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Actes du XXII Congrs AFM 11 & 12 mai 2006 - NANTES

EFFETS DES EVENEMENTS DENSEIGNE SUR LEXPERIENCE DE MAGASINAGE DES CONSOMMATEURS

Lionel SITZ *1

* Lionel SITZ est Doctorant en Marketing lUniversit Paris 12 Val de Marne, o il est Allocataire-Moniteur. Son champ de recherche concerne la marque et le comportement du consommateur. Il est membre du Laboratoire Marketing et Logistique de lIRG Paris 12. Contact : [email protected] - +33 (0)6 80 03 87 22 40, Rue Saint Lambert 75015 PARIS IRG - Institut de Recherche en Gestion - Universit Paris 12 Place de la Porte des Champs - Route de Choisy - 94000 Crteil - FRANCE

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Lauteur exprime sa gratitude la Chaire Marketing de la Distribution de la Reims Management

School pour son soutien technique et financier accord dans le cadre de la Bourse de Recherche Auchan. Il remercie galement les trois valuateurs anonymes pour leur remarques et suggestions constructives.

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EFFETS DES EVENEMENTS DENSEIGNE SUR LEXPERIENCE DE MAGASINAGE DES CONSOMMATEURSRsum : Cette recherche ethnographique tudie un nouvel outil de marketing relationnel utilis par le distributeur en vue de runir un groupe de consommateurs autour dune catgorie de produits : lvnement denseigne. Cette notion est dabord dfinie et clarifie, puis ses consquences sur lexprience de magasinage du consommateur sont prsentes et discutes.

Mots

cls :

vnement

denseigne,

exprience

de

magasinage,

marketing

relationnel,

consommation

EFFECTS OF RETAILERFESTS ON CONSUMERS SHOPPING EXPERIENCEAbstract: This ethnographic research studies a new marketing relationship tool used by the retailer in order to gather a group of consumers around a specific product category: the retailerfest. This notion is first defined and clarified then its consequences on consumers shopping experience are presented and discussed.

Keywords: retailerfest, shopping experience, relationship marketing, consumption activity

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INTRODUCTIONDans le secteur de la distribution, la dcouverte de nouvelles sources de diffrenciation et la fidlisation des clients lenseigne sont devenues de plus en plus difficiles, tant en raison des caractristiques de loffre que de la demande (Vargo et Lusch, 2004). Dans ce contexte dhyperconcurrence et de volatilit des consommateurs, la mise en place, par le distributeur, dune stratgie de marketing relationnel est dterminante pour augmenter la satisfaction de sa clientle et la fidliser durablement (Woodruff, 1997). La fidlit est dautant plus vue comme un facteur-cl de succs pour lenseigne quil est moins onreux de conserver les clients existants que den gagner de nouveaux (Stone, 1996). Pour ces raisons, le marketing relationnel est devenu la cl de vote des stratgies marketing des distributeurs. A lheure actuelle les outils relationnels employs consistent essentiellement en des programmes de fidlisation, bass sur des initiatives transactionnelles comme les cartes de fidlit (Benavent et Crie, 2001). Ces actions sappuient sur de puissants outils de tracking permettant de raliser des actions de marketing direct cibles (Stone, 1996). Ces oprations, qui forment le cur de la stratgie de marketing relationnel du distributeur, tendent augmenter la frquence et le montant des achats (Benavent et Crie, 2001 ; Sharp et Sharp, 1997) mais ne constituent plus aujourdhui un avantage concurrentiel durable du fait de leur banalisation. De surcrot, ils circonscrivent la relation du consommateur avec le distributeur dans un univers strictement marchand ; ils nintgrent pas les dimensions motionnelle et exprientielle de la consommation, pourtant dterminantes dans ltablissement dune relation durable (cf. Fournier, 1998 ; Holbrook et Hirschman, 1982). Pour tablir une relation durable, il est ncessaire quelle soit perue comme unique ou tout au moins particulire par le consommateur (Fournier, 1998 ; Fournier, Dobscha et Mick, 1998 ; Sheth et Parvatiyar, 2000). Lexprience vcue par les consommateurs dans le cadre de leur activit de magasinage est apprhende comme un moyen de crer une relation entre lenseigne et ses consommateurs (Bouchet, 2004 ; Caru et Cova, 2003). Le magasinage, dfini comme lactivit de visite dun point de vente avec ou sans intention dachat, peut en effet tre envisag travers lexprience quil propose aux consommateurs. Dans cette perspective, lexprience de magasinage constitue une activit de perception et de rception de donnes sensibles entre des consommateurs et un distributeur qui les informe, les reoit et/ou les pourvoit (Bouchet, 2004, p. 67). Il convient toutefois de distinguer lexprience de magasinage du comportement de butinage, ce dernier tant caractris par un non achat (Lombart, 2005). 1

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Conscients de lvolution du comportement des consommateurs, les distributeurs et les chercheurs sintressent de faon croissante latmosphre des points de vente (Donovan et Rossiter, 1982), au design des magasins (Hetzel et Morin-Delerm, 2002), au servicescape (Bitner, 1992 ; Sherry, 1998), au marketing sensoriel (Dauce et Rieunier, 2002 ; Jacob et Gueguen, 2002 ; Maille, 1999 ; Rieunier, 2001) et la prsence dautres consommateurs (Dion-Le-Mee, 1999). Les recherches mettent notamment en avant limportance de lexprience vcue par les consommateurs pendant lactivit de magasinage (Bonnin, 2002 ; Bouchet, 2004). Dans cette optique, lvnementiel est susceptible de participer la transformation de lactivit de magasinage par la construction dune composante motionnelle et exprientielle. Dans la stratgie marketing du distributeur, l vnementiel est traditionnellement apprhend comme lorganisation ponctuelle danimations commerciales et de dmonstrations en rayon dont le but affich est laugmentation immdiate des ventes. Ces oprations recouvrent des ralits diverses qui vont de lorganisation de semaines thmatiques (e.g. Nouvel An Chinois) la prsentation de produits en rayon. Dans le cadre de notre recherche, nous nous intressons une forme spcifique dvnement, qui inscrit la relation enseigne-consommateurs dans la dure et dpasse le cadre transactionnel habituel : l vnement denseigne . Nos objectifs sont de dfinir ce concept et de montrer en quoi il est la base dune (re)dfinition de la relation unissant le consommateur avec les parties prenantes lexprience de magasinage : lenseigne, le magasin, ses employs et les autres consommateurs. Plus prcisment, il sagit donner voir que la participation lvnement denseigne conduit le consommateur ajuster son apprhension de lexprience vcue en magasin. Il convient ensuite denvisager les implications marketing dcoulant de lorganisation de tels vnements pour le distributeur. Dans une premire partie, nous nous attachons clarifier le concept dvnement denseigne et en montrer linscription dans la stratgie relationnelle du distributeur. Nous exposons ensuite la mthodologie utilise pour rpondre la problmatique avant de prsenter les principaux rsultats obtenus. Enfin nous proposons une discussion des rsultats en vue de les lier entre eux et de montrer lopportunit des vnements denseigne pour les distributeurs.

