DON GIOVA N N I - pilefacebis.com · OPERA de LYON W O L F G ANG AMADEUS MOZART DON GIOVA N N I Don...

329
OPERA de LYON WOLFGANG AMADEUS MOZART DON GIOVANNI Don Giovanni ossia Il dissoluto punito Livret de Lorenzo da Ponte Dramma giocoso en deux actes K. 527 1787

Transcript of DON GIOVA N N I - pilefacebis.com · OPERA de LYON W O L F G ANG AMADEUS MOZART DON GIOVA N N I Don...

OPERA de LYON

W O L F GANG AMADEUS MOZART

DON GIOVA N N IDon Giovanni ossia Il dissoluto punito

Livret de Lorenzo da Ponte

Dramma giocoso

en deux actes

K. 527

1787

LIVRET

5 Fiche technique

11 L’argument

19 Les personnages

DON GIOVANNI

24 Atto primo / Premier acte

162 Atto secondo / Second acte

CAHIER de LECTURES

Molière

283 Un cœur à aimer toute la terre

Ivan Nagel

285 L’incarnation du bonheur

André Tubeuf

287 La chasse & la fuite

Alfred de Musset

289 Sérénade de Don Juan

Lorenzo Da Ponte

290 Don Juan n’eut aucun succès

E.T.A. Hoffmann

293 Don Juan

Jean Genet

304 Parmi les morts

Alexandre Blok

305 Les pas du Commandeur

Charles Baudelaire

307 Don Juan aux enfers

CARNET de NOTES

Wolfgang Amadeus Mozart

310 Repères biographiques

320 & Notice bibliographique

Don Giovanni

322 Orientations discographiques

Illustration.

L’une des gravures de Jean-Honoré FRAGONARD

pour les Contes & Nouvelles en versde Jean de La Fontaine

“À Paris, de l’Imprimerie de P. Didot l’aîné”, an III – 1795

LIVRET

Selon ses Mémoires, Lorenzo da Ponte (lire page 294) rédige

pendant une période de deux mois le livret de Don Giovanni

de front avec ceux de deux autres ouvrages. On sait que c’est

Da Ponte qui a proposé le sujet de l’opéra à Mozart. Il s’ins-

pire pour son travail du Dom Juan de Molière, ainsi que du

livret écrit par Giovanni Bertati pour l’opéra de Giuseppe

Gazzaniga, Don Giovanni Tenorio, créé quelques mois aupa-

ravant à Venise.

PARTITION

Pasquale Bondini, directeur du Théâtre de Prague commande

un nouvel opéra à Mozart à la suite de l’immense succès des

Noces de Figaro (1786). Mozart compose Don Giovanni entre

mai et septembre 1787. Arrivé le 4 octobre à Prague pour la

création, il y complète sa partition (numéros avec chœur,

scènes de Masetto et du Commandeur, ouverture). Il porte

l’œuvre dans son catalogue privé le 28 octobre, sous la déno-

mination d’opera buffa.

5

PERSONNAGES

DON GIOVANNI, giovane cavaliere estremamente licenzioso

DON GIOVANNI, jeune chevalier extrêmement libertin

Baryton

IL COMMENDATORE / LE COMMANDEUR

Basse

DONNA ANNA, sua figlia, dama promessa sposa di Don Ottavio

DONNA ANNA, sa fille, dame fiancée à Don Ottavio

Soprano

DON OTTAVIO

Ténor

DO N N A ELV I R A, dama di Burgos, abbandonata da Don Giovanni

DO N N A ELV I R A, dame de Burgos, abandonnée par Don Giovanni

Soprano

LEPORELLO, servo di Don Giovanni / valet de Don Giovanni

Basse

MASETTO, amante di Zerlina / amoureux de Zerline

Basse

ZERLINA, contadina / une paysanne

Soprano

CORO

Contadine e contadini ; servi ; coro di sotterra. Suonatori.

CHŒUR

Paysannes & paysans ; serviteurs ; chœur souterrain. Musiciens.

La scena si finge in una città della Spagna.

L’action se déroule dans une ville d’Espagne.

ORCHESTRE

2 flûtes

2 hautbois

2 clarinettes

2 bassons

6

2 cors

2 trompettes

3 trombones

Timbales

Mandoline

Cordes

Continuo : clavecin, violoncelle

Musique de scène

Acte I – No 13. Finale

Orchestre I : 2 hautbois, 2 cors,

Cordes sans les violoncelles, basson (ad libitum)

Orchestre II : violons, contrebasse

Orchestre III : violons, contrebasse

Acte II – No 24. Finale

2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 2 cors,

1 violoncelle

DURÉE MOYENNE

2 heures 50

CRÉATION

29 octobre 1787

Au Nationaltheater (actuel Théâtre Tyl) de Prague.

Direction. Wolfgang Amadeus Mozart

Mise en scène.Johann Josef Strohbach

7

Luigi Bassi (Don Giovanni), Giuseppe Lolli

(Le Commandeur), Teresa Saporiti (Donna Anna),

Antonio Baglioni (Don Ottavio), Caterina Micelli

(Donna Elvira), Felice Ponziani (Leporello),

Giuseppe Lolli (Masetto), Caterina Bondini (Zerlina)

CRÉATION en FRANCE

1805

Académie Impériale de Musique (salle Montansier).

Création le 17 septembre 1805, dans une version dont le

livret et la partition avaient été adaptés.

1811

Théâtre des Italiens.

Création le 12 octobre de la version en italien, sous la

direction du compositeur Gasparo Spontini.

L’ŒUVRE à LYON

1822

Création le 10 décembre dans une version en français.

1973

Direction musicale.Theodor Guschlbauer

Mise en scène.Louis Erlo

Décors & costumes.Jacques Rapp

Roger Soyer (Don Giovanni), Pierre Thau

(Le Commandeur), Sylvia Geszty (Donna Anna),

Éric Tappy (Don Ottavio), Bernadette Antoine

(Donna Elvira), Gabriel Bacquier (Leporello),

Georg Pappas (Masetto), Danièle Perriers (Zerlina)

1980

Direction musicale. Emil Tchakarov

8

Mise en scène. Louis Erlo

Décors.Jacques Rapp

Costumes. Jacques Rapp & Daniel Ogier

Roger Soyer (Don Giovanni), Sergios Kalabakos

(Le Commandeur), Margarita Castro-Alberti

(Donna Anna), Éric Tappy (Don Ottavio),

Rosario Andrade (Donna Elvira), Pierre-Yves Le Maigat

(Leporello), Helge Weidinger (Masetto),

Colette Alliot-Lugaz (Zerlina)

1983

Direction musicale.Armin Jordan

Mise en scène.Louis Erlo

Décors.Jacques Rapp

Costumes.Daniel Ogier

Claes Ahnsjö (Don Giovanni), Sergios Kalabakos

(Le Commandeur), Margarita Castro-Alberti

(Donna Anna), Éric Tappy (Don Ottavio),

Rosario Andrade (Donna Elvira), Pierre-Yves Le Maigat

(Leporello), Helge Weidinger (Masetto),

Colette Alliot-Lugaz (Zerlina)

1992

Direction musicale.Peter Eötvös

Mise en scène.Tamás Ascher

Décors.Zsolt Khell

Costumes.Györgyl Szakács

Éclairages. Tamás Banyai

Rodney Gilfry (Don Giovanni), Romuald Tesarowicz

(Le Commandeur), Michié Nakamaru/Joyce Guyer

(Donna Anna), John Mark Ainsley/Bruno Lazaretti

(Don Ottavio), Isabelle Vernet (Donna Elvira),

Giovanni Furlanetto (Leporello), Antonio Pirozzi

(Masetto), Janet Williams (Zerlina)

Au Théâtre du 8 e de Lyon

9

1993

Reprise à l’Opéra de la production précédente

Direction musicale. Peter Eötvös

William Shimell (Don Giovanni), Frode Olsen

(Le Commandeur), Michié Nakamaru (Donna Anna),

John Mark Ainsley (Don Ottavio), Isabelle Vernet

(Donna Elvira), Giovanni Furlanetto (Leporello),

Christophe Lacassagne (Masetto),

Virginie Pochon (Zerlina)

1998

Direction musicale.Daniel Harding

Orchestre de chambre Gustav-Mahler

Chœur de l’Académie européenne de musique

Mise en scène.Peter Brook

Eléments scéniques.Tom Pye

Costumes.Chloé Obolensky

Éclairages. Jean Kalman

Roberto Scaltriti/Peter Mattei (Don Giovanni),

Alessandro Guerzoni/Gudjon Oskarsson (Le Commandeur),

Monica Colonna/Carmela Remigio (Donna Anna),

Kenneth Tarver/John Mark Ainsley (Don Ottavio),

Véronique Gens/Melanie Diener (Donna Elvira),

Nicola Ulivieri/Gilles Cachemaille (Leporello),

Nathan Berg/Till Fechner (Masetto),

Catryn Wyn-Davies/Lisa Larsson (Zerlina)

10

PREMIER ACTE

SCÈNE 1

Un jardin, la nuit. Devant la maison de Donna Anna, LE P O-

RELLO fait les cents pas ; il récrimine contre sa condition

ingrate et fatigante de valet de grand seigneur. Du bruit,

on vient, il se cache. Son maître, DON GIOVANNI, cher-

chant à cacher son visage, fuit la maison, poursuivi par

DONNA ANNA : « N’espère pas, si tu ne me tues, que je te

laisse jamais fuir. » LE COMMANDEUR, père de Donna

Anna, survient à son tour. Entendant la voix de son père,

DONNA ANNA rentre dans la maison. LE COMMANDEUR in-

vite DON GIOVANNI au duel, il refuse. Le vieillard insiste,

GIOVANNI sort son épée ; bref combat ; DON GIOVANNI tue

LE COMMANDEUR.

SCÈNE II

DON GIOVANNI retrouve LEPORELLO, qui lui reproche iro-

niquement ses deux faits d’armes : « Violer la fille et tuer

le père ! » DON GIOVANNI le menace, LEPORELLO se calme.

Maître et serviteur s’éclipsent.

SCÈNE III

DONNA ANNA, accompagnée de son fiancé DON OTTAVIO,

revient. Elle ne peut que constater la mort de son père.

Désespérée, elle n’entend pas les paroles de consolation

d’OTTAVIO ; elle lui fait jurer de venger cette mort.

11

SCÈNES IV, V & VI

Une rue. C’est toujours la nuit. DON GIOVANNI accorde un

moment de liberté de parole à son LEPORELLO. Mais quand

son valet lui reproche sa vie dissolue, il lui intime violem-

ment l’ordre de se taire. Puis il lui fait part d’un nouveau

projet amoureux, quand il perçoit «une odeur de femme ».

Celle qui arrive, en tenue de voyage, est DONNA ELVIRA, à

la recherche de l’homme qui l’a abandonnée ; elle se pro-

met de lui infliger mille tourments. DON GIOVANNI se sent

évidemment attiré, et prêt à consoler cette belle délaissée,

qu’il ne reconnaît pas d’emblée. L’homme qui l’a trompée,

c’est lui. DONNA ELVIRA éclate en violent reproches.

Courageux, mais pas téméraire, DON GIOVANNI charge

LEPORELLO de prendre en charge ELVIRA avant de s’esqui-

ver discrètement.

LEPORELLO tente de consoler ELVIRA : « Vous n’êtes ni la

première ni la dernière. » Il lui montre et commente un

catalogue qu’il tient lui-même : celui des innombrables

conquêtes de son maître aux quatre coins de l’Europe.

DONNA ELVIRA, pleine de rage et de dépit – amoureuse

encore pourtant – jure de se venger du traître.

SCÈNES VII & VIII

En compagnie de leurs amis – PAYSANS et PAYSANNES –

ZERLINA et MASETTO chantent joyeusement leur amour et

leur mariage tout proche. DON GIOVANNI s’invite à la fête,

il y a tant de jolies femmes. Mais c’est la jeune mariée qui

aiguise son désir. Il charge LEPORELLO d’emmener dans

son palais toute la noce, sauf ZERLINA. MASETTO proteste

mais doit s’incliner devant les menaces de DON GIOVANNI.

SCÈNES IX & X

Enfin seul avec ZERLINA, DON GIOVANNI la séduit avec des

mots, des caresses, des promesses. ZERLINA hésite puis

cède. Tous deux chantent la joie toute proche d’un « inno-

12

cent amour ». DONNA ELVIRA surgit alors. Elle a tout

entendu et tire la jeune femme des griffes du séducteur,

l’emmenant avec elle.

SCÈNES XI & XII

DON GIOVANNI se retrouve seul, pestant contre sa mal-

chance, quand arrivent ses amis, DON OTTAVIO et DONNA

ANNA, qui lui demandent son soutien dans le malheur qui

les frappe. DON GIOVANNI se met généreusement à leur

disposition quand, une fois encore, ELVIRA survient. Elle

met en garde DONNA ANNA : ne te fie pas à ce scélérat, il

m’a trahie, il te trahira. DON GIOVANNI tente de la faire

passer pour folle, mais la douleur et la noblesse d’ELVIRA

sèment le trouble dans l’esprit d’ANNA et d’OTTAVIO qui ne

savent plus que croire. DONNA ELVIRA s’en va, promettant

de rendre publics les mauvais coups de DON GIOVANNI.

Celui-ci, feignant la pitié, la suit pour qu’il ne lui arrive

pas malheur, dit-il. En partant, il salue ses amis.

SCÈNES XIII & XIV

Aux accents des dernières paroles de DO N GI OVA N N I,

AN N A reconnaît en lui avec horreur son agresseur noc-

turne. Pour la première fois, elle fait alors à OT TAV I O l e

récit de cette nuit où DO N GI OVA N N I a failli la violer.

Maintenant que le coupable et ses actes sont démasqués,

elle exige de DO N OT TAV I O vengeance de l’outrage et de

la mort de son père.

OT TAV I O a du mal à croire qu’un noble chevalier puisse être

capable d’un tel crime. Il se promet, pour l’amour d’AN N A

et pour sa sérénité, de la détromper ou de la venger.

SCÈNE XV

LEPORELLO rend compte à son maître de sa mission : les

paysans sont tous au palais, à moitié ivres, tout est prêt

pour les entreprises amoureuses de DON GIOVANNI qui

13

demande à LEPORELLO de préparer une grande fête, de

rameuter encore quelques filles sur la place et de faire

danser tout le monde. Son catalogue, ce soir, doit s’enri-

chir de quelques unités.

SCÈNE XVI

Dans les jardins du palais, ZERLINA retrouve un MASETTO

furieux. Elle lui propose de payer le prix de son incartade :

qu’il la batte et qu’ensuite on fasse la paix. MASETTO est

reconquis. On entend DON GIOVANNI qui approche. ZER-

LINA prend peur, elle ne veut pas le revoir. MASETTO se

méprend sur le sens de son inquiétude : « Tu crains que je

comprenne comment la chose s’est passée entre vous. »

Il décide de se cacher pour observer la rencontre. ZERLINA

essaye en vain de l’en dissuader : c’est surtout pour lui

qu’elle a peur.

SCÈNE XVII

DO N GI OVA N N I rentre en scène avec ses serviteurs, réveillant

ses invités, les invitant à boire, à danser, à s’amuser.

SCÈNE XVIII

ZERLINA tente de se cacher parmi les arbres, mais DON

GIOVANNI la repère et l’entraîne vers la niche où, juste-

ment, MASETTO s’est caché. Après un mouvement de stu-

peur, il invite le couple à venir danser avec lui.

SCÈNE XIX

Arrivent DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO et DONNA ANNA,

masqués, décidés à saisir l’occasion de la fête pour dévoi-

ler les méfaits de DON GIOVANNI.

Par la fenêtre, LEPORELLO les aperçoit ; à la demande de

DON GIOVANNI, il les invite à rejoindre le bal. Les masques

invoquent l’aide du ciel avant d’entrer dans le palais.

14

SCÈNE XX

Le bal a commencé brillamment : orchestres, invités, ser-

viteurs. DON GIOVANNI continue à courtiser ZERLINA ;

MASETTO, furieux, ouvre l’œil... Le trio des masques fait

son entrée. DON GIOVANNI les accueille à bras ouvert :

« C’est ouvert à tous, vive la liberté ! »

Le bal reprend. DON OTTAVIO exécute un menuet avec

DONNA ANNA. LEPORELLO, pour distraire l’attention de

MASETTO, le force à danser avec lui. DON GIOVANNI invite

ZERLINA, puis l’entraîne dans une autre pièce, suivie par

MASETTO et LEPORELLO. Soudain, un cri, le bruit d’une

poursuite. Les trois masques volent au secours de ZERLINA

qui a réussi à s’échapper. DON GIOVANNI rentre, traînant

LEPORELLO qu’il accuse d’avoir outragée ZERLINA. Mais la

ruse ne prend pas. ELVIRA, ANNA et OTTAVIO Se démas-

quent et promettent à DON GIOVANNI le châtiment immi-

nent de ses forfaits. Celui-ci affirme qu’il ne le craint pas.

SECOND ACTE

SCÈNE I

Lassé de la conduite de son maître, excédé qu’il l’ait faus-

sement accusé, LEPORELLO veut le quitter. DON GIOVANNI

parvient à le faire changer d’avis en lui remettant quatre

doublons. Le valet conseille quand même au maître de

laisser tomber les femmes. Impossible pour DON GIO-

VANNI : elles lui aussi indispensables que l’air qu’il res-

pire et que le pain qu’il mange. Puis il l’informe de ses

nouveaux projets féminins : il a jeté son dévolu sur la

camériste de DONNA ELVIRA. Et pour mieux la séduire –

c’est une servante – il demande à LEPORELLO d’échanger

ses vêtements avec lui. Sitôt dit, sitôt fait.

19

SCÈNES II & III

Dans le soir qui tombe, on entend la voix d’ELV I R A à sa

fenêtre, qui chante son déchirement : son cœur aime

encore le criminel. DO N GI OVA N N I saisit l’occasion : d’en

bas, il lui redit son amour, il lui demande pardon, il l’im-

plore de la rejoindre. La crédule ELV I R A cède à ses sup-

plications. LE P O R E L L O, avec le costume de son maître, va

se charger d’elle pour laisser le champ libre à DO N GI O-

VA N N I. C e l u i -ci se cache pour observer un peu le jeu de

son valet avec ELV I R A. LE P O R E L L O prend goût à la farce,

s’échauffe même un peu. DO N GI OVA N N I, caché, simule

un duel nocturne qui fait fuir ELV I R A et LE P O R E L L O. I l

peut alors, sous les fenêtres, chanter une sérénade à celle

q u’il convoite.

SCÈNES IV, V & VI

Il est dérangé par MASETTO, accompagné d’un groupe de

paysans armés comme lui. Expédition punitive : il s’agit

de trouver DON GIOVANNI. Le faux LEPORELLO propose de

se joindre à eux, organise les recherches et s’arrange pour

que MASETTO reste seul avec lui. Alors il le roue de coups

et le laisse brisé dans la rue. C’est là que ZERLINA le

trouve, tout gémissant. À condition qu’il calme sa jalousie,

elle lui promet de le soigner avec un remède qui n’est qu’à

elle et qui bat là, dans sa poitrine.

SCÈNES VII & VIII

LEPORELLO et ELVIRA ont trouvé refuge, cachés dans un

vestibule mal éclairé de la maison de DONNA ANNA. Celle-

ci paraît avec son fiancé. LEPORELLO et ELVIRA cherchent

une porte pour fuir et tombent sur MASETTO et ZERLINA.

On veut se venger de DON GIOVANNI, DONNA ELVIRA

demande grâce pour lui. Quand LEPORELLO se découvre,

la stupéfaction est générale.

16

SCÈNE IX

LEPORELLO s’explique sur son déguisement, implore l’in-

dulgence de ceux qu’il a trompés, avant de réussir à

prendre la fuite.

SCÈNE X

DON OTTAVIO ne doute plus que DON GIOVANNI soit l’as-

sassin du Commandeur. Il exprime son intention d’aller

demander justice et vengeance à qui de droit. En atten-

dant, il demande à ELVIRA, ZERLINA et MASETTO d’aller

sécher les pleurs de DONNA ANNA.

Restée seule, elle exprime son angoisse : DO N GI OVA N N I

l’a certes trahie, mais elle ne peut s’empêcher d’avoir

peur et d’avoir pitié en voyant ouvert devant lui « l ’ a b î m e

de la mort » .

SCÈNE XI

Au clair de lune, DO N GI OVA N N I profite d’un moment de

répit dans un cimetière, celui où repose le Commandeur

dont on voit la statue. Il est rejoint par LE P O R E L L O à qui

il raconte ses derniers exploits en riant. On entend alors

une voix : « Avant le lever du jour, tu cesseras de rire. »

DO N GI OVA N N I croit à une plaisanterie, LE P O R E L L O n’ e s t

pas rassuré. C’est alors qu’il repère la statue du CO M-

M A N D E U R. Il demande à LE P O R E L L O de l’inviter à dîner le

soir suivant. Tremblant, LE P O R E L L O s ’ exécute. La statue

accepte l’invitation.

SCÈNE XII

DON OTTAVIO a fait le nécessaire pour que justice se fasse.

À présent, il exhorte DONNA ANNA à accepter la mort de

son père, à s’incliner devant la volonté du ciel. Il lui rap-

pelle qu’ils sont fiancés, mais ANNA hésite encore, elle

n’est pas prête, elle souffre encore. OTTAVIO est déterminé

à la soutenir dans son épreuve.

17

SCÈNES XIII & XIV

Chez lui, DON GIOVANNI s’apprête à dîner, servi par LEPO-

RELLO, accompagné par la musique d’un petit orchestre

interprétant quelques airs plus ou moins connus. ELVIRA

surgit. Pour la dernière fois, elle tente de sauver DON

GIOVANNI, sans résultat. Après qu’elle est sortie, on entend

son cri terrifié. DON GIOVANNI envoie son valet voir ce

qu’il se passe. Même cri. LEPORELLO revient, terrifié :

c’est l’homme de pierre qui arrive à pas lourds. On entend

frapper à la porte. LEPORELLO ayant trop peur pour aller

ouvrir, c’est DON GIOVANNI qui s’en charge.

SCÈNE XV

LE COMMANDEUR a répondu à l’invitation, il entre. DON

GIOVANNI fait bonne figure, demande un autre couvert à

son valet. LE COMMANDEUR veut rendre son invitation à

DON GIOVANNI qui accepte et, comme gage, lui tend une

main qu’il ne peut plus dégager de la poigne de pierre. LE

COMMANDEUR lui demande de se repentir. DON GIOVANNI

refuse obstinément. LE COMMANDEUR se retire. On entend

des voix sombres. Entouré de flammes, DON GIOVANNI est

englouti par la terre sous le regard terrifié de LEPORELLO.

DERNIÈRE SCÈNE

DO N N A AN N A, DO N N A ELV I R A, ZE R L I N A, DO N OT TAV I O e t

MA S E T T O surviennent avec des officiers de justice pour que

le coupable soit châtié. LE P O R E L L O leur dit que ce n’ e s t

plus la peine, qu’il est parti loin. Et il leur raconte, la sta-

tue... l’engloutissement final. DO N N A ELV I R A va se retirer

au couvent, LE P O R E L L O se chercher un nouveau maître.

DO N N A AN N A demande encore un délai d’un an à OT TAV I O

avant le mariage. MA S E T T O et ZE R L I N A s’apprêtent à aller

dîner tous les deux. Et tous reprennent en chœur une

ancienne moralité : « Ainsi finissent les méchants et la

mort des trompeurs à leur vie ressemble toujours ! »

Le mythe de Don Juan fait partie de ceux qui fondent

l’imaginaire européen. Le personnage de DON GIOVANNI et cet

opéra de Mozart, font partie de ceux sur lesquels on a le plus

écrit, pensé, imaginé, fantasmé. Don Giovanni est un opéra du

mouvement, de la poursuite, de la fuite en avant, des contra-

dictions secrètes. La richesse du personnage central tient peut-

être à son côté insaisissable.

DON GIOVA N N I, « jeune chevalier extrêmement liber-

t i n » est un aristocrate, « grand seigneur méchant homme »

pour reprendre la définition de Sganarelle dans la pièce de

Molière. Il peut être généreux, quand il ouvre ses fêtes à

tous, au nom de la liberté. Il peut être mesquin : LE P O R E L L O

se plaint de son ingratitude dès la première scène, le valet ne

mange peut-être pas à sa faim puisqu’il prélève quelques

morceaux lors du dernier dîner de son maître. Il peut être

courageux – même par obstination – lorsqu’il affronte ses

accusateurs au finale du premier acte et la statue du CO M-

M A N D E U R à la fin du deuxième. Il peut être lâche, quand

il accuse LE P O R E L L O de la tentative de viol dont il est

lui-même coupable ; ou quand il isole MA S E T T O pour mieux

le rouer de coups. Des femmes – comme il l’explique à

19

LE P O R E L L O, il a un besoin vital, organique, comme de « l ’ a i r

q u’il respire » ; un besoin plus qu’un désir, qui le pousse à la

poursuite incessante de toutes les femmes, de chaque femme.

C’est cette poursuite qui stimule le personnage, qui le fait

agir et tenir. DO N GI OVA N N I n’a que deux brefs airs solistes

dans la partition : un air brillant, où il presse LE P O R E L L O

d ’ o rganiser la fête et la danse ; une courte et caressante séré-

nade à la mandoline, dédiée à une qu’il aime... Sa vie débri-

dée l’amène jusqu’au meurtre, celui du CO M M A N D E U R : c’est

à partir de cet événement que l’abîme s’ouvre devant lui, et

que sa perte se joue.

Autour de ce personnage central, les autres personnages

tournent, comme en orbite, déterminés par ses agissements.

Son valet d’abord, LEPORELLO, toujours à la limite de

la démission, mais que des liens assez forts unissent à son

maître : on perçoit chez lui une grande admiration pour DON

GIOVANNI – c’est lui qui met à jour le catalogue de ses con-

quêtes – mêlée à une grande répulsion devant sa vie dissolue,

son cynisme ou sa méchanceté. LEPORELLO, comme double,

malgré lui, de son maître : l’inversion des rôles de l’acte II en

est comme un signe.

Les autres planètes qui tournent autour de DON GIOVANNI

sont les femmes.

DONNA ELV I R A, celle qu’il a presque épousée à

B u rgos, puis qu’il a abandonnée. C’est elle qui va se dresser à

plusieurs reprises devant DO N GI OVA N N I, pour déjouer ses

p l a n s . DO N N A ELV I R A l’abandonnée qui n’abandonne jamais :

sa colère et son dépit n’ont d’égaux que l’amour et la compas-

sion qu’elle persiste à éprouver pour DO N GI OVA N N I, j u s q u’ a u

dernier moment, jusqu’à la dernière visite, quasi humiliante,

où elle tente de le ramener dans le droit chemin. DO N N A

ELV I R A finira sa vie retirée dans un couvent, pour y finir ses

jours, dans le remords peut-être, dans les regrets sans doute.

20

DONNA ANNA fait partie du même monde que DON

GIOVANNI qui est un de ses amis. D’où sa stupeur quand elle

découvre presque par hasard – par une intonation de DON

GIOVANNI – que c’est lui qui a tenté de la violer avant de tuer

son père en duel. La scène dont elle fait le récit à son fiancé

DON OTTAVIO, elle en est profondément marquée, elle n’en

finit pas de la revivre. ANNA a du mal à faire le deuil, elle va

demander à son fiancé de remettre encore le mariage d’une

année : peut-être sa rencontre avec DON GIOVANNI l’aura-t-

elle tourmentée jusqu’en des domaines les plus secrets, ina-

vouables pour elle...

Son fiancé, DON OTTAVIO, peut paraître un person-

nage assez pâle, surtout face à la vitalité débridée de DON

GIOVANNI. C’est un honnête homme en fait, un homme cour-

tois, pacifique mais prêt à assumer toutes les vengeances et

tous les sacrifices pour le bonheur de celle qu’il aime.

ZERLINA est une jeune paysanne. Elle est évidemment

sensible aux séductions de DON GIOVANNI et manque de céder

à ses propositions. C’est l’intervention de DONNA ELVIRA qui

l’en préserve, et peut-être aussi une forme de bon sens, et

l’amour, tout simplement, qui l’unit à son MASETTO.

MASETTO est un personnage simple. Il aime celle qui

est sur le point de devenir sa femme. Il en est jaloux, si jaloux

qu’il en oublie que DON GIOVANNI est le maître, et que le pay-

san n’a jamais raison contre le seigneur. Il l’apprend à ses

dépens puisqu’il se fait finalement proprement corriger par

DON GIOVANNI qui l’a attiré dans une sorte de guet-apens.

LE COMMANDEUR enfin, est le père de DO N N A AN N A.

Il intervient peu mais fortement. Au début, en défendant sa

fille, imposant – pour son malheur – le duel à DO N GI OVA N N I :

il entre, se bat et meurt. On le retrouve en statue, mi-mort, mi-

vivant, comme messager et instrument de la chute finale du

héros. Représentant de forces célestes – il faut noter que Dieu

25

n’est pas cité dans l’opéra – il tente de provoquer le repentir de

DO N GI OVA N N I, sans y parvenir. Son rôle s’arrête là. Limité par

le temps, ayant échoué dans sa mission, il s’en repart, laissant

la place aux forces souterraines qui engloutissent le libertin.

W. A . M O Z A RT

DON GIOVA N N IDon Giovanni

ossia Il dissoluto punito

Ouvertura

ATTO PRIMO

Giardino. Notte.

