échos de l'étranger

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La revue de l'inspection générale Inspection générale Dominique Borne - doyen de l'IGEN Thierry Bossard - chef du service de l'IGAENR Michèle Jue-Denis - inspection générale www.education.gouv.fr/syst/inspections.htm Février 2005 Délégation à la communication Luc Boegly MENESR / 1000 exemplaires titre du document éditeur directeurs de la publication secrétaire générale de la rédaction accès internet date de parution conception graphique photographie couverture impression

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La revue de l'inspection générale

Inspection générale

Dominique Borne - doyen de l'IGENThierry Bossard - chef du service de l'IGAENR

Michèle Jue-Denis - inspection générale

www.education.gouv.fr/syst/inspections.htm

Février 2005

Délégation à la communication

Luc Boegly

MENESR / 1000 exemplaires

titre du document

éditeur

directeurs de la publication

secrétaire générale de la rédaction

accès internet

date de parution

conception graphique

photographie couverture

impression

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Construire pour enseignernuméro 2 – février 2005

> HÉLÈNE BERNARD

> FRANÇOIS BONACCORSI

> DOMINIQUE BORNE

> PATRICE BRESSON

> JEAN-YVES CERFONTAINE

> MARIE-CLAUDE DEROUET-BESSON

> FRANÇOIS DONTENWILLE

> OLIVIER DEROSAIS

> JEAN-LOUIS DURPAIRE

> MARC GOUGON

> CHRISTIAN LOARER

> FRANÇOIS LOUIS

> FRANÇOISE MALLET

> ANNIE MAMECIER

> JEAN PIGEASSOU

> GÉRARD POURCHET

> BENOÎT DE SAINT-MARTIN

> SUZANNE SRODOGORA

> PATRICE VAN LERBERGHE

la revuede l‘inspection générale

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Gérard Pourchet

Patrimoine architectural et pilotage des constructionsLe cadre a toujours influencé la vie de l’École et sa place dans la cité. Plus lesacteurs sont jeunes, plus ils sont sensibles à leur environnement. L’architecture etla pédagogie vivent une relation nouvelle et forte. Au centre du débat entre lescollectivités et l’État, dans le cadre de compétences partagées, se trouvent lesutilisateurs, mais aussi l’équilibre à établir entre la qualité architecturale, signaldans l’espace, et l’adaptation permanente aux exigences nouvelles d’accueil et deformation.La réflexion sur la conception des bâtiments scolaires ne se limite pas à la manièredont le bâtiment s’intègre dans son environnement. Les choix de développementdurable, la volonté d’une ouverture à des usages assurant un lien entre l’École etla communauté locale, le souci d’optimiser les investissements font aussi partiedes contraintes qui s’imposent aux nouveaux décideurs.

De la classe à l’établissementL’École devient un pôle de développement local qui implique disponibilité etadaptabilité. Mais comme la durée des usages et des pratiques est plus courteque celle des murs, les élus, soucieux de l’effet de ces bâtiments publics sur lecadre de vie quotidienne des citoyens, s’interrogent : comment faire pour que cesconstructions soient belles et efficaces, ouvertes et protégées, spécifiques etpolyvalentes ?Comment, à côté de la salle de classe et de l’enseignement simultané, traiterspatialement la transversalité ou la socialisation individuelle et collective ? Quelleconfiguration des bâtiments scolaires pour soutenir le contenu d’enseignement etcréer un environnement favorable à l’activité éducative ? Quelles recommandationspour anticiper sur les changements fondamentaux qui affecteront demain lesbâtiments scolaires ?

L’École de demainLes évolutions attendues doivent prendre en compte les nouvelles exigences desutilisateurs et réaliser les aménagements nécessaires à l’enseignement et àl’apprentissage. La qualité de la formation dans une société du savoir dépenddans une certaine mesure d’une conception appropriée de la construction desbâtiments scolaires. Il faut intégrer les développements des technologies, lechangement des contenus d’enseignement, la mise en œuvre des nouvellespratiques pédagogiques. Les tendances qui définissent cet environnement sonten constante évolution : programmistes, architectes, éducateurs, enseignants,décideurs politiques doivent non seulement répondre aux besoins d’aujourd’hui,mais aussi anticiper sur les attentes du futur. Ils doivent faire les meilleurs choixpour l’avenir.

Les pratiques pédagogiques et éducatives évolueront toujours plus vite que les murs.”MARIE-CLAUDE DEROUET-BESSON

Construire pour enseigner

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sommaireConstruire pour enseigner

> Le patrimoine architectural4 L’apport de l’École à la construction d’une culture

architecturale en FranceMARIE-CLAUDE DEROUET-BESSON

20 l’École dans la citéBENOÎT DE SAINT-MARTIN

> Entretiens avec...OLIVIER DEROSAIS

> Le pilotage des constructions28 Histoire et pilotage des constructions scolaires

FRANÇOIS DONTENWILLE

> De la classe à l‘établissement42 Une nouvelle logique de l’établissement scolaire

GÉRARD POURCHET

47 Des espaces d’enseignement aux lieux de vie : les leçons d’une enquête JEAN-YVES CERFONTAINE, GÉRARD POURCHET

56 Organiser l’espace des sciences de la vie et de la TerreANNIE MAMECIER

63 Architecture scolaire et formation tout au long de la vieJEAN PIGEASSOU

dossier

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> L‘École de demain71 Le CDI : entre multipolarité et virtualité

JEAN-LOUIS DURPAIRE

85 L’architecture scolaire : un judicieux point de rencontre entre l’État et les collectivités ?FRANÇOIS LOUIS

> De l‘étranger97 Une nouvelle ambition pour les constructions scolaires

en Angleterre FRANÇOISE MALLET

106 > Ils ont évaluéLa gestion des régimes indemnitaires et la modulation des primesHÉLÈNE BERNARD

113 > Échos de l‘étrangerCarrières scientifiques et espace européen de la recherche SUZANNE SRODOGORA, FRANÇOIS BONACCORSI, MARC GOUJON, PATRICE VAN LERBERGHE

121 > Abécédaire“É” comme élève DOMINIQUE BORNE

124 > Retour aux sourcesLa classe au temps de Jules Ferry ?

rubriques

Ce numéro a été coordonné par Gérard Pourchet, inspecteur général de l’éducation nationale.

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dossier : Construire pour enseigner > Le patrimoine architectural

L‘apport de l‘École à la construction d‘une culture architecturale en FranceMARIE-CLAUDE DEROUET-BESSON, maître de conférencesUMR Éducation & Politiques (INRP-Université Lumière Lyon 2)

Si les bâtiments scolaires sont couramment vus comme d’utiles objets d’éducation àl’espace pour les élèves des écoles maternelles, leur qualité de moyens d’éducationsemble moins prise en considération à l’école élémentaire puis au collège et au lycée.La découverte de l’architecture et du cadre bâti, en particulier urbain, fait partie deces nouveaux savoirs qu’aujourd’hui on demande à l’École de dispenser. Pourquoine pas saisir les usages quotidiens des dispositions spatiales des établissementsscolaires pour contribuer à la construction d’une culture architecturale tout enconcourant à l’évolution permanente des lieux d’école ?

De la classe à l’établissement,l’évolution est tangible dansl’organisation de l’espace sco-

laire. Si les salles de classe restent pré-dominantes, leurs surfaces se tassentau collège et au lycée et, de l’écolematernelle au lycée, des lieux de plusen plus nombreux et diversifiés se déve-loppent à côté d’elles. L’échelle del’établissement, celle de l’architecte etde l’élu territorial, trouve une nouvellepertinence pour approcher des dimen-sions pédagogiques et éducatives endécalage avec les pratiques longtempsassociées à la salle de classe. Pourautant, les raisons de cette lente

transformation sont peu analysées etcette lacune inhibe la prospective.Les questions foisonnent face auxmultiples références pédagogiques ouéducatives qui sont évoquées lors desprogrammations de construction ou derénovation d’établissements. Pour les col-lectivités territoriales, maîtres d’ouvrage,alors même qu’elles y consacrent intérêtet investissements et que certainestentent de faire homologuer en normeseuropéennes leurs procédures de ges-tion patrimoniale, l’espoir de recueillirune demande de locaux scolaires claireet compatible avec la durée des bâti-ments, toujours plus longue que celle

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des pratiques, reste largement inaccessible.Les maîtres d’œuvre, les architectes sontsouvent déroutés, quand ils s’y intéressent,par le mélange de routine prévisible, derésignation attristée et d’appétit de “surmesure” inventif qui se côtoient dans lesdemandes émanant des utilisateursdirects. Tous n’ont pas envie de sepencher plus avant sur cet écheveau etcertains préfèrent encore y substituerleur vision du fonctionnement de l’école.Du côté de ce que l’on commence àappeler la maîtrise d’usage, à l’échelledes établissements, leurs chefs, direc-teurs d’école, principaux ou proviseurs,peinent souvent à satisfaire les besoinsspatiaux manifestés par des utilisateursdirects sans cesse plus nombreux etorganisent de leur mieux la subversionspatiale des locaux dont ils disposent.L’essor perceptible aujourd’hui del’individualisation et de la transversalitépédagogiques qui grignote l’enseigne-ment simultané change inexorablementla donne, sans qu’un équilibre nouveause concrétise et fasse consensus autourd’un cursus commun et d’un bon espacescolaire à l’échelle de l’établissement.L’évolution des technologies nouvelles,l’irruption du sans fil et l’abandon ducâblage par exemple, ou les modifica-tions des conditions d’encadrement desélèves hors de la salle de classe,création puis réduction des aideséducateurs, ajoutent à la complexité.Pour contribuer à éclairer ce mouvementde la classe à l’établissement et pouvoirle prendre en compte, une interrogation,dans la durée, des constantes du che-minement du projet pédagogique au pro-jet architectural est utile. De la dimen-sion pédagogique de l’espace scolaireà la dimension spatiale des pratiqueséducatives, cet article souhaite renou-

veler et stimuler l’intérêt pour les situa-tions scolaires et redonner une placedynamique aux demandes des utilisa-teurs, enseignants ou non. L’espace sco-laire ne peut pas être isolé comme unevariable maîtrisable par des spécialis-tes indépendamment des autres facteurset des acteurs qui construisent ces situa-tions scolaires, de même qu’il n’est pasnon plus indépendant de son environ-nement spatial et social. Il souhaite aussiprogresser dans une direction qui appa-raît comme une des plus prometteusesmais aussi des plus difficiles de larecherche en éducation. Penser avecles mêmes modèles les questions de poli-tique et d’organisation – l’aménagementspatial est une des formes de l’organi-sation – et les questions de contenus.L’idée n’a rien de nouveau, c’est mêmele fondement de la sociologie de l’édu-cation. Durkheim, dans L’évolution péda-gogique en France, faisait l’hypothèsequ’à chaque période la société nourritun projet de socialisation pour la jeu-nesse correspondant à son besoin à lafois de se reproduire et de se renouve-ler. Ce projet sous-tend aussi bien lespolitiques d’éducation que l’organisationscolaire et les choix curriculaires : unegrille sélectionne parmi les multiplessavoirs sociaux ceux qui sont suscep-tibles d’entrer à l’école et ceux qui sontdu domaine des familles ou des Églises,les manières d’enseigner et les types derapports aux savoirs qu’elles supposent,les modalités de l’évaluation et de la cer-tification, etc. Ainsi, à son époque justeavant la première guerre mondiale, exis-tait-il au moins des harmoniques entrele choix de savoirs en rupture avec l’ex-périence commune, celui de l’ensei-gnement simultané dans une salle declasse avec un emploi du temps fondé

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dossier : Construire pour enseigner > Le patrimoine architectural

sur l’heure de cours et un découpagedisciplinaire des savoirs. Chez Durkheim,cette visée générale est liée à uneconception fonctionnaliste de la sociétéqui insiste sur la manière dont les diffé-rents éléments s’articulent les uns auxautres. Comment la poursuivre aujour-d’hui sans tomber dans le schématismealors que nous sommes plus sensibles– et à juste titre – aux décalages, à lapluralité des logiques qui sous-tendentl’action et à la crise des grands récits ?Durkheim pensait dans un univers où leprojet républicain opérait une réductionde la complexité autour d’un objectif deconstitution d’une conscience collec-tive liée à l’État-nation. S’il s’agit aujour-d’hui de reprendre ce projet dans un uni-vers à justification multiple (Derouet,2000), le souci de penser globalementles différentes composantes du projetscolaire reste valable aussi bien au planscientifique qu’au plan politique. Lafaiblesse de beaucoup de travauxcontemporains réside dans le croise-ment de données construites dans desespaces épistémologiques différents,par exemple, un agencement spatial etles performances des élèves en mathé-matiques (Derouet-Besson, 1998). Detels exercices achèvent de brouiller lepaysage en créant des artefacts.Les historiens discutent beaucoup de lapertinence de la rupture sur laquelleconvergent aussi bien Ariès queFoucault, entre une conception d’AncienRégime où l’apprentissage fait partie dela vie sociale ordinaire et l’émergenced’un temps des études, d’espaces sco-laires et de savoirs séparés. Si Foucaultn’a pas travaillé lui-même le “grand ren-fermement” pour l’école, cette notioninspire l’ensemble de l’entreprise de GuyVincent (1981, 1994) lorsqu’il avance la

notion de forme scolaire. Celle-ciimplique aussi bien un découpage dessavoirs qu’une discipline des corps, untemps, un espace. Ces analyses sontmarquées par une idéologie de la rupturepropre à la philosophie et à la politiquedes années 1960 et 1970. Les enquêteshistoriques mettent au jour une réalitéinfiniment plus complexe et diversifiée.Il est souvent beaucoup plus pertinentde parler de tuilage que de rupture. Desmodèles différents coexistent dans unemême période et si l’un est au premierplan, la société n’est pas ordonnée parune seule logique d’action. Il faut doncsans doute éviter toute radicalisation.Ainsi, le sentiment de l’enfance existebien avant le XVIe siècle et la thèsed’Ariès correspond à une lecture rapideet lacunaire des sources. Toutefois, lemouvement général peut être éclairant.L’idéal que nous connaissons, celui d’uneécole séparée du monde social, s’estconstitué contre une conception oùl’apprentissage était intégré à laproduction. Cette séparation est aujour-d’hui remise en cause. Non seulementla forme scolaire s’assouplit mais unautre horizon apparaît – la formation toutau long de la vie – qui retrouverait, dansune autre conjoncture sociale et éco-nomique, l’intégration des activités deformation et de production. Nul doutequ’elle aura à la fois des incidencescurriculaires et spatiales.

Du projet pédagogique au projetarchitectural : la généalogie des lieux d’école est pédagogique et éducativeChaque bâtiment scolaire concrétisedes liens entre architecture et éduca-tion. Que ces liens ne se matérialisentpas de la même façon selon l’époque

L’agencementspatial et laperformancedes élèves

““

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apparaît évident puisque les concep-tions pédagogiques et éducatives chan-gent au fil du temps. Un regard sur le patri-moine construit ces deux derniers sièclesmontre cependant une constante : sil’édifice scolaire paraît obéir à ses règlespropres, la forme urbaine a une influencedéterminante sur lui. Quel que soit lemoment, les établissements scolairesressemblent aux autres bâtimentspublics contemporains, ils sont insé-rés de la même façon dans le tissuurbain et toutes leurs formes netrouvent pas leur origine dans le modede socialisation des jeunes retenu àl’époque de leur construction. Ainsi, lagrande inversion de la place de la cour,qui passe d’une position centrale dansun établissement construit en bordurede rue à une position périphérique et,parfois, au statut d’espaces verts dansles établissements où les bâtimentssont regroupés au centre de la parcelle.Seules l’histoire de l’architecture et del’urbanisme et la révolution modernede l’entre-deux guerres expliquentcette transformation majeure quibouleverse les rapports entre l’espaceprivé de l’établissement et l’espacepublic, qui donne à voir au quartier unepartie du fonctionnement de l’école.Les utilisateurs des équipementsscolaires se sont adaptés, plus oumoins facilement, à de tels lieux, ilsn’en sont pas à l’origine.

> La salle de classe : un lieu d’écoleparmi d’autresLe constat est bien différent concernantles dispositions intérieures des établis-sements. L’évolution pédagogique etéducative les domine et elles sonttoujours inventées sur la longue duréepar leurs utilisateurs, leurs habitants

comme disent souvent les architectes.Ce sont des pratiques qui sont mises enmurs même si l’omniprésence de la sallede classe et la puissance de la mise enforme qu’elle propose font un peu oublierla généalogie des lieux d’école. La sallede classe semble immuable parce qu’elleest séculairement ancrée dans les habi-tudes mais elle correspond, à l’égal detoutes les autres dispositions spatialesscolaires, à la mise en forme spatialed’un projet pédagogique et d’un modede circulation des savoirs. Un regardrapide sur le XIXe siècle permet de cons-tater qu’un projet pédagogique assezsemblable, apprendre aux enfants à lireet à compter, voire à écrire, a générédes modes d’enseignement et des dispo-sitifs spatiaux différents qui coexistè-rent plus ou moins de l’Empire au débutde la Troisième République (Mayeur1981). Hérité de l’Ancien Régime,l’enseignement individuel a encore desadeptes. Le maître, clerc ou laïc,s’occupe, chez lui, de ses élèves quiviennent tour à tour le voir individuelle-ment pour réciter leurs leçons, montrerleurs lettres … Au même moment, descongrégationnistes et des laïcs pratiquentl’enseignement simultané : le maître,grâce au cours magistral, parle à touteune classe dont les élèves font en mêmetemps les mêmes exercices. La salle declasse est leur lieu commun pendant letemps des leçons et l’établissementcomprend autant de salles de classeque de couples enseignant-élèves sup-posés travailler en même temps. Unetroisième organisation, l’enseignementmutuel, importé de Grande-Bretagne,coexiste avec les deux autres. Il s’agitd’encadrer un grand nombre d’écoliersà la fois. Le maître en regroupe plusieurscentaines dans une grande halle et

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dossier : Construire pour enseigner > Le patrimoine architectural

délègue une partie de sa tâche auxmeilleurs élèves qui répètent son ensei-gnement aux plus faibles et aux plus jeu-nes. À chacune de ces procédures péda-gogiques correspondent une définitionpolitique de l’éducation, un traitementde la personne de l’élève, des rapportsentre le maître et l’élève. Les lieux quisont utilisés puis créés pour ces formesd’enseignement diffèrent aussi. La mêmedémonstration peut être faite à proposdes grands pédagogues. Chacun a conçuet adapté des lieux pour son projet édu-catif et pédagogique (Normand, 2000).

> Des innovations pédagogiques et spatiales constantesL’enseignement simultané l’a emportédès les années 1830 et la salle de classeest devenue le lieu essentiel de lacirculation des savoirs dans le mondescolaire. L’investissement de forme a étéfort, pour autant l’évolution ne s’est pasarrêtée. Si l’enseignement simultanédomine toujours, la nature des échanges,les pratiques, la circulation des savoirsdans la salle de classe d’aujourd’hui ontentraîné de multiples changements.Beaucoup d’entre eux se sont coulésdans l’espace défini sans entraîner samise en cause. Les salles de classe sesont ainsi transformées sous l’impulsionde leurs utilisateurs et diversifiées, spé-cialisées, équipées au rythme des inno-vations pédagogiques, éducatives outechnologiques. Dans le premier degré,des instituteurs ont inventé les mezza-nines (Strœsser, 1977), les zones d’ate-lier dédiées à telle ou telle activité ; dansle second degré, souvent regroupées parpôles disciplinaires, les salles de classeaccueillent désormais plus souvent lemême professeur ou les cours de lamême discipline qu’elles ne sont le

territoire d’une section tout au long del’année. D’autres changements ont faitéclater la forme spatiale de la salle declasse ou ont modifié fortement son envi-ronnement. Les utilisateurs sont toujoursles principaux initiateurs de ces inno-vations spatiales. Pour préparer et gérerdes situations d’enseignement et desocialisation plus efficaces, des ensei-gnants mais aussi des personnels de viescolaire et de santé qui sont progressi-vement entrés dans les établissementsquel que soit leur niveau (écoles mater-nelles et élémentaires, collèges et lycées)depuis les années 1970, cherchent àadapter des lieux à leurs pratiques nou-velles, à l’échelle des groupes d’élèvesdont ils sont responsables ou à celle del’établissement tout entier. Rien que dansla seconde moitié du XXe siècle, l’aireouverte, l’environnement enrichi, lesécoles dans l’école, les écoles surmesure, les salles de motricité, les biblio-thèques centres de documentation oud’information (BCD-BCI), les centres dedocumentation et d’information (les CDI),les salles audiovisuelles, les foyers desélèves, les laboratoires de langue, lessalles d’informatique (avec ou sans baievitrée permettant le contrôle visueldepuis une salle limitrophe), les sallesde permanence différenciée (travail indi-viduel silencieux, travail en groupes, jeuxcalmes, etc.), les cafétérias, les sallesmultimedia, les salles culturelles ou deconférence, les salles d’exposition oude projet, voire le retour des amphi-théâtres rebaptisés auditorium, etc., ontété autant de propositions spatiales pourdes projets pédagogiques et éducatifsrenouvelés. Chacune trouve sa légiti-mité et justifie les dispositions spatialesqu’elle génère dans des approches dif-férentes de l’école, de la ville et de la

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société. Aucune ne fait l’unanimité et neréunit les conditions d’un nouveauconsensus (Derouet-Besson, 1998).Ainsi, lorsque Roger Cousinet, par exem-ple, a ouvert l’école La Source vers 1950à Meudon, il a voulu casser la standar-disation de la salle de classe et de sestables bien alignées, symboles de la dis-tance et de l’impersonnalité des rela-tions à l’intérieur de l’école tradition-nelle. Il a demandé aux élèves d’apporterdu mobilier au rebut chez eux, chaises,fauteuils, canapés … pour que les coursse déroulent dans le cadre d’un salonfamilial. Ces objets offraient un bon pointd’appui à une pédagogie convivialecherchant à reconstituer dans l’école lachaleur du foyer. Encore fallait-il quel’enseignant mobilise ce point d’appui,que par ses paroles, son attitudecorporelle, il invite les élèves à se sentiren famille. Sinon, le plus traditionnel descours magistraux peut se dérouler dansce cadre. Le dispositif spatial est uneressource que les individus peuventmobiliser ou non et investir de sensdifférents. Bien sûr cette ressource peutoffrir un point d’appui plus solide à telou tel comportement, mais elle ne ledétermine pas. Le débat sur l’éducationet les aires ouvertes qui a déchiré lemonde anglo-saxon tout entier, duRoyaume-Uni et des États-Unis àl’Australie ou à la Nouvelle-Zélande,pendant près de vingt ans, le montre.L’écho, déjà obsolète, que renvoient lesnoms de certaines de ces innovationsdonne une idée de la rapidité des trans-formations et de la permanence desajustements opérés par les utilisateurs,de l’ampleur aussi des bricolages locaux.Cette dichotomie entre les dispositionsgénérales d’essence urbaine etarchitecturale et les dispositions

intérieures d’origine pédagogique etéducative n’est bien sûr jamais aussitranchée – la courbure d’une façadepeut avoir, par exemple, d’importantesconséquences sur l’aménagement inté-rieur – mais elle rend assez bien comptepour l’espace scolaire des tensions etdes complémentarités permanentes quiexistent entre la maîtrise d’œuvre et lamaîtrise d’usage. Ces tensions, ordinairespour toute commande de bâtiment privéou public, ce sont les maîtres d’ouvragequi doivent les gérer.

> Pluralité des références et recul del’enseignement simultanéDans le cas de l’école, comme pour tousles bâtiments publics, les utilisateurs nesont pas maîtres d’ouvrage. Les archi-tectes mettent en formes et en volumesdes demandes liées aux usages mais cesont les collectivités territoriales, maît-res d’ouvrage depuis la loi Guizot de 1833pour les écoles, depuis la loi de décen-tralisation de 1985 pour les collèges etles lycées, qui les formulent à travers leprogramme remis à l’architecte concep-teur. L’expression des demandes des uti-lisateurs est toujours indirecte, elle estaussi multiforme et foisonnante. Ladémultiplication des points de vue – lesélèves et leurs parents font partie desutilisateurs à côté des adultes, ensei-gnants, personnels de vie scolaire et desanté, d’encadrement et de gestion,d’entretien et de maintenance – l’iné-galité de statut social et de légitimitéentre les uns et les autres, la durée trèsvariable de leur séjour dans les lieux, ladiversité des fonctions et des usagesdonnent l’impression d’un imbroglio sansfin que le rédacteur du programme,démiurge providentiel, doit dominer.Tâche complexe car, aujourd’hui, il est

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dossier : Construire pour enseigner > Le patrimoine architectural

aussi devenu normal que les référenceséducatives et pédagogiques soientplurielles. L’École nouvelle, Freinet, lesmouvements pédagogiques liés àl’éducation populaire, les courants inno-vateurs contemporains ont accréditél’idée que les besoins spatiaux des unsou des autres ne sont plus semblables.Ces incertitudes sur les références péda-gogiques et éducatives compliquentencore les choses d’autant que la légis-lation née de la décentralisation a aboliles normes nationales et reporté la déci-sion à l’échelon local, sans faire de placelégale à la consultation des utilisateurs,à leurs demandes. Alors même que cer-tains utilisateurs font de l’espace uneressource pour leurs projets et redéfi-nissent ou remodèlent les lieux par desinitiatives spatiales prises dans les situa-tions scolaires au quotidien, l’absenced’observatoire des pratiques ne facilitepas la construction de référencescommunes.L’espace scolaire n’a donc jamais euautant de références possibles que denos jours alors même que l’enseigne-ment simultané recule sans doute pourla première fois de façon significative.D’abord, la prise en charge des élèvesen dehors de la salle de classe et de lasituation d’enseignement s’est déve-loppée sous l’impulsion des personnelsde vie scolaire. Ces dernières trenteannées ont plutôt vu l’essor d’espacesextérieurs à la salle de classe destinésà la socialisation des élèves (foyers,permanences spécialisées, les sallesd’activités du 12-14 h, etc.). Il a fallu aussicréer des bureaux ou des lieux de travailpour tous ces personnels nouveaux.Dans le même temps, le recours à dessituations complémentaires de la situa-tion d’enseignement traditionnelle, plus

instrumentées et plus individualisées aconduit par exemple à des travaux enCDI et au développement de petitescellules de travail à proximité directe.La taille des groupes aussi est devenuebeaucoup plus variable. Dans le seconddegré, des tentatives de définitionsdifférentes du groupe classe se sontmultipliées dans les années 1970 et 1980,générant une demande de grandessalles difficile à satisfaire. La périodedes groupes de niveaux a souventconduit pour certaines activités péda-gogiques à casser la taille habituelled’une section. Le regroupement del’équivalent de deux ou trois classes tra-ditionnelles a créé parfois des groupesd’une petite centaine d’élèves alors queles activités de soutien intensif pouvaientfaire descendre l’effectif du groupelargement en dessous de la vingtaine.Ces variations importantes du grouped’élèves faisant la même activité sontdemeurées fortes même si elles ontchangé de justification. Aujourd’hui,c’est, par exemple, la volonté de réunirles élèves de tout un niveau, voire detout l’établissement, pour les exigencesde la vie citoyenne ou diverses initia-tions collectives (la conférence sur lesdangers de la toxicomanie, la présen-tation de la formation au code de la route,l’organisation des portes ouvertes de find’année, de la participation au téléthon,à la semaine du développement durable,de l’architecture, de la protection desoiseaux, etc.) de s’adresser aux parentsd’élèves, qui conforte la demande d’aumoins une salle pour les grands nomb-res. Simultanément, l’individualisationdes situations d’enseignement etd’apprentissage gagne de l’importance.Les itinéraires de découverte, les travauxpersonnels encadrés, les projets

L’absence d’observatoiresdes pratiques“

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professionnels à caractère pédagogiqueet des formes variées de soutien scolaireengendrent une demande d’ampleurnouvelle pour des lieux différents dessalles de classe et destinés à de petitsgroupes.Cette explosion de la taille des groupesd’élèves et des situations d’enseignementest désormais régulière. Elle n’estcompatible que par défaut avec l’organi-sation spatiale des établissements dontla salle de classe est l’étalon. La subver-sion des lieux par les usages, le bricolagespatial sont incontournables et consti-tuent des dimensions indispensables dufonctionnement des établissements.

Le pré-agencement spatial des situations scolaires et l’espoird’une stabilisation harmonieuseLe cas des écoles n’est pas différent deceux de bâtiments où se déroulent desinteractions sociales. Les règles du jeusocial se négocient, à différenteséchelles, entre les acteurs pour définirce que doit être l’institution, ses rapportsavec le monde, le bâtiment, parfois lemonument qui l’abrite … Ce travail dedéfinition et d’ajustement ne peut cepen-dant pas être refait en permanence. Ilpasse dans des objets, des dispositifsqui en assurent la pérennité sans queles acteurs aient à recommencer àchaque fois le travail de conviction réci-proque. C’est ce que Bruno Latour (1984)appelle la délégation aux objets.

> L’indispensable délégation aux objetsElle s’est longtemps négociée pour leslieux d’école à l’échelle nationale etconstruite autour d’une conceptionpartagée : le choix d’un bâtiment d’écoleet d’un temps des études, lieu et moment

réservés aux apprentissages acadé-miques et sociaux, séparé des lieux etdes temps de vie et de travail du mondede la production. Un certain accord s’estfait sur une école qui appartient plus aumonde des idées qu’à celui del’expérience quotidienne, où le maîtres’adresse à des élèves d’âge et deniveau homogènes grâce à l’enseigne-ment simultané, base organisatrice dutemps et de l’espace. Cet accord estpassé dans un dispositif spatial, le bâti-ment scolaire divisé en salles de classe,espaces où les objets de la vie quoti-dienne entrent en petit nombre et à bonescient, où les élèves sont à égalité pourécouter la parole du maître, où la laïcitéest respectée.La délégation aux objets est patentepartout et d’autant plus à l’école où desadultes ont à éduquer des enfants, oùle cadre dans lequel se déroulent lesépreuves d’initiation du futur citoyen doitpréparer à les réussir. Ainsi, dans la sallede classe, bloquer les perspectivesvisuelles sur l’extérieur par des allègesélevées ou employer du verre cathé-drale comme vitres, c’est tenter deconcentrer les élèves sur l’intérieur, surla parole du maître et, sans les priver delumière, empêcher leur regard des’évader en déléguant aux objets uneparcelle de la mission de contrôle etd’encadrement de l’enseignant. Alignerles tables en rangées parallèles, lesregrouper par trois ou quatre sont desagencements qui correspondent à desactivités différentes, cours magistral,travail individuel ou travail en groupe.La disposition du mobilier dans la sallepréfigure, avant même l’entrée desélèves, un type d’activité, et tente de lesengager d’emblée dans le travail quel’enseignant souhaite leur voir accomplir.

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dossier : Construire pour enseigner > Le patrimoine architectural

À la BCD ou au CDI, disposer les meublesdes bibliothèques de façon à ménagerentre eux de petits lieux pour des travauxde groupe, des ateliers sur des thèmesdifférents ou les regrouper pour dégagerune aire de travail facile à surveiller età animer sont autant de pré-agence-ments matériels du fonctionnementsocial espéré. Ces agencements veulentaussi rappeler de nombreuses situationsantérieures où le travail s’est déroulédans de bonnes conditions ou, souventaujourd’hui, simplement manifester uneforme d’ordre dans lequel la situationscolaire devrait naturellement s’inscrire.

> Une paix des objets souventcontestéeToutes ces préparations, ces pré-agen-cements, ces anticipations, ces misesen ordre à travers les espaces et leschoses aboutissent à cet état du mondeque Luc Boltanski qualifie de paix desobjets (1990). L’univers social n’est querarement un univers de débat. La plupartdes actions sont accomplies sans penserparce que des objets et des dispositifsles guident. Bien sûr, il est toujours pos-sible de remettre en cause cette paixdes objets, mais c’est coûteux, aussibien au plan matériel qu’au plan social.Exemple rebattu au collège ou au lycée,un enseignant peut toujours disposerautrement les tables de la salle oùd’autres l’ont précédé et vont luisuccéder. En îlots pour faire des petitsgroupes de travail, en U pour susciterun autre type de communication, enpourtour pour dégager un espace central,les possibles sont légion mais ils sont touscoûteux à cause du temps et du bruit, dudérangement des collègues aveclesquels il faut négocier, d’éventuellesprotestations des personnels de service

qui doivent tout remettre en place, sansparler des réactions des élèves face auchangement, etc. Tout nouvel ordon-nancement de la salle qu’il occupe doitêtre pour l’enseignant une propositionde situation alternative forte pour qu’ilen accepte le coût et se lance dans latransformation. D’où le mouvement despécialisation des salles de classe cesvingt dernières années. Comme dansl’enseignement élémentaire, chaqueenseignant revendique d’enseigner dansla même salle pour pré-agencer lessituations d’enseignement selon seschoix.Si la salle de classe et l’établissementscolaire sont longtemps restés dans unepaix des objets qui induisait un type derelations sociales et de rapport au savoircaractérisé par l’écoute et le respectdes maîtres, tout a volé en éclats par àcoups depuis les années 1960 et la crisede l’école (Derouet, 1992). Aujourd’hui,non seulement la paix des objets est dés-tabilisée pour l’ensemble de l’établis-sement mais aucun consensus ne se faitjour sur sa définition. Le parallélisme estfrappant entre trois mouvements. Lepremier touche le projet curriculaire parla déstabilisation des disciplines,l’introduction de savoirs sociaux dansl’école, l’affirmation de thèmes trans-versaux, etc. Le deuxième, un mouve-ment politique d’ouverture de l’école,aboutit aujourd’hui aux projets degouvernance. Le troisième, une évolutionspatiale, remet en cause le monopolede la salle de classe.Jusqu’où va cette remise en cause ? Ily a sans doute ce que Jean-LouisDerouet et Alain Kerlan appellent unbougé de la forme scolaire, comme onparle d’un bougé en photographie.L’organisation traditionnelle demeure

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mais le développement d’autres espacesd’enseignement, l’introduction d’ensei-gnements inédits, d’autres méthodes etd’objets nouveaux créent un flou. Leproblème principal concerne le curri-culum. L’école est sommée de traiter denouveaux thèmes. Des plus instrumen-taux (le Code de la route et la sécuritéroutière par exemple) aux plus éthiques(lutte contre le racisme ou le sexisme,respect des droits des handicapés, etc.).Mais ces contenus sont présents sur lemode de la sensibilisation ou de l’ajout.La difficulté est de progresser vers unerecomposition curriculaire qui rattacheces contenus à un projet d’ensemble.Longtemps les propositions pédago-giques et éducatives alternatives ou endécalage se sont heurtées à la fois auxroutines et aux murs. Elles ont dû seglisser dans des interstices de la viesociale et de l’espace des établisse-ments. Elles ont peut-être davantagepénétré l’école maternelle et élémen-taire que le second degré où, majoritai-rement, l’organisation fondamentale duprojet pédagogique sur l’unité du groupe-classe, en séquences d’une heure dansl’espace de la salle de classe, a trèslongtemps été exclusive. C’est elle quiest en partie remise en cause aujour-d’hui par le développement demoments où l’individualisation l’em-porte sur l’approche collective et lamise en œuvre de projets qui enrôlentélèves, enseignants et autres interve-nants parfois dans des configurationsqui cassent le groupe-classe au profitde plus grands ou de plus petits ensem-bles et qui recomposent les frontières etles complémentarités entre disciplines.La juxtaposition de l’enseignement simul-tané qui reste prédominant et de multi-ples formes d’individualisation de

l’enseignement, de transversalité entredisciplines brouille le paysage sansencore le recomposer.

> La fin des normes nationales et les compromis difficiles sur lesdispositifs spatiauxSi bien d’autres préoccupations ontpoussé le législateur au milieu desannées 1980 à renoncer à participer parles normes nationales à la prédéfinitionspatiale des situations à l’école, nul douteque son abandon de pouvoir a été lié àl’éclatement de la paix des objets faceà la critique. L’échec de la standardisa-tion est aussi le refus d’une paix desobjets poussée si loin que tous sesfondements politiques et sociaux sontoubliés. L’idée de rapprocher la décisiondes acteurs qu’elle concerne, si souventavancée à propos de la décentralisation,a été jugée aussi pertinente pour lescollèges et les lycées qu’elle l’était pourles écoles. La démocratie de proximitédevait y trouver son compte en favori-sant la définition et la construction, aucas par cas, d’une paix des objets accor-dant les objectifs nationaux aux besoinslocaux, c’est-à-dire aux projets péda-gogiques et éducatifs des acteurs deterrain. L’habitude de la démocratiereprésentative et la difficulté de consul-ter les utilisateurs ont finalement faitécarter les acteurs directs du proces-sus de la commande d’architecture sco-laire. Ils ne sont consultés que si lacollectivité territoriale le juge utile.Si l’idée d’une interface entre les deman-des et la commande a incontestable-ment progressé depuis les débuts de ladécentralisation, s’intéresser auxdemandes des utilisateurs est loin d’êtreconsidéré partout comme une compo-sante utile ou nécessaire de la décision.

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Lors de rénovations, où la communautéscolaire existe et peut être consultée,certaines collectivités territoriales ontadopté des politiques de standardisa-tion des commandes qui mettent l’accentsur tout ce qui est semblable d’une opé-ration à une autre et ne voient dans lesdemandes locales que l’expression departicularités négligeables. Elles avan-cent souvent l’idée que la consultationdes usagers aboutit toujours à desdépenses supplémentaires, souventinutiles compte tenu de la rapidité de larotation des équipes éducatives et desélèves. D’autres s’engagent dans unepolitique de diversification des opéra-tions selon des critères qu’elles défi-nissent avec une infinie variété de l’uneà l’autre et qui peuvent aboutir à desétablissements “sur mesure”. La perti-nence des demandes et leur légitimiténe sont donc pas construites partout àpartir des mêmes critères.La constitution d’un espace d’intéres-sement politique (Akrich, Callon & Latour,1988) entre les partenaires, maîtred’ouvrage, maître d’œuvre et utilisateurs,c’est-à-dire la convergence de l’intérêtque les acteurs portent au projet resterare. Le souci de dégager un consensus,d’aboutir à des compromis acceptablespar le plus grand nombre freine souventle processus. La plupart des décisionssont prises, aujourd’hui, lorsque plusieurslogiques se rejoignent, pour des raisonsdistinctes, sur un même dispositif. Il fauten tirer les conséquences : il est vain dechercher l’accord entre tous les parte-naires. Le but d’une commande de bâti-ment scolaire n’est pas de dégager chezles demandeurs un consensus surl’éducation ou sur les méthodes péda-gogiques, mais de faire converger desinterprétations différentes de l’école sur

un même dispositif spatial que chacuntentera, ensuite, d’utiliser à son gré etque tous chercheront à modifier.L’instabilité des usages a fait reculer lapaix des objets qui n’encadre plus laprogrammation puis la vie du bâtimentscolaire. Pour autant, aucun utilisateurn’a renoncé à une délégation aux objetsadaptée à ses projets.

À l’écoute des projets pédagogiqueset éducatifs : éloge de l’éphémèreL’écart entre la pérennité des murs et lafugacité des usages est une constante.Il n’y a rien de plus dur, de plus statiquequ’un bâtiment. La pierre, la brique, lebéton n’évoquent ni la flexibilité, nil’adaptabilité mais la durée, la soliditéet une forme d’immuabilité. Il n’y a riende plus évolutif, de plus changeant, qu’unprojet éducatif et pédagogique quicherche à s’ajuster en permanence auxélèves, à leurs caractéristiques et à leurprogression. Immanquablement, parfoisdès l’entrée dans les murs, un décalagese crée entre les dispositions spatialeschoisies lors de la conception archi-tecturale pour servir de point d’appui àune forme scolaire et la mise en œuvredes pratiques quotidiennes. La perte depertinence est compensée par le brico-lage matériel, les changements d’attri-bution des locaux ou plus souvent parl’infléchissement des pratiques. Les mursdes salles de classe des écolesconstruites par Jules Ferry n’abritent plusles mêmes activités ni les mêmes relationsentre maîtres et élèves qu’à leur inaugu-ration. L’adaptabilité, la flexibilité sontaujourd’hui inscrites dans la plupart desprogrammes de constructions scolaireset les maîtres d’ouvrage sont vigilants àménager les capacités d’évolution desbâtiments. Si les exigences de haute

La pérennitédes murs et la fugacitédes images

““

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qualité architecturale et environne-mentale s’ajoutent aux innovations tech-nologiques en matière de communica-tion pour faire évoluer les bâtiments etles façons de s’en servir, l’essentiel duchangement de nos jours reste péda-gogique et éducatif. Si toutes les pra-tiques s’inscrivent tant bien que mal et,de fait, de gré ou de force entre les mursexistants, il faut accepter de prendre ausérieux le développement, à côté de l’en-seignement simultané qui perdure, del’individualisation et de la transversaliténouvelles des apprentissages mais ausside la nature des contenus d’enseigne-ment et des formes de circulation dessavoirs. Si, Durkheim a raison de penserque chaque époque nourrit un projet desocialisation qui correspond à l’idée quela société se fait des principes suscep-tibles d’assurer sa cohésion et son adap-tation à des conditions nouvelles, il fauten tirer les conséquences sur l’organi-sation de l’éducation mais aussi envi-sager en même temps les nouvellesformes de circulation des savoirs etl’élargissement des contenus à desdomaines qui échappent au découpagedisciplinaire actuel ou qui le traversent,tels que l’architecture et l’urbanisme.

> De l’enseignement à la circulation dessavoirs, les conséquences de l’évolutionde la conception curriculaireIl apparaît que ce que Guy Vincentappelle la forme scolaire n’est qu’unemodalité de la circulation des savoirs,peut-être pas la plus appropriée à lasituation contemporaine. Laissons decôté les problèmes que posent les payspauvres, dont l’exemple a pourtantinspiré le brûlot d’Ivan Illich (1971), maisles réflexions européennes présententun paradoxe. Elles mettent la création

et la circulation de la connaissance aucœur de leur projet de société et, enmême temps, elles dissocient cettequestion de celle de l’école. C’est lasociété dans son ensemble qui est“cognitive” et le savoir circule aussi bienpar différents réseaux d’échanges–notamment ceux que permet internet–que dans les entreprises apprenantes.En outre, les compétences ainsi forméesne sont plus seulement individuelles, ilpeut s’agir d’une intelligence collectiveet celle-ci est beaucoup plus articuléeà l’action et à la performance qu’à desclassements académiques. L’idée deréseau est partout présente, dansl’organisation économique (Boltanski &Chiapello, 1999) dans l’organisation dela connaissance, dans celle de sacirculation. Ces propositions sont loin-taines – peut-être utopiques – mais elleséclairent l’évolution actuelle de l’espacedes établissements scolaires. En outre,ceux-ci ne peuvent être indifférents à laconcurrence qu’exercent d’autres offresde savoirs et de valeurs aux élèves qu’ilsscolarisent : les media, la musique, latoile, les jeux, etc., (Brougère, 2002). Toutcela reprend une tradition de dispositifsde socialisation autonome de la jeunesse(Varagnac, 1948) mais avec des moyensde diffusion qui leur confèrent une autredimension.L’école est dès maintenant affectée parcette diversification des modes decirculation des savoirs. Un systèmeperdure où la circulation est univoqueet verticale : de l’enseignant ou de l’adultevers tous les élèves, simultanément. À côté ne cesse de se développer unecirculation des savoirs volontairementvariée, presque à la carte parfois, oùl’activité de l’élève est considéréecomme première, où son enrôlement

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dans le processus d’apprentissage estessentiel. La pédagogie différenciée etla pédagogie par objectifs ont finale-ment induit une individualisation diffuseet augmenté la part des rapportsnouveaux entre le professeur et chaqueélève. À la circulation verticale avecl’enseignant se sont ajoutées des acqui-sitions plus individuelles, liées à ladiffusion des méthodes actives de l’Écolenouvelle puis à l’essor dans les années1980 du travail autonome en CDI ou àpartir d’autres sources.Comment maîtriser ce phénomène ?D’abord en l’abordant avec sa dimen-sion spatiale et en repensant le curri-culum de manière à donner aux maîtreset aux élèves les moyens de compren-dre le processus dans lequel ils sont priset d’agir sur lui. Articulées aujourd’huiautour du travail personnel, ces exi-gences ont trouvé une place officielledans les emplois du temps et le fonc-tionnement des établissements. Lesthèmes des parcours diversifiés puis desitinéraires de découverte le montrentcomme ceux des PPCP ou des travauxpersonnels encadrés, ces dispositifsindividualisés ou ces approches parprojet sont un des lieux privilégiés del’entrée de savoirs sociaux nouveauxdans le cursus scolaire. Non seulementles disciplines ne se définissent plus etne s’enseignent plus de la même façonà cause de leur propre évolution, de celledes savoirs savants et du recours à denouvelles technologies mais elles setraitent de façon différente dans leursinteractions les unes avec les autres. Latransversalité du champ de l’architec-ture et de l’urbanisme par rapport auxdisciplines scolaires peut nourrir cetteporosité davantage souhaitée entre lessavoirs sociaux et ceux de l’École.

