Éditorial - APFM · Découverte de la méthode O Passo Atelier animé par Jérôme VIOLLET...

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Éditorial

Chers adhérents,

Voici la page blanche qui se profile …Voici le moment venu de vous présenter ce bulletin.Il est le vôtre : fruit d’un travail d’équipe, mené par Anne et Pierre, à l’image de notre métier. Je les vois,

pendant le congrès, aller à droite et à gauche vous demander votre collaboration afin de recueillir tous cestémoignages, ces compte-rendus, ces exposés.

Je les imagine ensuite, devant leur ordinateur, vous envoyer des messages afin de vous rappeler vosengagements… pour vous offrir enfin ce bulletin qui rappellera aux membres présents à Montpellier les momentsforts, tant artistiquement que pédagogiquement, de ces 3 jours.

Un grand merci à Patrick Pouget, directeur du CRR de Montpellier, et à toute son équipe de professeurs deFormation Musicale, qui nous ont préparé un congrès passionnant à tous points de vue, nous ont consacré leurtemps, partagé avec nous des moments de travail et de détente, et ce toujours avec compétence et gentillesse.

Des mots ou expressions glanés ici et là : musique, oralité, musiques actuelles, phrase musicale, musiquetraditionnelle, mémorisation, développer l’écoute, “pieds, mains, voix”, oreille, écoute harmonique , musiqueminimaliste, plaisir, prendre le temps, découverte, ouverture, … mais aussi compétence, passion, partage deconnaissances, bienveillance, énergie, enthousiasme, engagement : toutes ces expressions ont résonné pendant lecongrès.

Un grand merci à tous ceux qui ont partagé leurs compétences pendant ces trois jours.La page blanche se noircit peu à peu, et je ne peux la terminer sans remercier en votre nom à tous, les

membres du Conseil d’Administration et principalement ceux du bureau, avec qui j’ai un grand plaisir à travaillerau quotidien, dans un respect mutuel, à l’image de notre métier.

L’APFM vous souhaite une bonne lecture de ce bulletin, et malgré le changement de dates du congrès aumois de novembre prochain, j’espère vous retrouver nombreux au Conservatoire de Vanves

Sincères amitiés

Chantal Boulay Présidente de l’APFM

(CRR de Tours)

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Sommaire

Éditorial Chantal BOULAY 1

AteliersApproche didactique de rythmes flamencos Corinne FRAYSSINET-SAVY 3Découverte de la méthode O Passo Jérôme VIOLLET 5Éveil de l’écoute et de la voix des enfants de 5-6 ans Caroline GAULON 7Influence des musiques du monde sur l’enseignement

et la pratique de l’improvisation Serge LAZAREVITCH 68L’écoute collective et le travail polyphonique à traversle répertoire traditionnel d’Europe du Nord" Caroline COMOLA 11L’intonation Luc MARTY 15La musique électroacoustique Christophe De COUDENHOVE 19La musique minimaliste en cours de FM Mikaël LE PADAN 23La musique traditionnelle occitane Alain CHARRIÉ 31Musiques actuelles Laurent ELBAZ 34Tapkapella (percussions corporelles et chant a capella) Matthieu EYMARD 37

Table rondeLes actualités du milieu artistique Mikaël LE PADAN, Brice MONTAGNOUX,

Patrick POUGET, Philippe RIBOURG 39

ConférencesL’enseignement musical à l’époque baroque Jean SAINT-ARROMAN 42Le manuscrit de Montpellier (BIU Médecine, H 196)

et la polyphonie parisienne du XIIIe siècle Gisèle CLÉMENT 47Programmation lyrique et symphonique à l’Opéra – Comédie Sabine TEULON-LARDIC 51

Échanges pédagogiques Faire évoluer musicalement les épreuves de fin de cycle 55Évaluations : quels types ? 57FM adulte – FM chanteur 60L’instrument en cours de FM : similitudes et différences avec la pratique collective 63La tablette dans le cours FM 65

Cours public Serge LAZAREVITCH 73

ConcertsConcert-cinéma : Travail des classes de FM 76Passe ton Bach d’abord ! Philippe BRAQUART et Alain CAHAGNE 77Visite musicale des manuscrits du XIe et XIIe siècles... Gisèle CLÉMENT et Ensemble Hortus Deliciarum 79… et retours d’expérience Catherine MÉCHAIN, Véronique SANCHEZ, Luc MARTY 80

VisitesL’Opéra Comédie 82Le musée Fabre 83

Synthèse du congrès Élodie CORLAY-BOSQUET 85

Liste des participants 86

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Approche didactique de rythmes flamencosAtelier animé par Corinne Frayssinet-Savy,

ethnomusicologue, enseignante et chercheuseEt Céline Rouvière (“Chely la Torito”),

danseuse flamenca.

I. Origine du terme “flamenco”Ce terme a de nombreuses significations. Il désigne notamment celui qui est originaire des Flandres, mais

également des couteaux de Flandres, dits flamenco. Par extension, il nommerait des mercenaires issus des Terciosrappelés des Flandres et postés en Basse Andalousie (Séville, puis Cadix) au cours du XVII e siècle et surtout audébut du XVIIIe siècle. La dissolution des Tercios marginalise ces soldats se payant d’exactions. Leur situationmarginale vient grossir les rangs de populations errantes, parmi lesquelles se trouvaient des familles gitanesfuyant les lois promulguées à leur encontre.

Ce terme “fourre-tout” (qui met en scène des enjeux identitaires) renvoie à tout un imaginaire, évoquanttour à tour des andalous gitanisés, le churro (crâneur), les prostituées …

Dans le parler andalou, ce terme signifie “gitan” pour tous les Gitans des provinces de Séville et de Cadix enBasse Andalousie. Plusieurs auteurs et chercheurs en attestent dont Bernard LEBLON et Pedro PEÑA. L’origine decette synonymie reposerait sur un épisode de l’histoire des Gitans d’Andalousie. Certains d’entre eux se sontenrôlés dans l’armée du roi d’Espagne en Flandres. En remerciement des services rendus, celui-ci leur accorde desprivilèges afin d’échapper aux lois en vigueur contre les populations gitanes nomadisant en Espagne. Ces Gitansaux statuts particuliers, revenus en Andalousie, sont appelés les Gitans des Flandres, puis très vite surnommés“Flamencos” (Flamand = flamenco).

II. Développement du flamencoCet art s’est développé dans un premier temps au sein d’un triangle situé en Basse Andalousie :

Séville−Cadiz−Jerez.La danse y est capitale, c’est elle qui a sous-tendu l’évolution de la musique, essentiellement sur le plan de la

pratique professionnelle.Le flamenco s’est élaboré, d’une part, au sein de la cellule familiale gitane. Il se nourrit, d’autre part, de

rencontres entre danseurs et musiciens notamment à Séville dans des écoles dites “Académies de danses” où l’onpratiquait des danses boleras – danses de pays stylisées notamment à partir du modèle de l’école de danseclassique française. Dans ces académies sévillanes, on faisait venir des danseuses gitanes pour y animer lesdémonstrations de danses publiques avec leurs palmas (frappes de mains) et leur jaleo (interjections etexclamations animant les interprètes, voire se mêlant à la complexité rythmique des percussions des mains). Cesacadémies de danse deviennent ainsi un vecteur de diffusion d’un art nouveau.

III. Les différents genres de flamenco:On trouve quatre grandes sources de musique flamenca à valeur de forme qui constituent chacune un

répertoire très important et varié de styles. Ces sources sont :• la seguiriya• la soleá• le tango (réappropriation du tango cubain)• le fandango

Les deux intervenantes ont abordé les styles suivants :

a) La soleá (pluriel = soleares)Son cycle rythmique (compás) est sur 12 temps, avec un tempo assez lent.Le cycle se divise de la façon suivante:

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Les musiciens vont bien entendu “s’amuser” à décaler les appuis (toutes les noires sont effectuées auxmains, avec des accents communs aux mains et au pied).

Le flamenco fait appel à différents types de percussions effectuées par les pieds ou par les mains ( palmassecas, effectuées avec une main à plat – celle qui tape –, palmas sordas effectuées avec les mains creuses).

Les danseurs ne tapent pas tous les temps, bien sûr, et vont être à l’initiative de nouvelles propositionsd’appuis (en décalage).

b) La buleríaC’est un genre particulièrement rapide et virtuose, avec un cycle rythmique qui conserve les mêmes appuis

que ce que l’on a vu précédemment (temps 3, 6, 8, 10, 12), mais dont le cycle commence sur le 12 ème temps.12 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11

c) La seguiriyaDe tempo plutôt modéré, son cycle rythmique débute sur le 8 ème temps, tout en conservant les appuis sur les

temps 10, 12, 3, 6, et bien sûr 8. Souvent, on ne frappe plus que les accents et pas tous les temps.

d) Variantes concernant le cycle rythmique sur 12 temps dans le cadre des bulerías pour accompagner uneséquence de danse dite pata por bulerías :

• on y utilise le medio compás (la moitié du cycle de 12 temps type soleá) lors de la salida (introduction), oulors des figures de transition (celle du recoger)

• la clé rythmique est comparable au battement du cœur : 12 1 2 3 4 5 (on frappe les temps non accentués)• lors des fêtes, les participants superposent des motifs rythmiques, et ce, de manière très libre :

Les cellules rythmiques se mêlent, pour le plaisir de tous, permettant à chacun de participer, selon sesfacultés.

Cette musique de tradition orale constitue un excellent matériau pédagogique pour le travail rythmique(mais aussi des modes), avec un côté ludique, puisque cela implique tout le corps, avec des percussions des mains,des pieds.

Un des modes d’apprentissage des cycles rythmiques utilisé dans les familles gitanes est sûrementintéressant à expérimenter en classe : il consiste à faire travailler temps/contretemps en binôme, avec unepersonne frappant les temps avec les mains positionnées le pouce vers le haut, et une autre personne frappant lescontretemps avec le dos des mains parallèle au sol (comme la mâchoire d’un crocodile), les frappements de mainsse croisant (utilisable aussi pour les appuis dans les cycles rythmiques).

Cet atelier, dont le contenu était très riche, ne manquera pas de susciter la curiosité musicale de ceux quil’ont suivi… Karine BRUZY

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Découverte de la méthode O PassoAtelier animé par Jérôme VIOLLET

PréambuleO Passo est une méthode d’éducation musicale créée par Lucas CIAVATTA, musicien et formateur

brésilien, aujourd’hui utilisée aussi bien au Brésil qu’en Europe et en Amérique du Nord. Il s’agit d’untravail sur les bases du rythme et du son, construit à partir de la culture musicale brésilienne maisfacilement transposable à tout type de langage musical.

Compréhension musicale au corpsDans le travail avec O Passo, le corps n’est plus considéré seulement comme quelque chose qui

accompagne de loin les processus cognitifs réalisés par l’esprit, mais principalement comme une unitéautonome de construction de la connaissance.

Au conservatoire de Besançon, la méthode “O Passo” est utilisée en FM en 1er cycle. Cette méthodeest très riche : dès la maternelle avec le “Pré-Passo”, on apprend à marcher ensemble, mais cetteméthode est également adaptable pour les déficients.

Avec O Passo, nous travaillons avec la notation graphique, (la notation graphique, mais égalementavec la notation corporelle).

Pulsation − Le pas marque le tempsPour travailler cette feuille (cf. ci-dessous), il est nécessaire de savoir faire le mouvement du pas à

quatre temps. Consultez : https://www.youtube.com/watch?v=PJb_vzqncCgLa qualité du mouvement est fondamentale. La feuille sans le pas perd de son utilité.

O Passo à 4 temps binaire – sans plier les jambes • Exercice de préparation pour la Feuille des Numéros (extrait de la méthode)

1. Faire le pas et dire plusieurs fois le 1 (quand le pied fort va en avant)2. Faire le pas et dire plusieurs fois le 3 (quand le pied fort va en arrière)3. Faire le pas et dire plusieurs fois le 2 (quand le pied faible va en avant) 4. Faire le pas et dire plusieurs fois le 4 (quand le pied faible va en arrière) 5. Faire le pas et dire une fois le 1, une fois le 3, une fois le 2 et une fois le 4.

Répétez le cycle de quatre mesures jusqu’à ce que cela devienne fluide.

Attention, ne dites à haute voix et ne frappez avec les mains que ce qui se trouve en dehors desparenthèses.

Comment diviser le temps : Le Mouvement du e (à 4 temps binaire, en pliant les jambes)https://www.youtube.com/watch?v=4afKT79L03w

Gisèle BÉGUIN

Sitographiehttps://www.facebook.com/O-Passo-Musique-et-%C3%89ducation-867143400042083/timeline/http://www.opasso.com.br/http://www.combinacion-perfecta.com

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DOCUMENTS

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Exercices (A à D) sur une comptine avec la battue

pied plus la frappe Quatre groupes : (le 1 se déplace)

Montrer l’importance de connaitre sapartition (mélodie) et d’êtreautonome.Exercices en binôme

1. Dans le E, un des deux doit frapperplusieurs fois la première phrase (le 1et le 3), pendant que l’autre frappe ladeuxième (le 2 et le 4).

2. Dans le F, celui ou celle qui a frappé lapremière phrase du E doit maintenantfrapper la deuxième (le 2), pendant quel’autre, qui a frappé la deuxième du E,doit maintenant frapper la première (le1, le 3 et le 4).

3. Le binôme doit faire deux fois le E(chacun sa phrase) et alternerplusieurs fois avec le F jusqu’à ce quecela devienne familier.

4. puis décliner ad libitum

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Éveil de l’écoute et de la voixdes enfants de 5-6 anspar Caroline SEMONT-GAULON

chef de chœur, professeur de Direction et dumiste

Tour de table des problèmes particuliersLes personnes présentes sont intéressées par :

1. les problématiques de la voix et son placement 2. ce que l’on peut attendre anatomiquement d’un enfant de 5-6 ans3. le lien entre la FM et l’instrument voix4. une recherche de répertoire pour enfants5. l’éveil des enfants de 3 ans et demi jusqu’à 5 ans qui n’osent pas chanter.

Dans le déroulement prévu de cet atelier, les réponses aux questions que se posent l’ensemble desparticipants devraient être abordées.

Réveil musculaire➢ étirements ➢ tapoter sur le corps➢ bouger la langue dans sa bouche➢ faire la brouette brr en sirène ascendante et descendante➢ puis quelques exercices sur brr, vi-o ou va-a

Sur va-a accompagner d’un geste devant soi, la tenue du son.Respecter la “position chanteur” assis avec une jambe un peu en avant, mais avec les enfants on

peut bouger et varier les positions : assis/debout/en mouvement.

Signor abate BEETHOVEN (répertoire adulte)

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Apprentissage par mémorisation : la construction de l’apprentissage est primordial pour unebonne mémorisation.

1. Découpage musical en phrases pas trop longues2. Toujours répéter plusieurs fois la même phrase (2 ou 3 fois au moins), afin qu’elle s’ancre

dans la mémoire à long terme.3. Phrase A, puis apprentissage phrase B, puis enchaînements A-B : ce sont en effet le plus

souvent les enchaînements qui sont difficiles à retenir, car on oublie de les travailler.4. Bien faire la différence entre ce que restitue le groupe, qui est rapidement présentable, et la

véritable mémoire individuelle des enfants.5. Varier les façons de répéter, en jouant sur les émotions, les intentions musicales, les gestes,

afin que le chanteur ne s’ennuie pas et garde son attention éveillée : c’est tout l’art de lapédagogie.

Avec les petits, certains problèmes se posent, par exemple, en maternelle, celui des enfants qui neparlent pas français et donc qui vont avoir plus de mal que les autres : prendre le temps !!!

Il est aussi possible et très utile d’utiliser l’apprentissage par imprégnation : l’enseignant chanteplusieurs fois la chanson, en donnant systématiquement des consignes d’écoute différentes à chaquefois. Il peut ainsi attirer l’attention sur le texte, sur un mot, un intervalle, un caractère, etc...

Les consignes peuvent consister en écoute uniquement, ou en des gestes sur tel ou tel mot, ouencore en déplacements, etc...

Afin que les déplacements de groupe se passent bien, il est très utile également de préparer celadès le début d’année par de petits exercices :

➢ Le déplacement doit se faire sans bruit ➢ On doit suivre chacun son chemin➢ On ne doit pas se toucher ➢ L’espace de déplacement est bien délimité.

On peut aussi demander aux enfants d’inventer des gestes pendant l’écoute, si la chanson s’yprête, et on choisira avec eux ensuite un geste commun qui correspond bien, tant au niveau vocal que dusens de la phrase.

Après ces exercices, il y a un mieux dans la mémorisation du chant , il reste quelquesenchaînements à travailler, les débuts de phrases ne doivent pas être oubliés, c’est souvent là que lesenfants hésitent.

Quand le groupe récapitule la chanson, l’enseignant peut toujours dire à haute voix, en avance, lespremiers mots de la phrase suivante ; cela soutient la mémorisation de l’enchaînement.

A - B - C - D A + B puis C + D puis AB + CD……

Règles importantes à appliquer La règle d’or dont l’enseignant doit avoir conscience, est que l’enfant ne peut répéter correctement

que s’il a bien perçu tous les détails. Pour cela, il faut être bien conscient des difficultés du chant, et parexemple, travailler plus lentement sur un passage avec un intervalle délicat, ou parler le texte s’il est enlangue étrangère, etc.

Si les enfants reproduisent avec des erreurs, c’est qu’ils n’ont pas perçu parfaitement. Il est doncnécessaire de répéter et de ralentir, puis de reprendre le tempo.

Pour le texte italien, il faut bien entendu faire attention au texte, mais en français avec les petits ilfaut également être vigilant, car ils ne perçoivent pas toujours tous les mots correctement.

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Il faut éviter de parler le texte, sauf s’il y a une grosse difficulté. Par exemple “le hérisson de monjardin chasse les mouches et mâche le jasmin”.

En effet, scander le texte ne servira pas la mémoire et abîmera le phrasé. Il faut donc garder cela pour les casoù le texte est particulièrement difficile.

Une chanson gestuée sera beaucoup plus vite apprise si l’on met les gestes dès l’apprentissage. Ainsi, laphrase gestuée et chantée n’est qu’un seul et même élément pour la mémoire.

Plus on connaît à l’avance ce qui est à faire, plus on anticipe dans l’apprentissage, donc il vaut mieux éviterde trop compartimenter et séparer les difficultés. Garder cela pour les “vraies” difficultés.

De la même manière, il faut éviter de travailler la mélodie sans le texte, sauf si cela gêne dans l’écoute d’unpoint précis (un intervalle par exemple), mais très vite on remet tout ensemble.

Moins on compartimente, plus c’est facile pour la mémoire.Ne pas oublier que ce qui est très important pour les petits, c’est le geste et le rapport au corps.

Par rapport à la voixQuelle est la tessiture dans laquelle les petits chantent le mieux ?Actuellement, on rencontre de plus en plus de voix abîmées chez les enfants.Les 3 ans chantent naturellement dans le registre de voix parlée, certains vont passer au-dessus du

“la” en registre léger tout seul, d’autres ont du mal.

Que fait-on dans ce cas : il faut développer la voix aigüe, avec des sirènes sur ou par exemple, maisattention, il faut rechercher des résonances et les emmener dans une tessiture où ils ne peuvent pasfaire autrement que chanter en voix “chantée” (registre de tête, voix de chanteur…).

Il faut partir de ce registre et revenir petit à petit vers le grave.

On joue avec la voix parlée dans l’aigu. Par ex. : Bonjour Caroline (accent chic...)Chercher cette sensation en chantant moins fort, leur faire chercher leur voix de “chanteur” et

travailler dans ce registre.

Ce qui peut poser un problème, c’est si nous même n’avons pas la voix pour chanter ce registre. Ilsera donc difficile de leur montrer l’exemple ; dans ce cas utiliser la flûte à coulisse, ou un enfant“traducteur” qui aura compris, et qui chantera le modèle (un très bon outil !)

On peut rencontrer un problème avec les voix d’hommes qui font chanter, à cause de la tessitureréelle.

À partir du CE 1, on peut faire chanter individuellement sans souci.On développe plus l’écoute des enfants à partir du moment où ils ont développé leur voix aigüe.On a tout à gagner à les placer sur l’aigu. Par ex. : chanter Une souris verte dans l’aigu et la

transposer beaucoup. Avec une voix abîmée ou qui n’arrive pas à se placer, il y a un travail individuel à faire, les enfants

ont besoin de s’entendre seul pour se corriger, certains problèmes disparaissent seuls, c’est à nous devoir ce qui gêne en individuel (forçage vocal, voix abîmée, imitation de la voix d’un parent) ou voir avecles parents.

Il serait utile d’avoir un carnet d’adresses de spécialistes de la voix (phoniatres et orthophonistesspécialisés dans la voix).

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Parmi les chants distribués :

Roulez petits trains : travail de l’antécédent et du conséquent

La chanson de Queunotte : la 2e phrase est difficile, donc il faut la travailler avec unaccompagnement.

Pour développer la justesse chez les enfants il est important d’harmoniser en accompagnant, sinoncela leur demande beaucoup plus de temps pour chanter juste.

La tessiture difficile est de partir du grave et d’aller vers l’aigu, il vaut mieuxtravailler en descendant de l’aigu vers le grave.

La meilleure tessiture est grosso modo au départ :

Si la tessiture du chant n’est pas bonne il faut transposer, certains enfants réussissent tout de suiteà placer leurs voix mais la majorité doit être aidée.

En vocalises, avec les petits, il faut partir de l’aigu et descendre plutôt que monter, sirènesdescendantes…. tant que les voix ne sont pas placées. Avec les plus petits on utilise plutôt des bouts dechansons pour les vocalises.

Sylvie ABBES

RépertoireChansons à danser et à mimer, Jos WUYTACK, Éd. Van de VeldeLa musique et les petits (Jeux Activités Chansons), Dorothée KREUSCH-JACOB, Éd. Fleurus100 Jeux musicaux, Ger STORMS, Éd. Van de VeldeCantourel 4, Éd. À Cœur JoieLa maraude aux chansons, Pierrette RIERE-ROMASCANO, Éd. À Cœur JoieL’île en l’eau, Éd. À Cœur Joie (épuisé)

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in Le jardin musical N°125Suppl. à Musique et Culture

in Le jardin musical N°123Suppl. à Musique et Culture

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L’écoute collective et le travail polyphonique à traversle répertoire traditionnel d’Europe du Nord

Atelier animé par Caroline COMOLA,Chef de chœur au CRR de Montpellier et à l’Opéra Junior (opéra de Montpellier)

Après une présentation rapide de son parcours, Caroline nous propose d’explorer le répertoired’Europe du Nord, un peu comme un prétexte aux objectifs essentiels suivants :

• Comment développer des outils d’écoute individuels et collectifs dans le travail vocal ?• Comment sensibiliser les élèves à l’oreille harmonique et au placement vocal dans le travail

polyphonique ?

Nous commençons la séance avec une “chauffe” de danseurs : chacun se place dans la salle àl’endroit qu’il désire, en gardant une personne précise dans son champ de vision.

Le “meneur” (d’abord Caroline, puis une personne désignée sans que les autres le sachent) fait degrands et lents mouvements de bras, puis avec tout son corps ; mouvements qui sont repris en “écho”par la personne qui la regardait, qui elle-même sera le déclencheur pour une autre personne dont elleétait le repère, et ainsi de suite…

Cette “chorégraphie” se propage donc dans toute la pièce. Puis Caroline introduit des moments desolos qui servent de détente, plus rapides.

Sur le même principe, nous nous passons ensuite un son (ô) avec les yeux fermés, dont la hauteurchange lorsque le meneur l’a décidé et que les chanteurs perçoivent petit à petit ce changement en étantà l’écoute de ce qui se passe autour d’eux.

Le prochain changement introduit concerne les voyelles sur une hauteur fixe, toujours les yeuxfermés (écoute maximale et prononciation précise requises !).

Nous travaillons ensuite sur la sensation de repère de l’oreille, à conserver où que l’on “aille”musicalement :

Nous chantons alternativement un cluster (avec des tessitures Aigu/Medium/Grave identifiées) puisun unisson le plus homogène possible, à plusieurs reprises et en y ajoutant un glissando entre le clusteret l’unisson. Cette construction (une mesure de bourdon ré-la, une mesure de cluster, etc) sert ensuited’accompagnement au chant ci-dessous, Vem kan segla, qui sera aussi repris en canon :

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Pour l’exercice suivant, nous marchons en tous sens et au son du piano, nous devons chanter unedes notes entendues (l’accord s’enrichit progressivement, cf ci-dessous) et nous replacer par “famille” denotes. Pas évident de retrouver sa “famille” si l’on chante trop fort (on n’entend pas le son des autres) oupas assez (les autres ne nous reconnaissent pas).

Il faut donc être à la fois attentif à l’émission et l’écoute des sons.

Déchiffrage du chant Lauliku Lapsepoli de Veljo TORMIS (1930-2017), dont les accords précédentsconstituent l’accompagnement (deux voix mélodiques + groupe de 6 personnes pour le divisi progressifdes accords) :

Après cette séquence, nous enchaînons avec un travail vocal sur le demi-ton ascendant etdescendant, associé au geste du chef de chœur (ou du prof de FM…) :

À partir d’un unisson, séparés en deux groupes distincts ; chaque groupe suit la direction d’unedes mains – même chose avec les personnes des groupes 1 et 2 assises en alternance.

