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REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier chaleureusement toute l’équipe de l’incubateur Energies marines de la

société DCNS à Brest qui m’a accueillie pour réaliser mon stage ainsi que les équipes des

autres sites notamment de Lorient, pour leur contribution à la réalisation de ce mémoire, et

pour leur sympathie.

Je remercie Yves André pour avoir eu l’idée de proposer ce stage.

Je remercie Christophe Chabert pour son soutien au Master TEMPRO

Je remercie tout le personnel de la cellule éco-conception pour sa sympathie.

Merci aussi aux stagiaires et camarades de route, Emmanuel Chabanne, Julien Halleguen,

Jean-Julien Roche, Maxime Podeur, Paul-Henri Decamp, Guillaume Boulard pour le soutien

mutuel partagé dans la rigueur et la bonne humeur.

Je tiens à adresser ma gratitude à Marie Laure Lambert-Habib, directrice du Master

TEMPRO, pour son aide dans la conception de ce mémoire.

Un grand merci aussi à :

Antidia Citores, doctorante à l’Université Paul Cézanne,

Françoise Zitouni, maître de conférences à l’Université Paul Cézanne,

Jean Reynaud, docteur d’Université

Mathieu Wemaere, avocat inscrit au barreau de Paris et Bruxelles, représentant permanent

auprès des Institutions européennes à Bruxelles

Christophe Levisage, du Secrétariat général de la mer,

Pierre Alain Favier, du département éolien offshore de la société de courtage Marsh SA

Au personnel de la Bibliothèque La Pérouse de la Technopole Brest-Iroise à Plouzané

Au personnel de la bibliothèque de la Faculté de droit de Brest

pour leur contribution et leur disponibilité.

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SOMMAIRE

REMERCIEMENTS

ABREVIATIONS

INTRODUCTION

PARTIE I- LES POLITIQUES D’INCITATION AU DEVELOPPEMENT DE LA

PRODUCTION D’ELECTRICITE A PARTIR DES ENERGIES MARINES

Titre I - Incitation à la production : une nécessaire intervention publique au sein d’un marché

concurrentiel

Chapitre I - Le financement nécessaire de démonstrateurs

Chapitre II - Appels d’offre et mécanisme de l’obligation d’achat

I- Appels d’offre

II- Obligation d’achat

Chapitre III- La question de la conformité de ces aides publiques au droit communautaire

de la concurrence

Titre II - Aide à l’intégration de la production d’électricité produite à partir des EMR au sein

du réseau de distribution

Chapitre I - La facilitation du raccordement au réseau de l’électricité- SEMR

I- Principe de l’obligation de raccordement au réseau

II- Principe de priorité de l’accès au réseau

III- La problématique du coût de raccordement au réseau

Chapitre II - La planification du raccordement au réseau de l’électricité- SEMR

I- Le nouveau schéma de raccordement des énergies renouvelables

II- Les réseaux transeuropéens de l’énergie (RTE-E) et autres initiatives

européennes

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PARTIE II – LA NECESSITE DE LEVER LES CONTRAINTES JURIDIQUES DES EMR

SPECIFIQUES AU MILIEU MARIN

Titre I – Conflits d’usage : les EMR à l’épreuve du droit du littoral, du droit maritime et du

droit de l’environnement

Chapitre I - Les aspects juridiques de l’occupation du domaine littoral

I- La loi Littoral

II- Le domaine public maritime

Chapitre II - L’applicabilité du droit maritime

I- Nature juridique des engins

II- Conséquences de la qualification juridique de navire

Chapitre III - L’existence de zones marines protégées

I- Les dispositifs de protection spécifiques au milieu marin

II- Les dispositifs de protection pouvant concerner le milieu marin

Titre II- La planification de l’espace maritime dans la concertation

Chapitre I - Le besoin d’une planification de l’espace maritime

I- La planification à l’échelon international et européen

II- La planification à l’échelon national

III- La planification à l’échelon régional et local

Chapitre II- Le besoin de concertation

I- La procédure de débat public

II- La concertation avec les pêcheurs

Titre III - Vers une nécessaire simplification des procédures administratives d’implantation

Chapitre I- Les premières avancées de la loi grenelle 2

I- Allègement des autorisations demandées

II- Réforme des études d’impact et des enquêtes publiques

Chapitre II - Les vides juridiques à combler

I- Réglementer l’activité au-delà de la mer territoriale

II- La création d’un guichet unique

III- Le problème de l’absence de droits réels sur le domaine public maritime naturel

IV- La remise en état du site en fin d’exploitation et les garanties financières

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CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE

ANNEXES

TABLE DES MATIERES

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TABLE DES ABREVIATIONS

• ADEME: Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie

• AMI : appel à manifestation d’intérêt

• AOT : autorisation d’occupation temporaire

• ARER : Agence Régionale de l’Energie Réunion

• BEI : Banque européenne d’investissement

• BOE : Bureau of Ocean Energy

• BSH : Bundesamt für Seeschiffahrt und Hydrographie

• CECA : Centrale Enertrag Côte d’Albâtre

• CFE : centre de formalité des entreprises

• CGPPP : Code général de la propriété des personnes publiques

• CIADT : Comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire

• CMB : Convention de Montego Bay

• CNDP : Commission nationale du débat public

• CJUE: Cour de justice de l’Union européenne

• CNUDM : Convention des Nations Unies sur le droit de la mer

• CODERST : Conseil de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques

• COI : Commission Océanographique Intergouvernementale

• CPA : Coast Protection Act

• CRE : Commission de régulation de l’énergie

• CRPMEM: Comité régional des pêches maritimes et des élevages marins

• CSPE : contribution au service public de l’électricité

• DOM-COM : départements d’outre-mer – collectivités d’outre-mer

• DPM : domaine public maritime

• EMR : énergies marines renouvelables

• EPA: Environmental Protection Agency

• ERDF : Electricité Réseau Distribution France

• EU-OEA : European Ocean Energy Association

• FEDER : Fonds européen de développement régional

• FEPA : Food and Environmental Protection Act

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• GIZC : gestion intégrée des zones côtières

• GW : gigawatt

• HVDC : high voltage direct current

• ICPE: installation classée pour la protection de l'environnement

• MAB : Man and Biosphère

• MEEDDM: ministère de l'écologie de l'énergie, du développement durable et de la

mer

• MMO : Marine Management Organization

• MMS : Minerals Management Service

• NER : new entrant reserve

• NTE : Nouvelles technologies de l’énergie

• NIMBY : not in my backyard

• ORCU: Offshore renewables consents unit

• PACA : Provence Alpes Côte d’Azur

• PEER : programme énergétique européen pour la relance

• PLU: plan local d'urbanisme

• POPE (loi) : (de) programmation de l’orientation pour la politique énergétique

• PPI : programmation pluriannuelle des investissements

• PRERURE : plan régional des énergies renouvelables et de l’utilisation rationnelle de

l’énergie

• PTF : proposition technique et financière

• REZ : renewable energy zone

• RTE : Réseau de transport de l’électricité

• SAR : schéma d’aménagement régional

• SEAREV : Système Electrique Autonome de Récupération de l’Energie des Vagues

• SER : source d’énergie renouvelable

• SMVM : schéma de mise en valeur de la mer

• SREMER: schéma régional des énergies de la Mer

• UE : Union européenne

• UK : United Kingdom

• UNESCO : United Nations educational scientific and cultural organization

• WINFLO : Wind turbine with INnovative design for Floating Lightweight Offshore

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• ZDE: zone de développement éolien

• ZEE: zone économique exclusive

• ZPE: zone de protection écologique

• ZPS: zone de protection spéciale

• ZSC: zone spéciale de conservation

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INTRODUCTION

La mer a toujours fait rêver, c’est d’elle qu’est venue la découverte des nouveaux mondes.

Mais elle est aussi un extraordinaire gisement de ressources, ressources alimentaires, avec les

algues et le plancton, ressources pharmaceutiques, et ressources énergétiques : le vent en

milieu marin, les mouvements de l’eau par la récupération de l’énergie des courants, des

vagues et des marées, la température de l’eau, ou énergie thermique des mers, c'est-à-dire

l’utilisation de la différence de température entre les eaux chaudes de surface et des eaux

froides des profondeurs, la pression osmotique ou le mélange de deux eaux de concentrations

salines différentes, soit l’eau de mer et l’eau douce, et la biomasse marine.

Selon une étude menée par une vingtaine de partenaires dans le domaine des EMR1, plusieurs

raisons justifient de s’intéresser aux EMR, parmi lesquelles la nécessité de réduire les

émissions de gaz à effet de serre (GES), les risques à court et moyen termes sur

l’approvisionnement en hydrocarbures et la nécessité de s’intéresser à toutes les pistes de

production énergétique renouvelable. Certes, mais les EMR constituent aussi une formidable

opportunité de développement industriel et de créations d’emplois2. Christian Kjaer, directeur

général de l'EWEA3, l’association européenne de l’énergie éolienne, a déclaré :"Si les

décideurs nationaux et l'Union européenne prennent des mesures rapides, l'énergie éolienne

offshore peut devenir une nouvelle industrie générant des milliards d'euros, offrant des

milliers d'emplois verts et une nouvelle forme d'économie dans les énergies renouvelables4".

« Si seulement 0,1% de l'énergie renouvelable disponible dans les océans pouvait être

convertie en électricité, cela suffirait à satisfaire plus de cinq fois la demande du monde tel

que nous le connaissons aujourd'hui.» a déclaré en 2000 le Marine Foresight Panel du

gouvernement britannique.

Le potentiel techniquement exploitable est cependant inférieur au potentiel naturel de ces

énergies marines renouvelables (EMR). Quelles sont les sources d’EMR techniquement

exploitables d’un point de vue industriel ?

1 Ouvrage collectif coordonné par Michel Paillard, Denis Lacroix et Véronique Gamblin, Energies renouvelables marines, Etude prospective à l’horizon 2030, Editions Quae, 2009. 2 “Energie éolienne en mer, une chance à saisir pour l’industrie française” par Jean Michel Germa et Jean-Mathieu Kolb, Président et directeur des activités offshore de la Compagnie du Vent, La Revue Maritime n°484. 3 EWEA : European Wind Energy Association 4 Déclaration reprise dans un article du 28 septembre 2009 du blog Les énergies de la mer (lesenergiesdelamer.blogspot.com)

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La technologie la plus mature à l’heure actuelle est l’éolien offshore : les éoliennes, aussi

appelées aérogénérateurs, sont ancrées dans le sol sous-marin, dans des zones où la

profondeur d’eau est faible, soit entre 20 et 50 m. Cette technologie s’est surtout développée

dans des pays comme le Danemark, les Pays Bas, le Royaume Uni et l’Allemagne, où la

distance des côtes peut aller jusqu’à 100 km avec moins de 40 m de profondeur. Les éoliennes

offshore ont été conçues sur la base des éoliennes terrestres, des machines tripales en rotation

autour d’un rotor orienté face au vent. Les efforts de développement ont surtout porté sur la

conception des structures supports. Initialement en béton, elles ont plutôt tendance à être en

métal. La fondation en métal est réalisée soit par un pieu enfoncé profondément dans le sol

marin, soit par un tripode posé ou enfoncé légèrement dans le sol, se rapprochant des

technologies utilisées par l’industrie pétrolière offshore. Au 30 juin 2010, selon un rapport de

l’EWEA, 118 nouvelles éoliennes offshore posées ont été connectées au réseau électrique

représentant 333 MW, c'est-à-dire plus de la moitié des 577 MW offshore installés l'année

dernière. 151 autres éoliennes posées (440 MW) et flottantes ont été installées et sont en

attente de connexion au réseau. En tout, 16 parcs éoliens offshore sont actuellement en

construction, dont 4 sont entièrement opérationnels : Poséidon au Danemark qui a la

particularité de combiner éolien flottant (avec 3 turbines expérimentales) et énergie des

vagues, Alpha Ventus en Allemagne, et au Royaume-Uni Gunfleet Sands et Robin Rigg.

948 éoliennes offshore posées et flottantes réparties sur 43 parcs éoliens offshore totalement

opérationnels, totalisant une capacité de 2 396 MW existent ainsi en Europe. La capacité

atteindra 3 972 MW au total quand les 16 projets éoliens offshore seront achevés.

En Chine, un 1er parc de 34 éoliennes d’une capacité totale de 102 MW alimente déjà le

réseau chinois et les autres projets sont nombreux. Aux Etats-Unis, la catastrophe de la marée

noire dans le Golfe du Nouveau Mexique aura au moins eu l’effet positif de plaider pour la

cause des énergies renouvelables, et notamment de l’éolien offshore1. En effet, le premier

parc éolien offshore a enfin été autorisé. Il s’agit du projet Cape Wind, parc de 130 éoliennes,

situé à 8 km des côtes et à 22 km de l’Ile de Nantucket. Il permettra d’assurer 75% des

besoins en électricité de Cape Cod, Nantucket et Martha's Vineyard, le lieu de vacances

préféré de l'aristocratie américaine. Selon l'administration Obama, le Cape Wind permettra de

créer près d'un millier d'emplois. Le projet a un fournisseur - l'allemand Siemens qui réalisera

ses turbines - et un client, le réseau britannique National Grid, qui distribue déjà de

l'électricité à 3,3 millions de particuliers dans le Nord-Est des Etats-Unis. Pourtant ce projet,

1 Article paru sur le site de La Tribune : www.latribune.fr le 3 mai 2010 : « La marée noire plaide pour la cause de l’éolien offshore. »

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aboutissement de 9 ans d’enquête publique, a bien failli ne pas voir le jour, les opposants au

projet, que ce soit notamment les Kennedy qui ne voulaient pas de ce parc en face de leur

résidence secondaire, ou le lobby du pétrole, étant particulièrement virulents. La situation

s’est enfin débloquée grâce à l’éclatement du MMS1 en 3 services dont le BOE : Bureau of

Ocean Energy qui depuis sa création en juin 2010 aurait permis l’accélération de nombre

projets d’EMR en sommeil jusqu’ici. Le MMS, qui était la seule autorité toute puissante à

délivrer des permis de plates-formes offshore était en effet accusée de collusion avec le milieu

pétrolier.

Avec ses zones sous juridictions maritimes de 11 millions de km², la France, 2ème zone

maritime du monde par sa taille, dispose d’un potentiel énergétique exploitable parmi les plus

importants au monde…mais aucun MW n’est encore installé. Pourtant un porteur de projet est

détenteur de toutes les autorisations administratives nécessaires à son implantation : la société

Enertrag. Elle envisage d’implanter 21 éoliennes d’une puissance totale de 105 MW à 8 km

des côtes, au large de Veulettes sur Mer en Normandie. Le projet fait toutefois l’objet de

recours contre les arrêtés préfectoraux, notamment de la part de riverains, ce qui bloque les

financements La Compagnie du Vent, filiale de GDF-Suez, projette d’implanter un parc de

140 éoliennes pour une puissance totale de 705 MW, à 14 km des côtes du Tréport en

Normandie. Un débat public est en cours. D’autres projets sont en cours sur les côtes

normandes, bretonnes et en Loire atlantique.

Pour éloigner les éoliennes des côtes, certains pays comme la France, la Norvège et l’Italie

étudient des systèmes d’éoliennes flottantes, présentant l’avantage, n’étant pas construites

dans le sol, mais ancrées par des câbles, de pouvoir s’implanter dans des fonds marins de plus

grandes profondeurs. En matière d’éoliennes flottantes, il existe 2 systèmes de flotteurs : les

ensembles semi-submersibles, dont la forme s’inscrit dans un polyèdre, adaptés à des fonds de

50 à 200 mètres, et les spars, en forme de quille, pour les grandes profondeurs. Les projets

sont multiples. En France, Winflo est une éolienne flottante développée par un consortium

composé à 50% par la société lorientaise Nass and Wind, 25% par la société DCNS, acteur

majeur de la construction navale de défense et 25% par la société Saipem qui repose sur un

principe de plateforme semi-submersible. Il est prévu la fabrication d’un prototype en

grandeur réelle, implanté au large de la Bretagne et raccordé au réseau électrique. Les enjeux

du projet consistent à contribuer à terme à l’approvisionnement énergétique de la Bretagne par

la création de parcs éoliens offshore flottants. A terme, il est prévu d’installer une ferme de

1 Minerals Management Service

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plus de 100 éoliennes à une distance comprise entre 20 et 50 km des côtes, et à une

profondeur de plus de 50 m. Wertiwind est un projet d’éolienne flottante à axe verticale

développée par Technip et Nenuphar, co-labellisée par 2 pôles de compétitivité : Cap

Energies et Pole mer PACA. A l’étranger, Hywind porté par Statoil Hydro (utilisation de la

technique « spar ») est en test pour 2 ans en Norvège. La société néerlandaise Blue H de son

côté planche sur son éolienne Diwet. D’autres projets sont développés par les américains

Nautica Windpower et Principle Power et le britannique SeaEnergy.

Quant à l’énergie thermique des mers, outre son utilisation pour la climatisation, le

dessalement de l’eau de mer, ou l’aquaculture, son utilisation la plus intéressante est la

production d’électricité. Il faut au moins une différence de température de 20° C entre l’eau

chaude de surface et l’eau froide de profondeur, d'où l'obligation d'exploiter cette technologie

exclusivement dans les zones tropicales où la température des eaux de surface est constante

peu importe le moment de l'année. La chaleur de l’eau de surface sert à vaporiser un fluide,

comme l’ammoniac (qui passe à l’état gazeux à 28°C), afin de le faire passer sous pression (7

bars environ) dans une turbine produisant de l’électricité. L’eau profonde à 4°C, est pompée

et utilisée pour refaire passer l’ammoniac à l’état liquide. Le système produit plus d’énergie

qu’il n’en consomme. L’avantage de l’ETM est qu’elle est disponible 24h/ 24, contrairement

à l’éolien et à l’énergie des vagues. Elle est expérimentée par plusieurs pays comme les Etats-

Unis avec la société Lockheed Martin, l’Inde, le Japon, Taiwan et la France, qui possède une

très grande ressource en énergie thermique des mers avec son territoire ultramarin (DOM-

COM). L’idée d’exploiter la différence de température des mers n’est pas neuve, Jules Verne

l’évoquait déjà dans « Vingt mille lieux sous les mers », puis elle a été étudiée par nombre de

scientifiques1. Le verrou technologique le plus important dans l’ETM consiste dans la solidité

de la conduite eau froide dans les conditions de pression de l’environnement marin2. En effet,

il faut qu’elle soit d’une longueur importante puisqu’elle plonge à des profondeurs jusqu’à

1 500 m et d’un diamètre suffisant pour remonter des volumes d’eau les plus importants

possibles, gage d’une bonne efficacité du moteur thermique. La société DCNS met au point

une centrale pilote de 10 MW qui devrait être implantée à La Réunion d’ici 2014 dans le

cadre du projet Espadon labellisé par le Pôle Mer Bretagne, le Pôle Mer Paca et Cap Energies,

auquel participent Total et l’Ifremer et qui aura pour finalité de lever ce verrou, après avoir

réalisé des tests à partir de 2011 sur un prototype à terre à Saint Pierre. Une convention a été

1 « L’énergie thermique des mers 2009: année charnière d’une histoire industrielle française » Frédéric Le Lidec, Directeur du développement Mer de DCNS, La Revue Maritime n°484. 2 « Projet Espadon : 2 objectifs techniques pour développer l’ETM » site Les énergies de la mer, 2 juillet 2010

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signée avec la région Réunion en avril 2009. La France deviendrait ainsi leader mondial en

matière d’ETM1. Cette technologie pourrait à terme assurer l’indépendance énergétique de

certaines régions insulaires.

L’énergie issue du mouvement des vagues quant à elle est expérimentée de multiples façons

dans le monde. Il existe en effet plus d’une vingtaine de techniques, en surface ou immergées.

Le système Pelamis, né en Ecosse, est une sorte de « serpent » long de 170 m composé de 4

cylindres reliés par des articulations. Sa structure semi-émergée est positionnée dans la

direction de propagation de la vague. Le mouvement des vagues agit dans chaque articulation,

sur un vérin hydraulique, qui envoie du fluide haute pression, vers une turbine, pour produire

de l’électricité. L’énergie produite est envoyée, par l’intermédiaire d’un cordon ombilical,

dans les fonds marins et ensuite acheminée à terre. Ce système a été développé par la société

OPD en Ecosse, et elle est expérimentée aujourd’hui dans d’autres pays notamment au

Portugal. En Australie, un rapport de la CSIRO2 a estimé que 50% des besoins en électricité

pourraient être couverts même si uniquement 10% de la ressource répertoriée3 était exploitée.

La société Carnegie Wave Energy, qui est à l’origine du procédé CETO4, met en place son

démonstrateur CETO 3. Cette technique totalement immergée consiste à disposer des

activateurs sur les fonds marins, l'activateur ou bouée est mis en mouvement par l'énergie de

la houle et transmet son mouvement à une pompe qui met l’eau de mer sous pression. L’eau

de mer est ensuite transportée à terre via un système de pipe en acier vers un filtre à osmose

inverse qui la désalinise, puis vers une turbine couplée à un alternateur qui produit de

l’électricité.

L’Espagne n’est pas en reste et a pour ambition de développer, grâce au géant Iberdrola

Ingeniera un énorme projet d’énergie des vagues et des courants, Ocean Lider, au travers d’un

consortium de 19 entreprises et 25 centre de recherche.5. DCNS en France élabore également

un prototype d’houlomoteur immergé en partenariat avec EDF Energies Nouvelles basé sur la

technologie CETO à la Réunion. Un autre projet nommé SEAREV (Système Electrique

Autonome de Récupération de l’Energie des Vagues) est expérimenté par l’Ecole centrale de

Nantes.

L’énergie cinétique des courants de marée est exploitée par des hydroliennes, sorte

d’éoliennes sous-marines, dont le rotor est mis en rotation par les courants qui produisent de

1 « DCNS et la Réunion placeront la France en tête de l’ETM dès 2011. » site Les énergies de la mer, 1er juillet 2010 2 Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation 3 146 000 MW pourraient être tirés de la seule énergie des vagues disponible sur les côtes australiennes. 4 Déesse grecque de la mer, du grec Kêtôs qui désigne un gros poisson 5 Article tiré du blog Les Energies de la mer du 20 juillet 2010

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l’électricité exportée à terre par des câbles sous-marins. L’énergie tirée des courants marins

est 800 fois supérieure à celle du vent. En Europe, la ressource est répartie principalement

entre le Royaume Uni (75% dont la moitié en Ecosse) et la France (20%, Bretagne et Basse-

Normandie), le reste étant en Grèce, Italie et Norvège. Les projets sont là aussi multiples :

l’hydrolienne Deltastream développée par la société Tydal Energy Ltd au Royaume Uni,

Seagen en Irlande produit déjà de l’électricité. En France, le site le plus propice est celui du

courant du raz Blanchard, au large de Cherbourg, l’un des courants de marée les plus

puissants d’Europe. 2 sociétés étudient leur exploitation : GEOCEAN basée à Cassis, qui

envisage de tester 2 hydroliennes et DCNS avec son projet d’hydrolienne de 20 MW.

SABELLA1 SAS, après avoir fait un essai en mer réussi de leur prototype Sabelle D03 au

large de Bénodet, avec pour conclusion qu’un des problèmes techniques principaux pour

l’hydrolienne est le biofouling2 sur le rotor, va tester son modèle Sabella D10, à Ouessant,

Bréhat ou à l’EMEC3. EDF veut tester des hydroliennes à Paimpol –Bréhat qui seraient

fabriquées par l’irlandais Openhydro et il y a enfin le projet ORCA porté par Alstom.

L’énergie osmotique est libérée à la rencontre d’un courant d’eau douce avec un courant

d’eau salée, à l’embouchure d’un fleuve ou d’un delta. La Norvège teste actuellement le

système PRO4qui pourrait fournir 10% de la consommation du pays en électricité et les Pays

Bas planchent sur la technique de l’électrolyse inversée, moins mature5.

L’énergie marémotrice, qui est, avec l’énergie issue de l’action des hydroliennes, un autre

moyen d’utilisation de l’énergie de la marée, exploite les variations cycliques du niveau des

mers et des océans par entraînement de l’eau à travers un barrage. La France a été pionnière

dans le domaine de l’exploitation des courants de marée avec la 1ère usine marémotrice du

monde à la Rance dans les années 60. Elle produit actuellement l’équivalent de la

consommation annuelle d’une ville de plus de 200 000 habitants. Les perspectives de

développement de cette technique ailleurs dans le monde sont incertaines. Le Royaume Uni et

la Corée étudient des concepts tels que les lagons marémoteurs. Il est vrai que les impacts

environnementaux et sociaux sont considérables.

