GAUTHIER Aubin - Compérage Magnétique Réprimé - Questions Et Observations d'Ordre Public Sur La...

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Gauthier

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  • Gauthier

  • RFORMEMDICALE.

    COMPRAGE

    MAGNTIQUE

    RPRIM,

    QUESTIONSETOBSERVATIONSD'ORDREPUBLICSURLAPRATIQUEDUMAGNTISME, DUMESMR1SMEETDUSOMNAMBULISME

    CONSIDRECOMMEEXERCICEDE LAMDECINE;SUIVIES

    D'UNELETTREDEM.LEMINISTREDEL'INSTRUCTIONPUBLIQUEACESUJET.

    PAR

    jfflJBINGAUTHIER.

    flri : I fr. 50.

    PARIS,A L'ADMINISTRATION DE LIBRAIRIE,

    Rue NotreDame-des-Victoires,26,ET AU BUREAU DE LA REVUE MAGNTIQUE,

    Rue Brda, 28, avenue Frochot, 3.

    NOVEMBRE1846.

  • 1RFORME MDICALE.

    COMPRAGE

    MAGNTIQUE

    RPRIM,

    QUESTIONSETOBSERVATIONSD'ORDREPUBLICSURLAPRATIQUEDUMAGNTISMR,DUMESMERISMEETDUSOMNAMBULISME,

    CONSIDRECOMMEEXERCICEDE LAMDECINE.

    OBSERVATIONS PRLIMINAIRES.

    Lorsqu'il s'est agi de l'ouverture d'un Congrs mdical Paris, nous avons bien pens que le Magntisme et le Som-nambulisme pourraient y soulever quelque question rgle-mentaire et d'ordre public; mais, aprs ce qui s'est passau Congrs scientifique de Reims en septembre 1845 (1),nous n'avons pas conu un moment l'espoir que la mdecineparisienne pt se livrer d'elle-mme un examen srieux etrflchi. Nous ne nous sommes pas tromp.

    Un membre du Congrs, le docteur J. J. Beaux, ayant cruapercevoir une lueur antimagntique dans l'une des propositions rformatrices de la Commission charge du rapportsur l'Exercice illgal de la mdecine, avait demand quel-ques explications ce sujet. Il en est rsult, la honte de

    (1)VoirRevuemagntique,tomeIer,pages433 488.

  • 2 COMPRAGEMAGNTIQUEl'assemble, une recrudescence d'injures et d'insultes en-vers les magntiseurs et les somnambules (1).Honor un instant de la visite de M. le Ministre de l'In-

    truction publique, le Congrs a cru y trouver une approba-tion entire de ses travaux; il a pens que ses vux seraientraliss sans discussion ni contrle. Mais M. de Salvandy,tranger tout esprit de coterie, entend mieux ses devoirsque le Congrs; il a tenu compte des observations que nouslui avons soumises en juillet 184-5sur l'exercice du magn-tisme , et en'mars 1846 sur les abus naissants du somnam-bulisme (2) ; tmoin la lettre qu'il a bien voulu nous crirele 22 juin dernier.Sr, maintenant, d'tre cout en haut lieu, nous allons

    continuer tranquillement notre tche, et s'il est encorequestion du Congrs dans nos observations critiques, c'estque le rsultat de ses travaux se trouve naturellement li tout projet de rforme mdicale.

    Nous essayerons d'abord de faire sentir la ncessit dergler l'exercice du magntisme proprement dit; en termes

    plus positifs, du Mesmrisme ou application des divers pro-cds mesmriens la gurison des maladies. Car, nous le

    rpterons toujours: Magntisme, Mesmrisme et Som-nambulisme sont trois choses distinctes, et que cependantmdecins, savants et citoyens de toutes classes confondent

    chaque jour.Mesmer et ses successeurs ayant pos en principe que le

    magntisme tait un moyen de gurison; tout moyen

    (1)Dans sa sance du 10novembre, la question du magntismeayant t souleve,l'Assembles'estcriepresqueenmasse: LesMa-gntiseurssont des charlatans, DESSACRSCHARLATANS,qui abusentde la crdulitpublique; il faut lesfltrir tous!. TOUS1. etc., etc.Voir le rcit de cette sance, et la lettre du docteur Beaux, Revue

    magntique,tomeII, pages 27 37.(2) VoirRevuemagntique,tomeIer, pages373 378; et tomeII,

    pagesli9 181.

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    curatif ayant besoin d'tre administr avec discernement,il et t du devoir imprieux d'une mdecine charitableet zle d'examiner avec soin le magntisme, afin de s'enservir s'il est bon, ou de s'en dfendre s'il est mauvais. Quoiqu'il en soit, l'attention doit aujourd'hui, malgr l'impritieet la mauvaise volont des mdecins de l'poque, se fixertout fait sur ses inconvnients et ses dangers; il faut en-fin prendre garde qu'en fermant les yeux sur son utilit, onne reste encore plus profondment dans l'ignorance du mal

    qu'il peut faire.S'il y a des difficults entre la mdecine somnambu-

    lique et la mdecine ordinaire, il n'en doit pas srieuse-ment exister entre cette dernire et la mdecine purementmagntique. Celle-ci est une ralit ou une chimre. L'a-t-onexamine? Non t parce qu'on a pens qu'il fallait croire auxsomnambules, et qu'on nie l'exaltation des facults hu-maines et des proprits corporelles pendant l'tat aom-nambulique. Il y a cinquante ans, Buffon prtendait que lessomnambules taient plus stupides que des imbciles, qu'ilsne savaient dire et rpondre que des mots sans suite (1).Depuis, c'est bien diffrent; on leur a reproch de- tropparler et sur beaucoup trop de choses.

    Mais quand bien mme les somnambules ne seraient quedes imbciles, et si vraiment ils ne sont bons rien, pasmme en mdecine, qu'est-ce que cela peut faire au magn-tisme? En existera-t-il moins s'il n'y a plus de somnambulesou s'ils ne sont d'aucune utilit? Non certainement: le ma-gntisme peut se passer de somnambulisme et de som-nambules; Mesmer procdait sans leur secours; en un mot,avec le magntisme simple on n'en gurira pas moins beau-coup de maladies ordinaires et d'autres qui font le dsespoirde la mdecine.Nous avons dj trait plusieurs fois cet important su-

    (1)Buffon,de l'homme, tomeIV,pag.38.

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    jet(1), en invitant toujours nos lecteurs remonter la sourcemagntique avant de chercher voir des somnambules;mais les pratiques mesmriennes tant moins attrayantes, plusdifficiles, plus fatigantes que celles du somnambulisme,on les a dlaisses pour ces dernires, et elles n'ont pasattir l'attention gnrale. C'est pour cette raison que nousallons encore aujourd'hui procder par ordre dans l'examenque nous avons faire pour arriver rsoudre sainementdes questions qui intressent toutes les classes de la socit.Nous nous occuperons d'abord de magntisme et de ma-gntiseurs, pour traiter ensuite particulirement de som-nambuliseurs et de somnambulisme.

    Il s'agit, en effet, dans un intrt d'ordre public et priv,d'aider le Gouvernement et la Magistrature rsoudre lessept questions suivantes :

    1 Un mesmriseur ou un magntiseur peuvent-ils tre in-culps d'exercice illgal de la mdecine?

    2 Un somnambuliseur peut-il l'tre galement?3 Un mdecin peut-il s'associer avec un mesmriseur,

    un magntiseur, ou un somnambuliseur, sans tre tax de

    comprage et collusion?4 Un mdecin et un somnambule, peuvent-ils s'associer

    sans s'exposer tre taxs de comprage et collusion?5 Un somnambule qui s'annonce publiquement titre

    mdico-consultatif, mme avec l'assistance d'un mdecin,peut-il tre justement inculp d'exercice illgal de la m-decine?

    6 Le mdecin qui assiste ce somnambule peut-il tre

    inculp comme complice et souponn de comprage etcollusion?

    (1) VoirRevuemagntique, tome Ier,pages242 258,et 293 302;et tomeII, pages221 227; Introductionau magntisme,pages337et suivantes; Magntismecatholique, pages2247. Trait duMagntisme,pages297 309; et 360 429.

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    7 Un mdecin, devenu somnambule, peut-il signer etfaire excuter ses propres ordonnances ?

    La solution de ces questions offrait dj depuis nombred'annes un trs-vif intrt; cet intrt est devenu plus graveen prsence des menaces du Congrs mdical de 1845.

    PREMIRE QUESTION.

    UNMESMRISEUROUUNMAGNTISEUR(1) PEUVENT-ILSTREINCULPSD'EXERCICEILLGALDELAMDECINE?

    La loi ne confre qu'au mdecin le droit d'exercer l'artde gurir.Beaucoup de personnes croient qu'il suffit de ne pas faire

    payer ses soins pour viter une condamnation; c'est uneerreur. La loi ne distingue pas; il serait trop facile de l'-luder, et d'ailleurs l'ignorant guid par des vues chari-tables et dsintresses n'est pas moins dangereux qu'uncharlatan cupide.

    Si le magntisme gurit, peut-on le pratiquer quand onn'est pas mdecin soi-mme? C'est l une question qu'ilfaudrait rsoudre ngativement cause des principes, maisque l'on doit mrement examiner en raison des cons-quences.

    D'abord, le magntisme gurit-il les maladies? en d'au-tres termes plus positifs, est-il un remde curatif? Si cettequestion tait prsente devant les tribunaux, les jugesseraient fort embarrasss; surtout Paris, o le plus grandnombre des mdecins se rient de ceux de leurs confrres

    (1) Voirpourla diffrenceentrelesmotsMesmrismeet MagntismeRevuemagntique,tome II, pages221 227.

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    qui croient au magntisme et qui l'emploient dans leur pra-tique; mais ce n'est sans doute pas la question mme quiserait juge; on ne verrait peut-tre que les faits. Tel auraitguri par le magntisme, tel autre aurait compromis unmalade; conclusion force, malgr toutes les acadmies:le magntisme est un moyen de combattre les maladies, degurir ou de soulager les malades.Si les tribunaux dclaraient que le magntisme est un

    agent curatif, il n'en resterait pas moins vrai que la mde-cine parisienne ne le reconnat point pour tel; d'o il sem-blerait rsulter que les cas magntiques n'tant pas prvuspar la loi, aucune condamnation ne peut tre prononce.Mais la loi ne dfinissant pas la mdecine, les juges, aban-donns eux-mmes par les corps savants et les facultsmdicales, auront d'abord recours au bon sens et cherche-ront s'instruire ailleurs.

    Si la loi ne dfinit pas ce qu'est la mdecine, si les m-decins de l'poque prtendent que le magntisme n'en faitpas partie bien qu'il gurisse les maladies, comme les con-naissances actuelles ne sont, en beaucoup de cas, que lersultat des enseignements anciens, les tribunaux aurontrecours ces derniers.

    Or, Hippocrate dfinit la mdecine de la manire suivante: La Mdecine est un art qui gurit les malades ou qui calme leurs souffrances, et qui n'entreprend pas ceux dont le mal est incurable; car, ce qui est sans remde, la mdecine n'essaye pas de le gurir (1). Or, Mesmer

    ayant prsent le magntisme comme pouvant gurir im- mdiatemcnt les maladies des nerfs, et mdiatement les autres 1) (2), tout magntiseur qui gurit ou soulage,exerce la mdecine;.c'est vident.

