Doubnov Simon - Histoire Du Judaïsme

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Histoire du Judaïsme Précis d'histoire juive des origines à 1934 Par Simon Doubnov Première partie Le peuple en Palestine et dans les Pays voisins dans l’ANTIQUITÉ et au Moyen-âge Abraham et les Patriarches en pays de Canaan Il y a quatre mille ans, de grands peuples vivaient sur les côtes d'Asie et d'Afrique qui bordaient la Méditerranée ; ils y avaient fondé deux puissants royaumes : d'un côte, la Chaldée, de l'autre, l’Égypte. Entre ces deux grands royaumes s'étendaient de petits pays : la Syrie et Canaan, ce dernier appelé également Palestine. Il s'y trouvait, outre les Phéniciens, de petits peuples ou des tribus qui, ne possédant pas de sol propre, erraient d'une région à l'autre, avec leurs troupeaux de brebis et de bœufs, et vivaient dans le désert en nomades. Une de ces peuplades était celle des Hébreux, qui campaient entre la Chaldée et l’Égypte, sous la conduite de leur chef Abraham. Abraham fut le premier patriarche), du peuple hébreu, qui plus tard fut appelé le peuple juif (Abraham l'Hébreu). Et c'est ainsi qu'on le nomme encore de nos jours : notre père Abraham. Sa famille était originaire de l'ancienne ville d'Ur en Chaldée (Babylonie). Elle émigra et s'établit pour quelque temps en Mésopotamie, le pays des deux fleuves, situé entre le Tigre et l’Euphrate. Plus tard, Abraham et les siens se séparèrent des Araméens et continuèrent leur migration jusqu'en Canaan. Les livres saints rapportent qu'Abraham avait déjà, en ce temps, reconnu le vrai Dieu. Tandis que tous les peuples d'alors croyaient que le soleil, la lune, les phénomènes naturels étaient des divinités et qu'il fallait se prosterner devant leurs images, Abraham reconnut qu'il n'y a qu'un seul Dieu dans l'univers, un Dieu qui a créé le soleil, la lune et toute la nature. Ce Dieu, ainsi contait-on plus tard, lui apparut un jour et lui dit : " Quitte ton pays natal et va dans un pays que je t'indiquerai. Là, tu engendreras un grand peuple qui sera béni entre tous les peuples de la terre. " Abraham parcourut tout le pays de Canaan et parvint jusqu'en Égypte. Mais là, Pharaon roi d’Égypte – avait voulu lui ravir sa belle épouse Sarah, les nomades durent quitter ce pays. Ils s’installèrent au sud de Canaan, près de la ville d'Hébron, habitant sous des tentes et faisant paître leurs troupeaux dans les plaines. Le patriarche Abraham avait eu un fils de chacune de ses deux femmes (en ce temps-là, un homme pouvait avoir plus d'une épouse) ; de la servante égyptienne Agar, il avait un fils nommé Ismaël, et de sa femme Sarah, Isaac. Les deux femmes vivant en mauvaise intelligence, Abraham dut se séparer d'Agar et de son fils Ismaël. Ils partirent dans le désert,

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  • Histoire du Judasme

    Prcis d'histoire juive des origines 1934

    Par Simon Doubnov

    Premire partie

    Le peuple en Palestine

    et dans les Pays voisins dans lANTIQUIT et au Moyen-ge

    Abraham et les Patriarches en pays de Canaan

    Il y a quatre mille ans, de grands peuples vivaient sur les ctes d'Asie et d'Afrique qui

    bordaient la Mditerrane ; ils y avaient fond deux puissants royaumes : d'un cte, la

    Chalde, de l'autre, lgypte. Entre ces deux grands royaumes s'tendaient de petits pays : la Syrie et Canaan, ce dernier appel galement Palestine. Il s'y trouvait, outre les Phniciens, de

    petits peuples ou des tribus qui, ne possdant pas de sol propre, erraient d'une rgion l'autre,

    avec leurs troupeaux de brebis et de bufs, et vivaient dans le dsert en nomades. Une de ces peuplades tait celle des Hbreux, qui campaient entre la Chalde et lgypte, sous la conduite de leur chef Abraham. Abraham fut le premier patriarche), du peuple hbreu, qui

    plus tard fut appel le peuple juif (Abraham l'Hbreu). Et c'est ainsi qu'on le nomme encore de

    nos jours : notre pre Abraham.

    Sa famille tait originaire de l'ancienne ville d'Ur en Chalde (Babylonie). Elle migra et

    s'tablit pour quelque temps en Msopotamie, le pays des deux fleuves, situ entre le Tigre et

    lEuphrate. Plus tard, Abraham et les siens se sparrent des Aramens et continurent leur migration jusqu'en Canaan. Les livres saints rapportent qu'Abraham avait dj, en ce temps,

    reconnu le vrai Dieu. Tandis que tous les peuples d'alors croyaient que le soleil, la lune, les

    phnomnes naturels taient des divinits et qu'il fallait se prosterner devant leurs images,

    Abraham reconnut qu'il n'y a qu'un seul Dieu dans l'univers, un Dieu qui a cr le soleil, la

    lune et toute la nature. Ce Dieu, ainsi contait-on plus tard, lui apparut un jour et lui dit : "

    Quitte ton pays natal et va dans un pays que je t'indiquerai. L, tu engendreras un grand

    peuple qui sera bni entre tous les peuples de la terre. "

    Abraham parcourut tout le pays de Canaan et parvint jusqu'en gypte. Mais l, Pharaon roi dgypte avait voulu lui ravir sa belle pouse Sarah, les nomades durent quitter ce pays. Ils sinstallrent au sud de Canaan, prs de la ville d'Hbron, habitant sous des tentes et faisant patre leurs troupeaux dans les plaines.

    Le patriarche Abraham avait eu un fils de chacune de ses deux femmes (en ce temps-l, un

    homme pouvait avoir plus d'une pouse) ; de la servante gyptienne Agar, il avait un fils

    nomm Ismal, et de sa femme Sarah, Isaac. Les deux femmes vivant en mauvaise

    intelligence, Abraham dut se sparer d'Agar et de son fils Ismal. Ils partirent dans le dsert,

  • et l Ismal devint " un sauvage : il attaquait les autres, et les autres l'attaquaient ". C'est lui

    qui engendra les Arabes, les nomades du dsert. Isaac demeura l'unique hritier et successeur

    d'Abraham. Il pousa une de ses proches parentes d'Aram, Rbecca, et, aprs la mort de ses

    pre et mre, continua de vivre dans le midi du pays de Canaan, soccupant d'agriculture et d'levage.

    Isaac avait deux fils : Jacob et sa. Jacob tait un tre doux qui demeurait paisiblement au

    foyer paternel. Au contraire, sa, l'instar de son oncle Ismal, tait rude et sauvage, aimant

    a courir les bois et les plaines la poursuite de btes et d'oiseaux. Rbecca prfrait le doux

    Jacob au tumultueux sa. Le patriarche Isaac, vieux et aveugle, approchait de la mort, et

    Rbecca voulut que Jacob et non sa devnt aprs lui le chef de la famille. Il fallait, pour

    cela, que le pre donnt sa bndiction Jacob. Un jour, l'aveugle Isaac appela sa et le pria

    de lui apporter, pour s'en rgaler, une bte tue la chasse. En revanche, il le bnirait. Avec

    joie, sa partit pour la chasse. Mais Rbecca eut vent de ce projet et persuada Jacob

    d'apporter son pre, avant le retour dsa, un quartier de chvre rti, qu'elle prpara avec soin, afin d'obtenir la bndiction du patriarche. Lorsque Jacob s'approcha de son pre,

    l'aveugle Isaac crut que c'tait sa, et bnit son fils, afin qu'il devnt le chef de la famille.

    Lorsqu'ensuite arriva sa avec son prsent, il tait trop tard. Cependant, Isaac le bnit lui

    aussi, pour qu'il devnt fort et riche, bien que soumis son frre Jacob. Pris de fureur sa

    voulut tuer son frre qui lui avait ravi la bndiction paternelle. Rbecca envoya son fils bien-

    aim Jacob Aram, auprs de son frre Laban, chez qui il devait demeurer jusqu' ce que la

    colre d'sa se ft apaise.

    Voici ce que la Bible rapporte au sujet de Jacob, le dernier des trois patriarches du peuple juif

    :

    Jacob arriva Aram et s'installa dans la maison de son oncle, Laban lAramen, qui possdait des champs et de grands troupeaux de moutons prs de la ville de Haran. Aux abords de la

    ville, Jacob rencontra la plus jeune des filles de Laban, la belle Rachel et sprit d'elle. Un jour, il dit Laban : Je suis prt te servir dans les champs durant sept ans, si tu me donnes

    Rachel pour pouse. Avec joie Jacob servit pour sa bien-aime, faisant patre les troupeaux de

    son oncle le jour et les gardant la nuit, de sorte que les sept annes passrent pour lui comme

    quelques jours. Mais Laban trompa son neveu. Au lieu de Rachel, il lui donna pour pouse sa

    fille ane La, en lui disant : " Chez nous, il n'est pas d'usage de marier la sur cadette avant l'ane. " Jacob dut servir encore sept ans, pour conqurir Rachel. Il eut ainsi deux pouses.

    La lui donna six fils et une fille (Ruben, Simon, Lvi, Juda, Issachar, Zabulon, Dina), et

    Rachel deux fils seulement : Joseph et Benjamin. En outre, les servantes de Jacob lui

    donnrent quatre enfants (Dan, Nephtali, Gad, Aser). Plus tard, ces douze fils fondrent douze

    familles qui, s'accroissant, constiturent des tribus ou groupes de familles, et formrent ainsi

    le peuple dIsral. Ce nom vient de ce que Jacob s'appelait aussi Isral, et ses enfants, ainsi que ses petits-enfants s'appelrent " Fils d'Isral ". Plus tard on nomma le peuple juif Isral au

    lieu du nom ancien d'Hbreux.

    Quand Jacob, accompagn de ses femmes et de ses enfants, retourna d'Aram en Canaan, il

    rencontra en route sa. Les frres se rconcilirent. Jacob s'installa dans le centre de Canaan,

    prs des villes de Sichem et Beth-El, tandis qu'sa et sa famille allrent vers le sud, du ct

    du dsert arabe o, par la suite, se forma le peuple d'dom.

    Mais il ne fut pas donn a Jacob de demeurer longtemps au pays de Canaan. Un malheur

    l'atteignit : son jeune fils, le beau Joseph, disparut subitement. Voici ce qui stait pass.

  • Jacob prfrait Joseph, l'enfant de sa femme Rachel, morte jeune, ses autres enfants, et

    Joseph se glorifiait de cette prfrence devant ses frres ans. Ceux-ci l'enviaient et le

    dtestaient. Un jour, lorsque Joseph arriva au champ o ses frres faisaient patre leurs

    troupeaux, ils le saisirent et le jetrent dans une citerne. Des Bdouins nomades qui passaient

    par l, le retirrent et lemmenrent au loin, en gypte, o ils le vendirent comme esclave. leur pre Jacob, les frres coupables racontrent que Joseph avait disparu et qu'ils ignoraient

    ce qu'il en tait advenu.

    En gypte, Joseph servit d'abord comme esclave dans la riche maison du seigneur Putiphar,

    chef des gardes du corps royaux. Mais, un jour, il eut une querelle avec la femme de Putiphar,

    et on le punit en le jetant en prison. L, Joseph tonnait tout le monde par sa sagesse et son art

    d'interprter les songes cest--dire de trouver la signification des rves qu'on fait pendant le sommeil et de prdire, grce a eux l'avenir. Le souverain dgypte en fut inform. Or, il advint justement que le Pharaon avait vu en songe sept vaches grasses qui broutaient l'herbe, a

    ct de sept vaches maigres, qui, ensuite mangrent les grasses. Aucun des devins gyptiens

    ne put dire ce que signifiait ce rve. On fit venir Joseph de sa prison, et il dclara : " Les sept

    vaches grasses signifient sept annes d'abondance qui apporteront une riche rcolte, et les sept

    vaches maigres signifient sept annes de famine qui suivront, et durant lesquelles rien ne

    crotra dans les champs. Voil ce que Dieu a annonce au Pharaon en rve, afin qu'il ordonne

    de rserver, pendant les annes d'abondance, du pain destin aux annes venir, pour sauver

    le peuple de la famine ". Ce sage conseil plut au Pharaon. Aussitt, il fit mettre Joseph en

    libert et le nomma gouverneur dgypte pour lui permettre de raliser son plan qui consistait approvisionner le peuple en bl. Joseph s'acquitta brillamment de cette tche. Il amassa dans

    les greniers royaux tant de bl que, pendant la disette, on vint en acheter en gypte des pays

    environnants.

