Dp les indes de l'imaginaire fantasy juil 2013

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DOSSIER de PRESSE LA FANTASY EN FRANCE 1 • L’ÉVÉNEMENT : LA RENTRÉE LITTÉRAIRE DE LA FANTASY FRANÇAISE • LE DOSSIER : Enjeux, acteurs, territoires d’un phénomène littéraire contemporain par

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Dossier de presse des Indés de l'imaginaire pour tout connaître de l'opération "rentrée de la fantasy francophone" et de ce que représente le genre de la fantasy dans le paysage littéraire

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DOSSIER de PRESSELA FANTASY EN FRANCE

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• L’ÉVÉNEMENT : LA RENTRÉE LITTÉRAIRE DE LA FANTASY FRANÇAISE

• LE DOSSIER : Enjeux, acteurs, territoires d’un phénomène littéraire contemporain

par

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Sommaire

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Depuis plus de dix ans maintenant, la fantasy a gagné les faveurs du grand public à la suite des succès d’Harry Potter de J.K. Rowling, du Seigneur des Anneaux au

cinéma ou encore de la série télé Le Trône de Fer. Désormais le genre est bien ancré en France et de nombreux auteurs hexagonaux s’y sont plongés avec bonheur.

Réunis au sein des Indés de l’Imaginaire, le collectif des éditeurs défendant les littératures de l’imaginaire, ActuSF, les éditions Mnémos et les Moutons électriques proposent ce dossier de presse dédié à la fantasy francophone.

Deux raisons principales à cela :

- Les trois maisons d’édition font l’événement en publiant le 22 août trois nouveaux romans de fantasy écrits par des auteurs francophones majeurs du domaine.

- Il est temps aussi d’avoir une vision plus précise, des éléments d’information plus justes et plus équilibrés des enjeux, des acteurs et des territoires de la fantasy francophone et ceci au-delà du simple succès commercial permettant, nous le souhaitons, une lecture en profondeur du phénomène littéraire en cours.

Bonne lecture !

Les Indés de l’ImaginaireJérôme Vincent pour ActuSF, Frédéric Weil pour Mnémos et André-François Ruaud pour Les Moutons électriques

• Les Indés de l’Imaginaire - présentation du collectif des éditeurs

indépendants défendant les littératures de l’imaginaire

• L’événement : la rentrée littéraire de la fantasy française• La Chasse sauvage du colonel Rels par Armand Cabasson

• Mordred de Justine Niogret

• Même pas mort par Jean-Philippe Jaworski

• Le dossier : La fantasy française• Publics - qui lit de la fantasy en France ?

• Cartographie - mais au fait qu’est-ce que la fantasy ? et y a-t-il une

fantasy française ?

• Conteurs - trois auteur-e-s majeur-e-s de la fantasy française

• Généalogie - D’où vient la fantasy ?

• Trésors - 10 romans de fantasy francophones choisis par les Indés de

l’Imaginaire ! Loin des clichés...

• Frontières - où va la fantasy ?

• Experts - Trois éditeurs experts en fantasy partagent avec plaisir

leur passion et leurs expériences

• Décryptage - Quelques clichés sur la fantasy facilement évitables !

Prologue

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Présentation du collectif des éditeurs indépendants défendant les littératures de l’imaginaire

LES INDÉSde L’IMAGINAIRE

Fin 2012, trois maisons d’édition indépendantes, ActuSF, Les éditions Mnémos et Les Moutons électriques, spécialisées depuis de nombreuses années dans la science-fiction et la fantasy et ayant publié au total plus de 400 livres, décident de s’associer au sein d’un collectif afin de mutualiser une partie de leurs moyens : les Indés de l’Imaginaire.

Aujourd’hui, le collectif est le principal acteur de la construction de la voix francophone de la fantasy. Les Indés de l’Imaginaire sont attachés à mener une politique de découverte et de lancement d’auteurs francophones nouveaux et originaux prêts à explorer les genres et à les dépasser.

Avec l’opération « la rentrée de la fantasy française », le collectif met en avant trois auteurs majeurs, qui sont à la fois des plumes d’un talent remarquable et remarqué, et parmi les meilleures ventes de la fantasy francophone actuelle.

Né en 2000, le site Actusf.com a été lancé par des passionnées de science fiction, de fantastique et de fantasy avec la volonté de rendre compte de l’actualité du genre avec des infos sur toutes les sorties en librairie, des interviews, l’annonce des dédicaces, des

reportages sur les salons, etc. Passé en SARL en 2003, le site s’est doublé d’une activité d’édition de livres qui s’est accélérée en 2007. L’objectif était de défendre la nouvelle et les romans courts à travers des recueils d’auteurs français et d’auteurs étrangers. Avec une cinquantaine de titres à notre catalogue, nous avons ainsi eu le plaisir de publier des auteurs importants au niveau mondial comme Jack Vance, George R. R. Martin, Robert Heinlein, Michaël Moorcock, Robert Silverberg ou Nancy Kress et au niveau francophone comme Roland C. Wagner, Jean-Marc Ligny, Thierry Di Rollo, Sylvie Lainé, Mathieu Gaborit... Nous publions également des guides soit autour d’un genre (Guide de la fantasy, Guide des vampires), soit autour d’un auteur (Guide Philip K. Dick) et des anthologies, notamment l’anthologie officielle des Utopiales, le festival de science-fiction le plus important en Europe puisqu’il accueille chaque année à Nantes 50 000 visiteurs.

Créés le 1er juin 2004, les Moutons électriques est une maison d’édition spécialisée dans les littératures de genre et dans les imaginaires populaires contemporains issus de la culture de masse : roman policier, science-fiction, fantastique, merveilleux, jeux vidéo, manga, comic books, séries télévisées, cinéma de genre, etc. Notre activité est structurée autour de quatre collections :

• la « Bibliothèque voltaïque », où nous publions romans et recueils• le « Rayon vert », où nous redécouvrons la littérature populaire• la « Bibliothèque rouge », où nous publions des études de grandes figures mythiques de la littérature populaire• la « Bibliothèque des miroirs », où nous publions des essais et beaux livres sur nos domaines de prédilection (monographies sur des créateurs ou sur des grandes thématiques) Et un périodique de littérature de l’imaginaire : Fiction, qui existe depuis 1953 et dont nous avons repris la publication, de manière semestrielle. Nous avons actuellement une centaine de titres en exploitation.

Fondée en 1996, véritable pionnière dans le domaine de la fantasy et découvreuse des plus grands talents francophones des littératures de l’imaginaire (Mathieu Gaborit, Fabrice Colin, Xavier Mauméjean, David Calvo, Johan Heliot, etc.), cette

maison d’édition défend une littérature de l’imaginaire vivante et de qualité : invitation à l’évasion, les territoires de l’imaginaire sont de formidables espaces de liberté offerts à la création et à la réflexion. Sous une présentation faisant la part belle à l’image, plus de 150 titres ont été publiés à ce jour, explorant les mondes de la science-fiction, de la fantasy, du fantastique et de l’uchronie.

