entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand...

28
entrées ibres Écrire et lire l'Enseignement catholique / N° 25 / janvier 2008 entrées libres n°25 - janvier 2008 Mensuel - ne parait pas en juillet-aout Bureau de dépôt: 1099 Bruxelles X N° d’agréation: P302221 Photo: François TEFNIN DOSSIER Inscriptions: et maintenant? RENCONTRE Marcel RUFO Wikipédia

Transcript of entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand...

Page 1: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

entrées ibresÉcrire et lire l'Enseignement catholique / N° 25 / janvier 2008

entrées libres n°25 - janvier 2008 Mensuel - ne parait pas en juillet-aout Bureau de dépôt: 1099 Bruxelles X N° d’agréation: P302221 P

hoto

: Fra

nçoi

s TE

FNIN

DOSSIER

Inscriptions:et maintenant?

RENCONTRE

Marcel RUFO

Wikipédia

Page 2: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

édito3 Inscriptions: quelles solutions?

des soucis et des hommes4 Population scolaire dans l’enseignement catholique

entrez, c’est ouvert!6 Et la Belgique dans tout ça?7 Au bout du conte

Il peut faire toujours beau, quelle que soit la météo

l’exposé du moi(s)8 Marcel RUFO

Larguez les amarres!

rétroviseur10 Soumettre ou émanciper?

dossierinscriptions: et maintenant?

écoles du monde11 Sans frontières, mais pas sans

enthousiasme!

zoom12 Wikipédia, boite de Pandore ou

boite à outils pédagogique?

recto verso14 Des écoles musulmanes?

avis de recherche16 Et si c’était quand même

une question d’efficacité?

service compris18 À société plurielle, transmission nouvelle Printemps des

sciences: Terre à terres Choose Life Festival Muséesroyaux des Beaux-Arts de Belgique Contre le racisme La revue des revues

entrées livres19 Les noirceurs de l’aube Un libraire, un livre

hume(o)ur20 Quand Marx bat le pavé...

entrées libres < N°25 < janvier 20082

sommaire

entrées libresDécembre 2007 N° 24 3e annéePériodique mensuel (sauf juillet et aout)ISSN 1782-4346

entrées libres est la revue del'Enseignement catholique enCommunautés francophone et germanophone de [email protected]

Rédacteur en chef et éditeur responsableFrançois TEFNIN (02/256.70.30)avenue E. Mounier 100 - 1200 Bruxelles

Secrétaire Nadine VAN DAMME (02/256.70.77)

Création graphique Anne HOOGSTOEL

Membres du comité de rédaction Anne COLLETJean-Pierre DEGIVESBrigitte GERARD Thierry HULHOVENAnne LEBLANCMarie-Noëlle LOVENFOSSEMarthe MAHIEUBruno MATHELARTPaule PINPURNIAUXGuy SELDERSLAGHJacques VANDENSCHRICK

Publicité Marie-Noëlle LOVENFOSSE (02/256.70.31)

Abonnements Laurence GRANFATTI (02/256.70.72)

Impression IPM PRINTING Ganshoren

Tarifs abonnements1 an: Belgique: 16€ Europe: 26€

Hors-Europe: 30€2 ans: Belgique: 30€ Europe: 50€

Hors-Europe: 58€À verser au compte n°191-0513171-07du SeGECavenue E. Mounier 100 - 1200 Bruxellesavec la mention “entrées libres”.

Les articles paraissent sous la respon-sabilité de leurs auteurs.Les titres, intertitres et chapeaux sontde la rédaction.Textes conformes aux recommandationsorthographiques de 1990.

entrées libres est imprimé surpapier PEFC par l'imprimerieIPM PRINTING - certificationSGS - PEFC - COC - 0127

entrées libresJanvier 2008 N° 25 3e annéePériodique mensuel (sauf juillet et aout)ISSN 1782-4346

entrées libres est la revue del'Enseignement catholique enCommunautés francophone et germanophone de [email protected]

Rédacteur en chef et éditeur responsableFrançois TEFNIN (02/256.70.30)avenue E. Mounier 100 - 1200 Bruxelles

Secrétaire Nadine VAN DAMME (02/256.70.77)

Création graphique Anne HOOGSTOEL

Membres du comité de rédaction Anne COLLETJean-Pierre DEGIVESBrigitte GERARD Thierry HULHOVENAnne LEBLANCMarie-Noëlle LOVENFOSSEMarthe MAHIEUBruno MATHELARTPaule PINPURNIAUXGuy SELDERSLAGHJacques VANDENSCHRICK

Publicité Marie-Noëlle LOVENFOSSE (02/256.70.31)

Abonnements Laurence GRANFATTI (02/256.70.72)

Impression IPM PRINTING Ganshoren

Tarifs abonnements1 an: Belgique: 16€ Europe: 26€

Hors-Europe: 30€2 ans: Belgique: 30€ Europe: 50€

Hors-Europe: 58€À verser au compte n°191-0513171-07du SeGECavenue E. Mounier 100 - 1200 Bruxellesavec la mention “entrées libres”.

Les articles paraissent sous la respon-sabilité de leurs auteurs.Les titres, intertitres et chapeaux sontde la rédaction.Textes conformes aux recommandationsorthographiques de 1990.

entrées libres est imprimé surpapier PEFC par l'imprimerieIPM PRINTING - certificationSGS - PEFC - COC - 0127

8Marcel RUFO

dossier

3édito

wikipédia

12

Page 3: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

CONSTATS ET PRINCIPES

Face au phénomène des files devant les écoles au moment des inscrip-tions en première année du secondaire, le SeGEC a fait connaitre ses posi-tions à plusieurs reprises, notamment en organisant une conférence depresse avec les représentants des directeurs et des parents et en rencon-trant divers responsables politiques. Il s'est donné le devoir de réfléchir àcette question en bonne intelligence avec les acteurs concernés, dans latradition de l'enseignement catholique et dans l'esprit de son Congrès de2002. Une série de constats ont pu être opérés grâce à l'enquête menéetrès efficacement par la FESeC1 et la FéADI2. Vous en trouverez un aperçuà la page 3 du dossier de ce numéro et sur notre site Internet.Devant les résultats de cette analyse, il parait utile d'envisager à tout le moinsune évolution du cadre décrétal, qui tienne compte d'une série de principes,à savoir: l'articulation entre le souhait affirmé par tous de voir davantage demixité sociale dans les écoles et le respect du libre choix, le rétablissementdes conditions d'un dialogue entre les parents et l'école, une réelle sécuritéjuridique tant pour les écoles que pour les parents, la volonté de mettre finaux files d'attente, la continuité pédagogique avec le fondamental et une ges-tion efficace des inscriptions multiples et des listes d'attente.

SCÉNARIOS

Les constats effectués et les principes posés, il nous semble de notre responsabilité de réfléchir à des solutionsconcrètes et de vérifier leur applicabilité. Un groupe de travail a donc été constitué à cet effet. Sachant qu'il n'exis-te pas de solution simple à un problème complexe, il s'agit sans doute de privilégier une articulation cohérente deréponses de différentes natures. Actuellement, les scénarios les plus fréquemment évoqués sont les suivants:

le retour au décret "Missions" avec contrôle des abus éventuels;l'instauration d'une formule de tirage au sort;le modèle de la Communauté flamande qui délègue à des commissions locales, organisées en interréseaux, la

responsabilité de réguler les demandes d'inscription;un dispositif avec des priorités étagées et exerçables à des moments différents (priorité frère/sœur, priorité géo-

graphique, priorité socioéconomique, priorité de projet pédagogique et de PO…);la régulation du conventionnement multiple en rendant obligatoire, pour les écoles dotées d'un indice socioécono-

mique élevé, le conventionnement avec au moins une école fondamentale dotée d'un indice socioéconomique faible;l'instauration d'un quota d'enfants de milieu défavorisé dans chaque école, avec phasage dans le temps et gestion

libre des priorités;la responsabilisation des CES du secondaire et des entités du fondamental dans la gestion collective des priorités

et des conventions entre écoles, le cas échéant, avec un dispositif de traitement collectif des préférences et/ou d'in-citants à la constitution de DOA;

des modalités de gestion collective des doubles inscriptions et des listes d'attente, dans le respect de la législa-tion sur la vie privée.Même si, parce que le temps manquerait, cette réflexion ne débouche pas immédiatement sur la formulation d'uneproposition suffisamment arbitrée avec les acteurs les plus concernés, elle marquera très certainement la manièredont le SeGEC appréhendera les négociations à venir avec le gouvernement. Elle s'inscrit également dans notrequestionnement sur les priorités à définir pour les années à venir, au sein de l'Enseignement catholique et dans notrerapport avec les autorités publiques à la veille de la prochaine législature.

ÉTIENNE MICHEL, DIRECTEUR GÉNÉRAL DU SEGEC1. Fédération de l'enseignement secondaire catholique2. Fédération des associations de directeurs

Inscriptions:quelles solutions?

3entrées libres < N°25 < janvier 2008

édito

Pho

to: F

ranç

ois

TEFN

IN

Page 4: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

4

des soucis et des hommes

élèves etétudiantsé t a i e n t

inscrits en 2007 dans l'enseignementcatholique francophone. Les tableauxci-dessous présentent les chiffresdétaillés de population scolaire ainsique le pourcentage de la populationscolaire totale par niveau d'enseigne-ment. C'est dans l'enseignementsecondaire ordinaire que le nombred'élèves est le plus élevé (211.094),

vient ensuite l'enseignement fonda-mental (188.268). L'enseignementspécialisé catholique scolarise, tousniveaux confondus (maternel, primaireet secondaire), 13.138 élèves. Dansl'enseignement supérieur, 31.930 étu-diants suivent les cours proposés parles instituts d'architecture, écolessupérieures des Arts et Hautes Écolescatholiques. Enfin, 18.550 étudiantsfréquentent un établissement de pro-motion sociale catholique.

Il est également intéressant d'exa-miner l'évolution des chiffres de fré-quentation des établissements d'en-seignement catholique. Les gra-phiques ci-dessous retracent l'évo-lution du nombre d'élèves parréseau dans l'enseignement mater-nel et primaire sur longue période,sur la base des données disponi-bles. Celles-ci ne permettent toute-fois pas de faire la distinction entrel'enseignement libre confessionnelet non confessionnel; c'est doncl'ensemble de la population scolairedu libre qui est mentionné.

Le graphique 1 (page ci-contre)présente l'évolution de la populationscolaire dans l'enseignement mater-nel ordinaire, de 1975 à 2007, dansles trois réseaux d'enseignement(réseau de la Communauté françai-se (CF), officiel subventionné et libresubventionné).Sur l'ensemble de la période, leréseau d'enseignement qui scolari-se le plus d'élèves en maternel estl'enseignement officiel subventionné(communes et provinces), suivi del'enseignement libre, puis de l'ensei-gnement organisé par la CF.Le graphique montre une certaineconstante dans l'écart observé entreles populations scolaires dans l'offi-ciel subventionné et le libre subven-tionné. De la fin des années 70 à1994, l'écart entre les deux réseauxavait tendance à se réduire. Parcontre, depuis 1995, on observe quele nombre d'élèves croît plus rapide-ment dans l'officiel subventionné.C'est l'évolution du réseau de la CFqui apparait la plus atypique. Eneffet, les effectifs scolarisés dans ceréseau semblent peu sensibles auxévolutions démographiques et con-naissent, par ailleurs, une évolutionstructurellement négative.Si l'on compare les évolutions interve-nues sur l'ensemble de la périodeconsidérée (1975-2007), les effectifs

Population scolairedans l'enseignement catholique

Coup de projecteur sur la fréquentation des établissements d'enseignement catholique en Communauté française pour l'année scolaire 2006-2007.

462.980

Page 5: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

5

de l'enseignement maternel officielsubventionné se réduisent de 2,3%,ceux du libre subventionné enregistrentun recul de 3%, tandis que le nombred'élèves scolarisés en maternel dans leréseau de la CF diminue de 38,5%.

Le graphique 2 (ci-contre) présentel'évolution de la population scolairepar réseau dans l'enseignement pri-maire ordinaire de 1985 à 2007. Enfin de période, la part respective desdifférents réseaux dans l'enseigne-ment primaire est la suivante: officielsubventionné (48,9%), libre subven-tionné (42,3%) et réseau de la CF(8,8%).Alors que les effectifs du réseau de laCF s'inscrivent en recul sur l'ensemblede la période, le nombre d'élèves sco-larisés dans le libre subventionné pro-gresse durant la décennie 90 etconnait ensuite une diminution à partirde l'année 2000. Depuis deux ou troisannées, cette diminution de popula-tion semble toutefois être enrayée, leseffectifs de l'enseignement primairelibre étant stabilisés aux alentours de127.000 élèves.Après une période (1985-1992) mar-quée par un recul, l'enseignement offi-ciel subventionné enregistre une crois-sance régulière de sa population sco-laire à partir de 1993. Depuis quelquesannées, le nombre d'élèves scolarisésdans l'enseignement primaire officielsubventionné s'est également stabiliséà environ 146.000 unités.Si l'on compare les évolutions inter-venues sur l'ensemble de la périodeconsidérée (1985-2007), les effectifsde l'enseignement primaire officielsubventionné progressent de 0,83%,ceux du libre subventionné enregis-trent un recul de 7,16%, tandis que lenombre d'élèves scolarisés en pri-maire dans le réseau de la CF dimi-nue de 37,5%.Dans les prochains numéros d'en-trées libres, nous présenterons lesgraphiques retraçant l'évolution sur

longue période de la fréquentationdans les autres niveaux d'enseigne-ment ainsi que des données relati-ves aux centres psycho-médico-sociaux (CPMS) libres.