    En ce temps-l, la famine svissait au pays de Canaan, et Jacob envoya ses enfants en gypte

    pour s'y approvisionner. Ils arrivrent donc auprs du gouverneur sans savoir que ctait leur frre disparu. Mais lui, les reconnut. Il commena par les intimider, puis il leur dit : " Je suis

    votre frre Joseph que vous avez autrefois chass ; mais n'ayez crainte, car Dieu lui-mme m'a

    envoy ici pour devenir votre nourricier. Retournez la maison et amenez ici notre vieux

    pre, afin que nous vivions tous ensemble. " Jacob fut heureux en apprenant que Joseph

    vivait. Avec toute sa famille, il immigra en gypte et s'installa au pays de Gessen, o les siens

    s'occuprent d'levage comme en Canaan.

    Les enfants dIsral en Egypte. Esclavage et libration

    Les enfants et petits-enfants de Jacob, surnomms les enfants dIsral, vcurent de nombreuses annes en gypte. Depuis longtemps, Jacob tait mort, Joseph galement, mais

    les familles des douze frres s'taient multiplies, formant des tribus, au point que le pays de

    Gessen tait rempli d'enfants d'Isral. Alors les gyptiens prirent peur : le nouveau souverain

    dgypte craignait que ces nomades trangers ne vinssent conqurir et a dominer tout son pays. Il dcida donc de les rduire en esclavage. Pour btir de nouvelles villes, il fit travailler

    des esclaves trangers et, avec eux, les habitants juifs du pays de Gessen. Deux villes furent

    ainsi bties : Pithom et Ramss, cette dernire ainsi nomme en souvenir du grand Pharaon

    Ramss II. Des surveillants poussaient les esclaves au travail; il fallait ptrir l'argile, mouler

    des briques et construire de prodigieux difices. Mais plus on perscutait les enfants dIsral, et plus ils se multipliaient.

  • Le cruel Pharaon imagina alors de faire noyer tous leurs nouveau-ns mles dans le Nil.

    Seules les filles taient laisses en vie. Grande fut la douleur des mres juives a qui on

    arrachait leurs enfants. Souvent de jeunes mres sefforaient de cacher leurs garons nouveau-ns. L'une d'elles, pour sauver le sien, le plaa dans une corbeille qu'elle dissimula

    parmi les roseaux touffus au bord du fleuve. Ce mme jour, la fille du Pharaon, suivie de ses

    esclaves, vint se baigner dans le Nil, et elle aperut la corbeille. Elle l'ouvrit et y trouva un

    petit garon qui pleurait. La fille du Pharaon devina que c'tait un enfant juif, mais elle voulut

    le sauver de la mort. Elle fit donc appeler une femme juive et lui confia l'enfant pour l'lever.

    Il se trouva que ce fut la mre de l'enfant. On lui donna le nom de Mose, et il grandit sous la

    protection de la famille royale.

    Quand Mose atteignit l'ge de raison, il commena a observer de plus prs la vie de ses

    frres, et vit combien ils souffraient de leur dur labeur et de leur esclavage. Un jour, dans les

    champs, il aperut un gyptien maltraitant un Juif. Indign, le jeune Mose porta a l'agresseur

    un coup si violent qu'il en mourut sur place. Le Pharaon ayant t inform du fait voulut punir

    Mose. Mais celui-ci s'enfuit dans le dsert ou il fut accueilli par une famille de bergers. La

    Torah rapporte qu'un jour il partit avec ses troupeaux trs loin, jusqu'au Mont Sina. Il y

    aperut un buisson qui brlait sans se consumer. Une voix en sortit : " Mose, Mose, ne

    t'approche pas ! Enlve tes chaussures, car tu foules un sol sacr. Je suis le Dieu d'Abraham,

    d'Isaac et de Jacob. J'ai vu comment on perscute mon peuple en gypte, j'ai entendu ses cris

    et je suis venu le dlivrer de son esclavage et le conduire dans un pays o coulent le lait et le

    miel. Je t'enverrai auprs du Pharaon, et tu lui proposeras de laisser sortir mon peuple

    dgypte. Alors vous me servirez sur cette montagne. " Tout tremblant Mose demanda : " Comment devrai-je te nommer, quand je retournerai auprs de mes frres? " De nouveau, la

    voix retentit : " On m'appelle celui qui a t et qui sera ternellement. Dis tes frres que

    lternel, le Dieu des Hbreux, t'a envoy et t'a ordonn d e les conduire dans le dsert. Si le Pharaon s'y oppose, je lui enverrai de grands maux. "

    Mose rentra en gypte, auprs de ses frres asservis, et leur raconta sa vision. Les enfants

    d'Isral se rjouirent beaucoup. Mais, lorsque Mose arriva devant le Pharaon et lui demanda

    de laisser sortir les enfants dIsral de son pays, car ils voulaient servir leur Dieu dans le dsert, le roi s'cria : " Je ne connais pas votre Dieu et ne laisserait pas sortir votre peuple. Va-

    t-en et ne trouble pas mes esclaves dans leur travail ! " Puis il ordonna daccabler les maons juifs de travaux plus durs encore. Alors lgypte connut des flaux terribles : leau du Nil devint rouge comme du sang, on ne pouvait plus boire ; des grenouilles infectrent le pays, la

    vermine dvora le corps des hommes, des sauterelles dvastrent les rcoltes ; l'obscurit fut

    telle que durant trois jours, les hommes ne se virent pas; enfin, dans les familles gyptiennes,

    tous les fils ans moururent.- Aprs chacune de ces plaies, le Pharaon promettait de librer

    les enfants d'Isral, si Mose obtenait de Dieu que le mal cesst. Mais ds que la situation

    s'amliorait, il oubliait sa promesse. Cependant, lorsque les ans de toutes les familles furent

    morts, le Pharaon terrifi dit Mose : " Rassemble tous les Juifs et emmne-les hors

    dgypte, le plus tt possible. "

    Aussitt les enfants dIsral se prparrent au dpart. Pour aller plus vite, ils firent cuire au lieu de pain, des mazzoth (galettes sans levain). Sous la conduite de Mose, ils sortirent du

    pays et se dirigrent vers la Mer Rouge. Mais tandis qu'ils atteignaient le bord de la mer, le

    Pharaon qui avait une fois encore chang d'avis, les rattrapa avec ses cavaliers et voulut les

    arrter. Mose ordonna alors au peuple de continuer sa marche travers la mer qui, ce

    moment, ntait pas profonde. Un vent violent fendit les flots devant les enfants d'Isral, mais lorsque les cavaliers gyptiens, leur tour, s'engagrent dans l'eau, ils roulrent dans les

  • profondeurs et se noyrent, avec leurs chevaux. Sauvs, les enfants d'Isral ressentirent avec

    joie qu'ils n'taient plus des esclaves, mais des hommes libres.

    Mose et la traverse du dsert

    Longtemps les enfants d'Isral, affranchis de la servitude, errrent dans le dsert, o ils

    manqurent souvent d'eau et de pain. En premier lieu, Mose les conduisit ce mme Mont

    Sina o lui avait t annonce autrefois la libration de son peuple s'il demeurait fidle au

    Dieu unique. Il voulait que le peuple lui-mme prt connaissance, prs de la montagne sacre,

    du message qui lui expliquerait comment avoir foi en Dieu et comment vivre parmi les

    nations. Un jour le Mont Sina se couvrit entirement de nuages pais ; il y eut des coups de

    tonnerre et des clairs, le sommet de la montagne sembla s'embraser, et une voix se fit

    entendre, qui dit :

    1. Je suis lternel, ton Dieu, qui t'ai fait sortir du pays dgypte,

    2. Tu n'auras point d'autre Dieu que moi. Tu ne te feras point d'idole ni

    d'image quelconque te ce qui est en haut dans le ciel, ou en bas sur la terre,

    ou dans les eaux au-dessous de la terre, et tu ne te prosterneras point devant

    elles.

    3. Tu n'invoqueras point le nom de lternel ton Dieu l'appui du mensonge.

    4. Souviens-toi du jour du Sabbat pour le sanctifier. Durant six jours, tu

    travailleras et t'occuperas de toutes tes affaires. Mais le septime jour est le

    jour du repos de lternel, ton Dieu : tu ne feras aucun ouvrage, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton btail, ni l'tranger

    qui est dans tes portes.

    5. Honore ton pre et ta mre, afin que tes jours se prolongent.

    6. Tu ne tueras point.

    7. Tu ne commettras point d'adultre.

    8. Tu ne droberas point.

    9. Tu ne porteras point te faux tmoignage contre ton prochain.

    10. Tu ne convoiteras point la maison de ton prochain ; tu ne convoiteras point

    la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son buf, ni son ne, ni aucune chose qui appartienne ton prochain.

    Tels taient les " Dix Commandements ", premires lois de la foi et de la morale pures, sans

    lesquelles la vie ne serait pas possible dans la socit humaine. Ne pas tuer, ne pas voler, ne

    pas mentir, ne rien prendre de ce qui appartient autrui, respecter son pre et sa mre, se

    reposer de son travail un jour par semaine, ne pas se prosterner devant des idoles de pierre et

    de bois, mais croire ,en un seul Dieu, qui dirige le peuple juif, tout cela, les enfants d'Isral l'apprirent par leur chef Mose (surnomm " Mose, Notre Matre ") ds qu'ils s'affranchirent

    de l'esclavage, pour entrer dans une vie libre. Mose grava les dix commandements sur des

    tables de pierre, afin que chacun s'en souvnt et les appliqut.

    Mais tous ne purent slever jusqu'aux ides du grand matre. Beaucoup refusrent de croire en un Dieu invisible. En gypte, ils avaient vu des hommes se prosterner devant des idoles

    revtant des formes animalesbuf ou veauet ils fabriqurent eux aussi une image d'or ayant l'aspect d'un veau (le veau d'or) et dansrent autour de lui en clamant : " Voil notre Dieu qui

    nous a tirs dgypte ! " Quand Mose vit cette scne, sa colre et son chagrin furent tels quil

  • brisa les tables o se trouvait grav le commandement de ne pas se prosterner devant une

    image. Ensuite, cependant, il se calma : il comprit qu'un peuple ne pouvait s'adapter aussi vite

    un ordre nouveau. Il grava de nouvelles tables, qu'il plaa dans une belle arche abrite sous

    une tente {le tabernacle). C'tait le petit temple des Enfants d'Isral, qu'on transportait au

    cours des dplacements dans le dsert.

    Pendant quarante ans, les Enfants dIsral errrent dans le grand dsert. Mose avait promis de les mener dans le pays de Canaan (ou Palestine), pays qu'avaient habit autrefois les

    patriarches Abraham, Isaac et Jacob. Mais, sur les frontires, au sud de Canaan, s'taient

    tablis les peuples d'Ammon, de Moab et d'dom, qui refusaient de laisser passer les enfants

    d'Isral. Ceux-ci durent donc lentement s'approcher de la frontire orientale o de vastes

    plaines s'tendaient jusqu'au fleuve du Jourdain (la Transjordanie). L, les enfants d'Isral se

    divisrent en douze groupes ou tribus. Chaque tribu tait une grande famille qui portait le nom

    d'un des douze fils de Jacob : la tribu de Ruben, celle de Juda, celle de Lvi, et ainsi de suite.

    La tribu de Joseph se composait de deux parties, portant les noms des fils de Joseph : phram

    et Manass.

