Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

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connaître pour mieux protéger

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Les opinions exprimées dans cette publication ne reflètent pas nécessairementcelles de The Pew Charitable Trusts. Le présent ouvrage a pu être publié grâceà un soutien financier de The Pew Charitable Trusts.

droits d’auteur © Institut Récifs Coralliens Pacifique, CRIOBE et The Pew Charitable Trusts. 2015.La reproduction de cette publication à des fins non commerciales, notammentéducatives, est permise sans autorisation écrite préalable du détenteur des droitsd’auteur à condition que la source soit dûment citée.

citation OUVRAGE : Salvat B., Bambridge T., Tanret D. et Petit J., 2015. Environnement marin des îles Australes, Polynésie française. Institut Récifs Coralliens Pacifique, CRIOBE et The Pew Charitable Trusts Polynésie française. ISBN 978-2-905630-08-7, EAN 9782905630087.Polynésie française, Tahiti, p. 342

ARTICLE DANS L’OUVRAGE : Nom, Initial prénom. 2015. – Titre de l’article.In : Salvat B., Bambridge T., Tanret D. et Petit J., 2015. Environnement marin des îles Australes, Polynésie française. Institut Récifs Coralliens Pacifique, CRIOBE et The Pew Charitable Trusts Polynésie française. ISBN 978-2-905630-08-7, EAN 9782905630087. Polynésie française, Tahiti, p. XX-YY

disponible sur http://www.ircp.pf/wp-content/uploads/EnvironnementMarinDesIlesAustrales_IRCP_CRIOBE_PEW.pdf

graphismeMme Carotte

impressionSTP Multipress, labellisé IMPRIM'VERT. Ouvrage imprimé à Tahiti, sur du papier écologique avec des encres végétales.

crédits

Chants traditionnels lors de la journée de l’océan à Raivavae, 2014.

© Donatien Tanret

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SOMMAIRE

Histoire et cuLture Liée à L'océan des îLes austraLes

La vie au-delà du récif : la route des baleines et autres influences maritimes dans la vie des îles Australes..............(D'Arcy P.)

Les transformations des relations des habitants des Australes au grand océan (Moana) durant le XIXe siècle .........................................................................................(Bambridge T.)

L'Océan comme lien social..............................................................................................................................(Degrémont M., Hopuu T. et Opuu H.)

Expédition sur les pratiques culturelles et représentations de l’océan aux Australes..........(Bambridge T. et Degrémont M.)

Rapa dans le grand Océan ...............................................................................................................................(Ghasarian C.)

Le Rahui à Rapa : une mesure de préservation communautaire des ressources marines ......................................(Petit J., Du Prel P. et Laitame T..)

usages et pressions sur Le patrimoine marin des îLes austraLes

Démographie et économie de l’archipel des Australes .......................................................................(Couraud P.)

La pêche côtière aux Australes .....................................................................................................................(Stein A.)

La pêche hauturière pélagique et démersale autour de l’archipel des Australes....................(Misselis C. et Ponsonnet C.)

Le tourisme et les activités marines aux Australes...............................................................................(Claridge E.)

Le whale-watching aux Australes, une activité écotouristique en plein essor...........................(Benet A.)

Expédition whale-watching aux Australes................................................................................................(Benet A., PROGEM)

Les pressions et les pollutions sur le milieu marin aux Australes..................................................(Verducci M.)

Les îLes austraLes : éLéments de syntHèse issus de L’anaLyse écorégionaLe marine de La poLynésie française 2010......................................................(Duron S.-D., Brugneaux C. et Charles M.)

syntHèse des intérêts patrimoniaux de L’environnement marin des îLes austraLes(Salvat B., Tanret D., Bambridge T. et Petit J.)

Synthèse des intérêts et enjeux patrimoniaux à l’échelle de l’archipel .......................................Hiérarchisation des intérêts patrimoniaux par île.................................................................................Synthèse des intérêts patrimoniaux par île..............................................................................................

concLusion ........................................................................................................................................................(Salvat B., Bambridge T., Tanret D. et Petit J.)

contributeurs..................................................................................................................................................

avant-propos(Petit J. et Tanret D.)....................................................................................................................................................

résumé exécutif (Salvat B., Bambridge T., Tanret D. et Petit J.)............................................................................................................

introduction(Salvat B., Bambridge T., Tanret D. et Petit J.)............................................................................................................

Le patrimoine natureL marin des îLes austraLes

Naissance et évolution géologique des îles Australes .......................................................................(Montaggioni L.)

Le climat aux Australes....................................................................................................................................(Laurent V.)

Contexte océanographique de l’archipel des Australes ......................................................................(Maamaatuaiahutapu K.)

La biodiversité côtière des îles Australes..................................................................................................(Lison de Loma T.)

La biodiversité du pelagos et du benthos profond dans l’archipel des Australes ....................(Misselis T. et Ponsonnet C.)

Les ressources minérales de l’océan profond des Australes............................................................(Salvat B.)

Les tortues marines des îles Australes, espèces emblématiques de la conservation...........(Petit M. et Gaspard C.)

Expédition scientifique au sud des Australes et aux Gambier .........................................................(Connell A. et Sim-Smith C.)

Les cétacés des îles Australes et l’emblématique baleine à bosse................................................(Poole M.)

Les requins et raies des îles Australes, espèces emblématiques de la conservation............(Mourrier J. et Planes S.)

Les oiseaux marins reproducteurs des îles Australes.........................................................................(Raust P.)

Biodiversité marine de Rapa et Marotiri : les îles du bout du monde.............................................(Friedlander A. et al.)

Expédition National Geographic à Rapa et Marotiri .............................................................................(Friedlander A. et Rose P.)

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avant propos

bilan soit le plus complet et le plus participatifpossible. Au-delà de la description des intérêtsécologiques de ces îles, il nous semblait importantde présenter les intérêts culturels et les enjeuxsocio-économiques associés à l’environnementmarin, pour replacer l’homme au centre de sonenvironnement. Nous avons confié l’édition de cetouvrage à Bernard Salvat et Tamatoa Bambridge,reconnus pour leur grande expertise en matière debiologie marine et de culture polynésienne. Aveceux, nous avons identifié une trentaine d’expertsissus de centres de recherche, d’universités, deservices publics, d’associations et d’agencesenvironnementales, pour écrire ensemble cet étatdes lieux. Nous avons privilégié l’expertise locale,tout en invitant certains experts internationaux àcontribuer à cet effort. Quatre expéditions deterrain aux Australes sont venues compléter lesdonnées disponibles dans la littérature scientifique.

Nous avons invité les auteurs et le public intéresséà commenter et à valider cet ouvrage à travers uneconférence de restitution à Papeete le 18 février 2015.

Nous espérons que cet état des lieux participatif etpluridisciplinaire sur l’environnement marin desAustrales offrira un socle de connaissance solidesur lequel pourront être définies des mesures deconservation adaptées par le gouvernement. Nousremercions les auteurs d’avoir accepté decontribuer à cet ouvrage. Nous remercionségalement les populations des Australes de nousavoir fait découvrir une partie des richesses de leurpatrimoine marin et nous leur dédions ce travail.

JÉRÔME PETIT ET DONATIEN TANRETThe Pew Charitable Trusts, Polynésie française

Face au déclin alarmant des stocks halieutiques dansle monde, à l’impact des pollutions, aux effets duchangement climatique, et à l’ensemble despressions qui pèsent sur les océans, tous les pays dela planète se sont accordés pour protéger une partiesignificative des océans dans le cadre de l’ONU ens’engageant à créer des grandes Aires MarinesProtégées (AMP). La communauté scientifiqueinternationale recommande une protection stricte de30% de chaque habitat marin pour offrir des zones derégénération aux écosystèmes et pour pouvoircontinuer de bénéficier durablement des services renduspar les milieux marins aux populations (UICN, 2014).

The Pew Charitable Trusts s’appuie sur le pouvoir dela connaissance pour tenter de résoudre certains desproblèmes les plus complexes de notre époque. Cetteorganisation non gouvernementale travaille dans denombreux pays dans le monde dans les domaines del’environnement, la santé et la recherche. Pourfavoriser la mise en œuvre des engagementsinternationaux de protection des océans, Pew s’estassocié à plusieurs bailleurs de fonds privés pourcréer le programme Héritage Mondial des Océans. Ceprogramme, implanté dans 13 sites dans le monde,vise à aider les gouvernements qui le souhaitent àcréer des grandes Aires Marines Protégées (AMP)dans les eaux sous leur juridiction. Le gouvernement de Polynésie française s’est engagéen novembre 2013 à protéger au moins 20% des eauxpolynésiennes d’ici 2020. A la même période, Pewa ouvert un bureau à Papeete pour aider legouvernement à remplir cet objectif avec l’ensemble

de la société civile. En Polynésie française, Pewfinance des projets de recherche, des expéditionsscientifiques, des projets de sensibilisation et deconsultation, en collaboration avec de nombreuxpartenaires publics et privés, pour stimuler uneréflexion commune sur la stratégie de conservationdu milieu marin du Pays.

En mai 2014, le gouvernement de Polynésie françaisea invité Pew à travailler spécifiquement sur l’archipeldes Australes. Pew a été convié à proposer, dans unpremier temps, un état des lieux scientifique surl’environnement marin des Australes et, dans undeuxième temps, une stratégie de gestion pour cetarchipel. Les îles Australes présentent desopportunités de conservation majeures, avec unerichesse extraordinaire des écosystèmes marins et unintérêt marqué de la population des îles pour laprotection de leur patrimoine. De juin à décembre2014, les conseils municipaux des cinq îles habitéesdes Australes ont voté une délibération appelant à lacréation d’une grande AMP dans les eaux de leurarchipel. Le gouvernement a entendu ce message etannoncé en novembre 2014 la création future d’unegrande AMP dans les eaux des Australes, lors duCongrès Mondial des Parcs à Sydney. Cet engagementa été repris dans le document politique international« la promesse de Sydney».

Le présent ouvrage vise à répondre à la premièrerequête du gouvernement polynésien, l’élaborationd’un état des lieux scientifique sur l’environnementmarin des Australes. Nous avons souhaité que ce

Élèves de l’école de Rimatara participant à un atelier pédagogique de sensibilisation à la gestion durable de l’océan. © Jerome Petit

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Pêche côtière en pirogue traditionnelle, à Rimatara.© Jérôme Petit

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BERNARD SALVAT ET TAMATOA BAMBRIDGE Institut Récifs Coralliens Pacifique, CRIOBE, Moorea, Polynésie française

DONATIEN TANRET ET JÉRÔME PETITThe Pew Charitable Trusts Héritage, Polynésie française

Le gouvernement de Polynésie française s’estengagé en novembre 2013 à protéger au moins 20%des eaux polynésiennes d’ici 2020. En juin 2014, plusde 50 associations de Polynésie française ontsoutenu cet objectif à travers le message de lapirogue Hokule’a. Les îles Australes présentent desopportunités de conservation majeures, avec unerichesse extraordinaire des écosystèmes marins etun intérêt marqué de la population des îles pour laprotection de leur patrimoine. De juin à décembre2014, les conseils municipaux des cinq îles habitéesdes Australes ont voté une délibération appelant à lacréation d’une grande Aire Marine Protégée (AMP)dans les eaux de leur archipel. Le gouvernement aentendu ce message et annoncé en novembre 2014la création future d’une grande AMP dans les eauxdes Australes, lors du Congrès Mondial des Parcs àSydney. En mai 2014, le gouvernement de Polynésiefrançaise a invité The Pew Charitable Trusts àtravailler sur un état des lieux scientifique del’environnement marin des Australes ; le présentouvrage vise à répondre à cette requête. L’objectif dece rapport est d’établir un diagnostic détaillé etpartagé des connaissances disponibles sur le milieumarin de l’archipel des Australes, du littoral jusqu’àl’océan du large, et des relations entre les insulairesdes Australes et leur environnement marin. Cet étatdes lieux participatif et pluridisciplinaire offrira unsocle de connaissance solide sur lequel pourront êtredéfinies des mesures de conservation adaptées, parle gouvernement et les populations locales.

résumé exécutif

Élèves de l’école élémentaire de Raivavae rassemblés pour la journée de l’océan aux Australes, 2014.

© Donatien Tanret

LES CINQ COMMUNES DES AUSTRALES ONT VOTÉ EN 2014 UNE DÉLIBÉRATION APPELANT À LA CRÉATION D’UNE

GRANDE AIRE MARINE PROTÉGÉE DANS LES EAUX DE L’ARCHIPEL.

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méthodologie

L’édition de cet état des lieux soutenu par Pew a étéconfiée au CRIOBE-IRCP de Moorea. Une trentained’experts locaux et internationaux, issus de centresde recherche, d’universités, de services publics,d’associations et d’agences environnementales, ont étésollicités pour écrire un article dans cet ouvrage selonleur domaine d’expertise. Ce diagnostic se terminepar une synthèse qui met en avant les élémentstransversaux qui ressortent des articles. Quatreexpéditions de terrain aux Australes sont venuescompléter les données disponibles dans la littératurescientifique : une expédition d’inventaire biologique

organisée par la National Geographic Society à Rapa etMarotiri, une autre menée par le Museum d’Auckland(Nouvelle Zélande), une mission d’analyse des liensentre l’homme et l’océan organisée par le Service de laCulture et du Patrimoine de Polynésie française enassociation avec l’IRD et le CRIOBE-IRCP, et enfin, unemission sur les mammifères marins menée parl’agence PROGEM en partenariat avec la Direction del’environnement de Polynésie française. Les auteursdes articles et le public intéressé ont été invités àcommenter et à valider l’ensemble de l’ouvrage à traversune conférence de restitution à Papeete le 18 février 2015.

intérêts écologiques de l’environnement marin des australes

Le patrimoine naturel des îles Australes est caractérisépar une originalité et une diversité remarquable desécosystèmes marins. L’archipel offre une diversitégéomorphologique unique allant des îles volcaniquesrécentes sans lagon (Rapa et les îlots Marotiri), à des îlesavec un large lagon (Tubuai et Raivavae), jusqu’à un profild’atoll (Maria), en passant par des îles soulevées par uneseconde phase d’activité volcanique (Rurutu et Rimatara).Ces caractéristiques géomorphologiques extrêmementvariées et le climat particulier des Australes, entre zonetropicale et zone tempérée, ont offert à ces îles deshabitats et des écosystèmes marins particuliers, sedistinguant des autres archipels de Polynésie française, etprésentant parfois des similitudes avec les îles Cook,Pitcairn et les Gambier. L’isolement des îles leur confèreun taux d’endémisme particulièrement élevé pour certainsgroupes d’espèces comme les mollusques, les algues, lescoraux et les poissons. Le groupe des mollusques parexemple compte 455 espèces aux Australes dont 98 sontendémiques de l’archipel, soit un taux d’endémisme deplus de 20%. L’île de Rapa est un véritable point chaud dela biodiversité marine avec 112 espèces de coraux (sur les170 espèces recensées en Polynésie française), 250espèces de mollusques et 383 espèces de poissonscôtiers, dont 10% sont endémiques de l’île. La faunepélagique et démersale de l’archipel est remarquable avecplus de 60 espèces de pélagiques, 45 espèces de poissonsdes profondeurs recensées à ce jour et une productionprimaire importante. Les populations des espèces cibléespar la pêche hauturière comme les thons et les espadonssont encore préservées, du fait d’une pression de pêchetrès limitée, voire nulle au sud de l’archipel. Les

Australes se démarquent par l’abondance de certainesespèces pélagiques comme les espadons, les marlins,et les saumons des dieux. On note aussi une richesseen espèces emblématiques avec 3 espèces de tortuesmarines, 10 espèces de mammifères marins, 14espèces de requins et 4 espèces de raies. Là encore,les Australes présentent certaines particularitésremarquables, avec la présence du requin desGalápagos uniquement aux Australes et aux Gambier,une petite population de baleines à bosse commune auxîles de la Société et aux Tuamotu qui fréquente chaqueannée le large des côtes des îles Australes, et des sitesde pontes de tortues vertes recensées dans plusieursîles. L’archipel comprend l’assemblage d’oiseauxmarins le plus diversifié de Polynésie française, avec 23espèces reproductrices sur les 28 que compte laPolynésie française. Enfin, la biodiversité marine des 42monts sous-marins de l’archipel est encore peu connuemais témoigne d’une singulière biodiversité et d’uneétonnante richesse. Les expéditions scientifiques réalisées en 2014 à Rapaet Marotiri ont confirmé l’intérêt du patrimoine marinet le fort niveau d’endémisme des Australes. Lesconnaissances sur le milieu marin des cinq îles du nordde l’archipel et des monts sous-marins sont encore àapprofondir pour pouvoir mesurer avec précision toutela richesse et l’originalité de la biodiversité de l’archipel.Au niveau scientifique, le relatif isolement de ces îlesméridionales, le fort endémisme de la faune et laflore côtière et leur bon état de préservation enfont un site d’intérêt particulier pour l’observation deschangements climatiques en cours et à venir.

Expédition scientifique à Rapa et Marotiri menée par la National Géographic Society en partenariat avec Pew Polynésie française.© Jérôme Petit

Pirogue de pêche côtière artisanale à Rimatara.© Jérôme Petit

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Le patrimoine culturel des Australes lié au grandOcéan est tout aussi remarquable que leur patrimoinenaturel sur bien des aspects. Plusieurs espècesemblématiques (tortue, requin, baleine) sontcentrales dans les cosmogonies des Australes etapparaissent comme des piliers du rapport société-culture-environnement. Le patrimoine culturel esttopo-centré avec des noms de lieux sur la terre, lelagon, les récifs. Certains hauts fonds sont intégrés àl’histoire d’une communauté, d’une chefferie, voired’une île ou d’un archipel. À cet ancrage territorial,s’ajoute une dimension de circularité : la route desbaleines et d’autres pélagiques, l’apparition d’unebaleine ou d’un requin pour aider le voyageurégaré, témoignent d’une vision de l’océan commereliant les familles élargies, les chefferies, voire larégion, et mettant en connexion les Australes,Aoearoa/Nouvelle-Zélande, les archipels des Cook etde la Société. La période des contacts, les influencesreligieuses, politiques et économiques qui ontinfluencé, voire bouleversé les organisations socialesinsulaires aux Australes, n’ont pourtant pas mis unterme à la relation très proche de ces habitants vis à visde l’océan, qui fait partie intégrante de leur mode de vie. Comme dans l’ensemble de la Polynésie orientale, leshabitants des Australes ont compris l’importance deleur culture insulaire et sont engagés depuis le débutdes années 2000 dans une quête identitaire etculturelle qui vise à réhabiliter, voire réinstaurer despratiques longtemps mises de côté mais quiconcourent à une meilleure intégration de leursrelations entre la culture et l’environnement. Il en

est ainsi du rahui (interdiction temporaire sur uneressource ou un territoire) remis en place à Rapa, etencore présent à Rimatara et Rurutu. À Rapa, laréintroduction du rahui marin dans les années 1980s’est largement inspirée du rahui polynésientraditionnel, avec certains aménagements liés à desinfluences extérieures, mais aussi liés au nouveaucontexte social et aux besoins environnementaux del’île. Le rahui de Rapa est solidement ancré à laculture traditionnelle polynésienne, et c’est sansdoute une des raisons pour lesquelles il sembleefficace pour gérer collectivement les ressourcesmarines de l’île. Même si son rétablissement a étédifficile au départ, les habitants de Rapa sontmaintenant unanimement satisfaits et fiers de cemécanisme de gestion unique et espèrent qu’il pourraservir de modèle pour d’autre îles ou archipels dePolynésie française.Les enquêtes ethnologiques en octobre 2014 qui ontassocié le CRIOBE, le Service de la Culture et duPatrimoine, l’IRD et Pew, confirment la granderichesse du patrimoine marin culturel des Australeset soulignent la nécessité de mieux comprendreaujourd’hui les articulations entre les différentséléments de ce patrimoine à des échelles insulairesdistinctes, notamment entre les îles Cook et les îlesAustrales. Elles confirment que le rapport à l’océan(Moana) s’inscrit d’abord dans une relationgénéalogique aux Australes, et que les communautéslocales disposent d’une légitimité historique pours’exprimer face aux enjeux relatifs à la préservation(paruru) et à l’exploitation de leur océan.

aspects culturels du patrimoine marin des australes

enjeux socio-économiques de l’environnement marin des australes

L’administration publique et l’agriculture sont lespremiers secteurs d’activité des Australes, cependantla pêche côtière et lagonaire a également un poidssignificatif dans l’économie avec 49 professionnelset environ 1 600 pêcheurs non professionnels quiexercent la pêche en activité annexe.L’autoconsommation reste une pratique essentielledans l’économie des Australes avec plus de la moitiéde la consommation totale provenant des activités del’agriculture, de la pêche et de l’artisanat. Tubuai et

Raivavae disposent d’un vaste lagon, propice à lapêche récifale et à l’exploitation de la chair debénitiers, tandis que Rurutu, Rimatara et Rapa ontdiversifié leur pêcherie en exploitant plus densémentles ressources en invertébrés récifaux ainsi que dularge et des habitats profonds. Malgré les pressionsexercées par les pêcheries internationales sur lesprincipales espèces commerciales à l’extérieur de laZEE, l’archipel des Australes présente une faunepélagique diverse et abondante encore largement

préservée. La pêcherie polynésienne y est peudéveloppée malgré l’abondance relative de thonblanc, marlins et espadons, essentiellement du faitdes conditions météorologiques rudes, de l’absencede zone de repli pour les bateaux au sud de 20°S,et des longues distances à parcourir rendantl’exploitation peu rentable. Les pêcheries étrangèresde thons blancs et d’espadons fréquentent lesabords Sud de la zone économique à certainespériodes de l’année. L’écotourisme se développe aux Australes et s’ouvreprogressivement aux touristes internationaux.L’observation des baleines à bosse, une activité enplein essor aux Australes, fait déjà la réputation deRurutu. La mission sur le whale-watching, menée enseptembre 2014 par PROGEM, a permis de compléterl’inventaire des mammifères marins des îlesAustrales et de présenter aux prestataires lesréglementations pour l’approche des cétacés, afind’éviter une pression trop forte sur les animaux etd’assurer une durabilité de l’activité. À Raivavae, uneassociation d’écotourisme a développé un conceptintéressant d’accueil communautaire des visiteurs

par les familles de l’île, pour leur faire découvrir lemode de vie insulaire et les traditions locales. Les pressions sur le milieu marin aux Australes seconcentrent essentiellement sur les récifs coralliens,victimes de perturbations d’origine naturelle tellesque cyclones et infestations d’étoile de mercorallivore, ou de dégradations anthropiques telsque déroctages et remblais pour l’aménagementd’équipements. L’exploitation des ressources récifaleset côtières tient une place prépondérante dansl’économie locale, mais son impact reste jusqu’àaujourd’hui modéré.

Pêche collective réalisée lors de la levée du rahui de Rapa, système traditionnel polynésien rétabli sur l’île pour exploiter etpréserver durablement les ressources marines.© Ruben Kuevidjen

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Cet état des lieux a permis de mettre en avant lesintérêts écologiques et les enjeux socio-économiquesà l’échelle de l’archipel puis à l’échelle de chaque île.Dans la synthèse de l’ouvrage, une hiérarchisation deces intérêts et des enjeux a été réalisée sur la based’une matrice de scores agrégés pour chaque île,comprenant des critères multiples tels que lagéomorphologie, les coraux, les poissons côtiers, etc.(pour les intérêts écologiques) et la pêche lagonaire,le tourisme, etc. (pour les enjeux socio-économiques).Cette hiérarchisation permet d’identifier les îles àenjeux de conservation et de gestion prioritaires. Il enressort que l’île de Rapa et les îlots de Marotiriprésentent un intérêt écologique particulièrementremarquable, de par l’originalité et l’endémisme dela faune et l’avifaune. Ces îles représentent une

priorité de conservation. Rurutu et Tubuai présententles enjeux socio-économiques les plus élevés del’archipel du fait d’une densité d’habitant par km2 derécif plus importante, une production de pêchelagonaire et côtière plus élevée, et des pressions desactivités littorales et agricoles sur les ressourcesmarines plus fortes. Ces îles nécessiteront des effortsde gestion des pressions liées au milieu marin plusimportants. Raivavae et Rimatara présentent unintérêt écologique notable avec des enjeux de gestionmodérés. Enfin, les îlots de Marotiri et l’atoll de Mariase démarquent par des impacts sur les ressourcesmarines faibles à très faibles et un milieu naturelencore riche et particulièrement préservé. Ces îlesinhabitées présentent également une opportunité uniquepour la conservation du milieu marin.

intérêts patrimoniaux par île

conclusion

Cet ouvrage offre un premier bilan de l’environnementmarin des Australes. Par une approche transversaleet pluridisciplinaire, il décrit le milieu naturel marinde ces îles, mais aussi les liens entre les populationset leur environnement marin. Il est le fruit des travauxde plus de trente experts locaux et internationaux,issus du secteur public et privé, à travers une initiativede collaboration unique et une approche ouvertementparticipative. Les quatre expéditions scientifiquesréalisées dans le cadre de ce diagnostic ont permisune mise à jour des données existantes et uneconfrontation de la littérature scientifique auxobservations du terrain.

Cet ouvrage confirme que l’archipel des Australes,bien peu connu du public, se distingue des autresarchipels de Polynésie française par l’originalité etl’état de préservation de son patrimoine naturelmarin et par la richesse et la vivacité de laculture locale liée au grand Océan. Un domaineocéanique d’un million de km2, une positiongéographique subtropicale, des caractéristiquesgéomorphologiques extrêmement variées, un fortendémisme de la biodiversité côtière, des espècesemblématiques remarquables, une faune pélagiquediversifiée, un rahui structuré et respecté : chaque île

des Australes détient ses spécificités propres dufait de ses richesses naturelles ou de son identitéculturelle, et l’archipel dans son ensemble offre uneopportunité de conservation unique.

Suite à l’appel des communes des Australes et àl’engagement du gouvernement pour la créationd’une grande Aire Marine Protégée aux Australes, cetouvrage constitue un état des lieux préliminaire,nécessaire à la définition de stratégies deconservation. Ces données offriront une base deconnaissance aux populations locales et augouvernement pour élaborer un projet deconservation adapté aux besoins locaux et aux réalitésdu terrain. À n’en pas douter, la mise en place demesures de gestion durable et de conservation del’espace océanique des Australes sera un des enjeuxde la décennie à venir pour l’archipel.

La synthèse présentée dans l’ouvrage a également permis de tirer les conclusions suivantes pour chaqueîle de l’archipel :

- Situés en bordure de zone tropicale, soumis à desconditions hydro-climatiques particulières, l’île deRapa et les îlots de Marotiri constituent un enjeu deconservation prioritaire par leur biodiversité côtièreparticulièrement riche, un endémisme élevé, unefaune pélagique diverse et abondante et descommunautés récifales originales. Rapa présenteégalement un intérêt culturel majeur, notammentavec la réintroduction d’un rahui depuis 30 ans, pourgérer durablement et de manière collective lesressources marines de l’île. Le rahui de Rapa estcentral dans la culture locale et sa notoriété rayonnesur l’ensemble de la Polynésie française.

- Le milieu marin de Raivavae présente un intérêtécologique notable avec son grand lagon, unimportant peuplement de bénitiers et descommunautés lagonaires et récifales variées.L’avifaune est particulièrement riche avec 14 espècesd’oiseaux marins reproductrices classées sur la listerouge de l’UICN. Le patrimoine naturel et culturelpréservé de Raivavae est également un atout pour ledéveloppement de l’écotourisme.

- Le patrimoine marin de Tubuai présente un intérêtécologique majeur et des enjeux socio-économiquesimportants. Cette île se distingue par une faunecorallienne plus riche que dans le reste de l’archipel

et une diversité de poissons lagonaires remarquable,en raison de son très grand lagon. Son stocknaturel de bénitiers est considérable, estimé à unecinquantaine de millions d’individus. L’exploitation dela chair de bénitiers est devenue la spécialité depêche lagonaire de l’île. Les motus de Tubuai offrentdes sites de ponte pour les tortues vertes. Face à unediminution des ressources marines observée, denombreux pêcheurs souhaiteraient rétablir unsystème de rahui pour préserver les stocks depoissons et bénitiers de Tubuai.

- L’île de Rurutu se distingue par sa géomorphologieparticulière avec un relief soulevé de type Makatea etdes falaises hautes de 70 mètres bordées par un étroitrécif frangeant. C’est à Rurutu qu’on observe le plusde mammifères marins et de requins aux Australes.Le whale-watching est devenu le moteur dudéveloppement écotouristique de l’île, qui accueilleenviron un millier de visiteurs par an. La pression dela pêche sur les ressources côtières est plusimportante à Rurutu que dans les autres îles desAustrales, du fait d’une superficie récifale réduite etde la population la plus élevée de l’archipel.

- L’île de Rimatara présente une faible superficierécifo-lagonaire. Elle se distingue des autres îles del’archipel par sa proximité géographique, culturelle et

traditionnelle avec les îles Cook. Le patrimoineculturel lié au grand Océan est riche et satransmission perdure dans la tradition orale commedans les mesures de préservation collective desressources marines.

- L’atoll de Maria, à l’extrémité ouest de l’archipel,présente un intérêt écologique majeur de parses caractéristiques géomorphologiques et sespeuplements récifaux et lagonaires spécifiques.C’est le seul atoll des Australes, le plus occidental dePolynésie française avec l’atoll de Scilly dans les îlesde la Société et l’un des plus méridionaux. Cette îleinhabitée, préservée de toutes activités humaines, estun havre de conservation naturelle dans un secteurocéanique qui ne fait pratiquement l’objet d’aucunepêche de pélagique. C’est aussi un lien géographique

et culturel entre les îles Australes et les îles Cook.

- Enfin, le vaste domaine océanique de l’archipel desAustrales est riche de 42 monts sous-marins ouhauts fonds, dont les sommets et les flancsconcentrent une biodiversité remarquable. Ces lieuxsont caractérisés par un fort taux d’endémisme desespèces de poissons et d’invertébrés. Ils concentrentnaturellement une forte abondance d’espècespélagiques également. La pêche palangrière y estquasiment nulle, mais certains hauts fonds prochesdes îles habitées sont prospectés occasionnellementpar les pêcheurs locaux.

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Les îles Australes, l’archipel des Australes… C’estl’archipel méridional du Pays. Ce sont les îles quiregardent vers le sud, la fraicheur, le vent, une mersouvent houleuse et un environnement subtropical.C’est le dernier archipel du Pays colonisé par lesPolynésiens il y a un millénaire environ. C’est aussi ledernier archipel à s’ouvrir au tourisme. C’est l’île deRapa, l’île du bout du monde qui ne peut être abordéeque par bateau, pleine de mystères.

Un chapelet d’îles, presque alignées mais distantesles unes des autres, se succèdent sur 1 300kilomètres depuis les rochers de Marotiri au sud-està l’île basse corallienne de Maria au nord-ouest(figure 1). Avec les îles Cook du Sud, c’est une fratried’îles nées dans la zone de remontée du magmaprofond proche du volcan sous-marin Mac Donald,actif depuis plus de 20 millions d’années. L’archipeldes Australes affiche un palmarès de diversitégéomorphologique unique (figures 2 à 8) allant del’atoll (Maria), aux îles volcaniques sans lagon (Rapaet les îlots Marotiri), aux îles avec larges lagons(Tubuai et Raivavae) et à des îles parfois régénéréeset soulevées par une seconde phase d’activitévolcanique au second point chaud de l’archipel, Arago(Rurutu et Rimatara). Parfois nommé îles Toubouaisur les anciennes cartes, le domaine marin desAustrales a une surface réduite si l’on s’attache aux

formations coralliennes plus ou moins développéesautour des îles, mais c’est un domaine immense sil’on considère le large qui représente environ unmillion de kilomètres carrés, soit un cinquième de lazone économique exclusive de la Polynésiefrançaise.

À l’exception de l’atoll de Maria et des rochers deMarotiri, les îles Australes sont habitées par unepopulation relativement réduite, avec un peu moinsde 7 000 habitants répartis sur cinq îles habitées, soit2,5% de la population du Pays. Malgré une pressiondémographique faible comparativement à d’autresarchipels, les activités liées à la mer sont au centrede l’économie de ces îles. Elles relèvent de la pêchepour la consommation locale, mais aussi de certainesexportations vers Tahiti, ainsi que des activitésculturelles et économiques comme le tourisme. Surle plan culturel, les insulaires des Australesappartiennent à la grande famille austronésienne.Quatre dialectes y sont recensés (le rurutu, leraivavae, le rapa et le tahitien pratiqué à Tubuai etRimatara). Les Australes font également parti d’unensemble culturel, historique et régional plus vastepuisque les relations régulières entre les insulairesdes îles sont connues avec les îles de la Société et lesîles Cook, sans parler des relations occasionnellesavec Mangareva.

INTRODUCTION

FIGURE 1 : Carte de l’archipel des Australes.

18

BERNARD SALVAT ET TAMATOA BAMBRIDGE Institut Récifs Coralliens Pacifique, CRIOBE, Moorea, Polynésie française

DONATIEN TANRET ET JÉRÔME PETIT The Pew Charitable Trusts, Polynésie française

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2120

Dans cet ouvrage, nous avons voulu établir un bilandétaillé et partagé des connaissances disponibles surle milieu marin de l’archipel des Australes, du littoraljusqu’à l’océan du large, et des relations entre lesinsulaires des Australes et leur environnement marin,au-delà de la barrière de récif, espace que les gensdes Australes nomment «Moana». Nous avonssouhaité que cet état des lieux ne dissocie pasl’homme et l’environnement dans lequel il vit. C’estpour cette raison que trois parties aborderontsuccessivement le milieu naturel, la culture despopulations et les activités humaines associés àl’environnement marin. Pour chacune des troisparties, nous avons sollicité plusieurs experts locaux,nationaux et internationaux pour rédiger un articlescientifique dans leur domaine de compétence. Cebilan pluridisciplinaire des connaissances, composéd’une vingtaine d’articles, se termine par unesynthèse qui met en avant les éléments transversauxqui ressortent dans les articles écrits par les experts,au niveau de l’archipel, puis au niveau de chaqueîle. Cette synthèse présente également unehiérarchisation des intérêts patrimoniaux et desenjeux de gestion des îles. Les textes du présentouvrage ont été revus par l’ensemble des auteurs etdiscutés lors d’une conférence de restitution àPapeete le 18 février 2015 et lors de réunionspubliques à Rimatara, Rurutu, Tubuai et Raivavae,tenues en avril 2015. Une version préliminaire del’ouvrage a également été envoyée aux participantsdes conférences et au public intéressé pourcommenter et valider les écrits. Ces discussions nousont permis d’amender, de rectifier et de compléternos rédactions.

En 2010, une analyse éco-régionale marine dePolynésie française avait été réalisée par l’Agencedes Aires Marines Protégées en partenariat avec leWWF, le CRISP, et le Pays. Les principaux résultatsde cette étude pour l’archipel des Australes ont étérepris par l’Agence des Aires Marines Protégées etsont présentés pour mémoire avant la synthèse del’ouvrage.

Cet état des lieux détaillé rassemble pour la premièrefois la plupart des connaissances sur l’environnementmarin des Australes publiées dans des journauxscientifiques et dans des rapports techniques, maisaussi des données non publiées collectéesdirectement par des experts. Quatre expéditionsscientifiques réalisées dans le cadre de ce diagnostic

en partenariat avec Pew, sont venues compléter lesdonnées issues de la littérature avec de nouvellesdonnées de terrain. Une expédition pluridisciplinairede deux semaines organisée par la NationalGeographic Society a réuni une dizaine descientifiques à Rapa pour réaliser un inventaire de labiodiversité marine côtière. Une expédition menéepar le Museum d’Auckland de Nouvelle Zélande et leMuseum d’Australie a également permis de dresserun inventaire écologique du milieu marin de plusieursîles du sud des Australes et des Gambier. Une missiondu Service de la Culture et du Patrimoine de Polynésiefrançaise en association avec l’IRD, l’IRCP - CRIOBEet Pew a permis d’appréhender la culture liée àl’océan et ses représentations par les habitants desAustrales à Rimatara, Rurutu, Tubuai et Raivavae.Enfin, une mission réalisée par PROGEM a permisd’effectuer un état des lieux des activitésd’observation des baleines dans ces quatre îles. Cesexpéditions et missions entraineront plusieursarticles scientifiques ou rapport techniques quinécessitent encore un travail d’analyse des donnéesrecueillies, mais leurs premiers résultats sont déjàpubliés dans cet ouvrage. Des encarts présentant cesquatre missions complètent les articlescorrespondants.

Nous remercions vivement tous les auteurs ayantcontribué par leur compétence à cet ouvrage. Ils ontaccepté de se plier à certaines contraintes éditorialespour donner toute sa cohérence à l’ouvrage. Cetouvrage offre le premier bilan détaillé du patrimoinenaturel et culturel de l’environnement marin desAustrales. Il permettra par la suite de nourrir uneréflexion sur une stratégie de gestion et deconservation de ces ressources. Il propose undiagnostic complet pour travailler sur des mesuresde conservation de ce patrimoine dans le cadre d’undéveloppement durable et pour le bien-être despopulations de l’archipel. Ce sera une autre étape…

Expédition scientifique à Rapa, 2014. © Ian Skipworth

Conférence de restitution des résultats préliminaires de l’ouvrage sur l’environnement marin des Australes le 18 février 2015 à Papeete. © Donatien Tanret

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2322

FIGURE 5 - Image satellitaire IKONOS de 2005 de l’île de Tubuai.

FIGURE 4 - Image satellitaire IKONOS de 2005 de l’île de Rurutu.

FIGURE 2 - Image satellitaire IKONOS de 2005 de l’île de Maria.

FIGURE 3 - Image satellitaire IKONOS de 2005 de l’île de Rimatara.

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2524

FIGURE 8 - Image satellitaire IKONOS de 2005 des îlots de Marotiri.

FIGURE 7 - Image satellitaire IKONOS de 2005 de l’île de Rapa.

FIGURE 6 - Image satellitaire IKONOS de 2005 de l’île de Raivavae.

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le patrimoine naturel marin

des îles australes

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2928

Les Australes ont été édifiées à travers un(Rimatara ?, Rapa, Marotiri) ou plusieurs cycleséruptifs (Rurutu, Tubuai, Raevavae) entre 20 et1,2 Ma (millions d’années), le long de deuxalignements centrés respectivement sur lesvolcans sous-marins MacDonald et Arago(Tinomana). Les laves émises se rattachent à lalignée des magmas basiques (basaltes alcalins,foïdites), évoluant localement vers des termesplus différenciés (trachy-basaltes, trachytes).Dès 15 Ma, sur Rimatara, Rurutu et Raivavae, sedéveloppent des systèmes carbonatés à affinitérécifale, qui émergent à partir de 6,5 Ma.L’altération sub-aérienne transforme les rochesvolcaniques en sols principalement ferralitiqueset les calcaires en karsts. Des traces de hautsniveaux marins âgés de 125 000 et de moins de5 000 ans ont été localement identifiés. Lamorphologie récifale actuelle est l’expression dela tectonique locale: récif frangeant en modesoulevé, barrière ou plature submergée en modesubsident.

NAISSANCE ET ÉVOLUTION GÉOLOGIQUEDES ÎLES AUSTRALES

Vue aérienne de l’île de Raivavae entourée par son grand lagon.

© CRIOBE

DE L’ÎLE VOLCANIQUE RÉCENTE À L’ATOLL SURÉLEVÉ,

L’ARCHIPEL DES AUSTRALES OFFRE UNE DIVERSITÉ GÉOMORPHOLOGIQUE UNIQUE.

LUCIEN MONTAGGIONICentre Européen de Recherche et d’Enseignement en Géosciences, UMR-CNRS 7330, Aix-Marseille Université[email protected]

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3130

Les Australes appartiennent à la chaine volcaniquedite des « Australes–Cook », s’étendant sur plus de2 300 km entre le mont sous-marin Macdonald ausud-est, et l’atoll d’Aitutaki au nord-ouest (Figure 1).D’un âge compris entre 20 à environ 1,2 Ma (millionsd’années), ces îles reposent sur un plancherocéanique situé à une profondeur de 4 500 m environ,mis en place entre 80 et 35 Ma, et appartenant à laplaque lithosphérique «Pacifique». Cette plaque se

déplace vers le nord-ouest à la vitesse moyenne de11 cm/an. La chaine des Australes-Cook, orientéeESE-ONO, aurait été engendrée à partir de plusieurs«points chauds», zones lithosphériques à forteactivité volcanique induite par la remontée de magmasous la forme de panaches depuis le manteauterrestre profond. La Polynésie présente uneconcentration très élévée de points chauds,générateurs, non seulement des Australes et des Cook,

les australes, produits de points chauds

Bien que découvert dés la fin du XVIIIe siècle, lesAustrales n’attirèrent l’attention des géologuesqu’au début du XXe. Ce n’est qu’à partir des années1975 à 1980 qu’elles feront l’objet d’étudesgéologiques détaillées. À partir de 1990, lesrecherches se diversifient, intégrant les approchesgéochronologiques, pétrologiques, structurales etgéomorphologiques. Elles permettront de déterminerl’âge et l’origine des volcans insulaires et dereconstituer leur évolution physique (Tableau II) aucours des temps tertiaires et quaternaires (Tableau I).

ÎLES

SUPERFICIE (KM2)ALTITUDE MAXIMALE (M)DIAMÈTRE (KM)PÉRIMÈTRE (KM)TYPE INSULAIRE

PHASES D'ACTIVITÉ

FORMATIONS CARBONATÉESMIOCÈNES (MAKATEAS)RÉCIFS PLÉISTOCÉNESTENDANCE TECTONIQUERÉCIFS CORALLIENS

Volcans

Age

superficie (km2)

altitude (m)

altitude(m)

type

superficie (km2)

périmètre (km2)

profondeur (m)

rimatara

8,684

4,5 x 4,213

volcano-karstique

Uhau19,5 - 14,4

1,511

>10surrectionfrangeant

0,717<2

rurutu

32,75412

11,5 x 5,529

volcano-karstique

2Miocène

Pleistocène12,7 - 12,11,11 - 1,06

2,510015

surrectionfrangeant

2,8<2

tubuai

45422

7,5 x 5,526

volcanique

2Herani

Hanareho10,8 - 9,59,7 - 8,8

subsidencebarrière etfrangeant

8542

2-6 à 25

raivavae

17,94389 x 320

volcano-karstique

2Rairua

Anatonu10,6 - 7,46,4 - 5,4

<0,01200

surrectionbarrière et frangeant

5033

2 à 25

rapa

40,56509 x 755

volcanique

1Perau

6,0 - 4,10

subsidenceplatures

submergées NANA

15-50

marotiri

0,0431113

0,1 x 0,30,2 à 1

volcanique

NA

5,4 - 3,5

subsidenceplatures

submergéesNANA

15-50

maria

1,33

4 x 3,212,4

île basse,carbonatée

NA

>20

subsidenceatoll fermé

1,312,41 à 3

TABLEAU IIPrincipaux caractères physiques et géologiques des îles Australes.

TABLEAU I

Échelle simplifiée des temps géologiques, couvrant les derniers 85 millions d’années(période comprise entre la formation duplancher océanique supportant les Australes et le présent).

ÈRE

QUATERNAIRE

TERTIAIRE

SECONDAIRE

SÉRIE

HOLOCÈNEPLEISTOCÈNE

PLIOCÈNEMIOCÈNE OLIGOCÈNEEOCÈNE PALÉOCÈNE

CRÉTACÉ

âGE (millions d'années)

0 - 0,0100,010 - 1,80

1,80 - 5,35,3 - 23,5 23,5 - 3434 - 5353 - 65

65 - 135

mais aussi des archipels de la Société, des Marquiseset des Gambier. Cette activité serait en relation avecune vaste structure en forme de dôme, renfermantdu magma en fusion, appelée super-panache, etenracinée dans le manteau profond depuis plus de100 millions d’années. De ce super-panache, sedétacheraient périodiquement des «bulles» demagma fondu, sorte de mini-panaches, alimentantles points chauds. L’ascension des mini-panachesvers la surface serait facilitée par la pré-existenced’accidents et de zones de faiblesse au niveau dumanteau terrestre supérieur. Ce scénario expliqueraitle fait que plusieurs points chauds puissent fonctionnerde manière plus ou moins simultanée, comme c’est lecas pour la chaine des Australes-Cook. Concernant plus spécifiquement l’archipel desAustrales, il est généralement admis que saformation relèverait de l’activité de deux pointschauds, à l’origine de deux alignements distincts(Bonneville et al., 2002, 2006 ; Maury et al., 2013): (1)un premier alignement, dit « ligne de Tubuai»,incluant toutes les îles entre Mangaia au nord-ouestet Morotiri au sud-est, à savoir le socle volcanique del’atoll Maria, Rimatara, le volcan ancien de Rurutu,Tubuai, Raivavae, le mont sous-marin Président Thiers

et Rapa, en relation avec le point chaud du Macdonald ;(2) un second alignement, dit « ligne d’Atiu», incluantle mont sous-marin ZEP-2-12 et le volcan récent deRurutu, en relation avec le point chaud Arago (Figure 1).Le mini-panache actuellement situé à l’aplomb duvolcan Macdonald, serait actif depuis au moins 18 Ma,alors que celui alimentant le volcan sous-marin Aragoaurait commencé à fonctionner il y a moins de 10 Ma.Cependant, des anomalies par rapport au schémade fonctionnement standard des points chauds ontété constatées. Par exemple, l’hypothèse de deuxalignements distincts n’explique pas la quasi-synchronicité entre l’activité terminale de Raivavae(6.4 à 5.4 Ma) et la formation de Rapa (6.0 à 4.10 Ma).Pour Davies et Bunge (2006), ces apparentes anomaliespourraient être imputables au contôle tectoniqueexercé par les fractures majeures régionales. Eneffet, la chaine des Australes est affectée, dans sapartie centrale, par un accident majeur (dite « Zonede Fracture des Australes» ; Figure 1), considérécomme la cicatrice d’une ancienne faille qui entaillaitla ride médio-océanique de l’Est Pacifique. Cette zonede fracturation aurait été le siège d’un volcanismeintense vers 25 Ma, réactivé à partir de 2-1,5 Ma.

FIGURE 1

Carte bathymétrique simplifiée des îles Australes et Cook dans l’Océan Pacifique Sud, avec délimitation des zones volcaniquesalimentées respectivement par le point de chaud du Macdonald (ligne de Tubuai) et celui d’Arago (ligne d’Atiu). La vitesse dedérive de la plaque lithosphérique « pacifique » est indiquée. Modifié d’après Bonneville et al. (2002) et Maury et al. (2103).

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3332

Dans les Australes, les laves des volcans les plusanciens (Rimatara, Rurutu, Tubuai, Raivavae) ont unecomposition géochimique très originale, assez peurépandue dans les îles en position médio-océanique.Ces laves sont de type HIMU franc, c’est-à-dire richesen plomb radiogénique (HIMU pour High µ, µ étant lerapport 206Pb / 204Pb > 20,5) (Chauvel et al., 1992;Hanyu et al., 2013). En outre, ces laves sontappauvries en strontium radiogénique (87Sr / 86Srinférieur à 0,7030) et se différencient des autreslaves décrites dans la majorité des îles polynésiennes,par un enrichissement en fer, en oxydes demanganèse et de calcium, et un appauvrissement ensilice et phosphore. L’origine des laves HIMU seraità rechercher dans un processus de différenciationmagmatique complexe, impliquant une contaminationdu magma au contact de fragments d’une trèsancienne croûte océanique d’âge précambrien (1 à 2milliards d’années) qui aurait plongé dans le manteausous-jacent et y aurait été partiellement stockée etassimilée. La signature HIMU dans les laves deRimatara, Tubuai et les parties anciennes de Rurutuet de Raivavae semble s’être maintenue pendantenviron 11 millions d’années. Les laves émises il y a moins de 10 Ma offrent unesignature géochimique qui diffère nettement. Ainsi,les laves récentes de Rurutu et de Raivavae et l’île deTubuai offrent des rapports isotopiques du plombinférieurs à 20 et des rapports du strontium del’ordre de 0,7032. Ces laves sont de compositionintermédiaire entre les pôles HIMU et EM (EM pour«Enriched Mantle», source mantéllique enrichis enéléments hygromagmatophiles - potassium, césium,rubidium, strontium, baryum - préférentiellementmaintenus dans la phase liquide lors de lacristallisation des minéraux). Elles sont dites àsignature HIMU «atténuée». La signature du panachedu Macdonald aurait donc brutalement changé aprèsla formation de Tubuai, voire de Raivavae. Leurssources magmatiques auraient subi uneaugmentation du taux de fusion partielle ou unecontamination au contact de sédimentssilicoclastiques marins qui auraient été entrainésdans le manteau supérieur. En revanche, les îlesRapa et Morotiri, ainsi que le volcan actuelMacdonald, sont formées de laves de type EM franc.Leurs signatures isotopiques sont les suivantes :206 Pb / 204 Pb =18.9 à 19.5 ; 87Sr / 86 Sr = 0,7036.

Sur la base des données géochimiques, un schémaévolutif des îles Australes-Cook a été proposé parMaury et al. (2013). Il ya environ 20 Ma, un premiermini-panache serait à l’origine de la genèse d’unproto-Macdonald (Macdonald 1), donnant naissanceà l’île de Mangaia, puis à la « ligne volcanique deTubuai ». L’empreinte de ce premier mini-panacheaurait persisté à la partie supérieure du manteausous la forme d’une zone de faiblesse s’étendant deMangaia à Raivavae. Toutes les laves alors émises, àl’origine de l’édification, successivement, de Mangaia(19,4-18,4 Ma), de Rimatara (19,5-14,4 Ma), du volcanancien de Rurutu (12,7-12,1 Ma), des volcans deTubuai (12,61-8,8 Ma)et du volcan ancien de Raivavae(10,6-7,4 Ma), proviendraient d’un magma de typeHIMU franc. Puis, la signature HIMU se seraitprogressivement atténuée pour disparaître vers 7.4 Ma.À partir de 6.4 Ma, un nouveau conduit issu du mêmemini-panache aurait produit des laves à signaturegéochimique différente. Ces laves sont à l‘originede la construction du volcan récent de Raivavae(6,4-5,4 Ma). Vers la même époque, un autre mini-panache, profitant du passage initialement créé parle proto-Macdonald, aurait engendré un second pointchaud encore actif (Macdonald 2). Celui-ci seraitl’origine du mont sous-marin Président Thiers, deRapa (6,0-4,10 Ma), puis de Morotiri (5,4-3,5 Ma).Le mini-panache lié au point chaud Arago auraitutilisé la zone de faiblesse orientée ESE-ONO pourengendrer les îles Atiu (10,3-7,4 Ma), Aitutaki (8, 4-8,0 Ma), Mauke (6,06-4,6 Ma) et le volcan récentde Rurutu (1,11-1,06 Ma), créant ainsi la « lignevolcanique d’Atiu».

origine des laves

Les laves et pyroclastites présentes dans lesAustrales appartiennet essentiellent aux séries (oulignées) magmatiques dites basiques (ou alcalines),caractérisées par leur richesse en éléments alcalins(potassium et sodium) et leur sous-saturation ensilice (relative pauvreté en silice et absence totale dequartz). Elles sont caractéristiques des basaltes depoint chauds, dénommés «Oceanic Island Basalts»(Dupuy et al., 1988). Les produits lithologiquescorrespondent principalement à des basaltes fortementbasiques (dits ultra-basiques), riches en olivine(picrites) ou à des basaltes fortement sous-saturésen silice et renfermant des feldspathoïdes, tellesles basanites, foïdites (néphélinites, néphélinitesphonolitiques), téphrites, téphrites phonolitiques et

phonolites (Figure 2). Ces roches résulteraientd’une diminution progressive des taux de fusionpartielle à partir d’une source homogène de typeHIMU (Maury et al., 1994; 2000). Par ailleurs, au coursdu refoidissement dans le réservoir magmatique, leliquide résiduel peut évoluer, par cristallisationfractionnée des minéraux, vers des termesmoyennement alcalins, de plus en plus riches ensilice, conduisant à terme à la formation de basaltesdits différenciés, successivement trachybasaltes(hawaiites), trachybasaltes andésitiques (mugéarites),trachy-andésites (benmoréites), voire trachytes.Localement, peuvent aussi apparaitre des basaltestrès appauvris en élements alcalins (basaltestholéiitiques).

nature des laves : les « basaltes insulaires océaniques »

FIGURE 2

Classification pétrologique des laves émises par les volcans des îles Australes. Chaque île est caractérisée par son domaine(ou champ) pétrogénétique Noter l’appartenance dominante des laves à la lignée des magmas ultrabasiques et basiques..La classification utilisée ici est fondée sur l’analyse chimique et le calcul d’une composition minéralogique virtuelle (compositionthéorique d’un magma à partir duquel la cristallisation de tous les minéraux s’est effectuée en respectant les équilibresthermodynamiques). Les éléments chimiques pris en compte dans le calcul (Si, Ti, Al, Fe, Mn, Mg, Ca, Na, K, P plus H2O) sontexprimés sous leur forme oxydée en pourcentages pondéraux (donnés par l’analyse après broyage de la roche). Dansl’établissement du diagramme de classification, seules sont retenues les teneurs en silice (SiO2) et en éléments alcalins (oxydesde sodium NaO et de potassium KO).

2 2

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Les laves et pyroclastites présentes dans lesAustrales appartiennet essentiellent aux séries (oulignées) magmatiques dites basiques (ou alcalines),caractérisées par leur richesse en éléments alcalins(potassium et sodium) et leur sous-saturation ensilice (relative pauvreté en silice et absence totale dequartz). Elles sont caractéristiques des basaltes depoint chauds, dénommés «Oceanic Island Basalts»(Dupuy et al., 1988). Les produits lithologiquescorrespondent principalement à des basaltesfortement basiques (dits ultra-basiques), riches enolivine (picrites) ou à des basaltes fortement sous-saturés en silice et renfermant des feldspathoïdes,telles les basanites, foïdites (néphélinites,néphélinites phonolitiques), téphrites, téphrites

phonolitiques et phonolites (Figure 2). Ces rochesrésulteraient d’une diminution progressive destaux de fusion partielle à partir d’une sourcehomogène de type HIMU (Maury et al., 1994; 2000).Par ailleurs, au cours du refoidissement dans leréservoir magmatique, le liquide résiduel peutévoluer, par cristallisation fractionnée des minéraux,vers des termes moyennement alcalins, de plus enplus riches en silice, conduisant à terme à la formationde basaltes dits différenciés, successivementtrachybasaltes (hawaiites), trachybasaltes andésitiques(mugéarites), trachy-andésites (benmoréites), voiretrachytes. Localement, peuvent aussi apparaitre desbasaltes très appauvris en élements alcalins(basaltes tholéiitiques).

évolution structurale et morphologique

Il existe peu de données détaillées sur l’histoiregéologique de Rimatara (Obelliane, 1955). Réduits àl’état de sols latéritiques, les basaltes formant lecœur de l’île auraient été émis il y a environ 15 Ma.Trois plateaux formés de calcaires « récifaux» enposition émergée encerclent le socle volcanique,atteignant localement une altitude de près de 20 m.Sévèrement karstifiés, ces reliefs sont assimilables àdes «makateas» selon la terminologie polynésienne(Figures 3 et Photo 1). D’âge encore indéterminé(probablement miocène et/ou pleistocène), ils sontconsidérés comme étant la manifestation d’unsoulèvement de l’île, effet colatéral du soulèvementcentré sur l’île voisine de Rurutu (Dickinson, 1998).Les constructions coralliennes actuelles se limitent àun étroit récif frangeant (largeur maximale : 300 m).

FIGURE 3

Coupes géologiques schématiques àtravers les îles hautes des Australes.

RIMATARA : coupe établie et interprétée d’après lacarte de la Mission hydrographique enPolynésie Française (1960) in : MeyerJ.-Y., 2004 - Rapport de mission del’Expédition Scientifique à Rimatara(Australes) du 23 octobre au 8novembre. pp. 1-54. Tahiti, Délégation àla Recherche.

RURUTU ET TUBUAI : coupes d’après Maury et al. (2000).

RAIVAVAE : coupe d’après Maury et al. (2011).

RAPA : coupe d’après Brousse et Gélubre (1986).

L’âge des périodes d’activité desdifférents volcans est indiqué enmillions d’années (Ma).

PHOTO 1

Les formations carbonatées littorales de l’île de Rimatara, aulieu dit « Teanini ». Au deuxième plan, vue du récif frangeantpléistocène (génération 125 000 ans ?) formant une terrasseà l’altitude de 3-4 m, entaillée, à sa base, par l’encochemarine actuelle. Au premier plan, noter le contact entre unlambeau du récif pléistocène, directement plaqué sur lafalaise calcaire d’âge probablement miocène.© DIREN

rimatara

Elle est, sans conteste, celle qui a fait l’objet desétudes pluridisciplinaires les plus complètes (Figures3 et Photo 2). L’île s’est édifiée au cours de deuxépisodes éruptifs, respectivement entre 12,7 et 12,13Ma et entre 1,11 et 1,06 Ma environ. (Guille et al., 1998 ;Maury et al., 2000). Le premier édifice volcanique, estformé à sa base par des hyaloclastites (brêchesvolcaniques sous-marines), associées à des picrites,hawaiites et basaltes tholéiitiques. Il constituel’ossature de l’île entre la région de Moerai au Nord,et la pointe méridionale de l’île. Pendant l’épisode derepos (environ 11 millions d’années) séparant lesdeux épisodes éruptifs, le premier volcan subit uneintense abrasion à sa partie sommitale, responsablede la genèse d’un large plateau dans le secteursepentrional de l’île. Selon Bourrouilh-Le Jan et al.(1996), au Miocène moyen, suite à l’ennoyage desflancs du volcan, s’y déposent des couches de nodulesélaborés par des algues calcifiantes corallinacées

(rhodolithes). Apparemment dépourvus de toute faunecorallienne, ces dépôts d’algues rouges exprimeraientdes conditions climatiques sub-tropicales, mais peucompatibles avec la construction récifale. Ils furentenfouis sous les coulées émises lors des dernièresmanifestations éruptives du premier volcan (vers11 Ma). La sédimentation carbonatée reprend auMiocène supérieur avec la mise en place decarbonates à affinité récifale, suite à l’établissementd’un régime franchement tropical : présence deconstructions à coraux branchus et massifs emballésdans une matrice silto-sableuse enrichie en débriscoralliens, algues corallinacés et foraminifèresbenthiques (Figure 4a). D’une épaisseur totale de100 m environ, la séquence de dépôt se termine pardes niveaux enrichis en foraminifères planctoniqueset spicules d’échinides. Cette succession biologiqueest inteprétée comme refletant le développementd’un système récifal progressivement ennoyé par des

rurutu

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3736

PHOTO 2

Les formations carbonatées littorales de l’île de Rurutu, commune d’Avera. Les carbonates reposent sur les brèchesbasaltiques du volcan ancien actif au Miocène moyen (vers environ 12 millions d’années). Noter la présence de deux lignesd’encoche et de grotte, situées respectivement vers 1, 5 m et 8-10 m d’altitude, et encombrées de stalactites. Ces encochesmatérialisent la position de deux anciens niveaux de la mer. © Jérôme Petit

LES FORMATIONS CARBONATÉES DE L’ÎLE DE RURUTU.

FIGURE 4a

Stratigraphie et structure des dépôts carbonatés marins d’âge miocéne et quaternaire (modifié d’après Bourrouilh- Le Jan et al., 1996).Les carbonates miocènes ont subi une intense dissolution sous l’action des eaux de pluie et de ruissellement (karstification)essentiellement lors des bas niveaux marins au Miocène moyen et au Plio-Quaternaire. La courbe du niveau marin présentée est celleétablie par Miller K.G. et al., 2011 - A 180-million-year record of sea level and ice volume variations from continental marginand deep-sea isotopic records. Oceanography, 24:40–53. Les variations eustatiques sont relatives au niveau marin actuel (point zéro).

FIGURE 4b

Coupe morphologique de la falaise calcaire, Pointe Teutu, sud-ouest de l’île. Noter les deux niveaux d’encoches matérialisantrespectivement la position relative du niveau marin il y a 125 000ans et sa position actuelle. L’encoche fossile a entaillé, à sa base,une construction récifale. Modifié d’après Pirazzoli et Salvat, 1992.

dépôts biogènes à affinité circalittorale, entre 80 et100 m de profondeur, en relation avec une remontéeeustatique de grande ampleur. Avec la reprise del’activité volcanique, au Pleistocène, se mettent enplace des coulées (basanites et hawaiites) et despyroclastites à l’origine du second édifice volcanique.Celui-ci domine la région nord-ouest de l’île etrecouvre localement les formations carbonatées. Lemécanisme responsable du soulèvement serait unrajeunissement thermique de la lithosphère sous-jacente. Ont suivi de longues périodes d’érosionsub-aérienne sous l’action des eaux météoriques,induisant le développement d’un dense réseaukarstique et des reliefs de type « makatea » (Stoddartet al., 1987). En outre, les formations carbonatéesfossiles ont subi une phase d’intense dolomitisation(enrichissement des carbonates en magnésium àpartir de l’altération pédologique des substratsvolcaniques). Les falaises calcaires littorales sontactuellement entaillées par deux alignementsd’encoches continus, respectivement situées à + 8-10 met + 1,3-1,7 m au-dessus du niveau marin actuel

(Figure 4b). En accord avec Pirazzoli et Veeh (1987)et Pirazzoli et Salvat (1992), l’encoche supérieurematérialiserait la position du haut nivean marincorrespondant au dernier stade interglaciaire (125 000ans BP), alors que l’encoche inférieure marqueraitla position d’un haut niveau à l’Holocène moyen(5000-4000 ans BP). Les traits morphologiqueslittoraux militent en faveur d’une surrectiontectonique de l’île : calcaires récifaux culminant à +113 m ; encoches marines ; présence d’un étroit réciffrangeant dépourvu de zone d’arrière-récif. Lasurrection de l’île aurait débuté à la fin du Miocènesupérieur ou au début du Pliocène (entre 6,5 et 5 Ma)et se poursuivrait encore à la vitesse moyenne0,10 mm/an (Pirazzoli et Veeh, 1987). Cesobservations sont en accord avec celles effectuéessur l’île de Makatea, dans les Tuamotus (Montaggioni,1985). Selon Maury et al. (2000), compte tenu del’altitude actuelle atteinte par les récifs fossiles et dela position du niveau eustatique au Miocène terminal,l’ampleur minimale du soulèvement à Rurutu seraitde l’ordre de 50 à 70 m.

L’île a été édifiée en trois temps (Brousse et Maury,1980 ; Liotard et Barsczus, 1989 ; Maury et al., 1994,2000). L’épisode éruptif le plus ancien, daté de 12,61 et9,49 Ma, est à l’origine du bouclier du Herani, construit àpartir d’émissions de basaltes alcalins, centrées surPanee. D’un âge compris entre 10 et 9,5 Ma, le secondépisode a produit des basanites principalement émisesà partir de la zone éruptive du mont Taitaa et colmatantles paléovallées entaillées dans le premier édifice. Quantà la dernière phase éruptive (9,5 à 8,8 Ma), éméttrice delaves sous-saturées en silice (téphrites, néphélinites,phonolites), elle est centrée sur le massif du Hanareho,vestige d’une ancienne caldeira (Figure 3). L’évolutionpost-volcanique de Tubuai est conforme avec celle de laplupart des volcans médio-océaniques, à savoir un lent

enfoncement (subsidence) de l’île suite à la surchargeinduite par l’édifice volcanique sur la croûte océaniquesous-jacente. On peut supposer, à la suite de Brousse etal. (1980), que la subsidence, probablement effective désle Miocène terminal, a favorisé le développement ducomplexe récifal actuel et des vastes plaines littoralesvoisines. D’une superfie sensiblement équivalente àcelle de l’édifice volcanique (45 km2), le récif-barrièreactuel comprend une zone lagonaire d’une profondeurmaximale de 20 m. Localement, on y constate laprésence de bioconstructions en position émergée(jusqu’à + 0,30 – 0,50 m), datées entre 2 400 et 1 400 ans.Elles matérialisent un haut niveau marin holocènegénéralisé aux îles de Polynésie française (Pirazzoli etMontaggioni, 1988).

tubuai

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3938

Contrairement à la plupart des autres îles Australes,Raivavae est allongée selon un axe OSO-ENE,parallèlement à la Zone de Fracture des Australes, cequi suggère que les magmas générateurs de l’îleont pu être acheminés le long de cet accident. L’îleest le vestige émergé d’un vaste système de volcans-boucliers aujourd’hui effondrés. Deux volcans ont étéidentifiés (Maury et al., 2013) : (1) le volcan de Rairua,d’un âge compris entre 10,6 et 7,4 Ma, est constituéprincipalement de brèches sous-marines (dérivéesde basaltes alcalins, picrites, basanites, téphrites et

foïdites) sur plus de 200 d’épaisseur ; (2) le volcan deAnatonu, mis en place entre 6,4 et 5,4 Ma, forme unempilement de basaltes (tholéiitiques et alcalins,hawaiites, benmoréites) de plus de 400 m, traverséd’intrusions de trachytes et de phonolites (Figure 3).Des bancs de carbonates bioclastiques, considéréscomme d’âge miocène supérieur, affleurent sur lacôte nord-est, entre 10 et 70 m d’altitude, témoinsd’un soulèvement plio-quaternaire (Maury et al.,2011). L’île est bordée d’un récif barrière de 2 à 3 kmde large.

D’un âge compris entre 6 et 4.10 Ma, Rapa correspondà un simple volcan-bouclier à caldeira centrale,actuellement ouverte vers l’est, au niveau de laBaie d’Ahurei (Brousse et Gelugne, 1986). Les lavesappartiennent à une série différenciée, depuis lespicrites jusqu’aux hawaiites, mugéarites, benmoréiteset phonolites (Figure 3). L’activité post-caldeira selimite à la formation d’un volcan adventif basanitiquede moins de 1 km de diamètre à l’extrémité nord-est(Puputa). Profondément découpée, à l’exception dequelques platures algo-coralliennes, l’île est dépourvuede récif corallien, malgré la présence d’un plateausous-marin de 2 ,5 km de large. L’absence de récifreste encore énigmatique, les conditions écologiqueslocales n’étant pas a priori défavorables (Faure, 1986).Atteignant localement une puissance de 7 m et une

altitude de + 5 à + 25 m, deux affleurements calcairessont signalés au niveau de la Baie de Tupuaki, au nord,et d’Anarua, à l’ouest. Il s’agit de calcarénites àéléments biogènes (algues corallinacées, foraminifères,mollusques) plongeant de 10° vers la mer. Ellesconstituent des dunes éoliennes (éolianites) façonnées,au cours d’un épisode de régression marine,probablement au Pleistocène, à partir d’un matérielbioclastique accumulé sur le plateau sous-marin.Des dépôts de charbon (lignite) ont été signalés etétudiés à l’ouest de la baie de Akatanui, sous la crêtereliant les monts Tanga et Vairu (Fourmont et al.,1986). La carbonisation de débris végétaux enfouisdans le sol aurait pu être favorisée au contactd'épanchements volcaniques.

Les îles Morotiri sont caractérisées par des lavesfortement sous-saturées en silice : picrites etbasanites, associées à des hawaiites (Liotard etBarsczus, 1985). Quant au volcan sous-marin du

Macdonald, il apparaît constitué essentiellement depicrites, de basaltes alcalins et de mugéarites, avecdes intrusions de roches grenues alcalines de typegabbro (Stoffers et al., 1989).

raivavae

rapa

morotiri et macdonald

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bibliographie

Soumises à un climat tropical humide, les rochesvolcaniques ont produit, dans les parties hautes desîles, des sols rouges essentiellement ferralitiques,humifères (dégradation totale des minérauxprimaires, néogenèse d’argiles type kaolinite ethalloysite et d’oxyhydroxydes de fer). Dans lesparties basses (vallées, plaines), se développent des

sols peu évolués lithiques, bruns sur colluvions etalluvions ou des sols hydromorphes en zonesmarécageuses. Quant aux matériaux carbonatés(sables bioclastiques, surfaces des «makateas »),ils génèrent des « rendzines », sols peu évoluéscalco-magnésiens (Trichet et al., 1986 ; Jamet, 1993).

évolution pédogénétique

Issues de l’activité de 3 points chauds (Macdonald 1et 2, Arago) émetteurs de magmas basaltiques àl’origine fortement alcalins, les îles Australes ontsubi, après cessation de l’activité volcanique, uneévolution essentiellement contrôlée par la tectoniquerégionale (bombement lithosphérique et réactivationvolcanique), les variations eustatiques globales etles changements climatiques, entre le Miocènemoyen et le Quaternaire récent. Il en a résulté unedifférenciation morphologique : îles soulevéesvolcano-karstiques (Rimatara, Rurutu, Raivavae),îles subsidentes avec récif (Maria, Tubuai) ou sansrécif (Rapa, Morotiri).

conclusions

Page 22: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

Coucher de soleil au large de Rapa, Australes.

© Ian Skipworth

LE CLIMAT PARTICULIER DES AUSTRALES, À LA LIMITE ENTRE ZONE TROPICALE ET ZONE TEMPÉRÉE, CONFÈRE À CES ÎLES

DES ÉCOSYSTÈMES MARINS PARTICULIERS, SE DISTINGUANT DES AUTRES ARCHIPELS DE POLYNÉSIE FRANÇAISE.

40 41

L’archipel des Australes, de par sa positiongéographique entre 21° et 28° de latitude sud, aun climat tropical très humide, limite subtropicalpour l’île de Rapa. En saison fraîche, de mai àoctobre, l’environnement atmosphérique de cetarchipel se rapproche de celui des zones tempéréeset en saison chaude, de novembre à avril, de celuides zones tropicales. Le climat est caractérisépar des pluies fréquentes et importantes entoute saison, supérieures à 1 600 mm/an, unefaible insolation et des températures moyennesinférieures à 26°C. Les vents sont plus soutenuset plus variables que sur les autres îles de laPolynésie française. C’est sur cette zone que l’onobserve les plus fortes houles, en dehors deshoules cycloniques. L’archipel des Australes estle passage privilégié des cyclones qui naissent aunord-ouest de la Polynésie française et évoluentsur un axe nord-ouest/sud-est.

LE CLIMAT AUX AUSTRALES

VICTOIRE LAURENTMétéo-France, Direction Interrégionale de Météo-France en Polynésie franç[email protected]

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4342

La circulation atmosphérique du bassin polynésienest régie, en surface, par de hautes pressionssubtropicales (Figure 1). À l'est du 140°W delongitude, l'anticyclone de l’île de Pâques stable etpuissant s'impose comme la structure maîtressedu champ barométrique, à une latitude de 28°S.

À l'ouest du 140°W, l’anticyclone de Kermadecmoins stable évolue d’ouest en est le long d’unelatitude moyenne de 30°S. La position et l’intensitéde ces deux centres d’action fluctuent avec le cyclesaisonnier (Laurent et al., 2004).

les anticyclones subtropicaux

les facteurs influents de l’atmosphère polynésienne

À l’échelle de la Polynésie française, les alizés sontdes vents issus des anticyclones subtropicaux quis’écoulent en direction des zones de convergence.Ils sont de secteur sud-est à est avec unecomposante zonale de plus en plus importante aufur et à mesure qu’ils s’approchent de la zone de

basse pression équatoriale (Beucher, 2010). Cesalizés possèdent des caractéristiques variables aucours de l’année. En saison chaude, l’épaisseur dela couche d’alizés atteint environ 5 000 m, avec uneforte humidité. Elle se réduit à 1 500 m avec un airplus sec en saison fraîche.

les alizés

À la confluence du courant d’alizé chaud, dirigé parl’anticyclone de l’île de Pâques et du courant d’alizésplus frais, induit par l’anticyclone de Kermadec secrée une zone de convergence appelée Zone deConvergence du Pacifique Sud (ZCPS). Surtout active

en saison chaude, cette zone favorise la formation denuages à caractère pluvio-orageux à l’ouest de laPolynésie française. Si les conditions le permettent,ces perturbations atmosphériques peuvent évoluer endépression tropicale voire en cyclone.

la zone de convergence du pacifique sud

FIGURE 1représentation du champ de pression au niveau de la mer et du champ de vent à 10 mètres au cours de l’été austral. © Météo-France – DIRPF/EC

Globalement, l’archipel des Australes connaît trois principaux types de temps dont l’impact est plus ou moins important selon les saisons : - les perturbations dynamiques sur la ZCPS ;- les régimes d’alizé ;- les perturbations thermodynamiques par advection froide générant un type de temps particulier : le Mara’amu.

le temps sur les australes

- des stations synoptiques de Tubuai et de Rapa,respectivement situées aux villages de Mataura et deAhurei. Ces stations sont gérées par des agents deMétéo France qui réalisent toutes les heures desobservations de surface et une fois par jour desobservations d’altitude. Considérées comme stationsde référence pour l’archipel des Australes, lesgraphes de Tubuai sont très représentatifs des zonescôtières et ceux de Rapa des baies exposées à l’est.

- des postes climatologiques tenus par lesobservateurs bénévoles de Rurutu-aero, de Moerai etde Amaru qui mesurent les précipitations et lestempératures au pas de temps quotidien.- des postes pluviométriques, tenus aussi par lesobservateurs bénévoles de Hauti, de Amaru-Gendarmerie, de Mahu, de Taahuaia et deRairua-Gendarmerie.

les données d’observations

TABLEAU IStations et postes d’observations du réseau de Météo-France (Gend pour Gendarmerie et Aero pour Aéroport)

Nom

RURUTUHAUTIMOERAI

RURUTU-AERO

RIMATARAAMARU-GENDAMARU

TUBUAIMAHU

TAAHUAIATUBUAI

RAIVAVAERAIRUA-GEND

RAPARAPA

Latitude

22°29’06’’S22°27’12’’S22°25’54’’S

22°38’42’’S22°38’54’’S

23°23’24’’S23°21’36’’S23°20’36’’S

23°52’12’’S

27°37’6’’S

Longitude

151°19’30’’w151°20’6’’w151°22’00’’w

152°47’24’’w22°38’54’’s

149°26’54’’w149°26’18’’w149°28’36’’w

147°41’24’’w

144°20’00’’w

Altitude

3M3M5M

3M6M

2M3M2M

2M

2M

Période

12/1982 - 12/201301/1948 - 12/197501/1978 - 12/2013

06/1981 - 12/201301/1958 - 12/1973

12/1982 - 12/201312/1982 - 12/201301/1966 - 12/2013

01/1950 - 12/2013

01/1951 - 12/2013

Paramètres

PluiePluie, TempératurePluie, Température, Vent

PluiePluie, Température

PluiePluiePluie, Température, Vent, Insolation

Pluie

Pluie, Température, Vent, Insolation

Le réseau d’observation climatologique de Météo France ne quadrille pas de manière régulière l’archipel desAustrales. Il est plus ou moins dense selon les îles et principalement situé sur les côtes exposées au nord et àl’est. Les données qui ont servi à caractériser le climat des Australes proviennent (Tableau I) :

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4544

la température

Les valeurs de durée d’insolation mesurées à Tubuaiet à Rapa ne sont pas représentatives des conditionssur l’ensemble de l’Archipel. En effet, la nébulositégénérée par la convection thermique diurne limitel’insolation à l’intérieur et sous le vent des îles. Deplus, on estime que la présence du relief entraîne uneperte d’environ 10%. Cependant, elles suffisent pour

apprécier l’ensoleillement aux Australes.La durée d’insolation annuelle est plus importante aunord qu’au sud de l’archipel. À Tubuai, on mesure unedurée d’insolation annuelle de 2 294 h contre 1 560 hà Rapa. Les jours d’insolation nulle représententmoins de 14% dans une année et les jours de forteinsolation moins de 24% dans l’année.

l’insolation

La température moyenne annuelle varie entre 23,4°Cà Rurutu et 20,7°C à Rapa. La partie montagneuse desîles hautes de l’archipel des Australes est la plusfroide. La température y est considérablementaffectée par la forte nébulosité et l’altitude.Le cycle saisonnier de la température est bienmarqué, notamment à Rapa avec une amplitude de lavariation annuelle de l’ordre de 6,3°C, la plus forte dela Polynésie française (Figure 2). On observe lestempératures les plus chaudes en février et les plus

basses en août. Les amplitudes mensuelles moyennesdu cycle diurne varient peu au cours de l’année.Les températures minimales les plus froidess’observent sur l’île de Rapa et les températuresmaximales les plus chaudes à Rurutu. Le minimumabsolu, 8,5°C a été relevé sur l’île de Rapa le 5septembre 1972. C’est encore à ce jour le record detempérature minimale pour la Polynésie française.Le maximum absolu, 35,6°C a été mesuré à Rurutule 8 avril 1982.

La description des régimes de vent aux Australes s’appuie sur les simulations du modèle du centreeuropéen ERA-Interim, représentatives des vents rencontrés en mer (Figures 3a et 3b). On identifie quatrerégimes de vent.

le vent

FIGURE 3a

Roses des vents de janvier – février à 10 m issues de laréanalyse ERA-Interim 1989 – 2008 – maille 0,5°. © Météo-France / DIRO

FIGURE 3bRoses des vents de juillet - août à 10 m issues de la réanalyseERA-Interim 1989 – 2008 – maille 0,5°. © Météo-France / DIRO

FIGURE 2

Cycle saisonnier des précipitations en vert et des températuresmoyennes ligne en rouge de Rurutu, nord de l’archipel et de Rapa,l’île la plus septentrionale. © Météo-France – DIRPF/EC

À altitude égale, les cumuls annuels de précipitationsaugmentent du nord-ouest au sud-est, de 1 663mm/an à Rimatara, à 2 615 mm/an à Rapa. Lapluviométrie est assez bien répartie au cours del’année. Le cycle saisonnier des précipitationss’atténue quand on se dirige vers le sud (Figure 2). Aunord, les précipitations mensuelles sont importantesde décembre à avril, entre 162 et 274 mm/mois etmoins importantes de mai à novembre, entre 80 et169 mm/mois. À Rapa, on ne note pas de cyclesaisonnier de précipitations, les cumuls mensuelsrestent proches de 200 mm tout au long de l’année.

la pluviométrie

Pendant plus de la moitié de l’année, l’archipel desAustrales est soumis aux alizés d’est sud-est durant l’été

austral et aux alizés de sud-est pendant l’hiver austral.Leur vitesse moyenne est de l’ordre de 25 km/h.

le régime d’alizés et de secteur est

Aux Australes et notamment à Rapa, on observe unefréquence importante des vents de secteur ouest. Cesvents sont dus aux passages des perturbations tropicalesen été austral et des perturbations subtropicales ou

d’origine polaire en hiver austral. Les régimes de secteursud sont observés lors du passage dans le sud del’archipel de systèmes frontaux liés aux perturbationsdes moyennes latitudes.

le régime de secteur ouest et des autres secteurs

Le Mara’amu qui est un vent de sud-est assez fort affectesurtout l’archipel en saison fraîche. En saison chaude, safréquence est plus faible. Tout comme les autres régimes

de vent, il est modifié par le relief. Il présente une nettevariation diurne, au moins en zone côtière.

le régime de sud-est : le mara’amu

Le régime des brises s’établit lorsque l’archipel n’estpas sous l’influence d’une perturbation. L’orientationdes brises est déterminée par la configuration de l’île.On ne distingue pas de nette variation annuelle durégime des brises. Dans la journée, la convergence

des brises favorise le développement de formationsnuageuses sur les hauts reliefs ; l’air humide de lamer pris dans les ascendances est à l’origine decumulus bien développés.

le régime des brises

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4746

L’étude des vagues aux Australes n’est pas particulièrement aisée. Il n’existe aucun point de mesureinstrumentale directe. Les météorologistes ne peuvent effectuer d’observations valables au plan synoptique. Ilreste alors deux sources d’informations exploitables : les observations de navire et une nouvelle analyse demodèle de vagues. Même si ces deux approches ne sont pas parfaites, elles suffisent néanmoins à fournir unschéma de l’état de la mer aux Australes.

l’état de la mer

FIGURE 5Roses des moyennes mensuelles de houlesréalisées à partir des réanalyse du centreeuropéen du modèle de vague ERA-Interimau point 28,5° de latitude sud et 154,5° delongitude ouest sur la période allant de1989 à 2009.© Météo-France – DIRPF/EC

FIGURE 4aRoses de la mer du vent de janvier –février à 10 m issues de la réanalyse ERA-Interim 1989– 2008 – maille 0,5°.© Météo-France / DIRO

FIGURE 4bRoses de la mer du vent de juillet - aoûtà 10 m issues de la réanalyse ERA-Interim 1989– 2008 – maille 0,5°. © Météo-France / DIRO

FIGURE 6aRoses de houle de janvier – février à 10 m issues de la réanalyse ERA-Interim 1989 –2008 – maille 0,5°.© Météo-France / DIRO

FIGURE 6bRoses de houle de juillet - août à 10 m issues de la réanalyse ERA-Interim 1989 –2008 – maille 0,5°.© Météo-France / DIRO

L’état de la mer témoigne du caractère marqué dessaisons. La direction dominante de la mer du vent estmarquée par les alizés et vient du secteur est en

saison chaude ; elle est beaucoup moins marquée ensaison fraîche, avec toutefois des hauteurs de merplus élevées qu’en saison chaude (Figures 4a et 4b).

mer du vent

En été austral, des houles de sud sud-ouest à sudsud-est dominent. Ce sont des houles de périodesinférieures ou égales à 10 s dont l’amplitude moyenneest comprise entre 2 et 4 m (Figure 5). En hiveraustral, les houles dominantes sont en majorité

engendrées par des dépressions qui naviguent au suddu 40e de latitude sud, avec des périodes longuessupérieures à 10 s, de secteur sud à sud-ouest etdont la hauteur dépassent les trois mètres,exceptionnellement six mètres (Figures 6a et 6b).

la houle

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4948

L’activité cyclonique aux Australes coïncide avec l’été austral. Ces perturbations naissent habituellemententre 7 et 20°S de latitude. Quelques cas, comme le cyclone tropical Kim qui a touché Rapa en février2000, ont pris naissance au sud du 20°S de latitude. L’ouest des Australes est le passage privilégié descyclones générés au nord-ouest du territoire. Ainsi, les trois derniers phénomènes qui ont affecté le Pays,entre 2010 et 2013, ont tous traversé les Australes et notamment le cyclone tropical intense Oli dont l’œilest passé sur Tubuai (Laurent et al., 2014).

la marée de tempête

l’activité cyclonique

PHOTO 1Dégâts générés à Tubuai par la maréede tempête et la surcote générées parle cyclone William en 1995. © La Dépêche du vendredi 6 janvier 1995

Les surcotes ou les décotes sont des différences entrela marée prédite et la hauteur d’eau observée. Unesurcote étant une différence positive (plus d’eau queprévu) et une décote une différence négative (moinsd’eau que prévu). Les observations de surcote sont

obtenues à partir des marégraphes après avoir retiréle signal de la marée astronomique. Selon lessimulations du modèle de surcote de Météo France,le passage de Oli sur Tubuai a généré une surcotemaximale supérieure à 1,5 m (Photo 2 et Figure 7).

FIGURE 7Le cyclone Oli est passé surl’est de l’île de Tubuai créantà son passage une surcotemaximale supérieure à 1,5 m.© Météo-France – DIRPF/EC

Les houles cycloniques sont produites par desphénomènes cycloniques approchant ou existant enPolynésie française. Se déplaçant plus rapidementque les cyclones qui les ont engendrées, jusqu’à1 000 km à l’avant, elles sont aussi un signeprécurseur de l’arrivée d’un cyclone.

La direction de la houle est dépendante de latrajectoire du cyclone. La hauteur est variable et peutatteindre plusieurs mètres, entre 8 et 12 m. En 2010,lors du passage du cyclone tropical Oli, on estime quela houle, aux abords des îles Australes, a atteint 9 m.

la houle cyclonique

La houle cyclonique vient souvent se superposer à lamarée de tempête. Il s’agit d’une élévation anormaleet brutale du niveau moyen de la mer le long descôtes, associée au passage du cyclone. Cettesurélévation est provoquée conjointement par la fortebaisse des pressions au centre du cyclone et parl’intensité des vents à la périphérie de l’œil.

Lorsqu’un cyclone arrive sur les côtes, ce phénomènepeut être amplifié sur des hauts fonds (baie ou golfe).Cette onde s’ajoute à la marée astronomique pourdonner ce que l’on appelle la marée de tempête. AuxAustrales, la profondeur des fonds marins et le reliefdes îles limitent ce risque (Photo 1).

la surcote

Le climat des Australes est influencé par lesvariations saisonnières de l’anticyclone de l’île dePâques. Il se rapproche d’un climat tropical humideen été austral et d’un climat tempéré humide en hiveraustral. Les plus fortes houles du pays sontgénéralement observées sur cet archipel.

conclusions

PHOTO 2 Dégâts générés à Tubuai par la maréede tempête et la surcote générées parle cyclone Oli en 2010. L’île a étérecouverte de sables. © Moana Mariassouce

BEUCHER F., 2010 - Manuel de météorologie tropicale: Des alizés au cyclonetropical, Météo-France, Cours et Manuels, 19, 1, 1-476.

LAURENT V., MAAMAATUIAIHUTAPU K., MAIAU P., VARNEY P., 2004 - Atlasclimatologique de la Polynésie française, Météo-France, Direction Interrégional dela Polynésie Française, 1-204.

LAURENT V., VARNEY P., 2014 Historique des cyclones de Polynésie française de1831 à 2010, Météo-France, Direction Interrégional de la Polynésie Française,1-174.

bibliographie

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51

LE DOMAINE OCÉANIQUE DE L’ARCHIPEL DES AUSTRALES EST IMMENSE, AVEC ENVIRON UN MILLION DE KILOMÈTRES

CARRÉS, SOIT UN CINQUIÈME DE LA ZONE ÉCONOMIQUE EXCLUSIVE DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE.

50

Mer au large des Australes.

© Amelia Connell

L'archipel des Australes se trouve dans la partiesud du gyre subtropical de l'océan Pacifique Sud.Les propriétés de la mer révèlent un milieuocéanique oligotrophe donc pauvre en élémentsnutritifs. La température subit de grandesfluctuations dues aux variations saisonnièresmais aussi à une variation inter-annuelle dans lapartie nord de l'archipel. La partie sud estinfluencée par d'autres phénomènes de longuespériodes d'origine non connue. Les donnéesrévèlent des courants faibles dont les directionschangent suivant les saisons et aussi pendant lesévénements El Niño ou La Niña.

CONTEXTE OCÉANOGRAPHIQUEDE L’ARCHIPEL DES AUSTRALES

KEITAPU MAAMAATUAIAHUTAPUUniversité de la Polynésie franç[email protected]

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5352

Les îles de l'archipel des Australes sont situées dansla partie sud du gyre subtropical de l'Océan PacifiqueSud et dans la partie nord de la zone de convergencesubtropicale. Cette zone de convergence estcaractérisée par des courants de surface de faiblesintensités qui forment le Contre Courant Subtropical-CCS- (Martinez et al., 2009).D'un intérêt océanographique limité, le CCS dans larégion de l'archipel des Australes est très peu étudiéet notre connaissance des propriétés de la mer et descourants dans cette région est très restreinte. On peutciter les travaux de Martinez et al. (2009) pour lescourants déduits d'un modèle de circulation et deRougerie et Ranchez (1994) pour une étude despropriétés de la mer et des courants géostrophiquesle long de sections hydrographiques.Nous proposons ici une revue du contexteocéanographique au niveau de l'archipel desAustrales basée soit sur les travaux antérieurs soitsur les données disponibles dans les bases dedonnées accessibles, comme des climatologies dedonnées hydrologiques ou des données satellites.Dans un premier temps, nous décrirons, à partir dela climatologie, des courants moyens et quelquespropriétés de la mer en fonction de la profondeur.Dans un deuxième temps, nous analyserons à partirdes données satellites (température de la surface dela mer et courants de surface) la variabilitétemporelle autour des îles et dans l'archipel puisquele Pacifique est soumis à un cycle plus ou moinsrégulier aux phénomènes El Niño-La Niña.

introduction les courants océaniques

FIGURE 1Vecteurs des courants de surface moyennés. La moyenne esteffectuée sur la période 1993-2014. Les données sont issuesde la base de données OSCAR (Bonjean, F. et Lagerloef G.S.E.,2002). Le fond en couleur représente la chlorophylle -a(mg/m3) moyennée sur la période 1997-2007 et issue duproduit combiné Globcolour (ESA). Le pourtour en trait noirreprésente la ZEE de la Polynésie française. Extrait deMartinez et al., 2014.

Les propriétés de la mer (température, salinité, oxygènedissous, concentration des sels nutritifs, etc.) sont engénéral obtenues par la mesure in situ et notammentdans la colonne d'eau. À la surface de l'océan, latempérature, la couleur de la mer et la salinité peuventêtre mesurées par des radiomètres montés sur lessatellites. Ces dernières mesures donnent une meilleurecouverture spatiale et une meilleure résolutiontemporelle par rapport aux mesures in situ. La couleurde la mer permet de déterminer la chlorophylle(Figure 1) et confirme le caractère oligotrophique deseaux de surface dans l'archipel des Australes. Comme partout dans l'océan Pacifique Sud, les mesuresdans la colonne d'eau ne sont pas nombreuses. Dansl'archipel des Australes, les données disponibles sontcelles obtenues dans le cadre de la campagneHYDROPOL (Rougerie et Rancher, 1994) et dans le cadredes campagnes du programme de la World OceanCirculation Experiment (http://www.nodc.noaa.gov)(Figures 2 et 3).Les concentrations faibles des sels nutritifs (Figures 2 et3) confirment le caractère oligotrophe des eaux del'archipel des Australes jusqu'à une profondeur de 200m. Les valeurs des phosphates, nitrates et de silicatessont respectivement inférieures à 0.1, à 1 et à 1 mol/l(Figure 2) comme reportées aussi par Rougerie etRancher (1994). Ceci a conduit Rougerie et Rancher(1994) à conclure que les eaux des Australes et de laPolynésie en général, sont limpides et propices à lacroissance du corail. Aux profondeurs supérieures à200 m, les concentrations des sels nutritifs augmententprogressivement avec la profondeur pour atteindre desvaleurs maximales autour de 500 m, profondeur àlaquelle s'est installée de l'eau d'origine Antarctique.Dans l'archipel des Australes, la particularité des eauxde surfaces (couche 0 - 100 m) est le gradient nord-sudobservé pour la température, la salinité et l'oxygènedissous (Figure 3). On observe logiquement dans la partiesud des eaux plus froides, moins salées et plusoxygénées. Ceci démontre l'origine d'une eau extra-tropicale. La partie nord de la région est surtout marquéepar une eau beaucoup plus salée avec une salinité

qui dépasse les 36 psu. Cette eau est aussi la plus chaudeavec des températures supérieures à 24 °C et des valeursen oxygène dissous plus faibles comparativement àcelles du Sud. Elle proviendrait du centre du gyresubtropical où le taux d'évaporation est le plus élevédu Pacifique Sud (Tomczak et Godfrey, 1994). Unapprofondissement vers le nord des isocontours de latempérature et de la salinité est observé et est en accordavec un transport d'eau vers l'est. Elle indique aussi unepossibilité de subduction de l'eau de surface vers desprofondeurs de 100 à 250 m. Ce gradient nord-sud deschamps de température et de salinité est persistant toutau long de l'année près de la surface avec cependant destempératures plus fraîches pendant la saison sèche. Lasalinité à la surface ne change pas de façon significatived'une saison à l'autre.

les propriétés de la mer

Les variations du champ de courant observées dansl'archipel des Australes seraient associées auxvariations du champ de vent et aux perturbations(tourbillons par exemple) engendrées par la présence

d'îles. Pendant la saison chaude (janvier-février-mars) le CCS est affaibli et de façon exceptionnellecelui-ci peut changer de direction pendant lesphénomènes El Niño - La Niña.L'archipel des Australes est traversé par le CCS qui

transporte tout le long de l'année des eaux provenant del'intérieur du gyre subtropical dans la partie nord et deseaux provenant de l'Ouest dans sa partie sud (Figure 1).Il n'existe aucune mesure directe de ce courant dansl'archipel. Les seuls estimations disponibles ont étéeffectuées à partir des mesures hydrographiques(Rougerie et Rancher, 1994), ou à partir d'un modèle(Martinez et al., 2009), ou encore à partir des donnéesaltimétriques des satellites (Bonjean et Lagerloef, 2002).Les courants de surface sont disponibles en tempsquasi-réel (Bonjean et Lagerloef, 2002 ;www.oscar.noaa.gov). Les vitesses zonales (directionest-ouest) et méridionales (direction nord-sud) ont desvaleurs entre 0 et 20 cm/sec. Les courants bien quedominants vers l'est sur l'ensemble de l'archipel peuventchanger direction notamment autour des îles.En fonction de la profondeur, les courants ont étédéterminés par Rougerie et Rancher (1994) par un calculgéostrophique, c'est-à-dire en imposant une vitessenulle à une profondeur donnée. Ces derniers rapportentpour plusieurs mois entre 1987 et 1989 des vitessesgéostrophiques zonales inférieures à 6 cm/sec entre 0 et500 m de profondeur. Ils observent que les directions descourants durant ces années sont très variables. Enpériode normale, les courants vont vers l'est. En 1987,période El Niño, les courants sont orientés vers l'ouestpar endroit. En 1988, des structures méso-échelles(inférieurs à 100 km) sont observables autour de 22 °Ssoit approximativement la latitude de Rurutu.Basé sur un modèle, Martinez et al. (2009) confirment lapersistance du CCS dans la couche 0 à 500 m commeobservé par Rougerie et Rancher (1994). Martinez et al.(2009) montrent aussi à partir des données satellitesaltimétriques et dans la bande de latitude 26-29 °S uneforte variabilité des vitesses des courants avecchangement fréquent de direction des courants. Desvariations allant jusqu'à 8 cm de la hauteur de la mersont mesurées par satellite en concordance avec lesvariations des amplitudes de courants de 0 à 6 cm/sec.

FIGURE 2Section verticale sud - nord des concentrations de phosphate,nitrate et silicate le long du méridien 150 W. Données issuesdes campagnes WOCE (www.nodc.noaa.gov) et graphereproduit avec Ocean Data View (Schlitzer, 2002).

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sept en 1997-1998. Que les dépressions et les cyclonessoient formés en Polynésie française ou ailleurs (commele cyclone tropical Oli en 2010), l'archipel des Australessemble être un lieu de passage systématique de cesderniers avant leur extinction (Laurent et Varney, 2014).Sur la série temporelle de Rapa (en rouge sur Figure 4),les variations de température dues à ces événementsclimatiques majeurs restent visibles mais sont de plusfaibles amplitudes. D'autres événements de longuepériode viennent perturber le champ de température etleur origine reste à déterminer.

Les seuls jeux de données qui permettent l'étude de lavariabilité spatio-temporelle sont les données satellitesqui offrent une bonne couverture spatiale et une bonnerésolution temporelle. Cependant ces variations ne serontvalables que pour la surface ou la couche de mélange,profondeur inférieure à 100 m.Les données qui présentent une série temporelle assezlongue sont les données de température de surface de lamer (http://podaac.jpl.nasa.gov) et les données devitesses de courants issues de la base OSCAR (Bonjean,F. et Lagerloef G.S.E., 2002). Les données hydrologiquesont permis de montrer les variabilités spatiales à lasurface et en profondeur, notamment des structuresméso-échelles (e.g. Rougerie et Rancher, 1994). Pourétudier la variabilité temporelle, nous avons choisi deprésenter les séries temporelles de température et desvitesses pour les îles de Rurutu (22.5°S) et Rapa (27.7 °S)qui révèleront aussi une variabilité spatiale, du moins ungradient sud-nord.La variation saisonnière de la température est visible surles climatologies WOCE qui donnent des températuresmoyennes pour la région de 22.3 ± 1.8 °C et de 26.3 ± 1.1°C pour la saison sèche (juillet-août-septembre) et lasaison humide (janvier-février-mars), respectivement. LaFigure 4 met en évidence cette variabilité saisonnière surla période 1982 à 2014 pour Rurutu et Rapa. Les sériestemporelles montrent aussi le gradient sud-nord puisqueles valeurs moyennes temporelles sont de 25.1 ± 1.5 °Cpour Rurutu et de 22.1 ± 2.0 °C pour Rapa,La variabilité inter-annuelle (période supérieure àl'année) est visible sur la série temporelle de Rurutu (enrouge sur Figure 4) lors des événements intenses de LaNiña (1989, 1999) et El Niño (1983, 1997-1998, 2007). Lesinteractions entre l'océan et l'atmosphère dans lePacifique tropical sont à l'origine de l'oscillation australeENSO (El Niño - Southern Oscillation). Les deux phasesde ENSO qui sont caractérisées par une anomalie de latempérature de surface de la mer dans le Pacifiquetropical est sont La Niña, événement froid, et El Niño,événement chaud. Les phases de ENSO varient enintensité, de modéré (e.g., 2003) à extrême (1982-1983,1997-1998), et peuvent aussi se manifester par unesuccession rapide d'événements (1991-1995). Les phasesde ENSO sont définies par des indices (Trenberth, 1984 -http://www2.cgd.ucar.edu). Les événements extrêmes deENSO viennent perturber le climat de la Polynésiefrançaise qui devient alors le foyer de plusieursdépressions ou cyclones tropicaux, huit en 1982-1983 et

5554

la variabilité dans le temps

FIGURE 5Séries temporelles de 1993 à 2014 des courantszonaux et méridionaux moyens pour la zone del'archipel des Australes. Les données sont issues dela base de données OSCAR (Bonjean, F. et LagerloefG.S.E., 2002).

FIGURE 6Séries temporelles de 1993 à 2014 des courantszonaux et méridionaux pour Rurutu (haut) et Rapa(bas). Les données sont issues de la base dedonnées OSCAR (Bonjean, F. et Lagerloef G.S.E.,2002).

FIGURE 3Section verticale sud - nord de la température, salinité etoxygène dissous le long du méridien 150 W. Donnée issuesdes campagnes WOCE (http://www.nodc.noaa.gov) et graphereproduit avec Ocean Data View (Schlitzer, 2002).

FIGURE 4Variation (en bleu) autour de leurs moyennes destempératures de la surface de la mer à Rurutu et Rapa de1982 à 2014. Les valeurs moyennes des températures àRurutu et Rapa sont 25.07 C et 22.14 C, respectivement. Sonten rouge les variations de la température pour des périodessupérieures à l'année. Les données sont issues dehttp://podaac.jpl.nasa.gov.

Nous avons présenté une revue de la situationocéanographique basée sur nos connaissancesactuelles. Il faut retenir que l'archipel des Australes estla zone de transition pour la Polynésie entre le régimetropical et le régime extra-tropical. Peu d'études ont étéconsacrées à cet archipel et donc beaucoup reste à faireet notamment une analyse minutieuse de la variabilité àpartir de nouveaux jeux de données provenant dessatellites et des bouées dérivantes.

conclusions

BONJEAN F. et LAGERLOEF G.S.E., 2002 - Diagnostic Model and Analysis of theSurface Currents in the Tropical Pacific Ocean. Journal of Physical Oceanography,32 : 2938–2954.

LAURENT V. et P. VARNEY, 2014 – Historique des cyclones de Polynésie françaisede 1831 à 2010. 172 p. Météo-France.

MARTINEZ E., RODIER M. et MAAMAATUAIAHUTAPU K., 2014 - Environnementocéanique des Marquises. Biodiversité des Marquises, eds. Duron S.-D., Galzin R.,Meyer J.-Y. Soumis.

MARTINEZ E., GANACHAUD A., LEFEVRE J. et MAAMAATUAIAHUTAPU K., 2009 -Central South Pacific thermocline water circulation from a high-resolution oceanmodel validated against satellite data : Seasonal variability and El Niño 1997 –1998 influence. Journal of Geophysical Research 114, C05012,doi:10.1029/2008JC004824.

ROUGERIE F. et RANCHER J., 1994 - The Polynesian south ocean: Features andcirculations. Marine Pollution Bulletin 29 : 14–25.

SCHLITZER R., 2002 - Interactive analysis and visualization of geoscience data withOcean Data View. Computers and Geosciences. 28, 10, 1211-1218.

