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ÉTUDE

HISTORIQUE .ET LITTÉRAIRE

SUR

AD.É1\JAR DE CHAI3ANNII]S.

Adémar est pour notre histoire locale ce que Grégoirede Tours est pour l'histoire de France c'est le père de7'l4stoirc du Limousin. Il est, par ordre- de date, lepremier de nos chroniqueurs connus; et, parmi ceux quil'ont suivi, on n'en saurait trouver qui l'aient surpassésoit pour l'exactitude des faits, soit pour l'élégance et lecachet du style. Il mérite donc, à tous égards, une étudeSpéciale. Après avoir esquissé sa biographie, nous allonsaihilyser ses principaux ouvrages, indiquer ceux qui ontété publiés, signaler ceux qui sont encore manuscrits.

Mais, d'abord, une question se présente où est néAdémar?

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ARTICLE PRMIER.

Lieu de naissanced'Adémar.

C'était mie opinion adoptée par les principaux savantsdes deux derniers siècles, dom Cellier (1), Denys deSainte-Marthe (2), dom Rivet (3), Moiti (4), etc., opinioncontinuée jusqu'à nos jours (5), qu'Âdémar était né à Cha-banais, ville située sur la Viene, au-dessous de Saint-Junien et de Rochechouart, autrefois du diocèse deLimoges, et aujourd'hui du diocèse d'Angoulême et dudépartement de la Charente.

En 1760, les flférnoj'eg de i'rév'ouz publièrent une lettredont l'auteur s'élevait contre cette opinion communecette lettre, datée de Versailles, 1" décembre 1759, étaitanonyme (6); niais l'abbé du Mabaret, dans un articlebiographique sur Adémar, nous a révélé que cette lettreétait de l'abbé Oroux, chanoine de Saint-Léonard, et soncompatriote (7).

(1) Histoire générale des auteurs sacrés et ecclésiastiques, T. XX,P. 170.

(2) Gallia christiana nova, T. II, col. 958.(3) histoire littéraire de la .France. T. VII, p. 300-308.(4) Dictionnaire historique art. ADÉMAn.(5) Dictionnaire encyclopédique de la théologie catholique , tradûit

de l'allemand par l'abbé OoscnLuu, T. I, art. ADMÀR. -G. WiTz, Notice sur Adémar, ap. I'ERTZ, Monuin. Germ. hist.,T. IV, p. 100.— LÉOPOLD DELISLE, Cabinet des Manuscrits, P. 391.

(6) Mémoires de Trévoux, second volume de janvier 1700sub finein.

(7) Mémoires pour servir à la future édition du Dictionnaire deMoréri, ma. de la bibliothèque du Louvre (brûlé dans l'incendie

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L'abbé Oraux prouvait d'une façon péremptoire que lemoine de Saint-Cybard n'était pas né à Chabanais; il s'ap-puyait sur un texte décisif, tiré des écrits mêmesd'Adémar. A propos du bienheureux Tiirpin d'Aubusson,évêque de Limoges, le chroniqueur dit qhe la nièce decet évêque, nommée Officia, eut, de son mariage avecFoucher (Fuleherius), trois enfants Adalbert, doyen deSaint-Martial, Roger, chantre de ce monastère, et Ray-mond, leur frère puîné « Raymond, ajoute-t-il, dontmoi, Adémar je suis le fils (cwjus ego Adeinaru.s jUins

» or ces trois-frères étaient nés dans leur domainehéréditaire, qui s'appelle Champagne ou Chabannes iitproprio jure itereditarjo, quod vocatur Campaen.se) ou,d'après une autre leçon adoptée par dom Bouquet (Caban-nense), domaiiie situé auprès de Châteauponsat (juxtaCastelliø,z potentiam (1). ou mieux encore potenciacum,d'après nu manuscrit qui appartenait à M. de l'Épine,subdélégué de l'intendance de Limoges.

Que ce Castellznn potentiam ou potentiacuin soit la villede Châteauponsat, cela ne peut être l'objet d'un doute. Unécrivain limousin du XII 0 siècle traduit à peu près en cestermes le nom de Châteauponsat Apud Casteilumpoten.-ciantm 1wnoratur Thyrsi inartyris corpi&s (2). Et icipoteQicianuQit est-il encore pour potentiacum. En effet,Bernard Guidonis dit Casfrurnpoeneiacurn (3).

de la commune), art. .ADÉMAn. - BARBIER, Brame,, critique desDieNoun. JIisL, Paris, 1820, art. ADÉMAR.

(1) Cornme,noratio abbat. Lemovic.i'a.trotog., T. CXLI, col.81, 82.

(2) Apud LADRE, Ribl. flOVŒ. T. II, p. 281.(3) S. Thyrsi martyris corpus apud Castrum poenciacum

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-4-Adémar n'est donc pas né à Chabanai, puisque Chaba-

nais est bien loin de Ohâteauponsat.Ce qui prouve d'ailleurs qu'Adémar n'est pas né à Cha-

banais. c'est. que., dans sa Chronique, il parle de Jour-dam, prince de Chabanais, qui fat tué , vers l'an 1001près de Saint-Junien, à la suite d'un combat qu'il avaitlivré avantageusement aux troupes d'Hilduin, évêque deLimoges (1), Or cette famille des princes de Chabanais,dont on a la généalogie pour cette époque, est tout àfait différente de la noble famille d'Adémar (2).

Il est donc manifeste quAdémar n'est pas né à Chaba-nais, et que les savants qui le font naître danscette villese sont fourvoyés.

Maintenant quel est ce domaine héréditaire de Chavi-pagne de Chabannes, situé aux environs de Château-ponsat?

Sur ce point, l'abbé Oroux est moins heureux: il traduitCampanense par CMrnpagnczc, qui se traduirait bienmieux de Capaniaci&m; et il prétend que le lieu de nais-sance d'Adémar est le hameau appelé Champagnac,situé au voisinage de Châteauponsat , et oh l'on aperçoitencore quelques vestiges de château ou habitation sei-gneuriale.

Par malheur pour cette opinion, il n'y a, aux environsde Châteauponsat, aucun village du nom de Champagnac.A la vérité, il y a, dans le département de la Haute-Vienne, sur la lisière du Poitou, dans la commune de

honoratur, in cujus honore dicti loci ecclesia est fi.mdata. (De

sanctis Lemovic., n». LABBE , T. J, ccl 633.)(1) Ilistor. lib. III, 11042: i'atroiog. T. CXLI, col. 57, 53.

(2) Voir cette généalogie dans le Cailla Chrisliana nova . T. II,

in$lrl4lfl.. col. 195.

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Bussière-Poitevine, un village de Champagnac,, où setrouvait un château de ce nom, qui a eu autrefois de l'im-portance , et qui exerçait un droit de justice considé-rable (1); mais ce Champagnac n'est pas aux environs deChâteauponsat: il est l'autre extrémité du département,et bien plus rapproché du Dorat. Ce n'est donc pas 1hqu'il faut placer la naissance d'.Àdémar.

Pour trouver le véritable lieu (le naissance, il fautremarquer qu'Àdémar, dans sa Chronique, appelle sonpère Raymond de Chabannes (Raynwndus Caban"neasis (2)) : l'abbé Oroux prétendait que c'était 1k unefaute de copiste, et qu'il aurait fallu lire Raymond deChampagnac (Raymuhdus Caiszp(tnensis); mais les nom-breux manuscrits de la chronique d'Adémar sont una-nimes sur cette leçon, et c'est pourquoi on , l5appelaitAdéinar de Chabanais. La faute- de copiste doit 'setrouver dans l'unique manuscrit qui porte le mot Gain-pczncnse, où il faut lire, comme a lu dom Bouquet,GabaneMe (3) , domaine de Chabannes. Il s'agit doncde trouver un domaine de Chabannes, une propriétéseigneuriale de ce nom, aux environs de Châteauponsat.- Il y a, aux environs de Châteauponsat, deux localités

du nom de Chabannes la première est un village de lacommune de Compreignac, niais on n'y trouve aucunvestige d'antiquités rien n'atteste que ce village ait eude l'importance autrefois. s

Il y a, k trois• floues environ de Cliâteauponsat, une

(1) Voir l'Histoire de Bellac, par l'abbé Roi- on PIERnEFrT],

p. 241. 154.(2) Jlistor. lib. lu , no 45: Po,trolog., T. CXLI, col. 59.(3) Recueil des Historiens des Gaules et de la Franco,, T. X.

p. 151, note b.

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autre localité du nom de Chabannes c'est un village con-sidérable (1), situé dans la commune de Saint-Pierre deFursac (aujourd'hui canton du Grand-Bourg, départementde la Creuse). Cette localité a eu de l'importance, elle estindiquée dans une carte du Limousin, gravée, an xvi' siè-cle, par notre géographe Fayen, et la génération ac-tuelle a vu disparaître les ruines d'un vaste château quis'y trouvait autrefois.

C'est là, croyons-nous, qu'il faut placer la propriétéhéréditaire de la famille d'Adémar et le lieu de naissancede cet écrivain.• Après avoir rejeté Cluzbauais et Charnpagac, nous nevoyons que le lieu de Chabannes qqi réunisse les condi-tions renfermées dans le texte qu'a signalé l'abbé Oroux.

Ce n'est là, il faut l'avouer, qu'un détail historique;mais tout détail a son importance; et, à défaut d'autremérite, l'indication que nous donnons aujourd'hui acelui de la nouveauté.

Il y a quelques années, un savant d'un départementvoisin avait soulevé cette question. M. Eusèbe Castaigne,bibliothécaire de la ville d'Angoulême, - qui avait euconnaissance de la lettre (le l'abbé Oroux, d'après l'indi-cationde l'abbé du Mabaret, - M. Castaigne fit paraître,,en 1850 (2), une dissertation sur le lieu de naissanced'Adémar, dans laquelle il se contentait de reproduire lesarguments de l'abbé Oroux et son erreur relativement àChampagnac. Toutefois M. Castaigne a eu le mérite de

(1) Population, 260 habitants.(2) Bulletin de la Sefflê Areiuiologique de la Choreute, année 18.50.

P. 80.

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tirer de l'oubli cette lettre, qui était enfouie dans la col-lection des Mémoires de Trévoux.

Adéinar est donc né en Limousin, mais dans cettepartie qu'on appelait la Marche limousine, et nous avonsvu que son aïeule paternelle, Officia, de l'illustre maisond'Aubusson, appartenait aussi à cette partie de l'ancienLimousin.

Il faut donc dire désormais, non pas Adémar de Cha-banais, comme le disent presque tous les savants qui ontparlé de cet historien il Mut dire , comme nous l'avonsdit depuis vingt ans, Adérnar de Chtabnnes (1).

ARTICLE SECOND.

Biographie d'Adémar.

Adémar naquit en 988 (2), dans la Marche limousine,au lieu de Chabannes (3), propriété héréditaire de safamille, non loin de Châteauponsat.

Son père, Raymond de Chabannes, descendait, par samère, Officia, de l'illustre maison d'Aubusson. Officiaétait la nièce du bienheureux Turpin d'Aubusson, évêquede Limoges, mort en 944 (4).

(1) Biographe des honvrnes illustres du Li,nousi,, , art. AnÉ4An.() Adémar dit qu'il avait quarante ans en 1028. Epistola, etc.

