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    Claude Moniquet

    GAZA, LE GRAND MENSONGE

    Quand la dmocratie europenne capitule face l'islamisme

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    DU MME AUTEUR

    Djihad et Islamisme en Belgique, Bruxelles, ditions Jourdan le Clercq, 2006.

    Le djihad, histoire secrte des homes et des rseaux en Europe, Paris, Ramsay, 2004.

    La guerre sans visage : de Waddi Haddad Oussama Ben Laden, les rseaux de la peur, Paris, Michel Lafon, 2002.

    Les Dossiers noirs de la Belgique, Paris, Michel Lafon, 1999. Les affaires Dutroux et Derochette, Paris et Bruxelles,

    ditions du Flin et Luc Pire, 1997. Touvier, un milicien l'ombre de l'glise, Paris, Olivier

    Orban, 1989. Histoire des Juifs sovitiques, Paris, Olivier Orban, 1989.

    AVEC GENOVEFA ETIENNE

    Histoire de l'espionnage mondial, dition entirement revue et augmente, en deux volumes, Paris et Bruxelles, ditions du Flin et Luc Pire, 2000 et 2002 :

    Tome I : Les services secrets de l'Antiquit la Seconde Guerre mondiale.

    Tome II : De la guerre froide la guerre antiterroriste. Le journal de Lumi, la guerre sept ans, traduction,

    adaptation en Franais et prsentation. Paris, ditions de l'Archipel, 2000.

    Histoire de l'espionnage mondial, (premire dition) Paris et Bruxelles, ditions du Flin et Luc Pire, 1997.

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    ma mre qui m'a appris l'amour de la Rpublique

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    PRFACE

    PAR MOHAMED SIFAOUI1

    Je pense qu'il est des moments o il ne faut pas tourner autour du pot ou chercher des dclarations alambiques pour affirmer une position par rapport un conflit qui suscite toutes les passions. Je tiens le dire ex abrupto, clairement et sans ambages : dans la guerre qui oppose Isral au Hamas, je soutiens littralement l'arme isralienne dans sa lutte lgitime contre cette organisation terroriste porte par cette idologie fasciste qu'est la doctrine des Frres musulmans. Et je vais exprimer les raisons d'une telle position de la manire la plus claire possible. Je suis musulman, dmocrate et laque, homme de gauche, et je suis trs sensible la cause palestinienne et, par ailleurs, trs attach au droit de cette population disposer d'un tat souverain, libre, moderne, dmocratique et prospre, vivant en scurit dans un cadre d'une paix juste et durable, aux cts d'Isral.

    D'aucuns pourraient dire : mais quelle contradiction !

    Comment peut-on tre "pour les Palestiniens" et soutenir l'action militaire isralienne contre le Hamas ? Je vais en donner les explications dans cette prface que j'ai

    1Mohamed Sifaoui est journaliste, crivain et ralisateur. Trs engag dans la lutte contre l'islamisme et tous les extrmismes, il tient un blog remarquable : www.mohamed-sifaoui.com.

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    l'honneur de faire pour introduire l'ouvrage de mon ami Claude Moniquet qui, livre, chapitre aprs chapitre, tous les arguments qui montrent que lorsqu'on se reconnat rellement dans les valeurs universelles et, quand on est attentif au sort de la population palestinienne, on ne doit pas, on ne peut pas, on n'a pas le droit de manifester le moindre soutien pour une organisation comme le Hamas.

    Le mrite de ce livre c'est qu'il saura faire sortir le lecteur du manichisme ambiant. Le "mal" n'est pas l o beaucoup pensent le trouver. Claude Moniquet, expert international en matire de terrorisme et d'islamisme, a cern les spcificits d'une milice et d'un parti "religieux" comme le Hamas. Il connat surtout son ct obscur, ses manuvres, sa propagande effrne et sa nature idologique. Parce qu'il est erron de croire qu'il s'agit d'un "mouvement de rsistance", comme il est trs navement prsent dans certains mdias, qui lutte contre "l'oppresseur isralien". Dans ce genre de formulations, on ne retrouve pas la vrit mais les rsultats d'une publicit mensongre qui dure depuis vingt ans. Le Hamas ne "rsiste" pas, il utilise un objectif et une revendication fort louables, la construction d'un tat palestinien, pour lgitimer une idologie qui s'inscrit dans une vaste mouvance internationale et dont la finalit ne cherche autre chose qu' provoquer la transformation de tous les pays islamiques en des thocraties totalitaires, constituer une force importante afin de combattre les dmocraties et enfin supprimer Isral de la carte du monde. Trois buts contenus de manire explicite dans la doctrine salafiste qui est celle des Frres musulmans et galement du Hamas. Pour avoir un premier aperu, il suffit de lire les textes fondateurs de la milice palestinienne.

    En mditant sur le contenu de la charte de cette organisation terroriste, d'ailleurs brillamment dcortique dans ce livre, l'on s'aperoit qu'il faut avoir de la sympathie

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    pour les mouvements fascistes europens des annes 1930 et 1940 pour considrer que le Hamas est un parti "respectable". Ou alors il faut faire preuve d'une condescendance et d'un racisme dguis, enfoui et non assum qui tendraient dire, en dfinitive, que le fascisme est mauvais lorsqu'il s'exprime en Europe, mais tout fait "sympathique" quand ce sont des Arabes, des Palestiniens qui l'embrassent. Rassurez-vous ! Ce que j'affirme l n'est point exagr. J'observe, en effet, depuis plusieurs annes, cette tendance qu'ont certains partis et milieux, en Europe, auto-dclars "antifascistes" et de gauche, qui s'accommodent trangement de l'islamo-fascisme incarn par des organisations comme les Frres musulmans dont le Hamas n'est que l'un des avatars.

    Que des islamistes ayant pris pour base arrire certaines capitales europennes sortent dans les rues, tous crocs dehors, prts en dcoudre avec le premier uniforme, criant des Alla hou Akbar et des "Mort Isral" ne permet d'abord qu' me conforter dans mes convictions sur le fait que ces milieux islamistes, leurs leaders, leurs idologues et leurs gourous sont des semeurs de haine et de discorde, des ennemis de la paix et de la tolrance et, ensuite, qu' confirmer qu'ils sont malheureusement bien implants dans les pays des droits de l'Homme. Mais que ces mmes islamistes brandissant des drapeaux d'organisations, tels le Hezbollah, le Hamas ou le Djihad islamique, soient accompagns, soutenus et ports, dans leurs vires extrmistes, par des figures politiques, mdiatiques ou associatives se rclamant de la gauche, j'avoue qu'il y a l quelque chose qui me dpasse. Cela n'a plus aucun sens mes yeux parce que ces prtendus gauchistes acceptent de marcher derrire, devant ou ct des emblmes de l'extrme droite musulmane. Et pour l'homme de gauche que je suis, ce spectacle est tout simplement insupportable.

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    Si certains de ces militants gauchistes, dont peut-tre quelques-uns sont sincres dans leur dmarche, ont t abuss, il est temps, pour eux, de se rveiller. On ne peut pas raisonnablement se reconnatre dans des valeurs humanistes, dmocratiques, laques, progressistes, fministes et universalistes et soutenir des mouvements nihilistes, ngationnistes, intgristes, sexistes, antismites et communautaristes dont l'idologie est, quand mme, une sorte de "copier/coller" lgrement revu et corrig du nazisme. Raison pour laquelle, lorsque je vois l'arme d'un tat dmocratique, quelles que soient les failles et les faiblesses de la politique de cet tat, dfendre une population soumise, depuis huit ans, des tirs rguliers de roquettes et ragir, en fait, afin de faire cesser ces tirs qui, faut-il le rappeler, n'ont t d'aucune utilit pour la cause du peuple palestinien, je n'ai aucun complexe comprendre et mme justifier cette lutte lgitime contre une organisation terroriste dont le programme repose sur une idologie fasciste.

    Alors pourrait-on me rtorquer : mais que fait-on des victimes civiles ? Des femmes et des enfants, tus lors des bombardements israliens ? Je rpondrai la chose suivante : d'abord, l'humanisme n'est pas du ct de ceux qui soutiennent le Hamas, ni la barbarie intrinsquement lie ceux qui approuvent ou comprennent l'offensive isralienne. Les images de certaines chanes arabes - et principalement Al-Jazira - exhibant, de manire indcente, des cadavres de civils ont boulevers tout 1e monde, y compris la socit isralienne. Il n'est pas mes yeux un tre normalement constitu, dot d'une once d'humanit, qui n'a pas t branl la vue de ces images horribles.

    Des bombardements contre des cibles militaires provoquent malheureusement ce type d'images. Depuis que les guerres existent, les populations civiles payent

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    le prix fort. Cela ne fait pas forcment, n'en dplaise, de celui qui bombarde un "criminel de guerre". La question poser est la suivante : l'arme isralienne visait-elle des civils ? La rponse est non ! Parce que si tel tait le cas, le bilan aurait t cinq, dix, cent fois plus lourd. Dans la guerre qu'elles mnent aux Talibans en Afghanistan, les forces de l'OTAN ont tu, lors de leurs bombardements, un millier de civils afghan durant l'anne 2008. Les forces de l'OTAN sont-elles pour autant passibles de "crime de guerre" ? La rponse est videmment non !

    Ce qui provoque tant de pertes civiles est, me semble- t- il, d la nature de la guerre qui a radicalement chang. Un conflit qui oppose une arme classique une milice arme, elle-mme mlange la population, ne saurait qu'engendrer des images terribles. Il est donc important de revenir sur le rle et sur le vrai visage du Hamas et surtout sur la responsabilit de ce groupe terroriste dans la mort de femmes et d'enfants. Ceux qui instrumentalisent l'motion de l'opinion publique n'ont aucun intrt s'attarder sur cette question. D'ailleurs, bien que se disant mus par le sort des civils, peu de manifestants ont appel le Hamas cesser ses tirs. Je ne pense pas avoir aperu, lors des manifestations dites "pro palestiniennes", des pancartes exigeant l'arrt des hostilits des deux cts ni d'emblmes montrant un attachement la paix, encore moins un seul slogan dnonant les crimes du Hamas, ceux commis d'abord contre leurs propres "frres du Fatah", ensuite, ceux contre les civils du sud d'Isral qu'ils continuent de viser. Ce que j'ai vu, c'est ce que d'aucuns ont vu, des accusations de "gnocide", alors que le terme a une dfinition bien prcise ; des amalgames antismites comparant les Israliens aux nazis ; des appels au djihad ; des banderoles sur lesquelles on pouvait lire "Isral assassin" ; d'autres sur lesquelles tait faite l'apologie de l'image d'Hitler et j'en passe.

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    Cet ouvrage revient, cela dit, en dtail sur ce qui a fait de ces manifestations des marches honteuses porteuses de messages inacceptables. Ce que j'ai vu, et ce que d'aucuns ont vu, ce sont des cris de haine et des slogans antismites. Ce que j'ai vu, et ce d'aucuns ont vu, c'est une majorit de manifestants - et je sais que ce n'tait pas le cas de tout le monde - qui marchait davantage pour marquer leur rejet d'Isral que leur attachement aux Palestiniens. C'est dire qu'en tant que citoyen trs attentif au sort des Palestiniens, je ne peux pas accepter que l'avenir de ces derniers se construise sur la destruction d'Isral, sur les cendres des Israliens... sur les cendres des Juifs. Ce serait une honte pour les Palestiniens, ce serait une honte pour les Arabes, ce serait une honte pour les musulmans et c'est inacceptable pour l'humanit. L'inverse est naturellement valable, mais force est de reconnatre qu'hormis quelques groupuscules d'excits, personne en Isral ne parle de destruction de la Palestine.

