Edition du Lundi 23 Fevrier 2015

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LES ANNONCES DE LA SEINE J OURNAL OFFICIEL DʼANNONCES LÉGALES - I NFORMATIONS GÉNÉRALES, J UDICIAIRES ET TECHNIQUES bi-hebdomadaire habilité pour les départements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne 12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Téléphone : 01 42 60 36 35 - Télécopie : 01 47 03 92 15 Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected] FONDATEUR EN 1919 : RENÉ TANCRÈDE - DIRECTEUR : JEAN-RENÉ TANCRÈDE L a Cour des comptes, juridiction financière chargée de veiller au bon emploi des deniers publics, contrôle la régularité, l’efficience et l’efficacité de l’action publique. Le code des juridictions nancières prévoit qu’un rapport public retrace chaque année l’activité de l’année précédente. Didier Migaud, Premier Président de la Cour des Comptes, a remis au Président de la République François Hollande le rapport public annuel 2015 le 10 février dernier puis a tenu le lendemain une conférence de Presse rue Cambon. Ce fut l’occasion pour le Chef de la Haute Juridiction financière de remercier Henri Paul, rapporteur général de cette édition 2015, ainsi que les Présidents des sept Chambres de la Cour des comptes qui ont largement contribué à la mission d’information des citoyens et des décideurs publics. Une fois encore, les messages portés par la Cour des comptes sont inquiétants : les politiques publiques doivent être mieux ciblées afin d’être plus adaptées aux attentes et aux besoins de la société, les services publics doivent être gérés avec un niveau d’exigence plus élevé, le décalage observé, entre les engagements et les résultats réellement obtenus, est préjudiciable aux politiques publiques, les déficits du budget de l’État s’accumulent sans discontinuer depuis 1974, le coût du chômage atteint un niveau très préoccupant, la part des dépenses publiques dans le produit intérieur brut (PIB) est trop élevé… La Cour des comptes appelle donc les pouvoirs publics à « engager des efforts de réforme résolus en faveur du redressement des comptes publics ». Didier Migaud a conclu son propos en affirmant que « ces efforts étaient d’autant plus nécessaires et possibles que les réformes étaient attendues par les Français qui savent pertinemment que la qualité des services publics ne se confond pas avec l’augmentation de la dépense publique ». Jean-René Tancrède Lundi 23 février 2015 - Numéro 7 - 1,15 Euro - 96 e année Cour des comptes Rapport public annuel 2015 Photo © Jean-René Tancrède - Téléphone : 01.42.60.36.35 Evelyne Ratte, Antoine Durrleman et Didier Migaud SOCIÉTÉ l Cour des comptes La performance de l’action publique par Didier Migaud ............................. 2 l Cercle des Stratèges Disparus ....................................................................................................... 7 l Networking & Business Club....................................................................................................... 19 PALMARÈS l Prix Jean Carbonnier 2014 - 10 ème anniversaire du Prix Jean Carbonnier par Sandrine Zientara-Logeay ...................................... 8 - Le droit entre l’Homme et l’animal par Loïc Cadiet ........................................................................ 10 VEILLE LÉGISLATIVE l Confédération Nationale des Avocats Projet de loi pour la croissance et l’activité ................ 11 AUDIENCE SOLENNELLE l Cour d’appel de Versailles - Rayonnement de la jurisprudence versaillaise par Dominique Lottin............................................ 12 - Éclairer l’avenir par le passé par Marc Robert ................................................................................ 14 - Les écuries du Roi à travers les siècles par Walid Benatia .............................................................. 16 l Cour d’appel d’Orléans - Sauvegarder l’état de droit par François Pion ................................................................................. 29 - Lutter contre les violences au sein du couple par Martine Ceccaldi .............................................. 31 ANNONCES LÉGALES .............................................................................................. 20 ADJUDICATIONS ........................................................................................................ 22 DIRECT l Lutte contre le racisme et l’antisémitisme ............................................................................... 24 l 6 ème contrat de plan État-région 2015-2020 .............................................................................. 24 l L’UNion des Acteurs de la Construction (UNAC)...................................................................... 25 AU FIL DES PAGES l « Énergie - Environnement - Infrastructures » Revue mensuelle éditée par LexisNexis......... 25 l Code de l’arbitrage 2015 commenté par Thomas Clay et édité par LexisNexis ....................... 28 DÉCORATION Céline Cadars-Beaufour Chevalier de la Légion d’honneur ......................... 26 ELECTIONS l Fédération Nationale des Centres de Médiation Claude Duvernoy nommé Président ..... 28

Transcript of Edition du Lundi 23 Fevrier 2015

  • LES ANNONCES DE LA SEINE

    JOURNAL OFFICIEL DANNONCES LGALES - INFORMATIONS GNRALES, JUDICIAIRES ET TECHNIQUESbi-hebdomadaire habilit pour les dpartements de Paris, Yvelines, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val de Marne

    12, rue Notre-Dame des Victoires - 75002 PARIS - Tlphone : 01 42 60 36 35 - Tlcopie : 01 47 03 92 15Internet : www.annoncesdelaseine.fr - E-mail : [email protected]

    FONDATEUR EN 1919 : REN TANCRDE - DIRECTEUR : JEAN-REN TANCRDE

    La Cour des comptes, juridiction fi nancire charge de veiller au bon emploi des deniers publics, contrle la rgularit, leffi cience et leffi cacit de laction publique. Le code des juridictions fi nancires prvoit quun rapport public retrace chaque anne lactivit de lanne prcdente. Didier Migaud, Premier Prsident de la Cour des Comptes, a remis au Prsident de la Rpublique Franois Hollande le rapport public annuel 2015 le 10 fvrier dernier puis a tenu le lendemain une confrence de Presse rue Cambon. Ce fut loccasion pour le Chef de la Haute Juridiction fi nancire de remercier Henri Paul, rapporteur gnral de cette dition2015, ainsi que les Prsidents des septChambres de la Cour des comptes qui ont largement contribu la mission dinformation des citoyens et des dcideurs publics.Une fois encore, les messages ports par la Cour des comptes sont inquitants : les politiques publiques doivent tre mieux

    cibles afi n dtre plus adaptes aux attentes et aux besoins de la socit, les services publics doivent tre grs avec un niveau dexigence plus lev, le dcalage observ, entre les engagements et les rsultats rellement obtenus, est prjudiciable aux politiques publiques, les dfi cits du budget de ltat saccumulent sans discontinuer depuis 1974, le cot du chmage atteint un niveau trs proccupant, la part des dpenses publiques dans le produit intrieur brut (PIB) est trop levLa Cour des comptes appelle donc les pouvoirs publics engager des efforts de rforme rsolus en faveur du redressement des comptes publics. Didier Migaud a conclu son propos en affi rmant que ces eff orts taient dautant plus ncessaires et possibles que les rformes taient attendues par les Franais qui savent pertinemment que la qualit des services publics ne se confond pas avec laugmentation de la dpense publique. Jean-Ren Tancrde

    Lundi 23 fvrier 2015 - Numro 7 - 1,15 Euro - 96e anne

    Cour des comptesRapport public annuel 2015

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    Evelyne Ratte, Antoine Durrleman et Didier Migaud

    SOCITlCour des comptes La performance de laction publique par Didier Migaud ............................. 2lCercle des Stratges Disparus .......................................................................................................7lNetworking & Business Club ....................................................................................................... 19

    PALMARSlPrix Jean Carbonnier 2014- 10me anniversaire du Prix Jean Carbonnier par Sandrine Zientara-Logeay ......................................8- Le droit entre lHomme et lanimal par Loc Cadiet ........................................................................ 10

    VEILLE LGISLATIVElConfdration Nationale des Avocats Projet de loi pour la croissance et lactivit ................ 11

    AUDIENCE SOLENNELLElCour dappel de Versailles- Rayonnement de la jurisprudence versaillaise par Dominique Lottin ............................................ 12- clairer lavenir par le pass par Marc Robert ................................................................................ 14- Les curies du Roi travers les sicles par Walid Benatia .............................................................. 16lCour dappel dOrlans- Sauvegarder ltat de droit par Franois Pion ................................................................................. 29- Lutter contre les violences au sein du couple par Martine Ceccaldi .............................................. 31

    ANNONCES LGALES .............................................................................................. 20ADJUDICATIONS ........................................................................................................ 22DIRECTlLutte contre le racisme et lantismitisme ............................................................................... 24l6me contrat de plan tat-rgion 2015-2020 .............................................................................. 24lLUNion des Acteurs de la Construction (UNAC) ...................................................................... 25

    AU FIL DES PAGESl nergie - Environnement - Infrastructures Revue mensuelle dite par LexisNexis ......... 25l Code de larbitrage 2015 comment par Thomas Clay et dit par LexisNexis ....................... 28

    DCORATION Cline Cadars-Beaufour Chevalier de la Lgion dhonneur ......................... 26ELECTIONSlFdration Nationale des Centres de Mdiation ClaudeDuvernoy nomm Prsident ..... 28

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    La performance de laction publiquepar Didier Migaud

    A(...)vant dvoquer les observations et recommandations du rapport public annuel 2015, je veux voquer rapidement la contribution des juridictions financires aux eff orts de modernisation des services publics.Profondment attaches au principe de sparation des pouvoirs, elles sont au service de la Rpublique, dans le respect des textes fondamentaux qui rgissent leur mission: clairer les dcideurs publics et les citoyens. Elles apportent une contribution indpendante, grce une programmation libre de leurs travaux et la publicit donne leurs observations. Elles veulent, de manire constructive, soutenir, dans leurs dmarches, celles et ceux qui ont pour objectif damliorer laction publique.Ainsi, en 2014, la Cour des comptes a rendu publics 63travaux. Parmi ceux-ci, je signale notamment sept rapports consacrs des thmatiques spcifi ques [ainsi de la sant Outre-Mer ou de la grande vitesse ferroviaire] et treize rapports raliss dans le cadre de sa mission dassistance au Parlement [par exemple sur les services la personne ou la dette des tablissements de sant]. 25 rfrs ont t communiqus aux membres du Gouvernement et 5 rapports particuliers concernant les entreprises publiques ont t mis en ligne.Les juridictions financires veillent exercer leur mission avec un haut niveau dexigence thique et professionnelle. Jai arrt en dcembre dernier le recueil des normes que les quipes de contrle doivent respecter, conformment aux rgles nationales et internationales en vigueur. Ce recueil comporte en annexe notre charte de dontologie. Accessibles sur le site internet de la Cour, ces documents sont dsormais connus des

    organismes contrls et leur off rent, ainsi quaux citoyens, une garantie supplmentaire. Ils facilitent le bon droulement des travaux des juridictions fi nancires et reprsentent aussi, ce titre, une scurit pour les magistrats eux-mmes.(...)Ces propos prliminaires achevs, jen viens aux messages ports cette anne par le rapport de la Cour:

    1. UN DCALAGE Un dcalage est observ entre les annonces, les engagements et les rsultats rellement obtenus. Il est prjudiciable la crdibilit des politiques publiques.Nous accumulons les dfi cits depuis prs de quarante ans [depuis 1974 sans discontinuer sagissant du budget de ltat]. Le chmage atteint des niveaux inquitants. La part de nos dpenses publiques dans le PIB est parmi les plus leve sans que les rsultats soient la hauteur. Dans ce contexte, leff ort devrait tre plus rsolu en faveur dune gestion plus rigoureuse des fi nances et des services publics. Il doit tre davantage tourn vers la recherche deffi cacit.Au sein des administrations dtat, des administrations locales et de la scurit sociale, les dcideurs publics sont les garants de lefficacit et de lefficience de laction publique quil leur appartient de prserver. Or, cette anne encore, dans son rapport public annuel, la Cour observe, de nombreuses reprises, un dcalage entre les engagements pris, les objectifs affichs, les moyens qui leur sont consacrs et les rsultats obtenus. Cest le premier message de la Cour.La confiance dont jouit notre pays dans les instances politiques, conomiques et fi nancires, aux niveaux europen et international, nest pas infi nie: elle est troitement lie la crdibilit de sa politique budgtaire. Lactualit rcente montre que les dbats sont nourris quant lapproche retenir dans un contexte encore difficile, et alors que les dettes publiques de plusieurs tats europens, dont le ntre, continuent de se creuser.