> La maîtrise des lieux d’école : un objet d’éducationLorsque l’organisation scolaire estabordée à travers les apprentissagesacadémiques ou sociaux des élèves, lesdispositions spatiales sont courammentconsidérées comme un moyen (Best,1979) d’éducation susceptible, parmi biend’autres, de faciliter des acquisitions.En revanche, dès que l’espace scolaireest vu comme un objet d’éducation, uneoccasion d’acquérir à cette petiteéchelle des compétences à réinvestirailleurs, le processus semble s’inter-rompre avec l’arrivée de l’enfant audernier stade défini par Piaget, celui,euclidien, de l’intelligence opératoireformelle. Il est alors capable, vers onze-douze ans, de tenir compte des troisdimensions, de raisonner en termes géo-métriques. Pour parvenir à être maîtriséà ce stade, l’espace comme objetd’éducation, très étudié par les psycho-logues et les spécialistes du dévelop-pement moteur, cognitif et psycholo-gique de l’enfant, a été intégré dans lesmissions de l’école. Les bâtiments, grâceà des environnements “enrichis”, ontété diversifiés pour favoriser l’initiationdes petits. Les couleurs, les textures desmatériaux, leurs sonorités, la taille etl’agencement des équipements ontprogressivement pris de l’importance entant que supports d’activités destinéesà stimuler leurs apprentissages. Cet inté-rêt pour l’espace objet d’éducations’amenuise au fil des cycles et tout laissepenser que la formation dans ce domaineest achevée lorsque l’élève arrive aucollège. Les bâtiments scolaires necomptent vraiment comme objetsd’éducation qu’à l’école maternelle etélémentaire …Puisque l’architecture et l’urbanisme,

L’espacecomme objetd’éducation“

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l’espace aussi, sont souvent évoquésaujourd’hui comme un champ à aborderdans divers programmes disciplinairesà différents niveaux (une circulaire du31 juillet 1998 évoque l’architecture àpropos de l’éducation artistique etculturelle de la maternelle à l’université)pourquoi ne pas se servir davantage etplus longtemps des bâtiments scolairescomme moyen d’éducation ? Dans unpays où la culture architecturale estconsidérée comme inexistante, la dimen-sion spatiale est, de fait, à travailler toutau long de la vie … Pourquoi ne pas ensaisir l’occasion dans les bâtiments sco-laires et inciter, à côté des élèves, leursutilisateurs adultes, personnels ensei-gnants et de vie scolaire en particulier,à mieux intégrer la dimension spatialedans leurs projets pédagogiques et édu-catifs quotidiens ou exceptionnels ? Celaimplique de les inciter à l’initiative dansleurs usages divers de l’espace plus quede tenter de les satisfaire par du sur mesurelorsqu’on sollicite leurs demandes pourune réhabilitation.

> Aider les usagers directs à créerl’espace de leurs projets, à distinguerle durable de l’éphémèrePuisque la paix des objets est aujourd’huitoujours nécessaire mais plus difficile àconstruire dans le foisonnement despossibles, pourquoi ne pas saisir toutesles occasions de donner aux utilisateursla latitude, politique et matérielle, de per-cevoir l’espace comme une ressourceplus que comme une contrainte ?Beaucoup de revendications ou de sta-bilisations spatiales sont liées à un projetdont la durée dépend de la présenced’un adulte intéressé, de la nature d’undispositif, de la mobilisation d’un grouped’élèves, etc. Elles résultent souvent du

changement d’échelle de la situationd’enseignement ou de socialisationautrefois confinée dans la salle. Tout oupartie de l’espace commun de l’établis-sement est envahi par des projets qui,à l’instar des installations temporairesd’arts plastiques ou des spectacles derue bouleversent momentanément leregard et l’usage dans la ville.La prise en compte de l’éphémère, duprécaire, de la durée courte, celle del’événement, du projet, de la stabilisa-tion que l’on sait momentanée, est rare-ment associée à la dimension spatiale.Par contagion, la relative éternité desmurs incite plutôt à des perspectives lon-gues, à des investissements élevés maisrares. Trouver les lieux du projet collectifou individuel, c’est inciter les utilisa-teurs, les habitants, à considérerl’espace comme une ressource réelle-ment mobilisable dans une situation sco-laire. C’est aussi prendre au sérieux laréalité des pratiques, clé de l’évolutiondes bâtiments scolaires, alors même quele législateur décentralisateur n’a pasprévu d’expression directe desdemandes spatiales. C’est aussi enfinles conditions de la gestion matérielle,financière, architecturale et sécuritairede ces dispositions momentanées. Celasuppose, au moment des programma-tions des constructions ou des rénova-tions, de réfléchir à ce qui doit releverdu gros œuvre difficilement remaniableet des aménagements plus faciles àtransformer sans que le coût de la maind’œuvre soit prohibitif ni les conditionsde sécurité insuffisantes. La marge n’estpas si étroite qu’il y paraît, ni laperspective irréalisable. Nombre d’a-ménagements conçus pour durer sontpeu ou pas utilisés alors que des besoinscriants existent par ailleurs. Une

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meilleure régulation, passant par lacourte durée, est possible. Elle doit allerde pair avec une attention accrue pourtous les équipements que les établisse-ments acquièrent au fil du temps. Le mobi-lier peut faciliter ou freiner l’agence-ment de situations liées à des projetsacadémiques ou de socialisation. Ainsi,parmi mille autres exemples, les chaisesqui sont faciles à monter sur les tables etdégagent le sol pour le nettoyage serventsouvent de point d’appui à une construc-tion de l’ordre scolaire qui intègre lespersonnels d’entretien.

Dépasser la sensibilisation à l’architecture pour entrer dans la construction d’une culture architecturaleEn matière d’espace scolaire, l’éclate-ment des références antérieures liéesà l’enseignement simultané, la prolixitédes demandes et l’inaccessible maîtrisede la diversification des pratiques sontdes difficultés majeures qui éprouventla bonne volonté des élus territoriaux.Comprendre le montage composite entredispositions intérieures, façades etinscription urbaine ; aborder les situa-tions scolaires en tenant compte del’évolution des usages sans séparerl’espace des pratiques pédagogiques etéducatives, des contenus d’enseigne-ment ou de l’organisation du curriculum ;accepter la courte durée des projets etdes dispositifs spatiaux éphémères quileur correspondent ; s’interroger sur ladimension spatiale de la socialisationdes élèves par les élèves, sontaujourd’hui autant d’impératifs pour inci-ter toutes les catégories d’habitants desbâtiments scolaires à s’appuyer davan-tage sur les dispositions spatiales pourréussir leurs projets. Car l’établissement

scolaire d’aujourd’hui est sans douteplus une juxtaposition de projets diffé-rents de personnes et de groupes detailles variées qui se recoupent et serecomposent en permanence qu’uneconvergence consensuelle vers unprojet général et commun.Quelles formes spatiales donner à cetétablissement en perpétuelle recons-truction ? L’importance des pratiquesdans l’évolution des dispositionsspatiales intérieures et la méconnais-sance que l’on en a justifieraient unprogramme de recherche sur les consé-quences spatiales de la sortie partielle del’enseignement simultané au profit d’uneindividualisation de l’enseignement dansles établissements scolaires. Retrouverà l’échelle nationale et développer àl’échelle européenne une structure enréseau de dialogue, de documentation,de mutualisation, de capitalisation entrecollectivités territoriales, architectes etpartenaires de l’Éducation permettraitd’approcher la valeur d’usage des cons-tructions scolaires. Nul doute que lesréflexions actuelles sur la sécurité et lalutte contre la violence à l’école ytrouveraient matière.La prise en compte, en grandeur et entemps réels, de la dimension spatiale dessituations pédagogiques et éducativesdans les établissements scolaires estune occasion rare de contribuer à laconstruction d’une culture architectu-rale en France. Le défi est d’autant plusintéressant qu’il participe de la recom-position de la forme scolaire à traversles dispositions spatiales, le curriculum,les contenus, les pratiques.

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L‘École dans la cité BENOÎT DE SAINT-MARTIN, architecte-voyer, conseiller technique à la direction des affaires scolaires de la Ville de Paris

Le patrimoine scolaire de la Ville de Paris présente dans son histoire et sa diversitéun exemple édifiant de la richesse architecturale de l’École dans la cité. Mais il illustreaussi les contraintes que ce bâti ancien impose à l’évolution des pratiquesd’enseignement. Selon quels principes ont été construits ces établissements ?

Le patrimoine de la Ville de Parisaffecté à l’enseignement scolairepublic représente environ 650

écoles, 100 collèges, 130 lycées etcouvre plus de 2,5 millions de m2 desurface de plancher. Il abrite environ260 000 élèves, soit plus de 1/10 de lapopulation des Parisiens, auxquelss’ajoutent plus de 100 000 élèvesaccueillis dans le secteur privé.

Une seule certitude : ces lieux marquentà jamais la mémoire des élèves etparticipent à l’éducation des futurscitoyens. Ces équipements publics ontété bâtis au gré des lois sur l’éducation,des besoins démographiques et descourants architecturaux du moment.

De la salle d’asile sous la “Monarchiede Juillet” à l’école maternelle “Jules

Ferry”, du collège royal de 1815 à la citéscolaire de 1963, du groupe scolaire desannées trente à celui des années qua-tre-vingts, il y a peu de points communs,si ce n’est le module de la salle de classequi accueille désormais en moyenne 28élèves, au lieu de 48 au siècle dernier.

Les différentes périodes qui ont jalonnél’histoire de l’architecture scolaire de laVille de Paris se décrivent comme suit.

Les collèges royaux et les sallesd’asiles (5 % des bâtiments, aujourd’hui)La Ville de Paris compte en 1802, envi-ron 1700 élèves répartis dans 5 lycéesimpériaux, lesquels deviendront descollèges royaux en 1815. Il s’agit descollèges Louis le Grand, Saint louis,Bonaparte, Rollin et Henri IV. Deux autresétablissements viendront compléter ce

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dispositif : l’école Turgot en 1838 et lecollège Chaptal en 1844.Les lieux d’enseignement sont alorsétablis dans un patrimoine déjà existant,à fonction interchangeable. Ainsi, lecollège Bonaparte (futur lycéeCondorcet) est hébergé dans le couventdes Capucins, construit en 1783 parBrongniart, et le collège Louis le Grandhébergeait des Jésuites entre 1563 et1762 dans l’ancien Collège de Clermont.

En 1815, 24 écoles primaires sont instal-lées dans des hospices, des institutionset des bâtiments religieux. Ces établis-sements sont régis par le réseau desmaîtres des petites écoles, les écolesde charité et les fondations. Le moded’enseignement “mutuel”, qui prévautalors, est dispensé aux enfants de 3 à 6ans par un maître assisté de moniteurs,avec une cadence soutenue d’exerciceset de répétitions quotidiennes. En 1826, le premier asile est construitrue du Bac. Le bâtiment s’articule autourd’une salle d’exercice à gradins et àbancs qui peut accueillir jusqu’à 200enfants. Le préau couvert attenant donnesur une cour bordée de jardins. La salu-brité des lieux est assurée par deslambris sur le soubassement des murs,des lieux d’aisance “à siège” et un poêledans la salle principale.

En 1828, la construction de la maisonscolaire de la rue Saint-Hippolyte parCochin, inspirée du modèle anglais des“infant schools”, marque un tournantdans l’architecture scolaire. L’ensemblecomprend une salle d’asile, deux écolesde filles et de garçons, une biblio-thèque, des ateliers et des logements.Le financement de l’opération a étéconstitué avec l’aide de propriétaires

privés, avant que la municipalité nerachète finalement l’institution en 1830.En 1857, les écoles maternelles à classesmultiples d’environ 50 élèves font leurapparition. L’organisation des locaux estdictée par le mode d’enseignement“simultané”, basé sur les disciplines dela lecture, de l’écriture et des exercicescomplexes. La maison de secours,édifiée rue Parmentier en 1861 parLabrouste, regroupe une salle d’asileavec un dispensaire au rez de chausséeet des salles de classe au premier étagedu bâtiment.

Les écoles et les lycées de la IIIe République (40 % des bâtiments)L’enseignement primaire connaît lesbases de son fondement : - 1868 : réforme pédagogique de VictorDuruy ;- 1870 : création de la direction del’enseignement primaire de la Seine ;- 1880 : règlement pour la construction etl’ameublement des maisons d’écoles ; - 1882 : loi Jules Ferry créant l’instructionscolaire obligatoire.

Cette période est marquée par l’unifor-mité apparente dictée par le mouvementrationaliste, combinée avec une réelleliberté d’expression architecturale.L’architecture rationnelle est fondée surles opposition, fonctionnelle entre lesespaces servis / servants et construc-tive entre les matériaux métal / brique.Les corps de bâtiments et les cours sontorganisés de manière à respecter la divi-sion tripartite par niveaux d’enseigne-ment : élémentaire / moyen / supérieur.

L’école de la rue de Tanger, édifiée en1877 par l’architecte municipal Narjoux,et l’école de la rue de la Plaine, construite

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en 1892 par Julien, constituent des exem-ples significatifs de cette période deconstruction active, qui se soldera parla construction de 35 écoles parisiennessous l’égide d’Octave Gréard.

C’est aussi l’époque de la constructiondes grands lycées parisiens : Lavoisierdans le 5e arrondissement, Chaptal dansle 8e , Jacques Decour dans le 9e ,Voltaire dans le 11e , Buffon dans le 15e,Molière, Janson de Sailly, Jean-Baptiste Say dans le 16e, Carnot dansle 17e.

Les architectes de ces fleurons del’architecture parisienne étaient pour laplupart des Grands Prix de Rome, tantôtinspirés par le mouvement rationalistegothique “Viollet le Ducien” ou expertsdans “l’Art polychrome moderne”. Larelation étroite entre usage et architec-ture est à l’origine de la grande lisibilitéurbaine de ces bâtiments.

Les groupes scolaires des années 30(10 % des bâtiments)Le plan d’extension et d’embellissementde Paris, publié en 1919, et la prolonga-tion de l’obligation scolaire jusqu’à l’âgede 14 ans, décrétée en 1936, ont généréune production féconde en matière deconstructions scolaires, visible égalementen banlieue grâce aux politiquescommunales volontaristes de Villejuif,Maisons-Alfort, Boulogne, Suresnes etPuteaux.

L’architecture est marquée par l’héri-tage du mouvement moderne desannées vingt et l’exposition des ArtsDécoratifs de 1925. La modénature hori-zontale des façades et le jeu savant desvolumes rompent avec le classicisme

prôné par l’école des Beaux-Arts. Lesespaces sont libérés car le béton permetune plus grande portée et les salles sontéclairées grâce à des baies métalliquescoulissantes. La décoration intérieureest soignée et conviviale, avec une atten-tion particulière portée au traitement del’entrée.

Le mouvement hygiéniste se radicaliseet poursuit l’action entreprise dans laseconde moitié du XIXe siècle dans cedomaine. Le mobilier en bois ou bétonest souvent intégré et les revêtementsde sols en carrelage-mosaïque sontpérennes. Le chauffage central, laventilation et le sèche-main font leurapparition.

L’école est ouverte sur l’extérieur auniveau du rez de chaussée, par oppo-sition à l’école “Jules Ferry”, impres-sion renforcée par l’aménagementpaysager des espaces récréatifs. Lesdétracteurs évoquent un “toilettage dumodèle précédent sans grand change-ment”. Les partisans vantent les méritesde “l’école qui s’ouvre et donne envied’apprendre”.

Le groupe scolaire de la rue des TroisBornes, construit en 1935 par Réquet etBarville, illustre ce modèle architecturalqui intègre de nouveaux locauxd’accompagnement (hall, loge, parloir,cabinet médical, salle des maîtresses),tout en maintenant la distinction entreles deux établissements par leur volu-métrie. A une autre échelle, le lycéeCamille Sée, édifié en 1934 par Le Cœur,est emblématique du point de vue de lagénérosité offerte par ses halls d’accueil,ses aires de récréation et ses espacesde circulation intérieure.

La relationétroite entreusage etarchitectureest à l’originede la grandelisibilitéurbaine de cesbâtiments

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Les cités scolaires des années 50 à 70(25 % des bâtiments)La période des “trente glorieuses”s’accompagne d’une explosion démo-graphique à laquelle la constructionindustrialisée tente d’apporter uneréponse. Le recours à la préfabricationet à la standardisation devient systé-matique dans les lieux d’enseignement,principalement dans le secondaire.

En 1952, une circulaire impose la trameunique de 1,75 m, aussi bien en élévationqu’en plan : “Elle a été choisie aprèsdifférents essais, car tout en permettantde trouver une espèce de plus grand com-mun diviseur entre toutes les dimensionsdemandées, elle laisse aux circulations,escaliers, pièces de services ou sanitaires,des dimensions convenables” (extrait dela circulaire du 1er septembre 1952).

Les architectes en chef des bâtimentscivils et nationaux sont consultéssystématiquement et imposent les nor-mes en vigueur. Les établissements sco-laires sont réalisés sans distinction degenre, selon cette règle commune. Leratio de surface utile s’élève à 1,25 m2

par élève, au lieu de 0,8 m2, et la courexcède parfois les 5 m2 par élève, au lieude 3 m2 par élève.

C’est l’époque de la construction des“cités scolaires” ou “ensembles immo-biliers” : Paul Valéry dans le 12e, Rodinet Gabriel Fauré dans le 13e, FrançoisVillon dans le 14e, Honoré de Balzac dansle 17e, ainsi que des collèges d’ensei-gnement secondaire (CES) d’une capa-cité de 600 élèves avec une extensionpossible de 300. Ces bâtiments sont construits au milieude terrains étendus et possèdent de

vastes espaces libres, susceptiblesd’évolution mais leur échelle est souventmal vécue et les matériaux vieillissentprématurément.

Les équipements publics des années 80(20 % des bâtiments)La décentralisation favorise l’adaptationdes programmes et la diversité archi-tecturale dans le domaine de la cons-truction neuve. La loi sur la Maîtrised’ouvrage publique du 12 juillet 1985définit les conditions de la mise en œuvrede la commande publique et permet unedéfinition des besoins plus précise.

La rareté du foncier génère également demultiples interventions sur le patrimoineexistant pour étendre sa capacitéd’accueil au moyen de restructuration,surélévation ou extension.

L’adaptation des bâtiments aux normesde sécurité incendie, d’hygiène dans ledomaine de la restauration collective,de sécurité des élèves est rendue néces-saire. Elle génère cependant des besoinsde surfaces supplémentaires, toutcomme les évolutions pédagogiques(sciences, informatique, technologie,CDI, BCD …), et les activités périsco-laires (sports, ateliers activités cultu-relles et éducatives).

A titre de référence, l’école maternellede la rue des Cloys, construite en 1988par les architectes Dusapin et Leclerc,constitue une véritable “pièce urbaine”intégrée, tout comme l’école maternellede la place Jean-Baptiste Clément, cons-truite en 1992 par Stinco dans le quartierde Montmartre. A l’inverse, la façadeverrière de l’école maternelle de la ruePelleport, construite par Soler en 1998,

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dossier : Construire pour enseigner > Le patrimoine architectural

et le style post-moderne du collègeGeorge Brassens, conçu en 1994 parNunez-Zanowski, affirment l’équipe-ment public comme objet dans sonenvironnement.L’extension du collège Coysevox,réalisée en 1988 par Faloci, offre douzeclasses supplémentaires, deux réfec-toires et une salle polyvalente. Lasurélévation de l’école maternelle de larue Planchat, réalisée en 1992 parGazeau, permet un gain de surfaceappréciable sur une parcelle très exi-guë. La plupart des interventions portentnéanmoins sur des restructurationspartielles en milieu occupé, ce qui induitune grande complexité en raison de lanécessaire concertation avec lacommunauté scolaire et des délaiscontraints de travaux en période decongés scolaires.

Une nouvelle génération d’équipementsvient d’émerger, soucieuse d’intégrerdavantage encore des espaces partici-pant à la vie scolaire et périscolaire.L’architecture de ces bâtiments privilé-gie l’emploi de matériaux bruts ; lesespaces extérieurs sont traités avec soinet parfois plantés. La démonstration enest faite à l’école maternelle du PassagePivert, construite en 2004 par Jacquardet Pignot, ou à l’école polyvalente de laCité Champagne livrée en 2003 parLaverdan.Si les bâtiments rationalistes édifiés àla fin du XIXe siècle doivent êtremodernisés, ils demeurent la parfaiteillustration de la corrélation très fortepouvant exister entre la fonction etl’architecture, ce qui leur permet d’êtreencore identifiables dans la villecomposite d’aujourd’hui.Les édifices construits dans les années

trente s’avèrent adaptables, en raisonde la souplesse offerte par leurs vastesespaces de circulation et de l’épaisseurde leurs corps de bâtiment. Ceux desannées cinquante n’ont jamais reçul’adhésion des usagers en raison de leuréchelle industrielle et de leur architec-ture standardisée.

Les équipements scolaires des annéesquatre-vingts offrent une adéquation auprogramme pédagogique, avec encontrepartie une capacité d’évolutionrelative. Ceux des récentes annéesrésultent d’une meilleure prise encompte de leur environnement et fontappel à des matériaux bruts et des coursplantées.

La réussite des lieux d’enseignementscolaire relève aujourd’hui du partagede la conception entre l’État et lescollectivités territoriales, l’un étantresponsable de la pédagogie et lesautres de la gestion du patrimoine, maisdépend également de la qualité dupartenariat entre maître d’ouvrage,maître d’œuvre et maître d’usage.

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Construction et rénovation des lycées en Région Ile-de-FranceOLIVIER DEROSAIS, chef du service de la programmation pédagogique et fonctionnelleà la région Ile-de-FrancePATRICE BRESSON, inspecteur général de l’administration de l’éducation nationale et de la rechercheComment utiliser le bâti ancien aujourd’hui ? Quelles sont les procédures pour adapterdes locaux scolaires aux nouvelles exigences de formation et d’accueil ? Qui élaboreles programmes d’aménagement ou de construction ?

dossier : Construire pour enseigner > Entretien avec...

Patrice Bresson : La Région Ile-de-France, chargée du patrimoine bâti deslycées, lance de nombreuses opérationsde construction et de rénovation. Sont-elles toujours précédées d’un pro-gramme ?Olivier Dérosais : Il s’agit essentielle-ment de rénovations, le nouveau pro-gramme de constructions ne débutantqu’en 2004. Toutes ces opérations fontl’objet d’une étude de programmationfonctionnelle et technique, dès lors quel’intervention vise à modifier le fonc-tionnement ou à répondre à un besoinpédagogique. En d’autres termes, seules

les opérations qui ne concernent quede la maintenance (réfection d’unetoiture, remplacement des huisseries,etc.) ne donnent pas lieu à unprogramme fonctionnel.P. B. : En quoi consiste cette étude ?O. D. : Il s’agit, à partir d’une structurepédagogique prévisionnelle définie parle recteur pour les années à venir, d’exa-miner les besoins du lycée en locaux ;salles de classes, laboratoires spécia-lisés ou ateliers, mais aussi bureaux,salles de réunion, locaux dits “de viescolaire” pour les élèves, les profes-seurs, les personnels d’encadrement ou

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d’entretien, service de restauration, loge-ments de fonction, etc. Le programmedécrit le fonctionnement général dulycée, la liste des locaux nécessaires,leur organisation, leur surface, l’activitéqui s’y déroule, ainsi que les sujétionstechniques liées à cette activité : hauteursous plafond, charge admissible, gaba-rit d’accès, température, revêtementsde sols et de murs, distribution en fluides,équipements fixes, etc. Chaque étudeest menée en étroite concertation avecl’établissement, et le programme estsoumis à l’approbation du conseild’administration.P. B. : Vous n’avez donc pas deprogrammes types ?O. D. : Pas à proprement parler. De parla quantité des études menées, nousavons bien sûr un recul par rapport àcertains besoins dans les lycées. Nousavons élaboré au fil du temps ce quenous appelons des “références enmatière de programmation”, où nousavons défini une politique à l’échellerégionale pour les centres de docu-mentation, les services de restauration,et la plupart des autres locaux que l’onretrouve systématiquement dans tousles lycées. Il y a donc une certaine homo-généité de traitement entre les lycées.Mais ces références ne sont qu’une basede travail, et sont toujours discutées etadaptées avec la communauté scolaire.Par ailleurs, les lycées sont tous diffé-rents, ne serait-ce que par leurs struc-tures pédagogiques, et l’éventail desformations est large. Aussi, il est à peuprès impossible de posséder un état desbesoins en locaux d’enseignement cou-vrant toutes les filières de formation avectoutes les combinaisons de diplômes !Nous calculons, à partir des horairesd’enseignement publiés pour chaque

diplôme, le nombre d’heures de coursen salles banales, salles de sciences etautres laboratoires. Mais pour les ensei-gnements technologiques et profes-sionnels, nous nous tournons vers lespédagogues pour estimer ces besoins,et nous nous appuyons sur les docu-ments fournis par les services del’Éducation nationale.P. B. : Les guides d’équipement ?O. D. : En particulier, oui. Encore que cesguides nous posent également quelquesdifficultés : ils proposent des surfaces quise veulent “idéales”, mais qui sont com-prises trop souvent comme “minimales”par les équipes pédagogiques. Si l’onconsidère que presque toutes nos opé-rations concernent des bâtiments exis-tants, la plupart du temps sur des sitescontraints, parfois sans aucune possibi-lité d’extension, nous sommes souventobligés de revoir ces surfaces à la baisse.En fait, les surfaces préconisées dansces guides tiennent peu compte de laréalité : on y trouve régulièrement desplans d’implantation représentant dessalles sans fenêtre, sans porte, ou bienavec des dimensions qui ne correspon-dent à rien de connu. Le guide pour lesenseignements scientifiques préconiseune salle de travaux pratiques équipéed’ordinateurs mesurant douze mètrespar douze ! Or, toutes les trames de bâti-ments d’enseignement existants propo-sent des largeurs de 7 m 20, et l’on saitque la quantité de lumière naturelle arri-vant sur la table la plus éloignée de lafenêtre correspond à 2 % de celle quifranchit la vitre. Une salle de douze mèt-res de large est donc une aberration, tantdu point de vue ergonomique que de celuide la compatibilité avec le patrimoineexistant. De plus, ce type d’activité sesuffit tout à fait d’une salle de 90 m2…

dossier : Construire pour enseigner > Entretien avec...

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P. B. : Proposeriez-vous que les guidesd’équipement ne mentionnent pas desurfaces ?O. D. : Si les guides expriment en détailles activités et les équipements dechaque local, les surfaces peuvent êtredéduites facilement. C’est d’ailleurs lesens de notre travail de programmation ;nous ne demandons pas aux utilisateurs :“Dites-nous de quelle surface vous avezbesoin”, mais “Décrivez-nous ce quevous faites”. A partir du nombre d’élèves,de l’organisation des enseignements,des équipements utilisés et des règlesde sécurité à observer, nous dessinonsdes schémas, nous implantons lesmachines, nous décrivons lescirculations des élèves, des professeurs,des matériaux, etc. Ces informations sontbeaucoup plus précieuses aux archi-tectes que les surfaces elles-mêmes.Les surfaces sont naturellementdéduites de ce travail préalable. Que lesguides d’équipement préconisent dessurfaces, pourquoi pas, mais il seraitbon qu’elles soient étudiées avec lescollectivités territoriales qui devront lesinscrire dans leurs programmes, aveccette préoccupation opérationnelle.P. B. : Vous souhaiteriez être associés àl’élaboration de ces guides ?O. D. : Bien sûr. C’est indispensable.P. B. : N’y a-t-il pas un risque que lescollectivités territoriales s’opposent àcertaines demandes, pour des motifséconomiques par exemple ?O. D. : Je ne crois pas que les collecti-vités territoriales se soient montrées par-ticulièrement restrictives sur la cons-truction, la rénovation ou l’équipementdes lycées … Bien sûr, ce risque existe.Mais il est indépendant du fait que lescollectivités soient ou non associées.Nous sommes liés à l’Éducation nationale

par le partage des compétences. Noussommes compagnons de route, et nousignorer n’a pas de sens. Nous avons toutà gagner à collaborer.Prenons par exemple la réforme des BEP“électrotechnique”, dont personne nes’aviserait de contester la pertinencesur le plan pédagogique. Cette réformemodifie en profondeur les contenuspédagogiques, et donc les locaux et leséquipements nécessaires. En Région Ile-de-France, 89 établissements étaientconcernés, dont certains tout neufs,certains en plein chantier de rénovation,d’autre en cours d’études avant réno-vation. Dans certains cas, la mise enplace de cette réforme entraînait uneopération lourde, avec deux à trois ansde procédure ; dans d’autres cas, lelycée a pu lui-même réaliser les quelquesaménagements indispensables. Cetteréforme est parue moins d’un an avantson entrée en vigueur, délai parfaite-ment incompatible avec la quantité etl’ampleur des interventions immobilièresà conduire. Deux ans plus tard, alors quenous étions loin d’avoir achevé études ettravaux, arrivait la réforme des bacs pro-fessionnels dans les mêmes conditions,nous obligeant à reprendre nos étudessur une quarantaine d’établissements.

La participation des régions à l’élabo-ration de cette réforme aurait permisd’intégrer cette contrainte de mise enœuvre, au même titre que les autrescontraintes, d’examiner peut-être dessolutions plus efficaces, de définir uncalendrier réaliste et d’éviter ainsi, infine, que le même diplôme soit préparédans des conditions très différentes d’unlycée à l’autre.

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dossier : Construire pour enseigner > Le pilotage des constructions

Histoire et pilotage des constructions scolaires FRANÇOIS DONTENWILLE, chargé de mission à l’inspection généralede l’administration de l’éducation nationale et de la recherche

Construire des écoles et des lycées, c’était inscrire dans la pierre l’Instruction publiqueet l’État républicain. L’école primaire, c’était la Communale, majuscule d’un régimenaissant. Et le lycée de devenir, dans les murs des jésuites et de Napoléon, le lieude formation des élites bourgeoises. Le bâtiment scolaire, le bâtiment comme emblème,ne pouvait être conçu que sous le regard direct du ministère et de ses représentantslocaux. Un siècle plus tard, la centralisation a commencé de décliner. La diversitédes territoires s’est imposée, la figure de l’architecte a pris la place de celle del’ingénieur, l’École s’est ouverte. Un autre rapport entre la rue de Grenelle, gardienneanonyme de la pédagogie, et les élus locaux s’est instauré ; le contenant, les murs,participe désormais à l’évolution du système éducatif.

Un siècle d’État La toute puissance de l’État, bâtisseurdirect ou inspirateur mieux qu’écouté,a marqué l’histoire des constructionsscolaires sous trois Républiques. LaFrance des corps d’État, ingénieurs desPonts-et-chaussées et universitaires-recteurs, a tenu, par-delà les boulever-sements et changements politiques,l’ensemble du processus complexeconduisant à bâtir les écoles, les collègeset les lycées. Si les techniques ontchangé, si la scolarisation a progressé

dans des proportions peu imaginablesaux yeux des plus fervents promoteursde l’école unique, la gouvernance,comme on dit aujourd’hui, est longtempsdemeurée le monopole des hauts-fonc-tionnaires.

> Au temps de l’école républicaineGuizot, toujours oublié au profit de Ferry,éternel victime de son “Enrichissez-vous”. Et pourtant, l’école 1 et, mieuxencore, l’école normale d’instituteurs,c’est lui. La loi qu’il fait voter en 1833

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oblige “toute commune à pourvoir à ceque les enfants qui l’habitent reçoiventl’instruction primaire”. L’application dela loi se fait avec une sage lenteur. Sonvrai départ date de 1835 : des inspec-teurs, futurs inspecteurs d’académie, etsous-inspecteurs, futurs inspecteursprimaires, visitent la France ; ils imposentet le maître et l’école 2 , de garçons puisde filles 3. La qualité des bâtimentsdevient un objectif de l’État sous leSecond Empire ; en 1858, des plans sontexigés pour toute construction d’écoleet l’inspecteur primaire est requis deveiller à la bonne exécution des travaux.Les écoles de filles se multiplient sousl’empire de la loi Falloux (1850) ; les courssecondaires pour jeunes filles sont crééspar une circulaire de Victor Duruy (1867)mais, devant la résistance du clergé, lamise en œuvre de la réforme échoue. LaIIIe république poursuit et assoit l’œuvreen lançant une politique de subventionsd’État pour la construction des écoles(1878), en recréant les établissementsdestinés à l’enseignement secondairedes jeunes filles (1880), en imposant desnormes d’hygiène, bases d’une archi-tecture scolaire spécifique (1881) et, biensûr, en rendant l’enseignement gratuit(1881), obligatoire (1882) et laïque (1886).L’école primaire obéit à un modèle type :la mairie au centre avec son horloge et,à l’étage, les logements des maîtres puis,d’un côté, l’école de garçons et, de l’autre,l’école de filles. Les matériaux et lestechniques de construction sont locaux,ils donnent l’image du pays. L’école trônesur la place du village, souvent face àl’église ; la République s’affirme enchaque lieu. L’école publique est unproduit de l’État, d’une volonté politiquequi ne se relâche pas. Née avant la loisur les libertés communales (1884), elle

est la première affirmation du rôle d’unecollectivité locale. L’école primaire, lacommunale, est le premier signe de l’Étatqui instruit, de la collectivité qui bâtit.

Le secondaire, c’est Napoléon (1802).Quarante-cinq lycées sont institués danstoute la France, ce nombre est porté àcent en 1811. L’architecture majestueuses’impose avec la reprise des ancienscollèges des congrégations religieuses(lycées Charlemagne, Condorcet, HenriIV et Louis-le-Grand à Paris). Elle se pour-suit sous la Restauration, la monarchiede Juillet et le Second Empire avec denouvelles constructions (lycée Saint-Louis à Paris) puis se développe sous laIIIe République (lycée Lakanal en 1885 àSceaux ; lycées Buffon, Carnot, Chaptal,Janson-de-Sailly, Lamartine, Molière,Racine et Voltaire à Paris entre 1870 et1890). La machine administrative d’États’est mise en marche 4. Un comité desbâtiments civils est créé (1883), l’archi-tecture générale des lycées et l’ordon-nancement des lieux décrits (1885). Lacommande publique voit s’opposerarchitectes des monuments historiqueset architectes des beaux-arts, touscumulent les fonctions ; ces problèmesdureront. Mais la fonction du lycée, mar-quée par sa place dans la ville, montreque l’État n’abandonne à personne lesoin d’affirmer qu’il porte l’instructiondes futures élites. Si la commune doitfinancer la construction (ordonnance de1841, loi de 1850), c’est le ministère quichoisit la ville d’accueil, impose le projetet le concepteur. Il n’y a guère de respectde l’autonomie communale tant la notionde lycée paraît consubtantielle àl’idéologie étatique.Les constructions se développent sousla IIIe puis la IVe République au rythme

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dossier : Construire pour enseigner > Le pilotage des constructions

d’une scolarisation qui croît progressi-vement. La rupture majeure intervientau début de la Ve République.

> Au temps de la massificationLouis Cros, avec son ouvrage L’explosionscolaire paru en 1961, est le premier àprendre la mesure de l’obligation deconstruire qui s’impose aux pouvoirspublics 5. Dans un graphique, il montreles effets cumulés de la démographie(baby boom depuis 1941), du besoin éco-nomique de hausse des qualifications,d’une demande sociale nouvelle de sco-larisation et de la volonté politique desgouvernements de répondre à ces bou-leversements (ordonnance Berthoin de1959 portant l’obligation scolaire à 16ans). Le taux d’entrée en 6e (cours com-plémentaire puis collège d’enseignementgénéral ou CEG, d’une part, lycées, d’au-tre part) passe en moins de dix ans (1953-1962) de 30 à 55 %. Il y a bien “explosionscolaire”. Comment faire face ?

Après-guerre, l’État s’est forgé les outilslui permettant d’agir avec une réelleautorité par delà les errements ministé-riels de la IVe République. La création ducommissariat au plan et de la DATARassure le cadre conceptuel et adminis-tratif des grands choix économiques etfinanciers. L’urbanisme n’est pas en resteavec la création des zones à urbaniserpar priorité (ZUP, 1958), sigle préfigurant,sémantiquement et sociologiquement,ce que seront bien plus tard les zonesd’éducation prioritaire (ZEP, 1981), et desgrands ensembles obéissant à des pro-cédés de construction qui vont s’imposeren dehors de l’habitat. La Ve Républiquenaissante n’a plus à connaître que la finde la reconstruction des bases indus-trielles du pays, de ses infrastructures

de transport et du parc de logements 6.Les grands programmes publics d’écoles,d’hôpitaux vont pouvoir naître sousl’égide des planificateurs, entre lesmains du corps des Ponts-et-chaussées.

Pour le ministère, la rationalité admi-nistrative a un nom : la carte scolaire quinaît en 1956 et qui prend sa forme admi-nistrative en 1963 7. Elle n’est pas alors– comme l’évolution actuelle le laissepenser à tort – l’instrument de la mixitésociale. Elle est le moyen de répartirharmonieusement sur le territoire lesélèves suivant les niveaux d’étude et letype d’établissement. Elle exprime deschoix géographiques, traduit des déci-sions d’organisation pédagogique ; ellene marque pas une volonté sociale. Ils’agit de canaliser et diriger la demandeéducative vers les écoles des villes quis’étendent dans les champs et banlieues,vers les lycées qui accueillent un publiccroissant et, surtout, vers ces collèges,cours complémentaires qui deviennentCEG puis collèges d’enseignementsecondaire (CES en 1963) et qui vontdevoir assurer la scolarisation de tousles adolescents jusqu’à 16 ans. La Francepensait certificat d’études, tout d’uncoup, elle pense brevet ; c’est une pre-mière révolution. Plus tard, elle penserabac, ce sera une seconde révolution.Donc, il faut construire un collège parjour 8. Un corps de doctrine est élaboréau sein du ministère 9. Il repose sur uneorganisation administrative, un recueilde procédures, une rationalisation tech-nique, une contrainte financière, un partiéconomique. La commande publique estcentralisée à la direction des équipe-ments et constructions (DEC). Cettedirection a en charge la planification,dispose de l’ensemble des crédits de

l’État a marqué l’histoire desconstuctionsscolaires sous trois républiques

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construction (investissement etsubventions d’investissement), met aupoint les programmes de construction,assure le contrôle technique des projets,suit l’application des procédures admi-nistratives (décret de 1956). Les servicesextérieurs de l’équipement, dits servicesconstructeurs, sont mis à la dispositiondu ministère de l’éducation nationale.Les communes reçoivent une subven-tion forfaitaire, l’État assurant la bonnefin des travaux lorsqu’il est maître d’ou-vrage délégué, ce qui est pratique quasi-systématique. Il se garantit des aléasdes marchés et du chantier grâce à unstrict encadrement financier ; celui qui n’apas connu les prix plafonds 10 ne peut savoirce qu’est le bonheur de construire. Leprogramme pédagogique, arrêté par lerecteur, et le programme technique deconstruction (PTC) qui en découle,approuvé par le préfet, sont normalisés.C’est le temps béni des trames de 1,75 m,des hauteurs sous plafond de 3 m, d’uncouloir central. L’économie, dans tousles sens du terme, règne ; pouvait-il enêtre autrement ? La majeure partie desconstructions de collèges est réaliséesuivant les procédures rapides del’industrialisation. On voit mal commenteût pu être évitée “une certaine pauvretéarchitecturale” 11. Là n’est pas le plusgrave.

L’incendie du collège de la rue Paillerondans le XIXe à Paris (1973) frappe pourtoujours les constructions industriali-sées 12. Faisant suite à un autre incen-die, celui du dancing du Cinq-sept àSaint-Laurent-du-Pont (1970), il fait vingtmorts – pour l’essentiel des élèves duconservatoire municipal de musiquehébergé par le collège – et émeut l’opi-nion publique. Au-delà de l’acte criminel

de deux collégiens, c’est l’État et sesméthodes de construction qui sontaccusés. La réglementation relative à lasécurité incendie était moindre que dansles autres établissements recevant dupublic (ERP). Il y avait eu confusion entrele rôle de l’architecte et celui du serviceconstructeur, entre ceux du ministère,de ses services locaux et de la préfec-ture de police. Et, surtout, le procédé uti-lisé était prévu pour une constructiond’un CES 600 sur deux niveaux 13 ; or, c’estd’un CES 900 dont on avait besoin et, fauted’un terrain d’assiette suffisant, il fut cons-truit sur quatre niveaux. Circonstanceaggravante, la conception technique étaitdéfectueuse (faux-plafonds, matériauxdes façades et cloisons, arrivée de gaz).L’image du bâtiment effondré avec sespoutrelles d’acier tordues, télévision etpresse populaire aidant, signe l’échecd’une politique publique. On oublie quenécessité faisait loi. On omet de préciserque le précédent directeur des cons-tructions scolaires avait été remerciépour insuffisance de consommation descrédits et non-livraison des bâtiments àla rentrée scolaire.

L’ère des collectivités territorialesDoit-on dire que l’opprobre portée surles constructions industrialisées a rejaillisur les services constructeurs ? Ce nefut jamais dit ainsi. Mais, dans l’impli-cite, depuis le drame de la rue Pailleron,la sûreté du technicien haut-fonction-naire, celui qui sait, celui qui œuvre pourl’intérêt général, sera à jamais contestée.La décentralisation des constructionsscolaires comme remède aux difficultésfinancières de l’État, comme pouvoirdonné aux élus locaux, s’est installéenaturellement. La massification deslycées a été réalisée pour la plus grande

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dossier : Construire pour enseigner > Le pilotage des constructions

gloire des régions, l’architecture sco-laire est redevenue un art, seul le contri-buable local a un peu souffert. Cettephase de construction et de rénovationmassive est en voie d’être achevée.L’équilibre des pouvoirs entre repré-sentants locaux de l’État, – du directeurd’école au recteur en passant par le chefd’établissement et l’inspecteur d’acadé-mie – et élus ne peut que continuer àévoluer au bénéfice de ces derniers. Airdu temps, mais pas seulement, l’exer-cice des responsabilités a été réussi parles élus ; désormais, ils peuvent passer,lentement, du béton à la pédagogie.