ÉTIENNE DESCAMPSOLIVIER FOSSOUL

entrées libres < N°25 < janvier 2008

des soucis et des hommes

Page 6: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

6 entrées libres < N°25 < janvier 2008

entrez, c’est ouvert!

Il s'en passe des chosesdans et autour des écoles: coup de projecteursur quelques projets,réalisations ou proposi-tions à mettre en œuvre.Poussez la porte!

L a Belgique serait-elle devenue ingouvernable et serait-elle condam-née à disparaitre à plus ou moins brève échéance? Ces questionspréoccupantes, nous sommes plus d'un à nous les poser, et les plus

jeunes d'entre nous ne sont pas les derniers à s'interroger. À l'Institut secon-daire Saint-Joseph 1, implanté en plein cœur du quartier populaire Sainte-

Marguerite à Liège, si une majorité des élèves ontaujourd'hui la nationalité belge, ils sont nombreuxà ne pas être natifs du cru. Cela ne les empêchepas de s'intéresser à l'avenir de ce petit pays quiest devenu le leur, bien au contraire. "Ils sontvenus avec leurs propres racines et ils se sontenracinés ici, explique Renée LAMBION, la direc-trice. Ils sont particulièrement sensibles aux ques-tions touchant à l'avenir de la Belgique. Elle estdevenue leur pays d'accueil, et ils ont envie qu'el-le continue à exister telle qu'elle est. Quand le pro-fesseur d'histoire, Jean-Louis MATHY, a proposé,après le congé de Toussaint, de réaliser un dra-peau belge géant pour montrer notre attachementà la Belgique, nous avons été surpris de voir l'am-pleur rapidement prise par le projet".De bouts de tissu en morceaux d'étoffe noire,jaune et rouge, c'est, peu à peu, un drapeau de342 m2 qui a été constitué. Et les volontairesnécessaires à l'assemblage ne se sont pas défilés.Ils ont profité de tous les moments disponibles en-dehors des cours pour se faufiler derrière lesmachines à coudre. "Les enseignants ont aussimis cette période à profit pour poursuivre uneréflexion citoyenne pendant les cours, poursuit ladirectrice. En fonction des classes et de la motiva-tion des élèves, des accents différents ont étéapportés à la démarche. Certains ont travaillé surles paroles de la Brabançonne, d'autres sur lanotion de pays et l'importance de signes d'appar-tenance. Notre école pratique l'immersion en néer-landais, et cette initiative a également été uneoccasion de comprendre toute l'importance deconnaitre l'autre langue du pays, véritable passe-port pour l'emploi".Et le 30 novembre, c'est en grande pompe, avec

discours, lâcher de ballons, élèves habillés aux couleurs nationales et en pré-sence de la presse que le drapeau a été dévoilé dans la cour intérieure del'école. "Nous n'avons pas choisi cette date par hasard, précise R. LAMBION.Nous savions qu'on ne se bousculerait pas devant notre école pour lesinscriptions et nous avons décidé d'attirer l'attention d'une autre manière,avec un projet qui remobilise enseignants et élèves. Les médias ont beau-coup parlé des files de parents devant certaines écoles, mais on a peu évo-qué le vrai problème: la mixité sociale et culturelle. Elle fait peur! Si on yregarde de plus près, on peut voir que les couleurs de notre drapeau sontconstituées de nombreuses tonalités différentes. Comme dans toute sociétéhumaine équilibrée, c'est la mosaïque des différences qui permet l'unité!".

MARIE-NOËLLE LOVENFOSSE

1. www.stjo.be

un projet à faire connaitre?

[email protected]

ET LA BELGIQUE DANS TOUT ÇA?

Page 7: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

7

Q uand les élèves de l'écoleL'Espérance1 (enseignementspécialisé) à Mons sont allés

voir Émilie Jolie, jouée par les élèvesde l'IRSA (à Bruxelles), ils ont euenvie, eux aussi, de créer "quelquechose". Et comme leurs enseignantss'entendaient plutôt bien, ils ont rapi-dement décidé de mettre sur pied unprojet regroupant cinq classes et s'a-dressant à des enfants de 6 à 11 ansscolarisés dans le type 1 et 8 (retardsscolaires, troubles mentaux légers àsévères). "Nous nous sommes inté-ressés à l'univers des contes, explique

Hélène MAROT, enseignante à l'Es-pérance. Nous souhaitions un projetqui regroupe des niveaux et des âgesdifférents et qui soit adapté à tous.Les élèves ont décortiqué des contes,en ont repéré le schéma actanciel, etils ont analysé les différences entreun conte (avec une morale finale) etune histoire classique".Mais cela ne suffisait pas à ces créa-teurs en herbe, très enthousiastes àl'idée d'aller plus loin. Ils ont doncinventé des contes et les ont mis enscène. Chaque classe a égalementréalisé son propre livre. Pour stimulerl'imaginaire des élèves et les aider àse tenir à des schémas préétablis, lesenseignants ont eu recours à desastuces différentes en fonction desâges. "Nous avons, par exemple,imaginé des cartes à conter, préciseH. MAROT. Les élèves tiraient ausort un personnage principal, un lieu,un objet magique, ainsi que tous leséléments à partir desquels écrire unehistoire. Pour les plus petits, lesenseignants ont imaginé un systèmede roulettes en carton laissant, là

aussi, le sort décider de qui allaitvivre quoi, où et comment. Après l'écriture proprement dite, il a encorefallu réaliser des décors et descostumes. Tout le monde s'y est mis.Une narratrice est venue dans l'éco-le lire les livres créés par les enfants,et ceux-ci ont joué les histoiresdevant les autres classes faisantpartie du projet".Cette expérience a été un plus pourdes élèves d'habitude regroupés parâges et types de handicap. La moti-vation importante qui était la leur lesa aidés à faire fi des obstacles ren-contrés. "Non seulement ils ontdéveloppé énormément de compé-tences en langue maternelle, conclutl'institutrice, mais leurs comporte-ments ont évolué. Les récréationssont souvent «musclées», et le faitd'avoir participé tous ensemble à laréalisation d'un objectif commun lesa aidés à s'accepter mieux les unsles autres et à faire preuve dedavantage de patience".Belle initiative, qui vient d'ailleursd'être récompensée par le Prix del'Innovation pédagogique de l'asblPromopart. MNL1. http://users.swing.be/ecole.esperance/accueil.html

AU BOUT DU CONTE

IL PEUT FAIRE TOUJOURS BEAU, QUELLE QUE SOIT LA MÉTÉO

"V ent d'automne décroche les pommes", "Pluie du matin… fait danser les lapins": ces dictons - et biend'autres, un pour chaque mois de l'année - ont été inventés par les élèves de l'École Escale 1. Desdessins très colorés, également réalisés par les élèves, complètent un superbe calendrier 2.

L'Escale est une école un peu particulière, qui s'adresse aux jeunes malades des différents hôpitaux de larégion de Bruxelles et d'Ottignies. "Nos activités se déploient aujourd'hui dans cinq institutions hospitalières,rappelle Christian LIEUTENANT, le directeur. L'équipe se compose d'une cinquantaine de personnes. Nousfêtons nos 25 années d'existence, et nous sommes fiers d'avoir pu accueillir quelque 25.000 élèves à unmoment ou l'autre dans l'une de nos classes!"."Ce n'est pas la première fois que nous réalisons un calendrier, explique, quant à elle, Nadine BERTULOT,institutrice à l'hôpital de jour Albert et Elisabeth. Nous partons d'un thème précis et cette fois, nous avons tra-vaillé sur la météo et les notions de temps (le temps qu'il fait, le temps qui passe)". Les jeunes élèves de l'hô-pital de jour d'hémato-oncologie pédiatrique se sont mis à la tâche avec enthousiasme. Ils ont entre 5 et 10 ans,et certains viennent tous les jours à l'hôpital. "Nous avons vouluproposer une météo résolument positive, quels que soient le moiset la saison envisagés, précise l'institutrice. Les élèves ont cher-ché des dictons existants relatifs à la météo, les ont analysés etépluchés, ont travaillé sur le vocabulaire, puis ils ont imaginé denouveaux dictons. Les dessins sont venus ensuite. Comme tousles élèves ne sont pas présents au même rythme, certains ont ter-miné leur dessin en une matinée, d'autres y revenaient au fur età mesure de leurs séjours. Ce projet permet aussi de développerla sociabilité et l'entraide. Il n'est pas rare que les plus grandsaident les plus petits, ou qu'un élève termine du mieux qu'il peutle dessin entamé par un autre. Ils sont très fiers de leurs réalisa-tions qui ont, d'ailleurs, aussi fait l'objet d'une exposition!". MNL

1. www.asihs.org/ecoleescale/2. Le calendrier, dont les bénéfices sont destinés à embellir les lieux d'accueil desélèves, est vendu au prix de 7€. Renseignements et commandes: N. BERTULOT(02/764.23.74 ou 02/764.47.99).

entrez, c’est ouvert!

Page 8: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

8 entrées libres < N°25 < janvier 2008

Qu'est-ce qui caractérise, selonvous, les parents d'adolescentsaujourd'hui?Marcel RUFO: Ce sont des parentsqui, à l'époque, se sont beaucoupintéressés à leur bébé. Ils ont main-tenant vieilli, les bébés ont grandi etsont devenus des adolescents. Cettegénération de "bébéologues" croit - àtort - qu'il faut s'occuper des adoles-cents comme des bébés. Alors quec'est un âge où le jeune demandedes radicalités, des oppositions, enface, il trouve de la "guimauve"! Lesados veulent s'opposer pour cons-truire leur monde; ils veulent réussir às'écarter pour partir à l'aventure deleur propre vie. Un moment-clé de lavie des parents, c'est, par exemple, lacrise de la quarantaine. Un adoles-cent me demandait si les parents nevivaient pas aussi une crise à cemoment-là… Et bien, oui! Les pa-rents commencent à vieillir quandl'âge du premier baiser de leur enfants'annonce. Les ados doivent alorsfaire un pas incroyable. Ils doiventaller vers d'autres amours, alors quel'amour les entoure. Comment quitterun lieu aussi agréable? Commentquitter un endroit dans lequel on trou-ve tellement de confort?

Comment l'école peut-elle jouerun rôle dans l'introduction decette distance favorisant la sépa-ration entre les enfants et lesparents?MR: À l'adolescence, l'école, ce n'estplus comme en primaire: on doit tra-vailler seul, on commence à devenirplus fort que ses parents dans certai-nes matières… Et c'est à ce moment,quand les jeunes sont les plus rebel-les, qu'il faut en fait qu'ils soient lesplus conformes! La rencontre avec

un enseignant peut en tout cas servirà se détacher d'une image maternel-le ou paternelle. Le plaisir d'appren-dre des enseignants fonde le plaisirde recevoir des élèves. Pourquoi telprof d'histoire ou de latin nous plait-ilplus particulièrement? C'est parfoisun mystère… Les enseignants n'ensont d'ailleurs pas toujours responsa-bles; ils peuvent, par exemple, res-sembler à un membre de la famille. Ily a un tas de choses microscopiquesqui fondent une relation, qui vont faireque c'est LE bon professeur.

Vous écrivez: "Tous les parentsdu monde devraient rêver queleur enfant devienne un jour unnavigateur solitaire"…MR: La comparaison est assez sim-ple. Avoir un enfant, finalement, c'estpouvoir le laisser libre de sa vie et ilest bien compliqué, quand on estparent, de le respecter suffisammentpour qu'il vive sa vie sans nous, pourqu'il réussisse à partir à la découver-te, à rencontrer l'idéal. Ces décou-vertes, il faut permettre au jeune deles faire lui-même, plutôt que tout luimâcher. Ce qui est beau, c'est queles enfants s'approprient le tempsvécu. Leur temps devient leur pro-priété et c'est cela, être libre!

Que faire pour venir en aide auxenfants qui ont des difficultés àl'école?MR: D'une part, on peut se deman-der si l'enseignement professionnelne conviendrait pas mieux à unenfant qui ne réussit pas dans l'en-seignement général… D'autre part,je crois que les gosses qui "ne peu-vent pas" existent aussi, et qu'il fautles placer dans des établissementsavec intégration ponctuelle pour leur

permettre de garder espoir, et ne pasles mettre en situation de visualiserleur échec. L'école n'est pas un médi-cament, et elle peut même êtreaggravante! De temps en temps, ilfaut savoir renoncer à une scolariténormale. À Marseille, je vais d'ailleursessayer de créer un établissementpour les décrocheurs. J'ai eu derniè-rement la visite en consultation d'uncouple d'Algériens avec leur garçonde 3 ans, qui avait du retard à l'école.Ils souhaitaient que leur enfant réus-sisse, comme les autres. C'est unepreuve majeure d'intégration. On yvoit toute l'importance de l'école, del'intégration, de la réussite, et celame rend optimiste!