TOMCZAK M. et GODFREY J. S., 1994 - Regional Oceanography: An Introduction,New York. Pergamon, 1-422

TRENBERTHr K. E., 1984 - Signal versus Noise in the Southern Oscillation.Monthly Weather Review, 112, 326-332.

bibliographie

La série temporelle de 1993 à 2014 des vitesses zonalesmoyennées sur toute la région (Figure 5) confirme desécoulements des eaux de surface préférentiellementorientés vers l'est. Ces courants vers l'est faiblissentpendant la saison humide et changent de directionpendant les événements El Niño et La Niña par exempleen 1997-1999. Les vitesses méridionales moyennées surtoute la région (Figure 5) montrent une dominance decourants vers le sud et il est difficile de relier leursvariations aux événements El Niño et La Niña.Les séries temporelles des courants zonaux autour lesîles de Rurutu et de Rapa montrent une grande variabilité(Figure 6). Par rapport à la moyenne, outre les variationsclimatiques annuelles et inter-annuelles (visibleseulement pendant El Niño et La Niña comme en 1997-1999 pour Rurutu), la variabilité du courant due à laprésence d'île doit être prise en compte.

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5756

L’ENDÉMISME EST PARTICULIÈREMENT ÉLEVÉ POUR CERTAINES ESPÈCES MARINES COMME LES MOLLUSQUES,

LES ALGUES ET LES CORAUX AUX AUSTRALES.

Langouste Panulirus pascuensis récemment observée à Rapa, que l’on pensait endémique de l’île de Pâques.

© Ian Skipworth

La biodiversité côtière de l’archipel desAustrales résulte de facteurs biogéographiquesparticuliers. Comme ailleurs en Polynésiefrançaise, les récifs coralliens des îles du nord(Maria, Tubuai, Raivavae, Rimatara et Rurutu) endéterminent une part essentielle. Au sud,l’isolement, la température plus basse et lesbiotopes particuliers de Rapa et Marotiri, ycréent une flore et une faune très originales.Parmi ces deux groupes d’îles, Tubuai etRapa ont été les plus étudiées. L’effortd’échantillonnage particulier consenti à Rapaen 2002, qui en fait l’île la mieux connue,souligne un endémisme important. Malgré deuximportantes missions récentes (2013), certainesîles (Rimatara, Rurutu, Maria) restent largementinconnues, en particulier en profondeur. Lesgroupes taxonomiques les mieux étudiés sont lesalgues, les coraux, les mollusques, les crustacéset les poissons. Un manque de connaissancesimportant caractérise les autres groupes.

LA BIODIVERSITÉ CÔTIÈRE DES ÎLES AUSTRALES

THIERRY LISON DE LOMAOCEAN CONSULT POLYNESIE Raiatea, Polynésie franç[email protected]

Page 31: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

5958

La biodiversité côtière de l’archipel des Australes est essentiellement déterminée par la diversité de ses récifscoralliens, comme souvent en Polynésie française mais à l’exception des Marquises. Il y a encore une dizained’années, l’archipel des Australes figurait parmi les moins bien connus en terme de recherche scientifique (Gabrié,1998). Il ressort de la bibliographie que les îles les mieux étudiées sont Rapa et Tubuai, la première en raison de sonoriginalité à plusieurs points de vue, la seconde en raison de sa taille. Quelques missions récentes ont bien contribuéà augmenter les connaissances sur la biodiversité côtière, mais l’effort d’échantillonnage reste faible sur la plupartdes autres îles. Le niveau des connaissances acquises demeure très variable selon le groupe zoologique ou l’îleconsidéré, les communautés biologiques les mieux connues étant les peuplements ichtyologiques.

historique de l’acquisition des connaissances sur la biodiversité côtière des australes

Celle-ci ne saurait être exhaustive, mais elle reprend dans l’ordre chronologique les missions ayant permisdes avancées majeures dans la connaissance de la biodiversité côtière des îles Australes. Les workshops sontégalement mentionnés car une grande partie des publications scientifiques qui font référence en sont issues.

des campagnes d’envergure : l’accélération des connaissances

Des expéditions au XIXe et début du XXe siècle ont toutd’abord permis de défricher le terrain au gré de passagessur quelques-unes des îles de l’archipel, apportant desconnaissances sur les mollusques (Powys, 1835) et lespoissons (Nichols, 1923 ; Schmidt, 1925 ; Schultz,1945). Ces connaissances demeurent très parcellaires,jusqu’aux missions ponctuelles qui ont lieu entre les

années 1960 et 1980. Ces dernières apportent desconnaissances sur les algues (Denizot, 1980), lescoraux (Chevalier, 1975, 1980, 1981 ; Faure, 1985), lesmollusques (Salvat, 1971, 1973, Salvat et al. 1973 ;Richard, 1985a,b, 1986), et les poissons (Smith en 1970publié par Randall, 1978 ; Plessis, 1980, 1987 ; Randallet al., 1990).

une série de missions ponctuelles : la première phase exploratoire

Très peu de missions aux Australes voient le jour après1990, ce qui motive plusieurs chercheurs internationaux(Fidji, France, Italie et USA) à organiser une missionpluridisciplinaire à Rapa fin 2002, afin d’y étudier ladiversité des algues (N’Yeurt et Payri, 2010), des coraux(Adjeroud, 2002 ; Adjeroud et al., 2009), des poissons(Galzin et al. 2002 ; Galzin et al. 2006) et des mollusques(Lozouet et al., 2004, 2005 ; Schwabe et Lozouet, 2006 ;Oliverio 2009). Tour à tour surnommée BIODIV, AtelierRapa (Workshop), RAPA 2002 et autres combinaisonsde ces terminologies, cette mission va permettred’augmenter de manière importante les connaissancessur la biodiversité de Rapa. Une autre mission d’envergure a lieu la même année,menée sous le nom de BENTHAUS, à traversl’ensemble des îles Australes à bord du bateauocéanographique ALIS. Des traits de drague autour desîles apportent de nouvelles informations sur lespeuplements benthiques, en particulier mollusques etcrustacés, à la fois sur le domaine côtier et sur ledomaine profond (Bouchet et al., 2008). Il faut attendreune dizaine d’années pour qu’en 2103 deux campagnesimportantes soient conduites quasi-simultanément par

la Living Ocean Foundation et le CRIOBE en avril(Bruckner, 2014), et par l’IRD de mars à avril dansle cadre d’une mission appelée TUHAA PAE(www.pomare.org), axée sur les substances marines.Bien qu’aucune publication scientifique issue de cesdeux campagnes n’ait encore vu le jour, les résultatspréliminaires montrent des avancées dans lesconnaissances sur les coraux et les poissons récifaux,pour la première, et sur les mollusques, les éponges,et autres macro-invertébrés pour la seconde. Deuxcampagnes ont été menées récemment à Rapa etMarotiri par le Museum d’Auckland en septembre -octobre 2014 et par le National Geographic en Octobre2014. Les résultats préliminaires présentés dans leprésent ouvrage apportent des connaissancessupplémetaires sur la diversité des poissons, coraux,algues et au niveau de l’endémisme de ces îles.Enfin, il faut noter que l’île de Tubuai est le lieu d’unestation de suivi à long terme, dans le cadre du réseaud’observation Polynesia Mana (GCRMN et réseauCORAIL – INSU – CNRS), sur laquelle les peuplementscoralliens sont suivis depuis 1997 et les peuplementsichtyologiques depuis 2004.

La biodiversité des peuplements côtiers des Australesest directement liée à la diversité de ses habitatsmarins. Ainsi, la géomorphologie des îles (atoll, îlehaute), des récifs (falaises ou lagons, récifs barrièreset pente externe), et la nature des fonds (sables,coraux, rochers, herbiers) déterminent lespeuplements en place. Ces caractéristiques varientselon les îles de l’archipel (Tableau I).

Parmi les îles du nord, Maria est le seul atoll, tandisque Rurutu et Rimatara ne possèdent que des récifscoralliens frangeants aux lagons peu développés. Enrevanche, Tubuai et Raivavae possèdent des récifsbarrières étendus (Photo 1), dont la partie nord estlargement ouverte sur l’océan. Elles ont un lagonprofond et bien développé, dont les plaines sableusesforment la majeure partie.Les îles du sud (Rapa et Marotiri) se distinguent desautres, en raison de leur nature volcanique et del’absence de récifs coralliens. Des falaises bordéespar des trottoirs d’algues, des substrats rocheuxintertidaux (Photo 2) et des fonds peu profondsrecouverts d’algueraies ou d’herbiers caractérisentleurs côtes.

diversité des habitats côtiers

TABLEAU IPrincipaux caractères des habitats côtiers des différentes îles de l’archipel des Australes.

Iles

MARIA

RAIVAVAERIMATARARURUTUTUBUAIRAPAMOROTIRI

Géomorphologie

ATOLL

ÎLE HAUTE

ÎLE HAUTE

ÎLE HAUTE

ÎLE HAUTE

ÎLE HAUTE

ÎLOTS

Récif

CORALLIEN

CORALLIEN

CORALLIEN

CORALLIEN

CORALLIEN

VOLCANIQUE

VOLCANIQUE

Type de récif

BARRIÈRE

BARRIÈRE

FRANGEANT

FRANGEANT

BARRIÈRE

FALAISE

FALAISE

Lagon

OUI

OUI

NON

NON

OUI

NON

NON

Passes

NON

LAGON OUVERT

1 PSEUDO-PASSENON

LAGON OUVERT

NON

NON

Motu

4281NON

8NON

NON

PHOTO 1Habitat de pente externe du récif barrière de Tubuai,typique des îles Australes du Nord.© P. Bosserelle

PHOTO 2Habitat de falaise et substrats rocheux intertidaux, typique de Rapa et Marotiri.© Ian Skipworth

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6160

Le choix a été fait de détailler la biodiversité côtièrepar groupe taxonomique, les mêmes espèces étantsouvent rencontrées sur plusieurs îles, à l’exceptionparfois de Rapa et Marotiri comparativement auxautres îles de l’archipel.Seuls les groupes taxonomiques pour lesquels desinformations sont disponible sont ici présentés. Pourde nombreux groupes, aucune information n’existe ouelle est extrêmement parcellaire. Par exemple,aucune information n’a été trouvée pour les annélidespolychètes ou les ascidies, seulement 3 espèces ontété identifiées chez les bryozoaires (Rédier, 1971 ;d’Hont, 1985), et de manière très surprenante,quasiment aucune information publiée n’existe surles échinodermes des Australes, en dehors del’impact dû aux étoiles de mer prédatrice de corauxAcanthaster planci (taramea) à Rurutu et Rimatara(Bruckner, 2014). Les reptiles, mammifères marins etoiseaux ne seront pas abordés ici et sont traités dansd’autres chapitres du présent ouvrage.Par ailleurs, il convient de bien définir le terme de

biodiversité côtière. De manière arbitraire, nousrestreindrons le domaine côtier à la profondeur de 100 m.Ceci a son importance, notamment dans le cas decampagnes de prospection telles que BENTHAUS, dontcertains traits de chalutage sont beaucoup plus profonds.L’île de Maria, seul atoll de l’archipel mérite undéveloppement particulier. Les pentes externes del’atoll ont fait l’objet de prospections en avril 2013 lorsd’une expédition de la « Living Oceans Foundation ».Les peuplements coralliens sont dominés par lesPocillopora et des Acropora tabulaire à faible profondeurpuis une plus grande diversité avec des Favia, Lobophylliaet de très grands massifs de Porites. Un grandeabondance de mérous a été signalée mais une plus faiblediversité spécifique de poissons avec une faible biomasse(Bruckner, 2014). Maria est un atoll fermé sans passe etson lagon très peu profond est en voie de comblement.Les bénitiers (Tridacna maxima) et les petites nacresjaunes (Pinctada maculata) sont très nombreux avec unefaune corallienne essentiellement d’Acropora et dePorites (Salvat comm. pers.)

biodiversité côtière par groupe taxonomique

algues

Les premières listes d’espèces relativement élaboréesidentifient 43 taxons sur l’île de Tubuai (Denizot 1980,Brousse et al., 1980). Il faut attendre 2002 (Atelier Rapa)pour que le nombre d’espèces de la flore marineaugmente significativement : 150 espèces d’algues sontidentifiées à Rapa, sur les 452 espèces présentes enPolynésie (N’Yeurt et Payri, 2010). Cette proportion élevéereflète l’effort d’échantillonnage important par rapportau reste des Australes. Ainsi, 56 espèces deRhodophyceae ne se rencontrent qu’à Marotiri et Rapa,soit 28,7 % des algues rouges de Polynésie française, demême que 6 Phaeophyceae (N’Yeurt et Payri, 2006) et 8Chlorophyceae (N’Yeurt et Payri, 2007). Sans compter les Cyanophytes, l’ensemble des alguesrépertoriées aux Australes s’élève à 152 espèces dont 18algues brunes, 38 algues vertes et 96 algues rouges(N’Yeurt et Payri 2006, 2007, 2010). La flore marine desAustrales est assez originale par rapport au reste de laPolynésie, et montre des similitudes avec l'archipelHawaiien et les îles Cook (N’Yeurt et Payri, 2010), avec laprésence d'espèces sub-tropicales à tempérées enparticulier dans le sud (Marotiri et Rapa). La diversitéfloristique y est relativement élevée, à la différence desgroupes faunistiques. Par exemple, les espèces trouvées

aux Australes représentent 48 % des algues rouges dePolynésie française, cette proportion étant de 59 %dans les îles de la Société, et de 21 % aux Tuamotu.Les écosystèmes les plus tempérés des étatsinsulaires du Pacifique Sud sont les plus vulnérablesau regard du réchauffement global de la planète.Ainsi, les espèces d’algues qui ont leur limitegéographique de répartition au sud de l’archipelpourraient disparaître (Payri et N’Yeurt, 2005) leclimat passant du tempéré au tropical, au profitd’espèces indésirables, telles que l’espèceopportuniste Turbinaria ornata déjà présente au nordde l’archipel (île de Raivavae) et qui pourrait envahirles autres littoraux insulaires de l’archipel. L’atteinteà la diversité de la flore aura des répercussions surla faune ichtyologique inféodée, ressource clé pour lespopulations locales. Le suivi de ces groupes d’espècespermettra de détecter les effets des changementsfuturs, et un site comme Rapa pourrait devenir unobservatoire pour la région du Pacifique Sud.Enfin, certaines algues représentent une ressourcealimentaire traditionnelle, notamment pour leshabitants de Raivavae (Conte et Payri, 2002) et deRimatara comme les caulerpes (Photo 3).

PHOTO 3Une des espèces d’algues les plusconsommées aux Australes : Caulerparacemosa.© B. Da Gama

éponges

Les éponges ont fait l’objet d’un inventaire récent lorsde la campagne Tuhaa Pae menée par l’IRD en 2013de Marotiri aux îles Maria : la faune des spongiaires yest dominée par les démosponges, seulement deuxespèces d’éponges calcaires y ont été trouvées. Les éponges sont dispersées et peu abondantes auxîles Australes, et présentent une diversité liée à leurétendue latitudinale. Une trentaine d’espèces ont étéidentifiées, dont une douzaine de nouvelles espècesconnues à ce jour uniquement aux îles Australes.Quatorze autres espèces sont communes dans le

Pacifique dont sept ont été observées aux Tuamotu ouaux îles de la Société (Van Soest et al., 2012). Quatredémosponges, connues à ce jour uniquement auxTuamotu et/ou aux îles de la Société, ont été trouvéesaussi aux Australes. Rapa est l’île la plus riche avec près de la moitié desespèces, une seule vit à Marotiri, une éponge calcairedu nouveau genre Ernstia décrit en 2013 a étédécouverte dans les lagons de Tubuai et Raivavae(Hall et al., 2013).

coraux

C’est sur les récifs de Tubuai que furent réalisées lespremières observations conséquentes sur les corauxpar Chevalier en 1968 (Chevalier, 1975, 1980). La faunecorallienne y semble plus riche qu’ailleurs dansl’archipel. Ces premiers travaux relèvent la présencede 77 espèces réparties dans 31 genres. C’est à Tubuaique sont identifiés pour la première fois en Polynésiefrançaise au moins 7 espèces, et les genres Galaxea,Goniastrea, Turbinaria, Echinopora, Scolymia,Gardineroseris. La plupart de ces coraux se trouventsur les pentes externes du récif barrière entourantTubuai. La série d’observation à long terme, menée parle CRIOBE depuis 1997 sur la côte nord l’île (RéseauINSU CORAIL – Polynesia Mana GCRMN), indique laprésence de 16 genres de scléractinaires. Ces donnéesne concernent qu’un seul site, à une seule profondeur,

sur un transect de 20 m de longueur. Il est donc trèsprobable qu’un effort d’échantillonnage plus importantpermettra d’augmenter largement les connaissancessur la biodiversité des coraux de cette île. Notons queces données ont permis d’observer que la couverturecorallienne a chuté de plus de 20 % à une couverture nulle,suite au passage du cyclone Oli sur cette île en 2010.À Rapa, les premiers travaux de Chevalier (1981)identifient 13 genres. Ce nombre passe à 31 genres,répartis en 61 espèces suite à la mission de Faure(1985), qui concerne également les îlots de Marotiri. Lamission BIODIV en 2002 fait augmenter ces nombres à32 genres, comprenant 112 espèces dont 5 nouvellespour la science (Adjeroud 2002, Adjeroud et al. 2009).Les genres Goniastrea, Hydnophora, Merulina,Scolymia, et Turbinaria qui y sont identifiés ne sont pas

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trouvés ailleurs en Polynésie française ce qui démontrel’originalité du peuplement corallien de Rapa. D’autresgenres, tels que Pachyseris ou Synarea sont inconnusde Rapa, ou très rares tels que Porites, alors qu’ils sontabondants dans les autres archipels. La diversitécorallienne est particulièrement élevée pour une île decette dimension et située à cette latitude (Adjeroud,2009), quand on la compare au reste de la Polynésiefrançaise, dont les récifs coralliens comptent environ170 espèces réparties en 48 genres.Sur les autres îles de l’archipel des Australes nous nedisposons que de peu d’informations. Toutefois la collecterécente de 56 échantillons de scléractinaires parPaulay, déposés au Muséum d’Histoire Naturelle deFloride (www.flmnh.ufl.edu/invertpaleo/search_proc.asp)échantillons qui n’ont vraisemblablement pas encoreété exploités, et la mission de la Living OceanFoundation (LOF) de 2013, permettront sans doute deremédier à ce manque de connaissances. L’expéditionLOF a permis de visiter toutes les îles de l’archipelà l’exception de Rapa et Marotiri, et 143 échantillonsde coraux ont été prélevés pour 31 genres, en vued’analyses génétiques (Bruckner, 2014). Rimatara,Rurutu et Maria restent largement sous-échantillonnées. Outre l’aspect biodiversité, cetteexpédition a permis de caractériser la composition etla santé des communautés coralliennes : les coraux dela côte nord de Tubuai ont peu récupéré depuis l’impactdu cyclone Oli (Photo 4a et 4b) alors que le reste desrécifs de l’île semble en bon état. Les récifs de Rurutuet Rimatara ont grandement souffert de la proliférationde l’étoile de mer corallivore Acanthaster planci(taramea) en 2006-2007, avec des taux de recouvrementcorallien tombant à 0,1 % environ et un recrutement delarves très faible (Photo 5). L’atoll de Maria présentedes communautés coralliennes typiques d’un atollpolynésien, mais avec une composition générique un peudifférente (Bruckner, 2014).La faune scléractiniaire des Australes mérite donc uneattention particulière, en raison de la présence desgenres Galaxea, Goniastrea, Turbinaria, généralementabsents dans le reste de la Polynésie française. Demême, des espèces comme Favites flexuosa ouEchinophylla aspera sont absentes ou rares dans lesautres archipels (Chevalier, 1981 ; Faure, 1985 ;Pichon, 1985). Les colonies des genres Alveopora,Echinophyllia, Leptoria et Stylocoeniella sontabondantes aux Australes, alors qu'elles sont raresdans les récifs des autres archipels. Outre l’évidentfacteur température, la présence de ces taxa auxAustrales pourrait résulter du transport larvaire

depuis des zones plus riches en biodiversité situées àl’ouest, telles que les îles Cook (Chevalier, 1981).

PHOTO 4aCoraux de la pente externe de Tubuai en 2009 : avant le passage du cyclone Oli en 2010.© Y. Chancerelle

PHOTO 4bCoraux de la pente externe de Tubuai en 2013 : après le passage du cyclone Oli en 2010.© Y. Chancerelle

PHOTO 5 Coraux de la pente externe de Rimatara, après la proliférationd’étoiles de mer corallivores (taramea) Acanthaster planci.© B. Da Gama

mollusques

La bibliographie la plus récente (Tröndlé & Boutet,2009) fait état de 455 espèces de mollusques marinsaux Australes, reflétant à la fois une richesse spécifiqueet un effort d’échantillonnage plus faibles qu’ailleurs enPolynésie française, qui en compte plus de 2 400. Unquart (98) de ces espèces ne sont rencontrées qu’auxAustrales, au sein 48 familles zoologiques. Deuxfamilles (Muricidae et Coralliophilinae) totalisent 26espèces uniquement présentes aux Australes, avec uneoriginalité pour les Coralliophilinae, puisque près d’untiers des espèces rencontrées en Polynésie française,ne le sont qu’aux Australes.Ce nombre total d’espèces de mollusque, 455,contraste avec les 186 espèces recensées (Richard,1985a) avant les expéditions de 2002, et montre le bondde connaissances qu’ont permis ces missions. Ceschiffres évoluent d’ailleurs au gré du dépouillement desrécoltes et des révisions taxonomiques. Outre lesnouvelles espèces répertoriées, telles que les chitonset les brachiopodes, les révisions font apparaître plusd’une dizaine d’espèces nouvelles pour la science, etplusieurs nouveaux genres (Schwabe et Lozouet, 2006 ;Bitner, 2007 ; Vidal et Kirkendale, 2007 ; Geiger, 2008 ;Houart et Tröndlé, 2008 ; Alf et Kreipl, 2009 ; Dijkstra etMaestrati, 2010). Ce sont souvent les récoltes à Rapaqui augmentent le niveau d’endémisme de la faunemalacologique au sein du groupe des Australes.En marge de la zone intertropicale, Rapa est entourée

d’une plateforme littorale en pente douce, pauvre encoraux. La température de l’eau n’y favorisant pasl’édification de récifs comme dans les autres îlespolynésiennes, le milieu marin côtier de Rapa hébergeune faune malacologique originale. La présence defalaises bordées par des trottoirs d’algues, ledéploiement de substrats rocheux intertidaux et defonds peu profonds recouverts d’algueraies oud’herbiers, privilégie la présence de mollusquesherbivores (Patellidae, Trochidae, Turbinidae,Neritidae), moins représentés ailleurs en Polynésie(Richard, 1986). Enfin, l’extension de nombreux biotopesqui leur sont favorables, contribue à la prolifération deplusieurs familles de micro-mollusques (Rissoacea,Columbellidae, Triforidae). Au total, le nombred’espèces malacologiques y serait d’environ 250espèces (Richard, 1985a). L’endémisme, élevé,évoluerait autour de 10 % selon les groupes demollusques (Richard, 1986 ; Vidal et Kirkendale, 2007 ;Geiger, 2008 ; Dijkstra et Maestrati, 2010). Notons que certains mollusques, en particulier ceux dugenre Tridacna, présentent un intérêt commercial pourles habitants des Australes (Raivavae et Tubuai). Uneffort de recherche assez important vise à aider à lagestion des stocks de bénitiers dans une optiqued’exploitation durable de la ressource (cf. VanWynsberge et al., 2013). Ce point sera abordé plus endétails dans le chapitre sur la pêche côtière.

crustacés

Peu d’informations existent sur les crustacés marinscôtiers des Australes, à la différence des crustacésmarins profonds (Poupin, 1996). Les premiersrecensements d’espèces de crustacés sur laPolynésie française (Guinot, 1985) ne mentionnentpas les Australes, preuve du manque deconnaissances sur cet archipel. Comme pour lesmollusques, ce sont les campagnes BENTHAUS etBIODIV qui permettent d’obtenir des données sur lescrustacés en 2002. C’est essentiellement le travail dePoupin (2005) qui synthétise les connaissances sur lescrustacés. Au total, 200 espèces sont identifiées auxAustrales, contre 515 espèces aux îles de la Société,470 aux Tuamotu, 283 aux Marquises, et seulement134 aux Gambier. Ces disparités sont en partie liéesà des différences d’effort d’échantillonnage. Les îlesseptentrionales des Australes (Maria, Rimatara,Rurutu, Tubuai et Raivavae) présentent une faune tout

à fait similaire à celle du reste de la Polynésie. Enrevanche, les îles et haut fonds des îles méridionales(Rapa, Marotiri, volcan sous-marin McDonald) situésen bordure de zone tropicale et soumis à desconditions hydro-climatiques différentes du reste dela Polynésie, présentent des faunes différentes. Par ailleurs, 10 espèces de crabes du genre Calcinusont été identifiées à Rapa, et parmi elles unenouvelle espèce (Poupin et Lemaitre, 2003). D’autresinformations concernent 33 espèces de galathées(Galatheidae) identifiées par Macpherson (2006) surles échantillons de RAPA 2002, dont 17 espècesnouvelles et un nouveau genre. Au moins deux autresdécapodes que l’on pensait endémiques de l’île dePâques ont été trouvées à Rapa : la langoustePanulirus pascuensis (Laboute & Richer de Forge,1986 ; Photo p56) et la cigale Parribacus perlatus(J. Poupin, obs. pers. ; Photo 6). Encore une fois,

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echinodermes

En complément de la présence de taramea(Acanthaster planci) qui ont fait des ravages sur lesrécifs de Rurutu et Rimatara (Bruckner, 2014), laprésence de plusieurs espèces d’échinodermes nousa été signalée dans les lagons et récifs de Raivavaeet/ou de Tubuai (Salvat, com. pers.) : Holothuria atra

en abondance et Stichopus horrens pour lesholothuries, Echinometra mathaei, Tripneustesgratilla, Heterocentrotus mammillatus et Podophorapedifer pour les oursins, Ophiocoma sp. pour lesophiures. Mais cette liste est loin d’être exhaustive.

PHOTO 6 La cigale Parribacus perlatus observée à Rapa. © Ian Skipworth

l’originalité de Rapa apparaît comparativement auxautres îles du groupe, la rapprochant de l’île de Pâques.Des observations ont été effectuées en 2001 parGustav Paulay et ses collègues, au cours de récolteslittorales et en plongée. Cette collection américaine,déposée au Florida Museum of Natural History,comprend plus d’une centaine d’espèces, maisconcerne également la Société et les Tuamotu.Certaines espèces sont toujours à l’étude.

poissons

Les premiers recensements ichtyologiques auxAustrales remontent au tout début du XXe siècle(Seale, 1906), mais ce sont les travaux de Randall(1974, 1978) à Rapa et de Plessis (1980, 1987) à Tubuaiqui, au cours des années 1970 et 1980, permettent dedresser une première liste étoffée d’espèces. Ainsi,en 1985 il est recensé 211 espèces, dont 42 ne sonttrouvées que dans cet archipel (Randall, 1985).C’est encore l’Atelier Rapa 2002 qui, comme pour lesautres groupes taxonomiques, va permettre d’enrichircette liste (Galzin et al., 2006). Avant 1970, seules troisespèces de poissons avaient été signalées à Rapa. En1970, Smith réalise une mission de six jours sur l’îleet collecte 85 espèces de poissons (données nonpubliées reprises dans Randall, 1978). En 1971,Randall reste un mois sur l’île et publie une liste de220 espèces (Randall, 1978). En 1990, Randall etSmith publient une liste commune de 274 espèces depoissons coralliens (Randall et al., 1990). Depuis 1971,aucune nouvelle recherche n’avait été entreprise surRapa. Grâce à l’Atelier Rapa, la liste des poissonsrécifaux inventoriés se chiffre à 383 espèces, dont 27nouvelles et endémiques à Rapa. Randall et al. (1990)avaient classé 73% d’espèces de Rapa comme desespèces indo-pacifiques, 10% comme des espèces àrépartition subtropicale sud (Easter Island à LordHowe Island), 5% d’endémiques, 4% comme non

tropicales, 4% comme non pélagiques cosmopolitestransocéaniques, 3% pélagiques circumtropicales et1% ayant une affinité avec la région Est Pacifique.Parmi les 109 espèces rajoutées à la liste de Randallet al. (1990) par Galzin et al. (2006), 59% ont étéobservées en Polynésie française, 16% ont étéobservées dans la province Indo-Pacifique et 25%seraient des espèces nouvelles (sans douteendémiques à Rapa). Ces chiffres confirment l’origineIndo-Pacifique des espèces présentes à Rapa, etrenforcent surtout l’idée d’un endémisme assez élevé,autour de 6 %. L’étude comparative, avec unéchantillonnage similaire, à d’autres îles de Polynésiefrançaise (Tableau II) met en évidence une richessespécifique et une densité du peuplementichtyologique de Rapa plus faible que dans les autresîles polynésiennes, ce qui contraste avec la faunecorallienne (cf. ci-dessus). La faune ichtyologique deRapa présente de plus certaines originalités. Plusieursfamilles communes à de nombreuses îles polynésiennesn’ont pas été recensées à Rapa (Clupeidae, Carapidae,Platycephalidae, Pseudochromidae, Malacanthidae,Mugiloididae, Pleuronectidae ou Soleidae ; Randall,1985). Cette faible diversité serait à mettre en relationavec la température de l’eau, fraiche en hiver et qui limitela distribution de nombreuses familles de poissonscoralliens vers le sud, ainsi qu’avec la structure des récifs

de Rapa. L’absence d’une barrière corallienne autour deRapa (donc d’un lagon) réduirait la diversité des habitats.Enfin, le fort isolement géographique renforce sonisolement en terme de flux larvaire.Au-delà de Rapa, qui reste à ce jour l’île la mieuxétudiée de l’archipel, l’expédition de la Living OceanFoundations (LOF) et du CRIOBE en 2013 a permis decollecter sur 25 stations réparties dans les 5 îlesvisitées (Tubuai, Raivavae, Rurutu, Rimatara et Maria),un total de 2 233 spécimens, appartenant à 471espèces. Quelques 14 espèces nouvelles serontdécrites dans les années qui viennent (Planes etWilliams, 2014). De plus, cette expédition a permis derécolter une vingtaine d'espèces encore nonrépertoriées aux Australes dont certaines nouvellespour la science et qui seront décrites ultérieurement(exemple un labridae, Photo 7). Les résultats de cettecampagne d’échantillonnage sont actuellementanalysés génétiquement, et seront disponible dans labase de données FISHBOL (www.fishbol.org). Ceteffort d’échantillonnage, bien que conséquent parrapport aux précédentes explorations sur l’ensemble

des Australes, montre, comparativement au nombred’espèces trouvées sur Rapa, qu’il reste encore sansdoute beaucoup à découvrir sur la biodiversitéichtyologique des Australes, et sur la biodiversitémarine côtière en général. Les deux campagnes susmentionnées de recensement de la faune marinemenées récemment en octobre 2014 permettrontnotamment de compléter les connaisances de labiodiversité marine côtière de ces régions auxécosystèmes particuliers.

Iles

MEHETIA

TAKAPOTOMOOREA

MATAIVA

TIKEHAURAPA

Nombre d’individus.100m-2

516442400400337181

Nombre d’espèces.100m-2

464535474330

Nombre d’espèces sur la totalité des transects

1201452059399108

TABLEAU IICommunautés ichthyologiques :comparaison de Rapa à d’autres îles de Polynésie française.Source : Galzin et al., 2006.

PHOTO 7 Nouvelle espèce de poisson endémique des Australes de la famille des Labridae. © Jeff Williams

Il ressort finalement que la flore et la faune côtièredes îles Australes contraste avec le reste de laPolynésie française par une plus faible richessespécifique (notamment pour les poissons et lesinvertébrés), mais aussi par une grande originalité deces peuplements, essentiellement en raison du fortendémisme existant sur les îles méridionales del’archipel (Rapa et Marotiri ; Tableau III). Cettedifférence résulte à la fois de la diversité des habitatsmarins qui y sont rencontrés, et des conditionsclimatiques qui y règnent (températures plus basses,hydrodynamisme plus fort). C’est cette originalité, etleur relatif isolement, qui fait de ces îles du Sud, unsite d’intérêt particulier pour l’observation deschangements climatiques en cours et à venir.

conclusions

Groupe d’îles

ALGUESCORAUXMOLLUSQUES

CRUSTACÉSPOISSONS

Septentrional

152*77**455*200*471

Méridional

150112250N.D.383

TABLEAU IIIRichesse spécifique des différents groupes taxonomiquesdans les îles septentrionales (Tubuai, Raivavae, Rurutu,Rimatara et Maria) et méridionales (Rapa et Morotiri).* Toutes les Australes** Données disponibles pour Tubuai seulement (Chevalier 1980)n.d. : non disponible

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Raivavae. © GIE Tahiti Tourisme, Philippe Bacchet.

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bibliographie

Page 36: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

LES AUSTRALES SE DÉMARQUENT PAR L’ABONDANCE DE CERTAINES ESPÈCES PÉLAGIQUES

COMME LES ESPADONS, LES MARLINS, ET LES SAUMONS DES DIEUX.

68

Marlins rayés.

© Marc Montocchio

69

Les îles de l’archipel sont dans l’alignementd’une chaine de montagnes sous-marines étenduvers le sud est. Compte tenu de l’absence deplateau continental, le domaine hauturiercommence juste après le récif. Ce chapitredresse un inventaire des différentes ressourceshauturières, pélagiques et benthiques jusqu’àprésent identifiées dans cet archipel à partir dedonnées issues de pêches expérimentales et desdonnées récoltées à bord des thonierspolynésiens. Dans le milieu pélagique, toutes lesespèces recensées sont cosmopolites. Lescommunautés pélagiques sont diversifiées maispeu abondantes, les grands prédateurs restantles espèces les plus représentées. Le milieubenthique est caractérisé par une fortestratification bathymétrique des communautés.Les strates les plus superficielles sont dominéespar des espèces régionales pour laisser placeplus profond à des espèces à plus largedistribution géographique. Les connaissancessont cependant très parcellaires pour lescommunautés vivant au-delà de 800 m.

LA BIODIVERSITÉ DU PÉLAGOS ET DU BENTHOSPROFOND DANS L’ARCHIPEL DES AUSTRALES

CHRISTOPHE MISSELIS Tahiti Tuna ConsultingMoorea, Polynésie franç[email protected]

CÉDRIC PONSONNET Direction des Ressources Marines et MinièresTahiti, Polynésie franç[email protected]

Page 37: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

7170

La connaissance de la faune pélagique des îles Australesse limite à l’analyse des données des captures despêcheries thonières artisanales et industrielles.L’échantillonnage de la colonne d’eau est donc limité àla profondeur maximale de pêche atteinte par lespalangres (300 - 400 m).Les espèces pélagiques répertoriées sont toutescosmopolites et la plupart sont des espèces hautementmigratrices. Leur distribution géographique au sein dela zone économique de Polynésie française sembleévoluer en fonction des saisons mais aucun schéma demigration entre le nord et le sud n’a pu être mis enévidence. Tandis que la partie Nord est connue commeétant une zone de reproduction de plusieurs espèces(thon obèse, Thunnus obesus, et espadon, Xyphiasgladius, notamment), la partie Sud qui comprend lesAustrales et les Gambier n’est pas connue comme étantune zone de reproduction.Au sud de 20°S et donc dans le domaine maritime desîles Australes, ce sont près de 60 espèces différentes depoissons qui ont été capturées par les hameçons despalangriers polynésiens depuis 10 ans. Les grands

pélagiques sont les plus représentés car ils sont la cibleplus ou moins directe des capitaines polynésiens. Ainsi,les 3 espèces de thons majeures que sont le thon blancou germon (Thunnus alalunga) qui est l’espèce trèsmajoritairement ciblée, le thon à nageoires jaunes(Thunnus albacares) et le thon obèse (Thunnus obesus)ainsi que la bonite (Katsuwonus pelamis) représentent61,1% des individus capturés par les thonierspolynésiens ces dix dernières années. Les espèces àrostre (Makaira spp, Tetrapturus spp, Xiphias gladius)représentent 4,8% de ces captures en nombre d’individu,alors que le mahi mahi (Coryphaena hippurus) et lethazard (Acanthocybium solandri) représentent à euxseuls 15,5% de l’ensemble (Tableau I). Beaucoup depetits pélagiques sont également répertoriés ; ils sontcapturés en quantité souvent très faible, mais ils révèlentune petite part de la biodiversité totale évoluant en pleineeau à ces latitudes.

le pelagosles thons

Le thon blanc (Thunnus alalunga) est l’espèce cibléepar les palangriers polynésiens qui travaillentessentiellement entre 10°S et 22°S. Il représente51,8% des poissons capturés observés dans l’archipeldes Australes. C’est une espèce qui fréquente à l’étatjeune les eaux de surface des quarantièmesrugissants, puis à l’état adulte les couches profondesdes zones tropicales et subtropicales des trois océans.Les adultes évoluent principalement entre 150 et 350mètres de profondeur dans la plus grande partie de lazone économique (Misselis et al., 1999). La zone dereproduction identifiée aujourd’hui pour le stock degermon du Pacifique Sud est située dans la partietropicale Sud du Pacifique Ouest (Hoyle et al., 2008).Le thon obèse (Thunnus obesus) et le thon à nageoiresjaunes (Thunnus albacares) apparaissent comme lesseconde et quatrième espèces de thon les pluspêchées entre 20°S et 31°S. Ces espèces sonttypiquement tropicales et elles sont beaucoup moinsfréquentes dans les captures des palangriers auxAustrales que dans les parties centre et nord de la ZEEpolynésienne (Figure 1). Le thon à nageoires jaunesévolue la plupart du temps entre la surface et 100 mde profondeur avec un comportement plus côtier quele thon obèse qui évolue la journée à de grandesprofondeurs (jusqu’à plus de 1 000 m). Le thon ànageoires jaunes ne se reproduit pas ou peu dans leseaux polynésiennes contrairement au thon obèse quise reproduit dans le Nord Est de la ZEE polynésiennele premier semestre de l’année (Abbes et Bard, 1999).La bonite (Katsuwonus pelamis), qui est également

typiquement tropicale, constitue la troisième espèce dethon la plus pêchée aux Australes. Cette espèce à faiblelongévité et à maturation rapide atteint de grandestailles en Polynésie : le toheveri peut peser jusqu’à 20 kg.Quelques thons rouges du genre Thynnus spp. ont étéégalement occasionnellement répertoriés mais ennombre très faible.

les espèces à rostres

La proportion de marlins et d’espadons dans les capturesdes palangriers est plus forte au sud de 20°S qu’au nordde la zone économique (Figure 1). Aucune zone dereproduction n’est cependant identifiée dans l’archipeldes Australes pour ces espèces.L’espadon (Xiphias gladius) est l’espèce à rostre la plusabondante dans les captures accessoires des palangrierspolynésiens. Les gros individus sont plus fréquents dansles eaux tempérées que dans les eaux tropicales etéquatoriales. Les adultes migrent vers les zoneséquatoriales à certaines périodes de l’année pour s’yreproduire, et les juvéniles grandissent dans ces eauxchaudes avant de migrer vers le sud (Abbes et Bard,1999). Les données des observateurs montrent que les

thoniers capturent d’avantage de jeunes individus dansla partie Nord de la ZEE que dans la partie Sud.L’espadon peut occuper toute la colonne d’eau, de lasurface à plus de 1 000 m de profondeur. Soncomportement suit un rythme nycthéméral, les adultesrestent dans les couches les plus profondes durant lejour et s’approchent de la surface la nuit. Ceci se retrouvedans l’appellation par les pêcheurs polynésienstraditionnels qui le nomment «espadon de nuit» dansla mesure où il n’est accessible que la nuit aux lignes àmain qu’ils utilisent dans les 100 premiers mètres de lacolonne d’eau.Le marlin bleu (Makaira nigricans) est l’espèce de marlinla plus fréquente dans les captures des palangriers

FIGURE 1 Composition spécifique des captures des palangriers étrangers (sources : DRMM) NB : La limite nord de l’Archipel des Australes est considérée à partir de 20°S.

Débarquement de thons à nageoires jaunes au port de pêchede Papeete. © DRMM

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7372

les espèces épi-pélagiques

Le mahi mahi ou daurade coryphène (Coryphaenahippurus) constitue la deuxième espèce la pluscapturée par les palangriers polynésiens auxAustrales. Ce poisson à croissance rapide évolue enpetit banc, constitué souvent d’un mâle et deplusieurs femelles.

Le thazard (Acanthocybium solandri) est un poissonqui préfère la proximité des terres ou des hauts-fonds.Il vit en surface seul ou en groupe d’une dizained’individus et est souvent concentré sous des épaves.

les espèces pélagiques de profondeur

Parmi les espèces commercialisées, le saumon desDieux (Lampris gutattus) est une espèce accessoirecourante des palangriers opérant en milieu tropical. Lespêches expérimentales ont mis en évidence desprofondeurs fréquentées importantes, de 350 à 500 m(Misselis et al., 1999). Il est proportionnellement pluspêché au sud de 20°S qu’au nord par les palangriers.Le paru papio est également une espèce accessoirecommercialisée qui appartient à la famille des Bramidae(castagnoles). Différentes espèces ont été identifiées aularge des îles Australes (Taractichthys steindachneri,Eumegistus illustris, Taractichthys longipinnis, Bramabrama). Les plus fortes concentrations en paru papiosont observées à proximité et sur les hauts-fonds.L’habitat de cette espèce est plutôt profond mais descaptures importantes ont été réalisées en surface enpériode de pleine lune. Taractichthys steindachneri estmoins présent dans les captures au sud qu’au nord de lazone économique.Parmi les espèces non conservées par les palangriers,le poisson lancier (Alepisaurus ferox) est la troisièmeespèce la plus représentée dans les captures. C’est uneespèce à caractères primitifs avec un squelette peuossifié et des nageoires constituées exclusivementde rayons mous non épineux. Son habitat estmésopélagique, vivant entre la surface et 1 000 m deprofondeur (Abbes et Bard, 1999).L’escolier serpent (Gempylus serpens) est égalementpêché en grand nombre. Il appartient à la famille desGempylidés et bien que présent sur l’ensemble de laZEE, cette espèce apparaît plus importante dans lescaptures des palangriers au sud de 20°S. Deux espèces de ruvets, dénommées uravena enTahitien (Ruvettus pretiosus et Lepidocybiumflavobruneum) sont également présentes. La premièreespèce possède des écailles rugueuses et est très

souvent pêchée par les pêcheurs côtiers des Australesoù il est consommé malgré son effet laxatif. Ledeuxième, à écailles lisse, phylogénétiquement prochedes thons, a un comportement plus pélagique (Abbes etBard, 1999).L’escolier aile longue (Scombrolabrax heterolepis) estune espèce très proche des ruvets. Ce poisson est detaille beaucoup plus petite et les individus ne dépassentpas 30 cm de longueur à la fourche, et pèsent moins de500 g (Abbes et Bard, 1999). Cette espèce est égalementplus présente au sud qu’au nord dans les captures despalangriers.La raie violette (Dasyatis violacea) est la seule raie àaiguillon capturée en Polynésie française dont lecomportement est entièrement pélagique. L’archipel desAustrales se distingue du fait que la proportion de raiesviolettes capturées à la palangre est bien moindre qu’aucentre et au nord de la ZEE.Le grand barracuda (Sphyraena barracuda) estégalement moins présent dans les captures despalangriers que plus au nord. Il est capturé le plussouvent à proximité des îles et des hauts-fonds.Lophotus capellei, appelé paru mahi mahi par les marinsdes palangriers, du fait de son front haut et anguleux lefaisant ressembler à une daurade coryphène, est unpoisson primitif présent également dans les captures despalangriers.La famille des Molidés est également représentée avecle poisson lune (Mola mola) qui peut peser près de 200kg et le poisson tête (Ranzania laevis) qui au contraireatteint des tailles beaucoup plus modestes, un poids dequelques kg. Ce dernier est souvent pêché en rafales parles palangriers au cours de l’hiver Austral.

les ressources commerciales non ichtyques

L’archipel des Australes abrite très certainement desressources en calamars importantes, dont senourrissent en partie les thons et les espèces à rostre(Abbes et Bard, 1998 ; Allain, 2005). Des morceaux dechair très épais ont été retrouvés dans les estomacsde plusieurs espadons lors de la campagneexploratoire menée par le service de la pêche de 2006.Des pêches expérimentales aux îles Cook ont mis enévidence la présence d’espèces de grande taille

comme le calamar chipiloua (Thysanoteuthisrhombus) qui a une longueur de manteau pouvantatteindre 1 m et peser jusqu’à 30 kg, ainsi quel’encornet volant (Ommastrephes bartramii), espècede plus petite taille de 70 cm de longueur de manteaumaximale avec un poids se situant entre 5 et 18 kg.Ces deux espèces semblent présentes dansl’ensemble des eaux tropicales et subtropicales duPacifique Sud (Sokimi, 2013).

TABLEAU ICaptures observées à bord des thoniers palangriers polynésiens au sud et au nord de 20°S, entre 2004 et 2013.

Code

ALBDOLALXWAHBETSKJYFTLAGBSHSWOGESBUMSSPSXHLECMLSSMARZVPRPOILOCSTSTGBAUNSASZEBSOTHSNKPLSLOPMOXLMAALONENBLM

Nom GB

ALBACOREMAHI MAHI/DOLPHINFISH/DORADOLONGSNOUTED LANCETFISHWAHOOBIGEYESKIPJACKYELLOWFINOPAH / MOONFISHBLUE SHARKSWORDFISHSNAKE MACKERELBLUE MARLINSHORT-BILLED SPEARFISHBLACK MACKERELESCOLARSTRIPED MARLINSHORT FINNED MAKO SHARKSlender sunfishROUDI ESCOLAROILFISHOCEANIC WHITE-TIP SHARKSICKLE POMFRETGREAT BARRACUDAUNSPECIFIEDRAZORBACK SCABBARDFISHBRILLIANT POMFRETOTHER FISHBARRACOUTA (SNOEK)PELAGIC STING-RAYCRESTFISH/UNICORNFISHOCEAN SUNFISHLONG FINNED MAKO SHARKSHORTSNOUTED LANCETFISHBLACK GEMFISHBLACK MARLIN

Nord 20°S

59659437200341504927312367241988146468102241339989255061876311298537469146222158424527269119854476159807383206025932652728382225430252861109232010181455

Nom sci

Thunnus alalungaCoryphaena hippurusAlepisaurus feroxAcanthocybium solandriThunnus obesusKatsuwonus pelamisThunnus albacaresLampris guttatusPrionace glaucaXiphias gladiusGempylus serpensMakaira mazaraTetrapturus angustirostrisScombrolabrax heterolepisLepidocybium flavobrunneumTetrapturus audaxIsurus oxyrhinchusRanzania laevisPromethichthys prometheusRuvettus pretiosusCarcharhinus longimanusTaractichthys steindachneriSphyraena barracuda#REF!Assurger anzacEumegistus illustrisTeleostiiThyrsites atunDasyatis violaceaLophotus capelleiMola molaIsurus paucusAlepisaurus brevirostrisNesiarchus nasutusMakaira indica

Sud 20°S

1088282059812145119178263640249684274339432383152248323952277216819541485140713951258703548502455429400366343331289226212205172113

Total général

7054225779846295611901319354839015143614498167931216382131124613693765190828176306938598664132435179165287885251568872689331812258533145121321252511901568

% au sud

15,4%35,6%26,2%19,5%6,3%13,2%3,3%29,5%20,2%26,6%38,4%22,1%17,5%29,8%23,9%23,9%48,4%36,5%16,1%9,5%13,6%3,3%6,4%18,1%62,4%55,1%41,0%10,8%1,5%8,7%44,1%16,0%8,1%14,5%7,2%

Total général

49,6%4,1%3,3%4,3%9,3%3,4%10,7%1,0%1,2%0,9%0,6%0,8%1,0%0,5%0,6%0,6%0,2%0,3%0,6%0,9%0,4%1,2%0,6%0,2%0,0%0,1%0,1%0,2%1,6%0,2%0,0%0,1%0,2%0,1%0,1%

% des captures au sud de 20°S

51,8%9,8%5,8%5,7%3,9%3,0%2,4%2,0%1,6%1,5%1,5%1,2%1,1%1,1%1,0%0,9%0,7%0,7%0,7%0,6%0,3%0,3%0,2%0,2%0,2%0,2%0,2%0,2%0,2%0,1%0,1%0,1%0,1%0,1%0,1%

polynésiens aux Australes, suivi du marlin à rostre court(Tetrapturus angusti-rostris) qui, bien qu’étant latroisième espèce à rostre la plus pêchée, n’a aucunevaleur commerciale contrairement aux autres.Le marlin rayé (Tetrapturus audax) est un poissontypiquement pélagique dont l’abondance augmente avecl’éloignement des côtes. Il est proportionnellement plus

capturé par les palangriers polynésiens dans cetterégion des Australes que dans le reste de la zoneéconomique.Au contraire, le marlin noir (Makaira indica) et levoiler (Istiophorus platypterus) apparaissentproportionnellement moins dans les captures despalangriers au sud de 20°S (Tableau I).

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7574

Le milieu profond commence traditionnellement à lafin de la couche euphotique vers 150 m. Depuis 1980,plusieurs types de prospections ont été en effetmenés pour tenter d’évaluer les ressources de cesmilieux profonds et leurs intérêts commerciaux.Dragages, pêches aux casiers et pêches auxpalangres horizontales et verticales de fond ont étéréalisés sur les pentes externes des îles et sur lesmonts sous-marins dans l’ensemble de l’archipel desAustrales mais jamais au-delà de 700 m ; ainsi lescommunautés plus profondes n’ont a priori jamais étéétudiées et en tout cas jamais documentées.Les communautés de poissons démersaux sontcaractérisées par une forte stratificationbathymétrique principalement induite par lesmodifications des conditions physico-chimiques dumilieu : les strates les plus superficielles sontdominées par des espèces régionales dontl’abondance relative diminue avec la profondeur pourlaisser place à des espèces à plus large distributiongéographique voir cosmopolites. Aux Australes, onpeut distinguer :

le benthos profond

TABLEAU IIIListe des espèces de poissons profonds démersaux identifiés aux Australes.

FAMILLE

BRAMIDAECAPROIDAECARANGIDAECARNGIDAECENTROLOPHIDAEEMMELICHTHYIDAEHOLOCENTRIDAELABRIDAELUTJANIDAE

MULLIDAEMUREANIDAEPOLYMIXIDAEPRIACANTHIDAESCORPAENIDAESERRANIDAE

CENTROPHORIDAE

SQUALIDAEBERYCIDAE

ETMOPTERIDAEGEMPYLIDAE

PENTACEROTIDAE

NOM FRANÇAIS

castagnole communepoisson sangliersériolecarangue noiresériole argentéepoisson rubissoldat à nageoires jauneslabre de la perditionlantanier rougeaprion verdâtrevivaneau rougevivaneau la flammeColas écailleusevivaneau à réseaux d'argentvivaneau à tâches jaunesvivaneau blancvivaneau rosevivaneau rayévivaneau de Randallrouget barbetmurènebarbu argentégros œil à longues nageoiresrascasse rougeloche à bandes doréesloche écarlatemérou six raiesmérou comèteloche rouge du largeloche à peau de serpentholanthiasserranplectranthiasmérou orangéloche saumonelle

requin chagrin cagaourequin chagrin mosaiqueaiguillat à nez courtbéryx courtbéryx élancésagre luciferescolierpoisson huileescolier gracilepoisson cuirasse

NOM SCIENTIFIQUE

Eumegistus illustrisAntigonia caprosSeriola rivolianaCaranx lugubrisSchedophilus velainiErythrocles scintillansMyripristis chryseresBodianus perditioAphareus rutilansAprion virescensEtelis carbunculusEtelis coruscansParapristipomoides squamimaxillarisPristipomoides argyrogrammicusPristipomoides auricillaPristipomoides filamentosusPristipomoides sieboldiiPristipomoides zonatusRandallichthys filamentosusParupeneus sp.Lycodontis intensiPolymixia japonicaCookeolus japonicusPontinus macrocephalusCephalopholis igarashiensisCephalopholis sexmaculataEpinephelus fasciatusEpinephelus morrhuaEpinephelus retoutiEpinephelus tuamotuensisHolanthias tapuiLiopropoma lunulatumPlectranthias tayloriSaloptia powelliVariola louti

Centrophorus moluccensisCentrophorus tesellatusSqualus megalopsBeryx decadactylusBeryx splendensEtmopterus luciferPromethichthys prometheusRuvettus pretiosusThyristoides marleyiPentaceros knerii

CLASSE

OSTEICHTHYEN

CONDRICHTHYEN

OSTEICHTHYEN

Strate 150 m – 500 m

Strate 500 m – 800 m

Famille

PalaemindaeHyppolytidaePandalidae

Enoplometopidae

PalinuridaeScyllaridae

Diogenidae

Paguridae

Parapaguridae

Galatheidae

ChieoqtylidaeDromiidaeHomolidaeHomolidaeParthenopidaeCancridaeGeryonidaePortunidae

Xanthidae

Carpiliidae

Espèce

Periclimenes poupiniLigur ensiferusHeterocarpus amaculataHeterocarpus laevigatusHeterocarpus parvispinaHeterocarpus sibogaePlesonika carsiniPlesonika curvataPlesonika edwardsiiPlesonika fenneriPlesonika flavicaudaPlesonika macropodiaPlesonika reflexaPlesonika rubriorPlesonika sindoiPlesonika spindorsalisPlesonika wlliamsiHoplometopus sp.Hoplometopus gracilesJustitia longimanusScyllarus auroraScyllarus rapanusBathynarius albicinctusCiliopagurus pacificusDardanus australisDardanus gemmatusDardanus pedunculatusStrigopagurus poupiniSolitariopagurus triprobolusSympagurus affinisSympagurus boletiferSympagurus dofleiniSympagurus tuamotuMunia amatheaMunia plexauraMunia rubellaMunia rubrovattaEmunida treguieriDromia wilsoniHomola orientalisHypsophrys personataParthenope poupiniPlatepistoma balssiiChaceon orientalisLupocyclus quinquedentatusPortunus sp.Thalamita macrospiniferaThalamita mitsiensisThalamita philippnensisThalamita spiniferaAlainodaeus akiakiAlainodaeus rimataraEpistocavea mururoaLophozymus bertonciniaeDemania garthiBenroisia manqueneiMathildella maximaProgeryon mararaeCarpilius convexus

Infr Ordre

Caridea

Astracidea

Palinuridea

Anomura

Brachyura

TABLEAU IIListe de crustacés décapodes profondsidentifiés aux Australes (Poupin, 1996).

Banc de carangues. © GIE Tahiti Tourisme, Philippe Bacchet

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- la strate mésobathyale supérieure (150 m - 500 m)essentiellement dominée par les Lutjanidae profonds(Etelis spp. et Pristipomoides spp.) et quelquesSerranidae ;- la strate mésobathyale intermédiaire (500 m - 800 m)essentiellement dominée par les alfonsino (Beryxspp.) le barbu argenté (Polymixia spp), les escoliers(Gempylidae) et les requins de profondeur.La ségrégation entre les communautés est bienmarquée mais n’est néanmoins pas absolue. Desmigrations verticales nycthémérales sont notammentobservées chez certaines espèces telles que lesGempylidae (Promethichtys prometheus et Ruvettuspretiosus) et les requins de profondeurs qui sontcapturés au-dessus de 500 m la nuit et en dessousle jour. Au sein de la strate mésobathyale supérieure,l’intervalle 200 – 400 m cumule l’essentiel del’abondance et la diversité maximale mais auxAustrales, contrairement aux autres archipels,l’abondance est toujours relativement importantejusqu’à 500 m (Ponsonnet, 2004). Sur l’ensemble de l’archipel, au moins 45 espèces depoissons profonds réparties entre 21 familles ont puêtre identifiées lors des différentes campagnesexploratoires (Tableau III et IV).Cependant, comptetenu de la forte sélectivité des engins utilisés, ladiversité réelle est à l’évidence nettement supérieure.En effet, l’analyse des captures réalisées pendant lescampagnes POREMA montre clairement un lien directentre l’effort d’échantillonnage et la diversitéobservée (Ponsonnet, 2004). Des études comparativesentre des prélèvements à la palangre et desobservations visuelles in situ à l’aide de sous-marinsont notamment montré que la diversité est à minimasept fois supérieure (Ralston et al, 1986). Malgré la grande dispersion des îles de l’archipel(environ 1 250 km d’est en ouest et 650 km du nord ausud), aucune différence significative n’a pu êtreobservée dans la composition spécifique de cescommunautés dans les différentes îles. De même,contrairement à certaines observations réalisées parailleurs dans la Pacifique (Dalzell et al, 1992), aucuneinfluence du type d’île (atoll, île haute ou mont sous-marin) ou de la taille de l’île sur la structure descommunauté n’a pu être identifiée (Ponsonnet, 2004).Ces premières conclusions mériteraient cependantd’être confirmées dans la mesure où l’effortd’échantillonnage a été faible dans la partie sud desAustrales, notamment autour de Rapa où desdifférences dans les communautés de surface ont

déjà été mises en évidence comparativement àd’autres îles de l’archipel (Galzin et al, 2006). Des comparaisons entre les populations de la strate150 m – 500 m des différents archipels de Polynésiefrançaise montrent que les communautés desAustrales sont très proches de celles de l’archipel dela Société mais significativement différentes de cellesdes Tuamotu et des Marquises. Les poissons y sonten moyenne plus grands qu’ailleurs.Concernant les autres espèces, les mollusques sontgénéralement les organismes les plus abondantsdans les prélèvements (56 %), les bivalves comptantpour près de 75%, les gastéropodes totalisantpratiquement tout le reste. Les crustacés (18 %) ontété décris plus précisément avec 59 espècesidentifiées (Tableau II) réparties dans 19 familles(Poupin, 1996). Les échinodermes (14 %)appartiennent majoritairement à la famille desophiures (60 %), puis des échinides (32 %), lesastérides et les crionoïdes sont très peu présentsdans les échantillons. Les coraux (7 %) sontmajoritairement des madréporaires (88 %). Poissons,annélides, éponges, anémones, brachiopodes etforaminifères constituent le reste des prélèvements(5%) (Poupin, 1991)

7776

la couche migrante profonde

Les monts sous-marins sont traditionnellementdéfinis comme des élévations d’au moins 1 000mètres au-dessus du plancher océanique etprésentant une forme circulaire, elliptique ouallongée avec des pentes relativement abruptes etune surface sommitale limitée (Menard, 1964).Selon cette nomenclature, l’archipel des Australescompte au moins 42 monts sous-marins dont lesommet est à moins de 2 000 m de profondeur(Zepolyf 2, 2001). Parmi eux, 5 culminent à moins de50 m de profondeur: Arago ou Tinomana - BancThiers - Récif Neilson - Banc Mac Donald et undernier au nord de Rapa, et 4 autres entre 50 et 500 m :un nommé Lotus, un au nord est de Rimatara, un ausud de Rurutu et un dernier au sud est de Tubuai.Certains de ces monts sont relativement isoléstandis que d’autres sont intégrés dans une chaînesous-marine. Les formes sont très diverses mais laplupart du temps les pentes sont abruptes et lessommets relativement pointus. Le substrat despentes est généralement constitué de gros blocscoralliens avec une tendance à l’accumulation degravats coralliens (inférieurs à 2 cm) en profondeur(Poupin, 1991).

les monts sous-marins : des écosystèmes particuliers

La plus grande partie de la biomasse animale dumilieu pélagique est constituée de zooplancton et demicronecton (Fernandez et Allain, 2011). Cemicronecton se compose de divers organismes(lanternules, haches d’argent, crevettes profondes,petits calmars et animaux gélatineux) vivant à desprofondeurs différentes et migrant par déplacementsverticaux dans la colonne d’eau. Certains de cesorganismes, résidant dans des eaux très profondes,remontent à la surface au crépuscule pour y passerla nuit, avant de replonger à l’aube vers lesprofondeurs. Ils constituent la plus grande sourced’alimentation des ressources pélagiques (Allain,2005) et benthiques précédemment décrites. Ces organismes sont situés à l’interface entre lesforçages physico-chimiques, qui déterminent engrande partie leurs distributions et abondances.Les eaux du grand gyre du Pacifique Sud sontcaractérisées par une faible concentration en

nutriments, peu de proies au-dessus et en dessousde la couche d’eau profonde comprise entre 500 et600 m de profondeur et qui abrite la plus grandepartie du micronecton pélagique. Les espècespélagiques qui ne peuvent plonger jusqu’à 500 m deprofondeur pour se nourrir, exploitent la portionmigrante de ce micronecton au lever du jour et à latombée de la nuit. Cette couche d’eau plonge au niveaude la convergence sub-tropicale (Langlade, 2001 ;Molony, 2006) et remonte vers la surface à l’équateur.Le micronecton a été également détecté sous formede bancs plus ou moins concentrés au nord desTuamotu et plus dispersés dans le sud (Bertrand etal, 1999). Même si aucune mesure d’écho prospectionn’a été réalisée dans l’archipel des Australes pourétendre cette observation, la présence de patchsdispersés de micronecton a été observée sur lessondeurs au cours de la mission menée par le servicede la Pêche en 2006.

Genre

SuggrundusPseudanthiasIchthyapusApterichthusSynodusArnoglossusPlagiotremusParapercisOstracionCheilinusPolyipnisSymphysanodonAspidontusCynoglossusUrocongerAriosomaColocongerEuprotomicrusBrotulaSetarches guentheriSqualusSqualus

Espèce

Coloconger ranicepsEuprotomicrus bispinatusBrotula multibarbata

Squalus melanurusSqualus mistukurii

Famille

MacrouridaeDraconettidaePlatycephalidaeSerranidaeOphichthidae

SynodontidaeBothidaeBlenniidaeMugiloididaeOstraciidaeLabridaeSternoptichidaeSymphysanodontidaeBlenniidaeCynoglossidaeCongridae

ColocongridaeDalatidaeOphidiidaeSetarchidaeSqualidae

TABLEAU IVListe des espèces de poissons profonds démersaux dont laprésence doit être confirmée aux Australes.

Pinacle corallien à Maria. © Andrew Bruckner

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7978

Le milieu pélagique de l’archipel des Australes estcaractérisé par des eaux aux qualités peu stratifiées etrelativement oligotrophes malgré la diversité spécifiquequ’il semble abriter. Tandis que la partie Nord del’archipel subit encore l’influence tropicale, la partieSud offre des conditions plus tempérées avec unesaisonnalité bien marquée La biodiversité pélagiquereflètent ces deux influences. La distribution spatio-temporelle de la ressource est cependant très variableet les migrations entre les eaux avoisinantes sontquasiment inconnues. Les îles Australes, comme la plus grande partie duPacifique Sud ne sont sous l’influence d’aucun grandcontinent. Cette position particulière dans le PacifiqueCentral Sud, non loin du centre du grand gyre océanique,a longtemps poussé les scientifiques à considérer cettezone comme oligotrophe, pauvre en faune pélagique.

Depuis le développement des pêcheries insulaires dansle Pacifique Centre et Ouest, force est de constater quemême si la biomasse générale en ressourcesexploitables n’est pas aussi importante que dans lesgrandes régions de pêche situé à l’ouest du Pacifique, ladiversité y est quand même et certainement encore engrande partie méconnue. Les quelques espècescapturées à l’aide de gros hameçons ne représententcertainement que la partie immergé de cet iceberg quereprésente l’ensemble des faunes pélagiques etbenthiques identifiées à ce jour dans la région.Le domaine hauturier de l’archipel comprend égalementde nombreuses chaines montagneuses sous-marines.Les quelques connaissances acquises sur ces montssous-marins témoignent d’une singulière biodiversité etd’une étonnante richesse. Ces écosystèmes particuliersdemeurent cependant insuffisamment connus.

conclusions

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bibliographie

endémisme et dissémination transocéanique

Les communautés de poissons rencontrées sur lesmonts sont majoritairement composées d’espècescommunes à tous les biotopes (côtes continentales,monts sous-marins et îles), puis d’espècesendémiques aux monts sous-marins et d’espècescommunes aux monts sous-marins et aux îlesseulement. Selon les auteurs, sur les montséchantillonnés et surtout les taxons étudiés, le taux

d’endémisme varie de 15 % à 36 % (Richer de Forges,2000 et 2001). Ce taux important d’endémismerencontré sur les monts, y compris au sein de phylatrès mobiles comme les poissons par exemple, laissepenser que ces milieux sont le siège d’une spéciationélevée. Les monts sous-marins jouent un rôleprimordial de relais dans la dissémination trans-océanique des espèces (Wilson et Kaufmann, 1987).

topographie et hydrodynamisme induit

Créant des obstacles naturels aux courantsocéaniques, les monts sous-marins génèrent desperturbations importantes dans la direction etl’intensité des flux créant des courants ascendants etdes gradients de vitesse le long des pentes. Ils

déterminent aussi l’apparition de structuresdynamiques tourbillonnaires complexes pouvant êtrepermanentes ou ponctuelles et dont l’intensitédépend en partie de la stratification du milieuocéanique (Genin et al., 1986).

productivité des monts sous-marins

Les monts sous-marins sont systématiquement le sièged’une productivité plus élevée que la colonne d’eau quil’entoure. Cependant, ceux dont le sommet culmine endessous de 300 mètres de profondeur ne peuvent abriteraucun organisme photosynthétique fixé et la productionprimaire est limitée à la fraction phytoplanctoniquedes eaux avoisinantes. Des estimations de densitésplanctoniques et micronéctoniques par chalutagepélagique et méthodes acoustiques ont montré que lespopulations de poissons des monts sous-marins senourriraient en plus grande partie du zooplancton et dumicronecton qui effectue des migrations diurnes le longdes pentes. Une fraction est piégée à l’aube lors de lamigration inverse en étant balayé par le courantdominant à l’aplomb du mont où l’habitat et lesconditions (notamment la plus grande luminosité) lerendent plus vulnérable aux prédateurs. D’une manière générale, la structure des communautésplanctoniques et micronectoniques des eaux baignant lesmonts diffèrent significativement de celles des eauxavoisinantes, tant sur le plan qualitatif que quantitatif.Plusieurs études ont notamment mis en évidence unratio plus important de larves de poissons néritiques parrapport aux poissons océaniques dans la couche denseà l’aplomb du mont, cette tendance s’inversant dans leseaux avoisinantes (Boehlert, 1985 in. Boehlert, 1987). Les

communautés zooplanctoniques des monts seraientégalement renforcées par la présence d’espècesplanctonophages profondes inféodées aux monts(Myctophidae notamment) qui suivraient, en bancscompacts, la couche planctonique migrante dans sesdéplacements nocturnes, offrant ainsi une nourritureconséquente aux gros prédateurs, ainsi qu’entémoignent les études de contenus stomacaux faites surles espèces démersales et pélagiques telles que lesthons (Abbes et Bard, 1999). Cette productivité attire et concentre beaucoup d’espècespélagiques (Fernandez et Allain, 2011) qui fait leurrichesse et leur intérêt mais nos connaissances sur cesécosystèmes, autant benthique que pélagique, demandeà être approfondie. Les montagnes sous-marines sonten cela des repères pour les pêcheries palangrières quiaident à trouver des concentrations en thons et enespadons (Morato et al., 2009). Des études montrent quela composition spécifique à proximité des hauts-fondsévolue au cours du temps et que sur 37 taxons depoissons pélagiques recensés dans les grandespêcheries, 41% sont attirés par les monts sous-marins.Des capitaines du port de pêche rapportent qu’ilscapturent du thon obèse à proximité de quelques-unsdes hauts-fonds au sud de 20°S, et en particulier sur leLotus au large de Rurutu.

Page 42: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

80

LES FONDS MARINS DES AUSTRALES DISPOSENT DE RESSOURCES MINÉRALES PROFONDES QUI SONT ENCORE

INSUFFISAMMENT IDENTIFIÉES ET CARTOGRAPHIÉES.

Corail observé lors d’une expédition scientifique à Marotiri.

© Ian Skipworth

81

Les métaux rares qui sont dans les nodulespolymétalliques, les encroutements cobaltifèreset les boues à terres rares, existent sur les flancset les sommets des monts sous-marins et desplaines abyssales de la ZEE de Polynésiefrançaise, y compris dans le secteur de l’archipeldes Australes. L’exploitation de tels gisementsn’est pas encore à l’ordre du jour compte tenudes coûts d’exploitation comparativement auxexploitation des gisements terrestres. Une telleexploitation est de la compétence de l’État enraison du code minier national et de la référenceaux minerais stratégiques.

LES RESSOURCES MINÉRALES DE L’OCÉAN PROFOND DES AUSTRALES

BERNARD SALVATLaboratoire d'Excellence CORAILCRIOBE USR 3278 CNRS-EPHE-UPVDCentre de Recherches Insulaires et Observatoire de l'EnvironnementMoorea, Polynésie franç[email protected]

Page 43: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

8382

Les métaux sont des éléments (tableau périodiquedes éléments de Mendeleïev) qui ont pourpropriétés d’être de bons conducteurs électriqueet thermique. C’est pourquoi ils sont très utilisésdans l’industrie et certains d’entre eux dans lestechnologies nouvelles. Les ressources minéralessur le fond de l’océan sont de quatre types : lesnodules polymétalliques, les encroûtementscobaltifères, les boues à terre rares et les sulfuresdans les sources hydrothermales (Fouquet etLacroix, 2012 – Figure 1).Les nodules polymétalliques (diamètre de 5 à 10 cm)sont sur tous les fonds marins, au-delà de 4 000 mde profondeur ; ils contiennent essentiellementdes hydroxydes de fer et de manganèse mais aussidu cuivre, du cobalt, du nickel, etc. Les nodulespeuvent couvrir jusqu’à 70% du fond marin etdépasser les 10 kg au mètre carré.Les encroutements sont disposés aux sommetsdes guyots ou montagnes sous-marines et surleurs flancs, entre 400 et 4 000 m de profondeur.Sous forme de croûtes d’une épaisseur dequelques cm à 25 cm ils ont la même compositionque les nodules mais avec une bien plus forteconcentration en cobalt d’où leur dénominationd’encroutements cobaltifères. Ils contiennentégalement des concentrations intéressantes ennickel et cuivre mais aussi des métaux rarescomme le platine, le titane ou le cérium.Les boues abyssales, de plusieurs mètresd’épaisseur, se rencontrent à partir de 4 000 mdans les parties des bassins océaniques où la

sédimentation est très faible et ils contiennent desterres rares (groupes des 15 lanthanides dans letableau périodique des éléments dont lanthane,cérium, néodyme, etc.) et de l’yttrium.Les sources hydrothermales se rencontrent surles dorsales montagneuses océaniques où laremontée de fluides du magma permet des dépôtssulfurés dans des conditions particulières depression et de chaleur. Ces minéralisations sesituent aux débouchés et à proximité de ces« souffleurs » des grands fonds. Comme parexemple le long de la dorsale Pacifique Est àproximité de l’île de Pâques, là où prend naissancele plancher océanique avant de dériver versl’ouest, d’une part, et vers l’est, d’autre part, à lavitesse d’environ 10 cm par an. Dans les années 70, on utilisait quelques 20 métauxindustriels comme le fer, le cuivre, le nickel, lezinc, le manganèse, le plomb etc., qui étaient tousextraits de l’exploitation de gisements terrestres,on les nomme les métaux majeurs. Laclassification (tableau périodique) des élémentsde Mendeleïev comporte plus de 100 métaux dontplus de 60 sont utilisés actuellement dans lestechnologies nouvelles (Guillebon et Bihouix,2010). Pour ces métaux on emploie d’autresdénominations plus ou moins synonymes : métauxmineurs, rares, verts, high-tech, technologiques,exotiques, etc. (Hocquard et Samama, 2012)

quelles sont ces ressources minérales et où sont elles ?

Les mines exploitent des minerais mais ceux-ci ne sont pas toujours des métaux. Il s’agit parfois d’autresmatériaux comme le charbon ou les roches phosphatées. Il y a un gisement de charbon (lignite forméepar dégradation de matière organique végétale) à Rapa qui n’a jamais été exploité. Il y a eu les mines dephosphates de Makatea, roche appelée apatite formée au sein de milieu vaseux avec du phosphore etayant subie une diagénèse. Les mines de métaux, comme le fer, le nickel, le plomb ou le cobalt et de plus d’une centaine d’autresmétaux, n’existent pas en Polynésie française. Ce n’est que dans des îles du Pacifique Sud Ouest quel’on rencontre des gisements exploités ou ayant été exploités comme le nickel, le manganèse, l’or, etc.Les seules ressources minérales qui pourraient être exploitées un jour en Polynésie française sont surle fond de l’océan et concerne des dizaines de métaux, des plus communs (manganèse, nickel, etc.) auxplus rares (terres rares).

FIGURE 1 Composition minéralogique des différentes ressources minérales du fond des océans. © IFREMER

Encroutements cobaltifères.© IFREMER

Nodules polymétalliques.© IFREMER

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L’accès à l’exploration et à l’exploitation desressources minérales océaniques profondes n’estpas libre. Il dépend de la juridiction des États dansleurs ZEE et des règlements internationaux dans leseaux internationales qui sont du domaine duPatrimoine de l’Humanité.La convention des Nations Unies sur le droit de la merde 1982 (Montego Bay), entrée en vigueur en 1994, adéfini les Zones Economiques Exclusives (ZEE) dechaque état qui s’étendent jusqu’à 200 milles aularge (370 km) et dans lesquelles chaque Étatpossède «des droits souverains aux fins d’explorationet d’exploitation, de conservation et de gestion desressources naturelles, biologiques et non biologiques,des eaux surjacentes aux fonds marins, des fondsmarins et de leur sous-sol».

Pour ce qui concerne la Polynésie française, «La loiorganique n° 2004-192 du 27 février 2004, portantstatut d’autonomie du Pays, prévoit que ce dernier «réglemente et exerce le droit d’exploration et le droitd’exploitation des ressources naturelles biologiqueset non biologiques (…) du sol, du sous-sol et des eauxsurjacentes de la mer territoriale et de la zoneéconomique exclusive dans le respect desengagements internationaux ». Mais comme indiquédans un rapport du Sénat (2013) «En application del’article 671-1 du code minier national, la compétenceen matière d’exploration et d’exploitation desmatières premières stratégiques ne relève toutefoispas de la Polynésie française ». Une proposition de loiorganique a été déposée le 9 mars 2012 par lesénateur Richard Tuheiava en faveur de l’actualisation

l’accès aux ressources dans la zee de polynésie française

FIGURE 2 Distribution des concentrations moyennes de terres rares et d’yttrium dans les sédiments de surface du Pacifique. © Kato et al, 2011

les ressources minérales marines en polynésie française et la région

Dans sa zone exclusive économique des 200 millesmarins, la Polynésie française possède des champsde nodules, des encroutements et des boues richesen terres rares mais il n’y a pas de siteshydrothermaux donnant lieu à des minéralisations.Les nodules polymétalliques se rencontrent entre4 000 et 6 000 m de profondeur mais avec une densitéinférieure à 10 kg par mètre carré. Les encroutementscobaltifères, repérés par l’IFREMER, sont sur lesmonts sous-marins, entre 400 et 4 000 m avec desconcentrations de cobalt parmi les plus fortesconnues au monde et de bonnes teneurs en platine.Des boues abyssales riches en terres rares etyttrium existent à partir de 4 000 m sur quelquesmètres d’épaisseur. En 2011, une publication de chercheurs japonais(Kato et al. 2011) révélait dans les sédimentsprofonds du Pacifique l’existence de boues deterres rares sur des mètres d‘épaisseur (Figure 2).Selon ces auteurs 1 km2 de ces boues océaniquesrécupérées par plus de 3 000 m de profondeur puistraitées pouvaient fournir jusqu’à 1 400 tonnes de

terres rares, ce qui représentait la consommation deces éléments en 2009 à l’échelle mondiale. Lesprospections de Kato et al. (2011) ont porté sur 78prélèvements dans tout le Pacifique et 4 d’entre euxse situent dans la ZEE de Polynésie française : 3 dansle nord-ouest des Tuamotu et le 4e à mi-chemin entreTahiti et Raivavae. Par ailleurs 3 autres prélèvements sont situés à l’estde la ZEE mais à proximité. Tous ces prélèvementscontiennent des terres rares lanthanides ainsi que del’yttrium et du scandium.Peu de publications concernent les ressourcesminérales dans les fonds proches des îles Australesqui possèdent sans nul doute des champs de nodules,des encroutements sur les monts sous-marins et desboues à terres rares. Toutefois des encroutementscobaltifères ont été repérés dans la zone des îles dela Société et des Australes sur plusieurs dizaines demilliers de km2. Par ailleurs le prélèvement de Katoet al. (2011) atteste la présence de boues à yttrium etterres rares entre Tahiti et Raivavae.

Ces métaux rares sont utilisés dans les nouvellestechnologies informatiques et micro électroniquesdont la demande a explosé depuis deux décennies: téléphones portables, domaine photovoltaïque etéolien, générateurs électriques, batteries, écrans,transistors, écrans plats, aimants d’ordinateurs,etc. Ils sont également utilisés pour la fabricationd’armes stratégiques sophistiquées et pour lesvéhicules électriques. Certains métaux sontqualifiés de « critiques » pour l’économie desÉtats. Leur approvisionnement conditionne ledéveloppement des nouvelles technologies et laproduction des applications commerciales susmentionnées. L’exportation de ces métaux par lespays producteurs ne sont pas toujours libres sur lemarché. Pour les terres rares par exemple, dont90% sont produits par l’exploitation de gisementsterrestres en Chine, des embargos sur lesexportations ont été parfois décidés par cet État. La

nécessité d’importer ces métaux est stratégiquepour les États. L’Union Européenne, extrêmementdépendante de ces importations en métaux, aétabli en 2010 et actualisée en 2014 une liste de20 métaux « stratégiques » dont antimoine,béryllium, chrome, cobalt, gallium, germanium,indium, magnésium, niobium, tungstène, etc. Legouvernement français a créé par décret leComité pour les Métaux Stratégiques (COMES) enjanvier 2011, comité regroupant 22 membres, dontdes organismes publics (ADEME, AFD, BRGM,

IFREMER), l’État (différents services ministériels) etdes fédérations industrielles (Christmann, 2012).

quel est l’intérêt de ces ressources minérales ?

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La Polynésie française dispose dans sa ZEE deressources minérales profondes qui sont encoreinsuffisamment identifiées, cartographiées etévaluées qu’il s’agisse des encroutementscobaltifères, les nodules polymétalliques ou desboues à terre rares. Les fonds marins de la partiede la ZEE entourant les Australes possèdentassurément de telles ressources. Leur exploitationdans le futur et après des années d’explorationcomplémentaires sera fonction du marché de cesmétaux rares et stratégiques car pour l’instant lescoûts d’exploitation industrielle sont trop élevés. Parailleurs on notera que les techniques de traitementdes minerais récoltés dans les gisements terrestresse perfectionnent permettant d’exploiter de façonrentable des minerais aux concentrations enmétaux de plus en plus faibles. Les exploitationssous-marines s’ouvriront donc en fonction dumarché. L’exploitation à terre ou en mer est unequestion de coût ou d’indépendance nationale. Restequ’à l’heure actuelle la décision de telles exploitationsappartient au gouvernement métropolitain comptetenu du code minier national et du fait qu’il s’agit demétaux stratégiques.

conclusion

CHRISTMANN P., 2012 - Métaux et ressourcesminérales stratégiques : enjeux, réponses françaiseet européenne. Géologues, Société Géologique deFrance, 170, 25-28.

DYMENT J., LALLIER F., LE BRIS N., ROUXEL O.,SARRADIN P.M., LAMARE S., COUMERT C.,MORINEAUX M., TOUROLLE J. (coord.), 2014 – Lesimpacts environnementaux de l’exploitation desressources minérales marines profondes. Expertisescientifique collective, Synthèse du rapport, CNRS –IFREMER, 1-110.Conférence internationale IRDNouméa.

EUROPEAN COMMISSION, 2014 - Report on criticalraw materials for the UE. RE. Report of the Ad hocWorking Group on defining critical raw materials, May2014, 1-41.

FOUQUET Y., LACROIX D., 2012 - Les ressourcesminérales marines profondes : étude prospective àl’horizon 2030. Editions Quae.

GRIGNON G., 2013 – L’extension du plateaucontinental au-delà des 200 miles marins : un atoutpour la France. Avis du Conseil Economique Social etEnvironnemental, séance du 9 octobre 2013, 1-182.

GUILLEBON B., et BIHOUIX P., 2010 – Quel futur pourles métaux ?, EDP Sciences.

HOCQUARD C., SAMAMA J.C., 2012 - Les défis desmétaux « critiques ». Géologues, Société Géologiquede France, 170, 7-14.

KATO Y., FIJINAGA K., , NAKAMURA K., , TAKAYA Y.,KITAMURA K., OHTA J., TODA R., NAKASHIMA T.,IWAMORI H., 2011 – Deep-sea mud in the PacificOcean as a potential resource for rare-earthelements. Nature Geosciences, 4, 535-539.

PACE-NET, 2015 - Think Tank PACE-Net Plus,Réconcilier exploitation minière et développementdurable dans les pays du Pacifique, 8-9 Décembre2014, Auckland, Nouvelle-Zélande:http://plus.pacenet.eu/events/thinktank-auckland-2014.

SENAT, 2013 – Note sur les ressources minéralesmarines profondes : nodules polymétaliques,encroûtements et sulfures hydrothermaux. Directionde l’initiative parlementaire et des délégations, LC234, 1-45.

bibliographieL’exploitation de ces ressources minérales del’océan profond connaît une première en 2012-2013dans la ZEE de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, à1 600 m de profondeur (site «Solwata 1 ), par unecompagnie canadienne (Nautilus Minerals Inc ) en2012. L’extraction des métaux (or, argent et cuivre, cedernier à la concentration de 5%) est réalisée par unesociété chinoise (Tongling Nonferrous Metals GroupCo) qui entend bien préserver sa place de leader dansla production des métaux rares car elle en détientdepuis plusieurs années le marché pour près de 95%des terres rares (120 000 tonnes par an).Par ailleurs les Etats se préoccupent des modalitésde ces exploitations minières sous-marines pourpréserver la biodiversité et les peuplements des fondsmarins. Une conférence internationale consacrée àl’exploitation minière dans le Pacifique s’est tenue en

novembre 2011 à Nouméa sous l’égide de l’IRD et enpartenariat notamment avec le Secrétariat généralde la communauté du Pacifique (CPS). En présencede spécialistes, scientifiques et chercheursfrançais et océaniens ce colloque à examiné lesenjeux, les impacts et les perspectives pour cetteexploitation minière sous-marine dans le Pacifique(Dyment et al., 2014). Un séminaire s’est récemment tenu à Auckland surle thème «Réconcilier exploitation minière etdéveloppement durable dans les pays du Pacifique»qui a, entre autres sujets, évoqué les conditionsdans lesquelles pourraient être exploitées lesressources minérales océanique (Pace-net, 2015).

des exploitations déjà en cours

de certaines dispositions de ce code minier nationalafin de donner au Pays la capacité d’explorer etd’exploiter ces ressources océaniques nonbiologiques. En dehors des ZEE, les eaux sont internationales(environ la moitié des fonds marins de la planète) ettoute exploration ou exploitation est réglementée parl’Autorité Internationale des Fonds Marins, organeissu de la convention de Montégo Bay, pour lesressources minérales qui nous intéressent. Ainsicette Autorité a déjà accordé des permis d’explorationde certaines secteurs parfaitement délimités dans leseaux internationales ; c’est le cas pour la France sur75 000 km2 dans la zone de Clarion Clipperton.Plusieurs états se sont lancés dans ces explorationspour identifier ces ressources et demander àl’Autorité des permis pour ce faire. (Japon, Chine,Inde, Allemagne, Royaume Uni, France). C’est dans ce contexte que se pose pour la France lapossibilité d’une extension de la ZEE de Polynésiefrançaise qui permettrait l’exploration et l’exploitationde zones océaniques supplémentaires, placéesalors sous sa souveraineté. Notons que cela neconcernerait que le sol et le sous-sol et non la massed’eau surjacente et ses ressources. La possibilité dedemander une extension de la ZEE au titre del’existence d’un plateau continental concerne aussid’autres collectivités françaises d’outre-mer. Cesdemandes d’extensions doivent être présentées à

l’Autorité ; elles sont préparées pour la France parl’IFREMER dans le cadre d’un programme nommé«Extraplac» ("Extension raisonnée du plateaucontinental") mis en place en 2003. Selon les étudespréliminaires ces extensions représenteraient prèsde 2 millions de km2 qui s’ajouteraient aux 11 millionsde km2 de ZEE sous souveraineté française. Maisl’insuffisance des crédits accordés aux études a eupour conséquence un retard important dans lesdossiers devant être déposés auprès de l’Autorité.Pour la Polynésie française, le dossier bienqu’annoncé en 2009 n’a pas encore été présenté maisil porterait sur 7 zones et couvrirait plus de 800.000km2 soit 17% en plus des 5 millions de la ZEE du Pays.Le retard apporté au dépôt de cette demande auprèsde l’Autorité des fonds marins a été déploré par leConseil Economique, Social et Environnemental enoctobre 2013 (Grignon, 2013). En l’état actuel duprojet, environ la moitié de cette superficiesupplémentaire d’extension de ZEE se situerait àl’est, d’une part, et au sud-ouest, d’autre part, del’archipel des Australes.En 2014 une étude a été commanditée à l’Institut deRecherches pour le Développement (IRD) par le Haut-Commissariat et le gouvernement polynésien afin dedélivrer une expertise collégiale inter organismes etpluridisciplinaires sur les ressources minéralesprofondes du Pays.

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PLUSIEURS SITES DE PONTES DE TORTUES VERTES ONT ÉTÉ RECENSÉES AUX AUSTRALES.

Tortue verte juvénile.

© GIE Tahiti Tourisme, Jordi Chias

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Cinq espèces de tortues marines sont présentesen Polynésie française : la caouanne,l’imbriquée, la luth, l’olivâtre et la verte. Toutesces espèces sont menacées au niveau mondial etsont protégées en Polynésie. Malgré le statutsacré conféré autrefois aux tortues, celles-cisubissent aujourd’hui, une diminutionalarmante de leur effectif, en raison notammentd’un braconnage intensif. Les connaissancesdisponibles en Polynésie restent parcellaires etconstituent un frein au plan d’action mis en placepar le gouvernement. Si aucune étude n’a jusqu’àprésent ciblé les tortues des Australes, lestravaux et témoignages recueillis montrent uneprésence de la tortue verte, de la tortueimbriquée et de la tortue caouanne dansl’archipel. Les fouilles archéologiques ontmontré que la tortue faisait partie des metsservis lors de festins organisés pendant lapériode archaïque et classique. Enfin, desévènements de ponte de la tortue verte ont étéconstatés dans plusieurs îles.

LES TORTUES MARINES DES ÎLES AUSTRALES,ESPÈCES EMBLÉMATIQUES DE LA CONSERVATION

MATTHIEU PETIT ET CÉCILE GASPARAssociation Te mana o te moanaMoorea, Polynésie françaisewww.temanaotemoana.org

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TABLEAU IEspèces de tortues marines présentes en Polynésie française et répartition connue dans l’archipel des Australes. Les mentionsde ponte correspondent à des évènements actuels ou dans un passé récent.

espèce

Caretta caretta

Chelonia mydas

Dermochelys coriacea

Eretmochelys imbricata

Lepidochelys olivacea

Nom vernaculaire français

TORTUE CAOUANNETORTUE CARETTE

TORTUE VERTETORTUE FRANCHE

TORTUE LUTH

TORTUE IMBRIQUÉE

TORTUE OLIVÂTRE

Nom vernaculaire tahitien

HONU MAREGA

HONU

HONU KEA

HONU AFII MOA

RAIVAVAE

OUI(+PONTES)

OUI

RAPA

OUI(+PONTES)

RIMATARA

OUI(+PONTES)

RURUTU TUBUAI

OUI

OUI(+PONTES)

OUI

Présence dans l'archipel des Australes

Les tortues marines, réparties en 2 fas, 6 genres et 7 espèces, sont représentées en Polynésie française par 5espèces : la tortue caouanne (Caretta caretta), la tortue imbriquée (Eretmochelys imbricata), la tortue luth(Dermochelys coriacea), la tortue olivâtre (Lepidochelys olivacea) et la tortue verte (Chelonia mydas) (Fretey etLebeau, 1985 ; Brugneaux et al., 2010 ; Vucher-Visin et al., 2010 ; Petit et Gaspar, 2011a ; Ministère del’environnement, de l’énergie et des mines et Direction de l’environnement, 2013 (Tableau I - Figure 1 - Photos 1 à 5).Selon la liste rouge de l’IUCN (2014), la tortue luth et la tortue olivâtre sont vulnérables, la tortue verte etcaouanne sont en danger d’extinction tandis que la tortue imbriquée est en danger critique d’extinction.

état des lieux en polynésie française

espèces sacréesEn Polynésie française, les tortues marines étaientautrefois protégées par l’interdit religieux (tapu) quifrappait ces espèces marines hautement sacrées. Eneffet, la tortue marine, Chelonia mydas, était destinée -dans l’archipel des Tuamotu notamment - à être sacrifiéeà Tangaroa, le dieu des profondeurs marines et desorigines. On la nommait alors «te ika nui» (le «grandsacrifice») en remplacement du sacrifice humain. Lesmythes de l’atoll de Anaa précisent l’origine sacrée de latortue dont le couple primordial est la femelle Matarikiet le mâle Takero (Torrente, 2012). En regard de soncaractère hautement tapu, la tortue faisait l’objet de ritestrès complexes (Emory, 1947) elle était consommée surles temples sacrés (marae). La tortue cuite dans desfours séparés était offerte aux dieux puis au chef et auprêtre, le reste consommé par les aînés puis enfin par lapopulation selon son rang. De nombreuses traditions desTuamotu font état de luttes entre aînés et cadets pour la

consommation de la tête, prérogative des chefs. Les tracesde ces consommations rituelles sont attestées par laprésence d’ossements de tortues sur ces marae, commesur ceux de l’atoll de Napuka (Conte, 1990). Cet interditreligieux a été levé par le roi Pomaré V dans les années1880, représentant ainsi la première menace sérieusesur les populations de tortues marines en Polynésie.Avec l’avènement des moyens de transports moderneset l’introduction de l’économie de marché, la chassetraditionnelle s’est alors transformée en exploitationcommerciale. La chasse à la tortue s’est ensuitepratiquée en braconnage puisque les tortues ont étéprotégées dès 1971 (interdiction à la vente en Polynésiefrançaise ; Hirth, 1971 ; Rudrud, 2010). Ce braconnage asans doute conduit à la diminution des stocks d’individusdepuis les années 1990, dans des zones historiquement trèsfréquentées par les tortues pour la reproduction commeMopelia, Scilly ou Maupiti (Leach, 1984 ; Balazs et al., 1995).

FIGURE IClé d’identification des espèces de tortues marines présentes en Polynésie française. © Wyneken, J. 2001. The Anatomy of Sea Turtles. U.S. Department of Commerce NOAA Technical Memorandum NMFS-SEFSC-470, 1-172 pp.

TORTUE IMBRIQUÉE Adulte © Te Mana o te moana

TORTUE VERTE Juvénile© Pierre Lesage

TORTUE OLIVÂTRE Recueillie au centre de soins de Bora Bora © Te Mana o te moana

TORTUE CAOUANNE Adulte,recueillie au centre de soin de Moorea © Te Mana o te moana

TORTUE LUTH© Pierre Jaquet

espèces protégéesDepuis 1971, le gouvernement de la Polynésie françaises’est doté d’outils juridiques de protection des tortuesmarines. Cette réglementation a évolué en 1990 pourrenforcer les mesures de protection des tortues vertes,luth et imbriquées, puis en 2006, le code del’environnement a inclus dans la protection les tortuescaouannes et les tortues olivâtres. Toutes les espèces detortues marines fréquentant les eaux polynésiennes sontdonc aujourd’hui protégées. À partir de 2013, le code del’environnement différencie la tortue verte, placée encatégorie B (espèces considérées comme rares oud’intérêt particulier) des autres espèces de tortuesmarines, placées en catégorie A (espèces vulnérables ouen danger). Les tortues marines restent cependantmenacées principalement par le braconnage intensif

(pour la vente et la consommation de viande) et par ladestruction ou la détérioration de leurs habitats et deleurs sites de ponte (Vucher-Visin et al., 2010 ; Petit etGaspar, 2011a ; Ministère de l’environnement, de l’énergieet des mines et Direction de l’environnement, 2013 ; Temana o te moana, 2014). La communauté du Pacifiqueencadre la politique régionale de conservation des tortuesà travers le plan du PROE (Programme Régional Océanienpour l’Environnement) qui inclut un volet «tortuesmarines». En Polynésie française, un plan d’actions 2013-2015 sur les espèces marines emblématiques a été misen place et inclut des priorités de conservation, derecherche et de sensibilisation sur les tortues marines(Ministère de l’environnement, de l’énergie et des mineset Direction de l’environnement, 2013).

tête dossière plastron

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données spécifiques à l’archipel des australesles zones de ponte

FIGURE 2 Déplacements d’une tortue caouanneadulte relachée en 2013 depuis lapresqu’île de Tahiti.

des connaissances encore insuffisantesLes connaissances actuelles sur la biologie et l’écologiedes populations de tortues marines en Polynésie françaiserestent cependant parcellaires. L’étendue du territoire estune contrainte majeure rendant difficile la mise en placede programmes de recherche à grande échelle.Les populations de tortues vertes en Polynésie françaiseont fait l’objet de plusieurs études qui portent sur la ponte(Doumenge, 1973 ; Anonymous, 1979 ; Lebeau, 1985 ;Balazs et al., 1995 ; Tayalé, 2007 ; Goutenègre et al., 2011 ;Petit et al., 2013), les comportements migratoires(Anonymous, 1979 ; Craig et al., 2004 ; Petit et Gaspar,2011a) et la génétique des populations (Taquet, 2007 ;Dutton, 2010 ; Boulet Colomb D'Hauteserre, 2013). Lestortues imbriquées, n’ont, quant à elles, fait l’objet sur le

territoire que d’un nombre réduit d’études portantsur leur abondance au sein des zones d’habitat (Petitet Gaspar, 2011a ; Petit et al., 2012) et de suivissatellitaires (Petit et Gaspar, 2011b). Leur stock, leurrépartition et leur cycle de vie restent très méconnusdans cette région du globe.Le manque de données locales, qui contraste avec lesrésultats obtenus dans de nombreux pays du Pacifique,rend extrêmement difficile la mise en place de plans deconservation adaptés aux caractéristiques et aux enjeuxdu terrain. Enfin, la protection des tortues marines estun sujet qui est fréquemment débattu en Polynésiefrançaise, l’ouverture de la chasse à la tortue étantrégulièrement abordée à l’assemblée territoriale.

La Polynésie française est une zone de ponte importantepour les tortues vertes comme en témoignent lesrésultats des suivis menés à Tikehau dans l’archipel desTuamotu (Tayalé, 2007), à Tetiaroa (Petit et al., 2013) etdans le triangle des îles de la Société que sont Mopelia,Scilly et Bellinghausen (Lebeau, 1985 ; Balazs et al., 1995,Goutenègre et al., 2011). L’intensité des évènements deponte dans ces trois îles a ainsi motivé en partie leurclassement en réserve territoriale dès 1992. La posed’émetteurs satellites sur des tortues adultes a permisde montrer que les tortues vertes pondant dans l’archipelde la Société proviennent d’aires de nourrissage situéesdans le Pacifique Sud-Ouest, notamment les îles Fidji(Craig et al., 2004 ; Petit et Gaspar, 2011a).Une unique ponte de tortue imbriquée a été référencéeet confirmée par des photographies en Polynésiefrançaise par l’Observatoire des tortues marines en 2012à Reao, atoll des Tuamotu (Petit et al., 2012). Aucunévènement de ponte n’a été constaté pour la tortue luth,

la tortue caouanne et la tortue olivâtre.Les eaux polynésiennes constituent également une airede nourrissage et de croissance pour les tortuesimbriquées et les tortues vertes juvéniles. Ce sont cesdeux espèces qui sont le plus souvent rencontrées surles récifs coralliens de l’archipel de la Société (Petit etGaspar, 2011a ; Petit et al., 2012). En raison des mœurspélagiques des tortues luth, olivâtres et caouannes, il estsupposé que les eaux océaniques polynésiennes constituentune zone nourrissage et/ou des couloirs migratoires pources espèces. Nous ne disposons pas de donnéesparticulières sur ce sujet relatives aux îles Australes.Toutes les espèces de tortues marines effectuent desmigrations d’une partie de l‘océan à l’autre. Récemmentune tortue caouanne à laquelle un émetteur avait étécollé sur la carapace a révélé pas ses positionssuccessives une migration de plus de 13 000 km en 531jours, de la Polynésie française aux îles Fidji, îlesMarshall et retour aux Samoa américaines (Figure 2).

La présence de tortues marines dans l’archipel des Australes est avérée, grâce aux résultats de fouillesarchéologiques, aux témoignages et données recueillies par l’observatoire des tortues marines en Polynésie françaiseainsi qu’aux études régionales sur la mégafaune pélagique ou le patrimoine naturel de Polynésie (Tableau I).En revanche, aucune étude scientifique n’a ciblé les tortues présentes aux Australes à ce jour.

données historiques

Des restes de tortues marines ont été retrouvés dansplusieurs sites archéologiques des Australes ettémoignent de la présence régulière des tortues marinesdans les eaux côtières de l’archipel depuis plusieurscentaines d’années.

À Rurutu, les fouilles menées dans la vallée de Peva ontpermis de découvrir des artefacts et assemblagesprovenant de deux périodes : la période dite archaïque(couche stratigraphique estimée à la fin du XIIIe siècle –début du XVe siècle) et la période dite classique (XVIIIe

siècle - XIXe siècle). Les amas d’ossements de tortuesmarines découverts dans le dépôt de la périodearchaïque étaient mélangés à des ossements de porcs.Des carapaces de tortues travaillées par l’homme ontégalement été découvertes dans ce dépôt (Bollt, 2008).La tortue marine, identifiée comme la tortue verte(Chelonia mydas), représente pendant la périodearchaïque de Peva la ressource la plus abondante si l’onexcepte les poissons (Bollt, 2008). Une abondancecomparable n’a été retrouvée en Polynésie que sur le sitede Fa’ahia à Huahine (Leach et al, 1984).

À Tubuai, le site d’Atiahara a révélé la plus grossecollection de restes et d’ossements d’animaux del’archipel ; ces restes correspondant également à lapériode archaïque (1000-1450). Parmi les restes depoissons, de porcs, de chiens, de poulets, de rats, demammifères marins ou encore de roussettes, setrouvent des ossements de tortues marines (Worthy etBollt, 2011).

À Rapa, l’île la plus méridionale des îles Australes, desossements de tortues ont été trouvés au sein defortifications dont la construction aurait commencé auXIVe siècle de notre ère (Anderson, 2012). Des ossementsont été découverts sur le site côtier de la baie d’Angairao(Anderson, 2012), dans la grotte de Tangarutu (Tennysonet Anderson, 2012) et dans les fortifications de Tapitanga(Kennett et McClure, 2012).

En plus de nous donner de précieuses informations surla présence historique des tortues marines dansl’archipel, les résultats des fouilles archéologiquesdonnent une idée précise de l’utilisation de la tortuepar les habitants des Australes durant les périodesarchaïque et classique.

Les amas d’ossements retrouvés notamment sur lessites de Peva (Rurutu) et Atiahara (Tubuai) proviennentprobablement de l’organisation de festins. L'abondancedes ossements de tortue, un aliment au statut le plusélevé, reflète vraisemblablement la nature cérémonielleet religieuse du site (Bollt, 2008). Compte tenu de lamyriade de restrictions entourant la consommation detortue en Polynésie durant cette période, il est probableque les hommes de statut élevé tels que les chefs et lesprêtres participaient à des fêtes sur ces sites. SelonSzabo et al. (2012), à Rapa, les tortues étaient capturéesà l’aide de sennes, ces filets étant utilisés pour encerclerla tortue en surface. L’étude ethno-historique de Rapasur la période 1791-1840 montre également que, dessiècles plus tard, la tortue ('onu) était une ressource trèsrecherchée mais peu commune. En l’absence de nacreà disposition, les habitants de Rapa ont notammentutilisé les carapaces de tortues pour la confectiond’ustensiles de pêche (Anderson, 2012).

Les résultats des travaux archéologiques fournissent enrevanche peu d’informations sur les espèces présentesdans les Australes, leur distribution, l’utilisation de leurhabitat ou encore leur reproduction.