> La rupture de la décentralisationDe l’incendie du collège de la ruePailleron à la décentralisation, il y a euun peu plus d’une dizaine d’années pen-dant lesquelles la réflexion sur les cons-tructions scolaires a évolué, la crois-sance des taux de scolarisation s’estpoursuivie, la pression des élus locauxs’est faite plus pressante. Si bien qu’ona concomitamment – ce qui n’était sansdoute pas totalement prévu – mis enplace la décentralisation des construc-tions et développé fortement la scolari-sation en lycée ; la force de la demandesociale, la nature des analyses écono-miques ont conduit à cette poussée destaux de scolarisation que devait sanc-tionner la loi de 1989 (objectif de 80 %d’une génération au niveau du bac). Etcela alors que l’histoire était celle d’unretour à l’architecture. L’année 1981,rupture politique, conduisit en effet à undouble changement. Les constructionsscolaires du second degré allaient rele-ver à part entière des départements etrégions, ces dernières étant érigées encollectivités territoriales. Un programmede grands travaux culturels était lancé

par le Président de la République ; ilaboutissait à la création de la missioninterministérielle pour la qualité desconstructions publiques (MIQCP), àl’engagement d’opérations innovantes,à une nouvelle réflexion sur le proces-sus constructif (loi sur la maîtrised’ouvrage public de 1985 14). Pour autant,ces multiples réformes n’étaient pasnées ex nihilo en 1981. La commissionGuichard sur le développement desresponsabilités locales avait élaboré lecadre à partir duquel naîtrait l’œuvredécentralisatrice de Gaston Defferre.Dans l’un des documents de travail 15 decette commission, l’hypothèse d’untransfert total de la construction descollèges aux départements était évo-quée ; en sens inverse, la constructiondes lycées relèverait uniquement del’État. Quant à l’architecture, le tempsdes constructions industrialisées étaitcompté. Au-delà de l’image du dramede la rue Pailleron, c’est l’assimilationfoucaldienne du lycée à la caserne et àl’asile qui se diffusait 16 ; elle n’était passans conséquence sur le bagage concep-tuel des bâtisseurs. Les programmes-types (collèges 400, 600 … disparais-saient en 1981 et étaient remplacés parun guide pour l’élaboration du pro-gramme technique de construction (PTC)des collèges. Les normes techniques etla fameuse trame évoluaient. Si bien que“quelle que soit l’option adoptée 17, lemaître d’ouvrage se trouvait confronté,en premier lieu, au choix de l’architecte” 18.Les esprits étaient mûrs pour imposerl’architecture, pour transmettre le flambeauaux collectivités locales.L’État constructeur n’avait plus qu’àramener le drapeau. Il le fit tant àl’Éducation qu’ailleurs. Partout où il yavait transfert de compétences et des

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financements correspondants, lesservices constructeurs et leurs ingé-nieurs des Ponts disparurent. Les trenteans d’histoire de la direction des équi-pements et constructions (DEC) nes’effacèrent pas d’un seul coup. Letemps, les impératifs politiques ou, plusprosaïquement, bureaucratiques, eurentsuccessivement raison du service tech-nique de l’Éducation nationale (STEN)puis du centre de conseil technique auxcollectivités territoriales (CCTCT). Le pre-mier service fonctionna du 1er janvier1986 au 1er janvier 1988. Centre deressources, en capacité de donner desconseils techniques 19 et architecturaux,il eût l’heur de déplaire à un présidentde région et, au surplus, initiative ô com-bien malencontreuse, il avait constituéune base de données sur les prix et mar-chés afin de suivre l’évolution du secteurdes constructions scolaires. Le second,bien que moins offensif 20, mourut aussi,victime d’un ennemi de l’intérieur. Il fallaitdes ingénieurs et des personnels admi-nistratifs pour constituer la sous-direc-tion des constructions universitaireschargée de prendre en charge le planU 2000, il fallait aussi libérer des locauxfort convoités au ministère, ainsi va lapetite histoire. Ainsi disparut toutpilotage national, mais aussi toutemémoire et compétence technique.

> L’enjeu pour les collectivités territorialesLes collectivités territoriales, qu’ellessoient historiquement compétentes (lescommunes pour les écoles) ou nouvel-lement compétentes (les départementspour les collèges et, plus encore, lesrégions qui sont instituées en tant quecollectivité 21 par les lois de décentrali-sation de 1983-1985, pour les lycées) se

trouvent devant un enjeu redoutable :comment faire mieux que l’État ? Lesdotations transférées – comme il est dejuste calcul – correspondent strictementaux crédits dont disposait antérieure-ment l’État. On peut même se demandersi, à certains égards, la direction du bud-get ne s’est pas montrée peu faroucheface au transfert de compétences desconstructions scolaires en faveur descollectivités territoriales 22. Et celles-cisont allées fort au-delà des différentesdotations attribuées (la dotation géné-rale d’équipement ou DGE qui regroupel’ensemble des subventions d’État pourles communes, c’est-à-dire aussi biencelles provenant de l’éducation natio-nale pour les établissements scolairesque celles de jeunesse-et-sports pourles équipements sportifs… ; la dotationdépartementale d’équipement descollèges ou DDEC, dotation spécifiquepour les collèges transférés aux conseilsgénéraux ; la dotation régionale d’équi-pement scolaire ou DRES, dotationspécifique pour les lycées 23 transférésaux régions).Doit-on insister sur l’état du patrimoinetransféré ? L’âge ne dit qu’une partie dela vérité. Les collectivités ont au moinsautant à craindre des 75 % des bâtimentsdu second degré construits entre 1960et 1982 que des collèges et lycées bâtisantérieurement. Pour ne prendre que leseul exemple de la sécurité contrel’incendie, le bilan établi par la com-mission Schléret 24 fait apparaître 7 %de bâtiments 25 à risques et, parmi ceux-ci, vingt-deux bâtiments à structuremétallique avec internat. Face à cettesituation, les collectivités vont devoirnon seulement mettre en sécurité lepatrimoine scolaire, le rénover mais aussil’étendre du fait de la démographie

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dossier : Construire pour enseigner > Le pilotage des constructions

scolaire croissante, essentiellement dansles lycées avec la mise en œuvre del’objectif des 80 % au niveau du bac. Cefurent là des défis redoutables pour lescommunes, les départements et surtoutles régions.S’agissant du financement, les collec-tivités firent progressivement, mais mas-sivement, appel à l’impôt et, plus encore,à l’emprunt pour compléter les dotationsdécentralisées. “La DRES, qui couvrait95 % des dépenses d’investissementscolaire à l’origine, n’en couvrait plusque 15 % en 1991. La DDEC subit uneévolution similaire : 46 % des investis-sements scolaires étaient couverts en1986 contre seulement 19 % en 1991” 26.L’État apporta, conjoncturellement, desfinancements supplémentaires (1,2 milliardde F de crédits et 4 milliards de F de prêtsà taux réduits en 1988 ; 2 milliards de F decrédits et 2 milliards de F de prêts à tauxréduits en 1990 suite à une crise qui vit leslycéens manifester contre la vétusté deleurs établissements devant les rectoratset non sur le parvis des conseilsrégionaux).

Les difficultés du transfert de compé-tences se concentrèrent sur deux pro-blèmes : l’élaboration d’une méthode deconstruction, le partage des finance-ments entre communes, d’un côté,départements et régions, de l’autre.

Le terme de programmation a plusieursacceptions dans le processus cons-tructif. Le premier, à teneur économique,est celui de la loi. Les départements etrégions établissent des programmes pré-visionnels d’investissement (PPI), c’est-à-dire déterminent dans un documentsynthétique les travaux à entreprendre,leur phasage et leur coût. Le second

relève du vocabulaire de la construc-tion. Un spécialiste, dit programmiste 27,rédige un programme, c’est-à-dire lacommande qu’aura à réaliser l’archi-tecte à l’issue d’un concours. Ceprogramme intègre aussi bien les élé-ments d’urbanisme, les données tech-niques et financières que les choix péda-gogiques effectués. De fait, la notion deprogrammiste ne l’emporte pas en touslieux, le poids des services administra-tifs des collectivités étant plus fort dansnombre de collectivités, notammentparmi celles ayant en charge les plusgros programmes, au sens physico-financier, de constructions scolaires.On vit alors le retour, sous une formeplus adaptée au temps présent, desalliances avec les entreprises. On passavite de l’idée classique de conception-construction, alliant une entreprise à unarchitecte à celle, plus large, de marchéd’entreprise de travaux publics (METP) 28

allant jusqu’à la maintenance de l’ouvragepublic. Au-delà du délice pour juriste dési-reux de classer le concept de METP dansune catégorie reconnue, au-delà de cer-taines dérives qui rangèrent les cons-tructions scolaires parmi les produitsd’appel des marchés truqués 29, la vraiequestion posée était celle de l’efficacité,d’une part, du rôle de l’architecte, d’au-tre part. Après un temps de vénérationde l’architecte et du concours deconcepteurs, il n’était pas surprenantque les plus grandes collectivités, devantrépondre à un besoin urgent, succom-bassent à la tentation d’une globalisa-tion des procédures et d’une novationdes montages financiers 30. Répétition del’histoire, les collectivités territorialesavaient redécouvert l’intérêt des lon-gues séries portées directement par degrandes entreprises. Le tout avec des

Après un tempsde vénérationde l’architecte,la tentationd’une globalisationdes procédures est apparue

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facilités procédurales que l’État ignoraitlorsqu’il était aux commandes : lesnormes techniques 31, autres que cellesgénérales relevant de l’urbanisme, dela sécurité et des calculs de construc-tion, avaient disparu, de même, il n’exis-tait plus de cadrage financier, les prixplafonds s’étant évanouis avec la décen-tralisation.

Quel bilan tirer de près de vingt ans deconstructions scolaires assurées parles trois niveaux de collectivités territo-riales ? D’abord, et personne ne le nie,“la réussite se mesure aux efforts finan-ciers et aux réalisations accomplies”.Olivier Schrameck 32 ajoute – ce qui aété peu noté mais est révélateur de latâche accomplie – que “malgré d’inévi-tables disparités, l’action des collecti-vités locales a bien marqué que la prio-rité nationale conférée à l’éducation étaitaussi vécue comme une priorité locale”.Si des réserves subsistent, elles tien-nent à deux facteurs 33. Le premier a traitau choix des lieux d’implantation desnouveaux collèges et lycées. Alors quela période transitoire pendant laquelleles communes devaient participer aufinancement des collèges est achevée,bien des conseils généraux continuentà demander leur obole, sous forme deterrain d’assiette viabilisé voire d’équi-pements pour l’EPS, et cela nonobstantla lettre et l’esprit de la loi ; il en va demême pour les constructions de lycées 34.La belle époque des financements croisésne s’est, semble-t-il, guère dissipée avecla décentralisation. Phénomène plusgrave, là où les facteurs politiques ypoussaient, il n’est pas sûr que les choixd’implantation les plus rationnels aienttoujours été effectués. Le second, plusfondamental, a été décrit par Marie-

Claude Derouet-Besson 35. C’est laquestion des usagers et de leur partici-pation au processus de construction.Les collectivités éprouvent souvent desdifficultés à exprimer leur commande,malgré l’arrivée des programmistes. Quia la légitimité pour définir le bâtimentscolaire ? Comment caractériser l’usagedes bâtiments ? Pour Marie-ClaudeDerouet-Besson, le passage de la poli-tique ministérielle technocratique desannées 60 à 80 à la politique des éluslocaux n’a pas permis le retour desenseignants dans le circuit de décision,ni l’arrivée des parents et des élèves ;seul le chef d’établissement, mais pastoujours et fréquemment avec simplevoix consultative, a été intégré au dispo-sitif 36. Pour autant, l’image, esthétiqueet fonctionnelle, des bâtiments scolai-res 37, l’image, politique, des communes,départements et régions qui les ontcommandités sont sorties grandies dutransfert de compétences.Et demain, ira-t-on plus loin ? Assistera-t-on à une modification de l’équilibreentre l’État et les collectivités locales ?

> Pilotage des constructions scolaireset pilotage par les constructions scolairesLe pilotage par les moyens ou le pilo-tage par les résultats, à n’en pas dou-ter, la question n’a pas fini d’exercer laverve des chroniqueurs du système édu-catif 38. Le terme de moyens est cepen-dant réduit au cadrage financier d’en-semble et, plus précisément, aux moyenshumains. Piloter par les moyens, c’estjouer sur le nombre de maîtres pour centélèves (P/E) dans le premier degré, lenombre d’heures par élève (H/E) et ladotation horaire globale (DHG) de l’éta-blissement dans le second degré. Jamais

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dossier : Construire pour enseigner > Le pilotage des constructions

n’apparaissent les questions matérielles,ni un ratio touchant le personnel ATOS,ni a fortiori quelque donnée relative auxbâtiments. Serait-ce à dire que le pilo-tage du système éducatif n’est pas modi-fié par les compétences transférées auxcollectivités territoriales? On sait quec’est faux si on raisonne en termes delocalisation 39. Si on se place au niveaudu directeur d’école ou du chefd’établissement, le pilotage des cons-tructions joue, indirectement, sur safonction. Certes, le maire, le présidentde conseil général ou de région ne cons-tituent pas des tutelles de même typeque les autorités académiques. Mais laprogrammation des travaux, les métho-des d’entretien ne sont pas tout à faitneutres pour la conduite d’une école oud’un EPLE. Cette influence, et c’est là salimite essentielle, ne peut être corréléeni à la population accueillie, ni a fortioriaux résultats scolaires. Reste la ques-tion des résultats éducatifs : y a-t-il unlien entre la qualité des locaux et l’in-sertion civique et sociale des élèves ?On ne peut rien affirmer ; s’il vaut la peinede se poser la question, on ne voit pasa priori en quoi de beaux locaux auraientune influence déterminante. En revan-che, la question de la distribution desespaces et de leur utilisation n’est sansdoute pas neutre.

À terme, le débat majeur concernant lesconstructions scolaires pourrait êtrecelui de leur financement. Vingt ans dedécentralisation conduisent à un juge-ment très positif. Qu’en sera-t-il en 2020 ?La réponse n’est pas évidente. Premierindice d’une inquiétude, on se doit de cons-tater les réserves exprimées par nom-bre de collectivités au sujet du transfertdes personnels techniciens, ouvriers et

de service (TOS), bien qu’il soit dans lalogique de la décentralisation et ait étéproposé par la commission Mauroy. Fairedes constructions scolaires une prioritébudgétaire lorsqu’il y a peu de person-nels à gérer n’a pas posé de problèmesà ceux qui ont assumé la responsabilitédes départements et, plus encore, celledes régions. Avoir la masse des TOSsous sa coupe, c’est risquer une inflexionde la priorité donnée aux constructionsscolaires. Au-delà ce problème très réel,c’est la question de la structure desfinancements des collectivités qui sepose. La nature et l’importance descompétences transférées concernantles routes, les transports et, surtout, lesecteur social peuvent conduire à desarbitrages bien délicats. Quels que soientles crédits d’État qui correspondent ouvont correspondre, on peut se deman-der si on ne va pas assister à un dépla-cement de la demande des citoyens. Lesréactions de tous ordres enregistrées ily a un an à l’occasion de la canicule,élément subjectif, les données démo-graphiques, élément objectif, peuventconduire les conseils généraux à donner,de fait, la priorité au secteur social audétriment, relatif, des secteurs routieret éducatif. Pour un conseil régional, lasituation est un peu différente, encoreque le poids des transports ferroviairesvoire des infrastructures et les prémis-ses d’engagements en faveur de l’emploine peuvent être négligés.

Autre élément du débat : quelle placeaccorder à l’enseignement privé 40 ? C’estune nouvelle réflexion sur l’état de seslocaux qui conduisit au retour de la ques-tion scolaire en 1993-1994. La loi Falloux(1850) ne permettait que de subvention-ner à hauteur de 10 % des dépenses

Les constructionsscolairespourront-ellesrester une priorité descollectivitésterritoriales ?

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annuelles de l’établissement privé 41 ; enrevanche, la loi Astier (1919) autorisaitl’apport de subventions sans plafonne-ment lorsqu’il s’agissait d’un établisse-ment relevant de l’enseignement tech-nique 42. Une commission présidée parle doyen Vedel montra, sommairement,l’état de vétusté d’une majeure partie dupatrimoine des établissements privés 43.Le Conseil constitutionnel censura la ten-tative de modification de la loi Fallouxissue, fait peu fréquent, d’une proposi-tion de loi sénatoriale adoptée par leParlement. Le débat persista devant lesjuridictions administratives, certainescollectivités cherchant, postérieurementà cet épisode politico-juridique, à aiderfortement les constructions de l’ensei-gnement privé. Le juge ne pouvait quedire le droit et rappeler qu’aucunesubvention n’était possible pourl’enseignement primaire et qu’un plafondde 10 % s’imposait dans l’enseignementsecondaire hormis pour l’enseignementtechnologique et professionnel 44, ce quiconduisit à faire la part belle à ce der-nier. Aujourd’hui, le dossier paraîtenterré. Mais avec 13 % des élèvesscolarisés dans le premier degré, 20 %dans le second degré et, surtout, 40 %qui y viennent à un moment ou un autrede leur cursus scolaire, il n’est pointcertain que le problème ne ressurgissepas un jour, même très lointain 45.

Le territoire éducatif et pédagogique neressort pas neutre de l’acte de cons-truire. L’ouverture actuelle de la vie sco-laire, les évolutions des pratiques péda-gogiques ont, même si ce n’est qu’enpartie, un lien avec la nature des bâti-ments utilisés par les enseignants etleurs élèves. Les récents choix archi-tecturaux ont quelque chose à voir avec

l’idée d’une communauté scolaire insé-rée dans la cité ; en sens inverse, leretour aux clôtures traduit la nécessitéd’une appréhension moins irénique dela violence sociale et, implicitement oupas, le rêve d’un savoir protégé par lesmurs. La perpétuation de la qualité dubâti passe aussi par l’adaptation despolitiques de maintenance. Qu’il s’agissede ce qui relève de la collectivité maîtred’ouvrage et de ce qui revient àl’établissement 46, qu’il s’agisse des rap-ports entre les entreprises extérieureset l’établissement, derrière l’apparencede décisions techniques, ce sont desconceptions différentes du rôle desdifférents partenaires qui s’affirment. Lelien entre les choix effectués lors de laconstruction et ceux, ultérieurs, imposéspar la maintenance n’est pas sansconséquences. Ainsi en est-il d’un bâtiment aux vastessurfaces vitrées ou au système de chauf-fage complexe ; avec quelles équipesde TOS peut-on y faire face ? Leur nomi-nation, leur formation, le pouvoir dedirection sur leur activité dépend de l’au-torité académique ou de ses délégués,chef d’établissement et gestionnaire.Une forme de pilotage indirecte d’unepetite partie de l’établissement scolaires’est donc bien fait jour avec la concep-tion, la réalisation et la maintenance desbâtiments scolaires du second degré, lemodèle de l’école primaire où le direc-teur n’a aucune compétence matériellegagne l’ensemble du système scolaire.

Quant à la pédagogie, l’acte d’enseignerdans la classe, en quoi ce dernier est-ildépendant de la volonté des collectivi-tés, en quoi résulte-t-il des directives etdécisions des autorités de l’Éducationnationale ? Le premier équipement des

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dossier : Construire pour enseigner > Le pilotage des constructions

salles de sciences, des laboratoires delangues, des technologies de l’informa-tion et de la communication (TIC) et,naturellement, tout le parc de machinesdes lycées technologiques et profes-sionnels révèlent, de plus en plus fré-quemment, la volonté de la collectivitéde laisser sa marque au-delà du béton,de s’inscrire dans le cadre pédagogiquelui-même. Il n’est pas certain que lescollectivités continueront toujours à nes’intéresser parfois que de loin àl’utilisation des matériels dont elles ontdoté les établissements. Lorsque ce jourviendra, qu’une exigence de rentabilités’imposera, l’institution éducative, élémentde l’institution étatique, verra s’écornerla façade unitaire de la pédagogie. Déjà,bien des collectivités ont pris l’habitudede soutenir financièrement des projetspédagogiques, de contribuer au soutienscolaire, et ce pour des montants nonnégligeables. Du ministre, définissant lecadre pédagogique via les circulairesde la direction de l’enseignement

scolaire, sous l’influence et avec lecontrôle des différents corps d’inspec-tion, jusqu’au professeur dans sa classe,l’image d’une compétence étatique sansfaille existe toujours. Les textes le disent,les administrateurs et syndicats l’affir-ment. Pourtant, le transfert de compé-tences de 1986 a ébranlé la machineÉducation nationale. La loi a fait évoluerun ensemble trop lourd qui ne pouvaitcontinuer à vivre seul, à se financer seul,sans quoi il eût été paupérisé. Elle a intro-duit les germes d’un partenariatprometteur diront ceux qui croient à unéquilibre renouvelé entre personnespubliques attachées à un bien commun.Elle a fabriqué le cadre qui permet dedéconstruire, lentement, très lentement,une maison absorbée par la massifica-tion des effectifs d’élèves et d’ensei-gnants et qui a, inéluctablement, perdule prestige consubstantiel aux petitesunités et l’autorité qui en découle.

> 1 MEN-DEC, Architecture scolaire (CNDP, 1986) ; région Ile-de-France, Architectures & lycées en Ile-de-France (1988). “Les notions de service public et de fonctionnaire public apparaissent à propos des écoles primaires dans l’entourage de Guizot lui-même”. (A. Prost, cité supra, p. 211).

> 2 Vous êtes chargés, autant et peut-être plus que personne, de réaliser les promesses de la loi du 20 juin 1833 (circulaire de Guizot citée par J. Ferrier, Les inspecteurs des écoles primaires, L’Harmattan, 1997, TI, p. 38).

> 3 L’avant-projet de loi de Guizot prévoyait l’instauration d’écoles de filles. L’idée disparut… pour des raisons budgétaires (P. Albertini, L’École en France, Hachette, 1992, p. 49). “Il est impossible d’imposer à toute commune une école de filles, mais toute commune doit être encouragée à en établir une” déclare Guizot (M. Allaire, M-T Frank, Les politiques de l’éducation en France, 1995, La documentation française, p. 78). Finalement l’idée fut mise en œuvre en 1836 par ordonnance.

> 4 Une ville comme Foix, préfecture de l’Ariège, n’aura cependant son lycée qu’au début du XXe siècle.

> 5 Directeur de l’administration générale, L. Cros eut l’idée d’”explosion scolaire” en lisant un graphique budgétaire lui faisant apparaître l’allure exponentielle des dépenses éducatives, allure qui est celle des courbes d’explosion. Le titre a fait image. (Louis Cros, l’imagination à l’œuvre, INRP/CUIP, 2002, p. 265). On notera que le plan Langevin-Wallon (1944-1947) évoquait déjà “l’insuffisance des bâtiments scolaires pour un volume accru d’élèves” ; il traçait aussi les grandes lignes de la carte scolaire (Les politiques de l’éducation en France, précité, p. 167).

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> 6 Le premier plan (1947-1953) n’avait pas pris en compte les besoins de l’éducation nationale. Ce n’est qu’à partir du second plan (1954-1957) que ce fut possible.

> 7 Circulaires du 3 mai 1963 avec l’implantation des CEG, du 5 janvier 1965 avec celle des CES (réforme Fouchet-Capelle). V. Les politiques de l’éducation en France, précité, p. 440.

> 8 “Entre 1965 et 1975, 2 354 collèges ont été ainsi bâtis, soit un collège par jour ouvrable pendant dix ans” (A. Prost, Éducation, société et politiques, Le Seuil, 1992, p. 85).

> 9 Groupe de travail présidé par J. Millier, IGPC, avec R. Peylet, IPC en fonction à la DEC, comme rapporteur, Bilan de la politique technique et architecturale des constructions scolaires (MEN-DEC, 1983).

> 10 Prix calculé sur la base d’un ratio théorique au m2 et fixé par la direction du budget. Il ne peut être dépassé, d’où bien des économies en cours de réalisation ou une prise en charge non prévue par la collectivité locale, l’actualisation des prix n’étant pas toujours au rendez-vous.

> 11 J. Minot, L’administration de l’éducation nationale (IPN, p. 48).

> 12 F. Dontenwille, Sécurité et responsabilité pénale (Revue de l’AFAE, n° 2, 202, p. 27).

> 13 Ce qui permet une évacuation rapide en cas de sinistre.

> 14 La loi du 12 juillet 1985 précise que “le maître d’ouvrage est la personne morale pour laquelle l’ouvrage est construit […]. Il remplit dans ce rôle une fonction d’intérêt général dont il ne peut se démettre”.V. aussi l’arrêt du CE du 18 février 1991, région Midi-Pyrénées c/ syndicat de l’architecture à la RFDA de janvier-février 1992 avec les conclusions de M. Pochard. Une collectivité publique ne peut utiliser la notion de vente en état futur d’achèvement (VEFA) pour faire construire un ouvrage dont elle aura besoin. C’est un détournement de procédure que de ne pas respecter les règles des marchés publics en ayant recours à un contrat de droit privé “dans lequel l’acheteur n’exerce aucune des responsabilités du maître de l’ouvrage”.

> 15 Groupe de travail n° 2 présidé par l’IGPC Raoul Témimé, 1997.

> 16 V. Cahiers pédagogiques n° 95/96 de décembre 1970. “L’architecture scolaire actuelle renvoie à l’idée même que l’on se faisait de l’école depuis Napoléon : il suffit de regarder une caserne pour constater qu’entre un bâtiment militaire et un bâtiment scolaire la différence est simplement de nature rhétorique […] l’école est une entreprise de mise au pas, d’uniformisation”. On retrouve aussi les thèses d’Althusser sur l’éducation nationale comme “appareil idéologique d’État”, les constructions scolaires ne constituant qu’une application matérielle de cette conception du rôle du MEN.

> 17 Système industrialisé ou conception traditionnelle.

> 18 Circulaire de 1981.

> 19 Il publia, notamment, un guide des collèges, encore utilisé par certains aujourd’hui.

> 20 Il publia un guide des écoles qui est, lui aussi, encore utilisé par certains aujourd’hui.

> 21 Le conseil général a été érigé en collectivité territoriale un siècle plus tôt (1871).

> 22 Art. 14-2 et 14-3 de la loi du 22 juillet 1983 modifiée par la loi du 25 janvier 1985. Juridiquement, il s’agit d’un transfert de compétences (les travaux de rénovation, d’extension et de constructions neuves relèvent désormais totalement des collectivités territoriales) et non d’un transfert de propriété (si le bâtiment n’est plus affecté à un usage scolaire, son utilisation, et donc le produit de la vente du foncier, reviennent à leur propriétaire, la commune ou l’État). Cette acrobatie juridique provoqua quelques tensions, notamment lorsque le propriétaire et l’affectataire n’étaient pas du même bord politique. V. la jurisprudence administrative (CE, département de la Seine-Saint-Denis, 1994 ; chronique de Ch. Lavialle à la RFDA de juillet-août 1995).

> 23 Dont lycées agricoles. À noter que, dans un premier projet, il devait y avoir une DGE régionale faisant masse de l’ensemble des financements d’État pour toutes les politiques publiques transférées aux régions ; dans un second temps, il a été jugé préférable de constituer une dotation spécifique pour les lycées et donc d’identifier la politique éducative. Quant à l’idée de séparer la gestion des lycées (régions) de celles des collèges (départements), elle est due au Sénat.

> 24 Rapport p. 43, 1994.

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dossier : Construire pour enseigner > Le pilotage des constructions

> 25 Bâtiments et non établissement, un établissement scolaire pouvant comprendre plusieurs bâtiments. En matière de sécurité, on raisonne au niveau du bâtiment ou E.R.P. (établissement recevant du public). Un E.P.L.E. peut être constitué de plusieurs E.R.P. ; c’est plus encore le cas pour les établissements d’enseignement supérieur.

> 26 Rapport de l’Assemblée nationale cité par J.L. Auduc et J. Bayard, Le système éducatif français (CNDP, 2001, p. 32).

> 27 M.C. Derouet-Besson, L’évolution des politiques publiques en matière de construction scolaire (INRP, p. 7).

> 28 Le METP peut être considéré comme étant un “contrat de longue durée par lequel une collectivité publique confie à un contractant unique la construction d’un ouvrage et son exploitation, moyennant une rémunération forfaitaire versée de manière fractionnée”. (S. Braconnier cité infra). Le débat a tourné autour des notions de délégation de service public, de marché de travaux publics et corrélativement d’application du code des marchés publics.Avis du CE sur la notion de METP pour les marchés de rénovation des lycées d’Ile-de-France du 18 juin 1991(Grands avis du CE, p. 242 avec le commentaire de F. Rolin). Arrêts du CE du 8 février 1999, commune de La Ciotat (éclairage public) et département de l’Orne (collège) à l’AJDA du 20 avril 1999 avec une note de D. Chabanol. Chroniques de S. Braconnier, METP et constructions scolaires (Cahiers de l’éducation de juillet-août 1999), Un contrat en péril : le METP (RFDA de novembre-décembre 1999).Dans le cadre de la réforme des marchés publics, la difficile mise en place des partenariats public-privé (PPP), succédané des METP, montre la force des réserves juridiques et financières portées sur une procédure destinée à confier à un organisme privé, pour une période déterminée, la conception, la construction, le financement, l’entretien, la maintenance et la gestion d’un ouvrage public (école, hôpital, prison…).

> 29 La région Ile-de-France avait évalué son besoin total à 15 MdF (stock), la dotation annuelle de l’État (DRES, flux) étant de 300 MF. Globalement, sur l’ensemble du territoire, on peut observer que le tiers des LEGT et le quart des LP ont été construits depuis la mise en œuvre de la décentralisation.Ce n’est qu’à l’issue du procès en correctionnelle des marchés de la région Ile-de-France, qui viendra à l’audience à l’automne prochain, que l’on pourra faire le départ entre ce qui a été provoqué par le financementdes partis politiques et ce qui aura tenu aux procédures employées pour les constructions des lycées.

> 30 La collectivité paie durant une quinzaine d’années l’investissement initial et la maintenance. Cet étalement la conduit à supporter les frais financiers de l’entreprise titulaire du METP. Dans l’affaire de la commune de La Ciotat (v. note supra), une évaluation a conduit à estimer le coût de l’investissement à 15 MF et le paiement à échéance du contrat de seize ans de 30 MF. Par ailleurs, l’opération est peu claire puisque, d’une part, on distingue mal ce qui a trait à l’investissement, à la maintenance et au portage financier et, d’autre part, c’est un endettement occulte, hors bilan de la collectivité, qui est réalisé.

> 31 À l’origine un code devait rassembler les prescriptions techniques s’imposant tant à l’État qu’aux collectivités. Le décret n’est jamais paru ni même n’a jamais été réellement préparé.

> 32 Éducation et décentralisation, l’équilibre fragile du partenariat (AJDA, n° spécial d’avril 1992, p. 85).

> 33 La Cour des Comptes, de son côté, observe que les PPI tiennent parfois plus du recensement que d’une véritable programmation (La gestion du système éducatif, 2003, JO, p. 194).

> 34 La participation des communes aux dépenses d’investissement des collèges n’était prévue que jusqu’au 1er janvier 1990 (Cf. l’art. 15-3 de la loi du 25 janvier 1985 précitée et la circulaire du 23 avril 1985 ; BO spécial n° 5 du 5 septembre 1985, p. 42).

> 35 De la salle de classe à l’établissement, une négociation décentralisée aussi politique que technique(revue de l’AFE, n° 2, 2000, p. 13).

> 36 Gérard Pourchet (revue de l’AFAE n° 3, 2002, p. 47) “apprécie beaucoup l’organisation de l’établissement définie en commun avec les usagers “tout en observant :” qu’en sera-t-il des besoins des usagers de demain ?”.

> 37 François Louis, Décentralisation et autonomie des établissements (Hachette, 1994, chapitre 3 : Des préoccupations architecturales certaines, p. 27).

> 38 Le pilotage du système éducatif, revue de l’AFAE n° 3, 1993. Administrer l’enseignement, revue de l’AFAE n° 3, 2002.

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> 39 V. F. Louis, précité, p. 56 et “la portée relative de la liste des opérations de construction” arrêtée par le préfet.

> 40 B. Toulemonde, L’enseignement privé (Le système éducatif en France, La documentation française,2003, p. 141).

> 41 B. Genevois, Le principe d’égalité et la libre administration des collectivités territoriales (RFDA, mars-avril 1994, p. 209). Pour le juge constitutionnel, le principe d’égalité, appliqué tant aux établissements d’enseignement privé entre eux qu’entre établissements privés et publics, l’emporte sur celui de libre administration des collectivités.

> 42 Quant aux établissements d’enseignement agricole, la loi Rocard du 9 juillet 1984 permet aux collectivités locales de leur accorder des subventions ; soulignons à ce sujet que la majeure partie des élèves de l’enseignement agricole sont scolarisés dans des établissements privés.

> 43 Afin de connaître l’état réel de la totalité du patrimoine scolaire public et privé, le ministre créa la commission Schléret rassemblant l’ensemble des partenaires du système éducatif et notamment tous les syndicats. La technicisation du dossier, via le corps de doctrine des sapeurs-pompiers préventionnistes, permit d’aboutir à un diagnostic partagé. Sur ces bases fut créé l’observatoire national de la sécurité des établissements d’enseignement scolaire et d’enseignement supérieur.

> 44 CE, 1990, département d’Ille-et-Vilaine (GAJA n° 54) : l’article 69 de la loi Falloux n’a pas été abrogé par la loi Debré de 1959 (décision du CE du 6 avril 1990), la règle des 10 % est toujours valable et doit être entendue comme étant calculée en excluant de l’assiette les dépenses couvertes par les fonds publics.

> 45 Dans le commentaire précité aux GAJA, les auteurs sont plus prudents. Ils estiment “probable que les vives réactions et les très importantes manifestations qui furent suscitées par les projets de 1984 et 1993 ont figé pour un certain temps le régime d’aide des collectivités publiques aux établissements d’enseignement privé”.

> 46 Dans la circulaire DGF du 7 avril 1995 relative aux pouvoirs d’intervention des chefs d’établissements en matière de travaux immobiliers (BO n 16 du 20 avril 1995), la différence entre la construction proprement dite, qui relève de la collectivité mais que l’EPLE peut assurer en étant mandataire (art. 5 de la loi MOP) et non pas en ayant recours au METP, et les travaux d’entretien, qui peuvent être effectués directement par l’EPLE (art. 50 du décret du 30 août 1985 relatif aux EPLE), est clairement rappelée.

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dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

Une nouvelle logique de l‘établissementscolaire GÉRARD POURCHET, inspecteur général de l’éducation nationale

La fin des modèles standardisés a conduit à réfléchir à nouveau sur l’améliorationdes conditions d’enseignement et de socialisation des écoles, collèges et lycées.Une approche globale de l’établissement, différente des habitudes traditionnelles deconception à partir de la classe, a permis de développer, petit à petit, une nouvellelogique de fonctionnement et donc de construction et d’aménagement des espacesscolaires.

La fin des modèles standardisésPendant plusieurs années, la croissancedémographique et les restrictions bud-gétaires ont contraint l’État à réaliserdes bâtiments scolaires sur un modèletype. Les procédés constructifs étaientstandardisés, souvent industrialisés. Lesarchitectes ont, à plusieurs reprises etnotamment dans les années 70, remisen cause ces modes de constructionimposés par les marchés publics. Outrel’aspect architectural des bâtimentssouvent monolithiques, la gestion mêmedes espaces et des aménagements étaitcontestée et conçue en rupture avecl’approche disciplinaire systématique etla construction autour de la celluleclasse. Le fonctionnement des établis-sements était ainsi remis en cause.

Malgré ces propositions nouvelles,pendant plusieurs années la logique deconstruction est demeurée sensible-ment la même : les établissements ontcontinué à être perçus, de l’extérieurmais aussi de l’intérieur, comme desstructures fermées et emboîtées :l’établissement, la division, la classe.Pour les faire évoluer on se contentaitde les appréhender de manière quanti-tative : la capacité d’accueil était lecritère essentiel.

Pendant les premiers temps de la décen-tralisation, cette exigence de réponseà une évolution croissante de la popu-lation scolaire a freiné la définition denouveaux concepts et l’organisationd’une réponse plus en prise avec la

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révolution des techniques pédago-giques, le développement de modesd’apprentissage différents et l’utilisa-tion diversifiée des établissements.

Des propositions pour un lycée“expérimental”Les travaux et les publications de Marie-Claude Derouet-Besson rappellent qu’en1975, l’inspection générale avait déjà étésollicitée pour “réfléchir sur l’améliora-tion des conditions d’enseignement etde socialisation” dans les établisse-ments du second degré. Le groupe“Établissements et vie scolaire” avaitalors rédigé un document rassemblantun certain nombre de “propositions pourun lycée expérimental”. Le lycée expérimental ne fut jamaisconstruit. Mais le travail réalisé parl’inspection générale était intéressant :il tentait une approche globale de l’éta-blissement qui se démarquait des habi-tudes traditionnelles de lecture à partirde la classe et de conception à partir denormes bien définies. La propositionn’était pas la description d’un modèle nil’élaboration d’un schéma de fonction-nement comme auraient pu l’écrire desprogrammistes sollicités par les collec-tivités territoriales ou l’imaginer desarchitectes. Mais il s’agissait d’unensemble pour organiser les espaceset faciliter l’exercice des pratiques péda-gogiques et la vie dans un établissement.Faisaient notamment partie des proposi-tions : “la création d’une zone de conver-gence autour du CDI” ou encore “leregroupement des activités en zones fonc-tionnelles suivant les activités pédago-giques et les pratiques d’utilisation”, aujour-d’hui on parle de pôles d’enseignement oude départements affectés à une disciplineou à un groupe de disciplines…

L’espace repensé dans lesétablissements scolaires> Une sollicitation plus qualitativeEn confiant la responsabilité de laconstruction des établissements sco-laires aux régions et aux départements,la décentralisation a permis aux collec-tivités de répondre au problème quereprésentaient l’accueil de plus d’unemoitié d’une classe d’âge en lycées etun flux croissant des élèves en collège,en développant des démarches origi-nales pour ces publics de moins enmoins homogènes susceptibles deconnaître une scolarisation longue.L’évolution des objectifs de l’enseigne-ment et de la population concernée asuscité une évolution rapide des ensei-gnements, la rénovation des techniquespédagogiques, la modernisation desoutils d’information et d’acquisition desconnaissances, la recherche du déve-loppement de l’autonomie, l’individuali-sation des parcours de formation, la valo-risation du travail personnel, lesinter-relations qui se développent entrela formation initiale et la formation conti-nue et l’ouverture de l’établissement surson environnement sont autantd’exigences nouvelles.Elles n’entraînent pas pour autant lamultiplication des espaces et des équi-pements en fonction de normes prédé-finies. Elles génèrent cependant desajustements sur la programmation deslocaux et l’agencement des bâtiments.Pour répondre aux contraintes pédago-giques nouvelles, elles remettent encause la distribution traditionnelle autourde la classe (groupe d’élèves stable etsalle). Les établissements construitsautour de salles d’enseignement d’unedimension étudiée pour qu’un profes-seur soit entendu par un maximum

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dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

d’élèves n’avaient guère évolué dansleur conception pendant tout le tempsoù l’instruction est restée la seulemission fondatrice de l’institution.Certes, la classe demeure le module debase mais sa conception doit désormaisêtre différente. Il s’agit d’une unité devie qui doit pouvoir évoluer en fonctiondes pratiques pédagogiques.

> Une géométrie de moins en moinsfigéeLa configuration des locaux et le fonc-tionnement des établissements sontencore fortement marqués par le schémaclassique d’un mode d’apprentissagearticulé autour du groupe classe dansun face-à-face professeur et élèves.Beaucoup de disciplines enseignéesmettent en oeuvre une pédagogie auxmodalités de plus en plus variées, active,différenciée usant de supports technolo-giques facilitateurs et de moins en moinsrares et compliqués. L’enseignant n’estplus seul face à un groupe fixe. Il partageen équipe la prise en charge d’un ou plu-sieurs groupes de taille variable. Une telleévolution contribue à une transformationradicale des pratiques traditionnelles :même la dichotomie, classe/demi-classe,est remise en cause. Il faut désormais deslocaux adaptés, plus modulables, tant pourl’enseignement que pour le travailpersonnel des enseignants. Le regroupement de plusieurs classes,la division des classes en sous groupes,la gestion de l’autonomie des élèvesrépartis sur des sites différents dansl’établissement, l’utilisation des nouvellestechnologies – la liste ne se veut pasexhaustive – sont autant de situationsnouvelles qui influent sur la gestion desespaces et impliquent une redéfinitiondes locaux.

> Un nouveau mode de programmationest devenu indispensableDans un premier temps, les modalitésd’intervention des collectivités ont étéorganisées pour répondre aux problèmesque posait l’adaptation de la capacitéd’accueil à l’augmentation des effectifs.La programmation était perçue alors glo-balement comme un problème de cali-brage des surfaces et des équipementsen fonction de normes pré-établies.Cette approche nécessaire ne pouvaitsuffire aux représentants des collecti-vités, soucieux d’exercer “autrement”les compétences transférées, puisque,levant l’impôt, ils doivent rendre descomptes à des électeurs usagers ouparents d’usagers. Aussi, les proposi-tions d’aménagement sont devenues“plus qualitatives”. Pour apporter leurmarque et les améliorations escomp-tées sur le plus grand nombre de siteset d’établissements, des programmesd’ensemble par thèmes ont été propo-sés aux décisions des assemblées. Leschoix se répartissaient entre les lieuxd’enseignement (d’abord les centres dedocumentation, la démarche avait étéquelque peu initiée par l’État, les ateliers,les laboratoires, les salles et espacesd’EPS …), mais aussi les lieux de viepour rendre les établissements plusattractifs et accueillants (restaurant,internat, cafétéria, agora, espacesouverts à tous, foyers, décoration, mobi-lier rappelant la vie courante, insonori-sation, fonds musical, confidentialitépour la prise en charge de problèmespersonnels ou de santé …) ; on a mêmevu, après des mouvements de protesta-tion des élèves, des programmesd’action pour une amélioration dessanitaires.Cette pratique ne pouvait être satisfai-

La classedemeure le module de base

““

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sante pour des gestionnaires quicontinuaient ainsi à intervenir parajustements successifs et de manièreponctuelle ou ciblée.Un facteur a influé sur le changementde méthode pour un grand nombre decollectivités : la construction d’établis-sements neufs. La connaissance, lacritique et le traitement des difficultésengendrées par le patrimoine existantont contraint ces nouveaux maîtres d’ou-vrages à concevoir les établissementsdans leur globalité et à aborder leurconstruction dans le même état d’espritque pour les autres équipements publics(insertion dans le site, adaptabilité auxvariations d’effectifs et d’exigences,réceptivité aux besoins nouveaux,souplesse et diversité dans les répon-ses offertes, qualité et résistance desmatériaux …).

Les établissements ne sont plus de sim-ples supports physiques à des discipli-nes indépendantes. Les évolutions encours leur confèrent des dimensionsnouvelles : la conception, la répartitionet l’organisation des espaces et deséquipements doivent tenir compte deces évolutions et être capables des’adapter à celles à venir, comme parexemple la prise en compte de la prioritéeuropéenne et nationale faite désormaisà “l’éducation tout au long de la vie”.Cette nouvelle démarche s’appliquedésormais à la gestion de l’ensemble dupatrimoine scolaire notamment pour lesrénovations et les restructurationslourdes. Il n’est plus tant question deschémas prévisionnels pour planifierl’accueil des élèves que de référentielsde programmation ou de programmesprévisionnels pour organiser l’adapta-tion de l’ensemble du parc.