    Toutes les tribus taient armes, chacune groupe sous sa propre bannire : elles taient

    forces de se dfendre contre les barbares du dsert et de se prparer la guerre contre les

    peuplades qui s'opposaient l'entre des enfants d'Isral dans le pays de Canaan. La premire

    guerre clata l'Est du Jourdain : les Isralites chassrent le peuple belliqueux des Amorens

    et semparrent d'un territoire situ prs d'Ammon et de Moab. Plusieurs tribus se fixrent l, car le pays tait favorable l'levage du menu btail. Les autres durent attendre le moment de

    pouvoir traverser le Jourdain et de pntrer l'intrieur du pays de Canaan, o avaient vcu

    jadis les patriarches.

    Il ne fut pourtant pas donn a Mose, le grand conducteur du peuple, d'installer tous les Juifs

    sur la Terre promise. Il tait dj vieux et sentait la mort approcher. Ayant runi les anciens de

    son peuple, il leur enseigna vivre dans le nouveau pays selon les lois de libert et de justice.

    Comme chef, il dsigna son jeune ami Josu, fils de Nun. Puis, Mose monta au sommet du

    mont Nebo, et contempla, de cette hauteur, tout le pays de Canaan stendant des deux cts du Jourdain. Dans une profonde tristesse, il se tint l, jusqu ce que ses forces se fussent puises et qu'il mourut. Le peuple d'Isral pleura, trente jours durant, la mort du grand matre

    et librateur qui l'avait distingu d'entre les peuples et lui avait indiqu une nouvelle voie.

    Comment le pays de Canaan devint la terre dIsral : Les juges

    En ce temps-l, le pays de Canaan (ou Palestine) sis entre la Mditerrane et le Jourdain, tait

    habit par de petites peuplades, dont chacune avait son prince ou roi. Quand les Enfants

    d'Isral arrivrent devant le Jourdain sous la conduite de Josu, les Cananens n'taient pas

    prpars la guerre. Non loin du Jourdain, se dressait la ville fortifie de Jricho. Les Enfants

    d'Isral lassigrent; durant sept jours, ils multiplirent leurs assauts contre la forteresse. Enfin, les murs croulrent et les assaillants pntrrent dans la ville. Le bruit se rpandit dans

    tout le pays de Canaan qu'une grande arme avanait, qui voulait conqurir le pays et en

    chasser les anciens habitants. Les peuples les plus faibles prirent peur et quelques-uns d'entre

    eux laissrent entrer sans coup frir les Enfants d'Isral dans leurs villes et villages. Ceux qui

    rsistrent, furent battus : les Enfants d'Isral les mirent en droute, en chassrent une partie et

    soumirent ceux qui restrent dans le pays.

  • Aprs une longue priode de guerres, les tribus juives s'installrent dans le pays de Canaan,

    qui devint ainsi le Pays d'Isral. Elles partagrent entre elles le territoire : chaque tribu obtint

    sa part, sauf celles qui taient restes de l'autre ct du Jourdain (Ruben et Gad). Au centre du

    pays, se fixrent les deux grandes tribus dphram et de Manass ; au sud, Juda et Benjamin; au nord, Nephtali, Aser, Issachar et Zabulon; une seule tribu celle de Lvi ne reut pas de territoire en partage et se trouva dissmine parmi les autres. Aprs la mort de Josu, aucun

    chef ne se rvla apte diriger le peuple tout entier, mais chaque tribu eut son propre chef ou

    Juge. Cet parpillement du peuple juif profita ses voisins qui attaqurent tant6t une tribu,

    tantt une autre, afin de reprendre un bout de territoire. Dans les moments de dtresse,

    plusieurs tribus s'alliaient, et formaient une seule arme qui, sous le commandement d'un Juge

    hroque, d'un guerrier puissant, combattait les trangers et se librait de leur domination.

    Un tel vnement se produisit, entre autres, au Nord de la Palestine, ou la tribu de Nephtali et

    d'autres encore vivaient parmi des peuplades trangres. Un jour, un guerrier du nom de

    Sisara, runit une grande arme et se mit pourchasser et opprimer la tribu de Nephtali et

    les tribus juives voisines. Les Juifs afflurent dans les villes de la puissante tribu centrale

    d'phram. A cette poque, vivait sur le mont phram une femme d'une haute sagesse,

    appele Dborah. Ctait une " prophtesse ", pntre d'enthousiasme, qui parlait au nom de Dieu. Elle appela les Enfants d'phram au secours de leurs frres du Nord, et plaa le chef

    Barak (nom qui signifie : clair), de la tribu de Nephtali, la tte de l'arme juive qui allait

    guerroyer contre Sisara. Dborah en personne accompagna l'arme, et les hros d'Isral

    vainquirent les troupes de Sisara, qui s'enfuit et se rfugia sous la tente d'une femme. Celle-ci,

    pendant son sommeil, le tua d'un coup de bton. Dborah clbra cette libration par un beau

    chant qui commence ainsi : " Je chante le grand Dieu dIsral. Il n'y avait point de chef jusqu' ce que moi, Dborah, je me sois leve et sois venue comme une mre en Isral ! "

    Cependant, peu aprs, une nouvelle guerre clata contre les nomades qui venaient du dsert,

    monts sur leurs chameaux, et s'abattaient comme des sauterelles sur les champs juifs,

    emportant la rcolte et les bestiaux. Durant cette guerre, le chef des Juifs fut Gdon, de la

    tribu de Manass. A son appel, se runirent des milliers de guerriers, mais il leur annona : "

    Que celui qui a peur d'aller la guerre, s'en retourne chez lui ! Les faibles s'en retournrent, et

    autour du chef demeurrent trois cents hros, avec lesquels il remporta une grande victoire.

    Les brigands nomades furent chasss du pays. Alors, les anciens du peuple vinrent auprs de

    Gdon, et le prirent de devenir roi en Isral, mais il rpondit : " Ni moi, ni mes enfants ne

    domineront sur vous ; cest Dieu qui est votre roi. "

    Au cours d'une de ces guerres contre des peuplades hostiles, un incident tragique survint. Le

    chef des tribus de bergers juifs habitant la Transjordanie, Jepht de Galaad, guerroyait contre

    Ammon, qui voulait reprendre le pays aux Juifs. Dans le feu de la bataille, Jepht laissa

    chapper ces mots : " Si Dieu nous vient en aide et si nous triomphons de l'ennemi, j'offrirai

    en holocauste au Seigneur, mon retour, le premier de ma maison qui sortira ma rencontre.

    " Or, la premire personne qui vint au-devant de Jepht, fut sa jeune et jolie fille. Lorsque le

    pre lui fit connatre son vu, la jeune fille rpondit : " Ce que tu as promis, tu dois laccomplir. Laisse-moi seulement aller pour deux mois dans les montagnes ; l, en compagnie de mes amies, je vais pleurer ma jeunesse. " Cest ainsi que fut fauche une jeune vie en plein panouissement, cause dune croyance barbare qui subsistait encore chez les peuples du voisinage et aussi chez une partie du peuple juif, et selon laquelle Dieu se

    complaisait aux sacrifices humains. Plus tard, ces cruelles coutumes disparurent entirement

    chez les Juifs.

  • Bientt, un nouvel ennemi se dclara dans les rgions du sud, prs de la mer. L, dans les

    villes de Gaza, d'Askalon, etc., s'taient installs les Philistins, et ils opprimaient les tribus de

    Dan et de Juda. Un robuste hros de la tribu de Dan, Samson le Puissant, combattit les

    Philistins, et bien qu'il fut tout seul, il leur causa beaucoup de maux. Un jour, il captura trois

    cents renards, attacha leurs queues des torches enflammes et les lcha dans les champs des

    Philistins, dont toute la rcolte fut ainsi dtruite. Lorsque les Philistins aperurent Samson a

    Gaza, ils fermrent les portes de la ville, pour qu'il ne pt s'chapper. Mais, dans la nuit,

    Samson enleva sans bruit les portes et les serrures, les transporta sur une montagne et s'en alla

    tranquillement. Les Philistins furent frapps de sa force et ils persuadrent sa femme, une

    Philistine nomme Dalila, de leur venir en aide pour s'emparer du gant. La perfide Dalila

    interrogea son poux : " En quoi rside ton immense vigueur ? " Samson rpondit : " Depuis

    mon enfance, je n'ai pas taill mes cheveux, et si on me les coupait, je perdrais ma force. "

    Alors, pendant son sommeil, Dalila coupa ses longs cheveux et prvint ses amis philistins.

    Ceux-ci saisirent Samson, lui crevrent les veux et le mirent aux fers. Un jour, ils emmenrent

    le hros aveugle dans leur temple, afin que le peuple se rjouit aux dpens de l'ennemi

    prisonnier. Samson, exaspr, s'cria : " Mon Dieu, donnez-moi la force au moins une fois

    encore, et que je meure avec les Philistins ! " De ses mains puissantes, il s'agrippa aux

    colonnes du temple et les secoua. Tout l'difice s'croula et ensevelit sous ses dcombres des

    milliers de Philistins et, en mme temps, le hros juif.

    Saul, premier Roi dIsral

    Les Philistins tendant toujours plus leur domination, entreprirent des attaques contre les territoires d'phram, dans le centre du pays de Canaan. L, dans la ville de Silo, s'levait le Tabernacle de lternel, contenant l'arche sacre que le Enfants d'Isral avaient avec eux pendant la traverse du dsert. Le prtre (Cohen) de Silo s'appelait lie. Il tait galement Juge des tribus dans le centre de Canaan. Il s'efforait de redonner du courage au peuple pour lutter contre les oppresseurs trangers, mais parfois, il chouait. Un jour, les Philistins s'introduisirent dans la ville sainte de Silo et dtruisirent le Tabernacle et emportrent l'arche sacre. de crainte et de chagrin le vieil lie mourut. Cela s'tait pass sous les yeux d'un adolescent de la tribu de Lvi, Samuel, qui avait t lev par lie et devait prendre sa succession la mort du vieillard. Samuel tait un homme inspir, un prophte ; il voulait faire revivre l'enseignement de notre matre Mose et il prchait au peuple de vivre selon les lois par lui nonces On le considrait comme un saint, un " voyant ", capable de prvoir l'avenir. Quand, aprs la mort d'lie, Samuel devint juge, il dut mener le peuple au combat contre les Philistins. Mais il ntait pas un guerrier. Beaucoup pensaient qu'il fallait un roi puissant et un homme de guerre pour runir les tribus, crer une grande arme et librer le

    pays des ennemis. Les anciens du peuple vinrent auprs de Samuel, et lui demandrent de designer un roi qui les ment au combat.

    En ce temps, vint chez Samuel un grand et beau jeune homme qui lui dit : " Je suis Saul, agriculteur de la ville de Guilboa dans la tribu de Benjamin, et je cherche les nesses de mon pre qui se sont gares. Veux-tu me dire comment faire pour les retrouver ? " Samuel observa le vigoureux et nergique jeune homme et lui dit : " Ne te soucie pas des nesses ! Car cest toi quil est chu dtre roi en Isral ".

    Enthousiasm par ces paroles, Saul se mit la tte de l'arme juive et remporta une brillante victoire sur les Amorites qui avaient assig la ville juive de Jabs en Galaad. Dans le peuple, on commena parler de Saul, le librateur du joug tranger. Lorsque Samuel runit une assemble

  • du peuple dans la ville de Mitspa et proposa de choisir Saul pour roi, des cris dallgresse retentirent ; Guilboa, la ville de Saul, devint la capitale du royaume juif.

    Ainsi fut fond le premier royaume juif en terre dIsral. Cela se passait il y a prs de 3 000 ans (en l'an 1030 avant l're vulgaire).

    Tout le rgne de Saul se passa en guerres contre les Philistins et les peuplades du dsert (surtout contre les Amalcites) qui frquemment envahissaient l pays. Enfin le roi se sentit fatigu des soucis guerriers : il succombait une profonde mlancolie. On lui conseilla de faire venir un homme sachant jouer d'un instrument cordes, afin que, par son art, il chasst cette tristesse. On lui amena donc un adolescent de la tribu de Juda, aussi beau qu'intelligent, du nom de David. C'tait un berger de Beth-Lechem, musicien rput. David gaya, des sons de sa harpe, le roi mlancolique et se fit aimer dans sa maison. Bientt, on apprit qu'il tait aussi un hros. Un jour, au cours d'une guerre, Goliath, le chef des Philistins, un grand et puissant combattant, scria : " Que l'un d'entre vous s'avance dans le champ et se mesure avec moi ; s'il m'abat, nous serons vos esclaves ; si, au contraire, c'est moi qui triomphe, vous serez nos esclaves. " Alors, Saul dclara : " Celui qui vaincra le hros philistin, obtiendra la main de ma fille ". David savana et dit : " J'y vais, Dieu m'aidera ".