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FIGURE 3 Observation des tortues vertes à Raivavae.

FIGURE 4 Observation des tortues vertes à Rurutu.

études régionalesLes études régionales menées récemment confirmentelles aussi la présence de tortues marines dans lesAustrales mais sans apporter de réelles précisions surles points cités précédemment. Le programme REMMOAa réalisé en 2011 un recensement de la mégafaunepélagique incluant les tortues marines sur l’ensembledes archipels polynésiens. Les comptages aériensutilisés pour le recensement se sont peu intéressés auxlagons et ne nous donnent donc aucun indice sur lespeuplements lagonaires (récif frangeant et récif barrière)en tortues. Toutefois, 4 tortues à écailles (espèceindéterminée mais excluant la tortue luth) ont étéobservées dans le cadre de cette étude (Laran et al.,

2012). Le taux moyen de rencontre aux Australes suivantcette méthode est de 0,0002 obs/km d’effort. Il s’agit d’untaux comparable à celui de l’archipel des Marquises,supérieur à celui des Tuamotu Sud, mais nettementinférieur à ceux de la Société, des Tuamotu Nord et desGambier. Sur les 4 observations effectuées, l’une a étéeffectuée en zone côtière, deux sur zone de pente et uneen zone océanique.L’analyse éco-régionale de Polynésie française, réaliséede 2008 à 2010, cite enfin des observations de tortuesmarines sur les îles de Rapa, Rimatara et Raivavae sanspréciser l’espèce ni la fréquence de ces signalements(Brugneaux et al., 2010).

témoignages, observations et communications personnelles

Les observations et témoignages provenant descommunautés locales sont une source précieused’informations dans le cas où, comme ici, aucune étudescientifique ne s’est intéressée à la thématique ciblée. Ilest important de noter que de par leur source, lestémoignages ne peuvent être vérifiés scientifiquementmais sont basés des années d’expérience etd’observations des résidents qui ont été contactés.L’observatoire des tortues marines en Polynésiefrançaise a pu recueillir des témoignages provenant deRimatara, Raivavae, Tubuai et Rapa (figures 3 à 6). Cestémoignages concernent uniquement les tortuesrencontrées en zone côtière, c’est-à-dire dans le lagonou la pente externe, et les évènements de ponte.À Raivavae, au moins deux espèces sont présentes etobservées : la tortue verte (Chelonia mydas) et la tortueimbriquée (Eretmochelys imbricata). L’espèce la plusfréquemment rencontrée est la tortue verte au stadejuvénile. Cependant, une activité de ponte de tortuesvertes a également été rapportée. Ainsi, le motuVaiamanu, qui est maintenant l’une des zones phares desactivités touristiques de l’île, est connu par les habitantscomme un ancien site de ponte, encore fréquenté il y aune quinzaine d’années par les femelles de tortuesvertes (Opeta, comm. pers. 2014).À Rurutu, les pêcheurs sous-marins aperçoiventponctuellement (une à deux observations par semaine)des tortues sur les zones nord ouest, nord est de l’île etplus rarement au sud ouest. Des tortues en plus grandnombre seraient observées sur le sud de l’île, à Naairoa.Enfin, récemment, un guide de randonnée pédestre aobservé des traces de montée sur la plage de Narui ausud. Cet évènement de ponte semble rare d’après lesrésidents (Tavita, comm. pers. 2014).

À Tubuai, le journal de James Morrison (Morrison, 1966),relatait, déjà en 1792, que lors d’une escale de la Bounty,le capitaine avait pu observer un récif abondant enpoissons et en grosses tortues. À Tubuai, au moins troisespèces sont rencontrées : la tortue verte, la tortueimbriquée et la tortue caouanne (Caretta caretta).D’après les anciens, tous les motu de Tubuai sont deszones de ponte pour les tortues vertes. La saison deponte se situerait entre juin et août (Tere, comm. pers.2014). Le dernier nid observé par M. Tere indique despontes en 2001 sur le motu Mautaro. Le site internetTahiti Heritage rapporte également que le motu Mautaroest un lieu de ponte pour les tortues marines.À Rimatara, les observations de tortues sont très rares.La tortue verte y est observée et des pontes sur la côteEst et Sud-Est étaient régulières dans les années 1970(Mahaa, comm. pers. 2014).À Rapa, la tortue verte est observée et décembre semblecorrespondre à un pic d’abondance. Les tortuessemblent plus fréquentes dans les baies. Certaines baiesconstituent également d’anciennes zones de ponte tellesque la baie d’Angairao, la baie de Tukou et la baie deTupuaki qui seraient aujourd’hui trop exposées aux fortsépisodes de houle (Laitame, comm. pers. 2014). Deuxobservations datées de 2009 (Lebailly, comm. pers. 2009)viennent souligner le rôle éventuel des baies commehabitat de prédilection des tortues marines à Rapa : uneobservation de tortue verte dans la baie de Piriauta et uneobservation de deux tortues de couleur jaunâtre très claire(correspondant vraisemblablement à des individus detortues imbriquées ou caouannes) dans la baie d’Ahurei.Ces témoignages permettent également d’identifiercertaines menaces que rencontrent les populations detortues marines des Australes. ÀRaivavae, la tortue verte

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conclusion

La gestion et la conservation de ces espèces menacées,si elle est réalisée au niveau d’une surface aussiimportante que celle de la Polynésie française, doitcependant intégrer les spécificités rencontrées au niveaude chaque archipel et pâtit aujourd’hui du manque deconnaissances sur les tortues marines des Australes.Les connaissances très parcellaires ont besoin d’êtrecomplétées par des enquêtes auprès de la population

locale et des études ciblées sur les évènements et sitesde ponte, l’abondance et l’utilisation de l’habitat sur leszones côtières ou encore sur les usages traditionnels liésà la présence des tortues dans cet archipel. Les étudesgénétiques ou les suivis migratoires grâce à la posed’émetteurs satellites sont des outils qui permettront decomprendre les échanges entre les tortues des Australeset celles des autres archipels et du Pacifique.

semble être la cible d’une pêche illégale de faibleampleur. Sur le motu Vaiamanu, des initiatives illégalesde parcs de grossissement de tortues auraient été misesen place puis abandonnées suite à une plainte (Opeta,comm. pers. 2014). À Tubuai, le transfert sansautorisation légale d’une soixantaine d’œufs depuis le

motuMautaro jusqu’au village, la mise en éclosion dansune poubelle remplie de sable et l’élevage jusqu’à unetaille de 80 cm ont été rapportés (Tere, comm. pers.2014). À Rapa, est évoqué la capture d’une tortuemarquée par des bagues métalliques estampilléesd’Hawaii (Laitame, comm. pers. 2014).

bibliographieFIGURE 5 Observation des tortues vertes à Tubuai.

FIGURE 6 Observation des tortues vertes à Rapa.

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expédition scientifique AUX SUD DES AUSTRALES ET AUX GAMBIER

Inventaire biologique marin sur la côte Ouest de Rapa.

© Ian Skipworth

Malgré la forte houle qui s’abat sur les rochers de Marotiri,la visibilité en plongée y est exceptionnelle.

© Ian Skipworth

Nudibranche Bornella irvingi identifiée pour la première fois en Polynésie française.

© Ian Skipworth

LES EXPÉDITIONS SCIENTIFIQUES RÉALISÉES AUTOUR DE RAPA ET MAROTIRI

ONT PERMIS DE METTRE EN EXERGUE LES INTÉRÊTS REMARQUABLES

DU PATRIMOINE NATUREL ET CULTUREL DE CES ÎLES MÉRIDIONALES.

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100 101

Du 20 septembre au 4 octobre 2014, une expéditionscientifique a été menée par une équipe descientifiques du Museum d’Auckland - Nouvelle-Zélande, du Museum d’Australie et de Pew, afin deréaliser un inventaire de la biodiversité marinecôtière de quatre îles et îlots des Australes etGambier. L’objectif de cette mission était derechercher les similitudes entre la faune et la floremarine des îles du sud de la Polynésie et de la régionSud-Ouest Pacifique aux mêmes latitudes, dont lesîles Kermadec en Nouvelle-Zélande, les îles LordHowe et Norfolk en Australie, Niue et le sud desîles Cook. Les 9 scientifiques ont passé six jours autour de l’îlede Rapa, un jour à Marotiri, deux jours à Morane etun jour autour de Mangareva. Au total, 18 plongéesont été réalisées et un premier comptage porte lenombre d’espèces de poissons identifiés à 272, dontplusieurs espèces potentiellement nouvelles pour larégion, ce nombre sera sans doute plus élevé aprèsanalyse des résultats en laboratoire. Des différencesnotables ont pu être observées entre les 4 îlesétudiées. Rapa se distingue par de larges plateauxtrès riches en coraux Acropora aussi bien quepar des baies recouvertes d’algues. Les îlotsrocheux de Marotiri sont caractérisés par unenvironnement rude, très isolé et battu par lahoule, laissant affleurer des parois rocheusesentre les massifs coralliens. Les eaux de Moranesont spectaculairement claires et les pentes externesabruptes offrent une large variété d’espèces decoraux. Mangareva est davantage soumis àl’influence terrestre, une fine couche de limonrecouvrant les fonds dans les sites de plongéeétudiés. Les populations de poissons et d’invertébrés sedémarquent dans chacune des îles étudiées. La plusgrande concentration de requins de récifs a été

rencontrée à Marotiri, avec au moins cinq requins enpermanence autour des plongeurs. Il est intéressantde noter l’absence ou la rareté des grandsprédateurs de type vivaneaux et mérous autour deces îles, habituellement largement représentés dansles récifs coralliens tropicaux. Des espèces notablesd’invertébrés ont été enregistrées, dont sept espècesde limaces de mer (opisthobranches) et unepotentiellement nouvelle (Ceratosoma amoenum).L’espèce Bornella irvingi a été identifiée pour lapremière fois en Polynésie française. Jusqu’alors,seuls deux spécimens avaient été observés etdécrits à Pitcairn. Quatre espèces différentes decéphalopode ont été recueillies autour de Rapa etMorane. Un poulpe observé à Rapa a étéprovisoirement identifiée comme Octopus ornatus.Trois espèces différentes de décapodes ont étéobservées autour de Rapa, Scyllarides haanii, lalangouste Panulirus pascuensis que l’on pensaitendémique de l’île de Pâques (Laboute & Richer deForge, 1986) et une cigale de mer plus petite qui doitencore être identifiée. L'équipe a noté l’absence decomatules (crinoïdes), communes sur les récifstropicaux, à l’exception de Marotiri. Les quatre îlesprésentent une grande diversité d’échinodermes.Les oursins à diadèmes sont présents en abondancesur les récifs coralliens, tandis que les oursinsEchinometra mathaei dominent dans les baiesrecouvertes d’algues de Rapa. Plusieurs espècesd'étoiles de mer (ophiures) ont également étéobservées. Au moins trois espèces de concombres demer (holothuries) ont été identifiés, et d’autresdoivent encore être précisées. La découverte de lalimace de mer Bornella irvingi identifiée pour lapremière fois en Polynésie française et la présencede la langouste Panulirus pascuensis à Rapa ontconfirmé les liens entre les îles de Polynésiefrançaise, les îles Pitcairn et l'île de Pâques.

Amelia Connell The Pew Charitable Trusts Nouvelle-Zélande [email protected]

Carina Sim-Smith Directeur de l’expédition pour le Museum d’Auckland Nouvelle-Zélande [email protected]

Tri des échantillons collectés à bord du Braveheart. © Ian Skipworth

Canthigaster solandri observé à Rapa© Ian Skipworth

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103102

Baleine à bosse.

© iStockphoto

LA BALEINE TIENT UNE PLACE PARTICULIÈRE DANS LES LÉGENDES ET LA CULTURE TRADITIONNELLE DES AUSTRALES ;

ELLE EST AUSSI UN MOTEUR DE L’ÉCO-TOURISME.

Les cétacés comptent environ 90 espèces aumonde. En Polynésie française 21 espèces sontprésentes, dont 5 baleines à fanons, 5 baleinesà dents et 11 dauphins. Aux îles Australes, 10espèces ont été signalées : baleine à bosse,grand cachalot, cachalot nain, baleine à bec deCuvier, baleine à bec de Blainville, orque,globicéphale tropical, péponocéphale, dauphin àbec étroit et dauphin à long bec. Les baleines à bosse observées dans l’archipeldes Australes se déplacent entre les différentesîles de l’archipel ainsi qu’entre ce dernier et lesîles de la Société. Elles font parties d’une seuleet même population des îles de la Société, del’archipel des Tuamotu et des Gambier ; cettepopulation est parmi les plus petites au monde.Un respect des règlementations du Sanctuairedes Mammifères Marins en Polynésie pourl’approche et l’observation des cétacés, et lacréation d’aires marines protégées pourraientêtre des contributions utiles et efficaces pourassurer le bien-être et la survie de cette espèceemblématique.

LES CÉTACÉS DES ÎLES AUSTRALESET L’EMBLÉMATIQUE BALEINE À BOSSE

MICHAEL POOLEProgramme de recherches sur les mammifères marinsMoorea, Polynésie franç[email protected]

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FIGURE 1Les espèces de cétacés dontla présence est confirmée, ousignalée sans confirmation,en Polynésie française(poster par POOLE etMACEDO, 1996 ; réédité parBENET 2012).

Les cétacés (marsouins, dauphins et baleines) sont desmammifères marins qui comptent environ 90 espèces,divisées taxonomiquement en deux groupes : lesMysticètes, baleines à fanons, et les Odontocètes,baleines pourvues de dents, y compris dauphins etmarsouins. Six espèces sont des marsouins, absents dela Polynésie française, mais dauphins et baleines (avecdents ou fanons) sont bien représentés. Poole (1993) aprésenté le premier recensement des espèces dedauphins et de baleines dont la présence était confirméeou fortement supposée dans les eaux de la Polynésiefrançaise. Depuis lors, d’autres données ont enrichi cetinventaire (voir Poole, 1995, 2002, 2006 - Reeves et al.,1999 - Gannier, 2000, 2002, 2004, 2009 - Laran etGannier, 2001 - Laran et al., 2012 - Poole et al., 2013a,2013b, 2014). Il est désormais confirmé que pas moinsde 21 espèces de cétacés sont présents : 5 espèces debaleines à fanons, 5 de baleines à dents et 11 espèces dedauphins. On soupçonne la présence d’autres espècesmais cela reste à confirmer (Tableau 1 et Figure 1).Ces études ont permis de constater l’abondance dedauphins et de baleines à dents aux Marquises, alors queles baleines à bosse n’y sont observées que trèsrarement. Dans les îles Gambier, les baleines à bossesont présentes à chaque saison hivernale, tandis que lesdauphins y sont rarement vus et jamais à l’intérieur dulagon. Aux Tuamotu, on observe la présence aussi biende baleines à bosse de manière saisonnière que desbaleines à dents et des dauphins toute l’année. Les îles

de la Société sont aussi fréquentées par des dauphins etdes baleines à dents toute l’année, tandis qu’en hiveraustral les baleines à bosse sont plus nombreuses danscet archipel que dans les autres (Poole, 1993, 1995, 2002,2006 - Gannier, 2000, 2002, 2004, 2009 - Oremus et al.,2007, 2012 - Laran et al. 2012 - Poole et al., 2013a).

introduction

Sur les 21 espèces confirmées dans les eaux de laPolynésie française (Figure 1), au moins 10 sont signaléescomme parfois présentes aux îles Australes (Tableau I):la baleine à bosse (Megaptera novaeangliae, photo 1);le grand cachalot (Physeter macrocephalus), lecachalot nain (Kogia sima), la baleine à bec de Cuvier(Ziphius cavirostris), la baleine à bec de Blainville(Mesoplodon densirostris) et cinq espèces de dauphins :orque/épaulard (Orcinus orca), globicéphale tropical/baleine pilote (Globicephala macrorhychus), dauphind’Électre/péponocéphale (Peponocephala electra),dauphin à bec étroit (Steno bredanensis) et dauphin àlong bec (Stenella longirostris). La présencesaisonnière en hiver austral d’au moins quelquesbaleines à bosse est notoire à Rimatara, Rurutu,Tubuai, Raivavae et Rapa, alors qu’on ne dispose quede très peu de rapports d’observations sur d’autresespèces. Des habitants et des pêcheurs ont signalésdes cachalots à Raivavae et à Rurutu, des orques àTubuai et à Rimatara, et des globicéphales à Tubuai,Rurutu, et Rimatara. À Rurutu des péponocéphales,dauphins à bec étroit et/ou dauphins à long bec ont étésignalés par des pêcheurs et par le Raie Manta Club(Lefevre, comm. pers.). Benet (comm. pers.) a collectédes informations sur la présence de dauphins àRaivavae, tandis que Poole et al. (2014) y ont travailléen bateau pendant une semaine en septembre 2013sans en voir un seul. Les habitants ont confirmé quedepuis des années ils ne voyaient de dauphins que « detemps en temps ».

En 2011 des études intensives menées par voieaérienne ont été effectuées dans tous les archipels dela Polynésie (Laran et al., 2012) dans le cadre de lamission « REMMOA ». Dans les environs de Raivavae,Tubuai et Rurutu (les eaux environnant Rapa etRimatara ne furent pas étudiées), sept espèces decétacés, au minimum, ont fait l’objet d’observations(Tableau II). Les résultats obtenus ont été les suivants :un nombre plus important de baleines à bec et decachalots par rapport aux nombres d’individus d’autresespèces, très peu de dauphins et une densitéd’individus le plus bas de toute la Polynésie, à savoir12 fois moins qu’aux Marquises, 5 fois moins qu’auxTuamotu et 3 fois moins qu’aux îles de la Sociétés(Tableau II et Figure 2). Aucune baleine à bosse nefut aperçue, ces études ayant été menées horssaison hivernale.

les cétacés aux îles australes

Îles AustralesÎles GambierÎles de la SociétéÎles TuamotuÎles Marquises

Densités d'individus par 100 km-2

0.450.651.352.505.35

TABLEAU IIEstimation des densités de cétacés observées (sans compterle grand cachalot et la baleine à bosse) dans les archipels aucours de la campagne REMMOA (d’après Laran et al., 2012).

PHOTO 1Saut d’une baleine a bosse à Tubuai.© Michael Poole

FIGURE 2Estimation des densités de cétacés observées pendant lesétudes aériennes REMMOA dans les archipels de la Polynésiefrançaise (sans compter le grand cachalot et la baleine àbosse) (d’après Laran et al. 2012).

TABLEAU IListe des cétacés recensés enPolynésie française (1), auxAustrales (2) et aux Australesau cours des prospectionsaériennes REMMOA (3).Noms vernaculaires etscientifiques.

Baleines à fanons :

Baleine/Rorqual bleueBaleine à bosseRorqual de Bryde Petit rorqual nain de MinkePetit rorqual de l’Antarctique

Balaenoptera musculusMegaptera novaeangliaeBalaenoptera brydei (ou edeni) Balaenoptera acutorostrata Balaenoptera bonaerensis

11, 2111

Baleines à dents :

Grand cachalotCachalot pygméeCachalot nain Baleine à bec de CuvierBaleine à bec de Blainville

Physeter macrocephalus Kogia breviceps Kogia sima Ziphius cavirostris Mesoplodon densirostris

1, 2, 31, 31, 2, 31, 2, 31, 2, 3

Dauphins

Orque/EpaulardGlobicéphale tropicalFausse orqueGrand dauphinDauphin de RissoOrque pygmée Péponocéphale/Dauphin d’ElectreDauphin à bec étroitDauphin de FraserDauphin tacheté pantropicalDauphin à long bec

Orcinus orcaGlobicephala macrorhynchusPseudorca crassidens Tursiops truncatusGrampus griseusFeresa attenuata

Peponocephala electra Steno bredanensis Lagenodephis hoseiStenella attenuataStenella longirostris

1, 21, 2, 31, 3111

1,21,211

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107106

FIGURE 3Observations sur 20 baleines à bosserepérées à Moorea/Rurutu et dont laprésence a été signalée une autre annéedans une autre zone du Pacifique Sud. Ladirection d’une flèche montre l’ordrechronologique de repérage de l’individu àchaque site et non pas le chemin de sondéplacement, sauf pour les Iles Cook où labaleine a bien été aperçue en Polynésiefrançaise puis aux îles Cook la mêmeannée (mise à jour d’après POOLE, 2006).

Depuis 20 ans la baleine à bosse est devenue emblématique des îles Australes. Aucune donnée au cours desXVIIIe et XIXe siècles ne permet de confirmer la présence de cette espèce aux Australes et en Polynésie française.Des baleines à bosse furent observées et chassées durant les XVIIIe et XIXe siècles aux îles Cook, Tonga, Fidji,Nouvelle-Calédonie et Nouvelle-Zélande, mais rien n’a été relaté ni publié concernant la présence de cetteespèce où que ce soit en Polynésie française (Kellogg, 1929 - Townsend, 1935).

la baleine à bosse

la chasse à la baleine à rurutuLa présence des baleines à bosse aux Australes futsignalée au début du XXe siècle à Rurutu par desoccidentaux qui entreprirent la chasse de cette espèce.Opérant depuis la terre et dans un unique but desubsistance, les habitants de Rurutu lançaient de petitesembarcations à l’eau pour engager la poursuite lorsqueces cétacés étaient en vue de l’île (Walker, 1999). SelonGuillan (2001) la viande de baleine fournissait lesprotéines de base dont les habitants avaient besoin avantl’introduction d’animaux domestiques à Rurutu. Onsuppose qu’il évoque les espèces apportées d’Europe(moutons, chèvres, vaches), puisque les Rurutu élevaientdéjà des poulets, chiens et porcs dont ils consommaientla viande avec des poissons et des fruits de mer. Il sembledonc peu probable que les insulaires se soient livrésactivement à la chasse à la baleine avant l’arrivée deseuropéens, mais ils ont dû tout simplement profiter del’échouage de cétacés sur leur rivage, à l’instar de ceque faisaient leurs cousins à Tahiti (Wilson, 1799).Ultérieurement, Walker (comm. pers.) affirmera quec’est à la fin du XIXesiècle que la chasse à la baleine futintroduite par les européens, pratique ne faisant paspartie des coutumes insulaires polynésiennes. Hänni (1908) nous a livré le premier rapport sur cettechasse à Rurutu. Il indique avoir mangé la viande d’une

baleine que « les indigènes avaient harponnée et tuée...».Cette pratique de la chasse baleinière s’est maintenue àtrès petite échelle pendant des décennies jusqu'auxannées 1950. Selon Walker (1999) les baleines mèresavec leurs petits étaient les cibles de choix, le baleineauétant visé en premier par les harponneurs car la mèrene l’abandonnait pas, ce qui permettait parfois auxbaleiniers de tuer les deux. Walker (1999) et Guillin (2001)rapportent que c’est en 1957 que prit fin la chasse à labaleine, mais selon une autre source, ce ne serait qu’en1959 qu’eut lieu la dernière prise (compte rendu nonpublié, Toohitu no Rurutu, rapporté initialement dansPoole (2002 et Tableau III). Selon ce compte-rendu, de1930 à 1959, neuf baleines seulement furent tuées dontquatre : deux mères et deux petits.

année

1930193219331934194219571959

Nombre de baleines tuées

12 (mère et baleineau)1112 (mère et baleineau)1

TABLEAU IIINombre de baleines à bosse tuées à Rurutu entre 1930 et 1959,d’après le compte rendu Toohitu no Rurutu, dans Poole (2002).

la présence des baleines à rapa, raivavae, tubuai, rurutu, et rimataraC’est en 1993 que la présence des baleines à bosseest signalée pour la première fois dans quatre desarchipels de la Polynésie française, plus précisémentaux abords de quelques îles de la Société, Tuamotu etdes Gambier ainsi que dans trois îles Australes :Raivavae, Tubuai et Rurutu. En 1999 Rimatara a étéajouté. Des recherches aux Australes à bord debateaux en 1999, 2000 et 2001, conjointement à lacontribution d’autres observateurs, reconfirmant laprésence de baleines à bosse à ces quatre îles. Laprésence de baleines à bosse à Rapa a été confirméeen 2006 (Poole, 1993, 2002, 2006 - Poole et Darling,

1999 - Gannier, 2004).Guillan (2001) a noté à Tubuai des baleines àproximité du récif mais en raison de la très grandeétendue du lagon entre l’île et le récif elles ne sontaperçues que rarement. À Rimatara on peut lesobserver depuis la côte est car elles sont alorsproches du rivage. À Rurutu l’extrême clarté deseaux et la présence des baleines très près du rivageoffrent d’excellentes conditions d’observation (Photo 2),ce qui a fait de l’activité de « whale-watching » enbateau et en plongée libre la principale activitétouristique pendant l’hiver.

l’identification photographique et les déplacements des individus

Poole (2002, 2006) a pu identifier différents individusde baleines à bosse aux Australes et dans les autresarchipels de la Polynésie française, grâce à laphotographie, ciblant précisément le dessous de lanageoire caudale qui caractérise chaque individu(Photo 3). Une carte d’identité a été établie pourchacune des baleines à bosse, permettant de répertorierplus de 500 individus, essentiellement à Moorea (îles dela Société) et à Rurutu (Poole, 2002, 2006), aux Tuamotuet aux Gambier (Poole et al., 2013a). Cette technique apermis de suivre les déplacements des baleines dans leseaux de la Polynésie française et vers d’autres zones dereproduction dans le Pacifique Sud. De 1998 à 2007,quelques 51 individus ont pu être identifiés par photos àRurutu, dont trois ont été observés à nouveau à Moorea

dans les années qui suivirent, tandis que trois baleinesde Moorea furent observées ultérieurement à Rurutu(Poole et al., 2014). Dix pour cent des individus ont étéré-observés au cours d’années différentes autour deces deux îles de deux archipels distincts. Ce taux deré-observation des mêmes individus au cours d’annéesdifférentes est identique pour l’île de Moorea seule. Enoutre, de faible mouvements d’une année à l’autre(environ 4 %) ont été constatés entre Moorea/Rurutu etd’autres zones d’hivernage du Pacifique Sud, dont les IlesCook, les Samoa américaines, les Tonga et la Nouvelle-Calédonie (Poole, 2006 - Garrigue et al., 2011 - Figure 3),ainsi qu’un déplacement d’un individu entre la Polynésiefrançaise et la péninsule Antarctique, au sud del’Amérique du Sud (Poole et al., 2014).

PHOTO 3Photo-identification : caudales de deux baleines à Rurutu etd’une baleine à Rimatara.© Michael Poole

PHOTO 2Proximité au rivage d’une baleine à Rurutu. © Michael Poole

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109108

les études génétiques

Des études génétiques menées sur la base de l’ADNmitochondrial et des microsatellites nucléaires ontpermis de confirmer que les baleines des îles Australes,de la Société et des Tuamotu/Gambier sont issues desmêmes lignées maternelles et que ces cétacés sontgénétiquement distincts de ceux d’autres régions duPacifique Sud. Ainsi, les baleines de Polynésie française

appartiennent à une population jusqu'alors inconnuesur l’ensemble du Pacifique (Olavarria et al., 2007).Cette population de baleines à bosse, catégorisée « Fii »en 2003 par la Commission Baleinière Internationale,est celle ayant fait l’objet de la découverte la plusrécente parmi toutes les populations de cette espècedans le monde (Poole, 1993, 2002).

expédition austral islands

En septembre 2013, un projet de recherche intensifsur les baleines à bosse « Expedition Austral Islands »a été mené à bien sur quatre îles de l’archipel desAustrales : Raivavae, Tubuai, Rurutu et Rimatara(Poole et al., 2014). En raison de contrainteslogistiques et de temps, il s’avéra impossible d’inclureRapa. En opérant par des sorties en mer, ces étudesont permis d’observer les baleines à bosse, de lesidentifier photographiquement, de les échantillonnergénétiquement et d’effectuer des enregistrementsacoustiques, complétant ainsi des observationsantérieures dans le domaine acoustique réalisées àRurutu (Poole, 2002) et à Raivavae, Tubuai et Rurutu(Gannier, 2004). Les prélèvements biopsiques effectuésdans le cadre de cette expédition furent les toutespremiers sur les quatre îles ; il convient toutefois derappeler que des baleines à Rurutu avaient déjà faitl’objet de recueil de morceaux de squame au cours desannées passées (Poole, 2002, 2006).Toutes les catégories d’âge et de sexe firent l’objetd’observations sur ces quatre îles. Le nombre debaleines rencontrées était toutefois inférieur à ce quifut observé à Moorea, ceci venant confirmer les

rapports antérieurs soumis par Poole (2002) etGannier (2004). Les lieux de fréquentation desbaleines à bosse étaient identiques à ceux des îles dela Société : très près du rivage, à des dizaines oucentaines de mètres seulement des récifs ou deslittoraux (Photo 4). À l’exception de deux baleines sedéplaçant vers l’est à 15 km au large de la côte est deTubuai, aucune baleine ne fut observée au large. Chose surprenante, aucune autre espèce de cétacésne fut observée en quel que lieu que ce soit. Laplupart des études de l’Expédition Austral Islandsfurent conduites à quelques centaines de mètresseulement du récif et du littoral (du fait de la présencedes baleines), mais d’autres études furent menées à2 et 5 kilomètres au large de toutes ces îles, et jusqu'à15 km de Tubuai. Mais aucune autre espèce de cétacéne fut aperçue. Toutefois au cours d’études par voieaérienne, mais pendant une saison différente del’année (Laran et al., 2012) des baleines à bec ainsique des cachalots et quelques dauphins avaient étéobservées. L’absence d’autres espèces en septembreau cours de l’expédition est donc très intéressante.

PHOTO 4 - Adulte et baleineau près du rivage à Rurutu. © Michael Poole

déplacements des baleines entre les îles et entre les archipels

Au cours de cette expédition, le même chant émis àRaivavae fut reconnu à Rurutu 13 jours plus tard.Les 13 jours et 535 km entre Raivavae et Rurutureprésentent un déplacement d’une baleine de 41km/jour en moyenne. De même, une baleine futidentifiée à Rurutu après avoir été observée à Tubuai :sur une période de cinq jours, cet individu avaitparcouru 215 km, à une moyenne de 43 km/jour,pratiquement identique à celui du chanteur enregistréà Raivavae puis à Rurutu. Quoiqu’il en soit, il s’avèreque ces déplacements sont moins rapides que ceuxdocumentés pour d’autres baleines à bosse dans lePacifique Sud (Noad et Cato, 2007 - Hauser et al.,2010), le Pacifique Nord (Mate et al., 1998), et leszones Sud-Ouest de l’Atlantique (Zerbini et al., 2006).Une autre découverte concerne un adulte maleidentifié photographiquement dont le chant futenregistré à Rurutu et qui avait été observé en 1999,2005 et 2010 à Moorea, devenant ainsi la septièmebaleine à bosse observée tant à Rurutu qu’à Moorea.Les Australes constituent le prolongement le plusméridional de l’archipel géologique qui englobeégalement Rarotonga, dans le sud des îles Cook.

On pourrait donc s’attendre à ce que la migration desbaleines vers le nord s’effectue des Australes vers lesCook, en suivant la ligne d’îles du sud-est au nord-ouest. De même, au terme de la saison dereproduction, il se pourrait qu’elles transitent des îlesCook aux îles Australes, en route vers l’Antarctique.Mais, les données photographiques, acoustiques etgénétiques ne vont pas dans le sens de cettehypothèse, car il n’existe aucune concordanced’observations entre les îles Australes et les îlesCook. Des comparaisons de nageoires caudalesentre Moorea/Rurutu (environ 400 identifications) etle sud des Cook (environ 150) n’ont produit qu’uneseule concordance, soit 1% des baleines connuesdes îles Cook, avec toutefois Moorea pour origine etl’atoll de Palmerston aux îles Cook (Poole, 2002,2006 - Garrigue et al., 2002, 2011). De plus, le chantdifère entre les Cook et la Polynésie (Garland, 2011)et selon les études ADN, les baleines de Polynésiefrançaise et celles des îles Cook n’appartiennentpas génétiquement à la même famille (Olavarria etal., 2007).

le chant de la baleineDans leur zone de reproduction, les baleines à bosseadultes mâles sont connues pour leurs longuesvocalises complexes (Payne et McVay, 1971 - Winn etWinn, 1978 - Payne et al., 1983). C’est surtout quand ilssont immobiles, renversés, la tête tournée vers le basque les mâles chantent. Ce moyen d’expression estassurément l’un des phénomènes naturels les plussaisissants : voir un animal sens dessus-dessous, d’unelongueur de 12 à 15 mètres, qui pèse autant que 6 à 8éléphants d’Afrique, et entendre - tout en les ressentantphysiquement - les sonorités puissantes et stupéfiantesqu’il émet. On pense que ce chant aurait pour fonctiond’adresser un signal soit aux femelles pour les attirersoit aux autres mâles à des fins de hiérarchie (ou pourrevendiquer un espace), ou peut-être les deux (Tyack,1981 - Darling et al., 2006 - Smith et al., 2008). Chaquepopulation de baleines à bosse à travers le mondepossède son propre chant, à la manière d’un hymnenational chez nous. En conséquence, le chant de tous

les mâles au sein d’une même population est plus oumoins identique (Payne et Guinee, 1983). Quoiqu’il ensoit, les chants ne sont nullement inaltérables mais aucontraire très dynamiques, à savoir qu’ils se modifientprogressivement avec le temps (Payne et Payne, 1985).Aux Australes, les chants d’adultes mâles ont étéenregistrés à Raivavae, Tubuai, Rurutu et Rimatara(Poole, 2002, 2006, 2014 - Gannier, 2004). Les analysesde ces enregistrements ont permis de constater que lechant émis par ces cétacés aux Australes est quasi-identique à celui de leurs congénères à Moorea dans lesîles de la Société (Garland, 2011). Selon ces données, ilest fort probable que les baleines aux îles Australesferaient partie de la même population de reproductionque les baleines aux îles de la Société. Cette hypothèseest corroborée par les données obtenues par photo-identification, confirmant que certaines baleinesfréquentent aussi bien les eaux des Australes que cellesdes îles de la Société.

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bibliographie

Les trois bases de données comprenant les photo-identifications des caudales, les enregistrementsacoustiques du chant, et les échantillons génétiques,sont complémentaires pour confirmer :

1. que les îles Australes constituent avec les îlesde la Société et les Tuamotu/Gambier une partie dela zone de reproduction des baleines à bosse enPolynésie française,

2. que les baleines des Australes par leurs caractèresgénétiques similaires appartiennent à la mêmepopulation reproductrice, Fii, avec les baleinesrencontrées dans les îles de la Société et lesTuamotu/Gambier,

3. que ces baleines ne visitent pas les îles Cook etn’appartiennent pas à la population qui visite lesîles Cook.

S’il y a au moins dix espèces de baleines et de dauphinsaux îles Australes, c’est bien la baleine à bosse qui estdevenue le cétacé symbolique de ces îles. Mais le faiblenombre d’individus de cette espèce ainsi que leurproximité auprès des rivages nous incite à appliquer leprincipe de précaution, lié à un développement durable,pour que ces magnifiques géants reviennent chaquehiver se reposer et se reproduire dans les eaux de cesîles. Un respect des règlementations du sanctuaire desmammifères marins en Polynésie pour l’approche etl’observation des cétacés, et la création d’aires marinesprotégées pourraient être des contributions utiles etefficaces pour assurer le bien-être dont des aires derepos et de reproduction et la survie de cette espèceemblématique.

conclusion

En se basant sur les données par photo-identificationrecueillies de 2003 à 2007, Albertson-Gibb et al.(2009) ont pu estimer la population Fii de baleines àbosse en Polynésie française à 853 individus.Constantine et al. (2012) ont établi de nouvellesestimations de la population Fii : 440 individus enréférence à la photo-identification, et 934 individussur la base des analyses ADN. Quoiqu’il en soit, la

population de baleines à bosse en Polynésie françaiseest parmi les plus petites au monde. Cet élémentassocié à des chiffres également bas concernant lesbaleines de Nouvelle-Calédonie et des Tonga, aamené l’UICN à reclasser les baleines du PacifiqueSud (Océanie) dans la catégorie des espècesmenacées d’extinction (Childerhouse et al., 2008).

la taille de la population de baleines à bosse en polynésie française

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Raies pastenague et requin pointe noire.

© GIE Tahiti Tourisme, Ty Sawyer

ON DÉCOMPTE 14 ESPÈCES DE REQUINS ET 4 ESPÈCES DE RAIES AUX AUSTRALES ; EN PARTICULIER, LE REQUIN DES

GALÁPAGOS EST CARACTÉRISTIQUE DE RAPA

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De par leur importance culturelle ou en termesde conservation, les requins et raies sont desespèces emblématiques en Polynésie françaiseet représentent l’un des plus grands sanctuairesde requins au monde. Alors que nosconnaissances sur leurs populations dans lesarchipels de la Société et des Tuamotus’améliorent grâce au développement de laplongée récréative, elles restent limitées par unmanque d’information sur les archipels les pluséloignés tels que les Marquises, les Gambier etles Australes. Aux Australes, on recenseactuellement 14 espèces de requins et 4 espècesde raies (6 autres espèces de requins et 1 espècede raie sont potentiellement présentes maisnécessitent une confirmation). Situées àl’extrême sud de la Polynésie, les Australes ontpour particularité d’héberger le requin desGalápagos que l’on ne retrouve qu’aux Gambier.Des données supplémentaires sont nécessairesen termes de diversité spécifique, de répartitionet de connectivité mais aussi de localisation deszones de nurserie qui sont fondamentales dansle cycle de vie de ces espèces.

LES REQUINS ET RAIES DES ÎLES AUSTRALES,ESPÈCES EMBLÉMATIQUES DE LA CONSERVATION

JOHANN MOURIER ET SERGE PLANESLaboratoire d'Excellence CORAILCRIOBE USR 3278 CNRS-EPHE-UPVDCentre de Recherches Insulaires et Observatoire de l'EnvironnementMoorea, Polynésie franç[email protected] [email protected]

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Les requins et raies sont des espèces emblématiquesdans le Pacifique Sud de par leur rôle écologique ausein des écosystèmes tropicaux, leur place importantedans la culture des peuples locaux ou par leurimportance en termes de conservation. La plupartdes requins sont des prédateurs supérieurs desécosystèmes marins et jouent un rôle primordial dansle maintien de l’équilibre de l’écosystème corallien(Ruppert et al., 2013). Malgré cela, la plupart desespèces de requins et de raies sont menacées et leurspopulations sont en déclin dans le monde entier (Wormet al., 2013). C’est le cas aussi dans le Pacifique (Nadonet al., 2012 ; Clarke et al., 2013). Raies et requins ontdes caractéristiques propres qui les rendent plusvulnérables telles qu’une grande longévité, une faiblefécondité, une maturité tardive et généralement depetites tailles de population comparativement auxpoissons téléostéens. De plus, de nombreuses espècestropicales utilisent des zones dites de «nurserie» oùles femelles reviennent mettre bas à chaquereproduction (Mourier et Planes, 2013; Mourier et al.,2013a). Ces nurseries sont généralement localisées lelong du trait de côte correspondant à des zonesfortement influencées par les activités humaines.

Face à ce déclin, de nombreux états du Pacifique sesont alliés pour créer un vaste sanctuaire régionalmarin pour les requins, réunissant la Polynésiefrançaise (qui est aussi le plus vaste sanctuaire avecses 5,5 millions de km2), les îles Cook, Tokelau et lesSamoa américaines (Hoyt, 2014). Cette région resteisolée et peu fréquentée mais elle abrite encore despopulations presque vierges de prédateurs marins oude mégafaune marine. Ce sont des zones d’intérêtsparticuliers pour la biologie de la conservation(McCauley et al., 2013) puisqu’elles peuvent servir desource de biodiversité pour les zones adjacentesimpactées par les activités humaines. Cettecaractéristique est encore plus soulignée aux îlesAustrales en raison de leur éloignement et de leurfaible population humaine (moins de 7 000 habitants).Cependant, l’éloignement de ces îles fait aussiqu’elles sont généralement peu étudiées et qu’enconséquence l’état des populations de requins etraies, de même que le nombre d’espèces, sont peudocumentés.

sources de données et expéditions

En comparaison avec d’autres archipels du Pacifiquetels que ceux d’Hawaii (Dale et al., 2011a, 2011b) ou desGalápagos (Hearn et al., 2014), l’écologie et lesassemblages en requins et raies de Polynésie et plusparticulièrement des îles Australes n’ont pas reçu lamême attention (Plessis, 1986; Randall et al., 1990;Galzin et al., 2006). En effet, la plupart des observationsde Chondrychtiens aux îles Australes ont eu lieu autourdes îles de Rapa et de Rurutu. Afin de pouvoirdocumenter de la manière la plus complète possible ladiversité et la répartition spatiale des requins et raiesaux îles Australes, nous nous appuierons surdifférentes sources. Dans un premier temps, nousrecenserons des observations issues de campagnesocéanographiques menées sur zone en 1970 et 1971par Randall pour des musées américains et en 2002 parla Polynésie française (Randal et al., 1990; Galzin et al.,2006). La thèse de Untz (1993) apporte aussi deséléments complémentaires quant à la diversité enespèces de requins aux îles Australes. L’ouvrage deBacchet et al. (2007) est un guide illustré et pratique quipermet aussi de recenser les espèces de raies et

requins et leur distribution en Polynésie. Ces donnéesseront ensuite complétées par celles issues del’Observatoire des Requins de Polynésie (ORP:http://www.requinsdepolynesie.com/). Enfin, lesdonnées des campagnes de survols aériens pourl’étude de la distribution et de l’abondance de lamégafaune marine (REMMOA) effectués en 2011 ontété utilisées pour apporter des complémentsd’information. Ce programme a permis d’effectuer unecentaine d’heures de vol au-dessus des îles Australespour près de 22 880 km parcourus (Laran et al., 2012)avec des observations sur les espèces de grande tailleet sur les espèces pélagiques.

PHOTO 2 - Requin limon faucille (Negaprion acutidens).© Johann Mourier

PHOTO 3 - Requin gris de récif (Carcharhinus amblyrhynchos).© Johann Mourier

PHOTO 1 - Requin des Galápagos (Carcharhinus galapagensis)photographié en 2012 sur la pointe sud de Rurutu. Cettefemelle porte une marque de morsure suggérant lapossibilité de reproduction dans la zone. © Alex Lopez

diversités et répartition spatiale des requins

Randall et al. (1990) rapportent la présence de quatreespèces de requins issues de 3 familles à Rapa etMarotiri : le requin mako Isurus oxyrinchus(Lamnidés) régulièrement capturés par les pêcheurslocaux de Rapa, le requin tigre Galeocerdo cuvier(Carcharhinidés) et le requin des GalápagosCarcharhinus galapagensis (Carcharhinidés) (Photo 1)qui ont été capturés lors de leur mission, et enfin desrequins marteaux (Sphyrnidés) dont l’espèce n’a pasété identifiée. L’observation de C. galapagensis a étéaussi confirmée par Yves Lefèvre avec des individusde moins d’un mètre sur Rapa et Marotiri, et desindividus de deux mètres environ sur Rurutu. Lors desexpéditions effectuées par les auteurs du « guide despoissons de Tahiti et de ses îles » (Bacchet et al.,2007), de nombreuses espèces ont pu être observées :le requin des Galápagos (C. galapagensis), le requinnourrice fauve (Nebrius ferrugineus), le requin citron(Negaprion acutidens) (Photo 2), le requin tigre (G.cuvier), le requin corail (Triaenodon obesus), le requingris de récif (Carcharhinus amblyrhynchos) (Photo 3),le requin marteau halicornes (Sphyrna lewini), lerequin à pointes noires (Carcharhinus melanopterus)(Photo 4), et des requins pélagiques dont le requinocéanique ou longimane (Carcharhinus longimanus),le requin soyeux (Carcharhinus falciformis) et lerequin baleine (Rhincodon typus).Untz (1993) a recensé quant à lui onze espèces derequins aux abords des îles hautes des Australesdont les plus abondantes sont le requin gris derécif (C. amblyrhynchos) (Photo 3), le requin citron(N. acutidens) (Photo 2), le requin corail (T. obesus) etle requin à pointes blanches de récif (Carcharhinusalbimarginatus). Il note aussi la présence du requindes Galápagos (C. galapagensis) qui est en grandeabondance à Rapa et Marotiri (Plessis, 1986). De plus,sont mentionnées de manière plus rare des espècescomme le grand requin marteau (Sphyrna mokarran),le requin nourrice fauve (N. ferrugineus) ou le requinbordé (Cacharhinus limbatus).La campagne REMMORA a permis d’observer 3requins baleine (R. typus) répartis sur l’ensemble dela zone Australes (Laran et al., 2012). Mais l’Archipeldes Australes reste la zone géographique dePolynésie présentant le taux de rencontre de requinsen milieu pélagique le plus faible en comparaison auxautres archipels. La densité relative moyenne en

PHOTO 4 - Requin à pointes noires (Carcharhinus melanopterus).© Johann Mourier

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requin n’est que de 0,04 x 10-2 individus par km2

(Laran et al., 2012) alors qu’elle atteint des valeurscomprises entre 0,26 et 0,32 x 10-2 individus par km2

pour les secteurs des Gambier, de la Société, desTuamotu Sud et des Marquises. Le secteur desTuamotu Nord montre une densité 5 fois plus élevéeavec 1,67 x 10-2 individus par km2. C’est dans lasous-strate de pente côtière de la Société que ladensité la plus élevée pour toute la région estenregistrée avec 7,64 x 10-2 individus par km2. L’observatoire des requins de Polynésie (ORP)recense quant à lui six espèces de requins sur lesîles Australes depuis sa création en 2011. Desobservations de requin baleine (R. typus), derequin corail (T. obesus) et de requins gris (C.amblyrhynchos) ont été effectuées sur le Mont Arago(Tinomana) situé à 60 milles entre Tubuai et Rurutu.Un autre spécimen de requin baleine a été observé àTubuai sur le Nanue’s band. Des requins marteauxhalicornes (S. lewini) ainsi que des requins desGalápagos (C. galapagensis) (Photo 1) ont étéobservés sur les pentes de Rurutu. Un requinbouledogue (Carcharhinus leucas) aurait été identifiéau large, entre Moerai et Hauti, près de Rurutu maisaucune image n’a été prise pour confirmation. Unrassemblement de requins gris (C. amblyrhynchos) adernièrement été observé dans un mètre d’eau dansle lagon le long du rivage sur l’île de Tubuai (Photo 5).Ces rassemblements, généralement de femelles,ont été observés sur d’autres îles du Pacifique(Economakis et Lobel, 1993) et ont été attribués à descomportements de thermorégulation des femellesnotamment en cours de gestation.À noter aussi que Laboute et Richer de Forges(1986) rapportent la présence de requins soyeux(C. falciformis) et de requins gris (C. amblyrhynchos,pouvant aussi être C. galapagensis d’après lesauteurs) en abondance sur le mont MacDonald, volcansous-marin actif au sud-est de Rapa.

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PHOTO 6 - Raie manta de récif (Manta alfredi).© Johann Mourier

PHOTO 7 - Raie pastenague grise (Himantura fai).© Johann Mourier

PHOTO 8 - Vol de raies léopard (Aetobatus ocellatus).© Johann Mourier

diversités et répartition spatiale des raies

Randall et al. (1990) rapportent la présence de raiesmanta sans pour autant donner l’espèce. Bachet etal. (2007) notent la présence de raies manta (Mantabirostris) mais les deux espèces de raies manta (M.birostris et M. alfredi) sont confondues dans cet ouvrageet sont assimilées à M. birostris (Mourier, 2012). Lacampagne REMMORA a permis aussi d’observer 9 raiesmanta réparties sur l’ensemble de la zone des îlesAustrales (Laran et al., 2012). Cependant aucune desétudes ne permet de déterminer si ces observationsreprésentaient des manta océaniques (M. birostris) oudes manta de récif (M. alfredi) (Photo 6), ou même les

deux comme observé aux Marquises (Mourier, 2012).Six diables de mer (Mobula tarapacana) ont été aussiobservés lors des survols aériens de la missionREMMORA (Laran et al., 2012). L’ouvrage de Bacchet etal. (2007) fait état de la présence de raies pastenaguesgrises (Himantura fai) (Photo 7) et de raies léopard(Aetobattus narari) cette dernière ayant récemment étéreclassée comme étant Aetobatus ocellatus (Photo 8). PHOTO 5

Rassemblement de requins gris (C. amblyrhynchos) le longdes plages de Tubuaï en Septembre 2014. © Thierry Vogenstahl

conclusions, synthèse et directions futures

Les connaissances recueillies à ce jour aux îlesAustrales permettent de confirmer la présence de14 espèces de requins appartenant à 4 familles et de4 espèces de raies appartenant à 3 familles (Tableau I).Peuvent se rajouter 6 espèces de requins appartenant à5 familles et une espèce de raies dont la présence estfortement probable mais reste à confirmer (Tableau I). Les requins et raies sont généralement des animauxcraintifs et difficilement observables en conditionsnaturelles ce qui, combiné avec le faible effortd’échantillonnage effectué à ce jour aux Australes,peut expliquer que certaines espèces n’aient pasencore été formellement observées ou identifiées.Certaines espèces sont plutôt rares ou présentes demanière saisonnière et d’autres vivent à desprofondeurs plus grandes limitant ainsi la probabilitéd’observation par l’homme. Les données actuelles sont issues de très peu desources et les requins et raies des Australes ont été peuétudiés comparativement à leurs congénères desautres archipels de Polynésie. Il est donc possible qued’autres espèces soient présentes sans avoir été pourautant encore observées. Il est aussi possible derajouter les espèces pélagiques présentes sur cettezone incluant le requin renard pélagique (Alopiaspelagicus), le requin renard commun (Alopias vulpinus),le requin peau bleu (Prionace glauca) et le requincrocodile (Pseudocarcharias kamoharai). Le manque dedonnées de captures par pêche ou d’observationsdirectes en milieu pélagique ne permet donc pas

actuellement de confirmer la présence de ces espècesmême si leur aire de répartition est vaste dans lePacifique Sud. De plus, peu de connaissances sontdisponibles sur les espèces profondes et il est possibleque soient ultérieurement répertoriées d’autresespèces ou que soient décrites de nouvellesoccurrences lors de campagnes d’observationsous-marines profondes avec l’utilisation de ROV(Taquet et al., sous presse; HURL Animal ID Gallery:http://www.soest.hawaii.edu/HURL/animals/id/). Desespèces comme la raie géante de profondeur(Plesiobatis daviesi), assez abondante sur des fondsde plus de 500 m aux Marquises (Taquet et al., souspresse), tout comme le requin chagrin mosaïque(Centrophorus tessellatus), lui aussi observé enprofondeur aux Marquises, ont de grandes chancesd’être présentes en profondeur sur les pentes des îlesAustrales ou au niveau des hauts-fonds tels que lesmonts Arago (Tinomana) ou MacDonald. Le nombreimportant de hauts-fonds sur l’archipel des Australespermet de présumer la présence de hot-spots etd’étape ou d’oasis dans ce milieu pélagique fragmenté.Ces monts souvent peu accessibles abritentcertainement un grand nombre d’espèces de raies etde requins et peuvent notamment leur servir d’étapeslors de leurs migrations entre les îles.D’après l’IUCN, parmi les espèces de requins et raiesconfirmées, 6% sont en danger critique d’extinction,35% sont vulnérables et 47% sont quasi-menacées(Tableau I). L’une des particularités des îles Australes

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bibliographie

est la présence de requins des Galápagos qui est uneespèce rare en Polynésie française, n’ayant étéobservée à ce jour qu’aux Australes et aux Gambier.Alors qu’il existe très peu d’observations de requins etraies sur la zone des îles Australes et donc encorebeaucoup d’incertitudes quant à la diversité spécifiqueen élasmobranches, il existe encore moins de donnéesquant à l’état des stocks et à la taille des populationsd’élasmobranches sur cet archipel en comparaisonavec d’autres archipels, ainsi que le degré deconnectivité entre les populations des Australes et desautres Archipels (Vignaud et al., 2013). Les espèces les plus couramment cités dans lessources d’information sont les espèces récifalescommunément abondantes dans les autres archipelstels que le requin gris (C. amblyrhynchos) (Photo 3),requin corail (T. obesus) ou le requin à pointes noires(C. melanopterus) (Photo 2) ainsi que des espèces pluspélagiques telles que le requin marteau halicornes(S. lewini) ou le requin soyeux (C. falciformis) que l’onne retrouve pas en grande quantité dans les autresarchipels. Le requin des Galápagos reste quant à lui uneoriginalité de l’Archipel des Australes.Un descriptif des populations des principales espècesen raies et requins des Australes serait nécessaire carces données sont à la base de tout début d’étude des

populations et permettent de décrire la structure despopulations comme le sexe ratio, la proportiond’individus matures ou immatures, la distribution detaille et la répartition spatiale et saisonnière, commececi a été effectué sur les populations de requins àpointes noires (C. melanopterus) à Moorea (Mourier etal., 2013b) ou de requins citron (Negaprion acutidens)(Clua et al., 2010). Ces données descriptives peuventnotamment s’obtenir par le biais d’observations issuesde missions scientifiques ou par les réseaux de scienceparticipative tels que l’Observatoire des Requins dePolynésie (ORP) qui se développe depuis 2011. Il seraitenfin important de localiser les sites d’intérêt dans lecycle de vie des différentes espèces telles que les zonesde nurserie (Mourier et Planes, 2013 ; Mourier et al.,2013a) (Photo 9) ou des sites d’agrégation saisonnierscomme pour la période de reproduction. Par exemple,les études menées ces dernières années sur Moorea etTetiaroa ont pu montrer que les femelles de deuxespèces de requins (C. melanopterus et N. acutidens)revenaient à chaque reproduction mettre bas sur lemême site de nurserie (Mourier et Planes, 2013 ; Mourieret al., 2013a). Ce phénomène, appelé aussi « philopatriede reproduction », a des implications importantes entermes de conservation, puisque ce mécanisme dereproduction crée des unités génétiques discrètes pour

PHOTO 9 Juvénile de requin à pointes noires (Carcharhinus melanopterus) dans sa nurserie. © Johann Mourier

chaque nurserie, impliquant une structuration génétiquemalgré une connectivité possible entre les nurseries etles îles. La localisation de ces zones de nurserie est aussiprimordiale en termes de conservation car elles sontgénéralement situées sur des zones privilégiées par lesactivités humaines, qui par conséquent peuvent avoir unimpact significatif sur les premiers stades de vie desrequins. Le développement des populations insulairespeut affecter les populations de requins comme lesuggère une récente étude sur la connectivité génétiqueet l’histoire démographique des populations de requinsà pointes noires (C. melanopterus) sur l’ensemble deson aire de répartition, suggérant que le récentdéveloppement démographique humain sur l’île deMoorea pouvait être à l’origine d’un déclin récent destailles génétiques des populations de requins sur l’île(Vignaud et al. 2014). De plus cette dernière étudesouligne la vulnérabilité des populations de requins derécifs vivant en milieu fragmenté et isolé face au manquede connectivité génétiques en comparaison avec des

populations de régions côtières telles que l’Australie.L’ensemble de ces données est crucial si des mesuresde conservations sont à envisager sur cet archipelconcernant les élasmobranches.

Famille

CARCHARHINIDAECARCHARHINIDAECARCHARHINIDAECARCHARHINIDAECARCHARHINIDAECARCHARHINIDAECARCHARHINIDAECARCHARHINIDAECARCHARHINIDAECARCHARHINIDAECARCHARHINIDAESPHYRNIDAELAMNIDAEGINGLYMOSTOMATIDAEMOBULIDAEMOBULIDAEDASYATIDAEMYLIOBATIDAE

CARCHARHINIDAEALOPIIDAEALOPIIDAEPSEUDOCARCHARIIDAECENTROPHORIDAEDALATIIDAEPLESIOBATIDAE

Espèce

Carcharhinus melanopterusCarcharhinus amblyrhynchosCarcharhinus albimarginatusCarcharhinus galapagensisNegaprion acutidensTriaenodon obesusCarcharhinus limbatusCarcharhinus falciformisGaleocerdo cuvierCarcharhinus longimanusCarcharhinus leucasSphyrna lewiniIsurus oxyrinchusNebrius ferrugineusManta sp. (birostris ou alfredi)Mobula tarapacanaHimantura faiAetobatus ocellatus

Prionace glaucaAlopias pelagicusAlopias vulpinusPseudocarcharias kamoharaiCentrophorus tessellatusIsistius brasiliensisPlesiobatis daviesi

Ordre

Présence connue ou déjà rapportéeCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESCARCHARHINIFORMESLAMNIFORMESORECTOLOBIFORMESRAJIFORMESRAJIFORMESRAJIFORMESRAJIFORMES

Présence probable mais non confirméeCARCHARHINIFORMESLAMNIFORMESLAMNIFORMESLAMNIFORMESSQUALIFORMESSQUALIFORMESRAJIFORMES

Nom vernaculaire

Requin à pointes noiresRequin gris de récifAileron blanc de récifRequin des GalápagosRequin limon faucilleAileron blanc de lagonRequin bordéRequin soyeuxRequin tigreRequin longimaneRequin bouledogueRequin marteau halicorneRequin Mako (taupe bleu)Requin nourrice fauveRaie manta Diable de mer chilienRaie pastenague griseRaie léopard

Requin peau bleuRequin renard pélagiqueRequin renard communRequin crocodileRequin chagrin mosaïqueSqualelet férocePastenague géante de profondeur

IUCN

NTNTNTNTVUNTNTNTNTVUVUENVUVUVUDDLCNT

NTVUVUNTDDLCLC

TABLEAU I Récapitulatif de l’ensemble des espèces de requins et raies observées à ce jour aux îles Australes. Le statut IUCN de chaqueespèce est indiqué (EN = en danger critique d’extinction; VU = vulnérable ; NT = quasi-menacé; LC = préoccupation mineure; DD= manque de données).

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Albatros Diomedea sp. observé au large de Marotiri.

© Ian Skipworth

LES AUSTRALES COMPRENNENT L’ASSEMBLAGE D’OISEAUX MARINS LE PLUS DIVERSIFIÉ DE POLYNÉSIE FRANÇAISE,

AVEC 23 ESPÈCES REPRODUCTRICES SUR LES 28 QUE COMPTE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE.

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La répartition des 23 espèces oiseaux marinsreproducteurs des îles Australes et leurs effectifssont rapportés et analysés. L'archipel présentel’assemblage le plus diversifié de Polynésiefrançaise. La moitié des oiseaux marins nicheurs,sont des Procellaridae (pétrels et puffins) et desOceanitidae (océanites austraux). Deux espèces(Fregetta grallaria titan et Puffinus auricularismyrtae) sont endémiques de Rapa et lataxonomie du petit pétrel de Raivavae resteincertaine. Aucune espèce n’a disparu depuis1920, mais celles dont l'effectif est réduit sont trèsvulnérables. L'assemblage observé (abondancedes phaétons et faiblesse du groupe des fous)distingue l'archipel des Australes des autresarchipels et chaque île présente un profilspécifique, Rapa, Raivavae et Maria sedémarquant des autres par la diversité del'avifaune marine. Les principales menaces pourles oiseaux de mer à terre sont la prédation pardes animaux introduits et la destruction del'habitat des sites de nidification.

LES OISEAUX MARINS REPRODUCTEURS DES ÎLES AUSTRALES

PHILIPPE RAUSTSociété d’Ornithologie de Polynésie, Manu Tahiti, Polynésie franç[email protected]

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L’archipel des Australes, en Polynésie française, secompose de sept îles et groupes d'ilots rocheuxd’origine volcanique qui présentent unegéomorphologie très variée offrant en cela desconditions d’habitat diverses aux oiseaux et denombreux lieux de nidification adaptés à leur biologie.Les Australes étaient peuplées par des polynésiensdepuis environ le milieu du Ier siècle de notre ère. Ellesont toutes été visitées à la fin du XVIIIe siècle par Cook(Rurutu 1769, Tubuai 1777), Gayangos et Varela(Raivavae 1775) et Vancouver (Rapa 1791). Cetarchipel a peu retenu l’attention des naturalistes auXIXe siècle. L’expédition Whitney (Whitney South SeaExpedition - WSSE) visita entre 1921 et 1922 pour lecompte du Museum d'Histoire Naturelle de New York(AMNH) les îles de l'archipel à l'exception de Maria,nous permettant d’avoir une description de l’avifauneau début du XXe siècle (Holyoak et Thibault 1982). Ilfallut attendre la seconde moitié du XXe siècle pourque des ornithologues visitent à nouveau l’archipel :François Lacan (en 1968), Roland et Julia Seitre (en1989), Gerald McCormack (en 1992), Alain Guillemont(en 1993), Jean-Claude Thibault (en 1975, 1991, 2002),Philippe Raust et Georges Sanford (en 2002), RayPierce (en 2003), Benoit Gangloff et Philippe Raust (en

2007), Jean-Yves Meyer (en 2013). Cependant aucunesynthèse complète de l'avifaune marine desAustrales n'a été produite.En raison de la position latitudinale de l'archipeldes Australes l’avifaune marine présente un profilbien particulier car plusieurs espèces seretrouvent également aux Gambier et dans les îlesdu groupe Pitcairn.L'objectif de cet article est donc de présenter unétat des connaissances sur l'avifaune marine desAustrales au plan de la diversité spécifique et deseffectifs.Ce travail est essentiellement une revuebibliographique mais la plupart des îles ont étévisitées par l’auteur, à l’exception de Maria etMarotiri. La majorité des données provient néanmoinsde l’atlas des oiseaux marins nicheurs de Polynésiefrançaise et du groupe Pitcairn (Thibault &Bretagnolle, 2007) édité par la Société d’Ornithologiede Polynésie. Elles sont complétées par desobservations faites par différents observateurs,publiées dans le journal de la Société d’Ornithologiede Polynésie Te Manu. Les observations retenuesconcernent les vingt dernières années.

liste systématique des oiseaux marins rencontrés

Pseudobulweria rostrata - Pétrel de Tahiti Il est reproducteur dans de nombreuses îles du Pacifiquede la Mélanésie à la Polynésie orientale ; il est nicheurdans tous les archipels de Polynésie française àl’exception des Tuamotu.Aux Australes, il a été observé au large des côtes deRimatara et Rurutu et serait à rechercher dans la forêtnaturelle. A Raivavae des oiseaux ont été entendus endécembre 2002 (Thibault, 2003) et à nouveau en mars2007 (Raust, 2007). Il n’avait pas été noté auparavant et ilest vraisemblable qu’il se reproduise à Raivavae.En Polynésie, l’estimation des effectifs est sans doute deplusieurs milliers de couples, concentrés sur la Société.Moins de 10 à 20 ont été notés à Raivavae.

Pterodroma nigripennis - Pétrel à ailes noires Il est reproducteur essentiellement dans le Sud-Ouest duPacifique mais des populations nicheuses sont égalementprésentes aux îles Australes.À Rapa il niche sur Rapa iti et Tauturou avec quelquescentaines de couples (Thibault et Varney, 1991). Il a étéobservé à terre sur les rochers de Marotiri (Te Manun°39).L’effectif de la population mondiale est estimé à 8-10millions d’individus (Brooke, 2004).

Pterodroma brevipes - Pétrel à collier Il a été repéré en Polynésie sur l’île de Raivavae dans lanuit du 18 au 19 décembre 1989 (Seitre & Seitre) quanddes chants furent enregistrés au sommet de l’île(identification V. Bretagnolle). Quatre individus sontcapturés en février 1993 près du sommet (A. Guillemontcité par Thibault, 2003). Des prospections en mars 2007(Gangloff et al., inédit) ont permis de localiser les sites dereproduction au Mont Hiro et d’estimer l’effectif àquelques dizaines de couples. Depuis, la découverte régulière de juvéniles échoués ausol (une dizaine depuis 2000) est venue confirmer saprésence à Tahiti et Moorea (Te Manu n°20, 33, 34, 47,69,70, 71, 75, 82).

Pterodroma heraldica - Pétrel du HeraldIl est connu comme nicheur aux îles Marquises, dansles Tuamotu-Gambier et aux Australes ; des individusont été observés en vol au centre de l’île de Raivavae enjuillet 1992 mais aucun nid n’a été trouvé (McCormackcité par Thibault, 2003). En mars 2006, 8 individus sontobservés en vol (Raust, 2006).

Espèce

Pseudobulweria rostrata (Peale, 1848)Pterodroma nigripennis (Rothschild, 1893)Pterodroma brevipes (Peale, 1848)Pterodroma heraldica (Salvin, 1888)Pterodroma neglecta (Schlegel, 1863)Pterodroma ultima (Murphy, 1949Ardenna pacifica (Gmelin, 1789)Puffinus nativitatis (Streets, 1877Puffinus auricularis myrtae (Bourne, 1959Puffinus bailloni (Bonaparte, 1857)Fregetta grallaria titan (Murphy, 1927Nesofregetta fuliginosa (Gmelin, 1789)Fregata minor (Gmelin, 1789)Phaethon rubricauda (Boddaert, 1783Phaethon lepturus (Daudin, 1802Sula dactylatra (Lesson, 1831Sula sula (Linnaeus, 1766)Sula leucogaster (Boddaert, 1783)Onychoprion fuscatus (Linnaeus, 1766Anous minutus (Boie, 1844Anous stolidus (Linnaeus, 1758)Procelsterna cerulea (Bennett, 1840Gygis alba (Sparrman, 1786)

Nom

Pétrel de TahitiPétrel à ailes noiresPétrel à collierPétrel du HeraldPétrel de KermadecPétrel de MurphyPuffin fouquetPuffin de la NativitéPuffin de TownsendPuffin de BaillonOcéanite à ventre blancOcéanite à gorge blancheFrégate du PacifiquePhaéton à brins rougesPhaéton à bec jauneFou masquéFou à pieds rougesFou brunSterne fuligineuseNoddi noirNoddi brunNoddi bleuGygis blanche

Famille

ProcellariidaeProcellariidaeProcellariidaeProcellariidaeProcellariidaeProcellariidaeProcellariidaeProcellariidaeProcellariidaeProcellariidaeHydrobatidaeHydrobatidaeFregatidaePhaethontidaePhaethontidaeSulidaeSulidaeSulidaeLaridaeLaridaeLaridaeLaridaeLaridae

REPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREPREP

TABLEAU I Espèces d'oiseaux marins reproducteurs des Australes . REP reproducteur (au moins dans une île), LC préoccupation mineure(least concern), NT quasi menacé (near threatened), Vu vulnérable (vulnerable), EN en danger (endangered), CR en dangercritique (critically endangered), R reproducteur, R? reproducteur possible, V visiteur.

RR

RRRR?RR

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Stat

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Rapa

R

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Mar

otir

iNTLCVULCLCNTLCLCCRLCLCENLCLCLCLCLCLCLCLCLCLCLC

UICN

201

4

Pétrel du Herald - Pterodroma heraldica, identifié à Raivavae.© Fred Jacq

Pétrel à collier - Pterodroma brevipes, une espèce classée« vulnérable » sur la liste rouge de l’UICN répertorié enPolynésie française uniquement à Tahiti, Moorea et Raivavaeoù il se reproduit sur les pentes du mont Hiro, zone d’intérêtpour la conservation des oiseaux.© Philippe Raust

L’effectif total est estimé à 150 000 individusessentiellement dans les îles du Groupe Pitcairn (Brooke,2004). Ailleurs en Polynésie, les effectifs sont faibles àl’exception de Ua Pou (plus d’un millier de couples). SurRaivavae moins de 10 à 20 individus ont été notés.

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Pterodroma neglecta - Pétrel des Kermadec Espèce des eaux sub-tropicales, elle est absente desîles Marquises et de la Société, alors qu’elle nicherégulièrement au sud du 23e de latitude sud. À Tubuai, où des os appartenant à un pétrel de taillemoyenne rapportés à cette espèce ont été exhumés(Worthy et al., 2011), il est éteint. Des oiseaux ont étéobservés en vol à Rimatara et à Raivavae en décembre1989 (Seitre et Seitre, non daté). Malgré des prospectionsen 2002 il n'a pas été observé à Raivavae (Thibault 2003)et son extinction locale est possible. À Rapa il niche dansl’île principale et sur les îlots périphériques de Rapa iti,Tauturou , Karapoo iti et Karapoo rahi (Thibault et Varney,1991). Il a été observé en vol au-dessus des rochers sudet ouest de Marotiri en décembre 1991 (Seitre et Seitre,non daté) où c'est un reproducteur possible (Gaskin, 2007).L’effectif mondial est estimé à environ 50 000 couplesdont l’essentiel se reproduit dans le Groupe Pitcairn(Brooke, 2004). Rapa constitue le site le plus important dePolynésie française avec près d’un millier de couples.

Pterodroma ultima - Pétrel de Murphy Endémique de Polynésie orientale il est connu commenicheur certain aux Gambier, au sud des Tuamotu et auxAustrales.Des oiseaux ont été observés à Rurutu en juillet 2007 (TeManun°60) et à Tubuai en 1975 et 2003 mais sans preuvede reproduction (Thibault et Bretagnolle, 2007). Signalé àRaivavae (Lacan, McCormack et Guillemont), c'est unnicheur possible sur les motu Papararuu (moins de 10couples en 2003), Arae et Hune (Thibault et Bretagnolle,2007). À Rapa il niche seulement sur les îlots Rapa Iti,Tauturou, Tapiko, Karapoo iti et Karapoo rahi (Thibault etVarney, 1991). À Marotiri en septembre 2006, l’îlot sud-est est visité et sur le plateau pentu de 10 m de largecouvert de végétation, des pétrels de Murphy nichent aumilieu des graminées (Gaskin, 2007).Le Groupe Pitcairn abrite la quasi-totalité des effectifsestimés à environ 800 000 – 1 000 000 d’individus (Brooke,2004). Les Australes abritent seulement quelquesdizaines à quelques centaines de couples.

Ardenna pacifica - Puffin fouquet En Polynésie française, il est connu comme nicheur auxîles Marquises, dans la Société, et aux Australes.À Tubuai, une petite colonie a été trouvée en novembre2003 sur le motu Ofai (Thibault et Bretagnolle, 2007). ÀRaivavae, il est présent sur l’îlot Hotuatua et de petitescolonies ont été localisées au-dessus d’Anatonu, deRairua et au pied du Matotea (Raust, 2007).Dans l’état actuel des connaissances, une seule localitéde Polynésie (Raivavae) comporte un effectif supérieur à100 individus et l’effectif global de la région est estimé àmoins d’un millier de couples.

Puffinus nativitatis - Puffin de la Nativité Il occupe le Pacifique central tropical, depuis Hawai’ijusqu’au Groupe Pitcairn. En Polynésie, il est connu commenicheur aux Marquises, aux Gambier et aux Australes.À Tubuai la découverte d’un couveur sur le motu Ofai, ennovembre 2003 signe la présence probable d’une petitecolonie (Thibault et Bretagnolle, 2007). A Raivavae unecolonie d’une dizaine de couples est découverte en octobre2002 sur le motu Hotuatua (Thibault, 2003) ; la nidificationest confirmée en mars 2007 (Raust, 2007). A Rapa il nichesur les îlots périphériques de Tarakoi, Karapoo iti, Karapoorahi et peut être sur Tauturou (Thibault et Varney, 1991). ÀMarotiri plusieurs dizaines de couples reproducteurs sontrecensés sur le rocher sud-est (Gaskin, 2007).L’effectif mondial est estimé à environ 50 000 couples(Brooke, 2004). Ceux de Polynésie orientale sontinférieurs à 5 000 couples dont plusieurs dizaines àcentaines aux Australes.

Puffinus auricularis myrtae - Puffin de Rapa Le vaste complexe des petits puffins est présent danstoutes les eaux tropicales et sub-tropicales. La forme P.auricularis myrtae (Bourne,1959) est connue seulementde Rapa où il niche sur Tauturou, Rapa iti, Karapoo iti etKarapoo rahi (Thibault et Varney, 1991).L’effectif des reproducteurs sur les îlots satellites de Rapaest de l’ordre de quelques centaines de couples.

Puffinus bailloni - Puffin de Baillon En Polynésie, il occupe les eaux équatoriales et tropicaleset niche dans les îles hautes des Marquises, de la Société,des Gambier et des Australes (Holyoak & Thibault 1984).Des oiseaux ont été entendus à Raivavae juste après latombée de la nuit au col de la route traversière (Seitre etSeitre, non daté) et presque au même endroit, au pied duRaratepa ,en décembre 2002 (Thibault, 2003).En Polynésie, on estime l’effectif à 4 - 5 000 couplesreproducteurs. Celui des colonies des îles Australes estsans doute inférieur à une dizaine de couples.

Fregetta grallaria titan - Océanite à ventre blanc Il est eproducteur dans un nombre restreint de localitésdans le Sud de l’océan Indien, dans le Pacifique Sud-Ouest, en Polynésie et au large du Chili. La forme titan,est endémique à Rapa et à Marotiri (Murphy, 1928).L'espèce niche sur Tarakoi, Rapa iti, Tapiko, Karapoo iti etRarapai (Thibault et Varney, 1991). À Marotiri, desindividus sont vus en décembre 1989 en vol auprès desrochers (Seitre et Seitre, non daté) et au large des îlotsrocheux en septembre 2006 (Gaskin, 2007).L’effectif de la forme titan est très faible et évalué à unmillier de couples au maximum.

Nesofregetta fuliginosa - Océanite à gorge blanche En Polynésie, l'oiseau niche dans 9 îles seulement sur desîlots satellites d'îles des Marquises, des Gambier, et deRapa. Dans cette dernière, il niche sur Tarakoi, Rarapaiet peut-être Karapoo iti et Tapiko (Thibault et Varney1991). Il est probablement nicheur à Marotiri où l'espèceest vue autour des ilots rocheux en 2006 (Gaskin, 2007).L’effectif mondial est estimé à environ 10 000 individus(Brooke, 2004) et l’effectif reproducteur de la Polynésieest de 1 500 - 3 000 couples.

Fregata minor - Frégate du PacifiqueL’espèce est reproductrice dans les îles de la Société, auxMarquises, et aux Tuamotu. Aux Australes, elle niche à Maria (Pierce et al., 2003) etc’est un visiteur à Rimatara (Raust et Sanford, 2002),Rurutu (Te Manun°39), Tubuai (Ehrhardt, 1980), Raivavae- où elle est notée par Lacan, Seitre, McCormack etThibault - et Rapa (Ehrhardt, 1986).En Polynésie l’effectif est estimé à 4 500 - 7 000 couplesreproducteurs, essentiellement aux îles Marquises etTuamotu.

Phaethon rubricauda - Phaéton à brins rouges Il est connu comme nicheur dans la Société (atolls desîles sous le vent), aux Australes, aux Gambier et auxMarquises, ainsi que dans les Tuamotu du Sud. C’est auxAustrales qu’il est le plus abondant et il niche dans toutesles îles de l'archipel : Maria (Pierce et al., 2003), Rimatara(Raust et al., 2002), Rurutu (Seitre et Seitre, non daté),Tubuai (Ehrhardt, 1980), Raivavae (Thibault, 2003), Rapaet ses îlots satellites (Thibault & Varney, 1991) et Marotiri(Seitre et Seitre, non daté).On estime l’effectif de la Polynésie à 5 000 - 7 000 couples,les Australes et le sud des Tuamotu en abritant l’essentiel(Thibault et Bretagnolle, 2007).

Phaethon lepturus - Phaéton à bec jaune Il est reproducteur dans la Société, aux Marquises, auxGambier, à Makatea et aux Australes à Rimatara (Raustet Sanford, 2002), Rurutu (Te Manun°39), Tubuai (Ehrhardt,1980) et Raivavae où il est noté par les observateurs depassage (Lacan, Seitre, Mc Cormack, Thibault).On estime l’effectif de la Polynésie à 1 000 - 1 500 couples,surtout aux Marquises et dans la Société (Thibault etBretagnolle, 2007). Il n'y a pas plus de 100 à 200 couplesaux Australes.

Le Pétrel de Murphy - Pterodroma ultima est classé « quasimenacé » sur la liste rouge de l’UICN. Les Australes abritentquelques dizaines à quelques centaines de couples. © Fred Jacq

Rapa constitue le site le plus important de Polynésie françaisepour le Pétrel de Kermadec - Pterodroma neglecta avec prèsd’un millier de couples.© Fred Jacq

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discussion et conclusion

diversité des espècesOn rencontre 23 espèces d’oiseaux marins reproducteursaux Australes (soit la quasi-totalité des 28 espècesrecensées en Polynésie française) - Tableau I. C’estl’archipel qui présente l’assemblage le plus diversifiécomparé aux 21 espèces des Marquises, aux 17 de laSociété ou aux 14 des Gambier. La majorité des oiseaux marins nicheurs soit 12 espèces,appartiennent aux familles des Procellaridae (pétrelset puffins) - Figure 1a et 1b et des Oceanitidae(océanites austraux).Au moins deux espèces se détachent au plantaxonomique : Fregetta grallaria titan (Murphy 1924,Murphy 1928) et Puffinus auricularis myrtae (Bourne1959). Leurs positions ne sont pas définitivement établies(Austin et al. 2004) et elles sont pour le momentconsidérées comme des sous espèces. Ces deux taxonssont endémiques de Rapa et de Marotiri.Le cas du petit pétrel de Raivavae est encore en débatfaute de matériel biologique disponible pour des analysesgénétiques. La systématique de cette espèce estcomplexe et encore obscure : considérée comme unesous espèce du pétrel de Gould P. leucopterapar certains(Thibault, 2003), il est probable qu'elle se rattache plutôtà P. brevipes, à la lumière d’analyses sur les oiseaux deTahiti (Gangloff, 2010), et qu’il s’agisse a minima d’unesous-espèce qui serait alors endémique de Polynésieorientale (Iglesias-Vasquez, 2012).Aux oiseaux résidents, s’ajoutent une dizaine de visiteursoccasionnels reproducteurs en Polynésie françaises

dans d'autres archipels (Fregata ariel), et d'oiseauxd'origine subantarctique irréguliers ou erratiques(Diomedea exulans, Macronectes giganteus, Daptioncapense, Pterodroma lessonii, Pterodroma mollis,Pterodroma macroptera). Il s'agit fréquemment dejuvéniles qui se dispersent plus largement au nord du40e parallèle, particulièrement pendant l’hiver austral.

Nb. obs.

1 310142

128411471

7256147

31

101 806

Nb. oiseaux

1913492

669515601

7466158

62

103 030

Famille

Sternes "blanches" G. albaSternes "brunes" O. fuscatusSternes "grises" T. bergiiSternesNoddisA. stolidus & A. minutusProcellaridés indéterminésPétrels "gris" Pétrels "brun" / grands puffins Puffinus spp.ProcellariensPhaethon lepturusPhaethon rubricaudaPhaethon spp PhaétonsSula sulaSula leucogaster FousFrégatesTotal

TABLEAU II : Nombre d'oiseaux observés en mer au cours de la mission REMMOA Polynésie 2012 (d'après Mannocci et al., 2012).

Nb oiseaux/obs.

1,463,51

5,231,251,361,281

1,031,181,07

22

11,68

% Australes

63,14%1,62%0,07%64,82%22,08%0,17%0,50%1,98%0,03%2,67%2,44%2,18%5,21%9,83%0,20%0,07%0,26%0,33%

100,00%

% Polynésie

33,03%11,20%0,54%44,77%31,27%0,33%0,24%2,62%0,40%3,73%1,67%0,37%0,70%2,75%15,78%0,24%16,43%1,04%

100,00%

Sula dactylatra - Fou masquéC’est un nicheur essentiellement aux Marquises et dansle sud des Tuamotu ainsi qu'à Mopelia (Société). Aux Australes, sa présence est notée à Maria (Pierce etal., 2003), la reproduction est confirmée en 2013 (Meyer,2013).L’effectif reproducteur de la Polynésie est modeste avecmoins de 700 couples recensés. À Maria on a recensémoins de 10 couples.

Sula sula - Fou à pieds rouges Il est reproducteur dans la Société, aux Marquises etaux Tuamotu. Aux Australes il ne nidifie que sur Maria(Pierce et al. 2003) et c’est un visiteur rare dans toutesles autres îles.On estime l’effectif pour la Polynésie à 12 000 - 20 000couples, surtout dans la Société, aux Marquises et auxTuamotu (Thibault et Bretagnolle, 2007). À Maria on arecensé plus de 300 couples.

Sula leucogaster - Fou brun Il est nicheur aux Marquises, dans la Société et auxTuamotu. Sa présence est marginale aux Gambier etaux Australes où la reproduction n’a été observée quesur Maria (Pierce et al. 2003). Des individus isolés ontété observés à Rurutu (Te Manu n°53), Tubuai (Ehrhardt,1980), Raivavae (Thibault 2003), Rapa (Ehrhardt, 1986)et Marotiri (Seitre et Seitre non daté).L’effectif reproducteur de la Polynésie est modeste avecune estimation de 600 - 1 000 couples (Thibault etBretagnolle, 2007). Sur Maria on a recensé moins de100 couples.

Onychoprion fuscatus - Sterne fuligineuse Elle niche essentiellement aux Marquises et auxTuamotu ; elle est rare et localisée dans la Société etabsente des Gambier.Aux Australes, c’est un reproducteur possible à Maria(Pierce et al., 2003) et un visiteur noté à Rimatara (Seitreet Seitre, non daté), Tubuai (Ehrhardt, 1980), Raivavae(Thibault, 2003), Rapa (Seitre et Seitre, non daté) etMarotiri; Les effectifs des colonies des Tuamotu sont de l’ordrede 1 000 à 10 000 couples. Ceux des îles Marquisesatteignent des centaines de milliers de couples oudavantage (Thibault et Bretagnolle, 2007).

Anous minutus - Noddi noir Il est présent comme reproducteur dans tous lesarchipels de Polynésie, mais peu abondant dans les îlesméridionales (Gambier, Australes, Groupe Pitcairn). Aux Australes il est nicheur à Maria (Pierce et al., 2003),à Rimatara (Raust et Sanford, 2002), Rurutu (Te Manun°39), Tubuai (Ehrhardt, 1980) et Raivavae où il sereproduit sur trois îlots du lagon (Thibault, 2003). Il estabsent de Rapa et Marotiri.On estime l’effectif reproducteur en Polynésie à 28 000- 50 000 couples, pour l’essentiel aux Marquises etTuamotu (Thibault et Bretagnolle, 2007) ; ailleurs, leseffectifs sont modestes (environ 1 000 couples auxAustrales).

Anous stolidus - Noddi brun Présent dans tous les archipels, il niche en plus oumoins grand nombre sur la plupart des îles dePolynésie y compris aux Australes sur Maria (Pierce etal., 2003), Rimatara (Raust et Sanford, 2002), Rurutu (TeManu n°39), Tubuai (Ehrhardt, 1980), Raivavae (Thibault,2003), Rapa et ses îlots rocheux (Thibault et Varney,1991) ainsi qu'à Marotiri.En Polynésie, l’effectif reproducteur est estimé à 68 000- 80 000 couples (Thibault et Bretagnolle, 2007) dont 500- 7 000 couples aux Australes.

Procelsterna cerulea - Noddi bleu Il est bien réparti aux Marquises (dans toutes les îles),rare dans la Société et aux Tuamotu-Gambier.Aux Australes il est localisé et nicheur à Rurutu (TeManu n°42), Raivavae (Thibault, 2003), Rapa (Thibaultet Varney, 1991) et Marotiri (Gaskin, 2007).Les Marquises, Gambier et Rapa (où la population estestimée à 1 000 - 2 000 couples) concentrent l’essentieldes effectifs estimé à 5 000 - 7 000 couples (Thibault etBretagnolle, 2007).

Gygis alba - Gygis blanche Elle est omniprésente dans les îles de Polynésiefrançaise. Aux Australes, elle se reproduit à Maria(Pierce et al., 2003), Rimatara (Raust et Sanford, 2002),Rurutu (Te Manu n°39), Tubuai (Ehrhardt 1980),Raivavae (Thibault, 2003), Rapa (Thibault et Varney,1991) et Marotiri (Gaskin, 2007).On estime l’effectif reproducteur en Polynésie françaiseà 51 000 - 70 000 couples (Thibault et Bretagnolle, 2007)dont environ 10% aux Australes.

FIGURE 1aSituation des colonies de procellaridés à Rapa.

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bibliographie

originalité biogéographiqueChaque île de l’archipel semble avoir un profilspécifique pour les oiseaux marins (tableau I).Maria est la seule île des Australes où se reproduisentFregata minor, Sula dactylatra, Sula leucogaster etSula sula. Àce titre cet atoll présente un intérêt particulierpour les oiseaux de la région (Pierce et al. 2003).Raivavae se distingue également des îles du restede l’archipel avec un ensemble de 14 espèces dont8 procellariens. Enfin l’ensemble Rapa, ses îlots périphériques etMarotiri occupe une place à part du fait de son

isolement et de sa situation méridionale. Il forme uneentité biogéographique particulière abritant deuxtaxons endémiques. Ces sites ont été retenus dans la liste des zonesimportantes pour la conservation des oiseaux dePolynésie (PF18 - Maria, PF20 - Pentes du mont Hiro,PF21 - Rapa et PF22 - îlots rocheux de Rapa etMarotiri) (BirdLife International, 2014).

conservation de l'avifaune marineLa majorité des oiseaux marins reproducteurs auxAustrales est inscrite dans la liste rouge de l'UICN dansla catégorie "préoccupation mineure" (The IUCN Red Listof Threatened Species, 2014). Cependant le pétrel deTahiti et le pétrel de Murphy sont classés "quasi menacé",tandis que le pétrel à collier est "vulnérable". Enfinl'Océanite à gorge blanche est "en danger" et si on retientle puffin de Rapa comme une sous espèce de P.auricularis, il relève de la catégorie "en danger critiqued'extinction".Les principales menaces pour les oiseaux de mer à terresont la prédation par les rats et les chats et la destructionde l'habitat des sites de nidification par les pratiquesagricoles inadéquates (brulis) et le surpâturage par lesbœufs et les chèvres ensauvagés (Raivavae et Rapa).Signalons la consommation des poussins de puffins à unniveau non quantifié sur Raivavae. En mer il ne semblepas que les captures accessoires par la pêche à la longueligne soient suffisamment importantes pour impactersérieusement les espèces des Australes (Watling, 2006)

remerciementsJe suis particulièrement reconnaissant à Jean-Claude Thibault qui a bien voulu relire cet article et l'enrichir deses remarques pertinentes.

spécificité numérique de l’assemblageLa mission REMMOA (Mannocci et al., 2012) a apportédes éléments sur la densité des oiseaux en mer quicorroborent les observations dans les colonies : lessternes blanches dominent largement avec 63% desoiseaux observés, suivies des noddis (22%) et desphaétons (10%) confirmant l'importance des Australespour ces derniers. Les procellaridés ne comptent que

2,6% des individus observés et il est remarquable deconstater le très faible nombre de frégates et de fousfréquentant les eaux des Australes et la rareté de lasterne fuligineuse. Le tableau II donne les nombresd'oiseaux observés par avion le long de transects aularge des Australes.

stabilité des espèces et des effectifs

On retrouve les mêmes espèces entre 1920 etaujourd’hui et aucune espèce n’a complétementdisparu. Des extinctions locales sont cependantconstatées, postérieures à l’arrivée de l’homme surces îles, certainement dues à la chasse.

Par contre si les effectifs semblent stables, denombreuses espèces ne comptent qu’un nombre trèsréduit d'individus (quelques dizaines de couples) ce quiles rend très vulnérables.

FIGURE 1bSituation des colonies de procellaridés à Raivavae. Zone de nidification des pétrels de Murphy sous les touffes de

cypéracées, sur le rocher principal de Marotiri. © Chris Gaskin

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130

L’EXPÉDITION SCIENTIFIQUE MENÉE PAR NATIONAL GEOGRAPHIC À RAPA A DÉMONTRÉ SCIENTIFIQUEMENT L’EFFICACITÉ DU

RAHUIDE RAPA POUR LA PRÉSERVATION DES RESSOURCES MARINES DE L’ÎLE.

Écosystème marin côtier de Rapa.

© Manu San Felix, National Geographic

131

En 2014, nous avons effectué une évaluationintégrée des écosystèmes marins de Rapa et deMarotiri, des îles lointaines et isolées dansl’Extrême-Sud de la Polynésie française. Rapa estun des rares endroits où le système traditionnel degestion des pêches, le rahui, est encore pratiqué.Nos études ont permis l’inventaire de 10 nouvellesespèces d’algues, 19 coraux et 5 poissons, etprobablement une nouvelle espèce de demoiselle à61 m de profondeur. Compte tenu de sa latitudeélevée, le recouvrement corallien était important àcertains endroits autour de Rapa. La biomasse depoissons à Marotiri était élevée et comprenait unepart importante de grands prédateurs, tels que lesrequins. Toutefois, la plupart des requins observésétaient petits et plusieurs présentaient deshameçons. La biomasse de poissons dans le rahuiétait inférieure de 50 % à celle de Marotiri, mais 67 %supérieure à toutes les zones non-rahui autour deRapa. Les grands prédateurs étaient rares dans lerahui, montrant que les populations de poissonsn’avaient pas complètement retrouvé un niveausimilaire à celui de nombreuses réserves marines.Les espèces endémiques régionales représententla majorité de l’abondance en poissons à Rapa et àMarotiri. Cette étude met en avant la culture et labiodiversité exceptionnelles de ces îles.

biodiversité marine à rapa et à marotiri : les îles du bout du monde

ALAN FRIEDLANDER1,2, ENRIC BALLESTEROS3 , ERIC BERKENPAS1 , ERIC BROWN4 ,PHILIP BOUCHET5, POEMA DU PREL6, JERÔME PETIT6, PAUL ROSE1,7, GILLES SIU8,DAVID TICKLER5 ET ENRIC SALA1

1 National Geographic Society, Washington, DC2 University of Hawaii, Honolulu, Hawaii3 Centre d’Estudis Avançats-CSIC, Blanes, Espagne4 National Park Service, Kalaupapa, Hawaii5 Center for Marine Futures, University of Western Australia6 The Pew Charitable Trusts, Polynésie française7 Royal Geographical Society, Londres, Royaume Uni8 Centre de Recherche Insulaire et Observatoire de l’Environnement (CRIOBE)

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133132

introduction géologie et géographieRapa et Marotiri sont des îles lointaines et isolées desÎles Australes de Polynésie française (Hall, 1868 ; St John,1982). Rapa est une caldeira ouverte, avec des sommetsdécoupés, le plus haut étant le Mont Perau (650 m)(Anderson et al., 2012). L’île couvre 39 km2 avec un récif

frangeant (Fig. 1). À environ 83 km est-sud-est de Rapase trouvent les îlots inhabités de Marotiri (Bass) secomposant de plusieurs sommets basaltiques, le plushaut atteignant 113 m (Anderson et al., 2012).

FIGURE 1Lieux et méthodes d’échantillonnage autour de Rapa et de Marotiri. Le polygone rouge marquela zone de gestion du rahui. Carte des Habitats du Projet « Millennium Coral Reef Mapping »(Andréfouët et al., 2006).

histoireRapa est l’île la plus méridionale de la Polynésie et ellene fut colonisée que vers l’an 1200 de notre ère(Anderson, 2000). Elle hébergeait entre 1500 et 2000habitants lorsque le navigateur britannique Vancouver ladécouvrit en 1791 (Richards, 2004). Vancouver nota laprésence de nombreuses fortifications sur les plus hautssommets, suggérant que des guerres intertribalesavaient lieu assez souvent pour justifier de grandsinvestissements dans des défenses (Kennett et al.,2006). Les forts étaient associés à des bassinshydrographiques, concentrant de ce fait la productivitéagricole en sections clairement définies et défendables(Dyson-Hudson and Smith, 1978). La croissance de lapopulation, la dégradation de l’environnement et lalimitation des ressources entraînèrent la prolifération deces forts jusqu’à environ l’an 1700 (Kennett et al., 2006).Au début du XIXe siècle, les Européens exploitaient le boisde santal et les concombres de mer, mais très vite ilssurexploitèrent ces produits (Anderson et al., 2012). Le

peuple de Rapa développa une réputation d’excellentsplongeurs et marins et ils furent embarqués commeéquipage à bord des baleiniers et des navires decommerce. En 1867, la population était réduite à 120personnes en raison d’une maladie apportée par lesoccidentaux et du trafic d’esclaves péruviens. À l’heureactuelle, environ 500 personnes vivent sur Rapa.La côte Est de Rapa est protégée par un système degestion des ressources marines appelé rahui. Dans lepassé, le rahui se référait généralement à la capacitéd’un chef à fermer un endroit spécifique ou uneressource particulière pour une période de temps limité(Bambridge, 2013). À l’heure actuelle, la zone de rahuirecouvre environ 40 % de la côte de l’île (Fig. 1), avecuniquement les lignes de pêche autorisées tout au longde l’année sauf pendant un ou deux jours par an où lapêche au fusil est autorisée. Les récoltes de cette pêcheannuelle sont partagées entre les membres de lacommunauté.

biogéographieLa situation isolée et subtropicale de Rapa et Marotiriles rend très intéressantes d’un point de vuebiogéographique, car elles se trouvent à la frontière sud-est de la région indopacifique. En raison de leurisolement, ces îles possèdent un fort taux d’endémisme,ce qui en fait un «point chaud» de la biodiversité.Certains groupes d’invertébrés, particulièrement lesmollusques, démontrent un taux d’endémisme

remarquablement élevé (Richards, 1986 ; Tröndlé etBoutet, 2009). La composition des poissons de récifde Rapa a été précédemment décrite par Plessis(1986) et elle correspond à la population de la régionpolynésienne (Kulbicki et al., 2013), avec unecomposition en poissons similaire à celle de Hawaiiet de l’île de Pâques et de nombreuses espèces ayantdes distributions subtropicales (Randall, 1998).

objectifsEn raison de leur isolement, d’une densité humaine faibleet d’une faible pression de pêche, Rapa et Marotiri ontsubi moins de pressions anthropiques que le reste de laPolynésie française. Le peuple de Rapa a exprimé sonintérêt pour la création d’une grande aire marineprotégée autour de leur île en réponse à une diminutiondes ressources observée au large. Le projet Pristine Seasdu National Geographic, conjointement avec The Pew

Charitable Trusts, et le CRIOBE (Centre de RechercheInsulaire et Observatoire de l’Environnement) a menéune expédition à Rapa et Marotiri en octobre 2014 afind’explorer l’environnement marin autour de ces îles,d’impliquer la communauté de Rapa dans cet effortet de mettre en avant les valeurs naturelles etculturelles de cette région unique.

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135134

méthodes

échantillonnage

Les sites d’échantillonnage ont été sélectionnés auhasard autour des deux îles pour avoir unéchantillonnage représentatif de l’exposition aux vagues,des habitats, des conditions océanographiques et des

régimes de gestion (Fig. 1). Sur chaque site, desinventaires en plongée ont été effectués à 10 et 20 m,pour un total de 58 sites d’études dans 29 zonesdifférentes (Rapa, n = 44 ; Marotiri, n = 14).

benthosLa caractérisation du benthos a été effectuée le long d’untransect de 50 m de long parallèle à la ligne côtière, àchaque profondeur d’échantillonnage. Pour les algues,les coraux et les autres invertébrés sessiles, nous avonsutilisé une méthodologie d’intersection ligne-point lelong des transects, en notant les espèces ou les taxons

observés tous les 20 cm sur un mètre mesureur. Lesdonnées de chaque point de mesure ont été expriméesen pourcentage de couverture. Pour les oursins, nousavons compté et mesuré les individus dans quinzequadrats de 50 x 50 cm, aléatoirement placés le long dechaque transect de 50 m.

poissons de récifs

À chaque strate de profondeur du site, les plongeurs ontcompté et estimé les longueurs de tous les poissonsrencontrés le long de trois transects couloir de longueurfixe (25 m), dont les largeurs différaient en fonction de ladirection de natation. Tous les poissons d’une longueurtotale (LT) ≥ 20 cm ont été comptés dans une bande de 4

m de large étudiée lors d’une plongée initiale au momentde la pose du transect (zone = 100 m²). Tous les poissonsd’une LT < 20 cm ont été comptés dans une bande de2 m de large étudiée lors de la plongée de retour le longdu transect posé (zone = 50 m²).

poissons pélagiques

Les caméras sous-marines appâtées ettélécommandées à distance (BRUVS de l'anglaisMid-water baited remote underwater video stations)sont conçues pour quantifier les caractéristiques del’assemblage des poissons pélagiques (Letessier et al.,2013). Les BRUVS se composaient d’une traverse surlaquelle deux caméras GoPro étaient fixées à 0,8 md’écart avec un angle convergeant vers l’intérieur de 8°.En formation de palangre, nous avons déployé trois

unités simultanément et distantes de 200 m. Chaqueéquipement était appâté avec environ 800 g de bonitebroyée. Les sites d’échantillonnage ont été choisis pargroupe d’îles, par profondeur (par exemple <50, de 50 à200, >200 m) et par orientation (par ex., est et ouest)autour de Rapa. L’abondance relative a été estiméecomme étant le nombre maximum d’individus observédans n’importe quelle trame vidéo (Nmax).

Études par caméra vidéo sous-marine de grande profondeur

L’équipe d’image à distance du National Geographic(Remote Imaging Team) a développé des camérasvidéo sous-marines de grande profondeur, quiutilisent des caméras à haute définition enchâsséesdans une sphère de verre borosilicaté pouvantdescendre jusqu’à 10 000 m de profondeur. Le cadre

de visualisation était de 2 à 6 m², en fonction del’inclinaison de la pente où la caméra sous-marineatterrissait. Les caméras étaient appâtées avec unkilo de poisson surgelé et déployées pendant environquatre heures.

analyses statistiques

Les effets de l’emplacement (par ex., zone de pêcheouverte à Rapa, zone rahui à Rapa, Marotiri), laprofondeur et leurs interactions sur la structure de lacommunauté benthique ont été analysés en utilisant lavariance bivariée par permutation (PERMANOVA) sur lesdonnées transformées par la racine carrée de l’arc-sinus

et basées sur une matrice de distances euclidiennesdes différences. Les différences entre les lieuxd’échantillonnage ont été calculées en utilisant uneréduction proportionnelle multidimensionnelle nonmétrique, avec des vecteurs montrant les taxonsprimaires derrière l’ordination.

résultats

habitats benthiques

Plus de 87 % de la structure benthique importante autourde Rapa se compose d’un récif frangeant exposé àl’océan, suivi d’un récif frangeant exposé à la merintérieure (12 %), alors que 96% de Marotiri se composentd’une structure de bancs ennoyés (Tableau I, Figure 1).L’habitat de la pente externe du récif recouvre 62 % del’habitat total de Rapa, suivi par le platier (32%), alors quela pente externe du récif ne représentait que 3% del’habitat total de Marotiri.Autour de Rapa, la couverture benthique dominante secomposait à 45 % d’algues charnues, puis par des corauxdurs (20 %), un substrat dénudé couvert d’une moquetted’algue (20 %) et d’algues coralliennes encroûtantes (14%) (Figure 3). À l’inverse, Marotiri était dominée par unsubstrat dénudé couvert d’une moquette d’algue (45%),suivi d’algues coralliennes encroûtantes (38 et de corauxdurs (13%). Les couvertures varient considérablemententre les lieux autour de Rapa, avec du corail dur et desalgues coralliennes encroûtantes plus communes le longdes rivages face à l’est et à l’ouest, alors que lesmacroalgues dominaient les expositions nord et sud.À Marotiri, les communautés benthiques étaientextrêmement concordantes et bien différenciées des sitesautour de Rapa. Cette différenciation était motivée parl’abondance accrue d’oursins de mer, le substrat dénudéétant couvert d’une moquette d’algues et d’algues

coralliennes encroûtantes (Figure 2). Les macroalguesdominaient dans la zone ouverte de Rapa, au contrairedes coraux durs de la zone rahui. Les communautésbenthiques étaient très différentes entre les rahui et leszones ouvertes autour de Rapa (F1,55 = 6,1, p = 0,01), maisces zones différaient davantage de Marotiri que les unesdes autres (respectivement F1,55 = 15,8, p = 0,001, F1,55 =35,9, p = 0,001).<

La richesse en espèces de poissons a été estimée par lenombre total d’espèces observées par station par pairede plongeurs. La biomasse des poissons individuels a étéestimée en utilisant la conversion longueur-poidsallométrique : P = aLTb, où les paramètres a et b sont desconstantes spécifiques aux espèces, LT est la longueurtotale en cm et P est le poids en grammes. Lesparamètres longueur-poids correspondants ont étéobtenus de la base de données Fishbase(www.fishbase.org). La diversité des espèces a étécalculée à partir de l’index de diversité de Shannon-Weaver (Ludwig et Reynolds, 1988) :

, où est la proportion de tous les individus comptésde l’espèce . Les caractéristiques de l’assemblage despoissons (par ex. richesse spécifique, abondancenumérique, biomasse et diversité) ont été comparées enutilisant l’analyse de variance univariée (ANOVA). Lescomparaisons non planifiées entre les paires ont étéexaminées en utilisant le test de Tukey-Kramer. Labiomasse trophique des poissons a été comparée entreles lieux en utilisant un test de Kruskal-Wallis avec un testde Dunn pour les comparaisons multiples non planifiées.

