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Images en Dermatologie Vol. IV • n° 4 et 5 • juillet-octobre 2011 I À D É T A C H E R Fiche n° 8 Geste chirurgical Fiche Sous la responsabilité de ses auteurs L a chirurgie dermatologique est réalisée dans la majorité des cas sous anesthésie locale et en cabinet de ville. Les complications dommageables sont rares, de l’ordre de 1 %, et sont essentiellement de nature hémorragique ou infectieuse (1). Les conditions nécessaires à sa bonne réalisation ont été précisées dans un rapport de la Haute Autorité de santé en juillet 2007 (2). Le parcours du patient se décompose en 3 temps : une consultation préopératoire, une consultation interventionnelle et une consultation d’annonce et d’organisation du suivi. L’un des objectifs de ce parcours est d’identifier les patients à risque hémorragique, de quantifier ce risque et d’organiser les soins et le suivi postopératoire de manière adaptée. Actuellement, près de 1,5 million de patients en France reçoivent un traitement hypocoagulant par antiagrégant plaquettaire (AAP) ou antivitamine K (AVK). L’association aspirine + clopidogrel est le protocole recommandé chez les patients coronariens après un syndrome coronarien aigu, avec ou sans angioplastie, pose de stents coronaires ou pontage aortocoronaire. Alors, comment gérer ces traitements en vue d’une chirurgie cutanée ? Consultation préopératoire (figure 1) L’interrogatoire constitue le premier temps de la consultation préopératoire qui doit précéder d’une dizaine de jours le temps opératoire. Il vise à identifier le patient à risque hémorragique, de façon globale, en évaluant et en précisant : - son terrain : une hypertension artérielle mal équilibrée qui majore le saignement ou une pathologie influençant la fonc- tion plaquettaire ou la coagulation comme l’insuffisance rénale, l’insuffisance hépatique ou une hémopathie ; - ses prises médicamenteuses et/ou de toxiques, qui contribuent au saignement, les herbes thérapeutiques et les supplémentations vitaminiques, qui peuvent interférer sur la coagulation ; - son temps de saignement habituel en cas de coupure acciden- telle ou après une extraction dentaire, en particulier en cas de trouble de l’hémostase connu – de type hémophilie ou maladie de Willebrand. Ces pathologies nécessitent toujours une prise en charge préopératoire avec un hématologiste ; Gestion des anticoagulants avant un acte de chirurgie dermatologique Management of anticoagulant in dermatologic surgery J.M. Amici 1 , O. Cogrel 2 ( 1 Service de dermatologie, hôpital Saint-André, CHU de Bordeaux ; 2 Service de dermatologie, hôpital Haut-Lévêque, CHU de Bordeaux) - le risque hémorragique propre à la localisation anatomique de la lésion à opérer, la richesse vasculaire du territoire ainsi que l’ampleur de la réparation et des décollements cutanés envisagés. L’interrogatoire permettra enfin d’identifier les porteurs d’endo- prothèses coronaires, chez qui le risque thrombotique est majeur, en cas d’interruption du traitement pendant un délai critique qui varie de 4 à 6 semaines après la pose d’un stent nu et qui peut aller jusqu’à 12 mois après celle d’un stent pharmacoactif. Poursuivre ? Arrêter ? Substituer ? (figure 2, p. II) Traitements par anti-inflammatoires et antiagrégants plaquettaires Il a paru logique, pendant des années, de proposer l’arrêt transi- toire de l’aspirine et des AAP de façon à limiter le risque hémor- ragique d’une chirurgie cutanée. Actuellement, cette attitude est réévaluée en fonction du rapport bénéfice/risque lié à l’arrêt ou à la poursuite de ces traitements. Compte tenu de la survenue d’accidents thrombotiques parfois graves, voire mortels, et 1 L’interrogatoire, premier temps de la consultation préopératoire, est déterminant.

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Geste chirurgicalFiche Sous la responsabilité de ses auteurs

L a chirurgie dermatologique est réalisée dans la majorité des cas sous anesthésie locale et en cabinet de ville. Les complications dommageables sont

rares, de l’ordre de 1 %, et sont essentiellement de nature hémorragique ou infectieuse (1). Les conditions nécessaires à sa bonne réalisation ont été précisées dans un rapport de la Haute Autorité de santé en juillet 2007 (2). Le parcours du patient se décompose en 3 temps : une consultation préopératoire, une consultation interventionnelle et une consultation d’annonce et d’organisation du suivi. L’un des objectifs de ce parcours est d’identifi er les patients à risque hémorragique, de quantifi er ce risque et d’organiser les soins et le suivi postopératoire de manière adaptée. Actuellement, près de 1,5 million de patients en France reçoivent un traitement hypocoagulant par antiagrégant plaquettaire (AAP) ou antivitamine K (AVK). L’association aspirine + clopidogrel est le protocole recommandé chez les patients coronariens après un syndrome coronarien aigu, avec ou sans angioplastie, pose de stents coronaires ou pontage aortocoronaire. Alors, comment gérer ces traitements en vue d’une chirurgie cutanée ?