Putrolog., T. cxLl ,col. 89. -(3) Aujourd'hui commune do Saint-Pierre-de-Fursac, canton

du Grand-Bourg (Creuse).(4) Ex Cujus nepte Officia nomine, ,nti saut Adalbertus

docanus et Rotgerius patre Fulcherio in proprio jurehereditarlo,quod vocatur Cabanense juxta Castellum-potentiacum.. (Commenior.Abb. Lernou. Patrolog., T. CXLI, col. 81, 82.)

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Deux frères aînés de Rarnond de Chabannes, deuxoncles paternels d'Âdémar, étaient ensemble au monastèrede Saint-Martial de Limoges c'étaient Adalbert ou Aide-bert, doyen (lu monastère, et Roger le Chantre (1).Adéma.r en fait le plus grand éloge « Eu ce temps(1025), deux moines de Saint-Martial des plus éminents,remarquables par leur piété, illustres par .leur sainteté,distingués par leur science, qui s'aimaient cordialemententre tous, deux colonnes qui soutenaient le monastère,deux candélabres qui l'éclairaient (le leurs rayons, deuxfrères qui s'asseyaient à la même table, Roger le Chantreet son frère Aldebert le Bibliothécaire eurent tous les deux,le jour de Pâques, une vision dans laquelle le Christ lesappelait k lui; et, eu effet, dans la mme semaine, ilsterminèrent saintement leur vie (2) ».

La mère d'Adémar se nommait 'Aldéarde ou Hilde-garde ce devait être une châtélaine des environs duDorat. Elle avait trois frères Ainard prévôt du Dorat,conseiller habile et fidèle dé Pierre Drut , abbé de cemonastère; deux autres frères, Ahbo 'u et Raymond, braveschevaliers et vaillants capitaines (stronu.issirnos duces)robustes de corps et d'un coeur belliqueux. Aynard mourutà Rome; Raymond, son frère, k Jérusalem, et le troi-sième, Abbon, eut une vieillesse accablée d'infirmités (3).

Dès son enfance, Adémar fut placé au monastère deSaint-Cyhard d'Angoulême, oit il passa la plus gi'ande

(1) La tombe de Roger le Chantre est 'a Ventrée du musée deLimoges. On y lit ces paroles Rolgerius cantor IV. gal. majirequievit (26 avril 1025).

() Histor.. lib III, n°6. Patrolog.. T. CXLI, col. M.(2) Jlistor., lib. III, flo 45. Patrolog., T. CXLI, col. 59.

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partie de sa vie (1). Toutefois il fut instruit clans leslettres ecclésiastiques au monastère de Saint-MaillaI deLimoges, et il vécut plusieurs années auprès de son oncleRoger, qui avait une des premières dignités du monastère,celle de chantre, et qu'Àdémar appelle son maître (2).Un autre 'de ses oncles, un frère de Roger, Adalbert,était, comme nous Pavons dit, doyen et prévôt de Saint-Martial c'est auprès d'eux qu'il pùisa l'amour et la véné-ration dont il était pénétré pour l'apôtre de l'Aquitaine;et c'est lorsqu'il demeurait dans ce monastère qu'il

• composa un grand nombre de sermons sur saint Mar-tial (3).

Il raconte que, lorsqu'il demeurait dans ce monastère,vers l'an lolo (il avait alors vingt-deux ans), il fut favo-risé d'une vision merveilleuse. Ayant été réveillé aumilieu de la nuit par une tempête, il .se leva pourregarder les astres, et il vit du côté du midi, dans IShauteurs du ciel, un grand crucifix qui semblait yêtreattaché. La figure du Seigneur, suspendue à la croix,répandait un grand fleuve de larmes. A cette vue, saisid'étonnement, il ne put faire autre chose que verser despleurs; la croix et la figure du Crucifix étaient couleurde feu et de sang. Ce spectacle dura une demi-heure, puisle ciel se ferma sur le Crucifix céleste, et la vision s'éva-nouit. Et ce qu'il vit, il le tint caché dans son coeur

(1) Epistolade apostolatit S. Ma.rtiati. Patrolog., T. CXLI, col. 89.

(2) Qomrnernorat. abbat. Leinovic. Patrolog., T. CXLI, col. 84.

(3) Ademarus, monachus Sancti Eparchui et Sancti Martialis.qui scripsit multos sermones de sancto Martiale cum esset inmonasterio Sancti Martialis. (Note tirée d'un hymnaire de saintMartial, ap. B0NAVENT., T. I • p. 4G8.)

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jusqu'à ce qu'il l'écrivit (environ quinze ans après), et ilprend Dieu à témoin de la vérité du fait qu'il avance (1).

Adémar retourna à Saint-cybard d'Angoulême, où ils'occupa soit à composer, soit à transcrire de-nombreux

• ouvrages. Dans sa Lettre sur l'apostolat de sdint Martial,écrite 'an 1028, il; è'appel]e Adémar d'Angoulême, ledernier des prétres (2). Mabillon a Publié un. acrosticheen vers latins,, adressé à Rohon, évêque d'Angoulême.Les premières lettres des vers forment ces motsepiscopits Cltristi, et les dernières Ademarits, servusChristi. Adémar avait transcrit, pour l'évêque Rohon, uneHistoire des pontifes Romains attribuée au pape Da-xnase (3); et c'est en tête de ce manuscrit qu'il avait placécet acrostiche.

L'an 1028, Adémar, venu d'Angoulême à Limoges, eutavec Benoît, prieur de Cluse en Piémont, une discussionfort vive, dont il a rendu compte dans sa Lettre sur l'apos-tolat de saint Martial. Cette lettre, publiée par Mabillon,n'est pas le moins curieux de -ses ouvrages; elle peint auvif le caractère ardent et, fougueux , la trempe d'esprit

•énergique, l'eithousiasme passionné, le style éloquent,le talent distingué d'Adémar.

En quelle année mourut Adénir? Dom Ceillier dit que« le temps de sa mort n'est pas connu (4) n. Dom Rivet,ne le voyant pas figurer au Concile de Limoges de l'ân

(I) Ilislor., liii. III, 11° 46 Patrolog., T. CXLI, col. 60.(2) A(lemarus Ego1isrnensj, prcsbyterorum ulti,nus. (Episto la

de apostolat-a sancti !ilartialis Pat roloq.. T. cXLI, col 89.)(3) MAnILLON, Analecta, nova edit., p. 422 Pa-troloy,, T. CXLI,

col. 113.(4) Don CEILLIER, lhst. gônér. des auteurs sacrés cl ecclésiastiques,

T. XX, p . 171.

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1031, n conjecturé qu'il était mort à cette époque (1). Nousne comprenons pas que les deux savante bénédictinsn'aient pas été mieux informés. -

Â.démar mourut, l'an 1034, à Jérusalem, cil il était alléen pèlerinage an tombeau du Sauveur. Nous trouvons cefait dans une note de Bernard {itier•, moine de Saint-Mar-tial au xii 8 siècle, qui ajoute qu'Addrnar avait fait écrirenI blues d'or la légchde de saint Martial par A&ré-lien (2).

On lit d'ailleurs la note suivante dans un manuscrit dla bibliothèque de Leyde (Noinenclaura wni-versabis), quiavait appartenu à l'abbaye de Saint-Martial, et qui étaitun don d'Adémar e Ce livre est la propriété de Notre-Sei-gneur le grand saint Martial de Limoges, et il fit partie dela bibliothèque d'Adérnar le Grammairien, de pieuse mé-moire Car, après avoir passé plusieurs années au service duSeigneur et dans l'ordre monastique au couvent de Saint-Martial, avant d'aller en pèlerinage au sépulcre duSeigneur et de partir pour Jérusalem (d'où il ne devaitpas revenir), il laissa à saint Martial, son patron et sonnourricier, grand nombre de livres qui lui avaient coutébeaucoup, soit h composer, soit à transcrire, et ce livre enest un (3) e.

Adéinar mourut le sept des ides -(1 août) de l'année1034, à l'âge de quarante-six ans.

(1) DoM RivEr, lEst. tittôr., T. Vll, p. 302.(2) Anno gratie 1031, obiit Adeinarus monachus, Jui jussit

ficri vitam saneti i,lancialis cum litteris aureis, et in .lerusalciumigravit ad Ghrist-um. (Note de Bernard liber, mas. latins, 1338,Bibi, nation., - P. -BONAvENT., T. 1, p-468.)

(3) Apud G. \VAITZ, Nolitia in Ademar,tnt Patrolo.q., T. CXLI.col. 15. - D. RIVET, lEst. iitMr.. T. VII, p. 302. - Catalog. bibi.Luqd. rat., me, p.386.-

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ARTICLE TROISiÈME.

Chronique d'Adéxnar.

L'ouvrage le plus considérable d'Adémar est sa Civro-flUC 011 histoire des Francs; qu'il prend à l'origine dela monarchie, et qu'il conduit jusqu'à l'année 1028. Cetouvrage a été publié en 1657 par le P. Lâbbe (1), et, denos jours, en Allemagne, par G. Waitz, dans les Monu-mente 6ermanL'e liistorjec de Pertz (2). Adémar a diviséson ouvrage en trois livres, et il s'occupe avec un soinparticulier de l'histoire de l'Aquitaine. Le premier livres'étend depuis Pharamond jusqu'à Charlemagne; le secondlivre est uniquement consacré à l'histoire du grand-empe-reur; le troisième livre comprend les faits historiquesdepuis la mort de Charlemagne jusqu'au milieu de l'an-née 1028.

Dans les deux premiers livres, la Chronique d'Adémarn'offre rien de bien intéressant qu'on ne trouve clais lesanciens historiens de la France. Il a toutefois intercalécertains détails qui concernent principalement l'histoirede l'Angoumois et du Limousin, et qu'on chercherait

(I) Noua bibliotheca mss. librorum. T. Il, P. 157-185. - Pithouavait publié le second livre en 1588, dans son ouvrage intituléAn.naliu,n et historioe Francorwrn scriptores. pars Qa, P. 6. - DoraBouquèt a publié la chronique d'Adémar par fragments, dans leRecueil des historiens des Gaules et de la Franco, T. 11, p. 514;T. V, p. 184; T. VI, P. 223; T. VII, p. 225; T. VIII, p. 232;'T. X,p. 144-164.

(2) PERTZ, Monwnv. Corns. hist., T. 1V, p-106 Patro?og.. T. CXLI,col. 19-80.

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vainement ailleurs. Le dernier éditeur d'Adémar, qui apublié l'ouvrage de notre chroniqueur dans les lifonurnentaCrennanjœ historica, M. G. Waitz, a séparé avec soin cesdétails originaux dont on ne connaît pas la source.

