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411 Adresse de correspondance : Florence Roussarie – 77 boulevard du Maréchal Joffre – 92340 Bourg-la-Reine – France [email protected] Rev Orthop Dento Faciale 2015;49:411-426 © Revue d’O.D.F. DOI: 10.1051/odf/2015034 Article original Article reçu : 01-07-2015. Accepté pour publication : 29-07-2015. Effet indésirable des fils de contention collés : le « syndrome du fil » : 1 ère partie Unwanted tooth movement produced by the bonded retention wires: the “wire syndrom”: first part F. Roussarie 1 , G. Douady 2 1 Orthodontiste – Spécialiste qualifiée, Pratique privée Bourg-la-Reine 2 Ingénieur informaticien RÉSUMÉ Des mouvements de torque excessifs sur des dents collées entre elles par une contention fixée intégrant un fil métallique sont observés dans un très petit pourcen- tage de cas. Ces cas, certes rares, sont dangereux pour la pérennité dentaire et parodontale. Il nous a semblé intéressant de les décrire précisément à la mandibule et au maxillaire pour pouvoir les identifier précoce- ment avant que les conséquences sur le parodonte ne deviennent irréversibles. Quelle attitude adopter en cas de découverte du « syndrome du fil » et comment l’éviter ? MOT-CLÉS Contention collée, syndrome du fil, récession gingivale, torque ABSTRACT Important individual tipping movements in a group of teeth which are bonded together by a metallic wire can be noticed in a very tiny percentage of patients. Although quite uncommon, these erratic movements are dangerous for both dental and periodontics healthiness. They are prone to generate severe gingival recessions. It appears to us that it would be interesting to precisely describe this phenomena on both jaws, thus enabling us to identify them early enough, before their consequences on the periodontics become irreversible. KEYWORDS Bonded retention, wire, gingival recession, torque Article disponible sur le site http://odf.edpsciences.org ou http://dx.doi.org/10.1051/odf/2015034

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Adresse de correspondance : Florence Roussarie – 77 boulevard du Maréchal Joffre – 92340 Bourg-la-Reine – [email protected]

Rev Orthop Dento Faciale 2015;49:411-426© Revue d’O.D.F.

DOI: 10.1051/odf/2015034Article original

Article reçu : 01-07-2015.Accepté pour publication : 29-07-2015.

Effet indésirable des fils de contention collés : le « syndrome du fil » : 1ère partieUnwanted tooth movement produced by the bonded retention wires: the “wire syndrom”: first part

F. Roussarie1, G. Douady2

1 Orthodontiste – Spécialiste qualifiée, Pratique privée Bourg-la-Reine

2 Ingénieur informaticien

RÉSUMÉ

Des mouvements de torque excessifs sur des dents collées entre elles par une contention fixée intégrant un fil métallique sont observés dans un très petit pourcen-tage de cas. Ces cas, certes rares, sont dangereux pour la pérennité dentaire et parodontale. Il nous a semblé intéressant de les décrire précisément à la mandibule et au maxillaire pour pouvoir les identifier précoce-ment avant que les conséquences sur le parodonte ne deviennent irréversibles. Quelle attitude adopter en cas de découverte du « syndrome du fil » et comment l’éviter ?

MOT-CLÉS

Contention collée, syndrome du fil, récession gingivale, torque

ABSTRACT

Important individual tipping movements in a group of teeth which are bonded together by a metallic wire can be noticed in a very tiny percentage of patients. Although quite uncommon, these erratic movements are dangerous for both dental and periodontics healthiness. They are prone to generate severe gingival recessions.

It appears to us that it would be interesting to precisely describe this phenomena on both jaws, thus enabling us to identify them early enough, before their consequences on the periodontics become irreversible.

