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de l’éthique ?
Année 2009 – 2010
ETHIQUE DES AFFAIRES
SOMMAIRE
Introduction
1. Des résultats éloquents
II. Des révélations qui effritent l’icône
1. Dégradation de l’image de la marque
2. Des mesures correctives
Partie 2 : 10 ans plus tard, Nike est-elle devenue un modèle éthique ?
I. Un nouveau comportement ?
1.1. Les réactions propres au scandale sur ces 13 dernières années
1.2. Nike : Des mesures pour prendre les devants ?
II. L’image de Nike perçue par la population
2.1. La réalisation de l’enquête
2.2. L’analyse du questionnaire
2.3. Les conclusions
1. Des résultats éloquents
Leader du marché des articles sportifs, Nike doit tout d’abord sa suprématie à sa
grande popularité. En effet, en 2000, Nike détient 40% de parts de marché de
chaussures de sport, devançant ses concurrents directs, Reebok et Adidas, comme
le montre ce diagramme.
[pic]
Cette domination peut être expliquée par un souci d’innovation et de technologie
de pointe. Nike bénéficie également d’un marketing agressif, à travers un slogan
accrocheur « Just do it » et un fort sponsoring, qui permet une identification aux
plus grands sportifs internationaux. De plus, Nike est très présent lors des grands
évènements sportifs, tels que les coupes du monde de football par exemple. Ainsi,
le chiffre d’affaires record constaté par Nike en 1998, soit 9.5531 milliards de
dollars, peut être en partie expliqué par la coupe du monde, qui a suscité un fort
engouement pour l’achat de maillots de football, de ballon, et d’accessoires divers
(écharpes de supporters par exemple).
Cependant, les fortes performances de Nike ne sont pas uniquement le fruit de
leur implantation sur le marché. La stratégie d’outsourcing adoptée par Nike depuis
le début des années 1970 explique leur haut niveau de marge. C’est Phil Knight, le
fondateur et actuel dirigeant de Nike qui a mis en place cette forme de production
en investissant en 1970 au Japon. Depuis, Nike n’a cessé de faire appel à des sous-
traitants asiatiques. Aujourd’hui, le géant sportif traite avec des producteurs
thaïlandais, coréens, indonésiens, chinois, vietnamiens… Le système de
délocalisation de la production consiste à faire produire les biens dans des pays en
voie de développement, où la main d’œuvre est abondante et bon marché. Ainsi,
l’entreprise diminue considérablement ses coûts salariaux et constate une marge
considérable. Nike peut donc se permettre d’afficher des prix compétitifs et ainsi,
de préserver ses parts de marché. La sous-traitance productive de Nike est très
importante, puisque 54.48 % des unités productives de la marque sont situées en
Asie. Le succès de Nike repose donc également sur ses sous-traitants : Nike
emploie directement 20 000 personnes environ alors que près de 550 000 salariés
sont indirectement rattachés à Nike par la sous-traitance, comme le montre le
tableau suivant.
production |Nombre |En % |Nombre |En % |
| |par gamme de
sport | | | | |
Asie |57 |227 |67 |401 |54,48% | 467 146 |83,91% | |Etats-Unis |0 |117 |14 |131
|17,79% | 13 369 |2,40% | |Amérique, sauf EU |8 |91 |3 |102 |13,86% | 37
514 |6,74% | |Reste du monde |3 |94 |5 |102 |13,86% | 38 693 |6,95% |
|Total |68 |529 |89 |736 |100% | 556 722 |100% | |
Source : Locke (2001) et Nike (2001), extrait de l’article « Nike face à la
controverse éthique relative à ses sous-traitants » par Nacer Gasmi et Gilles
Groleau.
A travers ces chiffres, nous voyons bien que Nike fait appel de façon massive à
la sous-traitance. Aux vues de ces performances économiques, cette stratégie a l’air
de porter ses fruits. Cependant, en faisant appel à des unités de production externes
et géographiquement lointaines, Nike perd une partie du contrôle de sa production.
En effet, l’externalisation peut présenter des effets pervers qui peuvent notamment
nuire à l’image de marque de l’entreprise.
2. … mais une réalité moins élogieuse
Il est vrai que le leader du marché des articles sportifs demeure convoité par ses
concurrents du fait qu’il dégage des chiffres spectaculaires, mais il reste en
revanche bafoué, (mais non dénoncé car beaucoup de grandes entreprises agissent
de la même façon) en ce qui concerne ses relations sociales et notamment les
rapports de la direction avec ses employés.
Comme nous venons de le voir, le groupe Nike a mis en place, dès le début, une
stratégie d’externalisation de sa production, implantant ainsi ses usines aux quatre
coins du monde et notamment sur le flanc oriental. En effet localisé au Vietnam, en
Chine ou encore au Japon, l’entreprise a choisi des lieux stratégiques, c’est-à-dire,
dans lesquels les coûts sont bas et surtout où la main-d’œuvre n’est pas chère. Mais
le contrecoup est que, dans ces pays en développement, l’environnement et les
normes éthiques ne sont pas les mêmes que celles en vigueur dans les pays
développés. De nombreuses dérives font donc leur apparition et c’est ainsi que l’on
a découvert que les conditions de travail chez les sous-traitants de Nike, sont loin
d’être recevables.
En effet, en délocalisant dans de tels pays, Nike a de la sorte accès à un grand
nombre d’individu qui se trouve disponible et à la recherche d’un emploi. Mais le
fait qu’il existe justement autant de personnes sur le marché du travail permet à
l’entreprise d’en profiter, voire d’en abuser. Elle exploite ainsi la main-d’œuvre
présente sur le terrain, en élaborant une politique de bas salaires, qui, établit dans
les pays développés, ne pourrait perdurer. Ces travailleurs démunis se retrouvent de
ce fait surexploités et sous-payés.
C’est donc en profitant de ce labeur à faible coût que Nike compte pénétrer ce
marché des articles de sport. Mais si dans certains pays le prix de l’heure de travail
devient trop élevé par rapport aux objectifs que le groupe s’est fixé, il délocalise
dans d’autres pays où le coût du travail se trouve encore moins cher, comme par
exemple en Corée, en Thaïlande ou encore en Chine. Le problème reste que ces
derniers ne peuvent pas augmenter leurs coûts salariaux car cela leur ferait perdre
toute leur attractivité, et ils risqueraient de voir ainsi de plus en plus d’entreprises
partir de leur pays. On pourrait penser que certaines autorités devraient sévir quant
à cette façon d’agir et d’abuser de ce facteur travail, mais il faut savoir que se sont
des pays tellement pauvres, qu’ils ont besoin de se développer économiquement. Or
s’ils protestent contre la politique salariale de Nike, ils risquent de voir le groupe
progressivement délocaliser vers d’autres pays, ce qui engendrerait ainsi un
manque d’emploi pour la population et un ralentissement du développement
économique. L’entreprise se sert de cette situation de fragilité, et utilise cette
menace de délocalisation pour empêcher les pays en développement d’augmenter
leurs coûts salariaux.
Cette stratégie de départ a permis à Nike de mettre un peu les voiles sur les pays du
Sud-est Asiatique et ainsi d’accroître ses parts de marché en dehors de son pays
d’origine que sont les Etats-Unis. La plupart des gens qu’il emploie dans les pays
en développement sert à la production des différents articles, tandis que ceux
localisés aux States correspondent à des métiers moins pénibles physiquement, à
savoir la R&D ou encore, le marketing. La société emploie et exploite ainsi
plusieurs centaines de milliers de personnes à travers tous ces pays émergents. En
effet les politiques existantes chez ses sous-traitants ne sont pas forcément loyales
envers les employés, et sont surtout considérées comme non conformes aux
principes éthiques qui existent dans les pays développés. Certains sous-traitants
abusent de leur autorité et interdisent à leurs employés de pouvoir créer un
syndicat, alors que dans les pays développés, le droit syndical fait parti du droit du
travail ; l’employeur ne peut donc en aucun cas s’y opposer. D’autres licencient
leur personnel afin d’éviter de payer leurs primes d’ancienneté,… Ils mettent
également en place de sévères conditions de travail comme par exemple, le travail
forcé ou encore le travail des enfants.
C’est ainsi que les pays en voie de développement restent dominés par le géant
qui profite de leur situation de faiblesse pour instaurer des conditions de travail
difficiles en faisant pression sur l’éventualité d’une délocalisation vers d’autres
pays où la main-d’œuvre est plus avantageuse. Cette relation de chantage lui
permet de profiter de la vulnérabilité de ses employés et de les discipliner. C’est par
ce biais qu’il met en place différentes politiques de travail qui entrent en parfaite
contradiction avec le respect des droits de l’homme. En effet, il fait travailler les
petits enfants, et exploite son personnel dans ses nombreuses usines qui héritent
ainsi du terme « sweatshops » signifiant « usines à sueur », du fait de la fixation de
quotas de production et donc d’heures supplémentaires. Mais il existe aussi
d’autres « façons de faire », comme par exemple le harcèlement physique (coups,
pincements, tiraillements des oreilles,…) et/ou sexuel (attouchements, abus
physiques, faveurs sexuelles,…), punitions excessives, ou encore harcèlement
verbal (insultes, humiliations, intimidations,…).
Si ces pratiques ont existées et existent peut être toujours, cela vient du fait qu’il y
a différentes parties prenantes dans cette affaire et que certaines y sont favorables et
d’autres moins. A noter que ce sont les actionnaires, les pays sous-traitants (pas
étonnant), mais également les consommateurs, qui apprécient ce choix et qui sont
propices à ces pratiques, portant ainsi les problèmes éthiques au second plan.
Cependant il ne faut pas que Nike néglige le fait que cette dimension éthique est de
plus en plus considérée comme un critère de compétitivité.
II. Des révélations qui effritent l’icône
1. Dégradation de l’image de Nike
a) Nike, cible des médias
Les conditions de travail chez les sous-traitants de Nike ont été révélées au grand
jour notamment par le biais de la presse. Les médias sont bien entendu montés au
créneau dès la prise de connaissance des agissements de la firme, qualifiés de
« borderline ».
C’est en 1996, que le magazine « Life » est le premier à rendre publique cette
affaire, en publiant une photo « choc ». Souhaitant marquer les esprits, cette image
illustre un enfant confectionnant un ballon de football à l’effigie de la marque. Le
but du magazine a largement été atteint puisque cette photographie a massivement
été reprise dans d’autres journaux de monde entier.
[pic]
Photographie parue dans le magazine « Life », 1996
Ne se contentant pas de reprendre cette image, d’autres journalistes ont voulu à
leur tour montrer cette face cachée de la mondialisation. La polémique a donc été
lancée par le fait de la médiatisation et de la parution d’images marquantes de ce
type, dont voici deux exemples.
[pic] [pic]
Comme nous le montre le graphique suivant, le géant du sport a vivement été
critiqué dans les médias à partir de 1995, et ce jusqu’au début des années 2000.
Cette étude, tirée de Locke, a été établie sur un échantillon de 50 quotidiens
anglophones les plus importants.
[pic]
D’après ce document, nous voyons donc bien que Nike a été dénoncé à de
nombreuses reprises par les médias, associant cette marque aux termes
« sweatshop » (qui désigne les usines exploitants ses ouvriers), « child labour »
(signifiant le travail des enfants), et exploitation. Bien entendu, cette omniprésence
dans la presse a nourrit la polémique et a influencé l’opinion publique.
b) Des acteurs engagés
Suite à l’annonce de la polémique sur le travail des enfants chez les sous-traitants
de Nike, et à cet emballement médiatique, la population a souhaité manifester son
mécontentement, notamment à travers le boycott de la marque mais aussi à travers
les nombreuses manifestations d’étudiants, et de militants de par le monde.
Au cours de la lutte conte la marque, de nombreuses associations de
consommateurs se sont montées contre Nike ; en effet, elles ont toutes tenté de
combattre l’influence de Nike sur les consommateurs d’articles de sport dans le but
de faire baisser les ventes, d’une part pour nuire directement à la marque et d’autre
part afin de diminuer le travail effectué par les enfants dans les usines sous-
traitantes. En 1998, la marque s’est faite attaquée pour publicité mensongère par un
américain nommé Mike Kasky. Les tribunaux américains avaient dans un premier
temps donné raison à Nike, mais la Cour Suprême américaine a finalement décidé
de condamner la célèbre marque de sportswear. Ceci fut le seul cas de procès pour
Nike ; en effet, aucune action en justice n’a été intentée concernant le manque
d’éthique notoire dont elle a fait preuve à travers ses sous-traitants.
La marque a également vu se liguer contre elle des personnes influentes, tels que
Mickael Moore, célèbre réalisateur autodidacte, connu pour avoir des points de vue
critiques envers la société américaine. En 1999, dans son film « The big
one », Moore traite des aberrations économiques dues à la mondialisation ; il
parcourt les Etats-Unis à la rencontre de chefs d’entreprise ayant licencié des
salariés, alors même que des profits étaient enregistrés au cours de l’année. Lors de
son entretien avec le président de Nike, Moore adopte un comportement
décontracté et tourne en dérision l’interview pour prendre le dessus sur son
interlocuteur. Phil Knight livre ainsi aisément des informations sur le travail des
enfants chez ses sous-traitants, et fait ainsi lui-même sa mauvaise publicité.
