Edition multimédi@ 120 lundi 23 mars 2015

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Edition Multimédi @ : Le groupe Amazon est présent au Salon du livre de Paris encore cette année (après une absence remarquée en 2013) : que présentez-vous ? Marie-Pierre Sangouard : Cette année nous serons à nouveau présents au Salon du livre avec notre stand Kindle Direct Publishing (KDP) placé sous le signe de l’auto-édition et de la lecture numérique. C’est l’occasion pour les visiteurs de se familiariser avec les nou- velles formes de diffusion de la culture et de simplification de la création littéraire que nous proposons aux lecteurs d’une part, et aux auteurs en devenir d’autre part. En ce sens, nous organisons la 2 e édition du « speed dating KDP » à destination des auteurs en herbe sur notre stand au Salon du livre. Les gagnants seront publiés via notre programme d’auto-édition KDP et soutenus sur Amazon.fr pendant un mois: une belle opportunité de se faire remarquer du grand public, tout comme les plus de 600.000auteurs auto-édités présents aujourd’hui sur notre plateforme KDP par- tout dans le monde. Nos toutes dernières liseuses Kindle seront également exposées afin de permettre à tous les lecteurs d’en découvrir les multiples avantages et fonctionnalités. EM@ :Amazon va devenir aussi une maison d’édition en France à travers sa nouvelle filiale Amazon Publishing France, dont l’« éditeur de manuscrits originaux » (Senior Editor Original Manuscripts) a été recruté en février. Quand lancez-vous cette activité ? M-P. S. : Nous avons recruté Clément Monjou en tant qu’éditeur pour Amazon Publishing en France, dont nous sommes en train de constituer l’équipe. Il reporte à Dominic Myers, responsable Europe d’Amazon Publishing et a pour mission de découvrir des ouvrages de qualité à traduire et à publier en langue française. Clément travaille pour Amazon depuis plus de deux ans. Nous avons lancé le 10 mars nos deux N°120 Lundi 23 mars 2015 Interview de Marie-Pierre Sangouard, Amazon France ................. 1 Plan anti-piratage : ayants droit et Hadopi contents Orange mise sur son réseau, agrégrateur de contenus........ 3 Webedia, en sauveur de l’industrie culturelle française .......... 4 Android TV veut faire oublier l'échec de Google TV .................. 5 Fiscalité : la France se met à dos les acteurs du Net ..................... 6 Ce que reproche l' Asic au rapport « France Stratégie » ........... 7 La francophonie sonne la fin de la colonisation numérique ....... 8 Secret des affaires versus liberté d’informer ......................................... 10 Salon du livre, MipTV, Colloque NPA ............................................................... 12 Edition Multimédi @ est une publication bimensuelle paraissant un lundi sur deux Prochain numéro : Lundi 6 avril 2015 Abonnement : 01.39.15.62.15 Mots-clés : Abonnement illimité • App Store • Autoédition • Autorégulation • Ayants droits • Contrefaçon • Déréférencement • Editeur • Edition • Edition numérique Exceptions au droit d'auteur • Financement de la création • Fiscalité numérique • Gestion collective • Hadopi • Justice • Livre numérique • Lobbying • Moteurs de recherche • Offre légale • Partage de la valeur • Piratage • Plateforme vidéo • Publicité vidéo • Qualité de service • Régulation • Régulation • Réponse graduée • SMAd • Smartphone • SMS • Statut d'hébergeur • Streaming • Take down Stay down • Taxes • Télévision connectée • Télévision de rattrapage • VOD • Walled garden • 3G • 4K Economie numérique et nouveaux médias Edition Multimédi @ Evénement Décryptage Stratégie Tendance Polémique Zoom Géopolitique Juridique Agenda Pages Marie-Pierre Sangouard, Amazon France : « L'accueil de Kindle Unlimited a été très positif » Directrice des contenus Kindle d'Amazon France depuis 2011, après avoir été directrice du livre à la Fnac, Marie-Pierre Sangouard nous répond à l'occasion du Salon du livre de Paris sur l'auto-édition, le livre numérique, la TVA, le format AZW, ainsi que sur le lancement d'Amazon Publishing en France. (Suite en page 2) © DR

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Publication professionnelle sur l'économie numérique et les nouveaux médias

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Page 1: Edition multimédi@ 120 lundi 23 mars 2015

Edition Multimédi@ : Le groupe Amazon est

présent au Salon du livre de Paris encore cette

année (après une absence remarquée en

2013) : que présentez-vous ?

Marie-Pierre Sangouard : Cette année nous

serons à nouveau présents au Salon du livre

avec notre stand Kindle Direct Publishing (KDP)

placé sous le signe de l’auto-édition et de la lecture numérique.

C’est l’occasion pour les visiteurs de se familiariser avec les nou-

velles formes de diffusion de la culture et de simplification de la

création littéraire que nous proposons aux lecteurs d’une part, et

aux auteurs en devenir d’autre part. En ce sens, nous organisons

la 2e édition du « speed dating KDP » à destination des auteurs en

herbe sur notre stand au Salon du livre. Les gagnants seront

publiés via notre programme d’auto-édition KDP et soutenus sur

Amazon.fr pendant un mois : une belle opportunité de se faire

remarquer du grand public, tout comme les plus de 600.000 auteurs

auto-édités présents aujourd’hui sur notre plateforme KDP par-

tout dans le monde. Nos toutes dernières liseuses Kindle seront

également exposées afin de permettre à tous les lecteurs d’en

découvrir les multiples avantages et fonctionnalités.

EM@ : Amazon va devenir aussi une maison d’édition en France

à travers sa nouvelle filiale Amazon Publishing France, dont

l’« éditeur de manuscrits originaux » (Senior Editor Original

Manuscripts) a été recruté en février. Quand lancez-vous cette

activité ?

M-P. S. : Nous avons recruté Clément Monjou en tant qu’éditeur

pour Amazon Publishing en France, dont nous sommes en train

de constituer l’équipe. Il reporte à Dominic Myers, responsable

Europe d’Amazon Publishing et a pour mission de découvrir des

ouvrages de qualité à traduire et à publier en langue française.

Clément travaille pour Amazon depuis plus de deux ans. Nous

avons lancé le 10 mars nos deux

N°120 • Lundi 23 mars 2015

Interview de Marie-Pierre Sangouard, Amazon France ................. 1• Plan anti-piratage : ayants droit et Hadopi contents• Orange mise sur son réseau, agrégrateur de contenus........ 3

Webedia, en sauveur de l’industrie culturelle française .......... 4

Android TV veut faire oublier l'échec de Google TV .................. 5

Fiscalité : la France se met à dos les acteurs du Net ..................... 6

Ce que reproche l'Asic au rapport « France Stratégie » ........... 7

La francophonie sonne la fin de la colonisation numérique ....... 8

Secret des affaires versus liberté d’informer ......................................... 10

Salon du livre, MipTV, Colloque NPA ............................................................... 12

Edition Multimédi@ est une publication bimensuelle paraissant un lundi sur deux

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Marie-Pierre Sangouard, Amazon France : « L'accueil de Kindle Unlimited a été très positif »Directrice des contenus Kindle d'Amazon France depuis 2011, après avoir été directrice du livre à laFnac, Marie-Pierre Sangouard nous répond à l'occasion du Salon du livre de Paris sur l'auto-édition, lelivre numérique, la TVA, le format AZW, ainsi que sur le lancement d'Amazon Publishing en France.

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Lundi 23 mars 2015 • n°120Edition Multimédi@

premières traductions de l’anglais vers le français – un

thriller, « Hackeur et contre tous » de Dave Bushi, et

d’une comédie romantique, « Ladden et la lampe mer-

veilleuse » de Stéphanie Bond –, auxquelles viendront

s’ajouter trois autres titres d’ici la fin du mois. Notre

objectif est de publier des fictions issues de genres

variés tels que les thrillers, la littérature sentimentale et

la science-fiction.

EM@ : Depuis votre arrivée en juillet 2011 chez Amazon

France en tant que directrice des contenus Kindle, com-

ment a évolué l’activité « livres » (papier et ebook) dans

l’Hexagone selon vous ?