KEYWORDS

Bonded retention, wire, gingival recession, torque

Article disponible sur le site http://odf.edpsciences.org ou http://dx.doi.org/10.1051/odf/2015034

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INTRODUCTION

Après un traitement d’orthodontie multi-attaches, il est indispensable de coller une contention fixe pour maintenir les rotations incisives et la distance inter- canines. Cette contention peut être fabriquée avec des fils métalliques simples, torsadés, tressés, des plaquettes individuelles ou des chaînettes flexibles en métal. Les plots de composites utilisés varient égale-ment dans leur composition, ce qui a une influence sur leur résistance à la rupture et à l’usure7.

La méthode de collage peut être directe ou indirecte2.

L’objet de cet article est de décrire le déplacement des canines et/ou des incisives alors que la contention reste parfaitement collée sur toutes les dents.

Nous avons réuni et travaillé sur 60 cas provenant de notre cabinet et de celui de confrères qui nous ont confié leur documentation photographique.

Nous appellerons ce phénomène, qui peut prendre différentes formes, le «  syndrome du fil  ». Il est depuis quelques années partiellement décrit dans la littérature sous le terme de « sévères complications »8, ou de « complications inattendues des fils de conten-tion  »4, mais à notre connaissance n’a jamais été expliqué ni décrit à l’arcade maxillaire.

L’identification de ce phénomène peut permettre d’éviter des complications parodontales graves qui sont parfois irréversibles. C’est pourquoi il nous a semblé essentiel de le décrire précisément pour pouvoir l’intercepter en déposant la contention. Après

la description de ce syndrome, nous proposerons une conduite à tenir lors du dépistage.Les cas étudiés ont été collés avec différentes tech-niques, soit de façon directe, en façonnant le fil sur les dents du patient, soit de façon indirecte avec prépa-ration du fil et des plots sur un moulage en plâtre ou en silicone6.Les fils sont multibrins, tressés, torsadés, ou consti-tués d’un simple brin lisse, et de différents diamètres.Le syndrome du fil touche, nous le verrons, tous les types de fils, quelle que soit la méthode de collage employée.Une étude mécanique portant sur le processus de ce phénomène est en cours et sera décrite dans une seconde partie.

OBSERVATION ET DESCRIPTION DES DIFFÉRENTS ASPECTS DU SYNDROME DU FIL

Ce phénomène a été principalement observé sur des contentions collées en fils ronds torsadés 3 ou 6 brins. Cependant nous pouvons montrer un phénomène très comparable sur des fils tressés ou des chaînettes à maillon plat et même sur des barres de contention de canine à canine en acier monobrin 0,032 inch.Le pourcentage d’apparition calculé dans une étude néerlandaise sur 221 cas observés à trois et cinq ans après la dépose des bagues est de 2,7 %8. Ce pour-centage faible est néanmoins préoccupant car la

Figure 1 : Syndrome du fi l entraînant des mouvements de version sur les deux canines. Le fi l est bien collé. Le mouvement observé ne peut être confondu avec une récidive. a : arcade mandibulaire avant traitement ; b : le jour de la pose du fi l de contention ; c : syndrome du fi l 4 années après le collage du fi l.

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plupart des patients portant ce type de contention sont hors surveillance.Les mouvements observés n’ont rien à voir avec les malpositions d’origine. Ce ne sont pas des récidives observées avec des fils cassés ou perdus mais bien de nouvelles malpositions malgré la présence de la contention restée parfaitement collée sur chacune des dents (fig. 1).

LE SYNDROME DU FIL À LA MANDIBULE

Sous sa forme la plus observée, les canines présentent un mouvement de version excessif et toujours inversé si les deux canines sont touchées (fig. 2 et 3). Le fil reste parfaitement collé sur chacune des dents.Concomitamment à ce mouvement de version des canines, les incisives sont projetées frontalement ce qui aboutit à un bout à bout occlusal et dans les cas de parodonte fin à une dénudation radiculaire (fig. 4).

Sur les 40 cas de « syndrome mandibulaire » que nous avons collectés, 29 d’entre eux présentent la canine droite en version corono-vestibulaire et 11 montrent

Figure 2 : a : Le fi l (torsadé 3 brins 0,0190 inch) est collé en 1998 ; b : syndrome du fi l 12 ans après. Les plots de composite sont usés mais le fi l est collé sur chacune des dents.