Que pensez-vous du triangle"parents-école-élève"? Est-ceque, durant cette dernière décen-nie, les parents n'ont pas troptendance à s'occuper de l'envi-ronnement de leur adolescent?MR: Oh non, j'insisterais plutôt surleurs progrès! Dans un de mes livres,je dis que les parents doivent êtredes "supporters" de leur enfant…mais quand il perd! Il s'agit d'aimerson enfant pour les difficultés qu'ilprésente, et ne pas faire porter auxenseignants le fait qu'il soit incompé-tent. Plus on demande à un enfantd'être ce qu'il ne veut pas être, plus ilvit cela comme un mépris. C'est unevraie question, de s'adapter à sonenfant! Moi, ma fille est une tropbonne élève, et c'est terrifiant! Elle a27 ans, est diplômée, compétente,mais elle m'appelle encore régulière-ment pour me demander conseil…La question qu'elle me pose, en fait,c'est: "Suis-je la bonne élève de tesrêves?". En même temps, pourquoiest-ce que je lui réponds encore? Jepourrais lui dire de se débrouiller!

l’exposé du moi(s)

MARCEL RUFO

Larguez les amarres!On ne présente plus Marcel RUFO1, cet homme quifait rimer pédopsychiatrie avec chaleur et humanité.Ce spécialiste analyse les relations parents-enfantset, notamment, la nécessaire séparation qui doitadvenir…

à lire en “poche”

Détache-moi!Se séparer pour grandiréd. Anne Carrière, 2007

Tout ce que vous ne devriezjamais savoir sur la sexualitéde vos enfantséd. Anne Carrière, 2003

Oedipe toi-même!éd. Anne Carrière, 2002

Page 9: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

En lui répondant, je maintiens un lienqui n'est pas distendu. Ce n'est pasparce que je clame le détachementque j'en suis capable! Finalement,les enfants, on les fait pour notreavenir, ils nous survivent, ils nouspermettent de survivre, c'est quelquechose de fondamental.Vis-à-vis de l'école, il faut surtout évi-ter de se projeter. Son enfant, il estlibre de soi, il est libre de nous aussi.Aimer l'autre, c'est le respecter danssa destinée, ce n'est pas lui dire"Plais-moi!".

Pourquoi les parents viennent-ilsà vos conférences?MR: Déjà, le fait que des gens vien-nent écouter un pédopsychiatre, c'estun changement. Les parents sontpassés de la situation du "Je t'éduque" à une autre où "Je te com-prends", et c'est plus compliqué. Ilsviennent, je crois, pour entendre cequ'ils savent déjà. Quand je parle decas difficiles, les parents peuvent sesentir rassurés. Mais je ne suis pastranquille avec cela. Il y a un côté unpeu conjuratoire. Par ailleurs, lespédiatres ont réalisé des progrèsénormes au niveau des maladiesinfantiles, et cela a supprimé la notionde maladie. Du coup, que reste-t-il?

Il faut que les enfants soient heu-reux, qu'ils travaillent bien…L'école a pris, dès lors, une impor-tance fabuleuse. Les enfants deve-nant plus rares, il faut les réussir! Onprojette sur son enfant ce que l'onaurait voulu être, ce que l'on auraitvoulu devenir. L'enfant est un vérita-ble pari d'avenir. Et moi, je dis tou-jours aux parents: "Soyez moyens!".Il existe, en effet, de trop bonsparents, qui entourent trop leurs ado-lescents. Par exemple, un 1/6e desadolescents hospitalisés en psychia-trie en France sont des enfantsadoptés de couche socioculturelleélevée. Le milieu socioculturel paraitêtre ici un handicap. L'adolescent nes'identifie pas à sa famille d'accueil.Les parents adoptants que je ren-contre sont en fait de trop bonsparents. Cette volonté de bien faireentraine parfois une fusion trop gran-de, et de la fusion nait la rupture.

Comment, finalement, devient-onpsychiatre pour enfants et ado-lescents?MR: Au début, je travaillais en psy-chiatrie adultes où il n'y avait quedes malades chroniques, et je netenais pas le coup. J'étais devenu un"psychiatre chronique"! Ensuite, je

suis allé en pédiatrie, et j'y ai vu desenfants "normaux" mais malades,avec des cancers; cela m'a touché,et je me suis aperçu que la place dupsychisme, la prise en charge globa-le, le fait de s'intéresser à la vie del'enfant en-dehors de sa maladiepouvaient être très efficaces. Mais ilfaut se méfier des psys tristes, despsys affolants… On ne peut pas, parexemple, parler du "drame des ado-lescents en France". On ne peut passe mettre à se plaindre, alors qu'onreprésente le rêve de tous les ado-lescents du monde!

On peut dire que vous êtes unoptimiste modeste…MR: Il faut être modeste et optimiste.Il faut vérifier que le psy le soit aussi!Un psy est utile quand on n'a plusbesoin de lui… un peu comme lesenseignants!

INTERVIEW FRANÇOIS TEFNINTEXTE BRIGITTE GERARD

1. Invité le 27 novembre dernier par plusieursassociations de parents d'écoles catholiquesde la région de Huy, Marcel RUFO a fait sallecomble pour traiter des relations parents-enfants.

9entrées libres < N°25 < janvier 2008

l’exposé du moi(s)

Pho

to: F

ranç

ois

TEFN

IN

Page 10: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

rétroviseur

Soumettre ouémanciper?Éternelle question que celle de l'éducateur confrontéà son rôle. Entre désir de toute-puissance et réalité, ildoit aussi gérer les frustrations de l'acte éducatif. Unpeu comme Geppetto…

"À peine rentré chez lui, Geppetto prit vivement ses outils et se mit à tailleret à fabriquer son pantin.

- Quel nom vais-je lui donner? se demanda-t-il en lui-même. Je vais l'appelerPinocchio. Ce nom lui portera chance. J'ai connu toute une famille de Pinocchi:le père s'appelait Pinocchio, la mère Pinocchia, les enfants Pinocchi, et tousmenaient la bonne vie. Le plus riche d'entre eux était mendiant.Quand il eut trouvé le nom de son pantin, il commença à vraiment bien tra-vailler, et lui fit tout de suite les cheveux, puis le front, puis les yeux. Les yeuxterminés, imaginez sa stupeur quand il s'aperçut que ces yeux remuaient etle regardaient fixement. Geppetto, en se voyant regardé par ces deux yeux debois, fut sur le point de se trouver mal, et dit d'un ton irrité:- Vilains yeux de bois, pourquoi me regardez-vous?Personne ne répondit. Alors, après les yeux, il fit le nez; mais, à peine fait, lenez commença à grandir: et il grandit, il grandit, il grandit… En quelques minu-tes il devint un nez qui n'en finissait pas. Le pauvre Geppetto s'épuisait à leretailler; mais plus il le retaillait et le raccourcissait, plus ce nez impertinents'allongeait! Après le nez, il fit la bouche. La bouche n'était pas encore termi-née qu'elle commença à rire et à se moquer de lui.- Arrête de rire!, dit Geppetto piqué au vif; mais ce fut comme parler à un mur.Arrête de rire, je te dis!, cria-t-il d'une voix menaçante. Alors la bouche s'arrê-ta de rire, mais sortit une langue démesurée. Pour le bien de son œuvre,Geppetto fit semblant de ne pas s'en apercevoir et continua à travailler. Aprèsla bouche, il fit le menton, puis le cou, puis les épaules, l'estomac, les bras etles mains. À peine les mains étaient-elles terminées que Geppetto sentit saperruque s'enlever de sa tête. Il leva les yeux, et que vit-il? Il vit sa perruquejaune dans les mains du pantin.- Pinocchio!... Rends-moi tout de suite ma perruque!

Mais Pinocchio, au lieu de lui rendre la perruque, la mit sur sa tête àlui, et resta là-dessous à moitié étouffé. À ce geste insolent

et moqueur, Geppetto devint tout triste et mélan-colique comme il ne l'avait jamais été de sa vie; etse tournant vers Pinocchio, il lui dit:- Diable d'enfant! Tu n'es même pas terminé, et

déjà tu manques de respect à ton père! Ce n'est pasbien, mon garçon, ce n'est pas bien! Et il essuya une

larme. Il restait toujours à faire les jambes et les pieds. QuandGeppetto les eut terminés, il reçut un coup de pied sur le bout de son nez.- C'est bien fait!, se dit-il alors en lui-même. Il fallait y penser avant, maintenantc'est trop tard. Il prit alors le pantin sous les bras et le posa par terre, sur le par-quet de la pièce, pour le faire marcher. Pinocchio avait les jambes engourdieset ne savait pas s'en servir, aussi Geppetto le tenait-il par la main et le guidait-il pour lui apprendre à mettre un pied devant l'autre. Quand ses jambes sefurent bien dégourdies, Pinocchio commença à marcher tout seul et à courir àtravers la pièce; et brusquement, il prit la porte, bondit dans la rue et s'enfuit".

CARLO COLLODI, PINOCCHIO, GALLIMARD, PARIS, 1988 (ÉCRIT EN 1883)

Page 11: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

C omme dirait l'humoriste Marc HERMAN, il y a un "stûûût". Et encore, s'il n'y en avait qu'un! Lamise en œuvre du décret "inscription" a mis en évidence - créé - renforcé (barrer les mentionsinutiles) quelques problèmes. Liste sans garantie d'exhaustivité.

Comment faire pour:

décréter la mixité sociale sans la construire?

augmenter la mixité plutôt que l'homogénéité sociale?

traiter les spécificités géographiques d'une question sans avoir l'air de croire que ce qui est vrai àBruxelles l'est aussi à Arlon ou à La Louvière?

accroitre la mixité sociale à l'école sans la concevoir en articulation avec une politique de la ville etde l'habitat?

supprimer la médiatisation des files d'attente en évitant la tentation simple de transformer les direc-teurs en aubergistes?

échapper au mécanisme de la "punition collective" pour régler quelques cas particuliers?

organiser les procédures d'inscription sans désorganiser la rentrée scolaire, notamment en raison duphénomène des inscriptions multiples?

régler la question des inscriptions dans l'enseignement secondaire tout en prenant en compte sesconséquences dans l'enseignement fondamental?

Celui ou celle qui pense détenir une réponse simple à toutes ces questions peut se signaler à la rédac-tion. Ceux qui pensent que le problème est complexe et que les réponses sont de même nature peu-vent continuer à y travailler avec obstination et créativité là où ils sont.

FRANÇOIS TEFNIN

REVUE DE PRESSE Évaluations divergentes

ACTEURS De Bruxelles à Virton

VU DE FLANDRE Te mooi om waar te zijn

ANALYSE Le problème n’est pas la file...Libre choix: d’où vient-on?

JEUNES De l’amour, vraiment? entrées libres < N°25 < janvier 2008 dossier

1

Inscriptions:et maintenant?

le dossier du mois

Pho

to: F

ranç

ois

TEFN

IN

Page 12: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

le dossier du mois

La Ministre de l'enseignement,Marie ARENA:Pour elle, les inscriptions se sontbien passées dans la majorité descas. L'évaluation à venir doit doncavoir pour objectif d'adapter aumieux les modalités du décret, maisnon d'en modifier la finalité. Elleestime par ailleurs que le décret nevise pas seulement les 3% d'écolesqui connaissent une offre inférieureà la demande, mais bien l'ensembledes écoles afin que chacun puisses'y inscrire. Son principe du "pre-mier arrivé, premier inscrit" n'adonc, d'après elle, pas perturbé l'en-semble des écoles secondaires.Son bilan se veut apaisant. Elles'est cependant sentie interpelléepar les files devant les écoles et varéfléchir à d'éventuelles modifica-tions à apporter l'an prochain. Ellene renoncera pas pour autant à saméthode. Ce système est mis enœuvre en Flandre et y est, dit-elle,un succès. Conclusion: il n'y a pas

de raison que cela ne fonctionnepas chez nous.Source: La Libre du 01/12/07 et LeSoir du 03/12/07.

Le Secrétariat général de l'en-seignement catholique (SeGEC):Le SeGEC réaffirme son adhésionaux objectifs du décret "Missions"en ce qu'il promeut une école plusjuste et plus efficace pour tous.Cependant, il observe les dérivesengendrées par le décret "inscrip-tion" et demande une évaluationapprofondie des nouvelles disposi-tions. Le SeGEC met en avant troisrépercussions négatives du décret:les parents sont confrontés à desdifficultés importantes; les écolesqui font l'objet d'une forte demanded'inscriptions doivent gérer descontraintes lourdes et des situationshumainement insupportables; l'ac-croissement de la mixité sociale neprogresse pas, et régresse mêmedans de nombreuses écoles.

Le SeGEC demande par ailleurs larestauration de la sécurité juridique,tant pour les élèves et leurs parentsque pour les écoles. Comme denombreux parents ne pourrontinscrire leur enfant dans l'école deleur choix, le SeGEC souhaite quel'on agisse sur l'offre en dotant tou-tes les écoles de moyens qui garan-tissent un enseignement de qualitépour tous. Et il convient d'étendrel'offre scolaire en autorisant l'ouver-ture de nouveaux établissements làoù la situation l'exige.Source: communiqué de presse du30/11/07, à lire sur www.segec.be> actualités.

L'Union des Fédérations des As-sociations de Parents de l'Ensei-gnement Catholique (UFAPEC):L'UFAPEC déplore les effets perversdu décret qui, en revanche, n'a paseu l'effet escompté. Pour les parentsde l'enseignement catholique, l'objec-tif de mixité sociale est louable, mais

le dispositif mis enœuvre ici n'est pasadapté. Les parentsayant répondu à l'en-quête ont émis unesérie de réserves quantà l'application du décret(certains parents n'ontpas pu inscrire leurenfant dans l'école deleur choix; l'autonomiedes Pouvoirs organisa-teurs et directions setrouve réduite; longueuret durée des files…).Pour l'UFAPEC, "lesmodalités pratiquesn'ont pas été bien éta-blies et sont à revoir":information, procura-tion, doubles inscrip-tions…Par ailleurs, "le problè-me de mixité socialedépasse l'imposition

entrées libres < N°25 < janvier 2008dossier

2

REVUE DE PRESSE

Évaluations divergentesLes différents acteurs institutionnels du dossier "inscription" se sont exprimésabondamment à son sujet. Résumé des positions des uns et des autres.

