Et si l'océan était notre avenir ?

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Et si l’océan était notre avenir ? Médicaments, énergies renouvelables, ressources halieutiques, industries marines, tourisme... L’océan regorge de ressources encore inexploitées. Son exploration durable et respectueuse sera, à coup sûr, la prochaine aventure humaine de ce XXI e siècle. BONNARME/AQUASHOT

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Supplément au journal l'Aquitaine consacré à l'océan. Médicaments, énergies renouvelables, ressources halieutiques, industries marines, tourisme... L’océan regorge de ressources encore inexploitées. Son exploration durable et respectueuse sera, à coup sûr, la prochaine aventure humaine de ce xxie siècle.

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Et si l’océanétait notre

avenir ? Médicaments, énergies renouvelables, ressources halieutiques,

industries marines, tourisme... L’océan regorge de ressources encore inexploitées. Son exploration durable et respectueuse sera, à coup sûr, la prochaine aventure humaine de ce xxie siècle.

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L’AQUITAINE N°55 HIVER 2015

REGARDS CROISÉS02

Passer du diagnostic à l’action

La communauté scientifique dispose aujourd’hui de suffisamment de recul pour estimer que le changement climatique est lié aux activités humaines. Parmi ses conséquences, il y a

l’élévation inéluctable du niveau de la mer qui pourrait augmenter de plusieurs dizaines de centimètres d’ici à la fin du siècle. D’autres phénomènes sont plus difficiles à démontrer, comme l’érosion du trait de côte et les systèmes dépressionnaires observés. La recherche s’applique à étudier si leur variabilité naturelle n’a pas été aggravée par ce phénomène. Une chose est sûre : le milieu marin doit être surveillé, accompagné et géré dans la durée. De même, il faut que l’homme se prépare à des changements profonds et rapides. Selon le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), nous devrions, à l’échelle mondiale, réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 40 % à 70 % en 2050 et les supprimer totalement en 2080. Personnellement, je ne m’inscris pas dans une vision décourageante de la situation. Je crois qu’il est encore possible de s’adapter, à condition de passer du diagnostic à l’action. Cela implique une détermination politique forte et l’adhésion de la société civile. L’Europe aurait tout intérêt à s’engager dans ce dessein. La France, deuxième puissance maritime au monde*, doit s’ouvrir le plus possible vers l’océan pour chercher des solutions nouvelles. À ce titre, l’Aquitaine, qui dispose d’un littoral important et diversifié, peut légitimement être un bassin actif d’expérimentations pour préparer l’avenir. // * 11 millions de km2, juste derrière les États-Unis (11,3 millions de km2)

Une vocation maritime réaffirmée par la réforme territoriale

La vocation maritime de l’Aquitaine est ancienne, et ce n’est pas un hasard si notre Région est depuis l’origine un membre actif du cluster Atlantic Power, dont l’objectif est de promouvoir une économie de la mer – « l’économie bleue » – respectueuse de l’environnement.

Plusieurs de nos élus participent d’ailleurs dans ce cadre à un groupe de travail sur les énergies marines renouvelables, dont le potentiel en Aquitaine est immense : de l’énergie des courants à celle des vagues, en passant par l’énergie thermique et l’énergie osmotique.

Grâce au rapprochement de notre région avec la région Poitou-Charentes, venant s’ajouter à l’eurorégion Aquitaine-Euskadi que nous avons créée il y a trois ans, ce potentiel marin sera démultiplié.

Sur ce qui sera désormais l’une des plus longues façades côtières de France, la nouvelle région disposera de trois ports (Bordeaux, La Rochelle et Bayonne) à partir desquels il sera possible de mener des politiques concertées. Des secteurs comme la pêche, l’ostréiculture, la conchyliculture, mais aussi l’industrie nautique seront considérablement renforcés. Le littoral sera également beaucoup plus diversifié, avec à la clé d’immenses possibilités de promotion touristique et autant d’opportunités en matière d’emploi.

Se tourner vers les ressources de l’océan, c’est aussi explorer un nombre incalculable de molécules et d’organismes inconnus à ce jour, qui permettront d’élaborer les médicaments de demain.

