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R E P E R E S 60 Editions du CARIF Poitou-Charentes Les cahiers de l’accompagnement L’ACCOMPAGNEMENT , ENTRE CONTRAINTE ET LIBERTÉ QUELLES FORMES DE COOPÉRATION POUR L INSERTION ?

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60 Editions du CARIF Poitou-Charentes

Les cahiers de l’accompagnement

L’ ACCOMPAGNEMENT ,ENTRE CONTRAINTE ET LIBERTÉ

QUELLES FORMESDE COOPÉRATION POUR L’ INSERTION ?

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Les Journées de l'accompagnement rassemblent depuis 2001 des intervenants du champde la formation, de l'insertion sociale et professionnelle, de l'insertion par l'économique,de l'orientation, du bilan de compétences, de la validation d'acquis… désireux d'é-changer autour des pratiques d'accompagnement. Elles sont coordonnées par le GIPQualité de la formation en partenariat, selon les thèmes abordés, avec l'AGEVIF-CAFOC,le CIBC Charentes et Vienne, le CREAHI Poitou-Charentes, le CARIF Poitou-Charentes.

Ce numéro de la collection Repères regroupe les travaux et réflexions menés dans lecadre des Journées de l'accompagnement en juin 2004 (L'accompagnement, entrecontrainte et liberté) et juin 2005 (Quelles formes de coopération pour l'insertion ?).

Cette nouvelle parution complète les documents précédemment publiés :

• Repères n°42 (épuisé)- Ethique et accompagnement - Les compétences des accompagnateurs

• Repères n°47- L'entretien dans les pratiques d'accompagnement- Les limites de l'accompagnement

• Repères n° 52- Accompagnateurs, quels repères identitaires ?- Missions, rôles et effets de l'accompagnement

Tous ces documents sont téléchargeables à partir des sites :

www.gip-qualiteformation.frwww.carif-poitou-charentes.asso.fr

Pour toute information :

GIP Qualité de la formation22 bis rue Arsène Orillard - BP 393

86010 POITIERS cedexTél : 05 49 50 32 90

Courriel : [email protected]

Les Cahiers de l’AccompagnementEdition CARIF Poitou-Charentes

Présentation générale

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Ont contribué à ce numéro :

Catherine BERNATET, INSTEP Aquitaine

Anne GODIN-KIENON, GIP Qualité de la formation

Magali HUMEAU, AGEVIF-CAFOC, Poitiers

Abdelaâli LAOUKILI, ARIP, Paris

Ouiza MEZIANE, CARIF Poitou-Charentes

Elisabeth PELLOQUIN, CREAHI Poitou-Charentes

Patrick POITIERS, IRFREP Niort, Ligue de l'Enseignement Poitou-Charentes

Didier VALDES, AGEVIF-CAFOC, Poitiers

Coordination : Sonia SPERONI, GIP Qualité de la formation

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INTRODUCTION .....................................................................................................................4

PREMIÈRE PARTIE : L’ACCOMPAGNEMENT, ENTRE CONTRAINTE ET LIBERTÉ ..............................6

Présentation de la journée du 25 juin 2004......................................................................................6

La gestion par les procédures et le métier d’accompagnateur, Conférence d’Abdelaâli LAOUKILI .......7

Compte-rendu des ateliers .............................................................................................................23

Bibliographie ................................................................................................................................35

DEUXIÈME PARTIE : QUELLES FORMES DE COOPÉRATION POUR L’INSERTION ?......................36

Présentation de la journée du 30 juin 2005 ...................................................................................36

Réussir les parcours d’insertion : quel renouvellement des pratiques d’accompagnement ? Conférence

de Catherine BERNATET ................................................................................................................37

Témoignages régionaux ................................................................................................................48

Compte-rendu des ateliers .............................................................................................................52

Bibliographie ................................................................................................................................69

REPÈRESN U M É R O 60

LES CAHIERS DE L’ACCOMPAGNEMENTL’accompagnement, entre contrainte et liberté.

Quelles formes de coopération pour l’insertion ?

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L’ACCOMPAGNEMENT, ÇA SERT À QUOI ?Lors de notre rencontre de décembre2003, nous avions souhaité traiter l'ac-compagnement non seulement en termesde pratiques mais aussi permettre uneréflexion sur les effets attendus et les effetsproduits ; en d'autres termes, réfléchirensemble sur l'accompagnement, ça sert àqui ? ça sert à quoi ? En fait, ce thème étaitprésent depuis plusieurs années et s'est peuà peu précisé. Dès la première conférenceen juin 2001, Guy BOURGEAULT nousdemandait : Quelles sont mes adhésions,mes solidarités premières ? nous incitant ày réfléchir selon une éthique personnelle etune éthique professionnelle, nous recom-mandant de porter le questionnementéthique vers l'amont des interventions,quand se rédigent les cahiers des chargeset les contrats. Tandis que Bernard LANGE-LIER dans un atelier sur le rapport à l'ar-gent demandait : Qui achète la prestationd'accompagnement ? Il évoquait déjà l'é-valuation de la mesure et les critères derésultats ; on signalait le manque detransparence pour l'accompagnateur de cequi est négocié au niveau de la commande.

Un an plus tard, André CHAUVET nouslançait plus abruptement : Pour qui tra-

vaille-t-on ? et nous invitait à examinernotre travail de praticien de l'accompa-gnement avec une question : Commentexpliquer à un financeur à quoi se mesurel'autonomie ? L'accompagnement, d'abord pensé entermes de pratiques, est peu à peu perçucomme objet de commande, d'évaluation,de procédures et cela suscite d'embléedes réticences, s'exprime en termes d'in-compréhensions et de difficultés. En effet,l'application d'une certaine rationalité àune pratique qui se caractérise par lacomplexité et l'incertitude de la rencontrehumaine ne va pas sans poser questions.

UN OBJET FLOUMaëla PAUL nous avait avertis : l'accom-pagnement est une nébuleuse ; MarinePEYRE en 2003 signalait que, biensouvent, la formation et le parcours desaccompagnateurs ne permet pas dedéfinir une identité professionnelle àbords nets. Christian HESLON nous ademandé : Sommes-nous convaincants ?Si l'accompagnement est bien un objetflou, sommes-nous capables de le penserde façon suffisamment claire pour lesautres et en particulier pour les finan-ceurs ?

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Introduction

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Cette pratique souvent bricolée, qui s'estconstruite sur la créativité et l'autonomiedes praticiens, se voit aujourd'hui de plusen plus régulée, prescrite, décrite dans descontrats d'accompagnement ou dans lescahiers des clauses techniques des appelsd'offres, évaluée, cadrée par des indica-teurs, soumise à des exigences de résultats.Globalement et pour simplifier, les disposi-tifs de commande et d'évaluation mettentde la contrainte là où le professionnelcroyait travailler dans la liberté d'une ren-contre singulière avec un individu.L'émergence de cette préoccupation, pro-gressive mais constante, nous a assez natu-rellement conduits vers le thème de lajournée de juin 2004 : L'accompagnement,entre contrainte et liberté avec une inter-vention de Monsieur Abdelaâli LAOUKILIsur la gestion par les procédures et le métierd’accompagnateur.

DES ESPACES DE DIALOGUE ET DE RÉFLEXIONLa réflexion menée en 2003 et les moda-lités qu’elle a empruntées nous avaientconfirmé la pertinence de travailler auniveau des structures et de leur environne-ment institutionnel, en transversalité surcertaines mesures et en mettant du lienentre commanditaires et praticiens. Larencontre de juin 2005 a traité desformes de coopération pour l'insertionmises en œuvre entre les acteurs de l'ac-compagnement, le monde économique,les décideurs politiques du territoire.Madame Catherine BERNATET y a pré-senté des exemples de coopération et de

concertation qui ouvrent aux acteurs del'accompagnement des espaces de dia-logue et de réflexion. Le nombre et ladiversité des participants de cette ren-contre confirment les Journées de l'ac-compagnement comme un tel espace,propice à la réflexion partagée entre pra-ticiens et décideurs. C'est en tout cas unaxe de travail que le GIP Qualité de laformation entend poursuivre.

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L’accompagnement,

entre contrainte et liberté

Journée du 25 juin 2004

PRÉSENTATION

Organisée par le GIP Qualité de la forma-tion en partenariat avec l'AGEVIF-CAFOC,le CIBC Charente et le CREAHI, uneJournée de l'accompagnement intitulée"L'accompagnement entre contrainte etliberté" s'est tenue à POITIERS le 25 juin2004. Elle a rassemblé 85 participants duchamp de l'accompagnement (en forma-tion, insertion sociale et professionnelle,insertion par l'économique, orientation,bilan de compétences, validation desacquis…) autour du thème des contraintesdans lesquelles s'inscrivent les pratiquesd'accompagnement ; contraintes qui inter-pellent le praticien, interrogent ses margesde liberté, mais aussi qui structurent l'actionet la rendent lisible.

Monsieur Abdelaâli LAOUKILI, psychoso-ciologue, membre de l'ARIP (Associationde Recherche et d'Intervention Psycho-sociologiques) et du comité de rédaction de

la revue CONNEXIONS1, a proposé une

conférence intitulée : Le métier d'accompa-gnateur face à "l'homme procédural".

L’article de M. LAOUKILI, rédigé après sonintervention et enrichi de quelques

tableaux tirés de sa présentation, vous estproposé en première partie de ce numéro.Il est suivi des comptes-rendus des ateliersayant permis de poursuivre la réflexionautour des thèmes suivants :

• Entre commanditaires et praticiens,quels espaces de régulation ?

• En quoi les procédures modifient-elles larelation accompagnant / accompagné ?

• Les cadres de l'accompagnement : iden-tification et typologie des contraintes.

1. Les procédures comme organisateurs institutionnels.Revue Connexions n° 79. Editions ERES, 2003.

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INTRODUCTIONOn assiste, depuis une dizaine d’années,à une introduction forte de procédures etde méthodes de gestion dans tous les sec-teurs d’activités, des entreprises privéesaux administrations et associations à "butnon lucratif". Ces procédures et méthodesvisent, comme énoncé souvent, l’introduc-tion d’une logique d’efficacité et de résul-tats dans la gestion des moyens, maisaboutissent souvent à un contrôle sur lescomportements et conduites des acteurs etleur conformité à des modes opératoiresdéfinis préalablement. Le présent articlevise à comprendre les logiques structu-relles et culturelles, systémiques, qui fontde la gestion par les procédures un modede fonctionnement de plus en plus domi-nant, ayant des effets assez importants, etsouvent assez néfastes, sur le rapport autravail et les relations de travail. Il s’agitdonc de comprendre la logique propre dece "nouveau" mode de fonctionnementqui, pour certains, ne fait que "recycler"ou "mixer" d’anciens types de fonctionne-ment (bureaucratie, taylorisme, techno-cratie) pour aboutir à un néo-taylorismeou à une nouvelle bureaucratie2, détour-nant ou transgressant par là, toutes lespromesses qui ont été faites par les théo-riciens du management sur la participa-tion, l’implication, l’initiative et l’auto-nomie des salariés.

Pour comprendre les ressorts et les carac-téristiques de ce nouveau mode de fonc-tionnement, nous proposons une grille delecture cherchant à articuler de façondynamique les liens qui existent entre troisgrands types de variables :• les valeurs et la logique du système éco-nomique et les contraintes qu’il impose àla sphère sociale de manière générale, autravers notamment du rétrécissement desbudgets alloués à l’intervention publiquedans la logique libérale,• les systèmes d’organisation et de gestion,leur rationalité et la place prise par la tech-nique au détriment de la logique délibéra-tive entre les acteurs,• les représentations intériorisées par lesacteurs et les processus d’influence et depouvoir à l’œuvre dans ces nouveauxmodes de fonctionnement.

DÉTERMINANTS ET CARACTÉRISTIQUES DU MODE DEFONCTIONNEMENT PROCÉDURAL

Prégnance de l’économique sur les autres sphères de la vie socialeDe manière macro-économique et dans lalogique libérale dominante, il existe une

2. Voir DIET Emmanuel, "L’homme procéral. De la perver-sion sociale à la désubjectivation alienante", inConnexions, Erès, n° 79, 2004.

7Les Cahiers de l’accompagnementEdition CARIF Poitou-Charentes

LA GESTION PAR LES PROCEDURES ET LE METIER D’ACCOMPAGNATEUR

Par Abdelaâli LAOUKILI, Psycho-sociologue, intervenant à l’ARIP et consultant associé à TANIT RH

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pression sur les Etats nationaux pourréduire leurs dépenses et se retirer d’uncertain nombre de secteurs de la vie éco-nomique au profit du marché et deslogiques capitalistiques. Cette pression"intériorisée" et conçue dans une certainevision du rôle de l’Etat comme agent éco-nomique fonctionne comme l’indicateurde la "bonne gestion". L’Etat, convertiainsi à un rôle de gestionnaire, seretrouve investi dans une approche comp-table et à court terme des politiquespubliques conçues comme sources dedépenses et devant générer des résultats àcourt terme. L’introduction des logiquesd’évaluation (E. DIET parle de "folie éva-luative") est là pour sommer les différentsacteurs, dans le champ social notamment,de justifier les ressources et budgetsalloués par des résultats tangibles et visi-bles dans les champs de leur responsabi-lité. La visée procédurale et de contrôle estainsi réalisée par le truchement de lalogique comptable et de la logique éva-luative, qui à défaut d’évaluer des résul-tats ne pouvant être observés qu’à plus oumoins long terme, deviennent un contrôlesur les moyens et les conduites des acteurspour y arriver.

Prédominance de la logiqueinstrumentale sur la logiquedélibérative

Les procédures sont souvent présentées, etparfois à juste titre, comme une recherched’optimisation et d’efficacité dans lagestion des moyens. Si cet objectif ne doitpas être contesté en soi - la vocation d’uneprocédure est en effet d’aider à aller vite et

de favoriser un meilleur usage des moyens- sa prégnance risque de mettre de côté lesautres buts à atteindre ou conditions àrespecter dans la définition des objectifs etle choix des moyens. En effet, pour qu’uneprocédure soit juste, il faut qu’elle nouspermette d’atteindre les objectifs visés maisaussi, comme c’est le cas dans le domainejuridique, qu’elle puisse garantir les droitset les intérêts des différentes parties. Pource faire, chaque procédure doit comporterune phase incontournable d’élaboration etde partage des buts et des conduitesattendus à partir d’une vision commune dece qui, dans le réel, pose problème ou doitêtre amélioré.

Il est clair que la vision du "technocrate"(celui qui a une vision technique du pro-blème) dans sa volonté de maîtrise et decontrôle du réel, ne s’accommode pasfacilement avec les nécessités d’engagerune délibération avec les autres acteurs,foncièrement incertaine et "consomma-trice" de temps. Le contrôle de l’incerti-tude et le contrôle des coûts se trouventainsi et de manière inconsciente commedes impératifs majeurs aux yeux de notretechnocrate, pas toujours si libre ni siinnovant pour concevoir des dispositifsd’élaboration et de mise en œuvre desdécisions adaptés aux enjeux etcontraintes de la situation. La conceptionimplicite à ce type de fonctionnement (voirle tableau sur les structures d’organisationp. 10), est celle d’individus très compé-tents et capables par leur intelligence deconcevoir des systèmes de décision etd’action qui englobent les différents

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aspects d’un problème. De ce fait, ils sontcapables de se passer de la concertationet de la logique délibérative, ou alors seu-lement de la traiter au travers d’une phasede consultation préalable et sommaire,visant plus à asseoir une logique straté-gique (comment éviter les résistances)qu’à s’engager véritablement dans laprise en compte des besoins et intérêts desuns et des autres.

Jürgen HABERMAS3 démontre l’importanceprise par la technique dans la sociétémoderne. A la suite des auteurs de l’Ecolede Francfort (ADORNO, MARCUSE, HOR-KHEIMER)4, il se préoccupe des liens entrela logique des systèmes et la logique dumonde vécu (voir schéma page suivante)."La technique a arraisonné la société et l’asoumise à ses raisons" et il existe de plus enplus une disjonction entre le fonctionnementdes "systèmes" et le "monde vécu". Lesimpératifs des systèmes économiques etbureaucratiques menacent aujourd’hui de"coloniser" totalement la sphère privée etpublique. "Je fixe des objectifs à mesenfants" m’avait un jour dit fièrement uncadre supérieur d’une multinationale infor-matique, persuadé qu’il était de la justessedes principes de management de la sociétéoù il travaillait et de leur transférabilité sup-posée bénéfique dans sa vie familiale.

Pour sortir de la disjonction entre les sys-tèmes et le monde vécu, J. HABERMASarrive à distinguer entre une communica-tion stratégique et une communicationd’intercompréhension :

• Dans la première, caractéristique dufonctionnement actuel des systèmes, lavisée reste le succès ou l’efficacité, c’est-à-dire l’atteinte des objectifs de l’organi-sation. L’exigence du pouvoir est grandeet il existe une répartition hiérarchisée desrôles et des fonctions au sein du système.Les relations sont de sujet à objet et laconviction (l’adhésion dira-t-on) s’obtientpar influence, séduction, emprise, persua-sion/dissuasion ou récompense/punition.

L’environnement ou le champ d’action estobjectivé et l’action des partenaires estlimitée à leur valeur de moyens (ou res-sources) stratégiques pour atteindre lesbuts. L’accord est obtenu.

• Dans la seconde, la visée est l’entente.L’exigence du pouvoir est faible et celle dela validité est forte. Les relations sont desujet à sujet et la conviction est favoriséepar exigence réciproque de validité et devérité. L’environnement fait l’objet d’uneévaluation multidimensionnelle, objectiveet subjective, et les actions des partenairesont autant d’importance les unes que lesautres. L’accord, à la fin, est partagé.HABERMAS insiste sur l’ambivalence struc-turelle entre d’un côté la logique des sys-tèmes et, de l’autre, la logique du mondevécu. Le dépassement de cette ambivalencene peut se faire qu’au travers d’un accordcommun sur deux choses : l’importance duproblème à traiter, c’est-à-dire les

3. HABERMAS Jürgen, "La technique et la science commeidéologie", Gallimard, 1990. "Théorie de l’agir commu-nicationnel", Fayard, 1987.

4. Encyclopaedia Universalis, 1997 : voir le chapitreconsacré à l’Ecole de Francfort.

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COMMUNICATION STRATÉGIQUE ET COMMUNICATION D’INTERCOMPRÉHENSION

(J. Habermas)

Logiquedu Système

Logiquedu Monde vécu

Ambivalence

Communication stratégique Communication d’intercompréhension

Exigence de pouvoir Exigence de validité

PotentielleFaible exigence de justification de la validité

RéelleReconnaissance réciproque de lavaliditéLiée à l’acceptation de la réfutation

Suscitée par influence :- séduction, emprise- persuasion / dissuasion- récompense / punition

Suscitée par exigence réciproque devalidité dans trois mondes :- vérité (monde objectif)- justesse morale (monde social)- authenticité, expression esthétique

(monde subjectif)

Sujets / Objets Sujets / Sujets

Validité des arguments

Conviction

Relations entreles acteurs

Médiatisation par la technicisationMédiatisation par la symbolisation

du Monde Vécu et du système de rationalité

Clivage entre Système et Monde Vécu

Dialectique entre Système et Monde Vécu

Moyens decoordination

Société

Sans feed-back Avec feed-backInteraction

Objectivation Evaluation réciproqueEnvironnement

Limitée à leur valeur de moyens stratégiques

Aussi importante que la sienne propre

Action despartenaires

Faible ForteTransparence

UnilatéralAccord obtenu

RéciproqueAccord partagé

Engagement

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valeurs et buts poursuivis, et la viséedémocratique, c'est-à-dire le mode departicipation. Les procédures, penséessouvent sur le registre d’une communica-tion stratégique et non d’une communica-tion d’intercompréhension, risquent d’a-boutir à de nouvelles formes de domina-tion, qui viendraient accentuer ou masquerla domination dans le réel. HORKHEIMERet ADORNO ont montré que le "pouvoirdu progrès", entendu comme progrèstechnique, entraîne nécessairement "leprogrès du pouvoir". Ils ont mis en évi-dence que la rationalité et la logique de ladomination ont permis, pendant ladeuxième guerre mondiale, la mort deplusieurs millions d’hommes dans lescamps de concentration.

Réduction des problèmes au détriment de la complexité

Guy PALMADE5, dans un travail surl’étude des problèmes, présente uneapproche qui se distingue assez nettementdes approches TWI6 ou de la Qualité. Cesméthodes ont servi, dès les années 80, demodèles à l’ensemble des approches pro-cédurales qui se sont développées par lasuite et dont les nouvelles technologies del’information et de la communication(NTIC) ont favorisé l’essor. Ces méthodes,assez prisées par nos ingénieurs et techni-ciens et ayant une certaine pertinencedans le domaine de la production indus-trielle, ne s’avèrent pas toujours adaptéesquand les problèmes sont complexes ou àplusieurs entrées tel qu’il est questionsouvent dans le monde social.

Pour PALMADE, un problème existe àpartir du moment où l'on ne connaît ni lebut que l’on va poursuivre ni le chemin quiva nous permettre d’y arriver. On se trouvedans un "état initial insatisfaisant" sansconnaître suffisamment les raisons de cetteinsatisfaction, pas plus que "l’état-but" quinous permettrait de dépasser cette insatis-faction et d’atteindre nos objectifs, ni lesmoyens ou le chemin pour y arriver.

Un travail itératif est donc nécessaire entre :

• notre état d’insatisfaction (état initial) :de quoi est-on insatisfait, pourquoi,comment s’exprime notre insatisfaction,n’est-elle pas liée avec autre chose donton n’a pas une idée ou une informationprécise, est-ce important et urgent pournous de la traiter maintenant ?• nos objectifs ou notre représentation del’état-but dans lequel disparaîtrait l’insatis-faction : quels sont les buts finaux (intrans-itifs) que l’on doit se fixer pour sortir del’état d’insatisfaction, quels sont les butsintermédiaires (transitifs) qui peuvent nousaider ou par lesquels on doit passer pouratteindre le but final, poursuit-on un seulobjectif ou est-on obligé d’en avoir plu-sieurs à la fois, quels sont les liens entreces différents objectifs, sont-ils complé-mentaires, opposés, contradictoires, queloptimum doit-on pouvoir réaliser sur lesobjectifs pour que leur atteinte soit faci-litée, existe-t-il des priorités dans l’atteintedes différents objectifs, etc ?

5. PALMADE Guy, "L’étude des problèmes", document nonpublié. Service de formation d’EDF.

6. Training Within Industry, méthode de qualité d’origineaméricaine.

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• les variables réductrices (de la distanceau but) : il s’agit de l’ensemble des élé-ments sur lesquels on peut agir (varier) etqui vont nous permettre d’arriver à nosbuts. Elles peuvent être de plusieursnatures : des moyens ou des ressourcestechniques, financiers, humains, autres,des conduites et des comportements desagents concernés par le problème ou quipeuvent intervenir dans la solution.