> Tirer toutes les conséquences de ces objectifs élargisSi l’établissement reste pour sa missionprincipale un espace voué à l’enseigne-ment et à l’apprentissage il s’est imposélors de ces dernières années comme unlieu de vie où les conditions d’accueildoivent répondre aux attentes des mem-bres de la communauté scolaire (per-sonnels et élèves). A l’évidence, ilconvient de prendre en compte la néces-sité d’adapter le patrimoine scolaire àtoutes les variations dont il peuve êtrel’objet – effectifs, structures, modalitésd’apprentissage, programmes –, maiségalement de l’aménager ou le conce-voir pour qu’il puisse assumer une dimen-sion sociale nouvelle.Dans le cadre de leurs programmes deconstruction, de restructuration, et derénovation des établissements, lescollectivités ont cherché à leur donnerles moyens de devenir une entité fonc-tionnelle et accueillante. Les objectifspour ces opérations se déclinent presquetoujours sur les mêmes bases :> offrir des locaux d’enseignementadéquats pour la structure pédagogique > offrir des locaux qui répondent auxbesoins d’adultes concernés par l’éduca-tion et la formation tout au long de la vie> prévoir pour les enseignants des espa-ces pour le travail individuel ou collectif> assurer à tous accessibilité et sécurité> assurer les meilleures conditions de vieaux usagers et une bonne organisationfonctionnelle > créer un environnement en phase avecles exigences de la vie contemporaine > garantir l’adaptabilité aux évolutionspédagogiques et technologiques>réussir l’insertion de l’établissement dansson environnement et faciliter ainsi sonouverture vers l’extérieur.

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L’école Louise-Michel à Saint-Hervé (2 000 habitants), aaccueilli, en janvier 2003, 172 enfants répartis dans troisclasses maternelles et 4 classes élémentaires.La croissance démographique ayant rendu nécessaire laconstruction d’une école neuve, l’équipe enseignante aété invitée à renseigner un cahier des charges : le voletarchitectural a donc précédé le projet éducatif.

Le projet éducatifSa conception se rapporte à un double niveau d’analyse :trois orientations générales définies à l’échelle de l’écoleconsidérée en tant qu’entité fonctionnelle, déclinées ensuiteen propositions relatives aux locaux spécifiques.

Trois objectifs pour l’école- créer les conditions permettant aux élèves d’étudier dansun climat propice au travail : priorité accordée auxmatériaux d’une excellente qualité acoustique. Les espacessont vastes et fonctionnels, la lumière et les couleurs sontdouces.- faciliter l’accès des élèves à l’autonomie : la dispositiondes locaux entraîne une continuité dans la circulation, uneproximité et une visibilité des locaux annexes. Le mobilierest adapté à la taille des élèves.- favoriser la politique des cycles et la différenciationpédagogique : les salles de classe sont séparées parun local qui permet de faire travailler un grouped’élèves de la même classe ou de deux classes d’unmême cycle.

Les locaux spécialisésIls comprennent : une salle de garderie, deux salles derestauration, une salle informatique annexée à un centrede documentation, une salle de motricité, deux salles derepos et trois ateliers.Chaque local a été conçu à partird’une fiche rédigée par les enseignants et complétée parles services techniques Exemple : la rédaction de la fiche“auditorium”.Les enseignants sont conscients que les pratiqueséducatives dépendent essentiellement de leurs capacitéset de leur volonté mais que les données architecturalesfavorisent et facilitent leurs projets.

L’intérêt pédagogique d’une architecture adaptéeLa réponse architecturale à la commande éducative a produitdes effets particulièrement positifs sur l’enseignement enmaternelle. Deux exemples peuvent illustrer ce constat.

> L’auditoriumDe ses nombreuses utilisations, nous retiendrons son rôleen matière d’activités de langage. Les programmes de mater-nelle stipulent que “le langage s’exerce d’abord à traversl’expérience quotidienne, mais ses fonctions plus complexesse découvrent aussi dans des situations organisées”.Le recours à l’auditorium facilite la mise en œuvre de situa-tions de communication propices à l’acquisition de compé-tences liées à la compréhension de la parole d’autrui et auxrègles qu’il est nécessaire d’appliquer pour se faire comprendreou même, tout simplement écouter. Cet outil d’enseignementenrichit considérablement les situations de classe classiquesoù, trop souvent, l’enseignant se contente de dialoguer avecses élèves groupés “en rond” autour de lui, dans le cadre d’uneactivité de langage insuffisamment structurante.

> La salle de motricitéLa présence de plots, cerceaux et ballons dans une courde récréation peut donner lieu à une séance d’éducationphysique et sportive intéressante. Néanmoins, la lecturedes programmes officiels amène à mettre en œuvre despratiques ambitieuses : “l’école doit offrir à l’enfantl’occasion d’élargir le champ de ses expériences dans desmilieux et des espaces qui lui offrent une palette desensations et d’émotions variées qu’il est amené à agirface à des obstacles rencontrés en comprenant progres-sivement ce qu’est prendre un risque calculé…”.Un matériel adapté (espalier, toboggan, barres parallèles…)devient, dès lors, nécessaire.Cette école “du XXIe siècle”, d’une superficie de 1 823 m2, acoûté 1,7 million d’euros. Sans être exorbitante, cette dépenseparaît cependant inaccessible à beaucoup de petites com-munes qui ne pourraient, seules, se doter d’un tel outil. Lamise en œuvre de la coopération intercommunale, sous dif-férentes formes, paraît de nature à produire, d’un projet archi-tectural de qualité, une certaine “plus-value” pédagogique,particulièrement marquée au niveau de l’école maternelle.

Répondre à la demande éducative L’exemple de l’école Louise-Michel à Saint-HervéCHRISTIAN LOARER, inspecteur général de l’éducation nationale

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dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

Des espaces d‘enseignement aux lieux de vie : les leçons d‘une enquête GÉRARD POURCHET, inspecteur général de l’éducation nationale JEAN-YVES CERFONTAINE, chargé de mission d’inspection générale

La façon dont les élèves et toute la communauté éducative vont vivre dansl’établissement est conditionnée par la structuration de l’espace et l’organisationdes fonctions dans les différentes zones. Comment ces zones sont-elles organiséesentre elles ? Comment s’effectuent les mouvements et les concentrations d’élèves,quand ils ne sont pas en classe ? Quelles sont les activités des élèves en dehors desheures de cours ? Quels sont les lieux de rencontre, de regroupement ? Quelle estla répartition entre les pôles de travail et les pôles de vie ?

Ont apporté leur contribution au travail d’enquête :Robert Denquin, Joël Goyheneix, Guy Pouzard, Raymond Riquier, Jean-Louis Rollo,membres du groupe “établissements et vie scolaire”de l’IGEN

Pour illustrer des réponses possi-bles à ces questions sur l’organi-sation générale des établisse-

ments, mais surtout sur les lieux de viescolaire (modalités d’agencement,conditions d’accueil, initiatives pour desespaces spécifiques …), le groupe“Établissements et vie scolaire” aconforté les observations déjà recueilliesnotamment lors du travail sur le thèmede “l’accueil des élèves”, par des visitesdans quelques établissements (lycées,

lycées professionnels, collèges d’im-plantations diverses, de tailles et destructures bâties différentes), dont lesparticularités méritaient d’être relevées.

La méthode d’enquête proposée auxmembres du groupe participant à cetravail, s’appuyait sur un questionnaire,élaboré puis utilisé par la direction del’audit immobilier de la Région Centre :elle avait été chargée, en 1997, par sacollectivité d’observer l’organisation des

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dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

établissements et plus spécialement leslieux de vie scolaire, dans 32 lycées deneuf régions différentes. Les visites ontété effectuées de manière à couvrir unepériode de fin de matinée ou de débutd’après-midi, pour constater enparticulier comment s’effectuent lesmouvements d’une activité à l’autre.L’observation faite a porté à la fois surles espaces d’enseignement et sur leslieux de vie scolaire.

Les espaces d’enseignementL’analyse de l’aménagement des locauxen vue de l’organisation des activitéspédagogiques témoigne d’une volontéd’apporter des réponses aux évolutionsde l’enseignement et d’une difficultéd’anticiper sur les initiatives à prendrepour répondre aux exigences de demain.

> Une meilleure fonctionnalité par le dialogue avec les équipes d’établissementDe plus en plus souvent, dans lesrestructurations, et de manière systéma-tique dans les constructions nouvelles,la distribution des espaces favorise leregroupement des activités. Toutefoisles options pour définir la nature de ceregroupement varient en fonction du bâtiexistant, des projets architecturaux etdes contraintes imposées par l’espaceou, quand cela a été possible, selon lessouhaits et les projets exprimés par lesétablissements et donc selon ledynamisme de l’équipe de direction.

Ainsi, lors de la rénovation du lycéeTurgot à Roubaix, devenu lycée profes-sionnel, (des métiers et “de toutes leschances”) les enseignements ont étérépartis par plateaux et non par niveauxde classes. L’objectif avoué, dans un

établissement où la population scolaireavait beaucoup changé, est d’obliger lesélèves et les enseignants à se côtoyer.Chaque plateau est doté d’une ou deuxsalles de travail pour les enseignants,équipées avec des ordinateurs et amé-nagées de manière conviviale. Leproviseur a pu lier la transformation deson offre d’enseignement à une muearchitecturale d’un espace gris. Au lycée Léonard-de-Vinci, à Levallois-Perret, l’ensemble des 86 salles declasse indispensables à l’enseignementthéorique abrite sur cinq étages tous lesateliers techniques nécessaires auxfilières les plus pointues enseignées parle lycée. Sur chaque niveau sont répartisdes départements, avec leurs équipe-ments spécifiques (scientifiques, lettres,langues, histoire-géographie , ensei-gnement tertiaire), et des espaces poly-valents (centre de documentation, sallesinformatiques, salles audio-visuelles).Seul le cinquième étage, sur une surfacede 450 m2, bénéficie d’une modularitétotale pour la “junior entreprise” desélèves.

Au lycée Magendie à Bordeaux, leregroupement des salles, par pôles géo-graphiques autonomes en fonction desdisciplines, est apprécié : pôle d’ani-mation pédagogique autour du CDI, pôlede l’enseignement général, pôle d’en-seignement scientifique, pôle d’ensei-gnement des arts appliqués.En collège, l’écriture spatiale est quelquepeu différente, le nombre de salles spé-cialisées (sciences ou ateliers) étantmoins important. Mais dans les éta-blissements neufs, comme au collègeYves -Montand d’Allauch (académie deMarseille), l’organisation des bâtimentsse fait par niveaux et sur la base de blocs

Une réponse auxévolutions del’enseignement“

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d’enseignements bien identifiés etrépartis dans le collège pour faciliter lagestion des flux.En fait, c’est bien la gestion desmouvements d’élèves et de professeursqui le plus souvent pèse dans les choixd’organisation d’ensemble. On mesureles effets d’une prise en compte insuf-fisante de cette contrainte quand dansun lycée disposé en “barrettes” avecune pente de terrain importante (cas dulycée Luynes à Marseille), les commu-nications d’un bâtiment spécifique àl’autre s’étalent sur plus de 150 mètres.

> La taille et le nombre des sallesdeviennent un problèmeLes salles de classe, qu’elles soientaffectées à l’enseignement général oudes sciences, sont des espacesconçus, le plus souvent aujourd’hui,comme des espaces polyvalents,permettant toutes organisationssouhaitées par l’enseignant.

L’adaptation à de nouvelles fonctionna-lités pédagogiques, dont le dédouble-ment des classes, les travaux interdis-ciplinaires (comme les TPE), les séancesde modules ou les interventions pour lesaides individualisées, se fait d’autantplus facilement que l’établissement al’usage de mètres carrés d’enseigne-ment importants ou qu’il n’est pas aumaximum dans l’utilisation de sacapacité d’accueil.Dans ce cas, la mise en œuvre des acti-vités nouvelles ne peut se faire que parceque l’établissement est assez vaste pourque des disciplines annexent des locauxqui ne leur sont pas réservés. C’est lasituation rencontrée pour l’organisationde l’enseignement des arts plastiquesau lycée Delacroix à Maisons-Alfort.

Dans ce même établissement, les labo-ratoires de sciences ont paru dèsl’origine trop exigus : ils ne permettentpas une utilisation sécurisée desréserves dans le bâti existant et néces-sitent des constructions nouvelles.Quand, à ce type de dysfonctionnements,qui auraient pu être évités avec plus deconcertation dans la phase de concep-tion et d’aménagement, s’ajoutent descontraintes nouvelles imposées par lesréformes en cours, les difficultés devien-nent réelles pour les établissements,surtout si ils n’ont pas le temps de négo-cier les adaptations nécessaires.

Les possibilités techniques ou physiquesdes salles ne répondent pas toujoursaux besoins pédagogiques. La mise enplace des travaux croisés en classe dequatrième dans un collège récent peutse heurter aujourd’hui, non seulementà la réticence de nombre d’enseignantsmais aussi à un manque de salles pourle travail en petits groupes. Il faut dansun tel cas construire l’emploi du tempsen tenant compte du faible nombre desalles disponibles et de leur capacité.Cette pratique a évidemment ses limites.Quoi qu’il en soit, le constat qui s’imposele plus souvent conduit à valoriser lesprogrès effectués “par l’écoute des usa-gers sur le terrain”. Au fil des chantiersde restructuration et de reconstruction,les évolutions pédagogiques sont sou-vent anticipées : la systématisation desalles banalisées plus grandes et la pré-vision de salles plus petites, destinées àdes enseignements en petits groupes,devient la règle imposée aux program-mistes par les collectivités. La RégionNord-Pas-de-Calais (dans son référen-tiel de programmation des lycées) ou ledépartement de Seine Saint-Denis dans

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dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

les programmes de rénovation, commeau collège Jean-de- Beaumont àVillemomble ont ainsi intégré cetteexigence nouvelle.

La prise en compte des ressourcespédagogiques> Réseaux et infrastructures de communicationLe développement des nouvelles tech-nologies dans les pratiques pédagogiques(utilisation des moyens audio-visuels,organisation en réseaux sur l’ensemblede l’établissement ou par pôles des res-sources informatiques et multimédias)implique la mise en place d’infrastruc-tures de communication adaptées. Dansla quasi totalité des établissements obs-ervés, les opérations de rénovation oude restructuration ont été accompagnéesd’une mise à niveau des infrastructuresde communication (voix, données,images), dans les locaux concernés.Une phase de réflexion s’impose dès àprésent sur le devenir des salles spé-cialisées (audio-visuel, informatique),face à l’accès à une ressource centra-lisée, à partir de toutes les salles bana-lisées (expériences des pupitres du XXIe

siècle dans les écoles et les collèges del’académie de Lille).

> Les besoins en locaux pour les enseignantsLa traditionnelle salle des professeurs(répartie en deux espaces, fumeurs etnon fumeurs !) demeure avec ses dimen-sions de zone de détente et sa fonctionde lieu de transmission rapide d’infor-mation (casiers, panneaux). Mais desefforts sont constatés pour aménager desespaces de travail individuel ou collectif.Dans plusieurs établissements, deslocaux ont été aménagés et équipés pour

les charges administratives des ensei-gnants (saisie des notes, etc.), pour leurtravail personnel (préparation de cours,recherche sur l’Internet, etc.) ou la coor-dination des activités pluri disciplinaires.Les réponses techniques varient, enfonction des activités retenues aumoment des aménagements : tantôt ils’agit d’un ensemble de petites sallesaffectées aux enseignants à proximitédu CDI (collège Jean-de-Beaumont àVillemomble) ; tantôt elles sont distri-buées autour de la salle des professeurs(collège Valdo à Vaulx-en-Velin) ; tantôtelles sont aménagées dans les pôlesd’enseignement (lycée Léonard-de-Vincià Levallois-Perret).

Dans tous les cas, ces espaces, difficilesaujourd’hui à libérer, dans les restructu-rations, car ils ne faisaient pas partie dessurfaces affectées antérieurement,deviennent indispensables pour répon-dre aux nouvelles exigences de travaildes enseignants. Les expériences réus-sies comme au lycée Duby à Luynes quia aménagé un espace conçu comme “lamaison des enseignants” au cœur dulycée, s’appuient sur des critères deconfort, d’ambiance, d’accessibilité ;mais ils doivent aussi être conçuscomme des espaces privatifs pour lesprofesseurs, sans exclure la possibilitéde recevoir des gens de l’extérieur(parents, collègues) ou des représen-tants d’entreprises dans les lycéesprofessionnels.

Les lieux de vie scolaire> La situation particulière de chaqueétablissementAvant de mettre au point une opérationimmobilière et d’intervenir sur les lieuxde vie scolaire d’un établissement, il faut

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examiner comment la vie scolaire fonc-tionne ou devrait fonctionner. Chaquesituation est particulière et nécessite laprise en compte de différents facteurs :le type d’établissement, son insertiondans la ville, les caractéristiques desmembres de la communauté scolaire, lagestion du temps en dehors de l’activitéd’enseignement, les règles (règlements,projets, habitudes) qui agissent sur lesactivités et les relations, et plus préci-sément l’aménagement de l’espace danslequel elles s’exercent. Ce sont là autantd’éléments qui rendent différent et par-ticulier le fonctionnement de chaqueétablissement et contraignent à unegestion adaptée des espaces.

> L’accueil et la circulationdes élèvesLe hall est un lieu essentiel dans la vied’un établissement. Il assure le premiercontact : il constitue une sorte de sasentre le dehors et le dedans, il est lieud’accès et de sortie. Le bon fonctionne-ment implique qu’il soit plus un lieu depassage et un point de rencontre. Cettefonction de carrefour lui confère uneresponsabilité pour une bonne distribu-tion vers les autres espaces et unelecture aisée de l’organisation généralede l’établissement.Au collège Valdo (Vaulx-en-Velin), unparvis situé au-delà du portail donne unetrès grande visibilité et permet de sécu-riser l’établissement. Le grand portailextérieur du lycée Turgot (Roubaix)débouche sur une agora, immenseespace fleuri, “lieu de distribution desespaces” et lieu de passage obligé pourtoute la communauté. Le lycée Doisneaude Vaulx-en-Velin construit sur unebande de terrain étroite sembleentièrement ordonné autour d’un espace

couvert ou non. Le parti architecturalretenu pour le lycée Delacroix (Maisons-Alfort) a conduit dans l’enceinte del’établissement à privilégier l’œil. Ainsi,le vaste hall avec deux escaliers monu-mentaux bénéficie-t-il d’une large utili-sation du verre pour mettre en valeur leparc situé au pied du fort. Enfin, au lycéeDuby (Luynes), l’entrée se fait par un par-vis conduisant à un hall bien éclairé quisert aussi de lieu d’exposition et dereprésentation.La variété des réponses est accentuéepar la possibilité d’un traitement archi-tectural original qui participe à l’imagede l’établissement (Léonard-de-Vinci,Levallois-Perret).

Les circulations. La bonne fluidité entrele hall et les autres espaces est néces-saire. Autant l’importance que peut avoirle volume consacré à l’accueil est bienmesurée par les concepteurs, autant lagestion des circulations apparaît plusdélicate à résoudre de manière satis-faisante. Au lycée Delacroix, un soinparticulier a été apporté pour modulerla longueur des couloirs, contenir le fluxdes élèves et permettre une bonne sur-veillance. Par contre, au collèged’Allauch, les couloirs de circulationinterne sont sombres, l’éclairage artifi-ciel est nécessaire en permanence etle contrôle est difficile. Le parti archi-tectural peut ainsi conduire à des cir-culations complexes ou à des aména-gements bruyants (passerelle du lycéeDuby). L’espace de circulation intérieuredu collège Valdo (Vaulx-en-Velin) estjoliment traité, mais il demeure bruyantmalgré les efforts faits pour gérer lasonorité ; il en découle une attitude de“purge” systématique de cet espace etdes escaliers qui desservent les étages,

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d’où à la fois une tension (crainte d’in-cidents) et un agacement de ne pouvoirrester dans cet espace conçu pour êtreconvivial et souder une communautéscolaire.

> Le premier cercle des lieux de viescolaireLes locaux d’un premier cercle sont ceuxauxquels les élèves accèdent en générallibrement en dehors des heures de cours.Ce sont des locaux pour améliorerl’accueil, l’écoute des élèves et larencontre dans les moments de détente :bureaux de la vie scolaire, salles de travailautonome ou de permanence, foyer,cafétéria, maison des lycéens, etc.Les bureaux du conseiller principald’éducation et du service de vie scolairesont de préférence regroupés auprèsdu hall à proximité des lieux de travailautonome des élèves (dans les lycées)ou des salles de permanences (dans lescollèges), des lieux de détente desélèves ou au carrefour des circulationsprincipales.

Le positionnement du bureau du CPE auniveau du hall, un étage au dessous dela cour où se situe la maison des lycéensau lycée Léonard-de-Vinci (Levallois-Perret), apparaît comme un handicap ;de même, à Maisons-Alfort, où il est relé-gué au second étage du bâtiment.Les lieux d’autonomie peuvent être nom-breux et répartis dans l’établissement àcondition qu’ils soient toujours surveillésou susceptibles de l’être facilement. Aulycée Turgot (Roubaix) les salles sontdotées de grandes baies vitrées pourcela. Dans cet établissement, les adultessont répartis dans tout l’espace : les deuxCPE, le service santé, l’administration,tous sont éparpillés. C’est un choix

délibéré, sinon, commente de manièreimagée un proviseur, “dans un établis-sement de ce type, on est dans le fort etles indiens cavalent autour”. Mais untrop grand éclatement présentel’inconvénient de limiter les contactsspontanés entre CPE, surveillants, aideséducateurs, ce qui, sauf organisationadéquate et pratique volontariste, n’estpas favorable à la gestion de la viescolaire, surtout en collège.

Des espaces de détente, tels que le foyerou la cafétéria, sont des lieux privilégiésqui contribuent pour les élèves ausentiment de bien-être dans l’établis-sement. Ces espaces restent l’apanagedu lycée : le constat en avait été fait lorsde l’étude conduite par l’inspection géné-rale sur l’accueil dans les établissementsscolaires. Les critiques les plus vives desélèves concernant ces lieux portaientsur les surfaces, les conditions d’accès,le confort et les équipements souventdésuets. Les visites ont confirmé la situa-tion. Quelquefois les espaces existent,mais un manque d’engagement del’équipe éducative nuit à l’utilisationpossible ; dans un autre, un distributeurde boissons fait office de cafétéria et iln’y a pas de foyer. La plupart des lycéesont par contre des espaces dévolus àl’activité du foyer : espace bar, salle demusique ou d’activités artistiques, espa-ces de jeux ou lieu identifié comme“maison du lycéen” (Léonard-de-Vincià Levallois). Dans ce cas, les élèvesdisposent, comme le préconise le décretde 1991, de locaux dédiés et gérés demanière associative.Ces espaces doivent trancher sur lesautres : ils ont besoin d’être accessibles,modulables et attractifs. Les élèves seles approprient facilement pour s’arrêter,

Des locauxpour améliorer l’accueil“

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se détendre, se parler si le cadre estconvivial : mais ce sont des lieux difficilesà maintenir propres et accueillants. Lesaménagements devraient permettred’écarter, à défaut de pouvoir les isoler,les jeux et activités bruyantes desespaces d’échange. Quant aux activitésde club, il faut pouvoir s’adapter à lademande et utiliser des salles banales :il en va de même pour les activités desdélégués-élèves.

> Les autres lieux concourant à la viescolaireCette fois l’accès est soumis à des condi-tions ou comportements particuliers.Font partie de ce deuxième cercle, leCDI, les lieux d’écoute et d’accompa-gnement (bureaux de l’assistantesociale, de la conseillère d’orientation),l’infirmerie et l’espace santé, les lieuxde réunion (salles polyvalentes, amphi-théâtre, salle de conférence ou d’expo-sition), mais aussi les services de res-tauration et l’internat. Les espacesextérieurs (préaux, cours) peuvent êtrerangés dans cette catégorie.

Le centre de documentation est un lieude ressources qui fait partie intégrantedes activités d’enseignement. Il doit êtreattractif pour les élèves comme pourl’ensemble de la communauté éduca-tive. Il est conçu comme un espace aéréet clair au cœur de l’établissement. Levolume, les couleurs, la disposition deslocaux (espace de consultation, de lec-ture, possibilités de travaux de groupesdans des petites salles annexes, etc.),l’aménagement d’ensemble, tout doit yêtre propice à la réflexion et au travailpersonnel.Les locaux pour l’équipe administrativedoivent être accessibles et au plus

proche des élèves et du public accueilli.L’aménagement d’espace santé (lieuxd’information et de rencontre) dans lesétablissements visités a montré que ceslieux doivent, eux aussi, être facilementaccessibles. D’une manière généraleles lieux de contact et d’écoute pour per-mettre aux élèves de “parler autrement”avec des adultes (infirmière, assistantesociale, etc.) doivent satisfaire à cesfacilités d’accès mais aussi à un accueildiscret.

La demande de salles pour tenir desréunions ou d’espaces de taille suffi-sante pour regrouper des classes est deplus en plus pressante. Dans les nou-veaux lycées des petits amphithéâtresont remplacé les salles polyvalentes :dans certains établissements les deuxréponses continuent d’exister, avec dessalles banalisées permettant de réunirdeux divisions (une capacité de 70/80places à plat, très appréciable pour lesexamens et les devoirs surveillés) et unamphithéâtre de 150 à 200 places,implanté pour permettre une utilisationautonome dans le cadre d’activitésextérieures.L’impératif de confort et de commoditédes espaces de vie amène aujourd’huià considérer les services de restaura-tion et d’hébergement dans les établis-sements comme les autres services, età répondre à un impératif de qualité etde modernité. Les nouveaux cadres pourla restauration (vastes salles, bien éclai-rées, distribution des repas en libre ser-vice, mobilier moderne et ergonomique)font de ces locaux des restaurants à partentière. L’espace d’hébergement dansles lycées est modernisé pour mieuxrépondre aux attentes des élèves. Deuxtypes de lieux sont aménagés pour

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dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

assurer un meilleur accueil dans lesinternats : des chambres, de un à quatrelits le plus souvent, selon l’âge du publichébergé et des lieux de détente (foyers,pièces à vivre en groupe ou pourtravailler à plusieurs). Il reste à recher-cher, dans bien des cas, la synergie entreles espaces de détente de l’internat etceux de la “maison du lycéen”.Les espaces extérieurs, enfin, sont deséléments à prendre en compte dans lesaménagements d’ensemble : la présencede préaux en collège, des circulationsexternes claires et couvertes, destraitements paysagers, le recours à desrevêtements de sols drainants, permet-tent aux élèves de prendre l’air (etpermettent aux membres de l’équipeéducative de les inciter à aller s’aérer)et de dé-densifier l’intérieur.

> Des orientations plus que desrègles pour structurer les lieux de vie scolaireA côté des règles générales, il fautapprécier les mesures d’écart et adap-ter les réponses aux spécificités dechaque établissement. L’étude aconfirmé qu’il y a un besoin de plus enplus fort en locaux et espaces de viescolaire, et que la problématique peutêtre différente suivant les cas.L’expression des besoins ne doit pastoujours se traduire par une addition dessurfaces : il faut examiner la fonctionpremière des lieux et réfléchir sur lesutilisations complémentaires.On ne peut ignorer la disparité dessituations rencontrées. La demandeconduisait à signaler les réalisationset la qualité des initiatives : elle ne peutfaire oublier les constats de carence,les maladresses de conception, ou lesretards dans les réalisations. Dans

certaines interventions on chercheles logiques qui ont présidé auxdécisions.

Quelques éléments de portée générales’imposent pour infléchir les décisionsquant à l’organisation générale desétablissements et la structuration deslieux de vie scolaire :> garantir la flexibilité des espaces ; > organiser la gestion des flux decirculation des élèves ;> assurer l’articulation fonctionnelleentre les zones d’activités ;> faciliter l’appropriation des lieux pourpermettre à chacun de se situer dansl’établissement ;> avoir le souci de la surveillance ;> se donner la possibilité de mutualisa-tion des usages, d’évolutivité, d’ouvertureet d’utilisation par des gens de l’extérieur.

Depuis quelques années, des chefsd’établissement ont pu être affectés dèsla phase de construction desétablissements neufs et participer, selonleur appétence à ces questions, à la défi-nition ou à la correction du projetd’architecte. Les rénovations, lesrestructurations d’établissement sontdes occasions importantes pour lespersonnels de proposer un projetd’ensemble ou la transformation du bâtiet des équipements, de la dispositiondes locaux et de leur équipement. Lesconditions de vie et de travail despersonnels et des élèves peuvent enêtre profondément améliorées, lespratiques modifiées. L’image del’établissement se transforme et leregard vers l’avenir prend racine dansla manifestation de l’intérêt collective-ment porté à cet établissement.

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Un lycée professionnel en perte d’effectifs dans le Roubaixdes années 80. Le textile est parti, laissant ici des murssombres, et des résultats médiocres au sein de troisquartiers en grande souffrance. Aujourd’hui, les inspec-teurs et les parlementaires viennent y découvrir un bâtimentsuperbe, celui d’un lycée de la deuxième chance,exemplaire dans sa tenue, avec des résultats scolaires etune insertion dans la vie professionnelle très honorables.

Un cadre lépreux c’est le stigmate d’une situation difficile.Y remédier supposait des actions conjointes et complé-mentaires. Ne pas raser ce témoignage du passé mais entirer le meilleur parti par un amalgame avec des bâtimentsneufs, lumineux, c’était inscrire les élèves d’aujourd’huidans une lignée et redonner de l’espoir. Le bureau duproviseur, contemporain de Jules Ferry, est devenu unesalle de réunion de prestige.

Ce travail n’aurait été qu’un bel exercice de style pour unarchitecte et une fierté pour des élus régionaux et locauxqui n’aurait pas eu de sens pour les élèves, s’il n’y avaiteu un partenariat de qualité avec l’Éducation nationale,La citrouille et ses pépins deviennent un objet de débat etle fondement d’un projet collectif.

Le proviseur redonne de la confiance à ses personnels, àses élèves. Son projet peut paraître banal : redonner dusens à l’école, à l’apprentissage, à l’effort continu, au savoir.Surmonter les décrochages, trouver les moyens de conso-lider les bonnes intentions pour réussir un pari pédago-gique difficile : temps d’enseignement individualisé, travailen équipe, pour que le projet individuel de l’élève émergepuis se développe.

L’inscription dans la politique académique, les relationsavec les partenaires, qu’il s’agisse de la ville de Roubaix,de la Région Nord-Pas-de-Calais ou des entreprises pou-vaient avoir des effets bénéfiques si des transformationsvisibles apparaissaient, jour après jour, dans le quoti-dien. Les règles de civilité et de vie en commun ont contri-bué à créer une ambiance, le cadre de vie et d’études,sans cesse objet de réflexions, a suivi. Les élèves

devenaient des élèves normaux et leurs efforts pouvaientêtre récompensés selon les normes courantes. Chaqueélève est unique, un contrat entre l’élève, le chef d’éta-blissement et la famille situe périodiquement les résul-tats et les marges de progrès ; si le projet n’est pas mûr,l’élève “tourne” pendant parfois un an entre troisétablissements pour découvrir des métiers et desformations. Prendre un peu son temps, c’est en gagner,nous dit-on ici. L’ouverture du lycée sur la ville, sur larégion, sur la vie professionnelle et culturelle devenaitpossible et féconde.

La transformation des lieux accompagne et soutient lamutation des mentalités. Le lycée est hospitalier : desespaces de réunion ont été ménagés, on peut, que l’onsoit professeur ou élève, rester au lycée Turgot. L’espacede restauration a été conçu pour concilier les impératifsde rapidité et de convivialité. Les circulations ont étépensées pour être aisées, fluides, sans vacarme.L’établissement est fonctionnel avec son organisation parpôles conçu pour que l’élève s’y retrouve, puisse accom-plir au mieux sa tâche, mais aussi pour qu’il soit stimulépar la réussite des prédécesseurs. Des photos d’élèvesjalonnent les couloirs. Les parcours accomplis servent deréférence aux lycéens du moment.

Le lycée Turgot, tombé à 300 élèves en 1991, en forme plusde 500 en secrétariat, comptabilité, vente, usinage, électro-technique pour les BEP, avec quatre baccalauréatsprofessionnels. Il a le label “école de toutes les chances”et pourra accueillir à terme 736 élèves. Comme l’indiqueson proviseur, qui a compris également l’importance dudéveloppement de l’UNSS dans un tel contexte, “un grandprojet ne vit qu’au travers de l’engagement, de l’enthou-siasme, de l’imagination des équipes. Sa richesse viendrade la multiplicité des actions du quotidien, sans perdre devue que la vie scolaire, pour l’élève, prend un sens dans“la boîte noire” de la classe … “

Le travail de conception conduit de façon interactive avecles services et les élus des collectivités intéressées y atrès puissamment contribué.

De la citrouille au carrosse…Bâtir pour un grand dessein et changer l’imageJ-Y CERFONTAINE, chargé de mission à l’inspection générale de l’éducation nationale

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dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

Organiser l‘espace des sciences de la vie et de la TerreANNIE MAMECIER, inspectrice générale de l’éducation nationale

en référence aux travaux de BERNARD LE VOT, inspecteur général de l’éducation nationale 1

Depuis 1980, trois facteurs ont suc-cessivement puis simultanémentinfluencé l’évolution des idées

dans l’organisation du laboratoire et dessalles de cours de sciences de la vie etde la Terre. Ce sont l’augmentation dunombre des élèves, l’introduction destechnologies d’expérimentation assis-tée par ordinateur (ExAO) avec unrecours aux techniques d’information etde communication, et l’ensemble desréformes pédagogiques ayant pourobjectif de développer chez l’élève –surtout au lycée – l’acquisition de laméthodologie scientifique parallèlementà l’apprentissage de l’autonomie.L’accroissement de l’horaire de travauxpratiques dans les programmes d’en-seignement et leur valorisation en 1ère Sau moyen de l’option sciences expéri-mentales en 1992 y ont particulièrementcontribué. L’organisation des travaux personnels

encadrés (TPE) à partir de 1998, dansles classes de premières S et L et ter-minales S, devait répondre à cette ambi-tion éducative. Si dans les années 80,l’influence du nombre des élèves futdéterminante, ce sont actuellement leseffets conjugués des ouvertures péda-gogiques offertes par l’évolution destechniques et de la promotion del’intelligence du geste par les réformessuccessives qui ont des conséquencesmajeures sur l’organisation de l’espacedans les locaux scientifiques desétablissements scolaires. Offrir degrands plans de travail et – grande nou-veauté – de libre circulation dans laclasse et prévoir un plus grand nombrede salles, dont la plupart de typenouveau, apparaissent alors comme unaccompagnement nécessaire de l’évo-lution des pratiques pédagogiques.Désormais, l’augmentation générale desdimensions qui en résulte, une nouvelle

> 1 http://www.eduscol.education.fr - guide d’équipement du laboratoire SVT en collège MENESR/DESCO, octobre 2000- guide d’équipement type des lycées MEN/DESCO, janvier 2002

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ergonomie dans la posture de travail desélèves et, d’une façon générale, lesconditions d’hygiène et de sécurité àsatisfaire sont à prendre strictement encompte, de manière officielle.Les fonctionnalités pédagogiquessupplémentaires sont, d’une part, lepartage et la confrontation des résul-tats et des informations obtenus ausein de la classe et, d’autre part, larecherche et l’exploitation de l’infor-mation d’origine externe. Toutes lessalles du bloc scientifique doivent êtreéquipées de postes de travail infor-matisés branchés en réseau etconnectés à internet.

Expérimentation, information et communication au sein de la classe Dans la plupart des cas, et toujourslorsqu’il s’agit de salles d’enseigne-ment, chaque poste informatisé estintégré à un large plan de travail per-mettant simultanément l’observationet l’expérimentation (cf.annexes 1et 2).Tout poste du réseau – y compris, etc’est important, celui du professeurqui comporte un microscope et unecaméra connectés à l’ordinateur et ausystème vidéo – est aussi distributeurd’images et autres documents quideviennent ainsi des objets de travauxpratiques. Par ailleurs, la confronta-tion des informations permet de suivre,de comparer, de discuter les travauxet de les évaluer. La généralisationprogressive des vidéoprojecteurs etl’apparition des tableaux interactifsouvrent pour cela des perspectivesprometteuses : la pédagogie de lacommunication qui est rapidementapparue dans l’enseignement dessciences de la vie et de la Terre va ytrouver un nouvel élan.

Recherche exploitation de l’informationd’origine externeLe réseau du laboratoire prend une dimen-sion pédagogique supplémentaire lors-qu’il est ouvert sur le réseau del’établissement – le CDI, la salle polyva-lente, etc. – et le réseau internet. De nou-velles pratiques liées à l’apparition d’in-ternet sont chargées de potentialités enmatière de formation scientifique et deformation générale de l’esprit de l’élève :- recherche documentaire en ligne- travaux coopératifs entre établisse-ments (météorologie, sismologie …)

Ces nouvelles pratiques pédagogiques ontune valeur formatrice générale. Des pos-sibilités telles que l’arrêt sur image, lasélection et le regroupement d’informa-tions pertinentes permettent d’envisagerde nouvelles modalités d’évaluation, aumieux d’auto-évaluation, rapides et dontla mise en forme reste à fixer et à mettreen œuvre en tenant compte de la fonctionet de la place assignées à l’évaluationdans le processus d’apprentissage.

Des exemples de relations entrepratiques pédagogiques et espacesscolaires Les conceptions actuelles concernantl’espace des sciences de la vie et de laTerre au sein du bloc scientifique sontconcrétisées dans deux guides d’équi-pement élaborés en commun par ladirection de l’enseignement scolaire etl’inspection générale : le guided’équipement pour le collège, paru enoctobre 2000 et le guide d’équipementen lycée paru en janvier 2002. Ces guidesfournissent des exemples d’aménage-ments dont les plans présentés enannexe en représentent des extraits. Ilssont fondés sur des exemples réels de

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dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

locaux neufs ou construits dans un passérécent ou encore de locaux anciens.Quel que soit le cas, les fonctionnalitésdu poste de travail, identiques, doiventêtre satisfaites.

> Les fonctionnalités du poste de travail et l’augmentation desdimensions des sallesElles sont visibles sur la photographieci-dessous :Grand plan de travail.- possibilités d’observation et de mani-

pulation des objets naturels intégrantdes activités – informatisées le plussouvent – de mesure, d’observation, decommunication et des techniquesaudiovisuelles ;- mobilité des élèves autour du plande travail, permettant le travail enéquipe.Les conséquences directes et indirectes(ergonomie, sécurité) sur les dimensionsdes salles, salles de travaux pratiquesnotamment, sont importantes : la dimen-sion pour une salle de travaux pra-tiques/cours pour 24 élèves de collègepasse à une valeur minimum de 100 m2

(cf. annexe 1). La superficie optimale d’unesalle de TP de 9 postes pour 18 élèves delycée est 110 m2 (13 m sur 8,50 m, annexe 2).

Ci-dessous, vues d’une salle de travauxpratiques construite et aménagée en 1997(lycée Ile-de-France à Rennes).

> L’accès aux matériels du laboratoireet aux documents L’espace SVT comporte, de préférencedans une position centrale, outre lessalles de travaux pratiques, une salle decollections et de documentation scien-tifiques et une salle de préparations,cultures et élevages. Cette dispositionfavorise l’accès des élèves, lors des fré-quents travaux de recherche en équipe,aux données concernant des matérielsconcrets et naturels, vivants ou objetsgéologiques, ainsi que des donnéesdocumentaires. La salle de TP “à blocs”expérimentée au lycée, avec ses tablesde travail centrales, proches des paillas-ses latérales, facilite les regroupementspar quatre des élèves engagés dans uneconfrontation des résultats ou dans unesynthèse de leurs travaux. La salle decours, conçue pour quarante élèves,comporte dix postes de quatre élèvesavec un ordinateur central en réseaurelié à internet. Dans toutes les salles,le poste du professeur dispose d’un ordi-nateur en réseau avec une carte d’ac-quisition numérique, d’une caméra, d’unvidéoprojecteur, de l’accès à internet, d’uneimprimante laser en réseau, d’un magné-toscope et d’un espace de manipulation.La démarche privilégie l’autonomie et laresponsabilisation des élèves dans larecherche d’une explication argumentéedu problème biologique ou géologiqueposé.

> La recherche du confortLa diversification des activités pratiqueset leur complémentarité au sein des grou-pes de travail (deux à quatre élèves) sont

Poste de travail lycée Ile-de-France à Rennes

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rendues possibles, on l’a vu, par le déve-loppement des surfaces d’observation,d’expérimentation et de mesure.Cependant, le développement des acti-vités informatiques, plus statiques, arendu nécessaire une recherche desconforts postural et visuel des élèves.La position assise doit respecter les nor-mes ergonomiques posturales concer-nant, notamment, la hauteur du siège,la hauteur du plan de travail pour leconfort des bras, la hauteur réglable dudossier favorisant l’appui lombaire, ledégagement facile des membres infé-rieurs. Il est aussi très important d’évi-ter la fatigue visuelle en adaptant la dis-tance par rapport aux yeux ainsi que lahauteur et l’inclinaison du moniteur, quiconditionnent l’angle visuel du confort audessous du plan horizontal. L’ergonomiedu poste rejoint donc les préoccupationsrelatives à l’éducation à la santé desélèves.

> Une architecture en réponse auxinnovations pédagogiquesPour le travail en groupe dans le cadredes travaux personnels encadrés (TPE),l’organisation de salle recherchéepermet à la fois la mobilité ou l’isolementdes groupes et le travail sur desordinateurs en réseau avec accèsinternet (cf. annexe 3). Ainsi, ont étéaménagés des séparations mobiles des

tables ou séparations “antibruit”, unchariot permettant la vidéomicroscopie– de plus en plus utilisée –, des plans detravail fixes ainsi que des volumes derangement des travaux en cours.L’architecture expérimentée dégageainsi trois types d’espaces sur une sur-face voisine de 81 m2, respectivementréservés aux manipulations par grou-pes de deus élèves, à la recherche pargroupes de quatre et à la documenta-tion audiovisuelle, écrite et graphique.

Une variante, la salle de TP-TPE, combinesur 110 m2 (13 m sur 8,50 m) la possibilitéde conduire une recherche personnellesur ordinateurs (deux appareils en réseau,accès à l’internet), le travail en grouped’expérimentation et de manipulation (sixpaillasses et éviers latéraux, armoire derangement, deux interfaces ExAO pourquatre élèves), ainsi que l’encadrementet le conseil des professeurs à partir d’unposte avec ordinateur en réseau, vidéo-projecteur suspendu au plafond, magné-toscope, caméra, vidéomicroscope, impri-mante laser en réseau. Une séparationmobile anti-bruit, à mi-hauteur, sauve-garde le travail des groupes de quatreélèves attachés à des postes fixes.

