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L’examen du processus dialogique qui permit à Hamza d’arriver à une telle conclusion, montre :

- (1) qu’il produisit alors ce qui pourrait être appelé différents « je de récit » :

Je fais du soutien scolaire,

J’entraîne des jeunes footballeurs,

Je prépare le brevet de sauvetage en mer.

- (2) qu’il entendit ces différents « je de récit » du point de vue d’un ensemble de « tu » :

« tu » : ce qu’il imaginait que la conseillère entendait et pouvait avoir compris ;

« tu » : d’autres personnes de son entourage qui pourraient l’entendre dire cela (et pourraient commenter « ainsi » ce que il a dit ou qui, de fait, l’avaient déjà commenté « ainsi » dans le passé).

« tu » : Hamza lui-même s’entendant dire cela ;

Etc.

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Cette polyphonie de résonances des « tu » faisant écho à ces différents « je de récit » - qui caractérise la réflexivité trine - permet au bénéficiaire de les rapprocher et de les comparer synchroniquement (actuellement, je fais ceci et je fais aussi cela) et diachroniquement (actuellement, je fais ceci et précédemment, je faisait cela) et, ainsi, de produire un interprétant (provisoirement) final relatif à ce que ces « je » de récit ont en commun : c’est-à-dire une certaine interprétation attribuant un sens commun à ces différents « je » de récit.

Ce « je » interprétant (provisoirement) final est un « je » plus englobant.

Ainsi, Hamza dit quelque chose comme : ce « je » qui

fait ceci et ce « je » qui fait cela et encore ce « je » qui fit cela, etc., me montrent que « JE » désire être utile aux autres.

Ce je plus englobant est aussi un « je » plus assuré de

soi : Pas de doute, « c’est bien ce « JE » que je suis ».

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Pour que ce « je englobant et plus assuré », produit de la réflexivité trine, devienne un « je sujet d’action » (pour que le narrateur devienne un acteur, pour qu’il donne lieu à un engagement de la personne en vue de faire advenir ce « je » ou d’exceller en tant que tel), il faut encore que ce « je » soit investi affectivement. Ce « je » doit être l’objet d’une identification. Il faut que la personne rêve de devenir ce « je », qu’elle s’imagine, désire, être ce « Je ». C’est là qu’interviennent les processus de réflexivité duelle. Ceux-ci permettent à la personne de se constituer comme un objet pour elle-même, du point de vue de certains idéaux qu'elle veut atteindre. Chez les adolescents et les adultes émergents (mais pas seulement chez eux), cet idéal correspond généralement à une certaine FIS anticipée liée à l'image d'un personnage auquel ils s'identifient. Cette FIS anticipée et désirée joue alors un rôle décisif dans l'organisation de leur système de formes identitaires subjectives.

Ce passage de la réflexivité trine à la réflexivité duelle est explicite dans les dialogues d’Hamza. Au cours de la première rencontre avec la conseillère, Hamza avait envisagé à plusieurs reprises la poursuite d’études de médecine comme une vague possibilité n’ayant pas de chances d’aboutir, compte tenu de la faiblesse de ses résultats scolaires.

Lors de la deuxième rencontre, Hamza vint avec une liste relative à ce qu’il attendait de sa future vie professionnelle et il déclara au tour de parole 142 :

« Voilà ! Je me vois médecin. Et… heu… ma vie de famille ». Le conseillère s’étonna : (143) « D'accord. Ok ! Et alors là, tu m'expliques ? ». Hamza prit sa liste : (144) « Ben là, c’était 10 choses importantes dans le métier » et il

exposa les trois premiers critères qu’il avait indiqués : (1) un revenu suffisant, (2) des défis à relever, (3) une reconnaissance sociale.