Enfin, l’exploitation de la biomasse marine, c'est-à-dire des algues, présente de nombreux

avantages par rapport aux espèces terrestres : une production potentielle à l’hectare 1 « Sabella D10 : la petite hydrolienne française a maintenant tout d’une grande » site Les énergies de la mer, 11 décembre 2009. 2 Le biofouling est le fouling (incrustation sur une matière solide immergée de matériaux aquatiques) dû à des êtres vivants aquatiques. 3 European Marine Energy Center situé aux Orkney Islands au nord de l’Ecosse. 4 Pressure Retarded Osmosis ou pression osmotique retardée 5 « Statkraft et Wetsus développent 2 technologies osmotiques différentes » site Les énergies de la mer le 16 avril 2010

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supérieure, l’absence de conflits avec l’eau douce et les terres agricoles, pas d’apport de

phytosanitaires. On estime entre 200 000 et un million le nombre d’espèces d’algues existant

dans le monde. Ainsi, le potentiel de production d’acides gras pour la fabrication

d’algocarburants est immense1. Cette source d’énergie ne sera toutefois pas traitée par la

présente étude, celle-ci se limitant aux sources de production d’électricité.

Pour résumer le principe de l’exploitation des EMR, on peut constater qu’elles suivent

globalement toutes le même schéma. Après exploitation de ces ressources énergétiques, ces

flux sont récupérés par une machine pour être transformés en énergie mécanique, électrique

ou hydraulique via un système centralisateur en mer ou à terre. Cette machine dispose d’un

support maritime, plateforme fixe ou flottante par exemple, qui permet à la machine de

résister aux contraintes environnementales et d’être ancrée au fond de la mer. L’énergie

convertie est ensuite transportée à terre via des câbles sous marins. Dans certains cas, cette

énergie est produite à terre et non en mer, comme dans le système houlomoteur CETO.

L’électricité produite est ensuite injectée dans les réseaux de distribution via des procédures

de raccordement électriques. Le câble est pour le moment le seul mode de transport de

l’énergie produite, mais d’autres procédés de conditionnement sont à l’étude, comme

l’hydrogène liquide qui pourrait offrir un autre mode de transport de l’électricité via des

navires citernes, et faciliterait l’implantation des parcs à une distance plus éloignée des côtes.

Il existe même des synergies possibles entre les différentes sources d’énergie : entre l’éolien

et la houle et entre les marées et les courants. Il est possible de coupler les effets sur une

même machine : entre la houle et la pression osmotique, en utilisant de l’énergie mécanique

de la houle pour la production d’eau douce via l’osmose inverse, et entre la biomasse er

l’ETM, par la récupération des eaux profondes riches en sels minéraux pour favoriser la

croissance d’algues marines. Il serait même possible d’ajouter des panneaux solaires

photovoltaïques sur des infrastructures en mer pour accroître la production électrique. Les

potentiels de développement sont donc immenses, seront-ils tous traduits en potentiel réel

industriel ? Seul l’avenir nous le dira.

A quel prix cependant l’exploitation des EMR peut-elle se développer ? Est-elle sans

conséquence sur l’environnement, le climat? Tout d’abord, si la production d’énergie par une

éolienne offshore par exemple est très peu émettrice de CO², son analyse de cycle de vie

1 On estime que cela pourrait représenter entre 20 000 et 60 000 litres d’huile par hectare par an contre 6 000 litres pour l’huile de palme, un des meilleurs rendements terrestres. Source : Ouvrage collectif coordonné par Michel Paillard, Denis Lacroix et Véronique Gamblin, op cit.

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révèle certains postes très émetteurs lors de sa phase de construction. Son bilan CO² reste bien

évidemment bon par rapport aux autres moyens de production d’électricité1, mais son

amortissement CO² dépend du mix énergétique du pays dans lequel elle est installée. Or en

France, étant donné la présence du nucléaire, faiblement émetteur de CO², son amortissement

se fait sur plus de 19 ans2. Quant aux impacts sociaux et environnementaux, il ressort d'une

enquête financée par la Commission Européenne et menée auprès des Etats membres de

l'Union européenne3 que les principales préoccupations touchant à l'éolien offshore

concernent la perception d'un dommage écologique potentiel, en particulier pour les oiseaux

de mer, avec un risque de collision avec les pales, en particulier dans les zones où la visibilité

est souvent faible, des perturbations potentielles des facultés d'orientation, en particulier des

oiseaux migrateurs, en raison des possibles effets des champs électromagnétiques sur

l'avifaune ; les nuisances visuelles, la hauteur des aérogénérateurs dépasse 100 m, ce qui les

rend visibles à des distances supérieures à dix kilomètres, ainsi que les nuisances sonores, en

particulier au regard des usages récréatifs et de la valeur du littoral ; il existe des conflits

d'intérêt : alors qu'en zone terrestre les problèmes se posent surtout en termes d'aménagement

du territoire (paysages, cadre de vie, nuisances à la vie quotidienne), les préoccupations les

plus vives exprimées par les utilisateurs de la mer, face notamment à la multiplication des

projets de parcs éoliens, ont trait aux conflits d'intérêt, les zones maritimes revendiquées pour

l'implantation de parcs éoliens étant déjà traditionnellement le cadre de nombreuses activités ;

En ce qui concerne le risque écologique, ou l’impact sur la biodiversité, un rapport danois4

synthétise l’état des connaissances rassemblées sur les impacts environnementaux de deux

parcs éoliens en mer : Horns Rev (80 éoliennes de 2 MW chacune en mer du Nord) et Nysted

(72 éoliennes de 2,3 MW en mer Baltique) pour la période 1999-2006. La méthode employée

suit la méthode BACI (Before, After, Control Impact). Cette étude a été financée par une taxe

publique sur la consommation d’électricité. Il fait état d’un accroissement de 50 à 150 fois de

la biomasse marine (moules, algues, crabes…), de la création d’un effet « récif » des

fondations constituant une réserve de nourriture pour les poissons. Un scientifique suédois

avance que cette augmentation de poissons peut justement être due à l’absence de navigation

1 24 g/kWh el de CO² eq contre 400 pour une centrale à gaz en moyenne, source Oko Institut, mars 2007 2 Selon un rapport du club parlementaire sur les énergies renouvelables Prométhée du 7avril 2010 3 Offshore Wind Energy, Ready to Power a Sustainable Europe, Final Report, Concerted Action on Offshore Wind Energy in Europe, CA-OWEE, December 2001 4 Danish Offshore Wind: Key Environmental Issue, publié par Dong Energy, Vattenfall, The Danisg Energy Authority, et the Danish Forest and Nature Agency, novembre 2006.

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et de pêche aux alentours des éoliennes1. Le rapport danois relève aussi une réaction

d’évitement de la part des mammifères marins, comme les marsouins, et des phoques pendant

la phase de construction, et d’une très faible mortalité des oiseaux. Les résultats de cette étude

ne peuvent cependant pas être transposés systématiquement, les écosystèmes différant selon

les sites. Une étude au cas par cas est bien nécessaire. Au Royaume Uni, le COWRIE :

Collaborative Offshore Wind Research into the Environment, est dédié à la recherche et à

l’amélioration des connaissances sur les impacts de l’éolien offshore sur l’environnement,

financé par plusieurs porteurs de projet. Les hélices des hydroliennes quant à elles ne

risquent-elles pas de perturber la faune et la flore sous marine ? En dehors des risques

inhérents à l’activité normale de la production d’EMR, existe la probabilité de survenance

d’accidents, comme une chute de pales2 par exemple dans le cas des éoliennes ou une rupture

des ancrages de l’engin EMR au sol marin.

Malgré toutes ces incertitudes sur les conséquences du développement des EMR, son

caractère d’intérêt général est largement admis par la communauté internationale, qui

reconnaît la nécessité de soutiens publics à ces énergies, dont les fondements sont notamment

les décisions internationales sur le changement climatique. La CCNUCC (Convention Cadre

des Nations unies sur le changement climatique) de 1992, bien qu’elle n’évoque que la

biomasse comme seule SER (source d’énergie renouvelable), est le premier texte à imposer à

ses signataires, dont tous les pays européens, de mettre en place des programmes nationaux de

réduction de gaz à effet de serre. Le Protocole de Kyoto adopté le 11 décembre 1997 pose le

principe d’une réduction globale par rapport à 1990 de 5.2% des émissions de GES pendant la

première période d’engagement (2008-2012). Dans ce protocole, le recours aux énergies

renouvelables est expressément cité comme l’un des moyens pour atteindre ces objectifs.

L’accord de Copenhague signé le 18 décembre 2009 fixe comme objectif la limitation de la

température planétaire à 2° C d’ici 2100, mais sans toutefois l’assortir de garanties.

Au niveau européen, le changement climatique constitue l’un des 4 domaines prioritaires de

l’action de l’Union européenne et la pleine application du Protocole de Kyoto constitue une

première étape vers la réalisation de l’objectif à plus long terme de réduction de 70% des

1 D’après Dan Wilhelmsson, scientifique au département de zoologie de l’Université de Stockholm, éléments repris dans un rapport de l’ADEME (Pays de la Loire) : « Quelques éléments de retour d’expérience sur l’éolien fixe en mer ». 2 Un tel accident s’est produit dans le plus grand parc d’éoliennes terrestres d’Europe, le parc Whitelee, près de Glasgow, en Ecosse le 19 mars 2010. Aucun accident a priori n’a été signalé.

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émissions de GES1. L’Union européenne a mis en place le premier système d’échange

multinational de quotas d’émissions de CO² entré en vigueur en 20052 pour répondre aux

objectifs du Protocole d’une baisse globale de 8% des émissions entre 1990 et la première

période d’engagement (2008-2012).C’est pourquoi elle soutient les énergies –SER3. Le Livre

Vert du 20 novembre 1996 de la Commission européenne évoque précisément le thème des

sources d’énergie renouvelables sous leurs diverses formes (énergie solaire, éolienne,

biomasse…), ainsi que le Livre Blanc du 26 novembre 1997. La Commission européenne,

dans sa communication du 10 janvier 2007, a établi une feuille de route intitulée : « Feuille de

route pour les sources d’énergie renouvelables. Les sources d’énergie renouvelables au XXIe

siècle : construire un avenir plus durable4 ». La directive5 du 26 juin 2003 abrogeant la

directive 96/92 du 19 décembre 1996, vise à la réalisation d’un marché de l’électricité durable

sur le plan environnemental. La directive6 du 18 janvier 2006 a pour objectif de garantir la

sécurité de l’approvisionnement en électricité notamment provenant de SER et les

investissements dans les infrastructures. La Commission européenne présente le 23 janvier

2008 son « Paquet Energie Climat » qui prévoit notamment, pour les vingt sept pays

membres, un objectif global de 20 % d’énergies renouvelables dans la consommation

d’énergie finale d’ici à 2020 et qui a donné lieu à l’adoption de la directive du 23 avril 20097

sur la promotion des énergies renouvelables.

Sur le plan national, la loi du 13 juillet 20058 dite loi POPE est à l’origine du Facteur 4 à

l’horizon 2050, c'est-à-dire un objectif de division par 4 des émissions de GES dans les pays

développés, réaffirmé par la loi Grenelle 1 du 3 août 20099. Dans son rapport relatif à la

Décision10 européenne du 11 février 2004 sur le mécanisme de surveillance des émissions de

GES dans la Communauté et à la mise en œuvre du Protocole de Kyoto, la France indique que

« l’énergie éolienne est la plus mature et possède le plus fort potentiel de développement en

matière de production d’électricité EnR11 en France ». A l'issue du Grenelle de la mer, le

ministre de l'Écologie, de l'Énergie, du Développement durable et de la Mer (MEEDDM) a

1 Décision n°1600/2002. 2 Directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003, relative au système communautaire d’échanges de quotas d’émission de GES, modifiée par la directive n°2009/29/CE du 23 avril 2009. 3 Sources d’énergie renouvelables 4 COM (2006) 848 5 2003/54/CE concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité 6 2005/89 7 2009/28/CE 8 2005-781 9 N°2009-967 relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement. 10 Décision n°280/2004/CE du Parlement européen et du Conseil, art 3 § 2 11 Energie renouvelable

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rendu un livre bleu contenant 138 recommandations ayant pour objectif de préserver et

valoriser les potentialités de la mer et de contribuer au développement d'activités durables en

mer. « Au XXIe siècle, c’est la mer qui sauvera la terre » a déclaré Jean Louis Borloo. Quatre

groupes de travail, réunissant l'État, les collectivités territoriales, les acteurs de l'économie

maritime et la société civile, ont ainsi été réunis, dont un visant à « promouvoir le

développement d'activités maritimes compétitives et soutenables sur le plan

environnemental » et abordant les thématiques relatives aux énergies renouvelables, aux

ressources énergétiques maritimes.

En vertu de la loi dite Grenelle 1, la France s'est donnée pour objectif d'atteindre 23 %

d'énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale à l'horizon 2020. Afin de

réaliser cet objectif, il serait envisagé d'installer des parcs éoliens maritimes de 1 000 MW au

31 décembre 2012 et de 6 000 MW sur un total de 25 000 MW de production d'énergie

éolienne au 31 décembre 2020. D’après le Syndicat des énergies renouvelables, cela

correspond concrètement à une installation de 100 à 120 éoliennes par an pendant dix ans,

représentant plus de 1,5 milliard d’euros d’investissement chaque année. Les Programmations

Pluriannuelles des Investissements (PPI) sont issues de la loi électricité du 10 Février 20001.

L’arrêté du 15 décembre 2009 fixe la PPI 2009-2010. Celle-ci souligne le potentiel de

développement des énergies marines, encourage à ce titre le soutien à la recherche et au

développement. Elle prévoit en France pour 2020 un potentiel de production d’électricité par

l’énergie éolienne en mer de 6 000 MW, par l’énergie thermique des mers de 200 MW dans

les DOM-COM, par les hydroliennes de 400 MW et de 200 MW par l’énergie des vagues. Le

Livre Bleu « Stratégie nationale pour la mer et les océans »de décembre 2009, issu du

Grenelle de la mer de Juillet 2009 amorce le lancement d’un Plan Energies Bleues pour le

développement des énergies marines. On pourra peut être prochainement évoquer, à côté de

l’électricité SER, l’électricité SEMR (de sources d’énergie marine renouvelables).

L’Initiative PArtenariale Nationale pour l’émergence des Energies Marines (IPANEMA)

matérialisée par une Charte signée à Brest le 17 Octobre 2008 par 12 acteurs (MEEDDM,

IFREMER2, ADEME, les régions, EDF et DCNS) et approuvée par Jean Louis Borloo le 8

Juin 2009 s’est fixée pour objectifs notamment de promouvoir le développement d’une filière

scientifique et industrielle dans le domaine des EMR et de faciliter le développement de

démonstrateurs. C’est la raison pour laquelle le gouvernement a décidé de mettre en place une

plateforme technologique sur les énergies marines à Brest en décembre 2009 au sein de

1 N°2000-108 2 Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer

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l’IFREMER1. ''Cette localisation permettra à la plate-forme de bénéficier d'un environnement

industriel et de recherche de premier plan, avec entre autres la présence du pôle mer Bretagne

et la moitié du potentiel français de recherche en sciences et technologies marines'', a déclaré

le Premier ministre à Brest, en clôture des assises de l'économie marine. C’est dans ce

contexte que DCNS a créé, à la fin de l'année 2009, un incubateur à Brest afin de développer

ses activités dans le domaine des énergies renouvelables de la mer. La création de cet

incubateur s’inscrit dans la continuité des initiatives prises par le gouvernement français lors

du Grenelle de la Mer.

L’essor de cette nouvelle filière va soulever une multitude de problématiques juridiques.

Parmi elles, la question de la responsabilité des ports. En effet, les infrastructures portuaires

sont en cours d’évolution afin de proposer une offre adaptée à l’éolien offshore, comme le fait

déjà le port de Bremerhaven par exemple en Allemagne. Ce port connaît en effet une

formidable reconversion vers l’activité offshore, sauvant ainsi des emplois. Le géant allemand

des énergies renouvelables RWE Innogy a en effet signé un accord avec le port pour utiliser

ses installations comme base pour la construction de la ferme éolienne offshore Nordsee Ost.

Certains ports français comme celui du Havre par exemple seront spécialisés dans

l’assemblage, la maintenance et la mise en place test des éoliennes.

D’autre part, comment les compagnies d’assurance vont-elles appréhender la façon d’assurer

les différents risques qui pourront survenir tant pendant la phase de construction, que pendant

l’implantation et l’exploitation des engins EMR, si tant est qu’elles puissent les assurer en

totalité. Il est fort probable que les porteurs de projets se voient appliquer de fortes franchises.

Les risques ne sont pas strictement comparables aux risques offshore traditionnels. Les

assureurs vont bien évidemment s’inspirer des contrats tous risques offshore classiques, mais

en intégrant les problématiques spécifiques aux EMR, tels que les risques de pertes

d’exploitation liées à un problème de raccordement au réseau électrique notamment. Les

acteurs n'ont pas la même taille non plus. Lorsqu' un pétrolier peut supporter une part de

risques très élevée en rétention, dispose d'une mutuelle d'assurance pour une partie des risques

et de plusieurs captives, le développeur d'un parc EMR en financement externe ne pourra pas

se permettre de supporter une forte rétention, à supposer que les banquiers lui en laissent le

loisir, et il ne dispose pas des mêmes outils. Enfin, une autre problématique juridique

concerne la phase de démantèlement des engins en fin d’exploitation. Le régime juridique des

1 « La plateforme technologique sur les énergies marines sera située à Brest » Actu-environnement, 3 décembre 2009

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déchets s’appliquera t-il ? Toutes ces questions ne feront pas l’objet de la présente étude mais

mériteront d’être traitées rapidement.

L’Avis du Conseil Supérieur de l’Energie de juin 2009 dans le cadre du grenelle de la Mer,

soulignant que l’atteinte des objectifs de 2020 passe notamment par un développement

significatif de l’éolien offshore et des énergies marines, rappelle que les tarifs d’achat adaptés

de l’électricité d’origine renouvelable restent un moyen de développement efficace de ces

énergies, ainsi que le soutien aux projets de démonstration de technologies, et qu’il ne peut se

faire sans un développement tout aussi significatif du réseau terrestre de grand transport

d’électricité, encourage la concertation en vue de la détermination de zones favorables à

l’implantation d’éoliennes en mer et autres EMR et partage le constat d’une nécessaire

simplification et clarification des procédures administratives applicables aux énergies

marines. Sont ainsi énoncés les principaux éléments clés du développement des EMR, et

notamment la nécessité d’adapter le régime juridique de leur implantation, afin de sécuriser

les développeurs tout en protégeant l’environnement.

Ainsi, il existe une réelle volonté gouvernementale de développement des EMR, notamment

au travers de politiques d’incitation à la production d’électricité, de soutien à l’intégration de

cette production au réseau public de distribution d’électricité (Partie I). Néanmoins, la

particularité du milieu dans lequel elles sont exploitées, le milieu marin, soulève des

problématiques juridiques qui leur sont propres touchant à plusieurs branches du droit,

appelant des mesures de planification et de concertation en vue d’un partage intelligent de

l’espace maritime. Une fois le lieu d’implantation localisé, commence pour le porteur de

projet l’étape difficile de l’obtention des autorisations, certes récemment simplifiées, mais qui

nécessite encore des clarifications législatives. (Partie II).

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PARTIE I- LES POLITIQUES D’INCITATION AU DEVELOPPEM ENT DE LA

PRODUCTION D’ELECTRICITE A PARTIR DES ENERGIES MARI NES

La libéralisation du marché des énergies de réseaux a permis d’ouvrir à la concurrence les

activités de production et de fourniture d’énergie, permettant à de nouveaux producteurs de

s’installer sur le marché. La directive électricité du 26 juin 2003 a permis de créer un marché

intérieur unique dans le secteur de l’énergie, ayant pour but notamment de diminuer la facture

énergétique des pays européens et d’améliorer la sécurité des approvisionnements. En France,

c’est la loi du 10 février 20001qui a permis de mettre en œuvre cette libéralisation, qui s’avère

plutôt favorable aux énergies renouvelables. Les consommateurs ont ainsi le droit de choisir

le fournisseur de leur choix, faisant tomber le monopole d’EDF. Néanmoins, cette

libéralisation n’est pas totale et, dans le domaine des énergies marines, l’intervention publique

reste particulièrement nécessaire pour inciter les nouveaux producteurs à investir dans ce

marché (Titre I) et à intégrer leur production d’électricité dans le réseau (Titre II).

Titre I- Incitation à la production : une nécessaire intervention publique au sein d’un

marché concurrentiel

La première étape d’une politique incitative pour le développement des EMR consiste à

mettre en place des financements de démonstrateurs et de sites d’essais en mer dans toutes les

filières afin d’accélérer la maturation des technologies et de sélectionner les plus prometteuses

pour la phase de déploiement (Chapitre I). La deuxième étape consiste ensuite à accélérer le

déploiement par le jeu des mécanismes d’appel d’offre et d’obligation d’achat (Chapitre II).

Se pose néanmoins la question de la conformité de ces aides publiques au droit

communautaire de la concurrence (Chapitre III).

Chapitre I - Le financement nécessaire de démonstrateurs

L’exploitation des énergies marines renouvelables ne peut se développer sans une intervention

publique. Elle se justifie, outre les considérations environnementales, par le coût

d’investissement initial pour ces énergies qui est en moyenne cinq fois plus élevé que les

énergies fossiles. D’autre part, le retour sur investissement est très long.

1 N°2000-108 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité

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C’est pourquoi le gouvernement a décidé, suite aux recommandations du Comop Recherche

du Grenelle de l’Environnement1 la création d’un fonds de soutien à la mise au point de

démonstrateurs de recherche sur les nouvelles technologies de l’énergie (NTE) géré par

l’ADEME, qui a ainsi lancé le 20 juillet 2009 un appel à manifestation d’intérêt (AMI)

concernant les énergies marines. Ce Fonds démonstrateur de l’ADEME, dont les capacités

financières ont été portées à 3,8 milliards d’euros dans le cadre du Grand emprunt, permet

d’assumer une prise de risque technologique et financière pour des recherches très en amont

sur le marché. Il est centré sur 4 filières clés : les hydroliennes, les éoliennes flottantes,

l’énergie des vagues et l’énergie thermique des mers. Les projets de démonstrateurs de

recherche déposés doivent apporter la preuve de leur capacité à lever les verrous

technologiques et non technologiques, comme les conflits d’usage, les impacts

environnementaux. L’ADEME a ainsi émis une feuille de route que les développeurs de

projets doivent respecter.

L’ADEME favorise 4 projets candidats parmi les 19 projets présentés : Winflo, le projet

d’éoliennes flottantes développé par le consortium composé à 50% par Nass and Wind, 25%

par DCNS, acteur majeur de la construction navale de défense et 25% par la société Saipem,

le projet d’hydrolienne Sabella D10 de la société quimpéroise Sabella SAS, Wertiwind,

l’éolienne flottante de la société lilloise Nenuphar et le projet d’hydrolienne ORCA, porté par

Alstom.

Un autre appel à manifestation d’intérêt lancé par l’ADEME en 2010 concerne les projets

éligibles au dispositif européen NER 3002 (New Entrant Reserve).Parmi les mesures

envisagées pour réduire les émissions de GES, le nouvel article 10 bis de la directive

européenne du 13 octobre 20033 annonce la création d’un mécanisme de financement destiné

notamment aux démonstrateurs d’énergies renouvelables innovantes, doté de 300 millions de

quotas d’émission provenant de la réserve des nouveaux entrants du système d’échange

communautaire, soit entre 4.5 et 9 milliards d’euros pour un cours du CO² situé entre 15 et 30

euros la tonne. En effet, 5 % de l'ensemble des quotas qui seront délivrés sur la période de

2013-2020 seront réservés à de nouveaux entrants sur le marché du carbone. Leur allocation

est subordonnée à la condition que les émissions de CO² soient évitées de façon avérée. Ce

mécanisme de financement est géré conjointement par la Commission européenne, la Banque

1 Article 19 de la loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, dite loi Grenelle I 2 Approuvé par le Comité de changement climatique de l’Union Européenne le 2 février 2010 3 n°2003/87/CE relative au système communautaire d’échanges de quotas d’émission de GES, modifiée par la directive n°2009/29/CE du 23 avril 2009.