LEVENEMENT DENSEIGNE : UNE CLARIFICATIONLvnement denseigne est un concept rcent qui sinscrit dans un courant de recherche en mergence (i.e. lexprientiel). Cette partie a pour objectif de clarifier ce concept. A cette

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fin nous proposons dans un premier temps une dfinition du concept. Nous abordons ensuite son inscription dans la stratgie de marketing relationnel du distributeur.

Dfinition du concept dvnement d'enseigneLa dfinition du terme vnement est un pralable essentiel avant denvisager le concept dvnement denseigne. Lvnement est ce qui se produit, arrive ou apparat ; il est par extension le fait, la circonstance1. Le terme vient du latin evenire, sortir, avoir un rsultat, se produire . Par consquent, lvnement est la fois le produit et le processus qui y conduit. Dans le cadre du marketing des produits, McAlexander et Schouten (1998) sintressent aux vnements organiss par des marques et introduisent le concept de brandfest2. Selon eux, certains marketeurs utilisent le sponsoring dvnements centrs autour de la marque (brandfest) pour renforcer la fidlit des consommateurs cette marque (McAlexander et Schouten, 1998, p. 378). Les recherches tendent galement montrer quen rassemblant un groupe donn de consommateurs autour de la marque, lentreprise a la possibilit de crer des liens forts et durables entre eux et avec les employs de lentreprise (McAlexander et Schouten, 1998 ; McAlexander, W. et F., 2002). Les entreprises qui mettent en place de tels vnements cherchent transmettre des connaissances leurs consommateurs et leur faire vivre une exprience en dehors de lactivit de consommation ordinaire (McAlexander et Schouten, 1998). Partant de cette notion de brandfest et en ladaptant lenseigne, nous proposons la dfinition suivante : lvnement denseigne est un rassemblement de consommateurs, organis linitiative du distributeur et anim par un ou plusieurs individus reprsentant lenseigne, dans un lieu dfini, se droulant une seule fois ou sous la forme de sances rgulires et dont lobjectif est de faire vivre aux participants une exprience en groupe autour dun produit, dune catgorie de produits ou dune activit de consommation pour lesquels lenseigne a une lgitimit. Sur la base de la dfinition propose, il faut noter que lvnement denseigne ne sassimile pas la communication par lvnement (Giannelloni, 1993). Les animations commerciales et dmonstrations ponctuelles en magasin, quelles soient animes par un

Le Petit Larousse Illustr. Le terme anglais fest noffre pas de rel quivalent en franais, dans la mesure o il dsigne le regroupement et loccasion du regroupement. Aussi avons nous choisi de retenir le mot |vnement| par lequel les auteurs caractrisent la brandfest. Lvnement dsigne ici la fois loccasion et un rassemblement.2

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employ du magasin ou un fournisseur, ne sont pas des vnements denseigne. Des oprations comme les foires leuro , les foires au bricolage ou encore les semaines thmatiques (e.g. semaine italienne , fte des Mres , etc.) ont pour objectifs premiers de gnrer du trafic en magasin, de stimuler les ventes des assortiments concerns et danimer le point de vente. Par contre, ces vnements festifs et/ou promotionnels (Bouchet, 2004, p. 55) nont pas pour priorit de rassembler les consommateurs ni de faire merger des liens entre eux et avec lenseigne, contrairement lvnement denseigne qui runit un groupe donn de consommateurs et ambitionne de leur transmettre des connaissances. Enfin, les modalits dorganisation des vnements denseigne peuvent varier. Ces oprations peuvent se drouler dans le point de vente ou lextrieur ; tre gratuites ou payantes ; tre animes par un employ de lenseigne ou un intervenant extrieur (e.g. un spcialiste du domaine concern). Pour des raisons de commodit, nous ntudions pas ici de manire dtaille limpact propre chacune des modalits dorganisation des vnements denseigne sur lexprience vcue en magasin.

Inscription dans la stratgie de marketing relationnelLa dfinition propose indique que les vnements denseigne sinscrivent dans la stratgie de marketing relationnel du distributeur. En effet, ces manifestations visent rassembler des consommateurs et les faire participer une exprience singulire. Ce faisant, elles permettent au distributeur de mieux connatre les participants, de les fidliser, dchanger avec eux en dehors de la relation transactionnelle habituelle et de leur communiquer des lments cls concernant ses valeurs, sa stratgie et son positionnement marketing. Autrement dit, les vnements denseigne constituent un outil relationnel prsentant un fort potentiel la fois pour le consommateur et le distributeur : ils sont mme, sur la base dun rassemblement volontaire et actif dun groupe de consommateurs, dagir sur leur exprience vcue en magasin et dtablir une relation enseigne-consommateurs durable. En outre, cette relation est diffrente des interactions transactionnelles habituelles, car elle repose sur une forte composante exprientielle et motionnelle instaure dans le cadre dun groupe. Cest pourquoi cette manifestation vcue avec lenseigne est mme de changer la nature et lintensit des liens unissant clients et distributeur et, par suite, de mettre en place des relations gagnant-gagnant entre ces acteurs. Il convient prsent denvisager la mthodologie adopte pour conduire notre recherche.

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METHODENous situant dans une perspective interprtative, nous avons choisi avec soin les cas tudis. Nos donnes ont t rcoltes laide dune mthode ethnographique complte par des interviews phnomnologiques. Ce corpus de donnes a ensuite fait lobjet dune analyse reposant sur une perspective hermneutique.

Recherche interprtative rflexiveLa perspective interprtative invite le chercheur voir travers les yeux de lobserv , cest--dire se rapprocher au plus prs de la perspective emic (Geertz, 1983 [1986] ; Sherry, 1991). Pour ce faire, le chercheur est gnralement loutil principal de la recherche et cest pourquoi il est ncessaire de mettre jour les lments susceptibles de biaiser lanalyse (Hirschman, 1986 ; Wallendorf et Belk, 1989). A cette fin, nous avons tenu un journal de bord pendant les 14 mois de notre recherche, notant lvolution de notre pense, nos rapports avec le terrain et la transformation de nos comportements lie notre participation aux vnements3. Comme le propose Jorgensen (1989), nous avons cherch moduler notre degr dimplication, afin doccuper des rles diffrents situs sur le continuum entre pur observateur et pur participant (Adler et Adler, 1987). Cette rsistance une implication progressive permet de limiter laveuglement ethnographique et diversifie les points de vue sur lobjet de recherche (Jorgensen, 1989). De plus, nous avons demand leur avis aux informateurs afin de confronter nos interprtations avec leurs impressions. Ils ont ainsi pu nous donner leur point de vue sur nos interprtations et nous ont permis daffiner les rsultats.

Choix des vnements tudisLtape de slection des cas tudier est fondamentale dans le processus de recherche (Eisenhardt, 1989). Il convient de sassurer dune reprsentativit qualitative en respectant un chantillonnage thorique (Eisenhardt, 1989 ; Glaser et Strauss, 1967 [1999], p. 45-77). Nous avons cherch des vnements prsentant des points communs et des diffrences. Les cas retenus concernent des enseignes gnralistes (Monoprix), spcialises (BHV, Fnac, Nature et Dcouvertes, Nicolas) et un grand magasin (Galeries Lafayette). Ils recouvrent des situations varies sagissant de leurs modalits dorganisation.