SCENA 1

No 1. Introduzione

LEPORELLO (con ferraiuolo, passeggia davanti la casa

di Donna Anna)

Notte e giorno faticar, per chi nulla sa gradir,

Piova e vento sopportar, mangiar male e mal dormir...

Voglio far il gentiluomo, e non voglio più servir,

E non voglio piu servir; no no no no no non voglio più servir.

Oh che caro galantuomo! Voi star dentro colla bella,

Ed io far la sentinella, la sentinella, la sentinella!

Voglio far il gentiluomo, e non voglio più servir,

E non voglio piu servir; no no no no no non voglio più servir.

Ma mi par... che venga gente... ma mi par... che venga gente;

Non mi voglio far sentir, ah non mi voglio far sentir,

Non mi voglio far sentir, no, no, no, no, no,

Non mi voglio far sentir.

(S’asconde.)

24

Ouverture

PREMIER ACTE

Jardin. Nuit.

SCÈNE 1

No 1. Introduction

LEPORELLO (revêtu d’une cape, va et vient devant la maison

de Donna Anna)

Nuit et jour se fatiguer, pour qui ne sait pas dire merci,

La pluie, le vent, les supporter, dormir mal et mal manger. . .

Je veux faire le gentilhomme et ne plus faire le valet,

Et ne plus faire le valet ; non, non, non, ne plus faire le valet.

Oh quel cher et galant homme ! Vous dedans avec la belle,

Et moi je fais la sentinelle, la sentinelle, la sentinelle !

Je veux faire le gentilhomme, je ne veux plus faire le valet,

Je ne veux plus faire le valet, non, non, non, je ne veux

plus faire le valet.

Mais je crois... qu’il vient du monde... mais je crois... qu’il

vient du monde ;

Je ne veux pas me trahir, ah je ne veux pas me trahir,

Je ne veux pas me trahir, non, non, non, non, non

Je ne veux pas me trahir.

(Il se cache.)

25

DONNA ANNA (tenendo forte pel braccio Don Giovanni,

ed egli cercando sempre di celarsi)

Non sperar, se non m’uccidi, ch’io ti lasci fuggir mai.

DON GIOVANNI

Donna folle! indarno gridi! chi son io tu non saprai!

LEPORELLO

Che tumulto! oh ciel, che gridi!

Il padron in nuovi guai.

DONNA ANNA

Non sperar, se non m’uccidi, ch’io ti lasci fuggir mai,

Non sperar ch’io ti lasci fuggir mai.

DON GIOVANNI

Donna folle! indarno gridi! chi son io tu non saprai, no,

Tu non saprai.

DONNA ANNA

Gente! servi! al traditore!

DON GIOVANNI

Taci, e trema al mio furore;

DONNA ANNA

Scellerato!

DON GIOVANNI

Sconsigliata!

DONNA ANNA

Scellerato!

DON GIOVANNI

Sconsigliata!

MOZART DON GIOVANNI

26

DONNA ANNA (agrippant fortement Don Giovanni

qui cherche à se dissimuler)

N’espère pas, si tu ne me tues, que je te laisse jamais fuir.

DON GIOVANNI

Folle femme ! Tu cries en vain ! Tu ne sauras pas qui je suis !

LEPORELLO

Quel tumulte ! Oh ciel, quels cris !

Le patron a encore des ennuis.

DONNA ANNA

N’espère pas, si tu ne me tues, que je te laisse jamais fuir.

N’espère pas que je te laisse jamais fuir.

DON GIOVANNI

Folle femme ! tu cries en vain ! tu ne sauras pas qui je suis,

Non, tu ne sauras pas.

DONNA ANNA

Mes gens ! Mes serviteurs ! sus au traître !

DON GIOVANNI

Tais-toi, et tremble devant ma colère ;

DONNA ANNA

Scélérat !

DON GIOVANNI

Insensée !

DONNA ANNA

Scélérat !

DON GIOVANNI

Insensée !

27

PREMIER ACTE SCÈNE I

LEPORELLO

Sta a veder che il

Libertino...

DONNA ANNA

Gente! servi!

DON GIOVANNI

Taci, e trema!

LEPORELLO

... Mi farà precipitar!

DONNA ANNA

Come furia

Disperata ti saprò perseguitar.

Come furia disperata, disperata...

DON GIOVANNI

Questa furia disperata

Mi vuol far precipitar.

Questa furia disperata...

LEPORELLO

Che tumulto! oh ciel, che gridi.

Sta’a veder che il

Libertino mi farà precipitar.

Sta’a veder che il libertino mi farà precipitar.

DONNA ANNA

... ti saprò perseguitar.

DON GIOVANNI

... Mi vuol far precipitar.

MOZART DON GIOVANNI

28

LEPORELLO

Vous allez voir que ce

Libertin...

DONNA ANNA

Mes gens ! serviteurs !

DON GIOVANNI

Tais-toi, et tremble !

LEPORELLO

... Me perdra !

DONNA ANNA

Comme une furie

Au désespoir je saurai te harceler.

Comme une furie au désespoir...

DON GIOVANNI

Cette furie au désespoir

Veut précipiter ma perte.

Cette furie au désespoir...

LEPORELLO

Quel tumulte ! oh ciel, quels cris.

Vous allez voir que ce

Libertin me perdra.

Vous allez voir que ce libertin me perdra ;

DONNA ANNA

... je saurai te harceler.

DON GIOVANNI

... Veut causer ma perte.

29

PREMIER ACTE SCÈNE I

DONNA ANNA

Scellerato!

DON GIOVANNI

Sconsigliata!

DONNA ANNA

Scellerato!

DON GIOVANNI

Sconsigliata!

LEPORELLO

Sta a veder che il

Libertino mi farà precipitar!

Che tumulto!

Oh ciel che gridi!

DONNA ANNA

Gente! servi!

Come furia disperata

Ti sapron perseguitar,

Come furia...

DON GIOVANNI

Taci, e trema!

Questa furia disperata

Mi vuol far precipitar.

DONNA ANNA

... Disperata, disperata...

DON GIOVANNI

Questa furia disperata...

MOZART DON GIOVANNI

30

DONNA ANNA

Scélérat !

DON GIOVANNI

Insensée !

DONNA ANNA

Scélérat !

DON GIOVANNI

Insensée !

LEPORELLO

Vous allez voir que le

Libertin me perdra !

Quel tumulte !

Oh ciel quels cris !

DONNA ANNA

Mes gens ! serviteurs !

Comme une furie au désespoir,

Je saurai te harceler.

Comme une furie...

DON GIOVANNI

Tais-toi et tremble !

Cette furie au désespoir

Veut précipiter ma perte.

DONNA ANNA

... Au désespoir, au désespoir...

DON GIOVANNI

Cette furie au désespoir...

31

PREMIER ACTE SCÈNE I

LEPORELLO

Sta a veder che il libertino

Mi farà precipitar.

Sta a veder che il libertino mi farà precipitar.

Sta a veder che il libertino mi farà precipitar.

Sta a veder che il libertino mi farà precipitar.

DONNA ANNA

... Ti sapro perseguitar,

Ti sapro perseguitar.

(Sentendo il Commendatore lascia Don Giovanni

ed entra in casa.)

DON GIOVANNI

... Mi vuol far precipitar,

Mi vuol far precipitar.

IL COMMENDATORE

Lasciala, indegno, battiti meco!

DON GIOVANNI

Va’, non mi degno di pugnar teco.

IL COMMENDATORE

Così pretendi da me fuggir?

LEPORELLO

Potessi

Almeno di qua partir!

DON GIOVANNI

Va non mi degno, no.

IL COMMENDATORE

Così pretendi da me fuggir?

MOZART DON GIOVANNI

32

LEPORELLO

Vous allez voir que le libertin

Me perdra.

Vous allez voir que le libertin me perdra.

Vous allez voir que le libertin me perdra.

Vous allez voir que le libertin me perdra.

DONNA ANNA

... Je saurai te harceler

Je saurai te harceler.

(Entendant le Commandeur, elle laisse Don Giovanni

et rentre dans la maison.)

DON GIOVANNI

... Veut précipiter ma perte,

Veut précipiter ma perte.

LE COMMANDEUR

Laisse-la, misérable, bats-toi !

DON GIOVANNI

Va, je ne daigne pas me battre avec toi.

LE COMMANDEUR

Ainsi tu prétends m’échapper ?

LEPORELLO

Si je pouvais au moins

Fuir cet endroit !

DON GIOVANNI

Va, je ne daigne pas, non.

LE COMMANDEUR

Ainsi tu prétends m’échapper ?

33

PREMIER ACTE SCÈNE I

LEPORELLO

Potessi

Almeno...

DON GIOVANNI

Misero!

IL COMMENDATORE

Battiti!

LEPORELLO

... Di qua partir!

DON GIOVANNI

Misero! Misero, attendi, se vuoi morir!

Combattono.

IL COMMENDATORE

Ah... soccorso!...

Son tradito!... l’assassino... m’ha ferito...

E dal seno palpitante...

LEPORELLO (a parte)

Qual misfatto! Qual eccesso!

Entro il sen, dallo spavento palpitar il cor mi sento.

DON GIOVANNI (a parte)

Ah, già cade il sciagurato, affannoso

E agonizzante già dal seno palpitante

Veggo l’anima partir,

Veggo l’anima partir,

Già dal seno palpitante,

Veggo l’anima partir.

MOZART DON GIOVANNI

34

LEPORELLO

Si je pouvais

Au moins...

DON GIOVANNI

Malheureux !

LE COMMANDEUR

Bats-toi !

LEPORELLO

... Fuir cet endroit !

DON GIOVANNI

Malheureux ! Patience, si tu veux mourir !

Ils se battent.

LE COMMANDEUR

Ah... au secours !...

Je suis trahi !... l’assassin... m’a touché...

Et de mon sein qui palpite...

LEPORELLO (à part)

Quel méfait ! C’est trop !

Dans mon sein je sens mon cœur trembler d’épouvante.

DON GIOVANNI (à part)

Ah, le pauvre est déjà à terre, haletant

Et agonisant, de son sein palpitant déjà

Je vois son âme s’en aller,

Je vois son âme s’en aller,

De son sein palpitant, déjà

Je vois son âme s’en aller.

35

PREMIER ACTE SCÈNE I

IL COMMANDATORE

... Sento l’anima partir,

Sento l’anima partir.

(Muore.)

LEPORELLO

Io non sò che far, che dir.

Io non sò che far, che dir.

Entro il sen, dallo spavento, palpitar il cor mi sento.

Io non sò che far, che dir.

Io non sò che far, che dir.

SCENA II

Recitativo

DON GIOVANNI

Leporello, ove sei?

LEPORELLO

Son qui per mia disgrazia; e voi?

DON GIOVANNI

Son qui.

LEPORELLO

Chi è morto, voi, o il vecchio?

DON GIOVANNI

Che domanda da bestia! il vecchio.

LEPORELLO

Bravo: due imprese leggiadre!

Sforzar la figlia, ed ammazzar il padre!

MOZART DON GIOVANNI

36

LE COMMANDEUR

... Je sens mon âme s’en aller,

Je sens mon âme s’en aller.

(Il meurt.)

LEPORELLO

Je ne sais que faire ni que dire.

Je ne sais que faire ni que dire.

Dans mon sein je sens mon cœur trembler d’épouvante.

Je ne sais que faire ni que dire.

Je ne sais que faire ni que dire.

SCÈNE II

Récitatif

DON GIOVANNI

Leporello, où es-tu ?

LEPORELLO

Je suis là, pour mon malheur ; et vous ?

DON GIOVANNI

Je suis là.

LEPORELLO

Qui est mort, vous ou le vieux ?

DON GIOVANNI

Quelle question stupide ! le vieux.

LEPORELLO

Bravo : deux beaux faits d’armes !

Violer la fille et tuer le père !

37

PREMIER ACTE SCÈNE II

DON GIOVANNI

L’ha voluto, suo danno.

LEPORELLO

Ma Donn’Anna, cosa ha voluto?

DON GIOVANNI

Taci, non mi seccar, vien meco, (in atto di batterlo) se non

vuoi qualche cosa ancor tu!

LEPORELLO

Non vuo’ nulla, signor, non parlo più.

Partono.

SCENA III

DONNA ANNA (con rizolutezza)

Ah, del padre in periglio in soccorso voliam.

DON OTTAVIO (con ferro ignudo in mano)

Tutto il mio sangue verserò se bisogna: ma dov’è il scellerato?

DONNA ANNA

In questo loco...

No 2. Recitativo accompagnato e Duetto

DONNA ANNA (vede il cadavere.)

Ma qual mai s’offre, oh Dei, spettacolo funesto agli occhi miei!

II padre... padre mio... mio caro padre...

DON OTTAVIO

Signore...

MOZART DON GIOVANNI

38

DON GIOVANNI

Il l’a voulu, tant pis pour lui.

LEPORELLO

Mais Donna Anna, qu’a-t-elle voulu ?

DON GIOVANNI

Tais-toi, ne m’embête pas, viens avec moi (menaçant de le

battre) si tu ne veux pas prendre aussi !

LEPORELLO

Je ne veux rien, seigneur, je ne dis plus rien.

Ils sortent.

SCÈNE III

DONNA ANNA (avec résolution)

Ah, volons au secours de mon père.

DON OTTAVIO (épée dégainée à la main)

Je verserai tout mon sang si besoin : mais où est le scélérat ?

DONNA ANNA

En ce lieu...

No 2. Récitatif accompagné & Duo

DONNA ANNA (voyant le cadavre.)

Mais quel spectacle funeste, oh dieux, s’offre à mes yeux !

Le père... mon père... mon père aimé...

DON OTTAVIO

Seigneur...

39

PREMIER ACTE SCÈNE III

DONNA ANNA

Ah l’assassino mel trucidò. Quel sangue... quella piaga...

quel volto... tinto e coperto del color di morte... ei non res-

pira più... fredde ha le membra... Padre mio... caro padre...

padre amato... io manco... io moro...

DON OTTAVIO

Ah, soccorrete, amici, il mio tesoro! Cercatemi... recate-

mi... qualche odor... qualche spirto... ah non tardate...

Donn’Anna... sposa... amica... iI duolo estremo la meschi-

nella uccide...

DONNA ANNA

Ahi...

DON OTTAVIO

Già rinviene... datele nuovi aiuti...

DONNA ANNA

Padre mio...

DON OTTAVIO

Celate, allontanate agli occhi suoi quell’oggetto d’orrore.

Anima mia... consolati... fa’ core...

Duetto

DONNA ANNA (disperatamente)

Fuggi, crudele, fuggi! lascia ch’io mora anchi’io ora ch’è

morto, oh Dio, chi a me la vita diè.

DON OTTAVIO

Senti, cor mio, deh senti, guardami un solo istante, ti parla

il caro amante, che vive sol per te.

MOZART DON GIOVANNI

40

DONNA ANNA

Ah, l’assassin me l’a tué. Ce sang... cette blessure... ce

visage... recouvert par la couleur de la mort... il ne respire

plus... ses membres sont glacés... Mon père... cher père...

père aimé... je défaille... je meurs...

DON OTTAVIO

Ah, amis, secourez mon amour! Allez me chercher... m’ap-

porter... quelque parfum... des sels... ah ne tardez pas...

Donna Anna... épouse... amie... la pauvre, cette extrême

douleur va la tuer...

DONNA ANNA

Ah...

DON OTTAVIO

Elle revient à elle... aidez-la encore...

DONNA ANNA

Mon père...

DON OTTAVIO

Cachez, éloignez de ses yeux cet objet d’horreur. Mon

âme... console-toi... prends courage...

Duo

DONNA ANNA (avec désespoir)

Va-t-en, cruel ! laisse-moi mourir aussi à présent qu’il est

mort, oh Dieu, celui qui me donna la vie.

DON OTTAVIO

Mon cœur, de grâce écoute, regarde-moi juste un instant,

l’amant chéri te parle, qui ne vit que pour toi.

41

PREMIER ACTE SCÈNE III

DONNA ANNA

Tu sei... perdon... mio bene... l’affanno mio, le pene... Ah!

il padre mio dov’è?

DON OTTAVIO

Il padre... Lascia, o cara, la rimembranza amara... Hai

sposo e padre in me.

DONNA ANNA

Ah... il padre... il padre mio dov’è?

DON OTTAVIO

Lascia, o cara, la rimembranza amara... Hai sposo e padre,

hai sposo e padre in me.

Recitativo

DONNA ANNA

Ah! vendicar, se il puoi, giura quel sangue ognor.

DON OTTAVIO

Lo giuro... lo giuro... lo giuro agl’occhi tuoi, lo giuro al

nostro amor.

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Che giuramento, oh Dei!

Che barbaro momento!

Fra cento affetti e cento

Vammi ondeggiando il cor.

Fra cento affetti e cento

Vammi ondeggiando il cor.

DONNA ANNA

Vendicar quel sangue giura!

MOZART DON GIOVANNI

42

DONNA ANNA

C’est toi... pardon... mon amour... ma souffrance, la

peine... Ah ! où est mon père ?

DON OTTAVIO

Le père... Laisse, ô ma chérie, ce souvenir amer... Tu as en

moi un époux et un père.

DONNA ANNA

Ah... le père... où est mon père ?

DON OTTAVIO

Laisse, ô ma chérie, ce souvenir amer... Tu as un époux et

un père, tu as en moi un époux et un père.

Récitatif

DONNA ANNA

Ah ! jure, si tu peux, de venger ce sang.

DON OTTAVIO

Je le jure... je le jure... je le jure sur tes yeux, sur notre

amour.

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Quel serment, oh dieux !

Quel instant terrible !

Sur cent et cent sentiments

Mon cœur va flottant.

Sur cent et cent sentiments

Mon cœur va flottant.

DONNA ANNA

Jure de venger ce sang !

43

PREMIER ACTE SCÈNE III

DON OTTAVIO

Lo giuro! agl’occhi tuoi, al nostro amor.

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Che giuramento, oh Dei!

Che barbaro momento!

Fra cento affetti e cento

Vammi ondeggiando il cor.

Fra cento affetti e cento

Vammi ondeggiando il cor...

DONNA ANNA

Vammi ondeggiando

Ondeggiando il cor,

DON OTTAVIO

Vammi ondeggiando il cor

Vammi ondeggiando il cor,

DONNA ANNA

Vammi ondeggiando

Ondeggiando il cor,

Vammi ondeggiando il cor...

DON OTTAVIO

Vammi ondeggiando il cor,

Vammi ondeggiando il cor...

Partono.

MOZART DON GIOVANNI

44

DON OTTAVIO

Je le jure ! sur tes yeux, sur notre amour.

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Quel serment, oh dieux !

Quel instant terrible !

Sur cent et cent sentiments

Mon cœur va flottant.

Sur cent et cent sentiments

Mon cœur va flottant...

DONNA ANNA

Mon cœur va flottant

Mon cœur va flottant,

DON OTTAVIO

Mon cœur va flottant

Mon cœur va flottant,

DONNA ANNA

Mon cœur va

Flottant, mon cœur va

Mon cœur va flottant...

DON OTTAVIO

Mon cœur va flottant,

Mon cœur va flottant...

Ils sortent.

45

PREMIER ACTE SCÈNE III

SCENA IV

Notte. Strada.

Recitativo

DON GIOVANNI

Orsù, spicciati presto... cosa vuoi?

LEPORELLO

L’affar di cui si tratta è importante.

DON GIOVANNI

Lo credo.

LEPORELLO

È importantissimo.

DON GIOVANNI

Meglio ancora: finiscila.

LEPORELLO

Giurate di non andar in collera.

DON GIOVANNI

Lo giuro sul mio onore, purchè non parli del Commen-

datore.

LEPORELLO

Siam soli.

DON GIOVANNI

Lo vedo.

MOZART DON GIOVANNI

46

SCÈNE IV

Nuit. Rue.

Récitatif

DON GIOVANNI

Allons, dépêche-toi vite... que veux-tu ?

LEPORELLO

L’affaire dont il s’agit est importante.

DON GIOVANNI

Je le crois.

LEPORELLO

Elle est très importante.

DON GIOVANNI

Encore mieux : conclus.

LEPORELLO

Jurez de ne pas vous mettre en colère.

DON GIOVANNI

Je le jure sur mon honneur, pourvu que tu ne parles pas du

Commandeur.

LEPORELLO

Nous sommes seuls.

DON GIOVANNI

Je vois.

47

PREMIER ACTE SCÈNE IV

LEPORELLO

Nessun ci sente.

DON GIOVANNI

Via.

LEPORELLO

Vi posso dire tutto liberamente?

DON GIOVANNI

Sì.

LEPORELLO

Dunque quando è così: caro signor padrone, la vita che

menate (all’orecchio, ma forte) è da briccone.

DON GIOVANNI

Temerario! in tal guisa...

LEPORELLO

E il giuramento!...

DON GIOVANNI

Non sò di giuramenti... taci... o ch’io...

LEPORELLO

Non parlo più, non fiato, o padron mio.

DON GIOVANNI

Così saremo amici; or odi un poco, sai tu perchè son qui?

LEPORELLO

Non ne so nulla: ma essendo così tardi... non sarebbe

qualche nuova conquista? Io lo devo saper per porla in lista.

MOZART DON GIOVANNI

48

LEPORELLO

Personne n’écoute.

DON GIOVANNI

Allez.

LEPORELLO

Je peux tout vous dire librement ?

DON GIOVANNI

Oui.

LEPORELLO

Alors bon : cher seigneur maître, la vie que vous menez (à

l’oreille mais fort) est celle d’une canaille.

DON GIOVANNI

Téméraire ! si c’est comme ça...

LEPORELLO

Et le serment !...

DON GIOVANNI

Je ne connais pas de serments... tais-toi... ou je...

LEPORELLO

Je ne parle plus, je ne respire plus, ô mon maître.

DON GIOVANNI

Ainsi nous serons amis ; maintenant écoute un peu, sais-

tu pourquoi je suis ici ?

LEPORELLO

Je n’en sais rien : mais puisqu’il est si tard... ne serait-ce

pas quelque nouvelle conquête ? Il faut que je le sache

pour la mettre sur la liste.

49

PREMIER ACTE SCÈNE IV

DON GIOVANNI

Va’ là, che se’ il grand’uom. Sappi ch’io sono innamorato

d’una bella dama, e son certo che m’ama. La vidi... le par-

lai... meco al casino questa notte verrà... Zitto: mi pare

sentire odor di femmina...

LEPORELLO

Cospetto! che odorato perfetto!

DON GIOVANNI

All’aria, mi par bella:

LEPORELLO

E che occhio, dico!

DON GIOVANNI

Ritiriamoci un poco, e scopriamo terren.

LEPORELLO

Già prese foco.

Vanno in disparte.

SCENA V

No 3. Aria

DONNA ELVIRA (in abito da viaggio)

Ah chi mi dice mai quel barbaro dov’è,

Che per mio scorno amai, che mi mancò di fe,

Che mi mancò di fe?

Ah se ritrovo l’empio,

E a me non torna ancor,

Vo’ farne orrendo scempio, gli vo’ cavare il cor,

Gli vo’ cavare il cor...

MOZART DON GIOVANNI

50

DON GIOVANNI

Te voilà sage. Sache que j’aime une belle dame et je suis

sûr qu’elle m’aime. Je l’ai vue, lui ai parlé... cette nuit, elle

viendra avec moi au pavillon... Chut : je crois que je sens

une odeur de femme...

LEPORELLO

Parbleu ! quel odorat parfait !

DON GIOVANNI

À son allure, elle me semble belle :

LEPORELLO

Et quel œil, je trouve.

DON GIOVANNI

Écartons-nous un peu, et étudions le terrain.

LEPORELLO

Il s’est déjà enflammé.

Ils s’écartent.

SCÈNE V

No 3. Air

DONNA ELVIRA (en tenue de voyage)

Ah qui pourrait me dire où se trouve ce barbare,

Que pour ma honte j’ai aimé, qui de foi m’a manqué,

Qui de foi m’a manqué ?

Ah si je retrouve le cruel,

S’il ne me revient pas,

Je veux le massacrer, lui arracher le cœur,

Je veux lui arracher le cœur...

51

PREMIER ACTE SCÈNE V

DON GIOVANNI

Udisti! qualche bella dal vago abbandonata.

DONNA ELVIRA

... Vo’ farne orrendo scempio, gli vo’ cavare il cor,

DON GIOVANNI

Poverina, poverina!

DONNA ELVIRA

Gli vo’ cavare il cor, sì, gli vo cavare il cor.

DON GIOVANNI

Cerchiam di consolare il suo tormento.

LEPORELLO

Così ne consolò mille e ottocento.

DONNA ELVIRA

Ah chi mi dice mai quel barbaro dov’è,

Che per mio scorno amai, che mi mancò di fe,

Che mi mancò di fe?

Ah se ritrovo l’empio,

E a me non torna ancor,

Vo’ farne orrendo scempio, gli vo’ cavare il cor,

DON GIOVANNI

Poverina, poverina!

DONNA ELVIRA

Gli vo’ cavare il cor, sì, gli vo’ cavare il cor.

DON GIOVANNI

Cerchiam di consolare il suo tormento.

MOZART DON GIOVANNI

52

DON GIOVANNI

Tu as entendu ! quelque belle abandonnée.

DONNA ELVIRA

... Je veux le massacrer, lui arracher le cœur,

DON GIOVANNI

Pauvre petite, pauvre petite !

DONNA ELVIRA

Je veux lui arracher le cœur, oui, lui arracher le cœur.

DON GIOVANNI

Tentons de la consoler de son tourment.

LEPORELLO

Ainsi, il en a consolé mille huit cents.

DONNA ELVIRA

Ah qui pourrait me dire où se trouve ce barbare,

Que pour ma honte j’ai aimé, qui de foi m’a manqué,

Qui de foi m’a manqué ?

Ah si je retrouve le cruel,

S’il ne me revient pas,

Je veux le massacrer, lui arracher le cœur,

DON GIOVANNI

Pauvre petite, pauvre petite !

DONNA ELVIRA

Je veux lui arracher le cœur, oui, lui arracher le cœur.

DON GIOVANNI

Tentons de la consoler de son tourment.

53

PREMIER ACTE SCÈNE V

LEPORELLO

Così ne consolò mille e ottocento.

DONNA ELVIRA

Gli vo’ cavare il cor, gli vo’ cavare il cor,

Gli vo’ cavare il cor, cavare il cor.

DON GIOVANNI

Signorina, signorina!

DONNA ELVIRA

Chi è là?

Recitativo

DON GIOVANNI

Stelle! che vedo!

LEPORELLO

O bella! Donna Elvira!

DONNA ELVIRA

Don Giovanni! Sei qui, mostro, fellon, nido d’inganni!

LEPORELLO (a parte)

Che titoli cruscanti! Manco male che lo conosce bene!

DON GIOVANNI

Via, cara Donna Elvira, calmate questa collera... sentite...

lasciatemi parlar...

DONNA ELVIRA

Cosa puoi dire, dopo azion sì nera? In casa mia entri fur-

tivamente, a forza d’arte, di giuramenti e di lusinghe arri-

vi a sedurre il cor mio; m’innamori, o crudele, mi dichiari

tua sposa, e poi, mancando della terra e del cielo al santo

MOZART DON GIOVANNI

54

LEPORELLO

Ainsi, il en a consolé mille huit cents.

DONNA ELVIRA

Je veux lui arracher le cœur, lui arracher le cœur,

Je veux lui arracher le cœur, arracher le cœur.

DON GIOVANNI

Mademoiselle, mademoiselle !

DONNA ELVIRA

Qui est là ?

Récitatif

DON GIOVANNI

Ciel ! que vois-je ?

LEPORELLO

Excellent ! Donna Elvira !

DONNA ELVIRA

Don Giovanni ! Tu es ici, monstre, traître, nid de tromperies !

LEPORELLO (à part)

Quels titres brillants ! Par bonheur, elle le connaît bien !

DON GIOVANNI

Allons, chère Donna Elvira, calmez cette colère... écou-

tez... laissez-moi te parler...

DONNA ELVIRA

Que dire, après une action si noire ? Tu entres chez moi fur-

tivement, par ruses, serments et caresses, tu parviens à sé-

duire mon cœur ; je tombe amoureuse, ô cruel, tu m’ a p p e l l e s

ton épouse, puis, bafouant la loi sacrée de la terre et du ciel,

55

PREMIER ACTE SCÈNE V

dritto, con enorme delitto dopo tre dì da Burgos t’allonta-

ni, m’abbandoni, mi fuggi, e lasci in preda al rimorso ed al

pianto, per pena forse che t’amai cotanto!

LEPORELLO (a parte)

Pare un libro stampato.

DON GIOVANNI

Oh in quanto a questo ebbi le mie ragioni: è vero?

LEPORELLO (ironicamente)

È vero. E che ragioni forti!

DONNA ELVIRA

E quali sono, se non la tua perfidia, la leggerezza tua?

Ma il giusto cielo volle ch’io ti trovassi, per far le sue, le

mie vendette.

DON GIOVANNI

Eh via siate più ragionevole...

(A parte) Mi pone a cimento costei.

(A donn’Elvira)

Se non credete a labbro mio, credete a questo galantuomo.

LEPORELLO (a parte)

Salvo il vero.

DON GIOVANNI (forte)

Via, dille un poco...

LEPORELLO (piano)

E cosa devo dirle?

DON GIOVANNI (forte)

Sì, sì, dille pur tutto.

MOZART DON GIOVANNI

56

après trois jours – crime immense – tu quittes Burg o s ,

m’abandonnes, me fuis, me laissant la proie du remords et des

pleurs, punition peut-être de t’avoir tant aimé.

LEPORELLO (à part)

Elle parle comme un livre.