• les contraintes : ce sont l’ensemble deséléments qui vont agir dans le senscontraire à la réduction de la distance aubut et sur lesquels on ne peut pas inter-venir. Ils peuvent exister comme desdonnées à prendre en compte dès ledépart ou qui vont apparaître au fur et àmesure de notre avancée vers le but. Cescontraintes peuvent se présenter commedes caractéristiques du champ sur lequelon veut intervenir, des limites dans lesmoyens dont on peut disposer comme nospropres limites ou impossibilités. Notrecréativité à contourner ces contraintespeut nous aider à trouver d’autres moyenspour arriver à nos buts.

Dans cette approche, PALMADE fait la dis-tinction entre ce qu’il appelle des pro-blèmes en extériorité et des problèmes enintériorité. Les premiers renvoient aux ques-tions et aux réalités économiques, tech-niques, matérielles, en somme tout ce quipeut être extérieur aux agents. Les secondsconcernent les émotions, affectivité, repré-sentations et motivations des acteurs, ce quileur est intrinsèquement lié et qui se trouvevécu ou mobilisé dans leur interaction avec

la réalité "extérieure". L’auteur insiste sur lanécessité d’éviter deux biais :

- une approche technocratique qui consi-dère que tous les problèmes peuvent setraiter au travers d’approches opératoireset par la quantification sur des variablesqui doivent être "objectivées" ou mesurées,ce qui laisserait de côté tout ce qui ne peutl’être a priori ;

- une approche "psychologisante" qui a ten-dance à penser que "tout serait résolu si leproblème des relations humaines était traité".Il faut donc, selon l’auteur, éviter le clivageentre ce qui est, d’un côté, affectivité, émo-tions, conduites et motivations individuelles etcollectives et, de l’autre, institutions, réalitéséconomiques et technologiques.

Une des caractéristiques du fonctionne-ment par les procédures dans une visiontechnocratique est de considérer que lesproblèmes n'existent qu'en extériorité ouque l’on pourrait tout "objectiver" et toutrationaliser, qu’il suffirait aux acteursd’appliquer la bonne méthode pour yarriver. Dans cette conception, la subjecti-vité est une dimension qui doit être tenueà l’écart car elle risque de "fausser" lescapacités de jugement, ou alors les fac-teurs subjectifs ne sont pas pris en comptecar "trop variables" pour être "tenus"dans une équation. Cette tendance à lamaîtrise du réel dans une équationmathématique est aussi bien une exigenceforte du système capitaliste qu’une tour-nure d’esprit des technocrates chargés dele faire fonctionner. L’incertitude, les aléasde la subjectivité doivent être neutralisés,sinon contrôlés au maximum.

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Le nouveau management, les procédures et le contrôle socialMax PAGES et ses collaborateurs7 ontmontré comment le management en tantque "pouvoir de la science" et "science dupouvoir" est de moins en moins le champd’amateurs, il se "scientise" de plus enplus. Par conséquent le pouvoir n’est plusdans les mains de chefs "omnipotents" àqui l'on peut s’opposer ou résister. Ilréside "désormais dans les rouages, lesmécanismes et les procédures, l’appa-reillage, les dispositifs des organisations,plutôt que dans les individus qui les fontfonctionner (…). Ce sont donc les règles,les politiques, les dispositifs de l’organisa-tion, et non plus les décisions du chef, quigouvernent la vie quotidienne. Les inves-tissements et les conflits inconscientsmajeurs ne sont plus vécus dans le rapportaux chefs mais à l’organisation. On nefantasme plus sur le chef, devenu simpleagent de l’organisation, mais sur l’organi-sation elle-même." (op cit p. 250).Les procédures qu’on voit fleurir de plusen plus dans les organisations, quel quesoit leur type, ne sont plus des protocolesou des règles élaborées dans un coin parquelques bureaucrates zélés ou en mal dereconnaissance, mais le résultat d’unsystème fonctionnant de manière globaleet aboutissant à des formes plus ou moinstotalitaires. L’avènement des NTIC permetà ce système d’asseoir son contrôle sur lesmoindres détails de la vie d’une organisa-tion. Il suffit dorénavant de définir lesrègles, de les mettre dans les "tuyaux" (lesfameux systèmes d’information) et tout lemonde se trouve obligé de fonctionner àl'identique.

Cette homogénéisation des modes defonctionnement quel que soit le type d’or-ganisation et les valeurs qui les instituentest dénoncé par plusieurs auteurs.

Eugène ENRIQUEZ8 avait déjà montré lesdifférences existant entre cinq types d’orga-nisation : charismatique, bureaucratique,technocratique, coopérative et en réseau.Ceci, aussi bien au niveau des valeurs insti-tuantes (les valeurs fondatrices) qu’auniveau de ce qui est institué (les modes d’or-ganisation et de fonctionnement).

L’auteur démontre comment, dans tout pro-cessus de modernisation ou de change-ment des organisations, il est nécessaire defaire attention à leur structure. Celle-ci neconstitue pas seulement un organigrammerépartissant le pouvoir et le travail, dansune vision mécaniste (structure bureaucra-tique) ou rationnelle (structure technocra-tique) mais c’est l’ensemble des valeurs etmodes de fonctionnement intériorisés parles individus qui fait la structure. On nepeut donc agir seulement sur l’un des para-mètres pour produire le changement.

On peut noter avec Jean-Claude ROUCHY9

que les transpositions d’outils et deméthodes d’une structure à une autre ne suf-fisent pas pour créer le changement ou l’ef-ficacité attendue.

7. PAGES Max (et coll.), "L’emprise de l’organisation",Desclée De Brouwer, 1998.

8. ENRIQUEZ Eugène, "Evaluation des hommes et structuresd’organisation des entreprises", in Connexions, Erès, n°19, 1976, EPI. "Structures d’organisation et contrôlesocial", in Connexions, Erès, n° 41, 1983.

9. ROUCHY Jean-Claude, SOULA-DESROCHES Monique,"Institution et changement : processus psychique et organi-sation", Erès, 2004.

13Les Cahiers de l’accompagnementEdition CARIF Poitou-Charentes

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14 Les Cahiers de l’accompagnement Edition CARIF Poitou-Charentes

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"C’est le cas des efforts de décideurs ou deconsultants dans certaines structuresbureaucratiques qui, pour les rénover ou enaccroître l’efficacité, préconisent sans lesavoir l’adoption de certaines caractéris-tiques des structures technocratiques (mana-gement, direction par objectifs, entretiensd’évaluation, gestion par les compétences,etc.). Ce sont des instruments et des tech-niques isolés de leur contexte d’ensemble etperdant du coup toute cohérence et toutsens. Un haut degré de confusion est atteintsi l’on conserve une structure pyramidale etune autorité hiérarchique en préconisantdes "outils" correspondant à des structuresplates et à l’autorité de compétence, eninstaurant des groupes transversaux parprojet dans une autre logique. Ces groupesde travail inter-services, mêlant les niveauxhiérarchiques, peuvent à tout moment êtrecontestés et voir leurs élaborations annuléespar une autorité hiérarchique qui peut sesentir menacée de cette situation para-doxale."

Historiquement, l’usage des procédures aété initié dans les structures bureaucra-tiques au moment de la création desgrandes administrations, ce qui a, auniveau des valeurs instituantes, constitué(peut constituer encore) un réel progrès ; lafinalité étant en effet de fournir le mêmeservice pour les citoyens, de manière éga-litaire et d’éviter toute discrimination, favo-ritisme ou népotisme, caractéristiques de lasociété traditionnelle et des relations infor-melles. Ces procédures se sont muées, parla suite, en un rituel bureaucratique, en

bureaucratie perdant toute capacité derenouvellement et d’adaptation à uneréalité changeante et de plus en plus com-plexe. Le résultat en a été une perte de senset d’efficacité, qui finit par remettre encause l’administration elle-même. Que n’a-t-on glosé sur les fonctionnaires "ronds decuir", "fainéants", l’administration inca-pable de se réformer et autres qualificatifssubjectivant ou idéologisant les causesd’une telle difficulté de changement. Encherchant à imiter l’entreprise privée, prisecomme modèle, en empruntant certains deces méthodes et outils de management à"l’anglo-saxonne", les promoteurs de cetype de changement n’ont pas vu qu’on nepasse pas comme cela d’une structure detype bureaucratique à une autre de typetechnocratique et qu’il fallait considérer lacohérence d’ensemble du système.L’aveuglement a été parfois idéologique(moins d’Etat et plus de marché), parfoistechnique (il suffit d’utiliser les méthodes demanagement et les outils des entreprisesperformantes) et parfois les deux à la fois.

En guise de résumé…

Les procédures représentent un mode defonctionnement :- centré sur le faire (évacuant le sens),- évitant la subjectivité,- ayant une vision de la réalité positive et

fonctionnaliste,- intériorisé par les acteurs,- visant une efficacité (optimum sur les

moyens et résultats à court terme) et uncontrôle sur les moyens et les conduites.

15Les Cahiers de l’accompagnementEdition CARIF Poitou-Charentes

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LE TRAVAIL SOCIAL,L’ACCOMPAGNEMENT ET LES TENSIONS AVEC LA LOGIQUE PROCÉDURALE

Une des caractéristiques du mode de fonc-tionnement par les procédures, comme onvient de le voir, est que ses promoteurs netiennent pas compte du contexte et des struc-tures organisationnelles dans lesquels ilsveulent le mettre en place. C'est comme s’ilexistait un mode de fonctionnementrationnel et efficace quels que soient les butset les valeurs d’une institution, d'une organi-sation, ou que ce mode de fonctionnementn’était pas lui-même porteur de ses propresvaleurs et logiques d’action. Cette "dépoliti-sation" (absence d’interrogation sur les butset finalités, sur les intérêts des acteurs en pré-sence) est une caractéristique importante dela gestion par les procédures.

Dans le cadre du travail social, l’accompa-gnement par des professionnels repose,comme le souligne Brigitte BOUQUET10, "surtrois principes fondamentaux : l’action indivi-duelle (chaque individu vit une situation parti-culière et on doit y répondre de manière per-sonnalisée), l’approche globale des pro-blèmes d’une même personne et l’action col-lective. Mais celle-ci, poursuit-elle, s’est pro-gressivement effacée dans les années 90, àcause des dispositifs légaux qui privilégient deplus en plus la réponse ponctuelle, frag-mentée, et ce malgré le nouveau référentiel dudéveloppement social local (qui reste plus unerhétorique qu’une réalité). C’est cette nouvellelogique de la prestation de services qui

explique la grande souffrance des travailleurssociaux". Nous voilà ainsi fixés sur les moda-lités et les conséquences de l’introduction deslogiques procédurales dans le travail social.

Les contradictions et tensions vont appa-raître sur différents niveaux :• action individuelle/règles et traitement

homogènes,• approche globale/morcellement et

fragmentation,• prise en compte de la subjectivité et du

vécu/objectivité réduite au comporte-ment manifeste,

• suivi à moyen et long terme/réponseponctuelle et évaluation à court terme,

• mobilisation et co-production par lapersonne accompagnée/logique deprestation de service.

Il n’est pas nécessaire de continuer la listepour s’apercevoir comment le modèleimplicite de la logique procédurale reste lemodèle marchand (vente de service) danslequel le besoin de contrôle amène à l’éva-luation des résultats à court terme et où l’ef-ficacité globale des politiques et dispositifsest tronquée par la simple observation dela réalisation des actions ou de la mise enœuvre des moyens (centration sur le faire).On est dès lors autorisé à se poser la ques-tion de l’efficacité du fonctionnement pro-cédural, au-delà de sa dénonciation àcause de la souffrance et des tensions qu’ilsuscite. Cette souffrance vient des injonc-tions paradoxales vécues par les tra-vailleurs sociaux entre leur professionna-lisme (l’art de leur métier), leur exigence

10. Ethique et travail social, une recherche de sens. Brigitte

BOUQUET, DUNOD, 2003.

16 Les Cahiers de l’accompagnement Edition CARIF Poitou-Charentes

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de résultats face aux situations de préca-rité, et des procédures et des moyens defonctionnement de plus en plus aliénantsou inadaptés.

L’interrogation sur l’efficacité et l’effi-cience du mode de fonctionnement procé-dural doit être, à notre avis, au centre desréflexions des travailleurs sociaux, aussibien dans une perspective critique (et decontestation) des finalités (masquées) etdes modes opératoires de ces procéduresque dans un projet de dépassement etd’invention de nouveaux dispositifs d’in-tervention plus adaptés à la réalité de leurmétier et à ses spécificités.

De l’inefficacité des démarches et politiques procédurales dans le champ socialLes champs juridique et plus récemmentinformatique ont servi de "modèles" de défi-nition et de description de ce que doitcontenir une procédure, entendue à la foiscomme un processus de traitement de l’infor-mation et de résolution de problèmes, maisaussi comme un ensemble de prescriptionsdestinées à fixer les rôles, droits et devoirsdes acteurs. En effet, dans le champ juridiqueon trouve des notions d’obligation et deresponsabilité des différents acteurs, alorsque dans le champ informatique on retrouvela notion de traitement de l’information sousforme d’algorithmes et de raisonnementbinaire en oui/non, ou présence/absence.

La visée reste, et c’est là une des sources dela limite des procédures, une "délimitation"des champs des possibles et une anticipa-

tion forte de ce qui peut se passer. Ainsi setrouvent évacuées dans ce raisonnement, etsurtout dans les modalités de sa transposi-tion dans d’autres champs, les situationscontradictoires ou conflictuelles ainsi queles situations complexes et incertaines. Cesdernières ne peuvent être facilement trai-tées sans l’intervention des sujets et acteursde la situation qui vont leur donner sens etagir en fonction du sens ainsi attribué.

De ce point de vue et comme le noteEmmanuel DIET, "les procédures organi-sationnelles apparaissent d’embléecomme radicalement différentes aussibien des procédures juridiques et de leurfinalité de régulation symbolique, que desprotocoles scientifiques, soumis à l’inter-rogation critique et à la vérification,qu’elles miment dans le faire-semblant del’imposture… La logique du faire fonc-tionne comme productrice de l’impossibi-lité de penser et même de figurer".

On peut ainsi montrer les limites des pro-cédures et donc leur inefficacité sur les dif-férentes fonctions qu’elles cherchent leplus souvent à satisfaire :

• La fonction politique : Il s’agit de laprise en compte de l’intérêt, des droits etobligations des différents acteurs ainsique la définition du champ de responsa-bilité et de pouvoir des uns et des autres.Une "bonne procédure" serait, dans cecas-là, une procédure dans laquelle l’en-semble des intérêts, droits et obligationsseraient pris en compte. On peut cons-

17Les Cahiers de l’accompagnementEdition CARIF Poitou-Charentes

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tater, a contrario, que dans le cas où laprocédure est vécue comme trop contrai-gnante, peu adaptée à la réalité, ou peumobilisatrice, c’est qu’en amont de samise en œuvre, souvent, il n’y a pas eusuffisamment de partage et d’élaborationcommune autour des objectifs et des fina-lités de ladite procédure. La procédure estsouvent présentée uniquement sur leregistre de la rationalité instrumentale etde la recherche d’efficacité ou de confor-mité, comme si ses promoteurs n’avaientaucun autre objectif (politique, le leurnotamment) dans sa mise en œuvre.

• La fonction technique : Il s’agit desaspects stratégiques, techniques et organi-sationnels contenus dans la mise en œuvrede la procédure. Si on peut constater queles approches techniques et organisation-nelles ont permis un développement impor-tant dans le sens de la rationalisation et del’efficacité des processus de traitement del’information et, dans une certaine mesure,de la décision, il n’en demeure pas moinsvrai que la centration sur la rationalisationet la mise sous contrôle de certaines varia-bles d’action définissables a priori ont eupour conséquence de scotomiser voire delaisser de côté et en dehors du processus detraitement d’information d’autres variables,dites parfois irrationnelles, car relevant dela subjectivité des acteurs et ne pouvant êtreobservées qu’a posteriori. La difficulté dugestionnaire à prendre en compte ce typede variables l’amène à les considérercomme irrationnelles, susceptibles soitd’être laissées de côté, soit de devoir se

conformer à une norme qu’on peut du coupmieux maîtriser et anticiper, ne serait-ce quedans les tableaux de bord chiffrés avec desindicateurs présélectionnés et pas toujourssuffisamment pertinents !

• La fonction psychologique : Il s’agit dubesoin de l’individu d’avoir un contrôle surla réalité, angoisse archaïque d’autantplus forte que la réalité devient complexeet chargée d’incertitudes. Ce besoin decontrôle est d’autant plus satisfait quand laprocédure mise en place permet une cer-taine efficacité, d’où un renforcement,parfois obsessionnel de la tendance àfabriquer des procédures. Dans le cas oùla procédure ne marche pas, elle risque desusciter encore plus d’angoisses qu’elle nepermet d’en endiguer. Un autre cas estdécrit par des chercheurs sur la souffranceau travail qui peut résulter d’un décalageentre le mode de traitement des problèmesprévu par la procédure et la réalité vécuepar les personnes en situation. Ce déca-lage, dans la mesure où il n’est pasreconnu, par la hiérarchie notamment, vasusciter une angoisse et une souffrance autravail liées à la contradiction entre l’obli-gation d’appliquer les procédures et l’im-possibilité de cette application, ou à latension "déniée" entre la procédure et laréalité vécue par les personnes.

Le champ social en général, et l’accompa-gnement socioprofessionnel ou socio-psychologique en particulier, sont caracté-risés par la complexité des dimensions àprendre en compte (caractéristiques de la

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personne accompagnée, cadre et dispositifinstitutionnel de travail, multiplicité et variétédes fonctions, des compétences et desappartenances des intervenants, multiplicitédes buts et plus ou moins grande transitivitédes objectifs poursuivis, interdépendancedes structures et collectifs de travail, etc.).Quand une démarche procédurale échoueà intégrer l’ensemble des facteurs, elledevient, sinon inefficace, du moins unfacteur supplémentaire de stress et decontrainte. Dès lors, les différents acteursvont l’utiliser, soit pour affirmer leur pouvoiret imposer leur logique, soit pour se pro-téger face au risque anticipé, craint, denon-atteinte des résultats. La centration sur"le faire procédural" devient ainsi l’objectifet le mode de coordination et d’évaluation,en place et lieu d’une véritable coopérationet mobilisation vers l’atteinte des objectifs.L’énergie ainsi dépensée par les acteurs,soit dans le respect scrupuleux de procé-dures et de cahiers des charges techniquesdans leurs moindres détails, soit dans larecherche de leur contournement, finit parépuiser les ressources qui doivent êtredéployées dans l’invention et l’imaginationcréatrice de dispositifs de travail adaptés àl’esprit de la loi et aux besoins des per-sonnes accompagnées.

De la nécessité d’adaptation et d’innovation dans la conceptiondes dispositifs et des pratiquesd’intervention etd’accompagnementContraint par la logique procédurale etadministrative, la réduction et/ou la justifi-cation de ses moyens et ressources, sommé

de dégager ou de montrer des résultatstangibles, le champ de l’accompagnementse trouve obligé de s’adapter à ces nou-velles donnes et de développer de nou-veaux dispositifs et pratiques d’interven-tion. Pour ce faire, la crise qu’il traversedoit pouvoir l’aider à engager uneréflexion et des pratiques nouvelles.

• Une réflexion et une élaboration internede son identité et de sa pratique : Il estimportant que chaque organisme ou struc-ture puisse engager une réflexion en interne,sur sa raison, ses valeurs fondatrices, sesmodes de fonctionnement, d’intervention etsur sa pratique. Il faut ainsi pouvoir élaboreret partager en interne l’identité et la spécifi-cité de chaque structure ou établissement.Cette identité ainsi que les valeurs qui laconstituent ne doivent pas rester indéfinimentinscrites dans le marbre mais être interro-gées, revisitées en fonction de l’évolution desdemandes des publics et des contextes insti-tutionnels d’exercice du métier. Cette interro-gation est en elle-même facteur d’évolutiondes pratiques et de créativité.

• Une réflexion et une coordination sur lesdispositifs d’intervention transverses : Lesdispositifs d’accompagnement font rare-ment appel à une seule structure : le travailest assuré la plupart du temps de manièreinter-institutionnelle et comporte l’interven-tion de plusieurs professionnels. Si les acti-vités et tâches sont souvent réparties dansune logique administrative et bureaucra-tique, chaque activité relevant en effet d’undomaine de qualification précis et même

19Les Cahiers de l’accompagnementEdition CARIF Poitou-Charentes

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codifié, il manque souvent l’intégration deces activités dans un ensemble cohérenttendant vers un but et nécessitant des tempsde coordination et de transformation del’information dans un espace collectif. Ils’agira donc de bien identifier les objectifset contributions de chaque structure ouintervenant et de les relier vers une finalitéet un but commun à l’ensemble du systèmed’action. Le partage du but commun, l’inté-gration de la contribution et des compé-tences spécifiques à chaque structure ouintervenant sont nécessaires à la coordina-tion de l’ensemble.La sortie du système bureaucratique actuelde répartition des missions, objectifs etbudgets où le financeur est en même tempscelui qui décide, où la régulation se faitessentiellement de manière administrativesur les moyens, est nécessaire pour laisserplace à des espaces multi-partenairesayant une fonction de coordination, d’éva-luation et de transformation de l’informa-tion en vue d’ajuster les dispositifs et pro-duire de nouvelles idées. L’administration(centrale ou régionale) pourra garder unrôle d’animation et de synthèse des travauxde ces espaces, en vue d’ajuster les poli-tiques et dispositifs de manière institution-nelle. Cette conception, aux antipodes dela démarche procédurale, va nécessiter desitérations successives entre la conceptiondes politiques, leur mise en œuvre et leurajustement sur le terrain au travers d’éva-luations intermédiaires et finales avec lesprofessionnels eux-mêmes.

• De nouvelles pratiques de contractuali-sation et d’évaluation : Sortir de la

logique procédurale implique l’intégrationde la complexité des problèmes dans lechamp de l’accompagnement et, parconséquent, le refus de leur réductiondans la rédaction des cahiers des chargestechniques. Ce document très important etassez inducteur par ailleurs des stratégiesde réponse et d’évaluation, doit fairel’objet d’un soin particulier. La participa-tion, dans la mesure du possible, des pro-fessionnels du secteur à sa rédaction estune condition d’appropriation et de miseen œuvre par la suite. Cette rédactiondoit, par ailleurs, éviter de trop orienter lasolution. Elle devra clarifier l’esprit et lebut à atteindre et laisser la possibilité auxprofessionnels, en leur faisant confiance,de créer et proposer des solutions adap-tées aux problèmes posés. L’orientationsur les buts et la liberté laissée sur leschoix des moyens et des méthodes pour yarriver constituent des facteurs favorablesà la créativité et à l’innovation qui carac-térisent le secteur de l’accompagnement.