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Au tour de parole 180, Hamza énonça un 4ème critère. Un critère qui circonscrit un domaine professionnel (et en rejette d’autres) : « Voilà... Etre utile envers les autres… ». 181 (Conseillère) : « Tu ne pourrais pas être… Heu… J’sais pas moi… Un métier… ? Heu… ? Acheteur dans une entreprise ? ». 182 : (Hamza) : « Si ! Mais… » ; 183 (Conseillère) : « Si… ? ». 184 (Hamza) : « Quand on parle d'aider les autres, médecin ça…, ça vient ! Soigner les gens, c’est la première idée qu'on se fait…. Je pense ? ». 185 (Conseillère) : « Hum… Et au niveau de tes valeurs c’est important ça ? ». 186 (Hamza) : « Ouais ». 187 (Conseillère) : « Hum… Et tu as l'impression qu'il y a certain travail où on n'est pas à utile ? À la société ? ». 188 (Hamza) : « Si ! [Dans] tous les "travails" je pense qu'on est utile. Mais… Après… C’est personnel : dans certains travails on a l'impression d'être plus utile que dans d'autres ». 189 (Conseillère) : « Hum… ». 190 (Hamza) : « Moi, médecin, JE SAIS que c'est mon sentiment ».

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Hamza ajouta (au tour de parole 404) : « Maintenant (…) je pense déjà à comment je vais m'y prendre [pour réussir dans mes études de médecine] ».

Si Hamza passa ainsi sans transition de « être utile envers les autres » (un interprétant qu'il construisit à partir des connexions qu’il fit entre ses trois domaines de vie les plus importants) à un processus de réflexivité duelle : « Je me vois médecin », c'est sans doute parce que, comme il l'avait dit plus tôt, son père lui avait répété à diverses reprises : « Je te verrais bien médecin ».

En d'autres termes, l’analyse par Hamza de ses domaines de vie importants le conduisit à produire un interprétant correspondant à une FIS anticipée concordant avec les attentes de son père.

Hamza en conclut que la seule manière de parvenir à atteindre cet objectif était de transformer sa manière d’être lycéen (sa FIS « moi-lycéen ») et, par ricochet, ses autres FIS (notamment de sportif) qui l’empêchaient d’obtenir les résultats scolaires requis pour réussir des études supérieures de médecine. Il précisa tous les changements qu’il devait faire sur un schéma (diapositive suivante).

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Schéma de Hamza. « Ma vie passée » (en haut), « comme elle doit être maintenant » (au milieu) et « le futur que j’imagine pour moi » (en bas). Trois diagrammes de son système de FIS : le 1er au début du DCLD et les deux autres à la fin.

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Hamza s’en tient à ce programme. Il transforma considérablement sa FIS lycéen : il fit des fiches résumant et structurant les cours, il se rendit chaque samedi matin à la bibliothèque pour y travailler sans téléphone cellulaire, etc. Il supprima provisoirement ses autres activités.

A la fin de l’année, il obtint une mention à son baccalauréat et entra en

faculté de médecine l’année suivante. Ces deux réflexivités ne se combinent pas toujours d’une manière aussi harmonieuse lors d’un DCLD.

Dans certains cas, les processus de réflexivité duelle jouent un rôle si important dans l'organisation du système des FIS d'un individu qu'il ne lui est pas facile d'abandonner une perspective d'avenir ainsi cristallisée, une perspective ayant donné sens à sa vie pendant une longue période.

C’est ce que montre le DCLD avec Thomas (Piraud, 2009). Thomas était un lycéen de première scientifique qui s’était engagé dans des activités de coureur cycliste amateur. Pendant des années, il s’entraîna en s’imaginant porter dans l'avenir le maillot jaune sur le podium du Tour de France: il s’identifia au personnage du vainqueur du Tour de France, via un processus de réflexivité duelle (il se voyait ainsi en imagination). Cette identification lui permit de s'engager dans une intense activité physique pour se préparer à la profession de coureur cycliste.

Thomas rencontra la conseillère après s’être rendu compte qu’en dépit de ses efforts considérables, il ne parviendrait jamais à réaliser ce rêve.

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Les débuts du dialogue portèrent principalement sur la question de savoir comment annoncer cette conclusion à son entraîneur qui, d’après Thomas, le VOYAIT un peu comme SON PROPRE FILS.