Nous avons not une modification de nos comportements de consommation (e.g. acquisition dune expertise) lie la frquentation de certains vnements denseigne.

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Pour ces 6 enseignes, nous avons observ une trentaine dvnements denseigne portant sur : le bricolage et la dcoration au BHV, la cuisine et les arts de la table aux Galeries Lafayette, les logiciels photographiques la FNAC, lnologie chez Monoprix et Nicolas, et enfin les encens et parfums chez Nature & Dcouvertes. Lensemble des cas tudis, leurs caractristiques et modalits dorganisation ainsi que les mthodes de recherche employes pour chacun deux sont prsentes dans lAnnexe 1 (A1).

Rcolte des donnesCe travail repose sur une recherche ethnographique de quatorze mois (mai 2004 juin 2005), complte par des entretiens phnomnologiques avec dix informateurs, et portant sur une trentaine dvnements organiss par six enseignes. Cette mthode a t retenue en raison de sa capacit saisir les dimensions affectives et motionnelles de lexprience (Bouchet, 2004) qui constituent le cur de cette recherche.

Observation participanteLa mthode ethnographique vise rvler la signification culturelle et linterprtation donnes par les acteurs impliqus une exprience vcue (Arnould et Wallendorf, 1994). Elle est particulirement adapte dans le cadre de comportements de consommation se droulant dans des lieux dfinis (Pealoza, 2000 ; Sherry, 1990) et aux expriences des consommateurs lintrieur des servicescapes (Bitner, 1992, p. 68 ; Sherry, et al., 2001, p. 471). Nous avons examin les comportements (prsentation de soi, interactions entre participants, etc.) sur le terrain suivant une grille dobservations construite au fur et mesure. Nous avons galement men des entretiens informels avec plus de quarante participants et avec les animateurs des vnements. Ces discussions nous ont permis dinterroger les participants sur les interprtations donnes lvnement denseigne et les changements induits ; et de questionner les animateurs sur les objectifs et modalits dorganisation des vnements4 afin dapprhender la reprsentation organisationnelle de lvnement. En outre, nous avons discut de manire informelle avec des participants diffrents intervalles pour apprhender les changements induits par lvnement sur leurs comportements. Nous avons galement discut avec des animateurs dvnements pour obtenir leur point de vue sur les modifications comportementales des participants. La participation aux vnements stant

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Ceci nous a permis de nous rendre compte combien les rapports de pouvoir au sein de lorganisation jouent un rle dans lorganisation dvnements denseigne.

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prolonge dans le temps, il a t possible de sassurer de la durabilit des changements induits par les vnements tudis. Les observations sont rassembles dans un document de plus de cent cinquante pages (sans inclure le journal introspectif du chercheur). Ce document retrace les observations menes lors des vnements denseigne tudis, constituant une quarantaine dheures dobservationparticipante. Dans le double but denregistrer les comportements sur le terrain et de pouvoir les reprsenter (Collier et Collier, 1986 ; Pealoza, 1999), nous avons pris une cinquantaine de photographies lors des vnements observs. Ces donnes visuelles nont pas servi de donnes principales mais plutt de matriel facilitant la rflexion. Afin daccder linterprtation de lexprience vcue par les participants et de trianguler les donnes, nous avons complt ces donnes par des entretiens formels avec des participants.

Entretiens phnomnologiquesDans le cadre dune recherche interprtative, Thompson et alii. (1989) proposent dutiliser des interviews phnomnologiques visant atteindre une description la premire personne dun domaine spcifique de lexprience. Ce type dentretiens ne repose pas sur lutilisation dune grille dentretien structure mais essaye de sadapter aux registres et thmes mobiliss par linformateur (Thompson, Locander et Pollio, 1990 ; Thompson, Pollio et Locander, 1994). Les entretiens ont pour fonction dapprofondir les rsultats obtenus par le biais de lobservation participante. Nous avons ralis dix entretiens phnomnologiques5 avec des informateurs (huit participants et deux animateurs) choisis dans un souci de reprsentativit qualitative (Lfgren, 1998 ; Thompson, 1996 ; Thompson, Locander et Pollio, 1990). Ceux-ci ont t recruts sur le lieu de lvnement aprs une premire discussion informelle. Nos informateurs sont gs de 21 60 ans, en majorit des femmes (60%) et dans 80% des cas des participants. Ces entretiens ont dur de 50 90 minutes et ont t intgralement retranscrits afin dtre cods. La participation du chercheur aux vnements denseigne pouvant apparatre comme un biais dans la dynamique dentretien, nous avons interrog une participante un vnement denseigne auquel nous navons pas particip. Ceci nous a permis dapprcier lapport de la

Les prmisses sur lesquels reposent les entretiens phnomnologiques sont rapprocher de ceux des entretiens comprhensifs (Kaufmann, 1996 [2004]) ou ethnographiques (Spradley, 1979).

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mthode ethnographique en comparant cet entretien aux autres. De plus nous avons interrog une informatrice ayant particip deux des vnements denseigne tudis, afin de saisir la vision mic du droulement et des consquences respectives de deux vnements diffrents.

Analyse des donnesLes donnes ethnographiques ont t agrges dans une description dense et les entretiens ont fait lobjet dune analyse hermneutique supple par une analyse thmatique de contenu.

Description denseEn ethnographie, lanalyse des donnes commence pendant leur rcolte et lobservation se cristallise au fur et mesure du travail de terrain (Arnould et Wallendorf, 1994). De plus linterprtation des donnes relve dun processus rcursif qui lie la rcolte des donnes avec linterprtation tout au long du processus de recherche (Spiggle, 1994). Suivant ces principes, nous avons construit des interprtations pendant la collecte des donnes. Celles-ci ont t en permanence confrontes avec les nouvelles observations pour en prouver la robustesse. Ainsi lhtrognit des vnements observs a t une source denrichissement de linterprtation comme lindiquent Arnould et Wallendorf (1994, p. 494). Litration interprtative doit permettre de construire une description dense (thick description) de la ralit culturelle observe qui consiste en une reprsentation de lenvironnement culturel observ6 (Geertz, 1973). Lintrt du chercheur se focalise alors sur la faon dont le sens est construit, peru, manipul et dplac par les individus (Geertz, 1983 [1986], p. 192).

Analyse hermneutique des entretiensLes entretiens phnomnologiques doivent tre interprts laune de principes prcis (Thompson, 1996 ; Thompson, Pollio et Locander, 1994). Thompson (1997) propose de recourir un cadre hermneutique pour les analyser, rejoignant ainsi ce que Ricur a appel la greffe du problme hermneutique sur la mthode phnomnologique. (Ricoeur, 1969, p. 7). Linterprtation cherche vaincre une distance, un loignement culturel (Ricoeur, 1969, p. 8), rendre visibles les niveaux de signification engags dans la signification et rechercher une cohrence dans linterprtation. Comme lindique Thompson (1997, p. 451), lanalyse hermneutique dentretiens peut tre un complment intressant lanalyse ethnographique, car elle permet davoir accs 6

Cest ce titre que le combat de coqs prsent par Geertz (1973, p. 412-453) constitue une description dense .

