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www.agence-zadig.com / Photo : Céline Anaya Gautier Picture Tank Du 8 au 20 Novembre 2010 RencontRe avec écrivains olombieNs 12 c www.belles-etrangeres.culture.fr LES BELLES ÉTRANGÈRES www.agence-zadig.com

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édito

Non pas deux fois cent ans de solitude, mais bien deux siècles d’une indépendance vécue comme une épopée, pages d’ombres et de lumières mêlées : c’est sa marche

vers la liberté, sans cesse recommencée, parfois douloureuse mais toujours passionnée, que célèbre la Colombie en cet automne 2010. Loin des sempiternelles images d’une terre déchirée, le Centre national du livre a voulu s’associer à cette fête en allant à la rencontre d’une des littératures les plus fécondes d’Amérique latine. Son secret de fabrique ? La confluence des vastes horizons andin, pacifique et caraïbe n’y a d’égale qu’un amour intransigeant de la langue : le lourd héritage de l’histoire, un sens aigu de la chronique élevée au rang de mythe et l’exaltation du peuple, l’affirmation de l’irréductibilité de l’écriture. Il n’est que l’expérience de la plus vive violence pour engendrer une telle civilisation de la courtoisie. En Colombie, un don ne se refuse jamais. Aussi me faut-il formuler le vœu que l’accueil de la France aux douze écrivains d’exception que nous sommes heureux de faire découvrir, ou redécouvrir, sera à la hauteur de leur singulière générosité, gage d’avenir pour tout un continent, peut-être tourmenté, certainement flamboyant.

ColombieLES BELLES étrANgèrES

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JEAN-FrANçoIS CoLoSImo Président du centre national du livre

N

LES BELLES étrANgèrESColombie

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a Colombie est avant tout une terre de mythes. Pour les muiscas, qui habitaient

les montagnes andines bien avant l’arrivée des Espagnols, l’humanité est née de Bachué, surgie d’un lac en tenant par la main un enfant qu’elle finit par épouser et dont la descendance peupla la terre. Pour les conquistadors qui foulèrent pour la première fois le continent américain au Cabo de la Vela, où vivent aujourd’hui les Wayuu, l’Eldorado fut un puissant moteur d’expédition. Savaient-ils que ce mythe repose au fond du lac de guatavita, à quelques kilomètres de l’actuelle Bogotá, où chaque année le cacique, le corps enduit de poudre d’or, montait sur un radeau rempli d’offrandes ? Et que, lorsque les rayons du soleil frappaient l’embarcation, il se jetait à l’eau et en ressortait le corps lavé ? Ce rituel fécondait la terre et garantissait la survie du monde.

L’épopée de la Conquête, si bien retracée dans les romans de William ospina, fut placée d’emblée sous le signe de la violence. Entre Espagnols d’abord, mais aussi et surtout à l’encontre des indigènes, décimés par les mauvais traitements et les maladies venues d’Europe, puis des esclaves noirs amenés d’Afrique pour les remplacer. Carthagène des Indes, comme le rappelle gabriel garcía márquez dans L’Amour et autres démons, fut le premier port négrier des Amériques. L’or du Choco et les émeraudes

introduction hIStorIquEJEAN-mIChEL mArLAud Ambassadeur de France à Bogotá

de muzo, extraits par les esclaves, donnèrent naissance à de somptueuses cités coloniales comme Popayan où se développèrent une architecture et une peinture baroques de toute beauté, mais aussi à l’apparition des premiers villages d’esclaves révoltés comme Basilio de Palenque.

tout au long du xviie siècle, se développa une société coloniale aux références européennes, dominée par l’église catholique, les rivalités entre Espagnols, leur soif de richesse et la soumission des autres populations. Au xviiie siècle, les révolutions américaine et française se firent sentir dans les lettres, les sciences et les armes : en 1784, Antonio Nariño fut exilé à Cadix pour avoir osé traduire la déclaration des droits de l’homme et du citoyen et l’entourage de José Celestino mutis, botaniste et ami de humbolt et de Bonpland, compta nombre des futurs héros de la geste bolivarienne.

Le processus d’émancipation de la Colombie se fit dans la violence. Le mouvement débuta le 20 juillet 1810, il y a tout juste 200 ans, et s’acheva le 7 août 1819, au terme de longs et sanglants combats, avec la victoire de Boyacá. mais une fois les Espagnols vaincus, les nouveaux dirigeants ne tardèrent pas à s’entre-déchirer. La séparation du Venezuela et de l’équateur marqua la fin du rêve de Bolívar, convaincu, au crépuscule

Lhéctor ABAd FACIoLINCE

Antonio CABALLEro

Jorge FrANCo

Santiago gAmBoA

tomás goNZÁLEZ

William oSPINA

Juan manuel roCA

Evelio roSEro

gonzalo SÁNChEZ

Antonio uNgAr

Fernando VALLEJo

Juan gabriel VÁSquEZ

Auteurs invités par le Centre national du livredu 8 Au 20 NoVEmBrE 2010

2LES BELLES étrANgèrES

Colombie

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ANNIE morVAN conseillère littéraire auprès du cNL

de sa vie, d’avoir « labouré la mer ». Les affrontements sanglants entre conservateurs et libéraux se succèdèrent et aboutirent à la guerre des mille jours et à la sécession du Panama le 3 novembre 1903, magistralement relatées par Juan gabriel Vásquez dans Histoire secrète du costaguana. Pourtant, tout au long de ce xixe siècle chaotique, la vie intellectuelle resta florissante, symbolisée par le chef-d’œuvre de Jorge Isaacs, María, publié en 1867.

La transformation profonde de la Colombie dans la première moitié du xxe siècle − développement rapide de la production de café, urbanisation accélérée, construction de routes et de chemins de fer, création de grands journaux comme El Espectador − s’accompagna de mouvements sociaux meurtriers : ainsi les atrocités commises contre les indigènes par les producteurs de caoutchouc et racontées en 1924 dans La Vorágine, œuvre haletante de José Eustasio rivera, et le massacre, en 1928, des travailleurs de la banane, qui figure en bonne place dans cent ans de solitude.

À partir des années 1940, la Colombie, engagée aux côtés des Alliés, renoua avec une production intellectuelle brillante. Paul rivet, fondateur du musée de l’homme et du réseau de la résitance du même nom, réfugié à Bogotá, où il représentait la France libre, créa l’Institut d’Anthropologie. Entre 1948 et 1950, Le Corbusier effectua cinq voyages dans la capitale colombienne, avec des plans qui ne sortirent jamais de ses cartons, tandis qu’à Barranquilla fut fondé un petit groupe d’artistes, parmi lesquels gabriel garcía márquez et les peintres Fernando Botero et Alejandro obregón.

Pourtant, la violence entre conservateurs et libéraux s’exacerba. L’assassinat, le 9 avril 1948, du candidat libéral à l’élection présidentielle Jorge Eliecer gaitán, relaté par gabriel garcía márquez dans Vivre pour la raconter, déclencha une vague de violence qui fit 200 000 morts et dont témoigne le film de Fernando Vallejo cronica roja. Cette période, connue sous le nom de La Violencia, s’acheva en 1956 par un accord entre les deux partis politiques qui ne mit cependant pas fin

epuis la guerre de Troie, la dualité que forment violence et littérature

semble inhérente à la vie des peuples. depuis L’Iliade, la poésie est la rencontre d’une langue et des hommes, le flamboiement de la beauté au plus fort du combat, et l’écriture confronte la force de l’histoire aux passions des personnages. « on ne saurait lire Stendhal, dit Antonio Caballero, sans comprendre Napoléon ». Pas plus qu’on ne saurait lire les écrivains colombiens d’aujourd’hui sans savoir que depuis le xixe siècle plusieurs guerres civiles ont ensanglanté le pays ; celle des mille jours qui, de 1899 à 1902, fit plus de deux cent mille morts ; celle qui, dans les années 1950, opposa conservateurs et libéraux et, plus près de nous, les années d’affrontements entre militaires, paramilitaires, guérilleros et narcotrafiquants. À l’image du continent sud américain, la Colombie est un va-et-vient entre le rouge et le noir, la guerre et la paix, le crime et le châtiment.

du sommet des Andes colombiennes, chacun peut admirer le panorama infini de l’Amérique latine, mais seuls les Colombiens sont en mesure de raconter leur pays. La littérature indigène

au conflit. des guérillas s’organisèrent pour en finir avec les terribles inégalités sociales, tandis que la culture de la coca s’industrialisa. Commença le temps de la production et de la commercialisation de la cocaïne. d’où une certaine image de la Colombie contemporaine. C’est le règne des cartels de la drogue et de Pablo Escobar, abattu en 1993. Certes, la culture de la coca a toujours existé chez les populations andines et ce, bien avant la Conquête, mais à partir des années 1980, les trafiquants de cocaïne représentent une menace dramatique pour les peuples indigènes (qui sont plus de cent en Colombie, parlant 64 langues) car ils procèdent par assassinats sélectifs et suscitent des déplacements forcés de populations qui signent leur arrêt de mort, alors qu’ils sont coupés de leurs territoires et de leurs traditions. Les narcotrafiquants mettent aussi en danger l’environnement, en raison de la déforestation qu’ils pratiquent de façon intensive et des rejets de produits chimiques dans les rivières. La volonté de mettre un frein à l’avancée des guérillas et le trafic de la drogue ont conduit à la création de groupes paramilitaires qui se sont révélés rapidement coupables d’atrocités pires que celles de leurs adversaires.