FIGURE 2Graduation multidimensionnelle non métrique des principauxgroupes benthiques et zones d’échantillonnage entre lesemplacements. Les vecteurs sont les taxons primairesconduisant l’ordination (corrélations des mouvementsproduits de Pearson > 0,5).

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137136

FIGURE 3Distribution spatiale des principaux types de couvertures benthiques autour de Rapa. CE :algues coralliennes encroûtantes

Zone en ha

267,74,2

3929,41963,8

4,3

2240,0

% de la zone*

12,00,2

87,70,2

Géomorphologie structurale

Frangeant exposé à la mer intérieureComplexe de massifs coralliens de mer intérieureÎleFrangeant exposé à l’océanComplexe de plateau continental de massifs coralliensBanc ennoyéTotal sans terre

Zone en ha

2,3

21,2

619,9643,5

% de la zone*

0,4

3,3

96,3

rapa marotiri

Zone en ha

2,91395,13929,4

773,863,94,3

2240,0

% de la zone*

0,162,3

0,034,52,90,2

100,0

Type d’habitat

Banc ennoyéLagon fermé ou bassinPente externeÎlePinaclePlatierFrangeant réticuléPlatier récifal ennoyéTotal sans terre

*Pourcentage de zone sans terre

Zone en ha

619,9

21,2

2,3

643,5

% de la zone*

96,0

3,0

100,0

rapa marotiri

TABLEAU IGéomorphologie structurale et types d’habitat dérivés des données saisies à distance. Le projet « Millennium Coral Reef Mapping » (Andréfouët et al., 2006).

coraux

89 espèces de coraux au total ont été recensées àRapa et Marotiri. Nous avons identifié 19 nouvellesespèces pour cette zone, avec 12 pour Rapa, 5 pourMarotiri et 2 pour les deux (Annexe I). Beaucoup plusd’espèces ont été trouvées à Rapa (81) par rapport àMarotiri (26). L’espèce de corail la plus abondante àRapa était l’Acropora cytherea, qui couvre 8 % dufond. En comparaison, l’espèce la plus abondante àMarotiri était la Pocillopora verrucosa, qui couvre 9 %du fond. Montastrea curta était la deuxième espècepar ordre d’abondance sur les deux îles couvrant 1 %du fond marin de Rapa et 3 % de Marotiri.La composition de la communauté corallienne entreles différents régimes de gestion était très différente(F2,55 = 10,41, p = 0,001). Les récifs de Marotiri sontdominés par la Pocillopora verrucosa et la Montastrea

curta. En comparaison, des coraux du genre Acroporadominent la zone du rahui, alors que les zones depêche ouverte avaient un assortiment varié d’espècesavec une couverture de corail inférieure et unecouverture de macroalgues supérieure. Lesassemblages de coraux étaient aussi énormémentdifférents entre les diverses profondeurs (F1,55 = 2,37,p = 0,006), avec des coraux à la fois plus hauts et plusvariés sur les sites à 20 m que sur les sites à 10 m. Iln’y avait pas d’interaction importante (F2,55 = 0,82, p =0,73) entre les profondeurs et les régimes de gestionindiquant que la configuration de la composition de lacommunauté des coraux était consistante entre lesprofondeurs, quelle que soit la zone de gestion.

algues

Nos études en zones subtidales ont trouvé 44 taxonsd’algues marines, 8 d’identification inconnue et aumoins 10 nouvelles espèces (Tableau III). Quatreespèces de macroalgues dominent les habitatsmarins de Rapa et Marotiri (Figure 4a, b, c, d). La plusabondante est la Sargassum obtusifolium qui formed’immenses lits entre 0 et 25 m autour de Rapa. Lacouche de base de ces forêts de Sargassum contientdes algues coralliennes encroûtantes non identifiéeset l’algue Lithophyllum kotschyanum.Une autre espèce importante est l’Hydrolithononkodes, une algue corallienne encroûtante quirecouvre les coraux morts et les rochers autour deRapa (Figure 4b). Cette espèce est associée auxabondances modérées de l’oursin de mer Diademasavignyi et la macroalgue la plus abondante dans leshabitats dominés par les coraux autour de Rapa.L’Hydrolithon craspedium est la seule espèce d’alguecorallienne observée à Marotiri, où elle pousse dansdes environnements d’énergie de fortes vagues, surdes pierres nues et entre des coraux de 5 à > 25 m.Une Lobophora sp. (Figure 4c) abonde dans les lieuxavec de faibles densités de Diadema et une faiblecouverture de Sargassum autour de Rapa. Cetassemblage n’est pas ordinaire et il pousse enbosquets parmi les lits de Sargassum bien qu’ilpuisse être également abondant en eaux profondes,lorsque la couverture de Sargassum se réduit.

FIGURE 4a : Algues marines importantes de Rapa et Marotiri. UR- Sargassum obtusifolium.

FIGURE 4b : Algues marines importantes de Rapa et Marotiri. UL - Hydrolithon onkodes.

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FIGURE 5Biplot de densité de l’oursin de mer Diadema savignyi parrapport à la couverture de la Sargassum.

139138

oursins

Quatre espèces d’oursins ont été recensées pendantles études autour de Rapa et Marotiri (Tableau II). LeDiadema savignyi est l’espèce dominante dans tousles lieux, mais les densités sont d’un ordre demagnitude plus élevé à Marotiri qu’à Rapa. Les lits deSargassum prolifèrent dans les lieux avec de faiblesdensités de Diadema, car c’est leur nourriturepréférée. Sargassum est presque absente enprésence du Diadema (Figure 5).

Marotiri

20,2 (3,3)

20,2

Zone ouverte

2,1 (2,7)0,7 (1,1)0,1 (0,3)

<0,1 (<0,01)<0,1 (<0,01)3,0

Espèces d’oursins de mer

Diadema savignyiEchinostrephus aciculatusEchinometra matthaeiEchinothrix diademaTripneustes gratillaTotal

Rahui

3,4 (3,6)0,1 (0,3)

3,5

rapa

TABLEAU IIDensité des oursins (nb.m-2) autour de Rapa.

FIGURE 4d : Algues marines importantes de Rapa et Marotiri. LR - Hydrolithon craspedium

FIGURE 4c : Algues marines importantes de Rapa et Marotiri. LL - Erect Lobophora sp.

338 espèces de poissons sont connues à Rapa avec 10 %considérés comme endémiques de l’île (Randall et al.,1990 ; Galzin et al. 2006). Notre étude quantitative a relevé181 espèces de 42 familles. L’utilisation d’ichthyocidespour échantillonner les espèces cryptiques et nocturnes,ainsi que l’utilisation de filets, de harpons, de lignes depêche et le savoir-faire des pêcheurs traditionnels, est laraison du nombre d’espèces plus élevé recensées lorsdes études précédentes. Nous avons identifié cinqnouvelles espèces de poissons pour Rapa (Grammistessexlineatus, Canthigaster axiologus, Ctenochaetusflavicauda, Pseudocheilinus tetrataenia et Pteragogus cf.enneacanthus) (Tableau II).La richesse en espèces de poissons, la biomasse et ladiversité diffèrent énormément selon les lieux (Figure 6).La richesse en espèce était la plus élevée dans la zonedu rahui, sans différence entre Marotiri et la zone depêche ouverte à Rapa. La biomasse était plus de trois foisplus élevée à Marotiri par rapport à la zone de pêcheouverte à Rapa et presque le double de celle de la zonedu rahui. La biomasse dans le rahui était bien plusgrande que dans la zone de pêche ouverte. La densité estplus élevée dans le rahui, mais pas fortement différenteentre Marotiri et la zone ouverte. L’abondancenumérique n’est pas différente entre ces divers lieux.La biomasse des superprédateurs représente 65 % de labiomasse totale de poissons de Marotiri, alors qu’elle estde <5 % à la fois dans le rahui et la zone de pêche ouverteà Rapa (Figure 7). La biomasse des herbivores est 3,2 foisplus importante dans le rahui par rapport à Marotiri etpresque 3 fois plus élevée que dans la zone de pêcheouverte. La biomasse de planctophages est la plus élevéeà Marotiri et la plus basse dans la zone de pêche ouverte,

alors que la biomasse de carnivores n’est pas différenteentre les sites.Les espèces d’origine indopacifique composent la grandemajorité des espèces de poissons observées à Rapa(65 %) et à Marotiri (68 %) (Tableau IV). Les espècesendémiques régionales (ces espèces qui ne serencontrent que dans le sud-ouest du Pacifique [parex., les îles Pitcairn, l’île de Pâques / Salas y Gómez,Gambier ou les Îles des Australes]) représentaient 11 %des espèces de Rapa et 12 % de celles de Marotiri.Toutefois, ces espèces endémiques régionalesconstituent 54 % de l’abondance numérique enpoissons de Rapa et 68 % de celle de Marotiri.

Ganonema sp.Peyssonnelia conchicolaPeyssonnelia boergeseniiHydrolithon onkodesHydrolithon reinboldiiHydrolithon craspediumLithophyllum kotschyanumMastophora pacificaMesophyllum erubescensMesophyllum funafutiense

Acropora cf. cardenaeAcropora cf. floridaAcropora cf. humilisAcropora cf. monticulosaAcropora divaricataAcropora globicepsAcropora microphthalmaAcropora pulchraFavia cf. maritimaMontipora mollisFavia speciosaFavites complanataLeptastrea pruinosaPlatygyra cf. contortaPocillopora capitataPocillopora meandrinaPorites cf. randalliPorites solidaPsammocora nierstraszi

Grammistes sexlineatusPseudocheilinus tetrataeniaPteragogus cf. enneacanthusCtenochaetus flavicaudaCanthigaster axiologus

Rapa

XXXXXXXXXX

XX

XXXXX

XXXXX

XX

XXXXX

Division/ Famille

AlguesRhodophyta

CorauxAcroporidae

Faviidae

Pocilloporidae

Poritidae

SiderastreidaePoissonsSerranidaeLabridae

AcanthuridaeTetraodontidae

TABLEAU IIINouvelles espèces observées à Rapa et Marotiri.

Marotiri

X

XX

X

X

XXX

Rapa MarotiriGéomorphologie structurale

Indo-PacifiquesEndémiques régionales*PacifiquesAnti-tropicalesEndémiques à RapaSubtropicales du Pacifique SudCircumtropicalesCentre pacifiquePacifiques SudTotal

0,3550,627 0,041 0,0550,003 0,070

0,0050,0071,161

(25,8)(67,5)(2,1)(4,0)

(0,1)(0,1)

(0,3)

Nb d’espèces Nb.m-2Région biogéo

110 1716 7 4 3 2 2 1

162

(67,9)(10,5)( 9,9)(4,3)(2,5)(1,8)(1,2)(1,2)(0,6)

(64,6)(12,2)( 8,5)(7,3)

(2,4)(3,7)

(1,2)

Rapa Marotiri

53 1076

23

182

(30,6)(54,0)(3,5)(4,8)(0,2)(6,0)

(0,4)(0,6)

0,3350,876 0,0270,052

0,0020,002

0,0041,298

Endémiques régionales* : trouvée aux Îles Pitcairn, à l’Île de Pâques / Salas y Gómez ou aux Îles des Australes.

TABLEAU IVDistribution biogéographique des espèces de poissons observées autour de Rapa et Marotiri. Les valeurs sont le nombred’espèces et l’abondance numérique (nb.m-2) avec des pourcentages du total entre parenthèses.

poissons de récifs

FIGURE 6Statistiques résumées sur les poissons pour la zone ouverte de Rapa,le rahui de Rapa et Marotiri. Richesse en espèces – F2,55 = 5,9 ; p =0,005 ; Abondance numérique (nb.m-2)– F2,55 = 1,5 ; p = 0.23 ;Biomasse (g.m-2) – F2,55 = 12,8 ; p <0,001 ; Diversité – F2,55 = 6,2 ;p= 0,004. Ln(x+1) de l’abondance numérique et de la biomassetransformé pour les analyses statistiques. Les barres avec la mêmelettre ne sont pas très différentes pour αα= 0,05 (tests de Tukey).

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141140

FIGURE 7Comparaison de la biomasse trophique (g.m-2) entre lesdifférents lieux. superprédateurs -χ χ2 = 31,8 ; p < 0.001 ;herbivores - χ χ2 = 11,1 ; p = 0,004 ; carnivores - χ χ2 = 1,8 ; p= 0.37 ; planctophages - χ χ2 = 8,9 ; p = 0,012. Les barres avecla même lettre dans les groupes trophiques ne sont passignificativement différentes pour αα = 0,05 (tests de Dunn).

poissons pélagiques

Un total de 53 déploiements de caméras pélagiquesa été effectué autour de Rapa (n = 38) et Marotiri (n =15) au cours de l’expédition (Figure 1). Dix espèces depoissons ont été observées dans les vidéos, avec desrequins vus dans 66 % des déploiements autour deRapa et 87 % autour de Marotiri. Tous les requinsobservés étaient des Galapagos (Carcharhinusgalapagensis) à l’exception de deux requins-tigres(Galeocerdo cuvier), tous les deux observés du côté

ouest de Rapa. Le nombre d’espèces par déploiementa varié entre 0 et 5 avec une moyenne de 1,6 (σ = ±1,3). L’abondance relative de requins à Marotiri (10,7σ = ± 7,3) était presque trois fois plus élevée qu’autourde Rapa (3,7 σ = ± 6,3). À Marotiri, les requins étaientle plus abondant au-dessus des profondeurs > 200 m(Figure 8). Les requins ont été le plus abondant ducôté est de Rapa par rapport à l’ouest, avec la plusforte abondance au-dessus des profondeur 50-200 m.

FIGURE 9 - Demoiselle jamais décrite observée à 61 m de profondeur à Rapa, probablement une nouvelle espèce pour la science. © Manu San Felix

caméras sous-marines

Taxons

Acanthurus leucopareiusAulostomus chinensisBeryx sp.Grammatonotus sp.Pseudocaranx cheiloSeriola lalandiCarcharhinus galapagensisChaetodon mertensiiChaetodon smithiChaetodon unimaculatusCongridaeEpigonus sp.Etmopterus sp.Promethichthys prometheusRuvettus pretiosusKyphosus sp.Bodianus unimaculatusOxycheilinus unifasciatusPseudolabrus torotaiThalassoma lutescensThalassoma heiseriEtelis carbunculusLutjanus fulvusLutjanus kasmiraPristipomoides sp.Parupeneus multifasciatusGymnothorax sp. 1Gymnothorax sp. 2Gymnothorax sp. 3Gymnothorax ypsilonMyctophidaeMyrophinaePentacerotidaePolymixia sp.Chromis bamiChromis pamaeUndescribed pomacentridPseudotriakis microdonScarus longipinnisEpinephelus fasciatusPlectranthias sp.Variola vouti

Profondeur (m)

39de 34 à 3974537446de 34 à 108de 34 à 61de 34 à 39de 34 à 46303974574562110573910861463434374464610846108374374374833604374de 645 à 8333939611057394637439

Famille

AcanthuridaeAulostomidaeBerycidaeCallanthiidaeCarangidae

CarcharhinidaeChaetodontidae

CongridaeEpigonidaeEtmopteridaeGempylidae

KyphosidaeLabridae

Lutjanidae

MullidaeMuraenidae

MyctophidaeOphichthidaePentacerotidaePolymixiidaePomacentridae

PseudotriakidaeScaridaeSerranidae

TABLEAU VListe des taxons observés par les caméras sous-marinesd’eau profonde. N = nombre de trames dans lesquelles lestaxons ont été observés.

N

1211148217111111261131311111111112511121122

discussion

biodiversité marineIl y a peu de choses connues sur la biodiversité marineet la santé de l’écosystème de Rapa et Marotiri. Parconséquent, cette mission représente un progrèsimportant pour notre compréhension d’une des zonesles plus isolées du Pacifique. Marotiri est isolée etinhabitée et donc un bon endroit pour examiner lastructure de la communauté marine en l’absence depêche locale et d’autres facteurs de stress. À Rapa, ilexiste une forte tradition de la gestion locale desressources marines à travers le rahui, et un de nosobjectifs était d’examiner l’efficacité de ce système degestion d’un point de vue biologique.La biomasse de poissons à Marotiri était relativementélevée (1,7 ton/ha) pour un site situé dans les eaux lesmoins productives de l’Océan Pacifique (Friedlander etal., 2014) et elle comprenait une grande proportion desuperprédateurs (65 %), qui a été rarement rencontréependant les études en plongée à Rapa. Bienqu’ordinaires, la plupart des requins à Marotiri étaientpetits et plusieurs avaient des hameçons dans lagueule. Les requins des Galapagos étaient présentsdans plus de 66 % des déploiements des caméras sous-marines autour de Rapa, mais ils semblaient éviter leszones à proximité du rivage. Ces résultats pourraientsuggérer une pêche du requin récente dans la zone.Les lieux isolés possèdent souvent un endémismeélevé et représentent donc une forte valeur pour labiodiversité et des cibles importantes pour laconservation (Roberts et al., 2002). Le nombred’espèces de poissons endémiques de la région trouvéautour de Rapa et Marotiri était élevé et ces espècesendémiques étaient numériquement dominantes. Nosétudes constituent la première description des poissons

de haute mer autour de ces îles et la première étudedes eaux profondes jusqu’à 1057 m.La couverture de corail était étonnamment élevée àRapa compte tenu de son isolement et de la latitudeélevée des sites. Des coraux des genres Goniastrea,Hydnophora, Merulina, Scolymia et Turbinaria ont étérelevés à Rapa et dans les autres îles des Australes,mais nulle part ailleurs en Polynésie française, rendantces assemblages originaux (Chevalier, 1982 ; Adjeroudet al., 2009). Les communautés benthiques autour deRapa avaient un haut niveau d’hétérogénéité, aveccertaines sections de récifs endommagées avec peu derécupération jusqu’à ce jour. Cette configurationsuggère une exposition saisonnière aux vagues et à ladistribution de l’habitat contrôlé par la profondeur, ainsique des dérangements périodiques à une échelletemporelle plus que décennale, compte tenu de lagrande taille des colonies observées.Les 89 espèces de corail relevées à Rapa et Marotirisont comparables au nombre rencontré dans les autresrécifs des hautes latitudes tels que celui de l’île LordHowe, 770 km à l’est de Sydney, Australie (Harriott etal., 1995). Adjeroud et al. (2012) ont trouvé 112 espècesde corail à Rapa, avec la majorité de ces dernières entre20 m et 55 m. Ces eaux plus profondes fournissent unrefuge contre l’énergie des fortes vagues et lasurcroissance des algues, mais elles étaient au-delàdes profondeurs de la conception de notre étude. Notreétude fournit la première liste de coraux pour Marotiri.Les observations de la flore algale de Rapa sontcomparables à celles des autres îles bien étudiées dela Polynésie française (N’Yeurt & Payri, 2006, 2007,2010). Nous avons identifié 10 nouvelles espèces pour

FIGURE 8Abondance de requins dans les strates profondes autour deRapa et Marotiri. Nmax est le nombre maximum de requinsobservés dans n’importe quelle trame vidéo.

Un total de 15 déploiements de caméras sous-marinesa été effectué autour de Rapa. Les profondeurs dedéploiement allaient de 30 à 1057 m (x = 353 m σ = ±362), avec seulement deux déploiements à Marotiri en

raison des conditions météorologiques. Nous avonsidentifié un total de 42 taxons de 23 familles (Tableau V),y compris une demoiselle à 61 m qui est probablementune espèce nouvelle pour la science (Figure 9).

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143142

FIGURE 10Distribution des poissons à la communauté après la pêchecommunautaire dans la zone de rahui en décembre 2013. © M. Walworth.

gestion traditionnelle et gestion des ressources locales

La biomasse de poissons dans le rahui était bien plusélevée que dans la zone ouverte de Rapa, bien que lerahui ne présente que la moitié de la biomasse depoissons trouvée à Marotiri. Les requins étaient rares àla fois dans le rahui et la zone ouverte, suggérant que lerahui aide à maintenir une plus grande biomasse depoissons que sous un régime de pêche ouverte, mais quecela n’a pas été suffisant pour restaurer les populationsde poissons à un niveau similaire à celui de nombreusesréserves marines.Traditionnellement, le concept du rahui comprenait lamise en place de fermetures temporaires et d’autresformes de restrictions sur les ressources d’une île parles autorités, accompagnées de rituels et de cérémoniesspéciales (Bambridge, 2013). En 1984, l’interdiction del’usage des filets a été adoptée autour de Rapa en raisonde la faible abondance de mulets et d’autres espècesimportantes. À peu près au même moment, environ untiers de l’environnement marin près du rivage a étéprotégé par un rahui où seule la pêche à la ligne estautorisée sauf pendant un ou deux jours au mois dedécembre, où la pêche au fusil est permise. Les largesherbivores, principalement les poissons-perroquets, lesmulets et les chirurgiens, étaient plus abondants dans lerahui que dans les zones ouvertes autour de Rapa,confirmant l’efficacité de cette stratégie de gestion. Larécolte annuelle au sein du rahui est partagée de manièreéquitable entre les membres de la communauté (Figure10). De plus, les filets maillants, les casiers ou nacellessont interdits autour de Rapa et la pêche de nuit estinterdite dans la zone du rahui. Les zones connues pouravoir un chiffre élevé d’intoxication alimentaire à laCiguatera sont aussi fermées à la pêche. La gestion estdirigée par un conseil du rahui composé de neuf membresélus de la communauté, y compris les pêcheurs.Le déclin mondial des ressources des pêcheries indiquel’échec de la gestion conventionnelle des ressourcesmarines et suscite un intérêt croissant pour les modèlesde gestion écosystémique (Pikitch et al., 2004 ; Aswani etal., 2011) et pour l’intégration du savoir écologique

traditionnel et les pratiques de gestion usuelles dans lagestion marine contemporaine (Berkes et al., 2000 ;Johannes, 2002 ; Friedlander, 2015). Les insulaires duPacifique dépendent de la mer comme première sourcede nourriture depuis des siècles, et ils ont inventépresque toutes les mesures de base de la gestiondurable des stocks halieutiques que nous utilisons denos jours (par exemple zones fermées, fermeturessaisonnières, limites de taille, accès limité, etc ;Johannes, 1998). Une mesure de gestion essentielle aété la reconnaissance des droits à la propriété par lescommunautés locales, avec les chefs locaux capablesd’appliquer des politiques de conservation sachant queles avantages futurs des sacrifices du présentprofiteraient à l’ensemble de la communauté. Leszones fermées et les fermetures saisonnières étaienttrès répandues dans le Pacifique, particulièrementlorsque le chef pensait qu’un stock était en surpêche(Johannes 1978, 1981). Par exemple, Cinner et al. (2005)trouvent que les fermetures périodiques adaptativesaugmentaient la biomasse des poissons et la taillemoyenne des poissons dans certaines communautésde Nouvelle-Guinée et d’Indonésie.

Rapa, principalement des espèces encroûtantescalcaires, qui sont parmi les espèces les pluscommunes dans la région. Une caractéristiqueintéressante de la flore macro-algale est l’absence decertains genres qui abondent dans les îles à basseslatitudes de la Polynésie française et les autres îles duPacifique tropical telle que Halimeda ou Udotea.Toutefois, il existe plusieurs espèces connues

uniquement à Rapa et les autres îles à hauteslatitudes comme les îles Pitcairn ou l’île de Pâques.La Sargassum obtusifolium et la Stypopodiumaustralasicum sont typiques de cette configuration(Mattio et al., 2008 ; Friedlander et al., 2013, 2014), avecS. obtusifolium comme composante dominante del’écosystème marin près du rivage autour de Rapa,formant d’immenses lits jusqu’à 20 m.

conclusions

La connaissance traditionnelle et le savoir local sontde plus en plus reconnus comme indispensables à lagestion durable des pêcheries côtières (Cinner et al.,2009 ; Cinner et al., 2012 ; Friedlander et al., 2013).Néanmoins, le rahui local de Rapa est menacé pardes périls mondiaux comme la pêche illicite, nondéclarée et non réglementée, les pressions externesdu marché et le changement climatique. La gestiondoit prendre en considération l’échelle de ces impactset développer des stratégies appropriées afin

d’assurer l’utilisation durable des ressources sur lelong terme. Nous avons recensé une faune depoissons variée en haute mer et en eau profonde, ycompris de nombreux requins. La protection accruede ces poissons leur permettrait de croître en taille eten abondance et d’avoir un plus haut niveau dereproduction, profitant ainsi à la pêche locale de Rapaet ses environs. La grande valeur de la culture et dela biodiversité de Rapa est d’une importance mondialeet demande une protection urgente.

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expédition national geographic à rapa et marotiri

Requin des Galapagos et banc de nanue observés aux abords d’un îlot rocheux de Marotiri.

© Manu San Felix

Inventaire de la biodiversité côtière des îlots de Marotiri.

© Manu San Felix

Bateau de recherche Hanse Explorer dans la baie de Ahurei à Rapa.

© Éric Berkenpas

LES SCIENTIFIQUES DE L’EXPÉDITION NATIONAL GEOGRAPHIC

ONT EXPLORÉ L’ENVIRONNEMENT SOUS-MARIN REMARQUABLE DE RAPA ET MAROTIRI.

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Nous avons mis trois jours dans une mertumultueuse et agitée pour atteindre la lointaine îlede Rapa et son groupe d'îlots rocheux Marotiri, à 1180km au sud-est de Tahiti. Notre équipe internationalede scientifiques, explorateurs et vidéastes s’estdirigée vers l'un des endroits les plus lointains surterre pour percer les mystères de sa biodiversitémarine et les secrets de sa culture. Le projet PristineSeas Project du National Geographic a pour objectifd’aider à protéger les derniers lieux sauvages del'océan et de restaurer la santé et la résilienced'écosystèmes uniques à travers des explorations,des recherches scientifiques, des analyseséconomiques et politiques, et une couverturemédiatique internationale. Rapa et Marotiri sontparmi les zones les moins habitées et les moinsutilisées de la région, et Marotiri est potentiellementla zone la mieux préservée du fait de sonéloignement. En outre, la population de Rapa a unelongue histoire de conservation marine. C'est unedes dernières îles qui pratique encore le rahui, unemesure traditionnelle pour gérer collectivement lesressources marines et terrestres. Après un long voyage perturbé par une forte houle,nous sommes arrivés à Rapa sous des pluiestorrentielles et par des vents de 100 km/h. Mais leconseil de l'île et les habitants de Rapa ont accueillinotre équipe avec une très grande hospitalité. Nos recherches ont abouti à la création de l’une despremières bases de référence complète del'environnement marin autour de Rapa et de Marotiri.Des explorations en plongée sous-marine ont permisde recenser les poissons, les coraux, d’autresinvertébrés et la flore marine. Nous avons égalementutilisé des caméras à mi-profondeur pour examinerles eaux du large, et des caméras adaptées aux fondssous-marins afin d’explorer la partie la plus profondede l'océan autour de ces îles. Au bout d'une semaine passée à plonger autour deRapa, nous avons été frappés par les différences

étonnantes entre les peuplements de récif corallien.Des jardins de corail recouverts de centainesd'oursins contrastaient avec d'épaisses forêtsd’algues sargassum de plus d'un mètre de hauteurparfois, sans qu'un seul oursin soit visible !L'existence de ces deux types d’habitat différentsaugmente la diversité du paysage marin et renforcela préservation de l'écosystème sous-marin uniquede Rapa.L'une des choses les plus frappantes que nous avonségalement remarquées au cours de nos plongées estle grand nombre d'espèces endémiques que l'ontrouve sur les récifs coralliens, des espèces qu'on netrouve nulle part ailleurs sur terre. Après une semaine d'exploration des environs deRapa, nous nous sommes embarqués pour un voyagede 6 heures vers Marotiri grâce au soutien du conseilde l'île et de deux pêcheurs de Rapa à bord. Si l'île deRapa, éloignée mais luxuriante, représente la vie aubout du monde, Marotiri représente l’extrême de lavie sur terre ! Arrivés à Marotiri, nous avons trouvéune scène chaotique de vagues énormes qui sebrisaient en murs d'écume sur les rochers. Marotirine se compose que de quelques rochers au beaumilieu du Pacifique Sud, exposés à la forcegigantesque des grandes houles océaniques. Il n'y arien qui nous sépare de l'Antarctique et toute la viemarine est adaptée à cet environnement hostile. Il a été très difficile de mettre à l’eau et de récupérernos embarcations gonflables, mais après unedescente rapide pour échapper aux vagues, nousnous sommes retrouvés dans une étendue sous-marine immense et déserte, où l'eau était d’unelimpidité incroyable. Rapidement, nous avons vu desrequins des Galápagos venir tout près et des sériolesse heurter à nos masques et à nos caméras. Nousavons dû nous battre pour continuer à travailler danscette houle, même à 20 mètres de profondeur ; lespoissons n'ont pas dû être impressionnés par noscompétences sous l'eau…

Alan Friedlander Scientifique en chef, Université de Hawaii

Paul RoseChef de l'expédition, National Geographic Society

Scientifiques de l’expédition National Geographic dans la baie de Ahurei à Rapa. © Manu San Felix

Îlots rocheux de Marotiri abritant des fonds sous-marins d’une étonnante biodiversité. © Manu San Felix

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Les requins et les grands sérioles, de près d'unmètre de long étaient les rois du récif, renforçantnotre théorie selon laquelle les régions éloignées oùla pression exercée par la pêche est très faible ànulle, sont dominées par de grands prédateurs ausommet de la chaîne alimentaire. Toutefois, malgréson éloignement et son environnement rigoureux,des flottes de pêche hauturière sont certainementvenues dans cette zone, car nous avons remarqué ungrand nombre de requins avec des hameçons dansla gueule. La préservation de Marotiri est critique,car de tels endroits sont uniques, très fragiles et deplus en plus rares.Les caméras déployées à mi profondeur autour deRapa et de Marotiri ont permis de décrire la vie au-dessous des vagues, dans ces sites éloignés où lesplongeurs n'ont pas accès. Les requins étaientprésents en grand nombre devant pratiquementtoutes les caméras appâtées, avec parfois plus d’unevingtaine d’individus. Les requins des Galápagosétaient les plus nombreux, mais nous avonsremarqué deux jeunes requins tigres dans la zoneoccidentale la plus éloignée de Rapa, ce qui prouvela présence de ces prédateurs au sommet de lachaîne alimentaire. Les systèmes de Rapa et deMarotiri sont peut-être des centres vitaux dans les

cycles de vie de ces requins, ce qui rend plus urgenteencore la protection de cette zone.Après avoir exploré, plongé, écrit, photographié ettout simplement vécu à Rapa pendant plusieurssemaines, il était difficile de partir. Nous noussentions fortement liés à cette communauté et ilnous était difficile de la quitter. Nous avons assisté àde nombreuses réunions du conseil de Rapa, ducomité du rahui et à des réunions publiques avec lacommunauté afin de partager nos résultats,présenter les films réalisés et les images del'expédition, échanger des histoires, ainsi que notrepassion commune pour l'océan. Nos investigationsont montré que les grands herbivores, surtout lespoissons-perroquets, les mulets et les poissons-chirurgiens, étaient plus abondants dans la zoneprotégée par le rahui par rapport aux zones ouvertesentourant Rapa, ce qui montre bien l'efficacité decette stratégie de gestion. Nous espérons quenotre expédition aidera la population de Rapadans ses efforts pour protéger leurs eaux. Nousavons beaucoup à apprendre de ces pratiquestraditionnelles de préservation des ressources, quinous montrent l’exemple pour enrayer le déclin desressources marines mondiales et pour améliorer laqualité de notre planète pour les générations futures.

Conseil municipal de l’île de Rapa avec quelques scientifiques. © Jérôme Petit

Requin des Galapagos et banc de nanue observés lors des plongées autour de Marotiri© Manu San Felix

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histoire et culture liée

à l'océan des îles australes

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Population des Australes lors d’un office religieux.

© GIE Tahiti Tourisme, Raymond Sahuquet.

LE GRAND OCÉAN EST CENTRAL POUR LES COMMUNAUTÉS DES « TUHA’A PAE », À TRAVERS LES LIENS FORTS ENTRE

LES ÎLES, LA GÉNÉALOGIE ET LES REPRÉSENTATIONS MYTHIQUES.

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La plupart des spécialistes de l'archipel desAustrales soutiennent que les habitants de cesîles ont perdu, dans la longue durée, la volontéet la capacité à naviguer et sont devenus trèsisolés avant l'arrivée des Européens. Cetteperception a été facilitée par la perte d'unegrande partie des connaissances traditionnellesdans le sillage de dépeuplement massif auXIXe siècle. Cette histoire humaine dedécimation et de marginalisation est communeavec les baleines à bosse qui fréquentent ceseaux. Aujourd'hui, ce sous-groupe des baleines àbosse est de retour et peut fournir de l'emploilocal au travers de l'observation des baleines.Des traditions largement négligées, toutefoisenregistrées, contestent l'idée d’un isolementgéographique et humain des populations desAustrales. Les insulaires pêchaient etnaviguaient bien au-delà du récif frangeant etfaisaient partie de vastes réseaux régionauxreliés par la mer. Ces éléments sont au fondementde la légitimité des communautés localesconcernant leur participation à la prise de décisionet à la surveillance maritime de leur océan.

LA VIE AU-DELÀ DU RÉCIF : LA ROUTE DES BALEINES ET AUTRES INFLUENCES MARITIMES DANS LA VIE DES ÎLES AUSTRALES

PAUL D’ARCYUniversité Nationale d’[email protected]

Ce chapitre a énormément bénéficié des remarques et suggestionsgénéreusement proposées par Michael Poole, également auteur danscet ouvrage.

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les baleines et les humains dans Îles australes - histoires parallèles

Les «Tuha'a Pae» ou îles Australes se situent àl’extrémité sud-est de la Polynésie française moderne.Elles se composent de cinq îles hautes et habitéess’étendant 1500 km au sud-est des îles Cook ainsi quedeux îles inhabitées. Les îles Tubuai dans le nord-ouestsont la plus proche des îles Cook et du nord-ouest versle sud-est apparaissent l'îlot Maria, les îles Rimatara,Rurutu et Ra'ivāvae. Les îles Basses, Rapa et Marotiri, sesituent plus au sud-est. La plupart de ces îles sontséparées par 150 à 200 km d'océan. Tahiti est 472 km aunord-ouest de Rurutu, tandis que Mangaia, dans le suddes îles Cook, est à une distance inférieure à 400 milesnautiques de Rurutu (Chubb,1927 ; Bollt, 2008a). Leuremplacement au sud offre un climat plus frais et plushumide que le reste de la Polynésie française, avec unetempérature annuelle moyenne de 23 degrés Celsius etdes précipitations annuelles moyennes de 1848 mm(ORSTOM, 1993). La dépopulation chronique en raisondes maladies européennes introduites au début du XIXe

siècle, a réduit l’importance de la connaissance écritedes histoires et des réalisations ancestrales dans les îlesAustrales (voir par exemple Edwards, 2003). Lesrecherches contemporaines sur les îles Australes ontsurtout été le fait d’archéologues lesquels sont en grandepartie dépendants de la trace de vestiges matériels. Ilsdépeignent les communautés insulaires de l'archipelcomme de plus en plus isolées au fil du temps, au pointqu'ils s’aventurent rarement au-delà de leurs récifsfrangeants concernant la pêche. Les récits de navigationvers d’autres îles y sont également peu nombreux, àquelques exceptions notables. La brillante histoire del'archéologie de la Polynésie orientale réalisé par Eric

Conte souligne l'importance continue des contactsinter-îles pour les habitants de la région.L'anthropologue Tamatoa Bambridge a publié uneétude détaillée sur l’importance de l'environnement auxAustrales, intégrant la culture de subsistance, lesconnaissances et les traditions locales associées(Conte, 2000 ; Bambridge 2009).Il existe également un important corpus de traditionsrelatives aux échanges avec les terres et les mers au-delà de la barrière de corail. Ce chapitre se concentre surces traditions pour corriger cette lacune dans lalittérature scientifique. Ce faisant, il rejoint la renaissanceparallèle d’autres grands voyageurs inter-îles dans cesarchipels, à savoir les baleines à bosse migratrices quivont et viennent entre les lieux de naissance et de repostropicales et leurs aires subantarctiques d'alimentationau sud de l'archipel des Australes. Pratiquement anéantipar les baleiniers dans le courant du XXe siècles, ce sous-groupe de baleines à bosse en Polynésie orientaledemeure l’un des plus petits ensembles dans lePacifique Sud (derrière celui de la Nouvelle-Calédonie),dont la démographie reprend lentement. Ce sous-groupeest en train de devenir un élément important del’économie locale saisonnière et dans la consciencecollective des Australes, les baleines prenant la route deleurs ancêtres. Comme il sera démontré ci-dessous, leshumains, les baleines et la navigation au-delà de labarrière de corail, ont une longue histoire dans les ÎlesAustrales. Longtemps négligés, mais jamais oubliés, cesaspects de la vie de la communauté locale sont de plusen plus au cœur de l'identité et des perspectiveséconomiques des communautés.

Selon l’érudit maori Te Rangi Hiroa, de nombreuses îlesde la Polynésie ont été découvertes par les explorateursqui ont suivi les voies de migration des baleines etd’autres espèces pélagiques (Hīroa, 1954 ; Parsonson,1963). L’archéologie et la linguistique ont permis auxchercheurs d’accéder à la plupart des informations surces premiers voyages de découverte. La route desbaleines ne figure pas dans ces types de travaux. Au lieude cela, en travaillant à partir des datation relatives auxobjets les plus anciens datés sur chaque île et ladéviation linguistique de la langue proto-austronésienne,

les archéologues indiquent que les premiers habitantsde la Polynésie orientale venus de Polynésie occidentale(Tonga, Samoa et Fidji), ont initialement maintenu lecontact avec leurs terres de l'Ouest, et ont égalementéchangé régulièrement autour d'une zone centralecomposée des îles Cook, des îles de la Société et des îlesAustrales. Cette interaction est notée au travers de ladistribution de basalte volcanique utilisé pour lesherminettes, les nacres et les hameçons (Pinctadamargaritifera). Cette zone centrale était périodiquementen contact avec les autres groupes d'îles de la Polynésie

française moderne, mais au fil du temps, ces liens ontdiminué. Les trois archipels principaux sont réputés avoireu une interaction limitée au moment de la redécouvertepar Cook de leur région à la fin des années 1700 (Bollt,2008a ; Sheppard et al, 1997). On observe par ailleurs unenette réduction de preuves matérielles des échangesinter-îles à partir de AD 1450 (Bollt, 2008a). De manièresignificative, l’archéologue de renom Patrick Kirch aindiqué que l’hypothèse d’un isolement supposécroissant des Îles Australes au fil du temps, était fragileen raison de l'absence relative de sites archéologiques(Kirch, 2000 : 230). Les contacts européens étaientsporadiques durant les trois dernières décennies du18ème siècle. En outre, la population était décimée parl'introduction de maladies occidentales qui ont réduit lapopulation de 90% à la fin du XIXe siècle (Bollt, 2008a ;Hanson, 1970). Le premier effort organisé pourenregistrer les connaissances autochtones n’aura lieuque dans les années 1920 avec les chercheurs du BishopMuseum. Jusqu’alors, on peut estimer que beaucoup deconnaissances ont été perdues (Aitken, 1930).La même histoire de chute démographique et demarginalisation a également eu lieu concernant lesprincipales espèces de baleines (notamment les baleinesà bosse - Megaptera novaeangliae-) dans les îlesAustrales. Elles traversent les îles Australes chaqueannée depuis leurs aires d'alimentation dans les eauxantarctiques riches en krill jusqu’aux eaux tropicaleschaudes où elles viennent pour se reposer ainsi que pourdonner naissance et nourrir leurs petits. Les baleinesrestent dans cette zone pendant l'hiver austral jusqu'àce les petits soient assez forts pour faire le voyage versle sud jusque dans les aires d'alimentation de l’été. Ilexiste des variations minimes en ce qui concerne lapériode des migrations selon les sous-groupes debaleines. Les recherches sur les baleines à bosse del'Australie, révèlent que les mères et leurs petits sont lesplus nombreux dans les aires de reproduction tropicalesde mi-Août à mi-Septembre, juste avant de commencerleur long voyage vers le sud jusqu'à leurs airesd'alimentation de l'Antarctique, tandis que les mères etleurs petits dans le sous-groupe de Polynésie orientalesont plus nombreux dans la zone et la période denourrissage entre septembre jusqu’au début du mois denovembre (Poole, 2002, 2006).Les baleines ont parfois été chassées par les insulairesdes Australes pour leur viande à la fin du XIXe et débutdu XXe siècles et durant l'après-guerre (voir Poole, cevolume), mais cela est désormais interdit et cette chassea été introduite par les Européens. Bien que les baleinesviennent près de la côte des îles Australes, il y a peu d'os

de baleine parmi les vestiges archéologiques (Bollt,2008a : 62-63). La Commission baleinière internationale (CBI) reconnaîttrois stocks reproducteurs de baleines à bosse dans lePacifique Sud: celui (E) dont le lieu de reproductionenglobe l’est de l'Australie (E1), la Nouvelle-Calédonie(E2) et les Tonga (E3); un autre (F) comprenant deuxsous-groupes qui se trouvent dans les îles Cook (F1) eten Polynésie française (F2); et un groupe qui se reproduitau large de la côte ouest de la Colombie (G). Les baleinesde la Polynésie française et des îles Cook sontconsidérées comme suffisamment autonomes pour êtreperçues comme des sous-stocks au sens de l’IUCN caril n’existe à ce jour aucune preuve d'échanges entre cegroupe et les autres sur la base des prélèvementsgénétiques de l'ADN mitochondrial (UICN, Olavarría etal., 2007).

Quelques traditions d’Océanie racontent que lespremiers grands voyageurs de Polynésie occidentale ontdécouvert les îles de la Polynésie orientale en suivant lamigration des baleines à bosse. Cette hypothèse, enl’absence de découvertes scientifiques nouvelles, restecependant peu probable et va à l’encontre des donnéesexistantes. Des récentes expériences de suivi parsatellite de baleines à bosse dans les aires dereproduction autour de Rarotonga aux Iles Cook ontpermis de montrer que certaines ont émigré vers desaires d'alimentation au sud de la Polynésie française,mais en passant très loin des îles Australes et les autresbaleines ont émigré vers les Samoa Américaines, Niueet Tonga (Clapham et al, 2008 ; Hauser et al, 2010).La relation ancienne entre les Polynésiens et les baleinesest encore très mal documentée et on doit noter leurremarquable absence dans la littérature. Teuira Henry,spécialiste de l’histoire tahitienne, indique que lescétacés figurent parmi les ombres des navires ou sont,aux yeux des Polynésiens, des manifestations du dieuTa'aroa, lorsque ce dernier veut montrer sa présence auxhommes (Henry, 1928 ; Whimp, 2008). Bien qu'unmanque des références existe concernant les relationsentre les humains et les baleines dans les îles Australes(Hänni, 1908 ; Cook, 1976), il convient de relever laconsommation de la chair d'autres cétacés comme lesdauphins, dans les archipels de la Société, des Tuamotuet les Marquises (Whimp, 2008 : Nordhoff, 1930 ;Morrison, 1935 ; Emory, 1975). Les baleines ne semblentpas avoir été chassées dans les îles Marquises, bien queles os de baleine étaient très prisées pour l’ornementdes oreilles (Linton, 1923).

introduction

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traditions oubliées et visions maritimes élargies

L'hypothèse fondamentale selon laquelle l'autosuffisancede l'île a diminué le besoin et le désir de voyage, monnaiecourante dans l'archéologie du Pacifique, est encontradiction avec les traditions enregistrées et lespratiques observées. Les Samoans et les Tahitiens, parexemple, habitant de grandes îles fertiles, avaient unegrande maîtrise de la navigation y compris après lecontact avec les Européens, jusqu’à ce que lesnavigateurs et autres spécialistes maritimes polynésiensaient été décimés par les épidémies introduites par lesnavires européens (D'Arcy, 2006). La note de Kirch sur lesdonnées archéologiques limitées dans les îles Australesa déjà été évoquée. Les traditions orales de voyagesenregistrées dans cet archipel sont également limitéeset quelque peu contradictoires. James Morrison, officierà bord de la Bounty, indique que les habitants de Tubuaiavaient peu de connaissance des autres îles, n’avaientpas de bateaux à voile, et «ne quittent jamais la terre»,mais ont parfois été emportées vers d'autres îles, àl’occasion de leur pêche côtière en pirogue (Morrison,1935).Cependant, une revue extensive de la littérature montreune grande quantité de preuve pour contredire cetteaffirmation d'un isolat vis à vis de l’océan durant lessiècles qui précèdent l'arrivée des Européens à la fin duXVIIIe siècle. Les techniques de pêche utilisées serapportent à des poissons pélagiques pêchés au-delà durécif, à la traîne pour le thon (scombridés) et le listao(Katsuwonidae) (Bollt, 2008 ; Leach et Intoh, 1984). Lesinsulaires des Australes ont navigué et pêché autour demonts sous-marins localisés à 150 km au sud-est deRurutu, et continuent de le faire, même s’ils préfèrenttaire les lieux et les noms réputés fertiles en espècespélagiques. Le mont sous-marin appelé Tinomana (montsous-marin Arago) dont le pic est à 27 mètres de lasurface (Bonneville et al, 2002) est encore aujourd’huiévoqué par les pêcheurs. Ce fait soulève des doutes ausujet des allégations relatives à la perte de capacité denavigation et à la fréquence des voyages vers les archipelsvoisins. La seule référence relative à la consommationdes baleines par les insulaires provient de l'étude de Cookà Tubuai où il note que les baleines occasionnellementéchouées pouvaient être consommées par les habitants(Cook, 1976). En outre, les insulaires de Tubuai avaient degrandes pirogues pour la pêche hauturière (Cook, 1976).Les contacts inter-îles ont joué un rôle important dans la

vie de la Polynésie orientale dans les années 1700. Lenavigateur de Ra'iatea, Tupaia, qui accompagnait Cook,avait connaissance de l’emplacement de Rurutu, etl'artiste à bord du navire de Cook, Webber, a peint unRurutu à Tahiti à l’occasion du dernier voyage de Cook àla fin des années 1770. Morrison quant à lui, a enregistréun certain nombre de voyages accidentels entre Tubuaiet les îles de la Société (Beaglehole 1955 ; Morrison, 1935).Le missionnaire Ellis a décrit comment en 1821 Auura,un jeune chef de Rurutu, a quitté l'île avec un noyau de safamille et quelques disciples, pour se mettre à l’abri d'uneépidémie et a navigué sur une pirogue double vers Tubuai.Ils y ont été bien accueillis et ont cherché à revenir àRurutu pour persuader les autres de se réinstaller àTubuai, mais ont été frappés par un ouragan qui les apoussé à l'ouest de cet archipel. Ils sont ensuite parvenusà Ra'iatea où ils ont adopté le christianisme et sont plustard retournés à Rurutu (Ellis, 1969 ; Angas, 1866). Cetévénement démontre à la fois la capacité et la technologiedes navigations inter-îles en 1821, ainsi qu'un état d'esprits’accommodant de l’installation dans de nouvelles îles.De grands disques de nacre étaient couramment utiliséscomme ornements. Ces coquilles étaient rares à Rurutuet provenaient très probablement d'autres îles. Cesartéfacts apparaissent dans les strates de bassin versantet sont datés de AD 1450, période au cours de laquelle lesarchéologues suggèrent que les voyages ont commencéà décliner (Bollt, 2008a). Il y avait certainement une pénuried'arbres pour les pirogues à Rurutu quand les Européenssont arrivés à la fin des années 1700, bien que leCasuarinaet dans une moindre mesure les C. inophyllumcouramment utilisés pour la construction de pirogues,étaient relativement abondants lorsque le missionnaireWilliam Ellis a visité l’archipel dans les années 1820(Beaglehole, 1962 ; Ellis, 1969 ; Bollt, 2008b ; Prebble2008). La similitude entre la culture matérielle des îlesCook, des îles Australes et de la Société après 1450, esten contradiction avec la thèse de l'isolement (Bambridge,2005). Un certain nombre de sources se réfère à la valeurattachée à des coiffures de plumes à Rurutu, Tubuai etRimatara (Vérin, 1969), tandis que Morrison ne voyait pasl'utilisation de voiles sur les pirogues pendant son séjourà Tubuai et a attribué tous les contacts inter-îles à ladérive des embarcations. Ce dernier décrit à ce sujet unecoque de pirogue capable de faire des voyages inter-îles(Morrison, 1935 ; Cook, 1976).

l’hypothèse de l’isolat géographique mise en doute

Il y a toutefois des traditions suffisantes appuyant l’idéede connexions inter-îles. Ces traditions sont encontradiction avec l’hypothèse archéologique selonlaquelle ces relations diminuent au fil du temps. Ilconvient tout d’abord d’évoquer un travail critiqueprovenant des archéologues eux-mêmes qui procèdent àune recalibrage de dates, où les voyages auraient perduré

beaucoup plus tardivement que ce qui étaitcommunément admis. Bien que ce recalibrage de datessoit encore discuté, les traditions ultérieures des voyagesinter-îles anciennement attribuées à une périodeantérieure à 1450 par les archéologues, pourraitmaintenant se référer à une période postérieure(Wilmshurst et al 2011 ; Kirch et al., 2010).

l’importance des relations inter-îles dans les traditions orales

Te Rangi Hiroa se réfère aux traditions d'Aotearoa et deHawaii à propos d'un Tahitien nommé Tafa'i sollicitantl’aide du chef de Marerenui de Tubuai, qui était trèsprobablement un parent. Il situe cet événement vers lemilieu du XIIe siècle. Au XIXesiècle, le missionnaire JohnDavies et l’anthropologue John Cook au XXe siècle,enregistrent des traditions indiquant que les gens deTubuai sont venus de Tahiti (Hiroa, 1959 ; Newbury, 1967 ;Cook, 1976). Seabrook a pour sa part enregistré destraditions de migrations importantes ultérieures etl’influence des relations inter-îles au cours du XVe siècleaprès JC. Cela correspond à la période de l’émergencede la lignée des Teuruarii à Rurutu et à la création denouveaux marae à Raivavae, Tubuai et Rurutu par lehéros ancestral Tupaea (Seabrook 1938, cité dans Cook,1976). Aitken (1930) indique cependant Maui commefondateur de ces marae, héros provenant des archipelsTuamotu voisins. Les informateurs de Morrison indiquentque la colonisation de Tubuai résultait de deux voyages àla dérive, l'un de Paroodtoo (Rurutu) (Morrison, 1935 ;Verin, 1969, cités dans Cook, 1976) à l'ouest, et l'autrede 'O' Gweeva à l'est. Sur cette question, recherchantl’origine des Iva à partir de l’orthographie des îlesdonnées par les informateurs à propos de Rarotonga,Ron Crocombe évoque comme probable origine Nuku-Hiva, Hiva Oa aux Marquises ou Ra'iatea (Crocombe,1964). Les légendes guerrières et de conquêtesautochtones montrent des contacts assez fréquentsentre les Îles Australes (Aitken, 1930 ; Edwards, 2003),tandis que l'émigration pour accroître un espacepolitique constitue un fait récurent de l’ensemble destraditions en Polynésie (Cook, 1976 ; Parsonson, 1963).Edwards a enregistré des traditions de tentativesd’élargissement de leur espace politique par lesenvahisseurs de Anaa dans le groupe des Tuamotu, quise sont établis sur Tubuai puis qui ont tenté en vain deconquérir Raivavae. La même tradition est rappelée àAnaa (Edwards, 2003). Morisson a enregistré le fait queTamatoa, une des principales familles de Tubuai est lié àun chef de haut rang de Raiatea dans les îles de la

Société (Morrison, 1935), même si, selon Henry, la lignéeTamatoa descend du fondateur originaire de Tubuai, 18générations avant l'ère de Pomare 1 (Henry, 1928). Detoutes les façons, les îles Australes ont joué un rôleimportant dans la politique des îles de la Sociétéprincipalement en termes de liens socio-politiques etd’échanges de pièces de prestige (notamment lesplumes rouges).Peut-être la preuve traditionnelle la plus convaincantede liens inter-îles à travers une vaste étendue de laPolynésie orientale, centrée sur les îles Australes,est le réseau des marae sacrée centré sur le maraeprééminent de la région - Tapu-tapu-atea à O-po-A àRa'iatea. Ce fut d'abord le plus prestigieux marae pourle culte de Ta'aroa et il a maintenu sa centralité lors del’émergence de la nouvelle secte religieuse dédiée audieu de la guerre 'Oro, qui est venue dominer une partiedes îles de la Société, supplantant le dieu dominantprécédent Ta 'aroa. De solides relations de parenté avecles chefs sacré de Opoa, le droit de porter des ceinturesde plumes sacrées durant certains rituels importants,étaient devenus une marque de statut, de rang et deprestige parmi tous les lignages principaux de Tahiti(Newbury, 1967). En 1774 le capitaine James Cook a notéque les grandes familles de Tahiti, Moorea, Huahine,Bora Bora et Ra'iatea étaient toutes liées (Cook, 1976).La transition de la prééminence de Ta'aroa à celle de 'Oropeut être précisément daté car huit chefs basés aumaraede Ta'aroa régnait avant que ‘Oro naisse à O-po-A.Ces chefs étaient représentés par huit pierres-dossiers,dont les noms ont ensuite été transférés à partir durègne de ‘Oro (Driessen 1991 : 130-40). Le missionnaireThomson date l'arrivée du culte Arioï associé à ‘Oro aumoment de la vie du grand-père de Pomare I, en 1730 ou1740. Cependant, Davies pensait que le culte Oro avaitsurgi à O-po- A pendant le XVIIe siècle et était parvenu àTahiti au cours de la seconde moitié du XVIIe ou au débutdu XVIIIe siècle (Thomson 1969 ; Davies, le 24 Octobre1835, lettres de Lang, Davies 18 Juillet 1834). Lestraditions suggèrent que le culte de ‘Oro avait sa plus

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grande influence au cours d'une cérémonie d’ « Alliancede bienvenue » du XVIIIe siècle qui englobait toutes lesîles environnantes, y compris les îles Cook. Cette alliancea éclaté quand un grand prêtre de la région Aotea a ététué dans un différend à O-po-A par un chef Aouri(Driessen 1991).Raiatea était le lieu d'origine, le centre de l'universautochtone, la maison des chefs les plus sacrés dont lesorigines remontent au dieu Ta'aroa et la passerelle entreles deux zones cosmiques autochtones du Po et Ao. Leterrain sur lequel le marae le plus sacré des chefs sacrésde O-po-A, dédié en premier lieu à Ta'aroa, puis à 'Oro, aété appelé Te Po jusqu'à une époque récente, tandis quele reste de Ra'iatea était connu comme Te Ao (Henry,1928 ; Emory, 1930). En tant que tel, Tapu-tapu-atea étaitau centre d'une vaste région de marae connectés. Toutcomme les îles de la Société était au cœur d'un vasteréseau commercial et de navigation englobant le sud desCook, les îles Australes et Tuamotu, Tapu-tapu-atea étaitlié à d'autres marae à travers les îles de la Société et au-delà, à la fois à l’époque de Ta’aroa et durant celle de

l’ascension de Oro. Les traditions de Rarotonga et deRa'iatea convergent en ce qui concerne les alliancesreligieuses entre les deux îles autour du culte Oro à Tapu-tapu-atea à O-po-A. Rarotonga a également eu un maraeTapu-tapu-atea fondé par le Tahitien en exil Tangi'ia desîles sous-le-vent, lors de l'ascension de Ta'aroa vers 1200AD (Pomare, 1971 ; Savage, 1962 ; Maretu, 1983). Lestraditions rappellent également celle d'une allianceinternationale amicale appelée « Te Hau-fa'atau'aroha »centrée autour du culte de Oro à O-po-a. Ces traditionsprécisent que cette alliance a été créée par un chefappelé Te Fatu lié par alliance à la famille de Bora-Boraissu du marae Farerua. Ce chef était originaire de l'île deRotuma (Henry, 1928). Comme le note Henry, Te Fatu estvenu de Rarotonga « avec une pierre de marae de son îlenatale» avec laquelle il a établi un nouveau maraeappeléFarerua ou «deux maisons». La mention de pierres demarae suggère que l'île de Rotuma n’était pas au nordde Fidji, où ces structures de pierre sont inconnues, maisdans un lieu de Mangaia, la seule île mentionnée dansune tradition associée (Gill, 1876).

conclusion : le retour à la mer

Bien que l’artisanat et l’agriculture des Australessoient aujourd’hui renommés en Polynésie française,l’avenir économique des ces îles semble plus tournésau delà de la barrière de récif. Les Îles Australes sontun site particulièrement privilégié pour l'observationdes baleines à bosse qui viennent se réfugier près dela côte au cours de leurs passages. L’observation desbaleines pour le tourisme et la recherche scientifiqueoffre également les possibilités de relier plusétroitement les communautés des Îles Australes avecles autres archipels du Pacifique sud par le SouthPacific Whale Research Consortium qui dispose d’unprogramme des recherches scientifiques sur lesbaleines à travers toute l’Oceanie.L’intérêt croissant concernant la riche histoire ettradition des insulaires des Australes, offre unpotentiel supplémentaire et différencié pour liercelle-ci au tourisme culturel et à l’observation desbaleines. Les liens historiques et culturels desAustrales liés aux baleines a permis aux autochtonesde Aotearoa-Nouvelle-Zélande et de Tonga de se voirreconnaître légalement des droits à la consultation età la participation en ce qui concerne l’activitéd’observation des baleines (voir par exemplePoharama et al., 1998 ; Kessler and Harcourt, 2012).

Sur ce même plan de l’avenir culturel et économiquedes Australes et de la région avec leur espaceocéanique, un autre enjeu est celui de l’exploitationdes monts sous-marins. Avec ses onze îles et deuxatolls, la longue chaîne qui lie les îles Cook et les îlesAustrales s’étirent sur 2700 kilomètres et contient 60fonds marins volcaniques particuliers, dont la plupartse trouvent dans la zone économique exclusive desîles Cook. Toutefois, les îles Australes englobent lehotspot MacDonald sur le fond marin au sud deMarotiri, qui est une source potentielle pourl'exploitation minière des fonds marins. La chaîneCook-Australes se trouve sur la section relativementpeu profonde du fond marin connu dans le PacifiqueSud. Les relations non-interrompues entre lesinsulaires des Australes avec l’océan environnant deleurs ancêtres, leurs octroient des bases solides pourdévelopper une argumentation légale, culturelle,morale et économique concernant leur participationà tout débat relatif au futur de leur océan. En outre,elles leur permettraient de revendiquer une positionde membre dans les organes de décision et de gestiondes océans.

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bibliographie

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Classe de Tubuai lors de la journée de l’océan organisée aux Australes, 2014.

© Donatien Tanret

LES HABITANTS DES AUSTRALES, CONSCIENTS DE LA RICHESSE DE LEUR PATRIMOINE NATUREL ET CULTUREL,

SOUHAITENT ÉTABLIR DES MESURES DE PROTECTION DES RESSOURCES MARINES.

Aux Australes, comme dans l’ensemble dutriangle polynésien, le lien des Polynésiens àMoana (océan) a toujours revêtu un caractèreparticulier et sacré : origine du monde, espacesacralisé perçu comme le marae (espacepolitique et religieux à ciel ouvert) fondateur.L’océan est aussi considéré par les Polynésienscomme un espace reliant les îles et un élémentstructurant des réseaux politiques etéconomiques océaniens. Dès le XIXe siècle, lestransformations de relations des habitants del’archipel des îles Australes au grand océan(Moana) sont marquées par les contacts avec lesEuropéens. Les premiers contacts, le touchéréguliers de bateaux (baleiniers, santaliers),l’arrivée des missionnaires de la LondonMissionnary society, puis les changementspolitiques et économiques qui s’en suivent, sontles principaux facteurs qui réorganisent lesrelations sociales. En ce qui concerne lesrelations des habitants des Australes au grandocéan, cette période de contact va donner lieu àdeux mouvements contradictoires caractériséspar le repli sur soi jusqu’en 1850, puis par unepériode d’expansion extraordinaire à partir duXIXe siècle.

LES TRANSFORMATIONS DES RELATIONS DES HABITANTSDES AUSTRALES AU GRAND OCÉAN (MOANA ) DURANT LE XIXE SIÈCLE

TAMATOA BAMBRIDGE USR 3278 CNRS - EPHECentre de Recherches Insulaires et Observatoire de l'Environnement (CRIOBE) Laboratoire d'Excellence "CORAIL"[email protected]

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163162

L’archipel des Australes, avant l’époque des contactsavec les Européens, faisait partie d’un réseauinsulaire plus vaste qui impliquait notamment les îlesde la Société et l’archipel des îles Cook. Il convient dedistinguer d’une part, la période d’installation desPolynésiens au sein des archipels et d’autre part, lemaintien de relations continues entre les archipels àpartir du XVe siècle. Concernant la première commela seconde hypothèse, nous avons recours à troistypes de sources : les travaux archéologiques, lesdonnées linguistiques et les traditions orales.Selon les travaux archéologiques menés en Polynésieorientale, la surpopulation sur la plupart des petitesîles de la Polynésie a conduit, au sein du trianglePolynésien, à des migrations océaniques. Cettehypothèse reste cependant fondée sur l’idéecontroversée d’un isolat géographique où l’absenceou l’abondance de ressource conduit les insulaires àdes migrations ou à un isolement sur une longuepériode (Kirch 2010). Même si certains élémentsdemeurent encore imprécis, le modèle général de cesmigrations à une vaste échelle est désormais connu(Figure 1).En ce qui concerne plus spécifiquement les Australes,la tradition orale mentionne l'expédition de Ru, deTupuai aux Australes, jusqu’à Aitutaki (archipel desCook) qui serait arrivé à Rarotonga vers 800 après JC.Cette arrivée est attestée par une route en pierre,l'Ara Metua o To’i, qui s’étend autour de Rarotonga,que l'on estime être âgé d'au moins 1200 ans. Cetteroute pavée de 29 km de long constitue encoreaujourd’hui un témoignage important de l'ingénierieancienne, sans doute inégalée ailleurs en Polynésie.Les îles de Manihiki et Rakahanga retracent leursorigines à l'arrivée des Toa (de Rarotonga) et deTupaeru (une femme de haut rang dans la chefferiePuaikura de Rarotonga), les îles du nord ayantprobablement été colonisées par les expéditions deSamoa, Tonga et des îles de la Société.

Sur la base de preuves linguistiques, Kirch (2000: 245)suggère une chaîne d'interactions s’étendant desAustrales à l'Archipel des Tuamotu de l'Est jusqu’àMangareva, mais les connaissances archéologiquesde ces îles sont plutôt faibles et il n'y a pas de preuveconcrète sur cet aspect du modèle. En outre, notreanalyse actuelle de la tradition orale ne permet pasde préciser ces incertitudes. En l’état, des travauxarchéologiques plus récents suggèrent que lafréquence des voyages interocéaniques aux îlesaustrales aurait décliné à partir du 15eme siècle(Kirch et al, 2002).Nous avons quelques incertitudes concernant lapériode qui s’étend du XVe au XVIIIe siècle. A partir descontacts, l'épuisement des ressources en bois sembleconstaté dans l’ensemble des îles Australes. Il estpossible que cette situation ait exercé des contraintesconcernant la capacité à construire et à maintenir degrandes pirogues de navigation océanique aprèsle XVe siècle. À Rapa, la plus méridionale des îlesAustrales, les premiers Européens à visiter l’île notentque la plaine côtière et les collines inférieures sontparsemées de forêts clairsemées et de montagnesdénudées (Bellingshausen 1945 : 223, Ellis 1829 :365). En décrivant les canots qu'il a vu en 1820,Bellingshausen (1945 : 224) écrit : « (…) probablementà cause de l'absence d'arbres d’épaisseur suffisante,ces engins ont été faits de planches liées ensemblepar des cordes de fibres torsadées de l'écorce desarbres. Certains font jusqu'à 25 pieds de longueur,mais sont égaux ou inférieurs à 1 pied 2 pouces delarge». Moerenhout (1837 : T2) fait une remarqueidentique à propos des pirogues de Raivavae.Joseph Banks (1962 : 332), naturaliste lors du premiervoyage de James Cook, écrit à propos de Rurutu : « L'îleen toute apparence, était plus aride que toutes cellesque nous avons vu dans ces mers...». Les pirogues deTubuai étaient plutôt petites. James Morrison (1935:68), à bord du Bounty après la première visite à Tahiti,

la période pré-européenne

Le terme « moana » (Tableau I) désigne en langue polynésienne le grand océan ou l’espace océanique au-delàdu lagon et du récif barrière.Dans une première partie, nous évoquerons l’état des relations des Australes avec leur océan (Moana). Dansune seconde partie, nous discuterons les transformations socio-économiques profondes qui recomposent lesrelations des Australes à l’océan.

les migrations

indique : « (…) leurs canots sont différemmentconstruits … et mesurent 30 à 40 m de long etcomportent 12 à 24 hommes.... Ils ne sont paséquipés de voiles (…) ».Tenant compte de ces témoignages, si les seuls îlesAustrales n’étaient plus capables de maintenir desrelations insulaires interocéaniques, après le XVe

siècle, la situation pourrait être différente dans lecadre d’un réseau à grande échelle où les îles de lasociété demeuraient le centre d’un ensemble plus

vaste, surtout en matière de construction de pirogue(Kirsh et al. 2007, Lee et al. 2007, Barry 2002). Eneffet, au début du XVIIIe siècle, les Australes d’un côté,les îles de la société de l’autre étaient considéréscomme un réseau d’alliance politique, le premierétant nommé « Te ao uri o te fa’a tau aroha » et lesecond « Te ao tea » (Henry 1928 : 122). Les traditionsorales de Rurutu et de Raivavae relatent en effet lemaintien de grands voyages océaniques vers les îlesCook et les îles de la société (Vérin 1965, Opeta 1965).

FIGURE 1Modèle des voyages et spheres d’interactions en Polynésie orientale. Barry (2002 :183).

Les mythologies de l’ensemble de la Polynésieorientale et des Australes en particulier, serapportant à des animaux et des éléments del’Océan, sont nombreuses et convergentes en dépitde diversités linguistiques variées (Figure 2). Ainsi, Henry (1928: 389) indique que, dans l'ancienTahiti, la baleine était «l'ombre de Ta'aroa». Avecd’autres poissons, y compris des dauphins, ilspersonnifient les esprits de personnes perdues enmer ou qui se sont noyés. Dans ce dernier cas, lesmodifications de la couleur d'un dauphin ont étéattribuées au départ de ces esprits, après la mortdes personnes (Henry 1928: 390). Une interprétationde la recherche sur les pétroglyphes de rongorongo(la langue écrite de Rapanui) localise la baleinedans le chant de création de cette île comme né dudieu Tinirau et de la déesse Hina. Elle établit ainsiune relation avec le dieu suprême Makemake

(Métraux, 1940: 321, Rjabchikov, 2000, 2001: 219,2002, Whimp, 2008).Aux Australes comme aux Tuamotu, il existait desexperts (Tohunga, arai’a) spécifiques qui régulaientles relations entre les grands mammifères marinset les sociétés insulaires. Ainsi, les baleineséchouées à Pukapuka relevaient de la compétencede Te Mangamanga, le gardien des arbres. Ceprêtre-gardien supervisait la division et de ladistribution de la viande de baleine, mais laconsommation de leur chair était interdit auxenfants (Beaglehole & Beaglehole, 1938 : 311). Il enest de même à Rurutu et à Rimatara, où laconsommation de la viande de tortue était réservéeaux ari’i, au sein de la chefferie. La suppression duprivilège de la consommation de la tortue dans cesdeux dernières îles lors de l’annexion en 1900,amènera les experts-gardien (arai’a) à critiquer les

mythologies et pratiques

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les modifications des relations au grand océan (moana ) aux australes

Les relations des habitants des Australes au grandocéan (Moana) se sont indubitablement modifiées àpartir des contacts avec les Européens, même si,comme nous l’avons signalé, quelques incertitudesdemeurent à propos de la période comprise entre leXVe et le XVIIIe siècle (voir chapitre de D’Arcy dans

cet ouvrage). Concernant les relations au grandocéan (Moana) à partir du XVIIIe siècle, les donnéeshistoriques et issues de la tradition orale témoignentd’une phase de repli des populations suivi d’unepériode d’expansion très importante.

Les raisons du repli des populations des Australessont relativement connues car elles s’expliquent pardes facteurs épidémiologiques et démographiques.Dès que les contacts entre les Européens et les gensdes îles Australes se sont intensifiés, les premiers ontapporté avec eux des maladies jusque-là encoreinconnues des seconds, qui provoquèrent desépidémies et la mort d’une grande partie de lapopulation autochtone. A la fin du XVIIIe siècle,Morrison (1966) évaluait la population de Tupuai àenviron trois mille personnes. Celle de Raivavae étaitde deux mille personnes selon Ellis (1829, T2). Il yavait peut-être six mille personnes à Rurutu, millecinq cents personnes à Rapa d’après Vancouver etentre mille et mille deux cents personnes à Rimataraselon Moerenhout (1837).Il est très difficile d’imaginer l’ampleur du désastrequi va frapper les îles Australes à partir du début du19ème siècle. A Rapa, près de 90 % de la populationva disparaître en 14 ans, entre 1826 et 1840. A Tupuai,dès 1817, des épidémies ont vraisemblablementtouché cette île car Ellis constate que la populationest peu nombreuse. Montgomery évalue la populationde Tupuai à neuf cents personnes quatre ans plustard. Puis une autre épidémie a dû affecter l’île en1822 car la population n’est plus que de six centspersonnes selon cet auteur. Selon Caillot (1909 :442),une nouvelle maladie touche Tupuai en 1823 etMontgomery à cette même date évalue la populationà environ trois cents personnes. En l’espace d’un peuplus de trente ans (1789-1823), c’est donc près de 90% des autochtones de Tupuai qui disparaissent. En1838, Du Petit Thouars indique que Tupuai est peupeuplé et le commerçant Lucett (1851) comptera centquatre-vingt personnes en 1849. Il est incontestableque non seulement l’arrivée des bateaux européenset d’Amérique du sud, les baleiniers sont à l’originede ces épidémies, mais par ailleurs l’alcool fait

également de dramatiques ravages parmi lesindigènes. A Raivavae, après que le capitaine MichaelFodger eut signalé la présence de bois de santal etd’une baie relativement abritée, de nombreux bateauxy feront relâche. Entre 1817 et 1821, la population deRaivavae diminuera de plus de la moitié, passant dedeux milles à huit cent quarante-huit personnes, puisà environ cent personnes en 1834 selon Moerenhout(1837). En ce qui concerne Rurutu, à la fin de l’année1821, Tyerman et Bennet ne compteront que deuxcents à trois cent quatorze personnes à Rurutu. 90 %de la population y fut décimée en moins de vingt ans.A Rimatara, Ellis (1829) évalue la population à environtrois cents personnes en 1821 et Moerenhout (1837)note qu’il ne reste plus que deux cents personnes en1834 (voir Tableau II). En vingt ans, de 1820 à 1840, cesont donc de véritables catastrophes démographiquesqui s’abattent sur cet archipel.Ces épidémies ont un impact sur les relations desgens des Australes par rapport à l’océan. Denombreux sites résidentiels vont être abandonnés etles missionnaires de la London Missionnary Society,présents durant cette période, vont encourager leregroupement des populations dans quelquesvillages, souvent en face des passes. Jusque dans lesannées 1850, les activités de pêche au large vont êtrequasiment abandonnés, les constructions de piroguesseront délaissées (Bambridge 2009) tandis que lesrelations inter-archipels vont se recentrer entrel’archipel des îles de la société et celui des Australes.

épidémies

FIGURE 2Carte des langues et dialectes de Polynésie française. (Charpentier, Jean-Michel & Alexandre François. 2015)

modalités de rapprochement de leur îles dans lecadre de l’annexion (Bambridge 2009). A l’ouest desAustrales, Vatea, le père des dieux dans sa formeRarotongienne, apparu comme mi-homme, mi-poisson et était reconnu comme un alliée desmarsouins (Williamson 1933 : 12).Aux Australes, comme dans l’ensemble du Pacifiqueinsulaire, l’univers du grand océan imprégnaitl’ensemble des relations humaines en ce quiconcerne les mythologies, les dieux, les systèmesde classification et de taxonomie, les relations depouvoir et statutaires, les alliances entre chefferies,les protections du monde invisible, la capture et laconsommation des poissons et des animaux dugrand océan, Moana (Whimp 2008). Dans la tradition

orale en provenance de Rurutu et de Raivavae, lesmarsouins et certains requins, protecteur defamilles élargies spécifiques, sont des équivalentsdes toponymies terrestres et aident les habitants àretrouver leur route jusqu’à leur village (Concernantune réalité similaire à Kiribati, voir Grimble, 1972,1989). Le beau requin « Ire » est sauvé par les dieuxTaaroa et Tu. Ta’aroa le donnera à un autre dieuTane. Tane avait un petit oiseau rouge de compagniequi guidait ce requin et un grand oiseau rouge quiétait aussi son messager dans l’espace Moana (« eimono ia Tane i roto i te moana o teie nei ao »). Cegrand oiseau rouge guidait les voyageurs, mais ilspouvaient périr en raison d’une tempête si lesmarins le maltraitaient (Henry, 1928 : 369).

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conclusion

Aux Australes, comme dans l’ensemble du Pacifiqueinsulaire, l’univers du grand océan imprégnaitl’ensemble des relations humaines en ce quiconcerne les mythologies, les dieux, les systèmes declassification et de taxonomie, les relations de pouvoiret statutaires, les alliances entre chefferies, lesprotections du monde invisible, la capture et laconsommation des poissons et des animaux dugrand océan Moana. Ces relations singulières àl’environnement marin vont être bouleversées durantla période des contacts avec les Européens car detragiques épidémies vont décimer les gardiens de lamer, les chefferies traditionnelles, les alliancespolitiques inter-archipélagiques. Cependant, à partirdes années 1850, une période de rapide expansiondémographique, économique et humaine s’ouvre

alors encourageant les insulaires des Australes a unereconquête de leur espace maritime. Aujourd’hui,avec l’enjeu de protection de leur espace océaniquemais aussi d’extraction minière en eau profonde, lesInsulaires des Australes sont confrontés à denouveaux défis par rapport auxquels leur voixapparaît déterminante.

Les tragiques épidémies cessèrent à partir de 1849.De cent quatre-vingt personnes en 1849 (Lucett 1851),la population était de deux cent cinquante-troispersonnes en 1863 à Tupuai (Arbousset 1867). ÀRaivavae, contre cent personnes en 1834, lerecensement officiel réalisé en 1863 comptabilisaittrois cents personnes. L’annuaire des E.F.O(Etablissement Français d’Océanie) recense cinqcents personnes à Rurutu en 1865 et deux centcinquante à Rimatara. À Rapa, les chutesdémographiques avaient également cessé depuis1840. Cette année-là, cent quatre-vingt personnesétaient recensées par Barff et en 1858 on en était àenviron trois cents à trois cent cinquante personnes. Il est caractéristique de remarquer avec quellerapidité, les gens des Australes, s’investirent ànouveau dans les échanges commerciaux enconstruisant leurs propres navires pour naviguer dansles autres archipels des Cook, des Tuamotu et des Ilesde la Société. En effet, les premiers échangescommerciaux entre les îles Australes et les navireseuropéens commencèrent à peu près en mêmetemps que l’arrivée des missionnaires. Le capitaineLewis commandant le navire américain « The Arab »qui amena Pomare II à Raivavae en 1819, profita decette occasion pour ramener plusieurs tonnes de boisde santal. Il en est de même du Snapper en 1825 quiramenait deux indigènes à Rapa. Les Rapa avaientacquis dans tout le Pacifique la réputationd’excellents plongeurs de perles et de nacres etnombreux étaient ceux qui partaient sur les bateauxcontre un salaire en espèces ou une étoffe (Hanson1973 : 25).Dès 1840-1850, les gens des Australes s’étaient déjàhabitués à gagner un salaire leur permettantd’acquérir des étoffes et d’autres articles en toutgenre. Des autochtones de l’archipel des Australes sefirent eux-mêmes marchands, vendant de l’arrow-root, du tabac et du taro. En 1840, Tubuai possédait sapropre goélette, le Rava’ai. Tuanua de Rurutu avaitconstruit sa propre goélette vers 1850 et faisait lanavette entre les différentes îles Australes et Tahiti(Degage, 1990 : 15, 32). Au cours de cette mêmepériode, nous savons par la lecture du mouvementdes goélettes au port de Papeete que Rimatarapossédait au moins deux goélettes en propre: le Eivaet le Tane (Tableau III).

En plus des mouvements mentionnés ci-dessus, A.Degage (1990 :15) recense 12 goélettes détenues pardes familles ou des villages de Rurutu entre 1850 et1940, 2 pour Rimatara entre 1900 et 1920, 5 pourTupuai entre 1840 et 1937, une pour Raivavae et unepour Rapa (voir Tableau IV).En outre, l’étude des généalogies entre 1840 et 1990,montre que les relations historiques entre les îlesAustrales, l’archipel des Cook et celui des îles de lasociété s’intensifient durant cette période. Denombreuses revendications foncières aux Australesvont associés des parents (feti’i) résidant aux îlesCook (Bambridge 2009).

Le nouveau contexte politique dominé par laprééminence des îles de la société et de l’annexionfrançaise au milieu des années 1880, va accélérerla reconstitution des réseaux de circulationinterocéanique entre les îles de la société et l’archipeldes Australes. L’influence des goélettes des Australess’y s’étendra jusqu’au Tuamotu et aux îles Cook. Eneffet, en 1900 à Rurutu et à Rimatara, c’estessentiellement pour maintenir les relationséconomiques entre ces archipels que les chefferiesde ces îles demanderont à intégrer l’ensemblepolitique sous influence française : il s’agissaitnotamment de contourner les mises en quarantainedes îles des Tuamotu et de la société, décrétées parle gouverneur sous l’annexion (Zorn 1993 : 223).

une phase d’expansion océanique économique et politique

Pêche aux ature. © DRMM

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bibliographie

Tupuai Ra'ivavaeAnnée

17751789179118171820182118221823182618291830183118341836183818401846184918581862186318651867187118751881188718921893189719001902190719171921192219261946195119561962196419711977198319881996

InhabitéEnv. 3000

900600300

peu peuplé

180

253

397429

472494

543712755

100797611161011

14221419174118462049

Rurutu Rimatara

Gayangos

MontgomeryMontgomeryMontgomery

Du PetitThouars

Lucett

Arbousset

source officiellesource officielle

source officielleCaillot

source officiellesource officiellesource officielle

source officielle

2000

1600848

800120

Env. 100

300

320

300

748770861958

10211023117712251049

Ellis

Henry?

EllisMarshall

Moerenhout

source officielle

source officielle

source officielle

Env. 6000?

200-314

500

600

Env. 1000

764

1166127212381375

15141555197119532015

Ellis

Annuaire

Caillot

Ahnne

Off.

300

200

300250

391

695650612685

738813914969929

Ellis

Moerenhout

source officiellesource officielle

source officielle

Env. 1500

Env. 2000Env. 500

600

453

Env. 200150-160

300-350env. 360

120200-250

env. 176192

170

183

230299310279342362384398480516521

Vancouver

DaviesPritchard

Darling

Darling

HeathJ. Barff

C. BartfMorris

MérySaville

Teissiersource officielle

source officielle

source officielle

source officielle

source officiellesource officiellesource officiellesource officielleHanson

source officiellesource officiellesource officiellesource officielle

source officielle

Rapa

TABLEAU II : Tableau démographique

Nom de la goelette

RainuiateaFaitoTebaitaTamarii MoeraiManurevaTauramaToerauVahine AveraPariiTeohuMatieuraTumuhauOromonaAnapotoRava’iNaraiehaTeonevaehaaTeheiporouraTamaraTeitiVaitangi

Date

185018701890190018961898191019051906192119241940

190019201840189019101916193719051938

Ile

Rurutu

Rimatara

Tubuai

RaivavaeRapa

TABLEAU IVGoélette par île selon Degage, 1990.

Reflex

MoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMuanaMoanaMoaŋaMoanaMoanaMoanaMoana, maanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMooaaŋa, moanaKa/moanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoanaMoana

Source

(Fbg)(Mfr)(Fts)(Cpl)(Pki)(Clk)(Lbr)(Smd)(Rch)(???)(Dln)(Shd)(Wms)(Dye)(Sph)(Dvl)(Crl)(Sta)(Bge)(Zpn)(Sks)(Bse)(Ebt)(Prt)(Dnr)(Lmt)(Mle)(Fth)(Sma)(Cwd)(Stn)(Rby)(Grn)(Cpl)(Hmn)

Language

AnutaEast FutunaEaster IslandEmaeHawaiianIfira-MeleKapingamarangiLuangiuaMangarevaManihiki-RakahangaMarquesasMorioriNew Zealand MaoriNiuafoʔouNiueNuguriaNukuoroPenrhynPukapukaRaʔivavaeRapaRarotonganRennelleseSamoanSikaianaTahitianTakuuTikopiaTokelauTonganTuamotuTuvaluVaeakau-TaumakoWest FutunaWest Uvea

TABLEAU ILe terme « Moana » dans les langues polynésiennes. (http://pollex.org.nz/entry/moana/)

Description

Ocean beyond the reefSeaBlueOceanSeaOceanDeep oceanSeaOceanOpen sea, oceanLa haute merOcean. SeaSeaSeaOcean, deep seaOpen and/or deep seaOpen seaOcean; blueSeaSea, oceanBlueSeaSea beyond the reef, oceanSeaOceanOcéan, mer, le bleu (endroit ou la mer paraît bleue à cause de la profondeur), l'espace célesteSea, ocean, deep waterSea, especially deep sea; oceanDeep sea (especially outside the lagoonSeaSeaOceanOcean ; sea, open sea ; deep sea ; ocean, deep seaThe oceanHaute mer, large

1852

1853

1854

TABLEAU IIIMouvements des goélettes entre les Australes et Tahiti,années 1852-1854, (escales non mentionnées entre les îlesAustrales). Source: « Le Messager de Tahiti »

Tupuai

Ravaai

RavaaiAoruiRavaai

Ravaai

Ra'ivavae

Mary-Ann

Marie-LouiseOranto

Rurutu

RainuiateaHanals

Rimatara

Tane

TaneEiva

ManahotuEiva

Rapa

Dunham

H. Hort

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170

Technique de pêche traditionnelle à Rapa.

© Jérôme Petit

LE RAPPORT À L’OCÉAN EST PROFONDÉMENT ANCRÉ DANS LA TRADITION ORALE ET DANS LES PRATIQUES

ANCESTRALES DE GESTION COLLECTIVE DES RESSOURCES MARINES AUX AUSTRALES.

171

À première vue, l’archipel des Australesreprésente des petites îles éloignées à quelques800 km au sud de Tahiti, isolées et dispersées aumilieu de l’immensité océanique. Mais lorsquel’on considère les espaces terrestres et marinsdans leur ensemble, se dessine alors unemultitude de réseaux par lesquels transitent dessavoirs, des mythes et des généalogies qui fontde l’Océan un territoire chargé d’histoire et deliens socioculturels anciens. Au-delà de la visioncourante selon laquelle l’Océan est un espaceconsidéré comme vierge, les pratiques et récitsrecueillis auprès des habitants des Australestémoignent d’une appropriation sociale, politiqueet spirituelle dont les expressions diversesperdurent aujourd’hui.

L’OCÉAN COMME LIEN SOCIAL

MARLÈNE DÉGREMONT Doctorante en [email protected]

TIMIRI HOPUU Ethnologie et traditions oralesService de la Culture et du Patrimoine [email protected]

HEREITI ARAPARICVD du bureau EthnologieService de la Culture et du Patrimoine [email protected]

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173172

L’archipel des Australes se compose de cinq îlesprincipales, réparties sur un territoire océanique quis’étend sur une surface de plus de 1300 km delatitude. Rimatara, Rurutu, Tubuai, Raivavae et Rapase situent à une distance considérable les unes desautres, mais entretiennent d’étroites relations qui fontde l’archipel un espace traversé par des liens solideset anciens. À partir de l’hypothèse selon laquelle l’Océan est vucomme un lien à la fois dans ses dimensionsreprésentatives et d’usages, nous nous sommesintéressées à la manière dont s’établissent lesconnexions entre les îles, selon des réseaux quidépassent l’espace terrestre et maritime et qui fontsens aujourd’hui pour les populations. À l’issue d’uneenquête exploratoire d’une durée de dix jours réaliséepar notre équipe à Rimatara, Rurutu, Raivavae etTubuai, l’objet de cet article est de saisir la nature de

ces liens et d’apporter un éclairage sur la manièredont l’Océan est pensé et conçu par les habitants desAustrales. Des entretiens semi-directifs et ouvertsont été menés dans ces quatre îles auprès d’unequinzaine de personnes issues de milieux variés afinde saisir les différents points de vue, les pratiques etles usages liés à l’Océan. En amont de cette enquête,un travail de recherche bibliographique a été effectuéaux archives du Service de la Culture et du Patrimoinepour appréhender le contexte historique et socio-culturel des Australes. Ainsi, nous exposerons dansune première partie quelques éléments de la culturemaohi liée à l’Océan et à la conception du monde,pour ensuite explorer les différents liens qui unissentles îles dans le temps et dans l’espace. Enfin, nousaborderons l’évolution des pratiques liées à l’Océanet les perceptions actuelles du milieu marin.

introduction

L’histoire du peuplement de la Polynésie estintrinsèquement liée aux grands voyages denavigation entrepris sur des distances représentantprès d’un cinquième du globe (Lewis, 1994 ; D’Arcy,2006). Évoluant dans un monde mouvant, lesnavigateurs voyagent et s’établissent sur des terresoù rien ne semble définitif, ni leur installation(Bambridge, 2004), ni l’emplacement de l’île(Bachimon, 1995). À cette conception s’ajoute unevision de l’île en tant qu’entité essentiellementmarine, émergée du Grand Océan (Moana Nui),formant un tout indissociable avec le ciel, la mer etles hommes (Perez, 2005), comme nous l’expliqueun référent culturel de Raivavae :“Raivavae c’est la baleine. La baleine dans son marae.

D’ailleurs le marae Te Mahara, c’est l’histoire de Gononui

qui est allé récupérer la baleine à Vava’u aux Tonga.”

Ces éléments mythiques se retrouvent dans denombreux récits à travers la Polynésie où l’île estassociée à un poisson “pêché” par un héroscivilisateur. La terre, substantiellement liée à la mer,est maintenue à flot et stabilisée par des pratiquesrituelles (Perez, 2005). La construction mythique del’archipel, symbolisé par un banc d’“îles-poissons”,

s’inscrit dans une conception d’un monde réticulaireoù chaque élément est en relation avec les autres. Laréférence à la pieuvre (fe’e), récurrente dans lacosmogonie maohi, illustre également le lien entreles îles par ses tentacules qui s’étendent surl’ensemble du triangle polynésien selon la légendede Tumu-raì-fenua, dont l’origine est à la fois célesteet marine. Lors de la séparation entre le Ciel et laTerre, la pieuvre est découpée puis aurait étéprojetée au sud, formant l’île de Tubuai (Bachimon,1995). Selon une version proposée par W. Doom àTubuai, la pieuvre représente l’ensemble del’archipel des Australes :“Tubuai c’est la tête de la pieuvre, les Australes ce sont

ses cinq tentacules, le cinquième est Maria. Le fe’e a été

découpé et a créé les Australes. [….] Cette vision vient de

nos ancêtres.”

Constituant des éléments du monde marin, les îlesfont partie de l’océan qui compose avec le ciel unvaste ensemble uni à l’origine, puis séparé par lesdivinités. Ces liens primordiaux se retrouvent dansles récits mythologiques et dans l’histoire desmarae, dont certains entretiennent un lien fort avecl’Océan.

histoire et représentations de l’océan aux australes

quelques éléments de la cosmogonie polynésienne

Les marae représentent la “structure architecturale,religieuse et sociale la plus importante dans la sociététraditionnelle polynésienne” (Eddowes, 2004: 53). Lecaractère sacré des marae renvoie à des droits et desinterdits (tapu) qui régissent les relations entre leshommes et le monde des dieux et des ancêtres (pō),indissociablement liés aux éléments de la nature.Aux Australes, plusieursmarae sont associés au mondemarin, tel que le marae Te Mahara à Raivavae, relié à lamer et à la baleine. Selon l’interprétation de W. Doom :“Les marae ont été fabriqués parce qu’on a eu besoin de relier

le marae à la mer, parce qu’on ne côtoyait plus le grand

large.[…] La vénération de l’océan se fait à l’intérieur des îles.

Les marae sur terre c’est des représentations du grand large.”

Dotés de fonctions multiples et complexes, ces lieux deculte permettraient d’accomplir des pratiques rituellesdans le cadre du maintien des relations avec le grand

Océan. Ce dernier est lui-même représenté comme ungrand marae, comme indiqué lors de nos entretiens àTubuai et à Raivavae :“Au-delà du récif c’est le monde du pō. Le pō c’est les esprits,

les ancêtres et les dieux, qui symbolisent le respect, c’est tapu.”

“L’Océan c’est le grand marae sacré”

Plusieurs auteurs font référence à cette conception dugrand marae (Henry, 1988 ; Perez, 2004; Tcherkézoff,2004), “véhicule du sacré et véhicule vers le sacré ” (Rigo,2004: 129). Le lien substantiel entre l’Océan et les maraedéfinit les rapports entre l’homme et le grand large, àtravers une relation à la fois sacrée et filiale. Si l’onconsidère que l’Océan symbolise le lien entre le mondedes dieux et des ancêtres (pō) et le monde des hommes(ao), au même titre que les marae terrestres, il tientégalement une place prépondérante dans l’origine del’île et de ses habitants.

l’océan, un “grand marae ”

Concours de dessins organisé à Rimatara lors de la journée de l’océan, 2014.© Jérôme Petit

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175174

Certaines îles des Îles Cook et Rimatara constituaientun groupe d’îles appelé Te Fenua ‘Ura, du nom de laperruche endémique à ces territoires, car deséchanges de plumes rouges y étaient pratiqués(Eddowes, 2004). D’autres produits étaient inclus dansles systèmes d’échanges entre les Australes et lesîles Cook, comme les herminettes ainsi que destechniques de navigation. Selon un pêcheur deTubuai, Raroto’a et Tubuai avaient par exemple encommun le bateau à voile ‘a va’a ta’ie. Les Australessont encore aujourd’hui le lieu de nombreux échangesde produits et connaissent d’importants mouvementsde populations, dans la lignée des pratiquesprécédant le contact avec les Européens. Les familles

des différentes îles sont fréquemment composées demembres originaires de l’île voisine.Si les relations entre les îles Cook et les Australessont devenues moins intenses du fait de lacolonisation et de l’établissement des frontières, desliens perdurent entre ces îles notamment lorsqu’il estquestion du ‘Ura, l’oiseau emblématique de Rimatara.Une demande a été formulée en 2007 par la reine deAtiu aux anciens et à la population des Australes, pouracquérir plusieurs couples d’oiseaux destinés à laréhabilitation de l’espèce sur cette île des îles Cook. Rimatara entretient aussi des relations avec Rurutuavec laquelle elle partage les îlots Maria, un atollcomposé de quatre motu situé au Nord-Est de

systèmes de relations contemporaines

De nombreux types de pêche sont pratiqués auxAustrales, que ce soit la pêche au large, sur les récifsou dans les lagons. À Rurutu, un spécialiste de la pêche(oano’o) nous détaille une pratique très ancienneperpétuée au moyen d’un hameçon pi’i permettant decapturer les poissons des abysses. À Tubuai, unetechnique de pêche à l’encre de pieuvre (tuta'e fe'e)nous a été décrite par un pêcheur de l’île commeétant exclusivement pratiquée à Tubuai et héritée desanciens pêcheurs. Lors de nos entretiens, de nombreux pêcheursdéplorent la perte de pratiques autrefois respectéescomme le rahui ou la pêche collective. Le rahui est une“restriction temporaire dans le temps ou sur un espaceportant sur des ressources ou un territoire”(Bambridge, 2013 : 126). Il est pratiqué à Rurutu et àRimatara sur une seule espèce de poisson, le ature,comme nous l’explique un ancien de Rurutu : “Le rahui est une pratique très respectée et a été appliquée

par le Maire. Auparavant, il existait un To’ohitu (comité des

sages), qui mettait en place le rahui.[…] Pour signaler le

rahui, le tavana (maire) décide d’attacher le ni’au (palmes

de cocotier).[…] Cela signifie qu’à cet emplacement, il y a

un rahui sur cette zone et pour seulement un type de

poisson, le ature.”

Les modalités de sa mise en place sont très variablesselon les contextes et l’organisation socio-politiquelocale. À Rapa, le rahui est instauré sur une vaste zonecôtière par un comité (Tomite rahui). Certains pêcheurs de Tubuai et de Rurutu souhaitentappliquer le rahui sur les bénitiers, mais cette demanden’aurait jusque-là pas abouti pour des raisonspolitiques, économiques ou sociales. D’après nosinterlocuteurs, le clivage politique freinerait la mise enplace de nouvelles mesures et l’idée selon laquelle lerahui toucherait les plus démunis qui n’ont pas lesmoyens d’aller pêcher au large, constituerait un autremotif de refus. À Rimatara, c’est la disparition oul’affaiblissement d’instances autrefois présentes qui estévoquée par une habitante :“Il y a un rahui sur les ature mais la population n’a plus de

respect.[…] Quand il y avait le rahui, un pêcheur prévenait le

chef pour décider du rahui et puis on partageait. Aujourd’hui

il n’y a plus de chef.”

Par ailleurs, les perceptions autour de la ressourcemarine aux Australes sont multiples et complexes.Entre le constat d’une diminution du nombre depoissons et une ressource perçue comme illimitée, lapertinence d’un rahui n’est pas toujours reconnue parl’ensemble de la population.

pratiques et usages du milieu marin aux australes

la pêche, entre traditions et modernités

Dans la conception polynésienne du monde, l’Océann’est pas ce qui sépare les peuples, mais ce qui lesrelie. En tant qu’espace d’interactions, il est traversépar de multiples réseaux sociaux et fait partieintégrante du système de représentations despeuples océaniens (Hau’ofa, 1993).Avant l’arrivée des Européens, le marae était “le pivotfondamental du fonctionnement d'une sociétépolynésienne” (Eddowes, 2004: 53). Plusieurs d’entreeux étaient érigés à partir d’une pierre d’un autremarae, dessinant ainsi un vaste réseau de ces édificessacrés à travers l’ensemble de la Polynésie. Selon R.T. Aitken, les différents marae présents à Raivavae,Tubuai, Rurutu et Rimatara ont été construits par Hiroà partir d’une pierre d’un marae de l’île voisine (1930:123). L’existence de ces liens semble encore perdurerdans la tradition orale d’aujourd’hui, ce dont témoignele référent culturel de Raivavae : “Le marae Te Mahara, c’est le marae où a été intronisé Hiro.

[…] Hiro qui était tahu’a (grand prêtre) ici, il a pris le large.

[…] Comme l’île la plus près c’est Tubuai, c’est pour ça

qu’on a des liens familiaux avec Tubuai. […] On retrouve les

mêmes familles, les mêmes terres, les mêmes marae.”

Étroitement liée à la généalogie des habitants,l’histoire de certains marae peut apporter desindications sur les liens familiaux qui existent entreles îles. Les similitudes et connexions entre les quatreîles transparaissent dans les récits mythologiques

issus de la tradition orale ainsi que dans la toponymiedes îles, îlots et passes. Te-hei-poro-‘ura, une passede Tubuai tient son nom d’une embarcation venue deRurutu, et la passe de Rurutu nommée Opupu estassociée à un grand guerrier de Tubuai. Dans latradition orale de Rurutu, il y aurait un Hiro pourchaque île des Australes, qui choisirent Rurutu pourse rassembler, d’où son nom, ruru signifiant seréunir. Les récits retraçant les trajectoires des hérosmythiques et l’histoire des marae suggèrent que les îlesde l’archipel sont reliées entre elles par des histoirescommunes, un passé conjoint, profondément ancrésdans la mémoire collective des habitants. Les Australes entretenaient également des liens avecdes îles d’autres archipels, Raiatea notamment, où setrouve le grand marae Taputapuātea, mais aussi lesîles Cook, les Tuamotu ou les îles Tonga. Toutefois, lesîles Cook et les Australes sont caractérisées par uneimportante proximité, en particulier Rimatara commecela est indiqué lors de nos entretiens. D’après lesétudes archéologiques, l’ensemble insulaire comprisentre Rarotonga et Raivavae forme un espace culturelaux traditions communes, dont les îles Cook du Sudet Rimatara présentent un système économique etsocial identique (Eddowes, 2004). Cet ensemble étaitle lieu de nombreux échanges dont certains perdurentsous d’autres formes encore aujourd’hui.

l’océan, lien entre les îles

des liens ancestraux Rimatara. D’après le ‘ōrero de Rurutu, les îlots Mariafurent découverts par Amaitera’i, qui leur donnaleurs noms. Ils appartiendraient de ce fait à Rurutu.Selon certains écrits, Amaitera’i, fils d’un ari’i deRurutu, a érigé un marae lors de son passage à Maria(Babadzan, 1979; Bambridge, 2009). En 1937, unconflit au sujet de ces îlots donna lieu à un partageentre Rimatara et Rurutu (Bambridge, 2009: 113).Mais les habitants de Rurutu et de Rimatara, selonleurs indications, ont toujours fréquenté ces îlots. Ilss’y rendaient pour le ramassage du coprah, la pêcheet y séchaient le poisson ainsi que les feuilles depandanus. D’après Taiti, successeur pressenti du‘ōrero de Rurutu, ces îlots représentaient une sourcede richesse très importante autant pour les habitantsde Rurutu que pour ceux de Rimatara. Depuis l’arrêtdu bateau qui faisait la liaison, seuls les pêcheurs

munis d’un bateau suffisamment puissant peuvents’y rendre.À propos de l’univers polynésien, B. Rigo préconisaitd’“appréhender le monde visible et invisible commeun vaste champ de circulation, [d’] observer le mondesocial comme un tissu mouvant de réseaux” (2004:127). C’est d’autant plus vrai aux Australes car denombreuses références à la tradition orale, auxhistoires mythologiques, à l’organisation politique etsociale des sociétés anciennes, aux systèmesd’échanges de savoirs et de techniques, et à lagénéalogie qui fonde les systèmes de parenté actuels,sont mobilisées pour évoquer les liens entre les îles.Parmi toutes ces références, l’Océan se place commeun vecteur du lien social, en tant qu’espace decirculation concrète, mais aussi symbolique, àl’échelle de l’archipel et également au-delà.