M-P. S. : Le secteur du livre est en constante évolution et

nous faisons face aujourd’hui à une révolution des usages

qui passe notamment par le numérique, tant en termes

de distribution en ligne, complémentaire à la vente en

librairie, qu’en termes de format, avec l’ebook qui vient

compléter le livre traditionnel. S’agissant de la distribu-

tion, Internet constitue une opportunité pour démocrati-

ser la culture et la rendre accessible au plus grand

nombre, parfaitement complémentaire des réseaux tradi-

tionnels. Ce canal contribue également à la diffusion de la

culture française via la vente de livres en français dans le

monde entier et nous sommes fiers qu’Amazon soit le

premier distributeur hors de France de livres en langue

française avec l’ensemble de ses plateformes dans le

monde. Enfin, l’émergence de l’auto-édition en ligne, qui

permet la découverte de nouveaux talents littéraires, est

une des révolutions majeures de ces dernières années. Il

s’agit d’un tremplin unique qui a permis à de nombreux

talents d’émerger. Par exemple, c’est ainsi qu’Aurélie

Valognes, auteure de « Mémé dans les orties », a rencon-

tré le succès pour son premier roman auto-publié.

EM@ : Selon les premières estimations du Syndicat

national de l’édition (SNE), le livre numérique se situe

autour de seulement 5 % des ventes de l’édition en

France. Comment et pourquoi – vu d’Amazon – y a-t-il ce

retard français par rapport à d’autres pays ?

M-P. S. : Depuis le lancement de Kindle en France en

2011, nous sommes pour notre part très satisfaits des

résultats. Nous concentrons nos efforts sur la démocrati-

sation de la lecture numérique comme une offre présen-

tant de nombreux avantages, tels que la facilité d’accès

(téléchargement en 60 secondes 24h sur 24) et un cata-

logue se développant sans cesse. Sont ainsi accessibles à

partir de Kindle 3 millions de livres numériques présents

aujourd’hui, dont plus de 175.000 en français et plus de

4.000 grands classiques gratuits. La quasi-totalité des

nouveautés sont disponibles et cet élargissement de

l’offre est clé. Parmi les freins, on peut noter la faiblesse

du catalogue disponible en langue française par rapport à

l’offre papier, et des prix qui peuvent paraître élevés pour

les lecteurs : par exemple, certains ouvrages ont un prix

numérique supérieur à celui de leur équivalent papier.

EM@ : Le 5 mars, la Cour de justice de l’Union européen-

ne a décidé que la France ne pouvait appliquer aux ebooks

le même taux de TVA réduit que celui des livres imprimés

(5,5 % au lieu de 20 %). Quelles conséquences cela va avoir

sur les ventes d’ebooks sur Kindle en France ?

M-P. S. : L’importance culturelle et pédagogique d’un livre

réside dans le contenu du travail de l’auteur, pas dans son

format, qu’il soit numérique ou papier. Comme beaucoup

de nos clients, nous pensons que le même taux réduit de

TVA doit être appliqué aux livres, quel que soit leur format.

Sur les conséquences de cette décision, nous n’avons pas

de visibilité sur les éventuels changements de politique de

prix des éditeurs : il est donc difficile de faire des prévisions.

EM@ : L’interopéralité des formats des ebooks est de

plus en plus évoquée, tant par les utilisateurs que par les

pouvoirs publics : le format AZW de Kindle est-il un obs-

tacle ou pas au développement du livre numérique ?

M-P. S. : Au contraire, le fait de pouvoir maîtriser son for-

mat est un réel avantage parce que c’est cela qui permet

l’innovation au service d’une expérience du lecteur tou-

jours plus riche. Par exemple, grâce à son format AZW (ou

mobi), Amazon a développé des applications spécifiques,

les dictionnaires, le surlignage, le partage ou encore le

service X-Ray qui permet d’explorer et d’analyser la struc-

ture d’un ouvrage sur Kindle – ses idées essentielles, les

personnages ou les thèmes. En outre, nous faisons en

sorte qu’un client puisse lire ses ouvrages Kindle sur tous

les appareils dont il dispose – ordinateurs PC ou Mac,

smartphones ou tablettes, sous iOS ou Android – via l’ap-

plication de lecture gratuite Kindle, ce qui constitue une

véritable valeur ajoutée.

EM@ : En février, la médiatrice du livre a considéré que

les offres d’abonnement de lecture illimitée d’ebooks en

France sont illégales car « le prix n’est pas fixé par l’édi-

teur ». C’est le cas de Kindle Unlimited…

M-P. S. : L’accueil de Kindle Unlimited a été très positif en

France depuis son lancement en décembre, comme dans

tous les pays où le service a été lancé, car il permet aux

lecteurs de découvrir facilement un plus grand nombre

d’auteurs, soit 700.000 titres dont plus de 20.000 en fran-

çais [pour 9,99 euros par mois, ndlr], et aux auteurs de

toucher un plus grand nombre de lecteurs dans le monde

entier. Des éditeurs français sont d’ores et déjà présents

sur KU, tels que Fleurus [groupe Média-Participations,

ndlr], Jouvence, Eyrolles, La Musardine, Bragelonne,

Encyclopædia Universalis, ... La période de concertation

entre la médiatrice du livre et tous les acteurs qui propo-

sent ce type de service innovant est en cours. @Propos recueillis par Charles de Laubier

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Interview exclusive de Marie-Pierre Sangouard, Amazon France (suite de la Une)

« Nous avonsrecruté

ClémentMonjou en

tantqu’éditeur

pour AmazonPublishing en

France (...).Il a pour

mission dedécouvrir des

ouvrages dequalité à

traduire et àpublier en

languefrançaise ».

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Lundi 23 mars 2015 • n°120Edition Multimédi@ 3

En clair. Le nouveau plan « Essentiels 2020 » est un recen-

trage d’Orange sur son métier d’opérateur de réseaux. Pour ne

pas tomber dans la spirale de la baisse des prix, l’ex-France

Télécom va investir en cinq ans 15 milliards d’euros dans la 4G

et la fibre optique. Mais il est peu question de contenus dans

cette stratégie de « qualité de service ». Le seul moment où

« Essentiels 2020 » en parle, c’est pour évoquer sa nouvelle

interface TV, Polaris et la clé multimédia « TV Stick ».

Présenté en octobre dernier, Polaris propose une nouvelle

interface et des services unifiés sur tous les écrans au sein

d’un même foyer : téléviseur connecté, tablettes, mobiles,

ordinateurs, … « Il est désormais facile de retrouver ses

contenus (VOD, jeux, musique), ses choix et ses préférences

dans un univers clair et intuitif. Vous pouvez ainsi poursuivre

sur votre tablette ou sur votre smartphone le film ou la série

que vous avez commencé à regarder sur votre TV, et vice

versa », avait alors expliqué Stéphane Richard, lors de son

Show hello 2014. Succédant à Liveplay lancé en 2012, Polaris

donne accès par son moteur de recherche interne à un bou-

quet de contenus linéaires (chaînes de télévision, TV d’Orange

et OCS) ou non linéaires (vidéo à la demande, musiques en

ligne, jeux vidéo, …), ainsi qu’à Dailymotion toujours en quête

d’un investisseur international (1). Avec Polaris, Orange se

présente plus que jamais comme un agrégateur de contenus

(y compris Netflix, CanalPlay, Filmo TV, PassM6 ou encore

Jook Video).

Présentée en mars dernier au Mobile World Congress de

Barcelone, TV Stick a l’ambition de concurrencer le Chromecast

de Google sur le marché de l’OTT (2). « Grâce au TV stick lancé

en Roumanie et bientôt en France, les clients d’Orange pour-

ront avoir accès chez eux à la TV d’Orange et aux contenus

associés, simplement en branchant une clé HDMI sur leur télé-

viseur », indique l’opérateur télécoms. Cette clé HDMI (pour

High Definition Multimedia Interface), fabriquée par le taïwa-

nais Arcadyan, permet de recevoir la télévision linéaire (en

live) sur une tablette ou un téléviseur, mais aussi des services

à la demande tels que la catch up TV, la VOD ou encore les

services « maison » comme les chaînes OCS ou la plateforme

vidéo Dailymotion. L’utilisateur peut en outre visionner ses

propres vidéos ou photos sur l’écran de son choix. @

((11)) - Le 14 mars, leWall Street Journalaffirme qu’Orangeest entré en« négociationsexclusives » pourvendre 49 % deDailymotion auhongkongaisPCCW. « Simplesnégociations », adémenti StéphaneRichard le 17 mars.