Pho

to: P

ierr

e-P

aul V

ER

STA

PP

EN

Page 13: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

d'une date commune et est beau-coup plus complexe". Les parentsproposent de revaloriser l'enseigne-ment en général, rehausser sa qua-lité et donner plus de moyens auxécoles. L'association insiste aussisur la revalorisation de l'enseigne-ment technique et professionnel. Lebrassage social devrait se faire dèsla maternelle ou le primaire. Un der-nier constat: les parents plus défa-vorisés ou immigrés restent léséspar cette nouvelle règlementationqui a mobilisé les plus informés. Enrésumé, les parents choisissent uneécole selon trois critères: la qualitéde l'enseignement, le projet éducatifet des aspects pratiques (dont laproximité).Source: communiqué de presse du06/12/07, suite à l'enquête menéeauprès de 500 parents.

Les organisations syndicales:Pour la CSC et la CGSP-Enseigne-ment, les difficultés vécues par uncertain nombre d'écoles à l'occasiondes inscriptions ne sont en fait queles révélateurs de maux plus pro-fonds, tels que "l'inégalité d'accès ausavoir selon les groupes sociaux".D'après les représentants syndi-caux, le vrai problème est que "l'ob-jectif du décret vise à ce que l'on neretrouve plus tout à fait les mêmesnoms qu'avant sur les listes d'ins-

criptions". Le choix fondé sur le jour,l'heure voire la minute, n'est poureux certes pas idéal, mais moinsgrave que les priorités de classe etles passe-droits. Certaines écolessemblent en effet réservées à descastes qui entendent bien maintenirce droit. L'enjeu est de construire ungrand projet pour l'école œuvrant àune société plus juste et plusrespectueuse des faibles. De ce fait,"les moyens investis dans l'école

doivent viser un processus d'égalitéentre tous" et pas de sélection socia-le. Le décret "inscription" ne va pastout résoudre, mais il est "un pasdans la bonne direction".Source: carte blanche parue dansLe Soir du 29/11/07 signée de RégisDOHOGNE, Prosper BOULANGE etMichel VRANCKEN.

BRIGITTE GERARD

le dossier du mois

entrées libres < N°25 < janvier 2008dossier

3

des chiffres qui comptent…

E ntre le 29 novembre et le 4 décembre 2007, la Fédération de l'enseignement secondaire catholique(FESeC) et la Fédération des associations de directeurs (FéADI) ont adressé une enquête aux 240 éta-

blissements d'enseignement secondaire concernés. Le taux de réponse a été de 73,7%.

Environ 40% de ces établissements ont été confrontés au phénomène des "files anormales", c'est-à-dire cel-les qui se sont formées avant le 30/11 à 6h du matin. Dans la Région de Bruxelles-Capitale, ce ne sont pasmoins de 65% des écoles qui ont connu des files, alors qu'aucune file n'était signalée dans le Luxembourg.

72% des écoles secondaires ont signé une ou plusieurs conventions avec une/des écoles fondamentales, tan-dis que 28% des établissements n'en ont signé aucune.

L'enquête révèle également les données relatives au recrutement à la date du 30 novembre (sans tenir comp-te du phénomène de doubles inscriptions). En moyenne, pour 100 places disponibles en 1re secondaire lorsde la rentrée 2008-2009:

38,6 places étaient occupées par des élèves prioritaires; 32,5 places ont été octroyées durant la journée du 30/11/2007;28,9 places restaient disponibles au soir du 30/11/2007.

Par ailleurs, 25,9% des écoles étaient complètes le 30/11 et ont dû établir une liste d'attente. Pour l'ensembledes établissements de l'enseignement catholique, environ 2.575 élèves figurent sur une liste d'attente.

Pour lire les résultats complets de l'enquête: www.segec.be > actualités.

"MAMAN, PAPA, AURAIS-TU FAIT LA FILE?"Ce n'est pas parce qu'on n'a pas d'enfant à inscrire en première secon-daire qu'on ne peut pas imaginer ce qu'on lui aurait répondu s'il nous avaitposé cette question. Réponse de deux psys:

Patrick TRAUBE: "C'est très simple, je lui répondrais non! Et j'en don-nerais bien sûr les raisons. Je profiterais de cette occasion pour expliquercomment fonctionne la société, en donnant deux arguments. Un théo-rique: il n'y a aucune concordance entre la longueur d'une file et la quali-té de l'école, ni le fait qu'elle convienne à mon enfant. Et l'autre, de prin-cipe: il est tout à fait choquant et indécent dans une société comme lanôtre de devoir faire la file pour inscrire son enfant dans une école!".

Ann d'ALCANTARA: "C'est une question particulière, étant donnéqu'un enfant, ce n'est pas un concept abstrait. En tant que maman, j'au-rais répondu différemment à chacun de mes quatre enfants. Chacun estunique, a sa propre histoire, son propre parcours scolaire… J'aurais sansdoute répondu quelque chose qui lui signifierait l'importance de faire unchoix mature, avec lui, pour son école future. À l'un, j'aurais peut-êtrerépondu que cette question n'avait aucun sens; à un autre, j'aurais ditque, bien sûr, j'aurais fait la file avec lui; à un troisième, que je ne voyaispas pourquoi il était nécessaire de déployer ce type de démarche…".

Page 14: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

le dossier du mois

Les directeurs diocésains del'enseignement secondaire:Globalement, ils jugent négative-ment les effets produits par le décret.Si le souhait de tendre vers plus demixité sociale est louable, le décret,en revanche, rate sa cible. En effet,la hiérarchie entre les écoles estdorénavant encore plus marquée, eta été diffusée très largement. Lesdirecteurs diocésains constatent quela mixité sociale a finalement plutôtreculé, et que la concurrence entreles écoles est exacerbée.Joseph WOLLSEIFEN (Liège):"Avant le décret «inscription», certai-nes pratiques existaient, comme despriorités données à des écoles D+,qui ne sont plus possibles aujour-d'hui. Si l'on veut faire progresser lamixité sociale, il y a d'autres moyens,comme par exemple agir au niveaude l'instituteur de 6e primaire, qui estimportant pour l'orientation. Il fautaussi signaler l'effet négatif pour lesécoles sans files. C'est grave, carcela marque la dualisation, cela stig-matise les gens qui sont en difficultéet renforce les clivages".Philippe MOTTEQUIN (Namur-Luxembourg): "Il faudrait donner auxécoles davantage de moyens quisoient liés à l'indice socioécono-mique (un taux d'encadrement diffé-rent, par exemple). Mais ceux qui neveulent pas de la mixité sociale trou-veront toujours une solution pour l'éviter. Et par ailleurs, les gens demilieux socioéconomiques difficilesne se sentiront pas d'office à l'aisedans les écoles plus «huppées»".Michel LAMBERT (Bruxelles-Bra-bant): "Quelques écoles où il n'yavait auparavant pas d'afflux massifd'inscriptions ont été plus vite com-plètes cette fois-ci. Même une école

D+ s'est trouvée dans ce cas! Cedécret met également en péril letemps de rencontre entre le direc-teur, les parents et l'élève. Beaucoupd'écoles se sont contentées d'inscri-re en prévoyant de revoir lesparents par la suite. Mais ce n'estpas l'idéal!".Hubert LAURENT (Tournai): "Biensûr, la mixité sociale ne va pas s'ins-taller naturellement. Mais il faut dis-tinguer les petites villes, où il y a unecertaine forme de mixité sociale parla force des choses, des plus gros-ses villes comme Charleroi, où il y ades catégories d'établissement, etoù il n'existera jamais de mixitésociale s'il n'y a pas de règles en lamatière. Faut-il de la mixité socialepour plus d'équité, ou faut-il plutôtrenforcer les dispositifs de discrimi-nation positive? On doit agir sur dif-férents leviers. On peut rechercherdes moyens en termes de discrimi-nation, par exemple en responsabili-sant davantage les organes locaux,

comme les CES et les entités, et enmettant en place des incitants".

Léopold KROEMMER, directeurde l'Institut Notre-Dame de Bertix:"Dans la province de Luxembourg,aucune école n'a fait le plein desinscriptions, même si celles-ci ontété prises plus tôt que les autresannées, notamment en raison del'inquiétude suscitée chez certainsparents. Mais ces inscriptionsdevront être complétées pour lechoix des grilles-horaires. Ce quiserait plus utile, c'est de faire ensorte que pour le 5 juillet, tous lesélèves soient inscrits dans uneécole. Cela permettrait d'organisermieux la rentrée".

Alain MAINGAIN, directeur duCentre scolaire du Sacré-Cœurde Lindthout à Woluwé-Saint-Lambert:"Il y a eu un infléchissement durecrutement. Nos politiques volonta-ristes d'ouverture, tout en respectant

entrées libres < N°25 < janvier 2008dossier

4

ACTEURS

De Bruxelles à Virton

Toutes les écoles n'ont pas vécu les effets du décret "inscription" de la mêmemanière. Petit tour d'horizon de quelques acteurs aux quatre coins de laCommunauté française.

Pho

to: P

ierr

e-P

aul V

ER

STA

PP

EN

Page 15: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

l'ordre d'arrivée, avaient permis d'ac-cueillir une population immigrée deSt-Josse ou de Bruxelles-ville qui amaintenant disparu. Pourtant, unerégulation qui ne soit ni aveugle, nilinéaire est nécessaire car àBruxelles, le cadre libéral du décret«Missions» n'a eu que peu d'effet. Àpartir de la notion de convention, onpourrait exiger que toute écolesecondaire en ait au moins une avecune école fondamentale moins favo-risée. Par un partenariat volontaire,on pourrait ainsi intégrer des enfantsdéfavorisés dans une continuitépédagogique, en travaillant un ac-compagnement pédagogique avecle fondamental et en jouant sur uneculture commune entre écoles pastrop éloignées".

Daniel FASTENAKEL, présidentdu Pouvoir organisateur du Cen-tre scolaire Éperonniers-Mercelisà Bruxelles:"Les intentions de la ministre sontlouables. Il y a un réel problème demixité scolaire. Mais ce n'est pas labonne méthode. Il s'agit d'une mesu-re isolée qui sera sans effet et qui, aucontraire, ne fera que renforcer leschoses. Les parents qui ont fait la fileauraient de toute façon été inscrireleur enfant dans ces mêmes écoles.Le public populaire se trouve davan-tage dans une culture de l'immédia-teté, et ces parents ne vont pas pen-ser 10 mois à l'avance à l'établisse-ment dans lequel ils vont inscrire leurenfant! Par ailleurs, les jeunesinscrits dans des écoles dites «élitis-tes» risquent finalement d'y connai-tre un avenir assez court s'ils ne sui-vent pas convenablement. Ce seraitalors une perte de temps! L'avantagede ce décret est d'avoir rendu le pro-blème de la mixité visible, et le méri-te de la ministre est d'avoir tentéquelque chose. Mais si on attaque leproblème du point de vue de l'indivi-du, cela crée de la compétition. Il fau-drait plutôt penser au renforcementdes pédagogies dans les écoles D+et avoir la volonté de prendre encharge ces jeunes autrement".

Godefroid CARTUYVELS, Se-crétaire général de la Fédérationde l'enseignement fondamentalcatholique (FédEFoC):"Si le décret «inscription» semblesurtout concerner le secondaire, ilest évident qu'il a également deseffets dans l'enseignement fonda-

mental. Les remous suscités concer-nent essentiellement le régime depriorités. Le texte initial ne prévoyaitde priorité que pour les enfants dupersonnel et pour les élèves de 6e

primaire qui ont un frère ou unesœur dans l'école secondaire. Par lasuite, s'est ajoutée la priorité pourles enfants scolarisés avant le 10septembre 2007 dans le dernierdegré d'une école primaire «ados-sée» à une école secondaire. Ceci arassuré les parents des écolesconcernées, mais a redoublé l'an-goisse des autres!Outre les questions de sécurité juri-dique et de légalité posées par ledécret et sa circulaire d'application,et tenant compte du fait que cettepriorité aux écoles adossées cesse-ra de produire ses effets dans deuxans, la situation dans les années àvenir risque d'être particulièrementconfuse et tendue.Si le décret n'est pas modifié, dansdeux ans tous les parents - hormisceux qui pourront toujours fairejouer les priorités frères/sœurs etenfants du personnel - se trouverontà nouveau sur un pied d'égalité. Lesfiles se verront donc gonflées desparents d'enfants des écoles primai-res adossées, désormais sans prio-rité. Les tensions risquent d'être à lamesure de la frustration!Si, pour éviter ce risque, la prioritépour les élèves des écoles primai-res adossées est maintenue, lesécoles primaires non adossées ris-quent de payer la note et voir leurdernier degré se vider au profit d'écoles adossées. Quoi que l'onfasse, un bel imbroglio se prépare!".

