Elaborer et mettre en œuvre un contrat de transport public ... · Parler de DSP revient à parler...

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GART – Pôle juridique le 12/3/07 1 Elaborer et mettre en œuvre un contrat de transport public : Contenu, passation, exécution ENPC - Du 14 au 16 mars 2007 Régime juridique et typologie des contrats de transport Intervention de Catherine Delavaud Responsable juridique du GART Mercredi 14 mars 2007 9h – 11h

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Elaborer et mettre en œuvre un contrat de transport public :

Contenu, passation, exécution

ENPC - Du 14 au 16 mars 2007

Régime juridique et typologie des contrats de transport

Intervention de Catherine Delavaud Responsable juridique du GART

Mercredi 14 mars 2007 9h – 11h

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Introduction – Diversité et liberté

A - Une pluralité d’outils juridiques à la disposition des AO

1). Propos préliminaires : de la notion de PPP Parler de DSP revient à parler de maîtrise d’ouvrage privée, par opposition à la maîtrise d’ouvrage publique, et parler de maîtrise d’ouvrage privée revient à parler de PPP : partenariat public-privé. Le partenariat public-privé est un terme générique, qui désigne plusieurs formules d'association du secteur public et du secteur privé, sous forme de contrats différents des marchés publics, pour la réalisation et/ou l'exploitation d'ouvrages et de services. Les PPP constituent des modalités de financement privé d'équipement publics et/ou de gestion déléguée des services publics. Les PPP ont une longue histoire en France, parfois oubliée. La forme la plus ancienne de PPP est la concession de travaux publics et de service public. La première concession connue est celle du canal de Craponne (de la Durance au Rhône) en 1554. Les grands canaux ont été réalisés en concession (canal du Midi, canal de Bourgogne, par exemple). Les concessions ont connu un grand développement en France au XIXème siècle et au début du XXème siècle, dans de nombreux domaines, et notamment dans les infrastructures de transport (concessions ferroviaires). Il existait un cahier des charges type des concessions de tramway, édité en 1881. Au XXème siècle, le schéma autoroutier a été mis en œuvre essentiellement au travers de concessions. Aujourd'hui, existent des formules classiques de PPP et des formules plus récentes. Les solutions classiques sont désormais dénommées délégations de service public. Parmi les solutions plus récentes, le contrat de partenariat (CP) institué par l'ordonnance de 2004-559 du 17 juin 2004 occupe une place particulière. Il est souvent assimilé aux PPP, alors qu'il n'en constitue qu'une forme particulière et que la famille des PPP comporte plusieurs catégories de contrats ou montages contractuels. On peut les regrouper en trois catégories : - Délégations de service public, en rappelant que seuls les concessions et les

affermages sont de "vraies" délégations du service public, c'est-à-dire non seulement sur le plan juridique mais également sur le plan fiscal ;

- Contrats d'occupation du domaine public, c'est-à-dire les autorisations d'occupation temporaire (A.O.T.) constitutives ou non de droits réels, les baux emphytéotiques administratifs (B.E.A.) étant exclus sur la voirie ;

- Contrats de partenariat, nouvelle catégorie de contrats intermédiaires entre les concessions et les marchés publics, mais plus proches de la logique contractuelle des concessions, en raison du fait notamment que le titulaire d'un contrat de partenariat est, es qualités, maître d'ouvrage comme un concessionnaire.

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On ne peut passer sous silence les PPP institutionnels (« PPPI ») que constituent les sociétés d'économie mixte locales, qui associent capitaux majoritairement publics et capitaux privés, au sein d'une société anonyme. Elles sont régies par les articles L. 1511-1, L. 1511-8 et R. 1511-1 à R. 1511-47 du Code général des collectivités territoriales. Mais elles ne peuvent être, directement ou statutairement, des partenaires privés (juridiquement). Elles doivent, en effet, contracter avec les collectivités territoriales selon les diverses formules de marchés ou de PPP, et elles sont soumises aux règles de concurrence pour la passation des contrats avec leur collectivité de "tutelle" : les SEM entrent en effet dans le champ de la loi Sapin (à la différence des régies), qui ne fait pas de distinction en fonction du statut du délégataire. C’est d’ailleurs toute la difficulté soulevée par le statut des SEM, statut qui impose un double niveau de mise en concurrence (« double peine ») : une mise en concurrence amont, pour que la SEM puisse se voir confier le service public dont la collectivité à la charge ; une mise en concurrence aval, la SEM devant respecter le CMP pour la passation de ses propres marchés. Cette obligation découle du statut semi public de la SEM (bien que société de droit privé, la SEM est à capitaux majoritairement publics), qui la fait entrer dans le champ des pouvoirs adjudicateurs au sens du droit communautaire, ce qui signifie que, même non soumise au CMP (les personnes privées ne relevant pas du CMP), la personne morale aura à respecter des règles de mise en concurrence. Voir développements sur la notion de pouvoir adjudicateur dans le II.A. Cas par exemple de la SNCF qui, en tant qu’EPIC, n’est pas soumise au CMP (article 2 du CMP : « les PA soumis au présent code sont l’Etat et ses EP autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial ») mais qui, pour autant, du fait de son statut public, devra respecter des règles de mise en concurrence pour ses propres achats.

2). Une palette d’outils variable en fonction du projet de l’AO Variation de la palette disponible en fonction du projet de l’AO (même si on retrouve toujours, au bout du compte, les mêmes mécanismes)

o Réalisation d’une infrastructure nouvelle de transport : maîtrise d’ouvrage publique ou maîtrise d’ouvrage privée (MOP ou PPP) Le montage MOP est le plus utilisé dans le secteur des TP.

La maîtrise d'ouvrage publique (MOP) est définie par la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 modifiée relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses relations avec la maîtrise d'ouvrage privée (dite loi MOP). Ce texte définit le rôle de "donneur d'ordre" joué par le maître de l'ouvrage, c'est-à-dire la personne publique (généralement) pour laquelle l'ouvrage est construit : " Le maître de l'ouvrage est la personne morale, mentionnée à l'article premier, pour laquelle l'ouvrage est construit. Responsable principal de l'ouvrage, il remplit dans ce rôle une fonction d'intérêt général dont il ne peut se démettre. Il lui appartient, après s'être assuré de la faisabilité et de l'opportunité de l'opération envisagée, d'en déterminer la localisation, d'en définir le programme, d'en arrêter l'enveloppe financière prévisionnelle, d'en assurer le financement, de choisir le processus selon lequel l'ouvrage sera réalisé et de conclure, avec les maîtres d'œuvre et entrepreneurs qu'il choisit, les contrats ayant pour objet les études et l'exécution des travaux". (Art. 2 de la loi du 12 juillet 1985).

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Les dispositions de la loi MOP ne sont pas applicables aux partenariats public-privé, de même que le Code des marchés publics, qui ne sera applicable qu’en cas de MOP. Ce qui revient à dire que dans le cadre d’un montage MOP, les contrats passés par l’AO donneur d’ordre pour la réalisation et la gestion de son TCSP sont des marchés publics. Ces dispositions ne signifient nullement que tous les ouvrages et équipements publics doivent être réalisés en maîtrise d'ouvrage publique. Les personnes publiques, et notamment les AO peuvent choisir de recourir à des montages contractuels en maîtrise d'ouvrage privée, sous leur contrôle.

Cependant, les réalisations de TCSP en concession se comptent à ce jour sur les doigts de la main : Rouen (concession passée en 1991), Caen (concession signée en 1997), Strasbourg (concession confiée à une SEM – la CTS) et, plus récemment Reims (concession signée en 2006). Il est donc étonnant de voir que le montage concessif classique est un montage éprouvé en France (les premières concessions remontent au 16ème siècle !) mais peu utilisé dans les transports publics locaux, secteur marqué par une forte tradition de MOP, qui s’explique vraisemblablement par la volonté des AO d’avoir la main mise sur la conception et la réalisation de leurs infrastructures et par la montée en force de leur capacité d’expertise en interne.

o Réalisation d’une infrastructure nouvelle et exploitation du service de transport :

montages globaux ou montages dissociés

Montage public global MOP et exploitation publique (marchés de réalisation et marché d’exploitation) : cas de Clermont-Ferrand. Cas de figure assez atypique dans la mesure où la plupart des gros réseaux ou réseaux de taille moyenne (réseaux à TCSP) sont en DSP. L’essentiel des réseaux exploités par le biais d’un marché public sont des petits réseaux. Montage public et privé dissocié MOP et PPP (marchés de réalisation et DSP) : montage le plus utilisé – on y reviendra. Montage privé global Double PPP (double concession) : exemple de Caen. A Caen le montage retenu est le suivant :

- Une concession de travaux publics pour la réalisation et l'exploitation technique et maintenance du TCSP ;

- Une concession de service public pour l'exploitation commerciale du réseau bus et du TCSP et la réalisation de certains investissements ;

- Une convention tripartite de fonctionnement (concédant, concessionnaire TP, concessionnaire SP).

Pour que la concession TP puisse être considérée comme une véritable concession du point de vue fiscal, et qu’elle puisse bénéficier du taux réduit de TVA (5,5%), il faut que le concessionnaire TP soit rémunéré, partiellement, par les recettes perçues auprès des usagers par le concessionnaire SP. Il existe donc un mandat financier entre le concessionnaire SP et le concessionnaire TP.

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La maintenance du TCSP est partagée entre les deux concessionnaires. Ce qui peut paraître complexe, mais qui ne l'est pas plus que le partage de la maintenance entre l'autorité délégante et un délégataire dans le cadre d'un contrat d'affermage. Cette formule de la double concession, couramment utilisée dans le domaine du chauffage urbain, est demeurée unique, à notre connaissance, dans le domaine des transports publics de personnes. A l'époque de sa mise en œuvre (1993-1994), elle était la seule répondant à la préoccupation de dissocier les deux métiers, réaliser un TCSP et exploiter l'ensemble des transports urbains, et passer séparément les deux contrats, ce qui permettait à l'AO de choisir plus librement, d'une part, le partenaire TCSP, d'autre part, l'exploitant du service de transport (TCSP et bus). La concession unique impose en effet aux entreprises (constructeur-équipementier, fournisseur de matériel roulant et exploitant) de se regrouper et de constituer une société de projet. On peut prévoir une répartition différente du capital, en phase réalisation et en phase exploitation, ce qui est de nature à faciliter la constitution de la société.

Un montage privé global en contrat de partenariat (CP) est difficile à imaginer, dans la mesure où les missions du titulaire d’un CP, selon les termes de l’ordonnance du 17 juin 2004, ne recouvrent pas directement la gestion d’un service public.

D’après les textes, le titulaire peut (option facultative) assurer des « prestations de service concourant à l’exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée ». De même, le titulaire peut se procurer des recettes annexes mais non les redevances perçues auprès des usagers du service public, contrairement au délégataire de service public (art. L. 1414-1 CGCT). Dès lors, le titulaire du contrat de partenariat peut percevoir les recettes auprès des usagers du service public, non pas en son nom et pour son propre compte, mais seulement au nom et pour le compte de l’AO. Même si ces recettes sont de nature à procurer une rémunération, assurée de manière substantielle par les résultats de l'exploitation Dans cette hypothèse, la mise en œuvre d’un contrat global est donc difficilement envisageable, sauf à considérer que l’exploitation du service public, et, partant, la perception des recettes, soient confiées au titulaire du contrat de partenariat, sous forme de gérance ou de marché de services. Dans ce cas, un régisseur de recettes doit être nommé ou, à défaut, un mandat financier confié au titulaire du CP. Ainsi donc, une réserve demeure sur le fait qu'un contrat de partenariat permet ou ne permet pas de confier la gestion du service public lui-même à son titulaire. Certains commentateurs considèrent qu'on peut avoir une conception plus large du CP, ou qu'il faut modifier le texte en ce sens (ce qui est envisagé, semble-t-il). Dans l'état actuel de la définition du CP, le recours à ce type de contrat semble plutôt devoir être envisagé dans le cadre d'un montage dissocié.

Montage privé et public dissocié PPP et exploitation publique : aucun exemple à ce jour. Pourquoi pas Clermont Ferrand, qui réfléchit à une extension de son tram en CP et qui exploite actuellement l’ensemble de son réseau, y compris le tram, en MP.

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o Exploitation seule du service de transport : gestion déléguée, gestion semi-déléguée, gestion directe La « vraie » DSP __________________ = gestion déléguée La DSP hybride ___________________ = gestion déléguée / gestion semi-déléguée Le marché public __________________ = gestion semi-déléguée La régie EPIC ____________________ = gestion directe La régie autonomie (ou à simple autonomie financière) __________ = gestion directe

3). Les montages les plus fréquemment utilisés sont les suivants :

o Réalisation d’une infrastructure nouvelle et exploitation du service de transport : montage dissocié MOP et PPP Sur la plupart des réseaux à TCSP (métro ou tram ou tram-train ou simples couloirs bus), le volet infrastructure reste le plus souvent entre les mains de l’AO (MOP) qui, en tant que maître d’ouvrage, passe elle-même l’ensemble des marchés de réalisation (montage que l’on retrouve à Clermont-Ferrand, Bordeaux, Lyon, Marseille, Nice, etc…). L’AO peut également œuvrer dans le cadre d’une maîtrise d’ouvrage publique déléguée qui sera, le plus souvent, déléguée à une SEM dans le cadre d’un contrat de mandat (montage que l’on retrouve par exemple à Angers, au Mans, Grenoble, Montpellier, Mulhouse ou encore, plus récemment, à Brest). Notons à ce titre que le droit français s’est mis en conformité avec le DC assez récemment. En effet, pendant longtemps, la loi MOP consacrait un régime privilégié aux SEM en leur réservant un quasi monopole en matière de MOP déléguée. Article 4 de la loi MOP :

Peuvent seuls se voir confier, dans les limites de leurs compétences, les attributions définies à l'article précédent (attributions du mandataire du maître d’ouvrage public):

a) Les personnes morales mentionnées aux 1° et 2° de l'article premier de la présente loi (l’Etat et ses EP et les CT et leurs EP), à l'exception des établissements publics sanitaires et sociaux qui ne pourront être mandataires que pour d'autres établissements publics sanitaires et sociaux ;

b) Les personnes morales dont la moitié au moins du capital est, directement ou par une personne interposée, détenue par les personnes morales mentionnées aux 1° et 2° de l'article 1er et qui ont pour vocation d'apporter leur concours aux maîtres d'ouvrage, à condition qu'elles n'aient pas une activité de maître d'oeuvre ou d'entrepreneur pour le compte de tiers ;

c) Les organismes privés d'habitations à loyer modéré mentionnés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, pour la réalisation d'ouvrages de bâtiment dans le cadre d'une action ou opération d'aménagement ou pour la réalisation d'ouvrages de bâtiment au profit d'autres organismes d'habitations à loyer modéré ainsi que pour les opérations de logements réglementés et les ouvrages qui leur sont liés ;

d) Les sociétés d'économie mixte locales régies par la loi n° 83-597 du 7 juillet 1983 relative aux sociétés d'économie mixte locales ;

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e) Les établissements publics créés en application de l'article L. 321-1 du code de l'urbanisme ainsi que les associations foncières urbaines autorisées ou constituées d'office en application des articles L. 322-1 et suivants du code de l'urbanisme.

f) Les sociétés créées en application de l'article 9 de la loi n° 51-592 du 24 mai 1951 relative aux comptes spéciaux du Trésor pour l'année 1951, modifié par l'article 28 de la loi n° 62-933 du 8 août 1962 complémentaire à la loi d'orientation agricole ;

g) Toute personne publique ou privée à laquelle est confiée la réalisation d'une zone d'aménagement concerté ou d'un lotissement au sens du titre premier du livre III du code de l'urbanisme pour ce qui concerne les ouvrages inclus dans ces opérations.

h) Les sociétés concluant le contrat prévu à l'article L. 222-1 du code de la construction et de l'habitation pour la réalisation d'opérations de restructuration urbaine des grands ensembles et quartiers d'habitat dégradé mentionnés au I de l'article 1466 A du code général des impôts.

Ces collectivités, établissements et organismes sont soumis aux dispositions de la présente loi dans l'exercice des attributions qui, en application du précédent article, leur sont confiées par le maître de l'ouvrage.

Les règles de passation des contrats signés par le mandataire sont les règles applicables au maître de l'ouvrage, sous réserve des adaptations éventuelles nécessaires auxquelles il est procédé par décret pour tenir compte de l'intervention du mandataire.

Réserver certaines prestations à certaines catégories de personnes nommément citées contrevenant directement au principe de libre concurrence, plusieurs procédures en manquement ont été menées à l’encontre de la France (procédures basées sur une ou plusieurs mises en demeure de la Commission européenne, suivie, en cas de non réaction du pays interpellé, d’une procédure juridictionnelle matérialisée par un jugement de la CJCE de condamnation – ou non – pour manquement au DC). La France a donné suite à cette procédure en manquement en adoptant un texte qui a mis fin au domaine réservé de la MOP déléguée : ordonnance n°2004-566 du 17 juin 2004, portant modification de la loi MOP, qui modifie profondément l’article 4 de la loi et fait entrer les mandats de MOP dans le champ de la concurrence. Pour ce qui est du volet exploitation, la plupart des AO optent pour une exploitation privée (en PPP – qui prendra la forme d’une DSP) qu’elle délègue soit à un opérateur privé, soit à une SEM. Souvent, une mission de conseil ou d’assistance est confiée au délégataire de service public, déjà en place ou à venir, sur les fonctionnalités du système de transport ou de certains équipements, ce qui permet de l’associer, ainsi, à la réalisation de l’infrastructure de transport qu’il aura à exploiter.

Les nouvelles règles fiscales rendent plus facile et plus neutre fiscalement ce montage combiné. En résumé : - l'AO doit transférer les droits à déduction de la TVA ayant grevé les investissements

au délégataire, si le contrat est un affermage ; - le délégataire ("fermier") "récupère" la TVA et la reverse à l'AO ; - le délégataire n'est pas tenu de verser une redevance de mise à disposition des

biens, correspondant à l'amortissement des biens dans les comptes de l'AO.

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o Exploitation seule du service de transport : DSP La DSP est en effet le mode de gestion le plus utilisé en transports publics, sachant que les DSP que l’on trouve dans ce secteur se situent le plus souvent entre la « vraie » DSP et la DSP hybride (ce point sera développé plus avant ci-après).

B - Un principe de libre choix de l’AO entre ces différents outils

1). Libre choix reconnu en droit français

o La LA des CL : un principe constitutionnel Article 72 de la constitution : Alinéa 2 : « Les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon ». Alinéa 3 : « Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences ».

o Une liberté reconnue dans l’exercice de la compétence transport (mode d’exécution

des services publics de transport) Article 7.2 de la LOTI : « L'Etat et, dans la limite de leurs compétences, les collectivités territoriales ou leurs groupements organisent les transports publics réguliers de personnes et peuvent organiser des services de transports à la demande. L'exécution du service est assurée soit en régie par une personne publique sous forme d'un service public industriel et commercial, soit par une entreprise ayant passé à cet effet une convention à durée déterminée avec l'autorité compétente ».

De cette disposition se dégagent deux principes :

- le choix entre une gestion directe ou une gestion déléguée du service ; - la gestion déléguée comme un dispositif de concurrence régulée.

Dispositif d’après lequel : - des droits exclusifs sont octroyés par les autorités compétentes aux

transporteurs, - dans le cadre d’un contrat, - pour un laps de temps défini, - à l’issue d’une procédure de mise en concurrence - = « entreprise ayant passé à cet effet une convention à durée déterminée avec

l'autorité compétente ». Ce modèle se situe à mi-chemin entre : - les situations de marchés fermés avec octroi de droits exclusifs et absence totale de

concurrence : Autriche, Belgique, Grèce ou Allemagne pour ce qui concerne le transport

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urbain, mais également la France pour ce qui est de la Région Ile-de-France et pour les services ferroviaires ;

- et les systèmes dérégulés avec absence de droits exclusifs et intervention de plusieurs opérateurs en concurrence sur le même réseau ou sur la même ligne : Royaume-Uni hors Londres pour les transports par bus et par car régionaux et interrégionaux.

Le système de concurrence régulée se retrouve dans des Etats membres comme la France (pour le transport routier à l’exception de la Région Ile-de-France) ou l’Allemagne (pour le transport ferroviaire régional et local) ou encore la Suède. Pour ce qui concerne la gestion du service par la personne publique elle-même, la LOTI est elliptique et ne donne que peu d’indications : Elle en donne essentiellement deux : - mise en place d’une régie - exploitation du service sous forme d’un SPIC Sur la notion de SPIC : S.P.I.C. OU S.P.A. ? En théorie, un service public à caractère industriel et commercial est défini par L'article L. 323-1 al. 2 C.Cnes (repris à l'art. L. 2221-1 al. 2 CGCT) : “ sont considérées comme industrielles ou commerciales les exploitations susceptibles d'être gérées par des entreprises privées, soit par application de la loi des 2-17 mars 179 1, soit en ce qui concerne l'exploitation des services publics communaux, en vertu des contrats de concession ou d'affermage ”. Mais c’est la jurisprudence qui a apporté une contribution déterminante pour fonder la distinction entre SPA et SPIC. LE FAISCEAU D'INDICES JURISPRUDENTIELS

Suivant une démarche pragmatique, le juge devait tirer les leçons de l'irréductibilité à un seul critère de la distinction entre les services publics à caractère administratif et les services publics à caractère industriel et commercial. Il part d'une présomption simple suivant laquelle un service public non qualifié par le législateur a en principe un caractère administratif. Pour que cette proposition soit renversée en faveur du caractère industriel et commercial, trois indices doivent normalement être réunis : - un relatif à l'objet du service; - un second relatif à son mode de financement; - un troisième relatif aux modalités de fonctionnement. Le premier indice sera détecté lorsque l'objet du service porte sur une activité de production ou d'échange susceptible d'être exercée par une entreprise privée. A défaut le caractère administratif du service s'imposera. Tel est le cas du prêt sur gage octroyé par les caisses de crédit municipal, qui détient ce caractère car il s'agit d'une activité désintéressée; il en est de même de l'exploitation de ponts à péage (parce que les activités portant sur la voirie ont un caractère administratif) ou de services de bac. Le second indice apparaîtra si l'essentiel des ressources du service provient de redevances versées par les usagers. Un service public alimenté de manière prépondérante par des ressources fiscales ou des subventions budgétaires (au point d'être le cas échéant gratuit pour l'usager) ne peut donc normalement avoir un caractère industriel et commercial. Le troisième indice sera identifié à partir d'un examen réalisé par le juge des conditions de fonctionnement du gestionnaire du service public. Inclinera en faveur du caractère industriel et commercial de l'activité la présence de techniques de comptabilité privée (usage des effets de commerce, etc.). Ainsi donc, l’origine des ressources du service est l’un des critères retenus par la jurisprudence pour qualifier le service : importance de la notion de redevance pour service rendu, qui s’analyse comme un prix payé par les usagers en contrepartie des prestations qui leur sont fournies, par opposition à la notion de taxe à caractère fiscal qui frappe les contribuables sans contrepartie directe (la taxe relevant d’ailleurs du domaine de la loi, la redevance, elle, pouvant tout à fait être instituée par le pouvoir administratif).

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Cela pose donc la question de la tarification et, plus précisément, de la gratuité du service. Un SPIC ne peut pas, en principe, être gratuit. En effet, il ressort de la jurisprudence que la perception d’une redevance sur les usagers est la condition nécessaire du caractère industriel et commercial du service (TC, 22 janvier 1921, Société commerciale de l’Ouest africain – ou arrêt « Bac d’Eloka »), relatif à un service de transport (le Bac d’Eloka) que la Côte d’Ivoire exploitait dans les mêmes conditions qu’un industriel ordinaire dans la mesure où elle le faisait moyennant rémunération. Si le financement du service combine plusieurs types de ressources différentes et éventuellement variant dans le temps, il convient de s’attacher à celle qui en fournit la part prépondérante. D’où le caractère administratif d’un service principalement financé par une taxe para-fiscale. Cela pose donc la question de l’interprétation à donner à l’article 7.II de la LOTI dans la mesure où la part du VT (qui est un impôt) dans le financement des TPU n’a cessé de croître tout au long de ces dernières années (46% en 2002). Dans les TPU, VT et fiscalité locale contribuent désormais à plus des ¾ des ressources, la part des recettes commerciales n’étant que de 20%). Ex d’un théâtre lyrique. A partir de ces critères, on voit donc qu’un Théâtre lyrique remplit aisément la première et la troisième condition. En ce qui concerne le second critère, il est vrai que l’on peut considérer que les subventions sont prépondérantes mais l’existence d’une billetterie et donc d’une participation financière de l’usager doit être prise en considération. Une politique de bas tarifs devient alors un critère déterminant en faveur du caractère administratif d’un service public. Toutefois, on constate que la qualification juridique d’un service public local est variable du fait même du caractère non systématique de la combinaison des trois critères : La nature industrielle et commerciale d’un service public a pu être retenue sur la base exclusive d’un seul indice (l’objet ou le financement) ou à partir d’une combinaison partielle d’indices (objet de l’activité et conditions de fonctionnement). Ainsi, un service public de distribution de l’eau répondant aux 1er et troisième critères a été reconnu comme SPIC nonobstant l’importance de son financement public. Il semble donc possible de reconnaître à un théâtre lyrique le caractère industriel et commercial1. Cependant, pour que ce statut soit effectivement applicable, il est nécessaire d’aménager la règle de l'équilibre financier prévue par la loi de 1988 (article L 2224.2 du Code général des collectivités territoriales) afin de rendre compatible la gestion d’un théâtre avec celle des services publics à caractère industriel ou commercial (SPIC). 1 Dans le domaine culturel, au niveau des Etablissements Publics de l’État, on constate que l’Opéra de Paris, la Comédie Française sont des EPIC. Principe de l’équilibre budgétaire des SPIC (articles L2224-1 et L2224-2 du CGCT) : interdiction de subventionner les SPIC (articles L2224-1 et 2 du CGCT pour les communes et L3241-4 et 5 du CGCT pour les départements), sauf exceptions, mais pas les SPA. Cf Avis du CE du 7 octobre 1986 + 27 juin 1996 Pour rappel : l’article L2224-1 du CGCT précise que « les budgets des SPIC exploités en régie, affermés ou concédés par les communes, doivent être équilibrés en recettes et en dépenses ». L’article L2224-2 prévoit des exceptions (contraintes particulières de fonctionnement, réalisation d’investissement, etc). En effet, cet article prévoit que « Toutefois, le conseil municipal peut décider une telle prise en charge lorsque celle-ci est justifiée par l’une des raisons suivantes : Alinéa 2° : « Lorsque le fonctionnement du service public exige la réalisation d’investissements qui, en raison de leur importance et eu égard au nombre d’usagers, ne peuvent être financés sans augmentation excessive des tarifs ».

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Précisions sur les régies de transports Dans le cadre d’une régie, l’AO prend en charge l’ensemble de la gestion du service avec ses propres moyens matériels et humains. Si l’AO opte pour la gestion directe, deux voies s’ouvrent à elles. En effet, comme c’est le cas pour les régies en général (articles L2221-1 et suivant du CGCT), une régie de transport peut être, aux termes du décret d’application de la LOTI : - soit une régie dotée de la seule autonomie financière, - soit une régie dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière, constituée dans ce cas sous forme d’EPIC (l’établissement public à caractère industriel et commercial).

A) La régie dotée de la seule autonomie financière

La régie dotée de la seule autonomie financière n’est pas une régie simple en ce que, comme son nom l’indique, elle bénéficie d’une autonomie financière, mais elle ne va pas jusqu’à avoir la personnalité morale. Les règles précises de création et de fonctionnement sont prévues aux articles 18 à 20 du décret nº 85-891 du 16 août 1985. La régie est administrée sous l’autorité de l’exécutif de la collectivité (maire, président de l’EPCI, etc). Son directeur est désigné par l’exécutif. L’agent comptable est le comptable de la collectivité. Les recettes et les dépenses font l’objet d’un budget annexe à celui de l’autorité organisatrice. Il est préparé par le directeur, soumis pour avis au conseil d'exploitation et voté par l'organe délibérant de la collectivité.

B) L’établissement public ou régie personnalisée

La « régie de transport » sous forme d’établissement public est pour sa part dotée non seulement de l’autonomie financière, mais aussi de la personnalité morale. Les règles précises de création et de fonctionnement sont prévues aux articles 13 à 17 du décret nº 85-891 du 16 août 1985. La collectivité de rattachement exerce sur cet établissement public un pouvoir de contrôle. La régie est administrée par un conseil d’administration qui élit en son sein son président. Le directeur est nommé par le Conseil d’administration. L’agent comptable est soit un comptable du trésor, soit un agent comptable spécial nommé par le préfet sur proposition du conseil d’administration et après avis du trésorier-payeur général. Il y a obligatoirement un règlement intérieur qui fixe les modalités juridiques et financières de fonctionnement de la régie. Le cahier des charges fixe les obligations de la régie à l’égard des usagers et des tiers.

2). Libre choix reconnu en droit communautaire Une reconnaissance « laborieuse » du libre choix Dans le cadre de l’élaboration de son règlement transport (projet de règlement dit « OSP »), le principe longtemps défendu par la Commission européenne a été celui de la contractualisation avec procédure de mise en concurrence préalable obligatoire et généralisée : négation de l’existence même des régies de transport. Après plusieurs années de bataille juridique et de mobilisation des acteurs locaux, au premier rang desquels le GART, une nouvelle version du texte, actuellement en cours de discussion au PE, reconnaît, enfin, le principe du libre choix. La gestion directe est reconnue au travers de la notion d’opérateur interne, notion qui vise les régies de transport (autonomes et EPIC) et qui n’exclut pas, le cas échéant, les SEM.

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Article 5.2 du projet de règlement :

« Sauf interdiction en vertu du droit national, toute autorité locale compétente, qu'il s'agisse ou non d'une autorité individuelle ou d'un groupement d'autorités fournissant des services intégrés de transport public de voyageurs, peut décider de fournir elle-

même des services publics de transport de voyageurs ou d'attribuer directement des

contrats de service public à une entité juridiquement distincte sur laquelle l'autorité locale compétente, ou, dans le cas d'un groupement d'autorités, au moins une autorité locale compétente, exerce un contrôle analogue à celui qu'elle exerce

sur ses propres services (ci-après dénommée "opérateur interne"). Lorsqu'une autorité locale compétente prend une telle décision, les dispositions suivantes s'appliquent:

a) aux fins de déterminer si l'autorité locale compétente exerce un tel contrôle, il est tenu compte d'éléments tels que le niveau de représentation au sein des organes

d'administration, de direction ou de surveillance, les précisions y relatives dans les

statuts, la propriété ainsi que l'influence et le contrôle effectifs sur les décisions stratégiques et sur les décisions individuelles de gestion. Conformément au droit communautaire, la détention à 100 % du capital par l'autorité publique compétente,

en particulier dans le cas de partenariats publics-privés, n'est pas une condition obligatoire pour établir un contrôle au sens du présent paragraphe, pour autant que le secteur public exerce une influence dominante et que le contrôle puisse être établi sur la base d'autres critères;

b) le présent paragraphe est applicable à condition que l'opérateur interne et toute entité sur laquelle celui-ci a une influence, même minime, exercent leur activité de transport

public de voyageurs sur le territoire de l'autorité locale compétente, nonobstant d'éventuelles lignes sortantes et autres éléments accessoires à cette activité se prolongeant sur le territoire d'autorités locales compétentes voisines, et ne participent

pas à des mises en concurrence concernant la fourniture de services publics de transport de voyageurs organisés en dehors du territoire de l'autorité locale compétente;

c) nonobstant le point b), un opérateur interne peut participer à des mises en concurrence équitables pendant les deux années qui précèdent le terme du contrat de service public qui lui a été attribué directement, à condition qu'ait été prise une décision définitive visant à soumettre les services de transport de voyageurs faisant l'objet du contrat de l'opérateur interne à une mise en concurrence équitable et que l'opérateur interne n'ait conclu aucun autre contrat de service public attribué directement;

d) en l'absence d'autorité locale compétente, les points a), b) et c) s'appliquent à une autorité nationale agissant au bénéfice d'une zone géographique qui n'est pas nationale, à condition que l'opérateur interne ne participe pas à des mises en concurrence concernant la fourniture de services publics de transport de voyageurs organisés à l'extérieur de la zone pour laquelle le contrat de service public a été attribué ».

Les contraintes de la gestion directe Une double restriction pèse sur l’opérateur interne : - une restriction d’ordre organique : le critère du contrôle analogue - une restriction d’ordre géographique : la clause de cantonnement géographique, qui

limite le champ d’intervention de l’opérateur interne au territoire de compétence de l’AO dont il dépend.

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Cette contrainte géographique constitue une nouveauté au regard du droit positif existant. En effet, les établissements publics ne sont en aucun cas, au regard du droit français, empêchés de répondre à des appels d’offres en dehors, mais également à l’intérieur, du territoire de compétence de leur collectivité de rattachement. Rappel du droit positif existant : les établissements publics ne sont en aucun cas, au regard du droit français, empêchés de répondre à des appels d’offres en dehors, mais également à l’intérieur du territoire de compétence de leur collectivité de rattachement.

Le cas des établissements publics L’une des hypothèses dans lesquelles la mise en concurrence ne s’impose pas est celle où l’activité de service public est confiée à un établissement public. Il faut pourtant distinguer le principe et la limite comme le laisse entendre l’article L. 1411-12 : « b) Lorsque ce service est confié à un établissement public et à condition que l'activité déléguée figure expressément dans les statuts de l'établissement ; »

A) Le principe : les établissements publics n’ont pas à être mis en concurrence

lorsqu’ils agissent dans leur domaine

L’établissement public est une personne morale de droit public créée par une collectivité publique (État ou collectivité territoriale) disposant de l’autonomie juridique et financière, même si la collectivité de rattachement conserve des prérogatives de contrôle sur l’établissement. L’établissement public peut être un établissement public local ou national à vocation technique (S.N.C.F., R.A.T.P., Régie dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière, Caisse des écoles, O.P.H.L.M., etc.) ou un établissement public de coopération intercommunale ayant reçu compétence dans un ou plusieurs domaines. Les établissements publics ont une compétence d’attribution définie par leurs statuts. Ils bénéficient, dans leur domaine et dans les limites de leur compétence territoriale, d’un monopole. En contrepartie, ils sont limités par le principe de « spécialité » qui ne les autorise normalement à agir que dans leur domaine. Ce principe justifie que lorsqu’un service public est confié à un établissement public, les règles de publicité et de mise en concurrence prévues par la loi du 29 janvier 1993 ne s’appliquent pas. Cette dérogation ne joue cependant qu’à la double condition que :

• le délégataire ait la qualité d’établissement public ; • les statuts de l’établissement public mentionnent expressément l’activité déléguée au nombre des

activités statutaires de l’établissement public ; Si ces deux conditions sont satisfaites, l’établissement public pourra se voir confier le service public, sans qu’il soit nécessaire de mettre en œuvre la procédure de publicité et de mise en concurrence. Cette souplesse, qui vise les relations entre une collectivité et un EP qu’elle crée trouve son pendant, d’une certaine manière, pour les MP, dans les relations que l’on nomme relations « in house ». Ce type de relation est visé à l’article 3.1 du CMP, qui précise que : « Les dispositions du présent code ne sont pas applicables aux marchés et accords-cadres suivants passés par les pouvoirs adjudicateurs définis à l’article 2 : 1o Accords-cadres et marchés conclus entre un pouvoir adjudicateur et un cocontractant sur lequel il exerce un contrôle comparable à celui qu’il exerce sur ses propres services et qui réalise l’essentiel

de ses activités pour lui à condition que, même si ce cocontractant n’est pas un pouvoir adjudicateur, il applique, pour répondre à ses besoins propres, les règles de passation des marchés prévues par le présent code ou par l’ordonnance no 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics ».

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B) L’exception : un établissement public doit être mis en concurrence lorsqu’il

exerce son activité sur un marché Cependant, les personnes publiques peuvent répondre à une délégation de service public que propose une autre personne publique. Cela résulte de la définition même de l’article L. 1411-1 du CGCT

« Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être en charge de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service. »

Le principe de spécialité des établissements publics ne leur permet pas de répondre à tout type de délégations. Ils ne peuvent le faire que si ces activités sont complémentaires ou connexes de leur activité principale. Lorsque tel est le cas, ces établissements publics ne bénéficient plus de l’exception qui tient à leur statut, ils doivent être mis en concurrence comme tout autre opérateur. Exemple : une communauté d’agglomération n’a pas à mettre en concurrence une régie à personnalité morale qu’elle a créée pour gérer les transports sur son territoire. En revanche, si une commune limitrophe veut bénéficier de ce service sans faire partie de la communauté d’agglomération, elle devra respecter les articles L. 1411-1 et s. du CGCT et faire un avis d’appel à la concurrence auquel la régie de l’EPCI pourra répondre. Si son offre est la meilleure (voir la 2e partie pour les détails de la procédure), alors la régie remportera la délégation. En effet, le principe de liberté du commerce et de l’industrie ne fait pas obstacle, par lui-même, à ce qu’un EP se porte candidat à l’obtention d’une DSP ou d’un MP. Au contraire, si l’on se place sur le plan de la libre concurrence, il semble logique de permettre à toute personne, quel que soit son statut, de répondre à des appels d’offres. Cependant, pour répondre aux avis d’appel à la concurrence, le Conseil d’État a précisé dans un avis (CE, avis, 8 nov. 2000, Sté Jean-Louis Bernard Consultants), confirmé ensuite par le Tribunal administratif (TA Dijon, 20 févr. 2003, Sté Jean-Louis Bernard Consultants c/ District de l'Agglomération Dijonnaise, req. n° 99245), que l’établissement public devait remplir trois conditions pour que sa participation ne soit pas contraire au principe d’égalité de traitement durant les procédures :

• Premièrement, l'établissement public doit prendre en compte l'ensemble des coûts directs ou indirects qui participe à la formation du prix pour fixer le sien ;

• Deuxièmement, l'établissement public ne doit pas bénéficier d'un avantage découlant des ressources ou des moyens propres à sa mission de service public initiale pour déterminer son prix ;

• Troisièmement, il doit pouvoir justifier par ses documents comptables ou tout autre moyen d'information approprié la façon dont il a composé son prix de prestation afin de permettre au juge de contrôler le respect des deux premiers points

En d’autres termes : - le prix proposé par l’EP doit être déterminé en prenant en compte l’ensemble des coûts directs et indirects

concourant à la formation du prix de la prestation, objet du contrat ; - l’EP ne doit pas avoir bénéficié pour déterminer le prix proposé d’un avantage découlant des ressources ou

des moyens qui lui sont attribués au titre de sa mission de SP ; - l’EP doit pouvoir, si nécessaire, en justifier par ses documents comptables ou tout autre moyen

d’information approprié. Ces 3 exigences relèvent du principe d’égal accès des candidats

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Lorsque ces trois conditions sont remplies, alors un établissement peut répondre à un avis d’appel à la concurrence d’une autre personne publique pour une activité qui ne soit pas le cœur de son monopole et de sa spécialité. Autre illustration JPielle : CE 16 octobre 2000, Compagnie méditerranéenne d’exploitation des services d’eau : le juge a estimé que les subventions reçues par l’Office d’équipement hydraulique de la Corse et les négociations menées pour la conclusion d’autres contrats ne le plaçait pas dans une situation avantageuse par rapport aux autres candidats à l’obtention de la DSP de distribution d’eau et d’assainissement du district de Bastia. Les nouvelles limites posées par le DC ne manqueront pas d’avoir des répercutions importantes sur nombre d’EPIC en France et notamment, pour ce qui est des transports, pour la RATP.

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I – La voie classique de la gestion déléguée : la DSP

A – La DSP au regard du droit français Définition, régime juridique

Article L1411-1

(Loi nº 99-586 du 12 juillet 1999 art. 62 Journal Officiel du 13 juillet 1999) (Loi nº 2001-1168 du 11 décembre 2001 art. 3 Journal Officiel du 12 décembre 2001)

(Loi nº 2002-1 du 2 janvier 2002 art. 6 Journal Officiel du 3 janvier 2002) (Loi nº 2005-102 du 11 février 2005 art. 30 Journal Officiel du 12 février 2005)

« Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service ».

Les développements qui suivent sont extraits du Guide du GART intitulé : « Transport public et Délégation de service public »

2ème édition – Septembre 2005

Le conventionnement des services de transports publics selon la LOTI Un peu d’histoire – La dévolution contractuelle du service public de transports n’est pas une institution récente. On la retrouve dans le décret-loi de 1913 sur les voies ferrées d’intérêt local, mais aussi dans le décret du 14 novembre 1949 relatif à la coordination et à l’harmonisation des transports ferroviaires et routiers. Pour ce qui concerne les transports publics urbains, la loi du 19 juin 1979 relative aux transports publics d’intérêt local dite « TPIL » (loi abrogée par la loi Montagne) et son décret d’application nº 80-851 du 29 octobre 1980 relatif aux modalités d’exploitation des services de transports publics d’intérêt local imposaient à « l’autorité organisatrice » de respecter l’un des quatre modèles suivants : gestion aux risques et périls, gestion avec garantie de recettes, gestion à prix forfaitaire ou gérance. Ce décret a été abrogé expressément par l’article 48 du décret nº 85-891 du 16 août 1985, mais il a fortement marqué les catégories de contrats puisqu’on les retrouve aujourd’hui encore parfois alors qu’ils posent des problèmes importants au regard des règles de passation (voir 1re partie point II.2.2). À ces formules contractuelles correspondaient plusieurs conventions-types élaborées pour servir de modèles aux autorités organisatrices et publiées en annexe au décret nº 81-238 du 10 mars 1981 portant approbation de conventions types, d’un règlement intérieur type des régies, ainsi que des cahiers des charges types pour l’exploitation des services de transports publics d’intérêt local, aujourd’hui bien entendu elles aussi non obligatoires, voire illégales sur de nombreux points.

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La LOTI ne fixe pas en elle-même les procédures à suivre pour passer les contrats. Il faut pour cela se référer à d’autres textes (et notamment la loi Sapin et le Code des marchés publics, voir point II). Les articles 7-II et 7-III de la LOTI (ainsi que certains textes qui ont suivi) prévoient toutefois a minima un certain nombre de clauses devant figurer dans les contrats Notons que le service qui se limitait auparavant aux « transports publics réguliers de personnes » a été étendu par une modification de l’article 7-II en 2000 aux « services de transports à la demande », qui doivent donc eux aussi respecter ces textes si les collectivités ou leurs groupements doivent en mettre en place.

A retenir La LOTI prévoyait le « conventionnement » (le transfert de gestion du service par contrat) avant l’existence des « délégations de service public », catégorie de contrats créée en 1993. La LOTI ne mettait pas en place de procédure de passation, le Code des marchés publics et le CGCT en imposent aujourd’hui. Les « modèles » qui ont un temps été obligatoires ont été abrogés, ils auraient été de toute façon incompatibles avec le droit actuel des délégations de service public. L’essentiel des éléments de la LOTI sur le conventionnement consiste à imposer des clauses, certaines obligatoires, d’autres simplement facultatives.

L’identification des contrats de délégation de service public Avant l’intervention des lois nº 92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République, et nº 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie publique, la notion de « convention de délégation de service public » n’était pas employée dans le vocabulaire juridique français. Les divers types de contrats qui ne se présentaient pas sous la forme d’un marché public, étaient regroupés sous l’appellation de « modes de gestion déléguée », selon l’expression utilisée dans les avis du Conseil d’État des 7 octobre 1986 et 7 avril 1987, ainsi que dans la circulaire du 7 août 1987 (Circulaire relative à la gestion, par les collectivités locales, de leurs services publics locaux.) qui recense comme relevant de la gestion déléguée « la concession, l’affermage, la gérance, la régie intéressée ou, le cas échéant, une autre formule ». Notons dès maintenant que cette liste est aujourd’hui inexacte, certains de ces contrats n’étant plus considérés comme des délégations de service public (voir la suite pour plus de détails). Pour autant, avant la loi « Sapin » du 29 janvier 1993 aucune procédure ne devait être suivie pour la passation de ces contrats. Une telle qualification entraînait seulement l’absence de soumission aux procédures de mise en concurrence imposées par le Code des Marchés Publics. Aujourd’hui, les « délégations de service public » sont une catégorie de contrats qui sont soumis à une procédure particulière de publicité et de mise en concurrence précisée aux articles L. 1411-1 et suivants du Code général des collectivités territoriales. La loi MURCEF du 11 décembre 2001 est venue combler le vide laissé par la loi Sapin de 1993 qui ne donnait pas de définition des "délégation de service public" : il y a donc aujourd’hui une définition légale des DSP que l’on retrouve à la fois au premier alinéa de l’article L. 1411-1 du CGCT et à l’article 48 de la loi Sapin qui est encore applicable à l’État. Elle définit ces contrats comme suit :

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Définition légale des délégations de service public

« Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être en charge de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service. »

Trois critères doivent aujourd’hui être pris en considération, pour que soit identifiée une délégation de service public. Ainsi, l’existence d’une délégation de service public est conditionnée par l’objet de la mission confiée au délégataire), par la nature du lien unissant l’Autorité organisatrice au délégataire, et enfin par le mode de rémunération du délégataire. Ce dernier point prend une importance particulière parce qu’il permet de faire la différence entre les marchés publics et les délégations de service public lorsque les autres critères sont communs, comme c’est bien souvent le cas en matière de transports publics. Or, on le sait, le régime de passation n’est pas le même selon que l’on est en matière de marchés publics ou de DSP, ce qui conduit parfois à avoir des contrats illégaux parce que passés selon des procédures inappropriées.