((22)) - Over-The-Top(OTT).

Notes

En fait. Le 17 mars, Stéphane Richard, PDG du groupe Orange, a présenté son nouveau plan stratégiquebaptisé « Essentiels 2020 », lequel succède au plan « Conquêtes 2015 » – avec 15 milliards d’eurosd’investissement à la clé dans ses réseaux très haut débit fixe et mobile. Et les contenus ?

R é s e a u x • O T T • T V • V i d é o • S t r a t é g i e

Orange mise sur son réseau, agrégrateur de contenus

((11)) - Legouvernement a aussi indiquévouloir luttercontre « lescircuits financiersclandestins ».

((22)) - Ministre de laCulture et de laCommunication.

((33)) - Commissionde la protectiondes droits (CPD).

((44)) - Lire EM@109,p. 1 et 2.

Notes

En clair. L’« assèchement » des sources de financement des

sites web « pirates » va se mettre en place entre fin mars et juin.

Cette autorégulation des professionnels – de la publicité sur

Internet et des acteurs du paiement en ligne (1) – est le premier

volet du nouveau plan anti-piratage que Fleur Pellerin (2) a pré-

senté en conseil des ministres le 11 mars. Tous les types de

sites web – streaming, téléchargement ou référencement –

sont visés. Le second volet est judiciaire, avec le recours en réfé-

ré pour contrefaçon, avec suivi des mesures de blocage pro-

noncées par un juge à l’encontre des intermédiaires techniques,

et la saisine de « magistrats référents » qui seront nommés

d’ici fin juin.

Que pense l’Hadopi de ce nouveau dispositif anti-piratage ?

« L’Hadopi applaudit ce plan qui vient renforcer l’arsenal exis-

tant pour défendre la création sur Internet. La ministre a pris la

mesure de l’urgence et a agi en un temps record. C’est une

vraie bonne nouvelle pour la création. L’Hadopi se félicite éga-

lement de constater que les travaux prospectifs qu’elle conduit

sur ce sujet depuis 2011 (rapports Imbert-Quaretta) ne sont pas

restés lettre morte et ont pu inspirer les décisions annoncées.

Il y avait une forte attente des créateurs ; le gouvernement a su

y répondre », nous a répondu Eric Walter, son secrétaire géné-

ral. Contactée également, Mireille Imbert-Quaretta, président

de la CPD (3) de l’Hadopi, nous indique que la Haute autorité

« est susceptible de contribuer au dispositif en mettant en par-

tage son expertise et ses compétences ».

De leur côté, les organisations des ayants droits de la musique

et du cinéma se disent aussi satisfaites de ce plan anti-piratage

qui fait écho au discours que Premier ministre Manuel Valls a

prononcé le 15 septembre dernier (4). L’Association des produc-

teurs de cinéma (APC), par la voix de son délégué général

Frédéric Goldsmith, soutient ce plan « impliquant tous les

acteurs concernés (…) sans une nouvelle intervention législati-

ve ». Le Syndicat national de l’édition phonographique (Snep)

salue, lui, « les bonnes initiatives du gouvernement » perçues

comme « un signal encourageant pour les producteurs de

musique », mais demande « l’instauration d’une injonction de

retrait prolongée des contenus illicites à six mois ». La SACD,

elle, demande au gouvernement de réformer le statut d’inter-

médiaires techniques et leur responsabilité. @

En fait. Le 23 mars prochain, la charte de lutte contre le piratage des œuvres sur tous les types de sitesweb sera signée par les professionnels de la publicité sur Internet et les représentants des ayantsdroits. Une autre charte, avec cette fois les acteurs du paiement en ligne, sera signée en juin.

C o n t r e f a ç o n • M u s i q u e • C i n é • P o l i t i q u e

Plan anti-piratage : ayants droit et Hadopi contents

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Comment Webedia (Fimalac) entend venir en aider à l'industrie culturelle françaiseWebedia prévoit de doubler son chiffre d'affaires à 100 millions d'euros en 2015. Pour Véronique Morali,sa présidente, la filiale digitale de Fimalac – holding de son compagnon Marc Ladreit de Lacharrière –veut être le porte-drapeau numérique de l'industrie culturelle française dans le monde.

« Notre vision est que nous

pouvons être facilitateur de la

transformation digitale des

filières dans le divertissement

et l’industrie culturelle. Et le

cinéma est un bon exemple.

Nous avons trouvé qu’il était judicieux de devenir partenaire

du CNC (1) quand il a lancé (en janvier dernier) son offre de

mise en avant des films français [http://vod.cnc.fr, ndlr], en

apportant notre savoir-faire digital dans le cadre de la recom-

position de place qu’il est en train de mener », a déclaré

Véronique Morali (photo), présidente du directoire de Webedia

et présidente de Fimalac Développement, devant l’Association

des journalistes médias (AJM), le 9 mars dernier (2).

Acquisitions : « Pas de limites » !Le site web Allociné – que Webedia a acquis en juillet 2013

– propose aux internautes de voir les films en les louant ou

les achetant sur des plateformes tierces de vidéo à la

demande (VOD) vers lesquelles ils sont orientés. A terme,

les télécharger directement pourrait être proposé.

Webedia veut qu’Allociné soit plus qu’un simple site web de

référence du cinéma. « Plutôt que d’organiser en tant que

CNC le référencement des offres légales, nous lui avons

dit de profiter (en se mettant en dessous) de ce que l’on fait

depuis vingt ans chez Allociné pour les fiches-films. Tous

les mois sur Allociné, il y a environ 250 millions de fiches-

films qui sont consultées par mois, et sur lesquelles les

offres de VOD dites vertueuses sont référencées », a expli-

qué Cédric Siré, PDG de Webedia, présent aux côtés de

Véronique Morali. En revanche, Webedia ne compte pas

aller sur le terrain de la VOD : « Car entrer sur ce marché,

cela demande un premier investissement de 30 et 40 mil-

lions d’euros à mettre sur la table pour se payer aujour-

d’hui un catalogue (de films) à distribuer. Ce n’est pas

notre modèle. Nous préférons le modèle média », a justi-

fié le fondateur de Webedia.

Le cinéma fait partie des cinq thématiques verticales – avec

les jeux vidéo, la mode/beauté, la cuisine/gastronomie, et le

tourisme – sur lesquelles le groupe Fimalac a décidé d’in-

vestir en Europe et à l’international (3). « Avec nos verticales,

nous voulons être partenaire de la recomposition digitale de

filières pour le divertissement. L’industrie culturelle est

beaucoup travaillée par le groupe Fimalac, avec tout un pôle

entertainment [production de spectacles et exploitation de

salles (4), ndlr] », a indiqué Véronique Morali. Et Cédric Siré

de poursuivre : « Nous avons choisi ces cinq thématiques où

l’on est capable de devenir des numéros un mondiaux et où

nous estimons que la France a une légitimité, voire une

forme d’exception ». Sur chacune de ces cinq domaines cul-

turels, Webedia s’appuie sur un triple modèle économique :

la publicité (e-pub programmatique, vidéo, opérations spé-

ciales, …), les services (aider notamment les marques à

devenir elles-mêmes des médias), et le e-commerce

(comme la billetterie). Cédric Siré a aussi dit que les cinq

verticales n’avaient pas vocation à aller jusqu’à faire de la

presse papier (« Nous ne savons pas faire »).

En revanche, après avoir investi 240 millions d’euros depuis

l’acquisition de Webedia (Pure People, Allociné/Côté Ciné,

Jeuxvidéo.com/Millenium, 750g, …), Fimalac va plus que

jamais continuer à faire des acquisitions dans chacun de

ces cinq secteurs culturels du divertissement. « Nous

avons un actionnaire en quête de pépites et de développe-

ment, dans le cadre d’un capitalisme familial bien compris

(donc très rigoureux dans la gestion et la rentabilité). On ne

peut pas dire que l’on ait des limites. On ne peut pas ache-

ter Google, c’est clair ! », a lancé Véronique Morali. Et pour-

quoi pas Dailymotion ? « Ce n’est pas à vendre, d’abord.

