Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

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Institut de Recherche sur la Fusion par Confinement magnétique CEA Cadarache Thèse de doctorat de l’Université de Provence Spécialité : Mécanique et Energétique Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra Présentée par : Sophie CARPENTIER Soutenue publiquement le 2 février 2009 devant le jury composé de : Pr. J-Pierre Boeuf Directeur de Recherche CNRS, Rapporteur Université Paul Sabatier (UPS), Laboratoire LAPLACE, Toulouse Pr. J-Luc Battaglia Professeur, Rapporteur Université Bordeaux 1, Laboratoire TREFLE, Bordeaux Pr. Alain Degiovanni Professeur, Président du Jury Institut National Polytechnique de Lorraine (INPL), Laboratoire LEMTA, Nancy Pr. Christophe Le Niliot Professeur, Directeur de thèse Université de Provence, IUSTI, Marseille Dr. Yann Corre Ingénieur de Recherche, Responsable CEA CEA Cadarache Dr. Fabrice Rigollet Maître de Conférence, Université de Provence, IUSTI, Marseille Dr. Philip Andrew Ingénieur de Recherche, Invité ITER Organization, Cadarache Dr. J-Marcel Travère Ingénieur de Recherche, Invité CEA, Cadarache

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Institut de Recherche sur laFusion par Confinement

magnétiqueCEA Cadarache

Thèse de doctorat de l’Université de Provence

Spécialité :Mécanique et Energétique

Etude des dépôts de chaleur dans letokamak Tore Supra

Présentée par :

Sophie CARPENTIER

Soutenue publiquement le 2 février 2009 devant le jury composé de :

Pr. J-Pierre Boeuf Directeur de Recherche CNRS, RapporteurUniversité Paul Sabatier (UPS),Laboratoire LAPLACE, Toulouse

Pr. J-Luc Battaglia Professeur, RapporteurUniversité Bordeaux 1,Laboratoire TREFLE, Bordeaux

Pr. Alain Degiovanni Professeur, Président du JuryInstitut National Polytechnique de Lorraine (INPL),Laboratoire LEMTA, Nancy

Pr. Christophe Le Niliot Professeur, Directeur de thèseUniversité de Provence, IUSTI, Marseille

Dr. Yann Corre Ingénieur de Recherche, Responsable CEACEA Cadarache

Dr. Fabrice Rigollet Maître de Conférence,Université de Provence, IUSTI, Marseille

Dr. Philip Andrew Ingénieur de Recherche, InvitéITER Organization, Cadarache

Dr. J-Marcel Travère Ingénieur de Recherche, InvitéCEA, Cadarache

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A mes parents, A mes frères, A Mika,

A toutes celles et ceux qui m’ont accompagné avant, pendant et après la thèse.

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RésuméMesurer les flux de chaleur déposés sur les parois internes d’un tokamak est essentiel pour assurer la

sécurité de la machine. Afin d’accéder à des décharges performantes de longues durées, l’optimisationdes scénarii expérimentaux utilisés nécessite également de comprendre les phénomènes physiques misen jeu dans le plasma de bord. L’objectif de cette thèse est d’étudier les dépôts de chaleur calculés surles parois internes du tokamak Tore Supra. Pour quantifier les puissances déposées sur les composantsface au plasma de la machine, une approche de type méthode inverse est tout d’abord appliquée auxtempératures mesurées par les diagnostics IR et calorimétrie (température de surface des composants ettempérature de l’eau de refroidissement). Une incohérence entre le motif de dépôt de chaleur calculésur le plancher de la machine (le limiteur pompé toroïdal, LPT) et l’empreinte de flux théoriqueattendue sur la paroi est alors constatée : un étalement de la puissance conduite en dehors des zonesmouillées théoriques ainsi qu’un fort piquage de flux incidents dans la zone de tangence (proche de laDernière Surface Magnétique Fermée) sont observés. Une étude expérimentale du motif de flux calculésur le LPT est également réalisée pour différents chocs à facteur de sécurité q variable. Dans la zonedu LPT en accord avec les prédictions théoriques, cette analyse montre que l’étalement du dépôt dechaleur sur la paroi, induit par la diminution de q, est compensé par une réduction de la longueur dedécroissance λq dans la SOL. A l’inverse, en dehors des zones mouillées théoriques, l’étalement desflux de chaleur observé est accentué lorsque q diminue.

AbstractAccurate measurements of heat loads on internal tokamak components is essential for protection

of the device during steady state operation. The optimisation of experimental scenarios also requiresan in depth understanding of the physical mechanisms governing the heat flux deposition on the walls.The objective of this study is a detailed characterisation of the heat flux to plasma facing components(PFC) of the Tore Supra tokamak. The power deposited onto Tore Supra PFCs is calculated using aninverse method, which is applied to both the temperature maps measured by infrared thermographyand to the enthalpic signals from calorimetry. The derived experimental heat flux maps calculated onthe toroidal pumped limiter (TPL) are then compared with theoretical heat flux density distributionsfrom a standard SOL-model. They are two experimental observations that are not consistent with themodel : significant heat flux outside the theoritical wetted area, and heat load peaking close to thetangency point between the TPL and the last closed field surface (LCFS). An experimental analysis forseveral discharges with variable security factors q is made. In the area consistent with the theoriticalpredictions, this parametric study shows a clear dependence between the heat flux length λq (estimatedin the SOL from the IR measurements) and the magnetic configuration. We observe that the spreadingof heat fluxes on the component is compensated by a reduction of the power decay length λq in theSOL when q decreases. On the other hand, in the area where the derived experimental heat loads arenot consistent with the theoritical predictions, we observe that the spreading of heat fluxes outsidethe theoritical boundary increases when q decreases, and is thus not counterbalanced.

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Table des matières

Glossaire xi

Introduction 1

Plan de la thèse 4

1 La fusion thermonucléaire et les interactions plasma-paroi 5

1.1 Les grands principes de la fusion thermonucléaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.1.1 Produire de l’énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.1.2 Qu’est-ce qu’un plasma ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.1.3 Bilan d’énergie, critère de Lawson et ignition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

1.1.4 Le confinement du plasma : inertiel ou magnétique . . . . . . . . . . . . . . . . 10

1.1.5 Les deux filières de confinement magnétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

1.1.6 Reconstruction de l’équilibre magnétique du plasma dans le tokamak Tore Supra 14

1.1.7 Le chauffage du plasma . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

1.1.8 Les machines de fusion actuelles et futures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

1.2 Les Interactions Plasma-Paroi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

1.2.1 Le rôle des Composants Face au Plasma : extraire les particules et évacuer lespuissances dissipées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

1.2.2 Le recyclage et les mécanismes d’érosion et de redéposition . . . . . . . . . . . 30

1.2.3 Dépôts de chaleur dans la machine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

1.2.4 Quels matériaux pour les Composants Face au Plasma ? . . . . . . . . . . . . . 34

1.2.5 Les diagnostics de mesure et de surveillance des IPP dans Tore Supra . . . . . 36

1.3 Conclusion du chapitre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

2 Détermination de la chaleur déposée sur les CFP : calcul inverse à partir des

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TABLE DES MATIÈRES

données calorimétriques 50

2.1 Exploitation actuelle des données calorimétriques :bilans d’énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

2.2 Réalisation de bilans de puissances par inversion des mesures calorimétriques . . . . . 52

2.2.1 Première étape : résolution du problème direct (identification du modèle) . . . 53

2.2.2 Deuxième étape : application de l’intégrale de convolution et mise sous formematricielle du problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

2.2.3 Troisième étape : régularisation du problème mal posé . . . . . . . . . . . . . . 58

2.3 Calcul de la puissance déposée sur le limiteur de Tore Supra . . . . . . . . . . . . . . . 64

2.3.1 Description du réseau de refroidissement du LPT et de son instrumentation . . 64

2.3.2 Détermination de la réponse du système limiteur : calcul par éléments finis etapproche expérimentale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

2.3.3 Validation du calcul inverse sur un cas test simulé . . . . . . . . . . . . . . . . 72

2.3.4 Résultats obtenus depuis l’analyse de données expérimentales . . . . . . . . . . 78

2.4 Extrapolation de la méthode inverse aux autres CFP de Tore Supra . . . . . . . . . . 81

2.4.1 Calcul des réponses indicielles expérimentales φ(t) . . . . . . . . . . . . . . . . 81

2.4.2 Calcul des puissances déposées sur l’ensemble des CFP de Tore Supra (donnéesexpérimentales) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84

2.5 Bilans de puissances déposées dans la machine : deux exemples . . . . . . . . . . . . . 86

2.6 Conclusion et perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87

3 Traitement des images IR : calcul des flux incidents sur les surfaces propres etrecouvertes de carbone du LPT 90

3.1 Mesures IR sur le LPT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91

3.1.1 Distinction des 3 zones d’interaction plasma-paroi . . . . . . . . . . . . . . . . 91

3.1.2 Problématique des dépôts carbonés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93

3.1.3 Présence de tuiles présentant un défaut à l’interface CFC/Cuivre sur le limiteur 95

3.2 Détermination des flux de chaleur incidents : description de la méthode de calcul . . . 96

3.2.1 Résolution de l’équation de la chaleur à l’aide d’une méthode 1D linéaire : jus-tifications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97

3.2.2 Estimation du flux conduit dans le matériau par déconvolution des températuresIR : mise sous forme matricielle du problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99

3.2.3 Calcul de la réponse indicielle du composant : modélisation quadripôles d’unetuile propre du limiteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101

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TABLE DES MATIÈRES

3.2.4 Validation de la méthode de calcul de flux sur des données numériques (cas d’unetuile propre) et estimation des barres d’erreur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107

3.3 Caractérisation des défauts de cohésion et des dépôts carbonés recouvrant le LPT :description de la méthode d’identification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113

3.3.1 Précédentes études menées sur la caractérisation des défauts de cohésion et desdépôts carbonés observés en surface de CFP . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114

3.3.2 Présentation de la méthode d’identification du modèle de dépôt (ou de défaut)“optimal” . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116

3.3.3 Modélisations quadripôles des dépôts et défauts . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122

3.3.4 Validation de la méthode d’identification sur un cas test et estimation des erreurspropagées dans les calculs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126

3.3.5 Conclusion du paragraphe 3.3 : Validation de la méthode d’identification . . . 135

3.4 Développement d’un logiciel de traitement des images infrarouges : WOLFF . . . . . . 136

3.4.1 Reconnaissance de la forme des tuiles composant la surface du LPT par warpingdes images IR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136

3.4.2 Discrétisation des images IR et extraction des relevés de températures T (t) parrégions d’intérêts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140

3.5 Calculs de flux réalisés sur le limiteur(tuiles propres ou recouvertes de dépôts carbonés) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143

3.5.1 Estimation des flux incidents sur les tuiles propres du LPT (zones d’érosion etzones ombrées) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143

3.5.2 Calcul de flux sur les tuiles avec dépôts ou présentant un défaut d’interface . . 147

3.5.3 Cartographie de flux incidents calculée après le nettoyage du LPT (2008) . . . 156

3.6 Perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159

3.6.1 Optimisation de la méthode de calcul de flux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159

3.6.2 Conclusions et perspectives liées à la caractérisation des propriétés thermiquesdes dépôts carbonés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159

3.7 Conclusion du chapitre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161

4 Modélisation des flux de chaleur dans la SOL et simulation des dépôts de chaleursur le LPT 163

4.1 Modélisation théorique standard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164

4.1.1 Définition du modèle standard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164

4.1.2 Deux paramètres inconnus : λq et QDSMF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165

4.1.3 Configuration des lignes de champ : paramètres rDMSF et α . . . . . . . . . . . 167

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TABLE DES MATIÈRES

4.1.4 Exemple de cartographie de flux simulée depuis le modèle standard : q = 8,λq = 1.5cm, QDSMF = 31MW/m2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170

4.2 Influence des paramètres du modèle standard λq et (rDSMF ,α) sur l’empreinte de dépôtde flux simulée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174

4.2.1 Conséquence d’une variation de q (modification des paramètres rDSMF et α) . 174

4.2.2 Influence de la longueur de décroissance λq sur le motif de dépôt de chaleur simulé176

4.2.3 Synthèse de l’étude numérique réalisée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

4.3 Comparaison simulation-expérience et amélioration du modèle standard . . . . . . . . 178

4.3.1 Comparaison du motif 2D simulé avec une cartographie de flux expérimentale(choc 41696) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178

4.3.2 Révision du modèle standard : dissociation des contributions en flux parallèleset perpendiculaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 180

4.4 Estimation des paramètres λq, QDSMF et Q⊥(%) expérimentaux . . . . . . . . . . . . 183

4.4.1 Une infinité de solution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183

4.4.2 De QLPT vers QSOL : estimation de λq et QDSMF à partir la décroissances desflux de chaleur observée dans la zone mouillée du LPT . . . . . . . . . . . . . . 184

4.5 Conclusion du chapitre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188

5 Analyse expérimentale des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra : in-fluence du facteur de sécurité q sur la répartition des flux dans la machine 190

5.1 Présentation des scénarii plasma étudiés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191

5.2 Motif de dépôt de chaleur calculé sur le LPT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 192

5.3 Bilans de puissances et de flux dans la machine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193

5.3.1 Bilan des puissances totales déposées sur le limiteur (cohérence IR-Calorimétrie) 193

5.3.2 Evaluation des contributions en flux Qsupras, Qneutres et Qrad déposées sur le LPT196

5.4 Etude de l’étalement du dépôt de chaleur sur le LPT en fonction de q . . . . . . . . . 199

5.4.1 Evaluation de la part de puissance conduite étalée en dehors des zones mouilléesthéoriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 199

5.4.2 Evolution de l’étalement observé sur le composant en fonction de q . . . . . . . 201

5.5 Etude du motif de flux en accord avec la modélisation standard : évolution de la longueurde décroissance λq dans la SOL en fonction de q . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205

5.5.1 Mesures de QSOL avec les sondes de Langmuir . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205

5.5.2 Estimation de la longueur de décroissance λq depuis les images IR du LPT . . 206

5.6 Synthèse des principaux résultats expérimentaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209

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TABLE DES MATIÈRES

5.7 Perspectives : description des phénomènes locaux pouvant perturber le transport desparticules à proximité du limiteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211

5.8 Conclusion du chapitre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 214

Conclusion 215

Annexes 218

Table des Figures 259

Table des Tableaux 261

Bibliographie 262

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Glossaire

CFP : Composants Face au Plasma

LPT : Limiteur Pompé Toroïdal

PEI : Panneaux de Protection de l’Enceinte Interne

AG : Anneaux de Garde

LPA : Limiteur de Protection d’Antennes

PJ : Plan de Jonction (séparation entre deux queusots de la machine)

Z : Numéro atomique (nombre de protons d’un atome)

Q : Facteur d’amplification (définition au chapitre 1, §1.1.3)

τE : Temps de confinement de l’énergie dans le plasma (définition au chapitre 1, §1.1.3)

eV : Electronvolt (1eV=11600K)

ρL : Rayon de Larmor des particules (définition au chapitre 1, §1.1.4.2)

a : Petit rayon du tokamak

r : Position radiale d’une surface magnétique dans la direction du petit rayon

rDSMF : Position radiale d’une ligne de champ magnétique ramenée à la position de la DSMF

L// : Longueur de connexion d’une ligne de champ (aussi nommée libre parcours moyen)

R0 : Grand rayon du tokamak

R : Position radiale d’une surface magnétique dans la direction du grand rayon

ϕ : Angle toroïdal

θ : Angle poloïdal

Z : Axe de symétrie verticale du tokamak

q : facteur de sécurité ou taux d’enroulement des lignes de champ (définition au chapitre 1, §1.1.6)

Bϕ, Bθ, Br : Champs magnétiques toroïdaux, poloïdaux et radiaux

Ip : courant plasma

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FCI : Fréquence cyclotronique ionique (définition au chapitre 1, §1.1.7)

FCE : Fréquence cyclotronique électronique

LH : (Lower Hybrid) Fréquence de chauffage hybride

JET : Join European Torus, tokamak anglais

ITER : International Thermonuclear Experimental Reactor

SOL : Scrape-off layer ou Section à l’ombre du plasma (définition au chapitre 1, §1.2.1.1)

DSMF : Dernière Surface Magnétique Fermée du plasma (aussi appelée séparatrice)

LFS : (Low Field Side), côté faible champ d’un tokamak

HFS : (High Field Side), côté fort champ d’un tokamak

α : Angle d’incidence des lignes de champ magnétique sur le limiteur

QDSMF : Flux de chaleur à la séparatrice

QSOL : Flux de chaleur circulant dans la SOL

λq : Longueur de décroissance des flux de chaleur dans la SOL

Qalpha : Flux de chaleur déposé sur le LPT dans la zone α = 0 (point de tangence)

Qpic : Flux de chaleur maximum déposé sur le LPT en zone mouillée

Qrad : Flux rayonné par le plasma (définition au chapitre 1, §1.2.3)

Qcond : Flux conduit dans la SOL

Qsupras : Flux de chaleur incidents induit par le déconfinement de particules rapides (aussi appelésparticules suprathermiques)

Qneutres : Flux de neutres

Qneutrons : Flux de neutrons

frad : Fraction d’énergie rayonnée par le plasma (%)

CFC : Composite de Fibres Carbone

OFHC : Cuivre Oxygen Free High Conductivity

HR : Haute Résolution

ROI : (Region of Interest) Région d’intérêt

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a : Diffusivité thermique d’un matériau (m2/s)

λ : Conductivité thermique d’un matériau (W/m.K)

Cp : Capacité calorifique (J/kg.K)

ρ : Masse volumique (kg/m3)

MARFE : Multi Faced Radiation From the Edge Ce phénomène correspond à une augmenta-tion du rayonnement près de la paroi (généralement symétrique toroïdalement), accompagnée d’uneaugmentation de la densité ionique et d’une réduction de la température électronique. Le phénomènede MARFE se distingue d’un détachement du plasma (symétrique dans la direction θ) de part safaible extension poloïdale. L’origine d’un MARFE est attribuée à une instabilité thermique entre lespuissances convectées et rayonnée par le plasma, généralement causée par l’intrusion d’un “ovni” dansle plasma. Un MARFE peut donc être réduit en contrebalançant le déséquilibre des puissances aumoyen d’une augmentation locale de l’énergie convectée (conduisant le plasma à des états d’ionisationplus élevés, donc moins rayonnants).

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Introduction

Nous sommes actuellement assaillis sous des dizaines de chiffres devant nous faire prendreconscience des besoins énergétiques croissants de notre civilisation mais aussi de l’appauvrissementdes ressources naturelles de notre planète : le prix du baril de pétrole rythme ainsi notre quotidien,de même que les communiqués sur l’évolution préoccupante de la fonte des glaciers ou du taux deCO2 présent dans l’atmosphère. La consommation énergétique en France a atteint 276.1Mtep en 2007[Ministère de l’Ecologie 08]. Même si l’évolution des besoins mondiaux en énergie ne peut être estiméeprécisément, il paraît inévitable que ces derniers augmenteront de manière significative dans les annéesà venir du fait de la croissance des pays émergents. La consommation mondiale pourrait ainsi êtremultipliée par un facteur 2 (ou 4, suivant la politique environnementale adoptée) d’ici à 2100 selon lesdernières prédictions (figure 1, [CEA-Fusion08]). Face aux problèmes énergétiques croissants rencon-trés à l’échelle internationale, le développement de sources d’énergie durables, sûres et respectueusesde l’environnement représente l’un des défis majeurs du siècle à venir. Dans ce contexte, les recherchessur la fusion thermonucléaire contrôlée représentent un réel enjeu économique, politique mais aussitechnologique.

Figure 1 – Evolutions de la consommation d’énergie et de la population mondiale [CEA-Fusion08]

La fusion est potentiellement une des sources d’énergie primaire les plus intéressantes. Permettantde reproduire les réactions thermonucléaires existant sur le soleil, cette énergie n’est pas soumise auxproblèmes de réserves de combustible. Le deutérium et le lithium (servant à produire le tritium, secondisotope de l’hydrogène mis en jeu dans les procédés de fusion) sont en effet abondants dans la nature.Les réactions de fusion ne produisent pas non plus de déchets radioactifs à durée de vie longue ni deCO2, gaz responsable de l’effet de serre.

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Tout réacteur de fusion est une installation nucléaire qui peut présenter des risques associésà son exploitation (les futures machines, fonctionnant en tritium, devront notamment répondreà des contraintes de sûreté importantes), notons cependant que le risque d’emballement est nuldans une machine de fusion. L’application industrielle de la fusion thermonucléaire contrôlée estencore confrontée à des défis technologiques majeurs nécessitant des efforts intensifs de recherche etdéveloppement pour pouvoir construire un jour une installation produisant de l’électricité. L’enjeudes recherches actuelles sur la fusion par confinement magnétique est de réaliser des déchargesplasma de fortes puissances et de longues durées. Le CEA de Cadarache, exploitant le tokamak supra-conducteur Tore Supra, est un des centres de recherche bien placé pour répondre à cette problématique.

Pour réaliser des réactions de fusion thermonucléaire contrôlée avec un rendement élevé, il estnécessaire de confiner et de chauffer à plusieurs millions de degrés un milieu combustible (plasma)constitué d’isotopes de l’hydrogène (tritium et deutérium). La diffusion de la chaleur et des particulesdans un tokamak entraîne alors de fortes interactions avec les parois, se traduisant par des chargesthermiques pouvant atteindre plusieurs MW/m2 en régime stationnaire. Maîtriser ces interactionsentre le plasma et la paroi est un enjeu essentiel pour aboutir à un fonctionnement continu (réacteur).Les expériences réalisées ces 30 dernières années ont consisté à effectuer des chocs de durée courte oumoyenne (<300s) dans des tokamaks essentiellement composés de carbone (matériau de faible numéroatomique Z). Les objectifs des machines de nouvelles générations (ITER, JT-60 U) vont désormaisconsister à réaliser des chocs puissants et de longues durées dans des machines métalliques dont lesparois seront par exemple composées de tungstène (matériau qui, de part son fort numéro atomiqueZ rendra le plasma plus sensible à la production d’impuretés et pourra limiter ses performances). Lamesure précise des flux de chaleur déposés dans un tokamak est rendu d’autant plus indispensableque les niveaux de puissance mis en jeu dans le futur seront plus importants. Pour assurer la sécuritédes composants pendant les opérations plasma, deux solutions complémentaires sont envisagées :→ Un asservissement temps réel de la position du plasma et des puissances injectées dans la

machine peut par exemple être utilisé en cas de dépassement de seuils de sécurité (ce premier pointnécessitera alors le développement de diagnostics mesurant de manière fiable et quasi immédiate lestempératures de surface et/ou les flux de chaleur déposés sur les composants).→ Une optimisation des scénarii expérimentaux peut également être proposée afin de réduire

au maximum les interactions entre le plasma et la paroi et de réaliser des décharges performanteset compatibles avec le mur (ce deuxième point nécessitera alors une bonne compréhension desphénomènes physiques liés au transport et au dépôt de chaleur sur les composants).

Les pistes pré-citées justifient mon travail de thèse consistant à étudier les dépôts de chaleurdans le tokamak Tore Supra, ainsi que les précédentes études menées sur ce sujet pour cette machine([Mitteau 08], [Seigneur 93]).

Divers diagnostics peuvent être utilisés pour étudier les phénomènes de dépôts de chaleur dansun tokamak : la thermographie infrarouge peut par exemple fournir une image en températures desurface des composants, les mesures calorimétriques permettent de quantifier les puissances extraitesd’une paroi activement refroidie, une sonde mobile plongée dans le plasma de bord peut égalementmesurer les flux de chaleur et de particules circulant dans la SOL, la bolométrie, enfin, peut fournir uneestimation du rayonnement émis par le plasma. Tous ces diagnostics n’offrent qu’une vision partielledes phénomènes de transport et de dépôt de chaleur dans un tokamak. Aucun d’entre eux ne mesurenon plus de façon directe les flux de chaleur (enMW/m2) déposés sur les composants. Des traitementssont alors nécessaires pour pouvoir confronter les données issues de ces systèmes de mesure et obtenirune image complète et cohérente des flux de chaleur dans la machine. L’originalité du travail dethèse proposé va premièrement consister à appliquer aux données IR et calorimétriques différentes

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méthodes de traitement du signal permettant de remonter à l’information recherchée, à savoir : lapuissance (ou le flux) déposé en surface des composants face au plasma. Le lien entre la physiquedes plasmas et la thermique pourra alors être établi en confrontant les images de dépôt de chaleurcalculées à celles issues d’un modèle physique théorique. Ce dernier travail nous permettra d’aboutirà une compréhension empirique des phénomènes gouvernant l’écoulement des flux de chaleur dans leplasma de bord de Tore Supra et leur dépôt sur la paroi.

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Plan de la thèseLe but de ce travail de thèse est d’étudier les dépôts de chaleur sur les composants internes du

tokamak Tore Supra. Nous nous sommes fixés pour cela deux objectifs : le premier sera de quantifierles niveaux de chaleur déposés sur les composants, le second consistera à interpréter les imagescalculées en les comparant au motif de flux théorique attendu dans la machine. Le plan du mémoirese décomposera en 5 chapitres.

• Le chapitre 1 nous permettra tout d’abord de présenter les problématiques générales liéesaux interactions plasma-paroi dans les machines de fusion et de justifier la pertinence de l’étuderéalisée. Une description des principaux diagnostics de surveillance des flux de chaleur déposés dansle tokamak Tore Supra y sera également fournie.

Afin de quantifier les flux de chaleur déposés sur les composants, le développement de codesadaptés sera nécessaire.• Nous présenterons dans le chapitre 2 la technique inverse utilisée pour quantifier les niveaux de

puissances déposés en surface des composants à partir des mesures de puissances thermiques extraiteseffectuées en sortie de la machine (calorimétrie).• Nous présenterons ensuite dans le chapitre 3 le code thermique nous ayant permis d’effectuer

une déconvolution 1D linéaire des images IR du limiteur pompé toroïdal afin d’estimer les flux dechaleur déposés à sa surface. Nous présenterons également dans ce chapitre la méthode d’identifica-tion mise en oeuvre pour caractériser les propriétés thermiques des dépôts carbonés recouvrant lecomposant.

Les données issues des diagnostics IR et calorimétrie nous permettront d’établir une image précisedu dépôt de chaleur dans la machine, et notamment en surface du limiteur (composant interne eninteraction directe avec le plasma). Les charges thermiques calculées seront interprétées pour étudierles mécanismes de dépôt de chaleur dans la machine et remonter à des informations pertinentes surl’écoulement des flux dans le plasma de bord.• Nous présenterons dans le chapitre 4 le modèle standard théorique utilisé pour simuler l’em-

preinte de dépôt de chaleur sur le plancher de la machine (limiteur). Ce dernier permettra de modéliserl’interaction entre les flux circulant le long des lignes de champ magnétiques et la paroi.• Dans le chapitre 5, nous étudierons la variation de l’empreinte de dépôt chaleur observée sur le

limiteur en fonction de la configuration magnétique des lignes de champ dans la machine (facteur desécurité q). Cette analyse expérimentale nous permettra de déterminer les grandeurs macroscopiquescaractérisant l’écoulement des flux thermiques dans le plasma de bord (longueur de décroissance ra-diale, flux de chaleur atteint à la séparatrice, contribution en transport perpendiculaire). Les différencesobservées entre les simulations théoriques et l’expérience y seront également discutées. Une confronta-tion des mesures fournies par les diagnostics IR, calorimétrie, bolométrie et sondes de Langmuir nouspermettra également d’établir une image expérimentale complète des flux de chaleur mis en jeu dansla machine.

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Chapitre 1

La fusion thermonucléaire et lesinteractions plasma-paroi

L’objectif de ce chapitre est de présenter au lecteur les enjeux liés à l’étude des dépôts de chaleurdans un tokamak, et plus particulièrement dans la machine Tore Supra. Le but ne sera pas ici dedécrire exhaustivement les phénomènes physiques mis en jeu lors de la création d’un plasma, mais defournir les bases essentielles pour la compréhension globale du sujet traité dans ce mémoire.

La première partie de ce chapitre sera consacrée à la présentation du principe de fonctionnementdes machines de fusion. Les différentes configurations magnétiques et géométriques adoptées afin deconfiner le plasma dans un réacteur de fusion y seront décrites. Nous introduirons dans un second tempsles principales interactions plasma-paroi mises en jeu dans le tokamak Tore Supra. Nous donnerons unedescription plus détaillée des phénomènes d’érosion-redéposition et de dépôts de chaleur se produisantsur les composants face au plasma lors de décharges. Les diagnostics permettant la surveillance et lecontrôle des charges thermiques reçues par les composants seront présentés en fin de ce chapitre.

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Chapitre 1

1.1 Les grands principes de la fusion thermonucléaire

1.1.1 Produire de l’énergie

Le noyau d’un atome est constitué de nucléons (Z protons et N neutrons). Son énergie de liaison,correspondant à l’énergie nécessaire pour assurer la cohésion de son noyau, empêche les protons, tousde même signe, de se repousser. Cette énergie est proportionnelle au défaut de masse du noyau, définiecomme la différence entre la masse totale des nucléons séparés au repos et la masse du noyau formé.Chaque atome présente un défaut de masse plus ou moins important suivant la stabilité de son noyau.Comme le montre la courbe d’Aston présentée sur la figure 1.1, les éléments situés au milieu de laclassification de Mendeleiev comme le Fer et le Cuivre sont les éléments dont l’énergie de liaison parnucléon est la plus importante, ce sont les éléments les plus stables. Le défaut de masse d’atomes pluslégers (comme l’Hydrogéne ou l’Hélium) ou d’atomes lourds (comme l’Uranium) est plus faible.

Figure 1.1 – Courbe d’Aston : énergie de liaison par nucléon en fonction du nombre de nucléonsd’un atome

Toute transformation d’un noyau à faible défaut de masse en un noyau à défaut de masse plusimportant représente un gain d’énergie de liaison. Selon la théorie publiée par A. Einstein en 1905dans son article sur la relativité [Einstein 05], cette énergie est dépendante de la différence de masse∆m mise en jeu et s’exprime :

E = ∆mc2 (1.1)

où c est la vitesse de la lumière (299 792 458 m/s)

Deux catégories de réactions nucléaires permettent de libérer cette énergie :– les réactions de fission nucléaire, consistant à transformer un noyau lourd en deux noyaux pluslégers,

– les réactions de fusion, permettant de combiner deux noyaux légers afin d’obenir un noyau pluslourd.

Les réactions de fusion sont nombreuses, mais seules celles qui possèdent une section efficacesuffisante (figure 1.2) sont intéressantes pour une application industrielle (réacteur de fusion).

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Section 1.1

Figure 1.2 – Sections efficaces des réactions de fusion en fonction de l’énergie relative desréactifs employés [Wesson 97]

La réaction la plus favorable est celle faisant intervenir deux isotopes de l’hydrogène : un noyau dedeutérium et un noyau de tritium (isotope radioactif de l’hydrogène ayant une demi-vie de 12, 3 ans).Cette réaction libère un neutron n de 14.03 MeV et un hélium 4He (aussi appelé particule α) de 3.56MeV suivant la réaction :

D + T → He+ n (1.2)

Figure 1.3 – Réaction élémentaire de fusion Deutérium-Tritium

Définition. L’électron-volt (eV ) est une unité de mesure d’énergie couramment utilisée en physiquedes particules. Sa valeur est définie comme étant l’énergie d’un électron accéléré par une différence depotentiel d’un volt : 1eV = 11600 K.

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Chapitre 1

Les réactions de fusion présentent l’avantage d’utiliser le deutérium, matière relativement abon-dante puisque l’océan en contient environ 30mg par litre. Les réserves pour cet élément sont donc trèsabondantes voire même inépuisables. Le tritium est en revanche beaucoup plus rare dans la mesureoù il existe sur terre un élément de tritium pour 1017 éléments d’hydrogène. Dans un réacteur, celui-cisera produit à partir de lithium stocké dans la paroi de la machine et bombardé par les neutrons issusde la réaction D-T. Sur Tore Supra, les plasmas réalisés ne mettent en jeu que du deutérium ou del’helium.

1.1.2 Qu’est-ce qu’un plasma ?

Pour fusionner deux noyaux et vaincre leur barrière coulombienne, les températures mises enjeu doivent être très élevées (cf. niveaux d’énergie représentés sur la courbe de la figure 1.2). Unetelle condition peut être atteinte au sein d’un gaz totalement ou partiellement ionisé dans lequel lesélectrons sont détachés du noyau des particules. Cet état de plasma correspond au quatrième étatde la matière.

Les plasmas existent dans l’univers sous des formes très diverses. Ces derniers sont généralementcaractérisés par leur densité, leur température et leur degré d’ionisation. La température d’unplasma, correspondant à l’énergie cinétique moyenne Ecin de ses particules (suivant la relationEcin = (3/2)kT ), peut varier de quelques centaines de degrés à plusieurs millions de degrés suivant leplasma considéré. On distingue généralement les “plasmas froids” (faiblement ionisés) des “plasmaschauds” (fortement ionisés). La densité d’un plasma peut également atteindre jusqu’à 1030 particulespar mètre cube au centre de certaines étoiles ou être seulement équivalente à quelques particules parmètre cube (dans les gaz interstellaires).

Au sein d’un plasma chaud, l’énergie des particules est suffisante pour vaincre la répulsion cou-lombienne et les réactions de fusion peuvent s’amorcer. Une condition doit toutefois être rempliepour qu’un mélange de combustible conduise à un réacteur de fusion économiquement viable. Cettecondition est connue sous le nom de critère de Lawson [Lawson 57].

1.1.3 Bilan d’énergie, critère de Lawson et ignition

La différence entre les sources d’énergie alimentant un plasma et les pertes qui le refroidissentdéfinit le bilan d’énergie suivant (en régime stationnaire) :

dE

dt= Psource − Pperte = 0 (1.3)

où E représente l’énergie contenue dans le plasma telle que :

E = 3.n.k.T.V (1.4)

V étant le volume du plasma, n sa densité et T sa température.

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Page 23: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 1.1

La principale source d’énergie d’un plasma est la puissance de fusion Pfusion issue de la réactionthermonucléaire entre les atomes. Cette dernière peut s’exprimer sous la forme :

Pfusion = Nfusion.Efusion = n2

4 . < σ.v > .V.Efusion (1.5)

où :– le terme Nfusion représente le nombre total de réactions se produisant par une unité de tempsdans le plasma,

– Efusion représente l’énergie libérée par la réaction de fusion (≈ 17, 59 MeV pour la réactionD-T), cette dernière comprenant à la fois l’énergie des neutrons (80%) et celle des particuleshélium α (20%), cf. équation(1.2),

– < σ.v > représente le taux de réaction de fusion nucléaire.

Le comportement des particules α et des neutrons dans un plasma magnétisé diffère considérable-ment. Les particules α , chargées, peuvent être confinées magnétiquement et céder leur énergie parcollision. Les neutrons, non confinés, s’échappent rapidement du plasma sans interagir avec lui et sanscéder leur énergie. Ainsi, seule la fraction d’énergie portée par les particules α se couple aux particulesdu plasma. Cette dernière s’exprime :

Palpha = n2

4 . < σ.v > .V.Eα (1.6)

La mesure de la puissance Pperte permet de définir le temps de confinement de l’énergie τE dansun plasma tel que :

τE = E

Pperte(1.7)

Ce temps de confinement correspond à la capacité globale du plasma à conserver son énergie.Ces pertes d’énergie sont essentiellement dues au rayonnement du plasma (et dépendent donc de saconcentration en impuretés) et également à la diffusion des particules vers sa périphérie (§1.2.3). Dessources de chauffages (§1.1.7) sont nécessaires pour compenser ces pertes et apporter une puissanceextérieure Pext si l’énergie du plasma vient à décroître :

Psource = Pfusion + Pext = Pα + Pext (1.8)

Cette source d’énergie supplémentaire peut permettre d’atteindre un état stationnaire (dE/dt = 0)défini par :

Ppertes = Psource = Pα + Pext = E

τE(1.9)

Le facteur d’amplification Q d’un plasma est alors défini comme le rapport entre la puissancefournie par les réactions de fusion et la puissance extérieure fournie au plasma par les systèmes dechauffage.

Q = PfusionPext

= PαPext

(1.10)

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Chapitre 1

Ce facteur d’amplification permet de définir la notion de break-even (correspondant à la valeurparticulière Q = 1) pour laquelle la part d’énergie apportée au plasma Pext est égale à l’énergieproduite par les réactions de fusion. Les recherches sur la fusion visent à obtenir un plasma auto-entretenu permettant de produire de l’énergie au moyen de réactions de fusion efficaces. L’obtentionde telles décharges plasma nécessite alors de satisfaire la condition d’ignition : Q =∞ (NB. sur ToreSupra, la puissance de fusion Palpha est quasiment nulle : Q ∼= 0).

Un critère, appelé critère de Lawson [Lawson 57], permet de traduire les contraintes sur les para-mètres plasma (en terme de densité, température et temps de confinement de l’énergie) nécessaire àl’obtention d’une décharge d’un facteur d’amplification Q donné. Ce critère, déduit de la combinaisonsdes équations (1.4), (1.5) (1.9) et (1.10), s’exprime :

nτE = 12.kb.T< σ.v >

.(Efusion.(EalphaEfusion

+ 1Q

))−1 (1.11)

où kb est la constante de Boltzmann (1.38.10−23 m2.kg.s−2.K−1)

A l’ignition (Q =∞), le critère de Lawson est équivalent à une valeur de [Wesson 97] :

nτE ≈ 1, 5.1020 m−3s pour T ≈ 30 keV (1.12)

Cette dernière relation traduit le fait que pour produire de l’énergie à partir des réactions defusion, il est nécessaire de confiner efficacement un plasma très chaud et suffisament dense pendantune durée τE assez longue.

NB. Le fait qu’une réaction de fusion puisse s’autoréguler constitue un atout de sécurité majeurpour les procédés de fusion thermonucléaire (dans le cas d’un taux d’accroissement de l’énergie dE/dtconstamment positif, le plasma deviendrait en effet si chaud que les sections efficaces des réactions defusion diminueraient, cf. figure 1.2).

1.1.4 Le confinement du plasma : inertiel ou magnétique

Toute la difficulté de création d’un plasma réside dans l’obtention combinée d’un temps de confi-nement, d’une température et d’une densité des particules suffisante pour maintenir les réactions defusion (critère de Lawson). Un plasma, lorsqu’il se crée, a en effet tendance à se disperser et donc à serefroidir. Dans une étoile comme le soleil, cet effet est contrebalancé par la force gravitationnelle. Pourqu’un combustible à l’état de plasma puisse produire suffisamment de réactions thermonucléaires, ilest nécessaire de le maintenir dans un volume limité éloigné de toute paroi matérielle afin de mainte-nir sa température élevée. Deux procédés de confinement du plasma sont actuellement étudiés afin dereproduire sur Terre les réactions de fusion existant dans les étoiles : il s’agit du confinement inertielet du confinement magnétique.

1.1.4.1 Les recherches menées sur le confinement inertiel

La fusion inertielle (ou fusion par faisceaux) consiste à porter aux conditions de températureet de pression requises un petit volume de matière combustible. Le temps de confinement mis en jeudans ce type de réaction est alors extrêmement court (de l’ordre de 10−11s).

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Section 1.1

L’avènement du laser en tant que source de rayonnement impulsionnel facilement focalisable etpuissante (1kW/cm2) a permis de faire émerger ce concept dans les années 1960. En France, le CEA-DAM initie depuis 1962 les recherches sur la fusion par confinement inertiel. Le projet LMJ (LaserMéga-Joules) aura à ce titre pour objectif de faire imploser (pour la comprimer) une capsule conte-nant un mélange de deutérium et de tritium à l’état solide. Cet échantillon de quelques centaines demicromètres sera porté à la température requise pour les réactions de fusion au moyen de plusieurslasers délivrant simultanément une énergie de l’ordre du MJ en un temps très court (nanoseconde).L’impact des lasers chauffant violemment la cible sphérique provoquera alors son implosion par com-pression et la vaporisation de sa couche externe provoquant ainsi une onde de choc vers le centre dela cible. La compression qui s’en suivra fera augmenter la densité et la température au centre de lasphère provoquant ainsi la fusion des premiers noyaux. L’énergie dégagée par cet amorçage alimenteraalors le plasma créé et permettra la fusion du reste du combustible.

1.1.4.2 Le confinement magnétique

Le procédé de fusion par confinement magnétique consiste à chauffer à des températures très élevéeset sur un temps long un gaz combustible de densité relativement faible (1020m−3). Dans un plasma àl’état libre, la trajectoire des particules est aléatoire. Le principe du confinement magnétique consistealors à confiner ces dernières, chargées, dans une enceinte fermée à l’aide d’un champ magnétiquepuissant (plusieurs Teslas). La figure 1.4a illustre la trajectoire hélocoïdale d’une particule chargéeautour d’une ligne de champ magnétique (correspondant au centre-guide de son mouvement). Le rayonde giration d’une particule, appelé rayon de Larmor, dépend de l’intensité du champ magnétique(B) lui étant appliquée, de sa masse (e), de sa charge (Z) et de son énergie :

ρL = m.v⊥Z.e.B

∼=m.cse.B

(1.13)

cs représente la vitesse acoustique ionique de la particule (m/s) telle que :

cs =√kb.T

m(1.14)

Plus le champ magnétique est puissant, plus le rayon de Larmor d’une particule est faible (cedernier varie typiquement de quelques millimètres à plusieurs dizaines de centimètres pour uneparticule très énergétique dans un tokamak). Les électrons, beaucoup plus légers que les ions, ont unrayon de Larmor plus faible à même énergie.

Dans le cas d’un champ magnétique rectiligne (figure 1.4a) appliqué à un plasma chaud, les par-ticules s’enroulent autour des lignes de champ et ne peuvent plus atteindre les parois latérales. Afind’éviter les pertes aux extrémités, la “boite magnétique” peut alors être fermée sur elle-même pourcréer un tore (figure 1.4b). Le champ magnétique toroïdal imposé ne sera toutefois pas suffisant pourconfiner les particules, soumises à un phénomène de dérive verticale en raison de l’inhomogénéité duchamp créé dans la direction R (grand rayon du tore). La création d’une seconde composante de champmagnétique (poloïdale) perpendiculaire au champ toroïdal initial et plus faible que ce dernier peutminimiser cette dérive verticale (dirigée vers le haut pour les ions et vers le bas pour les électrons).L’addition de cette contribution aboutit à la création d’un champ hélicoïdal (figure 1.4c). Une parti-cule piégée autour d’une ligne de champ hélicoïdale parcourt alternativement une zone où le champmagnétique est fort (à l’intérieur du tore) et une zone où il est plus faible (côté externe). Cette tra-jectoire permet alors de compenser sa dérive verticale mais pas de l’éliminer totalement. Cette dérive

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Chapitre 1

verticale des particules, de sens opposé pour les ions et les électrons, entraîne alors une séparation descharges et l’apparition d’un champ électrique ~E. Ce dernier, combiné au champ magnétique provoquealors une dérive supplémentaire des particules en ~E × ~B dirigée vers l’extérieur du plasma.

Figure 1.4 – Etapes du confinement en “boîtes magnétiques”

Une configuration magnétique hélocoïdale, même si elle ne permet pas d’éliminer la fuite desparticules vers l’extérieur du plasma, améliore tout de même significativement le confinement duplasma et donc ses performances. La méthode utilisée pour générer des lignes de champ hélicoïdalesa donné naissance à deux types de machines : stellarator et tokamak.

NB. Le recours à un champ magnétique pour confiner un plasma limite la densité de ce dernier. Leconfinement magnétique des particules n’est en effet possible que si le rapport β entre la pression ci-nétique du plasma Pcin = 2nkbT (qui tend à le disperser) et la pression magnétique Pmag = B2/2µ0est inférieur à 1 (en pratique, la valeur de β peut même être limitée à quelques pour cents en raisond’instabilités apparaissant dans le plasma). Il est actuellement possible de créer de forts champs ma-gnétiques, limités toutefois à une dizaine de Teslas pour des raisons technologiques et économiques.La limite du confinement (traduit par le rapport β) est finalement équivalente à une limitation sur ladensité du plasma dans une machine de fusion non inertielle :

β = Pcin/Pmag =⇒ n < β(B2/4µ0kbT )

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Section 1.1

1.1.5 Les deux filières de confinement magnétique

1.1.5.1 Stellarator

Dans un stellarator, le champ magnétique total confinant le plasma est entièrement assuré parla circulation d’un courant dans des bobines magnétiques extérieures, de formes hélicoïdales. Cettesolution est techniquement difficile à mettre en oeuvre et explique le fait que la filière stellarator soithistoriquement moins avancée que celle des tokamaks. La figure 1.5 illustre par exemple le schéma dufutur stellarator allemand W7 − X en cours de construction (le bobinage est représenté en bleu surcette figure, le plasma en orange).

Figure 1.5 – Configuration magnétique du futur stellarator allemand W7 −X

1.1.5.2 Tokamak

La configuration magnétique d’un tokamak est relativement simple à mettre en oeuvre comparéeà celle d’un stellarator. Dans un tokamak, la structure hélicoïdale des lignes de champ magnétiquesest générée au moyen de deux composantes magnétiques distinctes (toroïdale et poloïdale). Le champmagnétique toroïdal Bϕ est créé par un ensemble de bobines extérieures au tore (figure 1.6). Lechamp poloïdal est généré séparément au moyen d’un courant intense axial circulant dans le plasma(appelé courant plasma Ip). Ce dernier crée alors par induction une composante Bθ dont l’intensitéest équivalente à environ 10% du champ toroïdal. Un tokamak est également équipé de bobinespoloïdales permettant d’asservir la position verticale du plasma dans la machine.

A ce jour, la filière tokamak est celle ayant obtenu les résultats les plus significatifs en termede confinement de l’énergie de fusion depuis son invention dans les années 1960 par des chercheursrusses. C’est actuellement la voie de recherche la plus étudiée dans la filière de fusion par confinementmagnétique.

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Chapitre 1

Figure 1.6 – Composantes magnétiques permettant le confinement du plasma dans un tokamak

1.1.6 Reconstruction de l’équilibre magnétique du plasma dans le tokamak ToreSupra

La figure 1.7 illustre les coordonnées permettant de définir la stucture magnétique d’un plasma detokamak.

Figure 1.7 – Définition des coordonnées d’un plasma confiné magnétiquement en géométrietorique

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Section 1.1

Nous noterons :– a (m) : le petit rayon du tokamak– r (m) : la position radiale d’une surface magnétique dans la direction du petit rayon– R0 (m) : le grand rayon du tokamak– R (m) : la position radiale d’une surface magnétique dans la direction du grand rayon– ϕ (°) : l’angle toroïdal– θ (°) : l’angle poloïdal– z (m) : la position verticale d’une surface magnétique

Un plasma peut être considéré comme un fluide conducteur soumis à un champ magnétique ~Bet parcouru par une densité de courant ~j. Ce dernier se trouve à l’équilibre magnétique lorsque legradient de pression cinétique ( ~∇p) et les forces de Laplace (~j. ~B) auxquelles il est soumis s’annulent.Cet état d’équilibre est défini par l’équation de Grad-Shafranov ([Grad 58], [Shafranov 66]).La résolution de cette équation de magnétohydrodynamique (MHD) suppose de connaître lescomposantes de champ magnétiques toroïdales, poloïdales et radiales (Bφ, Bθ, Br) confinant leplasma. Sur Tore Supra, le contrôle de la forme et de la position du plasma est assuré à l’aide de 424capteurs magnétiques répartis dans la machine. Ces mesures permettent de calculer les coordonnéesdes surfaces magnétiques confinant le plasma ([Saint-Laurent 01], [Moreau 03]).

Le plasma d’un tokamak est confiné dans des surfaces magnétiques emboitées de forme toriquesdont les frontières sont définies par la trajectoires des lignes de champ hélicoïdales. Chacune de ceslignes de champ est caractérisée par un taux d’enroulement q (ou facteur de sécurité1) traduisantleur hélicité. Ce dernier correspond au nombre de tours toroïdaux parcourus par chacune des lignesde champ formant une surface magnétique avant que ces dernières n’accomplisse une tour poloïdalcomplet. L’hypothèse de faibles rapports d’aspect étant vérifiée sur Tore Supra (le petit rayon a estpetit devant R0), le facteur de sécurité q peut être approché par :

q = r.BϕR.Bθ

(1.15)

Le facteur de sécurité q n’est pas constant dans la machine et varie avec la position radiale de lasurface magnétique considérée. Dans une configuration tokamak, ce paramètre varie typiquement de1 au centre du plasma à quelques unités au bord. La valeur de ce facteur est dépendante de l’intensitéchoisie pour les champs toroïdaux et poloïdaux. Le champ poloïdal Bθ étant directement lié au courantplasma Ip par le théorème d’Ampère (2.π.r.Bθ = µ0.Ip), le facteur de sécurité q peut également êtreapproché par :

q = 2.π.r2.Bϕµ0.R.Ip

(1.16)

Les lignes de champ dans le plasma ne sont pas toutes fermées. Certaines surfaces magnétiques,interceptées par la paroi, sont ouvertes. Si la reconstruction de l’équilibre du plasma en temps réelsert à asservir sa position, cette dernière peut également permettre de calculer les coordonnéesdes points d’impact des lignes de champ magnétiques sur les parois. Cette information seraexploitée au cours des chapitres 4 et 5 de ce mémoire, lorsque nous étudierons l’empreinte de dépôtde chaleur observée sur la paroi du tokamak Tore Supra.

1Cette appellation traduit le fait que pour des valeurs de q trop faibles, le plasma devient instable.

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Chapitre 1

1.1.7 Le chauffage du plasma

Nous avons vu que le principe de la fusion par confinement magnétique consiste à maintenir ungaz ionisé très peu dense à une température de plusieurs millions de degrés (10 à 30 keV ). Afin desatisfaire le critère de Lawson et d’atteindre la température requise pour les réactions de fusion, unepuissance extérieure (Pext) doit être apportée au plasma. Différents moyens de chauffage peuvent êtreutilisés.

Le chauffage ohmique

Le courant Ip circulant dans le plasma (et créant la composant magnétique poloïdale) peutégalement permettre de chauffer ce dernier par effet Joule. Ce mode de chauffage (ohmique)reste efficace jusqu’à une température de l’ordre de 10 millions de degrés et décroît lorsque la tem-pérature augmente en raison de la diminution de la résistance électrique du plasma (variant en T−3/2).

Le chauffage par ondes radio-fréquences

Pour atteindre des niveaux de température supérieurs, un chauffage additionnel par ondes électro-magnétiques doit être transmis au plasma via des antennes présentes dans l’enceinte de la machine. Leprincipe de ce mode de chauffage consiste à accélérer les particules du plasma en couplant à ce dernierune onde correspondant à la fréquence de giration des particules (ou fréquence cyclotronique). L’uti-lisation de systèmes de chauffage aux fréquences cyclotroniques ioniques (FCI : 50 − 100MHz)et électroniques (FCE : 100 − 200GHz) permettent respectivement le chauffage des ions et desélectrons qui, par collision, chauffent ensuite l’ensemble du plasma. Une troisisème fréquence, appeléefréquence hybride, intermédiaire entre FCE et FCI (LH : 3 − 5GHz), est également utilisée danscertains tokamaks et permet de générer une onde électromagnétique se couplant avec les électronsrapides du plasma dans la bande d’énergie 10− 100keV .

(a) Antenne FCI (b) Coupleur hybride (LH)

Figure 1.8 – Systèmes de chauffage additionnels de Tore Supra

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Section 1.1

Le chauffage par injection de particules neutres

Une dernière technique de chauffage peut également être employée dans un tokamak. Cettedernière consiste à injecter dans le plasma des neutres préalablement accélérées (et donc très éner-gétiques) de même nature que le combustible (deutérium ou tritium). Ces atomes, après ionisationdans le plasma, transfèrent leur énergie aux autres particules par collisions et augmentent ainsi latempérature du plasma.

L’injection de particules neutres n’est pas utilisée sur Tore Supra. Le tokamak est par contre équipéde plusieurs systèmes de chauffage par ondes électromagnétiques permettant de compléter le chauffageohmique du plasma (figure 1.8). Ces systèmes correspondent à :

– trois antennes FCI d’une puissance nominale totale de 9MW ,– deux antennes FCE d’une puissance totale de 1MW ,– deux coupleurs hybrides d’une puissance nominale de 3.5MW .

Nous noterons dans la suite de ce mémoire la puissance additionnelle extérieure Pext apportée auplasma : Pchauffage.

1.1.8 Les machines de fusion actuelles et futures

1.1.8.1 Particularités et performances des machines de fusion actuelles

Plusieurs dizaines de machine de fusion sont actuellement exploitées en Europe et dans le mondeafin d’explorer les problématiques physiques ou technologiques liées à la création d’un réacteur defusion électrogène (Q>10). Ces tokamaks (ou stellarators) expérimentaux sont tous dédiés à larecherche appliquée et ne permettent pas encore de produire de l’énergie. Ces machines diffèrent depart leur forme (sphérique ou allongée), leur taille (grand rayon R et petit rayon a) ou leurs conditionsopérationnelles (durée des décharges créées, champs magnétiques imposés, systèmes de chauffageutilisés, etc.). Ces machines peuvent également être différenciées par la configuration géométrique deleur première paroi (limiteur ou divertor, cf. §1.2.1.1) ainsi que par leur possibilité de fonctionneravec du combustible tritium.

Le tableau 1.1 synthétise les caractéristiques des principaux tokamaks mondiaux ayant permisune évolution significative des connaissances dans le domaine de la recherche thermonucléaire (cetteliste est non exhaustive). Les machines de fusion les plus performantes sont actuellement les toka-maks JET (Join European Torus), installé en Grande-Bretagne et le tokamak japonais JT-60 U. Lamachine JET a permis de produire une puissance de fusion de 16MW en 1997 atteignant ainsi unfacteur d’amplification Q ∼= 0.65, proche du break-even [Keilhacker 99]. Malgré ses performances, cetokamak n’est pourtant pas adapté à un fonctionnement en régime continu (la durée d’un plasma surcette machine est de l’ordre de 10s). La création de décharges plasma de longues durées nécessite eneffet le refroidissement actif de l’enceinte à vide, mais également l’utilisation de bobines magnétiquessupraconductrices. Ces deux systèmes équipent le tokamak français Tore Supra depuis 20 ans. Desbobines supraconductrices ont également été installées récemment sur les tokamaks JT-60 U (Japon)et EAST (en fin de construction en Chine).

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Chapitre 1

Machine R0 a V Ip Bϕ durée Pchauffage Pays(m) (m) (m3) (MA) (T) du plasma (MW)

CASTOR 0.4 0.085 ≈0.06 0.025 1,5 < 50 ms - Rép. Tch.TCV 0.88 0.24 ≈1 1.2 1.43 2 s 4.5 Suisse

TEXTOR 1.75 0.47 7 0.8 3 10 s 9 Allem.DIII-D 1.67 0.67 15 3 2.2 10 s 25 Etats-Unis

ASDEX-U 1.6 0.5-0.8 14 2 3.9 10 s 27 Allem.Tore Supra 2.4 0.72 25 1 4 > qqs min 13 FranceJT-60 U 3.4 1 90 3 4 10 s 55 JaponJET 3 1.25 90 4.8 3.5 10 s 25 G.-Bretagne

TFTR (fermée) 2.48 0.85 35 2.5 5.2 qqs sec - Etats-Unis

Tableau 1.1 – Paramètres principaux de quelques tokamaks mondiaux

1.1.8.2 Tore Supra : tokamak supraconducteur et activement refroidi

Depuis 1988, la France exploite le tokamak Tore Supra (figure 1.9) principalement dédié à l’étudede la physique et des technologies permettant de réaliser des plasmas de longues durées.

Le tokamak Tore Supra est actuellement la seule machine de taille moyenne équipée d’un systèmemagnétique toroïdal supraconducteur, refroidi en permanence à une température de 1.8K (n=18bobines). Afin d’augmenter les performances de la machine, l’énergie déposée par le plasma sur sesdifférents éléments de paroi est également évacuée à l’aide d’un dispositif de réfrigération à unetempérature de fonctionnement de 120°C (pression : 24 bar).

Le caractère supraconducteur et activement refroidi de Tore Supra rend possible l’analyse dedécharges plasma de longues durées et représente ainsi un réel intérêt scientifique et technologique pourles recherches sur la fusion contrôlée. Le record mondial de durée, établi en 2003 dans cette machine,a été réalisé en injectant dans le plasma une puissance de 1.07 GJ pendant 6min30s [Van Houtte 04].Le tokamak Tore Supra ne permet toutefois pas de générer une énergie de fusion (Q ∼= 0). Ce typede performance est en effet étroitement liée à la forme et la taille de l’enceinte à vide de la machine.Le futur tokamak ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor) devrait permettre uneavancée conséquente dans ce domaine en franchissant la frontière du break-even en régime stationnaire.

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Section 1.1

Figure 1.9 – Schéma d’ensemble du tokamak de Tore Supra (hall tore) et principaux composants(Bureau d’Etudes IRFM)

1 Structures mécaniques et bobines supraconductrices (n=18) refroidies à 1.8K2 Première paroi activement refroidie à 120°C3 Alimentation cryogénique4 Alimentation en eau pressurisée à 120°C5 Bobines de champ poloïdal6 Ouverture queusot (pour diagnostics ou systèmes de chauffage)

1.1.8.3 L’avenir avec ITER

Le 28 Juin 2005, six partenaires signent le traité permettant d’entériner la construction del’International Thermonuclear Experimental Reactor (ITER) : l’Europe, la Russie, les Etats-Unis, laCorée du sud, la Chine et le Japon. L’Inde se joint ensuite au projet en décembre 2005.

La mission du programme ITER est de démontrer la faisabilité scientifique et technologiqued’un réacteur de fusion. En terme de performances, l’objectif principal de ce tokamak est l’étude desplasmas en combustion (pour lesquels le chauffage du gaz ionisé par les particules alpha issues desréactions de fusion est majoritaire). Les expériences menées sur ce tokamak visent à reproduire desrapports d’amplification Q > 10 pour des durées comprises entre 300 et 500s. Afin de répondre à cetobjectif et d’augmenter de manière significative le temps de confinement des particules dans le plasma(et donc le critère de Lawson, §1.1.3), la taille de ce tokamak sera supérieure à celle de toutes lesmachines actuelles (V = 840m3).

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Chapitre 1

Figure 1.10 – Bobines magnétiques et circuits de refroidissement principaux de la machine ITER

Le projet ITER doit répondre aujourd’hui à de véritables défis technologiques et scientifiques. Samission consiste à valider des solutions techniques permettant d’assurer la résistance des composantsface au plasma, de tester des modules tritigènes (permettant d’alimenter le plasma en combustible) oud’assurer la maintenance à distance de la machine par robotique. Les défis scientifiques programméspour ses 20 ans d’exploitation consisteront également à résoudre les problématiques liées à la créationde plasmas stables, en régime permanent et fonctionnant en mode amélioré de confinement (§1.2.1.1).

La mise en service du tokamak ITER est prévue pour 2018. Ce tokamak expérimental constitue àce jour la dernière étape décisive avant la construction d’un réacteur prototype électrogène : DEMO.

1.1.8.4 Le futur : principe du réacteur électrogène de fusion nucléaire DEMO

La mission du projet DEMO est d’évaluer la faisabilité économique des réacteurs électrogènesdu futur. Une valeur de Q=15 est généralement associée à l’obtention de rendements pour lesquels unréacteur de fusion sera économiquement rentable. Pour sa conception, une grande partie des solutionstechnologiques sera empruntée à l’industrie de la fission nucléaire afin d’optimiser la récupération del’énergie produite dans le tokamak.

Le principe de ce type de réacteur est schématisé à la figure 1.11. La chaleur produite par réactionsde fusion dans la chambre à vide du tokamak sera déposée sur sa couverture tritigène. Cette puissancesera ensuite convertie en électricité à l’aide d’un alternateur couplé à une turbine, entraînée par del’eau sous pression. Un système complet de pompage des cendres (hélium), de séparation isotopique etd’injection de gaz offrira par ailleurs une gestion optimale des déchets et des combustibles primaires(lithium et deutérium).

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Section 1.2

Figure 1.11 – Schéma de principe d’un réacteur de fusion électrogène [CEA-Fusion08]

1.2 Les Interactions Plasma-Paroi

Malgré le champ magnétique régnant dans un tokamak, le confinement de la chaleur et desparticules n’est pas parfait. Energie et matière diffusent du centre du plasma vers les parois. Le rôledes Composants Face au Plasma (CFP) est de gérer simultanément ces deux problèmes.

Deux régions principales définissent un plasma de tokamak : une région centrale, appelée plasmade coeur (confiné), où la température et le nombre de particules doivent être élevés afin de produiredes réactions de fusion, et une région de bord (plasma déconfiné) où températures et densités doiventêtre les plus faibles possible pour protéger la paroi. Ce conflit d’intérêt rend très complexe la gestiondes interactions plasma-paroi (IPP) qui se manifestent par l’échaufement et le changement d’état desurface des matériaux (érosion et redéposition).

1.2.1 Le rôle des Composants Face au Plasma : extraire les particules et évacuerles puissances dissipées

Lors d’une décharge plasma, la première paroi d’un tokamak est soumise à des flux de particuleset de chaleur intenses. Le rôle des composants face au plasma constituant la paroi est alors :

– d’évacuer ces particules grâce à un système de pompage actif,– d’alimenter le plasma en combustible (principalement grâce à des injections de gaz réalisées aumoyen de vannes placées dans la paroi),

– et enfin, d’assurer l’extraction de la puissance dissipée par le plasma.

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Chapitre 1

Pour répondre à ces objectifs, deux solutions technologiques sont actuellement étudiées. Les deuxconfigurations géométriques présentées ci-après permettent de modifier la répartition des flux de par-ticules et d’énergie dans la machine et peuvent fonctionner soit en régime inertiel (dissipation de lachaleur déposée par conduction dans les matériaux et convection et rayonnement dans la chambre àvide) soit en refroidissement actif (circulation d’eau dans les matériaux).

1.2.1.1 Configurations Limiteur et Divertor

a - Divertor

La configuration la plus prometteuse est actuellement la configuration divertor. Cette dernièrepermet d’éloigner la zone d’interaction plasma-paroi du plasma central en créant une perturbationmagnétique à la périphérie de celui-ci. La configuration divertor permet de défléchir et de connecterles lignes de champ magnétiques à des plaques de neutralisation éloignées du plasma confiné. Elleprésente ainsi l’avantage d’éloigner du plasma de coeur les impuretés produites dans la zone de forteinteraction plasma-paroi. Il existe différents types de configuration divertor.

7−→ Le divertor axysimétrique

En configuration divertor axisymétrique, le plasma central est séparé du plasma de bord par unesurface (séparatrice) caractérisée par un point X où la composante de champ magnétique poloïdaleest annulée (figure 1.12). La suppression locale de cette composante poloïdale est provoquée par lacirculation d’un courant (Idiv) dans une bobine coaxiale aux bobines poloïdales. Le courant permet-tant de créer cette configuration magnétique est généralement de l’ordre de 30% du courant plasmapoloïdal imposé lors des expériences. La configuration divertor axisymétrique permet d’obtenir unmode de confinement amélioré appelé mode H (pour High confinement). Le temps de confinement del’énergie en mode H est environ deux fois supérieur à ceux obtenus sur des machines en configurationlimiteur (paragraphe suivant) en mode L (Low confinement).

La configuration divertor axisymétrique a permis de faire des progès considérables en terme deperformance. Toutefois, ce dispositif présente également deux inconvénients. Le premier correspond àla perte d’une partie du volume du plasma par rapport à la taille réelle de la chambre à vide (ce pointse traduit pour un futur réacteur électrogène par l’augmentation de la taille de la machine et doncde son coût). En régime de confinement amélioré, la configuration divertor axisymétrique entraîneégalement des gradients de pression très importants dans le plasma de bord, donnant naissance àdes instabilités de type ELMs (Edge Localized Mode). Les ELMs sont des évènements transitoires(∆t ∼= 100µs) correspondant à la perte brutale d’une partie de l’énergie du plasma (1 à 10%, soit0.01 à 1MJ) sous forme de bouffées de particules et de chaleur. Ces perturbations entraînent defortes contraintes thermiques sur les composants de la paroi. Les grandes machines actuelles tellesque les tokamaks JET ou JT-60 U sont équipées d’un divertor axisymétrique. Cette configuration estégalement retenue pour le tokamak nouvelle génération ITER.

7−→ Le divertor ergodique

Le divertor ergodique correspond à un composant modulaire placé dans la chambre d’un tokamaket dans lequel circule également un courant Idiv créant une zone magnétique chaotique entourant leplasma confiné. Dans cette configuration, une série de perturbations magnétiques radiales résonnantesviennent détruire les surfaces magnétiques à la périphérie du plasma. Un mélange chaotique de lignes

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Section 1.2

de champ remplace alors la structure initiale bien ordonnée en tores emboîtés. Pendant un dizained’années, le tokamak Tore Supra a permis de tester cette configuration divertor ergodique avant d’êtremodifié et équipé d’un limiteur. La configuration divertor ergodique est également envisagée sur ITERen complément du divertor axisymétrique afin de mitiger (atténuer) les perturbations de type ELMs[Thomas 01].

(a) Schéma de principe

(b) Vue in situ du tokamak JET

Figure 1.12 – Principe du divertor axisymétrique

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Chapitre 1

Figure 1.13 – Schéma de principe du divertor ergodique

b - Configuration Limiteur

La configuration limiteur correspond à l’agencement actuel de la machine Tore Supra. Dansce type de configuration, un objet est introduit dans le plasma afin de concentrer l’interactionplasma-paroi sur une surface dédiée et de créer une séparation nette entre la paroi et le plasmaconfiné. Le limiteur, ainsi mis en avant des autres composants face au plasma, est conçu pour pouvoirintercepter les lignes de champ avec une incidence rasante et étaler sur la plus grande surface possiblel’énergie en provenance du plasma. Ce composant participe également à la régulation de densité dansla machine grâce aux systèmes de pompage équipant ses gorges collectrices (les particules ionisées ysont collectées après avoir été neutralisées en entrant en contact avec des plaques de neutralisations,figure 1.14).

La position avancée du limiteur dans le plasma (en comparaison des autres élements de paroi)permet de créer une surface magnétique séparatrice, appelée également Dernière Surface Magné-tique Fermée (DSMF). A l’intérieur de la DSMF, les surfaces magnétiques correspondent à destores emboîtés les uns dans les autres, centrés sur un axe magnétique. A l’extérieur de la DSMF, leslignes de champ sont ouvertes et interceptées par le limiteur. La DSMF constitue la frontière entrele plasma central et le plasma de bord non confiné, aussi appelé SOL (pour Scrape-Off Layer ouSection à l’ombre du plasma2). Dans le plasma central et dans la SOL, le transport des particules sefait majoritairement dans la direction parallèle aux lignes de champ.

2Cette appellation peut être aussi bien employée pour une machine en configuration limiteur ou divertor.

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Section 1.2

(a) Vue générale (le plasma repose sur le limiteur)

(b) Pompage des flux de particules et de chaleur

Figure 1.14 – Schéma de principe d’une configuration limiteur

Une ligne de champ ouverte (située dans la SOL) peut être définie par sa longueur de connexionL//. Cette dernière correspond à la distance parcourue par une particule portée par une ligne de champavant d’être interceptée par un objet. Cette distance est définie par le produit :

L// = 2.Π.q.R (1.17)

où :• q est le taux d’enroulement des lignes de champ (ou facteur de sécurité, §1.1.6)• R est la position radiale de la ligne de champ dans la direction du grand rayon de plasma (R0)

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Chapitre 1

Sur Tore Supra, pour des expériences classiques menées avec un facteur d’enroulement q = 4au bord, la longueur de connexion des lignes de champ ouvertes peut atteindre 80m (cette valeurcorrespond à une ligne de champ située à un grand rayon R ∼= 3, 1m = a+R0).

Une ligne de champ ouverte peut également être définie par sa position radiale r dans la directiondu petit rayon a de la machine. Cette position définie la pénétration plus ou moins importante decette ligne de champ dans la SOL, et donc sa proximité avec le plasma central. Plus une ligne dechamp est caractérisée par un rayon faible, plus les particules véhiculées par cette dernière sonténergétiques.

1.2.1.2 Les interactions plasma-paroi sur le Limiteur Pompé Toroïdal de Tore Supra

Le Limiteur Pompé Toroïdal (LPT) de Tore Supra est constitué de 576 aiguilles en cuivre dur(CuCrZr) recouvert de tuiles réfractaires en composites de fibre carbone (CFC) avec une coucheintermédiaire en cuivre doux (OFHC) (cf. figure 1.15). Juxtaposées, ces aiguilles forment un disqueannulaire de 7.5m2, constituant le plancher de la machine. Dans chacune de ces aiguilles sont usinésdeux canaux dans lesquels circule de l’eau pressurisée à 120°C, permettant d’évacuer la chaleur déposéelors de décharges plasmas.