Par la suite, Thomas produisit

toute une série d’interprétants – c’est-à-dire de perspectives d’avenirs possibles – lui permettant d’ordonner de diverses manières certains événements qui marquèrent ses expériences passées.

À chaque occasion, Thomas sélectionna, pondéra et articula d'une manière particulière certaines de ses expériences de sa vie.

Cela se traduisit par l'émergence et la

considération des formes identitaires

subjectives anticipées potentielles (=

des interprétants de différentes

sélections d'événements de sa vie

arrangés, à chaque fois, d'une manière

spécifique) :

Joueur de football professionnel ?

Militaire ?

Coach pour sportifs ?

Kinésithérapeute pour sportifs ?

Diététicien

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Cependant, aucune de ces perspectives d’avenir ne semblait suffisamment attractive à Thomas pour qu’il s’engage dans sa réalisation… Deux ans après la 1ère rencontre avec la conseillère, Thomas passa le concours d’entrée dans la Gendarmerie : un emploi qui correspondait – selon sa représentation intime de cette fonction (= le sens personnel qu’il donne à cette activité professionnelle) (Guichard, 2007 ; 2011) – à son désir d'ordre, à son intérêt pour les activités sportives, et son souci d’autrui. Ainsi : certains demandeurs peuvent avoir des difficultés à formuler une perspective qui leur apparaît suffisamment significative et désirable pour qu’il puisse s’y investir. Tout s’est passé, pour Thomas, comme s’il ne parvenait pas à s’identifier au personnage correspondant à chacune des FIS qu’il produisait, alors que Hamza s’était immédiatement « vu » dans celui de médecin.

Hypothèse explicative de cette différence entre Hamza et Thomas :

- La vue de soi dans le personnage du médecin correspondait pour Hamza à une parole de son père : « je te verrais bien médecin ».

Une parole que Hamza ne pouvait reconnaitre comme légitime avant de s’entendre dire lui-même au cours du dialogue de conseil : « Voilà ! Je me vois médecin ! ». Un processus d’identification immédiate, faisant suite à sa synthèse « Voilà... Etre utile envers les autres ». Processus qu’Hamza décrit ainsi : « Quand on parle d'aider les autres, médecin ça…, ça vient ! Soigner les gens, c’est la première idée qu'on se fait…. Je pense ? ». Une évidence pour Hamza, car cette cette vue de soi, correspondait parfaitement à la vue qu’avait de lui un autrui important pour lui.

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Hypothèse explicative de cette différence entre Hamza et Thomas :

- La situation de Thomas était différente. D’une part, il lui fallait faire le deuil de la vue qu’avait de lui un autrui important pour lui (le fils merveilleux – champion cycliste – de son entraineur). D’autre part, toutes les FIS anticipées que Thomas parvint à construire au cours des dialogues furent remises en cause par les autrui comptant le plus pour lui (mère, sœur, beau-frère) : « non, je te vois pas là-dedans ». En particulier, par sa mère, à propos de la FIS dans laquelle il s’anticipait le mieux : « Militaire ! Je n’ai qu’un fils. Je n’ai pas envie qu’il se fasse tuer ».

La réflexivité duelle – l’institution d’un mode de rapport à soi du point de vue d’un idéal de soi que la personne veut atteindre – prend aisément le pas sur la réflexivité trine quand cet idéal est légitimé par d’autres qui comptent pour cette personne. Autrement dit : la reconnaissance de la reconnaissance de soi (sa légitimation) par d’autres qui importent pour la personne est fondamentale.

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Cette reconnaissance de la reconnaissance de soi la légitimant est une déclinaison particulière de la transaction relationnelle (Claude Dubar).

Ce phénomène est souligné par les chercheurs qui s’intéressent aux processus d’engagement de jeunes occidentaux dans les combats de l’organisation terroriste Etat Islamique : la légitimation de cette perspective provient alors d’inconnus ou de quasi-inconnus rencontrés le plus souvent via des réseaux sociaux et devenus des « amis – confidents ».