C’est une belle affaire mais ce n’est pas à vendre pour

Orange », a-t-elle répondu (5). « Au niveau mondial, on est

déjà le deuxième groupe français digital derrière

Dailymotion », s’est en tout cas félicité Véronique Morali.

S’il n’y pas de limite, une acquisition à 1 milliard d’euros ?

« Je ne sais pas, franchement… Si vous avez de bonnes

idées, vous me les passez. Ce que je peux vous dire, c’est

qu’on étudiera cette offre ! Nous n’avons pas de limites, si

ce n’est la limite de la liquidité de Fimalac. Et encore, Marc

de Lacharrière dirait que l’on des capacités d’emprunts qui

sont intactes puisque l’on a zéro dette », a-t-elle poursuit.

Fimalac, consolidateur culturel Dans un univers du divertissement très fragmenté, Fimalac

affirme ainsi son ambition d’être un acteur numérique de

l’industrie culturelle française et un consolidateur sur le

mode build-up (6) (dixit Véronique Morali). Le groupe du mil-

liardaire Marc Ladreit de Lacharrière en a les moyens,

notamment depuis la cession en décembre de 30 % de

l’agence de notation Fitch, dont il détient encore 20 %. Ce qui

lui a rapporté l’équivalent de plus de 1,5 milliards d’euros. @Charles de Laubier

((11)) - Centre nationaldu cinéma et de

l’image animée (CNC).

((22)) - Le lendemain,François Hollande

visitait les locauxparisiens du groupeWebedia, lequel doitdéménager en juin à

Levallois-Perret.

((33)) - Allociné est parexemple au Brésil, en

Turquie, en Allemagne,en Espagne.

((44)) - Fimalac détient40% dans la société

Gilbert CoullierProductions, Auguri

Productions, et K-WetProductions

(organisation despectacles), contrôle

Vega (exploitation desalles, dont les

«Zénith») et a crééTrois-S (divertissement

et loisir).

((55)) - Lire p. 3 surOrange et sa note

sur Dailymotion.

((66)) - Build-up : suited’acquisitions.

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Android TV sur Bbox Miami et Freebox Mini : commentGoogle France part à la conquête des téléviseursAvec Android TV, Google accélère l’expansion de son empire à la télévision en proposant aux fournisseurs –gratuitement comme pour les fabricants de smartphones – son écosystème de TV connectée. En France, laBbox Miami et la Freebox Mini l’ont adopté. D’autres fabriquants (box, Smart TV, ...) aussi.

Android TV fait une entrée remarquée chez deux

fournisseurs d’accès à Internet (FAI) français :

Bouygues Telecom a commencé à commerciali-

ser sa Bbox Miami fin janvier auprès de ses clients

existants et la proposera à tous à partir du

23 mars ; Free a lancé sa Freebox Mini le 10 mars

dernier avec disponibilité immédiate pour tous, ses clients ou pas.

La bataille des box sous Android TV des deux frères ennemis –

Martin Bouygues et Xavier Niel – ne fait que commencer, avec un

léger avantage pour la Bbox Miami à 25,99 euros par mois au lieu

de 29,99 euros par mois pour la Freebox Mini.

En attendant la box Nexus PlayerBien que les deux opérateurs télécoms assurent qu’ils gardent res-

pectivement le contrôle de leur box et restent indépendants, c’est

bien Google qui fait son entrée dans les foyers par le téléviseur

connecté du salon. Les FAI français ne pouvaient pas résister long-

temps au géant du Net, comme a tenté de le faire Free. En effet, en

octobre dernier, son DG Maxime Lombardini expliquait : « Android

sur les boxes, c’est donner accès à nos box à Google. Demain,

quand on aura un parc Android sur la France entière, ce sera

Google qui, depuis Mountain View, pourra décider de la VOD qui sera

distribuée », avait-il lancé. Manifestement, Xavier Niel n’était pas de

cet avis. Si Bouygues Telecom n’a pas hésité à adopter Android TV

pour sa nouvelle box, mais en essayant de garder la maîtrise de l’in-

terface (une surcouche que n’a pas faite son concurrent), il a en

revanche tardé six mois entre l’annonce et la commercialisation

effective.

Ces deux FAI donnent le véritable coup d’envoi de la plateforme

multimédia Android TV en France (lire encadré ci-dessous), huit

mois après son lancement à la conférence des développeurs Google

I/O et deux ans et demi après le lancement sur le marché français

de Google TV qui fut un échec (1). Est aussi venu les rejoindre le

fabricant américain Nvidia qui a annoncé le 3 mars Shield, « la pre-

mière console Android TV au monde, qui permet d’accéder aux

vidéos, à la musique, aux applications et à des jeux incroyables en

streaming depuis chez soi ». Mais elle ne sera disponible qu’en mai

prochain. Tandis que Free a affirmé, une semaine après Nvidia, être

« le premier opérateur au monde à proposer une box compatible

avec la technologie 4K (ultra haute définition) et intégrant Android

TV ». Selon Xavier Niel, Google a accepté « pour la première fois »

qu’un FAI développe un équipement – en l’occurrence une box triple

play – à partir de la dernière version Android TV. Quant au japonais

Sony, qui avait essuyé les plâtres de la Google TV en 2012, il est

parmi les premiers fabricants de Smart TV – avec Sharp et Philips –

à proposer Android TV (2). Mais il faudra aussi compter avec Google lui-même et son Nexus

Player, une box sous Android TV (fabriquée par Asus) annoncée en

octobre dernier : commercialisée depuis janvier aux Etats-Unis et

depuis peu au Japon, elle n’est pas encore disponible en Europe.

Thomas Riedl, le responsable mondial des partenariats pour

Android TV chez Google, sera présent à la conférence européenne

TV Connect à Londres, le 30 avril prochain. Il y fera la promotion de

la nouvelle plateforme de télévision connectée de la firme de

Mountain View fonctionnant sous la dernière version Android 5.0

(alias Lollipop), qui doit succéder à Android 4.4 (ex-Google TV). Alors

que Free a opté d’emblée pour la toute dernière version d’Android

TV, Bouygues Telecom a misé sur une version antérieure, la 4.3

(alias Jelly Bean) jugée plus stable techniquement (3). Que le

meilleur gagne ! @Charles de Laubier

Avec Android TV, l'abonné ADSL (si ce n'est VDSL2 ou FTTH) a accès àl'univers multimédia de Google sur son téléviseur connecté, sa tablette ouson smartphone : contenus et applications développés pour la Smart TVsont ainsi accessibles via une interface f luide et intuitive. Desrecommandations personnalisées de contenus sont faites en lien avecGoogle Play (films, musiques, jeux, …), YouTube et d'autres applications(myCanal, Pluzz, Netflix, VOD, …). Et avec Google Cast, les « télénautes »peuvent diffuser – aisément et directement sur le téléviseur connecté – leurs

photos, vidéos ou musiques, à partie de leur mobile, leur tablette ou leurordinateur (1). Grâce à la synchronisation de contenu sur Google Play, ilspeuvent par exemple commencer à regarder un film sur le téléviseur dans lesalon et le poursuivre sur la tablette dans la chambre. Quant à la recherchevocale sur Android TV, elle permet de trouver rapidement ce que l'onsouhaite regarder. Enfin, il est possible de contrôler totalement Android TVdepuis un téléphone mobile ou une montre connectée Android Wear. @

(1) - Les applications compatibles Google Cast : g.co/castapps

Zoom

Android TV multimédia pour faire oublier l'échec de Google TV

Notes : ((11)) - Lire « Vincent Dureau fut le grand absent du lancement en Francede la Google TV, dont il est le “père” », EM@65, p. 1 et 2. • ((22)) - Alors queSamsung a préféré miser sur propore système d’exploitation Tizen, LG aretenu WebOS de Hewlett-Packard et Panasonic a choisi Firefox. • ((33)) - Voirhttp://www.android.com/tv et http://www.android.com/history

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Google, Dailymotion, Microsoft,

Facebook, Yahoo, AOL, Spotify,

Deezer, PriceMinister ou encore

Wikimedia, tous membres de

l’Association des services Internet

communautaires (Asic), présidée par

Giuseppe de Martino (photo), s’insur-

gent contre le rapport « Fiscalité du numérique » qui,

selon eux, « stigmatise l’économie numérique sans

comprendre que toute l’économie devient numé-

rique ».