Mais il est surtout original dans ce qu'il raconte autroisième livre, depuis l'an 816 jusqu'en 1028. Ii rapportefidèlement ce qui s'est passé dans les monastères de Saint-Cybard d'Angoulême et de Saint-Martial de Limoges,dont il avait les anciennes chartes sous les yeux; il faitconnaître beaucoup de traité relatifs aux évêques deLimoges et aux évêques desdiocèses voisins; il exposeaussi en détail les faits militaires et domestiques des ducsd'Aquitaine, comtes de Poitiers, et des comtes d'Angoulême,de Limoges et de Périgueux; il fait entrer dans son récitbeaucoup de faits qui intéressent l'histoire de France et labiographie de nos rois aux ix° et x° siècles; non-seulementil rapporte ce qui lui paraît remarquable dans l'État etdans l'Église, niais il parle, à l'occasion, d'évènementsqui regardent l'empire d'Allemagne (1) et les royaumesdu nord; il pousse même ses investigations sur l'Orient,sur Constantinople (2) et Jérusalem (3). Il est vraisem-blable qu'il tenait ces récits des pèlerins qui revenaientde la Terre-Sainte ; d'autres pèlerins sans doute , quiavaient visité le tombeau des Apôtres, lui ont raconté cequ'il a consigné dans son histoire sur Home (4) et surl'Italie. L'Angleterre, l'Espagne (5) et d'autres royaumesétrangers fournissent aussi matière à ses récits.

(1) Lib. iii, n° (32: Palroiog., T. CXLI, coi. M.(2) Lib. HI, n°22, 32 : Ibid., col. 40, 49.(3) Lib. in, n° 47: Ibid., coi. 60.(4) Lib. III, no 52: Ibid., col. 64.(5) Lib. lii, n°' 38, 55,10Ibid., col. 54, 66, 80.

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Adémar fait un magnifique portrait d'un de ses contem-porains,.Guillaume, duc d'Aquitaine et comte de Poitiers.« 0e prince, très-glorieux et très-puissant était aimableà tous, grand par le conseil, remarquable par sa pru-dence, très-libéral dans ses dons, défenseur des pauvres,père des moines, constructeur d'églises, ami des églises,et principalement de la sainte Église romaine: Dès letemps de sa jeunesse, il avait la coutume d'aller chaqueannée en pèlerinage à Rdine, au tombeau des Apôtres;et., l'année où il n'allait pas à Rome, il se dédommageaiten se rendant eu pèlerinage à Saint-Jacques en Galice.Partout où il voyageait et où il tenait une assembléepubliqué, on le regardait plutôt comme un roi que commeun due.. Non-seulement il soumit toutel'Aquitaine à sonempire, - de telle sorte que personne n'osait lever lamain coutre lui, - mais encore il eut pour amis le roi deFrance (Robert), Alphoiise, roi «Espagne, Sanche, roi deNavarre, et même le roi de Danemark et d'Angleterre,nommé Canut. Il s'était tellement attaché ces princes,que chaque année il recevait leur lég&tion avec de richesprésents; et lui, à son tour, leur renvoyait des présentsplus précieux encore... Quand il allait à Rome, les pontifesromains le recevaient avec autant de respect que s'il eûtété leur empereur, et le sénat de Reine l'acclamait commeun père (1). »

kdémar ne se borne pas à raconter les faits historiquesil enregistre aussi les phénomènes célestes et ses observa-tions astronomiques, dans lesquelles il y a plus de poésieque de science. Qu'on en juge par l'extrait suivant

(1) Jlistor. Ut,. III ,no 41 r Patroloq., T. CXLI, col. W.

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- 15 -« Dans ce temps-là, au mois de janvier (1), il arriva uneeclipse qui dura pendant une heure la lune aussi éprouvade fréquents phénomèiies (frequentius laborem passa est)tantôt de couleur de sang, tantôt de couleur d'azur, tantôts'éclipsant tout à fait (2). Ou vit aussi, du côté du midi,dans. le signe du lion, deux étoiles qui se combattaientpendant tout l'automne la première et la plus brillanteétait à l'orient; la plus petite, à l'occident. La plus petite,comme irritée et effrayée, s'élançait vers la plus grande,qui ne lui permettaft pas d'approcher, mais qui, la frap-pant avec les rayons de sa clieveluie, la repoussait plusloin vers l'occident (3).

Adémar vit à Limoges un détachement de l'armée desMaures de Cordoue, qui, après avoir opéré une descentedans la ville de Narbonne, et tenté de s'en rendre maîtres,furent eux-mêmes défaits et réduits en captivité. Vingtd'entre eux, à corpulence énorme, furent envoyés eu pré-sent à l'abbaye de Saint-Martial. Quoiqu'ils parussentbien moins parler arabe que glapir comme de petitschiens (4) ,Adémar apprit toutefois de leur bouche coin-ment ils avaient été vaincus et faits prisonniers.

Vers la fin du troisième livre, il raconte la mort deGuillaume, comte d'Angoulême, arrivée le G avril 1028.Ce prince était de retour d'un pèlerinage qu'il avait faità Jéruslem. n avait demandé la pénitence aux évêqueset aux abbés, dès le commencement du carême, et s'étaitpréparé, pendant ce saint temps, à la mort. La veille des

(I) En 1023, 24 janvier.(2) En 1023, 9janvier.(3) Histor. lib. III, n°62 : Pat rotog., T. cxLI, col. M.(4) ifistor. lib. III, n° 52: Pat rotog., T. CXLI, col. 65.

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Rameaux, ilil reçut l'huile sainte des infirmes et le via-tique; puis; ayant adoré et baisé le bois de la croix, il.mourut entre les bras de l'évêque Rohon et des prêtres.L'historien ajoute que, le lendemain , après qu'on eûtachevé les cérémonies de la sépulture, les évêques, escor-tés du clergé et du peuple, firent la procession solennelle,avec la station marquée pour le dimanche des Rameaux.

Adémar parle ensuite d'un concile tenu à Charrouxcontre les erreurs des Manichéens que l'on renouvelaitdans le pays, de la défaits des Sarrasihs en Espagne parles armes d'Alphonse, roi de Galice, et de la mort dece prince. C'est par ce fait qu'il termine sa chronique.Quelques-uns enont conclu qu'il avait achevé de l'écrirel'année même de la mort d'Alphonse, c'est-à-dire l'an 1021:mais cette conclusion n'est pas rigoureuse. Adémar n'apas toujours rapporté les événements dans leur ordrechronologique, et, quelques lignes plus haut, il en raconteun de l'an 1028 (1).

Eu somme, ce que nous savons de plus intéressant surl'histoire du Limousin, surtout depuis le commencementdu rxc siècle jusqu'au premier tiers du xi', nous le devonsprincipalement à Adémar, et les autres traits que nouspouvons ajouter à son histoire sont glanés çà et là dansquelques chroniques sèches et arides, ou laborieusementarrachées à quelques chartes ou k quelques légendes.

(1) Dom CEILLIER, Histoire générale des auteurs sacrés et ecclésias-

tiques, T. XX, p. 172.

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ARTICLE QUATRIÈME.

Notice sur les abbés de Saint-Martial de Limoges.

Tin second ouvrage d'Adémar, qui paraît avoir été com-posé avant le précédent, c'est la Notice sur lés abbés deSaint-Martl de Limoges (1). Cette courte histoire u étéPubliée pour la première fois par le P. Labbe (2), et réim-primée de nos jours dans la Patroloçic de l'abbé Migne (3).Elle commence eu l'année 848, et se termine en l'an-née 1025, à la mort de Roger le Chantre oncle d'Adémar.

TI est à regretter qu'Adémar n'ait pas pris à son originel'histoire du monastère t de l'église de Saint-Martialil devait, avoir sous la main des documents que nous liepoUvons trouver aujourd'hui. Il ne la Commence qu'enl'année 848, lorsque les chanoines de Saint-Martial em-brassèrent volontairement la vie monastique avec Avnard,leur abbé. ils ne voulurent point prendre le nouvel abbéparmi eux, parce qu'aucun d'eux n'était asse'/instruit dela vie nouvelle qu'ils allaient professer; mais ils dioisi-rent l'abbé régulier de Saint-Savin en Poitou, nomméDodon, qui gouverna pendant trois ans le monastère deSaint-Martial.

Ce Changement se fit en présence de Charles le Chauve,qui tenait alors une assemblée générale à Limoges, et ce

(1) Commeynoratjo ahbajurn LCiflO;jce)jsju lias! lica S. ilIarlia lisaposloU.(2) LABBE, Buliliofl eau nova rnss. libroru•,n, 157, T. li,(3) Palroloq., T. CXLI, col. 79-54.

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prince en témoigna la satisfaction qu'il en éprouvait (1).C'était 1k, du reste, une imitation de ce qui s'était faitSaint-Denys de Paris, quelques années auparavant, sousl'inspiratioii de Louis le Pieux. En effet, l'an 832, Hilduin,abbé de Saint-Denys et ami particulier de Louis leDébonnaire, avait changé l'habit de chanoine pour l'habitmonastiqué ci la vie austère du cloîtré (2).

Adémar ne s'attache pas tellement à donner la listechronologique et la biographie des abbés de Saint-Martialqu'il ne fasse entrer dans son récit des traits qui intéres-sent non-seulement l'histoire du Limousin, mais encorel'histoire générale. Ainsi, tout en relatant les événementsprincipaux survenus dans le monastère de Saint-Martial,tout en parlant des incendies qui l'ont ravagé, des reli-quaires précieux dont il a étéenrichi, il intercale dans sanarration de précieux détails historiques sur les évêquesde Limoges, les rois de Erance, les fondations de mons-tères, les invasions des Normands, les guerres qui déso-lèrent la contrée , et la peste des Ardents, qui fit de sigrands ravages k la fin du r siècle. Il fait même uneincursion dans les pays étrangers , et il parle de la viola-tion du Saint-Sépulcre par les Sarrasins, et de la pestequi, causa en Orient une mortalité effrayante.

Notons quelques particularités. -,Sous le second abbé,nommé Abbon , Charles, fils de Charles le Chauve, futsacré roi d'Aquitaine à Limoges (855) par Rodulhearchevêque de Bourges, au milieu d'une grande affluenced'évêques et de seigneurs (3).

(1) ADEMAR. Iffitor.. lib, III, n°18: Pal rolog., T. CXLI, col. -34.

(2) DoM FÉLImEN, Histoire de l'abbaye de Saint-Denys P. 70, 80.

(3) Patrolog., T. CXLI, col. 80.— Cs. Ànnal. Berlin, ad ann, 855.

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Le septième abbé, nommé Étienne (929-937), plaça surl'autel de saint Martial une châsse en forme d'église,faite d'or, 'd'argent et de pierreries , qu'on appelaitÂfgtnercsni (1). Puis, afin de protéger le Château, c'est-à-dire la ville nouvelle de Limoges, contre les attaques deGuillaume, comte de Poitiers, il construisit deux tours,l'une en face des faiseurs de boucliers (scutarios), appeléeOrgolette (2); l'autre, en face des Arènes, appelée I'ustivie.Et, de même que le roi Charles le Chauve, en décorantla vile de Compiègne d'une magnifique église , avaitvoulu lui donner le nom de Carlopolis, ville de Charles (3),ainsi l'abbé Étienne voulut donner à la nouvelle ville quiS'élevait auprès du monastère de Saint-Martibl le nomde Step/uznopolis ou 'S'tenopolis, la ville d'Étienne maisla postérité n'a pas accepté ce titre ambitieux, pas plusqu'elle n'a ratifié, pour Compiègne, le nom de Cariopolis;

Guy ou Guigo, dixième abbé de Saint-Martial, était enmême temps abbé de Saint-Oybard d'Angoulême. Ladouzième année de son administration (986) , le roi

(1) Que veut dire CO mot Muneram? Nous n'avons vu jusqu'iciaucun écrivain qui aitt cherché à en deviner la signification,Comme les oeuvres d'orfàrerïe de cette époque étaient des 'ni-tations de l'art byzantin, ce doit être un 'net grec commel'icone nuira de Saint-Martial. Cr yurp; ou en grec,qui faitouà l'accusatif, veut dire UIihJUC. de

• seul. Ce mot veut dire unique ou non-pareille, c'est-à-dire1L'ayant pas sa semblable au monde

Si quid nosti melius bUs,Condidus imperti si non, his utere mecurn.

