DOSSIER P.10 PROJETS DE TERRITOIRE Tracer sa feuille de route

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Octobre 2014 • N° 193 Mensuel édité par l’AdCF - www.adcf.org 5,50 E DOSSIER P.10 PROJETS DE TERRITOIRE Tracer sa feuille de route DANS L’ACTU P.2 • INTERVIEW DE DANIEL DELAVEAU • DOTATIONS DE L’ÉTAT : DES PRÉCISIONS FOCUS P.5 25 e CONVENTION NATIONALE DE L’INTERCOMMUNALITÉ À LILLE FINANCES P.19 • L’INVESTISSEMENT PUBLIC MENACÉ DROIT P.20 FUSIONS DE SYNDICATS INTERNATIONAL P.21 • ROYAUME-UNI : L’ÉVALUATION PAR LES PAIRS © Klaus Leidorf / Corbis

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Octobre 2014 • N° 193 • Mensuel édité par l’AdCF - www.adcf.org • 5,50 E

DOSSIER P.10

PROJETS DE TERRITOIRE Tracer sa feuille de route

DANS L’ACTU P.2 • INTERVIEW DE DANIEL DELAVEAU • DOTATIONS DE L’ÉTAT : DES PRÉCISIONS

FOCUS P.5 • 25e CONVENTION NATIONALE

DE L’INTERCOMMUNALITÉ À LILLE

FINANCES P.19 • L’INVESTISSEMENT PUBLIC MENACÉ

DROIT P.20 • FUSIONS DE SYNDICATS

INTERNATIONAL P.21 • ROYAUME-UNI : L’ÉVALUATION PAR LES PAIRS

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« À l’image de l’intercommunalité, l’AdCF est un véritable collectif »Ayant choisi d’interrompre sa vie publique, Daniel Delaveau passera le flambeau de la présidence de l’AdCF le 8 octobre. Son mandat s’est révélé intense en réformes pour les collectivités : il aura vu la montée en puissance de l’intercommunalité et l’affirmation de l’AdCF comme force de proposition sur la scène nationale. Retour sur six années riches de débats et de travail collectif.

Vous allez transmettre la présidence de l’AdCF à l’occasion de la 25e Convention nationale de l’intercommunalité à Lille. Au terme de votre mandat, quel bilan tirez-vous de ces six années ? À la suite de Marc Censi, fondateur de l’association, j’ai eu la chance d’exercer la présidence de l’AdCF dans un contexte très riche pour l’intercommunalité. Ce mandat aura été celui de l’achèvement de la carte intercommunale et de la première élection directe des conseillers communautaires. Un cap symbolique a été franchi. Il aura fallu du temps, quand on pense que ces évolutions figuraient parmi les propositions du rapport Mauroy sur la décentralisation des années 2000.

Nous avons aussi connu et accompagné les très nombreuses recompositions de périmètres intervenues en fin de mandat. Près de 300 fusions en deux ans, ce n’est pas rien ! Mon mandat de président de l’AdCF a commencé au moment même où s’instal-lait le comité Balladur, auquel nous avions remis 40 propositions. Beaucoup de nos idées ont été reprises et mises en œuvre. D’autres se retrouvent dans les nouveaux projets de réforme.L’intercommunalité a le vent en poupe et plus personne ne doute de son caractère d’avenir. Ce n’était pas gagné en 2008 : nous sortions d’une phase critique marquée par des attaques violentes contre l’inter-communalité. Le mérite de Marc Censi est d’avoir organisé la contre-offensive et fédéré d’importants soutiens. Je me souviens qu’il avait dit : « Il n’y a pas de plan B. » Il avait raison. Le mandat 2008-2014 s’est clairement inscrit dans son héritage. Il a su doter l’AdCF d’une très forte cohésion associative et d’une volonté d’aller de l’avant, avec un regard prospectif marqué. Je me souviens de son discours de Deauville en 2006 et de la « feuille de route » qu’il proposait pour 2015. Je crois que notre équipe a été fidèle à son message.

Vous insistez beaucoup sur la notion d’équipe ?Oui, parce que ce fut une réalité forte au cours de ce mandat. Je me suis efforcé d’être un président de l’AdCF présent et actif, mais je n’aurais pas pu faire face à tous les sujets d’actualité et toutes les sollicitations sans le concours d’une équipe motivée,

complémentaire, très compétente. Charles-Éric Lemaignen1 a pris en main tous les dossiers financiers et fiscaux, avec une efficacité reconnue lors de la réforme de la taxe professionnelle puis la mise en place de la nouvelle péréquation. Notre bureau et notre conseil d’administration ont été très accaparés par l’immense chantier qu’a constitué, de 2008 à 2010, le Grenelle de l’environnement. Nos secrétaires natio-naux Dominique Braye2 et Jo Spiegel3, mais aussi nos vice-présidents Michel Piron4, Thierry Repentin5 et Patrice Yung6 ont été extrêmement actifs, aussi bien dans les travaux préparatoires que lors de la phase législative. C’est à partir de là qu’a été mise à l’agenda la question du PLU intercom-munal. Les résistances sur ce sujet se font encore sentir ; mais il n’est plus tabou. Le mouvement est lancé et il ne s’arrêtera pas. Nous avons également beaucoup travaillé, avec Loïc Cauret7, sur les questions écono-miques depuis le surgissement de la crise et ses lourds impacts sur notre appareil productif. Notre convention de Lille est largement axée sur ces sujets. Nous voulons renforcer nos liens avec les partenaires sociaux et le monde économique.Ma grande satisfaction a été de voir une nouvelle génération s’engager à nos côtés. Je pense à Estelle Grelier8 qui a intégré notre bureau et s’est montrée, depuis 2012, d’une impressionnante efficacité à l’Assem-blée nationale. Je pense aussi à Corinne Casanova9 qui a pris en main les questions

d’urbanisme avec énergie. Je ne peux pas citer tout le monde et je le regrette, mais je pense que l’AdCF est un véritable collectif. À l’image de l’intercommunalité d’ailleurs. Il faut qu’elle le demeure.

Cette cohésion associative parvient-elle à transcender les clivages, qu’ils soient politiques, territoriaux ou financiers ?C’est toujours un challenge mais je crois que nous y sommes bien parvenus. Lors de la réforme des collectivités de 2010, les cli-vages politiques nationaux ont été très vifs sur le conseiller ter-ritorial, mais nous avons réussi à nous concentrer sur les questions du bloc communes-com-munauté et à souligner le caractère consen-suel de ce volet. Lors de la réforme fiscale, des tensions sont également apparues, mais l’AdCF a toujours affirmé que l’ancienne taxe professionnelle était condamnée. Nous avons réussi à nous mettre d’accord sur des solutions de rechange. Nous avons également veillé à éviter le retour des clivages stériles entre espaces urbains et ruraux. Alors que certains font de ces oppositions leur fonds de commerce, nous cherchons au contraire à faire de l’AdCF un lieu de dialogue et de coopéra-tion. Nos territoires sont devenus totale-ment interdépendants. Il faut aménager la

solidarité entre eux, à travers la péréquation mais aussi des coopérations de toute nature. Une décentralisation parvenue à maturité, c’est cela. Les interventions de l’État ne doivent devenir que subsidiaires ; l’inter-communalité doit assurer les solidarités internes à nos bassins de vie. Mais il faut aussi organiser des solidarités entre métro-poles, réseaux urbains intermédiaires, espaces périurbains et ruraux. L’AdCF a toujours été un soutien des Scot, des pôles métropolitains, des pays et maintenant des pôles d’équilibre et de coopération territoriale.

Par rapport à ces six années passées, avez-vous des regrets ? Il m’arrive de déplorer la lenteur de cer-taines évolutions pourtant indispensables et inéluctables. Notre complexité admi-nistrative actuelle provient d’ailleurs de nos hésitations collectives ou de réformes inachevées. Une telle situation est parfois liée à un manque de courage, d’autres fois à un déficit de vision. L’intercommunalité est un succès mais elle est une succession de réformes législatives, de petits pas. Avec des avan-cées nombreuses mais parfois des reculs incompréhensibles. La minorité de blocage

Nous avons veillé à éviter les clivages stériles entre espaces urbains et ruraux

Notre complexité administrative provient de réformes inachevées

À la Convention de Montpellier, en 2013. / © Lionel Pagès

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introduite dans la loi Alur sur le transfert du PLU illustre cela. Autre exemple, au sujet de la démocratisation de l’intercommuna-lité, nous avons bien vu qu’il fallait passer par l’étape du scrutin fléché avant de se projeter vers autre chose. Mais le main-tien du panachage dans 28 000 communes, les contraintes imposées au flé-chage… ont conduit à une frustra-tion générale. Nous sommes tenus de conduire les réformes en deux ou trois étapes, avec des revoyures permanentes. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons l’habitude, à l ’AdCF, de lancer des coups de sonde et penser toujours en termes de « coups d’après ». Je constate que les évolutions vont dans le bon sens. Mais je suis parfois étonné par le conservatisme dont font preuve des élus ou parlementaires de tout bord sur les questions territoriales. Honnêtement, je crois que notre pays ne peut plus s’offrir un tel luxe. « Le temps est venu de décider », disait déjà le rapport Balladur. Le Premier ministre Manuel Valls ne dit pas autre chose. La réforme peut être débattue dans ses options mais pas dans sa nécessité. C’est ma conviction.Je tiens néanmoins à dire que j’ai bien plus de satisfactions que de regrets.

À quelles satisfactions en particulier pensez-vous ?Au bilan de nos propositions qui ont été retenues depuis cinq ans mais surtout, par-delà les réformes législatives, aux progrès de l’intercommunalité sur le terrain. Le mandat précédent a été marqué par une montée en compétences dans tous les domaines. Qu’elles soient d’aggloméra-tion ou rurales, les communautés sont bien installées dans la gestion locale. Malgré toutes les difficultés que rencontrent les élus, les solidarités intercommunales me semblent robustes. Nos métropoles vont se mettre en place. Il ne reste plus que la métropole Aix-Marseille-Provence et le Grand Paris à bien organiser, sans doute

avec des formules très particulières compte tenu de la taille de ces agglomérations. Les ouvertures du Premier ministre, qui visent à appuyer la future métropole parisienne sur des territoires forts, sont sages. Le fil du dialogue sur Aix-Marseille-Provence doit être repris, afin de trouver des amé-

nagements acceptés par tous.Parmi mes satisfactions, figurent également les temps forts de notre association : ce grand moment que constitue notre conven-tion annuelle itinérante, mais aussi nos uni-versités d’été, nos colloques, nos rencontres régionales, les réunions de notre conseil d’orientation, les temps de dialogue avec les pouvoirs publics nationaux. L’AdCF s’est beaucoup développée mais a su préserver, je l’espère, ses temps de convivialité. J’aimerais aussi évoquer le plaisir que j’ai eu de travailler avec notre équipe technique. Nous avons développé des rapports simples, marqués par une très forte confiance mutuelle. C’est une équipe appréciée par les élus pour son entrain, son dynamisme. Je veux lui rendre hommage.

Comment voyez-vous l’avenir de l’association ?Je le vois déjà en de très bonnes mains. En vue de l’assemblée générale de Lille, j’apporte mon parrainage à une liste plu-raliste de candidats pour recomposer notre conseil d’administration et l’élar-gir. Cette liste est conduite par Charles-Éric Lemaignen et Loïc Cauret qui, depuis longtemps, sont des chevilles ouvrières de l’AdCF. On retrouve à leurs côtés des per-sonnalités de la qualité de Valérie Létard10, Frédéric Sanchez11, Corinne Casanova, Olivier Bianchi12, Marc Fesneau13 et bien d’autres qui, j’en suis sûr, feront franchir une nouvelle étape à l’AdCF. Celle-ci est

désormais largement reconnue comme quatrième grande association nationale généraliste aux côtés de l’AMF, l’ADF et l’ARF. Cela impose d’être présents sur de très nombreux dossiers. Le nouveau mandat sera certainement marqué par des évolutions des associations de collectivités. Avec plusieurs réseaux nationaux, nous nous sommes rapprochés en par-tageant des locaux communs, rue Joubert à Paris. Il faudra aller plus loin dans la mutualisation et la complémentarité. Je verrais positivement l’évolution vers une confédération de nos associations, préser-vant certaines spécificités techniques ou territoriales, mais avec une forte capacité d’expression commune. Je pense aussi qu’il faudra reprendre des initiatives avec l’Association des maires de France pour approfondir nos rappro-chements. Ce sera à nos successeurs d’en définir les termes, puisque ni Jacques Pélissard ni moi ne nous représentons. Il est clair que lorsque nous marchons tous ensemble, nous sommes très forts.De telles évolutions sont nécessaires, puisque nous devons préparer à la fois la fin du cumul de mandats parlementaires avec des exécutifs locaux et le mouvement de régionalisation des politiques publiques. L’AdCF a anticipé en créant un statut de « parlementaire associé », déjà opération-nel, et en renforçant son organisation en région. Le déploiement régional de l’AdCF sera fondamental pour soutenir l’action des communautés au sein des futures confé-rences territoriales de l’action publique (CTAP) où elles seront très présentes.J’ai également grand plaisir à constater qu’un nombre croissant d’élus cherchent à s’impliquer au sein des instances de l’AdCF. On retrouvera à la fois des élus expérimentés, mais aussi la nouvelle génération. L’effort de féminisation va se poursuivre, mais la tâche n’est pas simple quand on sait que seulement 6 % des présidents de communauté sont des femmes !

Quelle est la « feuille de route » que vous laissez à vos successeurs ? Ils n’ont pas de consignes à recevoir de ma part. Nous avons réuni nos universités d’été à Rennes, en juillet dernier, pour tracer les priorités de mandat et être précis dans nos propositions. Viendront ensuite les rendez-vous d’automne avec la loi NOTR et les lois de finances. Le nouveau contexte budgétaire va tout changer. On ne pourra plus financer les réformes avec des incita-tions ; il faut maintenant parler clairement et dire où l’on va. Je ne suis pas convaincu par les seuils démographiques uniformes, le seuil de 20 000 habitants me rend donc perplexe, mais il faut impérativement

poursuivre la constitution d’intercom-munalités fortes, à l’échelle des bassins de vie. Il serait d’ailleurs nécessaire d’agir dès maintenant, sans retarder le processus. Un grand débat sur les modes de désignation des élus intercommunaux et de leurs exé-

cutifs à l’horizon 2020 doit être engagé le plus rapidement possible. Faisons le bilan complet des récentes élections ; le fléchage n’est pas à la hauteur de ce que deviennent les communautés – sans même parler de nos métropoles – dans notre gestion terri-toriale. En Italie, Mattéo Renzi est parvenu sur ce point à accélérer le processus. C’est en fonction de cette réponse que l’on pourra envisager des scénarios d’évolution de nos conseils départementaux. Tout se tient. Ma conviction, y compris parce que les temps sont difficiles, est que nous devons nous projeter dans l’avenir et faire preuve, aujourd’hui plus que jamais, d’innovation et d’audace.

Propos recueillis par la rédaction

1- Président de la communauté d’agglomération Orléans Val de Loire

2- Ancien président de la communauté d’agglomération de Mantes-en-Yvelines

3- Président délégué de Mulhouse Alsace Agglomération

4- Député du Maine-et-Loire5- Ancien président de la communauté

d’agglomération Chambéry Métropole6- Ancien président de la communauté

d’agglomération Seine-Eure7- Président de Lamballe Communauté8- Députée de Seine-Maritime9- Vice-présidente de la communauté

d’agglomération du Lac du Bourget10- Présidente de la communauté

d’agglomération Valenciennes Métropole11- Président de la métropole Rouen

Normandie12- Président de Clermont Communauté13- Président de la communauté

de communes Beauce et Forêt

Le mandat a été marqué par une montée en compétences dans tous les domaines

Le nouveau contexte budgétaire va tout changer

En 2009, l’AdCF a adressé 40 propositions à Édouard Balladur, président du comité pour la réforme des collectivités locales. / © Lebrun

Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale et Marylise Lebranchu, ministre de la Décentralisation, à la Convention de Biarritz en 2012. / © Lionel Pagès

À l’Élysée le 30 octobre 2012, avec Gérard Collomb, président de l’ACUF, Michel Destot, président de l’AMGVF et Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. / © DR

Le Premier ministre Manuel Valls lors de la 10e Journée des présidents d’agglomération le 16 juin 2013. / © Lionel Pagès

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En brefBAISSE DES DOTATIONS DE L’ÉTAT

Les précisions du gouvernementLe 11 septembre dernier, les ministres Marylise Lebranchu, Christian Eckert et André Vallini ont confirmé devant les associations nationales de collectivités le programme triennal 2015-2017 de réduction des concours de l’État, ainsi que sa mise en œuvre linéaire (- 3,67 milliards d’euros par an sur trois ans). Une annonce qui inquiète les élus. Explications.

I ntervenant dans un contexte bud-gétaire très dégradé (prévisions de déficits revues en forte hausse) et

marqué par la volonté des partenaires européens de la France de voir cette dernière respecter ses engagements, la réunion du 11 septembre entre ministres et associations d’élus a,

sans surprise, confirmé l’objectif du gouvernement de réduire de 3,67 Md€ les concours de l’État aux collectivités dès 2015 et d’accroître cette réduc-tion à hauteur de 11 Md€ en 2017 (par rapport à l’année 2014). En 2015, la réduction des dotations au bloc local serait ainsi de 2,07 Md€ (1,148 Md€ pour les départements et 0,451 Md€ pour les régions).Conscients des efforts importants demandés aux collectivités, les ministres ont souhaité qu’un dialogue s’ouvre pour aider les collectivités à maîtriser les impacts de ces baisses sans sacrifier l’investis-sement public. Ils ont indiqué que le gouvernement allait créer une instance de « dialogue natio-nal des territoires », comme le souhaitait le rapport Malvy-Lambert. À ce sujet, le document remis par le gouvernement évoque la mise en place (en réalité la relance) de la Conférence nationale des finances publiques et l’association des collec-tivités à la définition d’un « objectif d’évolution de la dépense publique ».

Le secrétaire d’État au Budget a confirmé que le FCTVA resterait bien exclu de l’enveloppe normée, comme le demandaient toutes les associations. André Vallini a fait état, pour sa part, des chantiers engagés pour alléger les normes et réduire les coûts de gestion des services publics locaux.