Qu’une telle reconnaissance d’une perspective de réalisation de soi par des autrui significatifs advienne ou non à l’issue d’un dialogue de conseil en life design, les expérimentations de ces interventions montrent qu’elles stimulent toujours des processus réflexifs générant des anticipations par lesquelles le demandeur vise à donner sens à sa vie (Cf. Journal of Vocational Behavior, 2016, 97, 1-90)

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3. Méthodologie des dialogues de conseil en life design (DCLD) Objectifs (rappel) :

Les dialogues de conseil en life design (DCLD) visent à aider les personnes à définir des perspectives d’avenir – pas nécessairement d’ordre professionnel – donnant sens à leur vie et à s’engager dans la voie de leur réalisation. Méthode :

Un DCLD est un entretien de conseil en orientation entre un demandeur et un conseiller qui se rencontrent trois ou quatre fois au cours d’une période allant de deux à six semaines. Ce dialogue s’organise autour de quatre grandes questions :

1. A quelles questions souhaitez-vous apporter des réponses ? A quels problèmes souhaitez-vous trouver des solutions ? Comment allons-nous procéder pour y apporter des réponses ?

2. Quels domaines de vie et expériences (actuelles, passées et espérées ou redoutées dans le futur) tiennent (ont tenu ou pourraient tenir) une place importante dans votre vie ?

3. Choisissez l’un de ces domaines particulièrement importants pour vous. Racontez ce qu’il vous semble important d’en dire... Puis un deuxième... Un troisième... Quels thèmes – liés à certaines attentes concernant votre futur – dessinent les mots récurrents, les expressions, etc., que vous avez utilisés et les émotions et sentiments que vous avez éprouvés au cours de ces narrations ?

4. Qu’allez-vous faire maintenant pour vous engager dans la réalisation de ces attentes ?

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Remarque préalable : Il s’agit d’un dialogue. La présentation qui suit en décrit la logique sous-jacente que le

conseiller doit avoir à l’esprit. La forme effective du dialogue peut être différente : le conseiller doit suivre les

associations faites par le demandeur. 3.1 Première interrogation (alliance de travail) Objectifs :

- Permettre au demandeur de formuler les questions fondamentales auxquelles il souhaite réfléchir.

- S’il déclare s’interroger sur les perspectives qui donnent sens à sa vie, lui proposer de s’engager dans un DCLD, après lui en avoir expliqué la méthodologie (en soulignant qu’elle suppose un travail de réflexion de sa part).

- Se mettre d’accord pour s’engager, soit dans un DCLD, soit dans une autre méthode d’accompagnement (par exemple : bilan de compétences, guidance fondée sur des tests, etc.).

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3.1 Première interrogation (alliance de travail) Méthode :

- Le conseiller engage le dialogue par une question (empruntée à Mark Savickas) : o « En quoi puis-je vous être utile ?

- Puis, il dialogue avec le demandeur en vue de l’aider à formuler les questions qui

importent le plus pour lui. Les premières questions formulées sont rarement celles qui importent le plus pour le demandeur.

Pour l’aider à formuler sa demande, le conseiller met en œuvre toutes les techniques d’entretiens non-directifs ou semi-directifs : relances, échos, reflets, demandes d’éclaircissements, reformulations, synthèses, questions précises, etc.

- Si l’attente majeure du demandeur est de prendre conscience ou de préciser des attentes, des anticipations ou des espérances majeures qui pourraient donner aujourd’hui un sens à sa vie, alors le conseiller lui propose de s’engager dans un dialogue de conseil en life design.

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3.1 Première interrogation (alliance de travail) Méthode (suite) :

- Le conseiller présente la méthode au demandeur : o Il s’agit d’un dialogue au cours desquels le demandeur réfléchit sur sa

situation présente dans ses différents aspects (le travail, la famille, les relations qui comptent, les loisirs, etc.), sur certaines expériences ou évènements passés qui ont compté ou l’ont marqué et sur certaines de ses anticipations relatives à son avenir.

o Cette réflexion est le travail du demandeur : le rôle du conseiller n’est que de l’aider à formuler ses questions, à narrer ses expériences et à trouver ses propres réponses à l’occasion de cette narration.

o Cette réflexion prend du temps : trois ou quatre rencontres étalées sur une période d’environ un mois sont souhaitables.