À partir d’un accord parfait Majeur, à trois voix (le chef ne dirige plus forcément de façonsimultanée les voix, chaque voix est conduite d’abord avec un regard puis le geste).

Cet exercice est décliné dans la partition Nuku, nuku lapsukaïnen (-page suivante-) : chaque voixest dirigée par un chef autonome (seuls les 3 chefs ont la partition). Chaque voix va évoluer vers la notesuivante aux gestes de son chef, toujours en progressant par demi-tons successifs jusqu’à la note écrite ;MAIS les autres voix qui ont des intervalles plus petits à chanter ne doivent pas avancer tant que les3 voix ne sont pas sur le bon accord complet. Cela demande une grande écoute et anticipation pourchaque chef, pour arriver à gérer son pupitre tout en restant à l’écoute des autres.

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(trad. estonien, arrt.)

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Ce chant nous a permis de travailler aussi l’audition intérieure : Voix 1 et 2 chantent une mesure sur deux de façon alternée, pendant que la voix 3 chante tout, Toujours la même alternance mais en ne chantant que deux temps par mesure, Chaque voix ne chante qu’un temps de la mesure (par ex. : voix 3 chante tous les premiers temps,

voix 2 les seconds, voix 1 les quatrièmes).

La séquence suivante est préparée autour de la gamme de Do m :(voix 3, puis canon voix 3/2, puis à 3 voix – sur “no” puis sur les voyelles des notes)

Cette gamme ascendante est ensuite exploitée avec un groupe qui la chante en blanches pointées,le second en blanches, le troisième en noires, le tout avec un départ simultané (ce n’est plus un canon)et plusieurs ascensions pour les voix 2 et 3, jusqu’à ce que l’on entende la dernière blanche pointée de lapremière voix (il faut donc rester à l’écoute des autres) :

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cf. Immortal Bach de Knut NYSTEDT (Norvégien) d’après Komm süsser Tod BWV 478 de J. S. BACH :

K. NYSTEDT propose deux versions pour chanter cette partition : 1. Version 1 : Chaque voix a une référence différente pour la noire.

Par exemple, dans l’original, voix 1 : noire = 8 temps, voix 2 : noire = 6 temps, voix 3 : noire = 4temps et voix 4 : noire = 2 temps,

2. Version 2 : Chaque pupitre choisit en autonomie sa pulsation, et “rendez-vous aux pointsd’orgue” comme on dit !

Nous essayons les deux versions mais la première demande un effectif beaucoup plus nombreuxpour la gestion de l’air et le rendu escompté…

La fée clochette étant passée, et parce que Caroline souhaite nous laisser partir avec tout de mêmeun air plus dynamique, nous déchiffrons en guise d’au revoir une dernière partition Laula kultani.

Mais la chaleur, l’énergie et l’enthousiasme de Caroline nous avaient déjà remplis de beaucoupd’envie pour ce beau répertoire a capella des pays d’Europe du Nord, qu’elle en soit ici vivementremerciée !!!

Antonia VUILLAUME

© histgeo.ac-aix-marseille.fr

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L’intonationAtelier animé par Luc Marty

professeur au CRR de Montpellier

IntroductionL’intonation concerne tout ce qui touche à notre perception des hauteurs en musique. Elle

conditionne d’un côté les systèmes musicaux eux-mêmes en tant qu’organisations du monde deshauteurs, représentés par les musiques des styles les plus variés, et de l’autre la possibilité de former etde développer l’oreille musicale. Cet atelier aborde trois dimensions correspondant à trois approchescomplémentaires : analytique (analyse des musiques et des systèmes musicaux), cognitive (quireprésente une prise de conscience du fonctionnement de notre oreille) et pédagogique (tournée vers latransmission des savoirs et savoir-faire).

La dimension analytique suscite en nous le questionnement. Il s’agit de répondre au comment dupourquoi. Comment se fait-il par exemple que notre notation musicale, ainsi que certains de nosinstruments encore aujourd’hui se limitent parfois à seulement 12 sons par octave, alors que ce systèmefut élaboré depuis déjà plusieurs milliers d’années (en Chine sous la dynastie TANG bien avantPYTHAGORE) et que toute l’histoire de la musique et des civilisations nous invitent à une écoute et àune compréhension beaucoup plus fines du monde des hauteurs ? Comment accueillir les questions, quece soit celles plus pointues des étudiants en musicologie ou les questions en apparence plus simples desenfants mais qui se révèlent parfois les plus redoutables. Elles concernent souvent les origines, originesdes intervalles musicaux, des échelles musicales, des modes, des harmonies, des tempéraments, et cettequestion des origines nous oblige à visiter les différents systèmes qui ont vu le jour : intonations dites“primitives” mais qui, à la réflexion, ne le sont pas tant que ça, à moins de nous considérer nous-mêmesaujourd’hui comme des primitifs ; intonations antiques organisées chez les Grecs en tétracordes ;intonations médiévales organisées autour de l’hexacorde et de ses muances qui ont fait apparaître lespremiers - et # dans l’écriture de la musique occidentale ; intonations de la Renaissance qui ont vécu larévolution zarlinienne, laquelle propose une conception harmonique de la gamme correspondant à unenouvelle esthétique musicale qui fait apparaître des “notes fictives”, résultat d’une savante articulationentre la dimension harmonique verticale et la dimension mélodique horizontale au point que lesprofesseurs de solfège de l’époque en perdent leur latin, faisant tomber le mot “solfège” dans unedisgrâce qui perdure dans notre inconscient collectif ; apparition au XVIIe s. de la “basse continue” quinous a orientés vers la tonalité classique et ses fonctions harmoniques associées, etc. La dimensionanalytique répond donc à notre soif de découvrir et de comprendre notre monde et son histoire, ainsique d’entrevoir des perspectives futures. C’est une dimension dynamique qui requiert de solliciter notrecuriosité intellectuelle et de donner de la matière à notre intelligence.

La dimension cognitive est liée au fonctionnement intime de notre oreille ou plutôt de notrecerveau traitant les informations que cette dernière lui donne. Le simple fait d’évoquer “l’oreille” ausingulier trahit une réalité cognitive : nous n’avons qu’une seule “oreille directrice” responsable de la“justesse musicale”. Un bon exemple de dimension cognitive est ce sentiment si particulier de la“consonance”, au sens large de “sonner avec” et qui associe une production sonore à une intentiond’écoute particulière. Ainsi, lorsqu’on joue harmoniquement une seconde mineure, il n’est pas rare devoir des grimaces chez les enfants du premier cycle comme s’il s’agissait d’une maladresse involontaireet non d’une intention musicale. Pourtant celle-ci peut très bien être entendue comme une consonance(exemples au piano : Forlane de RAVEL, impro Jazz).

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Anton WEBERN, représentant du style dodécaphonique de la seconde école de Vienne, considéraitque son langage s’inscrivait dans la parfaite continuité de l’histoire qui était pour lui, comme pour sonmaître A. SCHŒNBERG, celle de l’évolution de la consonance. Il faisait référence à la série desharmoniques naturelles qui régit les vibrations des corps sonores, et situait son propre style harmoniquedans une densité qui correspondait pour lui à des harmoniques de rangs plus élevés que celles qui ontinspiré Rameau ou encore Debussy, présentes dans chaque timbre que nous écoutons, mais dontl’appréciation suppose une acuité auditive que tout le monde ne posséderait pas au même degré. C’est làque nous constatons que nos élèves sont très différents les uns des autres, mais capables d’évolution. Lapertinence du point de vue de WEBERN lorsqu’il parle de la nécessité d’éduquer notre écoute peut nousinterpeller et nous amène tout droit à la dimension pédagogique.

La dimension pédagogique : Quels outils concrets nous donnent ces connaissances analytiques etcognitives pour former et développer l’oreille et l’intelligence musicale de nos élèves qui vivent dans unmonde heureusement ouvert, notamment par internet, sur la presque totalité des répertoires, descultures et des esthétiques ?

Pratique• Le groupe chante un do “à l’unisson”.• Puis glisse jusqu’à l’octave supérieure.

C (cognition) : Extrême facilité pour l’oreille à rejoindre l’octave.A (analyse) : Évocation d’une question d’un garçon de 8 ans : “Pourquoi le son de départ et le son

d’arrivée porte le même nom ?”La réponse est d’ordre cognitif, comportemental. L’unisson réalisé précédemment n’en était pas un

(= octave entre les voix de femme et d’homme). L’identité des noms de notes à l’octave résulte d’uneconfusion cognitive primordiale. Explications simples à donner à l’enfant avec plusieurs exemplesvocaux et instrumentaux.

P (pédagogie) : Utilité d’apprendre dès le début à distinguer auditivement les différents octaves(tessitures) sur la double portée (clés de Sol et Fa). Images parlantes pour l’enfant, par exemple : octave1 (voix du “géant”), 2 (du papa), 3 (de la maman), 4 (de la “fée Clochette”)…

• Reprise du glissando sur l’octave.• Ajout d’une étape intermédiaire laissée à la spontanéité du groupe et apparition d’un nouvel

intervalle chanté collectivement.C : Présentation des résultats statistiques. À l’évidence, nous avons une relation privilégiée et

instinctive avec l’intervalle de quinte juste, mais pas exclusivement. Ainsi, lorsqu’une personne dans legroupe cherche à contrecarrer exprès ce résultat, l’unisson de l’ensemble s’établit plus difficilement.

• Chant de la quinte en polyphonie (2 groupes) et jeux de broderies aux demi-tons pour sentir lastabilité caractéristique de cet intervalle qui produit acoustiquement un son différentiel à l’octaveinférieure de sa basse.

• Écoute d’une mélodie hindoue polarisée sur I - V et accompagnée par le double bourdon de laquinte.

P : Nécessité d’une approche sensorielle de chaque intervalle, pratiqué harmoniquement etmélodiquement pour ancrer une expérience singulière dans le cadre expressif des musiques et deschansons.

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A : De nombreux musiciens ont eu sans se concerter la même intuition que ces deux degréspolaires que nous appelons “tonique” et “dominante”, qui ponctuent notre musique classiqueeuropéenne par leur mouvement cadentiel (demi-cadence et cadence parfaite), constitueraient lapremière échelle musicale de l’humanité. Il existe certes des éléments très concrets pour alimenter cettethèse puisqu’il suffit de souffler dans une simple corne d’animal pour reproduire cette échelle.

• Écoute d’une musique du Togo (corne d’antilope) produisant naturellement l’octave et laquinte.

• Toujours au Togo, les gens ramassent des pierres dans le lit asséché des talwegs en lessélectionnant à l’oreille pour que celles-ci reproduisent la même échelle. Cela devient une donnéeculturelle, intentionnelle et non plus contingente. Ecoute de la musique produite par leurs lithophones.

• Que penser des compositeurs qu’une telle échelle mélodiquement si embryonnaire et archaïqueinspire pourtant ? Dans Ainsi parlait Zarathoustra, R. STRAUSS fait entendre par trois fois cette échelle“togolaise” au caractère si inchoatif. Génie ou instinct ? Élaboration savante ou archétype inconscient ?Maturité compositionnelle ou retour aux sources ?

• Écoute d’un extrait d’une musique de MOZART où cette mélodie “primitive” fonde l’édificeharmonique (basses fondamentales).

Contrairement à l’octave juste, la quinte juste marque le point de départ d’une véritable épopéemusicale qui aurait commencé dans notre préhistoire la plus reculée, peut-être plusieurs centaines demilliers d’années. C’est ce que suggère la théorie de la “formation des échelles”. Il s’agit d’une théorieconvergente, c’est à dire qu’elle n’est pas le produit d’un seul chercheur, ou d’un seul groupe dechercheurs mais qu’elle résulte de l’apport de personnalités aux démarches différentes et qui ne seconnaissent pas forcément, des musicologues (J. CHAILLEY et son équipe, Éléments de philologiemusicale), des ethnomusicologues (C. BRAÏLOÏOU, Sur une musique russe), des musiciens (E. ANSERMET,Les fondements de la musique dans la conscience humaine), des compositeurs (notament B. BARTÓK et sontravail considérable de transcription et de sauvegarde des chants traditionnels ainsi que ses ouvragespédagogiques ou compositions qui en découlent), des accordeurs et théoriciens (Serge CORDIER, Clavierbien tempéré et justesse orchestrale − Le Tempérament Égal à Quintes Justes ; B. MAURIN, Nature/Cultureen musique) et plus généralement tous les compositeurs et improvisateurs de tous les temps dontl’inspiration musicale semble confirmer le processus instinctif décrit par cette théorie. L’intuitionfondamentale de cette dernière donne pour point de départ l’articulation I − V.

• Évoquer cette intuition fait en effet ressurgir les “fantômes du passé” : thème du VaisseauFantôme de R. WAGNER.

Dès lors que les humains auraient maîtrisé l’intervalle de quinte, rien ne les aurait empêché dechanter la quinte de la quinte et ainsi de suite, faisant apparaître les échelles tritoniques, tétratoniques,pentatoniques, hexatoniques, etc. Les pythagoriciens eux-mêmes avaient découvert dans l’Antiquitéqu’en étendant le cycle des quintes justes, on pouvait reconstituer les différentes gammes grecques. Eneffet, avec un cycle de seulement sept quintes, nous obtenons l’échelle diatonique − touches blanches duclavier − et si nous poursuivons dans l’aigu, nous obtenons dans l’ordre les sept dièses, et dans le grave,les sept bémols. C’est ainsi que nous sommes parvenus aux touches noires et blanches de nos claviers.Tout cela correspond à un point d’aboutissement d’une évolution musicale. L’intonation, même la plusprimitive, va conditionner l’élaboration des futurs systèmes musicaux.

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• Maurice RAVEL ouvre son ballet Daphnis et Chloé sur une succession de quintes justesdéployées harmoniquement, son lever de rideau produit un effet très particulier.

• Le thème principal au cor qui suit celui de Daphnis à la flûte coïncide avec un enrichissementprogressif de l’échelle mélodique :

SOL DO←SOL (échelle ditonique avec DO doublement brodé) DO−SOL→RÉ (tritonisme)FA←DO−SOL−RÉ (tétratonisme)FA−DO−SOL−RÉ→LA (pentatonisme)

Il aurait existé un “stade tritonique”. C’est ce que l’on constate en observant l’intonationspontanée chez les enfants. Le babillement du bébé est très complexe. Le nourrisson semble enregistrerles moindres sons de son environnement. Deux ans plus tard, son chant spontané s’estconsidérablement simplifié à l’image du tri sélectif qui s’est opéré dans ses connexions neuronales. Nousavons tous entendu des enfants se parler en chantant et nous l’avons sans doute fait nous-mêmeslorsque nous étions petits. “T’auras pas mon chewing-gum, na-na-na-nè-re !” (mélodie tritonique). Lesenfants semblent reproduire dans leur développement les grandes étapes de l’évolution de l’humanité.On observe ce chant tritonique sur tous les continents de la terre, ce qui fait dire aux spécialistes qu’onest en présence d’“invariants culturels” ou encore de “données trans-culturelles” (cf. C. BRAÏLOÏOU, Surune musique russe).

• Écoute de différents thèmes ou chants traditionnels pour illustrer la récurrence des formulesmélodiques tritoniques, tout style confondu (chant des Pygmées Aka, 9e symphonie de F. SCHUBERT,chanson bretonne, Le chant de la terre de G. MAHLER, génériques de séries télévisées, musiques defilms, exemples dans le Jazz, le Rock, dans les musiques traditionnelles, “savantes”, etc.).

La durée de l’atelier (1h30) est déjà écoulée. Seuls ont été abordés les intervalles d’octave et dequinte justes. La théorie de la formation des échelles ne représente pour l’animateur qu’un petit aspectde l’intonation parmi d’autres qu’il conviendrait aussi d’exposer. Cependant, elle vaut le détour et elle-même n’a pu être que légèrement esquissée dans ce temps si réduit, laissant encore de côté sesdimensions de justesse expressive (attraction et altération des degrés), de verticalité (aspectharmonique, accords et agrégats), son rôle moteur dans l’apparition des fonctions harmoniques et desrelations tonales, son éclairage synthétique pour produire une compréhension vivante et articulée de lamodalité, particulièrement efficace dans l’improvisation. Luc MARTY rappelle avec insistance quel’étendue du sujet de l’intonation et de ses implications musicales pratiques et pédagogiques − qu’ilsouhaiterait développer plus largement − nécessiterait pour cela une immersion de deux journéescomplètes.

Une idée-force pointe tout de même à l’horizon de ce qui a été brièvement abordé : l’étude et lapratique des intervalles musicaux ne peuvent être abstraites et dissociées des échelles musicalesauxquelles ils ont donné naissance car notre oreille se nourrit des contextes musicaux significatifs etpoursuit elle-même un parcours évolutif que l’histoire renseigne et articule à l’intérieur de chaqueesthétique.

Luc MARTY

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La musique électroacoustiqueAtelier animé par Christophe de COUDENHOVE

La musique électroacoustique représente un vaste répertoire, qui a commencé dans les années1950. L’intervenant précise que la sélection des œuvres qu’il a faite correspond à des extraits quipeuvent être abordés dans la classe de Formation Musicale. La musique électroacoustique est selon luinécessaire pour la formation à l’écoute.

Dans ce vaste ensemble, le classement personnel de Christophe de COUDENHOVE est le suivant : électroacoustique “instrumentale” électroacoustique “concrète” électroacoustique “d’accompagnement” électroacoustique “Remix”

Dans le cours de sa présentation, notre intervenant, par ailleurs compositeur et passionné par cesunivers électroacoustiques, alternera entre écoutes actives et commentaires pédagogiques etesthétiques sur les œuvres.

1) L’électroacoustique “instrumentale” o u l o r s q u e l ’ é c r i t u r eélectroacoustique est proche de l’écriture instrumentale

Nous découvrons plusieurs extraits.

a) Des musiques mixtes avec instrument(s) en live. Nous comparons deux versions d’une œuvre de Pierre BOULEZ : Anthèmes pour violon seul (1991)

e t Anthèmes II pour violon et électronique en temps réel (1997). L’exercice consiste à détecter lesnouveautés : la réverbération, des arpèges, une épaisseur harmonique dans l’exemple 1.

Également des phénomènes d’harmonisation dans l’exemple 2.

L’écoute de Mettalics pour trompette et électronique en temps réel (1995) de Yann MARESZ met enavant une pensée orchestrale de l’écriture électroacoustique. Pour Christophe de COUDENHOVE, ladécouverte du timbre de la trompette peut se faire tout autant par cette œuvre que par un concerto de A. VIVALDI.

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Christophe de COUDENHOVE nous fait ensuite le plaisir de partager avec nous une de sescompositions récentes : Métamorphose − Apparition pour saxophone soprano et sons fixés (2015). Cetteœuvre peut être le support d’une improvisation seul ou à plusieurs. Les notes entourées sont les notesprincipales autour desquelles l’élève peut broder.

b) des musiques électroacoustiques sur support audio seul (ou “sons fixés”)

Dans Mortuos Plango, Vivos Voco (1980) de Jonathan HARVEY, nous suivons le développement enparallèle de l’enfant et des cloches. La texture naît de l’osmose et du mélange entre le sens des deuxsources.

Dans Jeïta, ou le Murmure des eaux (1970) de François BAYLE, nous pourrions faire une dictée à lavolée du mouvement “Cloches fossiles”. Dans “Intervalles d’eau”, Christophe de COUDENHOVE nouspropose une dictée d’intervalles.

Une œuvre de Pierre HENRY, Schismes, se prête bien à une écoute polyphonique pour répondre à laquestion : combien de voix ?

De Natura Sonorum est une œuvre incontournable de la musique électroacoustique. Elle estcomposée par Bernard PARMEGIANI en 1975. Sa deuxième partie, “Accidents / Harmoniques”, estpropice à un commentaire d’écoute, dont l’orientation pourrait être : quelle est l’idée principale, larelation entre les 2 éléments ?

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Christophe de COUDENHOVE : Métamorphose − Apparition pour saxophone soprano et sons fixés (2015).

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De même dans Variations en étoile de Guy REIBEL, une écoute ludique sera guidée par l’origine dessons : de quoi c’est fait, quelle est l’idée principale. Ici la surprise est permanente, les tranches vitesse /durée / hauteur donnent une grande mobilité à l’œuvre.

2) Électroacoustique concrète : lorsque le son pour lui-même commence àprendre une grande importance

Nous commençons par écouter plusieurs extraits d’œuvres de Pierre HENRY ; nous cherchons àsaisir leur beauté, leur intérêt par une analyse des éléments sonores en présence et du discours.

En écoutant Furistie (1975) de Pierre HENRY, notre intervenant nous sensibilise à des phénomènesde densification, d’intensification du volume, de masse. Dans l’extrait “Bruiteurs I”, l’élément hauteurperd son importance ; la texture prend le dessus.

Dans un autre extrait de Pierre HENRY, l’unité musicale tient à la présence des éléments enplusieurs couches qui sont dérangés par l’arrivée d’un nouvel élément.

Du même compositeur, le début de Mouvement-Rythme-Etude est comparé à l’Art de la Fugue. Ici,l’opposition repose sur des sons minimes (pulsation) et une masse sans durée.

Comment verbaliser ce qu’on entend, rendre par des mots une sonorité ? C’est l’entrée quepropose Christophe de COUDENHOVE dans un autre extrait de De Natura Sonorum, “Ondes croisées”.

3) Électroacoustique d’accompagnement : oratorio, poésie sonore…

L’origine de ce courant est la radio qui a contribué à faire connaître les musiquesélectroacoustiques. Ce groupe comprend des œuvres dont l’écriture accompagne une narration.

Cette dimension permet une approche de la musique électroacoustique aux plus jeunes élèves.Ainsi, dans la “Comptine” de Variations pour une porte et un soupir de Pierre HENRY (1963), il estpossible de faire parler les enfants et d’amener à des notions de solfège (hauteurs, durées, nuances).Dans “Gymnastique”, il est assez simple de percevoir et verbaliser des phénomènes qui évoquent cetteactivité sportive : glissement, apesanteur, atterrissage, balancement…

Chez le même Pierre HENRY, dans le “Sanctus” de la Messe de Liverpool (1967), la cohérencemusicale vient de l’opposition de hauteur entre une voix qui monte et un bruit qui descend. Le demi-tonest perceptible comme intervalle référent. Le crescendo est également un phénomène important.

Autre exemple : pour créer une atmosphère abstraite, François BAYLE utilise quelques cellulessimples (Paradis Terrestre).

La narration peut également s’apparenter à une ligne instrumentale à suivre, comme par exempledans Violostries pour violon et sons fixés (1963) de Bernard PARMEGIANI (3e mouvt : “Végétal”).

Nous écoutons également deux extraits de la Suite pour Edgar Poe (1973) de Guy REIBEL. Ici, c’estl’exploitation électroacoustique de l’enregistrement d’un chœur ou un accompagnement ensuperposition de voix parlées qui suscite l’intérêt.

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4) Électroacoustique “Remix”Il s’agit d’œuvres élaborées à partir d’œuvres existantes. Nous découvrons ainsi successivement :a) la combinaison d’une marche harmonique avec un orage/nuage de sons dans Pour en finir avec

le pouvoir d’Orphée (Bernard PARMEGIANI, 1972). En résonance, on peut s’interroger sur ce qu’auraitécrit A. VIVALDI s’il avait vécu à notre époque…

b) la réunion de musiques ethniques d’esthétiques différentes dans Voyage Initatique(“Unification”, 2004) de Pierre HENRY.

c) un collage à partir des moments les plus dramatiques des symphonies de L. van BEETHOVEN,opéré par Pierre HENRY dans La Dixième Symphonie - Remix (1986-1988)

d) dans un autre moment de la même œuvre ("Marche dans le temps"), un remix auquel beaucoupd’élèves pourraient être sensibles.

Cette présentation vivante et panoramique des musiques électroacoustiques s’est appuyée sur unpower point très bien conçu par Christophe de COUDENHOVE. Les écoutes ont été nombreuses ainsi queles pistes d’exploitation pédagogique qui en découlent. La liste des œuvres sélectionnées par notreintervenant est distribuée aux participants afin de pouvoir puiser dans ce réservoir… inépuisable !

Jean-Baptiste APÉRÉ

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La musique minimaliste en cours de FMAtelier animé par Mikaël LE PADAN

Les musiques minimalistes

Après un accueil en musique avec une pièce de Philip GLASS, Glassworks, Mikaël LE PADAN entredans le vif du sujet en essayant une définition. Si le sujet est ambitieux, la définition s’avère égalementdifficile car le minimalisme regroupe des styles et musiques différents dans des contrées éloignées. Lesdeux principaux courants sont :

• la branche “répétitive” aux États-Unis. Ce terme n’est pas apprécié par Steve REICH car selonlui, ces musiques ne sont pas plus répétitives que le Prélude en Do Majeur qui ouvre Le clavier bien tempé-ré. Ces musiques répétitives ont été influencées par les musiques africaines.

• des compositeurs des pays du Nord de l’Europe, dont la figure la plus connue est l’EstonienArvo PÄRT, s’inspirent quant à eux de leur tradition musicale (folklore). Ce courant porte différentsnoms : “nouvelle musique”, “nouvelle simplicité”, “postmodernisme”. Il naît d’une volonté de sortir del’avant-garde de l’après-guerre (absence de tonalité et de pulsation) et de proposer une alternative aumot d’ordre de Pierre BOULEZ : “la musique sera sérielle ou ne sera pas”.