L’inquiétude des élusÀ l’instar de la réunion précédente du mois de juillet, les interventions des représentants des collectivités ont consisté à rappeler à l’unisson que si les élus sont disposés à fournir des efforts, le programme de réduction devrait être plus étalé dans le temps. Nombre d’in-tervenants comme Jacques Pélissard (AMF), Olivier Dussopt (Association des petites villes de France) ou Pierre Méhaignerie (Villes de France) sont notamment revenus sur la question des normes et des dépenses imposées aux collectivités. Daniel Delaveau, au nom de l’AdCF, a plaidé pour la soutenabilité de l’effort demandé et la nécessité d’engager au plus tôt les efforts de mutualisation qui ne pro-duisent des effets que sur le moyen terme. Il a également souhaité que

l’effort demandé aux différentes admi-nistrations publiques soit calculé au prorata de leurs dépenses de fonction-nement. Le vice-président de l’AdCF, Loïc Cauret, a fait état de l’extrême inquiétude des agents territoriaux et de la nécessité de mettre en place un

important dialogue social dans les collectivités, au moment où chacun s’apprête à des arbitrages difficiles. Côté recettes fiscales, ont été évoquées par les élus la question du nouveau versement transport « interstitiel » des régions (M. Malvy au nom de l’ARF) sur lequel les collectivités doivent se prononcer avant la fin du mois d’oc-tobre sans pour autant disposer des textes d’application, ainsi que celle des exonérations prévues pour les entreprises de l’économie sociale et qui font courir un risque important de perte de recettes aux autorités organi-satrices (Jean-Luc Moudenc, président de l’AMGVF). Les élus ont également demandé des précisions quant aux menaces qui pèsent sur la taxe sur les spectacles, recette qui peut représen-ter un montant non négligeable pour certaines communes.

Des perspectives nouvellesSi la réunion aura surtout débouché sur la confirmation de certains arbitrages et quelques précisions, plutôt que sur des annonces majeures, le document remis aux participants mentionne, en revanche, des orientations qui

n’ont pas été commen-tées ni soumises à débat mais qui dessinent des perspectives nouvelles. Il en est ainsi de l’inten-tion affichée de fixer un objectif d’évolution de la

dépense publique locale, idée préco-nisée par plusieurs rapports publics récents (dont Malvy-Lambert) et qui s’inspire de l’Ondam en matière d’as-surance maladie, à la différence que l’Assurance maladie est un système centralisé et piloté nationalement alors que les collectivités constituent plus de 50 000 décisionnaires autonomes. Le gouvernement entend décliner cet objectif par catégorie de collectivités mais cela demeurera un exercice de responsabilité collective difficile à mettre en œuvre. Autre élément figurant dans le docu-ment : la volonté d’avancer en direction de la dotation forfaitaire territoriale pour les communautés urbaines et les métropoles. Déjà rendue possible par les lois RCT et Maptam soit à l’unanimité des communes (toutes intercommunalités) soit à la majorité qualifiée des communes (dans le cas des métropoles), une généralisation de la DGF territoriale aux grandes inter-communalités est à l’étude. Celle-ci fonctionnerait avec un schéma de répartition inspiré du FPIC.

La rédaction

En 2015, la réduction des dotations au bloc local serait ainsi de 2,07 Md€

Une généralisation de la DGF territoriale aux grandes intercommunalités est à l’étude

C’est la répartition de l’effort de réduction des dotations entre communes et com-munautés proposée par le

gouvernement pour 2015 à 2017, à savoir 70 % à la charge des communes et 30 % pour les communau-tés. Cette clé ne respecte pourtant pas les recettes de fonctionnement réelles, omettant de neutraliser les reversements financiers obligatoires aux com-munes (attributions de compensation). Nettes de ces dernières, les recettes réelles des communautés ne représentent que 23 % des recettes réelles de fonctionnement du bloc local.

La loi d’avenir agricole adoptéeLe 11 septembre, le Parlement a défini-tivement adopté le projet de loi d’ave-nir pour l’agriculture, l’alimentation et

la forêt. Ce texte crée notamment des commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) dont les prérogatives se trouvent renforcées par rapport aux CDCEA qu’elles sont amenées à remplacer. Cette commission pourra émettre un avis consultatif sur tout projet ou document d’aménagement ou d’urbanisme, à l’exception d’un PLU concernant des communes comprises dans le périmètre d’un Scot approuvé après la promulgation de la loi. Son avis est contraignant si elle est saisie sur un document d’urbanisme affectant des productions AOP.

Vieillissement : un projet de loi en cours d’examenLe projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement est actuellement en cours d’examen par

le Parlement. Sa première lecture par l’Assemblée nationale s’est achevée le 11 septembre. Ce texte contient un chapitre « Territoires, habitat et trans-ports » qui prévoit que les programmes locaux de l’habitat précisent « les réponses apportées aux besoins particuliers des personnes en situation de perte d’autonomie liée à l’âge ou au handicap, par le développement d’une offre nouvelle et l’adapta-tion des logements existants ». Par voie d’amende-ment, le gouvernement a également inséré dans le texte la création de conseils départementaux de la citoyenneté et de l’autonomie (CDCA) ainsi que la création d’un cadre juridique aux maisons départe-mentales de l’autonomie (MDA) créées par certains départements.

Le gouvernement a confirmé le montant et le rythme de la baisse des dotations de l’État. / © RGA / REA

70/30

Il l’a dit...

« Quant aux départements, vous le savez, le pragmatisme nous guide vers trois solutions. Dans les départements dotés d’une métropole – c’est l’exemple de Lyon –, la fusion des deux structures pourra être retenue. Lorsque le département compte des intercommunalités fortes, là, les compétences départementales pourront être assumées par une fédération d’intercommunalités. Enfin, dans les départements – notamment ruraux – où les communautés de communes n’atteignent pas la masse critique, le conseil départemental sera maintenu, avec des compétences clarifiées. »

Manuel Vallslors de sa déclaration de politique

générale du 16 septembre 2014

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Le Nord-Pas-de-Calais ou la région des transitions économiquesParler d’entreprises et de territoires lors d’une Convention de l’intercommunalité à Lille ne surprend pas quand on sait l’histoire et les enjeux économiques du Nord-Pas-de-Calais, région industrialisée durement touchée par la crise, qui amorce aujourd’hui un tournant impulsé par les partenaires publics aux côtés des acteurs privés. Un territoire à suivre de près.

L e Nord des corons, des usines textiles et des industries lourdes a marqué les esprits. Si l’industrie y est encore

une réalité assumée, l ’économie de la région s’est progressivement diversifiée, puis « verdie ». Une transition portée par les pouvoirs publics afin de sortir le terri-toire d’une histoire économique marquée par une phase de développement, puis un long déclin.Territoire d’échanges favorisé par sa situa-tion transfrontalière, sa proximité de la mer et sa topographie qui facilite le dévelop-pement des infrastructures de transports (chemin de fer notamment), la région se découvre, au début du XIXe siècle, des ressources importantes en charbon. En pleine révolu-tion industrielle, celles-ci font sa prospérité et participent à son industrialisation et à sa puissance économique. Si le Nord-Pas-de-Calais accueille, à cette même époque, de nombreux établissements d’enseignement technique supérieur, il est aussi le théâtre des luttes ouvrières et de la misère des cités minières et des travailleurs textiles.La région souffre durement au cours du XXe siècle : zone dévastée par deux guerres mondiales, le Nord-Pas-de-Calais bénéficie d’une reconstruction rapide au lendemain de 1945, mais sans diversification de son industrie : le déclin de l’activité minière entre les années 1950 et 1980 provoque sa plongée dans une crise économique grave. La création de la collectivité régionale Nord-Pas-de-Calais constitue toutefois l’un des leviers qui permet l’évolution, à partir des années 1980, d’une économie industrielle vers une montée en puissance du secteur tertiaire.

Une diversification limitéeL’économie régionale témoigne aujourd’hui d’une orientation marquée vers les services (dont notamment la vente à distance et l’e-commerce), mais voit le maintien d’une part importante d’activités industrielles (métallurgie, automobile, filière ferroviaire, agroalimentaire) et agricoles : les deux tiers de la superficie du territoire sont occupés par de grandes cultures intensives (céréales, betterave à sucre, lin, pomme de terre). Une étude de la Direccte Nord-Pas-de-Calais parue en 2012 précise qu’ « au cours de ces vingt dernières années, le tissu économique

régional converge vers le modèle métropo-litain du fait de la baisse de la part de l’in-dustrie au profit du tertiaire. Cette réalité régionale masque cependant des dispari-tés importantes au niveau infrarégional. (…) C’est la somme de ces spécialisations locales qui se complètent qui mène à cette normalisation régionale. »1 Cette même étude analyse la structure des activités économiques régionales par rapport à la France : elle remarque une convergence des deux modèles de répartition des activités, malgré toutefois un net retard du Nord-Pas-de-Calais en matière d’industrie de haute technologie (qui emploie 0,5 % des salariés de la région seulement, la plaçant au 20e rang national).

Vers une troisième révolution industrielle ?Au lendemain de la crise de 2008 qui, à nouveau, porte un coup dur à l’économie

de son territoire, le conseil régional s’engage dans une politique de transition appuyée sur les travaux du prospectiviste améri-cain Jeremy Rifkin. Un partenariat qui n’est pas « sorti de nulle part », selon Daniel Percheron, président du conseil régional, qui explique ainsi dans Régions Magazine2 : « Nous faisions déjà du Rifkin, nous parlions déjà le Rifkin sans le savoir. » Jeremy Rifkin est l’auteur d’un modèle de « troisième révolution industrielle » fondé sur cinq piliers : passage aux énergies renouvelables, développement de bâtiments producteurs d’énergie, construction de zones de stoc-

kage d’énergie, déploiement de l’internet de l’énergie et réinvention de la mobilité des personnes et des biens. Ces cinq axes, conjugués à trois

préoccupations majeures pour la région (efficacité énergétique, économique de la fonctionnalité, économie circulaire), ont jeté les bases d’un « master plan » pour le Nord-Pas-de-Calais, dévoilé lors du World Forum de Lille en 2012. Celui-ci verra sa mise en œuvre concrète dans un accom-pagnement et un soutien spécifique des projets qui s’inscriront dans sa vision par les deux porteurs de la « troisième révolution industrielle », à savoir le conseil régional et la chambre de commerce et d’industrie de région, établissement issu de la fusion de toutes les chambres consulaires d’une même région. Parmi les premières réalisations : un plan de réhabilitation des logements énergi-vores, un objectif zéro carbone pour l’uni-versité Lille 1, etc. Pour Daniel Percheron, par cette révolution, « nous assumons le Nord-Pas-de-Calais des corons, mais le tournons vers l’avenir ».

Apolline Prêtre

1- « Vingt ans de recomposition économique en région Nord-Pas-de-Calais », in Les Synthèses de la Direccte, n° 16, octobre 2012.

2- « Révolution en Nord », in Régions Magazine, supplément au n° 119, juin 2014.

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25e Convention de l’adCf Rendez-vous en  Nord-Pas-de-CalaisCette année, l’AdCF fête son quart de siècle en région Nord-Pas-de-Calais, le temps d’une escale à Lille Métropole placée sous le signe des alliances territoires-entreprises. Au programme pour les 2 000 congressistes attendus à cette 25e Convention nationale de l’intercommunalité : des temps de débats et de discussions sur la place des collectivités dans le développement économique des territoires et leur rôle vis-à-vis des acteurs économiques locaux, ainsi que sur les réformes territoriales en cours. Sans oublier une assemblée générale extraordinaire qui verra l’élection d’une nouvelle équipe à la tête de l’association.À cette occasion, Intercommunalités propose à ses lecteurs un zoom sur la région Nord-Pas-de-Calais et donne la parole aux collectivités partenaires de la Convention.

Nous assumons le Nord-Pas-de-Calais des corons, mais le tournons vers l’avenir

La région Nord-Pas-de-Calais en chiffres :

millions d’habitants en 2011, dont 75 % d’urbains

4,042

aires urbaines de plus de 250 000 habitants5

pôles de compétitivité nationaux7

pôles d’excellence économique14

région économique de France, avec un PIB de 100 milliards d’euros(mais 20e région française en termes de PIB/habitant)

4e

région française pour le taux de chômage2e

région françaisepourl’exportationagroalimentaire,l’agrobiotechnologieetlanutrition,ainsiqueladistribution

1re

région européennepourl’industrieferroviaire,laventeàdistance,l’e-commerceetlarecherchesurlestextilestechniques

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« Notre métropole doit compter à l’échelle européenne »

Cohésion intracommunautaire, passage en métropole, relations avec les collectivités voisines – en France mais aussi au-delà des frontières –, développement économique : Damien Castelain, président nouvellement élu de Lille Métropole, revient, pour Intercommunalités, sur les enjeux forts de son territoire et de son mandat.

Lille Métropole regroupe plus d’un million d’habitants et 85 communes dont la plus petite, Warneton, compte moins de 200 habitants. Comment la communauté urbaine assure-t-elle la cohésion entre centre et périphéries moins peuplées ? Lille Métropole a une particularité unique en France : elle compte 85 communes s’étendant sur 600 km2 et 1,2 million d’habitants, dont seuls 18 % résident dans la ville centre. La métropole lilloise est donc la métropole la plus agricole de France avec 44 % de son territoire concerné. Pluriel, composé de quartiers d’affaires en cœur urbain et de zones plus rurales comme les Weppes et le Mélantois, le territoire présente une réelle mixité sociale et fonctionnelle. Une vraie richesse ! Assurer la cohésion en donnant la priorité à l’emploi et en offrant à tous les habitants et usagers une qualité renforcée en matière de logement, de mobilité et d’accès aux services et aux équipements quel que soit leur lieu de résidence, telle est notre ambition. Pour relever ce défi et assurer un développement équilibré du territoire au bénéfice de tous les métro-politains, nous avons mis en place une gouvernance collective qui privilégie le dialogue et la collégialité.

Au 1er janvier 2015, votre communauté urbaine deviendra une métropole européenne. Que représente ce changement pour votre territoire ? Comment vous y préparez-vous ?Il s’agit d’une réelle opportunité. À mes yeux, cette transformation en métropole européenne représente bien davantage que la simple application d’une loi. Il importe d’aller au-delà et de s’approprier ce cadre juridique rénové. Notre métropole doit réellement compter à l’échelle européenne par sa capacité d’innovation, par sa créa-tivité et par son attractivité.

C’est l’état d’esprit qui nous guide dans la mise en œuvre des nouvelles compétences obligatoires que la loi confie aux métro-poles. Par exemple, j’entends mobiliser toutes ces compétences au service d’un aménagement durable et du développement économique du territoire au cœur d’une région engagée dans la troisième révolution industrielle.

C’est encore notre état d’esprit dans le travail de préparation de la prise de com-pétences optionnelles, travail que nous mènerons en dialoguant avec les com-munes, le département, la région et l’État. Je n’oublie pas, bien sûr, qu’à chaque nou-velle dépense devra correspondre une nou-velle recette, tout en assurant une stabilité fiscale à nos habitants et nos entreprises. La culture de la recette, c’est pour moi la condition sine qua non pour réussir cette réforme.

Le projet de loi de réforme territoriale présenté au Parlement devrait renforcer l’intercommunalité et les régions. On évoque la notion de « couple ». Comment voyez-vous l’évolution des relations entre votre communauté et la région Nord-Pas-de-Calais ? La région est d’ores et déjà un parte-naire privilégié de Lille Métropole pour construire nos politiques de développement économique et de transport. Ainsi, nos schémas de développement économique ont été élaborés pour coordonner étroite-ment nos actions. La métropole a d’ailleurs un rôle important à jouer pour l’attractivité et l’économie régionales.Mon objectif est qu’avec la loi Mapam, nous renforcions nos relations avec la région

pour une meilleure coordination de nos politiques. Placer la région en qualité de chef de file du développement économique et instaurer de nouveaux outils stratégiques rationaliseront les interventions respectives des différents acteurs. Parmi ces outils, je pense notamment au schéma régional d’intermodalité, auquel Lille Métropole sera étroitement associée.

Vous êtes pour un an président de l’Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai. Quels sont les axes forts de coopération frontalière, et en quoi l’Eurométropole participe-t-elle au développement de votre territoire ?Aujourd’hui, avec l’Eurométropole, nous repensons nos politiques publiques pour faciliter la vie des 2,1 millions d’habitants de ce territoire transfrontalier de 3 550 km².La force de ce groupement : s’appuyer sur une expérience de coopération de plus de

20 ans, réunir 14 institutions représentant tous les niveaux d’autorités françaises et belges, associer le monde économique et les acteurs de la société civile. Ensemble, nous coopérons autour de trois axes : déve-loppement socio-économique, mobilité et cadre de vie.

Pour être concret, le salon annuel de l’emploi de l’Eurométropole contribue au développement d’un bassin d’emploi trans-frontalier avec près de 36 000 visiteurs, 700 entreprises et 4 000 offres d’emploi. L’Eurométropole a aussi contribué à amélio-rer la fréquence, la ponctualité et le temps de trajet entre Lille, Courtrai et Tournai. Voyager entre Lille et les gares belges pour 8 euros aller-retour est maintenant possible et c’est moins cher qu’un billet national pour une distance équivalente !Grâce à l’Eurométropole, nous valorisons la complémentarité de nos territoires, dans notre stratégie touristique et économique et lors de grands salons internationaux. Notre coopération transfrontalière nous permet de changer d’échelle, au niveau des grandes métropoles européennes.

La 25e Convention de l’AdCF sera placée sous le thème de l’économie et des liens entreprises-territoires. Quels sont les grands enjeux économiques de votre communauté, et quel rôle souhaitez-vous tenir aux côtés des acteurs économiques locaux ?Notre action s’appuie sur le Plan métropo-litain de développement écono mique. Le fil rouge : proposer des conditions d’accueil et d’hébergement propices aux entreprises

et soutenir leurs démarches d’in-novation et de créativité. C’est le sens de notre politique « 1 000 ha à vocation économique ». Et notre ambition est aussi qualitative : réaliser les parcs d’activités du XXIe siècle, qui répondent aux exi-gences de développement durable, de densité urbaine et d’attractivité économique.Nos sites d’excellence (EuraTechno-logies, La Haute Borne, Eurasanté, Euralille, Plaine Images…) per-mettent d’attirer et de maintenir les entreprises et les emplois.Pour poursuivre ce dynamisme, nous avons candidaté à la label-lisation French Tech. L’objectif : faciliter la création et le développe-ment de start-up, championnes du numérique, à l’instar de la French

Tech City à Londres ou à San Francisco. Le Medef, la CCI et plusieurs entreprises nous ont soutenus dans ce véritable projet fédérateur : Bonduelle, EDF, ERDF, GDF, Orange, les groupes Doublet et Nacarat, ID Valeurs, La Redoute, Rabot Dutilleul, le Crédit Agricole et le Crédit Mutuel,

pour n’en citer que quelques-uns.Notre stratégie consiste aussi à faire du déve-loppement culturel et de l’accueil de grandes manifestations (cham-

pionnat d’Europe de basket en 2015, Euro 2016, championnat du monde de handball en 2017, grande exposition Modigliani…) un levier de développement économique.Au-delà de cette politique d’attractivité, notre action vise également à soutenir les PME et TPE, le commerce et l’artisanat de proximité ainsi que l’économie sociale et solidaire, créateurs d’emplois non déloca-lisables et de vitalité pour nos communes.Vous l’avez compris, nos objectifs sont ambitieux : l’essor économique mais aussi l’emploi, le cadre de vie, l’accessibilité, la connaissance, l’innovation, bref tout ce qui peut contribuer au développement harmonieux et au rayonnement de Lille Métropole !

