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Chapitre 3 Les usages de l’eau 71 L’eau est présente dans presque toutes les chaînes de production et de transformation des produits que nous consommons : métaux, plastiques, produits pétroliers, produits alimentaires... Pour limiter son impact sur l’environnement tout en conciliant les exigences de la croissance économique, l’industrie a consacré de gros efforts au cours des 40 dernières années pour réduire les quantités d’eau prélevées et les pollutions rejetées. 3. L’eau et l’industrie 1. Les besoins en eau de l’industrie • En France En France, 10 % de l’eau prélevée chaque année, soit 4,5 milliards de m 3 , est utilisée par l’industrie. Sur ce volume total, 300 millions de m 3 sont réellement consommés, c’est-à-dire ne retournent pas dans le milieu naturel. Comparée à d’autres usages, cette consommation réelle est faible car dans ce secteur les eaux utilisées sont ensuite rejetées dans leur quasi-totalité. En effet, la grande majorité du volume prélevé par les industries est utilisée pour le refroidissement, après quoi l’eau est renvoyée dans le milieu d’origine. On estime en moyenne à environ 7 % l’eau réellement consommée. Les industriels utilisent de l’eau : - pour fabriquer les produits (eaux de procédé), soit en l’utilisant directement comme matière première incorporée dans un produit fini (pour la fabrication des jus de fruits, des sham- pooings par exemple), soit en la faisant intervenir dans le procédé de fabrication, - pour refroidir les machines (eaux de refroi- dissement), - pour nettoyer les installations (eaux de lavage), - pour l’hygiène des employés (eaux sanitaires). L’eau est présente dans presque toutes les chaînes de production et de transformation des produits : production d’acier, industries agro-alimentaires, raffinage du pétrole, fabrication du papier… Remarquable solvant, l’eau est aussi très utilisée par l’industrie chimique pour laver, dissoudre, extraire, synthétiser un grand nombre de molé- cules. Il faut par exemple : - 20 000 litres d’eau pour produire une tonne d’acier, - 5 000 à 10 000 litres d’eau pour produire une voiture, - 80 litres d’eau pour produire 1 kg de sucre, - 10 à 100 litres d’eau pour produire 1 kg de papier, - 20 à 30 litres d’eau pour produire 1 kg de camembert, - 3 litres d’eau pour produire 1 kg de bonbon. La sucrerie de Connantre dans la Marne (51) une voiture 5.000 à 10.000 litres une tonne d'acier 20.000 litres 1 kg de papier 10 à 100 litres 1 kg de sucre 80 litres 1 kg de bonbons 3 litres

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L’eau est présente dans presque toutes les chaînes

de production et de transformation des produits que nous

consommons : métaux, plastiques, produits pétroliers, produits

alimentaires...

Pour limiter son impact sur l’environnement tout en conciliant les exigences de la croissance

économique, l’industrie a consacré de gros efforts au cours des 40 dernières années pour réduire

les quantités d’eau prélevées et les pollutions rejetées.

3. L’eau et l’industrie

1. Les besoins en eau de l’industrie

• En France

En France, 10 % de l’eau prélevée chaque année, soit 4,5 milliards de m3, est utilisée par l’industrie. Sur ce volume total, 300 millions de m3 sont réellement consommés, c’est-à-dire ne retournent pas dans le milieu naturel. Comparée à d’autres usages, cette consommation réelle est faible car dans ce secteur les eaux utilisées sont ensuite rejetées dans leur quasi-totalité. En effet, la grande majorité du volume prélevé par les industries est utilisée pour le refroidissement, après quoi l’eau est renvoyée dans le milieu d’origine. On estime en moyenne à environ 7 % l’eau réellement consommée.

Les industriels utilisent de l’eau :

- pour fabriquer les produits (eaux de procédé), soit en l’utilisant directement comme matière première incorporée dans un produit fi ni (pour la fabrication des jus de fruits, des sham- pooings par exemple), soit en la faisant intervenir dans le procédé de fabrication,- pour refroidir les machines (eaux de refroi- dissement), - pour nettoyer les installations (eaux de lavage),- pour l’hygiène des employés (eaux sanitaires).