> La salle de travail des professeursSituée à proximité de la salle de collectionset de documentation scientifiques, la salle

Postes de travail lycée Ile-de-France à Rennes

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dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

de travail des professeurs est conçue avecle double objectif de favoriser la concer-tation entre enseignants de la disciplineou la concertation interdisciplinaire rela-tive, par exemple, à l’éducation à la santéou à l’environnement et au développe-ment durable, ainsi que l’actualisationpermanente de la documentation scien-tifique, notamment au moyen de l’accèsaux différents serveurs académiques. Unetable centrale de réunion (2 m sur 1,20 m)facilite cette démarche concertée. Leprofesseur peut aussi s’isoler, mettre aupoint un document, corriger des travauxd’élèves ou recevoir une ou deuxpersonnes à proximité du laboratoire. Lasalle est équipée de placards individuels,de rayonnages pour la documentation,d’une bibliothèque spécialisée, d’unprésentoir à revues, d’un panneau d’affi-chage, d’un bureau avec un poste infor-matique et de trois autres bureaux detravail (1,60 sur 0,80 m).

> La situation nationale globaleBeaucoup de réalisations remarquablessont à signaler surtout en ce quiconcerne les lycées, par exemple uneconstruction récente au lycée l’Ile-de-France à Rennes, des aménagementsdans des locaux moyennement anciensau lycée Renoir à Limoges ou trèsanciens comme au lycée Joseph-Lothà Pontivy. Il faut néanmoins déplorer le

retard considérable pris par certainsétablissements qui ne possèdent quequelques postes aux ordinateurs, trèsanciens, incompatibles avec les logi-ciels récents. Tout le travail d’agrandis-sement, d’aménagement et d’équipe-ment des locaux reste parfois à faire !Ces situations extrêmes sont en contra-diction avec le principe d’égalité deschances dans le domaine éducatif. Bienidentifiées géographiquement, elles sontindéniablement imputables au fait quecertaines académies ont une politiqued’ensemble concertée avec le conseilrégional, tandis que d’autres académieslaissent les relations entre ce dernier etles établissements s’établir au cas parcas, suivant le degré de dynamisme deséquipes pédagogiques. Une telle dispa-rité dans les situations est beaucoupplus flagrante en ce qui concerne lescollèges pour l’aménagement desquelsrares sont les politiques d’ensemblemenées avec les conseils généraux. Debelles réalisations sont signalées dansdes collèges de zone urbaine, par exem-ple le collège de Talence (33), ou danstel petit collège rural comme le collègeRoquebleue à Saint-Georges-de-Reimtembault (35). Ces réalisationsapparaissent essentiellement liées audynamisme des enseignants.

En conclusion, l’aménagement internedes locaux scientifiques est appelé àévoluer parallèlement aux techniques :se développe actuellement, englobanttoutes les fonctionnalités d’observation,d’expérimentation et de communication,le concept de “classe mobile sans fil”,organisée autour d’ordinateurs portablescommuniquant entre eux et avec leréseau grâce à une liaison radio. Mais,loin de remettre en question l’évolution

Poste de travail lycée Ile-de-France à Rennes

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architecturale en cours, cela l’accen-tuera en développant la mobilité desélèves et des enseignants. Le temps del’élève assis à un endroit fixe pendanttoute la durée de la leçon de sciencesest terminé. Tout concourt à augmenterles surfaces en ménageant des facilitéspour passer du poste de travail dédiéaux manipulations et aux expériences à

la table où l’on argumente, écoute etécrit.

Suivent en annexes : annexe 1, une salle de TP/cours au collègeannexe 2, une salle de TP au lycée annexe 3, une salle de TPE

Annexe 1 : Une salle de TP / cours en collège

Exemple n° 1 : la salle de TP de type “frontal” ; superficie de l’ordre de 102 m2

Pour mémoire. Hauteur des paillassessèches : 0,80 m. Tabourets en bois,ergonomiques avec repose-pieds. Tableau triptyque blanc. Patères pourvêtements à prévoir au fond de la salle.

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Annexe 2 : La salle de TP “à blocs”

Superficie de l’ordre de 110 m2 (13 m x 8,50 m)

Nomenclature

1 Poste professeur avec ordinateur en réseau intégré dans la paillasse, avec carte d’acquisition numérique, internet, une imprimante laser en réseau, un magnétoscope et un espace manipulations.

2 Siège pour le professeur

3 Écran et tableau blanc

4 Vidéoprojecteur suspendu au plafond

5 Meuble évier abaissé par rapport à la paillasse

6 Poste pour 2 élèves avec ordinateur en réseau, internet

7 Meuble évier intégré au poste de travail

8 Tabouret ou siège pour élève

9 Table de travail

10 Portemanteaux

11 Armoire de rangement

Annexe 3 : Une salle de TPE

Surface de 81 m2 (9,50 m sur 8,50 m)

Nomenclature

1 Paillasse avec électricité, 2 ordinateurs en réseau, internet, imprimante laser

2 Chariot mobile pour ExAO et vidéomicroscopie

3 Évier 0,50 m x 0,50 m

4 Séparation mobile antibruit à mi-hauteur

5 Plan de travail pour 4 élèves avec 4 ordinateurs en réseau, internet

6 Table mobile

7 Armoire de rangement

8 Télévision, magnétoscope

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Architecture scolaire et formation tout au long de la vie JEAN PIGEASSOU, inspecteur général de l’éducation nationale

Les EPLE développent depuis des décennies des actions de formation continue desadultes. Cette mission des établissements publics nécessite une ingénierie pédagogiquespécifique et des locaux et équipements adaptés pour répondre aux exigences dela formation des adultes.Les régions, depuis la décentralisation, ont inégalement prisen compte ces exigences lors de la rénovation ou de la construction des établissements. Mais depuis quelques années des évolutions notables apparaissentdans de nombreuses régions.Cet article reprend les résultats de l’enquête conduitesur ce thème par Jean-Claude Cassaing en 2002.

La formation professionnelle tout aulong de la vie”, selon l’intitulé de latoute récente loi du 4 mai 2004

concernant notamment la formation desadultes en France, plonge ses racinesdans la très longue tradition humanistedatant de la fin du XVIIIe siècle. En 1792, Condorcet, dans son rapport surl’organisation générale de l’instructionpublique présenté à l’Assemblée natio-nale, définit déjà les principes d’un accèspermanent des citoyens aux savoirs.Depuis, l’avènement de l’éducation

permanente et de la promotion sociale(1959), la loi du 16 juillet 1971 sur laformation des adultes, la loi sur l’emploiet la formation du 20 décembre 1993 etla décision des chefs d’État de l’Unioneuropéenne en mars 2000 au sommetde Lisbonne instaurant “l’éducation etla formation tout au long de la vie”comme priorité de l’Union, consacrentla nécessité d’une indispensableformation tout au long de la vie. Parallèlement, l’Éducation nationaleaccueille depuis des décennies dans les

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établissements secondaires et les éta-blissements d’enseignement supérieurdes centaines de milliers d’adultes enformation chaque année. La loi du 26 jan-vier 1984 (article 4) confirme cette mis-sion des établissements d’enseignementsupérieur tout comme la loi d’orientationdu 10 juillet 1989 (article 1), pour les éta-blissements secondaires et en définit leprincipe d’organisation (article 19). Lacirculaire du 18 juin 1980 précise lesmodalités d’utilisation des “locaux etéquipements de tous les établissementsrelevant du ministère de l’Éducation”.

Les lois de décentralisation à partir de1982 confèrent aux régions des compé-tences dans le domaine de l’éducationet de la formation. L’État a transféré auxrégions d’une part, la charge de cons-truire, rénover entretenir et pourvoir aufonctionnement des lycées – les dépar-tements ayant la charge des collèges –et d’autre part, la responsabilité de la for-mation des adultes (loi du 3 janvier 1983)et des jeunes (loi du 20 décembre 1993).Cette dernière loi confère également auxrégions l’élaboration d’un plan régionalde développement des formationsprofessionnelles des jeunes. La loi surla démocratie de proximité du 27 février2002 élargit ce plan régional aux adulteset confie aux régions la définition des“priorités relatives à l’information, àl’orientation et à la validation des acquisde l’expérience” (VAE).

Comment dans ce contexte né des loisde décentralisation les collectivitésterritoriales accompagnent-elles les éta-blissements publics secondaires regrou-pés, pour la formation des adultes, enGRETA (groupement d’établissements)dans leurs besoins de locaux et

d’espaces dédiés à la formation desadultes ? Quelles évolutions depuis vingtans ? Y a-t-il une réelle prise en comptede la formation continue des adultesdans l’architecture scolaire ? La formation tout au long de la vie estsouvent mésestimée dans l’architecturescolaire. Les collèges et lycées membresdes GRETA ont connu et connaissentencore, malgré la baisse démographiquedes élèves, des difficultés pour accueillirles adultes en formation dans des locauxdédiés et adaptés au cahier des chargesde la formation continue, en particulierlors de la construction ou de la rénova-tion des établissements scolaires par lesrégions et les départements.

Toutefois l’implication de certaines com-munes, conseils généraux et conseilsrégionaux a permis, sur certains sites,quelquefois hors établissement,d’adapter les locaux aux exigences d’unepédagogie coopérative de la formationdes adultes en particulier lors del’implantation de centres de ressourcespédagogiques, de plates-formes tech-nologiques, de centres permanents(CPEN) et d’ateliers pédagogiquespersonnalisés (APP). Mais des évolutions se dessinent à lafois dans l’organisation de l’espace deformation et dans les moyens de forma-tion. Ainsi des sites de formations ouver-tes et à distance (FOAD) dépendant desGRETA modulent l’architecture auxcontraintes de la pédagogie de l’indivi-dualisation. L’impulsion de l’Union euro-péenne en matière d’éducation et de for-mation tout au long de la vie pour unesociété de la connaissance, la territo-rialisation des actions de l’État vers lesrégions et des régions vers les territoires,le développement de l’e-formation

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transforment peu à peu l’environnementde la formation, les missions desétablissements publics adhérents desGreta et la structure de leurs locaux.

La formation continue des adultes del’Éducation nationale et l’architecturescolaire : des disparités régionales L’enquête conduite dans vingt-trois aca-démies par Jean-Claude Cassing en 2002met en évidence une grande disparitéd’approches par les régions des spécifi-cités de la mission de la formation conti-nue des adultes et de son cahier des char-ges dans le domaine de l’architecturescolaire.

> Des stratégies régionales diverses On peut distinguer, dans ce domaine,trois catégories de régions : - celles qui ont délibérément ignoré lamission de formation des adultes desétablissements scolaires, sauf cas trèsparticulier, considérant ne pas vouloirmodifier l’équilibre de ce marché trèsconcurrentiel. Les GRETA, dans ces régions, sont par-fois contraints d’implanter des actionsdans des locaux commerciaux fort oné-reux ou, faute de ressources suffisan-tes, dans des locaux de fortune, commece GRETA industriel obligé de dévelop-per ses actions dans des préfabriquésen mauvais état. Ce refus systématiques’applique aussi aux locaux des servicescommuns des GRETA à savoir : accueil,secrétariat administratif, bureau des CFClors de la restructuration ou de la recons-truction des établissements.- celles, plus nombreuses, qui ont choisid’adapter les locaux de certains éta-blissements et de certains sites quiavaient d’étroites relations avecl’environnement industriel local pour

accompagner la mise en œuvre de prio-rités régionales. D’une façon généraleces régions ont maintenu, lors de la réno-vation des établissements, les surfacesdédiées à la formation continue desadultes en prenant en compte lesbesoins des services communs ainsi queles locaux pédagogiques. - celles qui ont intégré la mission deformation des adultes dans la concep-tion des établissements reconstruits ourénovés et ont défini des structuresoriginales, par exemple une surfaceprédéterminée par rapport à celle deslocaux affectés à la formation généraledes élèves.

> Différentes conceptions de l’espacepour la formation des adultes D’une manière générale le modèle domi-nant reste une juxtaposition de salles -classes dans les régions qui intègrentla mission de formation des adultes dansl’organisation de l’espace des nouveauxlycées. Les maîtres d’ouvrage n’ont pastoujours identifié les contraintes spatia-les spécifiques liées à cette mission :accueil individuel de stagiaires, petitessalles pour le positionnement oul’accompagnement, accessibilité deslocaux pendant les périodes devacances scolaires … pas plus que lapossible mixité de certaines sallespédagogiques.Toutefois certains lycées récents ourécemment réaménagés sont des exem-ples de mixité réussie des locaux : lelycée hôtelier d’Occitanie (académie deToulouse) ou le lycée Ampère à Lyon oùles locaux de formation initiale, du centrepermanent de formation générale, sani-taire et social et de l’espace languesentourent une médiathèque commune. Les objectifs approuvés par les quinze

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Une localisationpour un fonctionnementautonome

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gouvernements de l’Union européenneen mars 2000 sur ”l’éducation et laformation tout au long de la vie” avec ladéfinition par la commission de critèresconcrets et de financements spécifiquesont incité certaines régions à concevoirune nouvelle approche globale del’organisation de l’espace et des fonc-tions liées à ce concept. Ainsi émergel’esquisse de nouveaux établissements,centres polyvalents de formationaccueillant des élèves, des adultes, infor-mant les demandeurs sur la validationdes acquis de l’expérience et ouvrant,le cas échéant, centres de ressourceset plates-formes technologiques surl’environnement local. Le lycée desmétiers s’inscrit dans cette perspective. Cette nouvelle conception intégrativedes missions des établissements induitl’utilisation commune et partagée desnouvelles technologies et équipementspédagogiques et la création d’espacespédagogiques modulables permettantl’accueil, la mise en place de parcoursindividualisés de formation et l’évaluation.

> Des évolutions lisibles depuis 2000 On peut clairement identifier des évolu-tions significatives depuis plusieursannées dans le domaine des locaux dédiésà la formation des adultes comme danscelui de l’utilisation des équipements :- Les locaux Certains proviseurs de lycées indus trielsou tertiaires ont convaincu les régionsde prendre en compte l’ensemble deleurs besoins – formation initiale,formation continue – et les négociationsavec les programmistes des régionsaboutissent parfois à de remarquablesrésultats, y compris au niveau descontraintes spécifiques de la formationdes adultes.

Plus généralement, lors de la constructionde nouveaux lycées, plusieurs régionsHaute-Normandie, Limousin … ont prévu,à la demande des recteurs, les surfaceset les adaptations nécessaires à la for-mation continue. Les locaux mis à ladisposition de la formation des adultestémoignent, en effet, de la relation école- collectivités territoriales. Et malgré desapproches régionales diverses, certainesréalisations récentes illustrent unpartenariat réussi entre les académieset les collectivités locales. Le complexetechnique “Petits bois” du GRETA desArdennes, le centre régional de forma-tion en alternance (CERFA) de Pontarlier(académie de Besançon), le pôle de for-mation individualisée du lycée Minard(académie de Lyon) sont des exemplesqui témoignent de ces partenariats. Les communes et les conseils généraux,dans le cadre d’une politique territoriale,commencent aussi à investir pourréaménager d’anciens locaux, créer des“Points formation” ou des centres deformation pour adultes. L’importanteopération de l’Octroi à Elbeuf avec lamairie de Courdebec-les-Elbeuf réaliséeavec des crédits FEDER illustre cettenouvelle volonté.- Un exemple innovantPendant de nombreuses années larégion PACA n’a pas souhaité intégrerla mission formation continue dans lesrestructurations ou les constructionsdes établissements. Après une périoded’évolution où les corrections desprogrammes en cours sont restées trèsmarginales, la région PACA, dans larevue “Lycée du XXIe siècle” esquisseun référentiel pour les locaux deformation continue. “La formation continue fait partie inté-grante des missions des établissements.

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La programmation des locaux deformation est prise en compte lorsqu’ellecorrespond aux pratiques de l’établis-sement. Lorsqu’un établissement estcentre de formation continue, des locauxréservés à la formation continue,clairement identifiés seront prévus : - un espace d’accueil marquant l’entréedu pôle de formation continue et ouvertsur une circulation privative, - un secrétariat de 12 m2 carrés, - un local d’archives de 6 m2 carrés, - deux à trois salles de cours (à déter-miner en fonction des besoins) de 30 m2

pouvant accueillir une quinzaine depersonnes. Les locaux de formation continue,s’adressant à des personnes extérieuresau lycée, sont implantés à proximitéimmédiate de l’entrée principale del’établissement. Leur localisation garan-tit un fonctionnement autonome”. Cette référence écrite à un cahier descharges architectural de la formationcontinue des adultes dans les lycées estune procédure innovante.

- Les équipements Les conseils régionaux et les collectivi-tés locales développent massivementles équipements technologiques depointe, audiovisuels, internet et les TICEdans les établissements au bénéfice desélèves et souvent des adultes en forma-tion. Le projet Cybercantal (académie deClermont-Ferrand) pour la diffusion desnouvelles technologies associe le conseilgénéral et les communes du départe-ment. De même, dans le domaine tech-nologique on peut citer le lycée Hautequalité environnementale Maryse- Bastié(académie de Limoges), la plate-formetechnologique d’usinage à grande vitessede Haguenau (académie de Strasbourg)

ou la plate-forme plasturgie du lycéeFourneyron (académie de Grenoble). Compte tenu du maillage territorial desétablissements de l’Éducation nationale,du niveau des équipements dans ledomaine des nouvelles technologies etdes compétences des personnels, nepourrait-on pas élargir les fonctions desétablissements, dans des conditions àdéfinir, à la mise en œuvre de l’un desobjectifs concrets de “l’éducation et laformation tout au long de la vie”, à savoir“permettre à tous l’accès aux TIC” ?

Une nouvelle approche : une gestionde la mixité des espaces L’impact financier du développement deséquipements technologiques et indus-triels et de ceux liés aux nouvelles tech-nologies ont servi de catalyseur à uneréflexion globale sur les espaces mixtesde formation. D’autre part, la densité dumaillage territorial des établissementspublics, la baisse démographique desélèves, la demande croissante d’initia-tion aux nouvelles technologies et la fortedemande sociale dans le domaine de laVAE ont incité certains régions à valori-ser l’offre de formation de proximité deces établissements et des GRETA. Les constructions récentes – le lycéeArbez-Carme, à Oyonnax, le lycéeFiumorbo (académie de Corse), le lycéeR. Perrin d’Ugine, avec son centre deressources métrologie – attestent d’uneévolution significative des régions vis-à-vis des locaux des GRETA et de laformation des adultes On peut citer dans le domaine des nou-velles technologies des dispositifs deformation ouverte et à distance liés auxGRETA : S@fir en Bretagne, Sarapp dansl’académie de Toulouse, Sofia enAquitaine … La commune de Mauléon-

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dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

Licharre (Pyrénées-Atlantiques) met unesalle multimédia à la disposition desstagiaires du GRETA Béarn-Soule. Dans le domaine de la VAE, la conven-tion entre la région Nord-Pas-de-Calaiset l’académie de Lille prévoit la créationd’un réseau académique de onze centresde validation dont neuf sont implantésdans des EPLE pour l’accueil et l’infor-mation de tous publics, par le biais desTIC et des techniques de formationouverte et à distance.

> Des freins à cette évolution Ces évolutions notables se heurtent par-fois à des difficultés structurelles ou stra-tégiques au niveau des régions commedes académies. On peut identifier deuxtypes de freins à cette évolution :- au niveau externe, l’organisation desservices de certains conseils régionauxne facilite guère une approche globaledes missions des établissements, sansune coordination vigoureuse, notam-ment lorsque le secteur lycée est dis-tinct du secteur formation profession-nelle - apprentissage, ou lorsqu’il existeun service du patrimoine qui gère lesconstructions de façon autonome parrapport au service de la formation. - au niveau interne, on peut parfoisregretter que dans certaines académiesla mission de formation continue appa-raisse peu ou de façon peu lisible dansles projets d’établissements voire mêmedans les priorités des projets acadé-miques, même si plusieurs projetsacadémiques, dans la perspective de“l’éducation et la formation tout au longde la vie” incitent les établissementssecondaires et les GRETA à contribuerà leur place au développement localdans le cadre de la politique des payset des communautés de communes.

> Vers des établissements polyvalentsIl s’agit d’établissements pensés etorganisés pour l’accueil des divers publics(mixité des publics et globalité des mis-sions) et ouverts sur l’environnement local.L’académie de Lille avec ses onze lycéesde toutes les chances est en avance surles expériences conduites dans plu-sieurs autres académies. L’expérienceconcerne 11 000 élèves et adultes ets’appuie sur la mixité des publics avecpour objectif majeur, en partenariat avecla région, l’insertion professionnelle etsociale. Il s’agit d’articuler formationinitiale et formation continue et d’asso-cier dans un même établissement unpublic jeune en cours de scolarité ou deformation par l’apprentissage et desadultes en reconversion, en parcoursde promotion sociale ou d’actualisationdes connaissances.

D’autres académies (Grenoble, Lyon …)mènent des expériences de ce type dansles filières du bâtiment, du textile, del’automobile, avec le souci de mettre enplace la fluidité des parcours de forma-tion et une cohérence entre la formationinitiale et la formation continue dans unelogique d’accueil de tous les publics. D’autres régions s’interrogent sur la priseen compte des besoins en formationinitiale de petits flux, non satisfaits, enrelation avec la formation continue et laréalisation de plates-formes techniquespolyvalentes communes (académied’Aix-Marseille). L’exemplaire “Maison des savoirsd’Agde” (académie de Montpellier),espace de rencontres ouvert à tous lespublics, avec un centre de ressourcesmultimédias, une médiathèque desentreprises, un pôle de formation, unespace de consultation vidéo, un réseau

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de communication mettant en relationdifférents sites de la communauté decommunes et tous les établissementsscolaires de ce territoire est sans aucundoute un cas d’école d’une collabora-tion réussie entre l’éducation nationaleet une collectivité locale. On pourraitaussi citer l’antenne de Saverne (aca-démie de Strasbourg) installée dans uneMaison de l’économie, de l’emploi et dela formation.

Le cahier des charges du “Lycée desmétiers” devrait redessiner cet espacecommun des établissements nouveaux,adapté aux exigences pédagogiques dela formation initiale sous statut scolaire,de l’apprentissage, de la formation conti-nue, ainsi qu’à l’accueil des demandeursde validation des acquis et à l’ouverturede ces plateaux techniques sur lesentreprises de la filière considérée. Cetteapproche nouvelle entraînera certaine-ment l’élaboration de nouveaux réfé-rentiels, de nouveaux cahiers descharges et le besoin d’un diagnostic par-tagé avec les régions en charge de laconstruction des lycées et de l’élabo-ration des plans régionaux de dévelop-pement de la formation professionnelle.

L’histoire de l’architecture scolaire etdes locaux de la formation des adultesde l’Éducation nationale est complexe.Elle épouse, depuis plus de vingt ans,l’évolution des étapes de la décentrali-sation et des missions confiées auxrégions et témoigne de l’exercice decompétences partagées et de la qualitédu dialogue entre les académies et lescollectivités territoriales.

Il est souhaitable que les collectivitésterritoriales reconnaissent la pluralité

des missions des établissements publicset prennent en compte, lors des réno-vations ou des constructions neuves,les espaces dédiés à la formation conti-nue dans le cadre d’un cahier des char-ges de référence négocié. Cela ne peutque valoriser le bassin de formation etvivifier l’environnement local.

Cette reconnaissance des missions desGRETA et la recherche d’objectifs par-tagés avec les régions sont les clés d’unpartenariat réussi, comme en témoignedéjà la mise en œuvre de certains dispo-sitifs : ateliers pédagogiques personna-lisés (Bretagne, Limousin …), formationsouvertes et à distance (Bretagne, Midi-Pyrénées …).

Mais il y a, semble-t-il, en France unedifficulté de diagnostic partagé entre lescollectivités, les partenaires sociaux etl’État, comme l’a montré la consultationnationale sur le mémorandum européenconcernant “l’éducation et la formationtout au long de la vie” en 2001. Si la for-mation initiale relève bien, sans aucundoute, de la mission des EPLE, certainescollectivités et partenaires sociauxfeignent d’ignorer la mission de forma-tion continue des adultes des établis-sements, alors même que les GRETAaccueillent plus de 500 000 adultes enformation par an. Une communicationvolontariste du ministère de l’Éducationnationale envers les autres ministèreset les collectivités locales faciliterait lareconnaissance des diverses missionsdes EPLE. La future loi d’orientation devranaturellement conforter la mission del’Éducation nationale et de ses établis-sements dans le domaine de la forma-tion des adultes et de la validation desacquis.

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Un espace de rencontreouvert à tousles publics

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L’impulsion européenne sur les prioritésde “l’éducation et la formation tout aulong la vie” et la mise en œuvre concrètedu droit individuel à la formation (DIF)créé par la loi du 4 mai 2004 sur laformation tout au long de la vie devraientinciter les collectivités territoriales, lesbranches professionnelles et les parte-naires sociaux à un partenariat struc-turé et riche avec les académies et lesétablissements. Les EPLE membres desGRETA pourraient être des acteurslocaux déterminants dans ces domaines.Sur le modèle des conventions-cadressignées entre le ministère et certainesbranches professionnelles, pourquoi ne

pas envisager, au plan national, unaccord avec les régions sur desengagements communs concernant desobjectifs concrets de “l’éducation et dela formation tout au long la vie” et leurmise en œuvre par les établissementspublics ?

Alors, l’établissement du XXIe sièclepourrait se construire et s’organisercomme un service public au servicede tous les publics – l’établissementde l’éducation et de la formation toutau long de la vie – comme un profonddésir d’avenir et donc comme unearchitecture.

dossier : Construire pour enseigner > De la classe à l’établissement

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Le CDI : entre multipolarité et virtualitéJEAN-LOUIS DURPAIRE, inspecteur général de l’éducation nationale

Témoins et acteurs du développement de la société de l’information, les CDI sont enpleine transformation. Évolution progressive plus que révolution, les espaces s’étendentet se diversifient alors que, dans le même temps, ils se dématérialisent. Cette tension entre multipolarité et virtualité donne de la force à l’action documentaire.

Toutes les activités professionnellesainsi qu’une grande partie de cellesqui se rapportent aux loisirs sont

désormais concernées par les technolo-gies de l’information et de la communi-cation. La quasi-totalité de ce qui s’écritdans le monde aujourd’hui passe par unétat numérique : la tendance à latraduction directe des idées sous cetteforme s’accentue. On parle ainsi desdocuments “nativement numériques”.De cet état premier, ils peuvent devenirarticles de revue ou livres et se diffuserdans les circuits traditionnels, ou pagesde serveur et se propager dans lesréseaux électroniques. Ces formes dediffusion ne sont d’ailleurs pas exclusivesl’une de l’autre. Il y a aussi les documentsqui préexistaient ou qui continuent d’êtrecréés “à la main” : ceux-ci sont égale-ment concernés par les évolutionspuisque l’extension de leur diffusion peutpasser par leur numérisation.

Les métiers du livre sont transformés, leschaînes de production et les circuits dediffusion sont bouleversés. L’économieglobale du secteur est elle-même parti-culièrement affectée avec des interro-gations fortes sur les équilibres futurs.

La production individuelle émerge avecune simplicité de création et une poten-tialité de diffusion à coût quasi-nul. Laconséquence est évidemment la surin-formation et le risque est notammentcelui de la perte de la mémoire.

La conservation pose de nouveauxproblèmes ; l’archivage numérique estbeaucoup plus complexe que celui desautres supports en raison d’une part dugigantisme des données, de la variabi-lité des messages et de l’évolution trèsrapide des outils de lecture. Les bibliothèques et centres de docu-mentation sont évidemment totalement

dossier : Construire pour enseigner > l’École de demain

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L’éducation à l’informationfigure explicitementdans les programmesscolairesde tous lesniveaux

concernés par ces technologies et leurévolution au cours de la dernière décen-nie est considérable. Les bibliothèquesont longtemps été considérées enFrance comme d’importance secondairecontrairement à l’école : pour JoëlRoman, “outil de conservation et de miseà la disposition du livre, la bibliothèquea longtemps eu, en France, une placede second rôle”. Entre une vision élitiste(conservation du patrimoine, rechercheuniversitaire) et une dimension pluspopulaire (diffusion du livre notammentpar le réseau des bibliothèques dépar-tementales de prêt), les bibliothèquespeinaient en France à trouver la dimen-sion culturelle qui était la leur dansd’autres pays notamment anglo-saxons.

L’arrivée des technologies de l’informa-tion et de la communication a certaine-ment constitué, sans être le seul, unfacteur de leur rapide rénovation. Depuisdix ans, de nouvelles bibliothèques sontnées ; elles connaissent un succès popu-laire, le public, jeune ou moins jeune, lesconsidérant comme un espace deliberté, de culture, et de plaisir.

En 1998, le programme d’action gouver-nemental pour une société de l’infor-mation (PAGSI), dans son volet “culture”,a assigné aux bibliothèques une missiond’”appropriation culturelle” des tech-nologies de communication. Le plan pourune république numérique dans lasociété de l’information (RE/SO 2007)lancé par le Premier ministre ennovembre 2002 a insisté sur le rôle del’école : “L’école est le socle de la sociétéde l’information, elle doit être un despremiers lieux d’apprentissage desnouvelles technologies. “Ce plan a posécomme objectif celui de la formation de

“tous les Français à l’usage des TIC” eta postulé que “l’école et les pointsd’accès publics” sont les “clefs del’alphabétisation numérique”

L’ouverture de la Bibliothèque nationalede France, en 1997, peut marquer sym-boliquement le début de cette nouvelleétape de la vie des bibliothèques. Enrégion, de nombreuses bibliothèquesmunicipales ont été créées ou rénovéesrécemment.

En milieu scolaire, deux appellationsdifférentes sont utilisées : le terme biblio-thèque n’est plus employé dans le secon-daire alors qu’il l’est en primaire.Pourtant, le CDI a gardé des fonctionsde bibliothèque. Le CDI moderne estd’ailleurs plus proche de la bibliothèquemoderne que du centre de documenta-tion d’une entreprise ou d’une adminis-tration pour trois raisons essentielles :il est multi-support tout en laissant uneplace considérable au livre, il attacheune importance première à la formationde ses usagers, il offre une gammed’activités culturelles.

Les métiers évoluent également etconvergent. Le documentaliste desannées 2000 en établissement scolaire estun enseignant et un expert en sciencesde l’information. Il est de plus en plusreconnu par ses pairs à ce double titre.Dans la société de l’information, larichesse se trouve dans le croisementdes compétences : le bibliothécaire estaussi un formateur, le professeur estaussi un documentaliste, le documen-taliste d’entreprise ou d’administrationpense aussi culturel.Les besoins de formation à l’informationexplosent. Internetoffrant des documents

dossier : Construire pour enseigner > l’École de demain

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à profusion et sans organisationapparente pour le non-initié, l’école doitimpérativement expliquer aux élèvescomment il peut trier, sélectionner ets’enrichir véritablement à partir de cetensemble si divers. L’éducation àl’information est primordiale : elle figureexplicitement dans les programmes detous les niveaux de l’enseignementscolaire.

C’est tout ce contexte évolutif – évolu-tion des métiers, évolution des techno-logies de l’information et de la commu-nication, évolution des besoins deformation – que l’architecte doit prendreen compte en abordant les questionsdocumentaires dans la rénovation et laconstruction d’un nouvel établissement.

Durant la dernière décennie, denombreux lycées et collèges ont pubénéficier de transformations ou dereconstructions. En ce qui concerne lesCDI, deux catégories d’observationspeuvent être faites. La première serapporte aux espaces documentaireseux-mêmes, la seconde à l’intégrationdes nouvelles technologies à finalitédocumentaire au sein de l’établissementen général et du CDI en particulier. Lesévolutions sont significatives, en ce sensqu’elles traduisent des changementsdans les usages.

Dès leur origine, les CDI ont eu l’ambi-tion d’introduire de la modernité au seindes établissements scolaires ; il s’agis-sait de créer un espace qui permettraitune nouvelle relation au savoir. Espacede culture, de lecture libre, d’appren-tissage autonome, le CDI était le sym-bole d’une nouvelle démarche pédago-gique. En 1975, un numéro du Courrier

de l’éducation consacre une doublepage aux CDI sous le titre “Un espacenouveau pour une pédagogie active”.Le préambule indique que “le CDI estdevenu un élément très important de lavie des établissements scolaires. Lesméthodes actives de pédagogie quisupportent de moins en moins un espacecontraignant et un savoir figé se sontlargement développées.” Le texteindique également que deux mille lycéeset collèges sont déjà pourvus et que dansles années à venir tous le seront. Trenteans après, cet objectif est atteint ; lenombre de documentalistes est passéde 2 250 en 1976 à plus de 10 000 en 2004.L’idée CDI reste très moderne partoutoù les équipes ont su porter les évolu-tions structurelles nécessaires et toutparticulièrement intégrer les technolo-gies de l’information et de la communi-cation. Dans ce contexte, des tendancesnouvelles se dessinent à la fois dans laconception architecturale. Le lieu resteessentiel, la notion plus large de fonctiondocumentaire émerge.

> Des premiers CDI à ceux des années2000 : l’évolution architecturaleL’appellation CDI remonte officiellementà 1974. Elle succède à celle de SDI quiétait le concept fondateur visant àdépoussiérer les vieilles bibliothèquesdes lycées et à remplacer les biblio-thèques des CEG et CES qui n’étaientsouvent, comme à l’école primaire, quedes armoires en fond de classe.

Dès l’origine, le SDI est conçu commeun ensemble de locaux. Le documentédité en 1972 par le ministère del’Éducation nationale et composé d’unesérie de fiches jaunes, vertes, roses,pose des principes qui se veulent autant

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Un espaceéducatif noncontraint parles règles de l’éducationnationale

de normes et de règles à respecter pourtoute création. Il part du postulat que leSDI est créé pour unifier trois activitésqui étaient précédemment disjointesdans l’établissement : “la mise à dispo-sition des professeurs et des élèves dela documentation pédagogique soustoutes ses formes et des moyens tech-niques de tous ordres (audio-visuels,reprographie …), le fonctionnement desbibliothèques pour les élèves et les pro-fesseurs, la mise à disposition des per-sonnels, des élèves et de leurs parentsde la documentation relative à l’infor-mation scolaire et professionnelle.”Cedocument précise qu’en 1971 le SDI évo-lue vers “la formule du centre socio-culturel” et en déduit une organisationfonctionnelle autour des locaux suivants :bibliothèques (élèves et professeurs),salle(s) de lecture, salle de documentation,bureau du conseiller d’orientation, salledes professeurs, salle(s) de travail (pro-fesseurs-élèves), salle de réunion (élè-ves), salles de clubs, salle audio-visuelle,vestiaires-sanitaires,” à proximité immé-diate desquelles devront se trouver lessalles d’activités créatrices (dessin, édu-cation musicale, travaux pratiques, sallepolyvalente et, dans la mesure du pos-sible, les locaux médico-sociaux).”Desschémas fonctionnels sont proposéspour les CEG et CES en tenant comptedes effectifs (400, 600, 900, 1200) sous letitre “centre socioculturel”.

Ce schéma-type est repris dans unnuméro spécial des Cahiers pédago-giques consacré aux CDI sous le titre“l’optimisme officiel”. Il est vrai qu’àcette époque, le CDI se présente souventsous forme d’une salle rectangulaireplus ou moins vaste et aménagée avecdes espaces constitués par les

rayonnages : coin lecture, espaces detravail, bureau du documentaliste. Il fau-dra attendre quelques années pour quecommence à s’imposer une visionmultipolaire des CDI ; mais, il faut recon-naître que l’ambition affichée au niveauorganisationnel était en phase avec lesobjectifs pédagogiques, culturels etpédagogiques.

Deux décisions majeures ont concouruà la réalisation de CDI répondantglobalement aux critères posés initiale-ment : d’une part, les lois de décentra-lisation qui ont permis des rénovationset des constructions de collèges etlycées ; d’autre part, l’augmentation dunombre des documentalistes.

Depuis le milieu des années 80, les col-lectivités se sont efforcées de répondreaux attentes des communautés éduca-tives. Le CDI a souvent bénéficié d’uneattention particulière : un cadre où lesélèves peuvent travailler aisément, desespaces confortables, un lieu de moder-nité et de convivialité. Une rechercheesthétique était aussi effectuée.

Les transformations physiques des CDIse sont opérées et s’opèrent encore essen-tiellement dans deux circonstances : soitune équipe d’établissement a décidé, eninterne, que le CDI ne répondait pas àses missions dans les conditions où ilétait installé, soit, une restructurationvoire une construction ex nihilo s’estavérée nécessaire pour des raisons quipouvaient être indépendantes de la fonc-tion documentaire. Les modificationssont évidemment beaucoup plus impor-tantes et visibles dans le second casdont l’initiative revient à la collectivitéterritoriale.

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De manière générale, la problématiquedu CDI intéresse les collectivités terri-toriales qui y voient un espace éducatif“non contraint par les règles del’Éducation nationale” pour reprendreles termes d’un responsable adminis-tratif d’un conseil régional. En outre, cen’est pas le CDI seul qui est “intéres-sant”, mais un ensemble de fonctionsqui touchent à l’éducation des jeunes età des espaces “moins contraints que lasalle de classe.” À chaque fois qu’unerestructuration lourde est engagée, laquestion du CDI est posée : son rôle etses relations avec les autres services.

> Le CDI : un projet architectural quitraduit une ambition pédagogiqueDes préoccupations diverses peuvents’exprimer qui relèvent d’une volontépolitique de transformer ou au moinsd’infléchir l’image d’un établissement,l’architecture devant servir cette ambi-tion. Ainsi à Reims, au lycée Clémenceau

dont l’architecture initiale (fin des années50) était composée de deux parallélépi-pèdes, pour ne pas employer le termede barres, le projet de CDI en 1997 a viséà changer l’image et à créer de nouvellescirculations à l’intérieur de l’établisse-ment. Le nouvel espace a permis la miseen œuvre d’une pédagogie nouvelle. Lesenseignants de discipline n’hésitent plusà se rendre au CDI pour mettre en œuvre

des travaux qui nécessitent des recher-ches documentaires. Les documenta-listes appuient les démarches de leurscollègues en facilitant les accès aux“bonnes informations” et en proposantdes documents méthodologiques quifacilitent la tâche des élèves.Enseignants et documentalistes jouentde la diversité des espaces du CDI :petites salles, salle de documentation,etc. Les TPE ont joué un rôle de levier età partir d’un ensemble de professeursdéjà motivés, d’autres s’engagent.

> Le CDI : un lieu aisément accessibleLe CDI doit être un lieu où élèves etprofesseurs doivent pouvoir se rendre aisé-ment. Les nouveaux CDI sont donc plussouvent installés en rez-de-chausséeou au premier étage qu’à des niveauxsupérieurs.

Au collège Malraux à Dijon, ouvert enseptembre 2002, le CDI est accessibledès l’entrée dans l’établissement parune “rue” qui se définit comme un“espace d’art” et qui jouxte le préau. Ilfait face à deux salles dites “espacespolyvalents” qui s’inscrivent dans lamême logique de développement dutravail autonome des élèves.

L’ensemble occupe une superficie dequelque 400 m2 dont 230 pour l’espaceCDI lui-même, ce qui est remarquablepour un collège de 530 élèves. Pour met-tre en œuvre des activités pédagogiquesfaisant appel à la recherche d’informa-tion, au travail sur documents, les ensei-gnants peuvent jouer sur la variété desespaces offerts : au CDI lui-même, unesalle de travail organisée avec des pointsde travail sur ordinateur et des tables tra-ditionnelles, l’ensemble pouvant accueillir

Lycée Clémenceau à Reims (2000)

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dossier : Construire pour enseigner > l’École de demain

une classe complète, trois petites sallespour des groupes d’une dizaine d’élèves,une bibliothèque “élèves” qui permet desconsultations rapides (station debout).Les espaces polyvalents permettentactuellement des travaux qui nécessi-tent un espace plus important ou desvisionnements collectifs (regroupement

de deux ou trois classes). Le forum et larue qui ensemble constituent l’”espaced’art” valorisent la fonction créatrice duCDI : en effet, les lieux-ressources se doi-vent d’être des espaces non seulementde consultation, mais aussi de cons-truction d’un savoir personnel, ce quipasse par une restitution sous forme deproduction. La “rue” peut donc immé-diatement accueillir les expositions desélèves à partir des travaux effectués auCDI et dans les salles connexes.

> Le CDI : un carrefour de l’établissementLes CDI sont souvent situés à descarrefours de l’établissement avec desproximités privilégiées : salle desprofesseurs, administration, vie scolaire,maison des lycées, espace culturel (hall,amphithéâtre, galerie). Un pôle peut êtreconstitué. Ainsi au lycée Oehmichen àChâlons-en-Champagne, le CDI estétroitement associé à la vie scolaire, lessalles de permanence étant à proximitéimmédiate.

Ouvert en avril 2004, le CDI de cette citéscolaire de quelque 1 500 élèves estimmédiatement perçu comme un lieu derencontres. Jusqu’alors totalementexcentré dans un ancien dortoir au 3e

étage, le CDI est désormais sur un lieude passage. Pour les documentalistes,c’est le mot “proximité” qui est majeur :la “proximité des salles multimédias” sus-cite immédiatement “plus de contactsavec les personnes chargées de l’infor-matique” ; la proximité de la vie scolaire :CPE, salles de permanence fixes, foyerdes lycéens et de la salle des professeursfavorise les échanges : “ils montent auCDI par un escalier qui leur est réservé”,proximité directe des conseillersd’orientation psychologues : contactsplus fréquents (“nous gérons leursrendez-vous”), gestion (commune) del’auto-documentation : de nouvelles rela-tions se déterminent entre le foyer desélèves et le CDI : “L’implantation du foyer

des élèves a permis de désengorger leCDI : les élèves qui venaient pour s’occu-per disposent à présent d’un espace dedétente et d’accueil, ils gênent moins ceuxqui travaillent”. L’architecture a changéle cadre des relations. L’appropriation péda-gogique s’effectue progressivement ; demanière générale, on constate qu’elle serévèle d’autant plus rapide que l’équipe aété associée au projet.

Collège Malraux à Dijon (2002)

Lycée Oehmichen à Châlons-en-Champagne : le nouveau CDI au sein du pôle vie scolaire à l’entrée du lycée (2004)

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> Le CDI : au cœur de l’établissementLes restructurations importantespermettent de mettre en œuvre desvolontés pédagogiques, l’architectureservant l’ambition du projet d’établisse-ment. Ainsi, en 2002-2003, l’équipe dulycée Le- Grand-Chênois à Montbéliard(Doubs), partant d’un constat que “lestrois bâtiments qui formaient l’établis-sement ne communiquaient qu’au niveaudu rez-de-chaussée, ce qui engendrait

des engorgements lors de la circula-tion des élèves, il fut décidé de créerdes passerelles entre les trois bâtimentsau niveau du 1er étage pour faciliter lesflux.“ Dans ce cadre, le CDI fut appeléà déménager et à prendre sa place” aucœur de l’établissement à la jonctiondes trois bâtiments au niveau du 1er

étage, au-dessus de l’administration, àproximité de la salle des professeurs,sur le passage des élèves allant d’unbâtiment à l’autre”.

Dans le même esprit, peu de tempsauparavant, une restructuration demême nature est opérée au collègeAlbert-Camus à La-Chapelle-Saint-Lucdans l’agglomération troyenne. Untravail remarquable a permis d’aboutirà un collège totalement repensé du pointde vue fonctionnel en conservant les

parties anciennes. Une large concerta-tion entre les services du conseil géné-ral, l’équipe de direction, les personnelset les élèves, l’architecte, a conduit àrelier les bâtiments anciens entre eux“avec des pôles d’enseignement biendéfinis, répartis sur les deux étages, deslieux d’accueil et de rencontres struc-turés” ; comme l’avaient souhaité, nonseulement la documentaliste, mais laprincipale et les enseignants, le CDIdevenait le “cœur de l’établissement”.

