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Formation des guides mediateursLes journes du patrimoine de Casablanca

Dossier Pdagogique1

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formation organise par Casamemoire, partenaire de Mutual Heritage et de l'institut franais de Casablanca, dimanche 27 mars 2011

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Le patrimoine /// une mmoire collectiveDfinitionDu latin patrimonium, hritage du pre, le patrimoine est lhritage commun dun groupe ou dune collectivit qui est transmis aux gnrations suivantes. Il peut tre de nature trs diverse : culture, histoire, langue, systme de valeurs, monuments, oeuvres artistiques... (ex. : le patrimoine artistique, le patrimoine de lHumanit.) La notion de patrimoine ce qui est considr comme lhritage commun a t institutionnalise par la France avec le dcret de 1837 mettant en place la premire commission des monuments historiques. Ces monuments comprenaient, dans lesprit de lpoque, les vestiges de lantiquit, les difices religieux du Moyen Age, et quelques chteaux. La nation de patrimoine architectural na pratiquement pas volu pendant plusieurs dcennies, et elle ne sest gure tendue en dehors de lEurope occidentale : quand la premire confrence internationale pour la protection des mouvements historiques sest runie Athnes en 1931, seuls des pays europens y ont particip. Et seulement trois pays non europens - la Tunisie, le Mexique et le Prou, ont particip la seconde, Venise, trente ans plus tard (en 1964). Cette notion ne sera mondialise quen 1972, avec ladoption par la confrence gnrale de lUNESCO, en 1972, de la Convention et recommandations relatives la protection du patrimoine culturel et naturel; ratifie en 1975 par 21 pays, cette convention lest aujourdhui par plus de 115 pays.

Une nouvelle conception de la notion de patrimoineSimultanment, la notion de patrimoine architectural voluait sur le plan conceptuel, pour inclure, sous linfluence des Italiens, des difices construits sans lintervention darchitectes (architecture mineure), des difices marqus par le terroir (architecture vernaculaire), linstigation des Britanniques, et larchitecture industrielle (usines, gares, etc.), encore sous linfluence des Britanniques. Simultanment, lide mme de patrimoine architectural volue pour ne plus protger uniquement un difice, mais un lot, un quartier, ventuellement lensemble dune ville. En 1976, lUNESCO adopte Nairobi une recommandation concernant la sauvegarde des ensembles historiques et traditionnels et leur rle dans la vie contemporaine. Cest ainsi que la liste du patrimoine mondial de lUNESCO comprend non seulement Venise (Italie), Antigua (Guatemala) et le Vieux Quebec (Canada), mais aussi les villes de Shibam et Saana (Yemen), Gore (Sngal) et Fez (Maroc). La notion de tissu urbain est donc introduite dans le concept de patrimoine. En France, la loi Malraux sur les secteurs sauvegards institutionnalise la protection des quartiers historiques. Mais cette loi a ses effets pervers : elle protge les quartiersmuses le Marais, Paris, la vieille ville dAvignon et autorise la destruction des quartiers moins anciens, moins historiques, moins monumentaux. Un certain pass est protg mais ce pass sarrte autour de 1850 : la France officielle manifeste un dsintrt total pour ce qui a t construit aprs la Gare dOrsay na t sauve que de justesse, et les Halles de Baltard ont t dtruites et cest seulement en 1986 que la France cre une section du patrimoine industriel. Introduction de la notion de patrimoine au Maroc Pendant son sjour au Maroc, Lyautey introduit la notion de patrimoine et institue la Loi patrimoine qui inscrit un certain nombre de btiments et lieux la liste des monuments nationaux. Il commande de grandes oprations de restauration (Chellah et Oudayas Rabat, mdina de Fs et autres) en insistant particulirement sur la notion de valorisation du savoir-faire artisanal local.

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Le patrimoine architectural de CasablancaCasablanca dispose dune richesse architecturale et urbaine, la mettant au mme rang que les grandes mtropoles du XXe sicle : Brasilia (Brsil), Chandigarh (Inde), par exemple. On y trouve tous les courants architecturaux davant-garde qui ont t tests entre 1920 et 1975 : art nouveau, no-classicisme, art dco, fonctionnalisme, hyginisme, immeuble redans, brutalisme, et, pour lurbanisme : le zoning, les grands boulevards, le permis de construire, lamnagement urbain, les grands ensembles. Casablanca est donc une cole ciel ouvert, frquemment visite par des architectes et des urbanistes du monde entier pour son patrimoine et son histoire. Malheureusement, ces btiments et cette cohrence urbaine napparaissant pas encore comme un atout ni pour le dveloppement du tourisme culturel, ni pour la mmoire collective des habitants. Plusieurs dentre eux, bien que classs, sont menacs de dmolition.Immeuble Bessonneau dit htel Lincoln - 2009 Immeuble Bessonneau dit htel Lincoln - 2006

Lassociation Casammoire qui uvre activement pour la sauvegarde du patrimoine architectural du XXme de la ville, a list les sites et btiments classs : http://www.casamemoire.org/ Le Patrimoine culturel Selon lUNESCO, le patrimoine culturel dans son ensemble recouvre plusieurs grandes catgories de patrimoine : 1. le patrimoine culturel : a- le patrimoine culturel matriel : le patrimoine culturel mobilier (peintures, sculptures, monnaies, instruments de musiques, armes, manuscrits) ; le patrimoine culturel immobilier (monuments, sites archologiques) ; le patrimoine culturel subaquatique (paves de navire, ruines et cits enfouies sous les mers) ; b- le patrimoine culturel immatriel (traditions orales, arts du spectacle, rituels...) ; le patrimoine naturel (sites naturels ayant des aspects culturels tels que les paysages culturels, les formations physiques, biologiques ou gologiques...) ; le patrimoine culturel en situation de conflit arm.

2. 3.

Patrimoine culturel immatriel de lhumanit La notion de patrimoine culturel immatriel est apparue au dbut des annes 1990, aprs les recommandations de 1989 sur la protection des cultures traditionnelles, et en contrepoint de patrimoine mondial tourn essentiellement vers les aspects matriels de la culture.

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Regarder sa ville autrement, dcouvrir des lieux rarement accessibles, soutenir les efforts faits pour faire vivre le patrimoine de notre ville, connatre son histoire : tels sont les objectifs de la 3me dition des Journes du patrimoine de Casablanca . Le 15 avril, une journe est ddie laccueil des scolaires sur les sites visiter. Les 16 et 17, les Casablancais pourront visiter gratuitement et librement leurs monuments les plus emblmatiques. Aprs le succs rencontr par les portes ouvertes dans les monuments de lanne dernire, lambition des organisateurs est de faire de cette manifestation un rendez-vous annuel.

Accder aux plus beaux monumentsPendant deux jours, le public aura accs aux plus beaux monuments et sites de Casablanca, non seulement au centre ville, mais aussi dans lancienne mdina et le quartier des Habous. Un large ventail de la diversit de ce patrimoine sera accessible: administrations, villas, cinma, htel, lieux de culte, etc. Certains difices, qui nouvrent quexceptionnellement leurs portes, dvoileront cette occasion leurs coulisses ou leurs trsors .

Sapproprier le patrimoine communDes visites guides et des animations (confrences, concerts, expositions, ateliers, etc.) dans la plupart des monuments permettront au grand public de sapproprier cette mmoire collective. Des propositions caractre pdagogique seront faites lintention des lves des tablissements scolaires. Des activits ducatives autour de la ville et de ses monuments seront proposes aux jeunes enfants.

Sensibiliser sa valorisation et sa protection

Une autre ambition de la manifestation est de sensibiliser non seulement les populations, mais aussi les propritaires et les autorits publiques linfini richesse du patrimoine architectural du XXme sicle Casablanca, sa vulnrabilit et aux efforts quil requiert encore pour sa sauvegarde et sa protection. Ce sera le propos de confrences et tables-rondes. Enfin, un sminaire international, intitul Tourisme et patrimoine et destin aux professionnels, permettra de sinformer et de rflchir sur les retombes conomiques dune valorisation pertinente du patrimoine. Il runira des experts du monde entier.

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Une dition enrichieLdition 2009 de la manifestation tait une premire au Maroc et dans le monde arabe. En 2011, Casablanca innove et donne de lenvergure aux Portes ouvertes . 20 monuments accessibles ; 2 jours consacrs au grand public les samedi 16 et dimanche 17 avril contre un seul en 2009. De larges horaires (11h 17h) sont rservs la visite ; Nouveaut : une troisime journe destine aux scolaires ; Nouveaut : des animations sont proposes dans la plupart des monuments. Nouveaut : un cycle de confrences et dbats.