    Oui, mais encore pourra-t-on dire : le Hamas a gagn les lections lgislatives ! Certes, l'organisation islamiste a remport une consultation populaire lisant des parlementaires, mais elle a aussi fait un coup de force, s'emparant de manire illgitime de Gaza, voulant provoquer un coup d'tat pour dposer Mahmoud Abbas, massacrant au passage plusieurs militants du Fatah. Mais parce ce que justement elle n'avait gagn que des lections lgislatives, l'organisation d'Ismail Haniyeh n'avait nullement le droit de mettre les Palestiniens devant le fait accompli de la guerre avec Isral. Selon la Constitution palestinienne, les pouvoirs rgaliens, en d'autres termes, la Dfense, la Diplomatie et la Justice sont entre les mains du prsident de l'Autorit palestinienne. Cela veut dire que, constitutionnellement, il est le seul pouvoir dclarer un tat de guerre. Si on est lgaliste, respectueux des textes

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    rgissant l'Autorit palestinienne et dmocrate, il serait inacceptable de se substituer la seule et unique autorit lgitime et reconnue sur le plan international et engager ipso facto la population dans un conflit. C'est dire qu'en tant que dmocrate, je ne peux soutenir, d'aucune faon, le Hamas qui a agi de manire antidmocratique. Mais au-del, les dirigeants de l'organisation terroriste savaient pertinemment qu'ils mettraient les Gazaouis en danger en allant dfier la quatrime puissance militaire mondiale. Et, inutile de revenir ici sur la propagande du Hamas et sa tendance utiliser la population civile comme bouclier afin de ternir l'image de l'ennemi dsign. C'est la raison pour laquelle, chaque fois que je voyais le cadavre inerte d'un non-combattant, je maudissais les Khaled Mechaal et ses complices, tous tapis dans l'ombre ou abrits dans des grottes. Ils sont pour moi les seuls assassins du peuple palestinien.

    Ce livre est donc essentiel pour la comprhension de la vritable nature du conflit qui oppose Isral un groupe terroriste et, par ailleurs, tout aussi ncessaire pour clarifier ce que cache le drapeau du Hamas comme idologie et, davantage, ce que signifie marcher derrire cet emblme.

    Mohamed Sifaoui, Mars 2009

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    AVANT-PROPOS

    Le 27 dcembre 2008, en dbut de matine, une vingtaine de missiles israliens s'abattent sur des cibles stratgiques de la bande de Gaza, essentiellement des postes de police et des casernements du Hamas. Au cours des heures qui suivent, les bombardements s'intensifient au rythme des sorties des hlicoptres de combat et des chasseurs-bombardiers. Dans la journe, le ministre isralien de la Dfense, Ehud Barak, dclare, lors d'une brve allocution tlvise : "Il y a un temps pour le calme et un temps pour se battre, et maintenant, le temps est venu de se battre." L'opration "Plomb durci" vient de commencer. Elle durera vingt-deux jours, pour s'achever par un cessez-le-feu unilatral propos par Isral (et accept par le Hamas aprs quelques tergiversations) le 17 janvier minuit.

    Au Proche-Orient, ce seront vingt-deux jours de feu, de combats, de sang et de larmes. Le spectacle, hlas, habituel mais toujours horrible de la guerre et de ses victimes civiles. Dans les chancelleries, vingt-deux jours de ngociations et d'atermoiements en vue de trouver une issue rapide au conflit. En Europe, vingt-deux jours de tensions entretenues par les manifestations quasi quotidiennes. Vingt-deux jours durant lesquels, progressivement, la contestation de la guerre va passer sous le contrle des groupes et des milices islamistes.

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    Encourage, peut-tre, par la mise en cause quasi exclusive et massive d'Isral et par la dnonciation de ses crimes de guerre dont les colonnes de la presse et les journaux tlviss dborderont bientt, soutenue par nombre de partis politiques traditionnels, des organisations de Dfense des droits de l'Homme et les habituels gauchistes toujours prompts condamner Isral ou "l'Occident", conforte par l'indiffrence apparente de la majorit de la population, la mobilisation est norme. De Paris Bruxelles, de Londres Madrid, de Berne Rome, et dans des dizaines d'autres villes et capitales, ce sont des centaines de milliers de personnes qui descendent dans la rue pour crier leur colre.

    Mais s'il est lgitime, en dmocratie, de manifester son opinion, si l'on peut comprendre l'motion qui treint la vue des cadavres d'enfants et d'autres civils, il ne s'agit plus ici, souvent, d'une saine indignation mais bien d'une charge unilatrale et haineuse, largement teinte d'antismitisme et dans laquelle les extrmistes islamistes tiennent le haut du pav. Presque immdiatement, la raison cde le pas l'motion. Une motion comprhensible, certes, mais largement suscite et manipule par ceux qui ont tout intrt diaboliser Isral. Trs vite, ds lors, la protestation quittera le domaine de l'acceptable pour se muer -au mieux - en un dni absolu du droit d'Isral se dfendre - quoi que l'on puisse penser par ailleurs de la "proportionnalit" de la riposte de l'tat hbreu - au pire (et, hlas, le plus souvent), en vritables dmonstrations de soutien au Hamas, en attaques contre les valeurs dmocratiques, en ngation du droit l'existence mme d'Isral et en appels au meurtre.

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    Il ne s'agit malheureusement pas d'un "accident"2, ni mme d'une "drive "3. Car si cette volution est effectivement dangereuse, elle est loin d'tre incontrle mme si l'on peut admettre que certains comportements aient relev de la spontanit de jeunes gens peu duqus politiquement et ignorant, volontairement ou non, les ralits les plus lmentaires, nous avons bel et bien assist, durant ces trois semaines de conflit, la matrialisation d'un cauchemar : la prise de contrle par l'islamisme de la partie jeune, active, visible, militante des communauts musulmanes d'Europe. Cette volution, en effet, a t voulue, planifie, pense depuis des annes par la frange la plus extrmiste de la communaut musulmane, ceux que l'on appelle "les islamistes".

    Je le dmontrerai dans les pages qui suivent.

    Partout en Europe, les mmes scnes : de jeunes musulmans faisant leur prire en pleine rue avant de se joindre aux cortges, des drapeaux israliens brls puis pitins au cri de Allahou Akhbar ! D'autres drapeaux, les tendards du Hamas, bien entendu, mais aussi du Hezbollah ou du Djihad islamique brandis avec fiert, comme une provocation, des appels la haine, des incitations au meurtre des Juifs. Et l'on ne citera que pour mmoire ces petits groupes de manifestants, structurs, parfois trs jeunes, mlant fanatiques et suivistes imbciles allant " la casse" en fin de cortges. Rpugnant mlange de militantisme et de voyoucratie. Le spectacle dsolant de ces

    2 "vnement imprvu, malheureux ou dommageable [...]. vnement fortuit qui modifie ou interrompt le cours de quelque chose...", nous apprend le dictionnaire Larousse. 3 "Fait de s'carter de la norme, d'un cadre fix, volution incontrle et dangereuse", selon la mme source.

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    hordes sauvages pour lesquelles la violence gratuite semble tre la seule manire d'exprimer leur rejet viscral de notre socit et de nos valeurs est, hlas, devenu trop habituel pour qu'on s'en tonne encore.

    J'ai cinquante ans et, sur ces cinq dcennies, j'ai pass quelques annes, dans ma jeunesse, militer ( l'extrme gauche) puis une trentaine d'autres observer le monde et tenter de dcrypter les "signaux faibles" qu'il nous envoie sans cesse. Comme journaliste, d'abord, au profit d'un service de renseignement franais durant vingt ans, ensuite, en tant que directeur d'un centre de recherche stratgique, enfin. Eh bien, en trente ans, je n'avais jamais assist un tel dchanement - aussi massif, unilatral et international - de haine, de propagande et d'antismitisme. Jamais !

    Comment peut-on sincrement penser que ceux qui, Paris, dfilent derrire des banderoles Isral Assassin (ce qui signifie, donc, que l'ensemble de la population isralienne et chacun de ses membres, individuellement, sont "coupables"), ceux qui brlent des drapeaux, ceux qui, Londres, brandissent une pancarte God Bless Hitler, dfendent vraiment une "paix juste et durable" comme le prtendent les organisateurs de ces dfils ?

    Comment peut-on croire que ceux qui ne sont jamais descendus dans la rue pour condamner le massacre de 200.000 Algriens par les islamistes, ceux qui n'ont jamais sign aucune ptition pour exprimer leur colre aprs les attentats de New York, Washington, Djerba, Madrid ou Londres, ceux qui n'ont jamais pris la parole pour dnoncer la guerre atroce mene depuis des annes par les milices Jenjawid soudanaises contre les populations noires aprs que les islamistes de Khartoum aient dcim, durant bien d'autres annes, les chrtiens et animistes du Sud-Soudan,

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    oui, comment peut-on croire que ceux-l se soucient rellement des victimes ?

    Une femme, une Arabe, une musulmane, le docteur Wafa Sultan, a courageusement accus ceux qui "dnoncent les massacres de Gaza, non pas par amour de la vie, mais cause de 'l'identit des tueurs' : si le tueur tait musulman, appartenant au Hamas ou au Fatah, aucune manifestation n'aurait eu lieu..."4

    Paroles courageuses. Paroles de vrit, si ce n'est que le conditionnel est de trop. Nous le verrons dans les pages suivantes : effectivement, lorsque les tueurs taient membres du Hamas, personne n'est descendu dans les rues...

    Le journaliste et auteur franco-algrien et musulman Mohamed Sifaoui, qui m'a fait l'honneur et l'amiti de prfacer cet essai, crit quant lui : "Je pense que plusieurs marcheurs du samedi dfilent davantage contre Isral que pour la Palestine. Beaucoup d'entre eux ne marchent pas parce qu'ils adoreraient les Palestiniens mais parce qu'ils ont une dtestation idologique pour tout qui est juif et pour tout ce qui a trait Isral. Et je pense mme - passez-moi l'expression - que la plupart n'en ont rien foutre des Palestiniens. [Sinon] ils se seraient peut-tre leve contre la violence exerce par le Hamas non pas contre les Israliens mais contre leurs propres frres du Fatah. "5

    Triomphe des extrmistes, cette volution est aussi, surtout, une double dfaite : dfaite des "musulmans modrs", d'abord, qui n'ont pas t capables d'imposer leur vision paisible de l'islam et de son rapport au monde

    4 Wafa Sultan, http://www.aafaq.org/masahas.aspx'?id_mas=2939. Le texte original est en arabe et a t traduit par les soins de l'ESISC. 5 Mohamed Sifaoui : "Aux promeneurs du samedi et leurs copains d'une certaine gauche". Le texte peut tre consult sur son blog : http://www.mohamed-sifaoui.com

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    au sein de leur propre communaut et une partie de leur jeunesse et qui ont laiss les "fascistes" verts occuper le terrain. Dfaite de nos socits, ensuite : qui osera encore dire, au vu de ces atteintes rptes l'ordre public et la norme, que l'intgration est un succs ? On sait ce qui se passe dans certaines mosques, dans des associations, dans des salles de prires et dans des quartiers entiers pour arriver une telle catastrophe. Mais que s'est-il pass dans nos coles ? Ou plutt que ne s'est-il pas pass dans nos coles ? Comment expliquer que des jeunes gens encore scolariss ou de jeunes adultes ayant depuis peu quitt les bancs de l'cole ou de l'universit puissent se laisser aller un tel dferlement de bassesse, tellement contraire tout ce que ceux que l'on n'appelle plus leurs "matres" auraient d leur apprendre ? Est-ce la faillite de l'enseignement qui empche ces jeunes de saisir les vnements dans leur enchanement et dans leur complexit et les pousse vers ceux qui crient le plus fort et leur promettent une revanche sanglante et dfinitive sur les humiliations relles ou supposes qu'ils auraient vcues ou dont souffriraient leurs "frres" ?