Les contraintes techniques ne permet-taient pas de le réaliser sur un seul niveaucomme cela était souhaité, mais à l’usage,la documentaliste dresse le constat qu’ellen’a “rien perdu en ce qui concerne la com-munication directe avec les partenairespédagogiques : conseillère d’orientation,CPE et salles d’étude au rez-de-chaus-sée, salle des professeurs au premierétage”. Qui plus est, elle constate que“le CDI se trouve mieux inséré encoredans les locaux par le fait qu’il est établisur deux niveaux, il s’ouvre sur davan-tage d’espaces”. Ce CDI sur deux étagesse prolonge même depuis 2003 avec unesalle multimédia au second étage.

Comme le souligne la documentaliste,ce sont “les professeurs, représentéspar les coordonnateurs de disciplineréunis en groupe projet espace multi-

Collège Albert-Camus-La-Chapelle-Saint-Luc (Aube)

Collège Albert Camus-La Chapelle Saint-Luc (Aube)

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dossier : Construire pour enseigner > l’École de demain

médias” qui ont réfléchi aux utilisationsde ce type de salles, et la concertationa, comme pour la rénovation de l’éta-blissement, quelques années plus tôt,nourri le dossier du projet La continuitéest fonctionnelle : ces différents espa-ces traduisent architecturalement unepédagogie active, appuyée sur le travailde l’élève, les ressources documentaireset les nouvelles technologies.

> Superficies et organisation fonctionnelleLa décentralisation a entraîné l’abandonde normes nationales en matière deconstruction de CDI. Plusieurs respon-sables de services de constructions dansdes collectivités indiquent qu’ils appli-quent un principe d’accueil simultanéde 10 % de la population totale de l’éta-blissement et qu’ils multiplient le nombreobtenu par trois. Ainsi un établissementde 1 200 élèves aurait un CDI de 360 m2.Dans la plupart des situations, c’est lecontexte qui prime et le dialogue entrela collectivité et l’équipe d’établissement.Un programmiste reçoit souvent unemission pour ajuster besoins etenveloppe financière. Certaines collectivités facilitent laconcertation en proposant des pres-criptions adaptées aux effectifs et issuesd’un dialogue établi à un niveau pluslarge que l’établissement. Ainsi, leconseil régional de Poitou-Charentess’appuie-t-il sur un schéma fonctionneltype et sur des prescriptions calculéespar tranche de 100 élèves :Sur ces bases qui constituent un modèleopérationnel, les équipes réfléchissentà leur propre projet. En de nombreux lieux,on sent l’engagement de ceux qui ontporté les idées et comment le parti lemeilleur a pu être tiré des conditions

posées initialement. De l’exemple histo-rique du lycée pilote innovant duFuturoscope (1987), aux CDI en cours decréation (Marguerite-de-Valois àAngoulême, EREA Françoise-Dolto àSaint-Aubin-le-Cloud), en passant par leslycées Louis-Armand, Camille-Guérin,Bois-d’Amour à Poitiers, Émile-Combesà Pons, Cordouan à Royan, Valin à LaRochelle, autant de lieux où les talentsarchitecturaux et pédagogiques se sontconjugués.

Dans certaines académies, des docu-ments de conseil et de guidage dansl’élaboration du projet de rénovation duCDI sont créés. Ainsi à Orléans-Tours,un guide méthodologique pour la poli-tique documentaire des établissementsscolaires et des fiches de diagnosticpermettent de bien définir les besoins.Ce travail interne à l’établissement permetun meilleur dialogue avec la collectivitéterritoriale et les interlocuteurs qu’elle adésignés. Pour le conseil régional duCentre, comme pour de nombreusesautres collectivités, la procédure est endeux temps ; un programmiste qui déter-mine précisément l’étendue des travauxet effectue une évaluation des coûts,puis l’architecte qui sera chargé demener à bien le projet. A Montpellier, unguide d’équipement et d’aménagement

Effectifs (élèves) 300 700 1100 1500 1900400 800 1200 1600 2000

Bibliothèque - lecture - documentation 166 269 376 483 576

Espace d’information et d’exposition 40 78 116 154 191

Salles de travail 70 125 180 250 305

Bureau de l’orientation 15 15 18 20 20

Circulations 33 44 56 73 82

Total CDI en m2 324 531 746 980 1174

Source : conseil régional de Poitou-Charentes - 1999

Les différentsespacestraduisent dansl’architectureune pédagogieactive

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d’un CDI a été élaboré “afin d’offrir auxusagers un espace harmonieux etefficient”.

> Des CDI dans des locauxinitialement destinés à d’autresusages. Le réaménagement de locaux peut serévéler particulièrement pertinent lors-qu’un réel projet pédagogique a étédéfini. Ainsi au lycée professionnel LeChâteau à Sedan, une partie de cetteancienne école professionnelle desmétiers du textile a permis de créer unCDI original qui, pour le documentalisteporteur du projet de rénovation, “parti-cipe à l’objectif d’une meilleure inser-tion professionnelle et sociale”. Sonaménagement dégage un espace lec-ture (journaux, magazines et romans),une mezzanine de travail de 30 placesregroupant le fonds documentaire et lesusuels, des stations de travail informa-tiques intégrées dans le réseau péda-gogique, un amphithéâtre de 90 placesaux normes “cinéma” disposant de télé-projecteur, magnétoscope VHS, lecteurDVD et tuner satellite, une galerie d’ex-position, un centre de ressources “inser-tion et orientation” pour la recherchede stages en entreprise par les élèves.D’autres témoignages pourraient illust-rer cette même qualité de création. Aulycée Frédéric et Irène Joliot-Curie àRomilly-sur-Seine, une réutilisation d’unrestaurant scolaire se révèle parfaitementfonctionnelle et confortable. Organisé surdeux niveaux, le rez-de-chaussée estdestiné principalement aux élèves : plus

de 120 d’entre eux peuvent y être accueillissimultanément. Pour la documentaliste,il était indispensable de disposer d’unespace réservé aux enseignants : leniveau inférieur, correspondant auxanciennes caves et réserves des cuisi-nes a ainsi “été cloisonné en six petitessalles de travail pour les professeurs, leurpermettant d’y travailler au calme.” Lesenseignants y disposent de matériel pourdes enregistrements et des montages.

L’impact des TIC sur l’organisationdes ressources documentairesLe développement des CDI est conco-mitant de l’entrée de l’informatique dansl’enseignement secondaire puisque lapremière opération, dite des 58 lycéescommence au début des années 70. Lanotion de sciences de l’information naîtégalement à cette même époque, leConseil supérieur des universités recon-naissant la filière des SIC en 1975. Leconcept de société de l’information s’af-firme avec le rapport Nora-Minc en 1978.

Dès cette période, les documentalistessont attentifs aux questions d’informa-tion notamment à travers les supportsqui la véhiculent. C’est l’outil audiovisuelqui retient leur attention même si sonintroduction reste limitée, sauf pour cer-taines disciplines. L’impact de cetteréflexion sur l’organisation des CDI estpeu sensible. Il faut attendre la fin desannées 80 pour une réelle première intro-duction de l’informatique dans les CDI.

> De l’informatisation du CDI au réseaudocumentaire de l’établissement En matière documentaire, les débuts del’informatique remontent à une vingtained’années. Les premiers logiciels pourl’”informatisation des CDI” arrivent en

Lycée professionnel Le Château-Sedan (Ardennes)

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C’est donc bien par ladocumentationqu’entre réellement l’informatiquepour tous dansl’établissementscolaire

dossier : Construire pour enseigner > l’École de demain

effet sur le marché au milieu des années80. Ils ont pour nom Mémolog, Diderot,Sidéral et sont le fruit de la rencontrede documentalistes et d’enseignantsinformaticiens. L’objectif est double :gérer le CDI tant au niveau du fonds quedu prêt, initier les élèves à la recherchedocumentaire. Pour le premier aspect,l’informatisation du fonds posait bien sûrla question de la création de noticesdocumentaires dans un format standardet utilisant un langage normalisé. Enparallèle à la création des logiciels,d’autres outils apparaissent : un formatd’échange qui restera longtemps spé-cifique à chaque logiciel, un langage ouplutôt des langages (Mémobase, Thélycepar exemple) qui donneront naissanceau thésaurus Motbis. Par ailleurs, avantmême l’arrivée des outils d’informatiquedocumentaire, certains ont commencéà percevoir que les travaux techniquesde traitement documentaire peuvent êtreeffectués de manière coopérative. Desgroupes de production se créent dansplusieurs académies (Rennes, Bordeaux,Toulouse, Poitiers, etc.) et proposent desfiches. Ainsi, en 1980, naissent lesMémofiches dans une version cartonnéequi deviendra disquette, puis CD-ROM,puis qui seront diffusées par internet. Leproduit reste le même globalement, seulela diffusion change.En ce qui concerne la formation desélèves à la recherche documentaireinformatisée, il faudra réellementattendre l’arrivée de versions “postesmultiples” puis “réseau” des logiciels,c’est à dire le début des années 90.

Parallèlement, une autre évolution sedessine : le CDI devient centre deressources multimédias ; cette expres-sion qui est utilisée par la circulaire du

13 mars 1986 précise la nature de cessupports : le fonds documentaire du CDIest composé “de livres, de documents,de photographies, de diapositives, defilms ou de bandes sonores.” Au fil dutemps, viendront d’autres types desupports (cassette VHS, vidéodisque,CD-ROM, DVD, etc.).

La notion de réseau émerge : permettrel’accès au catalogue des collectionsdepuis divers postes du CDI, puis distri-buer des ressources plus larges : ency-clopédies, dictionnaires, logiciels deremédiation (apprentissage de la lecture,par exemple). Le besoin de servicesdocumentaires sur le réseau d’établis-sement s’accroît. Il faut souligner quec’est donc bien par la documentationqu’entre réellement l’informatique pourtous dans l’établissement scolaire. Eneffet, les autres dimensions étaientdavantage sectorisées : l’informatiqueadministrative, l’informatique pourl’expérimentation assistée en sciences,etc. Une nouvelle étape pour l’informa-tique documentaire est franchie dès lorsque le documentaliste rend sesressources – catalogues et documentsprimaires – accessibles en dehors duCDI.

> Du CDI en réseau à l’établissementcommunicant L’émergence des réseaux d’établisse-ment correspond à une étape que l’onpeut qualifier des “établissements com-municants” lancée dans certaines aca-démies dès la fin des années 80 (parexemple à Dijon). Cette phase n’est pasachevée. Elle suppose à la fois uneréflexion sur ses objectifs stratégiques,sur l’organisation fonctionnelle (archi-tecture – physique, logique et informa-

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tionnelle – du réseau), sur l’installationphysique et bien sûr sur son fonction-nement.Le réseau, c’est aussi la solution à unproblème d’espace de travail : les sallesde permanence, les chambres del’internat gagneraient à être systémati-quement équipées d’ordinateursraccordés au réseau dans des conditionsà préciser (charte d’usage à faire signerpar les utilisateurs en respect avec lesrègles définies au plan national et local).Les documentalistes ne devraient plusavoir à sélectionner les élèves qui peu-vent venir au CDI à certains moments.Tout élève devrait pouvoir travailler dansle calme et avec des outils de travailappropriés à chaque fois qu’il en a lapossibilité temporelle.

Les questions matérielles ne posent quedes problèmes finalement limités. Certes,relier le bâtiment A au bâtiment B dis-tant de cent mètres, voire relier plusieurssites d’un même établissement àquelques kilomètres de distance n’estpas toujours simple. Mais, plusieursannées d’expérience dans ce domainemontrent que les TIC et les TICE s’intè-grent aisément dans les établissementsquelles que soient les configurationsarrêtées. Les collectivités territorialesont généralement prévu la réalisationprogressive des câblages des établis-sements. Les établissements neufs ouceux qui ont été rénovés bénéficientgénéralement de prises dans toutes lessalles permettant la connexion de micro-ordinateurs. Le plus souvent, il s’agit deprises RJ 45, mais certaines collectivi-tés ont expérimenté d’autres solutionstels que les CPL (courants porteurs enligne). Les technologies CPL permettentde faire circuler de l’information à bas

débit ou haut débit sur des lignes élec-triques. Des expériences sont en coursdans divers établissements (collèges dela Drôme, de la Manche).De manière plus récente, les technolo-gies sans fil dites WiFI ont fait leur appa-rition. La pose de quelques bornes dansles couloirs ou dans les salles permetalors la transmission des signaux ; laportée et le débit sont encore limitésmais, comme pour toute technologie, ilest probable qu’ils seront améliorés.

Les parcs informatiques des établisse-ments ont crû de manière très sensible.Des lycées technologiques ont des tauxd’équipement proches d’un micro pourtrois élèves, les lycées d’enseignementgénéral et les collèges ont des chiffresun peu plus faibles. Mais les parcs sontdésormais de quelques dizaines pourles plus petits établissements à plusieurscentaines dans les gros lycées. Il fautaussi signaler que dans certains collègestous les élèves d’un niveau donné sontéquipés personnellement, ce qui posedes problèmes de stockage et derecharge, sans passer sous silence laquestion de la sécurité. On trouve aussides expériences de chariot mobile(micro + vidéoprojecteur) et plus récem-ment de classe mobile (autant de microsque d’élèves + vidéoprojecteur +connexion WiFI) qui peut être déployéeen quelques instants.Le lycée communicant doit permettre àtout membre de la communauté éduca-tive d’utiliser les technologies avancéesde communication à des fins de forma-tion sans difficulté. A tout instant, l’en-seignant ou l’élève peut trouver un postedisponible dans une salle ; en tout lieu,il retrouve sa configuration habituellede travail (notion d’environnement

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dossier : Construire pour enseigner > l’École de demain

numérique de travail, ENT), il peut com-muniquer en envoyant et recevant desmessages, consulter des ressourcesautorisées, ou encore, s’il est enseignant,faire “son cours” à partir de la prépa-ration qu’il a effectuée chez lui et qu’il

a stockée sur un serveur de l’établisse-ment ou sur son outil personnel demémorisation. Il peut aussi renvoyer enfin de cours ses élèves vers les docu-ments qu’il a créés à leur intention, issusde sa propre production ou mutualisésavec des collègues. Aujourd’hui, toutcela est en germes : ainsi le module“devoirs” des outils d’administration deréseau IACA – Installation automatiquede comptes et administration – ouGESPERE – GEStion PÉdagogique d’unRéseau – permettent déjà des échangesde cette nature. Les ENT permettrontd’avancer à condition que la volontéexiste dans chaque équipe d’établisse-ment et que les moyens d’assistancelogistique – qu’il ne faut pas sous-esti-mer – soient mis en place.En termes architecturaux, les évolutionstechnologiques ne devraient pas poserdavantage de problèmes qu’elles en ontposés jusqu’ici. Quel que soit le typed’établissement, du lycée bicentenaireà l’établissement le plus récent, il est

toujours possible de créer des condi-tions permettant la circulation del’information.

> Demain, un CDI uniquement virtuel ?Soyons net. L’école aura toujours besoinde centres de ressources de même quela société a besoin des bibliothèquespubliques. Cette fonction des lieux oùl’on peut travailler dans des conditionsconfortables, notamment au niveau dusilence, ou prendre un temps de loisiren parcourant tel ou tel document(sonore, écrit, iconographique) est irrem-plaçable. De plus, l’aide que peut poten-tiellement fournir le documentaliste, leconseil qu’il peut apporter sont des élé-ments qui rendent le lieu, bibliothèqueou CDI, indispensable à une vie ensociété. Enfin, les besoins en formationétant en croissance, ces structures sontappelées elles-mêmes à se développer.

Le citoyen en général, mais pour ce quinous concerne plus directement l’élève,a autant besoin de ressources tradi-tionnelles, c’est-à-dire pour l’essentielécrites, que de ressources numériques.L’écrit, faut-il le souligner, a de nomb-reux avantages sur tous les autres sup-ports : il permet des lectures plus aisées,plus rapides ; il facilite les comparaisonsen permettant de consulter plusieurssources simultanément – on peut lesétaler sur une table, les comparer, onpeut aussi les conserver plus facilementet y revenir rapidement sans crainted’une disparition subite. L’écrit, c’estaussi une qualité éditoriale, une orga-nisation, une structuration.

Quant au lieu, c’est la possibilitéd’échanger avec des camarades, doncde se former en compagnonnage, de

Collège Le Masségu à Vif (Isère) - 2004

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partager son savoir. Le CDI restera doncl’espace par excellence pour le travailnon seulement autonome mais en petitsgroupes. Il devra aussi rester le lieu deréférences pour l’ensemble des élèvesen matière de formation à l’information,et donc avoir des capacités d’accueilpour permettre aux enseignantsd’effectuer cette tâche.

Mais, la dimension virtuelle du CDI devracroître. Le CDI sera hybride comme lesont déjà de nombreuses bibliothèquespubliques (BMVR, BU). Les “biblio-thèques numériques” sont nées, pour laplupart, d’une bibliothèque traditionnelle.Une bibliothèque numérique, c’estd’abord une bibliothèque, c’est-à-direune structure qui répond à des principesorganisationnels : un fonds établi enréponse à une politique documentaire,des usagers qui sont précisés, desmodalités de mise à disposition arrêtéesen conformité avec la législation. Qu’ellesoit numérique signifie qu’elle offre desressources numériques, ce qui emportecomme conséquence une mise à dispo-sition plus large.

Par exemple, la BNF est déjà largementune bibliothèque numérique grâce àGallica qui se définit comme “une biblio-thèque patrimoniale et encyclopédique”.À partir de ses fonds propres, la BNFoffre un accès à 70 000 ouvrages numé-risés, à plus de 80 000 images et à plu-sieurs dizaines d’heures de ressourcessonores”. A une échelle plus modeste,des bibliothèques municipales mettenten ligne certaines de leurs ressources.Ainsi la BM de Troyes propose unecollection de plusieurs milliers d’imagesissues de son fonds patrimonial. Les collèges et les lycées sont également

dans ce mouvement. Les outils de la géné-ration XML permettent la mise en lignedes catalogues ; d’ores et déjà unetrentaine d’établissements offrent ceservice et ce nombre croît rapidement.Généralement, le catalogue prend placedans la rubrique CDI du site web del’établissement ; c’est le cas par exem-ple du collège Edmond Albius au Port àLa Réunion qui offre de plus d’autrespossibilités de recherche : sélection desites et moteurs de recherche, amorced’un “portail documentaire”. La notiond’intranet documentaire apparaît dansd’autres établissements tels le lycéeJeanne-d’Arc à Clermont-Ferrand ou lelycée agricole Georges-Desclaude àSaintes. “Un projet d’intranet concernel’organisation dans son ensemble,l’objectif étant de favoriser la commu-nication interne. Le documentaliste doitfaire “une offre documentaire” permet-tant d’intégrer le centre de documenta-tion dans le réseau interne. C’est unemanière pour lui de valoriser son actionet son travail, et cela s’apparente à unevéritable conduite de projet.”

La dynamique est donc en marche pourque le CDI sorte de ses murs. Le CDItotalement virtuel n’est ni pour demain,ni pour après-demain, mais la dimen-sion virtuelle du CDI se construit sur lesconcepts de portail documentaire etd’intranet qui prennent place eux-mêmesdans une réflexion élargie sur les besoinsen ressources des élèves et de tous lesmembres de la communauté éducativede l’établissement. La place du CDI et plus globalement duréseau d’information et de documenta-tion est à trouver dans le cadre de lapolitique documentaire de l’établisse-ment. Des équipes l’ont déjà bien

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compris. Ainsi, au lycée Le-Grand-Chênois à Montbéliard, le programmede restructuration a pleinement intégrécette dimension. Pour la documentaliste,“il était évident que compte tenu desbesoins, 1 380 élèves et parmi eux 400appelés à faire des TPE, 700 de l’ECJSet 300 des activités en STT ; nécessitéd’accueillir un grand nombre d’élèves àla fois sans pénaliser ceux qui viennenten autonomie, le CDI ne pouvant à luiseul répondre , il faut réfléchir à une poli-tique documentaire intégrant toutl’établissement”.

Dans un contexte de développementtoujours aussi rapide des technologiesde l’information et de la communicationqui conduit à une grande profusion desressources documentaires, la fonctiondocumentaire est essentielle au systèmeéducatif.

La réflexion locale, principalement del’établissement scolaire, deviendra deplus en plus importante. On a vu les CDIdoubler ou tripler de superficie, voireplus en comptant les espaces annexes.Le CDI est passé d’une salle unique à unensemble de salles et d’espaces ;demain, dans certains établissements,on pourra certainement considérer quela documentation est partout : toute sallesera en quelque sorte une annexe duCDI puisqu’en tout point on pourraconsulter une grande partie desressources. Alors que restera-t-il auCDI ? L’essentiel sans aucun doute : lacompétence spécifique du documenta-liste, l’accès à certains documents qu’onne trouvera pas ailleurs (livres et revuespapier), une certaine ambiance due àl’environnement et aussi la mise enœuvre de la politique documentaire. Le

CDI doit être la plaque tournante del’accès aux connaissances par unedémarche qui privilégie l’autonomie del’élève.Les besoins de formation des élèves enmatière d’accès à l’information conti-nueront de croître. La transformation deces informations obtenues en connais-sances est une démarche pédagogiquequi sollicite l’activité personnelle del’élève et appelle l’aide des enseignants.Déjà, les programmes de la plupart desdisciplines demandent de s’attacher àcette question.

La nécessité d’une organisation auniveau de l’établissement est indispen-sable. Le CDI, le réseau d’établissementsont des éléments structurants qui vontévoluer avec des variations dans lesusages tenant compte des richesses desdémarches mises en œuvre par chaqueéquipe. D’ores et déjà, les évolutionsconstatées attestent de cette dyna-mique. Les documentalistes quicumulent cette double compétence depédagogue et d’expert en sciences del’information et de la communication,contribueront à ce que l’école répondeà l’objectif qui lui est assigné de formerdes futurs citoyens maîtrisant la sociétéde l’information dans laquelle ils sontnés et grandissent.

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L‘architecture scolaire : un judicieux point de rencontre entre l‘État et les collectivités ?FRANÇOIS LOUIS, inspecteur général de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche 1

A la suite de la mise en œuvre des lois de décentralisation à compter du 1er janvier1986 et en application, précisément, de ces lois, l’Éducation nationale, en tantqu’administration d’État, s’est retirée nettement du champ de l’architecture scolaire,estimant qu’il relevait pleinement, dès lors, de la compétence des collectivitésterritoriales de rattachement des établissements ; ce retrait s’est concrétisé pardiverses mesures sur lesquelles on va revenir. Depuis, cependant, l’idée paraîtcheminer dans les esprits que les deux partenaires du système éducatif - l’État etles trois types de collectivités territoriales - ont, en cette matière, des intérêtscommuns et qu’une certaine concertation, ou à tout le moins une réflexion“partagée”sur ces questions, est fort opportune ; la réflexion sur “l’école du futur”est probablement l’un des facteurs les plus incitatifs à cette évolution.

La situation présente : une aspirationsans doute plus marquée à aborderensemble la réflexion sur lesquestions d’architecture scolaire

> “Architecture”, d’un côté, et “péda-gogie”, de l’autre : “chacun chez soi !”La mise en œuvre du partage de

compétences entre l’État et les collec-tivités territoriales de 1983-1985 dans lechamp éducatif a enlevé au ministèrede l’Éducation nationale tout pouvoird’imposer, en matière d’architecture sco-laire, soit des superficies, soit des agen-cements particuliers ; il en a d’ailleurstiré rapidement les conséquences pour

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ses propres structures. Auparavant eneffet, un service spécifique du ministère,responsable des constructions scolaires,était chargé de publier des directives àcet égard ; il avait d’autant plus de lati-tude en cette matière qu’il était associéà l’élaboration des programmes de cons-truction. Le centre de conseil techniqueaux collectivités territoriales (CCTCT),tout dernier intitulé de ce service, a ainsiété supprimé à la fin de 1989, le minis-tère ayant estimé qu’il était désormaisnécessaire de laisser toute liberté auxcollectivités dès lors que celles-ci sevoyaient confier la responsabilité desconstructions. Ce centre travaillait surcertaines spécialités, en liaison avec ladirection des lycées et collèges 2 pource qui relevait de sa compétence, dansle cadre de la publication de guides deconstruction et d’équipement ; après sasuppression, si la DLC a continué alorsà élaborer des guides d’équipementsconseillés, surtout pour les formationstechnologiques et professionnelles, etsi ces documents comportaient parfoisquelques indications immobilières ou/etd’aménagement des espaces, c’étaitvisiblement dans le souci de donner desexemples d’utilisation fonctionnelle etd’aménagement des locaux définis àpartir des besoins pédagogiques ; maisil ne s’agissait nullement d’impositionset l’approche était donc radicalementdifférente par rapport aux prescriptionsénoncées dans le passé.

De leur côté, les départements et lesrégions n’entendaient pas voir l’Étatempiéter éventuellement sur leurs attri-butions. Tenues, par ailleurs, comme lesautres maîtres d’ouvrage, d’organiserun concours d’architecture pour toutinvestissement public de plus de dix

millions de francs, les collectivitésterritoriales ont tiré judicieusement partide cette obligation pour stimuler larecherche architecturale dans le champscolaire, témoignant par là d’uneréflexion réelle sur les fonctionnalitésdes établissements ainsi que de leurvolonté de donner un look plus moderneaux collèges et aux lycées 3 . Les archi-tectes se sont généralement efforcésen conséquence de concevoir des bâti-ments susceptibles de répondre auxbesoins des établissements, parfois trèsspécifiques, tout en intégrant lesnouvelles constructions dans leur cadre ;à l’incitation des nouveaux maîtresd’ouvrage, ils ont rompu avec l’uniformitédes lycées d’avant, c’est-à-dired’avant la décentralisation, avec desexemples multiples de cette créativitéarchitecturale 4 .

Une séparation s’est donc instaurée,dans le domaine de l’architecture sco-laire, entre l’Éducation nationale, d’uncôté, et les collectivités de rattachementdes établissements scolaires, de l’autre,l’État demeurant responsable desaspects pédagogiques (outre la chargedes personnels). Deux éléments sontvenus atténuer cependant quelque peu,mais “quelque peu” seulement, le carac-tère radical qu’aurait pu prendre cetteséparation :- pour la construction de nouveauxcollèges ou lycées, l’administrationcentrale a introduit en effet la formulede nomination “par anticipation” deschefs d’établissement, ceux-ci ayantpour mission de participer au suivi tech-nique de la construction ; dansl’ensemble, on peut dire que cette expé-rience s’est révélée fructueuse pour queles architectes tiennent mieux compte

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des caractéristiques propres à l’éta-blissement à réaliser, et notamment depréoccupations d’ordre pédagogique.On peut ajouter également que cette pra-tique présente une certaine analogieavec la situation qui, dans plus d’un cas,paraît avoir prévalu pour ce qui concernel’enseignement primaire ; il ne faut pasoublier en effet qu’il arrivait assezfréquemment que l’inspecteur decirconscription (IDEN, puis IEN) inter-vienne en tant que “conseiller” auprès dumaire pour les constructions d’écoles :“j’ai travaillé avec des maires à desconstructions d’écoles dans les années1980”, rappelle ainsi un ancien IDENaujourd’hui inspecteur général, “enaidant les maîtres à être présents dansles projets lorsque ce n’était pas le cas ;nous dialoguions avec l’architecte, étantprécisé que ce qui était attendu de nous,c’était précisément l’expression desbesoins pédagogiques ainsi que notrevision d’une “belle école” dont chacunserait content dans la commune”. Enrésumé, on a observé dans le secon-daire depuis 1986 ce qui existait souventdans l’enseignement primaire depuis déjàfort longtemps, la différence résidantcertes dans la taille de la structure ;dans le domaine de l’ouverture inter-nationale, d’autre part, le ministère acontinué à participer, au sein del’Organisation de coopération et dedéveloppement économiques (OCDE),au programme pour la construction etl’équipement de l’éducation (PEB -Programme on Educational Building),dont la France était, au demeurant, lepremier contributeur. Depuis son lan-cement en 1972, ce programme apporteson concours aux pays membres del’OCDE qui y participent (ainsi qu’à desmembres associés) afin d’assurer le

meilleur emploi des ressources dévo-lues aux équipements éducatifs à tousles niveaux ; il s’attache à promouvoir,en liaison justement avec les respon-sables des diverses collectivités terri-toriales, les échanges internationauxtant au niveau des politiques que de larecherche et de l’expérimentation dansles domaines de la construction et del’équipement de l’Éducation, avec troisobjectifs principaux : améliorer, d’abord,la qualité des bâtiments scolaires etmieux les adapter aux besoins, afin decontribuer ainsi, parmi d’autres facteurs,à accroître la qualité de l’enseignement ;veiller, ensuite, à ce que la meilleure uti-lisation possible soit faite des ressourcesconsidérables consacrées à la cons-truction, au fonctionnement et à l’en-tretien des bâtiments scolaires ; appe-ler rapidement, enfin, l’attention desdivers responsables sur les incidencesqu’ont sur les équipements éducatifsles tendances majeures qui se dessi-nent dans l’enseignement et dans lasociété en général 5 .

> De “l’ignorance mutuelle” à uncertain réalisme partagé : l’architecturescolaire, naturellement, n’est pasneutre Une situation de “chacun chez soi” s’estdonc installée, durablement. Au fil desannées cependant, la crainte – mutuelle –de l’empiètement s’est estompée et uncertain réalisme a cheminé progressi-vement dans les esprits.

De fait, les infrastructures éducativesconstituent un enjeu réel au niveau localdont les conditions de réalisation pèse-ront durablement. Les autorités et lesfamilles (appuyées dans certains cas pardes enseignants) plaident spontanément

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pour la construction d’établissementsscolaires qui soient proches géographi-quement ; mais la construction scolairea un coût initial et elle a aussi - tout unensemble de coûts induits, la dépensed’investissement ayant un “effet d’en-traînement” : équipement des locaux,entretien et fonctionnement quotidien,outre la charge en personnel, naturelle-ment. Le “bâti” n’est donc pas neutre etil peut difficilement être considéré iso-lément ; des “rigidités” éventuelles peu-vent ultérieurement se révéler commedifficiles à corriger, soulignant d’autantl’importance du travail de préparation enamont de la construction elle-même. Carc’est au stade de la conception archi-tecturale d’un projet donné que bon nom-bre de choix essentiels vont être effec-tués, engageant l’avenir et lafonctionnalité pédagogique, étant sou-ligné qu’il importe de ne pas céder à latentation de construire des établisse-ments “vitrines architecturales futuris-tes” dont la fonctionnalité n’est pas for-cément garantie : sélection du site (avecdes incidences probables sous l’anglede l’organisation de transports scolai-res), choix soit d’une construction entiè-rement nouvelle, soit de la rénovationd’un bâtiment existant, grandes lignesarchitecturales du projet qui seront affi-nées par la suite, qualité des matériauxmis en œuvre, câblage et mise en réseaudes installations, organisation d’un cen-tre de documentation ou d’une biblio-thèque scolaire, etc.6 ; “Depuis une ving-taine d’années” rappelle notamment lerapport de l’IGEN sur “les politiquesdocumentaires des établissements sco-laires” publié en mai 2004 7 , “les col-lectivités territoriales ont largementrénové les établissements scolaires” ;pour ce qui concerne plus spécialement

les centres d’information et de docu-mentation, ce rapport souligne que,“dans ce contexte, les CDI ont été béné-ficiaires de ces efforts”, ceux-ci ayant“aussi porté sur les raccordements enréseau à internet” ; à propos descollèges, le rapport mentionne “de bellesréalisations architecturales”, en ajoutantplus largement que “le sentiment généralest la grande satisfaction” ; de fait, ”qu’ils’agisse de réaménagement de locauxexistants ou de nouvelle construction,dans le plus grand nombre de cas, uneconcertation entre l’équipe de l’établis-sement et l’architecte a permis d’aboutirà des CDI de grande qualité. En l’absencede directives nationales, diversdocuments ont pu servir d’appui. Parmiles plus récents faisant le point sur cettequestion, des documentalistes etchargés de mission auprès de l’IA-IPRde Rouen ont proposé un document quilivre des pistes de cahier des chargespour un CDI et des schémas fonctionnels 8 “.

Au niveau local, l’implication de l’en-semble des acteurs concernés – respon-sables territoriaux (“maîtres d’ouvrage”),architectes et entreprises de construc-tion (“maîtres d’œuvre”), administrateursdu système éducatif, personnels concer-nés (et d’abord les enseignants), et futursusagers de l’établissement d’enseigne-ment (les élèves, les étudiants, de mêmeque des adultes dans le cadre du déve-loppement de “l’apprentissage tout aulong de la vie”) – peut donc permettrede mieux prendre en compte les impé-ratifs pédagogiques et contribuer aussi,opportunément, à minimiser les coûtsinduits de fonctionnement et de main-tenance de l’établissement.Au niveau national, d’autre part, le fait

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Cheminer versun réalismepartagé“

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que l’Éducation nationale décided’introduire des dispositifs pédago-giques tels que les “modules”, les “travauxpersonnels encadrés” (TPE), les “itiné-raires de découverte” (IDD), les “projetspluridisciplinaires à caractère profes-sionnel” (PPCP), etc. sans “grande”concer-tation avec ses partenaires territoriaux n’apas été sansinconvénient puisque la miseen œuvre elle-même de ces dispositifsincitant les enseignants à travailler àcertains moments par petits groupesd’élèves plaidait pour une certaine sou-plesse dans la conception et l’utilisa-tion d’infrastructures éducatives quisoient flexibles et adaptables. Dans lemême sens, l’introduction des “nouvellestechnologies de l’information et de lacommunication” (NTIC) est venuesouligner encore plus nettement lanécessité d’”anticiper”, celle-ci jouanten tant que facteur incitatif pour uneconcertation entre l’Éducation natio-nale et ses partenaires territoriaux ; carces technologies amènent nécessaire-ment à s’interroger sur la conceptionde “l’école du futur”, thème que l’onabordera de façon plus approfondiedans la seconde partie de cettecontribution.

Ces diverses raisons expliquent sansdoute que soient apparus, au cours desdernières années, quelques signesrécents qui tendent à montrer – pru-demment – que l’architecture scolairepeut – sinon “doit” – constituer un pointde rencontre entre l’Éducation nationaleet ses partenaires territoriaux, chacunedes parties ayant effectivement un inté-rêt mutuel avéré à une telle concerta-tion ; parmi les éléments symptomatiquesà cet égard, on mentionnera ici deuxcirconstances, plus particulièrement :

- en premier lieu, des contacts nouésentre le Club des chargés de patrimoinedes régions et des départements etl’administration centrale : ce “club”, quiréunit sous la forme d’une associationloi de 1901 des responsables territoriauxdirectement concernés par les ques-tions de construction, rénovation et équi-pement des établissements secondaires,a notamment invité officiellementplusieurs représentants de l’adminis-tration centrale à intervenir sur le thèmede l’architecture scolaire à l’occasionde l’une de ses réunions périodiques,en octobre 2000 ;- en janvier 2002, en second lieu, lecabinet du ministre Jack Lang a organisésur le thème “Architecture et pédago-gie” un colloque important qui s’est tenuà la Sorbonne, avec la participation,naturellement, de nombreux responsa-bles de collectivités territoriales ; leministre avait au demeurant instituéalors, au sein de l’administrationcentrale, une “mission sur l’architecturescolaire” et un cédérom, support del’exposition qui illustrait le colloque dela Sorbonne, présentait une sélectionde solutions ou d’options considéréescomme “exemplaires” 9 .

Le contexte brossé précédemment adonc quelque peu évolué, les collecti-vités territoriales paraissant exprimerfinalement le souhait que l’État, en cettematière, ne se considère pas commetotalement désengagé. Mais ne nousméprenons pas : les collectivités ne sou-haitent nullement un “retour en arrière”et pas davantage un “discours acadé-mique” ; leur attente porte plutôt sur lespoints suivants : - non pas tant ce qu’il “faut” faire, un “livrede recettes”, que des recommandations

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sur des “erreurs” éventuelles dans laconception architecturale d’un établis-sement, la taille des établissements, ladisposition des bâtiments, “erreurs” qu’ilapparaît préférable d’éviter ;- des recommandations de naturequalitative 10 qui soient illustrées par desexemples concrets : quelle dispositiondes locaux se présente comme plusappropriée par rapport à lafonctionnalité pédagogique ? par rap-port à l’amélioration de la vie scolaireet/ou la prévention des dégradations oudes incivilités ? par rapport àl’équipement des établissements, lafonction documentaire, l’accès àl’information et l’utilisation des TICE ?etc. ;- des conseils ou suggestions, là aussià partir de cas concrets, pour ce quiconcerne les facteurs d’ambiance (lumi-ère, espaces verts, espaces de détentepour les élèves), la sécurité matérielle,l’agencement des couloirs, les installa-tions sportives, l’hébergement et larestauration, la sécurité aux abords desétablissements et la prévention des intru-sions, etc. ;- un éclairage, enfin, sur la relationinvestissement / coûts de fonctionne-ment, sur l’optimisation des ressources,ou encore sur l’organisation de lamaintenance.

On l’aura compris : ce qui serait, semble-t-il, apprécié ne relève pas du prescriptif,chaque collectivité entendant exercerpleinement les attributions que luiconfère la loi, mais plutôt de l’exerciced’une “fonction conseil“ qui soitpartagée et qui s’attache à favoriser lamutualisation des leçons de l’expérienceacquise sur les diverses zones duterritoire.

Une réflexion à partagereffectivement sur le thème de “l’école du futur “Parmi les thématiques sur lesquellescette mutualisation des réflexions et desexpériences récentes semble s’affirmer,celle relative à l’utilisation des TICE et,plus largement, la thématique sur“l’école du futur” constituent sans aucundoute un sujet privilégié et prioritaire :car il apparaît en effet indispensable eturgent de donner aux personnels et auxpartenaires impliqués dans le dévelop-pement et l’usage des TICE, tout spé-cialement les partenaires de l’école quesont précisément les collectivités terri-toriales, une vision globale du dévelop-pement de ces technologies, de leursenjeux et de leur impact, lesquels sontd’abord d’ordre pédagogique. On noteau demeurant à cet égard que tel et telinterlocuteurs, au sein des collectivitésterritoriales, ne cachent pas leur attented’une contribution de l’Éducation natio-nale pour tout ce qui concerne le volet“évaluation” dans l’utilisation des TICE(entre autres investissements matériels) :quel est en effet l’impact effectif, en termesd’amélioration de l’efficacité pédagogique,de ces technologies ? cet impact est-ilà la hauteur des investissementsconsentis ? quels investissementsconviendrait-il de privilégier ? et leconcours des collectivités peut-il s’ins-crire pleinement dans la perspectiveconstructive d’un vrai partenariat encette matière, avec pour souci fonda-mental et premier l’intérêt des élèves ?

De telles préoccupations dépassent bienévidemment le cadre de nos frontièreshexagonales et, sur ce thème, on peutjuger utile de faire état ici des réflexionséchangées en décembre 2000 à

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l’occasion d’un séminaire internationalsur le thème de “L’École intelligente, versl’architecture scolaire du futur” orga-nisé à Milan à l’initiative du Centre pourl’innovation et l’expérimentation éduca-tives de la Province de Milan (CISEM 11).L’approche de “l’école intelligente” quefait apparaître la synthèse de diverspoints de vue exprimés lors de ce sémi-naire international (tout particulièrementcelle développée par ce centre derecherche italien) recoupe en effet trèslargement la vision qui se dégage desactivités développées, au cours de ladécennie 90 plus particulièrement, parle programme de l’OCDE sur les cons-tructions et l’équipement de l’éducationmentionné précédemment (PEB) : - les notions “d’école intelligente” et“d’architecture scolaire du futur”incitent, en premier lieu, à concevoir unearchitecture et un environnementéducatifs qui servent et facilitent aumieux les apprentissages ;- mais concevoir “une architecture sco-laire du futur” n’amène pas seulementà réfléchir sur la place que doivent occu-per, dans le cadre scolaire, les NTIC etla domotique : il s’agit également de“penser l’école” de façon aussi “intel-ligente” que possible au regard de sesmissions propres, de même que parrapport à son environnement.

> “L’école intelligente” et “l’architec-ture scolaire du futur” : pour unearchitecture et un environnementéducatifs qui servent au mieux lesapprentissagesLa réflexion sur “l’école intelligente”développée à Milan apparaît d’abordtrès proche de travaux développés aucours des dernières années par l’OCDE,soit dans le cadre de son Centre pour la

recherche et l’innovation (CERI) sur laplace des NTIC dans les systèmes édu-catifs, soit aussi dans le cadre du PEBsur le thème de “l’école du futur” 12 .

Pour des installations qui procurent unaccès aussi large que possible à l’in-formation et au savoir : “l’école du futur“n’est pas forcément celle du futurismeLa notion “d’école intelligente” inviteassurément à considérer la place queles NTIC, l’informatique, le multimédiapeuvent - et doivent - occuper désor-mais dans la conception des construc-tions scolaires et l’équipement desétablissements sous plusieurs aspectsliés entre eux :- la localisation de ces ressources, defaçon telle qu’elles soient pleinement par-tagées et accessibles dans les diversessalles de l’établissement plutôt que dansdes salles hyper-spécialisées ;- le câblage et la mise en réseau desétablissements 13 ;- la localisation et la conception des cen-tres de documentation et d’information(CDI) et des bibliothèques scolaires 14.

D’autres éléments, cependant, doiventégalement être considérés :- la prise en compte, dès l’amont, descoûts probables de maintenance : deséquipements somptuaires, “vitrines”,peuvent induire en effet des dépensesd’entretien prohibitives ; “l’école dufutur” n’est pas nécessairement celledu futurisme ;- la problématique pédagogique, bienévidemment : les NTIC ne constituentpas une panacée, mais une ressource,un instrument afin de mieux aider lesélèves, surtout ceux qui rencontrent desdifficultés dans leurs apprentissages ;- la question de l’égalité des chances :

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l’équipement des établissementsscolaires en nouvelles technologieséducatives ne doit pas creuser lesdifférences entre établissements favo-risés et défavorisés ; il faut éviter, autantque possible, que ne s’installe, de cepoint de vue, une “fracture numérique”entre établissements.

Pour des espaces fonctionnels et adap-tables afin de faciliter la tâche des ensei-gnants et la réussite scolaire des élèvesAu-delà des équipements et installa-tions, une réflexion sur “l’école intelli-gente” et “l’architecture scolaire dufutur” conduit aussi à se pencher sur laconception des espaces ; de fait, ainsiqu’on l’évoquait précédemment,l’architecture scolaire n’est pas neutre,même si elle ne compte que parmi unemultiplicité de facteurs dans la bonnemarche des établissements et la réus-site scolaire des élèves. Il est néanmoinsgénéralement reconnu, dans nombre depays, que certains éléments peuvent uti-lement contribuer à créer un climat pluspropice pour les apprentissages : la tailledes établissements, la disposition desbâtiments, des installations de détenteou encore des couloirs, des facteursd’ambiance tels que l’éclairage, lacouleur des murs, etc. On insiste, demême, sur la nécessité de prendre effec-tivement en compte, dès l’amont, ladestination pédagogique des construc-tions scolaires, des concertations étroitesavec les futurs utilisateurs pouvantpermettre, de ce point de vue, d’intég-rer précisément les impératifs pédago-giques. On souligne encore l’importanced’espaces adaptables et modulaires,facilitant notamment le travail en petitsgroupes d’élèves ainsi qu’un tutorat pluspersonnalisé de certains élèves, et qui

incitent également les personnels ensei-gnants à travailler en équipe. Car si lesNTIC ne “suppriment” nullement la tâchedes enseignants, le défi néanmoins pourl’école consiste à dépasser les infras-tructures et matériels pour viser unepleine intégration de ces technologiesdans les pratiques pédagogiques ; leprimat donné à la souplesse dans lesconstructions scolaires ne suffit pas, etl’innovation doit donc avoir toute saplace, tout autant qu’une évaluationeffective de l’impact de ces technolo-gies, l’objectif essentiel étant biend’ordre qualitatif.

