Évaluation des risques sanitaires liés à · danger selon la directive 67/548/CEE Classification...

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Coordination scientifique Anses : G. Boulanger C. Fourneau Appui scientifique Anses : G. Argiles ML. Cointot E. Nerrière Catélinois Évaluation des risques sanitaires liés à l’utilisation professionnelle des produits bitumineux et de leurs additifs Résultats et conclusions de l’expertise collective Mardi 25 mars 2014 Clémence Fourneau

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Coordination scientifique Anses : G. Boulanger – C. Fourneau

Appui scientifique Anses : G. Argiles – ML. Cointot – E. Nerrière Catélinois

Évaluation des risques sanitaires liés à l’utilisation professionnelle des produits

bitumineux et de leurs additifs

Résultats et conclusions de l’expertise collective Mardi 25 mars 2014

Clémence Fourneau

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Contexte et question posée

• Saisine du 19 novembre 2008 de la FNSC CGT suite au décès par cancer d’un salarié de l’industrie de la construction et de l’entretien des routes

• Extension du champ d’expertise ciblé par la FNSC-CGT en réalisant une évaluation des risques sanitaires liés à l’utilisation professionnelle des produits bitumineux et de leurs additifs.

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Organisation de l’expertise et description de la méthode • Instruction par le GT « Produits bitumineux et additifs »

– 9 experts aux compétences complémentaires

– rattaché au Comité d’experts spécialisé (CES) « Evaluation des risques liés aux substances chimiques »

– Travaux réalisés dans le respect de la norme NF X 50-110 « qualité en expertise »

• Traitement de la saisine – Collecte d’informations concernant les liants bitumineux, leur composition, l’historique

d’utilisation, les postes de travail, les données d’exposition et les effets sanitaires associés chez les travailleurs

→ Analyse critique de la littérature; Auditions d’acteurs industriels, syndicaux, médicaux et de prévention; Visites de chantiers; Interrogation du RNV3P;

→ Initiation de CRD :

– Avec l’IST : interaction HAP du bitume/UV et risque de cancer cutané → résultats non conclusifs / Finalisation hiver 2013 (après la sortie du rapport)

– Avec le CHU de Grenoble : cartographie de l’exposition professionnelle aux HAP chez les travailleurs exposés aux produits bitumineux → apport de données complémentaires sur l’exposition atmosphérique et biologique des travailleurs / Finalisation mai 2013

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RÉSULTATS DE L’EXPERTISE

COLLECTIVE

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Liants hydrocarbonés : définitions et historique

5

0

500

1000

1500

2000

2500

3000

3500

4000

Masse [kt]

Années

Consommation métropolitaine française de bitume [t/an]

1ères applications industrielles des liants hydrocarbonés

→ la fabrication et l’entretien des routes

Propriétés d’adhésivité, de cohésion et caractère hydrophobe du bitume → liant « idéal »

Consommation moyenne de bitume en France > 3 Mt/an (de 2000 à 2010)

→ 90 % applications routières (> 80 % concernent l’entretien des voies existantes)

→ 10 % applications industrielles (activités d’étanchéité, d’isolation…)

→ Ces 50 dernières années, transition progressive et définitive du goudron au bitume

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Séparation des constituants du bitume par la méthode SARA

Composition très complexe des produits bitumineux : > 10 000 composés

→ Nombreuses classes de bitumes: spécifications basées sur les propriétés mécaniques attendues du revêtement final et non sur des propriétés physico-chimiques

Carbone Hydrogène Azote Soufre Oxygène

79 à 88 % 7 à 13 % Traces à 3 % Traces à 8 % 2 à 8 %

+ Métaux (Ni, V, Fe, Mn, Ca, Na…) – Maxi V : 1500ppm

Composition élémentaire

Composition chimique → La méthode SARA permet de classer ces constituants suivant 4 grandes familles

Complexité de composition des liants bitumineux et de leurs émissions

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Concentrations des HAP (ppm ou µg/g) dans du bitume et du brai de houille (Brandt et al. 1985)

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Teneurs en HAP 1000 fois plus faibles dans les bitumes par rapport aux goudrons → différence

majeure entre bitumes et goudrons

Distillation du pétrole

Basse température

Pyrolyse de la houille

Haute température BITUMES GOUDRONS

(CMR Cat. 1)

HAP Bitume

(min-max) Brai de houille

Phenanthrene 0,32-7,3 19 850-25 700

Anthracene 0,01-0,32 4 600-7 310

Fluoranthene 0,1-0,72 29 000-36 000

Pyrene 0,17-1,5 21 300-27 200

Chrysene 0,8-3,9 11 200-24 510

Perylene 0,04-3,9 2 770-3 500

Benzo(k)fluoranthene nd-2,2 5 250-6 010

Benzo(a)pyrene 0,22-1,8 11 360-15 170

Benzo(g,h,i)perylene 1,2-5,7 3 430-3 530

Anthanthrene nd-0,11 1 231-1 728

Dibenzo(a,i)pyrene nd-0,6 127-164

Coronene nd-0,4 nd-120

Génération de HAP

(pyrosynthèse)

1 000 – 1 200°C

HAP Nombre

de cycles

Classification

UE CIRC

Naphtalène 2 2 2B

Acénaphtylène 3

Acénaphtène 3 3

Fluorène 3 3

Phénanthrène 3 3

Anthracène 3 3

Pyrène 4 3

Fluoranthène 4 3

Benzo(a)anthracène 4 1B 2B

Chrysène 4 1B 2B

Benzo(b)fluoranthène 5 1B 2B Benzo(k)fluoranthène 5 1B 2B Benzo[a]pyrène 5 1B 1

Indéno(1,2,3-c,d)pyrène 5 2B

Dibenzo(a,h)anthracène 6 1B 2A

Benzo(ghi)pérylène 6 3

→ 16 HAP prioritaires de l’US EPA dont le B[a]P identifiés dans la composition des bitumes