Figure 3 : Vue frontale du cas de la fi gure 2 ; les sens de version sont inversés sur les deux canines.

Figure 4 : a : L’incisive latérale et, dans une moindre mesure, la centrale sont en translation antérieure. L’ensemble du bloc incisif est projeté en avant comme en témoignent l’ouver-ture de l’espace canine-prémolaire et le bout à bout incisif ; b  : la canine droite présente une version radiculo-linguale marquée.

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Figure 5 : Collection de 6 cas distincts de syndrome du fi l dans lesquels les versions canines excessives sont inversées à droite ou à gauche.

une version corono-linguale de la canine gauche (fig. 5).Parfois, les versions canines bien qu’anormales sont peu marquées et c’est une incisive centrale qui présente une très forte version radiculo-vestibulaire (fig. 6) ou corono-vestibulaire (fig. 7).

Dans certains cas, les milieux interincisifs ne sont plus alignés, les incisives présentant alors un axe incliné du côté de la canine qui est en version corono- vestibulaire (fig. 8).

Figure 6 : Version anormale de l’incisive centrale droite provoquant une très forte dénudation. On constate également la version corono-vestibulaire de la canine droite et corono- linguale de la canine gauche. (Copyright Dr D. Wiechmann)

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Figure 7 : Version corono-vestibulaire excessive de l’incisive centrale droite associée à une position antérieure de toutes les dents du groupe et des versions inversées des canines.

Figure 8 : a : Déviation des points milieux et version disto-vestibulaire du groupe incisivo-canin vers la droite ; b : déviation inverse vers la gauche avec des conséquences parodontales sur 32 et 33 qui sortent frontalement de l’os alvéolaire.

Figure 9 : a : Cliché panoramique de contrôle après la dépose de l’appareil ; b : cliché panoramique 4 ans après la pose du fi l de contention, la racine de la canine gauche sort du champ radiologique.

Aspect radiologique des versions canines excessivesSur la radio panoramique de contrôle, les racines des dents ayant une version excessive semblent dispa-

raître. En réalité, elles sortent du champ de coupe du cliché (fig. 9).

Il est intéressant d’utiliser des outils radiographiques plus modernes, en l’occurrence le cliché type cone

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beam (CBCT), pour mieux appréhender la situa-tion des racines des dents en très forte malposition (fig. 10).

Après retraitement, les racines vont pouvoir rentrer à nouveau dans la corticale. Dans son article, Pazera8 présente un cas clinique documenté atteint d’un « syndrome du fil » où la version de la canine est de plus de 35 degrés et son recentrage dans la corticale, après retraitement, visualisé par un cliché CBCT4. Au contraire dans son article M. Farrel3 sur un cas semblable montre sur des clichés CBCT successifs

qu’il n’a pas été possible de recentrer la racine dans la corticale.Il n’y a pas encore d’étude sur l’homme prouvant qu’il est possible de rentrer la racine dans la corticale de façon constante. Ces études ont été conduites sur les animaux12 avec des résultats positifs, mais nous savons qu’il n’est pas toujours possible de transférer ceux-ci à l’homme11.Nous pouvons parfaitement constater le recentrage des racines sur une simple radiographie panoramique (fig. 11).

Figure 10 : Sur ce cas très marqué (13 ans après dépose de l’appareil), nous avons prescrit un cliché cone beam. La racine de la canine mandibulaire gauche sort très nettement de la corticale (coupes 9 à 11).

Figure 11 : Cas de la fi gure 9 avant (a) et après retraitement (b). La version de la racine de la 33 est corrigée non sans avoir subi une résorption modérée.