1). La mission confiée au délégataire : la gestion d’un service public La délégation de service public doit avoir pour objet de confier au délégataire la gestion du service public. Il faut donc que la délégation porte sur une activité de service public et que le délégataire se voie confier sa gestion.

A) La notion de service public : les transports en sont généralement L’identification du service public, en dépit du rôle majeur joué par cette notion en droit français, n’est pas toujours aisée : en effet, lorsque les tâches confiées au cocontractant de l’administration ne sont pas parfaitement identifiées comme constitutives d’un service public, il y aura lieu de faire application de la méthode dite du « faisceau d’indices » que « classiquement, la jurisprudence utilise pour déceler la présence d’un service public dans l’activité de personnes privées : le caractère d’intérêt général de l’activité (qui doit être obligatoirement présent), doublé, soit d’un contrôle étroit par la collectivité, soit de la détention de prérogatives de puissance publique » (J-B. AUBY et Ch. MAUGÜE, « Les contrats de délégation de service public », JCP, Ed.G, nº 9, 1994, nº 3743).

1) Les transports sont a priori des services publics… Ce critère ne soulève cependant pas de problèmes particuliers en matière de transports, puisque cette activité est expressément qualifiée de service public par la LOTI :

Article 5 de la LOTI : Le service public des transports comporte l’ensemble des missions qui incombent aux pouvoirs publics en vue d’organiser et de promouvoir le transport des personnes et des biens. […] L’exécution de ces missions est assurée par l’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics en liaison avec les entreprises privées ou publiques qui en sont chargées ou qui y participent en vertu des dispositions de la présente loi. […].

Article 7-II de la LOTI : L’État et, dans la limite de leurs compétences, les collectivités territoriales ou leurs groupements organisent les transports publics réguliers de personnes. L’exécution du service est assurée soit en régie par une personne publique sous forme d’un service public industriel et commercial, soit par une entreprise ayant passé à cet effet une convention à durée déterminée avec l’autorité compétente […]. »

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On notera que le caractère de service public des transports publics est à ce point reconnu, que même le droit communautaire utilise ce terme dans le Traité CE (alors même que le terme de service public n’est jamais utilisé par ailleurs dans ce texte).

Sont compatibles avec le présent traité les aides qui répondent aux besoins de la coordination des transports ou qui correspondent au remboursement de certaines servitudes inhérentes à la notion de service public.

Article 73 de la version consolidée du Traité instituant la communauté européenne (article qui n’a jamais été contesté comme le montre le fait qu’il était repris à l’article III-238 du Projet de Traité portant constitution pour l’Europe)

Ainsi, non seulement le transport public constitue un service public, mais de surcroît la loi prévoit expressément que ce service peut faire l’objet d’une convention. En l’absence de service public, il ne peut y avoir délégation de service public, ainsi que l’a rappelé le Conseil d’État, par deux décisions :

Considérant qu'à la suite d'une procédure sur appel d'offres restreint, la commune de la Ciotat a conclu pour une durée de seize ans, le 22 novembre 1991, avec un groupement d'entreprises dont la société Eurolum est le mandataire un contrat ayant pour objet 'des travaux de modernisation, d'optimisation, voire d'extension ou de création des installations du service public d'éclairage et de signalisation tricolore […] ; qu'il ressort des pièces du dossier que ce contrat ne confie pas au cocontractant l'exploitation ou la gestion d'un ouvrage public et ne saurait dès lors être qualifié de délégation de service public ; que la convention litigieuse constitue par son objet un marché soumis au code des marchés publics […]

Conseil d'État, 7e et 10e sous-sections, 8 février 1999, Préfet des Bouches-du-Rhône c/ Commune de la Ciotat, Req. nº 150931.

Par ailleurs, la chose peut paraître évidente, mais la définition insiste dessus, un délégataire (une autorité organisatrice dans notre cas) ne peut déléguer qu’un « service dont elle a la responsabilité ». Cela signifie que le contrat ne peut être passé que par la personne responsable du service. Concrètement, ne peuvent passer des conventions de délégations que les AO ou les AO2 à laquelle elles ont transmis complètement la compétence transport.

2) …Mais ils n’en sont pas toujours Il convient de montrer les limites de cette qualification qui ne saurait être trop extensive. Ainsi, certains transports de personnes n’ont pas été qualifiés de service public :

• Il s’agit tout d’abord des transports « privés » de personnes. L’article 5 de la LOTI précise en effet : « Sont considérés comme des transports publics tous les transports de personnes ou de marchandises, à

l'exception des transports qu'organisent pour leur propre compte des personnes publiques ou

privées. ». L’article 29 de la LOTI précise d’ailleurs : « Les services privés peuvent être organisés par les collectivités publiques, les entreprises et les associations pour les besoins normaux de leur fonctionnement, notamment pour le transport de leur personnel ou de leurs membres. » Le régime et la définition des transports privés sont précisés dans le décret nº 87-242 du 7 avril 1987, applicable en Île-de-France depuis une loi du 16 avril 2001 qui a modifié l’article 46 de la LOTI. Trois conditions précises sont requises pour qu’un service de transports soit qualifié de « privé » : premièrement la gratuité du service (sauf pour le transport d’handicapés au terme de l’article 4 du décret du 7 avril 1987), deuxièmement l’exécution au moyen de véhicules appartenant à l’organisateur ou pris en location sans conducteur, et troisièmement que le service serve exclusivement à l’établissement de l’intéressé. Par exemple, une communauté d’agglomération mettant en place, pour ses employés, une

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navette entre les différentes mairies sur son territoire fera du transport « privé ». Le fait que ce soit une personne publique n’empêche en rien cette qualification.

• Certains services de transports organisés par des personnes privées, mais ouverts à tous, par exemple un service organisé par les commerçants d’une zone d’activité, ne rentrent pas dans la définition des « services publics »

• Certains services occasionnels de transports ne correspondent par ailleurs pas à la notion de service public, même s’ils sont envisagés par la LOTI ! C’est le cas des services de transports non réguliers pour une colonie de vacances ou certains services touristiques occasionnels : Ils ne peuvent donc faire l’objet d’une délégation de service public et la passation de ce type de contrat doit suivre les règles de passation des marchés publics.

B) L’objet même de la délégation : la gestion du service public

Pour qu’il y ait délégation de service public, il faut que le délégataire se voit confier la conduite et l’exécution même du service public, au lieu d’y apporter simplement sa collaboration comme dans un marché. Pour des développements importants sur ce sujet, voir G. GLENARD, La notion de délégation dans le droit de la délégation de service public : Dr. adm. 2002. chron. 3 et 6 Dans une délégation, il y a une véritable dévolution du service, opérant transfert de la gestion du service de la collectivité vers le délégataire. Le cocontractant de la collectivité doit être véritablement chargé de l’exploitation du service public, et pas seulement être associé à son exécution ou y participer. Comme le soulignait l’Institut de la Gestion Déléguée, la délégation de service public implique que le délégataire se voit confier une mission « particulière, globale et complète ».

1) Comment reconnaître une véritable délégation ? Le professeur J.-B. AUBY (« Délégations de service public : comment reconnaître ces conventions ? », Le Moniteur BTP, 8 novembre 1996, p. 50) relève plusieurs indices permettant de répondre à cette question :

• Le caractère répétitif de la tâche confiée au délégataire, alors que la mission confiée au titulaire d’un marché public s’épuise une fois fournie la prestation individualisée pour laquelle il a été recruté ;

• L’autonomie consentie par la collectivité à son cocontractant dans l’organisation du service

(détermination du règlement intérieur, par exemple), alors que la tâche du titulaire d’un marché public est dirigée par des ordres de service émanant de la collectivité ;

• Le fait que le cocontractant de la collectivité est l’interlocuteur direct des usagers du service.

On peut rajouter à cette liste d’indices les prérogatives de puissance publique dont est susceptible de bénéficier le délégataire pour remplir sa mission (expropriation, préemption, servitudes, occupation du domaine public assortie, le cas échéant, d’une constitution de droits réels sur celui-ci, etc… cf. Ph. TERNEYRE, « La notion de convention de délégation », AJDA numéro spécial Délégation de service public, 20 septembre 1996, p. 588.)

� Par expérience Attention de ne pas confondre les « délégations de signature » et « délégations de compétence » avec les « conventions de délégations de service public ». Dans les premiers cas, le transfert est un acte unilatéral et non un contrat comme dans le dernier. Cet élément de délégation est essentiel à l’existence d’une délégation de service public. Pourtant, l’expérience montre que la différence entre les marchés publics et les délégations de service public ne peut pas se faire sur ce critère (ni seulement sur lui, ni partiellement), dans la mesure où un certain nombre de marchés laissent une grande liberté au cocontractant, au point que le marché public peut être considéré comme « délégant » le service.

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Si cela existe depuis bien longtemps, le critère actuel de distinction entre marchés et concessions, fondé sur la rémunération (voir plus loin dans l’ouvrage) a multiplié le nombre de cas dans lesquels on est face à cette situation.

2) Quels sont les rôles de chacun des cocontractants dans une délégation ? En définitive, voilà comment doivent se répartir les rôles entre les cocontractants pour qu’il y ait véritable « délégation » de service public :

• LE DÉLÉGATAIRE (l’exploitant) doit être en charge de la gestion du service et de son exploitation, « c’est-à-dire combine un ensemble de moyens financiers, matériels, humains et techniques dans le but de délivrer à des usagers une prestation identifiée » (Institut de la Gestion Déléguée - IGD, La délégation de service public comme mode de gestion du traitement des déchets ménagers et assimilés, juin 1998, page 11.) Il est donc nécessaire d’avoir recours à la méthode du « faisceau d’indices » pour déterminer si le cocontractant de l’administration se voit réellement confier la gestion du service public. Pour simplifier, le délégataire doit être chargé de la gestion et de l’organisation quotidienne du service.

• LE DÉLÉGANT (l’autorité organisatrice) doit toutefois, conformément à la notion même de service

public qui implique que l’activité soit placée sous le contrôle d’une personne publique, conserver son pouvoir d’organisation du service et demeurer chargée du contrôle du délégataire. Ce pouvoir est spécialement important en matière de transports comme le montre le nom donné aux collectivités : « autorités organisatrices ». Cela montre bien qu’elles ont seules la compétence pour fixer l’organisation générale du service.

Pour qu’il y ait « délégation » du service public, la relation entre le délégant et le délégataire a été résumée ainsi : « le concessionnaire gère et l’administration contrôle ». Cette formule, tirée des conclusions du commissaire du gouvernement P.-L. JOSSE sur l’arrêt du Conseil d’État 18 juillet 1930 Cie des chemins de fer PLM et autres, montre bien l’équilibre qu’il y a à trouver dans les rôles de chacun : le délégant a une obligation générale d’organisation et de surveillance de la bonne exécution du contrat, mais ce contrôle ne doit pas être tel qu’il y a en réalité régie directe, il ne faut pas que la collectivité retire toute liberté de manœuvre au délégataire.

Attention En l’absence d’une véritable délégation du service public, le contrat sera nécessairement un marché public de service, soumis comme tel au Code des marchés publics et non à la procédure des DSP

3) Tous les services ne sont pas délégables… les transports le sont-ils tous ? Le recours à la délégation contractuelle du service public n’est cependant possible que dans la mesure où l’activité de service public est délégable.

Si l’ensemble des services publics à caractère industriel et commercial sont susceptibles de faire l’objet de délégation de service public, il existe en revanche des limitations à la possibilité de déléguer certaines activités de service public administratif. Dans un avis en date du 7 octobre 1986, le Conseil d’État a posé le principe selon lequel « le caractère administratif d’un service public n’interdit pas la collectivité territoriale compétente d’en confier l’exécution à des personnes privées, sous réserve toutefois que le service ne soit pas au nombre de ceux qui, par leur nature ou par la volonté du législateur, ne peuvent être assurés que par la collectivité territoriale elle-même ».

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De manière constante, il est admis que ne peuvent être déléguées, d’une part, les missions que les collectivités territoriales accomplissement au nom de l’État (état civil, élections, …) et, d’autre part, les activités se rattachant à l’exercice du pouvoir de police. a) S’agissant des transports de voyageurs, il n’existe aucune restriction à la possibilité de déléguer une telle activité. Cela est vrai pour ces activités lorsqu’elles ont un caractère industriel et commercial, et l’on peut se demander si la LOTI ne qualifie pas légalement les « services de transports » de services industriels et commerciaux. L’article 5 de la loi le fait pour la réalisation des infrastructures et leur entretien, les informations sur les systèmes de transports, la réglementation, la recherche et les études, et l’organisation des transports publics (points a à e de l’article 5). L’article 7 qualifie expressément ces services de SPIC lorsqu’ils sont réalisés en régie… la situation pour la gestion par une entreprise privée sous contrat n’étant pas qualifiée. b) S’agissant des transports scolaires, ils ont été qualifiés de « services publics administratifs » par un arrêt du Tribunal des conflits du 5 juillet 1982 DRIS. Sur ce point, l’article 7-II de la L.O.T.I. ne fait aucune différence et prévoit implicitement le recours à ce mode de gestion du service public quel que soit la qualification du service public. Le Conseil d’État est plus nuancé dans ses analyses et semble laisser entendre qu’il ne peut y avoir de délégation de service public de services publics administratifs, donc de transports scolaires. Il a abordé cette question dans un avis du 27 juin 1996 (EDCE 1996, nº 48) qui revient sur le premier avis précité du 7 octobre 1986. Ce nouvel avis prend en compte l’évolution jurisprudentielle, et notamment des précisions sur le mode de rémunération, pour conclure que le mode normal de gestion des transports scolaires est le marché public sauf s’il y a des recettes propres, ce qui n’est en théorie possible qu’avec des services public « industriels et commerciaux », les services publics « administratifs » n’étant pas faits pour fournir des recettes. C’est dans ce sens que va aussi la circulaire nº 98-43 du 19 mars 1998, relative aux règles applicables aux conventions de transports publics réguliers de personnes - Dispositions particulières relatives aux transports scolaires (BO équipement nº 7 du 25 avril 1998) qui tire les conséquences de cet avis. Les transports scolaires peuvent donc être délégués lorsqu’ils sont gérés de manière « commerciale » tout en restant un service public « administratif ». On ajoutera une seconde hypothèse dans laquelle les transports scolaires peuvent être l’objet d’une convention de délégation de service public : celle dans laquelle les transports scolaires sont adossés à toutes les autres lignes régulières, dans le même contrat. Dans ce cas, le caractère « peu risqué », voire « pas risqué » de ce service peut empêcher que le contrat, dans son ensemble soit encore une délégation de service public ; cela dépend de la part de risque qui existe dans le mode de rémunération des autres lignes. On pourra par ailleurs s’amuser à constater ce qui peut apparaître comme une contradiction à propos du transport scolaire : effectué en régie, il est un service public industriel et commercial au terme de l’article 7-II de la LOTI. En revanche, lorsqu’il est géré par une personne privée, si l’arrêt Dris précité s’applique encore (il juge d’une situation d’avant la LOTI) et que l’on ne pense pas que l’article 7-II qualifie, légalement, tous les transports public de SPIC, il est un service public administratif. Il serait donc industriel et commercial lorsqu’il est géré par une personne publique et administratif lorsqu’il est géré par une personne privée. La jurisprudence gagnerait à être remise en ordre sur ce point.

2). La nature du lien juridique unissant l’Autorité organisatrice au délégataire : la nécessité d’un contrat La nécessité d’un contrat est constante (A), même si l’on peut penser qu’elle sera peut-être remise en cause dans l’avenir (B). Les cas particuliers ne reviennent en tout cas pas sur cette situation aujourd’hui (C).

A) La nécessité d’un contrat

La délégation de service public est conditionnée par l’existence d’un contrat conclu entre la collectivité délégante et le délégataire. Cela est vrai en général, ainsi que dans le cas de délégations de service public

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conclues entre deux personnes publiques (a été mentionnée en introduction la possibilité pour les établissements publics de concourir à des DSP). L’article L. 1411-1 du Code général des collectivités territoriales le dit dans la définition, l’article L. 1411-2 souligne cet élément en utilisant l’expression « convention de délégation de service public ». La nature du lien unissant l’Autorité organisatrice au délégataire est donc nécessairement un contrat, c’est-à-dire un accord de volonté auquel les deux signataires (autorité délégante et délégataire) ont concouru. Cette interprétation a d’abord été confirmée par un avis de la Section des Travaux Publics du Conseil d’État en date du 9 mars 1995 relatif aux transports publics dans la région parisienne. Dans cet avis, le Conseil d’État a exclu l’application des règles relatives aux délégations de service public lorsque le gestionnaire du service public est désigné par voie unilatérale :

« Il ressort des dispositions [de la loi Sapin], éclairées par les travaux préparatoires de la loi, que les conditions qu’elle pose ne s’appliquent qu’au cas où de telles délégations font l’objet de contrat. Il en est ainsi même des formules de publicité qui doit, selon l’article 38, précéder le choix du délégataire. Par suite, lorsque ce choix est le résultat d’une décision unilatérale prévue par un texte, prise par l’autorité responsable de l’organisation du service, une telle décision n’a pas être soumis aux formalités de l’article 38 de la loi du 29 janvier 1993 »

Conseil d'État, Avis, Section des Travaux Publics, 9 mars 1995, [E.D.C.E. 1995 p. 399]]]].

Cette solution a également été confirmée par une décision contentieuse du Conseil d’État en date du 22 mars 2000 M. et Mme Lasaulce (nº 207804, B.J.C.P. nº 11 p. 252 et s.), à propos des opérations de dépannage sur autoroutes. Dans ses conclusions, le Commissaire du gouvernement, Monsieur H. SAVOIE, soulignait que le dépannage sur autoroute, constitue, conformément à l’article R. 43-4 du Code de la Route, une activité de service public que peuvent exercer les entreprises ou personnes habilitées par décision unilatérale de l’autorité administrative. Cependant, au cas d’espèce, le Préfet du Val de Marne avait décidé de se placer dans un cadre contractuel, de sorte, que le Conseil d’État a considéré que les règles relatives à la passation des conventions de délégation de service public étaient applicables. A contrario, le Préfet aurait légalement pu décider de se limiter à une habilitation unilatérale, sans recours à une délégation de service public Dans un autre arrêt du 3 mai 2004, Fondation assistance aux animaux, le Conseil d’État rappel que les procédures des délégations de service public ne sont applicables qu’aux délégations consenties par voie contractuelle. Plus encore, il rappel qu’il n’existe aucun principe général du droit qui impose la mise en concurrence des délégations unilatérales.

« Considérant qu’il résulte de ces dispositions [de l’article 38 de la loi Sapin, repris à l’article L. 1411-1], corroborées au demeurant par les débats parlementaires ayant précédé le vote de la loi du 29 janvier 1993 [il s’agit de la loi Sapin], que la procédure qu’elles définissent s’applique aux seules déélgations consenties par voie contractuelle […] »

CE 3 mai 2004 Fondation assistance aux animaux, req. n° 249.832, Bulletin juridique des contrats publics n° 37 avec les conclusions E. Glaser.

B) Une future remise en cause ?

Cette situation est pourtant l’objet de nombreux débats aujourd’hui. En effet, le droit communautaire ne s’arrête pas aux qualifications internes, il pose ses propres notions. En la matière, il semble qu’il veuille remettre en

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cause la référence à la présence d’un contrat afin d’éviter que cela ne permette aux États de ne pas mettre en concurrence en détournant les directives sur les marchés publics. Deux textes communautaires vont dans ce sens.

• Le premier est la « communication interprétative sur les concessions en droit communautaire des marchés publics » du 12 avril 2000 de la commission. Cette communication est particulièrement intéressante, puisqu’elle semble penser que certains actes unilatéraux doivent être passés après des procédures de mise en concurrence décrites dans les directives « marchés publics » (voir le Titre 3 de cette première partie.

« les actes étatiques par lesquels une autorité publique confie à un tiers – que ce soit par un acte contractuel ou par un acte unilatéral ayant reçu le consentement de ce tiers – la gestion totale ou partielle de services qui relèvent normalement de sa responsabilité et pour lesquels ce tiers assume l’essentiel du risque d’exploitation. Les services ne sont visés par la présente communication que s’ils s’analysent en une prestation d’activités économiques au sens des articles 52 et 66 du traité ».

La commission considère en effet, qu’il soit contractuel ou unilatéral, tout acte étatique fixant les conditions auxquelles une prestation d’activités économiques est subordonnée, est à apprécier au regard des principes du traité ou dégagés par la Cour de Justice des Communautés Européennes, au nombre desquels figurent les principes de non-discrimination, d’égalité de traitement, de transparence, de reconnaissance mutuelle, de proportionnalité, sans oublier la primauté du droit communautaire.

• Le second est le projet de règlement relatif aux services publics de transports de voyageurs par

chemin de fer et par route. Ce dernier soumet ce qu’il appelle les « contrats de service public » à des mises en concurrences. La spécificité communautaire apparaît dans la définition pour le moins étonnante de ces contrats de service public à l’article 2-i) :

Article 2- (i) "Contrat de service public": un ou plusieurs actes juridiquement contraignants manifestant l’accord entre une autorité compétente et un opérateur de service public en vue de confier à l’opérateur de service public la gestion et l’exploitation des services publics de transport de voyageurs soumis aux obligations de service public. Selon le droit des Etats membres, le contrat peut également consister en une décision arrêtée par l’autorité compétente qui :

• Prend la forme d’un acte individuel législatif ou réglementaire, ou • Contient les conditions dans lesquelles l’autorité compétente elle-même fournit

les services ou confie la fourniture de ces services à un opérateur interne ».

On constate bien à la lecture de cet article que la notion de contrat est spécialement extensible.

• Cependant, on ne peut pas aujourd’hui penser que cette approche extensive constitue le droit positif. La référence du droit français à l’existence d’un contrat, référence que l’on retrouve en droit communautaire, limite bien aux contrats tels qu’on les entend aujourd’hui l’application de la loi Sapin et de l’article L. 1411-1 du CGCT. Au pire peut-on avoir un doute sur un acte qui serait formellement un acte unilatéral, mais qui conditionnerait lui-même son application à l’acceptation du « délégataire ». On pourrait alors contester son caractère d’acte unilatéral puisqu’il aurait tous les critères du contrat (notamment une validité fondée sur l’accord des volontés).

A retenir Aujourd’hui, il n’y a pas de doute : les conventions de délégation de service public qui sont soumises à la loi Sapin ou aux articles L. 1411-1 et s. du CGCT ne sont que les délégations qui sont passées par contrat. L’Union européenne semble vouloir revenir dessus mais ce n’est pas encore le cas.

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3). La rémunération du délégataire, où comment distinguer les marchés publics de transports des délégations de service public de transports Le « transport public » constitue une matière un peu particulière :

• non seulement les critères qui sont communs aux deux définitions des marchés publics et des délégations de service public sont la plupart du temps remplis (il y a bien, en marché comme en délégation, un contrat, un service public – de transport – qui est géré par le cocontractant, une personne publique à la base du contrat et un cocontractant public ou privé) ;

• mais en plus, du fait du caractère structurellement déficitaire de la matière, le paiement du cocontractant a presque toujours une part non négligeable de son montant qui prend la forme d’une « subvention » ou d’un « forfait » que l’on assimile à un prix.

• Par conséquent, la question de la distinction entre marchés publics et délégations de service public est fondamentale en matière de transports publics.

Aujourd’hui, après de nombreuses hésitations, on peut dire que dans ce cas, le critère de distinction entre les marchés et les délégations est fondé sur le mode de rémunération, tel qu’interprété par la jurisprudence. Celui-ci doit être présenté en général (A) et concrétisé par des cas en matière de transports (B)

A) Un critère de la rémunération à aborder en deux temps Retrouvons la définition des conventions de délégations de service public telle qu’elle existe à l’article L. 1411-1 du CGCT depuis 2001, avec, en gras, ce critère de la rémunération : « Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de

l'exploitation du service. Le délégataire peut être en charge de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service. » Ce critère est une reprise par la loi de ce que la jurisprudence avait (à peu de chose près) fixé dans l’arrêt Préfet des Bouches-du-Rhône, rendu par le Conseil d’État le 15 avril 1996 (RFDA 1996, nº 4, note Ph. TERNEYRE ; CJEG, juillet-août 1996, p.267, conclusions Ch. CHANTEPY. Le mode de rémunération du cocontractant : critère unique d’identification de la délégation de service public ? par F. SARTORIO et Ch. LONQUEUE, La Gazette des Communes, 23 septembre 1996, p.34).

Considérant que les dispositions de la loi [Sapin], n'ont pas eu pour objet et ne sauraient être interprétées comme ayant pour effet de faire échapper au respect des règles régissant les marchés publics, tout ou partie des contrats dans lesquels la rémunération du cocontractant de l'administration n'est pas substantiellement assurée par les résultats de l'exploitation ; Considérant que le contrat litigieux, conclu entre la commune de Lambesc et la société « Silim Environnement » prévoyait que la rémunération du cocontractant serait assurée au moyen d'un prix payé par la commune ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que, même incluse dans un contrat conclu après l'entrée en vigueur de la loi du 29 janvier 1993, cette stipulation obligeait à regarder ledit contrat comme un marché soumis aux règles régissant les marchés publics ; qu'il n'est pas contesté que les règles dont il s'agit n'ont pas été, en l'espèce, respectées ; que, par suite, ledit marché ainsi que la délibération du conseil municipal le concernant étaient entachés d'irrégularité ;

Conseil d’État, 7e et 10e sous-sections, 15 avril 1996, Préfet des Bouches -du Rhône, Req. nº 168325 , Rec. p. 137

On peut distinguer deux temps dans ce raisonnement : l’existence d’une rémunération qui dépende des résultats de l’exploitation (1) et le caractère « substantiel » de celle-ci qui renvoie à une idée de risque (2).

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1) Une rémunération devant dépendre des résultats de l’exploitation On peut facilement partir de ce qui est à l’origine des contrats des délégations de service public : les concessions. Le principe en est que l’usager du service paye une redevance pour bénéficier du service public, comme on peut en voir un exemple avec un billet de bus qui paierait le voyage. Cet exemple est pourtant théorique : d'une part, la plupart des services publics ne sont pas « rentables », c’est-à-dire que les billets ne suffisent pas à payer le service, d’autres part certains services publics ne permettent pas de payer un billet, mais restent des délégations de service public.

• Les services de transports ne sont pas rentables. On le sait, l’activité de transport public est structurellement déficitaire. Si l’on souhaite conserver des tarifs attractifs pour les usagers et socialement supportables (compte tenu de la mission d’intérêt général conférée aux réseaux de transports), couvrir par les seules recettes tirées de l’exploitation du service, les charges d’exploitation, hors investissements, est en effet impossible.

• Certains services ne sont pas payés par les bénéficiaires du service. En matière de transports, on pense là à des hypothèses dans lesquelles la dimension sociale est importante, ce qui conduit les AO à proposer le service « gratuitement » à la population : transports scolaires ou d’handicapés. On pense aussi aux quelques cas (mais en extension) dans lesquels l’AO met en place un réseau complètement gratuit.

Dans ces deux hypothèses, une partie ou la totalité du montant du service est payée par la collectivité. Cette situation est donc différente du « modèle » de la concession (qui a servi de modèle à l’ensemble des délégations de service public) dans lequel la rémunération est uniquement issue des redevances payées par les usagers. Le problème est que ces sommes payées directement à l’exploitant par la collectivité n’ont que très peu de différence avec un prix. Tellement peu en réalité qu’on considère qu’il s’agit d’une « part » de prix. C’est là que le critère d’une « rémunération [substantiellement] liée aux résultats de l'exploitation du service » prend tout son sens : il faut que, quel que soit le mode de financement, son montant dépende de l’exploitation du service. Cela a deux conséquences :

• Au mieux, une partie non négligeable de la rémunération de l’exploitant doit malgré tout être payée par l’usager. C’est le cas la plupart du temps. Le « prix » payé par la collectivité est alors présenté comme un « forfait » ou comme une « subvention ». Le contrat ne pourra dans ce cas être une délégation de service public que si la rémunération directe par les usagers est « substantielle » (voir ci-dessous pour des explications).

ET/OU • Le prix doit dépendre de l’exploitation : En cas de paiement complet par la collectivité, le contrat

peut encore être une délégation de service public si la rémunération dépend de l’exploitation réelle du service, le « substantiel » est alors analysé comme devant laisser au cocontractant un « risque » (voir ci-dessous).

• MAIS si la « subvention » ou le « forfait » ne voit pas son montant dépendre de l’exploitation

effective et qu’il n’y a pas ou très peu de rémunération sur l’usager, ALORS LE CONTRAT NE PEUT ÊTRE QU’UN MARCHE PUBLIC

La qualification dépend donc, lorsque l’on est dans ce cas (c’est-à-dire bien souvent) de la façon dont le juge a compris la notion de « substantiellement lié aux résultats de l’exploitation ».

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2) Le « substantiellement » où le critère du « risque » a) Le raisonnement des juges Les praticiens du droit pensent bien souvent qu’il serait simple d’avoir une idée précise, mathématique, pour savoir si l’on est en présence d’une rémunération substantielle sur les résultats de l’exploitation. Ce n’est (malheureusement, diront certains) pas le cas. L’appréciation est plus compliquée, mais aussi plus subtile. La notion de « substantiellement » s'apprécie au cas par cas, en regardant si la part de rémunération non liée à l'exploitation ne retirerait pas le risque d'exploitation au cocontractant pour le faire retourner à la collectivité. En effet, si l'activité baisse, mais que le « forfait annuel » représente une grande part des bénéfices, le cocontractant ne supporte plus le risque du contrat. Or, plus encore que les redevances (même s’il y en a la plupart du temps), c'est le risque d'exploitation qui caractérise les délégations de service public. En somme, le « substantiellement » doit être interprété comme « qui permet de laisser le risque d'exploitation entre les mains du cocontractant de l'Administration ». Plus encore, on peut dire que le « risque » doit être compris comme le « risque de perte » et pas seulement le « risque de gagner un peu plus ou un peu moins ». Preuve en est l’article 16 du Code des marchés publics qui autorise les primes incitatives afin de pousser à un développement du service : a contrario, si cela est autorisé par le CMP, cela veut dire que la possibilité de plus ou moins de gains n’est pas un critère des délégations de service public. Le cocontractant doit donc pouvoir perdre de l’argent selon la qualité de sa gestion et de sa capacité à faire venir plus ou moins de clients. Sur ce point, le commissaire du gouvernement C. BERGEAL a précisé : « Pour vérifier si le cocontractant assume ou non un risque lié à l’exploitation, le recours à la notion de résultats nous paraît particulièrement approprié. Cette notion n’exclut nullement, nous semble-t-il, que puissent être prises en compte d’autres sources de revenus liés à l’exploitation que ceux directement perçus sur l’usager. Ainsi, il nous semble qu’un transporteur assume

un risque lorsque sa rémunération, qu’elle soit directe ou transite par la collectivité, dépend directement du

nombre de voyageurs qu’il prend en charge […] Ce qui est déterminant pour s’assurer de l’existence d’une responsabilité réelle du délégataire dans la gestion du service public, c’est, en fin de compte, que l’équilibre

financier du contrat dépende des recettes engendrées par l’exploitation du service. ». C'est pour cette raison que le pourcentage du chiffre d'affaires devant dépendre des résultats de l'exploitation est propre à chaque contrat et qu'il ne peut être fixé une fois pour toutes. En la simplifiant à l’extrême, on peut dire que la dernière phrase de Mme C. BERGEAL signifie que si l’exploitant gère correctement le service, il doit gagner de l’argent et que, s’il le gère mal, il doit pouvoir en perdre. b) Qu’est-ce que le risque ? Les différentes formes de risques La question n’est pas souvent expliquée dans les ouvrages sur les délégations de service public. Il peut pourtant prendre selon nous trois formes différentes.

• Un risque d’investissement : c’est le risque du cocontractant dans l’investissement qu’il faut faire avant d’effectuer le service public. On pense notamment à la création du réseau dans le cadre des TCSP (transports en commun en site propre) comme la mise en place de rails de tramways ou de couloirs de bus. Ce risque est la plupart du temps faible dans le cadre d’une délégation de service public, l’AO le prenant souvent en charge sauf dans le cadre des concessions dans lesquelles il est pris en très grande partie ou en totalité par l’exploitant (voir plus bas les différents types de contrats). Notons que le risque d’investissement peut être considéré comme ne permettant pas de faire la distinction entre marchés et délégations de service public dans la mesure où les marchés peuvent aussi bien transmettre ce risque au cocontractant (c’est le cas des marchés à forfait) ou les conserver en très grande partie.

• Un risque portant sur les charges d’exploitation : on l’appelle aussi « risque industriel » ou « risque portant sur la gestion de l’entreprise ». Il s’agit de savoir qui va supporter les hausses et qui va

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bénéficier des baisses des charges qui ressortissent de la gestion de l’entreprise fournissant le service : charges de personnel, essence, entretien, impôts, frais de gestion, électricité…

• Un risque portant sur les recettes d’exploitation : on l’appelle aussi « risque commercial » ou

« risque portant sur les bénéfices d’exploitation ». Il s’agit de savoir qui va supporter les bénéfices ou les pertes qui vont résulter de l’activité même, notamment les baisses de fréquentation ou les grèves. C’est sur ce point qu’il peut y avoir une distinction entre une rémunération « liée aux résultats de l’exploitation » et une rémunération « risquée » : si le paiement dépend du nombre d’usagers, (X euros /usager par exemple) mais que la clientèle est captive (par exemple des scolaires allant tous les jours à l’école), il n’y a aucun transfert des risques d’exploitation du service… et donc pas délégation de service public mais marché. Le « risque » en question signifie que le dynamisme commercial ou la qualité du service de l’exploitant ont une influence sur la fréquentation et, de ce fait, sur ces pertes ou bénéfices.

Mais quel risque prendre en compte ? On remarque une différence de mode de calcul entre les seuils selon les arrêts. Pour l’heure, la jurisprudence n’a pas précisé si l’un des modes de calcul doit primer entre

• la différence, en pourcentage, entre les recettes qui subissent un aléa et les recettes totales prévisionnelles.

• la différence, en pourcentage, entre les recettes de l’exploitation potentielles et les charges prévisionnelles.

Or, si dans les deux modes de calculs, le « risque d’exploitation du service » est pris en compte, dans le second, le « risque de gestion de l’entreprise l’est aussi ». Il ne faut donc pas forcément s’arrêter aux termes mêmes de l’article L. 1411-1 du CGCT qui utilise le terme de « résultats de l’exploitation du service », ni aux conclusions de Mme Catherine BERGEAL précitées. Dans le même sens, l’arrêt suivant ne peut être pris au pied de la lettre que si l’on calcule le pourcentage de rémunération lié aux résultats de l’exploitation selon la première formule ci-dessus.

Considérant qu'il résulte des stipulations mêmes de la convention du 3 décembre 1990, intervenue entre le Syndicat intercommunal des transports publics de la région de Douai et la Compagnie générale française des transports et d'entreprises, que le syndicat a confié la responsabilité de la gestion du service de transport public de voyageurs de la région de Douai à une entreprise privée qui perçoit des redevances sur les usagers et supporte, dans certaines limites, le risque financier de l'exploitation ; que ces modalités d'exploitation caractérisent l'existence d'une délégation de gestion d'un service public au sens des dispositions sus rappelées de l'article L.163-13 du code des communes ;

Conseil d'État, 9e et 8e sous-sections, 15 juin 1994, Syndicat Intercommunal des Transports Publics de la région de Douai, Req. n° 136.734

La question est par ailleurs légèrement différente dans la circulaire du 19 mars 1998 relative aux règles applicables aux conventions de transports publics réguliers de personnes puisqu’elle utilise le terme de « risque d’exploitation » alors que le risque compare les recettes d’exploitation et les charges de gestion :

« La prise en compte des résultats d’exploitation suppose pour qualifier le contrat de se fonder sur les prévisions de recettes attendues de l’exploitation confiée à l’entreprise et sur le caractère aléatoire de celle –ci qui traduit un risque d’exploitation. Il convient de souligner que dans le domaine des transports publics, le lien entre rémunération et résultats d’exploitation renvoie d’abord directement ou indirectement au risque de fréquentation »

On remarquera une phrase suivante de cette circulaire qui va parfaitement dans notre sens : « qu’une rémunération constituée de recettes perçues par l’entreprise auprès des usagers mais qui serait assortie d’une garantie totale d’équilibre non plafonnée ne permettrait pas de caractériser une délégation de service public ; en revanche, si l’entreprise de transport est rémunérée directement par la collectivité, mais que cette rémunération est étroitement corrélée

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aux aléas de fréquentation (sur la base de la fréquentation réelle ou de comptages), le contrat pourrait être qualifié de délégation de service public ».

B) Les cas d’application : quelle proportion de subvention est donc autorisée ?

La jurisprudence a cependant donné des pistes pour préciser un peu et donner (des exemples) de « pourcentages de rémunération liée à l’exploitation » qui permettent de retenir l’existence d’un transfert du risque. Mais ces exemples ne sont pas absolus et dépendent des clauses exactes des contrats. Comme le dit Catherine BERGEAL dans ses conclusions sur l’arrêt CE 7 avril 1999 Commune de Guilherand-Granges :

« il doit être clair que par résultats d’exploitation, il est entendu résultats financiers des produits engendrés par la gestion du service. Cela n’exclut donc pas que puissent être prises en compte d’autres sources de revenus liés à l’exploitation, que celles directement perçues sur l’usager, par exemple des recettes publicitaires. Ces recettes d’exploitation ne doivent pas nécessairement être majoritaires, mais elles ne peuvent être insignifiantes. Il serait vain de fixer un pourcentage précis. Ce qui est déterminant pour s’assurer de l’existence d’une responsabilité réelle du délégataire dans la gestion du service public, c’est, en fin de compte, que l’équilibre financier du contrat dépende des recettes engendrées par l’exploitation du service. Nous vous proposons par conséquent de juger, qu’il ne peut y avoir délégation de service public, lorsque l’équilibre financier du contrat ne dépend pas des recettes liées à l’exploitation du service »

1) 1er cas Dans l’arrêt du Conseil d’État du 30 juin 1999 Syndicat mixte du traitement des ordures ménagères centre ouest Seine-et-marnais (SMITOM), le CE a admis qu’un contrat dans le cadre duquel la rémunération du délégataire était, pour au moins 30% de sa valeur, liée aux résultats de l’exploitation, constituait une convention de DSP (malgré les 70 % de subvention). C’est à partir de cet arrêt que l’on a estimé qu’il y avait recours au critère du risque.

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond, et notamment de l'avis publié au Bulletin officiel des annonces des marchés publics du 19 décembre 1997, que la rémunération prévue pour le cocontractant était composée d'une part d'un prix payé par le Syndicat mixte du traitement des ordures ménagères centre ouest Seine-et-Marnais pour le traitement des déchets collectés auprès des adhérents de celui-ci et, d'autre part, d'une partie variable provenant tout à la fois des recettes d'exploitation liées au traitement des déchets collectés auprès d'autres usagers que les adhérents du SMITOM, de la vente de l'énergie produite et des éventuelles recettes supplémentaires liées aux performances réalisées dans le traitement des déchets collectés auprès des adhérents du syndicat ; qu'il ressort des pièces du dossier que la part des recettes autres que celles correspondant au prix payé par le SMITOM devait être d'environ 30 % de l'ensemble des recettes perçues par le cocontractant du SMITOM ; que, dans ces conditions, la rémunération prévue pour le cocontractant du SMITOM était substantiellement assurée par le résultat de l'exploitation du service ; que, dès lors, le contrat envisagé devant être analysé non comme un marché, mais comme une délégation de service public, la procédure engagée par le Syndicat mixte du traitement des ordures ménagères centre ouest Seine-et-Marnais pour la passation de ce contrat était soumise aux dispositions précitées de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales ;

Conseil d’État, 7e et 10e sous-sections, 30 juin 1999, Syndicat mixte du traitement des ordures ménagères centre ouest Seine-et-Marnais, Req. n° 198147

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2) 2e cas Dans certaines conditions, le juge administratif a accepté un financement plus important encore de la part de la personne publique.

• Le TA de Nice, dans un jugement du 26 mai 2000, Préfet du Var c/ Département du Var, a considéré, après une analyse détaillée des contrats litigieux, que constituait une DSP, la convention dans laquelle la part de recettes du transporteur, autre que la subvention du déficit d’exploitation versée par le Département et susceptible d’être complété par les communes pour les transports scolaires, représentait un pourcentage de 24,83%.

Considérant qu’il convient de constater que la part de la recette des transporteurs dans leur rémunération représente respectivement un pourcentage de 47,63% (lot 6), 65,56% (lot7), 65,16% (lot 23), 29,35% (lot 9), 40,40% (lot 10), 47,46% (lot 11), 42,68% (lot20), 72,89% (lot 34), 24,83% (lot36), et même 92,07% (lot 30) ; que le préfet du Var n’allègue pas que les autres aides départementales annoncées sous la formule, inscrite dans le préambule des conventions, de « la mise en place d’un faisceau d’indices…qui conduira pour un grand nombre de lignes régulières, à équilibrer leur compte d’exploitation », remettraient en cause cette part significative de la recette d’exploitation, qu’elle provienne des usagers ou pour le transport des élèves, à 72% du département (100% en zone montagne) et le cas échéant, en tout ou partie du pourcentage restant, des communes, qualifiées de collectivités publiques organisatrices secondaires dans le cadre de conventions tripartites ; que par ailleurs, si l’autorité préfectorale, à l’appui de la requalification des conventions en marchés, dénonce la subvention de 72% du département susceptible d’être complétée par les communes pour le transport scolaire, elle n’établit ni même n’allègue que la part entièrement subventionnée de ce transport serait représentative de la quasi-totalité de la recette, comptant pour accessoire les recettes perçues directement par le transporteur auprès des autres usagers, que dès lors, le préfet du Var ne démontre pas, en se bornant à mettre en exergue le taux de subvention du déficit d’exploitation, qu’eu égard à l’importance, ci-dessus chiffrée en pourcentage, du montant de la recette dans la rémunération des cocontractants de l’administration, soumise aux aléas de la fréquentation des usagers autres que les élèves, cette rémunération ne serait pas substantiellement assurée par le résultat de l’exploitation des services (…)

Tribunal Administratif de Nice du 26 mai 2000, Préfet du Var C/ Département du Var, req nº 99.4543, 99.4544, 99.1799

3) 3e cas

• Toutefois, dans un jugement daté du même jour, le tribunal administratif de Nice a requalifié certaines conventions de délégation de service public en marchés publics en considérant que la part de la recette n’était pas suffisamment significative pour estimer que la rémunération des cocontractants de l’administration était substantiellement assurée par les résultats de l’exploitation. (À suivre la logique du premier jugement, le pourcentage de recettes était tous inférieurs à 16%).

Qu’en réalité, il y a lieu de constater par comparaison entre les montants déjà mentionnés du coût auquel les entreprises s’engagent à exécuter les prestations et l’estimation par celles-ci de leur recette la part, toute relative, de cette recette prise dans la rémunération des transporteurs, eu égard à l’importance du déficit d’exploitation auquel s’applique le taux de la subvention départementale ;(…), qu’enfin le paiement du transport des élèves effectué directement par les communes suivant l’emploi du temps scolaire visé par les chefs d’établissement d’enseignement, n’expose pas les transporteurs aux fluctuations de recettes liées à la fréquentation scolaire effective.

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Tribunal Administratif de Nice du 26 mai 2000, Préfet du Var c/ Département du Var, req nº 99.1796, 99.1800, 99.4541

4) 4e cas

• Deux arrêts de la Cour administrative d’appel de Marseille du 5 mars 2001, Département du Var, ont qualifié de DSP des conventions relatives à l’exploitation de lignes régulières routières interurbaines dans lesquelles le cocontractant supportait seulement 10% du déficit d’exploitation, la subvention de la collectivité couvrant 90% du déficit d’exploitation (90% de la différence entre le montant des charges et le montant des recettes). En l’espèce, il s’agissait d’un cas limite d’application de la notion de « rémunération substantielle ».