350°C max

Complexité de composition des liants bitumineux et de leurs émissions Les HAP

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Complexité de composition des liants bitumineux et de leurs émissions Les additifs

8

Consommation annuelle 2010

Bitume

98,6%

Emulsifiant

0,1%

Fluxant

0,5%

Liant de synthèse

d'origine pétrolière

0,3%

Liant de synthèse

d'origine végétal

0,2%

Polymère

0,3%

Le bitume : ingrédient principal (voire exclusif) de la formulation d’un liant bitumineux

Intérêt des additifs → obtenir les propriétés physico-chimiques et mécaniques attendues du liant (stabilité, adhérence, durabilité, maniabilité…)

-Fluxants (pétroliers ou végétaux) -Dopes d’adhésivité -Métaux et agents captant l’H2S -Polymères -Fibres -Emulsifiants - « recyclage » de matériaux secondaires (caoutchouc, laitier, scories d’acier), …

Source : USIRF

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Réglementation (1/3)

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Réglementation REACH

Les bitumes sont enregistrés en tant que UVCB (Unknown or Variable composition, Complex reaction products or Biological materials) → Substances obtenues à partir d’huile ou de sources analogues à l’huile

Réglementation CLP

→Pas de classification harmonisée pour les bitumes routiers ou oxydés

→Classement CIRC récent des bitumes oxydés en catégorie 2A (cancérogène probable pour l’homme) pourrait modifier la définition de la classe de danger

→Classification des mélanges à base de bitumes comprenant d’autres produits chimiques suit une démarche encadrée

Fiches de données de sécurité (FDS)

→Pas d’obligation à ce jour de fournir des FDS tant pour les substances bitumineuses que pour le bitume utilisé en mélange

→Enregistrement des substances bitumineuses pour des utilisations à des T < 200 °C

Bitumes routiers

Bitumes oxydés

→Utilisations à des T > 200 °C relevées lors des auditions : quid de l’information des utilisateurs en aval

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Réglementation (2/3) Dangers liés aux additifs

Certains sont des produits chimiques dangereux

10 10

Substances non classées dans l’annexe VI du règlement CLP → Fabricants/importateurs/utilisateurs chargés d’établir la classification des substances selon le règlement CLP

→ Pas de classification harmonisée (données issues d’auto-classifications notifiées à l’Echa ou de FDS)

Substances classées dans l’annexe VI du règlement CLP

→ Faibles teneurs dans les mélanges >>> à priori pas de classement des produits finaux

→Classifications faites pour une utilisation des produits seuls et à température ambiante

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Réglementation (3/3) Dangers liés aux additifs

Additif Nom

de la substance Numéro

CAS Classification et pictogramme(s) de

danger selon la directive 67/548/CEE Classification et pictogramme(s) de

danger selon le règlement CLP

% max dans le

liant

Fluxant Kérosène (pétrole), hydrodésulfuré 64742-81-0 R65; H304; 10,0%

Acide Acide phosphorique… % 7664-38-2 R34: C ≥ 25 % R36/38: 10 % ≤ C < 25 %

H314: C ≥ 25 % H315: 10 % ≤ C <25 % H319: 10 % ≤ C < 25 %

1,0%

Acide Acide chlorhydrique… % 7647-01-0 R34-37 : C ≥ 25 % R36/37/38: 10 % ≤ C < 25 %

H314: C ≥ 25 % H315: 10 % ≤ C <25 % H319: 10 % ≤ C < 25 % H335 : C ≥ 10 %

0,5%

Soufre Soufre 7704-34-9 R38; H315; 1,0%

Solvant Xylène 1330-20-7 R10; R38 R20/21 : C ≥ 12,5%

H226; H312; H315; H332

15,0%

Fluxant Extraits au solvant (pétrole), huile résiduelle 64742-10-5 Non documenté Non documenté H351 10,0%

Fluxant coupe C15-C20 (désaromatisée) Pas de numéro R65 Non documenté Non documenté 10,0%

Fluxant Coupe C9 aromatique : Pas de numéro R10; R37; R 65/66/67; R51/53

H226; H304; H335; H336; H411

10,0%

Poly-amine Acides gras en C8-22, produits de réaction

avec les polyalkylènes en C2-3 polyamines et les éthanolamines

84082-48-4 Non documenté Non documenté H314; H317; H410

1,0%

Diamine grasse

Amines, N-suif alkyltriméthylènedi- 61791-55-7 Non documenté Non documenté H302; H314; H318; H372; H400

1,0%

H2S Scavenger

Carboxylate métallique Pas de numéro R36/37/38; R40; R51-53; R67

Non documenté Non documenté 0,5%

Cire Cires de paraffine

et cires d'hydrocarbures 8002-74-2 Non documenté Non documenté H370; 4,0%

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Secteur de la construction et de l’entretien des routes

3 grands procédés de mise en œuvre du bitume caractérisés par la production presque systématique d’émissions

Enrobés bitumineux Enduits superficiels Asphaltage

photo A. Maitre

Source : Office des Asphaltes

Source : USIRF

Secteur de l’étanchéité des toitures/terrasses Exploitation des propriétés d’étanchéité et d’isolation des bitumes → exposition possible aux émissions de bitume pendant le temps de soudage (≈ 30% du temps de travail)

Source :

Complexité de composition des liants bitumineux et de leurs émissions Domaines d’application des bitumes

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Mise en œuvre des bitumes Secteur de la construction et de l’entretien des routes (1/4)

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3 grandes techniques de mise en œuvre du bitume

5 000 travailleurs directement concernés par une exposition aux liants routiers dans les activités de construction ou de rénovation (données USIRF)

90 % de la consommation moyenne globale annuelle de bitumes en France

→ Caractérisées par l’émission presque systématique de fumées

Enrobés bitumineux Enduits superficiels

Asphaltage

photo A. Maitre Source : Office des Asphaltes Source : USIRF

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Mise en œuvre des bitumes Secteur de la construction et de l’entretien des routes (2/4)

Enrobé → mélange de granulats de tailles diverses à hauteur de 95 %, liés par environ 5 % de bitume

14

ENROBÉS À CHAUD

La dureté des liants est très variable de 10/20 à 80/100 en passant par le 35/50 qui est le plus utilisé actuellement en France.