    Si donc les tribunaux taient appels juger une guri-

    (t) Hippocrate,de l'Art.(2)Mesmer,PremierMmoire,Proposition23.

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    son ou une faute magntique, ils dclareraient peut-tre, 1 comme Mesmer, que les mdecins seuls sont capables de mettre le magntisme en pratique (1); 20et,comme la Commission de l'Acadmie de mdecine de Paris,en 1831, Que le Magntisme, considr comme moyen thrapeutique, doit trouver sa place dans le cadre des connaissances mdicales, et que les mdecins seuls doivent en faire ou en surveiller l'emploi (2). En cet tat,nul ne devra donc faire profession de magntiser, s'il n'yest autoris, soit par une loi qui lui en confrera le droit,soit par un mdecin.Mais comme il n'existe ni loi ni rglement sur le magn-

    tisme, il serait bien possible que les tribunaux ne voulus-sent pas rechercher par eux-mmes si vraiment on guritou l'on tue en magntisant, et que dans le doute et l'igno-rance o les corps savants laissent la France depuis soixante-dix annes, ils s'abstinssent.Il faut en effet remarquer que dans l'tat actuel des

    choses, la mdecine parisienne ne s'est jamais oppose l'exercice et la pratique du magntisme simple, par laraison qu'elle ne le comprend pas. Elle confond toujoursle magntisme avec le somnambulisme, la cause avec l'effetElle croit, comme le vulgaire et la plupart des gens dumonde, que le somnambulisme estle seul rsultat du ma-gntisme, tandis qu'il n'en est qu'un effet entre mille, etseulement le plus merveilleux. Ds lors, le magntismeconsidr comme agent physique n'tant point rputremde curatif, l'inculp d'exercice illgal de la mde-cine chapperait la loi.

    Car, il faut bien le remarquer encore, le Rapport fait l'Acadmie de mdecine de Paris, en 1831, ne constate pasplus que celui de 1784 l'existence d'un agent magn-

    (1) Idem,page47.(2) Foissac,Rapportsur le Magntisme,page 206.

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    tique curatif. Il reconnat bien ses effets quand il a pourrsultat de produire le somnambulisme, mais autrementil ne prouve rien de plus, puisque les travaux de la Com-mission se rsument en quatre points : Effets nuls;Effets peu marqus; - ERets produits par l'ennui, la mono-tonie et l'imagination; enfin,Effets dpendant trs-probable-ment du MAGNTISMESEUL(1); et quels sont ces derniers,des effets somnambuliques (2)1

    Ainsi, quant l'agent magntique qui fut prsent parMesmer comme moyen de gurir et de prserver les hommes,personne ne le connat en France hormis quelques vrais ma-gntiseurs, et sur ce point les plus experts de la mdecineparisienne. ne savent rien 1En l'tat actuel des choses, et sauf des lois ou rglements

    ultrieurs, nous n'hsitons pas poser en principe cequi suit:

    NON, le Mesmriseur et le Magntiseur ne peuvent trejustement inculps d'exercite illgal de la mdecine.

    DEUXIEME QUESTION.

    UN SOMNAMBULISEURPEUT-IL TRE INCULPD'EXRCICEILLGALDE LA MEDECINE?

    Lorsqu'en 1778 Mesmer prsenta sa dcouverte au mondesavant, il ne parla point somnambulisme; il cacha cettemerveille toutes les intelligences, tous les yeux. Danses vingt-sept propositions qui terminent son premier M-

    11) VoirFoissac,Rapportsur le Magntisme,pages126 137.(2) Idem, pages137et suivantes.

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    moire, il se contenta mme de placer obscurment et sansaucune explication cette assertion tout fait somnambu-

    lique et ds lors incomprhensible : Avec le secours du magntisme, le mdecin est clair sur l'usage des mdi-

    caments; il perfectionne leur action, il provoque et di- rige les crises de manire s'en rendre matre.

    Prop. 24.) Puis, il ajouta celle-ci encore plus surprenantepour l'poque et non moins vridique: Cette doctrine mettra le mdecin en tat de bien juger du degr de sant de chaque individu et de le prserver des maladies aux- quelles il pourrait tre expos. L'Art de gurir parviendra ainsi sa dernire perfection. ( Prop. 27.)

    a Les mdecins, comme dpositaires de la confiance pu- blique, sur ce qui touche de plus prs la conservation et le bonheur des hommes, dit-il en terminant, sont seuls capables, par les connaissances essentielles de leur tat, de bien juger de l'importance de la dcouverte que je viens d'annoncer et d'en prsenter les suites. Eux seuls, en un mot, sont capables de la mettre en pratique.

    Malheureusement, quelques centaines de mdecins prs,pars sur le sol de la France entire, la mdecine restasourde et aveugle devant les doctrines et les pratiques deMesmer; elles eussent t oublies, si le hasard n'avait pro-duit sous la main d'un lve du mdecin allemand un hommequi parlait, raisonnait et faisait de la mdecine en dormant 1

    Pour magntiser, en suivant les principes de Mesmer, ilfallait du temps, de l'attention et un vritable fonds d'in-struction; mais pour faire un somnambule, il suffisait decinq minutes; c'tait l une mthode bien facile, bien com-mode et surtout peu fatigante. Aussi ne parla-t-on bienttplus que somnambulisme; et comme c'tait l'aide du ma-gntisme que cet tat s'tait dvelopp, on confondit l'unavec l'autre; le somnambulisme passa gnralement pour leseul et unique rsultat du magntisme; toute la science deMesmer fut mconnue, rentra dans l'oubli et passa, comme

  • 10 COMPRAGEMAGNTIQUEl'a dit depuis un mdecin de Paris, pour une chimre.

    Mesmer s'en aperut; car dans la prface de son deuximeMmoire, publi en l'an VII, il ne manque pas de dire: Les imitateurs de ma mthode de gurir, pour l'avoir trop lgrement expose la curiosit et la contradiction, ont donn lieu beaucoup de prventions contre elle. Depuis cette poque, on a confondu le somnambulisme avec le magntisme; et par un zle irrflchi, par un en- thousiasme exagr, on a voulu constater la ralit de l'un par les effets surprenants de l'autre (1). Les chosessont encore en cet tat aprs soixante-dix ans, par suitedu zle irrflchi, de l'enthousiasme de quelques-uns, etdeIaparesse du plus grand nombre. On parle beaucoup de som-nambulisme, on le pratique, on l'observe plus ou moinsbien, on ne remonte pas plus haut.

    Nous avons eu plusieurs fois occasion d'expliquer noslecteurs que le mot Somnambuliseur se prenait presquetoujours en mauvaise part jusqu' prsent, et qu'on ap-pelait habituellement somnamluliseurs les hommes qui fonttrafic de montrer des somnambules tout venant, de villeen ville, de foire en foire; mais nous avons dit aussi que,scientifiquement parlant, lorsqu'un homme magntise dansle but unique de mettre en somnambulisme pour arriver des rsultats utiles, il se dveloppe quelquefois chez lui,avec le temps, une facult particulire. Il devient alors un

    praticien spcial; il est Somnambuliseur (2).Il y a, en effet, des hommes qui produisent le somnam-

    bulisme avec plus de facilit et de promptitude que d'autres.Un moment viendra o ce caractre particulier du magn-tiseur sera trs-apprci. Le somnambuliseur sera un hommefort utile; on peut dj le comparer ces chirurgiens quiont la main si heureuse et si lgre, qu' moins d'un cas

    (1)Mesmer,DeuximeMmoire,Avant-propos,page 31.(2) VoirMagntisqueCatholique,pages48 et 66.

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    urgent, les autres mdecins les envoient chercher pour sai-gner leurs malades.

    Si donc il arrive qu'un mdecin demande tel magn-tiseur, parce qu'il sait qu'il met trs-facilement, et mieuxque lui mdecin, les sujets en somnambulisme; s'il a recours un autre parce qu'il sait galement qu'il peut amenerl'insensibilit chez les malades, proprit que le mdecin nese sera pas reconnue; si enfin ce mdecin ne veut pas, parune raison quelconque, raison de temps, raison de sant,s'il ne veut pas faire lui-mme des somnambules, pour-rait-il lui tre interdit, parce qu'il est mdecin, de contracterun arrangement quelconque avec un somnambuliseur? Lebon sens indique que non.

    Sans doute, le malade devenant somnambule, la thsechaage, et il doit y avoir lieu l'administration de quel-ques remdes 1 C'est possible. Ds lors, il y a une tcheparticulire remplir pour chacun: d'un ct, la direc-tion du somnambule;et, de l'autre, l'excution de ses pres-criptions.

    La direction d'un somnambule est une chose trs-impor-tante pour lui-mme, comme pour la science. Si on l'aban-donne ses propres penses, ses seules ides, souventil s'gare. Le somnambulisme est un tat nouveau pourcelui qui s'y trouve; il a besoin de s'y habituer, de s'y re-connatre, de s'apprcier lui-mme.

    L'ducation d'un somnambule est donc un point capitald'o dpendent souvent ses facults et son salut. Il fautsavoir diriger ses entretiens sur un point plutt que suron autre; lui faire voir ses dfauts, et l'aider s'en cor-riger. Quand il se trompe, il faut le lui prouver sansblesser son amour-propre; mais chaque erreur nouvelle,lui rappeler les anciennes, en l'invitant mieux voir ou dire franchement qu'il n'est pas au degr de lucidit con-venable soit pour lui-mme, soit pour les autres. Or, toutcela ne peut tre fait que par une personne spciale, ha-

  • 12 COMPRAGEMAGNTIQUEbitue suivre et surveiller des somnambules. Ds lors,si le mdecin n'en a pas le temps ou la volont, il faut unhomme ad hoc; et cet homme, c'est un magntiseur ou unsomnambuliseur.

    Qu'arrive-t-il ensuite presque toujours? C'est que le ma-lade, rendant compte de son tat, voyant ses organes int-rieurs, le degr d'intensit de la maladie et son point dedpart, propose des remdes en consquence. Ici, com-mence le rle du mdecin. Il coute attentivement son ma-lade, approuve ou rectifie ses ides, lui demande desexplications, s'instruit de ce qu'il ignore, agit en cons-quence, et fait tout ce que son devoir et l'humanit luicommandent.

    Pourrait-on blmer et incriminer la conduite d'un m-decin en pareille circonstance? Nous croyons que non. Ilest vrai que le Congrs mdical de Paris a dcid: Que le traitement des maladies par des personnes non pour-0)vues d'un titre lgal et dont les ordonnances sont signes par un mdecin, devait tre considr comme un exer- cice illgal de la mdecine (1). Mais d'abord le Congrs nefait pas loi, il a seulement exprim des vux; ensuite onvavoir qu'ils ne peuvent se raliser que dans un seul cas;et enfin sa proposition manquer de porte.

    Ainsi le Congrs a t formel, sinon dans l'expression desa pense, au moins dans les termes dont il s'est servi; il adit: Tout traitement par des personnes dont LES ORDON- NANCESSONTSIGNESparun mdecin! et il a eu raison.Que serait, en effet, un mdecin qui se contenterait de si-

    gner l'ordonnance d'un individu non mdecin, sinon son

    complice?Sans doute, de mme qu'il y a des hommes, non pourvus

    de titre lgal, qui s'immiscent dans les fonctions de notaireou d'huissier, parce qu'ils trouvent des officiers assez in-

    (t) Actesdu CongrsmdicaldeParis, page192.