Exiger une évaluation, sans tomber dans lacaricature des artefacts actuels, est unedémarche légitime de la part des comman-ditaires. Il faut qu’elle soit mieux articuléeaux objectifs et finalités de chaque action etdispositif. Au lieu que les démarches d’é-valuation soient "normées" et imposées,comme c’est souvent le cas par les com-manditaires, il serait mieux de demanderaux professionnels eux-mêmes de proposerdes modes d’évaluation des objectifs qu’ilsveulent poursuivre et sur lesquels ils s’en-gagent. Que ce soit en termes de résultats

20 Les Cahiers de l’accompagnement Edition CARIF Poitou-Charentes

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ou de mise à disposition de moyens, l’en-gagement des professionnels devra porteraussi sur la meilleure façon d’évaluer et devérifier les progrès réalisés.La communication sur les visées et le che-minement nécessaire à tout processus d’ac-compagnement doit aider les profession-nels à mieux faire connaître "l’art" de leurmétier aux commanditaires et responsablesinstitutionnels et à partager les principes etfinalités de chaque type d’action.

• Un professionnalisme en partage ànourrir et à développer : les valeurs par-tagées par un grand nombre des profes-sionnels de l’accompagnement reposent,comme le note Saül KARSZ11, sur troisprincipes : "le principe de charité (on dirale comportement d’aide de manièrelaïque) ; la prise en charge, basée sur laconsidération éthique que chacun peutjouir des mêmes droits (au logement, à lascolarité, au travail, etc.) ; la prise encompte, qui considère que l’usager doitparticiper à l’accompagnement qui lui estproposé". Ces valeurs, aussi importanteset mobilisatrices soient-elles, ne suffisentpas à développer un professionnalisme ensituation, professionnalisme qui doitgarder sous les yeux les contraintes etlogiques des systèmes sans laisser de côtéou tronquer par quelque procédé opéra-toire et par la logique technicienne, les exi-gences du "monde vécu" des exclus.

Il s’agit de créer et de développer desespaces d’échanges et d’analyse des pra-tiques entre les professionnels. Ces espacesseront, de fait, des lieux d’élaboration et de

proposition d’alternatives à la logique pro-cédurale. Comment, en effet, sortir d’uneposture de dénonciation et de critique decette logique, de plus en plus dominantecar intériorisée par les commanditaires etles professionnels, pour aller vers laconception de dispositifs d’intervention pluscohérents, plus efficaces et porteurs de senspour chacun des acteurs ? Créer du lien,rassembler ce qui est découpé a priori parl’organisation du travail et la répartitiondes rôles, clarifier et articuler les différentstypes d’intervention, permettre à la per-sonne accompagnée de se retrouver elle-même et de mieux profiter des apports etdu travail avec chacun des intervenants :tels peuvent être les objectifs et visées deces dispositifs à élaborer et à expérimenteravec les différents interlocuteurs.

CONCLUSION

Nous avons cherché à montrer commentla logique procédurale est le résultat detrois éléments conjoints :• les contraintes imposées par le système

économique (réduction et contrôle descoûts),

• les logiques de rationalisation organisa-tionnelle du management post-modernecaractérisées par la technicisation et ladésubjectivation,

• les résonances intrapsychiques et lesmécanismes de lutte contre l’angoisseainsi que la volonté de maîtrise du réelspécifiques à la posture procédurale.

11. Philosophe et sociologue, il dirige depuis 1989 le sémi-naire "déconstruire le social" (Paris Sorbonne). Il a publié"Pourquoi le travail social ?", Dunod, 2004 et dirigé"L’exclusion, définir pour en finir", Dunod, 2000.

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Les contradictions entre le fonctionnementprocédural et le métier d’accompagnateuront pour conséquences d’appauvrir lespossibilités de créativité et d’adaptabiliténécessaires au métier et de renforcer lemalaise ressenti par les professionnelsdans l’exercice de leur métier. Pour sedégager de ce fonctionnement, les profes-sionnels, ainsi que les commanditaires,doivent refonder leur mode de coopéra-tion et de travail. Les cahiers des chargestechniques doivent refléter la réalité duterrain dans sa complexité et valoriser lesexpériences innovantes. Les objectifs et les

dispositifs d’accompagnement doiventêtre pensés comme un ensemble et éviterd’être morcelés et découpés en actions deprestations de services sans lien les unesavec les autres. L’évolution des personnesaccompagnées est un processus long,spécifique à chacune d’elles, mais quinécessite un cadre et des dispositifsadaptés et pertinents. Le partage entre lesréseaux de professionnels, mais aussi descommanditaires, est à même de favoriserl’émergence et l’élaboration de ces dispo-sitifs et pratiques nécessaires à l’accom-pagnement aujourd’hui.

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Cet atelier part du constat que l’accompa-gnement met en œuvre des processuscomplexes, de l’ordre de l’imprévisible,dont la logique semble en contradictionavec celle impulsée par la volonté derespecter les cadres posés a priori par lescahiers des charges du commanditaire.

Ainsi, les propositions pédagogiques, enmatière d’accompagnement, semblentconnaître parfois le même inconfort qu’unepersonne assise entre deux chaises : d’uncôté des praticiens, de l’autre des com-manditaires, chacun ayant la sensation dene pas toujours se faire entendre.C’est ainsi que pour les premiers, les for-mations souvent trop courtes ne favorisentpas un accompagnement dans la durée.Alors que les cahiers des charges neparlent que d’évaluations et critères deréussite, il n’est pas facile de faire entendrequ’il y a lieu d’aller au-delà du succès oude l'échec à l’examen et de tenir égalementcompte des réussites d’un projet profes-sionnel et/ou de vie. La réussite ne ren-voyant pas uniquement à un diplôme ou àun emploi, elle valorise aussi un processus.Le cadre du financement semble restreindrequelquefois l’évaluation en ne favorisant pasdes évaluations de type qualitatif et s’inscri-

vant dans la durée. Et puisqu’il faut rendredes comptes, l’idée n’est pas loin "qu’on nenous fait pas confiance" et l'on peut se sentircontraint, voire "fliqué" avec le corollaire dela menace "on va réduire mon budget".

Pour les seconds, il y a quelquefois constatd’absence "de remontées de terrain" ou"d’informations utiles" dans les bilans. Lescommanditaires et/ou financeurs seposent souvent des questions sur : "quisont vraiment les bénéficiaires des forma-tions ou de l’accompagnement ? En quoileur sont-ils utiles ? Qu’en font-ils ensuite ?Quels changements vont être induits, et àquels indices le verra-t-on concrètement ?Les durées estimées par les praticiens sejustifient-elles vraiment ? Pourquoi 30heures et pas 24 ou 50 par exemple ?".Les mêmes objets peuvent paraître telle-ment différents lorsqu’ils sont présentéssous un autre angle : l’ombre d’uncylindre n’est pas la même selon qu’il estéclairé par le dessus (l’ombre portée estun cercle) ou par le côté (l’ombre est celled’un rectangle)12. Travailler ensembledevient possible dès lors que le praticienprend aussi en compte l’éclairage et lebesoin du commanditaire.

12. Charles Hampden-Turner, 1990, Atlas de notrecerveau, Les éditions d’organisation.

Compte-rendu des ateliers

ENTRE COMMANDITAIRES ET PRATICIENS : QUELS ESPACES DE RÉGULATION DES CONTRAINTES POSÉES-IMPOSÉES

PAR LES CAHIERS DES CHARGES ?

Animation : Magali HUMEAU, AGEVIF-CAFOC

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La fonction de régulation, permettant defaire des feed-back, d’évaluer pour modi-fier, laisse aussi une place aux partages depoints de vue, aux mises en perspective. A-t-elle sa place en amont, pendant et en avalde la mise en place des actions d’accompa-gnement pour faire évoluer ses cadres, sescontraintes ? Faut-il lui faire une place ?Comment l’investir ? Qui doit l’investir ?C’est à ces questions que cet atelier atenté de répondre, à partir de deux témoi-gnages, par des échanges et débats surl’opportunité, l’utilité de ces espaces derégulation, en croisant les points de vue :commanditaire, opérateur et usager.

Première intervention : "La contrainte comme point de départ, socle, cadre deréférence, règle du jeu".

Grâce KRASKA, ingénieur en ingénierie deformation, formatrice à l’Université de LaRochelle - IDEA (Institut du Désird’Enseigner et d’Apprendre), commenceson intervention par deux illustrations13,prises hors du domaine de la formation,rendant compte du fait que les cahiers descharges posés, a priori, par des financeursou commanditaires peuvent être aussi l’oc-casion d’échanges, de régulation et demarges de liberté pour tous les partenaires.

Nos limites sont-elles celles de nos institu-tions ou celles que nous nous fixons nous-mêmes, centrés que nous sommes sur unelogique "proscriptive" (ce qui n’est pasprescrit est donc interdit, ce qui clôt toutepossibilité nouvelle non prévue) ?

Concrètement, comment investir les cadresimposés a priori à l’accompagnement ?Grâce KRASKA prend l'exemple de la for-mation de formateurs "Ingénierie de l’ap-prentissage Né pour Apprendre" qu'elleproposait dans le cadre du dispositifSafran14 dont la démarche est fondée surl’accompagnement des stagiaires dans ladurée. Oui, mais comment faire avec desstages courts financés sur la modalité duface à face, qui s’arrêtent une fois lesjournées d’intervention finies ?

Pour dilater la durée de l’accompagne-ment des personnes, deux phases, souventoubliées de la situation pédagogique, ontété investies : l’amont du face à face etson aval :1. L’amont est investi par un petit travailque réalisent les participants : il porte surun questionnement et un état des lieux dontles personnes seront déjà porteuses dèsleur premier jour de stage. Le phénomèned’inertie dans le début d’une rencontrejoue moins alors, puisque les personnessont déjà en marche. Cette démarche a étéinitiée par Hélène TROCME-FABRE, auteurdes sept films Né pour Apprendre15 utilisésdans la formation.

13. L’une fait référence au jeu du monopoly, l’autre montrecomment un projet peut dépasser largement le cadreinitialement prévu en ne le rendant pas limitant puis-qu’on peut en sortir tout en le conservant.

14. Safran est le dispositif d’appui à la professionnalisationdes acteurs de l’information, de l’accompagnement desparcours et de la formation proposé en Poitou-Charentes.Il est mis en oeuvre par le GIP Qualité de la formation etfinancé par la DRTEFP et la Région Poitou-Charentes.

15. 1995, vidéogramme en sept séquences, ENS Editions, Lyon

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2. L’aval du stage permet d’exploiter lequestionnaire d'évaluation préparé par leGIP Qualité de la formation et rempli ledernier jour par les participants pour luidonner une nouvelle dimension. Toutes lesréponses à ce questionnaire sont saisiesde manière exhaustive. Les réponsesquantitatives font apparaître le degré desatisfaction pour chacun des items, et lesréponses qualitatives sont regroupées demanière thématique pour faire émergerdes pistes. Le tout prend la forme d’undocument (4 pages, type journal àcolonnes) étayé d’images pédagogiquesprises sous forme de photos pendant laformation et légendées avec des phrasesfortes et idées-clés de la formation.Peuvent y prendre place aussi les repré-sentations et questionnements de départ,les perspectives envisagées par chacun àl’issue de la formation.

"Rendre compte de …" au delà de lacontrainte, une démarche participative

Le document final est envoyé deux à troismois après la fin de la formation àchaque participant avec un courrier l’invi-tant à nous renvoyer, dans les six mois, unétat des effets de la formation, sur le planpersonnel et/ou professionnel (dans sapratique, avec ses collègues et institution,avec les stagiaires ou personnes accom-pagnées). Il est aussi remis, avec les origi-naux des réponses, à l’organisateur (iciles directeurs des services de l’Université -IDEA et SUDEF) et également au com-manditaire/financeur.

Régulièrement les participants nous fontpart de l’intérêt de la démarche. Cetaccompagnement à distance investit lemoyen et long terme et le bilan contribueà favoriser un ancrage dans la durée. Deséchanges a posteriori ont lieu avec desparticipants, des contributions écrites ulté-rieures nous parviennent.

En faisant des renvois d’évaluation auxcommanditaires et financeurs sous cetteforme, l’objectif était de répondre à l’ab-sence ressentie de remontées du terrain.Un des bénéfices secondaires est que nousnous sommes vus proposer d’augmenterde quatre à cinq jours la durée de la for-mation, tant les participants avaient pointéle décalage entre la densité et la durée decelle-ci. Ces retours a posteriori ont permisd’adapter les contraintes posées a prioridans les cahiers des charges.

Dans d’autres régions, ce type de démarcheexpliqué en amont nous a amenés avec cer-tains commanditaires et financeurs àmoduler la durée de la formation (déclinéeà raison de deux jours par an durant quatreans en région limousine, soit huit jours aulieu de cinq pour le Poitou-Charentes), voireà transformer la formation en mise enappétence (un module seulement d’initia-tion à la démarche en région strasbour-geoise ou picarde), ou même de déve-lopper un projet d’accompagnement per-sonnalisé aux besoins d’une région (deuxmodules de deux jours, puis une formationde six jours en région corse, avec unaccompagnement à distance pour une pro-duction collective a posteriori).

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Sortir du cadre initial et élaborer unprojet

Les participants expriment souvent en finde formation la volonté de se revoir pourrefaire le point et continuer à réfléchirensemble ; de leur côté, les financeurs etcommanditaires se demandent quelque-fois à quoi peut servir cette formation-ciou celle-là, ce qu’en disent les participantset surtout ce qu’ils en font après.

Un projet s’est imposé et s’est construit surun partenariat IDEA/GIP Qualité de laformation/SUDEF : une Journée sur lesEffets de la formation pour répondre àcette double demande en invitant d’an-ciens participants de la formation Népour Apprendre de 1997 à 2003.

Un travail de réflexion a donc été réaliséen avril 2004 sur le concept "d’effets de laformation". Trois témoins ont égalementprésenté leur réflexion ou leur pratiqueaprès la formation. Le groupe a partagéconstats, questionnements et explicitations.Trois pistes ont conclu cette journée : d’au-tres présentations de mises en œuvre surle terrain en bénéficiant de l’éclairage dugroupe ; d’autres journées de ce type quirépondent à un besoin d’évaluation etd’arrêt sur image ; l’exploration d’unethématique comme le "changement" et"les déclics". Se pose aussi la question del’exploitation de tout ce matériau désor-mais à notre disposition : productionsécrites individuelles et collectives, témoi-gnages et quelques images filmées destravaux et des témoignages.

Comment accueillir les différentescontraintes ?Chacun d’entre nous a une représentationde la notion de contrainte qui peut être unfrein dans ses projets ou au contraire uneforce. Si je veux décoller en deltaplane, jene peux le faire que face au vent qui m’op-pose sa force. De manière intéressante,c’est grâce à cette énergie qui semblecontraire que je pourrai décoller : en yfaisant face, je pourrai me poser sur lesfilets d’air et utiliser cette énergie qui devientmon partenaire pour décoller et voler.

Ce qui m’anime avant tout, c’est l’utilisationde la contrainte comme énergie de départpour avancer ensemble, sachant que "l’éla-boration d’un projet requiert au moins troisconditions : que celui qui en est porteur"pense" la réalité d’abord comme insatis-faisante, ensuite comme transformable etenfin qu’il réussisse à l’imaginer différente",comme le souligne P. MARTIN16.

Seconde intervention : "De l’utilité du cahier des chargeset des instances de régulation"

Pour Annick LE MEAUX, chargée demission à la DDTEFP 79 (Direction DuTravail de l’Emploi et de la FormationProfessionnelle), responsable du serviceinsertion, formation, développementlocal, et Christophe MEUNIER, formateurà la Chambre de Métiers 79, le cahier des

16. 1992, "Le projet : un défi nécessaire face à une sociétésans projet", l’Harmattan

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charges, en tant qu'outil procédural, doitpermettre de générer des espaces deconcertation pour partager, entre tous ettout au long des prestations, le sens de cequi se trame dans les accompagnements.S’il y a des discordes entre les acteurs del’accompagnement (commanditaires,prestataires, usagers) cela est dû à desécarts de valeurs, d’où la nécessité demettre en place des espaces de concerta-tion et d’évaluation pour identifier, recon-naître et partager les valeurs de l’accom-pagnement. Les cahiers des chargesdoivent prévoir des instances de régula-tion pour (ré)interroger les besoins et ana-lyser les effets produits sur les personnes.

Dans le cadre d’une action d’accompa-gnement vers l’emploi de personnes han-dicapées, commanditée par la DDTEFP 79en 2001, plusieurs espaces de régulationont été mis en place :- Analyse des besoins du public concernéen partenariat avec la CRAMCO (CaisseRégionale d’Assurance Maladie duCentre Ouest), la MSA (Mutualité SocialeAgricole), l’EPSR (Equipe Professionnellede Soutien et de Reclassement des per-sonnes handicapées) et des associationsreprésentant les personnes handicapées.- Réunion mensuelle des partenaires, ycompris le prestataire par la présence desaccompagnateurs, pour valider lesentrées des personnes dans le dispositif etpour faire évoluer les prestations.

Dans la réalité du terrain, ces temps derégulation ont permis :

- de prendre en compte, par les échangesentre partenaires, la situation globale dubénéficiaire,

- d’éviter l’isolement de l’accompagnateurface aux problèmes des accompagnés,

- de changer de point de vue en portantson regard sur les difficultés rencontréespar les accompagnés,

- de faire remonter les problèmes auxquelssont confrontés les acteurs du terrain.

Globalement, cela a été un gain en qualitéet cela a permis de faire évoluer concrète-ment les actions d’accompagnement.

Des espaces de régulation à fonctions multiples

Sur la base des témoignages et échangesqui ont suivi, nous avons identifié que lesespaces de régulation entre commandi-taires, financeurs, prestataires et usagersont des fonctions multiples :- Partager les insatisfactions et y remédier

ensemble.- Questionner les cadres/contraintes

posés a priori : pourquoi ces cadres-là ?Quel sens ont-ils ? Les reconnaîtrepermet en effet d’agir plus facilement del'intérieur, d’une certaine manière etparadoxalement de les alléger. Le cadrepeut ainsi devenir fédérateur.

- Inventer et négocier de nouvelles règlesd’action.

- Se décentrer par rapport à ses propresdémarches, les mettre en perspective.

- Modérer/éviter la méfiance réciproqueentre financeur, commanditaire d’uncôté et prestataire de l’autre.

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- Partager le sens des actions d’accompa-gnement.

Mais en revanche, installer de tels espacesne va pas de soi. Cela nécessite :- Une confiance entre les différents parte-

naires ou acteurs de l’accompagnement.- L’investissement dans une réflexion sur ce

qui est en jeu dans l’accompagnement.- La capacité à rendre compte auprès de

ses partenaires des informations perti-nentes sur les usagers : d’où viennent-ils ?Où les a emmenés l’accompagnement ?

- Inscrire ces espaces dans le temps, sur lemoyen ou le long terme.

Se pose la question de la place de l’u-sager dans ces espaces de régulation. Lesinstances de régulation prévoient souventla participation de représentants desaccompagnés. Ceci étant dit, et sachantqu’il ne devrait pas y avoir d’accompa-gnement sans l’adhésion de l’usager, lesactions qui le mettent face à l’accompa-gnateur laissent place à de multiples pro-cessus de régulation, où les uns et lesautres tâtonnent, bricolent, négocient,recherchent le sens de ce qui est en jeu.

Le cadre donné est un point d’ancrage et unrepère structurant de départ. Il est possiblede rester dans les limites de la prescriptioninitiale, de la respecter ET de construire enbonne intelligence des modalités de fonc-tionnement inédites. Il y a alors élargisse-ment des contraintes avec une prise encompte d’un environnement particulier et dece qui se joue avec ces acteurs-là et pas

d’autres. La mise en place d’espaces derégulation entre acteurs de l’accompagne-ment permet donc de prendre en compte lescontraintes tout en les assouplissant, tout enen jouant, selon les vécus et les phénomènesobservés sur le terrain.

Il y a néanmoins un risque à voir les pro-cédures s’alourdir par l’établissement de"procédures de régulation". Dans biendes cas, ces régulations se déroulent demanière implicite. L’installation d’ins-tances de régulation ne doit pas sup-primer ces capacités à réagir de manièreopportune. Il importe que l’ouvertureinduite par le questionnement des pra-tiques et de ses effets reste la préoccupa-tion centrale des acteurs de l’accompa-gnement. Si, comme l’affirme M. LAOU-KILI, les procédures en exprimant une évo-lution vers plus de rationalité sont unavatar de la modernité, voire de la post-modernité, en revanche, elles ne doiventpas occulter le sens souvent implicite desdémarches d’accompagnement. Ce senspouvant se travailler à l’intérieurd’espaces de régulation qui sont avanttout des espaces de partage entre les dif-férents acteurs de l’accompagnement.

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Comment concilier la rationalité des pro-cédures et les phénomènes affectifs inhé-rents à toute relation dont la relation d’ac-compagnement ?La mise en place de procédures a-t-elle unimpact sur la qualité de la relation ?

Un tour de table des participants permet àchacun d'évoquer son expérience enmatière de procédures. Le mot "procé-dures" dans cet atelier a été utilisé surtoutdans le sens d'"outils" tels que fiches-types,documents formalisés et formulaires diversdont les participants soulignent tous l'utili-sation dans leur structure pour l'accueil, lesuivi et l'évaluation des personnes reçues,les bilans des actions et dispositifs, plusrarement pour fixer le cadre des entretiens.

Une grande partie des échanges a traitéde la question de la pertinence des procé-dures, que ce soit en direction des bénéfi-ciaires ou des accompagnateurs et de lastructure qui les accompagne.

De l'utilité des procédures pour les bénéficiaires ?Les participants se sont entendus pour direque la procédure pouvait être au servicedu bénéficiaire. Les procédures au niveauindividuel constituent un outil au servicede la personne car elles sont une manièrede contractualiser avec le bénéficiaire,

par un engagement réciproque, et per-mettent de donner des repères : "ça a dusens, c'est écrit, signé". On donne uneplace à la personne. Un autre avis estémis sur ce sujet : l'écrit est "utile, impor-tant, investi pour nous (les accompagna-teurs), pas pour les bénéficiaires".

La procédure peut être une contraintepour l'accompagnateur, mais elle garantitune égalité de traitement pour chaquepersonne. La procédure peut faciliter l'ac-compagnement car elle met un cadre. Leproblème est que les procédures et les for-mulaires à remplir varient et se multiplientselon les financeurs, ce qui alourdit lesystème. Si les procédures sont troplourdes, elles deviennent un carcan.Sur le rôle de l'accompagnateur, onretiendra que :- "c'est de la responsabilité de l'accompa-gnateur de rendre les procédures plushumaines".- "il faut savoir s'approprier au mieux lesoutils pour accompagner les bénéfi-ciaires".

… et pour les accompagnateurs et les structures chargées de l'accompagnement ?Tout le monde s'entend également sur cesujet pour dire que les procédures "c'estcasse-pieds", "il y a beaucoup de pape-

EN QUOI LES PROCÉDURES MODIFIENT-ELLES LA RELATION ACCOMPAGNANT / ACCOMPAGNÉ ?