(a) Vue schématique du Limiteur PompéToroïdal

(b) Coupe et profil d’une aiguille du limiteur

Figure 1.15 – Le LPT (plancher de la machine) est constitué de 576 aiguilles juxtaposées

Le limiteur de Tore Supra est équipé de 12 plaques de neutralisation (figure 1.16) destinées àneutraliser les particules ionisées provenant du plasma et à les diriger vers les systèmes de pompageéquipant ses gorges collectrices. Ces neutraliseurs, activement refroidis et localisés sous le LPT, sontégalement constitués d’un corps en CuCrZr sur lequel sont soudées des tuiles de CFC.

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Page 41: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 1.2

Figure 1.16 – Neutraliseur équipant le limiteur de Tore Supra

La composante toroïdale du champ magnétique sur Tore Supra est créée au moyen d’un nombrefini de bobines (figure 1.17). Lors de décharges plasma, la répartition des flux de chaleur sur le limiteurn’est de ce fait pas uniforme. Cette dernière subit une modulation induite par un confinement inégaldu plasma entre deux bobines verticales, appelée modulation ripple.

Figure 1.17 – Le champ magnétique toroïdal dans un tokamak est créé au moyen d’un nombrefini de bobines

La première conséquence de la modulation ripple perturbant la configuration magnétique duplasma sur Tore Supra est une diffusion radiale accrue des particules entre les bobines, augmentant dece fait les pertes d’énergie vers le plasma non confiné. Ce phénomène de ripple entraîne la formation

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Chapitre 1

d’un motif de dépôt de chaleur particulier sur le composant, présentant une alternance de zonesmouillées par le plasma et de zones ombrées. Les zones mouillées par le plasma correspondentaux aires où les lignes de champ interceptées par le limiteur possèdent une importante longueurde connexion L//, pouvant atteindre plusieurs dizaines de mètres. Les lignes de champ connectéesau plasma dans les zones ombrées sont quant à elles caractérisées par une très faible longueur deconnexion (de l’ordre de quelques centimètres). Ces lignes de champ ne pénètrent donc que très peudans la SOL et ne portent pas (ou très peu) de particules énergétiques provenant du plasma central.Les zones ombrées sont également appelées zones privées. Soumises à des très faibles contraintesthermiques, elles se distinguent des zones mouillées pouvant recevoir d’importants flux de chaleur etde particules.

Le motif de dépôt de chaleur observé sur le limiteur de Tore Supra lors de décharges plasmaest illustré à la figure 1.18. L’image (a) présentée correspond à une prise de vue de l’intérieur de lamachine réalisée lors d’une expérience menée en 2008. L’empreinte particulière du dépôt de chaleurinduit par le ripple y est clairement visible. Nous pouvons constater que ce motif est toroïdalementrépétitif (dans la direction ϕ). La fréquence d’apparition de cette empreinte singulière (tous les 20°toroïdaux) est directement liée au nombre de bobines magnétiques permettant la création du champmagnétique toroïdal sur Tore Supra (n=18). Nous verrons par la suite que ce phénomène de rippleentraîne également l’apparition de phénomènes d’érosion et de redéposition caractéristiques en surfacedu limiteur (figure (b)). Ce point sera abordé plus en détail au §1.2.2.

(a) Image visible acquise lors du choc 41696 (ca-méra tangentielle)

(b) Schéma des zones d’interactions plasma-paroi sur le li-miteur [Mitteau 06]

Figure 1.18 – Visualisation du motif de ripple sur le LPT

NB. La distance entre les bobines magnétiques dans la machine est également plus faible côté intérieurque côté extérieur (cf. figure 1.17). Cette configuration entraîne une assymérie de la valeur du champmagnétique suivant la position radiale R considérée. Un tokamak est généralement divisé en deuxdomaines : le côté intérieur correspondant aux forts champ magnétiques est baptisé domaine HFS(pour High Field Side) et le côté extérieur, où les champs magnétiques sont plus faibles, est nomméLFS (pour Low Field Side).

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Section 1.2

Le limiteur pompé toroïdal définit les limites du plasma confiné. Ce dernier est donc en interactiondirecte avec le plasma. Au cours de décharges, le limiteur reçoit la majorité des flux de chaleur prove-nant du plasma (à hauteur de 50 à 60% de sa puissance totale en fonctionnement standard, cf. chapitre2) et remplit ainsi son rôle de protection de l’enceinte interne. Le reste de la paroi peut cependant êtresoumis lui aussi à des charges thermiques non négligeables et donc donc être recouvert de matériauxadaptés.

1.2.1.3 Les autres CFP de Tore Supra

La figure 1.19 représente une vue de l’intérieur du tokamak Tore Supra où nous pouvons distinguerles autres composants face au plasma constituant la paroi de la chambre à vide. En complément dulimiteur, des panneaux de protection de l’enceinte interne (PEI) et des Anneaux de Garde (AG)protègent les parois latérales du tore. Les panneaux PEI sont principalement constitués d’inox, lesAnneaux de Garde sont recouverts de CFC. Les antennes de chauffage sont protégées à la fois par desprotections en CFC recouvrant leur surface mais aussi par la présence d’un limiteur complémentairemédian, le Limiteur de Protection d’Antenne (LPA). Ce dernier, avancé de quelques centimètres dansle plasma, permet de concentrer à sa surface les flux de particules et de chaleur pouvant être dirigésinitialement vers les systèmes de chauffage dans la direction radiale (selon le même principe que lelimiteur pompé toroïdal). Des protections ripple situées en partie haute de la machine (tubes en inox),permettent également de capter des particules rapides et hautement énergétiques (suprathermiques)émises par le plasma. Tous ces composants sont activement refroidis.

Figure 1.19 – Vue intérieure du tokamak Tore Supra (composants face au plasma constituantson enceinte)

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Chapitre 1

1.2.2 Le recyclage et les mécanismes d’érosion et de redéposition

Durant une décharge plasma, tous les composants de première paroi sont soumis à des flux departicules et de chaleur importants, aboutissant à l’apparition de différents processus de physiquesatomiques. La paroi interne de Tore Supra étant recouverte principalement de carbone, nous ne dé-crirons ici que les phénomènes et contraintes liés à ce type de paroi.

1.2.2.1 Le recyclage

Lors de leur impact avec la paroi, les particules chargées en provenance du plasma peuvent soitrester piégées dans les composants et diffuser, soit être neutralisées (par réflexion, désorption,etc.) etêtre réémises sous forme d’atomes ou de molécules formant une nuage de particules neutres devant laparoi. La fraction de particules neutres réémises par recyclage ([Tsitrone 95] [Azéroual 00]) contribuealors à la ré-alimentation du plasma en combustible. Contrairement aux métaux, les parois en carboneconstituent d’importants réservoirs de particules.

1.2.2.2 L’érosion et la redéposition du carbone

Lors d’une décharge plasma, des atomes peuvent également être arrachés de la paroi et se redéposersur les composants, soit localement (sur une surface voisine), soit après circulation dans le plasma. Cesprocessus aboutissent au final à la formation de zones distinctes d’érosion et de redéposition sur lescomposants (figure 1.20). Les zones où le nombre d’atomes arrachés est supérieur au nombre d’atomesdéposés correspondent aux zones d’érosion. Les flux de chaleur sont généralement importants dans cesrégions où le plasma est en contact direct avec la paroi (zones mouillées, §1.2.1.2). Les zones dominéespar le phénomène de redéposition des particules de carbone sont généralement situées “à l’ombre duplasma”. La localisation précise de ces zones d’érosion et redéposition est fonction de la topologiemagnétique imposée au plasma lors des expériences.

Figure 1.20 – Photo du limiteur (vue de dessus) : zones d’érosion et de redéposition

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Section 1.2

Les principaux processus aboutissant à l’érosion du carbone sont :

– L’érosion chimique [Hogan 07] : Un bombardement permanent de la paroi avec des particulesfortement énergétiques (neutres, ions ou électrons) peut entraîner l’augmentation de la tempé-rature du mur et la désorption d’atomes. Des réactions chimiques se produisent alors entre cesatomes et les flux de particules incidentes conduisant à la formation de molécules d’hydrocar-bures CxDy. Le carbone est un matériau très favorable aux processus d’érosion chimique de parsa structure électronique et sa forte capacité de piégeage [Ruggiéri 99] [Gauthier 89].

– L’érosion physique : Lorsqu’une particule percute la paroi, les atomes composants le matériaupeuvent également être arrachés si l’énergie cinétique qui leur est transférée est supérieure à leurénergie de liaison. Le taux d’érosion physique, correspondant au nombre d’atome arraché parion incident, est principalement fonction de l’énergie des particules incidentes.

– L’auto-érosion : Ce phénomène correspond à l’érosion physique d’une surface, non plus par undeutérium, mais par ion incident de même espèce que le substrat de la paroi (ion carbone dansle cas de Tore Supra, [Corre 01]).

– La sublimation augmentée par bombardement (en anglais, Radiation Enhanced Sublima-tion, RES) : Ce processus thermocinétique est spécifique aux parois carbonés. Le bombardementdu carbone par des particules énergétiques entraîne la création de défauts dans le réseau cris-tallographique. Lorsque le matériau s’échauffe au-delà d’une valeur seuil (environ 1200K pourle carbone), ces interstices migrent et peuvent soit se combiner aux lacunes déjà existantes, soitarriver à la surface du substrat où ils sont alors sublimés du fait de leur faible énergie de liaisonavec la paroi. Le taux d’érosion par sublimation dépend de la température du substrat et dutaux d’érosion physique ayant entraîné la création des défauts.

(a) Erosion et processus de recyclage (b) Erosion physique

Figure 1.21 – Schématisation de quelques processus d’interaction plasma-paroi (cas d’une paroien carbone et d’un flux incident de deutérium)

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Chapitre 1

Nous pouvons également distinguer deux processus de redéposition du carbone, à savoir la re-déposition et la co-déposition :

– La re-déposition correspond à un dépôt net de carbone (appelé couche de redéposition) seformant en surface du matériau lorsque, localement, le flux d’ions incidents carbone est supérieurau flux d’atomes arrachés à la paroi.

– La co-déposition correspond à un piégeage d’impuretés3 dans un dépôt carboné formé ensurface du substrat (et alors appelé couche de co-déposition).

NB. Dans la suite du mémoire, par abus de langage, nous parlerons essentiellement de zone de dépôtsou zones de redéposition. Sauf mention contraire, ces termes engloberont les deux processus citésprécédemment.

1.2.2.3 Les recherches sur l’interaction plasma-paroi : quels enjeux ?

Sur des durées d’exploitation longues, la combinaison des phénomènes d’érosion et de redépositiondes particules limite la durée de vie des composants. Ces phénomènes, déterminant le contenu enimpuretés du plasma, peuvent également entraîner des difficultés opérationnelles et limiter les perfor-mances de la machine. Nous décrivons ci-après trois problématiques majeures liées aux recherches surles interactions plasma-paroi.

• Impuretés dans le plasma : La contamination du plasma par des particules érodées est suscep-tible d’entraîner la dilution du combustible et de réduire la probabilité des réactions de fusion. Lamajorité des particules érodées, ionisées au contact du plasma à des profondeurs plus ou moins impor-tantes dans la machine, peuvent également rayonner une partie de son énergie. Le rayonnement desimpuretés entraîne le refroidissement du plasma central, voire son extinction brutale dans le cas d’unequantité érodée de taille conséquente en provenance des parois (“ovni”). Nous pouvons noter que si cesimpuretés sont localisées dans le plasma de bord, le rayonnement émis peut toutefois avoir des effetsbénéfiques en entraînant l’évacuation de l’énergie de façon homogène dans le tore, diminuant ainsi lesflux conduits locaux déposés sur la paroi. L’amplitude de la puissance perdue par rayonnement aucoeur du plasma et de sa dilution est d’autant plus importante que les impuretés ont un fort numéroatomique Z (ceci justifie le fait d’avoir choisi le carbone comme matériau de première paroi pour laconstruction des machines de fusion récentes).

• Rétention du tritium : Un enjeu plus récent (lié au projet ITER) est le contrôle du piégeage etde la co-déposition du combustible dans les parois pour des raisons de sûreté nucléaire (radioprotec-tion). Sur ITER, un enjeu majeur sera en effet de minimiser la contamination du mur par du tritiumradioactif. Cette problématique prend une place très importante dans les programmes expérimentauxactuels (Tore Supra : étude de la rétention du deutérium [Tsitrone 05], JET : étude de la rétention duTritium [Loarer 05]).

• Sécurité de la machine / Surveillance des CFP : L’augmentation du niveau de puissance misen jeu dans les futurs tokamaks (ITER, P=500MW ) débouche également sur un enjeu de taille lié àla sécurité des machines de fusion. Les charges thermiques reçues par les composants doivent en effetêtre quantifiées de manière fiable pour assurer leur durée de vie. Sur Tore Supra, les flux de chaleurreçus par les composants face au plasma sont contrôlés par thermographie infrarouge. La présencede dépôts carbonés en surface des matériaux peut toutefois perturber cette surveillance IR. Les dé-pôts carbonés correspondent à de fines couches de matériau mal attachées au substrat. Ces derniers,

3Le plasma n’est pas composé du seul combustible (deutérium), il contient également des impuretés qui, par définition,correspondent à toutes particules non combustibles : carbone, oxygène, fer, etc.

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Section 1.2

même si le flux de chaleur reçu est faible, chauffent donc extrêmement rapidement et plus intensé-ment que les matériaux activement refroidis. Il résulte de ce phénomène que la température mesuréedans les zones de redéposition ne correspond pas à la température réelle de surface du composant.Cela complique alors l’interprétation des images IR en empêchant d’assimiler directement les carto-graphies des températures mesurées à celle des charges thermiques provenant du plasma (les zones deredéposition sont généralement clairement visibles sur les images IR des composants, cf. chapitre 3).Un des derniers enjeux actuels des recherches sur les interactions plasma-paroi est donc de pouvoirmesurer ces flux de chaleurs incidents sur des composants de géométries complexes, constitués dedivers matériaux (carbone, métaux) et dont l’état de surface peut être perturbé par des phénomènesd’érosion-redéposition.

1.2.3 Dépôts de chaleur dans la machine

L’objet de notre étude est de caractériser la puissance déposée sur les composants et de comprendreles principaux mécanismes pouvant influencer la répartition des énergies perdues dans la machine. Lacompréhension des mécanismes de transport et de dépôt de chaleur dans un tokamak est en effet unenjeu important pour accéder à des décharges plasmas de longue durée (plusieurs minutes) et mettanten jeu des puissances importantes (plusieurs dizaines de MW sur Tore Supra, jusqu’à 500MW surITER). L’étude présentée dans ce mémoire est ciblée sur la compréhension des interactions plasma-paroi en terme de charges thermiques sur les composants (et non en flux de particules). Le schémasuivant représente les différentes contributions en flux de chaleur provenant du plasma et déposées surles composants de Tore Supra.

Figure 1.22 – Bilan des flux de chaleur mis en jeu dans la machine

Les charges thermiques observées sur les composants peuvent avoir plusieurs origines, nous pouvonsdistinguer les contributions suivantes :

Qtot = Qrad +Qcond +Qsupras +Qneutres +Qneutrons (1.18)

33

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Chapitre 1

où :• Qrad correspond à la part de flux de chaleur incident sur les composants provenant du rayonne-

ment émis par le plasma (la puissance totale rayonnée dans Tore Supra peut représenter 20 à 50% de lapuissance totale injectée dans le plasma suivant le scénario expérimental). Le rapport entre le niveaude puissance rayonnée par le plasma et la puissance totale du plasma est donné par le paramètre frad(ou fraction rayonnée) :

frad = PradPtot

(1.19)

• Qcond représente la part de flux de chaleur transportée le long des lignes de champ vers lesparois (nous emploierons par la suite le terme général flux conduit pour désigner cette contribution).

Ces flux de chaleur correspondent aux deux contributions thermiques majoritaires déposées surles parois. A ces derniers peuvent également s’ajouter d’autres composantes moins importantes :• Qsupras : ces flux correspondent au déconfinement de particules suprathermiques en provenance

du plasma et sont une autre conséquence de la modulation ripple induite par le nombre fini de bobinestoroïdales sur Tore Supra (§1.2.1.2). Ces ions et électrons sont en effet générés par les systèmes dechauffage additionnels et sont piégés dans les puits magnétiques locaux créés entre les bobines parl’effet ripple. Les particules suprathermiques, lorsqu’elles sont déconfinées du plasma, impactent lescomposants et peuvent contribuer à l’apparition d’échauffements locaux importants.• Qneutres : l’apparition de particules neutres rapides dans le plasma est due à un échange de

charges entre des neutres issus de la paroi (ex. D0) et des ions D+ tels que : D0 (froid) + D+

(chaud) → D+ (froid) + D0 (chaud). Les particules neutres ainsi créées, non confinées par le champmagnétique, percutent directement la paroi.• Qneutrons : les neutrons sont l’un des produits des réactions de fusion (§1.1). Sur Tore Supra, la

quantité de neutrons produite est jugée nulle. La densité de flux de neutrons prévue sur ITER pourraen revanche provoquer un échauffement des matériaux et leur modification après irradiation.

L’ensemble des CFP ne reçoit pas les mêmes quantités d’énergie en provenance du plasma. Lelimiteur, en position avancée dans la SOL, reçoit la majorité de la puissance conduite par les particulescirculant parallèlement aux lignes de champ. Les autres composants sont soumis à une part de fluxrayonné plus importante (notamment les panneaux de protection de l’enceinte interne, PEI). Lesprotections ripple reçoivent quant à elles la majorité des flux de particules suprathermiques émisespar le plasma (Qsupras). Dans la suite du mémoire, nous nous intéresserons plus particulièrement audépôt de chaleur sur le limiteur de Tore Supra. Ce dernier nous permettra d’évaluer le flux de chaleurtotal conduit dans la scrape-off layer (Qcond, cf. chapitres 4 et 5).

1.2.4 Quels matériaux pour les Composants Face au Plasma ?

Les matériaux de première paroi sont soumis à de très fortes contraintes mécaniques et thermiquesmais également à d’importants flux de particules. La résistance des matériaux face à ces contraintesest indispensable pour l’obtention de décharges plasma performantes. Le choix d’un matériau depremière paroi doit donc tenir compte de tous ces phénomènes d’interaction. La fiabilité d’un matériauest évalué selon différents critères dépendant de ses propriétés thermomécaniques, ses propriétésd’érosion, sa potentialité à piéger des particules issues du plasma ainsi que son influence sur le plasmaen terme de contamination.

34

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Section 1.2

Aucun matériau ne se distingue ajourd’hui comme le candidat idéal pour le réacteur du futur.Différentes études sont donc menées afin de tester les performances de CFP en carbone, tungstène,molybdène ou béryllium. Les avantages et les inconvénients de trois de ces matériaux sont résumésdans le tableau 1.2. Le carbone est principalement utilisé dans les tokamaks sous forme de compositeen fibre de carbone CFC, de graphite pyrolitique et de carbure de Bore B4C, très bons conducteurs.Les composés carbonés présentent également l’avantage d’avoir un faible numéro atomique (Z = 6)contrairement au molybdène (Z = 42) ou au tungstène (Z = 74) entraînant quant à eux un fortrayonnement du plasma lorsqu’ils sont érodés (les taux d’impuretés tolérables pour ces matériaux sontdonc très faibles). Le tungstène présente en revanche de bonnes propriétés en ce qui concerne l’érosion(faible taux d’érosion physique pour de faibles températures électroniques au bord), contrairement aucarbone. Les principaux inconvénients du béryllium correspondent à sa basse température de fusion,sa toxicité et son taux d’érosion élevés.

Avantages Inconvénients

Composite en Fibre decarbone (CFC)

– Bonnes propriétés thermiques etmécaniques

– Pas de fusion du composite– Faible perte par rayonnementdans le plasma

– Bon retour d’expérience liée à sonutilisation massive dans les toka-maks

– Érosion chimique élevée quiconduit à une durée de vie limitéedes composants

– Rétention du tritium dans lescouches redéposées

– Génération importante de pous-sière

Béryllium– Quelques retour d’expérience(JET)

– Faible contamination du plasma– Faible rétention du tritium

– Basse température de fusion– Important taux d’érosion chi-mique

– Toxique

Tungstène– Faible taux d’érosion physiqueavec un seuil en énergie élevé

– Pas d’érosion chimique dans unplasma d’hydrogène

– Pas de codéposition

– Nécessité d’une faible tempéra-ture de bord pour avoir une faibleérosion

– Importante activation

Tableau 1.2 – Tableau récapitulatif des avantages et inconvénients des matériaux CFC, tungstèneet béryllium (Extrait de [Frederici 01])

Le choix des matériaux constituant les composants face au plasma d’un tokamak résulte donc d’uncompromis. Les facteurs qui orientent ce choix sont la qualité du plasma recherchée (minimisation desa dilution et de sa contamination par des impuretés), la durée de vie des composants (résistance méca-nique, taux d’érosion acceptable) et la sûreté (faible rétention de tritium). Pour optimiser l’interactionplasma-paroi, la tendance est de concevoir des composants face au plasma constitués de plusieursmatériaux. Nous avons pu voir que les composants face au plasma de Tore Supra sont principalement

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Chapitre 1

composés de CFC ou d’inox (cf. §1.2.1.2 et 1.2.1.3). Les matériaux actuellement proposés et étudiéspour la construction du futur réacteur ITER sont : le carbone (pour les plaques de neutralisation), lebéryllium (pour l’enceinte) et le tungstène (devant composer les tuiles du divertor).

1.2.5 Les diagnostics de mesure et de surveillance des IPP dans Tore Supra

Nous avons défini dans le §1.2.3 les différentes contributions en flux de chaleur provenant duplasma et se déposant sur les composants. Le paragraphe suivant a pour objectif de présenter lesprincipaux diagnostics permettant la mesure de ces contributions et leur contrôle.

La thermographie infrarouge est couramment utilisée pour surveiller la température de surfacedes CFP. Ce diagnotic peut être complété par des informations provenant de thermocouples placésdans la masse d’un composant (souvent utilisé pour les composants inertiels, comme par exemple àJET) ou par des mesures de calorimétrie (dans le cas d’éléments activement refroidis, comme surTore Supra). Tous ces diagnostics ont cependant leurs limites et ne permettent pas de déterminerdirectement l’information spatio-temporelle recherchée, à savoir le flux de chaleur total incident ensurface des matériaux (en MW/m2).

La difficulté est de pouvoir estimer ces flux de chaleur dans un environnement extrême : champmagnétique supérieur à 3T , vide4, températures de surface de plusieurs centaines de degrés et fluxde chaleur pouvant atteindre plusieurs MW/m2 (pour comparaison, les flux de chaleur régnant à lasurface du soleil sont de l’ordre de plusieurs dizaines de MW/m2). Nous présentons dans ce para-graphe les diagnostics permettant la mesure des flux de chaleur mis en jeu dans la SOL et se dépo-sant sur les composants de Tore Supra. L’accent sera mis plus particulièrement sur la description desdiagnostics IR et calorimétrie dont le traitement des données fera l’objet des chapitres 2 et 3 de cemémoire. Les informations issues des deux autres diagnostics présentés ci-après (bolométrie et sondesde Langmuir) seront également analysées lors du chapitre 5 pour différents scénari expérimentaux(afin d’établir une image expérimentale cohérente et détaillée des flux de chaleur mis en jeu dans letokamak).

1.2.5.1 Localisation des différents diagnostics dans la machine

La figure suivante présente la localisation des diagnostics permettant l’observation des flux dechaleur dans le tokamak Tore Supra. L’emplacement en partie haute basse ou médiane des différentssystèmes de mesures peut être visualisé sur la coupe poloïdale présentée à la figure 1.23. Le plantoroïdal (en figure 1.24) permet de repérer la position des diagnostics dans les différents queusots dela machine. Tore Supra est en effet subdivisée en 6 secteurs de 60°, chacun appelé queusot (notationQ) et numéroté de 1 à 6. Chaque queusot contient 3 bobines toroïdales et est séparé du queusot voisinpar un plan nommé plan de jonction (noté PJ). Chaque queusot peut également être subdivisé endeux secteurs de 30°, le premier étant référencé A, le second B.

4Le vide initial imposé dans une machine de confinement magnétique atteint la gamme des 10−6 Pa.

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Page 51: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 1.2

Figure 1.23 – Localisation des principaux diagnostics de surveillance des IPP - Vue poloïdale

Figure 1.24 – Localisation des principaux diagnostics de surveillance des IPP - Vue toroïdale

Nous pouvons distinguer sur ces schémas que les diagnostics IR, bolométrie ou sondes ne sontpas situés dans les mêmes plan queusots et n’inspectent donc pas le même secteur de la machine. Lesmesures de calorimétrie équipent quant à elles l’intégralité des composants du tokamak. L’ensemble deces diagnostics n’offrent qu’une vision partielle des différentes contributions en flux de chaleur définiesdans le paragraphe précédent. Les grandeurs respectives auxquelles ils permettent d’accéder (Qrad,Qcond ou Qrad +Qcond) ainsi que leur principe général de fonctionnement sont décrits ci-après.

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Page 52: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 1

1.2.5.2 Le diagnostic bolométrie

Un plasma de tokamak est principalement composé de combustible (deutérium) mais peut aussicontenir des impuretés. Ces impuretés sont majoritairement composées de carbone provenant del’érosion des CFP, de métaux ou d’oxygène. La présence d’impuretés dans un plasma provoque ladilution du combustible et l’émission d’un rayonnement. Ces deux phénomènes ont pour conséquenceune baisse de l’efficacité des réactions de fusion et une diminution de la température du plasma. Lapuissance totale rayonnée par ce dernier peut être mesurée grâce à un système de bolométrie.

Le diagnostic bolométrie de Tore Supra est composé de cinq caméras permettant l’observation dedeux sections poloïdales distinctes (cf. figure 1.25) :

– la première visée bolométrique, située en partie haute du queusot Q4A, est composée de 3caméras et permet une mesure du rayonnement du plasma intégré dans une direction verticalede la machine,

– la seconde visée, située en Q2A, est constituée de deux caméras et observe le rayonnement émispar le plasma dans une direction horizontale.

Figure 1.25 – Lignes de visées des caméras bolométriques de Tore Supra

Chacune des caméras du diagnostic bolométrie est constituée de huit voies de mesure corres-pondant chacune à deux détecteurs orientés vers le plasma. La mesure de l’échauffement de cescapteurs permet de quantifier la puissance rayonnée par le plasma. Chaque détecteur est constituéd’une feuille de Kapton de 7.5µm d’épaisseur recouverte d’un absorbant en or de dimensions1.5×4mm2 (de 4µm d’épaisseur). Ces feuilles sont déposées sur deux résistances métalliques enor de 1.25kΩ. Le rôle de l’absorbant est de stopper les photons et les particules neutres rapidesprovenant du plasma déposées sur les capteurs (NB. l’énergie des particules neutres collectées parles détecteurs est négligée devant la part de flux rayonné par le plasma lors du traitement des données).

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Page 53: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 1.2

Un bolomètre, correspondant à une voie de mesure, est constitué de deux ensembles absorbant-kapton(feuille)-résistances (le premier détecteur recevant le flux d’énergie en provenance du plasma,le second étant écranté par une feuille d’aluminium de 0.6 mm d’épaisseur). Les quatre résistancesd’une même voie de mesure constitue alors un point de Wheastone. Sous l’effet du rayonnement duplasma, l’absorbant situé en surface de chaque détecteur s’échauffe. Cet échauffement est ensuitetransmis par conduction aux deux résistances du pont de Wheastone provoquant son déséquilibre.Les signaux de tension résultants (∆U , en V ) sont ensuite convertis en flux de puissance (W/cm2)à partir des courbes d’étalonnage du diagnostic [Vallet 08]. La densité de puissance locale recherchée(en W/cm3) est obtenue depuis une inversion d’Abel des profils mesurés par les différentes lignes devisée recouvrant le plasma. La reconstruction tomographique obtenue après traitement des donnéesbolométriques permet alors d’estimer la quantité rayonnée localement par le plasma (figure 1.26). Leslignes de visée bolométriques permettent de reconstruire une image 2D du rayonnement du plasmadans un plan queusot poloïdal avec une résolution spatiale de 10cm et une résolution temporelle de8ms).

Figure 1.26 – Exemple de reconstruction tomographique, choc 41453, [Balorin 08]

L’allure temporelle de puissance totale rayonnée par le plasma peut être déduite des puissancesincidentes Pi (brillance, W/cm2) mesurées par les lignes de visée et sommées de manière pondéréeen fonction des positions radiales de chaque détecteur. La figure 1.27 illustre l’évolution de puissancerayonnée par le plasma au cours d’un choc expérimental (décharge 41453). Cette puissance est évaluéeen supposant que le rayonnement émis par le plasma est symétrique dans la direction toroïdale ϕ.

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Page 54: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 1

Figure 1.27 – Evolution temporelle de la puissance rayonnée par le plasma (choc 41453)

1.2.5.3 Les sondes de Langmuir

Les flux conduits s’écoulant dans la scrape-off-layer (Qcond) peuvent être mesurés au moyen desondes électrostatiques (ou sondes de Langmuir, figure 1.28) plongées dans le plasma de bord.

Figure 1.28 – Sonde de Langmuir placée en partie haute du tore et permettant la mesure desflux circulant dans la SOL

Les grandeurs physiques permettant d’estimer les flux de particules de chaleur circulant dans laSOL sont :

– la température électronique du plasma (Te, en eV )– et son courant de saturation ionique jsat (en A)Ces deux grandeurs peuvent être quantifiées depuis une caractéristique courant-tension mesurée

en sortie d’un objet polarisé de petite dimension placé dans le plasma de bord (figure 1.29). Dans untokamak, une rampe de tension appliquée aux bornes d’une sonde permet de collecter les particuleschargées du plasma et l’acquisition de ces caractéristiques de courant (I,V).

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Page 55: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 1.2

Figure 1.29 – Exemple de caractéristique courant-tension mesurée par une sonde mobile dans letokamak Tore Supra

En raison de leur robustesse et de leur simplicité d’application, les sondes électrostatiques les plusrépandues et les plus utilisées actuellement sont les sondes de Langmuir mobiles. Une sonde mobileprésente en effet l’avantage d’être soumise à un dépôt d’énergie réduit lors de son plongeon dans leplasma de bord. Introduites perpendiculairement au lignes de champ jusqu’à un rayon de plusieurscm, ces dernières permettent la mesure de profils radiaux complets de densité et de température(dans la gamme 5-100eV ) suivant leur pénétration dans la SOL. Les mesures effectuées sont alorsnon perturbatives (la durée d’un plongeon de sonde est fixée à 65ms sur Tore Supra).

Les sondes de Langmuir sont généralement constituées d’un cylindre métallique perforé (pinoche)recouvert d’une protection en CFC (diamètre : 5cm, longueur : 25cm sur Tore Supra). Plusieurs typesde sondes mobiles, possèdant des spécifications propres à leur application peuvent être utilisées selonles besoins (mesure de phénomènes de turbulence, détermination précise du ratio Ti/Te, Ti étant latempérature ionique du plasma). Nous n’utiliserons dans ce mémoire que les mesures issues de sondestunnel implantées en partie haute de la machine (position poloïdale θ=79°).

L’analyse conventionnelle d’une caractéristique de courant-tension obtenue aux bornes d’une sondemobile consiste généralement à assimiler le nuage de point mesuré à une exponentielle (courbe rouge,figure 1.29). Cette approche permet alors de déterminer la température électronique Te, le potentielflottant du plasma Vf et son courant de saturation ionique jsat en considérant la relation suivante :

I(V ) = jsat[1− e(V−V f)/Te ] (1.20)

où :

• V est la tension variable appliquée aux bornes de la sonde (V )• Vf représente le potentiel flottant (V )

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Page 56: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 1

La densité électronique du plasma (ne, m−3) peut également être déduite du courant de saturationionique jsat estimé depuis la relation suivante :

jsat = ne.e.cs.Aeff (1.21)

où :• cs correspond à la vitesse sonique (m2/s)• Aeff est l’aire de collection de la sonde (m2)

La mesure des paramètres jsat et Te permet la reconstruction du profil spatial de flux de chaleurcirculant dans la SOL (figure 1.31) tel que :

QSOL = Qcond = γ.jsat.Te (1.22)

où :• γ (ua) représente le facteur de transmission de la gaine [Stangeby 00] (ce dernier traduit la quantitéde puissance transmise par une particule à la température Te)

La valeur du facteur de transmission γ dépend du rapport entre les températures ionique Ti etélectronique Te du plasma. Dans la suite du mémoire, nous ferons l’hypothèse que ces deux tempéra-tures sont égales. Dans le cas où Ti=Te, le modèle théorique de Stangeby indique que la valeur de γest égale à 7 (cf. figure 1.30).

Figure 1.30 – Evolution du facteur de transmission γ dans la gaine en fonction du ratio Ti/Te[Stangeby 00]

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Page 57: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 1.2

Figure 1.31 – Profil radial de flux de chaleur mesuré dans la SOL, choc 41688, γ = 7

L’exploitation des mesures de sondes électrostatiques faits encore l’objet de nombreuses études.Les difficultés recontrées pour l’analyse des données issues de ce sytème de mesure sont notammentinduites par leur grande sensibilité au champ magnétique et par un transport des particules légèrementanisotrope dans le plasma (entraînant l’apparition d’une composante perpendiculaire aux lignes dechamp difficilement mesurable) [Gunn 97].

Dans la suite de ce mémoire, les diagnostics bolométrie et sondes de Langmuir nous permettrontde quantifier les flux Qcond et Qrad. Les diagnostics calorimétrie et IR nous permettront quant à euxd’accéder à la puissance totale reçue par les composants face au plasma au cours d’une décharge (sansdifférenciation possible des contributions conduites ou rayonnées incidentes).

1.2.5.4 Le diagnostic calorimétrie

Le diagnostic calorimétrie permet de mesurer la puissance thermique extraite par l’ensemble descomposants face au plasma (protections d’antennes et coupleurs, LPA, panneaux PEI, LPT, anneauxde garde, protections ripple) et d’établir ainsi des bilans d’énergies et de puissances extraites par laparoi de la machine. La totalité des CFP de Tore Supra est en effet activement refroidie par uneboucle à eau pressurisée déminéralisée (120 C, 24 bar). Le réseau de refroidissement de Tore Supraest muni d’une instrumentation calorimétrique permettant de mesurer les différents débits ainsique la température de l’eau en entrée et en sortie de chacun des composants. Les débits sont soitmesurés à l’aide de débitmètres à effet Vortex, soit au moyen de capteurs déprimogènes de type Pitotmoyenné, connectés à des transmetteurs de pression différentielle. Les températures sont mesuréesà l’aide de sondes Platine gainées de type Pt100 (résistance R = 100 Ω à 0C), en montage 3 fils.La réponse de ces sondes, métalliques, peut être considérée comme linéaire dans la plage de mesureconcernée (entre 100 et 200C). Leurs principales caractéristiques sont présentées dans le tableau 1.3 5 .

5Le coefficient de température α correspond au rapport (R100C −R0C) / (100 ∗R0C)

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Chapitre 1

Sensibilité Tolérance (à 200C) Taille () Coefficient de température α Plage de mesure (∆T )2 ∗ 10−2K +/- 0.55 C 3 mm 0.00385C−1 −200C ; 850C

Tableau 1.3 – Caractéristiques des sondes Pt100 utilisées sur Tore Supra [NOR 83]

(a) Bilan de puissance dans le tokamak

(b) Evolution de la puissance totale extraite par la paroi au cours d’unedécharge, choc 37696

Figure 1.32 – Relevé de puissance extraite depuis le diagnostic calorimétrie

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Page 59: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 1.2

Le couplage des mesures de débits d’eau et de températures, effectuées à l’extérieur de la machine,permet de calculer la puissance thermique évacuée par chacun des composants constituant la paroi deTore Supra telle que [Chantant 06] :

Pextraite = ˙m(t)× ρ× Cp× (Ts(t)− Te(t− τtransit)) (1.23)

avec :– m : débit d’eau (m3/s), une consigne fixe les valeurs de débits dans les différents CFP mais cesderniers peuvent être légèrement variables dans le temps,

– ρ : masse volumique de l’eau (kg/m3), considérée constante compte-tenu de la pression P inva-riante dans le réseau et de la faible variation de la température entrée-sortie de l’eau,

– Cp : capacité calorifique de l’eau (J/kg.K), également considérée constante,– Ts : température de sortie de l’eau (C), variable dans le temps,– Te : température d’entrée de l’eau (C), légèrement variable dans le temps, contrainte à 120C(+/ − 2C) lors des chocs (sur Tore Supra, Te n’est pas mesurée sur tous les composants, unevaleur de température globale est mesurée en amont de la boucle après les vannes de barrage),

– τtransit : temps de transit de l’eau dans le circuit de refroidissement (s), ce dernier correspond audéphasage entre l’instant t où est mesurée la température Te globale et l’instant t+ τtransit oùsont mesurées les températures Ts. Ce déphasage τtransit varie pour chaque CFP (il est environégal à 12s pour le LPT et peut atteindre jusqu’à 30s pour des composants semi-inertiels commele LPA où les débits d’eau circulant sont plus faibles). Ce déphasage est estimé de manièreexpérimentale grâce à des chocs dédiés où l’on estime le temps de propagation d’un front d’eauchaude dans la machine jusqu’aux différents points de mesure Ts (chocs sans plasma).

La figure 1.32b montre l’allure temporelle de la puissance totale extraite de la machine lors d’unedécharge plasma (choc 37696). Le signal Pextraite représenté correspond à la somme des signaux calo-rimétriques obtenus en sortie de chaque CFP activement refroidi.

NB. Les caractéristiques du réseau de refroidissement et l’instrumentation calorimétrique propre auLPT seront abordés plus en détail au chapitre 2 de ce mémoire.

1.2.5.5 La surveillance par thermographie infrarouge

Tore Supra est aujourd’hui le seul tokamak équipé d’un système de sécurité IR contrôlé en tempsréel [Moreau. 07]. Diagnostic complémentaire du bilan calorimétrique, la surveillance IR peut fournirune image 2D instantanée du motif de dépôt de chaleur en surface des composants face au plasma,elle est de ce fait un outil de sécurité essentiel de la machine. L’intégrité du tokamak n’est en effetassurée si la température et le flux de chaleur déposé sur les parois ne dépassent pas des valeursseuils en températures et flux imposés. Seuls une partie du LPT et les différents systèmes de chauffageadditionnels sont surveillés par le diagnostic IR. Les autres élements internes (PEI, Anneaux de Garde,protections Ripple, LPA) ne sont pas observés par les endoscopes infrarouges. Ce diagnostic n’offredonc pas une vision complète de la machine, contrairement à la calorimétrie. Dans le cas du limiteur,les tuiles de CFC exposées au plasma peuvent supporter une température seuil de 1200°C (pour éviterla sublimation) et un flux de chaleur de 10 MW/m2 (contraintes thermohydrauliques) [Schlosser 00].Différentes limites opérationnelles sont définies pour la surveillance des coupleurs et antennes : latempérature seuil des grills en cuivre est par exemple fixée à 500°C contre 800°C pour les écrans dessystèmes FCI recouverts de B4C (leurs protections latérales en CFC peuvent quant à elles supportéesune température de 1200°C, comme le limiteur).

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Page 60: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 1

Sur Tore Supra, la surveillance IR est effectuée à l’aide de cinq endoscopes de 2.5 mètres de long,constitués chacun de trois parties principales (figure 1.33) [Guilhem 05] :

– Le corps de l’endoscope est activement refroidi à 120 °C et sépare le système optique du videmachine. La tête du corps, côté plasma est consitutée de trois hublots saphir et dotée d’une voleten CFC pivotant afin de protéger les hublots de la redéposition du carbone.

– Le fût optique est également sous vide et refroidi à 20°C.– La console haute montée au sommet du fût optique sert de support aux caméras IR, elle est

maintenue à pression atmoshérique et à température ambiante.

Figure 1.33 – Dispositif de surveillance IR de Tore Supra : schéma d’un endoscope

Chaque visée optique est constituée de 28 lentilles, d’un prisme et de 4 miroirs plan dorés. Ceciinduit une faible transmission globale du système, environ égale à 0,25 [Mitteau 04], [Desgranges 06].Chaque fût optique est équipé au maximum de deux caméras pouvant correspondre à trois viséesoptiques (tableau 1.4, actuellement, seuls deux endoscopes sont dotés de deux caméras, en Q5B etQ6B). Un total de sept caméras CEDIP (modèle Agathe 320× 256 pixels) est installé sur Tore Supra.Les filtres des caméras IR sont centrés sur 4,5µm (pour une bande spectrale possible de [3 - 5 µm]. Lafréquence d’acquisition du système est fixée à 50 Hz et le temps d’intégration des caméras varie avecles niveaux de luminance reçus afin d’obtenir une mesure optimale dans la gamme de température 120- 1800°C (τinte=11, 65 ou 340 µs).

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Page 61: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 1.2

Localisation endoscope Visées optiques Nombre caméras(queusot)

Q6B LPT Q6A, LPT Q6B, Coupleur LH C3 2Q6A Coupleur LH C2 1Q5B LPT Q5B (HR), Antenne FCI Q5 2Q1B Antenne FCI Q1 1Q2B Antenne FCI Q2 1

Tableau 1.4 – Localisation et visées des endoscopes IR de Tore Supra

Les endoscopes équipant le tokamak Tore Supra fournissent les images IR des composants face auplasma les plus critiques (à savoir : les cinq systèmes de chauffage et trois secteurs du LPT représentantau total une section de 80° du composant). La figure 1.34 illustre l’image obtenue pour une antenneFCI ainsi que pour deux visées de 30° du LPT recombinées sur une même caméra.

Figure 1.34 – Images IR d’une antenne FCI et de deux secteurs de 30° du LPT

Les caméras infrarouges mesurent une luminance (flux de photon par mètre carré et par stéradian)convertie en température de surface à partir des courbes de calibration des endoscopes en considérantl’émissivité6 des différents CFP égale à 1. Les courbes d’étalonnage (figure 1.35) sont établies enlaboratoire à l’aide d’un corps noir servant de source thermique de référence en considérant la loi dePlanck [Papini 94] :

L(λ, T ) = 2hc2

λ5(exph.c

λ.kb.T − 1)(1.24)

avec :h : constante de Planck = 6, 62.1034 J.skb : contante de Boltzmann = 1, 38.1023 W.s/Kc : vitesse de la lumière = 2, 9.108 m/sλ : longueur d’onde, en mT : température, en K

6La majorité des CFP surveillés par le système IR sont recouverts de fibres de CFC. L’émissivité du carbone estproche de 1 : ε ∼= 0.8− 0.9.

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Page 62: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 1

Figure 1.35 – Courbe d’étalonnage des endoscopes IR pour les trois temps d’intégration : τinte=11,65 et 340 µs [Balorin 08]

Le diagnostic IR est utilisé de façon routinière depuis 2004 pour assurer la sécurité des composantsface au plasma au moyen d’un système de contrôle temps réel régulant ou coupant la puissance dechauffage additonnelle lorsqu’un dépassement de température seuil est observé. Les cartographies detempératures mesurées peuvent également servir à des analyses physiques réalisées en temps différé(après choc) afin d’étudier des phénomènes physiques plus précis (érosion des surfaces, dépendancedu motif de dépôt de chaleur observé avec les paramètres plasma fixés pour les décharges, etc.).

Dans le cadre de cette surveillance, il s’est avéré nécessaire de développer des outils d’analyseafin d’accéder, en plus des température de surface, aux flux de chaleur incidents su les composants.Un problème déjà abordé précédemment (§1.2.2.3) correspond à la présence de dépôts carbonés ensurface des différents composants (visibles sur l’image du LPT, figure 1.34). Dans ce cas de figure,la fiabilité de la surveillance en température du composant n’est pas assurée et la connaissance desflux thermiques “réels” déposés est alors requise. Le traitement des images IR obtenues en surface dulimiteur fera l’objet du chapitre 3 de ce mémoire (des informations complémentaires sur les mesuresfournies pas la voie haute résolution visant ce composant y seront fournies).

1.3 Conclusion du chapitre

Ce chapitre nous a permis de présenter les aspects physiques généraux liés aux recherches sur lafusion thermonucléaire et de situer les enjeux du travail de thèse réalisé. La quantification des flux dechaleur déposés sur les parois d’un tokamak, ainsi que la compréhension des phénomènes physiquesgénérant ces charges thermiques, est indispensable pour assurer les performances des machines de

48

Page 63: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 1.3

fusion par confinement magnétique de demain. Maintenir un plasma très énergétique et stationnairenécessite en effet de comprendre et de maîtriser les phénomènes d’interactions plasma-paroi mis enjeu. Nous avons vu qu’il n’existe pas, à l’heure actuelle, de diagnostic permettant d’évaluer instan-tanément la forme et l’intensité des flux incidents sur les parois d’un tokamak. Dans les conditionsextrêmes des plasmas de fusion, les niveaux de flux de chaleur sont en effet trop élevés (plusieursMW/m2) pour disposer d’une mesure du flux direct sur les composants. L’existence de phénomènesd’érosion et redéposition rend également difficile la mise en place d’une instrumentation de surface.Les diagnostics couramment utilisés pour quantifier les flux de chaleur mis en jeu (thermographieIR, calorimétrie, bolométrie, sondes de Languir) possèdent tous leurs limites et des traitements sontsouvent nécessaires pour exploiter les mesures expérimentales à disposition.

Tore Supra possède un limiteur de surface plane permettant de révéler l’empreinte du plasmadans la machine. Ce dernier est très bien instrumenté (mesures de calorimétrie, visée perpendiculaireIR). Ces qualités, et la possibilité de pouvoir réaliser des décharges plasma longues et stationnaires,font de Tore Supra une machine bien adaptée pour étudier les phénomènes de dépôts de chaleur.Dans cette étude, l’accent sera mis plus particulièrement sur l’amélioration de l’interprétation desdonnées IR et calorimétriques. Le travail réalisé consistera notamment à accéder aux niveaux de fluxou de puissances déposés en surface des composants depuis les mesures de températures fournies.Les dépôts de chaleur calculés pourront alors être comparés aux mesures d’autres diagnostics (sondesde langmuir et bolométrie) mais également à des cartographies de flux théoriques (chapitre 4), ceciafin de comprendre les phénomènes d’interactions plasma-paroi observés dans la machine. Différentsparamètres peuvent en effet influencer la répartition d’énergie dans la machine : fraction rayonnéefrad, puissance injectée Pchauffage, configuration magnétique du plasma. Nous nous intéresserons plusparticulièrement à l’influence du facteur de sécurité q sur le motif de dépôt de chaleur observé sur lelimiteur dans les chapitres 4 et 5 de ce mémoire.

49

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Chapitre 2

Détermination de la chaleur déposéesur les CFP : calcul inverse à partir desdonnées calorimétriques

Les Composants Face au Plasma (CFP) du tokamak Tore Supra sont activement refroidis par uneboucle à eau pressurisée. L’instrumentation équipant cette boucle permet de mesurer en temps réelles températures et débits en entrée et sortie des CFP et de déduire la puissance thermique évacuéepar chacun d’eux, faisant ainsi du système de mesures calorimétriques le seul diagnostic à fournirune vision d’ensemble des dépôts de chaleur dans la machine (bilans enthalpiques). Dans un régimede fonctionnement de type dynamique, avec variation des paramètres plasmas, une des inconnuespertinentes pour la compréhension des phénomènes d’interaction-plasma est la quantité de puissanceréellement déposée à l’instant t sur les composants. Cette information n’est pas directement accessiblepar le diagnostic puisque les puissances extraites calculées sont retardées du temps de transfert de lachaleur dans les composants puis dans le réseau de refroidissement. Ce chapitre présente une approchede type méthode inverse appliquée aux relevés calorimétriques observés en sortie de la machine. Le butde ce traitement est de reconstruire l’allure temporelle de la puissance déposée en surface de chaquecomposant face au plasma. La difficulté majeure de cette approche sera de déterminer la fonction detransfert de chaque système.

Page 65: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.1

2.1 Exploitation actuelle des données calorimétriques :bilans d’énergie

Le diagnostic calorimétrie fournit les relevés de puissance thermique extraite par chacun des com-posants face au plasma (cf. figures 1.19 et 1.32, chapitre 1). En intégrant les différentes courbes enpuissances extraites obtenues, sur la durée d’un choc et pour tous les éléments de la machine, cediagnostic permet ainsi de vérifier le bouclage du bilan énergétique :

Echauffage = Eextraite(CFP ) (2.1)

où :• Echauffage correspond à l’énergie fournie au plasma par les différents moyens de chauffage

(ohmique, FCI, hybride) afin d’atteindre la température requise pour les réactions de fusion.• Eextraite correspond à l’énergie provenant du plasma et déposée sur les parois des CFP, cette

énergie est extraite par l’eau traversant les composants activement refroidis.

Ce dernier bilan permet de déterminer le pourcentage d’énergie totale extraite, et donc reçue, parchaque composant face au plasma au cours d’un choc. Un bilan d’énergie fournit donc un premierniveau d’information intéressant sur le niveau et la répartition de chaleur déposée par le plasma surchaque CFP. Toute chaleur déposée est en effet majoritairement conduite dans les couches de matériau(les flux et pertes radiatives en surface des composants peuvent être considérés comme négligeabledevant l’énergie conduite dans les matériaux et évacuée par les systèmes de refroidissement).

Depuis le complet renouvellement des composants internes de Tore Supra effectué entre 2000 et2002 dans le cadre du projet CIEL1, le diagnostic calorimétrie mis en place n’a cessé de fournir desrésultats de plus en plus précis. Actuellement, les bilans d’énergie réalisés en sortie de la machinepermettent de retrouver entre 95 et 99% de l’énergie totale injectée dans le plasma, suivant le scénarioexpérimental ([Vallet 03], [Chantant 05]). Le bilan de certains chocs peut être parfois moins bienbouclé en raison de signaux inutilisables (casse d’une sonde) ou de problèmes de régulation destempératures dans la boucle. Notons que pour des chocs de faible puissance (avec chauffage ohmiqueseul) et de courte durée, les bilans sont généralement difficiles à estimer (notamment en raison de lafaible élévation de température de l’eau en sortie des composants, se retrouvant alors de l’ordre degrandeur du bruit observé sur les mesures).

Le tableau 2.1 illustre deux bilans d’énergie effectués pour deux chocs longs (∼= 50s) correspondantà une puissance additionnelle hybride injectée dans le plasma d’environ 2.4MW . Les valeurs indiquéesen % dans la deuxième colonne de chaque tableau correspondent à la part d’énergie extraite par uncomposant, ramenée à l’énergie extraite totale de la machine. Nous pouvons nous apercevoir sur cetexemple que l’image globale de dépôts de chaleur dans la machine varie entre ces deux chocs pourlesquels la fraction de puissance rayonnée par le plasma (frad) est différente (cf. §1.2.3, chapitre 1).Considérons les CFP pour lesquels la part d’énergie extraite a le plus varié, à savoir le limiteur etles panneaux PEI. Alors que pour le premier choc, le limiteur n’absorbe qu’une part inférieure à30% de l’énergie totale injectée, il en extrait plus de 50% pour le second choc, ce qui correspondà son fonctionnement standard. A l’inverse, les PEI extraient une part très importante d’énergie enprovenance du plasma pour le choc à frad élevée (EPEI> 43% EExtraitetot pour le choc 37733) contreune quantité inférieure à 25% pour le choc 37721. Cet exemple illustre l’influence du facteur frad sur

1CIEL (Composants Internes Et Limiteurs) : Projet ayant pour but d’augmenter la capacité d’extraction de puissance(jusqu’à 25 MW) et de particules (jusqu’à 4 Pa.m3/s) de la machine Tore Supra.

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Chapitre 2

le bilan global d’énergie dans la machine. Dans le cas où la part de puissance conduite l’emportesur la part de puissance rayonnée, le limiteur joue son rôle d’extracteur d’énergie. Les panneaux PEIextraient quant à eux de préférence l’énergie rayonnée.

choc 37725ELPT 33 MJ 29.3%EPEI 49 MJ 43.5%Eprot.chauffages 15.5 MJ 13.8%EAG 11.2 MJ 10%ELPA 1.2 MJ 1%ERipple 2.7 MJ 2.4%EExtraitetot 112.6 MJEChauffagetot 116.9 MJBouclage 96.3%

choc 37733ELPT 52.2 MJ 50.5%EPEI 25.2 MJ 24.4%Eprot.chauffages 16.7 MJ 16%EAG 6.9 MJ 6.7%ELPA 1.2 MJ 1.2%ERipple 1.2 MJ 1.2%EExtraitetot 103.4 MJEChauffagetot 102.8 MJBouclage 99.4%

Tableau 2.1 – Bilans d’énergie (en MJ) réalisés pour les chocs 37725 (à gauche, choc en D2 avecinjection de Ne : frad ∼= 0.8) - et 37733 (à droite, choc en D2 : frad ∼= 0.4)

2.2 Réalisation de bilans de puissances par inversion des mesurescalorimétriques

Le système calorimétrique est le seul à l’heure actuelle permettant de surveiller l’ensemble desCFP de la machine et de réaliser des bilans d’énergie complets. Comme nous l’avons vu, ce diagnostics’avère bien adapté pour obtenir une mesure intégrée dans des conditions stationnaires à partirdes relevés de puissance extraite. A l’inverse, ce système paraît moins approprié pour quantifier lesvariations temporelles de puissance déposée sur un élément de paroi (dans la suite du document nousnoterons cette inconnue : Pdeposee). Les mesures de calorimétrie étant éloignées des parois (elles sonteffectuées en sortie de la machine), l’information sur la puissance déposée in-situ est retardée dutemps de transfert de la chaleur dans les composants puis dans leur réseau de refroidissement. L’étudeprésentée dans ce chapitre a pour but de reconstruire l’allure temporelle de la puissance déposée surchacun des CFP du tokamak à partir de l’observation des mesures en puissances thermiques Pextraiteeffectuées en sortie de la machine. Ce type de calcul correspond à une approche de type méthodeinverse (cette notion sera définie plus précisément au §2.2.3.1 de cette section).

Les puissances calorimétriques sont le résultat de trois mesures (cf. chapitre 1) : température d’en-trée de l’eau dans le système de refroidissement (Te), température de sortie (Ts) et débit d’eau circulant(m) telles que :

Pextraite = ˙m(t)× ρ× Cp× (Ts(t)− Te(t− τtransit)) (2.2)

La température Te et le débit entrant dans un composant sont régulés. Ces paramètres peuventtoutefois varier légèrement autour d’une valeur moyenne (les boucles de régulation mettent par exemplequelques secondes à réagir à la hausse de température globale de l’eau du circuit de refroidissementen début de choc, figure 2.1). Les variations subies par ces grandeurs d’entrée peuvent donc influersur la grandeur de sortie Ts.

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Section 2.2

La résolution de notre problème met donc en jeu 5 variables (Te, Ts, m, Pdeposee et τtransit), nonindépendantes entre elles. La figure 2.2 schématise l’organisation du système CFP multi-entrées/multi-sorties correspondant.

(a) Températures (b) Débit

Figure 2.1 – Evolutions temporelles des températures Te et Ts et du débit en entrée du LPT, choc39880

Figure 2.2 – Un CFP est un système multi-entrées/multi-sorties

2.2.1 Première étape : résolution du problème direct (identification du modèle)

Afin de pouvoir modéliser de manière simple l’ensemble des phénomènes physiques mis en jeu à lafois dans la masse d’un composant et dans son réseau de refroidissement, nous avons choisi d’aborderla résolution du problème par analogie avec les méthodes de traitement du signal. Tout CFP sera alorsconsidéré comme un système linéaire mono-entrée/mono-sortie. Afin de s’affranchir des problèmesde dépendance entre les paramètres connus Te et m et la variable d’état Ts, P. Eykhoff ([Eykhoff 74],p.126) préconise en effet de considérer l’enthalpie d’un système thermohydraulique comme seule va-riable d’état. Compte-tenu de la pression maintenue constante dans le circuit de refroidissement et

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Chapitre 2

de la faible variation de température entrée-sortie, les puissances calorimétriques mesurées peuventêtre considérées équivalentes à la variation d’enthalpie de chaque système CFP. Le Cp étant invariant,nous nous retrouvons en effet avec h = Cp.(T − T0) où T0 est la température de référence du système(120°C). Cette simplification nous permet de considérer tout composant activement refroidi commeun nouveau système mono-entrée/mono-sortie où la variable Pextraite est unique et ne dépend que del’entrée Pdeposee (figure 2.3). L’entrée du système est ici la puissance imposée sur les différents CFPétudiés, l’observable est la puissance calorimétrique.

Figure 2.3 – Simplification du problème : création d’une variable indépendante Pextraite - ToutCFP devient un système mono-entrée/mono-sortie (modélisation boîte noire)

Nous voulons déterminer l’évolution temporelle de puissance déposée par le plasma sur un com-posant (Pdeposee) à partir de la puissance thermique extraite de ce dernier (Pextraite). La résolutionde ce problème nécessite tout d’abord d’identifier la fonction de transfert de chaque système CFP(décrivant la relation entre les variations du vecteur d’entrée et celles de la mesure). Obtenir unesolution du problème direct nécessitera dans notre cas, d’une part de résoudre l’équation de lachaleur dans les couches de matériau des composants, et d’autre part, de modéliser le transport del’eau dans les circuits de refroidissement ainsi que ses interactions avec les parois. Compte-tenu dela complexité géométrique du réseau de refroidissement étudié, il n’existe pas de solution analytiquepour le problème posé (le réseau de refroidissement propre au limiteur du Tore Supra sera présentéau §2.3.1, figure 2.8). Il nous a alors paru judicieux de traiter tout système étudié comme une “boitenoire”. La modélisation “boîte noire”, aussi appelée modélisation comportementale [Wiener 48], estune approche mathématique reliant les entrées et sorties d’un problème en faisant abstraction desconnaissances physiques précises internes au système. Elle permet donc d’accéder à un formalismeplus simple mais la difficulté est alors reportée dans l’estimation de la fonction de transfert du systèmeconsidéré.

La méthode classique permettant d’identifier la fonction de transfert d’un système consiste àsoumettre ce dernier à une sollicitation connue de type impulsion (Dirac) ou échelon (Heaviside)et d’observer la réponse qu’il fournit. La première solution évidente pour obtenir ce type réponseest de modéliser la géométrie du système à l’aide d’un code de calcul modélisant les interactionsfluide/structure. Une telle modélisation permettrait d’appliquer à la surface du CFP concernéun échelon de puissance connue. Cette modélisation numérique possède plusieurs avantages. Toutd’abord, la réponse du système obtenue depuis une modélisation par calcul numérique, même si ellepeut être biaisée, est non bruitée. Travailler avec un code numérique peut également permettre demener une étude de sensibilité du modèle, c’est-à-dire de définir l’influence de différents paramètres(propriétés thermophysiques des matériaux, vitesse du fluide, etc.) sur la réponse en puissance extraitedu composant. Malgré tout, une modélisation numérique peut également introduire une erreur sur le

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Page 69: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.2

calcul direct, due à la simplification du modèle (erreurs d’hypothèses), à son maillage, aux conditionslimites imposées ou à la discrétisation de la solution.

Dans notre cas, le recours à une méthode numérique s’est avéré difficile puisqu’elle a nécessité unemodélisation en trois dimensions de la géométrie complexe de chaque composant et de leur réseau derefroidissement (cf. figures 1.9 et 1.19 du chapitre 1). De plus, il a été dans notre cas impossible de va-lider le modèle numérique créé en comparant de manière fiable les résultats numériques obtenus à desmesures expérimentales. La raison principale à cette impossibilité est que les puissances déposées dansla machine sont inconnues et qu’aucun banc test des composants (où une sollicitation flash maîtriséepourrait être imposée) n’est actuellement disponible. Une tentative de modélisation par éléments finisdu limiteur de la machine a tout de même été réalisée en 2005 [Carpentier 05]. L’analyse des résultatsfournis par ce modèle nous permettra de mettre en évidence la non pertinence de cette solution (§2.3.2).

Face à la diversité des phénomènes physiques mis en jeu (conduction de la chaleur dans lamasse des composants, convection et circulation de l’eau dans les circuits de refroidissement), nouspourrions également envisager la décomposition du système en modes réduits élémentaires (MRE,[E. Videcoq and D. Petit 01], [M. Girault and D. Petit 05]). La caractérisation de ce type de modèlenécessiterait toutefois, là encore, de pouvoir imposer en entrée du système réel (CFP) une sollicitationconnue et contrôlée pour en identifier ses modes principaux. La puissance déposée sur un composantétant inconnue et non maîtrisée, l’emploi de ce type de méthode est donc également exclu. Pour cettemême raison, l’identification de la fonction de transfert de chaque CFP à l’aide d’une excitationpseudo-aléatoire ([Battaglia 03], [Shen 03]), ou d’un réseau de neurones ([Yang 97]) n’a pas non plusété retenue.

La méthode que nous proposons d’utiliser dans cette étude va consister à estimer la réponseindicielle de chaque composant depuis un jeu de données expérimentales (vecteurs Pextraite) acquislors de chocs où la puissance injectée dans la machine pouvait être assimilée à une sollicitation detype échelon sur les différents composants. Le principe de cette technique et les résultats obtenus pourchaque CFP seront exposés aux paragraphes §2.3.2 et §2.4.1. Cette approche est basée sur une solutionrobuste, abordée dans la littérature par exemple par [Harrison 02]. L’approche que nous proposonspermet de s’affranchir d’un modèle de comportement à-priori comme on le trouve dans la plupart desarticles d’identification de systèmes thermiques ou autres ([Nielsen 95], [Rigas 00], [Shen 03]). Dansce cas, la procédure d’identification se résume à l’estimation des paramètres constituant le modèle. Cen’est pas notre cas ici.

2.2.2 Deuxième étape : application de l’intégrale de convolution et mise sousforme matricielle du problème

Nous avons vu que tout système linéaire peut être défini par sa fonction de transfert dans le domainefréquentiel (communément appelée réponse impulsionnelle, h(t), dans le domaine temporel). Celle-ciest unique2 pour un composant donné et traduit à la fois les phénomènes thermiques (conduction dansles aiguilles, convection avec l’eau), l’influence de l’agencement hydraulique (collection de différentessorties d’eau chaude) et enfin les aspects métrologiques du problème (mesures de températures et

2h est considérée unique pour les conditions expérimentales fixées par la calorimétrie (consignes appliquées sur ledébit d’eau et la température d’entrée pour les maintenir constants autour d’une valeur moyenne). Dans notre cas, d’unchoc à l’autre, seul le flux incident varie significativement, les consignes de calorimétrie appliquée lors des phases de chocne varient pas.

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Chapitre 2

débits). La puissance extraite d’un système CFP mono-entrée/mono-sortie peut être exprimée parconvolution de son signal d’entrée Pdeposee(t) avec la réponse impulsionnelle du système h(t) ([Korn 61],[Eykhoff 74]). Compte-tenu de la condition initiale à t = 0, Pextraite(t) = Pdeposee(t) = 0, cette relations’écrit :

Pextraite(t) =∫ t

0h(t− τ)× Pdeposee(τ).dτ (2.3)

La réponse impulsionnelle h(t) d’un composant n’est autre que la dérivée temporelle de sa réponseindicielle φ(t) :

h(t− τ) = dφ(t− τ)d(t− τ) = −dφ(t− τ)

dτ(2.4)

L’équation (2.3), exprimée en fonction de φ(t), fournit une nouvelle expression du produit deconvolution :

Pextraite(t) =∫ t

0−dφ(t− τ)

dτ.Pdeposee(τ).dτ (2.5)

L’expression (2.5) peut être discrétisée en posant (figure 2.4) :

−dφ(t− τ)dτ

∼=φ(F − f + 1)− φ(F − f)

∆τ (2.6)

Avec :∆τ : pas de temps (2.7)

t = F ×∆τ (2.8)

τ = f ×∆τ (2.9)

Figure 2.4 – Discrétisation temporelle

L’approximation de l’intégrale (2.5) par la méthode des rectangles conduit alors à l’expressiondiscrète :

Pextraite(F ) =F∑f=1

(φ(F − f + 1)− φ(F − f))× Pdeposee(f) (2.10)

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Page 71: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.2

En introduisant la notation :∆φ(f) = φ(f + 1)− φ(f) (2.11)

Nous obtenons :

Pextraite(1) = ∆φ(0)× Pdeposee(1) (2.12)

Pextraite(2) = ∆φ(1)× Pdeposee(1) + ∆φ(0)× Pdeposee(2)

Pextraite(3) = ∆φ(2)× Pdeposee(1) + ∆φ(1)× Pdeposee(2) + ∆φ(0)× Pdeposee(3)...

Pextraite(F ) = ∆φ(F − 1)× Pdeposee(1) + ∆φ(F − 2)× Pdeposee(2)

+∆φ(F − 3)× Pdeposee(3) + ...+ ∆φ(0)× Pdeposee(F )

Soit :

Pextraite(F ) =F∑f=1

∆φ(F − f)× Pdeposee(f) (2.13)

L’équation (2.13) correspond, pour un composant donné, à l’écriture matricielle :

Pextraite = Mcalo × Pdeposee (2.14)

où la matrice Mcalo est une matrice triangulaire inférieure faisant intervenir une forme discrétiséede la réponse indicielle φ(t) du système :

Pextraite1Pextraite2

...

...Pextraiten

=

∆φ0 0 ... ... 0∆φ1 ∆φ0 0 ... 0... ... ... ... ...... ... ... ... ...

∆φn−1 ... ... ... ∆φ0

×Pdeposee1Pdeposee2

...

...Pdeposeen

(2.15)

Mcalo est une matrice carrée de taille (n, n) ou n représente le nombre d’échantillons du vecteurd’observation Pextraite. Ce nombre n est directement lié à la durée du choc étudié. Le vecteur h(f) setrouvant être équivalent à ∆φ(f), indirectement, calculer la réponse φ(t) permet donc d’accéder à uneestimation de h(t), sa dérivée et fonction de transfert du système.

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Page 72: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 2

2.2.3 Troisième étape : régularisation du problème mal posé

2.2.3.1 Définition : problème inverse et problème mal posé

Soit x un vecteur inconnu à identifier et y le vecteur contenant les observations mesurées en sortiedu système. Plaçons nous en dimension finie ouX etY sont les deux espaces fonctionnelles auxquels lesvecteurs appartiennent (espaces vectoriels normés). Soit A le modèle, c’est-à-dire l’opérateur linéairereprésentant le système et appliquant X dans Y. L’expression d’un problème direct revient à :

A× x = y (2.16)

Estimer le vecteur x connaissant l’observation y correspond à la résolution d’un problème inversed’estimation de conditions aux limites, tel que :

x = A−1 × y (2.17)

Cette dernière expression correspond à une déconvolution du signal de mesure y. Dans notresituation, l’équation (2.17) comporte encore deux inconnues : le vecteur d’entrée x (Pdeposee), etl’opérateur linéaire A (correspondant à la matrice Mcalo). Comme nous l’avons vu, la résolution duproblème inverse posé impliquera donc tout d’abord de solutionner le problème direct pour pouvoircalculer la réponse indicielle (ou impulsionnelle) du système et estimer Mcalo.

Partant de l’équation (2.14), il semble possible de déduire la solution Pdeposee en inversant simple-ment la matrice Mcalo telle que :

Pdeposee = (Mcalo)−1 × Pextraite (2.18)

L’inversion du vecteur d’observation Pextraite peut toutefois comporter des difficultés d’ordre ma-thématique puisque se pose alors la question d’existence, d’unicité et de stabilité de la solutionPdeposee. Ces trois conditions définissent un problème bien posé du type A×x = y ([Hadamard 32],[Badeva 91]).

Un problème est bien posé si :1. Il existe toujours une solution : pour chaque vecteur y, x = A−1 × y est toujours calculable.2. La solution x est unique : un même vecteur y ne peut pas résulter de différentes valeurs de x.3. La solution x est stable numériquement.

Si les problèmes directs sont en général bien posés (ils possèdent autant d’inconnus que d’équa-tions), ce n’est pas nécessairement le cas pour les problèmes dits inverses faisant intervenir l’opérateurA−1. Dans le cas d’un problème bien posé, la matrice A est inversible et les erreurs sur la solutioncalculée sont bornées. Les problèmes inverses en transferts de chaleur, obtenus à partir d’un problèmedirect en permutant les rôles tenus par la solution (ici Pdeposee) et les mesures (Pextraite), sont généra-lement mal posés en raison du non respect de la condition de stabilité. La stabilité d’un système peutêtre évaluée par le nombre de conditionnement de la matrice A. Ce dernier est égal au rapport dela plus grande valeur singulière ω du système sur la plus petite [Press 94] (cond = ωmax/ωmin). Unematrice mal conditionnée, ou quasi-singulière, aura un nombre de conditionnement élevé et traduiral’instabilité du système étudié.