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ladaptation de lenvironnement culturel aux contingences de lexprience personnelle. Elle offre un accs privilgi au vcu du consommateur par le biais de sa mise en rcit. Pour coder les entretiens, nous avons utilis un logiciel danalyse qualitative des donnes inspir de lapproche hermneutique : Atlas-Ti. Ce codage a conduit la cration dun nombre important de codes (plus dune centaine), ensuite fusionns et regroups par familles de sens afin de construire graduellement des catgories exclusives. Cette tape effectue, nous avons repris cette liste de catgories et avons men une analyse thmatique de contenu.

Analyse thmatique de contenuLanalyse thmatique de contenu vise classer des units de codage (ici les phrases) dans des catgories pr-spcifies dans le but dassurer une analyse sinon objective, tout au moins objective permettant un dcoupage transversal et une cohrence thmatique inter-entretiens (Bardin, 1973 [2003] ; Kassarjian, 1977). Elle permet de dtricoter la spcificit cognitive et affective des personnes singulires (Blanchet et Gotman, 1992 [2001], p. 98). Nous avons utilis un deuxime codeur indpendant afin de calculer un coefficient daccord intercodeurs et ainsi sassurer de la fiabilit de lanalyse. La liste des codes issue de lanalyse hermneutique a servi de base la construction de la grille de codage. Le premier codeur a cod sept entretiens et le deuxime trois ; un entretien commun aux deux codeurs a permis le calcul du coefficient daccord intercodeurs. Le coefficient daccord intercodeurs retenu est le coefficient dagrment kappa de Cohen, largement retenu dans les recherches en marketing (Hughes et Garrett, 1990). Dans notre cas, le coefficient est suprieur 88 % (88,428), attestant dune bonne fiabilit du codage des entretiens sur la base de la grille danalyse. Les dsaccords ont ensuite fait lobjet de discussion pour en comprendre les causes.

RESULTATSLes rsultats sont structurs autour du rle de lvnement denseigne dans la (re)dfinition de la relation unissant le consommateur et les autres parties prenantes lexprience de magasinage. Ainsi, trois aspects fondamentaux sont successivement abords. Ces aspects ont en commun de montrer que les vnements denseigne sont la base dune (re-)dfinition de la relation unissant le consommateur avec les parties prenantes lexprience de magasinage : lenseigne, le magasin, les employs et les autres consommateurs. Plus prcisment, les vnements denseigne redfinissent lexprience de magasinage en tant quils participent lmergence dun sentiment damiti commerciale, la modification des rapports lespace de vente et la cration dun nouvel espace de sociabilit. 9

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Emergence dun sentiment damiti commercialeLa notion damiti commercialePrice et Arnould (1999) dcrivent l amiti commerciale comme une relation damiti mergeant dune relation de service, impliquant de laffection, de lintimit, de la confiance et des dons mutuels. Selon ces auteurs, la relation de service fournit une opportunit majeure pour lmergence de ce type damiti. Lvnement denseigne implique une grande proximit des participants avec un animateur-formateur. Ce dernier peut tre un employ de lenseigne ou un expert dans la catgorie de produits concerne. Fort de cette proximit avec le groupe de consommateurs, il peut devenir une connaissance, un ami. Dans ce cas, la relation du consommateur avec lanimateur et le magasin nest plus soumise aux mmes rgles ni aux mmes attentes : elle est incluse dans un univers rfrentiel diffrent. La dimension commerciale de la relation est recouverte dun habillage social (Remy, 2000) constitu par une relation damiti. Il sagit alors dun encastrement de lchange commercial dans une relation amicale. Il convient de prsenter les lments qui se trouvent lorigine de la naissance de ce sentiment : les comptences, qualits et fonctions de lanimateur, le partage dun savoirpassion commun avec les participants et la mise en place dune relation de proximit entre animateur et participants.

Importance de lanimateur dans lmergence dune amiti commercialeLe lien entre les participants et lanimateur joue un rle cl dans lexprience vcue par les participants (Arnould et Price, 1993). Lanimateur apparat comme une figure tutlaire dans le droulement de lvnement (Arnould, Price et Otnes, 1999) et contribue sa russite. Pags (1984) indique que lanimateur dun groupe est par de qualits particulires et quil est lobjet de transferts dordre psychanalytique par ses membres. Toutefois, pour quune relation profonde de ce type naisse entre participants et animateur, il est ncessaire que le groupe se rencontre plusieurs fois (Fine et Holyfield, 1996 ; Harrington et Fine, 2000). Cest pourquoi, le rle des vnements denseigne dans la cration de relations avec ses consommateurs est plus important dans le cadre dvnements rguliers (Galeries Lafayette, Monoprix, Nicolas). Comme tout employ de lenseigne (Pontier, 1997), lanimateur est le porte-parole de lenseigne : il est, durant lvnement, le point de contact physique entre consommateurs et enseigne et un diffuseur de connaissances. Par rapport aux interactions commerciales traditionnelles, lvnement denseigne permet donc de vhiculer plus facilement limage de lenseigne, ses valeurs et finalement dasseoir sa lgitimit pour la catgorie de produits 10

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concerne. Par ailleurs, ce rle de porte-parole permet de personnifier la relation consommateurs-enseigne et dy intgrer une dimension affective susceptible dvoluer vers une relation damiti. Moi, le rayon vins de Monoprix cest [animateur], cest comme Ducros qui se dcarcasse pour les pices, ils ont mis un personnage presque Et a me semble moins froid. (Brigitte, 35 ans, Cours dnologie Monoprix et Nicolas) [Animateur] donne un conseil une participante, lui explique que son chec est normal. Il sourit et lui dit : Il fallait venir me voir ! Chez BHV on aide toujours les gens. Elle sourit. (Journal dobservations, vnement BHV)

Enfin, la capacit de ce porte-parole trouver un quilibre entre transmission du savoir et prescription est un facteur important dans lmergence dun sentiment damiti, capable dhabiller socialement la relation et de lextraire du cadre marchand traditionnel. Labsence de vises explicitement commerciales est un lment essentiel pour la naissance dune amiti commerciale. Cest pas le sommelier Monoprix qui essaie absolument de vendre ses bouteilles parce quil pense son chiffre daffaires. Il y a vraiment Oui, je pense que cest a, il y a vraiment lamiti qui est entre en jeu. (Sophie, 27 ans, Cours dnologie Monoprix)

