Dossier Alimentation et territoires · l’alimentation (obésité, diabète, maladies...

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1 Février 2018 ALIMENTATION ET TERRITOIRES : comment garantir localement une alimentation de qualité et accessible à tous ? 2-4 place Rutebeuf, 75012 PARIS [email protected] www.fabrique-territoires-sante.org Twitter - @FabTerrSante

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    Fvrier 2018

    ALIMENTATION ET TERRITOIRES : comment garantir localement

    une alimentation de qualit et accessible tous ?

    2-4 place Rutebeuf, 75012 PARIS

    [email protected]

    www.fabrique-territoires-sante.org Twitter - @FabTerrSante

    mailto:[email protected]:// http://www.fabrique-territoires-sante.org

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    dito - La stratgie nationale de sant 2018-2022 appelle, dans son axe 1, promouvoir une alimentation saine. Elle explique qu une alimentation saine est facilite par des repres nutritionnels et de comportements favorables comme le fait de rinvestir le petit djeuner, notamment pour les enfants et les jeunes, dviter le grignotage ou les collations entre les repas, qui peuvent conduire un apport calorique excessif 1. Lalimentation est effectivement un dterminant majeur de sant ; et quand les acteurs de la sant publique sen saisissent, cest frquemment travers la notion de nutrition , o alimentation et activit physique vont de pair. Laccent est mis, en particulier dans le Programme national nutrition sant (PNNS), sur les recommandations nutritionnelles et le changement des comportements individuels comme levier privilgi. Cette perspective semble rductrice, voire normative et injonctive. En effet, les personnes rencontrant des difficults conomiques et sociales connaissent des obstacles, en partie lis leur environnement, pour respecter les repres nutritionnels : les produits dune alimentation saine ne sont pas toujours accessibles, financirement ou gographiquement. Il y a vingt ans, Jonathan Mann dplorait la rticence et linaptitude [de la sant publique] travailler directement sur les racines sociales des problmes de sant 2. On est tent de partager ce constat encore aujourdhui, face aux personnes nayant pas accs une alimentation suffisante ou de qualit et, de ce fait, plus fortement exposes aux pathologies chroniques lies lalimentation (obsit, diabte, maladies cardiovasculaires, etc.). En se focalisant sur lducation pour la sant, sur la sensibilisation au got, sur

    1 Stratgie nationale de sant 2018-2022 (en ligne) 2 Jonathan Mann, Sant publique : thique et droits de la personne , Sant publique vol.10 n3, 2010 (en ligne)

    http://solidarites-sante.gouv.fr/systeme-de-sante-et-medico-social/strategie-nationale-de-sante/article/la-strategie-nationale-de-sante-2018-2022http://fulltext.bdsp.ehesp.fr/Sfsp/SantePublique/1998/3/LAZARUS_ps.pdf

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    des ateliers cuisine et linformation nutritionnelle, les pouvoirs publics prennent le risque dluder linterrogation des conditions de vie et des causes structurelles de linscurit alimentaire et des pathologies lies lalimentation. Pourtant, sur les territoires, des initiatives lies lagriculture, notamment biologique, ou de nouvelles formes daide alimentaire foisonnent. La question de laccessibilit une alimentation saine parat essentielle pour traiter efficacement les problmes de sant publique. Les liens entre ces actions et les dmarches territorialises de sant restent souvent renforcer, voire construire. Ce dossier ressources, en valorisant la richesse des initiatives, invite les acteurs locaux se saisir de ces questions et se rinterroger sur les effets de leurs actions sur les ingalits sociales et territoriales de sant.

    Didier Febvrel, Prsident de Fabrique Territoires Sant

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    sommaire -

    dito ................................................................................... 1 sommaire ............................................................................ 3 liste des abrviations ............................................................ 5 mthode .............................................................................. 7 tat des lieux ........................................................................ 9

    alimentation, sant et ingalits ........................................................ 9 lalimentation, premier dterminant de sant ................................... 9 une inscurit alimentaire en hausse ............................................... 10 des ingalits sociales et territoriales accentues par des comportements dachats et alimentaires diffrencis ...................... 12

    des politiques publiques nationales peu coordonnes ....................... 14 ct sant publique, le Programme national nutrition sant ........... 14 ct agriculture, le Programme national pour lalimentation .......... 16 la lente mergence dune gouvernance conjointe ............................ 17

    la territorialisation des enjeux alimentaires ...................................... 19 actions locales inspirantes .................................................. 23

    laide alimentaire : premier mode dintervention pour lutter contre linscurit alimentaire ................................................................... 23

    cadrage ........................................................................................... 23 actions locales ................................................................................. 26 rflexions : laide alimentaire est-elle suffisante ? ............................ 28

    la restauration collective : un levier efficace pour la politique locale .. 29

    cadrage ........................................................................................... 29 actions locales ................................................................................. 32 rflexions : sachemine-t-on vers des cantines bios pour tous ? ....... 34

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    les jardins collectifs : un outil de dveloppement social .................... 35 cadrage ........................................................................................... 35 actions locales ................................................................................. 36 rflexions : les jardins collectifs sont-ils nourriciers ? ...................... 38

    sapprovisionner localement : circuits courts et de proximit et nouveaux modes de distribution ..................................................... 40

    cadrage ........................................................................................... 40 actions locales ................................................................................. 41 rflexions : quelle ouverture sociale de ces modes de distribution plus directs ? ........................................................................................... 43

    cultiver localement : le retour dune agriculture locale ...................... 45

    cadrage ........................................................................................... 45 actions locales ................................................................................. 46 rflexions : quels arbitrages entre le dveloppement des terres de culture et la densification urbaine ? ................................................ 48

    vers des stratgies alimentaires locales : une gouvernance alimentaire territoriale ..................................................................................... 50

    cadrage ........................................................................................... 50 actions locales ................................................................................. 52 rflexions : quelle transversalit relle des politiques alimentaires locales ? ........................................................................................... 53

    clairage sur Mayotte ..................................................................... 56

    en conclusion .................................................................... 60 slection de ressources bibliographiques ............................. 62 annexe ............................................................................... 71 Les rfrences des informations et citations utilises ci-aprs sont indiques en note de bas de page. Les documents ressources dont nous vous conseillons la lecture sont dans le corps du texte, prcdes dune flche ().

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    l iste des abrviations - AdCF Association des communauts de France ADEME Agence de lenvironnement et de la matrise de lnergie AMAP Association pour le maintien dune agriculture paysanne ANSES Agence nationale de scurit sanitaire de lalimentation, de

    lenvironnement et du travail ARS Agence rgionale de sant ASV Atelier sant ville CCAS Centre communal daction sociale CESE Conseil conomique, social et environnemental CLS Contrat local de sant CIAS Centre intercommunal daction sociale CNA Conseil national de lalimentation CNES Crdits nationaux destins aux piceries sociales CNESCO Conseil national dvaluation du systme scolaire CRES Comit rgional dducation pour la sant DAAF Direction de lalimentation, de lagriculture et de la fort DOM Dpartement doutre-mer EIS valuation dimpact sur la sant EHPAD tablissement dhbergement pour personnes ges

    dpendantes FEAD Fonds europen daide aux plus dmunis IAU Institut damnagement et durbanisme IFSTTAR Institut franais des sciences et technologies des

    transports, de lamnagement et des rseaux IGAS Inspection gnrale des affaires sociales INPES Institut national de prvention et dducation pour la sant

    (aujourdhui Sant publique France) INRA Institut national de la recherche agronomique INSEE Institut national de la statistique et des tudes

    conomiques

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    IREPS Institut rgional dducation et de promotion de la sant IUFN International Urban Food Network ONU Organisation des Nations Unies ORS Observatoire rgional de sant PAC Politique agricole commune PADES Programme autoproduction et dveloppement social PAI Programme alimentation et insertion PAT Projet alimentaire territorial PLU Plan local durbanisme PNA Programme national pour lalimentation PNNS Programme national nutrition sant PRAANS Programme rgional alimentation activits nutrition sant SCIC Socit cooprative dintrt collectif SCoT Schma de cohrence territoriale UE Union europenne UNCCAS Union nationale des CCAS et CIAS Uniopss Union nationale interfdrale des uvres et organismes

    privs non lucratifs sanitaires et sociaux

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    mthode - Afin de raliser ce dossier ressources, un appel contributions a t diffus du 4 septembre au 13 octobre 2017. Il a reu 26 rponses, venant principalement de centres communaux daction sociale (CCAS) et dassociations locales. Un seul service sant municipal a particip. Hormis avec les porteurs dactions, deux entretiens ont t raliss avec Marketa Braine-Supkova, directrice de lInternational Urban Food Network (IUFN), et Graldine Guarinos, charge de projets en promotion de la sant lInstitut rgional dducation et de promotion de la sant (IREPS) de Mayotte. Une recherche documentaire complmentaire, avec lappui du Comit rgional dducation pour la sant (CRES) de Provence-Alpes-Cte dAzur, a permis dagrger des ressources utiles aux acteurs locaux. Ce dossier ressources propose un tat des lieux de la thmatique et un tour dhorizon dactions mises en uvre sur les territoires. Il ne recherche pas lexhaustivit des actions existantes et des territoires impliqus. Dix projets ont fait lobjet dune Inspiraction. Elles ont t choisies pour la qualit de linformation transmise et la varit des actions et territoires reprsents. Ces fiches-action synthtiques ont t rdiges partir de la contribution du porteur (rponse un questionnaire en ligne) et dun entretien complmentaire ; elles ont t valides par le porteur avant publication. La carte ci-dessous indique lemplacement des actions mentionnes dans ce dossier (en bleu, celles faisant lobjet dune Inspiraction). Trois actions sont prsentes hors mtropole : deux Mayotte ( Mamoudzou et Chirongui), lune en Guadeloupe ( Pointe--Pitre).