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européenne d’investissement (BEI) et les Etats Membres. L'idée est de vendre aux enchères

une partie de cette réserve pour financer des technologiques innovantes dans les domaines des

énergies renouvelables et de la Capture et le Stockage du CO2 (CSC). C'est la BEI qui va

vendre aux enchères et les revenus seront alloués pour financer les projets sélectionnés dans le

cadre de l’appel à propositions NER300 qui financera à hauteur de 50% des frais éligibles des

projets : les frais d’investissement additionnels, ainsi que les frais d’exploitation moins les

avantages d’exploitation La Commission européenne a émis un projet de décision1 pour la

fixation des critères d’admissibilité des projets. Dans son annexe 1, elle vise 2 catégories de

technologies éligibles : l’éolien, dont l’éolien offshore, y compris flottant et les énergies

marines, c’est à dire l’énergie thermique des mers, l’énergie des vagues et des courants. Un

seul projet de chacune des catégories sera retenu. Les technologies doivent avoir atteint un

stade suffisant pour accéder à la phase de démonstration avant commercialisation, celle-ci

devant intervenir à compter du 31 décembre 2015.

Le dispositif ne peut concerner que 3 projets au maximum par pays. Le versement du

financement a lieu chaque année en fonction de la quantité d’énergie produite multipliée par

le taux de financement et est limitée à une période de 5 ans. Il est à craindre que le 1er

versement n’intervienne pas suffisamment en amont dans la réalisation des démonstrateurs,

les industriels ayant besoin du financement le plus tôt possible. Dans l’éventualité où le projet

connaîtrait des difficultés, il suffit que 75% de la production totale envisagée au départ soit

produite sur les 5 premières années pour recevoir la subvention dans sa totalité.

Le projet de décision dans son 5e considérant précise que ce système de financement peut se

cumuler avec le dispositif de financement PEER : Programme énergétique européen pour la

relance, mais celui-ci se déduit du dispositif NER 300. Le PEER a été adopté par le règlement

européen n°663/2009. Il s’agit d’un dispositif financier sans précédent2 au regard de son

montant, destiné à favoriser la reprise après la crise économique ayant touché l’Union

européenne, en aidant notamment le secteur énergétique. C’est ainsi que le PEER a alloué un

budget de 565 millions d’euros à des projets d’éoliennes en mer. Les candidats avaient

jusqu’au 15 juillet 2009 pour soumettre leurs propositions. Sur 29 projets de parcs éoliens

offshore, 9 ont été sélectionnés, dont aucun situé en France. Fin mars 2010, la Commission

avait effectué des paiements de préfinancement de plus de 65 millions d’euros et de 155

millions d’euros entre avril et juin 2010.

1 n°D0077 du 21 février 2010 2 Budget global du PEER : 3 980 millions d’euros

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Chapitre II – Appels d’offre et Mécanisme de l’obligation d’achat

I – Appels d’offre

L’intervention publique se justifie ici pour ajuster l’offre en énergies marines aux objectifs

quantitatifs de production déterminés notamment par la PPI (Programmation Pluriannuelle

des Investissements) .En effet, ceux-ci ne peuvent être pleinement réalisés par la seule

initiative privée. Le principe de l’appel d’offres dans le domaine de la production

d’électricité-SER1 trouve son origine dans la première directive électricité2. Son article 4

prévoit une mise en concurrence pour la construction de nouvelles installations de production.

Il est renforcé ensuite par l’article 7 de la seconde directive électricité3.C’est la loi du 10

février 20004 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité

qui a intégré dans le droit français de l’électricité le système des appels d’offre. En effet, selon

l’article 8, le ministre chargé de l’énergie peut recourir à la procédure d’appel d’offres dans le

cas où « les capacités de production d’électricité ne répondent pas aux objectifs de la PPI ». Il

a vocation à soutenir les filières émergentes et non encore matures.

Un appel d’offres a ainsi été lancé en 20045 dans le secteur de l’éolien offshore. Un seul

projet de ferme éolienne en mer, celui de la société Enertrag a été retenu par le ministre parmi

10 projets en lice. Enertrag envisage d’installer un parc de 21 éoliennes représentant une

capacité totale de production de 105 MW à 8 km des côtes de Veulettes sur Mer, en

Normandie. Parmi les critères de sélection des candidats, celui de l’impact environnemental

est ici primordial, contrairement à d’autres appels d’offres. Le candidat doit ainsi réaliser un

bilan complet des émissions de gaz à effet de serre dues tant à la construction des éoliennes,

qu’à leur exploitation et leur démantèlement. L’avantage pour un développeur de projets

d’être retenu à un appel d’offres est qu’il bénéficie de facto de l’autorisation d’exploiter une

unité de production d’électricité délivrée par le ministre de l’énergie. Cette autorisation

d’exploiter est régie par l’article 7 de la loi n°2000-108 et par le décret n°2000-877 du 7

septembre 2000 et concerne les installations dont la puissance installée est supérieure à 4.5

MW. Le gouvernement devrait lancer à partir de septembre 2010 une série d’appels d’offres

pour l’implantation de 600 éoliennes en mer représentant 3 000 MW dans des zones

1 SER: Sources d’énergie renouvelables 2 n°96/92 3 n°2003/54 4 n°2000-108 5 Publié au Journal Officiel de l’Union Européenne de juin 2004

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identifiées comme propices, au large des pays de la Loire, du nord de la Bretagne, du

Languedoc Roussillon, et de la Normandie. La sélection des projets commencera au 3ème

trimestre 2011 sur la base du prix d’achat de l’électricité proposé et du délai de mise en

service des installations1et les parcs ne devraient pas voir le jour avant 2015. Les

constructeurs de turbines, mâts et de câbles sous marins, sont débordés et les navires

spécialisés dans l’installation d’éoliennes sont peu nombreux. Si la France ne commence à

installer ces 3 000 MW d’éolien offshore qu’en 2015, comment fera t-elle pour respecter

l’objectif de la PPI de 6 000 MW en 2020 2?

II- Obligation d’achat

Si les pouvoirs publics souhaitent réellement encourager les développeurs de projets d’énergie

marine, les seules incitations à la production ne suffisent pas. Encore faut-il que ces derniers

soient assurés de trouver un débouché rentable à leur production d’électricité. C’est la raison

pour laquelle l’obligation d’achat, dispositif relativement ancien, profite en majorité à la

production d’électricité –SER et aux énergies marines en particulier. Il a été consacré par la

loi du 10 février 2000 et confirmé par d’autres lois plus récentes comme la loi POPE du 13

juillet 20053. Il impose ainsi à certains opérateurs comme EDF d’acheter l’électricité produite

à un prix supérieur à la valeur économique de cette énergie.

Il existe deux systèmes d’obligation d’achat : l’un fondé sur l’article 8 de la loi du 10 février

2000 et l’autre reposant sur l’article 10 de cette même loi. Le premier système d’obligation

d’achat est la conséquence automatique du succès remporté par un développeur à un appel

d’offres. Le deuxième mécanisme, basé sur l’article 10, prévoit une obligation pour EDF et

les autres distributeurs non nationalisés de conclure, si les producteurs en font la demande, un

contrat d’achat de l’électricité produite. La nouvelle loi portant engagement national pour

l’environnement, dite loi Grenelle 24, promulguée le 12 juillet 2010, a modifié l’article 10 en

ajoutant au nombre des bénéficiaires de cette obligation d’achat les producteurs d’énergie

éolienne dont les installations sont situées sur le domaine public maritime ou la ZEE (zone

économique exclusive), et les producteurs d’énergie marine.

1 « Eolien offshore : l’Etat lancera un appel d’offre de 3 000 MW en septembre. » Actu-environnement, 25 août 2010. 2 « L’éolien français se jettera t-il à l’eau ? » Journal de l’environnement, 24 août 2010 3 n°2005-781 4 n°2010-788

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On peut noter ici une avancée législative significative en faveur des énergies marines et de

l’énergie éolienne en mer, par rapport à l’éolien terrestre notamment. En effet, la loi n’impose

pas au producteur d’être installé dans une ZDE : zone de développement de l’éolien pour

bénéficier du tarif d’achat, comme c’est le cas pour l’énergie éolienne terrestre.

Que l’obligation d’achat découle de l’article 8 ou de l’article 10 de la loi électricité, elle se

matérialise dans les 2 cas par un contrat d’achat et un tarif d’achat. L’article 10 prévoit en

outre l’obtention, avant de conclure le contrat d’achat, par les producteurs d’énergie marine,

d’un certificat délivré par le préfet et ouvrant droit à l’obligation d’achat.

Le tarif d’achat est soit un prix contractuel proposé par le producteur et approuvé par EDF ou

un autre distributeur non nationalisé dans le cas d’un appel d’offres, soit un prix réglementé et

décidé par l’administration dans le cadre de l’article 10.

En cas de litige éventuel entre un producteur d’électricité et EDF par exemple, la situation

n’est pas claire. En effet, le Conseil d’Etat vient récemment de décider, dans un arrêt du 1er

juillet 20101, que le contrat d’achat de l’électricité par EDF fondé sur l’article 8 de la loi

2000-108 est de droit privé et relève donc de la compétence du juge privé, bien que les parties

contribuent au service public de l’électricité et qu’elles n’aient pas de marge de manœuvre

dans la négociation du contrat, dont le contenu est fixé par l’Etat. Les contrats conclus dans le

cadre de l’article 10 quant à eux ont été qualifiés récemment par la Loi Grenelle 2 de contrats

administratifs, relevant donc du juge administratif. Une harmonisation serait ici nécessaire

pour simplifier la situation.

Le prix d’achat qui a été fixé dans le cas de la société Enertrag, lauréat de l’appel d’offres de

2004, est de 105 € du MWh avec un contrat d’une durée de 20 ans. Dans le cadre de l’article

10, un premier arrêté du 10 juillet 2006 avait créé un tarif de rachat pour l’éolien en mer de

130 € le MWh les 10 premières années, et un tarif compris entre 30 et 130 € les 10 années

suivantes selon la durée annuelle de fonctionnement, et ce malgré un avis défavorable rendu

par la CRE (Commission de régulation de l’énergie). En effet, elle estimait que ce tarif

proposé était nettement supérieur à ceux qui avaient été présentés pas les candidats à l’appel

d’offres de 2004. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle elle recommandait vivement le

recours au mécanisme de l’appel d’offres afin de mettre les opérateurs en concurrence et faire

ainsi baisser les prix. Cet arrêté ayant été annulé par le Conseil d’Etat dans un arrêt rendu le 6

1 GOSSEMENT Arnaud, « Energie : Le Conseil d’Etat statue sur la qualification juridique du contrat d’achat d’électricité », Blog d’Arnaud Gossement 18 juillet 2010

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août 2008 pour vice de forme1, un autre arrêté a été pris le 17 novembre 2008, maintenant le

même tarif pour l’éolien en mer, complété par un autre arrêté du 23 décembre 2008, et ce

malgré un autre avis défavorable de la CRE rendu le 30 octobre 2008.

L’article 10 de la loi électricité précise que les conditions d’achat obligatoire par EDF et les

distributeurs non nationalisés de l’électricité produite doivent tenir compte des coûts

d’investissements et d’exploitation évités par les acheteurs obligés, auxquels peuvent s’ajouter

une prime rétribuant la contribution de la production livrée à la réalisation des objectifs

légaux tels que la qualité de l’air et la lutte contre l’effet de serre, la sécurité et l’indépendance

de l’approvisionnement… Or la CRE estime que le tarif de rachat proposé est bien supérieur

aux coûts évités aux acheteurs obligés augmentés de cette prime. Il risque donc de contrevenir

au principe de l’article 10 de la loi du 10 février 2000, à savoir que le niveau de cette prime ne

peut conduire à ce que la rémunération des capitaux immobilisés dans les installations

bénéficiant de ces conditions d'achat excède une rémunération normale des capitaux. Dans la

mesure où le surcoût induit par le système d’obligation d’achat de l’électricité est compensé

par la CSPE : contribution au service public de l’électricité, ces tarifs attractifs offriraient en

quelque sorte une « rente de situation payée par les consommateurs2 », d’autant que le

système de l’obligation d’achat ne tient pas compte des éventuelles subventions reçues par les

producteurs, qui pèsent aussi sur la collectivité.

Les industriels réclament pourtant un tarif de rachat de l’électricité tirée des EMR plus élevé

arguant du fait qu’il est par exemple compris entre 27 et 30 centimes le Kwh au Royaume

Uni3. Dans le domaine de l’énergie des vagues, le seuil de rentabilité est estimé par les

développeurs à 22 centimes le kWh (le tarif en France, publié en mars 2007, est de 15c €/

kWh, alors qu’il est de 23 c au Portugal). D’autre part, la question se pose aussi de savoir si ce

système de tarif de rachat, ainsi que toute autre forme d’aide publique dans le domaine des

énergies marines, sont conformes aux règles communautaires de droit de la concurrence.

1 CE 6 août 2008, Association Vent de colère, req n°297723 : le gouvernement n’avait en effet consulté que le Conseil supérieur de l’électricité et du gaz alors qu’il devait consulter le conseil supérieur de l’énergie. 2 Expression du ministre délégué à l’industrie lors des débats parlementaires à l’occasion du vote de la loi POPE du 13 juillet 2005. 3 Hausse du tarif réclamée notamment par le sénateur Roland Courteau dans sa question écrite au gouvernement n°09691 publiée dans le JO Sénat du 23/07/2009 page 1823

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Chapitre III- La question de la conformité de ces aides publiques au droit communautaire de

la concurrence

La directive 2001/771 sur l’électricité-SER dans son 12e considérant indique que « la nécessité

d’une aide publique en faveur des sources d’énergie renouvelables est admise dans

l’encadrement communautaire des aides d’Etat pour la protection de l’environnement (…).Les

dispositions du traité, et notamment ses articles 87 et 88 continueront toutefois à s’appliquer à

ces aides publiques ».A partir du 1er décembre 2009, date d’entrée en vigueur du traité de

Lisbonne, le traité instituant la Communauté européenne est devenu le traité sur le

fonctionnement de l’Union européenne et les articles 87 et 88 sont devenus les articles 107 et

108 de ce nouveau traité. Selon l’article 107, « sauf dérogations prévues par les traités, sont

incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre

les Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d’Etat sous

quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en

favorisant certaines entreprises ou certaines productions. »

Quatre conditions cumulatives sont donc nécessaires pour identifier une aide d’Etat2 : une

intervention de l’Etat ou au moyen de ressources de l’Etat ; celle-ci étant susceptible

d’affecter les échanges entre les Etats ; elle doit accorder un avantage à son bénéficiaire en

favorisant certaines entreprises ou certaines productions ; et elle doit fausser ou risquer de

fausser la concurrence.

La doctrine dominante3 semble dénier la qualification d’aide d’Etat à l’obligation d’achat en

se fondant sur l’arrêt Preussen-Elektra AG et Schleswag AG4. En effet, dans cet arrêt la Cour

de justice de l’Union européenne5 considère que seuls « les avantages qui sont accordés

directement par l’Etat ainsi que ceux qui le sont par l’intermédiaire d’un organisme public ou

privé, désigné ou institué par cet Etat » seront constitutifs d’aides d’Etat. Or le financement du

surcoût de l’obligation d’achat est assuré par les consommateurs via la CSPE et non par une

aide d’Etat. Pourtant, dans une décision du 23 octobre 2002 relative au système de

compensation luxembourgeois, la Commission européenne a considéré que les obligations

d’achat constituent des aides d’Etat, « dès lors qu’elles sont financées par des prélèvements

1 Du 27 septembre 2001, abrogée par la directive 2009/28/CE à partir du 1er janvier 2012. 2 Cour de justice de l’Union européenne, 21 mars 1990, Belgique c/ Commission, dit « Tubemeuse », aff. C-142/87. 3 Voir notamment BOITEAU Claudie, « Le prix controversé du rachat de l’énergie éolienne ou l’énergie renouvelable à quel prix ? » AJDA 2009, p.2105. 4 Cour de justice de l’Union européenne, 13 mars 2001, C-379/98, Rec CJCE p.I-2099 5 Nouvelle appellation de l’ancienne Cour de justice de la Communauté européenne (CJCE)

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obligatoires. ». La CSPE constituant bien un prélèvement obligatoire, l’obligation d’achat

n’est-elle donc pas alors une aide d’Etat ? La discussion reste ouverte. D’autant plus qu’un

des autres critères de l’article 107 du traité pour déterminer une aide d’Etat est la sélection de

certaines entreprises ou certaines productions. Or l’obligation d’achat de l’article 10 de la loi

électricité ne concerne exclusivement que les entreprises qui produisent de l’électricité à partir

de sources renouvelables. Elle risque donc de fausser la concurrence. Au vu de ces critères,

l’obligation d’achat d’électricité aurait du faire l’objet d’une notification préalable et s’expose

ainsi à être déclarée contraire aux dispositions du traité1.

Outre l’obligation d’achat, les aides aux investissements évoquées ci-dessus ne risquent-elles

pas de tomber aussi sous le coup de cette qualification. La Commission européenne, dans son

projet de décision du 21 février 2010 concernant le dispositif NER 300, indique qu’ « il

convient que les financements accordés en application de la présente décision soient

subordonnés à l’autorisation par la Commission de tout élément d’aide d’État contenu dans

l’apport financier global provenant de sources publiques, conformément aux articles 107 et

108 du traité, afin de garantir que lesdits financements sont limités à ce qui est nécessaire pour

mettre en œuvre et exécuter le projet, compte tenu de leurs effets négatifs potentiels sur la

concurrence. En conséquence, il est nécessaire que les États membres notifient à la

Commission tout financement comportant une aide d’État conformément à l’article 108,

paragraphe 3, du traité afin que la procédure de sélection au titre de la présente décision

puisse être coordonnée avec l’évaluation de l’aide d’État en question. ». Voilà qui promet de

vifs débats à venir sur la qualification ou non de ces aides comme aides d’Etat.

Titre II- Aide à l’intégration de la production d’é lectricité produite à partir des EMR au

sein du réseau de distribution

Une des conditions essentielles à une véritable concurrence sur le marché consiste à faciliter

le raccordement aux réseaux de distribution de l’électricité produite par les exploitants EMR

(Chapitre I), nécessitant toutefois une planification préalable, tant au plan national

qu’européen, pour mutualiser les coûts et éviter le mitage du paysage électrique (Chapitre II).

1 BOUQUET Gael, « Les mécanismes de soutien de la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables à l’épreuve des articles 87 et 88 du traité relatifs aux aides d’Etat », AJDA 2006, p.697.

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Chapitre I- La facilitation du raccordement au réseau de l’électricité- SEMR

I- Principe de l’obligation de raccordement au réseau

Les deux systèmes d’obligations d’achat, qu’ils soient issus de l’article 8 ou de l’article10 de

la loi du 10 février 2000 nécessitent le raccordement de l’installation aux réseaux publics de

distribution de l’électricité. L’article 8 alinéa 5 et l’article 10 alinéa 1 disposent en effet

qu’EDF et les distributeurs non nationalisés sont tenus de conclure le contrat d’achat « dès

lors que les installations de production sont raccordées à leur réseau de distribution ». Le

décret du 10 mai 20011 pris en application de l’article 10 de la loi du 10 février 2000 précise

que la prise d’effet du contrat d’achat est subordonnée au raccordement de l’installation au

réseau. Toutefois dans la pratique, la règle est appliquée de façon plus souple. En effet, la

CRE dans sa communication du 22 mai 2003 indique que l’absence d’un raccordement direct

n’empêche pas un site de production de bénéficier de l’obligation d’achat.

II- Principe de priorité d’accès au réseau

La loi du 9 août 20042 dans son article 5 indique que « la gestion d’un réseau de transport

d’électricité ou de gaz est assurée par des personnes morales distinctes de celles qui exercent

des activités de production ou de fourniture d’électricité ou de gaz ».Cette disposition a été

prise en application des directives électricité et gaz de 2003 : il s’agit du principe du

dégroupage ou découplage, sensé assurer le principe de non discrimination dans l’accès au

réseau. Ainsi depuis la libéralisation du marché électrique, c’est à RTE, société juridiquement

distincte d’EDF, ou à EDF-réseau de distribution ou un distributeur local qu’a été confiée la

gestion des réseaux d’électricité. C’est donc à l’une de ces entités qu’un producteur

d’électricité doit s’adresser pour être raccordé. Le gestionnaire statue sur sa demande en

respectant une obligation de transparence et de non discrimination. Il lui propose d’abord une

étude exploratoire définissant le schéma de raccordement puis lui fait signer une convention

de raccordement dans laquelle sont indiqués notamment les délais et coûts de raccordement et

une convention d’exploitation. Ensuite les parties concluent un contrat d’accès aux réseaux

1 N°2001-410 2 N°2004-803

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public d’électricité. Ainsi en 2008, une quinzaine de demandes d’études exploratoires ont été

déposées auprès de RTE pour des projets de fermes éoliennes offshore de 100 à 600 MW.

Comme en matière de production d’électricité, une intervention étatique peut s’avérer

nécessaire, dans un contexte de libéralisation du marché, pour aider les énergies renouvelables

à s’intégrer aux réseaux de distribution d’électricité.

Outre le principe de l’accès des tiers aux réseaux, rappelé par l’article 32 de la directive

électricité 2009/72/CE du 13 juillet 2009, qui impose aux Etats membres de mettre le réseau

d’électricité, anciennement réservé aux monopoles nationaux ou régionaux, à la disposition

des tiers, une discrimination positive peut être pratiquée en faveur des fournisseurs

d’électricité-SER1. L’article 25.4 indique en effet que « un Etat membre peut imposer au

gestionnaire d’un réseau de distribution, lorsqu’il appelle les installations de production, de

donner la priorité à celles qui utilisent des sources d’énergie renouvelables ». Le respect du

principe de non discrimination est assuré par la CRE. La directive du 23 avril 20092 relative à

la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables pose

également le principe d’accès prioritaire3.

III – La problématique du coût de raccordement au réseau

Il ne suffit pas de poser le principe d’une discrimination positive en faveur des énergies

renouvelables dans les textes. En pratique, cette intégration au réseau se heurte à plusieurs

problèmes. Tout d’abord, les réseaux électriques ont été conçus dans le principe d’une

production essentiellement centralisée d’électricité et ne sont donc pas adaptés pour le

raccordement de moult petits producteurs. Selon Jean-Yves Grandidier, le vice-président du

SER, syndicat des énergies renouvelables, évoquant les travaux des commissions

raccordement et offshore du SER, les projets offshore représentent 13 GW, pour un objectif

de la PPI de 6 GW en 2020, alors que la capacité d’accueil du réseau est de 2 GW4.

Le renforcement des réseaux et leur développement devraient prendre plusieurs années et être

confrontés à une possible pénurie de matériaux. Seuls deux ou trois constructeurs en

fabriquent en Europe et ceux-ci n'ont pas anticipé la demande croissante. En outre, le coût de

raccordement est d’autant plus important que les parcs de production d’énergie marine sont

1 C’est le système qui a été adopté en Espagne. Voir à ce propos MODERNE Franck « Le droit des énergies renouvelables, Observations sur le modèle espagnol » Mélanges en l’honneur de Michel Prieur, Dalloz 2005 2 N°2009/28/CE 3 Dans son 60ème considérant 4 Déclaration du 3 mars 2010 lors du 1er « Carrefour ‘in énergie » consacré à l’éolien offshore organisé par la SEM (société d’économie mixte) régionale des pays de la Loire.

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éloignés par rapport à la côte1. C’est d’ailleurs un des obstacles à l’installation dans la zone

économique exclusive.