Autant de possibles qui pourraient se matérialiser dans des projets d’avenir comme celui d’île artificielle auquel nous avons commencé à réfléchir, Athlena, qui réunirait dans un même espace une ferme marine, des activités énergétiques, touristiques et de recherche. Tout cela n’est pas, ne sera bientôt plus de la science-fiction : c’est notre avenir proche ! //

HERVÉ LE TREUTDirecteur de l’Institut Pierre-Simon-Laplace, climatologue, membre de l’Académie des sciences et participant aux travaux du GIEC

ALAIN ROUSSET Président du Conseil régional d’AquitaineB

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OCÉAN. À l’heure où se posent les questions de la rareté des ressources, du changement climatique, de la santé, des nouveaux leviers économiques générateurs d’emploi ou encore du développement durable, nous avons interrogé un climatologue, un universitaire, un chef d’entreprise et le président de la Région Aquitaine sur ces enjeux essentiels pour l’avenir des Aquitains.

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La vie future sur terre passera forcément par la mer

De nombreux pays qui ont un accès direct à la mer envisagent des stratégies nouvelles pour développer les ressources océaniques : la Norvège, le Portugal, le Japon, etc. Certains le font déjà avec succès. Ces nations ont conscience que leur avenir passera

par l’innovation en se tournant vers l’océan. Alors que l’homme est capable d’aller se poser sur une comète, qu’est-ce qui l’empêcherait d’exploiter le potentiel marin ?

La mer est une « bombe » d’énergie, les fonds marins des « trésors » nutritionnels. L’enjeu est crucial : faut-il laisser la pêche dépérir alors que des solutions de récifs artificiels existent et que l’aquaculture a progressé de façon vertigineuse en l’espace de trente ans seulement ? Faut-il continuer à consommer des carburants fossiles alors que les énergies renouvelables marines sont à portée de main ? Faut-il attendre en vain de Paris, ou d’ailleurs, un élan que nous pourrions créer ici, sur notre littoral ?

Je suis personnellement très heureux que l’Aquitaine exprime à la fois une vision dans ce domaine et l’envie de créer une dynamique océane en explorant de nouvelles voies créatrices d’emplois, respectueuses des femmes et des hommes et protectrices de l’environnement. Je crois qu’il faut casser les frontières physiques et mentales, qui existent entre les continents et les océans, et faire en sorte que l’un soit au service de l’autre et inversement. La vie future sur terre passera forcément par la mer. //

L’océan nous unit

L’université de La Rochelle, en lien avec le CNRS, abrite l’unité mixte de recherche Littoral, environnement et sociétés (LIENSs) qui fait référence dans son domaine d’expertise. Elle a pour originalité d’être

pluridisciplinaire et de regrouper des compétences autour d’un objet – ici le littoral à l’échelle mondiale – et non d’une discipline. Cette approche me semble pertinente pour traiter de la complexité de la question marine à travers les sciences de l’environnement, de la chimie, des biotechnologies, sans oublier les sciences humaines, à l’heure où 60 % de la population mondiale vit dans la grande zone côtière.

Le grand enjeu des années à venir est celui du développement durable, alors que nous observons les effets du réchauffement climatique sur l’océan, avec une augmentation du niveau de la mer et une dilatation thermique de ses eaux. La tempête Xynthia, en Charente-Maritime, et l’érosion du trait de côte en Gironde, dans les Landes ou au Pays basque, suite aux graves intempéries de l’hiver dernier, doivent nous interpeller.

Peut-être faudrait-il plus et mieux écouter les prévisions de la communauté des chercheurs qui disposent aujourd’hui d’outils prévisionnels d’une grande fiabilité. Pour autant, il n’est pas question de sanctuariser l’espace maritime, mais de trouver les solutions pour faire cohabiter le plus harmonieusement possible biodiversité, activités humaines et habitat. À ce titre, il faudrait réduire le décalage entre le temps du scientifique et celui du politique. L’océan est un sujet fédérateur qui unit nos deux régions. Leur fusion prochaine sur le plan administratif ne fait qu’entériner la continuité d’un même littoral. //

GÉRARD BLANCHARD Président de l’université de La Rochelle, spécialiste de l’écologie marine