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    LES ANNONCES DE LA SEINESige social :

    12, rue Notre-Dame des Victoires 75002 PARISR.C.S. PARIS B 339 349 888

    Tlphone : 01 42 60 36 35 - Tlcopie : 01 47 03 92 15Internet : www.annoncesdelaseine.fr

    e-mail : [email protected]

    Etablissements secondaires :l 4, rue de la Masse, 78910 BEHOUSTTlphone : 01 34 87 33 15l 1, place Paul-Verlaine, 92100 BOULOGNETlphone : 01 42 60 84 40l 7, place du 11 novembre 1918, 93000 BOBIGNYTlphone : 01 42 60 84 41l 1, place Charlemagne, 94290 VILLENEUVE-LE-ROITlphone : 01 45 97 42 05

    Directeur de la rdaction :Jean-Ren Tancrde

    Comit de rdaction :

    Thierry Bernard, Avocat la Cour, Cabinet BernardsFranois-Henri Briard, Avocat au Conseil dtatAgns Bricard, Prsidente de la Fdration des Femmes AdministrateursAntoine Bullier, Professeur lUniversit Paris I Panthon SorbonneMarie-Jeanne Campana, Professeur agrg des Universits de droitAndr Damien, Membre de lInstitutPhilippe Delebecque, Professeur de droit lUniversit Paris I Panthon SorbonneBertrand Favreau, Prsident de lInstitut des Droits de lHomme des Avocats Europens, ancien Btonnier de BordeauxDominique de La Garanderie, Avocate la Cour, ancien Btonnier de ParisBrigitte Gizardin, Magistrat honoraireRgis de Gouttes, Premier avocat gnral honoraire la Cour de cassation Serge Guinchard, Professeur de Droit lUniversit Paris II Panthon-AssasGrard Haas, Avocat la Cour, Prsident de GesicaFranoise Kamara, Conseiller la premire Chambre de la Cour de cassationMaurice-Antoine Lafortune, Avocat gnral honoraire la Cour de cassation Bernard Lagarde, Avocat la Cour, Matre de confrence H.E.C. - EntrepreneursJean Lamarque, Professeur de droit lUniversit Paris II Panthon-AssasChristian Lefebvre, Prsident Honoraire de la Chambre des Notaires de ParisDominique Lencou, Prsident dHonneur du Conseil National des Compagnies dExperts de JusticeNolle Lenoir, Avocate la Cour, ancienne MinistrePhilippe Malaurie, Professeur mrite lUniversit Paris II Panthon-AssasJean-Franois Pestureau, Expert-Comptable, Commissaire aux comptesGrard Pluyette, Conseiller Doyen la premire Chambre civile de la Cour de cassationJacqueline Socquet-Clerc Lafont, Avocate la Cour, Prsidente dhonneur de lUNAPLYves Repiquet, Avocat la Cour, ancien Btonnier de ParisRen Ricol, Ancien Prsident de lIFACFrancis Teitgen, Avocat la Cour, ancien Btonnier de ParisCarol Xueref, Directrice des affaires juridiques, Groupe Essilor International

    Publicit lgale et judiciaire : Didier Chotard

    Commission paritaire : n 0718 I 83461I.S.S.N. : 0994-3587Tirage : 13 656 exemplairesPriodicit : bi-hebdomadaireImpression : M.I.P.3, rue de lAtlas - 75019 PARIS

    Copyright 2015Les manuscrits non insrs ne sont pas rendus. Sauf dans les cas o elle est autorise expressment par la loi et les conventions internationales, toute reproduction,totale ou partielle du prsent numro est interdite et constituerait unecontrefaon sanctionne par les articles 425 et suivants du Code Pnal.

    Le journal Les Annonces de la Seine a t dsign comme publicateur of ciel pour la priode du 1er janvier au 31 dcembre 2015, par arrts de Messieurs les Prfets de Paris du 30 dcembre 2014, des Yvelines du 16 dcembre 2014, des Hauts-de-Seine du 16 dcembre 2014, de la Seine-Saint-Denis du 16 dcembre 2014 et du Val-de-Marne du 22 dcembre 2014, de toutes annonces judiciaires et lgales prescrites par le Code Civil, les Codes de Procdure Civile et de Procdure Pnale et de Commerce et les Lois spciales pour la publicit et la validit des actes de procdure ou des contrats et des dcisions de Justice pour les dpartements de Paris, des Yvelines, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.N.B. : Ladministration dcline toute responsabilit quant la teneur des annonces lgales.

    - Tarifs hors taxes des publicits la ligneA) Lgales :Paris : 5,49 Seine-Saint-Denis : 5,49 Yvelines : 5,24 Hauts-de-Seine : 5,49 Val-de-Marne : 5,49 B) Avis divers : 9,76 C) Avis nanciers : 10,86 D) Avis relatifs aux personnes : Paris : 3,83 Hauts-de-Seine : 3,83 Seine-Saint Denis : 3,83 Yvelines : 5,23 Val-de-Marne : 3,83 - Vente au numro : 1,15 - Abonnement annuel : 15 simple35 avec supplments culturels95 avec supplments judiciaires et culturels

    COMPOSITION DES ANNONCES LGALESNORMES TYPOGRAPHIQUES

    Surfaces consacres aux titres, sous-titres, lets, paragraphes, alinas

    Titres : chacune des lignes constituant le titre principal de lannonce sera compose en capitales (ou majuscules grasses) ; elle sera lquivalent de deux lignes de corps 6 points Didot, soit arrondi 4,5 mm. Les blancs dinterlignes sparant les lignes de titres nexcderont pas lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Sous-titres : chacune des lignes constituant le sous-titre de lannonce sera compose en bas-de-casse (minuscules grasses) ; elle sera lquivalent dune ligne de corps 9 points Didot soit arrondi 3,40 mm. Les blancs dinterlignes sparant les diffrentes lignes du sous-titre seront quivalents 4 points soit 1,50 mm.Filets : chaque annonce est spare de la prcdente et de la suivante par un let 1/4 gras. Lespace blanc compris entre le let et le dbut de lannonce sera lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot soit 2,256 mm. Le mme principe rgira le blanc situ entre la dernire ligne de lannonce et le let sparatif. Lensemble du sous-titre est spar du titre et du corps de lannonce par des lets maigres centrs. Le blanc plac avant et aprs le let sera gal une ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm.Paragraphes et Alinas : le blanc sparatif ncessaire a n de marquer le dbut dun paragraphe o dun alina sera lquivalent dune ligne de corps 6 points Didot, soit 2,256 mm. Ces d nitions typographiques ont t calcules pour une composition effectue en corps 6 points Didot. Dans lventualit o lditeur retiendrait un corps suprieur, il conviendrait de respecter le rapport entre les blancs et le corps choisi.

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    P R E S S EPAYANTEDiffusion Certi e

  • Les Annonces de la Seine - Lundi 23 fvrier 2015 - numro 7 3

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    Le rle de la Cour des comptes nest pas de trancher ces dbats. Il nest pas de se substituer aux pouvoirs publics dans la prise de dcision, les choix retenir ou les engagements prendre vis--vis de nos partenaires. En revanche, le rle de la Cour est bien dinformer le citoyen et les dcideurs publics sur la situation et les perspectives des finances publiques, et le respect des engagements pris.Pour ce faire, les magistrats de la Cour partent des engagements internationaux de notre pays et des lments contenus dans les lois financires votes par le Parlement la loi de programmation des finances publiques, la loi de finances initiale, la loi de financement de la scurit sociale et les lois de finances et de financement rectificatives. Les rapports de la Cour sappuient aussi sur les donnes issues de la statistique publique, nationale et europenne, ainsi que sur les hypothses et les rsultats communiqus par le Gouvernement.La Cour fonde ainsi son apprciation sur une ralit observable. Comme chaque anne, dans un chapitre de son rapport public annuel, la Cour livre nos concitoyens son apprciation sur la situation des finances publiques. Deux grandes observations sen dgagent:lle mouvement de rduction des dficits sest interrompu en 2014;lla capacit de la France tenir ses engagements reste incertaine en 2015.Le chapitre consacr aux finances publiques met en vidence le drapage des prvisions successives de dficit public pour 2013 et 2014. Depuis plusieurs annes des annonces peu ralistes se sont succd, fondes sur des hypothses trop optimistes, affichant des objectifs inatteignables et aboutissant des engagements non tenus. Le mois dernier, lors de laudience solennelle de rentre de la Cour, jai salu lopration vrit de septembre 2014, par laquelle le Gouvernement a [tardivement] reconnu la ralit de lampleur des dficits.Les rsultats de 2014 devraient savrer meilleurs que la prvision de 4,4% inscrite dans la loi de finances de dcembre 2014. Mais, quand bien mme se rapprocheraient-ils de 4,1%, cela resterait suprieur aux 3,6% prvus initialement. En tout tat de cause, ils ne marqueraient pas une amlioration par rapport 2013, au contraire de ce qui se passe dans tous les autres pays de lUnion europenne dont le dficit dpasse 3%.Malgr un objectif de rduction du dficit limit par rapport celui prvu initialement en 2014, la capacit de la France tenir ses engagements reste incertaine pour 2015. La Cour identifie en effet plusieurs risques, en dpenses comme en recettes, lis notamment aux perspectives de baisse de linflation.Un premier risque pse sur la ralisation des 21milliardsdeuros dconomies annonces en avril 2014. Ces conomies sont conues, je le rappelle, non comme une diminution de la dpense publique mais comme un effort de ralentissement par rapport son volution tendancielle. En pratique, les consquences attendues de la baisse des dotations de ltat aux collectivits locales demeurent hypothtiques: rien ne garantit quelles se traduiront par des rductions de mme ampleur des dpenses locales. Par ailleurs, une partie des autres conomies prvues ne devraient pas tre au rendez-vous. Cest notamment le cas de celles lies la non-revalorisation de rmunrations et de prestations sociales verses par le secteur public, en raison dune inflation en baisse.Un second risque pse sur le montant des recettes fiscales attendues pour 2015. Le risque ne se situe pas, comme les autres annes, sur la croissance ou