Qui prend en charge ce coût ? Le raccordement d’un parc éolien jusqu’au point de livraison,

c'est-à-dire à un transformateur, est mis à la charge de l’exploitant par contrat avec le

gestionnaire de réseau. Ce dernier établit un devis pour le coût de raccordement, appelé PTF :

proposition technique et financière dont l’exploitant tient compte dans son calcul budgétaire

global. Certains travaux nécessaires peuvent être effectués par le gestionnaire de réseau,

comme dans le cas du futur parc éolien offshore de Veulettes sur Mer, qui sera exploité par la

société Enertrag. En effet, les travaux de construction d’une liaison électrique souterraine de

90 000 volts pour le raccordement du parc éolien offshore entre Veulettes sur Mer et le poste

RTE de Fécamp ont été déclarés d’utilité publique par arrêté du Préfet de Seine-Maritime le

29 octobre 2008 au profit de RTE EDF Transport SA, gestionnaire du réseau de transport

d’électricité. Le coût de ces travaux sera par contre pris en charge par Enertrag2. Si le réseau

nécessite des travaux d’amélioration en aval, ceux-ci sont pris en charge le gestionnaire du

réseau et répercutés dans le tarif. Il faut préciser qu’en France c’est RTE principalement qui

est en charge du transport de l’électricité jusqu’aux principaux postes de transformation et

ERDF3 qui en assure la distribution jusqu’aux consommateurs finaux.

Certains exploitants évoquent le cas de l’Allemagne pour réclamer une prise en charge du

coût de raccordement par le gestionnaire du réseau. En effet, la plupart des parcs éoliens

offshore allemands se situant dans la zone économique exclusive, augmentant ainsi

considérablement le coût du raccordement, la loi pour l’accélération de la planification des

infrastructures4de décembre 2006 contraint désormais le gestionnaire de réseaux à réaliser le

raccordement des centrales offshore dont la construction a commencé avant fin 2015 de la

station de transformation au point de raccordement à terre le plus proche et à en supporter les

coûts.

Il est intéressant de noter que le paragraphe III de l’article 25 du projet de loi portant

engagement national pour l’environnement avait prévu une contribution des communes à la

prise en charge d’une partie des coûts liés au renforcement des réseaux, donc au-delà des

seuls coûts de branchement et d’extension, mais il a été supprimé.

1 Ce coût est évalué à un million d’euros du kilomètre. 2 Déclaration de Philippe Gouverneur, directeur d’Enertrag France dans l’Usine Nouvelle du 28 avril 2008 3 Electricité réseau Distribution France : Les réseaux de distribution appartiennent aux communes qui en concèdent la gestion à ERDF 4 Infrastrukturplanungsbeschleunigungsgesetz

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En attendant une éventuelle évolution législative en ce sens, l’idée est de mutualiser au

maximum les raccordements au moyen d’outils de planification.

Chapitre II – La planification du raccordement au réseau de l’électricité- SEMR

I- Le nouveau Schéma de raccordement des énergies renouvelables.

Il a été créé par la loi Grenelle 21, qui l’introduit ainsi dans la loi électricité du 10 février

2000, notamment dans les articles 14 et 23-1. Désormais, selon l’article 14, « le gestionnaire

du réseau public de transport élabore, en accord avec les gestionnaires des réseaux publics de

distribution, un schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables, qu’il

soumet à l’approbation du préfet de région dans un délai de 6 mois à compter de

l’établissement du schéma régional du climat, de l’air et l’énergie. Ce schéma définit les

ouvrages à créer ou à renforcer pour atteindre les objectifs fixés par le schéma régional du

climat, de l’air et de l’énergie. Il définit également un périmètre de mutualisation des postes

du réseau public de transport, des postes de transformation entre les réseaux publics de

distribution et le réseau public de transport et des liaisons de raccordement de ces postes au

réseau public de transport. Il mentionne, pour chacun d’eux, qu’ils soient existants ou à créer,

les capacités d’accueil de production permettant d’atteindre les objectifs fixés par le schéma

régional du climat, de l’air et de l’énergie. (…)Les capacités d’accueil de la production

prévues dans le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables sont

réservées pendant une période de 10 ans au bénéfice des installations de production

d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable. ». Il est mentionné également qu’ « un

décret précise les conditions d’application du présent article en mer. »

Comment en effet ces dispositions s’appliqueront-elles aux parcs éoliens offshore et aux

autres installations de production d’énergie marine ? Concerneront-elles les câbles de

raccordement ? Ce schéma évitera t-il que chaque projet ait ses propres câbles ?

RTE a déjà envisagé de regrouper plusieurs projets ensemble sous forme de plate-forme afin

de ne faire qu’un seul raccordement. Ces clusters de parcs éoliens permettraient de réduire les

coûts de raccordement. En Allemagne par exemple, les raccordements mutualisés sont

fortement recommandés parce qu’économiquement et écologiquement souhaitables dès lors

que les parcs concernés sont très proches les uns des autres et se trouvent à un stade

1 N°2010-788

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d’avancement similaire mais ils ne doivent pas s’effectuer au détriment des projets les plus

avancés et nécessitant une capacité de transport moins importante (400 MW)1.

II- Réseaux transeuropéens de l’énergie (RTE-E) et autres initiatives européennes.

L’idée des réseaux transeuropéens (RTE) date de la fin des années 1980, avec celle de la mise

en place d’un marché intérieur. Il apparaît que l’interconnexion et l’interopérabilité des

réseaux sont des facteurs clés essentiels de la construction d’un territoire communautaire

cohérent en vue de créer un marché unique de l’énergie et la sécurité des

approvisionnements.

C’est le titre XV du traité qui fonde l’action communautaire en matière de réseaux

transeuropéens. La directive du 23 avril 2009 sur la promotion des énergies SER prône

également le développement de projets dans le cadre du programme relatif au réseau

transeuropéen d’énergie RTE-E. La décision 1364/2006/CE du Parlement européen et du

Conseil en donne les grandes orientations. Le règlement n°680/2007 détermine les règles

générales pour l’octroi d’un concours financier communautaire dans ce domaine et vise à

renforcer et à adapter les connexions électriques comme celle de l’énergie éolienne offshore

au continent. L’Union européenne apporte aussi son soutien financier par le biais des fonds

structurels et du Fonds de cohésion, les prêts de la Banque européenne d’investissement et le

Fonds européen d’investissement. La Commission a ainsi nommé en 2007 4 coordinateurs,

dont l’un d’entre eux est chargé de suivre le dossier portant sur les connexions des éoliennes

offshore de la Baltique et de la Mer du Nord avec le réseau continental.

Le Livre vert de la Commission intitulé « vers un réseau d’énergie européen sûr, durable et

compétitif »du 13 novembre 20082 donne des recommandations pour aboutir à une approche

tarifaire plus souple pour les nouvelles infrastructures de réseau et notamment les réseaux

d’éoliennes offshore. Parmi les initiatives d’interconnexion les plus avancées, on peut citer le

North Seas Countries Offshore Grid Initiative ou Alliance offshore de la mer du Nord, qui a

fait l’objet d’une déclaration politique le 7 décembre 2009 et qui est un plan de

développement des réseaux de transport d’énergie pour les futurs parcs éoliens offshore de la

mer du Nord. Cette déclaration a été signée par l’Allemagne, le Danemark, la France, la

Belgique, l’Irlande, le Luxembourg, les Pays Bas, la Suisse et le Royaume Uni. Ce

programme se concentre sur des questions relatives au raccordement et à l’intégration au

1 Selon l’Agence Fédérale des réseaux dans son document d’avril 2009 sur l’obligation de raccordement. 2 COM (2008) 782 Final

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réseau, en restructurant et en modernisant les réseaux électriques et les systèmes énergétiques.

Un protocole d’accord devrait être signé d’ici la fin 2010. Cette initiative s’inscrit dans le

cadre du règlement 663/2009 (PEER) prévoyant le financement d’un réseau offshore en Mer

du Nord pour 165 millions d’euros.

Pour amorcer ce projet de Réseau de la Mer du Nord, la société C-Power a demandé des

financements PEER pour construire une interconnexion entre la ferme éolienne offshore

britannique de Greater Gabbard et la ferme belge de Thornton Bank. Elle a prévu de

moderniser la sous-station du Thornton Bank en un poste offshore haute tension compatible

avec le Réseau de la Mer du Nord qui permettrait de futures connexions à d’autres fermes

éoliennes et aux futures réseaux offshore HVDC1.Ce projet devrait servir de référentiel pour

le développement du Réseau offshore en Mer du Nord.

Il faut signaler aussi la feuille de route européenne établie à l’initiative de l’European Ocean

Energy Association (EU-OEA) et de la Direction Générale de l’Energie de la Commission

européenne (DG ENER) concernant les énergies marines pour la période 2010-2050. Elle

établit notamment une ligne budgétaire pour l’intégration au réseau et les mécanismes de

soutien au rachat égale à 250 millions d’euros dont 100 apportés par l’Union européenne.

PARTIE II- LA NECESSITE DE LEVER LES CONTRAINTES JU RIDIQUES DES

EMR SPECIFIQUES AU MILIEU MARIN

Les énergies marines sont des énergies renouvelables…en mer. Si, dans le cas des éoliennes

par exemple, l’implantation en milieu marin plutôt qu’à terre présente des avantages, en

termes de nuisances pour le voisinage notamment, elle se trouve néanmoins confrontée à des

contraintes liées aux conflits d’usage avec d’autres activités littorales et maritimes d’une part

et à l’existence de zones protégées d’autre part (Titre I). Il est donc nécessaire de planifier

l’implantation des EMR dans l’espace maritime, et ce dans un esprit de concertation avec les

différents acteurs (Titre II), et de clarifier le régime d’autorisation en vue de leur exploitation

(Titre III).

1 High Voltage Direct Current : courant continu haute tension

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Titre I- Conflits d’usage : les EMR à l’épreuve du littoral, du droit maritime et du droit

de l’environnement

L’implantation des systèmes d’exploitation d’EMR se fait sur des espaces publics ouverts à

tous, non susceptibles d’appropriation, et se trouve donc confrontée à un usage libre par le

public et à d’autres activités par essence nomades, comme la pêche ou la plaisance. Se pose

ici la question de l’occupation d’un domaine public (Chapitre I). La cohabitation avec ces

activités nomades peut engendrer des conflits en cas de collision. Y aura t-il alors application

du droit maritime ? (Chapitre II). Enfin, les lieux propices à l’exploitation de ces énergies

peuvent faire l’objet de protections particulières au regard du droit de l’environnement

(Chapitre III). La présence de servitudes militaires peut représenter une contrainte

supplémentaire également mais elle ne fera pas l’objet de la présente étude.

Chapitre I- Les aspects juridiques de l’occupation du domaine littoral

Les projets ont vocation à s’installer, tout au moins dans un premier temps, sur le domaine

public maritime, dont la destination fondamentale est l’usage libre et gratuit par le

public1pour la promenade, la pêche, les activités balnéaires et nautiques, l’échouage des

bateaux. Les activités économiques qui se développent sur le littoral ne peuvent porter atteinte

aux droits du public2. En dehors des activités expressément visées par la loi, l’utilisation libre

et gratuite par le public prévaut sur l’usage privatif du domaine public maritime naturel. Les

seules dérogations possibles sont liées à l’intérêt général et à l’impérieuse nécessité de la

proximité de la mer. Le domaine public maritime (DPM) (II) constitue, avec la loi Littoral (I)

du 3 janvier 1986, un des éléments fondamentaux du droit du littoral.

I- La loi Littoral

L’implantation des EMR est-elle concernée par la loi Littoral ? L’article L146-6 du Code de

l’urbanisme, issu de la loi Littoral, protège les espaces remarquables du littoral en prescrivant

une inconstructibilité de principe. Seuls des aménagements légers sont autorisés. A priori,

dans la mesure où les engins EMR ont vocation à s’implanter à une distance relativement

éloignée des côtes, cette disposition n’a pas vocation à s’appliquer. Pourtant, l’article L 146-6

1 CE. 20 mai 1977, Paoli et comité de défense du site de la Forêt Fouesnant req n°89943 et 89944 2 Article L321-9 du code de l’environnement

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est applicable à l’ensemble des espaces terrestres et marins situés sur le territoire des

communes littorales, qui se prolonge bien en mer dans la limite des eaux territoriales1 et pas

seulement en bordure de littoral.

Si les engins EMR sont implantés en mer, ils nécessitent toutefois d’être raccordés à terre via

des câbles électriques. L’article L146-4-III du Code de l’urbanisme interdit toute construction

ou installation, en dehors des espaces urbanisés, sur une bande littorale de 100 mètres à

compter de la limite haute du rivage. Il autorise toutefois certaines exceptions, qui se sont

vues élargies par la loi Grenelle 2. En effet, aux activités économiques exigeant la proximité

immédiate de l’eau se sont ajoutés les « ouvrages de raccordement aux réseaux publics de

transport ou de distribution d’électricité des installations marines utilisant les énergies

renouvelables ». Un décret en Conseil d’Etat en précisera les modalités de réalisation. Le

nouvel alinéa ajoute que « les techniques utilisées pour la réalisation de ces raccordements

sont souterraines et toujours celles de moindre impact environnemental. »

II- Le domaine public maritime

Qu’est-ce que le domaine public maritime ? Selon la loi du 28 novembre 19632, il comprend,

outre les rivages de la mer ainsi que ses lais3 et relais4, le sol et le sous-sol de la mer

territoriale, jusqu’à une limite de 12 miles marins à compter des lignes de base, qui sont la

propriété de l’Etat, même si le territoire des communes s’étend jusqu’aux 12 miles marins.

L’usage du DPM se limite aux seules implantations et activités ayant un lien suffisant avec la

mer, qui sont compatibles avec les autres usages du DPM, soit la pêche, l’aquaculture, la

navigation, cette compatibilité devant être démontrée en amont.

Selon l’art 1er du décret n°2004-308 du 29 mars 2004 : « les dépendances du DPM situées

hors des limites administratives des ports peuvent faire l’objet de concessions d’utilisation en

vue de leur affectation à l’usage public, à un service public ou à une opération d’intérêt

général », ce qui semble être le cas de l’installation d’éoliennes ou de toute autre unité de

production d’électricité utilisant l’énergie de la mer. Cette notion d’intérêt général fait

cependant l’objet d’une discussion à l’occasion d’un recours pour excès de pouvoir5 exercé

par une association fondée par Sabine Servan-Schreiber contre l’arrêté du Préfet de Seine-

1 CE 20 février 1981, Commune de Saint-Quay-Portrieux n°16449 2 n°63-1178 et l’article L.2111-4 du CGPPP (code général de la propriété des personnes publiques) 3 Terres nouvelles formées par les dépôts d’alluvions sur le rivage 4 Terrains qui émergent lorsque la mer les abandonne en se retirant 5 REP exercé devant le tribunal administratif de Rouen

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Maritime du 16 juillet 2008 portant concession d’utilisation du DPM au profit de la société

CECA SAS, filiale de la société Enertrag, pour l’implantation de leur parc de 21 éoliennes

d’une puissance totale de 105 MW au large de Veulettes sur Mer. C’est, rappelons le, le seul

projet d’implantation d’un parc EMR détenteur d’autorisations administratives. Selon

l’association, « ce projet éolien n’est ni à l’usage du public, ni affecté à un service public et ne

constitue pas non plus une opération d’intérêt général. » Elle se fonde notamment sur un avis

de la CRE du 28 juillet 20051 qui indique que « dans un contexte où la capacité du territoire

national à accueillir des centrales éoliennes terrestres n’est de loin pas saturée, l’intérêt

d’engager, à ce prix, le développement de la technologie maritime n’apparaît pas justifié. ». Il

serait intéressant de connaître l’avis de la CRE sur la question de l’opportunité de l’éolien

terrestre en 2010. La construction de parcs éoliens sur le domaine public maritime pourrait

être qualifiée de projet d'intérêt général au titre du « développement durable ». La loi Grenelle

2 a d’autre part créé l’article L121-9 du code de l’urbanisme qui permet de qualifier d'intérêt

général les projets de « mise en valeur des ressources naturelles » : cela pourrait-il s’appliquer

aux EMR ?

Chapitre II – L’applicabilité du droit maritime

I- Nature juridique des engins EMR

La présence d’installations de production d’énergie renouvelable en mer sera susceptible de

constituer une source de risques maritimes tels qu’une collision avec un navire de pêche par

exemple, en cas de visibilité réduite, tant pendant la phase d’acheminement en mer en vue de

leur installation que pendant l’exploitation. Certaines techniques d’exploitation de l’énergie

des vagues constituent une source de danger supplémentaire dans la mesure où elles sont plus

difficiles à détecter d’une passerelle car positionnés à la surface de l’eau (comme Pelamis par

exemple). Leur possible déradage par rupture des ancrages rend ces engins plus dangereux

que les autres EMR.

Dès lors, le droit maritime s’appliquera t-il à ces situations ? La question de la nature

juridique des engins EMR se pose par conséquent afin de déterminer le droit applicable.

Seront-ils qualifiés de navires ? Il semble que non, tout au moins en ce qui concerne les

installations construites dans le sol marin, telles que les éoliennes offshore, ou la plateforme

1 Pièce n°7, Avis de la Commission de Régulation de l’Energie du 28 juillet 2005

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qui va centraliser l’électricité produite par les différentes éoliennes d’un parc. Mais qu’en est-

il des engins flottants qui sont simplement ancrés grâce à des câbles au fonds de la mer ou

stabilisés par des fondations gravitaires en béton et en acier dimensionnées pour assurer leur

stabilité au fond de l’océan sans qu’un ancrage au sol soit nécessaire, comme la technologie

CETO par exemple?. Sont concernés ici les éoliennes flottantes, les engins d’exploitation de

l’énergie thermique des mers et des vagues. Un engin EMR n’a pas vocation à se déplacer, à

transporter des marchandises ou des passagers. Il est implanté en mer pour exploiter une

source d’énergie. Il pourra toutefois être remorqué pour des opérations de maintenance, et être

démantelé en fin d’exploitation.

La loi du 5 juillet 19831 sur la sauvegarde de la vie humaine en mer, l’habitabilité à bord des

navires et la prévention de la pollution, dans son art 2, indique que « sont considérés comme

navires, sous réserve d’autres définitions données par les conventions internationales dont la

liste est fixée à l’article 6, tout bâtiment de mer quel qu’il soit, y compris les engins flottants,

qui effectue une navigation de surface ou sous marine, ou qui stationne en mer (…)». Quelles

sont les autres définitions données par ces conventions internationales ? La Convention

internationale pour la prévention de la pollution par les navires du 2 novembre 19732 conforte

la qualification de navire : « bâtiment exploité en milieu marin de quel que type que ce soit et

englobant les hydroptères, aéroglisseurs, engins submersibles, engins flottants ou plateformes

fixes ou flottantes. ». Par contre, la loi sur l’abordage du 7 juillet 19673 dans le 2ème alinéa de

son article 1er en donne une autre définition : « tous engins flottants, à l'exception de ceux qui

sont amarrés à poste fixe ». Il n’existe pas de définition unique du navire, cette notion étant le

plus souvent tranchée par la jurisprudence.

II- Conséquences de la qualification juridique de navire

La qualification des engins EMR comme navire implique certaines obligations comme leur

immatriculation, leur francisation, l’application du droit du travail maritime.

Cette tentative de qualification et donc de classification devrait cependant distinguer deux

phases : la phase d’acheminement des engins EMR jusqu’à leur lieu d’implantation et la

phase d’exploitation en mer.

1 N°83-581 2 Signée à Londres et modifiée par le protocole du 17 février 1978 3 n°67-545

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A- Risques survenant avant l’installation de l’engin EMR

Est-ce que la phase d’acheminement de l’engin d’exploitation d’énergie marine vers son lieu

d’implantation en mer ou son lieu de maintenance est une activité qui relève du droit

maritime ? Les engins seront-ils transportés ou remorqués ?

Il faut distinguer les risques pouvant survenir dans le cadre du contrat liant l’engin EMR

remorqué ou transporté au navire remorqueur ou au navire transporteur et les risques de

collision entre l’engin EMR et un autre navire, en l’absence de lien contractuel.

1° Dans le cas d’un remorquage1, les dommages peuvent survenir entre l’engin remorqué et le

navire remorqueur (a). Le remorquage ne consiste pas, en principe, en un transport direct par

mer de passagers ou de marchandises. Il consiste plutôt en l’assistance au déplacement d’un

navire, d’un appareil de forage, d’une plateforme. Un remorqueur qui prête assistance à un

navire pour manœuvrer, apporter une propulsion additionnelle ou se substituer à ses machines

en cas de défaillance, porte assistance à ce navire qui transporte des passagers ou des

marchandises, mais il n’est pas lui-même le navire transporteur. Le contrat de remorquage

d’un engin inerte n’est en principe pas un contrat de transport, mais plutôt assimilé à un

contrat d’entreprise ou d’affrètement. Comment sera considéré l’engin EMR quand il sera

remorqué ? Comme un navire ou un engin inerte ?

Dans le cas du remorquage d’un navire, la loi du 3 janvier 19692 distingue pour déterminer les

responsabilités entre remorquage portuaire et remorquage de haute mer. En cas de

remorquage portuaire, tous les dommages pouvant survenir sont à la charge du navire

remorqué, sauf à prouver la faute du remorqueur. La loi de 1969 prévoit par contre que les

parties peuvent contractuellement convenir de l’inverse, c'est-à-dire faire supporter tous les

dommages par le remorqueur. En cas de remorquage de haute mer, c’est le principe inverse

qui prévaut : il y a responsabilité du navire remorqueur, sauf accord exprès entre les parties

pour disposer du contraire.

Dans le cas du remorquage d’un engin inerte, non considéré comme navire, la loi de 1969 ne

s’applique pas, ce sont les clauses du contrat qui déterminent le régime applicable. Ces

clauses prévoient en général des exonérations de responsabilité.

1 Le remorquage concernera par exemple les engins ETM 2 N°69-8

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b) Les dommages peuvent survenir aussi aux tiers : dans ce cas, hors champ contractuel, c’est

la responsabilité délictuelle de droit commun qui s’applique : responsabilité du fait des choses

de l’article 1384 du code civil ou du fait personnel de l’article 1382 du code civil.

2° Dans le cas d’un transport d’engins EMR1, le transporteur est responsable des pertes ou

dommages subis par la marchandise depuis la prise en charge jusqu’au lieu de livraison à

moins qu’il ne prouve que ces pertes ou dommages proviennent de causes extérieures comme

l’innavigabilité du navire ou la faute nautique du capitaine notamment.

3° Hormis les cas de dommages survenant lors d’un remorquage ou d’un transport, quels

pourraient être les autres cas de collision ? Et s’ils existent, les règles du droit maritime hors

du champ contractuel du remorquage ou du transport s’appliquent-elles ?

Est-ce que la loi du 3 janvier 1967 sur l’abordage s’applique ? Elle s’applique si l’engin EMR

est aussi considéré comme un navire. Quelle est la différence entre les régimes de

responsabilité de la loi de 1967 et les règles de responsabilité de droit commun ? Le principe

en matière d’abordage est la démonstration d’une faute : ce qui exclut la possibilité d’établir

une présomption de faute, et d’un lien de causalité entre la faute et l’abordage. En outre, la

responsabilité est limitée en matière d’indemnisation des dommages. Ce régime est donc

moins favorable à la victime. Il serait inéquitable d’appliquer la limitation de responsabilité

du propriétaire uniquement au navire entré en collision avec l’engin EMR et non à l’engin lui-

même, dans la mesure où les réparations de l’engin EMR pourront être onéreuses. En outre,

dans le cas de dommage à un tiers causé par les deux, cela amènerait ce tiers à se retourner

contre le propriétaire de l’engin et non celui du navire pour obtenir une réparation intégrale de

son préjudice. En cas d’abordage fortuit, dû à la force majeure, ou douteux : les dommages

restent à la charge des navires qui les subissent. Si l’abordage est causé par la faute de l’un

des navires : la réparation totale des dommages lui incombe. Si l’abordage est causé par une

faute commune aux deux navires : la responsabilité de chacun des navires est proportionnelle

à la gravité des fautes respectivement commises.

1 Ce sera le cas des éoliennes jusqu’à leur lieu d’implantation en mer.

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B- Risques pendant l’exploitation

Pendant l’exploitation, les installations de production d’énergie marine n’ont en principe rien

de commun avec le navire, elles sont ancrées pour la plupart et ne se livrent pas à une activité

de navigation. Malgré cela, un tribunal pourrait les qualifier de navire. D’autre part, la loi sur

l’abordage du 7 juillet 1967 ne s’applique pas en principe, puisque son article 2 exclut de son

champ d’application les engins flottants amarrés à poste fixe. Si, comme on peut le supposer,

ils sont soumis aux mêmes règles de sécurité que les plateformes pétrolières offshore, c'est-à-

dire aux zones de sécurité autour des installations, la collision entre un engin EMR en

exploitation et un autre engin flottant n’a strictement rien à voir avec les collisions maritimes

classiques.