> “L’école du futur” : “penser” l’écoleen prenant pleinement en compte sesmissions et son environnementRéfléchir sur “l’école du futur” conduitprobablement, en second lieu, à pren-dre pleinement en compte, dans une telleréflexion, les missions même de l’écoleainsi que son environnement, en dépas-sant par conséquent – sans en minorerl’importance – les seules questionsd’équipement et d’agencement desespaces.

“L’école du futur” : une ressource quisoit vraiment mobilisable, désormais,pour “l’apprentissage tout au long de lavie”En janvier 1996, au cours d’une réuniondes pays membres de l’OCDE, les minis-tres de l’éducation ont retenu commepriorité pour les activités de cette orga-nisation la réalisation de l’apprentissageà vie pour tous ; ils ont décrit les éta-blissements scolaires comme un “élé-ment important du patrimoine” et ils ontestimé que ceux-ci devaient “devenirdes centres d’apprentissage commu-nautaires qui proposent différents

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Réfléchir surl’architecturescolaire du futur

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programmes et techniques d’appren-tissage à diverses catégories depersonnes et restent ouverts toutel’année pendant de longues heures” 15.

Une telle ouverture sur l’apprentissagetout au long de la vie et pas simplementsur la scolarité rejoint l’approche duchamp de l’éducation et de la formationpromue par l’OCDE ; la préoccupationd’optimisation de “l’investissement édu-catif” y est en effet centrale, eu égardaux coûts considérables que représen-tent dans les différents pays les dépen-ses consacrées à l’éducation et à laformation. Les équipements éducatifsreprésentant un investissement trèsconséquent à la fois en capital et endépenses de fonctionnement pour toutesles sociétés, la gestion efficace dupatrimoine éducatif demeure une despriorités des pays membres de cetteorganisation 16 .

Un “bien commun” qui tienne comptede son environnement et qui serve aussila protection de l’environnement etl’éducation des élèves à cet égardUne réflexion sur “l’école du futur”implique enfin de concevoir l’écolecomme un “bien commun”, une “maisoncommune” – une “école communale”,en quelque sorte – ouverte de façoninteractive sur son environnement et,complémentairement, comme un pointd’appui au service de l’environnementet de sa protection. Déjà, la perspectived’apprentissage tout au long de la vieinvite à aller au-delà de la seule prise encompte des besoins “scolaires” ; maisl’architecture scolaire apparaît finalementcomme une question “politique”, au sensle plus noble et étymologique du terme,si l’on considère en effet qu’un

établissement scolaire compte parmices quelques édifices symboliques quiconstruisent la “cité”. Il ne peut doncs’agir d’une structure repliée sur elle-même ; l’école, au contraire, peut repré-senter un des forums pour aujourd’hui,les préoccupations de nature socialerecoupant de ce point de vue très large-ment le souci de nature économique d’op-timisation de la ressource publique 17 .

Structure ressource intégrée dans sonenvironnement et au service de celui-ci, une telle école intelligente doit appa-raître comme un espace délimité, repé-rable et accessible, y compris pour lespersonnes handicapées, et ce tout aulong de l’année ; ouverte, par conséquent,mais néanmoins protégée, en tant quede besoin, si le contexte dans lequel ellese situe l’expose à certains risques 18 .

Au-delà de son environnement proche,l’école peut jouer également un rôledécisif dans l’éducation des futurscitoyens, dans leur ouverture sur lemonde notamment par l’utilisation d’in-ternet, ainsi que dans la sensibilisationà la protection de la nature et de l’envi-ronnement, au sens plus large du terme ;notre administration ne vient-elle pas audemeurant d’insister tout récemment surl’importance de l’éducation au déve-loppement durable 19 ? De ce point devue, la mission éducative de l’école peuts’appuyer notamment sur une concep-tion architecturale, sur un choix de maté-riaux et sur des conditions de fonction-nement qui évitent au mieux le gaspillage(économies d’énergie et d’eau pour lechauffage, la ventilation, les installationssanitaires), qui favorisent le respect dela nature et qui incitent aussi à la miseen valeur et au respect du patrimoine 20.

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Il nous semble, pour conclure, qu’uneréflexion sur l’architecture scolaire duprésent et du futur peut constituer, dansle contexte d’aujourd’hui, un champsereinement “partagé” entre l’Éducationnationale et les partenaires que sont,pour l’ensemble de ses services et deses acteurs, les collectivités territoriales. Car les défis du présent comme del’avenir “méritent” sans doute effecti-vement que toutes les parties prenantesà l’organisation et au fonctionnement dusystème éducatif apportent leur “pierre”

à une vision de l’école d’aujourd’hui etde demain qui soit “construite” – c’estbien le mot – par les uns et par les autres,en tirant à cet effet intelligemment partid’expériences et d’innovations, ici et là,y compris assurément au delà de nosfrontières, ne serait-ce que pour éviterla répétition d’erreurs éventuelles, avecun souci prioritaire et primordial : assurerà tous les élèves des conditions aussisatisfaisantes que possible pour la pleineréussite de leur parcours scolaire 21 .

> 1 Président de juillet 1997 à décembre 2001 du comité de direction du programme de l’OCDE sur les constructions et équipements scolaires (PEB - Programme on Educational Building).

> 2 Section d’expertise technique de la sous-direction gestionnaire des moyens de l’enseignement secondaire.

> 3 LEGT, LP, ou lycées polyvalents.

> 4 Sur ce sujet, cf. notamment : Architectures et lycées en Ile-de-France, 1988, Conseil régional d’Ile-de-France ; Nouveaux lycées : les régions en action, Synthèse des premières rencontres nationales, 1989, Conseil régional de la région Centre ; “Des préoccupations architecturales certaines” et “Des exemples multiples de créativité architecturale”, in Décentralisation et autonomie des établissements, François Louis,février 1994, Hachette-Éducation.

> 5 Le PEB publie notamment une revue (3 numéros par an) intitulée “PEB Échanges”, disponible au centre de documentation des inspections générales.

> 6 Ces diverses questions ont été abordées, dans un passé récent, à l’occasion d’un séminaire international sur les infrastructures éducatives organisé par l’OCDE, le ministère fédéral de l’Éducation du Mexique et l’État de Jalisco, à Guadalajara, Mexique, les 24-27 février 2002.

> 7 Rapport n° 2004-037 du groupe Établissements et vie scolaire de l’IGEN, mai 2004 ; Jean-Louis Durpaire, IGEN, rapporteur.

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> 8 Claude Ragache, Michel Treut, Jean-Pierre Viger, Organiser l’espace CDI, mars 2000 ; http://www.ac-rouen.fr/pedagogie/equipes/doc/spip/article.php3 ?id_article=20

> 9 Cf. notamment : “Architecture et pédagogie”, dans la revue Objectif Établissement, n° 14, été 2002 (disponible au centre de documentation des inspections générales).

> 10 Cette préoccupation d’amélioration de la qualité de l’enseignement sous-tend l’ensemble des travaux conduits par l’OCDE dans le domaine de l’éducation. La même préoccupation a constitué le fil conducteur pour la préparation par le PEB d’un second “florilège” (un premier “florilège” était paru en 1996 sous le titre “Écoles d’aujourd’hui et de demain”, avec notamment trois établissements français : collège du Plan-du-Loup à Sainte-Foy-les-Lyon ; lycée La Fayette à Clermont-Ferrand ; lycée Jacques-Monod à Saint-Jean-de-Braye) d’une cinquantaine d’établissements scolaires “exemplaires” paru en mars 2001 (ouvrage disponible au centre de documentation des inspections générales) : l’examen des dossiers s’était attaché en effet à prendre en compte non seulement la qualité architecturale d’établissements nouvellement construits ou ayant fait l’objet de rénovation, choisis dans les différents pays participant au programme - et notamment en France (groupe scolaire Roger-Gavage à Fontaines-Saint-Martin, à proximité de Lyon ; collège de l’Estaque à Marseille ; collège Victor-Louis à Talence ; lycée Léonard-de-Vinci à Levallois-Perret) -, mais aussi l’évaluation pouvant être faite de l’impact positif sur le climat de l’établissement, sur la vie scolaire, sur les conditions d’enseignement, de la conception architecturale ainsi que de l’équipement (particulièrement en NTIC) de ces établissements.

> 11 Institut de recherche de la province de Milan et de l’Union des provinces d’Italie.

> 12 Sur la place des NTIC, le PEB a publié en 1992 un rapport intitulé “Les nouvelles technologies et leur impact sur les constructions scolaires”, ainsi qu’un ouvrage, en 1995, intitulé “Un nouveau lieu d’apprentissage” (disponibles au centre de documentation des inspections générales).

> 13 Une expérience “Tutti in rete” (“Tous en réseau”) avait été présentée lors de ce séminaire à Milan.

> 14 Le PEB avait organisé sur ce sujet un séminaire qui s’était tenu à Lisbonne en juin 1999 ; Guy Pouzard, IGEN, y avait présenté une communication sur l’expérience française dans ce domaine.

> 15 Le PEB a intégré cet élargissement des missions de l’école dans ses travaux, en prenant en compte tout un ensemble d’éléments relatifs à la fourniture d’équipements pour l’apprentissage à vie, y compris les crèches et équipements préscolaires, la formation continue des adultes, la formation professionnelle commerciale et industrielle ; il a mis en outre l’accent sur les besoins en matière d’enseignement supérieur. Plusieurs séminaires internationaux et publications ont abordé ces différents thèmes, la formation professionnelle à Québec, en 1994, la diversification dans l’utilisation des bâtiments scolaires à Lyon, en 1995, (le rapport de ce séminaire organisé à Lyon avait été préparé par André Lafond (IGEN) et publié en 1996 sous le titre “Diversifier les utilisations des bâtiments scolaires”), la gestion des équipements pour l’enseignement supérieur avec deux séminaires en Grèce, en 1995, et à Québec, en 1999, l’évolution du rôle et des fonctions des bibliothèques universitaires.

> 16 L’OCDE (PEB) a organisé avec la Banque européenne d’investissement (BEI) sur ce sujet, à Luxembourg, en novembre 1998, une conférence sur “l’évaluation des investissements en équipements éducatifs”(l’ouvrage présentant la synthèse de cette conférence ainsi que les principales interventions est paru en février 2000), ainsi qu’un séminaire à Tolède, en février 2000, consacré aux divers moyens de financement des équipements éducatifs, séminaire au cours duquel Thierry Malan, IGAENR, a présenté une communication sur la situation française à cet égard.

> 17 Le PEB a publié à ce titre un ouvrage sur “L’école dans la ville”, en 1995, ainsi qu’un autre sur “L’infrastructure de l’éducation dans les zones rurales” en 1994, rapport préparé par Martine Safra, IGEN, faisant suite à un séminaire organisé en Belgique ; mentionnons aussi “Sous un seul toit, la prestation de services intégrés dans les pays de l’OCDE”, 1998.

> 18 La sécurité des établissements scolaires a constitué précisément le thème de plusieurs séminaires depuis 1997, le premier s’étant tenu cette année-là en Italie, Antoine Bousquet, IGAENR, en ayant été le rapporteur (rapport intitulé “Assurer la sécurité du milieu éducatif”) ; un autre séminaire, à Thessalonique, en novembre 2001, a eu pour thème les “risques majeurs”, Jean-Marie Schléret, président de l’Observatoire sur la sécurité

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dossier : Construire pour enseigner > l’École de demain

des établissements scolaires et d’enseignement supérieur, y ayant présenté une communication.

> 19 Circulaire n° 2004-110 du 8 juillet 2004 (Bulletin officiel n° 28 du 15 juillet 2004) relative à la “généralisation d’une éducation à l’environnement pour un développement durable (EEDD) - rentrée 2004”.

> 20 Une telle préoccupation apparaît très présente et visible en Italie, où certains bâtiments anciens et désaffectés (usines, monastères et même palais) ont été rénovés de façon remarquable avec le double souci à la fois de fonctionnalité par rapport à leur nouvelle destination, mais aussi de respect et de mise en valeur de leur histoire.

> 21 Les diverses publications référencées dans cet article sont pour la plupart, sinon pour la totalité, disponibles au centre de documentation des inspections générales, de même que le numéro “Bâtir pour apprendre”de la revue de l’Association française des administrateurs de l’éducation (AFAE), n° 2, 2000.

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Une nouvelle ambition pour les constructionsscolaires en AngleterreFRANÇOISE MALLET, inspectrice générale de l’administration de l’éducation nationaleet de la recherche

De nombreuses réformes du système éducatif sont mises en œuvre depuis six ansen Angleterre. Inévitablement, la question de l’adaptation des installations scolairesà de telles ambitions se posait. Après avoir largement augmenté les crédits desconstructions scolaires sans observer de changements qualitatifs suffisants, legouvernement a décidé de piloter de plus près les maîtres d’ouvrage, depuis laconception des projets jusqu’aux modalités juridiques et financières de leur miseen œuvre.

L e ministère de l’Éducation a ainsilancé récemment plusieurs initia-tives, regroupées dans un vaste

programme au nom éloquent : “Des éco-les pour l’avenir” (Schools for the future ),dont l’objectif est de doter tout le paysd’établissements scolaires à la hauteur desdéfis du XXIe siècle. Seront présentéesici quatre initiatives intéressantes, enparticulier un appel d’offres auprèsd’architectes chargés de concevoir desréponses à onze études de cas diffé-rentes (Exemplar designs), ainsi qu’un

programme de financement et de gestiondes constructions scolaires, leprogramme BSF (Building schools forthe future), doté d’un budget annuel de5 milliards de £ dès 2005.

Les constructions scolaires : un des éléments (récents) de la politique scolaire du gouvernementde Tony Blair.De nombreuses réformes du systèmeéducatif sont mises en œuvre depuis sixans en Angleterre. Elles ont d’abord

dossier : Construire pour enseigner > De l’étranger

Les informations qui suivent ont étérecueillies dans desdocuments officiels et les publicationsen ligne du ministère de l’Éducation anglais. Il n’y a eu ni visites ni entretiens sur ce sujet.

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porté sur le contenu des enseignementset l’évaluation des compétences desélèves, avec la mise en place de “stra-tégies nationales pour l’enseignementde l’anglais et des mathématiques”. Puiselles ont concerné notamment ladiffusion des nouvelles technologies, laformation des enseignants, l’organisa-tion du collège, et enfin celle du lycée,avec deux mots d’ordre : excellence etdiversité. Les collèges sont invités à sespécialiser dans une dominante (tech-nologie, arts, langues, sports …) et àacquérir le label de specialist school,ce qu’à peu près la moitié des collègesont fait à ce jour ; les lycées sont invitésà diversifier leur offre d’options et leursparcours, y compris dans le domaineprofessionnel.

Inévitablement, la question de l’adapta-tion des installations scolaires à de tellesambitions se pose. En Angleterre, cesont les LEA (local education authori-ties), les autorités éducatives locales,qui sont propriétaires des bâtiments sco-laires. Une grande hétérogénéité pré-vaut, non seulement s’agissant du parcexistant, mais aussi des politiques deconstruction scolaire ou des réflexionssur le sujet. Face à cette multitude demaîtres d’ouvrage, l’État est d’ordinaireassez démuni, même s’il est le principalfinancier des autorités locales.

“De nouveaux modes d’interventionde la puissance publique”Le gouvernement actuel a déjà consi-dérablement augmenté les créditsconsacrés aux investissements scolai-res, passés de 700 millions de £ en 1997à 3 milliards de £ en 2003. Ces créditsont été répartis entre les LEA et ont per-mis de réaliser les réparations et les

constructions les plus urgentes. Mais le gouvernement a estimé ne pasavoir vu d’améliorations qualitatives àla hauteur des crédits investis, et à lahauteur des enjeux. Il a donc décidé deprendre plus directement en mains lesujet et de piloter davantage les maîtresd’ouvrage, qu’il s’agisse de la concep-tion des espaces scolaires ou des mon-tages juridiques et financiers. L’effortfinancier de l’État s’élèvera à 5 milliardsde £ en 2005, dite “Année des collègeset lycées”. L’État s’engage à rénover oureconstruire tous les établissementssecondaires d’ici dix à quinze ans, afind’en faire “des environnements detravail stimulants pour les élèves, lesprofesseurs et plus largement lanation”.

De très nombreuses réformes ont étéfaites ces dernières années pour réno-ver les modes d’intervention de la puis-sance publique, car les objectifs du gou-vernement travailliste sont nombreux :élever le niveau d’exigence dans les ser-vices publics, centraliser davantage ladéfinition des objectifs, contrôler leurexécution, tout ceci en associant davan-tage le secteur privé au fonctionnementdes services publics. De nouveaux outilsjuridiques et financiers sont donc cons-tamment testés, pour permettre lacollaboration des autorités publiques etdes partenaires privés, pour préserverà la fois la rentabilité immédiate et lesintérêts de long terme des investisse-ments publics et pour parvenir à associerle niveau national et le niveau local à ladéfinition des politiques et à la gestionpublique. Tout cela est passionnant maisd’une approche un peu compliquée pourles fonctionnaires étrangers !Pour simplifier les choses, on ne

dossier : Construire pour enseigner > De l’étranger

Rénover les modesd’intervention“

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présentera ici que les initiatives les plusrécentes, sachant que des programmesplus anciens et des modes d’interven-tion plus traditionnels sont encore envigueur sur le terrain. - “Building Bulletin”, une série de publi-cations du département des construc-tions scolaires du ministère, le SDBU,destinée à éclairer les maîtresd’ouvrage et les entreprises concernéspar le sujet.- ”Les salles de classes de l’avenir”(Classrooms of the future) : unecinquantaine de projets-pilotes inno-vants, gérés par le département desconstructions scolaires du ministère. - “Construire des écoles pour l’avenir”(Building schools for the future) : un pro-gramme de financement et de gestiondes constructions scolaires, mettant enplace des structures juridiques et finan-cières entièrement nouvelles. - “Des conceptions exemplaires”(Exemplar designs) : onze études de casréalisées par des architectes, destinéesà promouvoir des idées et des conceptsinnovants en matière de constructionsscolaires.

Ces quatre programmes sont largementaccessibles par internet et ont fait l’objetde publications, largement illustrées dephotos, de schémas et de dessinsd’architectes. Il faut aller sur le site dédiéaux professionnels de l’Éducationteachernet.gov.uk, puis à la rubriqueconsacrée aux administrateurs dusystème éducatif management, puis àla sous-rubrique consacrée auxconstructions scolaires building design,ressources & finance, et enfin aux deuxsous-rubriques building & design etfunding for buildings, qui sontcomplémentaires.

“Des publications spécialisées surles constructions scolaires”En 2002, un numéro spécial de BuildingBulletin, la revue officielle du SBDU, ledépartement des constructions scolai-res du ministère, a fait le recensementdes questions-clefs à se poser avant deconstruire ou de réaménager des bâti-ments scolaires. L’idée était de sensibi-liser les maîtres d’ouvrage aux évolu-tions pédagogiques jugées inéluctables,de faire la “check-list” des points essen-tiels à la qualité des réalisations, et d’in-sister sur la nécessité de prévoir desadaptations ultérieures sur une périodede vingt ou trente ans.

Voici un bref résumé de ce BuildingBulletin n°95, largement illustré :

> Les évolutions pédagogiques- le développement de l’école maternelle- l’intégration croissante des enfants han-dicapés, avec des problèmes d’accessi-bilité mais aussi la présence d’adultesplus nombreux- la diversification de l’offre dansl’enseignement secondaire. Autour d’unnoyau dur d’enseignements communs,les établissements sont encouragés àdiversifier leur offre, dès le collège (lamoitié d’entre eux ont une dominanteofficielle, exigeant souvent des équipe-ments particuliers), et naturellement aulycée. Beaucoup d’établissements déve-loppent ainsi des centres d’excellencespécialisés ( technologie, science, arts,sports …), qui doivent aussi profiter auxélèves d’autres établissements ainsi qu’àdes publics non scolaires qui doiventpouvoir avoir accès à l’établissement.- les nouvelles méthodes d’apprentis-sage. Il y a désormais davantage de tra-vail en autonomie, en petits groupes, en

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laboratoire, au CDI, avec des intervenantsdifférents et nombreux, ce qui nécessitedes espaces modulaires, une circulationplus facile d’un lieu à l’autre et des bureauxplus nombreux pour les personnels.

> L’impact des nouvelles technologiesCelles-ci sont souvent présentes dansles classes, les salles de ressources, lesbureaux des personnels. Plusieursscénarios sont décrits.

> La dilution des frontières de l’écoleLes établissements sont encouragés às’ouvrir à des publics non scolaires. Selonles sites, et surtout en milieu rural, il fautprévoir l’accès aux installations sportives,l’accès aux salles informatiques, les coursdu soir aux adultes, voire l’installation deservices sociaux, de services juridiques,de médecine préventive, d’une crèche …Des arbitrages entre les besoins desdifférents utilisateurs potentiels sont àrendre. Il faut permettre une grande flexi-bilité dans l’utilisation des locaux aucours des trente années suivantes.

> Les points-clefs de la conception- la conception des différents espacesspécialisés : les salles de classe, lesgrands espaces, les petites salles pourle soutien individuel, les salles de pro-fesseurs, les bureaux pour les enseignantset les responsables de département, lescentres de ressources, les espacessociaux, les espaces extérieurs …- la disposition des espaces les uns parrapport aux autres - la qualité de la réalisation. Cette partieaborde les questions liées à la qualitéde l’éclairage, de l’acoustique, de laventilation, du mobilier, de la décorationintérieure, mais aussi les économiesd’énergie et le développement durable …

“Les projets pilotes innovants” (Classrooms of the future)Selon une méthode habituelle enAngleterre, le ministère conduit plusieursdizaines de projets pilotes destinés àtester ou à promouvoir des idées reliéesà la politique gouvernementale en cours.Douze LEA se partagent ainsi treizemillions de £ pour développer des pro-jets innovants sur l’aménagement desclasses (classrooms for the future). Lesprojets sont expertisés par le départe-ment des constructions scolaires duministère et consultables en ligne.Suite à ce programme, un autre pro-gramme vient d’être lancé, Teachingenvironments for the future, TEF, pourexplorer l’impact de nouvelles organi-sations spatiales sur les conditions detravail des enseignants. Il est doté dedix millions de £ et devrait permettre definancer vingt projets pilotes.

“Onze études de cas réalisées pardes architectes” (Exemplar designs )Ce projet original a été lancé pouraccompagner le programme BSF,Building schools for the future(Construire des écoles pour l’avenir),exposé ci-dessous. Puisque beaucoupd’argent allait être dépensé en inves-tissements scolaires, il fallait en profiterpour opérer un saut qualitatif dans laconception et la réalisation des cons-tructions scolaires. Afin d’éclairer les LEAmaîtres d’ouvrage et les entreprises pres-tataires de services sur ce que devaientêtre des établissements scolaires dequalité aujourd’hui, l’opération Exemplardesigns (Des conceptions exemplaires)fut ainsi lancée en 2003.Un appel d’offres fut passé auprès decabinets d’architectes afin de susciterdes projets architecturaux intéressants,

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dossier : Construire pour enseigner > De l’étranger

Faire émergerdes conceptset des idées neuves

““

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en réponse à des cahiers des chargesprécis. Soixante cabinets ont été autori-sés à concourir parmi cent quarante pos-tulants, et onze équipes seulement ontfinalement été sélectionnées pour allerjusqu’au bout du projet, avec le servicedes constructions scolaires et des grou-pes d’utilisateurs mis en place par leministère. Cinq projets concernent desécoles primaires, cinq des établissementssecondaires, et le dernier un ensemblescolaire. Les onze projets ont été publiésdébut 2004, leur diffusion correspondantà l’annonce en février 2004 des LEA rete-nues pour la première vague d’investis-sement du programme BSF (cf. infra).

Le cahier des charges figure in extensosur le web. Pour une part, il reprend enles précisant les idées développées dès2002 dans le document du ministèreBuilding Bulletin n° 95 - Schools for thefuture (cf supra) : modularité des espaces,beaucoup d’espaces spécialisés, ouver-ture à davantage d’adultes, omnipré-sence des nouvelles technologies,ouverture sur la communauté extérieure,accessibilité aux handicapés, qualité del’éclairage et des matériaux …

Mais il se situe à un niveau plus opéra-tionnel. Il décline de nombreuses situa-tions-types et précise différents para-mètres : taille de l’école, état desbâtiments existants, localisation dans laville, état du terrain, contraintes tech-niques et environnementales … Chaqueéquipe d’architectes devait ainsi traiterdeux cas-types différents, fondés sur dessituations réelles. Elle devait en outrefaire la démonstration que son projet per-mettrait à l’établissement scolaire des’adapter dans le temps à des variationsde paramètres et présenter plusieurs scé-

narios d’évolution, les critères d’adapta-bilité et de coût de maintenance faisantpartie des critères de choix importants.Les réponses au cahier des charges,largement sous forme de schémas com-mentés, sont intéressantes et méritentd’être regardées sur le web ou dans labrochure réalisée par le ministère.Elles ne constituent pas des projets prêtsà l’emploi pour les LEA mais un corpusd’analyses, de schémas, de propositionsqui peuvent être réutilisés par les maît-res d’ouvrage, en les adaptant à leurpropre contexte. Le sous-titre de labrochure est d’ailleurs explicite : “Projetsexemplaires – des concepts et desidées”.

“Construire des écoles pour l’avenir”(Building schools for the future)(programme BSF)Ce programme a été lancé en février2003. Un document de 36 pages, préfacépar le ministre de l’Éducation CharlesClarke en donne les grandes lignes.L’engagement financier de l’État enfaveur des constructions scolaires, déjàpassé de 700 millions de £ en 1997 à 3milliards de £ en 2003, va se poursuivre.Il s’élèvera à 5 milliards de £ en 2005.

Toutefois, le gouvernement estime qu’onne peut pas se contenter d’injecter detelles sommes d’argent dans un systèmeadministratif à bout de souffle et à courtd’idées. Tandis que le projet “Desconceptions exemplaires” doit faireémerger et circuler des idées neuvessur le plan architectural, le programmeBSF, doté d’un budget de 5 milliards de £,doit proposer une approche totalementnouvelle des investissements scolaires. Pour ce faire, une agence gouverne-mentale a été créée, la PFS, Partnerships

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for schools (Des partenaires pourl’école). Son rôle est de mettre en œuvrele programme BFS pour le compte duministère. Elle doit en outre proposerdes modalités de gestion garantissantune plus grande efficience dans ledéroulement des programmes d’inves-tissements scolaires.

L’agence a commencé par élaborer unnouvel outil d’intervention pour la puis-sance publique, le LEP, Local educationpartnership (Un partenariat local pourl’éducation). Ce nouveau “véhicule juri-dique et financier” doit permettre laconstitution de partenariats locaux dura-bles pour la réalisation des investisse-ments éducatifs. La description précisede ce modèle, soumise à consultationau troisième trimestre 2004, a été plutôtfavorablement accueillie. Au cœur du modèle se trouve la créa-tion d’une co-entreprise (a joint-venturecompany) associant trois partenaires :l’autorité éducative locale (la LEA),l’agence gouvernementale (la PFS), etun partenaire privé apportant des com-pétences gestionnaires, commercialeset financières. La co-entreprise estdénommée le PPP (Public-Private-Partnership), un modèle d’associationpublique-privé déjà expérimenté dansle domaine de la santé.Le PPP joue le rôle de maître d’œuvreauprès de l’autorité éducative locale,qui reste propriétaire des bâtiments sco-laires et en garde la responsabilité. LePPP est chargé de coordonner toute lastratégie d’investissement, de cons-truction, d’équipement et de mainte-nance pour tous les établissements sco-laires de la région. A tous les stades duprogramme, il fait valider ses démarchespar la LEA, à qui il est lié par un contrat

de long terme d’au moins dix ans. Il estresponsable de la conduite générale duprojet, de sa gestion financière, de lapassation des appels d’offres aux entre-prises et du suivi de tous les contratsavec les fournisseurs d’équipements etde services.

Une des originalités du projet consiste sansdoute à faire entrer la LEA dans la co-entre-prise, ce qui lui confère à la fois le statutde maître d’ouvrage et de co-maîtred’œuvre. Cette disposition paraît crucialeaux concepteurs du modèle. L’objectif estd’instaurer au sein de la co-entrepriseune relation de confiance de long termeentre toutes les parties pour garantir unmaximum d’efficacité dans l’exécutiondu programme. Selon les analyses del’agence gouvernementale, un des gra-ves défauts du système antérieur est lemanque de continuité dans le temps pourdes chantiers qui durent plusieursannées, la difficulté à réorienter leschantiers en cas d’évolution de la com-mande, le manque de coordination entreconstructeurs et fournisseurs de servicesinformatiques …

Par rapport aux méthodes actuelles oùla LEA passe des contrats au coup parcoup avec les entreprises, le futur sys-tème est censé présenter plusieursavantages. L’autorité locale doit pré-senter un projet d’investissement glo-bal pour tous les établissements de lazone concernée (meilleure planificationstratégique), comprenant tout ce qui estnécessaire au fonctionnement des éta-blissements y compris les services infor-matiques (meilleure coordination et inté-gration des services), présentant un plande financement associant des capitauxprivés (meilleur financement), et confiant

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dossier : Construire pour enseigner > De l’étranger

Proposer uneapproche totalementnouvelle desinvestissementsscolaires

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la mise en œuvre du programme à uneco-entreprise intéressée financièrementau succès du programme (meilleuregestion).

La formule proposée vise aussi à faci-liter la tâche des LEA : partenariat dura-ble avec les entreprises, qui seront ainsimieux informées des besoins éduca-tifs, aide au management, puisque c’estla co-entreprise qui sera chargée de lagestion du projet et des relations avecles fournisseurs, et au sein de celle-ci,ce sera le plus souvent le partenaireprivé qui assumera cette fonction degestion, moyennant rémunération. Lespartenaires privés devraient y trouverdivers avantages selon la nature del’entreprise : gestion d’un projet com-plexe entraînant une rémunération dela prestation, perspective de contratsindustriels et commerciaux pour plu-sieurs années, investissements finan-ciers dans le projet … Enfin la partici-pation de l’agence gouvernementaleaux co-entreprises locales lui permet-tra de diffuser les bonnes pratiques ainsique d’encourager la standardisation des

procédures et des documents contrac-tuels sur tout le territoire national, cequi devrait générer des gains de pro-ductivité administrative importants etaméliorer la qualité des réalisations.Tout cet édifice est encore en cours deconstruction. La consultation sur le pro-jet d’ensemble vient de se terminer. Unedeuxième vague de consultation est encours jusqu’à mi-octobre 2004, portantcette fois sur des documents beaucoupplus précis : modèles de conventionspour la constitution des co-entreprises,modèles d’agrément d’actionnaires,contrats-types avec les partenairesprivés etc. Les seize LEA qui feront l’objetde la première vague d’investissementen 2005 ont été sélectionnées (dontLeeds, Manchester, Sheffield …). Lesquelques mois qui viennent vont doncêtre consacrés à la mise sur pied desstructures nécessaires. Cela ne signifiepas qu’il n’y a pas débat en Angleterresurl’opportunité des nouvelles appro-ches, jugées par certains trop com-plexes. Tout cela est consultable sur lesite du ministère et l’aventure reste àsuivre …

Bibliographie et webographie> Achieving success (DfEE White Paper - 2001)

> Schools for the future (DfES Building Bulletin 95 – 2002)

> Exemplar designs – concepts and ideas (DfES – 2004)

> Sur le site officiel du Ministère de l’Éducation, toutes les questions relatives aux constructions scolaires sont

accessibles à partir de la page d’accueil suivante

http://www.teachernet.gov.uk/management/resourcesfinanceandbuilding/,

qui donne en particulier accès à deux sous-rubriques, l’une plutôt consacrée aux questions de conception

et de réglementation (school building & design), l’autre plutôt consacrée aux questions de financement

et de programmation ( funding for buildings)

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dossier : Construire pour enseigner > De l’étranger

> Le document Building Bulletin 95, qui présente la politique “Des écoles pour l’avenir”

est également consultable en ligne :

http://www.teachernet.gov.uk/schoolsforthefuture/

et la version PDF est téléchargeable :

http://www.teachernet.gov.uk/docbank/index.cfm?id=3149

> L’opération “Les salles de classes de l’avenir” peut être suivie à l’adresse suivante :

http://www.teachernet.gov.uk/management/resourcesfinanceandbuilding/schoolbuildings/

sbschoolsforthefuture/futureclassrooms/

> L’ensemble du programme BSF, “Building schools for the future” (Construire des écoles pour l’avenir)

est consultable en ligne :

http://www.teachernet.gov.uk/management/resourcesfinanceandbuilding/funding/bsf/

Le document politique de lancement est disponible dans une version PDF :

http://www.teachernet.gov.uk/docbank/index.cfm?id=3611

Idem la description du modèle général de partenariat local :

http://www.teachernet.gov.uk/docbank/index.cfm?id=6444

Idem les projets de documents détaillés sur lesquels une consultation est actuellement en cours :

http://www.p4s.org.uk/StandardDocumentation.htm

> Les onze études d’architectes résultant de la démarche des “Conceptions exemplaires” (Exemplar designs)

sont également consultables en ligne :

http://www.teachernet.gov.uk/management/resourcesfinanceandbuilding/funding/bsf/exemplars/

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> échos de l’étranger > abécédaire > rubriques > abécéd

abécédaire > rubriques > échos de l’étranger > abécédair

abécédaire > ils ont évalué > échos de l’étranger > rubriq

> rubriques > échos de l’étranger > abécédaire > retour a

> échos de l’étranger > abécédaire > rubriques > abécéd

abécédaire > rubriques > échos de l’étranger > abécédair

> rubriques > échos de l’étranger > abécédaire > retour a

> abécédaire > retour aux sources > rubriques > échos d

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> ils ont évalué > échos de l’étranger > abécédaire > retour aux sources > ils

Le champ de l’étudePar lettre du 9 octobre 2002, Jean-Paul Delevoye,ministre de la Fonction publique, de la réforme del’État et de l’aménagement du territoire a demandéau comité d’enquête de conduire une étude sur lespolitiques indemnitaires mises en œuvre dans lesdifférents ministères, avec pour double objectif :- de connaître et d’évaluer la pratique réelle desministères notamment en matière de modulationindividuelle, aussi bien dans les administrationscentrales que dans les services déconcentrés ;- de proposer des mesures de modernisation ence qui concerne la gestion globale des régimesindemnitaires.

Le comité d’enquêtePlacé auprès du Premier ministre, son secrétariatgénéral étant assuré par la Cour des comptes, quifournit aux enquêteurs les pouvoirs d’investiga-tion et la logistique nécessaires, le comitéd’enquête occupe une place aussi discrète

qu’originale dans les instances d’évaluation. Il estle seul organisme à être capable de faire des ana-lyses comparées de coût et de rendement entreministères ou au sein du secteur public (autre-ment dit, du “bench-marking”) ; composé de repré-sentants des grands corps de contrôle et du conseild’État, des principales administrations, des septfédérations syndicales de fonctionnaires, ainsique d’élus locaux et nationaux, présidé par lePremier président de la Cour, le comité examineles rapports que lui remettent les enquêteurs. Ilen débat, et ses conclusion sont rendues publiques.Cette procédure permet ainsi d’aborder des sujetsparfois conflictuels, concernant les ressourceshumaines ou la modernisation de la gestionpublique, et de faire avancer réellement nonseulement la réflexion, mais aussi le droit. Parmi les quatorze rapports rendus depuis 1999,on peut citer le rapport “Bonnet” sur la mise enplace d’indicateurs de résultats dans trois minis-tères, particulièrement éclairant au moment de

La gestion des régimes indemnitaires et la modulation des primesHÉLÈNE BERNARD, inspectrice générale de l’administration l’éducationnationale et de la recherche

Rapport remis en octobre 2003 au comité d’enquête sur le coût et le rendement des services publics. Le rapport des enquêteurs a débouchésur les conclusions du comité, rendues publiques en avril 2004 1 .

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s ont évalué > échos de l’étranger > abécédaire > retour aux sources > ils ont é

la mise en œuvre de la LOLF, et le rapport “Rollet”sur la notation et l’évaluation des agents dansl’administration, qui est directement à l’originedu décret du 29 avril 2002.

Quand Christian Join-Lambert, conseiller maîtreà la Cour des comptes et à l’époque secrétairegénéral du comité, m’a proposé en septembre2002 de présider une enquête sur la modulationdes primes dans la fonction publique, je me suisdit que c’était un bon sujet, tout en me deman-dant si le comité d’enquête sur le coût et lerendement des services publics était bien le cadreadapté. Ne risquait-on pas que le rapport achevésombre dans l’oubli, affublé de cette appellationquelque peu surannée, ou finisse à ce pointélagué qu’il en aurait perdu tout intérêt ?

Je me félicite aujourd’hui d’avoir accepté. Commeun bathyscaphe des profondeurs, notre quatuorcomposite (Véronique Wallon de l’IGAS, ArnaudTeyssier de l’IGA, Jean Parmentier, contrôleur finan-cier du ministère des Affaires étrangères et moi-même) est parti explorer la gestion indemnitaire dequatre ministères, armé des pouvoirs d’investiga-tion de la Cour, sans idées préconçues, mais sanscomplaisance, animé du désir d’être objectif et utile,peut-être aussi d’une curiosité un peu perverse …Nous allions sans doute trouver de tristes pratiques,de mornes abandons à la pression de l’uniformité,contrastant avec le volontarisme isolé de quelqueskamikazes de la modulation ?

Ce ne fut pas du tout le cas. Nous avons bien sûrconstaté la diversité de l’administration française,l’importance de la culture ministérielle ou de ser-vice, mais aussi le désir des responsables, desgestionnaires, des personnels, de faire progresser

le pilotage, la gestion et les pratiques profession-nelles. Ce voyage au sein de l’administration(l’enquête s’est déroulée de novembre 2002 àseptembre 2003), sur un thème précis et fort sen-sible de la gestion des ressources humaines,nous a permis de porter témoignage devant lesmembres du comité d’enquête, loin des carica-tures trop souvent véhiculées sur les pratiquesde la fonction publique. Et d’en retirer la convic-tion encore plus forte qu’une bonne connais-sance de la réalité est indispensable à qui veutréformer. Souhaitons que notre rapport sur lagestion indemnitaire débouche aussi sur uneamélioration du cadre juridique et des pratiques.

L’objet du rapport n’était pas de traiter la disparitédes régimes indemnitaires des fonctionaires : onn’y trouvera pas un palmarès interministériel.

Le contexteCette commande intervenait après les observa-tions répétées de la Cour (cf. notamment le rapportpublic 1999) sur le manque de transparence, l’ab-scence de fondement juridique et la complexitédes systèmes indemnitaires dans plusieurs minis-tères, observations qui ont abouti à un début deremise en ordre à partir de 2001 2. Les principa-les primes interministérielles ont été réformées(décrets du 14 janvier 2002 remplaçant les indem-nités horaires pour travaux supplémentaires(IHTS) par une indemnité forfaitaire d’adminis-tration et de technicité (IAT), et rénovant lesindemnités forfaitaires pour travaux supplémen-taires (IFTS) ; décrets successifs mettant en place,sur le modèle du “troisième niveau” 3 déjà instituéet généralisé au ministère de l’Économie, desfinances et de l’industrie, une “indemnitécomplémentaire de fonction” (ICF). Ce troisième

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niveau devrait à terme devenir l’outil privilégiéde la modulation.

La mise en application à partir du 1er janvier 2004du décret du 29 avril 2002 qui rénove compléte-ment le cadre de l’évaluation et de la notationdes agents de l’État, impose l’entretien individueld’évaluation et crée les conditions d’une meilleureappréciation du “mérite”dans la gestion del’avancement.

Un abondement significatif des crédits indemni-taires (à défaut d’accord sur la revalorisationindiciaire au niveau interministériel), de l’ordrede 46 millions d’euros sur 1998-2002,a été opéréesur le budget de l’État.

Enfin, l’arrivée avec la LOLF d’un renforcementde la culture de résultat, l’affirmation par le gou-vernement de la nécessité de prendre en comptele mérite et la performance individuelle dans larémunération des fonctionnaires, la circulaire du25 juin 2003 du Premier ministre sur les straté-gies ministérielles de réforme, la communicationen conseil des ministres le 22 octobre 2003 surla réforme de l’encadrement supérieur ont portésur la place publique la question de la rémuné-ration au mérite des fonctionnaires.

Nous avons donc jugé utile de rappeler que lanotion de rémunération “au mérite” méritaitjustement quelques éclaircissements :- d’une part le terme “mérite” n’apparaît pas (pasplus que celui de “performance”) dans le droitde la fonction publique, à l’exception del’expression utilisée pour les résultats auxconcours ou le classement sur liste d’aptitude“par ordre de mérite”(sans parler de l’ordre

national du Mérite). Les textes évoquent plutôtla “valeur professionnelle” des agents ou leur“manière de servir” ; - pour autant, le principe de prise en compte dela valeur professionnelle individuelle pour lagestion des avancements et le déroulement dela carrière est parfaitement clair dans le statutgénéral. De même, le principe de la modulationdes montants indemnitaires en fonction de lamanière de servir figure dans la plupart desdécrets indemnitaires ;- la rémunération au mérite ne se résume pas àla modulation indemnitaire mais concerne aussiet même principalement la gestion de la carrière(notation, avancement d’échelon et de grade,promotion sur des emplois fonctionnels) ; - en toute rigueur, la modulation indemnitairedevrait être la règle et non pas l’exception, si lestextes étaient appliqués. C’est ce que noussommes allés voir.

L’enquête a porté sur quatre ministères : - Affaires sociales et emploi, - Éducation nationale, - Agriculture, - Économie, finances et industrie - en nousconcentrant sur les 12 300 agents de l’adminis-tration centrale et sur les deux réseaux de ladirection générale des impôts (78 000 agents) etde la direction générale de la comptabilitépublique.

Dans tous les cas ont été examinées les gestionsdes services centraux et déconcentrés.Pour le MENESR, nous n’avons pas traité de lasituation des personnels enseignants, assezéloignée du droit applicable aux autres agents,dans la mesure où leur régime indemnitaire

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forfaitaire et non modulé, correspond quasi-exclu-sivement aux HSE/HSA et heures complémen-taires de l’enseignement supérieur.

Le constatC’est d’abord celui de la plus extrême diversitédes modes de gestion, aussi bien d’un ministèreà l’autre qu’au sein d’un même ministère, entreadministrations centrales et services décon-centrés (c’est le cas notamment à l’Éducationnationale), ou entre les différents niveauxd’emplois.