Cinq ans de rapports français !Commandité par le Commissariat général à la straté-

gie et à la prospective – alias « France Stratégie » –

qui dépend du Premier ministre, ce rapport de

170 pages en anglais et publié le 9 mars (1) suggère

au gouvernement de mettre en œuvre « une taxation

spécifique pour lutter contre l’optimisation fiscale

des géants du numérique ». Sont ainsi proposées une

taxation de la publicité, une taxation sur le commer-

ce électronique, une taxation sur les flux de données

(bande passante), une taxation en fonction du nombre

d’internautes, une taxation en fonction du nombre de

données stockées sur le territoire français ou encore

une taxation sur la base des données échangées.

Après les rapports « Marini » d’avril 2010 et de juin

2012, « Blandin/Morin-Desailly » de janvier 2012, puis

« Collin & Colin » de janvier 2013, « CNNum » de

septembre 2013, tous consacrés à la fiscalité numé-

rique (sans oublier le rapport « Muet-Woerth » de

juillet 2013 sur l’optimisation fiscale internationale),

voici que le rapport « France Stratégie » pousse l’Etat

français à taxer sans attendre les acteurs du Net. « A

court terme, de nouveaux outils fiscaux spécifiques

pourraient être envisagés, au niveau européen ou

d’un noyau de pays, dans l’attente d’une refonte du

cadre fiscal international. Une telle fiscalité (…) repo-

serait sur une taxe ad valorem des revenus publici-

taires ou de la collecte de données personnelles,

plus facilement rattachables à un territoire », préco-

nisent les dix économistes auteurs de « ce rapport

sur le rapport du rapport » (dixit l’Asic). Ont ainsi été

sollicités par Matignon des experts de l’Ecole d’éco-

nomie de Paris, de l’Ecole d’économie de Toulouse et

de l’Institut Mines-Télécoms. Les acteurs du Net pré-

sents en France leur reprochent, via l’Asic, de faire des

propositions « qui auront pour effet de s’appliquer aux

seules entreprises ayant une résidence fiscale en

France, soit les acteurs français, et non pas aux

entreprises établies dans les autres pays de l’Union

européenne ». L’attractivité des services Internet

français en serait d’autant plus compromise et les

acteurs français seraient désavantagés par rapport à

leurs homologues européens. « De telles mesures

nationales, si elles sont mises en œuvre, pousseront

la France et son écosystème aux portes de la réces-

sion numérique », mettent-ils encore en garde (lire

encadré page suivante). Intervenant lors du séminaire

organisé à l’occasion de la présentation du rapport

« France Stratégie », la secrétaire d’Etat au numé-

rique, Axelle Lemaire, a conclu que « de nouveaux

outils fiscaux spécifiques pourraient être envisagés,

au niveau européen, en parallèle d’une adaptation du

cadre fiscal international ».

Autrement dit, des taxes nationales sur le numérique

ne sont pas envisageables. Une taxe sur la bande

passante, comme le souhaite Fleur Pellerin, ministre

de la Culture et de la Communication (2), ou une taxe

sur la publicité en ligne, sollicité notamment par

Frédérique Bredin, présidente du Contre national du

cinéma et de l’image animée (CNC), ne peuvent se

concevoir qu’à l’échelon européen (3), voire interna-

tional. L’Internet Advertising Bureau (IAB) a mis en

garde contre « les effets contreproductifs » de cette

taxe. Quoi qu’il en soit, Axelle Lemaire a prévu de ren-

contrer ses homologues européens pour que la ques-

tion de la fiscalité numérique soit à l’ordre du jour de

la « Stratégie numérique » que présentera la

Commission européenne en mai prochain.

« Taxe Google » multiformesCe énième rapport français sur la fiscalité numérique

en cinq ans préconise peu ou prou une « taxe Google »

qui pendrait plusieurs formes selon qu’elle s’applique

sur les recettes publicitaires, sur l’exploitation des

données ou encore sur le nombre d’utilisateurs.

Objectif : lutter contre « une optimisation fiscale

Les acteurs du Net fustigent les velléités de la France d’instaurer une fiscalité numérique nationaleAprès le rapport « Fiscalité du numérique » publié par France Stratégie (service du Premier ministre),qui conseille l’Etat de taxer « à court terme » la publicité en ligne et les données, les acteurs del’Internet dénoncent une approche franco-française et demandent un cadre fiscal international.

((11)) - Rapport« Fiscalité dunumérique »

(Taxation and thedigital economy: A

survey of theoreticalmodels), France

Stratégie 26-02-15 :http://lc.cx/Fisc

((22)) - Lire « Taxer labande passante

pourrait rapportertrès gros »,

EM@79, p. 4.

((33)) - Lire « Le débatsur la fiscalité du

numériques’européanise enfin

face aux GAFAtransfrontaliers »,

par Katia Duhamel,dans EM@91,

p. 8 et 9. Et « Donnéespersonnelles : taxer

les géants du Net ? »,EM@87, p. 5.

((44)) - Organisation decoopération et de

développementéconomiques

(OCDE), dont sontmembres 34 pays,

de l’Amérique duNord et du Sud à

l’Europe, en passantpar la région Asie-

Pacifique.

Notes

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agressive » des GAFA « réduisant drastiquement leur

taux d’imposition ». Or les acteurs du Net ne veulent

pas d’une fiscalité spécifique sur leurs activités

numériques car, selon eux, « l’optimisation fiscale

[n’est] pas le monopole du “numérique” ». La solution

doit être trouvée au sein de l’OCDE (4) – dont le siège

est à Paris – pour modifier au niveau international le

cadre juridique applicable à toutes les multinatio-

nales, qu’elles soient françaises ou étrangères.

Le BEPS de l’OCDE pour septembreC’est en septembre prochain que doivent aboutir,

notamment sur le numérique, les négociations sur la

coopération fiscale dans le cadre du projet BEPS

(Base Erosion and Profit Shifting, comprenez « éro-

sion de l’assiette fiscale et déplacement des pro-

fits »). « En matière de fiscalité des multinationales,

il est important que les Etats adaptent le cadre juri-

dique qu’ils ont élaboré au cours des quarante der-

nières années. La France se doit donc de supporter

les travaux actuellement en cours au sein de l’OCDE

relatifs à l’érosion des bases fiscales (BEPS), quand

bien même ceux-ci viseraient l’ensemble des multi-

nationales et non exclusivement celles du numé-

rique », estiment les acteurs du Net. Car les GAFA ne

sont pas les seuls à faire de l’optimisation fiscale jus-

qu’aux limites de la légalité. Beaucoup de multinatio-

nales profitent du « dumping fiscal » pratiqué par

certains Etats de l’Union européenne pour organiser

leur l’évasion fiscale.

C’est ainsi qu’ont été popularisés deux montages

financiers baptisés « double irlandais » et « sandwi-

ch hollandais » qui auraient permis par exemple à

Google d’échapper en grande partie à l’impôt en

Europe grâce à une filiale située dans le paradis fis-

cal des Bermudes (où est située sa filiale Google

Ireland Holdings). Cette double pirouette fiscale, a

priori légale, est décrite en détail dans le rapport

français « Colin & Collin » (5). Pierre Collin est juste-

ment l’un des six experts qui ont rendu en mai 2014

à la Commission européenne commanditaire un rap-

port sur « la taxation de l’économie digitale » (6). Ce

rapport européen d’il y a presque un an en conclut

que « l’économie numérique ne nécessite pas un

régime fiscal distinct ». Bruxelles a ensuite lancé, un

mois après ce rapport (en juin 2014) une enquête sur

des aides d’État dont auraient pu bénéficier Apple en

Irlande, Starbucks aux Pays-Bas, Fiat au

Luxembourg et, depuis octobre dernier, Amazon au

Luxembourg. Ce qui provoque des distorsions de

concurrence au sein de l’Union européenne.

Rappelons en outre que le 6 novembre dernier, le

Consortium international des journalistes d’investi-

gation (ICIJ) a publié une enquête – baptisée sous le

nom évocateur de « Luxembourg Leaks » ou

« LuxLeaks » (7) – menée par 80 reporters de 26 pays

sur les accords fiscaux (tax rulings) avantageux

conclus entre 340 entreprises et le Luxembourg.