Partage dun savoir-passion Lamiti commerciale repose galement sur le partage dun savoir commun. Les vnements denseigne tudis mettent en vidence un phnomne de transmission dun savoir. Ils sont organiss sous forme de cours ou de runions caractre pdagogique visant transmettre aux consommateurs des connaissances sur une catgorie de produits. Cette volont de diffuser et partager en groupe un savoir apparat rgulirement dans le discours des animateurs/organisateurs et des participants : Je crois que a vient de mon travail de caviste Non, peut-tre que cest d mon caractre. Je pense que jaime bien transmettre ma passion pour le vin. Voir les gens dguster le vin avec plaisir. (Animateur de lvnement Monoprix) Elle [participante] mexplique quelle ne connaissait absolument rien concernant lhuile dolive. Le cours lui a appris beaucoup de choses et lui a donn envie daller acheter un livre sur le sujet. Elle a achet trois bouteilles dhuile dolive depuis la semaine dernire [date de lvnement sur lhuile dolive]. (Evnement Galeries Lafayette, Journal dobservations)

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Grce cette transmission et ce partage dun savoir commun, les participants acquirent des connaissances et une meilleure comprhension de la catgorie de produits. Comme tout groupe social, les participants en viennent partager une culture commune, base sur le savoir transmis par lanimateur (Fine, 1979 ; Harrington et Fine, 2000). Le savoir transmis devient alors un savoir-passion . Selon les animateurs, cette transmission dun savoir-passion a pour but, de mieux vendre , cest--dire vendre des produits de meilleure qualit, des prix adapts (animateur Galeries Lafayette, Journal dobservations). Jai eu envie de transmettre mes connaissances aux consommateurs afin que ceux-ci puissent mieux connatre le vin et ainsi mieux en profiter et mieux acheter. (Animateur de lvnement Nicolas)

Relation de proximit entre animateur et participantsOutre le rle jou par lanimateur et le partage dun savoir commun, la construction dune relation de proximit entre animateur et participants est la troisime tape de lmergence dun sentiment damiti commerciale. Une relation de proximit stablit notamment grce la (re)connaissance des participants par lanimateur. En plus jaime bien y aller parce que je sais que tiens, je vais rencontrer [animateur] et que je vais lui faire un petit coucou, mme en semaine salut comment a va, quest-ce que tu deviens ? Bon voil. Jy vais, jsuis reconnue et voil on me connat, mme si cest un mot. (Sophie, 27 ans, Cours dnologie Monoprix) Ca permet de mettre un visage sur les clients. Aprs, les clients, on les connat. On sait qui ils sont, ce quils font. Ils font un peu partie, de nos amis, oui, de nos amis , Explique lanimateur. [] Ils [les clients venant aux dgustations] ne sont pas pareils pour nous ! On connat leurs prnoms. (Animateur des sances nologie Nicolas, Journal dobservations)

Cette proximit permet dinstaurer une relation singulire entre animateur et consommateur, et, comme lanimateur est un porte-parole de lenseigne, entre enseigne et consommateur. Lanimateur devient un conseiller sur lequel les participants ont tendance prendre exemple. Cet aspect est particulirement intressant pour lenseigne qui peut ainsi orienter le choix de ses clients par lintermdiaire de son animateur. Etant donn que [animateur] est l pour conseiller et je sais que lui, il a got tous les vins et quil est vraiment trs, en plus, trs honnte, un vin qui vraiment na pas de bon rapport qualit-prix, il me le dira, etc. Oui, cest agrable de davoir quelquun quon

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connaisse bien qui on peut faire confiance. (Sophie, 27 ans, Cours dnologie Monoprix) Cest un professionnel, donc je prends exemple sur lui, les produits quil trouve bien [] jachte en fonction de ce quil a conseill pour des choses identiques ou similaires dont on a parl pendant les cours. (Bernard, 60 ans, Cours dnologie Monoprix)

La relation de proximit instaure entre lanimateur et les participants se traduit aussi par la perception dun traitement de faveur qui conduit une plus grande satisfaction des participants vis--vis de lenseigne. Dailleurs, les participants mettent rgulirement en avant leur statut privilgi et se sentent traits diffremment.[Lanimateur] est en train de conseiller un homme dune quarantaine danne. [Le participant] regarde pendant ce temps le rayon des vins de Bourgogne. [Lanimateur] laisse le premier client, vient vers [le participant], lui sert la main, lui demande des nouvelles de sa femme. Ils discutent un moment. [Lanimateur] conseille un Bourgogne parce quil est bon . (Journal dobservations, Monoprix)

Cette perception est dterminante dans lmergence dune amiti commerciale, puisquelle repose sur lentraide et les dons mutuels (Price et Arnould, 1999). Lamiti commerciale entrane un rapport au magasin et lenseigne bas sur des facteurs motionnels et affectifs.

Nouveaux rapports lespace de venteLes vnements denseigne conduisent les participants redfinir leurs rapports lespace de vente. Cela passe par une exprience extraordinaire , qui cre un sens diffrent pour lespace de vente.

Une exprience extraordinaire Lvnement denseigne donne la possibilit au distributeur de faire vivre une exprience extraordinaire ses clients (Arnould et Price, 1993). Lexprience extraordinaire est gnralement due la mise en place de rituels, qui entranent un sentiment de communitas (Arnould et Price, 1993 ; Turner, 1969 [1990]). Ce type dexprience est gnralement vcu dans le cadre dune consommation hdonique, mais peut galement ltre dans un cadre plus classique. Lvnement denseigne qui se droule en magasin, que ce soit durant les heures douverture ou en dehors, permet au consommateur denvisager le point de vente dans une nouvelle perspective et selon des rapports de force nouveaux.

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Les sances ont lieu en dehors des heures douverture : 20h30. [] Les participants passent par la porte rserve aux livreurs et non pas par lentre du magasin [par laquelle pntrent normalement] les consommateurs pendant la journe. Lindividu suit un itinraire semblable au circuit emprunt par les marchandises et se constitue par l en participant de lvnement. [] Par ailleurs, le magasin se transforme [cf. Figure 1] : les rayons avec les bouteilles en promotion [se situant au centre du magasin] sont mis de ct. On les remplace par des caisses rassembles qui, recouvertes dun plateau, servent de table o sont poss des verres, des petits fours. Les participants sassoient autour. La dgustation se droule dans le magasin, au milieu, mais lespace ne ressemble pas lespace commercial habituel. (Observation, vnement Nicolas, Journal dobservations)

Figure 1 : Transformation du magasin Nicolas en espace de dgustation

Par suite, il est essentiel de souligner que lvnement denseigne qui ne se droule pas dans le point de vente ne permet pas de faire vivre cette exprience en magasin. Il a donc un potentiel plus limit en termes de modification de la symbolisation du point de vente. Dailleurs les vnements denseigne en dehors du magasin engendrent gnralement un niveau de satisfaction moins important. Ainsi, les participants aux vnements denseigne Fnac et Nature & Dcouvertes nont pas t satisfaits par le choix du lieu de lvnement et soulignent la froideur du contexte dexprience. En fait, ces manifestations ne sont pas interprtes comme des vnements denseigne mais plutt comme une offre de service de la part de lenseigne. Il ny a pas de congruence suffisamment forte entre lvnement en luimme et lexprience de magasinage qui se droule dans le point de vente. Parce que cest un peu trange, on se dit, ah, je vais aller chez Nature et Dcouvertes, je vais tre forme Ah, non, on memmne dans une salle de classe toute blanche, dans