La littérature colombienne contemporaine reflète ce sentiment de perte des repères et de désespoir, qu’il s’agisse de l’assassinat du père dans le livre d’héctor Abad, L’oubli que nous serons, de l’errance dans Bogotá du héros d’Antonio Caballero, du drame du village évoqué par Evelio rosero dans Les Armées, de l’exil chez Jorge Franco et Santiago gamboa ou de la poésie lyrique et visuelle de Juan manuel roca.

Aujourd’hui la situation évolue : le nombre d’homicides a été divisé par deux depuis deux ans, la Colombie s’ouvre au tourisme, un vent de confiance souffle. Les écrivains sont là pour nous rappeler qu’au-delà des incontestables succès qui ont bouleversé la réalité colombienne, des questions fondamentales subsistent, liées à la présence du narcotrafic, à la difficulté de concilier la lutte contre le crime organisé et le respect des droits de l’homme, à la nécessité de réduire les inégalités.

et caribéenne d’aujourd’hui, consignant la rumeur des anciennes légendes, témoigne du long et difficile passage de l’oralité à la prose et à la poésie ; les historiens cherchent les traces d’une conquête lointaine et cruelle pouvant expliquer la volonté d’indépendance et un présent qui n’est pas encore en paix avec lui-même ; pour entreprendre le voyage vers les Cyclades de la modernité, les romanciers colombiens traversent les mangroves de l’orénoque, les villages reculés, les métropoles tumultueuses et plongent sans crainte dans les labyrinthes du moi, les dédales du thriller, les jeux de l’amour et de l’érotisme transgresseur, pour mieux regarder l’histoire récente droit dans les yeux ; les poètes se glissent dans les fissures du réel.

Cette édition des Belles étrangères propose un choix – sans doute partiel mais puissant et légitime – d’auteurs qui partagent une même terre et une même histoire et dont les œuvres mènent le lecteur à la découverte d’une Colombie plurielle. on y voit le ciel tourmenté de Bogotá et des verts de toutes les couleurs dans la lumière zénithale des montagnes andines ; on y voit la pluie tomber comme elle tombait jadis sur macondo, village inoubliable de cent ans de solitude ; on souffre et on pleure avec

introduction LIttérAIrE

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4LES BELLES étrANgèrES

Colombie

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les paysans la disparition d’un fils ou la mort d’un père de la main des guérilleros, des paramilitaires ou des mafieux de la drogue, ce qui revient au même ; on accompagne des personnages en mal d’aventure, perdus dans le vaste espace mais portant en eux toute la beauté de leur pays pour mieux en révéler les secrets ; on pénètre dans des villes dont chaque quartier correspond à un cercle de l’Enfer de La Divine comédie et chaque coin de rue à l’un de ses chants ; on entend le langage urbain et macabre des sicaires, on s’égare dans les méandres de la mémoire et de l’imagination, et on finit par croire que ce pays s’est réellement appelé un jour le Costaguana, pays inventé par Joseph Conrad dans son roman Nostromo et repris par Juan gabriel Vásquez dans son Histoire secrète du costaguana.

À l’instar de toute autre, la littérature colombienne est une école d’universalité. Ses écrivains récents, un temps cachés aux yeux du monde par les astres éblouissants de gabriel garcía márquez et d’Alvaro mutis, livrent une double bataille. Nombre d’entre eux pactisent le jour avec la vérité en écrivant dans des revues et des quotidiens, et, la nuit, s’échappent ou cherchent leur salut en poussant la porte de la bibliothèque mondiale. Ce face à face nécessaire, ou ce délire, comme on voudra, existe bel et bien dans le dix-neuvième fragment d’un roman colombien où le dernier Aureliano Buendía, personnage de cent ans de solitude, réunit chaque jour quatre garçons qui mènent un dialogue acharné sur les mille et une façons de tuer les cafards au moyen Âge : Alvaro Cepeda Samudio, Alfonso Fuenmayor, germán Vargas et gabriel garcía márquez lui-même. quatre écrivains colombiens majeurs des années 1960 dont l’histoire littéraire de l’Amérique latine se souvient comme du groupe de Barranquilla.

Aujourd’hui ils ne sont pas quatre mais douze : héctor Abad Faciolince, Antonio Caballero, Jorge Franco, Santiago gamboa, tomás gonzález, William ospina, Juan manuel roca, Evelio rosero, gonzalo Sánchez, Antonio ungar, Fernando Vallejo et Juan gabriel Vásquez. gageons que, dans les pages d’un de leurs romans ou dans les vers d’un de leurs poèmes, se tient le personnage qui symbolisera, pour les lecteurs d’ici et d’ailleurs, la littérature de la Colombie du xxie siècle.

du 8 au 20 novembre 2010, le Centre national du livre invite douze écrivains de Colombie représentant la diversité de sa production littéraire : poètes, romanciers, essayistes. Le choix des auteurs a été réalisé avec Annie morvan, conseillère littéraire auprès du CNL pour cette édition colombienne des Belles étrangères.

Conçues et organisées par le Centre national du livre depuis 1987, Les Belles étrangères favorisent la découverte de littératures étrangères ou d’auteurs encore peu connus en France et accompagnent la politique d’aide à la traduction, à la publication et à la diffusion menée par le Centre national du livre. Le principe repose sur l’invitation, en novembre de chaque année, d’un groupe d’écrivains d’un même pays ou d’une même aire linguistique, et l’organisation d’une série de rencontres, pendant deux semaines, dans toute la France, avec des librairies, des bibliothèques, des universités, des théâtres et des associations culturelles, partenaires du Centre national du livre.

Les douze auteurs invités sillonnent la France et la Belgique seuls, à deux ou à trois. Plus de 40 villes sont concernées, soit près de soixante rencontres publiques, dont 19 rencontres scolaires et universitaires et 3 rencontres en prison, réalisées avec 90 partenaires parmi lesquels : 19 bibliothèques et médiathèques, 29 librairies et 21 associations.

Les éléments du programmme mentionnésont sous réserve de modification.

Retrouvez le programme complet : www.belles-etrangeres.culture.fr

6LES BELLES étrANgèrES

Colombie

LES BELLES étrANgèrESédition Colombie 2010

ACtuALIté édItorIALE

à PArAîtrE à L’AutoMNE 2010héctor ABAd FACIoLINCEL’oubli que nous serons, traduit par Albert Bensoussan, éd. gallimard,en librairie le 28 octobre 2010

traité culinaire à l ’usage des femmes tristes, éd. J.-C. Lattès, en librairie le 3 novembre 2010

Santiago gAmBoANécropolis 1209, traduit par François gaudry, éd. métailié, en librairie le 9 septembre 2010

tomás goNZÁLEZAu commencement était la mer, traduit par delphine Valentin, éd. Carnets Nord, en librairie le 7 octobre 2010

William oSPINALe Pays de la cannelle, traduit par Claude Bleton, éd. J.-C. Lattès, en librairie le 25 août 2010

Juan manuel roCABible de pauvres, poèmes, traduit par François-michel durazzo, éd. myriam Solal, en librairie le 24 octobre 2010

à PArAîtrE DéBut 2011Antonio uNgArtrois cercueils blancs, traduit par robert Amutio, éd. Les Allusifs

Juan gabriel VÁSquEZLes Amants de la toussaint, nouvelles, traduit par Isabelle gugnon, éd. du Seuil

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héctor Abad naît en 1958 à medellín. Après des études de journalisme à l’université d’Antioquia, il devient chroniqueur dans plusieurs journaux et revues dont El Espectador, Semana et cambio. Contraint à l’exil de 1987 à 1992, il s’installe d’abord en Espagne puis

en Italie, à Vérone, où il gagne sa vie en donnant des cours d’espagnol et commence son œuvre de romancier. traducteur d’auteurs italiens, dont gesualdo Bufalino et Italo Calvino, il publie en 1991 un premier livre de nouvelles, Malos pensamientos, suivi en 1996, de tratado culinario para mujeres tristes (traité culinaire à l ’usage des femmes tristes), et en 2000 d’un roman, Basura. Angosta, publié en 2004, lui vaut une reconnaissance internationale. En 2006, il publie El olvido que seremos (L’oubli que nous serons), récit autobiographique et poignant hommage à son père assassiné en 1987. En 2009, enfin, paraît un recueil de trois nouvelles, traiciones de la memoria. Il vit aujourd’hui à medellín.