Propos recueillis par Christophe Bernard

La transformation en métropole représente bien davantage que la simple application d’une loi

Grâce à l’Eurométropole, nous valorisons la complémentarité de nos territoires

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Damien CastelainPrésident de Lille Métropole view

Quatrième agglomération française par sa taille, Lille Métropole est composée de 85 communes et plus d’un million d’habitants. / © Shutterstock / Epiceum

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Lille Métropole soutient une politique culturelle ambitieuse et accessible à tousDès sa création, Lille Métropole s’est révélée précurseur en matière de culture. Trente ans plus tard, elle ne cesse de renouveler cette habitude.

L a démarche culturel le de Li l le Métropole ne date pas d’hier : elle est même « consubstantielle » à la

naissance de la communauté urbaine. « Dès sa création il y a 30 ans, Lille Métropole a financé le musée d’art moderne de Villeneuve-d’Ascq. Un tel investissement représentait, à l’époque, une démarche novatrice au sein des communautés urbaines », rappelle Olivier Henno, vice-président de la communauté urbaine en charge de la politique culturelle. Puis, avec la loi Chevènement et l’organisation de « Lille 2004, capitale européenne de la culture », Lille Métropole a pris le taureau par les cornes et s’est dotée de la compé-tence nécessaire pour soutenir les grands équipements et événements culturels.

Excellence et accessibilitéLes objectifs de Lille Métropole en matière de culture sont doubles : l ’excellence et l’accès à la culture d’un plus grand nombre d’habitants. « Le budget culturel atteint les 15 millions d’euros. Cela nous donne l’envergure pour être partenaires d’équi-pements tels que la Condition Publique, le LaM, l’Opéra de Lille. De la même façon, nous participons à Lille3000 ou à la future rétrospective Modigliani, programmée pour 2016 », souligne l’élu de Saint-André-lez-Lille. Lille Métropole participe ainsi au financement d’événements et de festivals culturels tel que les Toiles dans la ville (fes-tival des arts du cirque), le festival de danse contemporaine, la première édition de Lille

Design for Change, concours international de design, ou encore NEXT, le festival des arts vivants dont la sixième édition, en 2013, a attiré plus de 10 000 spectateurs. Lille Métropole consacre par ailleurs 750 000 euros aux Fabriques culturelles : « Elles sont nées de Lille 2004 et représentent autant de lieux de soutien à la création cultu-relle, qui visent à favoriser l’émergence d’artistes nou-veaux », explique l’élu com-munautaire. Depuis 2013, le dispositif d’accompagnement aux pratiques musicales des Fabriques, intitulé Tour de Chauffe, a même pris une dimension trans-frontalière : sept nouvelles structures et un partenaire flamand l’ont en effet rejoint. Pour ramener la culture au plus près des habitants du territoire, Lille Métropole

soutient le dispositif des Belles Sorties, une délocalisation des grands équipements comme le Théâtre du Nord, le Prato (arts du cirque), l’atelier lyrique ou l’Orchestre national de Lille dans des salles commu-nales. « Cela participe au rayonnement

de la métropole, à la démocratisation de la culture et cela donne envie aux gens de se déplacer la fois d’après », se félicite Olivier Henno. Lille Métropole encourage en outre l’accès à la culture grâce à une poli-

tique tarifaire attractive. En septembre 2013 en effet, est née la C’Art : pour 30 euros, ce pass consent un accès illi-mité pendant un an aux

cinq grands musées de l’agglomération. « À compter du 18 octobre, nous créons la Nuit des bibliothèques, un événement qui mettra la lecture publique à l’honneur. Nous nous efforçons aussi de numériser les œuvres des musées, ce qui permet à tout

un chacun de visionner certaines expo-sitions depuis la maison », poursuit l’élu communautaire.

Une attention au rayonnement culturel de la métropole« À tout moment, la compétence culturelle est envisagée sous l’angle de la plus-value communautaire : il n’est pas question de se substituer aux communes. Nous par-ticipons d’ailleurs aux manifestations culturelles à hauteur du financement consenti par les communes elles-mêmes. » Le soutien de Lille Métropole passe par un appel à projets annuel, qui sollicite les communes et les associations.

Stéphanie Marseille

À Villeneuve-d’Ascq, au cœur d’un parc de sculptures, le LaM abrite la plus importante collection française d’art brut. / © Lille Métropole / Vincent Lecigne

Objectifs : excellence et accès du plus grand nombre à la culture

Une future « Métropole French Tech » ?Consciente des enjeux du numérique sur son territoire, Lille Métropole brigue aujourd’hui la labellisation « Métropole French Tech ».

À l’instar de 15 autres collectivités, Lille Métropole a déposé son dossier de candidature pour obtenir le label

French Tech. But affiché : « Faire de la France un accélérateur de start-up », adossé à un réseau d’écosystèmes attractifs forte-ment soutenus par les collectivités locales.

Les métropoles candidates sont jugées à l’aune de leurs efforts préexistants pour stimuler le tissu des entreprises numé-riques locales, tout autant que sur leur capacité à mettre en œuvre une stratégie de développement du territoire.

Un enjeu de développement territorial« L’enjeu actuel est de savoir si on est capable, aujourd’hui, d’implémenter, sur le territoire, l’efficacité permise par le numérique », décrit Akim Oural, conseiller

de Lille Métropole à l’économie numé-rique. Aux dires de l’élu lillois, les champs d’intervention sont vastes. « Cela concerne l’ensemble des services qui font remonter les problématiques de voirie, de propreté, de dégradation de l’espace public, par exemple. Toutes les solutions techniques

qui permettent au citoyen de remonter l’existence d’un pro-blème auprès de la mairie, en vue d’une résolution. Cela concerne aussi la thématique des smart grids et des déficiences énergé-tiques, l’emploi des ressources,

leur production et distribution. Mais cela touche également à l’école, au travers du coding , ou encore la numérisation des œuvres d’art pour les mettre à disposition d’un public plus large », énumère-t-il.

Les atouts de Lille MétropoleLa métropole n’est pas novice en la matière. Grâce au programme Investissements d’avenir, Lille Métropole a également obtenu la labellisation « territoire leader du mobile sans contact ». Le but : construire la « ville servicielle ». « Nous avons en effet

développé un intergiciel : une plateforme qui touche à plusieurs domaines, avec plusieurs applications métiers, tels que les métiers de la culture, du sport, des transports, de la voirie... Nous promou-vons également un projet de carte cantine identique pour toutes les communes du territoire », reprend l’élu. Mais la dyna-mique est plus ancrée encore : « J’ai tra-vaillé avec Fleur Pellerin, en tant qu’élu local, sur la dynamique des quartiers numériques. À Lille, nous avons requalifié le bâtiment Le Blan-Lafont dans le parc EuraTechnologies, situé dans l’écoquartier

des Rives de la Haute Deûle. C’est un lieu emblématique qui, de friche industrielle, devient un message pour l’avenir. C’est un lieu symbolique qui concentre les relations avec les entrepreneurs », souligne Akim Oural. Lille Métropole offre ainsi un support technique, logistique mais aussi d’ingénierie aux projets des communes de l’agglomération. « L’idée consiste à créer un espace d’échanges et de dialogue entre les entreprises. Il s’agit d’apprendre à parler la même langue, dans le privé et le public, quand on est confronté aux mêmes pro-blématiques », conclut l’élu. SM

L’enjeu est d’implémenter, sur le territoire, l’efficacité permise par le numérique

Critères d’obtention du labelLes candidats qui briguent le label French Tech doivent répondre aux critères suivants :

• un écosystème entrepreneurial exis-tant parmi les plus remarquables en France ;

• une stratégie ambitieuse de dévelop-pement de cet écosystème ;

• des acteurs du territoire mobilisés et fédérés autour de cette stratégie ;

• des programmes opérationnels au service de la croissance et de la visi-bilité des start-up et entreprises de croissance du territoire ;

• des espaces identifiés et des infras-tructures favorables au développe-ment de ces entreprises.

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Le territoire de Lille Métropole concentre de nombreux sites aux sols pollués : dans quel état sont-ils aujourd’hui ?Les terrains ont été pollués par près de deux siècles d’activité industrielle. Sur ces sites, Lille Métropole a initié une démarche très qualitative de gestion et de traitement de la pollution. Le site de l’Union est d’ailleurs pilote en la matière et a reçu le label d’écoquartier. Un livret de communication a été réalisé pour présenter la méthode d’intervention sur les pollutions et le site est considéré comme une référence nationale dans ce domaine.

Quelles sont les exigences de Lille Métropole en matière de réhabilitation des friches industrielles ? Les ambitions de l’intercommunalité sont d’intervenir dans un cadre économique, environnemental et social adapté à chaque projet. La réutilisation des friches permet également de contribuer à limiter l’étalement urbain. L’optimisation du réemploi des

matériaux de déconstruction, du recyclage des terres polluées, sont des sujets sur lesquels la métropole travaille. L’enjeu est de parvenir à concevoir des opérations où les enjeux sanitaires sont pris en compte tout en permettant une gestion durable des eaux,

en limitant l’envoi de matériaux en décharge grâce à leur réutilisation dans le respect de la législation en vigueur. Par exemple sur la zone de l’Union, les terres sont triées pour pouvoir être réutilisées sur le site. Enfin, d’autres dimensions peuvent intéresser ces sites, comme par exemple la production d’énergie renouvelable.

Quel est le résultat des requalifications ?Les friches retrouvent souvent des voca-tions mixtes : logements, petites activités artisanales et commerciales insérées dans un tissu urbain dense qui ne se prête pas à des activités économiques lourdes telles qu’elles

sont exercées aujourd’hui (réglementation en matière de sécurité incendie nécessitant de grands espaces, voiries permettant l’accès à des semi-remorques…). Néanmoins, les sites qui présentent les caractéristiques pour redévelopper de l’activité sont orientés vers

cette fonction, c’est le cas du site de La Lainière à Roubaix, par exemple. D’autres vont trouver une vocation d’espaces naturels, comme le site PCUK à Wattrelos.

Quel est le montant de l’investissement de Lille Métropole dans la réhabilitation des friches ?Il n’y a pas un poste spécifique relatif à la réha-bilitation des friches, car presque toutes les grandes opérations d’aménagement portées en renouvellement urbain sur le territoire communautaire concernent des friches industrielles. Pour la période 2007-2014, Lille Métropole a conventionné pour un montant de 188 millions d’euros avec l’Établissement public foncier, qui rachète pour son compte d’anciens sites industriels pour remettre à niveau le foncier. Ces actions visent à préparer les sites qui seront ensuite aménagés.

Propos recueillis par SM

Pilier de l’Eurométropole Lille-Kortrijk-TournaiLille Métropole participe activement à l’Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai. But du jeu ? Promouvoir le développement du territoire grâce à une coopération transfrontalière renforcée.

C réé en 2008, le groupement euro-péen de coopération territoriale Eurométropole Li l le-Kortrijk-

Tournai comprend 147  communes belges et françaises. Il s’étend sur 3 550 km2, compte 2,1 millions d’habitants et deux langues officielles : le français et le néerlandais. Son but ? Développer des projets en direction des habitants, des chefs d’entreprise et des associations présents sur son territoire. Et affirmer une image collective attractive, susceptible d’attirer les investisseurs.

Promouvoir une image collectiveSes 14 membres représentent quatre niveaux de gouvernance : les États belge et français, le département du Nord et les provinces belges de Flandre-Occidentale et de Hainaut, l’intercommunalité Lille Métropole, et quatre de ses consœurs belges aux compétences légèrement différentes. Les 14 membres disposent de 84 repré-sentants, qui constituent une assemblée. Ce sont eux qui élaborent les stratégies du groupement. Ils sont secondés par l’Agence de l’Eurométropole : une équipe

d’une dizaine de collaborateurs belges et français chargés de mettre en œuvre les démarches, d’accompagner les projets, de faciliter les échanges. Car l’Eurométropole n’exerce aucune compétence en propre : elle s’appuye sur celles de ses membres. La présidence du groupement est tournante, alternant entre un président français et un président belge. Quand vient le tour de la Belgique, la présidence se divise entre un président flamand et un président wallon. Le président est épaulé par trois vice-pré-sidents, représentant la France, la Flandre et la Wallonie. La collégialité du travail en assure la continuité, l’alternance de la pré-sidence représente l’aiguillon qui stimule la créativité et le dynamisme de chacun. Le groupement de coopération a effectué un gros travail pour promouvoir le tou-risme sur le territoire : il existe désormais un guide Lonely Planet, un plan guide de l’Eurométropole pointant tous les sites à visiter et un site internet dédié. De même, l’Eurométropole s’efforce d’harmoniser les informations disponibles sur les sites de la SNCF et de la SNCB concernant les mêmes lignes. Soucieuse de booster l’éco-nomie, l’Eurométropole a mis sur pied un fonds de soutien à l’innovation ainsi qu’un forum de l’emploi qui tourne entre Lille, Kortrijk et Tournai, et cherche à mieux accompagner les demandeurs d’emploi

du territoire en attirant leur attention sur toutes les opportunités transfrontalières.

Épauler les projets entre communes belges et françaisesTous les deux ans, l’Eurométropole orga-nise une conférence des maires et des bourgmestres des 147 communes. Au nombre des coopérations fructueuses nées entre communes, peut par exemple être citée la requalification d’une place publique commune à Halluin, côté français, et à Menin, côté belge. Certes, l’opération a concerné l’aménagement de l’espace public et des commerces. Mais pas seulement : la requalification a nécessité un intense travail juridique et beaucoup d’échanges sur la façon d’appréhender cet espace public transfrontalier. Il a en effet fallu s’accorder sur la façon d’organiser des événements publics sur cette place et d’y gérer le public, sur quoi faire si un délinquant d’un pays franchit la « frontière » située en plein milieu de la place pour gagner le pays d’en face, etc. Cette réflexion menée par l’Euro-métropole a débouché sur l’édition d’un petit guide pratique de gestion de l’espace public transfrontalier, qui peut servir à toutes zones transfrontalières. Baptisée place Jacques-Delors, la place publique binationale sera inaugurée le 21 novembre prochain. SM

Français, Flamands et Wallons conjuguent leurs efforts pour réaliser ensemble des projets d’intérêt commun. / © Lille Métropole / Pascaline Chombart

« Lille Métropole consacre 188 millions d’euros aux requalifications de friches industrielles »

Les friches industrielles abondent sur le territoire de Lille Métropole. Loin d’y voir un fléau régional, l’agglomération les transforme petit à petit en lieux de vie et de développement économique, comme nous l’explique Gérard Caudron, vice-président de la communauté urbaine en charge de l’urbanisme opérationnel.

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Gérard CaudronVice-président de Lille Métropole en charge de l’urbanisme opérationnel view

Les friches lilloises en chiffresNombre de friches industrielles sur le territoire communautaire : 160, soit 50 % des friches industrielles en France

Anciens sites industriels ou de services : 6 700, soit 40 % des sites régionaux sur 5 % du territoire

Taille : environ 400 ha

Objectifs des requalifications : développer des emplois en aménageant 1 000 ha d’activités économiques, offrir 10 000 ha d’espaces naturels, tout en maîtrisant l’extension urbaine et en protégeant les espaces agricoles

Cadre de l’action de Lille Métropole : le rapport de la mission communautaire dédiée aux « friches industrielles et pollutions historiques », rendu en 2010 et qui contient 53 propositions. Celles-ci sont mises en œuvre par la délibération cadre « des friches industrielles à la régénération urbaine », votée à l’unanimité en juillet 2011.

Notre ambition est d’intervenir dans un cadre économique, environnemental et social adapté à chaque projet

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« Nous sommes engagés dans une troisième révolution industrielle »

Les 8, 9 et 10 octobre 2014, la Convention de l’AdCF sera placée sous le signe des relations territoires-entreprises. Une thématique que le Nord-Pas-de-Calais, partenaire de cet événement, connaît bien : marquée par une crise économique sévère, la région s’est lancée dans une « troisième révolution industrielle » afin de relancer son développement. Explications de Daniel Percheron, président du conseil régional.

La carte intercommunale en Nord-Pas-de-Calais se caractérise par la présence de 14 grands groupements intercommunaux urbains. Comment se positionne la région dans l’animation des communautés de son territoire ? C’est avec beaucoup de satisfaction et d’in-térêt que nous prenons acte de la réussite de l’intercommunalité en France et particuliè-rement en Nord-Pas-de-Calais. L’intercom-munalité à la Chevènement est un chef-d’œuvre d’équilibre et d’intelligence territoriale. Par conséquent, le dialogue est permanent, l’échange est respectueux et le dynamisme toujours partagé, dans une région encore en proie à la désindustrialisa-tion. Bien entendu, c’est à la fois avec un certain scepticisme et une certaine angoisse que nous voyons un parti social-démo-crate comme le nôtre bousculer, dans une certaine précipita-tion, cette France des territoires.

La Convention 2014 de l’intercommunalité, que vous contribuez à accueillir, aura pour thème central la relation territoires-entreprises. Quelle est la stratégie de la région en matière de soutien à l’économie régionale ? Le Nord-Pas-de-Calais a été le cœur indus-triel de notre pays. Sa mémoire génétique sans cesse sollicitée lui rappelle réguliè-rement qu’il n’y a pas de grandes régions sans grandes entreprises, qu’elles soient d’ailleurs publiques ou privées (automo-bile, sidérurgie, textile). La stratégie de

la région est simple. Dans le processus « création-destruction-création », qui est au cœur de l’économie de marché, le Nord-Pas-de-Calais vit depuis 40 ans le dos au mur. Et pour sa culture, profondément ouvrière, la destruction l’a emporté sur la création. Hélas, notre taux de chômage (12,8 %) le démontre. À l’heure de la com-pétition mondiale qui fait rage, l’échelon régional, pertinent, la volonté régionale, totale, le consensus régional, réel, se mobilisent désormais autour de la créa-tion d’entreprise et de l’innovation. Ainsi avec Jeremy Rifkin, le prophète américain

de l’économie durable, nous nous sommes engagés dans la création.

C’est celle de notre transition éner-gétique, de la troisième révolution industrielle, de ses filières nouvelles et de ses promesses d’emplois nou-veaux. Bien sûr, cette politique de

création trouve son sens dans sa liaison avec nos territoires et nos intercommunalités, pleinement actifs aux côtés des universités, des entreprises et des associations.

Le projet de loi NOTR prévoit d’accorder une valeur juridique renforcée aux schémas régionaux. Comment s’organisent les rapports entre la région et les territoires autour des schémas dont celle-ci a la responsabilité ?Schémas régionaux de développement économique, d’aménagement et de déve-loppement durable, de la recherche et de l’enseignement supérieur… nous avançons

avec les territoires, avec nos partenaires économiques et sociaux d’un même pas lors de leur élaboration. La concertation est perma-nente. Cela relève aussi du consensus régional que j’évo-quais précédemment. C’est

pourquoi nous sommes prêts à franchir cette nouvelle étape prévue dans le projet de loi NOTR, sans excès de confiance, sans excès d’arrogance, mais naturellement.

Propos recueillis par CB

« Les élus départementaux sont prêts à débattre »Quel travail mène le département, partenaire de la 25e Convention de l’AdCF, avec le bloc local ? Quelles visions portent ces élus sur les perspectives esquissées par le projet de loi NOTR ? Réponses de Didier Manier, vice-président.