Il rejoint dans ce film le mouvement altermondialiste puisqu’il dénonce les
agissements des grandes multinationales américaines, avec une critique
essentiellement au niveau social ; le chômage, les conditions de travail, sont des
points importants à respecter si l’on ne veut pas s’attirer les foudres des acteurs de
ce mouvement. On peut également noter le livre de Naomi Klein, No logo, écrit
en 2000, qui a été considéré comme « bible de l’alter mondialisme ». Elle y fait une
critique de la société de consommation actuelle, en parlant des dérives commises
par les grandes entreprises influentes de ce monde, notamment celles de Nike, et
des techniques qu’ont ces marques pour manipuler les consommateurs. Ce livre,
traduit en 28 langues, a ainsi largement contribué à la dénonciation publique des
abus commis par Nike entre autres. Grâce à ce livre, qui arrive après la polémique
Nike, les lecteurs ont pu avoir un aperçu des dérives commises dans les pays sous-
traitants ; c’est ici, une fois de plus, un coup dur pour la marque qui accumule les
mauvaises publicités.
Dans le même but que Naomi Klein, des campagnes de publicité « anti-
sweatshops » (mot anglais pour désigner les usines où les salariés sont exploités) se
sont créées dans le but de sensibiliser progressivement l’opinion publique
internationale comme le montre cette image :
[pic]
A noter que d’autres manifestations de mécontentement ont eu lieu, principalement
aux Etats-Unis, par des étudiants pour la plupart antimondialistes. Ces jeunes, que
la marque avait cru avoir défini et mis sous sa coupe, par le phénomène
d’identification sociale et l’importance grandissante dans nos sociétés de porter des
marques, ont finalement manifesté contre Nike en faveur du respect des conditions
de travail dans les pays sous-traitants. En effet, la marque, sûre d’elle, les a invité à
se rendre dans ses usines des pays en développement afin qu’ils constatent par eux-
mêmes les conditions réelles de travail ; mais Nike n’avait pas prévu que ce
qu’allaient voir les étudiants les pousserait à aller dans la rue et à manifester pour le
boycott de la marque.
Tous les mouvements sociaux, quels qu’ils soient, ont tous loué un but commun ;
celui de démolir une marque leader sur son marché au niveau mondial, dans le but
de la sanctionner pour son manque d’éthique. Bien que peu de traces de ses actions
ne soient disponibles aujourd’hui, que ce soit sur Internet (en tant que principal
canal de recherche utilisé actuellement) que dans les mémoires des générations
précédentes, elles ont contribué à d’importants changements au niveau des sous-
traitants, comme l’adoption de chartes éthiques, pour des conditions de travail
décentes.
c) Des clients sensibilisés
Bien que la marque soit un pilier dans le monde du sport, sa popularité a été
entachée par cette polémique. Aux vues de l’acharnement médiatique et de la
multiplication des mouvements sociaux à travers le monde, la clientèle de Nike a,
elle aussi, manifesté sa déception. La mauvaise publicité qu’a subie Nike s’est donc
traduite en boycott. Ainsi, la firme a vu son chiffre d’affaires diminuer de près de
8.13 % de 1998 à 1999. Le résultat de la société a également connu une chute
remarquable entre 1998 et 1999, passant de 795.8 millions à 399.6 millions de
dollars.
Bien sûr, ceci est à nuancer car ces éléments peuvent également être mis en
corrélation avec l’apparition de la crise du Sud-est asiatique. Cependant, il est plus
que probable que cette régression soit une conséquence des différentes attaques
dont Nike fut la cible. Il est indéniable que le comportement d’achat de la
population ait été influencé par la réputation et la mauvaise image véhiculées par la
célèbre virgule.
[pic]
Constatant cette chute historique des résultats, les marchés ont aussi réagi avec
véhémence. En effet, le cours de l’action a subi le même sort que les résultats de
Nike. Alors que les actions de Nike avaient une valeur de transaction de 76 dollars
en 1997, ces dernières ont chuté jusqu’à 27 dollars en 2000 (cours le plus bas
observé durant l’année). Cette chute considérable du cours de l’action Nike est pour
la plus grande partie expliquée par la baisse d’activité de la société aux Etats-Unis,
qui est son premier marché. Alors que le chiffre d’affaires réalisé dans cette zone
atteignait 5.54 milliards de dollars en 1997, les ventes américaines n’étaient plus
que de 2.43 milliards de dollars en 2000, soit une chute de 44%. La population
américaine semble donc avoir été très sensible aux agissements de Nike.
La controverse dont Nike à fait l’objet a donc eu des répercussions importantes sur
son image de marque ainsi que sur la confiance accordée par ses clients.
Conséquence directe de ce désamour entre Nike et le consommateur, l’entreprise a
dû également gérer cette perte de vitesse au niveau financier. Pour retrouver un
niveau d’activité à la hauteur de la puissance de Nike, la firme a dû regagner la
confiance du marché, et donc des consommateurs. Comment l’entreprise a-t-elle
procédé ? Quels engagements, quels changements ont permis à Nike de redorer son
image ?
a) Des mesures préventives inefficaces
Il faut souligner que, comme s’en défend Nike, les faits précédents ne relèvent
pas directement de sa responsabilité et que les sous-traitants avec lesquels elle
collabore sont des entreprises indépendantes. Mais ce n’est pas excusable pour
autant, et c’est au groupe de prendre les choses en main et de mettre en place divers
moyens afin de contrôler ce qui se passe dans ses usines au bout du monde.
Depuis le début des années 90, Nike semble pourtant avoir instauré plusieurs
principes, pour gérer au mieux toutes les critiques qui agissent contre elle. En effet
seulement deux ans après les premières controverses, le groupe élabore un code de
conduite : le « Memorandum of Understanding ». Ce code impose le respect des
lois relatives au travail, reprenant celles en vigueur dans les pays développés. Il
stipule notamment l’interdiction de faire travailler des enfants, ou encore
l’interdiction d’avoir recours au travail forcé.
Dans le même temps, un second point a été mis en place en vue d’améliorer les
conditions de travail des employés chez les sous-traitants : il s’agit d’une
vérification de tous les salaires que perçoivent les employés liés indirectement à
Nike. Est étudiée ici la décence des rétributions ainsi que leur conformité aux
normes légales. Le bémol à ce niveau est la crédibilité portée à l’approbation de ces
rémunérations, si celle-ci est réalisée par un membre de l’usine sur place et non par
une personne extérieure et objective.
Ce n’est qu’en 1994, que le groupe décide d’établir un système de contrôle des
différentes techniques mises en place depuis 1992, par le biais de vérifications sur
le terrain. Il s’agit de s’assurer que le code de conduite, établit deux ans plus tôt, est
bien respecté par les sous-traitants. Toutefois cette action est à nuancer car cette
surveillance est effectuée par du personnel de l’usine même ; c’est en quelque sorte
une auto-vérification qui limite ainsi l’impartialité de la mission.
En 1996, le travail des enfants constitue la préoccupation majeure de Nike selon
ses dires. Nike semble manifester un réel intérêt pour ce problème. Cependant, en
l’absence d’enregistrement de l’âge des employés, Les sous-traitants peuvent
continuer à faire travailler des enfants. De même, en l’absence de vérification des
conditions sociales de travail de manière indépendante, les sous-traitants continuent
à agir comme ils le souhaitent.
b) Intervention l’OIT
L’organisation internationale du travail fait partie de l’ONU et à pour but de
promouvoir le travail décent partout et pour tous. Elle est chargée de veiller à ce
qu’il n’y ait pas d’abus concernant le travail des enfants, la discrimination au
travail, la liberté syndicale, et le travail forcé.
D’une manière générale, l’OIT a un rôle important à jouer au niveau mondial
car il lui incombe de veiller au respect des règles et des bonnes mœurs, sur
l’ensemble du globe. Dans le cas de Nike, l’entreprise a délibérément choisi de
mettre à mal les règles sociales publiées par l’OIT. Dans certaine usines
indonésiennes, les ouvriers travaillent en moyenne 60 heures par semaines avec des
pics à 97 heures et chaque ouvrier doit produire un minimum de 350 paires de
chaussures par jours d’une valeur totale de 30 000$, pour un salaire de 40$. La part
du salaire dans le prix de vente des chaussures est d’environ 0,5%. La liste des
aberrations est encore longue... Mais quelle a été la réaction de l’OIT lors de
l’explosion médiatique du scandale ?
Etant donné la période à laquelle les évènements se sont passés, aucun document
traitant des éventuelles sanctions qu’aurait reçu Nike n’est disponible. Cela est à
déplorer car si les archives des précédentes décisions rendues par l’OIT étaient
consultables, cela encouragerait peut-être des sociétés à mieux se conduire. En
effet, les compagnies sanctionnées joueraient le rôle d’exemple et d’avertissement
pour des sociétés qui auraient éventuellement recours à des méthodes de travail non
éthique.
Mais comment Nike a-t-elle pu user de cette situation pendant autant d’années ?
Les usines implantées dans les pays sous-développés sont plus sujettes à faire
travailler des enfants que les usines occidentales ou outre-Atlantique étant donné la
situation économique de la population. Pourquoi l’OIT ne renforce-t-elle pas ses
contrôles spécialement dans ces pays ? Les directeurs de ces usines, qui usent de
tous les vices possibles pour exploiter leurs salariés, jusqu’à les détruire
moralement, ont conscience des facilités que procurent leur localisation. Les usines
peuvent parfois se trouver dans des coins reculés, difficile d’accès, ce qui peut
rendre difficile d’éventuelles vérifications. De plus, la pression menée sur les
salariés en cas de dénonciation, ou en cas de baisse de la cadence les empêche de
parler de leurs conditions de travail. Nike, après la polémique et les nombreuses
manifestations de la population, a mis en place des mesures de dénonciation
anonyme, pour que les salariés puissent faire part de leur mal être au sein de
l’entreprise. Pourquoi l’OIT n’a-t-elle pas mis en place de telles mesures
auparavant ? Cette organisation mondiale est pourtant au courant de la situation
dans laquelle vivent les habitants de ses pays et il a fallut un scandale pour faire
bouger les choses.
L’OIT ne fait pas état des sanctions prises envers des sociétés ne respectant pas ses
engagements. Nike en est la preuve puisqu’aucune information n’est disponible sur
la toile concernant les manquements aux règles de l’OIT alors que certains
identifient cet acte comme un crime contre l’humanité. L’OIT représente-t-il un
garde-fou suffisamment efficace face à la multitude des usines usant de mauvaises
conditions de travail dans les pays pauvres ? L’engagement de personnes dépêchées
sur place pour contrôler efficacement les usines serait me semble-t-il plus efficace
que des bureaucrates siégeant en Belgique ! Des conditions de travail telles qu’elles
étaient dans les usines sous-traitantes auraient pu être éradiquées plus rapidement.
On peut noter qu’actuellement, Nike travaille en étroite collaboration avec
l’OIT pour l’information de ses employés sur ses engagements ainsi que sur la
qualité sociale mise en place sur les différents sites de production. De plus, le code
de conduite élaboré en 1998 par Nike, et révisé déjà deux fois depuis sa création,
répond aux exigences de l’OIT.
Aujourd’hui le groupe Nike a dû changer et faire évoluer sa politique, et il
consacre exclusivement pour cela une centaine de personnes aux questions relatives
aux conditions de travail dans les pays des activités productives, et considère les
problèmes éthiques et environnementaux comme des priorités stratégiques.
Partie 2 :
I. Nike : Un réel changement ?
1.1 Les réactions propres au scandale sur ces 13 dernières années
Juste après le scandale des années 1996 et 1997 avec la parution de la photo
dans le magazine life en juin 1996, on a constaté que les mesures correctives prises
par Nike depuis le début des années 90 n’étaient qu’une façade. En effet, Nike n’a
jamais contrôlé le fait que ses sous-traitants respectent le code et, de ce fait, elle n’a
jamais appliqué aucune sanction en cas de non respect comme le prouve les faits.
Pourtant, il nous semble qu’un leader tel que Nike a la possibilité d’influer sur le
comportement de ses sous-traitants. En effet, ces derniers seraient prêts à tout pour
ne pas perdre le marché. De plus, leur comportement provient nécessairement des
exigences de Nike en matière de coût, de délai, et de quantité de production. En
effet, si le temps pour produire une certaine quantité était plus long, les sous-
traitants n’auraient pas besoin de recourir au travail des enfants ou à des journées
sans fin pour les travailleurs. De plus, il faut noter que Nike n’ignorait pas
l’existence de telles pratiques lorsqu’elle a décidé de recourir à des entreprises
sous-traitantes dans ces pays.
Il semble que beaucoup de personnes et de groupes partagent notre opinion.
Aussi, Nike a continué à être mal menée malgré les explications qu’elle a pu
fournir au sujet de ses sous-traitants. Comme les gens pensent que le groupe a sa
part de responsabilité, Nike a dû adopter une autre stratégie pour redorer son image.
Elle a donc commencé à réellement et concrètement prendre en compte les
problèmes éthiques.
En 1997, Nike adhère au Apparel Industry Partnership (appelé aujourd’hui
Fairlabor) créé dans le but d’améliorer les conditions et les normes de travail dans
les usines sous-traitantes. Néanmoins, il est à noter que cette adhésion lui a
fortement été recommandée par le Président Clinton et donc qu’elle n’y a pas
forcément adhéré de son propre chef. On peut donc penser que Nike attend qu’on
l’oblige à faire quelque chose pour agir ce qui montre encore une fois sa passivité
concernant les problèmes éthiques. L’adhésion à l’AIP aura tout de même le mérite
d’obliger Nike à revoir son code de conduite : Nike doit intégrer dans son code les
normes de l’AIP qui sont basées sur les conventions de l’Organisation
Internationale du Travail.