Les musiques minimalistes ont pendant longtemps été mises en marge dans l’enseignement fran-çais. Dans son ouvrage paru en 1997, La musique du XXe siècle, Jean-Noël von der WEID ne consacre au-cun chapitre à ce courant, simplement un encart dans lequel il évoque des “tisanières méditatives” (cf.1re éd., p. 237). Aujourd’hui, on voit tout l’intérêt de ces musiques, leur richesse et non plus seulementun “retour en arrière”.

Connexion avec notre temps et nos élèves

Pour Mikaël LE PADAN, qui s’appuie sur sa propre expérience avec des étudiants en Licence àl’Université de Montpellier, la démarche pédagogique autour des musiques minimalistes est intéres-sante car elle permet de connecter les élèves en FM à la musique contemporaine. Des passerelles avecleurs propres univers sonores peuvent être tendues.

Quelques raisons pour lesquelles les élèves sont réceptifs aux musiques minimalistes : • L’instrumentarium recourt souvent à des instruments “pop” (guitare, synthétiseurs, percus-

sions) mixés avec l’orchestre classique. La dichotomie française entre musique savante et populairen’existe pas aux États-Unis. Le compositeur John ADAMS se dit autant influencé par le rock, le jazz, lamusique populaire que par I. STRAVINSKY. Ces musiques sont métissées et s’apparentent à une“bouillabaisse”.

• Un lien étroit avec le cinéma existe depuis que des compositeurs comme Hans ZIMMER, DannyELFMAN s’inspirent fortement du style de Philip GLASS. La dimension visuelle des musiques minima-listes aide à “accrocher”.

• Ces musiques sont en phase avec notre temps et sont idées de "reproductibilité sans fin". Demême, les phénomènes urbains sont au cœur d’œuvres comme City Life de Steve REICH.

Des participants interviennent pour témoigner d’autres intérêts des musiques minimalistes :

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• Beaucoup de petites séquences pour lesquelles la mémorisation est facile. On peut mettre enconfiance l’élève.

• Ces musiques contemporaines ne sont pas uniquement des concepts, parfois difficiles à s’appro-prier pour les élèves.

Mikaël LE PADAN précise que la musique minimaliste américaine est connectée au public égale -ment dans sa dimension économique. L’absence de subventions publiques oblige le compositeur àprendre en compte la nécessité d’être apprécié par le public. Philip GLASS revendique une musique sé-duisante.

Enfin, le courant minimaliste ne rejette pas les autres cultures. Il n’y pas d’ethnocentrisme. Onconsultera à ce sujet le livre de Michel ONFRAY, La raison des sortilèges : entretiens sur la musique, danslequel le philosophe fustige la “bien-pensance musicologique” et rappelle qu’ “on peut aimer, c’est moncas, Rituel ou Messagesquisse de BOULEZ et en même temps Nixon in China de John ADAMS”.

Historique

Erik SATIE apparaît comme un des pionniers d’une musique répétitive avec des œuvres commeVexations (1893) et Musique d’ameublement (1917). Un de ses admirateurs, John CAGE, sera un lien im-portant entre le musicien d’Arcueil et les compositeurs d’Outre-Atlantique.

Nous écoutons un extrait de Sonatas and Interludes pour piano préparé dans lequel sont reconnais-sables des phénomènes de pulsation, de polarité sur une note, l’intervalle de tierce, la sonorité prochedu gamelan balinais.

Le premier emploi du mot “minimaliste” au sujet d’une musique est attribué à Michael NYMANpour qualifier l’œuvre de Terry RILEY, In C (1964).

Les 53 patterns mélodiques qui composent cette pièce peuvent donner lieu à un travail de relevé(ill. 1 et 2).

Les caractéristiques principales de l’œuvre sont :• un peu d’aléatoire (instrumentation)• une harmonie de base en Do Majeur autour d’un arpège et une évolution vers les pôles sol et ré• phénomènes de déphasage, répétition en contretemps• une superposition ternaire/binaire

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Steve REICH, qui fit partie de l’ensemble qui créa l’œuvre, suggère de rajouter des croches en

permanence ( ) ainsi que des points de ralliements sur lesquels se rejoignent les musiciens. Pour Mikaël LE PADAN, le rendu sonore est intéressant et nécessite de la part des musiciens d’y prêterattention. La pulsation et l’écoute sont deux directions pédagogiques essentielles dans cette pièce.

ill. 2 : Terry RILEY, in C (extrait)

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ill. 1 : Dictée à parties manquantes, In C (conception Mikaël LE PADAN)

Licence CreativeCommons

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Philip GLASSDans la musique minimaliste américaine, on peut distinguer deux grands courants, selon que les

compositeurs se rattachent plutôt à :• un temps statique (Terry RILEY, Philip GLASS)• un temps processionnel (Steve REICH)Le temps statique, tel qu’utilisé par Philip GLASS, peut être rapproché de sa collaboration avec

Ravi SHANKAR et la musique indienne. Chez le compositeur américain, ce temps statique prendra formedans les pièces pour piano avec l’arpège. Ces formes sont précédées par un temps d’expérimentation quel’on trouve dans les plus anciennes compositions de GLASS.

À partir d’un relevé harmonique (ill. 3), nous chantons les harmonies utilisées dans une œuvrechorale, Pierre de Soleil.

ill. 3a : Philip GLASS, Pierre de Soleil, harmonies chiffre 1 et 2

Les onomatopées utilisées (“mama”) peuvent être rapprochées du sonentendu au téléphone lorsqu’onappelle une ligne coupée. SteveREICH en fera un usage importantdans sa pièce, WTC 9/11, en référenceaux attentats du 11 septembre 2001.

ill. 3b : Philip GLASS, Pierre de Soleil, début de la partition (©)

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En 1966, Philip Glass propose dans 1+1 for One Player and Amplified Table Tap un des premiersprocessus de composition par addition d’éléments (ill. 4).

ill. 4 : Philip GLASS, One + One, partition manuscrite

Une réalisation en canon avec les élèves peut prendre appui sur le premier processus de lapartition (ill. 5).

ill. 5 : Philip GLASS, One + One, exemple d’application

Ce procédé n’est pas sans rappeler la science contrapuntique de la musique médiévale (dansProverb, en 1995, Steve REICH fait clairement référence à l’organum Viderunt Omnes de PEROTIN).

Autre exemple de processus (ill. 6) : une attention particulière doit être portée au volume sonore,pour équilibrer les deux voix.

ill. 6 : Philip GLASS, One + One, autre exemple de processus

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Une autre activité possible avec les élèves consiste à ce que chacun écrive son propre processus(Fin de Cycle 2 par exemple), ce qui leur permet ainsi de mieux comprendre le mécanisme et de pouvoirs’imposer de vrais défis rythmiques (ill. 7).

ill. 7 : invention d’un nouveau processus parun élève

Ce principe de composition par addition d’éléments, associé à une dimension mélodique, est àl’œuvre dans Music in Similar Motion (ill. 8).

ill. 8 : Philip GLASS, Music in Similar Motion, début

Quelques applications pratiques en classe à partir de cette œuvre : • travail avec l’instrument• travail des mesures irrégulières, des temps irréguliers• dictée à parties manquantes pour compléter la progression• utilisation de l’échelle pentatonique par l’écriture de ses propres extensions

En lien avec ces entrées successives de motifs, Mikaël LE PADAN revient sur Glassworks (1982)entendu en début de séance (assez anxiogène d’ailleurs pour certains participants à l’atelier). Il proposeun document pour faire un relevé du mouvement intitulé, Island (ill. 9).

Mikaël propose ensuite de le chanter et témoigne de son expérience avec ses propres élèves : “c’estflatteur ; ça marche”.

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ill. 9 : dictée à parties manquantes, Island (conception Mikaël LE PADAN)

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Steve REICH

Nous commençons par un bref rappel du motif de Clapping Music (ill. 10), pièce souvent utilisée enFM, mais dont l’expérience montre qu’elle requiert une réelle préparation et des élèves assez avancés.

Ce rythme caractéristique est également présent dans CityLife, dans lequel Steve REICH a beaucoup utilisé la transformationd’une parole en une cellule mélodique (ill. 11).

Cette cellule de 12 croches a un intérêt métrique tout particulier qui lui permet d’être penséebinaire ou ternaire.

Cette empreinte de la musique de Steve REICH dans d’autres styles musicaux américains se trouvedernièrement dans l’album du groupe The Divine Comedy,Foreverland, paru en 2016. Sur le titre 23rd of December, un pianoégrène un motif dont la paternité semble évidente (ill. 12).

ill. 12 : The Divine Comedy, 23rd December, début

On aura reconnu l’utilisation du mode acoustique (appelé également ”gamme Bartók “).

ill. 13 : gamme acoustique

Pour présenter très brièvement l’œuvre de Steve REICH, Mikaël LE PADAN nous parle de quelques-uns de ses procédés d’écriture :

• le phasage / déphasage• la variation timbrique de surface (proche des clusters métamorphiques de LIGETI)• le processus de substitution des pausesPour comprendre ce dernier processus, nous visionnons une vidéo de Drumming dans lequel le

thème est généré progressivement (1 croche, puis 2 etc. jusqu’à atteindre les 12 croches de la mesure).Cf. ill. 14.

Le même principe se retrouve dans Music for 18 Musicians avec la dimension mélodique (ill. 15).

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ill. 14 : S. REICH, Drumming ill. 15 : Music for 18 musicians ill. 14 : Steve Reich, Drumming

Ce type d’élaboration progressive du matériau mélodique, quand il est expérimenté par les élèves,leur permet de comprendre de l’intérieur l’écriture du compositeur.

Aujourd’hui encore, à 90 ans, Steve REICH ne cesse de se renouveler puisqu’il vient d’écrire uneœuvre après avoir écouté le groupe Radiohead : Rewrite avec des citations de deux chansons de cegroupe britannique. Cet aspect de citation est récurrent chez les compositeurs minimalistes, parexemple chez Michael NYMAN, qui dans Drowning by Numbers, se livre à une reconstruction du 2emouvement de la Symphonie concertante en mi b majeur pour violon, alto et cordes de W. A MOZART. Ouencore chez Max RICHTER qui dans, Recomposed by Max Richter, donne des couleurs minimalistes auxQuatre Saisons de A. VIVALDI.

Tous les participants remercient vivement Mikaël LE PADAN pour cette riche présentation del’esthétique minimaliste américaine.

Jean-Baptiste APÉRÉBibliographie – Filmographie

BODON-CLAIR Jérôme, Le langage de Steve Reich, L’Harmattan, 2008.BOSSEUR Dominique et Jean-Yves, Révolutions musicales : la musique contemporaine depuis 1945, Minerve, 1999.DARMON Eric et MALLET Franck, Steve Reich : Phase to Face, film de 2009 paru en DVD.GIRARD Johan, Répétitions : l’esthétique musicale de Terry Riley, Steve Reich et Philip Glass, Presses SorbonneNouvelle, 2010 LELONG Stéphane, Nouvelle musique, Balland, 1996MACHART Renaud, John Adams, Actes Sud, 2004TOOP David, Ocean of sound : musiques ambiantes, mondes imaginaires et autre voix de l’éther, Éclat, 2004.

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La Musique Traditionnelle OccitaneAtelier animé par Alain CHARRIÉ

Lors de cet atelier, Alain CHARRIÉ a présenté les trois instruments mélodiques qui illustrent lamusique traditionnelle occitane ainsi que le répertoire attenant à ces instruments. Il s’agit de lacornemuse auvergnate ou cabrette, le hautbois languedocien et le fifre.

La cabretteC’est avec les Auvergnats de Paris, fondateurs des “Cafés de Paris”

qu’est apparue au XIXe siècle la cabrette. Elle s’est ensuite vite répandueen Haute-Auvergne.

Cette cornemuse auvergnate a la particularité de posséder unsoufflet à mains. Elle comporte un tuyau mélodique et un tuyaud’accompagnement (bourdon), mais ce dernier, obturé, n’est pas toujoursfonctionnel, ce qui permet d’utiliser la note dominante grave del’instrument à la fois comme effet rythmique et comme pédaleharmonique. Autrefois, le sac en peau de chèvre (d’où le nom del’instrument) se gonflait à la bouche comme la plupart des cornemuses.L’ajout du soufflet remonte au milieu du XIXe siècle.

Cabrette est la forme francisée du mot occitan aurillacois cabreta,qui signifie “petite chèvre”. Il existe plusieurs cabrettes selon la tonalité.

La pièce musicale jouée par Alain CHARRIÉ à la cabrette se nomme Portatz chopina : “Lève lachope”. C’est une bourrée à trois temps. Elle se joue également avec des violons et une vielle à roue.

Citation Alain CHARRIÉ : “La bourrée à trois temps se joue en déséquilibre, c’est à dire toujours enavance sur le 1er temps pour garder le tempo.”

La partition de la bourrée n’est que le “squelette” de cette pièce.

L’ornementation n’est pasécrite et pourtant c’est elle quidonnera le caractère de cettebourrée. Il existe plusieurs stylesd’ornementation qui dépendentdes interprètes et sont souvent unmoyen de les reconnaître.

La transmission orale del’ornementation du professeur àl ’élève constitue un apportessentiel dans l’enseignement dela musique traditionnelle.

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Portatz chopina Bourrée à 3 temps

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Couffoulens

Couffoulens est unvillage entre Carcassonne etLimoux. C’est également unedanse pour le carnaval deLimoux qu’Alain CHARRIÉnous a interprété. Couffoulens(partition ci-contre) se jouecomme pour Portatz chopinaavec des ornementations, maiscontrairement à la bourrée ellese joue “au fond du temps“.

La musique traditionnellee s t t o u j o u r s d a n s é eaujourd’hui, permettant ainside maintenir le répertoire envie. Alain CHARRIÉ a insistés u r l ’ i m p o r t a n c e d e l areconnaissance musicale etculturelle d’une collectivité,d ’ u n e p o p u l a t i o n p o u rp r é s e r v e r l a m u s i q u etraditionnelle.

Le graïle (hautbois)

Le graïle, en occitan graile, o u l e autbòi, est un hautboislanguedocien populaire, joué dans les Monts de Lacaune (dans le Tarn) etla plaine languedocienne. L e autbòi est fait de trois parties en buisemboitables avec des renforts de corne. Il est muni d’une anche double.Le graïle, ce autbòis de la plaine, a une tonalité plus grave que sonhomologue des Monts de Lacaune.

Il est associé à Sète et ses joutes nautiques. Lors des joutes, les hautbois se trouvent sur chacunedes deux embarcations, les deux hautbois jouent la même mélodie lorsque les barques s’approchentpour jouter. Il existe donc un répertoire pour les joutes ainsi qu’un répertoire de défilé pour deuxhautbois et deux tambours qui se déroule le matin avant les joutes.

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Couffoulens

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Ces répertoires se trouvent dans de vieux carnets datant du XIXe siècle où les partitions ne sontécrites qu’avec les doigtés sur les trous. On pense que ce sont des instituteurs ou bien desecclésiastiques du XIXe siècle qui ont collecté ces musiques de tradition orale.

Alain CHARRIÉ a également interprété l’Air de Fecos qui est joué par deux hautbois lors duCarnaval de Limoux. Ce carnaval dure plusieurs semaines, les dimanches de janvier à Mardi gras. Cet Airde Fecos ou d’autres du même style peuvent durer une demi-heure.

Le carnaval se déroule sur une place avec des arcades. Les participants et les musiciens tournentdans ces arcades. Les airs du carnaval se jouent au fond du temps.

Le fifre

Le fifre est fabriqué en bois (ébène, buis, arbre fruitier ou canne deProvence Arundo donax). Il comporte six ou sept trous de jeu, et parfoisune clé. De perce conique ou cylindrique, cet instrument est le plussouvent dans la tonalité de mi, ré ou si. Sa petite longueur permet desonner sur un ambitus de deux octaves et demie, dans une tessiture aiguëavec une échelle diatonique. Quelques altérations peuvent cependant être jouées en bouchantpartiellement les trous de jeu, par un instrumentiste expérimenté.

Le fifre sans clé : en France, le fifre a été introduit vers la fin du XV e siècle par des mercenairessuisses qui furent nombreux à s’enrôler dans l’armée de Louis XII. Le fifre était joué dans l’armée maisde manière non officielle. C’est François Ier qui créera la charge officielle de fifre du roi, dont le rôle étaitde participer aux cérémonies et fêtes officielles. Il prendra, par la suite, toute sa place dans les armées etnotamment sous l’Empire. Le fifre disparaîtra de la musique militaire en 1845 au profit du piccolo.Aujourd’hui, il subsiste encore en France dans la musique des régiments de la Légion étrangère.

Parallèlement à sa carrière militaire, le fifre connaît une carrière civile dans la musiquetraditionnelle et la musique de carnaval. Les musiciens, formés à l’armée, continuaient de jouer auretour dans leur village, mêlant les morceaux militaires appris durant leur service ainsi que les airspopulaires de leur région. Les airs de musique militaire et populaire continuent de se transmettreoralement de génération en génération.

En Languedoc, il accompagne la danse des animaux totémiques (chameau de Béziers, âne deGignac, poulain de Pézenas, etc.). Il fait danser dans les remises et anime les carnavals. Le fifre estégalement l’instrument incontournable du carnaval dunkerquois. De même que la cabrette, il existeplusieurs tailles de fifres selon la tonalité.

Alain CHARRIÉ a interprété l’Air du Poulain totémique de Pézenas ainsi que l’Air de l’Escargot sejouant pour une farandole acrobatique. Ces airs sont très souvent écrits dans la mesure ternaire.

Dans l’enseignement de cette musique traditionnelle occitane, la pratique sur le terrain estindispensable. Alain CHARRIÉ a souligné l’importance pour les élèves de participer à l’animation desévénements culturels se rapportant à leurs instruments et leurs répertoires. C’est en étant dans lecontexte initial que les élèves s’approprient l’essence même de la musique traditionnelle occitane. Parexemple : à Pézenas, le lundi soir précédant Mardi gras, c’est le Charivari, moment où tous les ensemblesamateurs ou professionnels peuvent jouer ensemble.

Eva-Marie SIMON Avec emprunts à Wikipédia

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Atelier Musiques Actuelles proposé par Laurent ELBAZ

Laurent ELBAZ explique qu’il a commencé sa carrière comme professeur de FM tout en continuantà se former en Jazz et Musiques Actuelles. Il s’est finalement orienté sur ces disciplines. Il nous fait partde sa difficulté à envisager les apprentissages de manières compartimentées (rythme, notes,intonation…). Aussi, adopte-t-il une construction qui globalise les acquis.

Laurent propose un cours type à partir de la chanson : Walk On The Wild Side de Lou REED. • Le travail commence autour de deux accords : C F

I IV

En guise de d’échauffement vocal, les élèves improvisent un parcours le plus conjoint possible, enpartant de la tierce de C (mi) en utilisant les notes des deux accords, le tout accompagné au piano. (Unaccord = 4 temps ; 1 phrase = 4 mesures).

L’étape 2 consiste à refaire le même travail en partant de n’importe quelle note de C, en ajoutantles 7es de chaque accord, puis dans un troisième temps la 9e de C et la 6te de F. Cela permet, qu’au sein dela classe entière, il y ait la possibilité que toutes les notes soient chantées en même temps. (= agrégats).

• Laurent choisit un parcours guide : Sur le premier temps de chaque mesure, la note

choisie doit être chantée, mais entre les deux, chacunest libre de vagabonder sur la ou les notes de son choix.(image des pas japonais sur lesquels on doit s’appuyer).

1) Petit voyage autour de Do Majeur pendant 4temps, puis Fa Majeur la mesure suivante et ainsi desuite, dès l’instant que les élèves arrivent sur la note choisie, dite guide, à la mesure suivante (notiond’anticipation).

2) Même travail avec les gammes pentatoniques de Do et Fa Majeur.3) On rajoute le chromatisme entre ré et mi = ré, ré dièse, mi.4) Les mêmes consignes sur des mesures à 5 temps, puis sur des mesures alternées : une à 3 et une

à 2.

Cette grille finitpar devenir un jouet que l’on peut utiliser comme on le désire.

(simple, compliquée, plus courte, plus longue, plus lente,…)Cela marque la différence entre les musiques dites Classiques et les Musiques Actuelles.C’est dans la tradition du Jazz et des Musiques Actuelles de reprendre un thème et/ou une grille et

d’en faire ce que l’on veut, c’est fait pour.

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Laurent ELBAZ propose un nouvel exercice à partirdes mêmes accords : utiliser la gamme Blues de Do.

• Proposition de travail : démarrer autour de Do Majeur (pentatonique ou pas) puis injecter à unmoment la gamme Blues pour donner une couleur particulière. (4 mesures de l’un, 4 mesures de l’autre).

Une fois passé sur les quatre mesures en gamme Blues, le Si bécarre devient la note repère pourrevenir sur Do Majeur.

L’idée est d’utiliser les différentes contraintes, (accords, carrures,…) pour rendre le discoursmusical cohérent, en conscience.

Pour accompagner, mieux vaut être à l’aise ! Sinon, il y a la possibilité d’utiliser les “machines”, cequi permet à l’enseignant d’être plus présent avec les élèves (préparation de boucles pédagogiques, surun séquenceur / looper, ordinateur, téléphone, tablettes, etc.).

• Après ré-écoute du morceau, on observe un ajout de2 mesures, entre nos deux lignes :

Attention à l’écriture, lorsqu’une mesure est coupée endeux, en diagonale, c’est pour la partager en deux fois 2temps. La fréquence de changement des accords est ainsi deuxfois plus rapide dans ce passage.

Nouvel exercice : chanter cette grille avec le même travail autour de Do Maj. sur la première lignepuis Gamme Blues sur la dernière ligne. Lors des passages sur les accords de D, obligation de chanter leFa dièse.6) Avec accompagnement.7) Sans accompagnement, obligeant les élèves à prendre le rythme et l’énergie en charge.

Laurent ELBAZ conseille par ailleurs de faire travailler la gamme blues dans toutes les tonalités enpassant par les intervalles, le chromatisme, etc.

• Après tout ce travail, choix d’une harmonisation pourla grille :

En fonction des choix d’harmonisation des accords, il estpossible de forcer, ou non, un mode d’improvisation, et doncd’orienter l’utilisation de certaines notes afin d’illustrer lesaccords.

Laurent ELBAZ fait référence aux chorus de WyntonMARSALIS ou de Chet BAKER qui, malgré une interprétationsur instrument monodique, sont tellement clairs dans leurdiscours, que l’on peut retrouver très facilementl’harmonisation de leur morceau.

Travail sur une autre chanson de 1978, sur 4 accords : C G Am F

So Lonely de The Police, dans un style plus reggae punk. I V VI IV

(Il s’agit en fait d’un plagiat de Bob MARLEY : No Woman No Cry.)

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Deux entrées en matière possibles : relevé ou lecture directe à partir de la partition.

Sur un travail à partir de la grille de la chanson, Laurent ELBAZ propose qu’en insérant un nouvelaccord, un rapprochement devienne possible avec le canon de Johann PACHELBEL.

La séance se termine avec le déchiffrage d’une chanson du groupe : New Born, extrait del’album Origin Of Symmetry datant de 2003.

Groupe constitué de trois musiciens issus d’une formation classique et connu pour écrire leurstitres à partir de grands thèmes classiques connus.

Justine PERREAU (CRR Rennes) et Christine GRAF (CRR Dijon)

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Muse : New Born (extrait)

The Police : So Lonely (extrait)

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TapkapellaPercussions corporelles et chants a capella

Atelier animé par Mathieu EYMARD

PréambuleL’atelier est une synthèse de techniques de chants a capella et de percussions corporelles ayant

pour but non seulement la découverte des percussions corporelles mais aussi de débloquer de nouvellesapproches d’apprentissage de la musique, à travers le corps, la voix et la dissociation.

Pistes de travail (exercices d’échauffement à développer)

Dynamique de groupe ; concentration : exercice sur la concentration et dans l’énergie du groupe(thermomètre de la concentration).1. • Former un cercle et se faire passer très rapidement une balle imaginaire avec engagement ducorps. (frapper dans les mains avec déplacement de la droite vers la gauche)

Constatation : On s’aperçoit que s’il y a déconcentration, la balle ralentit et inversement, plus laconcentration est bonne, plus la vitesse va augmenter.

• La concentration peut impressionner et être difficile à installer. C’est l’écoute qui permettra del’apprivoiser et d’essayer de l’analyser.

Naturellement les pieds des participants vont s’écarter pour gagner dans l’engagement physique.• Quand le mouvement fonctionne bien, on va pouvoir changer le sens de circulation de la balle

imaginaire.On constate avec une consigne supplémentaire un ralentissement du jeu. Cet exercice développe une

écoute périphérique.2. Consigne supplémentaire avec la balle : cette fois, elle va traverser le cercle. Il faut rajouter unengagement du regard pour donner la direction.

Attention : intention claire, je ne lance pas la balle avant d’avoir décider à qui. Si le groupe est tropimportant, le diviser en deux.3. Mettre des challenges :

• On peut mettre plusieurs balles (imaginaire : rouge, bleue).• Variante avec une balle noire qui peut changer de sens.