- Si le demandeur et le conseiller s’accordent pour choisir cette méthode (qui peut être adaptée aux demandes du demandeur), le DCLD s’organise ensuite en fonction de : o ce qui a été dit lors de cette construction de l’alliance de travail. o et de ce qu’il apparaît pertinent d’analyser, compte tenu des dires du

demandeur.

- Dans tous les autres cas, le conseiller propose au demandeur de s’engager dans une autre méthode en vue de l’aider à trouver des réponses aux questions qu’il a formulées. 56

3.2 Deuxième interrogation (domaines et expériences de vie) Objectif :

- Aider le demandeur à repérer des évènements, domaines et expériences de vie qui comptent pour lui (ou ont compté, ou l’ont marqué, ou dont il aimerait qu’ils comptent dans son avenir).

Méthode :

- Le conseiller engage généralement le dialogue par une question telle que : o « Afin de vous permettre d’y voir plus clair dans vos attentes majeures

relatives à votre avenir, je vous propose de commencer par réfléchir aux domaines de vie, aux sphères d’activités, aux rôles, aux expériences, aux événements, etc., qui comptent dans votre vie d’aujourd’hui, ou bien qui ont compté pour vous, ou vous ont marqué, ou bien encore dont vous aimeriez (ou redoutiez) qu’ils comptent dans votre futur : Quels domaines de vie, sphère d’activités, rôles, expériences, évènements – passés, présents ou futurs – vous viennent à l’esprit ? »

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3.2 Deuxième interrogation (domaines et expériences de vie) Méthode (suite) :

- Le conseiller donne les explications nécessaires à la compréhension de la question.

Il utilise les techniques des entretiens non-directifs ou semi-directifs (relances, échos, reflets, demandes d’éclaircissements, reformulations, questions précises, etc.) pour permettre au demandeur d’énoncer les domaines, sphères, rôles, expériences, évènements, etc., qu’il juge important.

- Au terme de cette première analyse, le conseiller peut proposer au demandeur un inventaire des domaines, sphères, rôles, expériences, évènements, etc. qu’il considère importants.

Le conseiller discute de cette synthèse avec le demandeur et la rectifie en fonction de ses remarques. Ils sélectionnent ensemble ceux de ces domaines, sphères, rôles, expériences, évènements, etc., que le demandeur analysera ensuite.

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3.3 Troisième interrogation (quelles attentes relatives à votre avenir manifestent vos récits des expériences, domaines, rôles, évènements marquants de votre vie ?)

Objectif (cette troisième interrogation constitue le cœur de la méthode):

- Permettre au demandeur d’esquisser certaines attentes relatives à son avenir en se fondant sur ses récits à propos de lui-même lors de différentes expériences de vie importantes pour lui.

Méthode de la troisième interrogation (comprend trois moments) : Méthode du 1er moment

- Le conseiller dit (par exemple) : o « Maintenant, notre objectif est de rendre explicite les principales attentes

que révèlent vos récits relatifs aux domaines, sphères, rôles, expériences, évènements, etc., que vous avez jugés importants dans votre vie. Duquel souhaitez-vous parler en premier ?

o Que pouvez-vous dire à propos de ce domaine de votre vie (de ce rôle, de cet évènements, de cette expérience, etc.)?

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3.3 Troisième interrogation (quelles attentes relatives à votre avenir ?) Méthode du 1er moment (suite) - Le conseiller aide ensuite le demandeur à formuler un récit à propos de lui-même en relation avec cette expérience, ce domaine de vie, ce rôle, etc. Il peut le faire en utilisant les techniques des entretiens non-directifs ou semi-directifs (relances, reflets, échos, reformulation, demandes d’explicitations, etc.) et/ou en lui posant des questions telles que :

Que pouvez-vous dire au sujet de ce domaine de vie, sphère, rôle, expériences, évènement, etc., en relation avec vous-même ?