PIERRE CALLÉJA Président de Fermentalg

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REGARDS CROISÉS

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DU COMMERCEDE LA PLANÈTE TRANSITEPAR LA MER

90%

5 HUMAINS SUR 10

DE LA SURFACEDU GLOBE71%

ILS OCCUPENT

PLUS DE DE L’OXYGÈNEDISPONIBLE SUR TERREPROVIENT DE LA MER 3,5

LES OCÉANS PERMETTENTDE NOURRIR PRÈS DE

SOIT ENVIRON 50% DE LAPOPULATION MONDIALE

MILLIARDSD’ÊTRESHUMAINS

50%

DE L’EAU DISPONIBLE SUR TERRE

ET REPRÉSENTENT

97%

DE LA POPULATIONMONDIALE50%

VIT À MOINS DE 100 KMS DES CÔTES,SOIT

SOURCES : IFREMER - FONDATION GOODPLANET - COMMISSION EUROPÉENNE - IPCC - MAUD FONTENOY FONDATION

DU COMMERCEDE LA PLANÈTE TRANSITEPAR LA MER

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LES OCÉANS PERMETTENTDE NOURRIR PRÈS DE

SOIT ENVIRON 50% DE LAPOPULATION MONDIALE

MILLIARDSD’ÊTRESHUMAINS

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ET REPRÉSENTENT

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VIT À MOINS DE 100 KMS DES CÔTES,SOIT

SOURCES : IFREMER - FONDATION GOODPLANET - COMMISSION EUROPÉENNE - IPCC - MAUD FONTENOY FONDATION

L’AQUITAINE N°55 HIVER 2015

SPÉCIAL OCÉAN04

Source nourricière de l’humanité depuis la nuit des temps, puis espace de conquête

et d’échange entre les peuples, le mythe du grand bleu peut-il être réinventé au xxie siècle ? Confrontée au danger du ré-chauffement climatique et à l’enjeu planétaire de la transi-tion énergétique, l’Aquitaine phosphore pour imaginer de nouveaux potentiels marins. Elle étudie et expérimente des pistes et solutions pour exploi-ter de façon durable et respon-sable le potentiel d’un littoral qui atteindra, demain, plus de

700 km de long, dans le cadre de la future région Aquitaine - Li-mousin - Poitou-Charentes.

Avec ses trois ports (Bayonne, Bordeaux et La Rochelle), cette future région dispose de sérieux atouts qui

viendront renforcer ainsi le dynamisme de ses activités traditionnelles, notamment en

matière de transport maritime, de pêche, d’ostréiculture et de conchyliculture. Le tout adossé à une politique de préservation des milieux naturels et du res-pect de la biodiversité.

Un challenge alors que la pression démogra-phique s’est toujours avérée particuliè-rement dense pour répondre à l’afflux de nouvelles popula-tions sédentaires et touristiques. Enfin

et surtout, on mettra en avant l’émergence d’une dynamique vertueuse pour faire du littoral

aquitain un vecteur de dévelop-pement durable.

Les pionniers de la croissance bleueDe l’association Aquitaine Landes Récif, qui a expérimen-té avec succès des récifs artifi-ciels pour le repeuplement de la faune et de la flore des fonds marins, à Yves Parlier, qui a imaginé tracter des navires avec des ailes volantes, des pro-jets enthousiasmants voient le jour. Comme celui d’Athlena, une cité autonome en pleine mer qui rêve d’associer aqua-culture, exploitation minière,

production d’énergie, habitat, recherche et tourisme. L’année 2015 marquent également l’ar-rivée à maturité ou à titre expé-rimental de nouvelles formes d’exploitation des ressources de l’océan. Cela concerne la nutri-tion et la santé animale et hu-maine, mais aussi les énergies marines renouvelables, en plein essor. Autant d’approches in-novantes que nous présentons dans ce dossier et qui contri-buent à une nouvelle forme d’essor durable et responsable, porteuse d’espoir sur le plan économique et écologique : la croissance bleue. //

INNOVATION ET RECHERCHE. La mer et les océans ont alimenté les phantasmes et les rêves les plus fous, des monstres marins de l’Antiquité aux romans de Jules Verne. Larguons un instant les amarres du quotidien et projetons-nous à vingt-cinq ans pour imaginer notre futur océanique.

Et si l’océan était l’avenir de l’Aquitaine ?

Exploiter le potentiel d’un littoral qui atteindra plus de 700 km de long, dans le cadre de la nouvelle région Aquitaine - Limousin - Poitou-Charentes.