    Qu'on me comprenne bien : il n'est pas question ici de s'en prendre des opinions ni de condamner des ides respectables ou de nier le droit aux uns et aux autres d'tre solidaires de populations souffrantes. La beaut de la dmocratie est l : elle permet chacun de s'exprimer mme si ses opinions sont minoritaires, mme si elles sont discutables. Mais elle ne permet pas - elle ne peut pas permettre, sous peine de se nier elle-mme et de se mettre en danger - d'insulter, d'avilir, de rabaisser, de menacer. Or, c'est bien cela que nous avons vu durant ces trois semaines de combats : la haine l'tat chimiquement pur, haine sans limites, la haine absolue, assume, clame, revendique.

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    Les questions poses par ces comportements sont multiples. Comment en est-on arriv l ? Est-il encore possible d'inverser la tendance ? Quelles menaces cette volution fait-elle peser sur nos socits et sur les rapports entre "communauts" ? Pourquoi notre personnel politique a-t-il laiss faire ? Quelle est la responsabilit des mdias ? C'est ces questions que je tenterai de rpondre dans les pages qui suivent.

    Au printemps 2005, j'ai t invit tmoigner sur la radicalisation de la jeunesse musulmane en Europe6 devant une sous-commission du Congrs des tats-Unis. J'y dclarai, entre autres :

    "Au plan politique, les islamistes essaient de subvertir les socits occidentales par la contestation des valeurs humanistes telles que l'galit sexuelle, la libert de religion, la libert de parole. Ils se font les avocats de la cration de partis politiques bass sur la religion, ils dfendent la cration de tribunaux de la charia pour juger les matires civiles et personnelles... Ils savent, bien entendu, qu'ils ne gagneront pas toutes ces batailles, mais leur espoir est de crer ou d'approfondir un foss entre musulmans et non-musulmans. Leur but en agissant de la sorte est de radicaliser les communauts musulmanes."

    Je soulignai les problmes identitaires et les frustrations sociales qui nourrissent une partie de la "troisime gnration" de l'immigration et les checs de l'intgration qui la jettent dans les bras des extrmistes. Je rappelai l'importance des erreurs commises par nos gouvernements.

    6 Le 27 avril 2005, devant le Subcommittee on Europe and Emerging Threats, de la Commission des Relations internationales. United States House of Representatives. Le texte de mon tmoignage est disponible sur le site de l'ESISC : http://www.esisc.org sous le titre "The radicalisation of Muslim Youth in Europe: the Reality and the Scale of the Threat"

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    et dplorai - videmment ! - le racisme et l'exclusion qui, eux aussi, bien entendu, participent la marginalisation la radicalisation de trop de jeunes. Et je concluais par :"La question, mes yeux, n'est plus tellement de savoir "si" une tragdie se produira mais bien "quand" elle se produira. "

    Eh bien, nous y sommes. La tragdie s'est produite. Ou, du moins, elle a commenc. Certes, le sang n'a pas coul (mais on verra plus loin qu'il s'en est Peut-tre fallu de peu ; de plus, que savons-nous de ce que prparent, dans le secret de certains cercles, les esprits les plus chauffs ? Mais la dmonstration a t faite : dsormais, quand la "rue musulmane" parle, en Europe, c'est par la bouche des extrmistes.

    Avec la complicit de nos clercs, senss dfendre les valeurs qui nous lient - et, au premier chef, la lacit - et qui les ont honteusement trahies.

    Si nous ne corrigeons pas le tir rapidement, demain, cette lchet et ce renoncement se paieront au prix fort.

    Un dernier mot : ce livre sera attaqu, vilipend. Je le sais. On me traitera de raciste : je dfie quiconque de trouver, dans la douzaine de livres, les milliers d'articles et les milliers d'autres pages d'analyses que j'ai publis depuis trente ans une seule phrase qui taye cette accusation. On m'accusera d'tre un "propagandiste isralien" ou (injure suprme) un "sioniste" : je ne suis pas isralien et si j'tais "sioniste", je vivrais, bien videmment, en Isral. On me taxera "d'islamophobie", nouvelle accusation a la mode, sense interdire tout dbat : je n'ai rien contre l'islam, si ce n'est que je pense qu'il doit se rformer et se moderniser comme l'ont fait, avant lui, les autres grandes religions du Livre. Je ne suis donc pas plus "islamophobe " que "catholicophobe" ou "protestantophobe". Peut-tre

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    certains me prendront-ils pour un "intgriste laque" (autre accusation la mode depuis quelque temps). Eh bien oui, cette accusation-l, je l'accepte, je suis bien un "intgriste laque" : libre-penseur, j'estime que la religion appartient totalement et exclusivement la sphre prive et qu'elle n'a pas envahir la place publique, s'imposer aux autres et dicter la politique. La lacit est un trsor commun qui nous permet, en Occident, de vivre ensemble, malgr nos diffrences, dans le respect mutuel. Ceux qui pensent autrement se fourvoient et, plus grave, sont les fossoyeurs de nos liberts.

    Le fait que certains aient instrumentalis la religion musulmane pour en faire l'outil politique de revendications communautaires inacceptables, et que ceux-l aient trouv des appuis au sein du monde politique et de l'intelligentsia europens ne rend que plus pressant le ncessaire rveil des dmocrates, car si l'Europe ne dfend pas ses valeurs, elle mourra.

    Or, durant ce mois de janvier 2009, un nouveau seuil a t franchi dans la course aux extrmes avec l'importation systmatique du conflit isralo-palestinien en Europe.

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    DEUX OU TROIS CHOSES SAVOIR SUR LE HAMAS

    On me pardonnera de commencer par rappeler quelques

    vrits premires sur le Hamas, mais les (vrais ou faux) nafs qui se sont laiss embarquer par les fanatiques dans des manifestations de soutien ce parti de "rsistance" sauront ainsi quoi s'en tenir et auront une chance de mourir moins idiots qu'ils n'ont vcu, ce qui ne leur fera certainement pas de tort.

    Je sais, je sais : de fins intellectuels souriront avec condescendance et me trouveront bien lger de passer mon temps rappeler des vidences pour tous. Le problme, justement, est que ces vidences, "tous" ne les connaissent pas, sinon ils auraient t moins nombreux dfiler derrire les bannires de ce groupe terroriste et fasciste. A moins, bien entendu, que de s'afficher aux cts d'un tel mouvement ait t moins important pour les suivistes que de condamner Isral...

    Livrons-nous un exercice simple et salutaire, la porte du premier venu. Au sicle de la communication, nul besoin de s'enfermer dans des bibliothques encombres et d'y mener de fastidieuses recherches pour en exhumer LE document qui rsume la philosophie politique du Hamas. En quelques "clics" de souris, la charte de ce mouvement est accessible et il serait dommage que ce morceau d'anthologie totalitaire ne nous divertisse pas quelques instants.

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    Cr en 1987, au dbut de la premire Intifada, c'est le 18 aot 1988 que le barakal al-muqwama al-'islmiya (Mouvement de la Rsistance islamique), qui sera rapidement mieux connu sous son acronyme de Hamas1, se dote d'une charte qui, vingt-et-un ans plus tard, demeure le texte fondateur sur lequel se base la lgitimit du parti milice. Ce texte - vingt-cinq pages en franais2 - compte trente-six articles, mais que le lecteur se rassure, il nous suffira de nous pencher sur quelques-uns d'entre eux pour nous faire une ide exacte de la nature du mouvement.

    Islamiste, antismite, violent, sexiste : le Hamas par lui-mme

    D'abord, triste constat pour les tenants de la sparation de l'glise et de l'tat, qui est la rgle dans la plupart des dmocraties occidentales3, le Hamas est bel et bien un mouvement religieux puisque :

    "L'Islam est sa rgle de vie, il en tire ses ides, ses concepts de mme que ses points de vue sur l'univers, sur la vie et sur l'homme ; c'est lui qu'il se remet pour juger de l'ensemble de ses pratiques et c'est de lui qu'il tire les indications de la Voie droite sur laquelle mettre ses pas." (Article 1).

    Aprs avoir confirm ce que personne n'ignore (nous reviendrons malgr tout sur ce point un peu plus loin), savoir qu'il est "l'une des ailes des Frres musulmans en Palestine" (article 2), le Hamas nous assne qu'il "uvre

    1 Qui signifie galement "courage" ou "vigueur". 2 Nous utilisons la traduction de Jean-Franois Legrain, chercheur au CNRS. 3 A l'exception notable de la Grande-Bretagne, qui n'en est pas moins dmocratique, mais ceci est une autre histoire...

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    planter l'tendard de Dieu sur toute la Palestine" (article 6). Et quand le Hamas dit "toute la Palestine", il faut prendre l'expression au pied de la lettre : il s'agit bel et bien de nier le droit l'existence de l'tat d'Isral, que ce soit dans ses frontires actuelles, dans celles de 1967 ou mme dans celles de 1948. Du reste, l'article 11 prcise bien que toute la Palestine "est une terre islamique" et qu'il est "illicite d'y renoncer en tout ou en partie".

    Pour le Hamas, librer la Palestine ne peut se faire que par la voie du djihad, de la violence. Outre le rappel rituel (article 8) de la devise de l'organisation, copie servile de l'article premier de la constitution des Frres musulmans - "Dieu est son but, l'Aptre son modle, le Coran sa constitution, le Djihad son chemin et la mort sur le chemin de Dieu la plus minente de ses esprance4" - l'article 13 est formel :

    "Les initiatives, les prtendues solutions de paix et les confrences internationales prconises pour rgler la question palestinienne vont l'encontre de la profession de foi du Mouvement de la Rsistance islamique (...) Il n'y aura de solution la cause palestinienne que par le Djihad. Quant aux initiatives, propositions et autres confrences internationales, ce ne sont que perte de temps et activits futiles. Le peuple palestinien a trop d'honneur pour dilapider son droit et son destin en activits futiles."

    Autant pour ceux qui pensent, dans certaines chancelleries europennes, que le Hamas pourrait, sans une remise en cause fondamentale de ce qu'il est, de sa nature profonde, tre un partenaire crdible dans une quelconque ngociation de paix.