Considérant que, par la délibération nº 9/15 du 25 mai 1998, la commission permanente du conseil général du VAR a décidé, d'une part, d'approuver les documents composant les dossiers de consultation et le cahier des charges de projets de conventions relatives à l'exploitation de lignes routières interurbaines interdépartementales, et d'autre part, d'autoriser le président du conseil général à signer lesdites conventions ; qu'il ressort des pièces du dossier que la rémunération prévue pour les cocontractants est composée, d'une part, des redevances perçues sur les usagers, et d'autre part, d'une aide égale, aux termes des stipulations de l'article 4-5 du projet de cahier des charges, à "90 % de la différence entre le montant des charges actualisées figurant dans l'acte d'engagement et le montant des recettes perçu par l'exploitant pour le lot considéré" ; que, dans ces conditions, le Préfet du Var n'est pas fondé à soutenir que la rémunération prévue, à ce stade de la procédure, pour le cocontractant du département, n'est pas substantiellement assurée par le résultat de l'exploitation du service ; que dès lors, le contrat envisagé doit être regardé non comme un marché mais comme une délégation de service public ;

CAA Marseille 5 mars 2001, Département du Var, nº 99MA01751, Inédit au Recueil Lebon

5) 5e cas

• Le jugement du TA de Nantes du 17 juillet 2002, Société Hervouet France et les Cars Bleus Brisseau est très intéressant pour les modalités de calcul du risque.

Il a considéré qu’un risque d’exploitation à hauteur de 7 % seulement n’était pas suffisant pour qualifier le contrat de DSP. Dans cette affaire, le juge a analysé le dispositif contractuel suivant : 93 % des recettes d’exploitation proviennent des abonnés scolaires, contre 7 % pour les autres usagers. Le juge a estimé qu’il n’y avait pas de transfert du risque dès lors que :

• d’une part les abonnés scolaires sont subventionnés à hauteur de 80 % par le Conseil général (le risque sur les abonnés scolaires est donc limité à 20 % du total des recettes des usagers scolaires, ce pourcentage n’étant même pas avéré, l’accès des enfants aux transports étant subordonné au règlement préalable des familles) ;

• D'autre part, la fréquentation de la population scolaire est stable (inexistence d’un quelconque aléa lié à la fréquentation) ;

• Enfin, le déficit d’exploitation du service est intégralement couvert par le Conseil général à hauteur de 10 % d’augmentation et couvert à 70 % au-delà (ce qui réduit à une part infime l’intéressement lié aux coûts d’exploitation).

� Le juge a estimé que le risque d’exploitation supporté par l’exploitant ne portait que sur l’aléa de fréquentation des usagers non scolaires, à savoir 7 % du total des recettes d’exploitation (on note que le juge n’a pas intégré dans son raisonnement le risque portant sur les 20 % des recettes scolaires).

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6) 6e cas

• Par ailleurs, un arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes 12 avril 2000, Commune d’Olivet (req n°972217, BJCP n°13, p. 456), a précisé que ne constitue pas une délégation de service public un contrat de transport scolaire qui ne contient en réalité aucune part de risque du fait du mode de calcul du prix et, de manière sous-jacente, d’une clientèle captive.

Considérant que par la délibération litigieuse en date du 28 août 1995, le conseil municipal de la commune d'Olivet a décidé de confier pour cinq ans les transports scolaires de la commune à la société "Les cars Dunois" ; qu'en vertu de l'article 6 du contrat conclu en application de cette délibération, la rémunération de la société était uniquement composée d'un prix versé par la commune et calculé proportionnellement au nombre de jours de fonctionnement du service et au kilométrage journalier effectivement réalisé ; que, dès lors, le contrat doit être analysé, nonobstant la qualification de délégation de service public choisie par les parties comme un marché soumis aux règles fixées par le code des marchés publics pour les marchés passés au nom des collectivités territoriales et de leurs établissements publics ;

Cour administrative d’appel de Nantes 12 avril 2000, Commune d’Olivet

C) Attention aux clauses qui modifient la part de rémunération fixe et variable et le

risque

Voyons d’abord pourquoi la négociation des clauses est à envisager avec précaution (1) et ensuite quelles sont les clauses qu’il faut manier avec précaution (2)

1) Pourquoi faut-il faire attention dans la négociation des clauses ? Lors de la phase de discussion entre le délégant (l’AO) et le futur délégataire (voir 2e partie pour l’explication des différentes phases de la procédure de passation), certaines clauses du contrat peuvent être négociées entre les parties. Cela n’est bien évidemment pas contraire aux textes, mais il faut toutefois prendre garde de ne pas modifier tellement le contrat initialement prévu, au point que sa nature change (c’est-à-dire qu’il devienne un marché public). Trois cas doivent être envisagés :

• Soit le contrat est modifié mais ne change pas de qualification : il s’agit du cas dans lequel une « concession » ou une « contribution financière forfaitaire » sera modifiée mais que les éléments du contrat tels qu’ils sont décrits, contrat par contrat, dans le II.2.

• Soit le contrat est modifié, il change de qualification, mais il reste une délégation de service public : il s’agit du cas dans lequel un affermage devient, à la suite des négociations, une régie intéressée, ou dans lequel une concession devient un affermage. Si les changements sont à prendre en considération, ils ne mettent pas forcément en cause la légalité de la procédure de passation. Il y aura bien eu négociation dans le cadre de la procédure des articles L. 1411-1 et s. du CGCT. Toutefois, le contrat pourra être illégal si l’avis d’appel à la concurrence prévoyait que le contrat serait d’un type (ce qu’il n’est pas obligé de faire, même s’il est nécessaire de dire au moins que le contrat est un marché public ou une délégation de service public) et que la négociation le transforme en un autre. En effet, le juge considérera qu’il y a alors un non respect du principe d’égalité de traitement entre les candidats et annulera la procédure ou le contrat.

• Soit le contrat est modifié au point qu’il se transforme en marché public : Cette situation est la plus grave. La procédure de passation suivie, celle du CGCT devient alors une procédure inadaptée. Le

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contrat devient illégal parce qu’il aurait dû être passé en respectant les procédures prévues au code des marchés publics.

2) Quelles sont les clauses qui modifient le mode de rémunération ? Voici, ci-dessous, une liste des clauses qui peuvent permettre de modifier non seulement le fait que la rémunération dépende de l’exploitation, mais aussi la personne sur laquelle porte le risque de l’exploitation. Il faut donc les ajouter avec précaution.

• Clause d’intéressement. • Clause de qualité (avec intéressement). • Clause permettant au cocontractant de se rémunérer sur la publicité. Il peut s’agir de la publicité sur les

abribus comme de la publicité sur ou dans les bus. • Clauses mettant en place une éventuelle prolongation du réseau. • Clauses concernant l’entretien et les réparations des véhicules, ou de hangar ou encore du réseau en

TCSP. • Les garanties d’emprunt consenties par la collectivité territoriale à l’entreprise.

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La Semaine Juridique Edition Générale n° 14, 3 Avril 2002, I 125

LOI MURCEF : LA DÉFINITION LÉGISLATIVE DES DÉLÉGATIONS DE SERVICE PUBLIC

Etude par Marion UBAUD-BERGERON Allocataire de recherche-Moniteur à l'Université Montpellier I, Centre de

recherches et d'études administratives de Montpellier (CREAM) L'article 3 de la loi MURCEF du 11 décembre 2001, introduisant pour la première fois une définition légale des délégations de service public, décevra probablement les juristes regrettant le silence de la loi "Sapin". Le législateur confirme les solutions antérieures concernant le champ de la gestion déléguée et conforte le critère jurisprudentiel du lien exploitation-rémunération permettant d'identifier une délégation de service public. Mais une définition légale, nécessairement générale et figée, ne peut circonscrire une notion aussi complexe et évolutive que les délégations de service public. 1 - "Le législateur est mal placé pour préciser les qualifications (...) ; il est parfois nécessaire de conserver à la règle une certaine marge d'indétermination qu'ignore le plus souvent une définition légale" Note 1. Fallait-il une définition législative à la délégation de service public ? Rien n'est moins sûr. Certes, on nous rétorquera que la doctrine est mal placée pour de telles appréciations, elle qui déplora l'absence de définition de la notion lors de l'adoption de la loi du 29 janvier 1993. Mais la plainte était vite devenue une clause de style et l'on s'était habitué à cette absence, "marge d'indétermination" laissée par la loi Sapin et comblée lentement par une définition prétorienne. Et voilà que le législateur décide d'apporter sa pierre à l'édifice. La loi portant mesures urgentes de réforme à caractère économique et financier Note 2 vient en effet, pour la première fois, donner une définition légale à cette notion avec son article 3 ainsi rédigé :"Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service" Note 3. 2 - Cette intervention inattendue du législateur laisse perplexe : ni l'urgence ni la nécessité d'une telle définition ne sont évidentes. Urgente, cette définition ne l'était sûrement pas : aucun impératif national ou européen n'imposait dans l'immédiat une définition de la notion. Cette urgence n'est d'ailleurs pas manifeste à la lecture du projet de loi. Nécessaire, elle ne l'est probablement pas. En reprenant mot pour mot les solutions du juge, la loi fait peut-être bien plus que pérenniser une solution jurisprudentielle : elle "cristallise" des critères qui n'ont pas encore atteint leur "pleine maturité" pour reprendre les mots de Lucien Rapp Note 4. En un mot, elle enferme le juge dans une définition qu'il n'avait pas fini de construire. Il est vrai que sa jurisprudence commençait à dégager des lignes fortes d'identification des délégations de service public. Mais en voulant trop vite les figer, le législateur a peut-être manqué de clairvoyance. Car le caractère opérant d'un critère jurisprudentiel n'en fait pas nécessairement un bon critère législatif. La déception est d'autant plus grande qu'en revanche, certaines notions auraient pu être précisées par la loi et l'occasion n'a pas été saisie. Sans aucun doute, ces précisions pourront venir ultérieurement, et cette définition ne sera pas un obstacle à l'évolution inéluctable des délégations de service public.

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Nil Symchowicz a parlé de "révolution" Note 5 du droit des marchés publics avec l'article 2 de la loi MURCEF. L'article 3 n'en sera assurément pas une pour le droit des délégations de service public. Bien sûr, il y a toujours quelques enseignements à tirer d'une interprétation de la loi (1) : en confortant certaines solutions, en ne précisant pas certaines incertitudes, la loi esquisse sa contribution au droit des délégations de service public. Mais nous ne pouvons ignorer les limites d'une telle définition (2), trop générale pour être adaptée à l'ensemble de la catégorie, trop figée pour appréhender cette notion "encore en mouvement" Note 6.

1 - Interprétation de la définition législative 3 - L'exposé des motifs de la loi Note 7 justifie l'intervention du législateur par "l'impératif de sécurité juridique" qui rend nécessaire "une définition claire de la notion de délégation de service public". Nous ne pouvons qu'approuver l'ambition du législateur : les incertitudes entourant la notion sont effectivement innombrables et toute précision est donc la bienvenue. Malheureusement, l'écart est grand entre l'ambition et le résultat : le législateur, se contentant de confirmer l'ensemble des solutions jurisprudentielles n'apporte finalement qu'une contribution bien modeste à la construction de la notion. Le premier rapport de la commission des lois Note 8 révèle d'ailleurs toute la contradiction de la démarche : "malgré les avancées jurisprudentielles, la définition donnée par les tribunaux nationaux et communautaire apparaît évolutive (...) . Le présent article vient combler cette lacune en définissant précisément la délégation de service public". On voit mal ce que cette définition apportera au juge administratif confronté à un problème de qualification. Peut-être certaines confirmations concernant le champ de la gestion déléguée (A) mettront fin aux discussions portant sur l'étendue de la loi Sapin : le juge s'était déjà prononcé mais il est sûrement opportun que la loi confirme ces solutions. Peut-être aussi, la valeur légale conférée aux critères d'identification des délégations de service public (B) dégagés par le juge leur donne une certaine force, ou du moins une légitimité, face aux critiques doctrinales. A - Une précision du champ de la gestion déléguée 4 - Un premier regret est celui de ne pas voir consacrer, enfin, la notion de gestion déléguée du service public, largement préférable à celle de délégation de service public. La notion de "délégation de service public" est en effet inexacte Note 9, mais il est vrai que l'expression s'est tant diffusée qu'une modification est peu probable.Le législateur nous fournit donc une définition des délégations de service public soumises au respect de la loi Sapin : l'article 3 de la loi MURCEF doit s'insérer avant l'article 38 de cette dernière. La précision n'est pas négligeable car il existe de véritables délégations de service public non soumises à la loi Sapin, par exemple les délégations unilatérales de service public.La loi MURCEF, prenant le pas du juge administratif, vient préciser l'étendue du champ de la gestion déléguée. La loi est ainsi explicite sur le caractère contractuel de la délégation, sur la nature publique du délégant et publique ou privée du délégataire. Enfin, elle laisse penser que le service public délégué peut être aussi bien administratif qu'industriel et commercial. 1° Les délégations contractuelles 5 - Le première confirmation apportée par le législateur est la nature de l'acte de délégation : il s'agit d'un contrat. Cela semblait une évidence mais la précision n'est peut-être pas sans intérêt.L'acte d'habilitation à gérer le service public, condition

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obligatoire à la gestion déléguée, peut être en effet de nature contractuelle ou unilatérale Note 10. L'habilitation unilatérale est répandue mais relativement occultée par le succès des délégations contractuelles. Il n'est pas inutile d'en faire état car leur inventaire trace une définition en creux des délégations contractuelles. Les habilitations unilatérales législatives sont courantes : c'est le cas des fédérations sportives ou de France Télécom en vertu de la loi du 26 juillet 1996. Rares mais possibles sont les délégations réglementaires : la Comédie Française en est le seul exemple cité par les manuels. L'inapplication de la loi Sapin à ces délégations de service public ne pose aucun problème. Moins évidente est son inapplication aux habilitations unilatérales individuelles. Ces habilitations, prévues par un texte, peuvent avoir la forme d'autorisation comme certaines utilisations privatives du domaine public conditionnées par l'exercice d'une mission de service public, d'agrément, en matière économique généralement, ou enfin la reconnaissance d'utilité publique. L'éventuelle soumission à la loi Sapin de ce type de délégation unilatérale a rapidement été écartée. Le Conseil d'État a en effet rendu deux avis Note 11 confirmant la limitation de la loi Sapin aux seules délégations contractuelles.Une précision est toutefois à noter : dans les cas où l'habilitation unilatérale est possible, la personne publique a la liberté entre l'habilitation unilatérale ou le contrat, mais le choix de l'habilitation contractuelle entraîne évidemment l'application de la loi Sapin. Une affaire récente devant le Conseil d'État est venue illustrer ce cas de figure, dans le cas des agréments délivrés par le Préfet pour la circulation des véhicules de dépannage sur les voiries routières. Par un arrêt du 22 mars 2000, M. et Mme Lasaulce Note 12 la Haute juridiction a jugé que, puisque "le Préfet du Val de Marne a choisi, pour assurer l'exécution du service public de dépannage et d'évacuation sur les voies autoroutières, de confier cette mission à un cocontractant et non de se borner à agréer celles des entreprises remplissant les conditions qu'il entendait imposer pour participer à l'exécution du service", et le contrat en cause étant une délégation de service public, le Préfet devait respecter les obligations de mise en concurrence et de publicité. Il semble clair pour le Conseil d'État que ce n'est pas la seule existence d'une délégation de service public mais sa nature contractuelle qui justifie l'application de la loi Sapin. C'est donc en toute logique que le législateur précise aujourd'hui que les délégations en question sont des contrats Note 13. 2° Un délégant public, un délégataire public ou privé 6 - À l'origine de la gestion déléguée, la seule hypothèse envisagée est celle d'une personne publique délégant une activité de service public à une personne privée : c'est l'essence même d'un tel contrat. Mais il est admis aujourd'hui qu'une personne publique puisse être délégataire. Le Conseil d'État a admis dans son arrêt du 16 octobre 2000, Cie méditerranéenne d'exploitation des services d'eau Note 14la candidature d'un établissement public à un contrat d'affermage. La solution ne semblait pas aller de soi, notamment au regard de la liberté du commerce et de l'industrie invoquée par les requérants. Selon le Commissaire du Gouvernement Catherine Bergeal, la liberté du commerce et de l'industrie ne peut être utilement invoquée pour écarter la candidature d'une personne publique à une délégation de service public. D'une part, la liberté du commerce et de l'industrie concerne la création et l'extension d'un service public, et "n'a jamais signifié qu'un service public créé par la collectivité devait être obligatoirement géré par le secteur privé ". D'autre part, l'évolution du droit de l'intervention économique publique, sous l'influence communautaire, "qui reposait sur un principe de non-concurrence entre les activités publiques et privées, a désormais pour fondement un principe d'égale concurrence entre les opérateurs économiques intervenant sur un marché, quel que soit leur statut, public ou privé".

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Enfin, il résulte clairement de la loi Sapin Note 15 qu'un établissement public peut se voir déléguer la gestion d'un service public : en excluant les obligations de concurrence dans le cas des délégations à un établissement public et à condition que l'activité déléguée figure expressément dans les statuts de l'établissement, la loi a autorisé de telle délégation. Mais dans la mesure où le nouveau premier alinéa de l'article 38 résultant de l'article 3 de la loi MURCEF évoque la possibilité d'un délégataire public, on pouvait se demander dans quelle mesure un établissement public qui se voit confier la gestion d'un service public sera soumis aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Selon le commissaire du Gouvernement, si l'activité déléguée est prévue par ses statuts, "la collectivité n'est pas tenue de procéder à la mise en concurrence prévue par le droit interne", si elle ne l'est pas, l'établissement est soumis à la concurrence de droit commun.Le Conseil d'État, en formation consultative, confirme cette solution quelques jours plus tard dans son avis du 8 novembre 2000, Sté Jean-Louis Bernard Consultants Note 16 en admettant, sous certaines conditions, l'attribution d'un marché public ou d'une délégation de service public à une personne publique. La loi MURCEF conforte cette solution en mentionnant la qualité indifféremment publique ou privée du délégataire.Quant à la limitation aux seules personnes publiques de la possibilité d'être délégant elle paraît évidente : seule une personne publique détient la maîtrise d'un service public, par conséquent, elle seule peut en déléguer la gestion. Philippe Terneyre Note 17 avait toutefois mentionné l'article 9 de la loi du 3 janvier 1991 Note 18 qui prévoit la passation "par un groupement de droit privé formé entre des collectivités publiques ou un organisme de droit privé crée en vue de satisfaire spécifiquement un besoin d'intérêt général ... " de contrats "dont l'objet est de réaliser, concevoir et réaliser, ou faire réaliser par quelque moyen que ce soit tous travaux ou ouvrages de bâtiment ou de génie civil". L'interprétation la plus probable est que l'article 9 fait référence à des contrats de type "marché de travaux publics", pas aux délégations de service public. De plus, il est évident que de telles personnes privées se trouvent sous un contrôle étroit de la personne publique permettant à cette dernière de conserver la maîtrise du service public. Par conséquent, la formulation de l'article 3 de la loi MURCEF ne semble pas en contradiction avec cette disposition. Sur la limitation aux personnes publiques de la qualité de délégant, une dernière précision doit être apportée. Il s'agit de l'hypothèse de la subdélégation d'une activité de service public. La subdélégation désigne le "transfert par une personne habilitée à gérer une activité de service public de tout ou partie de cette activité à une personne tierce" Note 19. Cette situation a été l'objet de débats durant l'adoption de la loi MURCEF, le Sénat Note 20 ayant introduit un amendement ainsi rédigé : "Le délégataire ne peut subdéléguer une partie de la gestion de ce service à un tiers qu'avec l'accord exprès de la personne délégante". Cet amendement avait pour but, selon le rapport fait pour la commission des lois par Pierre Jarlier "de subordonner la subdélégation d'un service public à l'accord exprès de la collectivité publique délégante, et d'interdire la subdélégation de la totalité de la gestion du service". Cet amendement a été fort heureusement écarté. Ainsi que l'a fait remarquer lors des discussions le Secrétaire d'État Christian Pierret, la jurisprudence ayant toujours subordonné la subdélégation à l'accord de la personne publique, une précision de la loi n'aurait donc rien apporté. Mais surtout, la subdélégation totale, c'est-à-dire la cession à tiers, est un mécanisme autorisé, sous certaines conditions, depuis longtemps par le juge administratif et qui vient d'être confirmé par un avis du Conseil d'État du 8 juin 2000 Note 21. L'interdiction par la loi d'une cession des délégations de service public aurait été absurde.

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Toutefois, la question peut se poser d'une interdiction implicite du fait de l'exclusion des personnes privées comme délégants. Notre réponse est claire : la cession d'un contrat ne confère pas la qualité de délégant à la personne qui cède le contrat, car "le second contrat n'emporte pas par lui-même habilitation de la personne privée de second rang" Note 22. Cette cession se fait sous l'autorisation de la personne publique qui garde donc son statut de délégant responsable du service public. En conclusion, la qualité de délégant réservée aux seules personnes publiques est une solution de bon sens reprise par la loi MURCEF. 3° Les délégations de service public administratif ou industriel et commercial 7 - La loi ne fait référence qu'au service public, mais la lecture des rapports parlementaires est très claire sur la possibilité de confier la gestion d'un service public administratif ou industriel et commercial. Le rapport de Nicole Bricq fait en effet état de l'avis du Conseil d'État du 7 octobre 1986 dans lequel ce dernier confirme la liberté des collectivités locales de "procéder à la gestion déléguée de service public administratif". Toutefois, cet avis étant antérieur à la loi Sapin, on pouvait être réservé sur sa portée : le fait de pouvoir déléguer un service public administratif ne signifie pas que cette délégation soit soumise aux règles de la loi du 29 janvier 1993. Deux réponses ministérielles Note 23 semblent avoir tranché la question : la délégation des services publics administratifs est possible sous réserve que l'activité ne soit pas au nombre de celles qui, par leur nature ou par la volonté du législateur, ne peuvent être assurées que par la collectivité elle-même. De même, la jurisprudence du Conseil d'État citée par différents auteurs semble montrer que rien ne s'oppose en principe à la délégation d'un service public administratif. La solution semble donc acquise et le législateur en prend acte. Mais nous verrons par la suite qu'elle soulève quelques questions intéressantes. B - Une confirmation des critères jurisprudentiels d'identification des délégations de service public 8 - Les incertitudes concernant la qualification juridique des contrats administratifs ont pris une importance singulière avec le développement du droit de la concurrence : toute qualification est sous-tendue par la perspective de l'application du Code des marchés publics ou de la loi Sapin. Et, conséquence du silence de cette dernière sur la notion de délégation de service public, toute précision du juge administratif devient sujet de débat pour la doctrine. La notion est, il est vrai, particulièrement complexe et paradoxale. Complexe car elle est récente en tant que catégorie de contrat et l'on a encore du mal à cerner ses composantes au-delà des concessions. Paradoxale car son importance n'a justement d'égale que son imprécision, en faisant ainsi "le plus grand sujet d'étonnement du droit administratif contemporain" Note 24. Initialement, marchés publics et délégations de service public ne relèvent pas de la même économie. Dans un marché public, la personne publique est la bénéficiaire d'une prestation "ponctuelle" fournie par son cocontractant qu'elle rémunère par un prix. Dans une délégation de service public, elle lui confie l'exploitation d'un service public dont les bénéficiaires sont les usagers, la rémunération du délégataire provenant des résultats de l'exploitation. On sait à quel point cette "simplification" de la distinction connaît des limites. Pierre Delvolvé avait notamment souligné que les prestations résultant d'un marché public peuvent parfois avoir pour bénéficiaires les administrés - fourniture en eau d'une personne publique pour les fontaines publiques, rénovation de la chaussée d'une rue, ramassage des ordures ménagères.

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Sans nul doute, aucun critère n'est sûr pour identifier un contrat. Le juge lui-même les combine pour dégager l'économie générale du contrat. Deux critères se dégagent aujourd'hui de la jurisprudence, retranscrits par le législateur tels que formulés par le Conseil d'État : celui de l'objet du contrat, et celui de la rémunération. 1° Le "critère de l'objet" : la gestion et l'exploitation d'un service public 9 - C'est le premier, et très classique, critère d'identification d'une délégation. Premier, car, a priori, le juge ne s'intéresse à la rémunération que s'il est établi que la mission du délégataire consiste bien à gérer un service public, classique, car le juge l'utilise depuis longtemps. Lorsque le Commissaire du Gouvernement Chardennet écrit dans ses conclusions sur l'arrêt du 30 mars 1916, Sté Gaz de Bordeaux, que la mission du concessionnaire est "l'exploitation de l'ouvrage public ou l'exécution du service public", il fait bien référence à la spécificité de l'objet du contrat de concession. Dans la loi MURCEF, l'article 3 mentionne en premier lieu la "gestion" confiée au délégataire. Mais la fin de l'article faisant référence à la rémunération par "les résultats de l'exploitation", on en déduit que la mission est bien la gestion du service et son exploitation. L'emploi des termes gestion et exploitation n'est pas neutre dans le droit des services publics : il correspond à "un niveau de responsabilité" particulier à l'égard de l'activité. Trois niveaux de responsabilité sont identifiables Note 25. Le niveau le plus "haut" correspond à la maîtrise des missions d'intérêt général : cette responsabilité incombe à la personne publique qui ne peut s'en défaire. C'est en ce sens qu'il faut interpréter l'article 3 de la loi mentionnant "un service public dont elle (la personne publique) a la responsabilité". Le législateur ne fait rien d'autre ici que reprendre un principe classique de fonctionnement des services publics. Le second niveau de responsabilité correspond à l'organisation de la gestion de l'activité, niveau que la personne publique peut conserver ou déléguer. Enfin, le niveau "minimum" est celui de l'exploitation du service délégué. La mission du délégataire sera une combinaison variable des différents niveaux traduisant les différents modes de gestion des activités de service public : concession, affermage, régie intéressée, gérance. La référence de la loi à la gestion et l'exploitation permet de préciser une définition opérante du critère de l'objet. Cela a été relevé avec justesse par de nombreux auteurs, ce n'est pas l'objet de la prestation en elle-même qui doit être analysé : les marchés publics comme les délégations peuvent consister en des fournitures, des travaux ou des services. En revanche, ce qui est opérant, c'est la fonction du cocontractant : le délégataire a la responsabilité de la gestion et l'exploitation d'un service public. Le titulaire d'un marché public, même si sa prestation peut le conduire à participer au service public, n'a pas cette responsabilité. Encore faut-il pouvoir identifier avec précision l'existence d'une véritable gestion. Jean-Bernard Auby Note 26 a mis en valeur des éléments caractérisant une telle gestion. Un premier, rarement évoqué, est le "caractère répétible de la tâche" du délégataire. Vient ensuite le degré d'autonomie du cocontractant, et éventuellement l'existence de relation avec les usagers. Toutefois, ces éléments ne sont que des indices : il existe, par exemple, des délégations sans usagers "payants". De la même façon, la notion d'exploitation est parfois difficile à identifier. Le fait de fixer le règlement du service, notamment les modalités de fourniture de la prestation à l'usager, d'employer les agents chargés du fonctionnement, d'être l'interlocuteur exclusif des usagers, d'être le maître de l'ouvrage des installations durant l'exécution du contrat ou encore de bénéficier de prérogatives de puissance publique sont des éléments caractérisant une mission d'exploitation du service Note 27, mais là encore, ils ne sont pas systématiques.

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On notera pour finir que cette approche matérielle de la notion de délégation de service public est défendue par une partie de la doctrine, qui conteste leur définition par opposition aux marchés publics, résultant du mode de rémunération du cocontractant. Ces auteurs souhaitent donc que la notion de gestion du service public joue un rôle "attractif" sur l'ensemble des contrats de service public. Ce n'est cependant pas l'orientation de la jurisprudence qui a confirmé le rôle déterminant de la rémunération. 2° Le critère de la rémunération : une rémunération substantiellement assurée par les résultats de l'exploitation 10 - C'est la notion centrale et problématique de l'actualité des délégations de service public. L'approche binaire prix payé par la collectivité / résultat de l'exploitation ayant été vite dépassée par la pratique contemporaine de rémunération "mixte", bien des auteurs croyaient la notion de rémunération vouée à l'abandon. Mais le Conseil d'État, prenant en compte l'évolution des clauses financières des contrats de service public, adopte une conception renouvelée de la rémunération en 1996 dans sa célèbre décision Préfet des Bouches du Rhône Note 28. En jugeant que les dispositions de la loi Sapin "n'ont pas eu pour objet et ne sauraient être interprétées comme ayant pour effet de faire échapper au respect des règles régissant les marchés publics, tout ou partie des contrats dans lesquels la rémunération du cocontractant de l'Administration n'est pas substantiellement assurée par les résultats de l'exploitation", le juge administratif redonne une place significative à ce critère. Le fait que le cocontractant ait une rémunération assurée en partie par la personne publique n'est pas un obstacle à l'existence d'une délégation de service public, à partir du moment où sa rémunération continue à être assurée substantiellement, c'est-à-dire de façon décisive, par l'exploitation de l'ouvrage ou du service. Cette solution a été vivement critiquée par certains auteurs, jugeant le critère de la rémunération "non opérationnel, archaïque et déphasé" Note 29, ou encore "indéfinissable et inutilisable" Note 30. Pour notre part, le critère nous paraît tout à fait opérant, même si, comme nous le verrons plus après, la notion de risque ou d'aléa économique, nous semble préférable. Toujours est-il que le Conseil d'État a ensuite rendu plusieurs décisions confortant le critère de la rémunération comme élément central de qualification. Les arrêts qui suivent sont d'autant plus intéressants qu'ils ont permis au juge de se prononcer sur des contrats dont la qualification était incertaine. Il s'agit bien sûr des marchés d'entreprise de travaux publics, de la régie intéressée et de la gérance. L'appartenance des deux derniers à la catégorie des délégations de service public semblait à l'origine acquise. Il ressortait clairement, tant de nombreuses études consacrées à la catégorie, que des travaux préparatoires à la loi Sapin, qu'outre la concession et l'affermage, cette catégorie comprenait la régie intéressée et la gérance. Mais dès lors que la rémunération, et pas seulement la gestion d'un service public, entre en ligne de compte pour déterminer l'existence d'une délégation de service public, leur nature devenait moins certaine. Car en effet, dans ces contrats, le lien entre la rémunération du cocontractant et l'exploitation est moins évident que dans la concession et l'affermage, sans pour autant constituer un prix. Quant au marché d'entreprise de travaux publics, forme atypique de contrat à mi-chemin entre la concession et le marché de travaux publics, il suscitait bien des interrogations. L'utilisation pertinente de la rémunération par le juge administratif a permis d'apporter des réponses claires, et à notre avis cohérentes à ces questions. Dans un arrêt du 8 février 1999, Préfet des Bouches du Rhône contre Commune de la Ciotat Note 31, le Conseil d'État estime que la convention ayant pour objet des travaux d'installation et d'entretien d'un réseau d'éclairage public et de signalisation n'est pas un marché

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d'entreprise de travaux publics mais un marché public. Que dès lors, une telle convention est soumise au Code des marchés publics, et notamment à son article 356 interdisant les paiements différés. Posait également problème la gérance où le cocontractant a une rémunération forfaitaire généralement imputée sur les comptes du service public. L'intéressement n'est pas exclu, mais le risque de l'exploitation est néanmoins supporté pour l'essentiel par la collectivité. Donc sa rémunération n'est pas substantiellement liée aux résultats de l'exploitation. C'est ce qu'a jugé en 1999 le Conseil d'État dans l'arrêt Commune de Guilherand-Granges Note 32, à propos d'un service de distribution d'eau potable et d'assainissement où la part proportionnelle de la rémunération du gérant était fonction du volume d'eau distribué, garantissant selon le Commissaire du Gouvernement Catherine Bergeal une rémunération "totalement indifférente de la performance de l'exploitation". Une partie de la doctrine, mentionnée par le commissaire du gouvernement, ne s'y était pas trompée : pour Michel Guibal et Lucien Rapp Note 33, ces contrats sont une forme de marché de prestations de service. C'est aussi notre avis et l'exclusion de ces contrats de la catégorie des délégations de service public est donc logique.Enfin, dans la régie intéressée, la rémunération du régisseur est constituée par un pourcentage du chiffre d'affaires, éventuellement complétée par une prime de productivité et une part des bénéfices d'exploitation. L'intéressement du régisseur à la performance de l'exploitation ne fait donc pas de doute, mais il faut encore qu'il en soit la part substantielle pour être une délégation de service public, et tout dépendra des termes du contrat. Dans l'arrêt du 30 juin 1999, SMITOM Centre-Ouest Seine et marais Note 34le Conseil d'État, à propos d'une régie intéressée concernant l'exploitation des éléments d'une filière de traitement des déchets ménagers, où la partie variable de la rémunération était un intéressement aux résultats de la valorisation des déchets. L'équilibre financier du contrat dépendant directement des recettes issues de l'exploitation, la qualification de délégation de service public a été retenue par la Haute assemblée. Vivement critiquée par certains car elle conduit à écarter du champ des délégations de service public des contrats confiant la gestion d'un service public à une personne privée du seul fait de la rémunération de cette dernière, cette solution est néanmoins pérennisée par la loi MURCEF.Au final, le bilan de cette définition législative semblerait plutôt positif : confirmation des solutions concernant le champ de la gestion déléguée, légitimation des critères jurisprudentiels d'identification des délégations de service public. Néanmoins, elle connaît aussi des limites car une définition globale revient à simplifier excessivement la notion. Et s'il est une notion du droit administratif qui n'est pas simple, c'est bien celle des délégations de service public.

2 - Limites d'une définition législative 11 - "Il serait utopique de croire pouvoir parvenir à une définition immuable, pure et parfaite de la frontière entre marchés et délégations de service public (...) . Une telle définition tient de la quête du Graal" Note 35. Certes la loi n'est pas immuable : ce qu'une loi a fait, une loi pourra le défaire. Mais en figeant les critères dégagés par le juge administratif en un article de loi, le législateur s'est laissé aller à "l'utopie" d'une conception définitive et parfaite des délégations de service public. Car, énoncé par le juge, un critère n'a qu'une valeur relative au cas d'espèce. La doctrine cherchera bien sûr à le systématiser - c'est son rôle - mais reprochera difficilement au juge la spécificité de sa solution. Repris par le législateur, ce même critère prend la force d'une vérité généralisable à l'ensemble de la catégorie ... et devient très discutable.

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On ne reprochera pas au législateur ses intentions : rechercher une meilleure sécurité juridique en définissant une notion encadrée par la loi est un motif louable. Mais à l'impossible nul n'est tenu : il n'est pas possible de circonscrire en une "définition", nécessairement réductrice, une notion aussi complexe et insaisissable que les délégations de service public. Les limites de la définition apportée par l'article 3 sont donc inévitables, car intrinsèques à la notion. Cette définition législative est limitée car inadaptée à une catégorie d'ensemble des délégations de service public (A), et ignorante des perspectives d'évolution de la notion (B). A - L'inadaptation d'une définition législative à une catégorie d'ensemble des délégations de service public 12 - L'article 3 définit les délégations de service public en se référant à une conception administrative de la notion : c'est la définition des délégations par le Conseil d'État qui est pérennisée. Or, la notion de délégation de service public déborde aujourd'hui la seule jurisprudence administrative. Outre la dimension communautaire de la notion que nous aborderons plus après, sa dimension pénale n'est pas négligeable. De plus, l'absence de distinction qui semble être faite par le législateur entre service public industriel et commercial et service public administratif soulève quelques questions. 1° La dimension pénale des délégations de service public 13 - Les délégations de service public ont en effet "pénétré" le droit pénal par le biais de la responsabilité pénale des personnes morales de droit public. Aux termes de l'article 121-2 du Code pénal, les personnes morales de droit public - à l'exclusion de l'État - sont pénalement responsables "des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de délégation de service public". Le juge pénal se trouve saisi de la question de l'identification des délégations de service public, mais seulement d'un de ses aspects. Il n'aura pas à s'interroger sur ce qu'est une délégation de service public mais sur ce qu'est une "activité susceptible de faire l'objet d'une convention de délégation de service public", c'est-à-dire une activité délégable. En l'absence d'un texte fixant une liste précise des activités considérées comme non délégables, le juge pénal devra se prononcer au cas par cas, s'aventurant là en terrain méconnu. Il est possible que le juge pénal s'attache peu à définir une conception des activités délégables autonome de la définition administrative et qu'il se rallie à la jurisprudence du Conseil d'État : l'enjeu de la détermination de l'existence d'une infraction imputable à une personne morale de droit public risque d'occulter la condition à cette imputabilité qu'est la nature de l'activité en cause. Mais tout laisse penser que le juge pénal fera preuve d'indépendance. C'est notamment l'opinion du Conseiller d'État Jean-Claude Bonichot Note 36 avançant qu'il n'y a "aucune raison pour que le juge répressif n'ait pas sa propre conception de ce qui peut ou non faire l'objet d'une délégation, et même de ce qu'il faut entendre par délégation. Les données de la jurisprudence administrative seront pour lui une donnée parmi d'autres, à supposer même qu'il s'en préoccupe". Le Commissaire du Gouvernement Christine Maugüé Note 37 elle-même estimait que "rien ne contraindra le juge pénal à adopter les thèses du juge administratif sur l'étendue des activités susceptibles de faire l'objet d'une délégation de service public. Il n'est donc pas impossible que se dégage à terme uneconception pénale de la notion qui pourra différer de la conception administrative".

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À titre d'exemple, on citera la célèbre et dramatique Affaire du Drac où la Chambre criminelle de la Cour de cassation, par un arrêt du 12 décembre 2000 Note 38, se prononce ainsi : "Attendu que pour dire la Commune de Grenoble susceptible de poursuites pénales à raison de l'accident, la cour énonce que les faits reprochés ont été commis à l'occasion de l'exercice, par la commune, d'activités à la périphérie du service public de l'enseignement, auxquelles les personnes privées peuvent participer, qui ne relèvent pas d'une prérogative de puissance publique et qui peuvent dès lors être déléguées ; mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'exécution même du service public communal d'animation des classes de découverte suivies par les enfants des écoles publiques et privées pendant le temps scolaire, qui participe du service de l'enseignement public, n'est pas, par nature, susceptible de faire l'objet de conventions de délégation de service public, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé".Il n'est pas impossible qu'à l'avenir une divergence de jurisprudence entre les deux juges survienne. L'occasion se présentait avec la loi MURCEF de préciser ce qu'il faut entendre par activités délégables. Sans doute, à l'instar de la notion de délégation de service public, la notion d'activités délégables est contingente. On sait que certaines missions, souvent qualifiées de "régaliennes" ou de "puissance publique", sont insusceptibles d'être confiées à une personne privée : les missions de police, l'état civil, l'organisation des élections, la délivrance de certaines autorisations d'urbanisme, ou encore, la mission de prévention des maladies mentales infantiles qui incombe au département. Mais dans bien des cas la réponse n'est pas certaine, d'autant qu'il faut parfois faire une distinction au sein d'un même service public entre ce qui est délégable ou pas Note 39 : ainsi, en matière de cantines scolaires, la confection et la distribution des repas peuvent être déléguées mais pas la surveillance des élèves, ou encore en matière pénitentiaire, "les fonctions autres que celles de direction, du greffe, et de surveillance peuvent être confiées à des personnes de droit public ou privé selon une habilitation". Il y a donc aujourd'hui une certaine insécurité juridique pour les collectivités et leurs délégataires, qui tient d'une part à l'absence de certitudes sur l'étendue des missions de services publics délégables et d'autre part sur la possibilité d'une divergence d'interprétation entre les deux juges compétents. Une précision de la loi aurait été souhaitable, et il est regrettable que la loi MURCEF n'ait pas saisi cette opportunité. 2° Les questions soulevées par les services publics administratifs 14 - Comme nous l'avons indiqué plus haut, la loi semble avoir admis la délégation d'un service public indifféremment administratif ou industriel et commercial. Cela résulte clairement des travaux préparatoires, et va dans le sens de la jurisprudence du Conseil d'État. La définition donnée par le législateur est donc une définition générale des délégations, sans distinction de la nature de l'activité déléguée. Cette solution soulève deux séries d'observations, touchant à l'adéquation entre service public administratif et gestion déléguée, et à l'application du critère de l'exploitation à ces activités.- L'adéquation entre service public administratif et gestion déléguée15 - Pierre Delvolvé Note 40 relève que l'exploitation, entraînant une gestion de "type service industriel et commercial", fait supposer que la qualification même du service public délégué est affectée par sa délégation. Son analyse s'appuie sur le fait que, dans la plupart des cas, la nouvelle qualification est retenue. Dans un sens similaire, l'analyse de Gérard Marcou Note 41 est éclairante. D'après cet auteur, s'il est évident que les services publics administratifs peuvent être délégués à des personnes privées, de telles délégations semblent exclues du champ de la loi Sapin, notamment parce que dans la plupart des cas, l'organisme est investi par une habilitation réglementaire et non par un contrat de délégation de service public.

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L'auteur souligne d'ailleurs que dans un service public administratif, c'est souvent ce qui fait la nature administrative du service qui est considéré comme non délégable, la partie déléguée pouvant être assimilée à une activité industrielle et commerciale. Ainsi, dans la gestion des cantines scolaires, la confection des repas est délégable, pas la mission de surveillance. "Or, c'est là ce qui fait la nature administrative du service". L'auteur relève en outre que ce qui détermine le caractère d'un service public, ce n'est pas la nature matérielle de l'activité mais les conditions dans lesquelles le service est assuré. Ainsi, dans l'enlèvement des ordures ménagères, "ce service est de nature administrative lorsque la commune lève la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, qui est une recette à caractère fiscal, et de nature industrielle et commerciale lorsque la commune décide de lui substituer une rémunération directe du service par l'usager". Dans le deuxième cas seulement, le service peut être concédé ou affermé, alors que dans le premier cas, le service sera exploité en régie, la commune conservant la possibilité de conclure un marché de service avec une entreprise privée. La question se pose donc de savoir si la nature administrative d'un service public est réellement compatible avec sa délégation. Cet aspect pourrait prendre un relief intéressant avec l'intervention du juge pénal sur la question du caractère délégable de l'activité.- L'application du critère de l'exploitation à la délégation des services publics administratifs16 - À supposer admise la délégation d'un service public administratif, il n'est alors pas évident que les critères d'identification retenus soient opérants, notamment la notion d'exploitation. Selon nous, le critère "d'exploitation" est une notion imprégnée par le droit des services publics industriels et commerciaux. La doctrine a relevé que "la notion juridique de délégation de service public a été très clairement construite à partir de celle de concession de service public". Nous ajouterions que le droit des concessions s'est fait autour de celle de service public industriel et commercial. Bien sûr, la délégation d'un service public administratif, après quelques réticences, a été admise depuis le milieu du siècle, mais leur régime et leur définition se sont fondus dans le moule préétabli de ceux de la gestion d'un service public industriel et commercial. Ce dernier est assimilé, dans son fonctionnement, à une entreprise commerciale : l'exploitation économique et la rémunération du délégataire renvoient à celles d'une entité privée, avec des particularités dans le régime juridique. Dans ce cas, le lien exploitation-rémunération est la manifestation évidente d'une gestion déléguée du service public : il n'y a pas privatisation du service, mais le délégataire est chargé pour un temps de gérer le service à la place de la collectivité. Dans certains services publics administratifs, la situation sera différente : le délégataire, s'il assume bien l'exécution d'un service public avec le risque que comporte cette exécution, ne se trouve pas dans une situation d'exploitation proprement dite, et par là même, ne peut tirer sa rémunération de l'exploitation. L'exemple, cité par la plupart des auteurs, des conventions d'aménagement urbain Note 42 est caractéristique. Le cocontractant de l'Administration se voit confier une mission très étendue d'achat, de viabilisation et d'aménagement de terrains et sa rémunération proviendra généralement de la revente des terrains. Il n'exploite donc pas le service, au sens où l'entend la jurisprudence, comme la doctrine. Et pourtant, sa nature de délégation de service public nous paraît manifeste. L'aménageur se voit déléguer une partie du service public de l'aménagement, avec souvent des prérogatives de puissance publique (expropriation et préemption) et il supporte un risque économique évident : une opération d'aménagement n'est certainement pas une opération à la rentabilité assurée Note 43. D'autres exemples peuvent être présentés : le service public hospitalier Note 44, service public administratif dont la concession échappe au régime des délégations de service public, voit l'essentiel de ses ressources assuré par la sécurité sociale, les recettes

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perçues directement sur les usagers étant une part minime. Il est difficile de parler d'exploitation pour ce type de service public. La même remarque peut être faite s'agissant du service public de la culture. La délégation de ces services publics est pourtant possible. Mais il est évident que l'on aura du mal à identifier de telles délégations avec les seuls critères de l'exploitation et de la rémunération assurée par cette exploitation. Il n'est d'ailleurs pas inutile de relever que les conventions d'aménagement urbain ou les concessions de service public hospitalier ne sont pas soumises à la loi Sapin : la logique concurrentielle dans laquelle s'insèrent les services publics industriels et commerciaux est probablement étrangère à la logique des services publics administratifs.Or la loi MURCEF donne une définition non distinctive des délégations de service public. Dès lors, doit-on s'en tenir à la rigueur d'un critère ou apprécier l'économie générale du contrat ? Il ne nous semble pas que le juge lui-même se soit enfermé dans une acception rigide des critères qu'il dégage. On aurait donc souhaité que le législateur laisse une porte ouverte à un adaptation jurisprudentielle des critères au cas des services publics administratifs. B - Les perspectives d'évolution des critères d'identification 17 - "Le critère de la rémunération substantielle que retient la loi MURCEF n'est que la chrysalide d'où sortira le papillon (...) . La définition cristallise un état transitoire de la réflexion du juge, qu'il eût sans doute été préférable de laisser aboutir pour ne la gêner d'aucune manière" Note 45. Transitoire, la réflexion du juge l'est par nécessité face à la complexification de la pratique contractuelle. Elle l'est aussi par obligation face au droit communautaire. Ainsi, la notion même de délégation de service public, comme les éléments permettant son identification n'ont probablement pas atteint la stabilité que veut leur conférer la loi MURCEF. 1° L'évolution au regard de la pratique contractuelle 18 - C'est la complexité de la pratique contractuelle qui a amené le juge à affiner le critère de la rémunération : de la simple dichotomie prix/rémunération assurée par l'exploitation, on est passé à la notion de rémunération substantielle. La notion de résultats de l'exploitation a évolué en prenant en compte d'autres sources de revenus que les redevances versées par les usagers. L'imagination des partenaires économiques est grande et les seules catégories identifiées de concession, affermage ou régie intéressée ne correspondent plus à la complexité des montages contractuels réalisés. Dès lors, peut-on imaginer une définition simple répondant à cet ensemble de situations contractuelles ? Probablement pas. Seul le juge pourra progressivement affiner les éléments d'identification des délégations de service public, au gré des affaires qui seront portées devant lui. Il a apporté des réponses aux contrats que l'on connaissait : METP, régie intéressée et gérance. Mais face à un montage contractuel sophistiqué, le juge adoptera une démarche différente. Il recherchera probablement des éléments essentiels tels que l'existence d'une mission de service public et d'un risque supporté par le cocontractant, mais sa démonstration sera évidemment axée sur une appréciation de l'économie générale du contrat. Les "conventions complexes illustrent parfaitement le peu d'utilité des critères formels d'identification des contrats de délégation de service public" Note 46. Les auteurs illustrent les difficultés soulevées par ces contrats avec l'exemple caractéristique du bail emphytéotique administratif couplé de façon indivisible à une convention d'exploitation portant sur un service public. Selon le cas, la convention a pu être qualifiée de marché d'entreprise de travaux publics, de convention de délégation de service public, de concession de travaux au sens du droit communautaire.Sans doute la loi MURCEF n'empêche pas une telle démarche, mais elle constitue une donnée inutile dans cette perspective d'évolution.