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Il fallait être ingénieur, navigateur et chef d’entreprise pour oser un tel défi. Yves Parlier, spécialiste des matériaux composites, skipper visionnaire et dirigeant avisé, s’est lancé avec son équipe, depuis 2007, dans un pari audacieux. En utilisant la force du vent. Bluffant !

Pour tracter différentes embarcations de marine marchande, de plaisance, de pêche ou de sécurité, «notre idée s’appuie sur la techno-logie du kitesurf. Si l’idée d’installer une aile de kite sur un bateau n’est pas nou-velle, le fait d’adapter cette technologie à base d’arma-ture gonflable sur des navires de grande taille est une pre-mière », explique l’ancien ma-rin, notamment célèbre pour ses exploits à bord d’Aqui-taine Innovations*. Après plusieurs années de recherche et de développement sur des kites pour les petits bateaux, un nouveau prototype va être expérimenté. À terme, l’en-treprise pourra proposer des ailes de toutes tailles, avec un système de pilotage automa-tique capables de prendre en

charge une partie ou la totali-té de l’énergie nécessaire à la traction d’un navire, suivant sa zone de navigation et les performances, caractéris-tiques et objectifs du bateau. Le kite, raccordé à un point fixe du navire, est au choix en mouvement ou fixe suivant la force de traction souhaitée, avec un pilotage de l’aile qui peut être manuel ou automa-

tique selon la dimension de l’embarcation.

Une solution écologique et économique

90 % du commerce mondial se fait par voie maritime. D’ici à 2020, les flux maritimes pour-raient doubler selon les experts. Le projet Beyond the Sea se fixe comme objectif de réduire la consommation de carburant

des navires marchands de 20 %, limitant ainsi leurs émissions de CO2, de NOx et de SOx

**. « Si les armateurs ne s’intéressent pas à notre projet par respect de l’environnement, ils pourraient le faire par intérêt », souligne Yves Parlier. Un aller-retour Asie-Europe nécessite en effet 10 000 tonnes de gasoil. En réduisant leur facture énergé-tique de 1/5, l’économie sera de

un million de dollars par trajet et par cargo. L’utilisation du cerf-volant, en cas de panne, permettra en outre d’éviter des frais de remorquage, tout en réduisant le retard engendré. //

* En 2001, après trois semaines en tête de la course du Vendée Globe, Yves Parlier sur Aquitaine Innovations démâte au large des Iles Kerguelen. Il refuse d’aban-donner et se lance seul et sans assistance dans deux semaines de réparations avant de repartir. 13e au classement, il sera fêté comme un héros. Son exploit sera honoré par la médaille de chevalier de la Légion d’honneur.

** CO2 : Gaz carbonique,

NOx : oxydes d’azote,

SOx : oxydes de soufre.

www.parlier.org/

beyond_the_sea/

www.beyond-the-sea.com

L’AQUITAINE N°55 HIVER 2015

SPÉCIAL OCÉAN 05

Comment créer des conditions favorables au repeuplement et au maintien de la faune et de la flore marine, dans les eaux d’Aquitaine ? L’association Aquitaine Landes Récifs a apporté une réponse innovante dont les résultats sont spectaculaires : la créa-tion de récifs artificiels. Ces structures immergées placées sur les fonds marins, miment les caractéristiques des zones naturelles. Elles entraînent des modifications physiques et biologiques du milieu, permettant de créer un

nouvel écosystème. Les récifs landais installés par l’associa-tion à Capbreton, Soustons, Vieux-Boucau et Messanges- Azur-Moliets permettent en

outre la réintroduction d’espè-ces de poissons. Les profes-sionnels de la pêche ont un œil attentif sur les résultats encou-rageants obtenus et espèrent

un accroissement local des res-sources halieutiques. Aquitaine Landes Récifs effectue parallè-lement un suivi scientifique de ses récifs grâce au travail de ses plongeurs bénévoles et de bu-reaux d’études spécialisés.

De belles perspectives de développementInnovante, l’association a dé-veloppé un nouveau type de récifs artificiels totalement aménageable, permettant ain-si de tester différentes confi-gurations selon les espèces. Elle s’est également illustrée avec un modèle en forme de tourel le à plusieurs étages

destiné à l’acclimatation de naissains d’huîtres en eaux profondes, ainsi qu’au déve-loppement et à la protection des alevins.