    4 rapprocher du mot d'ordre des "Frres" : "Allah est notre objectif. Le prophte Mahomet est notre chef. Le Coran est notre loi. Le djihad est notre voie. Mourir dans les voies d'Allah est notre plus grand espoir. "

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    Pour ceux qui nourriraient encore des doutes, l'article 7 remet les choses en place en faisant explicitement rfrence au "Djihad des Frres musulmans de 1936" et la guerre de 1948. Pour le Hamas, l'tat hbreu est illgitime, nul et non avenu, et n'est appel qu' disparatre. Rien n'est ngociable. Pour les amateurs de cette rbarbative et mprisable discipline qu'est l'histoire (n'est-elle pas l, bien souvent, pour secouer nos ides reues ?), soulignons que le "Djihad des Frres musulmans de 1936" fait rfrence la "grande rvolte arabe" qui ensanglanta la Palestine sous mandat britannique, de 1935 1939. Sous l'impulsion du grand mufti de Jrusalem, Amin al-Husseini, soutenu par Hitler5, les Frres musulmans se lancrent dans une srie de pogroms et d'attentats qui turent 500 Juifs et 200 Anglais. Belle filiation. Faut-il s'en tonner ? Le Hamas... n'aime pas les Juifs. Ce n'est pas tellement avec les Israliens qu'il a un problme, non, mais avec les Juifs, cette dtestable race. L'article 7, que nous avons dj cit, est sans ambigut aucune :

    "L'Aptre de Dieu [ ...] a dit: "l'heure ne viendra pas avant que les musulmans n'aient combattu les Juifs(c'est--dire que les musulmans ne les aient tus), avant que les Juifs ne se fussent cachs derrire les pierres et les arbres et que les pierres et les arbres eussent dit : musulman serviteur de Dieu ! Un Juif se cache derrire moi. Viens et tue-le."

    5 Al-Husseini devait d'ailleurs s'illustrer, quelques annes plus tard, en permettant aux nazis de crer une division SS musulmane, recrute essentiellement en Bosnie et dans le Maghreb. Il ne faisait en cela que suivre l'exemple De Hassan al-Banna, fondateur des Frres musulmans, qui, grand admirateur de Hitler et du nazisme, lui avait offert ses services ds 1935.

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    Il faut dire qu'on ne se mfie jamais assez des Juifs puisqu'ils dissimulent leurs louches activits derrire "des organisations sionistes aux noms et formes multiples comme la franc-maonnerie, les clubs Rotary, les sections d'espionnage..." (Article 17). Grce l'argent :

    "Ils rgnent sur les mdias mondiaux, les agences d'information, la presse, les maisons d'dition, les radios, etc. Grce l'argent, ils font clater des rvolutions dans diffrentes rgions du monde pour raliser leurs intrts et les faire fructifier. Ce sont eux qui taient derrire la Rvolution franaise, la rvolution communiste et la plupart des rvolutions dont nous avons entendu et entendons parler de-ci de-l. Grce l'argent, ils ont cr des organisations secrtes qui tendent leur prsence dans toutes les parties du monde pour dtruire les socits et raliser les intrts du sionisme, comme la franc-maonnerie [c'est dcidment une obsession], les clubs Rotary et Lyons [...] Ce sont eux "qui taient derrire la Premire Guerre mondiale [et] la Seconde Guerre mondiale qui leur a permis amasser d'normes profits grce au commerce du matriel de guerre [...] Qu'une guerre clate, de-ci de-l, et c'est leur main qui se trouve derrire... "(Article 22).

    Aprs ce superbe morceau de littrature antismite qui n'aurait pas dpareill les colonnes du Strmer nazi des annes trente, penchons-nous encore sur une dernire question, celle de la femme :

    "Dans la bataille de la Libration, la femme musulmane a un rle qui n'est pas infrieur celui de l'homme : tre l'usine hommes [sic !]. Elle joue un grand rle dans l'orientation et l'ducation des jeunes gnrations. Les ennemis l'ont bien compris et considrent que s'ils parviennent la conseiller et il lui faire prendre le chemin de leurs dsirs loin de l'Islam, alors ils remporteront le combat." (Article 17).

    part une "usine hommes" et une ducatrice prparant ses fils "au rle de combattant du Djihad qui les attend", la femme doit galement tre une... bonne mnagre. (Article 18)

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    Raciste, fanatique, sexiste, prnant l'anantissement total d'Isral et l'extermination des Juifs : tel est le Hamas, dans ses propres mots. Une organisation fasciste, rien de plus, rien de moins. Comme il est agrable de voir son drapeau flotter dans les rues de nos villes, ces mmes villes o, voici soixante ans, flottaient d'autres drapeaux, ceux d'une autre idologie qui, dj, dnonait la mainmise des Juifs sur le monde et organisait leur extermination.

    Une usine de mort

    "Des mots" nous dira-t-on, ce ne sont que des mots auxquels il ne faudrait pas accorder trop d'importance : il est logique qu'une organisation "de rsistance" adopte une telle rhtorique, mais elle n'est destine qu' la propagande. Elle n'augure en rien de ce que fera, en fait, le Hamas. Ah bon ? Pourtant, la pratique dveloppe par le Hamas depuis sa naissance et, singulirement, Gaza depuis qu'il y a pris le pouvoir, pouse parfaitement son discours.

    Lorsqu'ils crent le Hamas et sa branche arme - les Brigades Ezzedine al-Qassam -, en 1987, les Frres musulmans de Palestine, regroups autour de Cheikh Ahmed Yassine, d'Abed al-Aziz Rantissi et du Docteur Mahmoud Zahar, ont un objectif clair : en faire le principal concurrent du Fatah et, si possible, profiter de l'Intifada pour supplanter ce mouvement auquel ils reprochent d'tre laque et de vouloir ngocier avec Isral. Comme tout mouvement islamiste qui se respecte, le Hamas maintient en permanence deux fers au feu, celui de la violence, qui lui permet de sduire la jeunesse, et celui de l'action sociale et culturelle, qui va lui rallier de larges pans des populations dshrites mais aussi des classes moyennes.

  • 31

    partir de 1994, les actions armes du Hamas - qui avait revendiqu de nombreuses agressions individuelles l'arme blanche ou l'arme feu au cours des annes prcdentes - se font de plus en plus violentes et sanglantes : le 6 avril 1994, l'attaque d'un bus Afula (en Galile, dans le nord d'Isral) fait huit morts. Cinq jours plus tard, mme type d'attaque Hadera (dans le nord d'Isral, toujours, non loin de Hafa) : 5 morts, nouveau. Le 19 octobre de la mme anne, un attentat suicide fait 22 morts bord de l'autobus n5, rue Dizengoff, Tel-Aviv. En tout, entre 1995 et 2004, une trentaine d'attentats massifs revendiqus par le Hamas - pour ne citer que leurs actions les plus spectaculaires - font plusieurs centaines de morts et plus de 2.000 blesss6 dans la population isralienne, et je ne tiens compte ici que des victimes civiles.

    On m'objectera : "Oui, mais c'est la guerre, il s'agit d'actes de rsistance face l'occupation de la Palestine par les Israliens." Le parallle est connu : "En Europe aussi, vous avez rsist pendant la Seconde Guerre mondiale. Il y a aussi eu des morts...

    Outre le fait qu'elle met sur le mme pied l'occupation nazie de l'Europe et l'occupation isralienne de territoires palestiniens, ce qui est insupportable, la comparaison est irrecevable. On peut discuter l'infini du bien fond thique (je ne parle pas ici de l'aspect stratgique ou "militaire") de l'assassinat individuel d'un soldat allemand par la Rsistance, dans un pays d'Europe occup, durant la Seconde Guerre mondiale. Mais la Rsistance, au moins, ciblait des militaires,

    6 On notera que, toutes organisations terroristes confondues, l'activisme palestinien fera, entre le 29 septembre 2000 et le 1er dcembre 2005, un total de 7.590 morts ou blesss (976 tus, 621 grivement blesss, 907 "modrment" blesss et 5.086 lgrement blesss). Ces chiffres ne comprennent pas les militaires.

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    des fonctionnaires de l'autorit d'occupation ou (mais plus rarement) des collaborateurs. Elle ne s'en est jamais prise aux civils. De trs nombreux rassemblements de partis ou organisations collaborationnistes ont eu lieu dans plusieurs pays occups, dont la France et la Belgique, et aucune de ces foules dans lesquelles les civils taient nombreux (et, de plus, tout acquis aux ides de l'ennemi) n'a jamais fait l'objet d'une attaque.

    Le Hamas, lui, n'a quasiment jamais frapp des militaires ou des policiers, pourtant faciles trouver en Isral : il cible exclusivement les civils, se spcialisant dans les attentats suicides contre des autobus et n'hsitant pas s'attaquer un march, des restaurants, des cafs, une bote de nuit, une cole ou encore la caftria de l'universit de Jrusalem.

    Quelle est la valeur militaire d'un banquet de mariage ? Aucune, tout le monde sera d'accord sur ce point. Pourtant, le 9 septembre 2003, le Hamas tue 7 personnes (dont la future marie ge de 20 ans, Nava Appelbaum, et son pre, le docteur David Appelbaum, chef des urgences d'un grand hpital de Jrusalem) et en blesse 57 autres dans un attentat suicide au Caf Hillel, Jrusalem.

    Quelle est la valeur militaire d'un dner de Pques organis pour des personnes ges ? Aucune l'vidence. Cela n'empchera pas le Hamas de "cibler" une telle fte, au Park Htel de Netanya, le 27 mars 2002. Bilan : 29 morts et 155 blesss.

    Quelle est la valeur militaire d'un... bassin de natation ? Plutt limite, vous rpondront les meilleurs experts. Cela ne gnera pas outre mesure le Hamas lorsqu'il s'attaquera une piscine de Tel-Aviv, le 7 mai 2002. Bilan : 15 morts.

  • 33

    J'arrte l cette litanie de l'horreur. Rien ne sert d'aligner les dossiers, les chiffres parlent d'eux-mmes, mais je me permets quand mme de les rappeler : plusieurs centaines de morts et plus de 2.000 blesss. TOUS civils. Human Rights Watch, l'une des rares organisations de dfense des droits de l'Homme tenter de faire honntement son travail - et qui, par ailleurs, a plusieurs fois condamn Isral et ne peut donc tre considre comme un instrument de propagande de Jrusalem - l'a crit on ne peut plus clairement : "Un groupe qui excute des attaques multiples et intentionnelles contre des civils comme part d'une stratgie consciente est responsable de crimes contre l'humanit. Les chef politiques et militaires du Hamas peuvent galement, titre individuel, tre tenus pour responsables de ces actes du fait de leur complicit directe. 7"Un texte qui, manifestement, n'a pas t lu par tout le monde.

    Des tueurs d'enfants, de femmes, de vieillards. Des tueurs d'coliers et d'tudiants. Des tueurs qui tuent parce que la mort les sduit et parce qu'ils veulent semer la terreur. Des tueurs froids, mthodiques, qui font tout pour maximaliser le nombre de victimes innocentes. Comme on doit se sentir bien quand on manifeste aux cts de ces gens-l !

    L'horreur de "l'attentat suicide"

    S'agit-il "d'erreurs de ciblages" ? De "dgts collatraux" ? De regrettables excs de zle dus quelques esprits surchauffs et malades ? Non, bien au contraire : le recours par le Hamas l'attentat dirig exclusivement contre des cibles civiles est trop systmatique (il reprsente

    7 Human Rights Watch, "Erased in a moment : Suicide bombings attacks against Israeli civilians", page 67.

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    plus de 95% des centaines "d'oprations" revendiques par cette organisation depuis sa cration), pour qu'il ne s'agisse pas, l'vidence, d'une stratgie politique, une stratgie de la terreur conue au sommet du mouvement et fidlement applique sa base.