DON GIOVANNI

Oh quant à cela, j’avais mes raisons : c’est vrai ?

LEPORELLO (ironiquement)

Vrai. Et des raisons puissantes !

DONNA ELVIRA

Et quelles sont-elles, sinon ta perfidie et ta désinvolture ?

Mais le ciel de justice a voulu que je te retrouve, pour sa

vengeance et la mienne.

DON GIOVANNI

Allons, soyez plus raisonnable...

(À part) Elle me met à rude épreuve.

(À Donna Elvira)

Si vous ne me croyez pas, croyez ce gentilhomme.

LEPORELLO (à part)

Vérité mise à part.

DON GIOVANNI (fort)

Allons, dis-lui un peu...

LEPORELLO (à voix basse)

Et que dois-je lui dire ?

DON GIOVANNI (fort)

Oui, oui, dis-lui tout.

57

PREMIER ACTE SCÈNE V

DONNA ELVIRA (a Leporello)

Ebben, fa presto.

In questo fra tempo Don Giovanni fugge.

LEPORELLO

Madama... veramente... in questo mondo conciossia cosa

quando fosse che il quadro non è tondo...

DONNA ELVIRA

Sciagurato, così del mio dolor gioco ti prendi?

(Verso Don Giovanni che non crede partito)

Ah voi... stelle! l’iniquo fuggì! misera me! dove, in qual

parte...

LEPORELLO

Eh, lasciate che vada: egli non merta che di lui ci pensiate...

DONNA ELVIRA

Il scellerato m’ingannò, mi tradì!

LEPORELLO

Eh consolatevi; non siete voi, non foste, e non sarete né la

prima, né l’ultima; guardate questo non picciol libro: è

tutto pieno dei nomi di sue belle; ogni villa, ogni borgo,

ogni paese è testimon di sue donnesche imprese.

No 4. Aria

LEPORELLO

Madamina, il catalogo è questo

Delle belle che amò il padron mio,

un catalogo egli è che ho fatti’io,

Osservate, leggete con me, osservate, legete con me.

In Italia seicento e quaranta,

MOZART DON GIOVANNI

58

DONNA ELVIRA (à Leporello)

Eh bien, fais vite.

Pendant ce temps, Don Giovanni s’échappe.

LEPORELLO

Madame... en vérité... en ce monde puisque et quand bien

même le carré n’est pas rond...

DONNA ELVIRA

Malheureux, tu te joues ainsi de ma douleur ?

(À Don Giovanni qu’elle croit toujours là)

Ah vous... ciel ! le misérable a fui ! pauvre de moi ! où, de

quel côté...

LEPORELLO

Eh laissez-le aller : il ne mérite pas que vous pensiez à lui...

DONNA ELVIRA

Le scélérat m’a trompée, m’a trahie !

LEPORELLO

Eh consolez-vous ; vous n’êtes, ne fûtes, ne serez, ni la

première, ni la dernière ; regardez ce gros livre ; il est

rempli des noms de ses belles ; chaque ville, chaque

bourg, chaque pays est le témoin de ses conquêtes.

No 4. Air

LEPORELLO

Petite madame, voici le catalogue

Des belles qu’aima mon maître,

Un catalogue que j’ai fait moi-même,

Regardez, lisez avec moi, regardez, lisez avec moi.

En Italie six cent quarante,

59

PREMIER ACTE SCÈNE V

In Lamagna duecento e trent’una,

Cento in Francia, in Turchia novantuna,

Ma in Ispagna son già mille e tre, mille e tre, mille e tre.

V’han fra queste contadine, cameriere, cittadine,

V’han contesse, baronesse, marchesine, principesse,

E v’han donne d’ogni grado, d’ogni forma, d’ogni età,

D’ogni forma, d’ogni età.

In Italia, seicento e quaranta,

In Lamagna duecento e trent’una,

Cento in Francia, in Turchia novantuna, ma, ma

Ma in Ispagna son già mille e tre, mille e tre, mille e tre.

V’han fra queste contadine, cameriere, cittadine,

V’han contesse, baronesse, marchesine, principesse,

E v’han donne d’ogni grado, d’ogni forma, d’ogni età,

D’ogni forma, d’ogni età.

Nella bionda egli ha l’usanza di lodar la gentilezza,

Nella bruna la costanza, nella bianca la dolcezza.

Vuol d’inverno la grassotta, vuol d’estate la magrotta;

È la grande maestosa, è la grande maestosa, la piccina,

La piccina, la piccina, la piccina, la piccina,

La piccina, la piccina, la piccina, la piccina,

È ognor vezzosa, è ognor vezzosa, è ognor vezzosa...

Delle vecchie fa conquista, pel piacer di porle in lista;

Sua passion predominante è la giovin principiante.

Non si picca se sia ricca, se sia brutta, se sia bella,

Se sia ricca, brutta, se sia bella:

Purché porti la gonnella, voi sapete quel che fa,

Voi sapete quel che fa, purché porti la gonnella

Voi sapete quel che fa, voi sapete, voi sapete quel che fa,

Quel che fa, quel che fa, voi sapete quel che fa.

(Parte.)

MOZART DON GIOVANNI

60

En Allemagne deux cent trente et une,

Cent en France, en Turquie quatre-vingt-onze,

Mais en Espagne, il y en a déjà mille trois, mille trois.

Parmi elles des paysannes, des femmes de chambre, des

c i t a d i n e s ,

Des comtesses, des baronnes, des marquises, des princesses,

Et des dames de tout rang, de toute forme, de tout âge

De toute forme, de tout âge.

En Italie six cent quarante,

En Allemagne deux cent trente et une,

Cent en France, en Turquie quatre-vingt-onze, mais, mais

Mais en Espagne, il y en a déjà mille trois, mille trois.

Parmi elles des paysannes, des femmes de chambre, des

c i t a d i n e s ,

Des comtesses, des baronnes, des marquises, des princesses,

Et des dames de tout rang, de toute forme, de tout âge

De toute forme, de tout âge.

Chez la blonde, il aime à louer la gentillesse,

Chez la brune, la constance, chez la tête blanche, la douceur.

En hiver il veut la grasse, en été il veut la maigre ;

La grande est majestueuse, la grande est majestueuse, la

petite,

La petite, la petite, la petite, la petite,

La petite, la petite, la petite, la petite,

Est toujours gracieuse, est toujours gracieuse...

Des vieilles, il fait la conquête pour le plaisir de les ajou-

ter à la liste ;

Sa passion prédominante, c’est la jeune débutante.

Peu lui importe qu’elle soit riche, laide, belle,

Qu’elle soit riche, belle, laide :

Pourvu qu’elle porte jupon, vous savez ce qu’il fait

Vous savez ce qu’il fait, pourvu qu’elle porte jupon,

Vous savez, vous savez ce qu’il fait,

Ce qu’il fait, ce qu’il fait, vous savez ce qu’il fait.

(Il sort.)

61

PREMIER ACTE SCÈNE V

SCENA VI

Recitativo

DONNA ELVIRA

In questa forma dunque mi tradì il scellerato! È questo il

premio che quel barbaro rende all’amor mio? Ah vendicar

vogl’io l’ingannato mio cor: pria ch’ei mi fugga... si ricor-

ra... si vada... Io sento in petto sol vendetta parlar, rabbia

e dispetto.

(Parte.)

SCENA VII

No 5. Coro

ZERLINA

Giovinette che fate all’amore, che fate all’amore,

Non lasciate che passi l’età, che passi l’età, che passi l’età:

Se nel seno vi bulica il core, vi bulica il core,

Il rimedio vedetelo qua...

Che piacer, che piacer che sarà!

CORO DI CONTADINE

Aaaa che piacer, che piacer che sarà,

La la la ra la, la la la ra la!

MASETTO

Giovinetti leggeri di testa, leggeri di testa,

Non andate girando qua e là, qua e là, e qua e là.

Poco dura dé matti la festa, dé matti la festa,

Ma per me cominciato non ha, cominciato non ha...

Che piacer, che piacer che sarà!

MOZART DON GIOVANNI

62

SCÈNE VI

Récitatif

DONNA ELVIRA

C’est ainsi donc que le scélérat m’a trahie! Voilà la récom-

pense que ce barbare réserve à mon amour ? Ah, je veux

venger mon cœur trompé: avant qu’il ne me fuie... j’aurais

recours... allons... En mon cœur je n’entends que la voix

de la vengeance, de la rage et du dépit.

(Elle sort.)

SCÈNE VII

No 5. Chœur

ZERLINA

Jeunes filles faites pour l’amour, faites pour l’amour,

Ne laissez pas passer le temps, passer le temps :

Si dans votre sein, votre cœur bouillonne, votre cœur

bouillonne,

Le remède, il est là, regardez...

Quel plaisir quel plaisir ce sera !

CHŒUR DES PAYSANNES

Aaaa quel plaisir, quel plaisir ce sera,

La la la ra la, la la la ra la !

MASETTO

Jeunes gens étourdis, étourdis,

Ne papillonnez pas ici et là, ici et là

Elle dure peu la fête des fous, la fête des fous,

Mais pour moi elle n’a pas commencé, commencé...

Quel plaisir, quel plaisir ce sera !

63

PREMIER ACTE SCÈNES VI & VII

CORO DI CONTADINI

Aaaa che piacer, che piacer che sarà,

La la la ra la, la la la ra la!

ZERLINA E MASETTO

Vieni, vieni, carino, e godiamo,

E cantiamo e balliamo e saltiamo;

Vieni, vieni, carino, e godiamo,

Che piacer, che piacer che sarà!

Aaaa che piacer, che piacer che sarà!

CORO DI CONTADINE ET CONTADINI

Aaaa che piacer, che piacer che sarà,

La la la ra la la ra la la ra la,

La la la ra la la ra la la ra la!

SCENA VIII

Recitativo

DON GIOVANNI

Manco male, è partita: oh guarda, guarda che bella gio-

ventù! che belle donne!

LEPORELLO

Fra tante per mia fè vi sarà qualche cosa anche per me.

DON GIOVANNI

Cari amici, buon giorno: seguitate a stare allegramente,

seguitate a suonar, o buona gente. C’è qualche sposalizio?

ZERLINA

Si signore, e la sposa son io.

DON GIOVANNI

Me ne consolo. Lo sposo?

MOZART DON GIOVANNI

64

CHŒUR DES PAYSANS

Aaaa quel plaisir, quel plaisir ce sera,

La la la ra la, la la la ra la !

ZERLINA & MASETTO

Viens, viens, chéri, et jouissons,

Et chantons, dansons, sautons ;

Viens, viens, chéri et jouissons,

Quel plaisir, quel plaisir ce sera !

Aaaa quel plaisir, quel plaisir ce sera !

CHŒUR DES PAYSANNES & DES PAYSANS

Aaaa quel plaisir, quel plaisir ce sera,

La la la ra la la ra la la ra la,

La la la ra la la ra la la ra la !

SCÈNE VIII

Récitatif

DON GIOVANNI

Heureusement, elle est partie : oh, regarde, regarde quelle

belle jeunesse ! quelles belles femmes !

LEPORELLO

Ma foi, parmi tant, il y en aura aussi une pour moi.

DON GIOVANNI

Chers amis, bonjour : continuez dans la joie, continuez à

jouer, ô brave gens. C’est une noce ?

ZERLINA

Oui monsieur, et je suis la mariée.

DON GIOVANNI

J’en suis heureux. Le marié ?

65

PREMIER ACTE SCÈNE VIII

MASETTO

Io, per servirla.

DON GIOVANNI

Oh bravo! per servirmi: questo è vero parlar da galantuomo!

LEPORELLO

Basta che sia marito.

ZERLINA

Oh il mio Masetto è un uom d’ottimo core.

DON GIOVANNI

Oh anch’io, vedete! voglio che siamo amici: il vostro

nome?

ZERLINA

Zerlina.

DON GIOVANNI

E il tuo?

MASETTO

Masetto.

DON GIOVANNI

O caro il mio Masetto! cara la mia Zerlina! v’esibisco la

mia protezione...

(A Leporello che fai dei scherzi alle altre contadine:)

Leporello... cosa fai lì, birbone?

LEPORELLO

Anch’io, caro padrone, esibisco la mia protezione.

DON GIOVANNI

Presto, va’ con costor: nel mio palazzo conducili sul fatto;

MOZART DON GIOVANNI

66

MASETTO

C’est moi, pour vous servir.

DON GIOVANNI

Oh bravo ! pour me servir : c’est vraiment parler en gen-

tilhomme !

LEPORELLO

Il suffit qu’il soit le mari.

ZERLINA

Oh, mon Masetto est un excellent homme.

DON GIOVANNI

Oh moi aussi, voyez ! je veux que nous soyons amis : votre nom ?

ZERLINA

Zerlina.

DON GIOVANNI

Et le tien ?

MASETTO

Masetto.

DON GIOVANNI

Ô mon cher Masetto ! ma chère Zerline ! je vous offre ma

protection...

(À Leporello qui taquine les autres paysannes :)

Leporello... que fais-tu, coquin ?

LEPORELLO

Moi aussi, cher maître, j’offre ma protection.

DON GIOVANNI

Vite, pars avec ceux-là : conduis-les tout de suite à mon

67

PREMIER ACTE SCÈNE VIII

ordina ch’abbiano cioccolata, caffè, vini, presciutti; cerca

divertir tutti, mostra loro il giardino, la galleria, le camere;

in effetto fa’ che resti contento il mio Masetto. Hai capito?

LEPORELLO

Ho capito: andiam!

MASETTO

Signore...

DON GIOVANNI

Cosa c’è?

MASETTO

La Zerlina senza me non può star.

LEPORELLO

In vostro loco vi sarà sua Eccellenza: e saprà bene fare le

vostre parti.

DON GIOVANNI

Oh la Zerlina è in man d’un Cavalier: va’ pur, fra poco ella

meco verrà.

ZERLINA

Va’, non temere! nelle mani son io d’un Cavaliere.

MASETTO

E per questo?

ZERLINA

E per questo non c’è da dubitar.

MASETTO

Ed io, cospetto...

MOZART DON GIOVANNI

68

palais ; fais-leur servir du chocolat, du café, des vins, du

jambon ; essaye de tous les divertir, montre-leur le jardin,

la galerie, les chambres ; fais vraiment en sorte que mon

Masetto soit satisfait. Tu as compris ?

LEPORELLO

J’ai compris : allons-y !

MASETTO

Seigneur...

DON GIOVANNI

Qu’est-ce qu’il y a ?

MASETTO

Zerlina ne peut demeurer sans moi.

LEPORELLO

Son Excellence prendra votre place : et il saura bien tenir

votre rôle.

DON GIOVANNI

Oh, Zerlina est entre les mains d’un chevalier : sous peu,

elle viendra avec moi.

ZERLINA

Va, n’aie pas peur ! je suis entre les mains d’un chevalier.

MASETTO

Et alors ?

ZERLINA

Et alors pas de méfiance.

MASETTO

Et moi, parbleu...

69

PREMIER ACTE SCÈNE VIII

DON GIOVANNI

Olà, finiam le dispute: se subito senz’ altro replicar non te

ne vai, (mostrandogli la spada) Masetto, guarda ben, ti

pentirai.

No 6. Aria

MASETTO

Ho capito, signor sì, signor sì,

Chino il capo, e me ne vò:

Già che piace a voi così.

Altre repliche non fo, no, no, no, no, no, no, non fo.

Cavalier voi siete già,

Dubitar non posso affè:

Me lo dice la bontà

Che volete aver per me, aver per me, aver per me.

(Da parte a Zerlina) Bricconaccia, malandrina,

Fosti ognor la mia ruina, fosti ognor la mia ruina.

(A Leporello che lo vuol condur seco)

Vengo, vengo!

(A Zerlina) Resta, resta!

È una cosa molto onesta:

Faccia il nostro cavaliere cavaliera ancora te,

Cavaliera ancora te.

(Da parte a Zerlina) Bricconaccia, malandrina,

Fosti ognor la mia ruina, fosti ognor la mia ruina.

(A Leporello che lo vuol condur seco)

Vengo, vengo!

(A Zerlina) Resta, resta!

È una cosa molto onesta:

Faccia il nostro cavaliere cavaliera ancora te,

Cavaliera ancora te,

Faccia il nostro cavaliere cavaliera ancora te,

Faccia il nostro cavaliere cavaliera ancora te,

Cavaliera ancora te, cavaliera ancora te.

(Via.)

MOZART DON GIOVANNI

70

DON GIOVANNI

Holà, finissons la dispute : si tu ne pars pas sur-le-champ

et sans rien dire (montrant son épée) Masetto, prends

garde, tu t’en repentiras.

No 6. Air

MASETTO

J’ai compris, oui seigneur, oui seigneur,

Je m’incline et je m’en vais :

Puisque tel est votre plaisir

Je ne dirai plus rien, non, non, non, non, plus rien.

Vous êtes chevalier,

Je ne peux en douter :

Me le disent les bontés

Que pour moi vous avez, pour moi, pour moi.

(À part, à Zerline) Canaille, coquine,

Tu as toujours été ma ruine, tu as toujours été ma ruine.

(À Leporello qui veut l’emmener avec lui)

Je viens, je viens !

(À Zerlina) Reste, reste !

C’est une chose bien honnête

Que notre chevalier fasse de toi une dame,

De toi une dame.

(À part, à Zerline) Canaille, coquine,

Tu as toujours été ma ruine, tu as toujours été ma ruine.

(À Leporello qui veut l’emmener avec lui)

Je viens, je viens !

(À Zerlina) Reste, reste !

C’est une chose bien honnête

Que notre chevalier fasse de toi une dame,

De toi une dame.

Que notre chevalier fasse de toi une dame,

Que notre chevalier fasse de toi une dame,

De toi une dame, de toi une dame.

(Il s’en va.)

71

PREMIER ACTE SCÈNE VIII

SCENA IX

DON GIOVANNI

Alfin siam liberati, Zerlinetta gentil, da quel scioccone:

che ne dite, mio ben, so far pulito?

ZERLINA

Signore, è mio marito...

DON GIOVANNI

Chi? colui? Vi par che un onest’uomo, un nobil Cavalier,

come io mi vanto, possa soffrir che quel visetto d’oro, quel

viso inzuccherato, da un bifolcaccio vil sia strapazzato?

ZERLINA

Ma signor, io gli diedi parola di sposarlo.

DON GIOVANNI

Tal parola non vale un zero; voi non siete fatta per essere

paesana: un’ altra sorte vi procuran quegli occhi briccon-

celli, quei labbretti sì belli, quelle ditucce candide e odo-

rose: parmi toccar giuncata, e fiutar rose.

ZERLINA

Ah non vorrei...

DON GIOVANNI

Che non vorreste?

ZERLINA

Alfine ingannata restar; io so che raro colle donne voi altri

cavalieri siete onesti e sinceri.

MOZART DON GIOVANNI

72

SCÈNE IX

DON GIOVANNI

Enfin nous sommes débarrassés, gentille Zerlinetta, de ce

grand sot : qu’en dites-vous, ma chère, je sais faire place nette ?

ZERLINA

Seigneur, c’est mon mari...

DON GIOVANNI

Qui ? Lui ? Pensez-vous que l’honnête homme, le noble

chevalier que je me flatte d’être pourrait souffrir que ce

minois doré, ce visage poudré de sucre soit maltraité par

un vulgaire paysan.

ZERLINA

Mais seigneur, je lui ai promis de l’épouser.

DON GIOVANNI

Une telle promesse ne vaut rien ; vous n’êtes pas faite pour

être paysanne : un autre destin vous réservent ces yeux

charmeurs, ces lèvres si belles, ces petits doigts blancs et

parfumés : il me semble toucher le velours d’un roseau,

respirer des roses.

ZERLINA

Ah je ne voudrais pas...

DON GIOVANNI

Que ne voudrais-tu pas ?

ZERLINA

Être finalement trompée ; je sais qu’avec les dames, vous

autres chevaliers êtes rarement honnêtes et sincères.

73

PREMIER ACTE SCÈNE IX

DON GIOVANNI

Eh, un’ impostura della gente plebea! La nobilità ha dipin-

ta negl’ occhi l’onestà. Orsù, non perdiam tempo: in ques-

to istante io ti voglio sposar.

ZERLINA

Voi?

DON GIOVANNI

Certo, io. Quel casinetto è mio: soli saremo, e là, gioiello

mio, ci sposeremo.

No 7. Duettino

DON GIOVANNI

Là ci darem la mano, là mi dirai di sì;

Vedi, non è lontano, partiam, ben mio, da qui.

ZERLINA

Vorrei, e non vorrei, mi trema un poco il cor;

Felice, è ver, sarei, ma può burlarmi ancor,

Ma può burlarmi ancor.

DON GIOVANNI

Vieni, mio bel diletto;

ZERLINA

Mi fa pietà Masetto;

DON GIOVANNI

Io cangerò tua sorte.

ZERLINA

Presto non son più forte,

Non son più forte, non son più forte.

MOZART DON GIOVANNI

74

DON GIOVANNI

Eh, c’est un mensonge des gens du peuple ! La noblesse a

l’honnêteté peinte dans le regard. Donc, ne perdons pas de

temps : sur-le-champ je veux t’épouser.

ZERLINA

Vous ?

DON GIOVANNI

Bien sûr. Ce petit pavillon est à moi : nous serons seuls et

là, mon bijou, nous nous marierons.

No 7. Duettino

DON GIOVANNI

Là, nous nous donnerons la main, là tu me diras oui ;

Vois, ce n’est pas loin, mon amour, partons d’ici.

ZERLINA

Je voudrais et ne voudrais pas, mon cœur tremble un peu ;

Je serais heureuse, c’est vrai, mais il peut se jouer de moi,

Mais il peut encore se jouer de moi.

DON GIOVANNI

Viens, mon bel amour ;

ZERLINA

Masetto me fait pitié ;

DON GIOVANNI

Je changerai ta destinée.

ZERLINA

Vite, je n’ai plus la force,

Je n’ai plus la force, je n’ai plus la force.

75

PREMIER ACTE SCÈNE IX

DON GIOVANNI

Vieni, vieni!

DON GIOVANNI

Là ci darem la mano,

ZERLINA

Vorrei, e non vorrei,

DON GIOVANNI

Là mi dirai di sì;

ZERLINA

Mi trema un poco il cor;

DON GIOVANNI

Partiam, ben mio, da qui.

ZERLINA

Ma può burlarmi ancor

DON GIOVANNI

Vieni, mio bel

Diletto;

ZERLINA

Mi fa

Pietà Masetto

DON GIOVANNI

Io cangierò

Tua sorte;

ZERLINA

Presto

MOZART DON GIOVANNI

76

DON GIOVANNI

Viens, viens !

DON GIOVANNI

Là, nous nous donnerons la main,

ZERLINA

Je voudrais et ne voudrais pas

DON GIOVANNI

Là tu me diras oui ;

ZERLINA

Mon cœur tremble un peu ;

DON GIOVANNI

Mon amour, quittons ces lieux.

ZERLINA

Il peut encore se jouer de moi.

DON GIOVANNI

Viens, mon bel

Amour ;

ZERLINA

J’ai

Pitié de Masetto.

DON GIOVANNI

Je changerai

Ton destin ;

ZERLINA

Vite

77

PREMIER ACTE SCÈNE IX

Non son più forte, non son più forte,

Non son più forte;

DON GIOVANNI

Andiam, andiam!...

ZERLINA

Andiam!...

DON GIOVANNI E ZERLINA

Andiam, andiam, mio bene,

A ristorar le pene d’un innocente amor.

Andiam, andiam, mio bene,

A ristorar le pene d’un innocente amor.

DON GIOVANNI

Andiam!

ZERLINA

Andiam! Andiam!

DON GIOVANNI

Andiam!

DON GIOVANNI E ZERLINA

Andiam, mio bene, andiam

Le pene a ristorar d’un innocente amor.

(Vanno verso il casino di Don Giovanni, abbracciati, etc.)

SCENA X

DONNA ELVIRA

Fermati, scellerato: il ciel mi fece udir le tue perfidie; io

sono a tempo di salvar questa misera innocente dal tuo

barbaro artiglio.

MOZART DON GIOVANNI

78

Je n’ai plus la force, je n’ai plus la force,

Je n’ai plus la force ;

DON GIOVANNI

Allons, allons !...

ZERLINA

Allons !...

DON GIOVANNI & ZERLINA

Allons, allons, mon amour,

Apaiser les peines d’un innocent amour.

Allons, allons, mon amour,

Apaiser les peines d’un innocent amour.

DON GIOVANNI

Allons !

ZERLINA

Allons ! Allons !

DON GIOVANNI

Allons !

DON GIOVANNI & ZERLINA

Allons, mon amour, allons,

Apaiser les peines d’un innocent amour.

(Ils se dirigent vers le pavillon de Don Giovanni, enlacés, etc.)

SCÈNE X

DONNA ELVIRA

Arrête scélérat : le ciel m’a fait entendre tes perfidies :

j’arrive à temps pour sauver cette pauvre innocente de ta

griffe barbare.

79

PREMIER ACTE SCÈNE X

ZERLINA

Meschina, cosa sento!

DON GIOVANNI (da parte)

Amor, consiglio!

(A Donna Elvira piano)

Idol mio, non vedete, ch’io voglio divertirmi...

DONNA ELVIRA

Divertiti? è vero! divertiti! Io so, crudele, come tu ti diverti...

ZERLINA

Ma signor Cavaliere... è ver quel ch’ella dice?

DON GIOVANNI (piano a Zerlina)

La povera infelice è di me innamorata, e per pietà deggio

fingere amore; ch’io son per mia disgrazia uom di buon core.

No 8. Aria

DONNA ELVIRA

Ah fuggi il traditor, non lo lasciar più dir:

Il labbro è mentitor, fallace il ciglio.

Da’ miei tormenti impara a creder a quel cor,

E nasca il tuo timor dal mio periglio.

Ah fuggi, fuggi, ah fuggi il traditor,

Non lo lasciar più dir: il labbro è mentitor,

Fallace il ciglio, il labbro è mentitor,

Fallace il ciglio, fallace il ciglio.

(Parte conducendo seco Zerlina.)

MOZART DON GIOVANNI

80

ZERLINA

Malheureuse, qu’entends-je !

DON GIOVANNI (à part)

Amour aide-moi !

(À Donna Elvira, à voix basse)

Mon amour, vous ne voyez pas que je veux me divertir...

DONNA ELVIRA

Te divertir ? vraiment ! te divertir ! Cruel, je sais comment

tu te divertis...

ZERLINA

Mais seigneur Chevalier... c’est vrai ce qu’elle dit ?

DON GIOVANNI (à voix basse à Zerlina)

La pauvre malheureuse m’aime, et je dois faire semblant

de l’aimer, par pitié ; car pour mon malheur, j’ai bon cœur.

No 8. Air

DONNA ELVIRA

Ah, fuis ce traître, ne le laisse plus parler :

Ses lèvres sont menteuses, ses yeux sont faux.

De mes tourments apprends à croire ce cœur,

Et que ta crainte naisse des périls où je suis.

Ah fuis, fuis, ah fuis ce traître,

Ne le laisse plus parler, ses lèvres sont menteuses,

Ses yeux sont faux, ses lèvres sont menteuses,

Ses yeux sont faux, ses yeux sont faux.

(Elle sort, emmenant Zerlina.)

81

PREMIER ACTE SCÈNE X

SCENA XI

Recitativo

DON GIOVANNI

Mi par ch’oggi il demonio si diverta d’opporsi a’ miei pia-

cevoli progressi; vanno mal tutti quanti.

DON OTTAVIO

Ah ch’ora, idolo mio, son vani i pianti! Di vendetta si

parli... Ah Don Giovanni!

DON GIOVANNI (a parte)

Mancava questo inver!

DONNA ANNA

Signore, a tempo vi ritroviam: avete core, avete anima

generosa?

DON GIOVANNI (a parte)

Sta’ a vedere che il diavolo gli ha detto qualche cosa.

(A Donna Anna)

Che domanda! perchè?

DONNA ANNA

Bisogno abbiamo della vostra amicizia.

DON GIOVANNI (a parte)

Mi torna il fiato in corpo.

(A Donna Anna)

Comandate: i congiunti, i parenti, questa man, questo ferro

i beni, il sangue spenderò per servivi: ma voi, bella

Donn’Anna, perché così piangete? II crudele chi fu, che

osò la calma turbar del viver vostro...

MOZART DON GIOVANNI

82

SCÈNE XI

Récitatif

DON GIOVANNI

Il me semble qu’aujourd’hui, le diable se divertit à contra-

rier mes plaisirs ; tout tourne mal.

DON OTTAVIO

Ah, à présent, mon amour, les pleurs sont inutiles ! Parlons

de vengeance... Ah, Don Giovanni !

DON GIOVANNI (à part)

Vraiment, il ne manquait que cela !

DONNA ANNA

Seigneur, nous vous retrouvons au bon moment : avez-vous

du courage, une âme généreuse ?

DON GIOVANNI (à part)

Vous allez voir que le diable lui a dit quelque chose.

(À Donna Anna)

Quelle question ! pourquoi ?

DONNA ANNA

Nous avons besoin de votre amitié.

DON GIOVANNI (à part)

Je respire.

(À Donna Anna)

Ordonnez : amis, parents, ma main, mon épée, mes biens,

mon sang, je les mets à votre service : mais, belle Donna

Anna, pourquoi pleurez-vous ainsi ? Qui est le cruel qui a

osé troubler votre sérénité...

83

PREMIER ACTE SCÈNE XI

SCENA XII

DONNA ELVIRA

Ah ti ritrovo ancor, perfido mostro!

No 9. Quartetto

DONNA ELVIRA

Non ti fidar, o misera, di quel ribaldo cor!

