Extrait de la publication...Tu penses à rien pis tu ris, tu ris, tu ris. De n’importe quoi, de...

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Extrait de la publication

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  • JEANNE CHEZ LES

    AUTRES

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  • JEANNE CHEZ LES

    AUTRES

    Marie Larocque

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  • Nous remercions le Conseil des Arts du Canada de l’aide accordée à notre programme de publication, et la SODEC pour son appui financier en vertu du Programme d’aide aux entreprises du livre et de l’édition spécialisée.

    Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PADIÉ) pour nos activités d’édition.

    Gouvernement du Québec — Programme de crédits d’impôt pour l’édition de livres — Gestion SODEC

    Conception graphique de la couverture : Marc-Antoine RousseauConception typographique : Marc-Antoine RousseauMise en page : Marie BlanchardRévision linguistique : Fleur NeeshamCorrection d’épreuves : Pierre-Yves Villeneuve

    © Marie Larocque et Tête première, 2013

    Dépôt légal — 3e trimestre 2013Bibliothèque et Archives nationales du QuébecBibliothèque et Archives Canada

    ISBN 978-2-924207-161

    Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage est interdite. Une copie ou reproduction par quelque procédé que ce soit, photographie, microfilm, bande magnétique, disque ou autre, constitue une contrefaçon passible des peines prévues par la loi du 11 mars 1957 sur la protection des droits d’auteur.

    Tous droits réservés

    Imprimé au Canada

    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Larocque, Marie, 1970-

    Jeanne chez les autres (Tête première) ISBN 978-2-924207-16-1

    I. Titre.

    PS8623.A762J42 2013 C843’.6 C2013-941556-4 PS9623.A762J42 2013

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  • À ma mère. Pour faire comme si elle était pas morte.

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  • Le secret du bonheur, c’est d’être heureux.

    Pierre Légaré

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  • La romancière Jeanne Fournier est morte.

    À Montréal, le 22 septembre 1990, à l’âge de vingt ans, est décédée de cause accidentelle la romancière Jeanne Fournier, fille d’Élizabeth Hamelin et de René Fournier.

    Découverte en 1989 par l’animateur Gaston Gingras, Jeanne Fournier s’est distinguée la même année avec la publication de son roman Marie chez les Autres, publié en France aux édi-tions du Scorpion.

    Outre ses parents, la jeune auteure laisse dans le deuil son fils de dix-huit mois, Loïc Fournier, ses trois sœurs, Nathalie, Chantal et Julie Fournier, sa grand-mère Rosanna Hamelin, ainsi que de nombreux amis.

    Ses funérailles auront lieu ce jeudi 27 septembre, sur la berge du lac Alouette, dans les Laurentides.

    Au lieu de dons, la famille Fournier demande au public de faire parvenir des fleurs, jaunes si possible.

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  • Le Journal de Jeanne

    Montréal, 10 décembre 1983

    J’ai encore treize ans. Il me reste trois semaines de cet âge-là. Tout le monde dit que c’est un chiffre malchanceux, mais c’est niaiseux, je suis sûre que c’est la plus belle année de ma vie. Depuis le temps qu’elle répète la même affaire, je pensais jamais que ma mère divorcerait pour de vrai. Ça fait depuis toute ma vie qu’elle dit ça. Même quand j’étais bébé, même quand je m’en souviens pas. J’suis sûre.

    Quand j’ai dit ça à Jessica, elle en revenait pas elle non plus. Pauvre elle, ses parents continuent de rester ensemble, pis sa mère parle même pas de s’en aller. Mais moi, c’est fini pour de vrai, même que la police est venue l’autre soir pour dire à mon père qu’il avait pas le droit de s’approcher de notre nouvelle maison. Trop cool. Une chance que ça existe, la police, sinon je pourrais pas écrire ça. C’est impossible, écrire, quand on se fait assommer avec une pelle. Hihihi !

    Mes sœurs sont folles. Elles braillent à cause de ça. Franchement ! Que c’est qu’elles lui trouvaient ? Je comprends pas. Pas toutes mes sœurs, juste Chantal pis Julie. Ma grande sœur Nathalie est aussi contente que moi, même si ça change

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    rien dans sa vie vu qu’elle reste plus avec nous autres. La

    maudite chanceuse, il paraît que mon père c’était pas son père.

    C’est mon mononcle Alain qui lui a dit ça, pendant qu’il était

    saoul. C’est pas juste, je trouve. J’aimerais ça moi aussi que

    quelqu’un me dise que mon père, c’est un autre. Même ima-

    ginaire. Juste quelqu’un d’autre. N’importe qui sauf lui.