    Qu'on me permette encore de m'attarder au concept "d'attentat suicide", car il s'agit l du mode oprationnel prfr du Hamas. Et non sans raison. Le kamikaze (le chabid ou "martyr", comme prfrent dire les islamistes) offre un "rapport qualit-prix" sans pareil : une seule vie humaine sacrifie, quelques kilos d'explosifs et un deux kilos de ferraille (essentiellement des clous, vis et boulons) suffisent semer mort et dvastation. De plus, le chabid est une arme "intelligente", capable de changer de trajectoire et de se choisir une nouvelle cible si celle qui lui a t indique est inaccessible, et capable aussi d'attendre le meilleur moment pour se faire sauter. Enfin, l'vidence, l'attentat suicide est celui qui provoque le plus d'horreur dans la socit qui en est victime, et qui tmoigne au plus haut point de la motivation sans faille des terroristes.

    L'expression "attentat suicide" est hlas tellement banalise dans nos journaux tlviss que le spectateur occidental n'y prte plus attention et ne comprend pas exactement toute l'horreur qui sous-tend ces mots.

    L'horreur commence ds le recrutement du kamikaze. Le Hamas repre en son sein ou dans la population qui l'environne des esprits faibles, fragiles ou des individus ayant une tache effacer8. Coup de son milieu - et, dans

    8 Les services de scurit israliens ont, par exemple, remarqu que les homosexuels (particulirement mal vus dans l'islam) ou les parents de "collaborateurs" avec les Israliens sont surreprsents dans les rangs des "martyrs".

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    le pire des cas, nous le verrons plus loin, encourag par son environnement et sa famille - le futur "martyr" subit un vritable lavage de cerveau destin lui faire "prendre conscience" de trois "ralits". Il n'a pas d'avenir sur cette terre, son sacrifice sera dcisif pour la cause et, enfin, il en sera amplement rcompens. Non seulement il sera glorifi par ses "frres" aprs sa mort mais, surtout, il jouira dans la vie qui l'attend dans l'au-del des rcompenses dues un hros : des dizaines de vierges soumises son plaisir. La femme martyre, elle, se voit promettre une beaut sans pareille, mais pas d'amants... bien entendu ! Mme dans la mort, aux yeux des islamistes, il n'y a pas d'galit entre l'homme et la femme !

    Vient ensuite l'attentat lui-mme. Sans entrer ici dans trop de dtails sinistres - je reviendrai plus loin sur la surexploitation morbide que les islamistes et leurs allis et trop de mdias "respectables" ont faite de certaines images durant l'opration de Gaza -, je rappellerai nanmoins le b.a-ba du parfait terroriste. L'atteinte physique d'une explosion se manifeste par quatre effets dvastateurs sur le corps humain. D'abord, il y a le souffle (ou "blast"), soit la cration instantane d'une onde de choc qui entrane une surpression de l'air et provoque des lsions internes gravissimes (dchirure des organes tels que poumons, cur, foie, etc.) Ensuite, la projection de dbris et d'clats (aggrave ici par le fait que la charge sera entoure de ferraille, ce shrapnel qui sera violemment projet autour du kamikaze) engendre des perforations, des lacrations, des arrachages de membres. Bien entendu, l'explosion va galement dtruire partiellement ou dformer la structure physique dans laquelle se trouvent les victimes (bus, wagon, pice), d'o de nouvelles projections et des effondrements qui produiront d'autres blessures et qui ncessiteront de longues oprations de dgagement et de dsincarcration. cela s'ajoutent les ventuelles brlures.

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    On ne s'tonnera pas, ds lors, du fait que la "scne de crime" rsultant d'un attentat suicide soit une horreur absolue : corps dchiquets, membres pars, morceaux de chair, lambeaux de peau, le tout baignant dans des dizaines de litres de sang. Une simple question permettra de se faire une ide plus prcise de ce cauchemar : comment dnombre-t-on exactement et rapidement les victimes d'un attentat suicide ? En... comptant les ttes. Mme arrache et mutile, une tte demeure toujours "reconnaissable" alors que ce qui reste du corps est parfois dans un tel tat qu'il serait vain d'essayer de s'en servir pour arriver au mme rsultat.

    Voil l'uvre du Hamas, ce quoi il excelle : rpandre la mort parmi les civils, de la plus horrible faon. L'ignorent-ils vraiment, ceux qui dfilent- sous ses bannires, en Europe ?

    Seule la construction de la barrire de scurit sparant la Cisjordanie d'Isral fera peu peu baisser le nombre des attaques, partir de 2003. La menace, toutefois, ne disparatra pas totalement : le 6 mars 2008, un Arabe isralien recrut par le Hamas, Alaa Hicham Abou Dheim, s'est introduit dans une Yeshiva (cole talmudique) de Jrusalem et y a tu huit adolescents gs de 15 16 ans avant d'tre abattu. Tout au long de l'anne 2008, plusieurs attentats suicides prpars par l'organisation seront djous.

    La prise de pouvoir Gaza

    Le 22 mars 2004, les forces israliennes abattent Cheikh Ahmed Yassine, puis, le 17 avril suivant, elles en finissent avec Abdel Aziz Rantissi, qui lui avait succd.

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    En septembre 2005, Isral se retire unilatralement et totalement de la bande de Gaza, qui passe sous le contrle exclusif de l'Autorit palestinienne.

    Tirant habilement parti de l'effrayante corruption de l'Autorit palestinienne l'poque de Yasser Arafat et jouant merveille du maillage troit de ses organisations sociales, le Hamas remporte les lections lgislatives de janvier 2006 et obtient la majorit absolue (74 siges sur 132), ce qui oblige le prsident Mahmoud Abbas dsigner Ismal Haniyeh, ancien homme de confiance de Cheikh Yassine, comme premier ministre. la mme poque, le mouvement commence se rapprocher de Thran - qui y voit une occasion d'exercer enfin une influence relle sur le terrain mythique de la Palestine - mais refuse obstinment de respecter les trois critres imposs par l'Union europenne pour reprendre ses relations directes avec l'Autorit palestinienne, savoir : reconnatre l'existence d'Isral, renoncer la violence et s'engager respecter tous les accords antrieurs conclus par l'Autorit palestinienne.

    Les rapports du Hamas avec le Fatah, composante historique de l'Organisation de libration de la Palestine, et avec le prsident Mahmoud Abbas sont, cependant, de plus en plus tendus. Au printemps 2007, les affrontements se multiplient, dans plusieurs villes de Cisjordanie et Gaza, entre les services de scurit palestiniens (rests largement sous le contrle de Mahmoud Abbas) et les groupes arms du Hamas qui tentent de crer une police "parallle". Le 15 juin 2007, enfin, c'est le coup de force : le Hamas s'empare du pouvoir dans la bande de Gaza.

    Dans les jours qui suivent, les crimes se multiplient. Encourags par des fatwas mises par leurs chefs religieux, les partisans du Mouvement de la Rsistance islamique traquent les militants du Fatah et les membres de la

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    police et des services de scurit ou, parfois, simplement, les fonctionnaires civils de l'Autorit palestinienne. Meurtres et excutions sommaires se comptent par centaines. Aligns dans des terrains vagues, les opposants l'organisation islamiste sont fauchs par des rafales de pistolets-mitrailleurs. Certains sont torturs ou mutils. Plusieurs dizaines de membres de la police se verront ainsi tirer dans les genoux avec des munitions de gros calibre, ce qui entranera des amputations (la plupart d'entre eux sont aujourd'hui soigns dans des hpitaux... israliens).

    Tortionnaires et tueurs de leurs propres "frres" : voil ce que sont les membres du Hamas. Vous avez vraiment dit Rsistance" ?

    Rupture progressive avec les rgimes arabes modrs et rapprochement stratgique avec Thran

    La monte en puissance politique du Hamas au sein des territoires palestiniens va s'accompagner d'un loignement des rgimes arabes modrs qui se mfient de plus en plus des vises radicales du mouvement.

    L'Arabie saoudite, qui a longtemps t le principal bailleur de fonds du Hamas, rduit son aide financire avant de la supprimer totalement. En Jordanie, le Roi Abdallah Il qui, ds son accession au trne, en 1999, avait rompu avec la prudence de son pre et ferm les bureaux du Hamas, finira par expulser vers Damas l'un de ses principaux dirigeants politiques, Khaled Mechaal. Par la suite, les services de scurit jordaniens dvoileront plusieurs complots du Hamas dirigs contre de hauts responsables de Amman. C'est ainsi qu'en juin 2008, trois membres de l'organisation seront condamns de lourdes

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    peines pour avoir constitu des stocks d'armes et prpar un complot visant assassiner des agents de renseignement jordaniens.

    Mais c'est sans doute en gypte que le Hamas est peru comme la menace la plus importante, puisqu'il est l'hritier spirituel des Frres musulmans, la principale force d'opposition du pays. Le Caire voit d'un mauvais il la situation se dtriorer Gaza et ne souhaite pas que le Hamas y rgne de manire durable, au risque d'entretenir sa frontire nord une dstabilisation permanente. Et une base ventuelle pour des actions terroristes menes en gypte...

    Pour autant que leurs moyens le permettent, les services de scurit gyptiens vont donc traquer les rseaux de contrebande d'armes du Hamas et dmanteler les cellules oprationnelles sur son sol. Ils s'attaqueront galement aux filires de collecte du Hamas et aux organes de liaison entre ce groupe et les Frres musulmans. Les violations rptes de la frontire par des civils palestiniens affams par la gestion du Hamas, au dbut de 2008, ne feront rien pour arranger les choses.

    Mais ce moment, le Hamas s'est dj fortement rapproch de l'Iran qui tend se substituer aux pays arabes dans le financement et le soutien du mouvement. Thran a en effet un intrt stratgique des plus clairs entretenir de (trs) bonnes relations avec le Hamas, mme si ce dernier est sunnite. Disposant dj du Hezbollah chiite la frontire Nord d'Isral, le rgime des mollahs, en se servant du Hamas pour accentuer la pression au sud, peut passer pour le seul appui rel de la "rsistance" palestinienne, une tape importante sur l'hgmonie que le rgime chiite a toujours voulu exercer sur la partie la plus radicale du monde musulman. Les Iraniens ne vont donc pas lsiner.

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    En 2007 et 2008, des milliers de roquettes et de missiles Grad (une porte de 20 45 kilomtres) seront livrs Gaza, de mme que des armes lgres et des systmes anti-tanks Raa'd et Konkurs. Des transferts de technologies auront lieu, qui permettront au Hamas de fabriquer des IED (Improvised Explosive Devices, bombes artisanales de forte puissance rgulirement utilises en Irak, au Liban et en Afghanistan) et des EFP (Explosively Formed Penetrators, projectiles artisanaux perforants), menaant les transports de troupes israliens, tandis que des centaines d'oprateurs de l'organisation seront entrans en Iran. Et des centaines de millions de dollars iraniens seront verss sur les comptes du Hamas pour financer ses ailes politique et militaire.

    C'est l'ensemble de cette assistance "technique" et financire qui permettra au Hamas de raliser un saut qualitatif dans ses capacits tactiques frapper Isral compter du dbut de 2008, en touchant des localits de plus en plus loignes de la bande de Gaza.

