Feu vert pour les réseaux de soins Brèves · hépato-gastro-entérologie, infectiologie,...

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FMC IMAGERIE SOCIO-PRO N° 87 / JANVIER 2014 Feu vert pour les réseaux de soins Brèves Les dix ans d’« ESPOIR » Cas clinique Best Of 2013 n Polyarthrite Rhumatoïde n Biothérapies La revue de la Fédération Française de Rhumatologie Le humatologue

Transcript of Feu vert pour les réseaux de soins Brèves · hépato-gastro-entérologie, infectiologie,...

FMC

IMAGERIE

SoCIo-PRo

N° 87 / jaNvier 2014

Feu vert pour les réseaux de soins

Brèves

Les dix ans d’« ESPoIR »

Cas clinique

Best of 2013n Polyarthrite Rhumatoïden Biothérapies

La revue de la Fédération Française de Rhumatologie

Lehumatologue

éd ItoR IAL

a tragi-comédie à laquelle nous assistons -et participons- à propos des menaces de déremboursement des traitements de fond de l’arthrose et des produits de visco-supplémentation illustre bien la déliquescence de la gestion de la santé, et surtout du

médicament, par nos pouvoirs publics. Après la grande comédie des génériques (comment arrive-t-on à faire avaler au bon peuple qu’une contrefaçon est identique à l’original, comment peut-on alléguer 45 milliards annuels d’économie quand tout un chacun constate des différences de prix de quelques centimes par boite, et pas toujours dans le sens qu’on voudrait nous faire croire ?), ça ne suffit plus, il faut s’attaquer carrément au remboursement des médicaments jugés les moins « utiles ». Malheureusement, c’est notre bon vieux rhumatisme qui a été pris dans le collimateur de ces grands spécialistes du handicap et de la qualité de vie. Première étape : diminuer le remboursement « sécu » en le portant de trente-cinq à quinze pour cent. Du coup, les mutuelles -des organismes caritatifs, comme le croient leurs adhérents- se sentent étranglées et passent leur part de prise en charge de soixante-cinq à zéro pour cent, ce qui ne doit pas leur faire économiser beaucoup… puisque leurs tarifs ont quand même augmenté. Deuxième étape : carrément dérembourser les produits en utilisant la bonne vieille méthode du tribunal d’exception : des commissions ad hoc composées de membres qui n’y connaissent rien, n’étant pas de la spécialité, mais qui savent très bien ce qu’on attend d’eux. Pour la forme, on récupère quelques études financées par les Laboratoires eux-mêmes -le plus souvent celles qui ont servi à octroyer la prise en charge !- et on les passe à la moulinette de la « méta-analyse » : un genre de guillotine, qui doit être bien réglée pour couper convenablement et au bon endroit, le « cut-off » (entendez : prouver scientifiquement qu’est inefficace ce qui a été prouvé scientifiquement efficace -ou inversement, d’ailleurs). On laisse plaider un minimum, et hop ! On a déjà connu ça sous la Terreur : pourquoi faire des frais d’avocat quand la charrette attend dehors, les chevaux piaffants d’impatience ? Sel de l’histoire, notre « visco »-Fouquier-Tinville se fait prendre en flagrant délit de conflit d’intérêt non déclaré. Malhonnête ? Que vous avez mauvais esprit ! Imprégné de l’importance de sa mission, il n’avait même pas pensé à un détail aussi trivial ! Il n’empêche que nos patients arthrosiques qui, étant incapables de lire politicorrectement les méta-analyses, se trouvaient fort bien de leurs traitements de fond et de leurs injections, auront du mal à avaler cette nouvelle pilule : vous avez cotisé « plein pot » pendant toute votre carrière et maintenant que vous avez besoin, ben non, c’est du confort et il faut le payer vous-mêmes sur votre fin de mois ; mais n’oubliez pas de continuer à cotiser, hein ! Quand on sait que naguère un Laboratoire pharmaceutique a été voué aux gémonies et crucifié dans les médias pendant des mois pour avoir prétendument -des années en arrière- usé de ses relations dans ce même genre de

L

LA GRAndE MASCARAdE

N° 87

Le RhumatologueRevue de la Fédération Française

de Rhumatologiewww.france-rhumato.fr

Directeur de la PublicationRenaud Samakh

Rédacteur en chefDr José Carbonnier

Coordination de la rédactionMaud Mazaniello

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Conseillers ScientifiquesPr Bernard Mazières, Pr Philippe Orcel,

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Dr Gilbert Guiraud, Dr Jean le Gallo Dr Yannick Hesbert, Dr Henri Lellouche,Dr Benoît Loze, Dr Jean-Jacques Mora, Dr Olivier Rossignol, Dr Hervé Zakarian

Comité de lecture Dr Daniel Chenebit, Dr Philippe Boyer, Dr Didier Jacques, Dr François Badois,

Dr Nicole Molinas, Dr Patrick Maury, Dr Michel de Bandt, Dr Françoise Gondouin,

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LE RHUMATOLOGUE 87 / jAnviER 2014

commissions pour y défendre ses produits, quand on voit qu’on lui fait maintenant payer ce crime en essayant par tous les moyens de « démolir » un de ses médicaments récents, quand on pense que nos gouvernants -aussi bien actuels que passés et probablement futurs- trouvent judicieux d’en profiter pour mettre la tête sous l’eau à toute l’industrie pharmaceutique, surtout celle qui cherche et qui produit, on a du mal à croire que cette façon de laver plus blanc que blanc pour de prétendues économies ou pour se principedeprécautionner n’est pas encore plus malhonnête que tout ce que l’on a pu reprocher au passé. Naturellement, chacun aura compris que, tout cela étant politique, l’honnêteté et la morale n’ont pas cours dans le débat : tout est calculette à euros et rapports de force. Aussi, les seuls qui seront peut-être entendus dans cette histoire, ce sont les électeurs, donc les patients floués par des communicants très habiles, mais qui ont cette fois poussé le bouchon un peu loin. Les rhumatologues l’ont bien compris, qui soutiennent de toute leur énergie la pétition des associations de patients opposées à ces nouvelles restrictions.

Encore un instant, Monsieur le bourreau !

jeanne du Barry du jenou-Quigrinsse

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GOD SAVE THE DATE !

Après la réussite du 13e Congrès de la Fédération Française de Rhumatologie

Le prochain congrès aura lieu les16 et 17 janvier 2015 à :

a l’hôtel Pullman, Paris Bercy a

Qu’on se le dise !

5industrie : dernières nouvelles

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La synergie de deux expertisesAmgen s’est associé à GlaxoSmithKline en juillet 2009 pour commer-cialiser ce nouveau traitement en Europe, en Australie, en Nouvelle-Zélande et au Mexique.

à propos de Prolia®

Amgen

Amgen utilise les ressources de la biologie pour découvrir, développer et assurer la production de médicaments innovants destinés à traiter des patients atteints de maladies graves. Pionnier des biotechnolo-gies médicales depuis 1980, Amgen est devenue la plus importante entreprise indépendante dans ce domaine, développe des médicaments prometteurs et continue de faire progresser la prise en charge des patients à travers le monde.

GlaxoSmithKline

Le laboratoire GlaxoSmithKline est l’un des acteurs majeurs de l’industrie pharmaceutique mondiale, avec un portefeuille riche en médicaments de prescription, vaccins, produits d’automédication et d’hygiène bucco-dentaire. Le laboratoire GlaxoSmithKline est présent dans plus de dix domaines thérapeutiques (neurologie, pneumologie, hépato-gastro-entérologie, infectiologie, diabète, vaccins…) et il investit en recherche dans d’autres domaines majeurs (oncologie, maladies cardiovasculaires, neurosciences, ostéoporose). n

Références

* D’après la Commission de la Transparence sont considérées comme patientes à risque élevé de fracture : • les patientes ayant fait une fracture par fragilité osseuse, • en l’absence de fracture, les femmes ayant une diminution importante de la densité osseuse (T score < -3) ou ayant un T score ≤ -2,5 associé à d’autres facteurs de risque de fracture en particulier, un âge > 60 ans, une corticothérapie systémique ancienne ou actuelle à une posologie ≥ 7,5 mg/jour d’équivalent prednisone, un indice de masse corporelle < 19 kg/m², un antécédent de fracture de l’extrémité du col du fémur chez un parent du premier degré (mère), une ménopause précoce (avant l’âge de 40 ans).1

** RANK : Récepteur Activateur du facteur Nucléaire-kB ; RANKL : RANK Ligand ; OPG : Ostéoprotégérine.

1- Avis de la Commission de la Transparence du 14 décembre 2011.

3- CHMP Assessment Report for Prolia®. Procedure No. EMEA/H/C/001120. 2010.

4- Baron R, Ferrari S, Russell RG. Denosumab and bisphosphonates: different mechanisms of action and effects. Bone 2011;48(4):677-92.

5- Miller PD, Bolognese MA, Lewiecki EM, et al. Effect of denosumab on bone density and turnover in postmenopausal women with low bone mass after long-term continued, discontinued, and restarting of therapy: a randomized blinded phase 2 clinical trial. Bone 2008;43(2):222-9.

6- Cummings SR, San Martin J, McClung MR, et al. Denosumab for prevention of fractures in postmenopausal women with osteoporosis. N England J Med 2009;361:756-65.

CoMMunIqué dE PRESSE dE AMGEn Et dE GLAxoSMIthKLInE

PRoLIA® (denosumab) : un nouveau médicament pour les femmes atteintes d’ostéoporose post-ménopausique

Prolia® réduit le risque de fractures avec une injection sous-cutanée tous les six mois

Prolia® (denosumab) est désormais disponible au remboursement en France dans le traitement de l’ostéoporose post-ménopausique chez les femmes à risque élevé de fractures, en relais des bisphosphonates1 *. Les patientes devront être préalablement traitées par bisphosphonates pendant au moins 3 mois consécutifs au cours de l’année précédant l’instauration de Prolia®.

Une innovation thérapeutique dans l’ostéoporose post-ménopausique

Prolia® est le fruit de plus de 15 années de recherche faisant suite à la découverte par Amgen d’un mécanisme de régulation du métabolisme osseux, la voie RANK/RANKL/OPG**.Cette innovation thérapeutique a fait l’objet d’un programme d’évaluation clinique d’ampleur inégalée dans le domaine de l’ostéoporose, avec 31 études ayant inclus plus de 13 000 patients dans le monde, toutes indications confondues, dont environ 11 000 femmes présentant une ostéoporose post-ménopausique ou une faible densité minérale osseuse3.Prolia® est la première thérapie ciblée qui inhibe la formation, la fonc-tion et la survie des ostéoclastes, les cellules responsables de la résorption osseuse. Ce traitement physiologique inhibe spécifiquement un médiateur essentiel de la résorption osseuse : le RANK ligand.Le denosumab ne s’incorpore pas dans la matrice osseuse4. Son action est réversible5.

Une efficacité anti-fracturaire confirmée

L’étude pivotale FREEDOM a confirmé l’efficacité de Prolia® à tous les sites du squelette étudiés en termes de réduction du risque fracturaire et d’augmentation de la densité minérale osseuse (DMO). Prolia® réduit le risque relatif de nouvelles fractures vertébrales de 68 % (p<0,001), de fracture de la hanche de 40 % (p = 0,04) et de fractures non verté-brales de 20 % (p = 0,01) à 36 mois (p<0,04)6.Les résultats de l’extension de l’étude pivotale FREEDOM confirment l’efficacité et la tolérance après 8 ans d’utilisation7.