Une expérimentation os-tréicole grandeur nature est prévue à Hossegor en avril prochain, à 18 mètres de pro-fondeur en pleine mer. En cas de succès, elle pourrait don-ner naissance à terme à une nouvelle variété d’huître à la croissance plus rapide et à la chair plus importante et de meilleure qualité. //

www.aquitaine-landes-

recifs.fr

AQUITAINE LANDES RÉCIFS

Des récifs artificiels plus vrais que nature

BEYOND THE SEA

Des cerfs-volants géants pour tracter les navires

De nombreux soutiensCe projet a reçu le soutien d’acteurs écono-miques majeurs du transport maritime (dont CMA CGM) et de la communauté scientifique (laboratoire de l’école polytechnique, l’ENSTA Bretagne, Mines Paris-tech, ESTIA, IMS…), ainsi que de l’ADEME dans le cadre de l’appel à projet « Navire du futur ».

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Le projet Beyond the Sea se fixe comme objectif de réduire

la consommation de carburant de navires marchands de 20 %,

limitant ainsi leurs émissions de CO2, de NOx et de SOx.

285 000 eSomme apportée par la Région Aquitaine au développement d’un kite pour les

bateaux de plaisance. Un projet à suivre...

La Région Aquitaine accompagne l’association à hauteur de 172 000 e.

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L’AQUITAINE N°55 HIVER 2015

SPÉCIAL OCÉAN06

Si les prospectivistes ne s’engagent jamais avec assurance sur un hori-zon à 25 ans et plus, il est toujours intéressant de prendre en compte leur vision de l’avenir. L’étude prospective du GIP Lit-toral Aquitain* et de la Région Aquitaine dessine ainsi le futur possible du tourisme dans notre région à l’échéance 2040.

Selon ce rapport, les desti-nations balnéaires continue-ront demain d’être à la mode. Les comportements du tou-riste ne devraient pas changer du tout au tout, d’autant que la quête de soleil, de plaisir, de détente et de divertissement

demeurera au cœur de ses préoccupations. Les voyages à thème, déjà sensibles au-jourd’hui, pourraient se mul-tiplier. Les publics, quant à eux, se diversifieront. Si on re-trouve les profils de touristes actuels, qu’ils soient français ou étrangers, en provenance d’Asie, d’Amérique du Sud, du Moyen Orient ou du Ma-ghreb, de nouveaux visiteurs devraient choisir notre façade atlantique pour leurs congés. Aux côtés de personnes aux revenus moyens qui opteront plutôt pour des hébergements économiques ou alternatifs, des établissements interna-tionaux très haut de gamme seront réservés à une clientèle

de luxe. Les capitales régio-nales ou nationales, malgré une uniformisation évidente, se livreront de leur côté à une compétition acharnée sur le tourisme d’affaires et d’agré-ment. Elles bénéficieront pour cela d’animations de plus en plus sophistiquées, destinées en priorité à retenir la popu-lation locale dans leurs murs à travers des spectacles, des événements et des fêtes.

De nouvelles formes d’habitats touristiques

De nouvelles formes d’ha-bitats touristiques devraient voir le jour dans les décen-nies à venir. Éphémères et mobiles, celles-ci seraient de

plus ou moins grande taille et fonctionneraient notamment en réseau, offrant des séjours sous forme d’étapes. Compte tenu du vieillissement de la population et de l’attrait de notre région, des « seniors cities » pourraient émerger, mêlant des populations lo-cale, nationale et européenne. On devrait assister par ail-leurs à la généralisation de la location et de l’échange entre particuliers pour des raisons économiques, mais aussi so-ciétales, notamment avec la réunion de communautés affinitaires. La mobilité et la souplesse concerneront éga-lement les infrastructures. Ainsi, le premier prototype de

DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

Quel tourisme littoral à l’horizon 2040 ?

L’homme a marché sur la Lune, il voyage dans l’espace. Sa dernière grande conquête sera l’univers marin. En Aquitaine, le projet Athlena propose d’inves-tir l’espace océanique de manière durable et pérenne. Le plus incroyable, c’est que cela pourrait devenir réalité d’ici à quelques décennies !

Imaginez une plate-forme type off-shore conçue en « étoile », avec six branches articulées autour d’un « îlot » central. Chacune d’elle aurait plusieurs fonctions, avec une face émergée et une face im-mergée.