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    tat des lieux -

    alimentation, sant et ingalits -

    lalimentation, premier dterminant de sant Lalimentation est un dterminant majeur de sant. Elle peut jouer comme un facteur de protection ou un facteur de risque, selon les aliments consomms. Une mauvaise alimentation est une alimentation dsquilibre et peu varie ; elle comporte des aliments et boissons forte teneur en gras saturs, en acides gras trans, en sucres libres et en sel. Les recommandations alimentaires portent principalement sur une plus grande consommation de fruits et lgumes. Selon ltude Gobal Burden of Disease3, depuis 20 ans, lalimentation est le principal facteur de risque de maladie, de dcs et dincapacit dans le monde. Dans les pays dvelopps, un tiers de cancers les plus communs pourrait tre vit par un changement de mode de vie. En France, 15 % de la mortalit est attribuable lalimentation ( titre de comparaison, la part de mortalit attribuable au tabac est de 12,5 %). Lalimentation influence diverses pathologies, certaines chroniques : des cancers, des maladies cardio-vasculaires, les accidents vasculaires crbraux ou le diabte de type 2. Aujourdhui en France, 54 % des hommes et 44 % des femmes sont en surpoids ou obses (chiffres de ltude ESTEBAN 2014-2016). La prvalence du surpoids et de lobsit donne voir des ingalits sociales : elle est suprieure chez les personnes les moins diplmes. 3 Le Global Burden Disease (ou fardeau global des maladies) est un programme de recherche port par lOrganisation mondiale de la sant depuis le dbut des annes 1990. Ce concept permet de donner une image complte de ltat de sant mondial en sappuyant sur le calcul des annes de vie corriges de lincapacit. Consulter les donnes

    http://www.healthdata.org/gbd

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    Chez les enfants, une mauvaise alimentation nuit au dveloppement cognitif, mental et psychomoteur. Elle affecte notamment les capacits de concentration en classe et affaiblit le systme immunitaire. Enfin, outre des effets sur la sant physique, une mauvaise alimentation ou la difficult se nourrir suffisamment peut engendrer de lisolement social et des effets ngatifs sur la sant mentale (dpression, honte, anxit, ). Pour un aperu rapide, PromoSant le-de-France a ralis une infographie sur la nutrition en France, prsentant les principales pathologies lies la nutrition, les axes de la politique nutritionnelle et des repres sur les ingalits sociales et territoriales. Le Conseil national de lalimentation (CNA) prpare, pour lt 2018, un avis sur la dfinition dune alimentation favorable la sant (consulter le mandat du groupe de concertation).

    une inscurit alimentaire en hausse Pour le Comit de la scurit alimentaire mondiale, la scurit alimentaire existe lorsque tous les tres humains ont, tout moment, un accs physique, social et conomique une nourriture suffisante, saine et nutritive, leur permettant de satisfaire leurs besoins nergtiques et leurs prfrences alimentaires pour mener une vie saine et active 4. La scurit alimentaire se caractrise donc par quatre piliers : la disponibilit de lalimentation, laccs physique, social et conomique, lutilisation des aliments et la stabilit des trois prcdents lments. A contrario, linscurit alimentaire (ou prcarit alimentaire) dcrit la situation o la possibilit de sapprovisionner en nourriture suffisante et adquate dun point de vue nutritionnel et de faon socialement acceptable (sans recours la mendicit, au vol, au don ou aux aides alimentaires) est limite ou incertaine. Daprs ltude individuelle nationale sur les consommations alimentaires (INCA 3) de lAgence nationale de scurit sanitaire de lalimentation, de lenvironnement et du travail (ANSES), 3,5 millions de Franais adultes, soit plus de 12% des adultes, nont pas accs une nourriture saine et quilibre en quantit suffisante : on dira quils sont en inscurit alimentaire, quantitative et/ou qualitative. Le plus souvent, ils doivent faire appel une aide extrieure pour se nourrir.

    4 Comit de la scurit alimentaire, Sentendre sur la terminologie, Rome, 2012 (en ligne)

    https://www.promosante-idf.org/infographie-la-nutrition-en-france-2http://www.cna-alimentation.fr/v2/wp-content/uploads/2017/09/CNA_AlimSant%C3%A9_Mandat.pdfhttps://www.anses.fr/fr/content/inca-3-evolution-des-habitudes-et-modes-de-consommation-de-nouveaux-enjeux-en-mati%C3%A8re-dehttp://www.fao.org/docrep/meeting/026/MD776F.pdf

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    Puisque lalimentation est un dterminant important de sant, les personnes en situation dinscurit alimentaire sont donc plus susceptibles de rencontrer ses effets dltres sur leur sant. Par exemple, pour les bnficiaires dune aide alimentaire, une enqute a montr que leur tat de sant tait globalement proccupant . La prvalence de pathologies lies lalimentation, comme lobsit, lhypertension artrielle, le diabte ou lanmie, est plus leve pour les usagers de laide alimentaire que dans la population gnrale5.

    Source : Schma des causes et consquences de linscurit alimentaire en France , in Uniopss, Dpasser laide alimentaire pour aller vers laccompagnement par lalimentation, synthse des travaux du groupe Alimentation, 2015 (en ligne)

    5 INPES, Alimentation et tat nutritionnel des bnficiaires de laide alimentaire. tude Abena 2011-2012 et volutions depuis 2004-2005, mars 2013 (en ligne)

    http://www.unaf.fr/IMG/pdf/plateforme_groupe_alimentation_uniopss.pdfhttp://inpes.santepubliquefrance.fr/etudes/pdf/2013-abena2-synthese.pdf

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    Linscurit alimentaire a des causes diverses, socitales et/ou individuelles, et concerne une population trs htrogne (familles monoparentales, chmeurs, travailleurs pauvres, jeunes non-qualifis, ). Elle ne touche pas que les mnages vivant sous le seuil de pauvret.

    des ingalits sociales et territoriales accentues par des comportements dachats et alimentaires diffrencis Tous les territoires noffrent pas le mme accs une alimentation de qualit : les tats-Unis ont dvelopp la notion de dsert alimentaire pour dsigner ces espaces o les habitants ne peuvent pas se procurer des aliments sains des prix abordables (populations nayant pas accs physiquement aux commerces, ne pouvant utiliser les transports en commun pour sy rendre, nayant pas les moyens de payer la marchandise ou ayant peur de sy rendre). Cependant, aucune tude ntablit un lien certain entre lenvironnement alimentaire et les comportements alimentaires. Ainsi, la consommation de fruits et lgumes nest pas corrle laccessibilit spatiale des supermarchs ; une tude amricaine faite avec un GPS suivant les dplacements des participants a montr que la densit de fast-foods autour des trajectoires quotidiennes (et non la densit autour du quartier de rsidence) tait associe la consommation de graisses satures. Le niveau socio-conomique du quartier de rsidence serait un facteur explicatif des comportements alimentaires plus pertinent. Une valuation dimpact sur la sant (EIS) sur les projets de transports de Plaine Commune (Seine-Saint-Denis) avait point limpact de la mobilit sur linscurit alimentaire. Les habitants du territoire ont dclar utiliser de faon trs majoritaire les transports en commun. Ainsi, pour accder aux biens de premire ncessit et en particulier lalimentation, ils doivent utiliser les transports pour des raisons conomiques : aller dans le magasin o le produit est le moins cher et adapt leurs habitudes alimentaires . Lvaluation faisait alors lhypothse que le cot du transport et la capacit se dplacer influencent le choix des lieux dapprovisionnement, voire le contenu du panier6. La question du cot de lalimentation est primordiale. La part du budget des mnages consacr lalimentation a baiss : elle est passe de 34,6 % en 1960 20,4 % en 2014, comme la montr lINSEE, notamment en raison de la hausse des niveaux de vie. Cette part est plus importante chez

    6 ARS le-de-France, ORS le-de-France, valuation des impacts sur la sant de projets transport de Plaine Commune rapport final, 2014 (en ligne)

    http://www.ors-idf.org/dmdocuments/2014/RAPPORT_EIS.pdf

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    les mnages les plus pauvres ; o le budget consacr lalimentation est une variable dajustement par rapport des postes de dpenses plus prioritaires (logement, lectricit, transports, etc.). Notons galement que les habitudes alimentaires sont de plus en plus tournes vers des produits transforms (80% de la consommation) et le temps de prparation des repas domicile a baiss de 25 % entre 1986 et 2010. Cinquante ans de consommation alimentaire : une croissance modre, mais de profonds changements, INSEE, 2015 (en ligne) Pourtant, une alimentation saine a un cot plus lev et nest donc pas accessible tous : une tude de lUniversit de Cambridge atteste quil cote trois fois plus cher de manger sain, cest--dire en respectant la fois les quilibres nutritionnels et la qualit des produits : 1 000 calories daliments qualifis sains cotent 9,40 pour 3,20 de 1 000 calories issues dune alimentation base de produits agro-industriels 7. En France, il a t calcul que le budget alimentaire qui permettrait une personnes de respecter lensemble des recommandations nutritionnelles tait denviron 3,50 par jour, condition de sloigner des habitudes alimentaires pour privilgier des aliments trs nutritifs. Les personnes en situation de pauvret adaptent leurs achats alimentaires un impratif de satit moindre cot : des scientifiques parlent dune ultra-rationalit des personnes faibles ressources. Par exemple, la kilocalorie cote 15 20 fois mois chre avec des biscuits fourrs au chocolat quavec des tomates . Cela suggre que la mauvaise alimentation des personnes en situation de pauvret est la consquence de leurs contraintes budgtaires, plutt que dun manque de connaissances des recommandations nutritionnelles8. La dernire tude sur les habitudes alimentaires des Franais de lANSES confirme que lalimentation est un marqueur social important. Par exemple, les consommations de boissons sucres et de fruits frais sont diffrentes selon le niveau dtudes des personnes9. Boris Tavernier, directeur dune association favorisant lorganisation de groupements dachats dans les quartiers prioritaires de lagglomration lyonnaise (VRAC), explique que la consommation sappuie sur un

    7 Dominique Paturel, Pourquoi faut-il aller au-del de laide alimentaire ?, European Anti Poverty Network France (en ligne) 8 Christine Csar, Les sciences de la nutrition et lalimentation des pauvres : jusquo rationaliser le budget alimentaire ? , in Christine Csar, tude Abena 2004-2005 : Comportements alimentaires et situations de pauvret, Institut de veille sanitaire, 2007 (en ligne) 9 ANSES, tude individuelle nationale des consommations alimentaires 3 (INCA 3), juin 2017 (en ligne)

    https://www.insee.fr/fr/statistiques/1379769http://www.academia.edu/14850403/Pourquoi_faut-il_aller_plus_loin_que_laide_alimentaire_http://opac.invs.sante.fr/doc_num.php?explnum_id=3497http://opac.invs.sante.fr/doc_num.php?explnum_id=3497https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT2014SA0234Ra.pdf