Animation : Elisabeth PELLOQUIN, CREAHI Poitou-Charentes

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rasse", "la paperasserie, c'est quelquechose d'imposé et lourd", "quand on ades financeurs multiples, il faut écrire lamême chose plusieurs fois dans leurs for-mulaires respectifs, c'est lourd, il y a uneperte de temps".Mais ils sont d'accord aussi sur le fait que,en l'absence de projet clairement définidans une structure, "on a un flou dans lesprocédures et on navigue à vue".

Le cadre de la validation des acquis de l'ex-périence (Université de Poitiers) est évoquéavec des procédures nombreuses, compati-bles ou non entre elles, émanant des institu-tions, des partenaires et des financeurs.Cette multiplication pose des problèmes dedates, de financement… on se demande s'ilne faudrait pas créer une procédure pour serepérer dans les procédures.

Les procédures, du "bricolage" de praticiens sur le terrain ?Les financeurs fournissent les documents etformulaires qui leur sont nécessaires, maisles acteurs sur le terrain construisent aussieux-mêmes, en équipe ou seuls, les outilsdont ils ont besoin :- "les outils de suivi sont élaborés par l'ac-compagnatrice elle-même, en fonction despersonnes bénéficiaires".- "nous utilisons des documents/formu-laires imposés par les financeurs et desdocuments conçus par nous-mêmes doncadaptés à nos besoins".- "nous avons modifié nos procéduresd'accueil et d'orientation : nous avonsopté pour des échanges simples avec la

personne ; auparavant, nous utilisions undocument à remplir, ce qui était fasti-dieux, formaliste."

Dans un service d'accueil familial pour lespersonnes âgées, on utilise une procédured'agrément très précise : visite au domi-cile, formulaires à remplir, puis la procé-dure d'accompagnement est assez floue,il n'y a pas de cadre précis. Les membresde l'équipe ont commencé une réflexionsur leurs pratiques et créent ensemble desoutils de suivi d'accompagnement.Une autre structure accompagne les por-teurs de projet dans leur démarche de créa-tion. Les outils reposent sur l'écriture par lesporteurs de projet de ce qu'ils ont en tête. Laprocédure évaluation/suivi se fait par uneentente entre le bénéficiaire et l'accompa-gnateur sur les objectifs fixés ensemble.

Concilier des intérêts divergents,un pari impossible ? Ou commentfaire avec les procédures ?Dans cette partie des échanges, sont évo-quées les difficultés que ressentent les pro-fessionnels à concilier les intérêts dufinanceur décrits dans les cahiers descharges et ceux des bénéficiaires :- "on est toujours pris entre deux choses :la procédure comme outil (son aspectpositif) et la procédure comme contrainte(son aspect négatif)".- "on a l'impression d'être dans un étauentre l'obligation économique d'un côté(les résultats de la structure) et la réalité dupublic" (cas d'une entreprise de travailtemporaire d’insertion).

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- "la notion de "rentabilité" de notremission peut être choquante, puisqu'ontravaille avec des personnes. Il peut yavoir un écart important entre la com-mande et la demande du terrain".

Pour une consultante en ressourceshumaines (coaching), "les procéduressont des outils qui nous permettent d'avoirune clarté, une lisibilité sur les objectifs etles stratégies à adopter pour y arriver.Elles sont formalisées et écrites, et permet-tent d'avoir de l'ordre (on en a besoin), ilfaut aussi laisser la place au désordre(créativité, oser, inventer) et avoir unmélange des deux".

Les procédures sont vivantes, elles doiventévoluer. Elles doivent être justifiées et com-prises, sinon elles deviennent un carcan.

Il semble que les financeurs exigent tou-jours mais on peut aussi leur faireentendre des choses. Par exemple, lesprocédures demandées par le financeurétaient basées sur des évaluations quanti-tatives. Après discussion, le financeur aaccepté d'intégrer des évaluations quali-tatives, à y mettre davantage la paroledes acteurs.

Dans le cas de l'exemple VAE : Commentquitter le mode artisanal (ce n'est paspéjoratif !) sur la partie stricte de l'accom-pagnement (caractère non obligatoire)pour arriver aux exigences au final d'unjury pétri de la culture de la norme ?Il y a aussi le problème du passage dutémoin : comment éviter qu'un candidat aità raconter sept fois son histoire de vie ?

L'opérateur rend des comptes au finan-ceur. L'opérateur contractualise avec lebénéficiaire. Quelle liaison ?

On peut regretter que les processus soientcloisonnés. Il faudrait partager ladémarche d'évaluation.

Quand des structures travaillentensemble, elles essaient d'harmoniserleurs approches et de donner du sens auparcours des personnes.

Pour une définition de la procédureUn des participants propose au groupe ladéfinition suivante :

Procédure : ensemble des règles, des for-malités qui doivent être observées, desactes qui doivent être accomplis pourarriver à une solution juridictionnelle ;ensemble de procédés utilisés dans laconduite d'une opération complexe.La procédure s'appuie sur un procédé,mais on l'a formalisé (écriture, schéma).Procédé : ensemble des actions quimènent à un résultat (= recette) côté prag-matique.Processus : ce qui se passe dans la réalité(= le réel).Procédure : méthode, marche à suivrepour obtenir un résultat (Petit Larousseillustré 2000).

Le tableau suivant a été proposé poursignaler les ambivalences, les contradic-tions que suscite la notion de procédure :

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Enfin, quelquesrecommandations…- Humaniser les procédures, ne jamaisperdre le sens. Les procédures ne sontjamais que des outils au service d'un but.- Intégrer les procédures (qui s'appuient le

plus souvent sur des documents écrits) dansl'accompagnement des publics proches del'illettrisme.- Harmoniser, évaluer les procédures.- Construire ou choisir, s'approprier lesprocédures, les faire évoluer, les faire vivre.

Points positifs Points négatifs

HarmoniserMoins de stressOffrir des repères pour réduire lacomplexitéOutil de "rentabilisation"GarantClarté, lisibilité

Incompatibilité de différentes procéduresPlus de stressLourdeur, lenteurCarcanComplexité

Partant de la définition suivante de lacontrainte : "Obligation qui m'incombe,mais que je n'ai pas choisie", l’animatricepropose à chacun des participants deréfléchir à la question suivante : Qu’est-ce que j’identifie comme unecontrainte dans ma pratique d'accompa-gnement ?

Après un temps d'auto-questionnement,chaque participant transcrit sous forme demots-clés (ou d’expressions) troiscontraintes repérées dans son contexteprofessionnel. Une fois cette identificationréalisée individuellement, chaque partici-pant présente au groupe une des sescontraintes en l'inscrivant dans un desquatre cadres proposés par l’animatrice :

1 - Le cadre législatif, réglementaire, poli-tique.

2 - Le cadre de la commande.3 - Le cadre technique (conditions de

réalisation de l’accompagnement).4 - Le cadre de la relation accompa-

gnant/accompagné.

Chaque présentation d'un mot-clé est l'oc-casion d'expliquer comment on perçoit cetélément comme une contrainte, de donnerdu sens à l'inscription dans l'un ou l'autredes cadres proposés.

Le tableau suivant reprend les élémentsprincipaux des échanges selon ces quatreentrées :

LES CADRES DE L’ACCOMPAGNEMENT :IDENTIFICATION ET TYPOLOGIE DES CONTRAINTES.

Animation : Sonia SPERONI et Anne GODIN, GIP Qualité de la formation

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33Les Cahiers de l’accompagnementEdition CARIF Poitou-Charentes

Les mots des participantsRemarques et commentaires

des participants

LE CADRE LEGISLATIF, REGLEMENTAIRE, POLI-TIQUE• Loi, réglementation

L'administratifTrop d'administratif

• Statut de la personneEntrer dans une "case"Les possibilités de financement

• Superposition des dispositifs de mesuresLes accompagnements multiplesLa communicationOrientation (de la personne)

• Orientation politiqueManque de "moyens" pour atteindre l'ob-jectif de l'actionLes possibilités de financement

Travail avec des partenaires différents.Interinstitutionnel. Lourdeur administrative. Loicontre l'exclusion, agrément de l'ANPE.Position humaniste : question du citoyen, prisede distance sur le législatif pour que lacontrainte de ce cadre devienne un catalyseur.

Il faut prendre en compte le statut de la personneavant de savoir ce qu'elle veut faire (âge,sexe…). Est-ce que la personne est dans "labonne case" ?

Une personne accompagnée par plusieurs per-sonnes en même temps. Accompagnementsubi. Voir plusieurs interlocuteurs. Il peut y avoirplusieurs commandes : les personnes sontorientées vers plusieurs choses, leur statut estengagé, ça engage aussi la position de l'ac-compagnateur. Réglementation du statut de lapersonne (cloisonnement).

Exemple : remettre au travail tout de suite desfemmes qui ne travaillent plus depuis 15 ans.

LE CADRE DE LA COMMANDE• Travail administratif

Rendre compte des résultatsLa notion de résultatL'obligation de résultat(s)

• Durée de la prestation/droits heure

• Modalité "stage" Le temps (cité 3 fois)

C'est une contrainte pour l'accompagné et lecommanditaire. Missions conventionnées.Comptabiliser le nombre de CDD, CDI. Il y al'obligation de moyens, mais l'obligation derésultats peut être contre productive (parrapport au chemin parcouru par l'accom-pagné).

Le paiement d'heures stagiaires. C'est une logiquede nombre d'heures par stagiaire et pas unelogique d'objectifs de la personne : c'est le tempsqui est financé. Le temps financé dans la com-mande ; l'écart par rapport au temps réel de l'ac-compagnement.

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34 Les Cahiers de l’accompagnement Edition CARIF Poitou-Charentes

Les mots des participantsRemarques et commentaires

des participants

LE CADRE DE LA RELATION ACCOMPAGNANT/ACCOMPAGNE• Singularité, diversité

L'autre

• Professionnalisme de la relationLes limites de l'actionLes limites de l'implicationDistance entre accompagnant et accompagné

• Les limites de l'actionLa durée de la relation

Par sa singularité/diversité, l’autre me contraintà exercer mon métier, à l’écouter. L’autre vaheurter mes représentations, je me repositionnesans cesse sur cette dimension. Ici la contrainten'est pas la pression, c'est un catalyseur, àchaque fois qu'on rencontre la personne.

Notre investissement peut nous mettre endanger.C’est parce que c’est un travail relationnel quela distance avec l’accompagné est unecontrainte. On ne fait pas un travail psycholo-gique.Le cadre déontologique protège l'un et l'autre.

On est dans une relation professionnelle, onpeut choisir de retrouver les mêmes personnesdans des contextes différents, privés.

LE CADRE TECHNIQUE (CONDITIONS DE REALISATION)• La durée

Le temps (entre la définition du projet et l'action)La durée plus ou moins adaptable aux besoinsLe temps imparti (cité 3 fois)Les durées de plus en plus courtes

• Se déplacer, lieu de travailLe temps – espace

• Les limites de l’accompagnantLes connaissances techniques liées auxchamps d’interventionLe statut de l'accompagnateur : la précarité des emplois de l'insertion

Diverses temporalités, temps de la prestation,temps de la personne. Il y a conjugaison destemps : temps de la commande, temps tech-nique, temps de l'accompagné.Dans le cas de la VAE, durée impartie (cf aussila commande).Les rapports au temps : les temps ne sont pasles mêmes selon les personnes.

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35Les Cahiers de l’accompagnementEdition CARIF Poitou-Charentes

BIBLIOGRAPHIE

L’accompagnement, entre contrainte et liberté.

OUVRAGES

• Les illusions du management. Jean-Pierre LE GOFF. Editions La Découverte, 2000

• La barbarie douce, la modernisation aveugle des entreprises et de l’école. Jean-Pierre LE GOFF. Editions La Découvert, 1999.

• Souffrance en France. Christophe DEJOURS. Edition Seuil, 1998. Réf. CARIF : £2365

• Théorie de l’agir communicationnel. Jürgen HABERMAS. Ed. Fayard, 1987

• Morale et communication. Jürgen HABERMAS. Ed. Flammarion, 1999

• La technique et la science comme idéologie. Jürgen HABERMAS. Ed. Denoêl, 1978

• L’emprise de l’organisation. Max PAGES et coll. Ed. PUF, 1984

• Institution et changement. Jean-Claude ROUCHY et Monique SOULA DESROCHE.Ed. ERES, 2004

• Les paradoxes du travail social. Michel AUTES. Ed. Dunod, 1999

• Ethique et travail social, une recherche de sens. Brigitte BOUQUET. Ed. Dunod, 2003

• Jürgen Habermas, une introduction. Stéphane HABER. Pocket/La Découverte, 2001

• 1984. George HABER. Ed. Gallimard, 1950 ou Folio 1981.

REVUES

• Les procédures comme organisateurs institutionnels. Revue Connexions N°79,Edition ERES, Octobre 2003. Disponible au GIP Qualité de la formation.

• A quoi sert le travail social ? Revue ESPRIT, Mars-avril 1998.

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36 Les Cahiers de l’accompagnement Edition CARIF Poitou-Charentes

Organisée par le GIP Qualité de la forma-tion en partenariat avec l'AGEVIF-CAFOC, le CARIF Poitou-Charentes et laLigue de l'Enseignement Poitou-Charentes-IRFREP, la Journée de l'accompagnementintitulée "Quelles formes de coopérationpour l'insertion ?" s'est tenue à Venours(86) le 30 juin 2005. Elle a rassemblé unecentaine de participants intéressés par lesformes de coopération entre les personnesen orientation et recherche d'emploi, lesprofessionnels de l'accompagnement et lesacteurs socio-économiques.

Madame Catherine BERNATET, consultanteauprès des professionnels de l'insertion etde la formation à l'Instep Aquitaine et ani-matrice régionale des APP en Aquitaine aproposé une conférence intitulée :

Réussir les parcours d'insertion : quelrenouvellement des pratiques d'accom-pagnement ?

L’article de Catherine BERNATET, rédigéaprès son intervention, est suivi des deuxséries de témoignages régionaux sur lespratiques d'insertion et d'accompagne-ment des parcours :

Parcours Femmes en Poitou-Charentes :un partenariat, des réseaux pour l'inser-tion des femmes par Patrick POITIERS(IRFREP- Ligue de l'Enseignement Poitou-

Charentes - Directeur de l'antenne deNiort) et Elisabeth GABILLARD (IRTSPoitiers - Coordonnatrice du département"Modes d'Emplois")

Accompagnement vers l’emploi mar-chand de personnes bénéficiaires du RMIsur le Pays des Six Vallées par StéphanieCHAIGNEAU (Chargée de mission,équipe de prospection placement IOD),Anita LOUET (Responsable de l'unité terri-toriale d'intervention sanitaire et sociale)et Thierry FAYOUX (Directeur, PAIOERIGE Lusignan)

Les comptes-rendus d'ateliers permettentde poursuivre la réflexion autour desthèmes suivants :

• Comment favoriser la participation despersonnes à leur projet de vie et d’in-sertion professionnelle ?

• Inscrire le temps de l’insertion, de l'o-rientation, de la mobilité profession-nelle, comme un temps de formation etde développement des personnes ?

• Inscrire le temps de l'insertion commeun temps relié à l’activité économique,sociale et culturelle d'un territoire ?

• Quels (nouveaux) besoins de profession-nalisation pour les métiers de l’insertionet de l'accompagnement des parcours ?

Quelles formes

de coopération pour l’insertion ?

Journée du 30 juin 2005

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37Les Cahiers de l’accompagnementEdition CARIF Poitou-Charentes

J’ouvrirai cette journée en proposant plu-sieurs définitions du mot coopération. Quelsens retenir pour désigner le concoursapporté par chaque professionnel dans unpartenariat effectif ? Les plus appropriéspour notre sujet pourraient être : une partprise à une œuvre faite en commun17, lacapacité de collaboration et de participa-tion à un projet commun, une mise enréseau des connaissances18.La notion de partage, de "faireensemble", corollaire à une aptitude desprotagonistes de "savoir faire ensemble"est abordée. Il y a urgence à faire se ren-contrer les acteurs du social, du politique,de l'économique, autour des parcoursd'insertion mis en place par les per-sonnes. Sur cette idée centrale de coopé-ration, nous examinerons plusieurs points: d’abord les modes de collaboration exis-tant entre les acteurs de l’insertion et lesusagers venus les rencontrer dans l’élabo-ration de parcours vers l’emploi ; puis l’in-tervention auprès des publics commesynonyme de formation et de développe-ment des personnes ; ensuite, les besoinsnouveaux en matière de professionnalisa-tion des métiers de l’insertion et de l’ac-compagnement au regard des mutationsde la société et du monde du travail ;enfin, le partenariat de territoire dans l’é-mergence des parcours réussis. Surchacun de ces sujets, je me propose deprésenter des expérimentations vécuesdans le cadre de coopérations réussiespour l’insertion et issues de mon expé-rience professionnelle.

Mais avant d’aborder toutes ces questions,il est primordial de se rappeler quelquesdates et évènements importants relatifs authème même de notre rencontre.

Qu’est-ce que l’insertion ? C’est d’abord, depuis une trentaine d’an-nées, un système administratif qui a connuune certaine évolution avec l’instaurationdu RMI dès 1988, désignant des dispositifset des modes d’intervention auprès despublics dits "en difficulté" sociale et/ouprofessionnelle. Il faut remonter au premierchoc pétrolier des années 1970 pour voirapparaître un ensemble de mesures spéci-fiques prescrites pour une populationdéterminée : les jeunes de moins de 25 anséprouvant des difficultés à trouver untravail et les chômeurs de longue duréedont les qualifications devenues obsolètesles engagent à s’acheminer toujours plusnombreux vers l’ANPE toute récente.

Ces difficultés sont considérées à l’époquecomme étant de nature conjoncturellealors que déjà le caractère en partie struc-turel du chômage est reconnu. Quelles sont les mesures appliquées depuisune trentaine d’années ? 1977 : mise enplace des Trois Pactes pour l’Emploi… et lechômage continue d’augmenter. 1981 :Bertrand SCHWARTZ remet un rapport auPremier ministre intitulé L’insertion socialeet professionnelle des jeunes en réponse à

17. Le Petit Larrousse Illustré de l’An Deux Mille, 1999.

18. L’office de la Langue Française, 1989.

REUSSIR LES PARCOURS D'INSERTION : QUEL RENOUVELLEMENT DES PRATIQUES D'ACCOMPAGNEMENT ?

Par Madame Catherine BERNATET, consultante auprès des professionnels del'insertion et de la formation à l'INSTEP Aquitaine,

animatrice régionale des APP d'Aquitaine

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une demande de ce dernier qui, dans salettre de mission, sollicitait des propositionsnovatrices afin que "les jeunes de 16 à 18ans ne soient jamais condamnés auchômage ni à des emplois trop précaires".Ce rapport montrait, entre autres, que lechômage perdurait non plus à cause d’uneinadéquation entre le profil professionneldes demandeurs d’emploi et les besoinsdes entreprises, mais à cause d’un "déficitde places" vacantes dans la société.1982/1985 : la volonté d’une action àvisée plus structurelle qui associe un rap-prochement des actions sur l’économiqueet le social est acquise. La démarche qui endécoule est inscrite au niveau local parl’institution des PAIO et des MissionsLocales. La pratique de la formation parl’alternance dont le concept prévaut depuisle temps du compagnonnage verra sonapogée avec l’instauration des contrats dequalification et des contrats d’adaptation.Depuis, plusieurs plans de lutte contre lechômage ont été proposés : PAQUE,TRACE et aujourd’hui CIVIS pour lesjeunes. Programme des 900 000 chô-meurs, Plan de cohésion sociale pour lesplus de 25 ans… pour n'en citer quequelques uns.

Malgré de réelles bonnes volontés et beau-coup d’argent investi, le chômageperdure, s’accroît, s’exerce à des circon-volutions et augmente inexorablement.Pourquoi ? En parallèle des raisons écono-miques avancées, il me semble qu’il existeplusieurs raisons ancrées dans le systèmeétabli pour lutter contre ce fléau. En effet,l'insertion n’est pas, comme on aimerait lecroire, synonyme d’intégration des publicsau sens défini par DURKHEIM : l'apparte-nance à un groupe ou à une société àpartir du moment où leurs membres sesentent liés les uns aux autres par des

croyances, des valeurs communes et lesentiment de participer à un grandensemble sans cesse renforcé par desinteractions régulières. C’est pourquoi"demander un droit à l’insertion" aboutitsouvent pour l’individu à l’acceptationd’une solitude toute particulière, celle duchômeur dont le statut n’est pas valorisant.

L’insertion est pensée comme une actionportée sur des publics à normaliser pouratteindre un état d’adaptation à une vieprofessionnelle dont l’accès semble tou-jours se complexifier. De quelle forme d’a-daptation parle-t-on ? De celle quiconsiste à former de futurs professionnelsde métiers dits "en tension" dont lesconditions d’emploi pérennes et les rému-nérations décentes semblent illusoires etpeu probantes depuis plusieurs années ?Ne doit-on pas aujourd’hui s’attacher àproduire une politique de formationcontinue qui orienterait ses programmesvers l’accès pour les personnes à uneautonomie des savoirs propice aux déve-loppement des intelligences plutôt qu’à deseuls apprentissages dont l’ambition est defournir une main-d’œuvre aux besoinschangeants des entreprises ? Dans unesociété qui s’accommode de plus de 10,4 %de chômeurs, il serait juste de s’interrogersur l’efficacité d’un tel système et de réflé-chir au moyen de faire de l’insertion unechance d’accéder à l’emploi. Comment ?En favorisant la participation des per-sonnes à leur projet de vie et d’insertionprofessionnelle. En considérant les béné-ficiaires comme des individus porteurs decapacités à trouver par eux-mêmes unesolution à leur orientation. Mais prend-onle temps de consulter les sans-emploiquant à leurs idées, leurs expériences,leurs connaissances à propos des possibi-lités de sortir de l’exclusion ? Les sollicite-

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t-on comme experts au même titre que lesprofessionnels dont le métier est de lesaccompagner vers l’emploi dans le cadred’une collaboration où chaque savoirserait entendu à la même place ? C’est lepari soutenu en septembre 2000 par l’or-ganisme Partenaires pour l’Emploi-PLIE(Plan Local pour l’Insertion et l’Emploi) etla Mission Locale d’Epinay sur Seine.