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Page 73: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.2

Le problème que nous étudions est mal posé au sens d’Hadamard. Dans notre cas, les mesures decalorimétrie sont très éloignées du phénomène que l’on observe et ce caractère mal-posé se traduitmathématiquement par un mauvais conditionnement de la matrice Mcalo que l’on cherche à inverser.Le caractère mal posé d’un problème se traduit généralement par un fort changement de la solutiond’entrée calculée (Pdeposee) lorsqu’une variation, même faible, entache les données d’observation(Pextraite, cf. figure 2.1). Dans le cas de mesures expérimentales, ceci peut avoir pour effet d’amplifierle bruit et d’entraîner l’apparition d’oscillations non physiques sur la solution. Un filtrage préalabledes données expérimentales peut alors être proposé pour s’affranchir de ce problème. Une étude dubruit de mesure est dans ce cas préconisée afin d’améliorer le filtrage. Ce type de méthode, si elle n’estpas optimisée, comporte toutefois le risque d’éliminer une information physique pertinente contenuedans le signal observé.

Le compromis généralement proposé pour résoudre un problème mal posé consiste à approcher unequasi-solution du vecteur inconnu (ici Pdeposee). Cette méthode consiste à rechercher une solutionrenvoyant à un vecteur Pextraite reproduisant les données observées à une incertitude près (de l’ordredu bruit de mesure), après convolution avec l’opérateur Mcalo. La solution la plus satisfaisante enterme de norme est obtenue lorsque la fonction suivante est minimale :

J(Mcalo) = ‖Mcalo × Pdeposee − Pextraite‖ (2.19)

Cette estimation est optimale et non biaisée si le bruit de mesure est blanc, de variance fixe etde moyenne nulle. Cette solution aux moindres carrés (OLS, Ordinary Least Squares) peut égalements’exprimer sous la forme du système carré suivant :

(McaloT ×Mcalo)× Pdeposee = Mcalo

T × Pextraite (2.20)

Justification de l’approche aux moindres carrés choisie

Nous pouvons supposer que le bruit présent sur les mesures calorimétriques est aléatoire gaussiencentré (cf. figure 2.5). La matrice de variance-covariance des perturbations observées n’est toutefoispas connue de manière précise.

Une approche TLS (Total Least Squares, [Markovsky 07], [Van Huffel 07], [De Groen 96]) peutégalement être préconisée comme alternative aux moindres carrés ordinaires lorsque le vecteur d’ob-servation et la matrice de sensibilité du système sont tous deux entachés d’erreur. Dans notre cas, nousidentifierons chaque matrice Mcalo (pour tout CFP) au moyen de données expérimentales (cf. §2.3.2),cette dernière sera donc également corrompue. Le recours aux moindres carrés totaux ne peut toutefoisêtre utilisé que pour des problèmes de type estimation de paramètres. Dans notre cas (identification defonction), le nombre d’inconnus (vecteur Pdeposee) sera égal à la dimension du vecteur d’observation.Cette approche ne se justifie donc pas ici.

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Chapitre 2

(a) Histogramme, écart-type=7.7kW , moyenne=0kW (b) Bruit de mesure

Figure 2.5 – Etude du bruit de mesure observé sur un relevé expérimental de Pextraite, choc39880, (phase après choc, hors plasma)

L’estimation d’une solution stable en puissance Pdeposee à partir de l’équation (2.20) est encoreimpossible. La matrice Mcalo étant mal conditionnée, le produit de cette matrice avec sa transposéel’est également. Nous nous retrouvons avec un problème tout aussi mal posé que le précédent, sujet auxproblèmes de divergence de solution en présence de bruit. Afin d’obtenir une solution stable et optimalereproduisant au mieux les mesures il est nécessaire de recourir à une méthode de régularisation.

2.2.3.2 Méthodes de régularisation

Les techniques de régularisation sont nombreuses et variées, leurs applications dépendent notam-ment du problème physique traité. Elles nécessitent fréquemment d’avoir une idée de la forme de lasolution avant la résolution. Nous aborderons ici l’emploi de deux méthodes pour la résolution denotre problème : une régularisation de type pénalisation proposée par Tikhonov [A.N. Tikhonov 77]et une méthode de troncature après Décomposition en Valeurs Singulières de la matrice Mcalodu système étudié (SVD, ou Singular Value Decomposition method, [O’Leary 81], [O’Leary 86] et[Hansen 98]).

a - Régularisation par pénalisation de Tikhonov

Une conséquence du mauvais conditionnement de Mcalo étant l’extrême sensibilité de la solutionaux erreurs de mesure contenues dans Pextraite, une quasi solution, biaisée mais stable, peut êtreobtenue en complétant l’approche des moindres carrés ordinaires avec une technique de régularisationdéveloppée par Tikhonov et Arsenine [A.N. Tikhonov 77], telle que :

J(Mcalo) = ||Mcalo × Pdeposee − Pextraite‖+ µ2‖L× Pdeposee‖ (2.21)

avec :• µ : coefficient de régularisation (chiffre sans dimension, compris entre 0 et 1)• L : opérateur de régularisation (matrice de taille (n, n))

60

Page 75: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.2

La fonction J à minimiser est modifiée par addition d’un terme dit de pénalisation. La quasisolution explicite de ce problème inverse s’exprime :

Pdeposee = (McaloT ×Mcalo + µ2 × IT × I)−1 ×Mcalo

T × Pextraite (2.22)

L’opérateur de régularisation L a été choisi égal à la matrice identité I. Cette méthode derégularisation rend le système mieux conditionné par le biais du coefficient µ. Suivant sa valeur,la solution sera dite plus ou moins régularisée. Celui-ci devra être choisi de manière à trouver uncompromis entre stabilité et solution physiquement acceptable, c’est-à-dire entre une solution Pdeposeenon divergente et un résidu sur Pextraite minimal.

L’opérateur de régularisation L proposé par Tikhonov est fondé sur les dérivées successives dela solution. Le choix d’une dérivée énième (n=0, 1 ou 2, appelé ordre de régularisation) permet enquelque sorte l’introduction d’un à-priori sur la solution et dépend de ce fait des exigences que l’on sefixe :

– Utiliser un opérateur d’ordre 0 a pour effet de minimiser la norme de la solution (ce que l’onsouhaite ici), L sera égal à la matrice identité. Le cas extrême correspondant à cet ordre derégularisation est une solution d’amplitude nulle.

– La régularisation au premier ordre empêche la solution de subir de fortes variations, autrementdit elle minimise sa dérivée (variation de la solution à un instant t par rapport à sa valeur àl’instant précédent). Dans ce cas, L sera un opérateur de dérivation discret. Une régularisationtrop forte aboutira à une solution constante.

– Enfin, la régularisation d’ordre 2 minimise les variations de Pdeposee (et donc de la courbure) enfonction des valeurs aux temps t−dt et t+dt. Le cas extrême correspond à une fonction linéairede la variable.

Les outils permettant le choix d’un coefficient de régularisation optimum seront discutés au§2.2.3.2c.

b - Régularisation par Singular Value Decomposition (SVD)

La décomposition en valeurs singulières (notée SVD, [O’Leary 81], [O’Leary 86] et [Hansen 98])est un algorithme permettant d’exprimer la matrice Mcalo connue, de taille (n, n), comme le produitde trois matrices particulières, U, V et W, telles que :

Mcalo = U×W×VT (2.23)

Mcalo

=

U

×ω1 0 0 0 00 ω2 ... ... 0... ... ... ... ...... ... ... ... 00 ... ... 0 ωn

× V

T

(2.24)

61

Page 76: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 2

avec :– U, matrice carrée, de taille (n, n) : cette matrice constitue la base orthonormale des vecteurs

singuliers de Mcalo ∗MTcalo.

– W, matrice carrée, diagonale, de taille (n, n) : les termes diagonaux ωi de W correspondent auxvaleurs singulières de Mcalo.

– V, matrice carrée, de taille (n, n) : les colonnes de V constituent la base orthonormale desvecteurs singuliers de MT

calo ∗Mcalo.

La décomposition SVD est à l’origine une méthode d’inversion de matrice de systèmes linéaires[Press 94]. Cette décomposition est unique, mis à part l’ordre des valeurs singulières ωi ou s’il y aégalité entre elles.

Si notre problème était bien posé, la matrice Mcalo serait bien conditionnée et les valeurs singulièresdu système seraient non nulles et du même ordre de grandeur. La solution de notre problème seraitalors donné par :

Pdeposee = V×W−1 ×UT × Pextraite (2.25)

La matrice Mcalo étant mal conditionnée, cela signifie qu’au moins une de ses valeurs singulièresωi est quasi nulle. Calculer l’inverse de la matrice Mcalo en se basant sur l’équation (2.25) est toujourspossible mais les faibles valeurs singulières contenues dans la matrice W−1 rendront la solution Pdeposeetrès sensible aux erreurs contenues dans Pextraite. Les termes de la matrice W−1, en 1/ωi, tendent eneffet vers +∞ dans le cas de très petites valeurs singulières, d’où le problème de divergence de lasolution calculée. Une issue pour résoudre le problème est alors d’utiliser une pseudo-inverse de lamatrice W. Ce calcul consiste à forcer à 0 les termes en 1/ωi inférieurs à une valeur seuil fixée,appelée valeur de troncature ([T.J. Martin and G.S. Dulikravich 96], [Hansen 98] [Lagier 99]). Tout leproblème réside alors dans le choix d’une valeur seuil optimum pour laquelle la matrice sera tronquée.Nous utiliserons dans notre cas un nombre de conditionnement limite (optimum) tel que :

condopt = ωmaxωtronc

(2.26)

La quasi-solution Pdeposee de notre problème, après troncature de la matrice W, sera alors donnéepar :

Pdeposee = V ×W−1tronc × UT × Pextraite (2.27)

c - Optimisation de la régularisation : choix d’un coefficient optimum

Quelle que soit la méthode choisie pour inverser les mesures (SVD ou Tikhonov), il sera impératifde choisir un coefficient µ ou une valeur du nombre de conditionnement cond pondérant la régu-larisation. Le choix d’un coefficient optimal permettra en effet de trouver un compromis entre unrésidu faible sur le problème direct et une allure physique stable pour la solution régularisée Pdeposee(t).

Une première méthode, non itérative, peut être proposée pour calculer la solution optimale du pro-blème. Une valeur de coefficient µ ou de nombre de conditionnement cond à-priori peut tout d’abord

62

Page 77: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.2

être calculée en estimant l’écart-type du bruit présent sur les mesures ([Jarny 99], [Lagier 99]). Leséquations doivent alors être normées, ce qui est notre cas (nous cherchons à reconstruire une puissancedéposée à partie d’une mesure de puissance extraite). Cette solution suppose toutefois de pouvoirquantifier très précisément le bruit présent sur les mesures. Ce dernier pourra varier entre différentschocs et suivant les composants étudiés lorsque nous analyserons les données calorimétriques. Nousavons donc préféré utiliser une méthode itérative et effectuer un certain nombre d’essais d’inversionafin de trouver le coefficient de régularisation optimal pour chaque choc expérimental étudié. Cecalcul consiste à établir une courbe en “L”, outil graphique permettant une visualisation rapide de larégularisation optimum à appliquer ([Hansen 93], [Hansen 98]).

Une courbe en L représente l’évolution de la norme ‖Pdeposee‖ en fonction du résidu ‖Mcalo ×Pdeposee − Pextraite‖. Elle est généralement tracée en échelle logarithmique pour une meilleure lecturedes résultats (figure 2.6). Pour garantir un résultat proche d’une solution physique, autrement ditnon amorti, et ne subissant que de faibles perturbations, il est préconisé de choisir le coefficient derégularisation au niveau du coude de la courbe. Une méthode permettant de localiser automatiquementce point de bifurcation a été proposée par Hansen.

Figure 2.6 – Allure théorique d’une courbe en L

Le coefficient de régularisation optimum correspond au point de courbure maximal de la courbeen “L”. Posons (ζ(l), η(l)) = (log(‖Mcalo × Pdeposee − Pextraite‖), log(‖Pdeposee‖)). La courbure k estalors donnée par une expression faisant intervenir les dérivées premières et secondes du résidu (ζ) etde la norme de la solution (η) par rapport à l [Hansen 98] :

k(l) = ζ ′η′′ − ζ ′′η′

((ζ ′)2 + (η′)2) 32

(2.28)

Dans notre cas la variable l correspondra soit au coefficient µ (pour une courbe en L associée àla méthode de Tikhonov), ou bien à la valeur singulière de troncature ωtronc dans le cas de la SVD

63

Page 78: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 2

(la connaissance de ωtronc indique directement la valeur du nombre de conditionnement à choisir). Lechoix d’une régularisation optimum avec la méthode du rayon de courbure ne fournit pas toujoursun résultat pertinent (cf. application au §2.3.3). Ceci dépendra notamment de l’incurvation plus oumoins prononcée de la courbe au niveau du coude et du nombre de points choisi pour calculer cettedernière. Lorsque cette méthode ne permet pas de trouver la variable l optimum (µ ou ωtronc), il esttoujours possible de choisir visuellement la régularisation idéale sur la courbe.

2.3 Calcul de la puissance déposée sur le limiteur de Tore Supra

Nous avons choisi de tester tout d’abord le calcul de puissance déposée proposé sur le composantextrayant la majorité de l’énergie du plasma : le limiteur pompé toroïdal (LPT). Nous décrirons toutd’abord dans ce paragraphe le réseau de refroidissement permettant d’extraire la puissance thermiquede ce composant. Nous présenterons ensuite les deux méthodes utilisées pour estimer la fonction detransfert de ce système. Le calcul inverse proposé sera enfin validé sur un cas test numérique avantd’être appliqué à l’analyse de données expérimentales.

2.3.1 Description du réseau de refroidissement du LPT et de son instrumentation

Le réseau de refroidissement alimentant les différents composants face au plasma de Tore Supraest hiérarchisé d’une manière bien précise. Pour le LPT, en partie basse de la machine, ce réseauest subdivisé en 12 secteurs de 30° chacun (cf. figure 2.7). Chaque secteur du LPT, composé de 48aiguilles, est équipé d’une instrumentation permettant le calcul de la puissance thermique extraite parl’eau le parcourant. Le plus petit système pouvant être étudié du point de vue des dépôts de chaleurpour ce composant est donc un ensemble de 48 aiguilles activement refroidies.

(a) Sous-entrées d’eau froide et d’eau chaude (b) Vue de dessous d’un secteur du LPT

Figure 2.7 – Vue d’un secteur du LPT démonté

L’agencement hydraulique de chacun de ces secteurs de 48 aiguilles est également particulier.Chacune des aiguilles d’un secteur de 30 est couplée en série avec sa voisine : l’eau entrant dansune aiguille N doit traverser l’aiguille voisine N + 1 avant de rejoindre le réseau. Un secteur de 30 est donc lui aussi subdivisé en 24 sous-groupes de deux aiguilles en série. Il possède 24 sous-entrées

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Page 79: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.3

d’eau froide et 24 sous-sorties d’eau chaude. Ces 24 sous-sorties d’eau chaude rejoignent au final uncollecteur situé sous chaque secteur du LPT (cf. figure 2.7).

Figure 2.8 – Schéma de l’agencement du réseau de refroidissement du LPT de Tore Supra

Les mesures calorimétriques (températures et débits) sont effectuées en sortie de la machine, surchacune des 12 canalisations alimentant les sous-ensembles de 30°. Chacun des douze collecteursd’eau chaude situés sous le limiteur est relié à la boucle mère de refroidissement, située à l’extérieurdu tokamak, par le biais de canaux fixés dans la structure porteuse du plancher de la machine. Lafigure 2.8 schématise l’agencement hydraulique des sorties d’eau chaude des différents secteurs ducomposant. Les mesures de température et débits effectuées y sont également localisées. Comme lemontre la figure 2.8, les douze sorties du LPT se rejoignent en deux étapes : tout d’abord, par queusot(additions des sorties A et B)3, ensuite, ces six sorties globales d’eau chaude se rassemblent en uneseule et même sortie commune pour tout le LPT.

Le réseau du LPT, comme les réseaux des autres CFP, est ensuite relié à une boucle de refroi-dissement secondaire située dans un bâtiment voisin au Tore. Toute la puissance thermique absorbéelors d’un choc plasma y est évacuée par le biais d’un échangeur thermique (dimensionné pour évacuerune puissance maximum de 9 MW [Chantant 05]) et de tours de refroidissement. Le débit total d’eau“froide” résultant (c’est-à-dire ramenée à une Tinitiale de 120C) est ensuite re-subdivisé avant unnouveau passage dans la machine.

3cf. Définition d’un queusot donnée au chapitre 1, §1.2.5

65

Page 80: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 2

2.3.2 Détermination de la réponse du système limiteur : calcul par éléments finiset approche expérimentale

2.3.2.1 Tentative de modélisation par éléments finis du comportement thermohydrau-lique du LPT

L’inversion des mesures calorimétriques nécessite au préalable d’identifier la fonction de transfertdu système. Pour identifier la réponse du limiteur, il nous faut soumettre le composant à unesollicitation définie en Pdeposee, paramètre qui justement constitue notre inconnue. Nous proposonsdans ce paragraphe de modéliser le comportement thermique du limiteur à l’aide d’un logiciel paréléments finis (ANSYS) afin d’appliquer à son entrée un échelon connu de puissance incidente.

La résolution du problème direct suppose de connaître : la géométrie du système, les propriétésthermophysiques mises en jeu, les conditions initiales et les conditions aux limites du problème,l’emplacement exact des mesures, le type de capteur utilisé et le temps de réponse de la chaîned’acquisition. Cette modélisation est donc complexe. Les paramètres pré-cités, caractérisant laréponse thermohydraulique du composant, doivent de plus être nécessairement invariants. Un seulchangement entraînerait l’invalidité de la réponse calculée numériquement devant être utilisée par lasuite pour inverser les mesures.

Un modèle par éléments finis représentant les échanges thermiques mis en jeu dans le réseau derefroidissement d’un secteur de 60 du LPT (soit 2× 48 aiguilles) a été créé sous ANSYS (cf. Annexe7) en 2005 [Carpentier 05]. La figure 2.9 illustre le résultat issu de ce modèle numérique où ont étéreproduites les conditions expérimentales d’un choc de l’année 2007 (afin de pouvoir comparer uneréponse simulée à une allure temporelle expérimentale en puissance Pextraite). Ce choc a été choisi enraison de la stabilité de ses conditions plasma (plateau de puissance injectée dans la machine, puissancerayonnée constante).

(a) Comparaison des courbes Pextraite (mesurée et simu-lée avec ANSYS) - Secteur de 60° du LPT

(b) Scénario expérimental du choc étudié

Figure 2.9 – Comparaison de réponses en Pextraite expérimentale (Secteur LPT-Q1) et simulée,choc 39880

66

Page 81: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.3

Les hypothèses et paramètres de la simulation réalisée sont les suivants :– Nous avons choisi de reproduire le comportement de deux secteurs de 30° du LPT, soit 96

aiguilles, correspondant au queusot 1 complet.– La forme spatiale de Pdeposee a été supposée uniforme sur la surface du LPT.– La puissance réellement déposée sur le composant constitue l’inconnue du problème, elle esttoutefois approchée pour les besoins du calcul direct en considérant :1. l’évolution temporelle de la puissance déposée sur le composant comme connue et

équivalente à celle de la puissance injectée dans la machine ; cette hypothèse est plau-sible puisque l’expérience reproduite correspond à un scénario plasma long (durée > 100s,fig. 2.9b) où le régime stationnaire est atteint et la puissance rayonnée est stable.

2. l’amplitude de la puissance déposée simulée sur le composant est déterminée grâce aubilan énergétique réalisé sur le secteur considéré (l’énergie extraite du module LPT-Q1 estégale à 9.96% de l’énergie totale injectée dans la machine d’après le bilan calorimétrique).

– Les valeurs de débit et de température d’entrée de l’eau dans le secteur considéré corres-pondent aux relevés expérimentaux présentés à la figure 2.1. Les variations de ces paramètresd’entrée étant très faibles au cours du choc, nous les avons considéré constants et égaux à leursvaleurs moyennes respectives dans la simulation (Te = 119°C, m = 0.4kg/s).

– Les propriétés thermophysiques (conductivité, masse volumique, etc.) de l’eau et des matériauxcomposant le LPT ont été maintenus constants (modèle linéaire). Les valeurs imposées dansla simulation correspondent aux propriétés thermiques choisies à une température de référencede 200°C pour les métaux et de 120°C pour l’eau (cf. tables présentées en Annexe 1).

Rappel. Nous ne cherchons pas encore ici à déterminer la fonction de transfert du système maisseulement à comparer le calcul direct réalisé sous ANSYS à l’allure expérimentale de puissanceextraite mesurée pour le choc considéré afin de valider le modèle.

Au vu de la figure 2.9a, nous constatons que la puissance extraite simulée a une dynamique plusrapide lors des phases transitoires que le relevé expérimental. La réponse thermohydraulique simuléeprésente une avance supérieure à 10 secondes lors de la montée en puissance. Le niveau de puissanceextraite atteint à l’état stationnaire est par contre bien respecté (ce dernier étant ajusté grâce au biland’énergie réalisé sur le secteur). Une étude détaillée des défauts du modèle numérique ANSYS a étémenée [Carpentier 05]. Les pistes suivantes ont été étudiées afin d’expliquer l’écart entre la réponsedu modèle numérique et la réponse expérimentale du composant : Non-linéarité. Le modèle utilisé ne prend pas en compte la non-linéarité des propriétés ther-

mophysiques des matériaux en fonction de la température. Cette hypothèse se justifie toutefois dansla gamme de températures étudiées. L’influence des paramètres thermophysiques sur la réponse enpuissance extraite du composant a donc été jugée négligeable. Erreur sur la dynamique du signal Pdeposee simulé. La dynamique de la puissance déposée sur

les composants est en réalité légèrement retardée comparée à celle de la puissance injectée par leschauffages, prise comme référence pour construire le signal d’entrée du système. Le temps de confi-nement des particules au sein du plasma est toutefois estimé inférieur à 100ms, cette incertitude estbien inférieure au retard observé en dynamique sur le modèle (supérieur à 10s). Répartition spatiale non-uniforme de puissance déposée à la surface du secteur du LPT. L’ex-

périence montre que la puissance plasma se répartit suivant une forme bien définie à la surface duplancher de la machine (ce point sera abordé plus en détail aux chapitres suivants). L’influence de laforme spatiale du flux imposé sur la réponse du modèle numérique n’a pas été jugée suffisante pourexpliquer à elle seule l’erreur en dynamique du modèle. Temps de réponse instrumental. Le temps de réponse de la chaîne d’acquisition du diagnostic

calorimétrie pourrait avoir une influence sur la dynamique de la réponse en Pextraite observée lors des

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Page 82: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 2

expériences. Une étude instrumentale nous a permis de mettre en évidence que le retard le plus consé-quent (<1s) est induit par l’utilisation nécessaire d’un conditionneur dans la chaîne de mesure. Leretard dû au temps de réponse des sondes Pt100 est quant à lui inférieur au pas de temps d’acquisition(250ms)4. Le temps de réponse de la chaîne de mesure ne peut donc pas expliquer à lui seul l’écartobservé entre la simulation et l’expérience. Erreur sur le coefficient d’échange convectif hc. La valeur du coefficient d’échange convectif hc

fixée pour la simulation (hc ∼=50 000 W/m2.K) a été surestimée5. Nous n’avons en effet pas prisen compte les pertes de charges dans le réseau pouvant provoquer un déséquilibre de la distributiondes vitesses dans les canaux de refroidissement. La diminution du débit (et donc de la vitesse del’eau dans les aiguilles du LPT) conduit à une valeur communément admise plus proche de 30 000W/m2.K ([Schlosser 93], [Boscary 98]). La figure 2.10 illustre les allures temporelles des puissancesPextraites simulees en sortie d’un queusot complet de LPT (60°) pour différentes valeurs de hc. L’écartobservé entre les puissances simulées pour un coefficient hc égal à 50 000 W/m2.K ou 30 000 W/m2.Kest minime (dynamique légèrement plus lente dans le cas d’un coefficient hc plus faible). Nous pou-vons constater que pour un coefficient d’échange convectif de l’ordre de 10 000 W/m2.K la dynamiquedu signal de sortie est par contre ralentie significativement. Toutefois, obtenir une si faible valeurd’échange convectif aux niveaux des aiguilles du LPT est peu probable compte tenu des conditionsexpérimentales fixées (cela supposerait notamment d’avoir une vitesse de l’eau dans les aiguilles infé-rieure à 1.5m/s). L’erreur sur le coefficient d’échange convectif ne suffit donc pas non plus à expliquerl’erreur observée en dynamique sur le modèle numérique.

Figure 2.10 – Comparaison des allures temporelles de Pextraite simulee lorsque hc varie : simulationsà hc=50 000, 30 000 et 10 000 W/m2.K

Hypothèses de modélisation. Les hypothèses simplificatrices faites sur la géométrie du compo-sant et la non modélisation des pertes de charges ou des pertes thermiques dans le réseau peuventégalement induire une erreur en dynamique. Maillage. Un maillage non adapté du modèle peut également induire une mauvaise convergence

des calculs thermiques et entraîner une erreur sur la dynamique globale calculée.

4Le temps de réponse des sondes Pt100 dépend directement du coefficient d’échange convectif hc dans les canalisations.Celui-ci étant très élevé, le temps de réponse des sondes est très rapide.

5Valeur calculée en considérant les propriétés thermophysiques de l’eau à une température de référence de 120C,pour une vitesse dans les aiguilles estimée à 9m/s (débit d’eau de 0.4kg/s pour un diamètre des canaux dans les aiguilles= 8 mm).

68

Page 83: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.3

Nous avons observé un manque d’inertie thermique flagrant au niveau du modèle. Les hypothèsesprécédemment citées ne semblent pas pouvoir entraîner, séparément, une erreur aussi importante quecelle observée sur la réponse numérique. L’addition de ces approximations peut par contre aggraverl’erreur globale commise lors de la modélisation. L’étude menée en 2005 a abouti à la conclusionqu’une erreur a été commise lors de la conception de la géométrie du système (notamment au niveaudu collecteur d’eau en sortie des aiguilles et du réseau de refroidissement aval). La méconnaissancedes véritables conditions expérimentales (pertes de charges, écoulements turbulents dans les canaux,pertes thermiques dans les réseaux) est également un handicap pour la création d’un modèle numériqueadapté. Il résulte que la modélisation par éléments finis réalisée présente une dynamique trop rapidecomparée à la réponse thermique réelle du limiteur. La modélisation numérique du composant n’adonc pas permis d’obtenir une solution satisfaisante. Une autre méthode a dû être envisagée afinde remonter à la véritable réponse indicielle du composant. La seconde solution proposée consiste àestimer la réponse du composant à partir de données expérimentales.

2.3.2.2 Détermination de la réponse indicielle depuis des données expérimentales

Face aux difficultés rencontrées pour modéliser numériquement et de manière fiable le comporte-ment thermohydraulique du limiteur de Tore Supra (calcul par éléments finis), une autre méthode adû être envisagée. Il est proposé ici de déterminer la réponse du composant en utilisant directementles données expérimentales. Nous cherchons ici à caractériser la réponse du composant dans sonensemble (360°) et non celle d’un secteur en particulier.

Afin de déterminer la réponse indicielle du limiteur, nous considérons plusieurs chocs plasma où lescénario est supposé stable6, où la puissance injectée correspond à un créneau assez long pour obtenirun régime stationnaire7 et où l’initialisation ou la coupure du plasma est très nette (cf. exemple de lafigure 2.11). Ces critères respectés, il est possible de considérer la puissance déposée sur le composantsimilaire à une sollicitation de type échelon à la montée ou à la coupure du plasma. Les valeurs depuissance Pextraite mesurées, correspondant à une des deux phases non-stationnaires (début et fin ducréneau de puissance), peuvent alors être assimilées à une réponse indicielle du système.

Nous avons choisi de considérer la phase descendante et non montante en Pextraite pour calculer lafonction φ(t). En conditions expérimentales, l’amorçage du plasma débute en effet par une phase dechauffage ohmique à faible puissance avant application d’un créneau de chauffage additionnel, rendantplus tardive l’atteinte du régime stationnaire. Nous n’obtenons donc pas une sollicitation nette enpuissance déposée en début de choc. La coupure des antennes des chauffages (FCI, hybride) est quantà elle immédiate (quelques millisecondes) en fin de choc. Nous avons également choisi d’étudier laréponse du limiteur dans le cas de disruptions (cf. définition donnée ci-après). Etudier ce genre dechocs permet en effet d’obtenir là aussi un échelon descendant net de puissance, dans le cas toutefoisoù la disruption n’a pas provoqué une perturbation des mesures, dues au mouvement de l’enceinte dela machine. Les chocs utilisés par la suite présentent des mesures stables.

6Scénarios où aucune perturbation importante du plasma n’a été observée.7Pour le LPT, l’atteinte du régime stationnaire pour les signaux en Pextraite calculés est estimée supérieure à 25s.

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Chapitre 2

Figure 2.11 – Exemple d’un scénario expérimental choisi pour déterminer Φ(t)

Définition. Une disruption correspond à la perte totale du confinement du plasma, généralementcausé par des instabilités MHD (§1.1.6) perturbant l’agencement de la configuration magnétique. Ilrésulte de ces phénomènes une extinction prématurée et brutale de la décharge (quelques millisecondes)par relaxation sur les parois de l’énergie totale contenue dans le plasma. Une disruption peut provoquerl’endommagement de l’enceinte en raison des contraintes thermiques et mécaniques (mouvement dela machine) subies lors de la relaxation de plasmas puissants.

Plusieurs chocs avec des scénarios plasma stationnaires ont été utilisés pour calculer une réponsemoyenne du composant. La figure 2.12a illustre la distribution de réponses indicielles obtenues enconsidérant la décroissance de Pextraite pour une série de six chocs. Les réponses, montrées ici enphase montante, ont été normalisées telles que :

φmontante(i) = φdesc(1)− φdesc(i)φdesc(1)− φdesc(∞) (2.29)

Les chocs utilisés correspondent à différents scénarios plasma : combinaison de chauffage hybrideseul ou hybride plus FCI, chocs avec ou sans disruption. Nous pouvons observer une distributiondes φ(t) expérimentales calculées autour d’une valeur moyenne (écart-type de l’ordre de 0.01ua). Laprésence de bruit sur les données perturbe fortement le calcul des ∆φ (termes de la matrice Mcalo).Ces fluctuations sont clairement visibles à la figure 2.12b sur les allures temporelles des réponsesimpulsionnelles h(t), correspondant aux dérivées respectives des fonctions φ(t).

70

Page 85: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.3

(a) φLPT (t) (b) hLPT (t)

Figure 2.12 – Réponses indicielles et impulsionnelles expérimentales non filtrées obtenues pourle composant LPT total (360°)

L’essentiel de l’information sur l’allure temporelle des fonctions φ étant contenu dans les premièresfréquences du signal, un filtrage a été réalisé sur les données précédentes afin d’éliminer les pertur-bations observées (oscillations ne représentant que du bruit). La fréquence de coupure (ici 0.12Hz) aété choisie en considérant le temps moyen de réponse à 63% des différentes courbes φLPT (estimé àenviron 10.7s) auquel a été retranché un retard pur d’environ 2s, durée pendant laquelle ces fonctionsrestent nulles. Le recours à ce filtrage passe-bas nous a permis d’obtenir la réponse φ(t) moyenneprésentée à la figure 2.13a. La réponse indicielle finale obtenue pour le LPT correspond à la moyennedes 6 réponses expérimentales filtrées considérées. Le temps de réponse du composant à 95% a ainsiété estimé égal à environ 24s.

(a) φLPT (t) (b) hLPT (t)

Figure 2.13 – Réponses indicielles et impulsionnelles expérimentales moyennes du composantLPT total (comparaison avant et après filtrage)

71

Page 86: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 2

NB. La cause du mauvais conditionnement de la matrice Mcalo est mis en évidence à la figure 2.14.Les premiers termes de la réponse indicielle φ(t) du système limiteur estimée sont en effet nuls (éloi-gnement des mesures). Ce retard pur de quelques secondes induit que les premiers termes ∆φ de lamatrice Mcalo vont eux aussi tendre vers 0, rendant cette dernière quasi singulière et non inversible.

Figure 2.14 – Visualisation des premiers termes de la matrice Mcalo

L’estimation de la réponse globale du système limiteur que nous avons effectué peut être discutée.Les principaux facteurs limitant la précision du calcul de la fonction φLPT (t) sont :

– la présence de bruit sur les données, obligeant à un filtrage de la réponse estimée,– la synchronisation de l’échelon incident sur le composant (de l’ordre du temps de confinementde la chaleur dans la machine : tconf ∼= 0.1s),

– la dynamique “nette” des échelons expérimentaux considérés.

Il résulte de ces trois facteurs limitant une approximation la réponse du composant calculée (valeurmoyenne). Lors de la résolution du problème inverse, l’erreur portera donc à la fois sur la mesure et lemodèle Mcalo (nous ignorerons par la suite l’erreur commise sur le modèle). La méthode expérimentaleprésentée reste toutefois la seule permettant d’obtenir rapidement et de manière assez précise uneréponse du composant. Les termes de la matrice Mcalo étant désormais connus, nous allons maintenantnous consacrer à la résolution du problème inverse en validant préalablement la méthode proposée surun cas test.

2.3.3 Validation du calcul inverse sur un cas test simulé

Avant d’appliquer le calcul inverse proposé sur des données expérimentales, ce dernier a étépréalablement testé afin d’apprécier l’erreur induite par la régularisation et d’illustrer le caractèremal posé du problème étudié.

Pour simuler les données utilisées dans cette section, nous n’avons d’autre choix que de résoudrele problème direct en effectuant le produit de convolution d’une sollicitation choisie en Pdeposee avecla matrice Mcalo définissant le comportement thermohydraulique du composant (identifiée expéri-mentalement, §2.3.2.2). En utilisant le même modèle à la fois pour construire les données simulées etensuite les inverser, nous réalisons un inverse crime [Kaipio 05]. Afin de se rapprocher des conditionsexpérimentales, un bruit gaussien centré est toutefois additionné à la courbe de Pextraite obtenue parcalcul direct (nous n’avons pas utilisé le modèle numérique ANSYS pour produire les données simuléescompte-tenu des résultats non satisfaisants obtenus au §2.3.2.1).

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Page 87: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.3

Le cas étudié dans cette section est illustré sur la figure 2.15 suivante. Il correspond à trois paliersde puissance déposée de 10s compris entre 0.5 et 6MW . L’amplitude moyenne du bruit généralementobservé sur les mesures expérimentales obtenues en sortie du composant complet8 (360°) est de l’ordrede 7 à 8kW (cf. figure 2.5). Cet écart-type représente en moyenne 0.15% du signal en Pextraite atteinten stationnaire dans le cas de chocs à forte puissance (Pchauffage ∼= 10MW avec 60% de l’énergieextraite par le LPT). Dans le cas de chocs à plus faibles puissances (pour une puissance hybrideinjectée d’environ 2MW ), ce ratio peut atteindre 0.8%. Dans le cas de chocs avec une puissanceplasma inférieure à 1MW (chocs ohmiques), le bruit peut alors représenter 1 à 2% du signal. Nousavons choisi de travailler ici avec un écart-type pour les simulations de l’ordre de 10kW , représentantrespectivement 0.2%, 0.4% et 2.8% du signal en puissance extraite correspondant au premier, secondet troisième plateau simulé.

Figure 2.15 – Obtention d’un signal Pextraite simulé par calcul direct

2.3.3.1 Comparaison des deux méthodes de régularisation proposée

Les courbes en L relatives aux deux procédures de calcul inverse proposées au §2.2.3.2 sontreprésentées à la figure 2.16a. Leur tracé a permis le choix d’un coefficient de régularisation optimumpour reconstruire l’allure temporelle de Pdeposee à partir de la puissance de sortie bruitée.

Les courbes en L correspondant à la méthode SVD et à la méthode Tikhonov d’ordre 0 doiventêtre analogues [Hansen 98]. Nous pouvons constater sur la figure 2.16a que les deux courbes ontune allure identique, elles sont superposées au niveau de leurs points d’inflexion. Les écarts observéspour les valeurs élevées de résidus (zone d’amortissement) et pour la zone correspondant aux solutionsinstables (partie verticale) sont dues à des problèmes de résolution numérique (nous pouvons égalementnoter que la procédure de Tikhonov est continue sur µ alors que la SVD est une méthode discrèteintervenant pas à pas sur chacune des valeurs singulières du système). Les courbes représentées ontété tracées respectivement pour 50 valeurs de µ suivant une progression géométrique dans l’intervalle[1.10−4 − 0.35] dans le cas de Tikhonov et pour 200 nombres de conditionnement compris entre 1 et3515 dans le cas de la SVD.

8Rappel : le bruit de mesure est étudié pendant des phases hors choc sur des signaux en Pextraite de moyenne nulle.

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Chapitre 2

(a) Courbes en L (b) Résultats obtenus depuis une régularisation par pé-nalisation (norme des résidus =210 kW) et par SVD(norme des résidus =195 kW)

Figure 2.16 – Comparaison des deux méthodes de régularisation (Tikhonov et SVD) sur un castest simulé

Les deux méthodes utilisées permettent de reconstruire l’allure initiale du paramètre d’entréePdeposee imposé dans le calcul direct à partir d’une courbe en Pextraite simulée bruitée. L’écart-type durésidu sur les deux solutions est de l’ordre de 10kW . Le principe de divergence (en anglais discrepancyprinciple) ([O.M Alifanov 75], [Morozov 84], [Alifanov 94]) indique qu’une technique de régularisationitérative doit être stoppée lorsque la norme de ces résidus et de l’ordre de grandeur du bruit de mesure,soit :

‖Mcalo × Pdeposee − Pextraite‖ ≈√n× σ (2.30)

où n est le nombre de points de mesure et σ l’écart-type caractérisant le bruit de mesure.

Cette règle traduit le fait qu’il est recommandé d’accepter un certain seuil pour le résidu afin dene pas chercher à reconstruire une information qui n’est pas celle du signal d’origine mais du bruit.La position des points d’inflexion des deux courbes en L est en accord avec le critère d’Alifanov(cf. figure 2.16a). Pour le cas test simulé considéré, la norme des résidus sur la solution doit êtresupérieure à 200kW (n ∼= 400). Les résidus obtenus (à savoir, 195kW pour la régularisation par SVDet 210kW pour une régularisation par pénalisation) respectent globalement ce critère.

Nous avons choisi pour la suite de l’étude de travailler avec la méthode de régularisation parpénalisation de Tikhonov, notamment en raison de temps de calculs plus courts. L’utilisation de laméthode SVD nécessite en effet la décomposition en valeurs singulières de la matrice carrée Mcalodont la dimension (n, n), dépendant de la durée des chocs traités, peut parfois rendre la durée ducalcul significative.

Les coefficients de régularisation et nombre de conditionnement indiqués sur les courbes 2.16a ontété choisis manuellement. Ils se situent volontairement sur le plateau des courbes correspondant à

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Page 89: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.3

une solution légèrement amortie. La méthode consistant à calculer le rayon de courbure de chacundes tracés (§2.2.3.2) n’a pas donné de résultat correct pour le cas test étudié. La figure 2.17 illustrele calcul de courbure réalisé pour la régularisation de Tikhonov. Le maximum de courbure atteintsur la figure 2.17a indique la position du point d’inflexion de la courbe en L de Tikhonov. Cettecourbure maximum est obtenue pour un coefficient µ = 0.005. Ce point se situe sur le coude de lacourbe, proche du domaine instable (partie verticale du tracé). La norme des résidus de la solutioncorrespondant à cette régularisation est égale à 177 kW. Le coefficient indiqué par la méthode du rayonde courbure se situe donc dans un domaine où la solution calculée cherche à reconstruire le bruit demesure (critère d’Alifanov). Nous pouvons observer que les transitoires sont mieux reconstruits dansle cas d’un coefficient µ égal à 0.005. Toutefois, cette solution est légèrement moins stable que celleobtenue avec le coefficient de régularisation µ = 0.028. La présence d’artefacts de puissance pendantles plateaux stationnaires est gênante (lors l’exploitation des données expérimentales nous chercheronsen effet à reconstruire des allures de puissances les plus stables possible lors des plateaux, même sicela doit induire une perte de précision du calcul lors des phases transitoires).

(a) Evolution de l’incurvation k de la courbe de Ti-khonov en fonction de µ

(b) Comparaison des Pdeposees calculées et position des co-efficients de régularisation sur la courbe en L

Figure 2.17 – Résultat obtenu à partir du coefficient µ calculé depuis l’étude de l’incurvation dela courbe en L (Tikhonov) - Comparaison avec le résultat obtenu pour le µopt choisi

2.3.3.2 Influence du coefficient de régularisation choisi

La figure 2.18 illustre l’importance du choix du coefficient de régularisation µ. Les trois résultatsprésentés correspondent à :

– une solution Pdeposee faiblement régularisée et donc instable (µ = 3.3e− 3),– une solution fortement régularisée et donc amortie (µ = 0.214)– une solution où le coefficient de régularisation a été choisi sur le coude de la courbe en L(µ = 0.028), solution dite “optimum”.

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Chapitre 2

Figure 2.18 – Influence du coefficient de régularisation choisi sur la solution en Pdeposee

Plus le coefficient de régularisation choisi est fort, plus les perturbations présentes aux hautesfréquences sont atténuées, au risque de perdre l’information physique contenue dans le vecteurd’observation. Nous pouvons notamment remarquer cet effet pour les phases transitoires du signal(échelons de montée en puissance aux temps t= 5, 15 et 25s). Pour ce type de configuration, le résidusur la solution calculée est important et la puissance calculée paraît amortie.

A l’inverse, le choix d’un coefficient de régularisation faible implique que la majorité de l’informa-tion présente dans le signal de sortie en Pextraite doit être conservée (le résidu sera donc faible), maisau risque de voir apparaître des oscillations non physiques sur la solution calculée. Pour un coefficientde régularisation trop faible, le traitement appliqué cherchera à modéliser le bruit de mesure, cequi peut rendre la solution totalement instable comme dans le cas présenté ici. Les nombreusesoscillations présentes sur la solution illustre le caractère mal posé du problème.

Un coefficient de régularisation de 0.028 permet d’obtenir une solution stable pour laquelle lesvariations des données d’entrée n’entraînent pas d’oscillations sur la solution. La courbe présentée àla figure 2.18 est proche du signal d’entrée simulé au départ.

2.3.3.3 Influence du bruit de mesure sur l’efficacité de la régularisation

La figure 2.19 illustre la gêne occasionnée par la présence d’un bruit trop important sur les mesures.Nous traitons ici le même cas test (triple palier de Pdeposee), seul change la valeur de l’écart-type imposépour l’ajout d’un bruit additif fictif sur les données en Pextraite. Trois mesures bruitées ont été simuléespour des écarts-types égaux à 1.1, 11 et 100 kW (figure 2.19), représentant respectivement 0.02%, 0.2%et 2% de la valeur maximum de Pextraite.

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Page 91: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.3

Figure 2.19 – Simulation de mesures de calorimétrie bruitées : Pextraite = Pextraite+ ε (σ = 1.1 kW,σ = 11 kW, σ = 100 kW)

L’équation 2.30 indique que la valeur du résidu sur la solution est directement liée à l’écart-typedu bruit observé. Cette dépendance se traduit par le décalage des courbes en L vers la droite dugraphique plus le bruit simulé est important.

La première courbe en L illustrée à la figure 2.20a correspond au bruit de mesure le plus faible. Cedernier étant quasi nul, nous ne voyons pas apparaître la partie verticale de la courbe correspondantau domaine instable. Le choix d’un coefficient de régularisation très faible (de l’ordre de 1.10−3)permet d’obtenir une solution extrêmement proche de la puissance initiale imposée dans le calculdirect (le choix d’un coefficient de régularisation nul permet également de retrouver les 3 paliers depuissance simulés mais les solutions sont alors très légèrement perturbées).

A l’inverse, plus les données sont perturbées, plus l’inversion des mesures sera rendue difficile. Laprésence d’un bruit de mesure important réduit la portion de la courbe correspondant à la transitionentre solution stable et divergente (et donc le nombre de valeur de µ permettant d’obtenir une so-lution physiquement acceptable). Choisir un coefficient de régularisation est alors délicat puisqu’unefaible variation de la valeur de µ peut entraîner l’obtention d’une solution parfaitement instable, oucomplètement amortie (comme la courbe calculée à la figure 2.20). La régularisation ayant pour effetd’atténuer les oscillations aux hautes fréquences, plus le rapport signal sur bruit est faible, plus il estdifficile de différencier l’information liées aux phénomènes de dynamique rapide (comme les montéesen puissance déposée dans le cas test simulé). L’allure temporelle de la solution optimale reconstruitedans ce cas de figure est moins précise. Ce cas test où le bruit atteint 2% du signal mesuré montreque l’application de la méthode inverse proposée sur des chocs ohmiques (de faible puissance) ne serapas pertinente. La méthode de régularisation proposée, en présence d’un bruit dont l’écart-type estde l’ordre de grandeur de 0.2 à 1% du signal mesuré permet en revanche une estimation fiable de lasolution Pdeposee. La procédure de calcul inverse est validée, elle peut maintenant être appliquée à desdonnées expérimentales.

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Chapitre 2

(a) Courbes en L et valeur de µ choisies (b) Pdeposees calculées pour différentes intensités du bruitde mesure

Figure 2.20 – Conséquence d’un bruit trop important lors de l’inversion des mesures

2.3.4 Résultats obtenus depuis l’analyse de données expérimentales

L’application du calcul inverse à des données expérimentales est illustrée ici pour deux chocs del’année 2005 et 2006 (d’autres résultats expérimentaux issus des mesures effectuées pour le LPT etpour les autres CFP de Tore Supra seront commentés aux paragraphes suivants).

Choc 35960

Le choc 35960 est une décharge plasma de 30 secondes où la puissance injectée correspond àune combinaison de chauffage FCI (plateau) et hybride (fluctuations de type “château fort”, cf.figure 2.21a). La fraction rayonnée dans la machine (frad, chapitre 1, §1.2.3) est restée constante toutau long du choc. Le signal mesuré que nous allons étudier correspond à la puissance thermique totaleextraite des 12 secteurs de 30° du limiteur.

Le calcul inverse nous a permis de reconstruire l’allure temporelle de puissance Pdeposee présentéeà la figure 2.21b pour ce choc. Ce résultat est très satisfaisant, le traitement des données a permisde mettre en évidence des pics de puissance successifs, non visibles sur l’observation en Pextraite. Lasolution obtenue présente de fortes concordances avec l’allure de la puissance injectée dans le plasma.Alors que le maximum atteint sur le signal en Pextraite était de 3.05MW (à t=61s), le calcul inverse apermis d’estimer la valeur maximale de puissance réellement déposée sur le composant lors du choc,estimée ici à 3.52MW (à t=46s).

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Page 93: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.3

(a) Scénario expérimental (b) Pextraite en sortie du LPT et Pdeposee (µ =0.053, résidu=15.8kW )

Figure 2.21 – Calcul inverse de puissance déposée sur le LPT pour le choc 35960

(a) Courbe en L et valeurs de µ choisies (b) Pdeposee obtenue pour µ = 4.10−3 (résidu=12.38kW )

(c) Pdeposee obtenue pour µ = 0.053 (résidu= 15.8kW ) (d) Pdeposee obtenue pour µ = 0.284 (résidu= 87.3kW )

Figure 2.22 – Influence du coefficient de régularisation choisi pour l’inversion des mesures decalorimétrie effectuées en sortie du LPT (choc 35960, 2005)

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Page 94: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 2

Le choix du coefficient de régularisation optimum a été effectué grâce au tracé de la courbe enL correspondant à cette expérience (figure 2.22a). De la même manière que pour le cas test simulé,le calcul de cette courbe a été réalisé pour une cinquantaine de valeurs de µ suivant une progressiongéométrique dans l’intervalle [1.10−4 − 0.35]. Ce tracé s’est avéré suffisant pour tracer une allurecomplète et assez précise de la courbe en L dans la zone de transition amortie-instable où est choisile coefficient µ. Un coefficient µ égal à 0.053 nous a permis de reconstruire une solution physiqueacceptable avec une erreur bornée en accord avec le bruit observé sur les mesures (critère d’Alifanov).La figure 2.22 nous permet de constater que le choix d’un coefficient µ inapproprié peut conduire àdes solutions physiques non pertinentes pour ce choc.

Choc 37725

Le choc 37725 correspond à une décharge plasma de 50 secondes alimentée par chauffage hybrideet chauffage ohmique (figure 2.23a). La puissance rayonnée par le plasma au cours de cette expériencen’est pas constante, ceci entraîne une variation de la puissance conduite vers les parois (chapitre 1,§1.2.3) telle que : Pcond = Ptot − Prad (tracée en violet sur le graphique).

L’allure temporelle de puissance déposée sur le limiteur n’est ici pas corrélée à la dynamiquedu signal Pchauffage. Le piquage de puissance sur la solution Pdeposee calculée au début du chocne représente pas un artefact numérique liée à une déconvolution non adaptée du signal Pextraite.L’évolution observée est corrélée avec la variation de puissance conduite Pcond dans la machine. Lapuissance incidente maximale sur le LPT atteint 1.4MW à l’application de la puissance hybride, contreun niveau moyen de 0.65MW pendant la phase stationnaire du choc. Ceci représente une augmentationdu dépôt de chaleur sur le composant d’un facteur 2.5 à l’amorçage du plasma. Cette valeur correspondau facteur multiplicatif observé entre le pic de puissance conduite apparaissant à l’application de lapuissance hybride (Pcond = 1.7MW à t ∼= 6 s) et la valeur asymptotique atteinte en régime stationnaire(Pcond = 0.7MW ). Nous retrouvons ici le résultat mis en évidence par le bilan d’énergie effectué audébut de ce chapitre (§2.1) : la puissance déposée sur le limiteur est liée à l’évolution de puissanceconduite Pcond (et donc de Prad) dans la machine.

(a) Scénario expérimental (b) Pextraite en sortie du LPT et Pdeposee (µ = 0.018,∑residu = 0.22 MW , norme des résidus=8.5kW )

Figure 2.23 – Calcul inverse de puissance déposée sur le LPT pour le choc 37725

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Page 95: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.4

Ce dernier exemple nous a permis d’illustrer la pertinence du calcul inverse proposé afin de remonterà la dynamique réel de dépôt de chaleur sur le limiteur. L’allure temporelle de puissance incidente surle composant peut en effet ne pas être directement liée à l’évolution temporelle de puissance injectéedans le plasma par les systèmes de chauffage. Certains phénomènes physiques (comme ici la variationde puissance rayonnée par le plasma) induisent une variation ponctuelle du dépôt de chaleur sur leplancher de la machine (très peu ou non visible sur les signaux en Pextraite).

De même que pour le LPT, les évolutions temporelles de puissances incidentes sur les autrescomposants de la machine sont actuellement inconnues. Ces dernières peuvent également présenterune dynamique particulière, non corrélée avec l’évolution de puissance injectée dans la machine. Nousproposons d’extrapoler la méthode inverse développée à l’ensemble des CFP du tokamak.

2.4 Extrapolation de la méthode inverse aux autres CFP de ToreSupra

Au vu des résultats satisfaisants obtenus pour le limiteur de Tore Supra (permettant uneestimation jugée fiable des niveaux de puissance déposée sur ce composant), nous avons extrapolé laméthode inverse employée aux autres CFP de la machine.

La réponse caractérisant le comportement thermohydraulique de chaque composant a été déter-minée par le biais de la méthode expérimentale proposée au §2.3.2.2. Cette démarche a été préférée àune modélisation par éléments finis de chaque composant, compte-tenu de sa rapidité et des difficultésrencontrées pour simuler numériquement le comportement thermohydraulique du LPT.

Les puissances extraites des autres CFP activement refroidis sont calculées de la même manièreque pour le LPT, soit :

Pextraite = ˙m(t) ∗ ρ ∗ Cp ∗ (Ts(t)− Te(t− τtransit))

L’agencement du réseau de refroidissement et l’emplacement des mesures de m, Ts et Te diffèrenten revanche pour chaque composant. Nous verrons qu’il en résulte un niveau de difficulté variablesuivant le CFP étudié, concernant à la fois l’estimation de la réponse φ(t) et l’obtention d’une solutionpar calcul inverse.

2.4.1 Calcul des réponses indicielles expérimentales φ(t)

Les composants face au plasma constituant la première paroi de Tore Supra ont des géométriesvariées. Leur maintien en température est assuré par des réseaux de refroidissement dont les carac-téristiques sont également très différentes : débits imposés plus ou moins importants, agencementsimple ou très complexe des canalisations, mesures de température en sortie des composants plus oumoins éloignées.

Comme nous l’avons mentionné au §2.3.2.2b, déterminer la réponse indicielle d’un composant parle biais de données expérimentales implique de considérer des chocs où le scénario plasma est stable,où les signaux en Pextraite observés ont atteint un régime stationnaire et où la puissance moyennedéposée sur les CFP à la coupure du plasma équivaut à la forme d’un échelon descendant.

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Page 96: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 2

Les CFP activement refroidis pour lesquels l’estimation d’une réponse indicielle expérimentales’est avérée impossible sont le grill du coupleur C3 (chapitre 1, §1.2.1.3) et les éléments de protectiondes antennes FCE (mesures trop perturbées). La non prise en compte de la puissance déposée sur cescomposants pour établir des bilans dans la machine n’est cependant pas pénalisante puisque le niveaud’énergie extraite, et donc reçue par ces derniers, est faible (comprise entre 1 et 5% de l’énergie totaleinjectée dans le plasma suivant le scénario expérimental).

Les réponses indicielles moyennes obtenues pour les autres CFP ont été filtrées au moyen de lamême méthode présentée au §2.3.2.2 (filtre passe-bas). Le nombre de chocs ayant permis l’estimationdes différentes réponses φ(t) varie. Sélectionner des chocs répondant aux critères cités précédemmentest parfois difficile, notamment pour les composants semi-inertiels, tels que le LPA ou les Anneaux deGarde (dont le refroidissement est beaucoup plus lent compte-tenu des faibles débits d’eau circulantdans ces CFP).

La méthode expérimentale proposée a tout de même permis d’estimer une réponse indiciellemoyenne de chaque composant présentés au tableau 2.2. Ces fonctions φ(t) sont très variables, commele montre les exemples obtenus à la figure 2.24 et les temps de réponse à 95% des réponses indiciellescalculées.

CFP Tps de réponse (τ95%) Principales caractéritiques - ParticularitésLPT 24s Géométrie et agencement du réseau hydraulique com-

plexes ; Mesures éloignéesPEI 25s Ensemble de 60 panneaux ; Géométrie et agencement du

réseau hydraulique complexes ; Mesures plus ou moinséloignées

Prot. Antennes 12 - 30s Géométries variables suivant la protection considérée ;Mesures éloignées

Prot. Coupleurs 15 - 20s Agencement du réseau hydraulique complexe ; Mesureséloignées ; Coupleur C3 : trois éléments de protectionsdissociés (2 protections latérales et un réseau de refroi-dissement équipant son grill) ; Coupleur C2 : un seulensemble de canalisations continu assure le maintien entempérature du composant

Prot. Ripple ≤ 8s 12 protections au total ; Géométrie simple ; Mesuresproches mais bruitées

LPA ≥ 100s CFP semi-inertiel : très faible débit circulant dans sescanaux de refroidissement (de l’ordre de 2 m3/h contreenviron 35 m3/h pour un seul secteur de 30° du LPT) ;Mesures éloignées

AG ≈ 93s Ensemble de 12 panneaux ; CFP semi-inertiels (débitcirculant dans un panneau de l’ordre de 5 m3/h) ; Me-sures éloignées

Tableau 2.2 – Temps de réponse et principales caractéristiques des CFP activement refroidis deTore Supra

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Page 97: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.4

Figure 2.24 – Comparaison des réponses expérimentales φ(t) obtenues pour trois CFP : Protec-tions Ripple, Protection latérale droite de l’antenne A1, LPT

Chaque élément de protection des systèmes de chauffage (protections latérales droites et gauches,écrans ou grills) ont leur propre comportement thermique, cela explique la disparité des temps deréponse obtenus (entre 12 et 25s).

Un CFP peut être composé de plusieurs sous-ensembles. C’est le cas notamment des protectionsripple (au nombre de 12), des 60 panneaux PEI, ou des différents anneaux de garde (AG). Les tempsde réponse indiqués dans le tableau correspondent à la réponse globale de chacun de ces systèmesCFP. Nous avons considéré les signaux en puissance extraite totale pour chacun de ces composants(obtenus sur la canalisation de jonction de leurs réseaux respectifs).

Dans le cas du LPT, pour une étude plus fine des dépôts de chaleur par secteur (cf. chapitre 3pour le secteur Q5), les réponses individuelles des différents secteurs de 60° ont été estimées. Leurtemps de réponse est similaire.

Les panneaux PEI assurent divers rôles et sont soumis à des flux de chaleur d’amplitudes trèsvariées. Les réseaux assurant leur maintien en température sont également plus ou moins complexes etla localisation des mesures diffère pour chacun d’eux. Dans le cas d’une étude cherchant à caractériserprécisément les puissances déposées sur les différents PEI, le calcul d’une réponse indicielle distinctepour chaque type de panneaux (jonctions, fenêtres, etc.) sera préconisé. Dans le cas de l’étude d’unbilan global des puissances reçues pour chaque CFP de Tore Supra, il a été choisi de ne calculerqu’une réponse globale définissant l’ensemble du système PEI.

Les réponses caractérisant les CFP semi-inertiels (LPA et AG) sont approximatives. Il est eneffet difficile pour ces composants d’isoler des relevés de puissance extraite présentant un plateaustationnaire, critère nécessaire pour l’estimation de φ(t) à partir de la coupure en puissance. Uneallure moyenne de leurs réponses indicielles respectives a tout de même été estimée (compte-tenu desfaibles niveaux de chaleur reçus sur ces composants, cette approximation est jugée satisfaisante pourétablir de premiers bilans de puissance).

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Page 98: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 2

Rappelons qu’une fois calculée, la réponse des différents composants ne variera pas. Les consignes endébit et température d’entrée de l’eau sont fixées et restent inchangées d’une campagne expérimentaleà l’autre. Cette estimation des réponses caractérisant le comportement thermohydraulique des CFP vamaintenant nous permettre de calculer les niveaux de puissance déposée sur chacun de ces éléments.

2.4.2 Calcul des puissances déposées sur l’ensemble des CFP de Tore Supra (don-nées expérimentales)

La figure 2.25 illustre une estimation des puissances Pdeposee (courbes vertes) réalisée pour chaquetype de CFP, à partir des relevés de chaque Pextraite (en bleu). Le choc étudié (35541, octobre 2005)correspond à une combinaison de chauffage hybride avec addition d’un créneau court de puissance FCI.

Le calcul inverse effectué permet de connaître les niveaux maximums de puissances déposées surchaque composant au cours du choc. Ainsi, dans le cas du limiteur (figure b), alors que le maximumdu signal Pextraite vaut 1.76MW à t=68s, le pic de puissance déposée reconstruit est quant à lui égalà 2.29MW et est atteint à t=60s (une atténuation de puissance de 23% en sortie du composant estdonc observée pour ce composant pour un retard sur l’information de 8s). L’allure générale de lacourbe en Pdeposee calculée pour le limiteur est cohérente avec l’allure de la puissance totale injectéeau cours du choc.

De même, les évolutions temporelles de puissances déposées pour les protections de l’antenneA3 et du coupleur C3 (figures g et h) présentent également un pic de puissance proche de t=60s,ce qui est cohérent avec l’application de la puissance FCI.

La figure 2.25 met également en évidence une différence notable de dynamique entre signaux decalorimétrie et signaux en Pdeposee pour les composants semi-inertiels. Comme nous pouvions nousy attendre, l’information sur la puissance déposée est fortement intégrée en sortie de ces CFP. Lecalcul inverse effectué peut parfois présenter comme inconvénient de reconstruire une informationnon pertinente comme des bouchons d’eau chaude en fin de choc. Le second pic de puissance observépar exemple pour le LPA (figure 2.25e) est typiquement induit par une faible oscillation apparue surla puissance extraite après choc (et due à une mauvaise régulation de la température d’entrée Te).Comme nous l’avons déjà mentionné, la puissance déposée sur ces composants est faible au regardd’autres CFP tels que le LPT ou les PEI.

L’utilisation d’un coefficient de régularisation µ = 0.13 a permis de reconstruire l’allure généralede la puissance moyenne déposée sur l’ensemble des composants PEI. Nous observons également iciun pic de puissance égal à 0.79MW proche du temps t=60s, soit une avance de quasiment 4s sur lepic signalé par le signal de sortie en Pextraite (dont le maximum atteignait quant à lui 0.66MW , soitune atténuation de 17% sur l’information en puissance réellement déposée dans la machine à l’instantt).

Les signaux issus des protections Ripple sont fortement bruités mais dans leur cas les mesuressont proches et la géométrie du composant est bien plus simple. Ainsi nous pouvons observer que lesallures en Pextraite et Pdeposee sont finalement assez similaires pour ce composant.

Cet exemple d’analyse mené pour le choc 35541 illustre la capacité du calcul inverse réalisé àextraire des informations non visibles initialement sur les signaux de sortie en Pextraite. Nous présentonsdans le paragraphe suivant deux exemples de bilan de puissances totales calculés dans la machine grâceau calcul développé.

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Page 99: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 2.4

(a) Scénario du choc 35541 (2005) (b) LPT

(c) PEI (d) AG

(e) LPA (f) Ripple

(g) Ecran, Antenne A3 (h) Protection latérale droite, Coupleur C3

Figure 2.25 – Calcul des Pdeposees sur les CFP de Tore Supra, choc 35541 (les coefficients derégularisation utilisés sont indiqués sur les courbes)

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Page 100: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 2

2.5 Bilans de puissances déposées dans la machine : deux exemples

L’estimation des niveaux de puissances déposées sur les différents composants au cours d’unedécharge plasma permet d’établir un nouveau bilan de puissance dans la machine, tel que cette fois :

Pinjectees(chauffage)− Pdeposees(CFP ) = b(MW ) (2.31)

ou, sous forme de bilan d’énergie (obtenu en intégrant les signaux calculés sur toute la durée d’unchoc) :

Einjectee(chauffage)− Edeposee(CFP ) = b(MJ) (2.32)

Le rapport b est l’écart observé entre les puissances de chauffage injectées dans le plasma et lespuissances déposées calculées sur les composants (bouclage exprimé relatif : %). La valeur du nouveaubouclage b estimé traduira à la fois les erreurs de mesures enthalpiques (comprise entre 1 et 5% selonla référence du §2.1) et l’erreur induite par l’inversion des signaux Pextraite (normes des résidus sur lessolutions Pdeposees calculées). Les figures 2.26 et 2.27 illustrent deux bilans de puissance réalisés surdes chocs récents. Le bouclage de puissance moins bon obtenu pour le choc 35960 (81.7%) est due àune imprécision des mesures de calorimétrie pour cette décharge (signaux erronés en raison de la cassed’une sonde).

(a) Scénario du choc 35960 (b) Bilan de puissance obtenu

Figure 2.26 – Bilan de puissance réalisé depuis l’inversion des mesures de calorimétrie, choc35960 (2005)

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Section 2.6

(a) Scénario du choc 40045 (b) Bilan de puissance obtenu

Figure 2.27 – Bilan de puissance réalisé depuis l’inversion des mesures de calorimétrie, choc40045 (2007)

La procédure de calcul inverse, appliquée à tous les CFP, nous permet de retrouver pour ceschocs la quasi totalité de la puissance injectée dans le plasma en sommant l’ensemble des puissancesPdeposees estimées. La précision du bouclage des bilans de puissances déposées obtenus à ce jour estsimilaire à celle des bilans de puissances extraites. La méthode de calcul inverse introduit bien unbiais supplémentaire sur les signaux reconstruits mais ce dernier (de l’ordre du kW ) reste en moyennetrès inférieur à l’amplitude des signaux traités (de plusieurs MW au total sur toute la machine), ilpeut donc être négligé.

L’éloignement des mesures de calorimétrie et la présence de bruit ne permet pas de reconstruireexactement la dynamique de la puissance Pchauffage injectée dans la machine mais les allures tempo-relles calculées en sommant tous les signaux sont tout de même très satisfaisantes. La montée et lacoupure de puissance du choc 40045 sont ainsi bien retranscrites. Nous pouvons observer des oscilla-tions de puissances déposées sur le plateau du choc 40045 pouvant être dues - si elles ne s’expliquentpas par des phénomènes identifiés d’interaction plasma-paroi- à la prise en compte lors de l’inversiond’une reliquat de bruit de mesure (choix d’un coefficient de régularisation trop faible pour un ou plu-sieurs CFP malgré l’utilisation de la courbe en L). Les variations de puissance reconstruites pour lechoc 35960 sont amorties mais retranscrivent bien les paliers de puissances injectées dans la machine(∆t < 3s).

2.6 Conclusion et perspectives

Dans ce chapitre, un calcul inverse a été développé et appliqué aux données calorimétriques descomposants face au plasma de Tore Supra. Bien que non conçu pour cette fonction initialement, lediagnostic calorimétrie nous permet aujourd’hui d’estimer les puissances déposées sur les différentsCFP de la machine.

La méthode proposée s’est basée sur la déconvolution des mesures de puissances thermiquesextraites observées en sortie de la machine, associée à une technique de régularisation. Les réponses

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Chapitre 2

indicielles caractérisant le comportement thermohydraulique des composants ont été calculées depuisun jeu de données expérimentales, où la puissance injectée dans la machine a été assimilée à unesollicitation de type échelon pour les différents systèmes. La procédure de calcul a été validée aupréalable sur des données simulées (cas LPT) puis extrapolée à l’analyse de données expérimentales.Le calcul inverse, robuste sur des essais numériques (même bruités), a présenté des limites lors de sonapplication à des données expérimentales trop perturbées (type PEI) ou soumises à des anomaliestype bouchons d’eau chaude (anneaux de garde et LPA). Son application sur des chocs expérimentauxa tout de même permis de reconstruire les allures temporelles de puissances reçues par chaquecomposant et d’établir des bilans de chaleur déposée dans la machine. La précision du bouclage desbilans de puissance (en MW) obtenus à ce jour est similaire à celle des bilans d’énergie extraite(MJ), déjà fournis par la calorimétrie. Le biais sur le bilan global, introduit par la régularisation dessolutions calculées est négligeable.

Ce nouveau traitement inverse des données calorimétriques de Tore Supra a pour but de mettreen évidence des informations pertinentes sur les phénomènes physiques liés au transport de chaleurdans le plasma. La présence de bruit sur les données et l’éloignement des mesures (entraînant lanécessité de régulariser les solutions) empêchera toutefois la reconstruction fiable de phénomènes detrop faibles amplitudes (quelques dizaines de kW) ou de trop courtes durées (< 3s). Rappelons quele système de mesures calorimétriques n’a de plus jamais été optimisé en vue de ce calcul inverse(nous aurions pu envisager de rapprocher les sondes de la paroi interne ou de réduire le pas detemps d’échantillonnage des données par exemple). La méthode proposée constitue néanmoins un netprogrès dans l’interprétation des données calorimétriques. Les résultats obtenus permettent de faireun pas supplémentaire vers l’étude des dépôts de chaleur sur les parois internes de Tore Supra enpassant de bilans intégrés en énergie (MJ) à la connaissance de l’évolution temporelle des puissancesincidentes sur les composants.

Le calcul inverse proposé, transposé aux éléments activement refroidis d’ITER, offrirait un moyensupplémentaire d’estimer les niveaux de chaleur reçus par les parois internes du futur tokamak encomplément, par exemple, de mesures infrarouges ou de thermocouples. Les conditions expérimentalesrencontrées sur Tore Supra peuvent toutefois différer de celles de la future machine ITER, notammentconcernant le bruit observé sur les mesures, l’agencement du réseau hydraulique des composants oul’existence de flux de neutrons significatifs pouvant perturbés les mesures. Les choix technologiquesdécidés pour la conception du système de mesure calorimétrique d’ITER pourront également influersur la pertinence et la précision du calcul inverse de puissance. Le choix de l’emplacement des mesureset de la fréquence d’acquisition des signaux conditionneront par exemple le caractère bien ou malposé du problème inverse.

La configuration la plus favorable consistera à choisir des systèmes d’acquisition ayant des tempsde réponse rapides et n’influençant pas la mesure. Il sera également préconisé de choisir des capteursde température robustes et précis. Un compromis doit également être trouvé afin de choisir unemplacement du système de mesures à la fois proche du phénomène que l’on veut observer maiségalement le moins exposé possible aux flux de neutrons ou aux vibrations de la machine.