Consultation préopératoire (fi gure 1)

L’interrogatoire constitue le premier temps de la consultation préopératoire qui doit précéder d’une dizaine de jours le temps opératoire. Il vise à identifi er le patient à risque hémorragique, de façon globale, en évaluant et en précisant :- son terrain : une hypertension artérielle mal équilibrée qui majore le saignement ou une pathologie infl uençant la fonc-tion plaquettaire ou la coagulation comme l’insuffi sance rénale, l’insuffi sance hépatique ou une hémopathie ;- ses prises médicamenteuses et/ou de toxiques, qui contribuent au saignement, les herbes thérapeutiques et les supplémentations vitaminiques, qui peuvent interférer sur la coagulation ;- son temps de saignement habituel en cas de coupure acciden-telle ou après une extraction dentaire, en particulier en cas de trouble de l’hémostase connu – de type hémophilie ou maladie de Willebrand. Ces pathologies nécessitent toujours une prise en charge préopératoire avec un hématologiste ;

Gestion des anticoagulants avant un acte de chirurgie dermatologiqueManagement of anticoagulant in dermatologic surgeryJ.M. Amici1, O. Cogrel2 (1 Service de dermatologie, hôpital Saint-André, CHU de Bordeaux ; 2 Service de dermatologie, hôpital Haut-Lévêque, CHU de Bordeaux)

- le risque hémorragique propre à la localisation anatomique de la lésion à opérer, la richesse vasculaire du territoire ainsi que l’ampleur de la réparation et des décollements cutanés envisagés.

L’interrogatoire permettra enfi n d’identifi er les porteurs d’endo-prothèses coronaires, chez qui le risque thrombotique est majeur, en cas d’interruption du traitement pendant un délai critique qui varie de 4 à 6 semaines après la pose d’un stent nu et qui peut aller jusqu’à 12 mois après celle d’un stent pharmacoactif.

Poursuivre ? Arrêter ? Substituer ? (fi gure 2, p. II)

•Traitements par anti-inflammatoires et antiagrégants plaquettairesIl a paru logique, pendant des années, de proposer l’arrêt transi-toire de l’aspirine et des AAP de façon à limiter le risque hémor-ragique d’une chirurgie cutanée. Actuellement, cette attitude est réévaluée en fonction du rapport bénéfi ce/risque lié à l’arrêt ou à la poursuite de ces traitements. Compte tenu de la survenue d’accidents thrombotiques parfois graves, voire mortels, et

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L’interrogatoire, premier temps de la consultation préopératoire, est déterminant.

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malgré leur relative rareté, estimée à 1 sur 21 000 interven-tions, il est recommandé de poursuivre l’aspirine et les AAP lors d’interventions de chirurgie dermatologique (3).

En pratique, on peut donc raisonnablement conseiller :- dans tous les cas, la poursuite des anti-infl ammatoires non stéroïdiens (AINS) et des AAP, et ce d’autant plus facilement s’il s’agit de l’acide acétylsalicylique (4, 5) ;- en cas de bithérapie par acide acétylsalicylique et clopidogrel, la poursuite de cette bithérapie est conseillée en recommandant un suivi postopératoire attentif (6). En cas de chirurgie lourde et complexe – relativement rare en dermatologie –, la possibilité d’un arrêt du clopidogrel 5 jours avant l’intervention, permet-tant un début de restauration de la fonction plaquettaire sans majoration du risque thrombotique, est évaluée en concertation avec le cardiologue (6).

•Traitement par antivitamine KLes données sur les AVK de l’Agence française de sécurité sani-taire des produits de santé (Afssaps) à l’attention des profession-nels de santé (7) ainsi que celles de la littérature sont favorables à la poursuite du traitement par AVK, le risque thromboembo-lique étant plus élevé que le risque hémorragique (3, 8, 9).

En fonction des données de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de la littérature, il est raisonnable de recommander :- de ne plus arrêter les AVK ;- de contrôler l’IN R 24 à 48 heures avant l’intervention ;- de respecter un INR inférieur à 3 avant l’acte opératoire ;

- de ne pas réaliser de relais des AVK par l’héparine, diffi cile à gérer, aléatoire en termes de risque hémorragique et de risque thrombotique et ne présentant pas d’intérêts en termes de complications. II

Références bibliographiques1. Amici JM, Rogues AM, Lashéras A et al. A prospective study of the inci-dence of complications associated with dermatological surgery. Br J Dermatol 2005;153:967-71.2. Conditions de réalisation des actes d’exérèse de lésion superfi cielle de la peau. Rapport de la Haute Autorité de santé, juillet 2007. http://www.has-sante.fr3. Kovich O, Otley CC. Thrombotic complications related to discontinuation of warfarin and aspirin therapy perioperatively for cutaneous operation. J Am Acad Dermatol 2003;48:233-7.4. Billingsley EM, Maloney ME. Intraoperative and postoperative bleeding problems in patients taking warfarin, aspirin, and nonsteroidal antiinfl am-matory agents. A prospective study. Dermatol Surg 1997;23:381-3; discussion 384-5.5. Danino A, Duvernay A, Dautriche R, Duvernay-Debin R, Cottin Y, Dalac S. L’arrêt d’un traitement antiagrégant plaquettaire est-il nécessaire avant une chirurgie cutanée carcinologique ? Ann Dermatol Venereol 2007;134:731-4.6. Recommandations de la Société française d’anesthésie et de réanimation, septembre 1991.7. Antivitamines K(AVK)-Information destinée au professionnel de santé. Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, avril 2003.8. Ah-Weng A, Natarajan S, Velangi S, Langtry JA. Preoperative monitoring of warfarin in cutaneous surgery. Br J Dermatol 2003; 149:386-9.9. Blasdale C, Lawrence CM. Perioperative international normalized ratio level is a poor predictor of postoperative bleeding complications in dermatological surgery patients taking warfarin. Br J Dermatol 2008;158:522-6.

Risque thrombotique

Risque hémorragique

Le risque thrombotique à l’arrêt des traitements anticoagulants est toujours plus grave qu’un saignement en chirurgie cutanée. Il justifi e la poursuite du traitement anticoagulant.

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