Dossier de présentation

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Jekyll Hyde Un spectacle de Pierre Azéma D’apres «Le cas étrange du Dr Jeckyll et de Mr Hyde» ROBERT LOUIS STEVENSON Adaptation pour la scène de Pascal Salaün L’hypocrisie me fait vomir, la liberté me fait peur

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Jekyll HydeUn spectacle de Pierre Azéma

D’apres «Le cas étrange du Dr Jeckyll et de Mr Hyde»ROBERT LOUIS STEVENSON

Adaptation pour la scène de Pascal Salaün

L’hypocrisie me fait vomir, la liberté me fait peur

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L’histoire

Le Docteur Jekyll est un homme et un scientifique fasciné par les tendances conflictuelles entre le bien et le mal. Il a œuvré pour la mise au point de la potion ultime ; celle qui peut séparer ces deux tendances en l’homme. Contraint d’expérimenter sur lui, faute de cobaye, la créature qui va surgir rendra Jekyll ivre de liberté ; il s'appellera Hyde.C’est d’abord avec l’insouciance d’un enfant que celui-ci va évoluer librement dans les rues brumeuses de Londres. Il fait outrage à la politesse, aux égards, au respect, tout cela n’est d’abord qu’un jeu, il plaisante avec autrui comme un enfant et se joue de chacun. Son goût grandissant pour l’émoi qu’il provoque dans les cercles bourgeois et conventionnés et qu’il bouscule un peu plus violemment de jour en jour l’enivre de pouvoir. Jekyll se questionne, se tourmente, se censure : Hyde peut-il continuer à vivre en lui ? Lorsque Hyde piétine et frappe violemment une enfant à terre, Jekyll se terre chez lui, paniqué et horrifié par les agissements de son double. Implacablement, Jekyll est acculé et doit rendre compte des actes terribles que la partie libre, amorale de son être a commis. Tour à tour il cache cet être de pulsions, le protège, le nourrit, veut s’en séparer, le honnit. Peu à peu Hyde prend le dessus. Il ne respecte pas son autre entité et la puissance bestiale qu’il acquiert se veut maître de tout, il veut anéantir Jekyll, la conscience qui le gêne. Pour être enfin, enfin libre de tout. Cette lutte presque inhumaine ne prendra t’elle fin que par la plus haute résolution pour Jekyll: se donner la mort  ; délivrer le monde, se délivrer lui-même. Au sein de son laboratoire qui a vu naître son rêve de liberté et de délivrance, la confrontation avec Hyde devient inéluctable.

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L’intention

L’œuvre de Stevenson est mythique et rend remarquablement compte de ce questionnement obsédant du sens de l’humanité, entre le bien et le mal. Elle est aussi une histoire d’épouvante, un cas dramatiquement étrange de dédoublement de la personnalité, ainsi qu’une riche allégorie de la tendance victorienne à l’hypocrisie sociale et à la codification protocolaire de l’expression de soi.

Le Docteur Jekyll est obsédé par sa double personnalité, et veut séparer ce qu’il considère comme les deux entités qui nous animent ; le bien et le mal. En donnant une vie à part entière à son côté obscur il éprouve la liberté, l’absence de règles et de contraintes sociales ; grâce à elle, il peut renverser la hiérarchie sociale, s’adonner au plaisir sans restriction, il vit «l’épreuve» d’un vif sentiment interne.Mais le docteur ne trouvera pas de repos et Hyde ne se contentera pas de petites satisfactions anti-sociales, son comportement vire à l’horreur.

Chacun peut reprendre la notion de double démoniaque de Stevenson à son compte. Le récit extraordinaire de Jekyll et Hyde fait écho aux puissantes contradictions qui nous habitent et qui rendent la cohabitation des toutes nos facettes parfois douloureuse et difficile.