Une cité marine entièrement autonomeDans cette cité installée à quelques milles des côtes, l’autonomie serait totale grâce notamment à l’aquaculture et à une station de produc-tion d’énergies marines. Une branche d’exploitation mi-nière sous-marine permet-trait l’exploitation des métaux et ressources minérales des

fonds marins. Des logements indépendants avec des pièces à vivre, situées sous le niveau de la mer, offriraient un ha-bitat à longueur d’année au milieu des poissons. Un com-plexe hôtelier pourrait même y être installé. Le tout dans une approche responsable et éthique de l’environne-ment marin. À l’image de sa branche de récifs artificiels et de sa gestion des stocks,

qui permettrait de repeupler les fonds marins et de valo-riser les ressources halieu-tiques, ou encore de celle liée à l’étude du réchauffement climatique. Science-fiction ? « Non », répond l’initiateur de ce projet futuriste baptisé Athlena, qui n’est autre que Pierre Calleja, président fon-dateur de Fermentalg*. « La question n’est plus de savoir si l’homme ira vivre un jour

sur l’océan, car c’est une évi-dence pour moi, mais bien de savoir quand. » //

* Société spécialisée dans la pro-duction d’huiles et de protéines à partir de microalgues, créée en 2009. Après des années de recherche et développement, elle entre aujourd’hui dans une phase d’industrialisation. Le premier secteur visé par ses protéines à base de microalgues est celui de la nutrition humaine, et plus particulièrement le segment d’oméga-3 et oméga-6.

PROJET ATHLENA

Quand l’homme habitera l’océan

Le projet Athlena pourrait prendre forme au large des côtes aquitaines.

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• Le berceau de l’industrie nautique En Aquitaine, la filière

nautique représente

plus de 400 entreprises

pour 2 400 salariés et un

chiffre d’affaires annuel

de 316 millions d’euros*.

Parmi les entreprises em-

blématiques, notre région

compte des construc-

teurs comme Couach ou

CNB (groupe Bénéteau),

mais également Nanni

Diesel ou encore Tribord

(Décathlon).

En Aquitaine, tous les

corps de métier de la

filière sont présents,

de l’amont à l’aval :

constructeurs, motoristes,

équipementiers, négoce

et maintenance, prestation

de services… Une filière au

fort potentiel de création

d’emploi, notamment

grâce au renouvellement

du parc nautique et au

développement de l’ex-

portation. Elle bénéficie

aussi de l’attractivité tou-

ristique et de l’accroisse-

ment des retraités attirés

par le nautisme de loisir. * Direccte Aquitaine,  Collection « Études », n°16, septembre 2012.

ENBREF

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SPÉCIAL OCÉAN 07

poste de secours déplaçable et modulaire**, inauguré à l’été 2015, à Biscarosse, sera peut-être généralisé. Le rapport pointe enfin la question des possibilités d’ac-cueil, précisant qu’il ne fau-drait surtout pas accroître de manière démesurée les capa-cités d’hébergement sur nos territoires déjà saturés l’été, mais mieux répartir et équi-librer l’offre. La grande ques-tion sera de trouver le savant dosage entre développement touristique et protection de l’environnement. //

* Étude prospective du tourisme – volet littoral par le GIP (Groupement d’intérêt général) Littoral 2012-2013.

** Ce poste, installé sur la plage l’été, sera déplacé l’hiver. Modulaire et intégré dans le paysage, il est construit à partir de matières premières et compétences locales.

L’océan est une source de matières premières aux richesses encore insoupçonnées, qui pour-ront, demain, répondre à de nombreux besoins dans des domaines aussi variés que la santé, la nutrition, la cosmétolo-gie ou encore l’énergie.

Comparées aux exploita-tions continentales, les ini-tiatives restent à ce jour em-bryonnaires. Ainsi, l’extraction des minéraux de la mer, autres que le sable et le gravier, a tout juste commencé. Mais les pro-jets s’accélèrent. D’ici à 2020, 5 % de la quantité mondiale de minerais, y compris le cobalt,

le cuivre et le zinc, pourraient provenir des fonds marins. Ce chiffre pourrait passer à 10 % dans quinze ans*. De même, l’utilisation des fonds marins à des fins médicales ou nu-tritionnelles est une réalité. Une grande partie du monde sous-marin étant encore inex-

plorée et peu étudiée, les ré-sultats sont encore limités. La mer contiendrait 80 % de la biodiversité existante. On n’en connaîtrait à peine 1 %. Mais il semble inéluctable que des or-ganismes marins autres que les poissons et les coquillages s’in-viteront dans notre quotidien.