Types Noms Utilisations Température d’application

Les bétons bitumineux

(BB)

Les bétons bitumineux très minces (BBTM) Enrobés très utilisés en France pour les couches de

roulement

150 à 180°C

Les bétons bitumineux minces (BBM) Les bétons bitumineux semi-grenus (BBSG)

Les bétons bitumineux à module élevé (BBME)

Enrobés utilisés essentiellement pour les couches de roulement et de liaison

Les graves bitumes (GB)

- Enrobés à plus faible teneur en liant destinés aux

couches d'assise

Les enrobés à module élevé

(EME) -

A base de bitume de grades durs, enrobés surtout utilisés pour les couches d’assise

ENROBÉS À TEMPÉRATURE RÉDUITE OU À BASSE TEMPÉRATURE

Les enrobés tièdes

- Peuvent être envisagés pour toutes les couches de

chaussées, sur tous les types de réseau routier

110 à 130°C

Les enrobés semi-tièdes

- Peuvent être envisagés pour toutes les couches de

chaussées, sur tous les types de réseau routier 60 à 100°C

LES TECHNIQUES À FROID

Les enrobés à froid

- Enrobés utilisés pour l’entretien et la rénovation

de la chaussée

Ambiante

Les enrobés coulés à froid

(ECF)

- Enrobés destinés aux couches de roulement

Les graves émulsions (GE)

- Essentiellement utilisées pour le reprofilage et les

réparations localisées ou pour couches d'assise

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Mise en œuvre des bitumes Secteur de la construction et de l’entretien des routes (3/4)

15

Mise en œuvre d’un

enrobé à chaud

Mise en œuvre d’un enrobé coulé à froid

30%

70%

Bitume à froid

Bitume à chaud

Utilisation des enrobés en France (2005)

Source : USIRF

Année

Quantités mises en œuvre par la profession routière

(Tonnes)

2006 800 000

2007 800 000

2008 520 000

2009 1 120 000

2010 1 200 000

2012 Objectif : 1 500 000

Source : USIRF

Augmentation progressive des quantités d’enrobés tièdes mises en œuvre en France (en 2010, cela correspond à environ 3% du total des enrobés)

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Mise en œuvre des bitumes Secteur de la construction et de l’entretien des routes (4/4)

Les enduits superficiels

→ Appliqués pour l’entretien de surface et la réfection des chaussées dégradées, notamment pour le réseau à faible ou moyen trafic

→ Technique : répandage de bitume chaud sous forme d’émulsion (50 à 75°C) ou anhydre (120 à 160°C) suivi de la pose de gravillons concassés et d’un compactage

16

L’asphalte coulé (production en France : 220 000 t/an ; Source : Office des asphaltes, 2012)

→ Utilisé pour les structures réservées aux piétons (trottoirs, quais de gare ou métro…) ainsi qu’aux véhicules (couloirs de bus, étanchéité en ouvrages d’art…)

→ Pré-mélange de bitume et de filler ou « mastic » additionné de sable et gravillons

→ Appliqué en principe à des températures inférieures à 200°C depuis fin 2010

→ Suivant la taille des chantiers, l’approvisionnement de l’asphalte est manuel (95% - via des sceaux ou brouettes) ou mécanisé (5% - par dumpers ou staccos)

Source : USIRF

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Mise en œuvre des bitumes Secteur de l’étanchéité des toitures/terrasses

Le complexe d’étanchéité est composé de couches/feuilles successives

Depuis 1960 jusqu’à nos jours : évolution des produits et des techniques utilisés

→ Disparition des goudrons, de l’amiante (1970) puis des bitumes oxydés (1980-2000) au profit des bitumes-polymères (SBS ou poudre d’ardoise)

17

Source :

< 10 % de la consommation moyenne globale annuelle de bitumes en France

→ Exploitation des propriétés d’étanchéité et d’isolation des bitumes

→ Exposition possible aux fumées de bitume pendant le temps de soudage (≈ 30% du temps de travail)

→ Le collage des feuilles au bitume chaud (≈220°C) est progressivement remplacé par

le soudage au chalumeau (80°C →180°C),

puis à partir de 2000 se développent les feuilles auto- adhésives (15% en 2010) collées à froid

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→ Essor du recyclage sous les contraintes environnementales et économiques

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Année Matériaux récupérés (Mt) Agrégats recyclés (Mt)

2007 7,13 1,7

2008 7,05 2,1

2009 7,07 2,3

2010 7,08 2,8

Source :

Proportion croissante d’enrobés recyclés en France (contre 40 Mt d’enrobés produits dans les centrales d’enrobage)

→ valorisés sans traitement

→ intégrés dans la fabrication d’enrobés neufs

Evolution des quantités d’agrégats recyclés en France entre 2007 et 2010

Complexité de composition des liants bitumineux et de leurs émissions Recyclage (1/2)

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Différentes techniques de recyclage : A froid en place ou en centrale (94%)

A chaud en centrale(4%)

Sources d’émissions de substances dangereuses :

Fibres d’amiante

Matériaux secondaires : métaux lourds, silice…

Produits goudronneux

→ HAP

Fluxants

Bitumes-soufre

Particules

Emissions éventuelles lors des étapes de fraisage des chaussées anciennes, de la réutilisation des agrégats d’enrobés en centrale, etc

Complexité de composition des liants bitumineux et de leurs émissions Recyclage (2/2)