L’intercommunalité dans le département du Nord a profondément évolué ces dernières années. Ces évolutions ont-elles amené le conseil général à modifier sa politique en direction des territoires ? Les intercommunalités sont, pour le dépar-tement, des partenaires de longue date. À l’origine, nous leur apportions notre soutien via nos politiques thématiques : culture, sport, tourisme ou développement économique. Puis nous avons eu l’idée de mieux struc-turer nos interventions en direction des territoires : ne plus agir au coup par coup sur une logique de « guichet » mais agir de manière plus structurée, sur une logique de projet. Le département du Nord s’est ainsi lancé, en 2009, dans une politique de contractualisation avec les territoires, afin de bâtir à l’échelle des Scot des stratégies d’aménagement et de développement parta-gées. L’objectif au cœur de la démarche était de faire travailler les collectivités sur des projets structurants à des niveaux supra-communaux et supra-intercommunaux. Par exemple, le Cambrésis est confronté

à des problèmes d’inondation. Dans le cadre du contrat, plusieurs communes ont déposé individuellement un projet d’action. Le rôle du département a été de les regrouper et de montrer qu’il était plus judicieux de réfléchir collectivement aux réponses à apporter. Cette politique des contrats de territoire a donc créé de nouvelles synergies locales dans une période de refonte de la carte intercommunale qui n’était pas la plus propice au dialogue entre élus com-munaux et intercommunaux.

Le projet de loi NOTR envisage des réaffectations de compétences départementales. Dans le Nord, comment pourrait s’envisager une réorganisation de l’échelon départemental ? Je pense que les élus départementaux sont prêts à débattre autour du rôle de la collecti-vité départementale, mais nous souhaitons également poser nos limites. Avant d’être inscrite à l’ordre du jour au Parlement, la réforme territoriale aurait

mérité une véritable réflexion associant les élus locaux mais également nos conci-toyens : c’est un acte manqué du gouver-nement. Pour autant, nous ne sommes pas

hostiles aux évolutions institutionnelles. D’ailleurs, dans notre région, nous avons déjà amorcé des rapprochements entre nos collectivités, officialisés par la Convention 59-62 qui organise la mutualisation de poli-tiques communes entre le Nord et le Pas-de-Calais en matière de mobilité, gestion des programmes européens, réhabilitation des cités minières, etc. En outre, il faut rappeler que les départe-ments ont démontré leur capacité à s’adap-ter et assumer les nombreux transferts de charges qui sont intervenus dans les domaines de la solidarité, de la voirie, des collèges ou encore du handicap dans des conditions financières particulièrement

défavorables. C’est pourquoi la réforme territoriale ne peut s’envisager sans une réforme de la fiscalité locale et une réflexion sur les moyens accordés aux collectivités. Il est indispensable de restaurer notre auto-nomie financière, corollaire de notre libre administration. La situation actuelle est très inquiétante, notamment sur le plan de l’investissement public. De plus, la nouvelle organisation territoriale doit prendre en compte les enjeux d’effi-cacité et de proximité du service public. Nous sommes opposés au dépeçage de nos compétences selon une démarche tech-nocratique pour des raisons d’économies budgétaires qui, à l’heure actuelle, sont loin d’être évidentes. Plus que jamais, nos territoires ont besoin d’un niveau intermédiaire entre des grandes régions stratégiques et des communes et intercom-munalités bien trop petites pour assurer une véritable péréquation en mesure de réduire les inégalités. Dans le contexte de fractures que l’on connaît aujourd’hui, le rôle du département, garant des solidarités territoriales, doit être réaffirmé.

Propos recueillis par AP

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Didier ManierPrésident du conseil général du Nord view

Daniel PercheronSénateur, président de la région Nord-Pas-de-Calais view

Le Centre européen des textiles innovants met en exergue l’importance du secteur textile dans la région et son dynamisme. / © Région Nord-Pas-de-Calais

La réforme territoriale ne peut s’envisager sans une réforme de la fiscalité locale

Notre politique de création d’entreprise trouve son sens dans sa liaison avec nos territoires

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Définir sa stratégie

Les projets de territoire passés au cribleDepuis sa création, l’AdCF promeut une intercommunalité de projet, réunissant des communes autour d’une vision de l’action publique locale, organisée en fonction des ressources du territoire et des enjeux auxquels celui-ci se voit confronté. Le projet de territoire constitue l’outil idoine pour tendre vers cet objectif. Alors que s’engage une nouvelle mandature, occasion fréquente de révision de ce document fondateur, l’AdCF a initié un travail d’étude des projets de territoire, dont les résultats sont présentés en avant-première dans ce dossier.

L a conduite d’un diagnostic partagé, la mobilisation des acteurs du terri-toire, la détermination d’une stratégie

territoriale, l’identification des priorités dans un plan d’action, la mobilisation des partenaires institutionnels (État, région, département) sont autant d’exercices pos-sibles pour bâtir un projet de territoire. L’enquête lancée par l’AdCF en mai dernier, les interviews menées auprès d’élus et tech-niciens sur leurs pratiques et la lecture de nombreux projets ont permis d’apprécier les méthodes employées et de sonder les motivations de nos interlocuteurs.

Un cadre juridique mouvantLe contexte amène à s’interroger sur cet exercice lourd que représente la construc-tion d’un projet de territoire. Réforme de la taxe professionnelle négociée en 2009, loi de réforme des collectivités adoptée en décembre 2010, loi Valls en 2013 introdui-sant le scrutin universel direct des délégués communautaires dans les communes de plus de 1 000 habitants, loi Maptam de janvier 2014, mise en place de la péréqua-tion en 2012, baisse des dotations de l’État, jurisprudence de juillet 2014 du Conseil constitutionnel menaçant les accords de répartition des sièges entre communes,

etc. Le cadre juridique et financier des communautés est mouvant, soumis à des évolutions qui se succèdent à un rythme soutenu et qui touchent les fondements de l’organisation intercommunale : périmètre,

compétence et gouvernance. Les projets de loi annoncés vont à nouveau modifier ces fondements. Cette instabilité juridique et financière est-elle propice à l’élaboration d’un projet de territoire ?

Un catalyseur des énergies localesLa loi Voynet de 1999 a reconnu cette notion de projet de territoire en se gardant d’en délimiter strictement les contours. Une liberté qui a permis aux élus d’adapter à leur contexte et à la maturité de leur inter-communalité cet exercice dont la portée est forte de leur engagement politique. Il en résulte une grande diversité de pratiques, de formes et de contenus avec quelques récurrences. Ainsi, notamment parce que

la loi l’encourageait, les conseils de déve-loppement sont régulièrement mobilisés pour construire et évaluer les projets. Des pays, des parcs naturels régionaux sont également porteurs d’un projet de

territoire qui peut venir en recouvrement de ceux de communautés. Là encore, la diversité s’exprime. Des com-munautés s’en réjouissent, disposant ainsi d’un cadre pluriannuel et concerté dans lequel inscrire leur action ;

d’autres déplorent le décrochage entre les exercices et le trouble provoqué lors de la diffusion des documents. L’affirmation, par la loi Maptam, de la responsabilité des communautés dans le pilotage des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux devrait faciliter les articulations à opérer.Dans leur très grande majorité, les terri-toires disposant d’un projet s’en félicitent. Cette feuille de route catalyseur des éner-gies locales est inscrite sur le temps d’un mandat ou à une portée de plus long terme quasi prospective. Elle figure finalement comme un repère, un fil à plomb, dans un environnement instable, impliquant une mise en œuvre pragmatique.

Christophe Bernard

Dans leur très grande majorité, les territoires disposant d’un projet s’en félicitent

Méthodologie d’enquêteL’étude sur les projets de territoire des intercommunalités s’est dérou-lée de mars à septembre 2014, avec une approche tant quantitative que qualitative.

L’AdCF a lancé un questionnaire auprès des 2 145 communautés existantes ; 323 communautés y ont répondu, com-munautés de communes pour les trois quarts, communautés d’aggloméra-tion ou urbaine pour le quart restant, selon un échantillon représentatif de l’ensemble des communautés en termes de strates démographiques (une majorité comptant moins de 20 000 habitants). Les DGS ou DGA des communautés représentent la majorité des répondants (63 %), avant les agents (25 %) et les élus communautaires (11 %).

Durant un second temps plus qualitatif, une quarantaine de projets de territoire ont été lus et analysés. Douze entretiens ont été menés avec des acteurs variés (élus communautaires, DGA , DGS, agents, chercheurs et consultants). Ce travail a permis de cibler quelques cas d’étude précis afin de mieux appréhender les contextes territoriaux, les jeux d’acteurs et les pratiques d’élaboration des projets.

OCTOBRE 2014 • N° 193 • www.adcf.org

DOSSIER PROJETS DE TERRITOIRE10

Page 11: DOSSIER P.10 PROJETS DE TERRITOIRE Tracer sa feuille de route

Pour quoi faire ?Référence pour inscrire l’action des intercommunalités dans un cadre pluriannuel et partagé, le projet de territoire n’est pourtant pas encore totalement généralisé. L’enquête menée par l’AdCF permet de mieux cerner les communautés qui en disposent, d’apprécier leurs motivations et de relever les limites de cet exercice.

P ourquoi faire un projet de terri-toire ? Quelles raisons guident le choix d’une communauté d’opter

ou non pour ce document stratégique ? Le travail d’enquête mené par l’AdCF révèle un certain consensus autour de l’intérêt de cette démarche, ainsi que certaines limites relatives à l’histoire du territoire, à la maturité de l’action ou au manque

de portage politique. Le cadre juridique et la forme du projet de territoire ne sont toutefois pas remis en cause : les résultats et témoignages recueillis laissent ainsi à penser que la généralisation de ces projets est une tendance confirmée.Si seule une toute petite majorité de com-munautés en dispose (49 %, et 26 % le pré-voient), le projet de territoire se révèle plus fréquent dans les espaces urbains (59 %) que dans les territoires ruraux (46 %) ou périurbains (45 %). Ces derniers, faute de moyens techniques (« la structure est de taille modeste »), parce qu’ils n’en per-çoivent pas l’utilité ou parce qu’ils ins-crivent leur action dans le cadre territorial et stratégique plus large d’un pays ou d’un parc naturel régional (PNR), sont moins disposés à s’en doter.Ainsi, après les élections de 2008, la com-munauté de communes Sèves Taute voulait se doter d’un plan d’action et travailler avec les citoyens. Le PNR des marais du Cotentin et du Bessin, innovant en matière de développement durable, a poussé la communauté à se doter d’un Agenda 21. Cette première démarche a ensuite permis la mise en place d’un projet de territoire intercommunautaire à l’échelle du pays de Coutances.

Des réticencesPlusieurs communautés, non dotées de projet ou qui indiquent qu’il est à venir, avancent à plusieurs reprises le besoin de

passer le cap d’une exten-sion de périmètre ou d’une fusion qui ont concentré l’attention sur des aspects administratifs, financiers et de ressources humaines : « la communauté vient de s’élargir », « le périmètre actuel a été défini il y a

seulement un an ». L’absence d’intérêt des élus (« on s’en tient à la mise en œuvre des compétences ») ou un « fonctionnement sur un programme annuel à court terme » sont

également signalés pour expliquer l’absence de projet, tout comme le manque de maturité de l’action commu-nautaire : « la communauté manque d’ambition poli-tique fédératrice, la logique de guichet et non de projet est encore trop présente ». Enfin, des réticences s’expriment : « le projet de territoire peut présenter un effet carcan, surtout s’il est formalisé ».

Une feuille de route utileLes communautés disposant d’un projet ne regrettent pas leur investissement. Celui-ci est estimé très utile (61 %) ou utile (33 %). La feuille de route qu’il représente est l’intérêt premier (25 % des réponses), vient ensuite le rassemblement des acteurs qu’il permet (19 %), puis l’affirmation de l’identité de la communauté (17 %). L’utilité, dans le cadre d’une montée en compétence, est soulignée par plusieurs communautés enquêtées, notamment pour « donner du sens ». La prise de recul, permise par la démarche, est aussi illustrée par l’étape du diagnostic.Les témoignages recueillis confortent l’intérêt du projet pour orga-niser l’action entre communes et commu-nauté (13 %) : il « canalise les initiatives », permet « aux élus des 28 communes de

prendre du recul en commun ». Il est même mentionné comme une étape préalable à l’écriture d’un pacte financier voire pour « élaborer en parallèle un plan pluriannuel d’investissement et un schéma de mutua-lisation des services ».Disposer d’un projet de territoire, c’est aussi gagner en « légitimité vis-à-vis des acteurs institutionnels », notamment pour

s’engager dans une contractualisation. Une communauté souligne qu’il favorise l’affir-mation de son territoire face à l’agglomé-ration voisine. La passation d’un contrat avec la région figure parmi les éléments déclencheurs (à l’image de la communauté d’agglomération du Douaisis qui souhaitait mettre en place une stratégie globale et européenne). La légitimité porte également en direction de la population et des parte-naires locaux, la communauté « affirmant son identité ».L’impact sur les services communautaires est souligné. Les techniciens « gagnent en visibilité », « en identification des priori-tés ». Alliant le politique et le technique, la communauté du Bassin de Pompey sou-ligne que le projet intervient comme un « outil de pilotage politique et managérial de la collectivité ».

Des limites à rapprocher des objectifs initiauxSi le projet de territoire a été instauré par la loi d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire de

1999 (loi Voynet) pour les communautés urbaines et les communautés d’agglomé-ration, il n’est pas cadré dans sa forme et est dépourvu d’effet au plan juridique. Pour autant, il peut être ressenti comme un « document lourd ».Son adoption n’implique pas de mise en adéquation d’autres documents. Cette limite est relevée par certains (22 % des

réponses) sans qu’elle soit majeure ; des commentaires recueillis contrebalancent cette faiblesse en insistant sur la portée politique du document, qui néanmoins peut se perdre au fil du temps.La difficulté à fédérer les acteurs

autour d’une démarche commune est une limite plus marquée (30 %) qui contraste avec les effets de mobilisation mentionnés précédemment. Le manque de portage politique (25 %) y fait écho.L’instabilité juridique, financière et la révi-sion répétée des périmètres affaiblissent la portée du projet de territoire, dont la mise à jour n’est pas nécessairement assurée. Les financements des projets inscrits sont rare-ment détaillés et risquent d’être affectés par les réductions de dotations que pré-voient les élus et cadres communautaires. Un DGS résume la situation en précisant : « Le projet de territoire peut ne pas être mis en œuvre vu les différentes évolutions exo-gènes auxquelles sont très régulièrement soumises les collectivités (nouvelle donne fiscale, baisse des dotations, transferts de compétences, mouvements de fusion). »Enfin, le caractère vague et imprécis ne semble être qu’un obstacle marginal (10 %). Chacun semble s’arranger du cadre souple en évitant deux écueils : « Trop global, il n’a pas d’intérêt, trop détaillé, il n’y a pas de priorité. » CB

Le projet de territoire se révèle plus fréquent dans les espaces urbains que ruraux ou périurbains

La feuille de route qu’il représente est son intérêt premier, avant ses aspects fédérateur et identitaire

Urbain Périurbain Rural

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11DOSSIER

Page 12: DOSSIER P.10 PROJETS DE TERRITOIRE Tracer sa feuille de route

« Mieux maîtriser l’avenir de son territoire dans un contexte d’incertitudes »

Comment qualifier et analyser les démarches d’élaboration de projet de territoire dans les communautés de communes, d’agglomération et urbaines ? Fort de l’expertise du centre de ressources Etd, qui s’appuie sur un travail d’étude, de formation et d’accompagnement des territoires, Gilles Rey-Giraud répond aux questions d’Intercommunalités.

L’appellation « projet de territoire » est une notion très large et peut désigner des démarches variées. Qu’est-ce qui différencie les projets des pays de ceux des intercommunalités ?Les différences tiennent à la nature et aux statuts de ces territoires. Les pays ont été créés par la loi en tant que territoires de projet, sans compétences déléguées : l’élaboration d’une stratégie de développement territorial est donc leur

vocation première, mais pas la maîtrise d’ouvrage d’actions qui sont du ressort des intercommunalités et communes qui les composent. De ce fait, la difficulté majeure pour un certain nombre de pays a été de tra-duire une stratégie en actions portées par les intercommunalités et/ou les communes.À l’inverse, les intercommunalités se sont construites sur la gestion de compétences. Le passage à l’élaboration d’une stratégie de leur territoire ne s’est souvent fait que dans un second temps, mais c’est un mouvement qui s’accélère au fil du temps, une fois la prise de compétences digérée.

Portez-vous un regard spécifique sur les projets des communautés ? J’ai le sentiment que l’élargissement récent ou futur des périmètres d’un nombre important de communautés peut être un frein à l’élaboration d’un projet territo-rial, la préoccupation première revenant à des questions d’harmonisation des compétences et de gestion des ressources humaines. Un effort d’animation, de péda-gogie et de coordination politique et tech-nique sera donc encore nécessaire.

Cela dit, il y a eu un passage progressif de l’intercommunalité de gestion et d’action à celle de projet : l’élargissement du champ des compétences incite en effet l’intercom-munalité à faire le lien avec un projet de communauté plus stratégique, voulu par les élus et décliné en actions.

Qu’est-ce qui différencie les projets de territoire de communauté urbaine, d’agglomération et de communes ?Entre communautés, les différences de moyens humains et financiers produisent une très grande hétérogénéité dans la

capacité d’élaboration d’un projet de territoire, tout autant que dans le contenu de ce projet. Parmi les communau-tés de communes les plus petites, certaines restent des intercom-munalités de gestion, assurant le portage d’actions communau-taires en s’appuyant sur une ingénierie

externe, départementale ou de niveau pays par exemple. L’élaboration d’une stratégie est une marche encore diffi-cile à franchir.

Dans les communautés plus grandes, et en particulier les communautés d’agglomération et les communautés urbaines, les problèmes sont autres : les moyens humains existent, ainsi que la capacité de réf lexion stratégique, mais la difficulté peut être de mobiliser les différentes directions au service d’un projet de développement transversal. En effet, il semble que plus le nombre de personnes dans la structure est élevé, moins il est aisé de coordonner et d’éviter les visions sectorielles ; cela rend aussi plus difficile un portage politique.

Quels sont les éléments qui permettent de déclencher une logique de projet territorial ?Le lancement de l’élaboration d’un projet de territoire passe par une volonté des élus – ou au moins de certains élus du terri-toire – de mieux maîtriser le devenir de ce territoire dans un contexte d’incertitude. Les dispositifs incitatifs ou réglementaires ne sont que des outils au service de cette volonté et non la finalité dans laquelle s’inscrire. Ensuite, le projet de territoire suppose une prise de recul et un diagnostic, nécessaires pour connaître les marges de manœuvre dont on dispose. Cette étape de diagnostic constitue le socle essentiel pour se projeter dans l’avenir, en s’appuyant par exemple sur une démarche de prospective.