Une nouvelle génération de médicaments

On compte déjà des essais concluants grâce à de nou-velles technologies de séquen-çage des gènes d’organismes vivants. Des médicaments an-tiviraux ont été obtenus à par-tir de nucléosides isolés chez des éponges des Caraïbes. Le

premier médica-ment antitumoral d’origine marine a été mis au point à partir de petits animaux marins

invertébrés. Une chercheuse française a découvert un ver marin qui, par son hémo-globine proche de celle de l’homme, pourrait un jour pallier la pénurie de sang à l’échelle mondiale. La bio-diversité marine nous aide aujourd’hui à comprendre

comment des organismes sont capables de résister à des températures et des pressions extrêmes sans lumière. Ces tra-vaux pourraient permettre la création à terme de nouvelles enzymes industrielles ou de nouveaux produits pharma-ceutiques. En avril 2014, une équipe de chercheurs améri-cains a réussi à transformer l’eau de mer en hydrocarbures, en extrayant du carbone et de l’hydrogène de l’eau saline.

L’avenir durable viendra de la merL’appétence pour la mer est indispensable pour participer à cette révolution qui s’an-nonce. Encore faut-il en avoir l’envie et la culture. Or, si les activités maritimes pèsent 16 % du PIB de la Chine, elles ne représentent que 2,45 % de celui de la France. Un change-ment des mentalités s’opère doucement depuis le Grenelle de la Mer. Tous les chercheurs sont arrivés à la conclusion que la quasi-totalité des solu-tions pour un avenir durable émaneront du milieu marin. L’Aquitaine entend participer à cette conquête. Ainsi, elle est

partenaire du projet européen Atlantic Power Cluster qui vise à favoriser le développement des énergies marines renou-velables à l’échelle de l’Atlan-tique. Elle soutient également des entreprises innovantes, comme Fermentalg. Si des études laissaient supposer que les algues seraient, à terme, utilisées pour la nutrition hu-maine et animale, la cosmé-tologie ou dans le secteur des

biocarburants, l’entreprise libournaise l’a prouvé après des années de recherche et développement. Elle passera prochainement à une phase industrielle. 2015 marquera peut-être le commencement d’une nouvelle ère marine. Une époque porteuse d’avenir, dans laquelle notre région pourrait jouer un rôle pilote. //

* Source : étude de la Commission européenne 2012.

INNOVATION

La mer et ses mille et une ressources

De nouveaux produits pharmaceutiques seront issus, demain, de l’océan.

L’océan constitue la principale motivation des touristes à séjourner dans notre région (46 %). Ce chiffre culmine à 56 % si l’on y ajoute les sports de glisse. La façade atlantique s’avère donc capitale pour un secteur d’activité porteur d’image et vecteur d’aménagement du territoire. Le tourisme sur le littoral constitue en outre une filière économique à part entière qui pèse déjà aujourd’hui 2,4 milliards d’euros et qui représente 13 % des emplois en Aquitaine. Si les activités

balnéaires sont prédominantes, nos côtes ont une influence forte sur le tourisme d’affaires (Bordeaux et Biarritz, principa-lement) et les métiers du bien-être et des soins (thalassothérapie et balnéothéra-pie). À noter enfin que l’Aquitaine est très prisée pour ses pistes cyclables en bordure d’océan, au sein d’une région qui a conservé son esprit « nature ». C’est la raison pour laquelle, notamment, elle est considérée historiquement comme le point de départ du naturisme en France.

« L’homme n’a exploré que 5% des fonds marins. Un à dix millions d’espèces se cacheraient au fond des océans. »

L’océan, première motivation touristique !

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Flashez ce code pour accéder à l’étude prospective.