    Il se plaa en face de Goliath, tenant en mains une fronde et quelques cailloux. Goliath, offens, s'exclama : " Suis-je un chien pour que tu m'attaques avec une fronde ? " Mais David lana un caillou qui atteignit le gant au milieu du front. L'adversaire tomba et ne put se relever. David s'approcha de lui et se saisissant de son pe, lui trancha la tte. Les ennemis s'enfuirent et David ramena ses combattants dans leurs foyers. A leur rencontre, s'avanaient les femmes juives, chantant et dansant. Elles acclamaient le triomphateur : " Saul a vaincu des milliers d'ennemis, mais David des dizaines de milliers ! "

    Saul se rjouit de la victoire de David, mais, en mme temps, il conut une vive jalousie pour le jeune hros qu'on plaait au-dessus du roi. David pousa sa fille, Mical, et se lia d'amiti avec son fils Jonathan. Mais, avec Saul, il ne put dsormais vivre en paix, car le roi irrit le souponnait de vouloir lui ravir son pouvoir, pour devenir souverain sa place. Un jour, sous l'empire de la colre, Saul lana son pe contre David et faillit le tuer. David dut s'enfuir. Longtemps, il erra, accompagn d'une troupe de gens arms, dans le dsert et dans les villes des Philistins. Saul le pourchassait, mais ne parvenait pas le capturer.

    A cette poque, une nouvelle guerre clata entre Juifs et Philistins. Saul, accompagn de son fils Jonathan engagea le combat, mais les Philistins infligrent une dfaite l'arme juive, et le roi ainsi que son fils y trouvrent la mort. Lorsqu'on annona cette nouvelle David, il pleura et entonna un chant funbre :

    " Comme ils sont tombes, les hros! Bien-aims, Saul et Jonathan, ils ne se sont spars ni dans la vie ni dans la mort ! Oh ! Comme ils sont tombs, les hros ! "

    Le Roi David Jrusalem

    Ceux qui, autrefois, avaient t tmoins des exploits de David la guerre, comprenaient que c'tait lui qui devait maintenant devenir le souverain du peuple d'Isral. Mais seuls les hommes de sa tribu le reconnurent pour roi, et c'est au milieu d'eux, dans la ville d'Hbron, qu'il fixa sa rsidence.

  • Quant aux autres tribus, elles pensaient que, d'aprs la loi, le pouvoir devait revenir Ischbaal, fils de Saul. Une guerre civile s'ensuivit. Pendant plusieurs annes, elle mit aux prises les partisans de David et ceux d'Ischbaal, jusqu'au moment ou ce dernier fut assassin. Alors tout le peuple se tourna vers David. Les plus anciens reprsentants des tribus se rendirent Hbron et le couronnrent roi.

    Le jeune roi choisit une nouvelle capitale dans les montagnes de Juda : Jrusalem. Jusqu'alors, cette ville avait t habite par une peuplade trangre, les Jbusens, qui l'avaient fortifie, afin de ne pas laisser pntrer dans son enceinte leurs voisins de la tribu de Juda. David s'empara de la forteresse de Jrusalem situe sur le mont Sion, et la ville prit alors le nom de Cit de David.

    La nouvelle capitale du royaume juif devait devenir, pour des millnaires, la ville la plus illustre du monde, " la ville sainte ". David y transporta l'arche qui, depuis le temps du prtre lie et de Samuel le prophte, se trouvait relgue dans une bourgade perdue. Maintenant, elle fut place sous un tabernacle Jrusalem, en attendant que fut construit le grand temple de lternel.

    David cra une puissante arme et soutint des guerres importantes contre tous les ennemis de la Palestine. Il chassa dfinitivement les Philistins des villes juives et les repoussa vers la frontire mridionale. Il vainquit galement les Moabites, les Ammonites et le peuple d'dom, sur la frontire orientale ; son arme pntra mme Damas, la capitale d'Aram (Syrie). Les peuples limitrophes durent reconnatre qu'un grand royaume juif tait en formation, et dsormais ils nosaient plus l'attaquer. Ainsi le calme tait rtabli lextrieur. Mais l'intrieur du pays, des querelles clatrent au sein mme de la famille royale.

    Comme il tait admis en ce temps-l, David avait plusieurs pouses, outre sa premire femme Mical, la fille de Saul. Elles lui avaient donne de nombreux enfants. Alors qu'il tait dj roi a Jrusalem, il s'prit d'une femme trs belle : Bethsabe, l'pouse d'Urie un de ses officiers et il la ravit son mari. Peu aprs, le prophte Nathan lui conta l'histoire suivante : " Dans une ville vivaient deux hommes. L'un tait riche ; il possdait beaucoup de brebis et de bufs ; l'autre tait pauvre et n'avait pour tout bien qu'une petite brebis. Un jour, le riche ayant reu une visite, il droba son pauvre voisin son unique brebis et la servit son hte ".

    Quand Nathan eut conte cette histoire, David s'cria avec colre : " Cet homme mrite la mort ! Et il faut qu'il paye au pauvre quatre fois la valeur de la brebis ! " Alors, le prophte leva la voix : " Tu es toi-mme cet homme ! Dieu t'a donn un royaume, des richesses et beaucoup d'pouses, et tu as pris Urie son unique femme ! " Le roi en ressentit un grand remords et avoua . " Oui, j'ai pch ! " Le prophte Nathan lui rpondit : " Tu seras chti. Ta maison ignorera la paix, et le malheur te viendra de ta propre famille ".

    Depuis ce moment, les dissensions et les querelles ne cessrent plus dans la maison du roi David. Les enfants de ses diverses femmes se faisaient constamment la guerre. D'abord, se querellrent ses deux fils ans, Amnon et Absalon. Amnon avant, un jour, outrag la sur d'Absalon (ne de la mme mre que lui) la belle Tamar, Absalon en conut un vif ressentiment. Il invita Amnon un festin et le fit tuer par ses serviteurs. Puis, par crainte de son pre, il s'enfuit. Absalon erra dans le pays. Autour de lui se grouprent les mcontents qui se plaignaient du roi, parce qu'il refusait d'entendre leurs revendications et leurs dolances, tandis qu'Absalon leur promettait : " Quand Je serai roi, vous serez tous contents ". C'est ainsi qu'une fraction du peuple prit parti pour le prince rvolt contre son pre qui il voulait ravir la couronne. A Hbron, on s'apprtait proclamer Absalon roi, et marcher avec lui sur Jrusalem.

  • David tait accabl par ce malheur terrible : voir son propre fils se dresser contre lui. Accompagne de sa famille et d'une partie de l'arme, il quitta Jrusalem. Les habitants, voyant le vieux roi s'loigner de sa capitale, versaient des larmes. Les prtres du temple voulurent se joindre au roi et porter devant lui l'arche sacre, mais David les pria de rester Jrusalem. " Si Dieu veut me ramener ici, dit-il, je reverrai le Lieu Saint ; sinon, qu'Il fasse de moi ce qu'Il voudra ".

    Le peuple tait divis en deux partis : les uns pour David, les autres pour Absalon. La guerre fratricide svissait. Le commandant en chef de l'arme de David, le puissant Joab, poursuivit l'arme d'Absalon et la rejoignit dans la fort d'phram. Absalon, enfourchant un ne, s'enfuit, mais ses longs cheveux s'accrochrent aux branches et il y demeura suspendu. Joab survint et le tua de trois flches. Bientt aprs, la rvolte fut rprime. Le roi et pu se rjouir de sa victoire, mais quand il apprit comment avait pri Absalon, il en fut profondment afflig. " Mon fils, mon fils Absalon ! s'cria-t-il. J'eusse prfr mourir avant toi ! "

    Cependant, le pays ne se calmait pas. Certaines tribus se rvoltrent contre la domination de David, car il avait plac la tribu de Juda dont il tait natif, au-dessus de toutes les autres. L'arme royale, sous la conduite de Joab, se portait d'une ville l'autre, capturant ou chassant les rebelles. Il ne fut mme pas donn au grand roi juif de mourir en paix. Sa famille, sous ses yeux, se disputait sa succession. La reine Bethsabe revendiquait la couronne pour son fils Salomon mais un des fils ans, Adonyia, fonda un parti qui le proclama roi. David, sur son lit de mort, donna l'ordre de couronner immdiatement son fils bien-aim, Salomon. Bientt David n'tant plus le peuple, aprs une courte lutte de partis, accepta la domination de Salomon.

    Le Roi Salomon et la construction du Temple

    Salomon hritait de son pre un grand royaume a l'abri des attaques extrieures. Le peuple n'tait plus oblige de guerroyer contre ses voisins, et pouvait s'adonner aux travaux pacifiques. Sous le rgne de Salomon, les Juifs vcurent tranquilles, " chacun dans son verger et sous son figuier ". Ils se livraient l'agriculture, l'artisanat et au commerce. Salomon conclut une alliance avec ses voisins les Phniciens, le peuple le plus commerant de lantiquit, qui possdait deux ports sur la Mditerrane : Tyr et Sidon. Ils enseignrent aux Juifs le ngoce. Des marchands juifs et phniciens prirent ensemble la mer et vogurent vers de lointains pays, pour vendre leurs marchandises et en acheter d'autres. Salomon s'tait galement apparent la maison rgnante dgypte, en pousant la fille du pharaon.

    Salomon acquit la rputation de l'homme le plus sage de son poque. Des pays les plus loigns, on venait entendre ses paroles de sagesse, ses proverbes et ses belles penses. Juge, il montra un discernement admirable. Un jour, deux femmes se prsentrent devant son trne et l'une dit : " Toutes deux, nous habitons la mme maison, et chacune de nous a donn le jour un enfant. Mais l'enfant de ma voisine est mort la nuit ; pendant le sommeil, elle a pes sur lui et l'a touff ; puis profitant de mon propre sommeil, elle s'est approche sans bruit de mon lit, a enlev mon enfant et l'a remplac par le cadavre du sien. Et maintenant, elle prtend que le bb vivant est son fils. " Mais la seconde femme vocifrait : " Ce nest pas vrai ! Lenfant vivant est mon fils ! Cest le tien qui est mort ! "

    Salomon s'adressa son serviteur : " Apporte-moi une pe et nous allons couper l'enfant vivant en deux : il en sera remis une moiti chacune des plaignantes. " Alors l'une des femmes s'cria : " Non, Seigneur, ne fais pas prir l'enfant, donne-le plutt ma voisine, pourvu qu'il reste en vie ! " L'autre, au contraire, scriait : " Partagez-le pour qu'il ne soit ni l'une ni l'autre ! " Alors, Salomon dclara : " Je sais maintenant qui est la vraie mre de l'enfant. C'est celle qui a eu piti de lui. Donnez-le lui. " Et le peuple admira la sagesse du roi.

  • Comme tous les grands monarques de cette poque, Salomon aimait les beaux difices. Sous son rgne, Jrusalem devint une magnifique cit orne de palais royaux et de grandes maisons. Tout d'abord le roi entreprit ddifier une " Maison de Dieu ", un Temple splendide. Des milliers d'esclaves et d'ouvriers, Phniciens et Juifs, taillrent la pierre dans les montagnes, et couprent des cdres dans les forets du Liban. Tous ces matriaux taient transports Jrusalem. Le roi phnicien, Hiram de Tyr, li damiti Salomon, lui envoya ses meilleurs constructeurs qui, aides de la main-duvre juive, levrent le Temple. Les murs en taient en pierre, revtus lintrieur de prcieux bois de cdre et orns de sculptures, de peintures et d'or. Dans le Temple se dressait un grand autel de cuivre destin aux sacrifices de brebis et de bufs. Dans une salle la lumire tamise, se trouvait l'arche sacre. De tous les coins du pays, des foules affluaient au Temple, surtout pour les grandes ftes de Pessach et de Souccoth. Sa beaut tait si grande que des trangers venaient de loin Jrusalem pour l'admirer et pour contempler la splendeur des palais difis pour le roi, ses femmes et ses officiers.