D’où provient l’obsession du Docteur ? Quelle suffocation éprouve-t-il pour être à ce point obsédé par le bien et le mal en lui ? En tous les hommes ?Il est tentant de tirer des conclusions ; mais il semble qu’aucune conclusion ne saurait être satisfaisante pour chaque individu qui se penche sur ce cas étrange du Dr Jekyll… Profondément intime et individuelle, la question de «Qu’est ce que ma liberté ?» appelle une foule, une multitude de sentiments. Voulons-nous réellement tout ce que nous prétendons vouloir  ? Pouvons nous toujours librement choisir, sommes nous inconsciemment et donc puissamment guidés voire conditionnés ? Peut-on vivre avec un sentiment d’impuissance face à nous-même ? Il faut croire que oui.. Comment… ?La philosophie et la psychanalyse apportent des notions et une lecture aux termes ‘liberté’, ‘bien et mal’. Le théâtre donne une histoire, et c’est bien l’histoire de cet homme perdu, éperdu de liberté qui est rendue ici. Cette liberté insaisissable qui s’annulera par elle-même, et qui causera la perte de Jekyll et Hyde.

Après avoir assisté au drame du Docteur, la question se posera peut-être autrement…

«Est-ce que je veux cette liberté?»

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La mise en scène

Le Docteur Henri Jekyll est un vieux garçon, préoccupé à l’extrême par son invention, marginalisé au sein du cercle de ses confrères scientifiques. Il agit dans le confinement de son laboratoire, à l’étroit dans son obsession maladive et passionnée, pour donner jour à cet autre lui-même, grand, svelte et vif, ce Hyde qui arpentera les rues de Londres librement.

Monter Jekyll et Hyde c’est mettre en scène la violence de la confrontation de ces deux entités au sein d’un même homme, c’est donner vie à l’aspiration de Jekyll au sein de son laboratoire et montrer Hyde, libre comme l’air, lâché dans la ville londonienne de l’époque Victorienne. Cette époque, caractérisée par les conventions, la stricte morale, l’asservissement de classes sociales les plus défavorisées, est rendue dans le choix du mobilier, des vêtements ainsi du décor suggéré des bords éclairés et brumeux de la Tamise à la tombée de la nuit.

Hyde est libéré dans une atmosphère fantastique servie par un éclairage proche des films expressionnistes allemands, il agit dans les rues inquiétantes de Londres pendant que Jekyll se tourmente dans son laboratoire.

C’est par le corps et la voix d’un seul acteur que ces deux expressions humaines violemment contraires prennent vie, et c’est par l’habile partage de la scène en plusieurs plans, que sont rendus les lieux  ; le laboratoire de Jekyll voit ressassées ses convictions, son entêtement, sa souffrance, son intime réflexion. Et puis il y a la ville, en arrière plan, lieu de tous les autres, de la civilisation, des bourgeois et des pauvres ; la ville et les autres: terrain de jeux privilégié de Hyde.

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L’adaptationL'hypocrisie me fait vomir ! La liberté me fait peur !

« Eh bien m'y voilà » me suis-je dit lorsque j'ai attaqué l'adaptation du Cas étrange du Dr Jekyll et de Mr Hyde. Toutefois, il faut rendre à César ce qui lui appartient… C'est Pierre Azema qui en est l'instigateur et qui a souhaité que cette adaptation soit un monologue. Bien lui en a pris !

En même temps, cette rencontre avec le texte de Stevenson ne pouvait me laisser insensible. Pourquoi ? Tout d'abord, parce que comme comédien, je suis confronté lors de la création de chaque personnage à cette dualité d'états d'âme, d'états d'être  : osciller entre ce que je ferais dans cette situation, et ce que mon personnage ferait dans le même cas. Et, afin de gagner en épaisseur, travailler les mauvais aussi bien que les bons côtés de ce personnage, etc. De plus, j'adore jouer «  le théâtre dans le théâtre » : incarner un personnage qui s’approprie pour l'intrigue les faits et gestes d'un « autre » personnage ‒ changements de voix, d'attitude ‒ à l'image de notre maître à tous, Molière !

Ensuite, mes travaux d'écriture (nouvelles, adaptations et pièces) sont empreints de ces sentiments de dualité, mes personnages souvent perturbés par cette problématique de la confrontation du bien et du mal. Pourtant, je n'avais jusqu’à maintenant jamais lu l'œuvre de Robert Louis Stevenson. L'œuvre originale, j'entends.

