Ebola, réponse à l’alerte · Arrivée en taxi le 12 nov à l’hôpital Gabriel Touré. DCD le...
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Ebola, réponse à l’alerte Retour mission du Mali – Mission GOARN
Sophie IoosInstitut de Veille Sanitaire, Département Coordination des Alertes et des Régions, unité VICAR,
St Maurice, France
30è Journée Scientifique EPITER – Rennes – Vendredi 17 avril 2015
L’alerte à Kayes
• Le 19 octobre 2014, une jeune fille de 2 ans en provenance de
Guékédou en Guinée, passe la frontière à Kourémalé en
direction de Kayes
– Hospitalisée à Kayes, le 23 oct., symptomatique +++
– PCR Ebola positive – Diagnostic : maladie à virus Ebola (MVE)
– Décès de la jeune fille à l’hôpital le 24 oct.
• Premier cas identifié sur le sol malien
• Mission du Goarn (Global Outbreak Alert and Response Network –
Réseau Mondial d’Alerte et d’Action en Cas d’Epidémie)
– Appui à la réponse : riposte immédiate = gouvernement malien + appui
des partenaires dont l’OMS
– Départ le 27 octobre : mission d’appui au Mali confiée à 2
épidémiologistes seniors de l’InVS, sous bannière GOARN
Itinéraire
du voyage du cas n°1
Organisation de la réponse
– Appui à la coordination de la surveillance épidémiologique
Investigations épidémiologiques
Historique patient (trajets, dates, expositions…)
Identifier personnes contacts + assurer suivi
– Anticiper l’apparition de nouveaux cas
• Système d’alerte précoce : Plateforme de signalement , Algorithme
décisionnel
• Prise en charge : Centre de traitement Ebola (CTE)
• Equipes d’intervention : Equipe de transfert + Inhumation
• Tri des patients dans les structures de santé
• La communication : Mobilisation sociale / information / prévention
Actions prioritaires à mettre en place -
plan de réponse d’urgence
A Kayes :
• « Quarantaine » à l’hôpital
durant 21 jours
- Suivi bi-quotidien
- Nourris, logés
Identifications des
contacts (n=141)
Triage dans
centres de santé• Objectifs
– Identifier toute
personne fébrile (fièvre
≥ 38°C)
– Eviter qu’une personne
atteinte de MVE pénètre
dans une structure
sanitaire
L’alerte à Bamako
• Le 10 novembre 2014, l’OMS Guinée informe l’OMS Mali
qu’un patient guinéen (chef religieux) est décédé à Bamako +
rapatrié à la frontière guinéenne inhumé
• Hypothèses : cet imam pourrait avoir été infecté par le virus
Ebola
– Son fils qui a ramené le corps est malade
– Une femme et sa fille seraient décédées d’Ebola en Guinée
• Fréquenté différents établissements de santé au Mali
Kouremalé
Cas index – Cas secondaires
• Homme de 70 ans
‾ Hospitalisé à la clinique Fidel Castro - Guinée
‾ Passe la frontière à Kourémalé accompagné de son fils
‾ Hospitalisé dans une autre clinique à Kourémalé - Mali
• Arrivée à Bamako
‾ Hospitalisation à la clinique Pasteur
‾ Décès à la clinique
‾ Cérémonie à Bamako / mosquée
• Retour du corps à la frontière accompagné de son fils
(Kourémalé-Guinée)
‾ Enterrement non sécurisé
• Cas secondaires et chaines de transmission
‾ Nosocomiale
‾ Communautaire
Cas n°2 : O. K., Homme 70 ans.DDS le 17 oct. Consultation le 25 oct à la clinique Mali à Kourémalé (frontière avec la Guinée puis arrivé à Bamako, le 25 octobre où il est hospitalisé à la clinique Pasteur. DCD le 27 octobre. Non confirmé
Cas n°2 : O. K., Homme 70 ans.DDS le 17 oct. Consultation le 25 oct à la clinique Mali à Kourémalé (frontière avec la Guinée puis arrivé à Bamako, le 25 octobre où il est hospitalisé à la clinique Pasteur. DCD le 27 octobre. Non confirmé
Clinique Pasteur
Co-voiturage, visite Clinique Pasteur
Bilan Bamako: 14 decCas confirmés : 6dont décès : 4Cas probable : 1dont décès : 1
Bilan Kayes: 14 decCas confirmés : 1dont décès : 1
Visite Clinique Pasteur Funéraille
HospitalisationFils
Fils de la co-épouse
Cas probable
Cas ConfirméCas non comptabilisé au Mali
Transmission probable
Transmission incertaine
Document de travail évolutif
Visite Clinique Pasteur
Cas n°3 : I. K. Homme 43 ans, DDS 5 nov (diarrhée et vomissement). DCD le 10 nov lors du transfert vers Gabriel Toure. Non confirmé. Enterrement non sécurisé.
Cas n°6 : M. K. Femme 57 ans. DDS le 3 nov. Hospitalisée à la clinique El Razi (11 au 12 nov). Arrivée en taxi le 12 nov à l’hôpital Gabriel Touré. DCD le 12 nov. Enterrement sécurisé.