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Composition très complexe : >> 10 000 composés parmi lesquels

- les 16 HAP prioritaires de l’US EPA dont le B[a]P

- HAP soufrés, azotés et méthylés - COV, COSV (benzène, toluène…) - …

→Impossible d’identifier de manière exhaustive et de quantifier l’ensemble des constituants

→ Nombreuses classes de bitumes: spécifications basées sur les propriétés mécaniques attendues du revêtement final et non sur des propriétés physico-chimiques

→ Différence majeure entre bitumes et goudrons : les teneurs en HAP sont 1000 fois plus faibles dans les produits bitumineux et leurs émissions par rapport aux goudrons

→ Evaluation des dangers et des risques sanitaires via une analyse des données considérant la substance « bitume » dans sa globalité

Modélisation des émissions de bitume étudiées en laboratoire

Complexité de composition des liants bitumineux et de leurs émissions Approche globale pour l’évaluation des risques

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Effets sanitaires liés à une exposition aux liants bitumineux et à leurs émissions

Effets cancérogènes → Synthèse des conclusions du CIRC (2011) concernant la cancérogénicité de l’exposition des travailleurs de différents groupements professionnels aux émissions de bitumes

- Pose de produits d’étanchéité à base de bitumes oxydés → probablement cancérogène pour l’Homme (2A)

- Asphaltage à base de bitumes durs et pose d’enrobés à base de bitumes routiers → possiblement cancérogène pour l’Homme (2B)

Observation d’une association positive entre les expositions professionnelles aux liants bitumineux et à leurs émissions, et l’apparition de cancers du poumon et des VADS (cavité buccale, pharynx, œsophage et larynx) chez les travailleurs lors de la pose de produits d’étanchéité ou lors de l’asphaltage.

Effets non-cancérogènes → Revue de la littérature

- Exposition aigüe : Irritations oculaires et respiratoires (études chez l’Homme)

- Exposition chronique :

Augmentation significative des risques d’asthme et de BPCO (études chez l’Homme)

Augmentation des marqueurs d’inflammation au niveau pulmonaire (études chez l’Homme)

Les résultats des études chez l’animal, bien qu’hétérogènes (conditions mises en œuvre et paramètres physiologiques étudiés), confirment l’existence d’effets respiratoires en lien avec une exposition aux émissions de bitumes

Suspicion d’effets cardiovasculaires et immunotoxiques (études chez l’Homme)

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Effets sanitaires Effets cancérogènes

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Niveau de preuve Classement

Homme (H) Animal Mécanismes

Roofing – oxidised bitumen Limité Suffisant Faible 2A

Mastic asphalt workers – hard bitumen

Limité Inadéquat Faible 2B

Paving – straight run bitumen Inadéquat Inadéquat Fort

(génotoxiques) 2B

Classement du CIRC (2011)

Conclusions du CIRC quant à une exposition au bitume et à ses fumées via les activités professionnelles suivantes :

Application de produits d’étanchéité à base de bitumes oxydés → probablement cancérogène pour l’Homme (2A)

Asphaltage et application d’enrobés à base de bitumes routiers → possiblement cancérogène pour l’Homme (2B)

→ Mise en évidence de mécanismes de génotoxicité (chez les travailleurs de la pose d’enrobés bitumineux)

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Concernant plus particulièrement les effets cutanés

→ Peu de données sur les effets non-cancérogènes (Irritations cutanées possibles pour une exposition aiguë, danger de brûlure avec les produits manipulés à chaud)

→ Recherche complémentaire menée par le GT sur les cancers cutanés

- Aucune étude spécifique recensée sur les cancers cutanés en lien avec une exposition aux produits bitumineux

- Identification de plusieurs études épidémiologiques présentant des données pour les cancers de la peau chez les travailleurs exposés aux produits bitumineux (8 études de cohortes : travailleurs exposés aux bitumes routiers, travailleurs de la pose de produits d’étanchéité et 1étude mentionne les travailleurs de l’asphaltage)

Seuls les mélanomes de la peau ont été rapportés et sont en nombre très réduit Aucune association statistiquement significative entre l’apparition de cancers cutanés chez les travailleurs et l’exposition aux émissions de bitumes

→ Plusieurs facteurs limitent l’interprétation de ces résultats : Les autres types de cancers de la peau n’ont pas été étudiés Les études de mortalité sont inadaptées pour évaluer l’incidence de ce type de cancers, souvent curables avec un traitement adapté et sans pronostic létal

- Exposition concomitante émissions de bitumes / UV → Aucune conclusion actuellement quant à l’existence d’effets conjugués par manque de données (les premiers résultats originaux au niveau international de travaux de recherche initiés avec l’IST de Lausanne, n’ont pas permis de conclure)

Effets sanitaires liés à une exposition aux liants bitumineux et à leurs émissions

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Evaluation des expositions Effectifs

• Recensement des effectifs exposés dans les secteurs professionnels concernés par le champ de la saisine → les travaux de construction et d’entretien des routes, la construction d’ouvrages d’art (ponts, viaducs, etc.), de stations-services et des tarmacs d’aéroport, les travaux d’étanchéité.