Travail rythmique1. Exercices avec les pieds (droit puis gauche). Attention à la position du dos, souplesse dans lesgenoux, plier sur le mouvement du deuxième pied, notion du poids du corps en jeu. Toujours engager le corpsdans une notion du poids.

• Puis sur 2 niveaux (mains/pieds) en accélérant petit à petit

Chaque fois que l’on rajoute une difficulté qui est traitée par une autre partie de notre cerveau, lesacquisitions précédentes, qui étaient difficiles, deviennent plus faciles (chacun étant différent, bienévidement).

• Toujours deux niveaux mais Snaps et haut de la poitrine d’abord régulier, puis après rythme desamba : poitrine G / snaps G / snaps D / Poitrine D (King King Kong Kong) (Commencer sa main directrice.)

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- Snaps Droite/ Gauche

(Jamais Droite/Droite ou Gauche/Gauche)

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• Puis rajouter les pieds sur les temps forts (1 et 3).• Idem mais on bascule sur 2 et 4.• Rajouter la voix : 1 sur les snaps King puis les Kong puis les deux en même temps.

2. Déclinaison : sur une base rythmique, à morceler, à jongler avec le moindre petit morceaucorporellement, dans le cerveau et en groupe.

Trouver de la difficulté dans le moindre petit élément, qui, quand il sera résolu aura desapplications dans absolument tout.

3. Sur un rythme simple avec le principe de la balle, chacun faisant un élément.

4. Travail de dissociationà deux (logique de jeu)

Cycle pas carré puisqu’ àchaque tour de cycle on va rajouterun élément…

Variantes : • Binaire : r a j o u t e r a u x

mains (croches) une fonctionsupplémentaire le corps enmettant les pieds (noires)

• Ternaire : I d e m e nmettant les pieds tous les 3 claps(croches avec les mains noirespointées avec les pieds)

Clap mains de face Clap Mains droites Clap Mains gauches

2 claps idem

3 claps idem

2 claps idem

1 clap idem

Mot de la finÀ partir d’un rythme simple on peut le décortiquer et y passer la journée.Tous ces exercices de dissociation peuvent permettre des déblocages rythmiques et une ouverture

rythmique différente. On n’est limité que par son imagination, donc sans limite… Le côté grisant prend l’avantage et on

va réellement prendre du plaisir.

Gisèle BÉGUIN

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Les actualités du monde artistique

Table ronde

Mikaël LE PADAN, modérateur,

Philippe RIBOUR, inspecteur DGCA (Direction Générale de la Création Artistique),

Brice MONTAGNOUX, IESM (ancien Cefedem) Aix-en-Provence,

Patrick POUGET, Directeur du CRR de Montpellier

M. LE PADAN Nous observons actuellement un problème de gel de concours, les jeunes qui veulent enseigner

sont bloqués, ce qui entraine pour eux une situation de précarité.P. RIBOURLe décret concours ATEA, présenté pour avis au Conseil Supérieur de la FPT, devrait entrer en

vigueur dans quelques semaines, après validation par le Conseil National d’Évaluation des Normes. Leconcours aura lieu en 2018.

Pourquoi cette longue attente ? La Réforme de la Fonction Publique Territoriale est sortie en 2012,les décrets sur le statut des fonctionnaires en mars 2012, puis les décrets sur les concours en septembre2012. Mais ces textes de 2012 sur les concours se sont avérés inapplicables. Nous avons dû les revoir,dans une collaboration entre la DGCA (ministère de la Culture) et la DGCL (ministère de l’Intérieur).

Voici les concours prévus :• ATEA principal concours ouvert en 2018, si tout va bien ;• PTEA examen professionnel toutes disciplines en 2017.La coordination des centres de gestion pour l’organisation des concours et examens de la filière

culturelle est assurée par le Centre interdépartemental de gestion (CIG) de la Grande Couronne àVersailles.

Dates prochaines : Retrait des dossiers d’inscription : du mardi 15 novembre 2016 au mercredi 14décembre 2016.

Date limite de dépôt des dossiers d’inscription : jeudi 22 décembre 2016.Les décrets et arrêtés définissant les diplômes de pédagogie délivrés par le ministère ont été revus

petit à petit, afin de réévaluer leur niveau au registre national de la certification professionnelle (RNCP) :le CA et le DE sont à présent inscrits respectivement au niveau I et au niveau II du RNCP.

La première formation diplômante au CA de Formation Musicale se fera au CNSMD de Paris à larentrée 2017, et très prochainement au CNSMD de Lyon, mais ce seront quelques étudiants parmi

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d’autres disciplines. Par la suite, il est probable que quelques pôles supérieurs déposent des demandesd’habilitation à délivrer ce CA.

B. MONTAGNOUXQuelques chiffres : 1800 diplômés sont en attente du concours entre 2011 et 2017 (pour les 3

formes de concours). En PACA, on aura besoin de 200 professeurs de FM dans les 15 ans à venir.

P. POUGETIl y a beaucoup d’attente sur tout ! On rencontre des problèmes pour recruter, pour maintenir des

postes, pour maintenir des labels, pour recruter des PEA et par conséquent pour maintenir les DEM dansles CRD puisque recruter des PEA coute trop cher !

P. RIBOURL’inspection de la DGCA a, ces deux dernières années, traité un nombre important de dossiers de

classement des conservatoires. Depuis 2006, ce classement est accordé pour une durée de 7 ans. Malgréla date butoir de 2013, peu de conservatoires ont demandé le renouvellement de leur classement à ladate butoir du 13 octobre 2013, ce qui a conduit à proroger de deux ans le délai, avec une échéance au 13octobre 2015, date à laquelle environ 50 % des demandes étaient parvenues au ministère.

Puis la DGCA travaille sur le cursus préparatoire à l’enseignement supérieur, avec l’idée dedissocier le diplôme (anciennement DNOP dans 2 régions, ou DEM) et cette préparation.

M. LE PADAN D’après vous, pour aller plus loin qu’un DEM de CRR, quelle formation technique serait nécessaire

en parallèle pour être bon musicien en plus d’être un bon pédagogue?

B. MONTAGNOUX (ancien professeur de FM) à l’entrée à l’IESM d’Aix-en-Provence, on recrute d’abord un “Musicien“.

J’ai vu des candidats en FM qui ne jouaient pas d’instrument et/ou ne chantaient pas. Le développementartistique reste indispensable en plus de la formation pédagogique.

P. RIBOURUn DNSP de FM n’est pas justifié car c’est avant tout un musicien qui va enseigner une matière.

Ceci reste en discussion entre APFM et ministère !!! Mais nous souhaitons de très bons musiciens-instrumentistes dont certains pourront choisir entre autres la voie de l’enseignement de la FM.

B. MONTAGNOUX A l’IESM, il y a un cursus complet car les étudiants qui arrivent sont souvent sans connaissance de

jazz, etc.

P. POUGETY-a-t-il un référentiel de compétences en FM comme celui qui existe pour les dumistes ? On

déplore une trop grande disparité d’un établissement à l’autre. Les limites d’âge, les modalités d’accèspeuvent bloquer des élèves dans certaines matières (piano par exemple). En conclusion, dans leVaucluse, par exemple, 50 % des enseignants n’ont pas de DEM et passeront une VAE, alors que ladiscipline réclame une grande technicité.

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(Claude VILLARD : on peut trouver le Référentiel d’activités et de compétences du diplôme d’étatde professeur de musique avec une liste des savoirs associés et spécifiques pour la FM sur l’ Annexe I del’arrêté du 29 mars 2006)

B. MONTAGNOUX On trouve les nouveaux écrits pour le CA sur le décret n° 2016-932 du 6 juillet 2016 relatif au

Diplôme d’Etat de professeur de musique.

M. LE PADAN Peut-on prédire une mutation des métiers d’enseignants de conservatoire ?

P. RIBOURL’enseignement artistique est une charge importante pour les collectivités qui demandent un

“retour sur investissement”, un élargissement des missions du conservatoire. Les professeurs de FM ontcertaines habitudes de réflexions et d’évolution, ils sont plus adaptables à des demandes de ce type,alors que certains professeurs d’instruments peuvent être quelque peu réfractaires à une évolution deleurs missions. Les professeurs de FM qui ont l’habitude de voir leurs élèves changer d’une année surl’autre sont d’une plus grande adaptabilité.

Oui, dans le futur, il faudra donc s’adapter…

B. MONTAGNOUXLes élèves sont très influencés par leur enseignant d’instrument. Dans le sud en particulier,

beaucoup d’enseignants n’ont pas évolué et enseignent comme leur professeur de l’époque (ils font leurs20 heures et seulement leurs 20 heures !)

Mais on voit les étudiants optimiser leur temps au maximum car ils sont en situation depaupérisation. Ils manquent de temps et de motivation pour leur pratique et leur réflexion (aller à desconcerts…) Ils doivent payer leurs études.

Virginie DAODans le cadre du DEM (au CRR de Paris), elle est amenée à valider des diplômes étrangers et

remarque que dans la formations initiale de leur pays, ils ont bénéficié d’une formation à la pédagogie cequi n’est pas le cas en France.

P. RIBOUROn n’a pas besoin en France d’une autorisation du ministère pour former aussi à la pédagogie !

L’habilitation des pôles a pour but de les autoriser à délivrer des diplômes (DE, DNSP).L’étude des contenus des différents diplômes étrangers (master) montre des disparités d’une

université à l’autre, d’un pays à l’autre.La France est le seul pays d’Europe à avoir deux niveaux de qualification pédagogique (DE, CA).

Claude VILLARD – Anne BERNOS

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L’exécution de la musique française aux XVIIe et XVIIIe s. Principes des traditions et de leur évolution

Conférence par Jean SAINT-ARROMAN

Sur quels éléments peut-on fonder une recherche concernant ce sujet ?1 − Le style d’exécution et celui de l’écriture varient sans cesse. Mais cette évolution n’est pas

uniforme : certains auteurs sont pionniers d’un nouveau style, d’autres sont très conservateurs.2 − Un style d’exécution ne naît pas du jour au lendemain. On a d’abord à faire à une tradition

orale. Cette tradition est alors très souple, plus proche de la sensibilité que de la théorie. On en repèreles traces et on peut s’en faire une idée. Par la suite, les théoriciens s’emparent de cette tradition et lathéorisent. On est alors souvent assez loin de la musique. Tenter une approche de la tradition orale estindispensable.

3 − Les ouvrages théoriques sont bien loin d’avoir toujours la même valeur. Un monde sépare L’Artde toucher le clavecin de François Couperin, des Eléments de musique de Cajon. On devra toujours nedonner à un ouvrage théorique que la place que son auteur mérite.

4 :− Il est assez rare que des théoriciens écrivent leurs ouvrages alors qu’ils sont jeunes. Trèssouvent, les ouvrages théoriques et les méthodes sont le fruit du travail de toute une vie. Ils résumentl’expérience d’un auteur et concernent donc plus les vingt ou trente années précédant la date deparution de l’ouvrage, que l’évolution à venir.

5 − Les œuvres musicales sont plus importantes que les ouvrages théoriques : l’étude d’un élémentde style doit réunir œuvres, traités et méthodes. C’est là que l’on voit clairement que les théorisationsinterviennent après les œuvres, elles interviennent souvent à la fin d’une évolution.

6 − Ayant étudié à fond un problème, on devra toujours avoir beaucoup de modestie quand aurésultat de sa recherche. Même si l’on arrivait à jouer exactement comme un interprète de telle ou telleépoque (ce qui est une pure illusion), ceux qui nous écoutent n’ont pas les mêmes oreilles et la mêmesensibilité : ils sont modernes.

Pour étudier un sujet, une méthode de travail sérieuse passe par quelques obligations :− Limiter exactement le sujet à étudier.− Réunir toute la documentation sur ce sujet et en classer les éléments par ordre chronologique.− Prendre conscience de la valeur de chaque élément retenu.− La documentation offre alors des caractéristiques et une évolution. On laisse parler les

documents plutôt que de s’en servir pour justifier des idées préconçues.Il conviendra de replacer le sujet étudié dans un contexte historique et culturel :− L’histoire, la littérature, les autres arts, la vie économique la vie sociale, participent à l’évolutionmusicale.− L’évolution des sensibilités n’offre pas de régularité et de constance.

Langue et musiqueLa terminologie expressive fait souvent appel à des images, car la musique échappe au

vocabulaire. Ce sont donc des métaphores.

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On dit d’un son qu’il est “rond”, alors que le terme “rond” s’applique à des formes. On dit qu’unesonorité est “moelleuse”, alors que ce terme s’applique à une matière. On dit qu’une interprétation est“brillante” alors que ce mot s’applique à la lumière.

De plus, les mots ne peuvent traduire parfaitement l’expression musicale, trop subtile et complexe.Un grand nombre de termes musicaux ont un sens complexe : la signification est multiple. Un

terme d’expression peut ainsi supposer ou exclure la lenteur du tempo. Un terme concernant le tempopeut être en même temps un terme d’expression.

Le vocabulaire ancien a changé de sens. Ainsi “médiocrité” exprimait un état qui n’a ni excès, nidéfaut. “Médiocre” n’était donc pas péjoratif. Ceci est valable pour les termes de tempo. Voici lescorrespondances entre les termes italiens et français. Les termes italiens se sont maintenus, la majoritédes termes français a disparu.

France Très lent Lent Grave Rondement Léger Gay Vite Très viteItalie Largo Adagio Grave Andante All° mod° Allegro Presto Prestissimo

Les titres des pièces nous échappent :Couperin − Pièces de clavecin − livre III (1722) “Le drôle de corps”Dictionnaire de Trévoux : “C’est un drôle de corps ; pour dire un homme facétieux.”Rameau − Nouvelles suites (1728), “L’Egyptienne” Il s’agit d’une bohémienne. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, on nommait ainsi les Égyptiennes.

Les sujets des œuvres lyriques françaises sont fort souvent tirés de la mythologie. La plupart desmusiciens et mélomanes n’ont plus que des connaissances très limitées et partielles de la mythologie.Les sujets des cantates leur sont donc étrangers.

Il est donc indispensable de présenter brièvement le sujet d’une cantate française aux auditeurs.Les textes anciens présentent de nombreuses métaphores dont le sens paraîtra obscur à l’auditeur

moderne. Ainsi, ce vers mérite-t-il une explication :

La nuit, trop lente en sa carrière devoit avoir deux fois abandonné les cieux(veut dire que la nuit s’était déroulée deux fois trop lentement).

De même, les nombreuses inversions des textes en vers peuvent nuire à la compréhensionimmédiate du texte : “des mortels étonnés n’éclairait point les yeux” est mis pour “n’éclairait point lesyeux des mortels étonnés”.

La langue déplace les accents : “éclairoit” a sa dernière syllabe accentuée. Mais si l’on dit“n’éclairoit point”, c’est le dernier mot qui porte l’accentuation principale.

L’expression, la déclamation, peuvent aussi modifier la place des syllabes accentuées. Mais c’estalors le choix du compositeur.

De la tradition orale à sa théorisation : Les inégalitésGénéralement, les traditions d’exécution se transmettent d’abord oralement, puis sont précisées et

enfin théorisées avant de disparaître.

Exemple sur les “inégalités”.

− Transmission orale1685 − Gigault, Livre de musique pour l’orgue.

“On pourra aussi pour animer son jeu plus ou moins en ajoutant des points où l’on voudra”.

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1702 – Saint-Lambert, Les principes du clavecin.“Quand on doit inégaliser les croches ou les noires, c’est au goût de décider si elles doivent être unpeu ou beaucoup inégales. Il y a des pièces où il sied bien de les faire fort inégales, et d’autres oùelles veulent l’être moins. Le goût juge de cela comme du mouvement”.

− Exemples de précisions apportées par la suite.1719 − Hotteterre, L’art de préluder

“Ce qui fait que les croches sont égales dans cette occasion, c’est premièrement de ce qu’ellessautent par intervalles, et par-dessus cela de ce qu’elles sont mêlées avec des doubles croches”.

Lully, Armide, couplet de la Passacaille

Clérambault, Cantates françaises, Livre III.

Au milieu du XVIIIe siècle, les inégalités quittent le terrain de la sensibilité. Elles obéissent à des“règles”, liant l’inégalité à la mesure, et que l’on peut résumer ainsi :

C à deux temps lents croches inégales

C à quatre temps modérés doubles croches inégales

2 une blanche par temps croches inégales

2/4 doubles croches inégales

3/2 noires ou croches inégales

3 (3/4) croches inégales

3/8 doubles croches inégales

c doubles croches inégales

4/8 (2/4 rapide) doubles croches inégales

6/4 croches inégales

6/8 doubles croches inégales

Les inégalités vont alors peu à peu disparaître.

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L’évolution n’est ni progressive, ni simultanéeLes solfèges

Pierre Maillart, Les tons ou discours sur les modes de la musique et les tons de l’EgIise, et ladistinction entre iceux, Lyon,1610.

A l’époque de Maillart, on dit souvent “tons” au lieu de “modes”Dans ce traité, dont le but est de distinguer les tons de l’église des tons musicaux ordinaires,

l’auteur donne une présentation claire du solfège pratiqué au début du XVIIe siècle.Le diapason est constitué de sept lettres indiquant les degrés de l’échelle musicale :

A B C D E F GLes trois octaves sont représentées − du grave à l’aigu − par des lettres majuscules, minuscules

simples, minuscules doubles :G A B C D E F G a b c d e f g aa bb cc dd ee ff gg

Ce sont des degrés, des sons. Mais cela ne correspond pas à un mode de lecture. Pour lire les notes,on ne se sert pas des lettres des sept mais de six noms de notes :

ut ré mi fa sol laChaque demi-ton doit être lu “mi−fa”. On doit donc lire :

si − ut : mi − fa / la − sib : mi−faAu cours d’une pièce, on est donc amené à changer le mode de lecture pour respecter cette lecture

des demi-tons. Il y a trois façons de lire :Par bécarre (b carré) : B−C est lu mi−fa

Par b mol (sib à la clef) : A−B est lu mi−faPar nature: E−F est lu mi−fa

(Mais Maillart signale que dès cette époque on rencontre déjà l’emploi du si).Jean Rousseau“Il faut encore remarquer que toutes ces Regles n’estant faites que pour apprendre à chanter laMusique, le rapport des Clefs n’est pas Propre pour ceux qui jouent des Instruments : car alors iI suffitde se servir seulement du b quarre, pourveu qu’on ait soin de ne toucher qu’un semi-ton du La au Si ;à cause du b qui est situé proche la Clef ou sur le mesme Degré.”

Traces de la solmisationExemple chez Michel de La Barre, Premier livre de pièces pour la flûte traversière avec la

basse continue, Paris, 1710.Tables des Suites figurant après l’Avertissement :

SUITE Ire D, la re, tierce majeure page – 1.SUITE IIe G, re sol, tierce majeure page – 10.SUITE IIIe E, si mi, tierce mineure page – 23.SUITE IIIe G, re sol, tierce mineure page – 33.SUITE IVe D, la re, tierce mineure page – 43.

Méthode par transposition de Frère (1706)Le solfège par transposition, que l’on nommait “solfège au naturel”, consiste à lire tous les tons

majeurs en Ut Majeur et tous les tons mineurs en ré mineur. La méthode est simple pour les tonsmajeurs, mais plus compliquée pour les tons mineurs.

Lorsqu’une pièce de musique module beaucoup, la lecture devient très difficile. C’est ce que luireprochera Rameau.

Morel de Lescer, Science de la musique vocale, Charleville, c. 1760.“Je conseille de chanter sans transposition, pour devenir bon Musicien.”

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Le solfège de l’agrémentationPrincipe général : les agréments sont chantés sous le nom de la note principale. Solfier ainsi une

phrase musicale, permet de lier parfaitement les agréments à la note principale, et préparel’instrumentiste à jouer à l’imitation du chant.

Cette méthode lie l’agrément à la note principale. C’est un excellent exercice.

Solfèges d’ItaliePierre Levesque et Jean-Louis Bêche, Solfèges d’Italie avec la basse chiffrée, Paris, 1778 (2e

édition) (il y eut de nombreuses rééditions).Ces Solfèges furent utilisés au Conservatoire de 1795 à 1822. On en trouve de nombreux plagiats.

Sous une forme ou sous une autre, ce type de solfège fut utilisé jusque dans les années 1950. En Italie,on accompagne en réalisant une basse non chiffrée. Levesque et Bêche ont chiffré la basse pourrespecter l’usage français.

La musique non écrite : Agréments ajoutés par l’interprèteLiberté de l’interprète et absence de notation.Le signe qui indique un agrément ne donne généralement pas le détail de l’exécution. La

sensibilité et le goût de l’interprète guident ses choix. Mais certains agréments ne sonttraditionnellement pas notés, mais ajoutés par les interprètes.

Le pincéCet agrément indiqué par un signe au clavecin, à l’orgue, ou à la viole de gambe, n’est

généralement pas noté pour la flûte, et n’est jamais indiqué pour le violon, le violoncelle ou le chant.1707 – Hotteterre-le-Romain, Principes de flûte

“Le battement se fait en frappant une ou deux fois de suite, et le plus vite qu’on peut. sur le troutoujours plein ou tout bouché, et le plus proche du ton où on veut le faire. (...) Il participe aussi d’unson inférieur.” “Ces agréments ne se trouent pas marqués dans toutes les pièces de musique , et ne lesont ordinairement que dans celles que les maîtres écrivent pour leurs écoliers ; voici de quellemanière.”

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1741 − M. Corrette, Méthode théorique et pratique (violoncelle) .“Le pincé est l’agitation de deux sons battus deux ou trois fois selon la valeur de la note, il ne diffèred’avec la Cadence qu’en ce qu’il se bat avec le demi-ton au dessous de la note sur laquelle on veut lafaire.” “Le Pincé se peut faire sur des notes d’une longue durée, il n’est jamais marqué sur la musiquepour le violoncelle.”

l74l – Rameau, Pièces de clavecin en concert.“On notera que les pincés sont écrits à la partie de clavecin mais non aux parties de flûte et deviolon. Ce n’est que le respect de l’usage ancien. Ces pincés doivent donc être ajoutes aux parties deflûte et de violon, à l’imitation de la partie de clavecin.”

1762 − M. Corette, Les dons d’Apollon.

“Il se marque [le martellement : le pincé] dans les anciens livres de guitare ainsi V ou + E F.Présentement on ne le marque plus. C’est le bon goût et l’usage qui doit déterminer quand ilconvient de le faire.”

L’absence de notation − L’accent1764 − Duval, Principes de musique, “De l’accent”

“C’est un agrément qui se fait à la fin d’une tenue par un coup de gosier composée d’une notepassagère un degré au-dessous avec la répétition du son de la tenue.” “On ne l’indique pas dans lesmusiques ordinaires”.

Musiques nationales ou provinciales

Certaines danses de la suite ont des caractères différents en France et en Italie. Les allemands ontpuisé aux deux sources. En Italie, il existe des différences de style entre les provinces.Allemande

Il existe trois sortes d’Allemandes :− L’allemande française classique, écrite à quatre temps très modérés, en deux parties avec

reprises. Elle a un caractère généralement fier. Souvent, les doubles croches peuvent être jouées inégales(inégalités assez prononcées).

(Allemande de Marin Marais, 1686)

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− Une pièce intitulée “allemande” ou “allemanda”, écrite sous l’influence de l’allegro de sonateitalienne, qui est plus rapide et doit être exécutée dans ce style italien.

(Allemande de Boismortier, 1725)

− Il existe également une “allemande” de la fin du XVIIIe siècle, danse à deux temps vifs, souventnommée “contre-danse”, et qui n’a aucun lien avec la formes précédentes.

Courante française

Elle est généralement écrite à trois temps lents, indiqués par 3 ou 3/2. C’est la plus lente desdanses de la suite française. Elle a remplacé la pavane, et disparaît au milieu du XVIIIe siècle.

Son écriture se distingue par un mélange fréquent de mesures pensées à 3/2 et à 6/4. Ces mesurespeuvent se succéder ou être superposées.

Il est très important de bien connaître toute l’agrémentation vocale française et ses possibilités :c’est l’exécution subtile de cette agrémentation qui permettra aux interprètes de jouer ces pièces avec lalenteur voulue.

(A. D. Philidor, 1712)

Courante italienneElle se joue à trois temps vifs, en détachant fort souvent les croches.1724 − Boismortier

Gigue françaiseGigue classique-type (Lully par exemple)Mesure à 6/4, parfois 6/8 / Débute par une anacrouse / Structurée en 2 parties avec reprises /Caractère essentiellement rythmique / Jeu détaché

1703 − De Brossard, Dictionnaire de musique“Giga ou gicque, ou gigue (car les étrangers l’écrivent de ces trois manières) est un air ordinairementpour les instruments, presque toujours en triple qui est plein de notes pointées et syncopées, qui enrendent le chant gay et pour ainsi dire sautillant”.

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Après 1700, on utilise très souvent le 6/8 pour écrire la gigue.Exemples de gigues françaises caractéristiques :

1670 − Chambonnières, Pièces de clavecin (Livre I)

1670 − Chambonnières, Pièces de clavecin (Livre II)

On remarque les rythmes suivants :

Il faut y ajouter les mélanges de mesures, les mesures doubles, les mesures divisées par deux,produisant toujours des effets rythmiques expressifs.