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2° L'évolution au regard du droit communautaire 19 - Les évolutions susceptibles d'être induites par le droit communautaire sont nombreuses. Nous en retiendrons deux. La première évolution potentielle pourrait porter sur la nature de l'activité déléguée. En droit interne, il doit s'agir évidemment d'une activité de service public : c'est la première condition vérifiée par le juge. Or, il semble qu'au niveau communautaire, cette conception matérielle des délégations de service public ne soit pas retenue. "Dans ses conclusions sur l'affaire Telaustria Verlags, l'Avocat général Fenelly a considéré pour sa part que le caractère d'intérêt général ou non du service en cause n'avait pas d'incidence (...) . La définition de la concession de travaux par la directive 93/37, dont est inspirée la définition de la concession de service, ne fait nullement mention d'un tel critère relatif à la nature des services en cause" Note 47. Le juge français pourrait donc être amené à modifier la condition d'une activité de service public, peut-être par un élargissement à une activité d'intérêt général. La deuxième évolution possible, déjà en germe dans la jurisprudence nationale, est l'émergence de la notion de risque supporté par le cocontractant, qui pourrait venir remplacer celle de rémunération substantielle. Cette notion ne serait pas véritablement une innovation jurisprudentielle : elle renvoie à l'idée classique en droit des concessions d'exploitation "aux risques et périls du concessionnaire". Elle est du reste sous-jacente aux dernières décisions rendues par le Conseil d'État - Préfet des Bouches-du-Rhône contre Commune de la Ciotat, SMITOM et Commune de Guilherand-Granges - où l'application du critère de la rémunération substantielle convergeait vers la détermination du risque supporté par le délégataire. Le Commissaire du Gouvernement avait en effet particulièrement insisté sur ce fait : "La notion de prise de risque est consubstantielle non seulement à la notion de concession, mais aussi, à celle englobante de délégation de service public. Nous pensons qu'on ne peut considérer que le service public a été réellement délégué si la rémunération du cocontractant est indifférente à sa gestion du service. Nous ne concevons pas de délégation sans responsabilité Note 48". Cette notion est semble-t-il celle qui prévaut en droit communautaire : le risque est une notion sur laquelle le projet de communication interprétative de la commission sur les concessions en droit communautaire a beaucoup insisté, et l'Avocat général A. La Pergola a particulièrement mis en valeur l'importance de cette notion Note 49. On peut donc légitimement penser qu'à terme, c'est bien la notion de risque qui ressortira de la jurisprudence de la Cour de justice, comme de celle du juge français. Une analyse Note 50 très intéressante a été faite dans ce sens à propos de la récente jurisprudence du Conseil d'État citée plus haut, démontrant que le critère du risque est "historiquement incontestable" et "juridiquement plus pertinent que celui du prix ou des résultats de l'exploitation" Sans doute, la doctrine, comme l'écrit Laurent Richer, "est destinée à rester insatisfaite". Mais l'on aurait souhaité que le législateur, à défaut de satisfaire le souci de perfection de la doctrine, n'enferme pas le juge dans une définition trop rigide. Gageons que cette dernière ne sera qu'un handicap relatif dont il saura s'affranchir.

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Note 1 F. Terré, Volonté et qualification, Archives de philosophie du droit, 1957, p. 99.Note 2 Loi MURCEF n° 2001-1168, 12 déc. 2001 : Journal Officiel 12 Décembre 2001. - A. Chaminade, Loi "MURCEF" : Les nouvelles règles relatives aux marchés publics et à la commande publique : JCP G 2002, act. 71.Note 3 Article inséré avant le premier alinéa de l'article 38 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et de la transparence de la vie économique et des procédures publiques et de l'article 1411-1 du Code général des collectivités territoriales.Note 4 Faut-il vraiment définir l'ensemble des délégations de service public ? : AJDA 2001, p. 1011.Note 5 ACCP n° 1, p. 54Note 6 C. Maugüé et P. Terneyre, Les délégations de service public en questions : CJEG 1997, p. 131.Note 7 ACCP n° 1, p. 51.Note 8 N. Bricq, Doc. AN, Rapp. n° 3028, 1re lecture.Note 9 G. J. Guglielmi et G. Koubi, Droit du service public, Montchrestien, 2000, n° 604.Note 10 G. J. Guglielmi et G. Koubi, op. cit. [note 9], nos 560 s. ; V. également : Lamy Droit public des affaires 2000, nos 2711 et 2712.Note 11 CE, avis, 9 mars 1995 et 28 sept. 1995 : EDCE 1996, n° 47, p. 399 et 402.Note 12 G. Guglielmi, Habilitation unilatérale, délégation contractuelle et consistance du service public, note ss CE, 22 mars 2000, M. et Mme Lasaulce ; RFD adm. 2001, p. 353 ; JCP G 2000, IV, 2168, obs. M.-Ch. Rouault.Note 13 La formulation de la loi est néanmoins maladroite car elle semble indiquer que toute délégation de service public est nécessairement un contrat alors que c'est uniquement celle visée par la loi Sapin.Note 14 RFD adm. 2001, p. 106, concl. C. Bergeal.Note 15 CGCT, art. L. 1411-2.Note 16 RFD adm. 2001, p. 112, concl. C. Bergeal ; E. Delacour, L'attribution d'un marché ou d'une délégation à une personne publique : JCP G 2000, I, 357.Note 17 P. Terneyre, La notion de convention de délégation : AJDA 1996, p. 588.Note 18 L. n° 91-3, 3 janv. 1991, relative à la transparence et à la régularité des procédures de marché et soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en concurrence : Journal Officiel 5 Janvier 1991.Note 19 G. J. Guglielmi et G. Koubi, op. cit. [note 9], nos 613 à 615.Note 20 Sénat, 1re lecture, séance du 5 juin 2001.Note 21 CE, avis, 8 juin 2000, req. n° 141654, Cession de contrats : AJDA 2000, p. 758, note L. Richer ; Contrats Marchés publ. 2000, p. 4, note F. Llorens ; CJEG 2001, p. 103, note C. Maugüé.Note 22 G. J. Guglielmi et G. Koubi, op. cit. [note 9].Note 23 Lamy Droit public des affaires, op. cit. [note 10], nos 2798 et 2799.Note 24 P. Terneyre, La notion de convention de délégation : AJDA 1996, p. 588.Note 25 Lamy Droit public des affaires, op. cit. [note 10], n° 2713.Note 26 J.-B. Auby, Bilan et Limites de l'analyse juridique de la gestion déléguée du service public : RFD adm. 1997, n° spécial, p. 3.Note 27 P. Terneyre, op. et loc. cit. [note 24].Note 28 CE, 15 avr. 1996, Préfet des Bouches du Rhône c/ Cne de Lambesc : CJEG 1996, p. 267, concl. M. Chantepy ; RFD adm. 1996, p. 718, note P. Terneyre ; V. également CE, 15 juin 1994, Synd. Intercnal des transports publics de la région de Douai (Rec. CE, tables, p. 1033), où la perception des redevances sur les usagers par l'entreprise est retenue par le juge pour qualifier le contrat de délégation de service public.Note 29 P. Terneyre, note préc. [note 28].Note 30 J.-C. Douence, Observations sur l'application à certains contrats de la distinction entre marchés et délégations fondée sur le mode de rémunération : RFD adm. 1999, p. 1134.Note 31 CE, 8 févr. 1999, Préfet des Bouches du Rhône c/ Cne de la Ciotat : AJDA 1999, p. 364, concl. C. Bergeal, note D. Chabanol.Note 32 CE, 7 avr. 1999, Cne de Guilherand-Granges : AJDA 1999, p. 517, concl. C. Bergeal.Note 33 M. Guibal et L. Rapp, Contrats des collectivités locales, éd. Francis Lefebvre, 1995, p. 346.Note 34 CE, 30 juin 1999, SMITOM Centre Ouest Seine et Marais : AJDA 1999, p. 714, concl. C. Bergeal, note J.-M. Peyrical.Note 35 C. Bergeal, concl. ss CE, 30 juin 1999, préc. [note 34].Note 36 J.-C. Bonichot, La responsabilité pénale des personnes morales de droit public : Gaz. Pal. 10 juin 1999, p. 768.Note 37 C. Maugüé, Les délégations de service public et le juge administratif : AJDA 1996, p. 597.Note 38 Cass. crim., 12 déc. 2000, V. Rostaing et a. (Drac), arrêt n° 7078 : AJFP 2001, p. 30 ; concl. D. Commaret : BJCP 2001, n° 15, p. 147.Note 39 Pour un inventaire des solutions jurisprudentielles plus complet : P. Terneyre, op. et loc. cit. [note 24].Note 40 P. Delvolvé, Les contradictions de la délégation de service public : AJDA 1996, p. 675.Note 41 G. Marcou, La notion de délégation de service public après la loi du 29 janvier 1993 : RFD adm. 1994, p. 691 ; l'auteur s'appuie notamment sur une différence subtile entre habilitation contractuelle et contrats de délégation de service public.Note 42 C. urb., art. L. 300-4 ; sur le débat doctrinal sur leur nature juridique, V. L. Richer et E. Fatôme, Nature et contenu du contrat d'aménagement : RD imm. 1994, p. 169 ; C. Maugüé et J.-B. Auby, Les contrats de délégation de service public : JCP G 1994, I, 3743.Note 43 La non-soumission de ces conventions d'aménagement à la loi Sapin, résultant de la loi du 9 février 1994, n'étant pas un indice sur sa nature juridique, mais sur son régime.Note 44 Pour une analyse de la délégation du service public hospitalier : G. Marcou, La notion de délégation de service public après la loi du 29 janvier 1993 : RFD adm. 1994, p. 691.Note 45 L. Rapp in AJDA 2001, p. 1011.Note 46 G. J. Guglielmi et G. Koubi, Droit du service public, Montchrestien, 2000, n° 658.Note 47 J. Arnould, Le texte définitif de la communication interprétative de la Commission européenne sur les concessions en droit communautaire : RFD adm. 2000, p. 1016 ; CJCE, 7 déc. 2000, Teleaustria Verlags GmbH, Telefonadress GmbH et Telekom Austria AG, note L. Richer : AJDA 2001, p. 106 ; concl. N. Fenelly : BJCP 2001, n° 15, p. 132 (V. notamment les points 34 à 36 de ses conclusions).Note 48 V. également : CAA Marseille, 5 mars 2000, Préfet des Alpes maritimes, concl. J.-C. Duchon-Doris : BJCP 2002, n° 20, p. 46 ; note L. Marcovici : AJDA 2001, p. 968.Note 49 A. La Pergola, concl. ss CJCE 10 nov. 1998, Gemente Arnhem. Gemente Rheden BFI Holding BV : BJCP 1999, n° 2, p. 155 : "Un aspect significatif de la concession de services dans le domaine communautaire (...) réside dans le fait que le concessionnaire assume le risque économique découlant de la fourniture et de la gestion des services".Note 50 L. Vidal, Le juge administratif, l'économie et le contrat : RFD adm. 1999, p. 1147.

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Notion de délégation de service public : n'est pas un marché public mais une DSP, le contrat de concession du

service de restauration municipal dans lequel le co-contractant tire une part substantielle de sa

rémunération des redevances versées par les usagers A noter également par François LLORENS

TA Nice, 23 sept. 2005, n° 0102139, n° 0103363, Sté Eurest France c/ Ville Cannes Était en cause, dans cette affaire, un contrat qualifié de concession au terme duquel le co-contractant était chargé du financement et de la construction d'une cuisine centrale ainsi que de la fabrication et de la livraison des repas aux points de distribution. Le prix des repas dû au « concessionnaire » était fixé par le contrat. La différence entre ce prix et les tarifs sociaux consentis à certaines catégories d'usagers lui était remboursée par la ville.Le préfet soutenait qu'il s'agissait d'un marché public, faute pour le « concessionnaire » d'être substantiellement rémunéré par les résultats de l'exploitation du service. À l'appui de cette thèse, il invoquait notamment le fait que le prix des repas était fixé par le contrat et que le co-contractant se voyait garantir une quantité déterminée de repas.Le tribunal écarte son argumentation au motif que le nombre des repas n'était pas garanti, mais simplement mentionné à titre prévisionnel par le contrat, et qu'il pouvait connaître des variations annuelles, susceptibles d'influer sur le chiffre d'affaires du concessionnaire. De plus, ce dernier était autorisé à fabriquer, pour le compte de tiers, des repas dont le nombre était également susceptible de variations.Le tribunal administratif en déduit que la rémunération du co-contractant dépendait bien de manière substantielle des résultats de son exploitation du service, sans prendre toutefois la peine de préciser quelles étaient, au sein de cette rémunération, les parts respectives des redevances perçues auprès des usagers et des sommes versées par la ville au titre de la compensation des tarifs sociaux, ni prendre position sur le point de savoir si le concessionnaire supportait effectivement le risque de l'exploitation du service (sur ce même jugement, V. infra, comm. 310).

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B – La DSP au regard du droit communautaire Définition, régime juridique Si le droit français des DSP est récent, le DC des DSP, lui, est plus qu’embryonnaire. Une précision liminaire s’impose : le DC ne connaît pas la notion de DSP, il ne connaît que celle de concession. Il convient donc, du point de vue communautaire, d’entendre le terme concession largement, comme synonyme de DSP quelle qu’elle soit (concession, affermage ou régie intéressée). En outre, le droit communautaire de la commande publique ne connaît que deux catégories de contrats : les concessions et les marchés publics. D'une manière générale, les contrats de partenariat seront qualifiés de marchés publics au sens du droit communautaire, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat dans sa décision du 29 octobre 2004 (décision prise sur le RPEDP introduit contre l’ordonnance du 17 juin 2004 sur les CP) :

« Considérant qu'aux termes du a) du deuxième paragraphe de l'article premier de la directive 2004/18/CE : Les marchés publics sont des contrats à titre onéreux conclus par écrit entre un ou plusieurs opérateurs économiques et un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et ayant pour objet l'exécution de travaux, la fourniture de produits ou la prestation de services au sens de la présente directive ; que, sous réserve que les personnes publiques procédant à leur passation puissent être regardées comme des pouvoirs adjudicateurs au sens du paragraphe 9 de l'article 1er de la même directive et qu'ils rentrent, par leur montant et par leur objet, dans les prévisions du chapitre II du titre II de celle-ci, les contrats de partenariat, qui ont vocation à être passés avec un ou plusieurs opérateurs économiques et en vertu desquels la rémunération du cocontractant fait l'objet d'un paiement par la personne publique, constituent des marchés publics au sens de cette directive ; que, dans cette mesure, l'ordonnance attaquée s'inscrit dans le champ d'application de la directive 2004/18/CE ».

Solution confirmée dans une réponse ministérielle n° 16896 : JO Sénat Q 19 mai 2005, p. 1428 (Q. 31 mars 2005, M. Bernard Piras) RÉPONSE : Les contrats de partenariat ne sont pas des marchés publics au sens du Code des marchés publics, mais ils entrent dans la définition des marchés publics au sens communautaire. Dès lors, ils demeurent en toute hypothèse soumis au principe général de transparence tel que résultant de la jurisprudence CJCE Teleaustria du 7 décembre 2000. L'intérêt de la réponse du ministre est : premièrement, de rappeler que si les contrats de partenariat ne sont pas des marchés publics au sens du Code des marchés publics, ils le sont très certainement au sens du droit communautaire et qu'ils se trouvent ainsi soumis au principe de transparence découlant du traité de l'Union européenne ; deuxièmement, qu'une simple consultation d'opérateurs présélectionnés par la personne publique, sans publicité préalable, ne satisfait pas aux exigences dudit principe. Comme le conseille le ministre, la solution la plus expédiente pour les collectivités publiques est celle qui consiste à s'inspirer des procédures nationales ou communautaires applicables en matière de marchés publics ou de celles auxquelles se trouvent assujetties les délégations de service public en droit interne, voire de s'y conformer purement et simplement à condition, dans ce dernier cas, de les respecter jusqu'à leur terme.

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A – Un droit surtout axé sur les MP Là encore, comme en droit français, c’est surtout sur les marchés publics que le législateur européen s’est concentré : nous disposons en effet d’un arsenal juridique européen solide en la matière à travers des directives, dont les principales sont :

- la directive travaux, qui encadre les marchés de travaux Directive n°93/37 du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux

- la directive fournitures, qui encadre les marchés de fournitures Directive n°93/36 du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures

- la directive services, qui encadre les marchés de services Directive n°92/50 du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services

- la directive dite « secteurs exclus », qui encadre les marchés publics passés dans les secteurs particuliers dits des industries de réseaux – à savoir l’eau, l’énergie, les transports et les télécommunications Directive n°93/38 du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications

Ces directives ont été refondues assez récemment dans deux textes :

- la directive n° 2004/18 reprend l’ensemble des directives applicables aux secteurs classiques ; Directive n°2004/18 du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services

- la directive n°2004/17 reprend la directive « secteurs spéciaux » en excluant désormais de son champ d’application de secteur des télécommunications (ne sont plus concernés que l’eau, l’énergie, les transports et les services postaux) Directive 2004/17 du 31 mars 2004, portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux

Les aberrations du droit français au regard du DC :

- « l’ancien nouveau » CMP avait été adopté au tout début 2004 (décret du 7 janvier 2004) alors même que l’on savait, à l’époque, que de nouvelles directives allaient sortir de manière imminente et alors même que l’un des objectifs du nouveau CMP était justement de se mettre en conformité avec le DC ;

- Aussi avons-nous été, pendant près de trois ans, d’un côté en présence d’un CMP qui, s’il s’avérait être en conformité avec l’essentiel des dispositions des nouvelles directives communautaires de mars 2004, présentait encore quelques points non conformes et, de l’autre, des directives qui devaient être transposées dans le droit des Etats membres au plus tard le 31 janvier 2006, alors que le CMP 2006 n’en était encore qu’à l’état de projet (CMP adopté avec le décret du 1er août 2006).

Concernant les concessions (DSP au sens communautaire), on l’a dit, il n’existe pas de véritable droit communautaire des concessions.

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B – Les DSP : textes épars et principes généraux 1). L’état du droit dérivé Des DSP non règlementées à ce jour … Tout d’abord, il n’existe pas de texte communautaire à valeur juridique contraignante sur les concessions : le seul texte existant en la matière est une communication interprétative du 8 février 2000, qui, en plus de définir les concessions, donne des indications sur le régime qui leur est applicable. Ce régime repose sur des principes extrêmement généraux, issus du traité ou dégagés par le juge communautaire, à savoir :

- égalité de traitement - transparence - proportionnalité - reconnaissance mutuelle - protection des droits des particuliers.

Au-delà de ces grands principes, aucune règle de procédure n’est posée par le texte. Depuis ce texte, adopté en 2000, la Commission a poursuivit ses réflexions sur l’élaboration d’un régime communautaire des concessions. Le 30 avril 2004, elle a lancé une vaste consultation sur le sujet dans le cadre d’un livre vert sur les partenariats public-privé et le droit communautaire des marchés publics et des concessions. Le GART avait pris part au débat en exprimant les idées suivantes : Pour ce qui est des concessions ou autres dispositifs contractuels (PPP), qui ne sont pas des marchés publics, nous sommes favorables à une intervention communautaire, mais nous souhaitons que cette intervention se fasse dans le respect d’un certain nombre de grands principes : 1). Nous souhaitons en premier lieu insister sur la distinction qui existe, et qui doit continuer d’exister, entre marchés publics et DSP

1. Il s’agit de 2 outils distincts, qui ne poursuivent pas les mêmes finalités (même si, en France, le marché public est de plus en plus usité pour la gestion de services publics et que les 2 corpus de règles – marchés et DSP – tendent à se rejoindre) et qui, donc, ne doivent pas obéir aux mêmes contraintes. Aussi ne soutenons-nous pas l’idée d’un régime unique aux 2 dispositifs contractuels comme le suggère la Commission en page 13 du Livre vert (question n°7, dans laquelle la Commission évoque la possibilité de « régimes de passation identiques »). Il convient en effet de préserver aux DSP leur spécificité et leur souplesse. 2). Nous insistons sur la nécessité d’avoir une définition communautaire adaptée aux caractéristiques des DSP. Celle qui est donnée par la Commission dans son Livre vert (page 6), et qui reprend celle déjà proposée dans sa commission interprétative sur les concessions en droit communautaire du 8 février 2000, nous convient : « contrat présentant les mêmes caractéristiques qu’un marché public à l’exception du fait que la contrepartie des travaux ou des services effectués consiste, soit uniquement dans le droit d’exploiter l’ouvrage ou le service, soit dans ce droit assorti d’un prix ». Il s’agit d’une définition large, qui s’appuie sur la notion de risque d’exploitation et qui, ce faisant, rejoint la définition française des DSP.

1 Les DSP (délégations de service public) en droit français correspondent à l’appellation communautaire de « concessions ».

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Cette définition se différencie de celle qui a été proposée dans le projet de règlement communautaire relatif aux exigences de service public dans le domaine des transports de voyageurs (« ROSP »), dont l’article 3 i donne des concessions de transport la définition suivante : contrats dont la majeure partie de la rémunération de l’opérateur provient des voyageurs, notamment par la perception de redevances. Dans ses différentes prises de position sur le « ROSP », le GART a critiqué cette définition trop restrictive des concessions, non adaptée au secteur des transports, dans lequel la part voyageurs ne couvre qu’une faible part des recettes, et susceptible de contentieux sur un sujet déjà sensible (on sait en effet que de nombreux contrats qualifiés de DSP ont été requalifiés par le juge au motif que le risque d’exploitation n’était pas suffisamment établi). 3). Pour ce qui est, enfin, de l’exécution des contrats (marchés publics ou concessions), nous sommes d’accord avec la Commission pour dire que les modalités d’exécution des projets de PPP doivent être définies de manière claire, transparente et non discriminatoire dans les cahiers des charges et qu’il ne doit pas y avoir de bouleversement substantiel des termes du contrat en cours d’exécution. Nous tenons néanmoins à rappeler que les dispositifs contractuels de type concessif sont le plus souvent utilisés pour la gestion ou l’exploitation d’un service public et que, de ce fait, ils doivent offrir la souplesse nécessaire à l’adaptation du service dans le temps. Il convient donc que le cadre communautaire à venir n’interdise pas complètement (ou n’encadre pas de façon trop contraignante) les possibilités d’insertion de clauses d’évolution du service ou de clauses de révision ou de réajustement, qui porteront notamment sur le régime financier du contrat. Dans le même esprit, il convient de conserver un minimum de souplesse quant à la possibilité de prolonger, selon des modalités bien définies (motif et durée de la prolongation), les contrats de type concession. On note en effet que la possibilité ouverte par le droit français (loi Sapin) de prolonger les DSP de une année pour des motifs d’intérêt général ou lorsque des investissements nouveaux s’imposent s’avère extrêmement utile tant pour les pouvoirs adjudicateurs que pour les opérateurs, alors même que la loi Sapin impose que les DSP soient limitées dans leur durée. Il y a donc là un juste équilibre à trouver. La Commission a pris acte des différentes contributions qu’elle a reçues sur ce livre vert en adoptant, en novembre 2005, une communication dans laquelle elle a notamment annoncé l’adoption d’une directive-cadre sur les concessions d’ici la fin de l’année 2006 (texte non adopté à ce jour).

Position du GART sur cette communication de novembre 2005 : Le GART a pris connaissance avec intérêt de la communication de la Commission sur les PPP et le droit communautaire des marchés publics et des concessions, rendue publique le 15 novembre dernier. Ce texte fait suite au Livre vert adopté en avril 2004, qui avait lancé une vaste consultation sur le sujet, à laquelle le GART avait pris part. Un premier point de cette communication peut être accueilli favorablement : le fait que la Commission n’envisage pas de légiférer uniformément sur l’ensemble des PPP, abandonnant ainsi l’idée d’un régime communautaire unique pour la passation des marchés publics et des concessions. A ce titre, le GART note avec satisfaction que le contenu de l’initiative législative envisagée par Bruxelles sur les concessions prendrait pleinement en compte la spécificité et la complexité de ces montages contractuels par rapport aux marchés publics, laissant ainsi une large place à la négociation. Concernant, par contre, la problématique de la durée des concessions, et notamment des concessions de travaux, la Commission ne fait que la mentionner, sans pour autant préciser quelle sera la teneur du texte communautaire à venir en la matière. Comme il l’avait indiqué dans sa position sur le Livre vert, et comme il l’a rappelé plus récemment dans son avis conjoint sur le projet de règlement relatif au transport de voyageurs, le GART souhaite que sur ce point, comme sur celui de la négociation, la Commission fasse preuve de souplesse.

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… mises à part les concessions de travaux. En marge de la communication interprétative du 8 février 2000, il convient également de se référer à la directive travaux qui, elle, donne une définition des concessions de travaux et réglemente leur passation.

Définition des concessions de travaux et des concessions de services Définitions données par la directive secteurs classiques (2004-18) : Article 1.3) directive 2004/18 : La «concession de travaux publics» est un contrat présentant les mêmes caractéristiques qu'un marché public de travaux, à l'exception du fait que la contrepartie des travaux consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter l'ouvrage, soit dans ce droit assorti d'un prix. Notons que la 2004/18 donne également une définition des concessions de service (même si elle ne les réglemente pas) Article 1.4) directive 2004/18 : La «concession de services» est un contrat présentant les mêmes caractéristiques qu'un marché public de services, à l'exception du fait que la contrepartie de la prestation des services consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter le service, soit dans ce droit assorti d'un prix. Article 17 directive 2004/18 : Sans préjudice de l'application des dispositions prévues à l'article 3, la présente directive ne s'applique pas aux concessions de services définies à l'article 1er, paragraphe 4. Définitions données par la directive secteurs spéciaux (2004-17) : Article 1. 3. a) La «concession de travaux» est un contrat présentant les mêmes caractéristiques qu'un marché de travaux à l'exception du fait que la contrepartie des travaux consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter l'ouvrage, soit dans ce droit assorti d'un prix. Article 1. 3.b) La «concession de services» est un contrat présentant les mêmes caractéristiques qu'un marché de services à l'exception du fait que la contrepartie de la prestation des services consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter le service, soit dans ce droit assorti d'un prix. Article 18 directive 2004/17 La présente directive n'est pas applicable aux concessions de travaux ou de services qui sont octroyées par des entités adjudicatrices exerçant une ou plusieurs des activités visées aux articles 3 à 7 lorsque ces concessions sont octroyées pour l'exercice de ces activités.

Il est à ce titre très étonnant que seules les concessions de travaux, et de surcroît uniquement les concessions de travaux non passées dans les secteurs dits spéciaux (activités de réseaux), soient réglementées par le DC. La communication interprétative de 2000 l’avait d’ailleurs rappelé en faisant référence au régime précédemment institué par les anciennes directives :

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- Existence d’un régime spécifique de la directive 93/37 pour les concessions de travaux La Commission estime utile de rappeler que les règles et les principes qu'elle a explicités ci-dessus sont applicables aux concessions de travaux. Pour ces dernières, cependant, la directive 93/37/CEE prévoit en outre un régime particulier qui contient notamment des règles de publicité. Pour les concessions qui n'atteignent pas le seuil prévu par la directive 93/37/CEE, seuls les règles et les principes du traité sont applicables. - Absence de régime spécifique pour les concessions dans les secteurs spéciaux La directive 93/38/CEE sur les marchés passés par les entités opérant dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications (ci-après dénommée «directive secteurs spéciaux») ne contient de règles spécifiques ni sur les concessions de travaux ni sur les concessions de services. Ce faisant, et c’est ce que la Commission a indiqué dans sa communication interprétative de 2000, les concessions de travaux conclues dans les secteurs spéciaux sont soumises au respect non pas de la directive 93-38, mais de la directive travaux 93-37, ce qui revient à leur conférer un régime plus strict : « l’octroi, par l’Etat ou une autre collectivité publique n’opérant pas spécifiquement dans un des quatre secteurs visés par la directive secteurs spéciaux, d’une concession visant une activité économique dans l’un de ces quatre secteurs relève des règles et principes du traité et même de la directive travaux, s’il s’agit d’une concession de travaux ». Pour ce qui est des concessions de service, des éléments de définition ont été donnés par la Commission européenne dans sa communication interprétative sur les concessions en droit communautaire du 8 février 2000. Ces éléments s’inspirent de la définition des concessions de travaux (que l’on vient de voir). D’après le texte : « L’objet des concessions de travaux est par hypothèse différent de celui des concessions de services. … Cependant, … un contrat de concession revêt en général les mêmes caractéristiques, quel que soit l’objet sur lequel il porte. En effet, comme pour les concessions de travaux, le critère de l’exploitation constitue une caractéristique essentielle pour déterminer si l’on est en présence d’une concession de services. En application de ce critère, une concession existe lorsque l’opérateur supporte des risques liés au service en cause … en se rémunérant pour une partie significative sur l’usager, notamment par la perception de redevances, sous quelque forme que ce soit. Le mode de rémunération de l’opérateur est, de même que pour la concession de travaux, un élément permettant de déterminer la prise en charge du risque d’exploitation. Comme la concession de travaux, la concession de services se caractérise par un transfert de responsabilité d’exploitation ». Comme on l’a dit, on trouve également des éléments de définition dans les directives MP. Voir définition des concessions de service dans les directives 18 et 17. Article 1.4 directive 18 : La «concession de services» est un contrat présentant les mêmes caractéristiques qu'un marché public de services, à l'exception du fait que la contrepartie de la prestation des services consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter le service, soit dans ce droit assorti d'un prix.

Article 1.3.b directive 17 : La «concession de services» est un contrat présentant les mêmes caractéristiques qu'un marché de services à l'exception du fait que la contrepartie de la prestation des services consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter le service, soit dans ce droit assorti d'un prix.

Les 2 définitions sont identiques.

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La seconde directive s’appliquera aux concessions passées pour l’attribution de services relevant des activités visées aux articles 3 à 7. Pour ce qui est de l’activité transport : Article 5 : « La présente directive s'applique aux activités visant la mise à disposition ou l'exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, systèmes automatiques, tramway, trolleybus, autobus ou câble. En ce qui concerne les services de transport, il est considéré qu'un réseau existe lorsque le service est fourni dans les conditions déterminées par une autorité compétente d'un État membre, telles que les conditions relatives aux itinéraires à suivre, à la capacité de transport disponible ou à la fréquence du service ». Définition de l’activité transport à mettre en regard de celle donnée par le CMP 2004. Article 82.5 : « La mise à disposition ou l'exploitation de réseaux de transport par chemin de fer, systèmes automatiques, tramway, trolleybus, autobus, autocars ou remontées mécaniques destinés au public ». Que ce soit au niveau français ou communautaire, l’activité d’opérateur de réseau dans le secteur des transports est définie de manière identique. Le fait que les DSP ne soient pas assujetties à des règles juridiques contraignantes au niveau communautaire, notamment pour ce qui est de leur passation, ne signifie pas qu’elles échappent aux règles et principes posés par le traité. Au contraire (d’une certaine manière) : en l’absence de règles de droit dérivé, il faut se référer directement à la lettre du traité. Celui-ci fixe des principes généraux, qu’il conviendra de respecter pour la passation des DSP. 2). Application des principes du traité Le juge communautaire a rappelé le nécessaire respect des principes du traité par les concessions, et notamment le principe général de transparence. Affaire C-324/98 Telaustria, CJCE 7 décembre 2000 La question posée en l’espèce portait sur le point de savoir si les contrats de concession de service public sont ou non exclus du champ d'application de la directive service 92/50 et de la directive secteurs exclus 93/38. S'ils sont exclus, se pose alors la question de la détermination de la portée de cette exclusion (se posait surtout en l’espèce la question des mentions minimales à apposer dans l’avis de publicité). Il a été jugé que en l'absence de définition adoptée par le législateur communautaire quant à la notion de «concessions de service public», il incombe nécessairement dans chaque cas à la juridiction nationale d'examiner l'ensemble des facteurs susceptibles d'indiquer si, en réalité, l'arrangement conclu entre les parties constitue un contrat écrit à titre onéreux portant sur la prestation des services. La caractéristique prédominante et typique d'une telle concession consiste en l'octroi d'un droit d'exploiter un service particulier associé au risque économique que cela implique. Le respect du principe de non-discrimination pour des raisons de nationalité fondé sur le traité exige que l'adjudication de «concessions de service public» respecte un degré minimal de publicité et de transparence, dont l'objectif est d'assurer l'impartialité des procédures d'adjudication ainsi qu'une opportunité raisonnable, pour les soumissionnaires non établis dans l'État membre de l'entité adjudicatrice, de soumettre des offres La règle à retenir de cet arrêt est que même en l’absence de règles de droit dérivé venant préciser la portée des dispositions du traité (en l’occurrence le principe de non discrimination), les principes du traité doivent être respectés. Ces principes sont essentiellement de deux ordres :

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- le respect du fonctionnement du marché intérieur. En découlent : o le principe d’égalité de traitement o le principe de non discrimination en raison de la nationalité (une consultation

nationale ou locale n’a pas à refuser de candidatures européennes pour quelque motif que ce soit – au motif par exemple que la prestation à fournir concerne qu’un déterminé) ;

o la libre prestation de service (Article 49 : « Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la libre prestation des services à l'intérieur de la Communauté sont interdites à l'égard des ressortissants des États membres établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire de la prestation »).

o Cette liberté est à mettre en regard de la liberté d’établissement (article 43 : « Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un État membre dans le territoire d'un autre État membre sont interdites. Cette interdiction s'étend également aux restrictions à la création d'agences, de succursales ou de filiales, par les ressortissants d'un État membre établis sur le territoire d'un État membre »).

- le respect des règles de concurrence pour l’accomplissement de toute activité à

caractère économique. En découlent : o l’obligation de respecter ces règles même lorsque l’activité en cause est un

service public dès lors qu’il revêt un caractère économique. Sont essentiellement visés les SPIC, dénommés par le DC « SIEG ». A ce titre, l’article 86.2 précise que : « Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général ou présentant le caractère d'un monopole fiscal sont soumises aux règles du présent traité, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de la Communauté ».

o l’interdiction de tout financement public qui viendrait fausser les règles de la concurrence (article 87.1 du traité, interdisant les aides d’Etat : « Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d’Etat sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions »).

C – Et les concessions de transport dans tout ça ? Les transports font l’objet de dispositions spécifiques en DC. En effet, dès le traité de Rome, il a été prévu de réserver un sort particulier à ce secteur, seul secteur qualifié de véritable service public dans les textes fondateurs de l’UE. Article 73 du traité : « Sont compatibles avec le présent traité les aides qui répondent aux besoins de la coordination des transports ou qui correspondent au remboursement de certaines servitudes inhérentes à la notion de service public ». Cet article étant formulé en termes très généraux (il ne peut être d’application immédiate), un texte de droit dérivé est nécessaire pour préciser la portée de cette dérogation : - qu’entend-on par « besoin de coordination des transports » ? - qu’entend-on « servitudes inhérentes à la notion de service public » (autrement dit

« obligations de service public ») ? Ce texte de droit dérivé existe :

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Règlement n°1191/69 du Conseil du 26 juin 1969, relatif à l’action des Etats membres en matière d’obligations inhérentes à la notion de service public dans le domaine des transports par chemin de fer, par route et par voie navigable. Il est néanmoins insuffisant : - le texte n’étant pas d’application obligatoire pour les transports locaux et régionaux2, - le texte ne définissant précisément pas les procédures de passation des contrats de

service public, - des pratiques différentes d’un Etat membre à l’autre ont continué de se perpétuer, - des incertitudes se sont faites jour sur la viabilité des financements publics versés aux

transporteurs (à partir du moment où la dérogation à l’interdiction des aides d’Etat posée par l’article 73 du traité ne s’applique pas – cas où l’Etat membre a décidé de ne pas faire application du règlement 1191/69, ce qu’il a le droit de faire pour les services locaux – c’est le principe général d’interdiction des aides qui s’applique – article 87.1 du traité ; or, la mise en œuvre de cette interdiction est soumise à l’interprétation de la notion d’aide d’Etat, interprétation qui diverge entre la Commission, le TPI, la CJCE et les avocats généraux de la CJCE).

Cette inadaptation du texte s’est révélée d’autant plus forte qu’ progressivement émergé un véritable marché des transports publics locaux en Europe. D’où la nécessité, pour la Commission, d’élaborer un nouveau cadre juridique communautaire applicable à l’ensemble des services de transport public et précisant les procédures de passation des contrats de service public, Ceci afin d’avoir un régime juridique clair applicable à l’ensemble des aides en faveur des transports publics (en d’autres termes : doivent être définies les différentes formes d’indemnisation des transporteurs compatibles avec les règles communautaires de concurrence). Tel est l’objet du projet de règlement dit « OSP », relatif aux services publics de transports de voyageurs par chemin de fer et par route, sur lequel travaille la Commission depuis plus de 6 ans. Article premier Objet et champ d'application « Le présent règlement a pour objet de définir comment, dans le respect des règles du droit communautaire, les autorités compétentes peuvent intervenir dans le domaine des transports publics de voyageurs pour assurer la fourniture de services d’intérêt général qui soient notamment plus nombreux, plus sûrs, d’une meilleure qualité ou d’un prix inférieur à ceux que le simple jeu du marché aurait permis de fournir. A cette fin, le présent règlement définit les conditions dans lesquelles les autorités compétentes compensent les opérateurs de transport des coûts supportés pour respecter les obligations de service public et accordent des droits exclusifs pour l'exploitation de services de transports publics de voyageurs ». Le champ d’application de ce texte est assez large puisqu’il s’applique :

2 Modifié en 1991, l’article 1er.1 alinéa 2 du règlement prévoit que « les Etats membres peuvent exclure du champ d’application du présent règlement les entreprises dont l’activité est limitée exclusivement à l’exploitation de services urbains, suburbains ou régionaux ».

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- à tous les services publics de transport de voyageurs, quelle que soit leur étendue

géographique : sont visées l’exploitation nationale et internationale des services de transport, l’exploitation nationale incluant également les transports urbains, suburbains et régionaux (services qui ne sont pas, actuellement, soumis à la réglementation communautaire de manière obligatoire vu que le texte qui régit le secteur permet une exclusion de ces services de son champ d’application) ;

- à tous les services de transport de voyageurs, quel que soit leur mode : mises à part

les voies navigables. Article 1er, § 2 : « Le présent règlement s'applique à l'exploitation nationale et internationale de services de transports publics de voyageurs par chemin de fer et autres modes ferroviaires et par route, à l’exception des services qui sont essentiellement exploités pour leur intérêt historique ou leur fonction touristique. Les États membres peuvent appliquer le présent règlement au transport public de voyageurs par voie navigable ».

Le texte ne concerne pas les services commerciaux, c’est-à-dire les services qui ne font pas l’objet d’OSP, donc qui font pas l’objet d’un contrat de SP, ce qui est le cas notamment des services ferroviaires internationaux et les lignes nationales GV. Ces services relèvent d’un autre corpus de textes (les « Paquets Ferroviaires »), qui prévoient une ouverture progressive à la concurrence, non pas dans le cadre d’un dispositif de régulation, mais dans le cadre d’un dispositif d’ouverture libre. Le texte concerne TOUS les contrats de transport qui ont pour objet : - d’octroyer un droit exclusif à un opérateur ; - et/ou d’une compensation de service public. Article 3 Contrats de services publics et règles générales « 1. Lorsqu’une autorité compétente décide d’octroyer à l’opérateur de son choix un droit exclusif ou une compensation, quelle qu’en soit la nature, en contrepartie de la réalisation d’obligations de service public, elle doit le faire dans le cadre d’un contrat de service public ». Ces contrats de SP devront être passés par appel d’offres. Article 5 Attribution des contrats de service public Article 5.3 : « Toute autorité compétente qui recourt à un tiers autre qu’un opérateur interne attribue les contrats de service public par voie de mise en concurrence, sauf dans les cas visés aux paragraphes 4, 5 et 6. La procédure adoptée pour la mise en concurrence est ouverte à tout opérateur, est équitable, et respecte les principes de transparence et de non-discrimination. Après la soumission des offres et une éventuelle présélection, la procédure peut donner lieu à des négociations dans le respect de ces principes, afin de préciser les éléments permettant de répondre au mieux à la spécificité ou à la complexité des besoins». Les obligations posées sont très générales. La négociation est permise. La procédure loi Sapin répond donc à l’ensemble de ces exigences. L’obligation d’appel d’offres disparaît pour les contrats de faible montant et portant sur des petits réseaux :

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Article 5.4 : « Sauf interdiction en vertu du droit national, les autorités compétentes peuvent décider d'attribuer directement des contrats de service public dont la valeur annuelle moyenne est estimée à moins de 1 million d'EUR ou qui ont pour objet la fourniture annuelle de moins de 300 000 kilomètres de services publics de transport de voyageurs». Pour info :

Kilométrage moyen des 60 réseaux de moins de 50 000 hab. 341 883 km

Kilométrage moyen des 59 réseaux de 50 000 à 100 000hab. 1 123 128 km

Kilométrage moyen des 119 réseaux de moins de 100 000hab. 729 198 km

Montant moyen annuel du contrat des 60 réseaux de moins de 50 000 hab. 795 167 €

Montant moyen annuel du contrat des 59 réseaux de 50 000 à 100 000hab. 2 514 441 €

Montant moyen annuel du contrat des 119 réseaux de moins de 100 000hab. 1 647 580 €

Ainsi donc, les montants retenus ne permettront pas d’exclure la totalité des réseaux de moins de 50.000 habitants. Notons toutefois que ces montants sont largement supérieurs à ceux prévus par la loi Sapin. Article L1411-12 du CGCT : Les dispositions de la loi ne s’appliquent pas « lorsque le montant des sommes dues au délégataire pour toute la durée de la convention n'excède pas 106 000 euros ou que la convention couvre une durée non supérieure à trois ans et porte sur un montant n'excédant pas 68 000 euros par an ». Si le règlement concerne TOUS les contrats de transport, pour ceux qui sont passés sous la forme de MP, l’article 5.1, concernant l’attribution des contrats, prévoit que le règlement devra s’entendre sans préjudice des directives MP : « Les contrats de service public sont attribués conformément aux règles établies dans le présent règlement. Toutefois, les marchés de services ou marchés publics de services, tels que définis par la directive 2004/17/CE ou par la directive 2004/18/CE, pour les services publics de transport de voyageurs par autobus ou par tramway sont attribués conformément aux procédures prévues par lesdites directives lorsque ces contrats ne revêtent pas la forme de contrats de concession de services tels que définis dans ces directives. Lorsque les contrats sont attribués conformément à la directive 2004/17/CE ou à la directive 2004/18/CE, les paragraphes 2 à 6 du présent article ne s'appliquent pas ».