Propos recueillis par Marine Descamps

© D

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Gilles Rey-GiraudResponsable politiques territoriales à Etd (centre de ressources du développement territorial) view

L’élargissement des compétences incite à faire le lien avec un projet de communauté plus stratégique

Projets de territoire : une typologieDans un contexte de bilan de son projet d’agglomération, Grenoble-Alpes Métropole a engagé une étude comparative de différents projets de territoire d’agglomérations. Analyse par Radia Daoud.

L a construction d’un projet de terri-toire représente pour les commu-nautés l’opportunité d’exprimer leur

vision politique et stratégique. L’absence de contraintes fortes de la loi leur permet de s’approprier librement la démarche. Si chaque projet reste unique, on remarque pourtant certaines similitudes qui per-mettent de dégager trois types de projet : le projet programmatique sur la durée du mandat, le projet stratégique et opération-nel à moyen terme, et le projet d’ambition prospective, regardant loin vers l’avenir.

Le « plan de mandat communautaire » Ce premier cas de figure intervient par choix de la majorité exécutive de ne pas imposer son propre plan de mandat pour lui préférer un projet politique partagé. L’objectif est de favoriser l’émergence d’une cohésion communautaire autour d’un projet à tendance programmatique, au travers de l’expression des élus et des services qui en

sont les contributeurs. Le projet s’articule autour d’axes thématiques et d’actions opé-rationnelles à mener dans la période du mandat. On observe des délais de construc-tion plutôt courts, de 6 à 12 mois, entre les premières concertations et l’adoption du projet. Cela laisse six ans pour mettre en œuvre les actions et éventuellement les réajuster en cours de mandat, notamment en cas de contraintes budgétaires.

La feuille de route stratégique et opérationnelle Certaines communautés s’engagent dans une logique de développement à moyen ou long terme. Dans ce cas, le projet a voca-tion à traduire une ambition territoriale large, dépassant souvent le cadre des com-pétences exercées. Il est un bon compro-mis entre le stratégique et l’opérationnel. L’approche se veut par grands enjeux et objectifs, complétés par l’identification de chantiers remarquables. La démarche, d’une durée observée de 12 à 20 mois, peut

intégrer des contributions externes par des dispositifs de participation citoyenne ou par la concertation des partenaires publics.

Le récit prospectif L’absence de cadrage réglementaire et la pré-sence de documents sectoriels sont parfois l’occasion de faire du projet de territoire un recueil d’ambitions et de projections vers un horizon très prospectif (2025, 2030…),

dans lequel la censure n’est pas souhai-table. Derrière la poésie souvent citée du « destin commun » s’exprime la volonté de s’appuyer sur un système de représen-tations et de valeurs comme socle pour l’avenir du territoire. La démarche peut être longue (24 mois), notamment en cas

de construction élargie aux habitants, aux acteurs socio-économiques ou encore aux territoires voisins. La diversité des projets de territoire est le reflet de choix contextuels : identification d’actions concrètes, contributions des habi-tants, recours à un bureau d’études… On observe toutefois que la réussite du projet se mesure dans sa capacité à s’installer comme le « document de référence » pour la

communauté, sur lequel pourront s’appuyer les engagements politiques, les orientations thé-matiques ou encore le projet d’administration. Enfin, le processus de

construction reste tout aussi important que le « produit » final. Au fil des étapes, ce sont des élus, des services, des territoires qui apprennent à dialoguer et construire ensemble cette feuille de route commune : à travers elle, c’est tout un intérêt commu-nautaire partagé qui s’exprime.

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Radia DaoudChef de projet Prospective et stratégie territoriale à Grenoble-Alpes Métropole

tribune

La réussite du projet de territoire se mesure dans sa capacité à s’installer comme document de référence

OCTOBRE 2014 • N° 193 • www.adcf.org

12 DOSSIER PROJETS DE TERRITOIRE

Page 13: DOSSIER P.10 PROJETS DE TERRITOIRE Tracer sa feuille de route

Projet de territoire de la communauté de…

Entre figure imposée et exercice de styleDémarche volontariste, l’élaboration d’un projet de territoire n’est pas normée. Dès lors, à quoi ressemble ce document ? La lecture des projets révèle des constantes, des « passages obligés » dans la structuration et le contenu de la stratégie exposée, mais également des volontés propres à chaque territoire de distinguer sa démarche.

S i les projets de territoire constituent tous des documents stratégiques exprimant une vision pour une

communauté, et, en ce sens, présentent des similitudes dans leur construction, leur analyse fait apparaître des varia-tions. Celles-ci peuvent être expliquées par le caractère volontariste du projet de territoire, mais également par ses reflets identitaires, qui incitent ses réalisateurs à le « personnifier ».

Adapter le projet au territoireCe caractère multiforme se retrouve dès le titre : « projet de territoire », « projet com-munautaire », « projet d’agglomération » ou encore « plan de mandat », il n’existe pas de désignation précise pour ce docu-ment fondateur des intercommunalités. Certains projets disposent également d’un titre propre ou d’un slogan (voir encadré).La forme diffère également d’un document à l’autre : longueur (d’une dizaine à une centaine de pages), textes, photos, iconogra-phie, cartographie, etc. Les projets peuvent comporter des documents com-plémentaires ou annexes : c’est souvent le cas avec l’explication de la démarche d’élaboration du projet. Rennes Métropole a ainsi édité deux documents : un « projet de territoire » de 80 pages et une explication sur « la démarche » de 94 pages.Enfin, les projets sont hétérogènes dans la façon de construire leur contenu et dans les outils utilisés : diagnostics, enquêtes auprès de la population, interviews, descriptifs de l’action communautaire et, plus rarement, chiffrage et calendrier.

Une construction similaireMais au-delà de cette diversité des projets de territoire, de nombreux éléments reviennent de façon récurrente : éditorial du président, historique de la commu-nauté (extensions, fusions et projets de territoire précédents), contexte territorial. Ce dernier élément peut parfois relever d’une dimension internationale, comme pour Lille Métropole qui se place dans une perspective européenne, ou pour Marseille Provence Métropole, tournée vers l’espace

méditerranéen. Mais des communautés aux périmètres plus restreints utilisent également des outils cartographiques et des analyses paysagères (par exemple la communauté d’agglomération de La Terre des 2 Caps, dans le Nord).

La forme la plus classique de construction du document est la combinaison d’un dia-gnostic (69 % des communautés déclarent le réaliser spécifiquement dans le cadre du projet de territoire), de l’énonciation des enjeux du territoire, d’une stratégie, et enfin de sa déclinaison en plan d’action. L’économie et l’emploi sont les princi-paux axes d’intervention des projets de territoire (99 % des communautés dotées d’un projet de territoire déclarent prendre en compte le développement économique). Les secteurs visés en prio-rité sont liés aux compétences déléguées aux communautés, mais pas seulement : le projet est aussi l’occasion de dépasser une logique de service et de prendre en compte les problématiques du territoire en termes de développement intégré.

Document politique fédérateurSi le projet de territoire détermine les modalités de l’action communautaire, il est avant tout un document politique et fédérateur : « un fil rouge entre les élus et les directions » (communauté de com-munes de la Hague), « il renforce l’identité

communautaire » (communauté de com-munes entre Thue et Mue). C’est pourquoi il peut prendre une forme communicante et pédagogique et sa mise en place dépend

beaucoup des calendriers électoraux. La portée temporelle d’un projet de territoire est encore souvent celle du mandat poli-tique (49 % des communautés).Mais au-delà de la forme que prend le document, celui-ci n’est finalement que la partie émergée de l’iceberg : l ’intérêt du projet de territoire réside surtout dans la démarche qui permet de faire parler ensemble les acteurs d’un même territoire (services, élus et associations qui ne sont pas forcément amenés à dialoguer au quotidien). Le document se doit d’être vivant, partagé, évalué.

Marine Descamps

Édito du président, historique de la communauté et contexte territorial constituent des récurrences

99 % des communautés dotées d’un projet déclarent y intégrer le développement économique

Pour 49 % des communautés, la portée temporelle du projet est celle du mandat

Titre chic, titre choc ou la poésie des « semeurs d’avenir »Le titre donné au projet de territoire peut être révélateur des objectifs assignés à la démarche. L’intitulé peut être neutre – « projet de ter-ritoire de la communauté de… », « schéma d’orientation », « plan de mandat » –, le cas échéant assorti d’une référence temporelle, « 2008-2014 » par exemple. « Reims 2020 », « Projet de territoire de développe-ment durable - Beauvaisis 2030 » sont des variantes qui néanmoins annoncent une ambition dépassant un mandat. La projection tempo-relle est récurrente : « Le projet de territoire 2012-2017, l’avenir dans le bon sens » (communauté du Pays de Châteaugiron).

L’intitulé peut a contrario annoncer une ambition, « Faire du Nord Basse 

Terre un territoire de haute qualité environnementale »  ou encore « Mulhouse 2020, réussir une tran-sition exigeante », voire porter l’axe majeur du projet et en conséquence être assez technique : « Inverser la  tendance démographique par l’accueil de nouvelles populations » (communauté Sumène Artense) ou encore « Faire de la vallée de Kay-sersberg un pôle économique, rési-dentiel et touristique de référence en développement durable ». Le slogan « Passeport pour un avenir réf léchi » de la communauté de communes du Pays Mornantais évoque, quant à lui, le projet de territoire comme la clé d’un déve-loppement choisi et maîtrisé. Le titre du projet peut également faire preuve d’un fort volontarisme, tel

« Contrat ambitions » (communauté de l’Auxois Sud) ou « Du peps et de l’énergie en Haute Picardie » (com-munauté de Haute Picardie), ou être porteur d’un message supra-local : « Faire vivre le milieu rural » (com-munauté de l’Arce et de l’Ource).

Le titre peut, enfin, relever de la devise, à l’image de « Bassin de Pompey, Horizon 2030... L’avenir en tête » ou « Loire Forez, partager plus qu’un territoire », être poé-tique, comme « Semeurs d’avenir : Rêves en tête et pieds sur terre » (Agenda 21 de la communauté du Pays entre Loire et Rhône) ou sus-citer la curiosité : « Ruralis in metro-polis » (communauté de Pontgibaud Sioule et Volcans), « Le livre vert » (Grand Évreux Agglomération).

Le projet de Territoire2012-2017L’avenir dans le bon sens

www.adcf.org • N° 193 • OCTOBRE 2014

13DOSSIER

Page 14: DOSSIER P.10 PROJETS DE TERRITOIRE Tracer sa feuille de route

L es lois ATR de 1992 puis Chevènement et Voynet de 1999 ont scellé l’interdépendance entre la démarche d’intégration commu-

nautaire, qui apporte cohérence et moyens, et sa finalité constituée par un projet de dévelop-pement territorial. Sur cette base juridique et technique, élus, cadres et techniciens territo-riaux ont progressivement développé un corpus maîtrisé de pratiques qui croise, à différents degrés, culture du développement local et de la co-construction, process issus des politiques contractuelles et ingénierie financière.

En 2014, pour la première fois, les exécutifs communautaires ont bénéficié de l’onction du suffrage universel direct. Cette nouvelle donne devrait logiquement renforcer l’exigence poli-tique et démocratique de formalisation rapide d’un projet de mandat explicite au service du territoire et de ses habitants. Ce, malgré les contraintes exogènes susceptibles de contrarier la dynamique attendue !

Visibilité réduite, environnement mouvantCar le constat est sans appel. L’environ nement de ce début de mandat interroge tant la tem-poralité que les modalités d’élaboration des projets de territoire :- L’issue de la réforme territoriale renouvellera nécessairement le champ des relations contrac-tuelles avec les conseils généraux et régionaux.- L’élargissement imposé de nombreux péri-mètres intercommunaux appellera, selon sa portée, la révision d’autant de schémas d’amé-nagement et de programmation, ainsi que la reconstruction d’identités territoriales.- L’évolution des dotations d’État renforce l’abso-lue nécessité d’élaborer de robustes schémas de mutualisation. Mais elle porte aussi en germe le risque d’une focalisation excessive des décisions au seul prisme des projections financières et fiscales.

Le fil rouge du pragmatismeDans un tel contexte, qui affecte différemment les communautés selon leur structure démo-graphique, géographique et économique, les habitus sont remis en cause et le pragmatisme doit primer. Une évolution inévitable de péri-mètre justifiera le report bien compris de la mise en chantier du projet de développement quand des incertitudes persistantes sur l’avenir d’une collectivité de rang supérieur ne devraient pas différer à l’excès l’ouverture du débat sur le devenir du territoire. L’exercice n’est certes pas aisé ! Mais il est de la responsabilité de chaque exécutif communautaire d’évaluer la meilleure – ou la moins mauvaise – articulation pos-sible entre prospective financière, perspectives

d’évolution de périmètre, schéma de mutuali-sation et, au final, élaboration et présentation d’un projet de mandat. Car s’il est une vérité qui prévaut, c’est bien celle qui veut qu’en période d’incertitudes économiques et de mutations institutionnelles, les besoins de réassurance et de confiance de nos concitoyens se resserrent pour grande partie au niveau local.

La cohérence comme finalitéComme consultants, observateurs et inter-venants auprès des communautés, nous nous sommes aujourd’hui forgé trois solides convictions :- d’abord celle que la production, le partage et la pédagogie d’une vision politique mobilisa-trice à la maille communautaire sont désormais inéluctables ;- ensuite celle que sa réduction à une approche uniquement financière conduirait inexorable-ment à une asphyxie de la dynamique et du potentiel collectif de la démarche ;- celle, enfin, qu’il convient de délaisser les approches sectorielles et segmentées pour revenir à une conduite de projet plus trans-versale et pluridisciplinaire, seule garante de la cohérence et de la compréhension partagée d’une ambition territoriale.

Le projet… malgré toutPour une ambition territoriale assumée à l’échelle communautaire : le regard d’un consultant et praticien auprès des collectivités.©

DR

Olivier AbuliConsultant, agence de communication Epiceum, groupement d’intervention La Règle de 3

tribune

2. CONCERTATION

4. ADOPTION

3. PRIORISATIONS

Solidarité�nancière

Identité &territoires

Richesses

Stratégie de communication

Stratégie�nancièreOrientations

Fiches actions

Pacte �nancier et �scal

Projet de territoire

Gouvernance

Évaluation / Accompagnement

Supports decommunication

Hommes &femmes

5. MISE EN ŒUVRE

1. DIAGNOSTICPROJET DETERRITOIRE

Élaborer un projet de territoire, du diagnostic à la mise en œuvre. / © Epiceum

L’occasion d’un rendez-vous citoyenPour réfléchir à un destin commun et imaginer des scénarios futurs, les communautés associent divers acteurs à leurs réflexions et à la construction du projet de territoire. La participation des citoyens semble indispensable : elle est toutefois complexe à mettre en œuvre. Explications appuyées sur l’enquête AdCF.

L ’ intérêt d’élaborer un projet de territoire selon une démarche participative est relevé par de très

nombreux élus : réponse mieux adaptée aux attentes, document plus riche mais surtout mise en œuvre et appropriation facilitées sont favorisés par le travail en commun. Ce dernier passe par la mobilisation des élus (président, bureau mais également conseil communautaire dans son ensemble, voire tous les conseillers municipaux), des agents de la communauté, des acteurs du territoire, mais aussi des habitants. Si la mise en place d’opérations de participation citoyenne efficaces et pérennes est une démarche complexe pour une collectivité, le projet de territoire semble toutefois particulièrement adapté à un travail avec la population du territoire et mérite un investissement particulier en ce sens.

CA et CU : des dispositifs préexistantsLes démarches impliquant les habitants supposent souvent un processus long (trois ans à la communauté urbaine de Bordeaux ou à Rennes Métropole) et nécessitent de déployer des méthodes d’animation et de mobilisation impor-tantes (forums, questionnaires, activités

ludiques et créatives). Les CU et CA ont donc plus de facilité à mettre en œuvre ces processus, grâce aux dispositifs dont elles disposent déjà comme les conseils de quartier ou le conseil de développe-ment, fortement mobilisé. En revanche, les outils de concertation plus conventionnels et ponctuels comme les réunions publiques, organisées par 39 % des communautés, ne permettent que dans une moindre mesure de mobi-liser et de produire une réflexion struc-turée sur un sujet si vaste.Les citoyens restent donc relativement peu consultés : seulement 33 % des com-munautés les associent au processus ; le même phénomène est observé pour les associations. En comparaison, 44 % des communautés consultent d’autres collectivités (département, région, etc.) et 42 % les chambres consulaires.

Un enjeu propice à l’innovationCependant, des initiatives prospectives originales, intégrant le point de vue des citoyens, ont été menées dans de nom-breuses communautés (pour la plupart avant les élections de 2014). Dans ce sens, Rennes Métropole a mis en place des « balades échanges », des « boîtes à sons » (placées dans chaque commune de l’agglomération, elles ont permis de

recueillir 700 témoignages de jeunes) ou encore un « bus métropolitain » dans le but de préparer l’événement « Rennes métropole demain ? Parlons en ! ». Cette manifestation a réuni, en une semaine, plus de 50 000 visiteurs autour d’un cycle de conférences, de temps d’échanges avec des acteurs de l’aménagement du territoire et des associations, ainsi que des débats ouverts à tous. La CARENE (communauté de Saint-Nazaire) a, elle aussi, utilisé un bus pour sensibiliser la population au projet communautaire.Le site internet dédié au projet de territoire est également un outil fréquemment employé (CARENE, Pays de Montbéliard Agglomération…) et peut se voir conférer une dimension très participative : à Rennes Métropole, le site causes-communes.fr permettait aux habitants de réagir, commenter ou répondre à des sondages à propos du projet de territoire.Cartographie interactive (aggloméra-tions de Rennes, Amiens, Metz…), boîtes à questions, course des idées, abécédaire des mots de la ville, bandes dessinées de lieux futurs, films, construction d’ob-jets, etc. sont, enfin, autant de manières de faire émerger des représentations collectives du territoire aujourd’hui et pour demain. MD

Les élections de 2014 devraient renforcer l’exigence démocratique d’un projet de mandat

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14 DOSSIER PROJETS DE TERRITOIRE

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Quel a été le contexte de mise en place du projet de territoire ?Nous avons pris le temps de réfléchir, à mi-mandat, à une vision pour le bassin de Pompey à l’horizon 2030, dans une période sans échéance électorale proche. C’était aussi le moment de se positionner par rapport à de grands enjeux, par exemple le projet régional Lorraine 2020.Le projet de territoire avait pour vocation de mettre en cohérence toutes les démarches d’aménagement, de planification et d’organisation interne : PLH, PDU, Agenda 21 territorial, plan paysage, certi-fication ISO 14001 de notre parc économique, de façon à ce que tous les acteurs puissent réfléchir à l’ensemble des problématiques du territoire et leur transversalité.

Quelle méthode de travail a été employée ?Un diagnostic a été mené par nos services, avec autour de la directrice générale ce qu’on a appelé une task force composée de trois chargés de mission. Nous avons ensuite mis en place quatre groupes de travail thématiques (mobilité, attractivité, services et équi-pements, développement économique), portés par des vice-présidents et ouverts aux 150 conseillers muni-cipaux du bassin. Cette démarche nous a fait prendre conscience de nos atouts, notamment notre patrimoine végétal et historique. Cela nous a par exemple amené, entre autres, à élaborer un plan paysage et à prendre la compétence tourisme.