Me già tradì quel barbaro: te vuol tradire ancor.

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Cieli! che aspetto nobile! che dolce maestà!

II suo pallor, le lagrime m’empiono di pietà,

M’empiono di pietà.

DON GIOVANNI (a parte, Donna Elvira ascolta)

La povera ragazza è pazza, amici miei, è pazza amici miei;

Lasciatemi con lei, forse si calmerà, forse si calmerà.

DONNA ELVIRA

Ah non credete al perfido!

DON GIOVANNI

È pazza, non badate,

DONNA ELVIRA

Restate ancor, restate!

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

A chi si crederà!

DON GIOVANNI

È pazza.

MOZART DON GIOVANNI

84

SCÈNE XII

DONNA ELVIRA

Ah, je te retrouve encore, monstre perfide !

No 9. Quatuor

DONNA ELVIRA

Ne te fie pas, ô malheureuse, à ce cœur scélérat !

Ce barbare m’a déjà trahie : il te trahira aussi.

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Ciel ! quel noble aspect ! quelle douce grandeur !

Sa pâleur, ses larmes m’emplissent de pitié,

M’emplissent de pitié.

DON GIOVANNI (à part, Donna Elvira écoutant)

La pauvre fille est folle, mes amis, folle, mes amis ;

Laissez-moi avec elle, elle se calmera peut-être.

DONNA ELVIRA

Ah ne croyez pas ce perfide !

DON GIOVANNI

Ne faites pas attention, elle est folle,

DONNA ELVIRA

Restez encore, restez !

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Qui croire ?

DON GIOVANNI

Elle est folle.

85

PREMIER ACTE SCÈNE XII

DONNA ANNA E DON OTTAVIO,

A chi se crederà!

DONNA ELVIRA

Restate!

DONNA ANNA E DON OTTAVIO,

A chi se crederà, si

Crederà!

DONNA ELVIRA

Ah non

Credete al perfido, restate!

DONNA ANNA, DON OTTAVIO E DON GIOVANNI

Certo moto d’ignoto tormento,

DONNA ELVIRA

Sdegno, rabbia, dispetto, tormento,

DONNA ANNA, DON OTTAVIO E DON GIOVANNI

Dentro l’alma girare mi sento,

DONNA ELVIRA

Dentro l’alma girare mi sento,

DONNA ANNA

Che mi dice,

Per quell’infelice, cento cose

Che intender, che intender non sa, no, no,

DONNA ELVIRA

Che mi dice, di quel traditore,

Cento cose che intender non sa, no, che mi dice...

MOZART DON GIOVANNI

86

DONNA ANNA & DON OTTAVIO,

Qui croire ?

DONNA ELVIRA

Restez !

DONNA ANNA & DON OTTAVIO,

Qui croire, qui

Croire ?

DONNA ELVIRA

Ah ne

Croyez pas le perfide, restez !

DONNA ANNA, DON OTTAVIO & DON GIOVANNI

L’émotion d’un tourment ignoré,

DONNA ELVIRA

Indignation, rage, dépit, tourment,

DONNA ANNA, DON OTTAVIO & DON GIOVANNI

Je la sens tournoyer en mon âme

DONNA ELVIRA

Je les sens tournoyer en mon âme,

DONNA ANNA

Qui me dit,

Mille choses de cette malheureuse

Que je ne peux comprendre, non, non,

DONNA ELVIRA

Qui me dit, de ce traître,

Mille choses que je ne peux comprendre, qui me dit...

87

PREMIER ACTE SCÈNE XII

DON OTTAVIO E DON GIOVANNI

Che mi dice per quell’infelice

Cento cose che intender non sa, no, no,

DONNA ELVIRA

... Di quel traditore,

Di quel traditore cento cose che intender non sa,

DON GIOVANNI

Cento cose che intender non sa

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Che intender non sa,

DONNA ELVIRA

Che mi dice, mi dice di

Quel traditore

Cento cose che intender non sa.

DON GIOVANNI

Cento cose che intender non sa.

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Che intender non sa.

DON OTTAVIO (a parte)

Io di qua non vado via, se non scopro questo affar.

DONNA ANNA (a parte)

Non ha l’aria di pazzia iI suo volto il suo parlar.

DON GIOVANNI

Se men vado, si potria qualche cosa sospettar.

DONNA ELVIRA

Da quel ceffo si dovria la ner’alma giudicar.

MOZART DON GIOVANNI

88

DON OTTAVIO & DON GIOVANNI

Qui me dit, de cette malheureuse,

Mille choses que je ne peux comprendre, non, non,

DONNA ELVIRA

... De ce traître,

De ce traître, mille choses que je ne peux comprendre,

DON GIOVANNI

Mille choses que je ne peux comprendre

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Que je ne peux comprendre,

DONNA ELVIRA

Qui me disent, me disent de

Ce traître,

Mille choses que je ne peux comprendre.

DON GIOVANNI

Mille choses que je ne peux comprendre.

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Que je ne peux comprendre.

DON OTTAVIO (à part)

Je ne partirai pas d’ici sans avoir éclairci cette affaire.

DONNA ANNA (à part)

Son visage, ses paroles, ne sont pas ceux d’une folle.

DON GIOVANNI

Si je pars, on pourrait avoir quelque soupçon.

DONNA ELVIRA

À sa mine, on devrait voir la noirceur de son âme.

89

PREMIER ACTE SCÈNE XII

DON OTTAVIO (a Don Giovanni)

Dunque quella?...

DON GIOVANNI

È pazarella:

DONNA ANNA (a Donna Elvira)

Dunque quegli?

DONNA ELVIRA

È un traditore:

DON GIOVANNI

Infelice!

DONNA ELVIRA

Mentitore! Mentitore! Mentitore!

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Incomincio a dubitar.

DON GIOVANNI (piano a Donna Elvira)

Zitto, zitto, che la gente si raduna a noi d’intorno, siate un

poco più prudente, vi farete criticar.

DONNA ELVIRA (forte, a Don Giovanni)

Non sperarlo, o scellerato, ho perduta la prudenza;

Le tue colpe ed il mio stato voglio a tutti palesar,

Voglio a tutti palesar.

DON GIOVANNI

Zitto, zitto che la gente si raduna a noi d’intorno,

Siate un poco più prudente, vi farete criticar,

Siate un poco più prudente!

Zitto, zitto che la gente si raduna a noi la gente,

Zitto, zitto, zitto,

MOZART DON GIOVANNI

90

DON OTTAVIO (à Don Giovanni)

Cette femme, donc ?...

DON GIOVANNI

Est un peu folle :

DONNA ANNA (à Donna Elvira)

Donc, cet homme ?

DONNA ELVIRA

C’est un traître :

DON GIOVANNI

Malheureuse !

DONNA ELVIRA

Menteur ! Menteur ! Menteur !

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Je commence à douter.

DON GIOVANNI (bas à Donna Elvira)

Chut, chut, car les gens s’attroupent autour de nous, soyez

un peu plus discrète, on va jaser de vous.

DONNA ELVIRA (fort, à Don Giovanni)

Ne l’espère pas, scélérat, j’ai perdu toute prudence ;

À tous je vais révéler tes mauvais coups et mon état,

Je vais les révéler à tous.

DON GIOVANNI

Chut, chut, car les gens s’attroupent autour de nous,

Soyez un peu plus discrète, on va jaser de vous,

Soyez un peu plus discrète !

Chut, car les gens s’attroupent autour de nous

Chut, chut, chut,

91

PREMIER ACTE SCÈNE XII

Siate un poco più prudente,

Vi farete criticar, vi farete criticar.

DONNA ANNA E DON OTTAVIO (a parte, guardando Don Giovanni)

Quegli accenti sì sommessi,

Quel cangiarsi di colore,

Son indizi troppo espressi,

Che mi fan determinar,

Che mi fan determinar, che mi fan determinar.

DONNA ELVIRA

Non sperarlo, o scellerato, ho perduta la prudenza;

Le tue colpe ed il mio stato voglio a tutti palesar,

Ho perduta la prudenza; non sperarlo,

Ho perduta la prudenza; non sperarlo, o scellerato!

Le tue colpe ed il mio stato voglio a tutti palesar.

(Parte.)

Recitativo

DON GIOVANNI

Povera sventurata! i passi suoi voglio seguir: non voglio

che faccia un precipizio. Perdonate, bellissima Donn’

Anna; se servirvi poss’io, in mia casa v’aspetto: Amici,

addio!

(Parte.)

SCENA XIII

No 10. Recitativo accompagnato ed Aria

DONNA ANNA

Don Ottavio, son morta!

DON OTTAVIO

Cosa è stato?

MOZART DON GIOVANNI

92

Soyez un peu plus discrète,

On va jaser de vous, on va jaser de vous.

DONNA ANNA & DON OTTAVIO (à part, regardant Don Giovanni)

Ces paroles si étouffées

Ce changement de teint,

Sont des indices évidents,

Qui emportent mon jugement,

Qui emportent mon jugement, mon jugement.

DONNA ELVIRA

Ne l’espère pas, scélérat, j’ai perdu toute prudence ;

À tous je vais révéler tes mauvais coups et mon état,

J’ai perdu toute prudence, ne l’espère pas,

J’ai perdu toute prudence ; ne l’espère pas, scélérat !

À tous je vais révéler tes mauvais coups et mon état.

(Elle sort.)

Récitatif

DON GIOVANNI

Pauvre malheureuse ! je vais suivre ses pas : je veux pas

qu’il lui arrive malheur. Pardonnez, très belle Donna

Anna ; si je puis vous servir, je vous attendrai chez moi :

adieu mes amis !

(Il sort.)

SCÈNE XIII

No 10. Récitatif accompagné & Air

DONNA ANNA

Don Ottavio, je suis morte !

DON OTTAVIO

Que se passe-t-il ?

93

PREMIER ACTE SCÈNE XIII

DONNA ANNA

Per pietà, soccorretemi!

DON OTTAVIO

Mio bene... fate coraggio!

DONNA ANNA

Oh Dei! Oh Dei! Quegli è il carnefice del padre mio.

DON OTTAVIO

Che dite...

DONNA ANNA

Non dubitate più: gli ultimi accenti che l’empio proferì

tutta la voce richiamar nel cor mio di quell’indegno che

nel mio appartamento...

DON OTTAVIO

O ciel! possibile che sotto il sacro manto d’amicizia... Ma

come fu, narratemi lo strano avvenimento.

DONNA ANNA

Era già alquanto avanzata la notte, quando nelle mie stan-

ze, ove soletta mi trovai per sventura, entrar io vidi, in un

mantello avvolto un uom che al primo istante avea preso

per voi: ma riconobbi poi che un inganno era il mio:

DON OTTAVIO (con affanno)

Stelle! seguite...

DONNA ANNA

Tacito a me s’appressa, e mi vuole abbracciar: sciogliermi

cerco, ei più mi stringe; io grido: non viene alcun. Con una

mano cerca d’impedire la voce, e coll’altra m’afferra stret-

ta così, che già mi credo vinta.

MOZART DON GIOVANNI

94

DONNA ANNA

Par pitié, secourez-moi !

DON OTTAVIO

Mon amour... du courage !

DONNA ANNA

Oh dieux ! Oh dieux ! C’est lui le bourreau de mon père.

DON OTTAVIO

Que dites-vous...

DONNA ANNA

Ne doutez plus : les dernières paroles de l’impie ont rap-

pelé à mon cœur la voix de ce misérable qui, dans mes

appartements...

DON OTTAVIO

Ô ciel ! est-il possible, sous le voile sacré de l’amitié ?

Que s’est-il passé, racontez-moi l’étrange affaire.

DONNA ANNA

La nuit était déjà avancée, quand dans ma chambre, où

par malheur je me trouvai seule, je vis entrer, enveloppé

dans une cape, un homme qu’au premier abord j’ai pris

pour vous : mais j’ai reconnu ensuite que je me trompais :

DON OTTAVIO (avec angoisse)

Ciel ! poursuivez...

DONNA ANNA

Silencieux il s’approche de moi et veut m’ e m b r a s s e r : je

cherche à m’ é c h a p p e r, il me serre davantage ; je crie : per-

sonne ne vient. D’une main, il cherche à étouffer ma voix et

de l’autre, il me tient si serrée que déjà je me crois perdue.

95

PREMIER ACTE SCÈNE XIII

DON OTTAVIO

Perfido! e alfin?

DONNA ANNA

Alfine il duol, l’orrore dell’infame attentato accrebbe sì la

lena mia, che a forza di svincolarmi, torcermi e piegarmi,

da lui mi sciolsi.

DON OTTAVIO

Ohimè, respiro!

DONNA ANNA

Allora rinforzo i stridi miei, chiamo soccorso, fugge il fel-

lon, arditamente il seguo fin nella strada per fermarlo, e

sono assalitrice d’assalita. Il padre v’accorre, vuol conos-

cerlo, e l’iniquo, che del povero vecchio era più forte, com-

pie il misfatto suo, compie il misfatto suo col dargli morte.

Aria

Or sai chi l’onore rapire a me volse,

Chi fu il traditore che il padre,

Che il padre mi tolse;

Vendetta ti chiedo,

La chiede il tuo cor, la chiede il tuo cor.

Rammenta la piaga del misero seno,

Rimira di sangue

Coperto, coperto il terreno,

Se l’ira in te langue d’un giusto furor,

D’un giusto furor.

Or sai chi l’onore rapire a me volse,

Chi fu il traditore che il padre,

Che il padre mi tolse;

Vendetta ti chiedo,

La chiede il tuo cor, la chiede il tuo cor.

Rammenta la piaga, rimira di sangue...

Vendetta ti chiedo,

MOZART DON GIOVANNI

96

DON OTTAVIO

Perfide ! et après?

DONNA ANNA

Après, la douleur, l’horreur de l’ignoble attentat accroît si

bien mon ardeur qu’à force de me débattre, de me tordre

et de me courber, je lui échappe.

DON OTTAVIO

Ah, je respire !

DONNA ANNA

Alors, je crie plus fort, j’appelle au secours, le traître fuit,

pour l’arrêter, je le poursuis hardiment dans la rue, je

donne l’assaut à l’assaillant. Le père accourt, veut le

démasquer et le cruel, plus fort que le pauvre vieillard,

accomplit son forfait en lui donnant la mort.

Air

Tu sais maintenant qui a voulu prendre mon honneur,

Qui fut le traître qui

Qui m’a enlevé mon père ;

Je te demande vengeance,

Ton cœur l’exige, ton cœur l’exige.

Souviens-toi de la blessure de cette pauvre poitrine,

Revois, le sang

Recouvrant, recouvrant le sol,

Si faiblit en toi la colère d’une juste fureur,

D’une juste fureur.

Tu sais maintenant qui a voulu prendre mon honneur,

Qui fut le traître qui

Qui m’a enlevé mon père ;

Je te demande vengeance,

Ton cœur l’exige, ton cœur l’exige.

Souviens-toi de la blessure, revois le sang...

Je te demande vengeance,

97

PREMIER ACTE SCÈNE XIII

La chiede il tuo cor, la chiede il tuo cor,

Vendetta ti chiedo, la chiede il tuo cor,

Vendetta ti chiedo, la chiede il tuo cor,

La chiede il tuo cor, la chiede il tuo cor,

La chiede il tuo cor, la chiede il tuo cor,

Vendetta ti chiedo, la chiede il tuo cor,

Vendetta ti chiedo, la chiede il tuo cor.

(Parte.)

SCENA XIV

Recitativo

DON OTTAVIO

Come mai creder deggio di sì nero delitto capace un cava-

liero! Ah di scoprire il vero ogni mezzo si cerchi; io sento

in petto e di sposo e d’amico il dover che mi parla: disin-

gannarla voglio, o vendicarla.

No 10a. Aria

DON OTTAVIO

Dalla sua pace la mia dipende,

Quel che a lei piace vita mi rende,

Quel che le incresce morte mi dà,

Morte, morte mi dà.

S’ella sospira, sospiro anch’io;

È mia quell’ira, quel pianto è mio;

E non ho bene, s’ella non l’ha,

E non ho bene, s’ella non l’ha,

E non ho bene, s’ella non l’ha.

Dalla sua pace la mia dipende,

Quel che a lei piace vita mi rende,

Quel che le incresce morte mi dà,

Morte, morte mi dà.

MOZART DON GIOVANNI

98

Ton cœur l’exige, ton cœur l’exige.

Je te demande vengeance, ton cœur l’exige.

Je te demande vengeance, ton cœur l’exige.

Ton cœur l’exige, ton cœur l’exige.

Ton cœur l’exige, ton cœur l’exige.

Je te demande vengeance, ton cœur l’exige.

Je te demande vengeance, ton cœur l’exige.

(Elle sort.)

SCÈNE XIV

Récitatif

DON OTTAVIO

Pourrais-je jamais croire un chevalier capable d’un crime

si noir ! Cherchons tous les moyens de dévoiler la vérité ;

j’entends parler en moi le devoir de l’époux, de l’ami; je

veux la détromper ou la venger.

No 10a. Air

DON OTTAVIO

De sa sérénité dépend la mienne,

Ce qu’elle aime me rend la vie,

Ce qui lui fait mal me fait mourir,

Mourir, me fait mourir.

Quand elle soupire, je soupire aussi

Sa colère est la mienne, ses pleurs les miens ;

Et je ne suis pas heureux, si elle ne l’est pas,

Et je ne suis pas heureux, si elle ne l’est pas,

Et je ne suis pas heureux, si elle ne l’est pas.

De sa sérénité dépend la mienne,

Ce qu’elle aime me rend la vie,

Ce qui lui fait mal me fait mourir,

Mourir, me fait mourir.

99

PREMIER ACTE SCÈNE XIV

Dalla sua pace la mia dipende,

Quel che a lei piace vita mi rende,

Quel che le incresce morte mi dà,

Morte, morte mi dà, morte mi dà

Quel che le incresce morte mi dà.

(Parte.)

SCENA XV

LEPORELLO

Io deggio ad ogni patto per sempre abbandonar questo bel

matto! Eccolo qui: guardate con qual indifferenza se ne

viene!

DON GIOVANNI

Oh Leporello mio, va tutto bene!

LEPORELLO

Don Giovannino mio, va tutto male!

DON GIOVANNI

Come va tutto male?

LEPORELLO

Vado a casa, come voi l’ordinaste, con tutta quella gente...

DON GIOVANNI

Bravo!

LEPORELLO

A forza di chiacchiere, di vezzi e di bugie, ch’ho imparato

sì bene a star con voi, cerco d’intrattenerli...

DON GIOVANNI

Bravo!

MOZART DON GIOVANNI

100

De sa sérénité dépend la mienne,

Ce qu’elle aime me rend la vie,

Ce qui lui fait mal me fait mourir,

Mourir, me fait mourir, me fait mourir,

Ce qui lui fait mal me fait mourir.

(Il sort.)

SCÈNE XV

LEPORELLO

À tout prix, il me faut abandonner ce fou ! Le voici : voyez

avec quelle désinvolture il arrive !

DON GIOVANNI

Oh mon Leporello, tout va bien !

LEPORELLO

Mon Don Giovannino, tout va mal !

DON GIOVANNI

Comment tout va mal ?

LEPORELLO

Je suis allé à la maison, comme vous l’avez ordonné, avec

tous ces gens...

DON GIOVANNI

Bravo !

LEPORELLO

À force de bavardage, de flatteries et de mensonges, appris

auprès de vous, je cherche à les retenir...

DON GIOVANNI

Bravo !

101

PREMIER ACTE SCÈNE XV

LEPORELLO

Dico mille cose a Masetto per placarlo, per trargli dal pen-

sier la gelosia...

DON GIOVANNI

Bravo, bravo in coscienza mia!

LEPORELLO

Faccio che bevano e gli uomini e le donne: son già mezzo

ubbriachi, altri canta, altri scherza, altri seguita a ber; in

sul più bello chi credete che capiti?

DON GIOVANNI

Zerlina!

LEPORELLO

Bravo! e con lei chi viene?

DON GIOVANNI

Donna Elvira!

LEPORELLO

Bravo! e disse di voi...

DON GIOVANNI

Tutto quel mal che in bocca le venia.

LEPORELLO

Bravo, bravo in coscienza mia!

DON GIOVANNI

E tu cosa facesti?

LEPORELLO

Tacqui.

MOZART DON GIOVANNI

102

LEPORELLO

Je dis mille choses à Masetto, pour lui plaire, pour lui faire

sortir la jalousie de la tête...

DON GIOVANNI

Bravo, bravo, sincèrement !

LEPORELLO

J’incite les hommes et les femmes à boire : ils sont déjà à

moitié saouls, il y en a qui chantent, d’autres rigolent,

d’autres continuent à boire ; au meilleur moment, qui

croyez-vous qui arrive ?

DON GIOVANNI

Zerlina !

LEPORELLO

Bravo ! et avec qui ?

DON GIOVANNI

Donna Elvira !

LEPORELLO

Bravo ! elle a dit de vous...

DON GIOVANNI

Tout le mal qu’elle a pu dire.

LEPORELLO

Bravo, bravo, sincèrement !

DON GIOVANNI

Et toi, qu’as-tu fait ?

LEPORELLO

Je n’ai rien dit.

103

PREMIER ACTE SCÈNE XV

DON GIOVANNI

Ed ella?

LEPORELLO

Seguì a gridar.

DON GIOVANNI

E tu?

LEPORELLO

Quando mi parve che già fosse sfogata, dolcemente fuor

dell’orto la trassi, e con bell’arte chiusa la porta a chiave

io mi cavai, e sulla via soletta la lasciai.

DON GIOVANNI

Bravo, bravo, arcibravo! L’affar non può andar meglio:

incominciasti, io saprò terminar. Troppo mi premono

queste contadinotte: le voglio divertir fin che vien notte.

No 11. Aria

DON GIOVANNI

Fin ch’han dal vino calda la testa,

Una gran festa fa’ preparar.

Se trovi in piazza qualche ragazza,

Teco ancor quella cerca menar,

Teco ancor quella cerca menar,

Cerca menar, cerca menar.

Senza alcun ordine la danza sia,

Chi’l minuetto, chi la follia, chi l’alemanna farai ballar,

Chi’l minuetto farai ballar,

Chi la follia farai ballar,

Chi l’alemanna farai ballar.

Ed io frattanto dall’altro canto

Con questa e quella vo’ amoreggiar.

MOZART DON GIOVANNI

104

DON GIOVANNI

Et elle ?

LEPORELLO

Elle a continué à crier.

DON GIOVANNI

Et toi ?

LEPORELLO

Quand il m’a semblé qu’elle était calmée, je l’ai menée

doucement hors du jardin, et habilement j’ai fermé la porte

à clé, j’ai filé et l’ai laissée seule dans la rue.

DON GIOVANNI

Bravo, bravo, archibravo ! L’affaire ne peut aller mieux: tu

as commencé, je saurai terminer. Ces petites paysannes

me plaisent trop : je veux les amuser jusqu’à la nuit.

No 11. Air

DON GIOVANNI

Tant que le vin échauffe les têtes

Fais préparer une grande fête.

Si sur la place, tu trouves quelque fille,

Avec toi, essaye de la prendre aussi,

Avec toi, essaye de la prendre aussi,

Essaye de la prendre, essaye de la prendre.

Que l’on danse librement,

Tu feras danser qui le menuet, qui la follia, qui l’allemande,

Tu feras danser qui le menuet,

Tu feras danser qui la follia,

Tu feras danser qui l’allemande.

Et moi, d’autre part et entre-temps

Avec telle ou telle, je parlerai d’amour.

105

PREMIER ACTE SCÈNE XV

Vo’ amoreggiar, vo’ amoreggiar.

Ah! la mia lista doman mattina

D’una decina devi aumentar.

Ah! la mia lista d’una decina devi aumentar.

Se trovi in piazza qualche ragazza,

Teco ancor quella cerca menar.

Ah! la mia lista doman mattina

D’una decina devi aumentar.

Senza alcun ordine la danza sia,

Chi’l minuetto, chi la follia, chi l’alemanna farai ballar.

Ah! la mia lista doman mattina

D’una decina devi aumentar,

D’una decina devi aumentar,

D’una decina devi aumentar,

devi aumentar, devi aumentar,

Devi, devi aumentar.

Partono.

SCENA XVI

Giardino con due porte chiuse a chiave per di fuori.

Due nicchie.

Recitativo

ZERLINA

Masetto: senti un po’! Masetto, dico!

MASETTO

Non mi toccar!

ZERLINA

Perché?

MOZART DON GIOVANNI

106

Je parlerai d’amour, je parlerai d’amour.

Ah ! que demain matin ma liste

Augmente d’une dizaine.

Ah ! que ma liste augmente d’une dizaine.

Si sur la place, tu trouves quelque fille,

Avec toi, essaye de la prendre aussi.

Ah ! que demain matin ma liste

Augmente d’une dizaine.

Que l’on danse librement,

Tu feras danser qui le menuet, qui la follia, qui l’allemande.

Ah ! que demain matin ma liste

Augmente d’une dizaine,

Augmente d’une dizaine,

Augmente d’une dizaine,

Augmente, augmente,

Qu’elle augmente, qu’elle augmente.

Ils sortent.

SCÈNE XVI

Jardin avec deux portes fermées à clé de l’extérieur.

Deux niches.

Récitatif

ZERLINA

Masetto, écoute un peu ! Masetto, je te parle !

MASETTO

Ne me touche pas !

ZERLINA

Pourquoi ?

107

PREMIER ACTE SCÈNE XVI

MASETTO

Perché mi chiedi? Perfida! il tatto sopportar dovrei d’una

man infedele?

ZERLINA

Ah no: taci, crudele! io non merto da te tal trattamento.

MASETTO

Come! ed hai l’ardimento di scusarti? Star sola con un

uom: abbandonarmi il dì delle mie nozze! porre in fronte a

un villano d’onore questa marca d’infamia! Ah, se non

fosse, se non fosse lo scandalo! vorrei...

ZERLINA

Ma se colpa io non ho! ma se da lui ingannata rimasi... E

poi che temi? Tranquillati, mia vita: non mi toccò la punta

della dita. Non me lo credi? Ingrato! vien qui, sfogati;

ammazzami, fa tutto di me quel che ti piace; ma poi,

Masetto mio, ma poi fa’ pace.

No 12. Aria

ZERLINA

Batti, batti, o bel Masetto, la tua povera Zerlina:

Starò qui come agnellina le tue botte ad aspettar.

Batti, batti la tua Zerlina: starò qui,

Starò qui le tue botte ad aspettar.

Lascerò straziarmi il crine,

Lascerò cavarmi gli occhi,

E le care tue manine lieta poi saprò baciar,

Saprò baciar, baciar, saprò, saprò baciar.

Batti, batti, o bel Masetto, la tua povera Zerlina:

Starò qui come agnellina le tue botte ad aspettar.

O bel Masetto, batti, batti, starò qui,

Starò qui le tue botte ad aspettar.

Ah lo vedo, non hai core,

MOZART DON GIOVANNI

108

MASETTO

Tu me demandes pourquoi ? Perfide ! je devrais supporter

qu’une main infidèle me touche ?

ZERLINA

Ah non: tais-toi, cruel ! je ne mérite pas un tel traitement.

MASETTO

Comment ! tu as l’audace de te disculper ? Rester seule

avec un homme : me laisser le jour de mes noces ! porter

au front d’un honorable paysan cette marque d’infamie !

Ah, si n’était, si n’était le scandale ! tu verrais...

ZERLINA

Mais si je n’ai pas fauté ! si c’est lui qui m’avait trompée...

Et puis de quoi as-tu peur ? Calme-toi mon amour : il ne

m’a touché le bout du doigt. Tu ne me crois pas ? Ingrat !

viens ici, lâche-toi, tue-moi, fais de moi ce que tu veux ;

mais après, mon Masetto, mais après fais la paix.

No 12. Air

ZERLINA

Bats-la, bats-la, ô beau Masetto, ta pauvre Zerlina :

Je resterai là, comme un agneau, attendant tes coups.

Bats-la, bats-la ta Zerlina : je resterai là

Je resterai là, attendant tes coups.

Je me laisserai déchirer les cheveux,

Je me laisserai arracher les yeux,

Et tes chères mains, heureuse, je saurai les baiser,

Je saurai les baiser, je saurai les baiser.

Bats-la, bats-la, ô beau Masetto, ta pauvre Zerlina :

Je resterai là, comme un agneau, attendant tes coups.

Ô beau Masetto, bats-la, bats-la, je resterai là

Je resterai là, attendant tes coups.

Ah, je le vois, tu n’en as pas le cœur,

109

PREMIER ACTE SCÈNE XVI

Ah non hai core, ah lo vedo, non hai core:

Pace, pace, o vita mia, pace, pace, o vita mia;

In contenti ed allegria notte e dì vogliam passar,

Notte e dì vogliam passar, notte e dì vogliam passar,

Notte e dì vogliam passar.

Pace, pace, o vita mia, pace, pace, o vita mia;

In contenti, in allegria notte e dì vogliam passar,

Sì, sì, sì, sì, sì, sì, notte e dì vogliam passar,

Sì, sì, sì, sì, sì, sì, notte e dì vogliam passar,

Vogliam passar, vogliam passar.

(Parte)

Recitativo

MASETTO

Guarda un po’ come seppe questa strega sedurmi! siamo

pure i deboli di testa!

DON GIOVANNI (di dentro)

Sia preparato tutto a una gran festa!

ZERLINA (rientrando)

Ah Masetto, Masetto! odi la voce del monsù cavaliero!

MASETTO

Ebben che c’è?

ZERLINA

Verrà!

MASETTO

Lascia che venga.