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le Grand Palais. Je ne comprends pas, cest qui qui me forme, comment a se passe ? (Nathalie, 30 ans, Nature & Dcouvertes)

Crer un sens diffrent pour le lieu de venteLa modification de lespace de vente habituel est opre par le biais dun rituel (Turner, 1969 [1990]) qui permet lindividu de passer dun rle de consommateur celui de participant et de parer le magasin de significations non marchandes. Ceci est notamment ralis par la mise distance des marchandises, leur recouvrement par des artefacts destins la dgustation et le dtournement de lespace de vente. La mise en scne de lespace de vente entrane un ajustement des rapports entre les parties prenantes lvnement. La relation dyadique habituelle entre client et enseigne devient un rseau complexe de relations. Ceci conduit un processus dencastrement qui dpasse lencastrement de lconomique dans le social (Granovetter, 1985) et met en jeu un tissu de liens conomiques, sociaux, culturels et matriels plus durables que la relation marchande habituelle. De telles relations sont gnralement le propre des circuits de distribution traditionnels , dits de proximit (De La Pradelle, 1996 ; Hassoun, 2005) et sont aujourdhui quasi inexistantes dans la distribution moderne , dont le mode de fonctionnement principal repose sur le libre-service (Debril et Dubuisson-Quellier, 2005 ; Miller, 1998). Suite lvnement denseigne, le signifi que constitue lespace de vente est associ un nouveau signifiant par un mouvement de dplacement du sens (Derrida, 1967). Tu ne sais pas que lors des cours, la caisse est ferme ? Nicolas ne vend rien pendant les cours, sinon, ce ne serait pas la mme chose ce serait un truc commercial ! (Discussion lors de lvnement Nicolas, Journal dobservations)

Lvnement denseigne modifie les rapports des participants lenseigne dans la mesure o il participe la modification du sens, traditionnellement marchand, du lieu de vente. La mise en discours de lexprience indique que le servicescape cre une ambiance propice ltablissement de contacts entre les participants, qui se retrouvent alors comme des amis . Par le biais de lvnement, lenseigne apporte un surcrot de valeur signifiante la mise en scne existante : elle recre une atmosphre. Monoprix a par exemple chang de lieu pour le droulement de ses sances dnologie : initialement ralises au bar vins du sous-sol, elles se droulent maintenant dans un espace marchand (i.e. non thmatis). En fait, ctait au sous-sol du magasin, jy reviens parce que a a quand mme de limportance, je trouve, le lieu, aussi parce que latmosphre a fait partie de la dgustation pour moi, donc il y avait le bar vins qui tait assez sympa, cest vrai que a

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donnait une bonne ambiance, une ambiance un peu bistrot, une ambiance un peu comme des amis qui se retrouvent autour dun verre et jai bien aim . (Sophie, 27 ans, Cours dnologie Monoprix)

En outre, le dplacement de signification du servicescape interagit fortement avec lamiti commerciale. Un transfert de signification seffectue entre le lieu de dgustation, peru comme un espace social, et lespace marchand, conu comme un non-lieu (Auge, 1992). Les dgustations a humanise, a nous rend sympathique le magasin explique [participante] Oui, souvent dans les magasins Nicolas on trouve toujours les mmes vendeurs. Ici ils sont diffrents. Ce sont des amis. On les aime bien. Le magasin devient diffrent ! Rajoute [participante]. (Observation de lvnement Nicolas, Journal dobservations)

Ainsi, les vnements denseigne conduisent lmergence dune amiti commerciale et la redfinition des rapports lespace de vente. Agissant au double niveau interindividuel et collectif, ils sont galement lorigine de la cration dun nouvel espace de sociabilit.

Cration dun nouvel espace de sociabilitLvnement denseigne cre un nouvel espace de sociabilit en suscitant un sentiment didentification et dappartenance un groupe et en constituant un nouveau rseau social non circonscrit lespace de vente ou la dure de lvnement.

Sentiment dappartenance et didentification un groupeLvnement denseigne permet de vivre une exprience en groupe. Ce phnomne dpasse lamiti commerciale, qui est une relation bilatrale entre animateur et participant(s), et inscrit lexprience vcue individuellement dans un groupe. De ce fait, lvnement denseigne en modifie la perception par les participants qui linterprtent laune des ressources interprtatives lies au groupe (Thompson, 2005 ; Turner, 1987). Plus prcisment, lactivit commune dans le cadre dun espace marchand entrane la cration de liens entre les consommateurs (Sherry, et al., 2001) et permet de renforcer le sentiment dappartenance et didentification au groupe (Bhattacharya, Rao et Glynn, 1995). Lintrt commun des participants pour le thme de lvnement apparat comme un trait commun entre les participants qui les fdre le temps de lvnement. Lorsque lvnement se poursuit sur une dure assez longue et/ou intervalles rguliers (mensuel, hebdomadaire), ceci peut conduire une identit commune et chaque sance est vcue comme un rituel (Turner, 1987 ; Turner, 1969 [1990]). Interrogs sur le droulement 16

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dun vnement sriel, les participants mettent en avant son aspect rptitif ( les sances cest un petit peu toujours pareil , Ca se droule toujours de la mme faon ). Par contre, lorsque lvnement est organis de manire ponctuelle, voire unique, ou rassemble des participants diffrents chaque sance, il est rare que les participants interagissent sur des sujets extrieurs lvnement. Les discussions restent alors centres sur la catgorie de produits concerne par lvnement et ne dpassent que rarement le stade des discussions de courtoisie (Goffman, 1967 [1974]). Il ne se cre pas de lien particulier et leur relation ne dure que le temps de lvnement.

Constitution dun nouveau rseau socialLenseigne constitue naturellement un sujet de conversation privilgi pendant la dure de lvnement. Ceci est particulirement prgnant dans nos notes dobservations : les discussions sur latmosphre des magasins, les comportements des employs, les cartes de fidlit, etc. sont nombreuses. Assez rapidement, les thmes des conversations slargissent. Les participants apprennent se connatre, se ctoient frquemment et en viennent changer sur des sujets autres que la catgorie de produits concerne par lvnement denseigne. Par consquent, ils redfinissent leur interprtation de lespace commercial en prenant en compte sa dimension sociale (Latan et Liu, 1996). Lvnement denseigne long et/ou rcurrent contribue encastrer la relation lenseigne dans un rseau social dont il est lorigine. Les participants un vnement long et/ou rcurrent crent un nouveau rseau social qui se dtache de lvnement pour devenir un groupe damis . Nous avons ainsi observ des participants qui, stant rencontrs dans le cadre dun vnement denseigne, se rencontrent rgulirement en dehors du cadre de lvnement et pratiquent des activits communes, comme le confirme une informatrice : Jai rencontr des personnes qui habitaient le quartier et qui venaient peu prs pour les mmes raisons que moi, qui voulaient dcouvrir le vin. Donc on a fini par se connatre, par sapprcier et finalement par constituer un petit groupe damis, donc a aussi ctait un lment qui ma bien plue (Sophie, 27 ans, cours dnologie Monoprix)

DISCUSSION : IMPLICATIONS MARKETING POUR LE DISTRIBUTEURNos rsultats soulignent que les vnements denseigne redfinissent lexprience vcue en magasin sous laction simultane de trois effets interdpendants agissant au double niveau interindividuel et collectif : lmergence dun sentiment damiti commerciale, la modification des rapports lespace de vente et la cration dun nouvel espace de sociabilit.