Un coopération réussie :public/acteurs de l’insertionLes acteurs de l’insertion de cette ville de laSeine Saint-Denis sont confrontés, commebeaucoup d’autres, à la lutte journalièrecontre un chômage récursif. Cependant,en dépit d’un manque de diplôme, d’unescolarité défaillante ainsi que d’autres fac-teurs invalidants, certains demandeursd’emploi réussissent à sortir de l’exclusion.Comment y réussissent-ils et quels sont lesprocessus activés ? Le Plie et la MissionLocale devinent que ces éléments pour-raient se traduire en savoirs professionnelsnécessaires aux pratiques d’accompagne-ment. Ils imaginent de donner la parole àdes personnes ayant connu des difficultésd’insertion et qui sont aujourd’hui dans lemonde du travail. Ainsi, vingt personnes,jeunes et adultes, ont accepté de raconterleur parcours de vie ; dix acteurs de l’in-sertion ayant accompagné ces parcoursont livré leur témoignage, acceptant deporter sur leurs pratiques professionnellesun regard critique. La recherche action Cités de Mémoires apermis de signifier par l’exemple quechaque individu porte en soi la possibilitéde sa réussite. Cités de Mémoires, c’estaussi le repérage, par les acteurs de l’in-sertion, de la diversité des compétencesmises en œuvre à l’occasion de l’accompa-gnement des personnes dans leur parcoursd’accès au travail, la capitalisation d’un

ensemble de compétences individuelles etpartenariales, le développement d’un senti-ment d’appartenance à un groupe de pairstravaillant sur un territoire. Chargée decette étude, j’ai choisi de bâtir maméthode d’investigation à partir de l’en-quête ethnosociologique19 : au lieu deposer des hypothèses, puis de concevoirune enquête destinée à les vérifier, ladémarche ethnosociologique consiste àenquêter sur une partie de réalité sociale-historique qui nous est inconnue. Ce que jesavais des banlieues parisiennes, desfaçons d’y vivre, des façons de penser,était de l’ordre des stéréotypes, des pré-jugés et autres représentations collectives.Je n’y avais jamais vécu, jamais travaillé.En m’appuyant sur cette ignorance, jepouvais, grâce à la méthodologie de cetype d’enquête, mieux écouter, mieuxregarder en étant dégagée de tout apriori. Ainsi, un type d’observation parti-culier et un questionnement fondé sur lesrécits de vie, m'ont permis de comprendreles facteurs de réussite vers l’emploi desjeunes et des adultes dans les banlieuesdites sinistrées et d'apporter dans l’espacepublic sous la forme d’une monographieCités de Mémoires puis d’un livre Oserréussir l’insertion20 des éléments deconnaissance objective et critique fondéssur l’observation concrète et enfin de pro-poser un modèle de ce fonctionnement eny dégageant des savoirs nouveaux et deshypothèses plausibles. La posture d’accompagnateur/interviewerinstaurée dans la méthode ethnosociolo-gique a permis aux personnes consultéesde prendre conscience de l’importance deleurs témoignages et des savoirs profes-sionnels qui pouvaient s’en dégager. 19. Voir à ce propos : Daniel Bertaux. Les récits de vie. Perspectives

ethnosociologique. Paris, Nathan, 1997. Alex Lainé. Faire desa vie une histoire. Théories et pratiques de l’histoire de vie enformation. Paris, Desclée de Brouwer, 1998.

20. Catherine Bernatet, Oser réussir l’insertion, Paris,Editions de l’Atelier, 2005.

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Le type d’entretien choisi s’inspire descourants de L’Ecole Nouvelle21 ainsi quede l’approche rogérienne. Il propose deretrouver par la narration les savoirs misen œuvre dans des expériences réussiesau regard de la personne, porteuses pourelle de joie et de satisfaction. Entre sep-tembre 2000 et mai 2001, se sontsuccédé : entretien, transcription, relec-ture, deuxième version, puis troisièmeentretien pour validation ; cela a donné lamonographie Cités de mémoires. Pendantle temps de l’élaboration, les personnesont développé beaucoup de confiance enelles, se sont reconnu des potentialitésnouvelles et ont engagé des projets collec-tifs. Certaines se sont mises à l’écriture,d’autres ont imaginé des projets de luttecontre la violence urbaine, d’autresencore ont témoigné lors d'une confé-rence organisée en octobre 2002 par laCaisse des Dépôts de Bordeaux.

Lors de cette rencontre, l’auditoire recon-naît implicitement chez les auteurs deCités de Mémoires une expertise dans lalutte contre le chômage. Il découvre etquestionne, discernant à la fois le mondede l’insertion, la paupérisation, la vie dela cité et les formidables ressorts mis enœuvre pour sortir de l’exclusion. Le succèsde cette manifestation dépassa le départe-ment de la Gironde car il fut convenu quece type de conférences serait reconduitdans l’ensemble des Caisses des Dépôtsde France. Très rapidement une demandefut formulée par celle d’Angers.

La reconnaissance des compétences desdemandeurs d’emploi mises en exerguelors de ces conférences a pour corollairela formalisation et le partage des savoirsdétenus par les professionnels de l’inser-tion intervenant sur la ville d’Epinay-sur-

Seine. L’enquête proposée aux acteurs del’insertion a eu pour objectif de faireémerger chez chacun d’entre eux unsavoir "dormant" ou inédits, né au cœurdes pratiques d’accompagnement. Enplus des entretiens individuels, j'aiproposé des entretiens collectifs sur lesvaleurs liées aux métiers, les récits d’ex-périences professionnelles avec l’objectifde renforcer un partenariat balbutiant (lesuns et les autres ne se connaissaient pas etéchangeaient par fiche navette). Enfin,j’ai emprunté à Yves Clot22 la méthode duSosie qui permet une explicitation trèsobjective de l’acte professionnel.

En effet, la clarification des gestes et desattitudes journalières permet de prendretoute la mesure du métier raconté et d’ydécouvrir des compétences inattenduesqui, sorties de leur automatisme, augmen-tent l’amplitude des savoirs agis dans lemétier exercé. A l’issue de ces rencontres,le groupe de professionnels exprima ledésir de continuer ce travail en intégrantdès septembre 2001 de nouveaux parte-naires dans leur groupe d'échange etd'analyse de la pratique. A Epinay-sur-Seine, les responsables des structures sou-haitent que leurs équipes s’expriment etmettent en lumière les ressorts et lessavoirs propices à l’accompagnement desparcours réussis.

Les travaux de ce groupe reconnu parl’ensemble des partenaires engagés don-nèrent naissance à la Maison de l’initia-tive et de l’Emploi d’Epinay-sur-Seinedans laquelle les professionnels ont cons-truit pas à pas leur collaboration. Chacuntravaille à partir de ses particularités maisdans un objectif pensé en commun : l’ac-compagnement des personnes à la réali-sation de leur projet personnel et profes-sionnel. D’autre part, le public est partie

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prenante du fonctionnement de ce dispo-sitif : un centre ressources, des personnesressources, un lieu destiné à la recherched’emploi (matériel informatique,internet…), des espaces de paroles. C'estune opportunité pour organiser la cohé-sion, la continuité des services. Ouverteen avril 2002, la Maison de l’initiative etde l’Emploi regroupe ainsi les différentsservices liés à l’emploi et à l’insertion endonnant une large place à l’initiative etaux projets des demandeurs d’emploi.L’expérience entamée en septembre 2000a incontestablement favorisé la synergiedes acteurs de terrain et des partenariatsefficaces pour lutter contre le chômage.Elle entretient l’enthousiasme des per-sonnes en recherche d’emploi qui conti-nuent à témoigner de leurs savoirs dans lalutte contre l’exclusion.

A Epinay-sur-Seine, les témoignages mon-trent qu’il est nécessaire de résister auxinjonctions de placement à l’emploi à n’im-porte quel prix, supportées à la fois par leprofessionnel et la personne en insertion. Ils’agit de bâtir de façon réaliste pour soi unprojet dans lequel chaque individu peut sereconnaître en temps qu’être humainaccompli. Le temps d’élaboration du projetn’exclut pas l’accès à des emplois précairesà condition qu’ils s’inscrivent dans unelogique de cheminement individuel, qu’ilsaient du sens pour la personne, qu’ils soientlibrement consentis. Il s’agit de permettre àce sens d’advenir en inscrivant le temps del’insertion, de l’orientation, de la mobilitéprofessionnelle comme un temps de forma-tion et de développement des personnes.

L’insertion et l’accompagnementA quel moment peut-on dire qu’un parcoursa réussi ? Quand l’évaluation est d’abord

portée par le demandeur d’emploi, aboutis-sement d’une coopération effective entredes personnes et les accompagnateurs. Lestechniques employées trouvent leur sourcedans la théorie des démarches participa-tives que le Conseil Economique et Socialdéfinit ainsi en juin 2003 : "Il faut se recen-trer sur les personnes, les reconnaître mêmelorsqu’elles sont en très grande difficulté,comme des interlocuteurs; il s’agit de substi-tuer à une logique de méfiance, une logiquede confiance. Il faut maintenant franchirune nouvelle étape. Il s’agit, en prenant encompte le point de vue des personnes ensituation de précarité et les acteurs deterrain, de transformer en vrai parcoursvers le droit commun, les dispositifs quiactuellement créent des inégalités." Il s’agitaussi de rechercher dans les passés sco-laires, professionnels et de formation, laréussite plutôt que l’échec. Il convient deconsidérer les publics comme des personneset cesser de les réduire selon des détermi-nants administratifs (DELD, Rmiste, les plusde 50 ans, les "pas prêts à l’emploi ", les"trop diplômés", etc.). Ces appellationscaricaturales des dispositifs focalisent desreprésentations et des stéréotypes, stigmati-sent les individus et empêchent leur inser-tion.

21. L’école nouvelle est un mouvement fondé par RogerCousinet et François Chatelain dès 1945 en France. Cemouvement est issu des réflexions sur la pédagogie. Dès1920, R. Cousinet écrit ses premiers livres dans lesquelsil considère l’enfant comme un apprenti et définit les dif-férentest façons d’envisager l’acte d’apprendre. Le pointcommun des pédagogues fut l’observation du dévelop-pement des enfants, non pour agir dessus, mais dans lebut d’agir sur le milieu scolaire, pour le rendre plusfavorable et mieux adapté à la croissance de l’enfant.L’évolution nouvelle disait Roger Cousinet ne comportepas de système, ce n’est pas un ensemble de règles oude procédés, ni même de méthodes... C’est un esprit, onne peut prendre une part de cet esprit. On le fait sientout entier ou on lui demeure étranger.

22. Professeur au Laboratoire de Psychologie duConservatoire National des Arts et Métiers.

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Dans les pratiques de travail social, l’ac-compagnement fait référence à uneposture, à une éthique, à la recherche d’unaccès à l’autonomie, à un mode de relationspécifique avec les personnes. Le socio-logue Robert CASTEL parle d’accompagne-ment effectif comme étant celui qui consisteà s’adresser à la personne en fonction deses besoins, de sa situation et qui passe à lafois par un soutien psychologique et par lagarantie de ressources effectives. La loi decohésion sociale a inscrit l’accompagne-ment dans les nouveaux contrats : CAE;contrat d’avenir, RMA, tutorat…

Le Plan BOORLO semble nous renvoyer à undroit à l’accompagnement et au devoir deréussir l’insertion dans le cadre d’une relationtripartite - les personnes en recherche d’em-ploi, les professionnels et les acteurs de l’éco-nomique - au service de laquelle se mettenten place des politiques publiques. Je croisque l’efficacité d’un tel plan peut trouver saréussite dans une approche particulière quis’appuie sur la reconnaissance et l’utilisationdes savoirs des chômeurs et des personnesen emplois précaires et sur la légitimation etle respect de la fonction accompagnementdans les métiers de l’insertion.

Je me situe dans une conception globale del’accompagnement qui tente d’allier éthique,technique, garantie du droit au travail et auxrevenus, individualisation des parcours etpersonnalisation de la prise en charge.L’accompagnement se définit comme uneprésence auprès de quelqu’un. On y trouvela notion de compagnon. La particularité decette relation installe deux individus en inter-action et requiert de la part du professionneldes compétences relationnelles qui révèlentchez l’accompagné une volonté de cons-truire lui-même son parcours Si l'accompa-gnement concerne l’ensemble des profes-sionnels du social, l’acteur principal reste la

personne. Les professionnels de l’insertion lesavent, le voient, et en parlent peu, préférantparfois s’en remettre aux méthodes et outilspropres à leur métier plutôt que de tenter dedévelopper leur professionnalisme en s’au-torisant d’autres compétences qui pren-draient pleinement en compte les capacitésdes personnes accompagnées à trouver dessolutions à leur insertion.

S’autoriser d’autres compétences, c’étaiten 1993 pour l’équipe du secteur emploidu CIDF23 de Bordeaux dont je faisaispartie, reconnaître les limites de notre pro-fession face à l'inédit : pour la premièrefois, un nombre important de cadres allo-cataires du RMI arrivaient sur le marchédu chômage. Ces personnes (médecin,avocat, DRH, comptable, etc.) possédaientdes diplômes, une expérience profession-nelle conséquente et maîtrisaient parfaite-ment les techniques de recherche d’em-ploi. Toutefois, elles ne parvenaient pas àréintégrer le monde du travail. Nous nesavions pas comment faire.

Notre démarche a été de proposer augroupe venu nous rencontrer de réfléchirensemble autour d’une idée envisagée enéquipe. Cette réflexion conjointe, letâtonnement pas à pas, la confiancemutuelle dans la mise en place d’actionsont permis par la suite de concrétiser ladémarche suivante : mener une réflexionsur les possibilités d’insertion dans lemonde du travail par le développementde pôles d’intérêts extra-professionnels ;accroître ou retrouver la capacité de sedétacher de la recherche d’emploi obses-sionnelle pour augmenter ses chances deretrouver un travail ; créer un lieu d’é-changes de savoirs et d’information, uti-liser les lieux, les personnes ressources et

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23. Centre d’Information des Droits des Femmes.

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les supports logistiques. C’est à partir decette coopération dynamique que laméthode "S’en détacher pour l’obtenir" avu le jour. Son objectif premier : romprel’isolement et rechercher des centres d’in-térêts personnels, apprendre à gérer sontemps entre la réalisation d’objectifs d’é-panouissement personnel et de recherched’emploi, enfin, s’insérer dans un réseausocial pour trouver un équilibre visant àacquérir la capacité de trouver unemploi. De 1993 à 2001, quinzegroupes se sont succédé avec des résul-tats de l’ordre de 75 % en termes d’em-ploi, de formations qualifiantes ou decréation d’entreprise. Nous avionsrepoussé les limites de notre métier enosant reconnaître nos difficultés et enproposant au public lui-même de s’asso-cier à nos réflexions. La démarcheposée, il nous a fallu l’enrichir, la ques-tionner, l’actualiser sans cesse. Nousavons défini des besoins nouveaux, nousnous sommes perfectionnés et remis enquestion par la formation continue et lacoopération.

L’insertion et laprofessionnalisation des acteurs

Quels que soient le niveau de formationinitiale, les diplômes, l’expérience profes-sionnelle, l’excellence dont disposentsouvent les acteurs de l'accompagnement,les métiers de l’insertion sociale et profes-sionnelle requièrent une constante profes-sionnalisation. Le besoin d'information estconstant sur les dispositifs, les métiers, lesemplois. La professionnalisation est aucœur de la pratique partenariale.Pourquoi ? Parce que celle-ci permet l’ap-prentissage de nouveaux savoirs par uneréflexion sur l’action, par exemple dans ungroupe d’échanges et d’analyse de pra-tiques institué entre partenaires. La mutua-

lisation des connaissances encourage laremontée des informations sur les difficultésde terrain et sur les évolutions des besoinsde professionnalisation constatés entrepairs. Il faut consulter le public, prendre cetemps-là plutôt que de proposer des solu-tions dans l'urgence. On est tenté de fairedu conseil car les gens attendent beaucoupde nous. L'accompagnement demande dutemps, il faut changer notre regard sur lespersonnes.

Qu'est-ce qu'on vient chercher dans cemétier ? Il est nécessaire d'éclaircir cettequestion pour pouvoir se professionnaliser,dans le champ des sciences humaines, lapsychologie mais aussi la sociologie, lapsychosociologie, l'interculturel, le droit,l'économie politique… L’accès à la forma-tion continue ou à la validation des acquisde l’expérience permet de contextualiserdes capacités en les adaptant à uncontexte local spécifique.

C’est à mon avis une garantie du maintiende la déontologie d’un corps de métier quipourrait, sans cela, céder à des exigencesqui seraient en désaccord avec ses valeurset son éthique. On le sait, ce secteur estdifficile à repérer au niveau de ses pra-tiques quotidiennes comme de ses résultatsdont l’évaluation aujourd’hui ne s’effectuepratiquement que sur les taux de place-ment à l’emploi. Cette difficulté d’identifi-cation repose sur les représentations diver-gentes entretenues par la population, lesacteurs sociaux, voire les acteurs politiquesà partir des multiples images identifica-toires de leur profession - formateurs ?éducateurs ? animateurs ? chargés d’inser-tion ?…- et sur des peurs que peut susciterchez chacun d’entre nous le mot chômage.Souvent pris dans les aléas du quotidien etde la gestion de l’urgence avec lesquels ilfaut bien se débrouiller, soumis à des

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actions nombreuses et diversifiées, les pro-fessionnels de l’insertion disent être parfoiscloisonnés dans leurs pratiques et regret-tent de ne pouvoir consacrer assez detemps à l’analyse de leur métier. Cela questionne les moyens de coopérationentre les acteurs du social, du politique etde l’économique autour des parcours misen œuvre avec les personnes. Pouvons-nous inscrire le temps de l’insertion commeun temps relié à l’activité économique,sociale et culturelle d’un territoire ?

L’insertion et le territoireQue ce soit à l’école, dans les milieuxsociaux, économiques et culturels, il esttemps de concevoir une forme de parte-nariat qui favoriserait l’utilisation des poli-tiques de l’emploi au service des indi-vidus. Cela repose sur l’émergence d’unecommunication dont les contours et lesformes sont encore à inventer. Il faut queles initiatives et les expériences existantdéjà puissent être valorisées et permettreun travail effectif entre les intervenantsd’un territoire. Cela suppose un désir etune compétence à se connaître pourpouvoir agir ensemble. Le bon vouloir nesuffit pas. Il s’agit de travailler, avecméthode et exigence de changement, desrelations coopératives qui produiraientdes réponses adaptées aux problèmesd’insertion ou d’exclusion. J’ai rencontrénombre d’expériences allant dans ce sens.Au Lycée Professionnel Bel Orme àBordeaux à partir de 1997, l’équipe dusecteur Santé, Social, Services s’interro-geait quant au problème des élèvesorientés souvent par défaut vers l'établis-sement. Ces élèves connaissaient des dif-ficultés scolaires et n’étaient pas tousvolontaires pour suivre les formationsenvisagées pour eux. Les difficultés sco-laires étaient souvent dues à des pro-

blèmes familiaux, de santé, d’empêche-ments scolaires anciens, de motivation. Apartir de ces constats, l’équipe et moi-même avons posé des objectifs d’accom-pagnement de ces élèves à partir deméthodes actives en orientation desadultes notamment la démarche du porte-feuille de compétences. Dans un premiertemps, l’équipe s’est formée à cetteméthode puis, ensemble, nous avons crééun outil inédit24 d’accompagnement desprojets de l’élève avec comme objectifs :aider les élèves à formuler par écrit unprojet de formation professionnelle ou lemétier qu’ils souhaitent exercer ; àprendre conscience de leurs savoirs, deleurs compétences, à opter pour un élar-gissement de choix professionnels. Ladémarche repose sur quatre règles :

• le respect du temps pris par l’élève pourconstruire son projet : la démarche duportfolio est jalonnée d’exercices, dematuration, de retours en arrière, de dis-cussions, de confrontation d’idées,• l’analyse de l’ensemble de la personneet non simplement le côté scolaire et pro-fessionnel : le bilan personnel doit ana-lyser les manifestations de la motivationdans l’ensemble de la vie,• l’utilisation de l’imaginaire et du ludiqueavant d’aborder le réel : la notion de"deuil d’un projet" disparaît ainsi car c’estl’élève lui-même qui vérifie au fil dutemps, parce qu’il en est acteur, la faisa-bilité de son projet,• l’utilisation des phases personnel/pro-fessionnel pour faciliter les déclics :moment où l’élève comprend quelquechose sur lui-même, moment-clé quipermet l’élaboration du projet.

24. Bâtir son itinéraire pour construire sa vie - LPP/LTP BelOrme, Bordeaux, 1997.

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Pendant l’année chaque professeur devientréférent/accompagnateur des portfolios detrois ou quatre élèves. A la fin de l’annéescolaire, un jury se réunit, composé de pro-fessionnels du secteur Santé, Social,Services, d’enseignants, et de moi-même.Chaque élève en classe terminale de CAP ouBEP présente son parcours, explique sesprojets, explicite ses atouts, clarifie le cheminqui reste encore à parcourir. Parfois, àl’issue de ces jurys et grâce à la clarté desdiscours et à la motivation des jeunes, desemplois sont proposés. Les premières expé-riences ont montré les résultats suivants : • Pour les élèves : le développement de lamotivation, une meilleure compréhensiondu monde du travail et de ses conditionsd’accès, la nécessité de se former et dedévelopper des compétences sociales. • Pour les enseignants : une vision del’élève dans sa globalité, une aide dans larelation, une meilleure connaissance dumonde du travail.

Cette collaboration entre élèves, ensei-gnants et professionnels a donné nais-sance au Café de l’emploi. A la manièredes "cafés philo", c’est un lieu de ren-contre convivial qui réunit les jeunes, leséquipes pédagogiques et les entreprisesautour de débats, de conférences, d’ate-liers thématiques et d’entretiens indivi-duels. Ici, la parole s’exprime autrementqu’à l’occasion de rencontres institution-nalisées. Chacun fait évoluer ses repré-sentations du monde du travail, de l’école,de la formation et entame un dialogueconstructif quant à l’insertion des jeunes.Mais de telles initiatives demandent unsoutien institutionnel à long terme. Il fautle courage et le militantisme des acteursde terrain pour soutenir ce type de projet,qui nécessite des financements et peut être

délaissé au gré des fluctuations écono-miques, sociétales et politiques.

L’insertion ne peut fonctionner sans une col-laboration avec le monde de l’économique.A partir d’études réalisées dans les six payspartenaires sur les processus d’insertiondes jeunes de 16 à 25 ans et d’un dia-gnostic territorial élaboré à l’échelle trans-nationale auprès des acteurs de l’insertionet de l’entreprise, est née en 2003, la for-mation expérimentale Eurojobmediator(projet européen Léonardo Da Vinci II). Ellese présente sous la forme de modules deformation pour les acteurs de l’insertion(futurs médiateurs externes) et les entre-prises (futurs médiateurs internes). Le projeta donné lieu à la rédaction d’une charte debonnes pratiques de l’Eurojobmédiateur.Un site web25 ainsi qu’un DVD26 ont étécréés.

Je suis intervenue dans le projet porté parla Mission Locale d’Agen (Lot et Garonne)pour un module de communication entreles acteurs de l’insertion et dix entre-prises d’Agen, grandes, moyennes etpetites. L’objectif principal est le suivant :faciliter le parcours des jeunes en insertionet notamment leur cheminement dans l’en-treprise, par la mise en place d’un réseaude partenaires. Deux objectifs secondairestout aussi importants : d’abord connaîtreet clarifier les domaines de l’insertionsociale, de l’insertion professionnelle ainsique les champs d’activités des différentesstructures d’accueil et leurs missionsrespectives (coopérations externes) puis

25. www.eurojmediator.org26. Eurojmediator : création d’une formation de médiateur

pour une insertion durable en entreprise de jeunes en dif-ficultés (témoignages vidéo, outils pédagogiques, docu-ments d’information, apports des échanges transnatio-naux) - Production/réalisation Télimage.