AnimationsExpositions : Patrimoine partags exposition de photographies ralise par lEcole Nationale dArchitecture. Carnet de route : Casablanca de Sbastien Verkindere Exposition de photographies en NB la villa Zevaco Confrences et projections Le jardin Murdoch par Ammara Bekkouche Le programme de restauration dAlger et Oran par lassociation Bel Horizon Ateliers pdagogiques

Vistes des monuments 15, 16 et 17 AvrilVendredi : visites scolaires Samedi et dimanche : visites grand public Ville moderne La Grande Poste Le Tribunal La Wilaya La Banque El Maghrib Le march central Lancienne glise du Sacr-Cur Lhtel Lincoln Limmeuble Assayag Ancienne mdina Le Makhzen, premier arrondissement La porte de la Marine La rsidence Lyautey Les fortifications de la Sqala La synagogue Ettedgui Lglise espagnole La mosque Jamma Ould El Hamra Quartier des Habous La Mahkama Le nadir Les mosques Les toilettes publiques Les kissarias

OrganisationCette manifestation est initie dans le cadre de la journe internationale des monuments et des sites de lUNESCO et organise par lassociation Casammoire, le ministre de la Culture (direction rgionale de Casablanca), la Ville de Casablanca, lInstitut franais de Casablanca et le Conseil rgional du tourisme. Elle bnficie du soutien des diffrentes institutions occupant ces btiments qui ont permis au public dy pntrer et den dcouvrir la richesse et la diversit. La 3me dition de la manifestation bnficie du soutien financier de lAmbassade de France au Maroc, La Marocaine Vie, la LYDEC et PAUL (liste non clture)

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abondance de gisements lithiques et la dcouverte de lhomme de Sidi Abderrahmane attestent dune implantation humaine trs ancienne sur le site de lactuelle Casablanca. Cependant les origines de la ville et de son nom primitif, Anfa, restent de nos jours trs imprcis. Daprs Lon lAfricain, n en 1490, Anfa aurait t fonde par les romains. Pour Marmol, son contemporain, son origine serait phnicienne. Rien cependant ne vient tayer ces deux hypothses. Pour Ezzayani, historien, homme dEtat (1734-1833), la fondation de la ville serait berbre : les Znata stablirent Tamesna et Tadla, les Senhadja en Doukkala. Les mirs des Znata btirent la ville dAnfa dans le Tamesna et la ville de Day dans le Tadla . Lauteur ne prcisant pas lpoque de cette fondation ni lorigine de ses sources dinformation. Le nom dAnfa, qui apparat sous des orthographes trs diverses dans les portulans et chez les cartographes du 14e et 15e sicle : Niffe, Anaf, Anife, Anafa, Naf est lui galement trs controvers. Certains y voient le mot arabe Anf (nez, bec, promontoire), dautres le mot berbre Anfa (cime, colline, sommet). Toujours selon Ezzayani, le conqurant Almoravide, Youssef Ibn Tachfin, se heurta en Tamesna (rgion qui stendait alors de lOum-Er Rabia au Bou-Rgreg) au mouvement hrtique berbre des Berghouata. Il assigea et conquit Anfa en 1068. Au 12e sicle, Anfa est dcrit par le gographe Al Idrissi comme un port au commerce actif. Du 13e au 15e sicle, Anfa est un chef lieu de province important que se disputent les Almohades et Mrinides, puis Mrinides et Ouattasides. A la dcadence de cette dernire dynastie, Anfa se rendra indpendante et formera une petite rpublique de corsaire. Au dbut du 16e sicle, Lon lAfricain crit dans sa description de lAfrique : A lintrieur dAnfa, nombreux taient les temples, les belles boutiques, les hauts palais ainsi quon peut le voir et sen rendre compte prsent daprs les restes que lon en trouve . Ces restes sont ceux laisss par les Portugais, aprs le sige et la destruction de la ville en 1468, en reprsailles du danger que faisaient courir leurs navires marchands, les corsaires dAnfa. La ville subit alors une longue clipse de trois sicles et dt attendre lavnement du Sultan Alaouite Sidi Mohamed Ben Abdellah (1757-1790) pour tre releve de ses ruines. Sidi Mohamed Ben Abdellah y fit construire une mosque, une mdersa, un hammam et la repeupla de berbres chleuhs des Haha (rgion sud dEssaouira) et de Bouakher de Mekns. Il accorda en outre deux maisons espagnoles le monopole du commerce dans la rgion. En 1794, la ville sous le nom de Dar ElBeda, la maison blanche , devient la rsidence du gouverneur de la province des Chaouia.

En 1830, le Sultan Moulay Abderrahman (1822-1859) rouvre au commerce europen le port de Dar ElBeda, ferm par Moulay Slimane suite la rbellion des autorits de la province. Au milieu du 19e sicle, une crise dapprovisionnement en laine et en bl en Europe va donner un nouvel essor la ville et son riche hinterland o franais, anglais, allemands viennent se ravitailler. Cet essor devra galement beaucoup lavnement de la navigation vapeur qui permettra des liaisons plus rapides et plus frquentes entre Casablanca et les principaux ports europens. M. Hortus crit en 1856 : Nous avons 32 navires en rade dont 6 8 franais, il y a en ce moment un mouvement comme on nen a jamais vu Casablanca . En 1871, un vice-consul souligne que le commerce tend de plus en plus se concentrer dans cette dernire ville (Casablanca au dtriment de Tanger) o nos ngociants les plus srieux ont tabli le sige de leurs affaires . A la fonction de port dexportation sajoutent maintenant celles dimportation et de distribution de produits manufacturs. Lensemble de ces activits entrane une augmentation significative de la population : ruraux des environs, agents du Makhzen, commerants de Fs, Tanger ou Rabat auxquels sajoutent le personnel des consulats, vice-consulats ou agences. Depuis une dizaine dannes Casablanca sest compltement transforme les huttes qui couvraient son enceinte disparaissent tous les jours pour faire place des maisons de pierre qui servent dhabitations et de dpts note un observateur de lpoque. De quelques centaines dhabitants en 1850, la ville en compte prs de huit mille en 1866, dont 6000 musulmans, 1800 isralites et plus dune centaine deuropens. Sous le rgne de Moulay Hassan 1er (1873-1894), Casablanca compte 20000 habitants, mais labsence de port entrave un rel dveloppement du commerce. En 1906, la confrence dAlgsiras attribue la France les travaux damnagement du port de Casablanca. En 1907, durant ces travaux, de graves incidents, aprs ceux des confins algro-marocains, donneront la France le prtexte dune intervention militaire Casablanca et dans loriental. Cette situation dbouchera, en 1912, sur la signature du protectorat. A laube du 20e sicle, Casablanca se confondait avec ce quon appelle aujourdhui lancienne mdina. Ctait une ville dune cinquantaine dhectares en bordure dune rade rocheuse peu hospitalire. Elle tait entoure dune ceinture de remparts qui lui donnait une forme triangulaire.

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Prhistoire / Le site dAnfa est dj occup. Le rsultat de nombreuses fouilles en atteste. VIIIme-XIme sicle / Anfa est la capitale du royaume berbre Kharjite des Berghouatas, dansla rgion de la Tamesna qui deviendra la Chaouia. Nombreuses hypothses sur lorigine du nom dAnfa.

XIme sicle / Destruction de la ville par les Almoravides. 1350 / Selon la lgende, arrive de Kairouan de Sidi Allal Al Kairaouani, premier saint de la ville dAnfa.La koubba de son tombeau, ne sera construite quau XIXme sicle.

XVme sicle / Les corsaires dAnfa, port modeste et petit centre provincial, ne craignent pas de

saventurer, suivant Lon lAfricain, jusque dans la rivire du Portugal. 1468 Une expdition portugaise commande par lInfant Don Fernando, frre du roi Alphonse V, dbarque sous les murs dAnfa. Cinquante navires de 10 000 hommes dlite font fuir les habitants. Les Portugais dtruisent la ville. Il ne subsistera rien de lantique Anfa.

Fin du XVIIIme sicle /

Anfa sappelle Dar El Bada ou Casablanca. L encore, diverses hypothses sur lorigine de ce nouveau nom.

1770 / Aprs une clipse de prs de trois sicles (qualifie de non-trepar Andr Adam), Casablancarenat de ses cendres. Inquiet des vises des puissances chrtiennes, le sultan alaouite Sidi Mohamed Ben Abdallah dote la ville de nouvelles fortifications et btit une sqala (plate-forme artillerie, dite aussi bastiyoun.) Les nouveaux habitants de la ville sont originaires des Haha, dans la rgion dAgadir.

1786 /

Une socit espagnole groupant quatre commerants de Cadix obtient le monopole de lexportation de grains par le port. Sidi Mohamed Ben Abdallah construit la mosque Jama El Kbir dont les travaux sachveront en 1795.

1799 / pidmie de la peste. 1806 / Moulay Slimane dcide la construction dun mellah pour la communaut isralite. 1830 / Ouverture du port au commerce extrieur. 1836 / Instauration dune douane permanente. La ville compte 700 habitants. 1839 / Le premier Franais sinstaller Casablanca est Pierre Ferrieu, originaire de Nmes et ngocianten laine, venu commercer avec la tribu des Chaouias.

1853 / Lexportation des laines de la Chaouia atteint 30 000 quintaux. 1856 / Le trait anglo-marocain, en supprimant les monopoles institus par Moulay Abderrahman, lve

les principaux obstacles au dveloppement du commerce extrieur. On vt en fvrier, crit Andr Adam, jusqu 32 navires en rade de Casablanca. La communaut europenne ne compte que quinze membres.