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    paradoxe chez les populations dfavorises : on observe une augmentation des produits gras et sucrs, aliments plaisir, prts consommer, bon march chez les publics les plus pauvres, mais aussi faiblement nutritionnels, en lien avec une absence denvie de cuisiner corrle linactivit et au chmage. Outre ses effets sur la sant, ces habitudes de consommation alimentaires ont galement un impact sur les relations sociales, le repas demeurant un espace de lien au sein des foyers 10. Lalimentation est sujette de nombreuses injonctions de la part des pouvoirs publics, des mdias, et de la population en gnral : bien manger, tre mince, cuisiner des produits frais, etc. Les ressorts des comportements alimentaires restent complexes identifier, entre dterminismes sociaux et choix individuels. Il faut tenir compte de certaines reprsentations culturelles pour expliquer, en partie, le choix des lieux dapprovisionnement.

    des polit iques publiques nationales peu coordonnes -

    ct sant publique, le Programme national nutrition sant (PNNS) La sant publique traite de lalimentation travers la notion de nutrition, qui englobe lalimentation et lactivit physique. Lanc en 2001, puis renouvel en 2006 et 2011, le PNNS est un plan de sant publique qui vise quatre principaux objectifs :

    - rduire lobsit et le surpoids dans la population ; - augmenter lactivit physique et diminuer la sdentarit tous les

    ges ; - amliorer les pratiques alimentaires et les apports nutritionnels,

    notamment chez les populations risque ; - rduire la prvalence des pathologies nutritionnelles.

    Il fait lobjet dune territorialisation via ladhsion volontaire des villes la charte du PNNS. Pour un exemple de territorialisation, voir cet article : Jean-Charles Basson, Nadine Haschar-No, Ivan Theis, La traduction territoriale du

    10 Entretien avec Fabrique Territoires Sant

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    Programme national nutrition sant (PNNS) en Midi-Pyrnes , Healthcare Policy vol.9, 2013 (en ligne) Le PNNS est lobjet de nombreuses critiques, dont lInspection gnrale des affaires sociales (IGAS) sest rcemment faite lcho, appelant mme ne pas reconduire le programme11. Parmi les difficults rencontres, et soulignes par les acteurs de terrain, la communication nationale autour de la nutrition (en particulier le message 5 fruits et lgumes par jour ) a souvent t mal comprise, normative, voire juge culpabilisante. Malgr ces critiques, la mise en place du PNNS a permis de mettre au premier plan la nutrition comme un enjeu majeur de sant publique, en reconnaissant son rle dans la monte de maladies non transmissibles comme le diabte de type 2 ou les maladies cardiovasculaires. Ainsi, la lutte contre lobsit a t inscrite dans la loi de sant publique de 2004. Linformation sur les recommandations nutritionnelles et les outils mis en uvre pour influencer les comportements individuels sont ncessaires, mais pas suffisants ; des pistes sur lesquelles le PNNS pourrait voluer. Franois Baudier, Retours sur les origines du PNNS pour mieux envisager son avenir (sil y en a encore un !) , Socit franaise de sant publique, novembre 2017 (en ligne) Le Nutri-score, nouveau systme dinformation nutritionnelle Depuis 2014, suite un rapport de Serge Hercberg, prsident du PNNS et directeur de lunit de recherche en pidmiologie nutritionnelle de lUniversit Paris 13, une rflexion a t engage pour simplifier le systme dinformation nutritionnelle prsent sur les emballages des aliments. La loi de modernisation de notre systme de sant du 26 janvier 2016 prvoyait la mise en place dun systme dtiquetage nutritionnel synthtique, simple et accessible tous, figurant sur la face avant des produits. Larrt dapplication du Nutri-score a t sign le 31 octobre 2017. Ce nouvel affichage vise amliorer linformation des consommateurs, mais aussi inciter les industriels entrer dans une logique damlioration nutritionnelle de leurs produits. Avec une lettre (de A E) et une couleur (du vert au rouge), le Nutri-score informe les consommateurs sur la qualit nutritionnelle dun produit (calcule partir des teneurs en fibres, protines, acides gras saturs, sucres, sel).

    11 IGAS, valuation du programme national nutrition sant 2011-2015 et 2016 (PNNS 3) et du plan obsit 2010-2013, 2016 (en ligne)

    https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4750150/https://www.sfsp.fr/images/docs/lire_et_ecrire/points_de_vue/pdv_pnnsbau1017.pdfhttp://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/174000725.pdf

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    Lexprimentation mene dans 60 magasins a montr que le Nutri-score permettait damliorer la qualit nutritionnelle du panier dachat, sans augmenter son cot.

    Si le tableau des valeurs nutritionnelles est obligatoire sur tous les aliments emballs, le Nutri-score est facultatif. ce jour, 33 entreprises de lagro-alimentaire et de la grande distribution se sont engages lutiliser. Dossier pdagogique Nutri-score (Sant publique France)

    ct agriculture, le Programme national pour lalimentation (PNA) La loi du 27 juillet 2010 de modernisation de lagriculture et de la pche dfinit, pour la premire fois en France, le cadre de la mise en uvre dune politique publique de lalimentation : la politique publique de lalimentation vise assurer la population laccs, dans des conditions conomiquement acceptables par tous, une alimentation sre, diversifie, en quantit suffisante, de bonne qualit gustative et nutritionnelle, produite dans des conditions durables. Elle vise offrir chacun les conditions du choix de son alimentation en fonction de ses souhaits, de ses contraintes et de ses besoins nutritionnels, pour son bien-tre et sa sant . La loi du 13 octobre 2014 davenir pour lagriculture, lalimentation et la fort a apport les prcisions suivantes : le PNA encourage le dveloppement des circuits courts et de la proximit gographique entre producteurs agricoles, transformateurs et consommateurs. Il prvoit notamment des actions mettre en uvre pour lapprovisionnement de la restauration collective, publique comme prive, en produits agricoles de saison ou en produits sous signes didentification de la qualit et de lorigine, notamment issus de lagriculture biologique. Les actions rpondant aux objectifs du PNA et aux objectifs des plans rgionaux de lagriculture durable peuvent prendre la forme de projets alimentaires territoriaux (PAT). Ces derniers visent rapprocher les producteurs, les transformateurs, les distributeurs, les collectivits territoriales et les consommateurs et dvelopper lagriculture sur les territoires et la qualit de lalimentation . Les collectivits ont un rle dans lancrage territorial des orientations du PNA, en particulier grce la possibilit de mettre en uvre un PAT.

    http://www.santepubliquefrance.fr/Media/Files/CP-DP/2018/1502_DP_NUTRISCORE

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    Ces projets territoriaux sont amens se dvelopper dans les prochaines annes, sous limpulsion de ltat. Depuis 2011, quatre appels projets nationaux ont t lancs pour soutenir des initiatives exemplaires ou dmultipliables portes par des partenaires privs ou publics, rpondant aux enjeux sanitaires, socio-conomiques et environnementaux de lalimentation. Lappel projets lanc en septembre 2017 dcline sous quatre axes les priorits de la politique publique de lalimentation : la justice sociale, lducation alimentaire des jeunes, la lutte contre le gaspillage alimentaire, lancrage territorial et la mise en valeur du patrimoine alimentaire. Il met aussi laccent sur le soutien lmergence et la mise en uvre de PAT. Ldition 2017 est dote dune enveloppe de 1,5 millions deuros, finance par le ministre de lagriculture et de lalimentation, le ministre des solidarits et de la sant et lAgence de lenvironnement et de la matrise de lnergie (ADEME). Cahier des charges de lappel projets 2017-2018 Liste des laurats de lappel projets national 2016-2017

    la lente mergence dune gouvernance conjointe Rglementairement, les actions mises en place dans le cadre du PNA doivent respecter les orientations du PNNS. Pourtant, pour Franois Baudier, un des initiateurs du PNNS, le PNA est un concurrent du PNNS et brouille le message de sant publique, face aux intrts de lagriculture et de lagro-alimentaire. La cohrence mme de la politique nationale, tiraille entre PNNS et PNA, entre ministre de la Sant et ministre de lAgriculture, est questionne. Citons galement le Programme alimentation et insertion (PAI) qui sadressent aux personnes bnficiant de laide alimentaire. Port par les ministres de lagriculture et de la sant depuis 2003, il vise sensibiliser les personnes recourant laide alimentaire lquilibre nutritionnel et tisser du lien social. Le PAI distribue des outils pdagogiques, valids par le PNNS : un calendrier annuel prsentant des recettes et des conseils nutritionnels, des affiches reprenant les messages du PNNS. Les deux ministres ont des occasions de travailler ensemble, par exemple sur le dernier appel projet du PNA ou dans le cadre du PAI ; mais sur la question systmique et globale de lalimentation, les liens et articulations mritent dtre claircis et renforcs.

    http://agriculture.gouv.fr/lancement-de-lappel-projets-2017-du-programme-national-pour-lalimentationhttp://agriculture.gouv.fr/pna-les-47-laureats-de-lappel-projet-2016-2017

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    ALIMENTATION ET TERRITOIRES

    Les tats gnraux de l alimentation

    Du 20 juillet au 21 dcembre 2017, ltat a organis des tats gnraux de lalimentation pilot par le ministre de lagriculture et de lalimentation et organis en interministriel. Lexercice tait la fois indit et difficile : lensemble des acteurs en jeu autour des questions dalimentation (citoyens, associations, collectivits, milieux agricoles, conomiques et agro-industriels, grande distribution) ont eu quatre mois pour dbattre et laborer des recommandations dactions autour de deux chantiers ambitieux : la cration et la rpartition de la valeur ; la promotion dune alimentation saine, sre, durable et accessible12 . Une consultation publique a galement t mise en uvre via une plateforme internet, dont les recommandations ont particulirement port sur la restauration collective et lducation la sant, notamment en direction des jeunes, lments qui sont aussi ressortis des diffrents ateliers.

    lissue des dbats sur les enjeux conomiques, territoriaux, environnementaux et sanitaires de lalimentation, lensemble des acteurs saccordait pour faire levier sur lintgralit de la chane, du champ la fourchette ; mais une approche incitative et non contraignante, notamment vers les acteurs conomiques, a t privilgie. Si la feuille de route 2018-2022 grne les diffrents axes dune politique de lalimentation sur lensemble des enjeux dbattus, pour linstant, les mesures annonces par le gouvernement ciblent prioritairement le rquilibrage des relations commerciales entre producteurs et distributeurs. Deux mesures phares, qui intressent les collectivits, sont aussi au menu : la restauration collective et la lutte contre le gaspillage alimentaire. Un second volet lgislatif devrait suivre, notamment autour des filires agricoles comme instrument de transition vers un modle agricole durable, sans calendrier prcis.