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Cette étude portant sur les pratiques et lesreprésentations de l’Océan aux Australes nous apermis de mettre au jour les différents systèmes derelations qui lient l’Homme à l’Océan, les îles entreelles et la terre à la mer. En tant que partie intégrantede l’archipel des Australes, l’Océan représente unespace de circulations et de réseaux par lesquelstransitent des liens symboliques relevant du mondedes dieux et des ancêtres, ainsi que les liens deparenté qui en découlent. Considéré comme un lieusacré, l’Océan est omniprésent dans la culture qui lieles différents peuples des îles polynésiennes.L’organisation politique qui prévalait avant le contactavec les Européens était basée sur une sociétéréticulaire où les îles étaient perçues non pas commeune destination, mais comme une étape. Lesbouleversements induits par la colonisation ontmodifié les rapports entre les archipels des Australes

et des îles Cook autrefois très liés, mais des échangesperdurent. Les habitants des Australes continuent depercevoir les autres îles comme de nouvellesopportunités pour étudier, se marier ou travailler.Toutefois ces relations semblent plus complexeslorsqu’il est question de territoires de pêche. Bien queles activités de pêche détiennent un rôle primordialdans la vie sociale, politique et culturelle desinsulaires, l’espace maritime entourant l’île estenchâssé dans des logiques d’interactions etd’appartenances encore assez peu étudiées. Cetteenquête exploratoire ouvre ainsi un vaste champd’étude, à l’image de cet Océan.

conclusion

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bibliographie

Aux Australes, les zones côtières ou lagonaires fontl’objet de toute l’attention des habitants. Considérécomme “un terrain de jeu” à Raivavae et comme un“garde-manger” à Tubuai, le lagon est le lieu denombreux usages, tandis que les activités au large neconcernent que les pêcheurs possédant un potimarara, bateau à moteur pouvant aller jusqu’à dixmiles nautiques, voire plus. À l’intérieur du lagon ouprès des côtes les pêcheurs utilisent des pirogues. Les pêcheurs détiennent un savoir concernant lesendroits où la ressource est abondante. Un pêcheurde Rimatara mentionne un lieu de pêche au large,connu pour être très poissonneux. À Rurutu, cesendroits appelés punai’a sont de véritables garde-mangers pour la population. Le haut-fond Arago,aussi appelé Tinomana, constitue l’un d’entre eux. Lepêcheur professionnel de Rurutu qui a découvert cehaut-fond tenait cette information de son grand-pèrequi lui parlait d’un îlot sur lequel les anciens allaientpêcher. Avec le temps, cet îlot s’est affaissé sous lasurface, mais représente toujours une zone de pêchetrès abondante.La toponymie des lieux situés en mer fait parfoisréférence à des éléments terrestres, tels que troismonts sous-marins situés entre Rurutu et Tubuaiportant les noms des trois montagnes de Rurutu :Manureva, Erai et Taurama. De la même façon, lasaison des baleines est annoncée par la floraison del’Atae, l’arbre aux baleines. L’association d’élémentsde la nature terrestre et marine laisse supposer quele principe de continuité entre la terre et la mer

s’exerce dans les pratiques et dans lesreprésentations de l’espace, comme l’illustre le récitde W. Doom à Tubuai :“Pour se repérer, les pêcheurs se référaient à l’axe, à

l’alignement par rapport à la montagne. […] Le nom de la

montagne change par rapport à où tu es situé dans le lagon.

[…] Chaque axe de montagne appartient à un pêcheur. Celui

qui pêche la langouste ne livre pas son alignement des

montagnes.”

En outre, le rahui tel qu’il s’appliquait lorsque lesdroits d’usage étaient déterminés par le marae, et telqu’il s’applique aujourd’hui dans certaines communes,peut concerner une zone terrestre ainsi que la portionmarine qui lui est associée (Bambridge, 2013). La continuité de l’espace terrestre et marin sepoursuit au-delà du récif pour les usagers de la hautemer. Cependant, le périmètre marin qui entoure l’îleest ouvertement revendiqué par ses habitants. Eneffet, les bateaux extérieurs à l’île sont mal perçus etsoupçonnés de pêcher en toute impunité, bien quel’ensemble de la ZEE (l’archipel des Australescompris) soit ouvert à tous les pêcheurs polynésiens.Un pêcheur de Rurutu nous a fait part de quelquesanecdotes illustrant l’hostilité des pêcheurs deRaivavae et de Tubuai lorsqu’il passe dans “leurszones”. Si cette perception de la frange de haute merentourant l’île comme lui étant directement associéen’a aucune valeur juridique, elle est présente dansles représentations de l’espace maritime despopulations locales.

espaces et territorialités

Selon les anciens de Rurutu, l’abondance de laressource est étroitement liée aux “bonnes pratiques”perpétuées par les pêcheurs. D’après le ‘ōrero, l’unionest un principe fondamental de la pêche. Un pêcheurseul aura une moins bonne pêche que s’il part engroupe. Il souligne également qu’un pêcheur animé parde bonnes intentions (nourrir la famille, partager lepoisson) aura plus de poissons que s’il le vend pours’enrichir. Au sujet de l’importance de la dimensioncollective, Taiti poursuit : “Il y a un lien fort entre l’Homme et la mer, les poissons

s’offrent en sacrifice à l’Homme pour qu’il puisse vivre. […] Le

non-respect de cette coutume ne fait qu’emmener l’Homme

à sa perdition. L’union de la population fait sa force, c’est la

clé pour ouvrir les portes de l’Océan.”

L’utilisation de nouvelles techniques de pêche estégalement évoquée pour illustrer la rupture du lien à latradition et, de ce fait, aux espèces marines. Un anciende Rurutu décrit: “Pour la pêche traditionnelle, on utilisait des produits naturels

pour s’éclairer, ça attirait le poisson. Avec les technologies

modernes, les lampes font fuir le poisson.”

En tant qu’activité autrefois marquée par uneimportante cohésion sociale, la pêche est une pratiquequi s’est peu à peu transformée du fait de lamodification des techniques et du rapport au milieumarin. Cependant ces transformations n’ont pas atteintcertains systèmes de gestion traditionnels, tels que lerahui, bien que le contexte politique, économique etsocial joue un rôle primordial dans sa mise en place.

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expédition sur les pratiques culturelles et representations de l’océanAUX AUSTRALES

Entretien à Avera, Rurutu.

© Timiri Opuu

Hameçon pi’i présenté par Nahuma Tavita, Rurutu.

© Donatien Tanret

Marae Vitaria à Rurutu.

© GIE Tahiti Tourisme, Don Travers

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Une expédition sur le thème de la culture a étéréalisée en octobre 2014 à Rimatara, Rurutu,Raivavae et Tubuai par une équipe d’anthropologuesde l’Institut de Recherche pour le Développement,du Service de la Culture et du Patrimoine dePolynésie française, du CRIOBE-IRCP et de PewPolynésie française. Cette expédition avait pourobjectif d’étudier les pratiques culturelles et lesreprésentations de l’Océan des habitants desAustrales.

Les anthropologues ont effectué des entretienssemi-directifs et ouverts en langue tahitienne etfrançaise, auprès de personnes issues de milieuxvariés, pêcheurs, représentants municipaux,membres du secteur environnemental et culturel,afin de saisir les différents points de vue, lespratiques et les usages liés à l’Océan. Les entretiensont été enregistrés puis retranscrits et analysés. Lesanthropologues ont également participé à desréunions publiques et aux « journées de l’océan»organisées par les mairies des Australes enpartenariat avec Pew. Les résultats de cettemission ont été complétés par des recherchesbibliographiques aux archives du Service de laCulture et du Patrimoine sur le contexte historiqueet socio-culturel des Australes.

Malgré le vaste territoire océanique qui séparent lescinq îles des Australes, Rimatara, Rurutu, Tubuai,Raivavae et Rapa entretiennent d’étroites relationsqui font de l’archipel un espace traversé par des lienssolides et anciens. Considéré comme un lieu sacré,l’Océan est omniprésent dans la culturepolynésienne et tient une place essentielle dans lesrelations entre les îles Australes. La conceptionancestrale de l’Océan correspond à un grand espacede voies maritimes reliant les peuples, par deschemins d’étoiles guidant les navigateurs. Ces liensentre les îles transparaissent aujourd’hui dans lesrécits mythologiques issus de la tradition orale ainsi

que dans la toponymie des îles, îlots et passes. Lesespèces emblématiques (tortue, requin, baleine) sontintégrées aux cosmogonies de telle sorte que lerapport nature-culture aux Australes est pensécomme une relation généalogique.

L’Océan tient un rôle primordial dans la vie sociale,politique et culturelle des habitants des Australes,notamment à travers les activités de pêche.Autrefois marquée par une importante cohésionsociale, la pêche participait à l’organisation socio-politique locale. Malgré la modernisation destechniques et des rapports au milieu marin, ladimension collective de la pratique de la pêche etde la gestion des ressources marines reste ancréedans les mémoires et dans les récits.

Cette expédition culturelle a permis d’exposer lessystèmes de relations ancestraux entre l’Homme etl’Océan et les représentations de l’Océan deshabitants des Australes, complétant ainsi l’étude dupatrimoine culturel marin des îles Australes.

Tamatoa Bambridge CRIOBE

Marlène Dégremont IRD

Entretien avec le ‘ōrero à Rurutu. © Marlène Dégremont

Entretien avec les pêcheurs à Rimatara.© Jérôme Petit

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Pêcheurs de Rapa.

© Jérôme Petit

LE PATRIMOINE CULTUREL MARIN DE RAPA EST TOUT AUSSI REMARQUABLE QUE SON PATRIMOINE NATUREL,

À TRAVERS NOTAMMENT LA PRATIQUE DU RAHUI, RÉTABLI DANS LES ANNÉES 1980.

Avec une population d’environ 500 personnes,Rapa, la plus méridionale des îles Australes,se caractérise par sa localisation, sa forme,son climat, sa végétation, et surtout par sagestion collective des ressources locales etenvironnementales. Sa distance avec lacentralité politique et économique de Tahiti et lapetite fréquence des liaisons maritimes donnentà la population locale une marge de manœuvreimportante, notamment pour définir en sespropres termes la gestion de ses ressourcesnaturelles. Cet article présente le rapportmythique, historique et contemporain desRapa au Grand Océan, les formes de pêche quisont déployées dans l’île et les logiquescoutumières déployées localement pour gérerl’environnement marin.

RAPA DANS LE GRAND OCÉAN

CHRISTIAN GHASARIANUniversité de Neuchâ[email protected]

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Les milieux insulaires du Pacifique conjuguent desspécificités et des similitudes. Il en va ainsi de laPolynésie française au sein du triangle polynésien etdes archipels et des îles de cette entité politique. Lerattachement de cinq îles habitées à ce qui estaujourd’hui appelé « l’archipel des Australes » est unecréation coloniale, décidée par des instancesextérieures – l’État français – sur la base d’unerelative proximité géographique. Ces îles ont reçudans un premier temps la visite des missionnaires etdes navires marchands puis celle des représentantsde la France pour y instaurer des Protectorats etAnnexions. Il en va ainsi de Rapa, la plus méridionaledes îles de la région, dont la population est d’environ500 personnes. Mais si l’histoire et la situationpolitique de cette île l’inscrivent dans des processusqui ne lui sont pas propres, elle se caractérise par salocalisation, sa forme, son climat, sa végétation, etsurtout par sa gestion collective des ressourceslocales et environnementales.

En effet, sa distance avec la centralité politique deTahiti et la petite fréquence des liaisons maritimesdonnent à la population locale une marge demanœuvre importante, notamment pour définir enses propres termes la gestion de ses ressourcesnaturelles. Deux institutions coutumières, le Toohituou Conseil des Sages et le Tōmite rāhui ou Comitédes pêches, gèrent les terres et la mer et sontvéritablement fondamentales dans l’île (la secondequi met en place un système de gestion contrôlée desressources marine – le rāhui – faisant l’objet d’unautre article dans cet ouvrage). Après avoirmentionné le rapport mythique, historique etcontemporain des Rapa au Grand Océan, je mepenche ici sur la seconde institution en soulignant leslogiques coutumières déployées localement pourgérer l’environnement marin.

introduction

Une légende à Rapa relate le voyage initial de cinqfrères entre les îles de cet archipel, chacun d’entreeux découvrant tour à tour une autre île pluséloignée. Ces frères nageaient dans l’Océan à larecherche d’une terre habitable. Après un moment,en provenance d’un lieu non défini (maislogiquement de l’ouest), ils arrivèrent à Rimatara,première île des Australes, à l’extrême ouest del’Archipel. L’un d’eux souhaita y rester. Les quatreautres décidèrent de poursuivre leur voyage versl’est. Ils reprirent leur nage et arrivèrent sur lesrivages d’une autre île, Rurutu. L’un des frères yresta tandis que les trois autres décidèrent depoursuivre leur chemin. Ils nagèrent plus loin à l’estet découvrirent Tubuai. À nouveau, l’un d’eux décidad’y rester et les deux derniers frères poursuivirentleur nage à l’est. Ils trouvèrent Raivavae et l’und’eux y resta. Le dernier des frères reparti seul, endirection du sud-est. Il nagea longtemps, troisfois plus que les nages précédentes entre les îles,et trouva la cinquième île et la plus isolée desAustrales : Rapa. Ce récit mythique del’implantation humaine dans les cinq îles, quicommence et s’arrête à l’arrivée du premier hommemais ne dit pas comment la population s’ydéveloppa ensuite, est marqué par un symbolismemettant en jeu le voyage en mer vers l’inconnu, lecourage, l’effort physique, la solidarité et laséparation d’avec les proches à travers l’optionindividuelle du départ. Il parle aussi d’unerépartition équitable des terres habitables, d’uneaction commune pour un but collectif et, une foiscelui-ci réalisé, d’une prise en charge personnellede son destin (Ghasarian, 2014a).Au niveau mythologique, les informateurs d’EugèneCaillot (en 1912) et de John Stokes (en 1922)s’accordent pour dire que tous les Rapadescendaient d’un « premier homme» nommé Tiki,qui épousa une femme de l’île ; un thème assezcommun en Polynésie. Du point de vuearchéologique, les quelques recherches menées àRapa s’accordent par contre en gros sur la définitiond’un peuplement de l’île vers le début du secondmillénaire. Jérôme Walczak trouva par exemple desévidences d’établissements humains entre 1150 et1250 (grotte de Tangarutu, dans la baie de Anarua),et entre 1350 et 1450 dans d’autres lieux (Ankatanui,Angairao, Taga) (2002). D’autres archéologues

suggèrent également que la période la plusprobable d’établissement humain dans l’île fut leXIIe siècle, une période de colonisation quiconcorde avec celle de la dispersion humaineinitiale en Polynésie orientale (Anderson &Kennett, 2012).Les données dont on dispose ne permettent pasd’affirmer avec certitude l’origine de la populationqui a peuplé Rapa. Le langage ancien dans cette îleest toutefois proche de celui de Mangareva et deRapa Nui (Caillot, 1932), mais il peut être envisagécomme tout aussi proche de celui des Tuamotu, desMarquises et de la Nouvelle Zélande, autant delangues polynésiennes qui appartiennent à lafamille austronésienne qui (à l’exception del’Australie) s’étend sur toute l’Océanie (Stokes,1930). Il semble que l’isolement géographique del’île ait longtemps limité les contacts des insulairesavec le monde extérieur – tout au moins avec lesnon polynésien-ne-s avant le contact européen.Mais rien n’indique que cet isolement océanique aitimpliqué un isolat social permanent. À l’instar desautres îles de la Polynésie, des circulations mêmeslimitées s’opéraient sans aucun doute entre Rapa etd’autres îles, comme en témoigne aujourd’huiencore à l’entrée d’un Marae de Maupiti (îles de laSociété) une inscription du passage dans cette îled’un roi de Rapa. Ces circulations et interactionspeuvent ainsi expliquer le sentiment qu’a eu GeorgeVancouver, le premier navigateur européen déclaréà s’approcher de l’île, que les insulairesconnaissaient déjà l’usage du fer (probablementdepuis les premiers contacts européens avec Tahitien 1767). Lors de son passage à Rapa en 1826, lemissionnaire John Davies rapporte toutefois (1829)que les insulaires ne sont pas habitués à voir desnavires passer chez eux et que le dernier étrangerarrivé dans l’île s’appelait «Mapuagau» et venait deMangareva.Une fois à terre, je demandai diligemment aux plus

intelligents des indigènes si, à leur connaissance, un

quelconque vaisseau (navire) était véritablement venu à

Rapa, avant le Snapper et le Minerva, et ils dirent tous

kare (non). Ils avaient vu des navires (qu’ils appellent

mikimiki) passant de temps à autre, d’après eux plus de

dix, mais aucun n’était venu ici avant le Snapper. Ils

étaient, à ces occasions, tous matagu, (craintifs). Le seul

étranger connu d’eux était un homme qui avait dérivé

migration et peuplement

Course de va’a organisée lors de la journée de l’océan à Rurutu, 2014.© Jérôme Petit

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le mārara, poisson volant (exocet) qui est aussiconsommé très souvent. La pêche au mārara a lieude mai et octobre, lorsque ces poissons viennentpondre leurs œufs autour de l’île et sont donc la proieplus facile des prédateurs marins et humains. Cepoisson appât est pêché de nuit en principe à deux, unhomme conduisant le bateau à moteur et suivant lesbancs, l’autre qui les détecte avec sa lampe et lescapture avec son épuisette. Si auparavant la pêche aularge se faisait en groupe dans des baleinières, ledéveloppement de l’individualisme dans l’île fait qu’ilest désormais nécessaire de posséder son proprebateau ou d’accompagner quelqu’un qui en possèdeun pour procéder à celle-ci. Les langoustes sont connues pour être en profusionà Rapa. Elles sont pêchées par les hommes durantles plongées sous-marine tandis que les oursins lesont avec l’aide d’une caisse en bois avec un verre(âfata hiò) – un accessoire aussi utilisé lors de lapêche à la ligne pour tirer d’un coup sec la lignelorsque l’on voit le poisson accrocher l’hameçon – etd’un harpon (pātia) à 3, 5, 7 ou 9 pointes. Si leslangoustes sont parfois envoyées dans des glacièresaux apparenté-e-s résidant à Tahiti, elles sontlocalement surtout prisées comme appât, notammentpour le karamami et le nanue. Elles sont aussipêchées la nuit avec une lampe et un harpon, mais leplus souvent, les pêcheurs les capturent à la main etau fusil sous-marin avec l’aide d’une lampe torchelors de leurs plongées en apnée. Il existe égalementdes « trous à langoustes » (âpoo kōura) que certainspêcheurs connaissent. Les plus audacieux s’engagentdans des grottes naturelles en mer au pied desfalaises, que des aînés leur ont montré, dont l’entréeest sous la mer. La plongée s’opère en deux temps carils reprennent leur souffle dans un petit trou d’air,replongent et arrivent dans un second trou où ilspeuvent respirer hors de l’eau et où les langoustessont en profusion.La localisation en mer des points de pêche (commeun pâté de corail) par les pêcheurs se fait enregardant et mémorisant des points naturels (rocher,une montagne, etc.) sur l’île et en plaçant le bateau àl’endroit (l’angle) précis ou au moins deux signes sontvisibles. Les oiseaux marins signalent aussi souventles bancs de poissons aux pêcheurs. Dernièrement,certains pêcheurs font usage du GPS qui estnotamment utile lorsque la visibilité est mauvaise.Pour pêcher efficacement, il est aussi importantd’être attentif aux différents états de la nature, c’estpourquoi ceux-ci sont définis avec précision dans la

langue rapa. Les pluies fréquentes ont ainsi plusieursappellations : Konoù tōpatapata ou konoù touauà,lorsqu’elle commence ; Konoù tōriirii lorsqu’elle estdouce ; Vero ua ou ua puaai te ua) lorsqu’elle est forte.Les Rapa distinguent par ailleurs plusieurs états dela mer, qui leur indiquent s’ils peuvent pêcher – et cequ’ils peuvent pêcher. Parmi ceux-ci : Mania : mertrès calme avec aucune vague montant sur lesrochers (parfois qualifiée de “mer d’huile” enfrançais) ; Karamate rupa : mer calme mais avec unelongue houle et vagues montant sur les rochers ;Karekare : mer agitée qui commence à faire des creuxet frappant sur les rochers.Un principe moral des pêcheurs à Rapa vis-à-vis dela mer est de la respecter. Une légende décritd’ailleurs les mésaventures d’un pêcheur quis’impatientait avec les vagues qui l’empêchaient debien voir ses proies dans l’eau. Suite à ses insultesenvers l’élément marin, il fut emporté par une vaguegéante dans un lieu aujourd’hui qui porte son nom :Pakarari (Make, Ghasarian & Oitokia, 2008).

Si la faune terrestre ne fait pas l’objet d’un grandinvestissement en matière alimentaire, ce n’est pasle cas de la mer qui constitue une ressourcealimentaire majeure dans la vie des Rapa. D’une façongénérale, la pêche est une des activités les plusprisées par les hommes de Rapa toutes classe d’âgeconfondues. Outre le plaisir gustatif (conduisantparfois à manger le poisson vivant et à pleines dents),la pêche est un travail-loisir-plaisir, ainsi qu’un sujetde conversation privilégié entre les hommes. Leproduit de cette sphère d’activité principalementmasculine est surtout consommé dans l’île mais il faitaussi l’objet de ventes ou d’échanges à Papeete grâceaux possibilités de congélation mises en place il y aplusieurs décennies et aux liaisons établies par lescargos. Comme pour la terre avec le Conseil desSages, un système collectif de gestion de la mer a étémis en place. Mais celui-ci n’empêche pas uninvestissement prioritairement personnel et/oufamilial dans cette activité, pour peu que les règlesd’usage générales soient respectées.La faune marine est variée à Rapa. Des baleinespassent parfois à côté des bateaux de pêche ou seperdent un moment dans la baie d’Ahurei. On sesouvient aussi de l’apparition, il y a un peu plus d’unedizaine d’années, d’un phoque qui fut entretenuplusieurs semaines par les insulaires dans la baied’Ahurei. L’absence de barrière de corail oblige lespêcheurs à plonger dans l’océan mais le potentielhalieutique de Rapa reste important, même si lapêche reste artisanale. Outre la plonge, il y a troistypes de pêche à Rapa : la pêche littorale, la pêche

côtière et la pêche au large. La pêche littorale porte sur les coquillages (mitata),les crustacés, les algues, les vers et les mollusques,et est surtout effectuée par les femmes. Les poissonspêchés et consommés à Rapa peuvent être répartisen différentes familles : les perroquets (komokomo,euhu, mamaringa, para, roro, pahoro, paati) ; leschirurgiens (maamaa) ; les dorades (karamami,nanue, pakavai, eume, Mahimahi) ; les mérous ouloches (Apuku, haroa, tarao, rārī) ; les rougets (iihi,kopa) ; les barracudas (ono, tazard ou ngana enrapa) ; les carangues (paihere, eurupiti, matu,kotumu, maaki) ; les mulets (kiamo, auarere, kanae,eututu) ; la bonite (àuhopu, kopiropiro, ahore). La pêche côtière, à la ligne de fond ou en plongée,concerne quant à elle des poissons plus petits telsque le komokomo ou euhu, le maamaa, le karamamiet le nanue, deux poissons notamment pêchés lors del’ouverture du rāhui. Pendant longtemps, la pêchecôtière s’est faite avec la baleinière (poti pamuera),embarcation à fond plat, assez sûre et très adaptéeaux conditions de navigabilité locale (mer forte àagitée, déferlantes et battantes). Ces baleinières, quiavaient à l’origine des rames fines, sont désormaispropulsées par des moteurs qui permettent de fairele tour de l’île en 4h.La pêche hauturière, à la ligne de fond, concernesurtout le thon (eikai en rapa, aahi en tahitien), le fauxsaumon (paipai), la bonite (àuhopu), la dorade(mahimahi), le faux saumon (maaki) et le thazard(ngana) et parfois l’espadon (haùrā). Cette pêche sefait notamment avec un autre poisson comme appât,

l’espace marin comme ressource collective

jusqu’à leur rivage, il y a longtemps déjà. Quand il arriva

à terre, il était presque mort, ses compagnons étaient

morts de faim en mer alors qu’ils voulaient atteindre une

autre île, et lui-même était épuisé, ayant longtemps

dérivé en mer avec des vents contraires. Le nom de cet

homme était Mapuagau, et son pays est appelé

Manganeva [Mangareva]. Il mourut juste avant notre

arrivée. Hota et Nene l’avait vu. Il était vieux et faible. Il

leur dit qu’il était depuis longtemps à Rapa, que les gens

avaient été gentils avec lui, mais qu’il voulait retourner

dans son pays natal avant sa mort. Il voulait que le navire

l’emmène, disant, que Manganeva était « tei te pae au

Mangarai, », soit dans le quartier du vent de sud-est

(Davies, 1829).

Les contacts qui commencent à s’établir alors àdomicile avec les Européens de passage, qu’ilssoient missionnaires ou marchands, favorisent lamobilité individuelle des Rapa et leurs sortiesdurables ou permanentes de l’île. En 1843, EdwardLucett, négociant et marchand de perles anglaisinstallé à Tahiti, passe à son tour Rapa pour yrecruter des plongeurs et les amener aux Tuamotu.D’autres hommes commencent aussi à êtreembauchés comme marins sur les navires depassage. Ces contacts sont porteurs de germes etd’épidémies qui vont vite décimer une très grandepartie de la population insulaire.

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insulaires à travers la pêche, il marque l’horizonextra-insulaire de l’ailleurs avec son autre champ-des-possibles, et il met en jeu, à divers moments dela vie de chacun-e, une trans-insularité nécessairepour sortir et revenir dans l’île (Ghasarian, 2014b). Un exemple parmi d’autres de gestion du foncier etd’usage protectionniste et durable des ressourcesmarines, le système communautaire mis en place àRapa offre une sécurité pour les insulaires et leursdescendant-e-s. Au moment où des crisesidéologiques, institutionnelles, économiques etécologiques frappent un nombre croissant desociétés à travers le monde, une île oubliée d’unarchipel mineur de la Polynésie, avec unepopulation réduite, offre un modèle du vivreensemble en valorisant l’intérêt collectif, un intérêtconstamment évoqué dans les réunions et prises deparoles en public (korero) car il toujours àconstruire.

Outre les moyens de transports (par cargos mixtestous les deux mois environ), les nouvellestechnologies de la communication (radio, télévision,Internet) qui se sont développées ces dernièresannées permettent aux Rapa d’accéder à desinformations « à domicile » tout en restantphysiquement « en retrait » du monde global. Cetisolat géographique n’est ainsi plus – s’il l’a jamaisété – un isolat idéel et social. Le monde peut ainsiêtre observé en étant oublié de celui-ci. Loin d’êtrevécu comme un manque, cette situation dedécentrement vis-à-vis d’un monde global perçucomme quelque peu inquiétant engendre l’idéepartagée par la très grande majorité de lapopulation de vouloir préserver l’île de l’arrivée nonplus virtuelle mais physique de ce monde dansl’espace quotidien ; un sentiment amplifié par ledrame du World trade center diffusé à Rapa via latélévision locale. De fait, le thème de la protectionde l’île face aux interférences extérieure estaujourd’hui fondamental dans la représentation parla communauté locale de sa propre centralitémondiale. Ce protectionnisme vient de l’idée que lesmaladies et les menaces sur la quiétude de la vieinsulaire viennent toujours de l’extérieur de l’île. Eneffet, si l’arrivée des bateaux signifie le retourattendu de proches et l’approvisionnement en objetsde consommation désormais nécessaires, elle estaussi associée à l’apparition de maladies. Il estconsidéré à Rapa que la présence à bord d’unporteur de germe engendre des réactions enchaine dans l’île. Si les maladies attrapéesaujourd’hui ne sont plus mortelles, l’arrivée debateaux continue néanmoins à engendrer dessentiments ambivalents.C’est dans ce dualisme menace/protection que s’estposé il y a quelques années la question (déjàplusieurs fois évoquée) de construire ou non unaéroport dans l’île ; un projet proposé alors avec unecertaine insistance par le gouvernement territorialqui considérait sa réalisation comme indispensableau désenclavement de l’île et en cas d’évacuationssanitaires. Aujourd’hui la grande majorité des Rapaqui résident dans l’île ne veulent pas d’aéroport. Siles Rapa sont tous d’accord sur l’importance depouvoir faire des évacuations sanitaires d’urgencesi nécessaire, l’aéroport constitue clairement unseuil critique dans la représentation et la gestion de

l’île. La très grande majorité estime qu’avec sonapparition plus rien ne serait pareil. Une dimensionsélective dans l’appréhension des nouvellestechnologies est ici en jeu. L’enjeu protectionnistelocal est d’assimiler les interférences extérieures,au potentiel perturbateur, en la contrôlant – et lacirculation par la mer, qui prend plusieurs joursdans des conditions pénibles, semble plusappropriées pour ce contrôle.Dans les représentations locales, les menacesportées sur l’île et ses intérêts, à travers sa terre etson espace marin, peuvent aussi provenir demaladresses ou d’inconsciences initiées del’intérieur. Je prends ici le cas de l’extraction de cequi est localement appelé la “soupe de corail” (lesdébris de coraux sur le littoral) qui fut lancée il y aquelques décennies par le maire d’alors, aussi chefde l’équipement. Estimant qu’à terme cela poserades problèmes à toute la baie (pour la pêche àtravers la destruction de l’habitat de la faunemarine, etc.) le Conseil des Sages a mis il y aquelques années un terme à cette extraction. Il n’endemeure pas moins que pour certain-e-s insulaires,l’apparition récente de la ciguatera dans l’île seraitdue à ces travaux dans la baie qui auraient détruitle corail et donc le fragile écosystème marin.La structuration du régime foncier et l’usage desressources marines sont largement sous-tenduspar la référence aux ancêtres (tupuna), aux modèlesd’actions qu’ils et elles ont laissés et à leurcontinuelle présence dans les consciences de leursdescendant-e-s. Cette référence implique un sensdu collectif et c’est aussi pourquoi lesinvestissements communs sont fortement valorisésà Rapa. Il est d’ailleurs possible d’affirmer que,sous ses diverses formes et à travers ses différentsenjeux, la communauté insulaire et extra-insulaireconstitue une extension routinière et sécurisante dela personne ; une extension qui dépasse d’ailleursle monde des vivant-e-s. Tout comme les espacesfamiliaux et ceux des ramages, l’espacecommunautaire met en jeu des réseaux sociauxfluides et mobilisés par les individus dans dessituations précises pour des finalités concrètes, quisous-tendent des circulations d’objets et desréciprocités de services. Il en va ainsi de l’espacemarin dont la géométrie est variable du point de vuedes insulaires : il offre un monde de ressources

logiques coutumières dans le contexte global

Journée de l’océan à Rapa, 2014.© Jérôme Petit

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Poti marara dans la baie de Ahurei, zone de rahui.

© Jérôme Petit

LE RAHUI DE RAPA EST UN MODÈLE DE GESTION COMMUNAUTAIRE EFFICACE POUR EXPLOITER DURABLEMENT LES

RESSOURCES MARINES DE L’ÎLE.

Le rahui dans la culture polynésienne s’inscrit dansune dimension politico-religieuse. Il se traduitnotamment par une sorte de jachère spatio-temporelle qui peut être placée sur la terre ou surla mer pour gérer durablement et collectivementles ressources naturelles d’une île. À Rapa, un rahuimarin a été réintroduit par la mairie en 1984 etest encore pratiqué aujourd’hui. Il comprend unensemble de mesures de protection appliquées surtoute l’île, avec des restrictions plus fortes dans unezone spécifique appelée la zone rahui. Il est gérépar le Tomité rahui, un comité élu de manièredémocratique par la population. La zone rahui estouverte de une à deux fois par an, pour une pêchecollective et un partage de la récolte avecl’ensemble de la population. Après des débutsrelativement difficiles, le rahui de Rapa estmaintenant bien compris par la population etrespecté par les pêcheurs. Même s’il n’est pas toutà fait fidèle au concept du rahui historique, il estmalgré tout solidement ancré dans la culturetraditionnelle polynésienne, et c’est sans doute unedes raisons pour laquelle il est si efficace pourgérer collectivement et durablement les ressourcesmarines de l’île.

LE RAHUI À RAPA : UNE MESURE DE PRÉSERVATION COMMUNAUTAIRE DES RESSOURCES MARINES

JÉRÔME PETIT Directeur The Pew Charitable Trusts - Polynésie française [email protected]

POEMA DU PREL The Pew Charitable Trusts - Polynésie française [email protected]

TIFFANY LAITAME Association Raumatariki Rapa [email protected]

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Le rahui est un mode de gestion traditionnelcommunautaire des ressources naturelles observédans l’ensemble du triangle polynésien (Bambridge2015). À Rapa, au Sud de l’archipel des Australes,depuis une trentaine d’année, la mairie a rétabli cettepratique qui représente un cas unique de rahuicontemporain, aux racines solidement ancrées dansla culture traditionnelle. Le rahui de Rapa a étérelativement peu documenté à ce jour alors qu’il offreun exemple intéressant d’aménagement du rahuitraditionnel pour la mise en place d’un mécanismede gestion durable des ressources marines d’uneîle. Cet article vise à décrire le concept du rahui àRapa tel qu’il est pratiqué aujourd’hui, en analysantl’historique de son rétablissement, les mesures qu’ilcomprend, sa gouvernance et son efficacité observée.

L’article se base sur des données collectées à Rapaau cours d’une expédition pluridisciplinaire organiséepar la National Geographic Society en partenariatavec The Pew Charitable Trusts, du 15 octobre au 2novembre 2014. Plus de 50 entretiens semi-directifs,comprenant des questions ouvertes, ont été réalisésauprès des pêcheurs, du «Tomite rahui », du conseildes sages «To’ohitu», du conseil municipal, desreprésentants des confessions religieuses, desassociations et d’autres autorités morales de Rapa.La plupart des entretiens ont été réalisés en langueRapa ou en langue tahitienne et beaucoup ont étéfilmés. En particulier, un riche entretien avec LionelWatanabe, ancien maire de Rapa, a permis de retraceravec précision l’historique et les raisons du retour durahui que la commune a rétabli dans cette île.

introduction

Le rahui est un terme que l’on retrouve dans tout letriangle polynésien, à quelques infimes nuancesphonétiques près, notamment aux îles Samoa, àHawaii, aux Marquises, aux Tuamotus, à Mangareva,aux Australes, en Nouvelle Zélande, etc. (Rigo 2012).Dans la culture polynésienne, le rahui est une sous-catégorie du « tapu » ou d’interdiction pour restreindrel'utilisation d’une zone ou d'une ressource (Barlow1994). C’est une sorte de jachère spatio-temporelle quipeut être placée sur la terre, la mer, les rivières, lesforêts, les jardins, les zones de pêche ou sur d'autresressources alimentaires et qui constitue l’un desaspects les plus importants de la gestion coutumièredes ressources (Kawharu 2000).

Traditionnellement, un rahui pouvait être placé sur unecertaine ressource pour la réserver à un usageparticulier (Taylor 1974 ; Best 1942 ; Barlow 1991). Parexemple, certains arbres étaient préservés pour laconstruction de canots ou pour la sculpture (Kawharu2000). Certains buissons de lin étaient mis de côté pourle tissage spécial d'un manteau de chef (Barlow 1994).D’autres rahui étaient placés sur certaines espècespour planifier une récolte communautaire déterminée,ou pour assurer une disponibilité de nourriture destinéeà une réunion tribale importante (Barlow 1994). Lerahui pouvait également qualifier un lieu bien défini ;par exemple, aux Tuamotu pendant le XIXe siècle : «onallait au rahui », sous-entendu dans la zone de rahui(Service de la culture de Polynésie française 2013).Certaines zones étaient placées sous rahui pour êtrelaissées en jachère ou en réserve intégrale afin queleurs ressources puissent se régénérer (Barlow1994). Le rahui traditionnel était parfois rotatif,particulièrement pour les rahui marins qui étaientouverts alternativement en fonction de la saison et descycles de régénération des espèces (Orakei 1868). Ilétait souvent temporel, il était appliqué pendant unepériode limitée pour permettre la maturation d’un fruitou la reproduction d’une espèce (Bambridge 2015).

Aux temps anciens, la raison principale de l’impositiond’un rahui était souvent politique ou religieuse. Elle étaitaussi probablement dû à un besoin perçu par lacommunauté de conserver et exploiter durablementleurs ressources alimentaires dans des systèmesinsulaires aux ressources limitées et avec une densité

de population parfois importante. Un rahui pouvait aussiêtre placé dans une zone particulière en état d’interditou tapu, pour respecter, par exemple, un défuntrécemment décédé dans la région (Kawharu 2000). Lerahui était un concept instauré par un pouvoir sacré ;son autorité était respectée par le «mana», ou lepouvoir, de la personne ou du groupe qui l'imposait. Lerahui était sans doute une des fonctions les plusimportantes d’un chef à la tête d’un groupe de parentéafin d’asseoir une suprématie sociale ou politique(Oliver 1974). Parfois, un symbole physique, comme unpoteau en bois sculpté, pouvait être affiché pourmontrer qu'un rahui était imposé. Bien souvent, lescaractéristiques naturelles du paysage indiquaientégalement les limites de la zone qui était sousrestriction (Barlow 1994).

Après l’arrivée des occidentaux en Polynésie, le rahuia progressivement été délaissé en raison du contactavec les missionnaires (Bambridge 2015) maisaussi probablement par la perte du mode de viecommunautaire des îles. Mais le rahui persiste encoreaujourd’hui, ou a été rétabli, dans certaines îles dePolynésie, et notamment à Rapa et à Maiao enPolynésie française. Certaines formes de rahui sontégalement présentes dans d’autres îles, comme parexemple le rahui spécifique pratiqué pour les poissonsature à Rurutu et Rimatara, où des feuilles de cocotiersont disposées sur le quai quand la pêche n’est pasencore ouverte. Par ailleurs, le concept du rahui a étéparfois réutilisé par les services publics de différentspays du Pacifique pour mettre en place une mesurede protection des ressources basée sur la culturetraditionnelle. Par exemple, en Nouvelle-Zélande et auxîles Cook, les gouvernements ont remis en place desrahui temporaire sur certaines espèces de poissons.En Polynésie française, la Direction des RessourcesMarines (DRM) a repris le concept du rahui pourassurer la protection de certaines espèces de poissons,mollusques et crustacés (chevrette, crabe vert, perchenato, bénitier, burgau, troca, cigale de mer, langouste,squille, etc.) en règlementant la taille minimale desprises pour ces espèces (DRM 2013). De même, à lapresqu’île de Tahiti, un rahui a été récemment rétabli,à la demande des populations locales, pour uneinterdiction partielle des prélèvements sur une étenduemarine de 700 hectares (Bambridge 2013).

le(s) rahui (s) de la tradition polynésienne à nos jours

FIGURE 1Carte de l’historique des zones de rahui à Rapa de 1984 à 2014 (modifiée de Ghasarian 2014).

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À Rapa, la pratique du rahui remonte aux tempsanciens, mais il est difficile de retracer commentce système fonctionnait à l’époque préchrétienne(Ghasarian 2014). Des interdits existaient enmatière de pêche, mais ils ne concernaient pas lapopulation dans son ensemble. Chaque valléepossédait son rivage et la partie de mer qui étaiten face appartenait aux habitants de cette vallée.Ce n’était qu’au large que la pêche étaitprobablement permise à tout le monde (Caillot,1932), bien que l’on ne sache pas de quellechefferie relevait les îlots de Marotiri. À cetteépoque, la pêche était pratiquée principalementdans des parcs à poissons en forme d’entonnoirappelés « pa ». Chaque clan avait son « pa » et ilétait interdit d’aller pêcher dans le « pa » du clanvoisin sous peine de guerre. Cet accès limité àquelques personnes autorisées était déjà unecertaine forme de rahui (L. Watanabe, com. pers.2014). Les « pa » se sont perdus avec l’arrivée desmoyens de pêche moderne et les pierres desanciens « pa » de la baie d’Ahurei ont été utiliséespour construire le quai. Certains anciens « pa »existent encore dans la baie de Hiri mais ils ne sontplus utilisés (L. Watanabe, com. pers. 2014).

Plus récemment et jusque dans les années 1970,un rahui était appliqué pour réguler l’exploitationde certaines espèces animales et végétales. Parexemple, la collecte des crabes noirs appelés« pari papa’a » étaient interdite par un rahui danscertaines zones pendant la période de gestation,car les femelles pleines sont très lentes et facilesà attraper (L. Watanabe, com. pers. 2014). Demême, une variété de taro appelée « apura »,poussant en bas des falaises, était protégée par unrahui pour une récolte communautaire en périodede disette (O. Riaria com. pers. 2014). Un rahuiétait également posé sur certains orangers pourque seules les familles les ayant plantées puissenten récolter les fruits (P. Narii, com. pers. 2014). Unrahui protégeait les œufs et les jeunes oiseaux del’espèce « kea » (Pterodroma neglecta, Pétrel deKermadec) qui étaient mangés en mars, justeavant de prendre leur envol (J. Faraire, com. pers.2014). Enfin, un rahui protégeait également lesfougères arborescentes dont le cœur était mangé

uniquement en période de disette. L’ensemble deces rahui traditionnels était placés et levés par leschefs de vallée légitimes, puis par le « To’ohitu »,le conseil des sages de l’île, de manière plusrécente. Il n’existait pas alors de comité rahuispécifique (L. Watanabe, com. pers. 2014). C’est seulement en 1984 que le rahui marin deRapa, actuellement en place, a été créé ou rétablipar l’ancien maire de l’île Lionel Watanabe. Eneffet, dans les années 1970 et au début des années1980, les pêcheurs de l’île ont remarqué que lespoissons de Rapa étaient de moins en moinsnombreux et de plus en plus petits. Les étudiantsde Rapa revenaient de Tahiti avec de nouvellestechniques de pêche comme la pêche au filet, lapêche au fusil, la pêche de nuit et la pêche enbateau à moteurs, des techniques qui n’étaientjusque-là pas pratiquées par la population. Cesnouvelles méthodes ont entrainé une pressionsans précédent sur les ressources locales. SelonLionel Watanabe, les filets ont entrainé la quasi-disparition des mulets « operu » (Decapterus sp.,famille des carangues) dans la baie alors qu’ilsétaient très nombreux jusqu’alors. Il précise que« les pêcheurs ramenaient tous les poissons de labaie sur la plage et remplissaient des sacs qu’ilsdevaient jeter par la suite tellement ils étaientpleins ». De plus, le progrès technologique aégalement entrainé l’arrivée à Rapa descongélateurs qui, d’après Tua Narii, l’actuel mairede Rapa, ont complètement changé la manière depêcher : « avant les gens pêchaient le matin cequ’ils mangeaient le soir et distribuaient le surplusde poisson ; mais après l’arrivée du congélateur,ils ont pu commencer à stocker ». C’est donc laprise de conscience collective d’une diminution desressources marines, liée à l’arrivée de techniquesmodernes, qui a encouragé la population de l’île àrétablir un rahui marin pour sécuriser l’autonomiealimentaire de l’île (Ghasarian 2014).

Un autre élément ayant déclenché lerétablissement du rahui à Rapa, fût un voyage queLionel Watanabe a fait à Hawaii en 1984 avecl’Association des Maires de Polynésie française. Ileut l’opportunité de visiter une réserve marinedans la baie de Hanauma à Honolulu et constata

historique du rahui à rapa

que les poissons dans cette zone avaient unedensité exceptionnelle. Dès lors, il décida de faireun essai de « réserve » basé sur ce modèleextérieur pour résoudre le problème de diminutiondes ressources observé dans son île, en reprenantle concept de rahui traditionnel. Il voulait alorsinterdire toute pêche dans la baie d’Ahurei, unezone de frayage principale des poissons, pourfavoriser leur reproduction et permettre leurexploitation durable sur le reste de l’île. Lesdiscussions avec les pêcheurs et la population ontété très difficiles, selon Lionel Watanabe : « tout lemonde râlait ». Le meilleur compromis qui a ététrouvé à l’époque était alors d’interdire seulementla pêche au fusil dans la baie. Et deux ans plustard, suite aux retours positifs de pêcheurs

expérimentés, la zone de rahui a été ouverte unepremière fois pour montrer à la population sonefficacité : « la pêche a été miraculeuse avec despoissons partout sur le quai et la population a bienvu que le rahui fonctionnait ; c’était gagné ». Depuiscette date, le rahui s’est maintenu à Rapa et sonouverture annuelle est devenue une coutumelocale incontournable.

Dans le rahui actuel de Rapa, certaines pratiquessont interdites sur toute l’île et de manièrepermanente tout au long de l’année, il s’agit de lapêche au filet et des cages à langoustes, qui sontconsidérées comme trop « faciles » et donc tropdestructrices pour la ressource. D’autres pratiquessont autorisées sur toute l’île et de manièrepermanente, il s’agit de la pêche à la ligne (àl’hameçon) et la pêche au harpon, qui sontconsidérées comme ayant un impact limité sur laressource. Enfin, la pêche au fusil sous-marin et lapêche de nuit, qui sont les «pratiques préférées despêcheurs de Rapa », sont autorisées à l’Ouest del’île, mais restreintes dans une zone rahui de taillevariable à l’Est de l’île. Dans cette zone, la pêche denuit est interdite en permanence tandis que la pêcheau fusil n’est autorisée qu’une à deux fois par an demanière collective lors de l’ouverture du rahui(« Tomite rahui », com. pers. 2014). La zone rahui a toujours été positionnée à l’Est del’île dans la baie d’Ahurei et aux alentours. Elle a étéchoisie à cet endroit car c’est la zone de frayageprincipale des poissons et c’est aussi la zone la plusfacile à surveiller, devant les villages de l’île.Cependant la taille et les limites de la zone ontchangé au cours de l’histoire du rahui. Lors de la

création du premier rahui en 1984, la zone couvraitla baie de Ahurei et son embouchure seulement,avec sa limite Nord au niveau de la pointe deKogote’emu et sa limite Sud au niveau de l’îlot deRapa iti (cf. Figure 1). En 1988, suite au succès de lapériode d’essai du rahui, sa limite a été étenduejusqu’à l’îlot de Tarakoi au Nord et jusqu’à la pointeMei au Sud. En 1991, sa limite a encore été étendued’avantage jusqu’à la pointe de Autea au Nord etl’îlot Karapo’o koio au Sud. De 1991 à 2010, seslimites ont varié encore plusieurs fois avec uneextension maximale de la zone de la pointe Rukuagaau Nord jusqu’à Karapo’o koio au Sud, soit plus dela moitié de la côte de l’île. Les extensionsmaximales au Nord ont souvent été effectuées enprévision d’un évènement important (mariage oucérémonie religieuse), pour régénérer les stocks depoissons environ un an à l’avance. La limite actuelledu rahui s’étend de la pointe de Tematapu au Nordà l’îlot de Karopo’o koio au Sud (« Tomite rahui»,com. pers. 2014).

pratiques réglementées et zonage

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L’ouverture du rahui de Rapa a d’ordinaire lieu uneseule journée par an, avant les fêtes de fin d’année.Avant l’ouverture, le « Tomite rahui » passe danschaque maison pour compter le nombre de membrede la famille présent, en incluant les visiteurs deTahiti présents à cette période. Le rahui est ouvertpour une durée de 8 heures, de 6 heures du matin à14 heures. Le pasteur ouvre officiellement la pêcheau fusil dans la zone de réserve par une prière, ildemande que la pêche soit fructueuse et que lespêcheurs reviennent sains et saufs, la populationentonne un chant religieux. Les pêcheurs, quipeuvent être au nombre de 80, se répartissent en9 bateaux, chacun contrôlé par un membre ducomité rahui, pour éviter que des prisesn’échappent à la redistribution. Au retour de lapêche, le pasteur referme le rahui et prie pour qu’ilsoit respecté jusqu’à la prochaine ouverture. Lespêcheurs et la population vont manger ensemblependant que le comité partage équitablement lesprises en fonction du nombre de membre recensédans chaque foyer. Puis le comité appelle chaquefamille une à une pour venir chercher son lot depoisson, qui représente en moyenne une vingtainede poissons « nanue» par foyer (Photos 1 et 2). Lespêcheurs bénéficient d’une part un peu plus

importante de la récolte en contrepartie de leureffort. Une partie des poissons est égalementgardée pour les deux paroisses de l’île. Leslangoustes récoltées sont vendues pour payerl’essence des bateaux et le repas des pêcheurs.Parfois, le rahui est exceptionnellement levé pourun temps plus court lors de l’installation d’unnouveau pasteur ou de la venue d’une délégation dugouvernement polynésien (Ghasarian 2014). Depuis3 ans environ, le rahui est ouvert 2 fois par an, unefois avant l’arrivée des visiteurs de Tahiti (vers le 15décembre) et une fois pendant leur visite (vers le 23décembre). Une ouverture a été ajoutée avantl’arrivée du bateau de Tahiti car certains habitantsse plaignaient de devoir partager la récolte du rahuiavec les habitants de Tahiti ne vivant pas à pleintemps sur l’île. Mais de nombreuses personnes seplaignent de cette double ouverture et pense qu’ellea un impact trop fort sur la population de poisson(« Tomite rahui », com. pers. 2014).

ouverture du rahui

Lors du rétablissement du rahui marin, le contrôledes pratiques localement réglementées étaitassuré par la mairie, qui prêtait son bateau poureffectuer des rondes. Le respect du règlementappliqué n’était pas optimal car le rahuirécemment créé était encore remis en questionpar la population. Une famille continuait d’allerpêcher ostensiblement dans la zone de rahui et lemaire avait alors décidé, en accord avec sonconseil municipal et les anciens de l’île, de leurcouper l’électricité pendant trois mois. Cetteaffaire avait fait grand bruit car elle a été reprisepar le journal « la Dépêche » et a coïncidé avec letournage d’un reportage de Thalassa qui avaitlargement couvert cet incident. La mairie avaitalors été menacée de payer des indemnités par letribunal de Papeete, car les sanctions appliquéesn’étaient pas légales. Il était alors devenu difficilede faire appliquer le rahui par la population car leshabitants de Rapa avaient compris que cerèglement n’avait pas de base juridique. La mairieet les anciens ont alors décidé de renforcer lanotion de sacré dans le concept du rahui, car selonl’ancien maire Lionel Watanabe, « seule unesanction divine pouvait fonctionner ». Ils ont alorsfait jurer à la famille devant le pasteur et devantdieu qu’ils n’iraient plus pêcher dans la zone, « surle modèle de la croix bleue pour la lutte contrel’alcoolisme ». Depuis lors, le rahui de Rapa aconservé une forte assise religieuse. Lapopulation de l’île est très pratiquante avec 95%de protestants et 5% de catholique. L’ensembledes habitants s’accordent à dire que « dieu protègele rahui » et qu’« on ne peut pas tricher car lesvoleurs sont rattrapés et punis par dieu ». Certainsrapportent des mésaventures qui seraient arrivéesà des pêcheurs violant le rahui, de qui « le bateause serait retourné », ou « leur moteur serait tombéà l’eau », parfois les réprimandes divines seraientmême « plus graves que des choses matérielles ».Le contrôle sacré a un fort pouvoir de dissuasion,car il est perçu comme n’étant pas du ressortexclusif des hommes. Mais on comprend bien quela notion divine est parfois utilisée pour couvrirdes réprimandes bien humaines, qui ne peuventpas être ouvertement dévoilées. En raison de cette affaire juridique avec la

population, depuis 1991, un comité spécifique,appelé localement « Tomite rahui », a été créé« pour ne pas faire porter à la mairie laresponsabilité de la gestion, et éviter les ennuislégaux » (L. Watanabe, com. pers. 2014). Ce comitéest une institution coutumière qui n’a pas dereconnaissance légale, ce n’est pas uneassociation ni une coopérative et il ne bénéficied’aucune subvention (Ghasarian 2014). Lerèglement qui est appliqué par ce comité est unrèglement local qui n’a aucune valeur juridique.Le comité est composé de 9 personnes,principalement des pêcheurs, élus par lapopulation de Rapa au suffrage direct par une urneà la mairie. Il est renouvelé tous les 2 ans à lapériode de l’ouverture du rahui en décembre. Lesmembres du comité n’ont pas le droit de sereprésenter pour un deuxième mandat, maispeuvent être réélus lors d’un mandat ultérieur, cequi permet une rotation des responsabilités entreles différentes familles de l’île et d’avoir desmembres du comité relativement jeunes. Lecomité se rassemble de manière irrégulière enfonction des besoins. Les décisions sont votées àla majorité après une discussion faisant intervenirtous les membres du comité. À peine élu, lenouveau comité relit les règlements écrits parl’ancien comité et décide s’il doit faire desmodifications. Lors d’une modification majeure desrèglements, comme un changement des limites dela zone de rahui, les décisions du comité doiventêtre validées par le Grand Conseil composé duconseil municipal, du « Toohitu » (comité coutumierdes anciens de l’île gérant les affaires foncières) etde représentants des confessions religieuses. Le « Tomite rahui » assure aujourd’hui que lerespect du rahui est très satisfaisant, « il y atoujours quelques braconniers mais c’est trèsexceptionnel, et ils sont vite recadrés ». Si un écartest observé, il est rapporté au comité et letransgresseur reçoit une sanction verbale du« Tomite rahui » et des anciens de l’île ; c’est doncun contrôle social qui s’applique. Au-delà del’aspect sacré, le respect du rahui est égalementdû à l’esprit communautaire encore très fort à Rapaet à l’autogestion qui s’applique naturellemententre les habitants : « tout le monde connait la

gouvernance, contrôle et sanctions

PHOTO 1Distribution communautaire des poissons lors de l’ouverturedu rahui.© Mary Walworth

PHOTO 2Lots de poissons distribués aux familles de l’île lors del’ouverture du rahui.© Ruben Kuevidjen

Page 101: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

199198

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bibliographie

L’ensemble des pêcheurs de Rapa s’accordent pourdire que le rahui est efficace pour préserver lesstocks de poissons de l’île pour la pêche côtière :« les nanue et komo komo sont devenus plusabondants, plus gros, ils ont moins peur et c’estgrâce au rahui », « les langoustes sont plusnombreuses depuis le retour du rahui ». L’équipe deNational Geographic ayant étudié la biomasse depoissons côtiers à Rapa a également observé uneffet significatif du rahui, avec environ 2 fois plus depoissons dans la zone protégée que dans la zoneouverte (A. Fridelander, com. pers. 2014). Cependant beaucoup de pêcheurs et habitantspensent que les mesures appliquées ne sont passuffisantes et que la pression est encore trop forteà Rapa pour maintenir une ressource abondante :« avant il y avait peu de bateaux à Rapa, maintenanton a beaucoup de poti marara autour de l’île, doncl’impact est plus fort » (T. Hennequin, com. pers.2014). En octobre 2014, 27 poti marara ont étérecensés dans la baie principale de l’île. Certainspréconisent d’agrandir la zone d’avantage, d’autresd’interdire la pêche à la ligne également dans lazone protégée, d’autres dénoncent la compétitionentre les pêcheurs à la ligne et les plongeurs quidoivent dépenser plus d’essence pour aller à l’ouestde l’île. Enfin, une prise de conscience del’exploitation des ressources du large commence àémerger. Les pêcheurs se plaignent d’avoir desprises de thons ou d’autres poissons pélagiques deplus en plus maigres en raison de la compétition

avec les bateaux thoniers de Tahiti et avec lesbateaux étrangers à l’extérieur des eauxpolynésiennes. Ils ont aussi remarqué unediminution importante des prises à Morotiri, où ilsn’étaient pas allés depuis de nombreuses années.Ils comprennent que cette zone est exploitée pardes bateaux qui ne viennent pas de Rapa, alorsqu’ils considèrent que les ressources de ces îlotsappartiennent à la population de l’île. Le conseilmunicipal de l’île, en accord avec le «Tomite rahui »,le « Toohitu » et l’ensemble des habitants, ontd’ailleurs récemment proposé la création d’unegrande zone de protection au large de Rapa,incluant Morotiri, en accord avec les autres îles desAustrales. Ils considèrent que ce projet serait uneextension du rahui qui est pratiqué à Rapa, maispour les ressources du large (T. Narii, com. pers.2014). Dans une délibération du conseil municipaldu 4 décembre 2014, ils ont même suggéré que ceprojet de grande réserve marine soit baptisé « rahuinui no tuhaa pae» traduit comme « le grand rahuides Australes ».

efficacité du rahui et recommandations des habitants

Le rahui, aussi bien au niveau terrestre qu’au niveaumarin, est un concept générique qui peut être définipar une mesure politique ou religieuse depréservation des ressources naturelle d’une îlepour sa régénération et/ou pour son exploitationéquitable par l’ensemble de la communauté. Laréintroduction du rahui marin à Rapa dans lesannées 1980 s’est largement inspirée du rahuipolynésien traditionnel, mais avec certainsaménagements liés à des influences extérieures(comme un voyage du maire à Hawaii), mais aussiliés au nouveau contexte social et aux besoinsenvironnementaux de l’île. Plutôt que d’êtrepratiqué à l’échelle d’une vallée ou d’un clan, lerahui contemporain est maintenant appliqué àl’ensemble de l’île ; il n’est pas rotatif mais figé àl’est de l’île, avec une taille variable en fonction des

ressources disponibles ; il ne semble pas toujourstemporaire car certaines interdictions sontdevenues permanentes ; et les rites sacréspolynésiens ont été remplacés par un rattachementà la religion chrétienne. Cela étant, même s’il n’estpas tout à fait fidèle au concept du rahui historique,le rahui de rapa est malgré tout solidement ancrédans la culture traditionnelle polynésienne, et c’estsans doute une des raisons pour lesquelles ilsemble efficace pour gérer collectivement etdurablement les ressources marines de l’île. Bienque son rétablissement ait été difficile au départ, leshabitants de Rapa sont maintenant unanimementsatisfaits et fiers de ce mécanisme de gestioncommunautaire et espèrent qu’il pourra servir demodèle pour d’autre îles ou archipels de Polynésiefrançaise, voire du Pacifique.

conclusion

Les auteurs remercient infiniment la population de Rapa pour leur avoir fait découvrir leur rahui. En particulier,nous remercions Tuanainai Narii (le maire de Rapa), Lionel Watanabe (l’ancien maire), l’ensemble du conseilmunicipal, du tomité rahui et Christian Ghasarian, pour leur relecture approfondie de cet article et leurcommentaires précieux.

remerciements

règle et tout le monde se contrôle » (« Tomiterahui », com. pers. 2014). De plus, l’efficacitéobservée du rahui encourage la population àcontinuer à protéger leur ressource : « les jeunesont compris que le rahui est pour eux aussi ; cen’est pas un interdit, mais un partage » (P. Narii,com. pers. 2014). Le respect des habitants de l’île pour ce mode degestion engendre légitimement les mêmesattentes envers les gens de l’extérieur (Gasharian2014). Une autre affaire ayant fait grand bruit dansles années 1990, a été l’arrivée d’un bateauTahitien à Rapa pour pêcher des poissons et deslangoustes à l’aide de casiers et de filets, alors que

ces pratiques sont interdites par le rahui. Lebateau a disposé discrètement ses casiers ainsique ses filets, et il s’est vu saisir et jeter au largeson matériel de pêche par la population. Letribunal ayant eu vent de cette affaire convoqua leMaire, et il aurait alors déclaré: «Mettez toute lapopulation de Rapa en prison et moi le premier ».L’affaire n’a pas eu de suite et aucun bateau del’extérieur n’a jamais réessayé de venir enfreindrele rahui de Rapa (L. Watanabe, com. pers. 2014).Cela étant, la mairie et le « Tomite rahui »s’accorde pour dire qu’une reconnaissance légaledu rahui est nécessaire afin d’éviter ce genre deproblèmes à l’avenir.

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usages et pressions

sur le patrimoine marin

des îles australes

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202

Enfants de Rurutu dans la baie d’Avera.

© Jérôme Petit

LA QUALITÉ DE VIE ET L’ENVIRONNEMENT PRÉSERVÉ DES AUSTRALES FONT DE CES ÎLES UN ARCHIPEL OÙ IL FAIT

PLUTÔT BON VIVRE.

203

L’archipel des Australes a une population de 6 820habitants, soit 2,5% de la population polynésienneet a retrouvé depuis 2007 une croissancedémographique et un solde migratoire positif.Toutes les îles, excepté Rapa, disposentaujourd’hui d’un niveau d’infrastructures etd’équipement, d’accès aux réseaux detélécommunication et aux services publics debase comparables aux autres archipels.L’économie est dominée par le poids del’administration publique qui occupe 44% desactifs. L’agriculture est le premier secteurproductif avec une part très importante deproductions autoconsommées et une formed’agriculture intensive dans la seule île deTubuai. La pêche côtière et lagonaire sontsignificativement présentes dans l’économie del’archipel. Le tourisme a connu un développementces dernières années, l’archipel misant surl’écotourisme. La part importante de la populationexerçant une activité annexe dans l’agriculture etla pêche, et la forte autoconsommation desproductions obtenues permet aux habitantsd’augmenter considérablement leurs ressources.

DÉMOGRAPHIE ET ÉCONOMIEDE L’ARCHIPEL DES AUSTRALES

PHILIPPE COURAUDService du Développement RuralTahiti, Polynésie française [email protected]

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205204

TABLEAU I : Données générales (surfaces, populations, densités).

L’archipel des Australes comprend cinq îles hautes habitées (Rurutu, Tubuai, Raivavae, Rimatara et Rapa) etdeux petites îles inhabités (Marotiri et Maria), (Tabelau I).Ces îles présentent des caractéristiques géomorphologiques extrêmement diverses où l’on retrouve l’ensembledes paysages typiques des quatre autres archipels polynésiens, ainsi que des formations uniques :• îles hautes avec un large lagon et des motu (Tubuai et Raivavae)• îles hautes avec montagnes abruptes et déchiquetées (Rapa)• îles hautes avec récifs surélevés au pourtour d’un ancien volcan (Rimatara et Rurutu)• atoll (Maria)• île formée de petits rochers escarpés (Marotiri). La superficie totale en terres émergées de l’archipel (143 km2), représente 4% de la surface totale de laPolynésie, à peine plus que la surface de l’île de Moorea (134 km2). Le climat de l’archipel se distingue pardes températures moyennes plus basses et une transition hiver-été plus marquée que sur le reste du Pays.C'est sur cette zone que l'on observe les plus fortes houles, et que le risque cyclonique est le plus élevé(Météo-France).

présentation des milieux terrestres

D’après les données issues du dernier recensementgénéral de la population de 2012 réalisé par l’INSEEet l’ISPF, l’archipel des Australes compte 6 820habitants, soit 2,5 % de la population totale de laPolynésie française (268 207 habitants).Rurutu (2 322 habitants) et Tubuai (2 170 habitants)sont les îles les plus peuplées de l’archipel, quiregroupent chacune le tiers de la population. Raivavae

regroupe 14% de la population de l’archipel avec 940habitants, Rimatara 13% avec 873 habitants et Rapa8% avec 515 habitants (Tableau I). Les habitants del’archipel des Australes sont pour 96% nés enPolynésie française (87% pour la population des Ilesdu vent).

démographie, population

une évolution démographique spécifique à l’archipel

C’est l’archipel de la Polynésie française dont lapopulation a le moins progressé sur les quarantedernières années (Figure 1), avec notamment unebaisse de population entre les années 1996 et 2007.Cette évolution diffère toutefois sensiblement entreles îles. Alors que Raivavae et Rimatara connaissentune baisse démographique importante et continueenregistrée sur la période 1988 – 2007(respectivement -35% et -23%), il faut davantageparler de stagnation démographique pour les autres

îles, Tubuai ne connaissant qu’une baisse réelle de3,4% entre 1996 et 2002 et Rurutu une baisse réellede 0,4% entre 2002 et 2007. Cette tendance s’estinversée entre 2007 et 2012 et l’archipel des Australesest alors devenu celui ayant connu la plus fortehausse démographique de toute la Polynésie avec 8,1%, hausse naturelle accentuée par un soldemigratoire qui est devenu pour la première foisexcédentaire.

FIGURE 1Pourcentage de hausse de la populationdes archipels de Polynésie française entre1971 et 2012.

densités de population

Les densités de population des îles de l’archipel sont trèsvariables. Rimatara avec 102 hab/km2 est la plusdensément peuplée, et figure à la quatrième place des

îles de Polynésie, après Bora Bora, Tahiti et Moorea.Rapa présente la densité la plus faible de l’archipel avec13 hab/km2.

pyramide des âges, espérance de vie, taux de fécondité

Les moins de 20 ans représentent 34% de lapopulation, taux identique à celui de la Polynésie. Cepourcentage continue à diminuer, puisqu’ilreprésentait la moitié de la population en 1988. Lenombre des personnes âgées de 60 ans et plus aaugmenté simultanément avec un pourcentage quidouble en vingt-cinq ans. Elles représentent

aujourd’hui 12% de la population. L’espérance de vieà la naissance est de 75 ans en moyenne pourl’archipel, hommes et femmes confondus, identiqueà la moyenne polynésienne. Le taux de fécondité eststable depuis 1996 dans l’archipel des Australes etatteint 2,2 enfants par femme en 2012 contre 4,1en 1988.

logement - taille des ménages

On dénombre 2 319 logements dans l’archipel desAustrales, dont 1 837 résidences principales, avec unehausse depuis 2007 corrélée à celle de la population.

La taille moyenne des ménages est restée stableentre 2007 et 2012, avec 3,7 personnes par logement.

équipement des ménages

Entre 2007 et 2012, le nombre de foyers possédant aumoins une voiture a progressé, passant de 53% en2007 à 59% en 2012 et 75% des ménages disposentd’un téléphone mobile alors que 35% des ménages

sont équipés d’un ordinateur (50% pour la Polynésie)et que 20% d’entre eux disposent d’une connexioninternet (43% pour la Polynésie).

Tubuai

45,0

94 422640 217048

Rurutu

32,7

5 389572 232271

Superficie terrestreSuperficie lagon (ligne de rivage - barrière récifale)Altitude maximum (mètres)Distance de Tahiti (km)Nombre d'habitantsDensité (hab/km2)

Raivavae

17,9

61 437730 94053

Rimatara

8,6

2 106660 873102

Rapa

40,5

6501240 51513

Ilots Maria

1,3

5 5

Marotiri

0,04

TOTAL

146,0

167

682047

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207206

FIGURE 2Répartition en pourcentage des individus âgés de 15 ans etplus par statut d’activité et par île.

FIGURE 3Répartition en nombre des individus âgés de 15 ans et pluspar statut d’activité et par île.

population active et statut d’activité (figures 2 et 3 )

L’archipel des Australes comprend 2 882 actifs, soit2,5% du nombre total d’actifs de Polynésie française,dont 2 039 actifs ayant un emploi, au titre de leuractivité principale. La situation de l’archipel des Australes, estcaractérisée par un taux de chômage supérieurd’environ 30% à la moyenne polynésienne (29,3%contre 21,8%). Il existe sur ce point une forte disparitéentre les îles puisque Tubuai et Rurutu ont un taux dechômage légèrement supérieur pour l’un, etlégèrement inférieur pour l’autre à la moyennepolynésienne (respectivement 22,9% et 20,9%), alorsque Raivavae (37,8%) et Rapa (69,2% - maximumenregistré au sein des communes de Polynésie)

affichent des taux de chômage extrêmement élevés. Rurutu est l’île où le nombre d’actifs ayant un emploiest le plus important de l’archipel (839), représentant50% de la population âgée de 15 ans et plus. Le nombre de pluriactifs est très important auxAustrales puisque 41% des actifs ayant un emploidéclarent une activité annexe dans l’agriculture, 29%dans l’artisanat et 27% dans la pêche. De même 62%des chômeurs et 40% des inactifs déclarent uneactivité annexe dans l’agriculture, 9% et 27% dans lapêche, 31% et 28% dans l’artisanat. Il est importantde noter que les productions issues de ces activités,dites annexes, sont le plus souvent tournées versl’autoconsommation (Tableau II).

494200623131714437952324659684226824945901598

24%10%31%65%17%45%62%12%29%40%54%10%12%32%

Exerçant à titre principalExerçant à titre annexe pour la venteExerçant à titre annexe sans la venteTotauxavec activité annexe pour la venteavec activité annexe sans la venteTotauxavec activité annexe pour la venteavec activité annexe sans la venteTotaux

TABLEAU II - Répartition des personnes ayant une activité dans l'agriculture, la pêche ou l'artisanat, vente ou autoconsommation,selon le statut d'activité.

49134771954175761044545581588492881300

2%7%38%47%0%9%9%5%22%27%32%1%6%26%

1771611945321021612633482425901385177788597

9%8%10%17%12%19%31%17%12%28%28%4%12%12%

2 039

843

2 087

4969

La desserte maritime de l’archipel est effectuéepar la compagnie maritime SNA Tuhaa Paedisposant d’un cargo mixte, le Tuhaa Pae IV, misen service en fin d’année 2012. Il effectue 32rotations par an, dont 6 seulement desservent l’îlede Rapa. Il peut transporter 2 000 m3 de fret, dont300 m3 en containers réfrigérés ou congelés,largement suffisant pour les besoins actuels del’archipel. Il possède 16 cabines pouvant accueillir50 passagers.Tubuai, Raivavae et Rapa disposent d’un quaipermettant l’accostage régulier du Tuhaa Pae IV.Mais ce bateau est surdimensionné pour le chenald’accès au quai de Moerai (Rurutu) où il ne peutaccoster actuellement. Rimatara ne dispose que depetits débarcadères accessibles uniquement pourles baleinières ou speed-boat.On note les parts importantes dans le fret « aller »des matériaux de construction (55%), deshydrocarbures (21%) et des produits alimentaires(10%). Les produits agricoles représentent 63%du volume total du fret « retour ». La comparaisonavec les autres archipels et la répartition partypes de produits sont détaillées dans les Figures4 et 5. Au total 1 093 passagers « aller » et 958passagers « retour » ont été recensés en 2013dont 90% environ sont des scolaires qui sontgénéralement transportés par un navire de laflottille administrative.

infrastructures et réseaux – échanges passagers et marchandises

infrastructures portuaires - desserte maritime - marchandises et passagers transportés

FIGURE 4Répartition du fret aller - année 2013 (Tahiti vers archipel).

FIGURE 5Répartition du fret retour - année 2013 (archipel vers Tahiti).

Tubuai

624 15 240 5 333

40%

Rurutu

602 16 355 4 316

42%

Mouvements d'avionNombre total de passagersDont passagers en transit

Coefficient de remplissage

TABLEAU III Mouvements d'avions, passagers et coefficients de remplissage.

Raivavae

360 8 353 2 689

37%

Rimatara

332 6 059 3 691

27%

Fakarava (Tuamotu)

862 21 804 3 882

50%

Nuku Hiva (Marquises)

1 981 34 385 4 370

54%

Statut d'activité

Actifs

Chômeurs

Inactifsde 15 ans et plus

Total âgés de 15 ans et plus ayant une activité annexe ou principal dont activité principaledont activité annexe avec ventedont activité annexe sans vente

SECTEUR D'ACTIVITÉ

agriculture pêche artisanat d’art

ARCHIPEL DES AUSTRALES

en % du total de la population de 15 ans et plusdans le statut d'activité

nombre

en % du total de la population de 15 ans et plusdans le statut d'activité

nombre

en % du total de la population de 15 ans et plusdans le statut d'activité

nombre

Total population de plus de 15 ans

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FIGURE 6Répartition en % des actifs ayantun emploi, selon le secteurd’activité principal, par archipel.

FIGURE 7Répartition en % des actifs ayantun emploi selon le secteurd’activité principal, par île.

FIGURE 8Répartition par île du nombred’actifs ayant un emploi selon lesecteur d’activité principal.

infrastructures aéroportuaires – desserte aérienne – transport de passagers

Toutes les îles de l’archipel, sauf Rapa, disposent d’unaéroport desservi par une ligne régulière exploitée parAir Tahiti avec des ATR 72. Actuellement, les îles sontdesservies avec les fréquences de 3 vols par semainepour Raivavae et Rimatara et 4 vols par semaine pour

Rurutu et Tubuai. Les données de l’année 2013, relativesaux mouvements commerciaux d’avion, transportspassagers et coefficient de remplissage, sont indiquéesdans le Tableau III.

les réseaux de télécommunications

Les deux réseaux de communication téléphoniques,réseau filaire et réseau sans fils, sont présents danstoutes les îles de l’archipel. Internet est disponible dans

tous les villages, y compris à Rapa, mais les débitsproposés sont encore bien inférieurs à la situation desusagers de l’archipel de la Société.

les réseaux d’eau et réseaux d’assainissement

Seul Tubuai dispose d’un réseau d’approvisionnementen eau rénové alimenté par des forages, avecfacturation de l’eau au volume consommé. Les autresîles sont alimentées par des eaux de surface et l’onrelève des difficultés d’approvisionnement dans l’île

de Raivavae. Aucune commune ne dispose d’unréseau d’assainissement des eaux usées,l’assainissement étant effectué par des fossesseptiques.

les différents secteurs de l’économie

Il n’existe pas de données homogènes en termes dechiffre d’affaire ou revenus distribués sur l’ensemble dessecteurs d’activité. Aussi, le nombre d’actifs occupés autitre de leur activité principale par secteur d’activité del’établissement employeur, établi par l’ISPF lors dudernier recensement de la population en 2012, est utilisépour évaluer le poids des différents secteurséconomiques. Nous avons retenu 7 ou 8 secteurs

d’activité (selon les données disponibles) pour montrerles spécificités de l’archipel et l’importance de chaquesecteur d’activité au sein de chaque île (Figures 6, 7 et 8).Pour autant, les activités annexes sont également prisesen compte car elles s’avèrent indispensables pourdisposer d’une juste appréciation de l’économie del’archipel.

les services publics, première source de revenus des ménages

Avec 902 personnes travaillant pour le compte d’uneadministration publique sur 2 039 actifs ayant un emploi,l’archipel des Australes possède le plus fort tauxd’emploi public de Polynésie, soit 44%. Cette situationcorrespond à l’existence de différentes structurespubliques rattachées au Pays en matière de santé,éducation (2 collèges), développement rural, équipementpublic, ainsi qu’à l’existence de services communaux etservices de l’État (gendarmerie) dans les cinq îles del’archipel, sans économies d’échelles possibles.Même en appliquant un niveau de salaire sensiblementinférieur au salaire moyen de l’administration publique(355 000 à 399 000 Fcp – Bodet & Talvard, 2014), le niveaude revenu distribué est à minima de l’ordre de 2 milliardsde Fcp, bien au-delà des revenus issus des autressecteurs de l’économie marchande.

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211210

l’agriculture, deuxième ressource économique

Les surfaces agricoles et forestières (Tableau IV)On compte 2 116 ha de surface agricole utilisée dans toutl’archipel des Australes, soit le plus fort pourcentage dela surface terrestre comparée aux 4 autres archipelspolynésiens constitués d’îles hautes. On recense 1 000ha de pâturages sur l’île de Rapa et 504 ha de cocoteraiesur Rimatara/Maria. Les 460 ha de pins des caraïbesrévèlent un potentiel futur pour une activité sylvicole,aujourd’hui inexistante dans l’archipel.Le nombre d’exploitations agricoles et le nombre d’actifs Le secteur agricole comprend 690 exploitations (SDR,2014). Le recensement de population dénombre quant àlui 417 actifs ayant leur activité principale dans le secteuragricole, soit 20% du total des actifs ayant un emploi (18%aux Marquises, 19% aux Tuamotu, 12% aux Iles sous levent, 10% aux Iles du vent) ce qui fait de l’agriculture le2ème secteur économique de l’archipel et la premièreactivité de production.Mais en Polynésie française, et particulièrement aux îlesAustrales, l’agriculture est aussi une activitéfréquemment pratiquée en guise d’activité annexe. Elleoccupe sous cette forme 46% des actifs et denombreuses personnes déclarées inactives. Ainsi, c’esten réalité 2 605 personnes au total, soit 52% de lapopulation âgée de 15 ans et plus qui exercent uneactivité agricole dans l’agriculture, dont une largemajorité à des fins d’autoconsommation (47% auxTuamotu Gambier, 45% aux Marquises, 31% aux Ilessous le vent, 11% aux Iles du vent). Les productions agricoles de l’archipel commercialiséesen 2013 (Tableau V)Les données présentées correspondent à la productionagricole commercialisée dans les circuits formels et neconcernent pas la production autoconsommée, qui estprise en compte par ailleurs

La production totale de l’archipel était de 387 millions deFcp en 2013, soit 6% seulement de la production agricoletotale de la Polynésie française. On note que 69% de laproduction de l’archipel (en valeur) provient de l’île deTubuai, 15% de Rurutu, 11% de Rimatara, 3% de Rapa et2% seulement de Raivavae.Tubuai tire pleinement partie de son climat plus frais quele reste de la Polynésie, de sa large plaine intérieure etplaine côtière, et exporte vers Tahiti ses productions decarottes, pommes de terre et litchis, qui représententenviron les 2/3 de la production agricole de l’île, soit 176,9millions de Fcp. Rurutu est spécialisé vers la culture detaro exportée vers Tahiti après découpe et congélation parune structure coopérative (26,2 millions de Fcp soit 44%de la valeur de la production agricole de l’île). Rimataraest la seule île à commercialiser du coprah de manièresignificative à l’échelle de l’archipel avec une productioncommercialisée de 188 tonnes, soit 26,4 millions de Fcp,représentant 60% de la production agricole de l’île. Rapa,où l’autoconsommation est très importante, produitessentiellement de la viande bovine à partir d’un troupeauen liberté ; les abattages s’effectuant à l’occasion dechasses organisées de manière collective (6 millions deFcp, soit 62% de la production de l’île). Le café, qui alongtemps été une des productions phare des Australes,notamment à Raivavae, subsiste encore aujourd’hui avecquelques tonnes produites.Il existe à Tubuai une forme d’agriculture intensivemécanisée qui n’existe pas dans les autres îles desAustrales. Ainsi, le chiffre d’affaire moyen annuel parexploitation est de 1,7 million de Fcp à Tubuai, contre 224000 Fcp pour les 4 autres îles (Tableau V). Cette formed’agriculture intensive est aussi celle qui fait le plus appelà des engrais et pesticides chimiques, avec les risques depollution que cela entraîne pour les milieux environnants.

TABLEAU IVSurfaces agricoles et forestières (archipels de Polynésie et îles des Australes).

Tubuai

19,8 5,0 0,6 0,1

2,0 1,4

22,5 6,4

3,0 1,8 0 0

3,0 1,8

25,5 8,2

103 79 806

Rurutu

1,5 1,1

1,5 1,1 12,0 6,0 3,0 2,1

1,6 0,6 16,6 8,7 18,1 9,8 34

286 765 71

Carottes

Pommes de terre

Autres légumes

Ananas

Litchis

Pastéques

Taro

Autres fruits et vivriers

Nono

Café vert

Coprah

Total productions végétales

Viande bovine

Viande caprine

Porcs charcutiers

Œufs

Total productions animales

TOTAL GENERAL

Nombre d'exploitations agricolesChiffre d'affaire moyen annuel /exploit. agricole (en Fcp)

TABLEAU V Productions agricoles des îles Australes et nombre d'exploitations agricoles.

Raivavae

2,0 0,3 28,9 3,5 -

8,2 3,3 4,6 0,5

150,0 6,0 1,2 0,8

188,3 26,4 383,1 40,8

3,0 1,8 3,2 1,2 6,2 3,0

389,3 43,7 158

276 709

Rimatara

10,7 2,7 3,6 0,5 5,0 5,0

87,3 26,2 43,2 8,2

5,7 4,5 12,1 1,7

167,6 48,8 0,5 0,3

1,0 0,6 12,8 8,5 14,8 10,1 182,4 58,9 242

243 512

Rapa

407,5 57,1 520,7 59,9 220,0 31,9 59,9 16,2 60,0 60,0 79,3 11,9 10,6 3,7 37,5 4,5

1 395,5 245,1 9,1 5,6 1,0 0,5 3,0 1,2 21,5 14,4 34,6 21,7

1 430,1 266,8

153 1 743 725

TOTAL

409,5 57,3 549,6 63,3 230,7 34,6 63,5 16,7 65,0 65,0 79,3 11,9 125,9 38,1 85,9 13,3 150,0 6,0 10,4 7,8

200,4 28,1

1 970,2 342,2 21,6 11,9 4,0 2,6 10,0 5,4 39,1 24,6 75,2 45,3

2 045,4 387,4 690

561 464

la pêcheLa pêche pratiquée aux îles Australes à l’aide d’unitésbasées dans l’archipel ne concerne que la pêche côtièreet lagonaire. Aucun palangrier ni aucun bonitier n’estbasé dans l’archipel.Le nombre de personnes pratiquant la pêche, commeactivité principale ou activité annexeOn compte dans l’archipel 49 professionnels ayant lapêche pour activité principale, pour les 2 activités pêchecôtière et pêche lagonaire. Pour autant, dés lors que lesactivités annexes pratiquées pour la vente oul’autoconsommation sont également prises en compte,on recense alors 1 588 pêcheurs dans l’archipel, dont771 actifs exerçant la pêche pour l’autoconsommationà titre d’activité annexe (voir détail Tableau II) La pêche côtièreOn compte 19 embarcations de pêche de type «poti-marara» (bateaux en bois ou fibre de verre de 6 à 8m)officiellement en activité en 2013 dans tout l’archipel, soit àpeine 4% de la flottille polynésienne pour ce type de bateau(Tubuai : 5, Rurutu : 8, Raivavae : 3, Rimatara : 2, Rapa : 1).

En 2013, les pêcheurs des Australes sont ceux qui onteffectué le plus de sorties par unité comparé au restede la Polynésie, avec une moyenne de 129 sorties paran, en augmentation de plus de 20% par rapport à 2012.Le poids moyen des prises par sortie (39 kg) est parcontre le plus faible de la Polynésie (68 kg en moyennepour les 4 autres archipels). La production totaleannuelle de la flottille est estimée à 111 tonnes, d’unevaleur marchande au stade producteur évaluée à 65millions de Fcp. La pêche lagonaireUne vingtaine de personnes environ pratiquent la pêchelagonaire comme activité principale. La production totaledes produits de cette pêche exportée vers Tahiti estestimée à 74 tonnes en 2013, dont 10 tonnes de chair debénitiers (essentiellement pêchés à Tubuai et à Raivavaedans une moindre mesure). La valeur marchande de cetteproduction est évaluée à 40 millions de Fcp. Aucunedonnée n’est disponible en ce qui concerne lesproductions vendues dans l’archipel lui-même.

612 303

4 975 1

1 069

1 000

6 63

402 1 337 1 688 25 082 504 102

247 120 34

1 587 620 358 73 541 30 24 84 144 257

2 603 2 260 7 022 25 157 2 116 132

1 024 332 271 356

2,2%5,8%7,1%34,5%14,8%8,3%25,6%33,5%8,4%7,9%

Bois précieux

81 105 186 3 18

9 10

Iles Du Vent Iles Sous-Le-Vent Marquises Tuamotu-Gambier Australes Raivavae Rapa Rimatara & Maria Rurutu Tubuai

Surface agricole utilisée en ha (SAU)

en % du totalsurfaceterrestre

Total SAUAutrescultures

CocoteraiePâturages

Pin des

caraïbes

630 1 210 1 830 120 460 90 60 30 60 220

qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va qt va

Surfaces terrestres(km2)

1 195,0 389,6 988,2 730,0 143,2 16,0 40,0 9,9 32,3 45,0

Surfaces forestières inventoriées en 2008 (en ha)

Page 108: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

213212

BODET C., TALVARD C., 2014 - « Bilan de l’emploi 2013 »,ISPF, Points forts n° 11, septembre 2014.

BUFFIERE B., 20002 - « Autoconsommation : uneéconomie de 21 milliards », ISPF, Points forts, n°2/2002.

BOUZERAND E, 2014 -« Les Australes en 2012, unsolde migratoire excédentaire », ISPF, Points forts n°10, octobre 2014,

DE VILLERS P. et Bureau d’études PTPU, 2008 -Schéma d’aménagement et de développement durabledes Australes – Diagnostic, Service de l’urbanisme,octobre 2008.

Direction des ressources marines et minières, 2014-Bulletin 2013, Synthèse des données de la pêcheprofessionnelle, de l’aquaculture et de la perliculture.

Service développement rural, 2014 - « Recensementgénéral de l’agriculture en Polynésie française –Situation de l’agriculture polynésienne en 2012 ».

Service développement rural, 2014 - Bulletin destatistiques agricoles 2013, données, septembre 2014,n° 42.

bibliographie

le tourisme

En comparaison des autres archipels de Polynésie,l’archipel des Australes ne présente actuellementaucune destination de renommée internationale,malgré quelques spécificités qui commencent àattirer une certaine clientèle. Ainsi, Rurutucommence à se faire connaître au travers despossibilités d’observation et d’approches des baleinesen plongée, qui est une activité en plein essor à fortpotentiel de développement. Raivavae mise davantagesur une forme de tourisme culturel et d’éco-tourismede plus en plus appréciée.L’économie du tourisme comprend désormaisquelques prestataires d’activités touristiques, etles activités susceptibles d’être proposées auxtouristes ne se limitent plus aux simplespromenades, baignades et pique-niques au bord dulagon mais se diversifient tout particulièrementpour voir les baleines.Environ 70 personnes travaillent directement dans lesecteur de l’hébergement et de la restauration, soit3% à peine de la population active, contre 6% auxMarquises, 8% aux îles Tuamotu et 24% aux îles sousle vent (Figure 6).

L’hébergement touristique (Tableau VI)L’archipel des Australes ne dispose encore que de faiblescapacités d’hébergement avec 84 chambres répartiesdans 16 enseignes, type « pensions de famille ». Cenombre a peu évolué depuis plusieurs années et ilsemble que les nouvelles offres touristiques setraduisent simplement par une amélioration duremplissage des pensions existantes.

La fréquentation touristiqueLes données sont peu nombreuses et regroupentplusieurs îles et archipels. Le taux de remplissage desenseignes des Australes est calculé avec celui desMarquises ; il est de 25% en moyenne (26% enhébergement classé, 9% en hébergement non classé).L’ISPF (cité par De Villers et SNC PTPU, 2008) évalue àenviron 1 100 le nombre de touristes extérieurs à laPolynésie ayant visité les Australes en cours d’année2007, en augmentation de 30% depuis 2003. Toutefois, laclientèle de cadres fonctionnaires, employés et salariésd’entreprises intervenant dans l’archipel assure encoreune part très significative de l’activité des pensions defamille de l’archipel, notamment à Rurutu et Tubuaï.

l’artisanat d’artLes Australes sont réputées pour la qualité de leurartisanat, notamment les chapeaux, ainsi que nattes etpaniers fabriqués à base d’une espèce particulière depandanus, le « paeore » (Pandanus spurius). Bien queprésent dans toutes les îles, la production de paeore deRimatara est vendue et exportée en rouleaux,notamment à l’attention des artisans de Tahiti. La vente des produits issus de cette activité repose surde nombreuses associations qui existent dans toutes lesîles de l’archipel. Le revenu total obtenu à l’occasion desplus grandes expositions organisées soit dans l’archipelsoit une fois par an sur l’île de Tahiti est de l’ordre de 12à 15 millions Fcp. On ne dispose pas d’estimations desventes réalisées tout au long de l’année directement par

les artisans auprès des touristes.Un total de 550 artisans d’art est recensé par le servicede l’artisanat en 2012, dont 164 à Raivavae, 118 à Rurutu,102 à Tubuai, 90 à Rimatara et 76 à Rapa. Ce nombre afortement baissé depuis une dizaine d’année puisque 879artisans d’art étaient recensés en 2001 (De Villers, 2008).Cette baisse est liée à la crise économique et à la chuteimportante du nombre de touristes ayantconsidérablement réduit les possibilités de vente deproduits de l’artisanat sur l’île de Tahiti. Commel’agriculture et la pêche, le secteur de l’artisanat d’artoccupe de nombreux pluriactifs ou personnes déclaréesinactives ou au chômage (853 personnes recensées parl’ISPF – voir détail Tableau II).

les autres secteurs de l’économie monétaire

Les revenus extérieurs importants correspondant auxsalaires versés aux agents publics de l’archipel,permettent le fonctionnement des diverses activitéséconomiques rencontrées habituellement dans cetype de petites sociétés insulaires. Ainsi, 19% des

actifs de l’archipel travaillent dans le secteur « autresservices » (436 personnes), 9% dans l’industrie et laconstruction (139 personnes), et 5% dans lecommerce (88 personnes).

les ressources non monétaires correspondant aux produits autoconsommés issus de la pêche et de l’agriculture

La population des Australes fait appel de manière toutà fait significative à l’autoconsommation desproductions agricoles et aux produits de la pêche.L’étude sur le budget des familles réalisée au débutdes années 2000 (Buffières, 2002) a ainsi montréqu’aux îles Australes, les dépenses réelles desménages font plus que doubler, sous l’effet desproductions autoconsommées. La consommation deproduits obtenus hors circuits monétaires était alors

évaluée à 57,2% de la consommation totale, soit 735millions Fcp dont 95,6% constitués par des produitsalimentaires. La production de biens vivriersconsommés par le ménage, ou insérés dans descircuits d’échanges non monétarisés impliquant lafamille élargie, permet encore aujourd’hui decompenser en partie l’insuffisance de revenusmonétaires, et constitue une ressource essentielle del’économie des Australes.

L’économie des îles Australes est d’abord marquéepar l’importance des emplois publics, le poids dusecteur agricole et un secteur touristique encore peudéveloppé. On relève également une propension àl’exercice d’activités annexes tournéesessentiellement vers l’obtention de denréesalimentaires destinées à l’autoconsommation.Compte tenu des difficultés à garantir un accèsdurable à des revenus salariés, ces activités annexessont de toute première importance pour les habitantsdes îles Australes car elles permettent, en diversifiantles sources de revenus, de mieux résister auxdifficultés économiques dans les situations de crise.

Il faudrait dès lors procéder à des études pluspoussées pour confirmer l’hypothèse que cette formeparticulière de résilience de l’économie des Australesexpliquerait le retour à un solde migratoire positifdans la période de crise économique sévère queconnaît la Polynésie depuis cinq ans. Ceci serait enconcordance avec le titre d’un article de presse publiéen mars 2013 à l’occasion des travaux préparatoiresau schéma d’aménagement de cet archipel quiavaient réuni pendant une journée une cinquantainede représentants de la société civile : « Les Australes,un archipel où il fait plutôt bon vivre ».

conclusions

Enseignes

1

2 2 5

Unités

5

10 9 24

RaivavaeRimataraRurutuTubuaiTOTAL

Capacité

10

30 19 59

Enseignes

5 2 3 1 11

Unités

18 8 11 16 53

Capacité

43 24 30 34 131

Total unités

23 8 21 25 775

Actifs secteur hébergement et

restauration

158341976

Hébergement classé Hébergement non classé

TABLEAU VINombre d'établissements d'hébergement touristique et capacité (novembre 2014).

Page 109: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

214

Poti marara dans la baie d’Ahurei.

© Jérôme Petit

L’AUTOCONSOMMATION DES RESSOURCES DE LA MER RESTE UNE COMPOSANTE ESSENTIELLE DE L’ÉCONOMIE DES

AUSTRALES.

215

En matière de pêche côtière, les îles de l’archipeldes Australes présentent des profils trèsdifférents, qui peuvent s’expliquer par la grandedifférence d’importance des structures récifalesexistantes, et par la situation latitudinale pour cequi concerne Rapa. Raivavae et Tubuai quidisposent chacun d’un véritable lagon, ont unepêcherie axée principalement sur la pêche despoissons lagonaires et du bénitier. Rapa,Rimatara et Rurutu, qui ne disposent pas degrandes surfaces récifales, ont diversifié lapêcherie en exploitant plus densément lesressources en invertébrés récifaux ainsi que lesressources océaniques et de profondeur. Pour cequi concerne Rapa, les conditions plus difficilesde l’état de la mer, son isolement et ladisponibilité de ressources océaniques procheset saisonnières peuvent expliquer la placestratégique de la pêche côtière dansl’alimentation de la population et la mise enplace d’une zone de réserve pour pallierd’éventuelles pénuries alimentaires.

LA PÊCHE COTIÈRE AUX AUSTRALES

ARSÈNE STEIN Direction des Ressources Marines et MinièresTahiti, Polynésie franç[email protected]

Page 110: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

217216

La pêche côtière concerne l’exploitation desressources marines comprises entre la zone littoraledes îles jusqu’à la profondeur de 100 mètres. L’atlasdes récifs coralliens de Polynésie française édité parl’IRD en 2005 (Andréfouët et al, 2005) est la référenceutilisée pour déterminer les superficies récifales desîles de l’archipel des Australes. Celui-ci comprend 6îles dont 5 sont habitées en permanence, ainsi qu’ungroupe de rochers nommés Marotiri et situés àl’extrême sud-est de l’archipel. Seules deux îles(Raivavae et Tubuai) disposent d’un véritable lagon,tandis que trois autres (Rapa, Rimatara et Rurutu)sont entourées de récifs frangeants, et que Maria estun petit atoll dont le lagon est proche du comblement.Les îlots Marotiri, groupe de 10 rochers émergés surun socle sous-marin d’environ 19 km². Le haut-fondd’ «Arago» (Tinomana) et un autre haut-fond situé aunord-ouest de Rimatara, présentent une couverturecorallienne ; ils ne seront pas traités dans ce chapitre

car leur exploitation reste occasionnelle et concerneprincipalement des ressources pélagiques. Il en serade même des grands bancs « Neilson » et « PrésidentThiers «. Le Tableau I indique qu’environ 40% de lasuperficie récifale des Australes est constituée parleurs pentes externes.

introduction

Le nombre de fiches de pêche renseignées par lespêcheurs et disponibles à la Direction desRessources Marines et Minières (DRMM) est trèsfaible et ne permet aucune exploitation (Tableau II).Les seules données officielles disponiblesconcernent les déclarations annuelles de transportde produits des Australes vers Tahiti, produites parla Direction du Port et des Affaires Maritimes (DPAM)dont le Tableau III compile les données entre 2005et 2013. La majorité du tonnage des produitsexportés concernerait des poissons récifaux et dela chair de bénitier lorsqu’ils proviennent deTubuai et Raivavae, et des poissons majoritairementpélagiques lorsqu’ils proviennent de Rapa. Desdonnées en provenance du Service duDéveloppement Rural (SDR) de Tubuai, de Raivavaeet de Rapa, sont également disponibles pour lesannées 2006, 2009 et 2011 (Tableau IV) ; ces donnéesdivergent sensiblement de celles produites par laDPAM, mais sont considérées comme donnant lameilleure estimation des véritables quantités de

produits exportés des îles.Le principal exercice a consisté à effectuer desestimations sur la base d’analyse des donnéesdisponibles et d’informations contenues dans desrapports de missions effectuées par des agents dela DRMM au cours de ces dernières années. LeTableau V compile les principales donnéesd’estimation des productions récifales de chaqueîle, ainsi que les mouvements interinsulairesschématisés sur la figure 1. Tubuai et Raivavae,disposant d’un véritable lagon, dominent laproduction de produits récifaux et assurent lesprincipales exportations sur Tahiti mais aussi versles autres îles de l’archipel. Rurutu et Rimataradisposant de faibles superficies récifales, exploitentfortement leurs ressources, avec des rendementsqui dépassent 3 tonnes/km². Enfin, lesconsommations les plus fortes en matière deproduits récifaux s’observent dans les îles les plusreculées, Rapa et Raivavae avec plus de 50 kg parhabitant et par an.

données disponibles et estimations de la pêche côtière

superticierécifale

lagonaire

806192391174

superticiepente

externe

31956145832137

îles

MariaMarotiriRaivavaeRaparRmataraRurutuTubuaiTotal

superticierecifale totale

111911723711123311

TABLEAU ISuperficies récifales (km²) des îles australes(source : atlas des récifs coralliens de Polynésie française)

Ra'ivavae RAPA

2007200820092010201120122013TOTALPERIODE

21112

RurutuRimatara

53141130100424

1121

2

5649045

204

111

4812

111

1

7311216

201

12211

2

583444211

185

TUBUAI

TABLEAU II Données de pêche disponibles à la DRMM (source : DRMM).

Ra'ivavae RAPA

200520062007200820092010201120122013TOTAL PERIODE%

16262024242013121216720%

RurutuRimatara

65*342019201785519323%

1212122111112118310%

40424950564029262035242%

TUBUAI

TABLEAU III - Exportations de produits marins (tonnes) vers Tahiti par voie maritime (source : DPAM).* chiffre modifié pour tenir compte de transferts effectués par un navire de la flottille administrative

9535610111415%

14211910411911798534539836

total

données 2006îles

Raivavae

Rapa

Tubuai

Total bénitier exportTotal poisson exportTotal langouste export

bénitierpoissonlangoustebénitierpoissonlangoustebénitierpoissonlangouste

20082007

29 5089 2321 956

038 325

017 40032 423

046 90879 9801 956

23 52012 6631760ndnd

16 27025 400

039 79038 063176

24 58314 7031730

49 7830

17 05031 780

041 63396 266173

2009

TABLEAU IVDonnées d'exportations de produits marins (kg) entre 2006 et 2011 pour Raivavae, Rapa et Tubuai (source : SDR).

15 26823 5988230ndnd

15 3409 800

030 60833 398823

116 48088 1173 219

0127 198

0110 235174 953

0226 715390 2683 219

total2010

10 44013 204

00ndnd

28 40053 300

038 84066 504

0

13 16114 717

910

39 0900

15 77522 250

028 93676 057

91

2011

pêcheurs jours pêche pêcheurs jours pêche pêcheurs jours pêche pêcheurs jours pêche pêcheurs jours pêche

îles habitants (2012)

RaivavaeRapaRimataraRurutuTubuaiTotal Australes

surfaces totales récifssurfaces terres

947 515 879

2 325 2 173 6 839

11723711123281

52,813,1105,169,847,947,4

nb hab/km² terres

17,9539,298,3633,2945,4144

8,122,4125,6211,417,724,3

nb hab/km² récif

TABLEAU VIDensité de population par unité de surface terrestre (km²) et par unité de surface récifale (km²)(source : ISPF et atlas des récifs coralliens de Polynésie française).