  • RPRIM. 13

    dignes pour se prter leurs manuvres, il ne serait pasnon plus impossible que des somnambuliseurs rencontras-sent des mdecins qui signeraient, pour un cu, et sansvoir,non-seulement toutes ordonnances qui leur seraient prsen-tes, mais encore et toujours raison d'un cu tous les pa-piers blancs qui leur seraient prsents et dont lesomnam-buliseur ferait son gr des ordonnances, c'est malheureu-sement vrai; cela s'est vu et se verra peut-tre encore.L, il y aurait complicit et comprage, et le Congrsmdical pourrait justement demander au Ministre de l'In-struction publique un rglement ce sujet; mais c'est surce point seulement qu'il peut appeler l'attention de l'au-torit.

    Cependant, disait ici le docteur Beaux au Congrs: con- sidrez-vous comme coupable de comprage le mdecin qui consulte des somnambules dont il connat la clair- voyance et qui ne signe leurs ordonnances qu'aprs s'tre assur qu'elles ne contiennent rien qui puisse nuire aux malades? Le rapporteur rpond en effet trs-positive-ment que la proposition du Congrs n'a pas d'autre but quecelui-l; mais nous ferons observer que, d'un ct, l'ob-servation du docteur Beaux, si pleine de sincrit, offre unsens contraire ses propres intentions; et que d'un autrect la rponse du Congrs parat cacher, sinon une per-fidie, au moins une subtilit.

    Ainsi, bien certainement et en quelque occasion que cesoit, un mdecin ne doit jamais approuver ni signer un avisquelconque, ds l'instant qu'il lui est impos par unepersonne non revtue d'un titre mdical; car si l'avis estrigoureusement formul ne varietur avant prsentation,alors le mdecin ne serait plus qu'une machine tirer desordonnances. Mais lorsqu'un individu, somnambule ou non,met une opinion, propose un remde et soumet l'un etl'autre un mdecin, chacun d'eux est dans son droitel'un de proposer, l'autre de refuser.

  • 14 COMPRAGEMAGNTIQUEPar exemple, un pre ou une mre de famille, un frre

    ouune sur deviennent somnambules 1Aussitt conseils hy-giniques; indication de tel ou tel remde celui-ci, de telautre celui-l; intervention du mdecin; tonnement pro-fond; questions au somnambule, et on voit alors se remu-veler les scnes de 1812 entre le docteur G.del de Soissoiset Alexandre Hbert, enfant de douze ans magntis parM. de Puysgur:

    Le docteur Godel au petit Hbert: O est votre mal?Rponse. Dans la tte. D. Est-ce qu'il n'y aurait pasquelques moyens employer pour votre gurison? R. Jene sais pas.

    D. Regardez-y. Moi je pense que des bains vous seraientfavorables; qu'en dites-vous? R. Ils me feraient dubien.D. Vous les faut-il chauds ou froids? R. Froids.D. Et combien? R. Huit ou dix. D. Faut-il

    TOUSbaigner jusqu'au cou ?-R. Non1 seulement jusque-l(montrant le dessous des seins).D. Quand voulez-vous commencer les prendre?

    R. Mardi. D. Et vous purger, cela ne serait-il pas aussincessaire? R. Oui. D. Avant ou aprs les bains?- R. Aprs les bains?

    D. Avec quoi faudra-t-il vous purger?R. Avec ce qu'on voudra.Ici, le mdecin, aussi tonn que le docteur Godel, entre

    en pourparler mdical avec son malade sur la nature duremde purgatif:D. Voyons; il y a en mdecine, la scammone, le jalap,

    avec laquelle de ces deux mdecines voulez-vous tre purg?R. Avec du jalap. 'fD. Est-ce que vous savez ce que c'est que du jalap?R. Non.Le docteur Godel M. de Puysgur : Il est certain qu'en

    lui faisant ma seconde question, je savais fort bien que

  • RPRIM. 15

    la scammone n'tait point unpurgatif; mais, comment a- t-il choisi le jalap, qu'il ne connat pas davantage? (1)

    Or, en pareille circonstance, si le mdecin de la familleest un homme instruit, qu'il croie ou ne croie pas au som-nambulisme, il se rappellera d'abord que Cabanis a dit : J'ai vu des malades dont le got avait acquis une finesse particulire, qui dsiraient et savaient choisir les aliments et mme les remdes avec une sagacit qu'on n'observe pour l'ordinaire que chez les animaux (2). S'il ne saitpas cela, mais s'il est homme de bon sens, il n'en signerapas moins, malgr tous les congrs possible, une ordon-nance.pour du jalap et toutes autres pour tels mdicamentsqu'il reconnatra convenables.Le Congrs pourrait donc prtendre n'avoir eu en vue

    que de rprimer les carts des membres du corps mdi-cal, et non de les empcher de profiter des conseils som-nambuliques. En tout cas, sa proposition tant crite entermes positifs, nous en expliquons la lettre et l'esprit endisant que tout mdecin qui signerait aveuglment des pres-criptions somnambuliques peut tre tax de complicit,comprage et collusion.

    Quant la question pose parle Congrs lui-mme, nousdisons que, si le somnambule ou le somnambuliseur for-mulent et prsentent des ordonnances auxquelles il ne man-que que la signature d'un mdecin, il ya pratique illgale.Si le cas n'existe pas, nous soutenons que tout individu,somnambule ou non, a droit de donner son opinion sur legenre de traitement suivre pour des malades, sauf cesderniers le faire approuver d'un mdecin; et nous allonsle prouver en indiquant aux praticiens un moyen certain,franc et loyal, de djouer les projets restrictifs d'une mde-cine inquite et jalouse, paresseuse et routinire.

    (1) Puysgur,Traitementdu jeuneHbert,page22.(2) Cabanis,de l'Influencedes maladiessur la formationdes ides

    etdes affectionsmorales.

  • 16 COMPRAGEMAGNTIQUENous avons pos tout l'heure en principe que chacun

    ale droit de prner son mdecin et sa mdecine; d'engager prendre le docteur tel ou tel; d'employer l'hydrothrapie,l'homopathie ou le magntisme. Il est en effet vident quenous sommestous libres de nous faire tuer ou gurir notregr; et c'est bien le moins assurment, puisque sous l'em-pire des lois qui nous rgissent le mdecin exerce sur nospersonnes un monopole qui lui permet son tour de noustuer ou de nous gurir aussi.

    Or, il n'y a pas de loi possible, au sein d'un tat civilis,qui puisse, mdicalement parlant, interdire le droit de pti-tion et celui de conseil; l'excution seule est rgie par leslois de la socit, et ds lors, il y a un moyen bien simpled'luder avec succs les; projets coupables du soi-disant

    Congrs mdical de France.Un malade se prsente-t-il un somnambule? celui-ci lui

    dcrira, s'il le peut, l'tat de ses organes'; Ce qu'il a dsouffrir; ce qu'il souffre encore; et il lui fera esprer, s'ily a lieu, une gurisonplus ou moins prochaine. Puis, lors-

    que le malade lui dira: Quel remde me conseillez-vous?Le somnambule lui rpondra: Aucun! Adressez-vous audocteur tel; je lui rendrai compte aujourd'hui mme de ceque j'ai vu et de ce que je pense. Les choses ainsi excu-tes, il n'y aura pas le plus petit reproche craindre, car le

    Congrs n'a pas formul de proposition pour dfendre auxmdecins de consulter des somnambules, mais bien au con-traire pour empcher les somnambules de se faire mdecins.

    En l'tat actuel des choses, et sauf des lois ou rglementsultrieurs, nous n'hsitons donc pas poser en principe ce

    qui suit :NON, le somnambuliseur ne peut tre justement inculp

    d'exercice illgal de la mdecine.

  • RPRIM. 17

    TROISIME QUESTION.

    UNMDECINPEUT-ILS'ASSOCIERAVECUNMESMRlSEUR,UNMAGNTISEUROUUNSOMNAMBULISEUR,SANSETRETAXDE COMPRAGEET COLLUSION?

    ,Deux principes rgissent les socits: la loi naturelle et b.

    loi civile. C'est par la dernire que la libert, cet apanagecommun de tous les hommes, reoit de sensibles atteintesdans le commerce de la vie.Cependant les lois civiles sont quelquefois muettes en cer-

    tains cas rests imprvus; en d'autres aussi elles sont rem-places et supples par des lois naturelles qui conserventun empire absolu auquel les hommes cherchent rarement se soustraire. De l, ce vieil adage si puissant et si res-pect des curs honntes: Quod non lex, pudor vetat (1).

    C'est qu'en effet au milieu des tourmentes sociales, il estdes hommes qui se trouvant au premier rang parmi leurssemblables n'ont pas besoin de lois crites pour se dirigerdans la conduite de la vie; elles sont graves dans leurscurs.* Tout se paye en ce monde. La noblesse, par des servicesrendus au pays; les titres qui caractrisent une professionlibre, par des preuves scientifiques; les charges publiques,par une incontestable solvabilit jointe une capacit ra-tionnelle. De l, l'investiture des offices de notaire, d'a-vou et d'huissier, les titres de mdecin et d'avocat, et lanoblesse de robe et d'pe."< 1

    ' 4;N, dfendpas, la pudeurl'interdit.2

  • 18 COMPRAGEMAGNTIQUELa robe, l'pe, ou la faveur du Roi anoblissaient seules

    autrefois. De l, peu de nobles; de l aussi, par cetteraison, cette belle parole de l'un d'eux: NOBLESSEOBLIGE.La rvolution de 1789 ayant nivel pour un moment toutes lesconditions, la noblesse personnelle, celle du fonctionnaire,du mdecin, du dfenseur public ont fait concurrence l'an-cienne aristocratie; en sorte qu'aujourd'hui beaucoup d'hom-mes ne recherchent plus la noblesse hrditaire; ils s'em-pressent de se faire inscrire et de prendre rang dans lesnotabilits de l'poque, et l'appel de leur nom prcd ousuivi du titre dont ils sont revtus, il devient impossible deles prendre pour des citoyens ordinaires.

    Mais si la socit a tabli des distinctions au profit dequelques-uns de ses membres, elle a voulu aussi qu'ils lesmritassent. Il ne suffit mme plus aujourd'hui que le titreait t acquis aux pres, il faut encore qu'il soit mrit parles enfants, c'est pourquoi la plupart des titres sont gnra-lement personnels sans vnalit ni hrdit. On n'achteplus un rgiment ni un sige magistral; on:, n'est avocatou mdecin qu'en vertu d'un diplme; les charges des of-ficiers ministriels exerant prs les judicatures s'achtentseules, de particulier particulier, mais avec approbationdu gouvernement. De l, une diffrence entre les mdecinsreus par les Facults et les officiers ministriels nomms

    par le Roi.Lorsqu'un lve en mdecine est reu officier de sant

    ou docteur, il n'a contract aucune obligation, prt aucunserment; il reste entirement libre, sauf quelques d-clarations d'usage qui ne valent pas la peine d'tre cites.Cette absence de tout frein l'ignorance et la cupiditest un grand malheur pour les mdecins en gnral; mais sielle existe pour les membres du grand corps mdical, iln'en est pas de mme vis--vis des notaires et des avous.Ceux-ci ne sont mis en possession de leurs charges qu'a-prs une enqute srieuse sur leur moralit et leurs antc-

  • RtPRIMt. 19

    dents, tandis qu'on reoit mdecins tous ceux qui ont passleurs examens et subi leur thse. Ils seraient les tres les

    plus vicieux, les citoyens les plus impurs, les hommes lesplus dbauchs, les plus malfaisants, les plus crapuleux, laFacult n'a rien voir dans leur conduite; elle ne peut queles interroger et les faire pratiquer sous ses yeux; et si l'as-pirant connat vraiment toutes les parties de la mdecine,elle est oblige de le recevoir. Ce vice organique est, sansaucun doute, une des raisons pour lesquelles les mdecinsne sont pas aujourd'hui plus considrs.