En 1998, Nike semble devenir plus réactive face aux problèmes éthiques. Elle
prend la décision de faire contrôler ses sous-traitants chaque année par un cabinet
indépendant (PriceWaterhouse Coopers) pour vérifier la bonne application du code
de conduite. Cette décision nous semble être une bonne idée car l’indépendance du
cabinet permet d’obtenir des résultats qui reflètent bien la réalité. En effet, si Nike
décidait de contrôler elle-même ses sous-traitants, rien ne nous assure qu’elle nous
donnerait les vrais résultats car il lui serait aisé de les falsifier. Cependant, « ces
audits-là sont efficaces pour vérifier les niveaux de salaire, les dépassements
d'heures, mais pas pour contrôler les conditions sociales de travail » admet Mme
Maria Eitel, vice-présidente chargée de l’engagement éthique chez Nike.
C’est pourquoi, en 1999, Nike créé et adhère à Global Alliance, une association
indépendante qui réunit la Fondation Internationale pour la Jeunesse, la Banque
Mondiale, la Fondation Mc Arthur, Nike, Gap Inc. ainsi que huit universités.
Chaque membre de l’association alloue une part de son budget à cette association
pour qu’elle enquête sur les conditions de travail et mène diverses actions de
mécénat et de formation. En mars 2002, Global Alliance avait déjà « interrogé 9
000 ouvriers dans 29 usines en Thaïlande, au Vietnam et en Indonésie sur leurs
besoins et leurs aspirations. A la suite de ces enquêtes, Global Alliance a fourni à
presque 10 000 ouvriers des programmes qui répondent aux besoins exprimés en
termes de santé, nutrition et compétences d’encadrement. En outre, Global Alliance
a formé 700 directeurs et contremaîtres d’usine pour leur donner des connaissances
et des compétences de direction » souligne Hannah Jones, la responsable du service
Responsabilité d’entreprise de Nike pour la zone Europe/Moyen Orient et Afrique.
Dans le même registre, Nike lance en avril 2000 le programme « Transparency
101 » où elle s’engage à publier, sur son site internet, les rapports d’audit de
PriceWaterhouse Coopers chez ses sous-traitants. En effet, jusque là, il leur était
possible d’auditer les usines mais les résultats n’étaient pas communiqués. Or, en
l’absence d’une telle communication, l’audit permet uniquement à Nike de prendre
d’éventuelles mesures. Il n’y avait donc aucune transparence pour le
consommateur. On peut donc penser que Nike a préféré attendre quelques années
avant de permettre la publication des rapports d’audit afin d’obtenir un délai lui
permettant de faire respecter son code de conduite. En agissant ainsi, elle peut
montrer une meilleure image d’elle car elle a eu le temps de prendre des mesures
auprès de ses sous-traitants. Aussi, les rapports d’audit ne peuvent être que plus
élogieux.
De plus, Nike a créé des services entièrement dédiés aux problèmes des
conditions de travail et de l’environnement. Ces services emploient environ 85
personnes et sont situés dans les pays où sont localisées les activités productives.
Enfin, pour jouer la transparence au maximum, il faut quand même souligner le
fait que Nike a publié le 13 avril 2005 la liste de ses 704 sous-traitants dans le
monde pour permettre à tout ceux qui le souhaite de faire leurs propres contrôles.
Nike est la seule et unique grande entreprise leader dans le domaine du sport a
avoir accepté de rendre cette information publique tout en sachant que certaines
conditions de travail continuaient à être bafouées. Néanmoins, elle a attendu que
des progrès aient été fait en la matière pour rendre cette information publique.
Il semble que Nike ait compris l’enjeu des problématiques éthiques en matière
de conditions de travail et que de réels progrès aient été faits pour améliorer les
conditions de travail dans les usines productives. Même si on peut penser que Nike
attend à chaque fois que la situation s’améliore pour rendre publique certaines
informations afin d’être valorisée, ce comportement a tout de même le mérite
d’avoir fait avancer les choses.
1.2 Nike : Des mesures pour prendre les devants ?
Suite aux nombreuses pressions concernant les conditions de travail de ses
sous-traitants, il semble que Nike ait décidé de prendre des mesures préventives sur
d’autres problèmes éthiques. Ces pressions auraient-elles transformé l’esprit de
Nike ?
En effet, l’entreprise Nike a pris un certain nombre de mesures en matière de
développement durable : Par exemple, elle a remplacé les solvants toxiques utilisés
pour fabriquer les chaussures par des solvants à l’eau qui en plus d’être plus
écologique, sont meilleurs pour la santé des ouvriers. De plus, Nike lance des
versions écologiques de ses modèles phares de chaussures de basket, comme l’Air
Jordan XX3. En effet, les quantités de colles toxiques nécessaires à la production
d’une chaussure sont réduites et la semelle est réalisée en caoutchouc recyclé.
Cependant, on peut s’interroger sur le fait que Nike garde ses versions classiques.
En effet, pourquoi continuer à lancer des versions non écologiques quand il est
possible de faire des versions écologiques ?
De même, Nike a mis en place le programme Reuse-A-Shoe en Amérique du
Nord. Ce programme consiste à récupérer les chaussures usagées, à les décomposer
et à les transformer en revêtement de sol pour terrain sportif. De plus, un des
composants recyclés (le Nike Grind) est utilisé dans la fabrication d’un autre
modèle : la Nike Trash Talk. Ce modèle de chaussure de basket entièrement
écologique devrait sortir à l’horizon 2011. Cette chaussure sera entièrement
fabriquée à base de déchets (essentiellement des déchets des usines sous-traitantes)
tels que des pièces de cuir, du caoutchouc, des mousses ou autres matériaux. Ce
programme apparaît être une bonne initiative à nos yeux cependant, pourquoi la
collecte est elle limitée à l’Amérique du nord ? De plus, il faut bien voir que les
chaussures collectées en Amérique du Nord vont devoir être expédiée dans une
usine de production puis de nouveau réexpédiée dans un pays distributeur de
chaussure. Toutes ces distances parcourues ne nous semblent pas très écologiques.
Il faudrait donc disposer de plus d’informations sur le coût pour la planète de ce
système afin de vérifier qu’il est bien écologique et qu’il n’est pas juste un moyen
de réduire encore une fois les coûts. En effet, dans ce genre de situation, la matière
première n’a qu’un coût de transport et de recyclage qui est peut être moindre par
rapport au coût d’achat des matériaux. Cependant, en l’absence d’élément sur ce
sujet il ne faut pas non plus être trop négatif.
Au niveau biologique, Nike a pris l’initiative en 1998 pour l’horizon 2003,
d’associer au coton conventionnel de ses tee-shirts, du coton biologique pour
permettre aux productions biologiques de se développer. Cependant, pour une
pièce, seulement 3% du coton est biologique, ce qui est relativement faible,
d’autant que l’utilisation de ce type de coton n’engendre pas un surcoût de
production trop élevé comme le montre le tableau ci-dessous :
[pic]
Source : revue française de gestion n°157 année 2005
Nike argue qu’il n’y a pas assez de productions biologiques de coton pour
permettre de créer des tee-shirts 100% coton biologique. Néanmoins, il y a un gap
entre 3% et 100%. On peut donc reprocher à Nike de ne pas utiliser plus de coton
biologique. Cependant, il semble que Nike envisage d’augmenter progressivement
la quantité de coton biologique par pièce. Il faut donc juste être sûr que cette
mesure sera réellement appliquée et qu’elle ne constitue pas juste une justification
de la faiblesse de la quantité de coton biologique utilisée.
Au niveau écologique, Nike avait mis en place en 1993 le comité
Environmental Action Team, servant à diriger et coordonner des programmes
mondiaux liés à l’environnement, comme la réduction de l’impact de ses activités
et de ses politiques sur la planète. Cependant, Nike n’est pas paru aussi crédible
qu’elle l’aurait souhaité. En effet, avant d’instaurer ce comité elle a accumulé un
sévère retard qui semble difficile à rattraper, et ceci ajouté à son manque
d’expérience dans ce domaine, ne rend pas les agents nécessairement plus
confiants. Néanmoins, quelques années plus tard, Nike s’est engagée dans le
Programme Climate Servers pour la diminution des gaz à effet de serre. A ce titre,
elle a reçu une distinction pour la baisse de diffusion de gaz à effet de serre dans
ses usines ce qui montre un acte bien réel et non juste un acte d’apparence.
L’entreprise a aussi pris un certain nombre d’engagements au niveau social et
communautaire:
Elle a contribué à fonder l’organisation « Ninemillion » de défense des droits
des enfants réfugiés et elle soutient aussi bien financièrement cette association que
par ses agissements. En effet, elle contribue à la sensibilisation à travers le monde
et elle soutient cette campagne à travers l’engagement des employés. Par exemple,
un tee-shirt 100% coton biologique est en vente sur le site store.nike.com. Les
profits de cette vente seront reversés à la fondation FC Barcelone et à Ninemillion
pour financer la scolarité et les activités sportives d’enfants réfugiés. On constate
dans cet exemple que Nike ne cherche en aucun cas à faire du profit (elle récupère
uniquement le coût de production du tee-shirt) mais simplement à aider les enfants.
Malgré tout, on peut penser que cet acte a aussi pour but de redorer son image
puisque les tee-shirts portent le logo de la marque et qu’ils sont en vente sur son
site internet.
En 2005, elle a contribué à la campagne de sensibilisation contre le racisme
« Stand up, Speak up ». Elle a fait diffuser 5 spots télévisés mettant en scène une
douzaine de joueurs de football selon les pays concernés par la campagne (Thierry
Henry pour représenter la France par exemple). Ces spots, financés par Nike,
avaient pour objectif de faire acheter des bracelets noir et blanc pour la somme de
2€ pour soutenir l’association. Aussi, dans cette campagne, Nike a donné de son
temps et de son argent sans rien attendre directement en retour au niveau financier.
Néanmoins, comme dans l’exemple précédent, cette action lui permet de redorer
son image et par la même occasion d’augmenter ses ventes. Cependant, on ne peut
pas critiquer cette façon de faire car personne n’a jamais interdit les autres leaders
sur le marché du sport de faire de même. Or, pour autant que nous nous en
souvenions, ils ne l’ont pas fait.
Plus récemment encore, au 1e décembre 2009, Nike a commencé à
commercialiser des pairs de lacet dans le cadre de la campagne « Lace Up. Save
Lives » (ou en français « des lacets pour sauver des vies ») en partenariat avec RED
pour lutter contre le virus du sida. L’ensemble des fonds qui seront recueillis
serviront pour des programmes éducatifs et médicaux en Afrique.
En conclusion, il apparaît que Nike a mis beaucoup de temps à réaliser que les
problématiques éthiques étaient importantes et qu’elles n’étaient pas toujours
opposées aux problématiques économiques. Au début, la prise en compte de ce
type de problématique par Nike relevait plus d’une obligation que d’un choix.
Cependant, on peut noter que Nike a fait de réels progrès en la matière puisqu’elle
intègre même maintenant d’autres problématiques que celles liées à ses sous-
traitants. Il reste encore du travail à faire car tout est loin d’être parfait comme on a
pu le voir mais Nike est sur la bonne voie.
Il faut tout de même noter un paradoxe : en effet, l’éthique est quelque chose de
normal à nos yeux donc on devrait sanctionner un comportement non éthique mais
un comportement éthique ne devrait pas susciter de réaction. Or, dans le cas des
entreprises comme Nike, on constate que la situation est inversée : quand une
entreprise ne fait pas preuve d’éthique, outre les groupes de pressions, elle ne
risque pas grand-chose. Au contraire, il semble qu’il faudrait presque remettre une
médaille aux entreprises éthiques alors qu’il s’agit d’un comportement normal. Ce
paradoxe apparaît aussi chez les enfants : en ce sens, Nike fait penser à un enfant
auquel on promet un bonbon s’il reste bien sage alors que, normalement, les bêtises
faites par un enfant devraient relever de l’exception et l’obéissance et la sagesse
devraient être la règle.
II. L’image Nike perçue par la population
Dans cette seconde sous-partie, il apparait essentiel de s’interroger sur l’impact
de cette polémique sur la population en général. Afin de pouvoir analyser la
situation actuelle dans l’esprit de la population, nous avons décidé de recourir à une
petite enquête, que nous soumettrons à quelques personnes de notre entourage.
Dans un deuxième temps, nous en ferons une analyse plus pertinente, et en
tirerons certaines conclusions.
2.1. La réalisation de l’enquête
La réalisation du questionnaire s’est faite en plusieurs étapes. Nous avons
préalablement rédigé des questions intermédiaires, que nous avons retravaillé afin
d’arriver au questionnaire final.
La plus grande difficulté fut de rendre les questions pertinentes afin que l'analyse
apporte une valeur ajoutée à notre projet. La banalité des questions était donc à
exclure.
Pour chaque intitulé des questions, nous avons essayé de faire en sorte de rester le
plus neutre possible afin de ne pas influencer les choix des interrogés.
Toutes les formes différentes de questions ont été utilisées : les questions fermées,
semi-ouvertes et ouvertes.