Cas n°9 : Y K. Homme 27 ans. DDS le 19 nov. Prise en charge et prélevé le 24 nov au CTE. Guéri
Cas n°7 : O K. Homme, 36 ans. DDS 2 nov A consulté le 2 nov à la clinique El Razi (Hoquet) puis le 5 à la clinique Keneyaton. DCD le 14 nov à domicile. Enterrement sécurisé.
Cas n°4 : Infirmier 25 ans, prise en charge du cas n°2 : DDS le 2 nov, hospitalisé le 8 nov, susp 10 nov, prel 11 nov. DCD le 11 nov. Enterrement sécurisé.
Cas n°5 : Médecin 41 ans. DDS le 5 nov : A traité cas n°2, hospitalisé le 7 nov et transféré le 11 au Centre de prise en charge. DCD le 20 nov. Enterrement sécurisé.
Cas n°8 : Fiancée du cas n°4 : Femme, 23 ans. DDS le 19 nov, hospitalisée au centre de prise en charge le 20 nov. Guérie
Demi-frère
Chaine de transmission des cas de MVE à Bamako au Mali
14 décembre 2014
Premiers éléments de la riposte
• Investigations par des équipes dédiées / méthodes
– Investigations
Identifications personnes contacts
Recherche active de cas
Historique des patients
Former des investigateurs
– Suivi des contacts : équipes aux domiciles /prise température
– Cas suspect : Investigateurs sur place / questionnaire et investigation
basée davantage sur le dialogue
• Un travail de terrain
– Priorité aux maliens
– Attention à la perception de la population locale
Rôle +++ de l’approche anthropologique
Identification et suivi des contacts6 cas / 428 contacts
• Identifier les périodes de suivi des contacts pour
chacun des cas
– Monitorage
– Identification des périodes à risque (7éme au 10éme jour)
Centre de traitement – Ebola- Bamako
• Composante épidémiologique
– Situation épidémiologique : identification et suivi des contacts +
gestion données + coordination et rédaction bulletins épidémiologique
– Commission surveillance : procédures, circuit de l’alerte, biologie
• Composante formation/appui des équipes (situation post crise)
– Equipes d’investigation - Bamako
– Equipes d’intervention rapide
– Equipes d’appui
• Composante terrain
– Tri aéroport
– Cordon sanitaire - frontière
– Implémentation en région /Struct. de santé
– Rassemblement de population
Organisation de la mission : activités
CREATION DU CENTRE OPÉRATIONNEL D’URGENCE : COU
• Sous commission « Surveillance et situation épidémiologique »
• Sous commission « Gestion des données »
• Sous commission « Labo »…
Composante épidémiologique/coordination
Commission surveillance
Composante épidémiologiqueCapacités de laboratoire : RT-PCR /BAMAKO seul
Labo mobile - Bamako– coopération allemande et française-
Composante épidémio/coordinationAlgorithme d’alerte, circuit, procédures, directives
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Etude sur la variabilité des mesures de
température –Thermomètres Thermoflash®
Evaluation « quick and dirty » visant à décrire cette variabilité à travers
plusieurs mesures effectuées sur chaque individu volontaire. Au total 164
personnes ont participé à cette évaluation avec 8 mesures par individu : 3
mesures frontales, 3 temporales et 2 axillaires.
Corrélation entre les moyennes individuelles des températures
frontales et les moyennes individuelles des températures
temporales
Corrélation entre les moyennes individuelles des températures axillaires
et les moyennes individuelles des températures frontales
Distribution des mesures individuelles de températures quelle
que soit la méthode utilisée
Composante coordination / formation
• Equipe d’intervention
rapide : multidisciplinaire
épidémiologiste, médecin clinicien,
biologistes-préleveurs , hygiéniste
• Equipe d’investigation : épidémiologiste - recherche active
de cas, suivi des contacts
• Equipe d’appui : équipe
d’investigation forme équipes
hospitalières et des dispensaires
en région
Formation en cascade
Modules de formation : théoriques et pratiques
• Epidémiologie
• Virologie
• Hygiène et protection contre l’infection
- L’équipement ne résout pas tout Sentiment de fausse sécurité
- Organisation des ambulances + équipes
enterrements protégés Recommandations OMS pour l’inhumation
Une équipe de 7 personnes
• Communication
Composante coordination / formation
La communication
La mobilisation sociale
• Population = au cœur de la lutte
• Information / discussion / explication
• «Les Maliens parlent aux Maliens»
• Approche anthropologique– Gestion de la peur au sein de la population / personnel médical
– Prise de contact
– Comportements
– Réintégration dans la communauté des survivants
Information• Communication médias
• Relai de l’information : réseau sociaux, prof. de santé
• Evènements, « porte à porte », actions
Prévention• Agent de sante communautaire
• Campagne de prévention : kits de protection, kits de protection des foyers
Attention aux rumeurs
Attention aux rumeurs
- Au Mali et en Guinée, le prix de
l'oignon = rumeur affirmant que
le bulbe protégeait du virus.