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Il convient prsent de discuter ces rsultats, en soulignant leurs implications marketing pour le distributeur. Le consommateur qui participe aux vnements denseigne se considre comme un client privilgi et mieux servi, et son niveau de satisfaction augmente sensiblement. Cela se traduit par des effets marketing notables pour le distributeur : conqute et fidlisation de clients, lvation du panier moyen dachats dans la catgorie de produits, amlioration de limage de lenseigne et mise en place dun bouche--oreille positif faisant passer les participants du statut de consommateurs celui dambassadeurs de lenseigne.

Conqute et fidlisation de clientsCertains participants aux vnements denseigne ntaient pas clients du distributeur avant la manifestation, tout au moins pas dans la catgorie de produits concerne. Dautres ne consommaient aucun produit de cette catgorie avant leur participation. Les vnements denseigne prsentent donc un important potentiel dattraction puisquils sont capables de conqurir de nouveaux clients malgr des frais dorganisation, gnralement minimes. La propension attirer, sduire et conqurir de nouveaux consommateurs est en grande partie due au fait que les vnements denseigne modifient les comportements dachat et de consommation via lducation du consommateur et quils font voluer linterprtation donne par les participants lexprience de magasinage. Pour que lvnement denseigne permette dlargir sa base de clientle, il est important que lenseigne soit lgitime concernant le produit ou la catgorie de produits en question. A cet gard, lexemple de Bernard rvle le potentiel dattraction des vnements denseigne. Ce consommateur ralisait lessentiel de ses achats de vins directement auprs des producteurs ou dans les circuits spcialiss et ne frquentait jamais les magasins Monoprix. Depuis sa participation aux runions nologiques de lenseigne, il y achte ses vins et y fait rgulirement ses achats alimentaires : [] je nallais jamais acheter de vins chez Monoprix. Donc la limite, le fait dorganiser ces sances, a permet Monoprix de gagner des clients. Et cest vrai que la partie du ct alimentaire, cest depuis cette opration que jy vais. On vient acheter du vin ici souvent depuis quon fait des dgustations. Moi avant, je ne mintressais pas au vin parce que je ny connaissais rien, explique [participante]. (Discussion lors de lvnement Nicolas, Journal dobservations)

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De manire gnrale, les clients qui participent aux vnements denseigne forment un groupe de clients particulirement fidles lenseigne et au point de vente. La participation lvnement denseigne augmente gnralement cette fidlit. A contrario, les effets peuvent tre ngatifs en termes de fidlit si le participant nest pas satisfait. Ainsi cette participante, due par lvnement Nature & Dcouvertes : Curieusement, depuis, en tant que consommatrice, jy vais moins je pense que comme jai t un peu due, je me suis dit Ah ! Mais pourquoi forcment aller chez eux ? (Nathalie, 30 ans, Nature & Dcouvertes)

Elvation du panier moyen dachatsPour un distributeur, lorganisation dun vnement denseigne vise crer une relation durable avec des consommateurs, les fidliser et amliorer les ventes, cest--dire augmenter la valeur moyenne des achats effectus par les participants dans la catgorie de produits. Les participants observs, impliqus dans la catgorie de produits, modifient leurs comportements de consommation : ils consomment davantage, en quantit et/ou en qualit.Participant 1 : Avant je nachetais que deux trois bricoles ici, maintenant jachte beaucoup plus. Participant 2 : Pareil. Moi je ne prenais rien et maintenant oui. Regardez, jai pris les marteaux quil nous a conseills la dernire fois. Ils sont plus chers, mais il a dit quils taient mieux. [Participant 2] (Montre son panier avec trois marteaux et deux pinces pour le travail des carreaux.). (Evnement BHV, Journal dobservations)

Image de lenseigneOutre limpact sur les habitudes de consommation et dachat, les vnements denseigne participent lamlioration de limage du point de vente et de lenseigne. Nombre de participants observs et interrogs indiquent quils ont une bonne et/ou une meilleure image de lenseigne et/ou du groupe de distribution depuis leur participation aux vnements denseigne. Lenseigne, grce ces oprations, parvient communiquer, de manire plus efficace, sa mission et ses valeurs aux consommateurs et lgitimer son discours institutionnel. En raison de laugmentation du nombre d initiatives citoyennes , dengagements pour un dveloppement durable et la gnralisation dactions socitales , les distributeurs peinent tablir la lgitimit de leur propre discours institutionnel (Arnold, Kozinets et Handelman, 2001). Lvnement denseigne apparat

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comme un nouveau moyen de transmettre, in situ, son discours auprs dun groupe de consommateurs7 et ainsi de le lgitimer. Donc voil, mon rapport en fait a chang, parce que maintenant, pour moi, il y a plus de lien entre leur activit marchande et puis finalement leur mission, leurs valeurs. Je trouve a bien, je trouve que cest plus cohrent Ca a chang la relation que jai eux, je trouve que cest trs bien ce quils font par rapport lenvironnement, au dveloppement durable et puis ils vivent vraiment leur mtier, leur vocation fond (Nathalie, 30 ans, Nature et Dcouvertes) Depuis que je fais les dgustations, je trouve que Nicolas est une enseigne super. (Discussion, vnement Nicolas, Journal dobservations)

En outre lvnement denseigne offre la possibilit de recueillir directement les questions, avis, suggestions et prfrences des consommateurs et de remonter ces informations du terrain aux managers marketing et commerciaux. Lanimateur Nicolas recueille par exemple lavis des participants sur la mise en rayon des produits et procde un vote des vins dgusts dans le but de constituer un classement des consommateurs .

Ambassadeurs de lenseigne : bouche--oreille positifLes vnements denseigne ont galement des implications marketing sur la communication interpersonnelle. En effet, les participants procdent souvent un bouche-oreille positif auprs de leur entourage. Ils communiquent autour de cet vnement et, dans beaucoup de cas, convainquent leurs proches de participer un de ces vnements ou daller dcouvrir lenseigne ou un de ses points de vente.La femme raconte sa voisine quelle a convaincu son mari de laccompagner pour quil voit comment se passent les cours. Elle poursuit en disant quelle a conseill ces cours toutes ses amies . (Evnement BHV, Journal dobservations)

Certaines des personnes observes, participants assidus et trs fidles lenseigne, se posent ainsi en vritables ambassadeurs de lenseigne. Dailleurs ils devraient membaucher parce que je leur fais de la super pub ct, parce que jen parle dans ma Vininfo, ma newsletter. Forcment, sans le vouloir, on est des ambassadeurs. On dit oui, moi mon Monoprix ct de chez moi il est bien parce

Le groupe de participants apparat alors comme une communaut interprtative susceptible de comprendre de manire uniforme le discours de lenseigne et de le transmettre aux autres consommateurs. Ce processus a t notamment montr dans un autre contexte par Kates (Kates, 2004).