    Mais la magnificence de la capitale et de la maison royale pesait bien lourd sur le peuple. Riches et pauvres payaient des impts crasants. Des milliers d'hommes taient accabls de rudes corves. Les agriculteurs et les artisans s'appauvrissaient et le nombre des mcontents ne cessait de crotre. Profitant de cet tat d'esprit, un des grands fonctionnaires du royaume, Jroboam, de la tribu d'phram, s'leva publiquement contre Salomon. Il tait second par le prophte Achiya de Silo qui n'aimait pas le roi, cause de sa vie dissipe. Un jour, Achiya rencontra Jroboam dans les champs ; il lui ta des paules son manteau, le dcoupa en douze morceaux, et lui en remit dix en dclarant : " Dix tribus se dtacheront du royaume de Salomon et te choisiront pour roi . " Jroboam fomentait une rvolte dans la tribu dphram, lorsque Salomon qui en avait eu connaissance donna lordre de le tuer. Alors Jroboam senfuit en gypte.

    A la mort de Salomon, alors que son fils Roboam s'apprtait lui succder, la rvolte clata. Jroboam revint dgypte, et la tribu d phram se groupa autour de lui. Dans la vieille cit de Sichem, se runirent les anciens du peuple, afin de se concerter au sujet du nouveau roi. Quand Roboam arriva Sichem, ils lui dirent : " Ton pre a fait peser sur nous un joug trs lourd, allge-le, et nous te servirons ". Mais Roboam leur rpondit brutalement : " Je rendrai ce joug plus lourd encore ". Alors les Fils d'phram s'crirent : " Qu'avons-nous faire avec la maison de David ? Juifs, rentrez dans vos foyers ! " phram et neuf autres tribus dsignrent comme roi Jroboam. Seules, les tribus de Juda et de Benjamin reconnurent Roboam.

    Ainsi, une scission divisa le royaume juif en deux parties : d'un ct, Juda, appel encore le Royaume de Juda, de l'autre, phram, appel le Royaume dIsral (environ 930 avant l're vulgaire).

    La scission. Le royaume dIsral

    Le royaume des dix tribus ou Royaume dIsral occupait tout le nord et le centre de la Palestine. Son premier roi fut Jroboam, qui fit de Sichem (dans le pays d'phram) sa capitale. Jroboam craignait que les hommes de son pays n'allassent prier dans le grand Temple de Jrusalem et que l, ils ne se soumissent Roboam. Aussi dcida-t-il ddifier deux temples dans son propre royaume : l'un au centre du pays, dans la ville de Beth-El (" Maison de Dieu "), l'autre dans la ville septentrionale de Dan. Il modifia le culte : dans chaque temple, il plaa un veau d'or, en dclarant que c'tait l'image de Dieu qu'il fallait adorer, en se prosternant devant elle. En cela, il faisait une concession au peuple qui ne comprenait pas encore comment on pouvait servir un Dieu invisible qui se trouvait au ciel. Il en rsulta que la population du royaume d'Isral se mla aux peuples voisins, qui adoraient des idoles.

  • Les Isralites se lirent d'amiti tout particulirement avec les Phniciens. Le roi d'Isral, Achab, tablit sa capitale Samarie, non loin de Sichem. Samarie, considrablement agrandie, ressemblait Jrusalem. Dans son enceinte habitaient galement des trangers : Phniciens et Aramens. La femme d'Achab, Jzabel, tait la fille du roi phnicien. Elle introduisit Samarie les coutumes de sa patrie. La reine s'entourait de prtres de l'idole Baal, et les classes suprieures l'imitaient, servant en mme temps l'ternel dans les temples, et adorant le Baal phnicien et la desse paenne Astart.

    Mais il y avait dans le peuple des hommes qui comprenaient combien il tait odieux de servir deux divinits et de se confondre avec les idoltres, en se dtachant des lois juives. De nouveau, un homme survint, pntr d'enthousiasme, le prophte lie, de la ville transjordanienne de Thishbi. Ouvertement, il dclarait Samarie que le roi et la reine entranaient le peuple dans l'erreur. La reine Jzabel s'en offensa et ordonna de punir lie et ses amis qui s'intitulaient les " prophtes du Dieu juif ". Beaucoup d'entre eux furent saisis et fustigs, d'autres s'enfuirent. lie se cacha prs du Jourdain ou dans le dsert du Sina, o Mose, autrefois, avait donn la Loi au peuple. Mais il ne pouvait se rsigner au silence et, de temps en temps, il venait Samarie crier la vrit la face d'Achab.

    Un jour, lie apprit qu'Achab et Jzabel avaient commis une action vile. Prs du palais royal se trouvait une vigne qui appartenait un honnte cultivateur, Naboth. Achab voulait acqurir cette vigne pour en faire un Jardin autour du palais, mais Naboth refusait de vendre son patrimoine. La cruelle Jzabel ordonna alors d'inculper Naboth d'outrage envers Dieu et le roi, et soudoya de faux tmoins. En consquence, le tribunal condamna le cultivateur la peine de mort, et sa belle vigne devint la proprit du roi lie vint alors auprs d'Achab et, transport de colre, s'cria : Cette prophtie devait se raliser bientt. Achab tait en guerre avec le roi d'Aram et des pays voisins, Ben-Hadar, qui voulait joindre ses possessions une partie du royaume d'Isral. Par deux fois, les Aramens envahirent le pays et assigrent Samarie, mais ils furent chasss par l'arme d'Achab. La troisime fois, cependant, les ennemis triomphrent, et Achab tomba dans la bataille. Grivement bless, il lut transport dans un char Samarie et l, les chiens lchrent son sang qui s'gouttait du char, lendroit mme o croissait autrefois la vigne de Naboth.

    Ainsi se ralisa la prdiction d'lie. Mais l'inhumaine Jzabel vivait toujours et, de concert avec son fils Joram, elle gouvernait le royaume. C'est ce moment que se fit connatre le disciple d'lie, le prophte lise. Aprs la mort d'lie (le peuple racontait qu'un tourbillon l'avait emport vivant au ciel), lise poursuivit la lutte contre la maison royale de Samarie. Il persuada l'un des chefs de larme, Jhu, de chasser, avec l'aide de ses soldats, les hritiers d'Achab et de se proclamer roi, condition toutefois qu'il abolt le culte de Baal et qu'il rtablt uniquement celui du Dieu Unique. Jhu s'acquitta sans piti de la mission ; il massacra toute la famille dAchab et les fidles de Baal. Couronn roi, Jhu continua guerroyer contre Aram. Ces guerres se poursuivirent sous le rgne de son fils et de son petit-fils, comportant des victoires, mais aussi de dures dfaites.

    Pour trs peu de temps seulement, le royaume d'Isral connut la paix. Jroboam II, un arrire-petit-fils de Jhu, qui rgna plus de cinquante ans, rtablit la paix dans le pays. Comme autrefois Salomon, il fit lever de beaux difices dans sa capitale Samarie ; pour son propre usage, il construisit deux palais : lun pour lt, lautre pour l'hiver. Dans ces annes paisibles, le commerce avec la Phnicie et avec d'autres pays, reprit ; beaucoup de gens s'enrichirent et menrent grande vie, se construisant de splendides demeures avec des meubles incrusts d'or et d'ivoire ; ils portaient des habits en tissus prcieux, mangeaient des mets recherches, buvaient les vins les plus coteux ; les femmes s'adonnaient tout particulirement au luxe, et se conduisaient frquemment d'une faon rprhensible. Le plus souvent, les riches amassaient leur fortune par

  • des moyens peu honorables : ils exploitaient leurs ouvriers, prtaient de l'argent gros intrts, et, quand le pauvre dbiteur ne pouvait payer temps, ils lui prenaient tout ce qu'il avait ou faisaient de lui un esclave. Dans les annes de disette, les marchands de bl donnaient crdit aux ouvriers du pain a un prix trs lev, et plus tard, ils leur enlevaient, en paiement, leurs champs et leurs vignes. Mme les prtres des temples recherchaient l'argent et les plaisirs. Les vrais guides spirituels, les Prophtes, se rvoltaient devant cette corruption et annonaient au peuple qu'une telle existence le conduirait une catastrophe.

    Le plus grand prophte de ce temps tait Amos, honnte cultivateur. Lorsqu'il vint de sa bourgade de Jude dans la grande ville de Beth-El, o s'levait le temple de Jroboam Ier, et qu'il vit la dbauche des habitants, il leur reprocha de ne pas vivre selon les lois de vrit et de charit et prdit qu'ils expieraient leurs pchs. Aux riches, il disait : " Puisque vous pitinez le pauvre, vous construirez des maisons avec la meilleure pierre, mais vous n'y habiterez point. " Aux femmes dissolues, il criait : " coutez, vous, vaches grasses qui pillez les pauvres, qui chassez les mendiants et qui dites vos poux : donne encore, nous allons boire ! Des jours viendront o l'on vous emmnera en exil sur des vaisseaux. " Amos montrait qu'on vivait plus honntement dans le royaume de Juda que dans celui dIsral, et il prdit que le peuple serait chass du pays.

    Un des prtres du temple de Beth-El informa le roi qu'un prophte de Juda parcourait le pays et menaait le peuple de toutes sortes de malheurs. Et il dclara Amos : " Retourne promptement en Jude et prophtise l-bas, mais ne te montre plus Beth-El. " Amos lui rpondit calmement : " Je ne suis ni prophte, ni fils de prophte, je suis un simple berger et un planteur de figuiers ; mais Dieu ma enlev mon troupeau et m'a dit : " Va, prophtise mon peuple dIsral ! "

    Aprs la mort de Jroboam II, commena en effet une poque terrible. Un grand et puissant royaume asiatique, lAssyrie assaillit les petits peuples, et parmi eux, le royaume dIsral, tentant de les conqurir. Les faibles monarques qui gouvernrent aprs Jroboam, durent se soumettre au grand roi assyrien Teglat-Phalazar. Un nouveau prophte, Ose, prdit que le peuple et ses matres ne rsisteraient pas au conqurant. Les rois de Samarie essayrent de s'allier aux roitelets voisins et de livrer bataille l'Assyrien. Mais ils furent vaincus. Le puissant monarque d'Assyrie commena par s'emparer de la moiti du royaume dIsral et emmena des milliers de prisonniers qu'il dispersa dans des pays trangers. Plus tard, ses successeurs, Salmanazar et Sargon, assigrent trois annes durant la ville fortifie de Samarie, et finalement s'en emparrent. Les vainqueurs saccagrent la capitale et les cits voisines et en chassrent les habitants dans de lointaines rgions de l'Asie Centrale. Dans les villes juives ruines, ils tablirent des Assyriens et des peuples trangers qui, plus tard, se confondirent avec les lments dIsral demeurs dans le pays, et formrent un peuple connu sous le nom de Samaritains.

    Le royaume d'Isral avait subsist environ 200 ans. Il fut dtruit voici plus de 2 500 ans. (An 720 avant l're vulgaire).

    Le Royaume de Judas : jusqu sa premire destruction

    Durant les deux sicles d'existence mouvemente du Royaume dIsral, la situation dans le Royaume de Juda, au sud de la Palestine, fut beaucoup plus calme. Tandis qu'en Isral, diverses maisons royales se succdaient, une seule dynastie se maintenait en Jude, celle de la maison de David. La capitale Jrusalem, dominait, avec son grand Temple o affluaient des plerins de tout le pays. La Jude se trouvait lcart des grands royaumes belliqueux d'Aram et d'Assyrie et elle ne fut pas condamne soutenir autant de guerres que le pays d'Isral. Au temps de Roboam, fils de Salomon, le pharaon dgypte Sesak, attaqua Jrusalem et d'autres villes, mais Roboam lui offrit une ranon, et les assaillants se retirrent. Alors qu'Achab rgnait sur Samarie, le roi de

  • Juda, Josaphat, l'aida dans sa guerre contre Aram. Les deux rois resserrrent leur alliance par un mariage, la fille d'Achab, Athalie, ayant pous Joram, fils de Josaphat. Mais lorsqu'Athalie voulut introduire Jrusalem le culte de Baal, selon les pratiques en honneur Samarie, le peuple brisa les idoles et la reine fut massacre. Plus tard, les chefs des deux royaumes se querellrent souvent et se firent mme la guerre. Aussi, lorsque les Assyriens assigrent Samarie et dtruisirent le Royaume d'Isral, les rois de Juda ne lui vinrent point en aide. Achaz, roi de Juda, se soumit bnvolement au puissant roi Tglat-Phalazar et sauva ainsi son pays de la grande destruction que les Assyriens infligrent au peuple frre.