Parmi les bénéficiaires de ces arrangements

fiscaux : la filiale iTunes d’Apple, Amazon Media,

Vodafone, Accenture, Sportive Group (Lagardère),

mais aussi LVMH et bien d’autres dans des secteurs

économiques différents.

Cet élargissement de la problématique « optimisa-

tion fiscale » va dans le sens des acteurs du numé-

rique qui refusent d’être discriminés en tombant

seuls sous le coup d’une éventuelle fiscalité digitale.

« L’ensemble des services développés par l’écono-

mie numérique se retrouvent aujourd’hui dans tous

les secteurs économiques. Les diverses plateformes

de vidéos sont aujourd’hui utilisées par les industries

culturelles qui y voient un vecteur de promotion, de

communication mais aussi de valorisation de leurs

oeuvres. Les réseaux sociaux sont présents en

entreprises ; les services de stockage deviennent

monnaie courante », explique l’Asic, qui déplore au

passage que ce rapport des services du Premier

ministre ait été réalisé sans réelle collaboration ni

même échanges avec les divers acteurs français de

l’économie numérique. « En effet, le rapport ne tient

pas compte du fait que le numérique n’est plus un

secteur à part entière @ Charles de Laubier

((55)) - Rapport de la« mission d’expertisede la fiscalité del’économienumérique », dePierre Collin et NicolasColin, 18 janvier 2013 :http://lc.cx/Fisc

((66)) - Rapport «Taxation of the DigitalEconomy », 28 mai2014 : http://lc.cx/Fisc

((77)) - Lire« “LuxembourgLeaks” : un pavé dansle numérique »,EM@112 p. 3 : http://lc.cx/LuxLeaks

L’Association des services Internet communautaires (Asic), créée en 2007,formule à titres d’exemples cinq critiques sur les taxes préconisées par lerapport « France Stratégie » : • Une taxe sur les données échangées ? « Il faudra donc installer des

sondes pour espionner chaque fait et geste d’un internaute en France » ; • Une taxe sur le stockage des données ? « Celui-ci deviendra donc plus

cher sur le territoire français au plus grand bénéfice des concurrentseuropéens » ;

• Une taxation en fonction du nombre d’utilisateurs français ? « Uneexcellente incitation à lancer sa start-up ou son entreprise, ailleurs qu’enFrance » ;

• Une taxation de la publicité ciblée ? « Elle forcera les entreprises fran-çaises à recourir à un modèle économique, celui du modèle payant. Unavantage sans doute concurrentiel pour toutes les entreprises baséeshors de France, non résidentes fiscales et donc, non soumises à cettenouvelle mesure » ;

• Une taxation de la publicité ? « Proposée initialement en 2007 par lesénateur [Philippe] Marini, maintes fois rejetées car visant exclusive-ment les acteurs domiciliés en France ». @

Focus

Les critiques des acteurs du Net en cinq points

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Il y a aujourd’hui 274 millions de francophones dans

le monde. Ils seront 700 millions en 2050, soit une

personne sur treize. Au moment où est célébrée, ce

20 mars, la Journée internationale de la francopho-

nie (1), le rapport sur « la francophonie numé-

rique » (2) dresse pour la première fois un état des

lieux de la langue française et des francophones sur

Internet. « A première vue, on peut penser que les francophones sont

bien servis dans l’univers du numérique. Bien qu’ils ne constituent

que 3 % de l’ensemble des internautes, 4 % de l’ensemble des conte-

nus qu’on trouve sur Internet sont en français », constate-t-il.

L’anglais, sureprésenté sur InternetMais à y regarder de plus près, l’anglais est la langue la plus surre-

présentée sur Internet : « il y est deux fois plus présent que ne paraît

le justifier sa proportion du nombre d’internautes ». Les utilisateurs

de langue anglaise représentent en effet 27 % de l’ensemble des inter-

nautes, alors que les contenus en anglais pèsent 56 % sur Internet –

soit une offre deux fois plus importante que la demande. Les franco-

phones, eux, ne représentent que 3 % des internautes mais disposent

de contenus en français en proportion avec leur nombre (voir tableau

ci-contre). Encore faut-il que les habitants des 57 pays membres de la

francophonie – sur cinq continents – aient bel et bien accès à des

contenus numériques de qualité, particulièrement pédagogiques.

« Pour que la quantité de contenus numériques de qualité en français

et en langues partenaires s’accroisse sur Internet et ailleurs, les

acteurs francophones doivent continuer d’investir dans leur produc-

tion et leur diffusion », recommande vivement ce rapport présenté le

18 mars par secrétaire général de l’Organisation internationale de la

francophonie (OIF), Michaëlle Jean (photo). Face aux Etats-Unis qui

produisent le plus de contenus sur Internet, portés par les GAFA amé-

ricains (3), l’OIF en appelle aux gouvernement des pays francophones

pour que leurs populations aient accès à des contenus en langue fran-

çaise. Cela passe par la production de contenus, le développement de

technologies en français, le soutien à la créativité artistique franco-

phone, mais aussi la production dynamique de contenus en mode col-

laboratif, à l’image de ceux de l’encyclopédie Wikipédia ou du système

de base mondiale de données géographiques OpenStreetMap. « Il faut

publier des livres numériques en français. Il faut publier des vidéos en

français sur YouTube. Il faut produire des logiciels en langue fran-

çaises, notamment dans le logiciel libre [voir tableau ci-contre, ndlr] »,

a insisté Réjean Roy, chargé de la rédaction du rapport de l’OIF et

expert canadien en technologies de l’information.

Droit d’auteur et domaine publicLa question du droit d’auteur à l’ère du numérique est également

posée, dans la mesure où les internautes et mobinautes franco-

phones peuvent créer de nouveaux contenus et services en se servant

de ce qui existe. « En fait, il n’a jamais été aussi facile de combiner dif-

férents films pour en créer un nouveau, d’enrichir un jeu vidéo de ses

propres idées, de produire une nouvelle chanson en modifiant le ryth-

La francophonie numérique veut s'imposer face à un Internet colonisé par les pays anglophones Ayant succédé au Sénégalais Abdou Diouf en tant que secrétaire générale de l’Organisation internationalede la francophonie (OIF), lors du XVe Sommet de la francophonie de novembre 2014, la CanadienneMichaëlle Jean a présenté le 18 mars à Paris le premier rapport sur « la francophonie numérique ».

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(selon la langue des internautes et des contenus)

Présence du français dans les logiciels libres (selon les systèmes d'exploitation)

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me d’un classique, de modifier un livre existant pour le mettre au

goût du jour et ainsi de suite. Il existe cependant un grand obstacle à

la créativité potentiellement sans fin des internautes et des utilisa-

teurs des TIC : le manque de matériel qu’il leur est possible d’exploi-

ter librement », relève le rapport de l’OIF, au moment où la

Commission européenne s’apprête de son côté à réformer la directi-

ve « Droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’informa-

tion » (DADVSI) de 2001. Il y a bien le Réseau numérique francopho-

ne (RNF), créé à Paris en 2006 par les bibliothèques nationales de dif-

férents pays avec pour mission d’assurer la présence du patrimoine

documentaire francophone sur le Web. Ce sont ainsi plus de

800 000 documents en français qui sont accessibles sur le site

Rfnum.org : journaux, revues, livres, cartes et plans, documents

audiovisuels. Il y a aussi le Calculateur du domaine public, dont la ver-

sion bêta est en ligne : créé à l’initiative de la France en partenariat

avec l’Open Knowledge Foundation, il s’agit d’un outil de valorisation

des oeuvres qui ne sont plus protégées par un droit de propriété lit-

téraire et artistique. Cet outil s’appuie sur les métadonnées des éta-

blissements culturels pour identifier, explorer et valoriser les œuvres

du domaine public. Mais ces initiatives ont encore une portée limitée.