    Favoriser les initiatives locales a t nonc comme une des conditions de russite, au travers des PAT dont le dploiement massif est encourag. Ils devront intgrer des aspects environnementaux, nutritionnels et lutter contre la prcarit. La question de leur financement, de leur coordination et de leur gouvernance reste en suspens.

    Consulter le dossier de presse de clture des tats gnraux de lalimentation

    Consulter la feuille de route de la politique de lalimentation 2018-2022

    12 Fabrique Territoires Sant a particip deux ateliers des tats gnraux de lalimentation : Faciliter ladoption par tous dune alimentation favorable la sant (4 runions) et Lutter contre linscurit alimentaire en France et dans le monde (1 runion).

    http://agriculture.gouv.fr/les-etats-generaux-de-lalimentation-0http://fr.calameo.com/read/0031969797e39b71aef79

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    la territorialisation des enjeux alimentaires - On la vu, les politiques nationales cherchent un ancrage territorial pour se dployer localement, par le biais dappels projets ou de contractualisations avec les collectivits locales. Paralllement, les territoires reprent de plus en plus lalimentation comme un enjeu local. A minima, cinq raisons justifient lintrt des villes pour lalimentation : limiter ltalement urbain, augmenter lautonomie alimentaire locale des zones urbaines, se librer de la dpendance au ptrole, lutter contre la pauvret, rpondre une demande de plus en plus prsente chez les citadins, et enfin lutter contre le rchauffement climatique. La convergence des intrts entre les niveaux national et locaux favorise lmergence de politiques territoriales sur diffrentes facettes du systme alimentaire. Nourrir nos villes. Pour une gouvernance alimentaire des rgions urbaines, AdCF, Etd, IUFN, Terres en villes, 2012 (en ligne) On assiste alors un mouvement de relocalisation de lalimentation. Apparat souvent dans les discours des villes la volont de renforcer son autonomie alimentaire. En moyenne aujourdhui, les villes consomment moins de 2 % de denres locales. La recherche de lautonomie alimentaire nest pas tant un objectif atteindre quune perspective dans lanticipation de potentielles crises climatiques. Aucune ville na jamais t autonome dans son alimentation et ne le deviendra. Amliorer son autonomie rpond dabord un enjeu de rsilience des territoires : il sagit de diminuer sa vulnrabilit et sa dpendance aux produits imports. Cabinet Utopies, Autonomie alimentaire des villes : tat des lieux et enjeux pour la filire agro-alimentaire franaise, 2016 (en ligne) Des villes anglophones, en particulier Toronto au Canada et Bristol au Royaume-Uni, sont pionnires dans la mise en uvre de politiques alimentaires locales. Ds les annes 1980, elles se saisissent des problmes de sant lis lalimentation pour dvelopper une nouvelle approche locale. En runissant et dialoguant avec une pluralit dacteurs locaux, reprsentant diffrents intrts, elles ont pu proposer des actions territoriales pour amliorer la qualit de lalimentation et son accessibilit, et la durabilit du systme. En 2015, lors de lExposition universelle de Milan, des villes ont lanc le Pacte de politiques alimentaires urbaines. Son cadre daction dcline six axes : assurer un environnement propice une action efficace, promouvoir une alimentation durable et une bonne nutrition, assurer

    http://www.iufn.org/wp-content/uploads/2013/05/Nourrir_nos_villes1.pdfhttp://www.utopies.com/wp-content/uploads/2017/06/autonomie-alimentaire-des-villes-notedeposition12.pdf

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    lquit sociale et conomique, appuyer la production alimentaire, orienter lapprovisionnement et la distribution alimentaires, et enfin prvenir le gaspillage alimentaire. Le Pacte de Milan appelle notamment les secteurs de la sant et de lalimentation joindre leurs efforts afin de promouvoir des modes de vie sains et lutter contre les maladies non-transmissibles lies une mauvaise alimentation. Aujourdhui, 161 villes, dont huit franaises (Bordeaux, Grenoble, Lyon, Marseille, Montpellier, Nantes, Paris, Rennes), sont signataires du Pacte et sengagent ainsi construire des systmes alimentaires plus durables. Site du Milan Urban Food Policy Pact Consulter le Pacte et le cadre dactions quil propose Dautres dclarations, internationales ou franaises, appuient le rle des territoires sur les enjeux alimentaires. Par exemple, la dclaration finale du Nouvel agenda urbain de lOrganisation des Nations Unies (ONU), faite Quito en octobre 2016, insiste sur le rle majeur des collectivits locales dans la lutte contre linscurit alimentaire et la transition vers des systmes alimentaires durables. Lassociation des rgions de France a galement affirm, dans une dclaration Rennes en 2014, sa volont de promouvoir les systmes alimentaires territorialiss . Dclaration de Rennes, Pour des systmes alimentaires territorialiss , 2014 Trois dimensions structurent un systme alimentaire, daprs le Comit pour la scurit alimentaire des Nations Unies : les chanes dapprovisionnement, lenvironnement alimentaire et les comportements des consommateurs. Il est ncessaire de travailler sur ces diffrentes dimensions pour amliorer la qualit de lalimentation et son accessibilit. Un appel projet Alimentation et agriculture durable , lanc fin 2017, par le ministre de lEurope et des affaires trangres, en partenariat avec le ministre de lagriculture et de lalimentation, souligne le rle des villes dans les systmes alimentaires et leur capacit les influencer en ces termes : les collectivits locales peuvent tre des acteurs fondamentaux de la transition vers des systmes alimentaires durables et bnfiques pour la sant. Par exemple, en orientant les tapes de production, transformation, distribution, consommation et de gestion des dchets alimentaires vers davantage de durabilit, elles peuvent relocaliser leur conomie en crant de la valeur et de lemploi local sur leurs territoires, et ainsi rpondre aux demandes citoyennes. Elles peuvent reconstruire le lien social entre producteurs et consommateurs tout en veillant la bonne rpartition de la valeur entre les acteurs des systmes alimentaires. Elles peuvent aussi promouvoir une alimentation saine et de qualit, en travaillant sur les infrastructures

    http://www.milanurbanfoodpolicypact.org/http://www.iufn.org/wp-content/uploads/2016/03/Pacte-de-Milan.pdfhttp://regions-france.org/wp-content/uploads/2016/10/de%CC%81claration-finale.pdfhttp://regions-france.org/wp-content/uploads/2016/10/de%CC%81claration-finale.pdf

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    permettant tous daccder une alimentation diversifie, ou en favorisant lducation nutritionnelle par exemple 13. Exemples dactions lchelle des systmes alimentaires portes par des collectivits du monde entier :

    Source : Appel projet Alimentation et agriculture durables , ministre de lEurope et des affaires trangres, 2017 Si les territoires ont bien un rle jouer sur lalimentation, au titre de quelle(s) comptence(s) peuvent-ils agir ? Aucune comptence des collectivits locales ne vise explicitement lalimentation, mais il est possible de rattacher des actions aux comptences connues, en fonction de lenjeu alimentaire concern. titre dillustration, les documents durbanisme peuvent dlimiter les espaces agricoles prserver, prvoir des jardins familiaux ou encore dfinir des dispositions relatives la logistique, notamment pour faciliter lapprovisionnement dun territoire. () La responsabilit de la restauration collective en milieu scolaire et priscolaire est confre aux communes ou intercommunalits pour lcole primaire, aux dpartements pour les collges et aux rgions pour les lyces, dans le respect, notamment, de consignes de scurit sanitaire et de nutrition tablies par ltat. Dans ce cadre, les collectivits peuvent, en outre, jouer un rle en matire de promotion dune alimentation de qualit et diversifie, dducation alimentaire, daccessibilit en termes de tarification ou de lutte contre le gaspillage alimentaire .

    13 Appel projet Alimentation et agriculture durable , ouvert du 18 dcembre 2017 au 28 fvrier 2018

    https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/politique-etrangere-de-la-france/action-exterieure-des-collectivites-territoriales/appels-a-projets-et-fonds-en-soutien-a-la-cooperation-decentralisee/appel-a-projets-alimentation-et-agriculture-durables/

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    Florence Arnaud, Alexandra Cocquire, Droit de lalimentation et territoires : un jeu de rles complexe , Institut damnagement et durbanisme le-de-France, 2017 (en ligne) Pour une vue synthtique sur les moyens daction des collectivits locales sur lalimentation : Commissariat gnral au dveloppement durable, Lalimentation : un nouvel enjeu de dveloppement durable pour les territoires , 2017 (en ligne)

    http://www.iau-idf.fr/savoir-faire/environnement/defis-alimentaires/droit-de-lalimentation-et-territoires-un-jeu-de-role-complexe.htmlhttps://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Th%C3%A9ma - L%27alimentation un nouvel enjeu de d%C3%A9veloppement durable pour les territoires.pdf

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    actions locales inspirantes - Voici un tour dhorizon dactions locales qui semparent des enjeux alimentaires dun point de vue territorial. Six champs dintervention sont mis en avant : laide alimentaire, la restauration collective, lanimation de jardins collectifs, lorganisation de circuits courts et de modes de distribution directs, le soutien lagriculture locale, et enfin llaboration de stratgies alimentaires territoriales. Les actions prsentes peuvent combiner plusieurs de ces stratgies (voir tableau en annexe), elles ont un rle dillustration et montrent la varit des possibilits dont les territoires peuvent se saisir.

    l aide alimentaire : premier mode d intervention pour lutter contre l inscurit alimentaire -

    cadrage Le dispositif franais daide alimentaire, cr dans les annes 1980 linitiative dassociations caritatives, a trouv sa premire dfinition lgale dans la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de lagriculture et de la pche : laide alimentaire a pour objet la fourniture de denres alimentaires aux personnes les plus dmunies. Cette aide est apporte tant par lUnion europenne que par ltat ou toute autre personne morale . Le CNA prcise les objectifs de laide alimentaire dans sa dfinition : laide alimentaire est une aide attribue des personnes dfavorises ou rencontrant ponctuellement des difficults conomiques. Elle vise diffrents objectifs : rpondre des situations durgence ; offrir une alimentation diversifie, de qualit et en quantit suffisante ; inciter la personne dmunie