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Ainsi donc :

- Les DSP ne sont soumises à aucune procédure de passation communautaire, mises à part les concessions de travaux passées dans les secteurs dits classiques (dont les transports sont exclus), soumises aux procédures fixées par la directive 2004/18 (ancienne directive 93/37) applicables aux marchés publics passés dans lesdits secteurs, lorsque la concession atteint les seuils fixés par la directive. Aussi peut-on estimer que les concessions de travaux passées dans le secteur des transports, elles, ne sont soumises à aucune procédure de passation particulière.

- Néanmoins, pour des raisons de sécurité juridique, la mise en œuvre d’une

procédure d’appel d’offres européen (« exigence d’un « niveau de publicité adéquat »), procédure prévue par la directive 2004-18, s’avère plus sage (ex : la concession pour le tram de Reims – à la fois concession de travaux et de service - a été passée sur appel d’offres européen).

- Quoi qu’il en soit et dans tous les cas, malgré cette absence de formalisme

(pour les concessions de travaux comme pour l’ensemble des DSP – concessions de service au sens du DC), toute DSP, quelle qu’elle soit, doit respecter les principes du traité (règles de fonctionnement du marché intérieur et règles de concurrence), et ce indépendamment du montant du contrat qui sera attribué et de la zone géographique dans laquelle le service, objet de la DSP, sera presté.

- Les DSP passées dans le secteur des transports publics, elles, devront

répondre aux obligations posées par le règlement « OSP » (une fois celui-ci adopté), qui sont des obligations très générales de transparence et de mise en concurrence, auxquelles répond largement la loi Sapin, avec une exception pour les DSP en-deça d’un certain seuil.

C - La DSP : une multitude de choix possibles Typologie des DSP de transport Les DSP : 5 types de DSP transport qui peuvent être regroupées en 3 grandes catégories : 1ère catégorie : DSP avec prise en charge des risques par l’AO 2ème catégorie : DSP avec partage des risques 3ème catégorie : DSP avec prise en charge des risques par l’exploitant

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Typologie des DSP de transport La délégation de service public est définie dorénavant par l'article L. 1411-1 du Code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001, dite loi « MURCEF » : "Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service." Cette catégorie de contrats comprend : - la concession de travaux et de service publics, portant à la fois sur la réalisation d'un

TCSP et l'exploitation des transports urbains (TCSP seul ou bus, transports à la demande et autres…) ;

- la double concession, de travaux publics (réalisation et exploitation technique ou maintenance partielle d'un TCSP), de service public (réalisation de certains investissements communs (ex. SAE), fourniture ou non des bus, maintenance partielle du TCSP, et exploitation commerciale de l'ensemble du service public des transports urbains ou interurbains) ,

- l'affermage, qui ne concerne que l'exploitation, les investissements étant réalisés par l'AOT ;

- la régie intéressée, qui ne concerne également que l'exploitation.

Mais ce dernier type de contrat n'est pas une « parfaite » DSP. Selon le niveau d'intéressement de l'exploitant, le contrat peut être une délégation de service sur le plan administratif. En revanche, c'est un marché public de services sur le plan fiscal, l'AO demeurant l'exploitant fiscal (v. Instruction fiscale du 21 janvier 1985). Les deux seules « véritables » DSP, à la fois sur le plan juridique et fiscal, sont donc les concessions et les affermages. Les délégations de service public, sous forme de contrats d'exploitation (affermage), sont largement utilisées dans les transports, urbains et interurbains, de personnes. En matière de TCSP, les concessions connaissent un renouveau. I - Concessions de travaux et service publics I.1. - Définition et champ d'application des concessions de travaux et de service

public Une concession de transports publics de personnes est le contrat par lequel une AO confie à une personne, généralement privée, la conception, le financement, la réalisation des biens affectés au service public, leur maintenance et leur renouvellement, ainsi que l'exploitation du service public, moyennant une rémunération, au moins partielle, auprès des usagers du service.

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La directive n° 2004/18/CE du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services définit sommairement les concessions de travaux publics : "La concession de travaux publics est un contrat présentant les mêmes caractéristiques qu'un marché public de travaux, à l'exception du fait que la contrepartie des travaux, consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter l'ouvrage, soit dans ce droit assorti d'un prix". et les concessions de services : "La concession de service est un contrat présentant les mêmes caractéristiques qu'un marché public de services, à l'exception du fait que la contrepartie de la prestation des servies consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter le service, soit dans ce droit assorti d'un prix". [art. 1er – "Définitions" 3.4.] L'assimilation partielle aux marchés est critiquable, et doit être limitée à une partie de l'objet du contrat : la prestation de travaux ou de services. Le Titre III de la Directive 2004/18/CE traite des "Règles dans le domaine des concessions de travaux publics" uniquement. Le texte présente une curiosité à cet égard. Ces règles ne s'appliquent pas aux concessions : "b) qui sont octroyées par des pouvoirs adjudicateurs exerçant une ou plusieurs des activités visées aux articles 3 à 7 de la directive 2007/17/CE, lorsque ces concessions sont octroyées pour l'exercice de ces activités". [Art. 57b de la Directive] Or, l'article 5 de la Directive 2004/17/CE traite des services de transport : "La présente directive s'applique aux activités visant la mise à disposition ou l'exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, systèmes automatiques, tramway, trolleybus, autobus ou câble. En ce qui concerne les services de transport, il est considéré qu'un réseau existe lorsque le service est fourni dans les conditions déterminées par une autorité compétente d'un Etat membre, telles que les conditions relatives aux itinéraires à suivre, à la capacité de transport disponible ou à la fréquence du service". L'article 1er de la Directive 2004/17/CE présente la même définition des "concessions de travaux" et des "concessions de services" que celle de la Directive 2004/18/CE [art. 1er 3a) et b)]. Mais l'article 18 de la Directive 2004/17/CE précise que : "La présente directive n'est pas applicable aux concessions de travaux ou de services qui sont octroyées par des entités adjudicatrices exerçant une ou plusieurs des activités visées aux articles 3 à 7 lorsque ces concessions sont octroyées pour l'exercice de ces activités". A strictement parler, on est en présence d'un vide juridique : ni la Directive 2004/18/CE ni la Directive 2004/17/CE ne sont applicables aux concessions de travaux ou de services passées dans le domaine des transports.

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Cela ne signifie nullement l’interdiction de mettre en œuvre des concessions de travaux publics, ou de travaux publics et de service public dans le domaine des transports. Simplement, dans la mesure où seules les règles de passation des concessions de travaux publics ont été définies au niveau communautaire, ce sont ces règles que l'on applique, et ce bien que les concessions de transport soient exclues du champ d'application de la Directive 2004/18/CE. Cette solution, qui est une solution de prudence3, est justifiée par l'obligation de mise en concurrence des contrats, tirée à défaut de directive applicable, des dispositions du Traité de l'Union européenne [CJCE, 7 décembre 2000, Telaustria Verlags GmbH et Telefonadress GmbH c/Telekom Austria, aff. C-324/98]. La personne publique doit assurer un "degré de publicité adéquat" pour la passation d'une concession, afin d'assurer le respect du principe de non-discrimination inscrit à l'article 12 du Traité instituant la Communauté européenne. Un Tribunal administratif français est même allé plus loin, en fondant l'obligation d'avis d'appel public à la concurrence à l'échelon européen sur les articles 43 et 49 du Traité du 25 mars 1957, qui consacrent la liberté d'établissement des ressortissants des Etats membres et la libre prestation des services à l'intérieur de la Communauté (TA Pau, 22 juin 2006, req. n° 0600294 – il s'agissait d'une DSP d'exploitation de casino). La définition générale des concessions, qui vaut tant au regard du Droit communautaire que du Droit national, implique : - une mission globale confiée au concessionnaire, - des prestations effectuées au profit de tiers par rapport au pouvoir adjudicateur, - un financement privé, au moins partiel, des investissements et de l'exploitation (prix

payé, au moins en partie, par les usagers du service). Cette définition implique donc que l'aléa économique doit être supporté, non pas par la collectivité publique, mais par le délégataire, dans les conditions et limites du contrat. Celui-ci gère le service public à ses risques et périls. En fait, il existe toujours un partage des risques, organisé contractuellement, le concessionnaire ayant droit à l'équilibre financier du contrat. Le risque de fréquentation est pris par le concessionnaire, dans des conditions normales, mais les contrats comportent une "clause de sauvegarde" ou de "réexamen des conditions financières" (parfois appelée "clause de rendez-vous contractuel" ou "de revoyure"). Cette clause contractualise l'imprévision, c'est-à-dire qu'elle permet de revoir les conditions financières du contrat en cas de survenance d'événements extérieurs aux parties, imprévisibles ou dont les effets ne pouvaient pas être raisonnablement prévus par les parties lors de la signature du contrat, et qui entraînent une dégradation significative de l'économie du contrat (expression qui remplace souvent celle plus ancienne de "bouleversement de l'économie du contrat" (v. notamment CE, 30 mars 1916, Compagnie générale de l’éclairage de Bordeaux, Rec. p. 125 ; CE, 16 avril 1986, Compagnie Luxembourgeoise de Télévision, AJDA 1986, p. 284). Il est difficile de fixer un seuil de rémunération substantielle liée aux résultats de l'exploitation (élément essentiel de la définition des DSP donnée par l’article L1411-1 du CGCT cité plus haut), qui comporte une appréciation du risque commercial. L’analyse financière est faite au cas par cas. En toute hypothèse, il n’est pas forcément de 30%, comme il a été souvent dit (CE, 30 juin 1999, SMITOM Centre-Ouest-Seine-et-Marnais, AJDA 1999, page714, Conclusions C. Bergeal).

3 A partir du moment où ni la directive 2004/18 (applicable aux secteurs dits classiques), ni la directive 2004/17 (applicable notamment aux transports) ne régissent la passation des concessions de travaux et de service, on serait tenté de ne pas appliquer les règles de passation prévues par l’un ou l’autre de ces textes et de se limiter aux grands principes généraux de transparence et non discrimination fixés par le Traité de l’UE.

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Dans cette affaire, relative à une usine d’incinération des déchets ménagers, la rémunération liée aux résultats de l’exploitation consistait en un intéressement dont le taux n’était pas indiqué, sur des recettes propres évaluées à 30% des recettes totales. Le contrat a, dans cette hypothèse, été qualifié de délégation de service public. La solution retenue a été la même dans une affaire, relative à des transports interurbains, où le cocontractant gardait à sa charge, le cas échéant, 10 % du déficit (CAA Marseille, 2 mai 2002, Département du Var, BJCP n° 20 page 46). De même, il est difficile de fixer un seuil d'applicabilité de la théorie de l'imprévision. Il varie selon les cas, notamment en pourcentage d'évolution de charges, ou d'indices de la formule de révision. La clause de réexamen des conditions financières doit assurer un équilibre entre : - la "gestion aux risques et périls" du concessionnaire, - le droit du concessionnaire à l'équilibre financier du contrat. Il faut donc maintenir une part de risque commercial, à la charge du concessionnaire, lié à la fréquentation, à la qualité du service et à la dynamique des recettes directement perçues auprès des "usagers" ou "clients" du service public. En toute hypothèse, les concessions, comme toutes les délégations de service public, ne sont pas réservées aux services publics rentables. Des services publics structurellement déficitaires, comme les transports publics de personnes, peuvent être concédés ou affermés, dès lors que sont respectées les règles, juridiques et fiscales, du subventionnement public. I.2. - Principales caractéristiques des concessions I.2.1. Maîtrise d'ouvrage privée Le concessionnaire est, es qualités, maître d'ouvrage [CE 3 mars 1989, Société AREA, Rec. p. 69]. Il agit, en son nom et pour son compte, même si les ouvrages (au sens large du terme) sont réalisés pour une personne publique. Le concessionnaire assume donc, en principe, le risque de construction, notamment en termes de performances, de délais et de coûts. Là encore, la règle est le partage des risques, dans la mesure où au-delà de certaines limites, le concessionnaire peut se retourner vers le concédant. Par exemple, en cas de sujétions imprévues (risques géologiques, archéologiques) ou de faits imputables au concédant ou à d'autres personnes (fait du prince, retards non imputables au concessionnaire). En pratique, pour obtenir la concession, le concessionnaire (la "société de projet") conclut un contrat de conception-construction avec les entreprises groupées et les entreprises liées, et transfère l'essentiel des risques de construction au groupement constructeur (selon la technique du "back to back" ou transparence). Toutefois, le concessionnaire demeure juridiquement responsable de l'exécution de ses missions et reste l'interlocuteur du concédant. Il faut préciser que le contrat de conception-construction, de même que le contrat d'exploitation-maintenance, conclu avec une filiale ou un actionnaire de la société de projet, ne sont pas des contrats de sous-traitance au sens de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975. Ils ne sont pas non plus des subdélégations, dans la mesure où ils ne comportent pas une cession partielle de la concession. Ce sont des contrats de droit privé que le concessionnaire peut conclure en sa qualité de maître d'ouvrage, librement, sans mise en concurrence.

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A cet égard, la loi n° 85-703 du 12 juillet 1985, relative à la maîtrise d'ouvrage publique (dite loi MOP), n'est pas applicable aux concessions. I.2.2. Régime des biens et durée du contrat Le régime des biens dans une concession est particulier, car il ne lie pas la maîtrise d'ouvrage, le financement et l'amortissement, d'une part, et la propriété des biens, d'autre part, comme classiquement. Il existe trois catégories de biens dans une concession : - les biens de retour, appartenant ab initio à la Collectivité, même ceux réalisés et

financés par le concessionnaire, sur lesquels celui-ci a un droit de jouissance exclusive, pendant la durée du contrat, et faisant obligatoirement retour au concédant en fin de contrat, ils ne peuvent donc pas être hypothéqués ;

- les biens de reprise, généralement mobiliers, appartenant au concessionnaire

pendant la durée du contrat, et pour lesquels la collectivité peut exercer une faculté de reprise à la fin du contrat ;

- les biens propres du concessionnaire, lui appartenant et restant sa propriété à la fin

du contrat (catégorie résiduelle). Le concessionnaire amortit les ouvrages sur la durée du contrat de concession (amortissement financier dit de caducité – Guide comptable des entreprises concessionnaires de service public). S’ajoutent les amortissements techniques et provisions de renouvellement pour les équipements et matériels renouvelables. Conformément aux dispositions de l'article L. 1411-2 du Code général des collectivités territoriales, la durée du contrat :

"est déterminée par la collectivité en fonction des prestations demandées au délégataire. Lorsque les installations sont à la charge du délégataire, la convention de délégation tient compte, pour la détermination de sa durée, de la nature et du montant de l'investissement à réaliser et ne peut dans ce cas dépasser la durée normale d'amortissement des installations mises en œuvre". Cette notion de "durée normale d'amortissement des installations" doit être interprétée dans le respect du principe de libre administration, et donc de liberté contractuelle des collectivités territoriales (Cons. Const., 20 janvier 1993, n° 92-316 DC ; Cons. Const., 20 janvier 1984, n° 83-168 DC). Et ce, nonobstant la "pression" sur la nécessité de remise régulière en compétition des contrats. La durée d'exploitation d'une concession doit permettre au concessionnaire non seulement de couvrir ses charges d'exploitation et de maintenance ("petit équilibre"), mais d'amortir les investissements de premier établissement qu'il a réalisés ("grand équilibre"). Il est, dès lors, difficile de dissocier : - la durée d'amortissement qui conditionne la durée du contrat, - la durée de l'exploitation. C'est ainsi que de grandes concessions récentes de l'Etat ont des durées très longues, même si le concessionnaire sous-traite l'exploitation à une filiale (à titre d'exemple, la concession du viaduc de Millau a une durée de plus de soixante-dix-huit ans- décret n° 2001-923 du 8 octobre 2001 ; la concession de l'autoroute A 65 a une durée de cinquante-cinq ans – décret n° 2006-1619 du 18 décembre 2006).

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Dans le domaine des transports publics urbains, la durée classique d'une concession de TCSP est de trente ans à compter de la mise en service commerciale (ex. la double concession de travaux publics et de service public de l'agglomération caennaise ; la concession globale de transports urbains de l'agglomération rémoise). A cette durée s'ajoute la durée prévisionnelle des études et des travaux, qui est variable. A titre d'exemple, elle a été de huit ans à Caen (plus longue que prévu) et elle est de quatre ans et demi, à titre prévisionnel à Reims – contrat signé le 13 juillet 2006. Néanmoins, de manière générale, des clauses permettent à la collectivité publique de mettre fin de manière anticipée au contrat (déchéance, résiliation unilatérale pour motif d'intérêt général, résiliation conventionnelle). Elles ont toutefois un coût, qui est au minimum le paiement de la valeur non amortie ou de la valeur nette comptable des biens, majorée, le cas échéant, de la TVA à reverser au Trésor public. Et plus généralement une indemnisation du manque à gagner du concessionnaire et des frais directement liés à la fin anticipée du contrat. Ces clauses d'indemnisation peuvent être aménagées, compte tenu des modalités de financement des investissements. I.2.3. Régime juridico-financier et fiscal des concessions Le concessionnaire, es qualités, maître d'ouvrage, est chargé du financement des ouvrages de premier investissement et, au cours de la concession, des renouvellements et, le cas échéant, des modernisations, modifications et ouvrages complémentaires. Les modes de financement possibles sont les suivants (développés dans le Titre II – Chapitre II ci-après) : - fonds propres, - quasi-fonds propres, - emprunts, - cession-escompte de créances, - crédit-bail SOFERGIE, - subventions d'équipement. La subvention d'équipement, définie comme la contribution au financement d'un équipement d'intérêt général (décret n° 99-1060 du 16 décembre 1999, relatif aux subventions de l'Etat pour des projets d'investissement), est versée nette de taxes. Depuis la suppression de la "condition financière (ou condition de répercussion)4", la subvention d'équipement n’est plus prise en compte pour la détermination du prorata de déduction prévu à l’article 212 de l’annexe II du CGI. La déduction de la TVA afférente aux investissements financés en tout ou partie par une subvention d’équipement est donc autorisée dès lors ces investissements sont utilisés pour les besoins d’une opération ouvrant droit à déduction, et sous réserve du respect des conditions de temps et de forme du droit à déduction. En phase d'exploitation, en raison du déficit structurel des transports publics de personnes, la rémunération du concessionnaire ou du fermier est constituée, en principe, de trois éléments :

4 La "condition financière", imposée par les articles 216 bis et suivants de l’annexe II du Code Général des Impôts, correspondait à l’obligation de répercussion de l’amortissement des investissements dans le prix du service. La décision de la CJCE du 6 octobre 2005 (aff. C-243/03, Commission des Communautés européennes c/République française, soutenue par le Royaume d’Espagne) a jugé cette obligation non-conforme à la 6ème directive TVA.

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- les recettes perçues directement auprès des usagers, et lui appartenant, selon les

tarifs fixés par l'autorité organisatrice (décret n° 85-891 du 16 août 1985 relatif aux transports urbains de personnes et aux transports routiers non urbains de personnes) ;

- les compensations tarifaires, remplaçant les gratuités, ou venant en complément des tarifs sociaux décidés par l'autorité organisatrice, et parfois des collectivités membres ;

- la subvention forfaitaire d'exploitation (SFE), destinée à contribuer à l'équilibre financier du contrat.

Celle-ci est déterminée sur la base des comptes prévisionnels du concessionnaire qui comportent un engagement sur la dynamique des recettes et la maîtrise des charges. La SFE est ainsi un montant annuel forfaitaire, qui évolue selon une formule de révision paramétrique [indices en relation avec l'objet du contrat, avec pondération et une partie fixe (variable selon les cas, 2 à 7 % ou plus)]. Elle a, de cette manière, une certaine autonomie par rapport aux conditions économiques réelles. En toute hypothèse, elle ne doit pas couvrir systématiquement le déficit d'exploitation (art. L 2224-2 du Code général des collectivités territoriales) et elle doit assurer une juste rémunération, incluant une marge "raisonnable" du concessionnaire ou du fermier (art. 6 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982). Si cette répartition est bien respectée dans le contrat, le régime fiscal est le suivant : - les recettes perçues auprès des usagers ou autres (titres de transport, recettes

annexes tirées de la publicité, le cas échéant) sont des prix normalement soumis à TVA, au taux réduit de 5,5 % ;

- les compensations tarifaires, calculées selon des clés de mobilité par abonnement ou

titre unitaire ou selon validation, sont des compléments de prix, et donc en tant que telles soumises à TVA au taux applicable ;

- la subvention forfaitaire d'exploitation est nette de taxes (Instruction fiscale 3-A-7-

06 n° 100 du 16 juin 2006 – TVA – Subventions directement liées aux prix d'opérations imposables).

Il faut insister sur la rédaction du contrat sur ce point. La SFE doit être réellement forfaitaire, une contribution globale à l'équilibre financier du contrat, et non susceptible d'être requalifiée de "complément de prix", comme les compensations tarifaires, dont elle doit être clairement distinguée. Dans ces conditions, le concessionnaire a droit à la déduction de la TVA sur toutes ses charges, et pas simplement au prorata des recettes soumises à TVA. Cependant, la question de l'assujettissement à la taxe sur les salaires5, lorsque les subventions de fonctionnement sont versées nettes de taxes, demeure posée et non clairement tranchée, semble-t-il, dans l'attente de solutions contentieuses. 5 La taxe sur les salaires est due pour les activités non assujetties ou, dans le cadre d’une activité assujettie, lorsque plus de 10% du chiffre d’affaire du redevable n’est pas taxé.

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II - Contrats d'exploitation Il existe un certain « désordre juridique » dans les contrats de transports publics au regard des deux catégories fondamentales que sont les marchés publics et les délégations de service public. Cette situation est due, au moins en partie, à l'héritage du décret n° 81-238 du 10 mars 1981, portant approbation des conventions types, d'un règlement intérieur type des régies, ainsi que des cahiers des charges types pour l'exploitation des services de transports publics d'intérêt local. Ce décret doit être considéré comme implicitement abrogé par la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, qui a supprimé la tutelle technique de l’Etat, et donc les documents contractuels types. Cependant, des contrats continuent à s'inspirer des quatre types de contrats figurant dans le décret du 10 mars 1981 : - gestion aux risques et périls, - gestion avec garantie de recettes, - gestion à prix forfaitaire, - exploitation en gérance. Compte tenu de la définition de la DSP, qui implique une part de risque commercial assumée par le délégataire, seule la première catégorie, la gestion aux risques et périls, qui correspond à l'affermage peut être qualifiée de DSP. On peut y ajouter la régie intéressée, dans certaines conditions, et seulement sur le plan juridique (et non fiscal). II.1. Affermage II.1.1. Exploitation du service public Le contrat d’affermage est le contrat par lequel une AO confie à une personne, généralement privée, l’exploitation du service public, moyennant une rémunération, au moins partielle, auprès des usagers du service, ainsi que la gestion et la maintenance (en partie) des ouvrages et équipements mis à sa disposition. Il s’agit d’un contrat relevant de la catégorie des délégations de service public, et qui comporte de nombreuses similitudes avec les contrats de concession de service public. La mise à disposition au profit du fermier concerne les ouvrages et équipements dits de premier établissement, ainsi que, le cas échéant, les ouvrages et équipements complémentaires réalisés au cours du contrat. Ceci n’empêche toutefois pas qu’un fermier puisse prendre à sa charge une partie du financement d’installations nouvelles ou renouvellement de matériels, dès lors que l’autorité délégante conserve la plus forte part de la charge d’investissement (v. en ce sens, CE, 19 avril 1989, Société des transports urbains d’Angers, DA 1989, comm. N° 266 ; CE, 3 novembre 1995, Société Lyonnaise des eaux-Dumez, Rec. T. p. 901). Dans la rédaction d'un contrat d'affermage, il faut être très attentif aux clauses relatives à la maintenance des biens, et à son partage entre l'AO et le "fermier" exploitant. La liberté contractuelle doit être mise en œuvre, mais à bon escient, s'agissant à la fois des équipements concernés et des niveaux d'intervention, incluant les renouvellements [Des normes relatives à la maintenance et aux contrats de maintenance (XP X 60-20 d'août 1995, NF EN 13306 de juin 2001, NF EN 13269, notamment) peuvent être obtenues auprès de l'AFNOR]. Les nouveaux outils informatiques, et notamment la GMAO (gestion de la maintenance assistée par ordinateur), qui permet de suivre notamment la maintenance, préventive et curative, sont évidemment utiles.

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Allant plus loin, la jurisprudence a admis qu'un contrat puisse être à la fois un affermage et une concession [CE 6 mai 1991, Syndicat intercommunal du Bocage, req. n° 65846]. Cette alliance au sein d'un même contrat ne soulève pas de difficultés, dès lors que le régime juridique et fiscal propre à la concession et à l'affermage est respecté pour chaque partie au sein du contrat. L’exploitation du service affermé est aux risques et périls du fermier. Celui-ci doit donc supporter les déficits d’exploitation (v. par ex. CAA Bordeaux, 19 décembre 1989, Société Sotest, req. n° 89BX00305). Néanmoins, comme en matière de concessions de service public, le contrat prévoit généralement des clauses de partage des risques ainsi que l’aménagement d’une certaine solidarité financière entre les parties. Enfin, la durée du contrat d’affermage est plus courte que celle prévue dans les contrats de concession de service public, le fermier n’ayant pas à supporter la charge des dépenses de premier établissement. II.1.2. - Régime juridico-financier et fiscal Le fermier est rémunéré, au moins partiellement, par des redevances perçues directement auprès des usagers, et assume donc un certain risque commercial, à l’instar des concessionnaires de service public. Néanmoins, dans les services équilibrés financièrement, le fermier ne conserve pas l’intégralité des redevances payées par les usagers, dans la mesure où il doit verser à la personne publique une redevance perçue auprès des usagers et correspondant à l’utilisation des ouvrages et équipements mis à disposition du service. Cette redevance de mise à disposition des biens est destinée à couvrir, au moins partiellement, les dépenses d’investissement supportées par la personne publique. En outre, en application des règles régissant la domanialité publique, le fermier peut également avoir à verser une redevance d’occupation du domaine public en vue de l’utilisation des dépendances qui sont affectées à l’usage du public. Dans le domaine des transports, le fermier ne paie pas de redevance d'occupation du domaine public pour l'utilisation de la voirie publique, celle-ci étant également affectée à la circulation des transports en commun. Si une convention d'occupation du domaine public et de superposition d'affectations a été conclue entre l'AO et la personne publique propriétaire ou gestionnaire de la voirie, cette convention est stipulée sans redevance, compte tenu du fait que l'occupation de la voirie par un TCSP est conforme à la destination de la voirie, à la différence des réseaux souterrains qui, eux, sont simplement compatibles avec cette destination [CE 23 février 2000, Société de distribution de chaleur de Saint-Denis, Rec. 79 – affaire relative au tramway de Bobigny et au déplacement du réseau de chauffage urbain aux frais du concessionnaire de ce dernier]. Dans le cadre d’un contrat d’affermage, l’AO n’est pas l’exploitant fiscal du service, le « compte transport » étant chez le fermier. Elle peut néanmoins récupérer la TVA sur ses investissements via le transfert de droit à déduction. Compte tenu de la suppression de la "condition financière" évoquée plus haut, le transfert, à l’exploitant du service, des droits à déduction de la TVA ayant grevé les investissements n'entraîne plus obligatoirement le versement, par cet exploitant, d’une redevance de mise à disposition des biens, nette de taxes, correspondant à l'amortissement des biens dans les comptes de la collectivité à la charge du fermier (v. Instruction fiscale 3 D-1-06 n° 15 du 27 janvier 2006 – TVA Conditions d'exercice du droit à déduction).

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Le transfert des droits à déduction de la TVA ayant grevé les investissements supportés par la collectivité est dorénavant possible en cas de financement de ces investissements par crédit-bail SOFERGIE (art. 87 de la loi de finances pour 1987), selon la nouvelle Instruction fiscale 3 D-02-06 n° 100 du 16 juin 2006 . TVA – Délégation de services publics. Procédure de transfert du droit à déduction. II.2. Régie intéressée II.2.1. Un contrat hybride La régie intéressée est le contrat par lequel une AO confie la gestion d’un service public à une personne publique ou privée, le régisseur, qui assure le contact avec les usagers, exécute les travaux courants, mais au nom et pour le compte de la personne publique, moyennant une rémunération forfaitaire indexée sur le chiffre d’affaires réalisé, et un intéressement sur le trafic et/ou les recettes. Il s’agit d’un contrat relevant de la catégorie des délégations de service public, dans la mesure où le régisseur assume une petite partie du risque lié à l’exploitation, nonobstant son mode de rémunération (v. CE, 30 juin 1999, Syndicat mixte du traitement des ordures ménagères centre-ouest seine-et-marnais, AJDA 1999, p. 714). . Le régisseur agit au nom et pour le compte de la collectivité publique. En conséquence, les engagements pris par le régisseur font naître des droits et obligations à la charge de la personne publique. Egalement, les contrats comportent généralement une clause de garantie de la collectivité par le régisseur contre toute réclamation ou toute action de tiers et d’usagers. Il s’agit néanmoins, sur le plan fiscal, d’un marché de services. II.2.2. Modalités de rémunération et régime fiscal Le mode de rémunération du régisseur présente certaines spécificités. Tout d’abord, il convient de souligner que les recettes et dépenses sont reversées dans leur intégralité à la collectivité. L'exploitant doit donc, en principe, afin de respecter les règles de la comptabilité publique, désigner un régisseur de recettes, agréé par le Trésorier Payeur Général, et souscrivant les garanties et assurances des comptables publics. En pratique, ce régime assez lourd n'est pas respecté. L'exploitant perçoit les recettes, au nom et pour le compte de l'autorité organisatrice, et les reverse régulièrement au Trésor public, selon une documentation convenue. Ainsi, le contrat donne une sorte de mandat financier à l'exploitant. Ensuite, la rémunération présente un caractère spécifique, dans la mesure où elle prend en considération les résultats obtenus s’agissant de la gestion du service. Deux éléments caractérisent, en effet, la rémunération du régisseur : - Un prix de base qui lui assure une rémunération forfaitaire annuelle et indexée, une

partie variable calculée en fonction des résultats de l'exploitation (recettes et/ou voyages).

- L'intéressement peut être aussi positif et négatif, avec un système de bonus/malus, fondé sur les résultats financiers de l'exploitation ou sur la qualité de service.

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L'exploitant, dans le cadre d'une régie intéressée, n'est pas l'exploitant fiscal. La rémunération, étant considérée comme un prix de service, est soumise à TVA (v. instruction fiscale du 21 janvier 1985). L'autorité organisatrice demeure l'exploitant fiscal et gère le "compte transport", et donc la TVA, puisque les transports publics de personnes sont soumis à la TVA au droit commun, qu'il s'agisse des investissements, des recettes et des dépenses de fonctionnement. La TVA ayant grevé les investissements n'est donc pas éligible au FCTVA.

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Typologie des DSP de transport Il est possible de distinguer trois groupes dans les contrats utilisés en matière de délégation du service public de transports.

• Les contrats que l’on regroupe classiquement sous le terme de « délégations de service public » dans l’analyse des contrats de l’administration sont parfaitement applicables en la matière. Ainsi, on verra qu’ils peuvent être des concessions, des affermages, parfois des régies intéressées (qui sont aussi qualifiées de marchés publics dans certains cas), mais qu’ils ne peuvent plus être des gérances qui sont tous qualifiés de marchés publics depuis 1999. (II.2.1)

• Aux contrats classiques s’ajoutent des contrats spéciaux aux transports publics, qui ont été contraignant dans les années 1980, dont le caractère obligatoire a été abandonné en 1985 (pour les textes précis mettant en place et annulant ces catégories contractuelles, voir 1re partie, point I.3.2) mais qui sont encore pratiqués la plupart du temps. Ce sont les fameux : gestion aux risques et périls, gestion avec garantie de recettes, gestion à prix forfaitaire ou gérance. (II.2.2)

• Enfin, à partir du contrat précité appelé « gestion avec garantie de recettes », la pratique a développé une forme contractuelle très répandue intitulée « compensation financière forfaitaire ». (II.2.3)

1. Les contrats classiques des délégations de service public Lors de l’examen, par le Parlement, du projet de loi, le rapporteur devant le Sénat avait indiqué que les contrats d’affermage, de régie intéressée et de gérance sont considérés comme faisant partie de la catégorie des délégations de service public (Rapport A.N., M. Y. DURAND, 12.10.1992 ; Rapport Sénat, M. C. BONNET, 25.11.92). Les évolutions jurisprudentielles lui ont donné tort : si les concessions et les affermages sont bien des délégations de service public dans tous les cas, les régies intéressées ne le sont que parfois (elles peuvent aussi être des marchés publics selon les cas) et les gérances n’en sont jamais.

Attention Le contrat tel qu’il est appelé par les parties n’a, pour ainsi dire, aucune importance. Le juge se donne tout pouvoir pour le requalifier en analysant ses clauses. Ainsi, un contrat que les parties auraient appelé « concession » mais qui serait en réalité une gérance selon ses clauses ne pourrait être une délégation de service public et devrait être passé selon une procédure de marché public.

A) La concession

La concession est une catégorie de contrats issue d’une construction jurisprudentielle, aucun texte n’en ayant jamais donné une quelconque définition. L’une des premières définitions jurisprudentielles qui en a été donnée est la suivante :

« [la concession est] le contrat qui charge un particulier ou une société d’exécuter un ouvrage public ou d’assurer un service à ses frais, avec ou sans subvention, avec ou sans garantie d’intérêts, et que l’on rémunère en lui confiant l’exploitation de l’ouvrage public ou l’exécution du service public avec le droit de percevoir des redevances sur les usagers de l’ouvrage ou ceux qui bénéficient du service public »

Conseil d’État, 30 mars 1916, Compagnie Générale d’éclairage de Bordeaux, Sirey 1916.3.p.17

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Si l'on exclut les concessions minières, il existe en réalité trois différents types de concessions : les "concessions de travaux publics", les "concessions de service public" et les "concessions de service et travaux publics". Toutes trois ont des éléments de définition communs, sauf leur objet matériel. Lorsque seul le service est délégué, il s’agit d’une concession de service public, lorsque seul un travail public est à réaliser et l’ouvrage est à gérer, il s’agit d’une concession de travaux publics (mais celles-ci n’existent pour ainsi dire plus, et de plus, elles ne sauraient en aucun cas être des délégations de service public puisque, par définition, aucun service n’est délégué) et, comme c’est le cas le plus souvent, lorsqu’il y a les deux, il s’agit d’une « concession de travaux et services publics ». La concession peut être aujourd’hui définie comme « un contrat de délégation de service public aux termes duquel une personne publique confie à une personne privée le soin de financer, construire et exploiter un

ouvrage public ou des biens meubles qui servent de support à la fourniture d’un service public. Le concessionnaire, maître d’ouvrage, agit pour son propre compte, exploite le service public à ses frais et

risques et se rémunère principalement au moyen de redevances perçues sur les usagers. »

Attention La « concession de travaux et service public » est le seul contrat de délégation de service public qui permette la mise en place ou l’agrandissement important d’un réseau de TCSP ou des investissements immobiliers et mobiliers lourds payés et réalisés par le même cocontractant que celui qui gère le service. Les autres contrats de délégation de service public ne permettent que la délégation du service lui-même, sauf quelques investissements limités. Si l’AO veut utiliser un autre type de contrat de DSP que la concession tout en investissant dans un réseau (rails, couloirs de bus) ou dans du matériel roulant, elle le fera alors en régie, sous forme de marchés publics (de travaux ou fournitures) ou de contrats de Partenariat. C’est le concessionnaire qui, juridiquement, est le maître d’ouvrage. Partant de ce constat, on distingue parmi les biens et ouvrages servant de support à la fourniture du service public :

• les biens de retour : ce sont les biens indispensables à la poursuite de l’activité de service public ; ils sont réputés être la propriété de l’autorité concédante « ab initio », c’est-à-dire dès le début du contrat ;

• les biens de reprise : pendant toute la durée du contrat, ils sont la propriété du concessionnaire ; au terme de la concession, ils peuvent être repris par l’autorité concédante moyennant versement d’un prix au concessionnaire ;

• les biens propres du concessionnaire ; • les biens mis par la collectivité à la disposition du concessionnaire pendant toute la durée du contrat

: par exemple, en matière de TCSP, un réseau de tramways déjà existant peut être confié au concessionnaire par l’autorité organisatrice.

Conformément à la définition classique d’une gestion aux risques et périls de l’exploitant, le mode traditionnel de rémunération du concessionnaire consistait exclusivement en la perception de redevances sur les usagers : la perception de telles recettes d’exploitation était un critère déterminant pour reconnaître l’existence d’une concession (Conseil d’État, 14 octobre 1988, Société Socéa-Balancy, Marchés publics n°240, p.27). La définition de l’arrêt de du Conseil d’État de 1916 Compagnie générale d’éclairage de Bordeaux (citée ci-dessus) prévoyait déjà des subventions d’investissement ou d’exploitation, mais elle montre aussi que le principe de la rémunération d’une concession se fait par un « droit de percevoir des redevances sur les usagers […] qui bénéficient du service public ». Aujourd’hui, il est couramment admis que le concessionnaire peut percevoir d’autres types de ressources : subventions publiques, recettes publicitaires...Toutefois, pour conserver à ce contrat sa qualification juridique de concession, la jurisprudence veille à ce que les recettes provenant des redevances ne deviennent pas accessoires par rapport aux autres ressources du concessionnaire, et notamment le prix versé par la collectivité publique.

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Or, dans le domaine des transports, les subventions versées au concessionnaire concernent le plus souvent non seulement les investissements, mais aussi l’exploitation. Cela est dû au caractère structurellement déficitaire de ce type de service. Cette situation a des conséquences juridiques non négligeables, dans la mesure où l’importance des subventions allouées au cocontractant de l’autorité organisatrice risque de dénaturer la qualification juridique du contrat de concession. Si l’approche par une répartition des risques entre l’exploitant et l’autorité organisatrice, permet en théorie, de classifier les contrats en fonction d’une plus ou moins grande implication du délégataire, l’examen attentif des dispositions contractuelles permet de constater que la contribution de l’autorité organisatrice (fondée sur les charges ou sur les recettes) et versée à l’exploitant évolue quasi systématiquement, par des clauses permettant (ce qui en soi n’est pas inconcevable) d’actualiser (en fonction de l’évolution des coûts), d’ajuster (en fonction des recettes réelles par exemple), ou de réviser (en fonction de l’évolution des conditions d’exploitation) la participation de l’autorité organisatrice.(Voir notamment sur ce point le dossier nº 95 réalisé par le CERTU sur les conventions d’exploitation dans les transports publics urbains - septembre 1999).

B) L’affermage

Construction jurisprudentielle au même titre que la concession de service public, un contrat d’affermage peut être défini comme « la convention de délégation de service public par laquelle une collectivité publique confie à un opérateur l’exploitation d’un service public à ses risques et périls, grâce à des ouvrages qu’elle lui remet en début de contrat, et ce moyennant le versement d’une contrepartie (redevance) prélevée sur les usagers. Le fermier peut aussi être chargé d’investissements légers. »

Attention La différence entre une « concession de service public (sans travaux publics) » et un « affermage » tient aux investissements autres qu’immobiliers. Lorsque le cocontractant doit acheter les biens meubles qui permettent de réaliser le service (bus, cars, tramways), le contrat sera plutôt une concession, lorsqu’il ne fait que rendre le service et que l’AO achète elle-même le matériel roulant, il s’agira d’un affermage. Pour ce qui concerne les investissements, dans un contrat d’affermage,

• C’est la collectivité affermante qui a la charge des frais de premier établissement, c’est-à-dire du financement et de la réalisation des infrastructures devant servir de support à la fourniture du service public.

• Par la suite, les travaux d’entretien et de renouvellement à l’identique des installations sont à la charge du fermier

• Mais, les travaux de modernisation et d’extension sont à la charge de la collectivité affermante. Juridiquement, le fermier est maître d’ouvrage des travaux qu’il est amené à réaliser.

L’ensemble des biens et ouvrages mis à la disposition du fermier revient de plein droit et gratuitement, en fin de contrat, à la collectivité propriétaire, sans que le fermier ne puisse prétendre au remboursement des frais exposés sur ces équipements, puisqu’ils l’ont été au titre de son obligation d’entretien. Les biens propres du fermier, qui ne sont pas indispensables à la poursuite de l’exploitation, peuvent librement être repris sans que la collectivité ne puisse en revendiquer l’appropriation (sauf à indemniser le fermier). Par ailleurs, en fin de contrat, la collectivité est tenue d’indemniser le fermier des travaux non encore amortis qu’il a pu engager, avec l’accord de la collectivité, dans les dernières années de vie du contrat. Traditionnellement, le fermier se rémunérait exclusivement par des redevances perçues sur les usagers. A l’heure actuelle, il est admis, comme pour les concessions, que le fermier puisse percevoir d’autres types de ressources (subventions publiques, recettes publicitaires...), dès lors que les redevances ne prennent pas un caractère simplement accessoire.

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En contrepartie de la mise à disposition des ouvrages, le fermier doit verser à la collectivité une redevance correspondant aux investissements engagés pour la réalisation de ces équipements. Il faut cependant distinguer la « redevance pour service rendu » qui est caractérisée par le prix d’un billet payé par les usagers, de la « redevance pour occupation domaniale » qui est celle payée par le fermier (et plus généralement par le délégataire de service public) pour l’utilisation des ouvrages (La redevance représente la contrepartie de l'avantage qu'est le droit d'utiliser à des fins privatives le domaine public.). Toutefois, cette différence est relativement théorique dans la mesure où, en fin de compte, ce sont les usagers qui en supportent le coût, sous la forme d’une augmentation du billet, c’est-à-dire de la redevance pour service rendu qu’ils versent au fermier.

C) La régie intéressée

Donner la définition de cette catégorie de contrat (1) permet de voir qu’elle peut, selon les cas, être à la source de conventions de délégations de service public ou de marchés publics (2)

1) La définition des régies intéressées La régie intéressée est notamment définie par une circulaire nº 75-634 du Ministre de l’Intérieur en date du 13 décembre 1975, relative aux modes de gestion des services publics locaux à caractère industriel et commercial :

« [La régie intéressée] se situe à mi-chemin entre la régie simple et la concession. Dans la régie intéressée, la collectivité finance elle-même l’établissement du service dont elle confie l’exploitation et l’entretien à une personne physique ou morale de droit privé qui assure la gestion pour le compte de la collectivité, moyennant une rémunération qui n’est pas assurée par les usagers, mais au moyen d’une prime fixée en pourcentage du chiffre d’affaires, complétée d’une prime de productivité et éventuellement par une part de bénéfices. Tous ces éléments de la rémunération de l’exploitant sont versés par la collectivité elle-même à son régisseur intéressé ».

La régie intéressée peut donc être définie comme « la convention de délégation de service public, par laquelle la collectivité organisatrice confie à un opérateur privé l’exploitation, pour son compte, du service public, tout en conservant la maîtrise des tarifs, en contrepartie d’une rémunération variant en partie en fonction des économies réalisées, des gains de productivité ou de l’amélioration du service, et éventuellement des pertes. » Dans cette formule juridique, le régisseur intéressé n’engage pas son patrimoine, l’autorité organisatrice ayant supporté les frais de premier établissement. Le régisseur intéressé se borne, quant à lui, à exploiter le service selon un degré d’indépendance qui sera généralement déterminé dans la convention conclue avec l’autorité organisatrice, ainsi qu’à entretenir les ouvrages. La rémunération du régisseur intéressé est généralement constituée :

• d’une prime de base, calculée en fonction du chiffre d’affaires, ou sous forme d’un forfait annuel indexé ;

• d’une série de primes supplémentaires fondées sur : l’augmentation du trafic de passagers, des autres recettes (publicitaires…) ou amélioration de la productivité permettant une baisse des charges d’exploitation.