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positionner les formés, issus de l’entre-prise, et ceux issus du secteur de l’inser-tion, dans une recherche d’adéquationentre leurs différents enjeux et ainsi ren-forcer leurs capacités d’actions communes(conduite au changement). Après ces deuxjours de rencontres, les chefs d’entreprises,les DRH et les acteurs de l’insertion disentqu’ils ont appris à mieux communiquertout en prenant en compte la façon depenser des partenaires, qu’ils ont mis enœuvre des projets communs basés sur lamutualisation des savoirs et l’utilisation descompétences entre les médiateurs interneset les médiateurs externes, qu’ils ontrecherché ensemble des solutions aux dif-ficultés. Ainsi, la transversalité des compé-tences et la reconnaissance de valeurscommunes entres les deux types de média-teurs ont permis l’interactivité, la volontécommune d’agir ensemble, l’engagement.Depuis, plusieurs projets ont vu le jourcomme les petits déjeuners entreprises /acteurs de l’insertion, des actions d’inté-grations innovantes dans l’entreprise pourles acteurs de l’insertion, dans les struc-tures d’accompagnement (mission locale,organisme de formation, etc.) à l’occasiondes entretiens avec les jeunes pour lesentreprises. Au bout d’un an, le bilaneffectué en avril 2005 montre que les per-sonnes ayant participé à l’intégralité de laformation ont renforcé leur collaborationet cela s’est traduit par un meilleur accès etun meilleur maintien des jeunes en emploi.

CONCLUSION

Choisir la mise en place d’un partenariatqui invente des formes de coopération pro-pices à la lutte contre l’exclusion comme àEpinay-sur-Seine, à Agen ou à Bordeaux,c’est oser l’instauration d’un nouveau

rapport entre emploi et formation, entreactions publiques et stratégies économiquesd’un territoire, entre salariés tuteurs et per-sonnes en formation. Mieux connaître lesdispositifs, résister à la prégnance de laperformance, oser sortir de sa culture pro-fessionnelle pour rencontrer d’autres sec-teurs et se reconnaître un corps de métier àpart entière amèneraient une somme decompétences propices à l’apport de solu-tions quant aux problèmes d’insertion despersonnes. Cette sincérité de coopérationportant sur les pratiques, les outils et lacapacité d’agir ensemble fonde un terreaude motivations et de compétences qui pour-raient à mon sens faire de l’insertion unsynonyme d’intégration où chaque per-sonne accompagnée saurait se reconnaîtreune identité sociale reconnue et valorisée.

QUELQUES RÉACTIONS ETÉCHANGES APRÈS LA CONFÉRENCE

Coopérer avec les entreprisesLes chefs d'entreprise, les DRH ont unereprésentation négative du secteur de l'in-sertion : les accompagnateurs sont dedoux rêveurs humanistes et les jeunes oules salariés des SIAE ne sauraient s'a-dapter aux postes à pourvoir. Ça bloquele processus d'insertion, ils ne veulent pasde ces publics dits "en difficulté". De leurcôté, les acteurs de l'insertion voient l'en-treprise comme un lieu d'exploitation,dénoncent les mauvaises conditions detravail. Les entreprises s'engagent quandelles ont besoin de recruter ou de stabi-liser des salariés sur les postes. A Agen,des visites se sont déroulées en entreprise,sur les postes de travail ; il y a eu desremarques sur les conditions de travail, lessalaires, qui ont conduit à des améliora-tions. Pour arriver à ça, il faut d'abord de

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la bonne volonté et des lieux de rencontre.Il faut faire bouger ces représentations,permettre à ces deux mondes de se ren-contrer, ne pas "parler boulot" tout desuite, faire tomber les peurs, les masquescar au fond les valeurs sont les mêmes.

Coopérer avec les décideurs politiquesLes professionnels de terrain ont à faireentendre leur professionnalisme lors de lamise en place des dispositifs. Il faut desrencontres pour faire passer ce savoir etces compétences issus du terrain, cons-truits avec les personnes en insertion, par-ticiper à une co-construction des cahiersdes charges et des évaluations. Il peut yavoir des écarts dans la lecture d'une cir-culaire par exemple. L'association"Education et société" s'efforce de par-tager avec les politiques sur des thèmes(actuellement sur les effets de la décentra-lisation) qui sont l'occasion de débatpublic, de discussion. Il faut imaginer desmoyens de ne pas tout accepter.

Coopérer avec le monde associatifUne épicerie sociale a pour but de distri-buer des aliments mais aussi de restaurerle lien social, de favoriser la solidarité etl'insertion des personnes. Comment lemonde associatif en lien avec les plus pré-caires peut-il contribuer à l'insertionsociale de ces publics, quels sont les ingré-dients du lien social ? responsabilité ? soli-darité ? L'action associative peut déve-lopper des compétences, redonner uneidentité, développer des savoirs, desastuces, les mécanismes de l'accès à l'em-ploi. La mutualisation et la solidaritépeuvent être innovantes, il faut mettre enplace très tôt de telles expériences associa-

tives. Ça fait partie de la responsabilité del'adulte : favoriser la citoyenneté,apprendre aux plus jeunes à vivre, à êtreen société.

Insertion et sens du travail Ne faut-il pas distinguer demandeurd'emploi et demandeur d'activité ? Desgens insérés, actifs socialement et plutôtsatisfaits sont contraints de maintenir leurstatut de DE. Faut-il courir après unemploi pour tous ou laisser les places auxjeunes ? Les plus âgés eux, s'y retrouventavec la famille, l'entraide, ils se sententutiles. L'emploi pour tous n'est pas uneaffaire de choix politique, on n'agit pasdessus. Aujourd'hui les entreprisespeuvent faire du profit en dehors de laforce salariale par la financiarisation del'économie. Deux millions et demi de per-sonnes vivent en dessous du seuil de pau-vreté. Les 35 heures ont entraîné desquestions sur ce qu'on fait du temps libéréet donc sur le sens de la vie, sur ce qui estimportant pour chacun. On ne demandepas à un demandeur d'emploi ce qu'ilveut faire de sa vie. On ne nous paye paspour parler de ça mais est-ce que notremétier c'est de l'aider à s'insérer dans unenorme ?Il faut requestionner le sens du travail surle terrain politique. C'est une importantequestion de société, GORZ et MEDA27

l'ont abordée dans les années 90. Letravail conserve aujourd'hui une placeprimordiale par la valorisation sociale etle sentiment d'appartenance qu'ilprocure.

27. André GORZ, Métamorphose du travail, quête de sens.Galilée, Paris, 1988. Dominique MEDA, Le travail, unevaleur en voie de disparition. Aubier, Paris, 1995.

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Elisabeth Gabillard (IRTS Poitiers - Coordonnatrice dudépartement "Modes d’Emplois")

Une action expérimentale a été menée àPoitiers en 1983, puis en 1986 une étudesur l'insertion professionnelle des femmessans qualification dans la région. Cetteaction a constitué un démarrage et l’étudea donné des préconisations et permis lacréation du dispositif "Parcours d’accès àl’emploi pour les femmes " pour l'insertiondes femmes sans qualification ou avec unbas niveau de qualification. Ce dispositifpartenarial est pris en charge dans lecadre du contrat de plan Etat Région ets'attache aux difficultés d'accès à l'emploirencontrées par les femmes.

Très souple, il combine des formations etun accompagnement individuel, à tempspartiel ou à temps plein, offre différentsmodules comme des remises à niveau, lagestion du temps, la recherche d'emploi ets'appuie sur les ressources locales enmatière de formation qualifiante.L'accompagnement est individuel, c'est unélément essentiel qui donne du sens auparcours. Il est réalisé en lien avec desprofessionnels spécialisés (santé, psycho-logie, social).

La durée est un élément important, unparcours peut durer 2 ans. Cela permetde faire des coupures, des pauses.Le dispositif "Parcours femmes" reliequatre structures dans la région Poitou-Charentes, une par département :• Charente : Retravailler• Charente-Maritime : GRETA

(anciennement la MEP)• Deux-Sèvres : IRFREP

Ligue de l'enseignement• Vienne : IRTS Modes d'emplois

Ces quatre structures travaillent en partena-riat depuis plus de quinze années avec unevolonté d'échanger sur les pratiques. Depuis1992, elles s'investissent dans différentsprojets européens (NOW, puis EQUAL) cequi leur donne du temps pour travaillerensemble, mener des études, partager despratiques et s'outiller conjointement.

Après plus de quinze ans, la priorité n'estplus l'accès à l'emploi le plus rapidementpossible : cela conduit trop souvent à main-tenir les femmes dans la précarité avec desemplois peu qualifiés, à temps partiel, àhoraires décalés. Nous travaillons davan-tage dans une perspective d'accompagne-ment centré sur la personne, dans la cons-truction de parcours plus durables.

Témoignages régionaux

Parcours Femmes en Poitou-Charentes :un partenariat, des réseaux pour l’insertion des femmes.

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Depuis 2002, dans le cadre du pro-gramme européen EQUAL, les structurestravaillent sur les axes suivants :• diversification des orientations profes-

sionnelles comme moyen d'accéder àdes emplois plus qualifiés, à temps plein,

• préparation pour l'accès à la VAE,• conciliation vie familiale / vie profes-

sionnelle,• technologies de l'information et de la

communication (le site www.cyb-elles.org permet de dif-fuser des travaux, de l'information).

"Parcours femmes" a aussi mené des étudessur les spécificités de l'accompagnementdes femmes vers l'emploi, sur l'évolution desmétiers féminins, engagé des réflexionsavec l'organisation de séminaires (parexemple en octobre 2004, une rencontresur la "Diversification des orientations pro-fessionnelles des femmes"). Notre partena-riat nous a permis de créer et d'échangerdes outils et des séquences de formation.Ces outils (le portefeuille de compétences,l'attestation d'activités) sont testés par desfemmes avant d'être finalisés et généralisés.

En quinze ans de travail en commun, noussommes passés de valeurs communes àune culture commune.

Patrick POITIERS (IRFREP- Ligue de l'EnseignementPoitou-Charentes - Directeur del'Agence des Deux-Sèvres)On peut parler d'une évolution de notrecoopération, d'une construction progres-sive du dispositif.

Les observations de terrain ont permis demodifier le dispositif, par exempleadmettre qu'une femme peut concilier soninscription dans le dispositif et un travail àtemps partiel. L'objectif principal, le projet partagé, estl'amélioration de l'insertion professionnelledes femmes. Le dispositif accueille 150 à200 personnes par département, soit 800femmes dans la région. Nous arrivons à untaux d'insertion supérieur à 50 %.

Entre nos quatre organismes, pas deconcurrence, mais un partage des outils etle respect des différences. Il n'y a pas desecret, ni de propriété des idées et desoutils. D'ailleurs, tout ce que nous produi-sons ensemble est diffusé, car nous tra-vaillons sur des financements publics.Chaque département a son réseau deproximité, chaque organisme ses spécifi-cités et il nous faut respecter ces diffé-rences. Nous avons une prise de décisioncommune et un équilibrage du tempspassé par chacun. Chacun de nous estautorisé à parler au nom des autres sur lesdécisions majoritaires.

Nous travaillons sur des questions et pro-blématiques minoritaires. Par exemple, en1992, la question de la diversification desemplois féminins n'était pas à l'ordre dujour. On s'est exposé ensemble. Se vivrecomme une minorité, cela nous a soudés,nous a amenés à parler d'une seule voix.

Sur le programme européen EQUAL, enpartenariat avec l'AFPA, 26 personnes

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ont participé aux activités : constructiond’outils, diffusion d'information, partagede valeurs. La caractéristique du partena-riat transnational EQUAL, c'est qu'il y ade nombreux partenaires dans chaque

pays, ce qui suppose de bien organiserles activités. Le partenariat transnationalexige de se caler, d'avoir partagé avant.Cette formalisation est constructive.

Thierry FAYOUX (directeur PAIO ERIGE Lusignan)Notre propos concerne aujourd'hui lesbénéficiaires du RMI mais la PAIO reçoittoute sorte de public. Nous travaillonsdans le Pays des Six Vallées, 48 com-munes sur lesquelles il n'y a aucune struc-ture pour l'emploi.

Anita LOUET(responsable de l'Unité territorialed'intervention sanitaire et socialede Fontaine le Comte)L'UTISS est rattachée au Conseil Généralavec pour missions :• l'accueil, l'écoute, l'orientation et l'ac-

compagnement de tout public, jeune,famille, adulte, pour les personnes ren-contrant des difficultés de toute nature ;

• le suivi et l'accompagnement des béné-ficiaires du RMI avec le dispositif descontrats d'insertion.

Stéphanie CHAIGNAUD (chargée de mission, équipe deprospection placement IOD, CapEmploi)La structure existe depuis 1995 et dépenddu Conseil Général. Elle vise l'accès à

l'emploi direct pour un public peu ou pasqualifié, niveau bac maximum, jeunes,bénéficiaires du RMI, demandeurs d'em-ploi. Six équipes sur la Vienne assurent unservice de proximité vers les entreprises etles demandeurs. En 2004, nous avonsaccompagné 120 personnes dont lamoitié allocataires RMI.

Thierry FAYOUXPourquoi ce partenariat ? Nous noussommes demandé : quels freins mettons-nous - nous-mêmes, acteurs du social - àl'accès direct à l'emploi ? Certaines per-sonnes sont passées par toutes les mesureset n'accèdent pas pour autant à l'emploi.

Toute demande d'emploi est entendablemais certaines personnes ne savent pas sevendre et se mettre en valeur. Il fautarrêter de se dire que les gens ne sont pasprêts et agir sur le système. On évite ainsiles parcours longs, les étapes préalables ;c'est un gain direct pour la collectivité.

Stéphanie CHAIGNAUDOn part de la demande de la personne,de ce qu'elle a envie de faire et de ses

Accompagnement vers l’emploi marchand de personnes bénéficiaires du RMI sur le Pays des Six Vallées (Vienne).

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savoir-faire. Si on ne part pas de la per-sonne, si elle n'est pas volontaire, cela nefonctionne pas. L'emploi qu'elle souhaite existe-t-il ? S'iln'existe pas sur le secteur, on lui proposeautre chose. Nous prospectons alors lesentreprises sur le type d'emploi querecherche la personne. Nous envisageonsensemble le poste, les conditions detravail…

Si la personne est intéressée, elle est miseen contact avec l'emploi sur le terrain.Nous allons ensemble rencontrer le chefd'entreprise et les collègues, visiter leslieux, afin que chacun décide en connais-sance de cause. Nous l'accompagnonstout au long de la période d'essai qui nedoit pas être une période de test mais untemps d'adaptation. Selon le cas, on faiten sorte que la personne soit opération-nelle à la fin de la période.

Thierry FAYOUXLes critères de sélection sont généralementbien plus élevés que ce qui est nécessaire.Dans le secteur rural, il y a des entreprisesqui ont des problèmes de recrutement. On

insiste sur l'idée de compétences mini-males (et non maximales) et d'adaptation.On travaille avec l'entreprise, on fait uneétude de poste qui débouche parfois surun changement de définition. Lesemployeurs ont besoin d'aide pour lesrecrutements mais aussi sur l'organisationdes postes dans l'entreprise. C'est cela,agir sur le système. 92 % des personnesen emploi restent en emploi l'année sui-vante. 30 % des gens rebondissent surd'autres types d'emplois.

Anita LOUET

Le RMI sur notre secteur concerne 450allocataires pour 58 % de contractualisa-tion. Nous organisons des temps de ren-contre entre nos trois structures autour desparcours, sur les besoins repérés du béné-ficiaire. Il y a des entretiens tripartites, desréajustements sur le contrat d'insertion.

Une commission technique de validation,instance mise en place en 2005, réunitdes élus du Conseil Général et des per-sonnes ressources. Les cellules d'appuisont des espaces de réflexion et d'infor-mation sur les situations des personnes.

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Si la participation de la personne à sonprojet de vie et d'insertion professionnellesuppose qu'on la prenne en compte dans saglobalité, quelles formes de coopération celaimplique-t-il et entre quels types d'acteurs ?

Comment donner du sens à l’engagementde l’individu et le rendre acteur de cettedémarche ? La formulation de la questionparait incongrue, voire paradoxale pourcertains…

• S’il n’y a pas de participation de la per-sonne ça veut dire qu’il n’ y a pas deprojet de vie.

• On peut avoir un projet sans être acteur(c'est-à-dire qu’il n’y a pas de mise enœuvre, pas encore de démarrage …).

Coopérer avec la personne :Coopérer avec la personne ce serait allervers "l’entrée en actes" et accompagner lecheminement. Comment faire pour se rap-procher, pour rejoindre la personne surson projet ? Comment s'articulent le projetde la personne et le projet du travailleursocial pour la personne ?

• Contractualiser, verbaliser l’intervention :- exposer le sur quoi on va travailler, le

comment, avec qui - faire exprimer ce que la personne attend

de la prestation/intervention - pourquoi est-on là ensemble ?

• Entrer dans la (en) relation - rassurer, gagner la confiance - éviter la violence de certaines questions

du genre : "quel est votre projet ?" touten prenant en compte l’injonction auprojet par exemple pour les allocatairesdu RMI

- permettre à l'envie, au vouloir de s'ex-primer

• Ce qui se joue dans la relation - transfert- préjugés- émotions - pouvoir (position non égalitaire)- jugement (le projet irréaliste : pour qui ?)

• Comprendre, interpréter les actes poséspar la personne

- quelle est son intention ? sa motivation ?

Compte-rendu des ateliers

COMMENT FAVORISER LA PARTICIPATION DES PERSONNES À LEUR PROJET DE VIE ET D’INSERTION PROFESSIONNELLES ?

Animation : Patrick POITIERS, Ligue de l'enseignement IRFREP

avec Emmanuelle MAZEAUD, CARIF Poitou-Charentes

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- Est-ce qu'elle fait ce qu’elle croit qu’onattend d’elle ?

Il convient de s’assurer que les non-actesne viennent pas du fait d’incapacités àcomprendre des situations plus complexesqu’il n’y paraît (par exemple téléphonerpour une période en entreprise ; prendrecontact pour obtenir une information,...) :le manque de compétences n’est passigne de manque de motivation.

• Le temps dans la relation - laisser le temps qu’il faut ?- y a-t-il un schéma type de déroulement

de mise en projet ? avec des étapes ?

La coopération entre acteurs de l’insertion La multiplicité des accompagnateurs, desaccompagnements autour d’une même per-sonne peut être un plus pour la personne :elle peut y prendre ce dont elle a besoin ; lapersonne "fait le tour", elle profite desexpertises et de la diversité des services. • pour plus de cohérence autour de la

personne en difficulté ?• pour un service optimisé ?• pour répondre aux exigences du financeur ?

Des étapes peuvent être dédiées, partagéesavec d’autres acteurs. Le partage d'infor-mations sur la personne exige une vigilanceaux règles d’éthique et de déontologie.

Quelques exemples de coopération réussie

1. Chantier d’insertion jeunes par lesport en Charente, CFOSEP

- 9 objectifs pédagogiques identifiés- 6 intervenants - un temps de concertation pour sedémarquer, pour mieux travailler enéquipe, formaliser, mettre à jour, préciser,le type de compétences, les limites desinterventions, les pratiques, les outils ….Des étapes structurées avec une semainede détermination, d’engagement quipermet de présenter la commande institu-tionnelle au jeune et de confirmer le choixdes intervenants.

2. Suivi MGI en Charente - mise à plat du partenariat - instance de suivi en présence du jeune :cellule d’appui

3. Comités opérationnels des PLIE- CLI, DDTEFP, entreprises d’insertion,etc.…

4. La Ligue – IRFREP 79 : coopérationentre pairs - Mise en place d’équipes projet pour desjeunes en insertion - L’engagement au cœur du projet

La coopération entre acteurs de l'insertionest une pratique émergente, avec deslimites et des difficultés. Les participantsconfirment le souhait de faire évoluer lespratiques, d'aller, au-delà des relationsinter-personnelles facilitantes, vers descoopérations raisonnées. Pour cela, il fautpouvoir se dire les choses, se comprendre,entendre les critiques, aller au-delà desreprésentations réciproques pour faireensemble, partager des outils construitsensemble.

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Est-ce que l'intervention des professionnelsde l'insertion ou de l'orientation se situenettement dans une logique de l'ajuste-ment, du placement, de l'adéquation ? Oubien l'accompagnement est-il censé mettrela personne dans un processus de change-ment ? Avoir un "effet formateur" ?

Didier VALDESNous essaierons d’explorer au cours de cetatelier les limites de la notion de formationrapportée aux situations d'insertion ou demobilité professionnelle. Ces temps d’o-rientation et de mobilité professionnelle,s'ils induisent un processus de changement,peuvent-ils être considérés comme destemps de formation ? Quelles sont lescontraintes ? Quel rôle a l'accompagne-ment dans la mise en place d'un processusde changement ? Si ces situations d’entre-deux contribuent au développement de lapersonne, peuvent-elles pour autant sepenser comme un temps de formation ?

Des actions entreaccompagnement et formation Nous menons des actions d'insertion pro-fessionnelle sur le terrain et réalisons unaccompagnement des jeunes de moins de25 ans. Il y a une dynamique de groupe,les objectifs de formation ne portent pas

seulement sur les savoir-faire, mais aussisur le savoir-être.Nous proposons à notre public unapprentissage ou ré-apprentissage desrythmes de vie collective, de vie au travailmais aussi des modules qui permettent dechanger leurs représentations de la for-mation pour qu'ils n'hésitent plus à seformer entre deux boulots. On fait évoluerle comportement des personnes parrapport à la formation.Il y a une image de la formation quirenvoie à l'école, à l'échec scolaire, et quipeut faire peur. Une formation Premierssecours qui n'est pas sanctionnée peutconstituer un point de départ, permettreune nouvelle approche de la formation.

Tout dépend de la définition que l'on donnede la formation. On se forme quand ontransforme ce que l'on a en quelque chosed'autre. L'accompagnement ne forme pasmais induit un processus de changementchez la personne.L'action menée sur l'accompagnement enemploi, il s'agit bien d'accompagnement ;par contre, la période en entreprise, c'estde la formation et c'est l'entreprise quil'assure. Puisqu'il y a eu un changement,que la personne a rebondi, c'est qu'ils'agit de formation.

INSCRIRE LE TEMPS DE L’INSERTION, DE L’ORIENTATION, DE LA MOBILITÉ PROFESSIONNELLE,

COMME UN TEMPS DE FORMATION ET DE DÉVELOPPEMENT DES PERSONNES ?