Combattre efficacement une maladie « silencieuse »

Avec une efficacité prouvée et une injection sous-cutanée tous les 6 mois, Prolia® offre aux femmes atteintes d’ostéoporose post-ménopausique une nouvelle alternative aux traitements actuels. Suivant la recommanda-tion de la Commission de la Transparence1, Prolia® est un médicament de deuxième intention en relais des bisphosphonates. Le relais des bisphos-phonates est défini comme un traitement instauré chez des patientes préalablement traitées par bisphosphonates pendant au moins 3 mois consécutifs au cours de l’année précédant l’instauration de Prolia®. d

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Industrie

dernières nouvelles Michel Bodin

Informations Socio-Professionnelles

Feu vert pour les réseaux de soins : les « pigeons » promettent un printemps chaudCatherine Sanfourche

BrèvesCatherine Sanfourche

Formation Médicale Continue

les dix ans d’« esPoir » Michel de Bandt

Best of 2013Polyarthrite rhumatoïdeBiothérapies

Michel de Bandt

Le coin de l’imagerie

Cas clinique David Petrover

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Sommaire

LE RHUMATOLOGUE 87 / jAnviER 2014

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inForMAtions soCio-ProFessionnelles 7

LE RHUMATOLOGUE 87 / jAnviER 2014

une quinzaine d’organisations de profes-sionnels libéraux annoncent qu’elles mène-ront une « action d’envergure » à partir du 14 mars prochain, juste avant le premier

tour des élections municipales.

Le « collectif de mars », qui rassemble une quinzaine d’or-ganisations de professionnels libéraux de la santé (*) pro-met une mobilisation et des actions « d’envergure » pour protester contre la politique gouvernementale concernant les soins de ville à compter du 17 mars 2014. La date n’est pas anodine, puisqu’elle précède le premier tour de élec-tions municipales.

Lors de l’annonce à la presse de leurs intentions printanières, Jérôme Marty, le président de l’Union française pour une Mé-decine Libre (UFML) n’a pas pré-cisé quelle forme prendra l’ac-tion des contestataires, mais il a prévenu qu’elle sera « d’enver-gure, fédératrice et historique ». Il a indiqué que cela pour-rait aller du déconvention-nement à des départs de praticiens pour l’étranger. L’ins-tigateur du mouvement des « pigeons » de l’automne 2012 demande aux pouvoirs publics d’organiser des « états généraux de la santé » pilotés par les profession-nels de santé. Sans attendre la réponse, le collectif a déjà rédigé son cahier des doléances : la dénonciation de « l’étatisation annoncée du système sanitaire français », du « remplacement du système solidaire par un système iné-galitaire » et de l’absence de revalorisations tarifaires, le refus de la généralisation du tiers payant, de la mise en place de réseaux de soins mutualistes, du développement

d’officines d’enseignement privés comme l’ex-centre uni-versitaire Fernando Pessoa, et de « la mise sous tutelle » des régimes de retraite complémentaires des professions libérales. Les membres du collectif redoutent également une organisation en filière de soins, avec des « gatekee-pers » à l’anglaise. « Nous ne pouvons plus accepter que les professionnels de santé ne s’installent plus, que les déserts médicaux se multiplient, estime Jérôme Marty. Nous ne pou-vons plus accepter le burn-out et que parmi nous le taux de suicide soit 2,37 fois celui constaté dans la population géné-rale. On ne peut plus accepter les problèmes de gouver-nance à l’hôpital public et dans le secteur privé. On ne peut plus accepter ce massacre. » La FMF déplore que les tutelles « ne réagissent pas face à la désertification médicale » et au

constat de l’Ordre des médecins selon lequel « moins de 10 % des jeunes diplômés s’installent aujourd’hui en libéral ».

Il reste au « collectif de mars » à mobiliser suffisamment pour une action « d’envergure », pour que les « pigeons » fassent le printemps. En d’autres termes, la base imposera-t-elle l’unité des centrales ?

(*) Le collectif réunit l’Union Française pour une Médecine

libre (UFML), la FMF ; l’Union des chirurgiens de France (UCDF), la FHP-MCO, la Fédération des Syndicats Den-taires Libéraux (FSDL), l’Union des Radiologues de France (URF), le Syndicat Français des Allergologues (SYFAL), le Syndicat des biologistes praticiens (Bioprat), les « pigeons pharmaciens », les « pigeons dentistes », les Opticiens lune-tiers unis, le syndicat des masseurs-kinésithérapeutes Alizé, le Syndicat des Médecins d’Aix et Région ‘SMAER) et l’Asso-ciation Santé Environnement France (ASEF).

FEu vERt PouR LES RéSEAux dE SoInS :LES « PIGEonS » PRoMEttEnt un PRIntEMPS ChAud

Catherine Sanfourche, Paris

Docteur Jérôme Marty

inForMAtions soCio-ProFessionnelles8

LE RHUMATOLOGUE 87 / jAnviER 2014

La loi relative aux réseaux de soins mutualistes a été publiée au Journal Offi-ciel du 28 janvier 2014. Adoptée par les députés le 20 décembre dernier, malgré la forte opposition d’ne immense majo-rité des professionnels de santé libéraux, elle a été validée dans son intégralité par le Conseil constitutionnel. Ce texte per-met désormais aux mutuelles de moduler le taux de remboursement lorsque leurs affiliés consultent un professionnel de santé adhérent à leur réseau de soins. Ce dispositif concerne essentiellement les domaines des soins dentaires, de l’op-tique et de l’audioprothèse. La loi exclut toute modulation du remboursement pour les soins assurés par les médecins.

Patrick Errard, nouveau président du LEEM

Le directeur général d’Astellas France a été élu président du LEEM (Les Entre-prises du Médicament) par le conseil d’administration précédemment renou-velé. Il succède à Hervé Gisserot, appelé à diriger la filiale chinoise de Glaxo- SmithKline. Dans uen contribution diffusée à l’automne en vue de l’élection, le nouveau président souhaitait que le LEEM mène une réflexion sur la place de l’industrie pharmaceutique en tant qu’acteur de santé, « en développant notamment le thème de l’efficience médico-éconoique du médicament dans tous ses aspects » et lui fixait comme objectif d’être « une force de proposition dans les réformes structurelles indispen-sables à la pérennité de notre système de soins » afin d’échapper à une contribution disproportionnée aux mesures d’écono-mies mises en œuvre chaque année.

500 millions d’euros, le coût des « merce-naires » hospitaliers

Le rapport du député socialiste (Isère) Olivier Véran révèle que l’emploi temporaire à l’hôpital représenterait 500 millions d’euros de surcoût annuel pour les établissements et concernerait environ 6 000 médecins « mercenaires ». La conjugaison du manque d’attractivité financière de l’hôpital public, d’une « forte pénibilité » et de « tensions démographique » sont à l’origine de ce phénomène qui s’est accru ces dernières années. Il concerne surtout les hôpi-taux hors CHU et principalement trois spécialités, l’anesthésie, la radiologie et la médecine d’urgence. Alors qu’un PH gagne environ 260 euros nets par jour travaillé et 600 euros pour une garde de 24 heures, un praticien en mission tem-poraire en gagne 650 pour une journée de travail et 1 300 pour 24 heures de garde, indique Olivier Véran, dont le rapport révèle bien d’autres pratiques peu « catholiques » et formule 14 recomman-dations pour limiter ce phénomène qui pourrait inspirer une proposition de loi.

Le lent essor de la messagerie MSSanté

Mise en œuvre par l’ASIP-Santé avec le concours des ordres professionnels, la messagerie sécurisée MSSanté est en ordre de marche et fonctionne. Mais elle est loin de faire le plein et ne compte à ce jour guère plus de 2 500 inscrits (dont plus de 60 % de médecins). On est loin encore du million de professionnels de santé que l’ASIP Santé ambitionne de faire communiquer.

Muni de sa carte CPS, un profession-nel peut, en cinq ou six clics, créer son compte et son [email protected]. Il peut y accéder également depuis un smartphone ou une tablette.

Médicaments en grandes surfaces : niet ministériel

L’Autorité de la concurrence a rendu un avis dans lequel elle se dit favorable à une adaptation progressive et limités du secteur aux nouveaux modes de commer-cialisation et aux attentes des consom-mateurs en matière de prix et services. Marisol Touraine a réaffirmé à cette occasion « son attachement au monopole officinal sur les médicaments, qui permet de sécuriser leur dispensation et d’agir efficacement contre la contrefaçon ».

Nominations à la HAS

Le mandat de quatre membres du collège de la HAS arrivant à expiration, quatre nouvelles nominations ont été effectuées. Pour le Pr Jean-Michel Dubernard, il s’agit d’un renouvellement de mandat. Les trois nouveaux entrants sont Yvonnick Morice, directeur du CHU de Lille, le Pr Jacques Belghiti, chef du ser-vice de chirurgie et transplantation hépa-tique de l’hôpital Beaujon (Clichy, 92), et le Pr Loïc Guillevin, responsable du centre de référence des maladies systé-miques et auto-immunes et président du Comité d’Evaluation et de Diffusion des Innovations Technologiques (CEDIT).

Brèves Catherine Sanfourche, Paris

es journées des 24 et 25 septembre 2013 ont vu se rassembler à Paris tous ceux qui, en France, s’intéressent à la polyarthrite et ont participé à la belle aventure de la cohorte ESPoIR qui fêtait ses dix ans.

ESPoIR (Etude et Suivi des Polyarthrites Indifférenciées Récentes) est une cohorte Française qui inclut, analyse et suit des polyarthrites récentes afin d’en apprécier les caractéristiques.

Créée sous l’impulsion de B. Combe il y a 10 ans, la cohorte ESPoIR est rapidement devenue en raison de la qualité du travail fournit une référence internationale. Pour exemple, les données de la cohorte ont largement contribué à l’élaboration des critères 2010 de la PR et à valider les nouveaux critères de rémission.

L

LES dIx AnS d’« ESPoIR »Dr Michel de Bandt - Hôpital de Fort de France, Martinique

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L’objectif principal de « Espoir » est de constituer une cohorte multicen-trique française d’arthrites débutantes servant de base de données pour des études diagnostiques (détermination de la meilleure combinaison de tests pour porter le plus tôt possible le diagnostic de PR afin de permettre un traitement précoce), pronostiques (développer une capacité pronos-tique fine, pour permettre l’identification pertinente des sujets à risques), médico-économiques (pour connaître les coûts les plus précis possibles) et pathogéniques (la banque biologique permet l’étude du transcriptome, des projets génomiques ainsi qu’une variété d’autres projets pathogéniques). Les objectifs secondaires de la cohorte portent sur la surveillance des évé-nements rares des polyarthrites débutantes.

La SFR est le promoteur de cette étude à laquelle participent 16 centres cliniques, plus un centre biologique à Bichat, un centre radiologique à Brest et un centre de coordination à Montpellier. Le premier patient a été inclus en décembre 2002. La cohorte comporte 812 patients, inclus entre 2002 et 2005. Le suivi est bisannuel. À l’inclusion ces patients avaient en moyenne 48 ans. Il s’agit de 76 % de femmes, la maladie évoluait depuis 4,6 mois. À l’entrée, ils avaient en moyenne 7,2 articulations gonflées et une CRP moyenne de 20. Trente-huit virgule huit pourcent avaient des ACPA et 45,8 % des FR positifs. À deux ans 85,3 % ont une PR selon les critères ACR/EULAR.