Les zones de sécurité sont marquées sur les cartes maritimes et en principe toute autre activité

y est formellement interdite ou limitée. Elles devraient suffire à éviter tout cas d’abordage ; si

malgré cela une collision se produit bel et bien, on peut distinguer trois cas :

1° Le navire qui est entré en collision avec l’engin EMR est un tiers :

Quelles seront les règles de circulation à l’intérieur d’un parc EMR ? Dans le cas du projet de

parc éolien offshore au large de Veulettes sur mer, les 21 éoliennes seront disposées sur 3

lignes distantes de 1600 mètres et espacées d’environ 800 mètres sur chacune ligne. Le parc

couvrira une surface d’environ 15 km².Dans son procès verbal de la réunion tenue le 20 juin

20071, la Grande Commission nautique indique qu’elle a acquis le principe de « la non

interdiction globale de la zone à la navigation », sauf dans un périmètre de 50 mètres autour

des éoliennes où toute activité est interdite. Elle ajoute cependant que dans la mesure où il

n’est pas envisagé un quelconque balisage dans le parc, ni d’autres règles de navigation que

celles du règlement international pour prévenir les abordages en mer, elle demande que soient

apportées quelques restrictions ou limitations. Il lui apparaît ainsi plus raisonnable de

n’autoriser la navigation qu’en deçà d’une taille limite de tous types de bâtiments, y compris

ceux de pêche. Elle interdit ainsi la navigation des bâtiments de plus de 30 mètres, et pour les

autres usagers, la navigation est autorisée de jour comme de nuit, avec une signalisation

lumineuse sur les éoliennes de coin (1 éclat toutes les 4 secondes). Quant à la pêche, pour des

raisons de risques de croche avec les câbles sous marins, bien qu’ensouillés à 2 m de

1 Procès verbal n°012 SHOM/GCN/NP

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profondeur, le chalutage est interdit dans un périmètre de un quart de mille au-delà du parc

éolien ainsi que dans le couloir de raccordement à terre. La pose de filets est autorisée. Les

activités nautiques sont interdites. Ainsi, si le navire tiers qui sera entré en collision avec

l’engin EMR en exploitation a outrepassé une de ces interdictions, il sera fautif. En outre, il

est rentré en collision avec une installation fixe ce qui exclut l’application des textes de droit

maritime, sauf si la qualification de navire est appliquée à l’engin EMR. Ainsi, si le droit

maritime ne trouve pas application, c’est le droit commun sur la responsabilité pour faute qui

joue. Le navire fautif devra donc prendre à sa charge ses dommages ainsi que ceux qu’il aura

infligés à l’engin.

2° Le navire qui est entré en collision avec l’engin EMR entretient une relation contractuelle

avec celui-ci.

Un navire qui achemine du matériel ou du personnel pour la maintenance peut heurter

l’installation. Si les deux sociétés, celle qui exploite l’installation en mer et celle qui gère la

maintenance sont différentes, il faudra rechercher dans le contrat liant les parties s’il existe

des clauses particulières concernant les dommages que chacune d’entre elles est susceptible

d’infliger à l’autre, comme des clauses de non recours. Ainsi dans ce cas, chacune des

victimes assumera les dommages qu’elle a subis. Certaines clauses peuvent aussi prévoir la

réparation en fonction de la faute commise cause du dommage.

3° Autre cas : l’engin EMR s’est détaché de ses ancrages ou ne parvient plus à rester en place,

partant à la dérive et rentrant en collision avec un autre engin flottant : on peut évoquer le cas

du naufrage du prototype d'absorbeur de vagues australien Oceanlinx. Le naufrage s'est

produit en mai 2010 à 93 miles au large de Port Kembla (Australie). La forte houle a d'abord

brisé les amarres de l’engin, le laissant partir à la dérive vers la haute mer. Tous les efforts

déployés pour le rattraper et le remorquer en zone de sécurité ont échoué, et il a dû être

abandonné en haute mer où, dès le lendemain, il a coulé. Il faut préciser qu'ici en coulant,

l’engin n'a causé aucun dommage à l'environnement si ce n'est la dispersion en haute mer de

quelques litres d'huile destinés à la lubrification des turbines. Mais s’il avait heurté un autre

engin flottant, ou navire et lui avait causé des dommages ? On pourrait considérer qu’il y a

une faute de la part de l’exploitant qui n’a pas pris les mesures nécessaires pour éviter le

dommage. Sera-t-il dans ce cas considéré comme un navire ? Si oui, les règles de l’abordage

peuvent s’appliquer. Il faut préciser que l’application des règles d’abordage n’exclut pas en

cas de dommages corporels entraînant le décès celle du droit pénal commun : tel que le délit

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d’homicide involontaire1 ou atteinte volontaire à l’intégrité de la personne2. Dans le cas

contraire, il sera fait application comme pour le cas de collision avec un tiers du droit

commun sur la responsabilité pour faute. Ce qui laisse ensuite la faculté à l’exploitant de se

retourner contre le fabricant des ancrages éventuellement, ou le contrôleur technique.

Chapitre II- L’existence de zones marines protégées

L’implantation d’engins de production d’énergie renouvelable en mer risque de se heurter aux

dispositifs toujours plus nombreux de protection des espaces marins.

I- Les dispositifs de protection spécifiques au milieu marin

A- Les parcs nationaux

Ils sont régis par les articles L331-1 à L 331-29 du code de l’environnement. L’article L331-

14 concerne plus particulièrement les espaces marins des parcs nationaux. Il indique que les

travaux ou installations y sont interdits s’ils se situent dans le cœur du parc, sauf s’il y a

autorisation spéciale de l’établissement public qui gère le parc et à l’exception de la pose de

câbles sous-marins. Si une activité est susceptible d’altérer de façon notable l’espace maritime

au cœur du parc, l’autorisation à laquelle elle est soumise ne peut être délivrée que sur avis

conforme de l’établissement public du parc pris après avis de son conseil scientifique. Est –ce

que l’implantation d’engins de production d’énergie marine peut altérer de façon notable le

milieu marin ? L’article R331-50, 5°, 6° et 7° énonce, entre autres activités concernées, les

autorisations d’occupation temporaire et les concessions du domaine public maritime. Seules

les activités de défense nationale, d’ordre public, de sécurité maritime, et de lutte contre la

pollution échappent à cette procédure. L’article ne mentionne pas les activités d’intérêt

général qui pourraient englober les EMR3.

En fait il faut analyser le règlement de chaque parc pour vérifier si on peut y implanter des

parcs de production d’énergie. En cas d’interdiction, il est quasiment impossible ou très

1 Article 221-6 du Code pénal 2 Article 222-19 du Code pénal 3 Circulaire interministérielle n°2007-17 du 20 février 2007

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difficile de les installer, à moins d’obtenir par un décret en Conseil d’Etat la modification du

règlement, ou si le projet n’est qu’en préparation, de s’associer à la préparation du règlement.

Sachant que le seul parc national en France comportant un espace maritime est l’île de Port

Cros, ce dispositif de protection ne risque pas vraiment de concerner l’activité de production

d’énergie marine.

B- Les parcs naturels marins

Ils ont été créés par la loi du 14 avril 20061 et sont régis par les articles L334-3 du code de

l’environnement. Ils sont gérés par l’Agence des aires marines protégées qui a le pouvoir

d’autoriser ou non les activités susceptibles d’altérer de façon notable le parc en question.

Echappent là aussi à cette autorisation les mêmes activités que celles prévues dans le cadre

des parcs nationaux, qui ne concernent donc pas la production d’énergie marine : défense

nationale, ordre public, sécurité maritime. Selon l’Agence des aires marines protégées, un

parc marin est un outil de gouvernance d’une zone maritime qui associe tous les acteurs

locaux.

Le premier parc naturel marin à avoir été créé est celui de la mer d’Iroise en Bretagne, qui

s’étend du nord d’Ouessant au sud de Sein, soit un espace maritime d’environ 300 000

hectares. Il est susceptible de voir s’implanter quelques projets de production d’énergie

marine. D’autres projets de création de parcs naturels marins sont en cours, notamment celui

qui est situé dans le golfe normando-breton, entre le cap Fréhel et le cap de la Hague. Il fera

partie des 10 parcs voulus par le Grenelle de la mer. Une agence des aires marines protégées

va s’installer à Granville pour lancer l’étude qui devrait durer 2 ans, la création du parc avec

l’enquête publique étant prévues pour 2012. Certains projets comme celui de l’implantation

d’un parc éolien offshore de 500 MW au large de Saint Malo auront certainement intérêt à

s’impliquer en amont dans le processus de création du parc. La situation en tout état de cause

sera loin de ressembler au cas anglais. En effet, à Cardiff au Royaume Uni, c’est un parc

national maritime, le Pembrokeshire Coast National Park Marine Nature Reserve, et non un

consortium financier, qui finance majoritairement le projet de mise au point de l’hydrolienne

Deltastream de la compagnie britannique Tidal Energy Ltd, celle-ci ne nécessitant pas

d’ancrage dans le sol marin et réduisant ainsi son impact sur la faune et la flore marines.

1 N°2006-436

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C- Les espaces du Conservatoire du littoral

Le Conservatoire du littoral a vocation à acquérir des terrains situés sur le littoral en vue de

leur protection, terrains qui deviennent inaliénables et entrent dans le domaine public de

l’Etat. La seule contrainte dans le cadre d’un projet d’implantation EMR tiendrait dans le

passage des câbles de transport d’énergie sur une zone dont le conservatoire possède la

maîtrise foncière, passage qui devrait respecter les objectifs de l’article L322-1 du Code de

l’environnement, avec obligation probable de remise en état du site après enfouissement des

câbles éventuels. Sa compétence peut aussi désormais s’exercer sur le domaine public

maritime, selon l’article L322-1-II du Code de l’environnement1 : « afin de promouvoir une

gestion plus intégrée des zones côtières, le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages

lacustres peut également exercer ses missions sur le domaine public maritime qui lui est

affecté ou confié. ». Il ne peut acquérir de terrains, puisque le sol et le sous sol de la mer

territoriale appartiennent à l’Etat, il ne peut pas non plus accorder de concessions

d’occupation du domaine public maritime, mais il a vocation à accueillir sur les sites

maritimes dont il a la gestion des activités économiques qui ne soient pas contraires à sa

politique de protection de l’environnement.

D- Les zones Natura 2000

Le réseau Natura 2000 qui comprend les zones spéciales de conservation (ZSC) et les zones

de protection spéciales (ZPS) concerne tant le milieu terrestre que marin2. Les mesures de

protection de l’environnement au sein de ces sites doivent se combiner avec les exigences

économiques, sociales et culturelles. Les projets d’implantation de parcs d’énergie marine

dans ces zones doivent faire l’objet d’une évaluation des incidences, qui peut se baser sur

l’étude d’impact nécessaire au projet mais adaptée aux objectifs de conservation du site.

Si le projet porte atteinte à l’état de conservation du site, il ne pourra pas être autorisé sauf

« raison impérative d’intérêt public ».Dans ce cas, des mesures compensatoires doivent être

prises. Les projets de parcs d’éoliennes offshore ou flottantes pouvant avoir des effets

perturbateurs sur le comportement et l’habitat des oiseaux, même si le risque de collision est

faible, ils s’implanteront difficilement dans des ZPS. Par contre, certains pourraient être

1 Article 160 de la loi n°2002-276 du 27 février 2002 2 Articles L414-1 et suivants du Code de l’environnement

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prévus dans des zones Natura 2000 en ZSC comme l’île de Groix par exemple au large de

Lorient, ou à Belle Ile en Bretagne. La commission offshore du Syndicat des Energies

Renouvelables (SER) regrette que le zonage NATURA 2000 en mer se soit fait sans

concertation sur la façade atlantique et que les EMR n’aient pu être prises en cpte à ce

moment là, faute de zonage existant en la matière1. Toutefois, ne pourrait-on pas envisager

des possibilités de contractualisation ? Les articles L414-1 et suivants du code de

l’environnement prévoit en effet, la possibilité pour l’autorité administrative de conclure des

contrats avec les utilisateurs des espaces marins, donc des exploitants d’EMR par exemple,

qui peuvent ainsi recevoir une aide financière de l’Etat en contrepartie de mesures prises pour

la conservation des habitats naturels et de la faune dans ces zones. En effet, l’ETM peut

remonter des profondeurs des nutriments pour l’aquaculture, les houlomoteurs peuvent dans

certains cas agir en brise-lame vis-à-vis de la côte, et les éoliennes peuvent être associées à

des installations aquacoles.

II- Les dispositifs de protection pouvant concerner le milieu marin

A- Parcs naturels régionaux

Régis par les articles L.333-1 et suivants du Code de l’environnement, ils peuvent comprendre

des espaces maritimes, comme le Parc naturel régional d’Armorique en Bretagne, qui dispose

d’une surface maritime de 60 000 hectares sur un total de 173 388 hectares. Si leur charte ne

l’interdit pas, les projets d’implantation de parcs de production d’énergie marine pourront s’y

implanter à condition d’en respecter les objectifs. L’article 12 de la charte 1997-2007 du parc

a prévu diverses dispositions en matière d’énergie et prévoit notamment que « le Parc, dans le

domaine de l’énergie, contribuera par l’information auprès des élus locaux à la mise en place

de sites pilotes dans le cadre (…) des programmes menés par l’ADEME pour le

développement d’énergies nouvelles renouvelables (éoliennes notamment).»

B- Réserves naturelles

L’article L 332-1 du Code de l’environnement permet le classement d’une partie du domaine

public maritime et des eaux territoriales françaises en réserve naturelle.

1 Déclaration de Philippe Gouverneur, président du SER et de la société CECA, filiale d’Enertrag, dans la Revue Maritime n°484

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Selon l’article L 332-3, l’acte de classement d’une réserve naturelle nationale peut soumettre

à un régime particulier, et, le cas échéant, interdire à l’intérieur de la réserve toute action

susceptible de nuire au développement naturel de la faune et de la flore et d’altérer le

caractère de la réserve, notamment les activités industrielles, l’exécution de travaux publics

ou privés, l’utilisation des eaux.

C- ZNIEFF

Etablis pour le compte du Ministère de l’environnement, les inventaires ZNIEFF1de l’article

L411-5 du code de l’environnement, constituent l’outil principal de la connaissance

scientifique du patrimoine naturel et servent de base à la définition de la politique de

protection de la nature. Ils n’ont cependant pas de valeur juridique directe et n’engendrent

donc aucune contrainte réglementaire vis-à-vis des espaces concernés. Elles permettent

toutefois une meilleure prise en compte de la richesse patrimoniale dans l’élaboration des

projets susceptibles d’avoir un impact sur le milieu naturel. Les inventaires ZNIEFF-mer en

Bretagne par exemple concernent les secteurs suivants : la côte de Granite Rose, l’Ile

d’Ouessant, la rade de Brest, l’archipel de Glenan, l’Ile de Groix, la baie de Saint-Malo…

Il faut absolument tenir compte de l’existence d’une ZNIEFF pour l’implantation d’un parc

EMR, y compris pour les câbles, leur zone d’atterrage, et les cheminements vers les postes de

connexion au réseau. En effet, le juge a par exemple retenu une erreur manifeste

d’appréciation de la part d’un préfet qui a autorisé un projet dont l’étude d’impact a montré

qu’il porterait une atteinte grave à une ZNIEFF2. L’omission de l’existence d’une ZNIEFF par

la notice d’impact entache d’irrégularité la composition du dossier d’enquête publique3.

Titre II- La planification de l’espace maritime pour l’implantation des EMR dans la

concertation.

L’implantation des engins EMR va ainsi s’effectuer dans un espace très convoité mais aussi

de mieux en mieux protégé. Elle ne pourra donc être possible qu’à condition de prendre en

1 Zone naturelle d’intérêt écologique faunistique et floristique. 2 Cour administrative d’appel de Douai, 4 mars 2004, Sté Sablières et Entreprise Morillon-Corvol, req n°02DA00666. 3 Cour administrative d’appel de Bordeaux, 20 avril 2000, Cts Roland-Gosselin : req n°97BX00560.

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compte tous les usages existants, par le biais d’outils de planifications (Chapitre I) et dans un

esprit de concertation de tous les usagers de la mer (Chapitre II).

Chapitre I - Le besoin d’une planification de l’espace maritime

L’augmentation constante des activités maritimes engendre des rivalités d’intérêts entre la

production d’énergie en mer et d’autres secteurs comme la navigation, le transport maritime,

le développement portuaire, la pêche, l’aquaculture, et les enjeux environnementaux. La

planification maritime permet de rationaliser l’utilisation de l’espace marin et fournit un cadre

pour arbitrer les conflits, dans le cadre de coopérations transfrontalières.

I -La planification à l’échelon international et européen

A- Au niveau international

Le texte de base en droit international est la Convention des Nations unies sur le droit de la

mer (CNUDM) du 10 décembre 1982, dite Convention de Montego Bay (CMB)1. Elle régit

pour et entre les Etats signataires « tout ce qui a trait aux espaces marins depuis les questions

de délimitation jusqu’à celles de la maîtrise de l’environnement et d’exploitation des fonds

marins, en passant par la recherche scientifique, les activités commerciales, la technologie, et

le règlement des différents touchant les problèmes de la mer. »2. Seuls les articles 3 à 15

relatifs aux limites de la mer territoriale et 56 à 60 relatifs aux implantations possibles dans la

zone économique exclusive (ZEE) concernent réellement les énergies marines.

A côté de textes à valeur juridique existent des outils d’aide à la planification tels que le

« Marine Spatial Planning : a step-by-step approach toward ecosystem-based management »

publié en juin 2009 par la Commission Océanographique Intergouvernementale (COI) et le

programme sur l’homme et la biosphère (MAB3) de l’UNESCO. Il donne une méthodologie

pour développer des activités économiques en mer tout en préservant la biodiversité.

1 Entrée en vigueur en droit français suite à la publication du décret n°96-774 du 30 août 1996. 2 SHOM, Guide du navigateur, Tome 3, 2000, page 22 3 Man and Biosphere

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B- Au niveau régional

Le groupe de travail OSPAR1, organisé dans le cadre de la Convention pour la protection du

milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est dite Convention OSPAR2 , qui a servi de plate-

forme d’échange d’informations concernant la planification de l’espace maritime, s’organise

autour de plusieurs axes ayant tous trait à la protection de l’environnement marin de

l’Atlantique du Nord-Est. Il donne des lignes directrices sur les considérations

environnementales pour le développement des éoliennes offshore3, notamment sur les critères

de choix de l’emplacement d’un parc.

C- Au niveau européen

La Commission européenne élabore en 2006 un livre vert4 sur le développement progressif

d’une politique maritime communautaire intégrée, puis un livre bleu5 le 10 octobre 2007 sur

« les lignes directrices pour une approche intégrée de la politique maritime ». Dans sa

communication6 du 25 novembre 2008, la commission établit une feuille de route

encourageant les pays européens à développer leurs activités maritimes et notamment les

énergies marines au moyen d'une planification maritime, en en définissant les principes

fondamentaux, en tirant les leçons de projets communautaires tels que l’initiative Interreg, et

en rappelant les instruments ayant un effet sur la planification de l’espace maritime tels que la

directive-cadre 2008/56/CE « stratégie pour le milieu marin. ». Cette directive constitue le

pilier environnemental de la politique maritime intégrée. L’Union européenne finance des

projets de planification par le biais du FEDER, le Fonds européen de développement régional,

et notamment le programme INTERREG IIIB, « Espace Atlantique » 2000-2006, qui a lancé

une mission d’expertise pour le développement des coopérations dans le domaine des énergies

marines7. Il concerne l’espace transnational atlantique constitué par des régions européennes

appartenant à 5 Etats : l’Espagne, le Portugal, la France, l’Irlande, et le Royaume Uni. Parmi

les 4 axes de coopération interrégionale définis pour le développement des énergies marines,

1 Dans laquelle sont impliqués les gouvernements de 15 pays : France, Belgique, Danemark, Finlande, Norvège, Suède, Allemagne, Espagne, Portugal, Royaume Uni, Islande, Irlande, Luxembourg, Pays bas, Suisse. 2 Signée à Paris le 22 septembre 1992 et entrée en vigueur le 25 mars 1998 3 Accord 2008-3 4 Livre vert de la Commission du 7 juin 2006 : « Vers une politique maritime de l’Union : une vision européenne des océans et des mers » COM (2006) 275 final 5 COM (2007) 575 final 6 COM (2008) 0791 final 7 Note de synthèse de décembre 2009

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le 3° concerne le développement des territoires de la façade atlantique par une planification

spatiale et une gouvernance locale.

Le processus de planification s’inscrit aussi dans une démarche de gestion intégrée des zones

côtières, concept issu du développement durable. La Recommandation du Parlement européen

et du Conseil du 30 mai 2002 relative à la mise en œuvre d’une stratégie de gestion intégrée

des zones côtières en Europe1 a pour but d’associer des acteurs multiples autour d’un projet

commun.

II- La planification à l’échelon national

Il n’existe pas en France jusqu’en 2009 de véritable politique maritime intégrée et non

sectorielle, et ce malgré quelques groupes de réflexion comme le groupe POSEIDON2. Le

concept de GIZC3 a été mis en œuvre par la France en 2003 et concrétisé par une décision du

CIADT4 littoral le 14 septembre 2004. L’article 35 de la loi du 3 août 2009, dite loi Grenelle

1, reprend les recommandations du rapport du Comité Opérationnel n°12 du Grenelle de

l’environnement de juillet 2008 intitulé « Gestion intégrée de la mer et du littoral » et

confirme l’urgence de repenser la gestion de la mer et du littoral dans une approche

véritablement intégrée pour assurer un développement équilibré des activités humaines en

mer, en mettant l’accent sur une meilleure planification stratégique et en proposant la création

d’un fonds national pour la gestion de la mer et du littoral, qui serait financé par les

différentes redevances et taxes d’usage de la mer et de ses ressources. On passe ainsi d’une

gestion intégrée des zones côtières à une gestion intégrée de la mer et du littoral, certains

poussant même la réflexion jusqu’à se demander s’il ne faudrait pas y inclure aussi la haute

mer, et aller vers une gestion intégrée des mers et des océans.5 La loi du 12 juillet 2010 dite

loi Grenelle 2 crée le document stratégique de façade dans un nouvel article L 219-3 du Code

de l’environnement, instrument de la gestion intégrée et concertée des activités liées à la mer

et au littoral. Ce document est établi pour chacune des façades maritimes délimitées par la

stratégie nationale pour la mer et le littoral du nouvel article L219-1 du Code de

l’environnement. Ces documents stratégiques de façade seront opposables, selon l’article

L219-4, aux différents plans, programmes et schémas applicables dans le périmètre d’une

1 N°2002/413/CE 2 Rapport publié en décembre 2006 « Politique maritime de la France » 3 Gestion Intégrée des Zones Côtières 4 Comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire 5 Colloque Gestion intégrée des zones côtières, Boulogne sur Mer, 13 et 14 janvier 2010, Université du Littoral

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façade maritime, qu’un décret en Conseil d’Etat viendra préciser. Les autorisations qui seront

délivrées pour l’implantation des parcs EMR devront les respecter. Ces documents sont

appelés documents stratégiques de bassin en outre-mer. L’article L219-9 précise que ces

documents stratégiques comprendront un Plan d’action pour le milieu marin, qui pourra faire

l’objet d’une coopération avec les Etats partageant une région maritime avec la France. Ce

document procédera d’une évaluation environnementale à réaliser avant 2012. Comment ces

documents prendront ils en compte les projets d’implantation d’EMR ?

Le Livre Bleu adopté par le Comité interministériel de la mer du 8 décembre 2009 a lancé un

Plan Energies bleues qui encourage une planification stratégique développée en concertation

pour déterminer les sites propices à l’implantation de parcs de production d’énergie marine. Il

rappelle que le développement des énergies marines est un axe prioritaire de la politique

maritime française.