    Parmi les autres causes qui contribuent les discrditer,se trouvent leur grand nombre et leur agglomration en unlieu plutt qu'en un autre. Les lois ou l'esprit de corpora-tion ont tout prvu lorsqu'il s'agit de Prtres, d'Avocats,d'Officiers ministriels. Les avocats attachs un tribunalsont obligs de subir un stage; il y a une chambre de dis-cipline pour les rprimander ou les punir. Les prtres ne peu-vent exercer leur ministre qu'en un lieu fixe et dtermin;et l ils sont sous la domination de l'vque diocsain.Quant aux officiers ministriels, aprs avoir t pralable-ment l'objet d'investigations trs-srieuses, l'il du gou-vernement les suit encore lorsqu'ils sont sous le joug deleurs propres confrres constitus en chambre de disci-pline. Rien de tout cela pour les mdecins; nous l'avonsdit, ils sont entirement libres.

    Pourquoi, et comment existe encore aujourd'hui cettelibert excessive? C'est ce que nous allons examiner.Un bon mdecin est homme d'art et de science; c'est-

    -dire qu'il est toujours la recherche du progrs. Cequ'un bon mdecin sait ne lui suffit jamais, parce que lescas morbifiques sont comme les vnements philosophi-ques, souvent imprvus, embarrassants et diversifis. Dsl'instant qu'il en est ainsi, le mdecin ne peut tre casdans un endroit, comme le prtre ou le fonctionnaire public.Un mdecin doit tudier les airs, les eaux, les lieux; il

  • 20 CONPRAGEMAGNTIQUE

    doit, s'il le juge convenable la science, quitter ses pnateset les transporter ailleurs, l o ses observations seront plussrieuses, plus positives et plus utiles. D'ailleurs, il en est dela Mdecine comme de la Philosophie: elles s'clairent auflambeau des sciences et du gnie, l o se rassemblentles hommes les plus instruits et o sont amoncels les tra-vaux des mondes ancien et moderne, c'est--dire dans lesgrandes villes. Or, de mme qu'un mdecin est assezordinairement stationnaire, il peut tre aussi nomade; l'a-mour de l'art ou une pidmie l'entraneront au loin;il a donc besoin de n'tre pas absolument soumis toute lacirconspection qui accompagne les autres titulaires.

    Il n'en est pas de lui comme du notaire. Le notaire estresponsable de ses faits et de ses actes, le mdecin ne l'estpas. Le notaire suit des rgles certaines; il a une besognepresque toute trace, souvent la mme; le mdecin, au con-traire, n'a rien d'absolument rgulier; il tudie et observesans cesse. De plus, le notaire est investi de la confiancepublique, tandis que le mdecin est oblig de la conqurir.

    Un notaire peut-il s'associer quelqu'un, un autre notaire,un simple praticien ou un spculateur, dans l'exploitationde sa charge? Non certainement. Nomm par le souverain,en raison de ses connaissances spciales, de sa solvabilit

    personnelle et de son incontestable moralit, il est seul d-

    sign la confiance publique. Le mdecin, au contraire,reu sans conditions ni serment par une Facult, est en-tirement libre de sa personne et de ses actions.Mais quelque libre qu'il soit le mdecin peut-il, dans

    un but mdical, s'associer un autre mdecin ou quelqueindividu non-mdecin? Nous voici arriv au but que nousnous tions propos, et nous allons indiquer clairement ladiffrence qui existe et qui existera toujours entre le m-decin et les autres titulaires de la socit.

    Si le mdecin exerce sa profession pour subvenir auxbesoins de la vie, c'est en lui-mme qu'il doit trouver

  • RPIUMK. 21

    des rgles de conduite; c'est alors que l'adage Quod nonlex pudor velat se prsente sa pense.Par exemple, un mdecin empirique vient faire part

    un confrre en rputation qu'il a dcouvert un remde sou-verain contre telle maladie: la folie, l'pilepsie, ou touteautre. preuves faites, succs obtenus, les deux mdecins

    voyant l un moyen loyal de faire fortune, crivent, pu-blient, pratiquent sous leurs noms communs. Les maladessurviennent, un tablissement clinique s'lve, un journal sefonde; enfin, des deux mdecins, l'un finit par adopter ladirection de l'tablissement et du journal, l'autre surveille,traite, observe les malades, et rend compte son associ. Icirien que de trs-lgal, de trs-convenable.

    Passons maintenant un autre tableau.Un mdecin, peu hippocratique, trouvant que l'art est

    bien long et la vie trs-courte, ne se sent pas dispos passer ses jours dans l'tude. Il sait que le public est gn-ralement ingrat, et que tout malade est volontiers la proiedu premier venu; en consquence, il est rsolu ne pasl'attendre, mais au contraire l'appeler; et chaque foisqu'il gurit, il se fait dlivrer une attestation qu'il a biensoin de reproduire aprs dans les journaux. Ici, quand l'an-nonce est pure, simple et sans commentaire, le Quod nonlex pudor vetat n'est pas encore attaqu; on s'aperoit seu-lement que le fils d'Esculape est press parle besoin ou ledsir de faire fortune.

    Passons un troisime tableau:Un mdecin, comptant sur les besoins des malades au-

    tant que sur leur crdulit, imagine de payer un journalpour faire son loge. Cet loge, il ne le mrite pas; les ou-vrages qu'il a faits ne sont pas de lui, les remdes qu'ilordonne sont insignifiants ou les vertus qu'il prtend leuravoir donnes sont le fait de la mdecine ordinaire. Unmdecin honorable peut-il s'associer un tel homme? Noncertainement, moins de passer lui-mme pour un charla-

  • 22 COMPRAGEMAGNTIQUEtan. Ds lors si la proposition lui en est faite, il la repoussede toutes les forces de son me. En vain lui prouve-t-onqu'il attendra longtemps une clientle; en vain lui expose-t-on qu'il vgtera peut-tre toujours; qu'il a tort de refuserles offres positives de fortune qui lui sont faites; qu'il n'arien craindre, qu'il est entirement libre!. le mdecindigne de son titre, de sa noble profession, de son art,l'homme enfin pour lequel la mdecine est un sacerdoce,rpondra toujours: Je ne puis pas; dfaut de lois, j'ai le sentiment de ma propre dignit, et. Quod non lex, pu- dor vetat.

    Voyons prsent un quatrime et dernier tableau, couleurs plus prononces, nuances plus dlicates.

    Un mdecin, convaincu de l'utilit du magntisme et dusomnambulisme, se lie d'estime et d'amiti, comme le fu-rent Mesmer et d'Eslon, avec un magntiseur non mde-cin. Ils conoivent le projet d'lever un tablissement ma-gntique pour la gurison des maladies. Le magntiseur,plus expert dans son art que le mdecin, se chargera de ladirection; le mdecin constatera l'tat des malades et lesobservera sans cesse pendant le cours des traitements ;aucun remde ne sera ordonn sans son autorisation, etil demeure bien convenu qu'en tous lieux comme en toustemps, le mdecin aura le pas sur le magntiseur; de tellefaon que rellement et publiquement il soit constant queles malades n'arrivent entre les mains du magntiseur qu'a-prs avoir pass sous les yeux du mdecin. Les choses ainsiarrtes, le traitement des maladies, par la mthode ma-gntique, s'ouvre au vu et au su de tout le monde.

    Mais bientt une mdecine inquite et jalouse imaginede traiter les deux associs comme jadis la Facult de m-decine de Paris traita Mesmer et d'Eslon. Dborde par les

    expriences et les gurisons magntiques, ne pouvant plusles nier, elle passe condamnation; et la honte au front,affichant elle-mme sa paresse et son incurie, avouant que

  • RPRIM. 23

    depuis plus d'un demi-sicle elle assassine et empoisonneses malades au lieu de les gurir, elle appelle la justice sonaide; elle intente enfin contre les deux associs une actioncorrectionnelle pour faits de comprage !Que statueront les tribunaux? Nous l'avons dj fait en-

    trevoir, mais nous le rpterons en quelques mots pourne point fatiguer la mmoire et l'intelligence de nos lec-teurs.

    Si l'associ du mdecin est mesmriseur ou magntiseur,comme aux yeux de la mdecine le magntisme curatif estune chimre, il n'y a point comprage ni exercice illgalde l'art de gurir.Si l'associ est somnambuliseur, considr comme simple

    tourneur de manivelles ou mme comme directeur de somnambules, il est inattaquable.Dans l'une et l'autre hypothse, le fait de frictionner des

    malades, et celui de montrer, faire agir ou parler des somnambules, ne peuvent constituer un dlit mdical.

    C'est pourquoi nous n'hsitons pas poser en principece qui suit :

    Oui, un mdecin peut s'adjoindre un mesmriseur, unmagntiseur ou un somnambuliseur, sans tre tax de com-prage et collusion.

    QUATRIME QUESTION.

    UNMEDECINET UN SOMNAMBULEPEUVENT-ILSS'ASSOCIER.SANSS'EXPOSERA TRETAXSDECOMPRAGE

    ET COLLUSION?

    Nous avons dit, en examinant la premire question, quele magntisme considr comme agent curatif n'tait gureplus connu aujourd'hui que du temps de son inventeur;

  • 1k COMPRAGEMAGNTIQUE

    quela mthode mesmrienne tait malheureusement peuprs oublie; mais qu'il n'en tait pas de mme du somnam-bulisme. Malgr les prjugs, les railleries, les dngationset les prohibitions de tous genres, il est en effet arriv se produire avec clat sur la scne du monde, accompagncomme toutes les choses utiles, au moment de leur dcou-verte ou de leur mise en pratique, d'extravagances et d'abus.

    On peut donc aujourd'hui poser en fait que l'existenced'un tat intermdiaire entre le sommeil et la veille estdevenue incontestable. Si parmi les mdecins quelques-unsrefusent aux somnambules l'instinct des remdes, beau-coup d'autres le leur accordent; si, pour nombre de physio-logistes, il est impossible que les somnambules voientleurs propres organes intrieurs et ceux des autres, il enest aussi qui admettait un sixime sens et qui ne voientpoint de bornes aux facults et aux proprits anthropio-tiques.

    Depuis le Rapport fait en 1831 par les membres de laCommission de l'Acadmie de mdecine de Paris, tout m-decin est en droit (Jp consulter des somnambules pour s'-clairer sur la question de l'utilit mdicale et chirurgicaledu somnambulisme. Car, en admettant que les expriencesde cette Commission n'aient pas t tenues pour cer-taines par tous les membres de l'Acadmie, il en est quiont t constates d'une manire irrcusable; d'autres ontreu du temps lui-mme une entire conscration (1), et sous

    peu on pourra dire aux acadmies comme Quintus Cic-ron : Le consentement universel ne peut-il donc vous sa- tisfaire? attendrez-vous que les btes parlent (2) ?