Angosta, ville imaginaire de Colombie, est, dans un décor fantastique, le lieu d’une vaste fable sur l’inégalité sociale et la séparation des classes où se déroule l’histoire

d’un marginal amoureux des livres qui s’éprend de la jeune amie d’un mafieux, et là les choses tournent mal… Inspiré, d’une certaine façon, par La Divine comédie de dante, le roman se divise en trois parties correspondant aux trois étages de la société : l’Enfer où vivent les pauvres, tout en bas de la ville, le Purgatoire qui est cette zone intermédiaire où se défend la classe moyenne, et le Paradis qui ne peut être que celui des riches. Nous sommes bien là dans la métaphore de medellín.

traité culinaire à l ’usage des femmes tristes est une sorte de jeu littéraire inspiré par L’Art d’aimer d’ovide.

L’oubli que nous serons, récit autobiographique, évoque les deux décès qui ont marqué la vie de l’auteur : celui de sa sœur, morte d’un cancer foudroyant, et celui de son père, un docteur humaniste, défenseur des droits de l’homme, assassiné pour ses idéaux. dans la poche du père tué à medellín, le jeune héctor Abad a trouvé un poème manuscrit qui commence par le vers : « Nous voilà devenus l’oubli que nous serons », poème de Jorge Luis Borges dont l’histoire est rapportée dans l’ouvrage suivant de l’auteur, traiciones de la memoria (trahisons de la mémoire) à paraître. L’oubli que nous serons, livre considérable où les pages de l’enfance sont d’une émouvante tendresse, est aussi une saisissante immersion dans l’enfer de la violence politique colombienne. écrit dans un style bouleversant de pudeur et de retenue, il a déjà conquis des milliers de lecteurs dans le monde.

ALBErt BENSouSSAN traducteur

Angosta,traduit par Anne Proenza,

éd. J.-C. Lattès, 2010

L’oubli que nous serons, traduit par Albert Bensoussan,

éd. gallimard, 2010

traité culinaire à l ’usage des femmes tristes,

traduit par Claude Bleton, éd. J.-C. Lattès, 2010

« LES LIVrES SoNt uN SImuLACrE dE SouVENIr, uNE ProthèSE Pour SE rAPPELEr, uNE tENtAtIVE déSESPéréE dE rENdrE uN PEu PLuS durABLE CE quI ESt IrrémédIABLEmENt LImIté. »L’oubli que nous serons, éd. gallimard

Vous retrouVerez Héctor ABAD FAcIoLINce à :• Dunkerque le 9 novembre avec Jorge Franco• metz les 12 et 13 novembre avec evelio Rosero et Gonzalo Sánchez • mulhouse et Colmar les 15 et 16 novembre avec antonio caballero• Poitiers le 17 novembre avec Gonzalo Sánchez• arles le 19 novembre avec Santiago Gamboa

8LES BELLES étrANgèrES

Colombie

HéCtor ABAdFACIoLINCE

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Antonio Caballero naît à Bogotá en 1945. Il grandit en Espagne et fait des études de droit et de sciences politiques à Paris. Au milieu des années soixante-dix, il participe à la fondation de la prestigieuse revue espagnole cambio 16, et, de retour en Colombie, consolide sa carrière

de journaliste. Sa plume claire et directe, sa rigueur et son éthique professionnelle lui valent une reconnaissance internationale. Contraint, dans les années quatre-vingt-dix, de quitter son pays en proie à la violence politique, il s’installe en grèce, puis de nouveau en Espagne. En 1999, No es por aguar la fiesta, livre qui reprend ses principaux articles politiques, remporte le prix Planeta de journalisme. Il est également l’auteur de plusieurs essais sur l’art publiés sous le titre Paisaje con figuras et d’un livre sur la tauromachie, dont il est un grand amateur. Il est l’auteur d’un unique roman : Sin remedio (un mal sans remède), comédie humaine emblématique du Bogotá des années soixante-dix.

un mal sans remède,traduit par Jean-marie Saint-Lu,

éd. Belfond, 2009

« PoèmE. PoèmE. PoèmE. dES grumEAux dE PoèmES rEStAIENt CoLLéS À SoN PALAIS, tout Au FoNd dE LA BouChE, LÀ où N’ArrIVE PAS LA PoINtE dE LA LANguE… »un mal sans remède, éd. Belfond, p. 18

Antonio

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CABALLEro

on ne peut que se rendre à l’évidence : Antonio Caballero porte fort bien son nom. Issu d’une grande famille de Bogotá, il a la distinction discrète de la bourgeoisie

intelligente, et sa bonne éducation n’a d’égale que sa très grande culture. Non seulement du monde hispanique – sa connaissance des Lettres du Siècle d’or est immense –, mais du monde en général, et sa maîtrise du français est absolue. Il était donc parfaitement armé pour devenir un observateur attentif de notre époque et pour porter sur son pays un regard d’une acuité exceptionnelle qui se manifeste dans les deux domaines où il exerce ses talents : le journalisme écrit et la caricature. Ne nous étonnons pas dès lors qu’avec un mal sans remède, il ait pu écrire, en y consacrant dix ans de sa vie, le roman des années soixante-dix à Bogotá, et que cet ouvrage soit devenu en Colombie un livre culte. mais ce n’est là qu’un décor : au-delà de sa valeur testimoniale, il faut voir dans ce livre – et c’était d’ailleurs le projet de son auteur – une méditation riche et désabusée sur la poésie et la difficulté d’être poète. Par-là, un mal sans remède échappe à la contingence et prend place parmi les grands livres qui invitent à réfléchir sur l’art et sur la beauté. on n’en sort pas indemne.

JEAN-mArIE SAINt-Lutraducteur

Vous retrouVerez ANtoNIo cABALLero à :• liège et bruxelles les 9 et 10 novembre avec Fernando vallejo• bordeaux, mérignac et biarritz les 12 et 13 novembre avec Juan Manuel Roca• mulhouse et Colmar les 15 et 16 novembre avec Héctor abad Faciolince• luçon et la roche-sur-Yon les 17 et 18 novembre avec Jorge Franco• saint-Nazaire et Nantes le 19 novembre avec William ospina et Juan Gabriel vásquez

LES BELLES étrANgèrESColombie

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Jorge Franco naît à medellín en 1962. Il fait des études de lettres à la Pontificia universidad Javeriana de Bogotá, puis des études de cinéma à la London International Film School. Il publie un premier recueil de nouvelles, Maldito amor, en 1996, et un premier roman, Mala noche, en 1997. En 1999,

rosario tijeras (La Fille aux ciseaux) remporte le prix dashiell hammet au Festival de la Semana Negra, en Espagne, avant d’être adapté au cinéma par Emilio maillé, puis dans une série pour la télévision. Son roman Paraíso travel, publié en 2001, a également été porté à l’écran et miguel urrutia a signé l’adaptation théâtrale de son dernier ouvrage, Melodrama. Jorge Franco est professeur d’écriture créative à l’université nationale de Bogotá.

Jorge

La Fille aux ciseaux, traduit par rené Solis,

éd. métailié 2001

Paraíso travel, traduit par rené Solis,

éd. métailié, 2004

Melodrama, traduit par rené Solis,

éd. métailié, 2010

« J’AI Su qu’EN mE mEttANt À CourIr J’ALLAIS LA PErdrE Et quE moI AuSSI, EN uN CLIN d’œIL, J’AVAIS SIgNé mA PErtE.»Paraíso travel, éd. métailié, coll. «Suites», p. 9

Vous retrouVerez Jorge FrANco à :• Dunkerque le 9 novembre avec Héctor abad Faciolince• Durban, Port-la-Nouvelle et villesèque-des-Corbières le 12 et 13 novembre avec antonio Ungar• luçon et la-roche-sur-Yon les 17 et 18 novembre avec antonio caballero• la rochelle le 19 novembre avec Gonzalo Sánchez

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FrANCo

dans un hôpital de medellín, une jeune femme criblée de balles agonise. Avec La Fille aux ciseaux, son premier grand succès, Jorge Franco plongeait au cœur de la

fournaise colombienne - narcotrafic, guerre des gangs, exécutions sommaires - à travers une folle histoire d’amour entre deux adolescents : un fils de bonne famille et une fille des bidonvilles, tueuse à la solde d’un cartel.