L’eau est présente dans presque toutes les chaînes de production et de transformation des produits : production d’acier, industries agro-alimentaires, raffi nage du pétrole, fabrication du papier… Remarquable solvant, l’eau est aussi très utilisée par l’industrie chimique pour laver, dissoudre, extraire, synthétiser un grand nombre de molé-cules.Il faut par exemple :- 20 000 litres d’eau pour produire une tonne d’acier,- 5 000 à 10 000 litres d’eau pour produire une voiture,- 80 litres d’eau pour produire 1 kg de sucre,- 10 à 100 litres d’eau pour produire 1 kg de papier,- 20 à 30 litres d’eau pour produire 1 kg de camembert, - 3 litres d’eau pour produire 1 kg de bonbon.

La sucrerie de Connantre dans la Marne (51)

une voiture5.000 à 10.000 litres

une tonne d'acier20.000 litres

1 kg de papier10 à 100 litres

1 kg de sucre80 litres

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• Dans le bassin Seine-Normandie

Le bassin Seine-Normandie accueille environ 40 % des industries françaises, parmi lesquelles, en particulier, 60% des industries automobiles et 37 % des raffi neries de pétrole. L’assemblage d’équipements mécaniques et électriques est l’employeur principal du bassin.L’industrie du bassin est caractérisée par une forte présence d’activités situées en aval des fi lières de production, c’est-à-dire celles qui réalisent des opérations d’assemblage ou de mélange (la chimie de spécialité, les automobiles, etc.). Le secteur tertiaire (activités de service et de commerce) est de plus en plus source d’emplois.

2. Les pollutions industrielles

• Les effl uents industriels

La fabrication des produits industriels génère très souvent des rejets d’eau polluée par les ateliers de production. Ils sont appelés effl uents industriels. Ces effl uents doivent impérativement être traités car la pollution qu’ils contiennent peut être très concentrée, ou avoir un effet toxique sur les organismes vivants et ainsi nuire au pouvoir d’auto-épuration de l’eau. Ils peuvent aussi induire l’accumulation de certains éléments dans la chaîne alimentaire (métaux, radioactivité, substances toxiques…). Les rejets d’eaux chaudes peuvent aussi perturber tout l’écosystème d’une rivière.

Certaines installations industrielles sont équipées de leur propre station d’épurationavant un rejet autorisé vers le milieu naturel et les cours d’eau superfi ciels.D’autres envoient leurs effl uents vers une station municipale lorsque ceux-ci sont compatibles avec le traitement réalisé pour les eaux domestiques. Ils sont alors mélangés et traités avec l’ensemble des eaux usées de la ville. Une partie de ces industries réalise un prétraitement de ses eaux usées pour les débarrasser de certaines pollutions qui n’auraient pas pu être traitées par la station. En revanche, les effl uents les plus concentrés en pollution ou très toxiques, dont le traitement est diffi cile sur le site ou par la station d’épuration communale, sont isolés et envoyés vers des fi lières de traitement adaptées et spécifi ques dans des centres de traite-ment externes.

Quelque soit la confi guration, les rejets industriels doivent respecter des valeurs réglementaires (en quelque sorte des normes de rejet), c’est-à-dire que leur concen-tration en polluants ne doit pas excéder certaines limites autorisées.

• Les pollutions par secteurs d’activités

Toutes les industries ne génèrent pas une pollution de même type ni de même impor-tance. On distingue les pollutions organiques, les pollutions chimiques, les pollutions toxiques et les pollutions physiques. - Les industries agro-alimentaires (conserveries de légumes, caves coopératives, laiteries…) rejettent principalement des matières organiques ou azotées.- Les industries lourdes, les industries chimiques et certaines industries de trans- formation des métaux peuvent être la source d’une pollution toxique et persistante.- Les effl uents provenant d’une tannerie par exemple, sont chargées de chrome et d’acides, produits toxiques utilisés pour le tannage des peaux. C’est une pollution chimique. - La pollution physique peut être due au réchauffement de l’eau par les centrales thermiques, aux matières en suspension des mines, des carrières ou de la sidérurgie.