    (1) Les oprationschirurgicalesexcutessur dessujets amensensomnambulisme un tat de complteinsensibilit, se succdentrapidement. VoirRevuemagntique, tomeI, pages 397et 307; ettomeII, page290.-Voir encorele JournaldeCherbourg,du 24 sep-tembre courant,dont nousdonneronsprochainementun extrait.(2) Cicron,Divination,liv. 1er, 39.

  • RPRIM. 25

    Supposons donc qu'un mdecin entr'ouvre le Rapportde la Commission de 1831, et qu'il y cherche une preuvede l'instinct des remdes chez les somnambules ainsi quede l'excellence de leurs facults diagnosticales, il lit ce

    qui suit : Lorsque la demoiselle Cline (la somnambule prsen-

    te la Commission par le docteur Foissac) tait dans cet tat de somnambulisme, la Commission a reconnu TROIS FOIS, chez elle, la facult de dcouvrir les maladies des personnes qu'elle touche et d'indiquer les remdes

    qu'il convient de leur opposer! Certes, voil un dbut positif et qui promet de fixer l'in-

    certitude du mdecin que nous mettons en scne. Commentla constatation de la facult en question a-t-elle t faite?Quelle a t la personne soumise au diagnostic de la som-nambule? Etait-ce un compre? Nous allons le voir.

    La commission trouva, PARMISESMEMBRES,quelqu'un qui voulut bien se soumettre l'exploration del somnam- bule ; ce fut M. MARC(1)1 Mademoiselle Cline fut prie d'examiner avec attention l'tat de la sant de notre col- lgue; elle appliqua la main sur le front et la rgion du cur, et au bout de trois minutes, elle dit: Que le sangse portait sa tte; qu'actuellement M. Marc avait mal dans le ct gauche de cette cavit; qu'il avait souventde l'oppression, surtout aprs avoir mang; qu'il devait avoir souvent une petite toux; que la partie infrieure desa poitrine tait gorge de sang; que quelque chose g-nait le passage des aliments; que cette partie (et elle d- signait la rgion de l'appendice xiphode) tait rtrcie ; que, pour gurir M. Marc, il fallait qu'on le saignt lar-

    (1) C. C. L. Marc, PremierMdecindu Roi, digne et excellenthomme,,vraimdecin,est mortle 12janvier1840,commeil venaitdesignerla prfacede son ouvragesur la Folie. (2 vol. J. B. Bail-lire.

  • 26 COMPRAGEMAGNTIQUE gement; que l'on appliqut des cataplasmes de cigu, et que l'on ft des frictions avec du laudanum sur la partie infrieure de la poitrine; qu'il bt de la limonade gomme,qu'il manget peu et souvent, et qu'il ne se proment pas immdiatement aprs le repas. Qu'arriva-t-il'? Ces indications furent-elles vraies ou

    fausses? Il nous tardait d'apprendre, de M. Marc, s'il prouvait

    tout ce que cette somnambule annonait. Il nous dit qu'eneffet il avait de l'oppression lorsqu'il marchait en sortantde table; que souvent il avait de la toux, et qu'avant l'ex- prience il avait mal DANSLECOTGAUCHEDELATTE, mais qu'il ne ressentait aucune gne dans le passage des aliments.

    Voil dj une preuve frappante de la facult de d-couvrir le sige des maladies. Mais, dira peut-tre le m- decin incrdule ou dfiant, c'est peut-tre le hasard! Voyons donc ce que le hasard va lui mettre une secondefois sous les yeux.

    Le 21 fvrier 1827, le Rapporteur alla chercher M. Fois-sac et mademoiselle Cline, et il les conduisit dans une maison rue du Faubourg du Roule, sans leur indiquer le nom ni la demeure, ni la nature de la maladie de la per- sonne qu'il voulait soumettre l'examen de la somnam- bule. Interroge pour savoir ce qu'elle a observ chez made- moiselle de N., la somnambule rpondit que tout le bas-ventre tait malade, etc. Elle conseilla l'usage d'une tisane de bourrache et de chiendent sucre, de cinq oncesde suc de paritaire pris chaque matin, et de trs-peu de mercure pris dans du lait. Elle ajouta que le lait d'une chvre, que l'on frotterait d'onguent mercuriel une demi- heure avant de la traire, conviendraitmieux! Or, qu'tait-il arriv dans le cours du traitement de ma-

    demoiselle de N. par le Rapporteur et le docteur Dupuy-

  • RPRIM. 27

    tren? C'est que les deux mdecins, aprs avoir ordonndiffrents remdes, avaient attach aussi quelque importance ce que mademoiselle de N. ft mise l'usage du laitd'ude chvre laquelle on ferait des frictions mercurielks !

    {Page 192.) Certes, en dpit des Congrs et des Acad-

    mies, voil une somnambule qui se trouve tre d'un aussibon conseil qu'un mdecin.Ici, l'incrdule ferme le Rapport, se tient pour satisfait

    de sa lecture, et attend l'occasion pour se convaincre parlui-mme. Comme il se peut, en effet, qu'au moment oil s'y attendra le moins, ce mdecin soit surpris par unecrise somnambulique qui surviendra chez son malade, iln'est pas inutile de voir comment il sera oblig de croireau magntisme autrement que par des expriences de cu-riosit qui n'ont jamais atteint le but qu'il s'tait pro-pos.

    Il ne s'agit pas ici de rentrer dans le domaine du mer-veilleux qui a fait tant de mal la cause magntique. Ona dit que le magntisme n'avait pas besoin du somnambu-lisme pour gurir, et cela est vrai; mais on a dit aussi quele somnambulisme tait une crise qui survenait quelquefoischez le malade; on a ajout que l'instinct des remdes, si na-turel aux tres anims, tait considrablement augmentchez le somnambule; que sa concentration en lui-mmetait pousse un tel point, qu'il paraissait voir ou toucherl'intrieur de son corps et qu'il rendait compte de son tatavec un aplomb et une tranquillit extraordinaires.JSicela n'est pas, il ne doit pas tre difficile au mdecin

    de s'en convaincre; il n'a qu' se promettre de ne pas c-der une illusion. Si cela est, il est bon qu'il y rflchisse,pour ne pas tre surpris trop vivement; car il peut se trou-ver en face de son malade somnambule et mconnatre sontat, de mme qu'il peut en tre averti par hasard ou parla prsence fortuite d'un magntiseur. Il est donc nces-saire, pour Lemalade comme pour lui-eime, que le mde-

  • 28 COMPRAGEMAGNTIQUEcin puisse, s'il y a lieu, tirer parti de l'tat de son client de-venu somnambule.

    Ainsi, un mdecin est appel pour donner ses soins unmalade, un pileptique, par exemple; il le voit hors deses accs, puis l'poque approchant de ses accs; enfinun jour, devant lui, le malade a une crise; on lui prodiguedes secours, on le touche, on lui frotte les mains, on luiprend les membres; il se calme; la tranquillit revient,on lui parle, il rpond, mais sans s'veiller: il est som-nambule!

    Ou bien, un homme a prouv des douleurs atroces, ilparat sans connaissance; le mdecin arrive, s'informe,ordonne, palpe, frictionne, et parle au malade qui rpondsans ouvrir les yeux: il est somnambule 1La position dumdecin devient alors extrmement intressante.

    Quoi de plus singulier, en effet, que la circonstance danslaquelle se trouve engag cet homme qui regardait lesomnambulisme magntique comme une rverie ou qui leniait, et qui reoit en ce moment de son malade des in-structions sur le traitement qu'il doit lui faire suivre!

    L, en effet, plus d'illusion se faire, plus de dfiance garder. Si c'tait le malade d'un autre mdecin, celui-cipourrait douter; mais c'est son malade lui, c'est l'hommequ'il voit tous les jours, sur le sort duquel il tait inquiet !et c'est ce malade qui lui dit de se rassurer, qu'il ne doit

    plus avoir de crainte, mais qu'il est ncessaire d'agir detelle et telle manire, parce que sa maladie est celle qu'ilva dpeindre, et il la dpeint en effet. La conversion estdonc force en pareil cas.

    Cette conversion du mdecin au magntisme, et de la-quelle il est encore trop agit pour pouvoir se rendre lui-mme un compte exact, reoit sa conscration quand ilrentre dans son cabinet.

    L, quels que soient son ge, ses connaissances, son

    exprience, il se demande si ce qu'il a vu et entendu n'est

  • RPRIM. 29

    pas un rve. Il a un malade, ce malade a paru s'endormir;*

    puis il a parl sans se rveiller ! Pendant ce prtendu som-meil il paraissait mieux portant que dans l'tat de veille;ses discours sont pleins de sens et de clart; il raisonnesans emphase, parle de source, dit ce qu'il prtend voir,ne peut rien expliquer, mais insiste sur ce qu'il veut, surce qu'il dit tre indispensable. Il devient donc vrai pour lemdecin que le somnambule a une espce de vue intrieure.Reste savoir s'il voit juste; c'est ce que l'exprience ap-prendra. Le mdecin rflchit alors sur le rapprochement faire entre les songes des anciens et le somnambulismedes modernes; puis il ouvre de nouveau le Rapport de laCommission de 1831, et y lit le fait suivant :

    Dans une circonstance dlicate o des mdecins fort habiles, dont plusieurs sont membres de l'Acadmie, avaient [prescrit un traitement mercuriel pour un engor- gement des glandes cervicales qu'ils attribuaient un vice vnrien, la famille de la malade, madame la com- tesse de L.F., voyant survenir de graves accidents, voulut avoir l'avis d'une somnambule. Mademoiselle Cline, que M. Foissac magntisa en

    prsence du Rapporteur, se mit en rapport avec la ma- lade, et dit que l'estomac avait t attaqu par une sub- stance commedu poison. Ici, le mdecin rapproche ce fait des deux premiers con-

    signs au Rapport. Dans ceux-ci, la somnambule jugeant surl'tat prsent du malade, indiquait les remdes pour l'ave-nir ; mais dans ce dernier cas, elle voit les ravages causspar un mdicament depuis longtemps administr! Ainsi,d'un ct, la somnambule a vu l'avenir, de l'autre le pass !Ceci fournit dj matire rflexion. Mais poursuivonsencore.Les mdecins avaient ordonn le traitement mercuriel

    parce que, suivant eux, l'engorgement devait tre attribu un vice vnrien; mais la somnambule ordonne un

  • 30 COMPRAGEMGNTIQTJEtraitement tout contraire! Quel a t le rsultat? Au boutde quelque temps il y eut amlioration notable! Mais le re-tour la sant n'tant pas assez prompt au gr de la malade,sa famille convoqua une nouvelle runion de mdecins quila soumirent encore un traitement mercuriel.Deux mois aprs, la comtesse meurt! Qui, dela somnam-

    bule ou des mdecins, a bien jug le mal? La membrane muqueuse du grand cul-de-sac de l'estomac, dit le pro- cs-verbal d'autopsie, tait presque entirement dtruite, et rien n'indiquait la prsence d'UNE MALADIEVN- RIENNE ancienne ou rcente, (pages 194 196) Lasomnambule avait donc bien vu; sa mdication avait trationnelle; et le traitement mdical a tu la malade.