José SOBLET, Secrétaire géné-ral de la Fédération de l'ensei-gnement secondaire catholique(FESeC):"L'enjeu est de ne pas opposer àune position idéologique - défenda-ble sur le fond sans l'être sur laforme -, une solution minimaliste,même fort élégamment vêtue, selimitant à développer une ingénieriequi permettrait de faire disparaitreles files d'attente devant les écolessans rien régler.La question est finalement celle del’adhésion à une dynamique volon-tariste d'accroissement de la mixitéscolaire dans chacune des écoles.En effet, il est plus pertinent de défi-nir le problème en termes scolaires

plutôt que sociaux. L'obstaclemajeur à franchir consiste à persua-der parents et directions d'écolesqu'il est plus porteur pour une socié-té de faire progresser tous les élè-ves par le biais d'une collaborationfructueuse entre plus forts et plusfaibles, que par la compétition, quiaboutit à la concentration des diffi-cultés dans certaines écoles. Plutôtque d'imaginer des quotas de pau-vres parmi les riches, il me sembleplus pertinent de réfléchir à unemutualisation de la prise en comptedes difficultés d'apprentissage,quelle qu'en soit l'origine: socioéco-nomique, familiale ou linguistique.Ceci ne pourra se faire spontané-ment, sans moyens supplémentai-res, ni en laissant pleine liberté auxparents et aux établissements.On a beaucoup parlé du voletinscriptions du décret; on a moinsparlé du deuxième volet, celui quicontraint les écoles qui ont inscrit unélève en première année à le garderpour lui faire acquérir les socles decompétences à 14 ans. Nous noussommes battus lors de la concerta-tion relative à ce décret pour obtenirla possibilité de changer d'école encours de premier degré sur la based'un risque pédagogique ou psycho-logique, avec l'accord des parentset de la direction de l'école. Si nousl'avons fait, c'est parce que nouspensions que c'était dans l'intérêt decertains enfants, et en aucun casafin de permettre à des établisse-ments de trier leur public à l'entamede la deuxième année.Enfin, il serait déraisonnable desubstituer à une solution simpliste -la fixation d'une date pour mettretout le monde sur pied d'égalité -une autre qui le serait tout autant.Un problème aussi complexe nepeut être résolu que par une appro-che diversifiée". BG - FT

le dossier du mois

entrées libres < N°25 < janvier 2008dossier

5

Page 16: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

le dossier du mois

MÊMES CAUSES,MÊMES EFFETS

Monsieur DE PRETER, pourquelles raisons et depuis quandles inscriptions en 1re année del'enseignement secondaire ont-elles été reprécisées en Flandre?Gust DE PRETER: En réponse auxexcès de sélection de quelquesécoles lors des inscriptions, lesministres flamands de l'enseigne-ment ont voulu en fixer les règles. Ilsl'ont fait dans un "Décret relatif à l'égalité des chances" de juin 2002,avec quelques aménagements en2003 et 2005, pour en tempérer leseffets négatifs.

Quel était l'objectif recherché, etquels effets cela a-t-il produits?GDP: L'intention initiale était: moinsde ségrégation, de discrimination.Le résultat: un renforcement de l'inégalité des chances dans la cour-se aux "bonnes écoles". La concen-tration des familles nanties, les

mieux renseignées, les plus stratè-ges, augmente dans certaines éco-les, tandis que le nombre defamilles moins bien équipées pourcette lutte des places augmentedans d'autres établissements. Il estvrai que ce renforcement de la dua-lisation des écoles est chronologi-quement parallèle à une dualisationplus marquée des quartiers dans lesgrandes villes, et que l'augmenta-tion de la ségrégation entre écolesest un phénomène complexe. Maisen tout cas, on peut dire que le"décret inscriptions" flamand ne l'apas ralentie ou contrariée.

DES EFFETS ET DES EFFORTS

N'y a-t-il eu que des effetsnégatifs?GDP: Non, bien sûr, il n'y a pas quedes aspects négatifs: les efforts encette matière ont sensibilisé toute lapopulation au problème, et les éco-les accordent dorénavant plus desoin à leurs inscriptions.Dans quelques lokaal overlegplat-form (plateforme locale de concerta-tion), des accords ont été pris pourne pas commencer les inscriptionstrop tôt: janvier de l'année scolaireprécédente pour les prioritaires,février pour les élèves défavorisés,mars-avril pour les autres. La datedu début des inscriptions est capita-le: plus elle est proche de la rentréescolaire pour laquelle les inscrip-tions sont prises, plus elle met lesfamilles sur pied d'égalité.

Quelles conclusions peut-onen tirer?GDP: Malgré ces quelques avan-cées, force est de reconnaitre queles effets du "décret inscriptions" fla-mand sont globalement négatifs.Mais il n'existe sans doute pas demoyen magique pour régler ce déli-cat problème! Communauté flaman-de et Communauté française deBelgique sont donc face au mêmedéfi, que des dispositions légalesfort proches et semblablementgénéreuses ont tenté de relever,sans y parvenir vraiment.

JEAN-PIERRE DEGIVES

1. Au Vlaams Secretariaat van het KatholiekOnderwijs, Gust DE PRETER s'occupe,entre autres, de la "gelijke kansenbeleid"(politique d'égalité des chances), et s'estdonc naturellement intéressé aux effets d'undécret fixant les règles d'une matière qu'ilgère quotidiennement.

entrées libres < N°25 < janvier 2008dossier

6

VU DE FLANDRE

Te mooi om waar te zijnÀ considérer les règles qui régissent les inscrip-tions en Flandre, on est frappé par la volonté qu'elles manifestent d'augmenter la mixité scolaire.Hélas, les tentatives pour réguler les inscriptionsen Communauté flamande ne font-elles pas partiede ces bonnes intentions dont l'enfer est pavé?À en croire Gust DE PRETER 1, un peu quand même!

COMMENT S'INSCRIT-ONEN COMMUNAUTÉ FLAMANDE DE BELGIQUE?

Règles: [1] Les inscriptions peuvent commencer le premier jour del'année scolaire qui précède, la date effective étant laissée à l'appré-ciation des pouvoirs organisateurs - [2] Elles sont enregistrées enfonction du principe "premier arrivé, premier inscrit".Priorités: [1] Les membres d'une même unité familiale sont prioritai-res - [2] Les élèves issus de milieux défavorisés peuvent être inscritspar priorité (décision à l'appréciation du PO).Refus: les écoles peuvent refuser des inscriptions pour raisons deplace, et/ou si des inscriptions supplémentaires compromettent lasécurité des élèves, et/ou si la proportion d'élèves défavorisés ou neparlant pas néerlandais à la maison est déjà importante.

Pho

to: F

ranç

ois

TEFN

IN

Page 17: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

P ourtant, c'est la réponsed'une maman finlandaise àun journaliste qui lui deman-

dait si l'obligation d'inscrire sesenfants dans l'école correspondantà son domicile ne la dérangeait pas."Non, pas du tout, lui répondit-elle.Ici, toutes les écoles sont bonnes!".

RÉPONSES CONTRADICTOIRES

"La question est donc bien: com-ment garantir la qualité de l'institu-tion scolaire? Or […] nous ne trou-vons que deux réponses, symé-triques et contradictoires à cettequestion: […] le dirigisme jacobin oule marché libéral" 1. C'est une desconclusions à laquelle arrivePhilippe MEIRIEU dans son analy-se du système éducatif français qui,par certains côtés, souffre desmêmes maux que le nôtre. Il récuse

l'une et l'autre réponse, mais il pré-conise de les articuler: il faut unegrande fermeté sur les finalités etplus de souplesse sur les modalités."Conjuguer une exigence forte del'État et une véritable responsabili-sation des acteurs: voilà le défi".

LA QUALITÉ POUR TOUS!Mais Philippe MEIRIEU ne secontente pas de tirer des conclu-sions, il y va de ses propositions, enl'occurrence le "cahier de chargenational de toutes les écoles".Douze propositions exactement.Elles vont de l'information et de l'ac-cueil des familles et des enfants, auplan de formation continue des per-sonnels, en passant par les critèresde constitution des classes et deséquipes éducatives, la contractuali-sation du règlement et la construc-tion d'un rapport positif à la loi et aucollectif, le partenariat avec les au-tres acteurs de la cité et des com-missions d'évaluation et de recours.Ainsi, l'hypothèse de départ n'estpeut-être pas tout à fait sotte: au lieud'adopter des mesures contraignan-tes destinées à instaurer une équitéqui se dérobe, on pourrait peut-êtred'abord viser à ce que tous les éta-blissements soient de qualité. Quitteà prévoir pendant un certain tempsune aide massive pour ceux quiconnaissent le plus de difficultés.L'exemple de régions voisines mon-tre que, à un certain niveau d'effica-cité, la question de l'équité pour lemoins se pose autrement, quandelle n'est pas en partie résolue.

JEAN-PIERRE DEGIVES

1. Philippe MEIRIEU, Nous mettrons nosenfants à l'école publique, Paris, ArthèmeFayard, 2005, p. 73.

ANALYSE

Le problème n'est pasla file…Si toutes les écoles étaient bonnes, il n'y aurait plusde files d'inscription devant aucune d'entre elles!Voilà une hypothèse qui parait inimaginable, enCommunauté française de Belgique…

le dossier du mois

entrées libres < N°25 < janvier 2008dossier

7

LIBRE CHOIX: D'OÙ VIENT-ON?Pendant des siècles, l'État ne sepréoccupe pas de l'organisationde l'enseignement. Il la laisseaux soins d'initiatives privées,souvent religieuses, qui veillentsurtout à former de bons chré-tiens. Sous le régime hollan-dais, Guillaume Ier d'Orangeestime que l'instruction relèvede la compétence de l'État cen-tral et s'oppose au mondecatholique qui ne supporte pascette mainmise d'un souverainprotestant. Dès la création del'État belge, la Constitution pré-voit que l'enseignement estlibre. Chacun interprète cettedisposition à sa manière. Lescatholiques estiment que, dansun monde où les baptisés sontmajoritaires, il leur revient d'or-ganiser les écoles, avec le sou-tien financier de l'État. Les libé-raux pensent que c'est à l'Étatde former les citoyens et refu-sent de subsidier l'enseigne-ment catholique.

Le combat dure jusqu'en 1959.L'adoption de la loi sur le Pactescolaire s'articule alors sur l'idéede "libre choix des parents".Derrière cette notion se cachel'option défendue par PierreHARMEL et à laquelle se sontralliés les socialistes et les libé-raux: les parents ont le droit dechoisir une éducation en confor-mité avec les convictions reli-gieuses ou philosophiques qu'ilssouhaitent transmettre à leursenfants. En 1988, lors de la révi-sion de la Constitution consa-crant la communautarisation dela Belgique, cette liberté dechoix est reprise dans l'article24. Entre le début des années60 et la fin du 20e siècle, lemonde subit de profondes muta-tions. Le rapport des parents àl'école a évolué, et leurs motiva-tions relatives au choix d'uneécole se sont davantage diversi-fiées et dépassent sans douteun choix fondé uniquement surles convictions philosophiquesou religieuses.

ANNE LEBLANC

Pho

to: E

doua

rd D

E P

RA

ETE

RE

Page 18: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

le dossier du mois

Quel peut être l'effet de la média-tisation des files sur les élèves?Philippe van MEERBEECK: L'âgede l'entrée au secondaire est aussicelui du deuil de l'enfance et de l'image parentale idéalisée. Quanddes parents prennent à ce point àcœur l'inscription de leur enfantdans une école - forcément lameilleure, puisqu'ils l'ont choisie -,ils exercent sur lui une pressionaffective et émotionnelle terrible…Ils lui font là un cadeau démesuré:attendre deux jours et deux nuitsdans le froid, on peut le concevoir siune vie en dépend! Dans le cas pré-sent, n'est-ce pas l'illustration d'unsurinvestissement de l'école de lapart des parents? Ne devraient-ilspas donner eux-mêmes à leurenfant ce qu'ils attendent que l'éco-le lui apporte? "J'ai tout fait pour toi",dit le père ou la mère, et le jeune,lui, entend "étouffer". C'est unepression qui coupe les ailes… Auseuil de l'adolescence, on se met àmentir à ses parents, on est endevoir de les décevoir. Comment yparvenir, quand l'école est à ce pointbalisée, investie? Se mettre enéchec ou se faire virer sera alors, àmon sens, un signe de bonne santé.

Peut-on parler ici d'un phénomè-ne de société?PhvM: Il y a, dans ce genre de com-portement, un côté "produit",comme lorsqu'on fait la file pour lessoldes, qu'on achète "la" marque àavoir, qu'on va voir "le" spectacle àne pas rater. C'est un mécanismeinquiétant et interpellant. Une telleconduite met aussi une pressiondémesurée sur l'école et les ensei-gnants, et favorise des attitudesclientélistes. Qu'est-ce qui fait lesuccès d'une école plutôt qu'uneautre? Leur réputation repose sou-vent sur des clichés, des rumeurs.C'est parfois archi-surfait! Il existebien des écoles surévaluées quivisent avant tout la performanceintellectuelle, exercent une pédago-gie de la terreur et ont produit quan-tité d'adolescents et d'adultes maldans leur peau. Certains enfantssont élevés comme des chevaux decourse. Leurs parents veulent lameilleure école, le meilleur sport,etc. Il y a un objectif à atteindre àtout prix! J'y vois une revanche nar-cissique pour les parents. Si l'enfantse coule dans ce programme, il nevit pas sa vie propre, et s'il résiste ets'oppose, il met à mal les parents etl'institution.

Les jeunes dont les parents ontpayé des étudiants pour faire lafile à leur place ne risquent-ilspas d'avoir l'impression que touts'achète?PhvM: Si! Ce sont ces parents-làaussi qui vont payer des cours parti-culiers à l'infini. Ce genre d'attitudepourrit le lien. L'adolescent doit pou-voir réfléchir par lui-même, avoir unéchec à lui. Devenir soi-même a unprix que personne d'autre que soi nepeut payer. L'argent ne peut pastout, et il complique même parfoisles choses. Selon moi, il faut dire à

ces parents: "Résistez à l'envie detout acheter, de tout donner à vosenfants!".