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Les cas présentés ci-dessus sont extrêmes et corres-pondent à des intervalles de temps entre la pose du fil et le dépistage du syndrome qui sont de l’ordre de 4 à 13 ans.Bien entendu, lorsque le syndrome est dépisté plus tôt, les effets en sont moins spectaculaires (fig. 12).Le but de cet article est précisément de permettre aux praticiens de dépister le syndrome dans les deux ans qui suivent la pose du fil collé, de façon à déposer cette contention devenue toxique, dans le temps où il est encore d’usage de revoir le patient.Si nous repérons le phénomène suffisamment tôt après le collage du fil, les effets en seront plus modérés et le retour à la normale plus simple.

LE SYNDROME DU FIL AU MAXILLAIRE

Les contentions collées sont moins employées au maxillaire car elles sont souvent difficiles à régler

en occlusion. Une supraclusie résiduelle est à l’ori-gine d’interférences entre le fil et les bords libres des incisives mandibulaires. Cette difficulté est souvent contournée par le collage des quatre inci-sives seulement. On les trouve sous forme de « 2-2 ». Le syndrome du fil touche également ce type de fil lorsqu’il est posé au maxillaire.

Pour l’instant, à notre connaissance, ces effets indési-rables de la contention fixe n’ont jamais été décrits à l’arcade maxillaire.

Nous avons collecté beaucoup moins de cas au maxil-laire qu’à la mandibule (20 sur 60), ceci étant proba-blement dû au fait que la contention fixe y est moins répandue. Sur l’ensemble des cas, seuls deux d’entre eux concernent les canines car beaucoup de ces fils ne prennent pas les canines en charge.

Le syndrome du fil au maxillaire avec l’effet observé sur une canine (fig. 13)Quand le syndrome touche une dent maxillaire, l’im-pact négatif sur le sourire est immédiat et conduit

Figure 12 : Le syndrome est dépisté 19 mois après la pose de la contention. Les effets sont modérés, le retour à la normale sera rapide et simple.

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le patient à consulter beaucoup plus rapidement (fig. 14).

Nous avons collecté davantage de cas dans les contentions collées d’incisive latérale à incisive latérale dites « 2-2 ».

Une des deux incisives latérales s’incline en version corono-vestibulaire malgré un collage du fil resté stable (fig. 15).

En principe, l’effet inesthétique sur le sourire conduit le patient à consulter rapidement.

Figure 13 : La canine droite présente une version corono- vestibulaire marquée. Le fi l est encore collé sur toutes les dents.

Figure 14  : Fil collé de 13 à 23 avec un mouvement coro-no-vestibulaire de la 13. L’effet sur le sourire conduit la patiente à consulter au plus vite.

Figure 15 : a et b : Fil collé le jour de la dépose des attaches. c et d : Syndrome du fi l maxillaire touchant la 12. Le fi l est collé et la couronne part en version corono-vestibulaire.

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LE SYNDROME DU FIL AVEC DES FILS NON TORSADÉS

Nous pouvons trouver des images de syndrome du fil avec un fil de section 0,036 inch monobrin collé

uniquement sur les canines par l’intermédiaire de plaquettes similaires à la base d’une attache. Ces images sont rares mais témoignent tout de même de la possibilité d’apparition d’un tel phénomène sans mise en œuvre d’un fil torsadé (fig. 16 et 17).

Figure 16 : Mouvement de translation du bloc canin reproduisant le même mouvement qu’avec les fi ls torsadés. Le mouvement semble se faire en translation sans effet de version. (Copyright « Le May orthodontics ».) a : Arc de contention (0,036 inch) collé seulement sur les canines après dépose de l’appareil ; b : syndrome du fi l avec ouverture d’un espace et translation vers l’avant des 32 et 33 ; c : après retraitement.

Figure 17 : a : Arc de contention juste après la dépose de l’appareil ; b : identifi cation du syndrome du fi l. (Copyright « Le May orthodontics ».)

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Nous observons également un exemple de syndrome du fil apparaissant avec la mise en œuvre d’une chaînette tressée plate de type Orthoflex (fig. 18).Ce phénomène peut donc être dépisté non seule-ment sur les fils torsadés mais aussi sur des fils tressés, à maille plate et même sur les contentions monobrin de canine à canine, non collées sur les incisives.