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L’ÉVÉNEMENT chez LES INDÉS :

Trois auteurs emblématiques des littératures francophones de l’imaginaire font

leur rentrée littéraire 2013 avec trois œuvres phares de fantasy

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MORDRED par Justine NIOGRET

MÊME PAS MORT par Jean-Philippe JAWORSKI

LA CHASSE SAUVAGE DU COLONEL RELSpar Armand CABASSON

Une saga de bruit de de fureur, mais aussi de magie et de malice, traversant toute l’Europe celte.

Quand la fantasy se mêle à l’Histoire !

Le mythe du roi Arthur comme vous ne l’avez jamais lu !

3 nouveautés phares de la fantasy francophone : sortie le 22 août 2013

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LA RENTRÉE de la FANTASY FRANÇAISE

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6 textes marquants à découvrir à cette occasion

ACTUS

Les

baLLons

DirigeaBles

R êvent-ils de poupéesGOnFLABLES?

Karim Berrouka

Parce que la littérature de fantasy n’est pas juste une duplication des mêmes clichés et des mêmes recettes, Parce que la fantasy est une littérature qui fait appel à l’une des facultés humaines les plus intéressantes : l’imagination,

Parce que la fantasy est une source inégalée de voyage, de rêves, d’émotions fortes et d’images poétiques et inoubliables, Parce que la fantasy est un phénomène qui dépasse aujourd’hui la littérature de genre,

Parce que le public connaisseur, de plus en plus nombreux, apprécie autre chose que des auteurs adeptes de la copie des œuvres fondatrices,

Parce qu'en France, il existe des auteurs majeurs, porteurs d'une voix originale et talentueuse !

Avec la rentrée de la fantasy, les Indés de l’Imaginaire mettent en avant les nouveaux romans

de trois auteurs majeurs, qui sont à la fois des plumes d’un talent remarquable et remarqué,

et parmi les meilleures ventes de la fantasy actuelle.

D’UNE RIVE À L’AUTRE

Mathieu Gaborit

LA MAISON DES MAGES

Adrien Tomas

LES BALLONS DIRIGEABLES RÊVENT-ILS DE POUPÉES

GONFLABLES ? Karim Berrouka

LES DERNIERS PARFAITS Paul Beorn

GAGNER LA GUERRE (luxe) Jean-Philippe

Jaworski

PORCELAINE Esttele Faye

&

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PROPULSÉ par

La Chasse sauvage du colonel Rels est un recueil se composant de neuf nouvelles, chacune racontant une histoire dans un contexte historique mais dans laquelle le fantastique a toute sa place. En Espagne, un artiste particulièrement talentueux est chargé de réaliser le portrait du Diable par l’Église, sous l’œil sévère de l’Inquisition. En 1348, le Roi Peste annonce qu’un Monde Nouveau était en train de voir le jour et que Londres en sera sa capitale... En Amérique, la guerre de Sécession fait rage et Fort Bull est soumis aux assauts des Nordistes... Armand Cabasson nous entraînera aussi en Russie, au Japon ou en Irlande, à la poursuite des légendes et des guerriers, pour des moments de fantasy forts, puissants, sauvages, épiques mais aussi d’une troublante poésie.

Zoom sur Armand Cabasson : Né en 1970, psychiatre pour les enfants et les adolescents en difficultés, Armand Cabasson consacre ses loisirs à l’écriture avec passion et talent.

Ses romans policiers se déroulant à l’époque napoléonienne ont connu de jolis succès, lui permettant d’être traduit en anglais à plusieurs reprises et de recevoir le Prix spécial de la Gendarmerie Nationale pour Les Proies de l’officier et le Prix de la Fondation Napoléon pour Chasse au loup. On y retrouve à chaque fois le capitaine Quentin Margont enquêtant sur des meurtres atroces, et racontant également les batailles auxquelles il a pris part.

C’est pour lui l’occasion d’aborder de front la révolution et la dérive de ses idéaux, les victoires de la Grande Armée et ses désastres, les manipulations diplomatiques, les premiers pas de la Psychiatrie « moderne », le Paris de l’époque napoléonienne, la naissance de l’amitié franco-polonaise…

On sent dans ces romans une passion pour l’Histoire dans ce qu’elle a de grandiose mais aussi de profondément humaine. Et c’est ce que l’on retrouve dans les nouvelles qui composent La Chasse sauvage du Colonel Rels.

D’époque en époque, il évoque des batailles et des conflits. Grâce à sa puissance d’évocation, on se retrouve aux côtés des Vikings menant une bataille désespérée en Angleterre ou aux côtés des Russes face aux terrifiants Mongols. On plonge dans Londres dévastée par le roi Peste faisant vaciller le pouvoir royal, avant de chercher le visage du Diable avec le talentueux peintre de la renaissance Giacomo Mandeli ou de regarder les troupes du Nord envahir l’un des derniers forts sudistes pendant la Guerre de Sécession. Et on assiste avec Uemonjo à la mort de son père

ISBN 978-2-91768-953-0 PVP 14 euros ActuSF

LA CHASSE SAUVAGE DU COLONEL RELSpar Armand CABASSON

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tandis que sa tête tranchée tente de lui donner ses derniers conseils dans un Japon médiéval et merveilleux. Ses héros ne s’en sortent pas toujours et les batailles sont rarement gagnées mais il y a une force qui se dégage de ces récits pleinement humaine et touchante. Car c’est l’âme même des hommes, leurs vanités et leurs impuissances, leurs peurs et leur courage qu’Armand Cabasson explore.

Avec lui, l’Histoire fait bon ménage avec le fantastique et la fantasy. Et ce n’en est que plus étonnant, passionnant et grandiose.

Armand Cabasson est un auteur exceptionnel et ce recueil en est la preuve et nous sommes très fiers de le publier aux éditions Actusf. Il s’inscrit parfaitement dans notre travail autour des nouvelles et trouve totalement sa place aux côtés de Français aussi talentueux que Jean-Marc Ligny, Roland C. Wagner, Sylvie Lainé, Sylvie Denis, Thierry Di Rollo, Karim Berrouka, Laurent Queyssi, Mathieu Gaborit, Thomas Day ou Laurent Genefort et que nous avons eu la grande joie de publier.