(2) Si l'on traduit scutarios par faiseurs de monnaie, cette tourdevait se trouver en face de la rue Vieille-Monnaie,

(3) Im punI Renie., ,ici ann. 871.

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Lothaire vint à Limoges, et lui ordonna de bâtir les mu-railles du Ch&leau, c'est-à-dire (le la ville nouvelle, diffé-rente de la ville ancienne, ou Cité. Ainsi ce sont deuxabbés de Saint-Martial , Étienne ét Guy, qui ont fortifiéet formé la ville actuelle de Limoges , dont le premier.noyau a été l'abbaye de Saint-Martial, comme ]a cathé-drale a été le noyau de la Cité.

Sous le même abbé, au mois de juin, avant la fête desaint Martial , un cierge mal éteint, et jeté au milieud'une multitude de cierges, occasionna l'incendie de lacrypte d'or (crypta aurez) de Saint-Martial. Les pierresprécieuses furent consumées par le feu. Mais, en quinzejours, Joshert, gardien du Sépulcre, fit une nouvellècrypte d'or, et l'orna de pierreries. Ce même artiste fitune image d'or S (iconc»2 aw-earn) de saint Martial j quiétait représenté assis sur un autel, bénissant le peuple deJa main droite, et, de lagauche, tenant le livre de l'Évan-gile. Ce mot grec icone trahit l'origine de l'art qui arendu si célèbres au moyen âge nos argentiers limou-sins.

Sous le xi° abbé, nommé Jeoffroy, eut lieu la pe'ste siconnue sous le nom' de mal des ardents, qui fit périr enAquitaine plus de quarante mille hommes (994). On saitcomment la contagion cessa après la procession solennellefaite à Mout-Jait'vy (1).

Ce moine-aitiste fit, avec l'image d'or de saint Martial(icozta aurca), une châsse d'or (loculum) ornée de pierre-

(1) Episcopi adujiati Lemovicas levavernllt corpus sanctiMnxtialis apostoli, et in montem Gaudit transtulerunt. (Pa.tro(og.,T. CXLI, col. 82, 83.) 11 ne faut donc pas écrire Mont -Jovis , mais31out—Jntvy, traduction exacte de Mons—Gcuidii.

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- 21 -ries, dans laquelle on porta le corps du saint apôtre.Il fit encore cieux croix d'or semées de pierres pré-cieuses.

Le xii' abbé, qui s'appelait aussi Jeoffroy, rebâtit avecmagnificence Ici du Sauveur (de Saint-)Iar-.Mal) (1011). C'était eiicore un habile orfèvre il suspenditdevant le sépulcre du saint une couronne d'or enrichie depierreries.

Le xnr abbé, nommé ilugues, eut à Paris ci ne codé-rence (1023) avec le roi Robert, Gauzlin , archevêque deBourges, et un grand nombre d'évêques et de docteurs duroyaume de France. On y traita la question de l'apostolatdc saint Martial, et il fut débidé, d'après des témoignagesanciens et trouvés chez des nations étrangères; que saintMartial devait être comme apôtre (1).

ARTICLE CINQUIÈME

Lettre sur l'Apostolat de saint Martial.

I. - La Lettre d'Adémar swr l'4postolat de saint Martial,qui se trouve parmi les manuscrits de la Bibliothèque*nationale (2), a été Publiée par Mabillon, en 1707, dansles Annales de l'ordre de Saint-Benoît (3), d'après lemanuscrit que lui avait communiqué le savant Balnze, etqu'il pensait être l'autographe même d'Adémar..

() Patrolog,, T. CXLI, col. 8384.(2) Fonds latin, e 5288.(3) Annal. Benedici., T. IV, appendix, flo 46 l'al rolog., T. CXLI,

col. 9-112.

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L'an 1028(1), et le 3août, qui était un dimanche, on tintà Limoges un concile où il fut décidé que saint Martial,étant du nombre des soixante-douze disciples désignéspar le Seigneur comme apôtres, et ayant reçu du Sauveurlui-même le pouvoir de prêchèr l'Évangile, devait êtreregardé comme apôtre (2). Le lendemain, Adémar Partitpour Angoulême. Mais, le jour même du concile, il avaiteu une altercation assez vive sur cette question de l'apos-tolat avec Benoît , prieur du monastère de Saint-Michelde Cluze en Piémont, qui se trouvait alors à Limoges.Benoît, s'étant rendu de Limoges au monastère de Bussière-Badil, près du Périgord (3), eut de fréquentes confé-rences sur ce sujet, notamment le 8 septembre, dans uneassemblée où se trouvaient deux moines d'&n'oulême,des moines de Brantôme et des prêtres du Limousin, quiétaient allés à Bussière k l'occasion de la fête de la Nati-vité de la Vierge. On rapporta à Adémar que Benoît deCluse s'était vanté d'avoir imposé silence à son adversairesur cette grave question. Adémar, piqué an vif, écrivitcette lettre, dans laquelle il rapporte fidèlement la discus-sion qu'il avait eue avec le prieur de Cluse.

(I) Telleest la date qu'on trouve dans le manuscrit: toutefoisles indications chronologiques renfermées clans cette lettre etdans d'autres documents désignent !'an 1029. (\oir LONG1IuvAL,an 1029.) Peut-être la dite hlxxvIII est-elle une faute de copistePour MXXVIIIÏ.

(2) Dissertation sur l'Apostolat 11e sain.? Martial, P. 39, note 3. -P. I3ONAVENT., T. J, p. 609.

(3) Mabillon a cru qu'il s'agissait de l3ussière-Poitevjnc, -cd Bu.reriensepagi plot avcnsis iflOflasterium (Minai., IiIj. LVI, n. 49);mais ]e voisinage de Brantôme et d'Angoulême désigne claire-ment llussière-Badil (aujourd'hui Dordogne).

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II. - Adémar adresse sa lettrek Jourdain , évêque de

Limoges; - k Odoiric , savant grammairien, abbé desmonastères de l'apôtre saint Martial; - à Raynaull, diacrede la cathédrale; à Albéric, et aux autres chanoines del'église de Saint-Étienne; - àAimeric; à Pierre, habilearchitecte; à Gérald , doyen ; à Adalaid,. et aux autresmoines de Saint-Martial; - àux grammairiens Engelrieet Théothard , son frère , et aux autres chanoines del'église du Puy; - au grammairien Werion, du monas-tère de Beaulieu - à Gérald, abbé du monastère deSaint-À-dgustin de Limoges, et .à toute sa congrégation;T Roger, prévôt du monastère de Sainte-Valérie deChambon; - à Gérald, homme très-savant, abbé de Soli-gnac, et à tous ses moines; - il .évêque deRhodez, et ail Théoderic, évêque de Metz.Apparemment plusieurs de ces personnages avaientassisté au concile de Limoges, et tous étaient en relationavec Adémar. Il adresse encore •sa dédicace à l'impéra-trice Cunégonde (1), k l'empereur Conon , à Guillaume,duc (l'Aquitaine, et au •pape Jean XJX, en ajoutant qu'iln'a pas eu l'honneur de voir, ces trois derniers person-nages, mais qu'il leur adresse son épître, afin iiue, si elletombe sous leurs yeux, ils en approuvent les conclusions.Il déclare s'adresser spécialement k l'évêque Jourdain, àl'abbé Odolrie, à Raynaud, diacre de la cathédrale, et àAimeric, moine de Saint-Martial.

111. - Écoutons Adémar lui-même rapporter dans leur -vrai jour ses débats avec Benoît de Cluse. - La discus-sion commerça k la cathédralé de Limoges, avant lamesse synodale qu'allait commencer l'évêque Jourdain.

(5) Sainte Cunégonde, veuve de lempereur saint l-Jean. . -

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benoît de Cluse soutenait que saint Martial n'était qu'unhomme apostolique Adémar prétendait que saint Martialest apôtre; comme étant du nombre des soixante-douzedisciples qui, d'après lui, sont appelés apôtres dans l'évan-gile de saint Lue. La cérémonie de la messe synodale etle tumulte de la foule , qui se pressait de toutes parts,forcèrent les deux adversaires d'interrompre la discussion.Le soir, quand on eut rapporté les reliques de saint Mar-.tial dans la bas j lique du Sauveur, après qu'on eut chantédans la basse églisè du Sépulcre les vêpres des apôtres,Adémar, apercevant'l3enoît au milieu de la foule, l'appelaau parloir durnonastère, où la discussion recommença.

Le matin, le prieur de Cluse avait affirmé que cetteopinion de l'apostolat était une invention récente, et ilavait mis son adversaire au défi de lui montrer ce titred'apôtre donné à saint Martial dans des livres anciens.Pour le convaincre, le moine Aimeric porta un très-vieuxvolume de k Vie de saint Martial, apôtre c'était lalégende écrite sous le nom d'Aurélien. Bendit prétenditque cette Vie était apocryphe; qu'elle avait été composée,depuis un siècle seulement, par quelque moine ami dumensonge; que l'ancienne Vie de saint Martial, perduedans un incendie du monastère , se bornait à dire quesaint Martial, converti à la prédication de saint Pierre,avait été envoyé par lui à la seule ville de Limogescomme Apollinaire à Ravenne, et Marc à Alexandrie.

Cependant, ajouta-t-il, comme ce livre est ancien, il aplus d'autorité que s'il était nouveau; car les anciennesautorités, quoique mensongères, ont plus de poids à nosyeux que les récentes, quoique vraies. » Adémar luirépondit que , longtemps avant l'incendie du monastère

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de Saint-Martial (952)2 avant même l'établissement dumonachisme dans cette église (848), cette Vie était répan-due dans toutes les povinces des Gaules, des Espagnes,de la Bretagne et de l'Italie, et qu'il croyait à cette Vie

comme aux quatre évangiles.Le moine Aimeric entra de nouveau, portant un vieux

bréviaire de Saint-Pierre-du-Sépulcre , et il montra àBenoît un répons d'une écriture fort ancienne « Il estillustre, Martial, l'apôtre de la Gaule, qui u fondé sonÉglise de telle sorte que, après avoir enduré beaucoup defatigués, toutefois mourant en paix, il laisse son Égliseen paix. » - e Ce répons est ancien, dit Benoît, et celaiqui l'a composé était savant. s - On montra encore auprieur de Cluse, dans le même volume, une vieille sé-quence écrite en caractères très—anciens « Les habitantsdu ciel regardent saint Martial comme leur collègue, ettoute l'Aquitaine l'honore comme son apôtre (1). s -Benoît dit alors e Je pense que ce n'est pas sans l'assen-timent de la volonté divine que saint Martial est prêchépar vous comme apôtre, puisque presque tout l'univers aappris cette prérogative par la voix de la renommée s.Adémar ajoute daims son compte-rendu « Je ne sais pasautre chose. Il était nuit, et nous nous séparémes. Jesoupai avec vous ô très-cher abbé (de Saint -Martial), et,comme le lendemain matin je voulaid partir pour Angou-lême, vous me permîtes de m'éloigner. Le lendemain ,-jene revis pas ce chien de Lombard. Si je l'avais connu pourco qu'il est, je serais resté un an b Limoges, jusqu'à ce

(1) Nous avons publié cette séquence, dapris trois manuscritsde la Bibliothèque nationale, dans nos Doekrncnis inédits surl'Apostolat de saint Martial, p. 50..