    Contrle social absolu et renforcement des capacits "militaires"

    Certains experts nous diront que le Hamas n'est pas seulement une organisation terroriste, mais qu'il est aussi une association jouant un rle social dans les territoires palestiniens. Et c'est partiellement vrai. Comme les autres organisations islamistes, le Hamas s'est infiltr l o "l'tat" (en l'occurrence, l'Autorit palestinienne) tait absent et il a palli son incurie en rendant les "services sociaux" qu'il ne rendait pas.

    Mais il ne faudrait pas s'y tromper. Ce n'est ni par grandeur d'me ni par pure gnrosit que le mouvement

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    a agi de la sorte. D'une part, le maillage d'organisations sociales et culturelles qu'il chapeaute lui permet de fournir des emplois, des financements et des couvertures ses oprateurs terroristes. D'autre part, les mmes organisations lui offrent d'intressantes opportunits de propagande et de recrutement, surtout parmi la jeunesse. On remarquera par exemple, en 2003, que plusieurs "martyrs" provenaient de... clubs de football financs et grs par des mosques proches du Hamas... Enfin, ces organisations lui permettent d'tendre sa domination et de mettre en uvre son idologie totalitaire.

    Les rglements de comptes politiques entre le Hamas et le Fatah qui ensanglantent la bande de Gaza partir de l't 2007 s'accompagnent de l'application immdiate du programme religieux radical du Hamas. Obligation est faite chacun de respecter scrupuleusement la chariah. Le commerce et la consommation d'alcool sont interdits, des magasins de location de vidos et des cafs Internet (qui aident propager le "vice" occidental) sont ferms ou dtruits, les chansons lors des banquets de noce sont prohibes. Plus anecdotique : si les femmes sont, videmment, vivement encourages respecter le code vestimentaire islamique et les "bonnes murs", et les hommes incits se laisser pousser la barbe, les peines des dtenus de droit commun de la prison Al-Saraya sont rduites s'ils apprennent par cur cinq sections du Coran. Les jeunes couples qui se promnent dans la rue sont arrts et doivent prouver, sous peine d'arrestation, qu'ils sont mari et femme, frre et sur ou fiancs.

    Les femmes souffriront particulirement de la prise de pouvoir des islamistes du Hamas. Une "police des femmes" est cre en aot 2007. Elle va s'illustrer, comme la "justice" du Hamas, de la faon la plus sinistre qui soit : des femmes violes se voient contraintes d'pouser

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    leur agresseur tandis que les hommes ayant assassin une pouse souponne d'adultre ou une sur accuse d'avoir attent "l'honneur de la famille" se voient condamns des peines symboliques. Souvent, des mdecins sont requis afin de "justifier" ces crimes, a posteriori ou parfois mme avant qu'ils ne soient commis, pour qu'ils constatent qu'une jeune fille non marie n'est plus vierge...

    Les enfants ne sont pas oublis par le Mouvement de la Rsistance islamique. Ds leur plus jeune ge, ils sont "cibls" par des programmes d'al-Aqsa TV, la chane du Hamas, qui vise les habituer l'ide du martyr. Ainsi, des dessins anims tels que Farfour (le "Mickey" islamiste) ou Foufou et Koukou les incitent la haine contre les Juifs et les chrtiens et glorifient ceux qui se sacrifient pour la Palestine et dans "le chemin d'Allah". Au printemps 2008, al-Aqsa a retransmis un spectacle de marionnettes dans lequel un jeune enfant poignarde le prsident George Bush avant d'annoncer la transformation de la Maison-Blanche en... mosque. Un peu plus gs, vers dix ans, nombre d'enfants subissent un entranement "militaire" pouvant aller jusqu' leur apprendre fabriquer et actionner des ceintures d'explosifs.

    Enfin, on ne peut passer sous silence le sort peu enviable des chrtiens. Sur une population d'un peu plus d'un million et demi de Palestiniens vivant dans la bande de Gaza, quelques milliers seulement sont chrtiens. L'article 31 de la charte du Hamas stipule que "A l'ombre de l'Islam, les disciples des trois religions, islamique, chrtienne et juive, peuvent coexister dans la scurit et la confiance. Ce n'est qu' l'ombre de l'islam que la scurit et la confiance peuvent se trouver." Faut-il s'tonner que la ralit soit trs diffrente ? Souponns d'tre des suppts de l'Autorit palestinienne de Mahmoud Abbas ou, pire encore, des tratres potentiels au service d'Isral, les chrtiens de Gaza sont impitoyablement perscuts. Des glises sont fermes, profanes ou dtruites,

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    des croyants assassins, emprisonns, torturs, pousss la conversion force ou l'exil, et il y a longtemps que la seule librairie chrtienne de Gaza n'est plus qu'un tas de ruines fumantes...

    Voil l'organisation qui a reu le soutien franc et massif de militants de gauche ou d'extrme gauche qu'on voudrait croire sincres et gars mais dont on s'tonne, dans ce cas, qu'ils ne se soient jamais manifests l'poque o s'accumulaient les crimes et violations des droits de l'Homme perptrs par le Hamas et qu'ils aient rserv leur vertueuse et saine indignation aux seules bombes israliennes.

    O taient-ils, ces zlotes de la libert et de la justice, lorsque le Hamas torturait des Palestiniens ou justifiait les crimes d'honneur ? Que disaient-ils lorsque cette noble organisation chassait les chrtiens ? Ont-ils manifest, ptitionn ou simplement protest du bout des lvres ? Je ne m'en souviens pas. Et nos journalistes, toujours rapides noircir du papier chaque fois que les Israliens commettent une bavure, combien de colonnes ont-ils remplies avec ces crimes ? Pas beaucoup ! Combien de minutes de tlvision pour ces exactions ? Fort peu. Soyons clairs : la mort d'un Palestinien n'est mouvante, intressante, "vendable" que lorsqu'il est tu par un Isralien, par un Juif. Il s'agit alors d'un acte abominable. Mais si le mme Palestinien est victime de ses propres frres, alors sa vie ne vaut rien et il n'intresse plus personne. Le Hamas a un permis de chasse en bonne et due forme qui lui permet de tuer des Arabes sans que cela n'meuve particulirement l'opinion mondiale. Que voulez-vous, on ne peut pas non plus s'occuper de toutes les misres du monde...

    Paralllement cette mise au pas de la socit gazaouite, telle que brivement dcrite, le Hamas augmentait trs

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    sensiblement, entre juin 2007 et dcembre 2008, son armement et sa capacit de nuisance. L'argent obtenu de Thran ne servira jamais amliorer le quotidien d'une population qui souffre mais acheter des armes achemines dans la bande de Gaza par les centaines de tunnels de contrebande qui la relient l'gypte. D'autres sont fabriques sur place, tandis que les tirs contre le territoire isralien se multiplient : depuis 2001, mais, a fortiori, depuis le retrait isralien de Gaza, en 2005, ce sont des milliers de roquettes et de missiles qui se sont abattus sur le sud d'Isral, un nombre croissant d'entre eux touchant des localits parfois loignes de plus de 40 kilomtres, comme Sderot ou Bersheeva. En tout, un million de citoyens israliens se trouveront ainsi sous la menace des projectiles du Hamas.

    Et ce qui devait arriver arriva...

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    II

    QUELQUES CONSIDRATIONS SUR LES CAUSES ET LES RALITS DE LA GUERRE

    "La premire victime d'une guerre, c'est la vrit", dclarait en 1917 le snateur amricain Hiram Warren Johnson. Rarement, sans doute, cet aphorisme n'aura t aussi applicable au monde rel qu'il ne le fut durant ce mois de janvier 2009.

    Une des raisons du dchanement passionnel suscit, en Europe, par l'opration "Plomb durci" rside certainement dans le fait que trop de mdias et bien des politiques ont insist, ds le dbut des bombardements, sur l'aspect disproportionn de l'offensive isralienne. Dsir de simplifier outrance une situation complexe pour mieux l'expliquer ? Volont de manipuler l'opinion pour la rendre plus rceptive aux arguments d'un camp qu' ceux de l'autre ? Empathie "naturelle" avec les victimes, entranant le dsir de stigmatiser leur agresseur ? Un peu de tout cela, sans doute, des doses diffrentes suivant les acteurs en prsence.

    cette simplification outrance - allant souvent jusqu'au dni pur et simple des arguments israliens - est venue s'ajouter, au fil des jours, une srie d'accusations, plus ou moins tayes, portant aussi bien sur le "ciblage" des civils par Tsahal que sur de supposs "crimes de guerre",

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    tels que l'utilisation "d'armes au phosphore blanc" ou des tirs "dlibrs" sur des installations de l'ONU. Des assertions qui tenaient autant la volont, pour certains, de diaboliser Isral qu' la profonde mconnaissance des autres pour la chose militaire. Autant d'tapes, en tout cas, qui ont t du pain bni pour les islamistes et leurs allis de circonstance dans leur volont de mobiliser la rue.

    Enfin, les chiffres des victimes de l'opration ont, trs probablement, t gonfls et repris sans aucun recul par la plupart des mdias internationaux qui, le plus souvent, "oubliaient" simplement de prciser que leur source exclusive n'tait autre que... le Hamas.

    Il me faut donc, avant d'aller plus loin, rpondre quelques-unes de ces questions qui se sont poses au long de ces trois semaines de guerre.

    Qui est responsable de la guerre ?

    Lorsque l'motion parle, trop souvent la raison s'efface. Les images d'une ville sous les bombes et celles de cadavres, a fortiori d'enfants, ont rapidement annihil chez beaucoup (chez ceux qui taient sincres, au moins, les autres s'en moquant, bien videmment) toute capacit entendre - et je ne parle mme pas "d'couter" - les arguments israliens, qui taient pourtant solides. Attardons-nous donc d'autres voix que personne, je pense, n'accusera d'tre vendues Isral.

    tout seigneur, tout honneur : qui mieux qu'un chef du Hamas peut nous dire qui a dclench les hostilits ? Le 14 dcembre 2008, Khaled Mechaal, l'un des principaux dirigeants politiques du Hamas, dclarait sur les ondes de

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    la tlvision al-Aqsa : "Cette Tahdiah a t limite une priode de six mois. Notons que l'ennemi ne s'est pas pli aux conditions de la Tahdia et que le sige continue de rprimer notre peuple. C'est pourquoi nous le Hamas, ainsi que la plupart des autres forces, dclarons haut et clair qu'aprs le 19 dcembre 2009, la Tahdiah prendra fin dfinitivement."

    Il faut noter que le mot "tahdiah" ne signifie pas "trve", comme il a t trop souvent traduit en franais, mais "calme" ou "accalmie". Et, en effet, il n'y a pas eu de "trve" puisque les actions offensives du Hamas ne se sont jamais arrtes aprs le 19 juin 2008 (date d'entre en vigueur de l'accalmie), entranant des ractions sporadiques de la part d'Isral : en tout, plus de 200 missiles et 100 obus de mortiers seront tirs sur le sud d'Isral entre le 19 juin et la fin de la "trve".

    Ds la fin du mois de dcembre, le prsident Mahmoud Abbas, tout en exprimant sa solidarit avec les victimes des bombardements en cours, dclarait qu'il avait, plusieurs reprises, "appel les leaders du Hamas pour leur parler, de faon directe et indirecte, via des intermdiaires arabes et non arabes. Nous leur avons parl au tlphone. Nous leur avons dit : s'il vous plat, ne mettez pas fin la Tahdiah". En vain, on le sait.