La gigue française a donc une expression particulière : rythmes contrastes, sauts, vivacité,fantaisie.

Gigue à I’italienneGigue-type: Mesures 6/8 9/8 12/8 / Allure essentiellement mélodique / L’expression vient du

phrasé / Structure en deux parties avec reprises1712 − Piani (Desplanes − auteur italien, naturalisé français), Sonates pour violon (préface)

“Dans les mouvements de gigue, c’est la diversité des coups d’archet qui donnent tout le brillant àl’exécution”.

L’évolution du style : de la préciosité au style classique

1666 − Milet, L’art de bien chanter ou la belle méthodeVoici un cas de compositeur/théoricien ayant voyagé en Italie, et rapportant en France une

agrémentation typique de la Renaissance italienne, et ayant assez peu à voir avec le style français.“Je ne pense pas que l’on puisse bien l’enseigner paraucun Exemple escrit, je ne laisse neantmoins de vousen marquer icy un autant qu’il m’est possible, poursatisfaire à vostre curiosité. Exemple”.

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1678 − J. Rousseau, Méthode claire, certaine et facile pour apprendre à chanter la musiqueCet auteur propose généralement des solutions trop théoriques, manquant de souplesse.

Toutefois, on a ici de précieuses indications sur les différentesexécutions de l’appui du tremblement.

“La Cadence avec Appuy se fait par anticipation de Valeur &de Son, nommant une Note sur une partie de la Valeur decelle qui la précède, & sur le Son de celle dont la situation estimmédiatement au dessus d’elle”

Exemple extrait des airs de Bacilly (port-de-voix exécuté avant le temps et appui du tremblementexécuté avant le temps) :

Application claire à la musique instrumentale.

1665 − Nivers, Livre d’orgue contenant cent Pieces de tousles tons de l’Eglise. p. 4 :

1666 − Michel Lambert, Les airs de Monsieur Lambert. Paris, 1666.

mélodie du premier couplet

double correspondant

basse continue

Toute cette agrémentation correspond à la “préciosité” dans la littérature. Les textes des airs decour sont de qualité littéraire médiocre. La musique est souvent fort belle. Les doubles sont trèscomplexes, et très ornés. Les airs de cour sont destinés aux ruelles.

Jean SAINT-ARROMAN

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Le manuscrit de Montpellier(BIU section Médecine H196)

et la polyphonie parisienne du XIIIe siècleConférence par Gisèle CLÉMENTMaître de conférences en musicologie

à l’Université Paul-Valéry – Montpellier 3

1. Histoire et contenu du manuscritIl est rédigé à partir de 1260 et contient 8 fascicules. Les six premiers sont rédigés vers cette date.

Le 7e l’a été vers la fin du XIIIe siècle et le 8e, prévu sans doute pour ouvrir un autre manuscrit, a lui étérédigé vers 1310. Il s’agit de la plus importante anthologie de motets du XIIIe siècle. Les enluminuresmontrent qu’il a été rédigé à Paris, mais on ne sait rien précisément de son commanditaire. Différenteshypothèses ont été avancées à ce sujet, sans qu’un consensus puisse être établi. Selon la premièreéditrice du manuscrit, Yvonne ROKSETH, qui appuie ses propos sur le choix des saints célébrés dans lesorgana du premier fascicule, il aurait été rédigé pour l’abbaye Saint-Germain d’Auxerre. D’autres commeMarie WOLINSKY, historienne de l’art américaine, y voit une l’influence parisienne plus marquée.

Les premiers écrits au sujet de ce manuscrit remontent au XVIIe siècle, où il est acquis par lafamille BOUHIER, magistrats à Dijon et grands bibliophiles. Le manuscrit est relié de nouveau et rogné,occasionnant des enluminures tronquées. Les BOUHIER vendent leurs manuscrits peu avant laRévolution à l’abbaye de Clairvaux. Les biens du clergé étant confisqués durant la Révolution, lesouvrages manuscrits et imprimés sont alors déposés dans les villes (dépôts littéraires).À la toute fin duXVIIIe siècle, NAPOLÉON entreprend de former des médecins et réouvre notamment la faculté demédecine de Montpellier. Gabriel PRUNELLE, bibliothécaire de cette faculté et humaniste, prônant laconnaissance des Humanités dans la formation même des médecins, est envoyé comme émissaire par leministre CHAPTAL pour recenser les manuscrits constituant ces dépôts littéraires. Et c’est ainsi que vers1802, le manuscrit entre dans la bibliothèque de la faculté de médecine de Montpellier, sous la côte H196. Il ramènera de ses recherches un autre manuscrit célèbre et de grande importance historique etmusicologique : le Tonaire H 159, recueil de pièces liturgiques classées par modes, et donc à caractèrepédagogique. Il présente une double notation, neumatique et alphabétique, associant la précision deshauteurs à la précision rythmique des neumes, et permettant au lecteur moderne la possibilité detranscrire ces pièces avec précision.

La première édition du chansonnier H 196 a été réalisée dans les années 40 par Yvonne ROKSETH,professeur de musicologie à l’université de Strasbourg.

Le fascicule 1 contient des organa et des conduits. Pour les 7 autres cahiers, il s’agit uniquement demotets, essentiellement anonymes bien que certains peuvent être attribués à Pierre de la CROIX. Lesdifférentes périodes de rédaction montrent une évolution sensible de la notation. En effet, si les organasont en notation modale, les motets sont surtout en notation pré-franconienne, franconienne (1270-1280), et pétronienne (de Pierre de la CROIX).

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2. Problématiques stylistiques et de notation

a) Évolution du motet à partir de l’organumL’organum n’est pas un genre ni une forme, c’est une façon de chanter en polyphonie. La société

médiévale est une société de l’oralité, et la primauté est donnée à la parole. Les chantres de la liturgiesont des clercs. Et à la messe, la parole sacrée n’est pas parlée comme aujourd’hui, maissystématiquement cantillée, déclamée, vocalisée.

Les pièces dévolues au chant sont les suivantes :Introït chœurGraduel alternance soliste et chœurAlléluia alternance soliste et chœurOffertoire solisteCommunion chœur

L’Alléluia est traité en organum sur les passages solistes :Alléluia : soliste puis reprise du chœurJubilus (mélisme sur le “a” de Alleluia) : chœurVerset : solisteFin du verset : chœur

Dans un organum, la voix de teneur (Tenor) ou vox principalis chante la mélodie grégorienne enétirant longuement chaque note (immensurabile). Au moment du verset cependant, la teneur retrouve uncaractère mesuré, et adopte un rythme plus proche des autres voix. Sur cette voix de teneur, 1 à 3 voixorganales (vox organa : duplum, triplum, quadruplum) à caractère mélismatique sont ajoutées enpolyphonie. Les organa ont vraisemblablement été créés à travers un travail d’improvisationpolyphonique, préparé au préalable, puis consigné par écrit. Dans son De musica mensurabili (1340), Jeande GARLANDE décrit comment est composé l’organum. Il y utilise le vocabulaire et les armes de laRhétorique à laquelle les chantres sont formés dans le cadre de leurs études du Trivium universitaire(grammaire, rhétorique, dialectique). Il s’agit d’un enseignement viva voce. Les sections d’organum où lateneur retrouve un caractère mesuré sont appelés “clausules”, et sont à l’origine de la création du motet,par l’adjonction d’un texte sur les voix organales. Le motet peut donc être considéré comme un trope del’organum.

Le motet est toujours pluritextuel, s’appuyant sur une mélodie de plain-chant. Certains motetscependant s’appuient sur des mélodies profanes, notamment d’Adam de la HALLE. Les voix et textesajoutées sont des commentaires de la voix principale, communément appelés gloses. La relationsémantique entre les différents textes est parfois ténue, mais elle existe toujours. Ces textes d’essenceallégorique sont issus d’un art du discours et de l’exégèse qui comprend quatre niveaux de lecture :littéral, allégorique, anagogique, et topologique. Le plaisir de l’auditeur naît de sa capacité à comprendreet naviguer dans ces différentes strates sémantiques. Certains commentaires d’époque illustrent cetteidée, notamment celui du théoricien Jean de GROUCHY, dans son traité Ars musicæ (ca. 1300) :

Cantus autem iste non debet coram uulgalibus propinari. eo quod eius subtilitatem non aduertunt nec ineius auditu delectantur. Sed coram litteratis et illis qui subtilitates arcium sunt querentes. Et solet in eorumfestis decantari ad eorum [de]corationem, quemadmodum cantilena que dicitur rotundellus in festisuulgalium laycorum.

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“Ce type de chant ne doit pas être représenté devant les vulgaires pour la raison qu’ils ne peuvent pasremarquer leur subtilité ni prendre plaisir à leur écoute. Mais il doit être chanté devant les lettrés etceux qui recherchent les subtilités de l’art. Il est coutume de les déchanter durant leurs fêtes pour lesdivertir de la même manière que l’on chante les cantilènes appelées rotundellus dans les fêtes deslaïcs peu éduqués.”

Le motet est donc créé par et pour des clercs, et peut se chanter à diverses occasions, religieusesou non.

Exemple de l’Alleluia Nativitas : on le trouve au folio 9 sous forme d’ organum, écrit en partition, et au folio100 sous forme de motet, avec textes ajoutés aux voix de duplum et triplum, et donc en voix séparées :

Organum Alleluia Nativitas, sur les paroles “ex semine”, folio 11r

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Motet Ex semine, folio 100v (début de la teneur et duplum) / folio 101r (fin de la teneur et triplum)

Motet Ex semine, transcription

b) Rôle et fonction de la notationLe Moyen Âge ne connaît pas le concept de valeur absolue. Il y est question de proportions et de

geste vocal (neumes), d’une empreinte corporelle. Les valeurs rythmiques sont relatives au contexterythmique dans lequel elles se trouvent. La notation rythmique franconienne reconnaît trois valeursrythmiques : la Longue (L), la Brève (B), et la Semi-Brève (SB). Par exemple, une B peut valoir autantqu’une L selon les valeurs qui la suivent ou qui la précèdent. Ces valeurs rythmiques sont issues de lanotation modale antérieure, cette dernière s’appuyant sur la prosodie du texte. La notation modaledistinguait 6 modes rythmiques. Après FRANCON, Pierre de la CROIX dépasse le cadre du système desmodes rythmiques et introduit le point de division, initiant la notation qui permettra le développementde l’Ars Nova au XIVe siècle.

L’historiographie de la notation rythmique médiévale pétronienne a abordé ce problème sousl’angle presque exclusif de l’écrit, du décodage des valeurs, et n’a donné que peu de cas de son ancragedans la prosodie et de l’art de la déclamation, de l’art de porter un discours. Il reste donc aujourd’hui àexplorer ces possibilités pour poursuivre le travail de valorisation et d’interprétation des musiquesmédiévales.

Baptiste CHOPIN

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L’Opéra Comédie de MontpellierConférence par Sabine TEULON-LARDIC

IntroductionSabine TEULON-LARDIC commence par remercier le

bureau de lui accorder sa confiance et de lui donner l’occasion departager le fruit de ses recherches. Elle note que la visite del’Opéra Comédie est une excellente introduction à saconférence.

La programmation de la musique lyrique et symphonique àl’Opéra Comédie a des implications socioculturelles et pas seulement artistiques et musicales, et ce,aujourd’hui comme en 1900. Le but est d’analyser dans la durée comment évolue cette diffusion,notamment ce qui est constant et ce qui l’est moins.

Le propos sera organisé en deux temps : les années 1900 et les années 2000. La comparaison de cesdeux époques si différentes est intéressante du point de vue de la programmation artistique deMontpellier.

Préambule : un peu d’histoire…En 1900, Montpellier, cité du Bas-Languedoc de 75.000 habitants, va énormément gagner à faire

partie du réseau ferré PLM (Paris, Lyon, Méditerranée). C’est, du reste, ce qui permettra à MASSENET devenir assister à des répétitions à l’Opéra de Montpellier.

En 2000, avec ses 272.000 habitants, la ville est devenue la 2ème métropole régionale de la granderégion Occitanie derrière Toulouse.

Sur le plan socio-culturel, Montpellier est un grand croisement méditerranéen grâce à sa positiongéographique. Depuis très longtemps, elle est un carrefour notamment sur le plan du commerce et desflux migratoires. Elle a ainsi fondé sa renommée et puisé sa force dans le commerce des étoffes et desrobes puis, à partir de 1900, du vin aussi appelé “or rouge”.

Les infrastructures musicales, quant à elles, se développent parallèlement pour accompagner cedéveloppement général de la ville.

En décembre 1755, le théâtre de Montpellier est inauguré avec la création d’une “Académie deMusique” régie par des notables de la ville. Elle comporte deux conservateurs et des professionnels. Acette occasion est donné l’opéra Pyrame et Thisbé de François REBEL et François FRANCŒUR.

Au XIXe siècle, la vie musicale montpelliéraine est très riche et pas seulement à l’Opéra. Depuis leSecond Empire, de nombreuses sociétés musicales et orphéons sont très vivaces et inondent trèsrégulièrement la vie des citadins sur le plan musical.

En 1886 est créée l’“École de Musique” qui comporte onze classes instrumentales et vocales. Ellesera labellisée “École Nationale de Musique” en 1889.

C’est en 1888 qu’est inauguré l’Opéra Comédie construit par Joseph-Marie CASSIEN-BERNARD,émule de Charles GARNIER à Paris. Le fait qu’il y ait une salle de concert en plus d’une salle de spectaclemontre cette volonté d’étoffer la diffusion musicale en dehors de l’opéra à proprement parler. Cette salleavait alors 700 à 800 places.

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En 1890 naît la première “Société de Concerts Symphoniques” en province loin de Paris. Lesconcerts ont alors lieu dans la salle Molière encore en service aujourd’hui et où se déroule la présenteconférence. Cette salle peut accueillir 350 personnes.

En 1905, Charles BORDES, fondateur de la “Schola Cantorum” de Paris, se retire à Montpellierpour des raisons de santé et y en fonde une autre. Celle-ci permet, comme à Paris, la diffusion de lamusique ancienne et religieuse.

Il faut attendre 1979 pour que soit créé par le Maire Georges FRÊCHE, “l’Orchestre Municipal”de Montpellier, qui devient “Orchestre Régional” en 1984 avec un effectif de 36 musiciens et enfin“Orchestre National” en 1999 avec ses 92 musiciens actuels. Parallèlement est créé en 1985 le Festivalde Radio-France Montpellier-Languedoc-Roussillon qui accueille de nombreux orchestres et qui estdiffusé sur de nombreuses radios de par le monde.

Juste après, en 1986-87 est construit le Zénith Sud avec sa jauge de 6300 places ainsi que la scènerock Victoire 2 de Saint Jean de Védas.

En 1990, c’est au tour du Corum de voir le jour avec plusieurs salles dont l’Opéra Berlioz.En 2010, un complexe nommé Salle Aréna voit le jour, réunissant une salle de spectacle de 14.000

places et un palais omnisports.L’Opéra Comédie subit des travaux de rénovation de 2010 à 2012 pour un montant de 14 millions

d’euros. Il rouvre ses portes le 22 juin 2012 avec les Noces de Figaro de MOZART dans une mise en scènede Jean-Paul SCARPITTA.

Les années 1900…Nous sommes alors à la mi-temps de la IIIe République. La vie

musicale est très riche avec, comme dans la plupart des villes du typede Montpellier, des outils de diffusion au complet : orchestre, ballet,chœur, troupe de théâtre et de chanteurs. On compte alors 6 à 7concerts par semaine permettant au public d’assister à desproductions théâtrales et musicales : opéras, opérettes, pièces dethéâtres…

Il y a peu de créations à Montpellier, mais les premières y sontdonnées en moyennes de 1 à 4 ans après leur création ailleurs.

Ainsi, la première de Carmen est donnée après seulement cinq répétitions en 1879. Lohengrin seradonné en 1892.

Deux compositeurs montpelliérains, Aymé MAILLART (1817-1871) et Émile PALADILHE (1844-1926), partent faire carrière à Paris. Mais leur ville d’origine ne les oublie pas : Les Dragons du Villars deMAILLART est donné tous les ans à Montpellier. Quant à l’oratorio Les Saintes Maries de la Mer dePALADILHE, il est créé à Montpellier puis connaît un large succès à Paris.

Y a-t-il des opéras fétiches dans la production montpelliéraine ? Comme dans toutes les villes àl’époque, sont régulièrement donnés Carmen, Faust, La Traviata… Mais c’est l’œuvre Les Huguenots deMEYERBEER qui connait le plus franc succès, sans doute eu égard à l’écho qu’ils ont auprès de laminorité active des protestants de la ville. C’est du reste cet opéra qui servira pour l’ouverture de l’opérade Montpellier en 1888 ainsi que pour celle du Corum en 1990.

Il ne faut pas oublier les prestations bi-hebdomadaires des harmonies militaires qui, à l’Esplanadeou aux Jardins du Pérou, jouent des arrangements pour leurs formations des extraits d’opéras en vogue àl’époque.

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En 1897, un premier festival a lieu. MASSENET y est invité et c’est son opéra Thaïs qui sera donnéavec notamment la basse ultra renommée de l’époque Francisque DELMAS.

La culture occitane n’est pas laissée de côté. En effet, la Mairie prête l’Opéra à des associationsoccitanes telle “Jacques le Conquérant” qui diffuse des musiques et chansons. En juin 1906 a lieu un“Congrès National du Chant Populaire” ; à cette occasion, la grande cantatrice Emma CALVE, d’origineaveyronnaise, interprète des chansons languedociennes dans la Salle Molière.

On peut se demander s’il existe un répertoire européen à cette époque à Montpellier. C’est le cascomme partout ailleurs. On trouve donc dans les programmations des opéras italiens (ROSSINI, VERDI,DONIZETTI), et allemands (Lohengrin de WAGNER). On ne compte pas moins de 10 représentations deMiss Helyett d’Edmond AUDRAN (1840-1901), presque autant que Lohengrin, ce qui aujourd’hui seraitdécrit comme une “dissonance culturelle”.

Concernant la musique symphonique, il faut attendre octobre 1890 pour que soit créée la première“Société de Concerts Symphoniques” qui connaîtra 13 saisons dans la salle Molière. Le répertoire laisseune large place à la musique à programme, aux suites d’orchestre et autres poèmes symphoniques. Cerépertoire l’emporte presque sur la symphonie à proprement parler. Cette musique descriptive est plusfacile à recevoir par le public et inspire grandement les journalistes qui glosent à son sujet. Parmi cesmusiques, La Danse Macabre de SAINT-SAËNS est très largement plébiscitée jusqu’en 1903 ; c’est sansaucun doute parce qu’Henri CAZALIS, auteur du texte qui lui sert de préambule est montpelliérain.Outre SAINT-SAËNS, des compositeurs comme BEETHOVEN, WAGNER, MENDELSSOHN, MASSENET etGRIEG sont également très représentés. Il est à noter que plus de la moitié des compositeurs joués sontcontemporains.

Les années 2000…C’est en 1979 qu’a lieu la création de l’ “Orchestre de Montpellier”. Il résulte de la fusion, opérée

par René KOERING, surintendant de la musique et directeur du festival Radio-France, de l’OrchestreSymphonique de Montpellier et de l’Opéra de Montpellier. Cette fusion fut bien évidemment possiblegrâce à des subventions publiques (ville, département, région et État). L’aide des mécènes qu’avaientconnu les structures au départ ne suffisaient plus. La diffusion musicale se fait alors dans les deuxsalles : Opéra Comédie et Opéra Berlioz depuis 1990. L’effectif orchestral de 90 musiciens environ peutse scinder en deux et assurer deux productions simultanées.

Il existe également, depuis 1989, un Opéra Junior qui assure une production de spectacles et deconcerts de façon autonome plusieurs fois par an. Il y a aussi un service jeune public, des concertsanimés par des étudiants de l’Université et enfin des conférences assurées autour des concerts par lesprofesseurs de cette dernière.

L’une des marques de l’Opéra Orchestre est de mutualiser la création et la diffusion d’œuvres : 24œuvres lyriques dont Perela uomo di fuomo de Pascal DUSAPIN et 20 œuvres symphoniques dont laChamber Symphony de John ADAMS.

Depuis 1990, l’Opéra Orchestre est également un lieu de résidence pour des ensembles baroques :“Les Talents Lyriques”. “Le Concert Spirituel” et actuellement “Les Ombres”. Hervé NIQUET anotamment produit le King Arthur de PURCELL avec une mise en scène originale et humoristique deSHIRLEY et DINO.

Quelle est la spécificité du répertoire aujourd’hui avec ce nouvel orchestre ?La musique baroque fait maintenant partie intégrante de ce répertoire tout comme la musique

d’aujourd’hui qui y tient également une large place, notamment les compositeurs de l’Amérique de

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Nord. BEETHOVEN reste très représenté avec un glissement progressif de la musique symphonique versla musique de chambre.

Depuis 1992, il y a beaucoup plus de créations que de premières. Par exemple, fut créé en 2015-2016 l’Hirondelle Inattendue du compositeur Simon LAKS (1901-1983).

Enfin, la dernière tendance initiée par René KOERING semble être celle du théâtre musical avecPar delà les Marronniers de Jean-Michel RIBES sur des musiques de Reinhardt WAGNER en 2016 etSoupe Pop de Marie-Eve SIGNEYROLE en 2017 avec des musiques actuelles.

La structure Opéra Junior est également très dynamique et se voit attribuer des commandes etdes créations. La dernière en date est celle, en juin 2016, d’Appergone du jeune compositeurmontpelliérain Guilhem ROSA (1985 - ).

La dernière griffe de l’ONM est de redécouvrir les répertoires romantiques et post-romantiques :ce fut le cas dans les années 1980 pour Le Désert de Félicien DAVID. Parfois, c’est la venue d’un chef quifavorise cette redécouverte : en 2010, la Rhapsodie Roumaine de Georges ENESCO est donnée par le chefaméricain d’origine roumaine Lawrence FORSTER. Enfin, cet été 2016, de très larges extraits de Aladdinde Carl NIELSEN ont été donnés sous la baguette du chef actuel, d’origine danoise, MichaelSCHONWANDT.

Peut-on parler d’un début de mixité entre musique savante et musique populaire ? Oui, sansdoute. Voici quelques exemples :

concert au Pont du Gard en collaboration avec le Dj Jeff MILLS festival de musique électroacoustique KLANG qui a lieu en juin à la Salle Molière. Cette année, le

jeune compositeur Julien GUILLAMAT est en résidence à l’ONM. expérience musique et arts graphiques avec un concert BEETHOVEN sur des projections du

vidéaste Tal Isaac HADAD qui détourne les codes du rituel du concert. expérience musique et danse avec un spectacle ayant eu lieu l’année dernière autour de la

musique baroque et du stepping. musique et cinéma avec la projection actuelle de La Ruée vers l’Or de Charlie CHAPLIN.

ConclusionL’ONM a donc une démarche qui contribue à redessiner les contours des patrimoines d’hier et

d’aujourd’hui et ce, selon trois axes : élargissement et pluralisme des esthétiques, vitalité des créationset diversification des répertoires. Il y a également la volonté de travailler en collaboration avec desmusiques d’autres pays et d’autres cultures.

L’offre culturelle portée par Montpellier est riche et diversifiée.Cela résulte d’une lente évolution marquée par ces acteursprogressistes et audacieux. Dernièrement, l’ONM a su s’adapter auxnouvelles politiques culturelles.

Comme le disait Claude LÉVI-STRAUSS en 1952 dans Race et Histoire : “Aucune culture n’est seule. Elle est toujours donnée en coalition avec d’autres cultures et c’est

cela qui lui permet d’édifier des séries cumulatives”.

Florent CHOLAT

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Faire évoluer musicalement les épreuves de fin de cycleÉchanges pédagogiques

L’évaluation et le caractère musical sont des sujets importants dans la réflexion de notrediscipline. De plus en plus d’écoles de musique sont confrontées au sujet et veulent rendre plusmusicales leurs épreuves longtemps fondées sur des aspects techniques.

Cette évolution n’est généralement plus remise en cause mais se pose la question des outils, desmoyens d’y parvenir notamment dans un contexte de cours collectifs : peut-on et doit-on tout évaluerdu cours de Formation musicale ? Comment ne pas alourdir les épreuves ? Comment améliorer lamusicalité de notre programme pédagogique ? sont des questions récurrentes de notre profession.Chacun a conscience que faire évoluer musicalement les épreuves de fin de cycle est sensiblement lié aucontenu de nos cours.

Aussi, beaucoup d’écoles de musique sont confrontées à des pertes d’élèves. Les adolescents ontbeaucoup de travail et il se dégage un certain étouffement après quelques années de formation musicale.On entend ainsi une volonté et une demande municipale de proposer “autre chose” pour regagner dupublic.

Malgré le cadre sensiblement différent (territoire, structure) où enseignent les participants, lespréoccupations se ressemblent et l’on a pu découvrir les expériences et les pistes de réflexion de chacunpour intégrer de plus en plus la musicalité dans les épreuves de formation musicale.

Ainsi, avec l’utilisation croissante de l’instrument dans nos classes, les exercices et les épreuvesde fin de cycle sont de plus en plus musicaux. Cela améliore le travail en autonomie, renforce les liensavec les professeurs d’instrument et privilégie la création et l’invention.