Et quelles peuvent être lesconséquences sur les enfantsdont les parents n'ont pas souhaité ou pu faire la file?PhvM: Quand des enfants deman-dent à leurs parents: "Et toi, tuaurais fait la file pour moi?", celasignifie: "M'aurais-tu aimé à cepoint?". Mais c'est une illusion decroire qu'il s'agit là d'une preuve d'amour. Je parlerais davantage depréhension, de projection de sesenjeux à soi. C'est inquiétant ettoxique. Quel est ce genre d'amourqui crée une dette à vie? C'est, pourmoi, une mauvaise notion de ce queveut dire aimer. La meilleure école,c'est celle qui épanouit l'enfant, quiest proche de chez lui, où il aura desamis et où il fera son trou. Il estimportant de découvrir l'autre, dansce qu'il a de surprenant, de différent.C'est utile, pour grandir, d'aller voirailleurs, de faire l'expérience del'exogamie, du mélange social etculturel. Si tout est écrit d'avance,on empêche le jeune de devenir lui-même. Et même si on scolarise sesenfants en "milieu protégé", avecdes adolescents "d'un bon milieu",la vie, elle, ne les protègera pas…

PROPOS RECUEILLIS PARMARIE-NOËLLE LOVENFOSSE

1. Neuropsychiatre, psychanalyste, fonda-teur du Département pour Adolescents etjeunes Adultes du Centre Chapelle-aux-champs à Woluwé et auteur du livre Ainsisoient-ils, de Boeck, 2007.

entrées libres < N°25 < janvier 2008dossier

8

JEUNES

De l'amour, vraiment?Les ministres décrètent. Les parents font la file. Les écoles s'organisent. Qu'en est-il des enfants? Rencontre avec Philippe van MEERBEECK 1.

Page 19: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

Q ue ce soit au Sénégal, auMexique, en Tunisie, àMadagascar, dans les

camps de réfugiés en Tanzanie, auRwanda, au Bénin, au Burundi, auBurkina Faso ou encore au Congo,depuis plus de 10 ans, l'asblEnseignants Sans Frontières (esf)travaille sur le terrain, mêlant théorieet pratique, réflexion et action.

EN PARTENARIATPÉDAGOGIQUE

Chaque année, des profs d'ici et delà-bas se rencontrent durant troissemaines à un mois, à Bastogne ouà Cotonou, à Bruxelles ou à Kigali.Ensemble, ils préparent une leçonde français, de mathématique ou desciences. Ensemble, ils échangentleurs outils didactiques et leurs pra-tiques professionnelles.- Parce que tu t'imagines qu'unepédagogie participative, ça peut sepratiquer avec une classe de 50, 60élèves?- Heu, non… Mais alors, c'est quoita pédagogie des grands groupes?

Le débat est franc, riche, concret.Les matières sont mises en chantieravec de nouvelles idées, un nou-veau public. C'est cela, la démarched'esf, "promouvoir des réseaux decoopération entre enseignants,dans un esprit de partenariat et depluralisme, en respectant l'identitéculturelle de chacun".

AVEC D'AUTRESACTEURS SOCIAUX

Dans ces "écoles du monde", esfveut aussi "encourager les syner-gies à tous les niveaux" et veille àassocier des partenaires "horsécole". C'est le cas, par exemple,dans un projet actuellement enchantier au Bénin. La demande estvenue de l'antenne esf-Bénin, inter-pellée par des enseignants sedemandant: "Comment initier lesjeunes à une affectivité épanouie etune sexualité responsable dans lecadre du respect des droits de lafemme et de la lutte contre leSIDA?". "Dès l'école primaire, insis-tent-ils, et c'est urgent!".

Une telle demande est l'affaire detous: enfants, parents, enseignants,responsables sanitaires et poli-tiques.Pour y répondre, esf-Belgique s'estdonc adjoint les services de spécia-listes d'un Planning familial belge, etesf-Bénin la collaboration de parte-naires locaux (infirmières, méde-cins, Ministre de la santé à Coto-nou). Partenariat et synergie vontdonc de pair.

DANS LE RESPECTDES CULTURES

"Vous ne croyez pas si bien dire",commente Yssoufou ZONGO, ins-tituteur burkinabé en séjour esf àBastogne, en septembre dernier.Dans son école de village, à Ramboau Burkina Faso, quelques ensei-gnants et leurs élèves ont, en effet,créé un "jardin scolaire" et construitun "poulailler pédagogique". La cul-ture au service de la culture! Lespaysans sont heureux de transmet-tre leur savoir-faire ancestral dansle choix des graines à semer ou desplans à repiquer, et le professeur degéométrie apprend aux enfants àmesurer la superficie idéale d'uneplatebande de patates douces ou levolume d'une cage à lapins. Quantau professeur d'économie, il tiendra,avec ses élèves de 6e, la comptabi-lité des dépenses et des recetteslors de la vente des poulets en juin.Cela ne vous fait-il pas penser àquelques mini-entreprises dans nosécoles belges?

JEAN SCHMITPRÉSIDENT DE ESF

www.esfbelgique.org02/375.20.34001-2602316-76

Sans frontières,mais pas sansenthousiasme!esf est une association d'enseignants bénévolesde la maternelle à l'université, offrant leurs compé-tences et un peu de temps à des projets pédago-giques avec des partenaires du Sud.

11

écoles du monde

APPEL À VOLONTAIRESesf reçoit régulièrement desdemandes de partenariat qu'ilfaut différer, par manque devolontaires ou d'argent. Soutenirles projets esf financièrement,ou mieux, y participer active-ment dans les groupes à tâchesici en Belgique, voire se portervolontaire pour un été là-bas, enAfrique ou ailleurs, cela voustente? Que vous soyez ensei-gnant ou non, toujours actif ou àla retraite, esf vous accueillevolontiers dans ses équipes…sans frontières!

Pho

to: E

SF

Page 20: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

P our mener une recherchedocumentaire pertinente, ilconvient de référencer cor-

rectement les sources d'informationsélectionnées de façon critique. Undes soucis rencontrés rapidement,c'est ce site sur lequel tous les élèvestombent inévitablement et que lesenseignants appelleraient volontiersleur boite de Pandore2: l'encyclopédieWikipédia. En effet, elle engendredes attentes qui s'avèrent excessivespar rapport à la réalité rencontrée.D'une encyclopédie, comme d'unatlas ou d'un dictionnaire, on attendqu'il soit un référent fiable, évoquantun savoir bien établi et rédigé dansune formulation ayant fait l'objet d'unlarge consensus. La notoriété de l'au-teur de l'article concourt également àsa crédibilité. Or, Wikipédia, c'est toutle contraire, diront ses détracteurs.

ENCYCLOPÉDIE LIBRE

Certes, la dynamique n'est pas celled'une encyclopédie classique (Bri-tannica, Universalis, Larousse…). Eneffet, il s'agit d'un ouvrage collaboratifouvert 3 auquel tous peuvent s'asso-cier, et qui autorise les modificationsen ligne à tout instant. Bien sûr, lesystème ouvert a été choisi pour queces modifications permettent nonseulement les corrections orthogra-phiques parfois nécessaires, maisaussi les améliorations qui feront pro-gresser une première contribution dustatut d'"ébauche" à celui d'"article dequalité". Mais il est vrai, tout troll 4 quile voudrait peut vandaliser l'œuvre eny introduisant son venin. Le systèmedéfend sa philosophie en disant queles vandales se fatigueront plus viteque la vigilance citoyenne, laquellerepasse sur les articles et leurs modi-fications et intervient, le cas échéant,jusqu'à bloquer l'accès de certainscontributeurs malveillants. En effet,pour la salubrité de l'ensemble, descontributeurs généreux se sont prisde sympathie pour le projet et œu-vrent en qualité de patrouilleurs, d'ar-bitres, de Wiki-pompiers, voire d'ad-ministrateurs5. Ce service à la com-munauté est rendu, il est vrai, par desbénévoles dont le statut n'est pas,pour l'instant, lié à une expertisescientifique reconnue.

ÊTRE CRITIQUE

En présence de Wikipédia, unedémarche d'approche critique des

Wikipédia, boite de Pandoreou boite à outilspédagogique?L'encyclopédie Wikipédia1 est aujourd'hui parmi lesdix sites Internet les plus visités. C'est la source enligne la plus "co-pillée". Le monde scolaire doit-il lamaudire ou y voir un partenaire inattendu, à condi-tion de l'intégrer de façon critique?

zoomP

hoto

: Fra

nçoi

s TE

FNIN

Page 21: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

médias doit donc évoquer cettecaractéristique structurelle d'ency-clopédie libre collaborative. Wikipé-dia n'est pas un site comme les au-tres. Il demande une grille d'analysespécifique. L'article encyclopédiqueest rarement le travail d'un seulcontributeur. Il est donc important deparcourir la page "Historique" pourprendre connaissance des différentsétats de rédaction que la page aconnus et de ses auteurs respectifs.Être critique sur la fiabilité d'un arti-cle de Wikipédia réclame d'apprécierla notoriété des auteurs et la capaci-té qu'ils ont de traiter du sujet.Certes, la page personnelle se lais-se écrire et l'auteur peut-il bluffer sonpublic. Mais il est possible de visua-liser l'ensemble des contributions detout auteur référencé, et donc d'ap-précier le niveau de ses apports. Parailleurs, les critères d'admissibilitéd'un article 6 mentionnent aussi lanécessité de "sourcer" correctementses apports: les rubriques de bas depage, liens internes et externes sont,à ce sujet, des informations à recou-per intelligemment.Mais l'intérêt pédagogique de ce pro-jet encyclopédique n'est-il pas alorsailleurs: dans la capacité de mettreles étudiants en statut de contribu-teurs, plutôt que d'être des "pom-peurs de contenus"? C'est danscette dynamique d'apprentissageque l'outil Wiki perd son statut deboite de Pandore pour devenir, peut-être, boite à outils pédagogique.

UN EXEMPLE: WIKIVERSITÉ

J'ai fait la rencontre de Jean-PolMARTIN sur le Net, au détour d'uncolloque virtuel sur l'apport des nou-velles technologies au processus

d'enseignement à distance7. Il voulaitmettre en œuvre un projet avec sesélèves étudiant le français langueétrangère à l'université de Eischstätt-Ingolstadt en Bavière. Il exprimait lachose au travers du terme "wissen-container", des conteneurs desavoirs. Rompus à la méthode detravail mise au point par leur profes-seur, l'apprentissage par les pairs8,les étudiants se voient accompagnésdans un processus de constructionde savoirs énoncés dans une langueétrangère dont ils font l'apprentissa-ge. Un projet audacieux!Les étudiants de l'université alle-mande utilisent l'infrastructure de laWikiversité 9 pour faire évoluer leurrecherche et en communiquer l'étatd'avancement. Chacun est inscrit àtitre de contributeur et dispose ainsid'une page auteur. Celle-ci compor-te les couches habituelles asso-ciées à une page de l'encyclopédie,à savoir la page "Discuter" et lapage "Historique". Bien évidem-ment, l'interface comprend aussil'onglet "Modifier", mais la déontolo-gie veut que, contrairement auxpages "Article", seul le propriétairede la page personnelle apporte desmodifications à celle-ci. Le débat,s'il doit avoir lieu, se tient sur lapage "Discuter".Les étudiants sont en mesure depublier en continu les diverses pha-ses de l'élaboration de leur travail.Ils sont susceptibles aussi d'êtreinterpellés, non seulement par leprofesseur, mais encore par lespairs en apprentissage, ou mêmepar la communauté mondiale desinternautes.L'outil informatique est donc l'instru-ment de l'apprentissage. La démar-che qu'il sous-tend est celle d'uneélaboration progressive de la con-naissance par un travail de recher-che et un exercice de formulationtoujours renouvelée au contact despairs engagés, eux aussi, dans leprocessus d'apprentissage.

C'est donc bien l'interface et sespotentialités de publication collabo-rative qui sont à apprécier ici, toutautant - si pas plus, parfois - que lecontenu qui s'élabore et demeuretoujours approchant, puisque réali-sé par des apprenants encore enphase de maturation de leursconnaissances. Mais n'en est-il pasaussi comme cela pour chacund'entre nous? Gros avantage desWikis, ces interfaces permettent unepublication à flux continu de l'avan-cement des recherches de ceux quivoudraient bénéficier d'une interpel-lation ou d'une collaboration deleurs pairs. En ce sens, les Wikissont un plus pour la constructioncollaborative de savoirs.

MICHEL BERHIN

CHARGÉ DE MISSION EN ÉDUCATIONAUX MÉDIAS À MÉDIA ANIMATION ASBL

1. Projet initié en 2001 par J. WALES et L.SANDER.Lire: http://fr.wikipedia.org/wiki/Wikipedia2. Dans la mythologie grecque, la boite dePandore, première femme de l'humanité, estcensée contenir tous les maux de l'humani-té. Mieux vaut ne pas l'ouvrir!3. Puisque publié sous le principe de la licen-ce libre; la citation de son contenu n'est sou-mise à aucun droit d'auteur.4. Derrière ce terme désignant un petit lutinfacétieux se cachent, dans la pratique infor-matique, de véritables pirates, lesquels peu-vent non seulement s'adonner à l'humourcaustique, mais aussi se livrer à des malver-sations plus graves.5. Pour découvrir la spécificité de ces sta-tuts, lire:http://fr.wikipedia.org/wiki/Wikip%C3%A9dia:Statuts_des_utilisateurs6. Lire:http://fr.wikipedia.org/wiki/Crit%C3%A8res_d%E2%80%99admissibilit%C3%A97. Février 2001. Lire:http://thot.cursus.edu/rubrique.asp?no=118198. Lire:http://fr.wikipedia.org/wiki/Lernen_durch_Lehren9. Lire: http://fr.wikiversity.org/wiki/Accueil

13entrées libres < N°25 < janvier 2008

zoom

Les Wikis, et plus particulièrement Wikipédia, seront au centre d'unnouveau programme de formation que proposera Média Animationasbl dans le cadre des formations en cours de carrière. Les intéres-sés sont invités à se faire connaitre (02/256.72.32) ou à être attentifsaux propositions qui seront faites dans les catalogues IFC, FOCEF etCECAFOC en début d'année.

Page 22: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

Des écolesmusulmanes?

14

recto verso

entrées libres < N°25 < janvier 2008

E n Belgique, explique Ph. VAN PARIJS, anima-teur de la rencontre, les écoles catholiquessont subventionnées par les pouvoirs publics.