    Plus tard, le Royaume de Juda se trouva entran dans la politique des grands tats. Dans les classes suprieures, on adoptait les murs des peuples trangers. Labme entre les pauvres et les riches devint aussi grand que nagure au Royaume d'Isral, et les Prophtes sentirent que cette situation pourrait tre cause d'une catastrophe sociale. Ils furent particulirement scandaliss lorsque le roi Achaz introduisit Jrusalem des usages assyriens dans les murs et mme dans le culte. Le grand prophte Isae, fils d'Amos, dnonait, dans des discours enflamms, les fautes et l'orgueil des grands, sans mnager le roi ni les hauts fonctionnaires. " Qu'elle s'est donc dbauche, clamait-il, la cit fidle de Jrusalem ! Autrefois, il y rgnait la justice et l'honntet, et maintenant, des criminels ! Tes princes sont des hommes corrompus, ils se lient avec des voleurs, se complaisent aux offrandes, courent aprs l'argent ; ils ne reconnaissent pas les droits de l'orphelin et ne veulent pas entendre les pleurs de la veuve... Pourquoi venez-vous dans mes temples, demande Dieu, et pourquoi mapportez-vous des offrandes ? Je ne peux couter vos prires, car vos mains sont couvertes de sang. Purifiez-vous, renoncez vos mauvaises actions, apprenez a faire le bien, recherchez la justice, soutenez l'opprim, reconnaissez les droits de l'orphelin, prenez la dfense de la veuve ". Avec force, Isae svit contre les " filles de Sion ", les femmes de Jrusalem, qui ne pensaient qu' leurs toilettes, se promenaient dans les rues, couvertes de bijoux, ointes de parfums, ne prtant pas attention au pauvre dmuni.

    Isae sleva contre le roi Achaz et lui reprocha son attachement au roi assyrien et son engouement pour les murs trangres. Le prophte dit : " L'Assyrien n'est quune verge entre les mains de Dieu, avec laquelle il chtie les peuples pcheurs ; mais toi, tu as peur de la verge et non de Celui qui la tient dans sa main. " C'est pourquoi Isae se rjouit de la mort d'Achaz, auquel succda son fils zchias qui, lui, voulait rgner selon l'esprit de la loi et des Prophtes. zchias interdit toutes les formes didoltrie, ordonna de dtruire toutes les idoles de bois et de mtal devant lesquelles beaucoup se prosternaient, et institua le culte du Dieu Unique, dans le Temple de Jrusalem. L, il clbra Pessach et les autres grandes ftes, en commun avec le peuple, qui de tous les coins du pays affluait vers la sainte ville de Jrusalem.

    zchias ne se souciait que d'une chose : librer le pays du joug assyrien auquel son pre Achaz s'tait soumis. A cette poque, rgnait en Assyrie le belliqueux Sennachrib qui voulait conqurir tous les pays situs entre la Msopotamie et lgypte. zchias conclut une alliance avec le Pharaon, afin de lutter ensemble contre Sennachrib. Il fortifia les murs de Jrusalem et amassa des armes et des munitions, pour dfendre la capitale en cas de sige. Sennachrib l'apprit, alors qu'il partait en guerre contre les gyptiens, et, sur-le-champ, il envoya des messagers zchias, exigeant que Jrusalem fut livre sans dlai larme assyrienne. Les portes de la ville taient fermes, et les messagers se tenaient dehors, sous les murailles de la forteresse, tandis que, sur le chemin de ronde, s'taient runis les habitants pouvants. L'un des messagers s'cria : " Dtes zchias, au nom du grand roi dAssyrie : qui te confies-tu quand tu te rvoltes contre moi ? lgypte, ce roseau cass, qui pntre et perce la main de quiconque sappuie dessus ? Ne vous laissez pas tromper par votre roi zchias et soumettez-vous au roi d'Assyrie ! " zchias, effray, supplia le prophte Isae de prier Dieu pour qu'il sauvt Jrusalem. Isae le rassura et prdit que Dieu infligerait une dfaite Sennachrib. Il en fut ainsi. Soudain, la nouvelle se

  • rpandit que Sennachrib avait battu en retraite. On racontait que, dans son immense arme, une pidmie s'tait rpandue, dont furent victimes des dizaines de milliers d'hommes, et qu'il avait d s'enfuir en Assyrie avec le reste de ses soldats.

    Manass, fils d'zchias, imita, non son pre pieux, mais son coupable grand-pre Achaz. De nouveau, il permit que se rpandt le culte des dieux trangers ; Jrusalem mme furent difis des autels ddis Baal et d'autres divinits auxquelles on offrait des sacrifices, comme au Temple. A l'une de ces idoles, nomme Moloch, on immolait des petits enfants. On se soumit la domination de l'Assyrie et on adopta toutes les mauvaises coutumes des peuples voisins. Mais, aprs la mort de Manass et de son fils, ce fut un rformateur qui monta sur le trne de Juda et qui gouverna dans l'esprit des Prophtes. Il s'appelait Josias.

    Josias acheva ce que son bisaeul Ezchias avait commenc. Avec l'aide des Prophtes, il tablit la domination de la Loi, de la Torah. Cela se passa ainsi : Un jour, on dcouvrit dans un coin secret du Temple, un livre o se trouvaient contresigns les lois et les discours de Mose. Lorsqu'on en donna lecture au roi, celui-ci en fut merveill ; dans ce livre (il s'agissait du Deutronome, la cinquime partie de la Torah de Mose), il tait crit que, si les Juifs n'obissaient pas tous les commandements que Dieu leur avait donns par la voix de Mose, ils seraient chtis, leur pays serait conquis par des peuples trangers et, plus tard, ils seraient chasss dans de lointaines contres. Les Prophtes convainquirent Josias de la vrit de cette prdiction. Le royaume d'Isral, disaient-ils, tait vaincu, et l'Assyrien dominait aussi le royaume de Juda. Peut-tre en arriverons-nous voir Jrusalem, elle aussi, dtruite comme l'a t Samarie ; il faut prendre des mesures pour viter une telle calamit ; pour cela, on doit purifier le pays des croyances trangres et de l'odieuse idoltrie. Josias se mit donc au travail. Pour draciner lidoltrie, il chassa du pays les prtres trangers. Il runit une grande assemble populaire Jrusalem et dclara que dsormais tous devaient se comporter selon les lois de la Torah de Mose.

    Dans cette rforme, le roi fut considrablement aid par le prophte Jrmie. C'tait un des prophtes les plus mouvants. Il ressentait profondment la douleur du peuple et cherchait des moyens pour sauver ses frres du malheur. Mais il ne put se flatter longtemps du succs de la rforme de Josias ni de l'espoir que le royaume de Juda s'en tiendrait fermement aux lois indispensables une saine vie sociale.

    Bientt commena une longue srie de misres. Le grand royaume dAssyrie, form de nombreux pays et peuples opprims, se dsagrgeait. Les princes rgnants d'gypte, de vieux ennemis de l'Assyrie, voulurent s'emparer de certaines parties du royaume affaibli, et leur arme se proposait de traverser la Jude. Mais Josias s'opposait leur passage, craignant que les gyptiens n'en profitassent pour s'emparer de son propre territoire. Il se dressa donc contre l'arme gyptienne, prs de la ville de Megiddo et il essuya une amre dfaite : l'arme juive fut dcime et Josias lui-mme tomba dans la bataille.

    La victoire des gyptiens fit d'eux les matres du royaume de Juda. Le pharaon couronna roi Jrusalem le fils an de Josias, Eliakim. Celui-ci, au lieu damliorer la situation de son peuple, ne se proccupait que de prlever les impts que les Juifs devaient payer leur dominateur gyptien, et se soumettait a toutes les exigences du pharaon. Alors Jrmie sleva contre le roi et l'aristocratie de Jrusalem. En plein Temple, il annona que si les chefs du peuple ne s'amendaient pas, le grand Temple de Jrusalem serait dtruit comme l'avait t autrefois le petit temple de Silo, au temps du prophte Samuel. Jrmie fut arrt et remis entre les mains des juges. On voulait le punir de mort pour ses sombres prdictions, mais ses amis obtinrent sa libration.

  • Quelques annes plus tard, le royaume d'Assyrie seffrita compltement. A sa place, sleva, en Msopotamie, une autre grande puissance : Babylone, qui se fortifia sous le rgne de Nabuchodonosor. Au cours dune violente bataille en Syrie, la grande arme babylonienne battit les gyptiens et les chassa de Palestine. liakim se souleva contre le nouveau dominateur mais le prophte Jrmie le prvint que la lutte tait vaine, car les Babyloniens allaient dominer tous les pays autour de la Mditerrane. Bientt liakim mourut et son fils Joakim, g de dix-huit ans, devint roi de Jrusalem. Nabuchodonosor mit le sige devant la ville. Le jeune roi, effray, accompagne de sa mre et de toute sa cour, se rendit au camp babylonien, afin de se concilier les bonnes grces du tyran. Mais Nabuchodonosor naccorda point foi ses dires et ordonna demmener Babylone le roi, sa famille et les notables les plus riches de Jrusalem. Dans la capitale de Juda, il tablit roi le frre cadet dliakim, Sdcias, qui prta serment de fidlit au despote babylonien.

    Sdcias observa son serment durant sept ans, mais la longue, il ne put supporter le joug et cessa de payer les dmes au roi de Babylone. Alors, Nabuchodonosor envoya une grande arme en Jude. Les Babyloniens semparrent de toutes les villes fortifies sur la route de Jrusalem, puis assigrent la capitale. La cit tait grouillante de gens accourus des villes moins importantes, dans lespoir que la forteresse de Jrusalem soutiendrait le sige. Les paisses murailles rsistrent, en effet, plus, dune anne, mais ceux qu'elles protgeaient ne purent supporter les privations. A Jrusalem, les vivres manqurent, et une terrible famine se dclara : des hommes tombaient dans les rues, partout on entendait les appels des enfants aux mres " Du pain, du pain ! " La faim svissait, plus terrible que lpe. Les guerriers puiss n'avaient plus de forces pour dfendre la ville. Les Babyloniens brisrent les murailles, firent irruption dans la cit et massacrrent, pillrent, incendirent ; le merveilleux Temple lui-mme fut la proie des flammes. Le roi Sdcias, qui stait enfui de Jrusalem, fut rattrap, amen devant Nabuchodonosor, et sur l'ordre de celui-ci, on lui creva les yeux. Des milliers de Juifs furent emmens captifs Babylone, de sorte que Jrusalem devint une ville dserte. (Ce fut la premire destruction de la ville sainte, il y a de cela 2500 ans, en l'an 586 avant lre vulgaire).

    Parmi les ruines de Jrusalem errait en pleurant le prophte Jrmie. " Combien solitaire est demeure la ville si populeuse nagure ! La voici veuve, et nul ne vient la consoler ! "

    Jrmie avait prvu le grand malheur et cherch dtourner le peuple d'une rvolte contre le roi de Babylone. Aussi, Nabuchodonosor le laissa-t-il en libert. Un ami de Jrmie, le prince Guedalia, devint, sur l'ordre de Nabuchodonosor, administrateur du pays de Juda et s'tablit Mitspa, non loin de Jrusalem. Mais ce reste du royaume de Juda ne subsista que peu de temps. Quelques officiers juifs rchapps se rvoltrent contre Guedalia, qui reprsentait la puissance ennemie et, aids de leurs soldats, ils le turent.