L’œuvre de Jorge Franco ne manque ni de jeunes femmes fatales ni de jeunes hommes faibles. dans Paraíso travel, reina, forte de son ascendant sur marlon, le convainc de la suivre à New York. L’horreur de leur périple clandestin n’est rien en comparaison de ce qui les attend. Allers retours entre passé et présent, art de la tension, économie de moyens, le style de Franco évoque le cinéma et son écriture frôle l’abîme. dans Melodrama, l’imminence de la mort imprègne tout le récit de Vidal, narrateur d’un cauchemar familial et amoureux.

« Voilà un des auteurs colombiens à qui j’aimerais passer le flambeau ». Ce mot de gabriel garcía márquez frappe d’autant plus que leurs univers semblent éloignés. tous deux partagent néanmoins, il est vrai, la conviction que la littérature est l’art de transformer des vies en destins.

rENé SoLIStraducteur

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Santiago gamboa naît à Bogotá en 1966. Après des études de lettres à l’université Javeriana de Bogotá, il émigre en Europe. Il vit à madrid où il obtient une licence en philologie hispanique. À Paris, il travaille comme journaliste à radio France Internationale avant d’être nommé

correspondant d’El tiempo, le quotidien le plus important de la capitale colombienne, puis attaché culturel à l’unesco. Son premier roman, Paginas de vuelta, est publié en 1995, suivi en 1997 de Perder es cuestión de método (Perdre est une question de méthode), immédiatement traduit dans plusieurs langues et porté à l’écran en 2005 par Sergio Cabrera. Lors de sa parution en France en 1999, El Síndrome de ulises (Le Syndrome d’ulysse) est sélectionné pour le prix médicis étranger. Son dernier roman, Nécropolis 1209, a remporté en Colombie le prix La otra orilla. Il a écrit une grande partie de son œuvre dans la capitale française avant d’être conseiller culturel de l’ambassade de Colombie en Inde et vit actuellement à rome.

SANtIAgo gAmBoA : LES VoIx du moNdE

La littérature de Santiago gamboa est l’expression d’un tournant intellectuel : celui des écrivains latino-américains qui proclament leur droit non seulement à raconter la réalité

de leur pays mais aussi à nommer le monde. En cela, son œuvre est colombienne et universelle. Ses personnages avancent dans les dédales convulsés de Bogotá, au rythme du roman noir dans Perdre est une question de méthode, ou empreints d’une ironie futuriste dans la nouvelle Le Siège de Bogotá. Ils se perdent aussi au détour de lointains labyrinthes. Ceux des sous-sols du désir et du désarroi du Paris sordide des immigrés dans Le Syndrome d’ulysse, ou ceux de l’espionnage et de l’humour dans Les captifs du Lys blanc où la Chine apparaît comme la digne héritière des imbroglios de la havane de graham greene, auteur dont Santiago gamboa est proche, tant par sa puissance narrative, la complexité de ses intrigues que par la confrontation des regards éthiques qui, dans ses récits, interrogent toujours de façon narquoise le rôle de la pensée religieuse d’aujourd’hui.

Petit à petit, Santiago gamboa a construit un alter ego littéraire, Esteban hinestroza, personnage du Syndrome d’ulysse que l’on rencontre une première fois dans son roman précédent, Esteban le héros, et dans son dernier, Nécropolis 1209, qui est une formidable polyphonie de voix dans un monde rongé par la violence. À 44 ans, Santiago gamboa est à l’apogée de sa maturité littéraire, maître d’une œuvre où s’équilibrent humour, inquiétude et désarroi. que ne peut-on espérer de son talent ?

JoSé mANuEL FAJArdoécrivain

SAntiAgo

Perdre est une question de méthode, traduit par Anne-marie meunier,

éd. métailié 1999

Les captifs du lys blanc, traduit par Claude Bleton,

éd. métailié, 2002

Esteban le héros, traduit par Anne-marie meunier,

éd. métailié, 2003

Le Syndrome d’ulysse, traduit par Claude Bleton,

éd. métailié, 2007

Le Siège de Bogotá, traduit par Claude Bleton,

éd. métailié, 2007

Nécropolis 1209, traduit par François gaudry,

éd. métailié, 2010

« AttENdrE, AttENdrE, JE NE FAISAIS quE çA Et uNE FoIS dE PLuS J’AttENdAIS, gArE dE L’ESt »Le Syndrome d’ulysse, éd. du Seuil, coll. « Points », p. 314

Vous retrouVerez sANtIAgo gAMBoA à :• lyon le 9 novembre • rochefort les 15 et 16 novembre avec William ospina• aix-en-Provence les 17 et 18 novembre avec Fernando vallejo• arles le 19 novembre avec Héctor abad Faciolince

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gAmBoA

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tomás gonzález naît à medellín en 1950 et vit aujourd’hui à Cachipay, à deux heures de route de Bogotá, dans la montagne. Il fait des études de philosophie à l’université nationale de Colombie et travaille comme barman dans la discothèque El goce pagano,

qui publie son premier roman en 1983. Cette même année, il part aux états-unis, vit 3 ans à miami, puis 16 ans à New York où il écrit une grande partie de son œuvre et travaille comme traducteur. Il rentre en Colombie en 2002. romancier, nouvelliste et poète, ses principaux romans sont : Primero estaba el mar (Au commencement était la mer), 1983, Para antes del olvido, 1987, La Historia de Horacio, 1997, Los caballitos del diablo, 2003, Abraham entre bandidos, 2010. Parmi ses recueils de nouvelles, il convient de citer El rey del Honka-Monka, 1995. Son œuvre poétique est rassemblée dans un recueil, Manglares, 1997-2006.

LES SECrEtS dE tomÁS goNZÁLEZ

tomás gonzález possède un secret que nous voudrions tous avoir : il ne vieillit pas. À l’image de son roman, Au commencement était la mer, écrit il y a une trentaine

d’années, ses textes ne se fanent pas. Cela tient à son langage éclatant et simple. Ce ton est unique dans la littérature colombienne, parce que, comme le dit l’un de ses personnages, ses mots ont « le naturel de la mousse sur les pierres ».

un autre de ses secrets est que son écriture, malgré des thèmes parfois très noirs, n’est pas déprimante, bien au contraire, elle célèbre la vie et la réconcilie avec la mort. tomás nous montre que mourir fait partie de la vie et que celle-ci va bien au-delà de la mort. de plus, il ne peint pas le monde en noir et blanc. dans ses livres, le bon côtoie le ma l, le beau se tient près du laid et, ce qui est typique de la Colombie, la souffrance accompagne la jouissance : « dans un bar fétide et pendant qu’un juke-box jouait un tango, le blessé perdait son sang et buvait de la bière ».

Le secret le plus intime de tomás est de savoir s’emparer du cœur de ses lecteurs. Presque tous ses personnages sont des perdants et des ratés. Cependant, l’auteur ne les laisse pas succomber à leurs défaites, et, en leur ouvrant la porte, il les libère et leur confère une dignité retrouvée. Cette libération se transmet au lecteur et provoque en lui une catharsis qui fait frissonner son âme. C’est pourquoi lire tomás gonzález et son invitation à connaître « l’épineuse beauté du monde » est une expérience gratifiante et enrichissante.

PEtEr SChuLtZE-krAFttraducteur

tomáS

Au commencement était la mer, traduit par delphine Valentin,

éd. Carnets Nord, 2010

« CEttE SAISoN dES PLuIES Fut LoNguE Et SINIStrE. Pour CEttE rAISoN PEut-êtrE, ou BIEN PArCE qu’IL AVAIt été oBLIgé dE CédEr LE BétAIL, J. S’ENFoNçA dE PLuS EN PLuS dANS LE SILENCE. »Au commencement était la mer, éd. Carnets Nord

Vous retrouVerez toMás goNzáLez à :• rennes les 10 et 12 novembre avec Juan Gabriel vásquez• Porto-vecchio, Corte et ajaccio du 17 au 19 novembre

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goNZÁLEZ

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William ospina naît en 1954 à Padua, dans la région de tolima. Il commence des études de droit et de sciences politiques à l’université Santiago de Cali, mais les abandonne pour se consacrer au journalisme et à l’écriture. Essayiste, poète, romancier, il publie en 1982 un essai sur le poète

Aurelio Arturo et, en 1986, un premier recueil de poèmes Hilo de Arena. Fondateur de la prestigieuse revue revista Número, il est l’auteur de nombreux essais, en particulier sur le rôle du langage dans la conquête de l’Amérique et sur les grands maîtres de la littérature : Walt Whitman, Arthur rimbaud, Lord Byron, Emily dickinson entre autres. En 1992, l’Instituto Colombiano de Cultura lui décerne le Prix national de poésie. Son premier roman, ursúa, paraît en 2005, suivi, en 2009, de El país de la canela (Le Pays de la cannelle). Cette même année son œuvre poétique (1974-2004) est éditée en Espagne. Il est également l’auteur d’une pièce de théâtre, Bolívar : fragmentos de un sueño (Bolivar : fragments d’un rêve), qui, adaptée et mise en scène par omar Porras, sera jouée au grand t de Nantes les 18 et 19 novembre 2010.