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que j'eusse brisé sa tête de serpent sous la verge de ma-raison. ' -

IV. - Un moine de Ravenne, nommé Bernard, habiledans l'art de la médecine, avait accompagné le prieur deCluse k Bussière-Badil. Il eut l'occasion de voir Adémar àAnouIêmè, et lui rapporta tes objections cJ.e Benoît coutrel'apostolat de saint Martial. « Quelle raison donnerai-je àmon abbé de Ravenne, lui demandait-il, pour lui montrerque saint Martial est apôtre? » - Adémar lui répondit« Il est apôtre, parce qu'il a été disciple du Seigneur, etqu'il a reçu de lui, comme Pierre, le pouvoir de lier et dedélier voilà la raison de soit apostolat s. - (( Mais, répli-qua Bernard, Benoît de Cluse prétend que la Vie de saintMartial reçue dans nos contrées n'est pas l'ancienneVie; qu'elle n'a été composée que depuis bu siècle. n -Adérnar nia cette assertion du moine de Ravenne, et luimontra par divers argurnehts que saint Martial méritaitle titre d'apôtre. Il ajoute à son argumentation quelquestraits digues d'être remarqués « Il y a plus de quinzeans (1012), dit-il, l'évêque de Limoges Gérald, étant deretour de Rome, nous attesta y avoir lu par hasard unvolume où il était écrit que saint Martial avait prêché lepremier k Ravenne en allant dans les Gaules (1), long-temps avant saint Apollinaire. Et, pour ce qui est de laVie de saint Martial, que Benoît prétend n'être pasancienne, écoutez comment, il y a plus de dix ans (1011),Donadeus, moine de Saint-Martial, assez peu instruit du

(1) Cette circonstance de la prédication de saint Martial kRavenne se trouve dans un documnt de la basilique romaine deSainte-Marie in via tata, que nous avons publié dans notre Disser-talion su l'Apoflola.t de saint Maniât , p. 01.

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reste, convainquit de mensongQ un grammairien étrangerqui voulait l'induire en erreur. Il conduisit ingénieuse-ment son homme dans la vieille basilique du Sauveur,qui menaçait ruine à cause de sa grande vétusté, et qui,depuis plus de sept ans (1020), a été rasée jusqu'au sol, etil lui demanda e Cette basilique est-elle ancienne? » -

Assurément, répondit le sot grammairien elle a plus decinq cents ans d'antiquité.» - Alors le moine, lui mon-trant des peintures presque effacées par le temps e Quereprésentent ces peintures? » ajouta-t-il. Son interlocu-teur, voyant saint Martial servant le Seigneur quand illavait les pieds aux apôtres, et d'autres peintures repré-sentant d'autres traits de la vie de saint Martial, se trouvahonteux et confus, et fut contraint d'avouer sa méprise,non sans prêter il à tous les assistants.

V. - Adéinar témoigne avec enthousiasme de sa foi àl'apostolat de saint Martial e Pour moi, si j'étais à cetteheure consumé par le feu de la foudre, je ne transgresse-rais pas les témoignages de nospères, et je m'écrierais

Martial, apôtre du Christ, sauvez-moi! » Quand bienmême le monastère tout entier de l'apôtre et la cité deLimoges seraient brûlés aujourd'hui par les flammesceux qui aiment saint Martial n'abandonneraient pas lavérité, et ils crieraient avec plus d'ardeur et de confiance« Seigneur, que nous soyons aidés par les prières de votren apôtre Martial I .....n

» Je l'atteste devant Dieu et le Christ Jésus, qui viendrajuger les vivants et les morts; je l'atteste par son avène-ment et son règne, je t'atteste devant l'Esprit-Saint, quia rempli le coeur des apôtres; - si tout à l'heure saintMartial m'apparaissait d'une manière visible, et s'il mefaisait cette question « Quedisent les hommes de moi?

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je lui répondrais sans hésitation , avec promptitude etconfiance « Les uns disent que vous êtes im homme• apostolique , les autres disent que vous êtes ïun des• évêques ou l'un des confesseurs ». - Et s'il daignaitm'interroger encore, et inc dire « Et mon abbé Odolric,' et nies moines, et mon évêque Jourdain, que disent-ils» que je suis? » - je lin répondrais sur-le-champ

L'apôtre de Dieu ! .....

» Pour moi, qui vis dans le Christ, - moi qui ne mour-rai pas, comme croyant en lui, - je monterai sur unehaute montagne, et, élevant ma voix avec force, j'annon-cerai à toute créature que, comme la vérité est en Jésus-Christ, ainsi (selon que l'atteste l'auteur de votre Vie),vous avez mérité de recevoir du Seigneur lui-même labénédiction pontificale avec les autres disciples! .....

» Ah! cet ébionite (1) lombard nous a menacés de nousaccuser auprès du pape de Rome ... il prétend quel'Aquitaine serait 'excommuniée à cause de vous 1... Quecet hérétique soit humilié dans ses filets!..: Que le Sei-gneur se lève, et que le Lombard ne prévalé pas 1... QuePierre tressaille en vous, son compagnon chéri d'apos-tolat ... Que le pape de Borne soit en communion avecl'Aquitaine, et qu'il ne l'excommunie pas!.....

Ici, emporté par sa fougue, Adémar va au-delà desbornes il fait'une sortie insolente et injurieuse contre leSaint-Siége; écoutons cette parole menaçante

« Mais si , par • hasard, les jugements des hommesn'étaient pas d'accord avec les jugements de Dieu, si l'oncroyait les ennemis de la vérité plutôt que ses amis...

() Les Ébionites ne regardaient pas saint Paul comme apôtre.

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D

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est-cc qu'un pape corruptible pourra être au-dessus dePierre, qui vous a communiqué, ô Martial, les préceptesdu Christ? Est-ce qu'un pape qui doit mourir pourravous excommuiïier, vous que le Christ, en s'élevant versson Père, a béni de sa propre main? Est-ce qu'un papequi doit être livré aux vers pourra excommunier le Fils deDieu, qui vous a donné, ainsi qu'aux autres apôtres, lascience de toutes les langues? Est-ce qu'un pape fragilepourra excommunier votre Aquitaine, que vous avez insti-tuée dohéritière du Christ polir la vie éternelle? Est-cequ'un pape - cendre et poussière - pourra excommunierl'Église de Dieu, que vous avez purifiée des idoles, et quevous avez toujours conservée exempte de toute hérésie?Est-ce qu'un pape qui doit devenir cadavre pourra empê-cher vos évêques (le prêcher votre apostolat, eux que vousprésenterez au Christ, avec toute la Gaule, comme lesgerbes de vos labeurs, pour être sauvés dans les grenierscélestes?

» C'est ainsi, je vous l'assure, que je parlerais à saintMartial, si je le voyais de mes yeux. Que si quelques bruteset quelques lâches disent que c'est un péché (lé le procla-mer apôtre..., je désire que ce péché reste sur moi main-tenant et dans l'éternité.....Je le déclare de nouveau,, enprésence de Dieu et de toute la cour céleste, si c'est unechose contraire à la gloire de Dieu, ou de saint Martial,ou des autres saints, de le proclamer apôtre, qu'à cetteheure même, qui est la sixième heure du jour, an momentoù j'écris, que je cesse de vivre 1 Que les deux messes que

• j'ai célébrées aujourd'hui , sixième jour de la semaine,en l'honneur de la sainte Croix, l'une volontairement,l'autre pour obéir à mon abbé Amalfred, que ces deux

- messes ne me servent de rien , mais qu'à l'instant où

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I.

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j'écris, rue trouvant seul dans l'église, je rende l'âme àl'instant même I... Le Christ est partout (1)1 »

Cette tirade, il faut l'avouer, ne manque pas d'élo-quence; mais à ces sentiments de conviction et de piétésincère se joignent malheureusement d'autres sentimentspeu conformes à la charité chrétienne. Voyons commentil tourne en ridicule la jactance et les vanteries du prieurde Cluse

O vénérables Pères, à qui j'écris cette lettre, écoutezles discours blasphématoires que ce Lombard tenait interpoczaa. Contrairement aux recommandations de l'apôtre,qui ordonne de manger son pain en silence (2), il disaitdans le réfectoire au lecteur de s'arrêter, et il parlait,non sur la lecture, mais sur l'apôtre Martial. Et, pendantle repos des frères, il tenait des discours tellement bouf-fons, - je le dis avec une immense amertume de coeur, -qu'il portait les frères de tout âge à rire et à rire auxéclats. Ses repas étaient des blasphêmes. Voici quelle étaitsa répétition de chaque jourMoi, je suis le neveu de» l'abbé de Cluse. Mon oncle m'a conduit en beaucoup

d'endroits; en Lombardie et en France, pour apprendrela grammaire ma science lui coûté déjà deux millesous qu'il a donnés à mes maîtres. Pendant neuf ans je

» me suis appliqué à la grammaire, et je suis encore sco-D lastique. Nous sommes neuf scolastiques qui apprenons

ensemble la grammaire, et je suis de beaucoup le plus» savant. J'ai deux grandes maisons pleines de livres, et» je ne les ai pas encore tous lits mais je les inédite

(I) J'atrolog., T. CXLT, col. 101-107.(2) lI ail Theskal., III, 12.

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chaque jour. Il n'y a pas sur toute la terre un livre queje ne possède. Quand je serai sorti de l'école, il n'y en

» aura pas un sous le ciel plus savant que moi. Je seraiaussi abbé de Cluse après la mort de mon oncle, car déjà

» je suis élu par tous et, sans les menées de quelques» mauvais moines pleins de rusticité et d'hypocrisie, il y a

longtemps que j'aurais été consacré abbé ..... .Ces sots» Limousins disent qu'en France on regarde saint Martial» comme apôtre, et qu'on met son nom dans les litanies» avant celui des martyrs c'est faux! J'ai habité plu-» sieurs années en France, et jamais je n'ai ouï dire que» son nom fût dans les litanies. La France ne sait rien

de lui elle ne sait s'il est apôtre, ou martyr, ou cou-» fesseur. On n'y fait aucune commémoraison de lui,» même au jour de son natalice. Jamais on n'aurait dû

penser à cela... En Aquitaine, il n'y â aucune science» ce sont tous des rustiques. Si quelqu'un en Aquitaine a

appris tant soit peu de grammaire, aussitôt il se regarde» comme un Virgile ... »

Adémar continue sur ce ton, mais nous ne pouvons toutciter.

Un autre moine de Saint-Jean-d'Angély, nommé Salgion,ayant dit que les évêques et les abbés de son pays s'in-quiétaient, et voulaient écrire au pape pour qu'il défendîtde donner ce titre à saint Martial,.Adémar, dont le 7èleintempérant ne connaissait plus de limites lui répondit« Si le pape, par le conseil des envieux, défend cela, ilvaut mieux obéir à Dieu qu'au pape romain ». - Salgioului ayant dit que les princes séculiets eux-mêmes blâ-maient cela, Adémhr répliqua: « Tous ceux qui ont en-tendu le Christ ou les apôtres n'ont pas reçu leur paroleli termine par ces mots empruntés à Térence : « Eu ce

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temps la flatterie fait des amis ; et la vérité engendre la.haine (1)

ARTICLE SIXIÉME.