Le pilotage du projet était assuré par le président, la task force et les quatre vice-présidents. L’ensemble des élus se sont exprimés très ouvertement, sans la pression qu’auraient pu amener les échéances électorales. J’ai moi-même été très surpris de ce que cette démarche apportait en termes de réflexion nouvelle et du fait qu’elle a vraiment permis d’aborder tous les sujets de discussion.

Le projet communautaire est-il plutôt de nature politique ou technique ?Il s’agit d’un projet politique qui, bien entendu, permet la déclinaison de notre vision en démarches opéra-tionnelles : équipements structurants, compétences nouvelles, etc.Aujourd’hui, le projet de territoire, c’est une mise en œuvre de dynamiques entre communes et com-munautés, un approfondissement de la logique des documents sectoriels, et un outil de portage poli-tique de nos objectifs en ce début de mandat. Il nous permettra de définir pour les prochaines années un pacte financier et fiscal.

En quoi le projet de territoire est-il un document de référence dans l’action communautaire ?Systématiquement, les actions font l’objet d’une réponse en logique au projet de territoire. Nous avons créé un logo, ainsi qu’une devise : « l’avenir en tête ». Cette marque de fabrique se retrouve maintenant dans les différentes communications et démarches de la communauté.

Quel a été l’intérêt du projet de territoire pour la communauté ?L’intérêt est de pouvoir porter un message sur tout ce qui concerne l’avenir du territoire : non seulement sa vie interne, l’évolution de ses compétences et de ses projets, mais aussi les projets structurants portés par

l’État, la région ou le département. C’est ce que nous avons fait en soutenant l’élargissement de l’A31, en signant un contrat local avec l’agence régionale de santé, ou en travaillant avec le conseil général sur l’éducation spécialisée.Alors que nous avions focalisé nos efforts écono-miques sur la réindustrialisation du bassin, grâce au diagnostic, nous savons que nous devons également développer l’agriculture : notre territoire comprend 10 % des ressources en bois de Meurthe-et-Moselle ; nous avons développé une filière bois pour valoriser ces ressources.

Si c’était à refaire, le projet de territoire serait-il conduit différemment ?Non. J’ai été agréablement surpris de l’investisse-ment des conseillers municipaux dans cette réflexion. Lorsque celle-ci devra faire l’objet d’une mise à jour, d’un bilan ou d’amendements, il faudra qu’elle soit portée selon les mêmes principes, la même dynamique. Chacun s’est ouvert au-delà de ses propres limites communales, nous avons pu réfléchir en commun.

Quel a été le portage politique du projet de territoire et l’implication des élus ?L’animation des groupes de travail a été très impor-tante. Les vice-présidents qui en avaient la charge ont su amener tout le monde à réfléchir au-delà des problématiques quotidiennes de gestion. Cela a permis de se transporter en 2030, une date bien ultérieure aux échéances de mandat. Je pense qu’en plus, cela a aidé les élus à se connaître et à partager des idées.

C’était différent des présentations de type « grands-messes » ou des comités consultatifs qui réfléchissent aux projets en cours selon des ordres du jour prédéfinis.Toute l’écriture a été réalisée par les services, c’est l’avantage d’avoir mis en place une structure technique et administrative en capacité de nous aider à porter la démarche, grâce à la task force proposée par la DGS et à des chargés de mission de très grande qualité.

Comment voyez-vous le futur de votre projet de territoire ? J’en ai fait une présentation aux nouveaux conseillers communautaires. Nous allons rebondir avec de nou-veaux groupes de réflexion thématiques pour aller plus loin. Et d’ici un an ou deux, nous amorcerons une démarche de bilan et d’amendements par rapport à notre environnement et à l’évolution législative.

Propos recueillis par MD

« L’ensemble des élus se sont exprimés très ouvertement »

Regard sur l’élaboration et la mise en œuvre du projet de territoire du Bassin de Pompey (Meurthe-et-Moselle) par son président, Laurent Trogrlic.

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Laurent TrogrlicPrésident de la communauté de communes du Bassin de Pompey view

Cette démarche nous a fait prendre conscience de nos atouts

Toute l’écriture a été réalisée par les services

Les quatre groupes de travail étaient ouverts aux 150 conseillers municipaux du bassin

La volonté politique, un élément déterminantLe rôle des élus communautaires dans le portage du projet de territoire est jugé « important » ou « primordial » par 91 % des répondants à l’enquête AdCF.

Selon Pierre-Antoine Landel, chercheur au laboratoire Pacte de Grenoble (IEPG-UJF-UPMF), « plus que le statut de la commu-nauté, sa taille ou son périmètre, l’élément déterminant d’un projet de territoire est son portage politique ». Qu’il s’agisse d’insuffler une dynamique collective et partagée, d’initier une stratégie de développement dans un territoire en crise ou d’acquérir une vision de sa communauté dans sa relation avec les autres collectivités, un projet de territoire requiert un portage politique affirmé. D’après les résultats de l’enquête AdCF, le rôle des élus communautaires dans l’élaboration et la mise en œuvre du projet de territoire est jugé « primordial » à 60 % et « important » à 31 % (seuls 6 % et 2 % le jugent respectivement « moyen » et « faible »). Les communautés qui n’en sont pas encore dotées, quant à elles, avancent comme principale raison le manque de volonté politique. Des agents communautaires ou DGS précisent « Cela ne correspondait pas à la façon de travailler des élus », « Manque d’ambition politique fédératrice, logique de guichet et non de projet », « Il n’y avait pas l’accord d’une majorité des maires pour doter la communauté de communes d’un projet de territoire ».

Une mobilisation essentielleÀ la tête du projet de territoire, on retrouve donc fréquemment une personnalité forte et identifiée par tous pour insuffler une dynamique collective. Ainsi dans 57 % des cas, c’est le président de la communauté qui en est le pilote. Mais le type de groupes d’élus qui s’impliquent dans le projet varie : plusieurs vice-présidents, le bureau communautaire, l’assemblée des maires et parfois même une ouverture à l’ensemble des conseillers municipaux de la communauté.

Dans les communautés les plus grandes, et en particulier les communautés d’agglomération et les communautés urbaines, les moyens humains ainsi que la capacité de réflexion straté-gique facilitent a priori la construction un projet territorial. Or mobiliser les différentes directions au service d’un projet de développement transversal peut s’avérer complexe. En 2010, la communauté urbaine Nantes Métropole avait ainsi fait le choix de confier la réalisation du projet de territoire à l’Agence d’urbanisme de l’agglomération nantaise (AURAN), qui bénéfi-ciait d’une position « neutre » selon Hélène Maury, chargée de mission, l’ensemble de la démarche étant d’abord portée de façon volontariste par le président de la communauté en asso-ciation avec l’assemblée des maires. MD

Projet de territoire :choisir le bon moment pour le porter !

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15DOSSIER

Page 16: DOSSIER P.10 PROJETS DE TERRITOIRE Tracer sa feuille de route

« Nous avons une vraie volonté d’appropriation et d’évaluation régulière »

Christophe Masse, responsable technique de la procédure du projet de territoire d’Artois (Artois Comm.), nous livre son regard sur l’élaboration et la vie de ce document stratégique.

Dans quel contexte a été mis en place votre projet de territoire ?Il existait un premier projet, réalisé en 2003, qui définissait les axes d’interven-tion de la communauté. Dix ans plus tard, le président a voulu, plus qu’une révision de ce premier projet, une nouvelle impul-sion pour confronter l’agglomération aux évolutions économiques, réglementaires et institutionnelles à venir. Ce document a également été utile dans la discussion avec l’EPCI avec lequel nous avons fusionné au 1er janvier 2014 (six communes).

Quelle a été la procédure d’élaboration du projet ?Elle a duré neuf mois. Le président l’a voulue courte, c’était un choix d’efficacité de notre part. À titre personnel, je suis convaincu de l’efficacité des démarches courtes, celles qui durent trop longtemps finissent par lasser. Nous n’avions donc pas le temps nécessaire pour mettre en place un vaste processus de consultation auprès de la population. Néanmoins, nous avons tenu des réunions territoriales auxquelles étaient conviés les habitants ainsi que l’ensemble des conseil-lers municipaux du territoire. Le conseil de

développement a été étroitement associé à la démarche.En interne nous avons organisé des sémi-naires avec les élus, d’autres avec des techniciens (directeurs, DGA). Le projet a également été discuté au sein de l’exé-cutif restreint (président et présidents de commission).

Comment voyez-vous les suites du projet de territoire ?Nous nous sommes fixé un objectif pour 2030 mais il faudra certainement revisiter le projet avant. Le précédent projet n’avait pas de dispositif d’évaluation ; cette fois-ci, nous avons une vraie volonté d’appropriation et d’évaluation régulière. Quand nous enga-geons une action nouvelle, nous soulignons son intégration à la stratégie du projet de territoire. Les orientations de ce document sont reprises dans la contractualisation qui nous lie au département ou à la région. La démarche de projet de territoire ne consiste pas à produire un document pour le laisser dans un placard : il faut le faire infuser, nous avons la volonté d’avoir un projet vivant. Par exemple, chaque année, nous organisons une fête de l’agglomération :

en 2013, le thème abordé par le conseil de développement était le projet de territoire.En ce qui concerne la mise en œuvre, les délégations accordées aux nouveaux vice-présidents sont étroitement liées aux axes de développement du projet de territoire.

La démarche politique s’est doublée d’une intervention vers les services. Pour chaque objectif, une direction est nommée tête de file et d’autres sont identifiées comme contributrices ; sur cette base, chaque direc-tion met en place un « projet de direction ».

Quel a été l’intérêt, pour votre communauté, de mettre en place ce projet d’agglomération ?Les intérêts sont multiples : le bilan du précé-dent projet nous a amenés à revisiter dix ans de fonctionnement communautaire. Cela nous permet de voir comment les objectifs

ont été remplis. Le projet de territoire donne un cadre politique pour le nouveau mandat, ainsi que pour la fusion et l’arrivée des nou-velles communes. Nous nous sommes aussi largement appuyés sur lui dans le cadre de la contractualisation avec le département, ainsi que pour nos contributions au SRADDT, aux programmes opérationnels des crédits européens, au CPER.Ce document permet en outre de montrer le sens de l’action aux habitants, voire aux élus municipaux qui ne se sentent pas toujours très impliqués.Enfin, il dépasse les seules compétences de l’agglomération. Nous avons par exemple lancé une étude sur la santé, car c’est un sujet de préoccupation de nombre d’habitants et d’acteurs locaux.

Si c’était à refaire, que changeriez-vous ?De mon point de vue de technicien, je considère que le bureau d’études ne nous a pas assez accompagnés sur l’évaluation en continu du projet de territoire, ainsi que sur les projets de direction. Mais avec nos contraintes de temps, peut-être deman-dions-nous un mouton à cinq pattes !

Propos recueillis par MD

Faire vivre le projet de territoireUne fois le projet de territoire adopté, à charge pour la communauté d’en assurer la diffusion et la mise en œuvre. En d’autres termes, comment faire de ce document une référence pour les élus, les techniciens, les partenaires de la communauté et les habitants ?

P armi les constats que tirent élus et techniciens de leur expérience d’éla-boration d’un projet de territoire, une

idée est fréquemment martelée : ce docu-ment stratégique n’est pas voué à rester « dans un tiroir », mais doit être mis en œuvre. Une concrétisation essentielle mais pas toujours évidente.

DiffusionL’étape première tient à la diffusion du projet de territoire. Au-delà de la pratique courante de mise en ligne sur le site de la communauté, dont témoignent 33 % des répondants à l’enquête de l’AdCF, près de la moitié des communautés disent avoir remis le projet aux élus. Moins fréquente, l’organisation de réunions autour du projet adopté est au demeurant pratiquée par 18 % des communautés. Il s’agit là d’assurer un retour aux personnes mobilisées lors de l’élaboration et de diffuser le document aux responsables politiques et techniques des communes et de la communauté. Pays de Montbéliard Agglomération a notamment organisé plusieurs réunions d’information avec ses 600 agents.La presse communautaire constitue un relai important : la communauté d’agglo-mération des Deux Rives de Seine a, par exemple, consacré un hors-série de son magazine Actus (mai 2010) à son projet de

territoire. Les territoires voisins de l’inter-communalité, l’État, les institutions parte-naires, peuvent également être la cible des actions de diffusion (comme à Montrevault Communauté). Certaines communautés, par souci de lisibilité et d’appropriation, réalisent deux documents : un technique et un grand public (Metz Métropole).Enfin, des formes originales sont déve-loppées, comme une exposition pour la communauté de communes Portes de Puisaye-Forterre, des assises de l’inter-communalité pour la communauté de communes du Bassin de Pompey ou encore un film pour Reims Métropole.

Un document de référenceLa capacité du projet de territoire à faire référence tient nécessairement à son niveau de précision, et à l’exis-tence d’un plan d’actions énonçant des priorités tel qu’il figure dans le projet de la communauté du Pays de Mayenne.Le document est également un point d’appui lors de la négociation de contrats avec la région, le départe-ment ou l’État, dans le cadre de pro-grammes européens, ou encore dans les échanges au sein d’un pays ou d’un parc naturel. La communauté

d’agglomération Maubeuge Val de Sambre indique que le projet devient indispensable dans la perspective d’un futur contrat de ville. Dans la même veine, la communauté du Grand Chambord évoque l’utilité du projet comme « support aux documents de programmation et planification ».

ÉvaluationSi bon nombre de communautés men-tionnent l’évaluation comme un élément majeur de mise en œuvre du projet de territoire, les pratiques en la matière

semblent être toutefois encore à déve-lopper. Parmi les atouts de la démarche, la communauté de com munes de l’Aulne Maritime mentionne « la mise en place de l’évaluation des politiques publiques menées ». La communauté de communes de la Hague et celle du Val d’Ornois évoquent le projet de territoire comme un moyen d’évaluer la mise en œuvre de la politique locale. L’axe transversal de celui de la communauté du Beauvaisis, pour sa part, prévoit l’évaluation de manière explicite. CB

Il donne un cadre politique pour le mandat, la fusion et l’arrivée de nouvelles communes

Le projet de territoire de Metz Métropole s’expose à la foire internationale de la ville. / © Metz Métropole

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Christophe MasseDGA à l’aménagement du territoire à la communauté d’agglomération de l’Artois (Artois Comm.) view

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16 DOSSIER PROJETS DE TERRITOIRE

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Philippe AudicPrésident du conseil de développement de Nantes Métropole view

Jean SerretPrésident de la communauté de communes du Val de Drôme et président de Biovallée view

« Le conseil de développement est un espace de prospective permanente »

Lancé par la communauté urbaine de Nantes, le projet Nantes 2030 s’appuie sur une démarche prospective et participative de grande ampleur : « Ma ville demain ». Le travail du conseil de développement de Nantes Métropole, un des plus anciens conseils de France, a permis d’élargir la réflexion et d’offrir un regard décalé sur l’avenir du territoire, comme nous l’explique Philippe Audic, son président.

Quels sont les liens du conseil de développement de Nantes Métropole avec le projet de territoire de l’intercommunalité ?Il s’agit de l’un des tous premiers conseils de développement, créé à l’initiative de Jean-Marc Ayrault en 1996, avant même la loi Voynet de 1999. La première mission de ce qui s’appelait alors la « conférence consultative d’agglomération » fut de participer à l’élaboration du projet District 2005. La question du projet de territoire constitue donc une part importante de l’ADN du conseil de développement nantais. Le conseil a grandi et regroupe aujourd’hui un réseau de plus de 300 personnes : acteurs économiques, sociaux, associatifs, citoyens volontaires. C’est un dispositif de plus en plus ouvert sans règles formelles d’adhésion, un espace d’échanges et de propositions, mais aussi un lieu de formation et d’information, une sorte d’université citoyenne prospective.

Quel a été le rôle du conseil de développement dans la démarche participative d’élaboration du projet de territoire « Ma ville demain » ?L’ensemble de la démarche « Ma ville demain » a ouvert une toute autre manière de travailler pour la collectivité, ce qui cor-respondait plutôt bien aux préconisations du conseil.

Nous avons constitué le « off » du projet de territoire en produisant un regard décalé (notamment avec nos propres documents), mais pas isolé du processus global. Notre démarche était très ouverte, elle permettait à tous ceux qui le souhaitaient d’y prendre

part puisqu’il s’agissait d’abord d’un débat entre les habitants eux-mêmes. Nous avons particulièrement insisté sur certaines thématiques (emploi, numérique, santé, sport, risques).Selon nous, l’exercice prospectif de « Ma ville demain » ne pouvait aboutir à la seule production d’un document mais devait se prolonger. Nous avons ainsi positionné le conseil comme l’espace de prospective permanente, de veille et d’alerte pour les décideurs.

En quoi l’action du conseil de développement était-elle utile à la démarche Nantes 2030 ?Les conseils de développement sont utiles aux projets de territoire parce qu’ils dif-fèrent des nombreux dispositifs partici-patifs qui existent aujourd’hui et dans lesquels les questions sont souvent mises en débat sans être resituées dans un contexte global. Le conseil est un outil qui permet de réfléchir sur le long terme et de passer

du « je » au « nous ». La consultation des habitants doit en effet dépasser la simple addition d’opinions pour produire de la pensée collective et du débat.Une autre plus-value du conseil de déve-loppement est l ’ouverture de pistes de réf lexion originales. Nous avons, par exemple, mené un exercice spécifique avec une cinquantaine de jeunes qui a mis en lumière le décalage, parfois important, entre ces jeunes et des politiques publiques normalement conçues pour eux.Enfin, c’est aussi un laboratoire d’idées sur la participation elle-même. À Nantes, cela s’est concrétisé par une saisine récente de la communauté urbaine sur les modali-tés du débat public relatif aux franchisse-ments de la Loire. Pour la première fois, nous n’avons pas été saisis sur un projet ou un programme, mais sur la manière d’organiser un débat public. C’est pourtant une question que les collectivités posent habituellement à un bureau d’études.

Propos recueillis par MD

« Des jeux de solidarités sont à construire »Les projets de territoire se construisent aussi à l’échelle intercommunautaire lorsque celle-ci est plus pertinente. Exemple avec Biovallée, un projet développé sur le territoire de la vallée de la Drôme.

Quel est le contexte de création de Biovallée ?Ce grand projet est issu d’une réflexion menée par les élus et les citoyens de la vallée de la Drôme sur un certain nombre de domaines touchant au développement durable.La prise de conscience a débuté il y a 18 ans, quand la pollution de notre rivière nous a amenés à nous interroger sur la notion de « bien commun » et sur son usage au titre du développement économique et touris-tique du territoire. Aujourd’hui, grâce à nos actions, la rivière est à nouveau ouverte à la baignade : élus et citoyens sont fiers de ce qui a été accompli.

En parallèle, nous avons remporté en 2005 un appel à candidatures lancé par l’État pour la création de pôles d’excellence rurale. Nous avons également noué un partenariat avec la région Rhône-Alpes et sommes devenus un territoire rural pilote.