La fréquence d’acquisition est également l’un des principaux facteurs rendant la matrice dusystème plus ou moins singulière. Le pas de temps d’échantillonnage des données conditionne en effetle calcul des termes de la matrice Mcalo. Plus le pas de temps d’acquisition (dt) sera grand, plus lesinformations physiques présentes dans la réponse du composant risquent d’être moyennées (on parlealors d’effet intégrateur de l’échantillonnage). Choisir un pas de temps d’acquisition supérieur auxtemps caractéristiques régissant les phénomènes physiques de diffusion de la chaleur dans le systèmeaura pour effet de lisser l’information physique contenue dans les données mesurées. La dynamiquede la solution calculée par inversion de ces mesures sera finalement imprécise. A l’opposé, choisir

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Section 2.6

une fréquence d’acquisition haute ne permettra pas non plus d’optimiser la précision obtenue surla solution calculée. Inverser des données échantillonnées trop finement, même en régularisant lasolution, peut vite s’avérer non pertinent. Pour un échantillonnage trop important, le déterminantde la matrice Mcalo tendra vers également vers 0, en raison des valeurs quasi nulles de ses premierstermes diagonaux. Celle-ci sera ainsi mal conditionnée pour les pas de temps d’acquisition faibles.Un compromis devra également être trouvé pour fixer le pas de temps d’acquisition des donnéesd’observation.

Nous avons présenté dans ce chapitre une méthode permettant de déterminer l’allure temporellede puissance déposée sur les composants face au plasma. L’accès à cette information ne permettra pasd’étudier une évolution locale de dépôt de chaleur sur la paroi, seulement mise en évidence par unecartographie 2D des flux de chaleur incidents (en MW/m2). Nous proposons dans le chapitre suivantde calculer ce type de cartographie sur le limiteur pompé toroïdal de la machine.

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Chapitre 3

Traitement des images IR : calcul desflux incidents sur les surfaces propreset recouvertes de carbone du LPT

Dans ce chapitre, nous allons étudier exclusivement les images IR du Limiteur PompéToroïdal dans le but d’établir des cartographies de flux de chaleur incident sur le plancher dela machine. Le limiteur pompé toroïdal est l’élément majeur d’interaction avec le plasma. Les bilansd’énergie et de puissance fournis par la calorimétrie ont déjà montré que ce composant permet d’éva-cuer plus de 50% de la puissance totale injectée suivant le choc étudié. Si les scénaris expérimentauxactuels mis en oeuvre sur Tore Supra (Pchauffage ≤ 10 MW) ne justifient pas encore la surveillanceen temps réel du LPT pour des raisons de sécurité machine, l’analyse des images infrarouges ducomposant est par contre essentielle afin d’étudier les mécanismes de transport de chaleur dans leplasma de bord. Lors de décharges, le LPT sert en effet d’appui au plasma. La répartition 2D deflux incidents observés sur le limiteur revelant l’empreinte du plasma dans la direction toroïdale φ etradiale r peut en effet fournir des informations pertinentes sur le déconfinement des flux de chaleurdu plasma vers la SOL.

La surveillance in-situ des composants face au plasma, de même que l’analyse physique des chargesthermiques reçues par le limiteur, sont à ce jour essentiellement réalisées en terme de températuresde surface ([Mitteau 08], [Mitteau 05], [Mitteau 03b]). Le flux maximum déposé sur le composant estquant à lui quantifié ponctuellement (dans le cas de chocs à fortes puissances) depuis l’analyse destempératures asymptotiques atteintes sur les tuiles les plus exposées au plasma ([Mitteau 03a]). L’in-formation en flux incident reçu par le composant (Q,MW/m2) peut ne pas être directement accessibledepuis les images en températures de surface (TIR, °C). Le traitement des images IR est notammentrendu délicat par la présence de dépôts carbonés sur le limiteur, gênant l’interprétation des tem-pératures observées. Le but de ce chapitre est tout d’abord de présenter au lecteur la méthode de calculde flux utilisée sur Tore Supra afin d’établir des cartographies dynamiques de flux incidents (films)en surface du LPT. Nous présenterons dans un second temps le logiciel développé pour le traitementdes images IR du limiteur, permettant de les discrétiser et d’appliquer un calcul thermique adaptéà chaque état de surface observé sur le composant (zone “propre” ou zone avec dépôts de carbone).L’estimation des flux de chaleur reçus dans les zones de redéposition nécessitant au préalable la carac-térisation des dépôts carbonés, nous commenterons également la méthode mise en oeuvre pour estimerleurs propriétés thermiques à partir de données IR acquises in situ.

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Section 3.1

Les données IR exploitées dans ce chapitre seront issues d’une campagne expérimentale baptiséeDITS (pour Deuterium Inventory in Tore Supra). Cette campagne avait pour objectif de caractériserles capacités de rétention des parois en CFC de Tore Supra. Nous avons choisi d’étudier ce type descénario puisqu’il correspond à la répétition de décharges plasma similaires, de puissance moyenne(Pchauffage ∼= 2MW ) et de longue durée (∆t ∼= 120s). Les conditions plasma répétées lors de cesdécharges correspondent à des régimes plasma stationnaire où la fraction rayonnée dans la machineest maintenue constante. Les chocs de cette campagne expérimentale sont de plus bien documentés(nombreuses mesures à disposition : sondes de Langmuir, données IR, etc.).

3.1 Mesures IR sur le LPT

3.1.1 Distinction des 3 zones d’interaction plasma-paroi

Les principales caractéristiques technologiques du diagnostic IR équipant Tore Supra ont étéfournies au chapitre 1. Le but de ce paragraphe est de décrire plus précisément le système de mesureet les images IR du CFP observés en surface du limiteur pompé toroïdal.

Deux endoscopes dotés de caméras infrarouges permettent la surveillance du LPT sur une surfaced’environ 1,7 m2 (ce qui représente un recouvrement de 23% de sa surface totale de 7,5 m2). Lapremière visée IR fournit une image en températures recombinée de deux secteurs juxtaposés de 30°(cf. figure 1.34 du chapitre 1), pour une résolution spatiale d’environ 9mm à une distance de 1,8m dudiaphragme de l’endoscope (cette résolution spatiale est obtenue pour une erreur sur la températureinférieure à 5%, [Guilhem 05]). Un second endoscope, équipé d’une caméra haute résolution (rs ∼=4 mm), permet quant à lui la surveillance d’un autre secteur d’environ 20° du limiteur (soit 31aiguilles). Par la suite, nous étudierons plus particulièrement les images IR du LPT fournies par cettevisée HR.

Les figures 3.2 et 3.1 mettent en évidence le motif d’érosion-redéposition du carbone sur le LPT,clairement visible sur les images infrarouges et les photos du composant acquises in situ. Nous pouvonsdistinguer sur ces images trois motifs particuliers :

– Une première zone A, dominée par la re-déposition des particules de carbone : les tuilessituées dans cette zone sont principalement exposées au rayonnement et aux flux de neutres, ellesne sont pas en contact direct avec le plasma.

– Différentes zones annotées B directement exposées au plasma : les flux de chaleur attendusy sont élevés et les mécanismes d’érosion dominants.

– Une dernière zone C, neutre : cette région n’est également exposée qu’au rayonnement et fluxde neutres en provenance du plasma. L’état de surface des tuiles de CFC localisées dans cettezone évolue par contre peu (à contrario des zones de dépôts carbonés A) puisque non seulementles flux de chaleur surfaciques y sont extrêmement faibles, mais aussi les flux de particules àl’origine des mécanismes d’érosion-redéposition.

Comme nous l’avons déjà mentionné au chapitre 1, ce motif particulier de dépôt de chaleur et departicules observé en surface du limiteur est lié à la configuration magnétique du plasma sur Tore Supra(cette dépendance sera explicitée plus en détail au chapitre 4). Les aires A et C sont généralementdésignées : zones “à l’ombre du plasma”. Nous baptiserons les zones B : zones “mouillées”.

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Chapitre 3

Figure 3.1 – Repérage des 3 zones d’interaction plasma-paroi sur une image IR du LPT (voieHR, choc 39862)

Figure 3.2 – Visualisation des dépôts carbonés en surface du LPT (photo prise in situ, inspectionde septembre 2006)

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Section 3.1

3.1.2 Problématique des dépôts carbonés

La principale difficulté rencontrée pour quantifier les flux incidents sur le LPT de Tore Supra estliée à la présence des dépôts carbonés formés au cours de l’exploitation de la machine. Ces dépôtssont d’épaisseurs variables, plus ou moins adhérents au substrat en CFC et peuvent se différencieren premier lieu en deux types de signatures. La première empreinte caractéristique des dépôts estappelée “effet gaufrier”. Cette signature correspond aux zones où les ions et atomes de carbonene s’agglomèrent qu’entre les tuiles de CFC, entraînant l’apparition de dépôts dans les gaps. Cephénomène de gaufrier peut se manifester à la fois dans les zones de redéposition mais aussi dans leszones d’érosion (zones B) où les flux de chaleur sont importants. Cette signature, visible sur l’imageIR (figure 3.1), permet de mettre en évidence le partitionnement de la surface du LPT composée detuiles de CFC. La deuxième signature des dépôts correspond à l’accumulation d’atomes de carboneen amas plus ou moins épais et adhérents, à la fois entre mais aussi en surface des tuiles de CFC.Cette seconde empreinte correspond aux zones A du limiteur “ombrées” magnétiquement appeléeszones de redéposition.

Les tuiles de CFC exposées au plasma ont été dimensionnées pour des valeurs seuils en températureet flux imposés (correspondant respectivement à 1200°C et 10 MW/m2) afin d’éviter la fonte ducomposant ou l’ébullition de l’eau dans ses canaux de refroidissement. En présence de dépôts decarbone sur le limiteur, les températures mesurées par le diagnostic infrarouge ne reflètent pas latempérature réelle des tuiles de CFC. Les dépôts carbonés, même si le flux de chaleur reçu est faible,peuvent s’échauffer extrêmement rapidement et plus intensément que le substrat activement refroidi.La présence de dépôts carbonés en surface du limiteur empêche ainsi d’associer directement les imagesIR acquises au motif réel de dépôt de chaleur sur le composant. La sécurité IR des CFP est alorsmise en échec dans les zones de redéposition et l’analyse physique des cartographies de températureest rendue bien plus complexe.

Les dépôts carbonés recouvrant le limiteur sont très hétérogènes. Cette hétérogénéité peut êtremise en évidence par l’observation de leur état de surface (cf. figure 3.2), mais aussi par la disparitédes températures IR observées dans les zones de redéposition, pourtant soumises à un fux de chaleursupposé quasi uniforme dans les zones ombrées (figure 3.1). La structure et les propriétés des couchesde redéposition évoluent également significativement au cours de l’exploitation de la machine : cesdernières peuvent croître, s’éroder ou se détacher. Une forte activité d’érosion et de redéposition anotamment été observée lors des expériences DITS menée en 2007. La figure 3.3 illustre l’évolution deséchauffements de quatre tuiles du limiteur au cours de cette campagne expérimentale, correspondantà la répétition de décharges plasma similaires de 2MW .

L’observation d’une variation de la température de surface des dépôts au cours de ces expériencesest révélatrice d’un changement de leur structure. La figure 3.3 met notamment en évidence uneévolution significative des températures IR (supérieure à 100°C) pour deux tuiles situées en zone deredéposition. En zones de forts flux (régions B), les températures sont quant à elles stable, comme lemontre l’exemple de la tuile propre repérée en bleu sur la figure 3.3a, dont la température est restéeconstante au cours des expériences.

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Chapitre 3

Figure 3.3 – Les échauffements observés en surface de tuiles avec dépôts au cours de la campagneDITS montrent une évolution des propriétés thermiques des couches de redéposition - figure (a)Localisation des tuiles étudiées sur la visée HR - figure (b) Evolution des échauffements station-naire atteints au cours de chocs longs identiques : les dépôts observés s’érodent, s’épaississentou se détachent

La croissance des dépôts gêne de plus en plus la surveillance IR (ces derniers recouvraient en 2007plus de 50% de la surface totale du limiteur). Leur possible décollement, sous l’effet d’interactionsavec le plasma, peut également provoquer des difficultés opérationnelles. La ionisation d’un dépot decarbone projeté dans la machine peut en effet déclencher une instabilité radiative de type MARFE1

provoquant dans de nombreux cas l’extinction du plasma par disruption (cf. définition donnée auchapitre 2, §2.3.2.2) [Ekedahl 08]. Ainsi, bien que la puissance incidente attendue sur les dépôtscarbonés soit globalement plus faible que celle reçue par les zones d’érosion, l’analyse des interactionsplasma-paroi dans les zones de redéposition représente aujourd’hui une double problématiqueimportante dans les recherches sur la fusion contrôlée (à la fois liée aux performances plasma et à lasurveillance des CFP).

Un autre comportement atypique menant à une surestimation des températures de surface destuiles de CFC doit également être signalé et pris en compte dans le calcul des cartographies de fluxincidents. Il s’agit de l’apparition de tuiles présentant des défauts d’interface.

1cf. définition donnée dans le Glossaire.

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Section 3.1

3.1.3 Présence de tuiles présentant un défaut à l’interface CFC/Cuivre sur lelimiteur

Le limiteur est constitué d’un substrat en cuivre dur (CuCrZr) recouvert de tuiles réfractaires encomposites de fibres de carbone (CFC). Une couche intermédiaire en cuivre doux (OFHC) est ajoutéeà l’interface de ces deux matériaux présentant des coefficients de dilatation thermique très différents(cf. valeurs indiquées en Annexe 1, tableaux 2, 7 et 13). Cette hétérogénéité fait de leur assemblageune opération délicate, pouvant induire l’apparition de défauts de cohésion à l’interface CFC/cuivrelors de la conception du composant.

Chaque aiguille composant le limiteur est préalablement testée avant son montage dans lamachine au moyen d’un contrôle non destructif réalisé sur banc test (installation SATIR). Un critèreDTref (défini comme la différence de température observée à chaque instant entre une aiguille deréférence et une aiguille à tester soumise à une excitation thermique connue) permet alors de jugerde la qualité de son assemblage. Toute aiguille possèdant sur une de ses tuiles un DTref supérieur à3 ou 5°C (suivant le chargement thermique attendu in-situ) sera refusée ([Durocher 03], [Cismondi 07]).

Les aiguilles testées lors de la fabrication du limiteur présentaient toutes des non-uniformitésacceptables. Le vieillissement du composant, soumis à de nombreuses heures de plasma, a toutefoisentraîné la propagation de certains défauts initiaux et l’apparition de nouvelles tuiles singulières. Laprésence d’un défaut d’interface induit une élévation de température anormale en surface des tuilesconcernées et, dans un cas extrême, peut provoquer leur décollement sous flux. Ce comportementthermique atypique doit également être pris en compte lors de la déconvolution des images IR (aumême titre que la présence d’une couche de dépôt) afin de ne pas surestimer les flux incidents sur lestuiles dérogées. A l’inverse des dépôts, la présence d’un défaut en profondeur dans les matériaux nepeut être mis en évidence par une inspection visuelle du composant. Le comportement anormal destuiles avec défauts peut par contre être révélé par l’étude de leur réponse thermique au cours d’unchoc.

La figure 3.4 représente l’évolution temporelle de la température de surface de trois tuiles de lavisée HR suspectées de présenter un défaut de cohésion. Le choc étudié (37685, août 2006) correspondà une décharge de forte puissance (10MW injectés). Nous pouvons constater sur cette image que lestrois éléments repérés présentent bien une décroissance en température beaucoup plus lente qu’unetuile saine à la coupure de puissance.

NB. Nous repérerons par la suite les trois tuiles singulières repérées sur la voie IR haute résolution àl’aide des notations D1, D2 et D3.

Le possible endommagement des tuiles du LPT peut être apprécié par une autre méthode decontrôle non destructif par thermographie Lock-in (ou thermographie infrarouge photothermique mo-dulée, [Courtois 07]). Le principe et les résultats obtenus depuis cette technique sont présentés enAnnexe 2. Plusieurs inspections par Lock-In ont été menées sur la section du LPT visée par la caméraHR lors de campagnes récentes. Ces expériences confirment la présence des trois défauts de cohésionsur le composant, mais ne permettent pas de remonter quantitativement à une valeur de résistance decontact caractérisant le défaut d’interface entre le CFC et le cuivre pour les éléments repérés. Nousproposerons au §3.3 de ce mémoire une méthode d’identification de cette résistance de contact.

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Chapitre 3

(a) Image IR du LPT (voie HR), à t=10s (et zoom à t=36s) : lestuiles avec défauts restent “éclairées” en fin de choc

(b) Constantes de temps de refroidissement des tuiles avec défauts D1, D2et D3

Figure 3.4 – L’observation des constantes de temps de refroidissement de trois tuiles avec défautspermet de mettre en évidence leur inertie thermique (choc 37685, coupure de puissance à t=34s)

3.2 Détermination des flux de chaleur incidents : description de laméthode de calcul

Mener des calculs de flux incidents sur les parois de tokamak a pour double objectif d’assurer lasécurité des composants face au plasma et de comprendre l’empreinte de dépôt de chaleur observéesur ces derniers. L’emploi d’une méthode de calcul rapide (pour une éventuelle extrapolation à unesurveillance temps réel) et dont la barre d’erreur est connue et jugée acceptable (pour assurer la fiabilitédes analyses physiques) est donc préconisée. La présence de dépôts carbonés en surface des CFP, oude défauts de cohésion dans les matériaux, nécessite par ailleurs le recours à une méthode flexible

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Section 3.2

permettant de prendre en compte aisément ces changements d’aspects lors des calculs thermiquesréalisés. Nous proposons ici d’estimer les flux incidents en surface du limiteur depuis une déconvolutionlinéaire 1D ([Korn 61], [Eykhoff 74]) des cartographies de températures IR acquises in-situ lors dedécharges plasma. La surface du composant étant composée de tuiles de CFC, nous mènerons uncalcul de flux par élément (tuile) afin de reconstruire une cartographie complète des flux déposés surle composant. La réponse indicielle des tuiles du limiteur sera calculée à l’aide d’une modélisation detype quadripôle thermique [Maillet 00], [Gardarein 8a].

3.2.1 Résolution de l’équation de la chaleur à l’aide d’une méthode 1D linéaire :justifications

Nous avons choisi de résoudre de manière semi-analytique l’équation de la chaleur dans le systèmemulticouche limiteur à l’aide d’un modèle de type quadripôles thermiques et d’utiliser cette solutionpour la déconvolution de mesures IR. D’autres schémas basés sur des approximations numériquesclassiques, tels que les éléments finis [Dhatt 84] auraient pu être utilisées pour résoudre le problèmeposé. Ce type de modélisation offre en effet la possibilité de prendre en compte à la fois l’aspectmultidimensionnel d’un problème et sa non-linéarité. Elle est de ce fait généralement préconisée dansle cas de géométries complexes mais peut alors induire des temps de calculs longs. Nous avons préféréla mise en oeuvre d’une méthode rapide et flexible afin de calculer les flux incidents en surface du LPT.Nous avons pour cela dû supposer que le problème étudié était à la fois linéaire et monodimensionnel.

3.2.1.1 Justification de l’hypothèse 1D du problème

Nous avons tout d’abord choisi de ne pas effectuer de calculs multidimensionnels pixel par pixelcompte-tenu de la résolution spatiale des caméras IR utilisées (rs ∼=4 mm pour la voie HR). Lasurface du LPT étant composée de tuiles de CFC, les images IR seront segmentées par la suiteen autant de maillons élémentaires. Un seul vecteur d’entrée Q(t) sera alors calculé et associé àchaque élément tuile discrétisant la surface du composant (les flux incidents seront estimés pardéconvolution du relevé de température moyenne atteinte au coeur de chaque tuile, cf. §3.4.2). Dansla suite de ce chapitre, l’appellation “tuile” désignera le système multicouches CFC-OHFC-CuCrZr-Eau de dimensions moyennes l=22,5 mm × L=25,7 mm × e=14 mm (les dimensions l et L étantlégèrement variables dans la direction x étant donnée la forme trapézoïdale des aiguilles, cf. figure 3.5).

Résoudre l’équation de la chaleur au sein du composant à l’aide d’une approche bidimensionnellea également été jugé inutile. Les tuiles de CFC recouvrant la surface du limiteur sont de petitesdimensions et les matériaux les constituant très conducteurs (seul le CFC composant la surface desaiguilles est un matériau faiblement orthotrope2). Le coefficient d’échange convectif mis en jeu dansles canaux de refroidissement, situés à seulement 3 mm de la jonction CFC/Cuivre, est égalementimportant (de l’ordre de 30 000 W/m2.K, pour un débit d’eau constant dans les aiguilles de 0.4 kg/s).Nous considérerons donc comme nulles les fuites latérales pouvant se produire dans les directions x et yà l’échelle d’une tuile. Chacune des tuiles recouvrant le limiteur sera également supposée indépendantedes tuiles voisines compte-tenu du gap les séparant (e= 2 mm), généralement comblé par des dépôtscarbonés supposés très peu conductifs3 (effet gaufrier). L’utilisation d’une modélisation réduite àune dimension semble donc bien adaptée à l’application proposée. Compte-tenu de la géométrie des

2Le CFC composant la surface des aiguilles est en effet un matériau faiblement orthotrope avec : λ// ∼= 200 W/m.K(directions x et y) et λ⊥ ∼= 130 W/m.K (direction z) à 120°C. Nous négligerons cette propriété dans la suite des calculset nous considérerons la conductivité du CFC égale à λ⊥.

3λdepots ≈ 40 à 60 W/m.K [Gardarein 8a].

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Chapitre 3

aiguilles et des conditions expérimentales pré-citées, nous considérerons que la chaleur ne se propageque dans le sens de la profondeur dans chaque système “tuile” étudié et que le champ de températureest uniforme à leur surface.

Figure 3.5 – Vue éclatée d’une aiguille du limiteur

La visée IR haute résolution permet la surveillance d’environ 600 tuiles du LPT. Le calcul decartographies de flux surfaciques depuis les images IR du composant nécessite donc, pour chaquedécharge plasma, le traitement d’autant de relevés de température, et ce pour chaque pas de tempsd’acquisition (un film IR compte de 1000 à 18000 images suivant la durée du choc étudié). Cettesimplification à un modèle 1D présente donc aussi l’avantage d’une rapidité de calcul accrue.

3.2.1.2 Hypothèse de linéarité du modèle

Nous avons également opté pour une méthode de calcul linéaire permettant l’estimation decartographies de flux en un temps réduit (pour comparaison, la durée d’un calcul de fux réalisé pourun choc de 20s, à un pas de temps de 0.02s (N=1000 points) sous un code par éléments finis 2Dnon-linéaire (ANSYS) est de l’ordre de la minute. La durée d’un calcul par déconvolution linéaire 1Dréalisé sous Matlab pour le même cas test est de 3s).

Durant une décharge plasma, les tuiles peuvent toutefois être soumises à de fortes variations detempératures comprises entre 120°C (leur température initiale) et 700°C4. En ignorant la dépendancedes propriétés thermiques des matériaux avec leur température (cf. tables de l’Annexe 1), nousintroduirons donc une erreur sur les flux estimés. Cette dernière augmentera avec la variation detempérature subie par les tuiles au cours d’un choc. Selon la température de référence considéréepour évaluer les propriétés des matériaux, les flux seront soit sous-estimés, soit surestimés (tendancepréférable pour assurer la sécurité IR des CFP).

Nous avons choisi dans cette étude de réaliser des calculs de flux en considérerant les propriétésdes matériaux à une température de référence correspondant à la température moyenne atteinte surles tuiles les plus exposées au flux (dans les zones B, “mouillées” par le plasma). Nous verrons par lasuite que ce choix engendre une erreur moyenne acceptable sur l’estimation des flux (cf. §3.2.4).

4Cet échauffement correspond à un choc record avec 10 MW injectés, pour une tuile située en zone mouillée par leplasma, soumise à un flux maximum de 7 MW/m2.

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Section 3.2

3.2.1.3 Pourquoi ne pas avoir recours à un calcul direct ?

Nous proposons dans cette étude d’utiliser le formalisme des quadripôles thermiques afin deconstruire la réponse indicielle du limiteur puis de calculer les flux en surface du composant pardéconvolution des mesures IR avec cette dernière. Dans le cas de mesures en surface d’un composant,comme c’est le cas ici, le recours à une modélisation de type quadripôles du composant (de mêmeque l’utilisation d’un modèle par éléments finis) pourrait permettre de calculer directement le fluxincident inconnu en surface d’une tuile en imposant en entrée du système le vecteur de mesureen températures IR. Cette technique, appliquée à des données simulées [Gardarein 8a], a d’ailleursmontré sa robustesse pour reconstruire des créneaux de flux en surface d’un composant multicouche(les résultats obtenus ont alors été similaires à ceux issus d’une déconvolution des mesures). Utiliserun calcul direct pour estimer le flux incident en surface d’un composant nécessite toutefois de calculeren premier lieu la transformée de Laplace du vecteur température (expérimental), puis d’inversernumériquement le flux calculé pour exprimer la solution recherchée dans l’espace temporel. En raisonde temps de calcul plus longs, nous avons donc préféré à cette méthode la déconvolution des images IR.

NB. La méthode de déconvolution présente également l’avantage d’être adaptée à la fois aux traitementsde températures de surface IR mais aussi à l’analyse de données fournies par des thermocouples insérésen profondeur dans les matériaux. L’application de cette méthode sur des mesures IR et thermocouplesacquises pour la surveillance des tuiles du divertor du JET (géométrie 2D et monocouche) a d’ailleursfourni de bons résultats [Gardarein 8a]. Aucune instrumentation thermocouple n’équipe actuellementle limiteur de Tore Supra. Le choix d’une méthode de déconvolution, préférée au calcul direct, laissecependant la possibilité d’étendre les codes de calcul créés à ce type de mesure complémentaire.

3.2.2 Estimation du flux conduit dans le matériau par déconvolution des tempé-ratures IR : mise sous forme matricielle du problème

De manière similaire à l’analyse des données calorimétriques (chapitre 2), l’équation de la cha-leur dans les couches du LPT sera résolue par analogie avec les méthodes de traitement du signal([Korn 61], [Eykhoff 74], [Cottet 97]). Chaque tuile du limiteur sera assimilée à un système linéaire detype “boîte noire” soumis à un flux incident entrant (Q, MW/m2) et dont la sortie correspond àl’échauffement de la surface observée par caméra IR (∆T , °C), tel que :

∆T (t) = T (t)− Tinit, (3.1)

La température initiale du composant est uniforme et fixée par la température de l’eau dans lesystème de refroidissement au temps t = 0s (Tinit = Teau = 120°C).

99

Page 114: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 3

Figure 3.6 – Modélisation boîte noire correspondant au traitement des images IR (le LPT estassimilé à un système linéaire)

Soit hIR(t) la réponse impulsionnelle d’une tuile du LPT, l’expression (2.3) utilisée dans le chapitre2 devient, dans le cas du traitement des mesures IR :

∆T (t) =∫ t

0hIR(t− τ)×Q(τ).dτ (3.2)

La réponse impulsionnelle étant équivalente à la dérivée de la réponse indicielle du système :

hIR(t− τ) = dφIR(t− τ)d(t− τ) = −dφIR(t− τ)

dτ(3.3)

L’expression (3.2) devient :

∆T (t) =∫ t

0−dφIR(t− τ)

dτ×Q(τ).dτ (3.4)

Nous retrouvons ici une formulation équivalente à l’intégrale de superposition de Duhamel (adap-tée à la résolution des problèmes de diffusion de la chaleur, [Carslaw 59] [Beck 85], [Ozisik 93],[Le Niliot 91]). L’application de la méthode des rectangles pour discrétiser cette intégrale nous permetd’écrire le problème sous la forme matricielle suivante5 :

∆T = MIR ×Q (3.5)

où MIR est une matrice carrée triangulaire inférieure dont les termes sont équivalents à la discrétisationde la réponse indicielle φIR(t) du système multicouche “tuile” :

MIR =

∆φIR0

0 0 0 0∆φIR1

∆φIR00 0 0

... ... ... ... ...

... ... ... ... ...∆φIRn−1

... ... ... ∆φIR0

5Les détails de calcul ont déjà été fournis au chapitre 2 de ce mémoire, § 2.2.2.

100

Page 115: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.2

Nous cherchons dans notre cas à déterminer l’évolution temporelle de flux à la surface du compo-sant. Le vecteur inconnu Q peut s’exprimer par déconvolution de la mesure ∆T , tel que :

Q = M−1IR ×∆T (3.6)

NB. Dans le cas des mesure IR, le problème est bien posé. La matrice MIR est bien conditionnée et lecalcul de flux depuis les températures de surface observées ne nécessitera pas le recours à une méthodede régularisation.

La réponse indicielle du système “tuile” φIR(t) représente la réponse en température de surface ducomposant à un échelon de flux imposé. Nous proposons d’utiliser un modèle quadripôle du limiteurpour la calculer.

3.2.3 Calcul de la réponse indicielle du composant : modélisation quadripôlesd’une tuile propre du limiteur

3.2.3.1 Formulation du problème à l’aide des quadripôles thermiques

Le limiteur de Tore Supra est constitué de trois couches de matériaux (CFC, OFHC, CuCrZr),activement refroidies par deux canalisations d’eau pressurisée à 120°C (figure 3.7).

Figure 3.7 – Coupe d’une tuile tricouche du limiteur et flux thermiques mis en jeu

Afin de déconvoluer les images IR obtenues en surface du LPT, nous allons calculer la réponseindicielle des tuiles le constituant à l’aide du formalisme des quadripôles thermiques [Maillet 00].Cette modélisation, flexible, est en effet bien adaptée pour résoudre les problèmes à géométrie simpleet multicouches. L’application de la modélisation quadripôles aux principaux CFP de Tore Supra(limiteur, neutraliseurs) et aussi aux tuiles du divertordu JET a été réalisée lors d’un précédent travailde thèse [Gardarein 8a], l’aspect théorique de ce formalisme y est donc bien détaillé. Nous fournissonstoutefois dans les paragraphes suivants une description de la modélisation utilisée pour le LPT.

101

Page 116: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 3

a - Modélisation quadripôle d’une couche de matériau

Pour un flux incident donné, la réponse en température de surface du limiteur est fournie par larésolution de l’équation de la chaleur au sein de ses matériaux (dans la direction z, figure 3.7). Ensupposant le problème traité linéaire et monodimensionnel, le transfert de la chaleur dans chaquecouche de matériau, considérée isotrope6, peut alors être exprimé comme suit :

∂2T (z, t)∂z2 = 1

a

∂T (z, t)∂t

(3.7)

avec :

a : diffusivité thermique du matériau (m2/s) : a = λρ.Cp

Considérons la loi de Fourier :Q(z, t) = −λ∂T (z, t)

∂z(3.8)

Et introduisons les notations suivantes :- Θ : transformée de Laplace de l’échauffement ∆T- Ψ : transformée de Laplace du flux Q

Les équations (3.7) et (3.8) s’expriment alors, dans l’espace de Laplace :

∂2Θ(z, p)∂z2 = p

aΘ(z, p) (3.9)

Ψ(x, p) = −λ∂Θ(z, p)∂z

(3.10)

NB. La notation Θ définira par la suite la transformée de Laplace de la différence de températureentre l’instant considéré et l’état initial (soit l’échauffement ∆T d’une tuile), et non la transforméede la solution originale T(x,t). Cette dernière peut être déduite aisément après transformation inversede l’échauffement Θ(x, p) puisque : T (x, t) = ∆T (x, t) + Tinit.

La résolution du système d’équations (3.9) et (3.10) dans l’espace de Laplace fournit alors lessolutions suivantes [Maillet 00] :

Θ(x, p) = C1e−σx + C2e

σx (3.11)

Ψ(x, p) = −λ[−σC1e−σx + σC2e

σx] (3.12)

où : σ =√p/a

avec p : variable de Laplace, homogène à l’inverse d’un temps6Nous avons choisi d’ignorer le caractère orthotrope du CFC pour nos calculs.

102

Page 117: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.2

Le recours à une modélisation de type quadripôles permet d’exprimer de la même manière les tem-pératures et les flux thermiques à l’entrée et à la sortie de chaque matériau (notée mat) composant lestuiles du limiteur. Appliquée séparément à chaque couche d’épaisseur e, cette modélisation correspondau formalisme matriciel suivant :[

Θin(0, p)Ψin(0, p)

]=[Amat BmatCmat Dmat

] [Θout(e, p)Ψout(e, p)

](3.13)

où :

– le vecteur[Θin(0, p)Ψin(0, p)

]contient l’expression de la température et du flux imposés à la surface du

matériau (en z = 0), dans l’espace de Laplace,

–[Θout(e, p)Ψout(e, p)

]est le vecteur contenant les valeurs de températures et flux résultants en z = e,

–[Amat BmatCmat Dmat

]est une matrice de transfert dont les termes sont fonctions des propriétés ther-

miques de la couche de matériau. Nous allons chercher à définir les termes de cette matrice.

L’équation (3.13) permet d’exprimer la température et le flux en surface d’un matériau dansl’espace de Laplace tels que :

Θin(0, p) = AmatΘout(e, p) +BmatΨout(e, p) (3.14)

Ψin(0, p) = CmatΘout(e, p) +DmatΨout(e, p) (3.15)

Si nous considérons les solutions de l’équation de la chaleur, fournies par les équations (3.11) et(3.12), aux positions x = 0 et x = e d’une couche, nous obtenons :

Θin(0, p) = C1 + C2 (3.16)

Ψin(0, p) = λσC1 − λσC2 (3.17)

etΘout(e, p) = C1e

−σe + C2eσe (3.18)

Ψout(e, p) = λσ[C1e−σe − C2e

σe] (3.19)

103

Page 118: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 3

La combinaison des équations (3.16) à (3.19) permet d’éliminer par identification les termes C1et C2 et d’exprimer les termes de la matrice de transfert de la couche de matériau dans l’espace deLaplace :

Amat = eσe + e−σe

2 = cosh(σe) (3.20)

Bmat = eσe − e−σe

2 = 1λσsinh(σe) (3.21)

Cmat = λσeσe − e−σe

2 = λσsinh(σe) (3.22)

Dmat = eσe + e−σe

2 = cosh(σe) = Amat (3.23)

Nous obtenons ainsi l’expression de la matrice de transfert de taille 2 × 2, typique d’un murpassif (sans source de chaleur), caractérisant l’expression du comportement thermique d’une couche.Chaque terme Amat, Bmat, Cmat et Dmat défini fait intervenir l’épaisseur et les propriétés thermiques(conductivité et diffusivité) du matériau constituant la couche.

NB. Dans le cas du LPT, les valeurs des propriétés définissant le comportement thermique desmatériaux seront calculées par interpolation linéaire à partir des tables présentées à l’Annexe 1. Lemodèle étant linéaire, nous supposerons ces propriétés invariantes au cours d’un choc. Les valeursconsidérées pourront par contre varier d’un choc à l’autre, la température de référence à laquelleseront choisies les propriétés dépendant en effet de la température moyenne atteinte par les tuiles lesplus exposées au flux au cours d’une décharge. Pour le CFC orthotrope, la conductivité considéréecorrespondra à la valeur λ// (conductivité du matériau dans la direction z).

b - Modélisation des échanges convectifs

La formulation présentée au paragraphe précédent permet de résoudre l’équation de la chaleurdans les trois couches de matériau du limiteur. Le calcul de la réponse indicielle complète d’une tuilenécessite également de modéliser les échanges convectifs au niveau des canaux de refroidissement. Lamatrice représentant les échanges par convection en face arrière du composant peut être assimilée à unerésistance pure. L’écriture quadripôle correspondante fera intervenir le coefficient d’échange convectifentre l’eau et les aiguilles (hc) : [

Aconv BconvCconv Dconv

]=[1 h−1

c

0 1

](3.24)

Le coefficient hc calculé dans les conditions hydrauliques de Tore Supra est environ égal à 30 000W/m2.K ([Schlosser 93], [Boscary 98]).

104

Page 119: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.2

c - Modélisation quadripôle complète du système multi-couche

La modélisation du limiteur au moyen de quatre quadripôles thermiques est résumée sur la fi-gure 3.8 :

Figure 3.8 – Le limiteur peut être modélisé à l’aide de quatre quadripôles thermiques (cas d’unetuile propre, non recouverte de dépôts carbonés)

Les différentes couches de matériau composant le limiteur étant en contact parfait, les flux ettempératures aux interfaces seront conservés. Si nous considérons la figure 3.9 :

Figure 3.9 – Modélisation quadripôles d’un matériau bicouche

cette hypothèse signifie que pour chaque interface :

[Θoutmat1(e1, p)Ψoutmat1(e1, p)

]=[Θinmat2(e1, p)Ψinmat2(e1, p)

](3.25)

La matrice de transfert globale du système multicouche est ainsi donnée par le produit des matricesde transfert de chaque élément constituant le système :[

Atot BtotCtot Dtot

]=[ACFC BCFCCCFC DCFC

] [AOFHC BOFHCCOFHC DOFHC

] [ACuCrZr BCuCrZrCCuCrZr DCuCrZr

] [1 h−1

c

0 1

](3.26)

105

Page 120: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 3

Et nous pouvons écrire, pour le système global :

[Θ(0, p)Ψ(0, p)

]=[Atot BtotCtot Dtot

] [Θ(e, p)Ψ(e, p)

](3.27)

en considérant les notations simplifiées :

[Θ(0, p)Ψ(0, p)

]=[Θin(0, p)Ψin(0, p)

]et[Θ(e, p)Ψ(e, p)

]=[Θout(etot, p)Ψout(etot, p)

]

NB. Nous avons choisi de ne pas prendre en compte l’influence des échanges radiatifs avec l’extérieur(en surface du CFC) dans la modélisation quadripôle du limiteur et lors des calculs de flux sur lecomposant (cette contribution est considérée négligeable en comparaison des flux conduits dans la tuile).

3.2.3.2 Calcul de la réponse indicielle d’une tuile du LPT

En conditions expérimentales, la température de l’eau avec laquelle échange la face arrière à l’épais-seur etot = 14 mm est constante et imposée par le système de refroidissement (Tinit = 120°C). L’équa-tion (3.27) définie précédemment devient alors :

[Θ(0, p)Ψ(0, p)

]=[Atot BtotCtot Dtot

] [0

Ψ(e, p)

](3.28)

Nous pouvons déduire de cette dernière équation l’expression de la température de surface ducomposant en fonction du flux imposé. Dans l’espace de Laplace, cette solution revient à :

Θ(0, p) = BtotDtot

Ψ(0, p) (3.29)

Dans le cas où le flux entrant simulé correspond à un échelon unitaire, la réponse du systèmes’écrit :

Θ(0, p) = BtotDtot

1p

(3.30)

L’expression (3.30) correspond au calcul direct de la réponse indicielle en température de surfaced’une tuile du limiteur, dans l’espace de Laplace. L’estimation de cette réponse indicielle dans l’espacetemporel est fournie par la transformée inverse de Θ(0, p). Elle sera calculée dans notre cas au moyende l’algorithme de Gaver-Stehfest ([Gaver 66], [Stehfest 70a], [Stehfest 70b], [Maillet 00]).

Les réponses indicielle ΦIR(t) (pour un flux constant de 1W/m2) et impulsionnelle hIR(t) (pourun flux correspondant à un dirac temporel d’énergie de 1J/m2) calculées pour une tuile “propre” nonrecouverte de dépôts de carbone sont présentées à la figure 3.10.

106

Page 121: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.2

(a) Réponse indicielle (b) Réponse impulsionnelle

Figure 3.10 – Réponses indicielle et impulsionnelle obtenue par calcul direct depuis une modélisa-tion quadripôle du limiteur (cas d’une tuile “propre”, sans dépôts carbonés, propriétés thermiquesdes matériaux choisies à Tref = 200 °C)

Le recours au formalisme quadripôle nous a permis de modéliser le comportement thermique dulimiteur constitué de trois couches de matériau ayant des propriétés thermiques distinctes. L’avantagede ce modèle est également sa flexibilité. La même méthode peut en effet fournir à l’identique unemodélisation des tuiles recouvertes de carbone en ajoutant à la syntaxe précédente une ou plusieurscouches supplémentaires représentant le dépôt. La modélisation quadripôles correspondant aux tuilesrecouvertes de dépôts carbonés nécessitera toutefois, au préalable, d’estimer leurs propriétés ther-miques (la méthode mise en oeuvre sur Tore Supra afin de caractériser les couches de redépositionfera l’objet du §3.3). La réponse indicielle d’une tuile (propre ou recouverte de dépôt), calculée àl’aide de la modélisation quadripôle, pourra être utilisée pour la déconvolution des cartographies detempératures IR mesurées sur le limiteur. Nous proposons dans la suite de cette section de valider aupréalable la méthode de calcul de flux proposée sur des cas tests numériques.

3.2.4 Validation de la méthode de calcul de flux sur des données numériques (casd’une tuile propre) et estimation des barres d’erreur

Nous pouvons identifier quatre principales sources d’erreur pouvant perturber les calculs de fluxréalisés en surface du limiteur :

– Un biais sur les flux calculés peut tout d’abord être introduit par une erreur d’appréciation destempératures de surface IR, estimées depuis les niveaux de luminance fournis par les endoscopes,

– L’hypothèse de linéarité du modèle peut également conduire à une mauvaise estimation des fluxréellement déposés sur le composant,

– Une incertitude sur les flux estimés peut aussi être induite par une erreur d’appréciation ducoefficient d’échange convectif régnant dans les canaux de refroidissement,

– Enfin, il est important de vérifier qu’un filtrage appliqué à-postériori aux signaux déconvoluésn’entraînera pas de biais significatif sur les valeurs de flux calculés.

Les incertitudes relatives à ces quatre sources d’erreur sont quantifiées ci-après.

107

Page 122: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 3

3.2.4.1 Erreur induite par une mauvaise estimation des températures de surface

La première source d’erreur sur les flux de chaleur estimés peut provenir d’un biais sur les DigitalLevel (DL) mesurés par le système IR ou d’un mauvais calcul des températures de surface IR déduitesde ces luminances. Les systèmes de mesure IR de Tore Supra sont équipés de nombreux optiques (cf.chapitre 1, §1.2.5.5). La très forte atténuation du signal IR mesuré par les caméras (en raison de lafaible transmission globale des endoscopes : τ ∼= 0.25) induit qu’une température “réelle” de 120°Csur le limiteur ne sera associée qu’à un niveau de luminance très faible (équivalent à une températureapparente de l’ordre de 30°C si l’atténuation du signal n’est pas prise en compte). Une incertitude surla transmission des optiques peut ainsi entraîner une appréciation erronée des températures observéesen surface du LPT. L’hypothèse faite sur l’émissivité des matériaux (supposée égale à 1 sur toute lasurface du composant) peut également entraîner un biais sur la température considérée7. Un biaissystématique est généralement observé sur les mesures IR. Ce dernier est de l’ordre plusieurs dizainesde degrés Celsius pour les faibles températures (comprises entre 100 et 200°C) et devient inférieur à10% pour les plus hautes températures [Corre 08] (le biais observé sur les mesures n’est pas constantavec les températures calculées).

Une erreur sur la lecture des températures infrarouges peut entraîner une mauvaise appréciationdes flux de chaleur calculés sur le limiteur. Les figures 3.11 et 3.12 illustre l’erreur induite par unemauvaise appréciation de la température de surface d’une tuile exposée à de forts flux de chaleur(le flux simulé correspond ici à un créneau de 5 MW/m2). Nous avons simulé un biais de +40°Csur la température initiale lue (160°C au lieu de 120°C). Le biais sur la température asymptotiquecalculé pour ce cas test est quant à lui de +10°C. La déconvolution de l’échauffement calculé depuisles températures biaisées entraîne une sous-estimation du flux initial imposé dans la simulation del’ordre de 8% (4.6MW/m2 au lieu de 5MW/m2).

(a) Thermogrammes simulés (b) Echauffements résultants : ∆T (t) = T (t)− Tinit

Figure 3.11 – Une surestimation des températures mesurées sur le LPT peut entraîner unesous-estimation de l’échauffement de surface

7De récentes mesures [Courtois 08] ont montré que l’émissivité du limiteur peut varier entre 0,6 (dans le cas de tuilesérodées) et 0,8 (émissivité réelle des tuiles neuves). L’émissivité des tuiles de CFC peut par contre être considérée égaleà 1 si ces dernières sont recouvertes de dépôts carbonés.

108

Page 123: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.2

Figure 3.12 – Flux déconvolués - Une surestimation des températures mesurées sur le LPT peutentraîner une sous-estimation des flux calculés

3.2.4.2 Test de l’hypothèse de linéarité du modèle quadripôle

Une erreur sur les flux calculés peut également être induites par la dépendance des propriétésthermophysiques des matériaux avec leur température. Nous pouvons estimé le biais induit parl’hypothèse de linéarité du problème en déconvoluant, à l’aide de la méthode linéaire proposée, unrelevé de température simulé à l’aide d’un code par élément finis 1D non-linéaire. Ce résultat estillustré à la figure 3.13.

La figure 3.13a représente deux thermogrammes linéaire (courbe bleue) et non-linéaire (courberouge) calculés après application d’un flux de référence (illustré à la figure 3.13b) en entrée du systèmequadripôle et d’un code par éléments finis 1D. Les deux relevés de températures estimés par calculdirect ne sont pas similaires. Ces derniers diffèrent notamment lors des phases transitoires. Nouspouvons également observer une différence d’amplitude entre les deux vecteurs température calculés.L’échauffement maximal ∆T atteint par la tuile “non-linéaire” est de 430°C contre 385°C pour la tuile“linéaire”.

Le graphique 3.13b représente les flux calculés par déconvolution linéaire du relevé de températurenon-linéaire simulé. Les trois courbes correspondent aux calculs effectués depuis trois réponses indi-cielles calculées à une température de référence correspondant à la température minimale, moyenneou maximale atteinte par la tuile en CFC lors du choc simulé8.

8Les températures minimales, moyennes et maximales atteintes par la tuile au cours du choc sont respectivement deTmin=120°C (Tinit), Tmoy=335°C et Tmax=540°C (lues sur le relevé non-linéaire).

109

Page 124: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 3

(a) Thermogrammes simulés (en bleu : convolution linéaire, enrouge : calcul par éléménts finis 1D non-linéaire)

(b) Flux calculés (déconvolution linéaire du thermogramme simulénon-linéaire)

Figure 3.13 – Déconvolution linéaire d’un thermogramme issu d’une simulation par éléments finisnon-linéaire - Les réponses indicielles utilisées ont été calculées pour des valeurs de propriétésthermiques des matériaux choisies à une température Tref=Tmin, Tmoy ou Tmax (atteinte par latuile au cours du choc)

La déconvolution linéaire du thermogramme issu de la simulation par éléments finis ne permet pasde reconstruire la forme initiale du flux imposé en surface de la tuile modélisée. L’allure temporellereconstruite dans le cas de propriétés constantes avec la température diffère de la dynamique initiale-ment imposée en entrée du modèle. Nous pouvons remarquer l’apparition de flux négatifs à la coupurede puissance et également une évolution du flux calculée sur les plateaux non stationnaire dans le casde propriétés choisies à Tref=Tmin ou Tmoy.

110

Page 125: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.2

La différence observée entre le flux simulé de référence et les flux linéaires déconvolués est maxi-male dans le cas de propriétés choisies à la température minimale atteinte par la tuile lors du choc(Tref=120°C). L’utilisation de propriétés thermophysiques constantes avec la température des maté-riaux entraîne en effet, pour ce cas de figure, une surestimation des flux de 16% dans le cas du plateaule plus élevé (5 MW/m2). Cette barre d’erreur devient par contre négligeable pour les faibles flux (<2 MW/m2).

La figure 3.13b illustre également qu’un flux de 5MW/m2 est sous-estimé d’environ 10% après unedéconvolution du relevé de température réalisée pour des propriétés prises à la température maximaledes matériaux (Tref = Tmax).

L’erreur réalisée en ignorant la non-linéarité des propriétés des matériaux avec la température estminime (< 8%) dans le cas de propriétés choisies à la température Tref = Tmoy. Le meilleur compromismis en avant par ces simulations revient donc à considérer, lors d’un calcul linéaire, les propriétés desmatériaux à la température moyenne atteinte par la tuile étudiée. Dans le cas d’une déconvolution decartographies de températures complètes pour la visée HR (ensemble de 600 tuiles), une seule tempé-rature de référence sera imposée. Cette dernière correspondra à la température moyenne atteinte parles tuiles les plus exposées au flux au cours du choc (nous sous-estimerons alors les plus faibles fluxatteints dans les zones ombrées).

3.2.4.3 Sensibilité du calcul au coefficient d’échange convectif

La réponse indicielle d’une tuile du limiteur est également calculée en supposant le coefficientd’échange convectif constant. Celui-ci peut toutefois varier avec la température de paroi et aussi sedégrader au cours du temps (du fait de l’encrassement des canalisations, augmentant les pertes decharge dans le réseau). Sa valeur, impossible à déterminer précisément en conditions expérimentales,est généralement fixée à 30 000 W/m2.K ([Schlosser 93], [Boscary 98]). Un test numérique réalisée surdes données simulées non bruitées peut nous permettre de quantifier le biais induit par une possibleerreur sur la valeur du coefficient d’échange convectif hc.

Figure 3.14 – Une erreur sur le coefficient d’échange convectif peut entraîner un biais sur lesvaleurs de flux calculés par déconvolution linéaire

111

Page 126: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 3

La figure 3.14 illustre les résultats issus de la déconvolution d’un thermogramme estimé par calculdirect (convolution) pour un coefficient hc fixé à 30 000 W/m2.K à l’aide de réponses indiciellesinadaptées (hc fixé à 25 000 puis 35 000 W/m2.K). Nous pouvons observer qu’une sous-estimationde 16% du coefficient d’échange convectif régnant dans les canaux de refroidissement entraîne unesurestimation des flux calculés de l’ordre de 8%. A l’inverse, une surestimation de 5000 W/m2.K(16%) du coefficient d’échange entraîne une sous-estimation des flux inférieure à 6% (pour la gammede flux simulée sur ce cas test, comprise entre 0.2 et 7 MW/m2). Nous pouvons également noterque dans le cas d’une mauvaise estimation du coefficient hc des artefacts numériques (flux positifs ounégatifs) apparaissent lors des transitoires (à l’application ou à la coupure de puissance). Le calcul deflux réalisé lors de fronts rapides sera donc sensible au coefficient d’échange convectif imposé dans lemodèle.

3.2.4.4 Influence du filtrage des signaux calculés

Les températures déconvoluées en surface de chaque tuile de CFC du limiteur correspondront à lamoyenne des relevés IR acquis sur plusieurs pixels au coeur de chaque tuile (cf. §3.4.2). Cette moyennepermettra un premier lissage spatial du bruit de mesure présent sur les températures étudiées. Nousavons toutefois choisi d’appliquer un filtrage supplémentaire par moyenne glissante sur les flux calculésafin d’obtenir des cartographies de flux non perturbées. Cette méthode de filtrage, choisie en raison desa simplicité et de sa rapidité de mise en oeuvre, sera équivalente à un filtrage passe-bas des données.

Figure 3.15 – Un filtrage par moyenne glissante sur les signaux calculés (flux déconvolués)permet de reconstruire l’allure initiale de flux incident imposé en surface d’une tuile du limiteur

L’amplitude du bruit de mesure observé sur les températures IR, gaussien centré (cf. figure 3.16),est généralement de l’ordre de 0,2°C à 2°C. Ces valeurs correspondent à un rapport signal sur bruitcompris entre 0.04 et 0.5% de la température mesurés suivant son amplitude. La figure 3.15 illustrele calcul de flux réalisé depuis un thermogramme perturbé par un bruit gaussien centré d’écart-type3°C (égal à environ 0.5% de la température maximale atteinte à l’état stationnaire sur le troisièmepalier de flux simulé). Ce graphique démontre dans un premier temps la nécessité de filtrer les signaux

112

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Section 3.3

déconvolués (en rouge sur la figure), fortement perturbés par la présence de bruit sur les températuresétudiées. L’application d’un filtrage par moyenne glissante sur 4 points (soit sur un ∆t = 80ms)permet de reconstruire de manière fiable le vecteur flux initialement imposé dans la simulation (signalreprésenté en bleu sur la figure). Nous pouvons constater que le filtrage des signaux déconvolués parmoyenne glissante entraîne une erreur nulle sur les valeurs de flux estimées. Le diamètre de filtragechoisi (n=4 pts) semble donc bien adapté au bruit généralement observé sur les mesures IR (nous netiendrons pas compte ici du fait qu’une fois la moyenne glissante appliquée, les mesures ne seront plusindépendantes entre elles).

(a) Histogramme, écart-type=1.4°C (0.3%),moyenne=482°C

(b) Distribution du bruit de mesure autour de la valeurmoyenne de température

Figure 3.16 – Etude du bruit de mesure observé sur un relevé expérimental ∆T (°C), choc 39862

Les barres d’erreur sur les flux calculés par déconvolution linéaire de thermogrammes IR observésen surface du LPT sont maintenant connues. Ces dernières, acceptables, rendent possible l’applicationde la méthode proposée aux traitements des images IR expérimentales du composant (nous exposeronsdans la section 3.5 de ce chapitre les résultats issus de la déconvolution de différentes cartographiesde température obtenues en surface du composant).

Avant de pouvoir estimer les flux de chaleur incidents sur le limiteur, nous allons tout d’abordnous intéresser à la caractérisation des dépôts (et défauts) présents sur le composant. La connaissancedes propriétés thermiques propres à ces éléments est en effet indispensable pour calculer les flux dechaleur incidents dans les zones de redéposition et sur les tuiles dérogées du LPT.

3.3 Caractérisation des défauts de cohésion et des dépôts carbonésrecouvrant le LPT : description de la méthode d’identification

Nous proposons dans cette étude d’estimer les propriétés thermophysiques des défauts et dépôtsrecouvrant le limiteur de Tore Supra. Le développement d’une telle méthode d’identification présenteune double intérêt dans le cadre des études sur les interactions plasma-paroi :→ Le calcul des flux incidents dans les zones de redéposition peut permettre d’estimer la puissance

totale déposée sur le composant, de comparer cette dernière au bouclage du bilan mesurée par calo-rimétrie et de parvenir ainsi à une estimation de la puissance moyenne reçue dans ces zones ombrées(actuellement inconnue).

113

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Chapitre 3

→ La connaissance des propriétés thermophysiques d’une couche de redéposition peut égalementdonner une indication sur sa composition ou sa structure (densité, porosité, adhérence). Si l’estimationde ces propriétés est effectuée sur une série de plusieurs chocs, une analyse comparative peut égalementêtre envisagée afin d’étudier l’évolution possible du dépôt étudié (croissance, érosion, décollement) aucours d’une campagne expérimentale.

La recherche des propriétés thermiques définissant les défauts ou les dépôts présents en surfacede tuiles correspond à la résolution d’un problème inverse d’estimation de paramètres. Nousallons nous attacher dans cette étude à caractériser les propriétés de 3 défauts et d’un échantillonde 21 dépôts recouvrant le limiteur lors de la campagne DITS (2007, choc 39862). Le principe dela méthode d’identification mise en oeuvre sera présentée au §3.3.2. Nous proposons tout d’aborddans le paragraphe suivant d’établir un rapide état des lieux des précédentes études menées sur lacaractérisation des défauts et dépôts observés en surface des composants face au plasma des machinesJET et Tore Supra.

3.3.1 Précédentes études menées sur la caractérisation des défauts de cohésion etdes dépôts carbonés observés en surface de CFP

Comme nous l’avons déjà mentionné (cf. §3.1.3 et Annexe 2 de ce mémoire), les analysesréalisées in-situ par thermographie Lock-In réalisées sur le LPT permettent la localisation de défautscréés à l’interface CFC/cuivre par les contraintes thermiques engendrées par les décharges plasmasuccessives, mais non l’estimation quantitative de leur résistance de contact [Courtois 07]. Les testsexpérimentaux permettant la quantification des défauts initialement présents dans les aiguilles dulimiteur (installation SATIR, [Cismondi 07]) ne peuvent pas quant à eux être réalisés in-situ afind’assurer le suivi de ces éléménts. A ce jour, seules différentes études comparatives consistant àétudier l’évolution des constantes de temps de refroidissement de tuiles dérogées ont donc été me-nées dans le cadre de la surveillance in-situ des tuiles singulières observées sur le limiteur [Mitteau 07a].

Diverses études ont été consacrées à la caractérisation des dépôts carbonés recouvrant les paroisde tokamaks. Un échantillon de dépôts carbonés recouvrant les neutraliseurs9 de Tore Supra (cf.figure 3.17) a récemment été soumis à une expérience flash face avant en laboratoire. Les résultatsexpérimentaux issus de ces analyses ont permis d’estimer les propriétés thermophysiques présentéesau tableau 3.3.1 [Gardarein 8a] (deux zones de mesure ont été étudiées).

Propriétés Zone 1 Zone 2diffusivité (a, m2/s) 4, 8e.10−5 4, 8e.10−5

conductivité (λ, W/m.K) 41 65capacité volumique (ρ.Cp, J/m3.K) 0, 86e.106 1, 35e.106

résistance (Rc, m2.K/W ) 1, 2.10−5 1, 4.10−5

Tableau 3.1 – Paramètres thermophysiques identifiés pour une couche de redéposition recou-vrant le neutraliseur N1 de Tore Supra (deux zones de mesures ont été étudiées, cf. figure 3.17,[Gardarein 8a])

9cf. description donnée au chapitre 1, §1.2.1.3.

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Section 3.3

Une première estimation de la résistance de contact caractérisant ces dépôts avait également étéfournie grâce à l’étude de thermogrammes acquis in situ à l’aide de fibres optiques [Gardarein 8c]. Latechnique alors utilisée avait consisté à contraindre le calcul de flux de chaleur (par déconvolution destempératures de surface) lors de la phase de coupure de puissance, de manière à ne plus obtenir deflux négatif. La résistance de contact maximale estimée à l’interface dépôts/CFC depuis cette premièreétude était plus élevée (8.10−4 m2.K/W). Cette valeur correspondait à un dépôt carboné observé ensurface d’un neutraliseur après une exposition de ce dernier à 2000 secondes de plasma.

Figure 3.17 – Visualisation du dépôt carboné recouvrant une aiguille du neutraliseur N1 de ToreSupra (les zones de mesures 1 et 2 étudiées y sont indiquées) [Gardarein 8a]

Diverses études ont également été menées afin d’identifier les dépôts de carbone recouvrant lescomposants inertiels10 de la machine européenne JET (Culham, United Kindgom). Ces dernières ontmontré que les dépôts observés dans la machine JET se différencient du comportement capacitif descouches de redéposition observées sur le limiteur ou sur les neutraliseurs de Tore Supra. Les dépôtsrecouvrant le divertor du JET se caractérisent en effet par une montée en température instantanée àl’application de puissance, caractéristique de couches fortement résistives (cf. figure 3.18). De premièreétudes, reposant sur l’exploitation de mesures IR acquises in situ, ont permis d’identifier approxima-tivement la résistance de contact équivalente11 (notée 1/α, m2.K/W ) caractérisant les couches deredéposition observées au niveau des strike-point12 de la machine. Cette dernière est généralementcomprise entre 1.10−5 et 1.25.10−4 m2.K/W [Corre 03]. Une différence de comportement a éga-lement été observée entre les dépôts recouvrant les tuiles du divertor suivant leur situation dans lamachine côté Low-Field-Side ou High-Field-Side [Eich 07] (les dépôts situés côté interne de la machineprésentant des résistances de contact globalement plus fortes que les couches de redéposition observéssur les tuiles côté faible champ).

Une étude plus récente [Daviot 08] a également permis d’estimer de manière fiable une cartogra-phie 2D des résistances de contact caractérisant les couches de redéposition présentes en surface dedeux tuiles du divertor (extraites de la machine et analysées à l’aide d’un banc test). Les résistancesde contact alors estimées variaient entre 1.10−6 m2.K/W (résistance jugée négligeable) à 4.10−4

m2.K/W.

10C’est-à-dire non activement refroidis.11Telle que : 1/α = Req = Rc + ( e

λ)depots

12cf. définition donnée au chapitre 1 de ce mémoire.

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Chapitre 3

Figure 3.18 – Les dépôts observés sur le divertor du JET présentent un saut en température àl’application de la puissance caractéristique, d’une couche résistive [Daviot 07]

Les différences de comportement thermique observées pour les dépôts recouvrant les neutraliseursde Tore Supra ou les tuiles du divertor de la machine JET montrent la nécessité d’identifier de manièrespécifique les propriétés thermophysiques d’une couche de redéposition donnée avant estimationdu flux incident à sa surface. Tout paramètre thermophysique estimé pour un dépôt ne peut êtreextrapolé au calcul thermique mené sur une autre couche de redéposition. Les valeurs issues desanalyses présentées précédemment ne peuvent donc pas être employée pour calculer les flux incidentssur le limiteur. Tout calcul de flux réalisé sur le LPT nécessitera également au préalable l’estimationdes résistances de contact caractérisant ses tuiles dérogées.

Les résistances de contact caractérisant les tuiles dérogées observées sur le limiteur sont actuel-lement inconnues. Il en est de même pour les propriétés thermiques des dépôts carbonés recouvrantle composant. Les dépôts ou défauts observés étant très hétérogènes et pouvant évoluer au cours dutemps, tout calcul de flux réalisé en zone de redéposition ou sur une tuile singulière nécessitera depouvoir caractériser les propriétés de chaque élément indépendamment et sur une période d’exploita-tion proche de la décharge plasma étudiée. Nous proposons ici de caractériser les défauts et les dépôtsrecouvrant le limiteur de Tore supra en exploitant les relevés de températures infrarouges acquis insitu au cours de campagnes expérimentales. Le principe de la méthode d’estimation proposée ainsique sa validation sur un cas test sont exposés ci-après.

3.3.2 Présentation de la méthode d’identification du modèle de dépôt (ou dedéfaut) “optimal”

Plaçons nons le cas d’une tuile recouverte de dépôts carbonés. La déconvolution d’un relevé detempérature IR, sans prise en compte de son état de surface particulier, peut conduire à des niveauxde flux aberrants et à une dynamique n’ayant aucune justification physique. Ce type de comportementest illustré à la figure 3.19. Pour un même niveau de flux reçu, la température observée en surface

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Section 3.3

d’une tuile avec dépôt est plus élevée et son temps de réponse plus rapide qu’une tuile propre. La dé-convolution d’un relevé de température observé sur une tuile avec dépôts à l’aide d’un modèle inadaptéde type “tuile propre” entraîne alors un comportement anormal lors des transitoires thermiques (picsde flux non physiques) ainsi qu’une surestimation de l’amplitude du flux réellement reçu. La présenced’un dépôt, même fin et caractérisé par une faible résistance de contact, gêne donc l’estimation despuissances reçues en zone de redéposition. L’estimation du flux incident sur un élement recouvertde dépôt carboné implique d’adapter la modélisation quadripôles utilisée pour calculer la réponseindicielle du composant. Il en sera de même pour une tuile présentant un défaut d’interface.

Figure 3.19 – La déconvolution des températures observées en surface de dépôts carbonés (àl’aide d’une modélisation quadripôles type “tuile propre”) entraîne une surestimation des fluxincidents et l’apparition de comportements aberrants lors des phases transitoires (dépôt carbonésimulé : e = 100.10−6 m, λ = 40 W/m.K, a = 4, 8.10−5 m2/s, Rc = 2.10−5 m2.K/W)

En conditions expérimentales, les propriétés des dépôts ou défauts, de même que les niveaux deflux de chaleur atteints sur les tuiles concernées, sont indéterminés. La résolution de l’équation de lachaleur en régime stationnaire peut nous permettre d’écrire de manière simplifiée :

∆Tstat = TIR − Teau = Rtot.Qstat (3.31)

où Rtot représente la résistance totale de la tuile (cette dernière est à la fois dépendante des propriétésdes matériaux constituant le limiteur, mais aussi de la résistance thermique des défauts ou des dépôtsle recouvrant, figure 3.20).

117

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Chapitre 3

Figure 3.20 – Résolution de l’équation de la chaleur dans les couches de matériau en régimestaionnaire

En régime asymptotique, il sera impossible de dissocier les deux inconnus Rtot et Qstat. Seulel’étude de la dynamique des signaux IR observés en surface des tuiles avec dépôts ou dérogées lors desphases transitoires peut nous apporter une indication sur leurs propriétés. Le principe de la méthoded’estimation proposée dans cette étude repose sur le constat suivant (cf. figure 3.21) : pendant unedécharge plasma expérimentale, une tuile propre et une tuile avec dépôt (ou défaut) seront toutesdeux soumises à :

– des amplitudes de flux différentes,– une variation temporelle de flux identique, telle que :

Q(i)(t) = Qstat (i).g(t) (3.32)

où :• g(t) représente la dynamique du dépôt de chaleur reçu par le LPT, identique sur toutes ses tuiles.• Qstat (i) correspond à l’amplitude de flux maximum atteinte sur une tuile i, en régime stationnaire,inconnue dans le cas de tuiles recouvertes de dépôts (ou présentant un défaut).

L’allure de la fonction g(t) peut être déduite de l’allure du flux normé déposé sur une tuile propre deréférence. Cette dynamique, unique pour un choc donné, sera ainsi estimée depuis la relation suivante :

g(t) = Qrefnorm(t) = Qtuile propre(t)Qtuile proprestat

(3.33)

La fonction g(t) sera notée par la suite Qrefnorm(t)

118

Page 133: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.3

Figure 3.21 – L’ensemble des tuiles du limiteur (propre, avec dépôts ou défauts) est soumis à lamême variation temporelle de dépôt de chaleur

Le critère d’identification choisi pour caractériser les propriétés des dépôts ou défauts étudiésconsistera à reproduire au mieux la dynamique de référence du flux normé, commune à toutes lestuiles du LPT. Il est important de noter que l’écart à minimiser portera donc ici sur les flux calculés etnon directement sur les températures mesurées. Cette approche, non classique, est rendue nécessairepar le fait que nous cherchons à déterminer deux inconnues (à la fois le niveau de flux déposé sur latuile et les propriétés thermiques du dépôts ou défaut étudié).

La méthode d’estimation proposée aura donc pour objectif d’identifier le dépôt optimal permettantde corriger la dynamique de flux observée sur les tuiles avec dépôts ou défauts, et ainsi éliminer lespics de flux positifs et négatifs non physiques observés lors des transitoires thermiques (cf. exemplede la figure 3.19). Ce type de problème consistant à définir les paramètres d’un système physiqueen minimisant les écarts entre une référence et un modèle appartient à la catégorie des problèmesinverses d’estimation de paramètres ([Beck 77], [Aster 05], [D. Petit and D. Maillet 08]). Le fluxnormé que nous chercherons à ajuster sur la tuile avec dépôt ou défaut étudiée sera notée Qmodelenorm .

Le principe de l’algorithme d’identification proposé est résumé sur la figure 3.23. Les traitementssuccessifs appliqués aux thermogrammes étudiés avant optimisation sont schématisés à la figure 3.22.Chaque flux mis en jeu dans la routine d’identification résultera en effet de la déconvolution duthermogramme relevé sur une tuile (propre ou avec dépôt ou défaut), calculé depuis leur réponseindicielle respective. Ces flux seront également normés puis filtrés avant application de l’algorithmed’optimisation (figure 3.22). Un calcul par itérations successives sera réalisé afin d’ajuster pas à pas lespropriétés thermiques de chaque tuile avec dépôt ou défaut étudiée et corriger ainsi la valeur de leursréponses indicielles. Une estimation correcte du jeu de paramètres thermophysiques recherché devrapermettre au final de calquer les dynamiques du flux de référence Qrefnorm et du flux modélisé Qmodelenorm .

119

Page 134: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 3

Figure 3.22 – Les signaux mis en jeu dans l’algorithme d’identification sont soumis successive-ment à divers traitements (déconvolution, normalisation, filtrage)

Figure 3.23 – Algorithme d’optimisation proposé pour caractériser les propriétés thermiques desdépôts carbonés (ou des défauts) recouvrant le limiteur de Tore Supra

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Page 135: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.3

Les notations utilisées dans la suite de cette étude sont résumées ci-après. Les paramètres de laméthode d’identification (diamètre de filtrage, durée d’observation, normalisation) seront discutés au§3.3.4. Une estimation de l’erreur propagée dans l’algorithme y sera également fournie.