1857 / LAngleterre nomme un vice-consul de carrire. Huit ans plus tard, elle sera imite par la France. 1876 / Dar Al Beda est encore une simple tape sur la route Fs-Rabat-Marrakech. Quand il sy arrte lesultan Moulay Hassan 1er campe en dehors des murs, au milieu de sa mehalla.

1905 / 570 europens, dont plus de la moiti est espagnole, sont tablis Casablanca. 1906 / LActe dAlgsiras prvoit la cration du port de Casablanca, dont le trafic dpasse dj celui deTanger.

1907 /

Le 30 juillet, des incidents offrent le prtexte lintervention militaire franaise qui entranera loccupation de la ville, prlude linstauration du protectorat. Linstallation dune voie ferre transportant les matriaux partir des Roches Noires pour la construction du port et traversant le cimetire de Sidi Belyout a provoqu la colre des habitants. Le 5 aot, la ville est bombarde partir du Galile dont les marins dbarquent. La ville sans citadins, selon lexpression dAndr Adam, sinscrit dans un primtre de 60 hectares et compte 20 000 habitants.

1908 / Casablanca concentre 20% du trafic des ports marocains. Construction dun poste TSF louestde la mdina : on peut dsormais correspondre directement avec la France.

1910 / Le premier syndicat ouvrier marocain est cre par un Franais, un certain Lendrat.

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1911 / La Magana ou Tour de lhorloge est rige contre les remparts de Bab El Kbir par le commandant

Dessigny. Symbole de modernit, elle donne son nom la rue qui se trouve dans son axe, aujourdhui la rue Allah Ben Abdallah.

1912 / Signature du trait du protectorat en mars. Lyautey, premier rsident gnral (de 1912 1925),prend la dcision, trs controverse, de crer le grand port de Casablanca (140 ha, 2 jetes, lune de 1 900 m, perpendiculaire au rivage, lautre transversale de 1 550 m). Il en dfend lide Paris devant le gouvernement. Premier plan damnagement de Casablanca dress par Tardif, gomtre qui dessine lemprise du boulevard circulaire, dcision dont les consquences seront dterminantes pour le futur.

1913 / 23 mars, un raz-de-mare interrompt les travaux damnagement du port. Promulgation dun Dahir

relatif lorganisation des commissions municipales dans les ports de lempire chrifien, instituant une commission compose de six fonctionnaires membres de droit et quatorze membres non-fonctionnaires, dont 8 Franais et 6 Marocains. En dcidant dinstaller la Rsidence Rabat, Lyautey provoque le mcontentement de la colonie franaise de la ville la plus importante du Maroc. Casablanca est dcrite par un auteur de lpoque, Maurice Zimmermann, comme un ocan de cahutes, une sorte de banlieue indfinie dune grande ville encore absente. La spculation, bien quencore naissante, fait tourner la tte plus dun colon. Un terrain achet 0,50 Franc le mtre en 1908, se revend 317 Francs.

1914 / la rue vers le Maroc, amorce depuis les accords franco-allemands de 1911, sajoute celle

sur Casablanca : la population trangre est estime 31 000 personnes (15 000 Franais, 6 000 Espagnols, 7 000 Italiens, 700 Britanniques et 300 Allemands). De lintrieur affluent les bourgeois fassis, les paysans et les juifs des villes ctires (notamment dEssaouira) dtrnes par lessor du port de Casablanca. Lextension rapide et incontrle de la ville exige la mise en place urgente dune rglementation. En fvrier 1914, le secrtaire gnral du Protectorat nomme Henri Prost, urbaniste, la direction dun Service spcial darchitecture et des plans des villes : premire administration dans lhistoire de lurbanisme franais. Paralllement aux services officiels, un groupement dintrts privs (le Syndicat des intrts franais et la Socit pour le dveloppement de Casablanca) fait appel un autre urbaniste, Donat Alfred Agache, dont les travaux resteront sans suite.

1915 / Exposition franco-marocaine durant la premire guerre mondiale. Monte lemplacement actuel

du march central, on y expose les premiers plans damnagement de la ville dHenri Prost. Lyautey veut faire la publicit de sa politique de grands projets au Maroc auprs des publics marocain et franais. Le pavillon de la ville de Rabat, construit par larchitecte Gosset, sera dmont et dplac dans le parc o il prendra lappellation de Palais des confrences.

1916 / Construction du Phare dEl Hank dont les superstructures sont dessines par Albert Laprade. 1915-1917 / Henri Prost labore les plans damnagement de la ville quil veut concentrique par rapport

au port et pousant le trac du boulevard circulaire. Ce travail durbanisme et son application constitueront un modle lchelle internationale.

1917-1919 / Amnagement du Parc Lyautey (aujourdhui Parc de la Ligue arabe) par Albert Laprade.

Les travaux seront excuts par un contingent de prisonniers allemands. 1921. Le primtre municipal atteint 2 450 ha. Le premier recensement effectu au Maroc tablit la population casablancaise 62 000 Marocains et 35 000 trangers.

1922 /

Construction des abattoirs par larchitecte Desmarets. Les mdecins du service dhygine de la ville recommandent de rassembler dans un mme quartier toutes les prostitues juives ou musulmanes. Les architectes Cadet et Brion construisent ce nouveau quartier rserv dans lesprit du quartier des Habous tout proche, au sud du Derb Carlotti. Bousbir est n. Dformation du prnom Prosper, qui dsignait lorigine des terrains appartenant Prosper Ferrieu (n en 1866 Casablanca) o staient installes de nombreuses maisons closes, louest de lancienne mdina. Bousbir sera ferm en 1954.

1923 / Construction de la gare dite Casa Voyageurs. 1925 / La mission du marchal Lyautey prend fin. Il embarque pour Marseille le 10 octobre bord du Fin des annes 20 / On invente Casablanca le terme bidonville pour dsigner un habitat prcaire

paquebot Anfa, de la compagnie Paquet, sous les ovations dune immense foule de Marocains conscients de limportance de son uvre. et misrable o sentasse la population rurale frachement arrive. Les bidonvilles sont concentrs principalement aux alentours de la route de Mdiouna dans le quartier des Carrires Carlotti.

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1934 / Inauguration le 14 juillet, de la piscine municipale Georges Orthlieb, creuse dans les rochers.

Elle totalise trois bassins dune longueur de 350 m, aliments en eau de mer, ce qui en fait lune des plus longues piscines du monde. Elle sera remblaye en 1986 sur lemplacement de la future mosque Hassan II.

1935 / Inauguration du cinma Vox de larchitecte Marius Boyer, un des plus grands dAfrique avec 2000places. Il sera dtruit la fin des annes 70.

1936 / Casablanca supplante Marrakech comme premire ville du royaume : 257 000 habitants contre190 000. Le primtre municipal atteint 9 535 ha.

1937 / pidmie du typhus. 1942 / Bombardement de la

ville par les Forces allies. Lopration Torch fait 1000 morts en trois jours. Dbarquement des troupes amricaines. Casablanca accueille des rfugis de toutes origines fuyant lEurope en guerre. Casablanca, le fameux film de Michael Curtiz, avec Humphrey Bogart et Ingrid Bergman, entirement tourn en studio Hollywood, inscrit en lettres dor Casablanca dans lhistoire du cinma. Le projet damnagement et dextension de la ville est confi Alexandre Courtois. Ces travaux ne verront jamais le jour.

1943 / En janvier, du 14 au 23, Casablanca est le sige de la Confrence dAnfa laquelle participent

Winston Churchill, Franklin Roosevelt, Charles De Gaulle et Giraud. Les runions ont lieu dans la villa Dar es Saada, et lhtel dAnfa. Des dcisions militaires cruciales devaient y tre prises conscutivement au succs du dbarquement alli en Afrique du Nord. Cest au cours de cette confrence que fut nonc le principe, par Roosevelt, de la reddition inconditionnelle de lAllemagne, du Japon et de lItalie. Josphine Baker chante au Rialto pour les troupes amricaines.

1946 / Erik Labonne, rsident gnral (libral) fait venir lurbaniste Michel cochard comme directeur duservice de lurbanisme.

1948 / Destruction de la Tour de lhorloge en prvision de louverture de lavenue de F.A.R. Elle serareconstruite en 1996 un emplacement diffrent. : 43 000 contre 25 000 musulmans.

1949 / La densit lhectare intra-muros est de 1 387 habitants. La population isralite y est prdominante 1950 / Construction de limmeuble Libert par larchitecte Lonard Morandi. Ses 17 tages en font le plushaut btiment de Casablanca avec 78 m. Construction de la gare dite Casa-port par Alexandre Courtois (grand prix de Rome).

1952. / Casablanca compte 682 000 habitants. Novembre : suite au mot dordre de grve dcid au

lendemain de lassassinat du leader syndicaliste tunisien Ferhat Hachad, des meutes ont lieu aux Carrires centrales. La rpression est orchestre par le chef de rgion, Boniface. On comptera un millier de morts et larrestation de nombreux dirigeants nationalistes.

1953 / La crise marocaine provoque un reflux de linvestissement immobilier et de la construction quine sattnuera qu partir de 1958. 24 dcembre : une bombe explose au March Central.