Qu’est-ce qui a poussé les quatre communautés à s’associer à cette échelle territoriale ? Le critère géographique est essentiel : nous sommes situés dans une vallée convergente, une main humaine incurvée, connectée sur le Rhône, qui est lui-même un important couloir de développement et de chemine-ment des richesses en Europe.

Et puis, historiquement, il est arrivé une génération d’élus qui partageaient le même point de vue sur le développement, considé-rant que le libéralisme et le communisme n’étaient pas des modèles viables, et qu’il fallait donc inventer quelque chose de nouveau. Le modèle du développement durable et la place qu’il laissait à l’inter-vention citoyenne nous séduisaient. C’est ce bain culturel commun fort qui nous a poussés à nous associer.

Quelles sont les difficultés lorsque l’on mène à bien un projet intercommunautaire ?Nous sommes des communautés et des communes de tailles et de capacités finan-cières différentes : des jeux de solidarités sont à construire. Cela demande du temps. Il peut aussi y avoir des ambitions personnelles qui font que le projet collectif peut se voir approprié ou à l’inverse remis en cause par un groupe d’individus. Nous n’avons pas toujours pu éviter ces écueils avec Biovallée.

Quel est l’intérêt de construire un projet intercommunautaire ?Mener une réflexion à l’échelle d’un ter-ritoire significatif : la Biovallée représente presque un tiers du département de la Drôme. Cela permet au territoire de peser et

d’obtenir des financements habituellement plutôt emportés par des territoires urbains.L’intérêt, c’est aussi de faire cheminer un groupe d’individus dans une réflexion commune : nous ne sommes pas tous au même niveau de réflexion, c’est donc inté-ressant de construire ensemble un projet qui décidera de la gestion et de la préservation de nos bien communs.

Votre communauté est sur le point de commencer l’élaboration d’un projet pour son territoire. En quoi sera-t-il complémentaire de celui de Biovallée ? Il revient à nos élus d’apporter leur pierre, je ne sais pas encore ce qu’il en ressortira. Mais nous allons prendre en compte des éléments du projet Biovallée, comme la thématique « énergie ». Nous partons d’ailleurs bientôt en Bretagne afin d’étudier ce qui se fait dans les territoires à énergie positive. En matière d’emploi, nous nous appuierons sûrement sur les entreprises de phytomédicaments et de biocosmétiques portées par le projet intercommunautaire.En revanche, la compétence jeunesse ou la mutualisation des services sont deux thèmes qui, me semblent-ils, devront être travaillés indépendamment du projet Biovallée. Propos recueillis par MD

Pour la première fois, la communauté nous a saisis sur l’organisation d’un débat public

Biovallée construit un éco-territoire de référence en matière de développement durable, par la synergie d’actions et de compétences. / © Biovallée

www.adcf.org • N° 193 • OCTOBRE 2014

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Page 18: DOSSIER P.10 PROJETS DE TERRITOIRE Tracer sa feuille de route

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RÉDUCTION DES DOTATIONS DE L’ÉTAT

Quelles implications sur les stratégies d’investissement des collectivités ?L’année 2015 pourrait bien être une « annus horribilis » pour les collectivités sur le plan financier : baisse drastique des dotations de l’État, perspectives faibles d’évolution des assiettes fiscales, progression mécanique des charges… Les programmes d’investissement, plus faciles à supprimer ou différer que les charges de fonctionnement, sont sur la sellette. Fort de son effet contracyclique, l’investissement des collectivités locales joue un rôle stabilisateur dans l’économie nationale. La réduction des dotations de l’État ne le remet-elle pas en cause ?

P remier investisseur public, les col-lectivités locales concentrent 73 % des dépenses d’investissement. Une

position renforcée par les transferts de compétences de ces vingt dernières années, qui ont stimulé l’investissement dans les domaines du logement, des transports publics, du développement des nouvelles technologies, et de l’environnement.

La dernière Note de conjoncture des fonds d’épargne (Caisse des dépôts) précise que l’investissement public, qui représente 16 % des investissements totaux dans l’économie nationale, a mieux résisté à la crise que l’investissement privé : en 2013, alors que l’investissement des entreprises et celui des ménages baissaient respectivement de 2,3 % et 3,8 %, l’investissement public affichait, pour sa part, une croissance de 1,4 %.

60 milliards d’euros de dépenses d’investissementEn 2013, le volume global de dépenses d’investissement porté par le secteur local se rapproche des 60 milliards d’euros : 41 milliards d’euros pour les budgets princi-paux, 6 à 8 milliards de budgets annexes et autant pour les syndicats, Sivu, Sivom. Les collectivités du bloc local portent plus de la moitié (64 %) de ces dépenses d’investisse-ment et 80 % des dépenses d’équipement en maîtrise d’ouvrage. À ce montant, il conviendrait d’ajouter les dépenses pilotées par les collectivités mais dont la maîtrise d’ouvrage est aux mains de leurs opérateurs (SEM, contrats externalisés…), difficilement chiffrables. Peu de statistiques permettent, à ce jour, de saisir la nature exacte des dépenses d’équipement réalisées par les collecti-vités ; les domaines d’intervention de ces dernières sont variés et liés aux contextes locaux. Si la construction de logements, le développement économique, les infrastructures de transport et de protection liées à l’environnement sont des points saillants des inves-tissements nouveaux, une très large part des dépenses d’équipement des collectivités est affectée à des opérations de rénovation, d’entretien et de renouvellement. C’est ce que confirme le suivi de la commande publique réalisé par la Fédération française du bâtiment, en notant l’extrême émiettement de la com-mande publique où dominent des marchés de très faible montant.

Quels scénarios prospectifs ?Devant la difficulté à réduire à niveau équivalent et à très court terme leurs charges de fonctionnement, et face à l’ampleur de l’effort demandé, la réduction des dotations de l’État va se traduire, dans un premier temps, par un recul de l’autofinancement des collec-tivités. Pourrait s’y ajouter un désengagement, déjà notable sur certains territoires, des partenaires cofinanceurs de leurs projets (régions, dépar-tements, grandes agences…) qui subissent également des baisses de dotations simi-laires. Selon les estimations de l’AdCF, l’épargne nette des collectivités du bloc commu-nal pourrait subir une érosion moyenne de - 12 % par an – un niveau jamais atteint – si l’hypothèse très probable d’une baisse des dotations de 3,6 milliards d’euros par an de 2015 à 2017 se confirme. Qu’en sera-t-il à plus long terme ? Plusieurs scénarios se dessinent. Selon certains experts, les collectivités vont mainte-nir un niveau élevé d’investissement et seront contraintes de s’endetter davantage, reportant l’effort financier à fournir sur le contribuable de demain (ce qui peut se justifier lorsqu’il s’agit d’investissements supposés servir plusieurs générations d’habitants). Pour d’autres, les contraintes financières vont avoir pour effet un net recul des dépenses d’investissement prises en charge par les collectivités. Sur le terrain, on peut imaginer que ces deux scénarios sont combinatoires et seront largement dépendants des situations locales.

Vers une hausse du recours à l’emprunt ?L’importance de l’offre en matière d’emprunt pourrait plaider en faveur du scénario d’un maintien des investissements. En effet, après une période de pénurie, poussant certaines communautés à gonfler par précaution leur trésorerie,

l’offre de crédit est aujourd’hui à nouveau abondante. En atteste l’enveloppe de 20 milliards d’euros mise à disposition par la Caisse des dépôts et consignations pour financer des projets demandant une durée d’amortissement longue, supérieure à 20 ans. En parallèle, d’autres établissements

proposent également des offres de prêts à taux intéressants, et parfois très concurrentiels.D’un autre côté, des signes avant-coureurs penchent vers le scéna-rio d’un recul de l’investissement. Ainsi la Note de conjoncture de la Banque Postale pointe une moindre progression des inves-tissements entre 2012 et 2013 pour les collectivités du bloc commu-nal, qui conservent néanmoins un niveau d’engagement important. La dégradation de l’autofinance-ment risque fort d’accentuer ce mouvement, qui sera plus ou moins marqué selon les territoires, les capacités des collectivités à s’endetter ou à puiser sur leurs fonds de roulement.

Repenser les stratégies d’optimisation des ressourcesDans tous les cas, il importe d’éviter « l’effet de chaîne » que pourrait produire un recul de l’investissement sur les écono-mies locales et par rebond sur l’économie nationale. Un arrêt trop brutal de la com-mande publique pourrait être fatal pour des

territoires déjà fragilisés par l’essouf-flement de la commande privée, essen-tielle pour les entreprises locales du BTP notamment. Il entraînerait une stagnation des assiettes fiscales, alors que la demande sociale progresse, et plus globalement un renforcement

des effets concurrentiels entre territoires. Pour les collectivités du bloc communal, l’objectif sera la reconstitution de leurs marges de manœuvre pour préserver leur capacité d’investis sement. Pour ce faire, une meilleure coordination des projets au sein des territoires communautaires avec

les communes membres, mais aussi avec les grandes priorités nationales (logement, environnement…), est indispensable. À ce titre, projets de territoire, pactes fiscaux et financiers, programmations plurian-nuelles concertées des investissements devraient occuper ces prochains mois le devant de la scène. Rendre « soutenable » la participation des collectivités du bloc communal à l’effort de redressement des comptes publics, c’est aussi le message porté par l’AdCF au travers de l’appel à la mise en place d’une Conférence nationale de l’investissement public.

Claire Delpech

Retrouvez la note Investissement public local : les analyses et propositions de l’AdCF sur le site www.adcf.org.

Les dépenses d’investissement s’élevaient à 60 milliards d’euros en 2013, portées à 64 % par le bloc communal. / © Shutterstock / Epiceum

L’investissement public a mieux résisté à la crise que l’investissement privé

Selon certains experts, les collectivités seront contraintes de s’endetter davantage

Régions

48 %

Communes

Départements

15 %

16 %

21 %

EPCI

Répartition en % des dépenses d’investissement entre les différents niveaux de collectivités locales (budgets principaux) - 2013

Source : DGFIP

www.adcf.org • N° 193 • OCTOBRE 2014

FINANCES 19

Page 20: DOSSIER P.10 PROJETS DE TERRITOIRE Tracer sa feuille de route

Dans quelles conditions  les syndicats fusionnent-ils ?La présentation du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dit « NOTR », a été l’occasion de rappeler que, s’ils avaient fait évoluer le périmètre de nombreuses communautés, les schémas départementaux de coopération intercommunale de 2011-2012 n’avaient qu’assez peu souvent abordé la question des syndicats, qui pourraient ainsi faire l’objet d’une attention plus forte lors de la « revoyure ». Intercommunalités propose ce mois-ci un rappel des règles qui organisent la fusion des syndicats.

E n matière de fusion de syndicats, les régimes juridiques qui trouvent à s’appliquer diffèrent selon les cas.

L’analyse qui est faite ici ne portera pas sur les syndicats mixtes ouverts, dans la mesure où leur périmètre dépasse ceux du bloc local en raison de l’adhésion de conseils généraux, régionaux, de leurs groupements ou d’autres personnes morales de droit public telles que les chambres consulaires. Sont donc abordés ci-après les syndicats de com-munes1 et les syndicats mixtes constitués de communes et d’éta-blissements publics de coopéra-tion intercommunale (EPCI) ou exclusivement d’EPCI, appelés « syndicats mixtes fermés »2.

1er cas : la fusion implique exclusivement des syndicats mixtes fermésLa fusion de syndicats mixtes fermés suit une procédure identique à celle qui s’im-pose aux communautés, sur renvoi formulé par l’article L. 5711-2 du CGCT à l’article L. 5211-41-3 relatif aux fusions d’EPCI dont l’un au moins est à fiscalité propre. Ce renvoi exclut néanmoins les disposi-tions relatives à la continuité territoriale, permettant la constitution d’enclaves ou de discontinuités de périmètre lors d’une fusion de syndicats mixtes fermés.Le nouveau syndicat mixte fermé se subs-titue aux anciens syndicats mixtes fermés fusionnés : « L’établissement public issu

de la fusion est substitué de plein droit, pour l’exercice de ses compétences, aux anciens établissements publics et, le cas échéant, aux communes incluses dans son périmètre dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes. »3

Par ailleurs, le syndicat mixte fermé issu de la fusion dispose de différents délais durant lesquels le comité syndical doit harmoniser

les compétences qu’il est amené à exercer4. Dans les trois mois à compter de l’entrée en vigueur de la fusion, il doit statuer sur ses compétences optionnelles, si besoin en en restituant aux communes membres. Dans un délai de deux ans à partir de la même date, il doit harmoniser les autres compé-tences ainsi que la définition de l’intérêt communautaire qui s’attache à certaines compétences. Tant que ces délais ne sont pas expirés et que le comité syndical n’a pas délibéré, le syndicat mixte fermé issu de la fusion exerce les compétences des syndicats mixtes fermés fusionnés dans leurs anciens périmètres respectifs. Si une ou plusieurs compétences ou définitions d’intérêt communautaire n’ont pas fait l’objet d’une délibération dans ces délais,

on considérera que le syndicat mixte fermé issu de la fusion les exerce toutes et de façon complète sur l’ensemble de son territoire.S’agissant des agents des anciens syndicats, l’ensemble relève du syndicat mixte fermé issu de la fusion au moment de son entrée en vigueur. Les décisions prises en matière d’harmonisation des compétences peuvent ensuite amener à transférer aux membres du syndicat les agents qui étaient affectés à l’exercice de compétences restituées, ou à mettre fin à leur mise à disposition.

2e cas : la fusion implique plusieurs syndicats de communes ou des syndicats de communes et des syndicats mixtesS’il s’agit d’une fusion concernant plusieurs syndicats de communes ou des syndicats de communes et des syndicats mixtes, un régime spécifique est prévu à l’article L. 5212-27 du CGCT. Contrairement à la situation où seuls des syndicats mixtes fermés étaient impliqués dans une fusion, lorsque des syndicats de communes et des syndicats mixtes fusionnent, la question des compétences qui seront exercées par l’établissement issu de la fusion doit être réglée lorsque les syndicats amenés à fusionner s’expriment sur l’arrêté de projet de périmètre du préfet : « Cet arrêté dresse la liste des syndicats intéressés. Les syndicats concernés sont consultés sur le projet de périmètre et les statuts. Leur avis est réputé favorable s’il

n’intervient pas dans un délai de trois mois après la notification du projet arrêté. Le projet de périmètre et les statuts sont égale-ment notifiés par le représentant de l’État dans le département au maire de chaque commune ou, le cas échéant, au président de l’organe délibérant de chaque membre d’un syndicat dont la fusion est envisagée. Les organes délibérants des membres des syndicats concernés disposent d’un délai de trois mois pour se prononcer sur le projet de périmètre et les statuts du nouveau syndi-cat. À défaut de délibération dans ce délai, celle-ci [la fusion] est réputée favorable. »5

Les statuts proposés dans l’arrêté de projet de périmètre « déterminent parmi les compétences transférées aux syndicats existants celles qui sont exercées par le nouveau syndicat dans son périmètre ; les autres compétences font l’objet d’une restitution aux membres des syndicats »6.Autrement dit, le syndicat issu de la fusion

ne bénéficiera pas de délais d’harmoni-sation des compétences exercées anté-rieurement à la fusion semblables à ceux laissés lorsque la fusion n’implique que des syndicats mixtes fermés. Dès l’entrée en vigueur de la fusion, les compétences exercées par le nouveau syndicat devront avoir été clarifiées pour l’ensemble du nouveau périmètre.S’agissant des conséquences de la fusion en matière de personne morale, les règles sont ici similaires à celles qui s’appliquent aux fusions de syndicats mixtes fermés : « Le syndicat issu de la fusion est substitué de plein droit, pour l’exercice de ses compé-tences, dans son périmètre, aux anciens syndicats dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes » ; « Les contrats sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu’à leur échéance, sauf accord contraire des parties. Les cocontractants sont infor-més de la substitution de personne morale par le syndicat issu de la fusion (…). »7 De même, l’ensemble des agents des syndicats fusionnés relèvent du nouveau syndicat, sauf si des compétences au titre desquelles ils réalisaient leurs missions ont été resti-tuées avant la fusion.

Simon Mauroux

1- Qui constituent des EPCI régis par les art. L. 5212-1 et suivants du CGCT.

2- Régis par les art. L. 5711-1 et suivants du CGCT.

3- Art. L. 5211-41-3, III, al. 8.4- Art. précité, III, al. 3 et 5.5- Régis par les art. L. 5711-1 et suivants

du CGCT.6- Art. L. 5211-41-3, III, al. 8.7- Art. précité, III, al. 3 et 5.On comptait 10 000 syndicats de communes au 1er avril 2014. / © J.C. Pattacini / Urba Images

La fusion de syndicats mixtes fermés suit une procédure identique à celle qui s’impose aux communautés

L’harmonisation des compétences peut amener à des transferts d’agents

OCTOBRE 2014 • N° 193 • www.adcf.org

DROIT20

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Le Royaume-Uni

243 600 km2 64 millions d’habitants

Monarchie parlementaire En Angleterre :

83 comtés (counties), dont le Grand Londres (Greater London Authority)

326 districts (districts)

8 700 paroisses civiles (parish and town councils)

L’évaluation par les pairs, une idée neuveAccessible depuis 2011 aux élus des collectivités locales anglaises et galloises, l’évaluation par les pairs consiste en un audit réalisé par une équipe bénévole d’élus et de hauts responsables territoriaux. Présentation d’un dispositif unique, symbole d’une certaine résilience territoriale dans une Grande-Bretagne marquée par une crise profonde de son système politique et administratif local.

L a peer challenge review (évaluation par les pairs) est un système original d’ins-pection/audit externe mis en place en

2011 par la Local Government Association (LGA), organisation à but non lucratif qui

agit comme porte-parole des collectivités locales en Angleterre et au pays de Galles, tout en cherchant à promouvoir les bonnes pratiques dans le champ du management et de la gouvernance. Nouveau dispositif régulateur du tissu institutionnel local, la peer review est le signe d’une certaine résilience territoriale de la part de collec-tivités britanniques malmenées par les coupes claires dans les dotations de l’État.Elle est proposée gratuitement par la LGA à ses collectivités membres, qui y ont accès

une fois tous les trois ans si elles la solli-citent. Quelque 200 évaluations de cette nature ont déjà été menées, et la LGA note une recrudescence des demandes. De fait, les collectivités locales (local

authorities) semblent tirer un réel profit de cette formule qui allie l ’expertise des pairs à la flexibilité du programme d’ins-pection, comme l’a récemment souligné l’évaluation de ce peer challenge programme menée par la Business School de Cardiff.

Quand le fair-play britannique s’applique au monde territorial…La peer review se présente comme une entraide entre professionnels du monde territorial, sur le mode de la critique amicale. Une mission d’inspection, qui dure quatre jours in situ, cherchera moins à pointer les dysfonctionnements remet-tant en cause la gestion de la collectivité concernée – comme le faisait jadis l’Audit Commission for Local Authorities – qu’à porter un regard extérieur, bienveillant et

constructif. C’est dire que son succès doit certainement beaucoup au légendaire fair-play britannique. Il tient aussi à la tradition de transparence, clé de voûte du principe structurant de responsabilité des adminis-trations locales (local accountability), de même qu’à l’habitude du travail en réseau et du benchmarking.