    les hypothses dlasticit des recettes fiscales, mais l encore sur linflation prvue. Les lois financires sappuient sur une hypothse de 0,9%largement suprieure aux dernires prvisions. La Commission europenne envisage ainsi une inflation voisine de 0% pour la France.Les pouvoirs publics doivent se pencher sans tarder selon nous sur les enjeux que soulve la priode actuelle de trs faible inflation. Elle remet en cause les perspectives dquilibre des finances publiques et le cadre budgtaire triennal sur lequel reposent notamment le budget de ltat et Lobjectif national des dpenses dassurance maladie (ONDAM). La trs faible inflation diminue mcaniquement certaines charges (carburant, chauffage) et elle a un impact indirect sur dautres dpenses de fonctionnement. Cette marge doit tre imprativement mobilise non seulement pour couvrir les dpenses supplmentaires nouvelles dcides en cours dexercice mais aussi pour compenser la perte de recettes fiscales engendres aussi par cette trs faible inflation. Si les risques identifis se concrtisent, le retour sous le seuil de 3% du PIB en 2017 sera probablement compromis. cet horizon, la dette publique pourrait approcher, voire dpasser 100% et lquilibre structurel des comptes publics serait encore repouss au-del de 2019. Attention ne pas se laisser abuser par le trs faible niveau des taux dintrt auxquels ltat se finance actuellement: la dette supplmentaire que nous continuons daccumuler va devoir tre finance et refinance pendant de nombreuses annes. Et elle ne le sera vraisemblablement pas aux taux exceptionnellement bas que nous connaissons aujourdhui. Ces dficits et cette dette supplmentaire pseront lourdement sur les gnrations futures et sur les marges de manuvre des gouvernements dans lavenir.Le rquilibrage durable de nos finances publiques dpend des choix de politique conomique susceptibles de renforcer le potentiel de croissance de lconomie. Il implique de faire aussi des choix clairs pour une organisation plus performante des services publics, une meilleure rpartition des comptences et des moyens. Lensemble de ces choix ne simposent pas au nom dune contrainte, subie ou importe jai dj eu loccasion de le dire. Ils simposent, si jose dire, de lintrieur si nous voulons prserver notre souverainet, cest--dire prcisment notre capacit faire des choix.

    Les politiques de rabot ne peuvent pas tenir lieu de stratgie de redressement des comptes publics.Dans le rapport public de cette anne, la Cour sinterroge plusieurs occasions sur la cohrence de laction de tel ou tel organisme public avec les objectifs viss. Parfois mme, elle met en doute la conduite de laction publique, au regard des objectifs quelle est cense remplir. Ce sont en effet les rsultats atteints par une politique publique qui garantissent sa crdibilit. Nos concitoyens sont attentifs ce que les intentions et les annonces soient suivies deffets. Ils ne confondent pas qualit du service public et quantit de dpense publique. Ils veulent une cohrence entre les intentions et les actions. Ils exigent, juste titre puisquils y contribuent financirement, que laction publique dbouche sur des rsultats tangibles et concrets, dans la vie de tous les jours. Cela est encore loin dtre le cas, au regard des crdits consacrs dans beaucoup de domaines.La Cour insiste notamment cette anne sur lefficacit de certains services publics du point de vue des citoyens. De nombreux sujets abords touchent la vie quotidienne des habitants, que ce soit les transports, leau, llectricit, lemploi, le sport ou la vie tudiante.lPrenons dabord le cas des agences de leau. Elles sont le principal financeur de la politique de leau en France. Entre 2007 et 2012, elles ont accord 14,9milliardsdeuros daides afin de soutenir des projets destins protger les ressources en eau. Pour financer ces aides, elles collectent des taxes, appeles redevances, auprs des usagers de leau. La loi sur leau et les milieux aquatiques de 2006 rappelait lapplication du principe selon lequel cest le pollueur qui paie. En ralit, la Cour constate que les redevances sont largement dconnectes du principe pollueur-payeur . Elles sont essentiellement acquittes par les particuliers alors que les acteurs conomiques les agriculteurs et les industriels ne sont pas taxs en proportion des dommages quils causent lenvironnement. Par voie de consquence, leur effet incitatif pour dvelopper des techniques de production moins polluantes ne joue pas.lDeuxime exemple: louverture du march de llectricit la concurrence. Dans les faits, le bilan est contrast, notamment en raison de la rigidit qui pse sur les prix. Je vous invite prendre connaissance de linfographie qui figure dans le dossier de presse, qui rsume visuellement les causes de cette rigidit des prix.

    LES SOLDES EN EUROPE (% DU PIB)

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    Source: Cour des comptes daprs Eurostat pour 2013 et prvisions de la Commission europenne de novembre 2014

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    Au total, les fournisseurs alternatifs dlectricit ont en effet peu de marge de manuvre pour construire des offres susceptibles de concurrencer EDF. Plusieurs dispositions du projet de loi sur la transition nergtique, en dbat au Parlement, vont dans le sens des prconisations de la Cour.lLa gestion des trains Intercits offre un exemple datermoiement entre volont affiche de rforme, et indcision persistante et prjudiciable au service public. Je veux tout dabord prciser que, contrairement ce qui a pu tre suggr, la Cour ne recommande pas de supprimer ce rseau. Elle appelle au contraire sortir de limpasse, prcisment pour lui offrir un horizon prenne. Depuis trois dcennies, lessentiel de la stratgie de la SNCF concernant ces trains a t, avec laccord implicite de ltat, den rduire le nombre. Elle a progressivement supprim les liaisons les plus dficitaires, mesure que se construisait le rseau de lignes grande vitesse. Cette prfrence systmatique pour la grande vitesse ferroviaire a t illustre dans le rcent rapport public quy a consacr la Cour. Affichant en 2010 la volont de revenir sur cette orientation, ltat a men une rforme en trompe lil, avec un financement en circuit ferm : ltat prlve des taxes sur la SNCF pour alimenter la subvention verse cette entreprise publique pour rduire le dficit dexploitation des trains Intercits. Pendant ce temps, le rseau reste inadapt, le matriel se dgrade et les investissements ne sont raliss que dans lurgence. La Cour recommande dinclure les trains Intercits dans un schma national de services de transport voyageurs, afin den enrayer le dclin et de dfinir les conditions de leur prennit.lLa politique de lutte contre le dopage dans le sport est une quatrime illustration daction peu cohrente avec les objectifs qui lui sont assigns, dans ses trois volets: contrle, prvention, et lutte contre les trafics de produits dopants. Dune part, la politique de contrle nest pas assez diffrencie et slective selon les publics. Dans le mme temps, lagence de lutte contre le dopage ninvestit pas suffisamment dans la recherche, alors que les volutions des pratiques de dopage sont rapides. Dautre part, la politique de prvention na pas t pilote depuis des annes, ce qui a conduit une implication trs ingale des fdrations et lobsolescence des principaux outils existants. Enfin, la lutte contre les trafics ptit dun dficit de coordination interministrielle et dchanges dinformations. (... )

    2. UNE GESTION PLUS RIGOUREUSE Certains services publics doivent tre grs avec un niveau dexigence plus lev.La Cour a voulu rendre publics des cas et des situations qui appellent plus de rigueur et plus de retenue dans lusage des deniers publics ou dans les comportements, sans prjudice des irrgularits quelle pourra constater et qui pourraient tre sanctionnes par ailleurs. Ces situations concernent aussi bien les institutions que les tablissements, les collectivits et les agents publics.

    lla Cour de cassation (CDC)Dans son rapport, la Cour voque dabord la mise en place dans le secteur public dun dispositif import du secteur priv: lattribution gratuite dactions aux salaris de CDCEntreprises, filiale 100% de la Caisse des dpts et consignations. Dans une entreprise publique grant des fonds publics, cette situation, apparue fin 2007, constitue une drive choquante. Le montant des dividendes perus partir de 2010 par les 60 salaris concerns sest avr

    sensiblement plus lev que prvu lors de la mise en place du plan. Il a atteint un total de 8,3millions deuros. Le dispositif a pris fin pour lessentiel en2013, dans le cadre de la cration de la Banque publique dinvestissement et de lapport des actifs de CDC Entreprises Bpifrance. cette occasion, la Caisse a rachet les actions gratuites encore dtenues par les salaris pour un montant total de 7,2millions deuros. Certains dirigeants ou cadres de CDC Entreprises ont bnfici, dans le cadre de ce rachat, de produits de cession sans lien avec la vocation initiale dintressement lie au dispositif. CDC Entreprises a ainsi fait preuve, lgard de sa maison-mre, dune transparence insuffisante. La Cour constate des failles dans la gouvernance interne de la Caisse des dpts, et dans sa capacit connatre et grer les rmunrations dans ses filiales. Elle relve les risques dune gouvernance sans contrle externe, dans la mesure o les organes de gouvernance de CDC Entreprises se composaient uniquement de reprsentants de la Caisse des dpts et de dirigeants de CDC Entreprises. Au regard du caractre tout fait anormal de lensemble de cette situation, la Cour de discipline budgtaire et financire a t saisie par le Procureur gnral.

    lle Conseil conomique, Social et Environnemental (CESE)Par ailleurs, la Cour a procd un contrle de suivi sur le Conseil conomique, social et environnemental. Dans son rapport public de 2010, elle avait notamment relev la situation proccupante de la caisse de retraite des anciens membres du Conseil, dont elle avait demand une rforme de fond. Le Conseil a procd une rforme partielle de ce rgime spcial en augmentant les cotisations, en supprimant les bonifications familiales et en rduisant le montant des pensions. La Cour estime toutefois que ces mesures demeurent insuffisantes si lon veut assurer, sur le long terme, lquilibre dune caisse qui fait peser un risque de 200millionsdeuros sur les finances publiques. Elle insiste par ailleurs sur les marges de progression qui demeurent dans la gestion du personnel. Elle souligne nouveau la ncessit dappliquer au CESE le cadre budgtaire et comptable publics de droit commun.

    Cette exigence de rigueur concerne aussi les collectivits territoriales. 13 Chambres rgionales des comptes ont examin plusieurs contrats de partenariats signs par des collectivits territoriales depuis 2004. Ces partenariats public-priv vont du simple contrat dclairage public communal aux grands stades rnovs dans la perspective de lEuro 2016. partir de ces enqutes locales, la Cour attire lattention des dcideurs publics sur plusieurs points. La mise en uvre des contrats ne permet pas encore, faute de recul suffisant, de trancher la question de la performance relle de ce mode drogatoire de gestion des services publics par rapport des formules plus classiques de la commande publique. Mais les risques lis au recours cet outil drogatoire de la commande publique ne doivent pas tre sous-estims, notamment au regard des rgles de la concurrence, qui imposent notamment lgalit de traitement des candidats. Ds lors, la Cour a souhait recenser les conditions qui devraient lavenir tre runies pour quun contrat de partenariat se justifie.

    lles fonctionnaires dOutre-MerLa Cour sest galement penche sur les complments de rmunration dont bnficient les fonctionnaires dtat Outre-Mer. Ces complments sont censs prendre en considration des sujtions spcifiques lies leur affectation, garantir lattractivit des postes, et compenser le surcot de la vie Outre-Mer. Le systme repose aujourdhui sur un inextricable maquis lgislatif et rglementaire et sur des justifications qui peuvent apparatre souvent dpasses. Ses effets pervers sont nombreux: les sur-rmunrations ont t tendues aux fonctionnaires territoriaux titulaires et psent ainsi sur les budgets des collectivits concernes; elles semblent avoir des consquences inflationnistes sur les prix; elles bnficient parfois indiffremment des agents pourtant placs dans des situations trs diffrentes. Une rforme de ce systme bout de souffle est souhaitable. Elle devrait se traduire par une simplification et une clarification juridiques, par un alignement sur les vrais diffrentiels de prix avec la mtropole et par une limitation du dispositif aux zones les moins attractives. La rduction des majorations de traitement au niveau rel du diffrentiel de prix entre Outre-Mer et mtropole permettrait de dgager des marges de manuvre pour des

    CHAMP DAPPLICATION DE LA CERTIFICATION DES COMPTES DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

    D.R

    .