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3. Comment limiter les impacts sur l’eau des activités industrielles ?

• Limiter les pollutions

Les progrès réalisés par les industries dubassin Seine-Normandie ces dernièresdécennies sont considérables : les rejets ont été réduits de plus de moitié. La législation est de plus en plus stricte, les industriels semblent aujourd’hui plus soucieux de la protection de l’environne-ment, qui devient même pour certains un argument de vente.

Pour inciter les industriels à lutter contre les pollutions, l’Agence de l’eau Seine- Normandie a mis en place la redevance pollution. Cette redevance suit le principe du «pollueur-payeur» : son montant est calculé en fonction de la quantité de pollution générée et émise par l’activité, et du type de pollution produit. L’effi cacité du système d’épuration mis en place est également prise en compte. Pour une entreprise qui pollue, la redevance versée à l’Agence de l’eau représente 0,5 à 5 % de son chiffre d’affaires.

Poissons morts au bord de Seine

• Les pollutions accidentelles

Leurs origines peuvent être multiples, mais à la différence des autres types de pollutions, elles restent très ponc-tuelles. Certains déversements de produits polluants oud’eaux polluées sont dus à des accidents (camions-citernes, bacs endommagés, fuites sur canalisations, fuites au cours du chargement ou du déchargement des produits...). D’autres surviennent dans les usines, lorsque des quantités importantes de gaz ou de liquides toxiques s’en échappent et sont disséminés en peu de temps dans la nature. C’est le cas notamment lors d’incendies où les eaux d’extinction en contact avec les produits polluants sont alors souillées.Des équipements spécifi ques sont très souvent installés sur les sites afi n de retenir ces pollutions et éviter leur transfert vers le milieu naturel.

• Les sites et les sols pollués

Il s’agit essentiellement des pollutions historiques, souvent à base d’hydrocarburesou de substances organiques. La plupart du temps, il s’agit de déchets qui ont été volontairement ou non enfouis, ou d’anciennes lagunes de traitement des effl uents industriels qui n’ont pas été réhabilitées. Ces pollutions ont souvent contaminé les sols des anciennes usines encore en activité ou non. Le traitement de la pollution de tels sites est diffi cile et souvent coûteux. Une bonne étude préalable, la suppressionde l’origine de la pollution ou éviter que la pollution ne se répande dans les ressources en eaux souterraines sont des étapes importantes avant le traitement éventuel des sols.

Un rejet industriel accidentel dans la Seine

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L’industrie reste responsable d’un tiers des rejets ponctuels de pollution organique sur le bassin de la Seine, le reste étant essentiellement d’origine domestique. Les activités industrielles sont aussi à l’origine de la majorité des rejets ponctuels toxiques. En revanche, si l’on considère la quantité de pollution générée par l’activité industrielle, avant tout traitement de la pollution, la part de l’industrie représente plus de la moitié de la quantité de pollution générée. Il est donc indispensable que les industriels maintiennent et améliorent en permanence leurs dispositifs de traite-ment de la pollution.

• Limiter les prélèvements en eau

Grâce aux progrès réalisés en matière d’économie d’eau (arrêt automatique des pompes, nettoyage à sec, etc.), les besoins en eau des industries restent stables malgré le développement de l’activité de ce secteur, voire diminuent. Les besoins en eau de refroidissement, par exemple, ont considérablement diminué grâce aux techniques nouvelles de recyclage et de réutilisation de l’eau (mise en circuit fermé).

Dans certains secteurs à forte consommation d’eau comme les laiteries, les brasseries ou les teintureries textiles, la mise en place de technologies propres a permis de réduire la demande en eau et de limiter les coûts d’épuration.Pour inciter les industriels à limiter leurs prélèvements d’eau dans le milieu naturel,l’Agence de l’eau Seine-Normandie a également mis en place une redevance

prélèvement. Le montant de cette redevance est essentiellement fonction du volume d’eau prélevée, ainsi que de la nature de cette eau (nappe ou surface).