ZERLINA

Ah se vi fosse un buco da fuggir!

MOZART DON GIOVANNI

110

Ah tu n’as pas le cœur, je le vois :

Paix, paix, ô mon amour paix, ô mon amour ;

Dans le bonheur et la joie, passons nos nuits et nos jours,

Passons nos nuits et nos jours, nos nuits et nos jours,

Passons nos nuits et nos jours.

Paix, paix, ô mon amour, paix, ô mon amour ;

Dans le bonheur et la joie, passons nos nuits et nos jours,

Oui, oui, oui, oui, passons nos nuits et nos jours,

Oui, oui, oui, oui, passons nos nuits et nos jours,

Passons, passons.

(Elle sort.)

Récitatif

MASETTO

Voyez un peu comme cette sorcière a su me séduire ! nous

sommes vraiment pauvres d’esprit !

DON GIOVANNI (de l’intérieur)

Que tout soit préparé pour une grande fête !

ZERLINA (rentrant)

Ah Masetto ! écoute, la voix de monsieur le chevalier !

MASETTO

Eh bien, et alors ?

ZERLINA

Il va venir !

MASETTO

Laisse-le venir.

ZERLINA

Ah, s’il y avait un petit trou pour fuir !

111

PREMIER ACTE SCÈNE XVI

MASETTO

Di cosa temi? Perché diventi pallida? Ah, capisco, capis-

co, bricconcella! Hai timor ch’io comprenda com’è tra voi,

passata la faccenda.

No 13. Finale

MASETTO

Presto presto pria ch’ei venga,

Por mi vo’ da qualche lato:

C’è una nicchia... qui celato cheto cheto mi vo’ star.

ZERLINA

Senti senti... dove vai! Ah, non t’asconder, o Masetto,

Se ti trova, poveretto, tu non sai quel che può far, poveretto!

Tu non sai quel che può far.

MASETTO

Faccia, dica quel che vuole!

ZERLINA

Ah non giovan le parole!

MASETTO

Parla forte, e qui t’arresta!

ZERLINA

Che capriccio ha nella testa!

Che capriccio ha nella testa!

MASETTO

Parla forte, e qui t’arresta!

MASETTO

Capirò...

MOZART DON GIOVANNI

112

MASETTO

De quoi as-tu peur ? Pourquoi pâlis-tu? Ah, je comprends,

je comprends, coquine ! Tu crains que je comprenne com-

ment la chose s’est passée entre vous.

No 13. Finale

MASETTO

Vite, vite, avant qu’il vienne,

Je vais me mettre dans un coin :

Voici une niche... caché là, je vais rester silencieux.

ZERLINA

Écoute, écoute, où vas-tu ! Ah ne te cache pas, Masetto,

S’il te trouve, mon pauvre, tu ne sais pas de quoi il est

capable,

Tu ne sais pas de quoi il est capable.

MASETTO

Qu’il fasse et dise ce qu’il veut !

ZERLINA

Ah les mots sont inutiles !

MASETTO

Parle haut et reste là !

ZERLINA

Quel caprice a-t-il en tête ?

Quel caprice a-t-il en tête ?

MASETTO

Parle haut et reste là !

MASETTO

Je saurai...

113

PREMIER ACTE SCÈNE XVI

ZERLINA

Quell’ingrato,

MASETTO

Se m’è fedele,

ZERLINA

Quel crudele...

MASETTO

E in qual modo...

ZERLINA

Oggi vuol...

MASETTO

Andò l’affar.

ZERLINA

Precipitar.

MASETTO

Capirò

Se m’è fedele,

ZERLINA

Quell’ingrato,

Quel crudele oggi vuol

Precipitar.

MASETTO

Se m’è fedele, e in qual

Modo andò l’affar,

ZERLINA

Quell’ingrato, quel crudele...

MOZART DON GIOVANNI

114

ZERLINA

Quel ingrat,

MASETTO

Si elle m’est fidèle,

ZERLINA

Quel cruel...

MASETTO

Et comment...

ZERLINA

Il veut aujourd’hui...

MASETTO

S’est passée la chose.

ZERLINA

Se perdre.

MASETTO

Je saurai

Si elle m’est fidèle,

ZERLINA

Quel ingrat,

Quel cruel, il veut aujourd’hui

Se perdre.

MASETTO

Si elle m’est fidèle, et comment

S’est passée la chose,

ZERLINA

Quel ingrat, quel cruel...

115

PREMIER ACTE SCÈNE XVI

MASETTO

In qual

Modo andò l’affar.

(Entra nella nicchia.)

ZERLINA

Oggi vuol precipitar.

SCENA XVII

DON GIOVANNI

Sù svegliatevi, da bravi,

Sù coraggio, o buona gente!

Vogliam stare allegramente,

Vogliam rider e scherzar.

(Ai servi)

Alla stanza della danza

Conducete tutti quanti,

Ed a tutti in abbondanza

Gran rinfreschi fate dar,

Gran rinfreschi fate dar.

CORO DI SERVI

Sù svegliatevi, da bravi,

Sù coraggio, o buona gente!

Vogliam stare allegramente,

Vogliam rider e scherzar,

Vogliam stare allegramente,

Vogliam rider e scherzar,

(Partendo)

Vogliam rider e scherzar,

Vogliam rider e scherzar,

(Entrano.)

Vogliam rider e scherzar.

MOZART DON GIOVANNI

116

MASETTO

Comment

S’est passée la chose.

(Il entre dans la niche.)

ZERLINA

Il veut se perdre aujourd’hui.

SCÈNE XVII

DON GIOVANNI

Allons réveillez-vous, les braves,

Allons du cœur, bonnes gens !

Nous voulons être joyeux,

Nous voulons rire, nous amuser.

(Aux serviteurs)

À la salle du bal

Conduisez-les tous,

Et à tous, à profusion,

Faites offrir les boissons,

Faites offrir les boissons.

CHŒUR DES SERVITEURS

Allons réveillez-vous, les braves,

Allons du cœur, bonnes gens !

Nous voulons être joyeux,

Nous voulons rire, nous amuser,

Nous voulons être joyeux,

Nous voulons rire, nous amuser,

(En sortant)

Nous voulons rire, nous amuser,

Nous voulons rire, nous amuser,

(Ils passent à l’intérieur.)

Nous voulons rire, nous amuser.

117

PREMIER ACTE SCÈNE XVII

SCENA XVIII

ZERLINA (vuol nascondersi)

Tra quest’arbori celata si può dar che non mi veda.

DON GIOVANNI

Zerlinetta mia garbata,

(La prende.) T’ho già visto, t’ho già visto, non scappar!

ZERLINA

Ah lasciatemi andar via...

DON GIOVANNI

No no, resta, gioia mia!

ZERLINA

Se pietade avete in core...

DON GIOVANNI

Sì, ben mio, son tutto amore. Vieni un poco in questo loco,

fortunata io ti vo’ far.

ZERLINA

Ah...

S’ei vede il sposo mio,

So ben io quel che può far,

DON GIOVANNI

Vieni un poco in questo loco,

Fortunata io ti vo’ far,

ZERLINA

So ben io, so ben

Io, so quel che può far,

MOZART DON GIOVANNI

118

SCÈNE XVIII

ZERLINA (voulant se cacher)

Il ne me verra peut-être pas, cachée parmi ces arbres.

DON GIOVANNI

Zerlinetta, ma charmante,

(Il la saisit.) Je t’ai vue, je t’ai vue, ne t’échappe pas !

ZERLINA

Ah, laissez-moi m’en aller...

DON GIOVANNI

Non non, reste, ma joie !

ZERLINA

Si votre cœur a pitié...

DON GIOVANNI

Oui, ma chérie, je suis tout amour. Viens un peu dans ce

coin, je veux faire ton bonheur.

ZERLINA

Ah...

Si mon époux le voit,

Je sais bien de quoi il est capable,

DON GIOVANNI

Viens un peu dans ce coin,

Je veux faire ton bonheur.

ZERLINA

Je sais bien, je sais bien

De quoi il est capable,

119

PREMIER ACTE SCÈNE XVIII

DON GIOVANNI

Fortunata io ti vo’ far,

ZERLINA

So ben io, so ben

Io, so quel che può far!

DON GIOVANNI

Fortunata io ti vo’ far!

DON GIOVANNI (nell’aprire la nicchia e vedendo Masetto,

fa un moto di stupore)

Masetto!

MASETTO

Sì Masetto.

DON GIOVANNI (un poco confuso)

È chiuso là, perchè?

La bella tua Zerlina non può, la poverina,

(Riprende ardir.)

Più star senza di te, non può più star senza di te.

MASETTO (un poco ironico)

Capisco, sì, signore.

DON GIOVANNI (a Zerlina)

Adesso fate core, fate core:

(Si sente il preludio della danza.)

I suonatori udite; venite omai con me.

ZERLINA

Sì, sì, facciamo core,

ZERLINA E MASETTO

Sì, sì, facciamo core,

MOZART DON GIOVANNI

120

DON GIOVANNI

Je veux faire ton bonheur,

ZERLINA

Je sais bien, je sais bien,

Je sais de quoi il est capable !

DON GIOVANNI

Je veux faire ton bonheur !

DON GIOVANNI (ouvrant la niche et voyant Masetto,

a un mouvement de stupeur)

Masetto !

MASETTO

Oui, Masetto.

DON GIOVANNI (un peu troublé)

Enfermé là, pourquoi ?

Ta belle Zerline ne peut plus, la pauvre

(Il reprend de l’assurance.)

Demeurer sans toi, elle ne peut demeurer sans toi.

MASETTO (un peu ironique)

Je comprends, oui, seigneur.

DON GIOVANNI (à Zerlina)

Maintenant haut les cœurs, haut les cœurs :

(On entend le prélude de la danse.)

Écoutez les musiciens ; venez donc avec moi.

ZERLINA

Oui, oui, haut les cœurs,

ZERLINA & MASETTO

Oui, oui, haut les cœurs,

121

PREMIER ACTE SCÈNE XVIII

Ed a ballar cogli altri

Andiamo tutti tre,

Andiamo, andiamo tutti tre,

Andiamo, andiamo tutti tre,

Andiamo tutti tre,

Andiamo tutti tre.

DON GIOVANNI

Venite omai,

Venite omai con me,

Venite, venite omai con me,

Venite, venite omai con me,

Venite omai con me,

Venite omai con me.

Partono.

SCENA XIX

DONNA ELVIRA

Bisogna aver coraggio, o cari amici miei,

E i suoi misfatti rei scoprir,

Scoprir potremo allor.

DON OTTAVIO

L’amica dice bene: coraggio aver conviene;

Discaccia, o vita mia, l’affanno ed il timor.

DONNA ANNA

Il passo è periglioso,

Può nascer qualche imbroglio:

Temo pel caro sposo, pel caro sposo,

E per noi temo ancor,

Temo pel caro sposo, pel caro sposo,

E per noi temo ancor.

MOZART DON GIOVANNI

122

Et pour danser avec les autres,

Allons-y tous les trois,

Allons-y, allons-y tous les trois,

Allons-y, allons-y tous les trois,

Allons-y tous les trois,

Allons-y tous les trois.

DON GIOVANNI

Venez donc,

Venez donc avec moi,

Venez, venez donc avec moi,

Venez, venez donc avec moi,

Venez donc avec moi,

Venez donc avec moi.

Ils sortent.

SCÈNE XIX

DONNA ELVIRA

Il nous faut avoir du courage, ô mes chers amis,

Et ses coupables méfaits,

Nous pourrons alors les dévoiler.

DON OTTAVIO

Notre amie a raison : il faut avoir du courage ;

Dissipe, ô mon amour, ton angoisse et ta peur.

DONNA ANNA

La démarche est dangereuse,

Il en peut naître quelque complication :

J’ai peur pour mon cher époux, cher époux,

Et j’ai peur aussi pour nous,

J’ai peur pour mon cher époux, cher époux,

Et j’ai peur aussi pour nous.

123

PREMIER ACTE SCÈNE XIX

Menuetto

LEPORELLO (apre la finestra)

Signor, guardate un poco che maschere galanti!

DON GIOVANNI (alla finestra)

Falle passar avanti, di’ che ci fanno onor.

DONNA ANNA, DON OTTAVIO E DONNA ELVIRA (a parte)

Al volto ed alla voce si scopre il traditore.

LEPORELLO

Zì, zì! signore maschere! zì, zì...

DONNA ANNA E DONNA ELVIRA (a Don Ottavio piano)

Via, rispondete!

LEPORELLO

Zì, zì, signore maschere!

DON OTTAVIO

Cosa chiedete?

LEPORELLO

Al ballo, se vi piace, v’invita il mio signor.

DON OTTAVIO

Grazie di tanto onore; andiam, compagne belle.

LEPORELLO

L’amico anche su quelle prove farà d’amor.

(Entra e chiude.)

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Protegga il giusto cielo

MOZART DON GIOVANNI

124

Menuet

LEPORELLO (ouvre la fenêtre)

Seigneur, voyez un peu ces masques élégants !

DON GIOVANNI (à la fenêtre)

Fais-les entrer, dis-leur qu’ils nous honoreraient.

DONNA ANNA, DON OTTAVIO & DONNA ELVIRA (à part)

Par son visage et sa voix le traître se découvre.

LEPORELLO

Pst, pst ! messieurs les masques ! pst, pst...

DONNA ANNA & DONNA ELVIRA (bas, à Don Ottavio)

Allons, répondez !

LEPORELLO

Pst, pst, messieurs les masques !

DON OTTAVIO

Que désirez-vous ?

LEPORELLO

Au bal, s’il vous plaît, mon maître vous invite.

DON OTTAVIO

Merci de tant d’honneur ; allons, belles compagnes.

LEPORELLO

À elles aussi, l’ami donnera des preuves d’amour.

(Il rentre et ferme la fenêtre.)

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Que le ciel de justice protège

125

PREMIER ACTE SCÈNE XIX

Il zelo del mio cor.

Protegga il giusto cielo il zelo del mio cor,

Il zelo, il zelo del mio cor.

DONNA ELVIRA

Vendichi il giusto cielo

Il mio tradito amor. Vendichi il giusto cielo

Il mio tradito amor, il mio tradito amor.

DONNA ANNA

Protegga

Il giusto cielo il zelo del mio cor.

DON OTTAVIO

Protegga il giusto cielo

Il zelo del mio cor, il zelo,

Il zelo del mio cor.

DONNA ELVIRA

Vendichi il giusto cielo

Il mio tradito amor,

Il mio, il mio tradito amor.

Vendichi, vendichi il giusto

Cielo...

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Protegga

Il giusto cielo...

DONNA ELVIRA

... Il mio tradito, tradito

Amor, tradito amor.

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

... Il zelo del mio cor.

Partono.

MOZART DON GIOVANNI

126

L’ardeur de mon cœur.

Que le ciel de justice protège l’ardeur de mon cœur,

L’ardeur, l’ardeur de mon cœur.

DONNA ELVIRA

Que le ciel de justice venge

Mon amour trahi. Que le ciel de justice venge

Mon amour trahi, mon amour trahi.

DONNA ANNA

Que protège

Le ciel de justice l’ardeur de mon cœur.

DON OTTAVIO

Que protège le ciel de justice

L’ardeur de mon cœur, l’ardeur,

L’ardeur de mon cœur.

DONNA ELVIRA

Que le ciel de justice venge

Mon amour trahi,

Mon, mon amour trahi.

Que venge, que venge le ciel

De justice...

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Que protège

Le ciel de justice...

DONNA ELVIRA

... Mon amour trahi, trahi,

Mon amour trahi.

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

... L’ardeur de mon cœur.

Ils sortent.

127

PREMIER ACTE SCÈNE XIX

SCENA XX

Sala illuminata e preparata per una gran festa da ballo.

Don Giovanni fa seder le ragazze, e Leporello i ragazzi

che saranno in atto d’aver finito un ballo.

DON GIOVANNI

Riposate, vezzose ragazze,

LEPORELLO

Rinfrescatevi, bei giovinotti,

DON GIOVANNI E LEPORELLO

Tornerete a far presto le pazze,

Tornerete a scherzar e ballar, a scherzar e ballar.

DON GIOVANNI

Ehi caffè!

LEPORELLO

Cioccolata!

MASETTO (piano a Zerlina)

Ah Zerlina, giudizio!

DON GIOVANNI

Sorbetti!

LEPORELLO

Confetti!

MASETTO

Ah Zerlina, giudizio!

MOZART DON GIOVANNI

128

SCÈNE XX

Salle illuminée et aménagée pour un grand bal.

Don Giovanni fait asseoir les jeunes filles et Leporello

les jeunes gens qui viennent d’arrêter de danser.

DON GIOVANNI

Reposez-vous, belles jeunes filles,

LEPORELLO

Rafraîchissez-vous, beaux jeunes gens,

DON GIOVANNI & LEPORELLO

Puis vous irez vite refaire les fous,

Vous irez plaisanter et danser, plaisanter et danser.

DON GIOVANNI

Eh café !

LEPORELLO

Chocolat !

MASETTO (bas à Zerlina)

Ah Zerlina, prudence !

DON GIOVANNI

Sorbets !

LEPORELLO

Dragées !

MASETTO

Ah Zerlina, prudence !

129

PREMIER ACTE SCÈNE XX

ZERLINA E MASETTO (a parte)

Troppo dolce comincia la scena, in amaro potria terminar, sì,

In amaro potria terminar.

DON GIOVANNI (fa carezze a Zerlina)

Sei pur vaga, brillante Zerlina!

ZERLINA

Sua bontà!

MASETTO (fremendo)

La briccona fa festa.

LEPORELLO (imita il padrone colle altre ragazze)

Sei pur cara, Giannotta, Sandrina!

MASETTO

Tocca pur, che ti cada la testa.

ZERLINA (a parte)

Quel Masetto mi par stralunato, brutto, brutto si

Fa quest’affar.

DON GIOVANNI E LEPORELLO

Quel Masetto

Mi par

Stralunato,

ZERLINA

Quel Masetto

Mi par stralunato,

MASETTO

Ah briccona

Fa festa.

MOZART DON GIOVANNI

130

ZERLINA & MASETTO (à part)

Trop doucement débute la scène, elle pourrait finir amère-

ment, oui,

Elle pourrait finir amèrement.

DON GIOVANNI (caressant Zerlina)

Tu es gracieuse, éclatante Zerlina !

ZERLINA

C’est trop de bonté !

MASETTO (frémissant)

La crapule est à la fête.

LEPORELLO (imitant son maître avec les autres filles)

Tu es tendre, Jeannette, Sandrine !

MASETTO

Touche donc, et ta tête tombe.

ZERLINA (à part)

Ce Masetto me semble mal luné, bien mal

S’annonce cette affaire.

DON GIOVANNI & LEPORELLO

Ce Masetto

Me semble

Mal luné,

ZERLINA

Ce Masetto

Me semble mal luné,

MASETTO

Ah la crapule

Est à la fête.

131

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DON GIOVANNI E LEPORELLO

Qui bisogna

Cervello

Adoprar.

ZERLINA

Brutto

Brutto, si fa quest’affar.

MASETTO

Tocca pur, che ti cada la testa!

ZERLINA

Quel Masetto mi par stralunato,

Brutto, brutto si fa quest’affar,

Si fa quest’affar.

DON GIOVANNI E LEPORELLO

Quel Masetto mi par stralunato,

Qui bisogna cervello adoprar,

Cervello adoprar.

MASETTO

Tocca

Tocca!

Ah briccona! Ah briccona,

Mi vuoi disperar,

Ah briccona, mi vuoi disperar.

ZERLINA

Quel Masetto mi par stralunato,

Brutto, brutto si fa quest’affar,

Si fa quest’affar,

Brutto, brutto si fa quest’affar.

MOZART DON GIOVANNI

132

DON GIOVANNI & LEPORELLO

À présent il faut

Faire marcher

Son cerveau.

ZERLINA

Bien mal

Bien mal, s’annonce cette affaire.

MASETTO

Touche donc, et ta tête tombe !

ZERLINA

Ce Masetto me semble mal luné,

Bien mal s’annonce cette affaire,

S’annonce cette affaire.

DON GIOVANNI & LEPORELLO

Ce Masetto me semble mal luné,

À présent il faut faire marcher son cerveau,

Faire marcher son cerveau.

MASETTO

Touche

Touche !

Ah crapule ! Ah crapule,

Elle veut faire mon désespoir,

Ah crapule, elle veut faire mon désespoir.

ZERLINA

Ce Masetto me semble mal luné,

Bien mal s’annonce cette affaire,

S’annonce cette affaire,

Bien mal, bien mal s’annonce cette affaire.

133

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DON GIOVANNI E LEPORELLO

Quel Masetto mi par stralunato,

Qui bisogna cervello adoprar,

Cervello adoprar,

Qui bisogna cervello adoprar.

LEPORELLO

Venite pur avanti, vezzose mascherette!

DON GIOVANNI

È aperto a tutti quanti, viva la libertà!

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO

Siam grati a tanti segni di generosità, di generosità.

DON GIOVANNI

È aperto a tutti,

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO

Siam

Grati

DON GIOVANNI

A tutti

Quanti,

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO

A tanti segni di generosità, di generosità.

Don Giovanni

Viva, viva la libertà,

LEPORELLO

Viva la

Liberta

MOZART DON GIOVANNI

134

DON GIOVANNI & LEPORELLO

Ce Masetto me semble mal luné,

À présent il faut faire marcher son cerveau,

Faire marcher son cerveau,

Maintenant, il faut faire marcher son cerveau,

LEPORELLO

Entrez donc, beaux masques !

DON GIOVANNI

C’est ouvert à tous, vive la liberté !

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO

Merci pour tant de témoignages de générosité.

DON GIOVANNI

C’est ouvert à tous,

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO

Nous vous

Remercions

DON GIOVANNI

À

Tous,

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO

De tant de témoignages de générosité.

DON GIOVANNI

Vive, vive la liberté,

LEPORELLO

Vive la

Liberté

135

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO E DON GIOVANNI

Viva la libertà

TUTTI

La libertà,

LEPORELLO

Viva la

Libertà

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO E DON GIOVANNI

Viva la libertà

TUTTI

La libertà, viva, viva la libertà,

Viva, viva la libertà, la libertà, la libertà!

DON GIOVANNI

Ricominciate il suono!

(A Leporello)

Tu accoppia i ballerini.

Menuetto

Don Ottavio balla Menuetto con Donna Anna.

LEPORELLO

Da bravi, via, ballate!

Ballano.

DONNA ELVIRA (a Donna Anna)

Quella è la contadina.

DONNA ANNA

Io moro!

MOZART DON GIOVANNI

136

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO & DON GIOVANNI

Vive la liberté

TOUS

La liberté,

LEPORELLO

Vive la

Liberté

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO & DON GIOVANNI

Vive la liberté

TOUS

La liberté, vive, vive la liberté,

Vive, vive la liberté, la liberté, la liberté !

DON GIOVANNI

Recommencez à jouer !

(À Leporello)

Toi, accouple les danseurs.

Menuet

Don Ottavio danse le menuet avec Donna Anna.

LEPORELLO

Allons vite, à la danse !

Ils dansent.

DONNA ELVIRA (à Donna Anna)

Voici la paysanne.

DONNA ANNA

Je meurs !

137

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DON OTTAVIO (a Donna Anna)

Simulate!

DON GIOVANNI E LEPORELLO

Va bene in verità!

MASETTO (ironicamente)

Va bene, va bene, va bene in verità!

DON GIOVANNI (a Leporello)

A bada tien Masetto.

LEPORELLO (a Masetto)

Non balli, poveretto! Poveretto!

DON GIOVANNI (a Zerlina)

Il tuo compagno io

Sono, Zerlina,

Zerlina, vien pur qua.

(Si mette a ballar con Zerlina una contradanza.)

LEPORELLO

Vien quà, Masetto caro, caro,

Facciam quel ch’altri fa.

MASETTO

No no, ballar non voglio.

LEPORELLO

Eh balla, amico mio!

MASETTO

No!

LEPORELLO

Sì! caro Masetto,

MOZART DON GIOVANNI

138

DON OTTAVIO (à Donna Anna)

Faites semblant !

DON GIOVANNI & LEPORELLO

Tout va bien vraiment !

MASETTO (ironiquement)

Tout va bien, tout va bien vraiment !

DON GIOVANNI (à Leporello)

Aie Masetto à l’œil.

LEPORELLO (à Masetto)

Tu ne danses pas, mon pauvre ! Mon pauvre !

DON GIOVANNI (à Zerlina)

Je suis ton cavalier,

Zerlina,

Zerlina, viens par ici.

(Il commence une contredanse avec Zerlina.)

LEPORELLO

Viens là, cher Masetto, mon cher,

Faisons comme les autres.

MASETTO

Non non, je ne veux pas danser.

LEPORELLO

Eh danse mon ami !

MASETTO

Non !

LEPORELLO

Si ! cher Masetto,

139

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DONNA ANNA (a Donna Elvira)

Resister non poss’io!

LEPORELLO

Balla!

MASETTO

No no, non voglio!

DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO (a Donna Anna)

Fingete...

LEPORELLO

Balla!

DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO

... per pietà!

MASETTO

No non, non voglio!

LEPORELLO (fa ballar per forza Masetto)

Eh balla, amico mio, facciam quel qu’altri fa.

(Balla la Teitsch con Masetto.)

DON GIOVANNI

Vieni con

Me, vita mia;

MASETTO

Lasciami... ah no...

DON GIOVANNI (conducendola via quasi per forza)

Vieni vieni...

MOZART DON GIOVANNI

140

DONNA ANNA (à Donna Elvira)

Je ne puis résister...

LEPORELLO

Danse !

MASETTO

Non non, je ne veux pas!

DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO (à Donna Anna)

Faites semblant...

LEPORELLO

Danse !

DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO

... de grâce !

MASETTO

Non je ne veux pas !

LEPORELLO (force Masetto à danser)

Eh danse, mon ami, faisons comme les autres.

(Il danse une allemande avec Masetto.)

DON GIOVANNI

Viens avec

Moi, mon amour ;

MASETTO

Laisse-moi... ah non...

DON GIOVANNI (l’emmenant presque de force)

Viens viens...

141

PREMIER ACTE SCÈNE XX

MASETTO (si cava delle mani di Leporello e seguita la Zerlina)

Zerlina!

ZERLINA

Oh Numi! son tradita!

LEPORELLO

Qui nasce una ruina.

(Sorte in fretta.)

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO

L’iniquo da se stesso nel laccio se ne và.

ZERLINA (di dentro ad altra voce; strepito di piedi a destra)

Gente aiuto, aiuto gente!

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO

Soccorriamo l’innocente!

Soccorriamo l’innocente!

I suonatori e gli altri partono confusi.

MASETTO (di dentro)

Ah Zerlina! ah Zerlina!

ZERLINA

Scellerato!

Si sente il grido e lo strepito dalla parte opposta.

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO

Ora grida da quel lato, da quel lato!

ZERLINA

Scellerato!

MOZART DON GIOVANNI

142

MASETTO (s’arrache des mains de Leporello et suit Zerlina)

Zerlina !

ZERLINA

Oh Dieux ! je suis trahie !

LEPORELLO

Voilà la catastrophe.

(Il sort en hâte.)

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO

Le méchant se prend à son prend piège.

ZERLINA (de l’intérieur, d’une voix altérée ; piétinements à droite)

Quelqu’un, à l’aide, quelqu’un, à l’aide !

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO

Secourons cette innocente !

Secourons cette innocente !

Les musiciens et les autres sortent dans la confusion.

MASETTO (de l’intérieur)

Ah Zerlina ! ah Zerlina !

ZERLINA

Scélérat !

On entend les cris et les piétinements de l’autre côté.

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO

On crie maintenant de ce côté, de ce côté !

ZERLINA

Scélérat !

143

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO

Ah gittiamo giù la porta, giù la porta!

(Gittano giù la porta.)

ZERLINA

Soccorretemi,

(Esce da un’altra parte.)

Ah soccorretemi, o son morta!

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO E MASETTO

Siam qui noi per tua difesa. Siam qui noi per tua difesa,

per tu difesa, per tua difesa.

Don Giovanni esce con spada in mano. Conduce seco per

un braccio Leporello, e finge di voler ferirlo; ma la spada

non esce dal fodero.

DON GIOVANNO

Ecco il birbo che t’ha offesa: ma da me la pena avrà, la

pena avrà! Mori, iniquo!

LEPORELLO

Ah cosa fate!

DON GIOVANNI

Mori iniquo!

LEPORELLO

Ah cosa fate!

DON GIOVANNI

Mori, dico!

LEPORELLO

Ah cosa fate!

MOZART DON GIOVANNI

144

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO

Ah enfonçons la porte !

(Ils enfoncent la porte.)

ZERLINA

Aidez-moi,

(Elle entre par un autre côté.)

Ah aidez-moi ou je suis morte !

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO & MASETTO

Nous sommes là pour te défendre. Nous sommes là pour te

défendre, te défendre.

Don Giovanni entre, l’épée à la main. Il mène Leporello

par le bras, et feint de vouloir le frapper; mais il ne sort

pas l’épée du fourreau.

DON GIOVANNI

Voici le gredin qui t’a outragée : mais je vais le châtier, le

châtier ! Meurs, infâme !

LEPORELLO

Ah que faites-vous !

DON GIOVANNI

Meurs infâme !

LEPORELLO

Ah que faites-vous !

DON GIOVANNI

Meurs, te dis-je !

LEPORELLO

Ah que faites-vous !

145

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DON OTTAVIO (pistola in mano)

Nol sperate! nol sperate!

(Si cava la maschera.)

L’empio crede con tal

Frode, con tal....