1955 /

Dcouverte archologique Casablanca de lAtlanthrope, vieux de 400 000 ans. Le site de Sidi Abderahmane est aujourdhui class. Mars : 48 attentats la bombe en 15 jours environ (20 morts). Assassinat de Jacques Lemaigre-Dubreuil, industriel anticolonialiste devant limmeuble Libert o il habitait. Il donne son nom la place. Casablanca se vide peu peu de sa population trangre.

1956 / Proclamation de lindpendance du Maroc. 1958 / Le 11 juin, un violent incendie dtruit le Derb Jdid laissant prs de 2 500 familles sans abri. 1960 / Un million dhabitants. la ville compte dj 1 100 km de chausses, 650 km dgots, 834 km deconduites deau et un rseau lectrique de 1 151 km.

1963 / Le primtre municipal passe 31 000 ha, saccroissant ainsi de 21 925 ha en 27 ans. 1965 / Les 22, 23 et 24 mars : meutes de lycens et dtudiants. Quatre jours de couvre-feu. Ltatdexception est mis en place jusquen 1970.

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1971 / 1 500 000 habitants. Destruction des arnes de Casablanca construites en 1930. Outre

les corridas, elles avaient abrit de nombreux vnements sportifs (combats de boxe, courses de stock-car, concours hippiques, Holiday on Ice) et accueilli une foule de chanteurs de varits.

1972 / 30 septembre : la charte communale institue la cration de la Communaut urbaine de

Casablanca comprenant 5 communes urbaines : An Diab, An Chock, Mers Sultan, Ben MSick et An Seba.

Fin des annes 70 / Destruction du btiment des Galeries marocaines (ex. Galeries Lafayette,

magasins Paris-Maroc) qui avait t construit en 1914 par larchitecte Hoppolyte-Joseph Delaporte et les frres Auguste et Gustave Perret. Le cinma Vox, mitoyen, subit le mme sort.

1981 / 20 juin : la hausse des produits de premire ncessit dclenche une grve gnrale et des

meutes svrement rprimes. On compte officiellement 60 morts, 600 officieusement, et plus de 2000 arrestations. Juillet : cration de 5 prfectures coiffes par une structure de coordination : la Wilaya du Grand Casablanca.

1982 / Jeux Mditerranens. 2 200 000 habitants. 1984 / Destruction du thtre municipal, construit en 1922 par Delaporte. Le nouveau schmadirecteur pour lamnagement de Casablanca est confi larchitecte-urbaniste Michel Pinseau qui diagnostique les dysfonctionnements de la lgislation intouche depuis 1950. Il reprend cependant le parti linaire le long du littoral quavait labor Michel cochard en 1951. Cration de lAgence urbaine charge de lapplication de ce nouveau schma directeur. dun livre sur la ville Casablanca, de Jean-Michel Zurflh. Cest le premier ouvrage du genre attirer lattention du public sur le patrimoine de la ville.

1985 / Feu Sa Majest le roi Hassan II reoit le pape Jean-Paul II au Stade dhonneur. Publication 1986 / Pose de la premire pierre de la grande mosque Hassan II lemplacement de lanciennepiscine municipale. Le projet est confi Michel Pinseau. commun, on introduit des socits prives dautobus.

1989 / Mise en place des plans damnagement communaux. Face la crise des transports en 1993 / Le 30 aot, Feu Sa Majest le roi Hassan II inaugure la grande mosque. Son minaret culmine 200 m. Elle peut accueillir 25 000 fidles. 1994 / 3 000 000 dhabitants. 1995 / Destruction de la villaBenazeraf, sise rue dAlger. Construite en 1928 par larchitecte Marius Boyer, elle a fait place lextension du sige de la BCM et un espace dexposition, la galerie Actua. Destruction de la villa du Grand Vizir Mokri, Anfa, alle des mriers ; construite en 1928 par larchitecte Marius Boyer. Ce gchis choquera profondment beaucoup de Casablancais alerts par la disparition de leur patrimoine. Casammoire : association pour la sauvegarde du patrimoine architectural de Casablanca est cre.

1996 / Premires destructions des quartiers situs lemplacement de la future avenue Royale quidoit relier la grande mosque Hassan II au centre ville. Les habitants sont en partie dplacs vers les nouvelles ralisations de la cit Nassim, au sud de la ville.

1997 /

Cration de la Rgion du Grand Casablanca dont la superficie est de 86 896 ha. Elle comprend dsormais 9 prfectures, 29 communes urbaines et 6 communes rurales. Linstitut franais, dirig alors par Alain Bourdon, organise une exposition dart contemporain, carte blanche

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Bellamine, dans une villa 1930 dsaffecte, situe Bd Zerktouni. Celle-ci abritera, une fois restaure lidentique, le muse de la Fondation ONA qui ouvrira ses portes en 1999. Il sagit de la premire initiative de rhabilitation dun btiment Casablanca.

1998 /

dification des tours Twin-Center par le groupe ONA, sur le boulevard Zerktouni. Limmeuble le plus haut de Casablanca (28 tages) est luvre de larchitecte Ricardo Bofill, assist dlie Mouyal. Novembre : parution du livre Casablanca, mythes et figures dune aventure urbaine de Monique Eleb et Jean-Louis Cohen aux ditions Hazan/Belvisi. Cest le rsultat, trs document, dun travail de longue haleine qui sattache dmontrer limportance de lexprience Casablanca dans lhistoire de larchitecture et de lurbanisme de la premire moiti du XXme sicle.

2000 / Fvrier : exposition Casablanca, mmoire darchitectures la Villa des Arts, de Monique

Eleb et Jean-Louis Cohen. Prcdemment prsente Paris, lexposition a remport, durant 3 mois, un succs sans prcdent au Maroc, montrant ainsi lattachement du public casablancais son patrimoine. Juillet : premire inscription dun btiment casablancais linventaire des Monuments historiques ; il sagit de la faade de limmeuble Bessonneau, dit Htel Lincoln, construit sur le boulevard Mohamed V, en 1916, par larchitecte Hubert Bride. Premire inscription dun btiment du XX sicle : immeuble Bessonneau (dit Htel Lincoln ) la liste national des Monuments Historiques.

2003 /

inscriptions la liste des Monuments historiques : lAquarium, les Anciens abattoirs, suivront jusquen 2006, 46 autres btiments. Dcs de Jean-Franois Zvaco, architecte franais qui oeuvra toute sa vie au Maroc. 2005. fermeture de laroport dAnfa pour tre reconverti en nouveau quartier de Casablanca (400 ha) dont un quart est rserv aux espaces verts la demande de sa Majest le Roi Mohamed VI.

2006 / Mise en place dun programme de dveloppement urbain avec notamment ltude dunplan de mobilit urbaine.

2008 / prsentation du nouveau schma directeur de Casablanca 23 janvier 2009 / dcs du premier grand architecte marocain, Elie Azagury, lge de 90ans. Architecte illustre qui est lauteur du plan damnagement de Hay Hassani (Derb Jdid), et qui a particip la reconstruction de Agadir.

Fvrier 2009 / A cause des dernires intempries, et surtout cause des procdures qui durent

depuis 15 ans, langle nord-ouest de la faade de limmeuble Bessoneau, dit htel Lincoln sest effondr. Le btiment appartient dsormais la ville aprs la nomination dexpropriation par la justice.

11-12 avril 2009 / Prfiguration des Anciens Abattoirs en Centre national des Arts.

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Henri ProstA partir de 1912, avec la signature du trait du protectorat, les premires constructions importantes apparaissent en dehors de lenceinte de lancienne mdina. La spculation sur les terrains est froce et lurgence dune rglementation simpose. Aprs les premiers plans damnagement de gomtres, dont Tardif qui dessine lemprise de la nouvelle ville circonscrite par le boulevard circulaire (boulevard de la Rsistance et boulevard Zerktouni), le premier Rsident gnral au Maroc, le Marchal Lyautey, fait nommer lurbaniste Henri Prost, Directeur du service spcial darchitecture et des plans des villes, en fvrier 1914. Henri Prost, qui reste 8 ans au Maroc, prsente son premier plan damnagement pour Casablanca en 1915. Il va inscrire dfinitivement Casablanca dans lhistoire des villes modernes, en mettant en uvre pour celle-ci, voulue capitale conomique dote dun grand port par le Gnral Lyautey, une rglementation originale et innovante en matire durbanisme (nouvelle science). Henri Prost sinspire des expriences allemandes et amricaines: zonage, occupations des sols, gabarits, alignements, remembrements. La mise en pratique de ces nouvelles rgles ne pourra se faire, en France, quaprs la premire guerre mondiale, faisant de Casablanca une rfrence.