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    prendre soin delle, dans un processus de renarcissisation ; constituer un outil dinclusion sociale, voire conomique 14. Le dispositif a fortement volu en 2014, suite une rforme europenne. Elle nest plus intgre la politique agricole commune (PAC) mais un fonds structurel : le Fonds europen daide aux plus dmunis (FEAD), gr en France par le ministre charg des affaires sociales. Les piceries sociales et solidaires, quant elles, refusant le principe de gratuit de laide impos par lUE, bnficient des crdits nationaux destins aux piceries sociales (CNES). Des financements nationaux compltent laide europenne dans le cadre du PNA, du PNNS et du PAI. Laide alimentaire est mise en uvre par des associations habilites (les quatre tte de rseau sont : les Restos du Cur, le Secours populaire, la Croix rouge et la Fdration des banques alimentaires) et les municipalits via les CCAS. Les sources dapprovisionnement de laide alimentaire sont diverses : les denres obtenues via le FEAD, les dons (par la grande distribution, lindustrie agro-alimentaire ou les agriculteurs), la rcupration de produits bruts invendus (pche, fruits et lgumes), les collectes auprs des particuliers, une part de la production de jardins vocation sociale ou lachat direct de denres complmentaires par les structures de laide alimentaire. On distingue quatre principaux modes de distribution de laide alimentaire :

    - la distribution de denres brutes sous formes de colis durgence dans des centres de distribution fixes ou itinrants ;

    - la distribution de repas chauds au sein des restaurants sociaux, accueils de jour ou lors de maraudes auprs des personnes sans domicile fixe ;

    - la distribution de denres au sein des piceries sociales et solidaires ;

    - des aides financires.

    14 Conseil national de lalimentation, avis n72 du 22 mars 2012 (en ligne)

    http://www.cna-alimentation.fr/v2/wp-content/uploads/2017/03/CNA_Avis72.pdf

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    Source : Uniopss, Dpasser laide alimentaire pour aller vers laccompagnement par lalimentation, synthse des travaux du groupe Alimentation, 2015 (en ligne) Le nombre de bnficiaires de laide alimentaire ne cesse daugmenter : 2,8 millions de personnes en bnficiaient en 2008, 3,5 en 2010 et 4,8 en 2015 (ce chiffre vient des donnes des quatre associations nationales tte de rseau, et nintgre pas les bnficiaires dune aide alimentaire distribue par des associations non-habilites), soit une augmentation de plus de 70 % en sept ans. Une tude mene en 2016 par la Direction gnrale de la cohsion sociale, rattache au ministre des solidarits et de la sant, en propose le

    http://www.unaf.fr/IMG/pdf/plateforme_groupe_alimentation_uniopss.pdf

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    panorama suivant : le paysage de laide alimentaire apparait comme foisonnant et en mutation. Alors que les grands rseaux associatifs de laide alimentaire ont diversifi leurs champs dintervention dans une approche large de la lutte contre lexclusion, dautres acteurs historiques, comme les CCAS, semblent affirmer leur volont de restreindre leur intervention directe en matire daide alimentaire au profit dune plus grande complmentarit avec les associations de leur territoire. Dans le mme temps, des associations gnralistes voire spcialises dans les domaines du logement, de lhbergement, de la sant, etc., ont, quant elles, dvelopp une pratique de laide alimentaire, en partie sans doute pour rpondre aux besoins des publics quelles accueillent, hbergent ou accompagnent. Les pratiques dans laide alimentaire sont souples et ne sont pas standardises : les pratiques mises en uvre par chaque association savrent en effet trs diversifies, quil sagisse des conditions daccs laide alimentaire (sur orientation des services sociaux ou universelle), des modalits employes pour calculer le reste--vivre ouvrant droit laide alimentaire, des dures daccs cette aide ou encore de la faon dont est organise la distribution 15. Relevons enfin que les modalits de la distribution alimentaire peuvent avoir des effets stigmatisants et dvalorisants ; ce qui a amen des structures repenser leur modle et les conditions daccueil du public.

    actions locales En raison des contributions reues, nous mettrons ici laccent sur des projets mis en uvre par des CCAS, dans le cadre dpiceries sociales et solidaires. Une picerie sociale et/ou solidaire permet ses bnficiaires de faire leurs achats en acquittant une participation financire de 10 20 % du prix affich. Ce principe vise favoriser la valorisation et le sentiment de dignit des bnficiaires. Ces piceries, principalement gres par des CCAS, sapprovisionnent auprs des banques alimentaires ou par des achats directs. Les actions ci-dessous montrent que cette aide alimentaire cherche relocaliser son approvisionnement et quelle peut, outre son caractre de ncessit, tre un support pour organiser des ateliers, notamment sur la nutrition. Reims (Marne), le CCAS a men une rflexion avec les acteurs locaux impliqus dans laide alimentaire. Cela a amen une coordination entre la ville, le CCAS, le dpartement et six associations : chaque association a un rle dfini dans le rseau soit la collecte des denres, laide transitoire 15 Direction gnrale de la cohsion sociale, tude portant sur les modalits de distribution de laide alimentaire et daccompagnement aux personnes dveloppes dans ce cadre, 2016 (en ligne)

    http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_final_dgcs_vf_201611.pdfhttp://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_final_dgcs_vf_201611.pdf

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    aux bnficiaires en attendant laccs lpicerie, la distribution de lalimentation pour les enfants de moins dun an, le portage domicile pour les personnes tant dans lincapacit de se dplacer, ou des soutiens autres qualimentaire. Une picerie sociale et solidaire, laquelle participent tous les partenaires, a t cre en 2011 afin dapporter une nouvelle forme daide. Des ateliers collectifs sur lalimentation sont galement organiss pour aller au-del de laide strictement ncessaire. retrouver dans le rpertoire InspirActions de Fabrique Territoires Sant Le Conseil dpartemental du Gers sest galement interrog sur la coordination et la cohrence territoriale des dispositifs daide alimentaire : cest pourquoi il a cr une plateforme dpartementale de laide alimentaire et des solidarits actives. Site du Conseil dpartemental du Gers Bordeaux, le CCAS a cr le dispositif Relais Popote pour proposer une offre aux personnes nayant pas accs un espace de cuisine. En coordination avec les acteurs impliqus dans laide et la distribution alimentaire, des structures locales mettent disposition des espaces-cuisines existants et non utiliss plein temps. Le but est de mailler le territoire, afin de diversifier loffre en aide alimentaire propose notamment aux personnes loges en htel. Les Relais Popote deviennent des lieux dchanges et de valorisation des bnficiaires en leur offrant un nouvel espace dautonomie. Responsabilit et solidarit alimentaires Bordeaux : les Relais Popote , fiche-exprience UNCCAS, 2016 (en ligne) pinay-sous-Snart (Essonne), le soutien alimentaire, apport via lpicerie sociale du CCAS, est une porte dentre pour dvelopper du lien avec les familles, jusqu favoriser linscription dans une dmarche dinsertion sociale et/ou professionnelle. Pour cela, lpicerie a dvelopp de nouvelles actions, au regard des attentes et besoins des bnficiaires : par exemple, la mise en place dune consultation infirmire une fois par semaine, lorganisation dentretiens daccueil collectifs, la culture daromatiques par les enfants sur le site de lpicerie, une vente hebdomadaire de fruits, lgumes et ufs issus de lagriculture locale et/ou biologique, Les familles sont ainsi places au cur des rflexions et de la mise en uvre de la programmation de lpicerie sociale ; ce qui a permis de lever des freins dans laccompagnement social en gnral. lpicerie sociale, mon alimentation et ma sant jy fais attention , rcit dexprience PromoSant le-de-France, 2017 (en ligne) Loon-Plage (Nord), le CCAS a repens son aide alimentaire quil ne jugeait pas satisfaisante. Pour dvelopper laccompagnement dans la

    https://www.fabrique-territoires-sante.org/ressources/inspir_actions/une-epicerie-sociale-et-solidaire-pour-coordonner-laide-alimentaire-duhttp://www.gers.fr/index.php?tg=oml&file=actualites.html&actu=548https://www.unccas.org/responsabilite-et-solidarite-alimentaires-a-bordeaux-les-relais-popote#.Wmiw5hOdXOShttps://static1.squarespace.com/static/599d74d249fc2b0ecbb93344/t/59fc937b8e7b0fde9d136109/1509725058284/Epicerie+sociale+-+R%C3%A9cit+d%27exp%C3%A9rience.pdf

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    dure des personnes demandeuses dune aide alimentaire, le CCAS a mis en place des paniers solidaires . Ces paniers proposent des produits cultivs localement, grce un partenariat avec une association porteuse de jardins dinsertion sous lgide des Jardins de Cocagne. De plus, ce nouveau circuit court a permis dapprovisionner la cantine scolaire et le foyer-restaurant pour les personnes ges et ainsi amliorer la qualit des repas fournis. retrouver dans le rpertoire InspirActions de Fabrique Territoires Sant

    rflexions : laide alimentaire est-elle suffisante ? Ce mouvement de relocalisation de lapprovisionnement de laide alimentaire et des piceries sociales et solidaires semble, daprs plusieurs tudes, permettre une relle amlioration des habitudes alimentaires des populations bnficiaires de ces dispositifs ainsi quun soutien plus prononc la production agricole paysanne locale 16. Plus globalement, laide alimentaire distributive rpond des besoins identifis et importants, mais elle nest pas suffisante. Elle permet la personne de faire face partiellement ses besoins alimentaires, mais nest pas une solution durable. Pour Dominique Paturel, chercheuse lInstitut national de la recherche agronomique (INRA) et spcialiste du sujet, laide alimentaire distributive nouvre pas un droit lalimentation effectif : ce que nous montrent les chiffres, cest une augmentation exponentielle des personnes qui y ont recours et le seul discours prsent dans larne publique est celui de laugmentation, au mme rythme, des ressources pour distribuer cette aide alimentaire. () ce sont bien les conditions de pauvret qui empchent laccs lalimentation et non la disponibilit ou le manque de rseau de distribution . Finalement, face la course pour trouver toujours plus de produits distribuer, les causes structurelles du besoin de recourir laide alimentaire ne sont pas interroges. Dominique Paturel, Pourquoi faut-il aller au-del de laide alimentaire ?, European Anti Poverty Network France (en ligne) Pire, focaliser le dbat sur laide alimentaire aux plus dmunis empche laccs lalimentation pour tous (), elle masque, occulte, capte le dbat public en en ignorant lenjeu dmocratique la fois de la relocalisation de laide alimentaire et de laccs lalimentation .