Petite bibliographie : Un monde hostile, Éditions LargoLes Proies de l’officier, Éditions10/18, Prix spécial de la Gendarmerie Nationale en 2003, traduit en anglaisChasse au loup, Éditions10/18, Prix de la Fondation Napoléon 2005, traduit en anglais  La Mémoire des flammes, Éditions 10/18, traduit en anglaisLa Dame des MacEnnen, Éditions GlypheLa Reine des Mots, Éditions FlammarionLoin à l’intérieur, Éditions de l’Oxymore, Prix LittréLe Poisson Bleu Nuit, Éditions Nuit d’avril, Prix Charles BrissetPar l’épée et le sabre, Éditions Thierry MagnierNoir américain, Éditions Thierry MagnierLa Chasse sauvage du Colonel Rels, Éditions Actusf

Quelques mots tirés d’une interview accordée au site Actusf : «La psychologie des personnages me passionne. Nombre de mes thèmes sont également très « psy » : la lutte contre ses démons intérieurs, le combat pour surmonter les épreuves du passé…» «Comment naissent mes idées ? Je ne le sais toujours pas… Je peux plus facilement répondre à la question de l’inspiration. Je la stimule en voyageant (partout en Europe, aux États-Unis, au Japon, en Russie, en Afrique du Nord… mais aussi en France !), en lisant, en visitant des musées ou des châteaux, en regardant des films, en discutant avec des amis auteurs... J’essaie de m’immerger régulièrement dans un bain d’images, de sons, d’odeurs… Il y a plusieurs sujets qui me passionnent, mais j’essaie aussi, régulièrement, de découvrir d’autres univers, de « goûter » à d’autres saveurs, de m’intéresser à tel ou tel sujet sur lequel j’ignore tout…»  «C’est vraiment l’époque qui m’intéresse, bien plus que le seul personnage de Napoléon. Il s’est passé énormément de choses durant ces quelques années, et, aujourd’hui, nous sommes les héritiers de cette période (et de toutes les autres), pour le meilleur comme pour le pire.» «J’aime beaucoup les États-Unis (je m’y suis rendu à plusieurs reprises), mais j’adore aussi la France, la Grande-Bretagne et le Japon. Plusieurs de mes nouvelles s’y déroulent car c’est une façon pour moi de « rompre » avec le quotidien. J’associe l’écriture et la lecture avec la notion « d’évasion ». On change d’univers… « Ailleurs », mon imagination se libère plus facilement qu’« ici »… Et, en même temps, les thèmes que je veux aborder demeurent très proches de nous.»

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PROPULSÉ par

Écoutez ! Écoutez la sinistre et triste histoire de Mordred, le chevalier renégat !

Face sombre des légendes arthuriennes, Mordred est le traître, fruit des amours illicites et incestueuses d’Arthur et de sa sœur Morgause. S’il fait un temps partie des chevaliers de la Table ronde, il est chassé de celle-ci avant de lever une armée pour combattre Arthur.

C’est l’histoire officielle, du moins. Peut-être Mordred n’était-il pas aussi fou que les gestes le prétendent ? Peut-être était-il un garçon sensible et droit ? Peut-être Arthur n’est-il pas le héros que l’on chante et que Mordred n’avait pas le choix ?

Justine Niogret propose une relecture du mythe de Mordred, de son enfance heureuse à sa fin tragique. Un récit pour réhabiliter celui que l’histoire a traîné dans la boue pour mieux faire briller la légende de la Table ronde.

Zoom sur Justine Niogret : Justine Niogret est devenue en seulement deux ans une auteure majeure de la fantasy française. Tout a commencé avec Chien du heaume, paru en 2009, un premier roman pour lequel elle obtient (fait rarissime) à la fois le prix des Imaginales et le Grand Prix de l’imaginaire. En 2011 pour son second roman, Mordre le bouclier, l’auteure nous dépeint les croisades dans toute leur fureur et leur réalisme, dans une langue ciselée et dure. Ce récit épique et violent surprendra le lecteur par la noirceur lumineuse de son ton et son onirisme cru.

Le diptyque Chien du Heaume et Mordre le bouclier totalise 15 000 ventes toutes éditions confondues.

ISBN 978-2-35408-159-1 PVP 17 euros Les Éditions Mnémos

MORDRED par Justine NIOGRET

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En avant-première pour son nouveau romanInterview de Justine Niogret

Les Indés : Pourquoi avoir choisi le personnage de Mordred, figure sombre de la légende arthurienne ?

Justine : C’est un choix qui s’est imposé, je pense. Je n’ai jamais été une fan hardcore de la légende arthurienne, mais j’aime cette histoire qu’on se raconte depuis des centaines et des centaines d’années, et que chaque génération vient nourrir de ses propres expériences et visions. Ça donne un mythe, ou des mythes, exceptionnellement rodés, patinés, et justement c’est avec ce genre de choses, je pense, qu’on peut au mieux jouer avec les préjugés et les archétypes ; parce qu’ils parlent à tout le monde, qu’on les nourrit tous de nous-mêmes. Si on dit « Mordred », tout le monde ou presque a comme première image un chevalier traître et cruel ; si on dit « Arthur » tout le monde ou presque voit le roi de Bretagne, preux, fier et responsable. C’est ça qui est intéressant, je trouve. Dans les livres, on apporte tous ce qu’on est et ce en quoi on est à peu près bon. Je fais, en tout cas il me semble, des livres un peu décalés, qui apportent une lumière un peu différente sur certaines choses, et qu’on aime ou qu’on n’aime pas. J’ai voulu dire que les méchants ne l’étaient peut-être pas à ce point  ; que les mythes étaient parfois écrits sur le dos des gens qui lui avaient donné naissance. Tout le monde veut du spectacle. Tout le monde veut des méchants, de la cruauté, de la boue, du sang et aussi de l’héroïsme. On n’en trouve pas tous aux mêmes endroits. J’ai voulu parler de l’endroit Mordred, et que ceux qui ont envie de découvrir cela viennent avec leurs propres lectures des mythes.

Les Indés : Avais-tu envie de réhabiliter celui que la Légende arthurienne a toujours présenté comme le traître ?

Justine : Réhabiliter, non, je n’aurais pas cette prétention. Mais montrer que les choses, chez l’humain, sont presque toujours complexes, qu’elles ont plusieurs faces et sont changeantes, certainement. Et pour cela, Mordred me semblait un des meilleurs personnages, un de ceux qui permettent, justement, de démontrer que chacun a un rôle à jouer dans une épopée, et qu’on ne peut plus en sortir une fois ceci posé. Et puis aussi l’envie de défendre l’oublié de la matière de Bretagne. On ne peut pas être aussi méchant, on ne peut pas avoir tout causé. En tout cas je le pense, mais j’ai de l’espoir quant à la nature humaine.

Les Indés : La relation de Mordred à Arthur est une relation père-fils qui ne se dit jamais. Pudeur d’écriture ou impossibilité pour eux de se révéler comme tels ?