DONNA ELVIRA (si cava la maschera)

L’empio crede con tal...

DON OTTAVIO

... Frode,

DONNA ELVIRA

... Frode,

DONNA ANNA (si cava la maschera)

L’empio

Crede

Con tal frode

Di nasconder l’empietà,

L’empietà.

DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO

Con tal frode

Di nasconder l’empietà,

L’empietà.

DON GIOVANNI

Donna Elvira!

DONNA ELVIRA

Sì malvagio!

DON GIOVANNI

Don Ottavio!

MOZART DON GIOVANNI

146

DON OTTAVIO (un pistolet à la main)

N’y comptez pas ! n’y comptez pas !

(Il enlève son masque.)

L’impie croit, par cette

Ruse, par cette...

DONNA ELVIRA (enlève son masque)

L’impie croit, par cette...

DON OTTAVIO

... Ruse,

DONNA ELVIRA

... Ruse,

DONNA ANNA (enlève son masque)

L’impie

Croit

Par cette ruse

Cacher son crime,

Son crime.

DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO

Par cette ruse

Cacher son crime,

Son crime.

DON GIOVANNI

Donna Elvira !

DONNA ELVIRA

Oui, malfaisant !

DON GIOVANNI

Don Ottavio !

147

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DON OTTAVIO

Sì signore!

DON GIOVANNI (a Donna Anna)

Ah credete!...

DONNA ANNA

Traditore,

Traditore, traditore!

DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO E MASETTO

Traditore, traditore!

ZERLINA

Tutto tutto già

Si sa, tutto tutto già si sa

....

Tutto, tutto, tutto!

MASETTO, DONNA ANNA, DONNA ELVIRA E DON OTTAVIO

Tutto tutto già si sa,

Tutto tutto già si sa

....

Tutto, tutto, tutto!

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Trema, trema, o scellerato!

DON GIOVANNI

È confusa la mia...

LEPORELLO

È confusa la sua...

MOZART DON GIOVANNI

148

DON OTTAVIO

Oui seigneur !

DON GIOVANNI (à Donna Anna)

Ah croyez !...

DONNA ANNA

Traître,

Traître, traître !

DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO & MASETTO

Traître, traître !

ZERLINA

Tout tout on sait

Déjà tout on sait déjà tout, tout,

....

Tout, tout, tout !

MASETTO, DONNA ANNA, DONNA ELVIRA & DON OTTAVIO

Tout tout, on sait déjà tout

Tout tout, on sait déjà tout

....

Tout, tout, tout !

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Tremble, tremble, ô scélérat !

DON GIOVANNI

Quel désordre dans ma...

LEPORELLO

Quel désordre dans sa...

149

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DON GIOVANNI E LEPORELLO

... Testa

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Trema

Trema, o scellerato!

DON GIOVANNI

Non so più quel ch’io...

LEPORELLO

Non sa più quel ch’ei...

DON GIOVANNI

... Mi faccia,

E un’ orribile tempesta

Minacciando, oh Dio, mi va.

LEPORELLO

... Si faccia,

E un’ orribile tempesta

Minacciando, oh Dio, lo va.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Saprà tosto il mondo intero

Il misfatto orrendo e nero la tua

Fiera crudeltà, la tua fiera crudeltà!

DON GIOVANNI

È confusa...

LEPORELLO

È confusa...

MOZART DON GIOVANNI

150

DON GIOVANNI & LEPORELLO

... Tête

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Tremble

Tremble, ô scélérat !

DON GIOVANNI

Je ne sais plus ce qu’il faut...

LEPORELLO

Il ne sait plus ce qu’il faut...

DON GIOVANNI

... Faire

C’est une horrible tempête

Qui me menace oh Dieu.

LEPORELLO

... Faire,

C’est une horrible tempête

Qui le menace oh Dieu.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Bientôt le monde entier saura

L’horrible et sombre crime, ta

Sauvage cruauté, ta sauvage cruauté !

DON GIOVANNI

Quel désordre...

LEPORELLO

Quel désordre...

151

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DON GIOVANNI

... La mia testa,

LEPORELLO

... La sua

Testa,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Trema!

DON GIOVANNI

Non so più

Quel ch’io mi faccia...

LEPORELLO

Non sa più quel ch’ei si...

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Trema!

DON GIOVANNI

E un orribile tempesta minacciando, oh

Dio, mi va.

LEPORELLO

Faccia, e un orribile tempesta minacciando, oh

Dio, lo va.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Trema,

Trema, trema, trema o scellerato!

MOZART DON GIOVANNI

152

DON GIOVANNI

... Dans ma tête,

LEPORELLO

... Dans sa

Tête,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Tremble !

DON GIOVANNI

Je ne sais plus

Ce qu’il faut faire...

LEPORELLO

Il ne sait plus ce qu’il faut...

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Tremble !

DON GIOVANNI

C’est une horrible tempête qui me menace oh

Dieu.

LEPORELLO

Faire, c’est une horrible tempête, oh

Dieu.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Tremble,

Tremble, tremble, tremble ô scélérat !

153

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DON GIOVANNI

È confusa la mia testa, non so più quel ch’io mi

Faccia,

LEPORELLO

È confusa la sua testa, non sa più quel ch’ei si

Faccia,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Odi

Il tuon della vendetta,

DON GIOVANNI

E un orribile tempesta minacciando, oh Dio, mi

Va.

LEPORELLO

E un orribile tempesta minacciando, oh Dio, lo

Va.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Odi

Il tuon della vendetta,

Che ti fischia intorno intorno;

Sul tuo capo in questo giorno

Il suo fulmine cadrà, il suo fulmine cadrà.

DON GIOVANNI

È confusa...

LEPORELLO

È confusa...

MOZART DON GIOVANNI

154

DON GIOVANNI

Quel désordre dans ma tête je ne sais plus ce qu’il faut

Faire

LEPORELLO

Quel désordre dans sa tête il ne sait plus ce qu’il faut

Faire

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Entends

La voix de la vengeance,

DON GIOVANNI

C’est une horrible tempête qui me menace, oh mon

Dieu.

LEPORELLO

C’est une horrible tempête qui le menace, oh mon

Dieu.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Entends

La voix de la vengeance

Qui siffle autour de toi ;

Sur ta tête aujourd’hui même,

Sa foudre frappera, sa foudre frappera.

DON GIOVANNI

Quel désordre...

LEPORELLO

Quel désordre...

155

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DON GIOVANNI

... La mia testa,

LEPORELLO

... La sua

Testa,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Trema!

DON GIOVANNI

Non so più

Quel ch’io mi faccia...

LEPORELLO

Non sa più quel ch’ei si...

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Trema!

DON GIOVANNI

E un orribile tempesta minacciando, oh

Dio, mi va.

LEPORELLO

... Faccia, e un orribile tempesta minacciando, oh

Dio, lo va.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Trema,

Trema, trema, trema o scellerato!

MOZART DON GIOVANNI

156

DON GIOVANNI

... Dans ma tête,

LEPORELLO

... Dans sa

Tête,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Tremble !

DON GIOVANNI

Je ne sais plus

Ce qu’il faut faire...

LEPORELLO

Il ne sait plus ce qu’il faut...

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Tremble !

DON GIOVANNI

C’est une horrible tempête qui me menace, oh

Dieu.

LEPORELLO

... Faire, c’est une horrible tempête qui le menace, oh

Dieu.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Tremble,

Tremble, tremble, tremble, ô scélérat !

157

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DON GIOVANNI

È confusa la mia testa, non so più quel ch’io mi

Faccia,

LEPORELLO

È confusa la sua testa, non sa più quel ch’ei si

Faccia,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Odi

Il tuon della vendetta,

DON GIOVANNI

E un orribile tempesta minacciando, oh Dio, mi

Va.

LEPORELLO

E un orribile tempesta minacciando, oh Dio, lo

Va.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Odi

Il tuon della vendetta,

Che ti fischia intorno intorno;

Sul tuo capo in questo giorno

Il suo fulmine cadrà, sì cadrà, il suo fulmine cadrà.

DON GIOVANNI

Ma non manca in me coraggio,

LEPORELLO

Ma non manca in lui coraggio,

MOZART DON GIOVANNI

158

DON GIOVANNI

Quel désordre dans ma tête je ne sais plus ce qu’il faut

Faire,

LEPORELLO

Quel désordre dans sa tête il ne sait plus ce qu’il faut

Faire,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Entends

La voix de la vengeance,

DON GIOVANNI

C’est une horrible tempête qui me menace, oh

Dieu.

LEPORELLO

C’est une horrible tempête qui le menace, oh

Dieu.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Entends

La voix de la vengeance,

Qui siffle autour de toi ;

Sur ta tête aujourd’hui même,

Sa foudre frappera, frappera, sa foudre frappera.

DON GIOVANNI

Je ne manque pas de courage,

LEPORELLO

Il ne manque pas de courage,

159

PREMIER ACTE SCÈNE XX

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Odi il tuon!

DON GIOVANNI

Non mi perdo o mi confondo,

LEPORELLO

Non si perde o si confonde,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Odi il tuon!

DON GIOVANNI E LEPORELLO

Se cadesse...

DON GIOVANNI

... Ancor il mondo, cadesse ancor il mondo,

Nulla mai temer, temer mi fa,

...

Nulla mai temer mi fa, nulla mai temer mi fa.

LEPORELLO

... Ancor il mondo, cadesse ancor il mondo

Nulla mai temer, temer lo fa,

...

Nulla mai temer lo fa, nulla mai temer lo fa.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Sul tuo capo in questo giorno

Il suo fulmine cadrà, il suo fulmine cadrà,

...

Il suo fulmine cadrà, il suo fulmine cadrà.

MOZART DON GIOVANNI

160

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Entends la voix !

DON GIOVANNI

Je ne me perds ni ne me trouble,

LEPORELLO

Il ne se perd ni ne se trouble,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Entends la voix !

DON GIOVANNI & LEPORELLO

Même si s’effondrait...

DON GIOVANNI

... Le monde, même si le monde s’effondrait,

Je n’aurai jamais peur de rien,

...

Je n’aurai jamais peur de rien, peur de rien.

LEPORELLO

... Le monde, même si le monde s’effondrait,

Il n’aura jamais peur de rien,

...

Il n’aura jamais peur de rien, peur de rien.

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Sur ta tête aujourd’hui même,

Sa foudre frappera, sa foudre frappera.

...

Sa foudre frappera, sa foudre frappera.

161

PREMIER ACTE SCÈNE XX

ATTO SECONDO

SCENA I

Strada.

No 14. Duetto

DON GIOVANNI

Eh via, buffone, eh via buffone, non mi seccar!

LEPORELLO

No no, padrone, no no padrone, non vo’ restar

DON GIOVANNI

Sentimi, amico:

LEPORELLO

Vo’ andar, vi dico.

DON GIOVANNI

Ma che ti ho fatto, che vuoi lasciarmi?

LEPORELLO

O niente affatto! quasi ammazzarmi

162

SECOND ACTE

SCÈNE I

Rue.

No 14. Duo

DON GIOVANNI

Allons, drôle, allons, drôle, ne m’embête pas !

LEPORELLO

Non non, maître, non non maître, je ne resterai pas.

DON GIOVANNI

Écoute, mon ami :

LEPORELLO

Je veux partir je vous dis.

DON GIOVANNI

Mais que t’ai-je fait pour que tu veuilles me laisser ?

LEPORELLO

Oh rien en fait ! me tuer presque.

163

DON GIOVANNI

Va’ che sei matto! Va’ che sei matto,

Matto, matto! fu per burlar.

LEPORELLO

Ed io non burlo, ed io non burlo,

Burlo, burlo, ma voglio

Andar.

DON GIOVANNI

Eh

Via

Buffone, sentimi, amico, va’ che sei matto!

Va’ che sei matto! Va’ che sei matto!

Va che sei matto, matto, matto, matto!

LEPORELLO

No no padrone, vo’ andar, vi dico

No! no! no! no!

No no no no no no no no no no no

Non vo’ restar, no! non

Vo’restar, sì!

Sì! sì! sì! sì...

DON GIOVANNI

Va’ che sei matto! Va’ che sei matto!

Va’ che sei matto!

Va che sei matto, matto, matto, matto!

LEPORELLO

... Sì sì sì sì sì sì sì sì sì sì sì!

Voglio andar, sì! sì! voglio

Andar!

No no padrone, no no padrone,

Non vo’ restar.

Ed io non burlo, ed io non burlo,

MOZART DON GIOVANNI

164

DON GIOVANNI

Allons, tu es fou ! Allons, tu es fou,

Fou, fou ! C’était pour rire.

LEPORELLO

Et moi je ne ris pas, et moi je ne ris pas,

Je ne ris pas, mais je veux

M’en aller.

DON GIOVANNI

Eh

Allons

Drôle, écoute, mon ami, allons tu es fou !

Allons tu es fou ! Allons tu es fou !

Allons tu es fou, fou, fou, fou !

LEPORELLO

Non non maître, je ne resterai pas, je vous dis

Non ! non ! non ! non !

Non non non non non non non non non

Je ne resterai pas ! je

Ne resterai pas, oui !

Oui ! oui ! oui...

DON GIOVANNI

Allons tu es fou ! Allons tu es fou !

Allons tu es fou !

Allons tu es fou, fou, fou, fou !

LEPORELLO

... Oui oui oui oui oui oui !

Je veux m’en aller, oui ! je veux

M’en aller !

Non non maître, non non maître,

Je ne veux pas rester.

Et je ne ris pas, et je ne ris pas,

165

SECOND ACTE SCÈNE I

Ma voglio andar, ma voglio andar,

Ma voglio andar, ma voglio andar.

DON GIOVANNI

Eh via, buffone, buffone, non mi seccar!

Va’ che sei matto! va’ che sei matto!

Fu per burlar, fu per burlar

Fu per burlar, fu per burlar.

Leporello va per partire. Don Giovanni lo richiama.

Recitativo

DON GIOVANNI

Leporello.

LEPORELLO

Signore.

DON GIOVANNI

Vien qui, facciamo pace: prendi...

LEPORELLO

Cosa?

DON GIOVANNI (gli da del danaro)

Quattro doppie.

LEPORELLO

Oh! Sentite, per questa volta la cerimonia accetto: ma non

vi ci avvezzate; non credete di sedurre i miei pari, come le

donne, a forza di danari.

DON GIOVANNI

Non parliam più di ciò; ti basta l’animo di far quel ch’ i o

ti dico?

MOZART DON GIOVANNI

166

Mais je veux m’en aller,

Mais je veux m’en aller.

DON GIOVANNI

Allons, drôle, drôle, ne m’embête pas !

Allons tu es fou ! allons tu es fou !

C’était pour rire, c’était pour rire

C’était pour rire, c’était pour rire.

Leporello s’apprête à sortir. Don Giovanni le rappelle.

Récitatif

DON GIOVANNI

Leporello.

LEPORELLO

Seigneur.

DON GIOVANNI

Viens ici, faisons la paix : prends...

LEPORELLO

Quoi ?

DON GIOVANNI (lui donne de l’argent)

Quatre doublons.

LEPORELLO

Oh ! Écoutez, pour cette fois, j’accepte la bonne manière :

mais n’en faites pas une habitude ; ne croyez pas séduire

mes semblables comme les femmes : par l’argent.

DON GIOVANNI

Ne parlons plus de ça ; as-tu assez de cœur pour faire ce

que je te dis ?

167

SECOND ACTE SCÈNE I

LEPORELLO

Purchè lasciam le donne.

DON GIOVANNI

Lasciar le donne? pazzo! lasciar le donne! Sai ch’elle per

me son necessarie più del pan che mangio, più dell’aria

che spiro!

LEPORELLO

E avete core d’ingannarle poi tutte?

DON GIOVANNI

È tutto amore. Chi a una sola è fedele verso l’altre è cru-

dele; io, che in me sento sì esteso sentimento, vo’ bene a

tutte quante: le donne poiche calcolar non sanno, il mio

buon natural chiamano inganno.

LEPORELLO

Non ho veduto mai naturale più vasto, e più benigno. Orsù,

cosa vorreste?

DON GIOVANNI

Odi, vedesti tu la cameriera di Donna Elvira?

LEPORELLO

Io no.

DON GIOVANNI

Non hai veduto qualche cosa di bello, caro il mio

Leporello: ora io con lei vo’ tentar la mia sorte; ed ho pen-

sato, giacche siam verso sera, per aguzzarle meglio l’appe-

tito, di presentarmi a lei col tuo vestito.

LEPORELLO

E perché non potreste presentarvi col vostro?

MOZART DON GIOVANNI

168

LEPORELLO

Si nous laissons les dames.

DON GIOVANNI

Laisser les dames ? fou ! laisser les dames ! Sache qu’elles

me sont plus nécessaires que le pain que je mange, que

l’air que je respire !

LEPORELLO

Et vous avez le cœur de les tromper toutes ?

DON GIOVANNI

C’est par amour. Qui est fidèle à une seule est cruel pour

les autres ; je sens en moi un sentiment si vaste que je

veux les aimer toutes ; mon bon naturel, les femmes qui ne

savent pas penser l’appellent tromperie.

LEPORELLO

Je n’ai jamais vu naturel plus large et plus bienveillant.

Alors, que voulez-vous ?

DON GIOVANNI

Écoute, as-tu vu la camériste de Donna Elvira ?

LEPORELLO

Moi, non.

DON GIOVANNI

Tu n’as jamais vu une telle beauté, mon cher Leporello :

aujourd’hui je veux tenter ma chance avec elle ; et pour

mieux lui aiguiser l’appétit, comme c’est le soir, j’ai pensé

me présenter à elle avec tes vêtements.

LEPORELLO

Et pourquoi pas vous présenter avec les vôtres ?

169

SECOND ACTE SCÈNE I

DON GIOVANNI

Han poco credito con genti di tal rango gli abiti signorili:

(si cava il proprio abito e si mette quello di Leporello)

Sbrigati... via...

LEPORELLO

Signor... per più ragioni...

DON GIOVANNI (con collera)

Finiscila, non soffro opposizioni!

Leporello si mette l’abito di Don Giovanni.

SCENA II

Si fa notte a poco a poco.

No 15.. Terzetto

DONNA ELVIRA (alla finestra)

Ah taci, ingiusto core,

Non palpitarmi in seno;

È un empio, è un traditore,

È colpa aver pietà, è colpa aver pietà.

LEPORELLO

Zitto! di Donna Elvira, signor, la voce io sento!

DON GIOVANNI

Cogliere io vo’ il momento; tu fermati un po’ là!

(Si mette dietro Leporello e parla a Donna Elvira.)

Elvira, idolo mio... Elvira, idolo mio...

DONNA ELVIRA

Non è costui l’ingrato?

MOZART DON GIOVANNI

170

DON GIOVANNI

Les vêtements de seigneur ont peu de crédit auprès de ces

gens : (il enlève son habit et met celui de Leporello) Dé-

pêche-toi... allons...

LEPORELLO

Seigneur... pour plusieurs raisons...

DON GIOVANNI (avec colère)

Finissons-en, je ne tolère aucune objection !

Leporello revêt l’habit de Don Giovanni.

SCÈNE II

La nuit se fait peu à peu.

No 15. Trio

DONNA ELVIRA (à la fenêtre)

Ah silence, cœur injuste,

Ne palpite pas en mon sein,

C’est un impie, c’est un traître,

C’est une faute d’avoir pitié, c’est une faute d’avoir pitié.

LEPORELLO

Chut ! seigneur, j’entends la voix de Donna Elvira !

DON GIOVANNI

Je vais saisir l’instant ; toi, reste un peu là !

(Se place derrière Leporello et s’adresse à Donna Elvira.)

Elvira, mon amour... Elvira, mon amour...

DONNA ELVIRA

Serait-ce l’ingrat ?

171

SECOND ACTE SCÈNE II

DON GIOVANNI

Si, vita mia, son io, e chiedo

Carità.

DONNA ELVIRA

Numi,

Che strano

Affetto...

LEPORELLO

State a

veder la

Pazza, che ancor gli crederà, gli crederà, gli crederà!

DONNA ELVIRA

Mi si risveglia in petto, mi si risveglia in petto!

DON GIOVANNI

Discendi, o gioia bella, o gioia bella:

Vedrai che tu sei quella che adora l’alma mia;

Pentito io sono

Già.

DONNA ELVIRA

No,

Non ti credo, o barbaro!

No, non...

DON GIOVANNI

Ah credimi,

Donna Elvira

... Ti credo, o barbaro!

DON GIOVANNI

Ah

MOZART DON GIOVANNI

172

DON GIOVANNI

Oui, ma vie, c’est moi, et je demande

Pardon.

DONNA ELVIRA

Dieu,

Quel étrange

Émoi...

LEPORELLO

Vous allez

Voir que la

Folle va encore le croire, le croire, le croire !

DONNA ELVIRA

Se réveille en mon cœur, se réveille en mon cœur !

DON GIOVANNI

Descends, ô ma belle, ô ma belle :

Tu verras que tu es celle que mon âme adore ;

Plein de remords je suis

Déjà.

DONNA ELVIRA

Non,

Je ne te crois pas, ô cruel !

Non, je ne...

DON GIOVANNI

Ah crois-moi,

DONNA ELVIRA

... Te crois pas ; ô cruel !

DON GIOVANNI

Ah

173

SECOND ACTE SCÈNE II

Credimi!

DONNA ELVIRA

No, non

Ti credo, o barbaro!

DON GIOVANNI

Ah credimi,

DONNA ELVIRA

Non ti credo!

DON GIOVANNU (con trasporto e quasi piangendo)

O m’uccido!

LEPORELLO (piano a Don Giovanni)

Se seguitate, io rido!

DON GIOVANNI

Io m’uccide

LEPORELLO

Se seguitate, io rido!

DON GIOVANNI

Ah m’uccido!

LEPORELLO

Se seguitate, io rido, rido, rido,

Rido, rido, rido, rido, rido, rido, rido.

DON GIOVANNI

Idolo mio, vien qua!

DONNA ELVIRA (a parte)

Dei, che cimento è questo!

MOZART DON GIOVANNI

174

Crois-moi !

DONNA ELVIRA

Non, je ne

Te crois pas, ô cruel !

DON GIOVANNI

Ah, crois-moi,

DONNA ELVIRA

Je ne te crois pas !

DON GIOVANNI (avec passion et pleurant presque)

Ou je me tue !

LEPORELLO (bas à Don Giovanni)

Si vous continuez, moi je ris !

DON GIOVANNI

Je me tue

LEPORELLO

Si vous continuez, moi je ris !

DON GIOVANNI

Ah je me tue !

LEPORELLO

Si vous continuez, moi je ris, je ris, je ris,

Je ris, je ris, je ris, je ris, je ris, je ris.

DON GIOVANNI

Mon amour, viens là !

DONNA ELVIRA (à part)

Dieux, quelle épreuve !

175

SECOND ACTE SCÈNE II

Non so s’io vado o resto;

Ah proteggete voi

La mia credulità, credulità.

DON GIOVANNI (a parte)

Spero che cada presto!

Che bel colpetto è questo;

Più fertile talento

Del mio no, non si dà.

Più fertile talento, no, del mio non si dà!

LEPORELLO (a parte)

Già quel mendace labbro!

Torna a sedur costei;

Deh proteggete, oh Dei,

La sua credulità, credulità.

DONNA ELVIRA

Dei! che cimento è questo!

Dei! che cimento è questo!

DON GIOVANNI

Spero che cada presto!

DONNA ELVIRA

Non

So s’io vado! Non so s’io resto!

Dei! che cimento è questo!

Non so s’io vado, o resto;

Ah proteggete voi la mia credulità, credulità,

DON GIOVANNI

Che bel colpetto è questo!

Che bel colpetto!

Spero che cada presto!

MOZART DON GIOVANNI

176

Partir ou rester, je ne sais ;

Ah protégez-moi

De ma crédulité.

DON GIOVANNI (à part)

Pourvu qu’elle tombe vite !

Quel beau coup ;

Talent plus ingénieux

Que le mien, non, il n’y en a pas.

Talent plus ingénieux que le mien, non il n’y en a pas !

LEPORELLO (à part)

Déjà son discours menteur

À nouveau la séduit ;

De grâce, protégez-la, oh dieux,

De sa crédulité.

DONNA ELVIRA

Dieux ! quelle épreuve !

Dieux ! quelle épreuve !

DON GIOVANNI

Pourvu qu’elle tombe vite !

DONNA ELVIRA

Je ne sais

S’il faut partir ! Je ne sais s’il faut rester !

Dieux ! quelle épreuve !

Je ne sais s’il faut partir ou rester ;

Ah protégez-moi de ma crédulité,

DON GIOVANNI

Quel beau coup que celui-ci !

Quel beau coup !

Pourvu qu’elle tombe vite !

177

SECOND ACTE SCÈNE II

Che bel colpetto è questo!

Piu fertile talento del mio no, non si da,

Più fertile talento, no, del mio, non si da,

LEPORELLO

Già quel mendace labbro

Torna a sedur costei!

Già quel mendace labbro

Torna a sedur costei;

Deh proteggete, oh Dei,

La sua credulità, credulità,

DONNA ELVIRA

La mia

Credulità,

DON GIOVANNI

No, non si da,

LEPORELLO

Credulità,

DONNA ELVIRA

La mia

Credulità.

DON GIOVANNI

No, non si da.

LEPORELLO

Credulità.

Donna Elvira parte dalla finestra.

MOZART DON GIOVANNI

178

Quel beau coup que celui-ci !

Talent plus ingénieux que le mien, non il n’y en a pas !

Talent plus ingénieux que le mien, non il n’y en a pas !

LEPORELLO

Déjà son discours menteur

À nouveau la séduit !

Déjà son discours menteur

À nouveau la séduit ;

De grâce, protégez-la, oh dieux,

De sa crédulité.

DONNA ELVIRA

De ma

Crédulité,

DON GIOVANNI

Non, il n’y en a pas,

LEPORELLO

De sa crédulité,

DONNA ELVIRA

De ma

Crédulité

DON GIOVANNI

Non, il n’y en a pas.

LEPORELLO

De sa crédulité.

Donna Elvira quitte la fenêtre.

179

SECOND ACTE SCÈNE II

Recitativo

DON GIOVANNI (allegrissimo)

Amico, che ti par?

LEPORELLO

Mi par che abbiate un’anima di bronzo.

DON GIOVANNI

Va là, che sei il gran gonzo! Ascolta bene: quando costei

qui viene, tu corri ad abbracciarla, falle quattro carezze,

fingi la voce mia, poi con bell’arte cerca teco condurla in

altra parte.

LEPORELLO

Ma, Signore...

DON GIOVANNI (mette presso il naso una pistola a Leporello)

Non più repliche!

LEPORELLO

Ma se poi mi conosce?

DON GIOVANNI

Non ti conoscerà, se tu non vuoi... Zitto, ell’apre: ehi giudizio.

(Va in disparte.)

SCENA III

DONNA ELVIRA

Eccomi a voi!

DON GIOVANNI (a parte)

Veggiamo che farà.

MOZART DON GIOVANNI

180

Récitatif

DON GIOVANNI (très joyeux)

Mon ami qu’en penses-tu ?

LEPORELLO

Je pense que vous avez une âme de bronze.

DON GIOVANNI

Va donc, tu es un grand sot! Écoute bien : quand elle arri-

vera, tu cours l’embrasser, caresse-la un peu, imite ma

voix, puis, avec art, essaye de l’emmener avec toi, ailleurs.

LEPORELLO

Mais, seigneur...

DON GIOVANNI (lui mettant un pistolet sous le nez)

Pas d’objection !

LEPORELLO

Mais si elle me reconnaît ?

DON GIOVANNI

Elle ne te reconnaîtra pas, si tu ne le veux pas... Chut, elle

ouvre : eh prudence.

(Il se met à l’écart.)

SCÈNE III

DONNA ELVIRA

Me voici à vous !

DON GIOVANNI (à part)

Voyons ce qu’il va faire.

181

SECOND ACTE SCÈNE III

LEPORELLO (a parte)

Che imbroglio!

DONNA ELVIRA

Dunque creder potrò che i pianti miei abbian vinto quel

cor? Dunque pentito l’amato Don Giovanni al suo dovere e

all’amor mio ritorna...

LEPORELLO

Sì, carina!

DONNA ELVIRA

Crudele! se sapeste, quante lagrime, e quanti sospir voi mi

costaste!

LEPORELLO

Io, vita mia?

DONNA ELVIRA

Voi.

LEPORELLO

Poverina! quanto mi dispiace!

DONNA ELVIRA

Mi fuggirete più?

LEPORELLO

No, muso bello.

DONNA ELVIRA

Sarete sempre mio?

LEPORELLO

Sempre.

MOZART DON GIOVANNI

182

LEPORELLO (à part)

Quelle embrouille !

DONNA ELVIRA

Ainsi je pourrais croire que mes pleurs ont vaincu ce

cœur ? Ainsi repentant, Don Giovanni, l’aimé, revient à

son devoir et à mon amour...

LEPORELLO

Oui, chérie !

DONNA ELVIRA

Cruel ! si vous saviez combien de larmes et de soupirs

vous m’avez coûté !

LEPORELLO

Moi, mon amour ?

DONNA ELVIRA

Vous.

LEPORELLO

Pauvrette ! combien je regrette !

DONNA ELVIRA

Vous ne fuirez plus ?

LEPORELLO

Non, beau masque.

DONNA ELVIRA

Vous serez toujours à moi ?

LEPORELLO

Toujours.

183

SECOND ACTE SCÈNE III

DONNA ELVIRA

Carissimo!

LEPORELLO

Carissima! (A parte) La burla mi dà gusto.