Le partenariat actif de l’industrie pharmaceutique (MSD, Abbvie, Roche, Pfizer, Schering) permet de financer cette étude. À ce jour on compte près de 44 publications internationales provenant des données collectées et 90 projets en cours. Un site internet en accès libre est dédié à la cohorte (http://lacohorteespoir.fr/).

ESPOIR a permis de nombreuses publications qui donnent un « état des lieux » de la PR en France ; en voici un bref résumé.

Facteurs d’environnement L’analyse des facteurs d’environnement qui pourraient influencer la pro-gression de la maladie montre qu’à côté de la valeur initiale du score de Sharp, de la VS, de l’épitope partagé et de la présence d’ACPA, c’est la date de début des signes de la maladie qui corrèle le mieux avec le risque évolutif à 12 mois. Les patients dont le PR débute en automne et hiver détruisant plus que ceux qui débutent au printemps et en été. Par contre dans ESPOIR aucun lien n’est observé entre la présence de l’épitope par-tagé, le tabagisme et la présence d’ACPA d’une part et la progression de la maladie et le fait de continuer à fumer d’autre part, probablement parce que la cohorte est trop faible pour ce genre de travail et que l’analyse a été faite en « intra cohorte ».

Porphyromonas gingivalis est une bactérie associée aux parodontopathies (qui touchent 25 % de la population), elle possède une déïminase, capable de citrulliner les protéines et pourrait déclencher l’apparition d’anti-ACPA sur un terrain favorisant. Dans ESPOIR, la recherche d’anticorps dirigés contre la bactérie ne différait pas significativement selon le caractère éro-sif ou non et n’était pas corrélé au niveau d’activité, au titre d’anti-ACPA et au score de Sharp modifié. Par contre chez les non fumeurs les taux d’anticorps sont plus élevés et sont associés à la présence d’érosions.

Biomarqueurs

À l’entrée parmi les 812 patients, 38,8 % avaient des ACPA, 45,8 % des FR et 54,8 % avaient l’un ou l’autre marqueur. La sensibilité et la spécifi-cité des trois tests (anti-CCP2, anti-VCMmod et anti-hFibA) est identique (47 %) et il ne sert à rien de les associer. Par contre associer un test ACPA aux critères 1987 augmente considérablement leur sensibilité de 72,5 %

ForMAtion MédiCAle Continue

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ForMAtion MédiCAle Continue12

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à 79,5 %. On note que sur 213 patients FR IgM+ à 7 ans : 178 (83,6 %) étaient positifs à M0 et sur 205 patients ACPA (CCP2) + à 7 ans : 174 (83,6 %) étaient positifs à M0, il est donc utile de refaire le test si il est initialement négatif. D’autre part Un résultat d’ACPA positif est un argument biologique plus important que la CRP élevée pour influer sur la décision d’instituer un « DMARD » avec des HR respectifs de 1,71 (1,44 – 2,03 ; p < 0,001) pour les anti-CCP (absent contre présent) et de 1,28 (1,09 – 1,52 ; p=0,003) pour la CRP (>10 mg/l contre < 10 mg/l). En établissant des matrices à 3 variables (CRP, articulations gonflées et ACPA) prédisant le risque structural rapide à un an, pour un même niveau de CRP et un même nombre d’articulations gonflées, la présence d’ACPA augmente la probabilité d’avoir des érosions précoces (2 % à 64 %). La cohorte ESPOIR a contribué à inclure les ACPA dans les critères ACR/EULAR 2010 de PR.

A l’inclusion l’IL-6 sérique différencie les futures PR des arthrites inclas-sées et chez les patients n’ayant pas d’augmentation de la CRP, l’IL-6 est détectée chez 38,3 % des PR contre 17,5 % des arthrites indifférenciées, p=0,02. Le taux initial d’IL6 est associé avec la présence d’érosions pré-coces et la progression radiologique à 12 mois et 3 ans.

Il est montré une élévation des taux sériques de DKK-1 au cours de la PR. Ces taux corrèlent avec ceux des paramètres biologiques de l’inflammation mais aussi avec la présence de lésions structurales et reflètent l’activité de la maladie. Ils s’abaissent sous anti-TNF. DKK-1 est un facteur associé à la progression structurale à 2 ans indépendamment des anti-CCP et des érosions à la baseline.

Les taux sériques d’adipokines (leptine, adiponectine, visfatine) au cours des PR ont été étudiés en comparaison avec ceux des arthrites indifféren-ciées mais ne diffèrent pas significativement dans l’une et l’autre situa-tion. Dans la PR débutante, les taux sériques d’adiponectine représentent un facteur indépendant modestement associé à la progression structurale radiographique qui pourrait être utilisé comme marqueur prédictif.

ComorbiditéL’analyse des risque cardio vasculaire dans la cohorte montre qu’en dehors du tabac il n’y a pas de différence en terme de facteurs de risque traditionnels cardio-vasculaires entre les patients PR et ceux avec une arthrite indifféren-ciée. Certaines anomalies sont cependant observées en lien avec l’activité de la maladie : une diminution du cholestérol total ainsi que des LDL et HDL cholestérol (tous associées à la CRP et l’IL6) ; une majoration des chiffres de pression artérielle différentielle, associées à l’IL6 et une majoration du rapport TG/HDL en lien avec la CRP. Ces deux derniers marqueurs pouvant expliquer une part du sur risque cardio vasculaire des patients.

ImagerieLes critères de la PR mentionnent la présence de lésions typiques permet-tant de faire le diagnostic de la PR (dans l’arbre décisionnel)… Qu’est-ce qu’une lésion typique ? Il a fallu définir une image très spécifique quitte à perdre en sensibilité car il y a des voies alternatives pour faire le diagnostic. L’analyse de la cohorte montre que très peu de patients reçoivent un dia-

gnostic de PR uniquement par l’analyse radiologique mais que pour parler de PR il faut au moins 3 articulations avec au moins une érosion (rupture corticale) parmi les articulations suivantes IPP, MCP, poignets et MTP.

Quelle est l’utilité de la radiographie des avant-pieds de 3/4 pour détecter les érosions au sein d’une cohorte de rhumatismes inflammatoires débu-tants ? Parmi les patients érosifs de la cohorte (22 % à l’entrée, n=160) : 54 % (86/160) ont des érosions aux mains et 73 % (116/160) ont des érosions aux pieds dont 22/160 (14 %) uniquement visibles sur l’incidence des avant-pieds de face et 16/160 (10 %) uniquement visibles sur les pieds de ¾. Autrement dit ne pas faire un des 3 clichés exclu des patients érosifs dans la proportion de 28 % pour les mains, 14 % pour les pieds de face et 10 % pour les pieds de ¾.

Plus que la progression à un temps donné c’est la vitesse de progression qui importe (pente de la courbe). La progression rapide est définie par une progression du score de Sharp de plus de 5 points sur un an. L’analyse montre que si la majorité des patients ne progresse que peu ou pas, environ 25 % progressent rapidement la première année et ensuite environ 20 % progressent rapidement chaque année suivante.

La rémission Dans la cohorte, la rémission a été appréciée en utilisant les critères ACR-EULAR 2011 à savoir les Critères booléens (NAG28 et NAD28 ≤ 1, avis du patient ≤ 1 et CRP ≤ 1 mg/dl) et le SDAI (Simplified Disease Activity Index = avis patient + avis médecin + NAG28 + NAD28 + CRP ≤3,3). C’est le nombre de patients atteignant ce critère par tranche de 6 mois de suivi qui est analysé. Le travail montre que 39 % des patients sont en rémission et que la probabilité de rester en rémission 1 et 3 ans plus tard dépends de la valeur initiale du DAS (< 5,1), de l’âge (<50) et d’être non ménopausée.L’analyse échographique montre que les PR récentes ont moins de syno-vites en écho et moins de signaux doppler (respectivement 1,9 ± 0,5 et 0,5 ± 1,7) que les PR anciennes (respectivement 4,9 ± 3,3 et 3,0 ± 3,1). La rémission échographique (absence de synovite et de signal doppler) est plus fréquemment observée pour les PR récentes (43,7 %) que pour les PR établies (17,4 %). Le taux de rechute à 1 an est plus élevé (p=0,009) pour les patients avec une synovite et un signal doppler positif (47,1 %) que pour ceux avec une synovite/ et un signal doppler négatif (20 %).

Les plaintes du patient (Patients Reported outcome -PRo)La fatigue a un impact majeur sur les patients atteints d’arthrite débutante et est rapportée comme significative par 40 à 80 % des patients. Souvent décrite comme le symptôme le plus important. Elle est multifactorielle. A l’inclusion 22 % des patients ne rapportent aucune fatigue, 18 % une fatigue modérée et 60 % une fatigue marquée (EVA fatigue > 60 %). Le ni-veau de fatigue baisse légèrement à 6 mois puis reste stable, influencé par les caractéristiques sociodémographiques, les styles de vie (tabagisme), la présence d’un syndrome de Sjögren et les caractéristiques de la maladie. Il y a peu de facteurs prédictifs de l’évolution de la fatigue (entre autre l’amé-lioration de la dimension physique de l’Emir court). Les différents types de prise en charge de la PR n’influencent pas l’évolution de la fatigue.

Les critères rapportés par le patient ont un intérêt grandissant car ils re-flètent le point de vue du patient sur sa maladie et ses traitements. Les aspects les plus importants pour les patients sont la douleur, les capacités fonctionnelles, la fatigue, les troubles du sommeil, la vie professionnelle et sociale, la capacité à faire face et le bien-être psychologique. La va-leur ajoutée de ces données est mal connu mais pourrait être importante. La comparaison entre l’avis du médecin et du patient diverge sur la sévérité des symptômes par exemple. Si on utilise un critère de « quasi rémission » en utilisant les nouveaux critères dépourvus de l’avis global du patient on note ainsi que beaucoup plus de malades sont en rémission, l’avis du patient étant influencé par la douleur principalement. Mais l’étude de la cohorte ne montre pas de corrélation entre l’appréciation globale du patient à l’entrée et l’évolution radiographique ultérieur.

Prise en charge

Quel délai et mode de prise en charge rhumatologique initiale des poly-arthrites débutantes en France ? Selon l’EULAR les PR doivent être vues en rhumatologie dans les 6 semaines du début des signes et recevoir un traitement de fond s’ils sont à risque d’une forme grave. Dans ESPOIR le délai de prise en charge (PeC) par le généraliste est en moyenne de 26,3 ± 41,1 jours (médiane 15) et par le rhumatologue de 75,5 ± 76,5 (mé-diane 60) et 46 % des patients sont vus dans le délai EULAR (6 semaines).

Il n’y a pas d’association significative entre le délai de PeC et l’âge, le sexe, l’ethnie caucasienne ou non, le mode de vie, le niveau d’étude, la profession et le statut professionnel. La PeC est plus rapide si la maladie est explosive, fébrile. Le mode mono ou polyarticulaire ou l’importance du handicap (HAQ) n’influencent pas. Le délai de PeC dépends de la densité médicale, mais est plus rapide si le patient va voir directement le rhumatologue que s’il passe par le généraliste (médianes respectives de 40 et 60 jours).