Justine : Si elle ne se dit pas, comment savoir si c’est bien cela ? Moi je ne sais pas. Je laisse le lecteur trancher. Ça peut être un fils et son père, qui l’ignorent. Ça peut être un fils et son père, qui obéissent à un serment pris avant la naissance de Mordred. Ça peut être un fils mais pas le père de ce fils, qui pourtant pense qu’avec un autre destin ç’aurait été le sien. Ça peut être deux personnes uniquement liées par le sang de la mère de l’un et la sœur de l’autre. Ça peut être un fantasme frustré des deux. Ça peut être n’importe quoi. On partage aujourd’hui une époque qui, d’après moi, a oublié beaucoup de choses de la pudeur. On m’a déjà reproché de ne pas avoir écrit une scène de sexe avec Chien du Heaume. Je ne parle pas des lecteurs qui m’ont dit qu’ils auraient aimé la savoir dans des bras confortables, je parle bien de ça ; des gens qui me disent « on aurait dû la voir au pieu », et je garde la vulgarité des mots d’origine pour moi. Je pense, je trouve, moi, que les personnages, qu’on lit ou écrit, gardent des choses pour eux. On les découvre, mais pas sur une table de biologie, ouverts en deux. Ils ont leur vie, leurs secrets, leur passé et leurs espoirs, et tout cela ne regarde pas forcément les gens qui donnent une voix à ces personnages, ni ceux qui les lisent. Ça semble peut-être tout à fait stupide, mais les personnages qui m’ont marquée, quand je lisais, je les compte presque comme des amis. Ceux que j’ai écrits aussi. Et mes amis, je les laisse me parler quand ils ont envie. Je ne les force pas. Je ne triture pas leurs plaies avec un scalpel pour savoir ce qu’ils gardent tout au fond d’eux. J’aime ce qu’ils me donnent. Alors voilà  ; je ne pense pas que ce soit une pudeur d’écriture ou une impossibilité pour eux, mais juste... Mordred et Arthur ont donné cela.

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PROPULSÉ par

Rien que pour vous, la star des Moutons électriques !Jean-Philippe JAWORSKI

Les Indés : Vous sortez en août un nouveau roman, dans

un autre univers que celui du Vieux royaume, pouvez-vous

nous le présenter ?

Jean-Philippe : Jadis, des tribus de héros sont sorties de la forêt. Il s’agissait des fils de la nuit et du dieu ténébreux : ils ont conquis les terres du vieux peuple, ils ont fondé des royaumes dans les pays de l’Arar, du Liger, de l’Autura et de la Sequana, dans les montagnes du Cemmène ou sur la péninsule entre la mer d’Ictis et la mer Œstrymnique. Ils ont bâti des forteresses de terre et de bois ; ils ont fait paître leurs troupeaux de vaches et de chevaux ; ils ont découvert que le fer était plus facile à trouver que l’étain ; quoiqu’elles ne soient guère meilleures que les armes de bronze, ils préfèrent désormais les armes de fer. Car ils se font la guerre, pour le plaisir, pour banqueter et pour sacrifier des bêtes, des trophées et des hommes. Afin de parachever leur conquête, ils ont donné au pays qu’ils ont pris heur propre nom : la Celtique.Parmi eux, le peuple le plus puissant s’appelle les Bituriges. Dans leur langue, cela signifie les Rois du monde.

Les Indés : Il s’agit du premier tome d’une trilogie, pourquoi une trilogie ?

Jean-Philippe : Dans mon projet initial, Rois du monde était un roman composé en trois époques. Cette tripartition correspondait autant à une dynamique narrative qu’à un trait de civilisation, le chiffre trois étant sacré chez les Celtes. On retrouve ce chiffre dans l’organisation de la poésie mnémotechnique des Celtes insulaires, dans l’unité de base de la cavalerie des Celtes orientaux (la trimarkisia, formée de trois combattants), dans la représentation de l’espace (trois points cardinaux), dans le calendrier (organisé en siècles lunisolaires de trente ans). Le plus fascinant provient de l’invention de la trinité religieuse chez les Celtes : les Deae Matronae forment souvent une trinité, ou certains dieux sont sculptés avec un triple visage. J’ai donc voulu me conformer à cette organisation ternaire. Toutefois, j’avais tant à dire qu’il est apparu que le roman d’un seul tenant serait trop gros.

La première partie fait déjà 300 pages en grand format. C’est pourquoi, en concertation avec André-François Ruaud, nous avons opté pour la trilogie plutôt que pour le volume unique. Chaque époque ayant son unité, cela ne coupe pas arbitrairement le récit.

Les Indés : Travailler sur les Celtes vous a demandé beaucoup de recherche et de documentation ?

Jean-Philippe : Un travail considérable, presque épuisant. J’explore un sujet très peu traité de façon romanesque, car je m’intéresse non aux Celtes insulaires de la fin de l’Antiquité et du haut moyen-âge, mais aux Celtes continentaux du premier âge du fer. J’ai bien sûr épluché les sources antiques (Athénée, César, Diodore de Sicile, Lucain, Tite Live, Strabon…), tout en sachant que ces documents sont déjà tardifs, lacunaires et subjectifs.Je me suis également fondé sur la documentation archéologique abondante parue depuis les années 1980, qui réforme profondément notre connaissance du monde celtique. Je me suis intéressé aux percées de la linguistique : l’étude systématique de l’épigraphie (en particulier funéraire) a permis ces dernières années l’établissement d’une ébauche de dictionnaire gaulois et de commencer à reconstituer la grammaire de la langue. En outre, je me suis penché sur l’onomastique, la topographie et l’hydronymie antiques. Malgré tout, ces recherches ne suffisaient pas à reconstituer complètement la vie de la Celtique archaïque : j’ai donc dû aussi spéculer sur les informations plus tardives que nous livrent les littératures galloise et irlandaise ainsi que sur les substrats celtiques qui ont perduré dans le folklore et dans la littérature français.

Les Indés : Entrer dans un nouvel univers vous a-t-il conduit à écrire de manière différente ?

Jean-Philippe : En effet, pour différentes raisons. Bellovèse, mon personnage principal, est également mon narrateur. Or si les druides ont maîtrisé très tôt l’alphabet grec, ils ne posaient pas leur tradition par écrit. Bellovèse n’étant pas druide, de surcroît, il est nécessairement analphabète. La narration doit donc comporter des traces d’oralité, et la situation d’énonciation du roman est celle d’un

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Rien que pour vous, la star des Moutons électriques !

récit fait à haute voix. D’autre part, il a fallu que j’adopte le point de vue d’un chef du premier âge du fer. Problème complexe : Grecs et Latins, épouvantés par les barbares tonitruants et coupeurs de têtes,

nous ont laissé des témoignages très dépréciatifs sur les Celtes. Ces lieux communs ont nourri nos clichés historiques pendant des siècles. Or, en lisant les auteurs antiques entre les lignes, en se penchant sur les fragments de littérature celtique que nous ont légués le Pays de Galles et l’Irlande, on découvre en fait une civilisation beaucoup plus complexe, voire, sur certains points, une culture raffinée. Je n’ai pas cherché à atténuer la brutalité de la société celtique, mais mon narrateur exprime aussi d’autres traits de civilisation : le goût pour l’éloquence et la poésie, le sens de l’hospitalité, l’omniprésence du sacré, le caractère ritualisé de la guerre et même, assez étonnamment, certaines digressions méditatives - car plusieurs auteurs antiques considéraient les druides comme des

philosophes et les rapprochaient des pythagoriciens. Tous ces éléments contribuent, je l’espère, à donner une voix assez singulière à mon narrateur.