    Alors Jrmie, accompagn de nombreux habitants, partit pour lgypte. Une seconde agglomration juive fut ainsi fonde dans le Galouth (exil), une premire et plus importante s'tant tablie Babylone. Et Nabuchodonosor svissait toujours dans le pays de Juda, ajoutant de nouvelles ruines, et exilant des milliers de gens dans de lointaines contres. Le peuple tait banni et dispers. Mais, plus tard, en des temps meilleurs, il fut donn une grande partie des exils, de rentrer dans leur patrie.

    Murs des Juifs dans lantiquit

    Au temps o le peuple juif vivait dans son pays de Canaan qui s'appelait encore Palestine ou Pays d'Isral, l'agriculture tait son occupation principale. " S'asseoir dans son verger sous son figuier ", voil ce que l'on considrait comme la plus belle et la plus paisible manire de vivre. C'est de la

  • classe des agriculteurs que sortirent de grands hommes tels que les rois Saul et David, les prophtes lise et Amos. Aux principales priodes de la vie agricole taient adaptes les grandes ftes annuelles : la Pque, Pessach, la fte du printemps, alors que les produits des champs commencent pousser ; la fte estivale de Shevouoth, lorsque commencent les moissons, et celle de Souccoth en automne, marquant l'poque o l'on amasse tout ce qu'ont produit les champs et les vergers. Plus tard, ces ftes rurales se transformrent en solennits historiques et religieuses. La Pque commmorait la sortie dgypte, la libration du peuple de l'esclavage gyptien. Shevouoth fut clbre en souvenir du " don de la Torah ", lorsque Mose transmit au peuple, au pied du Mont Sina, les commandements de Dieu ; Souccoth, pour rappeler la traverse du dsert, alors que les Juifs habitaient des tentes ou des cabanes.

    Toutes les semaines, chaque famille juive jouissait d'un jour de repos : le Sabbat (en hbreu, ce mot signifie repos). " Tu travailleras six jours, et le septime, tu te reposeras " ce commandement devint sacr. Le repos du Sabbat avait une grande influence conomique et spirituelle sur lexistence : l'homme consacrait ainsi la septime partie de sa vie des intrts spirituels suprieurs et ranimait ses forces pour le futur labeur.

    Dans les villes les plus importantes, les Juifs soccupaient aussi de ngoce. C'est chez leurs voisins, les Phniciens, qu'ils apprirent le commerce. Autrefois, on disait : " Le Phnicien tient dans sa main une fausse balance et aime a tromper l'acheteur " ; mais plus tard, on ne vit plus de honte pratiquer le ngoce. On fit mme le commerce de l'argent ; des riches prtaient moyennant intrts et souvent, comme nous lavons dj vu, ils prenaient au pauvre jusqu' lindispensable. Pourtant la loi juive l'interdisait : " Si tu prtes de l'argent un homme pauvre, ne l'accable pas de gros intrts. Si tu lui prends comme gage son manteau, rends-le lui avant le coucher du soleil, car c'est sa couverture, sans cela comment dormirait-il ? "

    La vie de famille chez le Juif d'autrefois tait adapte aux murs orientales, mais la Loi redressa beaucoup d'erreurs dans ces coutumes. Un homme pouvait avoir deux pouses, et les riches encore plus, mais en gnral, la monogamie rgnait chez les Juifs. Deux pouses dans la mme maison se querellaient constamment et troublaient la paix du foyer ; en outre, les gens peu fortuns avaient peine entretenir une maison avec beaucoup d'enfants ns de deux pouses ; aussi les gens les plus sages avaient-ils adopt la monogamie. La Loi tablit les mmes droits dans la famille pour le pre et pour la mre : "Tu honoreras pareillement ton pre et ta mre."

    Dans les maisons riches, il y avait des serviteurs et des servantes, mais chez les Juifs, lesclavage ne prit point de formes odieuses comme chez les autres peuples o l'on traitait l'esclave comme un animal. L'esclavage dfinitif tait interdit. Un esclave juif ne devait pas servir son matre plus de six ans ; la septime anne, il fallait le librer ; si, cependant, l'esclave refusait dtre libr cause de son attachement la famille, on devait pour un instant fixer son oreille la porte de la maison, afin de marquer qu'il demandait de son plein gr rester. Des esclaves trangers (issus d'autres peuples) pouvaient tre gards dfinitivement, ou vendus d'autres matres.

    Tous les habitants libres du pays jouissaient des droits de citoyen, mme les trangers ou " guerim " (concitoyens trangers). La Torah dit : " Vous nopprimerez pas le " guer ". Vous devez comprendre les sentiments du guer, car vous-mmes tiez autrefois des gurim en gypte ". S'occuper des pauvres tait un devoir pour chaque communaut. Les indigents avaient le droit de glaner les restes de la moisson dans les champs des riches. Selon la loi de la Torah, on tait tenu, tous les sept ans, d'observer lanne " sabbatique " au cours de laquelle tous les propritaires fonciers devaient abandonner leurs champs et leurs jardins aux pauvres, et les riches ne devaient point rclamer leurs crances aux moins fortuns.

  • Le roi, chez les Juifs, ne possdait pas un pouvoir illimit. Les despotes et les tyrans taient rares. Dans les affaires de ltat, le roi devait consulter les " Anciens ". Quand il commettait une action contre la Loi, ou faisait une mauvaise politique, les Prophtes le lui reprochaient svrement. C'est ainsi qu'autrefois Samuel se comporta avec Sal, Nathan avec David, lie avec Achab, Isae avec Achaz et Jrmie avec liakim et Sdcias. Le prophte parlait au nom de Dieu, et le roi tenait compte de ses paroles, mme s'il en tait mcontent.

    La religion juive se dveloppait lentement. Elle variait selon les diverses fractions du peuple. Il y avait des hommes qui soutenaient que le Dieu du peuple juif, le " Dieu d'Isral ", ntait quune des nombreuses divinits auxquelles croyaient les diffrents peuples ; mais d'autres comprenaient qu'il n'existe quun seul Dieu pour tout l'univers, que ce Dieu Unique a cr le ciel et la terre et qu'il s'est rvl en premier lieu au peuple juif, afin de rallier plus tard cette foi vritable, les autres peuples. L'ide d'un Dieu universel, les Prophtes l'expliqurent au peuple dans leurs discours enflamms. Ils rattachrent la foi en Dieu un enseignement moral suprieur : Dieu exige que les hommes soient purs et honntes, qu'ils aiment leur prochain, qu'il n'y ait pas de diffrence entre le riche et le pauvre ; il veut que les hommes vivent en frres, comme les enfants d'un mme pre ; voil les hommes que Dieu aime et chrit, et non pas ceux qui se contentent d'apporter des sacrifices dans les temples. Mais l une dissension s'levait entre les Prophtes et les prtres : les prtres dclaraient qu'il fallait servir Dieu par des prires et des sacrifices offerts au Temple, tandis que les Prophtes (comme Isae et d'autres) rappelaient constamment que l'on devait servir Dieu avec un cur pur, par de bonnes actions, par l'amour des hommes et par la justice dans la vie sociale.

    Dans les anciens livres sacrs du peuple juif les cinq livres composant le Pentateuque et les livres des Prophtes sont exposs ces deux enseignements : celui des prtres et celui des prophtes, de mme que toutes les lois et notions populaires sur Dieu et le monde, la vie et la mort, lhistoire du peuple juif et sa situation parmi les autres peuples.

    Comment le Peuple se reprsentait Dieu, le Monde et

    lHistoire

    La cration du monde et la manire de vivre des premires gnrations, nous sont contes dans le premier livre de la Torah, le livre de la Gense. Il ne faut pas croire que ce soient l de jolis contes pour enfants : il s'y trouve des croyances et des notions usuelles des trs anciennes gnrations, juives ou non juives. Dans la Torah, tous les rcits se rattachent des ides profondes qui expliquent la marche du monde et de l'humanit.

    Le monde fut cr en six " jours ". Auparavant, la terre tait vide et dsole, couverte de tnbres. Dieu dit : " Que la lumire soit ! " et la lumire fut. Le deuxime jour, Dieu cra le ciel. Le troisime jour, l'eau se spara de la terre ferme ; des mers et des lacs se formrent d'un cot, des champs. Des herbes et des arbres de l'autre. Le quatrime jour, se montrrent dans le ciel, le soleil, la lune et les toiles. Le cinquime jour, commencrent voler dans les airs toutes sortes d'oiseaux, et dans l'eau nagrent les poissons. Le sixime jour, parurent sur la terre toutes sortes d'tres vivants, et enfin, le premier homme. Dieu cra l'homme ainsi : il prit une poigne d'argile et lui insuffla une me vivante ; ensuite Dieu lui prit, pendant son sommeil, une cte, et de cette cte cra la femme. Il nomma le premier homme Adam, car il avait t cr de la terre (en hbreu : adamah), et la premire femme ve, car elle est la mre de tous les hommes vivants (en hbreu, ve se dit Hava et drive du mot ha : vie). Ainsi, en six " jours ", le monde tout entier fut cr dans lordre suivant : dabord la nature inerte (terre, eau), ensuite, le monde vgtal (herbes, arbres), puis le monde vivant et mouvant (poissons, oiseaux, btes des champs), et en dernier lieu

  • lhomme, qui doit dominer la nature entire. La Torah ajoute quaprs avoir cr le monde en six jours, Dieu se reposa le septime, c'est pourquoi l'homme doit aussi se reposer un jour par semaine le Sabbat.

    Le premier couple, Adam et ve, vivait heureux dans le jardin d'den, un beau jardin o poussaient toutes sortes de fruits bons manger. Parmi les arbres, il y en avait deux, l'Arbre de Vie et lArbre de la Science du Bien et du Mal. Il tait permis Adam de manger les fruits de tous les arbres du jardin, sauf ceux de l'arbre de la Connaissance. Mais ve aperut un beau fruit sur cet arbre, le cueillit et le mangea ; elle persuada Adam d'y goter aussi ; Adam lui obit. Alors chez tous deux les yeux s'ouvrirent : ils commencrent savoir et comprendre ce qu'ils ignoraient auparavant. C'est ainsi qu'ils s'aperurent pour la premire fois qu'ils taient nus et en eurent honte ; vite, ils se confectionnrent des ceintures de feuilles de figuier et en couvrirent leur corps. Tout a coup, Adam entendit dans le jardin la voix de Dieu :

    " Pourquoi as-tu mang le fruit de l'arbre dfendu ? " Adam rpondit : " La femme m'a persuad. " ve se justifia en dclarant que le subtil serpent qui errait dans le jardin l'avait tente. Alors Dieu dit : " Pour ta dsobissance, ve, tu enfanteras dans la douleur. Et toi, Adam, tu travailleras la terre durement, tu tireras ton pain de la terre a la sueur de ton front, jusqu'au moment o tu y retourneras aprs ta mort. " Puis le premier couple humain fut chass du Jardin dden et dut subvenir son existence terrestre, par un rude labeur.

    Les premiers enfants dAdam et dve furent deux fils : Can et Abel. Can tait agriculteur, Abel berger. Un jour, les deux frres se disputrent au champ : Can, le plus fort, se jeta sur Abel et le tua. Alors le meurtrier entendit la voix de Dieu : " Ou est ton frre Abel ? " Can rpondit : " Je n'en sais rien ; suis-je donc le gardien de mon frre ? " Dieu maudit Can pour son terrible crime et lui prdit que, durant toute sa vie, il serait errant et n'aurait point de repos sur la terre.

    Dans ce rcit, se reflte d'une part la vieille rivalit entre le cultivateur enracin son sol et le berger nomade, d'autre part, l'ternelle guerre d'homme homme, de peuple a peuple.

    Adam et ve eurent dautres enfants encore, des fils et des filles. Des familles humaines se dvelopprent, puis des gnrations entires, mais elles vivaient entre elles comme des btes : le plus fort battait et opprimait le plus faible ; il n'y avait ni justice ni charit sur la terre. Voyant cela, Dieu dcida de susciter un Dluge qui, en se rpandant sur la terre, anantirait les mchants et ferait place un genre humain meilleur. Dieu ne voulut laisser en vie qu'un seul juste, du nom de No, et Il lui dit : " Construis-toi une grande arche de bois et rfugie-toi l'intrieur avec ta famille et avec un couple de chaque espce animale : btes des champs et oiseaux. " No fit ainsi et lorsque commena le dluge et que toute la terre fut submerge, l'arche se souleva et glissa sur les hautes eaux. Ds que les eaux diminurent, No sortit de l'arche avec tous les siens et tous les animaux, qui devaient donner naissance a un nouveau monde vivant. Dieu promit No de ne plus envoyer de dluge sur la terre et fit paratre lArc-en-ciel dans les nuages comme un signe de paix entre lui et les hommes.