• le cas échéant, d’une part des bénéfices réalisés.

2) Les régies intéressées peuvent être des délégations de service public… ou des marchés publics Il convient de faire une appréciation au cas par cas des contrats de régie intéressée pour savoir s’ils sont des délégations de service public ou des marchés publics Il faut qu’il y ait effectivement délégation du service public

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Le régisseur intéressé est regardé comme agissant pour le compte de la collectivité et non pour son propre compte (conclusions O. FOUQUET sur Conseil d’État, 21 octobre 1985, Société des Automobiles Michel Delattre, AJDA 1986, p.105). C’est ce qu’a rappelé le Conseil d’État dans l’arrêt Société Socéa-Balancy du 1er février 1989 (Rec. p. 520), en opérant une substitution de la commune au régisseur intéressé à la suite de la dénonciation du contrat, qui prévoyait que la commune devait prendre en charge l’intégralité de l’actif et du passif d’exploitation. Des débats existent cependant en doctrine concernant la réalité de cette dépendance du régisseur vis-à-vis de l’AO. En effet, si la dépendance est trop importante, le service n’est pas réellement délégué et le contrat ne saurait alors être une délégation de service public ; il s’agirait d’un marché public. Il faut que le mode de rémunération corresponde à la définition des délégations du service public La question qui se pose de manière plus importante encore est celle du mode de rémunération de la régie intéressée qui permet que l’on doute de sa qualification de convention de délégation de service public. Bien souvent, les recettes sont considérées comme appartenant à la collectivité et sont reversées par l’exploitant à l’AO. Ce reversement montre qu’il n’y a pas forcément rémunération sur les résultats de l’exploitation… il faut que cette dépendance entre l’exploitation et le paiement du régisseur apparaisse autrement (c’est-à-dire par des intéressements, un prix variable) dans le contrat. On remarque en effet que la rémunération prend, par définition, la forme d’un prix payé par la collectivité. Il convient donc de vérifier si elle correspond effectivement à une « rémunération substantiellement liée aux résultats de l’exploitation ». Cela conduit à devoir regarder plus avant les deux points suivants :

• D’une part, quelle est la part variable en fonction des résultats de l’exploitation sur l’ensemble du prix payé par l’autorité organisatrice ? Si cette part est suffisamment importante (c’est-à-dire qu’elle dépasse 10 % au minimum, mais plus cette part est grande, mieux c’est) la qualification en DSP est possible

• D’autre part, lorsque la part variable est suffisante, y a-t-il véritablement transfert du risque au régisseur intéressé ?

• Si l’une de ces deux conditions n’est pas remplie, le contrat n’est pas une délégation de service, mais un marché public !

Attention En matière de régie intéressée, le contrat doit être pesé dans chacune de ses clauses pour ne pas devenir un marché public. La moindre modification des conditions, notamment financières, durant la phase de négociation de la procédure de passation peut conduire à rendre toute la procédure nulle, et le contrat par la même occasion, parce que celui-ci sera devenu un marché public et devra être passé en application du Code des marchés publics.

D) Le contrat de gérance Le contrat de gérance constitue le cas typique de ce que l’on a considéré comme l’un des contrats de délégation de service public (voir par exemple Rép. Min. nº 4494, J.O. Sénat, 13 octobre 1994, p. 2276) et qui, en application du critère de la rémunération tel qu’il résulte de la jurisprudence, s’est révélé être une catégorie de marchés publics et non de conventions de délégation soumise à la loi Sapin et aux articles L. 1411-1 et s. du CGCT Cette situation est d’autant plus marquante en matière de transports publics que le contrat de gérance était l’un des quatre contrats « spécifiques aux transports publics » de l’article 12 du décret du 29 octobre 1980, pris en application de la loi du 19 juin 1979 relative à la réforme des transports publics d’intérêt local (aujourd’hui abrogée).

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La définition de cette catégorie contractuelle (1) permet de comprendre pourquoi le juge les a implicitement tous qualifiés de marchés publics et non de conventions de délégation de service public (2).

1) La définition des contrats de gérance Le décret du 29 octobre 1980 (abrogé) le définissait comme suit :

« Dans le contrat de gérance, l’autorité organisatrice assure, en cas d’insuffisance des recettes, la couverture des dépenses exposées par l’exploitant, dans la limite d’un budget annuel qu’elle approuve ; en cas d’excédent des recettes sur les dépenses, l’excédent est versé à l’autorité organisatrice. L’exploitant perçoit une rémunération déterminée en fonction de la nature et du volume des prestations fournies, et éventuellement au moyen d’une prime calculée en fonction de paramètres significatifs de l’amélioration de la gestion du réseau ».

On peut donc définir la gérance comme « le contrat par lequel une collectivité organisatrice confie à un opérateur, public ou privé, le soin d’exploiter pour son propre compte un service public, sans que cet opérateur n’ait la maîtrise du service et des tarifs, mais également sans qu’il en assume les risques financiers. »

La conclusion d’un contrat de gérance suppose que la collectivité organisatrice ait supporté les frais de premier établissement. En effet, le gérant n’a pas à assurer les investissements ni la construction des installations devant servir de support à la fourniture du service public : il se borne à en assurer l’exploitation ultérieure (les travaux de mise en conformité étant également à la charge de la collectivité). La gérance se distingue essentiellement d’autres types de contrats d’exploitation d’un service public (régie intéressée, affermage...) par son régime financier : le délégataire de service public n’exploite pas le service à ses frais et risques ; le risque économique lié à l’activité de service public pèse exclusivement sur la collectivité organisatrice, puisque celle-ci conserve un éventuel excédent de recettes ou indemnise le gérant d’éventuelles pertes d’exploitation. En conséquence, le gérant a vocation à percevoir (en plus du remboursement des charges) de l’autorité organisatrice une rémunération annuelle fixe (assortie d’une formule d’actualisation), dont le caractère forfaitaire peut être atténué par la prise en compte de certains critères (qualité de la gestion, diligence apportée dans le recouvrement des redevances...). Une autre caractéristique importante du régime financier de la gérance est que la collectivité organisatrice conserve la maîtrise des tarifs à partir desquels le gérant déterminera les prix payés par les usagers. Dans ce cas, l’exploitant est autorisé à percevoir sur les usagers des prix calculés sur la base des tarifs arrêtés par l’autorité organisatrice. On doit donc considérer que la collectivité conserve, dans cette forme d’exploitation du service public, un large pouvoir de direction dans la définition de la politique générale (et notamment l’élaboration d’un programme d’action pluriannuel), le financement des investissements et le soin d’assurer l’équilibre financier de l’exploitation.

2) La solution jurisprudentielle : les gérances sont une catégorie de marchés publics et non de délégation de service public Le contrat de gérance doit être exclu de la catégorie des conventions de délégation de service public, c’est ce qu’a jugé le Conseil d’État dans une arrêt du 7 avril 1999 Commune de Guilherand-Granges :

Considérant, qu'en vertu des stipulations des traités de gérance passés par la Commune de Guilherand-Granges avec la compagnie générale des eaux, la rémunération de cette société comporte, d'une part, en ce qui concerne la gestion du service de distribution d'eau potable, une partie fixe représentée par la location des compteurs, et une partie proportionnelle au volume d'eau distribué, d'autre part, en ce qui concerne la gestion du

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service d'assainissement, une partie proportionnelle au volume d'eau ; que ces rémunérations proportionnelles au service rendu constituent un prix versé par la commune ; que, par suite, la conclusion de ces contrats, quelle que soit la qualification choisie par les parties, était soumise au respect des règles fixées par le code des marchés publics pour les marchés passés au nom des collectivités locales ; que si la commune soutient subsidiairement, qu'une mise en concurrence a été mise en oeuvre, elle ne verse au dossier aucun élément permettant de justifier que les règles du code des marchés ont été observées ;

Conseil d’État, 7e et 10e sous-sections, 7 avril 1999, Commune de Guilherand-Granges, Req. 156008 (AJDA 1999 p. 517, Concl. C. BERGEAL)

Cette jurisprudence est en réalité une application directe de la définition des gérances qui fait peut être dépendre le paiement de la quantité d’exploitation, mais qui ne transfert en aucun cas le risque au cocontractant. C’est d’ailleurs ce que disait déjà une circulaire n° 75-634 du Ministre de l’Intérieur en date du 13 décembre 1975, relative aux modes de gestion des services publics locaux à caractère industriel et commercial expliquait cela à propos de la gérance :

« Fondé sur les mêmes bases que le contrat de régie intéressée, le contrat de gérance s’en distingue dans la mesure où la collectivité décide seule de la fixation des tarifs. La collectivité conserve les bénéfices ou, en cas de déficit, rembourse celui-ci au gérant qui perçoit une rémunération forfaitaire. Donc le gérant ne prend aucun risque ».

Pour deux principales raisons, on peut être certain que les gérances ne sont pas des délégations de service, mais des marchés publics:

• Premièrement, le contrat de gérance s’analyse davantage en un contrat de prestations de service, dans le cadre duquel le gérant agit pour le compte de la collectivité et assure la gestion courante du service, dans le respect des instructions et orientations définies par la personne publique contractante.

• Deuxièmement dans le contrat de gérance, le gérant ne supporte pas les risques financiers liés à l’exploitation et bénéficie généralement d’une rémunération forfaitaire déterminée par le contrat.

Si un contrat de gérance ne répond pas à ces deux points, en réalité, c’est qu’il ne s’agit pas d’une gérance, mais d’une autre catégorie contractuelle, il faut donc voir à quelle catégorie il correspond et voir si, alors, il peut ou non s’agir d’une délégation de service public.

2. Les anciens contrats spécifiques aux transports publics : une méfiance à développer Le décret abrogé n° 80-591 du 29 octobre 1980 relatif aux modalités d’exploitation des services de transports publics d’intérêt local imposait l’utilisation d’un contrat parmi les quatre suivants : gestion aux risques et périls de l’exploitant, gestion avec garantie de recette, gestion à prix forfaitaire et gérance. En 1980, ces contrats n’étaient pas des « marchés publics » et n’étaient donc soumis à aucune procédure de mise en concurrence. Aujourd’hui, ces contrats ne sont non seulement plus obligatoires, mais ils sont de surcroît tous soumis à des procédures de mise en concurrence, soit comme délégations de service public, soit comme marchés publics. La question centrale est donc là : ces contrats sont-ils des délégations de service public ou des marchés. Outre les contrats de gérance que nous avons abordé juste plus haut (II.2.1 D 2) dont nous savons qu’ils sont tous des marchés publics, il convient d’envisager les trois autres contractuelles.

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A) gestion aux risques et périls de l’exploitant

« Dans le contrat de gestion aux risques et périls, l’autorité organisatrice peut allouer à l’exploitant une contribution financière destinée à compenser des réductions tarifaires accordées à la demande de l’autorité organisatrice à certaines catégories d’usagers. Cette contribution ne doit pas dépasser pendant deux exercices consécutifs, un pourcentage des charges d’exploitation fixé dans le contrat ». Deux remarques peuvent être faites à propos de cette catégorie de contrat spéciale aux transports publics :

• D’une part il s’agit d’un contrat qui correspond parfaitement à la qualification de « délégation de service public » telle qu’elle ressort de la définition de l’article L. 1411-1 du Code général des collectivités territoriales

• D’autre part ces contrats peuvent être rapprochés de deux autres contrats « classiques » décrits au point précédent :

o Soit dans la plupart des cas un affermage o Soit, lorsqu’en plus il y a des investissements de départ (l’achat de bus ou la construction d’un

réseau en cas de TCSP), il s’agira d’une concession.

B) La gestion avec garantie de recette « Dans les contrats de gestion avec garantie de recette, l’autorité organisatrice garantit à l’exploitant une recette minimale pour tout ou partie des services. Elle peut en outre allouer à l’exploitant une contribution financière destinée à compenser des réductions tarifaires qu’elle a accordées à certaines catégories d’usagers » Ces contrats posent plus de problèmes que les précédents quant à la détermination du régime qui leur est applicable. À l’analyse, on s’aperçoit qu’ils peuvent, selon les clauses, être soit des marchés publics, soit des délégations de service public. Il est même possible de dire que l’application stricte de ces critères conduit à ne pas transférer de risque au cocontractant de l’administration et donc à ce que tous ces contrats soient des marchés publics. Pourtant, effectivement, lorsque la recette minimale ne porte que sur une partie des services, il reste une possibilité pour que, sur l’ensemble du contrat, la rémunération soit « substantiellement liée aux résultats de l’exploitation ». Si tel est le cas, alors ce contrat « de gestion avec garantie de recette » pourra être une délégation de service public soumise aux procédures de la loi Sapin et non au Code des marchés publics.

C) La gestion à prix forfaitaire

« Dans le contrat de gestion à prix forfaitaire, l’autorité organisatrice s’engage à assurer à l’exploitant une somme forfaitaire annuelle, quel que soit le montant des charges d’exploitation. Le contrat fixe le montant du forfait en fonction d’une estimation prévisionnelle des charges d’exploitation et définit, pour une durée qui ne peut excéder 5 ans, les modalités d’actualisation du forfait » Cette définition, issue de l’article 11 du décret abrogé nº 80-591 du 29 octobre 1980, fixe les grandes lignes de cette qualification. Pour résumer, on peut dire que dans ce contrat,

• L’autorité organisatrice est propriétaire des biens et réalise les investissements. Elle supporte aussi l’aléa commercial (le risque de gagner ou de perdre des recettes par un moins grand nombre de clients) et est propriétaire des recettes commerciales.

• L’entreprise a pour mission d’exploiter le réseau, avec un engagement sur les charges d’exploitation (le coût du service : essence, personnel, entretien, impôts, frais de gestion) dans le cadre d’un forfait.

Sa rémunération est un forfait versé par l’autorité organisatrice pour compenser ces seules charges d’exploitation, augmentées, le cas échéant, d’un intéressement. L’intéressement porte généralement sur des objectifs de fréquentation commerciale ou de recettes commerciales et de qualité de service.

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Fiscalement, l’entreprise paye la taxe professionnelle, et l’autorité organisatrice est le redevable TVA Comme les contrats de la catégorie précédente, les contrats de « gestion à prix forfaitaire » peuvent être, selon les cas, des délégations de service public ou des marchés publics. Cependant, la qualification de marchés publics est très fréquente. Deux conditions doivent être remplies pour qu’ils soient des délégations de service public

• La première est que leur rémunération ne doit pas être que fixe. Autrement dit, il faut qu’il y ait une part variable. En effet, sinon, la rémunération ne pourra pas être considérée comme « liée aux résultats de l’exploitation ».

• La seconde est que le risque sur les « charges d’exploitation » (c’est-à-dire le risque qui porte sur la gestion de l’entreprise qui rend le service), additionné au risque « sur les résultats d’exploitation » (ceux qui portent sur les autres modes de rémunération que le forfait, c’est-à-dire l’intéressement) doit être assez important pour que le risque soit en réalité transféré à l’exploitant. On remarquera que cela est rare, les charges ne subissent pas habituellement de modifications importantes (si ce n’est le prix de l’essence…)

Dans les cas dans lesquels ces contrats sont assez modifiés par les cocontractants pour mettre une partie de prix fonction des résultats de l’exploitation (comme le leur permet leur liberté contractuelle) les « contrats de gestion à prix forfaitaire » sont assimilables à des régies intéressées.

3. La « contribution (ou compensation) financière forfaitaire », une forme courante à utiliser avec précaution

A) définition

Ce contrat est l’archétype actuel des contrats de transports urbains. Il ne constitue pourtant pas un absolu qui permet, sous ce titre, de mettre n’importe quelle clause et n’importe quelle condition. Il répond lui aussi à un certain nombre de critères. La difficulté est que ce contrat a été créé par la pratique – les entreprises délégataires étant souvent à l’origine du choix de ce contrat qu’elles modifient en fonction des possibilités du moment – et qu’il n’est nul part détaillé. L’analyse des contrats dont le GART a disposé pour écrire cet ouvrage nous permet pourtant d’en donner les éléments principaux. Il est possible de la définir ainsi : La contribution financière forfaitaire est la convention de délégation de service public par laquelle l’autorité organisatrice confie la gestion du service de transports en restant propriétaire des biens et en continuant à en réaliser les investissements. La rémunération du cocontractant est fondée sur les résultats qu’elle va retirer de la vente des tickets (les « recettes tarifaires ») et sur une contribution financière de l’autorité organisatrice. Cette contribution est calculée par avance pour plusieurs années (avec une formule d’indexation) sur l’estimation du déficit envisagé entre les recettes commerciales et les charges d’exploitations prévisionnelles. Cette subvention a pour objet de compenser les sujétions de service public exigées par l’autorité organisatrice (réductions générales ou spécifiques de tarifs, exigences en terme de lignes et de fréquences, de pollution), ainsi que de permettre un intéressement du délégataire fondé notamment sur la qualité du service ou sur l’augmentation du nombre d’usagers (« intéressement à la fréquentation »).

B) Est-ce vraiment un contrat original parmi les délégations de service public ?

L’analyse au regard des autres contrats décrits plus haut nous montre que, si l’on respecte strictement les critères de la définition, les contrats appelés « contribution financière forfaitaire » sont des « affermages ». Il ne s’agit donc pas d’un contrat si original que cela, au point que le juge le requalifiera la plupart du temps en affermage en cas de contentieux. Cependant, les critères qui sont présentés ci-dessus ne sont pas toujours suivis : certains cocontractants ne les respectent pas, ce qui conduit à modifier la qualification qu’il faut donner à la convention. Ainsi, certains contrats qualifiés de CFF (contribution financière forfaitaire) ne le sont pas parce qu’ils imposent au

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cocontractant d’effectuer des investissements initiaux (achat des bus ou création du TCSP). Dans ce cas, en application des catégories générales que nous avons vues, le contrat est en réalité une « concession ». Pourquoi alors les AO qualifient-elles souvent leurs contrats de délégation de service public de contribution financière forfaitaire ? La réponse est dans le titre même de ce contrat. La pratique constate en effet que les contrats de transport contiennent tous une contribution financière au profit de l’exploitant, contribution due au fait que ces contrats ne sont jamais « rentables » si l’on veut faire des tarifs attractifs. Mais c’est oublier que les « subventions d’exploitation » ne sont pas propres aux transports publics. En réalité, dans presque toutes les conventions de délégation de service public il y a une « contribution financière ». Elle est due au fait qu’un service public est la plupart du temps une activité non rentable, comme le traitement des ordures ménagères, la distribution d’eau potable, les services culturels, les crèches, les cantines… Dans chacun de ces cas, le contrat « classique » de délégation de service public (concession, affermage, régie intéressée) compensera les sujétions de service public, c'est-à-dire les exigences de la collectivité publique auprès de son cocontractant, par exemple :

• baisse tarifaire générale • baisse pour certaines catégories (jeunes, personnes âgées, handicapés, scolaires, chômeurs, militaires,

personnels ou employés municipaux et leur famille…) • exigences en termes de fréquence • ajout de lignes ou de dessertes non rentables • exigences en termes de pollution des bus…

Attention Les « contributions financières forfaitaires » correspondent à la qualification classique de « contrats d’affermage ». Les qualifier de CFF ne les rend pas illégaux, mais il ne faut pas que cela conduise à ne pas respecter les textes applicables aux délégations de service public sous prétexte qu’il s’agit d’un contrat propre aux transports publics. Par ailleurs, en aucun cas cela ne peut empêcher qu’ils soient soumis aux procédures de passation puisque le CGCT ne donne pas de liste des contrats de délégation de service public.

C) Les CFF sont-elles toujours des DSP ? La question qui se pose est celle de la nature du contrat : est-ce que ce contrat est toujours, ou non, une délégation de service public ?. En d’autres termes, ce contrat peut-il, parfois, être un marché public ? Le premier élément de réponse est que l’application stricte des critères en fait, la plupart du temps une délégation de service public. Les possibilités pour que ces contrats soient des marchés publics existent pourtant. Notamment, la multiplication des subventions (subventions pour baisse tarifaire générale, spécifique, d’intéressement) peut conduire à ce que la part de la rémunération par les usagers soit trop faible et que le cocontractant ne supporte qu’un très faible risque. Dans ce cas, le contrat sort de la qualification de service public pour rentrer dans celle de marché public. Par ailleurs, en pratique, la rémunération est généralement révisée dans le cas de modifications de l’offre, de modifications de la réglementation, de modification de la politique tarifaire… Là encore, il faut respecter à la fois le droit des avenants (voir 3e partie de ce Guide) et notamment l’idée qu’il ne faut pas modifier les conditions de la rémunération au point de modifier la nature du contrat (c’est-à-dire le faire devenir un marché public). Cette situation n’est pas du tout théorique et certains trésoriers-payeurs généraux refusent de payer les subventions s’ils constatent que le contrat n’est pas, en réalité, une délégation de service public, mais un marché public. Il faut alors prendre des mesures temporaires et repasser en urgence un nouveau contrat (de marché ou de délégation de service public). On peut aussi voir des exemples contentieux dans lesquels les CFF sont

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requalifiées en marchés publics, comme dans le jugement du Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, 13 juillet 1999, Préfet de la Réunion c/ Communauté intercommunale du Nord de la réunion (CINOR).

Considérant qu’il résulte de l’examen du contrat litigieux conclu entre la CINOR et la SODIPARC que la rémunération du délégataire est assurée, selon l’article IV-3 de la convention, par le versement annuel et forfaitaire d’une somme de 8 745 328 Francs ; que l’article IV-8 de la convention prévoit que l’autorité organisatrice versera au délégataire le 1er de chaque mois une rémunération mensuelle égale au 1/12ème de cette rémunération annuelle, déduction faite des recettes perçues directement et des autres produits d’exploitation ; qu’il ressort de ces dispositions contractuelles que la rémunération de la SODIPARC n’est pas directement liée aux résultats de l’exploitation, une augmentation ou une diminution du nombre de personnes transportées et des recettes directes induites par ces transports n’ayant pas d’incidence sur la rémunération mensuelle perçue par la SODIPARC ; que si la convention fait état, en son article IV-8, de la perception par la SODIPARC de recettes complémentaires tirées de l’exploitation du réseau ; telles que les recettes de publicité, produits des amendes et produits exceptionnels, ces recettes n’ont fait l’objet, dans l’offre de la société, d’aucun chiffrage ni d’aucune justification ; que, dans ces conditions, ni la circonstance que le contrat prévoit en son article II-6 que le délégataire percevra auprès des usagers des prix calculés sur la base des tarifs fixés par la collectivité, ni la circonstance que le montant prévisionnel de ces redevances perçues sur les usagers a été estimé par la SODIPARC à 2 500 000 Francs dans son offre initiale, ni la circonstance que la SODIPARC soit financièrement intéressée au développement des recettes commerciales en application de l’article IV-6 de la convention, ne sont de nature à faire regarder la rémunération de SODIPARC comme substantiellement assurée par les résultats de l’exploitation du réseau ; que le contrat, qui doit être par suite qualifié de marché, aurait dû être passé selon les formes et les règles de passation régissant les marchés publics ; que le Préfet, indique sans être contesté que ces règles n’ont pas été respectées ; que la délibération du 24 septembre 1998 est en conséquence illégale et doit être annulée ;

Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, 13 juillet 1999, Préfet de la Réunion c/ Communauté intercommunale du Nord de la réunion (CINOR), Req. n° 9900019.

Notons enfin que, fiscalement, l’entreprise paye la taxe professionnelle et récupère la TVA puisqu’elle supporte l’aléa commercial. Elle bénéficie du crédit TVA au titre de redevable de l’activité Transport.

Conclusion Les CFF ne sont donc pas toujours des délégations de service public, elles sont parfois des marchés publics. Elles peuvent être assimilées aux conventions d’affermages dont elles ont toutes les caractéristiques essentielles et pour lesquelles ce point est aussi tangent. En ce sens, il ne s’agit pas d’une catégorie de contrats qui a la spécificité qu’on leur reconnaît habituellement dans le monde des transports.

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Contrats spécifiques Il existe (ou il subsiste) en France, trois séries de contrats librement négociés dans le domaine des transports publics de personnes : - Hors Ile-de-France, les contrats d'exploitation des TER (trains express régionaux)

conclus entre les régions et l'opérateur unique, opérateur historique (la SNCF) ; - En Ile-de-France :

o le contrat d'exploitation de certaines lignes de RER et des Transiliens conclus entre le STIF (Syndicat des transports d'Ile-de-France) et l'opérateur unique, opérateur historique (la SNCF) ;

o les contrats d'exploitation de certaines lignes de RER, des lignes de métro, de tramway et de bus de Paris de la première couronne, conclus entre le STIF et, là encore, l'opérateur unique, opérateur historique, la RATP ;

o les contrats d'exploitation des lignes de bus de la grande couronne conclus entre le STIF et les autocaristes privés regroupés dans l'association OPTILE.

Notons que les deux opérateurs "historiques" ont succédé, avec la nationalisation, en 1937 pour la SNCF, en 1948, pour la RATP, à des concessionnaires privés, et que les autocaristes privés bénéficient de droits en ligne eux aussi historiques. 1. Contrats STIF Le régime des transports publics de personnes dans la région Ile-de-France est soumis à un régime dérogatoire (art. 46 de la LOTI du 30 décembre 1982). Il obéit à des règles spécifiques, et les contrats d'exploitation, que ce soit avec la SNCF ou la RATP, ou avec les autocaristes privés, propriétaires de droits de lignes, sont librement conclus, sans mise en concurrence (survivance de textes anciens – décret de 1949). L'organisation du STIF (qui a succédé au STP – Syndicat des Transports Parisiens -, lequel était un établissement public à caractère national) a été décentralisée et régionalisée par la loi n° 2004-809 du 13 août 2004, relative aux libertés et responsabilités locales (art. 37 à 43). Le STIF est l'AO des transports en Ile-de-France, mais les autres collectivités territoriales interviennent également, pour contribuer financièrement aux services de transports. En outre, aux termes de l'article 38 de la loi du 13 août 2004 modifiant l'article 1er de l'ordonnance n° 59-151 du 7 janvier 1959, relative à l'organisation des transports de voyageurs en Ile-de-France : "Sur des périmètres ou pour des services définis d'un commun accord, le syndicat peut déléguer tout ou partie des attributions précitées, à l'exception de la politique tarifaire, à des collectivités territoriales ou à leurs groupements. Une convention prévoit les conditions de participation des parties au financement de ces services et les aménagements tarifaires applicables". Des collectivités territoriales ou des EPCI peuvent se voir ainsi reconnaître la qualité d'AO secondaires (ou « AOP », autorités organisatrices de proximité).

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2. Contrats Régions/SNCF Après une première phase expérimentale (1997-2002), les Régions sont devenues les AO des services publics ferroviaires régionaux, à compter du 1er janvier 2002 (art. 21-1 et suivants de la LOTI). A ce titre, chaque région conclut avec la SNCF, opérateur unique actuellement, un contrat pour la gestion des TER. Ces contrats ont un régime particulier, laissant à la fois une grande liberté à la SNCF, pour l'acquisition du matériel roulant, aux frais de la région, et une responsabilité certaine quant à la qualité du service (clauses de bonus/malus). L'évolution de ces contrats est envisagée dans la perspective d'un rapprochement avec les délégations de service public. Ces contrats s'insèrent dans un régime juridique global des infrastructures et services ferroviaires qui est complexe. Il repose sur la distinction des infrastructures, qui relèvent de RFF et des services ferroviaires qui sont effectués par la SNCF, s'agissant des transports de voyageurs. Les textes organisent une répartition complexe des attributions et de la coopération entre RFF et la SNCF. C'est dans ce contexte législatif et réglementaire, et en particulier dans le cadre de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006, relative à la sécurité et au développement des transports, que devront être réalisés les projets du réseau ferroviaire national qui ont un impact sur les services ferroviaires régionaux. Les décrets d'application sont parus et notamment le décret n° 2006-1534 du 6 décembre 2006. L'Etat ou RFF peuvent désormais conclure des contrats de concession ou de partenariat pour les infrastructures ferroviaires. Les régions sont compétentes également pour intervenir dans des conventions aves des transporteurs pour des services routiers réguliers non urbains d'intérêt régional (art. 29 de la LOTI). Les régions peuvent également participer à des syndicats mixtes d'AO (art. 30-1 de la LOTI créé par l'article 111 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000). Ces nouveaux syndicats mixtes (largement à créer) peuvent réaliser des infrastructures de transport et gérer des équipements, et donc conclure des contrats à cet effet, avec des opérateurs autres que RFF ou la SNCF.

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II – Les autres outils possibles

A – Le marché public Même si le recours aux marchés publics est de plus en plus fréquent dans le secteur de la gestion des services publics, le marché de service consiste plus en une exécution externalisée du service qu’en une véritable délégation de gestion. Les marchés publics passés dans le secteur des transports sont des marchés de service classiques, passés le plus souvent sous la forme de marchés négociés, ou bien des marchés à bons de commande (fréquent pour le transport scolaire, sur lequel il n’y a bien souvent aucune recette perçue sur l’usager). 1). Cadrage général I. Définition générale La définition est donnée par le Code des marchés publics, dans sa nouvelle version issue du décret n° 2006-975 du 1er août 2006, applicable à compter du 1er septembre 2006. La définition générale des marchés publics est la suivante : "Les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs définis à l'article 2 et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leur besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services" (art. 1er I du Code) Le Code des marchés publics introduit une nouvelle catégorie, celle des accords-cadres : "Les accords-cadres sont les contrats conclus entre un des pouvoirs adjudicateurs définis à l'article 2 et des opérateurs économiques publics ou privé, ayant pour objet d'établir les termes régissant les marchés à passer au cours d'une période donnée, notamment en ce qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées". (art. 1er I du Code) II. Définitions particulières Selon leur objet, il existe trois catégories de marchés. II.1. Marchés de travaux

"Les marchés publics de travaux sont les marchés conclus avec des entrepreneurs, qui ont pour objet soit l'exécution, soit conjointement la conception et l'exécution d'un ouvrage ou de travaux de bâtiment ou de génie civil répondant à des besoins précisés par le pouvoir adjudicateur qui en exerce la maîtrise d'ouvrage. Un ouvrage est le résultat d'un ensemble de travaux de bâtiment ou de génie civil destiné à remplir par lui-même une fonction économique ou technique". (Art. 1er III du Code).

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Cette catégorie de marchés, dans le cadre de la réalisation d'un projet de TCSP, concerne principalement les déviations de réseaux, la plateforme du tramway et les travaux d'insertion urbaine, les tunnels et les stations d'un métro et, de manière plus large, les infrastructures.

II.2. Marchés de fournitures

"Les marchés publics de fournitures sont les marchés conclus avec des fournisseurs qui ont pour objet l'achat, la prise en crédit-bail, la location-vente de produits ou matériels". (art. 1er-III du Code). Cette catégorie de marché concerne notamment le matériel roulant d'un TCSP et les équipements électromécaniques, dans la mesure où leur fourniture est considérée comme plus importante que les travaux de pose des équipements électromécaniques : "Un marché public ayant pour objet l'acquisition de fournitures et, à titre accessoire, des travaux de pose et d'installation de celles-ci, est considéré comme un marché de fournitures". (Art. 1er – III du Code)

II.3. Marchés de services

"Les marchés publics de services sont les marchés conclus avec des prestataires de services qui ont pour objet la réalisation de prestations de services. Lorsqu'un marché public a pour objet à la fois des services et des fournitures, il est un marché de services si la valeur de ceux-ci dépasse celle des fournitures achetées. Lorsqu'un marché public porte à la fois sur des services et des travaux, il est un marché de travaux si son objet principal est de réaliser des travaux". (Art. 1er III du Code) Les marchés de services concernent de nombreuses prestations matérielles ou immatérielles : par ex. la maintenance, les prestations intellectuelles, telles que la maîtrise d'œuvre, les missions d'assistance à maîtrise d'ouvrage (technique, financière et juridique). Si la gestion du service public de transport est confiée à un exploitant par marché public (par exemple, les transports scolaires, ou les transports interurbains dans un département), il s’agira, là aussi, d’un marché public de services. Si un contrat comporte, par exemple, la fourniture du matériel roulant et sa maintenance pendant vingt ans ou plus, le contrat est un contrat de services, et non un contrat de fournitures (CE, 19 octobre 2001, Société Alstom transport SA, req. n° 233173). Le marché d'exploitation d’un service de transport est un marché de service Définition Un marché d'exploitation de transport public de personnes est un marché de prestations de services qui a pour objet de confier à un opérateur, généralement privé (société d'économie mixte locale ou société à capitaux privés) l'exploitation de transports urbains ou interurbains, moyennant une rémunération assurée par l'AO. Les marchés d'exploitation sont souvent dénommés contrats d'exploitation. Ils sont souvent utilisés par les départements pour les transports interurbains scolaires, en raison de leur gratuité ou quasi-gratuité pour les enfants.

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Caractéristiques générales Les prestations confiées à l'exploitant ne sont pas sensiblement différentes de celles assurées par un délégataire de service public. Mais, à la différence du délégataire, le prestataire ne prend aucun risque trafic. Il est rémunéré par l'AO selon des critères qui ne tiennent pas compte de la fréquentation du service (par ex. selon un prix forfaitaire ou un ensemble de coûts définis). La durée des marchés d'exploitation est souvent plus brève que celle des délégations de service public. A cet égard, le Code des marchés publics n'impose pas une durée prédéterminée, sauf pour certaines catégories de marchés (ex : quatre ans pour les marchés à bon de commande et les accords-cadres). L'article 16 du Code des marchés publics énonce simplement que : "la durée d'un marché ainsi que, le cas échéant, le nombre de ses reconductions, sont fixés en tenant compte de la nature des prestations et de la nécessité d'une remise en concurrence périodique". Il existe ainsi une relative marge d'appréciation pour les AO, à la fois sur la durée initiale du marché et sur les éventuelles reconductions. Celles-ci obéissent à deux conditions : être prévues dans la procédure de mise en concurrence, qui doit tenir compte de la durée globale, et être effectuées à conditions inchangées. Compte tenu de la "mutabilité" des services de transports, les reconductions à l'identique ne peuvent sans doute pas être nombreuses. Il faut, en effet, pour qu'un marché puisse faire l'objet d'une ou plusieurs reconductions que "ses caractéristiques restent inchangées". La circulaire du 3 août 2006, portant manuel d'application du Code des marchés publics, ne commente pas cette disposition. Il existe une incertitude sur la nécessité de reconduction à l'identique ou si des modifications mineures ou non substantielles, ne portant pas atteinte aux caractéristiques du marché, peuvent être apportées au marché lors de sa reconduction. Le titulaire ne peut refuser la reconduction, sauf clause contraire expresse du marché (art. 16 du Code des marchés publics). Régime juridico-financier et fiscal Le régime des biens [véhicules (autocars, par exemple), atelier-dépôt] est variable. Ces biens peuvent appartenir à l'AO ou à l'exploitant. Dans ce cas, il peut déduire la TVA sur ses investissements et les amortir. Dans un marché, les recettes du service (s'il y en a) sont publiques. Soit elles sont perçues directement par l'AO (ex. vente des "cartes" scolaires pour l'année) ; soit elles peuvent être perçues par l'exploitant. Mais, dans ce cas, il faut organiser une régie de recettes (le régisseur peut être un membre du personnel de l'exploitant) ou confier un mandat financier à l'exploitant, de sorte que celui-ci, ou le régisseur, puisse percevoir les recettes au nom et pour le compte de l'AO, sans risque de gestion de fait. Les recettes sont reversées au Trésor public, et la rémunération de l'exploitant est indépendante des recettes perçues. Le compte transport est tenu par l'AO, qui est l'exploitant fiscal (instruction fiscale du 21 janvier 1985). Les transports de personnes sont soumis à la TVA au droit commun (art. 256-B du Code général des impôts). L'AO gère donc la TVA : versement au Trésor public de la TVA sur les recettes (taux réduit de 5,5 %) et déduction de la TVA sur toutes les charges d'investissement et de fonctionnement (taux normal de 19,6 %).

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Les dépenses d'investissement ne sont pas éligibles au FCTVA, mais la TVA ayant grevé les investissements est déductible au droit commun. La taxe professionnelle est due par l'exploitant (instruction fiscale 6 E – 11-93 du 23 mars 1993). En réalité, il existe deux comptes : - le compte de l'exploitant, - le compte transport de l'AO. L'AO tient également son budget, suivant les règles de la comptabilité publique (M 43 ou M 14). Un marché d'exploitation limite les responsabilités de l'exploitant, et donne à l'AO une prise directe sur le service et lui en laisse aussi la charge très largement. III - Catégories internes Il existe, outre les trois types fondamentaux de marchés, travaux, fournitures et services, des catégories particulières de marchés, qui se définissent à la fois par leur configuration et leur procédure de passation. Ces catégories, prévues dans la première partie du Code des marchés publics, sont également applicables aux entités adjudicatrices, qui relèvent de la deuxième partie du Code (art. 141 du CMP). Au titre des catégories internes de marchés, on peut noter : - les marchés de maîtrise d'œuvre, - les marchés de définition, - les marchés à tranches conditionnelles, - les marchés à bons de commande. IV - Allotissement ou marché global ? Demeure, pour les entités adjudicatrices comme pour les pouvoirs adjudicateurs, un choix fondamental ou important, entre l'allotissement, plus ou moins poussé, et un marché, plus ou moins global, d'entreprise générale ou de conception-réalisation. Sans doute sous la pression des PME, l'article 10 du Code des marchés publics privilégie l'allotissement en ces termes : "Afin de susciter la plus large concurrence, et sauf si l'objet du marché ne permet pas l'identification de prestations distinctes, le pouvoir adjudicateur passe le marché en lots séparés dans les conditions prévues par le III de l'article 27. A cette fin, il choisit librement le nombre de lots, en tenant notamment compte des caractéristiques techniques des prestations demandées, de la structure du secteur économique en cause et, le cas échéant, des règles applicables à certaines professions". Le choix de l'allotissement, avec un nombre plus ou moins élevé de lots, suppose ou implique que la collectivité, maître d'ouvrage, mette en place une mission d'ordonnancement, pilotage, coordination (OPC – qui est un élément spécifique de la maîtrise d'œuvre) extrêmement forte, du fait de l’obligation de gérer les calendriers d'exécution et les interfaces entre les lots – ce qui est rien moins qu'aisé.

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C'est pourquoi l'article 10, sans doute aussi sous la pression des "majors" du BTP, apporte une nuance importante à l'obligation d'allotir : "Le pouvoir adjudicateur peut toutefois passer un marché global, avec ou sans identification de prestations distinctes, s'il estime que la dévolution en lots séparés est de nature, dans le cas particulier, à restreindre la concurrence, ou qu'elle risque de rendre techniquement difficile ou financièrement coûteuse l'exécution des prestations ou encore qu'il n'est pas en mesure d'assurer par lui-même les missions d'organisation, de pilotage et de coordination". Le choix existe donc, entre allotissement et marché global, en matière de réalisation d'un TCSP. La pratique est plutôt celle de l'allotissement, avec le choix de lots, plus ou moins "détaillés" ou "regroupés". En toute hypothèse, il faut séparer, soit contractuellement, soit comptablement, au sein d'un contrat global, la construction et l'exploitation : "Si le pouvoir adjudicateur recourt à des lots séparés pour une opération ayant à la fois pour objet la construction et l'exploitation ou la maintenance d'un ouvrage, les prestations de construction et d'exploitation ou de maintenance ne peuvent être regroupées dans un même lot. S'il recourt à un marché global, celui-ci fait obligatoirement apparaître, de manière séparée, les prix respectifs de la construction et de l'exploitation ou de la maintenance. La rémunération des prestations d'exploitation ou de maintenance ne peut en aucun cas contribuer au paiement de la construction". (Art. 10, dernier alinéa). Mais, dans le domaine des transports de personnes, la pratique est largement répandue de séparer la construction, ou même la réalisation des investissements, de l'exploitation. Quant au marché de conception-réalisation, défini à l'article 37 et dont la procédure est fixée par l'article 69, il ne paraît pas très approprié aux ouvrages dans le domaine des transports, sauf à l'utiliser dans le cadre d'une conception de système de transport, de contrat dit "ensemblier-systémier". Le marché de conception-réalisation est ainsi défini : "Un marché de conception-réalisation est un marché de travaux qui permet au pouvoir adjudicateur de confier à un groupement d'opérateurs économiques ou, pour les seuls ouvrages d'infrastructure, à un seul opérateur économique, une mission portant à la fois sur l'établissement des études et l'exécution des travaux". Mais le recours à ce type de marché est strictement conditionné : "Les pouvoirs adjudicateurs soumis aux dispositions de la loi du 12 juillet 1985 susmentionnée ne peuvent, en application du I de l'article 18 de cette loi, recourir à un marché de conception-réalisation, quel qu'en soit le montant, que si des motifs d'ordre technique rendent nécessaire l'association de l'entrepreneur aux études de l'ouvrage. Ces motifs sont liés à la destination ou à la mise en œuvre technique de l'ouvrage. Sont concernées des opérations dont la finalité majeure est une production dont le processus conditionne la conception, la réalisation et la mise en œuvre ainsi que des opérations dont les caractéristiques, telles que les dimensions exceptionnelles ou des difficultés techniques particulières, exigent de faire appel aux moyens et à la technicité propres des opérateurs économiques". Le contrat "d'ensemblier-systémier" est une notion technique, et non juridique au regard du Droit français. Il a été utilisé par exemple à Lille, pour réaliser la première et la deuxième ligne de métro VAL (VAL 206 et 208, qui sont des métros sans conducteur).

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Le marché a concerné à la fois l'aménagement des stations, la pose des voies, le matériel roulant, les équipements électromécaniques et les automatismes, tant au Poste central de commande (PCC), que les automatismes embarqués dans les rames de métro. Le génie civil (tunnels et stations) a fait l'objet de marchés séparés, en lots par secteur géographique. Les réservations pour les équipements étaient prévus dès le départ, selon les "plans-guides" élaborés par le titulaire du marché "ensemblier-systémier". Le marché "d'ensemblier-systémier" est un marché complexe, peut-être difficile à qualifier, entre travaux, fournitures et services, et ne pourra faire l'objet d'un marché de conception-réalisation que si les travaux représentent la partie dominante du contrat. S'agissant du matériel roulant, l'ancienne procédure de l’appel d'offres sur performances a été utilisée (par exemple, pour le tramway de Nice). Cette procédure n’a pas été remplacée par celle du dialogue compétitif pour les entités adjudicatrices (les articles 36 et 67 relatifs à la procédure du dialogue compétitif ne sont pas, comme on l’a dit, applicables aux entités adjudicatrices – art. 142 du Code des marchés publics). Mais les entités adjudicatrices disposent des procédures négociées après mise en concurrence, et même, sans mise en concurrence, dans certains cas bien précis. Ces deux catégories sont définies à l'article 35. Les cas prévus sont limités, et les cas visant les marchés de fournitures ou de services, qui pourraient être applicables au matériel roulant ou au matériel roulant + maintenance, ne paraissent pas utilisables : art. 35.I.4°, qui concerne les "cas exceptionnels, lorsqu'il s'agit de travaux, de fournitures ou de services dont la nature ou les aléas qui peuvent affecter leur réalisation ne permettant pas une fixation préalable et globale des prix". Demeurent donc principalement les procédures ouvertes et restreintes (appel d'offres ouvert ou restreint) et, compte tenu de la complexité de la réalisation d'un TCSP, faisant intervenir plusieurs métiers, (génie civil, pour les infrastructures et le ou les bâtiments - ex. centre de maintenance, PCC matériel roulant, équipements électromécaniques, maîtrise d'œuvre, insertion urbaine, l'allotissement est la pratique dans le cadre de la réalisation d'un TCSP en marchés publics. Ce qui n'interdit pas de séparer certains lots en marchés distincts et d'en regrouper d'autres en un seul marché de "système de transport", comportant, par exemple, la pose de la voie, le matériel roulant, des équipements électromécaniques et électroniques. (marché ensemblier-systémier évoqué plus haut). La notion d'intégration connaît des variations dans un système de transport. Quel que soit le choix des marchés, les procédures sont très encadrées par le Code des marchés publics. V - Règles de passation V.1. – Principes généraux Tout d'abord, de manière générale, les procédures de passation des marchés publics sont soumises à des principes généraux, gouvernant la concurrence : "Les marchés publics et les accords-cadres soumis au présent code respectent les principes de liberté d'accès la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. Ces principes permettent d'assurer l'efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics. Ces obligations sont mises en œuvre conformément aux règles fixées par le présent code". (Art. 1er-III du CMP).

