Financement participatifUne nouvelle source de financement des projets des gestionnaires de réserves naturelles

Dans le contexte général de recherche de financements, certains projets des gestionnaires de réserves naturelles pourraient s'appuyer sur le crowdfunding ou collecte participative, nouveau type de financement alternatif et complémentaire aux autres formes plus classiques (subventions, parrainage, mécénat).

Réserves Naturelles de France a missionné L’Agence Nature pour réaliser un décryptage de la pratique et évaluer les possibilités offertes au réseau des Réserves naturelles.

Le principe du crowdfunding ou financement participatif

Le crowdfunding ou financement participatif est une méthode récente de financement de projets, s'appuyant sur les réseaux sociaux et les plateformes communautaires internet. Cette pratique permet à des porteurs de projet de lancer via internet des campagnes de collecte de dons auprès d’un réseau déjà constitué. Utilisée majoritairement par des particuliers pour le développement de projets personnels, les associations sont aussi utilisatrices de cette pratique.

Des plateformes internet communautaires offrent aujourd’hui des fonctionnalités en ligne, des outils de communication, un conseil personnalisé... qui permettent aux porteurs de projets de construire et présenter leur action, gérer leur campagne de collecte, communiquer avec leurs donateurs, toucher d’autres réseaux de donateurs, percevoir les fonds récoltés, rendre compte de leurs réalisations,... Ainsi, le lancement d’une campagne de collecte de dons se fait très simplement en ligne.

Les administrateurs des plateformes opèrent cependant une sélection des collectes présentées. Et sur l'ensemble des projets validés, près de 2 collectes sur 3 sont réussies.

Les services offerts par ces plateformes sont rémunérés par une commission perçue sur le montant de la collecte, variant selon des paliers et le type de paiement des donateurs (chèque, carte bancaire, Paypal). Cette commission représente au minium 5 % des sommes collectées pour le service de mise en relation entre les créateurs de projets et les internautes auxquelles s’ajoutent 3 % de frais bancaires pour les transactions sécurisée. Il s’agira donc d’inclure ces frais dans le montage financier du projet.

Le montant de la collecte est fixé par le porteur de projet et constitue un objectif à atteindre rédhibitoire. En cas d’objectif non atteint, les fonds sont restitués intégralement aux donateurs, sans contrepartie pour la plateforme de financement.

Budget moyen constaté

Le montant des budgets collectés est variable, librement fixé par le porteur de projet en fonction de ses besoins et de la capacité de financement de son réseau : de quelques dizaines, centaines à plusieurs centaines de milliers d’euros. Selon les gestionnaires de ces plateformes, le financement moyen s’établit entre 2500 et 3500 euros avec une moyenne de 50 à 70 donateurs par collecte.

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Une sélection d’acteurs en France

My Major Company (www.mymajorcompany.com) a été pionnier dans ce domaine autour d’un concept de label participatif de musique en 2007 ayant fait le succès de certains artistes, avant de séparer label de musique et plateforme internet de financement participatif. Plusieurs acteurs se sont depuis positionnés sur cette activité et propose aujourd’hui des plateformes web élaborée destinées au financement d’une grande variété de projets.

L’association Financement Participatif France (financeparticipative.org), association des professionnels du financement participatif, est née en 2012 et organisera les premières Assises de la finance participative le 30 septembre 2013 au Ministère des Finances.

Le positionnement thématique, la dimension de la plateforme (parfois très spécialisée, ou au contraire très internationale), sont des critères à appréhender pour choisir celle adaptée à la recherche de fonds pour les actions des réserves Naturelles et plus largement pour les projets sur le sujet de la nature.

Parmi les acteurs du financement participatif en France, deux acteurs apparaissent susceptibles d’accompagner des projets portés par les gestionnaires de réserves naturelles.

Ulule Née en octobre 2010, cette plateforme s’affiche comme le premier site de financement participatif européen. Elle annonce avoir aidé à financer plus de 2 800 projets dans des domaines aussi variés que la musique, les jeux, la solidarité, le sport, l’édition, les spectacles... Elle propose une large thématique dédiée à l’écologie, avec des projets très hétéroclites : à ce jour, 152 projets ont été financés.

Kisskissbankbank Créée en 2010 également, cette plateforme cumule à ce jour 4 131 projets financés pour un montant collecté de 7 840 333 euros. Les domaines proposés sont similaires à ceux d’Ulule et intègrent une rubrique écologie recensant 66 projets financés.