→ Modèle η et vecteurs paramètres

Calquer les signaux déconvolués obtenus en surface d’une tuile propre Qrefnorm(t) et ceux corres-pondant à une tuile avec dépôt ou défaut Qmodelenorm (t) nécessitera d’ajuster le modèle quadripôle choisien jouant sur le vecteur inconnu à identifier. Nous noterons par la suite :

• η : le modèle quadripôle “tuile+dépôts” ou “tuile+défaut” : η = Qmodelenorm (t, β)• βr : le vecteur contenant les propriétés à identifier• βc : le vecteur contenant l’ensemble des paramètres supposés connus (coefficient d’échange hc

et propriétés thermiques des autres matériaux : CFC, OFHC, CuCrZr)

→ Contraintes de la méthode

La méthode proposée repose sur l’exploitation de données expérimentales acquises in-situ etdoit donc répondre à deux contraintes majeures. D’une part, les mesures exploitées seront acquisesavec un échantillonage des données de 20 ms (fréquence d’acquisition du système IR fixée à 50Hz). Ce pas de temps d’acquisition ne permettra pas d’étudier le comportement des dépôts auxtemps courts (de l’ordre de la milliseconde ou inférieur) et de différencier les régimes thermiquessuccessifs établis dans les couches. D’autre part, les données étudiées seront également entachéesde bruit. Nous supposerons par la suite les erreurs de mesure indépendantes à chaque instantet le bruit observé sur les signaux gaussien centré (cette dernière propriété a déjà été vérifiéeà la figure 3.16 de ce mémoire). L’amplitude du bruit de mesure observé sur les températuresIR, de l’ordre de 0,2°C à 2°C, correspond à un rapport signal sur bruit compris entre 0.04 et0.5% du signal mesuré suivant son amplitude. Ces perturbations entraînent l’apparition de fluc-tuations d’écart-type 0.002 à 0.05 ua (soit 0.2 à 5%) sur les flux normés calculés Qnorm (avant filtrage).

→ Justification du choix de l’algorithme d’optimisation

Le but de la méthode d’optimisation est de fournir la meilleure estimation βr (solution approchée)du vecteur des paramètres exacts βr depuis l’exploitation de données bruitées. La recherche de cettesolution correspond donc à un problème de minimisation. Aucune information à-priori sur le vecteurβr n’étant disponible et le bruit observé sur les mesures étant aléatoire gaussien centré, nous avonschoisi d’utiliser l’estimateur des moindres carrés ordinaires (OLS, Ordinary Least Square [Beck 77],[Aster 05]) pour résoudre le problème posé. La fonction à minimiser permettant de caratériser lespropriétés thermophysiques des dépôts revient dans notre cas à :

J(βr) = ‖Qrefnorm(t)−Qmodelenorm (t, βr)‖2 (3.34)

Nous verrons par la suite que le modèle η(t, βr) étudié est non-linéaire par rapport à ses paramètres,la solution optimale βr minimisant la fonction J doit donc être approchée par une méthode itérative.Nous avons choisi d’utiliser l’algorithme de Gauss-Newton ([Beck 77], [D. Petit and D. Maillet 08])pour résoudre notre problème. Cette technique, de type gradient, permet d’optimiser le pas numériquedes calculs en supposant le modèle linéaire par rapport au vecteur βr à proximité de la solution.Cet algorithme nécessite d’être initialisé en imposant une valeur βr0 sur la solution pour la première

121

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Chapitre 3

itération. Cette valeur initiale est ensuite ajustée afin d’obtenir une évolution de la fonction Jcontinuement décroissante, jusqu’à l’arrêt des caculs vérifiant le critère basé sur la variation relativede βr(k) par rapport à βr(k − 1) (fixé à 1.10−4, soit 0.01% pour cette étude).

Nous avons choisi par la suite de n’étudier qu’une seule des phases transitoires du choc expérimen-tal étudié (39862), à savoir la phase d’amorçage du plasma (correspondant à la montée en températuredes tuiles). Nous n’étudierons pas les signaux Qrefnorm et Qmodelenorm lors de la coupure de puissance corres-pondant à la phase de refroidissement des tuiles. Avant de tester la méthode d’identification proposéeà un cas test simulé puis de l’appliquer aux données expérimentales, nous allons tout d’abord présenterles modèles quadripôles associés au modèles étudiés : “tuile+dépôt” et “tuile+défaut”.

3.3.3 Modélisations quadripôles des dépôts et défauts

3.3.3.1 Dépôts

Le recours aux quadripôles thermiques lors des calculs de flux réalisés sur les tuiles propre du LPTnous a permis de modéliser le composant à l’aide des blocs suivants :

– trois matrices de transfert représentant chaque tuile multicouche du limiteur (composées desmatériaux CFC, OFHC et CuCrZr - noté Cu par la suite),

– une matrice modélisant les échanges par convection entre la paroi en cuivre et l’eau de refroi-dissement.

Considérons maintenant une tuile recouverte d’une couche de redéposition. Afin de prendre encompte la présence d’un dépôt carboné en surface du limiteur, nous avons choisi d’ajouter deuxquadripôles “face avant” au schéma initial “tuile propre”.

Le premier quadripôle additionné correspondra à une matrice de type résistance, permettant deprendre en compte la mauvaise adhérence de la couche de redéposition formée sur la tuile. A ce premierbloc complémentaire sera également additionné un second quadripôle, de type capacitif. De récentesétudes ont en effet montré que les dépôts les plus épais observés sur le limiteur peuvent atteindreune épaisseur maximale de l’ordre 100 à 200 µm ([Gardarein 8c], §3.3.1), pour une conductivitécomprise entre 40 et 65 W/m.K et une diffusivité de l’ordre de 4.8.10−5 m2/s [Gardarein 8a]. Cespropriétés correspondent à un temps diffusif moyen dans une couche de redéposition de l’ordre de8ms. L’étude des dépôts aux temps très courts où l’hypothèse d’une couche fine et très conductrice(couche capacitive) n’est plus vérifiée ne pourra donc être effectuée compte-tenu de la fréquence fixéepour l’acquisition des données IR (50 Hz, ∆t = 20ms). Nous considérerons donc par la suite que lecomportement thermique des dépôts étudiés peut être modélisé à l’aide d’un matériau caractérisépar une capacité ct et dont la température est homogène sur toute son épaisseur (voir justificationdétaillée donnée en Annexe 3 de ce mémoire).

NB. Une modélisation du système “tuile+dépôts” à l’aide d’un quadripôle de type mur passif (pour ledépôt) additionné à une résistance de contact a également été testée dans le cadre de cette étude. Cepremier modèle, présenté à l’Annexe 3, n’a pas permis d’aboutir à des résultats concluants compte-tenudu faible échantillonage disponible pour les données expérimentales.

Le schéma quadripôle final proposé pour caractériser les dépôts carbonés sur le limiteur de ToreSupra est représenté sur la figure 3.24. Dans la suite de cette section, les notations : e (épaisseur), λ

122

Page 137: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.3

(conductivité), a (diffusivité), Rc (résistance de contact), Cp (chaleur massique), ρ (masse volumique)et ct (capacité) désigneront les propriétés thermophysiques des dépôts carbonés.

Figure 3.24 – Modélisation quadripôles d’une tuile du limiteur recouverte de dépôts carbonés(modèle capacité-résistance)

La modélisation quadripôles présentée à la figure 3.24 correspond à la formulation matriciellesuivante : [

Θ(0, p)Ψ(0, p)

]=[

1 0p.ct 1

] [1 Rc1 0

] [Atuile BtuileCtuile Dtuile

] [0

Ψ(e, p)

](3.35)

où :

ct = ρ.Cp.e représente la capacité du dépôt

Rc, sa résistance de contact

et[Atuile BtuileCtuile Dtuile

]représente la matrice de transfert du système “tuile propre” telle que :

[Atuile BtuileCtuile Dtuile

]=[ACFC BCFCCCFC DCFC

] [AOFHC BOFHCCOFHC DOFHC

] [ACu BCuCCu DCu

] [1 h−1

c

0 1

](3.36)

Le calcul de la réponse indicielle en surface du système “tuile + dépôt” dans l’espace de Laplacepeut s’effectuer de la même manière que pour les tuiles propres, en considérant :

Θ(0, p) = Btuile+depotDtuile+depot

1p

(3.37)

123

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Chapitre 3

Les termes Btuile+depot et Dtuile+depot, déduits du produit matriciel (3.35), sont dépendants desparamètres ct et Rc définissant le comportement thermique du dépôt et s’écrivent :

Btuile+depot = Atuile +Rc.Ctuile + hc.Btuile + hc.Rc.Dtuile (3.38)

Dtuile+depot = ct.p(Atuile +Rc.Ctuile + hc.Btuile + hc.Rc.Dtuile) + (Ctuile + hc.Dtuile) (3.39)

La méthode d’identification proposée va consister à ajuster la valeur de la réponse indicielle définieà l’équation 3.37 afin de calquer la dynamique de flux calculée sur la tuile avec dépôt étudiée sur lesignal de référence Qrefnorm. Le vecteur paramètre βr à identifier correspondra, dans le cas d’une tuilerecouverte de dépôt, à :

βr = [ct Rc] (3.40)

La fonction J à minimiser s’exprimera quant à elle :

J(ct, Rc) = ‖Qrefnorm(t)−Qmodelenorm (t, ct, Rc)‖2 (3.41)

La figure 3.25 illustre le tracé des réponses indicielles d’une tuile recouverte de dépôt (pour ct = 150J/m2.K et Rc = 7.10−4 m2.K/W ) et d’une tuile propre du limiteur. Une tuile recouverte de carboneprésente généralement une réponse plus rapide (τ95% = 0.8s sur cet exemple contre 3.5s pour la tuilepropre) et une élévation de température plus importante qu’une tuile avec dépôt (majorée d’un facteur100 sur l’exemple donné).

(a) Echelle linéaire (b) Echelle log

Figure 3.25 – Réponses indicielles d’une tuile propre (en bleu) et d’une tuile recouverte de dépôts(en rouge, propriétés de la couche : ct = 150 J/m2.K, Rc = 7.10−4 m2.K/W)

Les coefficients de sensibilité relatifs à ce modèle seront étudiés au §3.3.4 : Validation de la méthoded’identification sur un cas test simulé (ces coefficients correspondront à la sensibilité du modèle η =Qmodelenorm aux variations de ct et Rc).

124

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Section 3.3

3.3.3.2 Tuiles dérogées

Afin d’exprimer quantitativement la présence de défauts à l’interface de tuiles dérogées, unenouvelle modélisation quadripôles doit également être créée. Les calculs menés dans cette étudeétant monodimensionnelle, nous ferons l’hypothèse que les défauts observés s’étendent sur toute ladimension de l’interface CFC/cuivre des tuiles concernées.

Les trois tuiles avec défauts étudiées ne présentent pas de dépôts carbonés à leur surface, seul unquadripôle représentant le contact imparfait entre les couches de CFC et OFHC est donc ajouté aumodèle initial “tuile propre”(cf. figure 3.26). Cette dernière modélisation correspond à l’expressionquadripôle suivante :

[Θ(0, p)Ψ(0, p)

]=[ACFC BCFCCCFC DCFC

] [1 Rdef1 0

] [AOFHC BOFHCCOFHC DOFHC

] [ACu BCuCCu DCu

] [1 h−1

c

0 1

] [0

Ψ(e, p)

](3.42)

Figure 3.26 – Schéma quadripôle correspondant à une tuile présentant un défaut à l’interfaceCFC/cuivre

Le seul paramètre inconnu à identifier pour caractériser une tuile dérogée est alors :

βr = Rdef (3.43)

De la même manière que pour un élément recouvert de dépôts carbonés, le défaut de cohésionprésent dans une tuile du limiteur sera calculé grâce à un ajustement successif du paramètre βr = Rdef(scalaire). Cette optimisation du paramètre βr permettra le calcul de la réponse indicielle reproduisantau mieux la dynamique de flux de référence (Qrefnorm). La fonction J à minimiser dans l’algorithme deGauss-Newton devient dans le cas d’une tuile avec défaut :

J(Rdef ) = ‖Qrefnorm(t)−Qmodelenorm (t, Rdef )‖2 (3.44)

125

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Chapitre 3

La figure 3.27 illustre la réponse indicielle obtenue pour une tuile présentant un défaut de cohésion13de 2, 5.10−5 m2.K/W . La réponse de la tuile avec défaut simulée est légèrement plus lente que celled’une tuile propre (τ95% = 3.9s contre 3.5s). De même, la température de surface de l’élement dérogéest plus élevée que celle observée sur une tuile sans défaut. Nous pouvons constater une augmentationde la température atteinte à l’état stationnaire de l’ordre de 30% pour l’exemple donné.

Figure 3.27 – Comparaison des réponses incidielles obtenues pour une tuile propre du limiteur(en bleu) et pour une tuile présentant un défaut d’interface Rdef = 2, 5.10−5 m2.K/W (en rouge)

3.3.4 Validation de la méthode d’identification sur un cas test et estimation deserreurs propagées dans les calculs

Nous allons préalablement tester la méthode d’identification des dépôts (et défauts) proposéesur un cas test numérique avant de l’appliquer à l’analyse de mesures expérimentales in-situ. Nousproposons de tester au préalable l’algorithme sur cas test simulé.

Le cas test simulé dans le cadre de cette validation correspond à :– une tuile recouverte de dépôt (le vecteur βr à estimer est donc composé de deux paramètres : ct

et Rc),– le dépôt modélisé présente une capacité thermique faible : ct ≈ 166 J/m2.K,– ce dernier est également mal attaché au substrat en CFC : Rc = 7.10−4 m2.K/W ,– L’allure temporelle de flux incident imposé en surface du composant est équivalente à un créneaude flux d’une durée de 10s et d’amplitude 1 MW/m2 pour la tuile propre de référence et 0.5MW/m2 pour la tuile avec dépôt,

– un bruit gaussien centré sera également ajouté aux thermogrammes ∆T simulés en surface destuiles (l’écart-type de ce dernier, σbruit ≈ 0.5 %, correspond au cas le plus défavorable observésur les mesures expérimentales),

13Cette valeur a été choisie par anticipation des résultats obtenus au §3.5.2.1. Elle correspond à la résistance de contactmaximale observée sur la tuile D3 présente sur la visée HR.

126

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Section 3.3

– Les vecteurs flux Qrefnorm et Qmodelenorm comparés dans l’algorithme d’identification correspondrontaux signaux déconvolués depuis les thermogrammes simulés. Ces vecteurs flux seront normés puisfiltrés (cf. schéma 3.22 présenté précédemment). Les valeurs Qstat respectives sur lesquelles serontnormés les signaux correspondront à l’amplitude stationnaire moyenne de flux calculée sur unplateau de n=80 pts (dans le cas du signal modélisé Qmodelenorm , cette valeur sera actualisée à chaqueitération où le jeu de paramètre βr, et donc le vecteur flux, seront modifiés). Les perturbationshautes fréquences observées sur les flux Qrefnorm et Qmodelenorm seront filtrées par moyenne glissantesur n=4 points.

Le couple de paramètres [ct Rc] choisi pour modéliser la couche de dépôt simulée dans cette sectioncorrespond approximativement au dépôt de plus petite capacité thermique identifié en surface dulimiteur (les valeurs indiquées ci-dessus ont été choisies par anticipation des résultats expérimentauxprésentés au §3.5 de ce chapitre). La valeur de capacité choisie pour le cas test (166 J/m2.K) estégalement cohérente avec les propriétés identifiées pour les dépôts des neutraliseurs (λ = 40 W/m.Ket a = 4.8.10−5 m2/s, [Gardarein 8a]) si l’on suppose l’épaisseur du dépôt équivalente à e = 200.10−6m.

Nous avons préféré un filtrage par moyenne glissante des signaux à un traitement fréquentiel deces derniers, notamment en raison de sa rapidité de mise en oeuvre. La moyenne glissante appliquée,équivalente à un fitre passse-bas appliqué sur les données, permet de plus de réaliser un lissageadéquat des signaux en réduisant un bruit initial d’écart-type σbruit = 0.05 ua à une valeur σbruit ≈0.02 ua sur les flux normés étudiés. L’utilisation d’un diamètre de filtrage plus élevé n’a pas été jugéenécessaire. Un lissage trop important des données pourrait en effet entraîner une atténuation nondésirée des phénomènes transitoires rapides (fronts montants de flux) nécessaires à l’identification despropriétés thermiques des dépôts.

Le tableau récapitulatif suivant synthétise les paramètres de la simulation. Nous avons pu vérifierà chaque étape du calcul (déconvolution, normalisation, filtrage) que le bruit de mesure présent surles données traitées restait gaussien centré.

Tuile propre Tuile avec dépôtFlux simulé (créneau) : Qstat 1 MW/m2 0.5 MW/m2

∆Tstat 80°C 390°Cbruit sur ∆T (t) σ ∼= 0.5% (0.4°C), moy ≈ 0 σ ∼= 0.5% (2°C), moy ≈ 0bruit sur Q(t) σ ∼= 5% (0.05 MW/m2), moy ≈ 0 σ ∼= 1% (0.02 MW/m2), moy ≈ 0bruit sur Qnorm(t) σ ∼= 5% (0.053 ua), moy ≈ 0 σ ∼= 5% (0.044 ua), moy ≈ 0bruit sur Qfiltrenorm(t) σ ∼= 1.8% (0.018 ua), moy ≈ 0 σ ∼= 1.2% (0.012 ua), moy ≈ 0

Tableau 3.2 – Résultats issus d’une étude du bruit observé sur les signaux IR simulés (test dela méthode d’identification)

La durée d’observation des signaux (tn) choisie pour l’étude du cas test simulé sera de 6s. L’op-timisation des paramètres de l’algorithme (normalisation, filtrage, durée tn) sera discutée en fin desection. Une estimation de la propagation des erreurs induites par le traitement des données y seraégalement fournie pour le cas test étudié.

127

Page 142: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 3

3.3.4.1 Etude des coefficients de sensibilité du modèle “tuile+dépôt”

La figure 3.28a illustre les flux incidents simulés en surface des tuiles propre et avec dépôt modéli-sées. Les thermogrammes résultants de la convolution de ces flux avec la réponse indicielle respectivede chaque tuile sont présentées à la figure 3.28b (rappelons que les relevés de températures simulésont été bruités).

(a) Flux initiaux imposés (b) Thermogrammes simulés, σbruit ≈ 0.5 % (sur les deuxrelevés de température)

Figure 3.28 – Flux incidents simulés (de dynamique identique mais d’amplitudes différentes) ensurface d’une tuile propre et d’une tuile avec dépôts (a) (Rc = 7.10−4 m2.K/W , ct = 166 J/m2.K)et thermogrammes numériques bruités correspondants (b)

Les coefficients de sensibilité réduits relatifs aux paramètres ct et Rc utilisés dans la simulationprécédente sont tracés à la figure 3.29. Ces coefficients représentent l’influence d’une variation relativede chacun des paramètres à identifier sur la valeur du modèle “tuile+dépôts”. Ces derniers s’expriment :

Zct(t) = ct.∂η(t, ct, Rc)

∂ct(3.45)

ZRc(t) = Rc.∂η(t, ct, Rc)

∂Rc(3.46)

où : η = Qmodelenorm (t, ct, Rc)

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Section 3.3

Figure 3.29 – Coefficients de sensibilité réduits du modèle “tuile+dépôts” pour les paramètresct = 166 J/m2.K et Rc = 7.10−4 m2.K/W - Réponse à un échelon de flux : Q = 0.5 MW/m2 (bruitécar issu de la déconvolution d’un thermogramme bruité)

NB. Le saut de valeur observé pour le premier pas de temps de la simulation est induit par le sous-échantillonage des données. Chaque coefficient de sensibilité est en effet tracé pour un échantillonagecorrespondant à la fréquence d’acquisition réelle des données expérimentales : f= 50 Hz (dt=0.02 s).

L’étude du graphique 3.29 montre que les deux paramètres ct et Rc ne sont que très légèrementdécorrélés. La différence de comportement observée entre les deux coefficients est minime (nouspouvons notamment observer un changement de signe du coefficient ZRc à partir du temps t= 0.4saprès application de la sollicitation en flux). Cette corrélation entre les propriétés thermophysiquesdu dépôt étudié montre l’utilité de réaliser une moyenne glissante sur les signaux étudiés avantapplication de l’algorithme d’optimisation. Les différences observées entre les coefficients de sensibilitédu modèle η “tuile+dépôts” doivent en effet être supérieures à l’amplitude du bruit sur les signauxà minimiser si l’on souhaite pouvoir identifier chacun des paramètres ct et Rc. Cette condition estvérifée : 3σ < 0.06 après filtrage des signaux Qnorm (contre 3σ=0.16 avant filtrage, cf. tableau 3.2).

L’analyse des coefficients de sensibilité peut également fournir une indication sur la duréed’observation minimale des signaux. Nous nous apercevons, au vu de la figure 3.29, que l’amplitudedes coefficients de sensibilité calculés est maximale lors du transitoire de flux imposé sur les tuiles (àt=0.02s). Les valeurs des coefficients Zct et ZRc tendent ensuite vers zéro pour les temps supérieurs à0.5s après application de la sollicitation en flux. Une durée d’observation de 0.5s serait donc suffisantepour identifier les paramètres. La durée d’observation tn=6s choisie pour identifier le dépôt simuléest toutefois largement supérieure à ce temps (nous avons étudié le plateau stationnaire de flux surune durée longue, la justification de cette large fenêtre d’observation sera donnée au §3.5.2.1).

129

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Chapitre 3

Nous nous sommes placés, de part le cas test choisi, dans la situation d’une identification difficiledes propriétés du dépôt (les coefficients de sensibilité étant très peu décorrélés). L’application del’algorithme d’optimisation aux données simulées bruitées nous a tout de même permis d’identifierun jeu de paramètres ct (169 J/m2.K) et Rc (6.8.10−4 m2.K/W ) très proche des valeurs imposéesinitialement (après 4 itérations de l’algorithme et pour une valeur initiale imposée βr0 =[120 J/m2.K et5.10−4 m2.K/W ]). La figure 3.30 illustre le résultat obtenu après optimisation de la dynamique de fluxcalculé sur la tuile avec dépôt modélisée. La moyenne du résidu obtenu sur la solution Qmodelenorm est nulle.Son écart-type (0.02 ua) est supérieur au bruit de mesure observé sur les données traitées. L’estimationdes propriétés du dépôt simulé nous a permis de reconstruire le créneau de flux initialement imposésur la tuile (0.5 MW/m2 en régime stationnaire) avec une erreur inférieure à 2%.

(a) Résultats de l’algorithme d’identification : signauxQrefnorm et Qmodelenorm (avant et après optimisation), résidusur la solution

(b) Flux initial imposé (en rouge) - Créneau de flux re-construit sur la tuile avec dépôt après identification desparamètres ct et Rc (en vert)

Figure 3.30 – Validation de l’algorithme d’identification proposé sur un cas test - Propriétésidentifiées : Rc = 6.8.10−4 m2.K/W , ct = 169 J/m2.K

La méthode d’identification proposée -basée sur l’analyse de thermogrammes déconvolués, normés,puis filtrés- ne fournit qu’une estimation approchée βr des paramètres thermiques réels de la couche deredéposition. La présence d’une erreur sur les valeurs estimées est en effet inévitable. Cette dernièrepeut être induite notamment par le bruit observé sur les mesures, par le traitement des signauxen température, ou par l’obligation de fixer des paramètres supposés connus (vecteur βc) lors dela résolution du problème d’optimisation. L’étude menée au paragraphe suivant a pour objectif defournir une valeur de l’incertitude sur les propriétés thermiques identifiées au moyen de l’algorithmed’optimisation proposé.

3.3.4.2 Estimation des erreurs propagées dans l’algorithme d’identification au moyende simulations stochastiques (Monte-Carlo) [Trigeassou 88]

a - Biais induit par le traitement des signaux

Le bruit de mesure observé sur les données expérimentales peut être variable suivant les tuiles oules décharges étudiées. Etant donné la connaissance approximative que nous avons de ces erreurs, l’uti-lisation d’une méthode stochastique s’est avérée plus adéquate que l’étude de la matrice de covariance

130

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Section 3.3

du modèle afin de quantifier l’incertitude sur les valeurs de ct et Rc induite par le bruit de mesure(nous pouvons également noter que le filtrage des données peut également entraîner une corrélation14de ce bruit de mesure après traitement et gêne ainsi l’estimation de la matrice de covariance). Une sta-tistique de Monte-Carlo réalisée sur 1000 simulations nous a permis de quantifier le biais induit par lefiltrage de ce bruit de mesure, mais aussi par la déconvolution et la normalisation des signaux étudiés.Ces résultats sont présentés à la figure 3.31. La valeur imposée pour l’initialisation de l’algorithmed’identification lors de ces calculs était : βr0 =[120 J/m2.K, 5.10−4 m2.K/W ].

(a) Nuage d’estimation des valeurs de ct et Rc identifiées à partir de donnéessimulées bruitées

(b) Histogramme des valeurs de flux estimées (σ = 0.03 MW/m2, 6%)

Figure 3.31 – Une estimation successive des paramètres de la couche de dépôt simulée nous apermis de retrouver les valeurs initiales imposées dans le modèle (ct, Rc et Qstat) avec un biais :ect =1%, eRc =3% et eQstat =2%

14Cette corrélation n’a pas été quantifiée.

131

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Chapitre 3

L’erreur globale propagée dans les calculs pour le cas test étudié peut être estimée depuis lesgraphiques de la figure 3.31. Les valeurs moyennes de capacité ct et de résistance de contact Rcobtenues après 1000 simulations successives sont respectivement de 167.8 J/m2.K et de 6.8.10−4

m2.K/W (contre un couple de valeurs de 166 J/m2.K et 7.10−4 m2.K/W imposées initialementdans le modèle). Ces valeurs représentent un biais respectif sur les paramètres ct et Rc de 1% et 3%.Les propriétés thermophysiques du dépôt modélisé ont été quantifiées avec un écart-type respectifde 7.8 J/m2.K pour le terme capacitif et de 4.10−5 m2.K/W pour la résistance de contact. Lesidentifications successives de la couche de redéposition ont conduit à une estimation moyenne du fluxincident sur la tuile avec dépôt de 0.51 MW/m2 en régime stationnaire (contre 0.5 MW/m2 imposéinitialement).

L’inclinaison du nuage d’estimation représentant les valeurs de ct et Rc estimées indique quel’erreur d’identification des deux paramètres est corrélée. Compte-tenu des résultats obtenus, trèsproches des valeurs initiales imposées dans le modèle, nous n’avons pas cherché à optimiser le codede calcul proposé afin de décorréler l’erreur sur l’estimation de ces deux grandeurs.

NB. Une optimisation de la durée d’observation tn pourrait permettre d’améliorer le nuage d’estima-tion obtenu et de décorréler l’estimation des deux paramètres ct et Rc. Divers outils mathématiquespourraient alors être proposés afin de calculer la durée d’observation optimale permettant d’estimerau mieux le vecteur paramètre inconnu (réalisation d’une statistique de Monte-Carlo à différents tn,ou encore, calcul d’un critère quantitatif basé sur l’appréciation du déterminant modifié de la matricehessienne du modèle [Aster 05]). Ces outils n’ont pas été utilisés dans cette étude.

b - Influence de la présence d’un artefact numérique sur le signal de référence

D’autres perturbations additionnées au bruit centré gaussien sur les données peuvent égale-ment entraîner un biais sur les propriétés estimées. Nous avons en effet pu constater, lors de ladéconvolution de signaux expérimentaux, l’apparition d’artefacts numériques sur les flux calculéslors de fronts raides de puisssance (cet effet est illustré à la figure 3.32a). La présence de cesartefacts peut être due à la non prise en compte des transferts thermiques 2D dans les tuiles ouà la non-linéarité du problème. Les hypothèses simplificatrices posées pour résoudre l’équationde la chaleur dans le composant à l’aide d’un modèle 1D linéaire peut donc entraîner une re-construction approximative des transitoires thermiques. Dans le cas où ces artefacts perturbent lesignal de référence Qrefnorm, une erreur supplémentaire peut alors être induite sur les propriétés estimées.

Une série de 1000 simulations numériques nous a permis de quantifier ce biais (nous avons pour celaétudié le même cas test que précédemment). Les valeurs initiales ct et Rc imposées dans le modèle ontpu être estimées avec une précision respective de 13% et 7% dans le cas d’un signal Qrefnorm perturbé parla présence d’un artefact égal à 40% de la valeur de flux Qstat (cf. figure 3.32b). La capacité moyenneestimée depuis ces simulations était de 188 J/m2.K, la valeur moyenne obtenue pour le paramètre Rcde 7.5.10−4 m2.K/W (les deux paramètres sont donc finalement surestimés). Le biais sur la valeur deflux Q(t) reconstruite depuis ces valeurs moyennes est alors à 6% (le flux moyen reconstruit, atteignant0.42 MW/m2, est sous-estimé). Les biais obtenus pour ce cas test sont plus importantes que cellesobservées pour des signaux seulement perturbés par un bruit centré gaussien. Les erreurs que nousavons quantifiées restent toutefois raisonnables. Nous pouvons observer que dans le cas où un artefact

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Section 3.3

apparaît sur le signal de référence, l’agorithme d’identification ne cherche pas à reproduire exactementla perturbation numérique présente mais lisse sa valeur en reconstruisant l’allure générale de l’échelonde flux observé sur tn = 6s (figure 3.32a).

(a) Résultats de l’algorithme d’identification : signaux Qrefnorm et Qmodelenorm (aprèsoptimisation), résidu sur la solution

(b) Nuage d’estimation des valeurs de ct et Rc identifiées : ect =13%, eRc =7%

Figure 3.32 – Estimation des paramètres ct et Rc à partir de données simulées bruitées et enprésence d’un artefact numérique sur le signal Qrefnorm à la montée en puissance

133

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Chapitre 3

c - Influence des paramètres supposé connus βc

Le signal de référence Qrefnorm, utilisé dans l’algorithme d’optimisation, correspond lui-même à unedonnée traitée, issue de la déconvolution d’un échauffement observé en surface d’une tuile propre.Afin d’estimer les propriétés des dépôts, l’ensemble des flux (flux de référence Qrefnorm et flux norméssur un dépôt ou un défaut Qmodelenorm ) sont donc calculés pour un même coefficient d’échange convectif(fixé à une valeur standard de 30 000 W/m2.K). Ce paramètre, supposé connu, peut influencer ladynamique des flux déconvolués en surface des tuiles que nous cherchons à calquer. De la mêmemanière, une erreur commise sur les propriétés thermiques des matériaux composant les aiguilles dulimiteur peut également modifier les transitoires de flux calculés.

Afin de quantifier l’erreur introduite par un biais sur ces paramètres supposés connus, nous avonsréalisé deux nouvelles statistiques de Monte-Carlo en introduisant tout d’abord dans le modèle uneerreur sur le coefficient hc, puis sur la diffusivité aCFC . Les résultats issues de ces simulations sontprésentés à l’Annexe 4. Ces derniers montrent qu’une surestimation du coefficient d’échange convectifdans les canalisations entraîne une sous-estimation de la capacité thermique identifiée et du flux inci-dent imposé. A l’inverse, une surestimation du paramètre hc entraîne une surestimation de la résistancede contact du dépôt. Les simulations illustrées à l’Annexe 4 correspondent au cas test précédemmentétudié (ct =166 J/m2.K, Rc =7.10−4 m2.K/W , Qstat =0.5 MW/m2). Pour cet exemple, un biais surle coefficient d’échange hc de +/- 5 000 W/m2.K (16%) entraîne une erreur sur les paramètres et leflux stationnaire identifiés inférieure à 18%. Une erreur commise sur le paramètre hc perturbe donc demanière acceptable l’identification des propriétés thermiques des dépôts et des flux déposés en surfacedes tuiles du limiteur.

L’influence d’une erreur possible commise sur la diffusivité thermique du CFC (+/-5%) a égalementété testée. Nous avons observé que cette dernière peut entraîner un biais sur les propriétés estimées del’ordre de 30% (< ct >=[124-210] J/m2.K et < RC >=[5.42-9.3.10−4] m2.K/W contre 166 J/m2.Ket 7.10−4 m2.K/W imposées initialement dans le modèle). Le biais sur le flux Qstat calculé atteintalors 26% pour le cas test étudié. Ces résultats démontrent que l’identification des paramètres desdépôts est sensible aux propriétés thermiques des matériaux fixées pour définir le comportement destuiles du limiteur.

3.3.4.3 Coefficient de sensibilité du modèle “tuile+défaut”

La possibilité d’identifier un défaut de cohésion à partir de données expérimentales dépendra elleaussi de la valeur de la résistance de contact du défaut étudié et du niveau de bruit observé surles mesures. La figure 3.33 (page suivante) illustre l’évolution du coefficient de sensibilité réduit dumodèle “tuile+défaut” présenté au §3.3.3.2 pour une valeur de Rdef simulée de 1.7.10−5 m2.K/W ,correspondant à la plus petite résistance de contact estimée (tuile D1). Les données simulées considéréespour ce cas test ont été bruitées avec un écart-type égal à 0.5% de la température maximale atteinteen stationnaire sur la tuile modélisée. Ce niveau de bruit entraîne des perturbations de l’ordre de0.02ua sur le flux normé filtré Qmodelenorm à optimiser (après filtrage). Un test stochastique effectué sur1000 simulations nous a permis d’estimer la valeur Rdef simulée pour ce cas test avec une précision de6%. L’erreur sur le flux incident reconstruit à partir cette estimation est alors inférieure à 1%. Nouspouvons également noter que la résistance de contact minimale présente à l’interface CFC/cuivrepouvant être estimé à partir de ces données bruitées est de l’ordre de 1.10−6 m2.K/W (pour unedurée d’observation tn fixée à 6s et une valeur βr0 imposée dans l’algorithme de 1.10−5 m2.K/W ).

134

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Section 3.3

Figure 3.33 – Coefficient de sensibilité réduit : influence du paramètre Rdef sur le modèle“tuile+défaut”

3.3.5 Conclusion du paragraphe 3.3 : Validation de la méthode d’identification

Les barres d’erreur calculées pour le cas tests présentés précédemment ont montré la robustesse del’algorithme d’identification proposé. Les paramètres thermiques ct et Rc d’une couche de redépositionsimulée ont pu être estimés de manière fiable depuis l’exploitation de données bruitées. L’exempleprécédent nous a aussi démontré que l’estimation d’une faible résistance de contact à l’interfaceCFC/cuivre au moyen de la méthode proposée est également possible. Cette caractérisation despropriétés thermiques des dépôts carbonés (ou de défauts) nous a alors permis un calcul fiable des fluxincidents sur les tuiles concernées (e<2% dans le cas d’une erreur supposée nulle sur les paramètresconnus βc).

Compte-tenu de la bonne précision des résultats obtenus précédemment, nous avons choisi de nepas mener d’étude d’optimisation de l’algorithme d’identification proposé. Les données expérimentalessélectionnées pour caractériser les défauts ou les dépôts en surface du limiteur seront analysées avecun paramétrage identique de l’algorithme d’identification (modèle capacitif pour le dépôt, duréed’observation tn longue, données filtrées par moyenne glissante). Ces résultats expérimentaux serontcommentés au §3.5. Les pistes d’améliorations ainsi que les perpsectives offertes par les premièresanalyses menées dans cette étude seront quant à elles abordées au §3.6.

Nous avons présenté dans les sections précédentes la méthode de calcul de flux utilisée pour estimerles quantités de chaleur déposées en surface du limiteur. Un algorithme permettant d’identifier lespropriétés thermiques des dépôts carbonés ou des défauts gênant l’interprétation des images IR aégalement été présenté et validé. Afin de mener des calculs de flux adaptés sur chacune des 600tuiles observées par la voie IR haute résolution, les méthodes proposées ont récemment été intégréesdans un nouveau code de traitement quantitatif des images IR. Le développement de cette nouvelleinferface logicielle (présentée dans la section suivante) s’est avéré nécessaire, d’une part pour localiseret différencier les tuiles propres de celles recouvertes de dépôts carbonés depuis les images IR, et

135

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Chapitre 3

d’autre part pour obtenir en temps différé (dans un temps raisonnable, <5 min) des cartographies deflux permettant de reconstituer l’évolution dynamique de dépôt de chaleur sur le composant au coursd’une décharge (films de flux IR).

3.4 Développement d’un logiciel de traitement des images infra-rouges : WOLFF

L’intégration, dans un même outil, de méthodes de calcul de flux et de traitement des imagesIR a abouti au développement d’un nouveau logiciel : WOLFF (pour Warping ToOL For Fusion,[Carpentier 07], [Dunand 06], [Moncada 06]). Cette interface présente à l’heure actuelle de nombreusesfonctionnalités permettant l’interprétation physique des images IR ou de spectroscopie visible de ToreSupra. Seule une présentation des outils associées au traitement des images IR sera fournie dans cemémoire. Les fonctions développées pour l’étude des flux en surface du limiteur sont décrites ci-après.

3.4.1 Reconnaissance de la forme des tuiles composant la surface du LPT parwarping des images IR

Nous avons pu voir précédemment que les images IR du limiteur sont fortement perturbées parla présence de dépôts carbonés en surface du substrat en CFC. La présence de ces dépôts sur deszones largement étendues complique l’interprétation des images IR car ils empêchent d’assimilerdirectement les flux réellement déposés aux niveaux de températures observées. Pour évaluer le fluxincident reçu par le composant, il est nécessaire de mener un calcul tenant compte de ces différencesd’état de surface. Nous présentons ici une méthode de reconnaissance de forme appliquée aux imagesdu limiteur. Ce traitement a pour objectif de repérer, sélectionner et trier les pixels associés auxdifférentes tuiles (propres ou recouvertes de dépôts).

Une contrainte liée au dimensionnement du système IR visant le LPT a rendue la mise en oeuvrede cette méthode de reconnaissance de formes délicate. Les images IR fournies par les endoscopes sonten effet déformées par rapport à une vue “réelle” du composant. Le système optique utilisé sur ToreSupra étant centré, les distorsions introduites par l’instrumentation sont nulles ou très faibles. Lesdéformations observées sur les images IR sont donc essentiellement dues à des effets de grandissementg définissant la distance d’un point de l’objet visé par rapport à la pupille du système optique :

g = y′

y(3.47)

avec :– g : grandissement– y′ : distance focale– y : distance entre le point visé et le centre optique de la première lentille

136

Page 151: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.4

Figure 3.34 – Les images IR du LPT subissent un effet de grandissement

Les effets de grandissement, variables suivant la zone observée, entraînent dans le cas du LPT unedéformation non homothétique de ses images IR. Afin de repérer de manière automatique le motif destuiles du limiteur sur les cartographies de température , il est nécessaire de pouvoir recaler la surfacevisée par la caméra HR sur les dimensions réelles du composant. Une transformation géométriqueadaptée à chaque point de la cartographie de température devient alors nécessaire.

Nous proposons d’utiliser un procédé de warping [Wolberg 90] afin de recaler les images IR acquisessur les dimensions réelles du composant. Les principe de cette méthode de warping consiste toutd’abord à placer des points de contrôle (PDC) sur l’objet réel et sa visée déformée. Dans le cas duLPT, ces images correspondront à un plan 2D de la géométrie du limiteur (figure 3.35a) et à une imageIR choisie à un temps t de la décharge étudiée (figure 3.35b). L’algorithme de warping permet alorsde faire coïncider les points de contrôle définis préalablement par l’utilisateur en appliquant à chaquepixel de l’image IR déformée un champ de vecteur déplacements (les points de contrôle étant placésde manière discrète, la déformation continue de l’image sera déduite de l’interpolation élastique duchamp de déplacement calculé). La figure 3.36 représente la déformation appliquée pour le warpingdes images IR du choc 39862. Cette dernière illustre l’effet de grandissement subi par les cartographiesIR, majoritairement étirées vers la droite de l’image et compressées dans le plan horizontal.

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Chapitre 3

(a) Image “réelle” du secteur du LPT vue par la voie IR haute résolution(dimensions : bureau d’études)

(b) Image IR du LPT, voie HR

Figure 3.35 – Les points de contrôle placés sur les vues réelle (a) et IR (b) du LPT (voie HR)permettent de recaler les deux images dans la même géométrie

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Section 3.4

Figure 3.36 – Champ de déformation résultant du warping des images IR du choc 39862 (vecteursdéplacement des PDC)

Le procédé de warping mis en oeuvre permet de recaler l’ensemble des images IR d’un film duLPT dans la géométrie 2D réelle du composant. Cette déformation permet alors de repérer automati-quement la forme des tuiles sur les images étudiées (cf. figure 3.37) grâce à une segmentation effectuéedepuis l’image “réelle” du composant (au moyen d’un algorithme d’extraction de contour [Vigra])transposée ensuite au film IR. Cette discrétisation des images IR n’aurait pas été rendue possibledepuis l’exploitation des images IR brutes du composant. L’effet gaufrier permettant la visualisationdes tuiles de CFC consituant la surface du LPT n’est en effet que partiellement visible sur ces images(il est par exemple inexistant dans les zones ombrées du composant).

Figure 3.37 – Résultat du warping des images IR du choc 39862 - L’image IR est discrétisée,chaque pixel de l’image est alors associé à un élément référencé du LPT (tuile)

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Chapitre 3

La méthode de warping proposée présente l’avantage d’être modulable afin de s’adapter à unchangement de position du système infrarouge ou des composants. Ces changements de visée sonten effet courants lors des arrêts de la machine pour maintenance ou lors d’expériences nécessitantla translation de certains CFP pour des raisons opérationnelles (changement d’altitude du limiteurde l’ordre de quelques centimètres face au plasma par exemple). La transformation géométriquecalculée au moyen des points de contrôle peut être modifiée en corrigeant aisément leur position surles images de référence. Cette adaptation serait moins aisée si nous avions considéré une déformationfixe de l’image, fournie par exemple par une simulation CAO d’une vue du LPT, observée depuis lesystème optique en haut de la machine. Ce type de simulation ne prendrait en effet en compte qu’ungrandissement fixé des images, à une position donnée.

NB. L’algorithme de warping présenté dans ce paragraphe a été développé au cours d’un stage réalisépar G. Dunand [Dunand 06] puis intégré à l’interface graphique finale de WOLFF par V. Moncada[Moncada 06].

3.4.2 Discrétisation des images IR et extraction des relevés de températures T (t)par régions d’intérêts

La discrétisation des images IR montrée ci-avant correspond à une segmentation orientée région([H. Maitre 05], [Canny 86]) de l’objet limiteur. Cette segmentation va nous permettre de définir ai-sément des masques de calcul où seront estimés les flux de chaleur incident. La figure 3.38 illustre parexemple la sélection automatique d’une région d’intérêt (ROI, ou region of interest) de 11 tuiles aucentre du LPT.

Figure 3.38 – Exemple d’une sélection de 11 tuiles au centre du LPT et image monochrome cor-respondant à la région d’intérêt créée (ce masque de calcul permet de segmenter automatiquementles images d’un film IR)

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Section 3.4

La région d’intérêt représentée à la figure 3.38 peut être sauvegardée sous forme d’une imagemonochrome où les valeurs des pixels du masque sont égales à 1 (les pixels exclus du masque sontquant à eux fixés à 0). La multiplication terme à terme entre la région d’intérêt générée depuis l’imageréelle du limiteur (masque) et les images d’un film IR permet ainsi d’extraire automatiquement lesrelevés temporels de température de surface de chaque tuile sélectionnée (les données sont alorssauvegardées sous forme de fichiers ascii contenant la température moyenne de chaque tuile, pourchaque pas de temps d’acquisition).

Déconvoluer les températures des tuiles du limiteur va également nécessiter de s’affranchir de l’effetgaufrier pouvant entraîner une surestimation des températures moyennes atteintes sur chaque élementde surface (cf. figure 3.39a). Seule la température atteinte par quelques pixels au centre de chaqueélément sera donc considérée par la suite pour estimer les flux surfaciques réels sur le composant .Afin d’exclure des masques de calcul les pixels perturbés par la présence de dépôts dans les gaps, tousles éléments tuiles composant une région d’intérêt seront érodés à l’aide d’un opérateur de morphologiemathématique ([H. Maitre 05], [Matheron 89]).

(a) Relevés de températures Tmoy effectués sur une tuile dulimiteur

(b) Région d’intérêt composée d’une seule tuile, avantet après érosion morphologique du masque de calcul

Figure 3.39 – Evolution temporelle de la température de surface d’une tuile de CFC, choc 39862(comparaison avant et après érosion morphologique du masque de calcul). En rouge : relevé réalisésans érosion morphologique de la région d’intérêt, le gaufrier n’est pas exclu, la températuremoyenne est surestimée - En bleu : relevé réalisé pour une ROI après erosion morphologiqued’un facteur 5.

Le post-traitement proposé pour les masques de calcul (érosion morphologique) permet ainsi dene plus prendre en compte les températures surestimées sur le bord des tuiles. Le facteur d’érosion(n=5) choisi pour le traitement des images IR permet de ne considérer que la température moyenneatteinte sur 3 à 5 pixels au centre de chaque tuile du limiteur.

Nous avons confronté le relevé de température effectué depuis la ROI précédente à la températureassociée à un seul pixel de cette même tuile15. La figure 3.40 montre que les deux relevés réalisés dansces conditions sont très proches.

15Ce type de relevé a pu être réalisé depuis la définition d’une région d’intérêt manuelle sous WOLFF (non issue de lasegmentation automatique des images IR) et limitée à un seul pixel.

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Chapitre 3

Cette comparaison illustre plusieurs résultats intéressants :– Le faible écart entre les deux températures prouve que nous pouvons considérer macroscopi-

quement16 la température homogène sur la surface d’une tuile (un seul vecteur flux Q(t) parélément de surface pourra donc être calculé par la suite afin d’obtenir une image du dépôt dechaleur complète sur le composant).

– Le relevé de température moyen réalisé automatiquement sur 3 à 5 pixels au centre de chaquetuile est fiable et reflète de manière correcte la température de l’élément considéré (le gaufrier aété convenablement exclu de la région d’intérêt et ne peut plus entraîner de surestimation de lal’échauffement observé).

– La moyenne des températures réalisée au centre de chaque tuile permet également un premierfiltrage du bruit présent sur les données expérimentales (d’écart-type ≈ 2°C sur la tuile étudiée).

Figure 3.40 – Comparaison des relevés de températures réalisés au coeur d’une tuile. En bleu :région d’intérêt automatique de la tuile, érodée d’un facteur 5 - En vert : région manuelle définiesur un pixel

La discrétisation des images IR nous a permis de nous affranchir automatiquement de la premièresignature des dépôts, représentant l’effet gaufrier, par une exclusion automatique des pixels corres-pondant aux gaps entre tuiles. Dans le cas de tuiles entièrement recouvertes de dépôts ce traitementne sera pas suffisant et un calcul thermique spécifique, réalisé au moyen modélisation quadripôle adé-quate, devra être mené. Le paragraphe suivant présente les résultats issus de différents calculs de fluxréalisés sur le LPT, à la fois en surface de tuiles propres mais aussi de tuiles recouvertes de dépôtscarbonés (les propriétés thermiques identifiées pour les couches de redéposition concernées y serontégalement commentées). Les cartographies obtenues en surface du limiteur recouvert de dépôts lorsde la campagne DITS (choc 39862) seront également comparées à l’empreinte de dépôt de chaleurcalculée sur le composant après sa remise à neuf (nettoyage complet des dépôts réalisé en 2008).

16Une distribution non uniforme de température sur un composant en CFC peut être observée à l’échelle microscopique.Ces phénomènes de pointes, généralement liés à la structure filamentaire du CFC ou à la présence de poussières très finessur la surface du composant [Delchambre 03], [Herrmann 04], [Fougerolle 07], n’influenceront pas les mesures réaliséessur le LPT compte-tenu de la résolution spatiale du système IR utilisée (4 mm).

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Section 3.5

3.5 Calculs de flux réalisés sur le limiteur(tuiles propres ou recouvertes de dépôts carbonés)

3.5.1 Estimation des flux incidents sur les tuiles propres du LPT (zones d’érosionet zones ombrées)

Nous proposons dans un premier temps d’étudier les flux de chaleur déposés sur les tuiles propresdu limiteur uniquement. Nous commenterons ici la cartographie de flux obtenue en surface du limiteurpour un choc de la campagne DITS (39862).

L’exclusion des dépôts carbonés des calculs thermiques nécessite de pouvoir localiser précisémentsur les images IR les tuiles recouvertes de dépôts et de les différencier des tuiles propres. La difficultéde ce type d’analyse réside dans la confusion possible entre les tuiles présentant un échauffement réeldû à un fort flux incident et celles présentant une température de surface anormale, révélatrice de laprésence d’une couche de redéposition. La prise de photos réalisées in situ lors de l’ouverture de lamachine peut permettre un premier repérage grossier des zones de redéposition sur le limiteur. Cesinspections ne sont toutefois que ponctuelles et donc insuffisantes pour assurer un repérage fiabledes dépôts (le motif précis des zones de redéposition peut en effet évoluer rapidement au cours descampagnes expérimentales, suivant la configuration magnétique imposée au plasma).

Plusieurs techniques, toutes basées sur l’analyse des températures de surface IR, ont été précé-demment étudiées sur Tore Supra afin de localiser les dépôts carbonés sur les CFP ou d’évaluer leurcroissance ([Corre 05], [Mitteau 06], [Mitteau 07b]). Nous avons choisi ici d’utiliser une combinaisonde trois méthodes d’analyse des images IR afin de localiser précisément les couches de redéposition ensurface du LPT. Ces dernières ont consisté à :

– étudier la réponse en température de l’ensemble des tuiles du limiteur lors d’évènements transi-toires rapides (disruptions, définition donnée au chapitre 2, §2.3.2.2),

– étudier le temps de réponse de ces mêmes tuiles lors de transitoires moins rapides (phasesd’amorçage ou de coupure de puissance “standards”) afin de compléter l’analyse menée à partirdes disruptions,

– et enfin, à vérifier le motif de redéposition repéré à l’aide des deux méthodes précédentes en leconfrontant à une image obtenue après nettoyage du composant.

Le principe de ces trois méthodes d’analyse est détaillé en Annexe 5 de ce mémoire. L’utilisationconjointe de ces trois traitements nous a permis de définir le masque présenté à la figure 3.41 pour lecalcul des flux sur les tuiles propres du limiteur lors du choc 39862 (campagne DITS). L’utilisationcombinée des trois méthodes pré-citées nous permet d’assurer la fiabilité du repérage des dépôtseffectué. Nous pouvons noter que le masque de calcul présenté pour le choc 39862 ne sera valableque pour l’analyse thermique des décharges de la campagne DITS. Tout calcul de flux réalisé lors del’étude d’une nouvelle session expérimentale nécessitera la réactualisation du motif de dépôt repérésur le limiteur.

Le masque présenté à la figure 3.41 comprend 594 régions d’intérêt correspondant chacune à unetuile du LPT. Les tuiles repérées en rouge correspondent à l’empreinte des dépôts carbonés et auxtrois tuiles présentant des défauts de cohésion. Nous pouvons observer la présence de tuiles recouvertesde dépôts en partie haute de l’image IR. Ces éléments sont en effet situés en périphérie d’une zoneB de forts flux et peuvent donc être soumis à des phénomènes de redéposition d’atomes de carbonearrachés dans la zone d’érosion voisine. L’ensemble des tuiles constituant le bord d’attaque du limiteurcôté fort champ est également recouverte de dépôt.

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Chapitre 3

Figure 3.41 – Masque de calcul de flux créé avec WOLFF. En rouge : tuiles avec dépôts et défauts(n=288) - En blanc : tuiles propres (n=306, soit 52% de la surface visée)

La figure 3.42 illustre le résultat du calcul de flux réalisé pour le choc 39862. La puissance addition-nelle hybride injectée dans le plasma pour ce choc atteignait 2MW en régime stationnaire. Les valeursde flux estimées sont issues de la déconvolution des échauffements moyens (∆T (t) = T (t) − Tinit)observés au centre de chaque tuile du LPT (le gaufrier a été exclu des calculs). Chacun desrelevés de température traité a également été filtré par moyenne glissante17 sur n=4 points (80ms)afin d’éviter l’apparition d’oscillations non physiques sur les flux calculés (seulement induites parle bruit de mesure). Le motif 2D de dépôt de chaleur reconstruit sur le limiteur correspond àl’interpolation par triangulation de Delaunay ([Klette 04], [Chassery 91]) des valeurs de flux cal-culées au centre de chaque tuile propre18 (la cartographie non interpolée est présentée à la figure 3.43).

Les propriétés des matériaux constituant les aiguilles du limiteur (CFC, OFHC, CuCrZr) ont étéconsidérées à une température de référence de 200°C pour ces calculs. Les propriétés thermophysiquesde l’eau ont quant à elle été choisies à une température de 120°C (les relevés de calorimétrie illustrésau chapitre 2, figure 2.1 ont en effet confirmé que la température de l’eau dans les canaux de refroidis-sement ne variait pas au-delà de -2/+5°C autour de cette valeur initiale pour toute décharge étudiéegrâce au système de régulation mis en oeuvre sur Tore Supra).

17Pour le choix de cette méthode : cf. justification donnée au §3.2.4 de ce mémoire.18L’interpolation par triangulation de Delaunay des valeurs de flux calculées au centre de chaque tuile du LPT donne

un résultat similaire à une interpolation élastique de ces mêmes valeurs [Dunand 08].

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Section 3.5

La distribution spatiale des flux incidents calculés sur le LPT est globalement conforme au motifde dépôt de chaleur attendu en théorie. Nous retrouvons sur cette cartographie les zones définies à lasection 3.1 de ce chapitre, à savoir :

– Deux aires B directement connectées aux lignes de champ confinant le plasma : les flux incidentsestimés dans ces régions sont compris entre 0,6 MW/m2 et 1,5 MW/m2 pour le choc étudié.

– Nous pouvons également distinguer la zone C située “à l’ombre du plasma”. Les flux de chaleurcalculés dans cette région sont compris entre 50 et 350 kW/m2.

– La zone A, correspondant aux couches de dépôts de carbone, est également repérée sur lafigure 3.42 (cette aire a été exclue des calculs thermiques lors de cette première analyse).

Figure 3.42 – Cartographie de flux incidents calculée sur le limiteur (résultat obtenu après uneinterpolation 2D des valeurs de flux estimées au centre de chaque tuile) - Voie HR, choc 39862,Pchauffage ∼= 2MW - L’images présentée correspond à une trame du film de flux obtenu sousWOLFF (à t=20s)

Si la cartographie de flux calculée sur le limiteur permet de retrouver dans l’ensemble l’empreintethéorique des flux incidents sur le composant, la présence de forts pics de chaleur proches des dépôts decarbone est toutefois inattendue. Les flux maximums expérimentaux sont en effet localisés sur les tuilesvoisines de la zone A de redéposition. Ces derniers devraient être en théorie plus éloignés des zonesombrées. Cette différence entre le motif de dépôt de chaleur observé expérimentalement et l’empreintethéorique de flux incident attendue sur le limiteur sera développée plus en détail aux chapitres 4 et 5de ce mémoire.

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Chapitre 3

Figure 3.43 – Cartographie de flux incidents sur le limiteur, image non interpolée

La figure 3.44a illustre les évolutions temporelles de flux calculées sur deux tuiles propres de lavisée HR pour le choc étudié (scénario plasma représenté à la figure 3.44b). Nous pouvons observersur cette figure la présence d’artefacts numériques de flux lors des phases transitoires de montée enpuissance et de coupure du plasma. Ces derniers mettent en évidence la limite de la méthode decalcul de flux utilisée, ne permettant pas toujours une reconstruction parfaite de phénomènes troprapides. Les artefacts observés sont majoritairement prononcés lors de l’application de la puissance(montée en température des tuiles) mais également lors de coupures ponctuelles de chauffage seproduisant lors du choc. Ainsi, si la déconvolution des températures de surface IR permet de réaliseren un temps réduit19 des cartographies de flux incident en surface du composant, la non priseen compte de possibles transferts thermiques 2D, de la non-linéarité de propriétés des matériauxou une mauvaise évaluation du coefficent d’échange convectif peut entraîner une reconstructionapproximative de transitoires thermiques rapides. Nous pouvons toutefois noter que les flux calculésmontrent globalement une bonne cohérence avec l’allure temporelle de dépôt de chaleur attendu surle composant pour le choc étudié, dépendant majoritairement de la dynamique de puissance injectéedans le plasma pour choc20 (figure 3.43b).

NB. La présence de tels artefacts numériques n’est pas systématique lors des calculs de flux menés surle LPT. L’apparition de ces derniers dépend notamment des fronts plus ou moins raides de puissancesubies par les tuiles au cours des décharges plasma.

19Le temps de calcul nécessaire au traitement des 8500 images IR de ce choc est inférieur à 5 minutes.20La fraction de puissance rayonnée est en effet restée constante pour ce choc, impliquant de ce fait un dépôt de chaleur

stationnaire sur le LPT, directement dépendant de l’allure temporelle de la puissance injectée.

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Section 3.5

(a) Flux calculés (MW/m2) (b) Puissance de chauffage totale : Phybride + Pohmique(MW )

Figure 3.44 – Evolutions temporelles de flux calculées sur deux tuiles propres du limiteur (a)pour le choc long 39862 - campagne DITS, Pchauffage(t) ∼=2 MW (b)

Nous avons estimé dans ce paragraphe la quantité de chaleur déposée sur 325 tuiles propres dulimiteur. Cette superficie représente environ 3% de la surface totale du composant et 52% de la viséeinfrarouge observée par la caméra haute résolution de Tore Supra. A ce stade de l’étude, la quantité dechaleur reçue par les couches de dépôts carbonés reste cependant encore inconnue. La méthode de calculde flux utilisée, flexible, peut être facilement adaptée aux couches de redéposition. Nous proposonsdans le paragraphe suivant de réaliser des calculs de flux sur les zones perturbées du limiteur en nousconcentrant sur la région du composant soumise à de fortes interactions plasma-paroi (en partie gauchede l’images IR). Les propriétés des dépôts carbonés et des défauts de cohésion présents dans cette zoneseront également estimées depuis l’analyse de données expérimentales acquises in-situ.

3.5.2 Calcul de flux sur les tuiles avec dépôts ou présentant un défaut d’interface

3.5.2.1 Estimation des propriétés thermiques des dépôts et défauts observés sur unéchantillon de 24 tuiles du LPT (campagne DITS)

Afin de compléter la cartographie de flux incidents calculée sur le limiteur (cf. figure 3.42 duparagraphe précédente), nous allons nous intéresser plus particulièrement à la caractérisation desdépôts recouvrant 21 tuiles de CFC dans la partie gauche de l’image IR. Cette analyse sera égalementcomplétée par la caractérisation des 3 tuiles avec défauts repérées sur la visée HR au §3.1.3 (laméthode d’identification proposée sera donc appliquée sur un total de 24 tuiles possédant des propriétésthermiques distinctes). La zone d’étude correspondant à ces 24 élements est repérée sur l’image 3.45.Cette région se situe à proximité d’une zone mouillée B recevant de forts flux et correspondant à lazone de connexion de la dernière surface magnétique fermée confinant le plasma (DSMF21) sur lelimiteur (nous verrons aux chapitres 4 et 5 que l’étude de cette région présente un intérêt particulierpour l’analyse des flux de chaleur circulant dans la SOL).

21cf. définition donnée au chapitre 1

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Chapitre 3

Figure 3.45 – La reconstruction du motif de flux dans la zone proche de la DSMF nécessite lacaractérisation de 21 dépôts carbonés et de 3 tuiles présentant des défauts de cohésion

a - Choix du signal de référence

Nous proposons d’étudier la phase transitoire de montée en puissance pour une décharge plasmade la campagne DITS (choc 39862) afin de caractériser les défauts et dépôts observés en surface dulimiteur. La figure 3.46 illustre la consigne en puissance (ohmique et hybride) imposée au plasma audébut de ce choc (t=0 à 16s).

Figure 3.46 – Pohmique(t) et Phybride(t) - Puissances alimentant le plasma, choc 39862 (t=0 à 16s)

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Section 3.5

L’étude des coefficients de sensibilité du modèle dans le cas d’un dépôt simulé (§3.3.4) nous amontré qu’une durée d’observation tn inférieure 1s après application d’une sollicitation en flux seraitsuffisante pour identifier les paramètres d’une couche de redéposition. Nous avons toutefois choisi detravailler avec une durée d’observation tn longue égale à 16s (soit n=800 points) dans le cadre del’exploitation des mesures expérimentales de la campagne DITS. Cette large fenêtre d’observationpermettra en effet d’identifier le vecteur βr en étudiant la réponse de chaque dépôt sur deux phases dechauffage transitoires consécutives, à savoir : la phase d’amorçage ohmique du plasma, et la montéeen puissance additionnelle hybride. Ce temps d’observation de 16s est également rendu nécessaireen raison de la mise en régime stationnaire parfois longues pour certains dépôts étudiés (tstat >14s). Nous avons de plus observé une forte sensibilité du calcul à la valeur initiale β0 imposée dansl’algorithme pour de trop faibles durées d’observation.

Le critère d’identification choisi pour caractériser les dépôts (et défauts) en surface du limiteurconsiste à calquer sur une allure temporelle normée de référence (Qrefnorm(t)) la dynamique de fluxcalculée sur chaque tuile perturbée. Dans le cas de décharges plasma exéprimentales, la dynamiquede référence Qrefnorm(t) n’est pas connue. Nous proposons d’obtenir une estimation de cette fonctionen déconvoluant les réponses en température d’un échantillon de plusieurs tuiles propres. Le choixde cette allure de référence suppose que la dynamique de flux calculée sur chacune des tuiles choisiessoit représentative de la dynamique réelle du flux déposé sur le LPT. Nous présumons également dece fait que l’allure temporelle de dépôt de chaleur sur le composant est uniforme sur toute sa surfaceet unique pour un choc donné (les amplitudes de flux sont quant à elle variables suivant la tuileconsidérée).

Nous pouvons vérifier ces dernières hypothèses en analysant les données expérimentales du choc39862 (cf. figure 3.47). Ce graphique représente l’évolution temporelle de la montée en température dequatre tuiles propres du limiteur (repérées à la figure 3.47a), situées dans des zones distinctes d’inter-actions plasma-paroi (zones plus ou moins mouillées par le plasma ou zones totalement ombrées). Lestempératures IR représentées ont été normées afin de s’affranchir du niveau maximum de températureatteint sur chaque élement et ne considérer que la dynamique de leur réponse (cf. figure 3.47c).L’allure temporelle des montées en température pour les quatre tuiles étudiées est identique. Ladistribution des quatre courbes (illustrée à la figure 3.47d) présente un écart-type de l’ordre degrandeur du bruit de mesure observé sur les signaux normés en température (σdistribution ∼= σbruit ∼=0.01 ua).

NB. Les évolutions temporelles de température observées pour ces quatre tuiles à la coupure depuissance (en fin du choc 39862) sont également très proches. L’écart-type de la distribution dessignaux normés, à l’extinction du plasma, est toutefois légèrement plus élevé que lors de la montée enpuissance.

Nous pouvons également effectuer une décomposition SVD de la matrice Mref correspondant auregroupement des quatre signaux de référence choisis telle que :

[U,W, V ] = svd(Mref ) (3.48)

avec :

Mref = [T1(t) T2(t) T3(t) T4(t)]

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Chapitre 3

où :– U, matrice carrée, de taille (n, n) constitue la base orthonormale des vecteurs singuliers deMref ×MT

ref : les termes de U décrivent la variation spatiale des données.– W est une matrice carrée, diagonale, de taille (n, n) dont les termes diagonaux ωi correspondentaux valeurs singulières de Mref .

– V est une matrice carrée, de taille (n, n) dont les colonnes constituent la base orthonormale desvecteurs singuliers de MT

ref ×Mref et décrivent la variation temporelle des données.

Le premier vecteur singulier associé à cette décomposition SVD fournit alors l’information tempo-relle recherchée22 (dynamique de référence en température) telle que :

T refnorm(t) = U(1, 1)×W (1, 1)× V (1, 1 : n) (3.49)

La fonction T refnorm(t) est représentée en magenta sur la figure 3.47. Le flux de référence Qrefnorm(t)déduit de la déconvolution de ce signal est représenté à la figure 3.48.

(a) Sélection de quatre tuiles du LPT (vueIR warpée, image à t=20s)

(b) Echauffements ∆(t) = T (t) − Tinit observéspour les 4 tuiles étudiées

(c) Echauffements normés (durée d’observation =16s) - Tuiles de référence repérées à la figure (a) -En magenta, dynamique de référence (décomposi-tion SVD)

(d) Ecart-type de la distribution des signaux nor-més représentés à la figure (c) (σdistribution ∼= 0.01ua)

Figure 3.47 – La dynamique du dépôt de chaleur sur le limiteur peut être considérée identiquesur toutes les tuiles du composant

22Seules les quatre premières valeurs singulières du système sont non nulles : W(1 :4) = [45.1 0.44 0.38 0.28]

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Section 3.5

Nous pouvons observer que le flux de référence calculé depuis la température T refnorm présente uneévolution piquée après application de la puissance hybride. Nous avons vérifié que ce pic de fluxne représentait pas une réelle évolution du dépôt de chaleur en surface du composant en étudiantnotamment les évolutions des puissances Prad et Pcond déposés sur les composants. L’évolution deflux piquée observée correspond à un artefact numérique induit par la déconvolution des signaux entempératures. Ce type de perturbation (déjà observée à la figure 3.44) n’apparait pas systématiquementsur les relevés de flux calculés depuis les données IR. Son apparition dépend notamment des transitoiresde dépôt de chaleur subis par les tuiles lors d’une décharge (fronts plus ou moins raides de puissance).Nous avons choisi par la suite de ne pas lisser cet artefact numérique dont la durée est inférieureà 0.6s. Cet dernier peut en effet également apparaître lors de la déconvolution des températures desurface de tuiles avec dépôt (en raison notamment des hypothèses simplificatrices du modèle utilisé,1D linéaire). Nous considérerons par la suite cet artefact équivalent à un bruit supplémentaire (nongaussien centré) pouvant perturber les calculs d’identification (cf. étude des barres d’erreur menée au§3.3.4). La présence de telles perturbations justifie également la longue durée d’observation choisiepour optimiser la dynamique des signaux étudiés (permettant d’étendre les calculs jusqu’au plateaustationnaire de flux).

Figure 3.48 – Flux de référence choisi pour l’estimation des propriétés des dépôts carbonés et desdéfauts présents sur le limiteur de Tore Supra (choc 39862) - Qrefnorm(t) est issu de la déconvolutiondes échauffements de tuiles propres

NB. L’utilisation d’un signal de référence Qrefnorm(t) calquée sur l’évolution temporelle de puissanceinjectée dans le plasma (Pchauffage(t), figure 3.46) n’a pas non plus été retenue pour l’identificationdes dépôts recouvrant le limiteur. Le recours à ce type de dynamique à-priori pourrait en effet induireune erreur supplémentaire sur l’identification des propriétés thermiques des dépôts dans le cas dephénomènes d’interactions plasma-paroi sur le limiteur non corrélées avec l’allure de puissance injectéepour certains chocs. Une évolution piquée de puissance déposée sur le composant (“réelle” dans ce cas)peut en effet être observée si la fraction rayonnée dans le plasma n’est pas constante. Ce phénomènetransitoire a notamment été mis en évidence par l’étude des signaux calorimétriques du choc 37725(cf.chapitre 2, figure 2.23). Cette constatation justifie le choix de considérer un signal de référenceissu du traitement des températures de surface IR du LPT (et non d’autres signaux mesurés dans lamachine), même si ce dernier est perturbé.

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Chapitre 3

b - Estimation des propriétés thermiques des dépôts

La figure 3.49 illustre le résultat fourni par l’algorithme d’optimisation pour un des 21 dépôtsétudiés. La déconvolution de la température de la tuile avec dépôt avec un modèle “tuile propre”inapproprié entraîne l’apparition d’un pic de flux à la montée en puissance supérieur à l’artefactnumérique observé sur le signal de référence Qrefnorm. La dynamique anormale de flux observée sur lesignal Qmodelenorm pour βr = 0 (courbe rouge) traduit donc à la fois une perturbation introduite parle modèle 1D linéaire mais aussi une déconvolution effectuée depuis un modèle thermique inadaptéau dépôt. L’utilisation de la méthode d’optimisation nous a permis de contraindre la dynamiquedu signal observé sur la tuile avec dépôt à une allure plus réaliste, proche de l’allure du flux deréférence. L’algorithme mis en oeuvre ne reconstruit pas précisément l’artefact initial présent sur lesignal Qrefnorm, traité comme un bruit de mesure. Le profil Qmodelenorm (βropt) calculé passe “au travers” de cette oscillation sans pour autant l’éliminer (nous admettrons que les flux calculés en surfacedes tuiles avec dépôts peuvent également présenter des artefacts numériques dus au front raide depuissance subi par les tuiles à l’application du chauffage hybride). La valeur initiale imposée dansl’algorithme d’identification pour caractériser le dépôt était : βr0=[150J/m2.K 1.10−4m2.K/W ]. Lecalcul a convergé au bout de 12 itérations pour cet exemple.