- La noix de cola et l'huile de coco =
souvent citées comme des aliments
permettant d'éviter toute
contamination, détaille Metronews.
- Des texto électrisent les population
(Les Observateurs de France 24)
- De même, les forums internet +++
Le tri à l’aéroport
Le tri dans les établissements de santé
Objectifs:
– Identifier personne fébrile (fièvre ≥38°C) + mettre en œuvre
les mesures pour réduire le risque d’exposition au virus Ebola
– Eviter qu’une personne atteinte de MVE pénètre dans une
structure sanitaire : structure d’isolement
- Donner l’alerte : système d’alerte précoce pour détection
rapide du virus + activer plans d’urgence en temps opportun
Protection des patients + personnel de santé
Mise en place en région + évaluation du tri à
l’entrée des établissements sanitaires
Surveillance de la frontière avec la Guinée
Postes frontières + Cordons sanitaires sur les pistes
(OMI +OMS)
Grands rassemblements de population :
Pèlerinage Maouloud
CAN 2015 (football)
Pèlerinage Maouloud: 4 – 11 janvier 2015 – Bamako + gdes villes
Mali + Guinée Conakry = qualifiés
CAN 2015 : 24 janvier 2015 – 8 février 2015
Les enseignements (1)
• Communication
• Protection
• Surveillance épidémiologique
– Surveillance active
• Système de détection précoce opérationnel +++
• Information de TOUS les professionnels de santé
• Recherche active des cas et le suivi des sujets contacts =
essentiels pour stopper une épidémie
– Identification des contacts et assurer leur suivi
Tous les cas étaient des contacts
Tous les contacts ne seront pas des cas
• Développement des connaissance sur Ebola– Remise en question / concept
• Formation
– Formation du personnel soignant• Formations répétées
– Identifier des équipes: travail spécifique pour chacun
Les enseignements (2)
Dysfonctionnements (1)
• Coordination
– Réunions quotidiennes trop longues (3h et +)
– Planification précise des tâches
• Logistique
– Afflux de capitaux et matériel non adapté
– Manque crucial de matériel dans centre de santé +++/ Dispatch ad hoc
• Surveillance communautaire
- Supervision approximative et irrégulière
- Suivi des contacts : perdus de vue (faire prendre conscience de l’importance)
• Alerte- Centre d’appel : 24h/24 - 3 médecins régulateurs - 3000 et 9000 appels/jour
- Pb circuit alerte et acheminement des patients
Attention traçabilité personnes contacts ++++
Dysfonctionnements (2)
• Enterrements sécurisés– Tenue de cosmonaute + Parfois effectués « au pas de charge »
– Digne
• Prise en charge des cas probables (zone de transfert)– Unité d’observation = éloignée centre de traitement (6h de route)
– Centre non habilité (prélèvements sanguins + gestes invasifs)
– Difficile d’avoir 1 équipe dédiée
– Capacité d’accueil limitée
• Transport des cas possiblesEquipes d’intervention à Bamako : 1 puis 2 ambulances pour tout le pays -
couvrir zone rurales et urbaines, dont certaines à plus de 300 km
Perte de chance pour les patients !!!
Dysfonctionnements (3)
• Sensibilisation – Communication
– Messages inadaptés / début des interventions
– Refus catégorique d’amener les malades au CTE =
« mouroir »
– Déni lors des premiers cas avec éventuellement opposition
aux interventions puis peur après plusieurs décès au sein
d’une ou plusieurs familles
– Eclatement des valeurs socioculturelles : stigmatisation,
racisme par rapport à l’étranger (Guinéens …), « no touch
policy »
– Tradipraticiens +++ dans la boucle
Contexte international particulier et une expérience
d’épidémiologie de terrain
- Epidémie « hors norme », « sans précèdent »: Nombre de cas / Durée /
Extension / zones urbaines et frontalières / structures sanitaires locales
fragiles / ONG spécialisées dépassées
- Réponse = en deçà des besoins et des objectifs avec de nombreux
disfonctionnements
- Importance de la surveillance / casser chaine de transmission
- Anthropologues/psychologues/sociologues +++: messages adaptés,
Interprétations et comportements populaires
Intérêt pour la France
- Organisme ou institut français (InVS) = « savoir faire » – expertise
- Intérêt zone Mali-Guinée = besoin épidémiologistes francophones
- Réel soutien pour équipes épuisées et pas toujours bien formées
Conclusion
Un seul nouveau cas suffit pour relancer une épidémie
…
Nous devons rester vigilants jusqu’à ce que toutes les
personnes qui sont entrées en contact avec le virus
Ebola soient identifiées
Nous avons gagné une bataille mais
pas encore la guerre
Depuis le 18 janvier 2015, fin de l’épidémie au Mali
Remerciements
• Ministère de la santé malien
• L’ensemble des investigateurs + acteurs luttant contre la
MVE au Mali
• OMS Genève – GOARN
• OMS Mali
• OMS Afro
• InVS
• Epiter