DONNA ELVIRA

Mio tesoro!

LEPORELLO

Mia Venere!

DONNA ELVIRA

Son per voi tutta foco.

LEPORELLO

Io tutto cenere.

DON GIOVANNI (a parte)

Il birbo si riscalda.

DONNA ELVIRA

E non m’ingannerete?

LEPORELLO

No, sicuro.

DONNA ELVIRA

Giuratemi.

LEPORELLO

Lo giuro a questa mano che bacio con trasporto... e a que’

bei lumi...

DO N GI OVA N N I (finge di uccider qualcheduno colla spada alla mano)

Ih, Eh, Ih, Ah sei morto!

MOZART DON GIOVANNI

184

DONNA ELVIRA

Mon adoré !

LEPORELLO

Mon adorée ! (À part) Je prends goût à la farce.

DONNA ELVIRA

Mon trésor !

LEPORELLO

Ma Vénus !

DONNA ELVIRA

Pour vous, je suis toute flamme.

LEPORELLO

Et moi toute cendre.

DON GIOVANNI (à part)

Le coquin s’échauffe.

DONNA ELVIRA

Et vous ne me tromperez pas ?

LEPORELLO

Non, bien sûr.

DONNA ELVIRA

Jurez-moi.

LEPORELLO

Je le jure sur cette main que je baise avec passion... et sur

ces beaux yeux...

DON GIOVANNI (feint de tuer quelqu’un avec son épée)

Oh, eh, oh, ah tu es mort !

185

SECOND ACTE SCÈNE III

DONNA ELVIRA (fugge con Leporello)

Oh Numi!

LEPORELLO

Oh Numi!

DON GIOVANNI

Ih, Eh, Ih, Eh, Ih, Ah! Purché la sorte mi secondi: veggia-

mo... le finestre son queste: ora cantiamo.

No 16. Canzonetta

DON GIOVANNI

Deh, vieni alla finestra, o mio tesoro,

Deh, vieni a consolar il pianto mio:

Se neghi a me di dar qualche ristoro,

Davanti agli occhi tuoi morir vogl’io.

Tu ch’hai la bocca dolce più che il miele,

Tu che il zucchero porti in mezzo al core,

Non esser, gioia mia, con me crudele:

Lasciati almen veder, mio bell’amore.

Recitativo

DON GIOVANNI

V’è gente alla finestra! Sarà dessa: zi, zi!

SCENA IV

MASETTO (armato d’archibuso e pistola ai contadini)

Non ci stanchiamo; il cor mi dice che trovarlo dobbiam!

DON GIOVANNI (a parte)

Qualcuno parla.

MOZART DON GIOVANNI

186

DONNA ELVIRA (fuit avec Leporello)

Oh dieux !

LEPORELLO

Oh dieux !

DON GIOVANNI

Oh, eh, oh, eh, ah ! C’est que le sort me sourit : voyons...

voici les fenêtres : maintenant chantons.

No 16. Canzonetta

DON GIOVANNI

De grâce, viens à la fenêtre, ô mon trésor,

De grâce, viens apaiser mes soupirs,

Si tu me refuses ton réconfort,

Sous tes yeux, je veux mourir.

Toi dont la bouche est plus douce que le miel

Toi dont le cœur est empli de douceur,

Ne sois pas, ma joie, cruelle avec moi :

Au moins, montre-toi, mon bel amour.

Récitatif

DON GIOVANNI

Il y a du monde à la fenêtre ! Elle, sans doute : pst, pst !

SCÈNE IV

MASETTO (armé d’un mousquet et d’un pistolet, aux paysans)

Poursuivons ; mon cœur me dit que nous le trouverons !

DON GIOVANNI (à part)

Quelqu’un parle.

187

SECOND ACTE SCÈNE IV

MASETTO

Fermatevi: mi pare che alcuno qui si muova!

DON GIOVANNI (piano, a parte)

Se non fallo è Masetto!

MASETTO (forte)

Chi va là? Non risponde: animo; schioppo al muso!

(Più forte) Chi va là?

DON GIOVANNI (a parte)

Non è solo: ci vuol giudizio!

(Cerca d’imitar la voce di Leporello.)

Amici... (A parte) Non mi voglio scoprir.

Sei tu, Masetto?

MASETTO (in collera)

Appunto quello! e tu?

DON GIOVANNI

Non mi conosci? Il servo son io di Don Giovanni.

MASETTO

Leporello! servo di quell’ indegno cavaliere!

DON GIOVANNI

Certo, i quel briccone...

MASETTO

Dì, quell’uom senza onore... Ah dimmi un poco dove pos-

siam trovarlo: lo cerco con costor per trucidarlo.

DON GIOVANNI

(A parte) Bagattelle!

MOZART DON GIOVANNI

188

MASETTO

Arrêtez-vous : je crois que quelqu’un bouge !

DON GIOVANNI (bas, à part)

Si je ne me trompe, c’est Masetto !

MASETTO (d’une voix forte)

Qui va là ? Pas de réponse : allons ; en joue !

(Plus fort) Qui va là ?

DON GIOVANNI (à part)

Il n’est pas seul : soyons prudent !

(Cherchant à imiter la voix de Leporello.)

Mes amis... (À part) Je ne veux pas me découvrir.

C’est toi, Masetto ?

MASETTO (en colère)

En personne ! et toi ?

DON GIOVANNI

Tu ne me reconnais pas ? Je suis le valet de Don Giovanni.

MASETTO

Leporello ! valet de cet indigne chevalier !

DON GIOVANNI

Oui, de ce brigand...

MASETTO

Dis, cet homme sans honneur... Ah dis-moi un peu où

nous pouvons le trouver : je le recherche avec ceux- l à

pour le tuer.

DON GIOVANNI

(À part) Une bagatelle !

189

SECOND ACTE SCÈNE IV

Bravissimo, Masetto! anch’io con voi m’unisco per farglie-

la a quel birbo di padrone: or senti un po’ qual è la mia

intenzione.

No 17. Aria

DON GIOVANNI (accennando a destra)

Metà di voi qua vadano, e gli altri vadan là,

E pian pianin lo cerchino, lontan non fia di qua,

No, lontan, lontan non fia di qua.

Se un uom e una ragazza passeggian per la piazza,

Se sotto a una finestra fare all’amor sentite:

Ferite pur, ferite, ferite pur, ferite, iI mio padron sarà.

In testa egli ha un cappello con candidi pennacchi,

Addosso un gran mantello, e spada al fianco egli ha,

E spada al fianco egli ha, e spada al fianco egli ha,

E spada al fianco egli ha, e spada al fianco egli ha.

Se un uom e una ragazza passeggian per la piazza,

Se sotto a una finestra fare all’amor sentite:

Ferite, ferite, ferite pur, ferite, ferite pur, ferite, ferite!

II mio padron sarà.

Metà di voi qua vadano, e gli altri vadan là,

E pian pianin lo cerchino, lontan non fia di qua,

No, lontan, lontan non fia di qua, no,

Lontan, lontan non fia di qua.

Andate, fate presto, andate, fate presto, fate presto,

Fate presto, presto, presto, presto, presto!

(I contadini partono. A Masetto)

Tu sol verrai con me, verrai con me, verrai con me.

Noi far dobbiamo il resto, e già vedrai cos’è, cos’è, cos’è.

Noi far dobbiamo il resto, e già vedrai cos’è, cos’è, cos’è,

E già vedrai cos’è, cos’è, cos’è, e già vedrai cos’è,

E già vedrai cos’è, e già vedrai cos’è, e già vedrai cos’è.

(Prende seco Masetto e parte.)

MOZART DON GIOVANNI

190

Bravissimo, Masetto ! moi aussi, je me joins à vous, pour

faire la peau à ce coquin de maître : écoute un peu main-

tenant quel est mon plan.

No 17. Air

DON GIOVANNI (montrant la droite)

Moitié d’entre vous va par ici, et les autres par là,

Et doux, tout doux, cherchez-le, il ne peut être loin,

Non, il ne peut, il ne peut être loin.

Si un homme et une fille se promènent sur la place,

Si, sous une fenêtre, vous entendez roucouler :

Frappez donc, frappez, frappez donc, ce sera mon maître.

Il porte un chapeau avec des plumes blanches,

Il a sur le dos une grande cape, une épée au côté,

Une épée au côté, au côté, une épée,

Une épée au côté, au côté, une épée.

Si un homme et une fille se promènent sur la place,

Si, sous une fenêtre, vous entendez roucouler :

Frappez, frappez, frappez donc, frappez, frappez !

Ce sera mon maître.

Moitié d’entre vous va par ici, et les autres par là,

Et doux, tout doux, cherchez-le, il ne peut être loin,

Non, il ne peut, il ne peut être loin, non,

Il ne peut, il ne peut être loin.

Allez, faites vite, allez, faites vite, faites vite,

Faites vite, vite, vite, vite, vite !

(Les paysans sortent. À Masetto)

Toi, tu viens avec moi, avec moi, avec moi.

Nous devons faire le reste, bientôt tu verras quoi, quoi,

Nous devons faire le reste, bientôt tu verras quoi, quoi,

Bientôt tu verras quoi, quoi, bientôt tu verras quoi,

Bientôt tu verras quoi, bientôt tu verras quoi.

(Il sort, emmenant Masetto.)

191

SECOND ACTE SCÈNE IV

SCENA V

Ritorna in scena Don Giovanni conducendo seco Masetto

per la mano.

Recitativo

DON GIOVANNI

Zitto! lascia ch’io senta: ottimamente; dunque dobbiam

ucciderlo!

MASETTO

Sicuro.

DON GIOVANNI

E non ti basteria rompergli l’ossa... fracassargli le spalle...

MASETTO

No no, voglio ammazzarlo; vo’ farlo in cento brani...

DON GIOVANNI

Hai buon’ arme?

MASETTO

Cospetto! ho pria questo moschetto;

(Da il moschetto e la pistola a Don Giovanni.)

E poi questa pistola...

DON GIOVANNI

E poi?

MASETTO

Non basta?

MOZART DON GIOVANNI

192

SCÈNE V

Don Giovanni rentre en scène, conduisant Masetto

par la main.

Récitatif

DON GIOVANNI

Chut ! laisse-moi écouter : très bien ; donc nous devons le

tuer !

MASETTO

Bien sûr.

DON GIOVANNI

Et ça ne te suffirait pas de lui rompre les os... lui fracas-

ser les épaules... ...

MASETTO

Non non, je veux le tuer ; je veux le déchirer en mille

m o r c e a u x . . .

DON GIOVANNI

Tu es bien armé ?

MASETTO

Dame ! d’abord j’ai ce mousquet ;

(Il donne le mousquet et le pistolet à Don Giovanni.)

Et puis ce pistolet...

DON GIOVANNI

Et puis ?

MASETTO

Ça ne suffit pas ?

193

SECOND ACTE SCÈNE V

DON GIOVANNI

Oh basta certo! Or prendi:

(Batte col rovescio della spada Masetto.)

Questa per la pistola... questa per il moschetto...

MASETTO

Ahi! chi soccorso! ahi!

DON GIOVANNI

Taci, o sei morto!

(Minacciandolo colle armi alla mano)

Questa per ammazzarlo... questi per farlo in brani...

Villano, mascalzon, ceffo da cani!

(Parte.)

SCENA VI

MASETTO (gridando forte)

Ahi ahi! la testa mia! ahi ahi! le spalle, e il petto!

ZERLINA (con lanterna)

Di sentire mi parve la voce di Masetto.

MASETTO

O Dio! Zerlina, Zerlina mia! soccorso!

ZERLINA

Cosa è stato?

MASETTO

L’iniquo! il scellerato mi ruppe l’ossa e i nervi!

ZERLINA

Oh poveretta me! chi?

MOZART DON GIOVANNI

194

DON GIOVANNI

Oh bien sûr, ça suffit ! Maintenant prends ça :

(Il bat Masetto avec le plat de l’épée.)

Celle-là pour le pistolet... celle-là pour le mousquet...

MASETTO

Aïe ! au secours ! aïe !

DON GIOVANNI

Tais-toi ou tu es mort !

(Le menaçant, les armes à la main)

Celle-là pour le tuer... celle-là pour les mille morceaux...

Malotru, salaud, tête de chien !

(Il sort.)

SCÈNE VI

MASETTO (avec de grands cris)

Aïe aïe ! ma tête ! Aïe aïe ! mes épaules, et ma poitrine !

ZERLINA (avec une lanterne)

J’ai cru entendre la voix de Masetto.

MASETTO

Ô Dieu ! Zerlina, ma Zerlina ! à l’aide !

ZERLINA

Que s’est-il passé ?

MASETTO

Le mauvais ! le scélérat m’a cassé les os et les nerfs !

ZERLINA

Oh pauvre de moi ! qui ?

195

SECOND ACTE SCÈNE VI

MASETTO

Leporello! o qualche diavol che somiglia a lui.

ZERLINA

Crudel! non tel diss’io che con questa tua pazza gelosia ti

ridurresti a qualche brutto passo? Dove ti duole?

MASETTO

Qui.

ZERLINA

E poi?

MASETTO

Qui... e ancora... qui...

ZERLINA

E poi non ti duol altro?

MASETTO

Duolmi un poco questo piè’, questo braccio, e questa mano.

ZERLINA

Via, via, non è gran mal, se il resto è sano. Vientene meco

a casa; purché tu mi prometta d’essere men geloso, io, io

ti guarirò, caro il mio sposo.

No 18. Aria

ZERLINA

Vedrai, carino, se sei buonino,

Che bel rimedio ti voglio dar.

È naturale, non dà disgusto, e lo speziale non lo sa far, no

Non lo sa far, no, non lo sa far.

MOZART DON GIOVANNI

196

MASETTO

Leporello ! ou quelque démon qui lui ressemble.

ZERLINA

Cruel ! je ne t’avais pas dit qu’avec ta folle jalousie tu te

mettrais dans un mauvais pas ? Où as-tu mal ?

MASETTO

Ici.

ZERLINA

Et puis ?

MASETTO

Ici... et encore... ici...

ZERLINA

Et tu n’as pas mal ailleurs ?

MASETTO

Ce pied me fait un peu mal, ce bras et cette main.

ZERLINA

Va, va, ce n’est pas grand mal si le reste n’a rien. Viens

chez moi ; moi, je te guérirai, mon cher époux, pourvu que

tu me promettes d’être moins jaloux.

No 18. Air

ZERLINA

Tu verras, amour, si tu es sage,

Le beau remède que je te donnerai.

Il est naturel, ne donne pas la nausée, le pharmacien ne

sait pas le faire, non,

Ne sait pas le faire, ne sait pas le faire.

197

SECOND ACTE SCÈNE VI

È un certo balsamo che porto addosso:

Dare te’l posso, se’l vuoi provar.

Saper vorresti dove mi sta,

Dove, dove, dove mi sta?

Sentilo battere,

(Facendogli toccar il core)

Toccami qua. Sentilo battere, sentilo battere, toccami qua.

Sentilo battere, sentilo battere, sentilo battere,

Toccami qua, qua, qua.

Sentilo battere, toccami qua, qua,

Toccami qua, qua, toccami qua, qua, toccami qua.

(Parte con Masetto.)

SCENA VII

Atrio terreno oscuro con tre porte in casa di Donna Anna.

LEPORELLO

Di molte faci il lume s’avvicina, o mio ben: stiamci qui

ascosi, fin che da noi si scosta.

DONNA ELVIRA

Ma che temi, adorato mio sposo?

LEPORELLO

Nulla, nulla... certi riguardi... io vo’ veder se il lume è già

lontano... (A parte) Ah, come da costei liberarmi!

Rimanti, anima bella...

(S’allontana.)

DONNA ELVIRA

Ah! non lasciarmi!

No 19. Sestetto.

MOZART DON GIOVANNI

198

C’est un certain baume que j’ai sur moi :

Je peux t’en donner si tu veux l’essayer.

Sais-tu où je l’ai,

Où, où, où je l’ai ?

(Elle lui fait toucher son cœur.)

To u c h e-moi, là. Sens-le battre, sens-le battre, touche-moi là.

Sens-le battre, sens-le battre, sens-le battre,

Touche-moi là, là, là.

Sens-le battre, touche-moi là, là,

Touche-moi là, là, Touche-moi là, là, touche-moi là.

(Elle sort avec Masetto.)

SCÈNE VII

Vestibule sombre avec trois portes chez Donna Anna.

LEPORELLO

De nombreux flambeaux s’approchent, mon amour :

cachons-nous ici jusqu’à ce qu’ils s’éloignent.

DONNA ELVIRA

Mais de quoi as-tu peur, mon époux adoré ?

LEPORELLO

De rien, de rien... certains regards... je vais voir si la

lumière s’est éloignée... (À part) Ah, comment me débar-

rasser d’elle !

Reste là, mon cœur...

(Il s’éloigne.)

DONNA ELVIRA

Ah ! ne m’abandonne pas !

No 19. Sextuor.

199

SECOND ACTE SCÈNE VII

DONNA ELVIRA

Sola sola in buio loco, palpitar il cor io sento,

E m’assale un tal spavento, che mi sembra di morir,

Che mi sembra di morir.

LEPORELLO (andando a tentone)

Più che cerco, men ritrovo

Questa porta, questa porta sciagurata!

Piano piano: l’ho trovata, l’ho trovata,

Ecco il tempo di fuggir, ecco il tempo di fuggir,

Ecco il tempo, ecco il tempo, ecco il tempo di fuggir.

(Sbaglia la porta.)

Donna Anna e Don Ottavio entrano vestiti a lutto.

DON OTTAVIO

Tergi il ciglio, o vita mia, e da’ calma a tuo dolore:

L’ombra omai del genitore pena avrà de’ tuoi martir, de’ tuoi

Martir.

DONNA ANNA

Lascia,

Lascia alla mia pena questo picciolo ristoro,

Sol la morte, sol la morte, o mio tesoro,

II mio pianto può finir, il mio pianto può finir.

DONNA ELVIRA (senza esser vista)

Ah dov’è lo sposo mio?

LEPORELLO (dalla porta, senza esser visto)

Se mi trova son perduto!

DONNA ELVIRA

Una porta là vegg’io,

Cheta cheta vo’ partir,

Cheta cheta vo’ partir.

MOZART DON GIOVANNI

200

DONNA ELVIRA

Seule, seule en ce lieu obscur, je sens mon cœur palpiter,

Et un tel effroi m’assaille, qu’il me semble que je meure,

Qu’il me semble que je meure.

LEPORELLO (avançant à tâtons)

Plus je cherche, moins je retrouve

Cette porte, cette maudite porte !

Doucement, doucement, je l’ai trouvée,

Voici le moment de fuir, le moment de fuir,

Voici le moment, voici le moment de fuir.

(Il se trompe de porte.)

Donna Anna et Don Ottavio entrent en habits de deuil.

DON OTTAVIO

Sèche tes yeux, ô ma vie, et calme ta douleur ;

L’ombre même de ton père souffrira de ton martyre, de ton

Martyre.

DONNA ANNA

Laisse,

Laisse à ma peine ce pauvre réconfort,

La mort seule, la mort seule, ô mon trésor,

Pourra sécher mes pleurs, pourra sécher mes pleurs.

DONNA ELVIRA (sans être vue)

Ah où est mon époux ?

LEPORELLO (à la porte, sans être vu)

Si on me trouve je suis perdu !

DONNA ELVIRA

Je vois là une porte,

Tout doucement je vais partir,

Tout doucement je vais partir.

201

SECOND ACTE SCÈNE VII

LEPORELLO

Una porta là vegg’io,

Cheto cheto, vo’ partir,

Cheto cheto cheto cheto cheto cheto vo’ partir.

Nel sortire s’incontranno in Zerlina e Masetto.

Leporello s’asconde la faccia.

SCENA VIII

ZERLINA E MASETTO

Ferma, briccone, dove ten vai?

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Ecco il fellone!... Com’era qua?

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO E MASETTO

Ah mora il perfido che m’ha tradito, che m’ha tradito!

DONNA ELVIRA

È mio marito! pietà, pietà, pietà, !

DONNA ANNA

È Donna Elvira,

ZERLINA

È Donna Elvira?

DON OTTAVIO, DONNA ANNA, ZERLINA E MASETTO

È Donna Elvira, Donna Elvira, è Donna Elvira

Quella ch’io vedo?Appena il credo!

Quella ch’io vedo? Appena il credo!

DONNA ELVIRA

Pietà, pietà!

MOZART DON GIOVANNI

202

LEPORELLO

Je vois là une porte,

Tout doucement je vais partir,

Tout doucement, tout doucement je vais partir.

En sortant, ils tombent nez à nez avec Zerlina et Masetto.

Leporello cache son visage.

SCÈNE VIII

ZERLINA ET MASETTO

Arrête, brigand, où vas-tu ?

DONNA ANNA ET DON OTTAVIO

Voici le traître !... Comment était-il là ?

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO & MASETTO

Ah que meure le perfide qui m’a trahi(e), qui m’a trahi(e).

DONNA ELVIRA

C’est mon mari ! pitié, pitié, pitié !

DONNA ANNA

C’est Donna Elvira,

ZERLINA

C’est Donna Elvira ?

DON OTTAVIO, DONNA ANNA, ZERLINA & MASETTO

C’est Donna Elvira, Donna Elvira, c’est Donna Elvira,

Elle que je vois ? J’ai du mal à le croire !

Elle que je vois ? J’ai du mal à le croire !

DONNA ELVIRA

Pitié, pitié !

203

SECOND ACTE SCÈNE VIII

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO E MASETTO

No, no, no, no! Morrà!

DONNA ELVIRA

Pietà!

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO E MASETTO

No!

DONNA ELVIRA

Pietà!

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO E MASETTO

No!

DONNA ELVIRA

Pietà!

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO (in atto di ucciderlo)

E MASETTO

No, no, no, no! Morrà!

LEPORELLO (quasi piangendo)

Perdon, perdono,

(Si scopre e si mette in ginocchio davanti gli altri.)

Signori miei, quello io non sono, sbaglia costei;

Viver lasciatemi per carità,

Viver lasciatemi per carità, per carità, per carità!

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Dei! Leporello! Che inganno è questo!

Leporello! Che inganno è questo!

Stupida resto... Che mai sarà!

MOZART DON GIOVANNI

204

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO & MASETTO

Non, non, non, non ! Qu’il meure !

DONNA ELVIRA

Pitié !

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO & MASETTO

Non !

DONNA ELVIRA

Pitié!

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO & MASETTO

Non !

DONNA ELVIRA

Pitié !

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO (sur le point de le tuer)

& MASETTO

Non, non, non, non ! Qu’il meure !

LEPORELLO (pleurant presque)

Pardon, pardon,

(Il se découvre et s’agenouille devant les autres.)

Mes seigneurs, je ne suis pas celui-là, elle se trompe ;

Laissez-moi la vie, par pitié,

Laissez-moi la vie, par pitié, par pitié, par pitié !

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Dieux ! Leporello ! Quelle histoire !

Leporello ! Quelle histoire !

J’en reste stupide... Qu’est-ce qui se passe !

205

SECOND ACTE SCÈNE VIII

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Che mai sarà! Che mai sarà!

Che mai sarà! che mai sarà!

LEPORELLO

Mille torbidi

Pensieri...

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Mille

Torbidi pensieri...

LEPORELLO

Mi s’aggiran per la

Testa;

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Mi

S’aggiran per la testa...

LEPORELLO

Mille torbidi pensieri mi s’aggiran per la testa:

Se mi salvo in tal tempesta, è un prodigio in verità!

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Che

Giornata, o stelle, è questa, o stelle è questa!

LEPORELLO

È un prodigio in verità!

Se mi salvo in tal tempesta, è un prodigio in verità,

MOZART DON GIOVANNI

206

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Qu’est-ce qui se passe ! Qu’est-ce qui se passe !

Qu’est-ce qui se passe ! Qu’est-ce qui se passe !

LEPORELLO

Mille troubles

Pensées...

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Mille

Troubles pensées...

LEPORELLO

Tournent dans ma

Tête ;

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Tournent

Dans ma tête...

LEPORELLO

Mille troubles pensées tournent dans ma tête :

Si je réchappe de cette tempête, ce sera prodige en vérité !

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Quelle

Journée, ô ciel, que celle-là, ô ciel que celle-là !

LEPORELLO

Ce sera prodige en vérité !

Si je réchappe de cette tempête, ce sera prodige en vérité,

207

SECOND ACTE SCÈNE VIII

È un prodigio in verità, in verità, in verità,

È un prodigio in verità!

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Che impensata...

LEPORELLO

Mille torbidi pensieri...

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

... Novità!

LEPORELLO

... Mi s’aggiran per la teste:

Se mi salvo in tal tempesta,

è un prodigio in verità,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Che impensata

Che impensata novità

Che impensata

Novità!

LEPORELLO

È un prodigio in verità!

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Mille torbidi pensieri...

DONNA ELVIRA

Mille mille...

MOZART DON GIOVANNI

208

Ce sera prodige en vérité, en vérité, en vérité,

Ce sera prodige en vérité !

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Imprévue...

LEPORELLO

Mille troubles pensées...

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

... Cette nouvelle !

LEPORELLO

... Tournent dans ma tête ;

Si je réchappe de cette tempête,

Ce sera prodige en vérité,

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Imprévue

Imprévue cette nouvelle

Imprévue cette

Nouvelle !

LEPORELLO

Ce sera prodige en vérité !

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Mille troubles pensées...

DONNA ELVIRA

Mille, mille...

209

SECOND ACTE SCÈNE VIII

ZERLINA E MASETTO

Mille torbidi pensieri

DONNA ELVIRA

... Torbidi pensieri...

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

... Mi s’aggiran per la testa...

DONNA ELVIRA

... Mi s’aggiran per la testa...

ZERLINA E MASETTO

Mi s’aggiran per la testa...

LEPORELLO

Mille torbide pensieri mi s’aggiran per la testa:

Se mi salvo un tal tempesta, è un prodigio in verità!

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Che

Giornata, o stelle, è questa, o stelle, è questa!

LEPORELLO

È un prodigio in verità,

Se mi salvo in tal tempesta, è un prodigio in verità

È un prodigio in verità, in verità, in verità

È un prodigio in verità!

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Che impensata...

LEPORELLO

Mille torbide

MOZART DON GIOVANNI

210

ZERLINA & MASETTO

Mille troubles pensées

DONNA ELVIRA

... Troubles pensées...

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

... Tournent dans ma tête...

DONNA ELVIRA

... Tournent dans ma tête...

ZERLINA & MASETTO

Tournent dans ma tête...

LEPORELLO

Mille troubles pensées tournent dans ma tête :

Si je réchappe de cette tempête, ce sera prodige en vérité !

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Quelle

Journée, ô ciel, que celle-là, ô ciel, que celle-là !

LEPORELLO

Ce sera prodige en vérité,

Si je réchappe de cette tempête, ce sera prodige en vérité !

Ce sera prodige en vérité, en vérité, en vérité

Ce sera prodige en vérité !

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Imprévue...

LEPORELLO

Mille troubles

211

SECOND ACTE SCÈNE VIII

Pensieri mi s’aggiran per la testa:

Se mi salvo in tal tempesta, è un prodigio in verità!

...

È un prodigio in verità!

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Novità! Che impensata, che impensata novità!

...

Che impensata novità!

Donna Anna parte.

SCENA IX

Recitativo

ZERLINA

Dunque quello sei tu che il mio Masetto poco fa crudel-

mente maltrattasti?

DONNA ELVIRA

Dunque tu m’ingannasti, o scellerato, spacciandoti con me

da Don Giovanni?

DON OTTAVIO

Dunque tu in questi panni venisti qui per qualche tradi-

m e n t o !

ZERLINA

A me tocca punirlo!

DONNA ELVIRA

Anzi a me.

MOZART DON GIOVANNI

212

Pensées tournent dans ma tête :

Si je réchappe de cette tempête, ce sera prodige en vérité !

...

Ce sera prodige en vérité !

DONNA ANNA, ZERLINA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Cette nouvelle ! Imprévue, imprévue cette nouvelle !

...

Imprévue cette nouvelle !

Donna Anna sort.

SCÈNE IX

Récitatif

ZERLINA

Donc tu es celui qui vient de cruellement maltraiter mon

Masetto ?

DONNA ELVIRA

Donc tu m’as trompée, scélérat, te faisant passer auprès de

moi pour Don Giovanni ?

DON OTTAVIO

Donc tu es venu ici, sous ces vêtements, pour quelque

t r a î t r i s e !

ZERLINA

C’est à moi de le punir !

DONNA ELVIRA

À moi plutôt.

213

SECOND ACTE SCÈNE IX

DON OTTAVIO

No no, a me.

MASETTO

Accoppatelo meco tutti tre.

No 20. Aria

LEPORELLO (a Don Ottavio e Donna Elvira)

Ah, pietà, signori miei, ah pietà,

Pietà di me, pietà di me, pietà!

Do ragione a voi e lei, a voi e lei,

Ma, ma il delitto, il delitto mio non è, mio non è.

II padron con prepotenza,

L’innocenza mi rubò, l’innocenza mi rubò.

(Piano a Donna Elvira)

Donna Elvira, compatite! già capite come andò,

Già capite, già capite, già capite come andò.

(A Zerlina) Di Masetto non so nulla,

Non so nulla, nulla, nulla, nulla, nulla;

(Accennando Donna Elvira)

Vel dirà questa fanciulla, questa fanciulla:

È un’ oretta circumcirca,

Che con lei girando vo, che con lei girando vo.

(A Don Ottavio, con confusione)

A voi, signore, non dico niente...

Certo timore...certo accidente...

Di fuori chiaro... di dentro oscuro...