« Il se pourrait que ce qui régit le destin de l’homme ne soit ni le Christ, ni Jupiter, ni Allah, ni moloch, mais Pachacámac, le dieu des arrivées nulle part, le dieu de la sagesse qui

survient un jour après l’échec. » Ainsi comprend-on que William ospina n’est pas seulement un grand poète et un auteur de roman historique, mais un écrivain de la quête, une quête détournée de sa dimension spirituelle chez les conquistadors, car aux Amériques, au xvie siècle, seul l’or est la mesure de l’homme, du temps et de l’espace.

William ospina a entrepris une vaste trilogie autour du conquistador Pedro de ursúa, qui n’a pas 17 ans quand il débarque sur le nouveau continent, en 1544, et qui finira assassiné à peine vingt ans plus tard par ses coreligionnaires. ursúa, le premier volume, rapporte par la voix d’un mystérieux conteur les premières aventures de Pedro de ursúa dans le Nouveau monde, ses combats contre les peuples amérindiens, contre ses propres concitoyens et contre la nature, démesurée, envahissante, obsédante, qui orchestre cette écriture symphonique.

dans le deuxième volume, Le Pays de la cannelle, la même voix, qu’on identifie peu à peu, raconte la folle descente de l’Amazone par une poignée de conquistadors persuadés qu’ils vont trouver en aval une immense forêt de canneliers, et donc la fortune.

derrière cette violence sans limites, William ospina mène, sans jamais le dire, une réflexion sur le pouvoir, en observant et décrivant les minuscules acteurs de la grande histoire.

CLAudE BLEtoNtraducteur et écrivain

à qui parle Virginia en marchant vers l ’eau,

poésie, traduit par tania roelens, éd. Cheyne, 2004

ursúa, traduit par Claude Bleton,

éd. J.-C. Lattès, 2007Le Pays de la cannelle,

traduit par Claude Bleton, éd. J.-C. Lattès, 2010

« AINSI AVANçAIt urSúA, touJourS ENgLué dANS SoN dEStIN, touJourS uN PEu EN rEtrAIt du PoINt où IL AurAIt Pu êtrE LIBrE Et mAîtrE dE SA VIE. »ursúa, éd. J.-C. Lattès, p. 250

WilliAm

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oSPINAVous retrouVerez WILLIAM osPINA à :• montpellier et béziers les 9 et 10 novembre avec evelio Rosero• rochefort les 15 et 16 novembre avec Santiago Gamboa• Nantes le 18 novembre avec Juan Manuel Roca• saint-Nazaire et Nantes le 19 novembre avec antonio caballero et Juan Gabriel vásquez

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Juan manuel roca naît à medellín en 1946. Poète et journaliste, il a dirigé le supplément hebdomadaire du quotidien El Espectador. Coordinateur des ateliers de poésie de la Casa Silva à Bogotá, il dirige la revue culturelle La Sangrada escritura. depuis le milieu des années soixante-dix, il a publié

une quinzaine de recueils de poésie, parmi lesquels : Memoria del agua, 1973 ; Luna de ciegos, 1975 ; Los ladrones nocturnos (Voleur de nuit), 1977 ; Pavana con el diablo, 1990 ; Los cinco entierros de Pessoa, 2001 ; Arenga del que sueña, 2002 et Biblia de pobres (Bible de pauvres), 2010. Il est également l’auteur de plusieurs essais et d’un roman, Esa maldita costumbre de morir, 2003. Son œuvre a reçu de nombreux prix littéraires tant en Amérique latine qu’en Espagne. Il est docteur honoris Causa de l’université del Valle.

Juan manuel roca fait partie de la génération dite « de la désillusion », des poètes nés au milieu des années quarante et ayant commencé à écrire autour de 1970,

à un moment où la Colombie est en passe de sombrer dans un « chaos de rues et de blessures ». Son écriture, alimentée par les grandes voix de la poésie tant latino-américaine qu’européenne, est trop originale pour faire partie d’une école, même si l’on y décèle, çà et là, des échos de la contestation nadaïste portée par ses aînés un peu plus tôt.

on dit que chaque poète est noueur de cordes. des cordes allant de l’aujourd’hui à l’éternel, de l’intime au cosmique. Chez roca, le chemin se ferait plutôt à rebours. Partant de loin, de l’autre côté de la nuit, pour se rapprocher de l’ici. Ainsi, évoquer la Colombie, cet immense hospice dans lequel l’aveuglement est roi, revient-il à parler d’abord d’un paysage premier juché quelque part dans les plaines de l’ailleurs. N’est dès lors sûr que ceci : il y a des fissures dans le réel. Par elles se glissent les gouttes que seul le non-voyant sait voir. C’est le sens de ces enfants aveugles jouant avec le bruit en tapant dans une boîte de conserve. ou de la main qui, agrippée à une corde, sonne les cloches de l’ombre. on en trouvera l’illustration dans les deux livres parus en français : l’anthologie Voleur de nuit, réunissant des textes écrits entre 1977 et 2005, et la toute récente Bible de pauvres.

JEAN PortANtEécrivain

Voleur de nuit, traduit par

François-michel durazzo, éd. myriam Solal, 2009

Bible de pauvres, traduit par

François-michel durazzo, éd. myriam Solal, 2010

« JE LAVE L’EAu, Et C’EStCommE LAVEr LA LIquIdIté du tEmPSSouS LES PoNtS »Voleur de nuit, éd. myriam Solal, p. 39

JuAn mAnuel

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roCAVous retrouVerez JuAN MANueL rocA à :• lyon le 10 novembre avec antonio Ungar• bordeaux et biarritz les 12 et 13 novembre avec antonio caballero• Guyancourt le 17 novembre avec Myriam Montoya• Nantes le 18 novembre avec William ospina• marseille le 19 novembre

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Evelio rosero naît en 1958 à Bogotá où il vit encore aujourd’hui. Journaliste et poète, il publie dans les années quatre-vingt une trilogie romanesque composée de Primera vez (1984), Juliana los mira (1986) et El incendiado (1988). Ses romans et ses recueils de nouvelles postérieurs

se caractérisent par une vision réaliste des conflits sociaux qui traversent la Colombie et une langue très imaginative et pleine d’ironie. En 2006, il reçoit, en Colombie, le Prix national de littérature, l’année suivante, en Espagne, le prix tusquets puis en grande Bretagne le prix « The Independent » du meilleur livre étranger pour son roman Los Ejercitos (Les Armées).

Journaliste de formation, écrivain par passion, romancier, nouvelliste, auteur de livres pour enfants, Evelio rosero est né dans une Colombie déjà meurtrie par une violence qui

la harcèle aujourd’hui encore, irradiant son soleil noir sur le roman Les Armées. Les personnages d’Evelio rosero sont les spectateurs malgré eux fascinés, tour à tour émerveillés et effrayés, par l’ordre ou le désordre incompréhensible des autres. dans Juliana los mira, une fillette épie sa mère et son amant ; dans Señor que no conoce la luna, un homme enfermé dans une armoire observe par une fente ceux qui l’y ont relégué ; le vieux Jeremias, de El lejero, découvre un village fantomatique peuplé de zombis. mais c’est avec Les Armées qu’Evelio rosero s’impose comme un écrivain majeur. guérilleros, paramilitaires, forces armées ou narcotrafiquants, que rien ne distingue, rivalisent de violence et d’horreur pour martyriser le village de San José. Ismael, le narrateur de cette descente aux enfers est un vieil instituteur à la retraite, gentil voyeur qui lorgne sa belle voisine dénudée avant de devenir le témoin halluciné du chaos dans lequel il perdra sa femme, sa raison et ses mots. La grande force de ce roman, sa supériorité sur toute description documentaire, tient au langage bouleversant d’Ismael, dont la grammaire se disloque au spectacle atroce d’une orgie de violence indifférenciée. À la culture de la mort, Evelio rosero oppose les mots de la littérature.