III- La planification à l’échelon régional et local

Jean Louis Borloo a demandé, le 5 mars 2009, aux préfets des régions Bretagne, Pays de la

Loire, Haute Normandie, Aquitaine et Provence Alpes Côte d’Azur, d’organiser une large

concertation sur chaque façade maritime en vue de planifier et d’accélérer le développement

des énergies marines, en tenant compte des différents usages et contraintes. La plupart des

propositions de planification ne retiendront que la technologie la plus aboutie et la plus

opérationnelle qu’est l’éolien posé en mer, C’est sur la base de la remontée de ces

propositions de planification que l’Etat lancera un appel d’offres en septembre 2010.

C’est ainsi que la Bretagne, qui est l’une des régions où le potentiel physique d’exploitation

des EMR est le plus important, et où le taux d’indépendance énergétique est l’un des plus

faibles en France avec moins de 7% d’électricité produite localement, a identifié deux zones

propices pour l’éolien offshore susceptibles de faire l’objet d’un appel d’offre : les Côtes

d’Armor et l’Ille-et-Vilaine. En PACA, l’implantation d’éoliennes offshore semble difficile

dans la mesure où les zones propices, c'est-à-dire l’une située entre les départements de

l’Aude et de l’Hérault, et l’autre au large de la Camargue notamment, sont pour l’une grevée

de servitudes militaires et pour l’autre soumises à des projets de création d’aires marines

protégées. La bathymétrie des fonds situés plus au large plonge trop rapidement pour pouvoir

y implanter des éoliennes.

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Quelle sera la portée juridique de ces documents de planification stratégique? Comment vont-

ils s’articuler avec les documents stratégiques de façade du nouvel article L219-3 du Code de

l’environnement ? Devront-ils être pris en compte par les différents documents d’urbanisme,

tels que les Schémas de mise en valeur de la mer (SMVM), instruments de la GIZC ? Institués

par l’article 57 de la loi du 7 janvier 19831, les SMVM fixent les orientations fondamentales

de l’aménagement, de la protection et de la mise en valeur du littoral. Ils précisent les mesures

de protection du milieu marin. Ils sont sensés concerner toute la mer territoriale, mais pour le

moment semblent se limiter à un mille marin, alors que les projets EMR vont s’implanter au-

delà.

Sur l’île de la Réunion, très active sur le plan des EMR, l’ARER (Agence Régionale de

l’Energie Réunion) a rédigé, dans le cadre du volet Energies de la mer du PRERURE (Plan

Régional des Energies Renouvelables et de l’Utilisation Rationnelle de l’Energie) le

SREMER : Schéma Régional des Energies de la Mer. Il sera annexé au SAR (Schéma

d’Aménagement Régional) et au SMVM afin d’accélérer le développement des énergies

marines sur l’ensemble du territoire de la Réunion.

Comment s’effectue cette planification à l’étranger ? Outre-Rhin par exemple, où la

construction du premier parc éolien offshore a démarré, la planification récente pour chaque

usage de la mer se traduit par l'élaboration par le gouvernement fédéral allemand de zones

prioritaires, au sein desquelles toute autre forme d’exploitation est exclue si elle n’est pas

compatible avec l’exploitation prioritaire de l’énergie éolienne. Au sein de ces zones, un

usage est défini comme prioritaire par rapport aux autres (navigation, extraction de matières

premières, câbles sous-marins, recherche sur le milieu marin, production d'énergie, pêche et

protection du milieu marin). La définition en "zones prioritaires" implique que tout usage

pouvant faire obstacle à l'usage prioritaire est prohibé. Cependant, il n'est pas interdit de

développer un usage en dehors de la zone où il est prioritaire à condition qu'il ne porte pas

atteinte à d'autres usages prioritaires. Pour l'éolien offshore, cinq zones prioritaires ont ainsi

été définies, trois en Mer du Nord et deux en Mer Baltique. Plus de vingt projets ont déjà été

approuvés, et le gouvernement fédéral a adopté un plan de construction de 40 parcs

représentant 2 500 éoliennes d'une capacité de 12 000 MW.

1 Loi n°83-8 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l’Etat

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Chapitre II- Le besoin de concertation

La planification des EMR ne peut se faire sans une concertation de toutes les catégories

d’acteurs impactées par l’implantation des parcs EMR : celles qui sont liées à la localisation

par rapport à la mer : riverains, touristes (I), et celles liées au métier comme les pêcheurs (II),

et ce bien en amont des projets

I- La procédure de débat public.

La question de l’acceptabilité sociale des EMR se pose. C’est l’impact sur le paysage qui est

considéré comme le plus important dans l’esprit du public profane. Sont donc concernées en

premier lieu les éoliennes offshore, situées plus près des côtes que les éoliennes flottantes. Les

hydroliennes et les houlomoteurs ne se voient pas, ils concernent plutôt les pêcheurs. Quant

aux centrales d’énergie thermique des mers, elles ressemblent à une installation industrielle

quelconque.

Selon un sondage TMO Régions pour la région Bretagne d’octobre 2008, 80% des Bretons se

disent favorables aux éoliennes en mer. Pourtant, le phénomène NIMBY, « not in my

backyard1 », qui s’observe déjà dans le domaine des éoliennes terrestres, persiste bien aussi

ici. Certains vont plus loin en refusant catégoriquement toute implantation, que ce soit chez

eux ou ailleurs, il s’agit du phénomène BANANA (Build absolutely nothing and nearby

anything) : non seulement pas dans ma commune mais nulle part ailleurs.

En témoignent les recours contre le projet Enertrag, dont l’un des arguments tient au fait qu’il

va « porter atteinte à l’intégrité d’un paysage exceptionnel » faisant l’objet d’une proposition

de classement au titre du projet Natura 2000. Ce recours est néanmoins davantage la volonté

de quelques notables locaux soucieux de préserver leur petit paradis que l’expression de

l’opinion dominante. « Ce que demandent nos concitoyens, ce n’est pas le risque zéro, mais le

mépris zéro »2. L’occasion est donnée au public de s’exprimer sur le projet de parc de 140

éoliennes en mer de 700 MW au total situé à 14 Km au large du Tréport porté par la

Compagnie du Vent lors d’un débat public du 28 avril au 10 septembre 2010. Le maître

d’ouvrage a en effet saisi le 24 août 2009 la Commission Nationale du Débat Public

(CNDP) en vertu de l’article L121-8 du Code de l’environnement. En effet, le coût du projet

est de 1.8 milliards d’euros et dépasse donc le seuil de saisine obligatoire. La saisine de la

1 « Pas dans mon jardin » 2 Noiville et Gouyou, 2000

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CNDP n’entraîne pas automatiquement l’organisation d’un débat public (article L121-9).

Dans le cas du projet des Deux-Côtes, la CNDP a décidé d’organiser un débat public pour les

raisons suivantes : le projet présente un intérêt sur le plan national eu égard au niveau élevé de

la production d’électricité et de son raccordement au réseau national, de l’objectif de 23%

d’énergie renouvelable d’ici 2020, de l’impact du projet sur l’environnement, l’avifaune, les

mammifères marins, la visibilité et le paysage, l’érosion du trait de côte, et enfin en raison des

enjeux socioéconomiques du projet, de l’activité générée pendant la construction du parc et de

ses impacts sur la navigation maritime et aérienne, la pêche et le tourisme. Le public est ainsi

amené à se prononcer sur deux questions principales : faut-il développer l’éolien en mer face

aux côtes d’albâtre et picarde ? Si oui à quelles conditions au vu des différents usages de la

mer ? Le projet de parc éolien des Deux -Côtes répond-il à ces enjeux et à ces contraintes ? Le

débat public ne peut dépasser 4 mois, mais peut être prorogé de 2 mois par une décision

motivée de la Commission nationale du débat public. Le président de la CNDP publie un

compte rendu du débat dans un délai de 2 mois à compter de la date de clôture du débat

public et en dresse le bilan. Le maître d’ouvrage décide ensuite dans les 3 mois suivant la

publication du bilan du principe et des conditions de poursuite du projet, en précisant les

éventuelles modifications qu’il y a apportées.

Afin de convaincre la population de l’intérêt du projet, la Compagnie du Vent a convié à

plusieurs reprises des journalistes au Danemark, où des parcs éoliens offshore sont en

exploitation depuis plus de 10 ans et fournissent plus de 22% de l’électricité. Bien que le

projet de la Compagnie du vent soit capable de produire l’équivalent de la consommation

annuelle de 900 000 personnes, la commune du Tréport, située dans l’axe des éoliennes, n’est

pas favorable au projet. Selon elle, il serait néfaste pour le tourisme et nuirait à l’activité des

pêcheurs. Peut-on imaginer un retournement de situation comme au Danemark, où les parcs

d’éoliennes ne sont plus vus comme un frein au tourisme mais au contraire une attraction

touristique ?

II- La concertation avec les pêcheurs

La pêche constitue la première activité économique impactée dans l’existence de conflits

d’usage avec les EMR. Cette situation est exacerbée par les difficultés économiques que

rencontre ce secteur : diminution des ressources halieutiques et des quotas de pêche, hausse

du prix du gasoil. L’implantation des EMR est donc vue comme une contrainte

supplémentaire pour la profession. Cette question a fait l’objet d’un rapport au Premier

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ministre par le député du Pas-de-Calais Dominique Dupilet le 3 avril 2001 intitulé : « le

règlement des conflits d’usage dans la zone côtière entre pêche professionnelle et autres

activités ». Il traite notamment du conflit avec l’activité d’éoliennes en mer. Parmi ces

propositions, il recommande une planification transversale des activités en mer intégrant tous

les usages et il invite les porteurs de projets à consulter les comités de pêcheurs le plus en

amont possible. Comment ces conflits seront-ils gérés par les porteurs de projets ? Dans le

cadre du projet Enertrag en Normandie, il a été décidé par exemple que seraient autorisés à

l’intérieur du parc les arts dormants (filets, casiers, lignes), contrairement aux arts traînants

comme le chalutage et le dragage. La société WPD, porteuse d’un projet en Loire Atlantique

entre l’Ile d’Yeu et Noirmoutier, a décidé d’emmener les pêcheurs sur un parc existant en

Angleterre. Ces derniers ont pu constater que les pêcheurs locaux pouvaient continuer à

pêcher et que les fondations des éoliennes créaient un effet « récif » pour les poissons. Ils sont

ainsi d’accord sur le principe pour la création du parc par la société WPD.

Pour son projet d’installation de deux hydroliennes au Raz Blanchard, la société Géocéan n’a

pas hésité à abandonner pour cause de conflit d’usage certaines des zones de développement

hydrolien envisagées au départ et a tenu à associer étroitement les pêcheurs à sa démarche en

demandant au Comité des pêches de l'aider à trouver un bateau pour sa campagne

océanographique. Le 1er juillet 2009, une réunion d'information était organisée présentant

clairement le projet devant les principaux intéressés mais certains points sur lesquels il fallait

porter une attention particulière ont été relevés : la planification de ce type de développement,

l’ensouillage du câble et son atterrage, l’impact sur la faune. A l'issue de cette réunion,

Géocéan avoue avoir appris à mieux connaître cette zone si particulière pour ceux qui la

pratiquent au quotidien. Par contre, les pêcheurs s’opposent violemment aux projets des

sociétés POWEO et NASS and WIND au large des Côtes d’Armor et d’Ille et Vilaine, zones

qui ont pourtant été choisies comme propices à l’implantation d’éoliennes dans le cadre de la

planification stratégique en région Bretagne en février 2010. Les pêcheurs défendaient leur

zone de pêche à la coquille Saint Jacques, mais restaient ouverts à la discussion. Ils ont fait

une contre-proposition en juin 2010 en suggérant aux promoteurs de s’implanter plus au large

mais à des profondeurs qui rendraient les projets plus coûteux, et en menaçant les projets s’ils

n’étaient pas entendus.

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Titre III- Vers une nécessaire simplification des procédures administratives

d’implantation

Après avoir déterminé le site propice à l’exploitation d’EMR, notamment au regard de toutes

les contraintes environnementales et les conflits d’usage, commence alors pour le promoteur

du projet une phase de procédures administratives auxquelles il est soumis pour pouvoir

démarrer les travaux et implanter les engins d’exploitation EMR. Celles-ci ont certes

récemment été simplifiées par la loi Grenelle 2 (Chapitre I), mais il demeure des vides

juridiques qui devront être comblés (Chapitre II).

Chapitre I- Les premières avancées de la loi grenelle 2

I - Allègement des autorisations demandées

A- Suppression de l’obligation d’obtention d’un permis de construire en mer

Jusqu’au vote de la loi Grenelle 2, l’implantation d’un parc éolien offshore était soumis à

l’obligation d’obtention d’un permis de construire. Il s’agissait en fait d’une obligation qui

concernait avant tout les éoliennes terrestres, et qui par extension avait été appliquée aux

éoliennes en mer. L’article L 421-1 du Code de l’urbanisme indique en effet que « les

constructions, même ne comportant pas de fondations, doivent être précédées de la délivrance

d’un permis de construire ». L’article R 421-2 exclut « les éoliennes dont la hauteur du mât et

de la nacelle au dessus du sol est inférieure à 12 m ». Ainsi les éoliennes offshore, dont la

hauteur dépasse dans tous les cas 12 m, étaient concernées, même si cette obligation était

manifestement inadaptée à une activité en mer. En effet, comment appliquer en mer des règles

et des documents d’urbanisme purement « terrestres »? Mme Jouano a proposé de faire

référence non plus aux règles du droit de l’urbanisme pour les éoliennes en mer mais à celles

régissant les phares et balises1.Quant aux autres formes d’exploitation d’énergie marine,

aucun texte précis ne les concernait. Cependant, dans la mesure où elles ne figuraient pas dans

la liste des exclusions prévues aux articles R 421-2 à R 421-12 du Code de l’urbanisme, elles

étaient a priori soumises à l’obligation d’obtention d’un permis. La loi Grenelle 2 est venue

1 Extrait du compte rendu des débats de la commission parlementaire sur le projet de loi Grenelle 2

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supprimer cette obligation. En effet, le nouvel article L 421-5 du code de l’urbanisme vient

ajouter à la liste des activités dispensées de permis de construire les installations implantées

en mer sur le domaine public maritime immergé au-delà de la laisse de la basse mer. C’est

ainsi que la société Enertrag est la première… et sera certainement la dernière société à avoir

obtenu un permis de construire pour l’implantation d’installations de production d’énergie

marine1.

B- Le régime ICPE et les EMR

Le projet de loi Grenelle 2 prévoyait d’intégrer les éoliennes dans la nomenclature des

installations classées (ICPE2) visées à l’article L511-2 du Code de l’environnement, y compris

les éoliennes en mer. Le régime applicable envisagé était soit celui de l’autorisation, soit le

nouveau régime de l’enregistrement. Finalement le nouvel article L553-1 du Code de

l’environnement modifié par la loi Grenelle 2 classe bel et bien les éoliennes dans la

nomenclature ICPE, mais en ne mentionnant que les « installations terrestres de production

d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent », soit les éoliennes terrestres, ce qui induit

donc que les éoliennes en mer échappent à ce régime. La volonté du législateur de favoriser

l’éolien offshore par rapport à l’éolien terrestre est ici manifeste.

Le classement ICPE pourrait-il concerner d’autres sources d’énergie marine ? Dans la mesure

où l’application du régime ICPE se détermine en fonction des substances utilisées ou de

l’activité, et qu’il est valable aussi en mer territoriale, d’autres techniques d’exploitation

d’énergie marine pourraient être touchées, tel que le système d’énergie thermique des mers,

qui utilise de l’ammoniac comme fluide frigorigène ou certains systèmes houlomoteurs. Les

rubriques concernées seraient ici la rubrique n°1136 en raison de l’utilisation de l’ammoniac

pour l’ETM, et, en fonction de la quantité, le régime des installations classées Seveso serait

applicable. La rubrique n°29203 s’appliquerait pour l’ETM et les houlomoteurs. La

soumission de ces systèmes d’exploitation EMR au régime ICPE serait-elle envisageable dans

l’hypothèse où les services de l’Etat les classent comme navires ? En effet, aucun « navire »

n’a jusqu’à présent été classé ICPE. Pourquoi pas cela dit, dans la mesure où le régime ICPE,

bien que constituant une contrainte administrative supplémentaire pour l’exploitant, est un

1 Enertrag a obtenu son permis de construire le 1er septembre 2008 2 Installations classées pour la protection de l’environnement 3 « Installation de réfrigération ou de compression fonctionnant à des pressions effectives supérieures à 1 bar comprimant ou utilisant des fluides inflammables ou toxiques »

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gage de respect de certaines normes environnementales et nécessiterait la réalisation d’une

étude de dangers, en plus de l’étude d’impact (Article L512-1 du code de l’environnement)..

C- Les autorisations nécessaires et les taxes dues

Les projets d’implantation de parcs d’énergie marine sont soumis principalement à deux

autorisations. Outre l’autorisation prévue par l’article 7 de la loi du 10 février 2000 et le

décret du 7 septembre 20001 qui est une autorisation ministérielle d’exploitation d’une

installation de production de plus de 4.5 MW d’électricité, accordée de facto à une entreprise

retenue dans le cadre d’un appel d’offres, et qui ne concerne donc pas uniquement les EMR,

il faut obtenir une autorisation d’occupation du domaine public maritime, qui se matérialise

par une concession ou une autorisation d’occupation temporaire ( AOT) et une autorisation au

titre de la loi sur l’eau.

1° L’obtention d’un titre d’occupation du domaine public maritime

Le décret du 29 mars 20042 dans son article 1er indique que le domaine public maritime peut

faire l’objet de concessions, tout au moins en qui concerne le sol et le sous sol de la mer

territoriale, qui appartiennent à l’Etat. Les eaux surjacentes et la colonne d’eau sont des res

communes, c'est-à-dire des choses communes n’appartenant à personne et non susceptibles

d’appropriation, dont l’usage est commun à tous, selon l’article 714 du code civil. Elles ne

font pas partie du domaine public maritime3. Leur utilisation ne peut donc donner lieu au

paiement d’une redevance ou être soumise à autorisation. Les EMR sont pourtant autant

concernées par les eaux surjacentes que le sol ou le sous-sol marin. La demande de

concession est adressée au préfet, le préfet maritime est consulté ainsi que d’autres instances

comme le directeur des services fiscaux qui est chargé de fixer les conditions financières de la

concession, et les communes concernées. Le projet de concession peut aussi être soumis à

l’avis de la commission nautique locale ou de la grande commission nautique. L’arrêté

préfectoral ayant accordé l’autorisation d’occuper le DPM à la société Enertrag ne mentionne

que les avis du gestionnaire du DPM et du commissaire enquêteur, ce qui constitue selon

l’association Vent de Colère un des deux motifs d’illégalité externe fondant le recours contre

1 n°2000-877 2 n°2004-308 3 CE 27 juillet 1984, Ministère de la mer c. Mme Galli et autres

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l’arrêté, l’autre motif étant l’absence de publicité préalable dans deux journaux à diffusion

nationale. En effet, l’article 5 du décret prévoit que le préfet, avant ouverture de l’instruction

administrative prévue à l’art 6, procède à une publicité préalable consistant en un avis publié

dans 2 journaux à diffusion locale, régionale, ou nationale si l’importance du projet le justifie.

Or, selon l’association, le projet étant issu d’un appel d’offres ministériel, il justifiait donc une

publicité dans un journal national. Il est intéressant de noter qu’ici l’association considère le

projet comme un projet d’importance nationale, alors que pour étayer son argumentation

fondée sur la violation de l’article 1er du décret, elle lui dénie tout caractère d’intérêt général.

L’article 7 du décret dispose que le projet fait l’objet, avant son approbation, d’une enquête

publique menée dans les formes prévues par les articles R 11-14-3 à R11-14-15 du code de

l’expropriation pour cause d’utilité publique, c'est-à-dire une enquête publique de droit

commun. Si le Préfet ne tient pas compte des conclusions du commissaire enquêteur, il y a

renvoi au Conseil d’Etat pour adoption par décret en Conseil d’Etat. A l’issue de l’instruction

administrative, le service gestionnaire du DPM transmet le dossier au préfet avec sa

proposition et si, le projet parait pouvoir être accepté, un projet de convention. La concession

est accordée pour une durée maximale de 30 ans moyennant le paiement d’une redevance

annuelle1, qui est de 450 000 € par an pour la société Enertrag. L’arrêté préfectoral lui

accordant concession d’occupation du DPM impose la mise en place d’un plan de gestion du

trafic maritime sur site pendant la phase de travaux et pendant la maintenance, interdit de

procéder à l’ensouillement des câbles à proximité des plages, sur terre ou en mer, pendant la

période estivale. La procédure d’obtention de l’autorisation a duré 2 ans, la demande ayant été

déposée le 13 juillet 2006 et la concession ayant été accordée le 16 juillet 2008.

2° Le respect de la loi sur l’eau

L’arrêté préfectoral accordant concession d’occupation du DPM à la société Enertrag indique

dans son article 1.3 d que le concessionnaire est tenu d’obtenir également l’autorisation au

titre de la loi sur l’eau (article L 214.3 du Code de l’environnement). En effet, l’article R 214-

1 dans la rubrique 4.1.2.0 de la nomenclature vise les ouvrages réalisés en contact avec le

milieu marin et ayant une incidence directe sur le milieu. Ils sont soumis à déclaration quand

le montant de leur réalisation est compris entre 1.6 et 1.9 millions d’euros et à autorisation à

1 Son montant a été fixé par un arrêté du 2 avril 2008 pour les éoliennes. Elle est composée d’une partie fixe :1 000 € par éolienne et 50 cents par mètre linéaire de câble pour les éoliennes en mer et d’une partie variable : 4 000 € le MW qui n’est due qu’à compter de la 3ème année à compter de la notification de l’arrêté.

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partir de 1.9 millions d’euros. Le dossier de demande est à adresser en sept exemplaires au

préfet. Suite au dépôt du dossier, une enquête publique est organisée. Le CODERST (Conseil

de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques) est consulté et rend un avis.

Ensuite le préfet prend ou non son arrêté d’autorisation assorti de prescriptions spéciales

s’imposant à l’exploitant. Les délais d’instruction peuvent varier. La société Enertrag a fait sa

demande d’autorisation loi sur l’eau le 25 octobre 2006 et a obtenu son autorisation

préfectorale le 14 janvier 2008, soit après 15 mois de procédure. Parmi les prescriptions

techniques imposées à la société Enertrag dans le cadre du projet de Veulettes sur Mer, on

peut citer l’obligation d’installer un dispositif d’éloignement des cétacés, l’interdiction de

l’utilisation de peintures anti-salissures. Dans la mesure où les études d’impact préalables

n’ont pas permis de déterminer les conséquences de la réalisation du projet sur la faune et la

flore, l’arrêté impose la mise en place d’un suivi environnemental notamment au niveau de

l’impact du bruit et des champs électromagnétiques. Un comité de suivi est à cet effet créé,

présidé par le préfet de région. Il devra se réunir au moins une fois par an.

3° Les taxes dues dans le cadre des EMR

a) Taxe sur les éoliennes en mer

Une taxe sur les éoliennes en mer, fixée par les articles 1 519 B et C du CGI1, à 13 137 € le

MW installé (et par an) est acquittée par l’exploitant de l’unité de production. La taxe est

assise sur le nombre de mégawatts installés dans chaque unité de production d'électricité

utilisant l'énergie mécanique du vent au 1er janvier de l'année d'imposition. Elle n'est pas due

l'année de la mise en service de l'unité. 50% sont reversés au profit des communes littorales

d’où les installations sont visibles, et, depuis la loi du 27 juillet 20102, 35% (50% auparavant)

aux pêcheurs, les 15% restant sont désormais versés au financement de projets concourant au

développement durable des autres activités maritimes. Quelles sont ces autres activités ? Dans

la cas d’implantation de projets dans des zones Natura 2000, ces 15% pourront-ils être

récupérés par les maîtres d’ouvrages dans le cadre de contrats passés avec l’Etat ? L’article

1519 C indique qu’un décret précisera ultérieurement le fonctionnement et l’affectation de

cette taxe. Est-elle applicable dans la ZEE ? A priori non, puisque l’article 1635 quinquies du

CGI stipule que cette taxe n’est pas applicable sur le plateau continental, ni au fonds de la mer

1 code général des impôts 2 n°2010-874

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et à son sous-sol dans la ZEE. Les engins EMR qui ne sont pas construits dans le sol marin

seront-ils concernés ?

b) Nouvelle taxe sur les énergies marines

Dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, un amendement, proposé par le

gouvernement et adopté le 18 décembre 2009 par le Sénat et l’Assemblée Nationale, a ramené

le niveau de l’imposition forfaitaire à laquelle sont soumises les éoliennes et les énergies

marines à 2 913 € par MW et par an, soit un montant identique à celui des autres moyens de

production d’électricité, alors qu’il avait été fixé à 8 000 € par MW et par an.