Les Indés : Et le Vieux royaume, alors, avez-vous prévu d’y revenir ?

Jean-Philippe : Oui, j’y reviendrai ! En fait, même en ce moment, je ne l’ai pas complètement abandonné. Cette année paraissent deux nouvelles qui lui sont consacrées : Profanation et Le Sentiment du Fer. À terme, je compte rassembler les nouvelles parues dans diverses anthologies, ajouter un ou deux inédits et en faire un recueil consacré à la guerre des Grands Vassaux. (Le conflit qui a provoqué l’effondrement du royaume de Leomance.) Quand j’aurai fini Rois du monde, je compte bien me lancer dans un roman qui se déroule quelques mois après l’action de Gagner la guerre, mais dans le duché de Bromael. Le livre s’intitulera probablement Le chevalier aux épines, car il aura pour personnage principal Ædan de Vaumacel, le preux (trop) courtois, jeté dans les guerres féodales des seigneurs bromallois, les intrigues ciudaliennes et les menaces venues d’Ouromagne.

ISBN 978-2-36183-100-4 PVP 23 euros Les Moutons électriques

Premier volume des mémoires dictées par le grand guerrier celte Bellovèse, fils de Sacrovèse, fils de Belinos, à un barde. Une saga de bruit et de fureur, mais aussi de magie et de malice, de complots et de découverte. Durant sa vie, Bellovèse aura traversé toute l’Europe celte, depuis l’archipel britannique jusqu’à la botte italienne. Transfiguré par le récit de son héros, qui bâtit sa propre légende, c’est un très grand roman de fantasy, par l’auteur de Gagner la guerre. On y retrouve sa langue splendide, sa gouaille et son sens du suspense, avec en plus le sens du merveilleux dont les Celtes emplissaient le monde.

Zoom sur Jean-Philippe Jaworski : Après Janua Vera et Gagner la guerre, très remarqués et récompensés de plusieurs prix, Jean-Philippe Jaworski se lance dans une trilogie celtique, Rois du monde, au souffle immense. Le tome 2 (Chasse royale) sortira en 2014 et le tome 3 (La Grande jument) en 2015. Jamais la fantasy n’a été aussi jubilatoire et d’une écriture aussi superbe.

Les œuvres de Jean-Philippe Jaworski totalisent plus de 30 000 ventes toutes éditions confondues.

MÊME PAS MORT par Jean-Philippe JAWORSKI

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LE DOSSIER par LES INDÉS :

Enjeux, territoires et acteurs d’un phénomène littéraire contemporain

PUBLICSQuels sont les publics français actuels de la fantasy ?

• Qui lit de la fantasy ?

La fantasy s’adresse à un public large et divers. Le genre a particulièrementdu succès auprès :

- des jeunes au sens large, attirés par la fantasy grâce au cinéma et au jeuvidéo, mais aussi par la littérature jeunesse qui l’utilise largement et qui donneenvie ensuite aux lecteurs de passer à d’autres livres une fois adulte ;

- des jeunes femmes, de 15 à 35 ans, attirées par la vivacité de ce que l’onappelle le Young Adult et la fantasy urbaine, et qui s’intéressent aussi à deslivres plus « adultes » de fantasy ;

- des quadra et quinquas, qui ont autrefois lu Conan de Robert Howard, les œuvres de J. R. R. Tolkien, Elric de Michael Moorcock et bien d’autres classiques du genre, qui ont souvent pratiqué ou approché le jeu de rôle et qui se retrouvent totalement dans cette littérature d’évasion.

La fantasy a littéralement explosé depuis les années 2000 et les grands succès cinématographiques que nous avons déjà évoqués. Désormais son lectorat est vaste et dépasse le cercle des fans pur et dur. Si l’on trouve sur le marché de nombreux romans un peu standardisés, traduits à la chaîne, il y a aussi une fantasy de haute tenue dans laquelle se sont investis des auteurs de talent, travaillant ce matériau avec bonheur pour donner de vrais chefs-d’œuvre.C’est particulièrement vrai en France avec des écrivains très talentueux comme Fabrice Colin, Justine Niogret, Jean-Philippe Jaworksi...

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LA FANTASY EN FRANCE

• Les signaux contemporains de la diffusion de la fantasy parmi les publics

Depuis plusieurs années, les éditeurs membres du collectif des Indés de l’Imaginaire relèvent plusieurs signes empiriques de la diffusion de la fantasy parmi les publics décrits et surtout au-delà. Ce sont des observations empiriques de professionnels chaque jour sur le terrain mais il manque encore des articles de fond dépassant la simple «tolkienmania», une étude de terrain plus poussée et plus scientifique. Nous l’appelons de nos vœux.

- Le bourgeonnement des salons et des festivals consacrés à la fantasy et leurs succès d’audience ! À côté des festivals installés comme les Imaginales à Épinal ou Troll & Légendes à Mons en Belgique qui attirent plusieurs dizaines de milliers de participants, il y a l’émergence forte de nombreux salons et festivals consacrés à la littérature de fantasy. Ils sont souvent organisés par des médiathèques qui perçoivent bien, sur le terrain, la demande forte de leurs publics et en particulier le public jeune pour ces littératures.Citons, entre autres, Les Oniriques organisé par la médiathèque de Meyzieu, Fantasy en Beaujolais, Octogônes à Lyon, Les Enchanteurs le salon du livre médiéval et de l’imaginaire à Châteaugiron (35), le Salon fantastique à Paris, Les Futuriales à Aulnay-sous-Bois, Zone Franche à Bagneux, les Halliennales à Lille.

- Le développement des fêtes et des reconstitutions médiévales dans les communes. Ces événements sont souvent le théâtre d’animations liées à la fantasy par la mise en place de jeux de rôle Grandeur Nature (GN) et de reconstitutions des légendes locales.

- La part croissante du domaine de la fantasy dans les manifestations liées aux mangas et à la culture pop japonaise (conventions de Cosplay, de mangas, etc.)

- La présence très importante de la fantasy sur la toile (forums, blogs, sites dédiés, etc.)

- Les sujets de fin d’étude des étudiants en art plastique et en dessin ou en jeux vidéo faisant souvent la part belle aux thématiques de la fantasy.

En conclusion : il y a bien un «phénomène fantasy» qui se diffuse en France parmi toute une partie de sa population et qui dépasse maintenant le

simple cadre de l’activité classique de l’édition !

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CARTOGRAPHIEMais au fait, qu’est-ce que la fantasy ?