Les questions fermées permettent d'orienter le questionnaire dans la direction que
l'on souhaite et d'obtenir une facilité dans l'analyse. Il est vrai que l'objectivité du
questionnaire peut alors être remise en cause. Mais si ce type de question n'était pas
utilisé, les questionnaires iraient dans des sens bien trop divergents, et il serait
impossible d'en tirer une analyse intéressante.
Les questions ouvertes permettent de laisser une libre expression aux questionnés et
d'obtenir des informations plus précises (parfois inattendues) que nous n'aurions
pas eu avec une question semi-ouverte.
Les questions semi-ouvertes permettent d'avoir une réponse plus précise qu'une
question fermée, mais en restreignant le nombre de possibilité de réponses.
Les questions de contrôle permettent de s'assurer de la sincérité et de l'attention du
questionné. Nous n’avons pas jugé utile d’employer ce type de questions, car le
questionnaire ne touche pas des points personnels ou sensibles.
Afin de rentrer progressivement dans le questionnaire, il est courant de commencer
avec des questions d'ordre général. Pour ce questionnaire, les deux premières
questions sont des questions introductives. Ces dernières nous serviront pour
compartimenter l’analyse.
Nous avons réalisé un test du questionnaire avec un membre du corps enseignant
de l’IAE. Nous lui avons donc soumis le questionnaire, afin d’obtenir un avis
objectif sur celui-ci. Ce professeur nous a fait part de son avis et nous a permis
d’effectuer quelques modifications pertinentes, comme l’intégration de la notion «
pas d’avis » comme réponse possible. Une fois ce test effectué, nous avons pu
lancer réellement ce questionnaire.
Notre groupe étant composé de six étudiantes, nous avons choisi de faire remplir
le questionnaire à au moins 4 personnes chacune, dans le but d’obtenir un nombre
suffisant de réponses à analyser. Les questionnaires ont été soumis en face à face
ou par téléphone, la personne interrogée s’est simplement contenter de donner ses
réponses oralement. Comme les questions proposées ne traitaient pas de sujet
tabou, l’anonymat n’était pas de rigueur.
Après avoir expliqué la réalisation et le mode d’affectation du questionnaire,
nous allons passer à la phase clef de cette partie, à savoir l’analyse des réponses.
2.2. L’analyse du questionnaire
Une fois que les questionnaires furent proposés et remplis, nous sommes passés
à la phase suivante, c'est à dire l'élaboration des tableaux, pour ensuite construire
des graphiques, des histogrammes et autres procédés beaucoup plus démonstratifs.
A présent, passons à la phase de l’analyse du questionnaire.
Questions 1 et 2 : Participation au questionnaire
[pic]
Vingt-six personnes de notre entourage ont gentiment accepté de participer à
notre questionnaire. Nous remarquons que nous avons interrogé plus de personnes
de 15-25 ans et 45-65 ans (nos amis, parents, oncles, tantes..).
Nous avons également d’avantage interrogé des étudiants et des actifs, à hauteur de
85 %.
[pic]
Pour la majorité des personnes, Nike est synonyme de : sport, de chaussures de
sport, ou bien d’une marque connue. A aucun moment, le mot « Nike » n’évoque le
travail des enfants. Nous nous attendions à d’autres commentaires que ceux
obtenus.
[pic]
A travers ces réponses, nous constatons que c’est la catégorie « étudiants » qui
a un avis le mieux défini. Ils sont 80 % à penser que Nike n’est pas une entreprise
éthique, les actifs, quand à eux, sont majoritairement du même avis. Les retraités
ont un avis contraire, ils disent croire à 50 % que Nike est éthique.
Question 5 : Avez-vous entendu parler de la polémique Nike qui s’est produite
il y a quelques années ?
[pic]
Comme nous pouvons le constater grâce à cet histogramme, ce sont les 25-45
ans qui ont le plus en mémoire la polémique de Nike sur le travail des enfants. 75
% d’entre eux s’en souviennent, alors qu’à l’opposé, aucune personne de plus de 65
ans n’a été marquée par ces évènements passés. Ceci peut s’expliquer par le fait
que les 25-45 ans ont été des consommateurs des produits Nike à l’époque du
scandale (les jeunes pratiquent plus de sport que les séniors).
Quant aux 15-25 ans, nous pouvons estimer qu’ils étaient trop jeunes pour avoir
été réellement marqués par ce sujet.
Question 5B : Si oui, quel est votre avis sur le sujet ?
[pic]
50 % des personnes ayant répondu favorablement à la question précédente
trouve que le travail des enfants est déplorable, scandaleux et qu’il est une
exploitation de personnes vulnérables et pauvres. 30 % trouve que ceci est à
relativiser, la cause du problème est liée au système, et surtout à l’augmentation des
délocalisations. Nike n’est qu’une entreprise concernée parmi tant d’autres.
Question 6 : Suite à cette affaire, votre comportement d’achat envers Nike a-t-il
changé ?
[pic]
Suite à cette affaire, parmi les personnes ayant été conscientes de la polémique,
seuls les 45-65 ans ont réellement pris en compte le manque d’éthique de Nike dans
leur comportement d’achat.
Bien qu’ayant à l’esprit le scandale de Nike, aucun des 15-25 n’ont changé
leurs habitudes d’achat. Ici, rien de démontre qu’ils sont des clients de Nike, ils ne
l’ont peut être jamais été.
Question 7 : Suite à leur problème d’image, avez-vous remarqué des
changements
[pic]
Parmi les interrogés ayant remarqué le problème d’image de Nike, que peu
d’entre eux ont remarqué des changements dans la communication de l’entreprise.
Au total, seules deux personnes ont soulevé des changements qui sont les suivants :
-développement de publicité plus éthique, et commercialisation de bracelet
« antiracisme »
2.3. Les conclusions
Au final, bien que l’avis d’une vingtaine de personnes ne reflète pas
obligatoirement celui de millions de personnes, nous nous sommes permis de faire
différents constats tirés de l’analyse du questionnaire. Les différents constats
formulés ci-après sont donc à nuancer.
Les individus jugent Nike comme non éthique, mais pour certains, sans arguments
ou faits précis : toutes les grandes entreprises n’ont pas obligatoirement des vices
cachés !
Le scandale qui s’est produit il y a plusieurs années n’est plus ancré dans l’esprit
des gens, ou ne l’a peut être jamais été.
Bien que les questionnés ont jugé majoritairement le travail des enfants comme
scandaleux, ils n’ont pas pour autant modifié leurs habitudes d’achat vis-à-vis de
Nike. On peut donc se demander si les consommateurs attachent réellement une
grande importance à l’éthique des entreprises. A première vue, tout un chacun
semble être révolté quant aux manque de responsabilité de Nike et des grandes
entreprises en général, mais cela ne modifie pas pour autant leur comportement
d’achat. Ainsi, on peut en déduire que l’affectif vis-à-vis de la marque prend le pas
sur la conscience citoyenne. Les consommateurs, bien que plein de bonne volonté
et d’idéaux, ne sont pas dans les faits prêts à renoncer à leurs marques favorites.
Les individus continuent à acheter des produits Nike, cette entreprise est toujours
une valeur sûre en ce qui concerne l’équipement sportif.
Pour finir, le changement de communication de l’entreprise n’a pas réellement
été remarqué. En effet, Nike use toujours d’un marketing agressif et d’un fort
sponsoring. Nike fait également de plus en plus appel à de célèbres sportifs de haut
niveau pour illustré son expertise. Cependant, Nike n’a pas de réelle
communication concernant ses engagements « éthiques ». Nike ne souligne ni sa
responsabilité environnementale, ni sa volonté d’œuvrer en faveur d’un commerce
plus équitable…Ainsi, comme le montre notre petite étude, Nike ne bénéficie
toujours pas d’une image responsable et éthique auprès des consommateurs. Ce
manque d’information peut pourtant lui être fatal car la population s’interroge : cet
état de fait marque-t-elle une volonté stratégique de la marque ou un manque réel
d’engagement social et environnemental ? Aux vues de ses résultats colossaux et de
sa présence sur le marché du sport, Nike repose en quelque sorte sur ses lauriers, en
récoltant les fruits de sa popularité, sans se soucier sérieusement des questions
éthiques.
Cette affaire est peu à peu tombée dans l’oubli de nos questionnés, mais c’est
en oubliant, que de telles erreurs peuvent refaire surface. Il est vrai que la presse
nous évoque le même sentiment : Nike et le travail des enfants ne fait plus partie de
la Une des journaux depuis longtemps. Non seulement cette polémique est
obsolète, mais nous pouvons aussi noter le fait qu’il est difficile de trouver des
articles ou bien des informations sur cet évènement passé. Ce problème rencontré
est notamment lié à l’archivage papier qui n’est plus conservé passé un certain
délai, mais également à l’archivage web qui a même été supprimé ! Nous avons
donc été confrontés à un vrai manque d’information, auquel nous avons répondu en
mettant en œuvre notre questionnaire afin d’obtenir des réponses à nos questions.
Conclusion
L’ensemble de cette analyse a été fait dans le but de répondre à une unique
question : Nike est-elle une puissance au service de l’éthique ?
Après avoir réalisé toute cette analyse, on peut répondre que l’entreprise Nike
n’est pas au dessus des problèmes éthiques même si certains éléments semblent
indiquer le contraire.
En effet, le scandale a mis à mal l’image de l’entreprise et a fait chuter ses
résultats financiers comme nous avons pu le voir dans la première partie. Nike a
donc été dans l’obligation de réagir car le fait d’arguer qu’elle n’était pas
responsable des agissements de ses sous-traitants n’a pas suffi à la dédouaner et à
apaiser les esprits. Aussi, les groupes de pression puis le public ont réagit par un
boycott de la marque. Comme nous l’avons vu, Nike s’est vue dans l’obligation de
prendre des mesures afin de redorer son image de marque. Elle a ainsi agi de
manière concrète contre les conditions de travail appliquées aux employés dans les
usines sous-traitantes. De plus, elle a d’elle-même adopté une stratégie intégrant
d’autres problèmes éthiques que ceux qui lui été reprochés. Il semble donc que
l’éthique ait pris le dessus sur la puissance du leader.
En revanche, ce qui est surprenant dans ce scandale, c’est que les autorités les
plus à même à sanctionner Nike n’ont pris aucune mesure. Nike était donc dans une
position où elle ne se sentait pas en danger de par son comportement. Néanmoins,
l’absence de sanctions pénales ou civiles ne rime pas avec « liberté de continuer et
d’agir».
Pourtant, aujourd’hui, il semble que le scandale ait été oublié : Même si les
gens ne considèrent pas pour autant Nike comme une entreprise éthique, cela ne les
empêche pas de continuer à acheter des produits de cette marque. Nous pensons
que ce comportement peut s’expliquer par le fait que, avec l’inondation des
produits asiatiques sur le marché, quelque soit le produit acheté, le consommateur
pense qu’il sera fabriqué dans les mêmes conditions de travail.
De plus, il faut souligner que la présence des médias est un élément clé dans ce
scandale car, en leur absence, Nike continuerait toujours à agir de la sorte. Or, les
médias, qui ont tenu une place majeure dans la révélation du scandale, semblent
avoir totalement oublié cette affaire. En effet, comme nous l’avons déjà souligné, il
est difficile d’obtenir des informations sur le scandale. Il faut avouer que lorsque
nous avons choisi le thème de notre exposé, nous nous attendions à avoir des
sources d’information considérables, ce qui est loin d’avoir été le cas. Le scandale
Nike est tombé dans l’oubli pour les médias et, par là même, il a disparu de l’esprit
des consommateurs. Les médias ont une forte influence sur l’opinion du public.
Aussi, si les médias ne soulèvent pas un problème, l’opinion publique pense que ce
problème n’existe pas dans la réalité. Ainsi, même si la majorité des gens que nous
avons interrogé ne considère pas Nike comme une entreprise éthique, le fait que les
médias ne parlent plus de Nike leur suffit à penser que la situation n’est pas si
dramatique. La puissance des médias dans cette affaire est donc un fait
indiscutable. L’essentiel réside dans le fait que Nike a réagi et a adopté un réel
comportement éthique et non un comportement de façade. Même si le scandale est
tombé dans l’oubli, l’éthique semble être plus forte que la puissance. De plus, on
peut penser que le scandale est tombé dans l’oubli car Nike a pris des mesures. En
effet, les médias aiment montrer des images « chocs » et non pas des situations où
tout va bien. Aussi, même si Nike n’a pas communiqué sur les changements qu’elle
a effectué ou que les gens n’ont pas vu ce changement, le fait que les médias ne
parlent plus du problème a été suffisant.
Bibliographie
Webographie
http://www.fluctuat.net/cinema/chroniques/bigone.htm
http://fr.wikipedia.org/wiki/No_Logo
http://www.transfert.net/Pour-Nike-exploiteur-c-est-de-l
inline/cid-102602/pid-254717/pgid-327203#l=shop,pdp,ctr-inline/cid-102602/pid-
http://www.fsa.ulaval.ca/personnel/vernag/EH/F/ethique/lectures/nike_violence.ht
m
L’ethique de l’entreprise de Michel dion edition 2007 Fides
http://www.filieresport.com/fr/actualites/tribune-libre/zwo_modules/news/tribune-
libre.pdf
http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/economie/20050414.OBS3972/nike_joue
_la_transparencesur_ses_usines.html
http://www.strategies.fr/actualites/marques/r35995W/nike-et-thierry-henry-contre-
le-racisme.html
http://success-story.over-blog.net/10-index.html
Année 2009 – 2010
ETHIQUE DES AFFAIRES
SOMMAIRE
Introduction
1. Des résultats éloquents
II. Des révélations qui effritent l’icône
1. Dégradation de l’image de la marque
2. Des mesures correctives
Partie 2 : 10 ans plus tard, Nike est-elle devenue un modèle éthique ?