Avec Le Cas étrange du Dr Jekyll et de Mr Hyde nous sommes dans la forme sérieuse du dédoublement de la personnalité. L'épouse de l'auteur, Fanny Stevenson, le rappelle dans le texte qu'elle consacre à la genèse du roman : « mon mari avait lu, quelque temps avant la rédaction de l'œuvre, un article sur le subconscient paru dans une revue scientifique française », et d’ajouter qu'il en avait été très impressionné…

C'est ainsi, et pour plus de véracité, que je me suis attaché à la biographie de l'auteur et de ses personnages. Pour la rédaction de la première scène, par exemple, je me suis appuyé sur le fait que Stevenson, avant de trouver l'inspiration, avait le dos au mur ; financièrement et son éditeur le relançait sans cesse, lui suggérant même d'écrire un petit roman à sensation, idée que Stevenson n'accepte qu'à contrecœur : «  Pendant deux jours, je me torturai la cervelle à la recherche d'une intrigue… ». Il est donc seul, livré à lui-même. Il sait qu'il a en lui, après le succès de L’Ile au trésor, les facultés d'écrire et d'intéresser un public…C’est donc sur un Dr Jekyll quémandant de tout son être l'aide de ses confrères savants afin de réaliser LA grande expérience, de scinder le bien et le mal chez l'être humain que se lève le rideau.

J'ai découvert que Stevenson, dans son essai intitulé Un Chapitre sur les rêves, déclarait que ses œuvres ne naissaient pas de son seul travail conscient, mais portaient la marque d'un travail inconscient effectué pendant son sommeil par des « Petites créatures » ou

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« brownies », qui l'aidaient sans qu'il le sache dans sa rédaction. Le dédoublement n'est pas seulement chez Stevenson un thème littéraire ou un mythe personnel. Il fait partie du processus même de l'écriture. C'est pourquoi, dans mon adaptation, Jekyll se voit affublé d'une « Petite créature », en l’occurrence un rat de laboratoire, qui permettra au Docteur de raisonner à voix haute sur ses faits et gestes, sur l'avancement de ses travaux et sur cette grande interrogation face aux péripéties qu'il va affronter lors de cette incroyable aventure : fuir, subir ou faire face ?

Autre parti pris : dynamiser le spectacle. Un monologue est, par définition, une longue tirade jouée par un comédien. Même si le roman n'est pas aussi peuplé que bien des adaptations cinématographiques auraient pu le faire croire, il fallait trouver le moyen d'échapper à une certaine lourdeur, pour ne pas dire une monotonie. La présence du rat permet justement d'y remédier. Le talent d'un acteur aussi. Comme je le faisais remarquer au début de cette note, un acteur peut incarner un ou deux personnages et, de ce fait, correspondre à ce que lance le Dr Jekyll à ses confrères à propos de ses recherches : « Sachez que je dis deux, parce que l'état de mes connaissances actuelles ne me permet pas d’aller au-delà. Je suis convaincu que d'autres viendront après moi, qui me dépasseront dans cette voie ; j'ose avancer devant vous, messieurs, l'hypothèse que l'on découvrira que l'homme est formé d'une véritable communauté d'hôtes multiformes, hétérogènes et surtout… autonomes ». Utterson sera donc présent sur scène ; le fidèle Lanyon également, sans oublier bien évidemment : Edward Hyde.

C’est un réel plaisir de travailler sur cette œuvre si universelle et si résolument moderne. Elle est même, malheureusement, d'une actualité ahurissante ; les faits divers relatent bien souvent de méfaits dignes d'Edward Hyde, les témoignages rapportant que les protagonistes étaient jusque là des gens adorables. L'adaptation que je signe se veut théâtrale, avec ses coups de théâtre, sa performance d'acteur et son interrogation poétique sur la dualité de l'homme au-delà du bien et du mal, la recherche d’une liberté sans bornes.