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La transparence des procédures implique, entre autres, une traçabilité de la procédure suivie, une publicité adéquate, des critères de choix objectifs, pertinents et non discriminatoires. V.2. Publicité européenne et/ou nationale Les obligations de publicité sont fonction du montant du marché. Les seuils de publicité sont définis à l'article 150 du Code des marchés publics pour ce qui est des entités adjudicatrices. Montant €/HT

Publicité

4.000 à 90.000

Libre choix des modalités de publicité adaptées

Fournitures-services 90.000 – 420.000

BOAMP ou journal habilité annonces légales + journal spécialisé (libre appréciation)

Fournitures services ≥ 420.000

JOUE + BOAMP

Travaux 90.000 – 5.270.000

BOAMP ou journal habilité annonces légales + journal spécialisé (libre appréciation)

≥ 5.270.000

JOUE + BOAMP

Sont obligatoires : - les formulaires standards pour la publicité européenne, fixés par le règlement CE n°

1564/2005 de la Commission du 7 septembre 2005 ;

- le modèle d'avis d'appel public à la concurrence, pour la publicité nationale, fixé par l'arrêté du 28 août 2006.

Ces formulaires sont désormais harmonisés, mais assez complexes, notamment en raison de la référence obligatoire à la nomenclature CPV (vocabulaire commun des marchés publics), qui classe les différentes catégories de travaux, fournitures et services. En outre, la jurisprudence administrative est formaliste et rigoureuse quant à l'appréciation des exigences de la publicité préalable et donc quant à la rédaction des avis d'appel public à candidatures. La publicité préalable est suivie par la procédure proprement dite de mise en concurrence. V.3. Liberté de choix des procédures formalisées Aux termes de l'article 144 du Code des marchés publics, les entités adjudicatrices ont le choix entre les procédures suivantes :

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"1° Procédure négociée avec mise en concurrence préalable ; 2° Appel d'offres ouvert ou restreint ; 3° Concours, défini à l'article 38 ; 4° Système d'acquisition dynamique, défini à l'article 78". V.3.1. Procédure négociée

L'article 34 du CMP, applicable aux entités adjudicatrices, définit, de manière générale, la procédure négociée : "Une procédure négociée est une procédure dans laquelle le pouvoir adjudicateur négocie les conditions du marché avec un ou plusieurs opérateurs économiques". La conduite de la procédure négociée est définie aux articles 165 (qui renvoie à l'article 65) et 166 du Code des marchés publics. Elle se déroule en deux temps, avec un délai de réception des candidatures de vingt-deux jours à compter de la date d'envoi de l'avis d'appel public à la concurrence, ramené à quinze jours quand l'avis est envoyé par voie électronique. Le délai de remise des offres peut être négocié avec les candidats sélectionnés, sinon il est au moins de dix jours à compter de la date d'envoi de la lettre de consultation. V.3.2. Appel d'offres ouvert ou restreint

L'appel d'offres ouvert se déroule en une seule étape à compter de l'avis d'appel public à la concurrence, avec la remise, en une seule fois, de deux enveloppes, correspondant à la candidature et à l'offre. Le délai normal de remise des offres est de cinquante-deux jours à compter de la date d'envoi de l'avis d'appel public à la concurrence. La procédure est définie à l'article 160 du Code des marchés publics, pour les entités adjudicatrices. L'appel d'offres restreint se déroule en deux phases, la première étant de "pré-qualification" ou sélection des candidats, la seconde étant la remise des offres et le choix après analyse du candidat retenu. La procédure est précisée à l'article 162 du Code des marchés publics. V.3.3. Concours

Les concours sont réservés aux marchés relatifs à des projets dans le domaine notamment de l'aménagement du territoire, de l'urbanisme, de l'architecture ou de l'ingénierie. C'est la procédure applicable aux marchés de maîtrise d'œuvre. Elle est définie aux articles 167 et 70 du Code des marchés publics. V.3.4. Système d'acquisition dynamique

Le système d'acquisition dynamique, défini à l'article 78 du CMP et applicable aux entités adjudicatrices, est réservé aux fournitures courantes. C'est une procédure entièrement électronique de passation d'un marché public, dont la durée maximale est de quatre ans. La procédure de passation est détaillée à l'article 78 du CMP. Ces trois dernières procédures, et surtout les appels d'offres ouverts ou restreints, obéissent à un formalisme assez rigide, en raison de la définition préalable des besoins, des spécifications techniques et performantielles, des formalités et règles procédurales, de l'absence de négociations.

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Une certaine souplesse peut être introduite par les options (à l'initiative du maître d'ouvrage) et les variantes (à l'initiative des candidats si la possibilité de variantes est accordée par le maître d'ouvrage). Dans ce dernier cas, les offres doivent clairement distinguer la solution de base et la ou les variantes. V.4. Procédures négociées sans mise en concurrence préalable L'article 144-II prévoit les cas dans lesquels les entités adjudicatrices peuvent recourir à la procédure négociée sans mise en concurrence préalable. Douze cas sont énumérés. Trois cas paraissent particulièrement intéressants : - les marchés complémentaires, - les marchés de travaux similaires. V.4.1. Marchés complémentaires

Les conditions de recours à ces procédures plus souples sont ainsi définies : "Pour les marchés complémentaires de fournitures qui sont exécutés par le fournisseur initial et qui sont destinés soit au renouvellement partiel de fournitures ou d'installations d'usage courant, soit à l'extension d'installations existantes, lorsque le changement de fournisseur obligerait l'entité adjudicatrice à acquérir un matériel de technique différente entraînant une incompatibilité avec le matériel déjà acquis ou des difficultés techniques d'utilisation et d'entretien disproportionnées". (art. 144.II.5° du CMP). Ces dispositions peuvent être utilisées, par exemple, pour l'allongement des rames ou la commande de nouvelles rames d'un TCSP : "Pour les marchés complémentaires de services ou de travaux qui consistent en des prestations qui ne figurent pas dans le marché initialement conclu mais qui sont devenues nécessaires, à la suite d'une circonstance imprévue, à l'exécution du service ou à la réalisation de l'ouvrage tel qu'il est décrit dans le marché initial, à condition que l'attribution soit faite à l'opérateur économique qui a exécuté ce service ou réalisé cet ouvrage : a) Lorsque ces services ou travaux complémentaires ne peuvent être techniquement ou économiquement séparés du marché principal sans inconvénient majeur pour l'entité adjudicatrice ;

Lorsque ces services ou travaux, quoiqu'ils soient séparables de l'exécution du marché initial, sont strictement nécessaires à son parfait achèvement". (art. 144.II.6° du CMP). On peut s'interroger sur la notion de "circonstance imprévue". En toute hypothèse, elle est plus large que celle de "sujétion imprévue". V.4.2. Marchés de travaux similaires

"Pour les marchés de travaux ayant pour objet la réalisation d'ouvrages similaires à ceux qui ont été confiés au titulaire d'un marché précédent passé après mise en concurrence. Le premier marché doit avoir indiqué la possibilité de recourir à cette procédure pour la réalisation d'ouvrages similaires. Sa mise en concurrence doit également avoir pris en compte le montant total envisagé, y compris celui des nouveaux travaux". (art. 144.II.7° du CMP).

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Là encore, cette souplesse de procédure peut être utilisée, à condition d'avoir été prévue dans l'appel d'offres initial – ce qui permettrait de faire face à une évolution du projet. Mais il faut évidemment circonscrire la notion "d'ouvrages similaires". On peut mentionner un cas de marché négocié sans mise en concurrence préalable, intéressant et réaliste. C'est celui relatif à "l'achat de matières premières cotées et achetées en bourse" (art. 144-II-8° du CMP). Mais ce cas concerne déjà l'exploitation du TCSP et du service. 2). Précisions sur les notions de pouvoir adjudicateur (PA) et d’entité adjudicatrice (EA)

o Une EA = un PA opérateur de réseau Depuis toujours (en tous cas depuis longtemps), un certain nombre de secteurs d’activité, dénommés activités de réseau, ont fait l’objet de dispositions particulières en DC des MP. La particularité de ces dispositions est qu’elles permettent des souplesses, notamment en termes de procédure de passation des marchés, que ne permettent pas les dispositions applicables aux secteurs dits classiques. D’où l’intérêt stratégique de savoir si l’objet d’un marché relève des secteurs dits « spéciaux » ou des secteurs classiques, ce qui revient à poser la question de savoir si la personne publique qui passe le marché agit ou non comme opérateur de réseau (OR). Si c’est le cas, elle sera dénommée entité adjudicatrice. 2ème partie du CMP - TITRE Ier - CHAMP D’APPLICATION ET PRINCIPES FONDAMENTAUX Section 1 – Définitions et principes fondamentaux Article134 I. - Les dispositions de la présente partie s’appliquent aux marchés et accords-cadres passés par les entités adjudicatrices. Les entités adjudicatrices sont les pouvoirs adjudicateurs définis à l’article 2 lorsqu’ils exercent une des activités d’opérateurs de réseaux énumérées à l’article 135. Cette question du statut de PA ou d’EA est d’autant plus importante que les collectivités AO interviennent fréquemment en matière de transport (au stade de la réalisation du réseau, au stade de son exploitation, en termes d’achat de véhicules, d’entretien des dépôts, etc …) et qu’il est logique qu’elles cherchent à bénéficier des souplesses procédurales accordées aux OR pour la passation de leurs marchés. La souplesse majeure tient notamment à la possibilité de passer, quel que soit leur montant, des marchés négociés après publicité préalable pour les besoins directement liés à leur activité (ancienne formulation du CMP 2004, article 84 - possibilité reprise, mais non formulée dans les mêmes termes, à l’article 144 du CMP 2006). La dichotomie entre ces 2 types de secteurs est désormais très claire en DC des MP, ce dernier reposant aujourd’hui sur 2 textes distincts applicables à l’un ou l’autre type d’activité :

- la directive n°2004-18, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services ;

- la directive n°2004-17, du 31 mars 2004, portant coordination des procédures de passation des marchés dans le secteur de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux.

Toutes deux publiées au JOUE du 30 avril 2004.

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Une telle situation est beaucoup plus claire qu’avant, lorsque coexistaient un très grand nombre de directives :

- une directive travaux, n°93-37 du 14 juin 1993 ;

- une directive fournitures, n°93-36 du 14 juin 1993 ;

- une directive services, n°92-50 du 18 juin 1992 ;

- une directive travaux, fournitures et services réservée aux secteurs spéciaux, n°93-38 du 14 juin 1993.

AINSI DONC : les activités d’OR recouvrent 4 secteurs principaux :

- L’énergie (électricité, gaz, chaleur),

- L’eau (et dans une certaine mesure l’assainissement),

- Les transports (terrestres, mais également aériens et maritimes),

- Les services postaux (nouvelle catégorie d’activité qui n’entrait pas jusque là dans le champ de la réglementation des marchés des OR).

Les services de télécommunications ne sont désormais plus visés, ce secteur étant entré dans le droit commun de la concurrence.

Directive 2004-17 Chapitre 2 : champ d’application : définition des entités et des activités visées

Section 2 : les activités

Article 3 Gaz, chaleur et électricité

Article 4

Eau

Article 5 Services de transport

1. La présente directive s'applique aux activités visant la mise à disposition ou l'exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, systèmes automatiques, tramway,

trolleybus, autobus ou câble. En ce qui concerne les services de transport, il est considéré qu'un réseau existe lorsque le service est fourni dans les conditions déterminées par une autorité compétente d'un État membre, telles que les conditions relatives aux

itinéraires à suivre, à la capacité de transport disponible ou à la fréquence du service. 2. La présente directive ne s'applique pas aux entités fournissant un service de transport par autobus au public qui étaient exclues du champ d'application de la directive 93/38/CEE en vertu de son article 2, paragraphe 4

Article 6

Services postaux

CMP 2006 Article 135

Sont soumises aux dispositions de la présente partie les activités d’opérateurs de réseaux suivantes : 1o L’exploitation de réseaux fixes destinés à fournir un service au public dans le domaine de la production, du transport ou de la distribution d’électricité, de gaz ou de chaleur, la mise à la disposition d’un exploitant de ces réseaux, ou l’alimentation de ces réseaux en électricité, en gaz, ou en chaleur ;

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2o L’exploitation de réseaux fixes destinés à fournir un service au public dans le domaine de la production, du transport ou de la distribution d’eau potable, la mise à la disposition d’un exploitant de ces réseaux, ou l’alimentation de ces réseaux en eau potable. Sont également soumis aux dispositions de la présente partie les marchés passés par les entités adjudicatrices exerçant une des activités mentionnées à l’alinéa précédent qui sont liés : a) Soit à l’évacuation ou au traitement des eaux usées ; b) Soit à des projets de génie hydraulique, d’irrigation ou de drainage, pour autant que le volume d’eau utilisé pour l’alimentation en eau potable mentionnée au 2o représente plus de 20 % du volume total d’eau utilisé pour ces projets ; 3o Les activités relatives à l’exploitation d’une aire géographique dans le but de prospecter ou d’extraire du pétrole, du gaz, du charbon ou d’autres combustibles solides ; 4o Les activités relatives à l’exploitation d’une aire géographique permettant d’organiser et de mettre à disposition des transporteurs, des aéroports, des ports maritimes, des ports fluviaux, ou d’autres terminaux de transport ; 5° Les activités d’exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, tramways, trolleybus, autobus, autocar, câble ou tout système automatique, ou la mise à la disposition d’un exploitant de ces réseaux. Le service de transport est regardé comme fourni par un réseau de transport lorsqu’une autorité nationale ou territoriale compétente définit les conditions générales d’organisation du service notamment en ce qui concerne les itinéraires à suivre, la capacité de transport disponible ou la fréquence du service ; 6o Les activités visant à fournir des services postaux ou les services autres que les services postaux mentionnés aux a à f ci-dessous. Les services postaux sont les services définis aux articles L. 1 et L. 2 du code des postes et des communications électroniques. Les services autres que les services postaux sont les services suivants, lorsqu’ils sont fournis par une entité adjudicatrice exerçant par ailleurs l’une des activités mentionnées à l’alinéa précédent : a) Les services de gestion de services courrier ; b) Les services de courrier électronique assurés entièrement par voie électronique, notamment la transmission sécurisée de documents codés par voie électronique, les services de gestion des adresses et la transmission de courrier électronique recommandé ; c) Les services d’envois non postaux tel que le publipostage sans adresse ; d) Les services bancaires et d’investissement et les services d’assurance ; e) Les services de philatélie ; f) Les services logistiques, associant la remise physique des colis ou leur dépôt à des fonctions autres que postales, tels que les services d’envois express.

Ordonnance du 6 juin 2005 Article 26

Sont soumises aux dispositions du présent chapitre les activités d'opérateur de réseaux suivantes lorsqu'elles sont exercées par une entité adjudicatrice : 1° L'exploitation de réseaux fixes destinés à fournir un service au public dans le domaine de la production, du transport ou de la distribution d'électricité, de gaz ou de chaleur, les achats destinés à l'organisation ou à la mise à la disposition d'un exploitant de ces réseaux, ou l'alimentation de ces réseaux en électricité, en gaz, ou en chaleur ; 2° L'exploitation de réseaux fixes destinés à fournir un service au public dans le domaine de la production, du transport ou de la distribution d'eau potable, les achats destinés à l'organisation ou à la mise à la disposition d'un exploitant de ces réseaux, ou l'alimentation de ces réseaux en eau potable. Sont également soumis aux dispositions du présent chapitre les marchés passés par les entités adjudicatrices exerçant une des activités mentionnées à l'alinéa précédent qui sont liés : a) Soit à l'évacuation ou au traitement des eaux usées ; b) Soit à des projets de génie hydraulique, d'irrigation ou de drainage, pour autant que le volume d'eau utilisé pour l'alimentation en eau potable mentionné au 2° représente plus de 20 % du volume total d'eau utilisé pour ces projets ; 3° Les activités relatives à l'exploitation d'une aire géographique dans le but de prospecter ou d'extraire du pétrole, du gaz, du charbon ou d'autres combustibles solides ; 4° Les achats destinés à l'organisation ou à la mise à la disposition des transporteurs des aéroports, des ports maritimes ou des ports fluviaux ;

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5° Les activités d'exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, tramways, trolleybus, autobus, câble ou tout système automatique, ou les achats destinés à l'organisation ou à la mise à la disposition d'un exploitant de ces réseaux. Le service de transport est regardé comme fourni par un réseau de transport lorsqu'une autorité nationale ou territoriale compétente définit les conditions générales d'organisation du service notamment en ce qui concerne les itinéraires à suivre, la capacité de transport disponible ou la fréquence du service ; 6° Les activités visant à fournir des services postaux ou les services autres que les services postaux mentionnés aux a à f ci-dessous. Les services postaux sont les services définis à l'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques. Les services autres que les services postaux, soumis au présent chapitre, sont les services suivants, lorsqu'ils sont fournis par une entité adjudicatrice exerçant par ailleurs l'une des activités mentionnées à l'alinéa précédent : a) Les services de gestion de services courrier ; b) Les services de courrier électronique assurés entièrement par voie électronique, notamment la transmission sécurisée de documents codés par voie électronique, les services de gestion des adresses et la transmission de courrier électronique recommandé ; c) Les services d'envois non postaux tel que le publipostage sans adresse ; d) Les services bancaires et d'investissement et les services d'assurance ; e) Les services de philatélie ; f) Les services logistiques, associant la remise physique des colis ou leur dépôt à des fonctions autres que postales, tels que les services d'envois express.

Que ce soit dans la directive secteurs spéciaux, le CMP ou l’ordonnance, les champs couverts sont les mêmes (les dispositions relatives à l’ordonnance sont détaillées plus loin). Dans chacun des 3 textes, l’activité d’OR s’entend largement puisqu’elle s’entend non seulement de l’exploitation ou de l’alimentation desdits réseaux, mais également de l’organisation ou de la mise à disposition de ces mêmes réseaux. Cela n’a pas toujours été le cas.

- Directive 93-38 : seule l’exploitation, à l’exclusion de toute mise à disposition emporte la qualification d’opérateur de réseau de transport.

L’article 2, §2, c) de la directive 93-38 visait « l’exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, systèmes automatiques, tramway, trolleybus ou autobus ou cable ».

- Circulaire interministérielle n°98-43, du 19 mars 1998, relative aux règles applicables aux conventions de transports publics réguliers de personnes – dispositions particulières relatives aux transports scolaires, qui associe la qualité d’OR au type de convention conclue : lorsqu’il s’agit d’un MP, l’AO « garde la main » sur son réseau et est donc OR.

- Parallèle avec la communication interprétative de la commission du 8 février 2000, sur les concessions en DC, qui soumet les concessions de travaux conclues dans les secteurs spéciaux au respect non pas de la directive 93-38, mais de la directive travaux 93-37 (aujourd’hui 2004-18).

- CMP 2001 : reprend la formulation restrictive de la directive 93-38 tout en renvoyant, dans l’instruction d’application du code, à la circulaire précitée de 1998 (donc dispositions peu claires).

- Arrêt Alstom CE 19 octobre 2001 : retient la notion de l’opérateur « en puissance ».

- Conclusions Mischo du 13 décembre 2001 dans l’affaire Concordia Bus Finland : réserve la qualité d’OR aux AO exploitantes de leur réseau.

- Directive 2004-17 : dissipe les incertitudes sur la notion d’exploitation du réseau puisqu’elle ne réserve plus à cette seule fonction d’exploitation la qualité d’OR : elle y inclut la mise à disposition du réseau.

- CMP 2004 : reprend la formulation large de la directive 2004-17 (alors qu’adopté avant même la publication de cette directive).

- CMP 2006 : idem.

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Réponse Ville de Vendôme : Une entité adjudicatrice est un pouvoir adjudicateur exerçant une activité d’opérateur de réseau (OR). Ainsi donc, afin de déterminer si une personne publique est ou non entité adjudicatrice, il convient de voir si elle exerce ou non une activité d’OR. Plus précisément, je serais tentée de dire qu’une personne publique sera, en fonction de l’activité dans laquelle s’inscrit l’objet de son marché, soit pouvoir adjudicateur, soit entité adjudicatrice. Tout dépend, donc, de l’objet du marché. Aussi convient-il de se poser les 2 questions suivantes :

- à quoi correspond l’activité d’OR dans le secteur des transports ? - l’objet du marché s’inscrit-il dans cette activité d’OR ?

Sur la première question : Depuis la refonte des directives communautaires relatives à la passation des marchés publics, la notion d’OR dans le secteur des transports est entendue beaucoup plus largement qu’auparavant. En effet, la précédente directive applicable en la matière (la directive n°93-38 applicable aux activités de réseau – dont les transports) ne visait que la seule « exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, systèmes automatiques, tramway, trolleybus ou autobus ou cable ». Cette formulation restrictive, qui avait été reprise dans l’ancien code des marchés publics de 2001, semblait en effet exclure de cette définition les collectivités n’exploitant pas elles-mêmes leur réseau de transport. C’est dans ce sens qu’avaient été rendues les conclusions de l’Avocat général Misho dans l’affaire Concordia Bus Finland que vous citez dans votre mail. Notez à ce propos qu’il ne s’agit « que » de conclusions générales, non reprises par la Cour qui, finalement, n’avait pas statué sur ce point (nous n’avons donc pas eu la position du juge communautaire sur cette question). Les choses ont largement évolué depuis (et je me permettrais au passage de vous demander quel est le bureau d’études avec lequel vous travaillez … car encore une fois la Cour n’a pas tranché sur cette question) : la nouvelle directive n°2004-17, applicables aux activités de réseaux (autrement dénommées « secteurs spéciaux ») a retenu une acception plus large de l’OR transport, puisque son article 5 vise désormais « la mise à disposition ou l'exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, systèmes automatiques, tramway, trolleybus, autobus ou câble ». Cette formulation plus large avait déjà, par anticipation, été reprise dans le précédant CMP de 2004 (adopté avant même l’adoption définitive de la nouvelle génération de directives communautaires – directive 2004-18 sur les secteurs classiques et directive 2004-17 sus mentionnée sur les secteurs spéciaux) et a été plus récemment confirmée dans le CMP de 2006, dont l’article 135-5 (qui figure dans la 2

ème partie du CMP, applicable aux entités adjudicatrices) prévoit que les activités d’OR dans

le secteur des transport englobent « Les activités d’exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, tramways, trolleybus, autobus, autocar, câble ou tout système automatique, ou la mise à la disposition d’un exploitant de ces réseaux ». Ainsi donc, une AO, qu’elle exploite elle-même son réseau en régie ou qu’elle en confie l’exploitation à un tiers par le biais d’un marché public est considérée comme une entité adjudicatrice. Elle peut donc bénéficier des souplesses procédurales (et notamment le recours à la procédure adaptée pour les marchés inférieurs à 420.000€ et à la procédure négociée pour tous les marchés quel que soit leur montant). La question se pose de savoir si l’AO est DANS TOUS LES CAS (c’est-à-dire pour tous ses marchés) entité adjudicatrice (c’est la 2

ème question).

Sur la deuxième question : Lorsque l’objet du marché est directement liée à l’activité d’OR, ce qui sera le cas, par exemple, d’un marché d’exploitation des services de transport, la collectivité doit, pour la passation dudit marché, être considérée comme entité adjudicatrice. Elle doit donc appliquer les seuils et procédures (plus souples) réservés à ces entités par le CMP (2

ème partie du Code). Par contre, lorsque l’autorité

organisatrice passe un marché sans aucun lien avec son activité d’OR (ce sera la cas par exemple d’un marché de fourniture de matériel informatique, ou fournitures courantes pour le fonctionnement de la collectivité ou de l’établissement public), elle doit dans ce cas être considérée comme pouvoir adjudicateur et appliquer la 1

ère partie du CMP.

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La solution est beaucoup moins tranchée pour les marchés que je qualifierais « d’intermédiaires » : cas par exemple d’un marché d’AMO pour la passation du marché (ou de la DSP) portant sur l’exploitation des services de transport. Certains juristes estiment que si le marché concerne la passation du contrat de transport, alors il s’insère dans l’activité d’OR de la collectivité qui, dans ce cas, est entité adjudicatrice. Je suis pour ma part beaucoup plus prudente, en considérant qu’il s’agit d’un marché de prestation intellectuelle (marché de prestation juridique s’il s’agit d’une AMO juridique) et je conseille, dans ce cas, à l’AO de se « comporter » comme un pouvoir adjudicateur. Pour le marché qui vous préoccupe, à savoir le marché d’exploitation de votre réseau, vous intervenez comme entité adjudicatrice et pouvez, dans ce cas, recourir à la procédure négociée.

AINSI DONC : Pour leurs interventions dans le secteur des transports, les collectivités et leurs EPCI peuvent bénéficier des souplesses offertes par la réglementation sur les secteurs spéciaux, non seulement lorsqu’elles exercent elles-mêmes ledit service (régie), mais également lorsqu’elles en confient l’exploitation à un tiers (MP ou DSP), sans que l’on puisse distinguer avec certitude ce qui relève de l’exploitation de ce qui relève de la mise à disposition (hypothèse notamment du MP de service). Cette donne est sans conséquence pratique puisque c’est l’activité qui compte et non la fonction pour déterminer la qualité d’OR (la directive 2004-17 rend désormais inutile la recherche de la fonction exercée). En conséquence, les marchés de service, travaux ou fournitures des CL et de leurs établissements, lorsqu’ils interviennent en tant qu’AO, et alors même que le réseau ne serait pas encore réalisé et qu’ils n’en seraient pas l’exploitant direct, sont exclusivement soumis à la 2ème partie du CMP et à celles de la directive 2004-17. Une petite incertitude persiste néanmoins sur les marchés conclus préalablement à la création du réseau : sur ce point, la rédaction de la directive 2004-17 et du CMP 2006 ne concordent pas exactement. Précision sur le cas de figure du réseau non encore réalisé : Si la directive 2004-17 inclut expressément la mise à disposition du réseau, elle est moins explicite sur les situations où le réseau n’existe pas encore : Article 5-1 : « il est considéré qu’un réseau existe lorsque le service est fourni dans les conditions déterminées par une autorité compétente d’un Etat membre, telles que les conditions relatives aux itinéraires à suivre, à la capacité de transport disponible ou à la fréquentation du service ». Ce qui laisse donc ouverte la question des marchés conclus préalablement à la création du réseau (études préalables ou achat de rames, etc …). Le CMP 2006, lui, est beaucoup plus explicite : Article 135-5 : « le service de transport est considéré comme fourni par un réseau de transport lorsqu’une autorité nationale ou territoriale compétente définit les conditions générales d’organisation du service notamment en ce qui concerne les itinéraires à suivre, la capacité de transport disponible ou la fréquence du service ». Confirmation sans ambiguïté du concept d’opérateur « en puissance » reconnu par le CE en 2001 : on reconnaît l’existence d’une activité d’OR non pas lorsque le service est effectivement fourni aux usagers (ce que laisserait à penser la directive 2004-17), mais lorsque ses caractéristiques essentielles ont été définies par l’autorité compétente. Les collectivités territoriales [commune, département, région, collectivités à statut spécial, telles que la collectivité territoriale de Corse, départements d'outremer, et territoires d'outremer avec parfois des règles spéciales), sont des pouvoirs adjudicateurs, ainsi que les établissements publics locaux (art. 2 du Code des marchés publics). Au titre

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des établissements publics locaux figurent les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), communautés urbaines, communautés d'agglomération, communautés de communes, syndicats mixtes (ouverts et fermés). Toutefois, les pouvoirs adjudicateurs sont des entités adjudicatrices "lorsqu'ils exercent des activités d'opérateurs de réseaux" (art. 134-I du Code). Celles-ci concernent notamment : "Les activités d'exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, tramways, trolleybus, autobus, autocar, câble ou toute système automatique, ou la mise à la disposition d'un exploitant de ces réseaux. Le service de transport est regardé comme fourni par un réseau de transport lorsqu'une autorité nationale ou territoriale compétente définit les conditions générales d'organisation du service notamment en ce qui concerne les itinéraires à suivre, la capacité de transport disponible ou la fréquence du service". (Art. 135-5° du Code des marchés publics). La définition des opérateurs de réseaux de transport est large, puisqu'elle inclut : - l'exploitation d'un réseau de transport, - la mise à disposition d'un exploitant d'un réseau de transport.

Pour la réalisation d'un TCSP en marchés publics, les collectivités, autorités organisatrices de transport au sens de la loi n° 82-1332 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs (dite "LOTI"), sont entités adjudicatrices. De même, lorsqu'elles confient la gestion du service à un exploitant dans le cadre d'un marché de prestations de services, les AO sont des entités adjudicatrices. En revanche, les AO sont des pouvoirs adjudicateurs lorsqu'elles concluent un contrat de concession de travaux publics et de service public ou un contrat de partenariat global. Dans ce cas, en effet, les AO ne répondent pas à la définition des entités adjudicatrices. Elles n'exercent pas l'activité d'opérateurs de réseaux de transport, puisqu'elles n'exploitent pas le service de transport et ne mettent pas un réseau à la disposition d'un exploitant. C'est le concessionnaire qui réalise le réseau de transport et qui exploite le service de transport. En conséquence, pour les marchés publics de travaux, de fournitures et de services, les AO étant entités adjudicatrices, c'est la deuxième partie du Code des marchés publics qui leur est applicable (art. 134 à 175 inclus du Code des marchés publics). Les définitions des marchés indiquées supra leur sont applicables (art. 134-II du Code). Entre la première partie et la deuxième partie, le Code des marchés publics est un jeu de piste. Certaines dispositions, applicables aux pouvoirs adjudicateurs, le sont également aux entités adjudicatrices, d'autres non. Ainsi sont applicables aux entités adjudicatrices : - l'article 1er relatif aux trois grandes catégories de marchés (travaux, fournitures,

services) - l'article 10 du Code, relatif à l'allotissement, - l'article 33 prévoyant l'appel d'offres ouvert et l'appel d'offres restreint, - l'article 34 prévoyant la procédure négociée, - l'article 51, relatif aux groupements d'opérateurs économiques, - l'article 65, relatif aux procédures négociées, - l'article 68, régissant les marchés relatifs à des opérations de communication, - l'article 69, relatif au marché de conception-réalisation,

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- l'article 70, relatif au concours, - l'article 72, relatif aux marchés à tranches conditionnelles, - l'article 73, concernant les marchés de définition, - l'article 78, relatif au système d'acquisition dynamique. Il faut noter que le dialogue compétitif (art. 67 du Code des marchés publics), ancien appel d'offres sur performances, n'est pas applicable aux entités adjudicatrices (art. 142 du Code). Ce qui est conforme à la Directive 2004/17/CE du 31 mars 2004 portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux, qui ne prévoit pas une telle procédure. Ne sont prévues que les procédures ouvertes, restreintes, adaptées et négociées. En revanche, certaines procédures obéissent à des règles spécifiques, pour les entités adjudicatrices : - les seuils, déterminant l'applicabilité des procédures européennes et/ou nationales

(art. 144 du CMP), - la procédure adaptée (art. 146), - l'appel d'offres ouvert (art. 160 et 161), - l'appel d'offres restreint (art. 162 à 164), - la procédure négociée avec mise en concurrence (art. 165 et 166), - le concours (art. 167), - la maîtrise d'œuvre (art. 168), - les accords-cadres et les marchés à bons à commandes (art. 169). Comme on l’a dit, la souplesse liée au statut d’OR (donc d’EA) tient aux procédures applicables. Liberté de choix des procédures formalisées Aux termes de l'article 144 du Code des marchés publics, les entités adjudicatrices ont le choix entre les procédures suivantes : "1° Procédure négociée avec mise en concurrence préalable ; 2° Appel d'offres ouvert ou restreint ; 3° Concours, défini à l'article 38 ; 4° Système d'acquisition dynamique, défini à l'article 78". Procédure négociée

L'article 34 du CMP, applicable aux entités adjudicatrices, définit, de manière générale, la procédure négociée : "Une procédure négociée est une procédure dans laquelle le pouvoir adjudicateur négocie les conditions du marché avec un ou plusieurs opérateurs économiques". La conduite de la procédure négociée est définie aux articles 165 (qui renvoie à l'article 65) et 166 du Code des marchés publics. Elle se déroule en deux temps, avec un délai de réception des candidatures de vingt-deux jours à compter de la date d'envoi de l'avis d'appel public à la concurrence, ramené à quinze jours quand l'avis est envoyé par voie électronique. Le délai de remise des offres peut être négocié avec les candidats sélectionnés, sinon il est au moins de dix jours à compter de la date d'envoi de la lettre de consultation.

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La souplesse liée au statut d’EA tient également aux seuils applicables : pour les marchés de services, le recours à une procédure formalisée (qui, donc, peut être une procédure négociée, ne s’impose qu’à partir de 420.000€.

o PA et EA = une notion entendue largement par le DC et reprise par le droit français

Le champ d’application des directives communautaires relatives aux marchés publics est plus large que celui du CMP, réservé aux seules personnes publiques. Art. 2 du CMP : « Les pouvoirs adjudicateurs soumis au présent code sont : 1o L’Etat et ses établissements publics autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial ; 2o Les collectivités territoriales et les établissements publics locaux. Sauf dispositions contraires, les règles applicables à l’Etat le sont également à ceux de ses établissements publics auxquels s’appliquent les dispositions du présent code. De même, sauf dispositions contraires, les règles applicables aux collectivités territoriales le sont également aux établissements publics locaux ». Les Directives MP, elles, visent non seulement les personnes publiques, mais également toute personne « soumise à influence publique ». De ce point de vue, le DC ne connaît pas la distinction entre personnes publiques et personnes privées. Elle emploie d’ailleurs une terminologie différente puisqu’elle parle de « pouvoirs adjudicateurs » (directive 2004-18) ou « d’entités adjudicatrices » (directive 2004-17). Les directives intègrent également dans leur champ les entreprises publiques et les organismes de droit privé bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs. D’où l’adoption, en droit interne, de l’ordonnance du 6 juin 2005 pour se mettre en conformité avec les directives et faire entrer dans le champ de la concurrence un certain nombre de personnes à statut para public ou privé non citées à l’article 2 du Code, donc non soumises au respect du CMP, mais relevant néanmoins du champ d’application des directives MP. Ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics

En février 2004, peu de temps, donc, après l’adoption du « nouveau » CMP (décret du 7 janvier 2004), la Commission avait décidé de saisir la CJCE contre la France pour non-conformité de son code aux directives MP, qui étaient à l’époque en cours d’adoption (directives 2004/18 et 2004/17 adoptées en mars 2004), sur un certain nombre de points. Il faut à ce titre relever une loi : la loi n°2003-591 du 2 juillet 2003, habilitant le Gouvernement à simplifier le droit par ordonnance, qui contenait dans son article 5 une disposition visant d’ores et déjà à répondre aux injonctions de la Commission puisqu’il y était prévu d’habiliter le Gouvernement à prendre des mesures nécessaires pour rendre compatibles avec le DC les dispositions législatives relatives à la passation des MP. Pour ce faire, le Gouvernement disposait délai d’un an, mais vu le retard pris dans l’adoption et la publication des nouvelles directives, une habilitation supplémentaire s’est avérée requise et a donc donné lieu à la loi n°2004-1343 du 9 décembre 2004, de simplification du droit, qui habilitait une nouvelle fois le Gouvernement à prendre les mesures nécessaires (article 65 de la loi). On parle là de « dispositions législatives » relatives à la passation des MP dans la mesure où les règles à adopter pour faire évoluer le droit français concernaient des personnes non soumises au Code, à savoir essentiellement des personnes privées ou des personnes dont

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les marchés sont privés. Ces règles relèvent du niveau législatif, alors que le CMP, lui, est un texte de valeur réglementaire, ses dispositions étant contenues dans un décret. D’où l’adoption d’une ordonnance concernant ces personnes non soumises au Code (et d’où la nécessité d’une habilitation législative).

AINSI DONC : si l’on réunit, au plan du DC, les directives 18 et 17 et, au plan du droit français, le CMP et l’ordonnance du 6 juin 2005, doivent respecter les règles de mise en concurrence découlant du droit communautaire : - les pouvoirs adjudicateurs (l’Etat, les CL, les EP de l’Etat et des CL – bref toutes les personnes visées à l’article 2 du CMP + les organismes de droit privé et organismes de droit public créés pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, dont : a) Soit l'activité est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics ou à la présente ordonnance ; b) Soit la gestion est soumise à un contrôle par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics ou à la présente ordonnance ; c) Soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics ou à la présente ordonnance + organismes de droit privé créés pour réaliser certaines activités en commun + Banque de France + Caisse des dépôts et consignations – article 3 de l’ordonnance) - les pouvoirs adjudicateurs et entreprises publiques spécifiques ayant une activité

d’OR, ainsi que les organismes de droit privé bénéficiant de droits spéciaux ou exclusifs dans les secteurs relevant de l’activité d’OR, dénommés entités adjudicatrices

C’est le chapitre III de l’ordonnance qui s’applique aux EA ; l’article 26 énumère les différentes activités d’OR. Difficulté soulevée par le statut des SEM, statut qui impose un double niveau de mise en concurrence (« double peine ») : une mise en concurrence amont, pour que la SEM puisse se voir confier le service public dont la collectivité à la charge ; une mise en concurrence aval, la SEM devant respecter le CMP pour la passation de ses propres marchés. Cette obligation découle du statut semi public de la SEM (bien que société de droit privé, la SEM est à capitaux majoritairement publics), qui la fait entrer dans le champ des pouvoirs adjudicateurs au sens du droit communautaire, ce qui signifie que, même non soumise au CMP (les personnes privées ne relevant pas du CMP), la personne morale aura à respecter des règles de mise en concurrence.

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Voir développements sur la notion de pouvoir adjudicateur dans le II.A. Cas par exemple de la SNCF qui, en tant qu’EPIC, n’est pas soumise au CMP (article 2 du CMP : « les PA soumis au présent code sont l’Etat et ses EP autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial ») mais qui, pour autant, du fait de son statut public, devra respecter des règles de mise en concurrence pour ses propres achats.

B – Le Contrat de partenariat : une piste pour les AO ?

Les développements qui suivent sont extraits d’une étude à paraître intitulée : « Solutions juridiques et financières pour le développement des projets de transports locaux :

Quelle place pour les PPP ? » Etude réalisée par le Cabinet Sur Mauvenu et Associé

et Service Public 2000 pour le compte du GART. Introduction Les contrats de partenariat ont été introduits en Droit national par l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004, codifiée, pour ce qui concerne les collectivités locales, aux articles L. 1414-1 et suivants du Code général des collectivités territoriales. Il s’agit d’un contrat au caractère novateur mais qui s’inspire largement du marché d’entreprise de travaux publics (ci-après dénommé « METP »), et de la concession. Le METP, contrat de construction jurisprudentielle, était (il n’a plus d’existence juridique aujourd’hui) un contrat par lequel une personne publique confiait à une entreprise la réalisation et l’exploitation d’un ouvrage, le titulaire étant rémunéré par une redevance versée par l'administration (v. CE, Sect., 26 novembre 1971, SIMA, Rec. p. 923 ; v. également, CE, 11 décembre 1963, Ville de Colombes, Rec. p. 611). Par son objet, ce contrat pouvait être assimilé à une concession. Néanmoins, le juge administratif a considéré que le METP était bien un marché public, soumis au Code des marchés publics, dans la mesure où ce contrat ne comportait pas de redevance perçue auprès des usagers mais le versement d’un prix par la personne publique (v. notamment, CE, 14 octobre 1988, SA Socea-Balancy, req. n° 68583). Ce contrat comportait un certain nombre d’avantages pour la personne publique (financement privé des infrastructures, exploitation sur longue durée, étalement de la charge budgétaire sur la durée du contrat), se rapprochant de ceux offerts aujourd’hui par le contrat de partenariat. Les METP étaient néanmoins en contradiction avec certaines règlementations, dont celle relative à l’interdiction du paiement différé des travaux figurant dans le Code des marchés publics, et ont été condamnés par le juge administratif (CE, 8 février 1999, Commune La Ciotat, AJDA 1999, p. 364), et par le Code des marchés publics 2001, puis par les deux Codes suivants de 2004 et 2006. Aux termes de l'article 96 de l’actuel Code : "Est interdite l'insertion dans un marché de toute clause de paiement différé".

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Toutefois, la nécessité d’une diversification des modalités de partenariat avec le secteur privé imposait le recours à une « troisième voie », en vue de combler le déficit en outils contractuels adéquats, dès lors que les DSP impliquent une rémunération liée aux résultats financiers de l'exploitation d'un service public. Tel est l’objet de l’ordonnance du 17 juin 2004 précitée créant un outil spécifique, le contrat de partenariat. Celui-ci, à l’instar du METP, dispose de caractères spécifiques, permettant de le distinguer des marchés publics et des délégations de service public. En effet, en premier lieu, les contrats de partenariat se distinguent des marchés publics en raison de l’interdiction du paiement différé des travaux inscrite, comme on l’a dit, dans le Code des marchés publics (art. 96 CMP 2006). En outre, la durée d’un marché public se fonde notamment sur la nature des prestations et la nécessité d’une mise en concurrence périodique (art. 16 CMP 2006), et non en fonction des investissements réalisés par le titulaire ou des modalités de financement. En second lieu, les contrats de partenariat se distinguent des délégations de service public, à la fois par l'objet er par le mode de rémunération. D’une part, les contrats de partenariat n'ont pas pour objet de confier à leur titulaire la gestion d'un service public, contrairement aux dispositions des articles L. 1414-1 et suivants CGCT. D'autre part, le titulaire est rémunéré par la personne publique et peut percevoir des recettes annexes. Il ne prend donc pas le risque trafic, ou risque de fréquentation, mais uniquement un risque performances. En d'autres termes, son risque n'est pas commercial mais technique. Enfin, le régime des biens de ces deux contrats diffèrent sensiblement : alors que dans les délégations de service public les biens dits de retour appartiennent ab initio à la personne publique, le titulaire du contrat de partenariat est « propriétaire » des ouvrages et équipements réalisés pendant toute la durée du contrat de partenariat, celui-ci valant AOT constitutive de droits réels. 1). Définition La définition est donnée par l’alinéa 1er de l’article L. 1414-1 du Code général des collectivités territoriales, issu de l’ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 : " Les contrats de partenariat sont des contrats administratifs par lesquels la personne publique confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale relative au financement d'investissements immatériels, d'ouvrages ou d'équipements nécessaires au service public, à la construction ou transformation des ouvrages ou équipements, ainsi qu'à leur entretien, leur maintenance, leur exploitation ou leur gestion, et, le cas échéant, à d'autres prestations de services concourant à l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée. Le cocontractant de la personne publique assure la maîtrise d'ouvrage des travaux à réaliser. Il peut se voir confier tout ou partie de la conception des ouvrages. La rémunération du cocontractant fait l'objet d'un paiement par la personne publique pendant toute la durée du contrat. Elle peut être liée à des objectifs de performance assignés au cocontractant". 2). Objet

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Les contrats de partenariat sont donc des contrats administratifs par lesquels une personne publique confie à un tiers, généralement privé, une mission globale relative : - au financement d’investissements immatériels, d’ouvrages ou d’équipements

nécessaires au service public, - à la construction ou transformation des ouvrages ou équipements, - à leur entretien, leur maintenance, leur exploitation ou leur gestion, - et, le cas échéant, à d’autres prestations de services concourant à l’exercice, par la

personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée. Il convient également de noter que, au sens du Droit communautaire, les contrats de partenariat ne forment pas une nouvelle catégorie de contrat, dans la mesure où ils constituent des marchés publics, relevant de la directive 2004/18/CE du 31 mars 2004 : « Considérant qu'aux termes du a) du deuxième paragraphe de l'article premier de la directive 2004/18/CE : Les marchés publics sont des contrats à titre onéreux conclus par écrit entre un ou plusieurs opérateurs économiques et un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs et ayant pour objet l'exécution de travaux, la fourniture de produits ou la prestation de services au sens de la présente directive ; que, sous réserve que les personnes publiques procédant à leur passation puissent être regardées comme des pouvoirs adjudicateurs au sens du paragraphe 9 de l'article 1er de la même directive et qu'ils rentrent, par leur montant et par leur objet, dans les prévisions du chapitre II du titre II de celle-ci, les contrats de partenariat, qui ont vocation à être passés avec un ou plusieurs opérateurs économiques et en vertu desquels la rémunération du cocontractant fait l'objet d'un paiement par la personne publique, constituent des marchés publics au sens de cette directive ; que, dans cette mesure, l'ordonnance attaquée s'inscrit dans le champ d'application de la directive 2004/18/CE » (CE, 29 octobre 2004, Sueur et autres, RFDA 2004, p. 1103). Pour autant, l'objet d'un CP est clairement distinct de celui d'un marché public et clairement plus large. L'objet d'un CP est proche de celui d'une DSP, et notamment de celui d'une concession de travaux publics. Toutefois, une différence nette subsiste quant à l'objet du contrat. Le titulaire d'un CP est chargé de l'exploitation et de la maintenance des ouvrages et équipements nécessaires à un service public, alors qu'un délégataire est chargé de la gestion même du service public et peut être chargé de construire les ouvrages et d'acquérir les biens nécessaires au service public. Dans le domaine des TCSP, cette définition limitative du CP implique, a priori, une utilisation du CP uniquement pour la réalisation de l'infrastructure de transport et de son exploitation technique incluant la maintenance, la gestion du service public de transports de personnes devant a priori6 être confiée à un autre opérateur économique, régie personnalisée ou non, ou délégataire (v. infra III). 3). Rémunération

6 La formulation de l’ordonnance de juin 2004 ne permet pas d’apporter une réponse ferme à la question du périmètre du CP : l’article L. 1414-1 du CGCT évoque « une mission globale relative (…), le cas échéant, à d'autres prestations de services concourant à l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée ».