« D’autres contenus ne peuvent être exploités de façon optimale par

les utilisateurs des TIC, parce que le mode de protection intellectuel-

le sélectionné volontairement ou involontairement par les créateurs

les empêche de le faire. Pour contourner ce problème, les franco-

phones gagnent à recourir à de nouveaux instruments comme les

licences Creative Commons », explique le rapport de l’OIF (4). Par exemple, un cinéaste pourra choisir une licence Creative

Commons pour laisser d’autres artistes intégrer des extraits de ses

films dans leurs propres productions et vendent ces dernières. Ou un

photographe pourra laisser les internautes reproduire et distribuer

ses clichés librement, à condition que ces derniers ne soient pas

modifiés, que l’on indique qu’ils sont de lui et qu’aucune utilisation

commerciale n’en soit faite. A noter que depuis janvier 2012, la

Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) et

la Creative Commons Collective Societies Liaison ont un accord pour

permettre aux artistes de mettre à disposition, notamment sur

Internet, leurs œuvres pour une utilisation non commerciale.

Vers un plan numérique de la francophonie ?L’année 2015 marque en tout cas une prise de conscience des enjeux

culturels de la francophonie numérique, au moment où c’est juste-

ment en octobre prochain que va être fêtée les dix ans de la Convention

de l’Unesco sur la protection et la promotion de la diversité des expres-

sions culturelles. Signée le 20 octobre 2005 à Paris, où se situe aussi le

siège de l’OIF, ce texte international doit faire l’objet de « directives opé-

rationnelles » pour prendre en compte le monde digital (5). Le rapport

de l’OIF montre bien que la francophone numérique dépend aussi à des

infrastructures d’accès à Internet (6). Selon l’Internet Society, cité dans

le rapport, « la faible connectivité entre les fournisseurs de services

Internet (FAI) se traduit souvent par le routage du trafic local vers des

liens internationaux coûteux, simplement pour atteindre ensuite des

destinations dans le pays d’origine. Ces liens doivent être payés en

devise étrangère. De fait, les FAI doivent payer les taux d’expédition

internationale pour une livraison locale. Il y a une solution internatio-

nalement reconnue à cette inefficacité. Il s’agit d’un point d’intercon-

nexion Internet ou IXP ». Or, sur plus de 400 IXP dans le monde, il sont

seulement 60 à être situés dans des pays membres de l’OIF – surtout

en Europe et au Canada (voir tableau ci-dessus).

Côté financements, afin de favoriser l’incubation dans l’investisse-

ment numérique, notamment auprès de projets et start-up franco-

phones innovantes, le Fonds francophone des inforoutes (FFI) –

créé en 1998 – vient d’être transformé en Fonds francophone de

l’innovation numérique (FFIN), dont les capacités financières seront

renforcées. « Un appel à projets va être lancé prochainement », a

indiqué Eric Adja, directeur de la francophonie numérique à l’OIF.

Le Réseau francophone de l’innovation (Finnov (7)), créé en juillet

2013, recense pour l’instant 64 incubateurs dans les pays franco-

phones. De là à imaginer un « plan numérique de la francophonie »

(dixit Louis Houle, président du chapitre québécois de l’Internet

Society), il n’y a qu’un pas… Peut-être d’ici le prochain Sommet de

la francophonie prévu à Madagascar en 2016. @ Charles de Laubier

Les IXP* installés dans les pays francophones

* Point d'interconnexion Internet (IXP), garantissant un trafic local moins coûteux. Sour

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Notes : ((11)) - Cette date a été choisie en référence au 20 mars 1970, marqué par la création à Niamey (Niger) de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), future Organisationinternationale de la Francophonie (OIF). • ((22)) - Rapport disponible ici : http://lc.cx/Culture • ((33)) - Google/YouTube, Apple, Facebook et Amazon (GAFA). • ((44)) - Pays de la Francophonie comptant aumoins un membre dans le réseau d’affiliés de Creative Commons : Belgique, Bulgarie, Canada, Égypte, France, Grèce, Liban, Luxembourg, Ex-République yougoslave de Macédoine, Roumanie,Rwanda, Suisse et Vietnam. • ((55)) - Lire «L’Unesco veut adapter au numérique la Convention sur la diversité culturelle, menacée d’obsolescence», EM@92, p. 7. • ((66)) - Seulement onze des vingt et unpays membres de l’OIF examinés par Cisco disposaient en 2012 d’infrastructures réseaux suffisantes pour offrir des services Internet avancés aux internautes, tels que des services de diffusion encontinu de vidéos haute définition, de gestion de la relation client via le cloud, d’enseignement virtuel ou de télémédecine. • ((77)) - www.francophonieinnovation.org

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Lundi 23 mars 2015 • n°120Edition Multimédi@ 10

Bouclier juridique, le secret des affaires s'arrête là où commence la liberté d'expressionAnciens médias, nouveaux médias et lanceurs d'alerte sont unanimes pour préserver la liberté d'expres-sion au nom de la liberté d'informer. C'est la limite naturelle du secret des affaires. Encore faut-il définirce dernier et légiférer. La loi « Macron » a tenté, en vain, de le faire. N'est-ce que partie remise ?

A l’occasion de l’examen en commis-

sion du projet de loi « Macron » pour la

croissance et l’activité, les parlemen-

taires ont adopté des amendements

visant à définir et protéger le secret

des affaires. Mais il n’aura fallu que

48 heures à deux journalistes de

renom, Edwy Plenel (1) et Elise Lucet (2), pour faire

renoncer l’Elysée, puis Bercy et la majorité parlemen-

taire, au maintien du projet de texte sur le secret des

affaires. Les deux journalistes estimaient qu’un tel

projet portait atteinte à l’activité des journalistes,

notamment leurs investigations et, de manière géné-

rale, que ce texte n’aurait jamais permis la sortie d’af-

faires telles que celle du Médiator ou des prothèses

mammaires PIP s’il avait été en vigueur lorsque des

journalistes enquêtaient sur ces affaires.

Liberté d’expression en EuropeInvoquer la protection de la liberté d’expression – à

juste titre ou non – quelques semaines après les atten-

tats de janvier 2015 était imparable. Lobotomisant. A

tel point que Emmanuel Macron (3) et le président de

la commission des lois de l’Assemblée nationale ont

vite craint leur « démonétisation » personnelle ou celle

du texte s’ils maintenaient les « amendements secret

des affaires ». Et ce, au milieu d’un débat parlementai-

re déjà très houleux qui conduisit à l’adoption sans vote

du projet de loi « Macron » par l’Assemblée nationale

en première lecture, par le recours à l’article 49-3 de la

Constitution. Il est vrai que le traitement d’un sujet

aussi important que le secret des affaires dans les

replis d’une loi aussi tentaculaire que la loi « Macron »,

était probablement une négligence : lorsque la presse

ne sait plus communiquer sur les thèmes abordés par

le projet de loi « Macron » tellement ils sont nombreux,

on s’expose naturellement à une critique d’autant plus

audible qu’elle porte sur un sous-thème précis, qui

« parle » plus facilement aux médias… surtout quand

ces derniers s’estiment visés par le sujet en question.

Dans ce tintamarre médiatico-politique, peu d’acteurs

concernés ont eu le temps d’analyser sereinement les

dispositions adoptées par les députés avant d’être reti-

rées par le gouvernement. Or, lorsqu’on est un journa-

liste, on ne peut de bonne foi affirmer que la liberté

d’expression pourrait être vraiment menacée par une

loi nationale au sein de l’Union européenne. Car qui-

conque s’intéresse aux mécanismes institutionnels de

protection de la liberté d’expression le sait : au sein de

l’Union européenne, les Etats membres ne sont pas

libres d’attenter par la loi à la liberté d’expression (4).Bref. Pourquoi tout ce bruit ? Qui a lu le projet de

texte ? Et à quoi bon légiférer sur le secret des

affaires ? Pourquoi faut-il clairement définir et organi-

ser la protection du secret des affaires ?

Il s’agit d’un indéniable progrès dans la protection du

patrimoine immatériel des entreprises comme des

organismes de recherche et de tous ceux qui imagi-

nent, innovent et créent ainsi les principales richesses

d’aujourd’hui et de demain. Or ce patrimoine, fruit de

l’intelligence, est régulièrement menacé de

« pillages » économique ou para-étatique. Et contre

ces menaces, les outils de défense ou de riposte sont

limités, mal adaptés, voire inexistants. Bien que la

notion de secret des affaires soit mentionnée dans le

code de commerce, de la consommation, des postes

et communications électroniques ou encore le code

monétaire et financier, il n’en existe aucune définition

véritable, ce qui est source d’insécurité juridique. Au

niveau du droit communautaire, où le secret des

affaires est rattaché au secret professionnel par l’ar-

ticle 339 du Traité européen (TFUE), les secrets d’af-

faires sont définis par les juridictions européennes

comme « des informations dont non seulement la

divulgation au public mais également la simple trans-

mission à un sujet de droit différent de celui qui a

fourni l’information peut gravement léser les intérêts

de celui-ci » (5). Cette définition jurisprudentielle a

ensuite été reprise et complétée par la communica-

tion de la Commission européenne sur l’accès au dos-

sier publiée le 22 décembre 2005.