    16 Julien Noel, Catherine Darrot, Des systmes alimentaires relocaliss plus durables : vers un accs une alimentation de qualit pour tous , RIODD, 2016 (en ligne)

    https://www.fabrique-territoires-sante.org/ressources/inspir_actions/alimentation-solidaire-un-nouveau-circuit-court-dapprovisionnementhttp://www.academia.edu/14850403/Pourquoi_faut-il_aller_plus_loin_que_laide_alimentaire_https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01349972/document

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    Dominique Paturel, Vronique Blanchot, Histoire de laide alimentaire. En bout de courses ?, confrence-dbat Agrobiosciences, 2014 (en ligne) Les pouvoirs publics affichent dans les textes que laide alimentaire doit tre une porte dentre un parcours de rinsertion sociale. Un champ nouveau se dveloppe pour dpasser laide alimentaire : l accompagnement par lalimentation . Il sagit de passer dune dmarche essentiellement distributive une dmarche plus globale visant lautonomie des personnes, en prenant la personne et ses choix en considration. Des associations impliques et runies par lUnion nationale interfdrale des uvres et organismes privs non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss) ont pos les jalons de cet accompagnement et ses conditions de russite pour que lalimentation devienne un moyen, et non une fin, et un outil dintgration et de dialogue. Uniopss, Dpasser laide alimentaire pour aller vers laccompagnement par lalimentation, synthse des travaux du groupe Alimentation, 2015 (en ligne)

    la restauration collective : un levier efficace pour la polit ique locale -

    cadrage La restauration collective est une porte dentre privilgie par les collectivits pour se saisir de la question alimentaire. En effet, comme la montre une enqute du Commissariat gnral au dveloppement durable, lapproche nutrition-sant de la restauration collective permet de crer un important levier sur la production durable du territoire via la commande publique. Cest une entre souvent privilgie qui invite les collectivits rflchir sur leurs ambitions en termes de qualit alimentaire et de relocalisation de la production . Commissariat gnral au dveloppement durable, Lalimentation : un nouvel enjeu de dveloppement durable pour les territoires , Analyse Thma, 2017 (en ligne) travers la commande publique, les collectivits peuvent agir sur diffrentes politiques : politique agricole, politique dachat, politique sociale, etc. Le programme europen de recherche Lascaux, install lUniversit de Nantes, se donne pour objectif de faire progresser le droit

    http://www.agrobiosciences.org/IMG/pdf/Cahier_Aide_alimentaire_DEF.pdfhttp://www.unaf.fr/IMG/pdf/plateforme_groupe_alimentation_uniopss.pdfhttp://www.unaf.fr/IMG/pdf/plateforme_groupe_alimentation_uniopss.pdfhttps://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Th%C3%A9ma - L%27alimentation un nouvel enjeu de d%C3%A9veloppement durable pour les territoires.pdf

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    alimentaire la lumire des enjeux de la scurit alimentaire, du dveloppement durable et du commerce international. Il ressort de cette recherche que le travail men sur la restauration collective peut tre apprhend comme un axe de transversalit. La recherche a identifi les diffrentes politiques publiques de restauration collective et ouvert un Observatoire de la restauration collective locale et durable. Le recueil ralis a recens, dans les diffrents domaines daction influenant la restauration collective, les leviers dont peuvent se saisir les collectivits selon leurs comptences (commune, intercommunalit, dpartement et rgion).

    Typologie des politiques publiques de restauration collective locale et durable. Des outils pour les collectivits territoriales, Programme Lascaux, Universit de Nantes, 2016 (en ligne) - voir, notamment, le tableau des leviers dactions aux pages 11 15 La restauration collective regroupe diffrents secteurs : la restauration scolaire, mdico-sociale, dentreprise, pnitentiaire, etc. La typologie ci-aprs prsente les tablissements et acteurs de la restauration collective.

    https://f.hypotheses.org/wp-content/blogs.dir/1874/files/2016/11/Recueil_Typologie-des-politiques-publique-de-restauration-collective-locale-et-durable-double-page.pdf

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    Source : Portail rgional de la restauration collective bio, locale et de qualit en Nouvelle-Aquitaine La restauration collective recouvre des ralits et des fonctionnements trs divers : la gestion (achats, laboration, livraison des repas, service en salle) peut tre directe, confie un prestataire ou mixte ; ce qui a son importance quant la marge de manuvre de la collectivit sapprovisionner en produits de qualit et localement. La restauration scolaire est trs dveloppe en France par rapport dautres pays europens. Mais des disparits dans laccs la cantine persistent selon les catgories socioprofessionnelles des parents, ce que met en vidence une rcente tude du Conseil national dvaluation du systme scolaire (CNESCO), organisme indpendant cr en 2013 pour valuer les politiques publiques en matire ducative17. Ltude note dabord une relle amlioration de la qualit des repas. Les cantoches sont devenues des restaurants scolaires, qui proposent des menus diversifis et constitus de produits frais . Cela est dautant plus important que le lien est tabli entre la consommation de repas quilibrs et la concentration des lves en classe. Outre les effets dune bonne alimentation sur la sant, la russite scolaire en dpend donc galement. Mais laccs la cantine scolaire reste ingal : 60 % des collgiens des tablissements en ducation prioritaire ny mangent pas (30 % des collgiens sur tout le territoire). Une des explications est un frein conomique : 60 % des tablissements ne proposent pas de tarifs indexs sur les revenus des parents. Du ct de la restauration hospitalire, le CNA a rcemment appel une rforme en profondeur : lavis se prsente comme un signal dalerte auprs des pouvoirs publics , face la prvalence de la dnutrition

    17 CNESCO, Qualit de vie lcole : enqute sur la restauration et larchitecture scolaires, 2017 (en ligne)

    http://www.restaurationcollectivena.fr/restauration-collective/http://www.restaurationcollectivena.fr/restauration-collective/http://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2017/10/170929_Note_QdeVie_VF.pdf

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    lhpital. Ses recommandations visent particulirement reconnatre le patient comme un citoyen responsable de ses choix et de ses modalits de consommation et penser lalimentation comme un vecteur dhospitalit lhpital 18. Les tablissements hbergeant des personnes ges, notamment les tablissements dhbergement pour personnes ges dpendantes (EHPAD), font galement face des situations de dnutrition et sont encourags amliorer la qualit des repas. Voir, ce sujet, le recueil dactions pour lamlioration de lalimentation en tablissements hbergeant des personnes ges du ministre de lagriculture, 2017 (en ligne) Suite aux tats gnraux de lalimentation, un projet de loi pour lquilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et pour une alimentation saine et durable a t dpos (vote prvu en septembre 2018) : il prvoit notamment que la restauration collective publique devra sapprovisionner avec au moins 50 % de produits issus de lagriculture biologique, locaux ou sous labels de qualit, dici 2022. De plus, la restauration collective, publique et prive, devra raliser un diagnostic pralable une dmarche de lutte contre le gaspillage alimentaire. Projet de loi pour lquilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable, prsent en Conseil des ministres le 31 janvier 2018

    actions locales La commune de Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes) fait figure de pionnire et mne depuis plusieurs annes une politique exemplaire pour une restauration collective locale et durable. Les lus se sont mobiliss sur les liens sant, alimentation et environnement suite la crise de la vache folle en 1999. La collectivit a commenc introduire des produits bio et locaux dans ses cantines scolaires. Face au manque de productions agricoles locales, elle sest ensuite dote dune rgie municipale agricole : elle produit ainsi des fruits et lgumes bio et approvisionne la restauration scolaire. Laction a pris de lampleur au fil des annes. Depuis 2012, 100 % de lalimentation servie provient de lagriculture biologique. Pour essaimer son modle, la ville est linitiative, avec luniversit Nice-Cte dAzur, dun diplme universitaire chef de projet en alimentation durable (dmarrage en janvier 2018). Cette formation vise

    18 Avis n78 du Conseil national de lalimentation du 4 juillet 2017 sur lalimentation en milieu hospitalier (en ligne)

    http://agriculture.gouv.fr/sites/minagri/files/documents/alimentation/pdf/Recueil_EHPAD_Web_Complet.pdfhttps://www.caissedesdepotsdesterritoires.fr/cs/BlobServer?blobkey=id&blobnocache=true&blobwhere=1250171036862&blobheader=application%2Fpdf&blobcol=urldata&blobtable=MungoBlobshttps://www.caissedesdepotsdesterritoires.fr/cs/BlobServer?blobkey=id&blobnocache=true&blobwhere=1250171036862&blobheader=application%2Fpdf&blobcol=urldata&blobtable=MungoBlobshttp://www.cna-alimentation.fr/v2/wp-content/uploads/2017/07/CNA_Avis78.pdf