Page 111: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

219218

Raivavae

117

60,90

1,2610,65694750,854

29,015,014,03,03,0

76,953,023,80,1

20,00,10,21,02,00,30,10,1

Rapa

22,5

8,68

3,7101,43151530586,05,01,03,51,02,532,325,07,20,1

1,00,54,00,51,00,2

superficie récifo-lagonaire avec pente externe (km²)superficie récifo-lagonaire sans pente externe (km²)rendement (tonne/km² lagon)rendement (tonne/km² total récif)population 2012produits lagonaires consommésconsommation( kg/hab)Total exportpoissons exportésinvertébrés exportésTotal importpoissons importésinvertébrés importésProduction localepoissons récifauxinvertébrésalguesInvertébrésbénitiermaoapieuvreautres mollusqueslangoustesautres crustacésoursinsholothuries

TABLEAU V Estimations de productions, d'exportations et d'importations de produits récifaux pour chaque île des Australes (source : DRMM).* Maximum annuel enregisté mais exploitation rare ces 10 dernières années

Marotiri*

19

0,07900

export1,51,00,50,0

1,51,00,5

0,5

Rimatara

6,75

2,20

9,5913,12687921241,51,00,51,50,51,021,318,32,80,2

0,10,20,10,50,50,20,21,0

Maria*

11,28

7,99

0,1380,098

00

export1,00,50,50,0

1,10,50,6

0,1

0,3

0,2

Rurutu

11,41

3,28

11,4023,2782 32544191,01,00,07,55,02,537,733,04,40,3

0,10,30,51,00,20,32,0

Tubuai

123,01

90,88

1,5051,1122 1738238

55,030,025,00,50,5

137,1105,031,80,3

25,00,13,01,02,00,30,30,1

Total

311174

1,765

0,987

6 83922833

95,053,541,516,010,06,0

307,9235,871,11,0

45,10,64,63,510,31,51,93,6

FIGURE 1Schéma des transfertsinterinsulaires de produitsrécifaux.

famille commune

aiguilletteaiguillettebalistebalistebalistebécunecaranguecaranguecaranguecaranguecaranguecarangue

caranguecaranguecaranguecaranguecaranguecaranguecaranguechirurgienchirurgienchirurgienchirurgienchirurgienchirurgienchirurgienchirurgienchirurgienchirurgienchirurgienchirurgienlabrelabrelabrelabrelochelochelochelochelochelochelochelochelochemuletmuletmuletmuletperchepercheperchepercheperchepercheperchepercheperchepercheperchepercheperroquetperroquetperroquetperroquet

perroquetperroquetperroquetperroquetperroquetperroquetperroquetperroquetpicotpicotpoisson coffrepoisson coffrepoisson coffrepoisson vachepoisson vachepoisson angepriacanthepriacanthe

espèce

Hyporhamphus affinisTylosurus crocodilusBalistoides undulatusPseudobalistes flavomarginatusPseudobalistes fuscusSphyraena barracudaAlectis indicusCarangoides ferdauCarangoides orthogrammusCaranx ignobilisCaranx lugubrisCaranx melampygus

Caranx papuensisCaranx sexfasciatusGnathanodon speciosusPseudocaranx dentexScomberoides lysanSelar crumenophthalmusUraspis helvolaAcanthurus guttatusAcanthurus leucopareiusAcanthurus lineatusAcanthurus nigricaudaAcanthurus triostegusAcanthurus xanthopterusCtenochaetus striatusNaso annulatusNaso hexacanthusNaso lituratusNaso unicornisZebrazoma veliferumBodianus perditioCheilinus chlorurusCheilinus trilobatusCoris aygulaCephalopholis argusCephalopholis sexmaculataCephalopholis urodetaEpinephelus fasciatusEpinephelus lanceolatusEpinephelus merraEpinephelus tauvinaPlectropomus laevisVariola loutiCrenimugil crenilabisEllochelon vaigiensisMugil cephalusNeomyxus leuciscusAphareus fuscusGnathodentex aureolineatusLethrinus atkinsoniLethrinus olivaceusLethrinus xanthochilusLutjanus boharLutjanus fulvusLutjanus gibbusLutjanus kasmiraLutjanus monostigmaMonotaxis grandoculisPlectorhynchus picusCetoscarus ocellatusChlorurus frontalisChlorurus microrhinosChlorurus sordidus

Leptoscarus vaigiensisScarus altipinnisScarus forsteniScarus ghobbanScarus globicepsScarus ovicepsScarus rubroviolaceusScarus schlegeliSiganus argenteusSiganus spinusArothron hispidusArothron meleagrisArothron stellatusOstracion cubicusOstracion meleagrisPomacanthus imperatorHeteropriacanthus cruentatusPriacanthus hamrur

nom français

Demi-becAiguillette crocodileBaliste striéBaliste géantBaliste marbreBarracudaCarangue écheveléeCarangue rayéeCarangue tachetéeCarangue à grosse têteCarangue noireCarangue bleue

Carangue mouchetéeCarangue aux gros yeuxCarangue d'orCarangue à grosses lèvresCarangue leurreChinchardCarangue striéeChirurgien mouchetéChirurgien à marques jaunesChirurgien zébréChirurgien à queue blancheChirurgien bagnardPoisson docteur à nageoires jaunesChirurgien noirNason à rostre longNason noirNason à éperon orangesNason brunChirurgien à voileLabre bananeLabre maori trilobéLabre maori trilobéLabre peigneMérou célesteLoche sanguineMérou drapeauLoche écarlateMérou géantLoche rayon de mielLoche mouchetéeLoche saumonéeLoche caméléonMuletMulet carreléMulet cabotMulet argentéPerche ardoisePerche d'orTamouréBec de cane à museau longBec de cane à museau courtLutjan rougePerche à bord jaunesPerche pagaiePerche à raies bleuesPerche à tache noireDaurade tropicalePerche peintePerroquet bicolorePerroquet tatouéPerroquet grand bleuPerroquet grenat

Perroquet pétrolePerroquet océanPerroquet mauvePerroquet sourisPerroquet masquéPerroquet bananePerroquet lie-de-vinPerroquet rayéPicot tachetéPicot rayéTétrodon marbréTétrodon mouchetéTétrodon étoilePoisson cubePoisson coffre ponctuéPoisson ange empereurPriacanthe sanglantPriacanthe sanglant

nom tubuai

iheaavereoiri tahora

onopaamoamatu manini

upoorahi, urupiti

harehare (p), autea (p), paaihere ninamu, uruatipaaihere reareaomuripaaihere toretorematueutuature

api

maroa

maninioturi paraimaitoume herepotiume turipoume tareiitipi ume (p), umeumuumu

roi

hapuu matapotaraohapuu oahatarao tonu (p), tonu

orie (p), orierie (p), anae, tehuanae raufau

taaharimaenetamureoeooeohaameatoautuharataape

muraeahau taaone (m), hauraura (f)nohepai'e (m), pa'e (f)paati paapaa mahana (m), pahoro utu meumeu (f)tamoehau meretue (m), roro (f)paati, pahoromamaria (m), rotea (f)uhu a'au

moreo ninamu (m), moreo (f)paho otimaemae (p), moravamaemae (p), tumoatete

momoaumuumuponuponu

nom raivavae

himu moanaono

matuurupitiruhi

auteamataoru, matapuu

ature

api purepureapimaroaparaimanini

maitoume herepoti

ume tareiumererehaumarateatiapiropapaehauparoi

hoahoa

taraohapuu mauritonuhahateaanaeanae

uoa

taraihitamure

oeo

toau

taivaivamuraeamaietauhaupa'e'epaati

moemoehaumeretue (m)

rotea (f)

otimoravatumoe

ariari tohoramoamoa

otumutumu

opa

nom tahitien

iheaavereoiri panitorooiri maheooiri utaroonopaaihere auveveru, auauverupahurupahuru pataupoo rahi, uruatiruhipaaihere

auteaomuripaaihere manini

raiature, orarepaiaapimaito aero uouomaroaoturimaniniparaimaitoume herepotiume turipoume tareiume paairiaeopooumara papaemara papaepataitairoirari, rorenohonohu taraotarao matapuuhapuu rerutarao marauraufaroatonuhoaauoa (p), tehunapeanaeauoaparumaenetamureoeo uturoaoeo utupoto - oeo tiamuhaameatoautuharataapetaivaivamuatara nato - oneoneuhu totokeuhu atoa (m),uhu nanao (f)uhu raepuupaati paapaa auahi (m), pahoro hohoni (f)tapiouhu opara ninamu (m), uteute (f)paati opu tautau, pahoro houuhu aopaati nanaopaati hiumaa (m), pahoro toruro (f)mamaria (m), moreo (f)paati tapu (m), pahoro tore (f)maravapaauarahuehuehuehue ereerehuehue mororimomoa afatamomoaparaharahamata anaana maere

nom rapa

maheoutaro

aruru

omuri

maturai

aruru

maito

turipoume tareiume tara

roirari

rariapukutaraoharoaatara

kanaenapeutuututehu

tamureoeo

toau

taape

ugu, uhupanaunau

komokomo

pahoro

parapoatu, marava

kopa

poissons

TABLEAU VII - Tableau de correspondances des noms vernaculaires et des noms scientifiques pour les îles de Raivavae, Rapa et Tubuai.

Page 112: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

221220

raivavae

Chaque île présente des particularités sur les pratiques et les usages. Toutes ces informations sont issues de rapportsde mission de la DRMM (Stein, 2005, 2006, 2007, 2010 - Ebb et Faana, 2009). Le Tableau VI indique les densités depopulation humaine par unité de surface terrestre et par unité de surface récifale. Pour permettre une identificationplus précise des principales espèces citées dans ce chapitre, le Tableau VII donne les correspondances entre les nomsvernaculaires et les noms scientifiques pour les poissons et les invertébrés lagonaires.

descriptif sommaire de la pêche côtière dans chaque île

Raivavae présente une densité de population de 53habitants/km², et la plus faible densité de population parrapport aux surfaces récifales avec 8 habitants par km²de récif. Cette île dispose d’un véritable lagon qui couvreune superficie de 60,9 km² ainsi qu’un vaste platier récifalexterne qui s’étend de manière remarquable vers le sud(banc Teaoa).Quasiment chaque famille dispose d'une embarcation detype pirogue à rames et les embarcations motoriséessont moins courantes. La population de Raivavaeconsomme beaucoup de poisson lagonaire et enrevanche très peu d'invertébrés. Cette dernièreconstatation est en contradiction avec l’analyserapportée dans le rapport PROCFish (SPC, 2009) quiindiquait une forte consommation de bénitier par lapopulation.Pour les poissons, les techniques les plus utilisées sontpar ordre décroissant : la pêche au fusil sous-marin(essentiellement de jour), le harpon, la pêche à la ligneet la pêche au filet maillant. La chasse sous-marine ciblesurtout les grands perroquets, les nasons, les mérous,les « nanue » (Kyphosus sp.) et les « morava » (Siganusargenteus). La pêche au harpon cible les grandsperroquets, les mérous et les mulets. La pêche à la lignecible les mérous, les lutjans mais aussi les perroquets(technique du « tutae fe’e ») et les «ume» Nasounicornis. Le filet maillant est déployé pour la capturedes perroquets et des « nanue ». Les poissons lesplus recherchées à Raivavae sont les «morava» et les«nanue». Le poisson lagonaire commercialisé localement estdestiné essentiellement aux pensions de famille et àl’exportation sur Tahiti. Selon les données du SDR deRaivavae entre 2006 et 2011 (Audouin C. – com. pers.), de9 à 24 tonnes de poissons sont exportées chaque annéede Raivavae, essentiellement des poissons lagonaires(entiers, congelés et emballés dans des sacs).La population locale consomme peu les invertébrés(oursins, crustacés) ; elle est peu friande d’algues,

d’holothuries et de mollusques, à l’exception toutefois dela pieuvre dont la chair est très recherchée. Même lebénitier, pourtant très abondant, est peu consommé;l’essentiel des pêches est destiné à l’exportation. Leramassage de coquillages pour la fabrication de colliersest bien développé.Une production importante de chair de bénitier a débutéen 2003 dont les quantités annuelles à l’exportation parvoie maritime (SDR de Raivavae depuis 2006) ont toujoursété supérieures à 10 tonnes avec un pic de 29 tonnes en2006. La réelle production annuelle au cours de cettepériode peut être estimée entre 10 et 30 tonnes. Le stocktotal de bénitiers de Raivavae en 2005 a été estimé à 11millions d’individus pour une biomasse de 450 tonnes dechair de bénitier (taille réglementaire supérieure à 12cm). En 2010, une nouvelle estimation donnait les valeurssuivantes : 8,5 millions d’individus, biomasse en légèrehausse à 503 tonnes (Gilbert et Andrefouet, 2006 -Andrefouet, 2010). On peut considérer que la forteexploitation du bénitier à Raivavae entre 2006 et 2011,estimée à 103 tonnes de chair (SDR de Raivavae)correspond à environ 1 million d’individus et estcompatible avec l’analyse effectuée par Andrefouet(2010). Il semblerait que le lagon disposait avant lesannées 70 d’un stock de bénitiers beaucoup plus faiblequ'aujourd'hui.Depuis l'ouverture de l'aérodrome en 2002, deschangements alimentaires s'opèrent progressivementau sein de la population du fait des contacts de plus enplus importants avec les membres de leur famillerésidant à Tahiti et venant passer leurs vacances dansl’île. Certains produits tels que la langouste prennent dela valeur du fait de commandes effectuées par lespensions de famille et des holothuries ont étécommercialisées en 2012.La zone nord de Raivavae est considérée encoreactuellement à grand risque ciguatoxique pour certainesespèces incluant le bénitier, mais la situation s’estnettement améliorée depuis 10 ans.

type

crustacés

échinodermes

mollusques

espèce

Bathynarius albicinctusGrapsus tenuicrustatusLysiosquilla maculataPanulirus pascuensisPanulirus penicillatusParribacus antarcticusScylla serrataScyllarides haaniiAcanthaster planciActinopyga mauritianaDiadema savignyHolothuria atraHolothuria leucospilotaThelenota ananasAsaphis violaceaGafrarium sp.Lambis truncataModiolus auriculatusOctopus sp.Octopus cyaneaPatella sp.Tridacna maximaTurbo setosusdivers sp.

nom français

Pagure marinCrabe coureur communSquilleLangouste de RapaLangouste épineuseCigale savateCrabe vertCigale de HaanCouronne d'épinesHolothurie de brisantsOursin longs piquantsHolothurie lollyHolothurie à filaments blancsHolothurie ananasPalourde violacéeCoqueSept-doigtsModiolePieuvre de rocherPieuvrePatelleBénitierEscargot turban rugueuxpetits coquillages

nom tubuai

oa'oaaraihivaro

paapaa pavai

taramearori atiharavanarori ereere

rori tarataraahitotoapu pae ho'euutau

fee

pahuamaoapupu

nom raivavae

varo

oura mitioura papapaapaa

taramearori oru

fee

pahuamaoapupu

TABLEAU VIITableau de correspondances des noms vernaculaires et des noms scientifiques pour les îles de Raivavae, Rapa et Tubuai.

nom tahitien

u'a mititoetoevaro

oura mititianeeupai

taramearori papaovana tara roarori toto

rori euataahituaipu tarauu

feemapihipahuamaoapupu

nom rapa

toetoe

kourakoura tahitikoura papa,kopapapaapaakopapa

rori ofaivana

rori tiare

fee pari

pagii

invertébrés

famille commune

raieraieraierequinrequinrequinrequinrougetrougetrougetrougetrougetsurmuletsurmuletsurmuletsurmuletsurmuletsurmuletsurmuletsurmuletsurmuletthondiversdiversdiversdiversdiversdiversdiversdiversdiversdivers

diversdiversdiversdiversdivers

espèce

Aebatus narinariHimantura faiManta birostrisCarcharhinus amblyrhynchosGaleocerdo cuvierSphyrna lewiniiTriaenodon obesusAdioryx lacteoguttatusMyripristis amaenusMyripristis berndtiMyripristis murdjanSargocentron spiniferMulloïdichthys flavolineatusMulloïdichthys samoensisMulloïdichthys vanicolensisParupeneus barberinusParupeneus cyclostomusParupeneus ciliatusParupeneus insularisParupeneus pleurostigmaUpeneus vittatusGymnosarda unicolorAlbula glossodontaAulostomus chinensisBothus mancusCantherhines dumeriliChaetodon aurigaChaetodon ulietensisChanos chanosCheilodactylus plessisiDiodon hystrixKyphosus cinerascens/pacificus/bigibbusKyphosus vaigiensisPlatax orbicularisPolydactylus sexfilisSaurida binotatusZanclus cornutus

nom français

Raie léopardRaie griseRaie mantaRequin gris de récifRequin tigreRequin marteau à festonsRequin pointes blanches du lagonEcureuil rayéRouget aux gros yeuxRouget de BerndtRouget à œillèresSoldat arméSurmulet auriflammeSurmulet appâtSurmulet sans tacheBarbillon rayéBarbillon travestiPoisson chèvre à lignes blanchesPoisson chèvre insulairePoisson chèvre à une sellePoisson chèvre rayéThon à dents de chienPoisson osPoisson trompetteSole tropicaleArbaletrier grisPapillon à antenne, cocherPapillon à sellePoisson laitPoisson triangle de PlessisDiodon porc-épicSaupe tropicale/du pacifique

Saupe cuivréePoisson luneTarpon des sablesPoisson lézardPoisson cocher

nom tubuai

faimanufaifafa pitiraira, mao aahimao maninimao hamaratorirearaverauu, iihi

apaioumaoumaoumaahuru

aturi

atiatia

vauio, ioiofaniu

paraharaha

omaa (p), ava

totaranato (p), nanue

nato, nanueparaha pereuemoi

paraharaha

nom raivavae

haihaharua

ihiihiihiihi

apai

tauoahurumoana

taira

vete raava

patiihimu

tiarara

totaraara'e (p), nanue

mo'e

moeonetiarara

nom tahitien

faimanufai iufafapitirairamao toretoretaumatamamaruaraoeiihiiihiiihiapaivetevetetauoahuru toreahuru haravaiahuru paaatiatia upoo rahiatiatiafaiavauioioaupapapatiioiri maimaiparaharahaparaharahaomaa (p), ava

totarananue

nanueparahapeuemoimoo mitiparaha tore

nom rapa

iihi

vauioio

pukakea

karamami (p),nanue, pakavaiume

moi

poissons

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223222

rapa

Rapa est l’île habitée la plus méridionale de Polynésiefrançaise ; elle présente la plus faible densité depopulation des Australes avec 13 habitants/km², et unefaible densité de population par rapport aux surfacesrécifales avec 22 habitants par km² de récif. Rapa n’a pasde véritables récifs mais dispose de platiers corallienssur la majorité de son pourtour. L’île est par ailleursentourée d’une vaste plate-forme insulaire sous-marinepuisqu’à 3 km des côtes où la profondeur reste inférieureà 100 m.Les activités de pêche à Rapa, bien qu’artisanales, sonttrès développées. Chaque famille possède une unité depêche, généralement un speed-boat en bois de 4 à 6mètres équipé d’un moteur hors-bord, et participe auxprélèvements de produits marins.La pêche à pied concerne essentiellement les algues etles mollusques telles que les patelles « pagii », les petitspoulpes de rocher « fe’e pari » ainsi que les petitscoquillages « pupu » servant à la confection des colliers.La pêche à la ligne vise la capture de poissons carnivores(mérous, carangues, lutjans, holocentridés, etc.) appâtéshabituellement avec de la chair d’exocets, mais aussi lacapture de poissons herbivores tels que les « nanue », lepoisson préféré de la population souvent appâté avec dela chair de langouste. La pêche en plongée concerne unegrande diversité d’organismes tels que les langoustes «koura », les cigales « kopapa » les oursins « vana », lespoulpes « fe’e » et bien sûr de nombreuses espèces depoissons capturées au fusil sous-marin. La langouste laplus commune « koura », Panulirus pascuensis, seretrouve aussi à Rapa Nui mais c’est Panuliruspenicillatus, « koura Tahiti », qui est l’espèce dominante,moins appréciée par la population. Le type de poisson leplus convoité est le « nanue » qui possède d’ailleursplusieurs noms en fonction de sa taille. Plusieursespèces co-existent : Kyphosus vaigiensis, K. bigibbus etK. pacificus ; l’affectation des noms vernaculaires auxdifférentes espèces n’est pas bien établi. Ce poisson estsi recherché que sa valeur n’est pas établie au poids,mais à l’unité. À côté des «nanue», il y a toute unepléiade d’autres espèces qui sont ciblées telles que lesperroquets, mérous, perches, becs de cane, rougets,nasons, carangues, etc. Le « rari » Epinephelus fasciatusest le poisson préféré au mois de mars ; il devient alorssi gras que sa livrée passe du rouge au noir. Au mois dedécembre, autour de la nouvelle lune, se passe lephénomène appelé « matenga » ; durant 2 à 4 jours, desmilliers d’exocets « ma’o’o» Cypselurus sp., etCheilopogon sp. viennent pondre dans certaines baies,attirant tous les carnassiers des environs (carangues,

requins, etc.). Ce phénomène est très attendu par leshabitants de Rapa qui peuvent alors facilement capturertoutes sortes de poissons mais du fait de l’abondance desrequins, la pêche sous-marine est interdite.Le poisson qui n’est pas destiné à la consommationlocale est mis à congeler, entier, en sac d’un poidsunitaire d’environ 30 kg, dans une chambre froidecommunale. À raison de 100 pêcheurs apportant chacunenviron 150 kg de poisson en deux mois, les quantitéspeuvent atteindre facilement 15 tonnes et 6 voyages decaboteurs à 15 tonnes donnent 90 tonnes, ce quicorrespond aux données d’exportations enregistréescertaines années. Ce poisson congelé est envoyéprincipalement à des parents qui vivent à Tahiti, lesquelsleur renvoient en échange d’autres produits alimentairesou biens de consommation.Les poissons pélagiques sont estimés constituer environ3/4 des produits exportés de Rapa. Les quantités deproduits lagonaires exportées avant 2009 représententdonc environ 20 tonnes, en majorité composés depoissons récifaux, mais aussi de langoustes. La flambéesoudaine de ciguatéra qui a touché durement Rapa en2009, a choqué les habitants qui n’avaient pas étéconfrontés jusqu’alors à cette intoxication. Laconséquence directe a été une baisse sensible desexportations entre 2009 et 2013.Le Tomite To’ohitu de Rapa, sorte de Conseil des Sages,est respecté et très actif. En concertation avec lesautorités communales, un rahui a été mis en place àRapa depuis au moins une quinzaine d’années. L’île estdivisée en deux zones : la zone ouest reste ouverte à lapêche alors que la zone est en face des villages estfermée, à l’exception de la pêche à la ligne. Cette zonede réserve n’est ouverte qu’exceptionnellement, deuxfois par an, à l’occasion de festivités importantes ou lorsde visites de personnalités. Par ailleurs, la pêche au filetet la pêche sous-marine de nuit sont interdites toutautour de l’île.Lorsque les conditions de mer le permettent, lacommune organise le samedi, le transport en bateau depêcheurs pour qu’ils rejoignent les sites de pêche horsde la zone de réserve. Les prises sont mises en communet redistribuées à l’ensemble des participants. Lorsquel'occasion se présente, les pêcheurs de Rapa effectuentune campagne de pêche aux îlots Marotiri, ciblantprincipalement les « nanue » et les langoustes, grâce auxnavires de l'administration ou de l'armée en visite. Unecampagne a été effectuée en 2014 mais la précédenteremonte à plus de 7 ans.

rimatara

Rimatara présente la plus forte densité de populationdes Australes avec 105 habitants/km², et la secondeplus forte densité de population par rapport auxsurfaces récifales avec 125 habitants par km² de récif.L’île est entourée d’un récif frangeant entaillé denombreux petits passages que seules de petitesembarcations peuvent emprunter par temps calme. Àla pointe Sud, le platier récifal s’élargit une sorte delagon appelé comme tel par les habitants. Au-delà durécif frangeant, s’étire un plateau en pente doucepuisqu’à 500 m de distance de la côte où la profondeurest inférieure à 100 m.En 2005, on pouvait dénombrer une cinquantaine depirogues de pêche, essentiellement monoxyles car plusrésistantes aux frictions sur le récif lors des sorties enmer. Les pirogues sont mues par des rames ouéquipées de moteurs hors-bord de 6 à 15 CV.Aucun professionnel de pêche lagonaire n’est recenséen 2014, mais quasiment toute la population s’adonneà la pêche pour satisfaire ses besoins alimentaires ; lecommerce des produits de la mer est quasimentinexistant à Rimatara.La pêche à pied mobilise toute la population dont lesfemmes et les enfants avec pour espèces ciblées lesholothuries «rori», les algues «rimu» et les petitscoquillages servant à la confection de colliers. Toutesles espèces d’holothuries sont concernées, notammentHolothuria atra, Bohadschia vitiensis, Holothurialeucospilota et Actinopyga mauritiana. Les alguesconsommées sont des caulerpes, Caulerpa racemosa.La pêche à la ligne sur le récif frangeant, avec unappât constitué d’un thalle d’algue, cible les « ume »Naso unicornis et les «nanue» Kyphosus sp. Les

holocentridés «uu» et les mérous sont pêchés avec unappât à base de poisson ou de pagure. La pêche sous-marine mobilise surtout les jeunes gens qui plongentles mollusques «pupu», Turbo setosus, et plusieursespèces de poissons : perroquets, carangues, nasons,mérous, labres, chirurgiens, holocentridés, etc. Cetype de pêche constitue aujourd’hui la majorité desapports en produits marins de l’île. Il existe une petitepêcherie sur la pente externe, visant en particulier unmérou dénommé «hahatea», Epinephelus fasciatus,particulièrement apprécié et pêché à la ligne de fond.À environ 18 milles nautiques dans le nord-ouest deRimatara, existe un haut-fond de grande taille dont lesommet se situe autour de 80 mètres de profondeur ;il est quelquefois visité par les pêcheurs de Rimataraqui font alors d’excellentes pêches, notamment degrosses carangues «urua», Caranx ignobilis, et demérous. Enfin, des pêches sont occasionnellementeffectuées sur l’île de Maria, ciblant surtout lalangouste Panulirus penicillatus, le «pupu» Turbosetosus et des holothuries.La ciguatéra ne constitue pas un problème àRimatara, bien que certaines espèces de poissons dezones situées à proximité d’ouvrages portuairessoient considérées comme suspectes.Le samedi est le jour consacré par une grande partiede la population à la recherche de nourriture etmérite tout à fait sa traduction de «mahana ma’a» .Le Tomite To’ohitu a instauré un « rahui» tournant,divisant l’île en trois secteurs maritimes dont un seulest ouvert chaque année.

Préparation du poisson au retour d'une pêchecommunautaire, Rapa.© Nicolas Ebb/Frédéric Faana – 2009

Pirogues de pêche de Amaru, Rimatara.© Arsène Stein – 2005

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225224

ANDREFOUET S., CHAUVIN C., SPRAGGINSS.,TORRES-PULLIZA D, KRANENBURG C., 2005 - Atlasdes récifs coralliens de Polynésie française. Centre IRDde Nouméa, février 2005, 38 pages + 86 planches.

ANDREFOUET S., 2011 – Rapport final de la conventionn°2558/MRM/SPE du 8 avril 2010 relative à la gestionde l’exploitation du bénitier dans 2 îles de Polynésiefrançaise, août 2011, 28 pages.

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STEIN A., 2007 - Rapport de mission à Tubuai enoctobre 2007 - Service de la pêche, 4 pages + 1 annexe.

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bibliographie

tubuaiTubuai présente une densité de population de 48habitants par km², et la seconde plus faible densité depopulation par rapport aux surfaces récifales avec 18habitants par km² de récif.La pêche lagonaire est beaucoup plus productive que lapêche océanique et les produits lagonaires constituentd’ailleurs l'essentiel des exportations à base de poissonset de chair de bénitier.La chasse sous-marine cible principalement lesperroquets, «nanue», nasons, marava, mérous etcarangues et se pratique de jour comme de nuit. Unetechnique originale nommée « tâapo’o » ou « turama »est pratiquée à Tubuai depuis plus de 40 ans et consisteà rabattre les poissons à l’aide d’un bateau à moteur etde les maintenir dans les coraux en tournoyant autourpour laisser le temps au chasseur de les dénicher dansleurs cachettes : nasons, perroquets et « nanue ». Lapêche au filet maillant cible surtout les « ature », Selarcrumenophthalmus, et certains poissons tels que les«nanue », perroquets et « morava », Siganus argenteus.Il existe par ailleurs des filets encerclant qui sont utiliséspour la pêche des « nanue ». Cette dernière pêche sedéroule de temps à autre pendant l’été austral, sur lapente externe et par mer très calme, avec des capturesqui peuvent varier entre 300 kg et 2 tonnes par pêche.La pêche à la ligne cible des carnivores tels que lesholocentridés, mérous et priacanthidés, mais aussi desherbivores et corallivores comme les perroquets, les

chirurgiens, les picots, les « nanue et les nasons, grâceà l’utilisation d’un appât spécial appelé « tutae fee »,littéralement appât « fait à partir d’encre de pieuvre ».La pêche au harpon n’est encore pratiquée que par unepoignée de pêcheurs et cible essentiellement lesperroquets à partir du récif barrière.Les poissons les plus appréciés localement sont les«morava», les «ume» et les «nanue», qui subissentdonc une pression de pêche importante. Les perroquetsconstituent les prises les plus fréquentes et composentla majorité des poissons qui sont exportées de Tubuai.Selon Audouin (com.pers.), environ 30 à 50 tonnes depoissons ont été exportées annuellement entre 2006et 2011.La seconde production majeure de Tubuai concerne lachair de bénitier, dont les quantités annuelles àl’exportation par voie maritime ont toujours étésupérieures à 15 tonnes depuis 2006 avec un pic à 28tonnes en 2010. La réelle production annuelle pour cettemême période peut raisonnablement être estimée entre18 et 32 tonnes en tenant compte de l’autoconsommationet des exportations par voie aérienne. Le stock total debénitiers de Tubuai a été estimé à 48,4 millionsd’individus en 2004 pour une biomasse de 2.050 tonnesde chair de bénitier de taille réglementaire (supérieureà 12 cm). En 2010, une nouvelle estimation donnait lesvaleurs suivantes 47,6 millions d’individus, et unebiomasse en hausse à 2.500 tonnes (Gilbert et

La pêcherie récifo-lagonaire des Australes estexploitée globalement de manière artisanale pourcouvrir en priorité les besoins alimentaires locaux.Des transferts de poissons récifaux, mais aussid’invertébrés, sont effectués majoritairement surTahiti afin d’approvisionner les membres des famillesqui y résident. Il en est de même vers les autres îlesde l’archipel qui ne disposent que de ressourceslimitées (Rurutu) ou pour diversifier les produitsconsommés : poissons de Rapa vers Tubuai etRaivavae, bénitiers de Raivavae et Tubuai vers Rapa,

Rurutu et Rimatara. Le principal produit qui faitl’objet de transferts purement commerciauxconcerne la chair de bénitier en raison d’unedemande permanente de Tahiti ; ce réseaucommercial existe depuis plus de 40 ans à Tubuaimais n’a qu’une dizaine d’années d’existence àRaivavae. Le commerce du poisson lagonaire neconcerne actuellement que l’île de Tubuai où certainspêcheurs ont pu développer un réseau commercialavec les îles de l’archipel et surtout avec Tahiti.

conclusion

rurutu

Rurutu présente une densité de population de 70habitants par km², et la plus forte densité de populationpar rapport aux surfaces récifales avec 211 habitantspar km² de récif.Peu de données sont disponibles sur la pêche récifaleà Rurutu qui est malgré tout pratiquée essentiellementpar les hommes notamment la chasse sous-marine.Les pêcheurs disposent généralement de pirogues nonmotorisées, et ciblent majoritairement les « ume » etles «nanue», autoconsommés ou commercialiséslocalement. La vingtaine de pêcheurs régulierspeuvent pêcher jusqu’à 100 kg par semaine, mais laplupart d’entre eux ne pêchent qu’une à deux fois parsemaine pour une production moyenne de l’ordre de30 kg. La chasse sous-marine de nuit n’a pas encorefait beaucoup d’adeptes à Rurutu. La pêche à la lignereste la pratique la plus répandue, visant à la capturedes «ume» et «nanue», mais également desholocentridés et des mérous. La pêche à la traîne, avec

bateau à moteur, cible les carangues. Le filet est utilisépour capturer les perroquets et les « ature », Selarcrumenophthalmus. Enfin, lors de déplacements trèsoccasionnels effectués sur l’île de Maria, desprélèvements ciblant surtout la langouste Panuliruspenicillatus, le «pupu» Turbo setosus et lesholothuries, sont effectués par les habitants de Rurutuou Rimatara.Malgré une lourde infestation de «taramea»,Acanthaster planci, en 2006 (Lagouy, 2007), il semblequ’elle n’ait pas eu d’impact majeur sur la densité despoissons. La ciguatéra est peu fréquente et neconcernerait qu’une espèce de chirurgien dénommé«api», Ctenochaetus flavicauda, dans une zone biencirconscrite près de l’aérodrome.La pratique du rahui n’est encore vivace que dans lalocalité de Avera et uniquement pour la pêche des«ature», Selar crumenophthalmus, sous le patronaged’un des deux « Tomite To’ohitu ».

Andrefouet, 2006 - Andrefouet, 2010). On peut doncconsidérer que le taux d’exploitation du bénitier àTubuai au cours de la dernière décennie est pérenne.Outre la chair de bénitier, des prélèvements debénitiers vivants destinés à l’aquariophilie ont étéeffectuées à une faible échelle en 2009 et 2010. Unepetite exploitation commerciale d’holothuries aégalement été initiée en 2012.Tubuai a connu par le passé des épisodes deciguatéra toujours liés à des travaux d’extractionscoralliennes dans le lagon nord réalisés dans le butd’améliorer la desserte maritime. La situation s’estsensiblement améliorée depuis 10 ans malgré lesravages causés sur les coraux par le cyclone Oli audébut de l’année 2010.

Prises d'une partie de chasse sous-marine, Tubuai. © Charly Audouin – 2008

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226

Thoniers dans le port de pêche de Papeete.

© Jérôme Petit

EN RAISON DE LEUR ÉLOIGNEMENT DU PORT DE PÊCHE DE PAPEETE, LES EAUX DES AUSTRALES SONT TRÈS PEU

EXPLOITÉES PAR LA PÊCHE HAUTURIÈRE POLYNÉSIENNE.

227

Ce chapitre décrit l’état de l’exploitation actuelledes ressources pélagiques et démersales dansl’archipel des Australes et dans la région ainsi quela situation des stocks des principales espècespélagiques exploitées. L’archipel des Australes n’ajamais était exploité de manière intense et leseaux internationales le jouxtant sont peufréquentées par les flottilles de grands navires depêche étrangers comparativement à celles situéesau nord de la zone économique. Seules lespêcheries étrangères de thons blancs etd’espadons fréquentent à certaines périodes del’année les abords au sud de la zone économique.Ce chapitre traite également de la pêchedémersale profonde qui peut être pratiquéeartisanalement ou de manière plus industrielle surle tombant des îles et les monts sous-marinsenvironnants. Les ressources démersales sontquasiment vierges et n’ont fait l’objet d’aucuneexploitation régulière ces dernières années. Leurhabitat est néanmoins très réduit du fait del’absence de plateau continental et les stocks sontrelativement limités.

LA PÊCHE HAUTURIÈRE PÉLAGIQUE ET DÉMERSALE AUTOUR DE L’ARCHIPEL DES AUSTRALES

CHRISTOPHE MISSELIS Tahiti Tuna ConsultingMoorea, Polynésie franç[email protected]

CÉDRIC PONSONNET Direction des Ressources Marines et MinièresTahiti, Polynésie franç[email protected]

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229228

Le domaine de la haute mer est largement dominanten Polynésie française par rapport aux domainesterrestres et littoraux. Ce milieu est très proche descôtes dans ce système insulaire dépourvu de plateaucontinental. La pêche hauturière est pratiquée dans laplupart des îles habitées des 5 archipels. Une flottille dethoniers polynésiens basés à Papeete, exploiteégalement les ressources de cette vaste surfacemaritime. La pêche hauturière concerne les espècespélagiques qui vivent dans la colonne d’eau et celles,benthiques, qui vivent au voisinage ou sur le fond.Les ressources pélagiques se distinguent desressources démersales car elles sont considéréescomme hautement migratrices contrairement aux

autres qui restent inféodées à leur île ou à leurmontagne sous-marine. Leur gestion ne peut êtreefficace qu’à l’échelle de l’océan. Le potentiel quereprésentent ces ressources doit être considéré àl’échelle géographique du stock qu’elles constituent, enconsidérant la pression de pêche globale qu’il subit, carce sont non seulement les pays voisins qui exploitentces mêmes ressources mais aussi les grands thonierstrans-océaniques des grands pays pêcheurs.Les ressources démersales ont un habitat beaucoupplus restreint et une biomasse beaucoup moinsconsidérable. L’exploitation des espèces profondes estbeaucoup plus fragile et le potentiel économiquequ’elles représentent est ainsi plus limité.

la pression de pêche exercée jusqu’à présent dans l’archipel des australes et ses environs

Depuis les années 50, les ressources hauturières duPacifique Central Sud ont été principalementexploitées par les flottilles thonières des paysindustrialisés de l’hémisphère Nord. Compte tenu dela situation subtropicale et tempérée de l’archipel desAustrales, l’exploitation des ressources pélagiquesest essentiellement le fait des thoniers palangriers.Le thon blanc (Thunnus alalunga) a été la premièreespèce à avoir été exploitée de manière industrielle.Historiquement les palangriers taïwanais ont étéles premiers à cibler ce thon et ils ont étéprogressivement remplacés par les palangrierscoréens (Abbes et al., 1999) qui se sont ensuiteorientés sur le thon obèse (Thunnus obesus). LaChine et ses partenaires océaniens ont récemmententamé le développement d’une vaste flotte depalangriers destinée à cette pêcherie dans lePacifique Centre et Ouest. Ces thoniers palangrierstrans- océaniques exploitent chaque année leseaux internationales au sud des Australesnotamment entre les mois de mars et avril.La Polynésie française a passé ses premiers accordsde pêche avec des flottilles japonaises et coréennesen 1988 pour 65 palangriers de type « sashimi boat ».De 1992 à 2000, période des derniers accords depêche internationaux, seuls les coréens continuaientà pêcher sous licence dans la Zone EconomiqueExclusive (ZEE) de la Polynésie française, et

déployaient l’essentiel de leur effort de pêche au nordde 12°S autour de l’archipel des Marquises pourcibler le thon obèse (Figure 1).À la fin des années 90, les petits états insulairessitués eux aussi dans la bande subtropicale duPacifique Centre et Ouest ont entamé ledéveloppement de l’exploitation de leur ressource enthon blanc. L’effort de pêche déployé par cesflottilles nationales a considérablement augmentéces dernières années. Les plus importantsdéveloppements ont été observés aux îles Cook, auxSamoa, à Fidji, en Polynésie française et au Vanuatu.Les captures de ces palangriers représentaient 33%des captures de thon blanc du Pacifique Sud en 1998 ;elles représentent ces dernières années 50 à 60% descaptures totales (Williams et Terawasi, 2014).Depuis 2004, une pêcherie d’espadons (Xiphiasgladius) a vu le jour en limite de la frontière sud dela zone économique. Des palangriers espagnolsexploitent cette ressource dans les eauxinternationales entre 25°S et 35°S. Contrairement àla pêcherie polynésienne qui cible le thon blanc enprofondeur, ces thoniers déploient leur ligne ensurface et la laisse dériver toute la nuit. Cettestratégie de pêche a pour conséquence de captureren moyenne autant de requins bleus (Prionaceaglauca) et de makos (Isurus oxyrhinchus) qued’espadons.

la pêche pélagique industrielle étrangère

FIGURE 1Proportion de l’effort de pêche despalangriers étrangers dans la ZEE ausud de 20°S.(Source : DRMM).

La pêcherie palangrière locale s’est développée audébut des années 1990 avec l’arrivée des premiersthoniers polynésiens et la conversion de certainsbonitiers à l’utilisation de la palangre pélagique.La pêcherie s’est orientée essentiellement surl’exploitation du thon blanc en zone subtropicale.En 2014, la flotte est constituée de 65 naviresbasés à Papeete dont la taille varie de 13 à 25 m.Ils sont gréés avec des palangres pélagiques enmonofilament de 40 milles nautiques et armés de1 500 à 2 000 hameçons. L’effort de pêche aura étéd’un peu plus de 13 millions d’hameçons posés en2013 ( Direction des Ressources Marines et Minières).Ces thoniers exploitent essentiellement la régionsubtropicale entre 12°S et 22°S et 155°W et 145°W.L’effort de pêche au sud de la zone qui concerne les

îles Australes est donc relativement faible (Figures 2et 3). C’est à la fin des années 90 que certainsthoniers polynésiens ont commencé à s’aventureraux Australes. Certains capitaines avaient décidé decibler l’espadon (Xiphias gladius) en changeant lesgréements et la tactique de pose de leur ligne. En1996, un patron pêcheur accompagné d’un maître depêche hawaiien a réalisé la première campagne depêche à l’espadon dans la partie la plus sud de la ZEEet donc les Australes. Les rendements furent jugéssatisfaisants, et le navire débarqua près de 10 tonnesd’espadons au port de Papeete. Les prix d’achat aubateau n’ont cependant pas été ceux espérés, etl’armateur décida de ne pas renouveler l’expérience.Aujourd’hui, les thoniers ne prennent pas toujours lerisque de pêcher au sud de 20°S où les zones de

la pêche palangrière polynésienne

FIGURE 2Proportion de l’effort de pêche despalangriers polynésiens au sud de20°S et de 25°S dans la ZEE.(Source : DRMM).

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231230

La pêche des grands pélagiques a toujours existé enPolynésie française. Initialement pratiquée non loinde la pente externe, et en particulier dans les trous àthons; elle s’est rapidement étendue vers le largeavec la motorisation des petites embarcationscôtières. Plusieurs techniques sont employées par lespêcheurs côtiers et les pêcheurs des Australes nepêchent pas à la canne mais essentiellement à latraine et à la ligne de fond (Figure 4).La flotte artisanale professionnelle des Australes estcomposée en 2013 de 19 navires (Tableau 1) qui sontuniquement des potimarara. Il existe également despêcheurs de plaisance dont les embarcations, lestechniques et l’efficacité sont souvent similaires àcelles des professionnels.

Les principales espèces ciblées sont assez similairesentre les îles (Tableau II) mais les proportionsdiffèrent sensiblement des autres archipelsnotamment par la prépondérance du thazard(Acanthocybium solandri) et du poisson volant(Cypselurus sp.). A l’inverse, la part du thon blanc estsensiblement plus faible qu’ailleurs malgrél’abondance relative de cette espèce. Ceci est sansdoute à relier au nombre plus restreint de Dispositifsde Concentration de Poissons (DCP) que dans lesautres archipels puisque depuis 1995 seulement 5DCP ont été posées dont les 4 derniers en 2011(Tableau III). La pêche démersale à l’aide de moulinetélectrique est également parfois pratiquée demanière complémentaire pour diversifier lescaptures.

la pêche hauturière artisanale locale

replis, en cas de mauvais rendement en thon blanc,sont peu nombreuses. Les Tuamotu offrent plusd’alternatives et une plus grande abondanced’espèces accessoires. De plus, les conditionsmétéorologiques au sud sont souvent plus rudesque dans la partie subtropicale. La fenêtremétéorologique optimale commence au printempsaustral et finit vers le mois d’avril.En décembre 2006, le service de la pêche a menéune campagne exploratoire au sud de la ZEE avec

6 thoniers polynésiens en se fixant l’objectif demieux comprendre et de mieux caractériser ladistribution des ressources en espadons et en thonsblancs durant le printemps austral. Les thoniersopéraient par carré de 1° pour échantillonner aumieux la zone, mais le ciblage des espèces n’était pasoptimal. Les rendements en thons blancs et enespadons furent faibles et les résultats de pêchene permirent pas une interprétation fiable de ladistribution et du déplacement de ces ressources.

FIGURE 3Carte des lâchers de palangre déclarés par les palangriers polynésiens depuis 1993 au sud de la ZEE. (Source : DRMM).

FIGURE 4Contribution des techniques de pêcheà la production de la pêche artisanalehauturière professionnelle. (Source : DRMM).

TABLEAU I - Evolution de la flotte professionnelle côtière et de sa production estimée sur 10 ans. (Source : DRMM).

2006

RAIVAVAENaviresProduction

RAPANaviresProduction

RIMATARANaviresProduction

RURUTUNaviresProduction

TUBUAINaviresProduction

Total Navires Total Production

20082007 2009 2010 20112004

12452

111802

741410

526832

1482496

2012 20132005

14438

17675

736098

748165

1696376

27245

210322

12123

835419

939435

2294545

18936

13983

736736

627923

1577578

27380

214460

1044136

632446

2098422

14522

1600

212605

1044232

529822

1991781

215972

12537

216101

1155611

645600

22135822

315642

12133

27974

1040948

536490

21103187

316760

16572

28457

929412

633914

2195114

327664

14748

26765

837320

534487

19110894

TABLEAU IIIHistorique des posesde Dispositifs àConcentration dePoissons (DCP) auxAustrales. (Source : DRMM).

Profondeur (m)

1,0401609009205204604501,3001,3601,5006507101,2601,2001,2001,2001,700203012601156506501100110011001030380

année de pose

198419861986198619871987198719871989198919891989198919911991199319931995199519951995199520082011201120112011

LongitudeW

149°32'144°17'147°43'149°35'149°38'152°48'140°32'151°23'151°23’151°23’152°50’147°45’149°34’

151° 25'153° 05'151° 25'151°25’149°35’150°44’147°45'152°50'149°30'151°24'149°33'147°44'144°16'

LatitudeS

23°19'27°33'23°49'23°20'23°32'22°38'23°20'22°24'22°25’22°32’22°39’23°51’23°20'

22° 26'22° 28'22° 26'22°24'23°20'23°23'23°51'22°38'23°18'22°25'23°19'23°49'27°34'

Commune

TUBUAIRAPARAIVAVAETUBUAIRURUTURIMATARATUBUAIRURUTURURUTURURUTURIMATARARAIVAVA'ETUBUAIRURUTURURUTURIMATARARURUTURURUTUTUBUAIHF RURUTURAIVAVAERIMATARATUBUAIRURUTUTUBUAIRAIVAVAERAPA

Dist. à la côte(MN)

1.752.002.502.800.800.500.802.402.251.800.903.102.802.002.402.402.803.43.6652.7511.81.723.42.4

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233232

les ressources thonières dans l’archipel des australes

Au regard des données récoltées par les observateursembarqués, les thons représentent 61,1 % du nombred’individus capturés par les palangres des thonierspolynésiens. La composition spécifique des capturesest sensiblement la même de 11°S à 26°S (Figure 5et Tableau IV). Autour de Rapa, la proportiond’espadons dans les captures semble augmenter.Le potentiel que peut offrir l’exploitation desressources thonières dans l’archipel des Australesdoit être considéré à l’échelle régionale. Les thons etplusieurs autres espèces pélagiques sont hautementmigratrices et effectuent leur cycle de vie à l’échellede l’océan. Leurs stocks s’étendent généralement surl’ensemble du Pacifique : le stock de thons obèses estcommun à l’ensemble du Pacifique. Le thon ànageoires jaunes se répartit quant à lui en deux

stocks distincts, l’un à l’est et à l’autre à l’ouest,tandis que le thon blanc se répartit en deux stocksséparés de part et d’autre de l’équateur.L’exploitation de ces ressources est gérée par lesdeux commissions thonières du Pacifique tropical,l’IATTC (Inter American Tropical Tuna Commission)pour la région Est et la WCPFC (Western and CentralPacific Fisheries Commission) pour l’ensembleCentre et Ouest. Ces commissions, dans lesquellessiège un représentant de chaque pays impliqué dansces pêcheries, décident des mesures de gestion quidoivent être appliquées. Seules les eauxinternationales entrent dans la juridiction de cesinstances. Chaque pays est censé reprendre à minimaces mesures (IATTC et WCPFC) dans ses plans degestion nationaux au sein de leurs ZEE.

l’exploitation des thons et espèces associées dans la région

Pour l’année 2013, le total des captures de thonsdans le Pacifique occidental et central a atteint plusde 2,6 millions de tonnes, dont 72% ont étécapturées à la senne. Ce résultat est le second plusfort jamais atteint et représente 80% de l’ensembledes captures thonières du Pacifique et 57% descaptures thonières mondiales.En 2013, les captures à la palangre dans le PacifiqueCentre et Ouest atteignent leur niveau le plus basdepuis 1999 avec 230 073 tonnes. Les captures dethon obèse (62 641 t – 27%) étaient les plus faiblesdepuis 1996, comme pour le thon à nageoires jaunes(65 499 t – 28%) dont le niveau de capture estretombé au niveau de 1991. Au contraire, lescaptures de thon blanc dans le Pacifique Sud

s’élèvent à 84 698 tonnes cette même année (37%de l’ensemble) et atteignent ainsi le troisième niveauhistorique le plus élevé depuis 2009 (Williams etTerawasi, 2014). Ce résultat est essentiellement laconséquence d’une augmentation de l’effort de pêchesur cette ressource dans la Pacifique Ouest.

TABLEAU IVPrincipales espècespélagiques exploitéescommercialement.

Dans le Pacifique, les premières pêcheriesdocumentées sont celles réalisées au large deShimoda et Chiba au Japon dans les années 1870(Seki et Tagami, 1986). Ce n’est qu’à partir de 1915 etl’amélioration des technologies des pêches, que leszones de pêches se sont étendues. À partir de la findes années 60, les japonais, les coréens, les taiwanaiset les russes possèdent des flottes de pêcheprofondes ciblant notamment le poisson cuirasse(Pseudopentaceros wheeleri) (Yamaoto, 1986 in Bachet al, 1999b). Les premiers chalutages documentésdatent quant à eux de 1969 (Sakiura, 1972 in Uchidaet Tagami, 1984). La Nouvelle Zélande se lance dansla pêche profonde en 1981 mais la pêcherie se

développe surtout à partir de 1983 avec l’introductiondu chalut semi-pélagique à grande ouverture verticale(GOV) et l’exploitation du stock d’empereurs(Hoplostethus atlanticus). Cette flotte a essentiellementopéré au large de la Nouvelle Zélande.En Polynésie française, outre les essais réalisés parle service en charge des pêches avec des naviresétrangers (Stein, 1987 et 1995, - Leproux, 1995 -Teumere, 1995) il n’existe aucune traced’exploitation industrielle des ressources profondes.Il est néanmoins probable qu’avant l’instauration deszones économiques exclusives les monts sous-marins des Australes aient déjà fait l’objet de pêchesopportunistes.

la pêche industrielle des ressources démersales dans la région et en polynésie française

Tubuai

27%22%1%17%14%10%6%3%1%0%0%0%0%100%

Rurutu

31%12%28%11%7%6%1%3%1%0%0%0%0%100%

ThazardThon à nageoires jaunesMararaMahi mahiParuPoissons de lagonMarlinsBoniteThon germonAutres poissons pélagiquesCrustacésMollusquesEchinodermesTotal

Raivavae

46%20%0%5%3%15%1%6%2%2%0%0%0%100%

Rimatara

n.d.

Rapa

n.d.

TOTAL

30%17%15%13%10%8%3%3%1%0%0%0%0%100%

TABLEAU IIComposition spécifique des captures de la flotte côtière professionnelle. (Source : DRMM).

Famille

Scombridae

Istiophoridae

XiphiidaeCarcharhinidaeLamnidae

Nom français

Thon germonThon obèseThon à nageoires jaunesBoniteThazardMarlin bleuMarlin rayéEspadonRequin bleuRequin mako

Nom tahitien

aahi tariaaahi tatumuaahi rea reaauhopupaerehaura moanahaura torehaura po / mekamao iri moanamao aahi

Espèce

Thunnus alalunga Thunnus obesus Thunnus albacares Katsuwonus pelamis Acanthocybium solandri Makaira nigricans Tetrapturus audax Xiphias gladius Prionace glauca Isurus oxyrinchus / Isurus paucus

FIGURE 5Composition spécifique des capturesdespalangriers locaux par latitude.© DRMM

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235234

les ressources démersales de l’archipel des australes

Seules les communautés de poissons démersaux destombants des îles et de quelques monts-marins lesmoins profonds ont été l’objet de pêches artisanalesou scientifiques. L’exploitation de ces ressourcesprofondes peut être réalisée soit avec des palangresde fond (posées ou suspendues), soit avec des chalutspélagiques. Aucun chalutage de fond en Polynésiefrançaise n’a été documenté à ce jour.Les statistiques montrent que la pêche des poissonsdémersaux profonds aux Australes est notablementplus développée que dans les archipels des Tuamotu-Gambier et de la Société. Ces captures représententprès de 10 % de la production des licenciés contrerespectivement 0,5 % dans l’archipel de la Société, 3 %aux Tuamotu et 16 % aux Marquises. Les Australessont également traditionnellement un haut lieu de lapêche du mana (Promethichthys prometheus), de

l’uravena (Ruvettuspretiosus), et des Gempylidaecapturés lors de pêches de nuit avec des hameçonsen bois de forme très particulière appelés pii.La production de l’archipel en poissons deprofondeur (paru) avoisine en moyenne 10 t par an,Tubuai et Rurutu sont les plus grandes pêcheries(Tableau V). Compte tenu de la qualité parfoismédiocre des déclarations de pêche, les vicissitudesinterannuelles sont délicates à interpréter etreflètent sans doute plus des évolutions decomportement des pêcheurs (éventuellement liéesà la demande du marché local) qu’une évolution del’abondance de la ressource elle- même.Les autres espèces démersales profondes(crustacés, mollusques, corail, etc.) ne sont, à priori,pas exploitées.

l’exploitation des ressources démersales en polynésie française

les mesures de gestion en place dans l’archipel des australes et ses environs

En ce qui concerne la pêche pélagique, le Pays ainterdit la pratique de la senne dans sa ZEE. Seulesles techniques de la palangre dérivante pour lesthoniers et de la canne pour les bonitiers, sontutilisées en Polynésie française. Les seules règles degestion mises en place concernent les modalitésd’obtention des autorisations de pêche et le suivi dedéclarations des captures. Aucune mesure ne retreintl’utilisation de la technique de la palangre ou necontraint les niveaux de capture.Au niveau international, le thon obèse est la principaleespèce pélagique surexploitée et la plupart desgrands pays pêcheurs sont limités à un niveau decapture chaque année. Néanmoins la Polynésiefrançaise, comme ses voisins insulaires plus à

l’ouest, bénéficie d’un droit : une exemption en tantque PVD reconnue par les deux commissions,d’augmenter son niveau d’exploitation sur cetteressource (seulement de 763 tonnes en 2013) dans lamesure où ce développement est raisonnable etcontribue à sa croissance économiqueLes captures d’espadons et de marlins rayés sontsoumises à quelques obligations de déclarationsparticulières afin de garantir leur traçabilité dans lesexportations. Enfin, il est important de signaler quedans les eaux internationales au sud de Rapa, à partirde 30°S, les pêcheries d’espadons ont l’obligationd’adopter des pratiques permettant de réduire lescaptures accidentelles d’oiseaux de mer.

Tubuai

4 01811 2593 6598 7726 7126 8063 3532 9002 327

Rurutu

1 0054 1572 2066 9761,6703 9831 6422 301804

Étiquettes de lignes

200520062007200820092010201120122013

Rapa

5722 202<100<100<100211137

<100<100

Rimatara

<100453149

1,499437616658538

<100

Raivavae

3311 546<100336150

<100109

<100<100

Total général

5 92619 6176 01417 5838 96911 6485 9005 7393 130

performante, en particulier pour les senneurs quiutilisent massivement des dispositifs deconcentration de poisson équipés d’instrumentsélectroniques.Le thon à nageoires jaunes, seconde espèce la pluscapturée après la bonite avec 535 656 tonnes en 2013soit 21% des captures, enregistre une baisse de 75000 tonnes par rapport à 2012. Cette baisse estobservée à la fois dans les pêcheries palangrières etdes senneurs. A l’issue de la dernière évaluation desstocks de thons jaune (Davies et al., 2014) le comitéscientifique de la WCPFC a réitéré sa mise en gardecontre une augmentation de la mortalité due à lapêche dans la région équatoriale du Pacifiqueoccidental. Le thon à nageoires jaunes est classécomme “quasi menacé” par l’IUCN.

Parmi les autres espèces, l’espadon et le marlin rayésont reconnus comme pleinement exploités pour larégion Sud Ouest du Pacifique, le centre du Pacifiqueétant jusqu’à présent peu étudié par manque dedonnées captures. Les commissions thonièresrecommandent de ne pas augmenter la pression depêche sur ces espèces.

état des stocks des thons

Les évaluations de stocks ne sont disponibles quepour les principales espèces de thons car la qualitédes données nécessaires est souvent insuffisantepour la plupart des autres espèces capturées.La toute dernière évaluation des stocks de germon duPacifique Sud a été réalisée en 2012 et s’appuie surdes données de la période 1960-2011 (Hoyle et al.,2012). D’après l’évaluation, la mortalité due à la pêchedes poissons adultes a considérablement augmentéau cours des dix dernières années. Toutefois lesrésultats des modélisations ne placent pas cette espèceen état de surexploitation. Le niveau des captures estsoutenable, néanmoins, l’augmentation du nombre depalangriers ciblant cette ressource dans le PacifiqueOuest ces dernières années laisse supposer une pleineexploitation à court terme alors que le germon estclassé comme “quasi menacé” par l’IUCN.Le thon obèse représente, avec 158 662 tonnescapturées, 6% des captures thonières de la région. Ladernière évaluation du stock dans le Pacifiqueoccidental et central réalisée en 2014 (Harley et al.,2014) montre que la mortalité imputable à la pêcheest trop importante et doit être diminuée par rapportà son niveau actuel. Le thon obèse est une espèce considérée commesurpêchée et classée “vulnérable” par l’IUCN. LaWCPFC a imposé des quotas dans un contexte oùl’efficacité de pêche des thoniers est de plus en plus

Pêche à la palangre en Polynésie française. © DRMM

TABLEAU VEstimation des captures de paru, poissons de profondeurs, par les licenciés de pêche professionnelles (kg). (Source : DRMM)

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les autres ressources

Parmi les autres ressources hauturières potentielles onpeut notamment citer les crustacés, les cnidaires et lesmollusques.En ce qui concerne les crustacés deux espècespourraient potentiellement être exploitées : les crabesprofonds du genre Chaceon (C. australis) et les crevettesprofondes du genre Heterocarpus (H. laevigatus). Uneressource intéressante de Chaceon avait déjà étéidentifiée aux Marquises avec des individus de tailleconséquente (environ 1 kg) et des densités intéressantes(Poupin et al, 1991). Une espèce du même genre a étéidentifiée à Rapa à 870 m de profondeur mais lesindividus de cette espèce étaient de plus petite taille etaucun individu de ce genre ne semble avoir été

capturé dans le reste de l’archipel. Le potentiel de cestock reste donc entièrement à étudier. Des crevettes del’espèce H. laevigatus ont été identifiées à Rapa et Tubaice qui suggère la présence potentielle d’un stock danstout l’archipel. Cette espèce est de grande taille (15 cm)et abondante entre 500 m et 800 m. Mais là encore, lepotentiel réel reste à déterminer.Enfin, il existe certainement un potentiel en calamarsprofonds. Les contenus stomacaux des espadonsobservés à bord des thoniers montrent la présence demorceaux de manteau de calamars d’une épaisseur deplus de 1 cm . Cette ressource constitue en tout cas unepart de l’alimentation de ces grands pélagiques capablesde chasser en dessous de 500 m de profondeur.

conclusions

Le domaine pélagique de l’archipel des Australes esttrès peu exploité. Les thoniers de Papeetefréquentent peu cette partie de la ZEE, et la flotte depêche artisanale exploite seulement les quelquesmilles nautiques autour des îles.Dans les eaux internationales autour de l’archipel,l’effort de pêche est également très faible. Entre lesméridiens 20°S et 35°S, les eaux du Pacifique Centralne sont exploitées que par les pêcheries palangrièresde grands pays industrialisés qui ciblent le thon blanc,l’espadon et plus rarement le marlin rayé.Le potentiel en thons pour la seule surface maritime

de l’archipel des Australes est relativement limité. Ilsemble en revanche exister une ressourceintéressante en espadons dans la région de Rapa etplus au sud.La pêche des espèces démersales est exclusivementpratiquée de manière artisanale jusqu’à aujourd’hui.L’effort de pêche est localisé sur les pentes externesdes îles jusqu’à 350 m environ. Les monts sous-marins sont a priori inexploités. L’état des stocksn’est pas connu, mais la faible surface de leur habitatne permet pas d’envisager d’exploitation importante.

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bibliographie

les stocks de poissons profonds démersaux aux Australes

Les espèces de poissons profonds ont en commun unecroissance lente, une longue durée de vie et unereproduction tardive. Ces paramètres biologiquesrendent ces stocks particulièrement vulnérables àl’exploitation. Dans la mesure où il n’existe pas deséries statistiques fiables des données d’efforts et decaptures historiques, il est impossible d’évaluerrigoureusement l’état des stocks. Les campagnesPOREMA (Ponsonnet, 2004) ont néanmoins permis defaire une première estimation du potentiel exploitablepour la tranche 150-500 m. Sur l’ensemble de l’archipeldes Australes, la biomasse vierge est estimée entre 130 tet 280 t ; le niveau de la production optimale annuelle,c'est-à-dire le volume maximum des captures quipermet de maintenir le même niveau de rendementchaque année sans porter atteinte au stock, est quantà lui estimé entre 28 et 62 t (Tableau VI).Le potentiel est donc faible et ne permet pasd’envisager une pêche semi- industrielle (Ponsonnet,2004). Pourtant, les pêches exploratoires réalisées dansle cadre du programme ZEPOLYF ont montré que 99 %des captures réalisées entre 150 m et 500 m étaientcommercialisables. Ces poissons ont par ailleurs uneforte valeur marchande et ils ne présentent a priorijamais d’ichtyosarcotoxine dans leur chair et ne sontdonc jamais toxiques pour les populations (des cas deparu ciguatoxiques ont cependant été relevés auxGambier). L’exploitation de ces stocks ne peut quepermettre le développement d’activités de pêche deproximité avec des techniques de pêche relativementpeu onéreuses.

Le potentiel des espèces plus profondes n’est enrevanche pas encore bien identifié. Les différentescampagnes exploratoires ont toutes démontrél’existence d’une ressource en alfonsino (Beryxsplendens) avec parfois de bons rendements mais larentabilité de ces exploitations, notamment à uneéchelle industrielle, n’a pas été démontrée. En mai1999, un palangrier polynésien a réalisé une premièrecampagne de pêche aux paru (Vivaneaux et Beryx) surles monts sous-marins et hauts fonds des Australesavec une palangre pélagique lestée. Les premiersrésultats furent encourageants avec des capturesd’alfonsino de plus de 400 kg mais l’expérience n’afinalement pas été renouvelée car la pêche desthonidae s’avérait plus rentable.L’absence d’identification d’empereurs (Hoplostethusatlanticus la plus grande espèce du genre) en Polynésiefrançaise reste énigmatique bien que sans doute dueau faible échantillonnage des strates de grandesprofondeurs (au-delà de 1 000 m). Cette espèce a eneffet été identifiée dans tous les océans du globe etnotamment dans le Pacifique Ouest (Australie, NouvelleZélande) et de l’Est (Chili) (Grandperrin et al, 1997).Dans tous les cas, au-delà de l’intérêt pour lesconnaissances sur la biodiversité, l’existence éventuelled’un stock d’empereurs sur les monts sous-marins desAustrales ne pourrait pas représenter un réel potentielde développement d’une activité industrielle tant cesstocks se sont révélés fragiles à l’exploitation. Ainsi, ledernier exemple vient d’Australie qui a inscrit en 2006cette espèce sur sa liste des espèces en danger.

TABLEAU VIFourchettes estimées de la production maximale à l’équilibre(MSY) pour les poissons profonds (150-500 m) pour chacunedes îles de l’archipel des Australes.(Source : Ponsonnet, 2004)

ILE

Rapa Raivavae Tubuai Rurutu Rimatara Maria Marotiri

max

17,315,29,07,87,72,82,6

Min

7,96,9 4,1 3,53,5 1,3 1,2

MSY (t)

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Découverte du milieu marin en palme-masque-tuba.

© GIE Tahiti Tourisme, Jordi Chias

LE MODE DE VIE AUTHENTIQUE ET L’ENVIRONNEMENT NATUREL PRÉSERVÉ DES AUSTRALES FAVORISENT LE

DÉVELOPPEMENT DE L’ÉCOTOURISME DANS CET ARCHIPEL.

239

En raison de leur isolement et du climatsubtropical, les îles Australes sont unedestination touristique peu connue, visitées parmoins de 1% des touristes internationaux serendant à Tahiti. Le premier aéroport et lespremières chambres d'hôtes ne s’ouvrent quedans les années 70, mais encore peu detouristes ont visité l'archipel avant la fin desannées 90, lorsque l'observation des baleines àbosse a débuté. On estime qu’environ 2 000touristes visitent chaque année les îlesAustrales, fournissant une source importante derevenus aux populations locales. Les activitéstouristiques marines comprennent l'observationdes baleines, la plongée sous-marine et lesexcursions autour des îles et sur les motu. Letourisme de croisière commence à se développer.La taille réduite des îles et la fragilité deleurs écosystèmes ne permettent pas ledéveloppement d’un tourisme de masse. Letourisme doit s’attacher au respect del’environnement et s’inscrire dans la durabilitédes activités proposées. Il n'y a actuellement que16 petits hôtels familiaux ou chambres d'hôtesdans l'archipel, orientés vers le voyageurindépendant ou d'écotourisme.

LE TOURISME ET LES ACTIVITÉS MARINESAUX AUSTRALES

ELIN CLARIDGEAssociation Toreanuanua, Comité du tourisme de Rurutu, University of California, Berkeley – Gump Station Moorea Rurutu, Polynésie franç[email protected]

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241240

De par son isolément (600 km au sud de Tahiti, plusque 5 400 km de l’Australie à l’ouest et 7 300 km del’Amérique du Sud à l’est), sa faible superficie terrestre(environ 143 km2 pour la totalité des îles) et son climatplus tempéré, l’archipel des îles Australes est moinsfréquenté par les touristes que le reste de la Polynésiefrançaise. Depuis l’ouverture de la première pension defamille il y a une quarantaine d’années et la constructiondes premiers aérodromes sur quelques îles, l’archipelse tourne doucement vers un tourisme «nature». Lestouristes de plus en plus nombreux cherchent àrencontrer les baleines à bosses, une nature préservée,

la tranquillité mais aussi la découverte d’une viepolynésienne traditionnelle, comme le Tahiti d’autrefois.Le tourisme dans chacune des îles s’est développéautour des différentes ressources naturelles etculturelles, et des infrastructures créées. Par exemple,la construction d’aéroports a facilité la fréquentationdes îles, et donc le développement touristique. Peu dedonnées existent sur le tourisme ; les chiffres defréquentation touristique dans les îles Australes ne sontpas recensés. Ceci rend difficile la rédaction d’un état delieu, mais cela met aussi en lumière un tourisme defaible ampleur et à ses débuts.

L’Institut des Statistiques de la Polynésie Française(ISPF) publie des chiffres de fréquentation touristiqueà l’échelle du territoire sans précision sur le nombrede touristes se rendant aux îles Australes. Parmi les164 393 touristes extérieurs à la Polynésie françaisequi ont visité Tahiti et ses îles en 2013, 15 591 soit 10%ont visité des îles autres que celles de la Société, lesMarquises ou Rangiroa. Malheureusement ces 10%concernent 21 autres îles toutes confondues : lesAustrales, Tuamotu autre que Rangiroa et les Gambier.L’estimation du nombre de touristes fréquentantchaque année les Australes peut être estimé del’ordre de 2 000 personnes. Environ 60% sont desrésidents de Tahiti ; la plupart étant desmétropolitains basés à Tahiti qui cherchent à s’évaderpour le weekend ou pendant les vacances scolaires.Les touristes internationaux qui visitent lesAustrales sont souvent des touristes qui reviennenten Polynésie. Ce sont des amoureux de ladestination qui cherchent à découvrir les îles lesplus lointaines et qui visitent plusieurs îles desAustrales pendant leur séjour. Par ailleurs, lesclients internationaux constituent souvent uneclientèle bien ciblée, des plongeurs qui combinentun séjour de plongée aux Tuamotu avec du whale-watching aux Australes, des fans de l’histoire de laBounty ou des ornithologues qui cherchent à voir laperruche rouge. La durée moyenne d’un séjour enPolynésie française est d’environ 13 jours (ISPF2014a). Elle est estimée entre 4 et 5 nuits pourl’archipel des Australes et entre 3 et 4 nuits pour la

visite d’une seule île. Ces estimations et généralitéssont basées sur les observations de l’auteur et ducomité du tourisme de Rurutu, et font suite auxrésultats d’une enquête informelle menée auprèsdes professionnels du tourisme et des actifs dans lesecteur de l’hébergement touristique aux Australes. Avec approximativement 2 000 personnes, le nombre detouriste aux Australes est moins important que dans unarchipel comparable comme celui des Marquises. En2013 les Marquises ont reçu 5 677 visiteurs del’extérieur, sans compter les touristes résidents. Unegrande partie de ces touristes comptabilisés sontdes croisiéristes sur l’Aranui ou le Paul Gauguinrégulièrement de passage dans l’archipel. Une huitainede bateaux de croisières seulement se sont rendu auxAustrales depuis 2000. Aussi, les Australes nebénéficient pas de la notoriété internationale desMarquises liée à la présence passée de personnalitéscélèbres comme le peintre Paul Gauguin, l’auteur-compositeur Jacques Brel et les écrits de Robert LouisStevenson, qui ont fait connaitre l’archipel et continuentd‘attirer les touristes. Le tournage du groupe Survivorsur l’archipel en 2002 a aussi contribué à faire connaitrela destination des Marquises à l’international. Signalonségalement le nombre plus important de voiliers dansles eaux marquisiennes qu’aux Australes. La plus grande difficulté pour le développementtouristique des petites îles éloignées au milieu del’océan Pacifique comme les îles Australes sontl’absence de communication et de publicité sur ladestination d’une part, et le coût élevé du transport

introduction

la fréquentation touristique des australes

aérien pour s’y rendre d’autre part. Au plan desinfrastructures hôtelières, les îles Australes nedisposent que de 16 pensions ou petits hôtels avecun total de 74 unités d’hébergement. Si chaque île ason propre comité du tourisme, il n’y a aucun officeouvert au public et l’accès aux informations

touristiques en dehors des pensions de famille estsouvent limité, voir inexistant. Il n’y a pour lemoment aucun musée, mais des projets sont encours et quelques objets archéologiques etd’artisanat d’art sont exposés dans certainesmairies ou chez des habitants.

L’archipel des Australes abrite 6 820 personnes soit2,5% de la population de la Polynésie française(données issues du dernier recensement général dela population de 2012 réalisé par l’INSEE et l’ISPF),population comparable à celle de l’archipel desMarquises. Le taux de chômage de 29,3% en 2012 estimportant (par rapport à 20,4% pour Tahiti,comparable aux Marquises avec 30,6%) avec peu deperspectives d’emplois modernes (ISPF, 2014b). Lesressources globales monétaires de l’archipel nereprésentent que 1,4% de celles de la Polynésiefrançaise, avec les revenus les plus faibles du Payspar foyer (Amigues 2005), compensés en partie parune autoconsommation des produits agricoles et dela pêche importante. Les dépenses du tourisme international en 2013apportaient 78% des ressources propres du Pays(ISPF 2014a), soit 25 milliards de Fcp. On peut estimerque le revenu lié au tourisme aux Australes nedépasse pas 200 millions de Fcp par an, apportant

cependant une part significative du revenu proprede l’archipel. Une quarantaine de familles viventpartiellement du tourisme, la pension de famille étantsouvent une activité secondaire. Le développement touristique des Australes est unespoir pour la création d’emplois si le développementreste approprié à la taille des îles dans le cadred’un développement durable pour l’économie etl’environnement. Il aidera l’économie indirectementpar la consommation des produits locaux, notammentles produits de l’agriculture (taro, café…), de la pêcheet de l’artisanat (vannerie et sculpture). En 2004, lesfoires artisanales apportaient 13,5 millions de Fcpde bénéfices pour les associations des Australes(Amigues 2005). En valorisant les produits locaux, letourisme aidera également à préserver et promouvoirla culture traditionnelle de l’archipel.

le tourisme et l’économie locale

Excursion touristique au motu piscine, Raivavae.© Jerome Petit

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243242

SITUATION :Rimatara est l’île habitée la plus occidentaledes Australes à 660 km de Tahiti.ACCESSIBILITÉ : L’aérodrome de Rimatara est ouvertdepuis 2006. L’île est desservie par 3 vols hebdomadairede Tahiti et un vol/semaine entre Rurutu ou Tubuai.PARTICULARITÉS : La plus petite des îles habitées desAustrales, Rimatara est une île makatea (surélevéesecondairement) comme Rurutu, bordée de mato(falaises calcaire d’origine corallienne), avec quelquesgrottes à visiter. Deux espèces d’oiseaux protégé sur la liste A du code del’environnement se trouvent sur l’île, la perruche rouge,Vini kuhlii, qui est endémique de cette île mais aussi decertaines îles Cook (Gouni et Zysman, 2007) et larousserole de Rimatara, Acrocephalus rimatarae,endémique de cette seule l’île. La survie de ces deuxespèces est conditionnée par l’absence du rat noir surl’île. La Perruche rouge ou vini ‘ura, est classée « endanger » (EN) sur la liste-rouge de l’UICN. L’oiseautrès coloré et charismatique est endémique de

Rimatara. Il est également présent sur trois îles desKiribati où il a été introduit, ainsi qu’à Atiu dans les îlesCook où 27 individus de Rimatara ont été réintroduits en2007 (Gouni et Zysman, 2007). Rimatara est le premier producteur de Pandanus pour letressage et la réalisation de vanneries aux Australes.TOURISME : Le développement du tourisme est trèsrécent et date de l’ouverture de l’aéroport en 2006. L’îleest difficilement accessible par bateau (Guillin, 2001). Lapremière pension de famille s’est ouverte en 2007. Ily a actuellement deux pensions de famille avec unecapacité d’hébergements de 9 unités pouvant accueillir25 personnes. Les pensions reçoivent peu de touristes,entre 150 à 200 touristes par an, avec peu de touristesinternationaux. Une forme de clientèle ciblée surl’observation de la perruche rouge se développe. ACTIVITÉS MARINES : Le tour de l’île en bateau, la pêcheau gros et les sorties pour voir les baleines sontproposées par des pêcheurs de l’île.

le tourisme île par île

rimatara : SUPERFICIE : 8,6 km2 - POPULATION : 873 habitants (12,8% de l’archipel)

SITUATION : C’est l’île la plus septentrionale desAustrales à 572 km au sud de Tahiti.ACCESSIBILITÉ : L’aéroport de Rurutu est ouvert depuis1976. L’île est desservie par 5 vols hebdomadairesde Tahiti, avec des liens entre Rimatara ou Tubuai 2 fois/semaine, et Raivavae 1 fois/mois. Particularités : Les baleines à bosses se rendent àproximité des côtes pendant l’hiver austral ; la femellevient pour mettre bas et reste près de la côte pendantque son baleineau se nourrit et grandit, en se préparantpour sa première migration vers les eaux del’antarctique. L’île présente des particularitésgéologiques intéressantes. L’île s’est surélevée au coursd’une seconde période volcanique, bien après saformation initiale. L’ancien récif corallien a été soulevé,formant d’impressionnantes falaises de calcaire et desnombreuses grottes à découvrir. L’ile possède des bellesplages de sable blanc, la surface du lagon est réduite.TOURISME : C’est l’île la plus touristique des Australes,avec une clientèle tournée vers le whale-watching, uneactivité qui a débuté en 1997. La haute saisond’observation des baleines à bosse se déroule de débutaoût à fin octobre. Le petit hôtel de l’île déclare faire 70%

de son chiffre d’affaire pendant cette saison. Il y aactuellement 5 hébergements touristiques en activité surl’île, deux autres en projet, et deux qui ont récemmentfermé. La capacité totale d’accueil est de 45 personnespour 20 unités d’hébergement. Environ 1 000 touristesvisitent Rurutu chaque année. La première pension defamille de l’île, et des Australes, «Chez Catherine»(actuellement fermée) a été ouverte en 1974, bien avantl’ouverture de l’aérodrome. Le premier hôtel desAustrales, le « Rurutu Village », a ouvert en 1982 avec dixbungalows, puis a été ré-ouvert sous le nom de « RurutuLodge ».Il est désormais fermé depuis 2013. L’île a reçurécemment la visite des croisiéristes du Paul Gauguinet du Silver Explorer.ACTIVITÉS MARINES : Sorties baleines par 3 prestatairesagréés, tour de l’ile en bateau, pêche au gros par unprestataire.

rurutu : SUPERFICIE : 36 km2 - POPULATION : 2 322 habitants (34% de l’archipel)

SITUATION : 640 km au sud de Tahiti, sur le Tropiquede Capricorne.ACCESSIBILITÉ : L’aérodrome est ouvert depuis 1973, lepremier des Australes. L’île est desservie par 6 volshebdomadaires de Tahiti, avec des liens entre Rurutu,Rimatara ou Raivavae 2 fois/semaine.PARTICULARITÉS : C’est la plus grande des îles Australes,île volcanique entourée d’un grand lagon peu profondavec plusieurs motus et de nombreuses plages de sableblanc. L’île est le centre administratif de l’archipel et leplus grand exportateur de fruits et légumes vers Tahitiavec une agriculture largement développée sur la grandeplaine cultivable à l’intérieur de l’île. L’île abrite desnombreux marae (sites archéologiques polynésiens)mais aussi les vestiges d’un fort construite en 1789 parles révoltés du Bounty, avant de s’enfuir définitivementsur l’île de Pitcairn.

TOURISME : L’île a été la première à avoir une liaisonaérienne avec Tahiti, mais n’est pas la plus touristique.L’île compte3 pensions de famille en activité avec 15unités et une capacité d’accueil de 32 personnes. Environ800 touristes visitent l’île chaque année. Les touristessont plus particulièrement intéressés par la découvertede la culture des habitants et de l’histoire locale liée auBounty. Une partie des touristes viennent pour pratiquerle kite-surf. L’activité de whale-watching est toutenouvelle sur l’île. Une douzaine de voiliers font escalechaque année dans le lagon très praticable et dans la baieprotégée de Mataura. L’île a récemment reçu les bateauxde croisière du Paul Gauguin et du Silver Explorer ; lestouristes de ce dernier ne sont pas descendus à terre.ACTIVITÉS MARINES : Visite du lagon et des motu enbateau, sorties baleine par un prestataire agréé.

tubuai : POPULATION : 2 170 (32% de la population de l’archipel) - SUPERFICIE : 45 km2

SITUATION : 730 km au sud sud-est de Tahiti.ACCESSIBILITÉ : L’aéroport est ouvert depuis 2002. L’île estdesservie par 4 vols/semaine sur Tahiti, 2 vols/semaineentre Tubuai et un lien sur Rurutu 1 fois/mois.PARTICULARITÉS : île d’origine volcanique, le mont Hiroculmine à 437 m d’altitude, L’île est caractérisée par unbeau lagon, grand, peu profond et poissonneux, avec denombreux motuà visiter et de belles plages de sable blanc.Comparé élogieusement aux paysages de Bora Bora avantle développement de luxe international, Raivavae disposeseulement de petites pensions ou hôtels familiaux. Lesmotu de l’île abritent des forêts de bois de santalindigène, arbre exploité depuis sa découverte par leseuropéens, aux XVIIIe et XIXe siècles, mais se raréfiant.TOURISME : 6 pensions de famille avec 30 unités etune capacité d’accueil de 70 personnes sontrecensées, ce qui marque une croissance importante

puisque seulement 5 pensions de famille existait en2004 avec 9 unités. Environ 800 à 900 touristes visitentl’île par an, dont 40% de visiteurs internationaux. Lapremière pension s’est créée quelques années avantl’ouverture de l’aérodrome, qui a permis à l’activitétouristique de se lancer réellement. Une vingtaine devoiliers font escale dans le lagon abrité de Raivavaechaque année. L’île a également reçu des croisiéristesdu Tahitian Princess, du Paul Gauguin et du SilverExplorer. L’association Ecotourisme Raivavae proposeà des touristes internationaux des séjours dans desfamilles d’accueil locales, avec participation à la viequotidienne des habitants, telle que les activités depêche, agriculture, artisanat…ACTIVITÉS MARINES : Visite des motu, baignade etsnorkelling, pêche lagonaire, kayak proposé par unprestataire ou par les hébergements.

raivavae : SUPERFICIE : 16 km2 - Population : 940 (14% de la population de l’archipel)

SITUATION : La plus australe et la plus isolée des îlespeuplées de l’archipel à 1 240 km au sud de Tahiti.ACCESSIBILITÉ : L’île n’a pas d’aérodrome. Elle est desserviepar le navire le Tuhaa Pae1 fois tous les deux mois environ. PARTICULARITÉS : L’île est caractérisée par son isolementet sa vie authentique, des paysages et montagnesimpressionnantes (point culminant mont Perahu à 650 m).Des sites archéologiques et un village fortifié peuvent êtrevisités en montagne. Le climat froid ne permet pas laprésence de cocotiers ni de bananiers mais celle depommiers et de pêchers.

TOURISME : Le tourisme y est très peu développé ; unprojet d’aérodrome a été refusé par les habitants.Quelques particuliers accueillent des visiteurs sur l’île,essentiellement des travailleurs ou scientifiques enmission. Le développement du fret mixte du Tuhaa Pae(croisière et cargo comme le bateau Aranui, dont lesuccès a contribué à la promotion du tourisme auxMarquises) offre peut-être la possibilité d’ouvrir l’île autourisme. Toutefois le bateau aborde Rapa depuis 2012sans pour autant amener de touristes, à la grandedéception des habitants.

rapa : POPULATION : 515 (7,6% de la population de l’archipel) - SUPERFICIE : 40 km2

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Le tourisme international aux Australes a démarrépar l’observation des baleines à bosses en 1997 àRurutu. La pureté des eaux marines et la possibilitéde nager avec les baleines amènent des équipes detournages du monde entier chaque année pour filmerles baleines à bosses dans leur milieu naturel. Lesdétails des activités touristiques liées au whale-watching sont présentés par ailleurs dans cetouvrage. Limitée pour l’instant aux îles de Rurutu etde Tubuai, ces activités pourraient se développer sur

les autres îles de l’archipel. Un prestataire agrée adémarré cette activité à Tubuai cette année et ellepourrait s’étendre sur Rurutu. Il faudra néanmoinsveiller au risque d’impact sur le comportement desbaleines à bosses, espèce protégée, qui se rendentaux Australes pour se reproduire. Le respect de laréglementation pour l’approche des baleines, et laprotection des baleines et de leur milieu naturel doitêtre une haute priorité pour l’archipel, afin d’assurerl’avenir du tourisme aux Australes.

le whale-watching

les activités touristiques marines

Le tour de l’île en bateau est proposé sur Rimatara,Rurutu, Tubuai et Raivavae pour la journée ou lademi-journée. L‘activité est encore peu demandéesur Rurutu et Rimatara en dehors de la saisond’observation des baleines. En revanche, les visitesdes motu sur les îles de Tubuai et Raivavae et le tourdu lagon sont appréciées des touristes. Diversesexcursions en bateau avec pique-nique, barbecue oudégustation de fruits de mer, et baignade, snorkellingou pêche sont proposées par des pensions de familleset prestataires dans la quasi-totalité des îles. Cetteactivité pourrait se développer pour rentabiliserl’investissement que représente le coût d’un bateau

pour les prestataires pour les sorties d’observationdes baleines. D’autres activités pourraient voir lejour telles que des démonstrations ou explicationsdes techniques de pêche traditionnelle commecelle des “ature” (Selar crumenophthalmus), des“marara” (Cypselurus simus), des “ura vena” (Ruvetuspretiosus) ou encore des explications sur l’histoirenaturelle et culturelle de l’île. La pêche au gros estproposée à Rurutu et Rimatara pour le thazard(Acanthcybium solandri) pendant l’hiver austral, le“mahi mahi” (Coryophena hippurus) et plusieursespèces de thon, mais rarement des marlins.

les sorties en bateau – tour de l’île, visites des motu ou pêche au large

Il n’y a aucun de club de plongée opérant de façonpermanente aux Australes. Toutefois, le « Raie MantaClub » des Tuamotu est présent à Rurutu pendant lasaison des baleines, d’août à octobre. Il propose desplongées et des sorties pour l’observation desbaleines, qui constitue son activité principale. Le club deplongée «La Bonne Bouteille» a fonctionné surTubuai entre 2008 et 2012. Il convient toutefois desouligner que la plongée a contribué au développementdu tourisme dans l’archipel, avec Yves Lefèvre,directeur du club de plongée le «Raie Manta Club»de Rangiroa, qui, conscient de l’intérêt économiquedes sorties baleines, a commencer les sorties à partirde 1997. De nombreux touristes se rendent au coursde leur séjour en Polynésie à la fois aux Tuamotu pour

plonger et aux Australes pour le whale-watching.La plongée reste moins propice qu’aux Tuamotu,notamment à Rurutu et Rimatara où le récif corallienest peu développé et dégradé (Benet, 2013) parl’action des vagues et la prédation périodique destaramea (Acanthaster planci). Les lagons de Tubuaiet Raivavae sont plus divers, mais peu profonds ; ilspermettent donc la plongée en apnée. L’atoll de Mariaet l’île de Rapa présentent des fonds marins préservésen raison de leur isolement et seraient intéressantspour la plongée touristique mais sont peu accessiblespour l’instant. Le navire « Tuhaa Pae IV » n’aborde Rapaqu’une fois tous les deux mois, tandis que lesrotations sur l’atoll de Maria ont cessé depuis lesannées 80 et l’arrêt des récoltes de coprah.

la plongée autonome

Les lagons peu profonds de Tubuai et Raivavaepermettent aux touristes d‘admirer les fonds marinsen palmes-masques-tubas et de joindre les motus en

kayak ou en pirogue qui sont proposés en locationdans quelques pensions.

les sorties en kayak ou pirogue

Ce sport nautique est pratiqué par certains touristesà Tubuai, qui offre de bonnes conditions avec un lagonétendu et peu profond et un vent régulier tout au long

de l’année. Il n’y a pas pour le moment de location dematériel ni de cours de kite surf proposés.

le kite surf

La récolte et la dégustation des fruits de mers locauxsont proposés aux touristes pendant les visites sur lesmotu ou lors de tours de l’île : bénitiers (nombreux àTubuai et Raivavae), oursins et concombres de mer

(spécialité de Rimatara). Les touristes sont souventinvités à pêcher dans le lagon et à la préparation desrepas traditionnels du dimanche, partageant ainsi laculture des populations résidentes.

la pêche lagonaire : récolte des fruits de mer et dégustation des plats traditionnels

À table dans les hébergements, le poisson du largeest servi, les poissons du lagon comme lacarangue (Caranx melampygus), le perroquet(Scarus spp.) et le “ume” (Naso unicornis) sontégalement appréciés des touristes, ainsi que lapieuvre, les oursins et les bénitiers. À Rurutu des maisons et des hébergementstouristiques sont construits en blocs de corail avec de

la chaux d’origine marine. L’artisanat des Australesest essentiellement représenté par la vannerie,mais concerne également la sculpture sur bois depirogues à voile (Raivavae) ou de baleines (Rurutu),la sculpture sur corail de “penu”, ou pilon, utilisépour la préparation du “popoi”, qui est l’emblèmede l’archipel, ou la confection de colliers decoquillages.

les ressources marines dans le tourisme

Observation de baleine à bosse en Polynésie française. © GIE Tahiti Tourisme, Lionel Pozzoli

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Les eaux des Australes sont peu fréquentés par lesvoiliers car la mer y est souvent très agitée. Toutefois,Raivavae et Tubuai possèdent des lieux de mouillages

abrités et attirent quelques voiliers dans leurs lagons.Chaque année une quarantaine de voiliers relâchentdans les îles Australes, nombre en légère croissance.

les bateaux de plaisance

tourisme nautique

Un quart des touristes de Polynésie sont descroisiéristes (27 044 personnes en 2013 - 25 296 en2012 - 26 344 en 2011). Les paquebots fréquententplutôt les îles de la Société. Les îles des Australesont été visitées récemment par le Paul Gauguin, leTahitian Princess, le Silver Explorer et le Tuhaa PaeIV. Le lancement de ce dernier, bateau mixte (fret etpassagers), propose une découverte originale etauthentique des îles, dans le même genre quel’Aranui aux Marquises. Il constitue un espoir dedéveloppement touristique pour les îles Australes,avec une capacité de 100 passagers et unefréquence de rotation bihebdomadaire, permettant

aux touristes de faire escale sur chacune des îles.Mais le bateau en service depuis 2012 n’accueillentpas encore de touristes régulièrement.Les bateaux de croisière amènent plusieurscentaines de touristes chaque année. Cependant,les avantages économiques pour les îliens sontassez limités car les touristes vivent sur leurbateaux : ils consomment peu de produits locaux etne participent guère aux activités proposées par lesprestataires de service. Par ailleurs, l’infrastructured’accueil de cette catégorie de plaisanciers n’estpas encore en place aux Australes.

les bateaux de croisière

Les Australes, comme les autres archipels de laPolynésie, ont un riche patrimoine marin qui doit êtremis en valeur et partagé avec les touristes. Lepeuplement des îles est une remarquable et uniquehistoire de navigation et de courage. L’arrivée despremiers voyageurs européens aux Australes, commele capitaine Cook, accompagnée par le navigateurtahitien Tupaia, ou l’histoire des mutins de la Bountysont autant d’histoires passionnantes qui pourraientêtre illustrées et valorisées dans le cadre d’activités

touristiques. Il en serait de même des nombreuseslégendes liées à la mer comme celle d’Orovaru, lasirène mangeuse de taro (Walker dit Pare, 1999) et lesvoyages des cinq Iros ou d’Amaiterai. Le travailartisanal de construction des goélettes à Rurutu etdes pirogues à voiles de Tubuai ou Raivavae sont àpréserver et à développer. La chasse à la baleine tellequ’elle était autrefois pratiquée à Rurutu serait àdocumenter dans un livre ou un musée.

le patrimoine maritime

La faible superficie des îles Australes et la fragilité deleurs écosystèmes, fortement impactés par lesactions de l’homme (Meyer et Claridge, 2014)permettent difficilement le développement d’untourisme de grande ampleur. L’apparition de laciguatera après les grands travaux témoigne de laprudence dont il faut faire preuve quant à la

construction d’infrastructure côtière. Plus inquiétantencore, aucune solution de gestion durable desdéchets n’a été mise en place aux Australes, pas plusque pour satisfaire les faibles besoins en énergie deshabitants. Il conviendra donc d’être prudent pourdévelopper le tourisme en harmonie avecl’environnement et sa préservation.

le développement touristique et l’environnement

Le tourisme aux Australes est en croissance maistoujours de faible ampleur. Il y a un réel potentiel pourle développement d’un tourisme original aux îlesAustrales grâce au whale-watching, et par le désirdes touristes de retrouver les modes de vie decommunautés villageoises polynésiennes encore bien

vivaces dans les îles Australes. Toutefois la fragilitédes écosystèmes de ces petites îles doit êtresoulignée ; elle nécessite une grande prudence quantaux projets à développer qui devront s’inscrire dansla durabilité et le respect de l’environnement.

conclusion

Je remercie toutes celles et ceux qui m’ont aidé pour la rédaction de ce chapitre, avec les chiffres dont ilsdisposaient : les acteurs du tourisme aux Australes, Karelle Tahuhuterani de la Circonscription des îlesAustrales à Tubuai, Tearotea Mapeura de l’ISPF et Agnes Benet de Progem.

AMIGUES B., 2005 - Iles Australes: Recueil de donnéesessentielles. Papeete. Rapport du Ministre dudéveloppement des archipels, Papeete, 1-53.

BENET A., 2013. Mission Report Global Reef Expedition.40 p. Living Oceans Foundation (LOF), Australscampaign - French Polynesia. PROGEM.

GOUNI A. & ZYSMAN T., 2007 - Oiseaux du Fenua: Tahitiet ses iles. Taravao, Tethys Editions, 1-239.

GUILLIN J., 2001 - L’Archipel des Australes. 173 pp.Avignon: Éditions A. Barthélemy & Éditions Le Motu.

ISPF, 2014a. Points forts de la Polynésie n° 07, études:Les dépenses des touristes internationaux en 2013.Publication de l’Institut des Statistiques de la PolynésieFrançaise, Papeete, 1-10.http://www.ispf.pf/docs/default-source/publi-pf-bilans-et-etudes/pf-etudes-07-2014-depenses-touristes-2013.pdf?sfvrsn=4).

ISPF, 2014b. Points forts de la Polynésie 10, études:Les Australes en 2012: un solde migratoireexcédentaire. Publication de l’Institut des Statistiquesde la Polynésie Française, Papeete, 1-10. (http://www.ispf.pf/docs/default-source/publi-pf-bilans-et-etudes/pf-etudes-pf07-2014-depenses-touristes-2013.pdf?sfvrsn=4).

MEYER J.-Y., CLARIDGE E., 2014 -TerrestrialBiodiversity of the Austral Islands. (Patrimoinesnaturels; 72) Paris: Musée National d’HistoireNaturelle, 1-224.

WALKER dit PARE T., 1999 - Rurutu, mémoiresd’avenir d’une île Australe. Papeete: Editions Haere Po,1-158.

bibliographie

Paysage littoral de Raivavae. © GIE Tahiti Tourisme, Philippe Bacchet

remerciements

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Baleine à bosse

© GIE Tahiti Tourisme, Lionel Pozzoli

L’OBSERVATION DES BALEINES ET DES AUTRES MAMMIFÈRES MARINS AUX AUSTRALES EST UNE ACTIVITÉ EN

PLEIN ESSOR.

249

Les cétacés ont toujours fasciné le public.L’observation des mammifères marins dans leurmilieu naturel ou encore « whale-watching » estdevenue une activité écotouristique en pleinessor depuis une quinzaine d’années. Le whale-watching commercial est apparu pour lapremière fois en 1992 à Moorea puis en 1996 àRurutu. Aux Australes, l’essor de cette activitéest récent avec une augmentation de 75 % deprofessionnels en 2014 à Rurutu et Tubuai.Rimatara et Raivavae souhaitent égalementdévelopper cette activité, ce qui confirme laperspective d’une évolution croissante rapidedans cet archipel. Créé en 2002, le sanctuaire desmammifères marins de la Polynésie françaiseprotège les 24 espèces de dauphins et debaleines recensées. Il réglemente l’approche deces animaux en bateau et dans l’eau afin delimiter les pressions anthropiques autour d’eux.À ce jour, ces pressions sur les cétacés auxAustrales sont évaluées de très faibles à faiblesce qui ne justifie pas une réglementationspécifique à cet archipel. Néanmoins, parprincipe de précaution, la gestion du sanctuairepourra envisager des réserves temporaires dansles aires marines protégées afin de préserver lerepos des cétacés.

LE WHALE-WATCHING AUX AUSTRALES,UNE ACTIVITÉ ÉCOTOURISTIQUEEN PLEIN ESSOR

AGNÈS BENETPROGEMTahiti, Polynésie franç[email protected]

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ESPÈCES NOMS VERNACULAIRES

BALEINE À BEC DE BLAINVILLEBALEINE À BEC DE CUVIER OU ZIPHIUSBALEINE À BOSSE

CACHALOT COMMUN

CACHALOT NAIN

CACHALOT PYGMÉE

DAUPHIN À LONG BEC

DAUPHIN D'ELECTRE PÉPONOCÉPHALEDAUPHIN DE FRASERDAUPHIN DE RISSODAUPHIN TACHETÉ PANTROPICAL

DAUPHIN À BEC DROIT OU STÉNOFAUSSE ORQUE

GLOBICÉPHALE TROPICAL

GRAND DAUPHIN

ORQUE OU ÉPAULARDORQUE PYGMÉE

PETIT RORQUAL DE L'ANTARCTIQUEPETIT RORQUAL NAIN DE MINKE

RORQUAL BLEU

RORQUAL DE BRYDE

ESPÈCES NOMS SCIENTIFIQUES

Mesoplodon densirostrisZiphius cavirostrisMegaptera novaeangliaePyseter macrocephalusKogia simaKogia brevicepsStenella longirostrisPeponocephala electraLagenodelphis hoseiGrampus griseusStenella attenuataSteno bredanensisPseudorca crassidensGlobicephala macrorhynchusTursiops truncatusOrcinus orcaFeresa attenuataBalaenoptera bonaerensisBalaenoptera acutorostrataBalaenoptera musculusBalaenoptera brydei

Des observations depuis la terre et des entretiensindividuels ont permis d’étudier les pratiques dewhale-watching et d’évaluer les activités autour descétacés. Des entretiens avec les whale-watchersprivés ou professionnels nous ont renseigné sur lesespèces observées et les impacts des pressionsanthropiques constatés sur les cétacés. Lesopérateurs de whale-watching nous ont décrit lecontenu de leurs sorties en mer. A l’issu de ces rendez-vous, des « zones d’ombres »apparaissent. Nous abordons alors les thèmes qui

n’ont pas été discutés lors de l’interview avec unentretien semi-directif, aidé d’un questionnaire, afinde combler les manques d’informations. Ainsi,pouvons nous évaluer les lieux les plus connus, lesplus fréquentés, les plus sollicités. Des cartes viergesdites « muettes » sont également présentées auxinterlocuteurs afin qu’ils identifient les lieux qu’ilsconnaissent, qu’ils pratiquent et qu’ils les nomment.Ces cartes reflètent la connaissance et lafréquentation réelle des lieux.

rencontre avec les whales-watchers

Espèces emblématiques, les mammifères marinssuscitent depuis toujours un intérêt pour le public dumonde entier. Cet attrait contribue par ailleurs depuisplusieurs années au développement d’une forme detourisme « nature » appelé « whale-watching » qu’onpeut traduire par « observation de mammifèresmarins dans leur milieu naturel ». La Polynésiefrançaise fait partie des Etats et Pays d’Outre Mer duPacifique qui possèdent un tel patrimoine présentantun intérêt scientifique, culturel et économique. Avec 21 espèces de baleines à fanons, de baleines àbec et de dauphins recensées en Polynésie française(Tableau I), les résidents et les touristes sont de plusen plus nombreux à observer, ici aussi, les cétacés enmer. En effet, l’activité commerciale d’observation desbaleines à bosse (Megaptera novaeangliae) et desdauphins à long bec (Stenella longirostris) estapparue pour la première fois en 1992 à Moorea puisen 1996 à Rurutu pour les baleines à bosse.Rapidement, cette activité s’est développée commedans les autres îles du Pacifique Sud. Même si lescétacés sont présents aux Marquises et aux Tuamotu-Gambier, le whale-watching ne s’y est pas développé.En revanche, depuis moins de dix ans, cette activitéconnait une croissance exponentielle sur Tahiti autantpour le commerce que pour le loisir des plaisanciers.Même si l’on ne connaît pas encore tous les effetsd’une pression liée à la présence rapprochée debateaux et de nageurs autour de ces animaux,plusieurs études montrent qu’une pressionanthropique trop importante peut provoquer unchangement de comportement des animauxobservés, notamment en phase de reproduction(Backer et Herman, 1989 ; Sousa-Lima et al., 2002).C’est pourquoi plusieurs pays, dont la Polynésie

française, ont décidé de réglementer l’approche desmammifères marins.Dans ce contexte, il est apparu nécessaire d’évaluerle développement du whale-watching sur les îles lesplus concernées. Ainsi, à la demande de la Directionde l’Environnement, un état des lieux de cette activitéa été réalisé en 2007 à Tahiti et à Moorea puis en 2014pour l’archipel des Australes (Rurutu, Tubuai,Rimatara et Raivavae) par le bureau d’étudesPROGEM. Les résultats permettront d’apprécierl’évolution de cette activité et de modifier, sinécessaire, la réglementation en vigueur en Polynésiefrançaise. En effet, depuis 2002, le Pays abrite l’un desplus grand sanctuaire de mammifères marins aumonde. Les approches et toutes les activités liées auxcétacés sont réglementées par le Code del’Environnement. Après avoir présenté le statut du whale-watching duPacifique à la Polynésie française, les prestationsproposées et les activités autour des cétacés serontdécrites. Les résultats pour l’ensemble de laPolynésie française seront indiqués et pour lesAustrales les lieux les plus fréquentés par les cétacéset les espèces observées seront synthétisés sousforme cartographique. Notons que nous n’établirons pas ici l’état desconnaissances des cétacés par archipel, ce chapitreétant rédigé par notre collègue Michael Poole. Il enest de même pour les activités touristiquesmaritimes qui sont détaillées par Elin Claridge dansun autre chapitre.

TABLEAU I Liste des mammifères marins recensés en Polynésie française, noms scientifiques et vernaculaires.

L’activité écotouristique «whale-watching» succède à lachasse à la baleine. En effet, en moins de 40 ans (1920 à1960) plus de 2 millions de baleines ont été tuées, dontenviron 200 000 baleines à bosse. Près de 97 % de lapopulation mondiale de cette espèce ont été massacrés.En 1962, il ne restait plus que 3% de leur nombre originel. Ce n’est qu’en 1986 que la Commission BaleinièreInternationale met officiellement un terme à cemassacre en créant un moratoire. Pourtant chaqueannée de nombreuses pêches de baleines à bossedans le Pacifique se déroulent pour des raisons dites«scientifiques».En 1996, l’Union Internationale pour la Conservation dela Nature (UICN) considère les baleines à bosse comme« espèce vulnérable ». Parallèlement, le développementdu whale-watching attire l’attention des scientifiquessuite aux conclusions de plusieurs études qui révèlentque la présence de bateaux ou d’avions près des baleinespeut entrainer des modifications de comportement, telsque changements de vitesse et de direction, modificationsdu temps d’apnée, arrêt de certaines activités dontl’allaitement, recherche de nouvelles aires de repos(Baker et Herman, 1989; Sousa-Lima et al., 2002).

L’activité commerciale d’observation des baleines à bossese développant dans plusieurs pays océaniens, lesrisques de perturbations s’accumulent tout au long de lamigration de ces mammifères marins. Cette prise deconscience de certains pays a conduit à la mise en placede sanctuaires réglementant l’approche des mammifèresmarins selon des directives précises figurant soit au seindu code de l’environnement soit sous forme de charte.Au niveau du Pacifique Sud, différentes conventionsinternationales gèrent la conservation des espèces demammifères marins, telles que la Convention sur lesEspèces Migratrices appartenant à la Faune Sauvage(CEM) ou Convention de Bonn, la Commission BaleinièreInternationale (CBI), la Convention pour le CommerceInternational des Espèces Protégées (CITES) et leProgramme Régional Océanien pour l’Environnement(PROE).Les baleines à bosse peuvent être observées de façoncommerciale dans 10 Etats et Territoires: l’Australie, laNouvelle-Zélande, la Nouvelle-Calédonie, Fidji, leRoyaume de Tonga, Samoa, Samoa Américaines, Niue,les îles Cook et enfin la Polynésie française (Schaffar etGarrigue, 2007). L’activité de whale-watching est très

de la chasse à la baleine à la création d’un sanctuaire

une prise de conscience globale

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le whale-watching, une déclinaison d’activités diverses

En décembre 1995, un décret du gouvernement dePolynésie française inscrivait les baleines et autresmammifères marins des eaux intérieures, de la merterritoriale et de la zone économique exclusive(ZEE), sur la liste des espèces protégées, interdisantla mutilation, le harcèlement, la capture, laconsommation et la chasse, ainsi que la détention, letransport, l’importation et l’exportation de ces espèces. Avec la mer territoriale et la ZEE de la Polynésiefrançaise, ce sont près de 5 millions de km2 qui ontété déclarés sanctuaire pour la protection et lasauvegarde des mammifères marins, par l’arrêté N°622 CM du 13 mai 2002. Au sein de ce sanctuaire,les activités de whale-watching commercialesnécessitent une autorisation par un arrêté en Conseildes Ministres pour être conduites. L’arrêté N° 624 CMdu 13 mai 2002 définit et réglemente les conditionsd’approche. Il donne les consignes à respecter pouréviter le harcèlement des animaux.L’arrêté N° 623 CM du 13 mai 2002 réglemente lesactivités exceptionnelles d’approche des mammifères

marins, à des fins scientifiques.Pour réduire au minimum le stress de chaque animalet les effets néfastes sur les groupes et leurcomportement social, dix règles élémentairesd’approche figurant dans le code de l’environnementsont expliquées directement sur l’eau à chaquewhale-watcher. Il s’agit du programme « C’est Assez! » réalisé depuis 2002 par l’association Mata Tohoraet le bureau d’études PROGEM pour le Ministère encharge de l'Ecologie et du Tourisme et la Direction del’Environnement. Ainsi, chaque usager de la mer estinformé et sensibilisé au respect des règlesd’approche. En 2014, devant l’essor du whale-watching, ce programme s’est étendu à l’archipel desAustrales. Un protocole établi par le Procureur de laRépublique permet à l’association Mata Tohora de luitransmettre directement les infractions à traiter. Dans des situations d’urgence, des périmètres desécurité peuvent également être mis en place pourune plus grande protection des cétacés.