FrANçoIS gAudrYtraducteur

evelio

Les Armées, traduit par François gaudry,

éd. métailié, 2008

« tu N’AS PAS ENtENdu ? dIS-JE À CrIStINA, CAChE-toI. » « mAIS où ? » mE CrIE-t-ELLE. « N’ImPortE où, SouS LA tErrE. »Les Armées, éd. métailié, p. 81

Vous retrouVerez eVeLIo rosero à :• montpellier et béziers les 9 et 10 novembre avec William ospina• metz les 12 et 13 novembre avec Héctor abad Faciolince et Gonzalo Sánchez• Périgueux, bergerac, Thenon, eglise-Neuve-d’issac du 16 au 19 novembre avec antonio Ungar

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roSEro

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« EN déFINItIVE, VouLoIr APPréhENdEr LA VIoLENCE AuJourd’huI NE CoNSIStE PAS SEuLEmENt À APProChEr uNE dES dImENSIoNS dE LA SoCIété CoLomBIENNE. SoN ANALYSE doIt PortEr Sur LA SoCIété dANS SA gLoBALIté. ELLE CoNStItuE uN ChAmP StrAtégIquE quI CArACtérISE LA SoCIété CoLomBIENNE (CommE oNt Pu L’êtrE dANS d’AutrES PAYS LE PoPuLISmE, L’AutorItArISmE, LA ProBLémAtIquE INdIgèNE ou LA réVoLutIoN). »Guerre et Politique en colombie, éd. L’harmattan, p. 217

gonzalo Sánchez naît en 1945 au Libano, dans la région de tolima. Il fait des études de droit et de philosophie et, après un master en sciences politiques à l’université d’Essex, il obtient en 2002, un doctorat en sociologie de l’école des hautes études en Sciences sociales à Paris.

Professeur d’histoire à l’université nationale de Colombie, il a été directeur de l’IEPrI (Institut d’études politiques et de relations internationales). une grande partie de son œuvre est consacrée au thème de la violence et des guerres en Colombie. outre les très nombreux articles qu’il a publiés sur le sujet, il est l’auteur, seul ou en collaboration, de près d’une quinzaine de livres, traduits dans plusieurs langues et il donne régulièrement des conférences et des séminaires dans de très nombreuses universités en Europe et aux états-unis. En 2006, il a été nommé directeur du groupe de mémoire historique dans le cadre de la Commission nationale de réconciliation et réparation.

être né au Libano, cette commune du tolima productrice de café mais aussi de libelles révolutionnaires dans les années vingt, épicentre de la violence dans les années cinquante,

marque un destin. toute l’œuvre d’historien de gonzalo Sánchez porte sur les divers épisodes de violence qui caractérisent la Colombie depuis la fin du xixe siècle. Ses premiers travaux portent précisément sur les années cinquante, connues comme la période de La Violencia, dont il s’est attaché à montrer les soubassements sociaux et les motivations diverses par-delà l’antagonisme des allégeances partisanes. La manière dont se sont articulées, pendant plus d’un siècle, guerre et politique, constitue le thème d’un de ses deux ouvrages majeurs Guerra y política en la sociedad colombiana, mais aussi l’un des fils conducteurs de toute son œuvre. L’autre, au cœur de son livre Guerras, memorias y historia, s’attache aux traces mémorielles laissées par des expériences traumatiques. Par la force des choses, en raison de la résurgence des conflits dans les années récentes, il est devenu l’un des historiens les plus respectés en Colombie comme en Europe et aux états-unis. En 1987, il a animé la Commission nationale de réconciliation et réparation, à l’origine de son livre Violencia y política. Le groupe de mémoire historique qu’il dirige aujourd’hui est chargé d’établir la vérité sur les atrocités de ces dernières années.

dANIEL PéCAutDirecteur d’études à l ’EHESS, sociologue spécialiste de la colombie

gonzAlo

Guerre et Politique en colombie,

traduit par Alexandra merveille, éd. L’harmattan, 1998

Vous retrouVerez goNzALo sáNcHez à :• metz les 12 et 13 novembre avec Héctor abad Faciolince et evelio Rosero• Poitiers le 17 novembre avec Héctor abad Faciolince• marennes le 18 novembre• la rochelle le 19 novembre avec Jorge Franco

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SÁNChEZ

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Antonio ungar naît à Bogotá en 1974. Après des études d’architecture, il vit une année dans la région amazonienne de l’orénoque. Il réside ensuite à mexico, Barcelone, manchester puis dans l’enclave palestinienne de Jaffa. Chroniqueur pour plusieurs revues colombiennes

et les quotidiens El tiempo et El Espectador, il obtient le prix de journalisme Simón Bolívar en 2006. Il réside actuellement à Bogotá où il poursuit son travail de journaliste. Il a publié deux recueils de nouvelles : trece circos comunes en 1999, De ciertos animales tristes en 2000, et trois romans, Zanahorias voladores en 2004, Las orejas del lobo (Les oreilles du loup), finaliste du prix du meilleur livre étranger du courrier international en 2008, et tres ataudes blancos (trois cercueils blancs) en 2010.

Encore étudiant en architecture, Antonio ungar, sous la pression d’images hallucinatoires qui s’imposent à lui, se met à écrire ce qui deviendra un recueil de nouvelles,

trece circos comunes (1999). un deuxième recueil, De ciertos animales tristes, sera publié en 2000. L’ensemble de ces nouvelles sont reprises à présent dans trece circos comunes y otros cuentos (2009). on trouve déjà, dans ces courts récits, le caractère autobiographique voilé, l’inquiétude politique, la confusion entre réalité et délire, la violence soudaine et la mélancolie souterraine qui seront au cœur des œuvres suivantes.

Zanahorias voladoras, paru en 2004, est le récit convulsif raconté du point de vue d’un alcoolique dément et autodestructeur qui dérive de Barcelone jusqu’en Amazonie, en passant par rome et mexico, lieux où l’auteur a séjourné. Ses magnifiques premières pages serviront de matrice à son livre suivant : Les oreilles du loup (2008) qui donne la parole à un enfant attachant et inquiétant confronté à la mort du père et à la folie.

revenu à Bogotá après avoir vécu dans l’enclave palestinienne de Jaffa, Antonio ungar vient de mettre un point final à l’écriture de trois cercueils blancs, son texte le plus ambitieux, mêlant récit d’amour et thriller politique, un roman à la fois burlesque et tragique qui se situe dans un pays latino-américain imaginaire, ravagé par la corruption et le crime.

roBErt AmutIotraducteur

Antonio

Les oreilles du loup, traduit par robert Amutio,

éd. Les Allusifs, 2008 trois cercueils blancs,

traduit par robert Amutio, éd. Les Allusifs,

à paraître en 2011

« JE SuIS uN tIgrE, PEtIt Et SEuL, grImPé Sur uN roChEr, quI AttENd LE BrouILLArd. »Les oreilles du loup, éd. Les Allusifs, p. 100

Vous retrouVerez ANtoNIo uNgAr à :• lyon le 10 novembre avec Juan Manuel Roca• Durban, Port-la-Nouvelle et villesèque-des-Corbières les 12 et 13 novembre avec Jorge Franco• Périgueux, bergerac, Thenon, église-Neuve-d’issac du 16 au 19 novembre avec evelio Rosero

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uNgAr

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Fernando Vallejo naît à medellín en 1942. Enfant, il fréquente l’école des Salésiens, puis entreprend des études de philosophie et de lettres à l’université de Bogotá, et de cinéma au Centro Sperimentale di Cinematografia de rome, sans les terminer. Après une année

à New York, en 1971 il s’installe au mexique où il réalise trois films : cronica roja (1977), En la tormenta (1980) et Barrio de campeones (1984), et il écrit. Il est l’auteur d’une grammaire du langage littéraire, d’une pentalogie romanesque réunie sous le titre El rio del tiempo, de biographies des poètes colombiens José Asunción Silva et Porfirio Barba Jacob, de deux essais (l’un de biologie, l’autre de physique) et d’un abrégé des crimes du christianisme : La Puta de Babilonia. Parmi ses nombreux romans, traduits dans une quinzaine de langues, La Virgen de los sicarios (La Vierge des tueurs) a été porté à l’écran par Barbet Schroeder en 2000.