Selon les établissements, l’épreuve préparée de fin de premier cycle est vocale ou instrumentale.L’utilisation de l’instrument en premier cycle a été soulevée. Une adaptation des évaluations au niveauinstrumental de chaque élève dans un cadre collectif n’est pas toujours chose aisée. On peut parexemple s’adapter à la difficulté des instruments en gardant un support harmonique. Unaccompagnement au piano permet souvent d’ajouter un caractère musical à des évaluations sur une,deux ou trois notes.

Il est parfois proposé des modules pour le second cycle. Ces modules permettent de s’adapter plusfacilement au cursus de chaque élève. L’évaluation peut se faire par contrôle continu auquel on ajoutedeux oraux en fin d’année : un oral technique devant le professeur et un oral musical devant un jury.L’oral musical comprend les compétences en chant (préparée et déchiffrage) et la FM à l’instrument. Lapossibilité de créer un diplôme de second cycle regroupant la FM, la pratique instrumentale et lapratique collective a également été évoquée.

En ce qui concerne la pratique vocale pour les épreuves de fin de cycle, on retrouve le plus souventun ou plusieurs chants préparés dont l’objectif principal est de juger les capacités musicales des élèves.

L’accent a également été mis sur le déchiffrage chanté pour lequel on constate la difficulté desélèves face à cette épreuve qui demande d’assimiler beaucoup de paramètres techniques et à laquelle ondemande aussi de donner une valeur musicale. La culture du chant, les problèmes liés à l’adolescence, lerapport à sa voix nous font entendre de plus en plus souvent des élèves en difficulté sur cette épreuvealors que l’on connaît par ailleurs leur capacité dans le cadre de projets. Mettre en groupe peut alors êtreune solution. Par exemple, une mise en loge commune avec deux groupes de trois élèves est mise enplace. Celle-ci dure une heure avec une partition à déchiffrer. Il s’agit d’un rondo dans lequel le refrainest chanté en tutti et les trois couplets en soliste. Le travail d’ensemble met les élèves en autonomie etpermet de favoriser l’organisation, la solidarité dans le travail, le choix de leur rôle ou le développement

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d’un “leadership”. Ce travail peut également être accompagné d’une partie personnelle dans laquelletrois pièces du répertoire sont à apprendre par cœur.

Nous avons pu aussi profiter de l’expérience du conservatoire d’Évryqui propose un profil atypique. La pédagogie à l’instrument commence dèsle premier cycle et la musique est au cœur du dispositif des évaluations defin de cycle. Elles se présentent sous la forme d’une évaluation continue etd’un concert-examen.

Le concert musical a lieu uniquement pour les fins de cycle. Iln’empêche pas les autres projets au cours du cycle mais il se veut plus abouti

et se prépare donc en amont. Aucune barrière n’est donnée pour laisser libre cours aux envies des élèves,du professeur ou au(x) partenariat(s) avec d’autre(s) classe(s) de l’établissement. Il est ainsi possible des’adapter au groupe (leurs âges, leurs instruments, leurs caractères…). Le système a été mis en place il ya deux ans. Les professeurs ont ensuite visionné des vidéos de différents projets dont aucun n’étaitressemblant (conte, musique de film, gastronomie…). Le format a été gardé en second cycle auquel onajoute un passage devant le jury.

Le concert examen est ainsi un projet de classe (une ou plusieurs). Il est basé sur un thème à partirduquel on peut proposer un panel des acquis rythmiques ou mélodiques. Un tableau d’items a étéélaboré afin de donner des repères aux professeurs et aux jurys : le chapeau pédagogique. La formationmusicale a été longtemps fondée sur la technicité : les items élargissent à cette dimension les autresaspects de notre enseignement comme : la posture corporelle, la structure de la phrase, la musicalité,l’expression artistique ou la concentration. Elles ajoutent ainsi un deuxième rideau aux critères plushabituels d’évaluation. Au conservatoire d’Évry, ces items sont mis au premier plan, ce qui implique unebase technique solide même si elle est moins pointue. L’expérience a démontré que les capacités desélèves n’en étaient pas pour autant amoindries.

Faire évoluer les évaluations de fin de cycle vers plus de musicalité oblige à rapprocher le contenudu cours de la vérification. Le sujet du contrôle continu a donc été plusieurs fois évoqué.

La vérification devient de plus en plus musicale par l’utilisation du répertoire. L’évaluation desacquis en fin d’année est de plus en plus difficile d’où la nécessité de faire confiance au professeur sur lecontrôle continu. De plus en plus souvent, le contrôle continu prévaut techniquement et musicalement.Tout évaluer soulève également le problème d’emploi du temps des élèves, notamment en fin d’année.

À Évry, le concert musical vient conclure le cycle d’évaluation. La réflexion du conservatoire aamené à une évaluation formative (basée sur des appréciations). Le professeur est garant du contrôlecontinu et le jury vient valider l’aspect musical. Un programme des acquis minimum a été mis en placeet est évalué tout au long de l’année. Cette évaluation figure dans le dossier d’élève. Le concert musicalest ainsi la validation d’un groupe classe dans son ensemble.

Faire de la musique dans nos classes de formation musicale permet le mélange des genres et desesthétiques. L’utilisation du chant, des instruments, des rythmes corporels… permettent de faire évoluerles épreuves vers plus de musicalité.

De nombreuses écoles en ont conscience et proposent des pistes de réflexions innovantespermettant cette évolution : concert examens, modules, programme d’acquisition minimum, diplôme desecond cycle, partenariats, invention, création, chapeau pédagogique… Le conservatoire de Rueilréfléchit également à la possibilité de clôturer l’évaluation en fin de 3e année de second cycle (surquatre). Dans un contexte de forte offre extrascolaire, de baisse des budgets, l’évolution de l’évaluationdevra continuer de s’adapter et tendre à rendre nos élèves acteurs de leur apprentissage.

Joffrey DELEMAIRE

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Évaluations : quels types ?Échanges pédagogiques

Avant de lister, à titre d’exemples, certains modes d’évaluation évoqués et commentés lors de cetéchange pédagogique, il semble important de mettre en exergue les différents sujets abordés par lesenseignants présents.

Lors de nos échanges s’est dégagé un axe principal de travail autour des évaluations : permettrel’autonomie de l’élève et éviter l’assimilation uniquement par mimétisme ou répétition.

Globalement, si les examens de fins de cycle sont conservés dans de nombreux établissements, lesprofesseurs présents prônent également l’utilisation du contrôle continu qui est sans doute le reflet leplus proche de la progression réelle de l’élève et permet de relativiser la réussite ou l’échec lors decertaines épreuves.

La question de la dissociation des évaluations instrumentales et de formation musicale a été posée. Siun grand nombre d’établissements sépare encore aujourd’hui ces deux évaluations, certains proposentnéanmoins une évaluation commune lors de l’épreuve de déchiffrage, mais également lors de l’épreuvede lecture rythmique, par exemple.

Une enseignante note cependant l’importance de ne pas utiliser l’instrument au détriment de lapratique vocale lors des évaluations. Ces deux modes d’expression musicale doivent être utilisés encomplémentarité.

L’autoévaluation est un outil permettant d’impliquer activement les élèves dans l’analyse de leurprocessus d’apprentissage mais qui ne peut se suffire à lui-même et doit être utilisé en complément ducontrôle continu. Il nous semblait cependant plus délicat de l’utiliser en formation musicale plutôt qu’àl’instrument.

Évaluer, ce n’est pas nécessairement noter, mais l’inverse n’est pas vrai. L’élève doit toujours êtreconscient des savoirs et savoir-faire à acquérir, cela ne donne cependant pas forcément lieu à une note.Néanmoins, si note il y a, elle constitue une forme d’évaluation et doit pouvoir être argumentée, toutesformes de notations confondues. Si la notation sur vingt points reste la plus répandue, certainsenseignants et établissements utilisent des lettres (A, B, C, D), des codes de couleurs, des abréviations(A pour Acquis, E pour En cours d’acquisition, NA pour Non acquis). Il nous semble que ce choix doit

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Bravo !Quelle créativitéAcquis !

A++++

Quel musicien !

22/20

Yes !I’m the best

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rester avant tout à la discrétion de l’enseignant, de l’équipe pédagogique et de l’établissement. Lapluralité des modes de notation est une question sur laquelle nous avons passé peu de temps.Néanmoins, une évolution de ces derniers pourrait être prise en compte afin de créer un lien avec lesnotations utilisées dans d’autres contextes, notamment au sein de l’Éducation Nationale.

La lecture de notes et la lecture rythmiqueCertains établissements proposent les lectures classiques connues par la

plupart des enseignants lorsqu’ils étaient eux-mêmes élèves : lecture de notesdans différentes clés et lecture rythmique avec ou sans notes.

Néanmoins, d’autres ont supprimé la lecture rythmique pure pour laisser la place à uneimprovisation avec l’instrument. Lors de l’examen de fin de deuxième cycle, l’élève improvise à l’aide decellules rythmiques étudiées avec son professeur durant l’année. Cette épreuve est préparée tout au longde l’année et du cursus puisqu’il lui est demandé d’improviser durant dix secondes, puis quinze, etc.jusqu’à la minute imposée à l’examen final.

Ce mode d’évaluation permet notamment à l’élève d’improviser en fonction de l’esthétique qu’ilpréfère, d’après sa propre expérience d’instrumentiste.

Comme nous le disions précédemment, il serait intéressant de coupler les examens de lecture enformation musicale avec l’épreuve de déchiffrage instrumental : après une mise en loge, la pièce est luepar l’élève puis jouée à l’instrument. Nombreux sont les enseignants à avoir fait le constat d’uneincapacité totale de certains élèves à déchiffrer, même en troisième cycle.

La dictéeÉcrire, c’est conceptualiser. Il nous paraît important de ne pas

négliger cet aspect lors de l’évaluation.Cette épreuve de dictée doit rester proche de la réalité quotidienne

et/ou future de l’apprenti musicien : “j’entends un morceau, j’ai envie dele jouer, je l’écris”.

L’épreuve de dictée musicale avec un nombre d’écoutes limité peut constituer un problème pourdes élèves ayant des difficultés à mémoriser ou de concentration, ou simplement sujets à la panique.C’est pourquoi certains établissements proposent une épreuve complémentaire en deuxième cycle : unemise en loge d’une heure avec support audio (écouteurs et lecteur MP3, par exemple) lors de laquellechaque élève peut écrire à sa vitesse, analyser auditivement plus longuement les passages qu’il souhaite,le tout en complète autonomie.

Si certains élèves sont perturbés par la liberté qui leur est laissée durant le type d’épreuve évoquéprécédemment et si la gestion du temps est complexe pour certains, il est rare qu’ils abandonnent lorsde celle-ci.

L’idée de permettre le relevé à l’aide de son instrument est intéressante mais ne contrôle pastotalement l’oreille et cette méthode reste un outil d’évaluation peu fiable selon certains collègues.

L’analyse harmoniqueAfin d’aider l’élève à s’inscrire au sein d’un processus de création musicale, une collègue a

proposé de donner une épreuve de composition, avec des éléments imposés (rythmiques, mélodiques,harmoniques), à réaliser à la maison et en loge.

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L’objectif serait de permettre à l’élève de faire le lien entre les différentes notions théoriquesabordées en cours de formation musicale et de mobiliser toutes ses connaissances pour l’écriture d’unepièce qui serait jouée lors de l’évaluation.

Le chantL’épreuve de chant est maintenue dans la plupart des établissements représentés, avec

néanmoins la possibilité d’utiliser l’instrument pour le déchiffrage mélodique.En ce qui concerne les chants préparés, ils sont en général sélectionnés au sein des morceaux

travaillés durant l’année scolaire et l’un d’entre eux est tiré au sort lors de l’examen final. Pour cesderniers, la langue utilisée est le français. Certains établissements proposent également un chant durépertoire à travailler en autonomie complète durant les quelques semaines qui précèdent l’examen(quatre à six en général).

Un établissement propose une épreuve d’autonomie qui consiste en l’écriture de paroles surune mélodie donnée. Cette dernière est donnée aux élèves trois semaines avant l’examen et l’élèveinterprète ce chant, accompagné au piano, devant le jury avec les paroles qu’il a choisies. Les avis àpropos de cette épreuve sont mitigés durant notre échange, certains enseignants considérant que lacréation évaluée est trop axée sur l’aspect littéraire et d’écriture plutôt que sur la capacité de l’élève àcomposer une mélodie (cette idée pourrait rejoindre celle citée précédemment de la composition d’unepièce lors de l’épreuve d’analyse harmonique).

Si nous n’avons pu évoquer toutes les épreuves concernant l’évaluation de notre discipline, cetéchange a permis de constater une nouvelle fois la diversité de celles-ci, mais également le manqued’harmonisation des programmes et objectifs pédagogiques.

La création de groupes de travail qui dépasseraient les établissements en eux-mêmes et quipermettraient un échange à plus grande échelle sur les évaluations, leur fonctionnement, leursavantages et inconvénients pourrait être intéressante.

Cela pourrait être précédé par la création d’une base de données (sur le site de l’APFM) qui auraitpour but de répertorier non seulement des annales d’épreuves mais également les objectifspédagogiques en formation musicale des différents établissements dans lesquels nous enseignons. Cettebase de données servirait de “boîte à idées” et permettrait aux enseignants d’avoir un aperçu plus précissur les modes d’évaluation proposés qui reflètent l’évolution constante de notre discipline ainsi que lamise en valeur de celle-ci.

En conclusion, nous fûmes tous d’accord pour avancer que l’évaluation doit être vue comme unsoutien d’apprentissage de l’élève musicien : évaluer, c’est aussi, voire surtout, mettre en valeur l’élèveet lui permettre d’évoluer.

Charlotte COTTEAU

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FM adulte – FM chanteurÉchanges pédagogiques

C’est par un hasard heureux que les ateliers de réflexion autour des FM adulte et chanteur ont étémutualisés. Les deux spécialités présentant certaines similitudes fortes, l’échange s’est révéléparticulièrement fructueux.

Deux cursus en construction et en recherche d’identité

FM adulte et FM chanteur partagent le fait de présenter des cursus très différents selon lesétablissements. Bien au-delà des différences de contenu que l’on retrouve également lorsque l’oncompare les formations musicales instrumentistes, ce sont les différences d’organisation des parcoursqui sont remarquables.

1. Ainsi, selon les structures, le nombre d’années consacré à ces cursus varie fortement, unemoyenne se situant entre deux ans, comme au CRC de Vanves, et quatre, comme au CRR de Montpellier.

2. Par ailleurs, le CRR de Montpellier organise son parcours de FM chanteur comme celui de laformation instrumentiste, favorisant une approche progressive et solide des notions musicales. Lecursus chanteur est néanmoins différent au niveau des épreuves et beaucoup d’élèves demandent àsuivre également le cursus instrumentiste pour compléter leur enseignement. Le conservatoire deBourgoin-Jallieu propose quant à lui, un cours par niveau dans le cycle 1 avant de fondre le cycle 2 enune seule classe, transformant les différences de niveaux des élèves en une richesse d’échangespédagogiques.

3. Enfin, la place de ces cursus par rapport aux autres parcours de formation musicale montre desdifférences d’approche de ces disciplines selon les institutions. Si le CRR de Montpellier choisit uncursus chanteur complet propre à la discipline afin de répondre aux besoins spécifiques des élèves, leCRR de Perpignan préfère associer les élèves chanteurs aux instrumentistes tout au long du cycle 1 afinde privilégier dans un premier temps une ouverture vers l’ensemble des domaines musicaux.

4. À cela s’ajoute enfin la question de l’enseignement supérieur car un établissement installé dansune ville bénéficiant d’une licence de musicologie, source de recrutement d’ élèves adultes commechanteurs, devra nécessairement orienter, du moins en partie, les deux cursus vers un parcoursprofessionnalisant.

5. Les différences sensibles d’organisation des cursus montrent à quel point une réflexionpédagogique est en cours sur l’ensemble du territoire et mériterait largement des échanges nourris. Àl’heure où les conservatoires s’ouvrent de plus en plus sur la ville, renforçant ainsi leur ancrage citoyen,le développement des musiques amateurs n’a jamais été aussi sensible. L’accession à l’enseignementmusical pour les adultes devient dès lors une réalité à prendre en compte. Par ailleurs, au moment où lesjeunes adultes sont de plus en plus nombreux à pousser les portes des structures à la recherche d’uncursus vocal dans le domaine des musiques actuelles, la FM chanteur n’a jamais été aussi nécessaire.

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La FM adulte et la FM chanteur partagent également une certaine forme de précarité. Quelleinstitution n’a-t-elle pas fréquemment envisagée de supprimer – voire de ne jamais ouvrir – l’un oul’autre de ces cursus ? Les raisons sont diverses, de l’établissement dont la ville non universitaire neparvient pas à maintenir de grands élèves, au conservatoire trop dispersé sur plusieurs sites pourpouvoir assurer la pérennité de l’un ou l’autre de ces parcours, en passant par la structure oùl’enseignant de chant s’oppose à la création d’un cursus spécialisé pour ses élèves.

Enfin, les deux cursus sont confrontés à un manque cruel de matériel. Si nous pouvons féliciterCatherine MÉCHAIN et Marie-Alice CHARRITAT pour la FM adulte et Jean-Paul DESPAX, JeanineRUEFF, Jacques CASTÉRÈDE pour la FM chanteur, ainsi que les sites C C D M D http://solfege.ccdmd.qc.ca/, L ’ œ i l q u i e n t e n d , l ’ o r e i l l e q u i v o i thttp://bw.musique.umontreal.ca/nm/index.html ou Méludia https://www.meludia.com/fr/, nous devonsremarquer que ces sujets, pourtant intéressants et on ne peut plus actuels, semblent ne pas inspirer denouvelles publications. Est-ce par manque d’intérêt ? Est-ce par manque de recul sur des formations enfin de compte relativement récentes ?

La FM adulte, entre sens et intellect

La question des profils à laquelle nous sommes confrontés est le point de départ d’une réflexionsur la FM adulte. Il est bon de rappeler que le public rassemble souvent les étudiants en musicologie, les(grands) parents d’élèves, les adultes frustrés de ne pas avoir appris plus jeune un instrument, lespassionnés de FM et les anciens instrumentistes en reprise de cursus. L’adulte semble manifester unbesoin constant de rationaliser chacun des apprentissages afin d’apaiser les craintes occasionnées par lanon-maîtrise d’un domaine si peu palpable. Pas de doute là-dessus, c’est bien en développant aucontraire l’aspect sensoriel des notions musicales que l’on parvient à déverrouiller chacune desréticences de l’adulte et le conduire sur le chemin de l’apprentissage. Sigismond GUBANSKI, enseignantau CRC de Vanves, dirige ainsi l’apprentissage de l’adulte comme celui de l’enfant, n’hésitant pas, entoute bienveillance, à placer l’adulte dès le premier cours en position de chanteur soliste etd’improvisateur en proposant des jeux d’éveil musical.

La FM chanteur, entre oreille interne et oreille externe

Certes, l’élève chanteur doit apprendre à déchiffrer, mais comment s’y prend-t-on ? Le premierélément à prendre en compte est sans aucun doute l’instrument lui-même, tout comme la formationmusicale traditionnelle s’appuie sur l’instrument de chacun des élèves. Ainsi, Laurence JÉGOUX, du CRRde Reims, nous explique que le choix des mélodies travaillées s’effectue en fonction de la tessiture dechacun des élèves chanteurs. Pour cela, elle met en place une collaboration étroite avec le professeur dechant. Le travail “sur l’instrument”, au-delà du respect du chanteur, permet de développer laconnaissance “physique” des hauteurs, favorisant la mise en place de repères dans le système deshauteurs.

Pour ce qui est du développement de l’oreille¸ essentiellement oral, le travail harmonique s’avèrecapital. Le travail de fond sur les échelles, l’importance donnée à la reconnaissance des notes étrangères,l’improvisation sur grille harmonique et l’intérêt porté aux carrures musicales témoignent du besoin deconstruire une oreille fondée sur les fonctions. Le travail d’intervalles se montre également primordial,qu’il se fasse à partir de chansons repères ou des ouvrages d’Isabelle ABOULKER ou Marie-ClaudeARBARETAZ par exemple. La récurrence du travail d’intonation évoque le besoin de construire une

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oreille solide malgré le temps réduit que l’on est en mesure de consacrer à un élève qui démarretardivement son cursus. Il est rappelé qu’à l’heure où les concours de chant sont de plus en plusdifficiles, compte tenu de l’augmentation du nombre de prétendants, une importance est donnée àl’épreuve de déchiffrage, assurant de la qualité technique d’un futur choriste professionnel.

Le travail de prosodie, spécifique aux chanteurs, est pris en compte. Si Catherine MÉCHAINtravaille le relevé rythmique à partir d’extraits déclamés ou l’improvisation à partir de textes, ce quidonne lieu à la composition de mélodies, Laurence JÉGOUX nous rappelle l’importance du déchiffragesur paroles, si particulier et en fait si différent du déchiffrage sur nom des notes ou onomatopées.

Pour traiter la question de l’évaluation, le cas de Reims peut servir de modèle de la volonté d’offrirà l’élève une oreille solide et une autonomie de travail. En fin de cursus, l’élève est interrogé sur desintonations sur nom de notes, des intonations sur paroles, un exercice de prosodie, un déchiffragepolyphonique, une analyse écrite, une analyse auditive, un déchiffrage avec paroles, un déchiffrage avecnotes et un chant et rythme frappé préparé.

Enfin, la question du répertoire abordé semble se concentrer autour d’un XIX e français afin deprivilégier les questions de phrase musicale et de réflexes tonals. Ainsi, le lyrisme mélodique deC. CHAMINADE, la densité harmonique de J. MASSENET, la clarté des duos sacrés de Ch. GOUNOD, lavariété rythmique de G. BIZET et le naturel des mélodies traditionnelles harmonisées par D. deSÉVERAC sont évoqués.

La richesse des échanges a révélé que la qualité des cursus des FM chanteur et adulte est livrée à labienveillance des enseignants eux-mêmes. La table ronde a permis de constater que les enseignantsprésents parvenaient à construire des parcours cohérents et enrichissants tout en s’adaptant auxparticularités locales. Cependant, la diversité de ces parcours démontre également le besoin urgentd’entreprendre une réflexion nationale sur ces sujets d’une part et de trouver des appuis du côté desdirections d’établissements d’autre part.

Julien GARDE

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L’instrument en cours de FM :similitudes et différences avec la pratique collective

Échanges pédagogiques

Plus d’une vingtaine de personnes participent à ces échanges pédagogiques,aussi est-il décidé de ne pas faire un tour de table.

La discussion s’engage immédiatement, après constat que presque tous lesprésents avaient si ce n’est pratiqué la FM à l’instrument sur le long terme, aumoins essayé d’introduire l’instrument dans la classe de FM.

Plusieurs témoignages de pratique sont exposés : Expérience de classe unique avec collaboration professeur d’instrument et

professeur de FM Expérience de FM incluant la pratique collective. Expérience avec le seul professeur de FM mais avec de petits groupes

d’élèves Construction du cursus FM par famille d’instrument Utilisation ponctuelle de l’instrument dans le cours de FM mais avec une

finalité d’apprentissage (et non d’instant récréatif comme cela peut parfoisêtre le cas)

Utilisation régulière de l’instrument en cours de FM mais avec des groupes nombreux et dont lanomenclature est hétérogène

Expérience collective pour certains établissements qui imposent un fonctionnement avecinstrument pour le cours de FM

Expériences avortées ou non convaincantes dans d’autresLes situations et le fonctionnement sont extrêmement différents d’un établissement à l’autre. D’une manière générale, le cours de FM avec pratique à l’instrument ne dispense pas les élèves de

participer au cours de pratique collective.

Suite à ces échanges il apparaît des différences avec le cours de pratique collective : la plupart du temps et contrairement aux espaces réservés aux pratiques collectives, les salles de

FM ne sont pas adaptées à la pratique instrumentale, ce qui implique pour l’enseignant en FM demettre en place une organisation matérielle et d’installation des élèves afin d’optimiser le travail

La problématique des instruments type percussion/ harpe/ multiples pianistes sur un uniquepiano est un frein dans bien des cas.

L’utilisation de l’instrument en cours de FM a pour vocation l’apprentissage de notionstechniques ou théoriques par le jeu instrumental, ce qui n’est pas le cas en classe de pratiquecollective

Il apparaît aussi des similitudes : La volonté d’un résultat musical est la même au sein du cours de FM La pratique instrumentale est valorisante et motivante pour les élèves

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Quels sont les bénéfices de la pratique instrumentale en classe de FM pour les enfants ? Les élèves semblent plus débrouillards, plus malins, plus solidaires, plus habiles en déchiffrage. Bon développement de l’écoute de l’autre avec un grand respect entre les élèves Les élèves sont dans le “faire“ qui rend immédiatement certaines notions plus concrètes. Certaines compétences sont mieux développées et /ou développées différemment. Les élèves apprennent à s’accompagner entre eux ce qui améliore l’audition harmonique. Toutes sortes de répertoire sont abordées

De nombreuses problématiques et inconvénients sont pointés : Le répertoire, ou plutôt l’absence de répertoire adapté pour ce type d’enseignement et

l’obligation pour chaque enseignant de préparer, arranger son matériel pédagogique.

À ce propos il est rappelé que le site de l’association peut permettre la mutualisation de moyens etl’échange de préparations pédagogiques.