• La fantasy, une littérature de l’imaginaire

La littérature de fantasy fait la part belle à la fois au plaisir de la narration et aux voyages dans des mondes imaginaires. Bâtir un monde inventé est l’une des caractéristiques les plus frappantes de cette partie de la littérature. L’auteur aime se faire tour à tour cartographe, historien, ethnologue, mythologue, encyclopédiste, linguiste, érudit de sociétés qui n’existent pas afin de créer lors de la lecture ce célèbre effet de réel. Lorsque l’écrivain relie son travail de créateur de monde imaginaire à un style marquant et une intrigue prenante, son œuvre compte parmi les meilleures. Ainsi, on peut dire que la fantasy est une littérature qui invite les lecteurs à aller voir derrière la montagne, la cité ou l’océan. Cet appel de l’aventure, ce décalage ethnologique, cette rêverie qui nous fait aller plus loin que l’intrigue constituent certainement les attraits primordiaux de la fantasy.

• Qu’est-ce que la fantasy pour les Indés de l’Imaginaire ?

Pour utiliser un terme français, on peut traduire fantasy par « merveilleux ». La fantasy est une littérature qui n’est pas simplement réductible au divertissement, mais qui est aussi une littérature du voyage — dans des pays imaginaires, bien sûr, mais aussi une littérature du voyage intérieur. La fantasy, finalement, c’est un nouveau romantisme : les paysages immenses, les saisons qui deviennent des années, les nains et les elfes qui sont des esprits élémentaires, le rapport à la nature, toute la symbolique des contes et des mythologies, la magie et le réenchantement du monde, les personnages héroïques et les récits épiques. Du mythe vivant !

Avec la fantasy telle que les éditeurs réunis au sein du collectif des Indés de l’Imaginaire publient, il est proposé aux lecteurs de voyager dans ces mondes rêvés, de revisiter avec jubilation les grands récits initiatiques et d’explorer les imaginaires inventifs de cette nouvelle littérature de l’émerveillement, croisement moderne des grands récits mythologiques, des fresques feuilletonnantes d’Alexandre Dumas, des Pulp Stories de Robert Howard ou de H. P. Lovecraft, des histoires érudites et labyrinthiques d’un J. L. Borgès ou des images surréelles et poétiques d’un Julien Gracq.

Et ce, à travers tout un travail de découverte et de création : conscients de la profondeur cachée du genre, au-delà des clichés, beaucoup des auteurs publiés par les maisons d’édition des Indés s’attachent à explorer les frontières, les styles et les sujets de cette littérature de l’imaginaire.

De plus, la fantasy n’a pas vocation à demeurer figée dans un passé mythique : elle s’introduit dans le réel, elle envahit nos métropoles démesurées, et elle confronte les thèmes de la société

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contemporaine aux grands mythes. Nous n’avons pas besoin de passer de l’autre côté du miroir, car nous y sommes déjà : les fées et les sorciers existent encore, le monde garde son mystère. Magie et merveilleux font irruption dans notre univers de la machine, la fantasy est la littérature du tohu-bohu de notre siècle — et du précédent.

• Y a-t-il une ou plusieurs fantasy ?

Il y a de nos jours une multitude de fantasy différentes, pratiquement autant que d’auteurs. On peut cependant distinguer deux grands champs principaux dans le domaine :

- la fantasy dans un passé rêvé, qui construit des mondes imaginaires, souvent inspirés des récits historiques et mythologiques (de la même manière que J. R. R. Tolkien inventa la Terre du Milieu, le monde imaginaire dans lequel se déroule Le Seigneur des Anneaux à partir de sa grande connaissance des sagas nordiques et du Kalevala finlandais) ;

- la fantasy dans le présent, qui introduit le merveilleux dans notre monde (de la même manière que les sorciers de Harry Potter ou la magie chez Tim Burton).

• Y a-t-il une fantasy française ?

En dépit d’une forte présence du merveilleux chez Flaubert (ce que l’on sait trop peu) et chez George Sand, il y a historiquement peu d’ancêtres de la fantasy dans la tradition littéraire francophone. C’est avec l’avènement de la culture du jeu de rôle qu’une première génération a éclaté en France, donnant à la fantasy sa coloration française, et ceci seulement au début des années 1990. C’est avec la fondation des éditions Mnémos en 1995 que cette génération s’est imposée  : Fabrice Colin, Mathieu Gaborit, David Calvo, Laurent Klœtzer, Pierre Grimbert… Après de longues années d’inhibition du merveilleux en France, cette génération a donné le signal du démarrage, beaucoup d’autres auteurs sont apparus, d’autres maisons d’édition se sont développées, le paysage s’est considérablement élargi et la fantasy s’est imposée en France comme un genre majeur, ainsi qu’elle l’était déjà dans la culture anglo-saxonne.

Quel est le style français ?

La grande différence entre le domaine français et le domaine anglo-saxon est que les auteurs français attachent beaucoup d’importance à l’invention, à l’originalité, à la force des images, au goût du récit et des sources historiques ainsi qu’à l’aspect stylistique pour certains d’entre eux.

Tandis que, fruit de la culture des « ateliers d’écriture », la fantasy américaine se base surtout sur des recettes de narration comme les péripéties du voyage du héros (structure narrative inspirée des récits mythologiques et largement utilisée par les scénaristes d’Hollywood), avec une écriture commerciale très lisse, privilégiant la sérialisation et l’utilisation systématique des clichés du genre afin d’essayer de toucher le plus grand nombre. La lecture divertissante est alors privilégiée. En France, certains éditeurs s’en sont fait les spécialistes.

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CONTEURSTrois auteur-e-s majeur-e-s de la fantasy francophone

Mathieu GABORIT

Jean-Philippe JAWORSKI

Justine NIOGRET

Mathieu Gaborit est né à Paris en 1972. Après de brèves études de droit, il se lance dans le roman en 1995 avec Souffre-jour, un roman de fantasy sombre et baroque, qui l’impose d’emblée comme le plus novateur dans ce genre. Ses romans riches et personnels transgressent les catégories de l’imaginaire.

Mathieu Gaborit est avant tout un créateur d’univers. Son imagination débordante, étrange et poétique s’exprime aussi bien dans la fantasy épique ou intimiste que dans l’uchronie comme avec le cycle Bohème qui fut célébré dans les pages du quotidien Le Monde comme l’invention du steampunk français. Il a publié de nombreux livres. Il est aussi concepteur de jeux de rôle et de jeux vidéo.

Jean-Philippe Jaworski a suivi des études de lettres et enseigne le français en lycée, dans la région de Nancy. Très investi à l’origine dans le domaine du jeu de rôle, il a tout d’abord collaboré au magazine Casus Belli, puis il a créé Tiers Âge, un jeu de rôle gratuit sur la Terre du Milieu, et Te Deum pour un massacre, un jeu de rôle historique sur les guerres de religion. S’étant

tourné vers la littérature de fantasy, il a rencontré un succès remarquable dès son premier livre, Janua Vera, un recueil de nouvelles paru en 2007. Succès qu’il renouvela en 2009 avec son premier roman, Gagner la guerre.