II- Réformes des études d’impact et des enquêtes publiques

A- Etudes d’impact

Jusqu’à la loi Grenelle 2, deux catégories de projets étaient soumises à l’obligation de

fournir une étude d’impact : ceux qui y sont soumis de par leur nature selon l’article R122-8 II

du code de l’environnement, quel que soit le coût de l’opération et

ceux soumis à étude d’impact de par leur montant selon l’art R 122-8 I du code de

l’environnement, c'est-à-dire les projets d’un montant supérieur à 1,9 millions d’euros.

Entraient dans le champ de l’article R 122-8 II du code de l’environnement, notamment les

travaux d'installation des ouvrages de production d'énergie éolienne dont la hauteur du mât

dépasse 50 mètres. Ensuite, dans la mesure où les opérations EMR de façon générale

représentent plus de 1.9 millions d’euros, elles étaient systématiquement soumises à étude

d’impact, que ce soit dans le cadre des procédures eau ou DPM. En effet, le décret du 29 mars

2004 relatif aux concessions d’utilisation du DPM impose parmi les éléments du dossier de

demande de concession les modalités proposées, à partir de l’état initial des lieux, de suivi du

projet, de son impact sur l’environnement et les ressources naturelles et précise qu’une étude

d’impact peut aussi être fournie. La loi sur l’eau impose soit un document d’incidence ou une

étude d’impact si elle reprend les éléments du document d’incidence.

Le nouvel article L122-11 du Code de l’environnement, introduit par la loi Grenelle 2, dispose

désormais : « Les projets de travaux, d’ouvrages, ou d’aménagement publics et privés qui, par

1 Toutes ces nouvelles dispositions seront applicables aux projets déposés à compter du 1er jour du 6ème mois après la publication du décret d’application à intervenir relatif aux études d’impact et prévu à l’article L122-3 du code de l’environnement.

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leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d’avoir des incidences

notables sur l’environnement ou la santé humaine sont précédés d’une étude d’impact. Ces

projets sont soumis à étude d’impact en fonction de critères et de seuils définis par voie

réglementaire et, pour certains d’entre eux, après examen au cas par cas effectué par l’autorité

administrative de l’Etat compétente en matière d’environnement. ». Ainsi, deux catégories de

projets là aussi se dessinent : les projets soumis à étude d’impact en fonction de critères et de

seuils qui seront fixés ultérieurement par décret, et ceux qui feront l’objet d’un examen au cas

par cas. L’article L122-3 précise aussi le contenu de l’étude d’impact, qui doit comprendre

une « description du projet, une analyse de l’état initial de la zone susceptible d’être affectée

et de son environnement1, l’étude des effets du projet sur l’environnement ou la santé

humaine, y compris les effets cumulés avec d’autres projets connus, les mesures

proportionnées envisagées pour éviter, réduire et, lorsque c’est possible, compenser les effets

négatifs notables du projet sur l’environnement ou la santé humaine, ainsi qu’une présentation

des principales modalités de suivi de ces mesures et du suivi de leurs effets sur

l’environnement ou la santé humaine. L’étude d’impact expose également une esquisse des

principales solutions de substitution qui ont été examinées par le maître d’ouvrage et une

indication des principales raisons de son choix, eu égard aux effets sur l’environnement ou la

santé humaine. ».

Une autre avancée de la loi Grenelle 2 consiste dans un mécanisme de sanctions nouvelles. Il

est admis qu’un projet peut être entravé par un recours d’un tiers dans le cas où il y a eu

autorisation du préfet malgré l’absence ou l’insuffisance de l’étude d’impact. Il s’agit du

référé suspension pour défaut d’étude d’impact prévu par les articles L122-2 et L554-11 du

code de l’environnement, d’où l’importance d’un cadrage préalable de celle ci avec le service

instructeur avant le dépôt du dossier de demande d’autorisation. La loi Grenelle 2 introduit à

ce propos un nouvel article L122-1-2 permettant au maître d’ouvrage de requérir l’avis du

préfet sur le « degré de précision des informations à fournir dans l’étude d’impact. ». Le

préfet peut même organiser, sur demande du maître d’ouvrage, « une réunion de concertation

avec les parties prenantes locales intéressées par le projet afin que chacune puisse faire part de

ses observations sur l’impact potentiel du projet envisagé. ». Il s’agit d’une disposition

1 Dans l’arrêt du Conseil d’Etat du 12 novembre 2007 Société Vicat SA requête n°295347 a été relevée l’insuffisance d’une étude d’impact qui ne précise pas le statut juridique des espèces de la faune et de la flore inventoriées, qui ne mentionne pas les mesures de protection de certaines espèces animales, cette insuffisance a donc été de nature à nuire à la conception de son projet par l’exploitant, à l’expression de ses observations par la population, et donc à l’exercice de son pouvoir d’appréciation par l’administration. L’arrêté autorisant le projet est donc annulé.

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intéressante, mais comment en pratique s’appliquera t-elle dans la mesure où c’est le maître

d’ouvrage qui la sollicite, et si elle a lieu, comment va-t-elle s’articuler avec l’enquête

publique ? Qui sont les parties prenantes ? L’article L122-1-2 continue en précisant que, bien

évidemment, les précisions apportées en amont par le préfet ne préjugent pas de la décision

qui sera prise à l’issue de la procédure d’instruction.

Le nouvel article L122-3-4 du Code de l’environnement indique qu’ « en cas d’inobservations

des mesures destinées à éviter, réduire et, si possible, compenser les effets négatifs notables

du projet sur l’environnement et la santé humaine fixées par la décision d’autorisation

(…)mentionnée à l’article L122-1, l’autorité administrative responsable de cette décision met

en demeure la personne à qui incombe leur mise en œuvre d’y satisfaire dans un délai

déterminé qui tient compte de la nature et de l’importance des travaux à réaliser. Si, à

l’expiration du délai imparti, l’intéressé n’a pas déféré à la mise en demeure, l’autorité

administrative peut 1° l’obliger à consigner (…) une somme correspondant au coût des

mesures à réaliser avant une date qu’elle détermine (…) 2° faire procéder d’office, en lieu et

place de la personne mise en demeure et à ses frais, à l’exécution des mesures prescrites

(…)3° suspendre la réalisation des travaux (…) jusqu’à la satisfaction complète des

conditions imposées. ». Comment cette sanction pourrait-elle être mise en oeuvre dans le

domaine des énergies marines ? Comment prévoir les mesures destinées à éviter, réduire ou

compenser les effets négatifs sur l’environnement ou la santé, dans la mesure où ceux-ci ne

sont pas encore réellement identifiés. Cette méconnaissance des effets sur l’environnement est

problématique. Le recours exercé contre la société Enertrag se fonde en partie sur la violation

du principe de précaution. En effet, il est reproché au préfet d’avoir autoriser le projet en dépit

d’études des conséquences sur le milieu marin des travaux d’implantation du parc, en

l’absence de données fiables sur les impacts des bruits et des champs électromagnétiques sur

les mammifères marins et les ressources halieutiques. L’article 5 de la Charte de

l’environnement, qui a désormais valeur constitutionnelle, stipule que : « lorsque la réalisation

d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter

de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par

application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en

œuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires afin de

parer à la réalisation du dommage. ». Ce n’est pourtant qu’en laissant les démonstrateurs

tester en mer les différentes technologies que nous pourrons petit à petit connaître les effets

sur l’environnement.

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B- Enquêtes publiques

L’enquête publique est une procédure ouverte à tous qui permet au public d’être informé et

d’exprimer ses appréciations, suggestions et contre-propositions sur un registre d’enquête,

préalablement à des opérations d’aménagement ou des opérations urbaines. Elle constitue en

quelque sorte le pendant du débat public mais bien plus en aval des projets, lors des

procédures administratives d’obtention des autorisations.

L’enquête publique peut être une enquête dite de « droit commun » codifiée aux articles R 11-

4 à R11-14 du code de l’expropriation, dont l’objet est la protection du droit de propriété ou

une enquête dite « Bouchardeau » issue de la loi n°83-630 du 12 juillet 1983, codifiée à

l’article L123-1 du code de l’environnement, dont la finalité est d’assurer l’information et la

participation du public lors de l’élaboration de décisions susceptibles d’affecter

l’environnement. Pour savoir quel est le type d’enquête publique qui doit être mené, il faut

d’abord déterminer si le projet est répertorié à l’Article R 123-1 du code de l’environnement.

S’il ne l’est pas, l’enquête est de droit commun. Quels sont donc les types d’enquête publique

applicables aux EMR prévus par cet article ? Sont mentionnés les travaux réalisés sur le sol

ou le sous sol de la mer en dehors des ports d’au moins 500 m² d’emprise et les travaux

d’installations des ouvrages utilisant l’énergie éolienne dont la hauteur du mât dépasse 50 m.

L’enquête publique de type Bouchardeau est ainsi requise à plusieurs titres : lors de la

construction des fondations des éoliennes sur le sol marin, l’ensouillement des câbles dans le

sous sol marin, et pour l’installation d’éoliennes offshore dont le mât dépasse 50 m. La loi

Grenelle 2 est venue simplifier le régime de l’enquête publique en soumettant à la procédure

de l’enquête publique de type Bouchardeau tous les projets soumis à étude d’impact, selon le

nouvel article L123-2 du Code de l’environnement. Comment ce nouvel article va-t-il

s’articuler avec l’article R123-1 ?

La loi Grenelle 21 vient simplifier le déroulement des procédures en permettant de ne réaliser

qu’une enquête publique commune. En effet, le nouvel article L123-6 du Code de

l’environnement dispose : « lorsque la réalisation d’un projet, plan ou programme est soumise

à la réalisation de plusieurs enquêtes publiques dont l’une au moins en application de l’article

L123-2, il peut être procédé à une enquête unique régie par le présent chapitre, dès lors que

les autorités compétentes désignent d’un commun accord celle qui sera chargée d’ouvrir et

1 Les dispositions de la loi Grenelle 2 sont applicables aux projets pour lesquels un arrêté d’ouverture et d’organisation de l’enquête publique est publié à compter du 1er jour du 6ème mois après la publication du décret en Conseil d’Etat à intervenir prévu à l’article L123-19 du code de l’environnement.

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d’organiser cette enquête. Le dossier soumis à enquête publique unique comporte les pièces

ou éléments exigés au titre de chacune des enquêtes initialement requises et une note de

présentation non technique du projet, plan ou programme. Cette enquête unique fait l'objet

d'un rapport unique du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête ainsi que de

conclusions motivées au titre de chacune des enquêtes publiques initialement requises.».

Chapitre II – Les vides juridiques à combler

I- Réglementer l’activité au-delà de la mer territoriale

Si les projets EMR en France ont pour le moment vocation à s’implanter dans les eaux

territoriales, ils pourraient dans un avenir plus ou moins proche, si la technologie des

éoliennes flottantes par exemple se développe, tutoyer les eaux non territoriales, ce qui

règlerait en partie les problèmes causés par les conflits d’usage. Si la réglementation

commence à se préciser dans la limite des 12 miles nautiques, c’est loin d’être le cas au-delà.

Une des mesures du projet de loi Grenelle 2 prévoyait la création d’une procédure pour

faciliter l’installation de parcs éoliens en zone économique exclusive (ZEE)1. Or

malheureusement, il n’en est rien. Dès lors, en attendant un prochain éclaircissement, on peut

se demander comment les EMR pourraient s’implanter en ZEE ou sur le plateau continental

en l’état actuel du droit.

C’est par la loi2 du 16 juillet 1976 que la France se dote du principe d’une ZEE, s’étendant

jusqu’à 200 milles marins au-delà de la ligne de base des eaux territoriales. Plusieurs décrets

ont ensuite créé des ZEE au large des côtes de la mer du Nord, de la Manche, et de

l’Atlantique, au large des côtes des DOM-COM. Par contre, aucune ZEE n’a été créée en

Méditerranée, mais seulement une ZPE : Zone de Protection Ecologique par la loi3 du 5 avril

2003. En l’absence de l’existence d’une ZEE, seul le plateau continental4 est alors pris en

compte. La ZEE permet l’implantation d’installations ou d’ouvrages. (Article L218-81 du

code de l’environnement).Ce principe de la ZEE a ensuite été définitivement légalisé par la 1 circulaire du 5 mars 2009 2 n°76-655 3 n°2003-346 4 Article 76 de la CMB : « Le plateau continental d’un Etat côtier comprend les fonds marins et leur sous sol au-delà des limites de la mer territoriale sur toute l’étendue du prolongement naturel du territoire terrestre de cet Etat jusqu’au rebord externe de la marge continentale. » Tout Etat peut exercer ses compétences sur le plateau continental dans une limite de 200 milles à partir des lignes de base, limite qui peut être repoussée jusqu’à 350 milles marins, soit 650 km environ.

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Convention de Montego-Bay (CMB)1 . L’article 60 de la CMB indique que dans la ZEE,

« l’Etat côtier a le droit exclusif de procéder à la construction, d’autoriser et de réglementer la

construction, l’exploitation et l’utilisation d’îles artificielles, d’installations, d’ouvrages

affectés aux fins prévues par l’article 56 ». Or l’article 56 précise que l’Etat côtier a non

seulement des droits souverains d’exploration et d’exploitation des ressources naturelles au

sens large, c'est-à-dire par exemple les stocks de poissons (contrairement au plateau

continental) mais aussi le droit d’exploiter d’autres activités économiques comme la

production d’énergie à partir de l’eau, des courants et des vents. On constate donc que dès

1982 la convention de Montego Bay prévoyait déjà la possibilité d’exploitation des énergies

marines dans la ZEE. On ne sait pourtant toujours pas en 2010 par quelles procédures

implanter un parc EMR dans la ZEE. Dans la mesure où l’article 56 indique aussi que « l’Etat

côtier a le droit d’exploiter des ressources naturelles », ne pourrait-on pas aussi justifier

l’implantation d’EMR en ZEE en considérant les sources d’énergie marine, telles que la

houle, les courants, comme des ressources naturelles ? Les ressources naturelles entendues ici

sont certainement les « res nullius » (c'est-à-dire en droit civil les choses n’appartenant à

personne mais susceptibles d’appropriation) alors que les sources d’énergies marines seraient

plutôt des « res communes » (choses communes à tous et non susceptibles d’appropriation,

comme l’eau, l’air…). Ce qui implique que leur utilisation ne peut pas faire l’objet d’une

autorisation ou d’une redevance. Dans le cas des éoliennes, on pourrait plutôt parler d’usage

du vent, plutôt que d’usage de l’air, le vent étant considéré comme ressource naturelle alors

que l’air est considéré plutôt comme un milieu physique. Il n’existe pas de définition des

ressources naturelles. La Commission Européenne considère que les ressources naturelles sont

un ensemble de ressources consommables. L’article 80 de la CMB prévoit que l’article 60 de

cette même convention s’applique aux îles artificielles, installations et ouvrages situés sur le

plateau continental. Il précise que l’Etat côtier peut instituer des zones de sécurité dans une

limite de 500m autour des installations et ouvrages.

Comment sont régies les implantations d’EMR dans les ZEE étrangères, là où des parcs

éoliens offshore sont déjà en exploitation ? L’Allemagne a étendu à sa ZEE2 les règles

d’implantation des éoliennes offshore valables dans ses eaux territoriales et a créé une

Autorité unique chargée de la délivrance des permis nécessaires : l’Office fédéral de la

1entrée en vigueur le 16 novembre 1994 ; la France en a autorisé la ratification par une loi du 21 décembre 1995. 2 AWZ

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navigation maritime et de l’hydrographie (BSH1). Dans les eaux territoriales, ce sont les

Lander côtiers qui délivrent les autorisations. Mais la plupart des projets de parcs se situent en

ZEE. Le Royaume Uni a déterminé des REZ (Renewable Energy Zones) pour réglementer la

production d’électricité à partir des parcs offshore au-delà de la mer territoriale2. A quand une

loi sur les procédures applicables dans les ZEE françaises, qui sont parmi les plus nombreuses

au monde ?

II- La création d’un « guichet unique »

Bien que la loi Grenelle 2 ait amorcé une simplification des procédures administratives

d’implantation de parcs de production d’énergie marine, il serait souhaitable de créer une

instance qui aurait pour fonction de centraliser les demandes d’autorisation, un genre de

« guichet unique », dans le même esprit que les centres de formalités des entreprises (CFE), à

l’image de pays comme le Danemark et Royaume Uni. Au Danemark, c’est la Danish Energy

Agency3 qui fait office de « one stop-shop » c'est-à-dire d’instance centralisatrice pour mener

les procédures des 3 autorisations requises au titre du Promotion of Renewable Energy Act

pour implanter un parc d’éoliennes offshore. Au Royaume uni, le UK’s Marine and Coastal

Access Act voté en novembre 2009 (et son pendant en Ecosse) a simplifié la procédure

d’obtention de permis pour les parcs offshore en créant une Autorité nommée MMO : Marine

Management Organization (« Marine Scotland » pour l’Ecosse) qui servira de guichet unique

pour la délivrance des autorisations y compris dans la REZ. A ainsi été mis en place l’ORCU :

Offshore Renewables Consents Unit. Ces autorisations sont de plusieurs types : une

autorisation en accord avec l’ « Electricity Act » de 1989 (qui correspond en quelque sorte à

notre autorisation d’exploiter une installation de production d’électricité), une autorisation en

accord avec le « Coast Protection Act » ( CPA) de 1949 qui réglemente les travaux pouvant

affecter la navigation, sorte de pendant à l’autorisation d’occupation du DPM en France, un

permis conforme au FEPA (Food and Environmental Protection Act), pour les rejets éventuels

dans le milieu marin , parallèle à notre autorisation au titre de la loi sur l’eau. Jusqu’à présent,

l’Autorité compétente n’avait la possibilité d’autoriser les projets au-delà de la mer territoriale

que sous le FEPA. La nouvelle loi lui donne pouvoir pour autoriser les projets aussi sous le

CPA. Le UK’s Marine and Coastal Access Act prône néanmoins, pour aller plus loin que le

1 Le BSH : Bundesamt für Seeschiffahrt und Hydrographie, relève de la compétence du Ministère fédéral des Transports (BMVBS) 2 Les REZ ont été créées par le UK Energy Bill de 2003 et par l’Energy Act de 2004 3 Agence danoise de l’énergie

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guichet unique, de réduire la procédure à une seule autorisation.

III- Le problème de l’absence de droits réels sur domaine public maritime naturel

Le sol et le sous sol de la mer territoriale appartiennent à l’Etat, ils ne peuvent être déclassés

puisque seules les « parcelles de lais et relais incorporés au domaine public pourront être

déclassées lorsqu’elles ne seront plus utiles à la satisfaction des besoins d’intérêt public ». Le

domaine public est inaliénable selon l’article L.3111-1 du CGPPP1. L’article 9 du décret du

29 mars 20042 indique que la concession n’est pas constitutive de droits réels, qu’elle n’est

pas soumise aux dispositions des articles L. 145-1 et L. 145-60 du code de commerce et ne

confère pas la propriété commerciale aux titulaires ou aux sous-traitants. L’implantation

d’EMR ne peut donc faire l’objet a priori d’aucun transfert de propriété La question se pose

donc de savoir à qui appartiendront les engins EMR qui seront construits sur le sol de la mer

territoriale, comme les éoliennes offshore par exemple ? L’inaliénabilité entraîne l’exclusion

de la constitution de droits réels sur le domaine public maritime naturel3, ce qui peut gêner un

investisseur qui ne peut ni hypothéquer son installation pour garantir un emprunt, ni obtenir

un financement par crédit-bail. Il est clair que le régime juridique d’occupation du domaine

public maritime doit être éclairci et garantir davantage de sécurité pour les investisseurs, tout

en continuant à protéger l’environnement. Il faudrait peut être s’inspirer du régime applicable

sur le domaine public maritime artificiel4, qui lui permet la constitution de droits

réels5 comme la possibilité de recourir au droit d'hypothèque et à la technique du crédit-bail,

l’indemnisation en cas d'éviction anticipée... mais ces prérogatives peuvent être en

contradiction avec la nécessaire protection du milieu naturel. Les règles de droit privé

relatives aux baux commerciaux ne s’appliquent pas non plus dans le cadre de la concession

d’utilisation du domaine public maritime naturel, qui ne confère pas la propriété commerciale

au titulaire.

Au Royaume Uni, le Crown Estate6 a commencé à délivrer en mars 2010 les premiers baux

commerciaux pour l’exploitation de parcs éoliens offshore sur dix sites situés en Ecosse. Ce

1 Code général de la propriété des personnes publiques 2 N°2004-308 3 Article L.2122-6 et suivants du Code général de la propriété des personnes publiques 4 Il englobe l’ensemble des dépendances affectées au service public portuaire et de la navigation maritime 5 Article L.2122-6 6 Le Crown Estate fait partie du Domaine de la Couronne. Il gère le portefeuille des actifs associés à La Cour. C’est l’un des plus importants propriétaires terriens du Royaume Uni.

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sont des baux locatifs accordés à long terme sur le territoire maritime britannique par le

Crown Estate qui en reste propriétaire. Il est en effet propriétaire des fonds marins du

Royaume Uni dans la limite de 12 miles nautiques dans les eaux territoriales et propriétaire de

55% de l’estran1. Ces baux commerciaux confèrent-ils la propriété commerciale des engins

aux preneurs ?

L’article 9 du décret du 29 mars 2004 indique également que le préfet peut mettre en oeuvre

toutes mesures indispensables à la conservation du domaine public maritime, sans que cela

n'ouvre droit à indemnité au profit du titulaire. Ainsi, une demande de démantèlement d'un

parc EMR par le préfet ne pourrait ouvrir droit à aucune indemnité au profit du

concessionnaire. Seule une clause d'indemnisation des investissements non encore amortis

peut être insérée dans la convention de concession, en cas de révocation pour motif d'intérêt

général. Il est clair que les développeurs de parcs EMR ont besoin ici d’une sécurisation

juridique de leurs projets.

IV- La remise en état du site en fin d’exploitation et les garanties financières

La durée de concession d’occupation du DPM étant limitée, la question de la remise en état du

site d’exploitation des EMR se pose notamment au travers du problème du démantèlement des

engins de production et de la garantie de sa réalisation, notamment en cas de défaillance de

l’exploitant. Seules les installations d’éoliennes en mer sont soumises à une obligation de

constituer des garanties financières. En effet, l’article L553-3 du code de l’environnement,

dont le projet de loi Grenelle 2 envisageait la suppression mais qui a finalement été maintenu

par la loi n°2010-788, fait peser sur l’exploitant (ou la société mère en cas de défaillance de

celui-ci) d’une installation d’éoliennes, sans préciser si elles sont terrestres ou maritimes, une

obligation de remise en état du site en fin d’exploitation et de constitution de garanties

financières et ce dès le début de la production d’électricité. L’article 8 du décret du 29 mars

2004 relatif aux concessions sur le DPM, prévoit la possibilité, et non l’obligation, de

demander au concessionnaire la constitution de garanties financières pour assurer la

réversibilité effective des modifications apportées au milieu naturel, dont le montant est

établi compte tenu du coût estimé des opérations de remise en état, de restauration ou de

réhabilitation du site. Comment ce coût peut-il être calculé, dans la mesure où ces

modifications apportées au milieu ne sont pas encore vraiment identifiées ? Comment ces

1 L’estran est la partie du littoral située entre les niveaux connus des plus hautes et des plus basses marées

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deux dispositions relatives à la garantie financière vont-elles s’articuler ? Dans le cas de la

société Enertrag, la convention d’occupation du DPM prévoit la constitution d’une garantie

financière fondée sur l’article L 552-1 du code de l’environnement. Or cet article vise « les

ouvrages ou installations présentant des risques dont les éventuelles conséquences financières

sont manifestement disproportionnées par rapport à la valeur du capital immobilisé », pour

lesquels l’autorité chargée de délivrer une autorisation d’exploitation peut imposer la

constitution de garanties financières. Cet article ne concerne pas les éoliennes en principe et il

est bien distinct de l’article L553-3 du code de l’environnement. La garantie doit ici être

adaptée « aux conséquences prévisibles de la réalisation du risque », plutôt qu’à la remise en

état du site. Comment savoir quelles sont les conséquences prévisibles des risques en matière

d’EMR ? Dans le cas des autres formes d’exploitation d’énergie marine, il n’existe donc

aucune obligation de constitution de garantie financière. On peut supposer que le préfet,

lorsqu’il accordera d’autres concessions d’occupation du DPM, les imposera, mais à quel

montant ? Il faudra une évolution législative à ce sujet, tant sur le DPM qu’en ZEE.