Michel EcochardCasablanca, mdiatise en mme temps quelle se construit, devient alors le rendez-vous de la modernit pour ses habitants, immigrs de lintrieur du pays ou de ltranger, comme pour ceux qui la visitent. La rglementation des plans de Henri Prost reste en vigueur jusqu la fin des annes 40. Bien quen 1943, Alexandre Courtois soit charg de leur remaniement, ce nest quavec larrive de Michel Ecochard en 1947 quun nouveau plan damnagement sera mis en place. Michel Ecochard, second grand urbaniste de Casablanca, inspir des principes de la charte dAthnes1 (rdige par Le Corbusier lissue du Congrs international darchitecture moderne, tenu Athnes en 1933), propose, en 1951, dans le rapport prliminaire sur lamnagement et lextension de Casablanca, un plan dextension linaire le long de la cte qui reliera les deux ples portuaires de Casablanca et de Mohammedia, bord par la cration de lautoroute CasablancaRabat. Il ralise la perce de lavenue des F.A.R., relanant le projet de quartier des affaires proche du port, o se construisent en peigne de nouveaux btiments comme lhtel Marhaba de Emile Duhon en 1956, longtemps repre dans le paysage de la ville. De 1946 1952, il mnera la bataille du logement social face aux intrts du grand capital. Ses plans de zoning sont approuvs en 1952. Il est dmis de ses fonctions en dcembre 1952 par le Gnral Guillaume. Il exercera une grande influence sur la nouvelle gnration darchitectes qui entrent en scne lindpendance et dcrira son exprience dans un livre Casablanca, le roman dune ville. Les rglements de 1952 seront appliqus jusquen 1984, o est publi le nouveau schma directeur labor par le cabinet de Michel Pinseau.

Quelques dates :

Henri Prost (1874-1959) dirige les services des plans des villes au Maroc de 1914 1922. Alexandre Courtois (1904-1974) exerce au Maroc de 1942 1965. Michel Ecochard (1905-1985) est directeur de lurbanisme du Protectorat de 1946 1952.

Les chiffres donnent la mesure de lexpansion de la ville : 1900 : 20 000 habitants 1913 : 78 000 habitants (dont 31 000 europens) 1920 : 100 000 habitants (dont 40 000 europens)

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1 Charte dAthnes rdige par Le Corbusier lissue du 4e CIAM (congrs international darchitecture moderne), en 1933, qui dfinit les 4 fonctions de lurbanisme (habiter, travailler, cultiver le corps et lesprit, circuler).

1932 : 165 000 habitants (dont 50 000 europens) 1936 : 257 000 habitants (dont 80 000 europens) 1947 : 550 000 habitants (dont 100 000 europens) 1950 : 658 000 habitants (dont 158 000 europens) 2000 : 4 800 000 habitants.

On voit ainsi sans la premire moiti du sicle la population se multiplier par 30 et par 7 dans la deuxime.

Les acteurs de la construction de la ville / Les services municipaux et de lurbanismeIls seront toujours confronts la fivre de la construction malgr la mise en place par Henri Prost dune administration rigoureuse charge de faire respecter les dispositions de ses plans damnagement. Mais laffrontement et la ngociation engendreront des solutions indites qui feront de Casablanca une ville pragmatique (J.-L. Cohen). Cet quilibre prcaire entre intrts publics et privs sobserve jusqu nos jours.

Les promoteurs

Publics : par larchitecture et limplantation, ils marquent la ville de btiments imposants qui structurent lespace : place Mohamed V, hpitaux, etc. Privs : industriels, grandes socits telles que les banque, les assurances, Ils sont europens de toutes origines, marocains issus de la grande bourgeoisie commerante de Fs, isralites certains viennent dEssaouira dont lexpansion du port de Casablanca a acclr le dclin. Tous attirs par la croissance prodigieuse de la ville. Leurs commandes, tant pour les immeubles de rapport que pour les habitations prives, montrent leur got pour les constructions modernes, et leur confiance dans lessor dune ville qui, dans les annes 20, nexiste pas encore. Parmi ces promoteurs, on trouve de nombreux architectes et entrepreneurs.

Les architectes

Ils viennent dEurope (France) ou dAfrique du Nord (Algrie, Tunisie). Encourags par latmosphre innovante qui rgne Casablanca, ils vont pouvoir raliser des difices denvergure. Libres dans leurs orientations, ils sauront, indiffremment, concevoir leurs uvres dans les styles relevs Casablanca. Ils trouveront dans larchitecture traditionnelle marocaine la correspondance avec le mouvement cubiste (toit terrasse, volumes dpouills) et dans lartisanat local (zelliges, fers forgs) les lments de dcoration propres larchitecture art dco . En tudiant lhabitat marocain et lorganisation des villes, ils sauront aussi construire les nouveaux quartiers, exemple des Habous. Plus tard, aprs la 2nd guerre mondiale, des jeunes architectes exprimenteront de nouveaux modes dhabitat. La rputation de modernit de Casablanca se transforme dfinitivement en tradition.

Principaux architectes ayant exerc Casablanca :

Albert LAPRADE (1883-1962). A Casablanca de 1915 1917. Hyppolite Joseph DELAPORTE (1875-1962). A Casablanca de 1913 1955. Auguste PERRET (1874-1954), associ lentreprise PERRET FRES. A Casablanca de

1913 1920. Marius BOYER (1885-1947). A Casablanca de 1919 1947. Pierre JABIN (1894-1967). A Casablanca de 1915 1955. Auguste CADET (1881-1956). A Casablanca de 1918 1956. Edmond BRION (1885-1973). A Casablanca de 1918 1973. Joseph et Elias SURAQUI (1893-1975) (1893-1977). A Casablanca de 1923 1975. Marcel DESMET (1892-1973). A Casablanca de 1915 1917. Erwin HINNEN (1894-1986). A Casablanca de 1932 1962. Albert PLANQUE (1910-1972). A Casablanca de 1943 1970. Alexandre COURTOIS (1904-1974). A Casablanca de 1942 1965. Emile DUHON (1911-1983). A Casablanca de 1946 1975. Jean-Franois ZEVACO (1916- ). N Casablanca, exera partir de 1947. Elie AZAGURY (1918-2009) Casablanca, exerce depuis 1950.

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Les entrepreneurs

Souvent dorigine italienne, ils sauront transmettre leur savoir-faire en matire de finitions : ornementation et revtements (sols en granito poli). La main-duvre est de toutes origines (europenne et marocaine). Les entrepreneurs seront seconds par les Malems et artisans marocains dans la mise en uvre des matriaux traditionnels : zelliges, bois sculpts, tuiles vernisses, pltres cisels. Ils utilisent trs vite les nouvelles techniques de bton arm la suite des pionniers en la matire : les frres Perret.

Les styles darchitecture dans le centre ville

Noclassique : XIXme sicle europen Quelques immeubles du centre ville avec colonnes, balcons, loggias, orns de dcorations florales, de guirlandes, de mdaillons sculpts. No-mauresque pour les premiers btiments importants construits en dehors de lancienne mdina, plutt inspirs des ralisations dAfrique du Nord au XIXme sicle (Algrie, Tunisie), comme lhtel Excelsior, caractriss par lemplois des arcs briss, des azulejos (carreaux de faence) sur les faades, des pergolas, des tuiles vertes sur les toits et les auvents. Les btiments publics Ils reprennent les lments dcoratifs de larchitecture traditionnelle : arcades, frises et panneaux recouvert de zelliges, tuiles vertes, plafond en bois, pierre sculpte. Cependant ils se dtachent nettement du style no-mauresque par la simplicit de leurs volumes et leur conception rationnelle. Style recommand par les autorits du Protectorat, en particulier, par le Gnral Lyautey trs attach la sobrit extrieure des constructions locales. Style Art Dco : exposition des Arts Dcoratifs de 1925 Les formes et le dcor deviennent gomtriques, styliss, dbarrasss des ordonnances classiques et des ornementations ralistes. Les zelliges seront utiliss la place des carreaux de cramique qui recouvrent les btiments de la mme poque en Europe. Style fonctionnaliste Le mouvement moderne issu du cubisme connu travers le constructivisme en URSS, puis le BAUHAUS en Allemagne, est prsent Casablanca ds les annes 20. Ces btiments aux faades dpouilles faonneront limage moderne de la ville.