Justine Niogret est une romancière française mêlant fantastique et historique dans ses romans. Amoureuse de la fantasy et du Moyen Âge, l’auteur approfondit ses connaissances romanesques et théoriques en pratiquant la forge et l’équitation.Après quelques nouvelles, dont «Un chant d’été», sélectionnée pour le Prix Imaginales en 2005, elle publie Chien du Heaume, son premier roman, qui remportera le Grand Prix de l’Imaginaire du meilleur roman francophone en 2010.

Son second roman Mordre le bouclier remporte lui aussi un grand succès. Son troisième roman, Gueule de truie, récit post-apocalyptique, est sorti début 2013.

J. Niogret a également participé à plusieurs anthologies comme Magiciennes et sorciers («T’humilierai»), Victimes et bourreaux («Porter dans mes veines l’artefact et l’antidote») ou Reines et dragons («Achab était amoureux»).

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GÉNÉALOGIED’où vient la fantasy ?

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En 1965, un éditeur américain publia le Seigneur des Anneaux de l’Anglais J. R. R. Tolkien, avec un succès phénoménal  : ce roman était jusqu’alors

presque inconnu. Dans la foulée, cet éditeur et d’autres cherchèrent ce qu’ils pourraient publier d’autre dans le style, définirent une nouvelle étiquette commerciale qu’ils nommèrent «  fantasy  », rééditèrent des œuvres anglo-saxonnes précédent Tolkien comme le fameux Conan le barbare de Howard ou Les Contrées du Rêve de Lovecraft et firent écrire à

des auteurs contemporains des ouvrages de ce style naissant (Fritz Leiber, Michael Moorcock, Ursula Le Guin).

Dans la foulée de cette naissance d’une littérature nommée fantasy, en 1974 Gary Gygax crée le jeu Dungeons & Dragons, qui constitue une révolution

culturelle  : les «  jeux de rôle  ». De cette œuvre séminale naitront des dizaines d’univers imaginaires et de très nombreux auteurs des deux côtés de l’Atlantique, qui vont investir à 100 % le genre de la fantasy et participer grandement à la popularisation du genre. La France devient alors en quelques années le deuxième pays, après les États-Unis, en terme de créations originales d’univers de jeu de rôle, en particulier pendant les dix

années d’activité intense de l’éditeur spécialisé Multisim où se formeront la plupart des premiers auteurs français de fantasy.

Cela, c’est l’histoire récente du genre, sa constitution en « genre » au même titre que la science-fiction ou le polar.Les racines profondes de cette littérature, toute son inspiration, sont à chercher du côté du sens français du terme fantasy, à savoir  : merveilleux et légendaire. Nous pouvons proposer ici trois étapes majeures :

• le XIXe siècle : la littérature néo-gothique, anglaise comme française et l’étude comparée des

contes des folklores européens

• la Matière de Bretagne réunissant les histoires du cycle arthurien et plus globalement les romans chevaleresques

issus de la culture médiévale

• les grands récits mythologiques du patrimoine culturel antique (Gilgamesh, l’Iliade, l’Odyssée, le Mahabharata, etc.)

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TRÉSORS !10 pépites ! 10 romans de fantasy francophones choisis le plus

subjectivement possible et chaudement recommandés par les Indés de l’Imaginaire ! Afin de découvrir la qualité, la variété et l’originalité de ce pan

entier de la littérature francophone.Loin des clichés...

• Chroniques d’un rêve enclavé d’AyerdhalAu Diable Vauvert, 2009

• Or Not to Be de Fabrice ColinL’Atalante, 2002

• Les Crépusculaires de Mathieu Gaborit Mnémos, édition prestige, 2013

• Gagner la guerre de Jean-Philippe JaworskiLes Moutons électriques, édition luxe, 2013 ; Folio-SF 2011

• La Voie du Cygne de Laurent KlœtzerMnémos, 1999 ; Folio-SF, 2001

• Chien du heaume de Justine NiogretMnémos, 2009 ; J’ai Lu, 2011

• La Gloire de l’Empire de Jean d’OrmessonFolio, 1994

• Les Flammes de la nuit de Michel PagelDenoël Lunes d’encre, 2000

• Martyrs d’Olivier PeruJ’ai Lu, 2013

• Les Soldats de la mer d’Yves & Ada RémyDystopia, 2013

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FRONTIÈRESOù va la fantasy ?

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• La fantasy, une partie constituante d’une culture mondiale émergente

Il existe de nos jours un véritable langage commun autour de l’imaginaire de fantasy, qui s’est développé depuis trente ans. Du Japon aux États-Unis, de la France à la Chine, tout le monde sait par exemple ce qu’est un elfe. Inconcevable il y a encore dix ans ! Bien sûr, chaque culture intègre et transforme à son aune ces briques élémentaires de la fantasy mais au-delà du partage des grand best-sellers de cette littérature, il y a aussi une production «locale» qui recycle, personnalise, dépasse alors les codes et les clichés de la fantasy mondiale.

C’est ainsi que partie de l’Europe et plus particulièrement du vieux fonds des sagas anglo-saxonnes et nordiques via Le Seigneur des Anneaux, la fantasy a trouvé aux États-Unis une terre d’une grande fertilité. Elle s’est depuis diffusée à travers la planète et ceci sans s’épuiser. Sur cet apport, depuis vingt ans, une voie originale francophone a été trouvée par une poignée d’auteurs ambitieux et créatifs.

Bien sûr, il est possible de voir cette émergence globale comme un affadissement culturel. Au contraire, nous ne pouvons que constater sa richesse, son intensité et sa multiplicité tant chez les auteurs que nous publions que par le nombre de manuscrits que nous recevons. C’est une chance formidable que d’être partie prenante d’une culture en formation et foisonnante !

À notre tour maintenant de renvoyer vers la Lingua Franca de l’imaginaire notre originalité et nos différences ! Et parions que la fantasy continuera dans les années prochaines d’être l’une des briques constituantes des cultures partagées des multitudes.

• Diffusion transmédia

La fantasy, ses codes, ses images, se retrouvent très largement disséminés dans l’ensemble des supports de la nouvelle culture populaire contemporaine, à savoir les séries télé (Le Trône de fer), le cinéma (Bilbo le Hobbit), le jeu vidéo (Zelda, World of Warcraft), la bande dessinée (La quête de l’oiseau du temps de Régis Loisel ou Donjons de Joann Sfarr), les dessins animés (Avatar, le dernier maître de l’air), les jeux « grandeur nature », etc.

En France, pour des raisons idéologiques, la fantasy (comme la science-fiction ou le fantastique) est absente des systèmes de financement du cinéma et donc de la télévision. Pour répondre à l’appétit très fort de son public toujours croissant, la fantasy s’est diffusée principalement dans la bande dessinée, certaines créations francophones vidéoludiques, les productions de dessins animés et a continué à se développer de manière créative au sein des jeux de rôle et des jeux de sociétés.