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    accompagner les collectivits territoriales dans la mise en uvre de transitions comparables celle de Mouans-Sartoux. retrouver dans le rpertoire InspirActions de Fabrique Territoires Sant Pour utiliser des produits locaux, les restaurations collectives ont besoin de lgumeries, des lieux o un lgume brut devient un lgume prt consommer (pluchage et prparation) ; puisquun produit terreux ne peut pas entrer dans une cuisine, par mesure dhygine. Or les lgumeries localises dans les cantines ont tendance disparatre, en raison dun manque de personnel, de place et de difficults lies la gestion des dchets et lhygine. Des villes soutiennent des projets de lgumeries, mais leur modle conomique reste instable ce jour. La ville de Lons-le-Saunier (Jura), 14 000 habitants, a appuy sa filire agricole biologique locale grce lapprovisionnement de la restauration collective. Constatant la pollution de leau (taux de nitrate et de pesticides importants), des conventions ont t passs avec les agriculteurs et la Chambre dagriculture pour imposer de nouvelles pratiques plus respectueuses de lenvironnement, en particulier autour des aires de captage deau. Pour offrir aux agriculteurs locaux une offre prenne et solvable, les cuisines de la ville et de lhpital ont fusionn (cela reprsente 1,4 million de repas par an). La ville a galement investi dans une lgumerie afin de transformer les produits en produits prts cuisiner. Lons-le-Saunier protge ses eaux grce ses cantines bio , LesEchos.fr, 2010 (en ligne) Lons-le-Saunier, une lgumerie pour conforter la filire bio locale , base expriences Localtis, 2017 (en ligne) Dans le Prigord, la Chambre dagriculture est linitiative dune socit cooprative dintrt collectif (SCIC) pour favoriser lalimentation locale. Avec le soutien du conseil dpartemental de Dordogne, la SCIC met en relation producteurs et collectivits pour faciliter lapprovisionnement des cuisines centrales et des restaurants collectifs en produits locaux. La cooprative assure la centralisation des demandes et des offres, le transport, le stockage, la livraison et la gestion administrative. Mangeons 24 : une Scic pour lalimentation locale en Prigord , base expriences Localtis, 2017 (en ligne) Lannemezan (Hautes-Pyrnes), depuis 2014 cest la cuisine centrale de lhpital qui gre la restauration scolaire. Cette mutualisation a permis dintroduire progressivement des produits bios dans la restauration hospitalire, puisque cela tait ncessaire dans le cahier des charges de la

    https://www.fabrique-territoires-sante.org/ressources/inspir_actions/une-experience-pionniere-pour-une-restauration-scolaire-durable-et-localehttps://www.lesechos.fr/29/03/2010/LesEchos/20645-046-ECH_lons-le-saunier-protege-ses-eaux-grace-a-ses-cantines-bio.htmhttps://www.caissedesdepotsdesterritoires.fr/cs/ContentServer/?pagename=Territoires/Experiences/Experiences&cid=1250280050673&nl=1https://www.caissedesdepotsdesterritoires.fr/cs/ContentServer?pagename=Territoires/Experiences/Experiences&cid=1250278786738

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    restauration scolaire. La quantit de repas cuisins renforce aussi les partenariats avec les agriculteurs locaux. Le bio, une bonne formule qui offre beaucoup de souplesse lhpital , Gazette Sant Social, 2017 (en ligne) Dans ces actions, les collectivits font aussi lhypothse que laction sur lalimentation des enfants pourra avoir un effet en chane sur lalimentation des parents : agir sur la restauration scolaire, cest agir sur la sant des familles.

    rflexions : sachemine-t-on vers des cantines bios pour tous ? Les exemples de restauration collective locale et durable restent peu nombreux par rapport la totalit des restaurants collectifs. Les principales difficults mises en avant sont : la rglementation des marchs publics, les carences de loffre et son manque de structuration, labsence de lgumeries, etc. Pourtant, les exemples cits ont palli ces difficults, en vitant des surcots importants. La volont politique est un facteur majeur dans lvolution des pratiques de la restauration collective. Vido Reporterre : Pourquoi est-il si difficile de faire des cantines bio ? Dans les actions cites, laugmentation du cot-matire a t compense par des actions de lutte contre le gaspillage et de valorisation des dchets alimentaires. Concernant les obstacles juridiques lapprovisionnement local de la restauration publique, il sagit didentifier les bons critres dattribution pour pallier linterdiction du Code des marchs publics de citer la proximit . Par exemple, le cahier des charges de Mouans-Sartoux impose parmi ses critres le fait de pouvoir visiter lexploitation agricole, un dlai entre la rcolte et la fourniture des produits, une distance de livraison, etc. Diffrentes ressources sont disponibles pour connatre ce qui est fait sur les territoires et changer des bonnes pratiques : Vade-mecum : encourager lapprovisionnement local, Association des Maires de France, Association des Dpartements de France, Rgions de France, 2016 (en ligne) Des fiches thmatiques et des actions sont prsentes sur lObservatoire de la restauration collective locale et durable. Il est important davoir une perspective globale de la restauration collective et de tenir compte de lensemble de la chane (de la production au service). Les expriences qui semblent donner des rsultats (augmentation de la part des approvisionnements en produits de qualit et locaux, adhsion des

    http://www.gazette-sante-social.fr/38383/le-bio-une-bonne-formule-qui-offre-beaucoup-de-souplesse-a-lhopitalhttps://reporterre.net/Pourquoi-est-il-difficile-de-faire-des-cantines-biohttps://reporterre.net/Pourquoi-est-il-difficile-de-faire-des-cantines-biohttps://reporterre.net/Pourquoi-est-il-difficile-de-faire-des-cantines-biohttps://reporterre.net/Pourquoi-est-il-difficile-de-faire-des-cantines-biohttp://www.amf.asso.fr/upload/fichiers/documents/AMF_14640VADE_MECUM_ENCOURAGER_L_APPROVISIONNEMENT_LOCAL.pdfhttp://www.observatoire-restoco-durable.org/

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    agents et de la population, cohrence des actions mises en uvre), sont des dmarches de long terme, construites tape par tape, qui ont bnfici un moment ou un autre dun portage politique fort, et pour lesquelles des moyens financiers, techniques et humains ont t allous.() Pour autant, ces expriences reposent beaucoup sur des personnes volontaires et volontaristes. Et elles sont encore des exceptions, bien loin des modles dits classiques de restauration collective 19. La question de laccs la cantine et des ingalits sociales reste un point peu voqu : est-ce que tous les enfants, en particulier les plus vulnrables, peuvent manger la cantine ? Le dbat sur la gratuit des cantines revient rgulirement. Rappelons que seuls 40% des tablissements scolaires appliquent une politique tarifaire spcifique pour les lves les plus dmunis.

    les jardins collectifs : un outil de dveloppement social -

    cadrage Jardins partags, jardins familiaux, jardins dinsertion, jardins pdagogiques ces diffrents formes dorganisation sont regroups sous le terme jardins collectifs . Les premiers jardins collectifs sont crs au XIXe sicle en Allemagne par des philanthropes. Le principe est transpos en France par labb Lemire, dput-maire dHazebrouck quand il fonde en 1896 la Ligue du coin de terre et du foyer. Lobjectif est alors de venir en aide aux plus ncessiteux en mettant gratuitement leur disposition une parcelle de terre, afin quils cultivent des lgumes pour se nourrir et disposent dun endroit pour prendre lair et se dtendre en famille. Les jardins ouvriers, puis familiaux se sont massivement dvelopps pendant lentre-deux guerres, jusqu en compter prs dun million. 90 % de ces jardins ont disparu pendant les Trente Glorieuses, notamment en raison de la pousse de lurbanisation. Lintrt pour les jardins est rapparu dans les annes 1990 sous de nouvelles formes et avec une vocation diffrente : le collectif et la cration de lien social sont davantage mis en avant que la valeur nourricire et occupationnelle des jardins. Cette nouvelle gnration de jardins

    19 Typologie des politiques publiques de restauration collective locale et durable. Des outils pour les collectivits territoriales, Programme Lascaux, Universit de Nantes, 2016 (en ligne)

    https://f.hypotheses.org/wp-content/blogs.dir/1874/files/2016/11/Recueil_Typologie-des-politiques-publique-de-restauration-collective-locale-et-durable-double-page.pdf

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    collectifs trouve une inspiration dans les community gardens dAmrique du Nord ns dans les annes 1970, linitiative du mouvement des green guerrillas. Il sagissait dun moyen daction politique pour se rapproprier des espaces abandonns en ville, interpeller les pouvoirs publics, interroger le droit la terre et crer des espaces communautaires conviviaux20. Les formes de jardins et les objectifs de leurs usagers sont trs divers. Une charte labore par le rseau national des jardins partags tablit quatre principes respecter : une gestion participative (ce sont les usagers qui dfinissent lamnagement, lorganisation et louverture du jardin), la diversit des objectifs et des publics, une animation territoriale (par louverture sur le quartier), et enfin le respect de lenvironnement. Charte du Jardin dans tous ses tats, Rseau national des jardins partags (en ligne)

    actions locales Villefontaine (Isre), le CCAS anime un jardin collectif communal vocation sociale depuis 1998. Celui-ci est devenu un outil privilgi dinsertion, de dveloppement social et dducation lenvironnement. Accueillant une centaine de personnes, orients par les travailleurs sociaux du CCAS ou de ses partenaires (conseil dpartemental, centre daccueil de demandeurs dasile, etc.), le jardin permet dabord de rompre lisolement. La production est partage entre les jardiniers, ce qui reprsente une conomie sur le budget alimentaire et une amlioration de lalimentation (lgumes frais et bio). La prsence dun assistant social au jardin, impliqu dans lanimation, permet une nouvelle approche du travail social, base sur la cration de liens dans les situations de travail et les moments de convivialit. retrouver dans le rpertoire InspirActions de Fabrique Territoires Sant Talence (Gironde), dans le cadre de lAtelier sant ville (ASV), des habitants ont souhait crer des potagres cultiver, limage de celles existantes dans une cole. Construit et organis collectivement, cet espace permet la sensibilisation une alimentation saine, aux mthodes de jardinage respectueuses de lenvironnement et facilite le lien social. Aprs un an dexistence, la douzaine de participants sont autonomes dans la gestion et lanimation du projet (constitution dune association).