Que vous apporte-t-il ? (a-t-il apporté ? Aimeriez/redoutiez qu’il vous apporte ?)

Quels intérêts ? Quels rejets ?

Quels savoirs, savoir-faire ou habiletés ? Quels intérêts ? Quelles relations ?

Quelles ressources ? Quels personnages vous a-t-il permis d’admirer ou de rejeter ? Pourquoi ?

Quelles attentes ? Quelles craintes ? 60

3.3 Troisième interrogation (quelles attentes relatives à votre avenir ?) Méthode du 1er moment (suite & fin) Au terme de ce premier récit, le conseiller peut en proposer une synthèse au demandeur en soulignant les assertions qui lui ont semblé saillantes. Le demandeur et le conseiller discutent alors cette synthèse jusqu’à ce qu’ils s’accordent sur ses points essentiels. Remarque : Généralement, la première rencontre du demandeur et du conseiller se termine à l’issue de ce premier moment de la troisième interrogation. Les deux moments suivants prennent place lors de la deuxième rencontre : quelques jours ou semaines plus tard.

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3.3 Troisième interrogation (quelles attentes relatives à votre avenir ?) Méthode du 2ème moment

- Quand ce 2ème moment advient au début de la deuxième rencontre, le conseiller l’introduit en proposant au demandeur de faire le point sur ce qui s’est passé lors de la précédente rencontre, sur les idées qui lui sont venues à l’esprit depuis et sur les échanges qu’il a pu avoir à ce sujet avec autrui, etc.

- Cet échange précède l’engagement du demandeur dans un récit relatif à lui-même en relation avec un deuxième domaine de vie, sphère, rôle, expérience, évènement, etc. importants pour lui..

- Le conseiller accompagne le demandeur lors de ce deuxième récit de la même manière que pour le précédent.

- DE PLUS, il stimule sa production d’associations (cognitives et émotives) et de mises en relations entre ses dires au cours de ce récit et ceux exprimés lors du précédent : quels en sont les points communs ? Quelles émotions communes suscitent-ils ? Quelles sont leurs différences ? Que ressort-il de ces mises en relation (par exemple : un thème commun ou des attentes similaires) ?

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3.3 Troisième interrogation (quelles attentes relatives à votre avenir ?) Méthode du 2ème moment (suite et fin)

- Le dialogue se poursuit par le récit de soi en relation avec d’autres domaines de vie, sphères, rôles, expériences, évènements, etc., jugés importants par le demandeur, en suivant les associations faites entre elles par ce dernier.

- Il arrive à son terme quand ses mises en relations de ses diverses déclarations (comparaisons, distinctions, assimilations, évocations d’émotions similaires, etc.), le conduisent : o soit à repérer des anticipations, aspirations, ou attentes

majeures communes qu’elles révèlent, o soit à mettre en évidence un(e) (parfois deux) domaine(s)

de vie, sphère(s) d’activités, rôle(s), expérience(s) de vie, etc. qui est (sont), pour lui, objet d’attentes fondamentales de réalisation de soi.

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3.3 Troisième interrogation (quelles attentes relatives à votre avenir ?) Moments 1 & 2. Remarques

- Le rôle du conseiller varie en fonction des demandeurs: Certains d'entre eux font par eux-mêmes les liens entre leurs déclarations : des liens qui révèlent leurs attentes ou désirs de réalisation de soi. D'autres ont besoin d'un soutien du conseiller, qui, dans ce cas, doit régulièrement formuler et rappeler les associations qui peuvent être faites entre ce que dit le demandeur à différents moments de ses récits.