    Source: Cour des comptes. Total de 1 514 milliards deuros correspondant au cumul des charges brutes. Ce cumul est suprieur au total des dpenses des administrations publiques, calcul par lINSEE (1208,2 milliards deuros) pour les besoins de la comptabilit nationale. Cour des comptes Rapport public.

    APU certifis par la Cour (tat, Rgime gnral de scurit sociale)

    239 Milliards deuros

    16%63

    Milliards deuros4%

    383 Milliards deuros

    25%

    829 Milliards deuros

    55%

    APU hors obligation de certification (dont les certications volontaires)

    APU certifies par les commissaires aux comptes (L. 132-6) dont les rapports nont pas t transmis

    APU certifies par les commissaires aux comptes (L. 132-6) dont les rapports ont t transmis

  • Les Annonces de la Seine - Lundi 23 fvrier 2015 - numro 7 5

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    actions plus utiles nos concitoyens ultramarins.Au-del des irrgularits et des dysfonctionnements que la Cour a pu relever en matire de gestion des ressources humaines de ladministration, des marges damlioration existent. La Cour la constat en revenant sur la gestion des chercheurs. Elle observe des progrs dans laccueil des jeunes chercheurs. Le plan carrires lanc en 2009 a amlior le droulement de carrire des chercheurs. Mais des insuffi sances persistent plusieurs gards. Le recrutement des chercheurs statutaires devrait tre davantage en phase avec les priorits nationales. Le droulement des carrires reste discontinu et dpend peu de lvaluation individuelle. Les perspectives dvolution et de mobilit restent trs limites. La politique de rmunration pourrait gagner en cohrence.

    3. LE REDRESSEMENT DES COMPTES PUBLICS Des marges dconomies et defficience existent et peuvent tre mobilises pour le redressement de nos comptes publics, mais aussi pour des politiques publiques mieux cibles, plus adaptes aux besoins et aux attentes de la socit. (...)Le maillage des services publics doit mieux rpondre aux besoins et aux attentes.lJe veux dabord voquer le rseau des uvres universitaires et scolaires, dont la modernisation apparat indispensable, la fois au regard de loff re territoriale, des choix dinvestissements, de la simplicit et du ciblage de son action. Dune part, en matire de logement tudiant, loff re reste insuffi sante et mal rpartie. Dautre part, la gestion des bourses fait intervenir une succession dintervenants mal coordonns: les CROUS, les recteurs dacadmie, la direction rgionale des finances publiques et les tablissements denseignement suprieur. La complexit de ce circuit est de nature dresponsabiliser les acteurs, notamment les tablissements du suprieur, chargs de contrler

    lassiduit des boursiers. Enfin, la restauration universitaire, devenue une prestation dficitaire, repose sur un modle conomique discutable. Une rorganisation du rseau et de ses modes de gestion est ncessaire pour rpondre des enjeux fi nanciers proccupants, mais aussi des besoins qui ont volu.Le rseau des seize trsoreries auprs des ambassades de France fournit un deuxime exemple de rationalisation possible, et mme ncessaire. Rattaches la Trsorerie gnrale pour ltranger et la direction gnrale des finances publiques, leur cot de fonctionnement compte parmi les plus levs de lensemble des services de ltat ltranger. Le Ministre des fi nances justifi e le maintien de ce rseau par le traitement doprations spcifi ques et nenvisage dvolutions que trs prudemment et trs lentement. Pour la Cour, cette spcifi cit nest pas avre en raison de lexistence de circuits alternatifs de paiement. La mise en extinction dfi nitive de ce rseau devrait tre rapidement programme et sa ralisation acheve brve chance. Si les masses budgtaires en jeu ne sont pas normes, ce dossier est rvlateur des lenteurs dont les administrations font trop souvent preuve pour sadapter et raliser des gains deffi cience parfaitement accessibles.lUn service public de qualit passe parfois par une refonte des cartes administratives.La ncessit dun meilleur maillage territorial vaut bien sr aussi pour laction locale, qui gagnerait une meilleure rpartition des missions et des moyens entre collectivits et entre niveaux de collectivit. La gestion des services deau et dassainissement lillustre parfaitement. La carte intercommunale des services deau et dassainissement na que peu volu depuis la rforme des collectivits territoriales de 2010. Ainsi, la France compte 31000services deau et dassainissement, dont 22 000grs en rgie. Symboles dune gestion communale de proximit, prs de 92%des rgies concernent un territoire de moins de 3500habitants. Dans ce cas comme dans dautres, proximit ne rime pas ncessairement avec effi cacit. Elle entrane en loccurrence un miettement

    du service public qui le fragilise. En lespce, trop de proximit tue lefficacit. Contrairement aux dlgataires, qui disposent dantennes territoriales et de personnels grant plusieurs dlgations de service public, les petites rgies ptissent de moyens souvent limits et trs rarement mutualiss. Leur regroupement serait de nature apporter une rponse aux enjeux de connaissance patrimoniale, de renouvellement des rseaux et damlioration des installations de traitement.lLa conduite dune rforme territoriale dampleur nest pas une tche impossible. Ltat en a dailleurs fait la preuve en procdant la refonte de la carte judiciaire. Rgulirement envisage depuis cinquante ans, elle avait toujours t diffre. Finalement engage en 2007, elle a permis de supprimer prs dune juridiction sur quatre. Il sagit ainsi de la plus importante rforme territoriale dans le domaine de la justice depuis 1958. Lobjectif ntait pas de rduire mais de rationaliser la carte pour plus deffi cacit. Cette rforme sest par ailleurs inscrite dans les limites budgtaires initialement fi xes. Les restructurations immobilires prvues se sont dans lensemble bien droules. Lessentiel des objectifs assigns la rforme ont t atteints: les TGI regroups ont une meilleure productivit que les autres; la collgialit des juridictions a t renforce. A contrario, la crainte des dserts judiciaires, qui aurait abouti une viction des publics les plus fragiles, ne parat pas stre ralise. Constatant ce bilan globalement positif, la Cour ritre sa recommandation dapprofondir la rforme de la carte judiciaire en rduisant le nombre des cours dappel, en rapprochant celles-ci de la cartographie des rgions administratives.lEn ce qui concerne le rseau des sous-prfectures, que la Cour avait examin en 2012, le Ministre de lintrieur se positionne entre le statu quo et lexprimentation. La refonte en profondeur de la carte des sous-prfectures, que la Cour appelait de ses vux, se fait toujours attendre. Bien que le Ministre ait lanc en 2012 et 2013 plusieurs missions prospectives, aucune na dbouch sur une rforme

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    Franois Hollande et Didier Migaud

  • 6 Les Annonces de la Seine - Lundi 23 fvrier 2015 - numro 7

    densemble. Finalement, une refonte exprimentale de la carte des arrondissements dAlsace et de Moselle vient dentrer en vigueur le 1er janvier 2015. Les dpartements concerns prsentaient une situation atypique, hrite de la prsence de lempire allemand avant la premire guerre mondiale.Aucun bilan ne peut encore tre tir dune dmarche aussi rcente. Mais le Ministre de lintrieur a annonc la poursuite de lexprimentation dans cinq rgions. Au regard de lexprience de la carte judiciaire, la Cour lui recommande de dessiner une nouvelle carte, ne conservant que les sous-prfectures pour lesquelles la prsence dun sous-Prfet et dun chelon dconcentr dadministration est ncessaire, l encore sans confondre proximit gographique et efficacit du service public: les services publics de demain doivent tre orients vers les besoins de demain, qui ne concident pas forcment avec le maillage administratif du XXme voire du XIXmesicle. Elle prconise de mettre en uvre cette nouvelle carte selon un calendrier fix davance. (...)lLa refonte du circuit de paie des agents de ltat offre un contre-exemple calamiteux dinvestissement. Le programme Oprateur national de paie (ONP), lanc au milieu des annes 2000, prvoyait en effet terme que la rmunration des agents de ltat serait tablie automatiquement partir des donnes de ressources humaines des systmes dinformation ministriels. Cette dmarche a chou pour plusieurs raisons, qui sont encore trop souvent releves dans les projets informatiques conduits par ltat. Lambition du programme tait srement excessive. De profondes difficults de coordination sont apparues. Le programme na pas bnfici dun soutien interministriel suffisant. Au final, entre 2008 et 2013, 346millionsdeuros ont t dpenss au titre de ce programme en pure perte puisque le coeur du systme dinformation interministriel na pu tre raccord aux systmes des ministres. Cet chec nest pas rassurant, au regard des enjeux soulevs par la modernisation des processus de paie. Il ne lest pas davantage quand on observe les difficults rcurrentes que rencontrent les grands projets informatiques mens par ltat. Devant la gravit des faits constats, lexamen se poursuit afin de dterminer les responsabilits susceptibles dtre engages devant la Cour de discipline budgtaire et financire.lLe rapport de la Cour voque par ailleurs un projet de rnovation immobilire emblmatique, celui du campus de Jussieu. 19 ans aprs son lancement, ce chantier est quasiment achev dans son primtre initial. Il a dur 16 annes de plus que prvu et a cot dix fois plus cher le budget initial slevait 183millionsdeuros. Luniversit Paris6 envisage un nouveau chantier, concernant les btiments appels barres de Cassan, qui pourrait porter son cot final