Pascal Salaün

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L’equipe

Pierre Azéma : Metteur en scène & acteur

J'ai été formé par Emile Salimov, metteur en scène diplômé du M.G.I.K. de Moscou. Dans des pièces de Tcheckhov, Harms, Boulgakhov ou Gogol, j’ai mis en pratique le système russe que j’étudiais auprès de lui, et ce, en art dramatique et en mise en scène. Plus tard auprès de Virgil Tanase, lui aussi ‘transfuge de l’Est’, j’ai évolué dans des personnages de Tchekhov mais aussi de Feydeau, Prévert et Saint-Exupéry avec le Petit Prince. Il m’a confié le rôle d’Octave dans l’adaptation théâtrale du film «La rêgle du jeu» de Renoir.Parallèlement, mon intérêt pour le jeu filmé grandit  ; c’est avec Catherine Hubeau et Olivier Nolin que j’ai apprivoisé mon jeu sous l’œil indiscret de la caméra.Durant toutes ces années où la recherche et la création de personnages ont été au centre de mes préoccupations, l’attrait de la mise en scène aussi a été grandissant ; Au sein d’un célèbre parc d’attractions, j’ai géré et assuré la bonne poursuite de spectacles que Jean-Claude Cotillard, entre autres, avait montés, puis petit , à petit j’ai travaillé à mes propres créations. L’idée de travailler dans un théâtre en dehors du parc m’enthousiasmait aussi. J’ai alors proposé à Pierre Santini du Théâtre Mouffetard, chez qui j’avais joué «La mouette» auparavant, une adaptation sur laquelle je travaillais, « Les trois mousquetaires». Ça a été un succès et plus de 5000 spectateurs ont vu ce spectacle ! J’ai enchaîné en mise en scène, parallèlement à mon travail d’acteur, avec un conte Juif de Ida Gordon «Une goutte de schnaps» qui après une exploitation d’un an aàParis, tourne encore dans nos villes de province.L’art dramatique et la mise en scène ; ces deux disciplines se nourrissent l’une de l’autre, et me permettent de proposer des créations tout autant originales que respectueuses d’une oeuvre commune.

Pascal Salaün : Auteur

Après des études de théâtre, notamment au Cours Florent (où il a pour professeur Denise Bonal) il joue L’Amour Molière, qui sera repris avec succès au festival d’Avignon). Pascal Salaün interprète des rôles importants dans Le cadavre vivant de Léon Tolstoï, dans Somnolente mésaventure de Theodor Mazilu et dans Les Jumeaux vénitiens de Goldoni (mise en scène de Virgil Tanase). Il se fait également connaître par ses interprétations dans les pièces d’Israël Horovitz L’Indien cherche le Bronx et le Baiser de la

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veuve. Il a travaillé avec Jean-Louis Bourdon sur ses pièces Jock et Visite d’un père à son fils. Plus récemment, Pascal Salaün s’est essayé à la mise en scène avec Jacques, galant du XVIIIe , adaptation personnelle d’après Diderot où il interprète le rôle de Jacques au côté de Philippe Gouinguenet, le maître. Puis, travaille avec le metteur en scène Emile Salimov, AMERIKA de Franz Kafka au Lucernaire (2000-2001). Il écrit des nouvelles qui sont consultables sur le site www.pascalsalaun.org. Deux pièces de théâtre sont à son actif, dont une saluée par Alain Decaux de l’Académie française et Jean Tulard, réunissant Napoléon et le tragédien Talma. Il est aujourd’hui en plus de comédien, professeur de théâtre, formateur dans le cadre de la formation continue en entreprise et d’expression orale au Lycée Michelet de Vanves (élèves de premières).

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L’extraitDr Jekyll:Si vous me la posez, c'est qu'en vous un doute subsiste. Vous me croyez donc assez stupide pour pouvoir cacher cet homme dans ma maison ? Utterson, je prends Dieu à témoin, oui je prends Dieu à témoin que je ne reverrai jamais de ma vie ce Hyde. Combien de fois faudra-t-il vous le répéter. Je vous en donne ma parole d'honneur ; tout est fini dans ce monde entre lui et moi. Absolument fini.Un temps.A présent, vous avez gagné, la migraine me ravage le crâne. Bien le bonsoir Utterson, et faites moi plaisir : prenez garde aux ombres de Londres ; nous ne sommes à l'abri de rien ici-bas !

Jekyll, une fois seul, essaie par quelques mouvements de se détendre la nuque. Il est évident qu'un changement de personnalité s'effectue.