    Mon mononcle Serge s’est marié la semaine passée. Un divorce

    pis un mariage la même semaine, c’est poétique quand on y

    pense. En tout cas c’était trop malade, j’ai bu toutes sortes

    d’affaires avec ma cousine pis on s’est retrouvées saoules

    comme des grands-mères. Hahahaha ! Ma mère a capoté ben

    raide, elle m’a crissé sa main sur la yeule pour je sais pu quoi

    mais ça m’a juste fait rire de toute façon. C’est l’fun être saoul,

    je comprends mieux les autres d’aimer ça autant. Tu penses à

    rien pis tu ris, tu ris, tu ris. De n’importe quoi, de toutes sortes

    de niaiseries. Ouin, j’ai vraiment beaucoup aimé ça.

    En attendant le prochain party de famille, je pense que je

    vais écrire une carte de Noël spéciale pour ma mère. C’est

    pas encore le temps, mais j’ai trop le goût de lui dire merci.

    Pu de père. Oh yeah !

    Je suis tellement contente que j’aurais le goût de sortir dehors

    pis de crier YOUPPPPPPI super fort. Mais je peux pas faire

    ça, le monde va savoir que je suis folle.

    Maudit que je commence à aimer ma vie.

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  • PREmièRE PARTiE

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  • PREmiER TAbLEAULa bâtarde

    Montréal, juin 1964

    Les Hamelin se fondaient dans le voisinage comme des bou-quins sur un rayon. Des classiques du Plateau Mont-Royal. Les deux époux étaient petits et frêles, avaient les cheveux foncés qui commençaient à grisonner et le teint jaune comme des filtres de cigarettes : ils fumaient comme une chaîne de montage. À l’avant de leurs visages, deux dentiers bien solides étincelaient comme des taches de propreté sur un plancher douteux. Des classiques, tout à fait.

    Peu instruit, le couple Hamelin n’était pas malheureux. Raoul Hamelin était peintre-lettreur et sa femme, Rosanna, charmante. Le couple avait cinq enfants. Quatre garçons, une fille. Tout ce beau monde se serrait dans un petit loge-ment sur la rue Saint-Dominique, sauf quand les plus âgés allaient faire un tour en prison. Pas souvent ni longtemps, mais régulièrement.

    Leur fille, Élizabeth Hamelin, était une longue adolescente maigrelette de seize ans, plutôt jolie mais complexée par son nez qu’elle trouvait trop long et qui ne l’était pas. Son regard allumé et effronté plaisait. La jeune fille avait les cheveux

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    brun foncé, ni raides ni bouclés, qu’elle coiffait comme elle s’habillait : avec plus de soin que de goût.

    Élizabeth avait quitté l’école deux ans plus tôt et travaillait désormais à temps plein dans une manufacture de cigares. Cet emploi lui permettait de verser une petite pension à ses parents, de se croire indépendante et de se payer une virée la fin de semaine. Deux hot-dogs au Montreal Pool Room, une sortie au cinéma ou une crème glacée chez Paquette, et la jeune Hamelin était heureuse comme on peut l’être à seize ans.

    La jeune fille n’avait pas de petit ami. Quelques jeunes hommes de la manufacture lui faisaient la cour, mais elle les trouvait trop laids, trop jeunes ou trop pauvres pour leur manifester un quelconque intérêt. Grande lectrice de petits romans, Élizabeth se promettait de sortir un jour de son trou de bums, au bras d’un vrai Monsieur. Un homme qui ne boirait pas, qui ne volerait pas et qui serait toujours poli. Il serait beau aussi, mais pas trop.

    Ce jour arriva et l’élu finit par avoir un nom : Henri Lafleur. Un vendeur de voitures usagées, quarante-huit ans, marié et père de trois grands enfants.

    Leur relation ne dura pas longtemps. Deux mois à peine et…

    — Penses-y comme il faut, ma belle Lizon, avait dit Henri. C’est pas juste toute ma vie à moé que tu vas gâcher, hein ? C’est la tienne avec.

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  • PREmiER TAbLEAU

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    — …

    — Mais t’as rien que seize ans, bon sang ! Quessé que tu veux faire avec un bébé ?

    Élizabeth pleurait, le vieux bafouillait. Découragé, il était reparti.

    La femme d’Henri n’entendit jamais parler de la première fille d’Élizabeth Hamelin, qui naquit sept mois plus tard. Le vieux Lafleur tenait à sa réputation.

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    CouvertureTitreFaux-titreCréditsDédicaceExergueLa romancière Jeanne Fournier est morte.Le Journal de JeannePremière partiePremier tableau – La bâtarde

    Quatrième de couverture