• D’après les auditions :

Exposition aux liants routiers : 5 000 salariés selon l’USIRF (activités de construction ou de rénovation) et 85000 salariés selon la CGT (travaux manuels et sur machine)

Exposition aux produits d’étanchéité à base de bitume (sans forcément les manipuler) : 7000 à 8000 personnes d’après la CSFE

• Interrogation de la DARES : résultats enquête SUMER 2010

=> Exposition à la nuisance chimique « goudrons de houille, huiles de houille et bitume »

Manque de pertinence des effectifs d’un point de vue statistique

Construction du questionnaire sans distinguer les expositions aux produits bitumineux et aux produits houillers

→ Résultats non exploitables

• Exposition des travailleurs aux produits bitumineux et leurs émissions implique les voies :

Respiratoire → inhalation des émissions;

Cutanée → contact direct avec les produits, dépôt des émissions sur la peau, contact éventuel avec les vêtements souillés;

Orale → ingestion de produits ou de leurs émissions (contact main-bouche)

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Evaluation des expositions Caractérisation des expositions - Limites de la métrologie

Exposition atmosphérique

• Caractérisation des expositions :

Méthodes « globales » (particules totales, fraction soluble dans le benzène…)

Méthodes « spécifiques » (mesure des concentrations en B[a]P, 16 HAP…)

• Limites de la métrologie atmosphérique : Multiplicité des méthodes et aucun consensus ni au niveau national, ni à l’international

Exposition cutanée aux HAP

• Absorption cutanée significative des HAP atmosphériques

• Limites de la métrologie cutanée → données très incomplètes à l’heure actuelle

Indicateurs biologiques d’exposition

• Etudes sur le sujet centrées sur le dosage des métabolites des HAP (notamment 1-OHP et 3OH-B[a]P), et peu d’entre elles ont mesuré à la fois ces métabolites et des marqueurs de toxicité => Aucune relation dose effet mise en évidence à l’heure actuelle

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• Campagnes de mesures des 16 HAP classés polluants prioritaires par l’US-EPA uniquement dans les fumées et dans différents contextes

→Limites d’exploitation :

– Données parcellaires

– Proportion élevée de valeurs < LD (notamment pour le B[a]P)

– Mesures difficilement comparables entre elles

=> caractérisation des bitumes incomplète, divergence des moyens de prélèvement ainsi que des techniques analytiques

=> fortes variabilités dues aux conditions climatiques (vitesse du vent, humidité, etc.) et à la localisation des chantiers

→Exploitation qualitative :

– Parmi les 16 HAP dont la mesure est recommandée par l’US-EPA :

• Les niveaux de B[a]P sont faibles (< 10% de la valeur CNAMTS 150 ng.m-3 )

• Les composés à 2 ou 3 cycles sont majoritaires (le naphtalène en particulier - µg.m-3)

Evaluation des expositions Exploitation des données métrologiques atmosphériques – Analyse de la

littérature

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• Bases de données métrologiques → COLCHIC (données INRS : issues des CARSAT/médecine du travail) et CIMAROUT (idem COLCHIC + données entreprises)

– Paramètres mesurés : Benzo[a]pyrène, Pyrène, Poussières totales, Poussières inhalables, Poussières alvéolaires, Fraction soluble dans le dichlorométhane…

→Limites d’exploitation :

– Nombre de prélèvements insuffisant pour faire une analyse statistique fiable

→Exploitation qualitative :

– Concentrations atmosphériques du B[a]P relevées sont largement inférieures à la valeur de 150 ng.m-3 recommandée par la CNAMTS

– Variabilité des niveaux mesurés d’un chantier à l’autre (météo, substances, technologies…)

Limite globale d’exploitation => Données centrées sur la métrologie des HAP

Peu ou pas de documentation concernant les autres composés identifiés dans les émissions (HAP soufrés, azotés, COV, COSV…)

Pertinence du B[a]P pour évaluer les expositions des travailleurs aux produits bitumineux aujourd’hui discutée

Evaluation des expositions Exploitation des données métrologiques – Analyse des bases de données

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Caractérisation des expositions potentielles Approche comparative

→Construction d’une matrice afin de comparer l’exposition des salariés aux différents postes de travail identifiés suivant les procédés de mise en œuvre des produits bitumineux

• Recensement des paramètres les plus influents sur la base des informations disponibles :

– Sélection comme voie d’entrée des 4 paramètres sur lesquels le GT peut se positionner

distance du travailleur par rapport à la source des émissions bitumineuses

température d’application des produits

débit ventilatoire lié à l’activité du travailleur

durée-fréquence d'exposition des travailleurs

– Autres paramètres influents identifiés (substances, technologies, météo...) mais ne peuvent être qualifiés

→D’après cette analyse, par grands types de procédés, certains postes ressortent comme étant a priori les plus concernés par des niveaux d’exposition importants :

– Enrobés : conducteurs finisseur, tireurs au râteau et régleur

– Enduits superficiels : gravillonneurs, opérateur lance

– Asphaltage : aide-asphalteur, asphalteur et régleur finisseur

– Réfection, petits chantiers : brouetteur, ratisseur d’enrobés à chaud et préparateur de fissures

– Etanchéité : étancheur, aide-étancheur

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Approche comparative : choix des paramètres

• Recensement par le GT des paramètres les plus influents sur la base des informations disponibles :

– 4 paramètres sur lesquels le GT peut se positionner (qualifiables)

distance du travailleur par rapport à la source des émissions bitumineuses

→notée de 1 à 5 ou de 2 à 10 : plus la note est élevée, plus le salarié travaille près de la source.

→ 3 plages de distances < 3 mètres, de 3 à 15 mètres et >15 mètres.

température d’application des produits

→ notée de 1 à 5

→ 5 zones de températures : de 0 à 40°C, de 40 à 100°C, de 100 à 140°C, de 140 à 180°C et > 180°C.

débit respiratoire ou débit ventilatoire de travail

→ noté de 1 à 3 ; f (faible), m (moyen), F (Fort)

→ valeurs de débits respiratoires suivantes : f < ou = 18 L/min, 18 L/min < m < 36 L/min et F > ou = 36 L/min.

durée-fréquence d'exposition des travailleurs

→ notée de 1 à 3 ; f (faible), m (moyen), F (Fort)

→ 3 niveaux d’exposition approximative de 6 h/jour, 5 jours/semaine : < 3 mois/an pour f, 6 mois/an pour m et 10 mois/an pour F.