Sermons d'Adémar.

Comme nous l'avons dit plus haut, d'après une notetirée d'un ancien hymnaire de Saint-Martial, Adémar,pendant qu'il était dans ce monastère, composa un grandnombre de sermons en l'honneur de l'apôtre de l'Aqui-taine (2).

Ces sermons sont pour la plupart inédits. Mabillon,dans ses Actes de l'ordre de Saint-Benoît , a publié unlong fragment d'un de 'ces sermons, qui fut prononcédans le synode de Limoges, et où l'on trouve un pompeuxéloge d'Abbon de Fleury, avec une citation d'une séquencecomposée par ce savant abbé en l'honneur de saint Mar-tial (3). Baluze, dans son Histoire de 2ulle, n publié aussitrois sermons d'Adéniar les deux premiers sont relatifsh la seconde translation des reliques de saint Martial, quieut lieu, en 994, à Montjauvy, à l'occasion de la peste desArdents; le troisième a pour objet la dédicace de l'église

(1) Andria, act. 1, scen. 1.(2) Seripsit multos sermones de sancto Martiale cûm esset in

Inonasterjo Saucti Martialis. (Voir ci-dessus, page 9, note 3.)(3) Acm s& Ordinis S, Bened., T. VIII, p. 34, n. 3 Patrojog,,

T. CXLI, col. 111. - Nous avons publié cette séquence d'Abhon deI?leurv dans nos Documents Médits SZ&r l'apostolat de saint Jta,'ttatP. 54.

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de Saint-Sauveur, c'est4tLdire de la basilique supérieuredu monastère de Saint-Martial (1). Le P. Bonaventure,dans les deux volumes in-folio qu'il a composés sur l'apos-tolat et la vie de saint Martial, a fait rie nombreux em-prunts aux sermons manuscrits d'Adérnar; mais cescitations, pour la plupart courtes et incomplètes, ne peu-vent servir à reconstituer un seul (le ces sermons.

Nous allons signaler les rares manuscrits qui les ren-ferment, en émettant le vu qu'ils soient publiés de nosjours.

1° Sc,,nons sur la Fête dé saint Martial.

* Dans le manuscrit 3785, fonds latin, de la Bibliothèquenationale, ou trouve sept sermons d'Adémar sur la fête

•de saint Martial (fol. 182-192).Ils portent le nom de leur auteur TIT. 70 /)ieta vene-

raôilis Ademctri in natali S. Martialis.En voici le titre spécial In ta(drsa,icti cc beatissiini

Aqwitanicai gentis pioteetoris et docto7is, Jlfartialis, disci.pzdi Christi.

C'est apparemment ce manuscrit que dom Rivet avaiten vue, lorsque, dans l'histoire littéraire de la 1i'ance,il signalait sept homélies manuscrites d'Adémar. (T. VIII,P. 507.)

Le ms. 5347 (xIIe siècle) renferme un sermon sur lafête de saint Martial, , qui commence par ces parolesLcjjimus Salomonem in edi/îcatione templi i'rosoliizi-tani, etc. Nous n'avons pas vérifié si c'est un sermon dé-.taché de la collection précédente.

(1) JHstor. Tutel., append., p. 285-400 Patrolog., T. CXLIcol. 115-124.

3

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Adémar, prenant pour base de ses assertions la légendede saint Martial, composée sous le nom d'Aurélien, pro-digue à l'apôtre de l'Aquitaine les éloges les plus magni-fiques. C'est un disciple de Jésus-Christ il suit le Sauveurdans ses prédications, et ne l'abandonne pas même à lamort (1) il assiste à la dernière Cène, où il figure commeun officier royal (2) e O élève du Christ, fortifié par lui,et nourri du pain des anges, qui est le pain de vie (3)! »

Condisciple de saint Pierre, son parent selon la chair, soufils par le baptême, il est délégué par lui pour prêcherdans les Gaules (4). Quoique l'iffi des soixante-douze, iln'a pas moins de mérite que les principaux apôtres (5).Il a été témoin de Jésns-Clu'ist depuis Jérusalem jusqu'àla mer occidentale (6). 11 a été établi prince dans l'Aqui-taine, comme saint Pierre en Italie et saint Thomas dansles Indes (7). L'Aquitaine, barbare, est devenue douce etobéissante à la voix de saint Martial (8). C'est à lui queremonte tout ce qu'j l y a de bien dans cette province (9).La principauté de saint Martial en Aquitaine a été établiesi solidement par Notre Seigneur Jésus-Christ que, pen-dant la vie de l'apôtre , comme après sa mort précieuse,elle n'a pu être abattue ni par les attaques du paganisme,ni par celles de l'hérésie, mais est sortie toujours triom-

(1) Sdrmo 1, apud. P. BoNAv. • T. U, p. 87.(2) Serin. 1, ap. Boyxv.,T. H, p. 91.(3) 5e»m, 3, Cl». BOA''., T. u, p. 111.(4) Serin. 2, al). B0NAv., T. 1, p. 505, 552; T. 11, p. 149.(5) Serin. 3,0». l3o yAv., T. I, p. 551.(6) gerni. G. ap. 13oxAv, T. I, p. 551; T.)1, P. 115, 494.r Serra. 5, n». J3ONAV.,T. 1, p. 550; T. 11, p. 157.(8) Serin. 4, 0». B0NAV., T. I, p. 504; T. II, p. 234.(9) Serin. 5. ap. BoNAv., TAI, p. 569.

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pliante de tous les assauts (1). Aprèsavoir souffert toutessortes de peines, saint Martial est mort en paix commel'apôtre saint Jean (2).

2° tin trcs Sen, nn. d'.4 tI,hna,.

Un précieux manuscrit de la Bibliothèque nationale, lems. 2469, ren.rerme presque toute la série des sermonsd 'Adémar

1 0 Sur la fête de saint Austriclinien (Sernw in natalesancti Aust'riclinia;ni, qzwd est idws octobris, /bi. 1-14')

2 Sur la fête de sainte Valérie (S'ermones in natalesanctœ Valeri, foi. 14h_25);

3" Sur la dédicace de l'église de Saint-Pièrre-du-Sépbl-cre, ou de l'église basse du monastère de Saint-Martial(Sermons: in dedicatione ecclesi(c Sancti Petri Lenovice,/01.25b_50a);

40 Sur la dédicace de l'église cathédrale de Saint-Étienne (Sermons: in dcdicztione S. Stepliani Lemovic'zsedis, fol. 501_60a)

50 Sur la translation et la chaire de saint Martial célé-brée le août (Sennonesin trgnsia4joae et cathedra S. Mar-litais, quod est II non. ang., fol. GO" -63)

60 Sur la première translation de saint Martial, célé-brée ]e 10 octobre (Sermones in translations primaS. Hart ialis, quod est VI idtss oct abris, fol. 64-75)

7° Sur la seconde translation de saint Martial, qu'oncélèbre le 12 novembre (ffomeliœ in Iran siatione S. Mar-litais secun%a, quod est pridie idns novembris, fol. 76-86;Lectio prima in octavis sancti Martialis de t'ranslatione

(1) Serm. 5, ap. }3oNAv.. T.1, P. 505; T. U, p. 150. 569, 656.(2) Scrm. 5, ap. B0XAV .,T.1I, p. 119, MO, 97.

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secundd, fol. 87-88°; - In transiatione beati Martialis,que Lothari te»zporiôus fa.cta est, fol. 881)

8° SUT la dédicace de l'église de Saint-Saveur b Limo-ges (basilique , supérieure du monastère de Saint-Martial),qu'on célèbre le 9 octobre (Sermones in dedicatione eccle-sia Domini Salvatoris apud Lemovican& ttrbern, quod est

G Xliii. hal. novembris, foi. 89-96);9 A la suite de ces sermons viennent les Actes, du

Concile de Limoges, de l'an 1031, qui terminent le volume(Conciliitm Lemovicense fol. 97-112).

Ce manuscrit, nobs écrit M. Michel Deprez, paraît êtredu xu° siècle. Le nom d'Adémar ne se trouve pas dans lecorps du manuscrit; on lit seulement sur le dos du volume: -Adhemari Caban. Sermones.

Il n'est pas douteux que tous ces sermons ne soientl'oeuvre du célèbre moine de Saint-Martial. Et d'abord,pour ce qui est des sermons de la première et de la secondetranslation, le P. Bonaventure dit qu'Adémar en est l'au-teur, et que son nom y était apposé dans le manuscritqu'il avait sous les yeux (1). Baluze a publié sous le nomd'Adémar non-seulement deux sermons de la secondetranslation, qui eut lieu en 994, mais encore un sermonsur la dédicace de l'église de Saint-Saueeitr. Le P. Bonn-venture reconnaît encore Adémar comme l'auteur dessermons sur la fdte de sainte Faune (2). Au reste, tous les

(1) « L'auteur des sermons de la translation de saint Martial(lequel doit être l'historien Aymar de Chabanez, le nom duquelest apposé k ces sermons , etc. » (P. BONAVENT., T. I, p. 465. Voirencore T. Il, P. 386.)

(2) « L'auteur du sermon 5e de sainte Valérie, qui est à monavis Aymar l'historien», etc. (P. BONAVENT., T. I, p. 548. Voirencore T. 1, p. 426.) -

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autres sermons qui figurent dans ce recueil, sur k ,féte desaint Austriclinie7v, nue k dédicace deSépulcre, surnue k dédibace de k eat/tddrale de 8aint-Étieie,sont écrits dans le même style, expriment les mêmesidées, respirent le même enthousiasme pour la gloire desaint Martial, en sorte que le savant Nadaud ne fait pasde difficulté de les attribuer tous au moine Adémar (1).Le titre Adeniari 8cr nwnes, qui se lit au dos du manus-crit 2469, les lui attribue tous sans distinction et mêmenous serions porté à croire que les Actes du Concile deLimoges, transcrits à la suite des semions rl'Adémar, ontété également rédigés par cet écrivain

Notons quelques particularités qu'on remarque dans lessermons de k translation, qui sont au nombre de seize,d'après le P. 13onaventure (T. I, p. 569).

Dans le deuxième sermon, Adémar dit que la prison oùsaint Martial fut renfermé, après avoir été flagellé parles prêtres des idoles, se trouvait près des anciennes mu-railles du temple de Jupiter Capitolin, là où l'on voitaujourd'hui, ajoute-t-il, l'église de Notre-Dame de laRègle (2). Il rappelle souvent cette tradition que la cathé-drale de Limoges était autrefois un temple païen quesaint Martial avait changé en église, et qu'ainsi e letemple de Jupiter était devenu k temple du Rédemp-teur (3) s.

(1) o Le style de ces sermons est le même on sera fondé, parceux que nous avons d'impr i més , 'n attribuer les manuscrits àAdéniar. » (NADAUD, Dissertat. tus, sur saint Martial, eh. Y)

(2) P. BONAVENT., T. II, p. 156, 231.(3) Serina 2. ap. B0NAVENT., T. II, p. 216. - In urbe Lemovica

de temple .Jovis factum est temjlum liedemptoris. (Serine S,B0NAv., T. II, p. 216, 222.) - (Sermon sur ta chaire de saint Martial,ap. BoNAv., T. II, p. 217.)