À 12 mois 19 % de patients n’ont pas de traitement de fond, les autres ont reçu majoritairement du MTX (64 %) surtout en monothérapie, 6 % des patients reçoivent une association avec ou sans anti-TNF. La dose moyenne initiale de MTX est de 12,5 mg montée en moyenne à 15 mg à 6 mois. L’analyse des patients traités avant le troisième mois de leur maladie et ceux traités après le 6ème mois montre que la progression radiologique est significativement plus importante dans ceux traités « tardivement » avec respectivement OR 1,11 [0,95;1,27] et 1,59 [1,48;1,69] p<0,001 et leur DAS est significativement différent (3,58±0,08 vs 3,23±0,08, p=0,001). L’optimisation des doses de MTX ne concerne que 25 % des patients. Dans la PR débutante en pratique, cette optimisation est plus efficace en terme de rémission clinique et de stabilité fonctionnelle à 1 et 2 ans mais sans impact sur la progression radiographique.

Les données de ESPOIR confirment dans « la vraie vie » l’intérêt d’une intervention précoce. g

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PoLyARthRItE RhuMAtoïdE

Après un premier infarctus les patients souffrant de PR reçoivent-ils une prise en charge cardiologique adaptée ? une étude de cohorte nationale

Initiation and adherence to secondary prevention pharmacotherapy after myocardial infarction in patients with rheumatoid arthritis: a nationwide cohort.J Lindhardsen et coll. Ann Rheum Dis 2012;71:1496-1501.

La gravité cardiovasculaire de la PR tient-elle d’une “mauvaise“ prise en charge des patients après un premier épisode cardiaque ?Des auteurs danois ont tenté de répondre à cette question en iden-tifiant au travers du « Danish National Patient Register » entre 2002 et 2009 tous les patients hospitalisé au Danemark pour un premier épisode d’infarctus myocardique et analysé la prise en charge qui y est répertoriée.L’instauration d’un traitement préventif standard post infarctus (anti-agrégant c’est à dire aspirine, plavix, béta bloquant, hypo-cholestérolémiant, inhibiteurs du système rénine-angiotensine) a été appréciée après la sortie de l’hôpital (accès par le registre des dossiers pharmaceutiques individuels). L’adhérence thérapeutique a été évaluée par les registres des pharmacies, par la proportion de patients prenant leur médicament et la date du premier arrêt.Parmi un total de 66 107 infarctus qui ont quitté l’hôpital (37% de femmes), 877 ont été identifiés comme souffrant de PR (59% de femmes). 30 jours après la sortie, le fait d’être atteint de PR est significativement associé avec une faible probabilité de recevoir de l’aspirine (OR 0,80 IC95% 0,67–0,96), des b-bloqueurs (0,77 IC95% 0,65–0,92) et des statines (0,69 IC95% 0,58–0,82), alors que l’initiation des inhibiteurs du système rénine-angiotensine et du plavix n’étaient pas modifié. Ces résultats demeurent inchangés

180 jours plus tard, ne sont pas modifiés de manière significative à cette date, et sont validés par les analyses en régression de COX.L’adhérence aux statines est plus faible que chez les patients PR que chez les non PR, mais pas pour les autres drogues.

En conclusion dans cette étude de vaste ampleur, on observe une franche réduction de la mise en application des stratégies de pré-vention secondaires après un premier infarctus chez les patients PR par rapport au reste de la population. Cette pratique est proba-blement néfaste pour les patients, majore la mortalité cardiovascu-laire et demande à être explorée pour en comprendre les motifs. n

La fréquence de l’athérome infra clinique identique dans la PR et le diabète !

Subclinical femoral atheromatosis in rheumatoid arthritis: compa-rable prevalence to diabetes mellitus in a case-control study.A Protogerou et coll.Ann Rheum Dis 2012;71:1534-1536.

La PR est associée avec une augmentation des atteintes corona-riennes et carotidiennes athéromateuses dont la fréquence est estimée identique à celle des patients diabétiques. Les auteurs ont donc comparé la fréquence des plaques athéromateuses fémorales chez des sujets diabétiques et des PR (sans diabète).La recherche de plaques fémorales a été faite chez 30 PR jeunes (17 hommes, âge moyen 43,0±12, durée moyenne de la PR 9,9±7,1 ans) et 60 PR plus âgées (27 hommes, âge moyen 63,0±7,1, durée moyenne de la PR 11,4±7,9 ans). Ces patients ont été appa-riés (1:1) pour l’âge, le sexe et la durée de leur affection avec des diabétiques de type I et II. Tous ces patients étaient asymptoma-tiques sur le plan vasculaire et coronarien.

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BESt oF 2013Dr Michel de Bandt - Hôpital de Fort de France, Martinique

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Le nombre de plaques fémorales par patient, dans le groupe PR et dans le groupe diabète entier est identique, respectivement (0,64±0,82 vs 0,77±0, p=0,340) ; et ce chiffre est aussi iden-tique en analysant les sous-groupes de diabètes (PR vs DID et PR vs DNID). A noter qu’une hypertension artérielle et une dyslipidé-mie sont plus souvent observées dans le groupe diabète.

En conclusion une maladie athéromateuse fémorale est aussi fré-quente dans la PR qu’au cours du diabète. Ce risque doit être éva-lué prospectivement pour chaque patient. n

L’hypothyroïdie, un facteur de risque cardiovasculaire au cours des RIC ?

Coexistence of hypothyroidism with inflammatory arthritis is asso-ciated with cardiovascular disease in women.Ann Rheum Dis. 2012 Jul;71(7):1216-8.H G Raterman et coll.

Une hypothyroïdie se rencontre de façon non exceptionnelle au cours des Rhumatismes Inflammatoires Chroniques, mais les don-nées concernant cette association sont réduites. En termes de complication cardiovasculaire cette association peut avoir des conséquences car ces deux affections sont associées avec une majoration du risque cardio. Afin de préciser la fréquence de cette association et son impact en termes de risque cardiovasculaire, les données du registre hollandais « Netherlands Information Network of General Practice » regroupant les données de 360 000 patients ont été utilisées.La prévalence de l’hypothyroïdie a été calculée et les analyses en régression logistiques multiples ont calculé la prévalence du risque cardiovasculaire.La prévalence de l’hypothyroïdie est de 6,5 % chez les femmes avec une polyarthrite contre 3,9 % chez les contrôles (p<0,001). La prévalence des affections cardiovasculaires est de 4,3 % chez les patients hypothyroïdiens, de 5,9 % chez les polyarthritiques et 14,3 % chez les polyarthritiques hypothyroïdiens contre 2,1 % chez les contrôles.La prévalence ajustée des risques cardiovasculaires est de 1,2 (IC95% 0,99-1,4) pour l’hypothyroïdie, de 1,5 (IC95% 1,1-2,0) pour les polyarthrites et de 3,7 (IC95% 1,7-8,0) pour les polyarth-rites hypothyroïdiennes, par comparaison avec les contrôles.

Ces données sont importantes en démontrant la fréquence de cette association et son impact sur le risque cardiovasculaire. La recherche et la correction d’une hypothyroïdie doivent donc dorénavant faire partie du bilan cardiovasculaire systématique des rhumatismes inflammatoires chroniques. n

Risque cardiovasculaire au cours de la PR, une méta analyse

Risk of incident cardiovascular events in patients with rheumatoid arthritis: a meta-analysis of observational studies.J A Avina-Zubieta et coll.Ann Rheum Dis 2012;71:1524-1529.

Nous l’avons tous entendu dire, les PR ont un sur risque cardiovas-culaire ! Mais quelle est la magnitude précise de ce risque. Pour le déterminer, une méta-analyse de toutes les études observation-nelles appréciant l’incidence d’une affection cardiovasculaire chez des PR par rapport à la population générale est présentée.Les auteurs ont analysé les bases de données Medline, Cochrane, Embase, LILACs depuis leur création jusqu’en juin 2011 à la re-cherche d’études observationnelles :1) chez des patients obéissant à des critères pré définis de PR,2) étudiant l’incidence de manifestations pré définies fatales ou non fatales (infarctus du myocarde, accident cérébro vasculaire, insuffisance cardiaque congestive),3) avec un groupe comparateur,4) avec une estimation du risque relatif à l’intervalle de confiance de 95 %.Quatorze études englobant 41 490 patients répondaient aux cri-tères de sélection et ont été poolées. Le risque relatif global d’un accident cardiovasculaire incident dans cette population est de 1,48 (IC95% 1,36-1,62). Le risque d’infarctus myocardique et d’AVC est majoré respectivement de 68% (RR 1,68 IC95% 1,4-2,03) et de 41 % (RR 1,41, IC95% 1,14-1,74). Le risque d’insuf-fisance cardiaque congestive est apprécié dans une seule étude et est de 87 % (RR 1,87 IC95% 1,47-2,39).Une hétérogénéité significative est observée entre les études. L’analyse en sous-groupe montre que le seul groupe de patient ou le risque CV est réduit est celui des cohortes de PR récentes (RR 1,12 IC95% CI 0,97-1,65) probablement par une meilleure prise en charge thérapeutique.

En conclusion, les données publiées montrent que la majoration du risque cardiovasculaire des PR est de 48 % ce qui est considé-rable. n

La dMo peut-elle identifier les patients souffrant de PR à risque élevé de lésion structurale ?

Does digital X-ray radiogrammetry have a role in identifying patients at increased risk for joint destruction in early rheumatoid arthritis?Kristina Forslind and Barfot Study Group.Arthritis Research & Therapy 2012,14: R219 doi:10.1186/ar4058.

Le but de cette étude est d’apprécier l’intérêt de la mesure de la densitométrie minérale osseuse de la main, dans la polyarthrite rhumatoïde débutante, comme élément prédictif de la progression de futures lésions et dégâts articulaires. La densitométrie minérale osseuse de la main a été mesurée à l’in-clusion et un an plus tard chez 379 patients souffrant de polyarth-rite rhumatoïde précoce.

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La technique d’analyse comportait la mesure de la plus petite varia-tion détectable d’une part et d’autre part une analyse par tertiles. Les lésions radiographiques articulaires des mains et des pieds ont été analysées en utilisant le score de Sharp à l’inclusion puis à 1, 2, 5 et huit ans. Aux mêmes périodes la mesure de l’activité de la maladie en utilisant le score DAS 28 a été faite et une étude des capacités fonctionnelles des patients appréciée par le score HAQ. La mesure des facteurs rhumatoïde et des anticorps anti-CCP a été réalisée à l’inclusion. Deux tiers des patients, quelque soit la méthode d’analyse utili-sée, au cours de la première année de la polyarthrite rhumatoïde, ont une perte minérale osseuse à la main. La progression radiogra-phique après 2, 5 et 8 ans est associée avec la présence initiale d’une déminéralisation osseuse de la main appréciée en densitomé-trie. Par l’étude des tertiles il existe une association significative à tous les temps de l’analyse entre perte osseuse et lésions structu-relles. La variation de la densitométrie à un an corrèle significative-ment et inversement avec la progression du score de Sharp après 2, 5 et huit ans. L’analyse multi-variée montre que seuls la variation du score de SHARP et la présence des anti-CCP prédisent de façon indépen-dante la survenue des lésions ultérieures. Cependant, si on n’utilise pas de score radiologique, la densité minérale osseuse de la main prédit de façon indépendante les lésions à venir.

Cependant ni la perte osseuse en densitométrie ni les tertiles de variation de densitométrie osseuse ne sont un facteur indépendant de prédiction de la rémission après 2, 5 et 8 ans de maladies.