Ces deux plateformes apportent un conseil personnalisé gratuit dans la préparation de la campagne et le soutien à la mise en ligne et à l’animation de la collecte. Elles disposent de Foires Aux Questions en ligne très détaillées et régulièrement actualisées, les services proposées évoluant constamment.

FAQ Ulule http://fr.ulule.com/about/faq/

FAQ Kisskissbankbank http://www.kisskissbankbank.com/fr/pages/faq/basics

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fr.ulule.com

Une campagne de collecte limitée dans le temps

Les collectes sont limitées dans le temps et ne peuvent en général dépasser 90 jours. Il s’agit donc pour le porteur de projet de bien organiser le lancement de sa campagne de collecte au regard des dates de réalisation du projet, de la disponibilité des donateurs potentiels, des périodes propices à la campagne de communication...

Selon les gestionnaires de plateforme, une collecte bien préparée et ciblée doit réunir très rapidement 30 % de l’objectif à collecter. Une fois ce seuil passé, la plupart des collectes réussissent.

Une préparation minutieuse du projet

Il convient de préparer sa campagne de collecte en veillant à tous les aspects. Le montage du projet doit être précis et détaillé, comme pour toute demande de financement ou subvention classique. L’objet de l’utilisation des fonds doit être clairement identifié, notamment si la collecte complète un budget et une opération plus large.

Le projet fera l'objet d’une présentation sur la plateforme de collecte qui devra être très pédagogique et illustrée, tournée vers des donateurs potentiels pouvant s’inscrire au-delà du réseau affinitaire du porteur de projet. L’ajout d’actualités en ligne, la relance du réseau doivent permettre d’animer la campagne de collecte pendant toute sa durée.

La publication de photos de qualité, des vidéos créatives sur le projet, mettant en scène les porteurs du projet... pouvant séduire les internautes et inciter au relai de la collecte, sont des atouts. Sur Ulule, les projets accompagnés de vidéos obtiennent des taux de succès supérieur de 15 à 20 %.

Une personne ressource devra être dédiée au montage et suivi de la collecte, avant, pendant et après la campagne.

L’importance du réseau

Les plateformes web de financement participatif ne constituent pas une solution miracle pour les porteurs de projets mais servent de support à la collecte en lui permettant de développer son réseau : le principe de collecte repose essentiellement sur un appel à don du porteur du projet vers son propre réseau constituant un premier cercle de donateurs. Il est donc essentiel pour le porteur de projet de disposer d’un réseau identifié, de préférence sur le web (page facebook, carnet d’adresse courriels...).

Avec une campagne bien menée et un réseau clairement identifié, la plateforme internet permettra au porteur de projet de toucher son propre réseau (premier cercle), les réseaux de son réseau (second cercle) et le réseau propre à la plateforme de financement (troisième cercle).

Une communauté internet déjà existante apparaît donc comme une condition essentielle au lancement et à la réussite d’une campagne de collecte.

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Exemple de décompte sur Kisskissbankbank

Des contreparties pour les donateurs

Le principe des collectes repose sur une offre de contrepartie aux donateurs définie et fournie par le porteur de projets

En fonction de la nature du projet et de la plateforme, plusieurs types de contreparties sont proposées aux contributeurs financiers : services ou produits liés au projet (ex : invitations à des événements, entrées ou visites privées, exemplaires d'une production écrite, etc.). Si la nature du porteur de projet le permet, les contreparties peuvent donner lieu à des reçus fiscaux qu’il lui faudra délivrer et transmettre.

Les contreparties sont organisées par paliers financiers librement fixés par le porteur de projet et le nombre de donateurs par contrepartie peut-être contrôlé. Une moyenne de 4 paliers est préconisée, fréquemment de 10, 25, 50 et 100 euros. Bien sûr, il est possible d’en définir davantage ou de plus importantes et de proposer la possibilité au donateur de ne pas recevoir de contrepartie.

Les contreparties les plus basses prennent souvent la forme de documents numériques ou imprimés (autocollants, cartes postales, document .pdf de jeux ou édition, simple remerciement ou citation sur le site internet de l’association...).

A partir de 25 à 30 euros, les contreparties constatées sont plus élaborées : le Conservatoire des Espaces Naturels d’Auvergne propose une visite guidée du site acheté grâce à la collecte, la Fondation Nicolas Hulot offre des livres, certains dédicacés, et va jusqu’à proposer une rencontre privilégiée avec Nicolas Hulot pour une donation de plus de 1000 euros.