    plus de 2milliardsdeuros et prolonger de dix ans encore le chantier. La Cour appelle la dfinition dun programme stratgique de limmobilier universitaire en le-de-France. (...)Le cas des aroports de Dole et de Dijon est bien des gards comparable. Ces aroports sont distants de moins de cinquante kilomtres; ils partagent un bassin de chalandise largement substituable; et ils ont dvelopp des stratgies de dveloppement trs proches. Le relatif succs de laroport dolois sexplique par limplantation subventionne dune compagnie bas cots [Ryanair] que convoitait galement Dijon. Les acteurs publics impliqus ne se sont pas concerts. Ils ont envisag le dveloppement des aroports de manire cloisonne, sans se positionner dans une optique interrgionale, malgr les recommandations de la Cour et de la Chambre rgionale des comptes de Bourgogne, Franche-Comt. Le bilan financier des oprations est choquant. Dune part, le soutien financier est disproportionn au regard du trafic aroportuaire. Dautre part, les financeurs de laroport de Dijon se sont largement dsengags alors que les investissements et les aides au fonctionnement ont reprsent prs de 15millionsdeuros depuis 2010. Enfin, le dpartement du Jura a vers des aides sans les notifier la Commission europenne, prenant le risque dune demande de remboursement en cas dincompatibilit avec les traits. La Cour recommande de mettre fin au soutien aux deux quipements et denvisager un scnario alternatif au dveloppement de la desserte arienne.Sans pour autant tre places au mme niveau que les investissements que je viens de mentionner, trois situations appellent la vigilance des pouvoirs publicslLa premire concerne le muse des civilisations de lEurope et de la Mditerrane de Marseille (le MuCEM). Malgr le succs populaire indniable de ce lieu de culture, sa gestation constitue une illustration saisissante de gestion dfaillante, en termes de gouvernance, de calendrier et de financements. Le muse a ouvert mi-2013 au lieu de 2008. Cette opration a mobilis a minima 350millions deuros. Alors que le MuCEM entre dans sa phase de fonctionnement en rythme de croisire, plusieurs difficults sont dores et dj perceptibles. La question se pose notamment de la soutenabilit financire du muse, compte tenu du cot de fonctionnement, plus lev que prvu, et de la faiblesse des ressources propres.lAlors que les contraintes budgtaires saccentuent chaque anne davantage, les offres proposes en matire de transports publics urbains de voyageurs continuent de stoffer sans coordination ni mutualisation des efforts. Ce service public est soumis des contraintes financires croissantes sous leffet de lextension des primtres de transports urbains

    au secteur priurbain, du caractre insuffisamment concurrentiel de ce secteur dactivit et du poids de ses charges de personnel. Le rtablissement durable de lquilibre du service passe par la rationalisation de loffre de transport, lexploitation des marges de productivit disponibles pour mieux en matriser les cots et un accroissement de la part des recettes commerciales dans son financement.lCes proccupations devront enfin rester lesprit des collectivits territoriales qui financent les stations de ski des Pyrnes. Leur rentabilit est conditionne la ncessit datteindre une taille critique et de mettre en uvre une vritable stratgie de dveloppement territorial qui ne soit plus exclusivement centre sur le ski alpin, en particulier en moyenne montagne. Seule une meilleure anticipation des mutations, comme observ dans le cas des stations espagnoles de lautre versant, peut permettre dviter la faillite brutale des stations les plus vulnrables et leffondrement dun pan entier de lconomie des territoires de montagne. Il est souhaitable que les collectivits territoriales acceptent de restructurer les stations et de repenser leur modle conomique.En conclusion, comme elle la toujours fait, la Cour appelle les pouvoirs publics sengager rsolument en faveur du redressement des comptes publics, pour une action publique plus exigeante, plus rigoureuse, plus efficace et plus efficiente.lCest ncessaire. Ne nous y trompons pas : si la France finance aujourdhui ses dficits des conditions exceptionnellement favorables, il nen sera pas de mme ternellement et le poids de la dette se fera sentir bien plus encore sur les gnrations futures. Dautre part, dimportantes marges de manuvre existent pour que les performances des services publics atteignent des rsultats la hauteur des moyens qui leur sont consacrs. Pour que laction publique rponde efficacement aux besoins et aux attentes des citoyens.lCest possible. Des rformes le dmontrent, telle la refonte de la carte judiciaire. Des rformes sont attendues par nos concitoyens, qui sont attachs aux services publics et qui savent pertinemment que la qualit des services publics ne se confond pas obligatoirement avec laugmentation de la dpense publique.Larticle15 de la Dclaration des droits de lhomme et du citoyen, qui fonde les missions de la Cour, est grav au-dessus de nous dans cette enceinte. Mais je veux rappeler un autre articlede cette Dclaration, larticle14: Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mmes ou par leurs reprsentants, la ncessit de la contribution publique, de la consentir librement, den suivre lemploi. Le consentement limpt est le fondement de notre dmocratie. Il appartient aux reprsentants du suffrage universel de convaincre nos concitoyens de la ncessit de consentir limpt. Et pour cela, nulle meilleure mthode que darrter des priorits, de prendre les dcisions qui en dcoulent, et de veiller la mise en uvre effective de ces dcisions; alors que trop souvent, une fois la loi vote ou la dcision prise, le regard se dtourne de lvaluation effective du rsultat.Par son rapport public annuel et, plus gnralement, par ses travaux, la Cour souhaite contribuer ce quune attention plus grande soit porte aux rsultats. Elle appelle les pouvoirs publics mettre fin au double dcalage mis en vidence: trop souvent, les rsultats obtenus ne sont pas conformes aux objectifs annoncs ni ne sont la hauteur des moyens publics consacrs latteinte de ces objectifs. Veiller larticle14 de notre dclaration de 1789, cest accorder, lavenir, plus dimportance la performance relle de laction publique. 2015-079

    Socit

    VOLUTION DE LINDICATEUR DE SUIVI DES RECOMMANDATIONSPOUR LES TROIS DERNIRES ANNES

    2012(suivi des

    recommandationsformules

    en 2009, 2010et 2011)

    2014(suivi des

    recommandationsformules

    en 2011, 2012et 2013)

    2013(suivi des

    recommandationsformules

    en 2010, 2011et 2012)

    Progression du nombre de

    recommandationsentre les

    suivis 2012et 2014

    Nombre derecommandations 1 213 1 671 1924 +58,6%suivies

    dont recommandationspartiellementou totalement 862 1 033 1 343 +55,8%mises en uvre

    soit 71,1% 62% 69,8%

    Source: Cour des comptes

  • Les Annonces de la Seine - Lundi 23 fvrier 2015 - numro 7 7

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    Le roman policier Les jeux de lart et de largent publi au mois de mai dernier par Marie-Hlne Grinfeder, auteur prcdemment de plusieurs ouvrages sur lart, lui a servi de prtexte pour aborder notamment la question de lauthenticit des uvres dart et celle de son trafi c illicite lequel constitue lun des trois commerces illgaux les plus importants au monde.Marie-Hlne Grinfeder a galement abord le march de lart et son volution. Lhistoire du march de lart est selon elle, toujours li largent, les donneurs dordre ayant ds lorigine infl uencs les artistes.Le march de lart contemporain aux enchres a franchi la barre des 2milliardsdedollars de recettes sur la priode juillet2013 juillet2014, cest la meilleure anne de son histoire. En 2014 les artistes (art moderne et contemporain) qui ont raliss les transactions les plus importantes sont:Pablo Picasso (345,8 millions de dollars), Andy Warhol (299,2 millions de dollars), Francis Bacon (236,5 millions de dollars), Claude Monet (176,6 millions de dollars), Qi Bashi (168,9millionsde dollars), Gerhardt Richter (159,2millionsde dollars), Mark Rothko (146,4millionsde dollars), Jean-Michel Basquiat (131,9millionsde dollars), Alberto Giacometti (116,7millionsde dollars) et Zhang Daqian (118,5millionsde dollars).Le march haut de gamme a vendu en 2014 treize uvres contemporaines au-del des 10millions de dollars et dsigne luvre la plus chre du monde sous les traits dun Balloon Dog gant de Jeff Koons vendu plus de 38,8 millions deuros.La tendance na jamais t si haute: elle dpasse mme de 15% les niveaux atteints au plus fort de lanne 2007. Au fi nal, lindice global des prix de

    lart contemporain progresse de plus de 70% sur la dcennie.La France ne reprsente que 2,79% du march de lart en 2014, les tats-Unis 33,72 %, la Chine 33,70 %, le Royaume-Uni 21,10 % et lAllemagne0,75%.Selon Marie-Hlne Grinfeder, lart business spanouie dans une bulle qui perdure et ne

    crve pas. Les signatures les plus spculatives de lart, considres par certain comme des valeurs sres malgr laffolement des prix et lactivit du secteur, sont propulss par de puissants rseaux de galeries prescriptives, dInstitutions prestigieuses, de curateurs et de conseillers dachat et par divers acteurs forts du march de lart dont les socits de vente leaders font parties intgrantes. Notons en guise de conclusion que le 15 septembre 2008, jour de la faillite de Lehman Brothers, Th e Golden Calf, sculpture reprsentant un veau dor (taille relle) a t vendu hors frais Londres au prix de 11,6millionsdeuros.Le Cercle des Stratges Disparus est compos dentrepreneurs, de hauts fonctionnaires, duniversitaires et de reprsentants de la socit civile.Il a pour vocation de contribuer par la rencontre desprits critiques et de points de vue pluralistes, lexpression danalyses et de propositions sur les enjeux politiques et conomiques auxquels est confronte la socit franaise. 2015-080

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    Marie-Hlne Grinfeder et Thierry Bernard

    Cercle des Stratges DisparusParis - 23 janvier 2015

    Les membres du Cercle des Stratges disparus, compos dentrepreneurs, de hauts fonctionnaires, duniversitaires et de reprsentants de la socit civile, prsid par Th ierry Bernard, avocat au Barreau de Paris et fondateur du cabinet davocats Bernards, se sont nouveau runis le 23 janvier 2015. Leur invite dhonneur, Marie-Hlne Grinfeder, est experte en arts des 20meet 21mesicles auprs de la Cour dappel de Paris et des Cours administratives dappel de Paris et de Versailles est intervenue dans les salons du Cercle Interallie notamment sur le thme des marchs de lart et a prsent son rcent roman intitul Les jeux de lart et de largent dit chez France-Empire Monde.

    Tess de Bellac, expert en art contemporain, mne une carrire exemplaire, voluant dans un milieu qui ne lest pas toujours.Un tra c international de faux tableaux, dans lequel elle est implique son insu la pousse la faute grave. Dabord dsoriente, de rebondissement en ricochets, elle perd ses repres puis ses convictions sur fond de crise passagre du march de lart contemporain, de ses outrances, de ses falsi cations et de sa folie magique.