- Parmi ces associations et mises en relations, celles que le demandeur fait entre des expériences passées et des expériences présentes (ou plus récentes) jouent un rôle majeur dans la production de perspectives d’avenir. Par conséquent, les interventions du conseiller dans le dialogue doivent viser à stimuler l’expression de telles associations – puis leur analyse – par le demandeur

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3.3 Troisième interrogation (Quelles attentes relatives à votre avenir ?) Le 3ème moment vise à aider le demandeur à faire le bilan des perspectives d’avenir qu’il a esquissées, abandonnées, retenues, précisées, etc., au cours des deux moments précédents et à les préciser plus encore. Méthode :

- Par le rappel de certains dires du demandeur, la formulation de questions et d’hypothèses de synthèse, l’expression d’étonnements, etc., le conseiller l’aide à préciser les attentes relatives à son avenir qu’il a esquissées ou formulées au fur et à mesure de sa progression dans ses récits.

- Parfois, le conseiller doit proposer au demandeur une synthèse hypothétique soulignant certains aspects de ses récits qui semblent indiquer certaines attentes majeures relatives à son avenir (et/ou les domaines, sphères, rôles, expériences, etc., qui sont l’objet de telles attentes de sa part).

- Dans tous les cas, les perspectives d’avenir qui se précisent ainsi sont discutées avec le demandeur. Le conseiller lui propose d’y réfléchir avant leur prochaine rencontre (qui ne peut avoir lieu, au plus tôt, que quelques jours plus tard).

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3.4 Quatrième interrogation (qu’allez-vous faire maintenant ?) Objectifs :

- Faire le point avec le demandeur sur ses attentes majeures actuelles relatives à son avenir.

- L’aider à préciser ce qu’il doit faire en vue de maximiser les chances de voir ses souhaits se réaliser.

- S’interroger sur le dialogue qui s’achève : répond-t-il bien aux demandes essentielles du demandeur ? Si ce n’est pas le cas : quelle autre démarche entreprendre ?

- Mettre un terme au dialogue.

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3.4 Quatrième interrogation (qu’allez-vous faire maintenant ?) Méthode (comprend 3 moments). 1er moment :

Le conseiller peut poser une question ouverte ou utiliser une procédure plus fermée :

o Question ouverte : « Avez-vous réfléchi à ce que nous nous sommes dits à la fin de notre dernière rencontre ? Aux attentes et aux domaines de votre vie qui apparaissent être les plus importants pour vous ? Comment résumeriez-vous les choses aujourd’hui ? »

o Procédure plus fermée : « A la fin de notre dernière rencontre, nous avions commencé à faire le point sur les attentes majeures qui ressortaient de vos analyses des domaines de vie, sphères d’activités, rôles, expériences, évènements, etc., que vous avez jugés importants pour vous. Lors de ce dialogue, nous avons noté que les attentes suivantes ressortaient …. Etes-vous d’accord avec mon résumé ? Aujourd’hui, comment voyez-vous les choses ? »

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3.4 Quatrième interrogation (qu’allez-vous faire maintenant ?) Méthode (comprend 3 moments). 1er moment (suite et fin) : Dans les deux cas, le dialogue qui s’instaure vise à s’assurer que le demandeur formule bien des souhaits qui sont fondamentaux pour lui (=qui donnent sens à sa vie actuelle) :

- Se voit-il en imagination en train d’effectuer ces activités dans le futur ? - Dans ce rôle ? Réalisant ce rêve ? - Ces souhaits sont-ils renforcés par des personnes qui comptent pour

lui? - Dans le cas contraire, le demandeur a-t-il entrepris de les convaincre du

bien-fondé de ses attentes ?

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3.4 Quatrième interrogation (qu’allez-vous faire maintenant ?) Méthode (comprend 3 moments). 2ème moment :

Le conseiller propose au demandeur d’examiner sa vie actuelle du point de vue de la réalisation de ses souhaits fondamentaux :

- Que doit-il faire pour accroître leurs chances de devenir réalité ? - Quelles actions entreprendre ? Quelles démarches faire ? - Quels changements doit-il apporter à sa vie actuelle ? Dans quel(s)

domaine(s) de vie ou sphère(s) d’activités ? Etc. Ce dialogue se poursuit jusqu’au moment où certaines pistes d’actions

sont précisées par le demandeur, des pistes dans lesquelles il apparaît prêt à s’engager.