Casablanca 2012 / Programme de dveloppement et damnagement urbainLe nouveau schma directeur damnagement urbain vise : Lamlioration de loffre de lhabitat, en particulier lhabitat social La mise en place du projet du tramway Lamnagement du nouveau ple urbanistique dans les quartiers de Hay Rahma, Sidi Moumen (complexe sportif), Lahraouiyine et Anfa. En outre, le programme du dveloppement rgional touristique de Casablanca, PRDT ou plan MadaIn met davantage laccent sur lamlioration de la qualit urbaine et la rhabilitation de lme culturelle de la ville et ce travers de nombreux projets :

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Prambule

Casablanca 1913 La GrandPlace constitue la 1re place administrative de Casablanca, ville dont la vocation est ds les annes 1900 de se consacrer au commerce et aux affaires. Elle runira les principales administrations et difices de la ville. Ple des loisirs officiels, civils ou militaires, cette place, initialement dnomme GrandPlace, rebaptise Place de la Victoire, puis Place Lyautey, ensuite Place Administrative, suivie de Place des Nations Unies pour sappeler aujourdhui place Mohamed V, rpond au programme damnagement dHenri Prost. Au dpart, de vastes terrains de camps militaires constituent cet espace qui se verra affect ds 1913 la cration de cette place o devront tre centraliss tous les organes directifs militaires et civils de la cit moderne. Cest sur cette place, articulation idale entre les quartiers daffaires et la Mdina, que slveront le Palais de Justice, lhtel du commandement militaire, lhtel de ville, lhtel des postes, le Cercle militaire et plusieurs immeubles qui accueillent bureaux, commerces et restaurants installs aux rez-de-chausse dont la particularit est de surplomber lesplanade. Louverture de cette place est rendue possible par lutilisation de lemprise rectangulaire des anciens camps militaires, Le programme est labor par Henri Prost en 1915 et lordonnance densemble est dessine par Joseph Marrast. Un lment essentiel du projet initial est llot du thtre qui donne au Nord de la place un caractre plus pittoresque. Proche de larchitecture publique de la Turquie kemaliste des annes 20, la dmarche consiste laborer des ordonnances modernises pour les parties centrales des btiments, associes parfois un traitement plus abstrait des annexes. La rencontre entre la lecture de lart islamique pratique par lquipe de Lyautey et la vision dune architecture moderne inscrite dans la tradition se rvle fconde et novatrice. Une assimilation nouvelle des types locaux apparat.

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IMMEUBLE BESSONNEAU, dit LHOTEL LINCOLN 1917 BOULERVARD MOHAMEMD V, rues Ibn Batouta et Abdallah al mdiouni ARCHITECTE : Hubert Bride (1889 - ?) Lensemble, un des premiers repres du centre-ville, comprenait une soixantaine dappartements, des commerces et un htel. Comme quelques btiments des annes dix, il est construit en maonnerie porteuse, des poutrelles mtalliques et des voutins en brique constituent les planchers. Le dcor No-mauresque est encore visible sur la structure dordonnance classique, voquant larchitecture du XIXe sicle en Afrique du Nord. Quinze annes ont suffi pour faire de ce btiment une ruine. Au dbut des annes quatre-vingt, leffondrement dune terrasse a provoqu la mort de deux clients de lhtel. Aussitt vacu, il a fait lobjet de procdures judiciaires et de demandes de dmolition. Linscription de sa faade linventaire des monuments historiques en 2000 na pas pour autant conduit la rhabilitation obligatoire. De nombreux incidents, volontaires ou pas, ont contribu une dgradation irrversible jusqu leffondrement en 2009. Une telle situation est la consquence de labsence de lgislation approprie en matire de protection du patrimoine dont lurgence simpose aujourdhui.

EGLISE DU SACRE CUR 19301952 PARC DE LA LIGUE ARABE, CASABLANCA ARCHITECTE : PAUL TOURNON (18811964) Lglise a t construite en plusieurs tranches partir de 1930. Acheve en 1953 par la nef et le chur, elle a t dsaffecte dans les annes 1970. Aprs diffrentes affectations envisages, elle abrite, depuis quelques annes, des expositions, des installations et des vnements. Le btiment en bton arm dont la vote principale culmine 30 mtres de haut, reprend les principes constructifs des cathdrales gothiques. Sy trouvent mlangs le style moderne (absence dornementations, faades nues), l Art Dco dans le traitement des ouvertures et des vitraux et ce que lon peut appeler le no-marocain qui, ici, se rsume la transposition dans les vitraux et leurs formes gomtriques, des techniques traditionnelles des verres colors insrs dans les claustras de ciment. Ceux-ci sont luvre de Florence Tournon Branly, Jean Mamez et Louis Barillet. Paul Tournon, spcialis dans les difices religieux (glise du Saint Esprit, Paris XIIme), grand prix de Rome, ne construira au Maroc que la cathdrale de Rabat et lglise dIfrane. LA POSTE 1918-1920 PLACE MOHAMMED V, CASABLANCA ARCHITECTE : ADRIEN LAFORGUE (1871 1952) Cest le premier btiment administratif construit sur la place. Ambitieux et moderne, il est toujours la poste principale de Casablanca, prs de 100 ans aprs. Largement inspir de la grande poste dAlger, il comporte un remarquable panneau, sous les arcades, de zelliges bleus et noirs qui soulignent les entres et les botes aux lettres. A lintrieur, des ferronneries autour du grand hall public sur deux niveaux dans lesquelles sinsrent au centre lhorloge monumentale. Ramnag dans les annes 1990, des lambris de bois sculpt recouvrent la coupole initiale et les comptoirs en marbre sont rcents.

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PARC DE LA LIGUE ARABE (ex. LYAUTEY) 1917 BD MY YOUSSEF, BD RACHIDI, AV. HASSAN II ARCHITECTE : ALBERT LAPRADE (1883-1978) LA COUPOLE 1915 ARCHITECTE : P.GOSSET Dans le cadre des grands projets tudis ds 1915, Albert Laprade dessine et dirige le chantier de ce jardin dont les ouvriers, en grande partie, sont des prisonniers allemands. La cration du parc est directement issue des recommandations de Jean-Claude-Nicolas Forestier venu en 1913 pour tracer les grandes lignes de lurbanisme des villes nouvelles. Conservateur des Promenades de Paris , il contribue la restructuration de nombreuses villes dans le monde : Barcelone, Buenos-Aires, La Havane, Sville Des terrains de sport avaient t initialement prvus : seul le stade dathltisme sera ralis. A lentre du parc, le Palais des Confrences ou Koubba ex pavillon de la ville de Rabat dplac de lexposition Franco-Marocaine de 1915. Lexposition de Casablanca rassemblait sur des terrains situs entre la rue de lhorloge et la route de Mdiouna, une centaine de constructions provisoires, dans lesquelles les municipalits et les industriels de France et du Maroc, prsentaient leurs activits. La structure mtallique du pavillon, conu pour la ville de Rabat par P.Gosset, sera transporte peu aprs lexposition vers le Parc. Il sera accompagn par un petit difice qui servira la Socit dhorticulture. La coupole ft galement ds 1934 le thtre de poche de la ville avant dtre rhabilite des annes plus tard par lAssociation des Anciens lves du Grand Casablanca et lAssociation Casablanca Carrires Centrales. Albert Laprade est prsent au Maroc de 1915 1917. Il ralise, pendant sa priode marocaine, de nombreux croquis, relevs et notes sur lhabitat traditionnel et les jardins. Il participe la mise en uvre des jardins des Oudaas avec le peintre de la Nzire, dessine ceux de Dar Batha Fs, labore les plans de restauration des jardins historiques de la Mamounia, ainsi que ceux de la Rsidence de Rabat. Rentr en France, il sinspirera pour de nombreuses rsidences et htels particuliers des riads marocains. WILAYA - HOTEL DE VILLE 1927-1937 PLACE MOHAMMED V, CASABLANCA ARCHITECTE : MARIUS BOYER (1885-1947) Avec la Banque du Maroc qui lui fait face, lHtel de Ville est le dernier btiment tre construit sur la partie est de la place, lemplacement qui lui est rserv ds 1913. Associ Jean Balois, Marius Boyer remporte en 1927 le concours lanc par ladministration municipale jusque l loge dans le petit btiment qui deviendra le Conservatoire Municipal. Son imposante faade servira de dcor pour le tournage du film de Martin Scorsese Kundun o lon voit le Dala-lama rendre visite Mao Zesong et la place Mohammed V transforme en place Tian-An-Men. La construction sorganise autour de 3 grands patios ceinturs, de circulation en arcades dont les colonnes sont recouvertes de zelliges aux couleurs et dessins impressionnistes. Les tuiles vertes vernisses en couronnement, affirment le caractre public de ldifice, en rfrence aux btiments religieux ou officiels des villes anciennes. A ltage la grande Salle des Ftes souvre sur la place travers une galerie dinspiration vnitienne. Deux grandes toiles de Majorelle ornent les paliers des escaliers. Marius Boyer, de 1919 sa mort, sera un des architectes les plus productifs de Casablanca. Il est lauteur des immeubles les plus spectaculaires du centre ville, dont larchitecture davant-garde est considre au-del des frontires. On lui doit galement lhtel Volubilis construit en 1919, mitoyen de lhtel Transatlantique. Malheureusement depuis une vingtaine danne une partie de ses uvres majeures ont t dtruites : Cinma Vox (3000 places), villas Mokri, Benazeraf et Villa Houel, rue Moussa Ibn Noussair.