Figure 3.49 – Qnorm obtenus à la montée en puissance (choc 39862). En bleu : signal de référence- En rouge : déconvolution de la température d’une tuile avec dépôt sans prise en compte de lacouche de redéposition - En vert : résultat obtenu après optimisation du modèle “tuile+dépôts”(paramètres estimés : Rc = 2.13.10−4 m2.K/W et ct = 917 J/m2.K)

L’écart-type du résidu obtenu sur la solution Qmodelenorm (βropt) et du bruit de mesure observé sur lessignaux traités sont synthétisés dans le tableau 3.3. Nous pouvons nous apercevoir que le résidu sur lasolution obtenue est supérieur au bruit de mesure observé sur les données. Nous ne chercherons pas àobtenir de résultats plus précis. Obtenir un résidu plus faible entraînerait en effet le risque de prendre

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Section 3.5

en compte les différentes perturbations présentes sur les signaux lors du calcul d’optimisation (netraduisant en aucun cas une information physique relative à la réponse thermique des tuiles étudiées).

Signal σ (ua)Qrefnorm 0.048Qmodelenorm 0.053Résidu solution 0.056

Tableau 3.3 – Ecarts-types du résidu sur la solution et du bruit de mesure observé sur les signaux

La méthode d’estimation, appliquée aux données expérimentales du choc 39862, nous a finalementpermis de caractériser les couples de paramètres [ct Rc] pour chacune des 21 tuiles avec dépôts étudiées.Les valeurs de capacité et de résistance estimées depuis l’algorithme de Gauss-Newton sont synthétiséesdans le tableau 3.4. Les gammes de propriétés identifiées, très larges, prouvent que les dépôts observésen surface du limiteur sont très hétérogènes.

Propriété thermique σ (ua)ct (J/m2.K) 150 à 1600Rc (m2.K/W ) 2.5.10−5 à 2.10−3

Tableau 3.4 – Gammes de valeurs indentifiées pour les propriétés ct et Rc caractérisant les 21dépôts carbonés étudiés

L’étude in-situ des dépôts recouvrant le limiteur de Tore Supra nous a permis de caractériserdifférentes couches de redéposition présentes dans la machine. Les valeurs de propriétés thermiquesidentifiées se montrent globalement cohérentes avec les valeurs issues de précédentes analyses menéesau JET ous sur les neutraliseurs de Tore Supra (cf. §3.3.1). Les larges gammes de propriétés identiféessont également cohérentes avec les différents états de surface des dépôts observés sur le limiteur(couches fines, épaisses, adhérentes, décollées). Les plus faibles valeurs de capacité peuvent ainsitraduire la présence de dépôts fins ou de dépôts poreux, voire désagrégés (de faible masse volumique).L’estimation de fortes capacités thermiques semble quant à elle induire la présence de dépôts épais oupeut également correspondre à l’hypothèse de couches très cohésives (et donc très denses). La valeurmaximale de capacité thermique estimée (1600 J/m2.K) paraît tout de même excessive et sembleindiquer une mauvaise caractérisation des propriétés du dépôt concerné. La caractérisation de valeursélevées de résistance de contact (Rmaxc =2.10−3 m2.K/W ) traduit quant à elle la présence de dépôtstrès mal attachés. Une analyse en laboratoire d’échantillons de carbone prélevés sur le composantest indispensable si nous souhaitons valider les valeurs de propriétés thermophysiques identifiées (cedernier point sera discuté plus en détail dans la section “Perpectives” de ce chapitre).

c - Identification de la résistance de contact caractérisant les trois tuiles dérogées

L’algorithme d’optimisation a également été appliqué aux trois tuiles dérogées repérées sur lavisée HR du limiteur. Les résistances de contact caractérisant les défauts D1, D2 et D3 pour le choc39862 étudié sont respectivement de 1, 7.10−5, 6.10−5 et 2, 6.10−4 m2.K/W . La figure 3.50 illustrele résultat obtenu après optimisation du flux calculé en surface de la tuile D2. Le résidu sur cettesolution présente un écart-type (0,08 ua) supérieur à la valeur du bruit de mesure observé sur le signalQtuile proprenorm (σbruit = 0, 04 ua). Nous pouvons noter que le résultat de l’algorithme d’identification

153

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Chapitre 3

pour cette tuile (courbe verte) est largement influencé par la présence de l’artefact de flux sur lesignal Qrefnorm. Les valeurs de résistance de contact identifiées pour les tuiles dérogées peuvent doncêtre entachées d’erreur et doiventêtre considérées assez approximatives.

Figure 3.50 – Qnorm obtenus à la montée en puissance (choc 39862). En bleu : signal de référence -En rouge : déconvolution de la température de surface de la tuile dérogée D2 sans prise en comptedu défaut - En vert : résultat obtenu après optimisation (Rdef estimée : 6.10−5 m2.K/W)

La méthode d’estimation mise en oeuvre dans cette étude nous a fourni de premières valeursde résistance de contact et de capacité thermique des dépôts recouvrant le limiteur de Tore Supra.Les propriétés estimées vont maintenant être utilisées pour calculer les flux en surface des 24 tuilesidentifiées et compléter ainsi la cartographie de dépôt de chaleur pour le choc 39862 étudié dans lazone proche de la DSMF.

3.5.2.2 Cartographie de flux incident réalisée dans la zone proche de la DSMF (cam-pagne DITS)

L’estimation des propriétés thermiques caractérisant les dépôts et défauts observés en partie gauchede l’image IR nous a permis de compléter l’image du dépôt de chaleur sur le limiteur. La figure 3.51illustre le résultat du calcul de flux réalisé sur le composant, au niveau de la région visée par la voieHR présentant une forte interaction avec le plasma. Les calculs de flux ont été menés à la fois sur lestuiles propres mais aussi sur les élements dérogés et recouverts de carbone grâce à l’implémentationde trois modèles quadripôles distincts (les valeurs des propriétés thermiques caractérisant les dépôtsou les défauts sont précisées dans WOLFF au moment de la création des masques de calcul).

154

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Section 3.5

Figure 3.51 – Complément de la cartographie des flux incidents déposés sur le limiteur pour lechoc 39862 - Caractérisation de 21 tuiles recouvertes de dépôts et des 3 tuiles présentant desdéfauts de cohésion (la zone étudiée correspond à la région d’interaction avec le plasma situéeproche de la DSMF)

La reconnaissance des éléments perturbés par la présence de dépôts carbonés ou de défauts nous aainsi permis de nous affranchir d’éventuelles erreurs d’interprétation engendrées par l’observation detempératures de surface anormalement élevées sur les images IR. Les calculs thermiques réalisés doiventen principe révéler l’empreinte de flux incident réelle sur le LPT. Les flux surfaciques déduits aprèsestimation des propriétés thermiques des dépôts atteignent à l’état stationnaire un niveau compris entre160 kW/m2 et 2,4 MW/m2 en zone A (de redéposition). Ces niveaux de flux sont plus importantsque ceux attendus initialement dans une région où la redéposition du carbone prédomine.

L’estimation de flux surfaciques élevés sur les couches de redéposition peut avoir deux origines :– La première correspond à la présence réelle de forts flux incidents sur les dépôts, induisantde ce fait un possible étalement du dépôt de chaleur théorique dans cette région. Les dépôtscarbonés situés à proximité des zones mouillées (régions B) seraient alors soumis à la fois aurayonnement en provenance du plasma mais également à des flux de chaleur conduits (Qcond,chapitre 1, §1.2.3). Cette constatation contredit la théorie (la cohérence entre les cartographiesexpérimentales et théoriques de flux sur le limiteur sera étudiée plus en détail dans les chapitres4 et 5 suivants).

– Les flux calculés sur les zones de redéposition sont également soumis aux même barres d’erreurque les flux estimés en zone “propre” (cf. §3.2.4). A cette première incertitude peut alors serajouter une erreur associée à la méthode d’estimation des propriétés thermiques des dépôts (cf.§3.3.4) pouvant engendrer une surestimation des flux déposés.

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Chapitre 3

Une comparaison entre le motif de flux incident calculé précédemment et celui observé sur lelimiteur avant apparition des dépôts permettrait de valider les calculs de flux réalisés précédemment.Cette comparaison avec une cartographie obtenue sur le limiteur “neuf” ne peut hélas être effectuée.Les différentes campagnes menées depuis le montage du limiteur dans la machine (en 2001) ne disposentpas de données IR acquises à l’aide du système haute résolution pour des scénarios similaires au choc39862 étudié (mêmes conditions plasma : Pchauffage, courant Ip, frad). Nous proposons en revanchedans le paragraphe suivant d’exploiter un choc récent similaire à la décharge 39862, réalisé après unnettoyage complet des CFP ayant permis d’éliminer la totalité des dépôts carbonés à leur surface.

3.5.3 Cartographie de flux incidents calculée après le nettoyage du LPT (2008)

Le motif de flux de chaleur calculé précédemment sur le LPT peut être perturbé par une erreurd’estimation des propriétés thermiques des dépôts recouvrant la zone étudiée. Afin de valider les calculsthermiques réalisés, nous proposons de comparer la cartographie de flux obtenue pour le choc 39862à celle calculée en surface du composant lors d’une campagne récente (juillet 2008), menée après uneremise en état de l’ensemble des CFP de la machine (cf. Annexe 6). Le choc étudié correspondra à ladécharge 41696.

Figure 3.52 – Cartographie de températures moyennes (exclusion du gaufrier) obtenue sur leLPT pour le choc 41696 (t=10s)

Les images IR obtenues sur le limiteur “propre” (choc 41696) peuvent être encore légère-ment parasitées par la présence de dépôts entre les tuiles (cf. Annexe 5). Une cartographie detempératures IR, reconstituée après suppression de l’effet gaufrier sous WOLFF, est présentée àla figure 3.52. Cette figure correspond à l’interpolation 2D linéaire des températures moyennesatteintes au centre de chaque tuile du limiteur (extraites depuis l’outil ROI présenté au §3.4). Lacartographie de température obtenue met globalement en évidence le motif de dépôt de chaleursur le composant. Les deux défauts (D1 et D2), encore présents sur la visée HR, gênent toutefois

156

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Section 3.5

l’interprétation de ce dernier (rappelons que l’aiguille contenant le défaut D3 a quant à elle étéremplacée lors d’une campagne de maintenance du composant, cf. Annexe 5). Nous pouvons observersur la figure 3.52 l’apparition d’un pic de température anormal sur une des nouvelles aiguillesdu limiteur au niveau de la région de forte interaction plasma-paroi (proche de la DSMF). Cetteélévation locale de température sur une des aiguilles remplacées, reproductible de choc à choc, a étéattribuée à un mauvais alignement (vertical) du nouvel élément par rapport à la surface du composant.

La déconvolution de l’image en température observée sur le LPT pour le choc 41696 nous a permisde reconstruire la cartographie de flux surfacique présentée à la figure 3.53. De la même manière quepour les calculs de flux menés précédemment, la différence d’émissivité entre les tuiles neuves, lestuiles grattées et les tuiles légèrement érodées, n’a pas été prise en compte (nous avons supposé uneémissivité égale à 1 pour l’ensemble des tuiles du limiteur). La totalité des relevés de températures(à l’exception de ceux observés sur les deux tuiles avec défauts) ont été déconvolués depuis le modèlequadripôle initial “tuile propre”. Une nouvelle estimation des résistances de contact caractérisant lesdéfauts D1 et D2 a pu être effectuée pour la décharge 41696. Ces valeurs, atteignant respectivement3, 6.10−5 et 1, 97.10−4 m2.K/W pour le choc 41696, semblent indiquer que les deux défauts ontévolués de manière non négligeable entre les deux campagnes expérimentales étudiées (ce résultatdoit cependant être nuancé compte-tenu de l’approximation des résultats fournis par l’algorithmed’identification dans le cas de tuiles dérogées, cf. remarque du §3.5.2.1). Le défaut d’alignementvertical observé sur l’aiguille neuve n’a quant à lui pas pu être corrigé avant application des calculsthermiques sur le composant. Ce dernier est donc encore visible sur les cartographies de flux déduitesdes images IR pour le choc 41696.

La cartographie de flux présentée à la figure 3.53 correspond globalement au motif de dépôt dechaleur attendu théoriquement sur le LPT, centré principalement sur la partie gauche de l’image IR.L’élimination complète des dépôts lors du nettoyage du composant nous a permis de quantifier demanière sûre les flux incidents sur les zones auparavant recouvertes de dépôts carbonés. Nous pouvonsnous apercevoir sur cette dernière cartographie que les zones de redéposition correspondent bien àdes régions où les interactions plasma-paroi sont globalement négligeables (les flux de chaleur estimésdans ces zones sont inférieurs à 300 kW/m2). Seules quelques tuiles auparavant recouvertes de dépôtssemblent soumises à des forts flux incidents. Ces tuiles, déjà repérées lors de l’étude précédente (choc39862), sont situées dans la région proche de la DSMF.

Le choc 41696 étudié correspond à un scénario plasma similaire à la décharge 39862. Le motif deflux incident obtenu après nettoyage du LPT ne correspond toutefois pas en tout point à la cartogra-phie présentée au §3.5.2.2 (cf. figure 3.53). Les flux calculés pour le choc 41696 dans la région prochede la DSMF sont globalement inférieurs aux valeurs estimées sur les dépôts après caractérisation deleurs propriétés thermiques. La position des pics de flux diffère également d’une cartographie à l’autre.Les différences observées entre les deux cartographies peuvent avoir plusieurs origines :7→ Nous pouvons tout d’abord supposer que la méthode d’estimation mise en oeuvre pour caracté-

riser les dépôts induit globalement une erreur non négligeable sur les propriétés thermiques calculées,entrainant de ce fait une surestimation des flux sur les dépôts.7→ La véritable empreinte du plasma sur le limiteur pour le choc 41696 peut être également faussée

par la présence d’une aiguille mal alignée dans la région proche de la DSMF. Cette aiguille, légèrementsurélevée par rapport à ses voisines, peut en effet être exposée de manière plus importante au flux enprovenance du plasma (la hauteur du composant n’étant plus constante dans cette zone, un change-ment local des angles d’incidence des lignes de champ peut aboutir à une modification des mécanismesde dépôts de chaleur dans la zone concernée). Le piquage de flux observé pour le choc 41696 peut donc

157

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Chapitre 3

être également erroné et entraîner une sous-estimation des flux voisins.7→ Les flux calculés sur les tuiles “grattées” peuvent également être globalement sous-estimés en

raison de l’émisssivité des tuiles fixées à 1 par défaut lors du calcul des températures de surface (contreune valeur de 0.8 caractérisant normalement la surface de tuiles neuves [Courtois 08]).

Figure 3.53 – Cartographie de flux incidents moyens obtenue sur le LPT pour le choc 41696(t=10s)

En conclusion, nous ne pouvons pas déterminer avec certitude l’erreur commise sur les flux estimésen surface des dépôts carbonés pour le choc 39862. Les différences observées entre les deux cartogra-phies calculées pour les chocs 39862 (LPT recouvert de dépôt) et 41696 (LPT gratté) ne permettent pasd’exclure une mauvaise caractérisation des propriétés thermiques des couches de redéposition étudiées.

La remise à neuf du LPT, réalisée récemment, ne remet pas en cause l’étude précedente menéesur la caractérisation des dépôts carbonés. En effet, si les premiers chocs de la nouvelle campagneexpérimentale 2008 ont pu être analysés sans exclusion de tuiles recouvertes de dépôts, l’exploitationdes chocs à venir nécessitera la prise en compte de couches de redéposition. L’apparition de nouveauxdépôts a en effet déjà pu être observée sur la surface des différents CFP depuis leur nettoyage (aprèsune exploitation de la machine de seulement quelques heures de plasma). Nous avons toutefois pu

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Page 173: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.6

vérifier, grâce aux calculs thermiques menés sur le limiteur nettoyé, que les zones de redéposition sontglobalement soumises à de très faibles flux incidents. Une caractérisation de l’ensemble des dépôtsrecouvrant le composant peut donc s’avérée optionnelle du point de vue de la sécurité du composant.L’étude des tuiles recouvertes de dépôts épais soumises paradoxalement à de forts flux incidents prochede la DSMF sera par contre indispensable, tant du point de vue de la sécurité IR que de l’analysephysique des phénomènes mis en jeu dans cette région.

3.6 Perspectives

3.6.1 Optimisation de la méthode de calcul de flux

La déconvolution linéaire 1D des images IR du limiteur pompé toroïdal s’est avérée être uneméthode rapide et efficace pour établir des cartographies de flux incdents en surface du composant.Toutefois, cette méthode présente aussi des limites. Nous avons notamment pu observer la présenced’artefacts numériques de flux lors de la reconstruction de transitoires thermiques rapides (amorçageou coupure du chauffage, figure 3.44). L’apparition de telles perturbations sur les flux calculés estrévélatrice de phénomènes thermiques non pris en compte dans le modèle proposé comme par exemplela présence de transferts 2D dans les matériaux ou l’existence d’un coefficent d’échange convectif plusfort que celui estimé (30 000 W/m2.K) au niveau des canaux de refroidissement. La non-linéaritédes propriétés thermiques des matériaux peut également engendrer une reconstruction approximativede transitoires thermiques rapides subis par le LPT. Ces derniers points peuvent être limitants pourl’application du code proposé à une analyses quantitative des images IR du composant en temps réel.L’estimation des flux incidents sur le limiteur lors de phénomènes transitoires présente en effet unfort intérêt du point du vue des analyses physiques et de la sécurité IR, au même titre que l’étudedes interactions plasma-paroi en régime stationnaire. Nous avons également mis en évidence quela présence de telles perturbations s’avère gênante pour l’estimation des propriétés thermiques desdépôts carbonés (le principe de l’algorithme d’identification proposé étant basé sur l’étude des fluxtransitoires observés à la montée en température des tuiles).

Dans ce cadre, une amélioration de la méthode de calcul de flux peut être nécessaire. Nous pouvonspar exemple proposer de calculer la réponse indicielle du composant à l’aide d’un modèle quadripôle2D avant déconvolution des températures de surface IR (cette technique a notamment été validée dansle cadre de calculs de flux réalisés en surface des tuiles du divertor du JET [Gardarein 8a]). L’équationde la chaleur au sein du composant peut également être résolue au moyen d’un modèle par élémentsfinis multidimensionnel non-linéaire. Notons toutefois que tout passage à un modèle thermique pluscomplexe se réalisera au détriment du temps de calcul nécessaire à l’estimation de cartographies deflux en surface du composant.

3.6.2 Conclusions et perspectives liées à la caractérisation des propriétés ther-miques des dépôts carbonés

La caractérisation fiable des propriétés thermophysiques des dépôts carbonés représente un enjeuimportant pour les bilans de puissance réalisés dans un tokamak. Au cours de cette étude nous avonscherché à estimer les propriétés thermiques des dépôts carbonés recouvrant le limiteur de Tore Supra.La méthode d’identification proposée, basée sur l’analyse des températures IR acquises in-situ, nousa permis de caractériser à la fois la capacité thermique et la résistance de contact d’une vingtainede dépôts présentant des comportements thermiques distincts. L’ensemble des dépôts recouvrant le

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Chapitre 3

limiteur n’a pas été identifié. De même, nous n’avons pas mener d’analyse comparative des propriétésestimées sur plusieurs chocs plasma (afin d’évaluer une évolution possible de la structure des dépôtétudiés). Les résultats obtenus dans cette étude représentent tout de même une avancée dans lacaractérisation des propriétés thermiques des dépôts recouvrant le limiteur de Tore Supra.

Au vu des résultats obtenus précédemment, nous n’avons pas pu conclure sur la fiabilité des calculsde flux réalisés dans les zones de redéposition (pour le choc 39862 étudié). Il en est de même pourles calculs de flux réalisés sur les tuiles dérogées (caractérisées au moyen d’une résistance Rdef ). Uneanalyse plus poussée du comportement de ces dépôts et défauts nécessiterait une amélioration del’algorithme d’identification proposée. La mise en oeuvre de mesures dédiées et optimisées pourraitégalement être envisagée. Le travail mené au cours de cette étude nous a permis d’identifier plusieurspistes d’amélioration.

3.6.2.1 Optimisation de l’algorithme d’identification

La technique d’identification proposée n’a pas pu être validée au moyen d’expériences tests réali-sées in-situ (consistant à solliciter les dépôts à l’aide d’un flux incident connu). L’exemple numériquetraité dans ce chapitre (§3.3.4) a tout de même permis de démontrer la robustesse du calcul mis enoeuvre. Notre ignorance à la fois des niveaux de flux déposés et des propriétés thermiques des dépôtset défauts étudiés a rendu nécessaire l’application d’un algortihme de minimisation, non pas surdes thermogrammes mesurés, mais sur des flux normalisés. La méthode proposée présente ainsi uneoriginalité comparée aux méthodes classiques consistant à minimiser les écart entre une températurede référence mesurée et un modèle. L’algorithme d’identification utilisé a permis une estimation fiabledes paramètres thermophysiques d’une couche de dépot simulée et du flux de chaleur observé à sasurface, et ce même depuis l’étude de données bruitées. La technique proposée consistant à ajusterun modèle quadripôle flexible afin de reproduire au mieux la réponse en flux d’une tuile de référenceoffre donc des perspectives intéressantes.

Cette dernière peut toutefois être optimisée afin d’améliorer la fiabilité des calculs réalisés :→ Un meilleur réglage de la durée d’observation tn des signaux peut tout d’abord être effectué

grâce à une analyse statistique des résultats obtenus pour différents tn.→ Nous avons également pu remarquer une forte sensibilité de l’algorithme de Gauss-Newton

utilisé à la valeur βr0 imposée lors de son initialisation. Cette dernière valeur conditionne en effetfortement la convergence du calcul et donc la valeur du vecteur βropt estimé. L’utilisation d’un algo-rithme complémentaire de Levenberg-Marquardt ([D. Petit and D. Maillet 08], [Aster 05], [Beck 77])pourrait limiter la divergence du calcul pour une valeur βr0 trop éloignée du vecteur à identifier. Lacombinaison de ce dernier avec l’algorithme de Gauss-Newton initialement implémenté permettrait defaire converger de façon sûre le calcul dans la “vallée” contenant la solution optimale.→ Une optimisation du modèle quadripôle proposé pour modéliser le comportement thermique de

la couche peut enfin être envisagé. L’utilisation d’un quadripôle thermique de type “mur” défini parson épaisseur e, sa diffusivité a et sa conductivité λ (et non seulement par une capacité ct) nécessi-terait toutefois d’avoir à disposition des mesures de températures IR échantillonées à une fréquenceplus rapide que 50 Hz.

160

Page 175: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 3.7

3.6.2.2 Optimisation du système de mesures IR in-situ et réalisation d’expériences flashen laboratoire

Afin de caractériser les propriétés des dépôts carbonés, nous nous sommes basés sur l’analyse de latempérature moyenne atteinte par quelques pixels observés au centre de chaque tuile. Les couches deredéposition observées en surface du limiteur de Tore Supra présentent toutefois des états de surfaceet des structures très hétérogènes. Dans le cas d’un élément recouvert de dépôt, le signal moyenconsidéré peut donc traduire de façon approximative la distribution réelle de température observée àl’échelle d’une tuile recouverte de dépôt. Une étude de sensibilité sur l’influence de cette hétérogénéitédes dépôts à l’échelle d’une tuile serait nécessaire afin de déterminer si un calcul à l’échelle dupixel doit être préconisé pour établir une cartographie plus fiable des propriétés thermophysiques desdépôts recouvrant le limiteur de Tore Supra. Nous pouvons noter qu’une identification des dépôts àl’échelle du pixel nécessiterait d’avoir à disposition une visée IR avec une résolution spatiale adaptée(de l’ordre de 1mm), non disponible actuellement.

Dans l’optique de développer un diagnostic IR toujours plus performant, l’utilisation decaméras rapides (facquisition ∼= 1-5 kHz) présenterait également l’avantage d’étudier la réponsethermique des différents dépôts sur des échelles de temps plus courtes et de caractériser par exempleleur temps diffusif td = e2/a. L’installation de caméras rapides pourrait alors être envisagée pourmener des expériences dédiées (hors plasma) consistant à soumettre les dépôts carbonés à unesollicitation connue en flux au moyen d’un système de thermographie modulée haute fréquence.

Les pistes proposées ci-dessus visent toutes à améliorer l’identification des dépôts réalisée à partirde mesures in-situ. L’analyse d’échantillons en laboratoire peut également être envisagée. Cettedernière a d’aileurs montré de bons résultats en permettant la caractérisation d’une couche de redépo-sition recouvrant un neutraliseur de Tore Supra (cf. §3.3.1, [Gardarein 8a]). L’expérience flash réaliséelors de ces essais doit être utilisée prochainement afin de caractériser différents dépôts prélevés sur lelimiteur avant son nettoyage. Les résultats issus de ces expériences pourront alors être comparés auxpropriétés estimées depuis l’exploitation de données IR acquises in-situ (si toutefois l’oxydation ou ledécollement des dépôts retirés de la machine sous vide reste limitée et ne modifie pas entièrement lastructure des couches analysées).

3.7 Conclusion du chapitre

Nous avons présenté dans ce chapitre la méthode mise en oeuvre pour estimer les flux de chaleurincidents sur le principal composant face au plasma de la machine Tore Supra : le limiteur pompétoroïdal. Les analyses réalisées ont toutes concerné le traitement des images IR fournies par la camérahaute résolution disponible pour ce composant.

La quantification des flux de chaleur se déposant sur le limiteur lors de décharges plasma n’est pastriviale. Si en pratique l’observation des images IR doit permettre la visualisation du motif de dépôtde chaleur sur le composant, l’interprétation de ces dernières peut être en réalité difficile. La présencede dépôts carbonés en surface du limiteur, de même que l’apparition des défauts dans la structuremême du composant, gêne en effet la surveillance IR et les analyses menées depuis les cartographiesde températures observées.

161

Page 176: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 3

Le recours à une modélisation de type quadripôles (1D linéaire) du composant s’est avéré êtreune solution rapide et fiable permettant de déconvoluer les images IR du limiteur et de déduire descartographies de flux incidents à sa surface. Cette méthode, flexible, a également permis de prendreen compte facilement un changement d’état du composant (présence d’un dépôt à sa surface ou d’undéfaut dans sa structure). Les propriétés thermiques de différents dépôts et défauts observés sur lelimiteur ont pu être quantifiées par le biais d’un algorithme d’optimisation consistant à contraindrela dynamique de flux observée dans ces zones perturbées. L’identification des paramètres thermiques(capacité ct et résistances de contact Rc ou Rdef ) nous a alors permis de compléter les cartographiesde flux incidents dans la zone proche de la DSMF du limiteur. Ces premiers calculs restent hélasencore incertains. Seul le recours à un montage expérimental complémentaire (disposant d’une camérarapide et de plus haute résolution) pourrait permettre une caractérisation plus fiable des couches deredéposition et une meilleure estimation des flux incidents sur ces dépôts et défauts.

Les résultats obtenus dans ce chapitre ont toutefois de nouveau démontré les perspectivesintéressantes que peuvent offrir les méthodes inverses appliquées aux données acquises dans untokamak. La méthode de calcul de flux utilisée au cours de cette étude a pu être intégrée avec succésau sein d’une nouvelle interface logicielle (WOLFF) et couplée à différents outils de traitementd’images. Ces outils (warping, reconnaissance de formes, soustraction d’images) ont facilité l’analysequantitative des données IR en permettant par exemple de reconnaître aisément l’empreinte desdépôts carbonés sur le composant ou d’appliquer un calcul thermique adéquat sur chacune des tuilesde CFC constituant la surface du composant. L’intégration de ces différents outils dans un mêmecode nous a également permis d’optimiser les temps de calcul des cartographies de flux et d’envisagerainsi une extrapolation de cette application à la sécurité en temps réel du composant.

Au cours de cette étude, nous avons pu établir de premières cartographies de flux incidents surle limiteur en nous assurant que le motif mis en évidence par le traitement des images IR reflétaitbien le motif réel de dépôt de chaleur sur le composant (et non la présence de dépôts carbonés).Les différentes cartographies obtenues ont montré globalement une assez bonne concordance avec lemotif de flux de chaleur attendu en théorie sur le composant. Les flux estimés sur le LPT nettoyé ontnotamment prouvé l’existence de faibles flux incidents dans les zones de redéposition, à l’exceptionde la zone proche de la DSMF. L’observation paradoxale de forts flux incidents et de couches deredéposition dans cette région reste d’ailleurs encore inexpliquée. Nous proposons dans le chapitresuivant de confronter les cartographies de flux calculées en surface du LPT à différentes simulationsissues d’un modèle théorique. Cette comparaison aura pour but d’améliorer la compréhension quenous avons des phénomènes de transport de chaleur dans la SOL.

162

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Chapitre 4

Modélisation des flux de chaleur dansla SOL et simulation des dépôts dechaleur sur le LPT

La mesure et la compréhension des dépôts de chaleur dans un tokamak constituent une probléma-tique cruciale pour la réalisation de décharges plasmas de longue durée dans les futures machines defusion (ITER). Estimer les flux de chaleur se déposant sur les composants est tout d’abord essentielpour assurer leur sécurité. Comprendre les phénomènes physiques menant à ces dépôts de chaleur estégalement nécessaire pour optimiser les scénarii plasma étudiés et mener des décharges mettant en jeudes niveaux de puissance de plus en plus élevés. Notons de plus que les flux de chaleur incidents sontreprésentent aussi un paramètre important conditionnant les processus d’érosion et de redépositiondans un tokamak.

Nous avons calculé dans le chapitre 3 précédent différentes cartographies de flux incidents surune surface du limiteur pompé toroïdal correspondant au secteur de 20° surveillé par la voie IRhaute résolution. Nous proposons maintenant d’analyser ces résultats en les confrontant à différentessimulations issues d’un modèle théorique standard. Ce chapitre aura pour premier objectif de décrirede manière pédagogique le modèle théorique utilisé. L’influence des différents paramètres du modèlesur le motif de flux reconstruit sur le LPT sera illustré au travers d’exemples simples. Une premièreconfrontation entre cartographies expérimentale et théorique sera également effectuée. Nous tenteronsalors d’estimer les principales grandeurs physiques caractérisant l’écoulement des flux de chaleur dansla SOL à partir des images IR observées sur le limiteur (cartographies de flux incident). Le choc étudiédans ce chapitre et confronté aux différentes simulations correspondra à la décharge 41696 (scénariode référence DITS) réalisée en 2008 après le nettoyage des composants face au plasma (LPT “gratté”).

Page 178: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 4

4.1 Modélisation théorique standard

Nous proposons dans cette section de décrire le modèle standard utilisé pour simuler les cartogra-phies de flux incidents sur le limiteur. Le principe de la modélisation proposée repose sur la prise encompte d’un profil de flux exponentiel dans la SOL (décrivant les écoulements de puissance conduite),projeté ensuite sur le limiteur dans la direction parallèle aux lignes de champ magnétique confinantle plasma. Nous négligerons dans ce chapitre les autres contributions thermiques déposées sur le LPT(Qrad, Qsupras, Qneutres et Qneutrons). Nous verrons par la suite que ces contributions sont minori-taires devant la part de flux conduite Qcond sur le LPT (cette hypothèse sera vérifiée lors de l’analyseexpérimentale réalisée au chapitre 5).

4.1.1 Définition du modèle standard

Le motif de dépôt de chaleur observé sur les parois d’un tokamak dépend essentiellement desflux conduits circulant dans le plasma non confiné. Les phénomènes de transport des particules dansun tokamak mène généralement à un profil de flux de chaleur (et de densité) dans la SOL prenantla forme d’une exponentielle décroissante dans la direction radiale et supposé homogène dans lesdirections poloïdale θ et toroïdale ϕ (cf. figure 1.31 du chapitre 1 et figure 4.1), [Stangeby 00]. Ce profilexponentiel est défini par une amplitude maximale (QDSMF ) et par une longueur de décroissance λq.Sa projection orthogonale sur une paroi peut être effectuée en considérant la relation suivante :

(4.1)

où QSOL représente le profil exponentiel de flux de chaleur observé dans la SOL, tel que :

(4.2)

Nous obtenons donc :

(4.3)

où :

• QDSMF correspond à la valeur de flux maximale atteinte à la séparatrice entre le plasma confiné etle plasma de bord (position r = r(plasma))• λq représente la longueur de décroissance des flux de chaleur dans la SOL• rDSMF désigne la distance entre chaque ligne de champ connectée à la paroi (limiteur) et la DSMF• α désigne l’angle d’incidence de chaque ligne de champ connectée à la paroi (limiteur)

164

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Section 4.1

La figure 4.1 illustre le principe du modèle standard proposé. Seule la contribution des flux conduitsle long des lignes de champ est prise en compte dans ce modèle (QSOL ∼= Qcond, cf. équation(1.18)du chapitre 1). Les grandeurs λq et QDSMF constituent les inconnues du problème. Les valeurs desparamètres α et rDSMF sont quant à elles contraintes par la configuration magnétique imposée auplasma (et dépendent des champs Bϕ, Bθ, Br fixés pour chaque choc expérimental). Nous pouvonsnoter que les lignes de champ impactent le LPT à la fois côté intérieur du tore1 (fort champ, HFS)et extérieur (faible champ, LFS). La frontière séparant les régions faible champ et fort champ sur lelimiteur correspond à la zone de tangence entre la DSMF et le composant (α = 0 sur la figure).

Figure 4.1 – Profil de flux de chaleur exponentiel dans la SOL et projeté sur le LPT

4.1.2 Deux paramètres inconnus : λq et QDSMF

Nous avons déjà défini au cours du chapitre 1 la notion de longueur de connexion d’une lignede champ ouverte (L//), caractérisant la distance moyenne parcourue par une particule suivantune direction parallèle à une ligne de champ. Le paramètre λq apparaissant dans l’équation (4.3)défini quant à lui la distance radiale moyenne parcourue dans la SOL par l’ensemble des particulesdéconfinées, avant d’être interceptées par le limiteur. Cette composante radiale de transport estinduite par une diffusion progressive des particules vers les parois au cours de leur parcours dans lamachine.

La composante transverse, aboutissant au profil de flux exponentiel défini par λq, peut avoir plu-sieurs origines : Lors d’une décharge plasma, il est établi que les particules se déplacent majoritairement suivant

une direction parallèle aux lignes de champ. Ces particules subissent toutefois un mouvement de dériveinduit par la courbure de ces mêmes lignes (chapitre 1, §1.1.4.2). La forme hélicoïdale des surfacesmagnétiques permet de réduire cette dérive en contrôlant le mouvement des particules (tantôt dérivéesvers l’intérieur, tantôt vers l’extérieur). Malgré cet enroulement, la dérive des particules ne peut êtresupprimée et leur trajectoire s’écartera in fine des surfaces magnétiques, impliquant alors l’apparitiond’un champ électrique vertical du fait de la séparation des charges (les ions sont dérivés vers le haut,les électrons vers le bas). Ce dernier, combiné au champ magnétique toroïdal, conduit à une vitesse dedérive en ~E× ~B dirigée vers l’extérieur du tore. Cette vitesse entraîne un déconfinement du plasma etun mouvement radial des particules dans la SOL. Les phénomènes de dérives sont également amplifiéspar la collision coulombienne des particules entre elles. La combinaison de ces deux perturbations(dérive et collisionnalité) mène à un régime de transport appelé transport “néoclassique” [Sarazin 06],[Weyssow 04], [Garbet 01].

1cf. définition donnée au chapitre 1.

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Chapitre 4

Les particules peuvent également diffuser perpendiculairement aux lignes de champ du fait dephénomènes de turbulence. Les transports néoclassique et turbulent, perpendiculaires aux surfacesmagnétiques, sont généralement considérés négligeables devant le transport parallèle des particules etde l’énergie dans le plasma de bord (L///λq << 1). Le coefficient de diffusion perpendiculaire D⊥estimé expérimentalement dans un plasma de Tore Supra est de l’ordre 1 m2/s, [Sarazin 06].

La diffusion radiale des particules mène aux profils exponentiels de densité, température ou fluxde chaleur observés dans la SOL et caractérisés par leurs longueurs de décroissances respectives λn,λT ou λq (nous cherchons dans cette étude à caractériser le paramètre λq)

Le paramètre λq gouvernant l’exponentiel QSOL correspond à une grandeur macroscopique per-mettant de décrire de manière générique les phénomènes de transport de la chaleur dans le plasmade bord. Cette grandeur est communément assimilée à la notion d’épaisseur de la SOL bien que savaleur (estimée entre 1 et 3cm dans Tore Supra) soit en réalité inférieure au rayon exact du plasmanon confiné (pouvant atteindre plusieurs dizaines de centimètres). La longueur de décroissance λqdéfinissant le profil exponentiel de flux dans le plasma non confiné correspond toutefois à la distanceradiale sur laquelle la majorité des particules et de l’énergie circulant dans la SOL sont contenues (cf.figure 4.2). Sa valeur est un indicateur sur la qualité du confinement des particules dans le plasma. Unevaleur de λq élevée traduira par exemple l’existence d’un transport radial fort dirigeant les particulesvers les parois et l’existence d’une région non confinée (SOL) très large. A l’inverse, une composanteradiale (et donc un λq) faible correspondra à une SOL de faible épaisseur et à un meilleur confinementdes particules.

Figure 4.2 – La grandeur λq caractérise la longueur de décroissance du profil exponentiel deflux dans la SOL - elle correspond également à la distance radiale sur laquelle la majorité desparticules et de l’énergie circulant dans la SOL sont contenues

Les grandeurs QDSMF et λq définissant la SOL peuvent être influencées par la configuration ma-gnétique imposée au plasma, le niveau de puissance injectée dans la machine (paramètres contrôlés)ou d’autres phénomènes physiques non contrôlés modifiant le transport des flux de chaleur et de par-ticules dans le plasma. Le modèle standard proposé précédemment permet de projeter sur le limiteur

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Section 4.1

la puissance incidente véhiculée par chaque ligne de champ parcourant le plasma de bord. Ce typede modélisation implique de fixer un profil synthétique de flux dans la SOL (et donc de connaîtreles paramètres QDSMF et λq). Nous proposons dans la suite de ce chapitre (ainsi que dans l’analyseexpérimentale menée au chapitre 5) de parvenir à une estimation des deux grandeurs QDSMF et λq enconfrontant les cartographies de flux expérimentales obtenues sur le limiteur à différentes simulationseffectuées à QDSMF et λq variables.

4.1.3 Configuration des lignes de champ : paramètres rDMSF et α

La configuration magnétique imposée au plasma lors des expériences (champs Bϕ, Bθ, Br) définieen grande partie l’empreinte des dépôts de chaleur dans l’enceinte de la machine. Le transport del’énergie dans le plasma de bord est en effet principalement gouverné par la circulation des particulesle long de ces lignes de champ (mouvement parallèle). Simuler une cartographie de flux incidentssur le limiteur de Tore Supra nécessite donc de connaître le point d’impact, l’angle d’incidenceet enfin la distance à la DSMF de chaque ligne de champ connectée au composant (paramètresrDMSF et α). Ces paramètres peuvent être estimés à partir des coordonnées 3D des surfaces magné-tiques, elles-même déduites du calcul de l’équilibre du plasma au cours d’un choc (chapitre 1, §1.1.4.2).

La distance à la DSMF d’une ligne de champ connectée à une paroi correspond à la distance radialeentre cette ligne de champ et la frontière du plasma confiné (séparatrice). Cette grandeur caractériseainsi la pénétration moyenne d’une surface magnétique dans le plasma de bord. Cette dernière estdéfinie telle que :

rDSMF = r − r(plasma) (4.4)

où r(plasma) correspond à la position radiale de la séparatrice (DSMF) dans la machine

Figure 4.3 – Calcul de la distance à la DSMF d’une ligne de champ ouverte connectée au LPT

Plus une ligne de champ sera caractérisée par une faible distance rDSMF , plus les particulesportées par cette dernière seront énergétiques car proches du plasma central. La position rDSMF

d’une ligne de champ ouverte peut légèrement varier en fonction de sa position poloïdale et toroïdale

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Chapitre 4

dans la machine. De même, le rayon r(plasma) ne reste pas toujours constant dans le tokamak(notamment en raison des perturbations ripple modifiant la forme du plasma entre les bobines,chapitre 1). Cette variation de position de la frontière du plasma n’excède pas 2cm dans la machine.La figure 4.4 illustre notamment cette variation de position pour le choc 41696 étudié. Les courbesreprésentées correspondent aux données traitées issues des mesures magnétiques effectuées dans lesdifférents plans bobines de la machine. Les données magnétiques sont tracées en fonction de l’anglepoloïdal occupé successivement par les lignes de champ constituant la dernière surface magnétiquefermée (DSMF). Le rayon minimum atteint par la DSMF se situe au niveau du point d’appui duplasma sur le LPT. Pour le choc considéré (41696), cette valeur est de 0.7125 m.

Nous considérerons en première approximation que les distances rDSMF et r(plasma) restentsconstantes dans les directions ϕ et θ de la machine. Le rayon rDSMF caractérisant chacune des lignesde champ connectées au limiteur sera mesuré au niveau du point d’impact entre le plasma et lecomposant (cf. illustration à la figure 4.3).

Figure 4.4 – Coordonnées radiales de la DSMF après traitement des mesures magnétiques ac-quises pour le choc 41696 (t=15s) : la position de la DSMF dans la direction θ n’est pas constantedans la machine (source : données grho, base de données TMAG, Tore Supra)

La figure 4.5 illustre les cartographies d’angle α et de rayon rDSMF obtenues sur une section de 20°du limiteur pour une topologie magnétique correspondant à un facteur de sécurité q = 8 (chapitre 1).Cette configuration correspond au champ magnétique imposé lors du choc 41696. Les images présentéessont issues d’un programme de reconstruction des coordonnées magnétiques des surfaces confinantle plasma de Tore Supra (source : [J. Gunn and F. Saint-Laurent 08]). Le motif représenté révèlel’empreinte théorique du plasma sur le limiteur. Ce dernier est induit par les modulations de champobservé entre chaque bobine toroïdale (ripple). L’image simulée représente une des 18 empreintesd’interactions plasma-paroi sur le limiteur (toroïdalement répétititive, avec une fréquence de 20°). Cemotif ne correspond pas exactement à la surface du limiteur visée par la caméra IR haute résolution.L’angle de vue de l’endoscope est en effet décalé par rapport au motif complet de dépôt de chaleurattendu sur cette section du composant (le périmètre observé par la caméra est indiqué en violet surles deux figures). Le système IR ne permet donc d’observer qu’un motif partiel de dépôt de chaleursur le limiteur puisque seule l’empreinte de flux côté faible champ (LFS) est entièrement visible surles images acquises.

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Section 4.1

(a) Angles d’incidence (zone mouillée)

(b) Distances à la dernière surface magnétique fermée dans la zone mouillée

Figure 4.5 – Cartographies illustrant la connexion des lignes de champ sur le limiteur pour unchoc simulé avec un facteur de sécurité q = 8, R0 = 2.4m, r(plasma) = 0.71m

Les zones de connexion représentées correspondent aux zones mouillées B définies dans le cha-pitre 3 précédent. Les zones à l’ombre du plasma (en blanc sur les figures) correspondent aux régionsombrées A et C. Ces régions sont également impactées par des lignes de champ dont la longueur deconnexion L// (chapitre 1) est toutefois inférieure à 1m (cf. illustration de la figure 4.6). Ces lignes dechamp, directement connectées au limiteur avant même de “parcourir” la SOL, conduisent donc desflux de chaleur négligeables.

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Chapitre 4

Figure 4.6 – Les lignes de champ impactant le limiteur dans les régions à l’ombre du plasmasont auto-connectées au composant

Nous pouvons constater que les distances rDSMF caractérisant la configuration magnétique du choc41696 sont comprises entre une valeur nulle (correspondant à la localisation du point de tangence dela DSMF sur le limiteur) et 0.07m. Les angles d’incidence des lignes de champ connectées au limiteursont compris entre 0° (lignes de champ rasante correspondant à la DSMF) et 4°. Comme nous l’avonsdéjà mentionné, la frontière entre les motifs HFS et LFS est donnée par la ligne de tangence corres-pondant aux angles α nuls (illustrée à la figure 4.5a). Le point de tangence précis entre le plasma(DSMF) et le limiteur correspond à la tuile située dans la zone mouillée théorique pour laquelle àla fois le rayon rDSMF et l’angle d’incidence α s’annulent. Ce point sera appelé par la suite zone α = 0.

La valeur de flux incident projeté sur une tuile du limiteur dépendra de l’angle d’incidence et de ladistance rDSMF caractérisant la ligne de champ connectée au composant en ce point. En effet, touteligne de champ rasante (angles α faibles) ne déposera que de faibles quantités de flux de chaleur surle composant (cette dépendance se traduit par le terme en sin(α) de l’équation(4.3)). De même, touteparticule portée par une ligne de champ éloignée de la DSMF (distance rDSMF importante) ne seraque peu énergétique. Le motif de flux de chaleur théorique déposé sur le composant résulte donc d’unecombinaison des deux paramètres rDSMF et α dont les variations spatiales 2D sont différentes dansles directions r et ϕ. L’empreinte observée sur le composant dépendra également de l’intensité et dela longueur de décroissance λq des flux de chaleur circulant dans la SOL. Le motif de flux de chaleurthéorique résultant de la prise en compte de l’ensemble de ces facteurs est simulé au paragraphe suivantau moyen du modèle standard.

4.1.4 Exemple de cartographie de flux simulée depuis le modèle standard : q = 8,λq = 1.5cm, QDSMF = 31MW/m2

La figure 4.7 illustre le résultat fourni par une modélisation standard des flux de chaleur déposéssur le limiteur de Tore Supra (équation (4.3)). Cette cartographie correspond à un profil exponentielsupposé QSOL, défini par une longueur de décroissance λq=1.5cm. Cette valeur correspond à lalongueur de décroissance standard utilisée lors des calculs de dimensionnement des CFP (consistant àsimuler un dépôt de flux théorique à la surface des parois afin de prédire leurs limites opérationnelles,[Mitteau 08]). La valeur de flux à la séparatrice QDSMF à quant à elle été fixée à 31MW/m2 afinde simuler une puissance total déposée dans les zones mouillées du limiteur de 0.6MW (soit une

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Section 4.1

puissance déposée sur la section de 20° modélisée à la figure 4.7 de 0.03MW ). Cette valeur a étéchoisie par anticipation du bilan de puissance calculé sur le composant pour le choc 41696 au chapitre5 de ce mémoire (figure 5.8).

Le profil de flux QSOL(rDSMF ) correspondant à la simulation réalisée est présenté à la figure 4.8.Les angles d’incidence α et les longueurs de pénétration rDSMF ayant permis le calcul de la figure 4.7correspondent aux cartographies 4.5 présentées au paragraphe précédent.

La cartographie de dépôt de chaleur représenté à la figure 4.7 met en évidence l’empreinte carac-téristique du plasma sur le composant. Cette forme, reproduite tous les 20° toroïdaux, est divisée endeux motifs quasiment symétriques (motif HFS côté fort champ et LFS côté faible champ). La fron-tière entre les deux empreintes observées correspond au point de tangence α = 0 où les flux incidentss’annulent localement (sin(α) = 0).

Figure 4.7 – Cartographie théorique des flux de chaleur déposés sur une section de 20° dulimiteur pompé toroïdal - Paramètres du modèle : q = 8, λq = 1.5cm, QDSMF = 31MW/m2, Pcond =PLPT = 0.6MW

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Chapitre 4

Figure 4.8 – Profil de flux QSOL simulé dans la SOL et projeté sur le limiteur : λq=1.5cm,QDSMF = 31MW/m2

Les régions du limiteur mouillées par le plasma présentent unmotif particulier de dépôt de chaleur“en double-bosse”. Les flux incidents maximums observés sur le limiteur sont localisés dans deuxzones concentriques distinctes, côtés LFS et HFS, situées à la frontière entre les zones ombrées etles zones mouillées. Pour le choc simulé, le flux de chaleur maximal déposé sur le LPT (Qpic) atteint0.6MW/m2 avec QLFSpic

∼= QHFSpic (motif de flux quasiment symétrique2 par rapport au plan α = 0). Lesflux incidents correspondants aux régions éloignées de la DSMF (en partie haute de l’image, côté LFS)tendent quant à eux vers une valeur faible (inférieure à 200 kW/m2). Le tracé d’un profil spatial deflux sur le LPT, perpendiculaire à la ligne de tangence, permet d’illustrer ce motif “en double-bosse”(schématisé à la figure 4.9).

Figure 4.9 – Les interactions plasma-paroi sur le limiteur conduisent à un motif de dépôt deflux en “double-bosse”

2Le motif de flux n’est pas exactement symétrique, la zone mouillée faible champ (LFS) étant plus étendue en raisonde l’emplacement du LPT, légèrement excentré par rapport au rayon de la machine.

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Section 4.1

Nous avons replacé sur l’image 4.10 les zones d’interactions plasma-paroi A, B et C précédemmentrepérées sur les images IR (figure 3.1, chapitre 3). Les zones A recouvertes de dépôts de carbonecorrespondent aux zones ombrées proches des régions de forts flux incidents. Ces dernières sont propicesà la redéposition des particules de carbone érodées dans les zones B voisines. Les zones ombrées C(“neutres”) sont quant à elles plus éloignées des sources d’érosion. Nous pouvons noter que la présencede dépôts de carbone entre les motifs de flux HFS et LFS est justifiée puisque la région séparant lesdeux pics de flux correspond à la ligne de tangence entre le plasma et le limiteur où les flux de chaleurthéoriques attendus sont nuls (α = 0).

Figure 4.10 – Repérage des zones d’interaction plasma-paroi A, B et C sur l’image théorique dedépôt de chaleur simulée en surface du LPT

L’empreinte des dépôts de chaleur sur le limiteur peut varier suivant les conditions expérimentalesimposées. En modélisant le profil de flux dans la SOL à l’aide du modèle standard proposé à l’équation(4.3) nous avons considéré que les interactions plasma-paroi sur le plancher de la machine étaientgouvernées par deux principaux facteurs :

– d’une part par les écoulements de flux de chaleur dans la SOL (caractérisés par les paramètresλq et QDSMF ),

– et d’autre part par la configuration magnétique des lignes de champ contrôlée au moyen dufacteur de sécurité q modifiant l’incidence des lignes de champ avec la paroi (paramètres rDSMF

et α),

Nous proposons maintenant de réaliser plusieurs simulations à facteur de sécurité q et λq variablesafin de visualiser l’effet de ces deux facteurs sur l’empreinte du dépôt de chaleur sur le limiteur (lescalculs présentés ci-après correspondent à des décharges fictives ayant pour seul objectif d’illustrerl’influence de ces paramètres sur le modèle standard de dépôt proposé).

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Chapitre 4

4.2 Influence des paramètres du modèle standard λq et (rDSMF ,α)sur l’empreinte de dépôt de flux simulée

4.2.1 Conséquence d’une variation de q (modification des paramètres rDSMF et α)

L’empreinte des dépôts de chaleur sur le limiteur peut être influencée par la configuration ma-gnétique. Nous avons choisi ici de réaliser différentes simulations à facteur de sécurité q variable(compris entre 4 et 8) afin de modéliser l’effet d’une variation de la géométrie des lignes de champmagnétiques sur le motif de dépôt de chaleur attendu sur le LPT (figure 4.11). Les configurationsmagnétiques simulées correspondent aux quatre chocs expérimentaux que nous étudierons au chapitre5 de ce mémoire. Les simulations sont effectuées pour un λq constant de 1.5cm (cf. justification donnéeau paragraphe précédent).

(a) q = 8, QDSMF = 31 MW/m2 (b) q = 6.4, QDSMF = 25 MW/m2

(c) q = 4.8, QDSMF = 20 MW/m2 (d) q = 4, QDSMF = 15 MW/m2

Figure 4.11 – Toute variation du facteur de sécurité q modifie l’incidence des lignes de champet l’empreinte du dépôt de chaleur sur le composant (simulations réalisées à λq = 1.5cm pourr(plasma) = 0.71m, R0 = 2.4m, et PLPT = 0.6MW)

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Section 4.2

La comparaison des cartographies obtenues à la figure 4.11 permet de mettre en évidence l’effetgéométrique induit par une variation du paramètre q sur le motif de dépôt de chaleur observé à lasurface du LPT. Nous pouvons noter que toute diminution du facteur de sécurité q a pour effet d’aug-menter l’étalement des flux incidents à la surface du limiteur. Afin de conserver une puissance déposéesur le limiteur constante pour les quatre cartographies (PLPT = 0.6MW , cf. justification donnée auparagraphe précédent), nous avons dû ajuster le paramètre QDSMF à chaque simulation. La valeurde flux fixée à la séparatrice est ainsi divisée par deux entre les deux simulations réalisées à q = 8 etq = 4. Les valeurs globales d’angles d’incidence, bien que légèrement modifiées par ce changement deconfiguration magnétique, restent comprises entre 0 et 4° pour les quatre chocs réalisés (cf. figure 4.12).

Un mode de fonctionnement à fort facteur de sécurité q a donc pour conséquence de comprimerla zone mouillée par le plasma et de réduire les régions du limiteur présentant des angles d’incidencefaibles avec les surfaces magnétiques. Ces phénomènes entraînent naturellement l’apparition de flux in-cidents locaux plus élevés et concentrés sur une surface moins étendue. A puissance déposée constante,la valeur des pics de flux locaux augmente si q augmente. La valeur maximale de flux observée pourle choc simulé à q = 8 atteint ainsi 0.6MW/m2 contre 0.35MW/m2 pour un choc réalisé à plus faibleq (= 4).

Ces simulations montrent l’intérêt de pouvoir réaliser des décharges plasma à faible facteur de sé-curité q. Ce type de configuration entraîne en effet un étalement plus important des dépôts de chaleursur les composants, diminuant ainsi les risques de piquage de flux sur les parois (élargissement deszones mouillées). L’exploitation de tels scénarii plasma, mettant en jeu de forts courants plasma Ip,peut cependant ne pas être compatible avec l’obtention d’un plasma stable ou le couplage des ondesde chauffage. Un compromis entre scénario plasma performant et scénario compatible avec le mur doitdonc toujours être trouvé.

Figure 4.12 – La diminution du facteur de sécurité q influence peu l’angle d’incidence des lignesde champ mais étale les zones mouillées

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Chapitre 4

4.2.2 Influence de la longueur de décroissance λq sur le motif de dépôt de chaleursimulé

L’empreinte du dépôt de chaleur sur le limiteur peut également être influencée par les phénomènesgouvernant le déconfinement des flux de particules et de chaleur dans la SOL. Le modèle standardutilisé propose de modéliser l’ensemble de ces phénomènes à l’aide d’un unique paramètre macrosco-pique, la longueur de décroissance λq.

La figure 4.13 illustre l’influence du paramètre λq sur le motif de dépôt de chaleur observé ensurface du limiteur. La configuration magnétique fixée pour les simulations correspond à une valeur defacteur de sécurité q = 8 (cartographies de rDSMF et α obtenues à la figure 4.5). Les images présentéesont été calculées pour quatre valeurs de λq différentes comprises dans la gamme [2 mm ; 2 cm]. Lavaleur du paramètre QDSMF a de nouveau été ajustée pour chaque simulation afin de conserver unepuissance constante sur le limiteur de 0.6MW .

(a) λq = 2 cm, QDSMF = 25 MW/m2 (b) λq = 1 cm, QDSMF = 40 MW/m2

(c) λq = 0.5 cm, QDSMF = 73 MW/m2 (d) λq = 0.2 cm, QDSMF = 147 MW/m2

Figure 4.13 – Un profil exponentiel de flux plus ou moins piqué dans la SOL modifie le motif dedépôt de chaleur observé sur le limiteur (simulations réalisées à q = 8)

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Section 4.2

Le piquage plus ou moins prononcé des flux dans le plasma de bord influence le motif de dépôtde chaleur sur le limiteur. L’étalement de la zone mouillée, de même que les valeurs de rDSMF

et α obtenues en tout point du LPT, ne sont pas dépendants de λq et ne varient donc pas d’unesimulation à l’autre. En revanche, l’épaisseur du plasma non confiné diminue proportionnellementavec ce paramètre. Nous observons de ce fait un dépôt de chaleur extrêment piqué sur le composantpour une faible valeur de λq. Les flux incidents maximum atteints localement côté fort champ (HFS)et faible champ (LFS) pour une valeur de λq fixée à 0.2cm sont de l’ordre de 2MW/m2. A l’inverse,pour un λq dix fois plus élevé (2cm), le motif de dépôt de chaleur observé est beaucoup plus étalé etles flux de chaleur atteints sont 3.5 fois moins importants (Qpic = 0.55MW/m2). La simulation d’uneSOL très fine nous contraint également à considérer des valeurs de flux à la séparatrice (QDSMF )extrêmement élevées afin de conserver une puissance déposée sur le limiteur équivalente entre chaquesimulation.

La position des pics de flux à l’intérieur de la zone mouillée se resserre autour de la zone α = 0lorsque λq diminue. Le calcul réalisé à λq = 0.2cm illustre en effet l’apparition de flux importantssur le LPT, proches de la zone de tangence où les angles incidents sont pourtant très faibles. Lasimulation de flux de chaleur QDSMF importants (ex. QDSMF = 147MW/m2 pour λq = 0.2cm)implique en effet que toute ligne de champ impactant le limiteur, même à angle rasant (sin(α)→ 0),entraîne un fort dépôt de puissance sur le composant (seuls les quelques points précisément localiséssur la ligne de tangence DSMF-limiteur présentent des valeurs de flux nuls).

Les simulations réalisées mettent en évidence les intérêts contradictoires opposant les études visantà améliorer le confinement et celles ayant pour objet d’assurer la protection des parois. En effet,pour un scénario plasma donné (Pchauffage fixée), toute diminution de la valeur de λq aura pour effetd’augmenter les flux de chaleur observés à la séparatrice QDSMF (comme nous l’avions déjà mentionné,pour une valeur de λq faible, le transport radial des particules sera diminué, assurant ainsi une meilleurconfinement de l’énergie au sein du plasma). La recherche d’un confinement amélioré au bord auraalors pour conséquence l’apparition d’interactions plasma-paroi plus dangereuses pour les composants.

4.2.3 Synthèse de l’étude numérique réalisée

Nous avons réalisé différentes simulations de cartographies de flux théoriques à facteur de sécuritéq et longueur λq variables afin d’illustrer l’influence de ces deux paramètres sur les phénomènes dedépôt de chaleur sur le limiteur (rappelons qu’à ce stade de l’étude les décharges simulées corres-pondent toutes à des scénarii plasmas fictifs). Nous avons ainsi pu démontrer que la configurationmagnétique du plasma ou l’épaisseur de la SOL n’influencent pas de la même manière l’empreinte dedépôt de puissance observée sur le composant. La variation de q modifie l’enroulement des surfacesmagnétiques et entraîne majoritairement un étalement plus ou moins prononcé des zones mouillées.Le paramètre λq influence quant à lui, non pas la frontière des zones connectées au plasma, mais larépartition des flux de chaleur à l’intérieur de ces zones mouillées. Nous avons également vu qu’uneoptimisation de la valeur de ces paramètres (afin de limiter les interactions entre le plasma et lesparois) peut présenter des intérêts contradictoires avec d’autres contraintes opérationnelles (liées auchauffage ou au confinement des particules).

A l’inverse de la configuration magnétique, imposée lors des expériences grâce aux grandeurs Ip ouBφ (chapitre 1), les paramètres λq et QDSMF ne peuvent être fixés et correspondront à des donnéesobservables que nous allons chercher à quantifier. Ces grandeurs sont en effet des indicateurs perti-nents sur la quantité de chaleur dissipée dans la SOL, ainsi que sur les phénomènes de transport misen jeu dans le plasma de bord. Ces dernières peuvent être modifiées par les conditions plasma imposées

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Chapitre 4

lors d’une décharge (facteur de sécurité q, puissances injectées,etc.). Nous allons tenter d’estimer cesparamètres en confrontant les simulations théoriques issues du modèle standard aux cartographies deflux incidents calculées en surface du limiteur (chapitre 3). L’étude suivante concernera plus particu-lièrement l’analyse du choc 41696 (scénario de référence DITS, q = 8, décharge longue, de puissancemoyenne : PLH = 2 MW ).

4.3 Comparaison simulation-expérience et amélioration du modèlestandard

4.3.1 Comparaison du motif 2D simulé avec une cartographie de flux expérimen-tale (choc 41696)

L’observation du motif 2D complet de dépôt de chaleur obtenu depuis les images IR du limiteurpeut être un indicateur des phénomènes de transport de chaleur mis en jeu dans le tokamak. Nousproposons ici de comparer la cartographie expérimentale de flux obtenue pour le choc 41696 à lasimulation issue du modèle théorique standard illustrée au §4.1.4. Ces deux images sont de nouveaureprésentées à la figure 4.14.Comme nous l’avons déjà mentionné,le diagnostic IR ne permet pas lasurveillance d’un motif complet de dépôt de chaleur sur le composant, les cartographies expérimentalesde flux présentées sont en effet tronquées au niveau du motif ionique (côté fort champ). La partiecommune correspondant aux images théoriques et expérimentales est indiquée sur la figure 4.14a(traits violets).

Le traitement des images IR réalisés au chapitre 3 a permis de nous assurer que la cartographieexpérimentale calculée pour le choc 41696 correspondait bien à une sollicitation thermique réelle dulimiteur en flux de chaleur, et non à une perturbation de la mesure IR (due notamment à la présencede dépôts carbonés). L’image présentée à la figure 4.14b révèle donc la véritable empreinte de dépôtde chaleur dans la machine, du moins dans la partie faible champ de l’image (LFS). Les valeurs deflux élevées calculées dans la région mouillée côté fort champ (HFS) seront quant à elles ignorées. Cesdernières peuvent en effet être attribuées au mauvais alignement vertical d’une aiguille du limiteurdans la région proche de la DSMF (cf. remarque du chapitre 3, §3.5.3). Nous n’étudierons par la suiteque le motif de flux observé au niveau de la zone de tangence (zone α = 0) et dans la région faiblechamp du limiteur (LFS).

Le motif 2D de dépôt de chaleur observé sur le limiteur est globalement cohérent avec l’empreinteprédite par le modèle standard. L’emplacement de la zone mouillée (zone de plus forts flux) estapproximativement retrouvée. Nous pouvons toutefois noter un léger débordement des flux de chaleuren dehors de la région connectée au plasma dans le cas expérimental. Cet étalement du dépôt dechaleur se trouve plus marqué dans la région proche de la DSMF (zone de tangence) où les niveauxde puissances sont maximums.

La valeur de flux déposé sur le limiteur, à la position des pics de flux simulés, est de 0.7MW/m2.Cette valeur est en accord avec le modèle théorique mais ne correspond pas dans le cas expérimental àla position des pics de flux observés sur le composant. Les pics de flux expérimentaux sont effet localisésplus près de la zone de tangence et atteignent une valeur deux fois plus grande : Qpic ∼= 1.3MW/m2.La “double-bosse” de dépôt de chaleur observée pour le choc 41696 se concentre autour de la régionproche de la DSMF, à contrario des pics de flux simulés, plus éloignés de la zone de tangence et plusfaibles.

178

Page 193: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 4.3

La position de la ligne de tangence marquant la frontière entre les deux motifs de flux côtés fortchamp (HFS) et faible champ (LFS) est en accord avec les prédictions théoriques. Cette dernière necorrespond toutefois pas, dans le cas expérimental, à une région de dépôt de chaleur nul. La valeur deflux atteint au point α = 0 est en effet estimée à 1MW/m2 pour ce choc (nous noterons par la suite lavaleur de flux atteint au point de tangence : Qα). Cette évaluation correspond à un rapport Qα/Qpicégal à 0.76 pour le choc étudié, contre une valeur tendant vers zéro en théorie (pour Qα nul).

(a) Cartographie théorique : q = 8, λq = 1.5cm, QDSMF = 31MW/m2,PLPT = 0.6MW

(b) Cartographie expérimentale : choc 41696, q = 8, PLPT =0.6MW (bilan de puissance réalisé dans les zones mouillées théo-riques uniquement, cf. figure 5.8, chapitre 5)

Figure 4.14 – Comparaison des cartographies de flux simulées et expérimentales pour le choc41696 (q = 8)

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Page 194: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 4

Nous avons démontrer dans ce paragraphe que si le modèle standard proposé est globalementadapté à la modélisation de l’empreinte de dépôt de chaleur sur le composant, ce dernier ne permettoutefois pas de décrire la totalité des interactions se produisant entre la plasma et la paroi. Nousn’avons en effet pas réussi, depuis la simulation précédente, à reproduire exactement le motif de dépôtde chaleur observé sur le LPT lors des expériences dans la zone proche de la DSMF. Un ajustementdu paramètre λq pourrait permettre de converger vers un motif de flux théorique plus proche del’empreinte expérimentale. Une diminution de l’épaisseur radiale de la SOL dans le modèle standardpermettrait en effet de resserrer la position des pics de flux autour de la DSMF et d’augmenter leuramplitude. Toutefois, cette correction du paramètre λq ne permettrait en aucun cas de simuler laprésence de flux de chaleur non nuls à la séparatrice où le terme sin(α) tend vers zéro. La projectionparallèle d’un profil de flux gouverné par une unique exponentielle ne nous permet pas de modéliserla présence de flux au niveau du point de tangence. Cette constation nous amène à supposer qu’unecomposante de transport perpendiculaire s’ajoute au transport parallèle des particules le long deslignes de champ dans la SOL.

NB. Le code de champ magnétique utilisé dans ces simulations a été validé expérimentalement[J. Gunn and F. Saint-Laurent 08]. L’incertitude sur ce calcul ne sera donc pas discutée dans ce mé-moire. Nous le supposerons sans erreur.

4.3.2 Révision du modèle standard : dissociation des contributions en flux paral-lèles et perpendiculaires

L’analyse des cartographies de flux en surface du limiteur de Tore Supra a montré l’existenced’un angle α minimum en-dessous duquel le dépôt de chaleur ne se réduit plus, voire se “sur-localise”dans la zone de tangence. Pour le choc 41696 étudié, cette non-conformité avec le modèle standardcorrespond aux angles α inférieurs à 1°. Ce constat est en accord avec les conclusions issues deprécédentes études expérimentales ayant mis en évidence la présence de flux de chaleur non nulsproche du point de tangence entre le plasma et la paroi pour les machines TFTR, JET ou ToreSupra (alors équipée de limiteurs verticaux) [Stangeby 92]. Cette contradiction avec la loi d’analysestandard en sin(α) avait par ailleurs déjà été observé dans le cas de sondes électrostatiques planesencastrées dans des composants face au plasma ([Matthews 90], [Gunn 97]). Ces premiers résultatsavaient ainsi mis en évidence l’obtention de mesures de sondes incohérentes pour les valeurs d’anglesα faibles.

Nous avons supposé précédemment que le dépôt de chaleur observé sur le limiteur avait pourprincipale origine le transport parrallèle des particules le long des lignes de champ, additionné à unefaible contribution d’origine diffusionnelle perpendiculaire à ces surfaces magnétiques. La concordanceglobale obtenue entre les motifs de flux expérimentaux et théoriques au paragraphe précédent nousa permis de vérifier cette hypothèse, constituant la base du modèle standard proposé. Toutefois, laprésence de flux de chaleur non nuls au niveau du point de tangence entre la DSMF et le limiteura également remis en cause la technique de projection du flux convecté total (ou conduit) sur lecomposant, effectuée essentiellement dans la direction parallèle depuis la loi standard en sin(α). Bienque la composante radiale de transport des particules dans la SOL (induite par les phénomènes dedérive, collision et turbulence) ait été prise en compte dans le modèle standard initial au moyen duparamètre macroscopique λq, nous avons en effet négligé sa projection directe sur le composant lorsdes calculs précédents. Nous proposons de recourir ici à une modélisation standard modifiée afin desimuler de manière macroscopique le transport perpendiculaire des particules vers la paroi. Ce modèle

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Page 195: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 4.3

standard modifié, proposé dans [Mitteau 08], va nous permettre de dissocier la projection des fluxd’origines perpendiculaire et parrallèle en considérant :

(4.5)

où Q// et Q⊥ représentent les contributions respectives en flux parallèle et perpendiculaire projetéssur le limiteur (dissociées pour les nouvelles simulations).

Figure 4.15 – Composantes d’écoulement perpendiculaire (faible) et parallèle (dominante) desflux de chaleur dans le plasma de bord

Le modèle précédent ne remet pas en cause l’importance du transport parallèle dans la SOL,seule la projection des flux de chaleur en provenance de la SOL est ici modifiée afin de prendreen compte une composante perpendiculaire indépendante de la projection parallèle des flux. Lamême échelle caractéristique λq sera considérée pour les deux contributions modélisées (parrallèle etperpendiculaire).