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3.4 Quatrième interrogation (qu’allez-vous faire maintenant ?) Méthode (comprend 3 moments). 3ème moment : Le dernier moment du dialogue commence un retour sur l’intervention qui s’achève : répond-t-elle bien aux questions que se posait le demandeur ? Si certaines questions restent en suspens : que faire maintenant ? Comment tenter de les résoudre ? Une intervention mieux adaptée devrait-elle être entreprise ? Le dialogue de conseil en life design se termine par une conversation visant à mettre un terme à la relation conseiller-demandeur. Le conseiller indique au demandeur que sa réflexion l’a conduit à la présente conclusion. Cette conclusion est importante pour lui aujourd’hui. Mais elle sera probablement remise en perspective plus tard dans son existence. Il devra alors effectuer des réflexions analogues, à l’occasion de dialogues intérieurs, ou avec des personnes significatives de son entourage, ou à nouveau, avec un conseiller.

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Conclusion En résumé : un dialogue « idéal-typique » de conseil en life-design s’organise selon les quatre grandes phases indiquées dans le tableau ci-dessous. Phase 1 Construction de l’alliance de travail.

Phase 2 Inventaire par le demandeur des domaines d’activités, des expériences, des rôles, des sphères de vie (passées, présentes ou espérées dans l’avenir), des évènements, etc., qu’il considère comme (ayant joué et) jouant un rôle important dans sa vie.

Phase 3 Narrations du demandeur relatives à « lui-même lors de chacune de ses différentes expériences majeures » lui permettant de repérer, dans ses formulations, des récurrences et relations entre des éléments significatifs donnant généralement lieu à certains affects : des récurrences et relations constitutives d’une direction esquissant des perspectives d’avenir donnant sens à son existence.

Phase 4 Définition d’actions à entreprendre, de conduites à mettre en œuvre et conclusion du dialogue.

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Les dialogues de conseil en life design sont des exemples d'interventions d’accompagnement en orientation visant à aider les personnes à concevoir, construire et diriger leur vie active. A la différence des interventions de guidance en employabilité, ces dialogues ne présupposent pas que la personne réponde à la question de la vie active donnant sens à son existence en termes d’insertion dans les organisations actuelles du travail et de ses échanges (sans, bien entendu, exclure une telle réponse). Ces dialogues ont été construits en se référant à une synthèse de savoirs en sciences humaines et sociales relatifs aux processus et facteurs de la construction de soi. Cette synthèse :

- décrit l’identité subjective comme un système dynamique de formes identitaires subjectives (ancré dans un système de cadres cognitifs identitaires subjectifs, lui-même intégré dans un système de cadres cognitifs identitaires en mémoire à long terme),

- considère, de plus, que la personne joue un rôle dans la dynamique de ce système par la médiation de deux formes de réflexivité : duelle et trine. Cette dernière est particulièrement mobilisée lors d’un dialogue de conseil en life design.

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Différentes études – présentées notamment dans un numéro thématique du Journal of Vocational Behavior (Savickas, & Guichard, eds., 2016) montrent :

- que ces interventions d’accompagnement à l’orientation répondent bien aux problèmes d’orientation de leur vie active qu’expriment les individus des sociétés moderne liquides

- et qu’elles atteignent bien leur objectif. Mais : sont-elle suffisantes pour préparer les personnes à contribuer à la résolution des graves crises globales actuelles (relatives notamment à la pérennité de notre écosystème, aux développements de conditions non décentes de travail et à la croissance considérable des inégalités de richesse) ?

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Chaire Francqui – 22 Février 2018

Les dialogues de conseil en life design:

une forme renouvelée

d’accompagnement à l’orientation (2ème

partie)

[email protected]

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Guichard (2018) – Les dialogues de conseil en life design (Mons. Chaire Francqui - 15 & 22 février) ------------------------------------------

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Mons – Chaire Francqui. Exposés 3 & 4 – 15 & 22 février 2018. Les dialogues de conseil en life design :

Une forme renouvelée d’accompagnement à l’orientation

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