Cette étude confirme donc une association entre une réduction de la densité minérale osseuse de la main mesurée durant la pre-mière année d’une maladie rhumatoïde et la progression ultérieure des lésions radiographiques sur une période de temps déterminé. Cette association est indépendante dans un modèle de régression uniquement si l’on n’utilise pas le score radiographique. Cependant des études ultérieures sont nécessaires pour établir définitivement l’intérêt de cette association en pratique clinique. n

L’inhibition de l’IL-6 permet la cicatrisation des lé-sions structurales de la PR

Interleukin-6 receptor blockade induces limited repair of bone ero-sions in rheumatoid arthritis: a micro CT study.S Finzel et coll.Ann Rheum Dis 2013;72:396-400.

Inhiber la voie de l’IL6 améliore les signes et symptômes de la PR et retarde les lésions radiologiques. On ne sait pas clairement cepen-dant si cette stratégie permet une cicatrisation et une réparation des lésions osseuses, comme cela a été suggéré.Le présent travail analyse les lésions osseuses, au niveau des MCP de 20 patients traités par Tocilizumab, avec des techniques de mi-cro scanner. Les dimensions maximales en largeur et en profondeur des lésions de PR au niveau de ces articulations ont été mesurées avant et après 1 an de traitement par TCZ. Un total de 133 lésions a été identifié à l’inclusion avec une largeur moyenne de 2,23

± 1,26 mm et une profondeur moyenne de 2,16 ± 1,50 mm. Les lésions sont le plus souvent notées sur le second métacarpien que sur les troisièmes ou le quatrième, sur les têtes des phalanges plutôt que sur les bases et sur le bord radial que sur le bord cubital.La réparation des lésions sous TCZ est observée uniquement sur les lésions qui sont éteintes, c’est-à-dire qui présentent un aspect sclérotique et condensé à l’inclusion et sur les lésions dont la lar-geur est de plus de 1,6 mm. La réduction moyenne en largeur des lésions sclérotiques est de 0,20±0,08 mm (p=0,019) après un an de traitement.

La stratégie de blocage de l’IL6 par le TCZ est donc bien capable de corriger certaines lésions osseuses de la PR, surtout celles qui sont larges et condensées. Ceci démontre un intérêt supplémentaire de cette approche thérapeutique. Il reste à préciser l’avenir définitif de ces lésions, vont-elles évoluer vers une restitution « ad integrum » et si oui en combien de temps ? n

transmission parentale de la PR ou du lupus aux en-fants : le sexe importe-t-il ?

Parental history of lupus and rheumatoid arthritis and risk in offs-pring in a nationwide cohort study: does sex matter?E C Somers et coll.Ann Rheum Dis 2013;72:525-529.

Les maladies inflammatoires chroniques des articulations telles la PR et le lupus sont caractérisées par une très forte représentation féminine parmi les patients. Le chromosome X est-il responsable de cette représentation ?

Une équipe danoise a donc apprécié prospectivement le risque familial des PR, des arthrites juvéniles et des lupus dans la po-pulation générale afin de déterminer si le mode de transmission diffère en fonction du sexe des parents ou du sexe des enfants et tente ainsi d’estimer le poids du rôle du chromosome X dans cette transmission.

Une cohorte issue de la population générale danoise a donc été constituée entre 1977 et 2010. Elle est composé de triplets c’est à dire des deux parents et de l’enfant (une famille de 3 enfants forme donc 3 triplets pour l’analyse). L’incidence des maladies était appréciée chez les enfants et une analyse en régression était effectuée pour déterminer le risque spécifique de transmission de la maladie en fonction du sexe du parent atteint. Le travail est colossal en nombre de patients et en durée.La cohorte comporte 3 513 817 triplets observés sur 30 ans. On identifie dans cette population 1258 cas de lupus (1095 filles et 163 garçons) et 9118 cas de PR (6086 filles et 3032 garçons). Parmi les filles le risque de lupus est identique si l’on regarde les antécédents maternels et paternels (Hazard Ratio respectifs de 14,1 et de 14,5, p=ns). De même chez les garçons le risque de lupus est similaire si l’on regarde les antécédents maternels et pa-ternels (p=ns). Pour la polyarthrite tous les risques estimés sont identiques quelque soit le sexe de l’enfant ou le sexe du parent atteint (HR 2,6–2,9; p=ns).

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Cet énorme travail extrêmement long et minutieux apporte donc définitivement une solution à une question à laquelle personne ne savait répondre. Il quantifie le risque familial de PR et de lupus et démontre que pour les deux maladies la transmission est iden-tique -chez les garçons et les filles- quel que soit le sexe du parent malade. Ces données démontrent aussi qu’à l’échelon d’une popu-lation le chromosome X ne joue pas de rôle particulier dans la disparité des sexes qui est observée au cours de la PR et du lupus. Il faut chercher une autre explication… n

une synovite peut-elle prédire une lésion structurale dans la PR ?

The ability of synovitis to predict structural damage in rheumatoid arthritis: a comparative study between clinical examination and ultrasound. M Dougados et coll.Ann Rheum Dis 2013;72:665-671.

Une synovite peut-elle prédire la survenue ultérieure de lésions structurales de la PR ? Pour répondre à cette question des pa-tients souffrant de PR ont été suivis pendant 2 ans de façon prospective et la capacité d’une synovite détectée cliniquement et échographiquement à prédire la progression radiologique a été évaluée.

L’analyse des 32 articulations (2 poignets, 10 MCP, 10 IPP et 10 MTP) à l’inclusion et après 4 mois a été faite par le clinicien et par l’échographiste, avec une analyse en échelle des gris et en doppler couleur. En parallèle des radiographies ont été faites à l’inclusion et à 2 ans. Un calcul statistique d’association a été fait entre la présence d’une synovite à l’inclusion, ou sa persistance au 4e mois et la détérioration structurale ultérieure.Cette détérioration a été observée chez 9 % des 1880 articula-tions étudiées chez 59 patients. La présence d’une synovite à l’inclusion augmente le risque de progression radiologique avec un OR=2,01 (1,36–2,98) p<0,001 contre 1,61 (1,06–2,45) p=0,026 et contre 1,75 (1,18–2,58) p=0,005 respectivement pour la comparaison entre l’examen clinique et le doppler échelle de gris et entre ce dernier et le doppler couleur.Dans les articulations dont un examen est normal (soit clinique soit échographique) à l’inclusion on note aussi une augmenta-tion de la progression structurale si l’autre examen ne l’est pas (OR=2,16 (1,16–4,02) p=0,015 et 3,50 (1,77–6,95) p<0,001 pour l’écho en gradient de gris contre le doppler couleur et 2,79 (1,35–5,76) p=0,002) pour l’examen clinique.La persistance (contre la disparition) des synovites au 4e mois est aussi associée avec une progression de la destruction.

Cette étude confirme donc la validité de l’hypothèse : la per-sistance de synovite traduit une maladie évolutive destructrice, quel que soit le mode de détection de cette synovite. En pratique clinique il est nécessaire d’associer un examen clinique et écho-graphique pour évaluer ces synovites. n

Les critères ACR 1987 et 2010 sont-ils capables de prédire le caractère érosif d’une PR débutante ?

Do the 2010 ACR/EULAR or ACR 1987 classification criteria pre-dict erosive disease in early arthritis?H Mäkinen et coll.Ann Rheum Dis 2013;72:745-747.

Les nouveaux critères ACR/EULAR de classification de la PR per-mettent un diagnostic plus précoce de la maladie par comparai-son avec ceux de 1987.

Mais quelle est la capacité de ces deux jeux de critères à prédire la progression radiographique à 10 ans ?Le centre de référence des arthrites aiguës dans l’hôpital central de Jyväskylä a analysé tous les patients vus pour la première fois entre 1997 et 1999 présentant une arthrite périphérique récente et sans explication diagnostique et les a réévalués 10 ans après. Les radiographies ont été scorées selon la méthode de Larsen (score de 0 à 100).À 10 ans, 58 % des patients ont une maladie érosive, définie par la présence d’un score de Larsen ≥2 points dans au moins une articulation.

La capacité discriminative respective des critères de 1987 et de 2010 pour prédire les formes destructrices à 10 ans est com-parable (aire sous la courbe 0,72 ; CI 95% 0,65-0,79 pour les critères 2010 et 0,65 ; CI95% 0,58-0,72 pour les critères 1987).Les sensibilités et spécificités sont respectivement de 0,87 et 0,70 et de 0,44 et 0,47. A 10 ans le score médian de Larsen est de 6 (0-15) chez les patients qui répondent aux deux jeux de critères, de 2 (0-8) chez ceux qui répondent aux critères 2010 et pas à ceux de 1987, de 0 (0-5) chez ceux qui répondent aux critères 1987 et pas à ceux de 2010, et de 0 (0-2) chez ceux qui n’obéissent à aucun critère. Dans ces groupes, le pourcentage moyen de patients avec des érosions était de 69 %, 64 %, 32 % et 26 %, respectivement.

En conclusion, dans cette étude, et bien que cela fut un des éléments essentiels servant de base à leur élaboration, ces nou-veaux critères de PR ont une très faible capacité à prédire les patients qui vont se détruire à 10 ans, capacité à peine supérieure à ceux de 1987. n

Efficacité d’un corticoïde retard oral dans le traite-ment de la PR I

Efficacy of modified-release versus standard prednisone to reduce duration of morning stiffness of the joints in rheumatoid arthritis (CAPRA-1): a double-blind, randomised controlled trial.F Buttgereit et coll.The Lancet, Volume 371, Issue 9608, Pages 205 - 214, 19 January 2008.

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Efficacité d’un corticoïde retard oral dans le traite-ment des la PR II

Extended report: Low-dose prednisone chronotherapy for rheuma-toid arthritis: a randomised clinical trial (CAPRA-2) F Buttgereit et coll.Ann Rheum Dis 2013;72:204-210.

La chronobiologie étudie les cycles biologiques, qu’ils soient bref (en seconde, tel le rythme cardiaque) ou plus long sur des jours ou des mois (cycles des hormones gonadiques ou surrénaliennes, cycles ovarien etc). Les hormones stéroïdiennes obéissent à un cycle circadien sous l’influence de la corticotropine secrétée par l’hypothalamus. Le taux de corticotropine augmente peu à peu pen-dant la nuit pour culminer au petit matin, induisant un pic matinal de corticoïdes au lever. Puis les taux s’abaissent pour atteindre un minima en milieu d’après-midi et ainsi de suite. Les cytokines pro inflammatoires telles l’IL6 ou le TNF alpha obéissent elles aussi à un cycle nycthéméral dont le pic maximal se situe au petit matin. Ces variations expliquent qu’au cours des rhu-matismes inflammatoires il existe une prédominance des plaintes en fin de nuit et au lever, liée au pic matinal des cytokines pro- inflammatoires. Plaintes encore aggravées -en particulier au cours de la PR- par le fait que la sécrétion physiologique de stéroïdes est fortement altérée au cours de la maladie et ne peut pas s’opposer efficacement aux cytokines pro-inflammatoires.

De la connaissance de ces cycles on peut proposer des interven-tions thérapeutiques. Ainsi on donne des corticoïdes au patient le matin, pour rester « physiologique » mais cette prise intervient au moment du pic maximal pro-inflammatoire donc en pratique un peu tard. À l’inverse donner des corticoïdes le soir n’est pas plus effi-cace compte tenu de la durée de vie trop courte de la prednisone et expose à plus d’effets secondaires.Le Lodotra™ est une formulation retard de prednisone destinée à un emploi chronothérapeutique grâce à une formulation à libéra-tion retardée. La structure du comprimé permet qu’avec une prise unique vers 22 heures, la libération de prednisone ne débute que vers 2 heures du matin et culmine deux à 3 heures plus tard, ce qui permet de mieux contre balancer le pic matinal des cytokines pro-inflammatoires tout en respectant le cycle du cortisol. Le pro-duit est disponible en Allemagne et en Italie depuis avril 2011. Les études CAPRA-1 et CAPRA-2 ont validé le concept et démontré l’efficacité du produit dans la PR.