I. Un nouveau comportement ?
1.1. Les réactions propres au scandale sur ces 13 dernières années
1.2. Nike : Des mesures pour prendre les devants ?
II. L’image de Nike perçue par la population
2.1. La réalisation de l’enquête
2.2. L’analyse du questionnaire
2.3. Les conclusions
1. Des résultats éloquents
Leader du marché des articles sportifs, Nike doit tout d’abord sa suprématie à sa
grande popularité. En effet, en 2000, Nike détient 40% de parts de marché de
chaussures de sport, devançant ses concurrents directs, Reebok et Adidas, comme
le montre ce diagramme.
[pic]
Cette domination peut être expliquée par un souci d’innovation et de technologie
de pointe. Nike bénéficie également d’un marketing agressif, à travers un slogan
accrocheur « Just do it » et un fort sponsoring, qui permet une identification aux
plus grands sportifs internationaux. De plus, Nike est très présent lors des grands
évènements sportifs, tels que les coupes du monde de football par exemple. Ainsi,
le chiffre d’affaires record constaté par Nike en 1998, soit 9.5531 milliards de
dollars, peut être en partie expliqué par la coupe du monde, qui a suscité un fort
engouement pour l’achat de maillots de football, de ballon, et d’accessoires divers
(écharpes de supporters par exemple).
Cependant, les fortes performances de Nike ne sont pas uniquement le fruit de
leur implantation sur le marché. La stratégie d’outsourcing adoptée par Nike depuis
le début des années 1970 explique leur haut niveau de marge. C’est Phil Knight, le
fondateur et actuel dirigeant de Nike qui a mis en place cette forme de production
en investissant en 1970 au Japon. Depuis, Nike n’a cessé de faire appel à des sous-
traitants asiatiques. Aujourd’hui, le géant sportif traite avec des producteurs
thaïlandais, coréens, indonésiens, chinois, vietnamiens… Le système de
délocalisation de la production consiste à faire produire les biens dans des pays en
voie de développement, où la main d’œuvre est abondante et bon marché. Ainsi,
l’entreprise diminue considérablement ses coûts salariaux et constate une marge
considérable. Nike peut donc se permettre d’afficher des prix compétitifs et ainsi,
de préserver ses parts de marché. La sous-traitance productive de Nike est très
importante, puisque 54.48 % des unités productives de la marque sont situées en
Asie. Le succès de Nike repose donc également sur ses sous-traitants : Nike
emploie directement 20 000 personnes environ alors que près de 550 000 salariés
sont indirectement rattachés à Nike par la sous-traitance, comme le montre le
tableau suivant.
production |Nombre |En % |Nombre |En % |
| |par gamme de
sport | | | | |
Asie |57 |227 |67 |401 |54,48% | 467 146 |83,91% | |Etats-Unis |0 |117 |14 |131
|17,79% | 13 369 |2,40% | |Amérique, sauf EU |8 |91 |3 |102 |13,86% | 37
514 |6,74% | |Reste du monde |3 |94 |5 |102 |13,86% | 38 693 |6,95% |
|Total |68 |529 |89 |736 |100% | 556 722 |100% | |
Source : Locke (2001) et Nike (2001), extrait de l’article « Nike face à la
controverse éthique relative à ses sous-traitants » par Nacer Gasmi et Gilles
Groleau.
A travers ces chiffres, nous voyons bien que Nike fait appel de façon massive à
la sous-traitance. Aux vues de ces performances économiques, cette stratégie a l’air
de porter ses fruits. Cependant, en faisant appel à des unités de production externes
et géographiquement lointaines, Nike perd une partie du contrôle de sa production.
En effet, l’externalisation peut présenter des effets pervers qui peuvent notamment
nuire à l’image de marque de l’entreprise.
2. … mais une réalité moins élogieuse
Il est vrai que le leader du marché des articles sportifs demeure convoité par ses
concurrents du fait qu’il dégage des chiffres spectaculaires, mais il reste en
revanche bafoué, (mais non dénoncé car beaucoup de grandes entreprises agissent
de la même façon) en ce qui concerne ses relations sociales et notamment les
rapports de la direction avec ses employés.
Comme nous venons de le voir, le groupe Nike a mis en place, dès le début, une
stratégie d’externalisation de sa production, implantant ainsi ses usines aux quatre
coins du monde et notamment sur le flanc oriental. En effet localisé au Vietnam, en
Chine ou encore au Japon, l’entreprise a choisi des lieux stratégiques, c’est-à-dire,
dans lesquels les coûts sont bas et surtout où la main-d’œuvre n’est pas chère. Mais
le contrecoup est que, dans ces pays en développement, l’environnement et les
normes éthiques ne sont pas les mêmes que celles en vigueur dans les pays
développés. De nombreuses dérives font donc leur apparition et c’est ainsi que l’on
a découvert que les conditions de travail chez les sous-traitants de Nike, sont loin
d’être recevables.
En effet, en délocalisant dans de tels pays, Nike a de la sorte accès à un grand
nombre d’individu qui se trouve disponible et à la recherche d’un emploi. Mais le
fait qu’il existe justement autant de personnes sur le marché du travail permet à
l’entreprise d’en profiter, voire d’en abuser. Elle exploite ainsi la main-d’œuvre
présente sur le terrain, en élaborant une politique de bas salaires, qui, établit dans
les pays développés, ne pourrait perdurer. Ces travailleurs démunis se retrouvent de
ce fait surexploités et sous-payés.
C’est donc en profitant de ce labeur à faible coût que Nike compte pénétrer ce
marché des articles de sport. Mais si dans certains pays le prix de l’heure de travail
devient trop élevé par rapport aux objectifs que le groupe s’est fixé, il délocalise
dans d’autres pays où le coût du travail se trouve encore moins cher, comme par
exemple en Corée, en Thaïlande ou encore en Chine. Le problème reste que ces
derniers ne peuvent pas augmenter leurs coûts salariaux car cela leur ferait perdre
toute leur attractivité, et ils risqueraient de voir ainsi de plus en plus d’entreprises
partir de leur pays. On pourrait penser que certaines autorités devraient sévir quant
à cette façon d’agir et d’abuser de ce facteur travail, mais il faut savoir que se sont
des pays tellement pauvres, qu’ils ont besoin de se développer économiquement. Or
s’ils protestent contre la politique salariale de Nike, ils risquent de voir le groupe
progressivement délocaliser vers d’autres pays, ce qui engendrerait ainsi un
manque d’emploi pour la population et un ralentissement du développement
économique. L’entreprise se sert de cette situation de fragilité, et utilise cette
menace de délocalisation pour empêcher les pays en développement d’augmenter
leurs coûts salariaux.
Cette stratégie de départ a permis à Nike de mettre un peu les voiles sur les pays du
Sud-est Asiatique et ainsi d’accroître ses parts de marché en dehors de son pays
d’origine que sont les Etats-Unis. La plupart des gens qu’il emploie dans les pays
en développement sert à la production des différents articles, tandis que ceux
localisés aux States correspondent à des métiers moins pénibles physiquement, à
savoir la R&D ou encore, le marketing. La société emploie et exploite ainsi
plusieurs centaines de milliers de personnes à travers tous ces pays émergents. En
effet les politiques existantes chez ses sous-traitants ne sont pas forcément loyales
envers les employés, et sont surtout considérées comme non conformes aux
principes éthiques qui existent dans les pays développés. Certains sous-traitants
abusent de leur autorité et interdisent à leurs employés de pouvoir créer un
syndicat, alors que dans les pays développés, le droit syndical fait parti du droit du
travail ; l’employeur ne peut donc en aucun cas s’y opposer. D’autres licencient
leur personnel afin d’éviter de payer leurs primes d’ancienneté,… Ils mettent
également en place de sévères conditions de travail comme par exemple, le travail
forcé ou encore le travail des enfants.
C’est ainsi que les pays en voie de développement restent dominés par le géant
qui profite de leur situation de faiblesse pour instaurer des conditions de travail
difficiles en faisant pression sur l’éventualité d’une délocalisation vers d’autres
pays où la main-d’œuvre est plus avantageuse. Cette relation de chantage lui
permet de profiter de la vulnérabilité de ses employés et de les discipliner. C’est par
ce biais qu’il met en place différentes politiques de travail qui entrent en parfaite
contradiction avec le respect des droits de l’homme. En effet, il fait travailler les
petits enfants, et exploite son personnel dans ses nombreuses usines qui héritent
ainsi du terme « sweatshops » signifiant « usines à sueur », du fait de la fixation de
quotas de production et donc d’heures supplémentaires. Mais il existe aussi
d’autres « façons de faire », comme par exemple le harcèlement physique (coups,
pincements, tiraillements des oreilles,…) et/ou sexuel (attouchements, abus
physiques, faveurs sexuelles,…), punitions excessives, ou encore harcèlement
verbal (insultes, humiliations, intimidations,…).
Si ces pratiques ont existées et existent peut être toujours, cela vient du fait qu’il y
a différentes parties prenantes dans cette affaire et que certaines y sont favorables et
d’autres moins. A noter que ce sont les actionnaires, les pays sous-traitants (pas
étonnant), mais également les consommateurs, qui apprécient ce choix et qui sont
propices à ces pratiques, portant ainsi les problèmes éthiques au second plan.
Cependant il ne faut pas que Nike néglige le fait que cette dimension éthique est de
plus en plus considérée comme un critère de compétitivité.
II. Des révélations qui effritent l’icône
1. Dégradation de l’image de Nike
a) Nike, cible des médias
Les conditions de travail chez les sous-traitants de Nike ont été révélées au grand
jour notamment par le biais de la presse. Les médias sont bien entendu montés au
créneau dès la prise de connaissance des agissements de la firme, qualifiés de
« borderline ».
C’est en 1996, que le magazine « Life » est le premier à rendre publique cette
affaire, en publiant une photo « choc ». Souhaitant marquer les esprits, cette image
illustre un enfant confectionnant un ballon de football à l’effigie de la marque. Le
but du magazine a largement été atteint puisque cette photographie a massivement
été reprise dans d’autres journaux de monde entier.
[pic]
Photographie parue dans le magazine « Life », 1996
Ne se contentant pas de reprendre cette image, d’autres journalistes ont voulu à
leur tour montrer cette face cachée de la mondialisation. La polémique a donc été
lancée par le fait de la médiatisation et de la parution d’images marquantes de ce
type, dont voici deux exemples.
[pic] [pic]
Comme nous le montre le graphique suivant, le géant du sport a vivement été
critiqué dans les médias à partir de 1995, et ce jusqu’au début des années 2000.
Cette étude, tirée de Locke, a été établie sur un échantillon de 50 quotidiens
anglophones les plus importants.
[pic]
D’après ce document, nous voyons donc bien que Nike a été dénoncé à de
nombreuses reprises par les médias, associant cette marque aux termes
« sweatshop » (qui désigne les usines exploitants ses ouvriers), « child labour »
(signifiant le travail des enfants), et exploitation. Bien entendu, cette omniprésence
dans la presse a nourrit la polémique et a influencé l’opinion publique.
b) Des acteurs engagés
Suite à l’annonce de la polémique sur le travail des enfants chez les sous-traitants
de Nike, et à cet emballement médiatique, la population a souhaité manifester son
mécontentement, notamment à travers le boycott de la marque mais aussi à travers
les nombreuses manifestations d’étudiants, et de militants de par le monde.
Au cours de la lutte conte la marque, de nombreuses associations de
consommateurs se sont montées contre Nike ; en effet, elles ont toutes tenté de
combattre l’influence de Nike sur les consommateurs d’articles de sport dans le but
de faire baisser les ventes, d’une part pour nuire directement à la marque et d’autre
part afin de diminuer le travail effectué par les enfants dans les usines sous-
traitantes. En 1998, la marque s’est faite attaquée pour publicité mensongère par un
américain nommé Mike Kasky. Les tribunaux américains avaient dans un premier
temps donné raison à Nike, mais la Cour Suprême américaine a finalement décidé
de condamner la célèbre marque de sportswear. Ceci fut le seul cas de procès pour
Nike ; en effet, aucune action en justice n’a été intentée concernant le manque
d’éthique notoire dont elle a fait preuve à travers ses sous-traitants.
La marque a également vu se liguer contre elle des personnes influentes, tels que
Mickael Moore, célèbre réalisateur autodidacte, connu pour avoir des points de vue
critiques envers la société américaine. En 1999, dans son film « The big
one », Moore traite des aberrations économiques dues à la mondialisation ; il
parcourt les Etats-Unis à la rencontre de chefs d’entreprise ayant licencié des
salariés, alors même que des profits étaient enregistrés au cours de l’année. Lors de
son entretien avec le président de Nike, Moore adopte un comportement
décontracté et tourne en dérision l’interview pour prendre le dessus sur son
interlocuteur. Phil Knight livre ainsi aisément des informations sur le travail des
enfants chez ses sous-traitants, et fait ainsi lui-même sa mauvaise publicité.