L’interprétation du décret de 2004 au sujet de la remise en état pourra évoluer. Plutôt qu’un

démantèlement des engins, il pourrait se produire un effet « Tour Eiffel » (maintien d’une

structure en raison de son impact sociétal), alors qu’elle ne devait être que provisoire.

CONCLUSION

Ainsi, la construction du droit des énergies marines n’en est qu’à ses débuts. La loi Grenelle 2

en a amorcé le processus. Cependant, l’évolution du cadre juridique, bien que nécessaire à la

sécurisation des projets, ne représente qu’un des ingrédients du développement des EMR.

Celui-ci ne se produira réellement qu’à la faveur d’une subtile combinaison entre poursuite

des politiques incitatives de financements publics, levée de verrous technologiques, essor de

nouvelles techniques telles que le stockage de l’électricité, meilleure acceptabilité sociale et

meilleure connaissance des impacts sur le milieu marin. Mais il faudrait surtout que le

prochain sommet des Nations unies sur le changement climatique qui se tiendra au Mexique

en novembre 2010 débouche sur un véritable accord contraignant, type Kyoto II, pour

accélérer le développement des énergies marines renouvelables.

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BIBLIOGRAPHIE

I- Ouvrages juridiques généraux :

• PRIEUR Michel, Droit de l’environnement, Précis Dalloz, 5ème édition, 2007, 945 p.

• ROCHE Catherine, Droit de l’environnement, Gualino, 2nde édition, 2006, 307 p.

• ROMI Raphaël, Droit et administration de l’environnement, Montchrestien, 6ème

édition, 2007, 647 p.

• VAN LANG Agathe, Droit de l’environnement, Thémis droit public, P.U.F, 2° édition

refondue 2007, 502 p.

II- Ouvrages juridiques spécialisés :

• LE BAUT-FERRARESE Bernadette et MICHALLET Isabelle, Droit des énergies

renouvelables, Editions Le Moniteur, Paris, 2008, 528 p.

• HOSTIOU René et HELIN Jean Claude, Droit des enquêtes publiques, les différents

types d’enquêtes, le statut du commissaire enquêteur, le déroulement de l’enquête,

Editions Le Moniteur, Collection L’actualité juridique, 1993, 392 p

• SAVARIT-BOURGEOIS Isabelle, l’essentiel du droit de l’urbanisme, Editions

Lextenso, 6e éditions, 2009, 157 p

• TERNEYRE Philippe, Energies renouvelables, Contrats d’implantation, Editions

Lamy Wolters Kluwer France, Collection Lamy Axe Droit, Avril 2010, 285 p.

• RICARD Michel, Le permis de construire, Editions Le Moniteur Paris, Collection

Analyse juridique, 5e Edition, novembre 2007, 558 p.

• BAILLON Nathalie, NAHMIAS Nicolas, SACKSICK Elsa, Pratique du droit de

l’environnement, Editions Le Moniteur Paris 2006, Collection Guides juridiques, 475

p.

• BEURIER Jean Pierre, Droits maritimes, Editions Dalloz, Paris, 2008,1 216 p,

Collection Dalloz Action.

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• BONASSIES Pierre, SCAPEL Christian, Droit maritime, Lextenso Editions, Paris

2010, LGDJ, 946 p.

• CUDENNEC Annie, DE CET BERTIN Cécile, Mer et responsabilité, Actes du

colloque de Brest, 16 et 17 octobre 2008, Editions A.Pedone, Paris, 2009, 218 p.

III- Autres Ouvrages spécialisés :

• PAILLARD Michel, LACROIX Denis et LAMBLIN Véronique, Energies

renouvelables marines, Etude prospective à l’horizon 2030, Editions Quae, 2009,

331p.

• GUELLEC Jean et LOROT Pascal, Planète Océane, l’essentiel de la mer, Editions

Choiseul, Paris, 2006, 523 p

• MANN BORGESE Elisabeth, The future of the oceans, a report to the Club of Rome,

1986, 144 p

• BLAIN Stéphane, CHARLOU Jean-Luc, COMPERE Chantal, DESBRUYERES

Daniel, FOUQUET Yves, HERROUIN Guy, JEANDEL Catherine, MARCHAND

Michel, MASSIOT Georges, MERLIN François-Xavier, QUINIOU Françoise,

ROMANA Louis-Alexandre, TREGUER Paul, La chimie et la mer, Ensemble au

service de l’homme, EDP Sciences, 2009, 205 p.

IV- Traités, Recueils, Codes, Dictionnaires, Encyclopédies et Colloques

A. Codes et dictionnaires:

• Code civil, Dalloz 2009

• Code de l’environnement, Dalloz 2009

• Code de l’urbanisme, Dalloz 2009

• Code pénal, Dalloz 2009

• Code du domaine de l’Etat

• Code de l’expropriation publique

• Code général de la propriété des personnes publiques

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B. Textes :

Internationaux :

• Convention- cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC)

de1992, entrée en vigueur le 21 mars 1994

• Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM) de 1982

• Protocole de Kyoto du 11 décembre 1997

• Convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est

(Convention OSPAR) du 22 septembre 1992

• Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires du 2

novembre 1973 signée à Londres et modifiée par le protocole du 17 février 1978

Communautaires :

Règlements :

• Règlement établissant un programme d’aide à la relance économique par l’octroi

d’une assistance financière communautaire à des projets dans le domaine de l’énergie

663/2009/CE du 13 juillet 2009

• Règlement n°680/2007 du 20 juin 2007 sur les réseaux transeuropéens

Directives :

• Directive électricité 2009/72/CE du 13 juillet 2009

• Directive relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de

sources renouvelables 2009/28/CE du 23 avril 2009 modifiant et abrogeant les

directives 2001/77/CE et 2003/30/CE

• Directive-cadre « Stratégie pour le milieu marin » du Parlement Européen et du

Conseil 2008/56/CE du 17 juin 2008

• Directive 2005/89 du 18 janvier 2006 relative à la sécurité de l’approvisionnement en

électricité notamment provenant de SER

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76

• Directive du 13 octobre 2003, n°2003/87/CE relative au système communautaire

d’échanges de quotas d’émission de GES, modifiée par la directive n°2009/29/CE du

23 avril 2009.

• Directive 2003/54/CE du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le

marché intérieur de l’électricité

• Directive 79/409/CEE du 6 avril 1979 dite Directive « Oiseaux »

• Directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 dite Directive « Habitats »

Décisions :

• Décision de la Commission établissant un modèle pour les plans d’actions nationaux

en matière d’énergie renouvelables conformément à la directive 2009/28/CE du

parlement européen et du Conseil 2009/548/CE du 30 juin 2009

• Décision du Conseil concernant la signature du protocole relatif à la gestion intégrée

des zones côtières de la Méditerranée 2009/89/CE du 4 décembre 2008

• Décision 98/249/CE du Conseil du 7 octobre 1997, relative à la conclusion de la

convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est

(Convention de Paris) Dite convention OSPAR.

• Décision n°1364/2006/CE du 6 septembre 2006 sur les réseaux transeuropéens

• Décision n°280/2004/CE du 11 février 2004 sur le mécanisme de surveillance des

émissions de GES dans la Communauté et à la mise en œuvre du Protocole de Kyoto

• Décision de la Commission du 23 octobre 2002 relative au système de compensation

luxembourgeois

• Décision n°1600/2002 du Parlement européen et du Conseil relative à la mise en

œuvre du Protocole de Kyoto

• Projet de décision n°D0077 de la Commission du 21 février 2010 concernant le

dispositif NER 300

Autres

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77

• Communication de la Commission du 25 novembre 2008 « Feuille de route pour la

planification de l’espace maritime : élaboration de principes communs pour l’Union

Européenne ». COM/2008/0791

• Communication de la Commission COM (2005)627

• Recommandation européenne n°2002/413/CE 30/05/93 GIZC sur le littoral européen

• Livre vert de la Commission « vers un réseau d’énergie européen sûr, durable et

compétitif » du 13 novembre 2008 (COM (2008) 782 Final)

• Livre vert de la Commission du 7 juin 2006 : « Vers une politique maritime de

l’Union : une vision européenne des océans et des mers » COM (2006) 275 final

• Livre bleu le 10 octobre 2007 sur « les lignes directrices pour une approche intégrée

de la politique maritime »(COM 2007 575 final)

Nationaux :

• La charte de l’environnement 2004

Lois :

• loi n°2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche

• loi n°2010-788 du 12 juillet 2010, dite loi Grenelle 2

• loi n° 2009-967 du 3 août 2009, dite loi Grenelle 1

• loi n°2006-436 du 14 avril 2006 sur les parcs naturels marins, les parcs nationaux et

les parcs naturels régionaux

• loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005, dite loi POPE

• loi n°2004.803 du 09 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz

• loi n° 2003-346 du 5 avril 2003 relative à la création d’une ZPE

• loi n°2000-108 du 10 février 2000 de modernisation de l’électricité

• loi n° 86-2 du 3 janvier 1986, dite loi Littoral

• loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les

communes, les départements, les régions et l’Etat

• loi n° 83-581 du 5 juillet 1983 sur la sauvegarde de la vie humaine en mer

• loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 sur les enquêtes publiques

• loi n° 76-655 du 16 juillet 1976 relative à la ZEE

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• loi n°69-8 du 3 janvier 1969 relative à l’armement et aux ventes maritimes

• loi n° 67-545 du 7 juillet 1967 sur l’abordage

• loi n°63-1178 du 28 novembre 1963 relative au domaine public maritime

Décrets :

• décret n°2004-308 du 29 mars 2004

• décret n°2000-877 du 7 septembre 2000

• décret n°2001-410 du 10 mai 2001

• décret n°96-774 du 30 août 1996 relatif à l’application de la Convention de Montego

Bay

Arrêtés :

• arrêté du 17 novembre 2008

• arrêté du 23 décembre 2008

• arrêté du 15 décembre 2009

Circulaires :

• Circulaire Guichard du 3 janvier 1973

• Circulaire interministérielle n°2007-17 du 20 février 2007 relative aux parcs nationaux

Divers :

• Avis du Conseil Supérieur de l’Energie de Juin 2009

• Avis de la Commission de Régulation de l’Energie du 30 octobre 2008

• Avis de la CRE du 28 juillet 2005

• Communication de la CRE du 22 mai 2003

C. Colloques :

• Sea Tech Week, Brest, juin 2010

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79

• Colloque “Gestion intégrée des zones côtières », Boulogne sur Mer, 13 et 14 janvier

2010, Université du Littoral

• Les Rencontres internationales du Havre : « pour un développement durable des

activités maritimes et portuaires, L’éolien en mer », 3 et 4 novembre 2009, Docks

Café, Le Havre.

• Séminaire « Eoliennes offshore », ADEME, CLAROM, 21 novembre 2002, IFP,

Grand Amphi des Dahlias, Rueil Malmaison

IV- Articles :

A. Articles de presse :

• « Les cétacés menacés par les éoliennes offshore en mer Baltique », Agence France

Presse, 22 mars 2010.

• « Alstom mise sur l’énergie marine », Greenunivers, Mardi 26 mai 2009.

• « Au Portugal, l’énergie des vagues prend l’eau », Greenunivers,19 mars 2009.

• « L’éolien prend le large », Enjeux -Les Echos, Avril 2009.

• « Eoliennes offshore : de nombreux défis restent à relever », Actu-

Environnement.com, 30 Octobre 2008.

• « L'éolien offshore en forte progression en Europe », Enerpresse, 20 janvier 2010.

• « Eolien Offshore : un droit en complète mutation », GOSSEMENT Arnaud

Greenunivers 3 novembre 2009.

• « Energie : Le Conseil d’Etat statue sur la qualification juridique du contrat d’achat

d’électricité », Blog d’Arnaud Gossement 18 juillet 2010

• « L’éolien off-shore, une utopie ? » GOSSEMENT Arnaud, Site Les Energies de la

mer, 25 novembre 2009.

• « Projet de loi Grenelle 2 : ce qui va vraiment changer pour les éoliennes… », Blog

d’Arnaud Gossement , 19 avril 2010

• « Eoliennes et radars : une cohabitation délicate », Greenunivers, 16 mars 2010.

• « La marée noire plaide la cause de l’éolien offshore », La Tribune, 3 mai 2010.

• « Le premier parc éolien offshore français sera mis en service en 2011 », Actu-

Environnement.com, 9 novembre 2009.

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80

• « Eolien offshore, l’Allemagne et les Etats-Unis s’y mettent », Actu-

Environnement.com, 3 mai 2010.

• « Les éoliennes réchauffent-elles le climat ? », Journal de l’environnement, 23 mars

2010.

• « Les projets d’éolien off-shore en France », terraeco.net, 6 janvier 2010

• « Eolien offshore : Enertrag (presque) au bout de ses peines », L’Usine Nouvelle, 28

avril 2008

• « Eolien en mer. La région très convoitée », Le Télégramme, 4 juin 2010.

• « L’énergie éolienne en mer, une chance à saisir pour l’industrie française », GERMA

Jean-Michel, KOLB Jean-Mathieu, La Revue maritime, n°484.

• « L’énergie thermique des mers 2009: année charnière d’une histoire industrielle

française » Frédéric Le Lidec, Directeur du développement Mer de DCNS, La Revue

Maritime n°484.

• « Projet Espadon : 2 objectifs techniques pour développer l’ETM » site Les énergies

de la mer, 2 juillet 2010

• « DCNS et la Réunion placeront la France en tête de l’ETM dès 2011. » site Les

énergies de la mer, 1er juillet 2010

• « Sabella D10 : la petite hydrolienne française a maintenant tout d’une grande » site

Les énergies de la mer, 11 décembre 2009.

• « Statkraft et Wetsus développent 2 technologies osmotiques différentes » site Les

énergies de la mer le 16 avril 2010

• « La plateforme technologique sur les énergies marines sera située à Brest » Actu-

environnement, 3 décembre 2009

• « Point sur le développement de l’éolien en mer », La Lettre du SER n°13, novembre

2009.

• « Eolien offshore : l’Etat lancera un appel d’offre de 3 000 MW en septembre. » Actu-

environnement, 25 août 2010.

• « L’éolien français se jettera t-il à l’eau ? » Journal de l’environnement, 24 août 2010

B. Articles de doctrine dans les revues juridiques spécialisées

• BOITEAU Claudie, « Le prix controversé du rachat de l’énergie éolienne ou l’énergie

renouvelable à quel prix ? », AJDA 2009 p.2105.

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81

• BORDEREAUX Laurent, « L’énergie éolienne à l’épreuve du droit du littoral », Droit

Maritime Français, n°630, Octobre 2002

• BORDEREAUX Laurent, « Les questions littorales dans le livre bleu Stratégie

Nationale pour la mer et les océans- Regard Critique », Droit de l’Environnement, 1er

Février 2010

• BOUQUET Gaël, « Les mécanismes de soutien de la production d’électricité à partir

de sources d’énergie renouvelables à l’épreuve des articles 87 et 88 du traité relatifs

aux aides d’Etat » , AJDA 2006, p.697.

• LISSOUCK Félix François, « La rénovation du régime des concessions d’utilisation

du domaine public maritime : entre assouplissement et protection de

l’environnement », AJDA 2005 p365.

• MODERNE Franck, « Le droit des énergies renouvelables-Observations sur le modèle

espagnol » Mélanges en l’honneur de Michel Prieur, Dalloz 2005

• Arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’homme du 29 mars 2010 n°34044/02,

AJDA 2010 p 647

• ROCHE Catherine, « Et pourtant, elles tournent, la réglementation applicable aux

éoliennes offshore », AJDA 2007 p 1785.

• ROUAULT Marie-Christine, « La constitution de droits réels sur le domaine public,

Loi du 25 juillet 1994 », Revue de droit immobilier 1995 p.27.

• SANDRIN-DEFORGE Armelle, « Aperçu sur la réglementation applicable aux

projets éoliens en mer », BDEI n °21/juin 2009.

• VAN DER MENSBRUGGHE Yves, « Des éoliennes le long des côtes : le cas belge »,

In La Mer et son droit, Mélanges offerts à Laurent Lucchini et Jean Pierre

Quéneudec, Editions A. Pedone, Paris, 2003.

• YOLKA Philippe, « Le domaine public naturel », AJDA 2009 p 2325.

V- Jurisprudence

• Arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’homme du 29 mars 2010 n°34044/02

• Arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 21 mars 1990, Belgique c/

Commission, dit « Tubemeuse », aff. C-142/87

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• Arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 13 mars 2001, C-379/98, Rec

CJCE p.I-2099

• Arrêt du Conseil d’Etat du 1er juillet 2010

• Arrêt du Conseil d’Etat du 6 août 2008 n°297723

• Arrêt du Conseil d’Etat du 12 novembre 2007 Société Vicat SA requête n°295347

• Arrêt du Conseil d’Etat du 20 mai 1977, M Paoli et comité de défense de la Forêt

Fouesnant req n°89943 et 89944

• Arrêt du Conseil d’Etat du 30 avril 1863 Bourgeois c/ ville de Boulogne sur mer

• Arrêt du Conseil d’Etat du 20 février 1981, Commune de Saint-Quay-Portrieux

n°16449

• Arrêt de la Cour administrative d’appel de Douai, 4 mars 2004, Sté Sablières et

Entreprise Morillon-Corvol, req n°02DA00666.

• Arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux, 20 avril 2000, Cts Roland-

Gosselin : req n°97BX00560

VI- Mémoires et rapports :

• Le statut juridique des plateformes pétrolières, BORDAHANDY Pierre Jean, DESS

Droit maritime et des transports à La Faculté de droit et de sciences politiques d’Aix

en Provence, année 1997/1998, 164 p.

• Eoliennes off-shore et maîtrise foncière : Eléments juridiques, BONNEFOI Serge

Rapport à l’ADEME, 2e trimestre 2002, 403 p.

• Des énergies marines en Bretagne à nous de jouer ! Le Conseil économique et social

de Bretagne, Synthèse du rapport adopté le 16 mars 2009.

• « Politique maritime de la France », rapport publié par le groupe POSEIDON en

décembre 2006

• Danish Offshore Wind: Key Environmental Issue, publié par Dong Energy, Vattenfall,

The Danish Energy Authority, et the Danish Forest and Nature Agency, novembre

2006.

• Offshore Wind Energy, Ready to Power a Sustainable Europe, Final Report,

Concerted Action on Offshore Wind Energy in Europe, CA-OWEE, December 2001

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VII- Sites internet :

• Blog d’Arnaud GOSSEMENT : www.arnaudgossement.com

• Blog Les Energies de la mer : energiesdelamer.blogspot.com

• France Energie Eolienne : fee.asso.fr

• Greenunivers : www.greenunivers.com

• ADEME: www.ademe.fr

• American Wind Energy Association: www.awea.org

• Commission de régulation de l’énergie: www.cre.fr

• Le portail de l’Union européenne : europa.eu

• Légifrance : www.legifrance.gouv.fr

• Actu-environnement : www.actu-environnement.com

• Journal de l’environnement :www.journaldel’environnement.net

VIII- Personnes ressources

Antidia Citores, doctorante à l’Université Paul Cézanne,

Françoise Zitouni, maître de conférences à l’Université Paul Cézanne,

Jean Reynaud, docteur d’Université

Mathieu Wemaere, avocat inscrit au barreau de Paris et Bruxelles, représentant permanent

auprès des Institutions européennes à Bruxelles

Christophe Levisage, du Secrétariat général de la mer,

Pierre Alain Favier, du département éolien offshore de la société de courtage Marsh SA

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LISTE DES ANNEXES

• Cartographies des différentes zones maritimes

• Arrêté portant concession d’utilisation du domaine public maritime au profit de la

société CECA SAS pour la création d’un parc éolien offshore au large de Veulettes sur

mer du 16 juillet 2008.

• Arrêté préfectoral d’autorisation au titre de la loi sur l’eau du 14 janvier 2008

• Illustrations d’une centrale ETM et du prototype d’éolienne flottante WINFLO

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TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS …………………………………………………………………………p1

SOMMAIRE…… ……………………………………………………………………………p2

ABREVIATIONS ……………………………………………………………………………p5

INTRODUCTION …………………………………………………………………………...p8

PARTIE I- LES POLITIQUES D’INCITATION AU DEVELOPPEMENT DE LA

PRODUCTION D’ELECTRICITE A PARTIR DES ENERGIES MARINES…………….p21

Titre I - Incitation à la production : une nécessaire intervention publique au sein d’un marché

concurrentiel……………………………………………………………………………… p21

Chapitre I - Le financement nécessaire de démonstrateurs………………………….. p21

Chapitre II - Appels d’offre et mécanisme de l’obligation d’achat…………………… p24

I- Appels d’offre……………………………………………………………………… p24

II-Obligation d’achat………………………………………………………………… p25

Chapitre III- La question de la conformité de ces aides publiques au droit communautaire

de la concurrence……………………………………………………………………………p28

Titre II - Aide à l’intégration de la production d’électricité produite à partir des EMR au sein

du réseau de distribution……………………………………………………………………p29

Chapitre I - La facilitation du raccordement au réseau de l’électricité- SEMR…………p30

I- Principe de l’obligation de raccordement au réseau…..……………………………p30

II-Principe de priorité de l’accès au réseau…………………………………………...p31

III-La problématique du coût de raccordement au réseau………………………….. ..p33

Chapitre II - La planification du raccordement au réseau de l’électricité- SEMR……. p33

I- Le nouveau schéma de raccordement des énergies renouvelables……………….. p33

II-Les réseaux transeuropéens de l’énergie (RTE-E) et autres initiatives

européennes………………………………………………………………………….p34

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PARTIE II – LA NECESSITE DE LEVER LES CONTRAINTES JURIDIQUES DES EMR

SPECIFIQUES AU MILIEU MARIN………………………………………………………p35

Titre I – Conflits d’usage : les EMR à l’épreuve du droit du littoral, du droit maritime et du

droit de l’environnement…………………………………………………………………… p36

Chapitre I - Les aspects juridiques de l’occupation du domaine littoral…………………p36

I- La loi Littoral………………………………………………………………………...p36

II-Le domaine public maritime……………………………………………………… p37

Chapitre II - L’applicabilité du droit maritime…………………………………………..p38

I- Nature juridique des engins………………………………………………………. ...p38

II-Conséquences de la qualification juridique de navire……………………………… p39

Chapitre III - L’existence de zones marines protégées………………………………… p44

I- Les dispositifs de protection spécifiques au milieu marin…………………………. p44

II-Les dispositifs de protection pouvant concerner le milieu marin………………….. p47

Titre II- La planification de l’espace maritime dans la concertation……………………….p48

Chapitre I - Le besoin d’une planification de l’espace maritime……………………….. p49

I- La planification à l’échelon international et européen…………………………......p49

II-La planification à l’échelon national……………………………………………….p51

III-La planification à l’échelon régional et local……………………………………...p52

Chapitre II- Le besoin de concertation………………………………………………… p54

I- La procédure de débat public………………………………………………………p54

II- La concertation avec les pêcheurs…………………………………………………p55

Titre III - Vers une nécessaire simplification des procédures administratives d’implantation….

Chapitre I- Les premières avancées de la loi grenelle 2……………………………… p57

I- Allègement des autorisations demandées………………………………………….. p57

II-Réforme des études d’impact et des enquêtes publiques………………………….. .p62

Chapitre II - Les vides juridiques à combler…………………………………………….p66

I- Réglementer l’activité au-delà de la mer territoriale………………………………. p66

II- La création d’un guichet unique……………………………………………………p68

III- Le problème de l’absence de droits réels sur le domaine public maritime naturel..p69

IV-La remise en état du site en fin d’exploitation et les garanties financières……….. p70

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CONCLUSION …………………………………………..………………………………...p71

BIBLIOGRAPHIE ……………………………………………………………………..…..p72

LISTE DES ANNEXES ………………………………………………………………… p82

TABLE DES MATIERES …………………………………………………….………… p85