    20 Jardins ouvriers, familiaux, collectifs. Ces mots qui prennent racine , entretien avec Franoise Dubost, Agrobiosciences, 2014 (en ligne)

    http://jardins-partages.org/IMG/pdf/JTSE-leger.pdfhttps://www.fabrique-territoires-sante.org/ressources/inspir_actions/un-jardin-collectif-communal-vocation-socialehttp://www.agrobiosciences.org/archives-114/alimentation-et-societe/publications/ca-ne-mange-pas-de-pain/article/alimentation-et-societe-jardins-ouvriers-familiaux-collectifs-ces-mots-qui-prennent-racine-interview-originale#.WhQqm7QtXOR

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    retrouver dans le rpertoire InspirActions de Fabrique Territoires Sant Pointe--Pitre (Guadeloupe), le CCAS, lassociation Bwa Lansan et la banque alimentaire ont ouvert deux jardins croles communautaires. Ceux-ci se sont installs sur des parcelles mises disposition par le CCAS sur les sites de deux foyers-logements quil gre. Ils sont ouverts des publics dmunis, dont les rsidents des foyers-logements. Le projet repose sur les savoir-faire traditionnels dont les Guadeloupens se sont loigns au fur et mesure de la modernisation. Les participants se partagent la rcolte produite ; le surplus est confi la banque alimentaire. Jardins croles de Pointe--Pitre : une meilleure alimentation pour les personnes en situation prcaire , base expriences Localtis, 2015 (en ligne) En Belgique, une association utilise le prtexte du jardinage pour recrer du lien avec des personnes frquentant des structures de soins en sant mentale. Ces personnes participent des potagers collectifs placs chez des agriculteurs bio, eux-mmes souvent isols. Le marachage amne plusieurs effets bnfiques : partager une activit hors des soins, retrouver un rythme, se sentir utile, renforcer lestime de soi, reprendre contact avec une alimentation de qualit, etc. Les agriculteurs sont galement demandeurs de ce lien social. Se refaire une sant en plantant des carottes , Fdration des maisons mdicales de Belgique, 2017 (en ligne) Dans le quartier des Mazades Toulouse (Haute-Garonne), un groupe dhabitants se mobilise pour transformer les espaces verts en pied dimmeuble, avec laide et lanimation de lassociation Partageons les jardins. Face un sentiment dinscurit croissant dans le quartier, des habitants ont souhait investir le bas des immeubles en crant un espace convivial comme un jardin collectif. Encore ltat de projet, les habitants sont soutenus par le bailleur social et accompagns par une association qui met en rseau les jardins collectifs et individuels de laire toulousaine. retrouver dans le rpertoire InspirActions de Fabrique Territoires Sant Sarcelles (Val dOise), dans le quartier des Vignes Blanches, un couple a spontanment investi un bac en y plantant des graines, sinspirant du mouvement citoyen dagriculture urbaine participative Incredible Edible (Incroyables Comestibles en franais). Rencontrant lintrt des autres habitants et du bailleur social, un potager a pu tre construit, sous forme de 25 bacs en bois. La culture en bacs hors-sol permet dviter

    https://www.fabrique-territoires-sante.org/ressources/inspir_actions/des-potageres-cultiver-talencehttps://www.caissedesdepotsdesterritoires.fr/cs/ContentServer?pagename=Territoires/MCExperience/Experience&cid=1250269068363https://www.caissedesdepotsdesterritoires.fr/cs/ContentServer?pagename=Territoires/MCExperience/Experience&cid=1250269068363http://www.maisonmedicale.org/Se-refaire-une-sante-en-plantant-des-carottes.htmlhttps://www.fabrique-territoires-sante.org/ressources/inspir_actions/transformation-des-espaces-verts-en-pied-dimmeuble-en-lieu-de-vie

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    de cultiver des lgumes dans un sol possiblement pollu. Le lieu est en accs libre et auto-gr. Une initiative citoyenne pour lappropriation de lenvironnement du quartier, le bien manger et la convivialit , fiche-exprience Ple de ressources Ville et dveloppement social, 2017 (en ligne) Sarcelles, les Engraineurs font pousser lgumes et lien social au pied de la cit , Bondy Blog, 2017 (en ligne) Valence (Drme), avec le soutien de la ville, une association a cr des jardins partags en bas des immeubles dun quartier sensible . Prs d1,5 hectare sont partags en 70 parcelles, chacune cultive par une famille. Les jardiniers partagent deux principales motivations : les cultures permettent un gain conomique et amliore la qualit de lalimentation. Lespace a redynamis le quartier et aide valoriser son image lextrieur. Les jardins sont maintenant partie intgrante du quartier : leur extension a t incluse dans les plans de rnovation urbaine. Dans un quartier sensible de Valence, le jardin partag cultive bien plus que la terre , Reporterre, 2015 (en ligne)

    Projet de recherche en cours

    JAASSUR Jardins associatifs urbains et villes durables : pratiques, fonctions et risques (2012-2017)

    Objectif : Identifier les modes daction ncessaires au maintien voire la restauration, au dveloppement ou lvolution des jardins associatifs sur des territoires urbains

    En savoir plus

    rflexions : les jardins collectifs sont-ils nourriciers ? Les actions prsentes mettent davantage en avant leurs bnfices en termes de lien social et dinsertion sociale et professionnelle que sur les enjeux de sant publique lis lalimentation. Les jardins nourrissent-ils ceux qui les cultivent et leurs familles, voire au-del ? Une tude qualitative mene auprs de 31 jardiniers dans 10 jardins associatifs urbains de Paris ou proche banlieue nous apprend que les rles attribus au jardin par les jardiniers sont trs divers : investir un nouvel espace, acqurir ou transmettre un savoir, rencontrer et partager, porter

    http://www.poleressources95.org/publications/experience_detail-199-une-initiative-citoyenne-pour-l-appropriation-de-l-environnement-du-quartier--le-bien-manger-et-la-convivialite.htmlhttp://www.bondyblog.fr/201707260840/a-sarcelles-les-engraineurs-font-pousser-legumes-et-lien-social-au-pied-de-la-cite/#.Wmm8dhOdXOShttps://reporterre.net/Dans-un-quartier-sensible-de-Valence-le-jardin-partage-cultive-bien-plus-que-lahttps://www.plante-et-cite.fr/data/fichiers_ressources/jassur_rapport_final_anr_20161021.pdf

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    un projet (une utopie), pratiquer un loisir, exprimenter, produire et goter, se souvenir, sisoler de la ville, tre en contact avec la nature, amliorer sa sant mentale et physique. La production napparat pas comme une fin en soi : sur les 31 jardiniers interrogs, cinq expliquaient que la production de leur jardin tait anecdotique et que la possibilit de produire des aliments ntait pas une motivation dans leur participation au jardin. () Les 26 autres jardiniers interrogs valuaient limportance de la production alimentaire selon diffrents critres, quantitatifs et qualitatifs. Onze personnes rcoltaient ponctuellement des fruits et lgumes du jardin, en gnral des produits consomms frais, picors au jardin. () Pour huit jardiniers, la production du jardin permettait de subvenir leurs besoins au moins pour une ou quelques cultures. Les laitues, les tomates et les haricots font partie de ces cultures frquemment plantes (). Enfin, sept personnes parmi les jardiniers interrogs produisaient suffisamment pour nacheter aucun autre lgume que ceux produits dans leur jardin pendant la pleine saison . Dautres tudes en Amrique du Nord ont dmontr lintrt de la participation une activit de jardinage pour amliorer le rgime nutritionnel des jardiniers, quand bien mme ils ne consommaient pas exclusivement des produits issus de leur jardin. Jeanne Pourias, Anne-Ccile Daniel, Christine Aubry, La fonction alimentaire des jardins associatifs urbains en question , POUR, 2012 (en ligne) Dans la mme ligne, une enqute auprs des jardins collectifs de Lyon prcise que les jardiniers ne prtendent pas viser une auto-suffisance alimentaire. Nombre denquts nous disent que leur jardin na pas pour but dtre nourricier, alimentaire ou productif (). La production est perue comme oppose la vision loisir et plaisir partags de la participation un jardin collectif, dont il sagit pour la plupart du temps du but principal. () Ici, nous pouvons penser que le terme mme de production fait appel un univers de sens dont les jardiniers se distancient 21. Si les jardins nourrissent finalement peu, quapportent-t-ils ? Une tude mene la fin des annes 1980 en Aquitaine sur les formes dautoconsommation alimentaire en milieu urbain (jardins ouvriers et jardins familiaux) mettait en vidence le rle autonomisant des pratiques dautoproduction dans le mode de vie des mnages disposant de faibles revenus 22. En effet, les jardins peuvent tre un outil de dveloppement social, cest--dire un outil dinsertion sociale et de prvention de lexclusion, condition dintgrer les publics vulnrables, notamment

    21 Le Passe Jardins, tude de la dimension nourricire des jardins collectifs lyonnais, Universit Lumire Lyon II, 2017 (en ligne) 22 Daniel Crzuelle, Yann Le Formal, Pierre-Jean Rocca, Les jardins collectifs : un outil de dveloppement social , IRSTA, 1990 (en ligne)

    http://www.cairn.info/revue-pour-2012-3-page-333.htmlhttp://www.cairn.info/revue-pour-2012-3-page-333.htmlhttps://www.lepassejardins.fr/IMG/pdf/etude_de_la_dimension_nourriciere_des_jardins_2017_gl.pdfhttp://www.padesautoproduction.net/Documents/Jardins collectifs outil insertion_1990.pdf

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    bnficiaires daides alimentaires. Pour cela, le Programme autoproduction et dveloppement social (PADES), n en 1996 pour favoriser lmergence de nouveaux oprateurs et leur apporter un soutien mthodologique dans le domaine de lautoproduction, a identifi quelques critres de qualit :

    - mettre en place, pralablement la cration ou la restructuration des jardins, une information des habitants qui favorise la mixit sociale des jardiniers (linformation crite est insuffisante) ;

    - associer par des mthodes de concertation participative, les futurs jardiniers la conception de lamnagement du groupe de jardins et la dfinition des rgles qui prsideront leur utilisation ;

    - confier une instance extrieure au collectif de jardiniers la mission danimation des jardins (une animation professionnelle et qualifie est indispensable pour grer avec transparence lattribution des parcelles, dynamiser la vie collective et sassurer que tous puissent participer son organisation)23.

    Pourtant, sur ce dernier point, il est souvent difficile pour les jardins davoir les ressources financires suffisantes pour une animation extrieure. Voir aussi le guide mthodologique : Du bon usage du jardinage comme outil dinsertion sociale et de prvention de lexclusion (en ligne)

    sapprovisionner localement : circuits courts et de proximit et nouveaux modes de distribution -

    cadrage Pour amliorer la qualit et la durabilit de lalimentation, des associations, des citoyens et des collectivits se sont engags dans des dynamiques de circuits courts et de proximit. Un circuit court se caractrise par la vente directe, ou via un seul intermdiaire, entre lexploitant et le consommateur. Il se distingue du circuit de proximit qui implique une distance maximale entre le lieu de production et le lieu de consommation dun produit (aucun consensus nexiste sur cette distance). Le Conseil conomique, social et

    23 PADES, Jardins et alimentation en le-de-France, 2010 (en ligne)

    http://jardins-partages.org/telechargezmoi_files/jardins.pdfhttp://