    Marie-Hlne Grinfeder, historienne de lart, auteur du livre de rfrence Les annes supports surfaces, est expert reconnue dans lart des XXmeet XXImesicles auprs des commissaires priseurs parisiens.Editions France-Empire Monde, 200 pages - 18 euros

    Les jeux de lart et de largentMarie-Hlne Grinfeder

  • 8 Les Annonces de la Seine - Lundi 23 fvrier 2015 - numro 7

    Palmars

    Co-organise par la Mission de Recherche Droit et Justice et le CNRS, la crmonie de remise du prix Jean Carbonnier 2014 sest droule ce 18 fvrier la Sorbonne en prsence de hautes personnalits au premier rang desquelles Jean-Hugues et Denis Carbonnier. Cette rcompense a t dcerne Pierre-Jrme Delage pour sa thse La condition animale. Essai juridique sur les justes places de lHomme et de lanimal, qui a t soutenue le 10 dcembre 2013 la Facult de Droit et de Sciences conomiques de Limoges, sous la direction du professeur Jean-Pierre Margunaud. Le jury prsid par Loc Cadiet (professeur de droit judiciaire priv lUniversit de Paris 1 Panthon-Sorbonne) tait compos de Pascal Ancel (professeur de droit civil, Universit du Luxembourg), Nicole Belloubet (professeur de droit public et Membre du Conseil constitutionnel), Yves Cartuyvels (professeur de droit pnal la Facult Saint-Louis de Bruxelles), Christian Charruault (Prsident de la Premire Chambre civile de la Cour de cassation), PierreGuibentif (juriste et sociologue, professeur associ au dpartement de sociologie de linstitut universitaire de Lisbonne et la facult de droit de luniversit nouvelle de Lisbonne), Jacques Krynen (professeur dhistoire de droit lUniversit de Toulouse 1 Capitole), Christine Lazerges (professeur mrite de droit priv et de sciences criminelles lUniversit de Paris 1 Panthon-Sorbonne et Prsidente de la Commission Nationale Consultative des Droits de lHomme) et Christian Vigouroux (conseiller dtat et Prsident de la Section de lintrieur). A galement t dcerne une mention spciale Jrmie van Meerbeeck pour sa thse Le principe de scurit juridique des juridictions de lUnion europenne. De la certitude la confi ance qui a t soutenue le 31 mai 2013 lUniversit Saint Louis de Bruxelles, sous la direction du professeur Franois Ost. Nous adressons nos chaleureuses flicitations aux laurats. Jean-Ren Tancrde

    10me anniversaire du Prix Jean Carbonnierpar Sandrine Zientara-Logeay

    Je voudrais dire quelques mots, en introduction de cette crmonie, avant que vous ne preniez la parole, Monsieur le Prsident, pour vous indiquer que le PrixCarbonnier fte cette anne ses 10 ans.Le prix Carbonnier a en effet, t cr, linitiative de la mission de recherche droit et justice, en 2005.Il marque lattachement de la mission non seulement la pense du Doyen Carbonnier mais aussi son action. Jean Carbonnier a, en effet, uvr pour introduire la sociologie juridique luniversit et aussi au Ministre de la justice, o il fit recruter des chercheurs pour clairer ce quil appelait la politique lgislative.La mission a prcisment cette fonction dassurer linterface entre le Ministre de la justice et le monde de la recherche et de luniversit. Elle garantit, ou plutt elle seff orce de garantir, car le combat de Jean Carbonnier nest pas termin, la pluridisciplinarit des approches et le dcloisonnement des savoirs.La composition du jury tmoigne de cette exigence de dialogue entre les praticiens du droit et les chercheurs dhorizons et de disciplines diffrentes. Pour la premire fois, aprs avoir t prsid par de hauts magistrats(1), le jury est cette anne prsid par un universitaire, le professeurLoc Cadiet. Je men rjouis et jespre que cela marque le dbut dune longue alternance. Je vous remercie Monsieur le Prsident, ainsi que tous les membres minents du jury, pour votre grande disponibilit et votre investissement dans la lecture des nombreuses thses qui candidatent ce prix prestigieux. Je remercie aussi les membres de la famille Carbonnier qui nous font lhonneur de leur prsence. Je remercie, enfi n, la Sorbonne

    qui a bien voulu nous accueillir dans cette belle salle des autorits.Le prix Carbonnier vise distinguer des travaux de recherche sur le droit et la justice, quel que soit la discipline juridique ou de sciences humaines concernes, et qui sinscrivent dans la pense du Doyen Carbonnier.Dans un entretien quil voulut bien donner Andr-Jean Arnaud, le Doyen Carbonnier usa de cette jolie mtaphore, pour distinguer le sociologue du droit et le juriste: le droit, cest, dans une fort vierge, des lianes, un massif de lianes, cest extrmement embrouill, cest cela le droit. Et le juriste est l-dedans, cest le perroquet, il est dans les branches et chaque fois quil parle, il fait bouger les branches, tandis que le sociologue est

    dehors: Il ne peut pas faire pas bouger de branches. () La di cult, cest dtre tout fait en dehors et nanmoins davoir lesprit du juriste.Lorsquil vient rcompenser une thse de droit, le prix distingue un fi n juriste, mais un juriste capable de prendre son envol et de planer au-dessus de la fort tropicale pour regarder le droit du dehors.

    Monsieur Pierre-Jrme Delage, sans dfl orer le sujet de votre thse, je crois pouvoir dire que vous tes cet oiseau rare l.Votre trs beau travail sinscrit aussi dans la tradition de Jean Carbonnier car cest une thse quon peut qualifi er dhumaniste.Humaniste, parce que la reconnaissance de la dignit irrductible de lhomme demeure centrale.

    Prix Jean Carbonnier 2014Sorbonne, salle des autorits - Paris, 18 fvrier 2015

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    Sandrine Zientara-Logeay, Jrmie van Meerbeeck, Loc Cadiet, Yves Cartuyvels, Pierre-Jrme Delage, Christian Vigouroux, Christine Lazerges et Pierre Guibentif

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    Humaniste, parce que cest le travail dun rudit. Vous parcourez avec brio la littrature, lhistoire, la philosophie, ltiologie, la science et le droit.Humaniste, car, je crois pouvoir le dire sans trahir le secret du dlibr du jury, elle procure un trs grand plaisir de lecture.

    Jen termine pour vous dire que la moisson fut si fconde cette anne que le jury, ce qui est exceptionnel, cest la troisime fois que cela se produit en 10ans, a choisi de dcerner une mention spciale une autre thse, trs stimulante pour lesprit aussi, celle de

    MonsieurJrmy vanMeerbeck, sur le principe de scurit juridique. (...)

    1.Marceau Long, ancien Vice-Prsident du Conseil dtat, Guy Canivet, membre du Conseil constitutionnel puis Jean-FranoisWeber, Prsident de Chambre honoraire la Cour de cassation

    SYNTHSE

    La tradition occidentale a difi une frontire intangible entre lHomme et lanimal, a fait de lun lantithse de lautre: le premier a t dit un individu suprieur, un tre-tout, le second un individu infrieur, un tre-rien. Le Droit a relay ce dualisme: il a institu lHomme en tant que personne et sujet de dignit; il a install lanimal dans la catgorie des choses, et lui a assign une valeur seulement utilitaire. Des contestations, cependant, slvent: daucuns veulent humaniser lanimal, aligner sa condition sur celle de lHomme; ils dsirent que soient attribus la bte une dignit, la personnalit juridique et certains des droits subjectifs humains. Cette tentation humanisante, toutefois, doit tre rcuse, car elle porte le pril de lanimalisation de lHomme: galiser les conditions de lhumain et de lanimal, on risque, en effet, plutt que de traiter la bte comme un Homme, de traiter

    lhumain comme une bte. Il faut donc, imprativement, maintenir la frontire Homme/animal: non pas au motif de la supriorit de lHomme sur la bte, mais pour viter qu lHomme, si fragile, si vulnrable quil est, il soit fait une condition animale. Cependant, lanimal est lui aussi un tre vulnrable, qui peut faire lobjet de traitements contraires son essence mme. Cette essence animale, il est propos de lappeler l essit . Une essit qui, pour ne pas se confondre avec la dignit humaine et ne pas commander la personni cation juridique de lanimal, appellerait par contre linstauration, au pro t de la bte, dune protection pnale absolue: ninterdisant pas son institution en tant que chose juridique, elle prohiberait catgoriquement, en revanche, tous agissements ou pratiques via lesquels lanimal serait ramen au rang de chose pure (cest--dire de matire inerte, insensible, de simple substance vide de respectabilit).

    Pierre-Jrme Delage

    La condition animale. Essai juridique sur les justes places de lHomme et de lanimal

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    Le droit entre lHomme et lanimalpar Loc Cadiet

    L(...)oralit de mon propos nindique pas le pluriel du mot laurat que jemploie, mais cest bien deux jeunes docteurs que le jury du prixCarbonnier a entendu distinguer au titre de lanne 2014.Le prix Jean Carbonnier 2014 est remis Monsieur Pierre-Jrme Delage pour sa thse intitule La condition animale Essai sur les justes places de lHomme et de lanimal. Mais le jury a galement souhait dcerner une mention spciale Monsieur Jrmy van Meerbeeck pour sa thse sur Le principe de scurit juridique dans la jurisprudence des juridictions de lUnion europenne. De la certitude la confi ance.

    lMonsieur Delage, vous avez soutenu votre thse le mardi 10 dcembre 2013 la Facult de droit et des sciences conomiques de Limoges, o vous lavez prpare sous la direction du professeur Jean-Pierre Margunaud, dont chacun sait quil est un expert du droit de lanimal, depuis sa propre thse de doctorat, soutenu il y a plus de vingt sous la direction du Recteur Lombois.Cet ouvrage de 710 pages, compte non tenu dune impressionnante bibliographie de 90 pages, souvre sur une citation de Jacques Derrida qui introduit parfaitement la thse que vous dfendez. Jen cite ces fragments, si tant est que lon puisse citer Derrida de manire orale, lui qui se lit plus quil ne se dit:La question-de-lanimalit nest pas une question parmi dautres (). Si je la tiens pour dcisive (), cest que () elle reprsente () la limite sur laquelle () se dterminent toutes les autres grande questions, et tous les concepts destins cerner le propre de lhomme, lessence et lavenir de lhumanit, lthique, la politique, les droits de lhomme, le crime contre lhumanit, le gnocide, etc.. La manire dont lhomme traite lanimal dit beaucoup de choses de son humanit, mais la manire dont il

    traite lhomme dit aussi beaucoup de chose de son animalit, pour ne pas dire sa bestialit. Au rebours de la tradition rejetant lanimal dans la catgorie des choses, objets de droit, pour mieux marquer la supriorit anthropologique de lhomme, qui est sujet de droit, mais en vous dmarquant du discours contemporain tendant la reconnaissance dune dignit animale rapprochant lanimal de lhomme, vous proposez une autre voie. Rpudiant la fois la tradition de la rification de lanimal, qui nest pas rductible une pure chose, et la tentation de lhumanisation de lanimal, qui nest pas assimilable lhomme, vous dfendez la thse originale dun entre-deux de la condition animale, ni tout ni rien, entre le tout de la dignit humaine (qui doit demeurer exclusivement humaine) et le rien de la chosit pure ( laquelle lanimal dou de sensibilit ne saurait tre lgitimement ramen). Cet entre-deux, vous le situez en son lieu propre que vous identifiez lessit de lanimal,

    son essence intime crivez-vous, ce quil a en lui de plus prcieux et de plus insaisissable, dcalque mais dmarque de la dignit humaine. En termes de vise lgislative, cette opinion doctrinale conduit lenseignement suivant: plutt que daccorder des droits aux animaux, au nom de leur suppose dignit, mieux vaut que le droit saccorde aux animaux et ce qui fait leur spcificit au sein du vivant. Distinguer lanimal de la chose nest pas affaiblir la spcificit de lhomme, mais la distinction de lhomme et de lanimal est galement indispensable la dignit de lhomme sans faire obstacle au respect de lanimal en tant qutre sensible. Seule cette qualification permet dassurer leur juste place lhomme et lanimal dans le monde du droit, afin que lanimal humanis nouvre licence lhomme animalis. L est en vrit votre thse, sur la juste place lhomme et lanimal dans le monde du droit, que suggre le sous-titre que vous lui avez donn, plus que ne le dit son intitul.