Une seule école musulmane, installée dans la grandeMosquée du Cinquantenaire à Bruxelles, bénéficie dumême statut. La création, cette année, d'une écolemusulmane privée à Molenbeek 3 fait entrevoir la pos-sibilité du développement d'un réseau d'écoles musul-manes. S'il devait avoir lieu, ce développement ne pré-senterait-il pas certains risques, comme: une éduca-tion en tension avec l'égalité des sexes ou d'autresprincipes constitutionnels, ou le renforcement d'uneségrégation religieuse, linguistique et sociale rendantencore plus difficile l'intégration des populations d'ori-gine musulmane? Faute de pouvoir restreindre demanière discriminatoire le champ d'application duPacte scolaire, les risques mentionnés ne vont-ils pasnous forcer à réexaminer celui-ci?

PAS DE DANGER, A PRIORI…Hervé HASQUIN rappelle brièvement quelques princi-pes du Pacte scolaire et de la Constitution belge. Envertu de la liberté d'enseignement en vigueur dans

Les écoles musulmanes menacent-elles le pacte scolaire?C'est la question posée par lesMidis de l'éthique, à l'UCL, le27 novembre dernier.Hervé HASQUIN1 et Étienne MICHEL2

étaient invités à en débattre.

Pho

to: M

.-N. L

OV

EN

FOS

SE

E. MICHEL, Ph. VAN PARIJS et H. HASQUIN

Page 23: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

23ouvertures < N°0 < juin 2005

recto verso

grandes religions reconnues, et le choix est laissé auxparents de faire suivre à leurs enfants un des cours dereligion ou le cours de morale. Dans l'enseignementcatholique, sauf exception, seul le cours de religioncatholique peut être organisé. Actuellement, l'ensei-gnement catholique et l'enseignement officielaccueillent massivement des populations musulma-nes. D'après un rapport de recherche réalisé par l'UCLen 2005 4, notre système d'enseignement, libre ou offi-ciel, offre aux populations musulmanes des modalitésd'intégration et de reconnaissance diverses qui sem-blent "trouver leur public. "On aurait tort, insiste leDirecteur général du SeGEC, de sous-estimer les ver-tus intégratives du modèle de la laïcité à la belge fondésur la reconnaissance positive des différentes religionset confessions".Alors, si les écoles existantes sont capables d'intégrerles demandes sociale et confessionnelle des popula-tions musulmanes, quid d'un réseau d'écoles isla-miques? De toute manière, le subventionnement envertu du Pacte scolaire est assorti de conditions qui of-frent des garanties aux autorités subventionnantes,notamment: répondre aux normes de création d'école,accueillir tous les publics dans le respect du projet édu-catif de l'école, accepter la référence commune auxsocles de compétences et aux compétences termina-les, soumettre ses programmes pour approbation à unecommission ad hoc, se soumettre au contrôle et àl'inspection de la Communauté française, adopter lefrançais comme langue d'enseignement, appliquer leprincipe de la gratuité, etc. De plus, ces écoles, si ellessont créées et subventionnées, devront encore êtrecapables de générer des ressources propres pour com-penser le moindre financement des écoles libres parrapport aux écoles officielles, en particulier pour lesfrais de fonctionnement et pour les bâtiments scolaires.E. MICHEL est d'avis que la véritable question, en défi-nitive, pourrait être de savoir si demain, le systèmehérité du Pacte scolaire de 1959 pourra continuer àrépondre de manière satisfaisante à la volonté dereconnaissance confessionnelle et d'affirmation identi-taire de la population musulmane. Ou si cette volonté,soucieuse de s'exprimer en-dehors des contraintesfixées par les pouvoirs publics, se traduira par la créa-tion de nouvelles écoles privées et affranchies desengagements qui peuvent être considérés comme lacontrepartie du subventionnement par les pouvoirspublics. "Ce qui est en jeu, estime-t-il, c'est la validitéd'un compromis historique et, faut-il le dire, d'une cer-taine conception du «vivre ensemble»".

MARIE-NOËLLE LOVENFOSSE

1. Professeur extraordinaire, président honoraire de l'Institut d'étu-de de la religion et de la laïcité et recteur honoraire de l'ULB.2. Directeur général du SeGEC.3. Avicenne est un établissement secondaire mixte qui vise à pré-parer les candidats aux examens du Jury central de laCommunauté française. Pour sa première année, le projet a pris laforme de deux classes-pilotes d'une quarantaine d'élèves. L'écolene fait l'objet d'aucun subventionnement de la Communauté fran-çaise. Le minerval y est de 1.800€.4. Sous le titre "Jeunes issus de l'immigration musulmane et écolesbruxelloises; le rôle de la religion dans l'identité sociale".

notre pays, toute personne qui le souhaite peut ouvrirune école ou une université. Il existe déjà une série dePouvoirs organisateurs d'enseignement en Belgiquefrancophone (Communauté française, CPEONS,enseignement libre confessionnel, libre non-confes-sionnel). Depuis plusieurs décennies, deux écoles jui-ves de Bruxelles (l'une proche des milieux orthodoxes,l'autre du judaïsme laïc) sont également reconnues parla Communauté française. Mais toute école ouverte nesera pas automatiquement reconnue ni subsidiée. Ellesera, en effet, dans l'obligation de répondre à une sériede conditions périodiquement vérifiées portant notam-ment sur le nombre minimum d'élèves ou l'absenced'une école de même type à proximité.Du point de vue pédagogique, certaines libertés d'orga-nisation sont admises, mais les compétences requisesdoivent être atteintes et une série de normes doiventêtre respectées. Et si la liberté d'enseignement s'ap-plique aussi en ce qui concerne le contenu des coursphilosophiques et religieux, l'enseignement se fera obli-gatoirement dans la langue de la région et le discoursqui y est tenu devra être compatible avec l'état de droit.Un problème pourrait se poser dans la manière d'en-seigner des matières comme la biologie. Les thèsescréationnistes en vogue dans certains milieux, parexemple, ne sont pas compatibles avec ce que l'on esten droit d'attendre aujourd'hui d'un cours de sciences.H. HASQUIN rappelle, en outre, que lorsqu'il étaitministre-président, il a refusé un projet de texte visantà interdire le port du foulard dans l'enseignement de laCommunauté française. Il s'est également opposé àun élargissement des possibilités d'accès à l'enseigne-ment à domicile, qui aurait pu favoriser, selon lui, lescomportements les plus radicaux en matière d'ensei-gnement. Et il invite à être particulièrement attentif enla matière. Pour lui, rendre plus facile l'accès à l'ensei-gnement à domicile pourrait s'avérer plus dangereuxpour les principes du Pacte scolaire que la créationd'écoles musulmanes.

QUESTION À PRENDRE AU SÉRIEUX

Pour Étienne MICHEL, le défi que constitue, au sein dusystème éducatif, la volonté d'affirmation de l'identitéconfessionnelle musulmane, est à prendre au sérieux.Plusieurs éléments contextuels nous y incitent. Onconstate une évolution démographique particulière-ment sensible dans les grandes villes. Les mutationssociologiques et urbanistiques sont considérables,notamment en raison de la concentration des popula-tions d'origine étrangère dans certains quartiers. Grâceà Internet et aux antennes paraboliques, la notion dedistance est abolie, et le lien avec le pays d'origine estassuré en permanence. Les écoles constatent fré-quemment que la langue française est moins bien mai-trisée par la troisième génération issue de l'immigrationque par celle qui l'a précédée. Par ailleurs, le processusgénéral de mondialisation et d'interpénétration crois-sante des cultures s'assortit de nouvelles affirmationsidentitaires et convictionnelles. Dans ce contexte, quel-le conception de la laïcité faut-il promouvoir?L'État belge se définit comme neutre, sans apparte-nance confessionnelle. Dans l'enseignement officiel,un cours de religion est organisé pour chacune des

15entrées libres < N°25 < janvier 2008

Page 24: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

Q ue faut-il penser des résul-tats des élèves de laCommunauté française de

Belgique au test PISA 1 2006? Rien.En tout cas, rien de plus que ce qu'ilfallait en penser en 2000 et 2003. Etc'est bien là un premier problème: lesrésultats de nos élèves aux testsinternationaux, au mieux, stagnent,au pire, se dégradent au fil des ans etdes décennies. Il semblerait dès lorsassez décent que les autoritéspubliques arrêtent de prédire des len-demains qui chantent lorsque leseffets des mesures qu'ils ont adop-tées se feront sentir! De rénové enréforme du premier degré, de "tousbilingues en l'an 2000!" en réforme dela réforme d'encore le premier degré,du Contrat pour l'École en réforme dela réforme de la réforme du mêmepremier degré, comme sœur Anne,nous ne voyons rien venir!

VOYONS LES CHOSESEN FACE

Foin des promesses de "grandssoirs", voyons les choses en face:

dans les années 60 et encore audébut des années 70, les élèves dela partie francophone de la Belgiquecaracolaient en tête des classe-ments, du moins en maitrise de lalangue maternelle et en mathéma-tique. Leurs résultats n'ont cessé dese dégrader. Et qu'on ne vienne pastout mettre sur le dos de la dégrada-tion économique de la Wallonie!Depuis 10 ans, on ne cesse de répé-ter qu'elle va mieux: où reste l'amé-lioration des résultats de ses élèves?Par ailleurs, les résultats des Pays-Bas, de la Finlande ou de la Flandreétaient peu satisfaisants il y a 30ans. Dans ces régions, on a su etosé prendre les mesures adéqua-tes pour améliorer l'efficacité dusystème éducatif. On l'a fait aussi,plus récemment, en Pologne, dontles résultats aux tests PISA ne ces-sent de progresser de 2000 à 2006.Et qu'on ne cherche pas non plus àexpliquer ces améliorations par laseule situation économique prospè-re - la Pologne est-elle plus richeque la Communauté française deBelgique? - de ces régions!

LA RECETTED'UN CERTAIN SUCCÈS

Le contexte socioéconomique pèseévidemment, mais il n'explique pastoutes les différences de résultatsentre les pays. On observe des"effets de système", résultats demesures prises par les autoritéspubliques en charge de l'enseigne-ment. Lesquelles mesures ne sontpas les mêmes d'une région à l'autre,parce que les systèmes éducatifssont dans des configurations diffé-rentes. Cependant, la recette de l'ef-ficacité est souvent la même: conju-guer une exigence forte de l'État surles finalités et sur les résultats,contrôlés sévèrement, avec une véri-table responsabilisation des acteurs,à qui on fait confiance pour définir lesmodalités qui permettront de les ren-contrer. Avec l'aide de la formationcontinue ou de l'accompagnementpédagogique, si nécessaire.Si on compare la situation de laCommunauté française à cette for-mule presque partout gagnante, onconstate que son système éducatif

16 entrées libres < N°25 < janvier 2008

Et si c'était quandmême une questiond'efficacité?

Cet "avis de recherche" est plutôt un avis éclairé par la recherche. Et même, unbillet de mauvaise humeur et d'irritation, à mettre sur le compte d'un battagemédiatique assez mal inspiré et peu avare en formules racoleuses.

avis de recherche

Pho

to: F

ranç

ois

TEFN

IN

Page 25: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

a des ressources pour aller dans cesens: le décret "Missions", avec sesdiverses mesures d'application, fixeclairement les finalités. La libertéd'enseignement garantie par laConstitution est un contexte favora-ble à la responsabilisation desacteurs. Mais il y manque un contrô-le sérieux des résultats, soit par desépreuves externes, soit par uneévaluation externe des établisse-ments d'enseignement obligatoire.Les autorités éducatives flamandesl'ont bien compris! Héritant, il y a unpeu moins de 20 ans, d'un modèleproche de celui de la Communautéfrançaise, elles ont su en exploiterles ressources.

QUAND EFFICACITÉRIME AVEC ÉQUITÉ

Efficaces, d'accord. Mais ces systè-mes sont-ils équitables? Incontesta-blement, oui. Même si certains com-mentaires tentent de jeter sur eux lasuspicion. Quel est, en effet, l'indi-cateur d'équité le plus significatif?Depuis John RAWLS, on sait que la

justice d'un système se mesure ausort des plus défavorisés. C'estbien ce que pointe l'équipe deDominique LAFONTAINE en chargedu dispositif PISA en Communautéfrançaise: "Réduire la proportiond'élèves très faibles - particulière-ment en lecture et en sciences -constitue le principal défi pour notresystème éducatif" 2.Qu'en est-il donc de la proportiond'élèves très faibles 3 dans les systè-mes qui ont cherché à devenir plusefficaces? Les chiffres parlentd'eux-mêmes (cf. tableau 1).

PLUS D'EFFICACITÉPOUR PLUS DE JUSTICE

Une autre présentation des résultatspermettra de confirmer que l'effica-cité d'un système garantit plus dejustice (cf. tableau 2).Il faut donc bien lire que la moyennedes élèves se situant au 5e centileen Finlande est de 411, aux Pays-Bas de 360… et que la moyennedes élèves se situant au 95e centileen Finlande est de 686, aux Pays-

Bas de 694. De ce tableau, on peutretenir que, pour juger de l'équitédes systèmes, il faut tenir comptede deux choses:

d'une part, de l'importance de l'écart entre les élèves les plus fortset les plus faibles: 275 points d'écarten Finlande, 302 en Flandre, 309 enmoyenne dans les pays de l'OCDE,334 aux Pays-Bas, 336 en Commu-nauté française (CF). On admetgénéralement que plus l'écart estfaible, plus le système est équitable;

mais aussi, de la manière dont cetécart se creuse. La comparaisonentre les Pays-Bas et la CF est à cetitre éclairante: l'écart entre les plusforts et les plus faibles y est prati-quement le même. Mais aux Pays-Bas, il se creuse par le haut: les élè-ves les plus faibles ont des résultatssupérieurs à la moyenne OCDE, etles élèves forts "cartonnent". En CF,l'écart se creuse par le bas: les élè-ves les plus forts ont des résultatséquivalents à la moyenne OCDE,tandis que les élèves les plus faiblesont des résultats inférieurs à ceuxde la moyenne OCDE.