Animation : Didier VALDES, AGEVIF- CAFOC

avec Christine CAVAILLE, GIP Qualité de la formation

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Il y a des personnes qui sont très éloignéesde la formation (sous méthadone, sanslogement, avec des tas de problèmes…) etqui pourtant arrivent à reprendre piedparce qu’elles sont en professionnalisationen entreprise, alors que d'autres qui sem-blent très près de l’insertion n'arrivent pasà entrer dans la formation. Il faut arriverà trouver ce qui est "déclencheur" chez lapersonne. Le travail en partenariat estprécieux ici car il peut aider à trouver lameilleure solution pour la personne.

On doit répondre à une logique institution-nelle plutôt qu'à une logique pédagogique.On nous demande de mettre en formationdes jeunes qui ont un problème depuis 16ans par rapport à l'école. Pour arriver àdes résultats, il nous faut contourner cer-taines directives. Avec la décentralisation,la formation professionnelle glisse vers laRégion. On a connu une période où l'in-sertion sociale était financée. L'insertion aglissé sur les Conseils Généraux. On nepeut plus proposer des actions de forma-tion de type social et insertion. Tout cequ'on peut faire, c'est de la qualification, etencore, avec des métiers bien ciblés, del'insertion vers l'emploi et c'est tout.

Pour tous ces temps d'accompagnement, peuimporte le terme qu'on y met : formation,information, accompagnement, il est impor-tant d'évaluer les actions : l'action a-t-elle deseffets sur la personne et son parcours ?

Il faut ancrer un certain nombre d'étapespour la personne. Est-ce qu'on appelle ces

étapes de la formation ou autre chose ?Il est très important de leur laisser destraces de ce qu'on fait.Les personnes se sentent valorisées quandelles reçoivent les attestations de forma-tion, même si elle n'est pas diplômante.Ça peut donner parfois envie d'aller plusloin. C'est une fierté, on peut en parler, onl'a fait, ça nous appartient.Dans le cadre du contrat d'insertion, ilfaudrait intégrer toutes les étapes dansune formation, pour que la personne sel'approprie et se rende compte de cequ'elle a fait dans son parcours. Désignerça comme une formation permet de valo-riser la personne.

Accompagnement vers la formation ou vers l'emploi Il y a un paradoxe : on considère que lesgens qui vont en formation sont en "sortiepositive" alors que ceux qui sont dansd'autres démarches comme par exempleune mission d'intérim, sont considérés en"sortie négative" dans les statistiques.Il faut laisser à la personne du temps pourfaire des expériences (par exemple, letravail en intérim), se poser, essayer autrechose et petit à petit en faire de plus en plus.

Pourquoi vouloir considérer l'accompa-gnement comme de la formation ? Est-ceque c'est par rapport aux financeurs ?Pour nos financeurs, ce n'est pas la for-mation qui prime, c'est l'emploi. L'objectifd'insertion est l'emploi.On nous demande d'amener les gens enemploi durable, en CDI et on sort de nou-

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veaux contrats de travail, des CDD sur 2ans…

C'est un problème de définition sémantique.L'insertion n'est pas une fin en soi, c'est unprocessus, une mise en mouvement. Dans letravail en mission temporaire, on oriente lespersonnes vers la formation quand les com-pétences manquent, mais de premierabord, parler de formation fait peur.

Il ne faut pas oublier que l'insertion passepar plein de choses avant d'aborder laformation et l'emploi.Cela dépend des personnes. Pour beau-coup, l'insertion sociale et l'insertion pro-fessionnelle peuvent se faire en mêmetemps. L'emploi peut parfois régler desdifficultés sociales.Le terme formation peut faire peur auxpersonnes (échec scolaire), le mot"travail" est valorisant.

Le chantier d'insertion est un point dedépart : travail, salaire avec les effetsinduits de reconnaissance. On ne parlepas d'accompagnement, ni de formation.Cela dépend vraiment de l'organisme etde sa mission.

Coopération et partenariatIl y a différents réseaux et des partenairesà solliciter et utiliser. On est malheureuse-ment sur des dispositifs où c'est la perfor-mance qui prime. C'est à nous de co-construire un dispositif d'évaluation avecles financeurs. Surtout ne pas vouloir s'endébrouiller tout seul.

Les partenariats apporteraient dessommes de compétences qui permet-traient d'apporter des solutions aux per-sonnes bénéficiaires. Mais cela pose aussile problème des personnes renvoyéesd'un organisme à un autre.

Il faut aussi avoir une logique institution-nelle de territoire pour avoir à proximitédes structures d'accompagnements, d'in-sertion, intermédiaires…

Professionnalisation Notre action est souvent peu lisible pourles financeurs. Ils refusent parfois definancer des projets car ils ne compren-nent pas ce que l'on fait. Il faudraitpouvoir mettre en place un diplôme d'ac-compagnateur pour enlever le côtéopaque de l'insertion.

Il existe déjà des formations à l'Université(licence professionnelle des métiers del'insertion) et à l'AFPA (Conseiller enInsertion Professionnelle) mais les finan-ceurs ne les connaissent pas non plus.

Il faut souhaiter que de nos métiers puissenaître une formation de longue durée :c'est une question de survie de nos métierspour lesquels il n'existe pas d'identifica-tion à un diplôme.

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Sonia SPERONI Avec le RMI-RMA relevant des départe-ments, l'individu "allocataire" est à chargedu territoire où il réside. Du coup, l'injonc-tion à (ré)insérer s'impose plus directementà un territoire : parce qu'il s'agit de seshabitants et parce qu'il paye, l'insertionrenvoie à la question des ressources mêmesdu territoire : il est plus ou moins riche pourpouvoir payer, plus ou moins développééconomiquement pour pouvoir insérer.Cela renforce la nécessité pour les acteursdu social de s'intéresser de près aux possi-bilités offertes localement, à mobiliser lesentreprises, les partenaires socio-écono-miques au nom d'un "civisme local", d'undéveloppement local. Certains parlent dedéveloppement local durable quand l'éco-nomique n'oublie pas le social…

Par ailleurs, on fait le constat que les pro-fessionnels de l'insertion ne sauraient tra-vailler en vase clos (entre ALE - ML - EI …)sinon il y a échec à insérer professionnel-lement, stigmatisation des bénéficiairesenkystés dans le chômage ou l'emploiaidé. Pour les amener vers le secteur mar-chand, le monde de l'entreprise, les pro-fessionnels de l'insertion s'intéressent autissu socio-économique local, sont en lien

avec nombre d'associations, un réseaud'entreprises…

Et surtout, l'individu n'est pas seulementun anonyme demandeur d'emploi ou allo-cataire ; il est habitant-citoyen-voisin-parent-adhérent sur un territoire, lieu devie, lieu de travail, territoire d'action où ilpeut être en lien avec une diversité d'ac-teurs. Il n'est pas seulement "à charge"mais peut être une ressource, un potentielde développement, d'animation, créateurd'activité pour demain.

Ces trois dimensions conduisent-elles "toutnaturellement" à mobiliser une diversitéde dimensions autour de la personne :économique, sociale, culturelle… Malgréle clivage entre ces dimensions, commentfaire du lien, se mettre en lien, se retrou-ver partenaires sur un même territoired'action ? Comment faire pour établir ce lien là ? Laproximité est-elle suffisante ? Quelle cohé-sion donne-t-elle aux projets d'insertionprofessionnelle ? Le territoire est-il porteur d'une logiquelocale de développement et de partenariatou bien la logique des réseaux prime-t-elle encore ?

INSCRIRE LE TEMPS DE L’INSERTION COMME UN TEMPS RELIÉ À L’ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE, SOCIALE ET CULTURELLE D’UN TERRITOIRE ?

Animation : Sonia SPERONI, GIP Qualité de la formation

avec Anne-Marie HAMON, CARIF Poitou-Charentes

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La mobilisation d'une diversité de dimen-sions autour de la personne apporte-t-elledes solutions nouvelles ? C'est peut-êtreune fausse bonne idée ; quelle en est laplus value ? Qu'est-ce qu'on fait mieuxavec des partenaires qu'entre soi ?

Coopération autour des allocataires RMILe Revenu Minimum d'Insertion est uneallocation départementale qui oblige àcontractualiser avec un instructeur, il fautdécliner qui on est, ce qu’on veut faire.Certains contrats d’insertion doivent per-mettre à la personne de bouger. Dans cecas, il faut mettre en œuvre les outils pourlui permettre de le faire, tant sur le plansocial, que sur celui du logement et de lasanté et pour certains, de l’emploi. À unallocataire du RMI qui souhaite s’insérerprofessionnellement, il faut permettred’accéder à tous les outils qui peuvent lemener à l’emploi. D’autres ont besoin deplus de temps. Le RMI n’est pas une fin ensoi. Il doit être un moyen pour s’en sortir.Mais il faut des mesures coercitives si lestermes du contrat ne sont pas respectés.

Être bénéficiaire du RMI correspond à dessituations très disparates. L'allocatairepeut avoir 55 ans et être en attente de laretraite, être un diplômé de 30 ans, avoirun statut d’agriculteur ou d’artisan, sortird’hospitalisation, etc. Cette hétérogénéitédes publics ne peut qu’engendrer descontractualisations hétérogènes. Les pro-blématiques territoriales sont elles aussidiverses.

Les actions d’insertion pour les bénéfi-ciaires du RMI sont mises en place dansun travail en réseau avec des travailleurssociaux. II y a un paradoxe du RMI : c’estun dispositif d'État qui répond à la fois àune philosophie et à une politique. Lacommission locale d’insertion (CLI) a pourobjectif le fonctionnement et le contrôle dudispositif.

Un nécessaire partage de pratiquesTravaillent au sein de la CLI des personnesqui ont des pratiques et des valeurs diffé-rentes. Toutes ne partagent pas uneculture de l'accompagnement. Les tra-vailleurs sociaux sont davantage dans uneposture d’aide pour répondre à desbesoins, à des urgences, alors que la CLIa pour rôle de faire bouger les gens horsdu dispositif, de trouver une solution desortie. On ne parle pas le même langage.On entend des choses comme "Vousobligez les personnes à travailler alorsque c’est difficile pour eux et qu’il n’y apas de travail. Vous ne les mettez dans unparcours que pour les insérer".

Nous sommes donc confrontés d’un côtéau malaise social du bénéficiaire et del’autre, à la pression sociale du ConseilGénéral et plus largement de la société.Cette incompréhension engendre l’inertie.C’est déstabilisant pour le public quientend des discours différents : du dis-cours moralisateur sur le travail, à lacharge contre la société et la violence dusystème.

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Il est important que les interlocuteurs com-prennent dans quelle logique chacunévolue sinon il peut y avoir des malen-tendus. Une personne peut être radiée dela liste des demandeurs d’emploi nonparce que le conseiller en aura décidéainsi mais sur injonction de la structurepar exemple. Il peut arriver que l’ANPEpose un diagnostic social et que l’assistantsocial émette un avis contraire : "il fautque la personne travaille". La position dechacun est fonction de l’évaluation quechacun a pu faire.

Cela vaut aussi pour la logique du secretprofessionnel qui n'est pas partagée partous. Il faudrait pouvoir former tous lesprestataires du dispositif ce qui est plusdifficile à réaliser.

L'ensemble des intervenants ont une légiti-mité dans l’accompagnement. L’assistantsocial a sa légitimité, l’ANPE aussi, toutcomme l’animateur PLIE ou l’organismequi s’occupe des handicapés. Si le bénéfi-ciaire est sous tutelle, la personne respon-sable chargée de la tutelle est aussi légi-time que les autres à intervenir.

Dans ce cas, comment met-on le bénéfi-ciaire au cœur des préoccupations ?Certains partenaires ne sont pas prêts àpartager, à lâcher leur terrain. Descomités techniques ont été mis en placepour intervenir sur le suivi de la personne.Ils réunissent des travailleurs sociaux duConseil Général, des CCAS, l’ANPE, desorganismes de formation, la CRAMCOetc. Le bénéficiaire reçoit des injonctionsdifférentes. Il n’a pas toujours le même

discours en fonction de la personne à quiil s’adresse et de l’endroit où il se trouve.Il faut donc partager sur la lecture quechacun peut avoir de la situation et serecentrer sur la personne. C’est le rôle desanimateurs de CLI d’amener chacun àrespecter les postures de l’autre.

Le temps de coordination n’est pascalculé. Il est informel si les relations entreles partenaires sont bonnes. Mais enmême temps, s’il n’est pas institutionna-lisé, il risque de ne pas avoir lieu.

L’échange de pratiques et la coopérationsont des temps professionnels essentiels quimanquent face à un public dont les problé-matiques se complexifient de plus en plus.Les problèmes psychiatriques par exemple,ne sont pas évoqués dans l’insertion. Etredans un parcours d’insertion, c’est aussis'inscrire dans une vie sociale. Insertion nesignifie pas qu’emploi. Nous avons besoind’échanger sur les réalités et les pratiques dechacun parce qu’on a parfois tendance àoublier les usagers. Ils ne sont pas unique-ment consommateurs, ils sont aussi acteurs.Il faut aussi les écouter et prendre en comptece qu’ils veulent et ce qu’ils peuvent faire.

La commission technique de validation,c’est une volonté du Conseil Général de laVienne de mettre en place des temps for-malisés. Nous y échangeons sur les situa-tions, sur nos savoir-faire, des informa-tions. Les instructeurs y assistent pour pré-senter les contrats d’insertion. Les instruc-teurs sont des assistants sociaux qui éla-borent le contrat et en posent les objectifs.

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En Charente, les acteurs de l’insertionbénéficient de financements pour desjournées de formation et d’analyse despratiques animées par Dominique PADE.C’est important car tous n’ont pas lamême culture, les mêmes objectifs, lesmêmes injonctions. Ces journées thématiques réunissent deuxfois par an et à leur demande, des accom-pagnateurs socioprofessionnels, tra-vailleurs sociaux, animateurs, assistantssociaux, des deux circonscriptions deJarnac et Cognac. On y travaille sur leslimites de l’intervention et les pratiques dechacun. C’est sans doute insuffisant maisc’est intéressant. Une journée sur l’insertion a réuni 250personnes. De cette émulation a émergé lebesoin de créer un programme local d’in-sertion sur trois ans, pour partagervaleurs et cultures.

Comment mieux travailler ensemble pourmonter des parcours plus efficients etcohérents ?On constate que les bénéficiaires du RMIsouffrent de problèmes psychologiques, lasolution est-elle pour autant dans l'em-bauche d'un psychologue ? Ou dans laformation ? Depuis trois ans, on demandece type de formation pour les travailleurssociaux, les ASP28, les animateurs dechantier, le personnel d’accueil.Une journée annuelle de partage des pra-tiques qui s’apparente à de la supervisiontouche dix-sept partenaires, soit environvingt personnes. On y échange sur lesparcours qui nécessitent un accord afin

d'éviter toute répercussion sur la per-sonne. Le travail se fait sur des cas précis,les représentations que chacun a de lasituation. La supervision n’a rien à voiravec un cours théorique. C'est une excel-lente réponse aux difficultés de partage etde coordination.

Coopération avec le secteur économiqueOn peut penser que la richesse du terri-toire intervient sur le nombre des bénéfi-ciaires du RMI or ce n'est pas le cas : larichesse locale ne permet pas pour autantl'insertion de tous. Les mutuelles dans lesDeux-Sèvres, produisent de la richesse.Pourtant, à Niort résident 40 à 42 % desallocataires RMI du département et ledépartement compte la plus forte concen-tration des bénéficiaires du RMI de Poitou-Charentes. À Bressuire, où les chômeurssont environ 5 %, le nombre d’allocatairesa peu fléchi. Actuellement, c’est comme sideux réalités économiques coexistaientsur un même territoire sans rapport entreelles.

Quel lien y a-t-il entre la logique sociale et lalogique économique ? L’accompagnementsocial, c’est ce qu’on sait le mieux faire.Mais sur le plan économique ? Un réseauéconomique actif est nécessaire pour faire lelien avec les entreprises. Des allocatairesRMI sont employables, il faut non seulementque l’offre soit repérée, décodée et acces-sible mais surtout que leur demande d'em-ploi soit légitimée.

28. Accompagnateur socioprofessionnel

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Il faut aussi se mettre d’accord avec la per-sonne sur ce que c’est que l’emploi, ce queça implique en termes de déplacements, degarde d’enfants, etc. On met souvent desétapes, on inscrit les gens sur des dispositifsfaute de pouvoir faire le lien avec l'entre-prise. Il y a trop souvent rupture, voire oppo-sition, entre l’accompagnement socioprofes-sionnel et la richesse, la vie économique.

Le territoire peut être un territoire de ren-contre – nous sommes alors dans le déve-loppement local – ou un territoire de repli– et là, il s’agit de cohabitation.

Aujourd'hui seulement 15 % à 20 % desmétiers sont des métiers de productionalors que nous maintenons une définitionarchaïque : le métier comme fabrication dequelque chose qu’on vend. Mais de plus enplus souvent, le métier c’est autre chose,des services par exemple. Faut-il remettredes gens dans l'emploi sur une conceptionantérieure du travail ou bien inventer autrechose ? Bien sûr nous n'avons pas toute lalégitimité pour cette question, c'est pour-quoi il nous faut travailler avec les élus, lesentrepreneurs sur cette "autre chose". Maiscomme ce n’est pas une injonction forma-lisée et que les logiques politiques sont dif-férentes, la rencontre n’a pas lieu.

Le territoire est équipé, voire suréquipé,dans une logique d’évitement. EnAllemagne par exemple, l’équivalent del’ANPE est financé par l’État et les entre-prises. En conséquence, toutes les offresdes entreprises passent par cet organisme.Nous sommes loin de ce résultat… S’il y avolonté de rencontre sur le territoire, il y a

collaboration et de ce fait, déterminationde la fonction et de la légitimité de chacun.Comment faire pour sortir de ces stratégiesd’évitement ? Comment fait-on pour qu’unethématique réunisse l’économique, lesaccompagnateurs sociaux, le financement(et donc les politiques) ? Il n’y a jamais lestrois ensemble, il en manque toujours un…

Le forum "Chemins de la réussite en HauteSaintonge" a rassemblé des personnesqui ne travaillaient jamais ensemble surun territoire fermé de 80 km de long, à l’i-dentité très forte, qui connaît des diffi-cultés économiques et sociales.

Ce forum a été une réussite et sera recon-duit en 2006. Il a réuni en mai 2005 tousles ASP, les entreprises, les organismes deformation, le Conseil Général, l’ANPE, lesservices sociaux, la COTOREP, les chan-tiers d’insertion, les consulaires, en pré-sence de Jean-Louis BORLOO. Les entre-prises sont venues par l’intermédiaire desconsulaires et de l’ANPE – un travail deGPEC est en cours sur la zone – qui ontlancé les invitations. Cette journée étaitdédiée aux demandeurs d’emploi qui sontvenus nombreux et ont pu prendre descontacts. Les objectifs ont été atteints. Il ya eu des signatures de contrats avec deschantiers d’insertion grâce à la mobilisa-tion conjointe des intervenants, bénéfi-ciaires compris, l’engagement de la per-sonne étant indispensable. La signaturedes contrats découle de l’action, de lavolonté du territoire. Cette rencontre apermis de travailler sur l’analyse des pra-tiques et les acteurs souhaitent continuer

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dans le but d’offrir le meilleur aux per-sonnes en difficulté. Cette collaborationpourrait déboucher sur la création d’unemaison de l’emploi.

Pour l’accès à l’emploi direct, il faut agirsur les représentants d’entreprises, les fédé-rations, les clubs d’entreprises, les commer-çants… La directrice de la PAIO de Ruffecfait partie d’un club d’entreprises, quandon arrive à entrer par un contact personnel,c’est un réseau qui s’ouvre.

Il faut s’autoriser à aller au-devant dusecteur économique. Nous n’osons pasinvestir certains lieux où pourtant il existedes moyens de promouvoir notre activité :des structures de pays, comme les conseilsde développement, les communautés decommunes ont des chargés de mission. Ilfaut donc vraiment s’autoriser à faire lenécessaire pour être légitimé, y aller. Etc’est le technicien, l’acteur direct, qui doitfréquenter ces lieux, pas le directeur ou leprésident.

Insertion et accès à l'emploiAu Conseil Général de Charente, leservice d'accès à l'emploi est passé de sixà trente personnes. Une méthode prochede IOD29 est utilisée pour mettre directe-ment les personnes en emploi sans pourautant négliger l’accompagnement social,les problèmes de santé, etc.L’accompagnement relève de la volontéaffichée d’animer la politique d’insertion.Ce sont aussi des structures et des accom-pagnateurs socioprofessionnels

Tout est question de choix politiques, descapacités du département à assumer lescompétences qui lui incombent.Davantage de personnes en emploi, c’estmoins d'allocataires à payer.

Le Conseil Général finance des actionsd’insertion. Nous avons monté un groupe-ment d’employeurs pour l’insertion et laqualification (GEIQ) artisanal. Le consti-tuer a nécessité un travail de fourmi, delongue haleine, de réseau, de relations ;nous avons fait jouer les clauses d’exécu-tion sociale sur les marchés publics. Maisce projet pose un problème de reconnais-sance en interne avec le service écono-mique.

La CAPEE est un réseau qui regroupe plu-sieurs associations et structures d’inser-tion. Ce réseau est composé de vingt-troismembres dont douze structures d’insertionpar l’activité économique (SIAE). Parmieux, des centres sociaux, la Croix rouge,le comité poitevin pour le logement, etc.Ceci permet une vision globale sur l’inser-tion et d’établir des relations avec lesentreprises. Ce fonctionnement en réseaupermet de ne pas travailler "en boucle". Une personne est chargée de la prospec-tion ciblée pour l'emploi. Il est difficilepour les entreprises d'insertion de laissersortir un salarié pour une évaluation enmilieu de travail (EMT) par exemple, desuspendre le contrat d’une personne et luipermettre de revenir ensuite à son postede travail.

29. Intervention sur les offres et les demandes.

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On se heurte à des limites juridiques et onse trouve confronté à la logique de pro-duction des SIAE.

En rencontrant une liste ciblée d’entre-prises, le prospecteur peut faire appa-raître dans l’entreprise des besoins qui necorrespondent pas au profil des per-sonnes accompagnées. Mais ce tempsn’est pas pris en compte, la personnechargée de la prospection n'est pas payéepour cela. Pourtant c'est avec ce type deservice rendu que l'entreprise voit qu'onpeut lui être utile. Le rapprochement avecl'entreprise passe aussi par là. Hélas, lalogique financière nous limite : on restesur une logique de financement parpublic. Si tous les financeurs étaient d’ac-cord sur un forfait global, il n’y aurait pasde problème. Mais on est sur une logiquede public, de dispositif et pas sur unelogique de territoire.

Des représentations qui freinent la coopérationDe nombreux chefs d'entreprise ont unemauvaise représentation des personnes eninsertion. Cela pose un réel problème. Pourla cueillette du melon, par exemple, noustravaillons depuis des années en amont avecl’ANPE pour le placement des personnes,étudiants, demandeurs d’emploi et bénéfi-ciaires du RMI, sans que les employeurs lesachent. Lorsque le Conseil Général desDeux-Sèvres a organisé le transport des per-sonnes pour résoudre un problème de mobi-lité, l'identification a été faite tout de suiteentre Conseil général et insertion ; les chefs

d’équipe ont alors réclamé une prime pourl’encadrement de ce public.

