Extrait de la publication… · Le terme lui-même,une fessée, que pour ma part je trouve plus...

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Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptationréservés pour tous les pays, y compris l'U.R.S.S.

© Éditions Gallimard, 1973.

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« Frappez, et on vous ouvrira. »

Matthieu, VII, 7.

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Pourquoi

I

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Nous, je parle des hommes, ne fessons plusnos jeunes femmes. Peut-être même ne lesavons-nous jamais fessées. Cette abstention,cette carence est scandaleuse. Elle l'est parceque nous nous privons ainsi, et elles, d'unenseignement, d'un rapprochement et d'un

plaisir. Voilà de quoi je veux dire.Le rond derrière de la femme est une des

plus nobles conquêtes de l'homme. PierreMac Orlan, vers les années 1930, pour carac-tériser la sorte d'imbécillité, ou tout au moins

d'immaturité de l'un de ses personnages, rus-

taud soudain parvenu, note avec beaucoupde justesse que ce grossier en est encore àressentir comme risible la vue du derrière

d'une femme. Les mœurs ne se modifient

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que lentement, c'est certain, beaucoup pluslentement que les idées. Admettons, pourtant,que cette partie admirable, soyeuse et tendre,rebondie et gracieuse, et d'autant plus émou-vante qu'elle est profondément fendue, du

corps humain, ne nous porte plus à rire,sinon d'aise comme parfois dans les contes

arabes, mais bien plutôt nous communique-rait ce sentiment impérieux de constrictiondans la gorge, d'accélération du cœur, avec les

reins qui pour ainsi dire se tendent, et sour-dement fulgurent, tant elle est, avec exactitude

et somptuosité, belle, offerte et close sur soi,comblante et exaspérante, candide et, de façonpresque intolérable, provocante tant elle estinsultante, gaie, railleuse, sereine et perverse.

Le sexe de la femme,à nous, hommes, est

déjà plus familier. Dès longtemps nous leconnaissons, ou du moins le reconnaissons,nous l'avons apprivoisé ou nous nous sommes

apprivoisés avec lui, nous l'avons bientôtpénétré, tenu dans nos mains, dans nos rêveset dans nos lèvres. Nous l'avons investi tandis

qu'il nous poignait. Mais le derrière demeureloin de nous. Qu'est-ce à dire?

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Cette femme, la mienne pour aujourd'huiou pour toujours, se déshabille. Sa poitrineest mon pays. Je chérirais décidément AndréBreton, même en dehors de tout autre pré-texte, pour avoir fourni .comme raison d'uneobédience non inconditionnelle à certaines

applications du marxisme qu'il y a desseins tropjolis.

Oui! Et c'est vrai, cela va à peu près sansdire, pour tout ce qui est ma femme ses

épaules, ses bras, son ventre, le pulpeuxcoquillage renflé, rayonnant et sombre, par-tagé comme la suggestion d'une autre faille, deson sexe. Tout cela m'est intime et proche,même si ce soir seulement, ou au contraire

jour après jour je le désire à en perdre unegrande partie de mon bon sens, et l'haleine,tout à coup. Ma femme se tourne, ouje laretourne moi-même, qu'elle soit debout, surun lit ou sur mes genoux, comme une crêpechaude, une chaude gerbe. Vraiment je recon-nais très bien son dos, la face dorsale de

ses cuisses et de ses jambes, l'ombre pro-longée de son sexe. Ah! Oui, mais c'est lederrière merveilleux à quoi, bien sûr,je

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prétends en arriver, et qui constammentm'étonne. On dirait qu'il me foudroie, c'estétincelant et doux, qu'il déchaîne ma faim et

ma soif, à la fin me met en rage. En vérité ilfait de moi un fou, une créature retournée

comme le lapin qu'on dépouille, un canni-bale. Certes, depuis les temps psychologiqueset affectifs du héros de Mac Orlan, nous avons

inventé beaucoup à propos de derrière de

femme. Je ne ris nullement, je l'embrasse, je lesaisis et le lèche autant que je puis, je lecaresse,je le griffe,je le mords et le mangeégalement autant que je puis, je n'hésite pasun instant, ou guère qu'un instant à lui faire

l'amour. Cependant, plus que la profondeurvertigineuse et préhensile du sexe, il sembleque ce soient la convexité même du derrière,sa masse, son équilibre oppressant de rocherdense au-dessus du videqui me restent inacces-

sibles, à la fois si immédiats, je voudrais écriresi imminents de perfection et de présence,réellement comme la voûte du ciel et, réelle-

ment toujours comme celle-ci, lointains, déses-

pérants dans la mesure, ou dans la démesuremême où ils arrachent du plus enfoui de moi