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• Dans le sermon cinquième. Aclmar parle d'une colonnequ'on voyait dans la bourgade d'Ahun, et où l'on disaitque saint Martial avait été attaché et flagellé par lespaïens (1). Cette colonne est dans une borne milliaire quiporte une inscription fort mutilée, où M. P. de Cessac alu le nom de l'empereur Gordien, consul pour la troisièmefois (n 240). Quelques savants ont cru trouver là unargument contre l'apostolat de saint Martial au premiersiècle (2). Mais, en supposant que cette borne milliaire nesoit pas cellé qui fut placée là du temps d'Auguste (3),et sur laquelle on écrivit plus tard le nom de Gordiencette tradition locale est sans importance. En effet lalégende d'Aurélien rapporte bien que saint Martial futflagellé à Àhun , mais ne dit pas un mot de cette colonne.C'est sans doute en similitude de la flagellation de NotreSeigneïir à la colonne que le vulgaire aura rattachéà cette borne le souvenir de la flagellation de saint Martialà Ahan. Ce n'est donc là qu'une tradition relativementrécente, dont la fausseté ne peut infirmer en rien la tra-dition immémoriale de la mission de saint Martial antemps de saint Pierre, tradition écrite avant Grégoire deTours clans des documents sincères et dignes de foi.

Le sixième sermon renferme (l'intéressants détails surla translation des reliques de saint Marial , qui fut faite,

(1) Ap. 13oAvENr., T. 11, p. 173, 253, 631.(2) P. nu CEssAc, Bulletin dota Société Archéologique du Limousin,

J. XIX. p, 41. - M. QUICHEIIAT, Société des Antiquaires de Franco,séance du juillet 1871.

(3) D'après Strabon (Lit. IV, P. 208), Agrippa, gendre d'Au-guste, fit construire quatre grandes voies , à partir de Lyonl'une allait dans l'Aquitaine et à Suintes; elle passait nécessai-rement par Clermont, Ahun et Limoges.

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en présence de Louis le Pieux, dans l'église de Saint-Sauveur, lorsqu'on dédia cette basilique, que ce princeavait bâtie depuis les fondements (1). On y lit encoreque , pour soustraire ces précieuses reliques à l'invasionnormande, on les transporta dans le château inexpu-gnable de Turenne, et plus tard à Solignac, oh ellesséjournèrent près de deux ans (2).

Dans le sermon septième, Adémar dit que saint Martial,en se rendant à Mortagne, s'arrêta à - Angoulême, qu'ilconvertit au Christ avec les villes et bourgades voisines,ainsi que l'attestent 1e écrits des anciens; il ajoute que',eu dehors des murs de cette cité , on voit, du côté del'orient, une très-ancienne église, que les premiers chré-tiens bâtirent en sou honneur après sa mort (3).

Il est dit, dans le sermon quinzième, que la colline oùfurent transportées les reliques de saint Martial, à l'occa-sion de la peste des Arde?Us, fut appelée Mont-Joie; MotU-.Jauvy (Mon-Gaudii), à cause de la joie immense quecausa dans toute l'Aquitaine la cessation du fléau; et que,S mémoire de ce miracle, on bâtit une église sur cettecolline (4). Voilà qui condamne absolument ces édiles deLimoges et ces écrisains d'annuaire qui s'obstinent,, endépit de l'histoire, à écrire Moné-Jovis, mont de .Tupiter,k cause d'un prétendu temple païen qui n'a jamais existéque dans leur imagination.

(1)P. Bc'NAvENr., T. I, P. 569 T. Il,(2) P. B0NAvENT., T. il, P. 638, 639.(3) P. IJ0NAVENT., T. Il, p. 289, 632.— Voir encore le sermon 2,

u». B0NAY., Tu, p. 289, 622. - Cette église n été reconstruiteen 1853, sous l'épiscopat de gr Cousseau.

(4) Et hue de causa gaudii, loco nomen imposituni est Mous-(jaudil et eeclesia nova ibi fiLeta cst • ut nulla oblivio hmmobhiterarct transiationem: (P. B0NAv.. T. II, p. 643.)

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Le premier sermon publié par Baluze, que le P. Bona-venture appelle le quatorzième de la tnnslatioi (1), ren-ferme un éloquent discours prononcé par Gombaud, arche-vêque de Bordeaux, devant le tombeau de saint Martial,à l'occasion de la peste des Ardents, en 994 « O pasteurde l'Aquitaine, vous qui l'avez éclairée des lumières de lafoi, levez-vous pour secourir votre peuple ... Ne permet-tez pas que ces tortures infernales règnent auprès de votrecorps sacré I O Martial, miroir des vertus, ô prince despontifes, où est donc ce que nous \isons de vous, que vousavez été le disciple de celui qui gurissait toute langueuret toute infirmité?... O gloire des évêques, honneur deséglises, où est donc ce que nous lisotis de vous, que vousavez été dans la Cène le ministre du Sauveur quand illavait les pieds à ses d'isciples?... Certainement la tradi-tion de nos anciens pères nous transmis que vous aviezreçu lé don des grâces avec les autres apôtres.....Necroyons-nous pas que notre ville épiscopale, la cité deBordeaux, a été par vous acquise à Jésus-Christ, etqu'une femme que vous aviez baptisée, imposant votrebâton pastoral sur le prince de la cité, l'a guéri d'unehorrible maladie?.,, 'Montrez-vous donc te disciple decelui qui est la source de la miséricorde . ! - Oui, j'enprends à 'témoin tous ceux qui m'écoutent, si, avant queje m'éloigne de cette ville, vous n'éteignez pas cette flammedévorante dans le corps de ceux qui sont ici si je ne vousvois pas guérir cette multitude , je ne croirai plus riendes choses admirables, qu'on dit de vous! Jamais plus je

(1) P. BONAVENT., T.1, P. 569; T. Il, P. 92, 291, 303. - Lesecond sermon publié par l3aluze est appelé par le P. Bonaven-ture le seizième (et dernier) sermon de la translation (T. IP. 625; T. li, P. 642).

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ne reviendrai dans cette cité pour implorer votre patro-nage! C'est en vain qu'on me dira que vous avez été ledisciple du Seigneur I c'est en vain qu'on me dira quevous avez été envoyé comme apôtre. aux nations de l'Occi-dent! c'est en vain qu'on me dira que vous avez baptisé lepeuple de Bordeaux, dont je suis l'évêque: je ne le croiraiplus si je n'obtiens pas la faveur que j'implore pour lesalut de cette multitude affligée! Et votre bâton pastoral,que l'on conservait jusqu'à présent dans ma ville épisco-pale comme un précieux trésor, cette relique sera vile âmes yeux si vous ne réjouissez pas mon coeur par la gué-rison de tous ces pauvres malades (1).

A la fin de ce sermon, ou voit que les décrets du conciletenu à Limoges en 994 furent envoyés an Saint-Siège deRome; le Souverain-Pontife, les accueillant avec bienveil-lance, les confirma par son autorité apostolique (2).

Nous n'indiquerons qu'en passant quelques particula-rités qu'on remarque dans les set'mous sur la fête de saintAustricliiiieit, d'abord le témoignage des Grecs enfaveur de l'apostolat de saint Martial (3) , ensuite lamention d'une église bâtie en l'honneur de l'apôtre del'Aquitaine, à Else, en Italie (4), c'est-à-dire -à Côlle di

(1) BALUZE, IIist Tutel., append., p. 386..—Pairotog., T. CXLI,col. 115. - Nous avons trouvé ce sermon d'Adémar dats unautre manuscrit de ]a Bibliothèque nationale, n°5341, fol. 180in oetav. Iransiat. (S. Martialis).

(2) Cujus concilii decreta antistiti Romanos sanetœ et aposto-1ice sedis miserant; quin idem Romanus papa gratanter susci-piens, auctoritate apostoliea roboravit. (Pa.trolog., T. CXLIcol. 111.)

(3) Sermo 3, ap. BONAVENT., T. 1, P. 570.(4) Sermo 2, ap. BONAVENT., T. Il, p. 149.

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- 42 -Val d'Elsa, en Toscane, où la tradition locale place larésurrection de saint Austriclinien; nous nous borneronsà signaler le passage suivant d'un sermon sur la Transia-lion de sainte Valéric.

Il y est dit que le château de ToulI, - cet oppidumgaulois qui se trouvait sur les limites du Limousin, et oùsaint Martial prêcha lEvangile en entrant dans notreprovince, - est à quatre lieues du monastère. - de Cham-bon (1) , ce qui désigne clairement 'la localité de Toul-Sainte-Croix (2) , et ruine les prétentions de la ville deTulle. Cette ville se croit désignée par le mot 2%lSn etse glorifie d'avoir été la première éva .ngelisée par saintMartial mais le nom de Tulle, au moyen âg, étaitTatela et non Tulium. D'ailleurs les 2'etlljstes n'ont en -faveur de leur prétendue tradition que des témoignagesrécents, c'est-à-dire deux écrivains du xvi' siècle, JeanChenu et Bertrand de la Tour (3) , copiés par La Selve etautres écrivains du Bas-Limousin.

30 Sermons synodaux.

Le P. Bonaventure, dans ses deux volumes sur l'Apos-tolat et la Vie de saint Martial, a emprunté de nombreusescitations aux Sermons synodaux, ainsi appelés parce qu'ils

(1) A Tullo castello quod quatuor minibus abest à monasterioCambonepsi in quo Tullo priinuin sanctus Martialis prdicareeœpit. (Ap. BONAVENT., T. II, P. 175, T. III, p. 49.)

(2) L'oppidum gaulois de Touli, aujourd'hui petite bourgade,avait trois enceintes concentriques. Voir dans les Recherches deM. flarailon (Paris, 1806) un article intéressant qui a pour titreRecherches sur les ruines et les no;,uments de la ,,Ulc celtique deTouli, P. 209-392.

(3) Voir ces témoignages dans le I'. Bonaventure, T. 11, P 174.

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furent prononcés ou composés à l'occasion du synode,c'est-à-dire du concile tenu à Limoges. Le docte Mabillon,qui a publié un long fragment de l'un de ces sermons,l'attribue au moine Adémar (I). Le P. Bonaventure nconjecturé que 1'auteur de ces sermons était l'évêque deLimoges sous lequel se tint ce concile , c'est-à-direJourdain de Laron, ou Hitler, son successeur (2) mais lesavant Nadaud a pensé, et avec raison, que ces sermons,comme les précédents, sont l'oeuvre du moine de Saint-Martial. « Tel est, dit-il, le caractère d'Âdémar pétulant,outré, furieux , même dans les sermons qu'il prêcha, ausynode ou concile de Limoges. - Je les ai transcritsajoute-t-il, sur un manuscrit très-curieux du XII 0 siècle,que M. de L'Epiue, de Limoges, n eu la bonté de mecommuniquer (3) o

M. de L'Epine, qui était au siècle dernier, secrétairegénéral de l'intendànce , possédait dans sa riche biblio-thèque un manuscrit du poème de Pierre le Scolastiqueet un autre des Bornions synodaux qui nous dira ce quesont devenus ces précieux manuscrits? Quant k la copieque Nadaud avait faite de ce dernier ouvrage, nous nel'avons jamais vue parmi les manuscrits du savant anti-quaire.