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    La plupart des juristes ont leur ide sur le sens et limportance du principe de scurit juridique et, surtout, leur avis sur le mal qui semble attaquer le droit de toutes parts: linscurit juridique. La thse a pour ambition de dmontrer que les problmes qui parcourent la jurisprudence de la Cour de justice de lUnion europenne relative ce principe peuvent sexpliquer par la faon dont lhistoire des ides la faonn. Le recensement des contradictions, imprcisions et ambiguts dont la jurisprudence europenne est entache permet, dans une premire partie, dillustrer le foss existant entre le discours limpide de la Cour sur le principe et son application, paradoxalement ambigu, incertaine et imprvisible.Lanalyse historique rvle ensuite que le principe de scurit juridique

    est travers par quatre logiques qui se sont construites au l du temps, parfois depuis lantiquit, et qui permettent de mieux comprendre la jurisprudence de la Cour de justice. Les deux premires sont lies au fondement du principe (la certitude pour la logique cartsienne et la con ance pour la logique duciaire) et les deux autres concernent ses destinataires (le pouvoir en place pour la logique politique et les sujets de droit pour la logique subjective).Enfin, douze suggestions sont formules a n damliorer lutilisation du principe de scurit juridique par les juridictions de lUnion. Elles sont inspires dune double proposition: remplacer la logique cartsienne par sa logique duciaire et mobiliser largument de scurit juridique en priorit en faveur des individus (logique subjective) plutt quen faveur des autorits (logique politique).

    Jrmie van Meerbeeck

    Le principe de scurit juridique des juridictions de lUnion europenne. De la certitude la con ance

  • Les Annonces de la Seine - Lundi 23 fvrier 2015 - numro 7 11

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    Certes, la ralit ne se laisse pas enfermer dans les thses des docteurs. Lanimalisation de lhomme nest pas un risque thorique; cest une ralit tristement avre dont tmoignent lhistoire de lhumanit aussi bien que lactualit du monde, sans parler de ce que donnent voir les volutions potentielles des biotechnologies dans lordre rationnel de la transgression de la frontire entre lhomme et lanimal. Cette ralit justifie prcisment lintervention inlassable du droit contre les briseurs dhumanit; il ny a pas de petits progrs en la matire. Le dernier en date tombe point puisque le Journal officiel dhier a publi la loi numro 2015-177 du 16 fvrier 2015 relative la modernisation et la simplification du droit et des procdures dans les domaines de la justice et des affaires intrieures. Sous cet intitul pitrement lgant, se cachent pourtant des volutions, pour ne pas dire des rvolutions, considrables. Je ne pense pas ici laggiornamento du Tribunal des conflits, qui se dbarrasse enfin dun des derniers vestiges de la justice retenue, mais lintroduction dans le Code civil, au seuil du Livre II: Des biens et des diffrentes modifications de la proprit, dun articleinaugural 515-14, aux termes duquel Les animaux sont des tres vivants dous de sensibilit. Sous rserve des lois qui les protgent, les animaux sont soumis au rgime des biens. Adieu veaux, vaches, cochons; les pigeons des colombiers, les lapins des garennes, les ruches miel, sortent du Code civil, mais lessit de lanimal y fait son entre, la notion sinon le mot. Dautres diront si la norme nouvelle suffira mettre un terme lusage abusif du mot dignit pour exprimer ce qui fait la spcificit de lanimal dans le monde du droit. lToujours est-il que lexergue de votre thse, Monsieur van Meerbeeck, rsonne de manire troublante la suite de la thse de Monsieur Delage. Votre thse souvre en effet sur la citation dun autre philosophe singulier, Alain Badiou. Le trouble ne tient pas aux mtaphores animalires qui ont pu, de

    manire polmique, accompagner la publication de certains travaux dAlain Badiou, mais simplement ce quexprime cette citation: Cest une lourde tche, pour le philosophe, darracher les noms ce qui en prostitue lusage. Ctait une lourde tche darracher la dignit lanimalit qui en prostitue lusage; ctait aussi une lourde tche darracher la scurit judaque la certitude qui lui est traditionnellement associe. Cest en effet la scurit juridique qui est lobjet de votre rflexion dans cette thse de 403 pages, prpare sous la direction du professeur Ost lUniversit Saint-Louis de Bruxelles, o vous lavez soutenue le 31 mai 2013. Cette scurit juridique est une notion cardinale du droit europen, ncessairement inhrente au droit de la Convention comme au droit communautaire pour reprendre les termes employs par la Cour europenne des droits de lhomme dans larrt Marcks de 1979. De cette notion cardinale, chacun pouvait attendre un repre sr, prcis, clair, stable et prvisible. Tel nest pas le cas, tant sen faut. Il y a loin du principe son application. Votre thse dconstruit donc, pour mieux le reconstruire, le principe de scurit juridique en le mettant lpreuve de la jurisprudence foisonnante de la Cour de justice de lUnion europenne do rsulte imprcision, incertitude et imprvisibilit. A partir dune enqute archologique dans lhistoire de la pense et des ides juridiques occidentales pour reprendre vos propres mots, vous expliquez ce paradoxe par une sorte dcartlement impens de la juridiction europenne entre diffrentes logiques sous-jacentes que vous mettez jour, les unes relatives au fondement de la scurit juridique, avec la certitude dun ct (cest la logique cartsienne), la confiance de lautre (cest la logique fiduciaire), les autres relatives la fonction de la scurit juridique, qui peut tre conue comme un instrument de la lgitimit de lUnion europenne (cest la logique

    politique) ou comme un instrument de protection des droits des citoyens (cest la logique subjective). Partant de l, vous laborez, de manire prospective, douze propositions concrtes pour sortir de lquivoque actuelle et rendre la jurisprudence de la cour plus prvisible dans le cadre dune conception rsolument subjective et fiduciaire du principe de scurit juridique. Mobilisant les apports de lhistoire et de la philosophie pour les appliquer ltude de la pratique juridictionnelle europenne, vous proposez ainsi une rflexion de thorie du droit tout entire tourne vers les processus de fabrication du droit, envisags la fois dun point de vue rtrospectif et dun point de vue prospectif. Penser le droit vivant, faire vivre le droit pens. Cest aussi lapport de la thse de Monsieur Delage.

    Ceci fait que, si elles sont trs diffrentes lune de lautre, par leur sujet, par leur domaine, par la personnalit de leur auteur, les deux thses que le jury du prix Carbonnier a souhait distinguer, ont beaucoup en partage.La vaste culture de leurs auteurs, au-del du droit dogmatique, au-del mme de la sphre juridique, loriginalit de lopinion quils y dfendent au service dune conception humaniste du droit, la qualit des analyses quils y conduisent dans un registre interdisciplinaire, leur capacit traduire de puissantes rflexions thoriques en perspectives rformatrices, sans oublier llgance de leur plume, tout cela signalaient particulirement ces thses lattention des membres du jury. Ce jury avait bien en tte que le prix quil a mission de dcerner porte le nom dun homme qui symbolise tout la fois louverture des juristes aux proccupations de leurs contemporains, la fcondit du dialogue entre les disciplines universitaires, le souci de la rforme du droit pour rpondre aux besoins du temps prsent dans un souci permanent de justice, cest--dire de paix sociale. (...) 2015-081

    Veille lgislative

    La CNA sinquite de la manire dont les pouvoirs publics et le parlement retranchent et ajoutent la loi Macron au fil des prises de conscience ou des luttes dinfluence des professionnels du droit et du chiffre.La CNA dnonce une drive proccupante, destine satisfaire les prtentions expansionnistes des experts comptables qui ambitionnent de promettre plus quils ne peuvent tenir et surtout plus quils ne peuvent garantir.La CNA constate que lAssemble Nationale et le Gouvernement viennent de rompre lquilibre entre ces deux professions:lDune part, en permettant aux experts comptables de se livrer des travaux dordre statistique, conomique, administratif, social et fiscal auprs de clients pour lesquels ils neffectuent aucune mission comptable.lDautre part, en introduisant au profit des experts comptables, la facult de rdiger des actes sous seing priv.

    La CNA ne peut pas se satisfaire de lamendement du Gouvernement qui prcise que les travaux ne seraient pas de nature juridique car elle sait que la permission permet lannexion.La CNA considre que cet largissement du domaine daction des experts comptables portera directement atteinte aux intrts des particuliers, des commerants, des entreprises ou des socits commerciales.La CNA rappelle que lavocat a t form pour assurer le conseil juridique, fiscal ou commercial, la gestion des procdures devant le Tribunal de commerce, pour le contentieux classique ou en Chambre du conseil, en matire sociale, pour les procdures de licenciements, les plans sociaux, la rdaction du contrat de travail et en matire commerciale, pour la rdaction de tous les contrats (franchise, concession, marques, etc.)La CNA souligne que la consultation juridique et lassistance judiciaire sinscrivent dans le domaine de comptence de lavocat auquel sajoutent la pratique et lexprience professionnelle et que lavocat en tant que spcialiste du droit, est

    soumis des obligations de formation juridique professionnelle, initiale et continue, rgulire et constante et quil fournit sa clientle des garanties que lui imposent lorganisation de sa profession et le respect dune dontologie.La CNA dnonce la tendance la marginalisation du conseil et de lassistance au profit dofficines qui ajoutent du chiffre au chiffre, sans avoir t formes au Droit.La CNA met en garde contre la volont de ltat de dpouiller lavocat de sa mission dassistance et de conseil alors quil offre son client, particulier ou entreprise, la garantie de sa comptence, de sa dontologie, de ses garanties professionnelles, de sa formation et de son exprience.A dpossder les avocats, ltat ne les trouvera plus aux seuls endroits o il veut les cantonner!La CNA va saisir les Snateurs pour labrogation de cet amendement et elle va prendre attache avec le Gouvernement pour linterpeller sur cette drive inacceptable. Pour une profession forte et une dfense renforce du droit, agissons! 2015-082 Source: communiqu du 18 fvrier 2015

    Confdration Nationale des Avocats (CNA)On se presse, on pousse, on coudoie, on renverse... Cent fois je tai vu marcher la fortune, et jamais droit (Le mariage de Figaro - Beaumarchais)

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    Audience solennelle

    Cour dappel de VersaillesVersailles, 9 janvier 2015

    Rayonnement de la jurisprudence versaillaisepar Dominique Lottin

    En ces jours o la France, terre de libert et de dmocratie est frappe par le terrorisme, nous avons dcid, en notre qualit de reprsentant de la Justice dans ce ressort, de maintenir cette audience solennelle et de ne pas en modifi er le droulement; la tenue de cette audience et votre prsence tous qui reprsentez la socit dans toute ses composantes est ainsi le symbole fort de la continuit de linstitution judiciaire, pilier essentiel de notre tat dmocratique. Face au terrorisme nous nous devons de poursuivre nos activits et ne pas relcher notre dtermination pour le combattre quelles que soit les formes quil puisse prendre et pour dfendre, la libert dexpression. Cest le serment que nous avons prt dtre en toute circonstance un digne et loyal magistrat et cest la mission premire du Juge dtre le garant des liberts individuelles. (...)Alors oui, en cette anne qui dbute, la Courdappel de Versailles est fi re de vous associer son anniversaire; et quel bel anniversaire que celui qui marque les 40ans dexistence de celle qui est devenue le 24 dcembre1975, la 36meCour dappel de France.Ne dans ce haut lieu de lhistoire de France, elle ne revendique pourtant pas lhritage des Parlements puisque la ville de Versailles tait initialement rattache au parlement de Paris. Et cest heureux car la Cour dappel de Versailles sest, ds lorigine, inscrite dans la modernit de la deuxime moiti du XXmesicle.Aujourdhui dans la force de lge, elle est rsolument tourne vers lavenir et ce XXImesicle dont elle marque par sa jurisprudence les grandes tapes civiles, conomiques, familiales et sociales.40 ans cest la fois lge de la maturit et celui des derniers doutes. Mais cest surtout lge o tout est encore permis et o, fort dune solide exprience et mue par une relle ambition, nous choisissons daller encore et toujours de lavant, et de repousser nos limites pour donner le meilleur de nous-mme.(...)