L’étude CAPRA-1 est une étude multicentrique randomisée double aveugle menée chez 288 patients souffrant de PR. Ces patients, avec une maladie active, sont randomisés pour recevoir soit de la prednisone classique en prise matinale soit une dose vespérale (22 heures) du produit actif dont la libération ne commence que 4 heures plus tard. L’objectif primaire est la variation de la durée du dérouillage matinal comparée entre l’inclusion et la 12e semaine. Les auteurs montrent une réduction de la durée de dérouillage matinal chez les patients recevant le produit actif (de 30 minutes) contre aucune modification dans le groupe prednisone classique (soit - 22,7 % vs - 0,4 %; différence =22,4 % [95% CI : 0,49 - 44,30]; p=0,045). Même si la tolérance est bonne et si les résul-

tats sont intéressants, cette étude, publiée dans une revue pres-tigieuse, a été très critiquée pour des raisons méthodologiques : impossibilité de garder l’aveugle et caractère subjectif de l’objectif primaire (dérouillage matinal), sans qu’aucun paramètre objectif clinico-biologique ne l’accompagne.

L’étude CAPRA-2 a enrôlé 350 PR considérées comme ayant une maladie active malgré un traitement par DMARD et AINS, aucun ne reçoit de corticoïdes. Leur traitement de fond reste stable et ils sont randomisés pour recevoir (2/1) soit le produit à libération retard (le soir) soit un placebo, sur une période de 12 semaines. L’objec-tif primaire est la réponse ACR20 à la 12e semaine. Les objectifs secondaires sont la variation de la valeur du DAS28, la variation du dérouillage matinal, de la douleur matinale et des indices de qualité de vie.Tous ces patients ont une PR établie, avec en moyenne 12 articu-lations douloureuses, 8 gonflées, une VS à 32, un HAQ de 1,3 et un dérouillage matinal de 150 minutes. A 12 semaines un taux de réponse ACR20 est observé chez un patient sur deux dans le groupe actif (48 %) contre 29 % dans le groupe placebo (29 %, p<0,001), une réponse ACR50 est observée chez 22 % vs 10 % des patients (p<0,006). A 12 semaines la réduction du dérouillage matinal est plus forte (55 % vs 35 %, p <0,002) dans le groupe actif que dans le groupe placebo. Une amélioration significative du DAS 28 et du score de fatigue sont observés dans le groupe actif par comparaison an groupe placebo. La survenue d’effets secon-daires est identique dans les deux groupes (43 % groupe actif, 49 % groupe placebo). Notre « bonne vieille cortisone » fait donc tout à l’envers… après avoir montré il y a 60 ans son efficacité dans le traitement de la PR, il a fallu attendre le début des années 2000 pour montrer son effet structural à petites doses et voilà qu’elle montre -à condition de l’utiliser de la bonne manière- une efficacité clinique sur des critères objectifs qui la placent au niveau des biothérapies inhibant les voies du TNF alpha. n

définition EuLAR d’une polyarthrite érosive

EULAR definition of erosive disease in light of the 2010 ACR/EU-LAR rheumatoid arthritis classification criteriaD van der Heijde et coll.Ann Rheum Dis 2013;72:479-481.

Comment définir une maladie érosive ? En effet la présence d’une érosion est un élément capital dans les nouveaux critères 2010 de la PR et pour répondre à cette question un groupe de travail a été créé. Le mode de travail été initialement basé sur les preuves puis a utilisé des réunion de consensus lors de l’analyse de dossiers de patients de la cohorte française ESPOIR et des patients de la clinique des arthrites aigues de Leyden.

Les mesures thérapeutiques telles la mise sous méthotrexate (ou tout autre forme de DMARD) et la persistance des signes d’arthrite à 5 ans ont été étudiées pour approcher au mieux la définition d’une maladie érosive chronique. Le choix du groupe était clairement de proposer une définition avec une forte spécificité et d’autre part

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de se centrer sur les patients qui ne répondaient pas aux critères ACR2010 de la polyarthrite (score de moins de 6 points).Par un vote unanime, la définition suivante a été adoptée : une ma-ladie est érosive lorsqu’il est détecté au moins 3 érosions (rupture corticale) sur 3 articulations différentes parmi les sites suivants : IPP, MCP, poignet, MTP sur les radiographies des deux mains et pieds. n

Faut-il faire systématiquement des radios des mains Et des pieds pour apprécier le caractère érosif d’une PR ?

Evaluating joint destruction in rheumatoid arthritis: is it necessary to radiograph both hands and feet?R Knevel et coll.Ann Rheum Dis 2013;72:345-349.

Les lésions radiologiques destructrices sont un élément important dans le diagnostic et le suivi d’une PR. Selon les habitudes on demande des radios de mains, des pieds ou des deux sites… Mais on ne sait pas si les images obtenues fournissent le même niveau d’information.

La présente étude compare donc l’information obtenue selon que l’on radiographie les mains ou les pieds ou les deux sites, à la fois pour le diagnostic et pour le suivi, à la fois dans les PR récentes mais aussi dans des formes anciennes.Pour ce faire, 6 261 jeux de radios de mains obtenus à partir de 2 193 PR suivies sur deux sites Hollandais (Leyden et Groningen) et Nord-Américains ont été analysés. Les corrélations entre les lé-sions radiologiques aux différents sites ont été étudiées (analyse uni versus bilatérale, analyse des mains seules versus mains plus pieds). Les analyses ont été faites à un temps donné et après un suivi pour évaluer la progression, en utilisant à la fois le score Sharp et une mesure d’érosion.En étudiant à un moment donné ces patients, la sévérité des lé-sions articulaires est fortement corrélée entre les côtés droits et gauches, mais faiblement corrélée entre les mains et les pieds. Plus la maladie avance et plus la corrélation s’améliore entre mains et pieds, et ceci quelques soit la cohorte analysée.Si on évalue la destruction en utilisant une seule radio unilatérale de main ou des radios de main sans pied, alors 19,3 % et 24,0 à 40,4 % des patients sont mal classés car identifiés comme non détruits.

De la même manière, pour l’analyse de la progression, en utilisant une seule radio unilatérale de main ou des radios de main sans pied, alors entre 11,5 et 16 % dans le premier cas et entre 21 et 31 % des patients dans le second cas sont mal classés car évalués comme non progresseurs. Il faut donc bien réaliser cette évaluation sur les deux sites à la fois. n

Peut-on prédire par échographie le risque de poussée des PR en rémission ?

Can flare be predicted in DMARD treated RA patients in remission, and is it important? A cohort studyB Saleem et coll.Ann Rheum Dis 2012;71:1316-1321.

L’objectif thérapeutique de la PR est la rémission, mais cette rémis-sion peut être émaillée de poussées. Il est possible que les tech-niques d’imagerie d’une part et les nouveaux critères de rémis-sion d’autre part permettent de prévoir ces poussées. L’objectif du travail présenté par l’équipe de P. Emery est de déterminer les éléments cliniques, fonctionnels et échographiques prédictifs d’une poussée chez des patients en rémission et d’étudier l’influence de ces poussées sur le devenir à long terme.Tous les patients en rémission selon leur rhumatologue traitant ont été suivis et examinés pendant un an sur le plan clinique et écho-graphique. Un suivi régulier de leurs scores de fonction et de qua-lité de vie était réalisé. Une poussée était définie par toute variation d’activité de la maladie justifiant une modification thérapeutique.Durant le suivi, 26 % des patients en rémission ont fait une pous-sée. Le fait de répondre aux nouveaux critères de rémission ne réduisait pas le risque de poussée. L’élévation (à l’inclusion) de l’activité power doppler échographique (OR 4,08 ; IC95% 1,26 – 13,19 ; p=0,014) et de l’index HAQ (OR 1,27 ; IC95% 1,07-1,52) sont indépendamment associés avec la survenue de poussée.Les patients qui ont une poussée, ont à 12 mois significativement par rapport à ceux sans poussée une maladie plus défavorable au long cours avec respectivement un DAS plus fort (moyenne 2,90 ; IC95% 2,55-3,24 contre 2,26 IC95% 2,06-2,46), p=0,002) et une score fonctionnel plus altéré (HAQ-DI 0,412 (IC95% 0,344-0,481) contre 0,322 (IC95% 0,282-0,362), p=0,029).

En conclusion la présence d’une anomalie power doppler à l’écho-graphie est le meilleur élément pour prédire une poussée chez les patients qui atteignent le niveau de rémission. Ces résultats sug-gèrent que l’échographie est un élément important de l’évaluation de l’activité de la PR. n

quels facteurs de risque des perforations digestives au cours de la PR ?

Factors associated with gastrointestinal perforation in a cohort of patients with rheumatoid arthritis. JR Curtis et coll.Arthritis Care Res, 2012, 64: 1819–1828.

Les perforations digestives sont des complications fréquentes des rhumatismes inflammatoires chroniques, leur fréquence exacte au cours de la PR reste mal évaluée.Une enquête a été réalisée auprès des organismes privés de santé américains, recherchant les patients atteints de PR et ayant été hospitalisés pour une perforation digestive haute ou basse. Une analyse selon le modèle de COX (avec des variables fixes ou non) a permis ensuite d’apprécier le risque.

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Parmi une population de 134 433 PR, en utilisant une définition large des perforations intestinales, un total de 696 cas a été détecté. Ce qui donne un taux de perforation de 1,7 pour 1000 patients-années (IC 95% 1,58-1,83). La majorité des perforations (83 %) touche le bas intestin.En utilisant une définition plus restreinte de la perforation, le taux est bien plus bas et non significatif (0,85, IC 95% 0,78-0,96).Les facteurs prédictifs puissant de la perforation sont l’âge et une diverticulite avec des hazard ratio de 14,5 (IC95% 11,8-11,7) pour la définition large et de 3,9 [IC 95% 2,5-5,9] pour la définition la plus stricte.Parmi les différents traitements et en prenant le risque du MTX comme étant égal à 1, on observe une majoration du risque de perforation chez les patients recevant des AINS, des corticoïdes et des DMARDS non biologiques. Les patients recevant un biologique sans corticoïde n’ont pas de sur risque de perforation.

En conclusion, les perforations digestives sont des complica-tions rares mais sévères au cours de la PR, les cliniciens doivent connaître le sur risque qu’apporte l’usage des corticoïdes et des AINS chez des sujets avec une diverticulite. n

Le meilleur facteur prédictif de la rémission de la PR ? une intervention thérapeutique au stade de very Early Arthritis (vERA) !

Very early rheumatoid arthritis as a predictor of remission: a multi-centre real life prospective study.E Gremese et coll.Ann Rheum Dis2013;72:858-862.

Dans la vraie vie des pays d’Europe du nord un patient avec une plainte articulaire arrive très vite en milieu spécialisé (clinique des arthrites aigues). Il est alors possible d’analyser ces patients et de chercher à savoir quel est le meilleur facteur prédictif de la rémission.