Le maquis législatif françaisEn droit français, les dispositions existantes consti-

tuent un maquis législatif dont la complexité laisse les

entreprises, notamment les plus petites, incapables

((11)) - Edwy Plenel estjournaliste et l’un des

co-fondateurs duservice en ligne

Mediapart, et sonprésident. Il a

travaillé durant vingt-cinq ans (1980-2005)au Monde, dont il fut

directeur de larédaction.

((22)) - Elice Lucet estjournaliste et

présente depuisseptembre 2005 le

journal de 13 heuresde France 2, après

une vingtained’années passées à

France 3.

((33)) - Ministre del’Économie, de

l’Industrie et duNumérique, depuis

le 26 août 2014.

Notes

Etienne Drouard, avocat associé, cabinet K&L Gates

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((44)) - Cette liberté,garantie par laConventioneuropéenne desauvegarde des Droitsde l’Homme, échappeclairement auxtentations nationalesde la restreindre. Cedont, en France, leConseil constitutionnelest le garant national,soit en dernier ressort,soit à titreintermédiaire, s’il devaitomettre l’une desexigences intangiblesdéjà posées par la Coureuropéenne des Droitsde l’Homme en lamatière.

((55)) - TPICE, 18 septembre 1996,Postbanke.

((66)) - Cette différenced’objectifs et derésultats marque ladifférencefondamentale delégitimité et deprotection qui sépare levol d’informationsconfidentielles etl’enquête journalistique– comme l’enquêteadministrative oujudiciaire, d’ailleurs.

Notes

de faire face à la diversité des stratégies de pillage et

des contentieux à mener pour y répondre. Ainsi, en

droit pénal, l’incrimination de vol n’est pas applicable

au vol d’information, laissant un trou béant dans la

cuirasse.

Et s’il est possible d’invoquer l’abus de confiance, l’es-

croquerie, l’intrusion dans un système informatique,

le secret de fabrique, le secret professionnel… il ne

s’agit là que de moyens de réponse fragmentés qui ne

recouvrent pas la diversité du pillage d’informations

confidentielles. Les principales victimes de ces

lacunes sont nos PME-PMI innovantes, source d’em-

ploi et de croissance.

La France soit combler un retardEn droit civil, aucune protection spécifique n’est pré-

vue par les textes. Les tribunaux ont tiré du droit com-

mun de la responsabilité une certaine protection

contre la concurrence déloyale. Mais elle n’est acces-

sible qu’à ceux qui ont les moyens de s’offrir l’experti-

se nécessaire à sa mise en œuvre, ce qui n’est pas le

cas des innovateurs les plus fragiles, qui sont pour-

tant l’un des tissus les plus féconds de l’innovation.

Enfin, la phase contentieuse fait trop souvent l’objet

de détournement afin d’accaparer légalement des

secrets indispensables à la position concurrentielle

de l’entreprise. La France doit donc combler un retard

qu’elle accuse depuis longue date par rapport à ses

partenaires et concurrents économiques directs

(États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, …), qui protè-

gent déjà le secret des affaires de leurs entreprises

face aux mêmes phénomènes de pillage que ceux

rencontrés par les entreprises françaises.

Si la liberté d’expression et d’enquête journalistique

autorisent de fracturer des portes, des coffres et des

systèmes informatiques, alors tout secret protégé par

la loi – professionnel, des affaires, défense ou médical

– viendrait violer une telle vision de la liberté d’infor-

mer. Or, ce qui distingue un espion d’un journaliste,

indépendamment des méthodes employées pour

accéder à une information, c’est la notion d’appro-

priation : le journaliste informe et révèle quand le

pilleur s’informe et s’approprie (6). De surcroît, la pro-

tection légale du secret des sources constitue en elle-

même une légitimation des moyens d’investigation

employés à des fins d’information du public, qui vient

compléter la protection de la liberté d’expression,

sans que le secret des affaires ne puisse lui porter

atteinte d’aucune manière.

Or, le projet de texte débattu en janvier 2015 intégrait

des exemptions claires, indiscutées et larges pour

garantir la protection des journalistes et des lanceurs

d’alerte. A ce titre, le projet d’article L. 152-2 du Code

de commerce précise que le secret des affaires n’est

pas opposable « dans les cas où la loi impose ou auto-

rise la révélation du secret ». Le texte ne met donc

nullement en cause les protections existantes, et

notamment celles déjà octroyées par les lois adoptées

entre 2007 et 2013 concernant les lanceurs d’alerte,

ainsi que celles prévues pour l’exercice légitime de

leurs missions par les institutions représentatives du

personnel.

De même, le projet d’article L. 151-2 prévoit : « Toute

atteinte, délibérée ou par imprudence, au secret des

affaires prévue aux deux premiers alinéas du présent

article engage la responsabilité civile de son auteur, à

moins qu’elle n’ait été strictement nécessaire à la

sauvegarde d’un intérêt supérieur, tel que l’exercice

légitime de la liberté d’expression ou d’information ou

la révélation d’un acte illégal ».

En faisant expressément la réserve d’un « intérêt

supérieur », le projet de texte s’est inscrit dans un édi-

fice au sommet duquel figurent un certain nombre de

valeurs, dont, comme il l’indique lui-même, la liberté

d’expression.

Celle-ci constitue la limite naturelle et stable au

secret des affaires, comme elle l’est déjà pour le droit

au respect de la vie privée ou le droit à l’image. Dans

ce domaine, la Cour de cassation rappelle « que ce

droit doit se combiner avec l’exercice de la liberté de

communication des informations, ce dont il résulte

qu’une personne ne peut s’opposer à la réalisation et

à la divulgation de son image chaque fois que le public

a un intérêt légitime à être informé ». Il en va de

même du secret des affaires, nécessairement limité

dans la mesure où le public a un intérêt légitime à être

informé, ce qu’énonce exactement le projet d’article

L. 151-2 du Code de commerce.

Bouclier juridique sous contrôle du jugeEn conclusion, il faudra rebondir pour légiférer sur le

secret des affaires. Vite. A force de conseiller et de

défendre des entreprises innovantes comme des

entreprises de presse, qui peuvent parfois et heureu-

sement être une même entreprise, je constate

qu’elles ont toutes besoin d’armes et de boucliers

dans la « sale guerre » que se livrent les Etats, les

ensembles régionaux et leurs économies. Le secret

des affaires relève plutôt du bouclier juridique. Il ne

peut s’employer que sous le contrôle du juge.

Lorsqu’il peut être un recours approprié, il faut que

les entreprises françaises victimes de pillage écono-

mique puissent s’en servir.

Et que la presse continue de remplir sa mission

essentielle, épaulée en cela par les lanceurs d’alerte,

tout en préservant son indépendance à toute force. @

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souveraineté numérique, sur le thème cette année de

« Quels enjeux pour l'économie française », organisées

par Aromates le 14 avril 2015 à la Maison de la Chimie à

Paris. Renseignements et inscriptions obligatoires :http://www.souverainetenumerique.aromates.fr

• Le 51e Marché international des programmes

de télévision (MipTV), se tiendra du 13 au 16 avril 2015

à Cannes, organisé par Reed Elsevier.

Enregistrement : http://www.miptv.com/en/participate/

• Edition Multimédi@ est partenaire du colloque

NPA-Le Figaro sur le thème, pour cette 21e édition,

de « Les piliers transformation de la numérique », orga-

nisé le 2 juin 2015 à la Maison des Travaux Publics (Paris)

par NPA Conseil. Renseignements et inscriptions :http://www.colloque-npa.fr.

Livre broché, 296 pages, 21,90 eurosen vente en librairie et ici : http://lc.cx/Broché2025