Le principal problème du systèmeéducatif en Communauté françaisede Belgique est donc bien un pro-blème d'efficacité. En effet, on cons-tate que les systèmes éducatifs effi-caces ont tendance à assurer,même aux plus faibles, la maitrisedes compétences de base, cellesqui permettent de s'insérer digne-ment dans la société. Le systèmeéducatif de la Communauté françai-se, en raison de son inefficacité, nepeut garantir cela à un quart de sesélèves de 15 ans, soit à 12.500 des50.000 enfants que les familles luiconfient chaque année.

JEAN-PIERRE DEGIVES

1. PISA: Plan International du Suivi desAcquis des élèves.2. A. BAYE, V. QUITTRE, G. HINDRYCK, A.FAGNANT, Les acquis des élèves en culturescientifique - Premiers résultats de PISA2006, Unité d'analyse des systèmes et despratiques d'enseignement (ULg) sous ladirection de D. LAFONTAINE, p. 22.3. Il s'agit des élèves classés au niveau 1(sur 6) ou en-dessous du niveau 1 dans letest PISA.4. Un centile est chacune des cent partiesd'effectif égal, d'un ensemble statistiquedonné.

17

avis de recherche

entrées libres < N°25 < janvier 2008

Tableau 1 - Proportion d'élèves très faibles au test PISA 2006

Tableau 2 - Tableau comparatif des résultats des élèves en sciences aux 5e et 95e

centiles 4 - test PISA 2006

Page 26: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

18

service compris

À SOCIÉTÉ PLURIELLE, TRANSMISSION NOUVELLEColloque organisé à Bruxelles du17 au 19 avril 2008 par LumenVitae. Comment penser une trans-mission qui soit respectueuse de laliberté et de l'autonomie de chacun,sans pour autant renoncer à la mis-sion d'annoncer la Bonne Nouvelle?Des conférences et des ateliers-séminaires et le mercredi 16 avril à20h, une conférence grand publicdonnée par Jean-Claude GUILLE-BAUD, auteur notamment deComment je suis redevenu chrétien(Albin Michel, 2006) sur le mêmethème.

Infos: Lumen Vitae (02/349.03.77)[email protected]

PRINTEMPS DES SCIENCES:TERRE À TERRESLa terre comme vous ne l'avez jamaisperçue, avec ses richesses, ses mys-tères, ses ressources, ses problè-mes… Une semaine de découverteet d'amusement pour s'intéresser à lascience. Du 10 au 16 mars 2008.Infos: www.printempsdessciences.be

entrées libres < N°25 < janvier 2008

CHOOSE LIFE FESTIVALPour les jeunes de 12 à 17 ans:découvrir Jésus et Dieu autrement,de façon jeune et dynamique, etchoisir la Vie. Activités: ateliers spor-tifs et artistiques, musique, témoi-gnages, forums, temps de partage,de prière, de célébration et de fête.Du 1er avril (16h) au 5 avril 2008(12h), au Centre scolaire de Berlay-mont (Waterloo).

Infos: Éric VOLLEN sj0474/[email protected]://festivalchooselife.be.cx/

MUSÉES ROYAUXDES BEAUX-ARTS DE BELGIQUEActivités proposées aux établisse-ments scolaires:

de la 3e maternelle à l'enseigne-ment supérieur: la visite active (dia-logue vivant devant l'œuvre d'art), leparcours créatif (visite ponctuéed'une activité plastique), les activitésen langue des signes (pour lessourds et malentendants) ou la visi-te équinoxe (pour les aveugles etmalvoyants). Outre le choix de laformule, celui d'un thème est égale-ment possible.

pour les futurs enseignants, éduca-teurs et animateurs: la journée péda-gogique (découverte du Musée et deses collections, présentation desdiverses approches pédagogiques etpratiques), les Midis de la Poésie.

Renseignements et réservations:EDUCATEAM (02/508.33.33)[email protected]ées royaux des Beaux-Artsde Belgiquerue du Musée 9 - 1000 BruxellesLes Midis de la Poésie:02/[email protected]/midis-poesie

LA REVUE DES REVUESCAHIERS PÉDAGOGIQUES

(CRAP)N°458, décembre 2007, "Diriger unétablissement scolaire""L'école au Maghreb"N°459, janvier 2008, "L’école à l’épreuve du handicap"

LE MONDE DE L'ÉDUCATIONN°365, janvier 2008, "L'universitéde proximité doit rimer avec qualité""Musulmans, juifs, catholiques: latentative du repli"

SCIENCES HUMAINESN°189, janvier 2008, "Géographiedes idées"N°190, février 2008, Au-delà du QI -Les autres intelligences"

CONTRE LE RACISME

Page 27: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

LES NOIRCEURS DE L'AUBE

D ans ce roman, PhilippeBRADFER, professeur dansle secondaire mais aussi

romancier, relate la troisième et der-nière enquête du commissaire LAR-TIGUE en Champagne-Ardenne.L'action - qui se déroule durant l'après 2e guerre mondiale - met enprésence des jeunes qui pourraientêtre les élèves de l'auteur, quelquesSDF, les enquêteurs chargés d'élu-cider des évènements particulière-ment odieux survenus de nuit dansdes cimetières ou aux abords desynagogues, mais aussi deux meur-tres inspirés par la vengeance.Ce sombre récit, bien rythmé tout aulong des 59 très courts chapitres dequelques pages, révèle les originespsychologiques et sociologiques deces actes inspirés par l'extrémismeet la radicalité violente de leurs jeu-nes auteurs.Dans l'interview qu'il a accordée àEddy CAEKELBERGHS le 10 dé-cembre dernier - journée dédiée auxDroits de l'Homme - dans l'émission"Face à l'info" (La PRem1èReRTBF), Philippe BRADFER, quidédicace son roman à ses élèves, adit vouloir, à travers cette enquête ducommissaire LARTIGUE, compren-dre le monde dans lequel il vit et lacolère des jeunes confrontés au malet tentés d'y répondre par la violen-ce. Il a évoqué la tuerie raciste sur-venue à Anvers en rappelant l'aveude son auteur, le jeune Hans V., auterme de son procès: "Je voudraisredevenir humain".C'est le sens que Ph. BRADFER avoulu donner à son récit, à découvriraujourd'hui avec les jeunes qu'il vou-drait "exhorter à faire preuve de luci-dité et à exercer davantage leurconscience critique à l'égard de ceuxqui prétendaient sauver la France aumépris de son humanité" (p. 205).

RECENSION PAULE PINPURNIAUX

19

entrées livres

entrées libres < N°25 < janvier 2008

un libraire, un livre

C e roman nous présente une visionde la société à travers trois person-nages truculents, parfois odieux,

souvent naïfs, et qui ne se connaissent pas.Tous font état d'une révolte face à leur des-tin et d'un malaise évident. Le premier, spé-cialiste de la finance, prend la fuite suite àla faillite de sa société d'investissements; lesecond se dirige vers un studio de télévi-sion, des armes cachées dans le coffre desa voiture, pour accomplir un geste dé-sespéré devant des millions de téléspecta-teurs; le troisième est un bourgeois accrod'Internet et se risque à des rencontres

douteuses. "Cendrillon" croise avec brio les vies de ces trois personna-ges issus de la classe moyenne.Ce livre, qui s'articule autour des thèmes de l'amour, du malaise fami-lial, de l'injustice sociale et du désespoir, nous révèle la société danstoute sa rudesse. E. REINHARDT n'hésite pas à faire preuve d'unregard sarcastique sur la société française, s'attaquant à la classemoyenne, à la caste des intellectuels de gauche, mais aussi aux vedet-tes médiatiques et au monde de la finance. Par ailleurs, l'écriture estenlevée, la construction en miroir est parfaitement maitrisée… On nes'y ennuie jamais!

Jean THONNARTLibrairie La DériveGrand-Place 10 - 4500 HuyTél: 085/21.25.14 - Fax: 085/[email protected]

CONCOURSGagnez un exemplaire de ce livre en envoyant, avant le 25 février, uncourriel à [email protected] avec vos coordonnées posta-les et comme objet du message: "Cendrillon".

Les gagnants du mois de novembre sont:

Amandine BLOC, de Sart-Saint-LaurentXavier DEJEMEPPE, d'ArsimontVéronique ELOY, de Lonzée

Éric REINHARDTCendrillonStock, 2007

PRIX FEMINA 2007Le 12 novembre dernier, Le jury du Prix Femina 2007 a décerné àCécile LADJALI un nouveau Prix, celui de la défense de la languefrançaise, pour son livre Mauvaise langue (Seuil), dont nous vousrecommandions la lecture dans le n° 23 de novembre 2007.

PhilippeBRADFERLes noirceurs del'aubeéditions LuceWILQUIN, 2007

Page 28: entrées · recto verso 14 Des écoles musulmanes? avis de recherche 16 Et si c’était quand même une question d’efficacité? service compris 18 À société plurielle, transmission

20

hume(o)ur

J e ne sais pas si vous êtescomme moi, mais dans certainessituations, je ne peux m'empê-

cher de procéder à des associationsque ne désavouerait pas mon psycha-nalyste. Ainsi, l'autre jour, en attendantà la caisse de mon supermarché pré-féré, certaines images me sont sou-dain revenues en mémoire…

EN EMBUSCADE

Rappelez-vous. C'était un peu commeles soldes de janvier délocalisés pré-ventivement en novembre. Ou commeun bouchon devant les toilettes d'uneaire de repos sur l'autoroute du soleil,soustraction faite des émanations depots d'échappement, les effluves desbarbecues en prime. En moins detemps qu'il ne faut pour le décréter, lafile avait vu le jour. Et même la nuit! Elleétait devenue un mode de vie, quasi unevocation. Pour prévenir de sa naissanceprématurée, des SMS jouant le délit d'initié avaient déferlé sur les écrans desfidèles qui s'étaient immédiatementagglutinés comme des guirlandes surun sapin de Noël, précoce lui aussi.Pour peu, on se serait cru à Banneux,entre pèlerinage et procession, saufqu'ici, le surplace s'imposait aux pèle-rins comme à un pistard avant le sprintfinal. Histoire de ne pas perdre uneplace chèrement acquise. Et pourtant, iln'y avait rien à voir, pas même uneapparition! Le spectacle était d'ailleursplutôt dans la salle - comprenez le trot-toir -, à en croire l'afflux de micros et decaméras braqués sur les fidèles dont ladévotion n'avait d'égal qu'une patiencesans limite. Ici, la foi ne préservant derien, la Croix-Rouge assurait un cordonsanitaire. Certains se donnaient des airsde Club Med, snow-boots et doudounecomprises, mais personne n'était dupe:il s'agissait avant tout de décrocher leprécieux sésame de cette piste noire.

"ON SERT LE 18"Non, nous n'étions ni devant une grottemiraculeuse, ni au pied d'un remonte-pente, mais bien aux portes des écoles.Le rang y était devenu la norme, ce qui

peut paraitre logique pour ce cadre.Mais ici, rentrer dans le rang - fût-ild'oignons - était surtout un moyen detenir le sien et de ne pas se mêler deceux - les oignons, toujours - des au-tres. En effet, pour décrocher uneinscription tant convoitée, mieux valaittenir le haut du pavé, de peur de restersur le carreau. Quitte à subir les affresde ce Koh Lanta du trottoir. Que neferait-on pas, même la queue, emmi-touflé comme Alain HUBERT à la sta-tion Élisabeth, pour obtenir un ticketnuméroté dument attribué par un huis-sier de justice (sociale?)?Les directeurs des établissementsconcernés campaient la nuit dans leurécole pendant que leurs collègues desécoles WIFI - entendez sans file - sedésespéraient. Autour d'un braséro,des papys vétérans des camps scoutsse rappelaient leurs exploits juvénilesponctués de quelques rasades de vinchaud. Conscients des enjeux socié-taux qui se tramaient sur cette agora,de courageux étudiants marxistessacrifiaient leurs études pour participerà la lutte des places. Sensible à l'in-confort de la situation, quelque géné-reux donateur avait mis à dispositionun mobile home qui n'aurait pas dépa-

reillé le dernier salon du véhicule utili-taire. Encore bien qu'il ne gelait pas,sinon les trottoirs auraient ressemblé àdes patinoires… des arénas, commeles appellent nos amis québécois! Etaucun décret n'avait prévu qui devaitfournir les patins.

3, 2, 1…Au bout de la nuit, les portes s'ou-vraient enfin, laissant déferler la meutedes participants dont on se plait à ima-giner que la motivation était directe-ment proportionnelle à celle de leurrejeton pour la chose scolaire. Aprèsdes heures interminables sous les feuxde la rampe, les espoirs des uns s'en-flammaient tandis que les illusions desautres s'envolaient en fumée, justeatténuées par les braises d'une listed'attente. Les uns et les autres s'enretournaient chez eux, s'en voulant den'avoir pas, douze ans auparavant,commencé par mettre au monde leurdeuxième enfant, synonyme d'unepriorité qui leur aurait évité un tel défilé.-Madame, vous avez la carte du magasin?-Oui, oui. Je suis inscrite…

EUGÉNIE DELCOMINETTE

entrées libres < N°25 < janvier 2008

Quand Marxbat le pavé…

LE CLOU DE L’ACTUALITÉ WIKIPÉDIA (P. 12)P

hoto

: Pie

rre-

Pau

l VE

RS

TAP

PE

N