Autrement dit de savoir si le devenir du patient dépend plus du trai-tement utilisé ou plus de la date de l’intervention thérapeutique ?Une cohorte de 1 795 patients avec des arthrites depuis moins de 2 mois sont entrés dans un suivi prospectif ; parmi eux 711 (39,6 %) reçoivent un diagnostic de PR. Chaque PR est traitée selon les pratiques locales. Ces patients sont suivis dans 3 centres (dont un hôpital universitaire). L’objectif primaire à 12 mois est la rémission définie par les critères ACR et le DAS28.Une rémission DAS28 est obtenue chez 34,3 % (écart 19,5–49 %) des patients et une rémission ACR chez 15,2 % (range 8,5–20,6 %). L’analyse en régression logistique montre que seules deux va-riables émergent comme capables de prédire cette rémission, ce sont le fait d’être à moins de 12 semaines du début clinique de la maladie lors du premier traitement (VERA) et le fait d’être traité par un DMARD avant la fin du troisième mois d’expression clinique de la maladie.Parmi les patients en rémission, seulement 10 % de ceux VERA reçoivent ensuite une biothérapie contre 32,2 % des patients non VERA (p=0,002, OR 0,23, IC95% 0,09 - 0,64).

En conclusion, dans la vraie vie une intervention précoce dans les 12 premières semaines d’expression clinique de la maladie est le meilleur garant pour amener le patient en rémission de sa PR. n

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AdACtA, première étude prospective randomisée double aveugle comparant directement deux biothérapies (le toci-lizumab et l’Adalimumab) en monothéra-pie dans le traitement de la Polyarthrite

Rhumatoïde

Tocilizumab monotherapy versus adalimumab monotherapy for treatment of rheumatoid arthritis (ADACTA): a randomised, double-blind, controlled phase 4 trial.C Gabay on behalf of the ADACTA Study Investigators.The Lancet, Volume 381, Issue 9877, Pages 1541-1550, 4 May 2013.

Les études de l’industrie pharmaceutiques nous apportent des in-formations intéressantes sur les nouvelles molécules mises à notre disposition, leur mode d’action, leur niveau d’efficacité clinique biologique et structural et leurs effets secondaires. Mais ces tra-vaux ne nous disent pas comment utiliser ces molécules, aucun ne nous indique quelle est la meilleure stratégie et surtout ils ne comparent pas deux molécules entre elles.Il faut donc saluer la réalisation et la publication de l’étude ADACTA qui compare face à face deux biothérapies largement utilisées dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde. Bien qu’une association au MTX soit recommandée pour ces deux molécules, en pratique environ un tiers des patients reçoivent les produits en monothéra-pie et les bénéfices respectifs et comparés des biothérapies dans ces situations assez peu étudiés.

Les auteurs ont donc mené une étude prospective, randomisée, double-aveugle dans 76 centres issus de 15 pays du monde entier, comportant 325 patients ; c’est clairement une étude de supério-rité (hypothèse de supériorité avec un écart de réponse DAS 28 d’au moins 0,6 point) du Tocilizumab (Toci) par rapport à l’Adali-mumab (Ada). Dans ces centres, les patients adultes (moyenne 53 ans) dont la maladie évolue en moyenne depuis 7 ans (75 % FR+ et 74 % CCP+) et qui sont intolérants au MTX (avis du clinicien) se voient proposer de participer. Le DAS moyen à l’inclusion est de 6,7 points, et la CRP moyenne de 27 mg/l. A l’inclusion 57 % des patients reçoivent des corticoïdes. Tous les traitements sont stoppés deux semaines avant l’inclusion. Les patients sont randomisés pour recevoir soit une injection SC d’Adalimumab (ou de placebo) toutes les deux semaines plus une perfusion toutes les 4 semaines de Tocilizumab (ou de placebo). L’objectif primaire est la variation du DAS 28 entre l’inclusion et la 24e semaine. Les objectifs secondaires sont classiques (nombre de patients en rémission, en LDA, réponse ACR 20, 50 ou 70, CDAI et SDAI…). Quinze pour cent des patients du groupe Toci et 17 % du groupe Ada sortent de l’étude pour intolérance, effet secondaire ou vio-lation du protocole. On note plus d’épisodes infectieux et d’ano-

malies biologiques dans le groupe Toci que dans le groupe Ada (respectivement 15,4 vs 11,7 % et 5,6 % vs 0,6 %).L’analyse en intention de traiter montre que la variation du DAS est plus forte à la 24e semaine dans le groupe Toci (-3,3 points) que dans le groupe Ada (-1,8 points) avec une différence de -1,5 points (IC95% −1,8 à −1,1; p<0,0001). A la 24° semaine, les patients du groupe Toci ont une réponse significativement supérieure à celle observée dans le groupe Ada sur l’ensemble des critères secon-daires de jugement. Curieusement il n’est pas observé de diffé-rence significative sur les indices de qualité de vie.

Clairement dans cette étude le TOCI est supérieur à l’Ada à la fois sur l’objectif principal et les objectifs secondaires chez des patients qui ne peuvent pas continuer le Méthotrexate. De façon intéressante, l’analyse en régression logistique ne détecte aucun élément de prédiction de cette bonne réponse après ajustement pour le traitement, autrement dit l’effet observé est lié au traite-ment et pas à des variables confondantes. D’autre part les niveaux de réponse et les effets secondaires observés sont identiques à ceux déjà publiés.

D’autres conclusions peuvent être tirées de cette étude, même si la prescription habituelle des biothérapies se fait en association avec le MTX. Clairement plus de patients bénéficient du Toci que de l’Ada en monothérapie. D’autre part la réponse obtenue avec un anti-TNF, en termes de réduction moyenne du DAS, est une fois de plus de l’ordre de deux points, comme dans de nombreuses études précédentes, démontrant la prédictabilité de l’effet thérapeutique de chaque biothérapie. Enfin si le choix de la première biothérapie est largement empi-rique il apparaît vraisemblable qu’à l’avenir ce choix sera basé sur deux éléments, d’une part la valeur du DAS du patient au début du traitement et d’autre part le niveau de réponse moyen apporté par la biothérapie. Autrement dit avec un DAS en dessous de 5 il vaudrait mieux initier un anti-TNF et préférer le Toci pour un DAS supérieur à 5. n

Peut-on arrêter une biothérapie au cours de la PR ?

Maintenance, reduction, or withdrawal of etanercept after treat-ment with etanercept and methotrexate in patients with moderate rheumatoid arthritis (PRESERVE): a randomised controlled trialJosef S Smolen et coll. Lancet 2013, 381: 918–29.

De nombreux cliniciens se posent parfois la question « Est-il possible d’interrompre une biothérapie chez un patient souffrant de PR ? » Il est évident que dans certaines situations il est nécessaire de stopper le traitement, en cas d’infection, d’effet secondaire grave ou en cas d’inefficacité.

BIothéRAPIES

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Mais que faire chez un patient dont la maladie va bien grâce à une biothérapie, dont le niveau d’activité est faible ou est arrivé en rémission et qui continue à aller bien depuis maintenant des mois grâce à une combinaison de MTX et d’anti-TNF ?

Peut-on suspendre le traitement pour des raisons de coûts de santé publique, pour des raisons de précautions afin de ne pas s’exposer aux infections et autres effets secondaires, ou tout simplement pour « faire une pause thérapeutique » en se disant que l’on repren-dra le traitement en cas de rechute. L’étude PRESERVE publiée dans le Lancet apporte certaines réponses.

Huit cent trente-quatre femmes (âge moyen 46 ans) majoritai-rement caucasiennes avec une PR séropositive évoluant depuis 6 ans, vierges de toute biothérapies et en échappement au MTX ont été traitées par l’association MTX + Etanercept à la dose usuelle. Toutes initialement ont une maladie modérément active avec un DAS28 situé entre 3,2 et 5,1. À l’issue de cette période ouverte de 36 semaines, 604/834 femmes ont atteint le niveau de Low Disease Activity (<3,2) et sont alors randomisées pour recevoir en double aveugle soit l’ETA à 50 mg par semaine (continuer le même traitement, n=202), soit l’ETA à 25 mg par semaine (réduire de moitié l’anti-TNF, n=202), soit un placebo d’ETA (arrêter l’anti-TNF, n=200). C’est le devenir de ces femmes qui est évalué, l’objectif primaire étant le nombre de patients restant en LDA dans chaque groupe à la fin d’une période de suivi de un an. Les objectifs secondaires principaux sont le nombre de patients en rémission selon DAS28 et SDAI, ainsi que le l’évolution du score radiologique sur l’ensemble de la durée de l’étude.

Le résultat montre qu’à la fin de la période en aveugle de 52 semaines, on observe autant de patients en LDA dans le groupe 50 mg que dans le groupe 25 mg (respectivement 82,6 % et 79,1 %), par contre dans le groupe placebo il est noté une dégrada-tion rapide des patients, en fin d’étude seulement 42,6 % d’entre eux sont encore en LDA. Pour les scores de rémission DAS28 et ACR les résultats sont respectivement dans chaque groupe de 66,7% et 36,3 % ; 60,2 % et 30,8 % et enfin 29,4 % et 10,7 %.Le bénéfice cardio vasculaire ne peut pas être apprécié sur une durée de un an, mais la remontée de la CRP dans le groupe placebo suggère que ce bénéfice pourrait être perdu dans cette situation. Les bénéfices radiologiques sont marginaux, certes il existe une dif-férence entre les patients recevant l’ETA et ceux recevant le place-bo, différence qui porte sur le nombre de patients qui progressent de moins de 2 points, mais il n’existe pas de différence sur le nombre de patients « non progresseurs » dans chaque groupe. D’autre part la variation du score de Sharp est significativement différente entre les groupes 50mg et placebo, mais pas entre les groupes 25 mg et placebo. Le bénéfice en termes d’effets secondaires, en particulier infec-tieux et effets secondaires graves n’est pas marqué non plus, avec des taux identiques dans les trois groupes à la fin de l’année de suivi. Autrement dit arrêter les anti-TNF pour espérer se mettre à l’abri les complications infectieuses ne semble pas valable. Mais il faut noter que dans cette étude 60% des patients reçoivent des stéroïdes ce qui peut fausser le risque infectieux.

Qu’en conclure pour la pratique ?Notre expérience nous a appris et des travaux anciens l’avaient déjà démontré (avec le MTX il y a 15 ans) : une fois le patient en rémission il est difficile voire impossible d’arrêter le traitement de fond. Sachant que seul l’état de rémission (ou à la rigueur de LDA) est bénéfique pour le patient, PRESERVE nous montre la même chose à savoir qu’environ un patient sur deux rechute de sa mala-die mais qu’environ une petite moitié reste en LDA un an après l’arrêt de la biothérapie. Des études Japonaises ou Néerlandaises ont montré que l’arrêt d’un anti-TNF (Infliximab) chez des patients en rémission ou en LDA laisse environ 50 % des patients dans le même état un an après l’arrêt et que pour les autres, la reprise du traitement s’accompagne d’une reprise de l’effet thérapeutique.On est donc aussi en droit de penser que suspendre le traitement chez un patient qui n’est « que » en LDA est prématuré et qu’il soit plus judicieux de discuter cette attitude après une rémission prolongée.

Pourquoi avoir choisi des PR « modérément actives » (DAS entre 3,2 et 5,1) pour cette étude ? On peut voir les choses de deux fa-çons. La première, est qu’à la différence de la France, de nombreux pays ne peuvent pas utiliser les anti-TNF si le DAS est inférieur au seuil de 5,1 et ce travail en ce sens démontre que la stratégie anti-TNF est aussi adaptée chez ces patients, avec des taux de répondeurs tout à fait intéressants. L’autre façon de voir est de se souvenir que d’une manière générale, la réponse aux anti-TNF est assez « formatée », offrant une baisse d’environ deux points de DAS et qu’il donc mieux réserver ces stratégies aux PR modéré-ment actives. En ce sens PRESERVE démontre et valide clairement cette hypothèse, et les résultats de 60% de patients en LDA et 30% de patients en rémission DAS avec l’association MTX +ETA sont de bons résultats.