    Comme en cho, l'un des conseillers du prsident palestinien, Nimr Hammad, affirmait, le 28 dcembre : "Le responsable de ces massacres est le Hamas et non l'entit sioniste qui, de son point de vue, a ragi aux tirs de missiles palestiniens. Le Hamas doit cesser de laisser verser la lgre le sang des Palestiniens. Il ne devrait pas donner aux israliens un prtexte pour attaquer."

    Le directeur de l'Autorit de diffusion audiovisuelle palestinienne, Bassem Abou Sumayyah, estimera pour sa part, le 29 dcembre, que le Hamas "est pris de mgalomanie depuis sa prise de contrle de Gaza qui l'a aveugl au point qu'il

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    ne prte plus attention aux conseils de qui que ce soit. Le Hamas s'est comport comme une superpuissance " De nombreux chroniqueurs palestiniens suivront la mme ligne ditoriale ainsi que quelques voix (assez rares) dans la presse arabe. Ainsi, le 9 janvier, dans al-Arab, au Qatar, un chroniqueur crivait : "Ngocier avec lsral est une ncessit, lui dclarer la guerre est une grave erreur."

    En Turquie - pays musulman qui, historiquement, a pourtant toujours entretenu d'excellentes relations avec Isral - le premier ministre islamiste "modr" Recep Erdogan qualifiait l'opration isralienne, ds le dbut de celle-ci, de "crime contre l'humanit" et rclamait l'exclusion d'Isral des Nations unies, insistant sur le fait qu'"Allah punirait" l'tat juif, ni plus ni moins. Ce pays a, par ailleurs, t le thtre de manifestations de masse de haine islamiste appelant la "mort d'Isral". On se rappellera encore que, en 2008, Ankara avait accueilli avec une sympathie non dissimule le chef d'tat soudanais Omar al-Bashir, qui se vantait d'avoir "restaur la paix au Darfour", ou le prsident iranien Mahmoud Ahmadinejad. Mais cela n'empchera pas le ministre turc des Affaires trangres, Ali Babacan, de dclarer, le 27 janvier 2009, qu'Ankara "n'approuve pas le Hamas" et d'appeler le mouvement islamiste adopter des moyens pacifiques pour atteindre ses objectifs : "Le Hamas doit se dcider. Veut-il tre une organisation arme ou un mouvement politique ? Nous souhaitons qu'il uvre dans le cadre d'un mcanisme politique." tant donn les orientations et les choix de l'AKP1, le parti de Monsieur Erdogan, il est permis de penser que cette dclaration est purement tactique, mais elle n'en constitue pas moins une condamnation claire du Hamas.

    1 AKP (Adalet ve Kalkinma Partisi), Parti pour la justice et le dveloppement

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    Le 3 janvier, c'est la prsidence tchque de l'Union europenne qui estimera que l'opration isralienne est "dfensive" et non pas "offensive". D'autres voix europennes s'lveront galement, comme celle de Nicolas Sarkozy qui, le 5 janvier, jugera que le Hamas "a agi de faon impardonnable et irresponsable". La chancelire Angela Merkel, pour sa part, chargera lourdement l'organisation terroriste, et ce, ds le 29 dcembre, dans une conversation tlphonique avec le premier ministre isralien Ehud Olmert : "La responsabilit de l'volution de la situation dans la rgion incombe clairement et exclusivement au Hamas qui a rompu unilatralement le cessez-le-feu." L'une des prises de position les plus courageuses enregistres lors de ce conflit sera certainement celle d'Armand De Decker, prsident du Snat belge, qui a beaucoup uvr aux cts de l'Autorit palestinienne l'poque o il tait Secrtaire d'tat la Coopration. On me pardonnera de le citer longuement, mais cela en vaut la peine car, le 15 janvier 2009, sur les ondes de RTL, il mettait les points sur les "i" en rappelant un certain nombre de vrits trop souvent occultes : "Ce que je vois aujourd'hui, c'est en fait, un grand bras de fer entre le monde entier et l'Iran. Parce que l'affaire de Gaza n'est pas tellement l'affaire des Palestiniens qui vivent Gaza. Le Hamas est le bras arm de l'Iran dans cette affaire, comme le Hezbollah l'est au Liban..."

    Et de continuer : "Je ne sais pas si les citoyens s'en rendent suffisamment compte mais je pense qu'il y a beaucoup d'hypocrisie dans les discours qui sont tenus et les attitudes qui sont prises aujourd'hui par rapport l'offensive isralienne dans la bande de Gaza. Les Israliens ont essay de convaincre le Hamas d'arrter de bombarder le sud d'Isral. Il y a eu une trve et, un certain moment, ils [le Hamas] ont rompu la trve et ils se dont remis bombarder, comme ils le faisaient depuis sept ou huit and, le sud d'Isral. Et Isral a rpt, rpt, rpt qu'il fallait qu'ils s'arrtent.

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    Et aujourd'hui, Isral a dcid d'en finir non pas avec Gaza, non pas avec les Palestiniens, mais avec le Hamas. Et c'est la raison pour laquelle on constate un silence norme du monde arabe. Aucun pays arabe n'est solidaire du Hamas. Le seul qui l'est c'est la Syrie. Tous les autres se taisent dans toutes les langues et, au contraire, cherchent tre le plus discrets possible et calmer le jeu car aucun pays arabe ne veut que l'Iran chiite ne gagne ce bras de fer avec le reste du monde et dstabilise entirement la rgion et puisse amener toute la rgion dans un nouveau conflit."

    Armand De Decker rappelle ensuite que la position isralienne est loin d'tre aussi agressive qu'on le dit gnralement : "J'ai une grande piti pour le peuple palestinien qui subit cela... [mais] il faut le savoir, ce sont des choses qui ne se disent pas beaucoup, mais le gouvernement isralien a demand certains moments au gouvernement belge de faire des choses [dans l'aide humanitaire] sur le territoire de Gaza. Je sais donc fort bien qu'Isral n'attend qu'une chose, c'est de vivre en paix et de ne plus tre agress par personne. Isral ne s'opposerait pas, je pense, ce que nous voulons tous avec nergie en Europe : la cration d'un tat palestinien reconnu qui, lui aussi, vive dans des frontires sres. Ceux qui empchent cela c'est le Hamas, le Hezbollah et l'Iran, et ce qui se passe pour le moment, c'est a et rien d'autre... Toute guerre est violente, mais c'est une guerre trs particulire parce qu'une guerre qui s'arrte trois heures par jour, c'est une guerre trs particulire. Une guerre o l'on prvient les gens qu'on va bombarder, soit par tracts soit par tlphone, et les mdias ne Le disent pas assez, c'est une guerre trs particulire... Il est vident que les rsolutions de l'ONU ne sont pas respectes par Isral, enfin certaines, ou elles ne le sont pas compltement. Il ne faut pas oublier que des rsolutions avaient demand Isral de sortir du Liban. Ils l'ont fait et ils ont t attaqus par le Hezbollah. On leur demandait de sortir de Gaza, ils sont sortis de Gaza et ils ont t bombards par le Hamas. Ils font un certain nombre de choses. Ils devraient encore sortir d'autre territoires mais ils ne le font pas car ils sont obsds par leur survie et leur scurit..."

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    Enfin, l'une des condamnations les plus fortes du Hamas viendra d'un homme qui est connu pour n'avoir jamais mch ses mots face ... Isral : le Commissaire europen Louis Michel, charg de la coopration au dveloppement. Le 26 janvier 2009, en visite Gaza, aprs avoir dclar que ce qu'il a vu "est abominable, injustifiable et inacceptable", ce qui constitue une nouvelle mise en cause de l'tat hbreu, il enchane : "Il faut aussi rappeler quand mme la responsabilit crasante du Hamas. Je le dis ici dessein, le Hamas est un mouvement terroriste et il faut le dnoncer comme tel." Il martlera encore : "Le Hamas a rat une opportunit d'tre un interlocuteur de la communaut internationale [aprs sa victoire en 2006] en ne rpondant pas la proposition europenne de dialogue, condition qu'il reconnaisse le droit l'existence d'Isral et abandonne la lutte anne [...] On ne peut pas discuter avec un mouvement terroriste qui utilise le terrorisme comme moyen. Nous ne pouvons pas accepter que la manire dont le Hamas se comporte soit confondue avec de la rsistance. Quand on tue des civils innocents, ce n'est pas de la rsistance, c'est du terrorisme..."

    Face ces propos d'une grande clart, le Hamas ragira immdiatement, par la voix de Taher al-Nounou, l'un de ses porte-paroles en stigmatisant des "dclarations odieuses qui traduisent une partialit totale en faveur de l'ennemi qu'il cherche exonrer des massacres atroces commis contre le peuple palestinien". Pour le Hamas, toujours dans la nuance lorsqu'on s'oppose lui, Louis Michel veut "faire plaisir l'administration amricaine et au lobby sioniste pour faire avancer sa carrire".

    J'ajouterai pour clore ce dbat que le droit international, malgr ce qui a pu se dire, est extrmement clair. La charte des Nations unies rappelle, en son article 51 "le droit individuel de lgitime dfense individuelle ou collective, dans le cas ou un membre des Nations unies est l'objet d'une agression arme, jusqu' ce que le Conseil de scurit ait pris les mesures ncessaires

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    pour maintenir la paix et la scurit internationales". Du reste, le 15 janvier, en rencontrant le premier ministre Ehud Omert, et tout en dplorant les "nombreuses pertes humaines et la souffrance de la population civile Gaza", le Secrtaire gnral de l'ONU, Ban Ki-Moon, condamnait les tirs de roquettes par le Hamas : "Il s'agit d'actes de terrorisme qui ne peuvent aucunement tre justifis et qui doivent s'interrompre. Isral a le droit de vivre en paix et de dfendre ses citoyens."

    Le Hamas, donc, apparat aux yeux de ceux qui tentent d'couter la voix de la raison - mme si, par ailleurs, ils peuvent regretter la force de la raction isralienne - comme le grand responsable voire le seul coupable de la tragdie. Reste savoir, videmment, si Isral aurait pu choisir une autre voie.

    Isral avait-il le choix ? Fallait-il dclencher une guerre pour "quelques roquettes", comme le souligneront certains ? tait-il ncessaire de bombarder une zone aussi densment peuple que la bande de Gaza pour mettre fin ces tirs ? Fallait-il tuer 1.500 personnes (je reviendrai plus loin sur ce chiffre fantaisiste) pour en terminer avec une agression - rpte des centaines de fois au cours de plusieurs annes, certes, mais qui, en dfinitive, n'a fait "que" quelques dizaines de morts ? La rponse politiquement correcte est videmment : Non, il ne le fallait pas." Alors que je l'interrogeais sur ce qu'aurait d faire Isral, le Commissaire europen Louis Michel m'a rtorqu, au cours d'un dbat tlvis la mi-janvier 2009, que " la place des dirigeants israliens, jamais il n'aurait choisi l'option militaire, jamais !" (Ce qui, soit dit en passant, prouve qu'il n'est pas le meilleur ami de

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    l'tat hbreu et donne, par contrecoup, un poids certain au jugement qu'il porte sur le Hamas comme cit ci-dessus.)