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PALAIS DE JUSTICE - 1922 PLACE MOHAMED V, CASABLANCA ARCHITECTE : JOSEPH MARRAST (1881-1971) Elment majeur, dcid ds 1913, le Palais de Justice limite lest la place dessine par Marrast lui-mme, au sein de lquipe dHenri Prost, quil a rejointe en 1915. Il reprsente une perception originale de la construction arabe qui met son point dhonneur ne se manifester lextrieur que pour la ligne, la simplicit des contours et des faades (Hubert Lyautey dans Paroles daction). Cest une illustration magistrale du style no-marocain qui, lextrieur, va exposer les richesses des arts traditionnels dont la renaissance est encadre par les services des Beaux-Arts (frises de zelliges). Une galerie autour des patios dominent la place de part et dautre de lentre monumentale. Joseph Marrast est prsent au Maroc de 1915 1922 aux cts dHenri Prost. Proche dAlbert Laprade, ils se retrouveront souvent en fin de journe de six sept pour pratiquer laquarelle sur les sites les plus pittoresques de Rabat et Sal (Les Oudaias, le Chellah, le Bouregreg). Crateur de jardins, il fait partie des grands rnovateurs de cet art, tels que Jean Claude Nicolas Forestier, qui lui confiera des jardins phmres loccasion de lexposition des Arts Dcoratifs de 1925 . Il est lauteur de Jardins (1925, Paris) et surtout de louvrage dit par lAcadmie dArchitecture en 1960 consacr luvre dHenri Prost. BANQUE DU MAROC 1937 AVENUE HASSAN II /RUE IDRISS LAHRIZI ARCHITECTE : EDMOND BRION (1885-1973) Dernier btiment construit sur la place, en retrait. A la suite des travaux dextension raliss dans les annes 1990 par le Cabinet dArchitecture dElie Azagury et Omar Alaoui le grand hall central sous verrire abrite une impressionnante sculpture de Csar. La faade principale donnant sur la place est richement dcore de motifs sculpts dans la pierre en rfrence larchitecture Almohade. A lintrieur, les panneaux de zelliges, la ferronnerie, les lambris, tmoignent dune recherche raffine lextrme. Edmond Brion arrive Casablanca en 1918 la demande dAuguste Cadet auquel il sera associ de 1920 1935 : ils signent ensemble de nombreux immeubles du centre ville (immeuble du Grand Bon March, immeuble Baille et surtout le quartier des Habous). Il construit seul limmeuble Bendahan, les cits ouvrires telles la COSUMA, la SOCICA, celle de Khouribga. Il se retire en 1961. IMMEUBLE ASSAYG AVENUE HASSAN seghir ARCHITECTE : MARIUS BOYER (1885 1947) Dans les annes 20, la refonte des quartiers du port en quartier des affaires est envisage. Eirik Labonne, secrtaire gnral de la rsidence, des architectes et des urbanistes, tudient la possibilit dy difier des immeubles de grande hauteur. Ainsi, Boyer, qui imagine des tours-portiques, ralise cet ensemble en deux parties de 8 et 4 tages, spares par une rue intrieure couvrant le garage en sous-sol. Sur lavenue Hassan Sghir, trois blocs relis jusquau 7e se dclinent en gradins crant de larges terrasses devant des studios et sont couronns par trois duplexs. A partir de trois escaliers, environ 90 appartements sorganisent autour des paliers circulaires, disposition leur permettant de bnficier de trois orientations et dtre isols par les parties communes insres entre eux (escaliers de service, ascenseurs, vide-ordures). Elles sont directement ventiles et claires par des verrires lamelles qui soulignent la verticalit de trois tours. Au 8e, les cages descaliers communiquent travers les locaux des buanderies communes ouvrant sur des terrasses dtendage.

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MARCHE CENTRAL - 1917 BOULEVARD MOHAMMED V, rues Mohamed Sitou, Allal ben Abdallah, Chaoua ARCHITECTE : PIERRE BOUSQUET (1885 1954) En 1914, il est dcid de dplacer le march municipal situ alors sur lancienne place de France (Place des Nations Unies). Le nouvel emplacement est celui qua occup pendant deux mois lExposition Franco-marocaine de 1915 voulue par le Marchal Lyautey afin de faire la promotion du potentiel conomique du pays. Le btiment bas et dpouill reprend le style traditionnel des marchs du sud marocain. Sur un quadrilatre au front continu, il est ponctu de boutiques sous les arcades le long du boulevard Mohammed V. A lintrieur, le corps central couvert est surmont dune ample rotonde qui abrite les marchands de poissons. La rue intrieure qui le ceinture est borde de boutiques. Fracheur et ventilation sont assures par des fontaines en zellijs traditionnels et dtroites ouvertures fermes de moucharabieh de ciment. Huit accs permettent de le traverser en tous sens. Lentre principale a t souligne rcemment par des encadrements sculpts et des panneaux de zellijs verts et jaunes.

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Ancienne Mdina

Etablit partir de louvrage de Robert Chavagnac : Casablanca : historique et guide de lancienne Mdina. Ed. Senso Unico 2004 Casablanca est prsente comme la ville moderne, au pass rcent et pourtant. Casablanca, lavant-gardiste, vritable laboratoire exprimental darchitecture, trouve son origine et son essor dans sa Mdina. Ancienne et unique Mdina, car elle ne ressemble aucune autre et porte encore la mmoire de nombreuses communauts qui y ont vcu. 75% des constructions sont du XXme sicle et sa spcificit demeure dans son architecture europenne : pas dhabitat traditionnel mais des htels particuliers et des maisons bourgeoises aux faades perces de porte-fentres et de balcons. Les faences en relief sont une imitation de zellige.Par sa modernit et son style art dco, La Mdina ne cessera dinfluencer la construction de la ville moderne. Au dbut du XXme sicle, Casablanca se limite lancienne Mdina. En 1900, elle compte 20.000 habitants. Dune forme triangulaire, la ville est protge par des remparts de 6 8 mtres de hauteurs, totalisant une longueur de 4 km, flanqus par endroit de tours carres. Une muraille qui se divise en trois tronons : - Sud-Est de Sidi Belyout la tour sud (actuellement Bd Houphout Boigny et place des Nations Unies) - Sud-ouest qui va de Bab Marrakech et Sour Jdid - Nord-Est en front de mer qui revient sur Sidi Belyout Six portes donnaient accs lextrieur de la ville : -deux sur le front de mer : Bab-el- Mersa porte de la Marine et Bab-el-kheut Mzab -deux sur le front Est : Bab-er-Rha (ou Bab-e Jdid) et Bab-es-souk (ou Bab-el-Kbir) -une sur le front Sud cest Bab Marrakech qui subsiste toujours -une sur le front Ouest : Bab-Sour-eJedid Lancienne ville se divisait en trois quartiers principaux : la Mdina, le Mellah et le Tnaker La mdina rassemblait la bourgeoisie marocaine juive et musulmane ainsi que les communauts europennes. Outre de nombreux marchs, choppes, sanctuaires et lieux de cultes, elle comptait plusieurs administrations dont la rsidence du Cad (Dar El-Makhzen) et plusieurs Consulats (allemand, italien, franais et britannique) Le Mellah est le quartier juif de la ville avec sa population dense et ses constructions sous formes de huttes en roseaux. Quant au Tnaker, il est le quartier populaire situ au nord avec des constructions en pis et en roseaux, matriau de fortune qui poussaient aux abords de loued Bouskoura. Le terme Tnaker viendrait du verbe arabe nakara qui signifie nier. Atanakour est le fait de nier lautre

Rue Tnaker en 1906 carte postale phot. R. Hedrich Chaque quartier est divis en derb, vritable unit de vie matrielle et spirituelle, une organisation qui sera reprise plus tard pour lensemble de la ville.

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LA SQALA

Cest autour de 1770 que le sultan Sidi Mohammed Ben Abdellah dcide de restaurer les murailles dj existantes. Il entend crer un point de rsistance aux incursions europennes entre Mazagan (El Jadida) et Rabat quil arme dune batterie appele Sqala. Il souhaite installer la ville de Dar el Beida sur le site mdival dAnfa. La Sqala aura pour fonction de protger la nouvelle ville grce dimposants canons placs dans ses embrasures et, laide dlgantes chauguettes, davoir une vue imprenable sur la mer. Tout en renforant les remparts de la ville, le Sultan difia une mosque, une mdersa, un hammam des moulins et des fours pain, infrastructures qui devaient participer lessor du commerce via le dveloppement humain. A proximit des deux marabouts Sidi Allal El Kairouani et Sidi Bousmara, les trois faces lgrement inclines de ce fortin prsentent une hauteur de mur peu importante. Les fondations poses mme le roc, visibles sur les reprsentations figures anciennes, affichent un gnie darchitecture largement inspir des travaux de Vauban. Le bourrelet de pierre rig au sommet du mur avait pour fonction de dvier les boulets de manire protger les affts des canons. De part et dautre du vaste portail, deux portes donnent accs la tour qui permet de surveiller la mer. Les inscriptions des linteaux des portails de ltage intermdiaire ont t sculptes, il y a une vingtaine dannes lors des travaux de restauration. La porte de gauche donne accs une galerie, en partie excave qui devait servir de casemate munitions. La porte de droite a t perce au dbut des annes 1980.

DAR EL MAKHZEN ou RESIDENCE DU CAD

Cette maison rvle un certain raffinement si lon en juge par lornement des portes, les zelliges, etc. Haut lieu du pouvoir chrifien, cet difice a donn son nom la rue qui comprend galement la Mosque fonde par le sultan Sidi Mohammed Ben Abdellah au 18e sicle et dont le minaret sera reconstruit sous le rgne de Mohammed V. Elle abrite aujourdhui le 1er arrondissement.