    Ici le mdecin ferme dfinitivement le Rapport; il courts'instruire dans les livres magntiques et auprs despraticiens les plus experts. Bientt il a lui-mme des som-nambules avec lesquels il s'claire son tour dans l'intrtde ses clients d'abord, et ensuite dans celui de l'art degurir. Plus tard, plein de reconnaissance pour les lumirestoutes divines qu'il tire du sommeil magntique, il pense s'attacher ceux de ses malades dont la lucidit n'a pascess avec leur gurison. Ainsi, il paye gnreusementleur temps; il rflchit leur avenir; sur chaque consul-tation il prlve leur profit une part qui les protgeraautant que possible contre la misre; puis enfin, pourplus de certitude, il finit par leur assurer un traitementannuel.De tels arrangements sont-ils rprouvs par les lois so-

    ciales, celle de la pudeur mdicale et du vrai mdecin?Nous croyons qu'ils sont au contraire une juste mise enaction de ce principe du grand Hippocrate: Il ne faut rien ngliger dans un art qui intresse tout le monde.

    En cet tat, sans autre souci des embches antima-

    gntiques dresses par le Congrs mdical de Paris, quin'a pas t, quoiqu'il dise, le CONGRSMDICAL DE

  • RPRM. 31

    FRANCE(1);- sans gard pour l'article 3 du Rapport de saCommission qui tendrait faire regarder les somnambulescomme exerant ill gaiement la mdecine, et taxer decomplicit les mdecins qui les consultent, nous posons'enprincipe ce qui suit :

    Ou, un mdecin peut s'associer un somnambule, sansque l'un et l'autre puissent tre taxs de comprage et col-lusion.

    CINQUIEME ET SIXIEME QUESTIONS.

    UNSOMNAMBULEQUI S'ANNONCEPUBLIQUEMENT,A TITREMDICO-CONSULTATIF,MMEAVECL'ASSISTANCED'UNMDECIN, PEUT-ILTRE JUSTEMENTINCULPD'EXERCICEILLGALDELAMDECINE?

    LE MDECINQUI L'ASSISTEPEUT-ILTREINCULPDECOM-PLICIT,ET SOUPONNDECOMPRAGEET COLLUSION?

    Nul n'est cens ignorer la loi. Si beaucoup de disposi-tions d'ordre public et priv demeurent inconnues la plu-part des citoyens, ce ne sont certainement pas celles quirgissent la mdecine et la pharmacie.

    Nul ne pourra embrasser la profession de Mdecin, Chirurgien ou Officier de sant, sans tre examin et reu comme il est prescrit. - (Loi du 10 mars 1803, art. 1er.) Nul ne pourra obtenir de patente pour exercer la pro-

    fession de Pharmacien, ouvrir une Officine de pharmacie, prparer, vendre ou acheter aucun Mdicament, s'il n'a t reu suivant les formes voulues jusqu' ce jour, ou

    (1)Touteslespublicationsprparatoiresontport: CongrsMdicalde Paris; le compte-rendu,seul, a prisce titre prtentieux,menteuret usurpateur: Actesdu CongrsMdical. DEFRANCE!

  • 32 COMPRAGEMAGNTIQUE s'il ne l'est dans une des coles de Pharmacie. - (Lodu 21 germinal an xi, art. 1er.)

    Ainsi, voil qui est clair, positif et facile comprendre,Tel qui aurait dcouvert un remde souverain, une panace,ne pourrait l'ordonner ni le dbiter; ainsi le veut la loi;aussi depuis quarante-trois ans ceux qui pratiquent illga-lement la mdecine n'ont-ils aucune bonne excuse donner.

    Dans un procs rcent et dont le retentissement a timmense, les choses s'taient nanmoins prsentes sousdes couleurs particulires.Il s'agissait d'une mthode curative dcouverte par M. Ras-

    pail, dont la rputation scientifique est universelle, mais quin'est point mdecin. Le camphre ayant fait l'objet destudes de ce savant, il le proposa comme moyen cura-tif; puis aprs avoir longtemps consult seul dans sonpropre cabinet, et s'tre ensuite associ avec un pharma-cien, il crut devoir, dit-il ses juges, rgulariser sa posi-tion en se faisant assister par un Docteur en mdecine,M. Cottereau, Professeur de la Facult de Paris. Malgrles prcautions de M. Raspail, le tribunal de la Seine l'acondamn 15 fr. d'amende pour exercice illgal de la m-decine. II n'en pouvait tre autrement, suivant nous.

    M. Raspail a un remde; il le croit souverain, et dansses vues loyales, gnreuses et tout fait philanthropiques,

    c'est notre opinion du moins, il fait choix d'un phar-macien qui le vendra un prix trs-modr, afin que cha-cun puisse en faire usage et le prfrer toutes les droguesmal prpares que dbitent Paris la plupart de ces mar-chands qui se dcorent du titre de pharmaciens. Tout estbien jusque-l. Voyons ensuite.

    Tant que j'ai donn des consultations moi seul, dit M. Raspail, l'Association des mdecins a gard le si- lence. Sans doute. Tant que M. Raspail s'est contentde faire vendre son remde par un homme revtu d'un titrelgal, il n'y avait rien lui dire.

  • RPRIM. 33

    3

    L'Accusation n'a d'autre base, ajoute-t-il, que mon as- sistance auprs de M. Cottereau. (1) L'Accusation ne

    pouvait effectivement avoir de meilleures preuves d'une

    pratique illgale, puisque de l'aveu de M. Raspail cen'est pas mme lui qui est assist par M. Cottereau, maisau contraire lui Raspail qui assiste le docteur en mde-cine. Je suis accus d'avoir viol la loi, dit surtout le sa-

    vant chimiste, par cela seul que j'ai voulu me conformer en tout ses dispositions/La loi exige la garantie d'un m- decin diplme; le public exige ma garantie d'homme de bonne foi sans diplme; j'ai associ les deux garan- ties. (2) Ici, deux erreurs.D'abord, pour se conformer la loi, il faut se faire re

    cevoir mdecin si l'on veut exercer l'art de gurir; il n'y apoint d'autre disposition lgislative que celle-l. En secondlieu, il n'est pas exact de dire que: La loi exige la garantie d'un mdecin diplme. La loi n'admet pas d'exercicemdical par procuration, elle ne reconnat pour mdecinque le citoyen porteur d'un diplme; et nul, -sesyeux,n'a le droit de pratiquer la mdecine en se faisant assisterd'un mdecin!Si en effet un individu non' mdecin pouvait prati-

    quer sous l'assistance d'un mdecin, il exercerait par lefait la mdecine. La loi elle-mme, il faut le remarquer,a prvu ce cas; elle a constitu deux ordres de mdecins.Le premier a toute omnipotence, le second est restreintdans l'exercice de l'art; et il se trouve des cas o l'officierde sant est oblig de se faire assister par un docteur enmdecine.Il rsulte donc, de cet examen, que M. Raspail n'tant pas

    officier de sant, ne devait en aucune circonstance se

    (1) Procset DfensedeF. V.Raspail,page82.(2)Raspail,ouvragecit, page53.

  • 34 COMPRAGEMAGNTIQUEcroire l'abri des poursuites de la justice en se faisant as-sister par un docteur en mdecine.

    Ceque M,Raspail chimiste et M. Cottereau mdecin, tousdeux hommes minents, n'ont pas pu faire malgr leursmrites connus, d'autres trs-humbles et trs-peu mritantsessayent d'y parvenir. Eux aussi, s'annoncent publique-ment comme donnant des consultations mdicales; et demme que M. Raspail, nous ne faisons ici, on le pensebien, aucun rapprochement entre ce savant et les individusqui prostituent dans Paris la mdecine somnambulique, -de mme que M. Raspail, disons-nous, ils se croient l'abri en se faisant assister par un mdecin1 Nous allons,par piti pour eux, par intrt pour la science, par respectpour l'art sacr de la mdecine, dans l'intrt gnral enfin,prouver leur erreur.

    Ici les commentaires, les explications. deviennent inu-tiles. Les faits existent; les lois aussi. Prenons les feuillespubliques depuis plusieurs annes; ouvrons-les; que lit-onaux annonces ?

    SOMNAMBULEdirige par un mdecin, rue. ; mardis, jeudis, samedis, de midi trois heures. Cette somnam- bule est cite, dans le Manuel de M. le docteur .H, comme la plus lucide de Paris.

    CONSULTATIONSDE SOMNAMBULE,par Mademoiselle V., sous la direction d'un docteur en mdecine, Rue.

    SOMNAMBULE,Madame L., rue. Gurisons frquentes de malades condamns par les mdecins. Consulte pour la province sur cheveux ou flanelles. Gratis en cas d'er- reur. MDECINATTITR. (Aff.les envois. )

    Quelquefois ces annonces sont faites sans aucune indica-tion du genre des facults somnambuliques; telles quecelles-ci :

    MADEMOISELLED., SOMNAMBULE,visible tous les jours, de onze heures quatre heures du soir, except les dimanches. Rue.

  • RPRIM. 35

    CONSULTATIONSDE SOMNAMBULE,par Mademoi- selle V. Rue. Mais quelquefois aussi l'annonciatrice droule ses titres

    de gloire, et bat la grosse caisse dans les termes suivants:

    SOMNAMBULE,Madame L. M., forme par M. l'Abb Faria qui dans ses ouvrages la cite comme un prodige, est la doyenne et la plus exprimente des SOMNAMBULES MDICALESde Paris. On consulte de onze heures deux)) heures. Sousla surveillance d'un mdecin. Rue.

    MADAMEG., clbre somnambule, renomme par ses cures merveilleuses, a transfr SON CABINETDE CON- SULTATIONS, sous la direction d'un mdecin, rue.; sances de une cinq heures.

    Qu'est-ce que tout cela signifie? Nous le demandonsaux femmes de bon sens, aux citoyens qui respectent leslois et qui honorent le caractre du vrai mdecin, laface du monde scientifique est-elle donc change? Est-ceque le sceptre mdical est tomb en quenouille? Parquelle loi, depuis quand, un docteur en mdecine est-ilautoris assister d'autres individus que l'officier de santdans l'exercice de son art?Il ne faut point ici rechercher et donner pour des excuses

    ou des raisons les torts de la mdecine parisienne enversle magntisme, les magntiseurs et les somnambules; laconduite des uns n'autorise point celle des autres. Des in-dividus, hommes ou femmes, non mdecins et se disantsomnambules, ont-ils le droit de s'annoncer publiquementcomme donnant des consultations mdicales? Telle est laquestion.

    Supposons, en effet, que d'office ou sur une plainteparticulire, les quelques femmes ci - dessus nommessoient traduites en justice. Qu'adviendra-t-iJ, suivant touteapparence ?

    Le Prsident la femme X. ceVoustes accuse d'exer-

  • 36 COMPRAGEMAGNTIQUEcice illgal de la mdecine. Vous vous annoncez, dans lesjournaux, commedonnant des consultations sur les maladies?

    Rponse. Il parat que je suis somnambule, et que danscet tat j'indique mon mdecin des remdes pour les per-sonnes malades.