L’obligation de produire des arrangements (ce qui peut se faire avec les élèves pour les groupesles plus avancés)

L’obligation en l’absence de méthode et de formation de tâtonner pour avancer alors quel’expérience en la matière existe mais que les outils ne sont pas répertoriés.

L’obligation pour l’enseignant en FM de maîtriser un minimum l’organologie afin de pouvoiraccorder les élèves et les aider un minimum (par exemple coup d’archet….) (sans pour autant sesubstituer au professeur d’instrument)

L’importance de ne pas solliciter les élèves sur leurs acquis instrumentaux récents afin qu’ilssoient à l’aise dans leur pratique.

Les enseignants en FM doivent être vigilants auprès des familles et des élus au fait de ne paslaisser s’installer la confusion entre FM à l’instrument et ensembles à apprentissage oral (typeDEMOS, orchestre à l’école…)

Regrouper les élèves par famille d’instruments soulève une question de pertinence par rapportaux groupes hétéroclites

L’apprentissage FM progresse différemment en particulier pour tout ce qui relève de l’écrit dontles acquis sont souvent moindres.

En conclusion, constat est fait qu’introduire la pratiqueinstrumentale en classe de FM n’est pas un “long fleuve tranquille”tant du point de vue organisationnel que pédagogique et que beaucoupd’entre nous s’ils sont convaincus de son bénéfice pour les élèvescherchent comment optimiser les apprentissages techniques par cebiais qui semble motiver les élèves tout en ne négligeant pasl’aboutissement musical d’une réalisation de partition avec un résultatsonore gratifiant.

Christine GRAF (CRR Dijon)

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La tablette en cours de FMÉchanges pédagogiques

Discussion animée par Benjamin GRAS et Florent CHOLAT

L’origine de ce thème d’échanges pédagogiques est venue de la demande de certains élusconcernant la modernisation dans les conservatoires, la mise en phase du contenu des cours avec lesoutils numériques, du projet d’attirer de nouveaux publics par le biais de ces mêmes outils.

Malgré le plan de départ proposé par les animateurs, la discussion s’est rapidement ouverte et asoulevé de nombreuses questions et réflexions. Aussi, plutôt que de faire un compte-rendu linéaire deces discussions, tentons de faire une synthèse des différents sujets abordés, de les regrouper de façoncohérente et thématique.

Cinq aspects en sont ressortis : 1. Contingences matérielles2. Contingences organisationnelles3. Réticences4. Bénéfices5. Pédagogie

Pour clore cette introduction, notre table ronde commença par un tour de table concernant unretour d’expériences qui révéla qu’aucun d’entre nous n’utilisait la tablette dans nos cours de manièresuivie.

1. Contingences matériellesTout d’abord, s’est posée la question des problèmes techniques liées à l’utilisation de la tablette, à

savoir:• le coût : par qui sont supportés l’achat et l’entretien ? Par souci d’équité, il semblait peu

envisageable de faire supporter cette charge aux familles. À titre d’exemple, il a été rapporté pardeux membres du groupe que du matériel informatique, un ordinateur portable pour l’un et unetablette pour l’autre, était fourni aux élèves par leur collège. En cas d’endommagement, ilincombe aux familles d’assurer les réparations.

• l’obsolescence : assez rapide chez ce type de produit augmente le coût,• la sécurité : risque de vols dans les conservatoires voire dans les sacs des élèves.

2. Contingences organisationnelles• la tablette est-elle emportée à la maison par les élèves ? Les avis furent partagés,• quel type de tablette ? Un membre du groupe a rapporté, qu’en dehors des tablettes généralistes,

il existait des tablettes dédiées, les restreignant ainsi à une utilisation scolaire,• a-telle vocation à compléter un support classique (manuel, cours personnel) ou à remplacer ce

dernier ? Certains manuels nécessitent d’écrire dessus et ne sont donc plus réutilisables. Par saversatilité, la tablette pourrait résoudre ce problème. Dans le cas du remplacement d’un manuel,il semble donc nécessaire que l’élève puisse l’emmener à la maison,

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• le support est-il présent physiquement sur la tablette ou bien accessible par Internet ? Dans lecas d’un accès en ligne, la tablette peut rester dans la salle et les élèves accèdent à l’applicationvia leur propre tablette ou ordinateur. Cependant, des témoignages ont montré que, dans lecadre du collège, les élèves n’utilisaient qu’assez peu l’outil numérique, certains parce qu’ilsn’avaient pas d’ordinateur à la maison, ce qui pose à nouveau le problème d’équité. De plus, a étésouligné le manque de réactivité des applications web,

• motivation : la tablette peut-elle être une “carotte” pour inciter l’élève à faire ses devoirs ? Unprofesseur présent a posé la question à des élèves : “l’utilisation d’outils numériques lesintéresseraient-ils ?” Il s’est avéré que si certains se sont montrés enthousiastes, d’autresn’envisageaient cette utilisation que de manière ponctuelle. Il semble donc que la question de lapertinence de l’utilisation de ces outils pour cette génération d’élèves mérite d’être posée defaçon objective,

• rôle du professeur : une remarque a été que le professeur doit avoir un rôle d’encadrement. Cetaspect a été évoqué lorsqu’il a été fait mention des applications concernant le travaild’intonation et le travail rythmique − cf. plus plus bas. Les applications, par leur automatisation,leur approche ludique et leur système de réussite/récompense, ne favorisent pas forcément lamise à distance, la nécessité de prendre le temps pour le travail d’écoute intérieure. Ces outilsont donc plus un rôle de soutien.

3. Réticences• éthique : un membre du groupe a soulevé le problème de la main mise de quelques grandes

entreprises privées des TICE sur le marché mondial. N’est-ce pas une faute déontologique qued’accentuer encore cet état de fait en encourageant les élèves à utiliser ces tablettes ? Un autremembre a répondu qu’une solution pourrait être d’utiliser, au moins au niveau applicatif, deslogiciels libres, pourquoi pas développés par l’État ou en s’appuyant sur des structures comme laCMF (Confédération Musicale de France) et sur un mouvement collectif des enseignants,

• santé : les écrans ne posent-ils pas de soucis au niveau des yeux − myopie, expositions à la“lumière bleue” − notamment chez les enfants,

• effet bulle : le rapport de l’enfant avec la tablette ne le coupe-t-il pas du groupe ?• quel âge pour l’utilisation de la tablette en cours ? Il a été évoqué des études concernant l’impact

des écrans sur la construction du cerveau de l’enfant. Notre responsabilité en tantqu’enseignants de FM se pose de la même façon que pour ceux de l’Éducation Nationale.

4. Bénéfices• avantages de la tablette sur l’ordinateur ? Il a été souligné le gain de place, même par rapport à

un ordinateur portable et le stockage plus facile,• handicap : une participante a rapporté son expérience personnelle concernant l’utilisation des

tablettes dans le cas d’enfants dyslexiques, dysorthographiques, etc. Le rapport à l’écrit s’entrouve facilité pour ces enfants ayant un rapport difficile au crayon,

• l’enseignement à distance (e-learning) : un témoignage a décrit le travail d’un professeur (CRRPerpignan) qui a mis en ligne ses cours − grâce à l’application web Moodle. Les élèves ont ainsiaccès à tout un ensemble de ressources textes, audio etc. Il a été toutefois soulignél’investissement énorme consenti par ce professeur et le caractère chronophage de cetteinitiative.

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5. PédagogieQuel serait l’intérêt de la tablette au niveau pédagogique ? Il a été souligné que nos cours sont des

cours de pratique artistique. Il pourrait être intéressant de l’utiliser dans un cadre d’improvisation parexemple. À cette fin, des séquences musicales pourraient être enregistrées sur la tablette. Un autreexemple concernant des programmes d’analyse spectrale pourrait être utilisé dans le cadre d’un travailsur de la musique contemporaine.

• lecture et rythme :◦ l’écran permettant de faire défiler une partition, et de ce fait de montrer la temporalité de la

musique et la nécessité d’une pulsation solide,• chant et formation de l’oreille :

◦ il a été souligné que l’autocorrection est très bénéfique à l’apprentissage. Dans ce cadre, uneapplication a été citée − Portée magique − qui permet à un élève qui chante de voir s’afficher àl’écran les notes correspondantes. Dans le travail d’intonation à la maison l’outil a sembléintéressant,

◦ une autre application, dont le nom n’a pu être cité, a été rapportée. Son principe est lesuivant: dans le cas d’un travail instrumental, un concerto par exemple, l’accompagnementest joué et l’élève joue sa partie. En cas d’erreur, les parties fausses sont affichées en rouge àl’écran.

◦ Session band. Son utilisation s’apparente un peu aux recueils Aebersold utilisés dans les coursde jazz. Toutefois il permet une plus grande souplesse par la possibilité, entre autre, dechanger le tempo, de sélectionner les voix que l’on désire conserver ou éliminer.

6. ConclusionSeul un petit nombre parmi les participants à cette table ronde ont commencé à utiliser ou plutôt

explorer les utilisations possibles de la tablette dans le cadre de la FM. Nombre d’entre nous avaient plusde questions que de réponses au début de notre discussion. Celle-ci a permis d’envisager un intérêt danscertains domaines. Toutefois le nombre d’applications actuellement disponibles est encore limité, dumoins à notre connaissance. De plus, les bénéfices envisageables ont été contrebalancés par desquestionnements divers. Gadget ou réel outil d’apprentissage, il est ressorti de cette table ronde unecertaine prudence vis-à-vis de la tablette et que le travail d’investigation reste encore devant nous.

Jean-Christophe PATTEFOZ

Sites et Applications évoquésIMSLP (Petrucci Music Library) : ressources de partitions (imslp.org)GNU Solfege (ordinateur) : Semble intéressant dans le travail de l’écoute des accords notamment. Utilisé dansle cours par un des membres du groupe (CRR d’Annecy). Logiciel libre.

(https://www.gnu.org/software/solfege/solfege.fr.html)MétronomesAccordeurPortée magique (iPad, iPhone) : affichage de notes sur une portée

(https://itunes.apple.com/fr/app/portee-magique/id348795310?mt=8Description)Session band (iPad, iPhone) : constructions d’accords et de rythmiques. Application utilisée à la base

pour des maquettes dans les musiques actuelles. (sessionbandapp.com)

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Influence des musiques du monde sur l’enseignement et la pratique

de l’improvisationAtelier animé par Serge LAZARÉVITCH

Qu’est-ce que musique du monde signifie pour vous ?Le terme de musique du monde est un peu désuet. : c’est

une catégorisation qui a été créée par le monde de la presse.Ces musiques sont liées à un lieu précis, aux voyages. Grâce à la mondialisation des médias, nous avonsun accès facilité pour écouter des musiques de chaque coin de la planète par les sites dédiés et lesvidéos.

On peut les travailler de manière intense sans avoir un maître forcément à côté : par exemple, lamusique indienne ou encore la musique africaine. L’apprentissage de ces musiques se fait par imitationau départ et non par l’écrit, tout comme pour le langage.

Le temps de l’atelier étant court, la séance de travail sera synthétique : il s’agit de donner quelquesoutils basiques pour la pratique de la transmission orale.

Si on est intéressé par ces musiques, on doit d’abord les écouter. Leurs spécificités sont : le lien à ladanse, les formes courtes sur des cycles, souvent sur un tempo régulier, le caractère fréquemment modal.Il faudra alors extraire des éléments qui peuvent être des outils pédagogiques simples qu’on peutexploiter physiquement et vocalement et voir comment les transposer à l’instrument.

Le travail proposé se base sur des éléments de musiques africaines, qui sont multiples, tout commeles musiques européennes.

Remarque : l’interprétation du rythme ne peut pas être notée.Un Maghrébin, un Éthiopien etc. n’ont pas la même interprétation du rythme. Écouter cette

musique est vraiment très important pour s’imprégner de la manière dont elle est jouée.

1) Serge LAZAREVITCH donne un tempo modéré et, par imitation à la voix sur des onomatopées,nous faisons un 12/8 avec trois croches par temps, qui peut être ressenti également comme un 4/4 avecdes triolets.

Nous gardons le même débit de croches mais nous changeons les appuis des temps : nous passonsde 4 temps (12/8) à 6 temps (6/4).

Nous refaisons la même chose sur des cycles de 4 mesures (4 mesures de 12/8 enchaînées à 4mesures de 6/4) avec le changement toutes les 4 mesures.

Notion importante : Points communs à toutes ces musiques :• musiques cycliques• en général basées sur des cycles de 4 mesures (il y a des exceptions)• idée de mélodie rythmiqueIl efface le tableau car il ne faut pas lire la musique. Il faut développer l’imprégnation orale.

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Pour le choix des onomatopées : l’idée est d’imiter le son d’un instrument de percussion avec dessons assez courts.

Pour relancer le cycle de la mesure, il faut accentuer avec la voix en plus des mains.

2) Division en 2 groupes : Un groupe en 12/8 et l’autre en 6/4Superposition des deux cycles :• Mains font 1er temps de chaque mesure• Pieds font tous les temps• Voix triolets ou groupe de 2 croches suivant si l’on joue en 12/8 ou en 6/4

Les deux groupes jouent en même temps.Le groupe A joue seulTuttiLe groupe B joue seulTutti

et ainsi de suite > Nous faisons alors du trois pour deuxNous répétons l’exercice pendant un certains temps afin de nous en imprégner. Il faut du temps

pour qu’un rythme devienne vivant, pour le jouer en évitant l’intellectualisation. Cette méthode estégalement valable pour l’apprentissage de la musique classique : lorsqu’un passage est difficile,technique, on le répète et on l’intègre alors.

Remarque : Ne pas hésiter à faire des variantes de ces exercices pour faire une progression et lesrendre plus complexes.

• Si la référence est le 6/4, on a la sensation de la noire pointée dans cette superposition.• Par la suite on peut mettre des notes en chantant et, pour aller plus loin, jouer sur un

instrument, mais pour l’instant le travail est concentré sur le rythme.

3) Le chiffre 12 est un nombre incroyable dans le monde musical : autre exemple avec 4x3 et 3x4On garde le même débit (qui pourrait être maintenu grâce à un métronome).C’est l’accentuation qui change : on passe de 12/8 à 6/4 à 12/8 à 3/2Superpositions des ces différentes accentuations en 2 groupes.Solo et tutti alternés sur des carrures de 4 mesures.

Exemple d’écritures différentes de rythmes, selon la métrique :

Grâce à cet outil simple on accède à des notionsrythmiques plus complexes. Les triolets de noires oules triolets de blanches sont souvent difficiles àmettre en place. Ce travail permet de les entendredans la continuité, plutôt que d’en avoir une visionverticale.

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4) Travail avec une clave : pour le ternaire :

Travail préparatoire pieds/mains :• Mains frappent de manière alternée (g/d) avec accents toutes les deux valeurs, trois et quatre

valeurs ensuite.• Pieds font la pulsation et se superposent avec les appuis des mainsOn peut alors travailler deux aspects :• le débit qui ne change pas avec des accents différents• inversement les accents ne bougent pas mais le débit change : ce qui revient à jouer des

croches, des triolets puis des 4 doubles par exemple.• Même exercice à la voix et les mains font les accentsToutes les deux mesures, ajouter une croche comme repère du retour du cycle de deux mesures,

toujours avec aller-retour sur le 12/8.Dire la clave avec des onomatopées + frapper la pulsation aux mains en 12/8, 6/4 et 3/2 par

carrures de 4 mesuresDire la clave avec des onomatopées + débit égal aux mains + pulsations aux pieds en 12/8, 6/4 et

3/2 par carrures de 4 mesuresÉcrit au tableau pour aide mémoire mais il faut faire ce travail sans lire. Puis, il efface car si on le

fait oralement on le voit et on le ressent.

Faire des sons courts avec la voix pour être précis. On choisit les onomatopées que l’on veut. Être créatif avec les exercices :Ne jouer qu’une partie de la clave par exemple en remplaçant le reste de celle-ci par des silences et

jouer les accentuations en 12/8, 6/4 et 3/2 en même temps.

5) Créer une mélodie sur la clave à partir de la gamme pentatoniqueCe sont des musiques assez simples harmoniquement :Pour les musiques africaines ou les musiques indiennes on peut parler de musiques statiques

harmoniquement, donc plutôt de musiques modales.Le point commun des musiques extra-européennes est qu’elles sont mélodiquement basées autour

des gammes pentatoniques (sauf pour la musique indienne).

Références culturelles des gammes pentatoniques :• Afrique = Gamme pentatonique mineure• Chine = Gamme pentatonique Majeure (gamme pentatonique mineure renversée)• Japon = Gamme pentatonique 1 2 -3 5 -6• Musique indienne : on en parle moins car profusion de modes avec règles strictes

Écrit au tableau : T -3 4 5 -7 (gamme pentatonique mineure)Cette écriture permet de reconnaître les intervalles très rapidement.• Chanter les intervalles avec le professeur qui montre le chiffre de l’intervalle avec la main en

revenant toujours sur la tonique :

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Par augmentation, par exemple : • T -3

• T -3 4• T -3 4 5• T -3 4 5 -7 > Puis par diminution.

Pour aller plus loin, on peut faire le même travail sur les modes de MESSIAEN, par exemple.Le travail peut aussi se faire ensuite comme les Indiens le font : par combinaisons de trois notes,

quatre notes, etc. Exemple : • T -3 4

• -3 4 5• 4 5 -7• Etc.

Ces notes vont servir de réservoir de notes pour travailler les intervalles ou l’improvisation. Il estimportant pour le professeur d’étudier ces notions pour pouvoir les faire travailler aux élèves.

Choix des tonalités :

• En ré par exemple > c’est une bonne référence pour la tessiture mais aussi pour le carillon caron joue sur les touches blanches.

• En la également

Proposition : à jouer/chanter une octave en

dessous (gamme pentatonique mineure de la) en frappant les pulsations en 12/8, 6/4 et 3/2 par carruresde 4 mesures.

Ajout d’une basse en 12/8 :

“La do ré mi“ en noires pointées avec pont de transition pour notifier le changement de carrure :Serge joue cette basse à la guitare + chant de la clave par le groupeDivision du groupe : Groupe A chante la basse + Groupe B chante la clave, puis faire l’inverse

Autre proposition de basse en 6/4 :

Faire chanter en 2 groupes les différentes propositions avec changements de pulsations. Exercices à développer : en 2 groupes :

• questions/réponses • solo et tutti également

• le groupe 2 chante les basses pendant que le groupe 1 chante la clave• À faire en soundpainting• On peut faire des gestes qui correspondent à l’échelle de la gamme pentatonique pour

faire chanter les élèves

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6) La mesure à 7/8On peut la voir comme un 3 plus long ou un 4 plus courtÉcrit une proposition de clave : 2 noires + 1 noire pointée N N N. (ou une noire avec une croche pour

structurer ce dernier temps long N N N C).• On joue/chante sur deux mesures un aller-retour sur le mode de la gamme majeure (ou d’une

autre gamme, le mode dorien par exemple) avec 7 notes sans doubler l’octave et jouer la clave aux piedsen 7.

• Laisser 2 mesures sans jouer la gamme mais on joue la clave.• Chanter aller-retour de la gamme sur 2 mesures et laisser deux mesures en chantant dans la

tête en frappant la clave• On peut également garder une valeur longue dans l’alternance ou en travail en deux groupes.C’est une manière d’aborder les métriques impaires par le vécu, l’imprégnation sans compter ni

intellectualiser.Cet exercice mène à l’improvisation dans l’espace des mesures "vides" où on invente des phrases

simples. Si on le fait par la lecture c’est plus difficile.Il est important que le professeur donne les exemples, mais il est intéressant également de laisser

les élèves faire des exemples pour développer l’autonomie.

Clarisse VARILH

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Cours public de Serge LAZAREVITCH

Le cours public donné par Serge LAZAREVITCH était dans le prolongement de son atelier“Influence des musiques du monde sur l’enseignement et la pratique de l’improvisation”. Il s’agissait enquelque sorte d’une application pratique, avec des élèves de la classe de jazz du CRR MontpellierMéditerranée Métropole (une chanteuse, un guitariste, un contrebassiste, un batteur, unpercussionniste, deux trompettistes) ainsi qu’une ancienne élève de Serge LAZAREVITCH, pianiste.

Le cours dura une heure mais Serge LAZAREVITCH précisa que, dans l’idéal, un atelier de deuxheures était nécessaire pour pouvoir jouer, chanter et écouter. Il rappelle que le premier point commundes musiques du monde est le rythme et que ce domaine est souvent absent des études (et desdiscussions dans le milieu jazz).

Pour commencer, ce seront les musiques africaines qui seront sollicitées pour des phénomènesrythmiques. Il s’agira de traverser des sensations rythmiques qui proviennent d’un croisement ternaire /binaire.

Les musiciens commencent par chanter sur onomatopées des groupes de trois croches, avecpulsation dans les mains sur les accents. Les sons des onomatopées sont à choisir par chacun (ci-dessous il s’agit uniquement d’un exemple).

À ce premier rythme est enchaîné un deuxième, dans lequel lesaccents sont marqués toutes les deux croches (et non plus trois). Danstout ce travail, la croche est toujours égale.

Les deux phrases rythmiques sont ensuite superposées.

Cette superposition fait apparaître (et donc travailler)les rythmes suivants :

et

Serge LAZAREVITCH insiste sur le fait de faire tourner les cellules sur des carrures régulières de 4mesures. La carrure est dans pratiquement toutes les musiques pulsées, rythmiques.

Une troisième phrase rythmique est ajoutée,à base d’accents toutes les quatre croches.

Ainsi apparaît une nouvelle figure rythmique, par superposition : le triolet et le quartolet deblanches.

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Les musiciens superposent et enchaînent les cellules précédentes, avec une séquence de type :

S e r g e Lazarévitch indique qu’après ce travailrythmique, les musiciens vont s’emparer d’un matériaumélodique.

Une gamme pentatoniquemineure est proposée. La gammeest jouée plusieurs fois par lesm u s i c i e n s e n m o n t a n t e tdescendant, afin de s’en imprégner.

L’échelle a l’avantage d’être commode pour lesinstruments transpositeurs en sib (pas d’altération).

Elle reçoit ensuite un “habillage” rythmique, décliné avec ses trois variantes :

Une phrase mélodique est inventée, toujours sur un cycle de 12 croches. Elle est répétée quatrefois, pour s’inscrire dans une carrure. La dernière mesure est bien marquée, différente rythmiquement,pour annoncer la reprise (carrure de 4 mesures).

Voici ses variantes dans les autres accentuations rythmiques.

La phrase mélodique — et l’enchaînement de ses variations rythmiques — est chantée par tous lesauditeurs en marquant la pulsation avec les mains. Ce travail d’alternance peut se faire et se ressentirégalement en alternant les deux mains.

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Les musiciens jouent ensuite avec tous ces éléments pour créer une polyrythmie (polymétrie) trèsvivante. Les mélodistes (chant, guitare, vents) alternent les trois formes rythmiques du motif (accent en3, 2 ou 4 croches) pendant que la “rythmique” (contrebasse, percussions, piano) alterne les trois formesde la gamme pentatonique, devenue figure de basse. Des chorus sont ensuite ajoutés. Tous lesinstrumentistes peuvent devenir alors vocalistes pour laisser plus d’espace sonore au soliste.

Serge LAZAREVITCH insiste sur deux paramètres importants : 1) le respect du tempo qui atendance à accélérer quand on passe de binaire à ternaire et à ralentir quand on passe de ternaire àbinaire, et 2) l’attention particulière sur le début des changements de rythmique.

L’oralité permet de sortir de la partition et d’utiliser davantage les signes. Le soundpainting estégalement requis et, dans le cas présent, Serge LAZAREVITCH l’utilise pour créer une introduction etlancer le départ du morceau.

Pour amorcer une autre séquence musicale, il est demandé au guitariste de proposer une

nouvelle phrase mélodique. Cette phrase est apprise par tous, mettant ainsi à l’œuvre un travaild’écoute, de mémoire, et de perception de la forme.

Cette nouvelle phrase est ensuite déclinée dans ses trois variantes et superposée aux motifs debasse précédents.

Pour conclure la séance et également ouvrir sur un autre approche rythmique basée sur desmusiques du monde, Serge LAZAREVITCH donne un petit aperçu de son travail sur les métriquesimpaires. Il revient sur l’importance de ne pas compter (“1 2 3 4 5 6 7 1 etc.”) pour éviter une approchemathématique de ces phénomènes.

Les exemples seront proposés sur une mesure à 7/8. Cette métrique peut être conçue comme unemesure à 3 temps (3/4) plus longue d’une croche ou une mesure à 4 temps (4/4) plus courte d’unecroche.

Une nouvelle échelle est utilisée pour la démonstration :le mode Hijaz.

Pour l’imprégnation de ce nouveau mode, les musicienschantent la première note puis la joue ; chantent ensuite lesdeux premières notes puis les jouent ; etc. jusqu’à chanter la gamme complète et la jouer à l’instrument.Même chose en descendant.

Puis la gamme est jouée trois fois successivement, en montant et en descendant. Elle est ensuite réinvestie par intervalles à partir de la note initiale (sol-lab / sol-si / sol-do / etc.),

pour que finalement un rythme lui soit attribué, afin de la répéter en boucle. La métrique à sept crochescommence à devenir ainsi effective.

etc.