– Autres paramètres influents (substances, technologies, météo, etc..) mais ne peuvent être qualifiés → le GT s’est contenté de subdiviser par grands types de chantiers (enrobés-enduits-asphalte) pour appréhender de manière « globale » ces paramètres

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Présentation de la matrice : cas des enrobés

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poste

liant

distance /

source t° application

débit

respiratoire

durée

fréquence notes

< 3

m

3 à

15

m

>

15

m

0 à

40°

C

40 à

100°C

100

à

140

°C

140

à

180

°C

>

180°

C

f m F f m F changement valeurs distance / source

ENR

OB

É

cond.camion enrobé semi tiède x x x x en cabine

" tiède x x x x en cabine

" chaud x x x x en cabine

conducteur

répandeuse émulsion x x x x en cabine

cond.finisseur semi tiède x x x x

" tiède x x x x

" chaud x x x x

régleur ECF x x x x x Distance/source dépend si sur plate forme ou non

" semi tiède x x x x x Distance/source dépend si sur plate forme ou non

" tiède x x x x x Distance/source dépend si sur plate forme ou non

" chaud x x x x x Distance/source dépend si sur plate forme ou non

tireur ratisseur ECF x x x x x

" semi tiède x x x x x

" tiède x x x x x

" chaud x x x x x

cond.compacteur ECF x x x x

" semi tiède x x x x

" tiède x x x x

" chaud x x x x

conducteur traineau ECF x x x x en cabine

chef d'équipe ECF x x x x x

" semi tiède x x x x x

" tiède x x x x x

" chaud x x x x x

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Présentation de la matrice : cas des enrobés

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poste liant distance /

source t° application

débit

respiratoire

durée

fréquence

total

DEFG

ENR

OB

É

conducteur camion enrobé semi tiède 3 2 1 1 7

" tiède 3 3 1 1 8

" chaud 3 4 1 3 11

conducteur répandeuse émulsion 3 2 1 3 9

conducteur finisseur semi tiède 5 2 1 1 9

" tiède 5 3 1 1 10

" chaud 5 4 1 3 13

régleur ECF 4 1 2 2 9

" semi tiède 4 2 2 1 9

" tiède 4 3 2 1 10

" chaud 4 4 2 3 13

tireur ECF 4 1 3 2 10

" semi tiède 4 2 3 1 10

" tiède 4 3 3 1 11

" chaud 4 4 3 3 14

conducteur compacteur ECF 1 1 1 2 5

" semi tiède 1 2 1 1 5

" tiède 1 3 1 1 6

" chaud 1 4 1 3 9

conducteur traineau ECF 3 1 1 2 7

chef d'équipe ECF 2 1 2 2 7

" semi tiède 2 2 2 1 7

" tiède 2 3 2 1 8

" chaud 2 4 3 3 12

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CONCLUSIONS DE

L’EXPERTISE COLLECTIVE

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• La démarche ERS quantitative n’est pas applicable en l’état actuel des connaissances

→ Manque de données concernant la caractérisation des dangers : aucune relation dose-réponse entre les niveaux d’exposition aux produits bitumineux et à leurs émissions, et les effets sanitaires décrits

→ Complexité du mélange

→ Valeurs quantitatives d’exposition disponibles centrées principalement sur un indicateur HAP dont la pertinence a été discutée au cours de cette expertise

→ Health Council of the Netherlands a essayé de calculer l’excès de risque de cancer du poumon lié à des expositions professionnelles au B[a]P à partir d’études menées spécifiquement chez les travailleurs du bitume, mais cette quantification n’a pu aboutir (manque d’informations + facteurs confondants)

>>> Mise en perspective des données sanitaires dans une démarche qualitative globale d’évaluation des risques sanitaires, avec un recensement et une analyse des données d’exposition en considérant les postes de travail.

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Conclusions de l’expertise

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Identification des dangers

• Potentiel cancérogène des produits bitumineux et de leurs émissions :

– Parmi les composés identifiés dans les bitumes et leurs émissions, certains sont classés (cancérogènes par le CIRC et/ou CMR et/ou dangereuses par l’Union Européenne)

– Classements récent du CIRC (exposition aux bitumes oxydés et à leurs émissions lors des travaux d’étanchéité comme cancérogène probable pour l’Homme (catégorie 2A) et l’exposition aux bitumes et leurs émissions lors de la pose d’enrobés et/ou lors de travaux d’asphaltage comme cancérogène possible (catégorie 2B).

• Mise en évidence dans les études épidémiologiques de l’existence d’effets respiratoires liés à une exposition des travailleurs.

• Suspicion d’effets cardiovasculaires et immunotoxiques.

• Aucune conclusion définitive actuellement possible concernant l’existence ou non d’un risque cancérogène cutané en lien avec ce type d’exposition par manque de données

Au niveau réglementaire :

– Aucune classification harmonisée au niveau européen pour les substances bitumineuses,

– Dans chacun des dossiers d’enregistrement REACH disponibles en ligne sur le site de l’ECHA, aucune substance enregistrée n’a été classée dangereuse par le déclarant (sur la base des critères tels que décrits par le règlement CLP).

– Certains additifs utilisés sont des produits chimiques classés dangereux

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Conclusions de l’expertise

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Suivi des expositions des travailleurs :

• Données centrées sur les HAP dont certains sont reconnus pour leur caractère cancérogène.

– Diminution des niveaux d’exposition des travailleurs aux HAP ces dernières années (disparition de l’utilisation du goudron et évolution des techniques de mise en œuvre)

– Niveaux d’exposition au B[a]P faibles (quasiment au niveau environnemental)

– Certaines situations peuvent encore générer des émissions conséquentes de HAP (tunnel, rabotage et recyclage, utilisation de fluxants houillers ou pétrochimiques non recommandés)

• Peu ou pas de données sur les autres composés émis lors de la mise en œuvre des produits bitumineux (HAP méthylés, S-HAP, N-HAP, COV, COSV et CONV)

→ Le B[a]P historiquement mesuré ne semble plus être aujourd’hui le seul traceur pertinent du risque cancérogène.