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le cri extrême du sempiternel espoir de l'amour.Qu'y a-t-il là d'enfantin, vraiment? Je

pense que si quoi que ce soit au monde ajamais dû être la proie, et le destin, dequiconque se considère comme un homme,ou plus simplement se croit adulte, c'est bience derrière magique, bouleversant, à toutprendre miraculeux.

Cependant, nous ne fessons plus nos jeunesfemmes. Peut-être ne les avons-nous jamaisfessées.

Le terme lui-même, une fessée, que pour mapart je trouve plus charnel, plus suggestif etgentil, plus sournoisement brûlant que le motdont il dérive, les fesses, vraiment bien lourd

et bien laid, ce terme paraît n'être associé,dans et pour l'ésprit masculin, et plus sim-plement adulte, qu'à un certain monde del'enfance. Ou bien, encore, il peut l'être àune pure perversité, si ce n'est pas une per-version, à un penchant libidineux, avec toutce que ceux-ci impliquent de fléchissant et desénile, de malsain.

A un certain monde de l'enfance. Il est,

pour moi, fascinant de lire, lorsque je consulte

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le dernier en date de nos grands ouvrages lexi-cographiques, le Dictionnaire alphabétique etanalogique de Robert FESSÉE Coupsdonnés sur les fesses. Donner la fessée, Une

fessée à un enfant. Et plus loin FESSERBattre en donnant des coups sur les fesses.

Fesser un enfant pour le punir.Sacrebleu qu'est-ce, à la fin, qui a pu lier,

dans une majorité des esprits, le derrière, oucet usage délicieux que l'on en peut faire, etle monde de l'enfance, si étroitement que lesdeux exemples destinés à illustrer l'emploicourant, dans une langue, du premier, seréfèrent tous deux au second? Donner la

fessée, une fessée à un enfant. Mais, sacrebleu,

pourquoi pas à une femme, à la mienne, àla vôtre, ou même pourquoi pas à un hommesi l'on se soucie de logique, ce qui est moncas? Et fesser un enfant pour le punir! Jereviendrai sur ce concept de punition, lui aussisemble-t-il bien trop lié à l'idée charmantede fessée. Mais en le reconnaissant même,pourquoi, encore, un enfant? C'est absurde.Fesser un enfant pour le punir qu'est-ceque cela veut dire? A supposer que l'on ait,

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ou que la fessée ait en soi,. une vocationpunitive, pourquoi celle-ci s'adresserait-elle,avec cet enragé exclusivisme, à un enfant?Sommes-nous donc, en cette matière de der-

rière, des amateurs d'enfants? Ou bien les

femmes, voire les hommes si l'on se soucie de

logique, c'est-à-dire finalement de justice, cequi j'y insiste est mon cas, ne posséderaient-ilspas leurs propres derrières? Répétons haute-ment que c'est absurde. Les lexicographessont d'ailleurs les premiers à le savoir, quine manquent guère à nous citer, tout de

suite après leurs f essée et fesser, un exemplelittéraire illustre celui non de Jean-JacquesRousseau, bel et bien atteint, dans ses digni-tés fondamentales, lorsque en effet il était unenfant, mais du Candide de Voltaire, lequelse trouvait on ne peut plus adulte quandil eut l'heur d'être ainsi, et en cadence à.

en croire le texte, fessé.

Puis le caractère libidineux, qui définit,toujours selon Paul Robert qui s'abandonnesans pudeur à de bas appétits sensuels ouvicieux. Un vieillard libidineux. Je veux assu-rément croire que l'on ne compte plus les

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