L’œuvre de création de Fernando Vallejo est composée exclusivement d’autofictions dont beaucoup ont pour cadre medellín, sa ville natale aimée et violente. Contempteur

acharné du roman à la troisième personne – ne prétend-t-il pas que le don quichotte est écrit à la première ? –, Vallejo joue d’une ample gamme de réécritures imaginaires de soi. de la pentalogie El río del tiempo (1985-1993) – dont seul, hélas !, El fuego secreto (Le Feu secret) a été traduit en français – à son dernier livre, El don de la vida (2010), il n’a eu de cesse de multiplier les avatars de ce je. tantôt il l’érige en protagoniste d’un « quasi » roman de forme autobiographique (La Vierge des tueurs) tantôt il le fait assister, avec une compassion aussi discrète qu’émouvante, à l’agonie de son frère darío, mort du sida (Et nous irons tous en enfer), tantôt encore il le dédouble dans le vieil homme de La rambla paralela, dépositaire de ses opinions les plus controversées. dans carlitos qui êtes aux cieux, il fait de ce je le chroniqueur à distance du mandat de maire d’un autre frère, et dans El don de la vida, il le transforme en interlocuteur d’une mort allégorisée, la sienne.

L’autofiction, genre au pacte de lecture ambigu, est susceptible de manipulations sémantiques dont Fernando Vallejo ne se prive pas. Elles font de lui, sans doute, le meilleur écrivain colombien depuis gabriel garcía márquez, qu’il voue par ailleurs aux gémonies. La prose aussi tourmentée qu’extraordinairement rythmée de ce que Vallejo persiste à appeler, non sans malice, ses « romans », véhicule une pensée systématiquement incorrecte qui lui vaut autant de bordées d’injures que d’adhésions admiratives. N’évoque-t-on pas souvent Céline à son propos ?

JACquES JoSEtProfesseur à la faculté de philosophie et de lettres de l ’université de Liège

FernAndo

Le Feu secret, traduit par michel Bibard,

éd. Belfond, 1998La Vierge des tueurs,

traduit par michel Bibard, éd. Belfond, 2000

Et nous irons tous en enfer, traduit par gabriel Iaculli,

éd. Le rocher, 2002La rambla paralela,

traduit par michel Bibard, éd. Belfond, 2004

carlitos qui êtes aux cieux, traduit par Jean-marie Saint-Lu,

éd. Belfond, 2007

« JE NE SuIS L’ENFANt dE PErSoNNE. JE NE rECoNNAIS LA PAtErNIté d’AuCuN NI LA mAtErNIté d’AuCuNE. JE SuIS L’ENFANt dE moI-mêmE, dE moN ESPrIt… »Et nous irons tous en enfer, éd. Le Serpent à plumes, coll. « motifs », p. 60

Vous retrouVerez FerNANDo VALLeJo à :• liège et bruxelles les 9 et 10 novembre avec antonio caballero• marseille les 12 et 13 novembre avec chloé Delaume• aix-en-Provence les 17 et 18 novembre avec Santiago Gamboa

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VALLEJo

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Juan gabriel Vásquez naît à Bogotá en 1973. En 1996, il quitte la Colombie pour suivre des cours de doctorat à l’université de Paris III, mais il renonce à faire une thèse pour se consacrer entièrement à l’écriture. Après plusieurs mois en Belgique, il s’installe à Barcelone en 1999, où il écrit un recueil

de nouvelles sur ses expériences belges et françaises, Los amantes de todos los Santos (Les Amants de la toussaint), 2001, et travaille comme journaliste culturel pour plusieurs publications espagnoles et latino-américaines. Il est l’auteur de deux romans, Los Informantes (Les Dénonciateurs), 2004, et Historia secreta de costaguana (Histoire secrète du costaguana), 2007, ainsi que d’une courte biographie de Joseph Conrad, El hombre de ninguna parte, 2004, et d’un recueil d’essais littéraires, El arte de la distorsión, 2009. Ses livres sont traduits dans une quinzaine de langues.

Il y a dans l’œuvre de Juan gabriel Vásquez un déplacement constant de territoires en territoires, tant dans la géographie que dans l’histoire, et ce depuis Les Amants de la toussaint,

son premier recueil de nouvelles. Ces sept histoires de Belgique, bien loin de sa Colombie natale, ont permis à Vásquez d’explorer les contrées du frôlement, des amours entrevues et des vies manquées, comme le pâle soleil des Ardennes, souvent vite disparu. Sa prose précise, subtile et poétique s’attarde sur les objets (un verre, un crayon de bois) comme sur les gestes les plus anodins, signes des minuscules tragédies quotidiennes. Son premier roman, Les Dénonciateurs, retrouve certes la Colombie, celle des années quarante, pour dévoiler un aspect méconnu de la seconde guerre mondiale au cœur d’un pays que l’on aurait pu croire épargné par les événements et, à travers lui, cette grande injustice qu’est l’histoire. C’est peut-être sa très belle biographie de Joseph Conrad (L’Homme de nulle part, inédite en français), qui constitue la meilleure porte d’entrée à son second roman, l’extraordinaire Histoire secrète du costaguana, le pays de Nostromo, qui ressemble beaucoup au Panamá, où les aventuriers réels, Conrad lui-même, ou Lesseps, croisent les personnages de fiction dans un époustouflant ballet aussi palpitant que littéraire.

Si l’on ajoute que Vásquez est par ailleurs l’auteur d’un recueil d’essais et de chroniques aussi original que délicieux (L’Art de la distorsion, inédit en Français), on comprendra sans difficultés qu’on a affaire à un des plus grands auteurs d’aujourd’hui, tous territoires confondus.

mAthIAS éNArdécrivain

JuAn gAbriel

Les Dénonciateurs, traduit par Claude Bleton,

éd. Actes Sud, 2008

Histoire secrète du costaguana, traduit par Isabelle gugnon,

éd. du Seuil, 2010

Les Amants de la toussaint, traduit par Isabelle gugnon,

éd. du Seuil, à paraître en 2011

« LE SoIr où NouS NouS SommES rENCoNtréS, CoNrAd A éCouté moN réCIt. Et C’ESt mAINtENANt VotrE tour, ChErS LECtEurS quI êtES AuSSI mES JuréS. »Histoire secrète du costaguana, éd. du Seuil, p. 16

Vous retrouVerez JuAN gABrIeL VásQuez à :• rennes les 10 et 12 novembre avec tomás González• marseille le 16 novembre avec Mathias enard• vienne le 17 novembre • saint-Nazaire et Nantes le 19 novembre avec William ospina et antonio caballero

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VÁSquEZ

LES BELLES étrANgèrESColombie

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est au cours de la dernière décennie du xxe siècle qu’a fait irruption en Colombie une génération

d’écrivains indigènes dont les œuvres poétiques, autobiographiques et narratives ont été publiées en espagnol. Si ces auteurs ont bénéficié de l’intérêt de quelques maisons d’édition et de diverses institutions, cela tient à la résonance mondiale des débats auxquels donnèrent lieu les commémorations du 500e anniversaire de l’arrivée des Européens en Amérique. un an auparavant, en 1991, la Colombie avait promulgué une nouvelle Constitution dans laquelle le pays se déclarait multiethnique et pluriculturel. Le texte de la Constitution fut d’emblée traduit dans sept langues amérindiennes parmi la bonne soixantaine qui sont actuellement parlées sur le territoire national. C’est donc dans le contexte d’un pays

une ardeur nouvelle que s’est affirmé l’intérêt pour l’apport irremplaçable des innombrables conteuses, conteurs, chanteuses et chanteurs traditionnels qui entretiennent la flamme vive des arts verbaux dans leurs communautés. Les écrivains de la première génération ont, quant à eux, continué de travailler et ont parfois rencontré en chemin une reconnaissance internationale, comme Fredy Chikangana.

Cette résurgence de la parole autochtone peut être perçue comme un phénomène continental et pas exclusivement latino-américain. on doit tenir compte ici des relations interculturelles et des échanges permanents entre écrivains indigènes de tout le continent (états-unis, mexique, guatemala, Venezuela, Colombie, Pérou, Brésil, Chili). Ces littératures, fréquemment multilingues, dotées à la fois de vigoureuses racines ancestrales et d’une grande charge autobiographique, se déploient dans toute leur force thématique et leur diversité stylistique. Elles peuvent être lues et perçues comme des réseaux de communication interculturelle qui nous atteignent dans la réalité même d’une Amérique différente jusqu’en ses racines.

mIguEL roChA VIVAS

traduit de l’espagnol par Jean-Baptiste Para

Extrait du texte à paraître dans la revue Europe, n° 979-980 de novembre-décembre 2010. Fredy chikangana, Miguelángel López Hernández et Hugo Jamioy Juagibioy, trois poètes indigènes de colombie, sont publiés pour la première fois en France dans ce numéro à l ’occasion des Belles étrangères colombie.

leS littérAtureS INdIgèNES EN CoLomBIE

C’reconnaissant sa propre diversité que les écrivains indigènes commencèrent à acquérir une certaine « visibilité ».