    Mais si ce pass est riche et nous a permis dancrer la cour de Versailles dans lhistoire de la justice de notre pays, force est de constater que les fondations sont, limage de ce btiment, fragilises comme pour toutes les juridictions de France par une volution contestable de nos mtiers et un manque cruel de moyens. Certes, en ces temps troubls, ce propos peut paratre incongru mais jai choisi de le maintenir car notre Institution, comme je lai dit au dbut de cette audience, lun des piliers essentiels de notre dmocratie, doit rapidement retrouver sa place au sein de ltat pour assumer pleinement ses missions.Alors solennellement comme la fait la confrence des premiers Prsident dans sa dlibration du 16 dcembre dernier, jappelle aujourdhui lattention des autorits de ltat sur la situation critique des juridictions de premire instance et dappel de notre ressort qui ne sont plus en mesure de faire face, dans des conditions satisfaisantes, au traitement des contentieux qui leur son soumis.Dans bien des domaines, cette situation pnalise les justiciables et confine au dni de justice. Elle

    gnre aussi chez les magistrats et les fonctionnaires dcouragement et lassitude.Aussi et comme tous mes collgues premiers Prsidents, jappelle de mes vux, en ce dbut danne, une mobilisation en urgence de moyens humains et matriels la hauteur des attentes des justiciables et des rformes denvergure qui recentrent le Juge sur ses missions essentielles.Et faute davoir obtenu les moyens ncessaires,et comme je my tais engage lors de mon audience dinstallation en septembre dernier, il ma fallu proposer aux magistrats et fonctionnaires de cette cour qui voient encore cette anne leurs e ectifs diminuer, de faire des choix et de prioriser certains contentieux.Ces priorits porteront en cette anne 2015, sur le traitement des contentieux commerciaux et sociaux qui revtent dans ce ressort une importance toute particulire. Cette priorisation sera modeste mais nous lesprons elle marquera les prmices dun contrat dobjectifs dont nous avons jet les premires bases avec la direction des services judiciaires et

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    Pour la 1refois en qualit de Chefs de la Cour dappel de Versailles, Madame le Premier Prsident et Monsieur le Procureur gnral ont prsid lAudience Solennelle de Rentre judiciaire, la crmonie sest droule le 9janvierdernier alors que la France tait frappe par le terrorisme. Dominique Lottin et Marc Robert, concomitamment installs le 19septembre 2014 (Les Annonces de la Seine du 2 octobre 2014 pages 1 et suivantes), ont rendu hommage aux victimes puis ont dress un bilan dactivit de lanne coule. Ils ont ensuite centr leurs propos sur lhistoire de la Cour dappel de Versailles qui clbrait, cette occasion, son 40 meanniversaire. La haute juridiction versaillaise fut o ciellement cre par dcret du 24dcembre1975 alors que Guy Pinot et Louis-Bruno Chairet prenaient leurs fonctions de Premier Prsident et de Procureur gnral le 1ermars1976. WalidBnatia, architecte du patrimoine et adjoint de larchitecte en Chef des monuments historiques, a dcrit grands traits lhistoire de la Cour dappel de Versailles et ses caractristiques architecturales depuis 1670 que le Roi LouisXIV avait ordonn la construction dune nouvelle curie sur un terrain acquis auprs de sa favorite de lpoque Louise de La Baume Le Blanc Duchesse de Lavallire et de Vaujours. Jean-Ren Tancrde

  • Les Annonces de la Seine - Lundi 23 fvrier 2015 - numro 7 13

    Audience solennelle

    qui devrait se conclure, au plus tard en septembre prochain, par un renforcement de nos moyens.Ces priorits nous ont conduit ne pas remplacer les collgues qui nous ont quitts pour dautres ressorts et qui occupaient des fonctions dans nos Chambres pnales ou comme Prsident des assises et, au contraire, affecter les nouveaux arrivants dans nos Chambres commerciales et sociales. (...)Il me revient de vous prsenter brivement les arrts les plus emblmatiques de la Cour dappel de Versailles qui ont marqu la jurisprudence de ces quarante dernires annes. Les recherches que nous avons t amenes raliser pour ce faire nous ont apportes la certitude que ce nest pas un hasard si notre cour vu le jour en cette danne 19751975 cest en effet une anne qui marque lentre de la France dans une nouvelle re conomique et sociale qui va fortement inspirer la jurisprudence de notre cour.Pourtant, si cest au mois de mars de cette anne l que lONU proclame 1975 comme lanne de la femme il faudra attendre prs de 40ans pour que la cour de Versailles se dote de son premier Chef de Cour du sexe fminin.....Mais part cette petite lacune, notre cour de Versailles a toujours t pionnire pour laborer des jurisprudences en phase avec les volutions technologiques et sociales qui ont trouv leurs origines dans les annes 70.lAinsi cest en 1975 que lORTF est remplace par 7socits de laudiovisuel public et cest aussi dans ces annes 70 que se dveloppent de nombreuses radios libres. Cette apparition de nouveaux mdias va acclrer la diffusion des uvres qui vont tre dmultiplies avec lapparition, quelques annes plus tard, des CD et du numrique et aujourdhui du dveloppement de lInternet.Le droit dauteur va en tre boulevers et certains viendront mme contester le monopole de la Sacem sur le fondement des dispositions de larticle177 du Trait de la CEE. De nombreux litiges seront ports devant notre cour, Sige de la Sacem. La cour de Versailles a reconnu le monopole et les droits de la Sacem notamment dans un arrt dfinitif du 9 avril 1987, mme si quelques limitations y seront par la suite apportes.Et nous aurons encore cette anne quelques arrts qui devraient sur ce terrain dfrayer la chronique judiciaire puisquun procs oppose devant notre cour la Sacem dimportants diteurs Sudamricains et que la socit Spedidam, qui gre en France les droits des artistes interprtes, est en litige avec la Comdie Franaise.Et cest encore dans le domaine de la tlvision que la Cour dappel de Versailles sest illustre dans un arrt du 9 novembre 2010 en reconnaissant aux participants dune mission de tl-ralit Lle de la tentation le statut de salaris, obligeant la socit productrice leur verser une rmunration.lDans le domaine des mdias rappelons galement que le Sige des socits ddition des principaux magazines sont implants dans les Hauts-de-Seine donnant la juridiction de Nanterre et donc notre Cour dappel la primaut de nombreuses procdures ayant pour fondement le respect de la vie prive et du droit limage mais aussi celui du respect de ce droit si fondamental quest celui de la libert dexpression et dont nous mesurons aujourdhui encore davantage le caractre absolu et la ncessit dunir nos forces pour le dfendre sans relche.lCest galement au cours de lanne1975 qua t cre lentreprise Microsoft qui est lorigine du dveloppement de linternet et des nouvelles technologies qui ont rvolutionn notre socit et

    ncessit de fixer de nouvelles rgles tant dans le domaine commercial que dans celui que je viens dvoquer du respect la vie prive et surtout dsormais du droit loubli.lDans le domaine des nouvelles technologies, je ne citerai quun seul arrt parmi la longue liste de ceux rendus par notre cour: - celui qui a oppos la socit vente-privee.com une autre socit de vente en ligne. Dans un arrt du 2juillet 2013 la cour a reconnu lexistence dun prjudice pour atteinte port au droit dauteur de la socit vente-privee.com et contribu ainsi rguler le dveloppement de ces socits.1975 cest encore, ladoption du premier plan de soutien lconomie pour soutenir les entreprises et relancer la croissance aprs la premire crise ptrolire.Malheureusement la France connatra encore de nombreuses crises conomiques et financires et la cour de Versailles sera depuis quarante ans trop frquemment saisis de plans sociaux ou de litiges opposant des entreprises, des particuliers ou des collectivits locales des tablissements bancaires ou portant sur des liquidations ou des redressements judiciaires dentreprises. Ainsi ont t ou sont encore suivies par notre cour la socit Mory-Ducros, la socit Moulinex Brandt, le groupe Fagor-Brandt qui au total emploient plus de 10000salaris.De trs nombreux arrts ont t rendus dans ce domaine par notre Cour dappel mais je me limiterai nen citer que deux rendus par les Chambres commerciales et civiles de la cour:llarrt du 7 mai 1997 qui a condamn la socit Renault la suite de la fermeture de son site belge de Vilvoorde, lereclassement et le licenciement de 3000 salaris, pour non respect de la procdure de consultation pralable du Comit du groupe europen,llarrt plus rcent dit du coeur de la dfense rendu le 19 janvier 2012 et qui portait sur louverture de la procdure de sauvegarde de justice des socits Hold et Dame Luxembourg concernant lachat par ces dernires dune tour de la dfense laide dun prt dun montant de 1,7milliards deurosOn peut encore citer dans le domaine financier, les affaires toujours en cours dits des emprunts toxiques contracts par les collectivits locales auprs de Dexia. Les consquences directes ou indirectes de ces prts ont t valus par le Conseil constitutionnel plus de 10 milliards deuros.....Et toujours dans le domaine de la finance, je ne peux omettre de citer:lun arrt de lune des Chambres pnales de la cour concernant la retraite chapeau du Prsident dune des plus importantes socits du BTP,let la procdure toujours en cours sur renvoi de cassation concernant le litige opposant sur les intrts civils Jrme Kerviel la socit gnrale.Dans le domaine conomique international, lanne 1975 a t marque par lorganisation au mois de novembre Rambouillet par le Prsident de la Rpublique Valry Giscard dEstaing du premier sommet des pays les plus industrialiss. Ils taient au nombre de 5 lpoque et passeront rapidement 7 donnant ainsi le nom de G7 leur sommet.A cet gard,je citerai larrt rendu par la Cour dappel de Versailles le 7 mars 1990 qui a contrl la validit de larbitrage international rendu la suite de laccord diplomatique pass en 1974 entre les gouvernements franais et iranien sur lutilisation pacifique de lnergie nuclaire et instituant une coopration conomique et financire entre les deux pays.Et dans le domaine international et diplomatique larrt le plus emblmatique rendu par la Cour dappel de Versailles est sans aucun doute celui

    concernant la construction du Tramway de Jrusalem prononc le 22 mars 2013.Dans les annes 1990 se sont, en effet, deux entreprises franaises, les socits Volia et Alstom qui ont remport lappel doffres lanc par ltat dIsral pour la construction dun tramway qui traverse depuis 2011 la ville de Jrusalem jusqu Jrusalem Est en passant par les territoires occups.Estimant que la construction tait illgale parce que portant sur des territoires nappartenant pas Isral, et violait ainsi les droits de lHomme et plusieurs conventions internationales, l Organisation de libration de la Palestine (OLP) et lassociation France Palestine Solidarit ont assign les deux socits devant le Tribunal Grande Insta