• Maintenir le suivi de ce traceur :

– Comparaison internationale

– Référentiel historique

– Niveaux encore élevés mesurés sur certains chantiers

• Elargir les recherches et le suivi à d’autres traceurs, notamment pour prendre en compte les effets non cancérogènes et ainsi mieux appréhender le risque sanitaire

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Conclusions de l’expertise

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• Analyse comparative des différents postes de travail par grands types de procédés (matrice) :

– Certains postes pour lesquels les niveaux d’exposition semblent a priori être les plus importants

– Impact fort de la température dans l’émission de fumée

• Tendance générale actuelle dans l’évolution des pratiques professionnelles est à la diminution des températures d’application des produits bitumineux.

– Diminution de l’exposition des travailleurs en limitant la génération d’émissions

→ Néanmoins, ces diminutions d’exposition ne peuvent être corrélées directement avec une réduction du risque encouru par les travailleurs.

→ Développement de procédés de fabrication innovants pour compenser une partie des effets de cette baisse de température sur la maniabilité de la préparation:

• incorporation d’agents plastifiants (additifs organiques fluidifiants)

• moussage, etc.

→ Impacts potentiels sur la santé des travailleurs (composition des émissions générées et intensité de transfert percutané en cas de contact)

36

Conclusions de l’expertise

→ Identification de situations d’exposition dont les impacts sanitaires pour les travailleurs concernés doivent être pris en compte.

→ Existence d’un risque sanitaire associé à une exposition aux liants bitumineux et à leurs émissions.

Il n’est en revanche pas possible, en l’état actuel des connaissances, de quantifier ce risque.

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• Exposition des travailleurs à d’autres facteurs de risque non étudiés dans le cadre de la saisine et potentiellement responsables d’effets sanitaires

→ rayonnements UV, co-exposition avec des particules, contact avec des matériaux ou pièces chaudes pouvant occasionner des brûlures, manutention de charges, répétitivité des gestes, postures pénibles, exposition aux vibrations, lavage des mains avec des solvants dangereux, bruit, etc.

• Exposition des travailleurs par voie cutanée non négligeable.

→ Question du risque lié à l’exposition par voie cutanée, notamment à des produits appliqués tièdes ou à froid, en particulier les émulsions (40-60°C), comprenant des tensioactifs susceptibles d’augmenter la perméation cutanée.

• Méthodes métrologiques d’évaluation de l’exposition atmosphérique des travailleurs aux émissions de bitumes :

→Difficulté d’interprétation liée à l’utilisation des deux stratégies globale et spécifique, isolément l’une de l’autre

→Encouragement de la mise en œuvre systématique de ces deux méthodes dans la caractérisation de l’exposition des travailleurs aux émissions de bitumes.

– approche globale non « qualitative » : démarche préventive de réduction des expositions

– approche spécifique : démarche d’investigation toxicologique.

• Activités de rabotage et de recyclage.

→Différentes sources d’émission de substances reconnues pour leur dangerosité et présentes dans les matériaux en place (anciens revêtements routiers )

– amiante susceptible de libérer des fibres, silice, goudrons et ses dérivés, matériaux secondaires, fluxants, polymères, additifs, anciens bitumes soufrés susceptibles d’émettre des CAP ou des COV.

→Activités susceptibles d’exposer les travailleurs à des émissions potentiellement dangereuses et doivent faire l’objet d’une surveillance particulière et renforcée.

37

Conclusions de l’expertise

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RECOMMANDATIONS (1)

Mise en œuvre d’une stratégie préventive

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→ Réduction des expositions aux émissions de liants bitumineux

→ Suivi médical approprié des travailleurs

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• Encourager la mise en place sur le chantier de systèmes d’aspiration des fumées et/ou de systèmes de ventilation adéquats lors de travaux en espace confiné (tunnels, sous-sols) et préconiser l’utilisation d’engins de chantier avec systèmes intégrés de captage de fumées.

• Sélectionner les produits (bitumes, additifs, etc.) et procédés d’application les moins exposants (au regard des connaissances disponibles) :

– Respecter les consignes de température propres à l’utilisation de chaque produit bitumineux ;

– Privilégier les émulsions de bitume permettant la réduction des fumées émises en travaillant « à froid » en dessous de 60°C. Privilégier les températures d’application d’asphalte les plus faibles (inférieures à 200°C) ;

– Substituer les produits de nettoyage des outils et/ou des mains dangereux (par exemple les solvants de type gasoil) ;

– Eviter de mettre en œuvre le procédé de collage au bitume oxydé fondu dans le cadre des travaux d’étanchéité et privilégier l’utilisation des membranes collées à froid (auto-adhésives).

• Adapter l’organisation du travail :

– Décaler les horaires plus tôt l’été de manière à réduire l’impact de la chaleur et minimiser la co-exposition entre le rayonnement solaire et les produits bitumineux ;

– Evaluer la faisabilité et la pertinence d’un système de rotation des postes de travail permettant aux travailleurs d’alterner entre différentes tâches.

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En termes de prévention collective

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• Préconiser, afin d’éviter la contamination cutanée, un renouvellement des vêtements de travail et la prise de douche sur le lieu du chantier.

• Adapter le port des équipements de protection individuelle à la protection de la peau et de l’appareil respiratoire :

– Vêtements de travail propres avec manches et jambes longues, port de visière ou lunettes, chapeau ou casque, etc. ;

– Port de protection respiratoire en cas d’exposition potentiellement importante comme en milieu confiné ou lors des opérations de rabotage.

En termes de prévention individuelle

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• Lors de la surveillance médicale régulière des travailleurs exposés aux liants bitumineux, inclure en complément des examens usuels, la réalisation d’explorations fonctionnelles respiratoires et une surveillance dermatologique. Ceci implique une communication ciblée auprès des médecins du travail concernant ces éléments de surveillance complémentaires.