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L’AQUITAINE N°55 HIVER 2015

L ’éolien off-shore est la plus connue des énergies marines renouvelables ac-

tuelles. Cette technologie ré-sulte de l’adaptation en mer des techniques employées sur terre. Au fil du temps, les procédés se sont adaptés au cadre marin. Résultat : ce dis-positif mature est aujourd’hui le plus développé dans le monde. À terme, il pourrait

contribuer à une production d’énergie renouvelable si-gnificative. Actuellement, la

technique de l’éolien « posé » est à l’étude dans le Nord-Mé-doc. Elle représente un poten-tiel de 450 MWh/an. L’éolien flottant*, de son côté, n’a pas encore donné lieu à projet. Un jour prochain peut-être.

Des vagues d’énergies Les vagues, chères aux sur-feurs, pourraient être aussi exploitées grâce à l’énergie houlomotrice. Les experts

estiment que des installations pour-raient bien fonc-tionner prioritaire-ment dans le sud de l’Aquitaine. À long terme, les résultats

dépasseraient même l’éolien offshore. Autre solution avec l’énergie des courants. Le

principe consiste à transfor-mer la force des marées et des courants océaniques en élec-tricité ou fluide sous pression, grâce à des turbines appelées « hydroliennes ». Une éner-gie qui présente l’avantage d’être disponible sans inter-ruption, puisque l’activité des courants est permanente. Un site d’essai fortement soute-nu notamment par la Région Aquitaine verra très prochai-nement le jour sous le Pont de Pierre à Bordeaux** et ses résultats seront suivis avec beaucoup d’attention. Autant de marchés potentiels, vec-teurs d’activités économiques et d’emplois, qui intéressent notre Région. Elle s’y engage fortement en se rapprochant des autres territoires leaders

en la matière comme la Bre-tagne, les Pays de la Loire, la Haute et la Basse-Normandie. Une façon de mutualiser les expériences des régions et de développer plus rapidement la filière en termes de développe-ment industriel, de recherche et développement, de forma-tion professionnelle, d’ingé-nierie financière, de coopé-ration ou de lobbying auprès des instances nationales et européennes. Cela représente beaucoup de travail mais ce n’est pas non plus la mer à boire. Juste à exploiter… //

* Il présente l’intérêt d’aller chercher les vents forts au-delà de la zone dite « des 12 milles ».** SEENEOH : Site expérimental estuarien national pour l’essai et l’optimisation d’hydroliennes.

ÉNERGIES MARINES RENOUVELABLES Notre région, baignée par l’Atlantique, dispose d’un réservoir énergétique au potentiel sous-exploité : l’océan. Quelles énergies peut-on produire grâce à la mer aujourd’hui et plus encore demain ?

Le vivier des énergies bleues

SPÉCIAL OCÉAN08

Des innovations en devenirD’autres technologies en lien avec la création d’énergies marines renouvelables existent mais ne sont pas les plus adaptées à l’Aquitaine. L’énergie marémotrice : elle exploite l’énergie de la marée, c’est-à-dire l’énergie liée à la diffé-rence de niveau entre deux masses d’eau.L’énergie thermique des mers : issue de la capacité calorifique d’une masse d’eau de mer, elle serait utilisée pour des réseaux de chaleur à des fins de climatisation (eau froide profonde) ou de chauf-fage (eau de mer tempé-rée). Et l’énergie osmo-tique, qui, dans les estuaires, exploite la pression hydrostatique apparaissant lors de la mise en contact d’eau de mer et d’eau douce.

Quelle stratégie en Aquitaine ?Comment transformer une vision politique en action économique pour le développement de l’économie bleue ? Alain Rousset a présenté les nombreuses actions de notre région pour dynamiser la recherche et valoriser la mise en œuvre d’actions en ce sens, au dernier forum BioMarine au Portugal en présence de 300 personnalités politiques, écologiques et écono-miques du monde entier. Le président du Conseil régional, vice- président de la Commission Arc Atlantique, œuvre pour que l’Aquitaine soit le fer de lance dans ces nouveaux gisements de croissance. Notre Région participe, à ce titre, à un projet européen de création d’un cluster* des énergies marines renouvelables baptisé Atlantic Power Cluster.

* Réseaux d’entreprises re-groupées autour d’une même thématique, en l’occurrence, ici, les énergies marines renouvelables.

« En deux ans, l’économie bleue a vu naître 50 000 emplois en Europe. Elle pourrait en créer 7 millions d’ici à 2020. »

La société Blue Shark Power System, soutenue à hauteur de 618 730 e par la Région, fait réaliser son

nouveau prototype d’hydrolienne en Aquitaine.

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