Une méthodologie soupleChoisie parmi un vivier national de 500 professionnels bénévoles, une équipe d’inspecteurs (peer review team) est composée de quatre à sept hauts respon-sables territoriaux ayant préala blement

souscrit aux principes de la Peer Charter. En général, l’équipe comprend le responsable élu d’un exécutif local tel qu’un Council Leader, un directeur général des services (Chief Executive) et plusieurs seniors de la LGA. C’est cette même LGA qui propose à la collectivité la composition de la challenge team, sachant néanmoins que l’élu retenu au sein de l’équipe est généralement de la même obédience politique que celle de la collectivité partie prenante, qui a d’ailleurs la possibilité de retoquer certains membres pour des raisons qui lui appartiennent (par exemple, ancien agent de la collec-tivité, élu dont la personnalité déplaît). Il revient ensuite au Chief Executive membre de l’équipe d’organiser la mission, tant pour l’intendance qu’au plan méthodo-logique. En pratique, une équipe procède par une série d’entretiens individuels avec des agents et partenaires extérieurs, mais également au moyen de groupes de discus-sion témoins ( focus groups) associant les habitants. Les personnes interrogées ayant la garantie que leurs témoignages seront anonymisés dans le rapport final d’ins-pection, des échanges libres et sans tabou sont attendus.

Un effet de pollinisation massif : la diffusion des bonnes pratiques à l’échelle nationaleL’office premier de la challenge team est clair : il s’agit de diffuser les bonnes pratiques du management de la perfor-mance en insistant sur l’empowerment (développement du pouvoir d’agir et responsabilisation des équipes) et l’affer-missement du leadership politique. À ce titre, la peer review cherchera systéma-tiquement à favoriser l’établissement de relations productives et consensuelles entre élus et agents afin d’améliorer la qualité du service rendu aux usagers/clients.

Sur la base de ces principes, le programme de la mission est librement établi par la collectivité inspectée, sachant que la challenge team est censée disposer de toutes les compétences requises pour évaluer aussi bien la soutenabilité des ressources que la qualité du management ou le pilotage de secteurs opérationnels (action sociale, gestion des déchets, logement, protection infantile, etc.). La collectivité peut aussi interroger les peers sur des sujets transver-saux (charge à eux d’y apporter une réponse contextualisée), ou encore leur demander de dresser le bilan des progrès et retards constatés depuis la précédente inspection.À l’issue de sa mission, la challenge team organise une présentation orale de ses observations et préconisations (action plan) aux élus et au top management, avant de communiquer à la collectivité, dans les 15 jours, le rapport définitif. La quasi-totalité des collectivités décident de rendre public le rapport d’inspection sur leur site web, y compris les réserves émises, quitte à y répondre de manière circonstanciée.

Emmanuel Auber DGA de la CA de Mantes-en-Yvelines

La Big Society : de l’inutilité des collectivités locales ?« La Big Society a le potentiel de com-plètement refondre la relation entre les citoyens et l’État : citoyens dotés de pouvoir ; extension des oppor-tunités individuelles ; communau-tés venant ensemble pour améliorer les vies de chacun » (manifeste de l’accord de coalition Tory/Lib Dem, 2010). La Big Society (« société civile forte ») est l’antithèse du Big Govern-ment (« État pesant ») : ce projet de transformation sociale, voulu comme une entreprise de redynamisation de l’esprit civique par l’approche par ticipative, ambitionnait d’en finir avec ce que le Premier ministre David Cameron a nommé la « société brisée » (broken society) par l’indivi-dualisme et l’étatisme.

L’idée initiale était ainsi de promou-voir le tiers secteur (associations de terrain, organisations caritatives et confessionnelles, syndicats de copro-priétaires, entreprises sociales…), paré de la vertu du dynamisme réfor-mateur, en lieu et place des adminis-trations locales.Mais, au f inal, la fragilité f inan-cière du tiers secteur a mis à mal la Big Society, d’autant que ce projet a rapidement été confondu avec la poli-tique d’austérité la plus dure menée depuis l’après-guerre au Royaume-Uni : 13 MdE (11,2 Md£) de coupes budgétaires pour l’exercice 2013-2014, et des subventions aux collec-tivités locales réduites de 42 % d’ici 2019/2020.

L’équipe procède par une série d’entretiens individuels avec des agents et partenaires ainsi que par des groupes de discussion avec des habitants

La formule allie l’expertise des pairs à la flexibilité du programme d’inspection

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INTERNATIONAL

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VAL DE GARONNE AGGLOMÉRATION (LOT-ET-GARONNE)

Plan numérique pour un « e-déclic »«O n entend souvent parler de smart

city, c’est-à-dire de ville intelligente. Ici, nous allons faire la campagne

intelligente » : c’est ainsi que Daniel Benquet, président de Val de Garonne Agglomération, motive son ambition de doter la communauté d’un plan numérique. Objectif : soutenir tous les projets de développement des usages numériques, privés comme publics. E-services permettant d’accéder à des informations, de réserver et de payer en ligne cantine scolaire, transports, etc., démocratie participative par des forums et

consultations sur internet, ou encore e-com-merce… Daniel Benquet souhaite initier un « e-déclic » en lequel il voit « la clé de déve-loppement de notre territoire ». Tout en étant bien conscient que cette révolution numérique repose d’abord sur des évolutions… culturelles. Le plan numérique de l’agglo comporte ainsi un volet formation, et un Numeric Day aura lieu le jeudi 27 novembre prochain à Marmande, en présence d’entreprises, de collectivités locales et de prestataires des technologies de l’information et de la communication.

MOYENNE VILAINE & SEMNON (ILLE-ET-VILAINE)

Breizh Bocage : planter des arbres à la mode bretonne

R eplanter haies et talus afin de lutter contre l’érosion et améliorer la qualité de l’eau, pré-server les paysages et favoriser la biodiver-

sité tout en respectant les contraintes de travail des agriculteurs : tels sont les objectifs du pro-gramme Breizh Bocage. Financé par le Feader, la région Bretagne, le conseil général d’Ille-et-Vilaine, l’agence de l’eau Loire-Bretagne et la communauté de Moyenne Vilaine et Semnon, le programme a permis la création ou la restauration de plus de 80 km de haies et près de 8 ha de bosquets pour un budget de 323 000 euros. La communauté de communes a ainsi pu suivre près de 100 particuliers et agriculteurs dans leurs projets de plantation, et a, en parallèle, accompagné plus de 10 km de plantations non pris en charge par Breizh Bocage.

VENTOUX-COMTAT VENAISSIN (VAUCLUSE)

Le handball à dimension intercommunale

C réé en 1970 sous l’impulsion d’Aimé Navello, vice-président de la communauté d’agglomération Ventoux-Comtat Venaissin (CoVe), le club de handball SC Mazan a récemment changé de nom

pour se voir rebaptiser « Mazan Ventoux-Comtat handball ». « Cette nouvelle appellation montre que nous sommes un club à rayonnement intercommunal », souligne Pascal Vasset, manager général. Une assise territoriale large pour des ambitions fortes : le club espère faire remonter son équipe première féminine en Nationale 3 (elle y a déjà joué deux saisons), puis en Nationale 2 à l’horizon 2020. Et son équipe de « hand-fauteuil » a remporté un tournoi de portée nationale, organisé en juin dernier à Mazan.

Sur les politiques intercommunales du sport, consulter Intercommunalités n° 188 – avril 2014.

PAYS NESLOIS (SOMME)

Coup de pelle symbolique pour le canal Seine-Nord Europe

PAYS MORNANTAIS (RHÔNE)

Un guide des services à la population«M algré plus de 20 ans d’existence et des réalisations concrètes,

la COPAMO reste pour beaucoup d’entre vous une structure administrative et technique trop lointaine. » Ce constat

dressé par Thierry Badel, président de la communauté de communes du Pays Mornantais (COPAMO), l’intercommunalité l’a saisi à bras-le-corps : à l’occasion du renouvellement du conseil communautaire, elle a distribué à l’intention de ses habitants une édition spéciale de son journal présentant la nouvelle équipe d’élus, mais surtout un guide répertoriant les services communautaires à la population. Services petite enfance (assistants maternels, crèches intercommunales, Passerelle Enfance…), jeunesse (espaces jeunes, accueils de loisirs…), santé (trans-port accompagné, maintien à domicile…) ou encore équipements, tous sont répertoriés au sein de ce livret, avec toutes les informations pratiques les concernant. Une initiative qui rend service…

LORIENT AGGLOMÉRATION (MORBIHAN)

Guichet unique à l’innovation

C onvaincu que les pouvoirs publics ont un rôle fort à jouer en matière d’accompagnement de l’innovation, la communauté d’agglomération de Lorient a mené un travail de regroupement des acteurs concernés,

auparavant éclatés en plusieurs structures. Résultat : « une organisation via un guichet unique, en filières et en métiers, qui permet de couvrir au mieux les besoins en matière d’accompagnement de l’innovation », explique l’agence d’urbanisme et de développement économique AudéLor, avec pour pilote Lorient Agglomération. Cinq filières ont été identifiées : industrie navale et énergies marines renouvelables, pêche-agro mer, technologie de l’information, de la communication et électronique, nautisme et matériaux, éco-activité. Le schéma territorial d’innovation est téléchargeable sur le site www.audelor.com.

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P our exprimer leur impatience devant les hésitations de l’État à donner le coup d’envoi des travaux du canal Seine-Nord Europe, les présidents des communautés de

communes concernées ont commencé à creuser. Une action symbolique par laquelle ils espèrent accélérer la prise de décision. Longue de 106 km, cette voie navigable devrait permettre de relier le port du Havre au Benelux en rattachant l’Oise au canal Dunkerque-Escaut. Frédéric Cuvillier (alors ministre délégué chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche) avait mis un coup de frein au projet en février 2013, réestimant à la hausse le coût initial de l’opération et donc sa rentabilité. Une décision qui suscite l’inquiétude des élus locaux et des entreprises ayant parié sur sa construction. Une délégation d’élus a d’ailleurs été reçue par Matignon en juin dernier. ©

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OCTOBRE 2014 • N° 193 • www.adcf.org

22 TERRITOIRES

Abonnement 1 an (11 numéros) 1 x 50 € = ......... €

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à découper et à retourner à ABO Intercommunalités 19, rue de l’Industrie - BP 90053 - 67402 Illkirch cedexTél. : 03 88 66 26 19 – Mail : [email protected]

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Tenez-nous informés de la vie de votre communauté !Envoyez vos journaux communautaires à l’AdCF – 22 rue Joubert – 75009 Paris

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SPL ET DYNAMIQUES TERRITORIALESL’implication des communautés dans les premières sociétés publiques locales

Étude AdCF / FedEpl

Partenaires depuis plusieurs années, la Fédération des entre-prises publi ques locales (FedEpl) et l’Assemblée des Commu nautés de France (AdCF) ont souhaité dresser en 2014 un bilan illustré du déploiement rapide des sociétés publiques locales (SPL) depuis l’adoption de la loi du

28 mai 2010 créant ce nouvel outil. Les objectifs de cette étude sont de dresser un panorama général sur le développement des SPL, mettre en évidence le niveau d’implication des commu-nautés dans cette dynamique et déceler des formes inédites d’organisation de la maîtrise d’ouvrage intercommunale et interterritoriale. Cette première étude commune à la FedEpl et à l’AdCF est révélatrice du lien croissant qui unit dorénavant, et sans doute plus encore demain, les entreprises publiques locales aux intercommunalités au fil des transferts de compétences et de leur entrée au capital. Elle aborde les processus de mutualisation, d’intégration, de coopération et d’évolution des compétences tout en restant attentive aux perceptions des acteurs locaux. Elle est illustrée par des recueils d’expériences et des témoignages de présidents de SPL, d’élus et dirigeants intercommunaux. Elle propose également des éclairages juridiques sur la notion de contrôle analogue en faisant un point détaillé sur l’évolution de la jurisprudence.

INSTRUCTION DES AUTORISATIONS D’URBANISME

Les enjeux d’une nouvelle organisation locale

Étude AdCF / AMF

La loi Alur de mars 2014 met fin à la mise à disposition gratuite des services de l’État pour l’instruction des auto-risations d’urbanisme dans toute commune appartenant à une communauté de plus de 10 000 habitants, et ce dès le 1er juillet 2015. En filigrane, cette disposition appelle à une organisation rapide

de services intercommunaux d’instruction. L’AdCF s’est associée à l’AMF pour réaliser une étude dans laquelle sont présentés les enjeux juridiques, financiers, organisationnels voire stratégiques de l’organisation de services mutualisés. Cet ouvrage à caractère pratique est en outre illustré par les résultats d’une enquête nationale réalisée auprès des commu-nautés et à laquelle 420 communautés ont accepté d’apporter leur concours. Au total, 20 % d’entre elles seraient déjà dotées d’un service mutualisé d’instruction des autorisa-tions d’urbanisme. Celui-ci opère au bénéfice des maires et les communautés déjà engagées témoignent entre autres des relations orga-nisées entre les communes membres et le service instructeur.

dynamiquesterritoriales

Études et perspectives

L’implication des communautés dans les premières Sociétés publiques locales

etSpl

A V E C L E S O U T I E N D E

Nouvelle Parution

Nouvelle Parution

Dialogue entre les communautés ultramarines en MartiniqueRéunies du 8 au 11 septembre en Martinique dans le cadre de la Conférence des communautés des DOM présidée par Eugène Larcher, les communautés d’Outre-mer ont croisé leurs regards sur deux sujets majeurs et d’actualité : l’urbanisme intercommunal et la nouvelle organisation territoriale. Charles-Éric Lemaignen et Corinne Casanova y représentaient l’AdCF afin de débattre des réformes en cours.

I nvités notamment par Eugène Larcher, président de la communauté d’agglo-mération de l’Espace Sud Martinique,

Charles-Éric Lemaignen et Corinne Casanova, président délégué et vice-présidente de l’AdCF, ont apporté leur concours aux journées des communautés ultramarines organisées chaque année par la Conférence des communautés des DOM. Ils ont pu, à cette occasion, se féli-citer de l’implication renforcée des élus ultramarins dans les instances nationales de l’AdCF et ont appelé collectivement à l’expression de propositions tenant compte de leurs spécificités en amont des évolu-tions législatives.

Des communautés hétérogènes aux enjeux spécifiquesLes 120 élus présents et originaires des cinq DOM (Guyane, Martinique, Guadeloupe, La Réunion et Mayotte) ont en effet fréquemment pointé les « spécificités » ultramarines : superficie et poids démographique importants des communes membres, faible nombre de communes regroupées, enjeux urbains atypiques par leur ampleur dans les ter-ritoires… Un particularisme à leurs yeux insuffisamment pris en compte dans les textes de lois. Sans disposition contraire, il est vrai que le droit commun s’applique, et ni le projet de loi NOTR ni la récente loi Maptam ne comporte de dispositions spécifiques. Mais ces spécificités ultramarines ne doivent pas cacher la grande hétérogénéité de situations et d’enjeux. Les espaces de forte densité (500 hab./km2 à Mayotte) sont incomparables aux territoires immenses et vierges de la Guyane. L’insuffisance voire l’absence d’infrastructures primaires (réseaux ou équipements), l’exclusion d’une partie de la population de l’accès à l’eau potable et à la collecte des déchets restent encore les premiers enjeux à Mayotte et dans une partie importante de la Guyane.

La loi Alur n’exonère pas les DOM du débat sur le PLUi Le sujet de l’urbanisme a été plus particu-lièrement évoqué sous l’angle du plan local d’urbanisme intercommunal. Sur ce point, la loi Alur ne contient aucune disposition spécifique aux DOM. Le PLUi a suscité,

comme fréquem-ment dans l’Hexa-gone, enthousiasme et circonspection. Les réserves portent sur la difficile réali-sation d’un PLUi sur des communes de grande taille, mais surtout sur l’atteinte faite aux responsa-bilités du maire dans son lien avec les administrés. Ces derniers sont particulièrement attachés à la valeur que le document d’urbanisme accorde à leur terrain ; point majeur de débat avec certains participants qui jugent au contraire indispensable de déplacer ce niveau de pression. Dans les DOM peut-être plus encore qu’en métro-pole, l’équation est difficile entre la notion de propriété privée à respecter et celle de l’intérêt général à affirmer.

Inquiétudes sur le contexte financier Le contexte financier a également fait l’objet d’échanges nourris. Charles-Éric Lemaignen a mis l’accent sur les impéra-tifs de mutualisation, principale voie de réponse possible, selon lui, pour le bloc local à la raréfaction des ressources (y compris des fonds européens dont bénéfi-cient fortement les DOM). L’agglomération de Cayenne, engagée dans la création d’un important réseau de transport en site propre, a fait par exemple état d’une dégradation de 40 % de sa capacité d’autofinancement. Le 8 septembre dernier, le sénateur de la Guyane Georges Patient a remis son rapport dans le cadre de la mission qui lui avait été confiée conjointement par Marylise Lebranchu, ministre de la Décentralisation et de la Fonction publique, George Pau-Langevin, ministre des Outre-mer et Christian Eckert, secré-taire d’État au Budget. Il y fait notamment le constat d’une fra-gilité financière de ces collectivités qui s’explique par des niveaux de dépenses structurellement plus importants que dans l’Hexagone et par la persistance de besoins spécifiques en matière d’équipements

(alimentation en eau potable, assainis-sement, traitement des déchets, construc-tions scolaires). Il y met également en lumière la faiblesse structurelle de la fis-calité directe locale et l’insuffisance des mécanismes de péréquation au regard des spécificités ultramarines. Plusieurs propo-sitions visent à rechercher une meilleure équité et une meilleure efficacité de la fiscalité directe locale. D’autres formulent des pistes de réforme des dotations aux collectivités dans le sens d’une meilleure prise en compte de la démographie et d’une plus grande solidarité par de nouveaux mécanismes de péréquation.

Philippe Schmit

L’ensemble des documents supports aux réflexions des communautés des DOM est téléchargeable sur le site www.conference-com.fr.

L’AgendaINSTANCES NATIONALES

• Mardi 23 septembre : conseil d’administration

• Mercredi 8 octobre : assemblée générale ordinaire et assemblée générale extraordinaire

AUTRES RENDEZ-VOUS

• Mercredi 17 septembre : audition de l’AdCF sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

• Jeudi 18 septembre : Jean-Luc Guilhot (CC Terres d’Aurignac) a représenté l’AdCF auprès de l’UNCPIE et de Mairie-conseils lors d’une rencontre intitulée « Les intercommunalités sur le chemin du développement durable avec la DDmarche »

• Jeudi 9 et vendredi 10 octobre : 25e Convention nationale de l’intercommunalité à Lille

• Jeudi 16 octobre : intervention de l’AdCF lors du congrès de l’UNCCAS

Retrouvez ces études sur le site de l’AdCF, rubrique « Publications »

Les 120 élus ont pu échanger sur les spécificités ultramarines en matière d’aménagement intercommunal et d’organisation territoriale. / © DR

www.adcf.org • N° 193 • OCTOBRE 2014

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