Il est donc déterminant de définir très précisément le contenu des contreparties en veillant à bien marquer les différences de paliers, intégrer leur coût et le coût de leur gestion dans le montage budgétaire du projet, garantir leur gestion et leur suivi tout en imaginant des contreparties séduisantes et créatives, notamment pour les paliers de contribution supérieurs à 50 euros

Un suivi des donateurs et un retour sur le projet

Une fois la collecte terminée, le porteur de projet devra fournir les contreparties promises. En plus de ces contreparties, des actualités et un suivi du projet sont une forme de remerciement auxquels il faut songer pour fédérer les donateurs et les solliciter ultérieurement pour un futur projet et une nouvelle collecte.

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Exemple de contreparties du WWF France sur Ulule

Des montages amont de partenariats

En plus de l’appel aux donateurs internautes, certaines collectes reposent sur des accords préalables avec des partenaires financiers. Un montage intéressant qui permet de dynamiser la collecte en multipliant ses fruits.

Par exemple, pour un projet d’application mobile sur les volcans d’Auvergne avec un objectif de collecte de 10 000 euros, des partenariats amont avec des acteurs de la région ont permis de rapidement atteindre l’objectif : la délégation régionale d’EDF Auvergne versait 10! par euro récolté (dans la limite de 1500!), Volvic doublant les mises (dans la limite de 1000 euros) et Planète Puy de Dôme, outil du Conseil général versant 10 ! par euro récolté (dans la limite de 4 000 euros).

Ce montage multi-parties peut être automatisé par les administrateurs de la plateforme et permet à la fois de rapidement multiplier les gains tout en valorisant les partenaires associés qui bénéficient ainsi d’une visibilité auprès des autres donateurs.

Des statuts particuliers au sein de la communauté des donateurs et soutiens

Appelé Official user sur Ulule ou Mentor sur Kisskissbankbank, il est offert à des entités qui soutiennent des projets la possibilité de créer un compte particulier sur ces plateformes. Cet espace web personnalisé permet de rassembler et soutenir une sélection de campagnes de collectes en les faisant connaître à son propre réseau communautaire, en y contribuant financièrement...

Ces acteurs sont sélectionnés par les administrateurs de la plateforme et sont aujourd’hui pour l’essentiel des médias, des entreprises... Ils soutiennent les projets qui correspondent à leur domaine d’action tout en valorisant leur présence auprès des porteurs de projets.

Une association comme Réserves Naturelles de France pourrait utiliser cette fonctionnalité pour rassembler les collectes de ses membres et leur donner ainsi plus de visibilité. La Ligue pour la Protection des Oiseaux a créé un compte Official user sur Ulule en juin 2013, sans l’avoir utilisé de manière active pour le moment.

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Exemple de soutien d’EDF sur Ulule

Quelle place pour les projets tournés vers la nature ?

A ce jour, les projets et acteurs sur le thème de la nature sont peu présents, difficilement visibles et intègrent une thématique générale dédiée à l’écologie rassemblant à la fois des projets tournés vers l'agriculture bio, la mode éthique, l'énergie, des voyages etc.

Parmi les besoins de financements de Réserves Naturelles de France et de ses membres, les projets ponctuels, les projets pédagogiques avec infrastructures ou équipement, la création d’outils pédagogiques, l’édition ou la production de documents sont à privilégier.

Les projets reposant principalement sur des frais de fonctionnement sont à éviter, les résultats étant difficilement perceptibles par les donateurs potentiels.

Parmi les rares projets en lien avec la nature sauvage, on trouve les exemples suivants :

- le WWF France a récolté :

- 12 715 euros (objectif de 7 000 euros) pour le financement de 4 mois de salaires, matériel et alimentation de 7 rangers surveillant les gorilles dans le Parc des Virunga en République Démocratique du Congo

- 10 523 euros (objectif de 8 000 euros) pour la mise en place de caméras de suivi et l’appui d’équipe de ranger dans le cadre d’un programme de préservation du tigre dans le Dawna Tenasserim en Thaïlande et à la frontière Birmane,

- le Conservatoire des Espaces Naturels d’Auvergne a réussi une collecte de 700 euros (objectif de 700 euros) pour la finalisation d’un achat foncier,

- l’association franco-congolaise Renatura a collecté 3 570 euros (objectif de 3465 euros) pour la construction d’une base de vie pour l’étude de tortues marines au Congo.

- la Fondation Nicolas Hulot qui vient de lancer une campagne de collecte de 5 000 euros (non terminée à cette date) pour le programme J’agis pour la nature.

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