    Le Prs. Mais comment se fait-il que ce soit vous, et nonvotre mdecin, qui vous annonciez comme donnant desconsultations? Vous ne pouvez ignorer que vous n'avezpas e droit de pratiquer la mdecine.

    R. La loi exige la garantie d'un mdecin diplme. Jeme suis conforme ses dispositions. ( Systme Raspail.)

    Le Prs. Vous tes dans l'erreur; la loi ne dit rien desemblable.

    Si ncus voulons bien admettre pour aujourd'hui quevous avez t de bonne foi, que vous tes pure de tout com-

    prage, nous devons vous engager supprimer vos an-nonces et vous mettre sous la protection relle d'un m-decin, si tant est que vous soyez mdicalement bonne

    quelque chose. Autrement, le tribunal userait de svritenvers vous.

    Le Prsident au mdecin. Vous avez assist la dame X.dans les consultations mdicales qu'elle annonce publique-ment comme somnambule?

    R. Oui, Monsieur le Prsident.

    D. Comme Docteur mdecin, vous ne devez prter votreconcours qu' l'Officier de sant, seule personne investieavec vous du droit d'exercer la mdecine. Comment doncavez-vous sanctionn, par votre prsence et votre appro-bation, l'infraction rsultant de l'annonce publique des actesconsultatifs de la dame X. ?

    R. Les docteurs en mdecine et les officiers de sant serendent d'habitude chez leurs clients. J'ai d'abord traitla dame X. pour maladie; reconnaissant ensuite sa grande

  • RPRIM. 37

    lucidit comme somnambule, je lui ai prsent d'autres ma-lades. Elle m'a propos des remdes; je les ai critiqus ou

    approuvs selon mes connaissances; j'ai t dans mon droit,je crois y tre encore.

    Le Prs. Le tribunal ne vous reproche pas de vous clai-rer auprs d'un somnambule; vous tes en droit de cher-cher la lumire partout o vous pensez la trouver. On vousdemande seulement comment vous, Docteur mdecin, fait

    pour chaperonner l'Officier de sant ou la Sage-Femme,vous avez exerc votre art au domicile et sous le nom d'une

    personne trangre la mdecine?R. Beaucoup de mdecins consultent ailleurs que chez

    eux. Je reois mon domicile les malades que je soumets la mdecine ordinaire; et, chez la dame X., ceux que jetraite par le magntisme ou le somnambulisme.

    L'Avocatdu roi. Mais ce n'est pas sur l'annonce de votrenom que le public se rend au domicile de la dame X.c'est sur le sien. C'est encore en sa qualit de somnambule.Qu'en rsulte-t-il? C'est que le public pense que les som-nambules ont droit de proposer et d'ordonner des remdes,en un mot, de pratiquer la mdecine; et vous autorisez le croire, puisque votre somnambule a soin de dire qu'elleest sous votre direction.

    R. Un mdecin appelle la clientle comme il l'entend.Tel a une maison de sant qui est tenue par une personneentirement trangre la mdecine; tel autre se rend dansun tablissement gymnastique ou orthopdique qui est ga-lement tenu par des individus trangers l'art de gurir. Jeme rendais donc chez la dame X., comme je serais allen maison de sant.

    L'Avocat du roi. Le tribunal ne peut admettre votre sys-tme. Nous concevrions parfaitement qu'un individu, mmetranger la mdecine, s'annont publiquement pour teniune maison de sant o l'on serait sr de rencontrer des

  • 38 COMPRAGEMAGNTIQUEsomnambules qui indiqueraient des remdes contrls en-suite par un mdecin. Nous trouverions alors naturel que ne-voulant ou ne pouvant avoir de somnambules chez vous.,vous vous rendissiez chez un individu connu pour en avoir.Mais autre chose est d'aller chez quelqu'un qui est connupour offrir des somnambules consulter, ou bien de se rendrechez le somnambule qui s'annonce LUT-MME titre m-dico-consultatif. Dans le premier cas, qu'un homme ouune femme tenant maison de sant runisse les genres detraitement magntique, somnambulique, orthopdique,homopathique, hydrolhrapique, ou qu'il n'en ait qu'unseul, le public ne voit toujours dans le chef de la maisonque le propritaire de l'tablissement et non le mdecin.Mais la dame X. emploie ouvertement des manoeuvrequi ont un rsultat contraire; son but patent, affich,clair et prcis, est de donner ELLE-MMEdes consultations!Il devient donc vident que vous avez aid la femme X.

    tromper le public et pratiquer illgalement la mdecine.R. Je n'ai jamais eu l'intention de tromper qui que ce

    soit, et je ne pense pas que personne ose le soutenir devantvous.

    Le prsident. Le tribunal veut bien vous croire; mais l'avenir couvrez vos somnambules de votre nom, et ne leur

    permettez pas de s'annoncer sous le leur. Sinon, le tribu-nal y verrait une preuve de collusion, de comprage et de

    complicit. Nous esprons, eneffet, que les magistrats qui ont dj

    donn des preuves de l'intrt qu'ils portent la science ma-gntique etaux travaux des hommeslaborieux qui la cultiventavec ardeur (1), voudraient bien userici d'indulgence en con-sidration des premiers pas embarrasss d'une pratique g-nralement repousse et bannie par la mdecine ordinaire;mais nous n'en posons pas moins en principe ce qui suit r

    (1)VoirRevuemagntique, tomeIer, pages82 et224.

  • RPRIM. 39

    Oui, un somnambule qui s'annonce publiquement, titremdico-consultatif, mme avec l'assistance d'un mdecin,peut tre justement inculp d'exercice illgal dela mdecine.

    Oui, le mdecin qui l'assiste peut tre souponn de

    comprage et collusion, et inculp de complicit.

    SEPTIME ET DERNIRE QUESTION.

    UNMDECIN,DEVENUSOMNAMBULE, PEUT-ILSIGNERETFAIREEXCUTERSESPROPRESORDONNANCES?

    Au milieu des injures et des qualifications de bas tageprodigues aux magntiseurs par les membres du Congrsmdical de 1845, le Rapporteur de la Commission sur laquestion de l'Exercice illgal de la mdecine rponditau docteur Beaux qui l'avait interpell au sujet du Som-nambulisme: Je vous ferai remarquer qu'il n'est pas ques- tion de dcider si le somnambulisme est une vrit ou un mensonge. Il s'agit uniquement de savoir s'il y a ou non exercice de la mdecine. La commission pense affirmali- vement. Si le mdecin tait lui-mme somnambule, il si- gnerait ses ordonnances, et la LGALIT SERAIT COM- PLTE (1). Or, il n'y a pas d'nerie mdico-magntiqueplus flagrante et plus dangereuse que cette dernire allga-tion. Il ne pouvait appartenir qu' des praticiens aussi en-tts que ceux de Paris, de dcider, sans examen ni rflexion,qu'un mdecin devenu somnambule peut continuer traiterses malades.

    Car, enfin, qu'est-ce que le somnambulisme? C'est ce quo

    (1)Actesdu Congrsmdicalde Paris, sessionde 1845,page193

  • 40 COMPRAGEMAGNTIQUEla docte assemble serait bien embarrasse de dire; maisnous allons le lui apprendre.

    Le somnambulisme est un tat mixte, particulier, abso- lument entre le sommeil et la veille, n'appartenant pas plus l'un qu' l'autre; vritable concentration intrieure et intgrale de toutes les facults.

    Il consiste souvent dans un sommeil apparent; il a pour caractre principal de prsenter un changement dans les relations de l'me et du corps.

    C'est un tat transitoire, une affection morbide, rsultat d'une perturbation cause par les actions spares ou com- bines de l'me, du corps ou de la nature.

    Il est susceptible de direction et de perfection, sans pouvoir arriver runir avec un degr d'gale suprio- rit toutes les facults de l'homme qui veille. Si les unes s'exaltent, les autres sont affaiblies. Comme l'tat de veille, il prsente le tableau de l'erreur unie la vrit, et le sujet qui s'y trouve est encore plac entre la folie et la raison (1).

    Ainsi, suivant nous, et nous sommes ici d'accord avec lesmatres de l'art (2), le somnambulisme est un tat mixte, etqui demande tre surveill avec le plus grand soin. Lu-cide sur un point, il est obscur sur un autre. Ce que le som-nambule a bien vu la veille, il peut le voir trs-malle len-demain; en un mot, il a besoin de direction; abandonn lui-mme, il peut commettre des erreurs graves; mal conduit,il suit la pente vers laquelle il se sent entran.

    Les somnambules qui ne se trompent jamais sont rares;ils ont cela de commun avec les hommes qui vivent de lavie ordinaire. On en a vu ordonner des remdes qui aggra-

    (1) TraitPratique, Dfinitiondu Somnambulisme,page566.(2)Mesmer,DeuximeMmoire, pages80, 85, 94 100. Puys-

    gur, Mmoires,p. 456. Deleuze,HistoireCritique, tomeI, p. 181et suivantes. Instr. prat., pag. 98 et suiv.

  • RPRIM. Ul

    vaient la maladie, si le magntiseur n'en et pas fait l'ob-servation (1) ; un grand nombre ont annonc leur mort oucelle des autres, qui se sont tromps et ont fini par trouverdes remdes curatifs (2); en un mot, comme l'a trs-bien ditMesmer, on peut comparer le somnambule un tlescope,dont l'effet varie comme les moyens de l'ajuster (3). Si celaest, et ce n'est pas le Congrs qui pourra nous dmentir,il est facile de comprendre qu'un mdecin diplme, de-venu somnambule, peut se trouver un pauvre sire mdicalet un homme fort dangereux.

    Sans doute, comme l'a fait observer un mdecin magnti-seur trs-judicieux, le docteur Koreff, les bons somnam- bules sont, surtout dans les cas extraordinaires, CENT FOIS MOINSEXPOSSA L'ERREURQUE LES MDECINS LESPLUSHABILES(4); mais il faut qu'ils soient bons!Or, combien sont lourds, stupides, hbts; ou bien vani-teux, imprudents, insouciants, distraits! Les mdecinsdevenus somnambules auront donc besoin, comme leshommes les plus ordinaires, d'tre aids, dirigs, soutenus,redresss, corrigs, clairs.

    Qui fera leur ducation? sera-ce le Congrs? Non, puis-que, suivant lui, les mdecins diplms, bien que somnam-bules, ont le droit d'exercer quand mme!S'iis tuent, s'ils empoisonnent, qui dsignera-t-on pour

    juger de leur tat moral? seraient-ce encore les mem-bres du Congrs? Ils oseraient peut-tre bien en accepterla mission; mais quel est le tribunal qui la leur confierait,lorsque de leur propre aveu et quels que soient d'ailleursleurs mrites, ils ne sont encore aprs soixante-dix ans quedes nes en magntisme?

    (1)Deleuze,Instructionpratique,pages127 130.(2)Deleuze,idem, page122. Koreff,Lettred'un mdecintran-

    ger, page422.(3)Mesmer,DeuximeMmoire,page97. (4)Koreff,page425.