RESIDENCE DU MARECHAL LYAUTEY

Cet difice servait de maison dhtes pour la Rsidence. Situe langle de la rue de Safi et la Rue de la Marine, proximit de la Mosque Jamma Ould El Hamra, une des plus anciennes mosques de la ville, la rsidence bnficiait dune position stratgique. Aprs lindpendance, le Roi Mohamed V en fit don lUMT, centrale syndicale de lUnion marocaine du Travail, en reconnaissance des actions de Rsistance de la force ouvrire.

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Quartier des HabousEtablit partir de louvrage de Gislhaine Meffre : Architecture marocaine du XXe sicle. Ed.Senso Unico 2009

Le quartier des Habous (19181950)Situ dans la partie sud de la ville, ce quartier est n dune ide de Samuel Biarnay, directeur de lAdministration des Habous en 1916 et dun plan durbanisme tabli par Prost ds 1915. Situs sur lemplacement du Fort Provost , en dehors du boulevard circulaire, sur la colline de Mers Sultan, en bordure de la route de Mdiouna et de la ligne de chemins de fer, les terrains destins ce quartier ont t donns par un riche commerant isralite, Ham Bendahan, ami de Biarnay, au Sultan. Le sultan Moulay Youssef partage le terrain en 4 lots : le 1er est destin ldification dun palais le 2nd est destin la construction dune petite cit pour les employs du palais (derb Sidna) sur le 3me, le chambellan du sultan fait difier une petite cit (derb El-Hjib Thami) rserve aux fonctionnaires. Dtruite au dbut des annes 1980, ce terrain accueille aujourdhui les jardins du Palais Royal dune superficie de 4 ha environ, le 4me lot est attribue aux Habous. En 1916, Prost charge larchitecte Laprade dlaborer le premier plan du quartier des Habous. Oblig de suivre Prost en 1917 Rabat, cest aux architectes A. Cadet et E. Brion que revient la tche dlaborer un vritable plan et de le dvelopper tout au long de lextension du quartier sur une priode de plus de 30 ans. Ldification de cette ville nouvelle indigne a pour fonction, lorigine, de loger la population rurale des bidonvilles qui se multiplient aux abords de la cit, consquence du dveloppement trop rapide de Casablanca. Elle sera galement prise dassaut par des familles plus aises (commerants fassis, ) sduites par lalliance russie entre culture domestique et urbaine marocaine (maison traditionnelle cour avec toit terrasse, espace privilgi des femmes et de communication entre elles) et urbanisme moderne (introduction du tout--lgout, du bton arm et de llectricit). Avec sa structure labyrinthique, ses petites places, ses maisons tournes vers lintrieur, ses arcades de pierre et ses marchs traditionnels, cette ville nouvelle, pense comme tel, est rellement un lieu o la vie sorganise de manire trs authentique. Bien plus quune reconduction des expriences ralises avec les quartiers arabes des expositions universelles depuis la fin du XIXme sicle, il sagit l dun travail de composition rigoureux et inventif, refusant le pittoresque gratuit, mais jouant de la diversit tant lchelle de la maison qu celle des tracs urbains. Il sagit aussi de conserver dans cette ville nouvelle toutes les pratiques urbaines habituelles et les lieux perptuant la sociabilit traditionnelle et les rites des musulmans : mosques, bains maures, boutiques (prs de cent cinquante) isoles ou regroupes dans une kissaria, caravansrails, bazars, fontaines publiques, Les Habous sont des biens lgus par des particuliers des fins religieuses ou de bienfaisance une fondation pieuse, dont ils deviennent proprits inalinables. Cest le conseil suprieur des Habous qui les gre. Kissaria : Une Kissaria est un march couvert et ferm, lactivit trs spcialise (kissaria des bijoutiers, des piciers, etc.). Son intrt nest pas seulement dans ses marchandises mais dans sa structure et ses dcorations (belles portes de cdre qui ferment les boutiques, arcades, etc.).

Mahakma du pacha de Casablanca (19411952)La Mahakma simpose comme le monument des Habous, la fois par ltagement de ses toits pyramidaux de tuiles vertes 4 ou 6 pans et par la magnificence araboandalouse des patios, salles de rception et galeries qui ponctuent un plan densemble remarquablement agenc.

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Seul chantier entrepris sous le Protectorat pendant la seconde guerre mondiale, onze annes seront ncessaires Cadet, compte tenu des restrictions pendant cette priode, pour raliser ce btiment. En raison de la pnurie de matriaux, en particulier le fer et le ciment, Cadet dcide de btir avec des matriaux traditionnels locaux de grande qualit : pierres dures de Ben Slimane ou de Bouskoura, zelliges et tuiles de Fs, marbres de lOued Yquem, bois de cdre des forts dItzer et de Khnifra, pltre de Safi sculpt et cuit dans les fours dAsni, verrous et clous en fer forg Casablanca et Fs, etc. Le tout est savamment travaill par des mallemin (matres artisans) avec lesquels Cadet travaille depuis plus de 30 ans. Sur ce chantier, Cadet tait vritablement larchitecte au sens tymologique du mot, cest--dire le chef des ouvriers. Mais suivant la tradition antique, chacun deux conservait la possibilit dapporter un peu de lui-mme dans luvre commune. Edifi pour servir la fois de tribunal pour les musulmans et de salon de rception pour le Pacha, il tait destin remplacer le tribunal de Dar El-Makhzen dans lancienne mdina devenu trop exigu. Aujourdhui, le btiment abrite lune des huit prfectures du Grand Casablanca et fait office de prfecture du Mchouar. A. Cadet, La Mahakma prface de Laprade

Les mosques1) MOSQUE MOULAY YOUSSEF, CASABLANCA, 1921 (CONSTRUITES PAR CADET ET BRION) La cration de la nouvelle mdina de Casablanca fut loccasion pour les Sultans du XXe sicle de renouer avec la tradition de btisseurs de mosques des grandes dynasties marocaines. La mosque Moulay Youssef la premire dune longue srie est inaugure avec faste en 1923 par le Sultan dont elle porte le nom. Le minaret de cette mosque est dinspiration almohade. Sa silhouette rappelle celle de la Koutoubia, que Cadet a restaur, chef-duvre de larchitecture almohade difie par Yacoub el-Mansour en 1196. Cadet tudie particulirement les ouvertures et lornementation, sachant que dans lart religieux maghrbin, cest le minaret qui donne la mosque son style, qui en est la caractristique extrieure. Comme la plupart des mosques marocaines, le minaret de la mosque Moulay Youssef est quadrangulaire. La salle des prires se compose de trois nefs perpendiculaires au mirhab de chaque ct de la nef axiale, plus large, et dune nef transversale le long du mur de la qibla. Des annexes prolongent les nefs latrales extrmes le long du sahn. Ce dernier, de forme rectangulaire, a t ferm, il y a quelques annes. Les nefs sont couvertes dune toiture deux pentes et les plafonds sont en charpente, de type berchla, dcore de motifs gomtriques entrelacs peints ou sculpts. 2) MOSQUE SIDI MOHAMMED BEN YOUSSEF, CASABLANCA, 1934-36 (CONSTRUITE PAR CADET) Construite en seulement deux ans, sa conception est classique et voque par certains aspects la Qaraouiyyine de Fs. Lors de son inauguration le 12 juin 1936 par le jeune sultan Sidi Mohamed (dont elle tient son appellation), elle est la plus grande mosque de Casablanca et va clipser la mosque Moulay Youssef dont mane en revanche une lumire plus discrte et chaleureuse. Elle dispose de sept grandes portes. La salle des prires, cour intrieure comprise, est de 4 210 m2. Son plan hypostyle se compose essentiellement dune vaste cour avec deux pavillons des ablutions se faisant face et somptueusement dcors de pltres cisels, et dune salle de prires divise en onze traves diriges perpendiculairement au mur de la qibla. Cadet reprend ici, comme pour la mosque Moulay Youssef, le plan des mosques almohades : des nefs transversales au mihrb et au mur de la qibla, avec une nef mdiane plus large dans la salle de prire dont les nefs extrieures se prolongent en galeries autour de la cour qui se trouve ainsi insre dans la structure de lensemble comme lment spatial ciel ouvert. Cadet a particulirement soign les lments dcoratifs (bois sculpt, gebs, etc.) du mihrb et du minbar quil savait tre les pices matresses de toute mosque. Limposant minaret en pierre de la mosque est beaucoup plus lev (56 mtres de hauteur) que celui de la mosque Moulay Youssef quon aperoit quelques dizaines de mtres. son sommet on retrouve lpi traditionnel, forme qui tait le symbole de la fertilit dans les civilisations agraires, sorte de synthse entre terre et ciel. Sa tour carre se termine par des panneaux de losanges en rseaux. cette poque, Casablanca ne possdait pas de mosque assez ancienne ou remarquable pour attirer les fidles des quartiers les plus loigns. De ce fait, la mosque Sidi Mohammed, bien que rcente, devient trs vite la mosque la plus prestigieuse de la ville, grce ses proportions, sa dcoration somptueuse et la renomme de ses imams. Plus tard, avec linstallation de nombreuses librairies spcialises dans le domaine religieux, elle va contribuer faire du quartier des Habous le ple du savoir thologique et de la prire.

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