Plus de 80 % des personnes pratiquant l’activité du «whale-watching» ont été interviewées sur l’ensembledes îles concernées par le whale-watching commercial et officiel aussi bien à Tahiti, Moorea, Huahine, BoraBora et Raiatea-Tahaa (Iles de la Société) qu’à Rurutu et Tubuai (Archipel des Australes). Activité saisonnière,les prestations diffèrent selon les îles en fonction de l’attente des clients, des moyens techniques, de laformation du professionnel, de la géomorphologie des côtes et de la situation géographique.

Dans les îles de la Société, les espèces de cétacés lesplus souvent rencontrées en mer, toute l’année, sont :baleine à bec de Cuvier (Ziphius cavorostris),globicéphale tropical (Globicephala macrorhynchus),dauphin à long bec (Stenella longirostris), dauphin àbec étroit (Steno bredanensis) et peponocéphales(Peponocephala electra). De juin à novembre, les baleines à bosse (Megapteranovaeangliae) qui migrent dans les eaux polynésiennespour y mettre bas et se reproduire font l’objet principal

de l’activité de whale-watching autant dans les îles de laSociété que dans les Australes. Elles sont observées prèsdes côtes et dans les baies.Aux Australes, même si les baleines à bosse sont lesstars de la saison, de juin à novembre, les pêcheurssont témoins de la présence des orques (Orcinusorca) à Tubuai et à Rurutu et des peponocéphales(Peponocephala electra) à Rurutu. Le cachalot (Physetermacrocephalus) est le plus souvent observé échoué auxAustrales et notamment à Raivavae et à Rurutu.

En 2014, 29 prestataires pratiquent l’activitécommerciale de whale-watching répartis sur lesarchipels de la Société et des Australes. C’est dans les îles de la Société que l’on compte leplus grand nombre de professionnels de whale-watching (Tableau II) : 10 à Tahiti, 11 à Moorea, 1 àHuahine, 2 à Bora Bora et 1 à Raiatea-Tahaa. Aux Australes, seulement 4 prestataires ontdéveloppé cette activité à Rurutu et Tubuai (TableauII). À Raivavae et Rimatara, l’observation des cétacésen milieu naturel n’est développée ni par lesplaisanciers ni par des professionnels mais lesinformations viennent des pêcheurs. Certains d’entreeux envisagent une formation pour débuter cetteactivité commerciale.À Tahiti, certains professionnels disposent jusqu’à3 bateaux pour exercer cette activité. À Moorea et àRurutu 2 bateaux sont enregistrés pour quelquesprestataires. Un seul bateau à la fois est autorisé surl’eau afin de limiter la pression près des cétacés. Les professionnels ne sont pas les seuls à pratiquerle whale-watching. En effet, cette activité est unvéritable loisir pour les plaisanciers de Tahiti, surtoutle week-end. Ainsi, les particuliers creusent l’écart dunombre d’embarcations d’observation des cétacésavec une dizaine de jets ski et une trentaine de

bateaux par week-end, essentiellement répartis dansla zone la plus urbanisée, de Arue à Papara. Al’inverse, aux Australes, ce sont uniquement lesprofessionnels qui Papara. Certains pêcheurs se sontrecyclés dans le whale-watching, d’autres stoppent lapêche pendant la saison des baleines en raison del’obstination de ces animaux à rester collés à lacoque, ce qui rend la pêche difficile. Alors que dans l’archipel de la Société 85 % desprofessionnels ont suivi la formation de la Directionde l’Environnement sur le whale-watching en 2013, etseulement 25 % des prestataires des Australes ontété formés. Ceci s’explique par l’augmentation dunombre de whale-watchers en 2014 aux Australes.Avec une hausse de 75 % de prestataires, le whale-watching est donc une jeune activité économique enplein essor dans cet archipel. Néanmoins, le nombremoyen de bateaux par prestataire aux Australes estde 1,4 alors qu’il est de 1,7 à Tahiti.Malgré le manque de formation, 80 % des prestatairesconnaissent les règles d’approche. En revancheseulement 20 % d’entre eux donnent des explicationsà leurs clients sur la présence des baleines et lesrègles d’approche. Le nombre de passagers embarqués varie égalementd’un archipel à l’autre. À Moorea, des prestataires

2014

Archipel de la Société

Archipel des Australes

Total Polynésie française

îLe

TahitiMooreaHuahineBora BoraRaiatea-TahaaTotal

RurutuTubuaiRimataraRaivavaeTotal

nombre de prestataires

101112125

31004

29

nombre de bateaux

171512136

51006

42

TABLEAU I INombre de prestataires et moyens navigants opérant du whale-watching dans les îles de la Société et les Australes.

en polynésie française

les cétacés observés

variable selon les pays avec ou sans mise à l’eau desobservateurs, chaque pays ayant adopté sa propreréglementation. Australie, Nouvelle-Calédonie, Fidji,Samoa, Samoa Américaines, Niue, îles Cook et enfin

Polynésie française ont créé un sanctuaire. La Nouvelle-Zélande a mis en place une protection totale par unelégislation nationale alors que les Tonga ont opté pourune protection partielle.

une activité inégalement développée

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255254

En synthétisant les informations données par leswhale-watchers et des pêcheurs on peut évaluer leslieux où les cétacés sont les plus observés (Figures 1à 4). Nous constatons alors qu’ils sont inégalementrépartis autour des îles. Certaines zones (en rougesur les cartes) sont très fréquentées par les baleinesà bosse. De manière générale, les femellesaccompagnées d’un baleineau s’établissent la plupartdu temps près du récif et dans les baies afin deprotéger leur progéniture des grands prédateurs(requins, orques). Il arrive qu’elles soient « escortées» par un ou plusieurs mâles cherchant à s’accoupler.Dans ce cas, il n’est pas rare de voir la femelle et sonbaleineau en déplacement le long du récif, cherchantà éloigner le mâle « escorteur ». Les mâles solitairessont le plus souvent aux pointes des îles afin que leur

chant porte le plus loin possible autour de l’île. De même, la répartition des globicéphales tropicauxreprésentée sur la carte (en zébré) indique les sitesoù ces animaux sont le plus souvent observés. Cesdelphinidés sont des nomades et parcourent donc denombreux kilomètres par jour. Par conséquent, leuraire de répartition est vaste, au large comme près descôtes. À l’inverse, les dauphins à long bec sont sédentaires.Leur présence est également cartographiée et peuttraduire leurs « habitudes » comportementales enterme de déplacement près des côtes, ceux-cirejoignant les baies au lever du jour pour notammentse sociabiliser et regagnant le large en fin de matinéepour pêcher par exemple.

En raison de l’absence de lagon autour de ces deuxîles, les baleines à bosse sont observables depuis lacôte, sur la plage ou en hauteur sur des sites bord deroute très accessibles (Fig. 3 et 4). Cette activité ne

présente alors aucun dérangement pour lesanimaux. De plus, nécessitant peu de moyens cesobservations pourraient valoriser ce type d’activitéséco-touristiques et pédagogiques.

possèdent des bateaux pouvant contenir jusqu’à 40passagers alors qu’à Rurutu, sur les quatre bateaux,deux sont homologués pour 3 passagers maximum.Le nombre de sortie en mer par jour varie de 1(Tubuai) à 2 (Rurutu), alors qu’à Tahiti, certains clubsde plongée sortent jusqu’à 4 fois par jour pourobserver les baleines et les dauphins.Chaque île possède ses arguments commerciaux. ÀTahiti, certains prestataires proposent de revenirgratuitement si les baleines n’ont pas pu êtreobservées. C’est ce qu’ils appellent « la garantie ». ÀRurutu, certains professionnels ont un tarif dégressifen cas d’absence de baleine lors de la sortie. En effet,à Rurutu, il est rare de ne pas observer les baleines àbosse de juillet à novembre. L’activité anthropiqueautour des cétacés reste très largement réduite parrapport à Tahiti et à Moorea. À Rurutu, dans 40 % descas, seulement 1 ou 2 bateaux sont observéssimultanément autour des cétacés et ne dépasse pas4, alors qu’il peut avoisiner la quinzaine à Tahiti. Lapression anthropique est donc plus limitée que sur lacôte ouest de Tahiti d’autant qu’à Rurutu certainsprofessionnels quittent le site d’observation àl’arrivée d’un nouveau bateau.

Contrairement aux îles du Vent où les passagersmontent à bord des bateaux sans avoirobligatoirement revêtu une combinaison de plongée,ils en portent une en embarquant à Rurutu. Lesprofessionnels des Australes indiquent qu’ilsproposent systématiquement la mise à l’eau avec lesbaleines. En effet, alors que dans les îles de la Sociétéon parle de « sorties baleines », à Rurutu on proposedes « plongées baleines ». La réglementationinterdisant la plongée en bouteille avec les baleines,il faut alors entendre par « plongée », « nage avec lesbaleines ». Environ 40 % de la clientèle des Australesvient spécifiquement pour nager avec les baleines.Dans 60 % des cas les clients sont accompagnés dansl’eau. Quant aux consignes d’approche des baleines, lesprofessionnels s’appliquent à les faire respecter auxclients immergés. Sur l’eau, un conflit d’usage esttrès souvent cité à Rurutu et concerne l’applicationdes règles des professionnels entre eux, chacundénonçant son concurrent.

Comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Nouvelle-Calédonie, Fidji, le Royaume de Tonga, Samoa, SamoaAméricaines, Niue et les Iles Cook, la Polynésiefrançaise a fait du whale-watching une activité éco-touristique en plein essor. Cependant, elle estinégalement développée puisque les Iles du Ventreprésentent à elles seules 72 % de ce secteurd’activité. Aux Australes, même si le premier whale-watchingcommercial date de 1996, cette activité reste récenteavec une augmentation de 75 % de nouveauxprestataires en 2014 autour de Rurutu et de Tubuai.L’observation des cétacés présente une perspectived’évolution croissante dans cet archipel, avec les îlesde Rimatara et de Raivavae qui souhaitent égalementdévelopper ce nouveau secteur économique.La Polynésie française étant un sanctuaire pour lesmammifères marins, le code de l’environnementréglemente toutes les activités autour de cesanimaux. À l’heure actuelle, les pressionsanthropiques exercées sur les cétacés de l’archipeldes Australes sont évaluées de très faibles à faiblessur l’ensemble de l’année. Un zonage spécifique auxIles du Vent pourrait établir des réserves temporaires

au sein du sanctuaire en raison de la forte pressionqui pèse sur ces animaux. La mise en place deréserves dans le sanctuaire favorise le repos descétacés, notamment pendant la période dereproduction et de sociabilisation. Le principe deprécaution nous amènera à prévoir des zones derepos également aux Australes, afin de préservercette population et de valoriser le whale-watching entant qu’activité éco-touristique. De plus, dans un objectif de développement durable,les observations à terre sont vivement encouragées àRimatara et à Rurutu où de nombreux points de vuesfavorisent ce loisir qui nécessite peu de moyens.

FIGURE 1Répartition de la fréquentation des cétacés autour de Raivavae.

fréquentation des cétacés aux australes

particularités de rurutu et rimatara

conclusion

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257256

FIGURE 2Répartition de la fréquentation des cétacés autour de Tubuai.

FIGURE 4Répartition de la fréquentation des cétacés autour de Rimatara.

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FIGURE 3Répartition de la fréquentation des cétacés autour de Rurutu.

bibliographie

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259258

expédition whale-watching aux australes

Baleine à bosse Megaptera novaeangliaeobservée dans les eaux limpides de Rurutu.

© Agnes Benet

Observation de baleine à bosse Megaptera novaeangliaedepuis le rivage de Rimatara.

© Agnes Benet

Observation des baleineslors de l’expédition whale-watching aux Australes.

© Agnes Benet

UNE EXPÉDITION SUR LE WHALE-WATCHING

À TUBUAI, RURUTU, RIMATARA, ET RAIVAVAE EN 2014 A PERMIS

DE SENSIBILISER LES PRESTATAIRES AUX BONNES PRATIQUES D’APPROCHE.

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260 261

Agnès BenetPROGEMTahiti, Polynésie franç[email protected]

Une expédition sur l’observation des baleines à bosseet la sensibilisation des usagers aux bonnespratiques d’approche a été réalisée du 3 au 17septembre 2014 dans les îles de Tubuai, Rurutu,Rimatara, et Raivavae en partenariat avec Pew. Cetteexpédition a été effectuée dans le cadre duprogramme «C’est Assez !», mandaté par laDirection de l’Environnement et mené par PROGEMet l’association Mata Tohora. Elle a permis decompléter le diagnostic des mammifères marins desîles Australes.

Des entretiens individuels ont été réalisés avec leswhale-watchers professionnels et les usagers de lamer à l’aide de questionnaires, de travaux dereconnaissance sur carte et de sorties en mer. Lerecueil des données sur l’activité de whale-watchingaux Australes, les pratiques effectuées, le contenudes sorties d’observation et les espèces observées apermis de localiser les zones propices à l’observationdes mammifères marins et d’évaluer les pressionsanthropiques potentielles sur les cétacés. Desrencontres avec les guides d’observation desbaleines et les professionnels de la mer ont étéorganisées pour présenter les démarchesadministratives et les autorisations délivrées par laDirection de l’Environnement pour exercer uneactivité de whale-watching. Les prestataires et lesusagers ont été informés de l’importance du respectde la réglementation des conditions d’approche descétacés pour éviter le harcèlement des animaux etdu rôle des prestataires pour assurer la durabilité del’activité. En concertation avec la Direction del’Environnement et en collaboration avec les usagersde la mer, la gestion du sanctuaire pourra prévoir desréserves temporaires dans les aires marinesprotégées. La mise en place de réserves temporairesfavorise le repos des cétacés, notamment pendant lapériode de reproduction et de sociabilisation. Desréunions publiques ont été organisées dans lesmairies en présence des élus municipaux, despêcheurs et des personnes intéressées par lesbaleines et le whale-watching. Le code de

l’environnement relatif à l’observation des cétacésen Polynésie française a été présenté. Des guidesd’approche et des fiches d’observation des baleineset des dauphins ont été distribuées pour sensibiliserle public à la sauvegarde des mammifèresmarins du sanctuaire. Enfin, plusieurs animationspédagogiques ont également été proposées dans lesécoles et les collèges. Des documents et des filmssur les baleines et les dauphins, réalisés parl’association Mata Tohora, ont été remis aux classesafin de poursuivre l'enseignement sur ce thème.

«C’est Assez !» est un programme d’étude desmammifères marins en Polynésie française et desensibilisation aux bonnes pratiques d’approche desbaleines et des dauphins. Il est réalisé depuis 2012par l’association Mata Tohora et le bureau d’étudesPROGEM, pour le Ministère en charge de l'Ecologieet du Tourisme et la Direction de l’Environnement.Les objectifs du programme sont de sensibiliserles usagers de la mer aux bonnes techniquesd'approche, directement sur les sites d’observationsdes baleines et des dauphins; de participer àl'inventaire des mammifères marins en Polynésiefrançaise; d’étudier l’impact du whale-watching surle comportement des cétacés ; d’étudier l'évolutiondu whale-watching en Polynésie française depuis2008 ; et de mettre en valeur cette activitéécotouristique. Depuis 2012, plus de 800 bateaux ontété sensibilisés directement sur l’eau à l’approchedes mammifères marins, et 80 % des personnespratiquant l’activité commerciale de « whale-watching » ont été interviewées, à Tahiti, Moorea,Huahine, Bora Bora et Raiatea-Tahaa (îles de laSociété), Rurutu et Tubuai (Archipel des Australes).

Pour plus d’informations sur le projet «C’estAssez !», veuillez contacter Dr Agnès [email protected]), ou consulter le siteinternet : http://www.matatohora.com/

Observation de baleines à bosse lors de sorties pédagogiques.

© Agnes Benet

Jeunes baleines à bosse observées dans les eaux claires de Rurutu.

© GIE Tahiti Tourisme, Lionel Pozzoli

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Filet de pêche sur la plage de Mutuaura à Rimatara.

© Jérôme Petit

L’EXPLOITATION DES RESSOURCES RÉCIFALES ET CÔTIÈRES TIENT UNE PLACE PRÉPONDÉRANTE DANS L’ÉCONOMIE

LOCALE DES AUSTRALES, MAIS SON IMPACT RESTE MODÉRÉ.

263

Le milieu marin de l’archipel des Australes estsoumis à des pressions d’origines naturelles etanthropiques. Les perturbations induites par cesdernières se traduisent par l’apparition deflambées ciguatériques préoccupantes pourcertaines îles (Raivavae et Rapa). En l’absenced’industrie, de zones fortement urbanisées etcompte tenu de la faible pression touristique, lesdégradations majeures du milieu marin sontoccasionnées par les phénomènes naturels(cyclones, Acanthaster) compte tenu de leurétendue géographique. Les actions anthropiquescomme la construction des équipementsmaritimes et aéroportuaires (extractions dematériaux coralliens, remblais, etc.) et lesactivités agricoles ont des impacts plus localisés.Excepté pour certains sites qui ont été dégradés,les récifs coralliens des îles Australes sont enrelative bonne santé. Toutefois, les prévisionsannoncées liées aux changements du climatsuscitent de fortes inquiétudes quant à l’avenirde ces derniers.

LES PRESSIONS ET LES POLLUTIONS SUR LE MILIEU MARIN AUX AUSTRALES

MAGALI VERDUCCIHeremoana Consulting Tahiti, Polynésie franç[email protected]

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265264

Les écosystèmes marins de Polynésie française subissent des pressions diverses, qui se traduisent parfois parl’apparition de symptômes de perturbations. Les pressions qui s’exercent sont d’une part, d’origines naturelles,et d’autre part, d’origines anthropiques. Ce sont les milieux côtiers, principalement formés par des récifscoralliens, qui sont les plus exposés.

introduction

L’archipel des Australes est fortement touché par laciguatéra, intoxication alimentaire résultant de laconsommation de produits marins d'ambiancecorallienne contaminés par des toxines marines(Chinain et al., 2014). Depuis 2009, une augmentationpréoccupante du nombre de cas d’intoxications a étéconstatée (Tableau I), alors que jusqu’en 1984l’archipel était pourtant considéré comme le moins àrisque de ciguatéra (Hossen et al., 2013). Les îles deRapa (depuis 6 années consécutives) et Raivavaeprésentent en 2013 une situation sanitairepréoccupante, avec des taux d’incidence supérieurs à100 cas/10 000 habitants (Gatti et al., 2014). Les perturbations environnementales naturelles (e.g.températures élevées) et d'origine anthropiques

infligées aux écosystèmes coralliens sont autant defacteurs déclenchant des flambées ciguatériques(Chinain et al., 2014). Elles peuvent apparaître suite àdes combinaisons de facteurs (cyclones, tsunamis,et/ou travaux d’aménagements par exemple), et il estalors impossible de préciser leurs origines. ÀRaivavae, les habitants de l’île incriminent les récentstravaux de construction routière et aéroportuaire,ainsi que le dynamitage réalisé pour élargir l’entréedu port (Kronen et al., 2009). La ciguatéra constitue un problème réel pour lespopulations de ces îles éloignées, qui pêchentmajoritairement pour leur subsistance.

les symptômes de perturbations

la ciguatéra

TABLEAU INombre de cas déclarés de ciguatéra de 2008 à 2014, taux d'incidence de 2012 à 2013 et population pour les îles Australes. (Source : ILM et ISPF)

ÎLE NON COMMUNIQUÉETUBUAIRAIVAVAERURUTURAPARIMATARAAUSTRALESPOLYNÉSIE FRANÇAISE

2008 20122009 2010 2011 2012 2013

Nombre de cas déclarés Taux d'incidence (/10 000 habitants)

2013 2012

Population

1711461250577

17745881

148615

122327433

108576

85913

35502

27517132455

215734361309

9,273,921,5330,111,444,617

915830660348912

2 170940

2 322515873

6 820268 207

Depuis 1980, la Polynésie française a connu 10épisodes de blanchissement. Aucun n’a été relevé pourl’archipel des îles Australes. En effet, à cause de sasituation géographique, il a un environnement

atmosphérique qui se rapproche de celui des zonestempérées en saison fraiche, et de celui des zonestropicales en saison chaude (Météo France, [1]).Toutefois, cette situation pourrait évoluer dans le futur.

le blanchissement des récifs coralliens

Les cyclones causent de nombreux dégâts à terre, et ontégalement des effets directs et indirects sur les milieuxmarins côtiers constitués principalement par des récifscoralliens aux Australes. Ils sont reconnus à long termecomme l’un des facteurs majeurs de l’évolutiongéomorphologique des récifs et des îles coralliennes.Lors du passage d’un cyclone, les 20 premiers mètres dela pente externe des récifs peuvent être détruits enraison des débris arrachés au récif par les vagues et lescourants induits. En profondeur, les colonies subissentles effets indirects : avalanches de blocs de corail cassésdégringolant le long des pentes à forte déclivité,détruisant par fracture, abrasion, déplacement desédiments et enfouissement les organismes benthiques(Langlade, 2008 [2].

Plusieurs cyclones ont frappé les îles Australes depuis1980. Leurs impacts n’ont pas été toujours documentés.Wasa en 1991 a eu un impact fort, tout comme le dernieren date en 2010, Oli, qui est passé à proximité de l’île deRurutu et a sévèrement touché l’île de Tubuai. La mer estmontée très loin sur le littoral ; il y a eu beaucoupd'inondations, des blocs de corail déposés un peu partout,des arbres arrachés, des maisons détruites, etc. [3].Le recouvrement corallien, sur le site de Tubuai (penteexterne, côte est, 12 m de profondeur) suivi par leCRIOBE dans le cadre du réseau de surveillancePolynesia Mana avait tendance à augmenter de 1997 à2010. Suite au passage d’Oli, il est passé de 24% à moinsde 1% (Chancerelle, 2014).

les pressions et les dégradations liées à des phénomènes naturels

les cyclones

Acanthaster planci est une étoile de mer qui senourrit de coraux. L’origine de leurs explosionsdémographiques est incertaine. Elles ont décimé lespeuplements coralliens dans tout l’Indo-Pacifique àla fin des années 70 et au début des années 80, etn’ont pas épargné les récifs polynésiens (Salvat etal., 2008). Sur les îles touchées, on relève une trèsforte diminution de la couverture en corail vivant surles pentes externes.Aux Australes, d’après Lagouy (2007), les récifs de

l’île de Tubuai ont été épargnés alors que ceux de l’îlede Rurutu ont été décimés sur au moins 4 zones. L’îlede Rimatara aurait également été touchée. Des récifscoralliens morts à plus de 90% et bien plus érodésque ceux de Rurutu, entre 65 et 12 m [4], y ont étéobservés lors de la campagne Tuhaa pae 2013 del’IRD. Des dégradations y ont également étéremarquées lors de plongées effectuées pour laréalisation d’une collection de coraux en profondeur(Bosserelle, comm. pers.).

les explosions démographiques d’acanthaster planci

le changement climatique et ses impacts

La Polynésie française avec ses petites îles et ses récifscoralliens compte parmi les territoires les plussusceptibles d’être affectés par les futurs impacts deschangements liés au climat : réchauffement desocéans, acidification, élévation du niveau de la mer,ainsi que des cyclones tropicaux et des précipitationsplus intenses (Gattuso et al., 2014). Les données météorologiques obtenues à Tahiti durantla période 1958-2002 montrent que la températuremoyenne de l’air a augmenté de 0,0343°C par an, avecune augmentation moins sensible dans l’archipel desAustrales (Laurent et al., 2004), soit une augmentationde plus de 1°C. Cette augmentation devrait se

poursuivre pour atteindre 1,4 à 5,8 °C à l’horizon 2100.D’après les prévisions pour les 100 années à venir, latempérature de l’eau devrait atteindre le seuil deblanchissement des coraux dans tous les océans et d’ici2020, l’ensemble des récifs coralliens devrait subirdes phénomènes de blanchissement annuellement(Gabrié et You, 2007). Toutefois, ces prévisions sont trèsdiscutées. La question actuellement étudiée par leschercheurs réside dans la possibilité d’adaptation descoraux, d’une part, et dans la vitesse d’augmentation dela température, d’autre part (Salvat et al., 2008).Le pH des océans a diminué de 0,1 unité depuis1850, passant de 8,2 à 8,1 (Gattuso et al., 2014) et

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Il y a une suspicion de pollution géogénique àl’arsenic sur l’île de Rapa, liée à l’analyse d’uncompost d’algues où des teneurs de 116 mg/kgd’arsenic ont été mesurées. Suite à ces résultats, d’autres échantillons d’alguesfraiches ont été analysés à la demande de la directiondes ressources marines, mais ces valeurs n’ont pasété confirmées (Monier, comm. pers.).

la pollution géogénique

les pressions et les dégradations d’origine anthropique

Lagon de Raivavae et remblai aménagé pour la construction de l’aérodrome. © CRIOBE

correspondant à une augmentation de la concentrationen ions hydrogène de 30%. L’acidification des eauxocéaniques diminuerait le métabolisme de lacalcification des coraux. La hausse du niveau de la mer reste un sujet depréoccupation majeur pour les populations des paysinsulaires du Pacifique qui vivent principalement sur leslittoraux. Les projections pour les régions des petitesîles du Pacifique sud, varient de 0,5 à 0,6 m à l’horizon

2100 par rapport au niveau de la période 1986-2005(Nurse et al., 2014). Si dans de nombreuses régions dumonde, la dernière remontée du niveau de la mer avaitété favorable au développement vertical des coraux, ilest fort peu probable que ce scénario se reproduise(Duvat et Magnan, 2010).Les prévisions annoncent également des cyclones deplus forte intensité.

Les dragages des récifs frangeants, pour l’extractionde granulats coralliens, utilisés dans la constructionde routes notamment, ou pour la réalisationd’aménagements maritimes, ont été l’une des causesmajeures de destruction des récifs en Polynésiependant de longues années (Seguin et al., 2014). Aux Australes, les demandes d’extractions restentmodestes au regard de celles concernant le milieufluvial et sont ponctuelles (Brugneaux et al., 2010),comme lors de la construction de l’aérodrome deRaivavae qui a nécessité l’extraction de 540 000 m3 de

matériaux sur le platier récifal [5]. En 2013, seules 3autorisations d’extraction ont été délivrées pourl’archipel des Australes (14 100 m3 à Tubuai pour lequai et le chenal ; 8 300 m3 à Rurutu pour un four àchaux et le chenal d’accès au port de Moerai) [6].Les impacts des extractions sur les récifs corallienssont liés à la destruction du milieu et à sonappauvrissement biologique, à des modificationsmorphologiques, à la turbidité, à la modificationdu paysage, et au développement de flambéesciguatériques.

les dragages et les extractions de matériaux coralliens

Les remblais ont un impact important sur le milieumarin. Ils correspondent à la destruction totale desrécifs sur l’ensemble de la surface remblayée.Rarement réalisés en alignement avec la côte, ilsconstituent des excroissances qui perturbent lacourantologie lagonaire. Il s’ensuit une modificationdes flux sédimentaires et la création de zonesconfinées, peu propices à la vie corallienne, où seconcentre la pollution des eaux (Gabrié et You, 2007).Aux Australes, le trait de côte est peu artificialisé,

contrairement à certaines îles où il dépasse 50%comme à Moorea (Leoture, 2013). Les remblaisconstruits pour gagner des terrains sur la mer sontpeu nombreux. Ils ont été réalisés essentiellementpour la construction des équipements maritimespublics aéroportuaires et routiers (Figures 1 à 5). Leremblai le plus important, d’une superficie de 166 000m2 [5], est celui réalisé sur le récif frangeant deRaivavae pour la construction de l’aérodrome(Figure1).

les remblais

FIGURE 1Carte des pressions anthropiques à Raivavae.

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FIGURE 2Carte des pressions anthropiques à Tubuai.

FIGURE 3Carte des pressions anthropiques à Rurutu.

FIGURE 4Carte des pressions anthropiques à Rimatara

FIGURE 5Carte des pressions anthropiques à Rapa

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Ces travaux ont été nécessaires pour permettre ladesserte maritime des îles, le chargement etdéchargement des marchandises à quai (Rapa, Raivavae,Tubuai) ou pour permettre aux pêcheurs de rejoindre lelarge comme à Rimatara et à Rurutu où la passe Ava Tuia du être dynamitée (PTPU, 2008) (Figure 3). Les impactsde ces travaux sont : la destruction des récifs,l’augmentation de la turbidité, le développement defoyers ciguatériques et les perturbations de la faune.

Le déroctage du chenal portuaire de Tubuai a mobiliséune partie des habitants en 2014, qui s’est opposée auxtravaux durant 1 mois, à cause du risque de ciguatéra.Suite à une décision de justice, les travaux ont repris etdevraient être achevés en mars 2015. Un suiviichtyologique est prévu pour évaluer la ciguatéra sur lesite avant les travaux et 1 an après leur fin (Chinain,comm.pers.)

les déroctages

Ce phénomène touche principalement les îles ayantun lagon comme Tubuai et Raivavae mais lesapports terrigènes ne semblent pas poser deproblème. En effet, les parcelles cultivées se situent

essentiellement au niveau de la plaine littorale, il n’ya pas de défrichage de nouvelle parcelle ni de rivièreimportante (Couraud, comm. pers.). Les facteursfavorisant ce phénomène ne sont donc pas réunis.

l’hyper-sédimentation terrigène

Vue aérienne du littoral de Mataura, Tubuai © CRIOBE

La collecte de données fiables et régulières sur lescaptures de poissons et d’invertébrés marins estcomplexe, surtout pour les îles éloignées où unepart importante des ressources pêchées estautoconsommée. En règle générale, en Océanie, lesressources hauturières sont en assez bonne santé, àl’exception du thon obèse Thunnus obesus et, dansune moindre mesure, du thon à nageoires jaunes

Thunnus albacares (Gillet et Cartwright, 2010). EnPolynésie française, la production commerciale dethons et de poissons à rostre est reportée dans leTableau II. La pression de pêche exercée sur cesespèces peut être qualifiée de faible à moyenneselon les espèces. Le même constat peut être fait pour l’archipel desAustrales peu fréquenté par la flotte palangrière

l’exploitation des ressources marines

(Figure 6). Toutefois, le fait que ces espèces résidentdans des habitats au large et qu’elles effectuent devastes déplacements à travers les ZEE (Gillet etCartwright, 2010) risque à terme d’impacter laressource en Polynésie française, si la gestion desstocks à l’échelle du Pacifique n’est pas effective. Lethon à nageoires jaunes est quasi menacé, alors quele thon obèse l’est déjà. Pour les ressources hauturières épi-pélagiques,“mahi mahi” (Coryphaena hippurus) et thazard(Acanthocybium solandri), la production commercialetotale (Tableau II) est estimée pour 2013 à 1 096 t(DRMM, 2014). Aucune évaluation de stock n’estdisponible pour ces espèces mais les populationsmondiales tendent à être stables (Collette et al., 2011).C’est probablement le cas également dans les eauxau large des Australes. L’exploitation des ressources hauturières pélagiquesde profondeur concerne essentiellement le saumondes dieux (Lampris gutattus) et le “papio” (plusieursespèces de la famille des Bramidae). La productioncommerciale totale de Polynésie française de cesespèces tend à augmenter. En effet, en 2013 elle estestimée à 143 t pour le saumon des dieux (108 t en2006) et à 38 t pour le papio (15 t en 2006). La biologiede ces espèces est mal connue et en l’absence dedonnées précises sur les stocks, il est impossible dese prononcer sur le niveau d’exploitation actuel parrapport au niveau maximum optimal. Nous disposons également de peu de données sur lapêche des poissons démersaux de profondeur, très

vulnérables à toute forme d’exploitation en raison deleurs caractéristiques biologiques (croissante lente,maturité sexuelle tardive, sédentarité). La pressionsur les espèces vivant aux plus grandes profondeursest quasi nulle car elles ne sont pas exploitées oul’ont été de manière très ponctuelle dans le temps ;tel est le cas de l’alfonsino (Beryx sp.). D’autresespèces présentes aux Australes à moins de 350 met abondantes comme les paru “iihi” (Eteliscarbunculus) et le paru “rehu” (Pristipomoidesauricilla) (Ponsonnet, 2002), qui sont recherchéesen raison de leur qualité gustative et leur valeurmarchande, sont probablement exploitées. Il estpossible que certains sites soient surpêchés, commeaux îles de la Société, mais rien ne nous permetde l’affirmer. La pression de pêche sur les espèces de mollusques,crustacés et coraux démersaux est nulle car ellesne sont pas exploitées.L’étude réalisée sur l’exploitation des ressourceslagonaires de l’île de Raivavae (Kronen et al., 2009)indique que globalement, la pression de pêche(exprimée en besoins annuels de subsistance parrécif et par lieu de pêche) pour les poissons estfaible ; et s’établit entre 0,3 et 0,4 tonne/km2

seulement. Elle précise également que la plusforte pression de pêche est exercée sur lesbénitiers et, dans une moindre mesure, sur leslangoustes. La pression de pêche exercée sur lesressources du récif et du lagon n’a pas atteint unniveau critique.

TABLEAU IIProduction de la pêche palangrière en Polynésie française en 2013.(Source : DRMM 2013).

RESSOURCES PÉLAGIQUESTHONSTHON BLANCTHON JAUNETHON OBÈSEBONITETOTAL THONSESPÈCES À ROSTREESPADON MARLIN (BLEU, RAYÉ)TOTAL ESPÈCES À ROSTRERESSOURCES ÉPIPÉLAGIQUESTHAZARDMAHI MAHITOTALRESSOURCES PÉLAGIQUES DE PROFONDEURSAUMON DES DIEUXPAPIO

Production palangrière Production cotière Total

339659476333

4786

124337461

201177378

14338

343624318421841

0250250

156562718

Production Polynésie française (en tonnes)

373912187948756627

124587711

3577391096

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Le tourisme est encore peu développé sur l’archipeldes Australes et la pression qu’il exerce sur le milieulittoral et marin est faible. Les structuresd’hébergement ne sont pas implantées sur le milieumarin et les constructions n’ont donc pas eu d’effetdirect sur ce dernier.L’impact des activités touristiques sur le milieu marinn’a pas été évalué. Les excusions sur le lagon peuvententrainer une pollution par le rejet d’hydrocarbureset/ou de déchets dans le milieu marin. Elles peuventêtre responsables de la destruction des récifs, si lessites fréquentés ne sont pas équipés d’ancrages.L’impact lié à ces activités est probablement faibleaux Australes mais il peut être fort sur des sitesparticuliers. La baignade et le snorkeling peuvententrainer des dégradations qui sont dues aupiétinement des platiers, aux coups de palmes quipeuvent briser des colonies coralliennes, et à lacollecte d’organismes marins, notamment lescoquillages. En l’absence de données de terrain, il estimpossible de qualifier l’impact de ces activités sur lemilieu naturel. La plongée sous-marine n’est plusproposée ni à Rurutu, ni à Tubuai. Il est probable quel’impact de cette activité a été faible.

Le whale whatching est une activité phare pourl’archipel des Australes, et a contribué à la notoriétéde l’île de Rurutu. Si cette activité est mal gérée, ellepeut avoir des impacts sur le comportement despopulations de mammifères marins (augmentation dutemps de plongée ou de la vitesse de déplacement,modification des déplacements, etc.). Aucune étudesur l’impact du whale whatching n’a été réalisée enPolynésie française. Toutefois, afin de réduire lesimpacts, une réglementation spécifique a été mise enplace. Tous les prestataires proposant cette activitéont été formés en 2013, avec pour objectif de limiterl’impact sur les mammifères marins parl’apprentissage des bonnes pratiques à mettre enœuvre lors des observations.

tourisme et activités touristiques sur le milieu marin

Aux Australes, il n’y a pas de zones fortementurbanisées, ni d’industrie. Les pollutions marinespourraient principalement être liées aux rejets d’eauxusées et pluviales et au déversement de déchets dansle milieu naturel, à l’utilisation d’engrais et depesticides pour l’agriculture, et aux hydrocarburesutilisés comme carburants ou autres. L’habitat bien que majoritairement situé dans la zonelittorale est peu dense. Les habitations sont enprincipe équipées de fosses septiques et de puisards.Il est toutefois possible que ces installations soientmal entretenues ou fonctionnent mal, et que desrejets d’eaux usées soient émis dans le milieu marin. L’impact de ces rejets potentiels avec celui des eauxpluviales n’a pas été évalué. Dans les îles sans lagon,il est peu probable que ces eaux, s’écoulant dansl’océan, engendrent une pollution importante dumilieu marin compte tenu de la forte et immédiatedilution. Pour les îles avec lagon, il est possible quecertains sites côtiers soient pollués.

La gestion des déchets au sein de l’archipel estdésastreuse (PTPU, 2008). Les déchets sont déposésdans des décharges communales ou sont brulés ouenfouis dans les jardins car la collecte et le tri ne sontpas systématiques. À Rurutu existent de nombreuxdépôts sauvages, notamment au niveau de l’anciendépotoir pourtant remblayé et dans le lit de certainesrivières (PTPU, 2004). La situation des décharges(autorisées ou sauvages) est parfois problématiquecar elles sont situées dans des zones sensiblescomme des marais ou à proximité du lagon. Tel est lecas à Tubuai, aux abords du marais de Matavahi nonloin du lagon ou encore à Rimatara. Face à ce constat,il est possible que certains déchets ou des lixiviatsarrivent dans le milieu marin qui serait alors pollué.Les îles Australes sont connues pour être le grenierde la Polynésie française et les agriculteurs utilisentdes engrais et pesticides qui pourraient induire unepollution chimique du milieu marin. D’aprèsBrugneaux et al. (2010), le risque est surtout présent

les pollutions marinesIl est probable, au regard de la taille despopulations des îles, des habitats, et desproblèmes de ciguatéra limitant pour certaines îlesl’exploitation des ressources, que la situationactuelle soit identique pour toutes les îles, exceptéRurutu. En effet, la pression de pêche y est plusimportante en raison de la taille de la populationet celle très réduite du platier.Pour les bénitiers, la pression de pêche est plusimportante sur l’île de Raivavae que sur celle deTubuai (Stein, et Remoissenet, comm. pers.). Dansces îles l’exploitation des bénitiers est stable etdurable au niveau actuel (10 t par an/île). En effet,entre 2004-2005 et 2010, des signes d’exploitationont été observés (déficit de gros individus partout)

mais aucune baisse des stocks (Andrefouet, 2011). Pour les langoustes, il est possible qu’existe unesurexploitation sur certaines îles mais rien nepermet de l’affirmer. À Rapa, les langoustes seraientmoins nombreuses et moins grosses (Philippe,habitant de Rapa, comm. pers.). De plus, lespêcheurs sont allés récemment à Marotiri et ils ontprécisé « avant, il y avait beaucoup de langoustes etlà, c’était désolant, il n’y en avait plus ».

FIGURE 6Répartition géographique de la production commerciale de la pêche palangrière (DRMM, 2014)

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bibliographie

Les dégradations naturelles impactent plusfortement les milieux marins des îles de l’archipeldes Australes par leur étendue géographique, quecelles anthropiques qui sont plus localisées.Les dégradations majeures sont occasionnées pardes phénomènes naturels (cyclones, Acanthaster),par les équipements maritimes, aéroportuaires, etpar les activités agricoles. Les récifs coralliens des îles Australes, exceptécertains sites qui ont souffert des effets de cyclonesou d’invasions d’Acanthaster semblent être enrelative bonne santé par rapport à d’autres régionsdu monde où ils sont très dégradés (zone Caraïbes).Toutefois, les prévisions annoncées liées auxchangements du climat suscitent de fortesinquiétudes quant à l’avenir des récifs coralliens dansle monde. Il en est de même pour les récifs coralliensdes petites îles de Polynésie française dont ceux desîles Australes, menacés par l’augmentation destempératures, l’acidification des océans, l’élévationdu niveau du la mer, et des précipitations et descyclones plus intenses.

conclusion

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à Tubuai, et est lié aux cultures de la pomme de terreet des carottes. A notre connaissance, seule l’île deTubuai a fait l’objet d’études sur la recherche depollutions anthropiques éventuelles du milieu marin.Un contrôle des eaux de baignade est réalisé depuis2012 et en 2013, la qualité des eaux était bonne àexcellente sur les 4 points de contrôle (CHSP, 2014).Par ailleurs, la situation de l’ancienne décharge aincité la commune à réaliser une évaluation simplifiéedes risques. Les échantillons d’eaux lagonairesanalysés montrent que contrairement aux eauxsouterraines, le dépotoir semble avoir eu peud’impact sur les poissons, bénitiers et sédimentslagonaires. Toutefois, la réalisation d’investigationscomplémentaires a été proposée pour lever lesdernières incertitudes (Murzilli et al., 2012). En effet,

la présence de certains métaux lourds tels quel’arsenic, dans tous les compartiments et dansplusieurs stations, semble indiquer une forteutilisation de produits liés à l’agriculture, qui peuventprésenter des risques de contamination pourl’homme (Tanret, 2010).La présence de pesticides et autres polluants aégalement été recherchée dans des bénitiers qui ontété prélevés in situ à Tubuai en 2009. Les analyses ontpermis de détecter plusieurs contaminants chimiquestels que des métaux lourds, des pesticidesorganochlorés (PCB, aldrine, endrine, etc.) et deshydrocarbures aromatiques polycycliques (Bernagoutet al., 2012). Il y a donc bien des traces de pollutiondes eaux marines au niveau de l’île de Tubuai.

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les îles australes :

éléments de synthèse issus de

l’analyse écorégionale marine

de la polynésie française 2010

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Corail photographié à Rapa.

© Ian Skipworth

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Lancée en 2008 par la Polynésie française, l’analyseéco-régionale (AER) du milieu marin polynésien a étécoordonnée conjointement par l’Agence des airesmarines protégées et le WWF-France. Elle a étéréalisée en partenariat avec les services duPays, de l’État, des communes, mais aussi denombreux scientifiques, des représentants de lasociété civile et de professionnels du territoire. CetteAER s’inscrivait dans le cadre du programme CRISP(Initiatives Corail pour le Pacifique Sud). Son objectifétait de produire une synthèse des données et unoutil partagé d'aide à la décision en matière deprotection et de valorisation de l'espace maritime,notamment à travers la création d'aires marinesprotégées. Cette analyse a concerné l’ensemble descinq archipels, dont les Australes. Les connaissancessur cet archipel restaient à cette date relativementlimitées, mise à part Rapa qui avait fait l’objet denombreux inventaires. Les conclusions principalesde cette AER concernant les Australes avaientconduit à énoncer que la zone maritime autour deRapa présentait des enjeux forts de gestion et quele milieu marin des Australes en généralmériterait de plus larges investigationsscientifiques afin de mieux caractériser sabiodiversité et les enjeux de sa protection.

LES ÎLES AUSTRALES : ÉLÉMENTS DE SYNTHÈSE ISSUSDE L’ANALYSE ÉCORÉGIONALEMARINE DE LA POLYNÉSIEFRANÇAISE 2010SOPHIE-DOROTHÉE [email protected]

SOPHIE [email protected]

MAHÉ [email protected]

Agence des aires marines protégées

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Les informations présentées dans ce chapitre sont issues de l’AER de Polynésie française publiée en 2010.Elles reflètent l’état de la connaissance à la date de sa production.

note préliminaire des auteurs

La convention sur la diversité biologique (CDB)recommande de protéger d’urgence les zonesmarines remarquables et sensibles, notammentgrâce à la mise en place d’aires marines protégées(AMP). L’Union Internationale pour la Conservation dela Nature (UICN) définit une aire marine protégéecomme étant un espace géographique clairementdéfini, reconnu, spécialisé et géré par des moyenslégaux ou d’autres moyens efficaces, visant à assurerla conservation à long terme de la nature, desservices écosystémiques et des valeurs culturellesqui y sont associés. L’UICN définit 6 catégoriesgénériques d’AMP avec des objectifs graduels deconservation. Ces catégories peuvent se combiner.Dans les AMP, la protection de la nature est unepriorité mais dans certaines conditions, elle peut êtrecompatible avec des activités économiquesencadrées et poser les bases d’un développementdurable des territoires.Ainsi afin de déterminer l’implantation d’AMP, il est

essentiel de pouvoir localiser et hiérarchiser lesenjeux, qu’ils soient naturels, culturels ou socio-économiques. Dès lors, nombre d’organisations nongouvernementales (ONG) et autres structurespubliques ont déployé divers processus pour yparvenir (Clément et al. 2010). Il existe différentesméthodes pour déterminer les zones d’importanceen termes de conservation, basées sur descritères variables («hotspots», étude de la résilience,espèces à statut, espèces endémiques, etc.). Cesméthodes peuvent se baser sur les donnéesexistantes (publications, voire littérature grise), maisaussi sur des dires « d’experts » lorsque les donnéesdisponibles n’ont jamais fait l’objet de publication. Cesdeux types de données peuvent d’ailleurs utilementse compléter. Comme cela est notamment le cas dansles démarches d’analyse écorégionale telles quedéveloppées par le world wildlife fund (WWF) oul’Agence des aires marines protégées.

cadre général

les analyses écorégionales : objectifs et méthodes

L’approche mise en oeuvre par le WWF se concentre surles principaux objectifs de conservation de la diversitébiologique (Clément et al., 2010), tels que : lareprésentation et le maintien de tous les écosystèmes,le maintien des processus écologiques et évolutifs quicréent et maintiennent la diversité biologique et lesressources commerciales, le maintien des populationsviables d'espèces d'intérêt particulier, la conservationd'habitats naturels intacts suffisamment larges pourrésister aux perturbations à grande échelle et auxchangements à long terme. Au regard de ces objectifs,l’analyse écorégionale, telle que menée par le WWF, sedéroule en 3 étapes qui visent à :- identifier des zones d’intérêt écologique ;- identifier les usages et les pressions qui s’exercent surle milieu et identifier les enjeux croisés ;- définir de façon partagée une vision et une stratégiepour la protection de ces sites remarquables.Dans la lignée des démarches engagées par le WWF etsoutenues par le Fonds Français pour l’Environnement

Mondial (FFEM), l’Agence des aires marines protégées(Agence) a également développé une méthodologied’identification des zones à enjeux de conservation sur lemodèle des analyses écorégionales et l’a adaptée àd’autres échelles (qui ne sont pas des écorégions), sousle vocable «analyses stratégiques régionales-ASR».Ces approches se fondent sur un retour d’expérience(Brugneaux, 2013), fruit de la réalisation de septanalysesréalisées en Polynésie française, Guadeloupe,Martinique, Nouvelle-Calédonie, Bretagne Nord,Bretagne Sud, Guyane, Corse. La démarche d’AER/ASRest une synthèse des enjeux selon trois entréesthématiques principales :- la fonctionnalité des écosystèmes ;- le patrimoine naturel et culturel ;- les usages et les pressions : analyse des usages etactivités qui se développent sur le milieu marin,également des pressions induites à la fois par ces usagesmais aussi par les activités en milieu terrestre ayant unimpact sur le milieu marin.

Les données (brutes, traitées, à dires d’expert) sontcollectées par thème, synthétisées puis analysées selonces trois thématiques. Une base de données géoloclaiséecentralise les informations. Les connaissances acquisessont ensuite croisées pour identifier les sites porteursdes enjeux les plus forts en termes de gestion del’espace marin et conduisent à la proposition destratégies de création d’AMP adaptées au territoire etparfois d’acquisition de connaissances.

La démarche est conduite en concertation avec lesacteurs concernés sous l’égide des autoritéscompétentes. L’intérêt de ces démarches d’AER/ASR estque l’analyse des données écologiques, culturelleset socio-économiques, portées par des experts etdes scientifiques, s’accompagne d’une importanteconsultation des acteurs du territoire concerné qui envalident le contenu et élaborent collégialement lesconclusions.

La Polynésie française compte 118 îles disséminéessur un espace maritime d’environ 5 millions de km².Composée de 5 archipels, cet espace abrite près de15 000 km² d’écosystèmes coralliens très diversifiésdont 20% des atolls de la planète. Cependant, cesterritoires doivent faire face à de nombreusespressions anthropiques et naturelles, quinécessitent de mettre en place des mesures degestion adaptées. Ce défi est d'autant plusimportant à relever que les modes de vie etl’économie polynésienne sont dépendants de laqualité du milieu marin. Or, des zones maritimesgérées de manière effective peuvent répondre à cesenjeux écologiques, culturels et économiques.Les compétences en matière de gestion desressources et de protection de la biodiversité

marine (loi organique n°2004-192) relevant de lacollectivité polynésienne ; celle-ci détermine sastratégie en matière d’AMP. Les AMP polynésiennesexistantes ont des objectifs variés (sites classés,plan de gestion de l’espace maritime, etc.). Certainsde ces espaces bénéficient d’une reconnaissanceinternationale au titre du Programme «Man andBiosphere » de l’UNESCO (atolls de Fakarava) oubien de la Convention RAMSAR relative aux zoneshumides d’importance internationale (Moorea).Parallèlement, il existe des mesures de gestiontraditionnelles, les "rahui", qui ont coursnotamment à Rapa et Maiao. Enfin, la Polynésiefrançaise dispose de sanctuaires pour les requinset les mammifères marins couvrant l’ensemble deseaux sous juridiction (source DIREN).

l’analyse écorégionale marine de polynésie française

collaboration entre l’agence des aires marines protégées et le wwf

L’Agence est un organisme public visant à offrir unappui aux politiques publiques pour la création et lagestion d’AMP. Elle contribue à l’élaboration et à lamise en œuvre d’une stratégie de création et degestion d’AMP dans les eaux sous juridictionfrançaise à travers des analyses stratégiquesrégionales (ASR) ou éco-régionales (AER). Depuisl’accord cadre signé en novembre 2007 avec laPolynésie française, l’Agence apporte un soutientechnique au gouvernement polynésien pour la miseen œuvre de sa stratégie en matière d’AMP.De son côté l’ONG WWF France avait réalisé en 2005l’AER de Nouvelle-Calédonie. Dans le cadre d’unecollaboration avec le gouvernement de Polynésiefrançaise, la réalisation d’une AER Polynésiefrançaise était envisagée dès 2006.C’est ainsi qu’en 2007, le gouvernement polynésien amandaté le WWF et l’Agence pour la réalisation del’AER marine de son espace maritime. Lancée en

2008, cette AER polynésienne s’inscrivait égalementdans le cadre des actions du programme CRISP(Initiative en faveur des récifs coralliens du PacifiqueSud). Son objectif était de fournir un outil partagéd'aide à la décision en matière de protection et devalorisation de l'espace maritime, notamment àtravers la création d’AMP. Elle trace une synthèsepartagée de l’état des connaissances disponibles surle milieu marin. Elle permet d’offrir un outil d’aide àla décision pour les institutions, comme lespartenaires privés. La réalisation de cette AER s’estdéroulée sur deux ans avec plusieurs temps forts. Lasynthèse des données a été réalisée de manièrecollégiale par l’ensemble des parties prenantespubliques et privées concernées en Polynésiefrançaise en 2009. Ces données ont ensuite étécroisées et l’élaboration des enjeux s’est faite demanière participative durant des ateliers rassemblantégalement les représentants des mêmes parties

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Les 8 îles ou îlots des Australes et les îles Cook situéesdans le même alignement, s’étirent sur 2200 km. Néesdu point chaud Mac Donald, seules les trois premières(Marotiri, Rapa et Raivavae) ont suivi une évolution sansperturbation depuis leur émergence. L’évolution destrois suivantes (Tubuai, Rurutu, Rimatara) a étéperturbée secondairement par un rehaussement de lalithosphère (Morhange, 1993) expliquant d’ailleurs lavariation de hauteur des anciens niveaux calcairesmarins. Tubuai, dont les soubassements calcaires sontproches du niveau de la mer, serait en début d’émersion.Les deux autres, dont les affleurements sont nettementplus hauts, seraient émergées depuis beaucoup plus

longtemps (Bonvallot, 1993). L’atoll Maria n’a pas subi desoulèvement.L’alignement des Australes, comprend donc troistypes d’îles :- des îles à récif frangeant, dont le soulèvementsecondaire a modifié le déroulement de la constructioncorallienne (Rurutu, Rimatara aux Australes). EgalementRapa, pour des raisons sans doute plus complexe.- des îles à constructions récifales complètes (frangeant,chenal, Barrière), telles que Raivavae et Tubuai.- également un petit atoll, sans passe ni pinacle, etquasiment dépourvu de lagon.

synthèse des éléments concernant les australes issus de l’aer marine de polynésie française de 2010

contexte géologique

Les Australes se situent à la limite sud de la zoned’influence tropicale de la Polynésie et bénéficient, aumoins pour les coraux, d’un apport larvaire des Cook. Àcheval sur les aires d’influence des faunes tropicales ettempérées, la faune de Rapa présente une doubleparticularité, liée à sa position «d’écotone» et à sonisolement générateur d’un fort endémisme. Sa

biodiversité côtière est remarquablement élevée auregard de sa position géographique (extrémité sud- est).Ceci s’explique en partie par un effort de connaissancebeaucoup plus important sur Rapa qu’ailleurs enPolynésie et notamment les autres îles des Australes. Eneffet, la biodiversité des autres secteurs est sans douteencore sous-estimée (Tableaux I et II).

patrimoine naturel

TABLEAU I - Richesse spécifique observée dans les archipels de Polynésie (AER 2010) (mise à jour pour les crustacés surhttp/decapoda.free.fr).

mollusques

700600

627 (1000)300160

500 (600)

SociétéTuamotuMarquisesGambierAustrales (hors Rapa)Rapa

coraux

1271043554105110

crustacés

405281

411 (>800)69?31

poisssons

767619558259351417

mollusques

3,5292320

SociétéTuamotuMarquisesGambierAustrales (hors Rapa)Rapa

coraux

000000

crustacés

3,94,9

98,7

??

poisssons

1,20,58 (9)

00,62,2

TABLEAU II - Pourcentages d’endémisme observé au sein des groupes côtiers dans les archipels de Polynésie française (AERA2010) (mise à jour pour les crustacés sur http/decapoda.free.fr).

FIGURE 1 - Patrimoine naturel (AER de Polynésie française, 2010).

prenantes issues de tous les archipels. Des réunionspubliques de restitution ont permis de restituer cestravaux à la population à Nuku Hiva, Hiva Oa,Rangiroa, Fakarava et Tubuai en 2010-2011.

Ces tournées coordonnées par la Polynésie françaiseavait pour but d’engager un débat avec la sociétécivile et les élus sur la suite à donner concernant lagestion du milieu marin polynésien.

FIGURE 2 - Synthèse des enjeux écologiques (AER Polynésie française, 2010).

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La synthèse des différents usages sur le milieu (pêchecôtière, pêche lagonaire, perliculture et tourisme) montreune concentration d’activités dans les îles de la Société etdans les atolls du nord des Tuamotu. Les Australes fontproportionnellement, l’objet de moins d’usages.Les pêches lagonaire et côtière sont pratiquées dansquasiment toute la Polynésie française. Aux Australes, lapêche lagonaire est principalement développée à Tubuai,Raivavae et Rurutu. Une grande partie de la productionde pêche est liée à l’exploitation des bénitiers dont lesstocks naturels sont particulièrement importants à Tubuai.Raivavae et Tubuai produisent le plus de bénitiers avecl’atoll de Tatakoto aux Tuamotu (70 tonnes par an). Lapêche côtière est pratiquée sur toutes les îles desAustrales, principalement à bord de poti marara, et seconcentre beaucoup sur les poissons pélagiques. En 2009,était notée une augmentation de la flottille de 42% en deuxans. L’analyse des pressions exercées par ces deux typesde pêche sur les îles Australes a montré que celles-cipouvaient être qualifiées de moyennes à fortes selon lesîles. Compte tenu de l’importance de l’activité, l’enjeuéconomique est essentiel pour ces îles. Dans cet esprit, leservice des pêches polynésien avait engagé en 2005 unprogramme pluridisciplinaire visant à étudier les stocksde bénitier et à proposer des mesures de gestion dans lestrois principales îles exportatrices vers Tahiti dont Tubuai.En matière de pêche hauturière, l’activité palangrièrepolynésienne se concentre sur le nord-nord-ouest de la

Polynésie française. Ceci s’explique par la localisation dela ressource mais aussi en raison de l’absenced’infrastructures relai dans les archipels. Les Australesn’apparaissent pas comme une zone fréquentée par cespalangriers. Cependant il a été envisagé de développerdes bases de pêche avancées aux Australes (à Rapa).Le tourisme est beaucoup plus restreint aux Australesque dans les îles de la Société. Les infrastructuresd’accueil restent de la petite hôtellerie de famille avecdes flux relativement modérés. Néanmoins, l’île deRurutu connait une certaine activité et renommée avecl’observation des baleines à bosses.Concernant les activités à terre, telles que l’agriculture,la gestion des déchets ou l’assainissement, celles-ci sontmodérées mais génèrent des pressions importantes surle milieu lagonaire des îles de Rurutu et Tubuai.En résumé, les Australes sont le siège d’usagesmultiples sur le milieu lagonaire et côtier mais ayant uneintensité assez modérée. Les îles concentrant le plusd’activités sont Tubuai ainsi que Rurutu dans unemoindre mesure. Dans cet archipel, les pressionspossibles sur le milieu marin résultent de l’agricultureet de l’élevage, des déchets et de l’assainissement ainsique des pêcheries lagonaire et côtière (Figures 3 et 4).Le milieu hauturier fait l’objet de peu d’activités. Il estdonc probable qu’il fasse l’objet de peu d’impacts,quoique la biodiversité n’ait pas fait l’objet de beaucoupd’évaluation.

les usages et les pressions en mer aux australes

L’archipel des Australes n’est sans doute pas uneentité écologiquement homogène. Cette hétérogénéitése traduit d’ailleurs dans le découpage des écorégionsmarines (Spalding et al., 2007). En effet Rapa, du faitde ses nombreuses spécificités, représente une entitéécologique sensiblement différente de la Polynésie dupoint de vue du pool d’espèces présentes et peut êtredu reste des Australes du fait de son éloignement et desa position latitudinale extrême (écorégion Rapa-Pitcairn) alors que le reste des Australes est rattachéà l’écorégion Cook. Toutefois, les connaissancesactuelles ne permettent pas de déterminer si lesîles proches, notamment Raivavae, possèdent lesmêmes caractéristiques d’assemblages d’espèces.L’endémisme et la particularité des cortègesd’espèces côtières observés à Rapa doit donc êtreconfirmé par des recherches supplémentaires dans lesautres îles de l’archipel (Figure 1). Par ailleurs et quelque soit le groupe côtier, la question se poseégalement de l’affinité de la faune des Australes avec

celle des Tuamotu- Gambier.Pour ce qui est du patrimoine pélagique, celui ci estencore peu connu près des îles (requins, tortues,cétacés) car peu de campagnes d’acquisition deconnaissances ont été réalisées sur ce domaine(campagnes de pêche expérimentales ou d’observationdes cétacés). La présence de mégaptères y estcependant attestée autour de quatre îles : Rimatara,Rurutu, Tubuai, Raivavae, probablement aussi autourde l’atoll Maria. Des observations ont également étéréalisées sur les bancs au large et au niveau des montssous marins (mont Arago, Banc Thiers, Banc du lotus).Les écosystèmes profonds liés aux pentes récifales desîles ou aux monts sous-marins sont encore peu connus(campagne BENTHAUS).La prise en compte de tous les éléments disponiblesconcernant le patrimoine naturel a permis lors del’AER Polynésie française de mettre en avant deux îlesà fort intérêt écologique Rapa et Tubuai (Figure 2).

FIGURE 3 - Synthèse des usages (AER Polynésie française, 2010).

FIGURE 4 - Synthèse des pressions (AER Polynésie française, 2010).

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synthèse des enjeux aux australes

FIGURE 5 - Carte de synthèse Australes - AER de Polynésie française 2010.

ENJEUX GÉNÉRAUXConcernant les enjeux côtiers. Il est important de souligner que les connaissances patrimoniales sur les différentesîles des Australes étaient très limitées en 2009. Mise à part Rapa qui avait fait l’objet de d’inventaires conséquents etpluritaxons dans les années 2000. Ces résultats sont présentés sur la Figure 5.

ENJEUX PAR ÎLES

RAPA – ENJEU PRIORITAIRE MAJEUR

C’est l’île la plus méridionale de Polynésie françaiseet aussi la plus isolée. A cheval entre les zonestropicales et tempérées, elle abrite des assemblagesparticuliers et de nombreuses espèces endémiques.Elle abrite également des populations remarquablesde Puffin de Newell (Puffinus nexelli) et de Pétrel deMurphy ainsi que de fortes densités de langoustes etde requins, notamment le requin des Galapagos(Carcharhinus galapagensis) observable aux

Australes. Sa position lui confère un rôled’observatoire des changements climatiques. Lîle està associer à Marotiri, au banc Nelson etéventuellement au mont Mac Donald.L’activité de pêche lagonaire et côtière estrelativement développée. Les pressions restentmoyennes et peu nombreuses (pêche, agriculture etérosion). L’île bénéficie d’un rahui (système degestion traditionnel) original.

TUBUAI - ENJEU PRIORITAIRE

Une des deux îles hautes à récif barrière desAustrales, Tubuai présente de fortes potentialités entermes de biodiversité récifale et côtière. De plus, elleabrite des structures récifales particulières,réticulées. L’île abrite le seul stock important debénitiers du sud de la Polynésie française (dynamiquedifférente des stocks du nord). Celui-ci fait l’objetd’une exploitation conséquente. Avec plus de 2000

habitants en 2007, les usages sont multiples etdéveloppés, surtout la pêche lagonaire sur lesbénitiers mais la pression de pêche reste modérée.Les pressions liées à la démographie sont moyennes(assainissement et érosion) à fortes (agriculture etdéchets). Les enjeux de diminution des pressions etde règlementation des usages sont donc importants.

RAIVAVAE - PRESSIONS ET/OU USAGES IMPORTANTS SUR UN PATRIMOINE NATUREL MÉCONNU

L’autre île à récif barrière des Australes présente lesmêmes potentialités que Tubuai mais n’abrite pas destructure réticulée. Elle abrite également un stock debénitiers remarquable, bien que moins important quesur Tubuai. Les connaissances sur les communautésmarines de cette île sont très limitées, notamment

sur leurs liens avec les communautés de Rapa. Lapression de pêche lagonaire est importante(exploitation du stock de bénitiers nécessitant unegestion raisonnée) et les pressions des activitésterrestres (agriculture, érosion, déchet etassainissement) sont notables.

RURUTU - PRESSIONS ET/OU USAGES IMPORTANTS SUR UN PATRIMOINE NATUREL MÉCONNU

Ile haute sans barrière récifale, Rurutu n’abritethéoriquement pas autant de biodiversité récifale queles deux précédentes. Cependant les connaissancessur les communautés de cette île sont inexistantes.Rurutu est connue pour accueillir des baleines àbosse (Megaptera novaegliae) durant la période de

mise bas. Les pressions sur le milieu sont fortes etmultiples (importantes pour la pêche lagonaire,l’agriculture et la gestion des déchets, moyennesconcernant le tourisme, l’érosion, la pêche côtière etl’assainissement).

RIMATARA - PRESSIONS ET/OU USAGES IMPORTANTS SUR UN PATRIMOINE NATUREL MÉCONNU

Comme Rurutu, cette île haute n’a pas de barrièrerécifale et donc un potentiel de biodiversité récifaleplus faible que Tubuai et Raivavae. Des pressionsmultiples mais modérées s’y exercent. On notecependant une activité de pêche côtière importante

induisant une forte pression. Un projet de création deport et la construction récente de l’aéroport risquentd’accroitre la fréquentation de l’île et donc lespressions probables sur le milieu.

L’ATOLL DE MARIAMalgré son positionnement géographique et le faitd’être le seul atoll de l’archipel, n’a pas été retenucomme présentant un intérêt particulier lors des

ateliers. En effet, celui a été jugé de trop petite taillepour présenter un intérêt remarquable, également enraison de l’absence de véritable lagon.

ÉLÉMENTS RELATIFS AU LARGEÀ la date de 2009, les enjeux hauturiers étaientdifficilement évaluables en l’absence de tout

inventaire ou de campagne océanographique dédiéeà l’ensemble de cette zone des Australes.

conclusion

Les caractéristiques relatives aux Australes qui sedégagent de l’AER marine de Polynésie française sontde deux ordres. Le premier point tend à démontrerqu’en l’état actuel des connaissances en 2009, la zonede Rapa, y compris les monts-sous-marins adjacents,présentent un fort enjeu de protection, mais ellenécessite également une évaluation croisée de sescaractéristiques avec d’autres îles des Australes et

des Gambier. Le second point est que la zonemaritime des Australes est relativement inconnuepour la science au-delà de la zone lagonaire. L’AERde Polynésie française avait donc insisté sur lesenjeux d’acquisition de connaissances nouvelles, parla réalisation de campagnes scientifiques dans leszones côtières des îles des Australes mais aussi aularge et dans les milieux profonds.

bibliographie

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MORHANGE C., 1993 - La typologie des îles in Atlas de laPolynésie française, Ed. ORSTOM, 113 p.

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synthèse

des intérêts patrimoniaux

de l’environnement marin

des îles australes

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290

Récifs coralliens observés sur un platier à Rapa.

© Ian Skipworth

LA DIVERSITÉ DES ESPÈCES DE CORAIL ET LA BEAUTÉ DES RÉCIFS DES PENTES EXTERNES CONSTITUENT UNE

ORIGINALITÉ NOTABLE AUX AUSTRALES.

291

SYNTHÈSE DES INTÉRÊTS et enjeux patrimoniaux à l’échelle de l’archipel

BERNARD SALVAT 1

DONATIEN TANRET 2

TAMATOA BAMBRIDGE 1

JÉRÔME PETIT 2

1 Institut Récifs Coralliens Pacifique, CRIOBE, Moorea, Polynésie française

2 The Pew Charitable Trusts, Polynésie française

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293292

C’est en raison de leur histoire géologique, de leur situation géographique, de leur histoire culturelle, que lesîles Australes forment un archipel original et diversifié au sein de la Polynésie française. Cela est vrai pour ledomaine marin littoral et hauturier.

les intérêts écologiques du patrimoine marin des australes

le domaine océanique des îles australes

Avec le temps les îles Australes s’étirent dans l’espace :de la zone volcanique sous-marine du MacDonald ontémergé des îles au cours de la vingtaine de millionsd’années passées, qui ont dérivé sur le plancherocéanique en direction de l’ouest nord-ouest. Après leurnaissance, les îles vont se différencier, certainessubissant une nouvelle activité volcanique avec ou sansmouvement tectonique, et révéler un archipel aupalmarès de diversité incomparable. Il s’agit autant dediversité morphologique terrestre que littorale et récifale: îles soulevées volcano-karstiques (Rimatara, Rurutu),îles subsidantes avec récif (Maria, Tubuai, Raivavae) ousans lagon (Rapa, Marotiri). La diversité littorale etrécifale tient aussi à une position géographique tropicaleet limite subtropicale pour le climat comme pour les eauxocéaniques : vent, houle, trajectoires cycloniques,température des eaux, oligotrophie des eaux, etc. Toutesces caractéristiques vont déterminer des patrimoinesnaturels très divers pour chaque île en fonction de sonhistoire. C’est dans ce contexte que se situent les enjeuxactuels de gestion du patrimoine naturel des îlesAustrales, conjointement aux activités humainesactuelles et à venir.Ce patrimoine naturel que nous observons aujourd’huiest un instantané de la vie de chaque île et de l’archipel,

correspondant à la présence de l’homme qui n’a coloniséces îles que depuis un millénaire tout au plus. Un flashsur le milieu naturel, quelques 15 ou 20 millionsd’années après que le volcan de Maria (la plus ancienneîle de l’Archipel) n’émerge, ne dérive de 1600 km, nes’enfonce et ne se recouvre d’une chape de corail pourdevenir un atoll dont le lagon sera bientôt comblé. C’estce patrimoine naturel qui nous est laissé en héritagepour les générations futures. L’homme a pris en marcheun archipel qui avance et se modifiera au cours du tempsgéologique, mais peut être aussi avec les changementsclimatiques annoncés. Il se modifiera aussi en raison desactivités humaines.Le domaine océanique des îles Australes estgigantesque. Si on le limite aux eaux sous souveraineténationale, sa superficie recouvre aisément le cinquièmede la ZEE de la Polynésie française. Bien que distant despopulations de ces îles, on peut toutefois considérer quecet océan du large, fonds et colonnes d’eaux, fait partiede leur patrimoine naturel avec la connotation de ce quereprésente l’océan dans la culture polynésienne. Lesfonds proches des côtes, les récifs et les lagons sontdavantage appropriés par les populations riveraines quiy exercent des activités quasi quotidiennes.

biodiversité marine côtière

Le domaine marin littoral comprend les plages, leslagons quand ils existent, et les récifs coralliens jusqu’àla limite bathymétrique de vie des coraux qui estcomprise entre 50 et 100 m de profondeur selon lesconditions de milieu aux abords de chaque île. D’unemanière générale, la biodiversité côtière et les activitéshumaines en liaison avec la mer sont d’autant plusimportantes que ce domaine est vaste. Les îlespossédant un lagon large détiennent une plus grandebiodiversité en raison d’habitats sableux qui n’existentpratiquement pas dans les îles sans lagon. Raivavae etTubuai possèdent des peuplements lagonaires plusdiversifiés que ceux des étroits platiers récifaux bordantRimatara et Rurutu. Les habitats marins de l’atoll de

Maria sont majoritairement sédimentaires. Le cas deRapa est un peu particulier ; s’il ne possède ni récifbarrière ni lagon, l’île présente néanmoins des baiesavec des dépôts sédimentaires. Les connaissances surla biodiversité dans le domaine marin côtier sont trèsparcellaires, les iles les mieux prospectées étant Tubuaiet Rapa. Par ailleurs, ces connaissances sontinsuffisantes pour certains groupes taxonomiquescomme les éponges, les coraux mous ou même leséchinodermes. La faune marine côtière des Australes estcaractérisée par un assemblage diversifié et original,avec des espèces très bien représentées, absentes ourares dans le reste de la Polynésie française. L’isolementdes îles offre un taux d’endémisme particulièrement

élevé pour certains groupes d’espèces comme, lescoraux, les mollusques, les poissons et les algues, évaluéà 10% de leur diversité à Rapa et Marotiri, ce qui traduitun patrimoine unique de la faune marine côtière. Les coraux sont très diversifiés à Rapa avec 112 espèces,dont plusieurs genres rencontrés uniquement dans leseaux subtropicales de l’archipel. Les coraux sontégalement diversifiés à Tubuai avec 77 espèces (environ170 espèces dans les îles de la Société et les Tuamotu). Ceséléments constituent une originalité notable aux plans dela diversité des espèces et de leurs abondances. Les fondscoralliens des pentes externes des îles Australes sont aussibeaux que ceux de la Société ou des Tuamotu. Les mollusques affichent une image semblable.Quelques 455 espèces sont répertoriées aux Australessur un total de 2 400 connues en Polynésie française. Unquart d’entre elles ne se rencontrent que dans l’archipel.A cela s’ajoute un endémisme important à Rapa, quicompte sans doute 10% d’espèces n’existant nulle partailleurs dans le monde.Les crustacés sont bien représentés avec quelques 200espèces de la zone littorale mais aussi d’habitats plusprofonds. Les invertébrés ont fait l’objet d’un effortd’échantillonnage plus faible qu’ailleurs en Polynésie

française, cependant le nombre d’espèces recensées necesse d’augmenter au fur et à mesure des campagnesscientifiques et il reste encore beaucoup à découvrir.La richesse spécifique et la densité de peuplementichtyologique, moindre que dans certaines autres îlespolynésiennes en raison de la température des eaux,contraste avec la diversité de la faune corallienne. Oncompte 471 espèces d’espèces de poissons dans la partieseptentrionale de l’archipel des Australes et 383 dans lapartie méridionale de Rapa et de Marotiri. Mais c’est ànouveau à Rapa que le bilan actuel fait état d’unendémisme de 6% des espèces, sans compter toutescelles récoltées lors d’expéditions scientifiques menéesrécemment dans le cadre de cet ouvrage et qui serontprochainement décrites.La flore algale des Australes est relativement abondanteavec 152 espèces répertoriées soit la moitié des espècesconnues de Polynésie française. Elle est caractérisée parune grande originalité de ces peuplements par rapportau reste de la Polynésie, et montre des similitudes avecl'archipel Hawaiien et les îles Cook par la présenced'espèces subtropicales à tempérées, en particulier dansle sud où l’on dénombre 70 espèces qui ne se rencontrentqu’à Rapa et Marotiri.

la biodiversité marine du large

Le patrimoine de l’océan du large concerne selon lesterminologies des textes : « le sol, le sous-sol et les eauxsurnageantes». Il s’agit du domaine benthique et dudomaine pélagique au large des îles, après la penterécifale, et dont les peuplements coralliens ne dépassentjamais la profondeur d’une centaine de mètres. Les îlesAustrales sont les témoins de montagnes sous-mariness’élevant du plancher océanique, situé à quelques 4 500m de profondeur, et dont émergent les sommets. Cettechaine volcanique sous-marine s’étire sur plus de 1300km entre Maria et Marotiri. Plus de 40 monts sous-marins ont été identifiés dans le secteur des Australes,dont 5 culminant à moins de 50 m de profondeur. Le peude connaissance acquise sur ces monts sous-marinstémoigne d’une singulière biodiversité marine et d’uneétonnante richesse.La colonne d’eau au-dessus des fonds océaniques abritedes communautés pélagiques diversifiées. Le planctondérivant au grès des courants et le necton avec desespèces migratrices, sont des espèces à large distributiondans l’océan, bien au-delà de la ZEE du Pays. On peutexaminer la diversité de ces espèces et leurs abondancesdans les eaux des Australes afin d’établir d’éventuellesoriginalités locales par rapport aux autres archipels

polynésiens et aux communautés pélagiques du reste del’océan Pacifique. Le manque de connaissancescientifique et le peu de données de captures de pêcheliée à une activité peu développée dans la région ontsouvent amené à considérer cette zone commeoligotrophe, pauvre en faune pélagique. Force est deconstater que la diversité pélagique est importante, avec60 espèces identifiés à ce jour par les palangriers au sud20° Sud. Le nombre d’espèce serait vraisemblablementsupérieur avec la réalisation d’études prospectivesciblées sur des inventaires de biodiversité. Les grands prédateurs sont les espèces les plusreprésentées avec thons, bonites, espadons, marlins,mahi mahi, thazards, saumons des dieux, etc. Si l’on enjuge par les prises des palangriers, les populations demarlins, espadons, saumon des dieux, escolier serpentet escolier ailes longues seraient plus abondantes dansles Australes au sud du 20° de latitude sud que dans lesautres zones de la ZEE du Pays. Les captures de thonssont moins abondantes aux Australes que dans lesparties centre et nord de la ZEE, où l’effort de pêche y estplus important. De nombreux petits pélagiques sontégalement répertoriés. Par ailleurs, la zone abrite unefaune pélagique remarquable avec des ressources en

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micronecton abondante et la présence de calamars. Leseaux autour de Rapa sont connues pour être une zone deproduction primaire importante.Les connaissances des poissons benthiques deprofondeur des Australes sont très limitées et neconcernent pratiquement que les fonds inférieurs à 700m. Au total, 45 espèces de poissons ont été identifiées, cenombre pourrait être bien plus important avec laréalisation de campagnes d’inventaires pour approcherleur réelle diversité. On notera que les poissons profondsobservés dans la zone sont en moyenne plus grands

qu’ailleurs. Des centaines d’invertébrés ont égalementété identifiés. La majorité de ces espèces sontcosmopolites et ce n’est guère que sur les monts sous-marins que s’affichent des endémismes. Selon desprospections réalisées sur d’autres monts sous-marinsque ceux des Australes, cet endémisme peut varier de15% à 36% selon les groupes zoologiques considérés,qu’il s’agisse d’invertébrés ou de poissons. Ce patrimoinede biodiversité des Australes est donc important, ladestruction de ces habitats profonds amènerait ladisparition de centaines d’espèces de notre planète.

les espèces emblématiques de la conservation

Sur les 5 espèces de tortues recensées en Polynésiefrançaise, 3 sont présentes aux Australes : la tortueverte observée dans toutes les îles habitées , la tortuecaouanne uniquement repérée à Tubuai et la tortueimbriquée à Raivavae et Tubuai. La distribution de cesespèces dans les îles de l’archipel sera élargie par deprochaines prospections mais il semblerait que lestortues luth et olivâtre soient absentes. Toutes cesespèces sont protégées en Polynésie : la tortue verte estconsidérée comme rare ou d’intérêt particulier alorsque la caouanne et l’imbriquée sont considérées commevulnérable ou en danger. Il est important de préserverles sites de ponte de la tortue verte dans toutes les îlesoù ils ont été observés, notamment à Rurutu, Tubuai etRaivavae. On connait les problèmes que posent laprotection des tortues compte tenu des aspectsculturels et traditionnels qui se rattachent à leurconsommation. Les infractions à la législation sontassez nombreuses dans toutes les îles. On noteratoutefois que cette consommation ne constitue pas dansles îles un apport alimentaire indispensable et que lasensibilisation des adultes et l’éducation des jeunesdevraient amener à un respect de ces espècesmigratrices emblématiques et à leur protectionconformément à la législation adoptée et au plan d’actiondiligentée par le Ministère de l’Environnement en 2013.L’archipel des Australes compte 10 espèces demammifères marins signalées sur les 21 en Polynésiefrançaise. La baleine à bosse caractéristique del’archipel est la seule baleine à fanons fréquente danstoutes les îles, alors que les rorquals sont absents. Enrevanche toutes les baleines à dents de Polynésiefrançaise (cachalots et baleines à bec) se trouventégalement aux Australes. Pour les dauphins, la diversitéaux Australes est moindre que dans les eaux plusseptentrionales de la ZEE. A l’exception des baleines à

bosse et du grand cachalot, la densité des espèces esttrès faible dans les eaux des Australes comparativementaux autres archipels. Toutes les espèces demammifères marins sont protégées en Polynésiefrançaise depuis 1995 et l’ensemble de la ZEE a étédéclaré sanctuaire pour leur protection et leursauvegarde en 2002. La réglementation en vigueurprécise les conditions d’approche des mammifèresmarins pour les observer. Aux Australes, le whale-watching a débuté à Rurutu en 1996 et s’est récemmentdéveloppé à Tubuai ; les possibilités existent à Raivavaeet Rimatara mais ne sont pas encore mises en place. Lapopulation de baleines à bosse des Australes et des îlesde la Société constitue un ensemble au plan génétiqueavec une population réduite qu’il convient de préserver.La création d’aires marines protégées pourrait être unecontribution utile et efficace pour la sauvegarde de cettepopulation de baleines à bosse alors que l’espèce estclassée comme « vulnérable » depuis 1996 par l’UICN.Les requins et les raies, espèces côtières et pélagiques,sont représentés par 17 espèces parfaitementidentifiées (14 requins et 4 raies) alors que la Polynésiefrançaise en compte 25. Peuvent se rajouter 6 espècesde requins et une espèce de raies dont la présence estfortement probable mais reste à confirmer. Les requinsgris, corail ou à pointe noires sont les espèces côtièresalors que les requins marteau, soyeux, chagrin, renard,peau bleu et crocodile sont de haute mer ou deprofondeur. On notera la présence du requin desGalápagos qui n’a été observé à ce jour que dans lesAustrales et aux Gambier. On sait peu de choses sur leszones de nurseries aux Australes et sur les rapports desdiverses populations insulaires entre elles. Toutes cesespèces sont protégées dans le cadre d’un vastesanctuaire avec les pays voisins des îles Cook, Tokelauet les îles Samoa américaines.

les oiseaux marins reproducteurs

L’avifaune marine de l’archipel des Australes sedistingue par l’originalité et la diversité de sespeuplements. L’archipel présente l’assemblaged’oiseaux marins le plus diversifié de Polynésie française,avec 24 espèces reproductrices sur les 28 que compte laPolynésie française. La moitié de ces oiseaux marinsnicheurs sont des Procellaridae (pétrels et puffins) et desOceanitidae tandis que l’abondance des phaétons et lafaiblesse du groupe des fous le distingue des autresarchipels. Plusieurs espèces se retrouvent également

aux Gambier et dans les îles du groupe Pitcairn, etconfère à l’archipel un profil bien particulier. Enfinchacune des 7 îles présente un profil spécifique pour lesoiseaux marins, offrant des conditions d’habitat diverseset de nombreux lieux de nidification adaptés. Cettepopulation d’oiseaux marins unique en Polynésiefrançaise est cependant menacée par la prédation desrats et des chats et la destruction de l'habitat des sitesde nidification. L’ensemble des espèces reproductricesdans l’archipel est inscrite sur la liste rouge de l'UICN.

les minerais sous-marins

Les minerais, encore incomplètement documentésdans l’espace de l’archipel des Australes, sont lesnodules polymétalliques et les terres rares dans lesplaines abyssales ainsi que les encroutementscobaltifères sur les flancs et les sommets des montssous-marins. Hormis des concentrations de certainsmétaux intéressantes sur les fonds marins de Polynésiefrançaise, ces ressources n’ont rien d’originales. Les

densités de nodules au mètre carré y sont peu élevéescomparativement à d’autres fonds du Pacifique. Lesminerais des fonds océaniques ne donnent lieu àaucune exploitation actuellement mais il est clair quecelle-ci entrainerait des dégradations des fondsmarins et de leurs peuplements. Ces conditionsenvironnementales de protection ont déjà fait l’objet decolloques et de recommandations.

les intérêts culturels du patrimoine marin des australes

histoire culturelle dans la longue durée

Si les habitants des Australes appartiennentlinguistiquement à la famille austronésienne, cetarchipel est parmi les derniers à avoir été peuplé parles Polynésiens, à une période toutefois antérieure àAotearoa/Nouvelle-Zélande. De tous les archipels de laPolynésie française d’aujourd’hui, c’est sans doute lemoins connu car peu de recherches en scienceshumaines y ont été réalisées. La majorité des travauxmenés aux Australes relève de l’archéologie. Travaillantà l’échelle de plusieurs centaines d’années, les seulsfaits matériels relevés sont les marae et les objets(parures, pierres polies, ornements, etc.). Cela aconduit nombres d’archéologues à considérer deuxpériodes. La première s’étend depuis l’installation despremiers Polynésiens dans ces îles au début dumillénaire jusqu’à une époque qui varie entre 1250 et1500 AJC. La seconde période débute vers 1250jusqu’au contact avec les Européens. Cette dichotomiese retrouve aussi à travers l’interprétation que lesarchéologues font de l’activité humaine. La premièrepériode est dominée par l’installation dans les îles puisdes échanges réguliers avec les autres archipels à unedouble échelle inter-îles et régionale (comprenant letriangle îles de la Société-îles Cook-îles Australes). Laseconde est marquée par un isolement relatif des

populations des îles Australes par rapport aux autresarchipels. Ces résultats en archéologie ne concordentpas avec les travaux en ethnologie qui soulignent lacontinuité des traditions, des mobilités culturelles et del’appréhension de l’Océan (moana) par les insulaires.En particulier, l’examen des relations spécifiques desinsulaires des Australes vis à vis de leur océan (moana)montre qu’au-delà de la barrière de récif, l’océanimprégnait l’ensemble des relations humaines relativesaux mythologies, aux dieux, aux systèmes declassification et d’ethno-taxonomie, les relations depouvoir et statutaires, les alliances entre chefferies,les protections du monde invisible, la capture et laconsommation des poissons et des animauxemblématiques. Parmi les espèces emblématiques quiont une importance historique dans cet archipel, ilconvient de noter l’importance des baleines, de latortue, des requins, des raies qui, de près ou de loin,sont intégrés dans les cosmogonies polynésiennes. Lerapport nature/culture est aux Australes, comme dansl’ensemble de l’Océanie, un rapport généalogique.D’autres travaux seront sans doute nécessaires tanten archéologie qu’en ethnologie pour préciser lesdifférentes périodes et la richesse des continuités/interruptions culturelles aux Australes.

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la période contemporaineLa période contemporaine débute avec les contactsavec les Européens. Notre proximité historique aveccette période nous permet d’être plus précis en cequi concerne les dynamiques démographiques,politiques et culturelles. Les premières rencontresdu point de vue des Australes, auront été fatales :sévères épidémies menant à une catastrophedémographique, disparition des savoirs traditionnelsrelatifs aux relations à l’Océan, effacement del’ancienne religion polythéiste au profit d’unereligion monothéiste judéo-chrétienne introduite parles missionnaires de la London Missionary Society.La colonisation française dans ces îles achèveral’œuvre de décomposition culturelle des relationsdes Insulaires à l’Océan : destruction des chefferiestraditionnelles, intégration de ces mêmes chefferiesà l’appareil de coercition étatique, enregistrementdes droits de propriété terrestre, le lagon commel’océan étant désormais incorporés au domaine

public de l’Etat et du Pays. Ce qui relevait hier d’unesuperposition de droits statutaires et d’usages enrapport avec les territoires marins et terrestres, estdésormais considéré comme des droits de propriétéaliénable ou du domaine public. Mais contre touteattente, les évolutions démographiques seront ànouveau positives à partir du milieu du XIXe siècle,témoignant d’une vitalité des populations. A partirde la stabilisation de l’organisation sociale dans unnouveau contexte politique, religieux et culturel, lesinsulaires des Australes vont montrer une grandevitalité dans leur rapport à l’Océan : construction deleur propres goélettes pour beaucoup d’îles,commerce avec les archipels des Tuamotu, des Cooket de la société. Certains insulaires des Australes(notamment de Rapa) seront alors connus pour leurgrande réputation de plongeur et de travailleursinfatigables.

représentations et pratiques de l’océan aujourd’hui

Les représentations liées à l’océan (au senspolynésien de Moana) témoignent d’un lien intime queles habitants des Australes ont conservé avec leurlongue histoire. Les mythes, les légendes de l’Océan,les lieux de pêches sur certains hauts fonds et montssous-marins, sont toujours connus, transmisintergénérationnellement dans les familles. Certainsgrands pélagiques ou espèces emblématiques,continuent d’être liés aux communautés humaines autravers des taura’a (protection familiale) et fontsouvent l’objet d’une protection et d’une vénération(cas des requins, des baleines). Là encore, le rapportnature/culture continue d’être généalogique plutôtque naturaliste. La tortue jadis tapu (interdiction àcaractère sacré) consommée par les personnes dehaut rang (notamment les arii) pour témoigner de leurproximité avec les ancêtres déifiés et la sacralitépolynésienne, fait l’objet d’une interdiction généralemais aussi de braconnage. Ce dernier point apparaîtcomme une déliquescence des structurestraditionnelles qui n’encadrent plus des pratiquesjadis cérémonielles.Enfin, comme dans l’ensemble de la Polynésieorientale, les autochtones des Australes, ont prisl’importance de leur culture et sont engagés depuisle début des années 2000 dans une quête identitaireet culturelle qui vise à réhabiliter, voire réinstaurer

des pratiques longtemps mises de côté mais quiconcourent à une meilleure intégration de leursrelations entre la culture et l’environnement. Il en estainsi du rahui (interdiction temporaire sur uneressource ou un territoire) remis en place à Rapa, puisà Rimatara. Parfois, des institutions syncrétiqueslocales où la dimension religieuse n’est jamais trèséloignée, ont pris en charge la gestion del’environnement (Toohitu à Rurutu et Raivavae, liésaux églises protestantes locales). Comme ailleurs enPolynésie française, les autochtones pensent laprotection de l’environnement (paruru) au traversd’institutions locales qui revêtent une importancepolitique et religieuse déterminante. C’est à la fois cette longue histoire d’un rapportétroit avec l’Océan, la modification des pratiquesocéaniques dans un nouveau contexte, qui font que laprotection et l’utilisation de ces espaces océaniquessont de véritables enjeux culturels et de société. An’en pas douter, la participation des populationslocales à la mise en place puis à la gestion de leurespace océanique, sera un des enjeux de la décennieà venir.

les enjeux socio-économiques du patrimoine marin des australes

la démographie et l’économie

Avec 6 820 habitants, soit 2,5% de la population de laPolynésie française, les Australes ont retrouvé depuis2007 une croissance démographique et un soldemigratoire positif. Les densités de populations sontvariables entre Rapa avec 13 habitants/km2 et Rimatara,102 habitants/km2. L’économie est dominée par le poidsde l’administration publique (44% des actifs).L’agriculture est le premier secteur productif occupant54% des actifs de plus de 15 ans contre 32 % au secteurde la pêche et 28% à celui de l’artisanat d’art.

L’autoconsommation est une ressource essentielle dansl’économie des Australes avec plus de la moitié de laconsommation totale provenant des activités del’agriculture, de la pêche et de l’artisanat, permettant decompenser en partie un chômage important (30%). Avecla mise en place d’infrastructures, les liaisons maritimeset aéroportuaires se sont développées ces dernièresannées : actuellement quelques 40 rotations de bateauxpar an, sauf pour Rapa (6 rotations) et 3-4 vols parsemaines dans les îles habitées sauf Rapa.

la pêche lagonaire et côtière

La pêche lagonaire et côtière, selon les statistiques,n’occupe que 49 professionnels déclarés dans toutl’archipel des Australes : 19 pêcheurs lagonaires et 19pêcheurs côtiers. Cependant dans chaque île,l’exploitation artisanale des ressources marines côtièrescontribue de façon importante à l’alimentation desfoyers. La pêche à pied sur les récifs est surtout le faitdes femmes et des enfants (algues, holothuries,mollusques, oursins). La pêche, quelle que soit laméthode de pêche (à pied, fusil sous-marin, filets, etc.),concerne plus de 120 espèces de poissons et 25d’invertébrés (mollusques, crustacés, échinodermes) ;elle traduit bien une exploitation artisanale. Raivavae etTubuai qui disposent chacun d’un véritable lagon, ont unepêcherie axée principalement sur les poissonslagonaires et les bénitiers. Rapa, Rimatara et Rurutu, quine disposent pas de grandes surfaces récifales, ontdiversifié la pêcherie en exploitant plus densément lesressources en invertébrés récifaux ainsi que du large etdes habitats profonds. La consommation de quelquesalgues comme les caulerpes par les habitants, àRaivavae et Rimatara, est traditionnelle et ne met enaucun cas en danger ces peuplements. Des exportationsse font vers Tahiti, essentiellement par voie maritime :entre 40 et 50 tonnes par an, à partir de Tubuai (20 tonnesde bénitiers et de poissons), de Raivavae (12 tonnes debénitiers, de poissons et de langoustes) et de Rapa (5tonnes de poissons mais surtout pélagiques). Des pêchesde poissons récifaux et d’invertébrés sont égalementtransférées entre les îles de l’archipel. La principaleactivité de pêche commerciale concerne les bénitiers.L’exploitation et l’exportation de la chair de bénitiers vers

Tahiti date de plus de 40 ans à Tubuai, avec uneproduction de l’ordre de 18 et 32 tonnes annuellementau cours de la dernière décennie. Raivavae a débuté cecommerce depuis une dizaine d’années avec uneexportation annuelle supérieure à 10 tonnes. Cetteexploitation s’inscrit maintenant dans un cadreréglementaire établi par la Direction des RessourcesMarines et Minières pour une activité durable, en passantprogressivement d’une collecte des stocks sauvages àcelle de stocks élevés. On peut donc considérer que la pêche côtière dans lesîles Australes est artisanale et satisfait la consommationlocale. Elle donne lieu à des exportations inter-îles et versTahiti qui ne mettent pas en danger les stocks despeuplements, tant de poissons que d’invertébrés. Onnote également l’existence de rahui pratiqués à Rimataraet surtout à Rapa, pour préserver durablement les stocksen offrant une zone de régénération, et en autorisant lapêche communautaire occasionnelle de quelquesespèces dans certaines zones.

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la pêche hauturière

Les îles Australes n’hébergent ni palangriers nibonitiers mais une vingtaine de poti-marara de pêcheprofessionnelle. Par ailleurs, la pêche des espècespélagiques dans la zone des Australes est peuimportante et ne concerne que des palangriers venantde Tahiti, qui prospectent peu cette zone. Les espècespélagiques d’intérêt majeur pour la pêche hauturièrecommerciale sont les thonidés (thons sensu stricto,thazards et bonites), les espadons et les marlins. Lesthons obèse et thons à nageoires jaunes sont moinspêchés aux Australes qu’au nord de 20° sud, où lapression de la pêche hauturière y est plus importante.Il semble en revanche exister une ressourceintéressante en marlins et espadons dans la régionde Rapa et plus au sud. Si dans le Pacifique Sud etCentral les stocks de thons sont le plus souventsurexploités, l’archipel des Australes présente unefaune pélagique diverse encore largement préservée.Les thoniers de Papeete fréquentent peu cette zonede pêche en raison de son éloignement, d’une part, etde conditions de mer parfois rudes et aux ports derepli distants et peu nombreux, d’autre part, rendantl’exploitation peu rentable. Les pêcheries étrangèresciblant le thon blanc, l’espadon et le marlin rayéfréquentent à certaines périodes de l’année lesabords Sud de la zone économique. La pêchehauturière artisanale à quelques milles nautiquesautour des îles Australes (19 poti marara recensésofficiellement) est très faible et concerne plus lesthazards et les poissons volants que les autresespèces. Au total donc, les stocks de poissons pélagiques etdémersaux sont sous exploités et bien préservés dansl’archipel. Mais il convient de rappeler que les stocks

des trois principales espèces de thons pêchées (thonblanc, obèse, et à nageoires jaunes) sont considéréescomme « vulnérable » ou « quasi menacée » parl’UICN au regard de leurs stocks et de leurexploitation actuelle dans le Pacifique sud.L’exploitation des ressources thonières dans lePacifique est gérée à l’échelle régionale. Cependant,face aux pressions exercées par les pêcheriesinternationales, les eaux des Australes présententune surface considérable (1 millions km2) pour larégénération des stocks d’espèces pélagiquesmigratrices. L’intérêt de certaines espèces dupelagos tient aux ressources alimentaires qu’ellesreprésentent comme les thons et les espadons, ou àleur statut d’espèces culturelles emblématiquescomme les tortues, ou encore à leur intérêtéconomique comme les baleines pour le tourisme. Cesont ces espèces, leurs stocks, leur exploitation ouleur statut d’espèces protégées qui doivent retenirnotre attention comme enjeu de gestion.La pêche des poissons benthiques profonds estartisanale et très limitée, dans certaines localités auxabords immédiats des îles et à des profondeursinférieures à 350m environ. Les stocks ne risquentrien tant que cette pêche est artisanale et si réduite.Les poissons démersaux de plus grande profondeur,non encore recensés dans les eaux de l’archipel maisqui s’y trouvent assurément, ne sont l’objet d’aucuneexploitation. On sait que les espèces des grands fondsont une croissance très lente, un âge tardif pour lareproduction et une grande longévité ; toutescaractéristiques qui rendent difficile une exploitationdurable de cette ressource dans l’avenir.

le tourisme

En dehors de la pêche des habitants et des quelquesprofessionnels, les activités en milieu marin (lagonset récifs) sont récréative pour les résidents et lestouristes. Le secteur touristique est encore peudéveloppé avec moins de 80 unités hôtelières et s’estorienté vers l’éco-tourisme. Avec environ 2 000touristes par an, la pression liée au tourisme estfaible. Les activités très variables selon les îlesconcernent le sorties en bateau, la pêche dans lelagon, la pêche au gros, les excursions sur les motu,et surtout l’observation des baleines à Rurutu (3prestataires) et Tubuai (1 prestataire). Le whale-

watching est devenu une des spécialités touristiquesdes Australes, parfaitement réglementée quant àl’approche des cétacés et leur observation pourconsidérer que cette activité sera pérenne dans lecadre du sanctuaire existant et de la protection dontjouissent ces mammifères marins.

les pressions environnementales

L’état des lieux de l’environnement lagonaire etrécifal des îles Australes révèle surtout desdégradations des formations coralliennes et de leurspeuplements d’origine naturelles. Il en fut ainsi avecles cyclones comme Oli qui affecta fortement lesrécifs de Tubuai ou la prolifération des étoiles de merépineuse à Rurutu et Rimatara. Mais ces récifsrécupèrent avec le temps à condition que d’autresperturbations analogues ne surviennent pasconstamment, ce que laisse craindre les prédictionsdu changement climatique qu’il faudra subir. La seuleparade à ces prévisions pessimistes est de préserverles récifs actuels de toute dégradation anthropique defaçon à leur laisser la capacité de mieux résister. A cetitre, le relatif isolement des îles méridionales del’archipel (Rapa et Marotiri), le fort endémisme de lafaune et la flore côtière et leur bon état depréservation en font un site d’intérêt particulier pourl’observation des changements climatiques en courset à venir. Aucune concentration de zone urbanisée

n’existe aux îles Australes comme dans les îles de laSociété, de sorte que de nombreuses pollutions sontfaibles à inexistantes, des eaux notamment. Lesremblais sont peu fréquents aux Australes àl’exception de celui réalisé pour la construction del’aérodrome de Raivavae. Des extractions dematériaux coralliens ont été réalisées à Raivavae,Tubuai et Rurutu. Des déroctages ont été effectuésdans toutes les îles pour améliorer la dessertemaritime et ont rencontré une opposition despopulations sensibilisées au risque ciguatérique. Lerisque de ciguatéra est présent dans plusieurs îles àla suite de travaux d’extraction de matériauxcoralliens ou de la réalisation d’équipements dans leslagons et sur les récifs les îles (Tubuai, Raivavae,Rimatara). La ciguatéra est toujours présente dansles esprits et l’actualité la rappelle parfois à notreattention, comme lors de la soudaine flambéed’intoxications à Rapa en 2009.

Coraux recouvrant les substrats rocheux et les fonds peu profonds de Rapa. © Manu San Felix

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Paysage littoral et falaises calcaires de Rurutu.

© GIE Tahiti Tourisme, Gilles Diraimond.

L’ARCHIPEL DES AUSTRALES SE DISTINGUE PAR L’ORIGINALITÉ DE SON PATRIMOINE NATUREL MARIN ET PAR LA

VIVACITÉ DE LA CULTURE LOCALE LIÉE AU GRAND OCÉAN.