  • IL2 COMPRAGEMAGNTIQUESans doute encore, le mdecin peut aussi, en tat som-

    nambulique, se trouver suprieur lui-mme1 C'est vrai,et nous en avons cit l'anne dernire (1) un remarquableexemple dont nous avons t le tmoin.

    veill, un jeune mdecin somnambule rptait et appli-quait les leons de l'Ecole de Paris; mais, en sommeil ma-gntique, il devenait fort plaisant de le voir se rvoltercontre les remdes qu'il avait ordonns lui-mme en tat or-dinaire; se traitant de cuistre et de Diafoirus dignus intrare.Puis au sortir du sommeil, la vue de ses ordonnances

    somnambuliques, il s'tonnait tantt de la justesse de son

    diagnostic, tantt de la saine apprciation de l'effet des re-mdes ordonns. Enfin, avec le temps, son tact mdicalet son

    jugement se trouvrent considrablement augments.Malheureusement, de quelque ct que l'on envisage le

    somnambulisme, il n'chappe pas aux erreurs de l'huma-nit; et le mdecin le plus instruit, devenu somnambule, peutse trouver descendu au niveau de la brute ou de l'imbcile.La Commission congressiste, charge du rapport sur

    l'Exercice illgal de la mdecine, a donc commis une grandefaute en dcidant implicitement qu'un mdecin somnam-bule tait apte exercer sa profession. Heureusement cettefaute est le rsultat de son ignorance magntique; et commeil est de la plus haute importance qu'elle soit promptementrpare, c'est la Commission elle-mme, son examen plusrflchi, des tudes svres et consciencieuses de toutes

    parts rclames, que nous renvoyons l'intressante questionde savoir si un mdecin devenu somnambule peut signeret faire excuter ses propres ordonnances.

    Nous serions heureux de pouvoir rendre justice ses tra-vaux. Si elle se trompe, nous relverons ses erreurs.

    (1) Revuemagntique, tome II, page36.

  • RPRIM. , 43

    RSUM.

    Les limites de l'esprit humain sont encore aussi incon-nues que les effets de la matire. La dcouverte des pro-prits mdicinales du corps humain par Mesmer, celle desfacults somnambuliques par Puysgur; et celle, enfin, dela puissance motrice de la vapeur par Fulton, en sont les

    preuves.Il est donc des choses que la loi n'a pas prvues, parce

    qu'elles taient encore en germe et inaperues, mais elle lesatteindra un jour. Les lois sont comme les mots, elles nais-sent avec les besoins ou les habitudes des hommes.En attendant que l'autorit gouvernementale ait fix la

    position des magntiseurs, leur intrt et celui dela scienceexigent qu'ils apportent la plus grande circonspection dansleur conduite.

    Si une mdecine inquite et jalouse, plutt que charitableet digne, les signalait aux Autorits ou les traduisait devantles tribunaux, forts de leur conscience, recommandables parde nobles travaux, en possession d'une place reste vide,abandonne et mprise, puis envie, dispute et honteu-sement revendique, tout indique qu'ils trouveront auprsdu Gouvernement et des Magistrats, intrt et bienveillance,justice et protection.

    IN LEGIBUSSALUS.

    POST-SCRIPTUM. 20 NOVEMBRE1846. Nous avonsdit, plus haut, que nous tions sr d'tre cout en haut

  • 44 COMPRAGEMAGNTIQUE

    ImprimerieDondey-Dupr,rueSaint-Louis,46,i{~tMf{s.f~

    lieu; nous avons mme ajout que les magntiseurs pou-vaient compter sur la bienveillance du gouvernement et desmagistrats. Nos prvisions se ralisent. Voici la lettre quenous venons de recevoir.

    UNIVERSITDEFRANCE.

    MINISTREDE L'INSTRUCTIONPUBLIQUE.

    Paris, le 9 novembre1846.

    Monsieur Aubin Gauthier,

    J'ai reu, avec les lettres que vous m'avez fait l'honneurde m'adresser les 27 et 31 octobre dernier, deux numrosde la Revue magntique (1) dans lesquels se trouvent traitesdiverses questions sur la rforme de la lgislation mdicale.

    Je vous remercie, Monsieur, de cette communication,qui sera, de ma part, l'objet d'une attention particuliredans l'apprciation des lments du projet de loi qui se

    prpare sur l'enseignement de la Mdecine et de la Phar-macie.Recevez, Monsieur, l'assurance de ma considration

    trs-distingue,Pourle Ministrede l'Instructionpublique,

    Le Conseillerd'tat, Directeur,DELEBECQUE.

    (1)Lesbrochuresayantpour titre: ComprageMagntique, Bou-cherieChirurgicale,rprimes,sont extraitesdesnumros22et 23 dela RevueMagntique. (Septembreet Octobre).

  • TABLE DES MATIERES.

    OBSERVATIONSPRLIMINAIRES. 1I" QUESTION.Unmesmriseurou un magntiseurpeuvent-ilstre inculpsd'exerciceillgal dela mdecine?-(Rsoluenga-tivement.) 5

    IIeQUESTION.Un somnambuliseurpeut-il l'tre galement?(Rs.ng.). 8

    IIIeQUESTION.Un mdecinpeut-il s'associeravecun mesmri-seur, un magntiseurou un somnambuliseur,sans tre taxdecomprageet collusion? (Rs. aO'.). 17

    IVeQUESTION.Unmdecinet un somnambulepeuvent-ilss'asso-cier sans s'exposer tre taxsde comprageet collusion?(Rs.aff.) 23

    VeQUESTION.Un somnambulequi s'annoncepubliquement,titre mdico-consultatif,mmeavec l'assistanced'un mdecin,peut-il tre justementinculpd'exerciceillgal de lamdecine?

    (Rs.aff.). 31VIeQUESTION.Le mdecinqui assistece somnambule,peut-iltre inculpcommecompliceet souponnde comprageet col-lusion? (Rs.aff.). 36

    VIIeQUESTION.- Un mdecin,devenusomnambule,peut-ilsigneret faire excuter ses propres ordonnances? - (Non rsolu.). 39

    BSUM 43POST-SCRIPTUM.Lettre de M.le Ministrede l'Instructionpu-blique. 44

  • PARIS. IMPRIMERIEDEMm.V DONDEY-DUPR,RueSaint-Louis,46,auMarais.

    ~~M~~IM)~ RWffVIBIHHnQo

    SOUS PRESSE:

    TRAIT D'HYDROSCOPIE ET DE GOSCOPIE. Recherches.psychologiqueset physiologiquessur les facultsdevoir et sentir l'eau etlesmtauxdans les profondeursde la terre. 1 vol.in-80.

    DE CET ANIMAL DE MAGNTISME ET DUSOMNAMBULISME*ENCOREPLUS ANIMAL COMPARS. Lettres d'un rat amtique un rat moderne, recueillieset misesen ordre par MM.Pou, PEAUetVIEILLE-LOQUE,Docteursen Mdecinede la Facult de Paris,Membresde la Commissionanti-magntique,de-la Commissionanti-orthopdique.Rapporteurs vie de toutes les commissionsanti-scieniiifquea,arti-catholiqueset anti-philosophiquesde la FactionAcadmiqueet Htro-clite de Paris. -

    SOMMAIREDEL'OUVRAGE: LIVREIer. Introduction d'un Rat. Som-nambulisme des Rats de l'antiquit, Rats Egyptiens, Grecs, Ro-mains. Admirablesfacults de prvisiondu Rat antique. LIVREII.

    Caractredu Rat somnambule. Ses fonctionsdans l'antiquit.Rats civils; Rats militaires.- Belles actions de Rats somne-rnbules-monumentslevs leur gloireselonHrodote, lien, Pausaniaj, etautres historiens. LIVREIII. Dcadencedes Rats; leur migrationde Rome considrepar les hommesles plus clbrescommeun signecertainde la chutede la Rpublique.- Rats du moyenge; leur install-lation dans les caves de l'AcadmieRoyale de Mdecinede Paris.LIVREIV. Dcouvertedu somnambulismedes Rats modernespar lesDocteurs Pou, PEAUet VIEILLE-LOQUE;Rapport l'Acadmie. Fuiteprcipitede tous les Rats somnambules, expliqueparCicroocommeprsagede la ruine de la Mdecineparisienne. Brochurein-80,

    EN VENTE:BOUCHERIE CHIRURGICALE RPRIME; Considrationsociale?sur les attentats de la Mdecineparisienne contre la vie des animaux;suiviesd'une lettre deM. le Ministrede l'Instructionpublique ce sujet.- Brochure in8.. 1 fr. SOc.

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    1 fr. 50c.REVUE MAGNTIQUE, Journal des Faits et des Curesmagntiqueset somnambuliques,des Thories, Rechercheshistoriques, Discussionsscientifiqueset Progrsgnrauxdu Magntismeen France et dans lespays trangers. Tomes1 et 2; premireet deuximeannes.Ce Journal parait une foispar mois. Prix: 24 fr. par an, pour Paris;

    26 fr. pour les Dpartements.Bureaux: rue Brda, 28, avenueFrochot, 3.

  • OBSERVATIONS PRLIMINAIRES1re QUESTION. - Un mesmriseur ou un magntiseur peuvent-ils tre inculps d'exercice illgal de la mdecine? - (Rsolue ngativement.)IIe QUESTION. - Un somnambuliseur peut-il l'tre galement? - (Rs. ng.)IIIe QUESTION. - Un mdecin peut-il s'associer avec un mesmriseur, un magntiseur ou un somnambuliseur, sans tre tax de comprage et collusion? - (Rs. aff.)IVe QUESTION. - Un mdecin et un somnambule peuvent-ils s'associer sans s'exposer tre taxs de comprage et collusion? - (Rs. aff.)Ve QUESTION. - Un somnambule qui s'annonce publiquement, titre mdico-consultatif, mme avec l'assistance d'un mdecin, peut-il tre justement inculp d'exerciceillgal de la mdecine? - (Rs. aff.)VIe QUESTION. - Le mdecin qui assiste ce somnambule, peut-il tre inculp comme complice et souponn de comprage et collusion? - (Rs. aff.)VIIe QUESTION. - Un mdecin, devenu somnambule, peut-il signer et faire excuter ses propres ordonnances? - (Non rsolu.).RSUMPOST-SCRIPTUM. - Lettre de M. le Ministre de l'Instruction publique

    OBSERVATIONS PRLIMINAIRES1re QUESTION. - Un mesmriseur ou un magntiseur peuvent-ils tre inculps d'exercice illgal de la mdecine? - (Rsolue ngativement.)IIe QUESTION. - Un somnambuliseur peut-il l'tre galement? - (Rs. ng.)IIIe QUESTION. - Un mdecin peut-il s'associer avec un mesmriseur, un magntiseur ou un somnambuliseur, sans tre tax de comprage et collusion? - (Rs. aff.)IVe QUESTION. - Un mdecin et un somnambule peuvent-ils s'associer sans s'exposer tre taxs de comprage et collusion? - (Rs. aff.)Ve QUESTION. - Un somnambule qui s'annonce publiquement, titre mdico-consultatif, mme avec l'assistance d'un mdecin, peut-il tre justement inculp d'exercice illgal de la mdecine? - (Rs. aff.)VIe QUESTION. - Le mdecin qui assiste ce somnambule, peut-il tre inculp comme complice et souponn de comprage et collusion? - (Rs. aff.)VIIe QUESTION. - Un mdecin, devenu somnambule, peut-il signer et faire excuter ses propres ordonnances? - (Non rsolu.).RSUMPOST-SCRIPTUM. - Lettre de M. le Ministre de l'Instruction publique