Il rejoint dans ce film le mouvement altermondialiste puisqu’il dénonce les
agissements des grandes multinationales américaines, avec une critique
essentiellement au niveau social ; le chômage, les conditions de travail, sont des
points importants à respecter si l’on ne veut pas s’attirer les foudres des acteurs de
ce mouvement. On peut également noter le livre de Naomi Klein, No logo, écrit
en 2000, qui a été considéré comme « bible de l’alter mondialisme ». Elle y fait une
critique de la société de consommation actuelle, en parlant des dérives commises
par les grandes entreprises influentes de ce monde, notamment celles de Nike, et
des techniques qu’ont ces marques pour manipuler les consommateurs. Ce livre,
traduit en 28 langues, a ainsi largement contribué à la dénonciation publique des
abus commis par Nike entre autres. Grâce à ce livre, qui arrive après la polémique
Nike, les lecteurs ont pu avoir un aperçu des dérives commises dans les pays sous-
traitants ; c’est ici, une fois de plus, un coup dur pour la marque qui accumule les
mauvaises publicités.
Dans le même but que Naomi Klein, des campagnes de publicité « anti-
sweatshops » (mot anglais pour désigner les usines où les salariés sont exploités) se
sont créées dans le but de sensibiliser progressivement l’opinion publique
internationale comme le montre cette image :
[pic]
A noter que d’autres manifestations de mécontentement ont eu lieu, principalement
aux Etats-Unis, par des étudiants pour la plupart antimondialistes. Ces jeunes, que
la marque avait cru avoir défini et mis sous sa coupe, par le phénomène
d’identification sociale et l’importance grandissante dans nos sociétés de porter des
marques, ont finalement manifesté contre Nike en faveur du respect des conditions
de travail dans les pays sous-traitants. En effet, la marque, sûre d’elle, les a invité à
se rendre dans ses usines des pays en développement afin qu’ils constatent par eux-
mêmes les conditions réelles de travail ; mais Nike n’avait pas prévu que ce
qu’allaient voir les étudiants les pousserait à aller dans la rue et à manifester pour le
boycott de la marque.
Tous les mouvements sociaux, quels qu’ils soient, ont tous loué un but commun ;
celui de démolir une marque leader sur son marché au niveau mondial, dans le but
de la sanctionner pour son manque d’éthique. Bien que peu de traces de ses actions
ne soient disponibles aujourd’hui, que ce soit sur Internet (en tant que principal
canal de recherche utilisé actuellement) que dans les mémoires des générations
précédentes, elles ont contribué à d’importants changements au niveau des sous-
traitants, comme l’adoption de chartes éthiques, pour des conditions de travail
décentes.
c) Des clients sensibilisés
Bien que la marque soit un pilier dans le monde du sport, sa popularité a été
entachée par cette polémique. Aux vues de l’acharnement médiatique et de la
multiplication des mouvements sociaux à travers le monde, la clientèle de Nike a,
elle aussi, manifesté sa déception. La mauvaise publicité qu’a subie Nike s’est donc
traduite en boycott. Ainsi, la firme a vu son chiffre d’affaires diminuer de près de
8.13 % de 1998 à 1999. Le résultat de la société a également connu une chute
remarquable entre 1998 et 1999, passant de 795.8 millions à 399.6 millions de
dollars.
Bien sûr, ceci est à nuancer car ces éléments peuvent également être mis en
corrélation avec l’apparition de la crise du Sud-est asiatique. Cependant, il est plus
que probable que cette régression soit une conséquence des différentes attaques
dont Nike fut la cible. Il est indéniable que le comportement d’achat de la
population ait été influencé par la réputation et la mauvaise image véhiculées par la
célèbre virgule.
[pic]
Constatant cette chute historique des résultats, les marchés ont aussi réagi avec
véhémence. En effet, le cours de l’action a subi le même sort que les résultats de
Nike. Alors que les actions de Nike avaient une valeur de transaction de 76 dollars
en 1997, ces dernières ont chuté jusqu’à 27 dollars en 2000 (cours le plus bas
observé durant l’année). Cette chute considérable du cours de l’action Nike est pour
la plus grande partie expliquée par la baisse d’activité de la société aux Etats-Unis,
qui est son premier marché. Alors que le chiffre d’affaires réalisé dans cette zone
atteignait 5.54 milliards de dollars en 1997, les ventes américaines n’étaient plus
que de 2.43 milliards de dollars en 2000, soit une chute de 44%. La population
américaine semble donc avoir été très sensible aux agissements de Nike.
La controverse dont Nike à fait l’objet a donc eu des répercussions importantes sur
son image de marque ainsi que sur la confiance accordée par ses clients.
Conséquence directe de ce désamour entre Nike et le consommateur, l’entreprise a
dû également gérer cette perte de vitesse au niveau financier. Pour retrouver un
niveau d’activité à la hauteur de la puissance de Nike, la firme a dû regagner la
confiance du marché, et donc des consommateurs. Comment l’entreprise a-t-elle
procédé ? Quels engagements, quels changements ont permis à Nike de redorer son
image ?
a) Des mesures préventives inefficaces
Il faut souligner que, comme s’en défend Nike, les faits précédents ne relèvent
pas directement de sa responsabilité et que les sous-traitants avec lesquels elle
collabore sont des entreprises indépendantes. Mais ce n’est pas excusable pour
autant, et c’est au groupe de prendre les choses en main et de mettre en place divers
moyens afin de contrôler ce qui se passe dans ses usines au bout du monde.
Depuis le début des années 90, Nike semble pourtant avoir instauré plusieurs
principes, pour gérer au mieux toutes les critiques qui agissent contre elle. En effet
seulement deux ans après les premières controverses, le groupe élabore un code de
conduite : le « Memorandum of Understanding ». Ce code impose le respect des
lois relatives au travail, reprenant celles en vigueur dans les pays développés. Il
stipule notamment l’interdiction de faire travailler des enfants, ou encore
l’interdiction d’avoir recours au travail forcé.
Dans le même temps, un second point a été mis en place en vue d’améliorer les
conditions de travail des employés chez les sous-traitants : il s’agit d’une
vérification de tous les salaires que perçoivent les employés liés indirectement à
Nike. Est étudiée ici la décence des rétributions ainsi que leur conformité aux
normes légales. Le bémol à ce niveau est la crédibilité portée à l’approbation de ces
rémunérations, si celle-ci est réalisée par un membre de l’usine sur place et non par
une personne extérieure et objective.
Ce n’est qu’en 1994, que le groupe décide d’établir un système de contrôle des
différentes techniques mises en place depuis 1992, par le biais de vérifications sur
le terrain. Il s’agit de s’assurer que le code de conduite, établit deux ans plus tôt, est
bien respecté par les sous-traitants. Toutefois cette action est à nuancer car cette
surveillance est effectuée par du personnel de l’usine même ; c’est en quelque sorte
une auto-vérification qui limite ainsi l’impartialité de la mission.
En 1996, le travail des enfants constitue la préoccupation majeure de Nike selon
ses dires. Nike semble manifester un réel intérêt pour ce problème. Cependant, en
l’absence d’enregistrement de l’âge des employés, Les sous-traitants peuvent
continuer à faire travailler des enfants. De même, en l’absence de vérification des
conditions sociales de travail de manière indépendante, les sous-traitants continuent
à agir comme ils le souhaitent.
b) Intervention l’OIT
L’organisation internationale du travail fait partie de l’ONU et à pour but de
promouvoir le travail décent partout et pour tous. Elle est chargée de veiller à ce
qu’il n’y ait pas d’abus concernant le travail des enfants, la discrimination au
travail, la liberté syndicale, et le travail forcé.
D’une manière générale, l’OIT a un rôle important à jouer au niveau mondial
car il lui incombe de veiller au respect des règles et des bonnes mœurs, sur
l’ensemble du globe. Dans le cas de Nike, l’entreprise a délibérément choisi de
mettre à mal les règles sociales publiées par l’OIT. Dans certaine usines
indonésiennes, les ouvriers travaillent en moyenne 60 heures par semaines avec des
pics à 97 heures et chaque ouvrier doit produire un minimum de 350 paires de
chaussures par jours d’une valeur totale de 30 000$, pour un salaire de 40$. La part
du salaire dans le prix de vente des chaussures est d’environ 0,5%. La liste des
aberrations est encore longue... Mais quelle a été la réaction de l’OIT lors de
l’explosion médiatique du scandale ?
Etant donné la période à laquelle les évènements se sont passés, aucun document
traitant des éventuelles sanctions qu’aurait reçu Nike n’est disponible. Cela est à
déplorer car si les archives des précédentes décisions rendues par l’OIT étaient
consultables, cela encouragerait peut-être des sociétés à mieux se conduire. En
effet, les compagnies sanctionnées joueraient le rôle d’exemple et d’avertissement
pour des sociétés qui auraient éventuellement recours à des méthodes de travail non
éthique.
Mais comment Nike a-t-elle pu user de cette situation pendant autant d’années ?
Les usines implantées dans les pays sous-développés sont plus sujettes à faire
travailler des enfants que les usines occidentales ou outre-Atlantique étant donné la
situation économique de la population. Pourquoi l’OIT ne renforce-t-elle pas ses
contrôles spécialement dans ces pays ? Les directeurs de ces usines, qui usent de
tous les vices possibles pour exploiter leurs salariés, jusqu’à les détruire
moralement, ont conscience des facilités que procurent leur localisation. Les usines
peuvent parfois se trouver dans des coins reculés, difficile d’accès, ce qui peut
rendre difficile d’éventuelles vérifications. De plus, la pression menée sur les
salariés en cas de dénonciation, ou en cas de baisse de la cadence les empêche de
parler de leurs conditions de travail. Nike, après la polémique et les nombreuses
manifestations de la population, a mis en place des mesures de dénonciation
anonyme, pour que les salariés puissent faire part de leur mal être au sein de
l’entreprise. Pourquoi l’OIT n’a-t-elle pas mis en place de telles mesures
auparavant ? Cette organisation mondiale est pourtant au courant de la situation
dans laquelle vivent les habitants de ses pays et il a fallut un scandale pour faire
bouger les choses.
L’OIT ne fait pas état des sanctions prises envers des sociétés ne respectant pas ses
engagements. Nike en est la preuve puisqu’aucune information n’est disponible sur
la toile concernant les manquements aux règles de l’OIT alors que certains
identifient cet acte comme un crime contre l’humanité. L’OIT représente-t-il un
garde-fou suffisamment efficace face à la multitude des usines usant de mauvaises
conditions de travail dans les pays pauvres ? L’engagement de personnes dépêchées
sur place pour contrôler efficacement les usines serait me semble-t-il plus efficace
que des bureaucrates siégeant en Belgique ! Des conditions de travail telles qu’elles
étaient dans les usines sous-traitantes auraient pu être éradiquées plus rapidement.
On peut noter qu’actuellement, Nike travaille en étroite collaboration avec
l’OIT pour l’information de ses employés sur ses engagements ainsi que sur la
qualité sociale mise en place sur les différents sites de production. De plus, le code
de conduite élaboré en 1998 par Nike, et révisé déjà deux fois depuis sa création,
répond aux exigences de l’OIT.
Aujourd’hui le groupe Nike a dû changer et faire évoluer sa politique, et il
consacre exclusivement pour cela une centaine de personnes aux questions relatives
aux conditions de travail dans les pays des activités productives, et considère les
problèmes éthiques et environnementaux comme des priorités stratégiques.
Partie 2 :
I. Nike : Un réel changement ?
1.1 Les réactions propres au scandale sur ces 13 dernières années
Juste après le scandale des années 1996 et 1997 avec la parution de la photo
dans le magazine life en juin 1996, on a constaté que les mesures correctives prises
par Nike depuis le début des années 90 n’étaient qu’une façade. En effet, Nike n’a
jamais contrôlé le fait que ses sous-traitants respectent le code et, de ce fait, elle n’a
jamais appliqué aucune sanction en cas de non respect comme le prouve les faits.
Pourtant, il nous semble qu’un leader tel que Nike a la possibilité d’influer sur le
comportement de ses sous-traitants. En effet, ces derniers seraient prêts à tout pour
ne pas perdre le marché. De plus, leur comportement provient nécessairement des
exigences de Nike en matière de coût, de délai, et de quantité de production. En
effet, si le temps pour produire une certaine quantité était plus long, les sous-
traitants n’auraient pas besoin de recourir au travail des enfants ou à des journées
sans fin pour les travailleurs. De plus, il faut noter que Nike n’ignorait pas
l’existence de telles pratiques lorsqu’elle a décidé de recourir à des entreprises
sous-traitantes dans ces pays.
Il semble que beaucoup de personnes et de groupes partagent notre opinion.
Aussi, Nike a continué à être mal menée malgré les explications qu’elle a pu
fournir au sujet de ses sous-traitants. Comme les gens pensent que le groupe a sa
part de responsabilité, Nike a dû adopter une autre stratégie pour redorer son image.
Elle a donc commencé à réellement et concrètement prendre en compte les
problèmes éthiques.
En 1997, Nike adhère au Apparel Industry Partnership (appelé aujourd’hui
Fairlabor) créé dans le but d’améliorer les conditions et les normes de travail dans
les usines sous-traitantes. Néanmoins, il est à noter que cette adhésion lui a
fortement été recommandée par le Président Clinton et donc qu’elle n’y a pas
forcément adhéré de son propre chef. On peut donc penser que Nike attend qu’on
l’oblige à faire quelque chose pour agir ce qui montre encore une fois sa passivité
concernant les problèmes éthiques. L’adhésion à l’AIP aura tout de même le mérite
d’obliger Nike à revoir son code de conduite : Nike doit intégrer dans son code les
normes de l’AIP qui sont basées sur les conventions de l’Organisation
Internationale du Travail.