301

HIÉRARCHISATION DES INTÉRÊTS PATRIMONIAUXPAR ÎLE

BERNARD SALVAT 1

DONATIEN TANRET 2

TAMATOA BAMBRIDGE 1

JÉRÔME PETIT 2

1 Institut Récifs Coralliens Pacifique, CRIOBE, Moorea, Polynésie française

2 The Pew Charitable Trusts, Polynésie française

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303302

scores

Le présent état des lieux sur les données etconnaissances disponibles sur l’environnement marindes Australes a permis de dresser un bilan complet dupatrimoine naturel, culturel, historique et des usages etpressions associés au milieu marin de l’archipel. Surcette base, des intérêts patrimoniaux et des enjeux

socio-économiques ont pu être identifiés à l’échelle del’archipel. Nous proposons dans la présente synthèse dehiérarchiser ces intérêts et enjeux pour faire ressortir leséléments les plus marquants dans chaque île et identifierles îles à enjeux de gestion et de conservationprioritaires.

méthodologie

La méthodologie proposée pour cette hiérarchisations’inspire de la méthodologie de l’analyse écorégionale(AER) de la Polynésie française de 2010, visant à identifierles îles remarquables et analyser les enjeux socio-économiques à l’échelle du territoire. Dans notre étude, il a été choisi de considérer les 2thèmes suivants pour l’évaluation des intérêtspatrimoniaux de l’archipel : les intérêts écologiques etles enjeux socio-économiques. L’intérêt culturel des îlesn’a pas été intégré, en considérant que le patrimoine

culturel ne pouvait être hiérarchisé et comparé d’une îleà une autre. L’intérêt des 2 thèmes choisis a été évaluépour chaque île sur la base d’une agrégation de scorespour plusieurs thématiques spécifiques.Ces scores ont été proposés pour chaque île sur la basedes synthèses bibliographiques et des observations desexperts recueillies dans le présent ouvrage. Les expertsde chaque thématique ont pu affiner ces premièrespropositions, validées à l’issue d’une conférence derestitution le 18 février 2015 à Papeete.

évaluation de l’intérêt écologique

Un score allant de 0 à 3 a été attribuée pour chaque île, pour chaque thématique et critère d’évaluation retenu (Tableau I) :

Quand les informations recueillies ne permettaient pasde renseigner avec précision le niveau d’intérêt d’unethématique pour une île considérée, les scores ont étéattribués sur la base d’une moyenne de l’intérêt de lathématique pour l’archipel. Cette moyenne a été

proposée sur la base des données disponibles pourl’archipel et en réflexion avec les experts. Cette moyennepermet de ne pas sous-évaluer l’intérêt d’une île moinsétudiée et dont les données scientifiques sont limitées.

Intérêt

L’île ne présente pas d’intérêt pour cette thématiqueL’île présente un intérêt faible pour cette thématiqueL’île présente un intérêt notable pour cette thématique l’île présente un intérêt remarquable pour cette thématique

Score

0123

TABLEAU IScore des intérêts et enjeux patrimoniaux par critère et par thématique.

L’intérêt écologique de l’environnement marin a été évalué selon 13 thématiques : géomorphologie,mollusques, coraux, poissons côtiers, crustacés, échinodermes, algues, pelagos, benthos profond, tortues,requins, cétacés, oiseaux marins. Ces 13 thématiques ont été évaluées sur la base de 3 critères d’évaluation, inspirés des critères proposés dansl’AER de Polynésie française : - Critère « diversité » : richesse en espèces, habitats ou des types géomorphologiques- Critère « rareté » : rareté et unicité des espèces, habitats ou types géomorphologiques, peu communs en Polynésie française, assemblages d’espèces particuliers, espèces classées sur la liste rouge de l’UICN- Critère « espèces remarquables » : densité des espèces remarquables, à statut (faisant l’objet d’uneréglementation locale, nationale ou internationale), emblématiques, endémiques, rares, habitats indispensablesau cycle de vie de ces espèces.Les critères retenus pour chaque thématique étudiée pour l’évaluation de l’intérêt écologique des îles sontdéfinis dans le tableau 2 ci-après :

critère « diversité »

Diversité des types et des faciès géomorphologiques

Potentiel de diversité

Potentiel de diversité des espèceset des habitats

Potentiel de diversité

Potentiel de diversité

Potentiel de diversité

Potentiel de diversité

Potentiel de diversité

Potentiel de diversité

Potentiel de diversité

Potentiel de diversité

Potentiel de diversité

Potentiel de diversité

thématique

Géomorphologie

Mollusques

Coraux

Poissons côtiers

Crustacés

Echinodermes

Algues

Pelagos

Benthos profond

Tortues

Requins

Cétacés

Oiseaux marins

critère « rareté »

Type ou faciès géomorphologique peu commun ou unique en Polynésie française

Espèce peu commune en Polynésie française, assemblages d’espèces particuliers

Assemblages d’espèces particuliers, principaux habitats représentés

Espèce peu commune en Polynésie française, assemblages d’espèces particuliers, principaux habitats représentés

Assemblages d’espèces particuliers

Assemblages d’espèces particuliers

Endémisme, espèce peu commune en Polynésie française, assemblages d’espèces particuliers

Espèce peu commune en Polynésie française, assemblages d’espèces particuliers

Espèce peu commune en Polynésie française, assemblages d’espèces particuliers

Espèce peu commune en Polynésie française

Espèce peu commune en Polynésie française, classée sur la liste rouge de l’UICN,assemblages d’espèces particuliers

Espèce peu commune en Polynésie française, assemblages d’espèces particuliers

Endémisme, espèce peu commune en Polynésie française,classée sur la liste rouge de l’UICN,assemblages d’espèces particuliers

critère « espèces remarquables »

Non quantifiable

Stock important de Bénitiers - pahua - Tridacna maxima

Présence de formations coralliennes remarquables

Densité d’espèces remarquables : Napoléon - mara - Cheilinus undulatusMérou géant - hapuu reru - Epinephelus lanceolatus, Loche marbrée - hapu'u - Epinephelus polyphekadion, Perroquet grand bleu - uhu raepuu - Chlorurus microrhinos

Densité d’espèces d'intérêt commercial ou culinaire : Saupe tropicale - nanue - Kyphosus sp.Picot tacheté - marava - Siganus argenteusNason brun - ume - Naso unicornisCarangue à grosse tête - urua - Caranx ignobilis

Densité d’espèces remarquables : Langouste de Rapa – koura - Panulirus pascuensisLangouste épineuse - oura miti - Panulirus penicillatusCigale - tianee - Parribacus perlatus

Population importante d’espèces remarquables : Rori toto - Holothuria atraOursins longs piquants - vana tara roa - Diadema savignyHolothurie à filaments bleus -Holothuria leucospilotaHolothurie de brisants - rori papao - Actinopyga mauritiana

Population importante d’espèces remarquables : Remu - Caulerpa racemosa, Sargassum

Densité d’espèces remarquables ou d’intérêt commercial :Germon - A’ahi tari’a - Thunnus alalunga Thon à nageoires jaunes - A’ahi rearea - Thunnus albacaresThon obèse - A’ahi tatumu - Thunnus obesusMarlin bleu - Haura moana - Makaira mazaraThazard - Paere - Acanthocybium solandriSaumon des dieux - Temonatua - Lampris regius

Densité d’espèces remarquables : Poissons démersaux : Berycidae et Lutjanidae (beryx et principaux vivaneaux)Faune benthique sessile et endobathique (crinoides, coraux, mollusques et crustacés)

Sites de pontes réguliers et importants

Densité d’espèces remarquables peu fréquentes en PF ou classées sur la liste rouge de l'UICN : Raie manta - fafapiti - Manta birostrisRequin tigre - mao toretore - Galeocerdo cuvierRequin marteau à festons - taumata - Sphyrna lewiniiRequin des Galapagos - C. galapagensis

Densité importante d’une espèce remarquable : baleine à bosse - tohora - Megaptera novaeangliae

Colonies d’espèces vulnérables et sites de nidifications

TABLEAU II - Thématiques et critères d’évaluation considérés pour l’évaluation de l’intérêt écologique de chaque île.

Un score moyen pour chaque thématique a été calculé en faisant la moyenne des scores obtenus pour chaque critère.Un score total de l’intérêt écologique de chaque île est proposé en faisant la somme des scores moyens de chaquethématique (voir Tableau IV).

Page 154: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

FIGURE 1 - Carte de synthèse des intérêts écologiques par îles

rim

atar

a

305304

évaluation des enjeux socio-économiques

Les enjeux socio-économiques ont été évalués sur la base de 6 thématiques spécifiques : population, pêche lagonaire,pêche côtière, pêche hauturière, tourisme, et urbanisation et activités terrestres.Chaque thématique a été évaluée selon les 2 critères d’évaluation suivants : - Critère « usages » : intensité de l’activité - Critère « pressions » : impact de l’activité sur le milieu marin.Certaines thématiques sont liées directement au milieu marin et ont un rôle socio-économique particulier pour lesîles des Australes : la pêche lagonaire, la pêche côtière, la pêche hauturière et le tourisme. Les autres thématiquesretenues sont issues d’activités terrestres qui peuvent exercer des pressions sur le milieu marin : la population,l’urbanisation et les activités terrestres, voir le tourisme. Les critères pour chaque thématique étudiée, pourl’évaluation des enjeux socio-économiques des îles, sont définis dans le tableau III.

thématique

Population

Pêche lagonaire

Pêche côtière

Pêche hauturière

Tourisme

Urbanisation et activités terrestres

critère « usage »

Nombre d’habitants

Production totale

Production totale

Production totale

Capacité d’hébergement, nombre de touristes, activités nautiques

Infrastructures portuaires, desserte maritime, marchandises,passagers transportés, agriculture,déchets, assainissements

critère « pressions »

Densité de population, densité d’habitants par km2 de récifs

Impact de la pêche sur les ressources lagonaires, dires d'experts

Impact de la pêche sur les ressources côtières, dires d'experts

Impact de la pêche sur les ressources pélagiques, dires d'experts

Impact des activités nautiques

Pollutions marines (eaux usées, déchets, intrants agricoles), occupation du domaine public maritime (remblais, déroctage, dragage, extraction)

TABLEAU III - Critères et thématiques considérés pour l’évaluation des enjeux socio-économiques de chaque île.

Un score moyen pour chaque thématique a été calculéen faisant la moyenne des scores obtenus pour chaquecritère. Un score total de l’enjeu socio-économique dechaque île est proposé en faisant la somme des scoresmoyens de chaque thématique (voir Tableau V).Un faible score du total des enjeux socio-économiquespour une île donnée n’implique pas un intérêt ou desenjeux socio-économiques inintéressants. En effet, uneîle peu impactée par les activités sur le milieu marin peutprésenter un intérêt pour la conservation du milieunaturel préservé avec des efforts de gestion réduits. Al’inverse, une île présentant des enjeux socio-économiques sur le milieu marin élevés nécessitera desefforts de gestion des usages et pressions liés au milieumarin plus importants.

hiérarchisation des intérêts écologiques

TABLEAU IV - Hiérarchisation de l’intérêt écologique par île.

critèrediversité

1

1

2

1

2

2

2

2

2

1

2

2

1

Na

thématique

Géomorphologie

Mollusques

Coraux

Poissons côtiers

Crustacés

Echinodermes

Algues

Pelagos

Benthos profond

Tortues

Requins

Cétacés

Oiseaux marins

Total

commantaires

Trois plateaux calcaires « récifaux » de 20 m Soulèvement du relief de l’île type "makatea"Etroit récif frangeant de 300m

Absence de spécificité notable

Récifs coralliens morts à plus de 90%, cause acanthaster planci

Pression de la pêche lagonaire, surface du platier récifal réduit, potentiel ichtyologique moins élevé

Corrélation données pêche ; pression, pêche faible superficie recifo-lagonaire et densité d'habitant/km2

Corrélation données de pêche de crustacés, production relativement élevée d'holothuries (1t) et d'oursins (0,2t)

Corrélation données de pêche d'algues, production relativement élevée (0,2t)

Moyenne archipel

Moyenne archipel

Observations de tortues rares

Moyenne archipel

Observations de baleines à bosse, orques, globicéphales ; baleines observables depuis le rivage

Espèces d'oiseaux marins reproducteurs classées sur la liste rouge de l’UICN : 5, visiteurs: 2

critèrerareté

2

1

1

1

1

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2

2

2

1

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2

1

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critèreepèces

remarquable

Non quantifiable

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2

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indice finalintérêt

écologique

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2

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19

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mar

otir

ira

ivav

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2

3

2

2

2

2

2

2

2

2

2

2

Géomorphologie

Mollusques

Coraux

Poissons côtiers

Crustacés

Echinodermes

Algues

Pelagos

Benthos profond

Tortues

Requins

Cétacés

Oiseaux marins

Total

Récif barrière de 45 km2, profondeur maximale de la zone lagonaire de 25m. Présence de bioconstructions en position émergée (jusqu’à + 0,30 – 0,50 m).

Stocks naturels importants de bénitiers estimé à 48 millions d'individus ; potentiel ichtyologique élevé

Faune corallienne plus riche qu’ailleurs dans l’archipel. 77 espèces, 31 genres. Au moins 7 espèces et genres Galaxea, Goniastrea,Turbinaria, Echinopora, Scolymia, Gardineroseris uniques en PF. 16 genres de scléractinaires.

Île haute à potentiel ichtyologique élevé : géomorphologie complexe, récif barrière, superficie platier récifal et lagonimportante. Structure récifale réticulée.

Corrélation données pêche, production relativement élevée de langouste (2t)

Plusieurs espèces d’échinodermes en abondance

Corrélation données de pêche d'algues, production relativement élevée (0,3t)

Moyenne archipel

Moyenne archipel

3 espèces : tortue verte, tortue imbriquée, tortue caouanne. Zones de ponte de tortues vertes sur tous les motus. saison de ponte en juin etaoût. Motu Rautaro est un lieu de ponte, observation récente

Observations de requin baleine (R. typus), nombreux requins marteau autour de Tubuai

Observations de baleines à bosse, d'orques, globicéphales.Baleines surtout en début en en fin de saison.

Espèces d'oiseaux marins reproducteurs classées sur la liste rouge de l’UICN : 7, visiteurs : 7Pterodroma ultima (classé NT liste rouge UICN)Présence de Puffinus nativitatis, Ardenna pacifica

tubu

ai

2

2

3

2

2

2

2

2

2

2

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2

3

Non quantifiable

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2

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2

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2

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27

2

3

2

3

3

2

2

2

2

1

2

1

3

Géomorphologie

Mollusques

Coraux

Poissons côtiers

Crustacés

Echinodermes

Algues

Pelagos

Benthos profond

Tortues

Requins

Cétacés

Oiseaux marins

Total

Formation unique en Polynésie française. Groupe de 10 rochers posés sur un socled’environ 19 km². Profondeur entre les rochers ne dépasse pas 100 mètresDistinct par sa nature volcanique, absence de récifs coralliens, falaises bordées par des trottoirs d’algues, substrats rocheux intertidaux, fonds peu profonds recouverts d’algueraies ou d’herbiers. Intérêt scientifique : rôle d’observatoire du changement climatique par sa position méridionale

Faune malacologique originale. Présence de mollusques herbivores moins représentés ailleurs en Polynésie. 250 espèces malacologiques. Endémisme, élevé, autour de 10 % selon les groupes de mollusques.

Milieu corallien dominé par les algues brunes (Sargassum) et des algues rouges calcaires encroûtantes (Lithophyllum et Hydrolithon)Coraux Rapa et Morotiri: 32 genres, comprenant 131 espèces

Biomasse poisson relativement élevé (1.7 t ha-1), inclus une grande proportion de grands prédateurs comme les requins (65%),indicateur d'un bon état écologique des populations de poissons. 12,2% d’espèces endémiques de l'île , 68% d’individus de poissons endémiques

Originalité, la rapprochant de l’île de Paques. situé en bordure de zone tropicale et soumis à des conditions hydro-climatiques différentes du reste de la Polynésie, présentent des faunes différentes des autres îles de PF. 10 espèces de crabes du genreCalcinus, 33 espèces de galathées (Galatheidae) 2 autres décapodes endémiques de l’île de Paques. 3 espèces de langoustes : Scyllarides haanii, Panulirus pascuensis,Panulirus penicillatus

Densité de Diadema savignyi élevée: 20.2 (3.3) (no. m-2), crinoids identifiés

30 espèces d'algues vertes, 11 brunes et 88 rouges.56 espèces de Rhodophyceae,6 Phaeophyceae et 8 Chlorophyceae ne se rencontrent qu’à Marotiri et Rapa.

Densité de grands prédateurs comme les requins 65% de la biomasse total de poissons. Diversité des espèces pélagiques élevée pour cette latitude.Faune pélagique remarquable, production primaire importante autour de Rapa.

Moyenne archipel

Potentiel de diversité moins élevé. Aucun site de ponte potentiel

Abondance des requins : 10.7 ± 7.3 sd, 3 fois plus qu'à Rapa. Requin des Galápagos en grande abondance autour de Rapa et Marotiri4 espèces de requins issues de 3 familles à Rapa et Marotiri

Moyenne archipel

Espèces d'oiseaux marins reproducteurs classés liste rouge UICN : 12Entité biogéographique particulière, isolement, situation méridionale. Abrite 2 taxonsendémiques : Fregetta grallaria titanet Puffinus auricularis myrtae (classé CR listerouge UICN). Nesofregetta fuliginosa (classé EN liste roue UICN), Pterodroma ultima(classé NT liste rouge UICN) ZICO PF22 - îlots rocheux de Rapa et Marotiri

3

3

2

3

3

2

2

2

2

1

3

2

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Non quantifiable

2

2

3

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3

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2

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3

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1

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29

critèrediversité

2

2

2

2

2

2

2

2

2

2

2

2

3

thématique

Géomorphologie

Mollusques

Coraux

Poissons côtiers

Crustacés

Echinodermes

Algues

Pelagos

Benthos profond

Tortues

Requins

Cétacés

Oiseaux marins

Total

commantaires

Lagon de 60,9 km², récif barrière de 2 à 3 km de large

Stock de bénitiers estimé entre 8,5 et 11 millions d'individus. Originalité en Polynésie française : population en augmentation depuis 1970.Faible consommation des bénitiers et mollusques par la population, à l'exception de la pieuvre, chaire très recherchée.

Vaste platier récifal externe. Moyenne archipel

Île haute à potentiel ichtyologique élevé : géomorphologie complexe, récif barrière,superficie platier récifal et lagon importante. Structure récifale réticulée en quelques endroits.

Corrélation données pêche, production relativement élevée de langouste (2t)

Plusieurs espèces d’échinodermes en abondance

Moyenne archipel. Ressource alimentaire traditionnelle mais peu de consommation d'algue aujourd'hui

Moyenne archipel

Moyenne archipel

2 espèces: tortue verte et tortue imbriquée. Motu Vaiamanu ancien site de ponte

Moyenne archipel

Observations de baleines à bosse, dauphins (peu dans le reste des Australes), cachalots

Espèces d'oiseaux marins reproducteurs classées sur la liste rouge de lUICN : 14,dont 8 procellariens, visiteurs : 4 - Pterodroma ultimaet Pseudobulweria rostrata(classé NT liste rouge UICN), Pterodroma brevipes (classé VU liste rouge UICN), Siteparticulier, ZICO PF20 - Pentes du mont Hiro

critèrerareté

2

2

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2

1

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critèreepèces

remarquable

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2

indice finalintérêt

écologique

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2

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26

critèrediversité

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1

2

1

2

2

2

2

2

2

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3

1

thématique

Géomorphologie

Mollusques

Coraux

Poissons côtiers

Crustacés

Echinodermes

Algues

Pelagos

Benthos profond

Tortues

Requins

Cétacés

Oiseaux marins

Total

commantaires

Soulèvement type "Makatea" de 50 à 100m, falaises calcaires littorales

Absence de spécificité notable

Récifs coralliens morts à plus de 90%, cause acanthaster planci

Pression de la pêche lagonaire, surface du platier récifal réduite ; potentiel ichtyologique moins élevé

Corrélation données de pêche de crustacés ; pression de pêche, faible superficie recifo-lagonaire et forte densité d'habitant/km2

Corrélation données de pêche d'échinodermes, production élevée d'holothuries (2t) et d'oursins (0,3t)

Corrélation données de pêche, production relativement élevée (0,3t)

Moyenne archipel

Moyenne archipel

Tortues observées sur les zones nord-ouest et nord-est, plus rarement ausud-ouest. Observées en plus grand nombre au sud à Naairoa. Traces et évènement de ponte récente à Narui au sud. Pontes de tortues vertes sur la côte Est et Sud-Est régulières dans les années 1970.

La plupart des observations de Chondrychtiens aux îles Australes ont eu lieu autour des îles de Rapa et de Rurutu.Présence confirmée de halicornes (S. lewini), Carcharhinus leucaset C. galapagensis, individus de 2 mètres (plus grands qu'à Rapa)

Observations de baleines à bosse, péponocéphales, dauphins à bec étroitet/ou dauphins à long bec, cachalots, globicéphales.Baleines observables depuis le rivage, extrême clarté des eaux offrant d'excellentes conditions d'observations. 51 individus identifiés entre 1998 à 2007

Espèces d'oiseaux marins reproducteurs classées sur la liste rouge de l’UICN : 6, visiteurs : 4

critèrerareté

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1

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critèreepèces

remarquable

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24

RURU

TU

Page 156: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

309

critèrediversité

2

3

3

3

3

3

3

2

2

1

2

1

3

thématique

Géomorphologie

Mollusques

Coraux

Poissons côtiers

Crustacés

Echinodermes

Algues

Pelagos

Benthos profond

Tortues

Requins

Cétacés

Oiseaux marins

Total

commantaires

Rapa et Marotiri se distinguent en raison de leur nature volcanique, absence de récifs coralliens, falaises bordées par des trottoirs d’algues,substrats rocheux intertidaux, fonds peu profonds recouverts d’algueraies ou d’herbiers. Relief profondément découpé.Absence de récif corallien encore énigmatique, mais présence de platiers corallienssur la majorité de son pourtour. Plateau sous-marin de 2 ,5 km de large.2 affleurements calcaires et dunes éoliennes de puissance 7m au niveau des baies la Baie de Tupuaki et d’Anarua.Intérêt scientifique : rôle d’observatoire du changement climatique par sa position méridionale.

Faune malacologique originale. Présence de mollusques herbivores moins représentés ailleurs en Polynésie. 250 espèces malacologiques.Endémisme, élevé, autour de 10 % selon les groupes de mollusques.

Originalité et diversité corallienne de Rapa particulièrement élevée pour une île de cette dimension et située à cette latitude.170 espèces réparties en 48 genres. 5 nouvelles espèces pour la science découvertes pendant la mission BIODIV en 2002.Genres Goniastrea, Hydnophora, Merulina, Scolymia, et Turbinaria qui y sontidentifiés ne sont pas trouvés ailleurs en Polynésie française ce qui démontrel’originalité du peuplement corallien.

383 espèces, dont 27 nouvelles et endémiques à Rapa, 5 nouvelles pendant l'expédition National Geographic en octobre 2014. Origine Indo-Pacifique des espèces. Endémisme régionale élevé. 10,5% espèce endémique de l'île , 54% des poissons endémiques régionale.Densité du peuplement ichtyologique de Rapa originale par rapport aux autresîles polynésiennes.Biomasse et diversité variée selon les sites : plus élevé dans les zones rahui,biomasse 3 fois plus importante à Marotiri, diversité et richesse spécifiqueéquivalente entre Marotiri et Rapa.

Originalité de Rapa, la rapprochant de l’île de Paques. situé en bordure de zonetropicale et soumis à des conditions hydro-climatiques différentes du reste de la Polynésie, présentent des faunes différentes des autres iles de PF10 espèces de crabes du genre Calcinus, 33 espèces de galathées (Galatheidae)2 autres décapodes endémiques de l’île de Paques. 3 espèces de langoustes : Scyllarides haanii, Panulirus pascuensis , Panuliruspenicillatuset une espèce observée en Septembre 2014 lors de l'expéditionMuseum d'Auckland restant à identifier.Corrélation données pêche, production élevée de langouste (4t)

5 espèces d'oursins identifiés : Diadema savignyi, Echinostrephus aciculatus,Echinometra matthaei, Echinothrix diadema, Tripneustes gratilla

Algues: 150 espèces d’algues identifiées sur les 452 espèces présentes en Polynésie, dont 30 espèces d'algues vertes, 11 brunes et 88 rouges - 28,7 % des algues rouges de PF56 espèces de Rhodophyceae, 6 Phaeophyceae et 8 Chlorophyceae ne se rencontrent qu’à Marotiri et Rapa.Falaises bordées par des trottoirs d’algues, substrats rocheux intertidaux et de fonds peu profonds recouverts d’algueraies ou d’herbiers,Espèces recensées uniquement à Rapa aux hautes latitues comme Pitcairn,Rapa Nui comme Sargassum obtusifoliumet Stypopodium australasicum.S. aquifoliumreporté comme Sargassum cf. echinocarpum identifiée à Rapa est extrêmement rare.

Faune pélagique remarquable, production primaire importante autour de RapaDiversité des espèces pélagiques élevée pour cette latitude comparée à d'autres sites comme la mer de Timor.

Moyenne archipel

Tortue verte, pic observation en décembre

4 espèces de requins issues de 3 familles à Rapa et MarotiriAbondance des requins : (3.7 ± 6.3 sd). Requin des Galápagos en grande abondance autour de Rapa et Marotiri. Requin tigre observé. La plupart des observations de Chondrychtiens aux îles Australes ont eu lieu autour des îles de Rapa et de Rurutu.

Moyenne archipel

Espèces d'oiseaux marins reproducteurs classées sur la liste rouge UICN : 14, visiteur: 1Entité biogéographique particulière, isolement, situation méridionale. Abrite 2 taxons endémiques de Rapa et de Marotiri : Fregetta grallaria titanet Puffinus auricularis myrtae (classé CR liste rouge UICN). Nesofregetta fuliginosa (classé EN liste roue UICN), Pterodroma ultima (classé NT liste rouge UICN) ZICO PF21 - Rapa.

critèrerareté

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écologique

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critèrediversité

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3

3

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2

2

2

1

3

thématique

Géomorphologie

Mollusques

Coraux

Poissons côtiers

Crustacés

Echinodermes

Algues

Pelagos

Benthos profond

Tortues

Requins

Cétacés

Oiseaux marins

Total

commantaires

Caractéristiques géomorphologiques originales au sein de l'archipel.Atoll le plus occidental et l’un des plus méridionaux de Polynésie française.Petit atoll, sans passe ni pinacle, lagon quasiment comblé

Peuplements importants de bénitiers (Tridacna maxima) et de nacre jaune (Pinctada maculata)

Communautés coralliennes typiques d’un atoll polynésien, mais avec une composition générique un peu différente.Assemblages de coraux branchus (Acropora) et jaunes (Porites) mais sanspinacles coralliens.Taux de recouvrement important, récifs coralliens préservés

Pêche très rare par les pêcheurs de Rurutu et Rimatara, intérêt pour poissons côtiers

Langouste Panulirus penicillatuset Turbo setosusen abondance

Moyenne archipel

Atoll, potentiel inférieur à la moyenne archipel

Atoll inhabité, pression de pêche pélagique faible à nulle

Moyenne archipel

Moyenne archipel, atoll inhabité zone de ponte potentielle

Moyenne archipel

Moyenne archipel

Espèces d'oiseaux marins reproducteurs classées liste rouge UICN : 9, dontFregata minor, Sula sula, Sula leucogaster et Sula dactylatra et Onychoprionfuscatus reproducteur possible, recensés uniquement à Maria aux AustralesDiversité de l'avifaune marine, cet atoll présente un intérêt particulier pourles oiseaux de la région classé ZICO PF18 - Maria

critèrerareté

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1

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2

2

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Non quantifiable

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3

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2

2

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indice finalintérêt

écologique

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3

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3

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1

2

2

2

2

2

3

28

L’île de Rapa et les îlots de Marotiri présentent un intérêtdu patrimoine naturel marin remarquable (scores de 31et 29) de par l’originalité et l’endémisme local et régionalde la faune et de l’avifaune élevés. Les conditions hydro-climatiques soumises à l’influence subtropicale etl’absence de récifs coralliens dans ces îles font qu’ellesse démarquent des autres îles de l’archipel. Mariaprésente un intérêt écologique majeur (score de 28).Seul atoll de l’archipel, l’île possède une compositiongénérique sensiblement différente des autres atollspolynésiens et présente de fortes originalités au sein del’archipel par ses caractéristiques géomorphologiqueset ses peuplements récifaux et lagonaires. Leslangoustes Panulirus penicillatus et Turbo setosus y sontprésents en abondance et l’atoll présente un intérêtparticulier pour les oiseaux marins de la région. Tubuaise distingue par une faune corallienne plus richequ’ailleurs dans l’archipel et un stock naturelconsidérable de bénitiers estimé à 48 millions d'individus(score de 27). La diversité des espèces marines y estreprésentative des îles volcaniques à structure récifale

de Polynésie française. Raivavae et Rurutu (scoresrespectivement de 26 et 24) présentent également unintérêt écologique notable. Rurutu est marqué par sonrelief soulevé de type Makatea et par la diversité desespèces de requins et de mammifères marins. Lasuperficie du platier récifal et du lagon à Raivavae offreun potentiel ichtyologique élevée et un stock de bénitiersimportant. L’intérêt écologique de Rimatara est moinsmarqué (score de 19), du fait notamment de la faiblesuperficie récifo-lagonaire.

TABLEAU IV - Hiérarchisation de l’intérêt écologique par île.

Page 157: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

311310

hiérarchisation des enjeux socio-économiques

FIGURE 2 - Carte de synthèse des enjeux socio-économiques par îles

ruru

tu

critèreUsage

1

3

2

1

1

1

Na

2

3

3

1

2

2

Na

2

3

2

1

1

2

Na

thématique

Population

Pêche lagonaire

Pêche côtière

Pêche hauturière

Tourisme

Urbanisation et activités terrestres

Total

Population

Pêche lagonaire

Pêche côtière

Pêche hauturière

Tourisme

Urbanisation et activités terrestres

Total

Population

Pêche lagonaire

Pêche côtière

Pêche hauturière

Tourisme

Urbanisation et activités terrestres

Total

commantaires

873 habitants, 102 habitants/km2

125 habitants par km² de récif

Exploitent fortement leurs ressources disponiblesCinquantaine de pirogue de pêche en 2005Exploitent plus densément les ressources en invertébrés récifaux ainsi que les ressourcesocéaniques et de profondeurRendement de 9,6 t/km2 dans le lagon, 3 t/km2 total sur le récif

Exploitent densément les ressources océaniques et de profondeurMoyenne production flotte professionnelle entre 2004 et 2013: 8052 ; moyenne navire: 1

Pêche rare sur Maria

150 à 200 touristes par anCapacité d’hébergements de 9 unités, 25 personnes. entre 150 à 200 touristes par anActivités marines : tour de l’île en bateau, pêche au gros et sorties d’observation des baleines proposées par des pêcheurs de l’île.

Pas de darse ou marina. Peu de remblais et aménagements littoraux

2325 habitants, 71 habitants/km2, 211 habitants/km2de récif

rendement 11,4 t/km2 lagon, 3 t/km2 total récifPression de pêche lagonaire plus importante taille de la population et celle très réduite du platier

Moyenne production flotte professionnelle entre 2004 et 2013: 36475 ; moyenne navire: 8

Exploitation de pêche palangrière des thoniers de Tahiti faible légèrement supérieure aux autres îles, pression faible

Ile la plus touristique de l'archipel. 1 000 touristes par an. 5 établissements touristiques, 2 en projets ; capacité totale d’accueil 45 personnes pour 20 unités d’hébergementActivités marines : sorties baleines par trois prestataires agréés, tour de l’ile en bateau,pêche au gros par un prestataire.

Dépotoir dans lits rivières, dynamitage de la passe Avatui

2173 habitants, 48 habitants/km2, 18 habitants/km2 récif, centre administratif

Rendement 1,5 t/km2 lagon, 1,1 t/km2 total récif.Exportation de 30 à 50 tonnes/an de poissons lagonaires ; 18 et 32 t de bénitiers. Exploitationcommerciale des bénitiers depuis 40 ans stable et durable au niveau actuel, 10 t/an.

Moyenne production flotte professionnelle entre 2004 et 2013: 32283 ; moyenne navire: 5

Exploitation de pêche palangrière des thoniers de Tahiti faible

800 touristes par an3 pensions de famille, 15 unités, capacité d’accueil de 32 personnes. Activités marines : Visite du lagon et des motu en bateau, sorties baleine par un prestataire agréé. Lagon peu profond, snorkelling et sortie kayak. pratique du kite surf.

Déroctage du chenal portuaire dans le lagon. Dépotoir dans zone sensible marais et proche lagon. Agriculture intensive mécanisée, engrais et pesticides chimiques, risques de pollution pour les milieux environnants.

critèrePressions

2

2

2

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0

1

Na

2

2

2

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indiceenjeux

socio-éco

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3

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1

1

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3

3

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3

10

rim

atar

atu

buai

TABLEAU V - Hiérarchisation des enjeux socio-économiques par île.Requin des Galápagos Carcharhinus galapagensis et Sériole Seriola rivoliana observés à Marotiri. © Manu San Felix

Page 158: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

313312

rapa

critèreUsage

1

2

2

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2

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3

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0

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Na

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1

1

0

0

Na

thématique

Population

Pêche lagonaire

Pêche côtière

Pêche hauturière

Tourisme

Urbanisation et activités terrestres

Total

Population

Pêche lagonaire

Pêche côtière

Pêche hauturière

Tourisme

Urbanisation et activités terrestres

Total

Population

Pêche lagonaire

Pêche côtière

Pêche hauturière

Tourisme

Urbanisation et activités terrestres

Total

Population

Pêche lagonaire

Pêche côtière

Pêche hauturière

Tourisme

Urbanisation et activités terrestres

Total

commantaires

947 habitants, 53 habitants/km2, 8,1 habitants/km2 récif

Rendement 1,2 t/km2dans le lagon, 0,6 t/km2 total sur le récifExploitation des bénitiers depuis 10 ans, stable et durable au niveau actuel, 10 t/an

Données DRMM: Moyenne production flotte professionnelle entre 2004 et 2013 : 10092 ;moyenne navire: 2

2 poti marara, peu de pêche locale au large.Exploitation de pêche palangrière des thoniers de Tahiti faible.

800 à 900 touristes visitent l’île par an, dont 40% de visiteurs internationaux.6 pensions de famille, 30 unités, capacité d’accueil 70 personnes.Activités marines : Visite des motus, avec baignade et snorkelling, pêche lagonaire, kayakproposé par un prestataire ou par les hébergements.

Dynamitage pour l'élargissement de la darse.Travaux routiers et d'extraction de 540 000 m3

de matériaux sur le platier récifal pour la construction de l’aérodrome coïncident avecl'arrivée de la ciguatera. Enrochements sur la côte nord.

515 habitants, 13 habitants/km2, 22 habitants/km2 récif

Rendement 4 t/km2 lagon, 1,4 t/km2 total récif. Rahui sur la côte est.

Données DRMM ; moyenne production flotte professionnelle entre 2004 et 2013: 5154 ;moyenne navire: 1 + autres non déclarés

Peu de pêche locale au large des côtes, exploitation de pêche palangrière des thoniers de Tahiti nulle

Tourisme très peu développé.Projet de fret mixte du Tuhaa pae (cargo et croisière) possibilité d'ouvrir l'ile au tourisme

1 quai, 6 roations Tuhaa Pae / an

Îlots rocheux inhabités

Rendement 0,08 t/km2 total récif

Pêche très occasionnelle des habitants de Rapa

Requins avec des hameçons, stock de langouste en diminution, signes de pêche. Pêche très occasionnelle par quelques pêcheurs de Rapa. Exploitation de pêche palangrière des thoniers de Tahiti nulle.

Pas de tourisme

Aucune infrastructure

Atoll inhabité

rendement 0,1 t/km2 lagon, 0,1 t/km2 total récif

Pêche très occasionnelle par quelques pêcheurs de Rimatara et Rurutu

Exploitation de pêche palangrière des thoniers de Tahiti faible autour de Maria

Pas de tourisme

Aucune infrastructure

critèrePressions

1

2

1

0

0

2

Na

1

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1

0

0

0

Na

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1

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Na

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0

0

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indiceenjeux

socio-éco

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2

2

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2

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1

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0

0

1

raiv

avae

mar

otir

im

aria

Les îlots de Marotiri et l’atoll de Maria (scores de 2 et 1)se démarquent par des impacts sur les ressourcesmarines faibles à très faibles et un milieu naturelencore très préservé. Ces îles inhabitées présententun intérêt remarquable pour la conservation du milieumarin avec des efforts de gestion réduits. Rurutu etTubuai (scores de 11et 10) présentent les enjeuxsocio-économiques les plus élevés de l’archipel dufait d’une densité d’habitant par km2 de récif plusimportante, une production de pêche lagonaire etcôtière plus élevée et des pressions des activitéslittorales et agricoles sur les ressources marines plusfortes. Ces îles nécessiteront des efforts de gestiondes usages et pressions liés au milieu marin plusimportants. Les enjeux socio-économiques àRimatara, Raivavae et Rapa (scores respectivementde 8, 8 et 7) sont moindres. L’usage direct desressources marines, tels que la pêche lagonaire etcôtière, est largement développé, mais les pressionssur le milieu marin liées aux activités anthropiques(tourisme, démographie, urbanisme) sont moinsimportantes.

Atoll de Maria.© CRIOBE

TABLEAU V - Hiérarchisation des enjeux socio-économiques par île.

Page 159: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

314

Lagon de Raivavae et « motu piscine » vus de la crête du mont Hiro.

© GIE Tahiti Tourisme - Philippe Bacchet

CHAQUE ÎLE DES AUSTRALES PRÉSENTE DES CARACTÉRISTIQUES BIOLOGIQUES ET DES CULTURES TRADITIONNELLES

SPÉCIFIQUES.

315

SYNTHÈSE DES INTÉRÊTS PATRIMONIAUX PAR ÎLE

BERNARD SALVAT 1

DONATIEN TANRET 2

TAMATOA BAMBRIDGE 1

JÉRÔME PETIT 2

1 Institut Récifs Coralliens Pacifique, CRIOBE, Moorea, Polynésie française

2 The Pew Charitable Trusts, Polynésie française

Page 160: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

317316

Rapa et Marotiri sont les îles les plus méridionalesde Polynésie française. Rapa, est une îlevolcanique de 40 km2 culminant à 650 m d’altitude.C’est la plus jeune des îles Australes, née il y a4 à 6 millions d’années. Les îlots Marotiri sontconstitués de 10 pinacles basaltiques qui émergentd’un haut-fond de moins de 100 m de profondeur.Le principal îlot culmine à 113 m alors que 3 autresatteignent entre 48 et 99 m et que les 6 derniersn’excèdent pas 14 m. Ce groupe de rochersinhabités est situé à 83 km au sud-est de Rapa, àla limite de la zone économique exclusive. Situé enbordure de zone tropicale et soumis à desconditions hydro-climatiques particulières,l’ensemble Rapa Marotiri se distingue des autresîles Australes et de la Polynésie française par lessituations biogéographiques particulières dumilieu marin, le rapprochant de l’île de Pâques etde Pitcairn. L’endémisme élevé, l’originalité de lafaune marine et la diversité de l’avifaune marineen font un point chaud de la biodiversité. A ce titre,ces îles constituent un site d’intérêt particulierpour l’observation des changements climatiquesen cours et à venir.

La côte de Rapa est très découpée avec denombreuses petites baies et une grande baie surla face orientale de l’île qui pénètre jusqu’aucentre de la caldeira. Malgré l’absence encoreénigmatique de récifs coralliens, tel que récifs etplatiers frangeants bordant Rimatara ou Rurutu etrécifs barrières délimitant des lagons comme àTubuai et Raivavae, un plateau corallien submergéentoure l’île de Rapa sur 2,5 km de large jusqu’àune profondeur inférieure à 100 m et des platierscoralliens se développent sur le pourtour de l’île.Les platiers sont dominés par les algues brunes(Sargassum) et des algues rouges calcairesencroûtantes (Lithophyllum et Hydrolithon). Lesdifférents groupes taxonomiques marins de Rapaet Marotiri affichent une diversité importantede coraux (131 espèces), de mollusques (455espèces), de crustacés (200 espèces) et depoissons (388 espèces). La richesse de cespeuplements récifaux tient à l’originalité et ladiversité corallienne de Rapa, particulièrementélevée pour une île située à cette latitude, d’unepart, et à un taux d’endémisme important deplusieurs groupes d’invertébrés et de poissons àRapa et Marotiri, d’autre part. Des genres de

RAPA ET MAROTIRI

coraux peu représentées dans le reste de laPolynésie déterminent des peuplementsparticuliers à Rapa : Goniastrea, Hydnophora,Merulina, Scolymia, et Turbinaria. Le tauxd‘endémisme pour des groupes comme lesmollusques, les crustacés et les poissons estévalué à 10% de leur diversité, ce qui traduit unpatrimoine unique de la faune marine côtière deRapa et Marotiri. Des baleines à bosse sont parfoisaperçues près de Rapa pendant l’hiver australmais aucun relevé n’existe sur d’autres espèces demammifères marins. Au XIXe siècle des cachalotsétaient péchés dans les parages. Aussi, quatreespèces de requins ont été identifiés à Rapa etMarotiri : le requin des Galápagos, observé engrande abondance et rencontré en Polynésiefrançaise uniquement aux Australes et auxGambier, le requin mako observé à de nombreusesreprises portant des hameçons de palangriersaccrochés, le requin tigre et le requin marteau. Latortue verte semble être la seule espèce de cesreptiles à fréquenter les eaux de Rapa; elle ypond dans plusieurs baies. La faune pélagiquedes eaux entourant Rapa et Marotiri semble plusriche que celles des eaux plus septentrionales,

conjointement à une production primaire plusimportante. L’avifaune marine est particulièrementriche avec 14 espèces d’oiseaux marins nicheusesqui sont toutes sur la liste rouge de l’UICN, dontdeux sous espèces endémiques (une frégate et unpuffin) en danger critique d’extinction. Le patrimoine culturel marin de Rapa est tout à faitremarquable avec un rahui réintroduit en 1984 parla mairie pour gérer collectivement et durablementles ressources marines de l’île. Ce systèmetraditionnel ancré dans la culture polynésienne estgéré par le Tomité rahui, un comité élu de manièredémocratique par la population. Il comprend unensemble de mesures de protection appliquéessur toute l’île, interdisant la pêche au filet et lapêche sous-marine de nuit. Par ailleurs, unezone rahui à l’est de l’île et dans la grande baieest interdite à la pêche à l’exception de la pêcheà la ligne. Cette zone de réserve n’est ouvertequ’exceptionnellement, deux fois par an, pour unepêche collective et un partage de la récolte avecl’ensemble de la population. Ce rahui côtier estrespecté par l’ensemble de la population, quisouhaiterait désormais lui donner une valeurjuridique et l’étendre aux ressources du large.

Paysage littoral et relief découpé de Rapa. © Manu San Felix Principal îlot rocheux de Marotiri. © Enric Berkenpas

Page 161: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

319318

Rapa compte 515 résidents avec la densité la plusfaible des îles de l’archipel, soit de 53 habitantsau km2. L’île n’est accessible que par bateau avec6 rotations par an. La population est à ce jour peufavorable à la construction d’un aérodrome. Si 75%des actifs ont un emploi dans les services publicset si moins de 15 actifs déclarent avoir une activitédans le domaine de la pêche et de l’agriculture, lapêche tient une place essentielle dans le modede vie et l’alimentation des habitants. L’activitéconcerne toutes les familles qui disposent chacuned’une embarcation de pêche. Il s’agit de la pêchelittorale à marée basse ou à faible profondeur(algues, crustacés, coquillages, vers), de la pêchecôtière au-dessus des platiers submergés à laligne de fond ou au fusil sous-marin, et de la pêcheau large autour de l’île (thons, bonites dorades

coryphène, tazards, langoustes et poissonsvolants pêchés la nuit pour servir d’appâts). Laconsommation de poissons est la plus forte del’archipel avec Raivavae, avec plus de 50 kg parhabitant par an. Les pêches effectuées par lapopulation de Rapa aux îlots Marotiri sontexceptionnelles lors de visites de bateauxextérieurs pouvant les amener sur ces îlots. L’île de Rapa et les îlots de Marotiri présententun intérêt remarquable au plan du patrimoinenaturel marin par leur biodiversité côtièreparticulièrement riche, une faune pélagiquediverse et abondante et des communautésbenthiques originales. Leur position géographique,très subtropicale comparativement aux autres îlesde l’archipel, et les conditions climatiques etocéanographiques qui règnent à cette latitude,

Carte de synthese des inte rets patrimoniaux et des pressions anthropiques de Rapa. Carte topographique et des récifs coralliens de Marotiri.

à 4 ° plus au sud que Raivavae et les Gambier, ontgénéré une originalité et un endémisme élevé,caractérisant de nombreux groupes de poissons etinvertébrés. Enfin, Rapa présente un intérêtculturel majeur concernant le patrimoine marinavec la pratique d’un rahui, une mesuretraditionnelle de préservation des ressourcesnaturelle de l’île pour leur exploitation durable etéquitable par l’ensemble de la communauté.

Page 162: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

321320

Raivavae est une île haute volcanique avec des récifscoralliens surélevés et karstifiés d’une superficie deprès de 18 km2. Elle est protégée des assauts del’océan par un récif barrière qui l’entoure, délimitantun vaste lagon de 61 km2 dont la profondeur maximaleest de 25 m. L’ensemble forme une unité insulaireallongée ouest-est. La population est de 940 habitantsavec une densité de 53 habitants au km2.Un grand lagon caractérise Raivavae comme Tubuai.Le récif barrière est largement ouvert sur l’océandans ses parties septentrionale et méridionale etplusieurs motu sont présents sur les borduresrécifales orientale et méridionale. Compte tenu del’existence de dépôts sédimentaires lagonairesimportants en plus des formations récifalesfrangeantes et barrières, les communautés vivanteset les ressources sont plus diverses à Raivavaecomme à Tubuai, qu’à Rimatara et Rurutu qui nepossèdent pas de véritables lagons. Les poissons sontabondants dans le lagon, les récifs et sur les pentesexternes des récifs barrières. Un importantpeuplement de bénitiers estimé à une dizaine demillions d’individus réside dans le lagon et les autrespeuplements d’invertébrés sont bien représentésdont des langoustes et des échinodermes. On note la

présence de baleines à bosse, de cachalots et dedauphins, quoiqu’il semble que ces derniers sefassent plus rares depuis quelques années. L’absencede recensement des espèces de requins et de raiesne permet pas d’identifier une spécificité de Raivavae.Les tortues vertes et imbriquées fréquentent lelagon et pondent parfois sur un des motu. Avec les14 espèces d’oiseaux marins classées sur la listerouge de l’UICN, qui se reproduisent dans l’île et surses motu, Raivavae se distingue des autres îles del’archipel par la richesse de son avifaune. Au titre desdégradations anthropiques on doit mentionner leremblai d’une superficie de 166 000 m2 réalisé sur lerécif frangeant pour la construction de l’aérodrome.La zone nord de Raivavae est encore considéréeactuellement à grand risque ciguatoxique pourcertaines espèces incluant le bénitier.Les liens de Raivavae avec l’océan sont marqués dansla culture traditionnelle. La tortue constitue lesymbole de l’île depuis le XIXe siècle. Plusieurs maraesur l’île sont associés au monde marin et symbolisentd’ailleurs la représentation des liens entre l’île et lamer ou les espèces marines. L’existence de cesliens perdure dans la tradition orale d’aujourd’hui,notamment à travers la généalogie des habitants

RAIVAVAE

entre les îles ou la place de l’océan dans l’artisanatd’art local, comme les colliers de «pupu» ou lespirogues traditionnelles sculptées et cousues.L’économie de Raivavae repose sur une faibleproduction agricole, avec 25 tonnes par an, une desplus faibles avec Rapa, alors que Tubuai produitpresque 60 fois plus. L’exportation de produits de lamer tient une place importante dans l’économie del’île. Le tourisme est encore peu développé avec 25unités d’hébergement pour 800 à 900 touristes par an.Souvent comparé à Bora Bora, le lagon peu profondet le motu «piscine» sont autant d’atouts pour letourisme de l’île. Des projets d’écotourisme d’accueildans des familles locales sont portés par uneassociation active.Les poissons lagonaires et récifaux sont pêchés pourla consommation familiale, pour la commercialisationlocale et pour l’exportation vers Tahiti. Presque toutesles familles disposent d’une embarcation à rames ouà moteur mais Raivavae ne compte officiellement que2 poti marara pour la pêche côtière et un peu au large.Entre 2006 et 2011, l’exportation en congelés depoissons a été très variable entre 9 et 24 tonnes selonles années. La chair des bénitiers représente depuisune dizaine d’année une ressource importante

d’exportation qui s’est située entre 10 et 30 tonnesannuellement. La pression de pêche des bénitiers estplus importante sur l’île de Raivavae que sur celle deTubuai. La production des bénitiers est bien encadréepas des réglementations en faveur de la pérennité desstocks et de leur exploitation. Un prestataire organisepour les touristes des sorties en mer pour pêcher,faire du kayak ou visiter les motu et des séjoursécotouristiques chez l’habitant sont organisées parune association locale.Le milieu marin de Raivavae présente un intérêtécologique notable avec son grand lagon, descommunautés lagonaires et récifales variées qui sontbien exploitées pour la consommation des résidentset pour l’exportation vers Tahiti. Le patrimoine naturelet culturel préservé de Raivavae est un atout pour ledéveloppement de l’écotourisme. Les ressources dela haute mer au large de Raivavae, thons et autrespélagiques, comme au large des autres îles Australes,sont peu exploitées.

Le « motu piscine » dans le lagon de Raivavae. © GIE Tahiti Tourisme - Philippe Bacchet Carte de synthese des intere ts patrimoniaux et des pressions anthropiques de Raivavae.

Page 163: Environnement marin des ®les Australes Polyn©sie Fran§aise

323322

Tubuai est une île haute volcanique de près de 45 km2.Son vaste lagon de 45 km2, la même superficie que ledomaine terrestre, d’une profondeur maximale de25 m, est entouré d’un récif barrière. L’ensemble estorienté ouest-est. La population est de 2 170habitants avec une densité de 48 habitants au km2.Après Rurutu (2 322 habitants) Tubuai est la secondeîle la plus peuplée des Australes. Quatre petits motu sont alignés sur la bordure récifaleorientale de l’île. Tubuai est caractérisé par un grandlagon, constitué de formations récifales frangeanteset barrières et de dépôts sédimentaires lagonairesimportants. Les communautés vivantes et lesressources y sont plus diverses qu’à Rimatara etRurutu qui ne possèdent pas de véritable lagon. Despâtés coralliens parsèment le lagon de Tubuai, ce quienrichit la diversité des peuplements de poissons etd’invertébrés. Un très important peuplement debénitiers, estimé à une cinquantaine de millionsd’individus, réside dans le lagon. Les autrespeuplements d’invertébrés comme les langoustes etles échinodermes sont bien représentés. Desbaleines à bosse, orques et globicéphales fréquententles eaux au voisinage de Tubuai. Des requins baleineset des requins marteaux ont également été observés.

Les tortues vertes, caouannes et imbriquées sontprésentes et on note que les premières pondent surles plages des motus. On compte 7 espèces d’oiseauxmarins qui se reproduisent sur l’île, toutes sur la listerouge de l’UICN. Tubuai a connu par le passé des épisodes deciguatéra, toujours liés à des travaux d’extractionscoralliennes dans le lagon nord réalisés dans le butd’améliorer la desserte maritime. Des travaux dedéroctage sont encore d’actualité et la population yest très attentive. Le recouvrement corallien, sur lesite oriental de pente externe était de l’ordre de 20%de recouvrement avant que le cyclone Oli en 2010 nele réduise à moins de 1%. On doit porter une attentionparticulière aux risques de pollution chimique deseaux marines côtières en raison de l’emploi depesticides dans l’agriculture.Tubuai tient une place particulière dans lareprésentation mythique du monde marin et dans lesliens entre les îles de l’archipel. L’histoire de Tubuaiest marquée par les navigateurs, originaires del’île comme Ru ou Tupai maître en navigationtraditionnelle, ou par les visites des missionnaires dela Bounty et des navires marchands, qui ontégalement contribué à la renommée de l’île. La

TUBUAI

remise en place de système traditionnel comme lerahui pour la préservation des poissons et bénitiersest demandée par de nombreux pêcheurs quidéplorent la perte de pratiques de pêche collectiveet la diminution des ressources disponibles.L’économie de Tubuai est très fortement dominée parla production agricole, la plus forte des îles Australesavec 1 430 tonnes (1 395 de végétaux et 35 d’animaux),plus de deux fois la totalité des productions agricolesde toutes les autres îles Australes (615 tonnes). L’îlebénéficie d’une très bonne déserte aérienne pour cesexportations qui concerne les productions agricolesmais aussi les ressources exploitées du milieumarin. Le tourisme est peu développé avec moinsde 800 visiteurs par an qui peuvent être hébergésdans 25 unités hôtelières.La pêche lagonaire est beaucoup plus productive quela pêche océanique et les produits du lagonconstituent d’ailleurs l'essentiel des exportations àbase de poissons et de chair de bénitiers. De 30 à50 tonnes de poissons ont été exportéesannuellement ces dernières années représentantun tiers environ de la pêche locale. La productionannuelle de bénitiers peut être estimée entre 18 et 32tonnes selon les années en tenant compte de

l’autoconsommation et des exportations par voieaérienne. La production des bénitiers est bienencadrée pas des réglementations en faveur de lapérennité des stocks et de leur exploitation. Unprestataire propose l’observation des baleines àbosse pendant l’hiver austral, mais cette activitétouristique est moins développée qu’elle ne l’està Rurutu.En somme, avec son grand lagon, un potentielichtyologique élevé, une faune corallienne plus richequ’ailleurs dans l’archipel et le plus grand stock debénitiers de l’archipel, Tubuai présente un intérêtécologique majeur et un patrimoine important entermes de biodiversité récifale et côtière. Les enjeuxsocio-économiques du milieu marin sont égalementimportants avec une exploitation des ressourcesmarines notable pour la consommation locale et pourles exportations. L’exploitation de la chair de bénitiersest devenue une des spécialités de Tubuai, secondproducteur de Polynésie française (jusqu’à 30 tonnes)derrière Tatakoto aux Tuamotu (70 tonnes). Lesressources de la haute mer au large de Tubuai, thonset autres pélagiques, comme au large des autres îlesAustrales, sont peu exploitées.

Vue aérienne du lagon de Tubuai. © CRIOBE Carte de synthese des intere ts patrimoniaux et des pressions anthropiques de Tubuai.

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325324

Rurutu est une île allongée nord-sud de 33 km2

bordée par un étroit système récifal de quelques 250m de large au maximum et d’une superficie de moinsde 3 km2. Un petit « lagon» s’étend sur presque 500m de large sur la façade occidentale devant le villagede Avera. Plus petite que Tubuai et Rapa, Rurutu estplus grande que Raivavae et Rimatara. L’histoiregéologique de l’île donne à Rurutu des paysageslittoraux très originaux avec des falaises calcairesspectaculaires de plus de 70 m de hauteur bordéespar un récif frangeant. Rurutu est la plus peuplée desîles Australes avec 2 322 résidents et une densité depopulation de 71 habitants/km2.Les habitats et les peuplements récifaux sontrelativement communs comme à Rimatara, sans quedes abondances particulières d’espèces puissent êtrenotées. L’infestation de l’étoile de mer corallivoreAcanthaster planci (taramea) a décimé en partie les

récifs de Rurutu, sans pour autant causer d’impactsmajeurs sur la densité de poissons. C’est à Rurutuqu’on observe le plus de mammifères marins :baleines à bosse, péponocéphales, dauphins àbec étroit, dauphins à long bec, cachalots etglobicéphales fréquentent les parages de l’île surtoutde juillet à novembre. La plupart des observations derequins aux îles Australes ont eu lieu autour des îlesde Rurutu et Rapa. On note la présence confirmée deplusieurs espèces communes de requins marteauxhalicornes (Sphyrna lewini), de requins desGalápagos (Carcharhinus galapagensis) et de requinsbouledogues (Carcharhinus leucas). L’observation detortues est fréquente mais sans qu’ait été établiel’identité de l’espèce ou des espèces présentes dansles eaux côtières de Rurutu parmi les 5 espècesprésentes dans l’archipel. Des traces et évènementsde ponte ont été relatés récemment au sud de l’îletandis que la côte est et sud-est était une zone deponte de tortues vertes régulière dans les années1970. Six espèces d’oiseaux marins inscrits sur laliste rouge de l’UICN se reproduisent dans l’île avecdes populations non négligeables.La transmission des traditions orales liées à l’océan etdes connaissances sur les techniques de pêcheancestrales perdurent à Rurutu. De nombreuseslégendes sur l’océan sont encore présentes dans latradition orale, tandis que les mesures traditionnelleset communautaires de préservation des ressourcesnaturelles telles que le rahui font l’objet d’un débatrenouvelé face à la pression de la pêche côtière et à ladéprédation des stocks de poissons. Il convient de noterla connaissance par des pêcheurs de Rurutu de lieuxde pêches nommés dans la langue locale, localisés surcertains hauts-fonds marins.L’économie de l’île est dominée par l’exploitation dudomaine terrestre. Rurutu a une production agricole de182 tonnes, inférieure à celle de Rimatara qui est de 390tonnes, pourtant d’une superficie 4 fois plus petite, etrelativement modeste par rapport à celle de Tubuai avec1 430 tonnes. Rurutu est l’île la plus ouverte autourisme et accueille environ un millier de visiteursdans ses 21 unités d’hébergements.Les activités liées à la mer sont importantes dansl’économie de l’île avec la pêche et le tourisme. Près de40 tonnes de poissons et d’invertébrés sont collectésannuellement sur les récifs de Rurutu. Ils sontconsommés localement alors qu’une à deux tonnes

RURUTU

seulement sont exportées. La pression de collecte surles ressources récifales est plus forte à Rurutu qu’àRimatara car le rapport entre nombre d’habitants etsurface récifale est plus élevé. Cette pression estbeaucoup plus forte que celles qui s’exercent à Raivavaeet à Tubuai qui présentent de grands lagons. La pêchedes «ature» devant le village d’Avera se fait dans lecadre d’un rahui. Le whale-watching (observations enbateau mais aussi en plongée libre) rythme les activitéstouristiques de Rurutu qui en a fait un des facteurs deson développement. Trois prestataires organisent cessorties auxquelles participent chaque année la grandemajorité du millier de touristes. C’est un tourismerelativement bien encadré quant à la protection desmammifères marins.Malgré une faible superficie recifo-lagonaire et unpotentiel ichtyologique moins élevé que dans d’autresîles de l’archipel, le milieu marin de Rurutu présente

un intérêt écologique notable. Sa géomorphologieremarquable de type «makatea» et la diversité desespèces marines emblématiques de la conservationprésentes aux abords de l’île sont parmi les originalitésde Rurutu au sein des Australes et de la Polynésie.L’abondance des baleines à bosse de juillet àseptembre observables depuis le rivage, et la clarté deseaux offrant d'excellentes conditions d'observations, ontfait du whale-watching un atout écotouristique pour ledéveloppement de Rurutu. Les ressources océaniqueset de profondeur sont exploitées plus densément quedans les autres îles Australes, du fait de la démographieet de la pression de pêche côtière plus importante et dela taille très réduite du platier récifal. Ces particularitésdu milieu marin et les nombreux usages et pressionsassociés confèrent à Rurutu des enjeux de gestion plusélevés que les autres îles des Australes.

Carte de synthese des intere ts patrimoniaux et des pressions anthropiques de Rurutu.Grotte calcaire et paysage littoral de Rurutu. © GIE Tahiti Tourisme - Tatiana Salmon

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Rimatara est une île presque circulaire de 8,6 km2

bordée par un étroit système récifal de quelques300 m de large au maximum et d’une superficie demoins de 1 km2. Une large baie, appelé localement« le lagon », est ouverte au sud devant le village deMutuaura. C’est la plus petite île habitée desAustrales avec une population de 873 habitantsmais avec la densité de population au km2 la plusélevée (102 habitants au km2).L’écosystème récifal entourant l’île, essentiellementun platier frangeant de bordure sans véritablelagon et des pentes récifales externes,déterminent les habitats et les peuplementsprésents. Ceux-ci sont relativement communssans que des abondances particulières d’espècespuissent être notées. En 2006 les récifs ontsouffert d’une prolifération d’étoiles de merépineuses, la « taramea », et ont été détruits engrande partie. Des baleines à bosse, des orques etdes globicéphales peuvent être observés depuis lerivage. L’absence de recensement des espèces derequins et de raies ne permet pas d’identifier unespécificité de Rimatara. Il est assez rare de voirdes tortues vertes dont on observait des pontesdans les années 1970, mais nous disposons de peu

d’information sur ces reptiles à Rimatara. Cinqespèces d’oiseaux marins inscrits sur la listerouge de l’UICN se reproduisent dans l’île.Les liens culturels de Rimatara avec l’océantransparaissent dans la similitude des légendes etla toponymie entre les îles. Ces connexionsperdurent aujourd’hui dans la tradition orale etdans les échanges inter-îles. Rimatara sedistingue des autres îles de l’archipel par saproximité avec les îles Cook, proximitégéographique mais également culturelle ettraditionnelle. Ce groupe d’îles formait un systèmesocial et économique commun dont les échangesse faisaient par l’océan. Les relations entreRimatara et les îles Cook persistent aujourd’hui àtravers des liens familiaux ou culturels. Lessystèmes traditionnels de préservation desressources marines sont toujours en vigueur surl’île. Un rahui a été instauré par le Tomite To’ohituou Conseil des Sages de Rimatara divisant lemilieu littoral marin en trois secteurs dont un seulest ouvert chaque année.L’économie de l’île est dominée par le domaineterrestre. Si les actifs de l’île sont pour la moitiérémunérés par les services publics, on note que

RIMATARA

Rimatara a une forte production agricole, laseconde des îles Australes (390 tonnes) aprèsTubuai (1 430 tonnes) d’une superficie 5 fois plusgrande, mais bien avant Rurutu (182 tonnes)pourtant 4 fois plus grande. Le tourisme est récentet encore peu développé. Rimatara accueille moinsde 200 visiteurs par an et ne compte que 7 unitésd’hébergements contre plus de 20 dans lesautres îles. Dans ce contexte de géographie physique etd’économie, les activités liées à la mer sont plusrestreintes. La pêche sous toutes ses formes(à pied, fusil sous-marin, ligne ou filet) occupetout de même l’ensemble de la population dansle cadre d’une consommation locale familiale,avec une cinquantaine de pirogues recenséesdans l’île. L’exploitation des ressources marinesest particulièrement importante, avec desrendements qui dépassent 3 tonnes/km² desurfaces récifales. La pêche en poissons etinvertébrés représente une vingtaine de tonnespar an dont le vingtième est exporté. Des sortiestouristiques en bateau autour de l’île, de pêche augros ou d’observation des cétacés sont proposéespar des pêcheurs de l’île.

En conclusion, Rimatara est une petite île àl’écosystème récifal réduit et dont l’économie estsurtout tournée vers l’agriculture. Le patrimoinemarin est peu original mais toute la population tirebénéfice de ses ressources pour sa proprealimentation (environ 21 tonnes annuellement)avec une faible exportation vers Tahiti (1 à 2 tonnespar an au cours des dernières années). Lesressources de la haute mer au large de Rimatarasont davantage exploitées que dans les autres îlesqui présentent une superficie de lagon et de platierrécifal plus importante. Le patrimoine culturellié au grand Océan est riche et sa transmissionperdure dans la tradition orale comme dans lesmesures de préservation collective des ressourcesmarines. Rimatara entretient des liens culturels ethistoriques forts avec les îles Cook de par l’océan.

Vue aérienne de Rimatara. © CRIOBE Carte de synthese des intere ts patrimoniaux et des pressions anthropiques de Rimatara.

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L’île basse corallienne de Maria est le seul atoll del’archipel des Australes. Avec l’atoll de Scilly, dansl’archipel de la Société, ce sont les deux îles les plusoccidentales de la Polynésie française. Entre autrenom, Maria fut nommée Nororutu et on la désigneaussi sous le nom de Maria Ouest pour la distinguerd’un autre atoll, Maria Est, dans les Tuamotu au sudde Marutea. L’île Maria Ouest est originale en ce qu’elle est le seulatoll de l’archipel des Australes, l’atoll le plus àl’Ouest et l’un des plus méridionaux de Polynésiefrançaise. L’ile est inhabitée. Ses caractéristiquessont comparables aux 53 autres atolls fermés quecompte la Polynésie française. C’est en effet un atollfermé sans réelle passe mais avec une fausse passeau nord-ouest ne permettant qu’à de petitesembarcations de pénétrer dans le lagon. Les eauxocéaniques et lagonaires communiquent largementpar-dessus le récif. Les quatre motu de l’atoll sontoccupés par une cocoteraie. Le lagon est très peuprofond, dominé par la sédimentation avec desassemblages de coraux branchus (Acropora) etjaunes (Porites) mais sans pinacles coralliens. Onnote des peuplements importants de bénitiers(Tridacna maxima) et de la petite nacre jaune

(Pinctada maculata) mais pas de nacre perlière. Onne sait pas si les grandes étendues de sable blanc quicaractérisent les abords de certains motus sont deslieux de ponte des tortues. Nous ne disposons pas nonplus d’informations sur les cétacés croisant auvoisinage de cette partie occidentale de l’archipel desAustrales. Plusieurs espèces d’oiseaux marins sereproduisent uniquement sur cette île dans l’archipel,dont des frégates et des fous qui sont sur la liste rougede l’UICN. À ce titre, l’atoll présente un intérêtparticulier pour les oiseaux de la région, et a été retenudans la liste des zones importantes pour laconservation des oiseaux de Polynésie.Les atolls de Maria et de Mangaia font le lien entre lesAustrales et les îles Cook du sud ; un peu plus de300 km les séparent. Maria, située à environ 115 milesnautiques au nord-est de Rimatara et 150 milesnautique à l’ouest de Rurutu, était visitéeépisodiquement par des coprahculteurs des 2 îles, quipêchaient à l’occasion les poissons côtiers, les «pupu»ou «maua» des Tuamotu (Turbo setosus) sur les frontsrécifaux et les langoustes (Panulirus penicillatus).Depuis l’interruption des liaisons maritimes vers Mariapour la récolte du coprah dans les années 1980, lesactivités de pêche sur l’atoll ont été largement réduites.

MARIA

En conclusion, l’atoll de Maria présente un intérêtremarquable au plan du patrimoine naturel marinavec une forte originalité au sein de l’archipel et parses caractéristiques géomorphologiques et sespeuplements récifaux et lagonaires. C’est une îleinhabitée, préservée de toutes activités humaineset un havre de conservation naturelle, un liengéographique et culturel entre les îles Australes et lesîles Cook dans un secteur océanique où la haute merne fait pratiquement l’objet d’aucune pêche depélagiques.

Vue aérienne de l’atoll de Maria. © CRIOBE Carte topographique et des récifs coralliens de Maria.

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En Polynésie française, 118 montagnes émergent àla surface de l’océan en formant des îles. Certainesde ces îles ne continuent d’exister que grâce à laconstruction corallienne, ce sont les 81 atolls.La zone exclusive économique de la Polynésiefrançaise compte encore davantage de montagnessous-marines submergées, avec au moins 230 montssous-marins identifiés. Plus de quarante se situentau voisinage des îles Australes.Les monts sous-marins ont la même origine quecelle des îles. Pour la Société, les Marquises, lesGambier et les Australes, monts sous-marins et îlesont été créés au niveau de points chauds. Pour lesAustrales deux points chauds ont fonctionné et sonttoujours des volcans sous-marins actifs : le MacDonald qui a donné naissance à Mangaia dans les îlesCook, puis à Maria, Rimatara, Rururu, Tubuai,Raivavae, Rapa et Marotiri, d’une part, et Arago qui adonné le volcan récent de Rurutu et Mauke, Aitutki etAtiu dans les îles Cook. Les monts sous-marins sont définis comme desélévations d’au moins mille mètres au-dessus duplancher océanique. De forme circulaire, elliptiqueou allongée, leurs pentes sont relativement abrupteset leurs surfaces sommitales limitées. Parmi les42 monts repérés dans les Australes, 6 culminent àmoins de 50 m de profondeur : Arago ou Tinomana(volcan actif) - Banc Thiers - Récif Neilson - MacDonald (volcan actif) - Rapa 1 et Rapa 2. Par ailleurs,6 autres monts sous-marins ont leurs sommetsentre 50 et 500 m : Byus - Lotus Raivavae - LotusRurutu - Moses - Bouchard et Rapa 3. Deux autresmonts sous-marins sont en dehors de la zone desîles Australes, au nord de Rurutu : Rigault deGenouilly et Confiance.Les eaux au-dessus des monts sous-marins sontsystématiquement le siège d’une productivité plusélevée qu’ailleurs, surtout pour les monts dont lesommet s’approche de la surface car ces sommetspeuvent comporter des organismes au métabolismefaisant intervenir la photosynthèse comme les corauxhermatypiques. La structure des communautésplanctoniques et micronectoniques des eauxbaignant les monts diffèrent significativement decelles des eaux avoisinantes, tant sur le planqualitatif que quantitatif. On note une plus grandeabondance de larves de poissons néritiques parrapport aux poissons océaniques alors que c’estl’inverse en dehors des monts. L’abondance descommunautés zooplanctoniques expliquerait la

présence d’espèce planctonophages inféodéesaux monts sous-marins, et par voie deconséquence une nourriture plus abondante pourles grands prédateurs comme les thons. Certainsde ces hauts-fonds sont d’ailleurs des repères pourles pêcheurs résidents dans les îles lorsqu’ilspeuvent s’y rendre et aussi pour les palangriers. Sansdisposer de relevés sur les requins et les raies surces hauts-fonds des Australes, on peut penser quecertaines espèces s’y trouvent et constituent despoints d’étape dans leurs déplacements entre lesîles, comme la raie géante de profondeur ou le requinchagrin mosaïque. Des plongées sur le Mac Donaldont révélé la présence de requins soyeux et derequins gris.Les quelques connaissances disponibles sur lespeuplements du domaine benthique des montssous-marins (sommets et pentes) résultent dedragages, de pêches au casier et à la palangre,au-dessus de 700 m de profondeur. Alors que lesespèces qui vivent dans les grands fonds sontcosmopolites, les prospections réalisées sur d’autresmonts sous-marins que ceux des Australes indiquentun endémisme de 15% à 36% selon les groupeszoologiques, qu’il s’agisse d’invertébrés ou depoissons. La pêche des espèces démersales sur lesmonts sous-marins est inexistante et la faiblesurface de leur habitat ne permet pas d’envisagerune exploitation importante. Parmi les ressources minérales océaniques,rappelons que les sommets et les pentes des montssous-marins comportent des encroutementscobaltifères, alors que les nodules polymétalliqueset les boues à terres rares se trouvent à desprofondes plus importantes (dépôts dans lesplaines abyssales).Les monts sous-marins des Australes, 6 fois plusnombreux que les îles émergées, sont un lieud’abondance des espèces pélagiques dans l’océan.Les ressources de ces lieux sont sous-exploitéscomme l’ensemble de la zone océanique desAustrales, très faiblement prospectée par lespalangriers. Les sommets et les flancs de cesmonts sous-marins représentent donc unpatrimoine biologique très important et comportent,en référence à ce qui est connu ailleurs, despeuplements avec un fort taux d’endémisme depoissons et d‘invertébrés, qu’il conviendraitd’étudier pour en démontrer tout l’intérêt au plande la biodiversité.

MONTS SOUS-MARINS

Paysage sous-marin autour de Rapa. © Ian Skipworth

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conclusion

Poisson clown, Amphiprion clarkii observé à Rapa.

© Ian Skipworth

CET OUVRAGE CONSTITUE UN ÉTAT DES LIEUX PARTICIPATIF ET PLURIDISCIPLINAIRE DE L’ENVIRONNEMENT MARIN

DES AUSTRALES, NÉCESSAIRE À LA DÉFINITION D’UNE STRATÉGIE DE CONSERVATION.

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Cet ouvrage offre un premier bilan de l’environnementmarin des Australes. À travers une approchetransversale et pluridisciplinaire, il décrit le milieunaturel marin de ces îles mais aussi les liens entre lespopulations et leur environnement marin. Il est le fruitdes travaux de plus de trente experts locaux etinternationaux, issus du secteur public et privé, àtravers une initiative de collaboration unique et uneapproche ouvertement participative. Les quatreexpéditions scientifiques réalisées dans le cadre dece diagnostic ont permis une mise à jour des donnéesexistantes et une confrontation de la littératurescientifique aux observations du terrain.

Cet ouvrage confirme que l’archipel des Australes, peuconnu du public, se distingue des autres archipels dePolynésie française par l’originalité et l’état depréservation de son patrimoine naturel marin et par larichesse et la vivacité de la culture locale liée augrand Océan. Un domaine océanique d’un millionde km2, une position géographique subtropicale, descaractéristiques géomorphologiques extrêmementvariées, un fort endémisme de la biodiversité côtière,des espèces emblématiques remarquables, une faunepélagique diversifiée, un rahui structuré et respecté :chaque île des Australes détient ses spécificités propresdu fait de ses richesses naturelles ou de son identitéculturelle. Et l’archipel dans son ensemble offre uneopportunité de conservation unique.

Suite à l’appel des communes des Australes et àl’engagement du gouvernement pour la création d’unegrande Aire Marine Protégée aux Australes, cet ouvrageconstitue un état des lieux préliminaire, nécessaire à ladéfinition de stratégies de conservation. Ces donnéesoffriront une base de connaissance de référence auxpopulations locales et au gouvernement pour élaborerun projet d’Aire Marine Protégée adapté aux besoinslocaux et aux réalités du terrain. A n’en pas douter, lamise en place de mesures de gestion durable et deconservation de l’espace maritime des Australes sera undes enjeux de la décennie à venir pour l’archipel.

bernard salvat et tamatoa bambridge Institut Récifs Coralliens Pacifique, CRIOBE, Moorea, Polynésie française

donatien tanret et jérôme petit The Pew Charitable Trusts Héritage Mondial des Océans, Polynésie française

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contributeurs

Le Centre de Recherches Insulaires et Observatoirede l’Environnement (CRIOBE) de Moorea est la basearrière qui soutient l’IRCP avec ses infrastructures etson équipe forte de plus de 25 chercheurs ettechniciens. Le CRIOBE est une unité de l’EcolePratique des Hautes Etudes (EPHE) associée auCentre National de la Recherche Scientifique(CNRS) et à l’Université de Perpignan Via Domitia(UPVD) au sein d’une unité de recherche (USR 3278).

L’EPHE gère le laboratoire d’excellence LABEXCORAIL : « Les récifs coralliens face au changementglobal de la planète » regroupant 9 Institutions et4 Universités de Métropole et d’Outre-Mer. Il vise àétudier les écosystèmes coralliens en vued’améliorer leur gestion durable. L’objectif est decréer à terme un Centre d’Excellence Français surles Récifs Coralliens.

à propos de l’ircpinstitut des récifs coralliens du pacifique,moorea, polynésie françaisewww.ircp.pf

The Pew Charitable Trusts, à travers le projet HéritageMondial des Océans, travaille avec les gouvernementset la société civile à travers le monde pour assurer lasanté de nos océans sur le long terme. Ceprogramme finance des activités de recherche, desensibilisation, de communication, et travaille encollaboration avec de nombreux partenaires locauxpour favoriser la création de grandes aires marinesprotégées. Dans le Pacifique, le programme Héritage Mondialdes Océans est implanté en Polynésie française, enNouvelle-Calédonie, à l’île de Pâques, à Pitcairn, enNouvelle-Zélande, en Australie et à Palau. Les effortsde ce programme, avec ceux de l’ensemble de sespartenaires, ont contribué à la sauvegarde de prèsde 2 millions de kilomètres carrés d’océan, à travers lacréation de plusieurs grandes aires marines protégées :le parc national de Papahānaumokuākea à Hawaï(USA), le parc national des îles Mariannes (USA), leparc marin des Chagos (UK), l’extension du parcnational des Pacific Remote Islands (USA), et laréserve marine de la mer de Corail (Australie).

En Polynésie française, Pew travaille en étroitecollaboration avec le gouvernement, les élus des îles,les pêcheurs, les scientifiques, les associations et lesecteur privé, pour contribuer à mettre en oeuvrel’objectif ambitieux du gouvernement de protégerau moins 20 % des eaux polynésiennes d’ici 2020.À travers une approche participative et denombreuses consultations, Pew et ses partenairesespèrent identifier des scénarios de protection quisont largement soutenus par la société civile et quirespectent la culture traditionnelle polynésienne. Enmai 2014, le gouvernement de la Polynésie françaisea invité Pew à entreprendre un diagnostic scientifiquedu patrimoine marin des îles Australes, puis àémettre des recommandations pour élaborer unestratégie de gestion durable des ressources marinesde cet archipel.

à propos de the pew charitable trusts polynésie françaisewww.pewtrusts.org

à propos du criobecentre de recherches insulaires et observatoire de l’environnement (criobe), moorea, polynésie françaisewww.criobe.pf

L’Institut des Récifs Coralliens du Pacifique (IRCP) estun institut de l’École Pratique des Hautes Etudes(EPHE), créé le 21 janvier 2009 par arrêté du Ministèrede l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.L’IRCP a pour mission de favoriser à l’échellerégionale du Pacifique, le lien nécessaire entrerecherche fondamentale, politique de préservation etformations des acteurs dans le domaine de la gestiondes récifs coralliens, - de soutenir les problématiquestransversales avec l’apport des sciences humaines etsociales, - de développer un réseau de surveillancesur l’état de santé des récifs coralliens, - et d’œuvreren faveur de projets fédérateurs visant à lapréservation de ces écosystèmes dans un contexte dedéveloppement durable.

Ces missions se déclinent en trois actions :

1. Organisation de séminaires avec rencontre descompétences techniques des Pays du Pacifique surdes thématiques liées à la gestion des récifscoralliens ou d’ateliers de formation en Polynésiefrançaise et à l’étranger.

2. Politique d’allocation de bourses dans le cadre d’unpartenariat avec des entreprises privées (Tahiti PerlesRobert Wan - Société des Nouveaux Hôtels - SociétéPolynésienne de Développement Durable). Chaqueannée quatre bourses sont offertes à de jeuneschercheurs étrangers ou français à la suite d’un appeld’offre afin qu’ils développent un axe de recherchenovateur sur les récifs de et en Polynésie française.

3. Surveillance de l’état de santé et des perturbationssubies par les récifs coralliens dans un cadrerégional. Il s’agit de développer le réseau desurveillance des récifs coralliens mis en place par leCRIOBE il y a une vingtaine d’années et qui, en plusd’un quinzaine de sites répartis dans tous lesarchipels de Polynésie française, couvre maintenantdes Pays voisins (Pitcairn, Tonga, Cook, Kiribati,Samoa).

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Bernard Salvat - CRIOBE Biologiste. Docteur es sciences. Professeur émérite. Laboratoire d'Excellence CORAIL,CRIOBE USR 3278 CNRS-EPHE-UPVD - Centre de Recherches Insulaires et Observatoire del'Environnement BP 1013 Papetoai, 98729 Moorea, Polynésie française. Centre National dela Recherche Scientifique, Ecole Pratique des Hautes Etudes, Université de Perpignan ViaDomitia. Fondateur du CRIOBE. Le domaine de recherche porte sur les récifs coralliens del’outre-mer français, tout particulièrement de la Polynésie française, et du domaineinternational : écologie, état de santé, pressions et dégradations anthropiques et naturelles,pollutions, changement climatique, invertébrés, biodiversité, protection et conservation,systèmes de gouvernance. [email protected]

Tamatoa Bambridge - CRIOBE Socio-anthropologue, Directeur de recherche au CNRS. Laboratoire d’Excellence CORAIL,CRIOBE USR 3278 CNRS-EPHE-UPVD – Centre de Recherches Insulaires et Observatoire del’Environnement BP 1013 Papetoai, 98 729 Moorea, Polynésie française. Centre National de laRecherche Scientifique, Ecole Pratique des Hautes Etudes, Université de Perpignan Via Domitia.Le champ de recherche comprend la gouvernance des territoires de la biodiversité dans le contextedes changements environnementaux planétaires (foncier terrestre et marin, usages traditionnels,gouvernance). Les régions concernées sont l’Océanie, les mondes polynésiens et mélanésiens.Principales disciplines mobilisées : Anthropologie du droit, sociologie, écologie des récifscoralliens. [email protected]

Donatien Tanret - THE PEW CHARITABLE TRUSTS POLYNÉSIE FRANÇAISEDonatien Tanret est chargé de projet au sein du bureau Pew en Polynésie française depuisjanvier 2014. Il a travaillé 6 ans au sein du bureau d’études en environnement CAPSE PF surla gestion des ressources naturelles en Polynésie française et sur différents projets declassement d’espaces naturels protégés. Auparavant il a travaillé en tant qu’ingénieurenvironnement en Nouvelle Calédonie pour la préservation des rivières et des lagons, auCRIOBE de Moorea et à la Direction de l’environnement de Polynésie française sur la gestionde la ressource en eau. Il a travaillé dans une trentaine d’îles en Polynésie française. [email protected]

Jérôme Petit - THE PEW CHARITABLE TRUSTS POLYNÉSIE FRANÇAISEJérôme Petit est le directeur du bureau Pew en Polynésie française depuis octobre 2013. Il aréalisé son doctorat à Moorea avec la station Gump (UC Berkeley) et le CRIOBE sur unprogramme de lutte biologique. Il a coordonné le projet d’inventaire biologique MooreaBiocode et travaillé avec le gouvernement polynésien sur un état des lieux sur le changementclimatique en Polynésie française. Au niveau international, il a travaillé avec le CSIRO enAustralie sur l’identification d’indicateurs biologiques, avec l’Union Internationale pour laConservation de la Nature (UICN) sur la biodiversité de l’outre-mer européen et avec laCommission Européenne à Bruxelles, notamment pour participer aux négociationsinternationales en matière de biodiversité (CBD)[email protected]

Agnès Benet - PROGEM, ASSOCIATION MATA TOHORABiologiste marin, Directrice du bureau d’études PROGEM (Protection et Gestion desEcosystèmes Marins) et Présidente de l’association MATA TOHORA – BP 42860 Fare Tony98713 Papeete, Tahiti, Polynésie française. La majorité des études portent sur la gestionintégrée des récifs coralliens et des mammifères marins, dans le contexte du changementclimatique et des pressions naturelles et anthropiques. La région concernée est l’Océanieavec une expertise particulièrement en Polynésie française. Principales disciplines mobilisées :biologie marine, écologie des récifs coralliens, gestion intégrée, éthologie des cétacés. [email protected] - www.matatohora.com

Elin Claridge - ASSOCIATION TOREANUANUA, COMITÉ DU TOURISME DE RURUTU, UNIVERSITY OF CALIFORNIA, BERKELEY - GUMP STATIONActeur du tourisme à Rurutu, gérante de pension de famille et membre du comité detourisme, chercheur affiliée à la station Gump Research Station, Université de CalifornieBerkeley, Paopao, Moorea. Impliquée dans la conservation et le développement durable dutourisme aux iles Australes. Scientifique de formation, a participé à l’inventaire des insecteset des araignées de Polynésie française mené par l’Université de Californie Berkeley.Doctorat ciblé sur la diversification et la phylogénie du genre Rhyncogonus (Curculionidae:Coleoptera) en Polynésie française. [email protected]

Amelia Connell - THE PEW CHARITABLE TRUSTS NOUVELLE ZÉLANDEAmelia Connell est responsable de projet pour The Pew Charitable trusts, programmeHéritage mondial des océans Nouvelle Zélande. Elle est basée à Wellington et travaille encollaboration avec le gouvernement de Nouvelle Zélande pour la création d’une granderéserve marine autour des îles Kermadecs. Elle est biologiste marin et a travaillé surl’écologie des fonds marins et de plusieurs espèces pélagiques commerciales. Elle a participéà plusieurs expéditions scientifiques, notamment à l’expédition au sud des Australes et auxGambier en Polynésie française en septembre - octobre [email protected]

Philippe Couraud - SERVICE DU DÉVELOPPEMENT RURAL DE POLYNÉSIE FRANÇAISE Ingénieur agronome (1980), docteur ingénieur en agro-économie (1985), Urbaniste (OPQU-2014); fonctionnaire de la Polynésie française, chargé de mission au Service du développement rural,responsable d’un programme de gestion intégré des zones côtières à Opunohu (Moorea) et de ladirection du domaine territorial (1500 ha) ; Membre du conseil supérieur de la fonction publique ;Chef du service de l’urbanisme (2004 à 2006 et 2011 à 2013) ; Chef de service du développementrural (2009 à 2010) ; Secrétaire général de la Chambre d’agriculture et de la pêche lagonaire (2007à 2009) ; Chef du département aménagement et équipement rural (1992 à 2003) ; Direction deprogrammes de développement agricole et filières agro-industrielles (1981 à 1991)[email protected]

Paul D’Arcy - UNIVERSITÉ NATIONALE D’AUSTRALIEPaul D’Arcy est professeur d’histoire de l’environnement à l’Université Nationale d’Australie. Ilest spécialiste des aires polynésiennes et micronésiennes. Ses travaux portent également surles relations croisées entre mondes océaniens et asiatiques. Il a notamment publié The Peopleof the sea (2006) aux presses universitaires de Hawaii, ainsi que plusieurs synthèses sur l’histoiredes relations des Océaniens à leurs environnements marin et terre aux presses universitairesd’Oxford. Ses recherches actuelles portent notamment sur l’intégration des communautéslocales dans la gestion de leurs ressources et sur les très grandes aires marines protégé[email protected]

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Marlène Dégremont - IRDDoctorante en Anthropologie et spécialisée dans les questions environnementales, MarlèneDégremont réalise sa thèse sur la gouvernance des espaces marins en Nouvelle-Calédonieet en Polynésie française. L’étude des pratiques et des représentations liées à la nature etdes relations entre l’homme et le milieu marin font partie des domaines de compétencesqu’elle développe depuis sa licence et son master en Anthropologie et Développementdurable. Actuellement accueillie au centre IRD de Nouméa, lieu de son premier stage derecherche, elle consacre ses travaux à un sujet d’actualité pour les sociétés insulaires : ledéveloppement des aires marines protégées dans l’océan Pacifique [email protected]

Poema Du Prel - THE PEW CHARITABLE TRUSTS POLYNÉSIE FRANÇAISEPoema Du Prel a rejoint le bureau Pew en Polynésie française en septembre 2014. Elle a uneexpérience éclectique dans le domaine de la mer, de l’environnement, du tourisme et de laculture. Elle a travaillé dans de nombreux pays autour du monde, de l’Antarctique aux îlesSalomon. En Polynésie française, elle a travaillé dans de nombreuses îles avec les populationslocales et les pêcheurs, notamment aux Australes et aux Tuamotu. Elle est chargée desconsultations aux Australes pour l’élaboration d’un projet d’Aire Marine Protégée concerté[email protected]

Sophie Dorothée Duron - AGENCE FRANÇAISE DES AIRES MARINES PROTÉGÉESSophie-Dorothée Duron est administrateur en chef des affaires maritimes. Diplômée ensciences politiques, elle a exercé ses fonctions sur différentes façades maritimes. Depuis2009, elle dirige l’antenne polynésienne de l’Agence française des aires marines protégéesdans le cadre d’une collaboration avec le gouvernement polynésien. A ce titre, elle acoordonné ou pris part à de nombreux programmes scientifiques, notamment aux Marquises.Elle a participé à l’édition et à l’élaboration de l’analyse écorégionale marine de Polynésiefrançaise (2008-2009)[email protected]

Alan Friedlander - NATIONAL GEOGRAPHIC, UNIVERSITY OF HAWAII Durant les 35 dernières années, Alan Friedlander a passé plus de 8000 heures sous la mer,des récifs coralliens de l’Arctique aux grandes profondeurs, à explorer parmi les endroits lesplus isolés et remarquables de la planète. Il est actuellement directeur scientifique duprogramme Pristine Seas de National Geographic et directeur du laboratoire de rechercheen écologie des poissons de l’université d’Hawaii. Avec plus d’une centaine de publicationsscientifiques, ses nombreux articles et films documentaires sont largement reconnus etutilisés pour la conservation. Alan a effectué son doctorat (Ph.D) à l’université d’Hawaii etest titulaire d’un Postdoctoral (National Research Council Postdoctoral Associate) avec lelaboratoire environnemental des pêcheries du Pacifique de Monterey, Californie. [email protected]

Cécile Gaspar - ASSOCIATION TE MANA O TE MOANADr. Cécile Gaspar est vétérinaire et docteur en écologie marine (EPHE/UPF). Elle fonde et présidel’association Te mana o te moana en 2004.Cette association reconnue d’Intérêt Général et membrede l’UICN a trois objectifs : éducation, conservation et recherche sur le milieu marin polynésien.Ses programmes pédagogiques (cétacés, tortues, récifs coralliens, éco-citoyenneté) ontsensibilisé plus de 50 000 scolaires depuis sa création. Cécile a aussi créé une clinique pour tortuesmarines à Moorea, qui a accueilli plus de 400 tortues malades ou blessées en 10 ans. Elledéveloppe aussi des programmes de recherche sur les tortues en Polynésie. Elle est membre ducomité «espèces» de l’UICN et du comité d’experts « tortues marines » de l’UICN [email protected]

Christian Ghasarian - UNIVERSITÉ DE NEUCHÂTELChristian Ghasarian est professeur d'ethnologie à l'Université de Neuchâtel (Suisse). Sesrecherches portent sur le multiculturalisme à La Réunion, les pratiques New Age (aux États-Uniset en Europe) et les relations sociales en Polynésie française, notamment à Rapa qu’il étudie depuis2001. Il a publié plusieurs livres, parmi lesquels : Rapa dans l’histoire (2015) ; Rapa. Une île dubout du monde, une île dans le monde (2014) ; Des plantes psychotropes. Initiations, thérapies etquête de soi (2010) ; Anthropologie de La Réunion (2008) ; De l’ethnographie à l’anthropologieréflexive (2002) ; Introduction à l’étude de la parenté (1996)[email protected]

Fred Jacq - CONSULTANT - INGÉNIEUR ÉCOLOGUE ET BOTANISTE Polynésie française. Ses connaissances sur la Flore vasculaire de Polynésie française et surles Systèmes d’information Géographique, le font intervenir dans les domaines de laConservation de la Nature, de l’aménagement du territoire et du tourisme vert. Il réalise denombreux inventaires et cartographies du patrimoine naturel, voire culturel, sur de grandsdomaines territoriaux et aires protégées dans tous les archipels de la Polynésie française. Ilcoordonne et participe également à plusieurs plans et actions de conservation d’espaces etespèces menacées, et projets de classement en aire protégée. [email protected]

Tiffany Laitame - ASSOCIATION RAUMATARIKI RAPA Tiffany Laitame est la vice-présidente de l’association Raumatariki de l’île de Rapa. Cetteassociation a été créée en 2011 afin de protéger les espaces naturels de l’île. Elle a obtenuson Master en écologie terrestre à l’université de Bordeaux 1. Elle poursuit actuellement undoctorat en écologie au sein de l’université de la Polynésie française sur la restauration deforêts naturelles polyné[email protected]

Victoire Laurent - MÉTÉO-FRANCE POLYNÉSIE FRANÇAISEMétéorologue, Chef de la division Etudes et Climatologie à Météo-France en Polynésiefrançaise, Direction interrégionale de Météo-France en Polynésie française - BP 6005 - 98702 Faa'a– Tahiti, Polynésie française. Responsable des études climatiques menées sur le bassin polynésiencomprenant entre autre la prévision saisonnière et l’élaboration de projection [email protected]

Thierry Lison de Loma - OCEAN CONSULT POLYNÉSIEIchtyologue corallien, Docteur en Sciences de l’Environnement Marin. Ocean ConsultPolynésie, BP 1489 Uturoa, 98729 Raiatea, Polynésie française. Ex directeur-adjoint del’Institut des Récifs Coralliens du Pacifique (Ecole Pratique des Hautes Etudes), et chargédes suivis des récifs coralliens du Pacifique (GCRMN, réseau CORAIL) au CRIOBE. L’expertisecomprend la dynamique des peuplements de poissons récifaux, et la biodiversité dans lecontexte des changements environnementaux à différentes échelles (modifications del’habitat corallien par les changements climatiques, les cyclones, les étoiles de merprédatrices des coraux ; effets des Aires Marines Protégées). Les régions concernées sontla Polynésie française, et plus largement le Pacifique. Principales disciplines : Ichtyologie,Dynamique des populations, Statistique, Biologie des récifs coralliens. [email protected]

Keitapu Maamaatuaiahutapu - UNIVERSITÉ DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE Maître de conférences en océanographie. Laboratoire GEPASUD, Université de laPolynésie française, BP 6570 - 98702 Faa'a-Tahiti, Polynésie française. Le champ derecherche se concentre sur l'océanographie régionale pour une meilleure connaissancedes courants à l'échelle des archipels à partir des données satellitales. Principalesdisciplines mobilisées: physique et [email protected]

Christophe Misselis - TAHITI TUNA CONSULTING Ingénieur halieute. Directeur de la société Tahiti Tuna Consulting – Ingénierie en pêche,spécialisée dans le thon tropical ; Conseil ; Etude ; Montage de projet Port de Pêche dePapeete – BP 9956 Motu Uta - 98 715 Papeete – Polynésie franç[email protected]

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Lucien Montaggioni - CEREGEGéologue, Professeur Emérite, Centre Européen de Recherche et d’Enseignement en Géosciences(CEREGE), UMR-CNRS 7330, OSU Pythéas, Aix-Marseille Université. Spécialités de recherche:sédimentologie des carbonates, paléoécologie récifale. Chantiers d’étude: Océan Indien Occidental(Iles de La Réunion, Maurice, Rodrigues, Seychelles), Mer Rouge (Egypte, Soudan, Jordanie, ArabieSéoudite), Océan Pacifique (Polynésie Française, Nouvelle Calédonie, Australie). Les travaux ontporté sur l’analyse des conditions de développement des systèmes récifaux en relation avec leschangements climatiques et environnementaux au cours du Néogène et du Quaternaire (entre23 millions d’années et, le présent) en particulier, lors du Pleistocène Récent et de l’Holocène(derniers 20 000 ans). [email protected]

Johann Mourier - CRIOBEEcologiste spécialiste des requins. Post-doctorant au Laboratoire d'Excellence CORAIL,CRIOBE USR 3278 CNRS-EPHE-UPVD - Centre de Recherches Insulaires et Observatoire del'Environnement BP 1013 Papetoai, 98729 Moorea, Polynésie française. Centre National dela Recherche Scientifique, Ecole Pratique des Hautes Etudes, Université de Perpignan ViaDomitia. Il travaille depuis 2008 à mieux comprendre l’importance des individus et leursinteractions dans la structuration des populations de requins récifaux de Polynésie.Principales disciplines mobilisées : analyses individus-centrées, écologie spatiale etcomportementale, écologie moléculaire, dynamique des populations. [email protected] - www.johannmourier.wordpress.com

Matthieu Petit - ASSOCIATION TE MANA O TE MOANA Matthieu Petit est coordinateur des programmes de recherche et de conservation au sein del’association Te mana o te moana. Depuis 8 ans, il travaille sur les tortues marines dePolynésie française à travers la gestion de la Clinique des tortues de Moorea et la mise enplace d’études sur la ponte des tortues vertes, les zones d’habitat en mer ou lesdéplacements et migrations des tortues polynésiennes. Les travaux réalisés dans le cadrede l’association Te mana o te moana apportent des résultats le plus souvent inédits tant lestortues marines sont peu étudiées en Polynésie française. Matthieu intervient égalementdans le cadre de projets éducatifs et de conservation sur la thématique des récifs coralliens,des mammifères marins et de l’é[email protected]

Serge Planes - CRIOBEBiologiste. Docteur en océanologie biologique. Directeur de recherche au CNRS et Directeurd’Etudes Cumulant à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes. Laboratoire d'Excellence CORAIL,CRIOBE USR 3278 CNRS-EPHE-UPVD - Centre de Recherches Insulaires et Observatoire del'Environnement BP 1013 Papetoai, 98729 Moorea, Polynésie française. Centre National dela Recherche Scientifique, ¬ Ecole Pratique des Hautes Etudes, Université de Perpignan ViaDomitia. Actuel directeur du CRIOBE et directeur du LabEx CORAIL. Le domaine de rechercheporte sur la connectivité entre les populations dans les systèmes fragmentés comme lesrécifs coralliens du Pacifique. Ces concepts sont appliqués à la gestion des écosystèmes.Principales disciplines mobilisées : génétique des populations, écologie des récifs coralliens,gestion des aires marines protégées. [email protected]

Cédric Ponsonnet - DIRECTION DES RESSOURCES MARINES ET MINIÈRES DE POLYNÉSIEFRANÇAISEIngénieur halieute, Directeur Adjoint à la Direction des Ressources Marines et Minières.BP 20 - 98 713 Papeete. [email protected]

Michael Poole - PROGRAMME DE RECHERCHE SUR LES MAMMIFÈRES MARINSPh.D., Biologiste marin, Directeur du programme de recherche sur les mammifères marins,BP 698 Maharepa, 98728 Moorea, Polynésie française. Co-fondateur du South Pacific WhaleResearch Consortium ; fondateur de whale watching en Polynésie française. Depuis 1987 sesrecherches se concentrent sur la distribution géographique, l’abondance, la structure socialeet les aspects génétiques des cétacés dans les cinq archipels. Sa plus grande découverte -la Polynésie française est un lieu de reproduction pour une population de baleines à bosseauparavant inconnue. Sa plus grande réussite - le gouvernement a adopté en 2002 son projetde législation visant à créer, sur l’ensemble de la ZEE de Polynésie française, le sanctuairele plus vaste du Pacifique sud pour les baleines et les dauphins. [email protected]

Philippe Raust - SOCIÉTÉ D'ORNITHOLOGIE DE POLYNÉSIE "MANU"Docteur vétérinaire, président de la Société d'Ornithologie de Polynésie "Manu" (partenairede BirdLife international en Polynésie française) dont il est membre fondateur en 1990 - SOP ManuB.P.7023, 98719 - Taravao, Tahiti, Polynésie française.Coordonnateur du Programme d'identification des Zones Importantes pour la Conservation desOiseaux (ZICO) pour la Polynésie française (2005-2007). Membre du conseil Mondial de BirdLife international depuis 2010.Résidant en Polynésie française depuis 1975, il a une connaissance approfondie de tous lesarchipels de Polynésie française. Son intérêt pour la biodiversité l'a conduit à s'intéresser àl'avifaune du territoire et à œuvrer pour la conservation des espèces menacées et de leurs [email protected]

Paul Rose - NATIONAL GEOGRAPHICUn homme en première ligne des explorations et l’une des plus grandes expériencesmondiales en expédition scientifique. Paul Rose aide les scientifiques à percer etcommuniquer sur les mystères des endroits les plus isolés et les plus remarquables de laplanète. Ancien vice président de la Royal Geographical Society, Paul est chef d’expéditionpour le programme Pristine Seas de National Geographic. Il fût commandant de base de lastation de recherche de Rothera en Antarctique pour la British Antarctic Survey pendant 10 anset a reçu la médaille polaire de Sa Majesté la reine Elisabeth II. Il s’est vu décerné la médaillepolaire des Etats-Unis pour son travail avec la NASA et le Mars Lander project sur le montErebus en [email protected] - www.paulrose.org

Arsène Stein - DIRECTION DES RESSOURCES MARINES ET MINIÈRES DE POLYNÉSIEFRANÇAISEBiologiste des pêches, Chef de la direction des ressources marines et minières depuis octobre2014 – BP 20 - 98713 Papeete, Tahiti, Polynésie française. Titulaire d’un DEA d’écologie aquatiqueobtenu en 1984, a travaillé une dizaine d’années dans le domaine de la pêche lagonaire auxTuamotu et à Tahiti et organisé notamment les campagnes de pêche de trocas depuis 2006 et lacampagne de pêche des holothuries en 2014. Principale discipline mobilisée : écologie [email protected]

Magali Verducci - HEREMOANA CONSULTINGBiologiste marin, spécialisée dans la gestion des récifs coralliens. Consultante enenvironnement. Heremoana Consulting BP 72 78 – 98719 Taravao Tahiti Polynésie française.Je me suis spécialisée dans la gestion effective des aires marines à l’Université du PacifiqueSud (Fidji). Depuis 10 ans, je travaille sur plusieurs projets liés à la gestion des espacesnaturels en Polynésie française et m’intéresse également au renforcement des capacités desacteurs locaux dans le cadre du programme Te Me Um (Terres et Mers UltraMarines) dont jesuis le référent en Polynésie française. J’ai réalisé des études d’impacts sur l’environnementpour différents projets et des diagnostics environnementaux sur des espaces [email protected]

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Imprimé à Tahiti - STP Multipress ISBN 978-2-905630-08-7

Dépôt légal troisième trimestre 2015

Ci-dessus : Rapa, 2014.

© Manu San Felix

Couverture : Pêche côtière à Rurutu.

© GIE Tahiti Tourisme, Gilles Diraimondo

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