Toutefois,• comme le P. Bonaventure dit , en parlantdu livre des Bernions synodaux qui se trouvait à l'abbayede Saint-Martial , que ce manuscrit portait le'n° 144 (4)

(1)Ara SS. ord. S. BCnCd., T. VIII, p. 34, n°3 Patrolog., T. CXLI.col. 111.

(2) T. I, p. 287, 466. 617; - T. II, P. 48, 385.(3) DissertatiOn m.ç. sur saint Martial. chap. XI, sub fi.nenz.(4) P. B0NÀvENr., T. 1, P. 486, 617. -, Le P. Bonaventure n ré-

digé un catalogue des manuscrits de Saint-Martial, dont la

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Mrm

nous ne désespérons pas de le retrouver à la BibliothèqueNationale, où ont été transportés la plupart des manus-crits de la célèbre abbaye.

D'après divers renseignements glanés çà et là dans le•P. Bonaventure, ces serinons avaient pour titre Sermo-n,': in synocto habiU ils traitaient du symbole et dessacrements (1). Ce même auteur signale en particulier unsermon -sur le baptême (T. I, P. 505), un autre sur lesaint-chrème (T. J, p. 466), un aufre sur cet article dusymbole Ecclesiam catholicam (T. I, p. 505) , un autre,sur le symbole de saint Athanase (T. I, p. 466) , etc.

Nous avons compté dans les deux volumes du P. Bona-venture pins de soixante citations des Sermons synodcntz.Si nous en jugeons par ces extraits, ces sermons doiventêtre aussi d'Adémar en effet, c'est toujours le mêmestyle, ce sont les, mêmes idées, c'est le même enthou-'siasme pour l'apostolat et la gloire de saint Martial. Nousretrouvons là ce que nous lisons dans d'autres sermonsou d'autres ouvrages d'Adémar: par exemple, quand ildit, en parlant de la cathédrale de Limoges, que letemple des idoles avait été en un jour changé en église deJésus-Christ (2); quand il rappelle que saint Martial estappelé apôtre dans les litanies des Anglais (3); quand il

Bibliothèque Nationale possède plusieurs copies; me. latin 0363,f. 69,— 12863, f. 59, - 13069, f. Si. - Montfaucon a pub] té ce Ca-talogue, BibI. 11, 1033 h 1040. (LÉOPOLD DELi5LE, Cabinet desManuscrits, p. 305.)

(1) T. I, p. 617, 466, 506.(2)Ap. I30NAvENT., T. 11, p. 180. - Voir le sermon 2 sur la

Translation. (Ap. BONAVENT., T. II, p. 216.)(3) Ap. B0NAvENT., T. J, p. 2.37. - Voir le sermon sur la dédi-

cace de Saint-Sauveur Patrolog., T. CXLI, col. 122.

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parle des peintures murales de l'église de Saint-Sauveur,où saint Martial était représenté servant à la Cène (1), etc.

La mention, qui est faite dans ces sermons, de l'autelérigé en l'honneur de saint Martial par le Souverain-Pon-tife dans la basilique de Saint-Pierre, à Rome, vientconfirmer ce que dit à ce sujet le pape Jean XIX dans salettresur l'Apostolat (2).

Nous y voyons encore que la Cathédrale de Poitiersdédiée de tout temps à l'apôtre saint Pierre, avait étéconsacrée par saint Martial au commencement du chris-tianisme (3). Plus tard, Bernard Guidonis a amplifiécette tradition (4)..

ARTICLE SEPTIÈME.

Manuscrits d'Adémar:

La Bibliothèque Nationale possède quelques manuscritsd'Adémar.

1° Citons • en premier lieu le manuscrit 1121 (fondslatin). Dans un ouvrage publié en 1860, nous avons dit:

Ce manuscrit a été peint par Adémar, comme ou le voitaux feuilles 58, 60 et 70 (5) s. Et dans des notes prises àla Bibliothèque Nationale en 1855, nous ajoutions « Ce

(1) Ap. BONAVENT., T. J, p. 621. - Voir la Lettre sur l'apostolatde saint Martial Patroloy., T. cxLl, col. 102.

(2) Ap. B0NAvENV., T. I, p. 597. - Voir l'article que nous avons,publié sur cet autel de Saint—Martiaf à Rome dans la Semainereligieuse de Limoges, 1868, p. 119.

(3) Ap. B0NAVENT., T. li, p. 265.--(4) Ap. LABBE, Bibi, nova snss. lil,r., T. J, p. 629.(5) Documents inédits sur l'apostolat de saint Martial, p . 62.

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manuscrit renferme des tropes sur saint Martial , avecl'indication des séquences qui commencent par cesmotsVaide lumen, Co,vcelebrernws, Aime Vous, Aile sublimeAdest nempe ». I

M. Léopold Delisle, dans son savait ouvrage sur lesmanuscrits de la Bibliothèque Nationale, indique aussice manuscrit d'Adémar:

« Le ms., latin 1121; qui appartient k la même époque( Xi e siècle), paraît avoir été exécuté par deux moinesnommés Adéinar et Daniel. Cela résulte de ces trois sous-criptions

A dcrna,'ns rnonaclws sancti Mârtialis. (Fol. 58).4dcn,arus ,nonachus , .Dunihcl ,nonach us. (Fol. 60.)O Danicl in onaoh us prw incens doyn afr ChristiIn iniro bi libusq uc bonis tu sis A deni api.Pcrts'actans actis quihuncbibln,u , 'itcnotavit. (Fol. 72 y') (1). »

Ce même Daniel collaborateur d'Adémar est cité parlui dans sa .TÀUTC sur l'Apostolat de saint Martial (2).

20 M. Léopold Delisle ajoute « On cite encore un moineAdémar qui mourut à Jérusalem en 1034, et qui avait faitfaire une Vie de saint Martial en lettres d'or (3).

Le savant membre de l'Institut nous permettra de luifaire remarquer que ce moine Adémar est le même que le

(1) Le Cabinet des Manuscrits, p. 380.(2) Stephanus et Daniel monachi nie clamant. (Epistota de

.4postotatu S. Martialis Patroloçj., T. CXLI, col. 03.)(3) « Anno gratie 1034 obiit Ademarus monacus, qui jussit fieri

vitam sancti Marcialis cum litteris aureis, et in Jerusalem migravit ad Çhristum n. - Note de Bernard Ithier, publiée parM. Duplès-Agier. (Biblioth. de t'Ecole des chartes, 4' série, 1, 30),d'après le ms. latin 1338. - Lop . DELISLE.

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précédent c'est notre Adémar (le Chabannes; et nouspensons que cette Vie de saint Martial en lettres d'or estle manuscrit de la Bibliothèque Nationale 5296 Â.

Voici une note que nous écrivions en 1855 â propos dece manuscrit

«Ce manuscrit, que. le Catalogue dit avoir été peint auXe siècle (lvi. de Wailly hésite entre le r et le xI°), ren-ferme une vie de saint Martial , - la légende. d'Aurélien- dont les quatre premières pages sont écrites eh lettrestu nciales magnifiques. De semblables lettres sont seméesdans le corps de l'ouvrage. C'est peut-être l'exemplairequ'Adémar fit écrire en lettres d'or; il renferme la légended'Aurélien, et, au folio 35, l'lipitre de saint Martial auxBordelais. »-

Nous sommes heuretx de voir que M. Léopold Delislea fait lamême conjecture: ((Suivant une note du xix°siècle,Aimard fit un livre fleuri renfermant la vie de saintMartial (1). Serait-ce une allusion à notre manuscrit latin5296 A, qui contient la vie de saint Martial, et dont leslettres sont extrêmement fleuries (2) ?

3 0 Le même savant nous signale un autre manuscritd'Adéraar

« L'auteur du Catalogue des manuscrits de saint Mar-tial imprimé en 1130 dit qu'on lisait autrefois à la findu manuscrit 133 (aujourd'hui n° 2353 du fonds latin)cette souscription : « Adeywuirzts, indifiQius presôyter et

(1) « Scptinio idus augusti, Aimardus, iste fecit librum fier[idurnl, «bi est vit» sancti Marcialis». - J'ai relevé cette note aucommencement du ms. latin, 75222. - Lop, DELISLE.

(2) Le Cabinet des Manuscrits. p. 389.

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nwnczchns, apud Enyolis',rtam liôrum /twnc scripe L (1).- Malgré la différence d'orthographe, cet Adcymar esttoujours, comme Aimard le précédent, notre Adémar deChabannes, moine à Saint-Martial de Limoges et à Saint-Cybard d'Angoulême.

40 Nous trouvons l'indication suivante dans un ouvragedu docte Mabillon : « Adérfiar écrivit de sa propre mainl'Histoire des Pwitifes romains attribuée au pape Da-mase, et qui se termine au pontificat de Léon IV,, - dans

•un manuscrit sur parchemin du monastère de Saint-•Evroul, en tête duquel sont les vers acrostiches adressés à

Rohon, évêque d'Angoulême, que nous avons publiés à la• fin du tome troisième des Analecta (2).

50 A la suite de ces vers d'Adémar publiés dans les Ana-lecta, Mabillon a inséré cette note Il ne sera pas horsde propos d'ajouter ici le titre et la conclusion que lemême Adémar a mis sur un manuscrit sur parchemin de

•l'église de Saint-Martial, qui renferme les quatre livresd'Amalaire sur les divins offices... Voici la conclusionQwem librum in itoc corpbre transcribi curavit Adèmwrnsindignas mon-achus in ho,wrem Dei et sancti .Renedicti« Adérnar, moine indigne, a fait transcrire ce livre enl'honneur deD ieu et de saint Benoît (3). »

6° Un manuscrit de la Bibliothèque de Leyde, Nomn-clatnra univers&is, provient aussi de la Bibliothèqued'Adémar

(1) Le Cabinet dès Manuscrits, p. 389.(2) Idem sua manu exaravit historiam Itomanôrum pontificum

Damase adscriptam, et in Leone IV, desinentem in meinbraneocodico Uticensi, etc. (Annal. Benectict.,.lib. L!V, n. LIV, an. 1018.

(3) Analecta, nova edit., p.432 Patrotog,, T. CXLI, col. 113.(4) Voir ci—dessus, p. 11.

s

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Nous terminons ici cette Etude /tistorique et litdrairesur Adémar de Chabannes. On voit que cet écrivain peut.figureravec honneur parmi les plus illustres du Limousin.Père de notre histoire locale, il a eu le mérite de recueil-lir les faits les plus importants de cette histoire avant lexr siècle, et d'écrire d'une plume magistrale les événe-ments (le 50fl époque. Apologiste passionné de l'apostolatde saint Martial, s'il a péché quelquefois par excès dezèle et par défaut de critique, il s'est fait l'écho fidèled'anciennes traditions dont on chercherait vainementailleurs que dans ses ouvrages 'le dépôt précieux. Nousexprimons de nouveau le voeu que la Société Archéolo-gique du Limousin publie, sinon les oeuvres complètes, aumoins les oeuvres inédites d'Adéinar elle rendra par làun - service éminent à l'histoire littéraire de notre pro-vince.

L'abbé ARBELLOT.

(Extrait do .Eufletôt de la SocidU Archéologique et Historique duLirnousiti, T, XXII.)

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