En 1998, Nike semble devenir plus réactive face aux problèmes éthiques. Elle
prend la décision de faire contrôler ses sous-traitants chaque année par un cabinet
indépendant (PriceWaterhouse Coopers) pour vérifier la bonne application du code
de conduite. Cette décision nous semble être une bonne idée car l’indépendance du
cabinet permet d’obtenir des résultats qui reflètent bien la réalité. En effet, si Nike
décidait de contrôler elle-même ses sous-traitants, rien ne nous assure qu’elle nous
donnerait les vrais résultats car il lui serait aisé de les falsifier. Cependant, « ces
audits-là sont efficaces pour vérifier les niveaux de salaire, les dépassements
d'heures, mais pas pour contrôler les conditions sociales de travail » admet Mme
Maria Eitel, vice-présidente chargée de l’engagement éthique chez Nike.
C’est pourquoi, en 1999, Nike créé et adhère à Global Alliance, une association
indépendante qui réunit la Fondation Internationale pour la Jeunesse, la Banque
Mondiale, la Fondation Mc Arthur, Nike, Gap Inc. ainsi que huit universités.
Chaque membre de l’association alloue une part de son budget à cette association
pour qu’elle enquête sur les conditions de travail et mène diverses actions de
mécénat et de formation. En mars 2002, Global Alliance avait déjà « interrogé 9
000 ouvriers dans 29 usines en Thaïlande, au Vietnam et en Indonésie sur leurs
besoins et leurs aspirations. A la suite de ces enquêtes, Global Alliance a fourni à
presque 10 000 ouvriers des programmes qui répondent aux besoins exprimés en
termes de santé, nutrition et compétences d’encadrement. En outre, Global Alliance
a formé 700 directeurs et contremaîtres d’usine pour leur donner des connaissances
et des compétences de direction » souligne Hannah Jones, la responsable du service
Responsabilité d’entreprise de Nike pour la zone Europe/Moyen Orient et Afrique.
Dans le même registre, Nike lance en avril 2000 le programme « Transparency
101 » où elle s’engage à publier, sur son site internet, les rapports d’audit de
PriceWaterhouse Coopers chez ses sous-traitants. En effet, jusque là, il leur était
possible d’auditer les usines mais les résultats n’étaient pas communiqués. Or, en
l’absence d’une telle communication, l’audit permet uniquement à Nike de prendre
d’éventuelles mesures. Il n’y avait donc aucune transparence pour le
consommateur. On peut donc penser que Nike a préféré attendre quelques années
avant de permettre la publication des rapports d’audit afin d’obtenir un délai lui
permettant de faire respecter son code de conduite. En agissant ainsi, elle peut
montrer une meilleure image d’elle car elle a eu le temps de prendre des mesures
auprès de ses sous-traitants. Aussi, les rapports d’audit ne peuvent être que plus
élogieux.
De plus, Nike a créé des services entièrement dédiés aux problèmes des
conditions de travail et de l’environnement. Ces services emploient environ 85
personnes et sont situés dans les pays où sont localisées les activités productives.
Enfin, pour jouer la transparence au maximum, il faut quand même souligner le
fait que Nike a publié le 13 avril 2005 la liste de ses 704 sous-traitants dans le
monde pour permettre à tout ceux qui le souhaite de faire leurs propres contrôles.
Nike est la seule et unique grande entreprise leader dans le domaine du sport a
avoir accepté de rendre cette information publique tout en sachant que certaines
conditions de travail continuaient à être bafouées. Néanmoins, elle a attendu que
des progrès aient été fait en la matière pour rendre cette information publique.
Il semble que Nike ait compris l’enjeu des problématiques éthiques en matière
de conditions de travail et que de réels progrès aient été faits pour améliorer les
conditions de travail dans les usines productives. Même si on peut penser que Nike
attend à chaque fois que la situation s’améliore pour rendre publique certaines
informations afin d’être valorisée, ce comportement a tout de même le mérite
d’avoir fait avancer les choses.
1.2 Nike : Des mesures pour prendre les devants ?
Suite aux nombreuses pressions concernant les conditions de travail de ses
sous-traitants, il semble que Nike ait décidé de prendre des mesures préventives sur
d’autres problèmes éthiques. Ces pressions auraient-elles transformé l’esprit de
Nike ?
En effet, l’entreprise Nike a pris un certain nombre de mesures en matière de
développement durable : Par exemple, elle a remplacé les solvants toxiques utilisés
pour fabriquer les chaussures par des solvants à l’eau qui en plus d’être plus
écologique, sont meilleurs pour la santé des ouvriers. De plus, Nike lance des
versions écologiques de ses modèles phares de chaussures de basket, comme l’Air
Jordan XX3. En effet, les quantités de colles toxiques nécessaires à la production
d’une chaussure sont réduites et la semelle est réalisée en caoutchouc recyclé.
Cependant, on peut s’interroger sur le fait que Nike garde ses versions classiques.
En effet, pourquoi continuer à lancer des versions non écologiques quand il est
possible de faire des versions écologiques ?
De même, Nike a mis en place le programme Reuse-A-Shoe en Amérique du
Nord. Ce programme consiste à récupérer les chaussures usagées, à les décomposer
et à les transformer en revêtement de sol pour terrain sportif. De plus, un des
composants recyclés (le Nike Grind) est utilisé dans la fabrication d’un autre
modèle : la Nike Trash Talk. Ce modèle de chaussure de basket entièrement
écologique devrait sortir à l’horizon 2011. Cette chaussure sera entièrement
fabriquée à base de déchets (essentiellement des déchets des usines sous-traitantes)
tels que des pièces de cuir, du caoutchouc, des mousses ou autres matériaux. Ce
programme apparaît être une bonne initiative à nos yeux cependant, pourquoi la
collecte est elle limitée à l’Amérique du nord ? De plus, il faut bien voir que les
chaussures collectées en Amérique du Nord vont devoir être expédiée dans une
usine de production puis de nouveau réexpédiée dans un pays distributeur de
chaussure. Toutes ces distances parcourues ne nous semblent pas très écologiques.
Il faudrait donc disposer de plus d’informations sur le coût pour la planète de ce
système afin de vérifier qu’il est bien écologique et qu’il n’est pas juste un moyen
de réduire encore une fois les coûts. En effet, dans ce genre de situation, la matière
première n’a qu’un coût de transport et de recyclage qui est peut être moindre par
rapport au coût d’achat des matériaux. Cependant, en l’absence d’élément sur ce
sujet il ne faut pas non plus être trop négatif.
Au niveau biologique, Nike a pris l’initiative en 1998 pour l’horizon 2003,
d’associer au coton conventionnel de ses tee-shirts, du coton biologique pour
permettre aux productions biologiques de se développer. Cependant, pour une
pièce, seulement 3% du coton est biologique, ce qui est relativement faible,
d’autant que l’utilisation de ce type de coton n’engendre pas un surcoût de
production trop élevé comme le montre le tableau ci-dessous :
[pic]
Source : revue française de gestion n°157 année 2005
Nike argue qu’il n’y a pas assez de productions biologiques de coton pour
permettre de créer des tee-shirts 100% coton biologique. Néanmoins, il y a un gap
entre 3% et 100%. On peut donc reprocher à Nike de ne pas utiliser plus de coton
biologique. Cependant, il semble que Nike envisage d’augmenter progressivement
la quantité de coton biologique par pièce. Il faut donc juste être sûr que cette
mesure sera réellement appliquée et qu’elle ne constitue pas juste une justification
de la faiblesse de la quantité de coton biologique utilisée.
Au niveau écologique, Nike avait mis en place en 1993 le comité
Environmental Action Team, servant à diriger et coordonner des programmes
mondiaux liés à l’environnement, comme la réduction de l’impact de ses activités
et de ses politiques sur la planète. Cependant, Nike n’est pas paru aussi crédible
qu’elle l’aurait souhaité. En effet, avant d’instaurer ce comité elle a accumulé un
sévère retard qui semble difficile à rattraper, et ceci ajouté à son manque
d’expérience dans ce domaine, ne rend pas les agents nécessairement plus
confiants. Néanmoins, quelques années plus tard, Nike s’est engagée dans le
Programme Climate Servers pour la diminution des gaz à effet de serre. A ce titre,
elle a reçu une distinction pour la baisse de diffusion de gaz à effet de serre dans
ses usines ce qui montre un acte bien réel et non juste un acte d’apparence.
L’entreprise a aussi pris un certain nombre d’engagements au niveau social et
communautaire:
Elle a contribué à fonder l’organisation « Ninemillion » de défense des droits
des enfants réfugiés et elle soutient aussi bien financièrement cette association que
par ses agissements. En effet, elle contribue à la sensibilisation à travers le monde
et elle soutient cette campagne à travers l’engagement des employés. Par exemple,
un tee-shirt 100% coton biologique est en vente sur le site store.nike.com. Les
profits de cette vente seront reversés à la fondation FC Barcelone et à Ninemillion
pour financer la scolarité et les activités sportives d’enfants réfugiés. On constate
dans cet exemple que Nike ne cherche en aucun cas à faire du profit (elle récupère
uniquement le coût de production du tee-shirt) mais simplement à aider les enfants.
Malgré tout, on peut penser que cet acte a aussi pour but de redorer son image
puisque les tee-shirts portent le logo de la marque et qu’ils sont en vente sur son
site internet.
En 2005, elle a contribué à la campagne de sensibilisation contre le racisme
« Stand up, Speak up ». Elle a fait diffuser 5 spots télévisés mettant en scène une
douzaine de joueurs de football selon les pays concernés par la campagne (Thierry
Henry pour représenter la France par exemple). Ces spots, financés par Nike,
avaient pour objectif de faire acheter des bracelets noir et blanc pour la somme de
2€ pour soutenir l’association. Aussi, dans cette campagne, Nike a donné de son
temps et de son argent sans rien attendre directement en retour au niveau financier.
Néanmoins, comme dans l’exemple précédent, cette action lui permet de redorer
son image et par la même occasion d’augmenter ses ventes. Cependant, on ne peut
pas critiquer cette façon de faire car personne n’a jamais interdit les autres leaders
sur le marché du sport de faire de même. Or, pour autant que nous nous en
souvenions, ils ne l’ont pas fait.
Plus récemment encore, au 1e décembre 2009, Nike a commencé à
commercialiser des pairs de lacet dans le cadre de la campagne « Lace Up. Save
Lives » (ou en français « des lacets pour sauver des vies ») en partenariat avec RED
pour lutter contre le virus du sida. L’ensemble des fonds qui seront recueillis
serviront pour des programmes éducatifs et médicaux en Afrique.
En conclusion, il apparaît que Nike a mis beaucoup de temps à réaliser que les
problématiques éthiques étaient importantes et qu’elles n’étaient pas toujours
opposées aux problématiques économiques. Au début, la prise en compte de ce
type de problématique par Nike relevait plus d’une obligation que d’un choix.
Cependant, on peut noter que Nike a fait de réels progrès en la matière puisqu’elle
intègre même maintenant d’autres problématiques que celles liées à ses sous-
traitants. Il reste encore du travail à faire car tout est loin d’être parfait comme on a
pu le voir mais Nike est sur la bonne voie.
Il faut tout de même noter un paradoxe : en effet, l’éthique est quelque chose de
normal à nos yeux donc on devrait sanctionner un comportement non éthique mais
un comportement éthique ne devrait pas susciter de réaction. Or, dans le cas des
entreprises comme Nike, on constate que la situation est inversée : quand une
entreprise ne fait pas preuve d’éthique, outre les groupes de pressions, elle ne
risque pas grand-chose. Au contraire, il semble qu’il faudrait presque remettre une
médaille aux entreprises éthiques alors qu’il s’agit d’un comportement normal. Ce
paradoxe apparaît aussi chez les enfants : en ce sens, Nike fait penser à un enfant
auquel on promet un bonbon s’il reste bien sage alors que, normalement, les bêtises
faites par un enfant devraient relever de l’exception et l’obéissance et la sagesse
devraient être la règle.
II. L’image Nike perçue par la population
Dans cette seconde sous-partie, il apparait essentiel de s’interroger sur l’impact
de cette polémique sur la population en général. Afin de pouvoir analyser la
situation actuelle dans l’esprit de la population, nous avons décidé de recourir à une
petite enquête, que nous soumettrons à quelques personnes de notre entourage.
Dans un deuxième temps, nous en ferons une analyse plus pertinente, et en
tirerons certaines conclusions.
2.1. La réalisation de l’enquête
La réalisation du questionnaire s’est faite en plusieurs étapes. Nous avons
préalablement rédigé des questions intermédiaires, que nous avons retravaillé afin
d’arriver au questionnaire final.
La plus grande difficulté fut de rendre les questions pertinentes afin que l'analyse
apporte une valeur ajoutée à notre projet. La banalité des questions était donc à
exclure.
Pour chaque intitulé des questions, nous avons essayé de faire en sorte de rester le
plus neutre possible afin de ne pas influencer les choix des interrogés.
Toutes les formes différentes de questions ont été utilisées : les questions fermées,
semi-ouvertes et ouvertes.