L’application du modèle standard révisé nous a permis de calculer quatre nouvelles cartographiesthéoriques présentées à la figure 4.16 (ces cartographies correspondent au facteur de sécurité du choc41696 : q = 8). Ces simulations ont été réalisés en conservant une longueur de décroissance dansla SOL constante (λq = 1.5cm). Nous avons de nouveau ajusté le paramètre QDSMF à chaque si-mulation afin de conserver une puissance totale reçue par le limiteur équivalente pour chaque calcul(PLPT = 0.6MW ). Le pourcentage de contribution perpendiculaire additionnée au transport standarddes particules varie entre 0 à 10% sur les cartographies présentées.

181

Page 196: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 4

(a) Q⊥ = 0 %, QDSMF = 31 MW/m2 (b) Q⊥ = 3 %, QDSMF = 12 MW/m2

(c) Q⊥ = 5 %, QDSMF = 8.5 MW/m2 (d) Q⊥ = 10 %, QDSMF = 5 MW/m2

Figure 4.16 – Prise en compte d’un dépôt de chaleur perpendiculaire sur le limiteur - Simulationsréalisées à q = 8 et λq = 1.5cm

Le modèle standard modifié ne permet pas de modéliser l’étalement du dépôt de chaleur en dehorsde la zone mouillée (ce dernier reste toujours confiné dans les zones connectées au plasma). Le modèleproposé nous permettra donc uniquement de modifier la répartition des flux de chaleur au sein de cesrégions.

De même que pour une faible longueur de décroissance λq, la position des pics de chaleur serecentre autour du point de tangence lorsque la part de flux perpendiculaire augmente. A l’inversedes simulations réalisées à λq variabes (§4.2.2), le modèle standard modifié permet en revanche demodéliser l’existence de flux de chaleur non nuls au niveau du point de tangence entre la DSMF etle limiteur. Le ratio Qα/Qpic est en effet modifié par la projection normale de flux de chaleur surle composant. La valeur du flux local Qα augmente avec le paramètre Q⊥ (elle atteint 0.4MW/m2

pour la simulation réalisée à Q⊥=10%). L’amplitude Qpic reste quant à elle similaire pour les quatres

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Page 197: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 4.4

cartographies réalisées à puissance déposée constante (Qpic ∼= 0.6MW/m2). La contribution Qα estajoutée au moyen de la projection en cos(α) non nulle (et même maximum) pour les angles d’incidencerasants sur le composant. Les flux perpendiculaires déposés sur le composant sont prédominants auniveau du point de tangence (puisque Q// → 0 dans cette région).

Les différentes contributions en flux Q⊥(%) fixées dans la SOL conduisent à un niveau depuissance perpendiculaire P⊥ sur le limiteur comprise entre 60 et 87% de la puissance totale déposéesur le composant. Ce niveau élevé de puissance P⊥, en comparaison de la puissance parallèle P//déposée, est induite par le facteur cos(α) de l’équation (4.3) (tendant vers 1 puisque les anglesd’incidence mis en jeu sont faibles). La composante perpendiculaire Q⊥ fixée dans la SOL est projetéeorthogonalement sur le LPT. Même faible, cette dernière sera donc source de fortes puissancesindicentes sur tout le composant.

La modélisation standard modifiée nous permet de nous rapprocher du motif de dépôt de chaleurexpérimental en prenant en compte la projection de flux perpendiculaires sur le composant. La contri-bution Q⊥ à estimer devient alors une inconnue supplémentaire de notre problème, s’ajoutant auxparamètres λq et QDSMF que nous voulons également quantifier (rappelons que les paramètres α etrDSMF sont quant à eux connus et fixés par la configuration magnétique imposée au plasma).

4.4 Estimation des paramètres λq, QDSMF et Q⊥(%) expérimentaux

4.4.1 Une infinité de solution

Trois inconnues peuvent être ajustés afin de reproduire au mieux l’empreinte de dépôt de chaleurobservée sur le composant : le flux à la séparatrice QDSMF , la longueur de décroissance λq et lacontribution Q⊥. Outre l’observation globale du motif 2D de dépôt de chaleur calculé sur le composant,plusieurs critères qualitatifs et quantitatifs peuvent être proposés afin de déterminer quelle imagethéorique reproduit le plus exactement l’image expérimentale :

– la position des pics de chaleur sur le limiteur, et notamment leur espacement autour du laligne de tangence, peut tout d’abord être évaluée,

– le rapport Qα/Qpic3, peut également être un bon indicateur de la contribution en flux per-

pendiculaire dans la SOL,– enfin, la connaissance de la puissance totale PLPT déposée sur le composant dans les zonesmouillées peut permettre d’ajuster le paramètre QDSMF afin d’obtenir un bilan de puissancesur le limiteur cohérent avec les observations expérimentales (mesures IR ou calorimétriques, cf.chapitre 5 suivant).

Le modèle que nous utilisons est un modèle simplifié, nous savons donc que nous ne pourrons pasreproduire entièrement l’empreinte de dépôt de chaleur observée à la surface du composant. Nousne chercherons pas, par exemple, à reproduire l’étalement des flux de chaleur en dehors des zonesmouillées (ce dernier ne pouvant pas être pris en compte depuis le modèle standard proposé, mêmemodifié). La contribution en puissance conduite étalée dans les zones ombrées du limiteur sera doncignorée au cours de cette première étude. Nous allons en revanche étudier l’image restante en fluxdéposés, localisée dans les zones mouillées théorique du LPT.

3Qpic représentant l’amplitude maximum de flux atteinte sur le motif observé côté LFS (l’analyse du motif de fluxcôté fort champ (HFS) est ignorée car perturbée).

183

Page 198: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 4

L’influence respective des deux paramètres Q⊥(%) et λq sur le motif de flux simulé étant corrélées,les critères de comparaison pré-cités ne seront pas suffisants pour estimer conjointement les 3 para-mètres inconnus de notre modèle. En effet, nous avons vu que la contribution en flux perpendiculaireQ⊥ a pour conséquence de faire converger la position des pics de flux vers le point de tangence (DSMF)et d’augmenter la valeur de flux Qα (§4.3.2). Ces deux tendances (observées expérimentalement)peuvent également être simulées en prenant en compte dans le modèle standard modifié4, non plusune contribution perpendiculaire forte, mais une très faible longueur de décroissance (λq<0.5cm).L’influence des paramètres Q⊥ et λq sur le motif de dépôt de chaleur ne peuvent donc être dissociées.Plusieurs jeux de valeurs (QDSMF , λq, Q⊥) permettent de se rapprocher de l’image expérimentaleobservée sur le LPT. La solution du problème ne peut donc être trouvée sans fixer auparavant un ouplusieurs paramètres à-priori.

La méthode couramment utilisée pour estimer les grandeurs QDSMF , λq et Q⊥ consiste à projeterles flux de chaleur circulant dans la SOL sur le LPT et de comparer les images théoriques obtenues auximages expérimentales. Il est toutefois souvent difficile de fixer par tâtonnement les valeurs exactes desparamètres du modèle permettant de reproduire les trois critères cités précédemment. Nous proposonsdans le paragraphe suivant d’utiliser une nouvelle approche permettant d’analyser les cartographiesde flux incidents expérimentales calculées sur le LPT afin de remonter au profil de flux de chaleurs’écoulant dans la SOL.

4.4.2 De QLPT vers QSOL : estimation de λq et QDSMF à partir la décroissances desflux de chaleur observée dans la zone mouillée du LPT

4.4.2.1 Reconstruction du profil de flux dans le plasma de bord QSOL, à Q⊥(%) fixé

Nous proposons dans ce paragraphe de reconstruire l’allure expérimentale de flux QSOL(rDSMF )en “transposant” dans le plasma non confiné les valeurs de flux de chaleur calculées sur le limiteurdepuis les images IR. Cette approche ne permettra pas de s’affranchir des trois inconnues du problèmemais présentera l’avantage de fournir une estimation du profil de flux s’écoulant dans la SOL,directement comparable aux mesures de sondes de Langmuir effectuées en partie haute de la machine(cette comparaison sera effectuée au chapitre 5 de ce mémoire).

Nous proposons donc d’“inverser” l’équation(4.5) en fixant au préalable une part de flux per-pendiculaire dans la SOL (Q⊥,%) afin de déterminer les deux autres inconnues du problème : λq etQDSMF :

(4.6)

4L’ajustement de λq dans le modèle standard modifié (prenant en compte une projection des flux en cos(α) dépendantégalement de λq, équation (4.5)) permet d’ajuster à la fois la position des pics et la valeur de Qα. Ce double ajustementétait en revanche impossible depuis le modèle considérant une simple projection des flux sin(α), §4.2.2.

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Page 199: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 4.4

Nous cherchons ici à estimer le profil radial de flux de chaleur dans la SOL (fonction de rDSMF ) :QIRSOL(rDSMF ). Afin d’obtenir un profil de flux QLPT dépendant de la variable rDSMF nous proposonsd’étudier le profil spatial de flux de chaleur observé sur le limiteur le long d’une aiguille, dans la zonemouillée théorique côté faible champ (LFS). La figure 4.17b illustre le profil spatial de flux QLPTobservé sur le composant le long du profil repéré à la figure 4.17a.

(a) Localisation du profil radial étudié sur le LPTpour reconstruire le profil QIRSOL

(b) Profil de flux observé sur le limiteur : QLPT (rDSMF )

Figure 4.17 – Profil de flux calculé le long d’une aiguille du LPT

La position du profil spatial de flux étudié sur le LPT a été choisie en raison de sa localisationdans la zone mouillée théorique, dans la région de plus forts flux. Le profil étudié permet ainside couvrir la gamme maximale de rayon rDSMF caractérisant les lignes de champ connectées aulimiteur (comprise entre 0 et 0.06m pour ce profil, cf. figure 4.5 du §4.1.3). La courbe 4.17 illustrela présence de forts flux piqués proches de la séparatrice. Les flux de chaleur déposés sur le LPTdiminuent ensuite progressivement le long de l’aiguille. Les valeurs nulles indiquées pour les rayons0.042 < rDSMF < 0.06m correspondent aux tuiles de CFC situées en dehors du champ de vision dela caméra IR.

La figure 4.18 présente le résultat issu de l’inversion du profil QLPT considéré. Les valeurs deflux QSOL illustrées ont été déduites de l’équation(4.6) en fixant dans le modèle un ratio Q⊥ de10% (cette valeur a été choisie par anticipation des résultats obtenus au chapitre 5 de ce mémoire,l’influence du ratio Q⊥ considéré dans les calculs sera également discutée au §4.4.2.2 de ce chapitre).La présence de forts flux incidents sur le limiteur proche de la DSMF entraîne la reconstruction d’unprofil de flux piqué dans la SOL pour les faibles rayons rDSMF (correspondant aux lignes de champproches de la séparatrice). L’obtention de ce profil de flux, non exponentiel, n’est pas en accord avecla modélisation théorique standard. Cette forme n’est également pas cohérente avec les profils deflux mesurés par les sondes de Langmuir dans la SOL (cf. exemple de la figure 1.31, chapitre 1). Cepiquage de flux proche de la séparatrice traduit donc l’existence de phénomènes de dépôt de chaleurnon expliqués par le modèle standard, menant à un calcul de flux jugé non réaliste pour les faiblesrayons rDSMF . Cette contribution n’étant pas clairement identifiée et non compatible la modélisationproposée, nous choisissons de l’ignorer et de ne considérer que la seconde partie du profil calculé (pourrDSMF > 0.002m).

185

Page 200: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 4

Figure 4.18 – Profil radial de flux QSOL estimé depuis l’analyse des images IR du choc 41696(Q⊥ fixé à 10%)

L’exclusion des premiers points calculés (flux piqués “non standards”) nous permet d’approcherla seconde partie du profil reconstruit par une exponentielle unique (figure 4.18b). La longueur dedécroissance λq et le flux QDSMF définissant le profil calculé peuvent alors être estimés depuis uneapproximation aux moindres carrés minimisant la fonction J suivante :

J(λq, QDSMF ) = ‖QIRSOL(rDSMF )−QIR fitSOL (rDSMF , λq, QDSMF )‖2 (4.7)

où :QIR fitSOL (rDSMF , λq, QDSMF ) = QDSMF .e

−rDSMFλq (4.8)

La fonction QIR fitSOL permettant d’approcher le profil QIRSOL calculé expérimentalement est tracée

à la figure 4.18b. La longeur de décroissance caractérisant ce profil approché (après exclusion desflux piqués aberrants proches de la séparatrice) est de 2.7cm. Cette valeur est légèrement supérieureà l’évaluation du paramètre λq réalisée lors de précédentes études sur Tore Supra : λq=1 à 2cmen configuration limiteur ([Mitteau 03b], [Vallet 03]) ou λq=1.2 à 2.4cm en configuration divertorergodique5 ([Seigneur 93], [Guilhem 92]). La valeur de flux QDSMF atteint à la séparatrice est quantà elle de 3.5MW/m2 pour ce choc (en supposant Q⊥=10%).

Nous avons pu vérifier, en “inversant” des profils QLPT tracés à différentes positions toroïdalesϕ sur le limiteur (sur différentes aiguilles “mouillées”), que le profil QSOL(rDSMF ) reconstruit restequasiment invariant. Seul le rayon maximal rDSMF couvert pas le calcul varie d’une aiguille à l’autre.L’allure du profil de flux calculé dans la SOL est en revanche dépendant de la contribution en fluxperpendiculaire imposée dans l’équation(4.6). Nous proposons de quantifier son influence dans le pa-ragraphe suivant.

5cf. chapitre 1, §1.2.1.1.

186

Page 201: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 4.4

4.4.2.2 Influence de la contribution Q⊥(%) fixée sur le profil de flux QSOL reconstruitdans le plasma de bord

Le profil de flux calculé dans la SOL depuis les images IR varie avec la contribution en fluxperpendiculaire fixée dans l’équation(4.6). Plus le flux perpendiculaire imposé arbitrairement serafaible, plus la longueur de décroissance λq estimée sera petite. Ce résultat est illustré à la figure 4.19.

Figure 4.19 – Influence de la contribution perpendiculaire fixée Q⊥ sur le profil radial de fluxcalculé dans la SOL

Le graphique 4.19 correspond à trois profils de flux QIRSOL calculés depuis le même profil QLPT(correspondant au tracé de la figure 4.17). Les profils reconstruits dans le plasma de bord ont étécalculés pour des contributions en flux perpendiculaires : Q⊥ =0, 5 et 10%. Les fonctions approchéesQIR fitSOL correspondant à chaque calcul ont été reproduites sur la figure. Les valeurs de flux QDSMF

et de longueur λq correspondant à ces courbes sont synthétisées dans le tableau 4.1. Nous observonsque les paramètres QDSMF et λq estimés varient d’un facteur 2 environ entre une contributionperpendiculaire fixée dans la SOL nulle ou égale à 10%. Ce résultat montre la grande sensibilitédes valeurs de λq et QDSMF estimées au paramètre Q⊥ fixé à-priori dans l’équation (4.6). Sans uneconnaissance exacte de la contribution en flux perpendiculaire déposée sur le LPT, nous ne pourronsdonc pas juger de la pertinence des valeurs de λq et QDSMF estimées depuis les images IR. Nousproposons par la suite (chapitre 5) d’évaluer cette contribution en flux perpendiculaire en confrontantles profils de flux QIR fit

SOL calculés aux mesures de sondes de Langmuir réalisées en partie haute de lamachine.

Q⊥ λq (cm) QDSMF (MW/m2)0% 1.4 8.25% 2.3 5.910% 2.7 3.5

Tableau 4.1 – Les paramètres λq et QDSMF estimés dépendent de la contribution en flux perpen-diculaire prise en compte dans la SOL

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Page 202: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 4

4.5 Conclusion du chapitre

Dans ce chapitre, nous avons utilisé un modèle théorique standard afin de simuler des cartograhiesde flux incidents sur le LPT et de comparer ces dernières aux images expérimentales obtenues depuisle système IR. Au travers des simulations réalisées, nous avons mis en évidence l’influence que peutavoir la configuration magnétique du plasma sur l’empreinte du dépôt de chaleur observée dans lamachine. Nous avons également pu observer que les phénomènes physiques associés au transport desparticules dans la SOL modifie de façon importante l’empreinte du plasma sur le composant. Lessimulations théoriques réalisées dans cette étude ont en effet démontré que le facteur de sécurité qd’une part, et les paramètres λq et Q⊥ d’autre part, peuvent influencer de manière non négligeable lavaleur et la position des pics de flux observés sur le limiteur.

Le modèle standard modifié utilisé pour simuler l’empreinte de dépôt de flux théorique sur lelimiteur s’est montré globalement cohérent avec l’image expérimentale observée pour le choc 41696.La position des zones mouillées par le plasma a pu être retrouvée sur le composant. Nous avonstoutefois pu observer deux incohérences notables entre les images expérimentales acquises in-situ etles simulations réalisées. Cette constation nous conduit à diviser le motif de flux expérimental observésur le LPT en 3 zones distinctes (cf. figure 4.20) :7−→ Une première zone (1) correspond à l’étalement du dépôt de chaleur observé en dehors de la

zone mouillée théorique (non modélisée avec le code standard proposé).7−→ Une deuxième zone (2) correspond à la présence de flux incidents très piqués dans la région

proche de la DSMF. Notons que ce piquage de flux ne peut être expliqué à lui seul par une composanteperpendiculaire forte dans la SOL. Cette incohérence avec le modèle standard, même révisé, a été miseen évidence par le calcul de flux aberrants dans la SOL lors de l’inversion du profil QLPT (§4.4.2).7−→ La troisième zone (3) correspond à un motif de dépôt de chaleur cohérent avec les prédictions

théoriques standards. Une décroissance progressive des flux de chaleur incidents sur le limiteur yest observée dans la direction radiale. Cette dernière zone, même restreinte (ne correspondant qu’àune partie de l’empreinte de flux sur le composant), nous a permis de remonter à des informationspertinentes sur l’écoulement des flux de chaleur dans la SOL (à travers l’estimation des paramètresstandards QDSMF , λq et Q⊥).

(La zone perturbée côté fort champ (HFS) a quant à elle été ignorée lors des analyses.)

Nous pouvons noter que la présence de forts flux de chaleur (Qα) au niveau du point de tangenceα = 0 est incohérente avec l’observation d’une croissance des dépôts carbonés dans cette région(chapitre 3). Cette question n’est pas encore résolue actuellement. La présence de deux zonesd’interactions plasma-paroi incohérentes avec le modèle théorique a également mis en évidencel’existence de phénomènes de transport anormaux proches de la paroi, modifiant le motif de dépôt dechaleur attendu sur le composant (nous proposons de discuter de ce point dans le chapitre suivant).

La première comparaison entre cartographies de flux expérimentales et théoriques effectuée dansce chapitre nous a fourni des informations intéressantes sur les phénomènes de transport et de dépôtde chaleur. La méthodologie développée peut maintenant être appliquée à l’analyse de nouvelles dé-charges expérimentales. L’estimation des grandeurs QDSMF , λq et Q⊥ que nous avons effectuée resteen effet à valider. Nous proposons dans le chapitre suivant de comparer nos résultats à ceux préditspar d’autres diagnostics de surveillance des interactions plasma-paroi. L’étude menée consistera tout

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Page 203: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 4.5

d’abord à établir une cohérence entre les images infrarouges expérimentales obtenues sur le limiteuret les données issues des diagnostics calorimétrie, sondes de langmuir et bolométrie. Cette analysecomparative sera menée pour quatre chocs à facteur de sécurité q variables (compris entre 4 et 8).Cette analyse expérimentale aura pour but de différencier les mécanismes de dépôt de chaleur mis enjeu dans les 3 zones d’interactions définies précédemment.

Figure 4.20 – L’empreinte de dépôt de chaleur observée sur le composant lors des expériencespeut se diviser en 3 zones : les zones 1 et 2 ne sont pas cohérentes avec les prédictions théoriques,les interactions plasma-paroi se produisant sur la zone 3 peuvent quant à elles être prédites parle modèle standard

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Chapitre 5

Analyse expérimentale des dépôts dechaleur dans le tokamak Tore Supra :influence du facteur de sécurité q sur larépartition des flux dans la machine

Divers paramètres peuvent influencer la répartition d’énergie dans un tokamak. Nous pouvonsciter entre autres l’amplitude et la nature des puissances de chauffage apportées au plasma (couplaged’ondes électromagnétiques ou chauffage ohmique) ou bien la fraction d’énergie rayonnée par ce der-nier (nous avons vu, à travers divers exemples traités dans les chapitres précédents, que cette dernièrepeut en effet modifier de manière significative la répartition des puissances dans la machine, §2.1 et§2.3.4, chapitre 2). La configuration magnétique imposée au plasma, et notamment l’enroulement deslignes de champ (caractérisé par le facteur de sécurité q) est également un critère important pouvantmodifier la répartition 2D des flux de chaleur sur les CFP (§4.2.1, chapitre 4). Nous avons choisid’étudier de manière plus spécifique l’influence de ce dernier paramètre dans ce chapitre.

Afin d’analyser l’influence du facteur de sécurité sur le motif de dépôt de chaleur dans le tokamak,nous proposons de comparer entre elles les cartographies de flux incidents calculées en surface dulimiteur pour quatre décharges réalisées à q variable. La comparaison de ces cartographies IR avec lesmesures de bolométrie, calorimétrie et sondes de Langmuir effectuées dans la machine nous permettraégalement de reconstruire une image empirique des contributions en flux déposés sur le composant.

190

Page 205: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 5.1

5.1 Présentation des scénarii plasma étudiés

Nous proposons dans ce chapitre d’étudier l’influence du facteur de sécurité q sur l’empreinte dedépôt de chaleur observée sur le limiteur pompé toroïdal. La figure 5.1 illustre les quatre scénariiplasma que nous allons étudier. Aux temps t = tobs indiqués sur les figures, les conditions plasmasont similaires de chocs à chocs à l’exception du courant plasma Ip imposé dans la machine, modifiéd’une décharge à l’autre. Cette variation du courant Ip, alors que le champ magnétique toroïdal Bφest maintenu constant, nous permet d’obtenir une variation contrôlée du facteur de sécurité q entreles quatres décharges (cf. équation (1.16), chapitre 1, la valeur du facteur de sécurité q est fixé par lesvariables Ip et Bφ). Les paramètres Ip et q correspondants à chaque choc étudié sont synthétisés dansle tableau 5.1. Les facteurs de sécurité q indiqués correspondent aux taux d’enroulement des lignes dechamp dans le plasma de bord à la position : r ∼= a ∼= 0.72m. Ces valeurs ont été calculées depuis lesmesures d’équilibre magnétique réalisées dans la machine (base de données TMAG, chapitre 1, §1.1.6).

(a) choc 41696, Ip = 0.6MA, q = 8 (b) choc 41688, Ip = 0.8MA, q = 6.4

(c) choc 41677, Ip = 1MA, q = 4.8 (d) choc 41686, Ip = 1.2MA, q = 4

Figure 5.1 – Scénarii plasma correspondant à quatre chocs hybrides en scan de q

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Chapitre 5

NB. Pour des raisons techniques et opérationnelles, les puissances Pchauffage et Prad n’ont pas puêtre conservées strictement identiques d’une décharge à l’autre (1.9 < Pchauffage < 2.6MW , 0.67 <Prad < 0.74MW ). La fraction de puissance rayonnée par le plasma frad est toutefois constante dans lamachine pour les quatre chocs étudiés (frad = Prad/Pchauffage ∼= 0.33), permettant ainsi de conserverune répartition d’énergie dans la machine inchangée (un des objectifs de l’expérience était en effet deconserver une fraction de puissance conduite dans la SOL constante afin d’isoler l’influence du facteurde sécurité q d’autres phénomènes d’interactions plasma-paroi pouvant dépendre de frad).

Choc Ip (MA) q (ua)41696 0.6 841688 0.8 6.441677 1 4.841686 1.2 4

Tableau 5.1 – Facteurs de sécurité q (mesurés au bord) correspondants à chaque décharge étudiée

5.2 Motif de dépôt de chaleur calculé sur le LPT

Les cartographies de flux calculées sur le limiteur pour les quatre chocs étudiés sont représentéesà la figure 5.2. Les quatre décharges plasma analysées correspondent à une campagne expérimentalede l’année 2008 réalisée après le nettoyage complet des CFP (c’est-à-dire après le grattage des dépôtscarbonés présents sur leur surface). Les deux défauts d’interface D1 et D2 encore présents après la re-mise en état du limiteur ont été pris en compte lors de la déconvolution des images IR (cf. figure 5.2a).Les résistances de contact considérées pour les calculs sont respectivement de 3, 6.10−5m2.K/W et1, 97.10−4m2.K/W (cf. chapitre 3, §3.5.3). La présence de l’“effet gaufrier” dès le début de la cam-pagne expérimentale nous a également contraint à exclure des calculs thermiques les pixels pollués parla redéposition de carbone entre les tuiles. Les cartographies de flux illustrées à la figure 5.2 ont étéobtenues après une interpolation linéaire 2D des valeurs de flux estimées au centre de chaque tuile deCFC (cf. démarche présentée au chapitre 3 de ce mémoire, §3.4). Les propriétés thermiques des maté-riaux considérées pour les calculs ont été choisies à une température de référence de 200°C (cf. Annexe1). Les échelles des différentes cartographies de flux présentées ont été ajustées sur la valeur maximumde flux atteint pour chaque choc. Ces flux maximums, compris entre 1.4MW/m2 et 1.9MW/m2 (selonla puissance Pchauffage injectée), sont atteints dans les zones mouillées du composant proche de laDSMF (rappelons que le motif de flux observé du côté HFS est pertubé par le mauvais alignementvertical d’une aiguille dans cette zone). Les flux déposés en zones ombrées sont plus faibles (de l’ordrede 100 à 200 kW/m2 pour les quatre décharges étudiées). Les images représentées correspondent auxtemps d’observation t = tobs repérés sur la figure 5.1.

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Section 5.3

(a) choc 41696, Ip = 0.6MA, q = 8, tobs = 25s (b) choc 41688, Ip = 0.8MA, q = 6.4, tobs = 55s

(c) choc 41677, Ip = 1MA, q = 4.8, tobs = 10s (d) choc 41686, Ip = 1.2MA, q = 4, tobs = 10s

Figure 5.2 – Cartographies de flux incidents calculées en surface du LPT pour les quatre chocsréalisés en scan de q - Les zones mouillées théoriques sont délimitées par les contours rouges

Avant d’analyser les variations du motif de chaleur observé sur le limiteur pour les quatre chocsétudiés, nous proposons tout d’abord d’établir, à l’aide des différents systèmes de mesure disponibles,une image cohérente des différentes contributions en flux de chaleur déposés dans la machine.

5.3 Bilans de puissances et de flux dans la machine

5.3.1 Bilan des puissances totales déposées sur le limiteur (cohérence IR-Calorimétrie)

L’intégration spatiale du motif de flux calculé sur le limiteur depuis les images IR peut nous per-mettre d’estimer l’évolution temporelle de puissance déposée sur la section de 20° du composant viséepar la voie HR. En supposant que le motif de dépôt de chaleur observé sur le limiteur soit toroïda-lement répétitif (cette symétrie étant induite par le ripple entre les bobines magnétiques, chapitre

193

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Chapitre 5

1), nous pouvons déduire la quantité de chaleur totale déposée sur le composant depuis la relationsuivante (les coordonnées (r,φ) correspondant au repère indiqué sur la figure 5.2a) :

PIR(t) = 18×∫QIR(r, φ, t).dS (5.1)

L’inversion des mesures calorimétriques présentée au chapitre 2 permet également de remonterà la puissance déposée sur le composant. La confrontation des niveaux de puissance calculés depuisles deux diagnostics (IR et calorimétre) permet alors de vérifier la cohérence obtenue entre les deuxsystèmes de mesure. Cette comparaison est illustrée à la figure 5.3 pour les quatre chocs étudiés. Lapuissance déposée sur le composant, déduite de l’inversion des mesures calorimétriques, est représentéeen vert sur les graphiques (ces signaux ont été calculés depuis les mesures de puissance Pextraitereprésentées en bleu sur les figures). Les coefficients de régularisation optimum choisis pour inverserles mesures calorimétriques sont respectivement de 0.066, 0.043, 0.053 et 0.053 pour les quatre chocsétudiés (ces derniers ont été estimés depuis les courbes en L établies pour chaque décharge, chapitre2, §2.2.3.2). Le niveau de puissance déposée sur le limiteur calculé depuis la déconvolution des imagesIR est représenté en rouge sur les quatre figures.

Nous avons ajouté à ce premier bilan réalisé sur le LPT un relevé supplémentaire de puissance cor-respondant à l’évolution temporelle de puissance conduite estimée dans la machine lors des décharges(Pcond). Ces relevés (représentés en violet sur les différents graphiques) correspondent au bilan :

Pcond = Ptot − Prad ∼= Pchauffage − Prad (5.2)

(nous avons négligé dans ce bilan les contributions des puissance Psupras, Pneutres et Pneutrons,équation(1.18), chapitre 1)

Premier constat expérimental :

Les courbes de puissances Pdeposee(IR) et Pdeposee(calorimétrie) sont extrêmement prochespour les quatre décharges analysées. Compte-tenu de la précision des systèmes de mesure IR etcalorimétrie et des traitements successifs appliqués à leurs données1, cette cohérence est très satisfai-sante et permet de valider les valeurs de flux incidents calculées sur le composant depuis les images IR.

Deuxième constat expérimental :

Nous remarquons également que les puissances Pdeposee calculées pour les quatre chocs sont enaccord avec les niveaux de puissance conduite Pcond estimés dans la machine. Le LPT semble ainsirecevoir la totalité de la puissance conduite en provenance du plasma lors des expériences. Cettedernière représente 60 à 65% de la puissance totale injectée dans le plasma, ce qui est en accord avecune fraction frad ∼= 33% conservée constante dans la machine pour les quatre chocs étudiés. Ce premierbilan sous-entend que les contributions en flux rayonné, en flux de neutres ou en flux suprathermiquessont négligeables sur le limiteur pour ces scénarii. Nous proposons de vérifier cette hypothèse grâce àun bilan de flux plus détaillé dans le paragraphe suivant.

1cf. barres d’erreur respectives fournies dans les chapitres 2 et 3

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Section 5.3

(a) choc 41696, Ip = 0.6MA, q = 8 (b) choc 41688, Ip = 0.8MA, q = 6.4

(c) choc 41677, Ip = 1MA, q = 4.8 (d) choc 41686, Ip = 1.2MA, q = 4

Figure 5.3 – Bilan de puissance déposée sur le limiteur pour les quatre chocs en scan de Ip :Pextraite(calorimétrie) - Pdeposee(calorimétrie) - Pdeposee(IR) - Pconduite (bilan de puissance)

Discussion sur l’allure temporelle des puissances calculées :

Les graphiques de la figure 5.3 mettent en évidence les limites des traitements proposés pour dé-duire des mesures IR et calorimétriques les niveaux de puissances déposées sur le composant.

L’inversion des signaux en Pextraite(t) permet de reconstruire une allure de puissance déposée surle composant globalement cohérente avec l’allure temporelle de puissance conduite dans la machine.Toutefois, ce traitement des données calorimétriques ne permet pas de reconstituer précisément lestransitoires rapides de dépôt de chaleur correspondant aux phases de montée et de coupure de puis-sance. Cette limite est notamment mise en évidence par le traitement des signaux du choc 41677 (figurec) où l’inversion du signal calorimétrique permet de s’affranchir globalement du temps de transfert dela chaleur dans le réseau de refroidissement mais ne permet pas de reconstruire la dynamique exactede la puissance déposée sur le composant. Nous pouvons également noter que les signaux calorimé-triques de la décharge 41696 (choc long) ont été perturbés par un problème de régulation des bouclesde refroidissement survenu en cours de choc (à t ∼= 80− 110s).

Les courbes de puissances déposées, déduites des cartographies de flux IR, sont également per-turbées. L’allure temporelle de puissance reconstruite pour le choc 41696 (q = 8) ne présente pas de

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Chapitre 5

plateau stationnaire. L’évolution légèrement croissante du signal Pdeposee(IR) pour ce choc peut êtreinduite par l’utilisation d’un modèle thermique trop simplifié (ne prenant pas en compte les effets2D ou la non-linéarité du modèle, cf. chapitre 3). Nous observons également la présence d’artefactsnumériques non justifiés (pics de puissance positifs ou négatifs) lors des phases transitoires rapidespour les chocs 41677 et 41686. Ces perturbations peuvent là encore être dues à l’utilisation du calcul1D linéaire. La méthode de calcul de flux utilisée sur Tore Supra (rapide et flexible) montre donc iciquelques limites.

5.3.2 Evaluation des contributions en flux Qsupras, Qneutres et Qrad déposées sur leLPT

Nous avons introduit au chapitre 1 de ce mémoire le bilan de flux détaillé caractérisant les diffé-rentes contributions thermiques reçues par les composants face au plasma de la machine, tel que :

Qdepose = Qrad +Qcond +Qsupras +Qneutres +Qneutrons (5.3)

Nous avons négligé dans le bilan précédent les charges thermiques déposées sur le limiteur induitespar les flux Qrad, Qsupras, Qneutres et Qneutrons. Si la contribution Qneutrons peut être considérée nullesur Tore Supra (réactions de fusion inexistantes, chapitre 1), nous proposons en revanche d’estimerles flux Qsupras, Qneutres et Qrad déposés sur le composant.

Qsupras :

La part d’énergie reçue par les protections ripple de la machine est un bon indicateur des puis-sances suprathermiques perdues dans le tokamak. Les bilans enthalpiques réalisés sur les protectionsripples (calorimétrie) pour les quatre chocs étudiés montrent que ces puissances sont égales enmoyenne à 3 ou 4% de l’énergie totale injectée dans la machine. Ces dernières sont donc négligeablesau regard des puissances conduites circulant dans le plasma de bord et déposées sur le LPT.

Qneutres :

Dans le cadre d’études numériques sur l’érosion et la redéposition du carbone dans le tokamak ToreSupra, un code cinétique nommé EIRENE ([Tsitrone 05],[Marandet 08]) a récemment permis d’évaluerle taux d’échanges de charges entre les ions du plasma (population “chaude”) et les particules recycléesémises des CFP (population “froide”). Ce type de simulation est intéressante pour l’étude des dépôtsde chaleur dans la machine puisqu’elle peut fournir une cartographie 2D des flux de particules neutresreçues par les composants. La figure 5.4 illustre la contribution thermique de ces particules neutres surle limiteur pour un choc plasma similaire aux décharges étudiées dans ce chapitre (choc de référenceDITS).

Les flux maximums Qneutres déposés sur le limiteur d’après la simulation de la figure 5.4 sontde l’ordre de 100 kW/m2 dans la région proche de la DSMF. Cette contribution est négligeable encomparaison des flux de chaleur estimés dans cette même zone depuis les images IR (de l’ordre de1MW/m2 pour les quatre chocs étudiés). Les flux de particules neutres s’étendent également au-delàde la zone mouillée théorique. La puissance incidente déposée dans les régions ombrées du composantest toutefois estimée équivalente à seulement 15% de la puissance totale déposée sur le composantpar les particules neutres pour cette simulation (les valeurs de flux Qneutres estimés dans les zonesombrées sont inférieures à 50 kW/m2). Cette estimation des flux de chaleur Qneutres reçus par le LPTmontrent que nous pouvons également négliger cette contribution au regard des flux conduits déposéssur le composant.

196

Page 211: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 5.3

Figure 5.4 – Flux de chaleur déposés sur le LPT par les particules neutres, simulation EIRENE[Marandet 08]

Qrad :

Le flux rayonné par le plasma et déposé sur les composants (Qrad) peut être évalué grâce auxmesures de bolométrie (cf. description du diagnostic donnée au chapitre 1).

Figure 5.5 – Reconstruction tomographique du choc 39880 [Balorin 08] (densités de puissancesrayonnées dans la machine)

197

Page 212: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 5

Le plasma peut être divisé en trois zones rayonnantes (figure 5.5) :– une première zone 1, de fort rayonnement, localisée au-dessus du limiteur pompé toroïdal,

correspond au rayonnement des ions faiblement ionisés,– une seconde zone 2 correspond aux couches rayonnantes des états plus ionisés et présente unedistribution poloïdale des flux rayonnés plus homogène,

– une dernière zone 3, le plasma central, correspond au rayonnement émis par les impuretésmétalliques ionisées au coeur de la machine et au rayonnement continu (Bremmstrahlung).

Chaque source ponctuelle localisée dans la machine émet un rayonnement isotrope. Un calculconsistant à évaluer les flux rayonnés émis par chacune de ces sources ponctuelles dans la directiondu LPT a été mené pour un choc de référence DITS en 2008 [Preynas 08] (le principe de ce calculest illustré à la figure 5.6). Ce dernier nous a permis d’évaluer la part de puissance rayonnée déposéesur le LPT par chacune des zones 1, 2 et 3 et a ainsi démontré que le rayonnement du plasmacentral contribue à 14% de la puissance totale rayonnée déposée sur le LPT. Les zones rayonnantes 1et 2 contribuent quant à elles à hauteur de 22% et 64% de la puissance totale rayonnée sur le composant.

La distribution de densité de puissance founie par la reconstruction tomographique de la figure 5.5nous a également permis d’évaluer la distribution radiale de flux rayonné sur le LPT présenté à lafigure 5.7, [Preynas 08]. Ce profil de flux Qrad(r) déduit des mesures de bolométrie indique que leflux rayonné maximum déposé sur le limiteur pour les chocs étudiés (scénario de référence DITS) estd’environ 25kW/m2. Cette contribution est très faible au regard du flux total déposé sur le composantestimé depuis les mesures IR, aussi bien dans les zones mouillées que dans les zones ombrées.

Figure 5.6 – Principe du calcul de flux Qrad provenant du plasma et déposé sur le LPT (géométrieassociée au calcul, [Preynas 08])

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Page 213: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 5.4

(a) Repérage du profil calculé sur le LPT (b) Profil de flux Qrad(r) le long d’une aiguille du LPT

Figure 5.7 – Evaluation des flux rayonnés déposés sur le LPT (profil radial), choc 39880 (scé-nario de référence DITS), [Preynas 08] - Les valeurs calculées sont supposées homogènes dansla direction toroïdale ϕ

Troisième constat expérimental :

Les données analysées dans ce paragraphe ont démontré que les flux Qsupras, Qneutres, Qneutrons ouQrad déposés sur le limiteur sont négligeables au regard de la puissance totale reçue par le composant.Cette constation confirme que nous pouvons simplifier le bilan de puissance sur le composant tel que :

Pdeposee ∼= Pcond (5.4)

avec :

Prad ∼= Psupras ∼= Pneutres ∼= Pneutrons ∼= 0

5.4 Etude de l’étalement du dépôt de chaleur sur le LPT en fonctionde q

5.4.1 Evaluation de la part de puissance conduite étalée en dehors des zonesmouillées théoriques

La frontière des zones mouillées théoriques sur le limiteur est représentée en rouge sur lesfigures 5.2 a à d. Nous constatons que des flux incidents non négligeables sont étalés en dehors de ceszones pour les quatre chos étudiés. Nous avons démontré dans le paragraphe précédent que les fluxrayonnés, neutres ou suprathermiques déposés sur le limiteur ne peuvent expliquer à eux seuls cesflux de chaleur. Ces derniers proviennent donc d’un étalement de puissance conduite dans les zonesthéoriquement ombrées du composant.

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Chapitre 5

Nous pouvons quantifier l’étalement de puissance observé en dehors des zones mouillées théoriquesdu composant en comparant la puissance reçue dans ces régions à la puissance totale incidente calculéesur le limiteur. Les courbes rouges pointillées représentées à la figure 5.8 correspondent à l’intégrationdu motif de flux déposé dans les zones mouillées théoriques du composant uniquement.

(a) choc 41696, Ip = 0.6MA, q = 8 (b) choc 41688, Ip = 0.8MA, q = 6.4

(c) choc 41677, Ip = 1MA, q = 4.8 (d) choc 41686, Ip = 1.2MA, q = 4

Figure 5.8 – Les puissances déposées dans les zones mouillées théoriques du limiteur représententenviron la moitié de la puissance totale reçue par le composant pour les quatres chocs étudiés

Quatrième constat expérimental :

Les niveaux de puissances déposées dans les zones ombrées du limiteur représentent entre 56%et 63% de la puissance totale reçue par le composant. Ces ratios indique que plus de la moitié dela puissance conduite provenant du plasma s’étale en dehors des zones mouillées théoriques pourles quatre chocs étudiés. Ce constat indique que les cartographies de flux simulées sur le composantdepuis le modèle standard ne pourront expliquer que la moitié des charges thermiques observées. Nousproposons d’étudier expérimentalement l’évolution de cet étalement en fonction du facteur de sécuritéq imposé dans la machine.

200

Page 215: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 5.4

5.4.2 Evolution de l’étalement observé sur le composant en fonction de q

Afin d’évaluer l’étalement des flux en dehors des zones mouillées théoriques du LPT, nous allonstout d’abord analyser la variation d’un profil radial de flux tracé le long d’une aiguille du composant.Nous étudierons ensuite la distribution des flux de chaleur incidents autour du point de tangenceα = 0.

5.4.2.1 Etude d’un profil radial de flux déposé sur le LPT

Nous pouvons difficilement observer, à partir des cartographies présentées à la figure 5.2, sile motif de dépôt de chaleur calculé sur le limiteur varie lorsque le facteur de sécurité q diminue.Nous proposons donc d’étudier plus particulièrement la variation d’un profil radial de flux tracé lelong d’une aiguille du LPT (traversant la zone mouillée théorique) afin d’évaluer cet étalement. Lafigure 5.10 illustre les profils de flux QLPT obtenus pour les quatre chocs étudiés, correspondant autracé spatial représenté à la figure 5.9. Ces profils ont été normés afin de s’affranchir de l’amplitudemaximum de flux déposée sur le LPT pour les quatre décharges (légèrement différente puisque lapuissance de chauffage totale injectée dans la machine pour les quatre expériences est légèrementvariable, cf. remarque du §5.1).

Figure 5.9 – Repérage du tracé spatial utilisé sur la cartographie du choc 41696 (q = 8)

Cinquième constat expérimental :

Les profils radiaux tracés à la figure 5.10 montrent que le dépôt de chaleur sur le limiteur s’étalelorsque le facteur de sécurité q diminue. Cet étalement des flux de chaleur induit par la variation deq est en accord avec les prédictions théoriques réalisées au chapitre 4 (§4.2.1). Cet étalement ne seproduit toutefois pas dans la zone mouillée théorique attendue sur le composant mais dans la zone 1

201

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Chapitre 5

non standard repérée lors de la confrontation expérience-théorie réalisée au chapitre 4 (figure 4.20).Le reste du motif de dépôt de chaleur dans la zone 3 “standard” (pour daiguille > 0.2m) n’est luipas modifié par la variation du facteur de sécurité avec q. Nous remarquons également que dans le casexpérimental l’étalement observé n’est pas progressif avec q. Un “saut” d’étalement est observé entreles chocs réalisés à q = 8 et q = 6.4 (41696 et 41688) et les chocs réalisés à q = 4.8 et q = 4 (41677 et41686).

Figure 5.10 – Profils spatiaux de flux sur une aiguille du LPT (valeurs normées) pour les quatrechocs en scan de q - L’empreinte de dépôt de chaleur sur le limiteur s’étale dans la zone ombréelorsque le facteur de sécurité q diminue

5.4.2.2 Etude des flux déposés au point de contact entre le plasma et le limiteur (zoneα = 0)

Nous proposons de compléter cette première analyse de l’étalement du dépôt de chaleur en surfacedu limiteur par une étude plus détaillée des profils de flux observés au niveau de la zone de tangenceentre le plasma et le composant (zone α = 0).

Nous avons déjà pu observer au chapitre 4 de ce mémoire que le dépôt de flux minimal observésur le limiteur (entre les motifs HFS et LFS) est cohérent avec la position du point de tangencethéorique α = 0 attendu sur le composant. La figure 5.12 illustre l’évolution des flux déposés auniveau de ce point de tangence pour les quatre chocs étudiés. Le profil spatial étudié correspond autracé représenté à la figure 5.11 (distance dα). Ce profil, perpendiculaire à la ligne de tangence, relie lespics de flux observés sur le composant côtés fort champ et faible champ. Les valeurs représentées surle graphique 5.12 ont été normées afin de s’affranchir des légères variations de puissance injectée dansla machine entre les quatre chocs étudiés (§5.1). Les flux déposés sur le côté fort champ du limiteur

202

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Section 5.4

(motif HFS) ne seront pas analysés en raison de la perturbation locale du motif de chaleur dans cettezone induite par la présence d’une aiguille mal alignée (chapitre 3, §3.5.3).

Figure 5.11 – Repérage du profil spatial dalpha sur la cartographie de flux expérimentale du choc41696

Figure 5.12 – Evolution du profil de flux le long d’un axe perpendiculaire à la ligne de tangencelorsque q diminue (valeurs de flux normées)

203

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Chapitre 5

Sixième constat expérimental :

Le pic de flux observé côté faible champ (LFS) est très proche de la zone de tangence pour lesquatre décharges (d<2cm). Sa position reste inchangée quelle que soit la configuration magnétiqueimposée. Sa valeur(Qpic) diminue en revanche avec le facteur de sécurité q (diminution d’un facteur1.2 entre la décharge réalisée à q = 8 et celle à q = 4). Cette réduction du piquage de flux sur lelimiteur est dû à un étalement progressif des flux de chaleur dans la zone mouillée lorsque q diminue.Cette observation est en accord avec la modélisation théorique standard. Les simulations réalisées au§4.2.1 du chapitre 4 avaient toutefois montré que la valeur Qpic diminuait d’un facteur 1.7 en théorielorsque q diminuait d’une valeur de 8 à une valeur de 4 (rappelons toutefois que ces simulations neprenaient pas en compte le transport perpendiculaire des flux dans la SOL à ce stade de l’étude).

Septième constat expérimental :

Les forts ratios Qα/Qpic calculés (compris entre 0.76 et 0.88, figure 5.13) indiquent que les valeursde flux déposés au niveau du point de tangence entre le plasma et le limiteur sont significatifs. Le ratioQα/Qpic diminue lorsque q augmente : Qpic diminue alors que la valeur de flux Qα reste constante(cf. figure 5.12). Les mécanismes de dépôt de chaleur dans la zone de tangence ne semblent doncpas perturbés par une variation du facteur de sécurité (nous ne pouvons toutefois pas affirmer aveccertitude que les mécanismes de dépôt de chaleur dans cette région ne soient pas perturbés par laprésence de l’aiguille mal alignée du côté fort champ).

Figure 5.13 – Evolution du rapport Qα/Qpic en fonction de q

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Section 5.5

5.5 Etude du motif de flux en accord avec la modélisation stan-dard : évolution de la longueur de décroissance λq dans la SOLen fonction de q

Nous avons démontré au chapitre 4 de ce mémoire que les images expérimentales de dépôt dechaleur observées sur le limiteur ne sont pas cohérentes en tout point avec le motif de flux standardattendu sur le composant. L’analyse d’une partie des images IR expérimentales (correspondant à larégion théorique mouillée par le plasma côté faible champ) peut cependant fournir des informationsmacroscopiques sur le transport des flux dans la scrape-off layer : valeur de flux QDSMF et longueur dedécroissance λq caractérisant leur profil radial (chapitre 4, §4.4). Nous proposons dans ce paragraphed’estimer de nouveau ces deux paramètres pour les quatre chocs à facteurs de sécurité q variablesétudiés. Ayant démontré que la puissance déposée sur le limiteur est essentiellement de nature conduite(cf. conclusions du §5.3.2), les flux estimés dans la SOL depuis les images IR pourront alors êtredirectement comparés aux mesures de sondes de Langmuir mobiles effectuées en partie haute de lamachine (ces dernières mesurant l’écoulement des flux conduits uniquement).

5.5.1 Mesures de QSOL avec les sondes de Langmuir

Les profils de flux de chaleur mesurés dans la SOL par les sondes de Langmuir pour les quatredécharges étudiées sont présentés à la figure 5.14. Ces mesures sont issues des caractéristiques decourant-tension acquises par les sondes tunnel (chapitre 1, §1.2.5.3) aux temps t = tobs indiqués surla figure 5.1. Les profils ont été calculés en fixant la valeur du facteur de transmission γ dans la gaineégale à 7 (hypothèse Ti = Te, chapitre 1, figure 1.30). Les longueurs de décroissance caractérisantles quatre profils mesurés sont synthétisées dans le tableau 5.2. Les valeurs de flux QDSMF obtenuespour les quatre profils ne seront pas comparées, ces dernières sont en effet très sensibles à la valeurde puissance Pchauffage injectée dans la machine lors des décharges, légèrement variable suivant leschocs (cf. remarque du §5.1).

q λsondesq (cm) QDSMF (MW/m2)8 3 3.56.4 2.5 34.8 1.9 3.24 1.8 2.8

Tableau 5.2 – Longeurs de décroissance et flux QDSMF caractérisant les profils QSOL mesuréspar les sondes de Langmuir

Nous observons que le profil de flux QSOL mesuré par les sondes se resserre lorsque le facteurde sécurité q diminue dans la machine (figure 5.14). Cet effet s’oppose à l’effet géométrique induitpar le changement de configuration des lignes de champ, tendant à étaler le dépôt de chaleur sur lescomposants.

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Chapitre 5

Figure 5.14 – Profils de flux de chaleur QSOL mesurés par les sondes de Langmuir en partiehaute de la machine, hypothèse Ti = Te (γ = 7)

Nous proposons maintenant d’étudier plus particulièrement les images IR du limiteur dans la zonemouillée théorique 3 (correspondant à la modélisation standard, cf. figure 4.20, chapitre 4) afin devérifier si l’évolution du profil de QSOL mesuré par les sondes est en accord avec les cartographies deflux observées dans cette région du limiteur.

5.5.2 Estimation de la longueur de décroissance λq depuis les images IR du LPT

5.5.2.1 Comparaison aux mesures de sondes de Langmuir pour une valeur de Q⊥ fixéeà 10%

La figure 5.15 illustre les profils moyens QIRSOL reconstruits dans la SOL à partir des cartographiesde flux estimées sur le limiteur pour les quatre chocs étudiés. Ces profils ont été calculés depuis laméthode présentée au chapitre 4 de ce mémoire (§4.4.2) pour une contribution en flux perpendiculaireQ⊥ dans la SOL fixée à 10% (ce choix sera justifié au §5.5.2.2). Les paramètres λq et QDSMF estimésdepuis les mesures IR sont synthétisés dans le tableau 5.3.

q λIRq (cm) QDSMF (MW/m2)8 2.7 3.46.4 2.35 3.64.8 1.8 4.74 1.4 3.8

Tableau 5.3 – Longeurs de décroissance et flux QDSMF caractérisant les profils QSOL déduits desmesures IR

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Section 5.5

Figure 5.15 – Comparaison des profils de flux de chaleur QSOL(rDSMF ) déduits des images IR(traits pleins) et des mesures de Langmuir (traits pointillés) : les profils calculés depuis les deuxsystèmes de mesure sont similaires dans la gamme rDSMF=[0-0.04]m si nous supposons : γ = 7et Q⊥ = 10%

Figure 5.16 – Coordonnées (r,z) des surfaces magnétiques connectées au limiteur : les lignesde champ les plus éloignées de la DSMF sont connectées sur les faces latérales et intérieures dulimiteur (hors champ de la caméra IR)

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Chapitre 5

Huitième constat expérimental :

Les profils reconstruits depuis les images IR sont similaires aux mesures de sondes de Lang-muir pour les rayons compris entre 0 et 0.04m (si nous supposons une contribution de transportperpendiculaire dans la SOL de 10%). Les mesures IR ne permettront pas d’accéder aux calculs deflux pour des rayons supérieurs à 0.04m, les lignes de champ éloignées de la DSMF sont en effetconnectées au limiteur en dehors du champ de vision de la caméra IR (cf. figure 5.16). Le dépôtde puissance dans ces zones est toutefois négligeable au regard des flux reçus par le reste du composant.

Neuvième constat expérimental :

Les profils de flux QIRSOL reconstruits depuis les images IR se resserrent lorsque le facteur de sécuritéq diminue. Le paramètre λq estimé depuis les images IR varie de 2.7cm pour un facteur de sécurité q=8à 1.4cm lorsque q=4 (fort courant Ip = 1.2MA). Cette observation est cohérente avec de précédentesanalyses expérimentales menées sur Tore Supra (alors en configuration divertor ergodique, chapitre 1,§1.2.1.1) indiquant que la longueur de décroissance dans la SOL variait d’un facteur 2 pour un facteurde sécurité q variant de 8 à 4 (les longueurs λq estimées dans cette étude étaient alors comprises entre1.2 et 2.4cm, les chocs étudiés correspondaient à des chocs ohmiques, [Seigneur 93], [Guilhem 92]).

5.5.2.2 Discussion sur la valeur Q⊥=10% choisie

Les longueurs de décroissance λq estimées pour les quatre profils à la figure 5.15 sont dépendantesde la contribution en flux perpendiculaire Q⊥ fixée lors de “l’inversion” des profils QLPT (chapitre4, §4.4.2.2). L’hypothèse d’une contribution perpendiculaire plus faible sur le limiteur peut en effetconduire à la reconstruction de profils dans la SOL plus piquées (caractérisés par des longueurs dedécroissance plus faibles et un flux à la DSMF plus élevé). La figure 5.17 illustre les différentes longueursde décroissance λq estimées depuis les cartographies de flux IR, en fonction du pourcentage Q⊥ imposédans le modèle. La comparaison des deux systèmes de mesure (IR et sondes de Langmuir) nous apermis d’évaluer la contribution perpendiculaire déposée sur le LPT menant au meilleur accord entreles profils calculés. La meilleure similitude a été obtenue pour une contribution Q⊥ de l’ordre de 10%.Cette estimation a été fondée sur deux hypothèses :

– nous avons présumé, en établissant un parallèle entre les deux systèmes de mesures, que lalongueur de décroissance λq caractérisant les écoulements de flux dans la SOL ne variait passuivant la position poloïdale occupée dans la machine (partie haute ou partie basse, proche dulimiteur),

– nous avons également supposé que la contribution perpendiculaire mise en jeu dans la SOL nevariait pas avec le facteur de sécurité q (Q⊥ supposé identique entre tous les chocs),

Compte-tenu de ces dernières hypothèses et des barres d’erreur associées aux calculs de flux surle limiteur (cf. chapitre 3), nous ne pouvons pas estimer la contribution Q⊥ de manière plus précise.Les profils étudiés sont en effet issus de nombreux traitements intermédiaires (interprétation descaractéristiques courant-tension pour les sondes, déconvolution des cartographies de températurespuis extrapolation des flux calculés dans la SOL dans le cas des mesures IR). A ces traitementsviennent également se rajouter des approximations telles que l’hypothèse d’égalité des températuresTi et Te pour l’interprétation des mesures de sondes (permettant de fixer la valeur du facteur detransmission γ).

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Page 223: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 5.6

La contribution perpendiculaire Q⊥ menant au meilleur accord entre les mesures de sondes et lesmesures IR (10%) correspond à un dépôt de puissance théorique P⊥ sur le limiteur environ égal à 80%de la puissance totale déposée sur le composant. Cette évaluation est supérieure à une estimation depuissance P⊥ déposée effectuée antérieurement sur Tore Supra : P⊥=50%, [Mitteau 08]. Cette valeurest en revanche en bon accord avec une autre estimation du transport perpendiculaire réalisé en 2005 :Q⊥ = 10%, [Bonnin 05].

Figure 5.17 – Longueurs de décroissance λq caractérisant les profils de flux de chaleur reconstruitsdans la SOL depuis les mesures de sondes et Langmuir et les images IR : le meilleur accord entreles deux systèmes de mesure est obtenu pour une contribution en flux perpendiculaire dans laSOL de 10%

5.6 Synthèse des principaux résultats expérimentaux

Résultat 1 :

Nous avons étudié dans ce chapitre l’effet d’une variation du facteur de sécurité q sur le motif dedépôt de chaleur observé sur le limiteur. Cette analyse a pu mettre en évidence trois comportementsdistincts suivant les zones d’interactions considérées sur le composant (zones définies à la figure 4.20du chapitre 4) :

– le dépot de chaleur observé dans la zone 1 (située en dehors des zones mouillées théoriques)s’étale lorsque le facteur de sécurité q diminue,

– le motif de dépôt de chaleur reste en revanche inchangé dans la zone de tangence 2 même sila configuration magnétique varie,

– de même, l’empreinte de dépôt de chaleur ne varie pas avec q dans la zone mouillée 3.

Ces observations indiquent que les mécanismes de dépôt de chaleur diffèrent suivant les régionsd’interactions considérées sur le limiteur.

209

Page 224: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 5

Figure 5.18 – Le motif de dépôt de chaleur sur le limiteur varie différement avec q suivant leszones d’interactions considérées

Résultat 2 :

Le fait que le motif de flux expérimental reste inchangé dans la zone mouillée 3 est à-priori encontradiction avec la modélisation standard prédisant un étalement du dépôt de chaleur lorsque lefacteur de sécurité q diminue. Nous avons toutefois pu démontrer dans le §5.5 que cet étalementexiste et que son effet est en fait compensé par un resserrement du profil de flux de chaleur dans laSOL (diminution de λq), contreblançant l’étalement imposé par la configuration magnétique.

La contribution perpendiculaire Q⊥ utilisée dans le modèle standard “révisé” nous a permis deprendre en compte les phénomènes de convection anormaux (dérive, turbulence) se produisant dansla SOL sur de grandes échelles (le long d’une trajectoire de plusieurs mètres). Elle nous a égalementpermis de simuler la présence de flux de chaleur non nuls dans la région proche de la DSMF. Mêmesi cette amélioration nous a rapproché du motif de flux expérimental calculé sur le limiteur, elle n’acependant pas été suffisante pour expliquer la totalité de l’empreinte observée sur le composant. Lemodèle standard utilisé, balistique, suppose en effet que les flux de chaleur et de particules se déposentsur le limiteur uniquement au point d’impact entre la paroi et les lignes de champ caractérisées parune grande longueur de connexion L//. Cette approche ne s’est pas avérée suffisante pour modélisertous les phénomènes physiques complexes mis en jeu proche de la paroi, modifiant localement laprojection des flux de particules sur le composant. D’autres phénomènes physiques semblent en effetintervenir à proximité de la paroi, induisant un transport perpendiculaire accentué des particules versle composant. Plusieurs théories peuvent expliquer la présence de flux de chaleur non nuls dans la

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Page 225: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 5.7

région proche de la DSMF et dans les zones ombrées des composants face au plasma. Le principe dechacun de ces phénomènes est décrit ci-après.

5.7 Perspectives : description des phénomènes locaux pouvant per-turber le transport des particules à proximité du limiteur

Nous avons établi que les contributions thermiques Qrad, Qneutres ou Qsupras ne peuvent expliquerà elles seules les forts flux de chaleur incidents observés sur le LPT en dehors des zones mouilléesthéoriques (§5.3.2). L’échauffement observé en surface du composant dans les zones théoriquementombrées semble donc dû à une perturbation du dépôt de chaleur conduite dans la machine. Nousexposons ci-après plusieurs alternatives pouvant expliquer cet étalement de puissance conduite sur lasurface du composant. Les illustrations propres à chacune de ces hypothèses sont synthétisées à lafigure 5.19.

Prise en compte du rayon de giration des particules :

Dans un champ magnétique, une particule chargée électriquement (ion ou électron) suit unmouvement hélicoïdal (ou cyclotronique) autour des lignes de champ confinant le plasma. Le rayonde cette trajectoire correspond au rayon de Larmor de la particule (chapitre 1, §1.1.4.2). Le rayon deLarmor maximal des ions estimé dans le cas du choc DITS2 41696 est de 0.4 mm. Dans les simulationsprécédentes, nous avons supposé que les flux de particules et de chaleur se déposaient sur le LPT auniveau précis du point d’impact entre chaque surface magnétique et la paroi (modèle balistique). Laprise en compte du mouvement de giration des particules autour des lignes de champ peut toutefoisinduire une modification sensible du motif de dépôt de chaleur théorique, étalant sur plusieurscentimètres la projection réelle des flux de chaleur circulant dans la SOL sur le limiteur (figure 5.19a).Cet effet a été étudié de façon préliminaire dans [Bonnin 05] dans le cadre de simulations réaliséessur le limiteur de Tore Supra. Cette première analyse a montré que le mouvement de giration desparticules autour des lignes de champ ne suffit pas à expliquer seul l’étalement du dépôt de chaleurobservé en surface du LPT autour de la zone de tangence.

Etalement du dépôt de chaleur causé par la dérive des ions dans la pré-gaine :

La pré-gaine créée à proximité d’une paroi de tokamak correspond à une couche quasi-neutre oùrègne un fort champ électrostatique. Sa largeur caractéristique est de l’ordre de quelques rayons deLarmor (figure 5.19b). Dans un plasma de tokamak, les particules sont accélérées jusqu’à la vitessesonique dans la pré-gaine. Une barrière de potentiel est alors créée à proximité de la paroi en raisondes différences de flux ioniques et électroniques incidents. Les électrons dont l’énergie est suffisantepour vaincre la barrière de potentiel sont aborbés par le mur (ceux dont l’énergie est plus faible sontfreinés et repoussés). Les ions sont accélérés dans la pré-gaine et leur orbite ionique détournée. Cetteperturbation locale de la trajectoire des ions peut alors induire l’apparition de flux perpendiculairesimportants sur la paroi ([Chodura 82], [Stangeby 95], [Gunn 97]).

2Calcul effectué pour mi = 3600 ∗me = 3600 ∗ 9.31.10−31 = 3.27.10−27 kg et T = Te + Ti = 100 eV à la DSMF.

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Page 226: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 5

Dérive des particules vers les lignes de champ “auto-connectées” au composant :

Nous avons mis en évidence l’existence d’une composante perpendiculaire de transport nonnégligeable dans la SOL lors des analyses précédentes. Cette dérive entraîne une redistribution desparticules sur les surfaces magnétiques confinant le plasma. Nous pouvons envisager la possibilitéque des particules énergétiques portées par des lignes de champ ouvertes dans la SOL soient dérivéesà l’approche du LPT vers des lignes de champ auto-connectées au composant (figure 5.19d). Cesdernières, ne pénétrant qu’à une épaisseur très faible dans la SOL, définissent la frontière des zonesombrées sur le composant. La diffusion d’une énergie non négligeable vers ces lignes de champ (par-ticules) pourrait expliquer une partie de l’étalement des flux de chaleur observé en surface du limiteur.

Emission d’ions secondaires :

Une autre théorie pouvant expliquer la redistribution des flux de chaleur en surface du limiteurconsiste à considérer l’émission secondaire de particules ionisées à proximité de la paroi comme sourcepossible de flux incidents anormaux [Sato 95].

En régime stationnaire, un ion D+ percutant un composant est réémis dans le plasma sous formede neutres (rétrodiffusion) ou de molécules (thermodésorption) selon l’énergie qu’il transporte. Ilpeut aussi provoquer l’érosion d’un atome de carbone (également émis sous forme de neutres, cf.chapitre 1). Les atomes neutres ré-émis sont rapidement re-ionisés dans le plasma, parfois mêmeavant d’avoir atteint la DSMF. Un ion issu de la paroi, même s’il est moins énergétique qu’un ionchaud provenant du plasma central, peut ainsi percuter une seconde fois la paroi en suivant les lignesde champ ouvertes (sans circuler de nouveau dans la machine) et peut augmenter localement lesflux de chaleur déposés sur le composant. L’émission de ces particules incidentes re-ionisées, baptiséeémission secondaire, peut elle aussi expliquer en partie le décalage du motif de flux observé vers lecôté fort champ du limiteur.

Effet “funnelling” (entonnoir) :

Dans le cas de Tore Supra, la présence d’une composante perpendiculaire forte sur le limi-teur pompé toroïdal a également été associée ([Mitteau 08]) à l’existence d’un “effet entonnoir”([Stangeby 92]) s’établissant à proximité du composant.

Le phénomène de “funneling” (figure 5.19e) correspond à la création d’une dépression locale dedensité dans le plasma de bord, créée par l’introduction d’un objet (sonde ou limiteur) dans la SOL.L’objet introduit se comporte alors comme un puits de particule et crée une dépression entraînantl’apparition d’un flux sonique à la paroi. Cette dépression augmente alors localement le transportperpendiculaire des particules. L“effet entonnoir” est généralement associé à une épaisseur λf corres-pondant à la distance radiale sur laquelle le plasma est perturbé et définissant l’extension de la SOLà l’intérieur du plasma central.

212

Page 227: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Section 5.7

(a) Modification de la projection des dépôts de chaleursur la paroi en raison du rayon de giration des particulesautour des lignes de champ

(b) Déviation des ions incidents à proximité dulimiteur (effet de gaine)

(c) Dérive de particules énergétiques vers les lignes dechamp “auto-connectées” au composant

(d) Emission secondaire d’ions incidents

(e) Effet “entonnoir” : perturbation locale de la SOL à proximité du limiteur se comportant commeun puits de particules

Figure 5.19 – Phénomènes locaux pouvant modifier la répartition des flux de chaleur en surfacedu limiteur de Tore Supra

Le modèle standard utilisé dans cette étude ne permet donc qu’une approche macroscopique limitéedes interactions plasma-paroi mises en jeu sur le limiteur. La modélisation des phénomènes locaux pré-cités, se produisant sur de petites échelles, nécessite le développement d’un code cinétique adapté. Ledéveloppement de ce type de modèle, à l’échelle particulaire, peut être rendu difficile en raison de lacomplexité et de la diversité des mécanismes locaux se produisant à proximité de la paroi. Il peut êtreaussi rendu délicat par la connaissance imprécise de conditions aux limites telles que la température oula densité du plasma de bord. Cette amélioration du modèle théorique utilisé est toutefois nécessairesi l’on souhaite pouvoir identifier lequel des phénomèns pré-cités est responsable du motif de fluxanormal observé expérimentalement.

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Page 228: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Chapitre 5

5.8 Conclusion du chapitre

Dans ce chapitre, nous avons tout d’abord établi une image cohérente des dépôts de chaleur dansla machine en comparant les résultats issus des différents diagnostics de surveillance des CFP et dela SOL (IR, calorimétrie, bolométrie, sondes de Langmuir). Un bon accord a été constaté entre lesniveaux de puissances déposées calculés depuis les images IR, les mesures calorimétriques et les bilansde puissance dans la machine fournissant une estimation de la puissance conduite dans le plasma debord. Cette cohérence nous a permis de valider les cartographies de flux calculés et de confirmer quela quasi totalité des flux conduits se dépose sur le limiteur.

L’exploitation d’une partie des images IR (correspondant à l’emplacement des zones mouilléesthéoriques sur le limiteur) nous a permis d’estimer les paramètres λq et QDSMF caractérisantl’écoulement des flux de chaleur dans la SOL. Ces paramètres, difficilement accessibles, demeurentune conséquence des phénomènes globaux de transport de chaleur se produisant dans le plasma debord. L’analyse des profils de flux dans la SOL, effectuée pour quatres décharges expérimentalesdistinctes, nous a permis d’établir une dépendance du paramètre λq avec le facteur de sécurité q.Cette observation s’est montrée cohérente avec les mesures de sonde de Langmuir réalisées en partiehaute de la machine. Nous avons ainsi observé qu’une diminution du facteur de sécurité q entraînaitun resserrement du profil de flux dans la SOL, compensant l’étalement imposé par la configurationmagnétique dans les zones mouillées. La comparaison des mesures IR et de sondes de Langmuir nous aégalement permis d’estimer la contribution perpendiculaire de transport dans la SOL (Q⊥ ∼=10%) ensupposant un profil de flux invariant dans la machine avec la position poloïdale occupée. L’estimationde cette contribution, très forte, se traduit par un transport radial des particules important vers lesparois pour les quatre chocs étudiés.

Les cartographies de flux analysées dans ce chapitre ont également mis en évidence l’existence demécanismes de dépôt de chaleur distincts sur le composant suivant les régions d’interaction considérées.Un fort étalement des flux de chaleur lorsque le facteur q diminue a en effet été observé dans la régionthéoriquement ombrée du composant (zone 1). A l’inverse, la zone de tangence α = 0 (zone 2) n’a pasété perturbée par le changement de configuration magnétique. La tendance observée dans cette zonerejoint ainsi le comportement observé dans les zones mouillées théoriques plus éloignées de la DSMF.Le dépôt de flux n’est en effet pas modifié par q dans la zone 3 (cohérente avec le modèle standard).Nous avons enfin décrit dans ce chapitre quelques processus locaux pouvant accentuer la diffusionradiale des flux à proximité du limiteur et expliquer les différences de comportement observées. Laprise en compte de ces phénomènes, au moyen d’un code cinétique adapté, doit désormais être réaliséesi l’on souhaite reproduire de manière précise l’image de dépôt de chaleur calculée expérimentalementsur le plancher de la machine.