La préconisation de ces examens complémentaires s’appuie notamment sur le fait que :

1) Les résultats de l’expertise ont mis en évidence l’apparition d’effets respiratoires aigus (de type irritations) et chroniques (de type asthme ou BPCO) en lien avec une exposition des travailleurs aux émissions de bitumes ;

2) L’exposition des travailleurs par voie cutanée est non négligeable (notamment avec le développement de l’utilisation de produits bitumineux appliqués tièdes ou à froid).

De plus, il n’est actuellement pas possible de tirer des conclusions définitives concernant l’existence ou non d’un risque de développer un cancer cutané chez les travailleurs exposés aux émissions de bitumes, ni d’évaluer les effets conjugués liés à une co-exposition aux émissions de bitumes et aux rayonnements solaires.

• Poursuivre et développer le suivi des expositions par métrologie et biométrologie afin d’assurer une traçabilité de l’exposition des travailleurs.

• Encourager une veille active sur les effets sanitaires respiratoires mais également cardiovasculaires, immunotoxiques, neurotoxiques, etc., en lien avec une exposition des travailleurs aux liants bitumineux.

Concernant le suivi des travailleurs

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→ Pour les fabricants de produits bitumineux • Encourager la réflexion sur les effets respiratoires et une éventuelle classification de la substance « bitume » avec

l’objectif de parvenir in fine à une harmonisation de sa classification par les acteurs concernés.

• Encourager la mise à disposition de fiches de données de sécurité (FDS) actualisées.

→ Pour les utilisateurs de produits bitumineux • Informer les travailleurs du risque chimique lié à la manipulation des produits bitumineux et/ou de leurs additifs

(dont certains sont des produits chimiques dangereux).

• Actualiser le document unique d’évaluation des risques au vu des données sanitaires récentes et encourager la mise à disposition par les industriels de fiches de données de sécurité (FDS) actualisées.

• Dans le cadre de l’élaboration du document unique d’évaluation des risques, l’employeur doit caractériser l’exposition des travailleurs aux émissions de liants bitumineux par la mise en œuvre en parallèle de deux approches :

– Une approche globale d’une part, quantifiant les grandes classes de polluants présents dans les émissions (COV, poussières, etc.), pertinente dans le cadre d’une démarche comparative de prévention des risques. La méthode en cours de développement par l’INRS pourra s’avérer un outil utile dans cette optique ;

– Une approche spécifique d’autre part, ciblée sur certains polluants bien identifiés (B[a]P, HAP, etc.), et utile dans une démarche de caractérisation des profils toxicologiques des liants bitumineux et de leurs émissions. Dans l’attente de nouveaux traceurs complémentaires, la mesure des HAP reste la référence actuelle. Néanmoins, il est d’ores et déjà possible d’avoir une approche multi-résidus.

→ Pour les pouvoirs publics • Réfléchir à une éventuelle classification de la substance « bitume » au vu des données sanitaires récentes.

En termes de prévention au titre du risque chimique

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• Renforcer la réglementation sur les activités de rabotage et de recyclage des anciens revêtements routiers en préconisant :

– La recherche obligatoire et systématique de certains composants du matériau en place (amiante et goudrons principalement) avant toute opération de rabotage ou de recyclage ;

– Une surveillance accrue des possibles émissions générées lors de ces opérations.

Amiante : Circulaire du 15 mai 2013 portant instruction sur la gestion des risques sanitaires liés à l'amiante dans le cas de travaux sur les enrobés amiantés du réseau routier national non concédé - Ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie ; Ministère de l’égalité des territoires et du logement - NOR : TRAT1311107C, texte paru au Bulletin Officiel le 25 juin 2013.

Concernant le rabotage et le recyclage

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RECOMMANDATIONS (2)

Mise en œuvre d’actions de recherche et développement

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• Mettre en place une harmonisation des méthodes globales de mesure des expositions (travaux INRS en cours ainsi qu’au niveau international).

• Développer, en parallèle du suivi des HAP de référence, un ou d’autre(s) traceur(s) spécifique(s) des émissions de liants bitumineux afin d’apprécier les risques cancérogènes. Les experts proposent en premier lieu l’exploration des composés suivants :

Hétérocycles soufrés (benzo[b]naphto[2,1,d]thiophène, etc.) ;

Hétérocycles azotés (carbazole, etc.) ;

Naphtalène (en tenant compte de la spécificité liée à la mesure de ce HAP par rapport aux autres) ;

HAP méthylés (5-méthylchrysène, etc.).

• Développer la recherche de traceurs pour l’évaluation des effets non-cancérogènes.

En termes de développement d’outils métrologiques de suivi des expositions

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• Mettre en place des études épidémiologiques concernant les cancers cutanés en lien avec une exposition aux émissions de liants bitumineux ou à défaut proposer au CIRC une évaluation spécifique de ce cancer à partir de l’étude de cohorte multi centrique européenne.

• Poursuivre les recherches concernant l’exposition conjointe aux émissions de bitumes et aux rayonnements UV de la peau humaine et le risque de cancer.

• Mettre en place des actions de recherche sur la composition et la toxicité des liants bitumineux mis en œuvre, avec le maximum de transparence de la part des professionnels afin de pouvoir évaluer l’impact sanitaire de certaines formulations (bitumes polymères, enrobés tièdes, émulsions, etc.) et des différents grades de bitumes utilisés.

• Mettre en place des études en populations professionnelles exposées aux liants bitumineux, couplant des aspects de biosurveillance (évaluation de la dose interne d’exposition par l’analyse de matrices biologiques) à des biomarqueurs d’effets sur les mêmes individus.

En termes de mise en œuvre d’études

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Merci de

votre

attention