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quils font des dgustations. Ah bon ? Eh bien, cest super tu nas qu venir voir . Donc pour Monoprix, je pense que cest vraiment du positif. (Sophie, 27 ans, Cours dnologie Monoprix)

En rsum, les implications marketing de la mise en place dvnements denseigne sont prometteuses pour le distributeur : conqute et fidlisation de clients, hausse du panier dachats moyen dans la catgorie de produits, amlioration de limage du magasin et de lenseigne et mise en place dun bouche--oreille par les participants. Ces implications rsultent du fait que les vnements denseigne influent sur lexprience de magasinage pour les diffrentes parties prenantes et sur les interprtations qui sont donnes au point de vente par les consommateurs-participants. Nanmoins, les vnements denseigne touchent un nombre limit de consommateurs. Par consquent leur utilisation dans le cadre dune stratgie de marketing relationnel demande une rflexion spcifique de la part du distributeur afin doptimiser le couple cots/rsultats li lorganisation de tels vnements. Par ailleurs, cette recherche sest concentre sur la dfinition et les consquences positives des vnements denseigne. Enfin, comme de nombreux autres outils marketing, (cf. Sen et Bhattacharya, 2001 ; Sharp et Sharp, 1997) ces vnements peuvent aussi avoir des effets ngatifs, qui ne font cependant pas lobjet du prsent travail.

CONCLUSIONNotre article a contribu dfinir la notion dvnement denseigne et prsenter les effets de ce nouvel outil de marketing relationnel sur ltablissement et/ou le renforcement dune relation de long-terme et dimension motionnelle entre enseigne et consommateurs. En particulier, nous avons mis en exergue la capacit des vnements denseigne faire merger un sentiment damiti commerciale et redfinir lexprience de magasinage : cette manifestation conduit ainsi encastrer les rapports distributeur-consommateurs dans un tissu dense et complexe de relations. Nous avons galement insist sur le fait que ces consquences bnficient la fois lenseigne et aux clients, de sorte que les vnements denseigne sont mme de crer des relations gagnant-gagnant entre les parties prenantes. Sur le plan managrial, notre recherche a soulign limportance des stratgies de transmission du savoir des entreprises et leurs consquences sur les comportements des consommateurs ainsi que le potentiel des vnements denseigne dans la transformation des reprsentations que se font les participants du point de vente, devenant un nouvel espace de sociabilit. Nous montrons en particulier les implications marketing en termes de conqute et fidlisation des clients, dlvation quantitative et qualitative de la consommation dans la 21

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catgorie de produits, damlioration de limage de lenseigne et de la mise en place dun bouche--oreille positif. Ces effets nous semblent particulirement prometteurs alors que les distributeurs peinent fidliser les consommateurs et sessoufflent dans la recherche de nouvelles sources de diffrenciation. Si les vnements denseigne ne ciblent quun nombre restreint de consommateurs, ils nous semblent pertinents pour les distributeurs du fait de leur capacit tablir de nouveaux types de relations avec des consommateurs qui peuvent aller jusqu devenir des ambassadeurs de lenseigne. A ce titre, les vnements denseigne constituent un outil attractif venant enrichir la stratgie de marketing relationnel du distributeur, dont la pierre angulaire reste les programmes de fidlisation ciblant une large base de clientle. Notre travail souffre cependant de limites qui ouvrent la voie de nouvelles recherches. En premier lieu, ce travail repose sur une recherche situe, dont il conviendrait dlargir le champ pour en accrotre la gnralisibilit. Les rsultats prsents offrent une validit interne certaine, mais il serait intressant dtudier de nouveaux cas afin den prouver la validit externe. Aprs cette recherche exploratoire, il conviendrait donc doprer une phase de validation quantitative de ces rsultats. Il serait par exemple clairant de croiser la participation lvnement denseigne avec des donnes comportementales factuelles enregistres par le biais des cartes de fidlit. Ensuite, il serait opportun de sintresser plus prcisment aux facteurs cls de succs des vnements denseigne afin de dterminer plus finement les aspects organisationnels que le distributeur doit prendre en compte pour assurer le succs de ces manifestations (lieu, crneau horaire, choix de lanimateur, droulement, gratuit, etc.). Enfin, de nouveaux travaux sont ncessaires, pour tudier le rle des stratgies marketing et des connaissances des consommateurs dans la reprsentation quils construisent des dispositifs marchands et des changes conomiques, sociaux et culturels.

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A1 : Caractristiques des vnements denseigne tudisENSEIGNE BHV METHODE Oui Observation participante Conversations sur le terrain Oui Oui (1) Interviews formelles avec participants et animateurs Oui Conversations avec un animateur ou responsable 5 Nombre de sances observes Moyenne Implication du chercheur Deuxime chercheur utilis Non EVENEMENT DENSEIGNE Distributeur Type de distributeur spcialis Techniques de Objectifs des animations bricolage et de dcoration heure Dure de lanimation 10 en moyenne Nombre de participants Non Participation financire Frquence de lvnement denseigne Lieu de droulement de lvnement denseigne Facilit daccs lvnement denseigne Liens entre animateur et enseigne Ponctuel Dans le magasin (au "Caf", un bar dcor) Oui : libre, aucune procdure dinscription Employ du rayon concern FNAC Non Non Oui (1) Non 0 Aucune Non Distributeur spcialis Cours relatifs certains logiciels informatiques journe 5 Oui (50 ) Ponctuel En dehors du magasin GALERIES LAFAYETTE Oui Oui Oui (1) Oui 5 Moyenne Non Grand magasin Cours de cuisine et sur les arts de la table 1 heure 1 heure 30 10 en moyenne Non Sriel MONOPRIX Oui Oui Oui (4) Oui une quinzaine Forte Oui Grande distribution Initiation loenologie 1 heure 10 en moyenne Non Sriel Dans le magasin (au bar vins puis au bar sushis) Moyenne : procdure dinscription Employ du rayon concern (caviste du magasin) NATURE ET DECOUVERTES Oui Oui Oui (1) Non 1 Faible Oui Distributeur spcialis Initiation aux encens et parfums 2 heures 15 en moyenne Oui (15) Ponctuel En dehors du magasin Non, seuls membres du club Nature & Dcouvertes Sous-traitant NICOLAS Oui Oui Oui (2) Oui 6 Forte Oui Distributeur spcialis Initiation loenologie Environ 2 heures 30 15 en moyenne Oui (de 20 30 ) Sriel Dans le magasin (avec amnagement de lespace) Moyenne : procdure dinscription Grant

Dans le magasin (bar vins, stands de restauration, etc.) Moyenne : procdure Moyenne : procdure dinscription dinscription Employ ddi aux formations Fournisseurs experts de la catgorie de produits

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