Cependant l’absence de différence entre les patients recevant 50 et 25 mg d’ETA montre aussi clairement que nombre de patients sont « sur traités » alors que la différence entre 25 mg et placebo montre que nombre de patients sont sous traités. On aurait aimé une stratification des réponses à 36 et 88 semaines en fonction de la valeur initiale du DAS !Une petite moitié des patients qui arrêtent les anti-TNF ont encore un LDA un an après cet arrêt… ! Ce verre à moitié vide est cepen-dant intéressant. En effet il devient nécessaire de pouvoir définir plus précisément à l’avenir ces patients grâce à de nouveaux mar-queurs pronostiques (IL17, angiogénèse, dégradation de matrice…) pour leur proposer des stratégies « allégées ». Reste encore et c’est la grosse incertitude de PRESERVE à démontrer qu’une telle approche n’obère pas les chances des patients au plan structural et au plan cardiovasculaire. En ce sens, un des reproches à formuler à l’étude est l’absence de données sur les doses de corticoïdes et leurs variations dans les différents groupes au long de l’étude.

Les patients étudiés dans cette étude sont des patients relative-ment jeunes et avec une durée de la maladie de 6 ans. Rien ne dit que les résultats observés puissent être extrapolés à d’autres populations de malades, à des patients avec des PR plus récentes ou plus anciennes ou qui arrivent en LDA après des « parcours » thérapeutiques différents de ceux de l’étude.

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Mais ne boudons pas la bonne nouvelle, et elle est claire, le niveau de LDA chez bon nombre de patients peut être maintenu en rédui-sant les doses d’ETA de moitié en gardant l’association avec le MTX. n

Moindre réponse aux anti-tnF alpha chez les sujets obèses I

Obesity and reduction of the response rate to anti–tumor necro-sis factor a in rheumatoid arthritis: An approach to a personalized medicine.E Gremese for the Gruppo Italiano di Studio sulle Early Arthritis (GISEA).Arthritis Care Res, 2013 ; 65: 94–100.

L’obésité est une maladie inflammatoire modérée mais durable et en tant que telle pourrait aggraver les phénomènes inflammatoires de la PR. Le but de l’étude présentée est d’évaluer l’impact de l’obésité sur la réponse aux anti-TNF chez des patients souffrant de PR, en échec du MTX et autres DMARDS.Les patients ont été identifiés dans 15 hôpitaux participant au réseau italien des arthrites débutantes (Gruppo Italiano di Studio sulle Early Arthritis). Les données de bases (DAS 28, BMI divisé en 3 catégories <25, 25–30, >30 kg/m2), protéines de l’inflamma-tion, Facteurs rhumatoïdes et anti-CCP), et la rémission définie par une valeur du DAS<2,6 pendant au moins 3 mois.Une cohorte (recrutée entre 2006 et 2009) de 641 patients rece-vant un anti-TNF a été analysée (adalimumab, n=260 ; étanercept, n=227; infliximab, n=154). Tous ont été suivis au moins 12 mois. La valeur moyenne initiale du DAS est de 5,6 ± 1,4. Un BMI > 30 est observé à l’inclusion chez 10,3 % des patients.Apres 12 mois de traitement anti-TNF, une rémission est observée chez 15 % des sujets avec un BMI > 30, chez 30 % des patients avec un BMI entre 25 et 30 et chez 33 % des patients avec un BMI<25 (p=0,01). Le plus petit pourcentage de répondeur est observé de manière significative avec l’Infliximab par comparaison avec les deux autres anti-TNF, alors qu’avec ce produit la dose est ajustée en fonction du poids.

En conclusion, pour les auteurs l’obésité est un facteur prédictif de mauvaise réponse aux anti-TNF et ceci doit être intégré dans la prise en charge des patients. n

Moindre réponse aux anti-tnF alpha chez les sujets obèses II

Obesity and the prediction of minimal disease activity: A prospec-tive study in psoriatic arthritis.M di Minno et coll.Arthritis Care Res, 2013; 65: 141–147.

Le surpoids joue-t-il sur la possibilité d’amener en rémission un patient souffrant de rhumatisme psoriasique ?Une population de rhumatisme psoriasique avec une maladie ac-tive et devant débuter un anti-TNF a été suivie prospectivement

pendant 24 mois. Il s’agit de 135 patients obèses avec un BMI 30 kg/m2 et 135 patients avec un BMI normal. A l’inclusion puis tous les 12 mois les patients ont eu un examen complet à la fois clinique et biologique. A l’exception d’une plus forte prévalence de l’hypercholestérolémie et de l’hyertriglycéridémie chez les obèses, les deux populations sont en tous points comparables à l’inclusion, aux plans cliniques et démographiquesAprès12 mois aucune variation de poids n’est notée dans l’un et l’autre groupe. Un état de LDA est atteint chez 98 des 270 patients de la cohorte soit 36 %.La prévalence de l’obésité est plus forte chez les patients qui n’ar-rivent pas en LDA (64 %) comparé à ceux qui arrivent en LDA (25,5 % P < 0,001). Après ajustement pour les autres variables, l’obésité est associée avec un fort risque de ne pas atteindre le LDA (hazard ratio 4,90, IC95% 3,04–7,87; P < 0,001).Le risque de ne pas atteindre le niveau de LDA est respective-ment de 3,98 (IC95% 1,96–8,06, P < 0,001) pour un BMI < 30 kg/m2 et de 5,40 (IC95% 3,09–9,43, P < 0.001) pour un BMI de 30–35 kg/m2.

Parmi les 98 sujets qui ont atteint le niveau de LDA à 12 mois, la probabilité de rester en LDA au 24e mois est réduite si ces sujets sont obèses (HR 2.04, 95% CI 1.015–3.61; P = 0.014).Clairement l’obésité est un élément défavorable pour prédire la rémission ou pour la maintenir. n

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Dr David Petrover - Centre d’imagerie Bachaumont, Hôpital Lariboisiere, Paris

CAS CLInIquE

onsieur R. 57 ans marathonien, depuis plusieurs années.Apparition de douleurs mécaniques du tiers moyen du tibia droit après 30 minutes de course nécessitant l’arrêt de l’effort.

une radiographie puis une IRM et un scanner sont réalisés (Figures 1).

quel est votre diagnostic ?

Le diagnostic de bénignité a été porté, le patient est traité par antalgique simple et mise au repos.Après 6 mois, la tentative de reprise de l’effort se solde par un échec et le patient voit appa-raitre progressivement une tuméfaction dure du tiers moyen du tibia en regard de la zone douloureuse.un nouveau contrôle scanner et IRM sont réalisés (Figures 2).

M

Figures 1.

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LE RHUMATOLOGUE 87 / jAnviER 2014

a b

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LE RHUMATOLOGUE 87 / jAnviER 2014

Figures 1.

Figures 2.

c d e

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b

d

dESCRIPtIon

Le premier scanner montrait une petite image lacunaire bien limitée développée au sein de la corticale antérieure du tibia, sans réaction osseuse au contact, d’allure lytique mais présentant un aspect grilla-gé en son sein pouvant faire évoquer un petit angiome extra-rachidien ou une anomalie osseuse pré-fissuraire dans le cadre d’une périostite tibiale.L’IRM confirme le caractère discrètement inflammatoire du périoste au contact avec un hypersignal linéaire soulignant la corticale osseuse et la petite lésion arrondie focale.Le contrôle à 6 mois montre l’apparition d’une désorganisation cortico-périostée avec une lyse plus étendue associée à l’apparition d’une lésion tissulaire des parties molles.L’IRM confirme le caractère essentiellement cortical et sous-pe-riosté de la lésion. La cavité médullaire est respectée avec un signal graisseux préservé à l’exception d’un hypersignal modéré au contact immédiat de la lésion.Il s’agit donc d’une lésion agressive d’un os péripherique centré sur la cortical d’évolution rapide.L’ensemble évoque le diagnostic d’une métastase corticale isolée du tibia.L’interrogatoire retrouve secondairement un antécédent de cancer du poumon il y a 10 ans, traité, en rémission.

La biopsie percutanée sous contrôle scannographique a confirmé le diagnostic de métastase d’adénocarcinome pulmonaire.

dISCuSSIon

Les métastases osseuses sont la tumeur osseuse la plus fréquente chez les patients présentant une tumeur primitive non osseuse.Une localisation osseuse est ainsi retrouvée chez 20 à 70 % des patients présentant une néoplasie non osseuse. La localisation corticale est en revanche extrêmement rare.Elle représente 2 % des métastases osseuses mais 22 % des métas-tases du squelette appendiculaire.La première description est récente remontant à 1980 par Resnick chez un patient présentant un cancer bronchique.Les métastases osseuses intéressent les espaces riches en endothé-lium vasculaire et se localisent ainsi de manière préférentielle au sein de l’os spongieux (vertèbres, bassin, extrémité proximale du fémur ou de l’humérus), ou au sein de la cavité médullaire des os longs.

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Classiquement, l’atteinte corticale n’est que secondaire, liée à la diffusion progressive de la métastase à la corticale puis aux parties molles.La localisation corticale est permise par la présence de riches capillaires anastomotiques alimentés par des vaisseaux endostés et périostés qui proviennent de l’artère nourricière d’un os long.Ainsi, en fonction de l’artère nourricière, elle intéresserait le ver-sant endosté ou périosité, voire même le centre de la corticale par emboles métastasiques.La localisation au membre inférieur et en particulier au fémur sur sa diaphyse en particulier son quadrant postérieur et médian proba-blement liée à une richesse vasculaire plus importante, est le plus classique dans ces atteintes corticales isolées.Comme les premières observations, la plupart des lésions secon-daires corticales seraient liées à un cancer du poumon, mais plus rarement, on peut retrouver un primitif mammaire ou rénal.Dans la plupart des cas, il s’agit d’un adénocarcinome.

Les métastases corticales sont des lésions lytiques qui peuvent prendre plusieurs aspects.Une ostéolyse de toute petite taille comme notre cas, initialement peut être visible, mais dans les cas décrits, les lésions sont lytiques pures.Des lésions lytiques plus étendues le long de l’axe du fémur ou du tibia sont également classiques, de même que les petites encoches superficielles.

Le risque principal est la méconnaissance de ce type de lésions, et les métastases corticales doivent être connues en particulier en cas d’antécédent de cancer pulmonaire.Le risque de fracture pathologique par fragilisation progressive est plus important que dans les localisations purement médullaires où l’atteinte corticale n’apparait que plus tardivement.

C onCLuSIon

Les métastases corticales sont rares comme les localisations épiphysaires ou musculaires secon-daires, mais certains contextes comme les anté-cédents cancéreux d’adénocarcinome bronchique doivent faire évoquer le diagnostic devant une lésion lytique de petite taille, isolée, intéressant le membre inférieur.

dIAGnoStIC> MétAStASE CoRtICALE d’un AdénoCARCInoME PuLMonAIRE

Références :

u Métastases osseuses atypiques, V. Bousson et coll. p138-139. Savoir faire en radiologie ostéo-articulaire, Vol 12 (2010). Ed. Sauramps Médical. JD. Laredo, M. Wybier, V. Bousson, C Parlier, D. Petrover.