    Un rcit semblable, voquant un dluge universel tait rpandu chez tous les peuples d'Asie : mais dans la Torah, on lui donnait une explication morale : ce dluge tait destin remplacer des hommes mchants par des meilleurs.

    No avait trois fils Sem, Cham et Japhet. Deux, de leurs enfants et petits-enfants, sortit une humanit nouvelle : des familles, des tribus et des peuples. Au dbut, tous parlaient la mme langue et se comprenaient entre eux. Un jour, des hommes s'assemblrent Babylone et y entreprirent la construction d'une haute tour dont le sommet devait atteindre le ciel ; cela et

  • servi de signe de ralliement pour tous les hommes qui, voyant la tour de loin, ne se disperseraient pas sur toute la terre. Mais au cours du travail qui dura longtemps, voici ce qui se produisit : les constructeurs se mirent parler des langues diffrentes et l'un ne comprenait point ce que lui disait l'autre. Alors la construction fut interrompue et les hommes se rpandirent de Babylone sur toute la surface du globe. Ils se divisrent en peuples habitant divers pays. Chaque peuple parlait sa propre langue. Les trois fils de No donnrent naissance trois races : Les Smites issues de Sem, les Chamites de Cham, les Japhtites de Japhet. Aux Smites appartenaient les peuples asiatiques : Assyriens, Babyloniens, Aramens, Juifs et Arabes ; aux Chamites les gyptiens, les Abyssins et les peuples noirs d'Afrique ; aux Japhtites les peuples europens blancs. Le peuple juif provenait de la tribu smite des Hbreux, et son premier patriarche tait Abraham l'Hbreu dont nous avons parl au dbut de notre histoire.

    La captivit de Babylone

    Aprs la destruction de Jrusalem, la plus grande partie des habitants fut dporte en Babylonie. Mais l, ils ne s'parpillrent pas dans tout le pays et ne se mlrent pas la population indigne ; ils s'tablirent dans quelques villes et fondrent des communauts particulires. Les exils avaient leurs maisons de prires ou ils se runissaient pour lire leurs livres sacrs, chanter les psaumes, entendre les discours de leurs matres et prophtes. Pour prier, ils tournaient leur face dans la direction de Jrusalem, comme pour regarder le Temple. On chantait l des hymnes populaires pntrs de nostalgie et du dsir brlant de revoir la patrie, ainsi le chant :

    Sur les rives de Babylone :

    Au bord des fleuves de Babylone, nous tions assis et nous pleurions, en nous rappelant Sion.

    Aux saules du rivage, nous avions suspendu nos harpes. L-bas, nos geliers nous demandaient des cantiques... Mais comment chanterions-nous le cantique de Dieu dans un pays tranger ?

    Si je t'oublie, Jrusalem, que ma main se dessche !...

    A Babylone, les exils de Juda rencontrrent des descendants des exils d'Isral qui autrefois avaient t chasss de Samarie en Assyrie et Babylone. l'tranger, les restes des deux royaumes juifs fusionnrent. Ainsi, se cra Babylone une trs grande agglomration juive. On vivait en paix, s'occupant de travaux agricoles, d'artisanat et de commerce. Daniel et ses trois compagnons, enfants d'Isral issus de familles aristocratiques de Jrusalem, habitaient la maison du grand roi de Babylone, Nabuchodonosor. On raconte que celui-ci, un jour, leur ordonna de se prosterner devant l'idole babylonienne ; ils refusrent et on les jeta dans une fournaise ardente ; mais l un miracle s'opra : les jeunes gens sortirent indemnes de la flamme ; leurs cheveux mmes ne furent pas brls. Alors Nabuchodonosor comprit combien tait grand le Dieu d'Isral, et il cessa d'astreindre les Juifs l'idoltrie.

    Au dbut de la captivit de Babylone, vivait l-bas le prophte juif zchiel. On l'y avait amen en compagnie du jeune roi Joakim, avec le premier groupe de captifs de Jrusalem. zchiel devint le guide spirituel des exils ; il les consolait dans leur tristesse, il leur enseignait comment vivre en pays tranger en restant fidle son propre peuple. Un jour, il leur conta un rve prophtique qu'il avait eu : " Un vent violent se leva et m'emporta dans une valle pleine d'ossements. Tout coup, les ossements dissmins se rapprochrent les uns des autres, se couvrirent de chair et de peau, et un esprit vivant entra en eux ; une masse d'hommes se leva. Je demandai qui ils taient, et j'entendis la voix de Dieu : Ce sont les enfants d'Isral ; ils se plaignent d'tre des ossements desschs, un peuple mort, mais J'assemblerai les ossements disperss, Je les

  • animerai de Mon esprit, et Je les reconduirai dans leur patrie ; de nouveau ils seront Mon Peuple. "

    Environ cinquante annes passrent. Nabuchodonosor tait mort, ses successeurs taient trop faibles pour maintenir un aussi grand royaume que l'empire babylonien. L'immense agglomration de diffrents peuples commena se dsagrger. Au centre de l'Asie, apparut un autre peuple puissant : les Perses, leur fameux chef Cyrus enleva de nombreux pays aux monarques babyloniens et finalement se rua sur la capitale. La ville tait bien fortifie, d'paisses murailles l'entouraient, et le roi Balthasar tait certain que l'ennemi n'y pntrerait pas. Dans le palais royal, on tait tranquille, on y faisait de joyeux festins, afin d'oublier les rigueurs de la guerre. Un jour, Balthasar invita de nombreux convives un grand repas ; jusqu' une heure avance de la nuit, on but du vin dans les coupes d'or que Nabuchodonosor avait drobes au Temple de Jrusalem. Soudain, selon la tradition une main mystrieuse inscrivit sur le mur de la salle du festin trois mots dont personne ne comprit le sens :

    " Men, tekel, uphrarsin ". On appela Daniel, le sage Juif, qui traduisit immdiatement ces paroles aramennes : " Compt, pes et divis ". Voici l'explication qu'il en donna au roi : " Compts sont les jours de ton rgne, peses tes mauvaises actions et divis est ton royaume entre des peuples ennemis. " Bientt, en effet, la prophtie se ralisa. Au cours de cette mme nuit, les Perses s'introduisirent dans la ville et turent le roi Balthasar.

    Dans tout le pays, Cyrus fut reconnu roi de Babylone. La population juive accueillit avec joie le nouveau monarque perse. Un grand prophte qui vivait en ce temps-l Babylone (on l'appelle le second Isae) proclama au nom de Dieu : " Console, console mon peuple ! Annonce la cit de Jrusalem que les temps de misre sont rvolus... J'ai donn Cyrus la grande domination pour le bien de mon cher peuple d'Isral... Il reconstruira ma cit et dlivrera mes captifs. " Cyrus, fort sensible aux esprances que les Juifs mettaient en lui, promit de laisser les captifs du Royaume de Juda retourner dans leur pays. Il mit un dcret selon lequel ceux qui voulaient revenir en Jude pourraient y reconstruire la ville de Jrusalem et le Temple ; il ordonna qu'on puist cet effet dans les trsors royaux et qu'on restitut tous les objets prcieux que Nabuchodonosor avait drobs dans le Temple. Des dizaines de milliers de Juifs se mirent en route pour la Jude, sous la conduite du prince Zorobabel, petit-fils du roi Joakim. Aprs cinquante ans de captivit Babylone, ils retournrent avec allgresse dans leur patrie. On clbra ce retour dans le beau psaume qui commence ainsi :

    Quand Dieu ramena les captifs de Sion, Nous tions comme dans un rve, Notre bouche tait pleine de rires joyeux Et notre langue de chants d'allgresse.

    La Jude sous la domination des Perses

    Quand les exils revinrent en Jude, ils trouvrent un pays dvast. Jrusalem et les environs n'taient pas encore reconstruits ; dans les provinces s'taient tablis des trangers : Philistins, Moabites, Ammonites, et des demi-Juifs, les Samaritains ; parmi eux vivaient des familles de Juifs pauvres qui souvent se mlaient aux trangers et parlaient leur langue.

    Le prince Zorobabel, chef des captifs librs, et le grand prtre Josu comprirent que, pour vivifier et unifier le peuple, il fallait tout d'abord rebtir la capitale, Jrusalem, ainsi que le Temple, et y tablir un nouveau gouvernement. En toute hte, on difia au lieu o s'tait lev l'ancien Temple, un autel pour les sacrifices et on posa les premiers fondements d'un petit Temple ; car pour en construire un grand, les moyens faisaient dfaut au peuple appauvri. A cette fte afflurent des gens de toutes les cits, les prtres chantrent des psaumes, les Prophtes

  • enthousiasmrent le peuple par leurs chaleureuses exhortations. La joie fut grande. Mais de vieilles gens taient l, qui avaient vu autrefois le premier Temple de Salomon, et qui pleuraient : les fondations de la nouvelle " Maison de Dieu " taient bien petites compares aux anciennes et l'on comprenait que l'clat de jadis ne reviendrait plus. Mme la construction de ce petit difice n'alla pas sans peine Les Samaritains dirent Zorobabel : " Construisons le Temple ensemble. " Mais Zorobabel refusa, car on les considrait comme des demi-Juifs. Aussi allrent-ils trouver les gouvernants des Perses pour leur raconter que les Juifs prparaient une rvolte contre eux, afin de librer la ville de Jrusalem. Les travaux s'arrtrent pour un temps ; ce n'est que la vingtime anne aprs le retour de Babylone et la soixante-dixime anne aprs la destruction de la " premire Maison " que fut termin le deuxime Temple, la " deuxime Maison ".

    Le pays de Juda, devenu une province du grand empire Perse, n'avait pas de monarque indpendant. Au lieu d'un roi, se trouvait, la tte du peuple, un grand prtre, reprsentant de la religion juive. Aprs la mort de Zorobabel, le grand prtre Josu ben Saduc demeura le seul chef, et aprs lui, gouvernrent ses enfants et ses petits-enfants, grands prtres de la famille des Saduc. Mais l'ordre n'tait pas encore rtabli. Jrusalem, la capitale, n'tait encore ni reconstruite ni fortifie par une ceinture de murailles ; des bandes trangres y pntraient et pillaient les habitants. Les Juifs n'obissaient pas tous aux lois de la Torah ; car peu de gens seulement les prtres, les Prophtes et les savants savaient lire et comprendre les livres sacrs. Depuis longtemps, le peuple avait cess de parler la vieille langue hbraque ; celle-ci demeura seulement une langue littraire, mais on parlait couramment la langue des Perses l'aramen. Il fallait maintenant, pour tablir l'ordre dans le pays, faire connatre au peuple son code national, la Torah, afin que tous apprissent ce qui tait permis et ce qui tait dfendu. Cette tche fut comprise par deux grands hommes venus de Babylone et de Perse : Ezra et Nhmie.

    Ezra tait un savant de la communaut juive, demeure Babylone aprs le retour des premiers captifs dans leur patrie, sous la conduite de Zorobabel. Il tait surnomm " Ezra le scribe ", car il rassemblait et transcrivait les livres sacrs de la Torah et les rpandait dans le peuple. Nhmie, lui, tait un notable de la cour du roi des Perses, Artaxerxs, dans Suze, sa capitale.

    Tous deux reurent du roi pleins pouvoirs pour se rendre Jrusalem et pour y tablir l'ordre, pour engager des fonctionnaires et des juges juifs. Ezra vint Jrusalem avec un groupe important de Juifs de Babylone et convoqua une assemble populaire sur la place du Saint Temple. Dans un discours enflamm, il rappela qu'aprs toutes les misres passes, le peuple devait commencer mener une vie nouvelle, selon les lois de la sainte Torah, sans se mler aux peuples trangers.

    Ds son arrive, Nhmie commena la construction d'une muraille tout autour de Jrusalem, pour fortifier la ville. Des milliers de gens y apportrent des pierres. Pendant leur travail, ils taient