Ensuite, pour se diriger vers l’improvisation, les musiciens sont invités à jouer quatre mesures degamme en alternance avec 4 mesures d’improvisation.

Le “professeur” Serge LAZAREVITCH et ses élèves sont chaleureusement applaudis et remerciéspar l’ensemble des congressistes.

Jean-Baptiste APÉRÉ

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Concert−Cinémapar les classes de FM, harpes et l’ensemble de saxophones

PROGRAMMEINTRODUCTION :

Générique de la 20th Century Fox− Les Temps modernes − Deux petits chaussons− Façon Chaplin (Cl. NOUGARO)− Les Aristochats− La mélodie du bonheur

INTERMÈDE (Psychose par l'ensemble de saxophones)− Parle plus bas (Le Parrain)− Le Château dans les nuages− L’oiseau (Belle et Sébastien)− La chanson d’Hélène (Les Choses de la Vie)INTERMÈDE (Mission Impossible)− Orfeu Negro

Projet construit en partenariat avec la classe de saxophone : Olivier VAISSETTE (l’un des deux professeurs de saxophone) avait réalisé desarrangements pour ensemble de “sax” de quelques célèbres musiques de film :Psychose et Mission Impossible.

Après avoir sélectionné des chants pour nos cours de FM (ce projet concernaitles élèves de FM et chorale des deux sites extérieurs du CRR : environ 70 enfants),nous avons laissé les saxophonistes Olivier VAISSETTE et Philippe BRAQUARTréaliser les arrangements pour ensemble modulable sur la plupart des chants.

Ce programme a été présenté lors de deux concerts dans les sites extérieurs duCRR en juin 2016. Mikaël LE PADAN

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Passe ton Bac(h) d’abord !Concert donné par Philippe BRAQUART et Alain CAHAGNE

Philippe BRAQUART et Alain CAHAGNE nousoffrent ce programme de concert “Passe ton Bac(h)d’abord !” à partir du projet de réunir trois instrumentsqui spontanément ne se rencontrent pas… Le titre estvolontairement provocateur, évocateur et en clin d’œil.Ils opposent délibérément au début leur attitude etleurs choix musicaux mais se rapprochent pourfinalement nous faire partager leur complicité et leursémotions dans ce beau programme pour saxophonesoprano, clavecin et orgue.

I Garden of love J. TER VELDHUIS (°1951) II Variations Goldberg BWV 988 J. S. BACH III Sur une variation Goldberg M. GODARD (°1960) IV Pink P…B…M…quizz, for APFM fugue P.B.M. / A. CAHAGNE V Concerto pour hautbois SF D 935 A. MARCELLO / J. S. BACH VI Toccata en sol (Sonate V, op. 4) A. DELLA CIAJA (1671-1755) VII Sonate BWV 1028 J. S. BACH

S’imitant, se coupant la parole, trouvant des points communs pour interprète ces musiquesd’époques et de styles différents, ils nous font partager leur passion.

Commencer ce concert par cette pièce de Jacob TV n’est pas anodin !The garden of love fut composé par Jacob TER VELDHUIS pour Saxophone soprano et bande

magnétique, à partir d’un poème extrait des Songs of Experience écrits par William BLAKE, poète anglais,en 1794.

Philippe BRAQUART nous fait d’entrée de jeu ressentir et partager l’expression de différentsaspects des élans de la vie et de l’amour. Les oppositions, tant du point de vue rythmique quemélodique, peuvent être ressenties comme des allers et retours entre rêve et réalité, passé et présent,etc.

La bande magnétique fait entendre le poème lu intégralement au début, puis des chants d’oiseaux.Différentes parties instrumentales et extraits parlés du poème se combinent avec la partie de saxophonesoprano en épisodes successifs.

Franchir des portes, découvrir des espaces inconnus, la douceur et les épines des fleurs, leschapelles et les cimetières sont des motifs puissants d’inspiration universelle…

Enchaîner les “Variations Goldberg“ de J. S BACH et “Sur une Variation Goldberg de J. S. Bach“ deMichel GODARD nous fait ressentir et réfléchir autrement. Voici la réponse que donne M. GODARD à laquestion : “Pourquoi essayer de mettre ensemble deux musiques qui n’ont rien à voir entre elles ?”

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“Au fil des siècles, il y a des choses qui se répètent dans l’être humain. Un musicien du 17e siècleétait très proche d’un musicien de jazz d’aujourd’hui sur différents aspects, dans son mode defonctionnement comme dans la vision qu’il avait de la musique. Les musiciens de l’époque étaientcapables d’improviser et ils étaient aussi compositeurs. Dans le jazz, il n’y a pas éloignement du rôlequ’a l’interprète par rapport à celui de compositeur, le jazz est la seule musique où le rapport est aussirapide et facile.” (Propos recueillis par Armel Bloch dans l’entretien “À voix basses”).

Par sa variation de la Variation Goldberg, Michel GODARD nous exprime que ses racines “sont plusau niveau du baroque que des comédies musicales américaines des années 20 et 30”.

Avec Pink… P.B.M …. Quizz , Alain CAHAGNE nous fait voyager avec humour dans le temps et lesstyles…

Quel plaisir que celui de découvrir toutes ces citations qui s’enchaînent ou se superposent dans unjeu effréné en habiles dialogues et contrepoints, de faire cette audacieuse et joyeuse promenade dansdes extraits de H. MANCINI (La Panthère Rose), J. S BACH (Toccata et fugue, l’Art de la Fugue), G. BIZET(La Bohème) et F. POULENC (Concerto pour 2 pianos).

L’interprétation a aussi ce rôle de reconstruire en prenant des risques les œuvres pour leur donnerune nouvelle vitalité.

Jean Sébastien BACH, ce grand maître contrapuntiste, est un modèle pour des générations demusiciens. P. BRAQUART et A. CAHAGNE terminent ce programme par leur interprétation de la sonateBWV 1028 pour clavecin et viole de gambe dont le final est une fugue à 2 thèmes qui s’échangent entreles deux instruments.

Marie Christine FAURIE

Philippe BRAQUART est saxophoniste, professeur et compositeur.

1er Prix du CNSM de Paris, il obtient plusieurs prix internationaux de Musique de Chambre et le C.A de Saxophone. Saxophoniste polyvalent, il se produit régulièrement ausein de l’Orchestre National de Montpellier, de l’Ensemble Intercontemporain et de l’Orchestre de Paris.Après avoir été professeur au CNSM de Paris de 2000 à2004 et avoir dirigé le Big Band du conservatoire deMontpellier de 1999 à 2006, il enseigne actuellement auCRR de Montpellier ainsi qu’à l’Institut Supérieur desArts de Toulouse Spectacle Vivant (ISDAT).

Alain CAHAGNE est organiste et claveciniste.

Diplômé du CNSM de Lyon, il est titulaire du C.A. deMusique Ancienne option orgue et clavecin et des D.E.d’Instrument Ancien clavecin et de Formation Musicale.Il enseigne le clavecin, la basse-continue, la musiqueancienne au CRR de Montpellier. Il est aussi titulaire del’orgue historique de l’Église Saint Pierre de Sète. Il seproduit en tant que soliste ou continuiste, a pris ladirection artistique du Festival de Musique AncienneLes Rencontres Internationales de l’Abbaye du Vignogoul à Pignan (près de Montpellier), élabore desprojets pédagogiques en partenariat avec l’Université de Musicologie Montpellier III et avec le MuséeJacques Fabre de Montpellier.

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Le Manuscrit de MontpellierVisite-Concert

Avec l’Ensemble Hortus Deliciarum

Accueil en musique

Émotion, admiration… … Exploration,

… Interprétation.

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Travail sur un motet extrait du manuscrit de MontpellierRetour d’expérience

Grâce à la préparation du congrès,nous avons rencontré Gisèle CLÉMENT àplusieurs reprises. Elle nous a présenté lemanuscrit de Montpellier, fourni lespartitions de quatre pièces et donnéquelques clés pour les aborder. Nousavons pensé qu’en prolongement de lavisite à la Faculté de Médecine, et dumini-concert autour des manuscrits, ilserait intéressant de vous faire part denotre expérience pédagogique. Nousavons donc commencé dès la rentrée àtravailler avec certains cours sur une despièces. Sans nous concerter, nous avonschoisi tous les trois la même :

Plus bele que flor (f° 26v)

Nos buts de travail : sensibilisationà un langage inhabituel : mode de ré,intervalles descendants, travail dejustesse sur quartes et quintes parallèles,attirances mélodiques et rythmiques,alternance de rythmes en longues etb r è v e s , p r o b l é m a t i q u e d e l asuperposition de trois textes différents,approche du contexte historiquemédiéval, de l’écriture musicale à cettepériode, et explication des signesmusicaux toujours utilisés de nos jours,

adaptation instrumentale.

Notre conclusion: travail passionnant ayant plu aux élèves quel que soit leur âge et niveau. Quel’approche ait été sensorielle, auditive, ou visuelle, les élèves ont été très réceptifs à ce répertoire.

Nous avons tous les trois envie de persévérer et de découvrir d’autres pièces du manuscrit.

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Le tableau ci-dessous résume les façons de travailler de chacun.Lu

c

Cycle 1

− Découverte et ressenti à l'écoute de cette musique.− Déchiffrage de chaque voix en notation moderne.− Superposition de deux voix puis trois et quatre.− Recherches sur le XIIIe s. exposées par 4 élèves présentant un panneau illustré (format A2)collé depuis au-dessus du tableau.− Découverte de l'écriture médiévale (rythmes proportionnels, ornements, “clés de lectures”avec les lettres C et F, etc.).− Lecture du texte correspondant à chaque voix représentant quatre façons d'évoquer le “cœuramoureux”.

Cat

heri

ne

Cycle 21re et 2e

années

Cycle 23e année

− Contexte historique du manuscrit et sondage des connaissances des élèves de cette période− Mémorisation de la teneur chantée en vocalise (sauf la première phrase qui était écrite autableau. Recherche de moyens mnémotechniques pour la retenir : structure, ambitus, notesimportantes)− Chant de la teneur par les élèves et chant du double par moi (sans paroles). Travail d’attirancemélodique et rythmique sans l’aide du support visuel− Distribution de la partition médiévale. Chant de la teneur cette fois en suivant la partition.− Décryptage de celle-ci par déduction en fonction de la mémorisation: découverte des clésanciennes (lecture relative), des rythmes en longues et brèves− Distribution de la partition en notation moderne− Écoute de l’enregistrement et repérage de l’ordre d’apparition des voix− Travail de chant polyphonique− Travail instrumental sur la teneur avec superposition de différentes voix chantées− Improvisation dans le mode de ré sur bourdon en ternaire dans le style de la pièce étudiée

Vér

oniq

ue

Fin deCycle 1

− Travail sur le mode de Ré− Improvisation− Polyphonie à 2 voix− Dictée mélodique− Déchiffrage à 2 voix du manuscrit : teneur et double sur partition simplifiée en 3/4− Écoute de l’enregistrement

Cycle 2

− Déchiffrage du texte musical : teneur et double− Travail d’analyse et observation des partitions anciennes− Étude du contexte historique− Travail sur les dissonances − Polyphonie à 2 voix, plus triple et quadruple parlés “déclamés” et 3 voix parlées.

Catherine MÉCHAIN, Véronique SANCHEZ, Luc MARTY

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L’Opéra ComédieVisite

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Le 22 décembre 1755, Pyrame et Thisbé, opéra de FrançoisREBEL et François FRANCŒUR, inaugure le premier théâtre dontl’architecture est signée Jacques Philippe MARESCHAL. Il comporteune salle de spectacle doublée d’une salle de concertperpendiculaire à la première : c’est une originalitémontpelliéraine que l’on retrouve dans l’actuelOpéra Comédie. En    décembre 1785, un incendie détruitle théâtre. Il est reconstruit à l’ identique etcommence à fonctionner en 1788. Mais en 1789, undébut d’incendie le détériore à nouveau. Pendant laRévolution, le théâtre sert à différentes manifestations.

En avril 1881, un incendie détruit complètement lebâtiment : rien n’est récupérable. Un théâtre provisoire (en bois) est construit sur le Champ de Mars devenu depuis l’EsplanadeReconstruit, l’Opéra Comédie est inauguré en 1888. Ce grandthéâtre à l’Italienne est l’œuvre de l’architecte Joseph-MarieCASSIEN-BERNARD, élève de Charles GARNIER.

Fermé en août 2010 pour de grands travaux de rénovation,il a rouvre ses portes au public en juin 2012.

(Source : Wikipedia)

L’Opéra Comédie

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Le Musée FabreVisite

Tout d’abord, nous tenons à remercier Mme Martine TOURRÉ DARCOURT,directrice adjointe du musée Fabre, pour son invitation et son accueil.

Le Musée Fabre, situé en plein centre de Montpellier, possède des collectionsde peintures et sculptures du XIVe au XXIe siècles.

Il fut créé grâce à la volonté du peintre néoclassique François-Xavier FABRE en 1828.Sur près de 9200 m2, ce musée possède l’une des toutes premières collections de Beaux-Arts en

France et en Europe et présente un rôle de leader tant sur le plan local qu’international.Catherine MECHAIN a emmené une vingtaine de congressistes visiter ce

musée. À notre arrivée, Martine TOURRÉ DARCOURT nous a proposé une visitelibre dans le musée parmi les différentes collections selon nos envies.

Compte tenu du temps que nous avions, j’ai choisi d’orienter ma visiteplus particulièrement sur la découverte des peintures flamandes et

hollandaises du XVIIe s. (salles 1 à 8) et les œuvres de Pierre SOULAGES (salles 46 et 47)Peinture flamande et hollandaise du XVIIe siècle :On peut y découvrir des œuvres de RUBENS, TENIERS, SEGHERS, BREUGHEL, RUIDAEL.Le parcours débute dans l’hôtel du Chevalier de MASSILIAN par la présentation des collections

nordiques du XVIIe siècle, dans cinq salles aux volumes intimes, comparables àceux d’un cabinet d’amateur. Cet ensemble important par la qualité desœuvres et cohérent stylistiquement provient majoritairement du legsd’Antoine VALEDAU.

La salle RUBENS est dévolue à l’art flamand du XVIIe siècle. Le début dusiècle est évoqué à travers BREUGHEL le Jeune, continuateur de l’œuvre de sonpère le grand BREUGHEL. Une importante section est consacrée à RUBENS et l’art baroque (DanielSEGHERS, Cornelis De HEEM, HUYSMANS...), tandis que la série de neuf tableaux de David TENIERSmontre la prédilection de l’art nordique pour les scènes de la vie quotidienne.

Collection Soulages “L’outil n’est pas le noir, c’est la lumière”.

L’histoire du noir commence dans les grottes, lieu particulièrement connu et apprécié de PierreSOULAGES. C’est avec de l’encre noire qu’il a connu ses premiers émois artistiques, peut-être est-ce delà que le noir a toujours été présent dans son œuvre.

Le projet plastique de SOULAGES n’est pas un travail sur le noir mais un travail sur les noirs carphysiquement, plastiquement et visuellement des différences sont à observer dont les plus évidentessont : − brillance / matité

− transparence / opacité (saturation) / translucidité (vitraux de Conques) − lisse / texturé (rugueux/ granuleux…) − finesse / épaisseur / reliefs

Ces qualités physiques du (des) noir(s) sont à associer avec des gestes spécifiques et significatifs dela pratique de l’artiste : − étaler / racler / lisser

− peigner / brosser − empâter

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Fab

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− projeter − superposer (couches) / juxtaposer (touches-gestes-traces) − essuyer (pour faire ressurgir la couche antérieure dont la couleur est désormais altérée)

− recouvrir − tracer/ inciser /réserver − saturer / remplir l’espace

Pierre SOULAGES explique à plusieurs reprises dans ses entretiens que ce n’est pas la matérialitéde la peinture qui l’intéresse mais la présence de la peinture dans la triangulation peinture-œuvre-spectateur. “Je n’ai jamais pensé que la peinture pouvait se réduire à sa matérialité. La réalité d’une œuvrec’est le triple rapport qui s’établit entre la chose qu’elle est, le peintre qui l’a produite et celui qui la regarde”

“Ma peinture est un espace de questionnement et de méditation où les sens qu’on lui prête peuvent venir se faireet se défaire”

Dans la salle 46, il n’y a pas d’ordre chronologique. Les œuvres sont dans leur majorité, plusanciennes que dans la salle suivante. Elles sont de formats divers. C’est aussi dans cette salle que l’onvoit ses œuvres colorées. Les trois espaces successifs de cette salle semblent aussi présenter chacun unecertaine unité. Plus de formats sont différents et les aspects des œuvres les plus contrastés : le trèsgrand polyptyque Peinture (Mars 1986, 162x724 cm) fait face à un groupe de six petits formats Peinture(1971 , 33x41 cm).

L’espace II est celui de la trace (traces raclées, rythmées, colorées). L’espace temps est le plusresserré puisque les œuvres présentées ont été réalisées entre 1956 et 1963.

L’espace III pourrait être celui du passage. Il concerne la décennie 70 qui voit apparaître les œuvres"outrenoir". Les peintures présentées sont formellement différentes (couleur, noir, brou de noix),certaines montrent le support comme entrée de lumière mais elles forment une unité stylistique etannoncent les œuvres de la salle suivante.

Dans la salle 47, on y trouve 2 peintures de 1971, des grands polyptiques (324x181 et 324x362)suspendus datant de 1986-1996-1997-2001-2005 et un diptyque (222x222) datant du 1/9/2001. Cesœuvres font toutes partie de la période de “l’outrenoir”de 1986 à 2005. Deux œuvres font exception à laprésentation face au mur de verre, deux peintures de 1971, elles se répondent, face à face.

Soulages a souhaité suspendre ces polyptyques. Les câbles arrimés au sol et au plafond créent unetension verticale plus radicale et les peintures sont aussi bien stèles, écrans, objets tridimensionnels enapesanteur, objets d’une forte présence. Le tableau détaché du mur acquiert une plus forte autonomie.

Les peintures ainsi accrochées ne sont ni objets ni fenêtres mais desécrans, qui se dressent ou glissent devant le spectateur qui devient acteur deschangements de perception, des reflets, effets de miroir ou de glissement delumière. Le mur quant à lui apporte des reflets bleutés ou ocre rose suivant laplace du spectateur, mais aussi en fonction de l’heure de la journée et de lamétéo.La salle 47 se prête à une "écoute" de son corps et des sensations ressenties, à un jeu decorrespondance avec les autres sens. Laurence JÉGOUXCollection du musée :

Niveau -1 : Salles 1 à 8 : peinture Flamande et Hollandaise du XVIIe siècle Niveau 0 : Salle d’exposition temporaire Niveau 1 : Salles 9 à 19 : peinture et sculpture Européennes du XVe au milieu du XVIIIeNiveau 1 : Salles 20 à 28 : peinture et sculpture néoclassiquesNiveau 1 : Salles 29 à 36 : Romantisme et ClassicismeNiveau 2 : Salles 37 à 45 : La modernité, de 1850 à 1914 et l’après-guerre, entre préfiguration et abstractionNiveau 2 : Salles 46 à 47 : la collection Pierre Soulages Niveau 1 : Salles 48 à 52 : Le renouveau de la peinture à l’époque contemporaineCitations in Françoise JAUNIN, Pierre SOULAGES, Lumières d’“Outrenoir”, article sur le site du Ministère desaffaires étrangères.

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Synthèse du 32e Congrès de l’APFMpar Élodie CORLAY-BOSQUET

Quelle “diversité”… et “esthétique” de surcroît !Nous avons déjà pu apprécier cette diversité dans l’histoire de cette magnifique ville de

Montpellier, née de mouvements migratoires constants, d’échanges commerciaux, scientifiques,culturels, et d’un brassage multiconfessionnel.

Aujourd’hui cette agglomération est forte de son offre en matière de diffusion et deprogrammation culturelles : elle propose une diversité stylistique quasi exhaustive.

À travers les ateliers, conférences et concerts de ce rassemblement, nous avons voyagé dans letemps et dans l’espace profitant de musiques métissées toujours à la croisée de différentes cultures.Nous avons “crépité” aux rythmes du flamenco, un peu “tremblé” dans la société baroque de l’époque etbeaucoup “groové” avec les musiques du monde, minimaliste, jazz ou électroacoustique.

En fait, voici encore un grand moment collectif que nous avons pu vivre grâce à toutes les bellesvolontés et énergies individuelles !!

À travers cette large palette temporelle et stylistique qui nous a été proposée – et toujours encontact avec l’œuvre d’art-, nous avons désormais beaucoup d’outils pour offrir à notre tour unenvironnement musical pluriel et riche qu’il faudra peut-être approfondir, vivre ou revivre.

Ce sont les philosophes Edmund BURKE et Emmanuel KANT précédés par LONGIN au IIIe siècle,qui parlaient de “sublime” lorsqu’une émotion esthétique puissante est ressentie. Alors, il nousappartiendra de trouver parmi toutes ces propositions, nos sensibilités culturelles. Nous pourrons lesdévelopper et ainsi faire émerger la personnalité des élèves qui choisiront leur(s) centre(s) d’intérêt(s).En somme, trouver son ou ses propre(s) “sublime(s)” est une perspective assez réjouissante, n’est-ce-pas ?

De plus, cette diversité permet de mettre en lumière les liens unificateurs. Partir de la diversité desesthétiques et arriver à une esthétique de la diversité. Jongler avec les styles, confronter les œuvres,permet de dégager leurs caractéristiques communes. Celles-ci apparaissent ainsi évidentes à l’auditeur.Il peut alors apprécier ce qui les unit. L’APFM a réussi à faire la même chose, c’est-à-dire faire émerger cequi nous lie : des moments de sensibilité, d’émotion, d’art, de notre art !

Ces quelques mots de Maurice RAVEL concluront bien, me semble-t-il, notre sujet :“Je n’ai jamais éprouvé le besoin de formuler soit pour autrui soit pour moi-même les principes de

mon esthétique. Si j’étais tenu de le faire, je demanderais la permission de reprendre à mon compte lessimples déclarations que MOZART a faites à ce sujet. Il se bornait à dire que :

La musique peut tout entreprendre, tout oser et tout peindre pourvu qu’elle charme et reste enfin et toujours de la musique.”

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Liste des participantsABBES SylvieABRAMIER IsabelleAPERE Jean BapstisteARSAUT LaurentASCENSIO NicoleBANDA LEMOINE Claire BECAAS CécileBEGUIN GiseleBELLONNET Chloé BENOTEAU MarieBERNOS AnneBERTRAND ValérieBEZAULT FloreBOCHE AnneBONAUD AudreyBONAUD EtienneBONNAURE EtienneBORDES LénaBOSQUET CORLAY Élodie BOU GHAZALE Joëlle BOULAY Chantal BOUTHEGOURD Mathilde BOUTTE PernetteBRUZY KarineCABARET GabrielCAGIN CLERC Marie Caroline CARETTI BrigitteCHABLOZ ClaireCHEPELOV PierreCHOLAT FlorentCHOPIN BaptisteCORITON SandraCOTE CécileCOTTEAU Charlotte COUILLEBAULT Delphine COURTILLON Rachel DANILIAN TatianaDAO VirginieDAUPHIN Anne Sophie DELEMAIRE Joffrey DEMOUSSIS Catherine DESFRANCOIS Colette DONABEDIAN SoniaDULAC CélineEPITER France Lise FATYKHOVA JACMAIRE AliaFAURIE Marie ChristineGARDE JulienGAUGUIER Corinne GIOVAGNOLI Catherine

GRAF Christine GRAS Benjamin GUBAŃSKI Sigismond HAON Chantal IMBERT Amélie IMBERT Françoise JEGOUX Laurence JELLAL Jean Pascal KLAINE Nathalie KLEINBERG Valérie KVARTSKHAVA Isabelle LAPLACE Caroline LE PADAN Mikaël LEFRANC Marjolaine LEUPE Isabelle MADINIER Marie Brigitte MALASSIGNE Françoise MALET Blandine MARTY Luc MECHAIN Catherine MILLET Dominique NASLIN Sami NIKULINSKAYA GILLES Valérya OLIVAUD Aymeric PAILLET Sylvène PAPA Mathilda PATEFFOZ Jean Christophe PENNIELLO Michèle PERREAU justine PETIT Mathilde PIERRE Laurence RENAUD Claudie RINCHARD Faustine ROBIN Judith SAINT JALMES CécileRINCHARD FaustineROBIN JudithSANCASSIANI GAGNIERE Anne MarySANCHEZ VéroniqueSIMON Eva MarieSOULIET MarieTRANCHINA Marie ClaudeTSUHA ErinaVANEL SylvieVARIHL ClarisseVENE SamuelVIENNOT IsabelleVILLARD ClaudeVUILLAUME AntoniaZAMBONI Audrey

Nous avons partagé ce congrès dynamique grâce à l’équipe montpelliéraine du CRR, l’ensemble Hortusdeliciarum, l’Archevêché (école de médecine), Pascaline TODESCHINI, responsable des manuscrits et GisèleCLÉMENT, historienne pour leur présentation des ouvrages, Martine TOURRÉ DARCOURT, directrice adjointe dumusée Fabre pour son invitation et son accueil, Guy DELISLE pour la belle affiche qu’il nous a offerte et toutes les“petites mains“ indispensables…

Que tous soient ici chaleureusement remerciés !

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