Quand on prononce le mot "insertion", onsent tout de suite des réticences. Depuisque nous avons supprimé le mot insertiondu nom de notre structure, nous avons vucroître le placement des stagiaires.

Si on décline le terme CIRMA30 auprès desentreprises, on perd 80 % des possibilitésde placement. Il faut donc les prospecteravec un autre discours. Nous disposonsd’outils comme les clauses d’exécutionsociale. La mise en place de cet outillageest simple pour les entreprises. Cesclauses existent dans les contrats d’entre-tien, de construction, de démolition.Il faut parallèlement que les collectivitéssoient convaincues que les acteurs de l’in-sertion sont capables d'intervenir là-dessus. Démontrer l’intérêt de l’insertionest une démarche volontariste, il faut allerconvaincre, oser, prendre le risque.Se faire connaître et se faire reconnaître,c’est primordial. On peut se dire qu’on aréussi à établir le contact quand onaccède aux offres d’emploi qui nepassent pas par l’ANPE, lorsqu’on estsollicité par une entreprise pour pourvoirune offre.

On voit émerger une compétence com-merciale dans le secteur de l’insertion. LesAPP31 reçoivent des demandeurs d’emploimais aussi de plus en plus de salariés.

30. Contrat d’insertion revenu minimum d’activité31. Ateliers de pédagogie personnalisée

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Ils ont des difficultés à communiquer avecles entreprises et ont choisi de les aborderpar l’intermédiaire des OPCA. En rencon-trant les conseillers des OPCA, les coor-donnateurs APP acquièrent une compé-tence de développeur local. Il faut réussir àporter nos valeurs sur le champ des entre-prises tout en répondant à leurs besoins.

Les enjeux ne sont pas les mêmes : l'enjeuest économique pour l'entreprise quiespère embaucher des personnes immé-diatement adaptables ou adaptées ; ducôté social, l’enjeu est d’insérer. Ladémarche à faire vers l’entreprise doit êtreune démarche individualisée. C'est parcontacts avec les entreprises locales qu'onarrive à placer les salariés les plusadaptés à l’emploi.

Le mot "insertion", les personnes n’enveulent pas, les entreprises non plus.Denis Castra32 a montré que la fréquenta-tion des structures d’insertion débouchesur des contrats aidés. Il faut trouver unsystème qui libère de la culpabilité d’êtresans travail. Le vieux modèle de l’emplois’affronte à la réalité. Il faut penser letravail, penser l’insertion selon un schémaqui se vit déjà, hors CDI…Le travail est une valeur qui génère uneconfrontation entre générations.

Insertion et vie culturelleOn a largement évoqué le lien avec l'éco-nomique, le social. Mais il existe aussi unlien culturel. Les personnes au RMI sont despersonnes à part entière. On a tendance à

penser qu’une personne en insertion n’a ledroit que de trouver du travail, éventuelle-ment d’aller bien, d’être en bonne santé. Ilfaut arrêter de penser l'allocation RMIcomme synonyme de difficulté.

Il faudrait davantage de cofinancementpour accéder à la culture. Il existe un finan-cement pour les spectacles du festivalMusiques métisses à Angoulême. À Poitiers,il y a une bourse spectacles, portée par lebénéficiaire valable sur la Ville de Poitiers.

On fait de l’insertion économique etsociale avant tout ; culturelle s’il restequelque chose.

32. L’insertion professionnelle des publics précaires. CastraDenis. Paris : PUF, 2003.

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La professionnalisation est un axe fort del'animation régionale des ML-PAIO. Comment se définissent les besoins et lesréponses de formation pour les autresréseaux d'acteurs de l'insertion ?Les coopérations entraînent-elles desbesoins ou des occasions de profession-nalisation croisée ?

Les modalités deprofessionnalisation par réseau

L’expérience de professionnalisation desPAIO/Missions LocalesL'expérience de professionnalisationengagée avec les structures d'accueil enPoitou-Charentes montre qu'il s'agit d'unaxe fort de l'animation régionale :

1) La professionnalisation constante desactivités du réseau :Elle se traduit par la mise en place régu-lière de journées d’échanges de pratiquessur des thématiques diverses : santé,orientation… Les ML-PAIO qui le souhai-tent font part des expériences et des outilsqu’elles développent mais également desdifficultés qu’elles rencontrent. L’objectifest de pouvoir questionner les pratiques etde tenter de répondre par l’information,

la mise en réseaux et la mutualisation desbonnes pratiques.

2) La mutualisation des savoirs partena-riaux :Des échanges de pratiques inter-réseauxsont régulièrement mis en place avec l’ob-jectif de mieux travailler ensemble pourmieux répondre aux besoins des jeunes.C’est la formalisation des partenariatsengagés au travers de conventions : pro-positions d’un cadre de travail régional,socle commun partagé, qui peut sedécliner localement en fonction des spéci-ficités territoriales. Actuellement uneconvention est en cours de signature avecl’Administration pénitentiaire et le SAIO33.

3) Le partenariat entre le secteur de l’in-sertion et de l’entreprise :C’est un axe prioritaire pour les ML/PAIOqui œuvrent dans ce sens depuis plusieursannées. La professionnalisation dans cedomaine a pris la forme d'une formation-action sur la relation et le partenariat avecl'entreprise et plus globalement le mondeéconomique.

33. Service académique d’information et d’orientation.

QUELS (NOUVEAUX) BESOINS DE PROFESSIONNALISATION POUR LES MÉTIERS DE L’INSERTION

ET DE L’ACCOMPAGNEMENT DES PARCOURS ?

Animation : Ouiza MEZIANE, Animation régionale ML-PAIO

avec Catherine METAIS, GIP Qualité de la formation

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La professionnalisation des salariés deML-PAIO repose sur un partenariat avecle GIP Qualité de la formation : repéragedes besoins, accompagnement sur desthématiques en lien avec leurs pratiquesmais aussi participation au dispositifSafran34. La convention collective des ML-PAIO miseen place en 2001 est un autre élémentstructurant la professionnalisation.Certains personnels bénéficient des for-mations proposées par le CNFPT.

Le réseau IRIS (union régionale des struc-tures d'insertion par l'activité écono-mique)La professionnalisation du réseau prenddifférentes formes avec la mise en placed’une démarche qualité dans les pra-tiques d’accueil et d’accompagnement(40 personnes par an pour les formationsaccueil) et des réunions de structures duréseau autour de thématiques deréflexion. Un tutorat d’insertion est co-animé avec le CREAHI.Les professionnels des SIAE participentégalement aux actions du dispositifSafran. Par ailleurs, ils ont accès à desprogrammes nationaux du réseau IAE quipeuvent leur être proposés en région.

Conseil Général Charente Il existe une volonté du département deprofessionnaliser les acteurs, en particulierpar la mise en place de groupes d’analysede pratiques (aller en formation, c’est avanttout échanger). Le partenariat entre les tra-vailleurs sociaux et les accompagnateurs

est un élément de professionnalisation avecun programme départemental autour del’insertion. L'offre de professionnalisationest une forme de reconnaissance des fonc-tions exercées par les personnes.

Par ailleurs, la DDASS de Charente met enplace l'intervention d'un psychologueauprès des accompagnateurs sur la mesureASI (Accompagnement Social Individualisé).

Conseil Général Deux-Sèvres Plusieurs types d'accompagnements sontfinancés par le Conseil Général (PLIE…).Le département travaille avec la Région etl’AFPA sur l’accompagnement socio-pro-fessionnel suivant un cahier des charges. Un programme de professionnalisation(ASPIR) a été mis en place.

Rectorat / MGI(Mission Générale d’Insertion del'Education nationale)Dans l’Education nationale, la profession-nalisation passe par la voie des concours.Chaque agent a droit à quatre joursannuels de formation ; les actions dudispositif Safran sont donc une bonneréponse sur cette durée.La MGI a instauré des partenariats avecla PJJ (Protection Judiciaire de laJeunesse). Des réunions organisées régu-lièrement au niveau départemental, sontaussi un élément de professionnalisation.

34. Le dispositif de professionnalisation des acteurs de l’in-formation, de l’accompagnement des parcours et de laformation, financé par l’Etat (DRTEFP) et la RégionPoitou-Charentes.

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Campus des Métiers 79 (Chambre de Métiers des Deux-Sèvres)La Chambre de Métiers dispose d’un pôleinsertion pour lequel s'est constitué unréseau interne de formateurs. Un supervi-seur intervient en analyse transactionnellepour les situations où il s'agit de rétablir lacommunication.Le pôle insertion bénéficie également desformations proposées par l’AFPA dans cedomaine (Conseiller en insertion profession-nelle et Encadrant technique d’insertion).

Les besoins deprofessionnalisationLe GIP Qualité de la formation a mené endébut d’année 2005 une enquête concer-nant le dispositif Safran auprès des utili-sateurs et de leurs employeurs. L’enquêtea permis d’une part, de mieux connaîtreles pratiques et les habitudes de formationet, d’autre part, de repérer des élémentsde satisfaction ou d’insatisfaction pourenvisager des améliorations. Cela a permis de recueillir des élémentsutiles à la préparation de l’appel d’offresSafran 2006 : problèmes rencontrés,points à améliorer, besoins de profession-nalisation recensés …Cet atelier est aussi une opportunité d’en-tendre les besoins de professionnalisationpour les métiers de l’insertion et de l’ac-compagnement des parcours.

Réseau IRISLes besoins sont repérés par des actionssur le terrain mais aussi à travers uneenquête. Les SIAE ne disposent pas de

convention collective et le besoin dereconnaissance est fort : la VAE peut yrépondre. Les formations doivent êtreadaptées à la situation des salariés : deuxans pour le titre d'Encadrant techniqued’insertion, c’est trop long, là encore, laVAE peut être utile.Par ailleurs, un besoin de formation estpointé sur les fonctions de direction. Il fau-drait penser à la gestion anticipée descompétences.Les actions du dispositif Safran répondentbien dans l’ensemble aux besoins mais,selon les dates de programmation, il fautparfois attendre plusieurs mois alors quele besoin est immédiat.La modalité "échanges" est une nécessité :il faut échanger sur les "valeurs" entretechniciens, politiques et financeurs carl’objectif est le même.

Conseils Généraux(Deux-Sèvres – Charente) Le manque de moyens financiers peut êtreun frein à la formation. Il est importantd’avoir un niveau de culture partagé et detravailler sur l’analyse de la pratique.Il faudrait pouvoir valider les expérienceset attribuer des attestations d’activités auplan régional.Une formation serait nécessaire pour allervers l’entreprise.

Rectorat / MGILe besoin a été pointé d'actions sur lamédiation pour être mieux à même detraiter les problèmes et, plus largement,la relation avec les familles.

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Des "débriefings" seraient nécessaires :une supervision est demandée depuis desannées. Il faut des lieux d’écoute et d’é-change pour pouvoir exprimer ses diffi-cultés professionnelles.Le travail en partenariat est source de pro-fessionnalisation ; il permet l'acquisitionde connaissances, de pratiques d’inter-ventions différentes.

PAIO SurgèresLes conseillers des structures d’accueilregrettent de ne pas se réunir pour faireremonter les besoins du terrain ; seuls, lesdirecteurs se réunissent régulièrement.Dans le réseau des PAIO-ML, l’entrée sefait par les compétences et non par lediplôme. D’où la difficulté d'obtenir l'ac-cord pour une formation qualifiante : l’em-ployeur hésite à engager un financementcar le salarié peut partir ailleurs après saformation. De plus, partir deux ans en for-mation, c’est long ! On culpabilise vis-à-visde l’équipe qui doit pallier l’absence.

Sur quelques besoins spécifiques…Le public change mais un formateur ou unaccompagnateur n'a pas à jouer les théra-

peutes. Comment peut-on entendre la souf-france alors que cela n’est pas notre métier ?Il existe des besoins de formation sur l'ac-compagnement des publics en grande dif-ficulté : écoute / demande des personnesavec des pathologies légères qui sontpour l'accompagnateur des cas difficiles.Quelle est la différence entre la dépres-sion et la maladie mentale ? Il y a desbesoins de se former aux conduites addic-tives : toxicomanie, alcoologie et aussi desapports en psychologie pour être capablede dialoguer avec un toxicomane. Desformations sur la non-violence seraientaussi utiles dans l’accompagnement.Pour conclureIl faut garder la multiplicité des réseaux etleur démarche de professionnalisation.Elle permet la richesse et la diversité. Ledispositif Safran et les démarches de pro-fessionnalisation par réseau doivent êtrecomplémentaires. On n'y trouve pas lesmêmes choses.

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BIBLIOGRAPHIE

Quelles formes de coopération pour l’insertion ?

OUVRAGES

• Oser réussir l’insertion. BERNATET Catherine. Paris : Les Editions de l’Atelier, 2005.

Résumé : Qu'est-ce qu'une insertion réussie ? A partir de quand peut-on dire d'une per-sonne qu'elle est insérée ? L'insertion est-elle un leurre ?... L'auteur s'appuie sur les résul-tats d'une recherche-action menée en Seine-Saint-Denis pour explorer des voies diffé-rentes menant à des parcours réussis. Réf. GIP : II-40-BER - Réf. CARIF : L3245

• Le travail non qualifié - Permanences et paradoxes. MEDA Dominique, VENNATFrancis. Paris : Edition La Découverte, 2004.

Résumé : En France, cinq millions de salariés occupent des emplois non qualifiés qui sonten recrudescence depuis les années 90. Cette recherche explore le contenu de cesemplois, le profil des salariés et leurs trajectoires. L'ouvrage invite à pointer l'enjeu poli-tique de cette question : est-il possible d'atteindre les objectifs européens de qualité del'emploi et d'économie de la connaissance, tout en favorisant le développement d'em-plois peu qualifiés ? Réf. GIP : I-3-MED

• L’insertion professionnelle des publics précaires. CASTRA Denis. Paris : PUF, 2003.

Résumé : Pourquoi les dispositifs d'insertion en France produisent-ils si peu d'accès àl'emploi de droit commun ? Analysant quelques représentations invalidantes dominantce secteur professionnel, l'auteur montre, en particulier, l'impasse que constituent desapproches trop strictement centrées sur l'individu et ses cognitions au détriment descontextes et des conduites concrètes. Réf. GIP : II-40-CAS

• Les bricoleurs de l’indicible. LABBÉ Philippe. Paris : Editions APOGEE, 2003.

Résumé : Combinant travail conceptuel et contribution méthodologique, particulièrementsur le projet et son évaluation, cet ouvrage développe une théorie critique de l'action auservice des professionnels des missions locales et PAIO et, plus largement, de tous les pro-fessionnels de l'intervention sociale et de l'insertion des jeunes en difficulté. Outre un his-torique des missions locales et une mise en perspective de l'insertion, cet ouvrage proposeune méthodologie de la démarche du projet. Réf. GIP : II-41-LAB - Réf. CARIF : £3050

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• Et le travail se transforme. CONSTANTIN Hélène, MAGNIER Jacqueline. Strasbourg :CRAPT-CARRLI, 2002.

Résumé : Des professionnels de l'insertion s'interrogent sur leur propre rapport au travailpour mieux comprendre comment leurs publics y sont eux-mêmes confrontés. Il s'agit demises en perspective du travail d'accompagnement social et professionnel sur desaspects aussi divers qu'inattendus : les cadres du travail d'accompagnement, l'identitéprofessionnelle, le sens du travail et sa reconnaissance. Réf. GIP : II-5-CRA

• Pratiques d’accompagnement social et professionnel. Collectif d’auteurs. Strasbourg :CRAPT-CARRLI, 2002.

Résumé : Onze textes, onze points de vue d'acteurs questionnant les pratiques d'ac-compagnement social et professionnel... Réf. GIP : II-5-CRA

• L'insertion : défi pour l'analyse, enjeu pour l'action. Collectif d’auteurs. Sprimont :PIERRE MARDAGA, 2001.

Résumé : Cet ouvrage regroupe différentes contributions de chercheurs en psychologie,en économie et en sociologie. Confrontés à la question de l'insertion, ils souhaitentdémonter les mécanismes conduisant à l'exclusion et contribuer ainsi à l'amélioration del'efficacité des dispositifs visant la réinsertion. Réf. GIP : II-40-LIE

• La crise des identités : l’interprétation d’une mutation. DUBAR Claude. Paris : PUF,2000 (Le lien social).

Résumé : Cet ouvrage dresse un bilan des changements intervenus dans la société fran-çaise, depuis les années 1960, en matière de vie privée, de vie de travail et decroyances symboliques (religion, politique, etc.), où il apparaît que si les formes anté-rieures d'identification des individus (culturelles, statutaires...) ont perdu de leur légiti-mité, les formes nouvelles (réflexives, narratives...) ne sont pas encore pleinement cons-tituées, ni reconnues. Réf. GIP : III-01-DUB - Réf. CARIF : £2699

• Les sciences humaines : panorama des connaissances. DORTIER Jean-François.Edition Sciences humaines, 1999.

Résumé : Cet ouvrage se veut guide pour parcourir les différents domaines des scienceshumaines à travers les théories, les auteurs, les recherches. Anthropologie, linguistique,psychologie, sciences cognitives, psychologie sociale, sociologie, économie, histoire,géographie, philosophie : panorama d'un univers de connaissances. Réf GIP : III-0-DOR(Ed. 1998)

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71Les Cahiers de l’accompagnementEdition CARIF Poitou-Charentes

• Les jeunes face à l’emploi. ROSE José. Paris : Ed. Desclée de Brouwer, 1998.

Résumé : Au cours des dernières années nous avons assisté à une accumulation inten-sive de données et de réflexions sur l'emploi des jeunes. Accumulation suffisamment fortepour pouvoir, aujourd'hui, mettre en avant quelques acquis, sélectionner quelques "faitsstylisés" significatifs parmi la multitude des observations empiriques et résumer les prin-cipales interprétations disponibles. Tel est l'objet de ce livre qui aborde successivementles questions suivantes : qu'est-ce que la jeunesse ? Que fait l'école ? À quoi servent lespolitiques d'emploi ? La situation en France est-elle singulière ? Les entreprises jouent-elles un rôle déterminant ? Existe-t-il un marché du travail des jeunes ? Réf. GIP : I-3-ROS - Réf. CARIF : £2464

• Les jeunes, l’insertion, l’emploi. CHARLOT Bernard, GLASMAN Dominique. Paris :Edition PUF, 1998.

Résumé : Cet ouvrage reprend les travaux de la Troisième Biennale de l'éducation et dela formation (Sorbonne et CNAM, avril 1996). Il traite de questions vives : la question del'insertion, mais aussi par extension, celles de "l'intégration", du devenir du monderural... Il les aborde dans une perspective de recherche, mais aussi d'innovation, en mul-tipliant les approches (chercheurs, acteurs de terrain, politiques ou professionnels). Toutesces questions sont abordées dans cet ouvrage, organisé en cinq parties : 1 - L'insertiondes jeunes : des questions nouvelles, 2 - L'insertion, problèmes des entreprises ? 3 -"Inséreurs" et "insérables", 4 - Parcours d'insertion, 5 - L'insertion et la construction desoi. Réf. GIP : II-40-CHA - Réf. CARIF : £2409

• Les métamorphoses de la question sociale. CASTEL Robert. Paris : Edition Fayard,1995.

Résumé : Il a fallu des siècles de sacrifices, de souffrances et d'exercice continu de lacontrainte pour fixer le travailleur à la tâche, puis pour l'y maintenir en lui associant unlarge éventail de protections qui définissent un statut constitutif de l'identité sociale. Maisc'est au moment même où la "civilisation" du travail paraissait consolidée que l'édifices'est fissuré, faisant ressurgir la vieille obsession populaire d'avoir à vivre "au jour lajournée". L'onde de choc produite par l'effritement de la société salariale traverse toutela structure sociale. Quelles sont alors les ressources mobilisables pour faire face à cettehémorragie et pour sauver les naufragés de la société salariale ? Réf. GIP : III-01-CAS - Réf. CARIF : £1819

QUELQUES REVUES

• Le pouvoir des mots : A propos de l’encadrement socio-éducatif des jeunes " sans avenir" - A quelles conditions des jeunes " difficiles et sans avenir " arrivent-ils à se réinsérer, voireà s’insérer ? Isabelle COUTANT. Revue Formation Emploi n°89, Janvier - Mars 2005.

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72 Les Cahiers de l’accompagnement Edition CARIF Poitou-Charentes

• Un article paru dans La lettre de l’insertion par l’activité économique, N° 105, Juillet-Août 2004 : Les compétences cachées des ENQ.

• Dossier : L’accompagnement des personnes en difficulté. Françoise LEPLATRE.Actualité de la Formation Permanente n°176, Janvier - Février 2002.

QUELQUES SITES

• Bilan de la politique de l’emploi en 2003 (texte intégral) : résultats et analyses desmesures pour l’emploi : emplois aidés, actions d’insertion et de formation, accom-pagnement des restructurations. Les dossiers de la DARES, n°1, 2005. Ministère del’Emploi, du travail et de la cohésion social - Direction de l’animation de la recherchedes études et des statistiques.

www.travail.gouv.fr/publications/picts/titres/titre2488/integral/BILAN%202003.pdf

• Quelles ruptures de tendance dans l’emploi peu qualifié ? Islem Gafsi, NathalieGreenan, Yannick L’horty, Ferhat Mihoubi – Centre d’Etude des PolitiquesEconomiques de l’Université d’Evry-val d’Essone. Mars 2004, 84 p. Téléchargementau format Pdf :

www.travail.gouv.fr/etudes/pdf/EPEE.pdf

• Le travail non qualifié : enjeux économiques et sociaux d’une catégorie statistique-Emploi non qualifié : quel(s) usage(s) pour quels parcours professionnels ? C. Béduwé, B. Fourcade, P. Lemistre, M. Ourtau – LIRHE, Université des SciencesSociales de Toulouse. Juillet 2003, 139 p. Téléchargement au format Pdf :

www.travail.gouv.fr/etudes/pdf/LIRHE2003.pdf

• La construction sociale des frontières entre la qualification et la non qualification. M. Charlier, T. Colin, B. Grasser, J-P. Higelé, A. Khristova, J. Rose, T. Rouyer, G. Ryk-GREE Groupe de Recherche sur l’Education et l’Emploi. Juillet 2003, 162 p.Téléchargement au format Pdf :

www.travail.gouv.fr/etudes/pdf/GREE2003.pdf

• Les enjeux de la qualification des employés – Conditions de travail et compétencesdes " non qualifiés ". Nicole Gadrey, Florence Jany-Catrice, Martine Pernod-Lemattre(CLERSE-IFRESI Université de Lille 1). Juin 2003. Téléchargement au format Pdf :

www.travail.gouv.fr/etudes/etudes_g.html

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Ce fascicule est édité par le CARIF Poitou-Charentes15, rue Alsace-Lorraine - 17044 La Rochelle Cedex 1

✆ 05 46 00 32 32 - N° ISSN : 1262-0408Novembre 2005

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