Ainsi, sauf exception concernant certains postesde l’encadrement supérieur, le MINEFI ne pratiqueplus aucune modulation indemnitaire individuelledepuis la “démodulation” accordée en 1989 auxagents des catégories C et D, à l’issue du conflitdes services fiscaux. Cette démodulation a étéensuite étendue à tous les autres personnels desFinances, à l’exception des cadres de deuxièmeniveau de la DGI, des cadres supérieurs desservices du Trésor, et des agents de catégorie Ade l’administration centrale. A Bercy, compte tenud’une sensibilité syndicale extrême sur cettequestion, la prise en compte du mérite va résulternon pas d’une modulation indemnitaire, mais dela rénovation du processus de notation et d’a-vancement, l’objectif étant d’appliquer “danstoute sa pureté” le nouveau décret de 2002. Apartir de la généralisation des entretiens indivi-duels, le choix a été fait de lier automatiquementla note de l’agent à l’attribution des majorationsd’ancienneté (ce qui nécessite de contingenternon seulement les majorations d’anciennetéd’échelon, mais aussi les majorations de la note).Si l’on gère de façon véritablement discriminanteles avancements, à condition que l’évaluation

des personnels soit complètement rénovée etdéconcentrée, et que des marges de manœuvresuffisantes en gestion permettent ensuite de pour-suivre cette dynamique par les promotions degrade, on peut estimer que le MINEFI s’engagedans une des voies de la rémunération au mérite.

Par ailleurs, l’effort important de régularisationjuridique des régimes indemnitaires mené à Bercyà la suite des observations de la Cour a permisde maintenir le niveau des montants individuelsmais n’a pas véritablement conduit à une réelletransparence de ces régimes 4.

Par contre la situation de l’encadrement supé-rieur, jusque-là exempté de modulation person-nalisée, est en cours d’évolution à la suite desdécisions prises récemment au niveau intermi-nistériel. Il était prévu fin 2003 de moduler le “Top500” du ministère, les cadres supérieurs de lacentrale et les chefs de services et adjoints dépar-tementaux et régionaux (trésoriers payeurs géné-raux, directeurs des services fiscaux). Cet exer-cice est facilité par la mise en œuvre depuisquelques années à la DGI du premier contrat d’ob-jectif, suivi du contrat de performance 2003-2005,et à la DGCP d’un exercice de diagnostic contra-dictoire, et de projet de performance critérisé,entre les TPG et la direction générale. C’est unedémarche managériale très conforme à l’espritde la LOLF qui s’est ainsi développée dans lesdeux grands réseaux du MINEFI. Le ministère de l’Agriculture affiche une politiquevolontariste de modulation individuelle.A l’opposé du MINEFI, très cloisonné entre sesgrandes directions à réseau, une seule direction gèrel’ensemble des personnels. Cette unité de pilotagea permis d’y déterminer une politique indemnitaire

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homogène et volontariste, clairement orientée surla modulation individuelle, aussi bien en centrale quedans les directions régionales et départementales.La modulation intervient une fois par an en décembre,et sur une seule prime. Une circulaire nationaleindique une série de critères et fixe des fourchettesde modulation. Nous avons toutefois apportéquelques nuances à ce tableau assezconvaincant : les modulations réellement prati-quées sont jugées trop faibles (elles se situentdans une fourchette de 95 % à 105 %), l’encadre-ment supérieur n’est pas concerné, le ministèrejugeant que la vraie décision managériale pour lescadres est la promotion statutaire ou fonctionnelle,donc le déroulement de carrière d’un poste à l’autre.Il n’y a enfin aucune relation entre la note et l’évolutiondes primes.A noter, l’existence des IGIR (inspecteurs géné-raux interrégionaux), chargés de suivre pour ladirection générale la situation des agents dansdeux régions. Ils sont à l’écoute des personnels,suivent les carrières, s’attachent à harmoniserles pratiques, éventuellement “coachent” lesDDAF débutants, et facilitent les décisions degestion de la direction générale, à laquelle ilssont rattachés.

Au ministère des Affaires sociales, du travail etde la solidarité, la modulation indemnitaire est unexercice très encadré. Dans le secteur affairessociales et solidarité, elle a été progressivementgénéralisée entre 1999 et 2003. La modulation nepeut excéder une fourchette de 80 % à 120 % destaux moyens, mais sans dépasser un ajustementde 5 % par an 5. Les chefs de services reçoiventune enveloppe correspondant à leurs effectifsen équivalent-temps plein, qu’ils répartissent enmodulant sur le douzième mois.

Le secteur “emploi” du ministère n’a pas la mêmegestion indemnitaire, bien que la plupart des corpssoient communs aux deux secteurs. L’objectifprincipal depuis 2000-2001 a été de revaloriser leniveau indemnitaire des agents, et de réduire lesécarts entre services centraux et déconcentrés.Les dotations indemnitaires comprennent des“parts fixes” et des parts “variables”, calculéessur les effectifs théoriques ou réels selon les cas,les parts variables accordées une année étanttoujours reprises en base l’année suivante. Lesystème se révèle être à la longue assez rigide,dès lors que les enveloppes indemnitaires ne sontplus abondées. Par ailleurs, comme à Bercy et à l’Agriculture,l’ensemble des sous-directeurs et chefs deservice du ministère recevaient un niveau deprime homogène au moment de l’enquête.

La gestion indemnitaire est apparue enfin parti-culièrement contrastée au ministère de l’Éducationnationale, de l’enseignement supérieur et de larecherche. La modulation indemnitaire est unepratique ancienne à l’administration centrale, quiconcerne y compris l’encadrement supérieur. Elles’effectue en une fois sur une prime globalisée(la “multiprime”) désormais mensualisée. Les déci-sions d’attribution sont très déconcentrées surles directions, au prix d’écarts non négligeablesconstatés à grade équivalent. Les critères n’y sontguère explicites. La modulation ne reposait pasnon plus sur une pratique convaincante de l’éva-luation, en dépit d’une première expérience menéeen 2000-2001, exercice relancé en 2004. Les services académiques et les établissementsscolaires se caractérisent par la faiblesse desniveaux indemnitaires 6 et l’absence totale demodulation individuelle, malgré l’existence d’une

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ligne de crédits déléguée au recteur “non crité-risée” qui pouvait le permettre. Le ministère aobtenu une revalorisation très significative deses crédits entre 1998 et 2004, qui devrait faciliterl’introduction d’une gestion plus dynamique. Aumoment de notre enquête, le ministère ne connais-sait pas les taux effectivement servis dans lesdifférentes académies aux personnels ATOSSdes établissements et des services, et la DAFvenait pour la première fois d’exploiter lesrésultats d’une enquête lancée en 2001 auprèsdes académies. Le résultat est intéressant : onconstate une réelle disparité des taux effective-ment servis d’une académie à l’autre, les moinsbien dotées en emplois ATOSS s’avérant desurcroît moins généreuses en primes, du fait sansdoute d’absence de marges de manœuvre finan-cière ! On se reportera au rapport pour le détail. Par ailleurs, ni les recteurs, ni les secrétairesgénéraux ni les IA-DSDEN, ni les corps d’inspec-tions et de directions ne font l’objet d’une éva-luation conduisant à une modulation indemni-taire, les modulations de rémunération étantfonctionnelles et liées à la NBI.

Pour l’enseignement supérieur, on ne disposed’aucune analyse nationale des pratiques. Lesétablissements ont semblent-il, quand ils en ont,des politiques variées, incluant des abondementsindemnitaires financés sur ressources propres.La variété des régimes indemnitaires ne facilitepas non plus une vue d’ensemble, qu’on ne cher-che cependant pas véritablement à obtenir. Lagestion des EPST n’a été abordée que pour leCNRS, où la modulation s’opère essentiellementsur la prime de participation à la recherche.La modulation est donc assez largement prati-quée dans les ministères étudiés, à l’exception

du MINEFI. Mais on ne trouve pas toujours unepolitique explicite, argumentée et harmonisée àl’échelle ministérielle. Les modulations reposentexceptionnellement sur une pratique convain-cante et acceptée d’évaluation des personnels.

Les critères de la modulation sont peu explicites,la communication sur les politiques de person-nel très formelle et pas assez stratégique. La question de moduler ou pas l’encadrementsupérieur se posait au vu de ce constat : danstous les ministères, il y a une gestion indemni-taire d’exception pour les principaux cadres. (Lerapport évoque aussi quelques exemples parmiles inspections générales). La décision récentedu gouvernement d’expérimenter une modula-tion des directeurs d’administration centraledevrait plutôt conduire à une généralisation àl’ensemble des cadres.

L’opacité, la complexité des régimes indemnitaireset l’inéquité des différents régimes affaiblissentla légitimité d’une gestion plus modulée et sonacceptation par les personnels. La modulationest le plus souvent contestée dans son principepar les organisations syndicales.En même temps, les cadres rencontrés revendi-quent volontiers leurs responsabilités managé-riales, en particulier celle d’apprécier le travailde leurs collaborateurs et d’en tirer quelquesconséquences.

Les propositionsLe rapport a privilégié des propositions réalistessusceptibles d’être mises en œuvre sans pourautant engager un “grand soir” indemnitaire. Lierune partie de la rémunération à la contributionde chacun nous a paru finalement légitime et

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équitable, malgré les défauts du maquis indem-nitaire. Pour être acceptée, la modulation doitobéir à des règles et à des procédures claires,et être directement liée à l’évaluation. Elle ne doitêtre ni symbolique, ni trop fluctuante par rapportà la rémunération globale.

Pour être efficace et légitime, la modulation doits’inscrire dans une culture de résultats, avec unetransparence très améliorée. La LOLF devraitnormalement favoriser ces évolutions.Les principales recommandations sont donc lessuivantes : - inscrire toute modulation sur une évaluationincontestable des performances individuelles etcollectives (une modulation collective par équipepeut d’ailleurs s’envisager),- améliorer la transparence et le dialogue socialsur ces questions ; une modification du décretde 1982 précisant à cet égard les compétencesdes CTP est suggérée (à l’inverse, la politiqueindemnitaire n’a pas à être évoquée en CAP, autitre des attributions individuelles),- poursuivre la simplification du paysage

indemnitaire, en profitant d’une part de l’oppor-tunité de la globalisation des crédits de rému-nération introduite par la LOLF, d’autre part de lacréation de la prime de 3e niveau,- réussir la LOLF du point de vue de la GRH, enne cantonnant pas cette réforme budgétaire àses aspects de technique comptable etinformatique,- laisser surtout des marges de manœuvre auxéchelons de gestion déconcentrés,- donner un cadre de référence clair au niveaunational,- adapter le niveau de modulation aux différentescatégories de personnel, pour des raisons d’équité,mais aller dans le sens d’une généralisation.

On voit qu’il s’agit plus de recommandations denature managériale que de propositions deréforme juridique. Les principes de la rémuné-ration au mérite figurent déjà dans les textes. Ilfaut se donner les moyens de les appliquer, etcela relève beaucoup plus de la compétencemanagériale de l’encadrement et des bonnespratiques que de règles vraiment nouvelles.

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> 1 Ce document est mis en ligne et consultable sur le site de la Documentation française ; 70 pages plus les annexes :www.ladocumentationfrancaise.fr

> 2 Circulaire conjointe Budget/Fonction publique du 1er octobre 1999 rappelant les règles d’élaboration et de publicité des textes indemnitaires ; rappel de ces objectifs par le comité interministériel de la réforme de l’État de novembre 2001, qui recommandait aussi une simplification et une plus grande équité du dispositif indemnitaire.

> 3 Le premier niveau est constitué des IAT ou IFTS, le second niveau de la prime de rendement (versée selon les cas dans les seules administrations centrales ou aussi dans les services déconcentrés), le troisième de l’ICF.

> 4 Le barème de l’allocation complémentaire de fonctions, le “troisième niveau” indemnitaire du MINEFI, comprend 44 pages pour la seule direction générale des impôts, qui reconnaît 1 400 situations de types différents, en raison de taux différenciés selon les fonctions et le niveau des responsabilités exercées, voire le lieu d’affectation (sur-rémunération des personnels affectés en Ile-de-France et dans les Alpes Maritimes, pour cherté de vie).

> 5 Le conseil d’État avait annulé une disposition de la circulaire ministérielle qui prévoyait cette fourchette, la jugeant de nature réglementaire. Elle est donc désormais présentée comme une recommandation, et non une obligation.

> 6 Les comparaisons disponibles à la direction générale de la fonction publique les situent tout en bas des fourchettes interministérielles.

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Carrières scientifiques et espace européen de la recherche SUZANNE SRODOGORA, FRANÇOIS BONACCORSI,MARC GOUJON, PATRICE VAN LERBERGHE, inspecteurs généraux de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche

La construction de l’espace européen de larecherche, étendu à vingt-cinq pays mem-bres, passe par une meilleure connaissance

des carrières scientifiques et de leurs particula-rités nationales, envisagées à la fois sous l’anglede la diversité des parcours professionnels et dustatut des personnels de recherche et dévelop-pement (R&D). La Commission européenne a invitéexpressément les États membres à se livrer à untel examen. Par ailleurs la France conduit depuisquelques mois un large débat sur son appareilde recherche et de développement technolo-gique, destiné à déboucher en fin d’année sur unprojet de loi d’orientation et de programmationvisant la modernisation des institutions scienti-fiques, les modes de financement des opérateursnationaux et la gestion des ressources humainesqui leur sont affectées.Au sein de l’IGAENR ces trois dernières annéesplusieurs démarches et travaux ont été effec-tués, relatifs aux financements européens et à laconstruction de l’espace européen de l’ensei-

gnement supérieur et de la recherche : rapportsur le Fond social européen (FSE) 1, adhésion àl’ENQA (European network for assessment quality)et dans ce cadre, participation en 2004 à deuxprogrammes de travail sur l’agrément de normesde qualité et de guides 2, rapport sur les conditionsadministratives, financières et juridiques de lamise en place du 6e PCRDT 3.

L’engagement de l’IGAENR dans les comparai-sons internationalesLe rapport sur la carrière des chercheurs enEurope 4 se place dans la même perspective :acquérir de nouvelles compétences au sein desréseaux administratifs européens (en particulierà la direction générale de la recherche de laCommission européenne) ; confronter les bonnespratiques ; s’appuyer sur le réseau des servicesscientifiques de nos ambassades en Europe,indispensable pour l’organisation des visites deterrain mais également pour la production dedonnées et de documents qui nous ont permis

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de réduire nos déplacements à l’étranger ;appuyer nos recommandations sur les pratiqueset les expériences internationales qui nous ontparu significatives, mais également signaler ànos interlocuteurs étrangers l’intérêt que prêtenotre institution à la construction de l’Europe etla contribution qu’elle s’efforce d’apporter en cesens à la communauté scientifique française.

Le champ du rapport a nécessité un long travailde recherche en matière de données compara-tives. Il est en effet particulièrement difficileactuellement de comparer des ensembles telsque le niveau des salaires ou les parcoursprofessionnels des chercheurs en Europe, commeil est difficile de les rapporter à leur environne-ment social et familial (scolarité des enfants,protection sociale, fiscalité). Les données sur lestraitements ne sont pas disponibles à laCommission européenne et la mission a dans laplupart des cas dû recueillir directement cesdonnées auprès des institutions allemandes,anglaises, irlandaises, italiennes, espagnoles etfinlandaises.

L’enquête a été menée par le groupe de travailconstitué au sein de l’IGAENR et comprenantSuzanne Srodogora qui en assure la coordination,François Bonaccorsi, Marc Goujon et Patrice VanLerberghe. L’analyse comparative internationale àlaquelle ce groupe a procédé lui a paru être unedémarche peu présente dans le débat actuel surle système de recherche français ou tout au moinspeu précise et souvent circonscrite à la triadeAllemagne, Royaume-Uni, France. Elle est viteapparue comme le seul fondement qui autorisaitl’équipe à formuler ses recommandations sur la ges-tion nationale de l’emploi scientifique et technique.

A cette fin, la mission s’est intéressée en premierlieu aux données internationales du marché dutravail relatif aux métiers de la recherche à horizonde 2010, compte tenu des ressources mondialesdisponibles pour la formation à la recherche depersonnels de haute qualification, titulaires notam-ment de doctorats ou de titres universitaires équi-valents qui ouvrent la voie à l’exercice descarrières scientifiques proprement dites. Il s’agitlà d’un enjeu de dimension mondiale, largementconditionné par la demande forte des États-Unis,l’avancée des pays d’Extrême-Orient et les ambi-tieux objectifs que s’est fixés l’Union européenne.A partir de cet examen, le groupe de travail a, ensecond lieu, poursuivi son enquête en se rendantdans quatre pays européens dont la situationmérite d’être mise en perspective avec les pré-occupations de la France : l’Espagne, la Finlande,l’Irlande et l’Italie. Elle a complété ces études deterrain par les analyses déjà effectuées enAllemagne, Danemark et Grande-Bretagne àl’occasion de travaux antérieurs sur le 6 e programme-cadre européen de recherche et de développementtechnologique, analyses qu’elle a recentrées etenrichies sur le thème de l’emploi scientifique. Philippe Busquin 5 résume ainsi les enjeuxauxquels sont confrontés les gouvernements despays membres de l’Union : “La priorité de larecherche est désormais clairement affirmée.L’objectif de faire passer l’investissement global– public et privé – au sein de l’Union de son niveauactuel de 1,9 % du PIB à 3 % d’ici 2010 a été adoptépar le conseil européen de Barcelone. Hormisquelques pays, tels la Suède et la Finlande, quiatteignent déjà ce niveau, il ne faut pas se cacherque cette ambition sera très difficile à réaliser.Les indicateurs scientifiques et technologiquesn’évoluent guère dans le bon sens et le climat

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économique est très morose. Face aux difficultésbudgétaires, les gouvernements sont tentés defreiner les dépenses – je préfère parler d’inves-tissements – de recherche. Certains ont com-mencé à le faire. Cette attitude est totalementcontre-productive. Regardez les Japonais : ilstraversent depuis des années une conjonctureéconomique difficile, mais ils ont spectaculairementrenforcé leur effort de recherche. Pour contrer lacrise économique, il faut, en effet, sortir “par lehaut”. Atteindre ce taux de 3 %, d’ici 2010, celasignifie également 700 000 chercheurs de plus enEurope… Il faut les former, inclure davantage defemmes et, parallèlement, attirer les meilleurschercheurs du monde entier.”

Les données internationales du problèmeL’objectif ambitieux des 3 % adopté lors de la confé-rence de Barcelone et auquel souscrivent pourleur propre compte un certain nombre d’Étatsmembres dont la France, comme l’évaluation parla Commission de la croissance en Europe deseffectifs de personnels de recherche qu’elle éta-blit à 700 000 pour les seuls chercheurs, impliquentun saut quantitatif et qualitatif dont les indicateursdisponibles donnent toute la mesure. Si l’on consi-dère par exemple les doctorats décernés en 2001,ils sont au nombre de 82 500 dans les 25 pays mem-bres de l’Union, dont 35 600 diplômes concernantles sciences et l’ingénierie 6 (S&E). L’Allemagnearrive en tête avec 24 800 doctorats toutes disci-plines (9 200 en S&E), suivie par le Royaume-Uni(14 150 dont 7 400 S&E) et la France (10 400 envi-ron dont 2 700 S&E). Ce constat conduit à uneconclusion difficilement contournable : un fortaccroissement des compétences scientifiques ettechniques en Europe implique l’accueil d’univer-sitaires de haute qualification, extérieurs à l’Union.

Les États-Unis connaissent une situation équi-valente, d’autant plus que leur potentiel deformation de nouveaux docteurs, qui bénéficied’une incontestable notoriété internationale, estsensiblement inférieur à celui de l’Unioneuropéenne avec 44 800 doctorats décernés en2001, dont 16 300 en sciences et ingénierie. Leursmoyens financiers consacrés à la R&D encroissance continue supposent le recrutementde milliers de docteurs que ne favorisent pas lesmesures restrictives en matière d’immigrationprises à partir de 2001 pour des raisons d’uneautre nature. Par ailleurs, en Extrême-Orient, laforte croissance de la Chine, la relance del’économie japonaise drainent un nombrecroissant de jeunes docteurs qui, une fois leurdiplôme en poche, quittent les universitésaméricaines, européennes ou australiennes pourrevenir dans leurs pays d’origine.

Face à cette ressource rare que sont les diplômésdes meilleures universités, au premier rangdesquelles se trouvent les universités du mondeanglophone, les États commencent à prendre desmesures susceptibles d’attirer des scientifiquesà l’avenir le plus prometteur dans leurslaboratoires et leurs universités.De son côté, le marché mondial des jeunes cher-cheurs s’organise empiriquement sur la base desinformations et des expériences vécues par lesscientifiques à la faveur des échanges avec leurshomologues étrangers. A cette occasion, les sys-tèmes de recherche font l’objet de confrontationsainsi que les rémunérations et avantages ennature qui distinguent les conditions de travailscientifique dans les pays employeurs. C’est toutun ensemble de paramètres qui fonde la décisiondes jeunes scientifiques et ingénieurs d’aller

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travailler dans tel ou tel pays. Au premier plan decet ensemble se situe la renommée de l’équiped’accueil ; viennent ensuite les conditions de tra-vail proprement dites, largement conditionnéespar les moyens de fonctionnement disponibleset la performance des équipements. La rémuné-ration constitue également un élément de choixnon négligeable tant dans son montant que dansla nature du contrat qui lie le nouveau venu à sonemployeur (contrat de plus ou moins longue durée,CDI ou recrutement comme fonctionnaire). Enfin,le niveau de vie du pays et plus simplement laqualité de vie constituent des éléments non négli-geables de choix. On peut y ajouter égalementles dispositions offertes couvrant le risque maladieainsi que la qualité des institutions de type familialet du système scolaire pour les enfants desexpatriés.

Certains de ces critères ne sont pas propres à lamobilité des scientifiques, mais sans douteétaient-ils sous-estimés par certains pays, sûrsde leur pouvoir d’attraction intellectuelle. Lacompétition qui s’organise désormais au niveaumondial pour accueillir les chercheurs donne àces conditions d’accueil une portée nouvelle dontle rôle est déterminant.Un marché de l’emploi scientifique orienté surles seuls besoins nationaux, qui s’organisait parune régulation du nombre des diplômes délivréset ou la mobilité des jeunes scientifiques, faitplace à une situation beaucoup plus fluide oùl’employeur n’est plus le seul maître du jeu maisdoit savoir attirer les scientifiques pour espérerconserver un potentiel de haut niveau. Cette situa-tion constitue une des données du changementdes dernières années et sans doute une tendancelourde pour les dix années qui viennent.

A cette tendance générale s’ajoute le relatifdésintérêt des jeunes pour les carrièresscientifiques à peu près également réparti parmiles différents grands pays scientifiques, àl’exception de la Chine. Les causes profondes quiconduisent à formuler un tel constat demeurentinsuffisamment élucidées dans la mesure où para-doxalement l’attrait des avancées de la scienceet des technologies trouve chez les jeunes unpublic attentif et participatif.

Une concurrence mondiale forte sur desressources humaines rares et qui risquent de seraréfier encore si l’on ne parvient pas à entraverla réduction des effectifs dans les filières scien-tifiques, telle peut être la première conclusionque l’on peut porter à partir du travail qui a étéle nôtre.

Les exemples européensFace à cette situation, les systèmes européensde recherche et d’enseignement supérieur exa-minés par le groupe de travail ont eu à affronterun ensemble de problèmes identiques ou tout aumoins voisins. A ce titre on peut citer :- le renouvellement des enseignants chercheurs et des personnels de R&D ;- la nécessité de mesures nouvelles pour favo-riser le recrutement de jeunes scientifiques ;- la faiblesse du volume relatif de R&D financéet exécuté par les entreprises industrielleset par le secteur des services ;- un pilotage des universités à reconsidérer ;- les dispositifs d’évaluation des personnes et des structures à créer ou à refonder selon les pays ;- l’essoufflement des financements publics et la

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difficulté d’instauration de modes de program-mation pluriannuelle.

Compte tenu de cette analyse, les grands paysscientifiques européens ont pour la plupart réagien jouant sur plusieurs domaines.

On peut regrouper la réponse des États sous troisgrandes rubriques :- des mesures pour attirer les jeunes chercheurs et leur faciliter l’entrée dans les carrières scien-tifiques ; - une révision de textes statutaires relatifs auxpersonnels scientifiques, fondée sur la réforme des systèmes d’évaluation et sur l’introduction de modes de rémunération au mérite ; - une modernisation des structures de produc-tion scientifique reposant sur un management plus directif et responsable de ses choix.

Chaque pays visité par la mission a perçu ceshandicaps et entrepris d’y porter remède avecplus ou moins de succès. Nous avons noté plusparticulièrement les points suivants.L’Allemagne a pris conscience de la nécessitéde permettre à de jeunes chercheurs de disposerde moyens suffisants pour conduire leur projetde recherche et a développé à cet effet le dispo-sitif dit des “juniors professors”. Cet outil est des-tiné à doter les scientifiques sélectionnés d’unbudget qui pendant trois ans leur permet de recru-ter du personnel, d’acheter du matériel et deconduire une recherche. Le deuxième point nota-ble de la réforme porte sur une meilleure éva-luation des universitaires et sur l’introductiond’une rémunération au mérite qui se met en placeprogressivement pour être généralisée en 2010.L’Irlande, de son côté, a choisi de concentrer ses

efforts de recherche sur deux secteurs clefs, lesbiotechnologies et les sciences de l’informationet de la communication. Les rémunérations desscientifiques et des universitaires, contractuelspour la plupart, sont ajustés en fonction de lanotoriété des chercheurs recrutés. Les contratsdits à dix ans équivalent dans les faits à des recru-tements à durée indéterminée.

Le Royaume-Uni met l’accent sur le recrutementde post-docs et sur des centres d’excellence dontla configuration permet de fortes concentrationsde potentiel. Des quatre parties du royaume,l’Ecosse, le Pays de Galles, l’Ulster et l’Angleterre,c’est cette dernière qui regroupe 94 % de larecherche britannique. Ainsi, l’est de Londres etOxford comptent pour 26 % ; le sud de Londres etCambridge pour 24 % et Londres, l’Imperial Collegeet la London School of Economics pour 7 %.L’essentiel des personnels de recherche sontrecrutés sur des contrats à durée déterminée.Toutefois la transposition dans la législationbritannique d’une directive européenne conduitce pays à transformer à terme les contrats à duréedéterminée (CDD), à l’issue de 6 ans de service,en contrats à durée indéterminée. Actuellement,sur 43 000 chercheurs, 41 000 bénéficient de CDD,ainsi que 23 000 universitaires sur 97 000. Pour certains, le modèle anglo-saxon de recher-che et d’enseignement supérieur se caractérisepar son attachement excessif à des principesconservateurs ; mais nous avons été frappés parses capacités d’autodiagnostic, de débat etd’évolution.

L’Espagne accomplit depuis plusieurs années uneffort sans précédent en Europe pour accroîtreson potentiel humain scientifique et technique

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tout en gardant une attitude prudente et prag-matique à l’égard de l’objectif des 3 %. Nous avonsété particulièrement sensibles à l’intégration decette politique de développement des ressour-ces humaines au sein d’un plan national quadri-ennal 2004-2007 qui en fixe les conditions. Sonapproche des carrières scientifiques l’a encou-ragée à mettre en œuvre depuis 2001 plusieursprogrammes contractuels de professionnalisa-tion destinés à la formation et à l’insertion despost-docs dans les carrières du secteur publiccomme du secteur privé. Nous avons enfin notél’instauration d’un dispositif d’évaluation quipermet notamment d’accorder aux méritespersonnels des chercheurs et des enseignants-chercheurs du secteur public une place impor-tante dans la détermination de leurs modes derémunération.

Pour tous les pays que nous avons étudié, la dif-ficulté tient à la difficulté des États à donner auxjeunes une vision de leur avenir. “Une carrière,des métiers multiples”, analyse fort justement lacommission dans une communication de juillet2003. Le problème des CDD n’est pas insurmon-table si les jeunes ont l’assurance de pouvoircontinuer leur carrière et ils devront le faire avecune “employabilité accrue”, c’est à dire le plussouvent changer de métier au cours de cettecarrière.

L’avenir du modèle français : les questionsposéesLorsque l’on examine les exemples étrangersqu’ils soient européens ou d’autres continents,on doit se poser la question du modèle françaisde service public appliqué à la recherche et àl’enseignement supérieur. Ce modèle se carac-

térise par un certain nombre d’éléments parmilesquels on trouve : - des chercheurs, des enseignants-chercheurs,des ingénieurs, techniciens et agents admi-nistratifs relevant du régime de la fonctionpublique ;- un recrutement par concours nationaux ;- le financement de la recherche publique assuréà 80 % sur dotations budgétaires de l’État, les res-sources sur contrats et les ressources propresne représentant respectivement que 14 % et 6 %du budget global ; - une évaluation par les pairs.

> La décentralisation La question que l’on peut se poser est de savoirsi ce modèle où l’État joue le rôle principal commeemployeur et financeur est toujours pertinent.

Nos partenaires européens ont renforcé leurspolitiques de décentralisation des activités deR&D, en Espagne dans le cadre des“Communidades autonomas” et en Italie avecles régions ; certains bénéficient historiquementd’une organisation largement décentraliséecomme l’Allemagne et la Grande-Bretagne.Le modèle français avait sa cohérence dans lecadre d’un État centralisé et centralisateur.Aujourd’hui l’État doit être en mesure de redéfinirle périmètre de ses prérogatives face à lapoursuite de son action de décentralisation etface à la construction européenne qui confèreaux régions une nouvelle dimension. De cetteévidence surgit une série d’interrogations :

- le système de recrutement et de promotions desenseignants-chercheurs (en partie décentralisé)doit-il être conservé en l’état ou doit-il relever des

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attributions des établissements universitaires oùles postes sont affectés, comme c’est le cas pourles chercheurs relevant des établissementspublics à caractère scientifiques et technolo-giques (EPST) ? - les carrières scientifiques et les évaluationsdoivent-elles être gérées au niveau national oulocal ?- à côté des statuts de titulaires, y a-t-il une placepour le recrutement de contractuels à duréedéterminée ?- les statuts de chercheurs et d’enseignants-cher-cheurs doivent-ils continuer à être distincts oudoivent-ils être progressivement fondus en unstatut unique de chercheur-enseignant ?- le mode de gouvernance des universités et desEPST doit-il être réformé pour donner plus deresponsabilité à l’équipe dirigeante jugée auxrésultats ?- plus généralement, n’est-il pas temps en Franced’accompagner une gestion des ressourceshumaines qui privilégie les modes d’avancementau sein des corps, des grades statutaires et deséchelles indiciaires, par une approche plusglobale des carrières scientifiques qui renforcel’attrait des métiers de la recherche chez lesjeunes, qui respecte la pluralité de ces métierset de leurs bifurcations possibles, qui rendentcompte des diverses temporalités qui caractéri-sent ces types de parcours professionnels, quimette un terme au sempiternel débat sur “leschercheurs à vie”, qui puisse enfin valoriserl’activité des seniors ?

Voilà quelques unes des questions que le groupede travail s’est posé à la suite des entretiens qu’ila pu avoir avec des responsables d’universitéset des services d’administration centrale. Sans

prétendre apporter de réponse définitive à cessujets difficiles le groupe de travail indique uncertain nombre de directions dans lesquelstravailler et qui figurent dans le rapport qui vientd’être remis.

ConclusionsL’étude de systèmes de R&D différents du nôtre,les expériences étrangères de conduite desréformes nous ont montré que nos partenairesont révisé ces dernières années, souventprofondément, leurs modes d’intervention dansles domaines de la recherche et de l’ensei-gnement supérieur pour s’adapter à la concur-rence internationale et attirer les meilleursétudiants et les meilleurs chercheurs dans leurpays.

Le défi qui est le nôtre actuellement est de réaliserrapidement les adaptations nécessaires pourrendre notre dispositif de recherche et d’ensei-gnement supérieur plus performant qu’il ne l’estactuellement. Le débat actuel sur la recherchetémoigne de ce souci collectif.

La loi organique sur les lois de finances (LOLF)qui peut être un incomparable instrumentd’évolution dans le domaine de la recherchecomme pour d’autres politiques publiques, lesmessages et contributions de la communautéuniversitaire et scientifique, rendus publicsrécemment, qui visent la réforme des structuresde recherche, constituent autant d’atouts pourles rénovations à opérer. Ces atouts ne seronteffectifs qu’à la faveur d’une méthode clairementaffichée pour conduire le changement et d’unevolonté politique forte pour animer cet ensemble .

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> 1 Thierry Malan, et Jacques Haudebourg, responsables pour la programmation FSE 1994-1999, Jacques Haudebourg et Anne-Marie Grosmaire, responsables pour la programmation 2000-2006Audit financier de l’agence Socrates Leonardo da Vinci : Jacques Haudebourg et Françoise Boutet-Waïss - Rapport nationalsur la mise en œuvre du programme communautaire Socrates : Marc Ollivier et Alain Michel (IGEN).

> 2 Josette Soulas et Huguette Haugades.

> 3 Juillet 2003.

> 4 Les carrières scientifiques : une approche fondée sur des éléments d’analyse comparative européenne, Rapport remis en octobre 2004,consultable sur www.education.gouv.fr/syst/igaenr/rapports

> 5 Commissaire européen pour la recherche jusqu’à la date de la prise de fonction de la nouvelle commission Barroso. Cette déclaration est extraite de la lettre d’information “RDT-info”.

> 6 Selon la nomenclature statistique Eurostat/OCDE le groupe Sciences et ingénierie (S&E) comprend : sciences de la vie, sciences physiques, mathématiques et statistiques, sciences informatiques, ingénierie et techniques apparentées, industrie de transformation et de traitement, architecture et bâtiment.

> 7 Les sources de cet article : les rapports de statistiques et de conjoncture de l’OCDE ; les données de l’OST ; les rapports des missions effectuées par l’IGAENR en Allemagne, Espagne, Finlande, Grande-Bretagne, Irlande, Italie ; l’apport des postes scientifiques des ambassades de France en Belgique et en Pologne qui ont fourni également des données.L’ensemble des données que le groupe de travail a rassemblé peut être consulté au centre de documentation de l’inspection générale ou sur www.education.gouv.fr/syst/igaenr/rapports

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Abécédaire : “É” comme Élève DOMINIQUE BORNE, doyen de l’inspection générale de l’éducation nationale

Les élèves sont partout dans les textes officiels.L’article premier de la loi d’orientation sur l’éducation du 10 juillet 1989 donne le ton :

“Dans chaque école, collège ou lycée lacommunauté éducative rassemble les élèves ettous ceux qui, dans l’établissement scolaire ouen relation avec lui, participent à la formation desélèves.Les élèves et les étudiants élaborent leur projetd’orientation scolaire …”

L’article 10 de la même loi précise les obligationsdes élèves, il énumère leurs droits. L’article 11installe les parents d’élèves dans la communautééducative. Pour compléter ce tour d’horizon, ilfaut relever la multiplication des élèves en diffi-culté qui se glissent dans les textes, au rythmede la croissance numérique de l’institution, etvérifier que les élèves sont bien présents à toutesles pages du rapport de la commission présidéepar Claude Thélot ; sans surprise ils reviennentcomme un refrain : il faut faire vraiment réussirtous les élèves, aider les élèves à construire unprojet éclairé …Le projet de loi d’orientation pour l’avenir del’École, discuté en 2005, ajoute enfin que “laNation fixe comme mission première à l’École dedonner à chaque élève la conscience des valeursde la République.”Cette invasion du mot élève est significative d’unmoment de l’institution scolaire et de la

représentation de son fonctionnement. Le moten effet évacue les familles : il est rare qu’appa-raisse le mot “enfant”, les jeunes, mais aussileurs parents n’ont d’existence que dans leurrapport à l’École, les parents sont immuablementparents d’élèves, et même étrangement annexésà l’institution comme membres de la communautééducative. Dans cette perspective il est parfai-tement cohérent que les élèves, et non pas lesenfants, soient “en difficulté”. Le rapport à l’Écolesubmerge tout le reste. Comment l’interpréter ?Impérialisme de l’institution scolaire ?Affaiblissement de la famille ? Affaiblissementdes autres institutions qui donnent identité, levillage, le quartier ? Certes l’École est surinvestiede multiples rôles par la société, mais ce recoursmassif aux élèves est aussi le signe de l’appari-tion d’un être social avec ses droits et sesobligations.

D’ailleurs le mot a changé de sens et de portée :“élève” ne renvoie pas nécessairement au maître.Le couple maître/élève est central chez Jean-Jacques Rousseau, l’Émile le montre à l’évidence ;dorénavant ce n’est plus le singulier qui dominedans les textes, ce sont les élèves qui sont aucentre,comme un groupe autonome, consommateur etexigeant ; ce groupe est représenté, organisé àdifférents niveaux, le niveau de l’établissement,le niveau académique et même le niveau national.Les élèves ne sont pas des enfants que l’on instruit

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mais des interlocuteurs reconnus et consultéscomme membres de communautés organisées.Ainsi changent de sens les problèmes identitaires.

Les élèves, histoire d’un motLe Littré identifie d’abord l’élève, au singulier, à”celui ou celle qui a reçu les leçons, l’enseigne-ment de quelqu’un dans les arts ou les sciences“et, pour le pluriel, renvoie à la relation avec leprofesseur, “le maître et les élèves”. Le Robertne dit pas autre chose “Elève : personne qui reçoitl’enseignement d’un maître”, mais les deuxexemples donnés à l’appui de cette définitiondatent : “Raphaël fut l’élève du Pérugin ; le ducde Bourgogne l’élève de Fénelon”.

L’origine du mot et son histoire expliquent cespersistantes définitions. Le mot élève apparaîttardivement en français puisqu’il n’est attestéqu’à partir du milieu du XVIIe siècle. Sa naissances’explique par la nécessité de donner un équi-valent français à l’italien allievo, construit à partird’un verbe pour désigner celui qui est ”élevé“par son maître. Le mot italien est lui-même apparuau XVIe siècle, il est contemporain des ateliersde la Renaissance et désigne d’abord celui quiest instruit dans un art par un maître, avant d’êtregénéralisé pour nommer celui qui reçoit l’ensei-gnement dans une école.

Cette origine est de conséquence. C’est aumoment où le français s’émancipe progressive-ment du latin que s’impose un mot, un déverbal,forgé sur un verbe, et qui ne vient pas directe-ment de la langue mère. Tous les textes latins eneffet opposent les discipuli aux magistri, ou par-fois comme dans le Ratio studiorum des Jésuitesce sont les auditores qui bénéficient des leçons

des magistri. Il ne peut y avoir d’élèves tant quela langue de l’école est exclusivement le latin.D’ailleurs si la langue courante a abandonné lesens scolaire de “disciple” le mot a servi à forgerdiscipline, qui reste scolaire dans toute sonétendue polysémique : la discipline est imposéeaux élèves pour les maintenir dans l’ordre maisla discipline renvoie aussi à un champ du savoirqui a été délimité à usage scolaire. La langue aconservé aussi condisciple : “c’était mon condis-ciple”, il a fréquenté en même temps que moi lesmêmes salles de classe. A partir du mot élève,au contraire, aucun dérivé n’a été forgé, le motn’a jamais renvoyé à un ordre, à un contenu ouà une communauté de destin scolaire.

Si l’on met à part le bref épisode rousseauiste, lemot élève ne triomphe qu’à une date récente. Ilfigure certes dans les discours des Opportunistesmais il est absent des grandes lois fondatricesde notre institution scolaire, la loi Guizot de 1833,les lois Ferry du début des années 1880 ; il appa-raît fugitivement dans la loi Goblet mais avec uneacception très particulière, en référence auxÉcoles normales d’instituteurs (“les élèvesmaîtres”). Pourquoi cette absence des élèvesdans ces grands textes ? La première raison estsimple, l’usage a longtemps gardé à l’élève sonsens singulier et son lien avec un maître, un maîtrede pensée, un maître de longue influence. Ainsidira-t-on : “lors de son passage dans la khâgned’Henri IV, vers 1930, il a été l’élève d’Alain” ouencore : “il est passé par la rue d’Ulm dans lesannées 1950, il fut donc l’élève d’Althusser.” Dumaître à l’élève il y a toujours, comme dans lesateliers des peintres de la Renaissance, une sortede filiation ; les traditions picturales ou philoso-phiques se perpétuent et se transmettent de

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maître en maître, d’élève en élève. Ainsi se formentet se reproduisent les tribus intellectuelles : lesélèves de Raymond Aron ne se confondent pasavec ceux de Pierre Bourdieu. Mais il y a d’autresraisons, plus élémentaires encore, à cetteabsence des élèves : les lois fondatrices de l’écoledisent simplement “les enfants” quand ellesveulent nommer ceux qui fréquentent les sallesde classe ; ils franchissent les murs de l’institu-tion mais ils restent des enfants. Ils ne changentpas de nature en entrant en classe. La Républiquequi institue l’École n’inscrit pas prioritairementles élèves dans ses finalités, elle institue l’Écolepour la Nation, elle l’inscrit au cœur d’un ambitieuxprojet républicain et patriotique tout à la fois.“Les élèves”, “les parents d’élèves”, “les élèvesen difficulté” sont donc contemporains desgrandes mutations de la deuxième moitié du XXe

siècle. Une galaxie étrange et spécifique s’estformée autour de ce que les textes appellent la“communauté éducative”. Le rapport individuelau maître s’efface à mesure que le mandarinatest discrédité, que les magistri s’effacent devant“les profs” ; alors, en masse, les élèves arriventavec leurs droits et leurs devoirs.

ChansonQuand les mots qui disent le monde scolaire sontpétrifiés, quand ils viennent par automatismesparesseux dans les phrases, quand ils inondentmécaniquement les circulaires, comment faire pourréenchanter l’École ? Peut-être faut-il essayer deretrouver une musique qui rajeunirait les cadencesde la vieille ritournelle : é-lè-ve, é-lè-ve, élève. Elève, é accent aigu, è accent grave, e muet, lemot élève est en lui-même un exercice scolairequi met en bouche la couleur sonore de la langue :l’aigu, d’entrée de jeu, interpelle et sollicite l’attention

de tous, il attire les regards qui se tournent vers lemaître, il éveille ; le grave qui vient ensuite, sonneà un autre rythme, il apaise et rassure, il incite àl’écoute active du maître et à l’exercice de la rai-son ; enfin, arrivée d’on ne sait où, s’installe cettesonorité blanche, étrangement qualifiée de“muette”, elle allonge et prolonge les leçons dumaître, elle les installe dans la durée ; ce dernier “e”est le temps de l’apprentissage des leçons, de lalecture silencieuse, de la rédaction des devoirs, ilsymbolise peut-être l’enracinement du savoir.

Ainsi épelle-t-on é-lè-ve, ainsi répète-t-on cestrois syllabes comme un exercice de justeprononciation, comme une incantation, commeune évocation. Répéter les mots, faire litanie,c’est parfois donner sens ou tout au contrairec’est rendre les mots étrangers à eux-mêmes ;Louis Aragon en répétant :”persiennes,persiennes, persiennes …” a fini par faire unétrange poème. Au contraire la réitération denotre mot, é-lè-ve, é-lè-ve, é-lè-ve, loin de fairepoème met au travail, peut-être parce que le motmime dans sa résonance le rythme même dulabeur scolaire, mais aussi parce que d’autressignifications surgissent de sa polysémie : élève,élève, élève et nous voilà renvoyés vers le ciel.Elève, élève, élève : entends l’injonction du maîtreà son disciple. Mais suffit-il de chanter ?

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La classe au temps de Jules Ferry ?La construction et le mobilier scolaires, l’agencement et l’éclairage desclasses n’ont cessé d’évoluer au fil des décénnies. Ces changementsillustrent le souci permanent des éducateurs d’offrir aux élèves les conditionsjugées, ici et maintenant, les meilleures pour apprendre …

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Cent ans d’école : Édition du Champs-Vallon

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notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

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Crédits photographiques :© ENSTIB-UHP : pages 5 à 19© Caroline Lucas MENESR : pages 21 à 37

pages 65 à 69pages 87 à 103

© Université d’Angers : pages 43 à 59© Clément Lievre : pages 58 à 62

pages 75 à 83© Université Bretagne Sud : pages 73 à 83