CONDUITE À TENIR

Lorsque ce phénomène est constaté, il est indispen-sable de déposer le système de contention fixe le plus rapidement possible.Nous constatons que le patient ressent volontiers les mouvements dentaires même les plus minimes. L’examen clinique et surtout l’anamnèse sont très importants pour dépister ce phénomène.Une « tension » est nettement perçue par le patient et un soulagement est ressenti lors de la dépose du fil.Il peut être intéressant d’attendre entre six mois et un an avant de reprendre le traitement pour corriger

les malpositions. Dans certains cas, la « récidive » est importante et permet de diminuer la durée de reprise de traitement (fig. 19).

Dans certain cas, le retour à la normale est spectacu-laire (fig. 20).

Néanmoins deux précautions doivent accompagner la dépose du fil : – beaucoup de patients reconnaissent « jouer avec

le fil » avec leur langue. Il nous faut alors vérifier que la position de la langue au repos et lors de la déglutition est correcte et prescrire une rééduca-tion en cas de doute. Des conseils comportemen-taux sont indispensables ;

– les parafonctions telles que l’onychophagie ont été mises en avant et participent à l’explication de ce phénomène pour certains auteurs1. Aucune expli-cation purement mécanique ne peut confirmer cette hypothèse.

Pour éviter le retour trop rapide des rotations durant la période de surveillance, il peut être indiqué d’ef-fectuer une légère réduction amélaire proximale sur les dents si elles sont très serrées.

Figure 18 : Syndrome du fi l débutant (9 mois après la dépose de l’appareil), la canine droite s’incline en version corono- vestibulaire. Le système utilisé est un fi l tressé plat du type « Ortho Flex Tech ».

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07/2008 07/2009

Figure 19 : Découverte du syndrome du fi l, dépose et correction partielle spontanée en 1 an.

06/2012 09/2012

Figure 20 : a : Le bloc incisif se déplace en avant et à droite entraînant une déviation des milieux et un bout à bout incisif ; b : 3 mois après la dépose du fi l, sans retraitement : le repositionnement du bloc incisivo-canin est spontané.

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Si le mouvement est simple, une correction avec une simple gouttière est possible (fig. 21).

Après une période de surveillance et si aucune amélio-ration spontanée est constatée, alors un traitement

Figure 21 : a : Fin de traitement 2006 ; b : découverte du syndrome du fi l en mars 2012 ; c : correction de la version de 12 avec une gouttière thermoformée et pose d’un nouveau fi l 0,0215 inch 6 brins en novembre 2012 ; d : contrôle de stabilité en avril 2014.

Figure 22 : Reprise de traitement au maxillaire uniquement en technique linguale (appareil « Win »). Une réduction amélaire bien calculée permet de corriger l’alignement des milieux et de replacer l’incisive latérale.

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fixe doit être repris pour corriger les versions (fig. 22 et 23).Quand la récession est très importante comme dans le cas de la figure 6, il est préférable de reprendre le traitement dès la dépose du fil (fig. 24).

Si le patient refuse la reprise de traitement, le fil doit tout de même être déposé. Dans le cas contraire, nous risquons d’assister à une aggravation certaine et nette dont nous pourrions être tenus pour respon-sables. Dans son article, Bonetti1 présente un cas à

Figure 23 : Sourire avant et après la reprise de traitement uniquement à l’arcade maxillaire.

Figure 24 : Reprise du traitement pour effectuer la correction de la version aberrante de 41 et 31 ; a : découverte du syndrome du fi l ; b : dépose du fi l et reprise immédiate du traitement (appareil « Win ») ; c : durée de traitement 9 mois ; c : collage d’un nouveau fi l 0,0175 inch 6 brins de 34 à 44. (Copyright Dirk Wiechman)

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4 ans puis à 5 ans après le traitement. Nous observons un syndrome du fil entraînant une récession gingivale marquée. Dans un premier temps, le patient refu-sant le traitement, le fil avait été laissé en place avec comme conséquence une aggravation spectaculaire de la récession gingivale.