Il est important de noter que le succès majeur en France de la série télé Le Trône de Fer, adaptation de la saga littéraire éponyme de G. R. R. Martin, a fait bouger les lignes. De plus en plus de producteurs achètent les droits de romans francophones de fantasy. Ainsi, Forge animation a acquis chez Mnémos les droits d’Abyme, un roman de Mathieu Gaborit.

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EXPERTSTrois éditeurs experts en fantasy partagent avec plaisir

leur passion et leurs expériences

André-François RUAUD Les Moutons électriques

Jérôme VINCENTActuSF

Frédéric WEILMnémos

André-François Ruaud, le directeur littéraire des Moutons électriques, œuvre depuis une trentaine d’années dans les littératures de genre. Romancier, anthologiste, revuiste, il a développé en tant qu’essayiste une

expertise particulière dans les domaines des littératures du merveilleux (essais chez Denoël, Folio et les Moutons électriques), de la science-fiction (essais chez Klincksieck, Mnémos et bien d’autres éditeurs) et du roman policier (avec notamment les ouvrages de la « Bibliothèque rouge », aux Moutons électriques). Conférencier, il intervient régulièrement en salons et médiathèques.

Journaliste de formation, Jérôme Vincent est responsable des éditions Actusf (avec plus d’un cinquantaine de titres au catalogue) et du site Actusf.com, lancé en mars 2000 et centré sur l’actualité des littératures de l’imaginaire. Il s’occupe également d’Emaginaire.com, une librairie en

ligne vendant exclusivement des livres numériques. Il est aussi membre du jury des Imaginales, animateurs de conférences dans différents salons (Utopiales, Imaginales etc), et par ailleurs journalistes radio. De part sa profession, il connaît les mécanismes de l’édition en tant qu’éditeur mais aussi en tant que chroniqueur et observateur.

Directeur éditorial des éditons Mnémos, Frédéric Weil en est aussi le fondateur. Passionné depuis l’enfance par les littératures de l’imaginaire, après des études d’histoire et de sciences politiques, entre 1992 et 2003, il coécrit et édite de nombreux jeux de rôle dont l’un des jdr français les

plus célèbres : Nephilim. Après plus de 15 ans chez Mnémos, il est devenu un expert des littératures de l’imaginaire. Ayant en parallèle acquis une connaissance du transmédia et du jeu vidéo, il s’attache à décrypter les hybridations et les relations entre les littératures de l’imaginaire et les nouvelles technologies. Il est membre du bureau de l’Agence Rhône-Alpes pour le Livre et la Documentation.

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De même que les préjugés contre la littérature populaire sont chose courante, les clichés sur la fantasy ne manquent pas non plus. Petit panorama des lieux communs erronés qu’il est facile d’éviter :

• Un cliché ancien consiste à parler du genre comme « héroïc fantasy » (un barbarisme n’existant pas en langue anglaise), et de le réduire aux caricatures du barbare musculeux à la Conan. Les retraductions récentes des romans de Robert Howard, inventeur du personnage de Conan, ont montré que le personnage était loin de ce poncif créé par le film éponyme et par une esthétique heavy metal. La fantasy, au contraire, se jouant des codes de notre réalité, porte mille mondes possibles.

• Un cliché récent consiste à réduire le genre à sa seule composante « fantastique médiéval », dans le style du Seigneur des Anneaux. Cette littérature ne peut être réduite à sa seule source anglo-saxonne que connaissait sur le bout des doigts l’auteur du Seigneur des Anneaux. Il y a une fantasy antique, urbaine, paysanne, chinoise, africaine, russe, etc.

• Un autre cliché récurrent  : qu’il n’y ait que les hommes qui lisent et écrivent de la fantasy. L’évolution récente du genre montre l’inverse, la fantasy est devenue une littérature partagée par le masculin comme le féminin aussi bien en terme de lecture que de création.

• Enfin, il peut sembler de bon ton de dire que la fantasy est un genre « réac », aussi bien par les structures sociales qu’elle porterait dans ses récits que par les morales de bien versus mal qu’elle mettrait souvent en scène. C’est bien sûr une lecture rapide et facile et une façon de déclasser cette littérature. Beaucoup d’auteurs s’inscrivent ailleurs et poursuivent leur travail sur le terrain de l’imaginaire, du style, de l’invention, des symboles, de la narration. Certains d’entre eux peuvent introduire des visions politiques de manière consciente ou bien même impensée mais la plupart ne le souhaitent pas. Leur terrain de jeux n’est pas celui de la politique, il est celui de l’imagination et de la rêverie, de l’ingénierie de monde imaginaire. Les structures profondes de la fantasy sont plus à chercher du côté de Gaston Bachelard que du structuralisme.

Cette classification volontairement dévalorisante a été longtemps l’argument principal des commentateurs s’inscrivant dans le culte du progrès et dans une vision d’ingénieur de la société. En vérité, les structures narratives et les sources légendaires de la fantasy s’appuient effectivement sur des clichés socio-culturels (souvent fixés au 19ème siècle) des sociétés pré-démocratiques, il est alors facile d’utiliser ce remix et par un raisonnement fallacieux en rendre coupable la fantasy. Il nous semble beaucoup plus intéressant de s’interroger sur les raisons d’un tel succès et du pourquoi de sa réception si forte auprès en particulier d’un public jeune.

La fantasy est rarement politique, en tout cas pas de manière directe et au premier degré militant. Néanmoins, dire que tout ce genre est « réac », c’est se tromper de cible : le souffle mythique qui anime cette littérature relève du réenchantement du réel et d’un romantisme contemporain.

DÉCRYPTAGE21

Quelques clichés sur la fantasy facilement évitables !

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Parce que la littérature de fantasy n’est pas juste une duplication des mêmes clichés et des mêmes recettes,

Parce que la fantasy est une littérature qui fait appel à l’une des facultés humaines les plus intéressantes : l’imagination,

Parce que la fantasy est une source inégalée de voyage, de rêves, d’émotions fortes et d’images poétiques et inoubliables,

Parce que la fantasy est un phénomène qui dépasse aujourd’hui la littérature de genre,

Parce que le public connaisseur, de plus en plus nombreux, apprécie autre chose que des auteurs adeptes de la copie des œuvres fondatrices,

Parce qu'en France, il existe des auteurs majeurs, porteurs d'une voix originale et talentueuse !

Le collectif des éditeurs défendant les littératures de l'imaginaire

Réalisé par

Contacts

POUR L’OPÉ : LA RENTRÉE DE LA FANTASY FRANÇAISEAndré-François Ruaud / Les Moutons électriques

[email protected] / Tel : 09 53 38 58 61

POUR LE DOSSIER : LA FANTASY FRANÇAISEFrédéric Weil / Mnémos

[email protected] / Tel : 06 89 46 12 51

POUR LES INDÉS DE L’IMAGINAIREJérôme Vincent / ActuSF

[email protected] / Tel : 06 13 23 92 68