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4. L’eau comme source d’énergie

La force de l’eau a été utilisée pour faire tourner les roues des moulins à eau dès l’Antiquité. Plusieurs siècles avant notre ère, en Chine et en Inde, des roues hydrauliques servaientau concassage des minéraux. Chez les Grecs puis chez les Romains, le moulin à eau était couramment employé pour extraire l’huile d’olive, tailler les pierres ou martelerles métaux. Jusqu’au XIXe siècle, les moulins à eau sont demeurés une sourced’énergie essentielle dans toutes les industries : métallurgie, industrie du bois, textile…

• La production d’électricité

De nos jours, la force motrice de l’eau est utilisée dans les centrales hydrauliques pour la production d’électricité. L’eau est envoyée sur les aubes d’une turbine. Celle-ciest couplée à un alternateur qui transforme l’énergie mécanique produite par laturbine en électricité. Le cours d’eau (ou le lac) est barré, de manière à constituerune réserve. L’usine peut se situer au pied du barrage ; elle peut aussi en êtreéloignée : l’eau est alors conduite vers l’usine par un canal de dérivation dontl’extrémité aval est une conduite forcée. L’énergie hydraulique est la seconde source de production d’électricité en France après l’énergie nucléaire. La production varie selon les aléas de l’hydraulicité (précipitations). Elle a représenté en 2006 près de 61 TWh, soit environ 12 % de la production totale d’électricité. L’hydroélectricité est une source d’énergie renouvelable ; elle produit ni pollution ni gaz à effet de serre.

Retenued'eau

Turbine

Alternateur

Schéma de principe d’une centrale hydraulique

1 kilowatt correspond

à la puissance de

1000 litres d’eau

tombant d’une hauteur

de 1 mètre en 1 seconde.

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• Les types d’installation

En fonction de la confi guration du terrain, on distingue plusieurs types d’installations : - les usines de haute chute (ou usines de lac) et les usines de moyenne chute (ou

usines d’éclusée) sont situées en haute et en moyenne montagne ; elles ont un réservoir important, ce qui permet de moduler la production d’électricité en fonction de la demande : les turbines fonctionnent en période de pointe de consom- mation ; ces usines se situent en montagne, il n’y en a donc pas dans le bassin Seine-Normandie ;- les usines de basse chute ou usine au fi l de l’eau se situent sur les fl euves et se caractérisent par l’absence de réservoir : leur capacité de retenue n’excède pas deux heures ; elles fonctionnent sous de très faibles hauteurs de chute et sont alimentées uniquement par le débit du fl euve ; elles assurent une production de base et ne jouent aucun rôle de régulation ;- les stations de pompage utilisent un réservoir en amont et un réservoir en aval : l’eau est pompée vers l’amont en période de basse consommation quand l’élec- tricité est peu chère, et turbinée vers l’aval en période de pointe de consommation. Pompage et turbinage sont assurés par les mêmes turbines réversibles.

• Les conséquences sur l’environnement

La construction d’un barrage et l’aménagement d’une retenue d’eau artifi cielle ontfatalement une incidence sur l’environnement et le milieu biologique concerné : perte de terres cultivables, réduction des zones de frai, obstacle à la circulation des poissons… Afi n de limiter au maximum cet impact, toute réalisation fait l’objet d’une étude portant sur différents domaines : hydrologie, hydrogéologie, hydrobiologie, insertion dans le paysage, impact socio-économique. Cette étude permet la mise en place de mesures destinées à compenser ou à réduire les éventuelles conséquences domma-geables de l’installation. En ce qui concerne la protection de la faune et le respect des migrations par exemples, de nombreuses actions sont entreprises : création et protection de zones de frayères, installation d’écluses et de passes à poissons…

Voir la plaquette« Les usages industriels de l’eau »

téléchargeable sur le site de l’Agence de l’eau Seine-Normandie :http://www.eau-seine-normandie.fr - rubrique Expert - Etudes et synthèses

Pour accéder aux études socio-économiques des usages de l’eau

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