    On me permettra d'abord de remarquer que cette question - Isral devait-il dclencher cette opration ? - est simplement grotesque. Pose - de prfrence sur un ton grave et pntr - dans un restaurant accueillant de la Rive gauche, dans une caftria universitaire de Bruxelles ou de Berlin, autour de la machine caf d'une salle de rdaction de Londres ou de Zurich ou dans un salon feutr du Parlement europen, elle est mme carrment indcente. vrai dire, elle ne peut se poser qu' un gentil bourgeois bohme qui n'a jamais pris de roquette, grenade ou autre missile sur la gueule. On me pardonnera - ou, d'ailleurs, on ne me pardonnera pas, je m'en moque- la violence de l'expression, mais elle est justifie par la totale dconnection avec la ralit de ceux qui osent se lancer dans ce genre de dbat. Serait-il possible qu'une seule minute, tous ces braves contempteurs d'Isral laissent tomber leurs illres et essaient de se mettre la place de ceux qui ne parlent pas des roquettes mais en sont victimes ? Un minimum d'empathie, est-ce vraiment trop demander ?

    Depuis 2003, plus de 9.000 roquettes ont t tires par le Hamas sur Isral. Sur ce nombre, plus de 6.000 l'ont t aprs le retrait isralien de Gaza durant l't 2005, et plus de 3.000 durant la seule anne 2008. Certes, ces tirs n'ont fait "que" trente-quatre morts et un millier de blesss. J'aurais la faiblesse d'ajouter qu'ils ont galement traumatis plusieurs dizaines de milliers d'enfants et autres civils. Quelle tait, avant l'opration, la vie des centaines de milliers d'Israliens - plus d'un million, en fait - rsidant porte de ces roquettes ? Ils vivaient traqus comme des btes, tentant d'oublier la menace omniprsente pour vaquer, aussi normalement que possible, leurs occupations. Mais ds qu'un dpart de projectile tait signal, ils n'avaient que quinze secondes pour gagner un abri, s'aplatir sous

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    une table pour viter les clats ou s'allonger au sol pour se protger. Quinze secondes ! Et ce, parfois, jusqu' dix fois par jour, sinon plus. Est-ce cela vivre ? Comment expliquer un enfant qu'il doit dormir dans un abri pour chapper la mort ? Comment lever sa famille, travailler, aimer, penser, manger, avoir une vie sociale dans ces conditions ? Comment vivre, tout simplement, sous cette menace constante, rpte jour aprs jour, semaine aprs semaine, mois aprs mois et anne aprs anne ? Car cela a dur cinq ans !

    Se sont-ils pos ces questions, ceux qui nous expliquent qu'Isral avait le choix ? Non, pas une seconde ! Ont-ils tent de se mettre la place de ceux qui vivaient cette vie qui n'en n'tait plus une ? Non, jamais ! Combien aurait-il fallu de morts israliens pour qu'ils y rflchissent, puisque trente-quatre, ce n'est manifestement pas suffisant ? Cinquante ? Cent ? Deux cents ? Est-ce une question de simple arithmtique ? Dans le confort de leur bonne conscience et de leur vie bien douillette, ils se contentent de nous expliquer, ces moralistes courte vue, qu'Isral avait d'autres choix. Ah oui ? Mais lesquels alors ?

    Car tout a t tent. Des ripostes "tactiques" - des bombardements cibls pour liminer les terroristes responsables des tirs - les pressions internationales, entre autres celles de l'gypte, le recours la diplomatie et, bien entendu, les admonestations de l'Autorit palestinienne. Averti de multiples reprises par Isral, menac d'une catastrophe qui finirait par s'abattre sur le peuple palestinien, somm par le Caire de renoncer la violence, suppli par le prsident Mahmoud Abbas de renoncer la violence, comment a ragi le Hamas ?

    En continuant ses tirs. Tout simplement en continuant ses tirs.

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    Je pose ds lors une question simple : comment aurait ragi n'importe quelle dmocratie europenne si elle s'tait trouve la place d'Isral ? Imaginons une seconde, juste pour rire, qu'un groupe terroriste alsacien se rfugie derrire la frontire allemande et, de l, bombarde, jour aprs jour, mois aprs mois, des villes et des villages d'Alsace. Imaginons que l'Allemagne refuse de faire ce qu'il faut pour mettre fin ces tirs. Pire : qu'elle les encourage. Une fois tous les autres recours puiss, la France attendrait-elle deux mois, six mois, un an avant de ragir ? Je ne le pense pas. Mais Isral a attendu cinq ans. Il a fallu trente-quatre morts, mille blesss, cinq ans de bombardements et plus de 9.000 roquettes pour que la foudre, longtemps annonce, s'abatte sur Gaza. C'est long cinq ans : 1.825 jours ! Aurait-il fallu attendre six ans ? Dix ans ? Vingt ans ?

    J'ajouterai un dernier point : outre ses attentats multiples et rpts, outre les milliers de missiles et de roquettes tirs depuis Gaza, le Hamas est coupable de l'enlvement, le 25 juin 2006, du caporal Gilad Shalit, gard en otage quelque part Gaza depuis cette date, soit depuis plus de trente et un mois au moment o j'cris ces lignes. Les pressions et mdiations internationales et les offres de ngociation d'Isral sont restes lettre morte. En quoi l'enlvement et la squestration d'un jeune soldat de 18 ans peuvent-ils rellement tre considrs comme une opration militaire acceptable ? Cela aussi, il aurait fallu que Jrusalem accepte ?

    On me rtorquera, bien entendu, que je noie le poisson, que c'est pour de pures et simples raisons de politique intrieure que la guerre a t dclenche. Pour satisfaire une opinion publique avide de revanche quelques mois d'lections qui s'annonaient difficiles.

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    Dsol, je n'achte pas ! Je dis, moi, que le premier devoir d'un tat qui se respecte est de protger ses citoyens et que, quand tout a t tent, en vain, pour assurer leur scurit, oui, la guerre, aussi horrible qu'elle soit, est la dernire solution.

    Un mot encore sur le fameux "blocus" qui aurait trangl et affam Gaza. Entre le 19 juin et le 18 juillet 2008, soit pendant toute la dure de la trve, 9.562 camions d'aide humanitaire ont pntr dans la bande de Gaza depuis Isral, livrant 209.896 tonnes de biens divers. Durant la mme priode, 52 millions de litres de fuel et 10.670 tonnes de gaz ont t livrs Gaza tandis que 3.466 personnes (des malades et leurs accompagnants) taient accueillies dans des hpitaux israliens. Contrairement ce que prtendent les propagandistes du Hamas et leurs dociles allis en Europe, la fourniture d'lectricit Gaza (depuis la centrale d'Ashkelon, rgulirement cible par les roquettes des terroristes), n'a jamais t interrompue, la rduction maximale tant de 30%. Vous avez dit "blocus" ?

    Non, Isral n'avait pas - n'avait plus - le choix.

    L'offensive a-t-elle fait de trop nombreuses victimes civiles ?

    Deuxime accusation souvent entendue : les bombardements indiscrimins de l'aviation isralienne ont tu normment de civils. La plupart des dtracteurs d'Isral n'hsiteront mme pas affirmer qu'Isral a volontairement et dlibrment frapp les populations civiles. C'est tout fait faux, mais qu'importe ! Goebbels le disait dj : plus le mensonge est gros, mieux il passe. Les propagandistes

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    du fascisme vert et leurs amis gauchistes ont bien retenu la leon et l'appliquent la perfection.

    Bien sr qu'il y a eu trop de morts civiles. Il y en a toujours trop et personne ne se rjouit de la mort d'un civil, d'une femme, d'un enfant - enfin, personne de "normal", parce qu'au Hamas, a aurait plutt tendance les amuser. Mais revenons quelques faits : la bande de Gaza est l'une des zones urbaines les plus densment peuples du monde, avec un peu plus d'un million cinq cent mille personnes habitant sur une troite langue de terre de 360 km. Les spcialistes estiment qu'une opration militaire combine du type de celle qui a t mene par Isral - mlant bombardements ariens, tirs d'artillerie, intervention de blinds et progression de troupes pied en zone urbaine - peut causer jusqu' 30 % de pertes dans la population civile. Or, les chiffres du Hamas font tat de 1.300 morts dont 40 % 50 % de civils. On est donc trs loin, mais vraiment trs loin de ce qu'aurait pu tre la tragdie.

    Force est donc de constater, quitte ne pas tre politiquement correct, que ces chiffres relativement bas sont dus, en grande partie, la restriction dans l'usage de la force que s'est impose l'arme isralienne. coutons l'expert Joseph Henrotin2 : "Le conflit isralo-palestinien est extrmement motionnel et donc, quand bien mme il n'y aurait que deux morts, Isral serait malgr tout point du doigt... C'est la problmatique de la guerre urbaine. Vous aurez des morts, mme si vous parvenez les rduire des niveaux historiquement trs bas...

    2 Chercheur, rdacteur en chef adjoint de "Dfense et Scurit Internationale", co-auteur de l'ouvrage collectif "Les oprations militaires en zones urbaines : paradigmes, stratgies et enjeu.'", Edition Bruylant, Bruxelles, 2008.

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    Il y a assez peu de morts pour l'instant Je sais que ce que je vais vous dire provoque une certaine dissonance par rapport ce que l'on peut entendre dans les journaux tlviss. Mais en fait, les Israliens progressent assez lentement. Non pas parce qu'ils font face une grosse rsistance, quoiqu'elle existe, mais parce qu'ils progressent prudemment. Dans la mesure o ils savent que s'ils avancent trop rapidement, le nombre de pertes civiles va augmenter."

    Un ciblage extrmement prcis des frappes ariennes, prpares et appuyes par un usage intelligent et extensif du renseignement sous toutes ses formes - imagerie arienne, interceptions techniques, sources humaines - l'utilisation de munitions spciales destines limiter les destructions la structure attaque3, une progression lente et mesure des troupes au sol : Isral a tout fait pour rduire, autant que faire se peut, les "dgts collatraux" et autres pertes civiles. Mais ce n'est pas tout : les bombardements ont t prcds de largages massifs de tracts sur les zones vises, pour donner aux civils une chance d'vacuer les lieux. Mieux encore, dans une opration d'une grande originalit baptise "Dafak Ba Gaq" ("Toquer au toit"), le service de renseignement militaire isralien Aman a... tlphon aux habitants des immeubles qui allaient tre bombards pour les prvenir de l'action imminente. Certains chefs terroristes eux-mmes ont reu ce type d'appel afin qu'ils aient le temps de mettre leur famille l'abri. Beaucoup d'armes ont-elles agi de la sorte au cours de l'histoire ?

    Certains ont qualifi ces pratiques de "cyniques", se demandant "o ces civils pouvaient-ils fuir dans un territoire entirement boucl". Colossale hypocrisie :

    3 Il ne s'agissait d'ailleurs pas d'une "premire", loin de la. J'ai personnellement vu Tsahal utiliser ce type de munitions - en l'occurrence des bombes " implosion" capables de raser un immeuble sans endommager ceux qui l'entourent - lors de la "premire guerre du Liban", durant l't 1982.

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    Isral n'a pas pratiqu le "bombardement stratgique", mais le "bombardement tactique". La diffrence est de taille : le premier vise craser un pays ou une ville sous les bombes (comme ce fut le cas durant la Seconde Guerre mondiale ou au Vietnam) afin de dtruire son potentiel conomique et de bri