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La rémunération du titulaire d'un CP est, en partie, proche de celle d'un marché public (paiement par la personne publique) et, en partie, différente (paiement "lissé" sur la durée du contrat, intégrant l'amortissement des investissements initiaux). La rémunération est très différente de celle d'un délégataire, dans la mesure où le titulaire ne perçoit pas de redevance auprès des usagers du service, sauf d'éventuelles recettes annexes. En outre, la rémunération est assurée par la personne publique et elle peut, en partie, être liée à des objectifs de performance. Ainsi qu'il a été dit, la notion de risque ou de partage de risques est différente. II - Caractéristiques générales II.1. Maîtrise d'ouvrage et régime des biens Il résulte des dispositions de l'article L. 1414-1 du CGCT précité que le titulaire d'un CP assure la maîtrise d'ouvrage des travaux à réaliser et peut également se voir confier la totalité ou une partie de la conception des ouvrages. A ce titre, le titulaire d'un CP est, es qualités, maître d'ouvrage, comme un concessionnaire, un emphytéote ou le titulaire d'une AOT constitutive de droits réels. La loi MOP ne s'applique pas au contrat de partenariat, qui est un mode de réalisation en maîtrise d'ouvrage privée sous le contrôle de la personne publique contractante. En revanche, la loi MOP est applicable à celle-ci, si une partie de la conception est effectuée, au départ, sous son autorité, selon un ou plusieurs marchés de maîtrise d'œuvre. Le titulaire d'un CP est "propriétaire" des ouvrage et équipements objets du contrat pendant la durée du contrat, en l'absence de stipulation contractuelle contraire. Précisément, le titulaire dispose de droits réels sur les biens qu'il réalise dans le cadre du contrat de partenariat, lorsque le contrat comporte occupation du domaine public. Conformément aux dispositions de l'article L. 1414-16 du CGCT, ces droits réels lui confèrent les prérogatives et obligations du propriétaire, selon les conditions et modalités prévues par le contrat ayant pour objet de garantir l'intégrité et l'affectation du domaine public. Ces droits ne peuvent être cédés qu'avec l'accord exprès et préalable de la personne publique, et hypothéqués uniquement pour garantir les emprunts contractés en vue de financier la réalisation ou l'amélioration des biens. Ces droits réels sont donc limités, dans la mesure où ils n'existent que sur la durée du contrat, et où ils permettent au titulaire de disposer de l'usus et du fructus à l'égard des biens, et non de l'abusus. En outre, à l'instar des concessions, les biens peuvent être répartis selon les trois catégories usuelles (biens de retour, biens de reprise et biens propres). A cette fin, un inventaire peut être établi selon les trois catégories précitées, et mis à jour tout au long de l'exécution du contrat. Une originalité du contrat de partenariat est que les biens peuvent être privés, "apportés" par le titulaire et conservés par lui à l'issue du contrat. L’originalité est, dans ce cas, de nature fiscale, la TVA sur la totalité de la rémunération versée au titulaire du CP par l'AO des transports étant déductible au droit commun. Toutefois, cette déduction ne sera possible que si l'AO a la qualité d'exploitant fiscal, le transfert des droits à déduction de la TVA à un délégataire, même dans le cadre d'un affermage, n'étant pas possible dans la mesure où la rémunération du titulaire est une dépense de fonctionnement et non d’investissement [voir les Fiches fiscales éditées par la MAPP – Mission d'appui à la réalisation des contrats de partenariat].

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II.2. Contenu minimum légal du contrat de partenariat Conformément aux dispositions de l’article L. 1414-12 CGCT, le contrat de partenariat doit nécessairement comporter un certain nombre de clauses.

a) Durée

Conformément aux dispositions de l’article L. 1414-1 CGCT, les contrats de partenariat sont conclus pour une « période déterminée en fonction de la durée d’amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues ». La durée du contrat de partenariat comprend la conception, la construction des ouvrages et équipements, et, leur exploitation technique et leur maintenance. De manière corrélative, les montants annuels des loyers qui devront être versés par la personne publique vont dépendre de la durée du contrat. Cette durée revêt donc une importance primordiale. Celle-ci doit être définie en fonction, d’une part, de l’étendue des missions et des performances imposées au titulaire, et, d’autre part, des contraintes financières et budgétaires pesant sur l’autorité organisatrice. De même, la durée du contrat conditionne la durée des financements mis en œuvre par le titulaire. En outre, la phase d’exploitation et de maintenance doit être suffisamment longue, afin de permettre au titulaire d’amortir les investissements réalisés pendant les phases de conception et de construction, et de bénéficier d'une juste rémunération. La phase de dialogue compétitif doit permettre de trouver un équilibre entre les contraintes inhérentes au projet et celles de l’autorité organisatrice, du titulaire et des financiers. Le CP est nécessairement de longue durée par rapport aux marchés publics

b) Partage des risques

Le contrat de partenariat est fondé sur une répartition optimale des risques entre le titulaire et la personne publique. En effet, l’objectif est de transférer au titulaire une partie des risques de la personne publique. Cela induit des coûts supplémentaires pour le titulaire, qui sont répercutés dans les loyers devant lui être versés par la personne publique. Le partage des risques n'est pas spécifique au CP. C'est une notion existant également dans les DSP. Le principe est de faire supporter chaque risque à celui qui est le mieux à même de le faire. Quatre grandes familles de risques peuvent être identifiées : - risques relatifs à la conception - risques relatifs à la construction - risques relatifs à l’exploitation technique et à la maintenance - risques relatifs au financement. Il est opportun de transmettre aux candidats un projet de matrice des risques, lors de la passation du contrat. La répartition établie dans le projet peut faire l’objet de modifications au cours du dialogue compétitif. La matrice des risques définitive peut constituer une annexe au contrat de partenariat.

c) Objectifs de performance

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La fixation et le respect d’objectifs de performance contractuellement assignés au titulaire sont un élément primordial qui caractérise le contrat de partenariat, mais là encore, pas totalement original. Il s’agit là, en effet, de l’un des motifs justifiant le recours à ce type de contrat, permettant à l’autorité organisatrice d’obtenir le respect d’exigences contractuellement prévues et des prestations contrôlables pendant toute la durée du contrat. C’est une application du principe « Best value for money » (meilleur rendement pour un prix donné). Ainsi, des objectifs de performance doivent être assignés au cocontractant, « notamment en ce qui concerne la qualité des prestations de services, la qualité des ouvrages et équipements, les conditions dans lesquelles ils sont mis à la disposition de la personne publique et, le cas échéant, leur niveau de fréquentation » (art. L. 1414-12 c)). Les performances et résultats à obtenir peuvent ainsi concerner les domaines suivants : - conception des ouvrages, - construction des ouvrages et des équipements, - réalisation des travaux (techniques employées, durée des travaux, …) - maintenance et exploitation technique des ouvrages et équipements. Ces objectifs et résultats doivent être mesurables, afin que des contrôles soient effectués, et, le cas échéant, des sanctions soient prononcées. Ces contrôles ont lieu, au stade de la conception des ouvrages, lors de l’achèvement de la phase de réalisation des travaux, et lors de la phase d’exploitation. On peut comprendre que soient assignés des objectifs de performance concernant l'exploitation et la maintenance des ouvrages et équipements et leur disponibilité. Le "niveau de fréquentation" est plus surprenant, dans la mesure où le cocontractant n'assure pas directement la gestion du service public et n'assume pas le risque commercial. Cependant, la circulaire du 29 novembre 2005 relative aux contrats de partenariat à l'attention des collectivités territoriales énonce que : "Si la règle générale est que la personne publique conserve le risque volume, ou risque de fréquentation, le contrat de partenariat peut néanmoins affecter au partenaire privé une partie du risque volume" Il est vrai que c'est une simple éventualité. On ne voit pas très bien comment demander à un titulaire d’un CP réalisant un TCSP de respecter ou de garantir des objectifs de fréquentation, sauf si l'on considère que l'article L. 1414-1, nonobstant sa rédaction, permet de lui confier l'exploitation technique et commerciale de l'infrastructure de transport.

d) Rémunération du titulaire

La rémunération du titulaire fait l’objet d’un paiement par la personne publique, étalé sur la durée du contrat. Cette rémunération est calculée sur la base de plusieurs éléments clairement distingués : - coûts d'investissement, - coûts de fonctionnement, - coûts de financement, - le cas échéant, recettes annexes, tirées de l'exploitation des ouvrages et

équipements pour répondre à d'autres besoins que ceux de la personne publique contractante.

Ainsi la rémunération se décompose entre un "loyer financier" et un "loyer fonctionnement".

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Le loyer "financier" intègre les coûts d'investissements (investissements initiaux et investissements liés au renouvellement des équipements) et les coûts de financement supportés par le titulaire. Sont ainsi pris en compte les coûts suivants : - coûts de développement, ou de conception, - coût des travaux, - coûts de la société de projet, incluant la maîtrise d'ouvrage, - amortissements, - impôts et taxes, - assurances, - coûts de formation des conducteurs, des essais et de la marche à blanc, - frais financiers. Le loyer "fonctionnement" intègre l'ensemble des coûts liés à la maintenance, à l'exploitation technique et aux services. Sont ainsi pris en compte les coûts suivants : - coût des prestations de services, - coûts de maintenance préventive et curative, - assurances, - frais de structure du titulaire, - marge pour aléas et bénéfices. La rémunération du titulaire du CP peut et même doit comprendre, dans les coûts de fonctionnement, une partie variable liée aux objectifs de performance, un système de variation bonus/malus. Le contrat doit expliquer ses modalités de mise en œuvre, ainsi que les mécanismes de compensation entre les sommes dues par la personne publique et celles dues par son cocontractant au titre de sanctions ou de pénalités. Le contrat doit également fixer les modalités de paiement de la rémunération. Le versement peut être mensuel ou trimestriel, avec une régularisation annuelle, compte tenu des éventuelles compensations ou du bonus/malus. La formule d'indexation peut être annuelle ou à fréquence plus élevée. Il faut mentionner, quand aux modalités de paiement, les règles particulières de la cession partielle de créances, codifiées au Code monétaire et financier, à l'article L. 313-29-1, qui dispose : "En cas de cession d'une créance détenue sur une personne publique par le titulaire d'un contrat de partenariat, ce contrat peut prévoir que, pour une part de la créance cédée représentant une fraction du coût des investissements, les dispositions des articles L. 313-28 et L. 313-29 ne sont pas applicables. Dans ce cas, le contrat prévoit que la part de la créance mentionnée ci-dessus est, après constatation par la personne publique contractante que les investissements ont été réalisés, définitivement acquise au cessionnaire, sans pouvoir être affectée par aucune compensation. Le titulaire du contrat est tenu de se libérer auprès de la personne publique contractante des dettes dont il peut être redevable à son égard du fait de manquements à ses obligations contractuelles, et notamment, du fait des pénalités qui ont pu lui être infligées : l'opposition à l'état exécutoire émis par la personne publique n'a pas d'effet suspensif dans la limite du montant ayant fait l'objet de la garantie au profit du cessionnaire". Il s'agit donc d'une cession sans recours, sans qu'il soit nécessaire qu'elle fasse l'objet d'un acte d'acceptation. Elle constitue une garantie sur les flux financiers et permet au titulaire du CP d'obtenir des conditions de financement plus favorables – ce dont bénéficie la personne publique contractante.

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e) Respect de l’affectation des ouvrages et des exigences du service public

Les missions dévolues au titulaire du contrat de partenariat ne recouvrent pas celles relatives à la gestion d’un service public, comme c’est le cas s’agissant des délégations de service public. Néanmoins, le contrat doit prévoir une clause relative aux « obligations du cocontractant ayant pour objet de garantir le respect de l’affectation des ouvrages et équipements du service public dont la personne publique contractante est chargée et le respect des exigences du service public » (art. L. 1414-12 e)). Cette clause est nécessaire dans la mesure où les exigences de service public doivent se concilier avec les droits réels du titulaire du CP et son éventuelle exploitation des ouvrages et équipements à des fins accessoires, ainsi qu'avec les conditions de financement par crédit-bail, le cas échéant. Le crédit-bailleur est juridiquement propriétaire des biens financés, mais il doit respecter leur affectation au service public et les exigences du service public. Au demeurant, la même condition existe dans les conventions tripartites conclues entre un concédant, un concessionnaire et une SOFERGIE, en cas de financement par crédit-bail, immobilier et mobilier, des ouvrages et équipements de la concession. Elle existe aussi pour le financement par crédit-bail, dans le cadre d'un BEA ou d'une AOT constitutive de droits réels.

f) Modalités de contrôle et sanctions et pénalités applicables

Le contrôle de l’autorité organisatrice sur l’exécution du contrat s’exerce à un double titre, ainsi qu'il a été dit. Les dispositions précitées prévoient légalement et imposent d'organiser contractuellement le pouvoir de contrôle de la personne publique, qui relève des règles générales applicables aux contrats administratifs. Le contenu du rapport annuel devant être remis par le titulaire du CP n'est pas précisé. On peut utilement s'inspirer, en l'adaptant, du contenu du rapport annuel du délégataire, notamment quant aux indicateurs de qualité qui correspondent aux objectifs de performance et aux méthodes de mesure et de suivi. La partie originale du contrôle porte sur la sous-traitance à des PME et artisans. Il peut s'agir de sous-traitance des travaux de construction comme de celle de prestations de maintenance. S'agissant de la construction, le contrôle porte également sur l'obligation faite au titulaire du CP de constituer une caution garantissant le paiement des sous-traitants au fur et à mesure de la réalisation des travaux, "dans un délai maximum de quarante-cinq jours à compter de la réception de ceux-ci". Ainsi que dans un contrat de concession, il faut rappeler que la sous-traitance ne relève pas de la loi du 31 décembre 1975 et que la réception des travaux est prononcée entre le titulaire du CP et les entreprises sous-traitantes. En cas de non-respect des engagements souscrits ou des objectifs de performance, l’autorité organisatrice peut prononcer des sanctions et des pénalités. Celles-ci sont établies en fonction de l’objet du contrat et des objectifs de performance assignés au titulaire du contrat. Ainsi qu’il a été précédemment indiqué, une compensation est effectuée entre les loyers et les pénalités appliquées au cocontractant. En outre, des sanctions sont encourues en cas d’inexécution totale ou partielle de ses missions par le titulaire, celles-ci pouvant aller jusqu’à la mise en régie et la résiliation pour faute du contrat.

g) Conditions de modification du contrat

Le contrat doit prévoir les « conditions dans lesquelles il peut être procédé, par avenant, ou, faute d’accord, par une décision unilatérale de la personne publique, à la modification de certains aspects du contrat ou à sa résiliation » (art. L. 1414-12 h)).

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Une modification peut notamment intervenir en cas : - d’évolution des besoins de la personne publique, - d’innovations technologiques, - de modifications dans les conditions de financement obtenues par le cocontractant. Tout projet d’avenant entraînant une augmentation du montant global du contrat supérieur à 5 % doit être soumis pour avis à la commission de contrat de partenariat. L’assemblée délibérante ou l’organe délibérant qui autorise la conclusion du projet d’avenant doit être préalablement informé de cet avis. La règle existant pour les marchés publics et les DSP a été étendue aux CP, chaque catégorie ayant sa commission spécifique d'appel d'offres (au sens large du terme).

h) Cession totale ou partielle du contrat

Conformément à l’avis précité du Conseil d’Etat en date du 8 juin 2000 (CE, Sect. Fin., 8 juin 2000, avis n° 141654, BJDCP n° 15/2001, p. 94), toute cession, totale ou partielle, du contrat doit être préalablement et expressément autorisé par l’autorité organisatrice. Celle-ci ne peut cependant être refusée que si le cessionnaire ne dispose pas de garanties techniques ou financières suffisantes, selon les principes jurisprudentiels.

i) Continuité du service en cas de défaillance ou de fin anticipée

Le contrat doit également prévoir les conditions dans lesquelles la continuité du service public est assurée en cas de défaillance du titulaire, et notamment dans l’hypothèse d’une résiliation du contrat. Cette clause permet de prendre toutes mesures destinées à assurer la continuité du service public. Une clause sur la continuité du service public existe dans de nombreux contrats de DSP. En cas de résiliation pour faute, ou en cas de défaillance, elle peut paraître "littéraire". Dans le cadre d'un CP, la situation peut être la même et difficile à gérer. Cependant, toute résiliation pour faute rendant nécessaire une mise en demeure, ce délai peut être mis à profit pour trouver une solution de remplacement. La passation d'un marché public en urgence peut être envisagée, ou la reprise en régie. Il peut aussi être prévu d'insérer une "clause de substitution" qui existe dans le "financement de projet". En cas de risque de résiliation pour faute, la mise en demeure est également adressée aux "prêteurs", et ceux-ci peuvent proposer une "entité substituée", à laquelle le contrat serait cédé avec l'agrément de la personne publique. Cette clause existe dans des concessions de l'Etat et de collectivités territoriales. A notre connaissance, elle n'a jamais été mise en œuvre (ni dans la concession "Eurotunnel", ni dans la concession "Orly-Val"). Quelles que soient les difficultés pratiques le moment venu, il faut prévoir une clause permettant à l'autorité organisatrice de prendre toutes mesures pour assurer la continuité du service public. Mais il faut tenter de définir des conditions et modalités plus précises à cette fin, étant entendu que le titulaire du CP en place est défaillant, et qu'il faut mettre à profit la "période grise" qui précède la défaillance, tout en respectant les dispositions protectrices des entreprises en difficulté ou en redressement judiciaire qui sont d'ordre public.

j) Conséquences de la fin du contrat, notamment sur la propriété des ouvrages et équipements

Une attention particulière doit être portée à l’identification et à la classification des biens objets du contrat, s’agissant notamment de leur sort à la fin du contrat, anticipée ou non.

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GART – Pôle juridique le 12/3/07 113

A cet égard, l'ordonnance du 17 juin 2004 laisse une certaine liberté aux parties. Les biens peuvent : - appartenir à l'autorité organisatrice ab initio, selon des stipulations contractuelles

expresses, si le contrat comporte occupation du domaine public ; - appartenir au titulaire du CP pendant la durée du contrat , - appartenir au titulaire du CP et rester sa propriété à la fin du contrat. Ainsi qu'il a été dit, le régime des biens doit être déterminé clairement dans le contrat. Il peut s'inspirer ou non de la classification des biens dans une concession. En toute hypothèse, l'établissement d'un inventaire et sa mise à jour régulière sont indispensables. L'inventaire est nécessaire aussi pour l'obligation de remettre, en fin de contrat, les biens appartenant à la personne publique ou destinés à être intégrés dans son patrimoine, en bon état de fonctionnement et d'entretien, compte tenu de leur âge et de leur destination.

k) Prévention, règlement des litiges et arbitrage

Le contrat doit prévoir les modalités de prévention et de règlement des litiges. En outre, il convient de souligner que l’article L. 1414-12 l)) du CGCT constitue une dérogation à l’interdiction de principe de recours à l‘arbitrage pour les personnes publiques (v. art. 2060 du Code civil ; CE, Ass., avis n° 339710, GACE, Dalloz, n° 15). Le recours à l’arbitrage est possible avec application de la loi française. Cette dérogation s'ajoute aux huit dérogations à la compétence des juridictions administratives de premier ressort énumérées à l'article L. 311-6 du Code de justice administrative. En principe, le CP relève de la juridiction administrative territorialement compétente (Tribunal administratif dans le ressort duquel se situe le lieu d'exécution du contrat). Avant la saisine du Tribunal administratif, il peut être prévu des modalités de règlement amiable, le cas échéant, avec la mise en place d'une commission de conciliation. Si le recours à l'arbitrage est envisagé, il faut rédiger une "clause compromissoire". Elle doit comporter certaines indications obligatoires relatives :

� au choix des arbitres ou à la description des modalités de choix (il existe de nombreux centres d'arbitrage ou chambres arbitrales en France) ;

� à la détermination de la procédure d'arbitrage qui sera applicable (référence au règlement de la Cour arbitrale choisie) ;

� à la définition du champ d'application de la clause (tous les litiges ou une partie des litiges nés du contrat).

II.3. Régime juridico-financier et fiscal Sur les modalités de financement, les dispositions législatives relatives au CP sont quasiment muettes, sauf sur la cession partielle de la créance professionnelle détenue par le titulaire du CP sur la personne publique. En réalité, le CP étant un mode de financement privé d'équipements publics, ce sont les modalités de financement de tous les PPP qui peuvent s'appliquer (v. Aspects financiers). Le régime fiscal du CP présente deux particularités, qui n'ont pas de réel impact en matière de transports publics payants. Elles concernent la taxe foncière et la TVA. En revanche, une troisième particularité concernant la taxe professionnelle peut donner lieu à complications.

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GART – Pôle juridique le 12/3/07 114

S'agissant de l'exonération de taxe foncière, elle ne joue qu’en cas d'absence de production de revenus des biens immobiliers devant être incorporés dans le domaine public. Or, les transports publics, sauf exception, sont payants, même faiblement, par les usagers. La condition d'absence de revenus n'est donc pas remplie. La seconde disposition concerne la TVA. L'éligibilité au FCTVA est limitée à la part de la rémunération correspondant à l'investissement réalisé par le titulaire du CP pour les besoins d'une activité non soumise à la TVA, et à condition que le bien appartienne à la personne publique ou soit destiné à lui appartenir. Cette disposition ne concerne pas les transports publics de personnes soumis à la TVA au droit commun. L'assujettissement de l'exploitant du TCSP à la TVA au droit commun, qu'il s'agisse d'une régie ou d'un délégataire, rend la TVA grevant la rémunération du titulaire du CP déductible au droit commun, les recettes du service public de transport de personnes étant elles-mêmes soumises à TVA (au taux réduit de 5,5 %). Il faut toutefois que l'ouvrage réalisé par le titulaire du CP soit mis à disposition directement de l'exploitant fiscal, AO ou délégataire, en raison de l'impossibilité du transfert par l'AO au délégataire des droits à déduction de la TVA grevant la rémunération du titulaire du CP [Voir Fiches fiscales de la MAPP]. S'agissant de la taxe professionnelle, la situation peut se révéler complexe, avec un partage entre le titulaire du CP et l'exploitant soumis à la taxe professionnelle (délégataire). Le régime fiscal d'un CP ne soulève donc pas de difficultés particulières dans le domaine des transports, sauf en ce qui concerne la taxe professionnelle. Il faut seulement déterminer, compte tenu du mode de gestion choisi, qui gère le compte transport et la TVA, et qui acquitte la taxe foncière et la taxe professionnelle. 4). Contrat global ou exploitation dissociée 4). 1. Contrat global réalisation-exploitation Par définition, l’exploitation d’un réseau de transports publics de personnes suppose la perception de recettes perçues auprès des usagers du service public. Or, ainsi qu’il a été précédemment rappelé, les missions du titulaire d’un contrat de partenariat ne recouvrent pas directement la gestion d’un service public. D’après les textes, le titulaire peut (option facultative) assurer des « prestations de service concourant à l’exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée ».. De même, le titulaire peut se procurer des recettes annexes mais non les redevances perçues auprès des usagers du service public, contrairement au délégataire de service public (art. L. 1414-1 CGCT). Dès lors, le titulaire du contrat de partenariat peut percevoir les recettes auprès des usagers du service public, non pas en son nom et pour son propre compte, mais seulement au nom et pour le compte de l’AO. Même si ces recettes sont de nature à procurer une rémunération, assurée de manière substantielle par les résultats de l'exploitation Dans cette hypothèse, la mise en œuvre d’un contrat global est donc difficilement envisageable, sauf à considérer que l’exploitation du service public, et, partant, la perception des recettes, soient confiées au titulaire du contrat de partenariat, sous forme de gérance ou de marché de services. Dans ce cas, un régisseur de recettes doit être nommé ou, à défaut, un mandat financier confié au titulaire du CP.

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GART – Pôle juridique le 12/3/07 115

Comme indiqué précédemment, une réserve demeure sur le fait qu'un contrat de partenariat ne permet pas de confier la gestion du service public lui-même à son titulaire. Certains commentateurs considèrent qu'on peut avoir une conception plus large du CP, ou qu'il faut modifier le texte en ce sens (ce qui est envisagé, semble-t-il). Dans l'état actuel de la définition du CP, le recours à ce type de contrat nous semble plutôt devoir être envisagé dans le cadre d'un montage dissocié. 4). 2. Exploitation dissociée S’agissant des TCSP, le contrat de partenariat pourrait opportunément être utilisé dans le cadre d’un montage dissocié. Précisément, le titulaire du contrat de partenariat aurait pour mission la réalisation du TCSP (conception, construction et financement) ainsi que son exploitation technique et sa maintenance. L’exploitation du service public serait quant à elle assurée : - par la personne publique, au travers d’une régie, personnalisée ou non,

- ou par un autre cocontractant de la personne publique, sous la forme d’une régie intéressée ou d’un contrat d’affermage.

Il s'agirait d'un montage contractuel triangulaire, comme la double concession, assez complexe, juridiquement et fiscalement. Deux schémas peuvent être envisagés, principalement.

Schéma 1

A.O.

Titulaire Délégataire ou Régie

CP DSP ou

cahier des charges

location

loyer

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GART – Pôle juridique le 12/3/07 116

Schéma 2

Ces deux schémas peuvent être aménagés. Ils soulèvent des questions (peut-être des difficultés) quant à la gestion des interfaces entre le titulaire du CP et l'exploitant du service public des transports. Elles peuvent être résolues dans le cadre d'une convention directe entre le titulaire du CP et l'exploitant. C'est le cas dans la convention tripartite de fonctionnement, dans le cadre d'une double concession, de travaux publics et de service public. Ce type de montage est également prévu dans le secteur ferroviaire entre le titulaire d'un CP, le gestionnaire de l'infrastructure, et la SNCF, par le décret précité n° 2006-1534 du 6 décembre 2006. Sur le plan fiscal, pour la déductibilité de la TVA grevant la totalité de la rémunération du titulaire du CP, parfois qualifiée de "loyer", il faut préférer le schéma 1, de mise à disposition directe d'un délégataire, qui pourra intégralement déduire la TVA sur ses charges. Le "loyer" versé par le délégataire au titulaire du CP est pris en compte dans les coûts d'exploitation et les comptes prévisionnels, sur la base desquels est déterminé le montant de la subvention forfaitaire d'exploitation. 5). Règles de passation Les contrats de partenariat n’étant ni des délégations de service public, ni des marchés publics (au sens du Code des marchés publics), leur procédure de passation ne relève ni des articles L. 1411-1 et suivants CGCT, ni du Code des marchés publics. L’article L. 1414-3 CGCT a néanmoins pris soin de dégager les principes applicables, le décret n°

A.O.

Titulaire Délégataire ou Régie

CP location Mise à disposition

gratuite

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GART – Pôle juridique le 12/3/07 117

2004-1145 du 27 octobre 2004 déterminant les modalités de publicité applicables (codifié aux articles D.1414-1 et suivants du CGCT). Principes applicables L'article L. 1414-3 du CGCT dispose que : "la passation d'un contrat de partenariat est soumise aux principes de liberté d'accès, d'égalité de traitement des candidats et d'objectivité des procédures". Ces principes constituent une sorte de fonds commun de la concurrence pour la passation des marchés publics et contrats administratifs en général. En outre, l’alinéa 2 de l’article L. 1414-13 CGCT précise que la passation des contrats de partenariat « est précédée d’une publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes dans des conditions prévues par décret » (décret n° 2004-1145 du 27 octobre 2004). Cette disposition est très proche de celle relative à la publicité préalable pour la passation des DSP. Cependant, la passation d'un CP est plus complexe que celle d'une DSP, dans la mesure notamment où elle rend nécessaire l'établissement d'une évaluation préalable. Evaluation préalable Au terme des dispositions applicables, le recours au contrat de partenariat est entendu de manière restrictive. En effet, le lancement de la procédure de passation doit obligatoirement être précédé d’une étude d’évaluation sur les plans juridique, technique, économique et financier démontrant la nécessité de recourir à ce type de contrat. En effet, aux termes de l’article L. 1411-2 du Code général des collectivités territoriales, l’étude d’évaluation à laquelle procède la personne publique avant le lancement de la procédure de passation du contrat, a un double objet. Elle : « a) Montre ou bien que, compte tenu de la complexité du projet, la personne publique n’est pas objectivement en mesure de définir seule et à l’avance les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d’établir le montage financier ou juridique du projet, ou bien que le projet présente un caractère d’urgence ; b) Expose avec précision les motifs de caractère économique, financier, juridique et administratif, qui l’on conduite, après une analyse comparative, notamment en termes de coût global, de performance et de partage des risques, de différentes options, à retenir le projet envisagé et à décider de lancer une procédure de passation d’un contrat de partenariat. En cas d’urgence, cet exposé peut être succinct ». Ce double objet porte donc sur : - la complexité, technique ou juridico-financière, du projet, ou son urgence ;

- l’analyse comparative et multicritères des diverses solutions possibles.

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Tout d’abord, les collectivités territoriales ont la liberté de choix des bureaux, consultants, ou organismes chargés d’établir l’étude d’évaluation, dès lors qu'elles respectent les règles de passation du ou des marchés conclus à cet effet. Ensuite, sans que l’on bénéficie du recul de l’expérience, la mise en œuvre des contrats de partenariat étant plutôt lente, on peut tenter de dégager quelques principes pour l’établissement de l’évaluation préalable. A cet égard, deux fascicules peuvent être consultés, qui ont été publiés par le Moniteur des Travaux publics : - « Evaluation des contrats globaux de partenariat. Principes, méthode et

comparaisons », Institut de la gestion déléguée, MTP 26 mars 2004 (72 p) ; - « Le contrat de partenariat et la collectivité territoriale. Comment utiliser le contrat

de partenariat ?, X Bezançon, M. Fornacciari, MTP 18 mars 2005 (24 p). S’agissant de la complexité du projet, qui pourra être aisément démontrée pour un projet de transports publics, on peut appliquer la notion retenue par la directive 2004/18/CE du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services. Le considérant 31 de la directive énonce que : « Les pouvoirs adjudicateurs qui réalisent des projets particulièrement complexes peuvent, sans qu’une critique puisse leur être adressée à cet égard, être dans l’impossibilité objective de définir les moyens aptes à satisfaire leurs besoins ou d’évaluer ce que le marché peut offrir en termes de solutions techniques et/ou de solutions financières/juridiques. Cette situation peut notamment se présenter pour la réalisation d’importantes infrastructures de transport intégrées, la réalisation de grands réseaux informatiques ou la réalisation de projets comportant un financement complexe et structuré, dont le montage financier et juridique ne peut pas être prescrit à l’avance ». Cette considération justifie le recours à une procédure plus souple de passation d’un "marché public" au sens communautaire : le dialogue compétitif. La même notion de complexité vaut pour les contrats de partenariat ; elle a d’ailleurs été reprise à l’article L.1414-5 du CGCT : « Si, compte tenu de la complexité du projet, la personne publique est objectivement dans l'impossibilité de définir les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d'établir le montage financier ou juridique du projet, elle indique dans l'avis qu'il sera recouru à une phase de dialogue dans les conditions prévues à l'article L. 1414-7 ». Notons à ce titre que la plupart des CP lancés à ce jour l’ont été sur la base du critère de la complexité (c’est le cas du Conseil régional de La Réunion – contrat de partenariat pour le tram-train) En cas d’urgence, autre critère pouvant justifier le recours au CP, la procédure de passation est l’appel d’offres, conformément à l’article L. 1414-8 du Code général des collectivités territoriales (c’est le cas d’Auvers-sur-Oise. – contrat de partenariat pour l’éclairage public) L’analyse comparative doit être à la fois économique, financière, juridique et administrative. Elle doit porter notamment sur : - le coût global, - les performances, - le partage des risques.

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GART – Pôle juridique le 12/3/07 119

Elle doit conclure sur les motifs, à caractère économique et financier, juridique et administratif, qui conduisent la collectivité territoriale à choisir la formule du contrat de partenariat. Le fascicule MTP du 18 mars 2005 présente un « Tableau d’évaluation des contrats de partenariat public privé », à double entrée. Il retient quatre familles de critères : A. les performances, B. le partage des risques, C. le coût global, D. les externalités socio-économiques, et quatre modes de gestion pour la comparaison : - régie, - marché public, - délégation de service public, - contrat de partenariat. L'étude d'évaluation est présentée à l'assemblée délibérante qui se prononce sur le recours au CP. Principales étapes Le tableau suivant permet de retracer les principales étapes de la publicité et de la mise en concurrence précédant la passation du contrat de partenariat. La phase de dialogue compétitif décrite comporte deux étapes successives de discussions avec les candidats, en raison, notamment, de l’importance des projets de TCSP considérés, et de la nécessité, pour l’AO, de disposer de l’ensemble des renseignements d’ordre technique, juridique, économique et financier lui permettant de contracter sur une longue durée.

Item

Délai

1. Evaluation préalable et définition du

programme fonctionnel des besoins

2 ou 3 mois environ

2. Avis préalable de la commission

consultative des service publics locaux

3. Avis préalable du CTP

4. Décision de principe du recours à un

contrat de partenariat (assemblée délibérante)

Convocation des conseillers 5 jours francs avant la date de délibération

5. Délibération relative à la commission

des contrats de partenariat

Convocation des conseillers 5 jours francs avant la date de délibération

6. Publication des avis de publicité

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préalable (JOUE – BOAMP) 7. Réception des candidatures

40 jours minimum à compter de la date d'envoi à la publication

8. Ouverture des plis par la commission

des contrats de partenariat

Jour de réception ou après

9. Etablissement de la liste des candidats

autorisés à présenter une offre

Jour de réception ou après

10. Envoi d'une lettre de consultation

invitant les candidats retenus à remettre une proposition sommaire

Après

11. Remise des propositions sommaires et

ouverture des plis

12. Participation des candidats retenus au

dialogue compétitif

13. Envoi d'une lettre de consultation

invitant les candidats retenus à remettre une proposition détaillée

De 15 jours à 1 mois (non obligatoire)

14. Remise par les candidats de leur

proposition détaillée

15. Envoi d'une lettre de consultation

invitant les candidats retenus à remettre une offre finale

16. Remise par les candidats de leur Offre

finale

1 mois

17. Examen des offres finales, avec, le cas

échéant, clarifications, précisions et compléments apportés par les candidats, ainsi que confirmation de certains de leurs engagements

1 mois environ

18. Choix de l'offre économiquement la

plus avantageuse et désignation du titulaire pressenti

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GART – Pôle juridique le 12/3/07 121

19. Mise au point du contrat

15 jours environ

20. Information des candidats non retenus

du rejet de leur offre finale

21. Délibération approuvant le choix du

titulaire, ainsi que le contrat et autorisant l'autorité exécutive à signer le contrat

22. Transmission au représentant de l'Etat

dans le département de la délibération

23. Signature et notification du contrat

10 jours minimum après notification aux candidats non retenus du rejet de leur offre

24. Transmission au contrôle de légalité de

la date de notification

25. Publication d'un avis d'attribution

1 mois après la notification

6). Questions de procédure Le dialogue compétitif est : - une procédure restreinte, comportant une phase de préqualification (3 à 5 candidats,

si le nombre de candidatures le permet) ; - une procédure négociée plus encadrée. Les candidats doivent remplir les conditions classiques en matière de marchés publics et de DSP : satisfaire aux obligations fiscales et sociales, ne pas avoir été condamnés pour diverses infractions, notamment au Droit du travail. En outre, ne peuvent soumissionner à un CP les personnes en état de liquidation judiciaire ou admises au redressement judiciaire (ou procédure équivalente dans un droit étranger) [art. L. 1414-4 du CGCT]. Si le CP comporte tout ou partie de la conception des ouvrages, les candidats ont intérêt à présenter leur équipe de maîtrise d'œuvre, chargée de la conception des ouvrages et du suivi de leur réalisation, puisque son identification sera une des conditions d'exécution du contrat (art. L. 1414-13 du CGCG). Il est également de l'intérêt de la personne publique de le demander dans l'avis d'appel public à la concurrence. Plus largement, quand le CP allie plusieurs métiers, comme c'est le cas, en TCSP, les candidats doivent se présenter en groupement et s'engager à constituer une "Société de projet". La même règle vaut pour les concessions. Le règlement de consultation peut prévoir plusieurs étapes du dialogue compétitif et l'élimination de certains candidats en cours de route. Cette restriction du nombre de

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GART – Pôle juridique le 12/3/07 122

candidats ne peut être effectuée que si le règlement de consultation le prévoit, et au regard des critères de sélection des offres. La phase de dialogue compétitif est particulièrement complexe. L'AO doit respecter strictement l'égalité de traitement des candidats (pas d'informations privilégiées) et la confidentialité des offres, alors que sont nécessairement comparées et confrontées les propositions des candidats. Le choix doit être celui de "l'offre économiquement la plus avantageuse", sur la base des critères d'appréciation définis dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans le règlement de la consultation. Les critères doivent prendre en compte les conclusions de l'étude d'évaluation et être pondérés, sauf impossibilité démontrée. Les critères d'appréciation ne sont pas totalement libres. Doivent figurer : - le coût global de l'offre, - les objectifs de performance, - la part d'exécution confiée à des PME et des artisans. Sont facultatifs d'autres critères et notamment : - la valeur technique de l'offre, - le caractère innovant de l'offre, - le délai de réalisation des ouvrages et équipements. En outre, si la conception est confiée, en totalité ou en partie, au titulaire du CP, figure nécessairement : - le critère de la qualité globale des ouvrages. Le jugement des offres dans un CP est nettement plus encadré que dans une DSP, même si les principes sont identiques : critères objectifs, pertinents, non discriminatoires et motivés. Dans une DSP, n'existe aucune obligation de pondérer ou hiérarchiser les critères de jugement. Les critères énoncés doivent être appliqués, et eux seuls, à tous les candidats. Les critères peuvent être précisés en cours de procédure mais non modifiés. Cette faculté est expressément prévue pour les CP (art. L. 1414-7 du CGCT) et elle est reconnue pour les DSP. A la fin de la procédure de passation du CP, c'est l'assemblée délibérante qui autorise la signature du contrat (dont elle doit avoir le projet) ou déclare la procédure infructueuse. Le projet de délibération est accompagné d'une information financière portant sur :

� le coût global prévisionnel du contrat, en moyenne annuelle, � la part de ce coût par rapport à la capacité financière annuelle de la personne

publique (ratio défini à l'article D 1414-4 du CGCT – art. L. 1414-10 du CGCT). Là encore, la procédure est différente de celle des DSP, pour lesquelles l'assemblée délibérante se prononce au vu, outre le projet de contrat, du rapport de la commission DSP sur l'analyse des propositions des candidats et du rapport du Président présentant les motifs de choix, et de l'entreprise et de l'économie générale du contrat. Aucune disposition ou aucun principe n'interdit d'appliquer une procédure semblable ou proche, même si elle n'est pas formellement un dialogue compétitif, pour la passation d'une DSP. Le Conseil d'Etat a d’ailleurs jugé, pour la passation d’une DSP, que l'autorité exécutive pouvait commencer les discussions ou négociations avec plusieurs entreprises et ne les poursuivre qu'avec certaines ou un seul candidat "délégataire pressenti" (CE 21

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juin 2000, Syndicat intercommunal de la Côte d'Amour et de la Presqu'ile guérandaise, req. n° 209319). De même, l'autorité délégante peut demander aux candidats leur ultime meilleure proposition, qui peut modifier sensiblement l'offre initiale (CE 9 août 2006, Cie Gén. des eaux, req. n° 286107, 286108). Cependant, l'ultime meilleure proposition (B.A.F.O. : « best and final offer ») n'a pas la même portée dans une DSP que l'offre finale dans un CP. Dans le cadre d'une DSP, elle permet de désigner le "délégataire pressenti" et de négocier le contrat avec lui. Dans le cadre d'un CP, les offres finales "comprennent tous les éléments nécessaires à l'exécution du contrat ». Ensuite, la personne publique ne peut demander que "des clarifications, des précisions ou des compléments…. ainsi que la confirmation de certains des engagements, notamment financiers" (art. L. 1414-7 du CGCT). En outre, les offres finales "ne peuvent avoir pour effet de modifier les éléments fondamentaux de l'offre ou des caractéristiques essentielles du contrat" (art. L. 1414-7 du CGCT). Il ne reste alors qu'à finaliser le contrat de partenariat. Ainsi, le CP se situe dans une zone intermédiaire, entre les marchés publics et les DSP, quant aux modalités de sa passation. De manière plus générale, les PPP, compte tenu de leur complexité, bénéficient d'une certaine liberté de négociation et de règles plus souples de passation que les marchés publics. Cependant, la marge de liberté est difficile à déterminer, en raison du principe d'égalité entre candidats et donc de la nécessité, pour la personne publique, de ne pas modifier de manière substantielle les conditions initiales de la mise en concurrence. 7). Initiative privée Le contrat de partenariat peut être, officiellement, d'initiative privée. C'est une originalité dans le droit français des contrats administratifs. Suivant l'article L. 1414-11 du CGCT, la personne publique peut être saisie d'un projet par une entreprise ou un groupement d'entreprises, et elle peut lui donner suite en contrat de partenariat. La procédure de passation est alors la même : - étude d'évaluation préalable et décision de principe, - dialogue compétitif, ou appel d'offres en cas d'urgence. L'auteur du projet, à condition de ne se trouver dans aucun cas d'exclusion et de présenter des capacités techniques, professionnelles et financières suffisantes, est admis à participer au dialogue compétitif ou à l'appel d'offres. On peut légitimement s'interroger sur le respect de la propriété intellectuelle, artistique ou industrielle et le respect de l'égalité de traitement des candidats. Aucune indication particulière n'est fournie par les textes. C'est la procédure normale qui s'applique. Le dialogue compétitif peut paraître encore plus complexe dans cette hypothèse et, en premier lieu, l'étude d'évaluation préalable et la rédaction de l'avis d'appel public à la concurrence. Mais cette consécration de l'initiative privée à l'origine d'un projet public n'est pas inintéressante. Conclusion

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Les PPP sont une forme ancienne et renouvelée de contrats en France, qui ont permis et qui peuvent permettre :

� de recourir au financement privé ou mixte des équipements publics, � de faire appel au savoir-faire professionnel des entreprises, � d'associer les exigences du service public, dont est garante l'autorité publique, et

les impératifs de bonne gestion (pour ne pas dire de rentabilité) des entreprises privées.

Dans les années récentes, la France s'est laissé distancer par la Grande-Bretagne dans l'utilisation des PPP. Plus de 700 PPP ont été conclus en Grande-Bretagne depuis 1992, dans le cadre de la Private Finance Initiative (PFI), totalisant 60 milliards d'euros. 500 PPP ont été livrés dans des domaines variés (v. Moniteur des Travaux Publics, 22 décembre 2006, n° 5378, p. 10-11, interview du Président de la Mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques – MIQCP). Les PPP sont une voie entre le "tout public" et le "tout privé" : il ne s’agit pas d’une privatisation pure et simple des équipements et services publics. Les diverses catégories de marchés et de contrats et les différentes combinaisons possibles laissent une liberté certaine de choix aux autorités organisatrices pour faire face au développement, à la fois indispensable et coûteux, des transports publics locaux. Les contrats de partenariat se mettent en place dans plusieurs domaines, plutôt lentement. Une proposition de loi réformant le régime juridique et fiscal des partenariats public-privé a été récemment dépose par un député. Elle vise à assouplir la notion d'urgence, à mettre en œuvre une égalité fiscale entre toutes les procédures de la commande publique (exonération des contrats de partenariat et BEA de la taxe locale d'équipement, de la taxe pour le financement des conseils d'architecture d'urbanisme et d'environnement, de la taxe départementale des espaces naturels sensibles et de la taxe de publicité foncière). En outre, le texte prévoit de rendre les BEA éligibles au fond de compensation pour la TVA, et étend le dispositif en matière de cession de créances aux frais financiers. Enfin, le texte propose de transférer le contrôle de légalité des contrats de partenariat à la MAPP, ce qui soulève des difficultés en raison de la compétence des préfets, représentants de l'Etat.