Mon cher Utterson, sachez que je mènerai dorénavant une vie tout à fait retirée ; ne soyez pas surpris, et ne doutez pas non plus de mon amitié, si ma porte reste fermée même pour vous. Laissez-moi suivre ma voie ténébreuse. J'ai attiré sur moi un châtiment et un danger qu'il m'est interdit de préciser. Si je suis pleinement coupable, ne doutez pas que je souffre en proportion. J'étais loin de penser qu’un être pût autant souffrir et devenir la proie de terreurs à ce point consternantes. La seule chose que vous puissiez faire pour adoucir mon sort, Utterson, c'est de respecter… mon silence… Adieu.

L’homme qui apparaît est plus souple dans ces mouvements, plus lent et dégageant plus de force.

Mr Hyde: Et d'un !Il se dirige vers le rat.Alors compagnon d'infortune, toujours muet ? Sais-tu seulement d'où je viens ? Tu veux le savoir ? J'vais te le dire ! Je viens de chez not' cher Lanyon. Il aurait fallu que tu voies sa bobine pour que tu jouisses du même plaisir. Mais, avant d'arriver au clou du spectacle, il faut que j'commence par le début. Pas plus tard qu'hier, son vieil ami Jekyll lui demande un service. Avec une lettre bien tournée dont je t'épargne les détails. Jekyll se noie sans cesse dans les détails. De l'action, de l'action… Lanyon se voit donc prié de passer chez Jekyll afin de récupérer dans son labo le tiroir regroupant les fioles, le sel et le cahier de notes à propos de ce que tu sais. Faut dire que le pauv' Jekyll était coincé dans mon appartement à Soho, sous mes traits. Parce qu'il faut que tu le saches, je prends de plus en plus le dessus et, puisque j'en suis aux confidences, j'ai bien l'intention de le chasser complètement. Sais-tu pourquoi ? Pour le bal, Ratus, le bal masqué qui doit avoir lieu chez l'ambassadeur. Eh bien, j'veux en être !Il se prépare pour le bal en conséquences, se pare d'une grande cape et d'une canne...

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Je veux approcher tout ce beau monde, Jekyll est trop coincé pour ces sauteries ! C'est pourquoi, voyant la date approchée, il n'a eu de cesse de reprendre son apparence. Et ce sournois, il a profité d'un de mes moments de faiblesse pour rédiger cette lettre qui stipule qu'à minuit de la nuit prochaine, je devrai me rendre chez lui afin de prendre ce tiroir et surtout son contenu.Il se maquille tel un clown blanc.Ne suis-je pas présentable ? Je ne voulais pas y aller dans un premier temps, sachant très bien ce qu'il avait en tête, mais une "fichue" idée m'est venu, alors j'ai accepté. Au douzième coup de minuit, je cognais à sa porte, il n'en menait pas large le père Lanyon, et je suis sûr, à l'odeur de poudre qui régnait dans son salon, qu'il avait une trouille du tonnerre de Dieu. Et là, je passe à l'acte  : au lieu de déguerpir gentiment avec le nécessaire pour la transformation, j'ingurgite la formule devant un Lanyon médusé !Il simule la transformation.Eh bien, mon cher Ratus, je parie dix contre un que ce cher Lanyon n'en a plus pour très longtemps à vivre. Parce qu'il fallait la voir sa tête quand mon corps s'est mis à trembler de partout, quand mes os se sont mis à craquer comme un plancher et quand enfin son ami Jekyll a fait son apparition, empruntant le même corps que l’inconnu qui venait de faire irruption chez lui. Il était blême ! N'était-ce pas une fichue idée ! Je suis parvenu en moins de vingt quatre heures à faire table rase de ses amis les plus proches. Personne ne s'inquiètera de la disparition de Jekyll avant un bon mois. Alors, toujours muet ? Aucune envie de me féliciter ? Je sais, je sais, ce que tu veux toi aussi, c'est la liberté. Et bien ce n'est plus un souci, tonton Hyde va te la rendre. Moi, je vais au bal, toi tu gagnes ta liberté. Viens par ici, mon gars… Et surtout fais attention, la liberté a son prix… qu'il faut parfois payer très cher… C'est dingue, non ? Comme on se comprend entre cobayes. Tu veux ta liberté et bien… voilà, c'est chose faite…

A peine a-t-il lâché le rat, qu'il l'écrase violemment sous son pied alors qu'il adresse déjà la parole à une jeune femme.