Les questions fermées permettent d'orienter le questionnaire dans la direction que
l'on souhaite et d'obtenir une facilité dans l'analyse. Il est vrai que l'objectivité du
questionnaire peut alors être remise en cause. Mais si ce type de question n'était pas
utilisé, les questionnaires iraient dans des sens bien trop divergents, et il serait
impossible d'en tirer une analyse intéressante.
Les questions ouvertes permettent de laisser une libre expression aux questionnés et
d'obtenir des informations plus précises (parfois inattendues) que nous n'aurions
pas eu avec une question semi-ouverte.
Les questions semi-ouvertes permettent d'avoir une réponse plus précise qu'une
question fermée, mais en restreignant le nombre de possibilité de réponses.
Les questions de contrôle permettent de s'assurer de la sincérité et de l'attention du
questionné. Nous n’avons pas jugé utile d’employer ce type de questions, car le
questionnaire ne touche pas des points personnels ou sensibles.
Afin de rentrer progressivement dans le questionnaire, il est courant de commencer
avec des questions d'ordre général. Pour ce questionnaire, les deux premières
questions sont des questions introductives. Ces dernières nous serviront pour
compartimenter l’analyse.
Nous avons réalisé un test du questionnaire avec un membre du corps enseignant
de l’IAE. Nous lui avons donc soumis le questionnaire, afin d’obtenir un avis
objectif sur celui-ci. Ce professeur nous a fait part de son avis et nous a permis
d’effectuer quelques modifications pertinentes, comme l’intégration de la notion «
pas d’avis » comme réponse possible. Une fois ce test effectué, nous avons pu
lancer réellement ce questionnaire.
Notre groupe étant composé de six étudiantes, nous avons choisi de faire remplir
le questionnaire à au moins 4 personnes chacune, dans le but d’obtenir un nombre
suffisant de réponses à analyser. Les questionnaires ont été soumis en face à face
ou par téléphone, la personne interrogée s’est simplement contenter de donner ses
réponses oralement. Comme les questions proposées ne traitaient pas de sujet
tabou, l’anonymat n’était pas de rigueur.
Après avoir expliqué la réalisation et le mode d’affectation du questionnaire,
nous allons passer à la phase clef de cette partie, à savoir l’analyse des réponses.
2.2. L’analyse du questionnaire
Une fois que les questionnaires furent proposés et remplis, nous sommes passés
à la phase suivante, c'est à dire l'élaboration des tableaux, pour ensuite construire
des graphiques, des histogrammes et autres procédés beaucoup plus démonstratifs.
A présent, passons à la phase de l’analyse du questionnaire.
Questions 1 et 2 : Participation au questionnaire
[pic]
Vingt-six personnes de notre entourage ont gentiment accepté de participer à
notre questionnaire. Nous remarquons que nous avons interrogé plus de personnes
de 15-25 ans et 45-65 ans (nos amis, parents, oncles, tantes..).
Nous avons également d’avantage interrogé des étudiants et des actifs, à hauteur de
85 %.
[pic]
Pour la majorité des personnes, Nike est synonyme de : sport, de chaussures de
sport, ou bien d’une marque connue. A aucun moment, le mot « Nike » n’évoque le
travail des enfants. Nous nous attendions à d’autres commentaires que ceux
obtenus.
[pic]
A travers ces réponses, nous constatons que c’est la catégorie « étudiants » qui
a un avis le mieux défini. Ils sont 80 % à penser que Nike n’est pas une entreprise
éthique, les actifs, quand à eux, sont majoritairement du même avis. Les retraités
ont un avis contraire, ils disent croire à 50 % que Nike est éthique.
Question 5 : Avez-vous entendu parler de la polémique Nike qui s’est produite
il y a quelques années ?
[pic]
Comme nous pouvons le constater grâce à cet histogramme, ce sont les 25-45
ans qui ont le plus en mémoire la polémique de Nike sur le travail des enfants. 75
% d’entre eux s’en souviennent, alors qu’à l’opposé, aucune personne de plus de 65
ans n’a été marquée par ces évènements passés. Ceci peut s’expliquer par le fait
que les 25-45 ans ont été des consommateurs des produits Nike à l’époque du
scandale (les jeunes pratiquent plus de sport que les séniors).
Quant aux 15-25 ans, nous pouvons estimer qu’ils étaient trop jeunes pour avoir
été réellement marqués par ce sujet.
Question 5B : Si oui, quel est votre avis sur le sujet ?
[pic]
50 % des personnes ayant répondu favorablement à la question précédente
trouve que le travail des enfants est déplorable, scandaleux et qu’il est une
exploitation de personnes vulnérables et pauvres. 30 % trouve que ceci est à
relativiser, la cause du problème est liée au système, et surtout à l’augmentation des
délocalisations. Nike n’est qu’une entreprise concernée parmi tant d’autres.
Question 6 : Suite à cette affaire, votre comportement d’achat envers Nike a-t-il
changé ?
[pic]
Suite à cette affaire, parmi les personnes ayant été conscientes de la polémique,
seuls les 45-65 ans ont réellement pris en compte le manque d’éthique de Nike dans
leur comportement d’achat.
Bien qu’ayant à l’esprit le scandale de Nike, aucun des 15-25 n’ont changé
leurs habitudes d’achat. Ici, rien de démontre qu’ils sont des clients de Nike, ils ne
l’ont peut être jamais été.
Question 7 : Suite à leur problème d’image, avez-vous remarqué des
changements
[pic]
Parmi les interrogés ayant remarqué le problème d’image de Nike, que peu
d’entre eux ont remarqué des changements dans la communication de l’entreprise.
Au total, seules deux personnes ont soulevé des changements qui sont les suivants :
-développement de publicité plus éthique, et commercialisation de bracelet
« antiracisme »
2.3. Les conclusions
Au final, bien que l’avis d’une vingtaine de personnes ne reflète pas
obligatoirement celui de millions de personnes, nous nous sommes permis de faire
différents constats tirés de l’analyse du questionnaire. Les différents constats
formulés ci-après sont donc à nuancer.
Les individus jugent Nike comme non éthique, mais pour certains, sans arguments
ou faits précis : toutes les grandes entreprises n’ont pas obligatoirement des vices
cachés !
Le scandale qui s’est produit il y a plusieurs années n’est plus ancré dans l’esprit
des gens, ou ne l’a peut être jamais été.
Bien que les questionnés ont jugé majoritairement le travail des enfants comme
scandaleux, ils n’ont pas pour autant modifié leurs habitudes d’achat vis-à-vis de
Nike. On peut donc se demander si les consommateurs attachent réellement une
grande importance à l’éthique des entreprises. A première vue, tout un chacun
semble être révolté quant aux manque de responsabilité de Nike et des grandes
entreprises en général, mais cela ne modifie pas pour autant leur comportement
d’achat. Ainsi, on peut en déduire que l’affectif vis-à-vis de la marque prend le pas
sur la conscience citoyenne. Les consommateurs, bien que plein de bonne volonté
et d’idéaux, ne sont pas dans les faits prêts à renoncer à leurs marques favorites.
Les individus continuent à acheter des produits Nike, cette entreprise est toujours
une valeur sûre en ce qui concerne l’équipement sportif.
Pour finir, le changement de communication de l’entreprise n’a pas réellement
été remarqué. En effet, Nike use toujours d’un marketing agressif et d’un fort
sponsoring. Nike fait également de plus en plus appel à de célèbres sportifs de haut
niveau pour illustré son expertise. Cependant, Nike n’a pas de réelle
communication concernant ses engagements « éthiques ». Nike ne souligne ni sa
responsabilité environnementale, ni sa volonté d’œuvrer en faveur d’un commerce
plus équitable…Ainsi, comme le montre notre petite étude, Nike ne bénéficie
toujours pas d’une image responsable et éthique auprès des consommateurs. Ce
manque d’information peut pourtant lui être fatal car la population s’interroge : cet
état de fait marque-t-elle une volonté stratégique de la marque ou un manque réel
d’engagement social et environnemental ? Aux vues de ses résultats colossaux et de
sa présence sur le marché du sport, Nike repose en quelque sorte sur ses lauriers, en
récoltant les fruits de sa popularité, sans se soucier sérieusement des questions
éthiques.
Cette affaire est peu à peu tombée dans l’oubli de nos questionnés, mais c’est
en oubliant, que de telles erreurs peuvent refaire surface. Il est vrai que la presse
nous évoque le même sentiment : Nike et le travail des enfants ne fait plus partie de
la Une des journaux depuis longtemps. Non seulement cette polémique est
obsolète, mais nous pouvons aussi noter le fait qu’il est difficile de trouver des
articles ou bien des informations sur cet évènement passé. Ce problème rencontré
est notamment lié à l’archivage papier qui n’est plus conservé passé un certain
délai, mais également à l’archivage web qui a même été supprimé ! Nous avons
donc été confrontés à un vrai manque d’information, auquel nous avons répondu en
mettant en œuvre notre questionnaire afin d’obtenir des réponses à nos questions.
Conclusion
L’ensemble de cette analyse a été fait dans le but de répondre à une unique
question : Nike est-elle une puissance au service de l’éthique ?
Après avoir réalisé toute cette analyse, on peut répondre que l’entreprise Nike
n’est pas au dessus des problèmes éthiques même si certains éléments semblent
indiquer le contraire.
En effet, le scandale a mis à mal l’image de l’entreprise et a fait chuter ses
résultats financiers comme nous avons pu le voir dans la première partie. Nike a
donc été dans l’obligation de réagir car le fait d’arguer qu’elle n’était pas
responsable des agissements de ses sous-traitants n’a pas suffi à la dédouaner et à
apaiser les esprits. Aussi, les groupes de pression puis le public ont réagit par un
boycott de la marque. Comme nous l’avons vu, Nike s’est vue dans l’obligation de
prendre des mesures afin de redorer son image de marque. Elle a ainsi agi de
manière concrète contre les conditions de travail appliquées aux employés dans les
usines sous-traitantes. De plus, elle a d’elle-même adopté une stratégie intégrant
d’autres problèmes éthiques que ceux qui lui été reprochés. Il semble donc que
l’éthique ait pris le dessus sur la puissance du leader.
En revanche, ce qui est surprenant dans ce scandale, c’est que les autorités les
plus à même à sanctionner Nike n’ont pris aucune mesure. Nike était donc dans une
position où elle ne se sentait pas en danger de par son comportement. Néanmoins,
l’absence de sanctions pénales ou civiles ne rime pas avec « liberté de continuer et
d’agir».
Pourtant, aujourd’hui, il semble que le scandale ait été oublié : Même si les
gens ne considèrent pas pour autant Nike comme une entreprise éthique, cela ne les
empêche pas de continuer à acheter des produits de cette marque. Nous pensons
que ce comportement peut s’expliquer par le fait que, avec l’inondation des
produits asiatiques sur le marché, quelque soit le produit acheté, le consommateur
pense qu’il sera fabriqué dans les mêmes conditions de travail.
De plus, il faut souligner que la présence des médias est un élément clé dans ce
scandale car, en leur absence, Nike continuerait toujours à agir de la sorte. Or, les
médias, qui ont tenu une place majeure dans la révélation du scandale, semblent
avoir totalement oublié cette affaire. En effet, comme nous l’avons déjà souligné, il
est difficile d’obtenir des informations sur le scandale. Il faut avouer que lorsque
nous avons choisi le thème de notre exposé, nous nous attendions à avoir des
sources d’information considérables, ce qui est loin d’avoir été le cas. Le scandale
Nike est tombé dans l’oubli pour les médias et, par là même, il a disparu de l’esprit
des consommateurs. Les médias ont une forte influence sur l’opinion du public.
Aussi, si les médias ne soulèvent pas un problème, l’opinion publique pense que ce
problème n’existe pas dans la réalité. Ainsi, même si la majorité des gens que nous
avons interrogé ne considère pas Nike comme une entreprise éthique, le fait que les
médias ne parlent plus de Nike leur suffit à penser que la situation n’est pas si
dramatique. La puissance des médias dans cette affaire est donc un fait
indiscutable. L’essentiel réside dans le fait que Nike a réagi et a adopté un réel
comportement éthique et non un comportement de façade. Même si le scandale est
tombé dans l’oubli, l’éthique semble être plus forte que la puissance. De plus, on
peut penser que le scandale est tombé dans l’oubli car Nike a pris des mesures. En
effet, les médias aiment montrer des images « chocs » et non pas des situations où
tout va bien. Aussi, même si Nike n’a pas communiqué sur les changements qu’elle
a effectué ou que les gens n’ont pas vu ce changement, le fait que les médias ne
parlent plus du problème a été suffisant.
Bibliographie
Webographie
http://www.fluctuat.net/cinema/chroniques/bigone.htm
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http://www.transfert.net/Pour-Nike-exploiteur-c-est-de-l
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http://www.fsa.ulaval.ca/personnel/vernag/EH/F/ethique/lectures/nike_violence.ht
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L’ethique de l’entreprise de Michel dion edition 2007 Fides
http://www.filieresport.com/fr/actualites/tribune-libre/zwo_modules/news/tribune-
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http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/economie/20050414.OBS3972/nike_joue
_la_transparencesur_ses_usines.html
http://www.strategies.fr/actualites/marques/r35995W/nike-et-thierry-henry-contre-
le-racisme.html
http://success-story.over-blog.net/10-index.html