CONSÉQUENCES PARODONTALES DU SYNDROME DU FIL ET CONDUITE À TENIR

Les mouvements de torque et de translation provoquent des amincissements alvéolaires et, dans les configurations de parodonte fin, nous observons des dénudations radiculaires (fig. 25).

Nous devons identifier le syndrome pour déposer le fil avant toute intervention parodontale. La chirurgie parodontale sera sans effet si le phénomène qui est évolutif continue à propulser la racine hors de l’os alvéolaire.

Inversement, une chirurgie parodontale précoce dès la dépose du fil « toxique » est sans objet, car une amélioration spontanée est toujours observée même sans reprise de traitement.

Il nous faudra ensuite replacer la dent au mieux dans son os avec un appareillage orthodontique pour ensuite intervenir sur la lésion restante (fig. 26).Quand la lésion parodontale est trop marquée, le trai-tement doit être repris immédiatement. Une greffe parodontale en fin de traitement sera alors prescrite (fig. 27).Si le patient refuse la reprise de traitement, il est indis-pensable de déposer le fil de contention, pour éviter de voir la lésion s’aggraver5. Le patient craignant souvent l’apparition d’une récidive orthodontique doit être informé.

CONCLUSION

La connaissance des différentes formes permet qu’aucun syndrome du fil ne puisse passer inaperçu lors d’un rendez-vous de contrôle. Ce phénomène peut être à l’origine de graves lésions parodontales. Le dispositif doit être déposé immédiatement et les dents faire l’objet d’une période de surveillance. Un retraitement est le plus souvent nécessaire.Le pourcentage d’apparition reste extrêmement faible mais le ressenti tant du point de vue du patient que de celui du praticien est très négatif.

Figure 25 : a : Fin de traitement ; b : fi l de contention de 33 à 43 ; c : apparition du syndrome du fi l avec des récessions importantes sur 31 et 41. La canine maxillaire droite présente une version corono-linguale ; d : un espace s’est ouvert entre 42 et 43.

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Figure 26 : a : Fin de traitement ; b : 4 années après la dépose de l’appareil, syndrome du fi l avec récession gingivale marquée sur la 32 ; c : 9 mois après la dépose du fi l de contention. La dent se recentre et la lésion commence à se réparer. Le traitement va pouvoir être repris.

Figure 27 : Même patient que sur fi gure 6. a : Syndrome du fi l. La racine de 41 sort dans le vestibule et la dent présente une version radiculo-vestibulaire marquée ; b : le fi l est déposé et le traitement repris immédiatement. Correction partielle naturelle de la récession en cours de traitement ; c : fi n du traitement et lésion résiduelle ; d : 15 jours après la greffe épithélio-conjonctive. (Copyright Dr D. Wiechmann, traitement parodontal Dr. Axel Berens)

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Il est important d’informer le patient du fait qu’un fil de contention n’est pas un élément neutre et qu’une surveillance au moins bisannuelle après les deux premières années s’impose ; que tout mouve-ment anormal dépisté peut être évolutif et mérite une consultation. Nous sommes tous concernés par ce phénomène même si le fil collé n’est pas notre choix personnel de type de contention. Ce syndrome étant généralement dépisté par le patient plusieurs années après le collage du fil, le praticien consulté n’est souvent plus le praticien traitant. Enfin il serait souhaitable que nos confrères omnipraticiens soient également formés à reconnaître ce type de mouve-ment pour pouvoir prendre l’initiative de déposer le fil ou de renvoyer le patient chez l’orthodontiste traitant. Une étude tant sur les causes probables du syndrome que sur le processus mécanique aboutis-sant à ces versions excessives est en cours et sera publiée prochainement.

REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier chaleureusement les confrères français, allemands et canadiens qui nous ont fait la confiance de nous adresser leur documen-tation photographique.

Note  : Cette étude étant toujours en cours, nous serions très heureux si nos lecteurs acceptaient d’y participer en nous adressant leurs cas de syndrome du fil.

Conflit d’intérêtLes auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêt.

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