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Page 229: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Conclusion et PerspectivesL’augmentation récente de la durée des décharges plasma et des niveaux de puissance injectée

dans les machines de fusion (plus de 10 MW dans Tore Supra, 30 MW au JET et prochainement500 MW pour ITER) nécessite une surveillance de plus en plus exigeante des composants faceau plasma. La mesure des flux de chaleur déposés sur les parois d’un tokamak est en effet unecomposante essentielle de la sécurité des CFP. La compréhension des processus physiques menantà ces dépôts de chaleur est également indispensable si l’on souhaite optimiser les scénarii plasmaréalisés, réduire les interactions entre le plasma et la paroi et accéder à des décharges perfor-mantes de longue durée. Ce mémoire présente les résultats d’une étude sur les dépôts de chaleurobservés dans le tokamak Tore Supra. Nous avons tenté de répondre à deux problématiques, lapremière liée au développement d’outils fiables et adaptés à l’environnement tokamak pour me-surer les flux de chaleur déposés sur la paroi, la seconde liée à l’interprétation du motif de flux observé.

Pour calculer les quantités de chaleur déposées sur les composants face au plasma, nousavons analysé les données issues de deux diagnostics de surveillance de la machine : le diagnostic ca-lorimétrie et le système de thermographie IR. La limite principale associée au système calorimétriqueest que les mesures sont éloignées de plusieurs mètres du phénomène que l’on veut observer. Pourrépondre à ce problème, nous avons appliqué une approche de type méthode inverse aux mesures depuissances extraites réalisées en sortie de la machine, ceci afin de reconstruire l’allure temporelle despuissances déposées sur l’ensemble des composants face au plasma du tokamak. Ce travail présentedes résultats satisfaisants et nous a permis de réaliser pour la première fois dans Tore Supra des bilansde puissances déposées à l’échelle de la machine (auparavant seuls des calculs de bilans d’énergieintégrés étaient disponibles).

L’interprétation des cartographies de températures IR s’est également avérée délicate en raison dela présence de dépôts carbonés formés en surface des composants et empêchant d’associer directementles images IR mesurées au motif de dépôt de flux déposé sur la paroi. Pour répondre à ce problème,nous avons intégré dans une interface logicielle de traitement d’images IR un code de calcul de flux dechaleur 1D linéaire adapté à chaque état de surface observé. Ce code nous a permis de déconvoluer lescartographies de température mesurées sur le limiteur au moyen de différentes fonctions de transfertscalculées depuis une modélisation quadripôles multicouche du composant. Une première identificationdes propriétés thermiques des dépôts carbonés a été également réalisée depuis l’exploitation de donnéesIR acquises in-situ (pendant les opérations plasmas). L’algorithme d’identification développé au coursde cette thèse s’avère prometteur et ouvre la voie au calcul de flux de chaleur sur les dépôts de carbone.

Les traitements mis en oeuvre au cours de ce travail de thèse constituent un progrès dans l’inter-prétation des données calorimétriques et IR. L’extrapolation des méthodes de traitement du signalutilisées (déconvolution, calcul inverse) aux données acquises dans la future machine ITER est égale-ment tout à fait envisageable. Une partie de ce travail peut être utile dès aujourd’hui pour les étudesde conception des diagnostics de cette machine ayant des exigences en terme de sécurité très élevéesdu fait de l’environnement nucléaire (16 endoscopes IR y sont prévus : projet Wide Angle ViewingSystem, [D. Guilhem and Y. Corre 07]). Notons que les fonctions de traitements d’images et la struc-ture modulaire du logiciel de calcul de flux utilisées dans cette thèse ont également débouché sur ledéveloppement d’un nouveau code multi-capteur pour l’analyse quantitative des images IR et

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visible (projet WOLFF, pour Warping Tool For Fusion). Ce projet, porté par le groupe Imagerieet Diagnostics de Tore Supra, est actuellement en phase finale de développement et a déjà pu êtreexporté dans le tokamak MAST en Angleterre (pour preuve que l’exportation de logiciels et lacapitalisation des connaissances est possible entre machines expérimentales).

Au cours de cette étude, quelques voies d’amélioration des codes utilisés ont également étéidentifiées. Pour palier aux limites posées par un calcul de flux 1D linéaire (induisant l’apparitiond’artefacts numériques lors de transitoires rapides ou de barres d’erreurs asymptotiques), le recours àun code 2D non-linéaire pourrait être proposé. Ce type de développement sera en effet indispensablesi l’on souhaite étudier des phénomènes rapides de dépôts de puissance de type ELMs ou disruptions.Le recours à un calcul 2D non-linéaire nécessitera toutefois des temps de calculs plus longs, et serade ce fait moins adapté à une application temps réel. Des techniques de type réseau de neurones(Artificial Neural Network, [Personnaz 03], [Haykin 98]) “exercées” à l’interprétation de scénariiplasma pertinents seront alors nécessaires. Nous avons également pu mettre en évidence au coursde notre étude que le développement d’un système de mesure IR performant (caméra rapide hauterésolution) ou d’un montage expérimental dédié (méthode flash) est nécessaire si l’on souhaitecaractériser de façon précise les propriétés thermiques des couches de dépôts carbonés formées ensurface des composants [Gardarein 8d].

Les méthodes de calculs développées dans la première partie de cette thèse ont ensuite été appli-quées au tokamak Tore Supra pour étudier le dépôt de flux sur le LPT. L’analyse expérimentaleeffectuée a permis de mettre en évidence que les dépôts de chaleur mesurés par les systèmes calorimé-trie et IR sur le limiteur sont cohérents. Nous avons également utilisé un modèle numérique simplifié(basé sur un modèle standard que nous avons ensuite révisé pour prendre en compte la convectionperpendiculaire) pour simuler le motif de dépôt de chaleur en surface du limiteur. La confrontationdes images de flux théoriques et expérimentales ont alors montré que les phénomènes de dépôts dechaleur diffèrent selon les régions d’interaction plasma-paroi considérées sur le composant :

• Nous avons d’abord observé un fort piquage des flux déposés dans la zone de tangence entre leplasma et la paroi (zone 2). Les flux importants observés dans cette zone peuvent être en partie expli-qués par l’effet de convection perpendiculaire (composante Q⊥) causée par des phénomènes de dériveet de turbulence dans le plasma de bord. L’analyse menée a toutefois montré que cette composanten’est pas suffisante pour reproduire exactement le motif expérimental. Des effets locaux (tels qu’uneffet de pré-gaine, un effet “funneling” [Stangeby 92] ou une augmentation du dépôt de chaleur parémission secondaire [Sato 95]) pourraient aussi avoir un rôle dans cette région. Ce piquage des flux estparadoxalement observé dans une région où des dépôts de carbone s’accumulent lors des opérationsplasma. Un effet géométrique non souhaité ayant perturbé l’interprétation des images dans cette zone(mauvais alignement vertical d’une aiguille neuve), il nous a été difficile d’aller plus loin dans l’analyse.

• Nous avons aussi constaté un net étalement des flux de chaleur reçus par le limiteur en dehors deszones connectées au plasma (dans les zones ombrées). Cet étalement correspond lui aussi en partie àune zone où des dépôts de carbone se forment.

• Dans la région mouillée plus éloignée de la DSMF (zone 3), le dépôt de chaleur est assez bien repro-duit par le modèle standard révisé prenant en compte la convection perpendiculaire. Nous avons puexploiter le motif de dépôt de chaleur dans cette région pour estimer les flux conduits s’écoulant dansla SOL et comparer cette dernière estimation aux mesures de sonde de Langmuir effectuées en partiehaute de la machine.

Page 231: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Au cours de cette analyse expérimentale, nous avons également focalisé notre attention surl’influence de l’enroulement des lignes de champ magnétiques (facteur de sécurité q) sur le motifde dépôt de chaleur observé sur le plancher de la machine (limiteur). Les profils de dépôt dechaleur relevés dans la région mouillée théorique ont montré que la variation du facteur de sé-curité modifie l’épaisseur de la SOL dans le sens opposé de l’effet géométrique attendu lorsqueq diminue (le profil de flux se resserre dans la SOL, compensant ainsi l’effet d’étalement imposépar la configuration magnétique). Une perspective à cette première analyse expérimentale seraitmaintenant d’étudier l’influence d’autres paramètres sur le dépôt de chaleur observé dans la ma-chine (tels que le niveau ou le type de puissance injectée, la fraction rayonnée ou la densité du plasma).

Les observations expérimentales réalisées au cours de cette étude ont laissé plusieurs questionsouvertes. En effet, la croissance non négligeable de dépôts carbonés au niveau du point de tangenceentre le plasma et le limiteur (où les flux de chaleur sont pourtant significatifs) est encore incomprise.La compréhension des phénomènes physiques mis en jeu dans cette zone d’interaction présente unintérêt pour l’amélioration des scénarii plasma actuels, confrontés à des problèmes tels que la pro-duction d’impuretés, la rétention du combustible, mais aussi l’instabilité des décharges causée pardes conditions de plasma de bord perturbées ([Ekedahl 08]). Nous n’avons pas non plus conclu surl’origine physique des flux conduits étalés en dehors des zones mouillées théoriques. Différents proces-sus locaux pouvant accentuer la diffusion radiale des flux de chaleur à proximité du limiteur ont étéidentifiés pour expliquer ces singularités. La prise en compte de ces phénomènes, au moyen d’un codecinétique adapté, doit désormais être réalisée si l’on souhaite reproduire de manière complète l’imagede dépôt de chaleur observé sur le plancher de la machine. Ce type d’étude ouvre des perspectivesintéressantes et peut apporter des informations sur le transport et le dépôt local des flux de chaleurà proximité du point de tangence entre le plasma et la paroi. Parmi tous les phénomènes gouvernantles dépôts de chaleur dans Tore Supra, il est tout à fait probable que certains d’entre eux jouent unrôle, mineur ou majeur, dans le prochain tokamak ITER (leur manifestation pourra toutefois êtredifférente du fait des conditions plasmas qui seront distinctes entre les deux machines). Une chose estsûre, seul le développement conjoint de méthodes performantes de traitement des données et de codesd’analyses physiques détaillés peut permettre de comprendre les dépôts de chaleur observés dans lesfutures machines de fusion.

Page 232: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Table des Annexes

Annexe 1 : Propriétés des matériaux constituant le LPT

Annexe 2 : Thermographie Lock-In pour le repérage des défauts d’interface sur le LPT

Annexe 3 : Modélisation des dépôts carbonés en surface du limiteur à l’aide d’un quadripôleMur 1D additionné à une résistance de contact

Annexe 4 : Influence des paramètres supposés connus hc et aCFC sur l’algorithme d’identifi-cation des propriétés thermiques des dépôts carbonés

Annexe 5 : Méthodes utilisées pour localiser les dépôts carbonés en surface du limiteur deTore Supra

Annexe 6 : Opérations de nettoyage du LPT (2008)

Annexe 7 : Modélisation du comportement thermohydraulique du LPT sous ANSYS (calculpar éléments finis)

Page 233: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

(CFC)

Annexe 1

Propriétés des matériaux constituant le LPT

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Tableau 1

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Tableau 2

Tableau 3

Tableau 4

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Tableau 5

Tableau 6

Tableau 7

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Tableau 8

Tableau 9

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Tableau 10

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Tableau 11

Tableau 12

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Tableau 13

Tableau 14

Tableau 15

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Le possible endommagement des tuiles du LPT peut être apprécié par une technique de contrôlenon destructif par thermographie Lock-in (ou thermographie infrarouge photothermique modulée). Leprincipe de cette méthode, récemment mise en oeuvre sur Tore Supra, consiste à exciter thermiquementla surface d’un composant pendant quelques secondes, zone par zone, et de manière sinusoïdale aumoyen de lampes halogènes, et à analyser sa réponse thermique à l’aide d’une caméra infrarouge. Ledispositif expérimental relatif à cette technique est illustré à la figure 5.20.

Figure 5.20 – Dispositif expérimental de mesures Lock-In menées sur le limiteur de Tore Supra[Courtois 06]

Les mesures de Lock-In se réalisent in-situ, lors des arrêts pour maintenance de la machine. L’ana-lyse des cartographies de module et de phase obtenues depuis ces expériences permettent de contrôlerl’état du limiteur jusqu’à l’interface CFC/cuivre.

Page 243: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Plusieurs campagnes de mesures in-situ ont été effectuées sur le LPT. Ces inspections ont confirméla présence des trois défauts de cohésion sur la section du LPT visée par la caméra HR. La figure 5.21illustre le résultat brut issu de mesures Lock-in réalisées en septembre 2006. Cette image met enévidence les aires de redéposition du carbone (en bleu) et les zones propres ou érodées (en vert). Enprésence d’un défaut, les valeurs de phase sont plus faibles (en rouge sur la figure), ce retard indiquela présence d’une résistance de contact entre le CFC et le cuivre.

Figure 5.21 – Mise en évidence de trois tuiles dérogées présentes sur le secteur Q5B du limiteur[Courtois 06]

NB. De la même manière que les photos prises in-situ lors des arrêts de la machine, les cartographiesde Lock-In peuvent fournir un repérage précis des dépôts. Ce dernier n’est toutefois valable qu’à uninstant donné, et ne permet pas de prendre en compte l’évolution des dépôts tout au long une campagneexpérimentale de plusieurs mois. Les méthodes mise en oeuvre dans cette étude pour assurer un repéragefiable des dépôts carbonés sur le limiteur sont présentées en Annexe 5.

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Modèle Mur(dépôt)-Rc-Mur(tuile)

Dans le cadre de l’étude sur l’identification des propriétés thermiques des dépôts carbonés recou-vrant le limiteur de Tore Supra, nous avons initialement modélisé la couche de redéposition en surfaced’une tuile de CFC par un quadripôle de type mur 1D, additionné à une résistance de contact (cf.figure 5.22).

Figure 5.22 – Modélisation d’un dépôt carboné recouvrant une tuile de CFC du limiteur à l’aidede deux quadripôles : mur + résistance

La modélisation quadripôles présentée à la figure précédente correspond à la formulation matriciellesuivante :

[Θ(0, p)Ψ(0, p)

]=[Adepot BdepotCdepot Ddepot

] [1 Rc1 0

] [Atuile BtuileCtuile Dtuile

] [0

Ψ(e, p)

](5.5)

Page 245: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Le calcul de la réponse indicielle du système en surface “tuile + dépôt” dans l’espace de Laplacese déduit alors du produit matriciel (5.5) tel que : :

Θ(0, p) = Btuile+depotDtuile+depot

1p

(5.6)

où les termes Btuile+depot et Dtuile+depot dépendent des paramètres e, λ, a et Rc définissant le compor-tement thermique du dépôt et s’écrivent :

Btuile+depot = cosh(σe).Atuile + cosh(σe).Rc.Ctuile + (1/λσ)sinh(σe).Btuile + ... (5.7)

cosh(σe).hc.Btuile + cosh(σe).hc.Rc.Dtuile + (1/λσ)sinh(σe).hc.Dtuile

Dtuile+depot = λσ.sinh(σe).Atuile + λσ.sinh(σe).Rc.Ctuile + λσ.sinh(σe).hc.Btuile + ... (5.8)

λσ.sinh(σe).hc.Dtuile + cosh(σe).hc.Dtuile

avec : σ =√p/a

La méthode d’identification proposée (consistant à ajuster la valeur de la réponse indicielle dudépôt afin de calquer les dynamiques de flux calculées sur une dynamique de référence) doit, dans cecas de figure, minimiser la fonction J suivante :

J(e, λ, a,Rc) = ‖Qrefnorm(t)−Qmodelenorm (t, e, λ, a,Rc)‖2 (5.9)

Le vecteur βr à identifier est alors de dimension n=4 :

βr = [e λ a Rc] (5.10)

La figure 5.23 illustre le tracé en valeur absolue des coefficients de sensibilité réduits du modèleproposé aux paramètres e=200 µm, λ=40 W/m.K, a=4.8.10−5 m2/s et Rc=7.10−4 m2.K/W (lesvaleurs simulées dans cette Annexe correspondent aux propriétés thermophysiques imposées pour lecas test étudié au §3.3.4 du chapitre 3, les données simulées ne sont pas bruitées).

Nous pouvons nous apercevoir, au vu de la figure 5.23, que les paramètres e, k et a de la couche dedépôt simulée sont parfaitement corrélés. L’évolution du coefficient de sensibilité ZRc est quant à ellelégèrement différente des trois autres facteurs pour les temps supérieurs à 0.3s après application dela sollicitation en flux. La corrélation des propriétés thermophysiques e, a et λ définissant le modèle“mur-résistance” empêchera l’identification simultanée de ces dernières, et ce même en exploitant desdonnées “parfaites” (non bruitées). Seule une identification de deux des quatre paramètres du dépôtpeut être effectuée depuis l’analyse de données IR (par exemple Rc et λ). Cette caractérisation dudépôt “idéal” permettant de reproduire la dynamique de flux observée sur une tuile propre nécessitetoutefois de fixer à une valeur arbitraire les paramètres restants (également inconnus). Cette solutiona été jugée non satisfaisante.

Page 246: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Figure 5.23 – Coefficients de sensibilité réduits du modèle “mur-résistance” (valeurs absolues)- Réponses à un échelon de flux de 0.5MW/m2 imposé à t = 0.22s - Propriétés : e = 200.10−6 m,λ = 40 W/m.K, a = 4.8.10−5 m2/s, Rc = 7.10−4 m2.K/W

Au vu de ces observations, nous avons alors tenté de regouper les paramètres du modèle afin delimiter le nombre d’inconnues à seulement trois grandeurs thermophysiques.

Modèle identique Mur(dépôt)-Rc-Mur(tuile) avec regroupement de paramètres

Un regroupement des paramètres du modèle “mur-résistance” peut permettre de limiter le nombrede grandeurs inconnues du dépôt à identifier.

Nous avons posé pour cela :

td = e2

a : temps diffusif de la couche de dépôt (s)

b = λ√a: effusivité de la couche de dépôt (J/m2.K.

√s)

Les termes Btuile+depot et Dtuile+depot permettant le calcul de la réponse indicielle du dépôt peuvents’exprimer en fonction de ces nouveaux paramètres et de la résistance Rc :

Btuile+depot = Atuile +Rc.Ctuile + hc.Btuile + hc.Rc.Dtuile + ... (5.11)

sinh(√tdp).(1/(b

√p)).(Ctuile + hc.Dtuile)

Page 247: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Dtuile+depot = cosh(√tdp).(Ctuile + hc.Dtuile)+ (5.12)

sinh(√tdp).(b

√p).(Atuile +Rc.Ctuile + hc.Btuile + hc.Rc.Dtuile)

La fonction à minimiser revient, dans le cas d’un modèle “groupé”, à :

J(td, b, Rc) = ‖Qrefnorm(t)−Qmodelenorm (t, td, b, Rc)‖2 (5.13)

Le nombre d’inconnues à identifier est alors limiter à trois :

βr = [td b Rc] (5.14)

La figure 5.24 illustre le tracé en valeur absolue des coefficients de sensibilité réduits du modèle“groupé” proposé aux paramètres td = 8.3.10−4 s, b = 5.77.103 J/m2.K.

√s et Rc = 7.10−4 m2.K/W

(les valeurs simulées correspondent aux propriétés thermophysiques imposées pour le calcul de lafigure 5.23 précédente).

Figure 5.24 – Coefficients de sensibilité réduits du modèle “mur-résistance” groupé (valeursabsolues) - Réponse à un échelon de flux de 0.5MW/m2 imposé à t = 0.22s - Propriétés : td =8.3.10−4 s,b = 5.77.103 J/m2.K.

√s, Rc = 7.10−4 m2.K/W

Si le regroupement de paramètres du modèle nous a permis de réduire le nombre d’inconnues àtrois, nous pouvons remarquer que les sensibilités Ztd et Zb sont là encore identiques. La caractérisationconjointe des trois paramètres td, b et Rc caractérisant le couche de dépôt est donc impossible. Nouspourrions là encore envisager l’estimation de seulement deux grandeurs thermiques (par ex. td et Rc)en fixant le dernier paramètre du modèle à une valeur arbitraire. Cette solution n’a toutefois pas étéjugée satisfaisante. La modélisation des dépôts recouvrant le limiteur de Tore Supra à l’aide d’unmodèle de type “mur-résistance” n’a donc pas été retenue.

Page 248: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Justification du modèle capacitif choisi

Les paramètres de dépôts simulés lors des calculs précédents ont été choisis par anticipation desrésultats obtenus au §3.5.2.1 du chapitre 3. Ces derniers correspondent aux propriétés réelles identifiéessur une couche de redéposition recouvrant une tuile du limiteur de Tore Supra. La parfaite corrélation(en valeur absolue) des sensibilités du modèle aux paramètres e, k, et a (figure 5.23) nous a permisde mettre en avant un comportement du dépôt étudié typique d’une couche capacitive définie par unparamètre ct = ρ.Cp.e. L’hypothèse d’une couche de redéposition mince et très conductrice intervenant(excepté aux temps très courts) comme une simple capacité reliée à la tuile via sa résistance decontact a donc finalement été retenue afin de caractériser les dépôts observés en surface du limiteurde Tore Supra (ces résultats sont présentés à la section 3.3 de ce mémoire). La figure 5.25 illustre lesréponses en température des modèles “capacité-résistance” (retenu) et “mur-résistance” (abandonné)à un échelon de flux imposé de 0.5 MW/m2. Ce résultat confirme l’hypothèse précédente : au pas detemps d’échantillonage considéré (0.02s), les réponses de deux modèles sont parfaitement identiques.Les dépôts recouvrant le LPT peuvent être modélisés par une couche capacitive dont la températureest homogène sur tout le matériau.

Figure 5.25 – Réponse en température d’une tuile avec dépôt soumise à un échelon de flux de0.5 MW/m2 - Comparaison des réponses simulées depuis un modèle mur-résistance et capacité-résistance

Page 249: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Cette annexe présente les résultats issus de simulations stochastiques réalisées afin de quantifierle biais induit par une erreur sur les paramètres supposés connus hc et aCFC .

La statistique de Monte-Carlo illustrée à la figure 5.26 est issue du traitement de thermogrammessimulés bruitées (σ =0.5% ∆Tstat). Une erreur sur le coefficient d’échange convectif hc a été introduitelors du calcul direct de ces thermogrammes ∆T (e=+/-5 000 W/m2.K). Une estimation successivedes paramètres de la couche de dépôt simulée depuis ces données nous a permis de retrouver lesvaleurs initiales imposées dans le modèle (ct et Rc) avec une précision moyenne : ect =16%, eRc =17%.

Le flux moyen calculé en surface de la tuile à partir des propriétés identifiées (figure 5.28) estsurestimé lorsque le biais sur hc est positif (hc surestimé, e=+18% sur cet exemple) et sous-estimélorsque le biais sur hc est négatif (e=-8%).

La statistique de Monte-Carlo illustrée à la figure 5.27 est également issue du traitement dedonnées simulées bruitées tel que σ =0.5% ∆Tstat. Une erreur sur la diffusivité thermique du CFCaCFC a ici été introduite lors du calcul direct des thermogrammes ∆T (e=+/-5% aCFC initial). Uneestimation successive des paramètres de la couche de dépôt simulée depuis ces données nous a permisde retrouver les valeurs initiales imposées dans le modèle (ct et Rc) avec une précision moyenne :ect =26%, eRc =34%.

Le flux moyen identifié en surface de la tuile avec dépôt est sous-estimé lorsque aCFC est surestimé(e=-24% sur cet exemple) et surestimé lorsque aCFC est sous-estimé (e=+26%).

Page 250: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

(a) Effet d’une surestimation de hc lors de l’identification des propriétés thermiquesd’un dépôt - Calcul direct des thermogrammes simulés effectué pour hc = 25000W/m2.K, identification du dépôt pour hc = 30000 W/m2.K

(b) Effet d’une sous-estimation de hc lors de l’identification des propriétés thermiquesd’un dépôt - Calcul direct des thermogrammes simulés effectué pour hc = 35000W/m2.K, identification du dépôt pour hc = 30000 W/m2.K

Figure 5.26 – Nuages d’estimation des valeurs de ct et Rc identifiées à partir de données simuléesbruitées (une erreur sur le coefficient d’échange convectif hc a été introduite lors du calcul directdes thermogrammes simulés ; l’estimation des propriétés est faite pour une valeur de hc = 30000W/m2.K)

Page 251: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

(a) Effet d’une surestimation de aCFC lors de l’identification des propriétés ther-miques d’un dépôt - Calcul direct des thermogrammes simulés pour aCFC − 5%,identification du dépôt pour aCFC = 1.01.10−4 m2/s

(b) Effet d’une sous-estimation de aCFC lors de l’identification des propriétés ther-miques d’un dépôt - Calcul direct des thermogrammes simulés pour aCFC + 5%,identification du dépôt pour aCFC = 1.01.10−4 m2/s

Figure 5.27 – Nuages d’estimation des valeurs de ct et Rc identifiées à partir de données simuléesbruitées (une erreur sur la diffusivité thermique du CFC a été introduite lors du calcul direct desthermogrammes simulés ; l’estimation des propriétés est faite pour une valeur :aCFC= 1.01.10−4 m2/s)

Page 252: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

(a) Flux moyens estimés lorsque hc est surestimé (b) Flux moyens estimés lorsque hc est sous-estimé

Figure 5.28 – Introduction d’une erreur sur hc - Histogramme des valeurs de flux estimées

(a) Flux moyens estimés lorsque aCFC est surestimé (b) Flux moyens estimés lorsque aCFC est sous-estimé

Figure 5.29 – Introduction d’une erreur sur aCFC - Histogramme des valeurs de flux estimées

Page 253: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Cette annexe présente les trois méthodes d’analyse utilisées dans ce mémoire afin de localiserprécisément les couches de redéposition en surface du limiteur.

Etude des échauffements de surface des tuiles du LPT lors de transitoires rapides :analyse de disruptions

La première méthode proposée afin de localiser le motif de dépôts carbonés en surface du limiteurconsiste à étudier la réponse en température de l’ensemble des tuiles de CFC surveillées par la voieIR haute résolution, lors d’évènements transitoires rapides (disruptions du plasma) [Corre 05].

Pendant une disruption, l’énergie contenue dans le plasma est déconfinée en quelques millisecondes(< dtIRacqui = 20ms) et se dépose de manière quasi-uniforme sur les composants. L’observation d’unéchauffement important sur une tuile pendant une telle relaxation du plasma est donc un bonindicateur de la présence de couches de redéposition en surface du substrat activement refroidi.Soumis à un flux de même amplitude que les tuiles voisines lors de ces évènements transitoires, lesdépôts carbonés s’échauffent en effet plus intensément que les tuiles propres et peuvent donc êtrefacilement repérés sur les images IR.

La figure 5.30 illustre le repérage des dépôts carbonés réalisé lors de la campagne expérimentaleDITS (mai 2007). Le résultat présenté à l’image (c) est issu de la soustraction des cartographiesde températures obtenues avant et pendant une disruption du plasma (images (a) et (b)). Cettesoustraction des images IR acquises lors de la décharge permet de repérer aisément l’empreinte descouches de redéposition sur le composant et notamment la présence des dépôts fins (généralementdifficile à repérer sur les images IR analysées en régime stationnaire). Tout écart entre les températuresavant et pendant disruption supérieure à 50°C peut en effet être assurément attribué à la présencede dépôts (cf. justification ci-après). Les tuiles dont l’échauffement est inférieure à 50°C serontconsidérées comme propres (elles apparaissent en noir sur l’image).

Justification. La puissance injectée dans la machine au cours du choc 39863 est de 2 MW . En suppo-sant que la moitié de cette puissance se soit répartie uniformément sur la surface du limiteur lors dela disruption (ce dernier recevant généralement 50 à 60% de la puissance conduite dans la SOL), lesflux moyens attendus sur le composant lors de la relaxation du plasma sont alors de l’ordre de 0.15MW/m2. De tels niveaux de flux correspondent pour une tuile propre à un échauffement d’environ12°C (soit une température infrarouge de surface T (t) ∼=135°C). Tout échauffement inférieur à cetteamplitude peut donc être associé à une tuile propre. Nous avons toutefois choisi d’utiliser un “échauf-fement seuil” de référence plus important en raison des erreurs de mesure communément observéesdans la gamme 100-200°C (de l’ordre de quelques dizaines de degrés Celsius, cf. chapitre 3, §3.2.4).

Page 254: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Le motif de redéposition du carbone mis en évidence par l’étude de la disruption 39863 est globale-ment cohérent avec l’état de surface du composant observé in-situ en février 2007 (cf. photographie 3.2,§3.1 du chapitre 3).

(a) Image IR warpée du limiteur, t=62.26s(avant disruption)

(b) Image IR warpée du limiteur, t=62.28s(pendant la disruption)

(c) Résultat de la soustraction des images (a) et (b)

Figure 5.30 – Le motif des dépôts carbonés sur le limiteur de Tore Supra peut être mis enévidence par la soustraction d’images IR obtenues avant et pendant une disruption (choc 39863,campagne DITS, mai 2007)

Page 255: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Figure 5.31 – Ecarts de températures observés sur une tuile propre (en noir) et une tuile avecdépôt (en rouge) au cours d’une disruption (tuiles repérées à la figure 5.30c)

L’analyse des images IR acquises lors de disruptions présente l’avantage d’être rapide mais com-porte toutefois certaines limites. Le mouvement des endoscopes infrarouges induit par l’importanterelaxation d’énergie lors de la disruption du plasma peut entraîner un léger décalage spatial entre lesdeux images IR à soustraire (translation de la visée de l’ordre de quelques pixels), faussant ainsi lerepérage des dépôts effectué. De même, l’utilisation de chocs disruptés suppose l’acquisition de tramesIR au temps t exact de la relaxation du plasma (la fréquence d’acquisition de 50 Hz du système nepermet pas toujours l’observation d’un phénomène aussi rapide). La soustraction effectuée ne metparfois pas non plus en évidence l’ensemble des dépôts carbonés, dont les comportements thermiquessont très distincts (couches mal attachées, adhérentes, fines, épaisses).

Etude des constantes des temps lors de transitoires de puissance

Une étude comparative de la réponse en température des tuiles lors de transitoires moins rapides(de type montée ou coupure de puissance) peut également être un bon indicateur de la présence ounon d’une couche de redéposition à leur surface.

La figure 5.32 illustre l’exemple de deux tuiles non repérées comme recouvertes de dépôts aprèsobservation de leur réponse en température lors de la disruption 39863 (∆T <12°C lors de la re-laxation du plasma). La dynamique de ces tuiles lors de l’amorçage de plasma “standard” (montéeen puissance) indique en réalité que ces dernières sont recouvertes d’une couche de redéposition malattachée : leurs réponses en début de choc est en effet plus rapide que l’évolution temporelle de tem-pérature normalement observée sur une tuile propre. Le mauvais repérage de ce type de dépôts, peu

Page 256: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

adhérents et dont la température de surface devient vite extrêmement élevée, est généralement dû àun changement du temps d’intégration des données IR lors d’une disruption. Le passage d’un tempsd’intégration de 340 µs à 65 µs est en effet automatique pour les températures supérieures à 375°C, ledernier temps d’intégration (11 µs) est utilisé pour les températures supérieures à 700°C. Ces change-ments automatiques de gammes d’intégration entraîne une hétérogénéité des temps d’acquisition desdifférents pixels constituant une image infrarouge (pouvant être décalés de quelques millisecondes).L’observation de la température de dépôts mal attachés lors d’une disruption peut ainsi être légère-ment retardée et ne plus traduire l’échauffement réel des tuiles étudiées, survenu lors de la relaxationdu plasma.

(a) Repérage de deux tuiles sur lesquelles la pré-sence de dépots carbonés n’est pas révélée parl’étude de la disruption 39862

(b) Evolutions temporelles (normées) des températuresde surface des deux tuiles repérées à la figure a (compa-raison avec la dynamique observée sur une tuile propre)

Figure 5.32 – L’observation des montées en température de tuiles lors d’une montée en puissancestandard (amorçage du choc 39863) peut mettre en évidence la présence de dépôts carbonés malattachés, non repérés lors de l’étude de disruptions

Mise en évidence de l’empreinte des dépôts carbonés sur le LPT par comparaisond’images IR acquises avant et après nettoyage du composant

En raison de difficultés opérationnelles liées à une augmentation du nombre de disruptions duplasma, un nettoyage complet du tokamak a été réalisé lors de l’arrêt de la machine pour maintenanceen mars 2008 (cf. Annexe 6). Ces opérations de nettoyage, consistant à gratter les dépôts carbonésobservés en surface des composants, ont permis de revenir à l’état de surface initial des CFP dans leszones de redéposition [Martinez 08].

La soustraction de deux images IR du limiteur, obtenues avant et après grattage du composant(pour des chocs avec conditions plasma similaires) peut permettre de révéler l’empreinte des dépôtscarbonés présente sur le composant avant son nettoyage. La figure 5.34 illustre le résultat obtenu aprèssoustraction d’une image IR du choc 39862 (campagne DITS, mai 2007) à une image du choc 41696(juillet 2008, choc similaire réalisé après grattage du composant). Ces décharges correspondent toutesdeux à un scénario expérimental de référence DITS dont les paramètres plasma sont : Ip = 0,6 MA,PLHinjectee = 2 MW , frad ∼= 33%.

Page 257: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

Nous pouvons noter que l’effet du nettoyage du LPT est clairement visible sur l’image IRdu choc 41696 (figure 5.33b). Si l’effet gaufrier reste encore légèrement perceptible dans certainsgaps entre tuiles, le motif de redéposition en surface du composant a quant à lui complètement disparu.

NB. Plusieurs aiguilles du limiteur ont également été entièrement remplacées3 entre les deux cam-pagnes expérimentales étudiées (39862 et 41696). Deux d’entre elles, visibles sur la visée HR, ont étérepérées sur la figure 5.33. Ce renouvellement des aiguilles du limiteur présente l’avantage d’avoiréliminé la présence d’une des tuiles dérogées observée sur la visée HR (défaut D3). Cette dernière,gênant auparavant la surveillance IR, ne sera donc plus visible sur les images acquises lors de futurescampagnes expérimentales.

Figure 5.33 – Images IR warpées obtenues sur le LPT avant grattage (choc 39862, à gauche,t=10s), et après grattage (choc 41696, à droite, t=10s)

Figure 5.34 – La soustraction d’images IR du limiteur avant et après grattage permet de révélerl’empreinte des dépôts initialement présente sur le composant

3Au cours de l’arrêt précédent (hiver 2007).

Page 258: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

La soustraction des deux images IR présentées à la figure 5.33 permet d’obtenir une nouvellecartographie de température en ∆T mettant elle aussi en relief le motif des couches de redépositionsur le LPT. Toute variation ∆T supérieure 50°C entre les deux chocs a été attribuée sur cette imageà la présence de dépôts carbonés. Nous avons en revanche également choisi d’ignorer les valeurs de∆T inférieures à l’incertitude de mesure couramment observées sur les faibles températures (quelquesdizaines de degrés Celsius), ces dernières pouvant être été imputées à une différence d’étalonnage desendoscopes entre les deux campagnes, et non à la présence d’une couche de redéposition.

L’empreinte des dépôts carbonés mise en évidence à la figure 5.34 coïncide globalement avec lemotif défini lors de l’étude de la disruption 39863 réalisée à la figure 5.30 (ce dernier est repéré sur lafigure 5.34 en trait plein blanc). La comparaison des images IR avant et après grattage du limiteurindique cependant la présence de fines couches de redéposition en partie gauche de l’image IR (nonmises en évidence par l’étude des images IR acquises lors de la disruption 39863). A l’inverse, lasoustraction des images avant et après grattage n’a pas permis de mettre en évidence la présenced’une large zone de dépôts fins et très adhérents au centre de la visée HR (ces derniers avaient parcontre été localisés grâce à leurs échauffements rapides lors de la disruption 39863).

En conclusion, nous avons utilisé dans ce mémoire trois méthodes permettant de repérer le motifexact des dépôts carbonés sur le limiteur. Nous avons pu démontrer que chacune de ces techniquesprésentent des avantages et des inconvénients. Toute étude nécessitant la localisation fiable des zonesde redéposition sur le limiteur nécessitera donc le recours à ces trois traitements complémentaires.

Les méthodes présentées dans cette Annexe ne font pas partie d’une procédure de traitementautomatisée sous WOLFF. Les outils disponibles sous l’interface logicielle (ROI, soustractiond’images, recalage par warping) facilite toutefois grandement les analyses effectuées.

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Une augmentation du nombre de disruptions du plasma a été observée lors des dernièrescampagnes expérimentales menées sur Tore Supra. Ces pertes de confinement ont pu être corréléesavec l’apparition de dépôts se détachant des CFP lors des expériences et venant polluer les décharges[Ekedahl 08]. Afin de contrer les difficultés opérationnelles induites par ces “ovnis”, un nettoyagecomplet du tokamak a été réalisé lors de l’arrêt de la machine pour maintenance en mars 2008. Cesopérations de nettoyage ont permis de revenir à l’état de surface initial des composants dans les zonesde redéposition [Martinez 08].

Une visualisation de la surface des composants face au plasma après grattage des dépôts carbonésest présenté à la figure 5.35. La figure 5.35b permet notamment de mettre en évidence les fibres deCFC composant les tuiles du limiteur.

Du point de vue des analyses IR, ce récent grattage des dépôts offre la possibilité de localiser, parsoustraction des images IR avant et après grattage, le motif exact des dépôts carbonés observés sur lelimiteur lors de campagnes antérieures au nettoyage du composant. En l’abscence de dépôts carbonés,il est également possible d’établir de premières cartographies de flux complètes sur le secteur ducomposant visé par la caméra IR haute résolution (cf. résultats présentés au chapitre 3 de ce mémoire).

(a) Etat de surface des différents CFP après un net-toyage complet de leur surface

(b) Mise en évidence des fibres de CFC en surface desaiguilles du limiteur après grattage des dépôts

Figure 5.35 – Résultat des opérations de nettoyage des CFP de Tore Supra menées en mars2008 [Martinez 08]

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La géométrie d’une aiguille du limiteur reproduite sous ANSYS est illustrée à la figure 5.36. Leséléments utilisés dans cette modélisation 3D pour reproduire le comportement thermiques des couchesde matériaux CFC, OFHC et CuCrZr sont des SOLID70. Une sollicitation en flux incident appliquéen surface de cette géométrie permet de simuler la température de l’eau en sortie du canal de refroi-dissement d’une aiguille. Les échanges par convection dans les canaux sont modélisées à l’aide desélements FLUID116 et SURF152.

Figure 5.36 – Modélisation 3D du comportement thermohydraulique d’une aiguille du LPT

Le relevé de température simulé est ensuite appliqué comme donnée d’entrée dans un second fichierde modélisation “réseau” (figure 5.37). Ce dernier permet de reproduire la circulation des débits d’eauet leur mélange dans le circuit de refroidissement complet d’un secteur de 60° du composant (2×48aiguilles). Cette modélisation 1D (FLUID116) fournit le relevé Ts correspondant à la température desortie mesurée par le système calorimétrique (sondes Pt100) pour un secteur du limiteur complet ensortie de la machine.

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NB. Afin de reproduire le comportement thermohydraulique global d’un secteur, nous supposons quela température de sortie de chaque aiguille constituant le composant est identique, quelle que soit saposition toroïdale dans la machine.

Figure 5.37 – Modélisation 1D du réseau de refroidissement d’un secteur du LPT

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Table des figures

1 Evolutions de la consommation d’énergie et de la population mondiale [CEA-Fusion08] 1

1.1 Courbe d’Aston : énergie de liaison par nucléon en fonction du nombre de nucléons d’unatome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.2 Sections efficaces des réactions de fusion en fonction de l’énergie relative des réactifsemployés [Wesson 97] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

1.3 Réaction élémentaire de fusion Deutérium-Tritium . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

1.4 Etapes du confinement en “boîtes magnétiques” . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

1.5 Configuration magnétique du futur stellarator allemand W7 −X . . . . . . . . . . . . 13

1.6 Composantes magnétiques permettant le confinement du plasma dans un tokamak . . 14

1.7 Définition des coordonnées d’un plasma confiné magnétiquement en géométrie torique 14

1.8 Systèmes de chauffage additionnels de Tore Supra . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

1.9 Schéma d’ensemble du tokamak de Tore Supra (hall tore) et principaux composants(Bureau d’Etudes IRFM) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

1.10 Bobines magnétiques et circuits de refroidissement principaux de la machine ITER . . 20

1.11 Schéma de principe d’un réacteur de fusion électrogène [CEA-Fusion08] . . . . . . . . 21

1.12 Principe du divertor axisymétrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

1.13 Schéma de principe du divertor ergodique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24

1.14 Schéma de principe d’une configuration limiteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25

1.15 Le LPT (plancher de la machine) est constitué de 576 aiguilles juxtaposées . . . . . . 26

1.16 Neutraliseur équipant le limiteur de Tore Supra . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

1.17 Le champ magnétique toroïdal dans un tokamak est créé au moyen d’un nombre fini debobines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

1.18 Visualisation du motif de ripple sur le LPT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

1.19 Vue intérieure du tokamak Tore Supra (composants face au plasma constituant sonenceinte) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

1.20 Photo du limiteur (vue de dessus) : zones d’érosion et de redéposition . . . . . . . . . 30

250

Page 265: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

TABLE DES FIGURES

1.21 Schématisation de quelques processus d’interaction plasma-paroi (cas d’une paroi encarbone et d’un flux incident de deutérium) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

1.22 Bilan des flux de chaleur mis en jeu dans la machine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

1.23 Localisation des principaux diagnostics de surveillance des IPP - Vue poloïdale . . . . 37

1.24 Localisation des principaux diagnostics de surveillance des IPP - Vue toroïdale . . . . 37

1.25 Lignes de visées des caméras bolométriques de Tore Supra . . . . . . . . . . . . . . . . 38

1.26 Exemple de reconstruction tomographique, choc 41453, [Balorin 08] . . . . . . . . . . . 39

1.27 Evolution temporelle de la puissance rayonnée par le plasma (choc 41453) . . . . . . . 40

1.28 Sonde de Langmuir placée en partie haute du tore et permettant la mesure des fluxcirculant dans la SOL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

1.29 Exemple de caractéristique courant-tension mesurée par une sonde mobile dans le to-kamak Tore Supra . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41

1.30 Evolution du facteur de transmission γ dans la gaine en fonction du ratio Ti/Te[Stangeby 00] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

1.31 Profil radial de flux de chaleur mesuré dans la SOL, choc 41688, γ = 7 . . . . . . . . . 43

1.32 Relevé de puissance extraite depuis le diagnostic calorimétrie . . . . . . . . . . . . . . 44

1.33 Dispositif de surveillance IR de Tore Supra : schéma d’un endoscope . . . . . . . . . . 46

1.34 Images IR d’une antenne FCI et de deux secteurs de 30° du LPT . . . . . . . . . . . . 47

1.35 Courbe d’étalonnage des endoscopes IR pour les trois temps d’intégration : τinte=11,65 et 340 µs [Balorin 08] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

2.1 Evolutions temporelles des températures Te et Ts et du débit en entrée du LPT, choc39880 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

2.2 Un CFP est un système multi-entrées/multi-sorties . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

2.3 Simplification du problème : création d’une variable indépendante Pextraite - Tout CFPdevient un système mono-entrée/mono-sortie (modélisation boîte noire) . . . . . . . . 54

2.4 Discrétisation temporelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

2.5 Etude du bruit de mesure observé sur un relevé expérimental de Pextraite, choc 39880,(phase après choc, hors plasma) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

2.6 Allure théorique d’une courbe en L . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

2.7 Vue d’un secteur du LPT démonté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

2.8 Schéma de l’agencement du réseau de refroidissement du LPT de Tore Supra . . . . . 65

2.9 Comparaison de réponses en Pextraite expérimentale (Secteur LPT-Q1) et simulée, choc39880 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

251

Page 266: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

TABLE DES FIGURES

2.10 Comparaison des allures temporelles de Pextraite simulee lorsque hc varie : simulations àhc=50 000, 30 000 et 10 000 W/m2.K . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

2.11 Exemple d’un scénario expérimental choisi pour déterminer Φ(t) . . . . . . . . . . . . 70

2.12 Réponses indicielles et impulsionnelles expérimentales non filtrées obtenues pour le com-posant LPT total (360°) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

2.13 Réponses indicielles et impulsionnelles expérimentales moyennes du composant LPTtotal (comparaison avant et après filtrage) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

2.14 Visualisation des premiers termes de la matrice Mcalo . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

2.15 Obtention d’un signal Pextraite simulé par calcul direct . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73

2.16 Comparaison des deux méthodes de régularisation (Tikhonov et SVD) sur un cas testsimulé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

2.17 Résultat obtenu à partir du coefficient µ calculé depuis l’étude de l’incurvation de lacourbe en L (Tikhonov) - Comparaison avec le résultat obtenu pour le µopt choisi . . . 75

2.18 Influence du coefficient de régularisation choisi sur la solution en Pdeposee . . . . . . . 76

2.19 Simulation de mesures de calorimétrie bruitées : Pextraite = Pextraite + ε (σ = 1.1 kW,σ = 11 kW, σ = 100 kW) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

2.20 Conséquence d’un bruit trop important lors de l’inversion des mesures . . . . . . . . . 78

2.21 Calcul inverse de puissance déposée sur le LPT pour le choc 35960 . . . . . . . . . . . 79

2.22 Influence du coefficient de régularisation choisi pour l’inversion des mesures de calori-métrie effectuées en sortie du LPT (choc 35960, 2005) . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79

2.23 Calcul inverse de puissance déposée sur le LPT pour le choc 37725 . . . . . . . . . . . 80

2.24 Comparaison des réponses expérimentales φ(t) obtenues pour trois CFP : ProtectionsRipple, Protection latérale droite de l’antenne A1, LPT . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

2.25 Calcul des Pdeposees sur les CFP de Tore Supra, choc 35541 (les coefficients de régula-risation utilisés sont indiqués sur les courbes) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85

2.26 Bilan de puissance réalisé depuis l’inversion des mesures de calorimétrie, choc 35960(2005) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86

2.27 Bilan de puissance réalisé depuis l’inversion des mesures de calorimétrie, choc 40045(2007) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87

3.1 Repérage des 3 zones d’interaction plasma-paroi sur une image IR du LPT (voie HR,choc 39862) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92

3.2 Visualisation des dépôts carbonés en surface du LPT (photo prise in situ, inspection deseptembre 2006) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92

252

Page 267: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

TABLE DES FIGURES

3.3 Les échauffements observés en surface de tuiles avec dépôts au cours de la campagneDITS montrent une évolution des propriétés thermiques des couches de redéposition- figure (a) Localisation des tuiles étudiées sur la visée HR - figure (b) Evolution deséchauffements stationnaire atteints au cours de chocs longs identiques : les dépôts ob-servés s’érodent, s’épaississent ou se détachent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94

3.4 L’observation des constantes de temps de refroidissement de trois tuiles avec défautspermet de mettre en évidence leur inertie thermique (choc 37685, coupure de puissanceà t=34s) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96

3.5 Vue éclatée d’une aiguille du limiteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98

3.6 Modélisation boîte noire correspondant au traitement des images IR (le LPT est assimiléà un système linéaire) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100

3.7 Coupe d’une tuile tricouche du limiteur et flux thermiques mis en jeu . . . . . . . . . 101

3.8 Le limiteur peut être modélisé à l’aide de quatre quadripôles thermiques (cas d’une tuilepropre, non recouverte de dépôts carbonés) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105

3.9 Modélisation quadripôles d’un matériau bicouche . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105

3.10 Réponses indicielle et impulsionnelle obtenue par calcul direct depuis une modélisa-tion quadripôle du limiteur (cas d’une tuile “propre”, sans dépôts carbonés, propriétésthermiques des matériaux choisies à Tref = 200 °C) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107

3.11 Une surestimation des températures mesurées sur le LPT peut entraîner une sous-estimation de l’échauffement de surface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108

3.12 Flux déconvolués - Une surestimation des températures mesurées sur le LPT peut en-traîner une sous-estimation des flux calculés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109

3.13 Déconvolution linéaire d’un thermogramme issu d’une simulation par éléments finisnon-linéaire - Les réponses indicielles utilisées ont été calculées pour des valeurs depropriétés thermiques des matériaux choisies à une température Tref=Tmin, Tmoy ouTmax (atteinte par la tuile au cours du choc) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110

3.14 Une erreur sur le coefficient d’échange convectif peut entraîner un biais sur les valeursde flux calculés par déconvolution linéaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111

3.15 Un filtrage par moyenne glissante sur les signaux calculés (flux déconvolués) permet dereconstruire l’allure initiale de flux incident imposé en surface d’une tuile du limiteur . 112

3.16 Etude du bruit de mesure observé sur un relevé expérimental ∆T (°C), choc 39862 . . 113

3.17 Visualisation du dépôt carboné recouvrant une aiguille du neutraliseur N1 de ToreSupra (les zones de mesures 1 et 2 étudiées y sont indiquées) [Gardarein 8a] . . . . . . 115

3.18 Les dépôts observés sur le divertor du JET présentent un saut en température à l’ap-plication de la puissance caractéristique, d’une couche résistive [Daviot 07] . . . . . . . 116

3.19 La déconvolution des températures observées en surface de dépôts carbonés (à l’aided’une modélisation quadripôles type “tuile propre”) entraîne une surestimation des fluxincidents et l’apparition de comportements aberrants lors des phases transitoires (dépôtcarboné simulé : e = 100.10−6 m, λ = 40 W/m.K, a = 4, 8.10−5 m2/s, Rc = 2.10−5

m2.K/W ) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117

253

Page 268: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

TABLE DES FIGURES

3.20 Résolution de l’équation de la chaleur dans les couches de matériau en régime staionnaire118

3.21 L’ensemble des tuiles du limiteur (propre, avec dépôts ou défauts) est soumis à la mêmevariation temporelle de dépôt de chaleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119

3.22 Les signaux mis en jeu dans l’algorithme d’identification sont soumis successivement àdivers traitements (déconvolution, normalisation, filtrage) . . . . . . . . . . . . . . . . 120

3.23 Algorithme d’optimisation proposé pour caractériser les propriétés thermiques des dé-pôts carbonés (ou des défauts) recouvrant le limiteur de Tore Supra . . . . . . . . . . 120

3.24 Modélisation quadripôles d’une tuile du limiteur recouverte de dépôts carbonés (modèlecapacité-résistance) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123

3.25 Réponses indicielles d’une tuile propre (en bleu) et d’une tuile recouverte de dépôts (enrouge, propriétés de la couche : ct = 150 J/m2.K, Rc = 7.10−4 m2.K/W ) . . . . . . . 124

3.26 Schéma quadripôle correspondant à une tuile présentant un défaut à l’interfaceCFC/cuivre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125

3.27 Comparaison des réponses incidielles obtenues pour une tuile propre du limiteur (enbleu) et pour une tuile présentant un défaut d’interface Rdef = 2, 5.10−5 m2.K/W (enrouge) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126

3.28 Flux incidents simulés (de dynamique identique mais d’amplitudes différentes) en sur-face d’une tuile propre et d’une tuile avec dépôts (a) (Rc = 7.10−4 m2.K/W , ct = 166J/m2.K) et thermogrammes numériques bruités correspondants (b) . . . . . . . . . . 128

3.29 Coefficients de sensibilité réduits du modèle “tuile+dépôts” pour les paramètres ct =166 J/m2.K et Rc = 7.10−4 m2.K/W - Réponse à un échelon de flux : Q = 0.5 MW/m2

(bruité car issu de la déconvolution d’un thermogramme bruité) . . . . . . . . . . . . . 129

3.30 Validation de l’algorithme d’identification proposé sur un cas test - Propriétés identi-fiées : Rc = 6.8.10−4 m2.K/W , ct = 169 J/m2.K . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130

3.31 Une estimation successive des paramètres de la couche de dépôt simulée nous a permisde retrouver les valeurs initiales imposées dans le modèle (ct, Rc et Qstat) avec un biais :ect =1%, eRc =3% et eQstat =2% . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131

3.32 Estimation des paramètres ct et Rc à partir de données simulées bruitées et en présenced’un artefact numérique sur le signal Qrefnorm à la montée en puissance . . . . . . . . . . 133

3.33 Coefficient de sensibilité réduit : influence du paramètre Rdef sur le modèle “tuile+défaut”135

3.34 Les images IR du LPT subissent un effet de grandissement . . . . . . . . . . . . . . . 137

3.35 Les points de contrôle placés sur les vues réelle (a) et IR (b) du LPT (voie HR) per-mettent de recaler les deux images dans la même géométrie . . . . . . . . . . . . . . . 138

3.36 Champ de déformation résultant du warping des images IR du choc 39862 (vecteursdéplacement des PDC) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139

3.37 Résultat du warping des images IR du choc 39862 - L’image IR est discrétisée, chaquepixel de l’image est alors associé à un élément référencé du LPT (tuile) . . . . . . . . . 139

254

Page 269: Etude des dépôts de chaleur dans le tokamak Tore Supra

TABLE DES FIGURES

3.38 Exemple d’une sélection de 11 tuiles au centre du LPT et image monochrome corres-pondant à la région d’intérêt créée (ce masque de calcul permet de segmenter automa-tiquement les images d’un film IR) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140

3.39 Evolution temporelle de la température de surface d’une tuile de CFC, choc 39862(comparaison avant et après érosion morphologique du masque de calcul). En rouge :relevé réalisé sans érosion morphologique de la région d’intérêt, le gaufrier n’est pasexclu, la température moyenne est surestimée - En bleu : relevé réalisé pour une ROIaprès erosion morphologique d’un facteur 5. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141

3.40 Comparaison des relevés de températures réalisés au coeur d’une tuile. En bleu : régiond’intérêt automatique de la tuile, érodée d’un facteur 5 - En vert : région manuelledéfinie sur un pixel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142

3.41 Masque de calcul de flux créé avec WOLFF. En rouge : tuiles avec dépôts et défauts(n=288) - En blanc : tuiles propres (n=306, soit 52% de la surface visée) . . . . . . . . 144

3.42 Cartographie de flux incidents calculée sur le limiteur (résultat obtenu après une in-terpolation 2D des valeurs de flux estimées au centre de chaque tuile) - Voie HR, choc39862, Pchauffage ∼= 2MW - L’images présentée correspond à une trame du film de fluxobtenu sous WOLFF (à t=20s) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145

3.43 Cartographie de flux incidents sur le limiteur, image non interpolée . . . . . . . . . . . 146

3.44 Evolutions temporelles de flux calculées sur deux tuiles propres du limiteur (a) pour lechoc long 39862 - campagne DITS, Pchauffage(t) ∼=2 MW (b) . . . . . . . . . . . . . . 147

3.45 La reconstruction du motif de flux dans la zone proche de la DSMF nécessite la carac-térisation de 21 dépôts carbonés et de 3 tuiles présentant des défauts de cohésion . . . 148

3.46 Pohmique(t) et Phybride(t) - Puissances alimentant le plasma, choc 39862 (t=0 à 16s) . . 148

3.47 La dynamique du dépôt de chaleur sur le limiteur peut être considérée identique surtoutes les tuiles du composant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150

3.48 Flux de référence choisi pour l’estimation des propriétés des dépôts carbonés et desdéfauts présents sur le limiteur de Tore Supra (choc 39862) - Qrefnorm(t) est issu de ladéconvolution des échauffements de tuiles propres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151

3.49 Qnorm obtenus à la montée en puissance (choc 39862). En bleu : signal de référence -En rouge : déconvolution de la température d’une tuile avec dépôt sans prise en comptede la couche de redéposition - En vert : résultat obtenu après optimisation du modèle“tuile+dépôts” (paramètres estimés : Rc = 2.13.10−4 m2.K/W et ct = 917 J/m2.K) . 152

3.50 Qnorm obtenus à la montée en puissance (choc 39862). En bleu : signal de référence - Enrouge : déconvolution de la température de surface de la tuile dérogée D2 sans prise encompte du défaut - En vert : résultat obtenu après optimisation (Rdef estimée : 6.10−5

m2.K/W ) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154

3.51 Complément de la cartographie des flux incidents déposés sur le limiteur pour le choc39862 - Caractérisation de 21 tuiles recouvertes de dépôts et des 3 tuiles présentant desdéfauts de cohésion (la zone étudiée correspond à la région d’interaction avec le plasmasituée proche de la DSMF) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155

255

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TABLE DES FIGURES

3.52 Cartographie de températures moyennes (exclusion du gaufrier) obtenue sur le LPTpour le choc 41696 (t=10s) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156

3.53 Cartographie de flux incidents moyens obtenue sur le LPT pour le choc 41696 (t=10s) 158

4.1 Profil de flux de chaleur exponentiel dans la SOL et projeté sur le LPT . . . . . . . . 165

4.2 La grandeur λq caractérise la longueur de décroissance du profil exponentiel de fluxdans la SOL - elle correspond également à la distance radiale sur laquelle la majoritédes particules et de l’énergie circulant dans la SOL sont contenues . . . . . . . . . . . 166

4.3 Calcul de la distance à la DSMF d’une ligne de champ ouverte connectée au LPT . . . 167

4.4 Coordonnées radiales de la DSMF après traitement des mesures magnétiques acquisespour le choc 41696 (t=15s) : la position de la DSMF dans la direction θ n’est pasconstante dans la machine (source : données grho, base de données TMAG, Tore Supra) 168

4.5 Cartographies illustrant la connexion des lignes de champ sur le limiteur pour un chocsimulé avec un facteur de sécurité q = 8, R0 = 2.4m, r(plasma) = 0.71m . . . . . . . . 169

4.6 Les lignes de champ impactant le limiteur dans les régions à l’ombre du plasma sontauto-connectées au composant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170

4.7 Cartographie théorique des flux de chaleur déposés sur une section de 20° du limiteurpompé toroïdal - Paramètres du modèle : q = 8, λq = 1.5cm, QDSMF = 31MW/m2,Pcond = PLPT = 0.6MW . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171

4.8 Profil de flux QSOL simulé dans la SOL et projeté sur le limiteur : λq=1.5cm, QDSMF =31MW/m2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172

4.9 Les interactions plasma-paroi sur le limiteur conduisent à un motif de dépôt de flux en“double-bosse” . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172

4.10 Repérage des zones d’interaction plasma-paroi A, B et C sur l’image théorique de dépôtde chaleur simulée en surface du LPT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173

4.11 Toute variation du facteur de sécurité q modifie l’incidence des lignes de champ etl’empreinte du dépôt de chaleur sur le composant (simulations réalisées à λq = 1.5cmpour r(plasma) = 0.71m, R0 = 2.4m, et PLPT = 0.6MW ) . . . . . . . . . . . . . . . . 174

4.12 La diminution du facteur de sécurité q influence peu l’angle d’incidence des lignes dechamp mais étale les zones mouillées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175

4.13 Un profil exponentiel de flux plus ou moins piqué dans la SOL modifie le motif de dépôtde chaleur observé sur le limiteur (simulations réalisées à q = 8) . . . . . . . . . . . . . 176

4.14 Comparaison des cartographies de flux simulées et expérimentales pour le choc 41696(q = 8) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179

4.15 Composantes d’écoulement perpendiculaire (faible) et parallèle (dominante) des flux dechaleur dans le plasma de bord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181

4.16 Prise en compte d’un dépôt de chaleur perpendiculaire sur le limiteur - Simulationsréalisées à q = 8 et λq = 1.5cm . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182

4.17 Profil de flux calculé le long d’une aiguille du LPT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185

256

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TABLE DES FIGURES

4.18 Profil radial de flux QSOL estimé depuis l’analyse des images IR du choc 41696 (Q⊥fixé à 10%) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 186

4.19 Influence de la contribution perpendiculaire fixée Q⊥ sur le profil radial de flux calculédans la SOL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187

4.20 L’empreinte de dépôt de chaleur observée sur le composant lors des expériences peutse diviser en 3 zones : les zones 1 et 2 ne sont pas cohérentes avec les prédictionsthéoriques, les interactions plasma-paroi se produisant sur la zone 3 peuvent quant àelles être prédites par le modèle standard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 189

5.1 Scénarii plasma correspondant à quatre chocs hybrides en scan de q . . . . . . . . . . 191

5.2 Cartographies de flux incidents calculées en surface du LPT pour les quatre chocsréalisés en scan de q - Les zones mouillées théoriques sont délimitées par les contoursrouges . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193

5.3 Bilan de puissance déposée sur le limiteur pour les quatre chocs en scan de Ip :Pextraite(calorimétrie) - Pdeposee(calorimétrie) - Pdeposee(IR) - Pconduite (bilan de puissance)195

5.4 Flux de chaleur déposés sur le LPT par les particules neutres, simulation EIRENE[Marandet 08] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 197

5.5 Reconstruction tomographique du choc 39880 [Balorin 08] (densités de puissancesrayonnées dans la machine) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 197

5.6 Principe du calcul de flux Qrad provenant du plasma et déposé sur le LPT (géométrieassociée au calcul, [Preynas 08]) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 198

5.7 Evaluation des flux rayonnés déposés sur le LPT (profil radial), choc 39880 (scénario deréférence DITS), [Preynas 08] - Les valeurs calculées sont supposées homogènes dans ladirection toroïdale ϕ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 199

5.8 Les puissances déposées dans les zones mouillées théoriques du limiteur représententenviron la moitié de la puissance totale reçue par le composant pour les quatres chocsétudiés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 200

5.9 Repérage du tracé spatial utilisé sur la cartographie du choc 41696 (q = 8) . . . . . . . 201

5.10 Profils spatiaux de flux sur une aiguille du LPT (valeurs normées) pour les quatre chocsen scan de q - L’empreinte de dépôt de chaleur sur le limiteur s’étale dans la zone ombréelorsque le facteur de sécurité q diminue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 202

5.11 Repérage du profil spatial dalpha sur la cartographie de flux expérimentale du choc 41696203

5.12 Evolution du profil de flux le long d’un axe perpendiculaire à la ligne de tangence lorsqueq diminue (valeurs de flux normées) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203

5.13 Evolution du rapport Qα/Qpic en fonction de q . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 204

5.14 Profils de flux de chaleur QSOL mesurés par les sondes de Langmuir en partie haute dela machine, hypothèse Ti = Te (γ = 7) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206

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TABLE DES FIGURES

5.15 Comparaison des profils de flux de chaleur QSOL(rDSMF ) déduits des images IR (traitspleins) et des mesures de Langmuir (traits pointillés) : les profils calculés depuis les deuxsystèmes de mesure sont similaires dans la gamme rDSMF=[0-0.04]m si nous supposons :γ = 7 et Q⊥ = 10% . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 207

5.16 Coordonnées (r,z) des surfaces magnétiques connectées au limiteur : les lignes de champles plus éloignées de la DSMF sont connectées sur les faces latérales et intérieures dulimiteur (hors champ de la caméra IR) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 207

5.17 Longueurs de décroissance λq caractérisant les profils de flux de chaleur reconstruitsdans la SOL depuis les mesures de sondes et Langmuir et les images IR : le meilleuraccord entre les deux systèmes de mesure est obtenu pour une contribution en fluxperpendiculaire dans la SOL de 10% . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209

5.18 Le motif de dépôt de chaleur sur le limiteur varie différement avec q suivant les zonesd’interactions considérées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 210

5.19 Phénomènes locaux pouvant modifier la répartition des flux de chaleur en surface dulimiteur de Tore Supra . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 213

5.20 Dispositif expérimental de mesures Lock-In menées sur le limiteur de Tore Supra[Courtois 06] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 228

5.21 Mise en évidence de trois tuiles dérogées présentes sur le secteur Q5B du limiteur[Courtois 06] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 229

5.22 Modélisation d’un dépôt carboné recouvrant une tuile de CFC du limiteur à l’aide dedeux quadripôles : mur + résistance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 230

5.23 Coefficients de sensibilité réduits du modèle “mur-résistance” (valeurs absolues) - Ré-ponses à un échelon de flux de 0.5MW/m2 imposé à t = 0.22s - Propriétés : e = 200.10−6

m, λ = 40 W/m.K, a = 4.8.10−5 m2/s, Rc = 7.10−4 m2.K/W . . . . . . . . . . . . . 232

5.24 Coefficients de sensibilité réduits du modèle “mur-résistance” groupé (valeurs absolues)- Réponse à un échelon de flux de 0.5MW/m2 imposé à t = 0.22s - Propriétés : td =8.3.10−4 s,b = 5.77.103 J/m2.K.

√s, Rc = 7.10−4 m2.K/W . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 233

5.25 Réponse en température d’une tuile avec dépôt soumise à un échelon de flux de 0.5MW/m2 - Comparaison des réponses simulées depuis un modèle mur-résistance etcapacité-résistance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234

5.26 Nuages d’estimation des valeurs de ct et Rc identifiées à partir de données simuléesbruitées (une erreur sur le coefficient d’échange convectif hc a été introduite lors ducalcul direct des thermogrammes simulés ; l’estimation des propriétés est faite pour unevaleur de hc = 30000 W/m2.K) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 236

5.27 Nuages d’estimation des valeurs de ct et Rc identifiées à partir de données simuléesbruitées (une erreur sur la diffusivité thermique du CFC a été introduite lors du calculdirect des thermogrammes simulés ; l’estimation des propriétés est faite pour une valeur :aCFC= 1.01.10−4 m2/s) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237

5.28 Introduction d’une erreur sur hc - Histogramme des valeurs de flux estimées . . . . . . 238

5.29 Introduction d’une erreur sur aCFC - Histogramme des valeurs de flux estimées . . . . 238

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TABLE DES FIGURES

5.30 Le motif des dépôts carbonés sur le limiteur de Tore Supra peut être mis en évidencepar la soustraction d’images IR obtenues avant et pendant une disruption (choc 39863,campagne DITS, mai 2007) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 240

5.31 Ecarts de températures observés sur une tuile propre (en noir) et une tuile avec dépôt(en rouge) au cours d’une disruption (tuiles repérées à la figure 5.30c) . . . . . . . . . 241

5.32 L’observation des montées en température de tuiles lors d’une montée en puissancestandard (amorçage du choc 39863) peut mettre en évidence la présence de dépôtscarbonés mal attachés, non repérés lors de l’étude de disruptions . . . . . . . . . . . . 242

5.33 Images IR warpées obtenues sur le LPT avant grattage (choc 39862, à gauche, t=10s),et après grattage (choc 41696, à droite, t=10s) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 243

5.34 La soustraction d’images IR du limiteur avant et après grattage permet de révélerl’empreinte des dépôts initialement présente sur le composant . . . . . . . . . . . . . . 243

5.35 Résultat des opérations de nettoyage des CFP de Tore Supra menées en mars 2008[Martinez 08] . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 245

5.36 Modélisation 3D du comportement thermohydraulique d’une aiguille du LPT . . . . . 246

5.37 Modélisation 1D du réseau de refroidissement d’un secteur du LPT . . . . . . . . . . . 247

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Liste des tableaux

1.1 Paramètres principaux de quelques tokamaks mondiaux . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

1.2 Tableau récapitulatif des avantages et inconvénients des matériaux CFC, tungstène etbéryllium (Extrait de [Frederici 01]) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

1.3 Caractéristiques des sondes Pt100 utilisées sur Tore Supra [NOR 83] . . . . . . . . . . 44

1.4 Localisation et visées des endoscopes IR de Tore Supra . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47

2.1 Bilans d’énergie (en MJ) réalisés pour les chocs 37725 (à gauche, choc en D2 avecinjection de Ne : frad ∼= 0.8) - et 37733 (à droite, choc en D2 : frad ∼= 0.4) . . . . . . . 52

2.2 Temps de réponse et principales caractéristiques des CFP activement refroidis de ToreSupra . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82

3.1 Paramètres thermophysiques identifiés pour une couche de redéposition recouvrant leneutraliseur N1 de Tore Supra (deux zones de mesures ont été étudiées, cf. figure 3.17,[Gardarein 8a]) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114

3.2 Résultats issus d’une étude du bruit observé sur les signaux IR simulés (test de laméthode d’identification) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127

3.3 Ecarts-types du résidu sur la solution et du bruit de mesure observé sur les signaux . . 153

3.4 Gammes de valeurs indentifiées pour les propriétés ct et Rc caractérisant les 21 dépôtscarbonés étudiés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

4.1 Les paramètres λq et QDSMF estimés dépendent de la contribution en flux perpendicu-laire prise en compte dans la SOL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187

5.1 Facteurs de sécurité q (mesurés au bord) correspondants à chaque décharge étudiée . . 192

5.2 Longeurs de décroissance et flux QDSMF caractérisant les profils QSOL mesurés par lessondes de Langmuir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205

5.3 Longeurs de décroissance et flux QDSMF caractérisant les profils QSOL déduits desmesures IR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 206

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