Parmi cette première génération, se détachent miguelángel López hernández (Vito Apüshana) et Vicenta maría Siosi (tous deux wayuu), Berichá (écrivaine uwa), Fredy Chikangana (poète et conteur yanakuna) et Yenny muruy Andoque (écrivaine andoke-uitoto). Ils ont toutefois été précédés par quelques « pionniers » de la littérature indigène en Colombie qui forment une pléiade hétérogène d’auteurs ayant réussi à publier à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, comme les écrivains wayuu Antonio Joaquín López (Briscol), glicerio tomás Pana, miguel Ángel Jusayú et Alberto Juajibioy Chindoy, écrivain kamëntsá dont le parcours et l’œuvre représentent le lent passage de l’informateur à l’écrivain indigène en tant que tel.

dans la première décennie du nouveau siècle, on a vu croître le nombre des écrivains indigènes et particulièrement des poètes. Ils ont commencé à publier des textes littéraires dans leur langue maternelle et en espagnol. Si cette décennie a vu son début marqué par l’attribution du prix Casa de las Américas à miguelángel López hernández en 2000, elle s’achève sur un projet du ministère de la Culture qui entend créer une bibliothèque de la littérature indigène. Au cours de ces années, nous avons vu émerger des écrivains d’une force et d’une sensibilité remarquables comme hugo Jamioy Juagibioy (kamëntsá) et Estercilia Simanca Pushaina (wayuu). Simultanément, c’est avec

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34quELquES rEPèrES

Superficie : 1 141 748 km2, soit deux fois la superficie de la France.Population : 44 760 630 habitants, 3e pays le plus peuplé d’Amérique latine après le Brésil et le mexique.Fête nationale : le 20 juillet – date commémorative de la proclamation de l’indépendance de la Colombie en 1810.Langue officielle : espagnol.Capitale : Bogotá, au centre de la cordillère orientale des Andes. Située à 2 600 m. d’altitude, c’est la troisième plus haute capitale du monde après La Paz (Bolivie) et quito (Equateur). Centre majeur des décisions économiques et politiques du pays, l’agglomération de Bogotá compte entre 7 et 8 millions d’habitants.Situation géographique : disposant de deux façades océaniques et d’un accès au fleuve Amazone, la Colombie partage des frontières avec le Panamá, le Venezuela, le Pérou, l’équateur et le Brésil. Le pays se divise en trois grands types de régions offrant une grande diversité de conditions climatiques et géologiques : à l’ouest, la région montagneuse andine abrite près de 80 % de la population ; à l’est, la région des vastes plaines (les « Llanos ») et la forêt amazonienne, bien que totalisant 55 % de la superficie du pays, regroupent à peine 2 % de la population ; les régions formées par les littoraux du Pacifique et de l’Atlantique accueillent le reste de la population.

quELquES dAtES

1499 : découverte de la Colombie par Alonso de ojeda.1538 : fondation de Santa Fe de Bogotá par le conquistador gonzalo Jiménez de quesada.1810 : début du mouvement indépendantiste mené par Simón Bolívar et Francisco de Paula Santander ; proclamation de l’indépendance le 20 juillet.1819 : Bataille de Boyacá et création de la république fédérale de grande-Colombie.1830 : le Venezuela et l’équateur quittent la république.1899-1902 : guerre civile dite des mille jours, fruit de la rivalité entre les libéraux et les conservateurs, qui cause la mort de 100 000 personnes.1903 : sécession du Panamá.1948 à 1958 : suite à l’assassinat à Bogotá du dirigeant libéral Jorge Eliécer gaitán, déclenchement de la guerre civile dite La Violencia, entre les deux forces politiques qui se partagent le pouvoir, libéraux et conservateurs. La guerre fait 200 000 morts.1964 : naissance des FArC (Fuerzas Armadas revolucionarias de Colombia) et de l’ELN (Ejército de Liberación Nacional).1973 : création du mouvement du 19 avril (m-19) qui mène des actions de guérilla urbaine. 1984-1993 : attentats à Bogotá, medellín et Cali perpétrés par les cartels de la drogue.1985 : attaque du Palais de Justice de Bogotá par le m-19 ; création de milices d’autodéfense et de groupes paramilitaires. 1993 : mort de Pablo Escobar, chef du cartel de medellín.2000 : « Plan Colombie » ou plan d’aide américaine à la lutte contre les narcotrafiquants et la guérilla.2002 : élection d’Álvaro uribe à la présidence de la république.2005 : vote de la loi « Justice et paix » pour le démantèlement des groupes armés illégaux.2006 : réélection du Président Álvaro uribe, après une réforme constitutionnelle. de nombreux hommes politiques sont mis en accusation en raison de leurs liens avec les paramilitaires.2008 : libération de quinze otages des FArC dont Ingrid Betancourt.2010 : en juin, élection de Juan manuel Santos à la présidence de la république.

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Océan Paci�que

Mer des Caraïbes

Medellín

Bogotá

C O L O M B I E

EQUATEUR

PANAMA

VENEZUELA

GUYANE

BRESIL

PEROU

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¿qué tAL CoLomBIA? LES BELLES étrANgèrES

Le Centre national du livre a confié la production d’un film documentaire à BlisterProd pour accompagner cette édition des Belles étrangères 2010. tourné en juillet dernier en Colombie – et à Paris pour Santiago gamboa – avec les écrivains invités, ce film de 52 minutes a été réalisé par Laurent Nunez, Aurélie Bernos de gastold a assuré la photographie, sur une musique originale de Pascal Jambry. Les interviews ont été réalisées conjointement par Laurent Nunez et Annie morvan.

Les écrivains ont choisi les lieux où ils souhaitaient être filmés : À BOGOTÁ : Antonio CABALLEro, Evelio roSEro

et Antonio uNgAr, chez eux ; Jorge FrANCo au théâtre de la bibliothèque Santo domingo ; William oSPINA au Centre culturel gabriel garcía márquez ; gonzalo SÁNChEZ à l’université nationale dans le bâtiment Salmona des sciences humaines ; Juan gabriel VÁSquEZ au Festival malpensante. dans le village de SoPo à quelques kilomètres de Bogotá : Juan manuel roCA.

À CACHIPAY : tomás goNZÁLES, chez lui dans la montagne à trois heures de route au nord-ouest de Bogotá.

À MEDELLíN : héctor ABAd FACIoLINCE chez lui et Fernando VALLEJo dans le metro-cable.

À PARIS : Santiago gAmBoA, dans le salon de L’hôtel, rue des Beaux-Arts.

LES BELLES étrANgèrESColombie

CE doCumENt ESt PuBLIé PAr LE CENtrE NAtIoNAL du LIVrEJean-François CoLoSImo Président

Annie morVAN Conseiller littéraire auprès du CNL pour cette édition colombienne des Belles étrangères

michèle thomAS Chef du bureau de la Vie litté[email protected]

martine grELLE Commissaire général des Belles étrangè[email protected]

Estelle kESZtENBAum Chargée de [email protected]

Valérie touSSAINt [email protected]

rEmErCIEmENtS : à l’ambassade de France à Bogotá et à ses services culturel et audiovisuel ; aux Alliances françaises de medellín, de Carthagène des Indes et de Barranquilla ; au chef du service culturel et social du métro et à la Ville de medellín ; au ministère de la culture de Colombie, à l’ambassade de Colombie à Paris et à son service culturel. Aux traducteurs et aux éditeurs, aux libraires, bibliothécaires, responsables des établissements culturels, établissements scolaires et universitaires, centres culturels et cinémas qui permettent la rencontre des écrivains invités avec le public.

CrédItS PhotoS : Jean-François Colosimo : Hannahéctor Abad Faciolince : Jairo RuizAntonio Caballero : Aurélie Bernos de GastoldJorge Franco : Daniel SalgueroSantiago gamboa : Mordzinskitomás gonzález : Juan Carlos Sierra ArcadiaWilliam ospina : Aurélie Bernos de GastoldJuan manuel roca : MorhorEvelio rosero : Milcíades Arévalogonzalo Sánchez : Aurélie Bernos de GastoldAntonio ungar : droits réservésFernando Vallejo : Aurélie Bernos de GastoldJuan gabriel Vásquez : Aurélie Bernos de Gastold

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LE ProgrAmmE ComPLEt dES rENCoNtrES AVEC LES éCrIVAINS SErA dISPoNIBLE déBut oCtoBrE 2010 Sur LE SItE du CENtrE NAtIoNAL du LIVrE :www.belles-etrangeres.culture.fr

CoNtACtS - PrESSELangage et Projets ConseilsLaurent PayetAmélie de mac-mahonJean-Claude Berline01 53 26 42 [email protected]

marilyne Arcaïni relations presse et relations publiques (CNL)01 49 54 68 [email protected]