Non c’è riparo... la porta... il muro... lo... il... la...

(Additando la porta dov’era si chiuso per errore)

Vo da quel lato... poi qui celato...

L’affar si sa... oh, si sa...

(S’avvicina con destrezza alla porte e fugge.)

Ma s’io sapeva fuggia per qua, fuggia per qua

Fuggia per qua, fuggia per qua.

MOZART DON GIOVANNI

214

DON OTTAVIO

Non non, à moi.

MASETTO

Tous les trois, assommez-le avec moi.

No 20. Air

LEPORELLO (à Don Ottavio et Donna Elvira)

Ah pitié, mes seigneurs, ah pitié,

Pitié pour moi, pitié pour moi, pitié !

Je vous donne raison, à vous et à elle, à vous et à elle,

Mais ce forfait, ce forfait n’est pas le mien.

Mon maître, par violence

A volé mon innocence, a volé mon innocence.

(Bas, à Donna Elvira)

Donna Elvira, comprenez ! vous savez ce qu’il en est,

Vous savez, vous savez, vous savez ce qu’il en est.

(À Zerlina) Pour Masetto, je ne sais rien,

Je ne sais rien, rien, rien, rien, rien ;

(Montrant Donna Elvira)

Cette jeune fille vous le dira, cette jeune fille :

Ça fait une petite heure environ

Qu’avec elle je me balade, qu’avec elle je me balade.

(À Don Ottavio, troublé)

À vous, seigneur, je ne dis rien...

Une crainte... un hasard...

Dehors la lumière... dedans l’obscurité...

Aucun refuge... la porte... le mur... le... le... la...

(Désignant la porte où il était entré par erreur)

Je vais de ce côté...puis caché ici...

Ça s’est vu... oh, ça c’est vu...

(Il se rapproche adroitement de la porte et s’enfuit.)

Mais si j’avais su, j’aurais fui par là

J’aurais fui par là, j’aurais fui par là.

215

SECOND ACTE SCÈNE IX

SCENA X

Recitativo

DONNA ELVIRA

Ferma, perfido, ferma...

MASETTO

Il birbo ha l’ali ai piedi...

ZERLINA

Con qual arte si sottrasse l’iniquo!...

DON OTTAVIO

Amici miei, dopo eccessi sì enormi, dubitar non possiam

che Don Giovanni non sia l’empio uccisore del padre di

Donn’Anna: in questa casa per poche ore fermatevi... un

ricorso vo’ far a chi si deve, e in pochi istanti vendicarvi

prometto; così vuole dover, pietade, affetto.

No 21. Aria

DON OTTAVIO

Il mio tesoro intanto andate, andate a consolar,

E del bel ciglio il pianto cercate di asciugar,

Cercate, cercate, cercate di asciugar,

Cercate di asciugar.

Ditele che i suoi torti a vendicar io vado,

A vendicar io vado: che sol di stragi e morti

Nunzio vogl’io tornar, nunzio vogl’io tornar,

Sì, nunzio vogl’io tornar.

Il mio tesoro intanto andate, andate a consolar,

E del bel ciglio il pianto cercate di asciugar,

Cercate, cercate, cercate di asciugar,

MOZART DON GIOVANNI

216

SCÈNE X

Récitatif

DONNA ELVIRA

Arrête, coquin, arrête...

MASETTO

Le gredin a des ailes aux pieds...

ZERLINA

Avec quel art la canaille s’est enfuie !...

DON OTTAVIO

Mes amis, après de telles outrances, nous ne pouvons dou-

ter que Don Giovanni soit l’infâme assassin du père de

Donna Anna : demeurez un peu dans cette maison... je

vais recourir à qui de droit, et je promets de vous venger

sous peu ; ainsi le veulent le devoir, la piété et l’affection.

No 21. Air

DON OTTAVIO

En attendant, allez, allez consoler mon amour

Et tentez de sécher les larmes de ces beaux yeux,

Tentez, tentez, tentez de les sécher,

Tentez de les sécher.

Dites-lui que je vais venger les outrages qu’elle a subis,

Je vais les venger : hécatombe et mort

Je reviendrai les annoncer, les annoncer,

Je reviendrai les annoncer.

En attendant, allez, allez consoler mon amour

Et tentez de sécher les larmes de ces beaux yeux,

Tentez, tentez, tentez de les sécher,

217

SECOND ACTE SCÈNE X

Cercate di asciugar.

Ditele che i suoi torti a vendicar io vado,

A vendicar io vado: che sol di stragi e morti

Nunzio vogl’io tornar, nunzio vogl’io tornar,

Che sol di stragi e morti nunzio vogl’io tornar,

Sì, nunzio vogl’io tornar.

Zerlina, Don Ottavio e Masetto partono.

No 21b. Recitativo accompagnato ed Aria

DONNA ELVIRA

In quali eccessi, o Numi, in quai misfatti orribili, tremen-

di è avvolto il sciagurato! Ah no, non puote tardar l’ira del

cielo!... la giustizia tardar! Sentir già parmi la fatale saet-

ta, che gli piomba sul capo!... aperto vegg’io il baratro

mortal... Misera Elvira, che contrasto d’affetti, in sen ti

nasce!... Perchè questi sospiri, e queste ambasce?

Aria

Mi tradì quell’alma ingrata, quell’alma ingrata:

Infelice, oddio! mi fa, infelice, oddio! mi fa,

Infelice, oddio! oddio! mi fa.

Ma tradita e abbandonata, provo ancor per lui pietà,

Provo ancor per lui pietà, provo ancor per lui, per lui pietà.

Mi tradì quell’alma ingrata, quell’alma ingrata:

Infelice, oddio! mi fa, infelice oddio! mi fa,

Infelice, oddio! oddio! mi fa.

Quando sento il mio tormento, il mio tormento,

Di vendetta il cor favella: ma se guardo il suo cimento,

Palpitando il cor mi va, palpitando il cor mi va, palpitando!

Mi tradì quell’alma ingrata, quell’alma ingrata:

Infelice, oddio! mi fa, infelice, oddio! mi fa,

Infelice, oddio! oddio! mi fa.

Ma tradita, abbandonata, provo ancor per lui pietà,

Per lui pietà, provo ancor per lui, per lui pietà,

MOZART DON GIOVANNI

218

Tentez de les sécher.

Dites-lui que je vais venger les outrages qu’elle a subis,

Je vais les venger : hécatombes et mort

Je reviendrai les annoncer, les annoncer,

Hécatombe et mort, je reviendrai les annoncer,

Oui, je reviendrai les annoncer.

Zerlina, Don Ottavio et Masetto sortent.

No 21b. Récitatif accompagné & Air

DONNA ELVIRA

Dans quels outrances, ô dieux, dans quels horribles et ter-

ribles méfaits s’est vautré le misérable ! Ah non, la colère et

la justice divines ne peuvent tarder ! Je crois entendre déjà

la foudre fatale tomber sur sa tête !... je vois ouvert l’abîme

de la mort... Pauvre Elvira, quels sentiments opposés nais-

sent dans ton cœur! Pourquoi ces soupirs et cette angoisse ?

Air

Elle m’a trahie, cette âme ingrate, ingrate:

Elle m’a rendue malheureuse, ô Dieu,

Malheureuse, ô Dieu, ô Dieu.

Mais trahie, abandonnée, j’ai encore pitié de lui,

J’ai encore pitié de lui, j’ai encore pitié de lui, pitié de lui.

Elle m’a trahie, cette âme ingrate, ingrate :

Malheureuse, ô Dieu, elle m’a rendue malheureuse, ô Dieu,

Elle m’a rendu malheureuse, ô Dieu, ô Dieu.

Quand mon tourment me fait souffrir, mon tourment,

Mon cœur parle de vengeance: mais voyant le danger,

Mon cœur palpite, mon cœur palpite, palpite!

Elle m’a trahie, cette âme ingrate, ingrate:

Elle m’a rendu malheureuse, ô Dieu, malheureuse

M’a rendu malheureuse, malheureuse, ô Dieu.

Mais trahie, abandonnée, j’ai encore pitié de lui,

Pitié, j’ai encore pitié de lui, pitié de lui.

219

SECOND ACTE SCÈNE X

Provo ancor per lui, per lui pietà,

Per lui pietà per lui pietà per lui pietà

(Parte.)

SCENA XI

Recitativo

Loco chiuso in forma di sepolcreto.

Diverse statue equestri; statua del Commendatore.

DON GIOVANNI (ridendo forte, entra pel muretto)

Ah, ah, ah, ah, questa è buona: or lasciala cercar! Che

bella notte! È più chiara del giorno; sembra fatta per gir a

zonzo a caccia di ragazze. (Guarda sull’orologio.) È tardi?

Oh ancor non sono due della notte; avrei voglia un po’ di

saper come è finito l’affar tra Leporello e Donna Elvira.

S’egli ha avuto giudizio...

LEPORELLO (in strada)

Alfin vuole ch’io faccia un precipizio!

DON GIOVANNI

È desso; oh Leporello!

LEPORELLO (dal muretto)

Chi mi chiama?

DON GIOVANNI

Non conosci il padron?

LEPORELLO

Così nol conoscessi!

DON GIOVANNI

Come? birbo!

MOZART DON GIOVANNI

220

J’ai encore pitié de lui, pitié de lui,

Pitié de lui, pitié de lui, pitié de lui.

(Elle sort.)

SCÈNE XI

Récitatif

Lieu clos de murs ressemblant à un cimetière.

Plusieurs statues équestres; statue du Commandeur.

DON GIOVANNI (riant fort, entre en sautant le mur)

Ah, ah, ah, ah, elle est bonne celle-là : maintenant laisse-

la chercher ! Quelle belle nuit ! Plus claire que le jour ;

elle paraît faite pour chasser les filles. ( Regarde sa montre.)

Il est tard ? Oh, pas encore deux heures ; j’aimerais savoir

comment s’est finie l’affaire entre Leporello et Donna

Elvira, s’il a été malin.

LEPORELLO (dans la rue)

Finalement, il veut que je me perde !

DON GIOVANNI

C’est lui ; oh Leporello !

LEPORELLO (du mur)

Qui m’appelle ?

DON GIOVANNI

Tu ne reconnais pas ton maître ?

LEPORELLO

Si seulement je ne l’avais pas connu !

DON GIOVANNI

Comment ? Gredin !

221

SECOND ACTE SCÈNE XI

LEPORELLO

Ah siete voi? scusate!

DON GIOVANNI

Cosa è stato?

LEPORELLO

Per cagion vostra io fui quasi accoppato.

DON GIOVANNI

Ebben, no era questo un onore per te?

LEPORELLO

Signor, vel dono.

DON GIOVANNI

Via via, vien qua: che belle cose ti deggio dir!

LEPORELLO

Ma cosa fate qui?

DON GIOVANNI

Vien dentro; e lo saprai.

(Leporello entra; si cangiano d’abito.)

Diverse istorielle, che accadute mi son da che partisti, ti

dirò un’ altra volta: or la più bella ti vo’ solo narrar.

LEPORELLO

Donnesca al certo.

DON GIOVANNI

C’è dubbio? Una fanciulla, bella, giovin, galante, per la

strada incontrai; le vado appresso, la prendo per la mano,

fuggir mi vuole; dico poche parole, ella mi piglia... sai

per chi?

MOZART DON GIOVANNI

222

LEPORELLO

Ah, c’est vous ? excusez !

DON GIOVANNI

Que s’est-il passé ?

LEPORELLO

Par votre faute, j’ai été presque assommé.

DON GIOVANNI

Eh bien, n’était-ce pas un honneur pour toi ?

LEPORELLO

Seigneur, je vous le laisse.

DON GIOVANNI

Allez allez, viens là : que de belles choses j’ai à te dire!

LEPORELLO

Mais que faites-vous ici ?

DON GIOVANNI

Viens et tu le sauras.

(Leporello entre ; ils échangent leurs habits.)

Les petites histoires qui me sont arrivées depuis ton

départ, je te les dirai une autre fois : je ne vais te raconter

que la plus belle.

LEPORELLO

De femme, bien sûr.

DON GIOVANNI

Tu en doutes ? J’ai rencontré dans la rue une fille belle,

jeune, gracieuse ; je m’approche d’elle, je la prends par la

main, elle veut me fuir ; je lui dis peu de choses, elle me

prend... tu sais pour qui ?

223

SECOND ACTE SCÈNE XI

LEPORELLO

Non lo so.

DON GIOVANNI

Per Leporello.

LEPORELLO

Per me?

DON GIOVANNI

Per te.

LEPORELLO

Va bene.

DON GIOVANNI

Per la mano essa allora mi prende...

LEPORELLO

Ancora meglio.

DON GIOVANNI

M’accarezza, mi abbraccia... “Caro il mio Leporello, Lepo-

rello, mio caro...” Allor m’accorsi ch’era qualche tua bella.

LEPORELLO (a parte)

Oh maledetto!

DON GIOVANNI

Dell’inganno approfitto; non so come mi riconosce: grida;

sento gente; a fuggire mi metto; e pronto pronto, per quel

muretto in questo loco io monto.

LEPORELLO

E mi dite la cosa con tale indifferenza?

MOZART DON GIOVANNI

224

LEPORELLO

Je ne sais pas.

DON GIOVANNI

Pour Leporello.

LEPORELLO

Pour moi ?

DON GIOVANNI

Pour toi.

LEPORELLO

Très bien.

DON GIOVANNI

Elle me prend alors par la main...

LEPORELLO

Encore mieux.

DON GIOVANNI

Me caresse, m’embrasse... « Mon cher Leporello, Lepo-

rello, mon chéri...» Je m’aperçois alors qu’elle était une de

tes belles.

LEPORELLO (à part)

Oh maudit !

DON GIOVANNI

Je profite de la méprise ; elle me reconnaît, je ne sais

c o m m e n t : elle crie ; j’entends des gens, je prends la

fuite et vite vite, j’arrive ici par ce mur.

LEPORELLO

Et vous me dites la chose avec une telle indifférence ?

225

SECOND ACTE SCÈNE XI

DON GIOVANNI

Perché no?

LEPORELLO

Ma se fosse costei stata mia moglie?

DON GIOVANNI (ride molto forte)

Meglio ancora!

IL COMMENDATORE

Di rider finirai pria dell’aurora.

DON GIOVANNI

Chi ha parlato?

LEPORELLO (con atti di paura)

Ah! qualche anima sarà dell’altro mondo! che vi conosce a

fondo.

DON GIOVANNI

Taci, sciocco!

(Metta mano alla spada, cerca qua e là pel sepolcreto,

dando diverse percosse alle statue.)

Chi va là! chi va là!

IL COMMENDATORE

Ribaldo, audace, lascia a’ morti la pace.

LEPORELLO

Ve l’ho detto!

DON GIOVANNI (con indifferenza e sprezzo)

Sarà qualcun di fuori che si burla di noi... Ehi? del

Commendatore non è questa la statua? Leggi un poco

quella iscrizion.

MOZART DON GIOVANNI

226

DON GIOVANNI

Pourquoi pas ?

LEPORELLO

Mais si elle avait été ma femme ?

DON GIOVANNI (rit très fort)

Encore mieux !

LE COMMANDEUR

Avant le lever du jour, tu cesseras de rire.

DON GIOVANNI

Qui a parlé ?

LEPORELLO (avec des gestes apeurés)

Ah ! ça doit être une âme de l’autre monde ! qui vous

connaît à fond.

DON GIOVANNI

Tais-toi, imbécile !

(Il saisit son épée, cherche çà et là dans le cimetière,

frappant quelques statues.)

Qui va là ? Qui va là ?

LE COMMANDEUR

Scélérat, insolent, laisse les morts en paix.

LEPORELLO

Je vous l’ai dit !

DON GIOVANNI (avec indifférence et mépris)

Ce sera quelqu’un à l’extérieur qui se joue de nous... Eh ?

n’est-ce pas la statue du Commandeur ? Lis un peu cette

inscription.

227

SECOND ACTE SCÈNE XI

LEPORELLO

Scusate... non ho imparato a leggere a’ raggi della luna...

DON GIOVANNI

Leggi dico!

LEPORELLO (legge)

“Dell’empio che mi trasse al passo estremo qui attendo la

vendetta.” Udiste? Io tremo!

DON GIOVANNI

O vecchio buffonissimo! Digli che questa sera l’attendo a

cena meco.

LEPORELLO

Che pazzia! Ma vi par... oh Dei, mirate! che terribili

occhiate egli ci dà! Par vivo! par che senta! e che voglia

parlar...

DON GIOVANNI

Orsù, va là, o qui t’ammazzo, e poi ti seppellisco!

LEPORELLO (tremando)

Piano piano, signore, ora ubbidisco.

No 22. Duetto

LEPORELLO

O statua gentilissima del gran Commendatore...

(A Don Giovanni)

Padron... mi trema il core,

Non posso, non posso terminar.

DON GIOVANNI

Finiscila, o nel petto ti metto questo acciar, ti metto ques-

to acciar.

MOZART DON GIOVANNI

228

LEPORELLO

Excusez... je n’ai pas appris à lire à la lumière de la lune...

DON GIOVANNI

Lis te dis-je !

LEPORELLO (lit)

« J’attends ici la vengeance sur l’impie qui m’a mené au

trépas. » Vous entendez ? Je tremble !

DON GIOVANNI

Ô vieux bouffonissime ! Dis-lui que je l’attends ce soir à

ma table.

LEPORELLO

Quelle folie ! Mais il me semble... oh dieux, regardez ! il

lance de terribles regards ! On dirait qu’il vit ! qu’il

entend ! et qu’il veut parler...

DON GIOVANNI

Allons, va, ou je te tue ici et je t’enterre ensuite !

LEPORELLO (tremblant)

Tout doux, tout doux, seigneur, j’obéis.

No 22. Duo

LEPORELLO

Ô très noble statue du grand Commandeur...

(À Don Giovanni)

Maître... mon cœur tremble,

Je ne peux, je ne peux pas achever.

DON GIOVANNI

Termine ou je te plonge ce fer dans le cœur, je te plonge

ce fer.

229

SECOND ACTE SCÈNE XI

LEPORELLO

Che impiccio, che capriccio!

DON GIOVANNI

Che gusto, che spassetto!

LEPORELLO

Io sentomi gelar,

DON GIOVANNI

Lo voglio far

Tremar,

Lo voglio far tremar.

LEPORELLO

Io sentomi

Gelar

LEPORELLO

O statua gentilissima benchè di marmo siate...

(A Don Giovanni)

Ah padron... padron mio, mirate, mirate

Che seguita a guardar, che seguita a guardar.

DON GIOVANNI

Mori, mori!...

LEPORELLO

No no... no no, attendete... attendete...

(Alla statua)

Signor, il padron mio... badate ben, non io...

Vorria con voi cenar...

(La statua china la testa.)

Ah , ah, ah, che scena è questa!

Ah , ah, che scena è questa!

Oh ciel, chinò la testa!

MOZART DON GIOVANNI

230

LEPORELLO

Quelle affaire, quel caprice !

DON GIOVANNI

Quel plaisir, quelle joie !

LEPORELLO

Je me sens glacé,

DON GIOVANNI

Je veux le faire

Trembler,

Je veux le faire trembler.

LEPORELLO

Je me sens

Glacé.

LEPORELLO

Ô très noble statue, bien que vous soyez de marbre...

(À Don Giovanni)

Ah maître... mon maître, voyez, voyez...

Il continue à regarder, il continue à regarder.

DON GIOVANNI

Meurs, meurs !...

LEPORELLO

Non non... non non, attendez... attendez...

(À la statue)

Seigneur, mon maître... non pas moi notez bien,

Voudrait dîner avec vous...

(La statue incline la tête.)

Ah, ah, ah, mais quelle histoire !

Ah, ah, mais quelle histoire !

Oh ciel, il a incliné la tête !

231

SECOND ACTE SCÈNE XI

DON GIOVANNI

Va là, che se’ un buffone, va là, che se’ un buffone,

Se un buffone, se un buffone...

LEPORELLO

Guardate, guardate, guardate ancor, padrone!

DON GIOVANNI

E che degg’io guardar,

Degg’io guardar degg’io guardar?

LEPORELLO

Colla marmorea testa,

(Imita la statua.)

Ei fa così, così!

La statua china qui la testa.

DON GIOVANNI (vedendo il chino)E LEPORELLO

Colla marmorea testa,

Ei fa così, così!

DON GIOVANNI (alla statua)

Parlate se potete: verrete a cena? Verrete a cena?

IL COMMENDATORE

Sì!

LEPORELLO

Mover mi posso

Appena... mi manca, o Dei, la lena!

Mi manca, o Dei, la lena...

DON GIOVANNI

Bizzarra è inver la scena...Verrà il

Buon vecchio, il buon vecchio a cena...

MOZART DON GIOVANNI

232

DON GIOVANNI

Va donc, tu es fou, va donc, tu es fou,

Tu es fou, tu es fou...

LEPORELLO

Regardez, regardez, regardez encore, maître !

DON GIOVANNI

Et que devrais-je regarder,

Devrais-je regarder, devrais-je regarder ?

LEPORELLO

Avec sa tête en marbre

(Il imite la statue.)

Il fait comme ça, comme ça !

Ici, la statue incline la tête.

DON GIOVANNI (voyant le mouvement) & LEPORELLO

Avec sa tête en marbre

Il fait comme ça, comme ça !

DON GIOVANNI (à la statue)

Parlez si vous pouvez : viendrez-vous pour le dîner ?

LE COMMANDEUR

Oui !

LEPORELLO

Je peux à peine

Bouger... Ô dieux, le souffle me manque !

Ô dieux, le souffle me manque...

DON GIOVANNI

L’histoire est étrange en vérité... Le bon

Vieux, le vieux va venir pour le dîner...

233

SECOND ACTE SCÈNE XI

LEPORELLO

Per carità...

Partiamo, per carità, partiamo,

Andiamo via di qui, andiamo, andiamo via di qui.

DON GIOVANNI

A prepararla andiamo,

A prepararla andiamo, partiamo, via di qui.

LEPORELLO

Per carità,

Partiamo, andiamo via di qui.

DON GIOVANNI

Bizarra è inver la scena...

LEPORELLO

Per carità,

Partiamo, andiamo via di qui,

Andiamo via di qui, andiamo via di qui,

Andiamo, andiamo, andiamo, andiamo, andiamo,

Andiamo via di qui, via di qui,

DON GIOVANNI

Verrà il buon vecchio a cena...

A prepararla andiamo, partiamo via di qui,

Partiamo via di qui.

LEPORELLO

Di qui, di qui, di qui.

Partono.

MOZART DON GIOVANNI

234

LEPORELLO

Par pitié...

Partons, par pitié, partons,

Allons-nous en d’ici, allons, allons-nous en d’ici.

DON GIOVANNI

Allons le préparer,

Allons le préparer, allons-nous en d’ici.

LEPORELLO

Par pitié,

Partons, allons-nous en d’ici.

DON GIOVANNI

L’histoire est étrange en vérité...

LEPORELLO

Par pitié,

Partons, allons-nous en d’ici.

Allons-nous en d’ici, allons-nous en d’ici

Allons, allons, allons, allons, allons,

Allons-nous en d’ici, d’ici,

DON GIOVANNI

Le bon vieux viendra pour le dîner...

Allons le préparer, allons-nous en d’ici

Allons-nous en d’ici.

LEPORELLO

D’ici, d’ici, d’ici.

Ils sortent.

235

SECOND ACTE SCÈNE XI

SCENA XII

Camera tetra.

Recitativo

DON OTTAVIO

Calmatevi, idol mio; di quel ribaldo vedrem puniti in

breve i gravi eccessi; vendicati sarem.

DONNA ANNA

Ma il padre, oddio!

DON OTTAVIO

Convien chinare il ciglio ai voleri del ciel; respira, o cara,

di tua perdita amara fia domani, se vuoi, dolce compenso

questo cor; questa mano... che il mio tenero amor...

DONNA ANNA

O Dei, che dite?... In sì tristi momenti...

DON OTTAVIO

E che? vorresti con indugi novelli accrescer le mie pene?

Crudele!

No 23. Recitativo accompagnato e Rondo

DONNA ANNA

Crudele! Ah no, mio bene! Troppo mi spiace allontanarti

un ben che lungamente la nostr’alma desia...

Ma il mondo... oh Dio... non sedur la costanza del sensibil

mio core! Abbastanza per te mi parla amore.

Rondo

Non mi dir, bell’idol mio, che son io crudel con te;

Tu ben sai quant’io t’amai, tu conosci la mia fè,

MOZART DON GIOVANNI

236

SCÈNE XII

Une pièce obscure.

Récitatif

DON OTTAVIO

Calmez-vous, mon amour ; nous verrons bientôt punis les

graves outrages de ce scélérat ; nous serons vengés.

DONNA ANNA

Mais mon père, ô Dieu !

DON OTTAVIO

Face aux volontés du ciel, il faut s’incliner ; reprends ton

souffle, tu auras demain, si tu veux, douce réparation de ton

amère perte, ce cœur... cette main... que mon tendre amour. . .

DONNA ANNA

Ô dieux, que dites-vous ? En de si tristes instants...

DON OTTAVIO

Eh quoi ? voudrais-tu, par de nouvelles hésitations,

accroître mes peines ? Cruelle !

No 23. Récitatif accompagné & Rondo

DONNA ANNA

C r u e l l e ! Ah non, mon amour ! Il me déplaît trop d’éloigner

de toi un bonheur que notre âme désire depuis longtemps...

Mais le monde... oh Dieu... ne détourne pas la constance de

mon cœur sensible ! L’amour me parle assez pour toi.

Rondo

Ne me dis pas, mon bel amour, que je suis cruelle avec toi ;

Tu sais bien combien je t’aime, tu connais ma fidélité,

237

SECOND ACTE SCÈNE XII

Tu conosci la mia fè.

Calma, calma il tuo tormento,

Se di duol non vuoi ch’io mora,

Se di duol non vuoi ch’io mora, non vuoi ch’io mora!

Non mi dir, bell’idol mio, che son io crudel con te.

Calma, calma il tuo tormento,

Se di duol non vuoi ch’io mora, non vuoi ch’io mora!

Forse, forse un giorno il cielo ancora

Sentirà, sentirà pietà di me.

Forse un giorno il cielo ancora sentirà pietà di me,

Sentirà pietà, pietà di me, sentirà pietà di me.

Forse, forse il cielo un giorno sentirà pietà di me.

Sentirà pietà, di me, pietà di me.

(Parte.)

Recitativo

DON OTTAVIO

Ah, si segua il suo passo: io vo’ con lei dividere i martiri;

saran meco men gravi i suoi sospiri.

(Parte.)

SCENA XIII

No 24. Finale

Sala: una mensa preparata per mangiare; alcuni suonatori.

DON GIOVANNI

Già la mensa è preparata.

Voi suonate, amici cari:

Già che spendo i miei danari,

Io mi voglio divertir.

Leporello, presto in tavola!

MOZART DON GIOVANNI

238

Tu connais ma fidélité.

Apaise, apaise ton tourment,

Si tu ne veux pas que la douleur me tue,

Si tu ne veux pas que la douleur me tue, si tu ne veux pas

que je meure.

Ne me dis pas, mon bel amour, que je suis cruelle avec toi.

Apaise, apaise ton tourment,

Si tu ne veux pas que la douleur me tue, si tu ne veux pas

que je meure !

Peut-être, peut-être un jour le ciel encore aura pitié de moi.

Peut-être un jour le ciel encore aura pitié de moi,

Aura pitié, pitié de moi, aura pitié de moi.

Peut-être, peut-être un jour le ciel aura pitié de moi.

Aura pitié, de moi, pitié de moi.

(Elle sort.)

Récitatif

DON OTTAVIO

Ah, suivons ses pas : je veux partager son martyre ; en ma

compagnie, ses soupirs seront allégés.

(Il sort.)

SCÈNE XIII

No 24. Finale

Une salle : une table dressée; quelques musiciens.

DON GIOVANNI

La table est déjà dressée,

Vous, chers amis, jouez :

Puisque que je dépense mes deniers

Je veux me divertir.

Leporello, vite, à la table !

239

SECOND ACTE SCÈNE XIII

LEPORELLO

Son prontissimo a servir, son prontissimo a servir.

I servi portano in tavola, mentre Leporello vuol uscire.

DON GIOVANNI

Già che spendo i miei danari,

Io mi voglio divertir.

Voi suonate, amici cari:

Già che spendo i miei danari,

Io mi voglio divertir, io mi voglio divertir.

(Mangia; i suonatori cominiciano a suonare.)

LEPORELLO

Bravi! “Cosa rara”

DON GIOVANNI

Che ti par del bel concerto?

LEPORELLO

È conforme, è conforme al vostro merto.

DON GIOVANNI

Ah che piatto saporito! Ah che piatto saporito, saporito,

saporito!

LEPORELLO (a parte)

Ah che barbaro appetito! Che bocconi da gigante!

Mi par proprio di svenir. Mi par proprio di svenir.

DON GIOVANNI (a parte)

Nel veder i miei bocconi gli par proprio di svenir,

Gli par proprio di svenir.

MOZART DON GIOVANNI

240

LEPORELLO

Je suis tout prêt à vous servir, je suis tout prêt à vous servir.

Les serviteurs apportent les plats alors que Leporello

fait mine de sortir.

DON GIOVANNI

Puisque je dépense mes deniers,

Je veux me divertir.

Vous, chers amis, jouez :

Puisque je dépense mes deniers,

Je veux me divertir, je veux me divertir.

(Il mange ; les musiciens commencent à jouer.)

LEPORELLO

Bravo ! Cosa rara

DON GIOVANNI

Que dis-tu de ce beau concert ?

LEPORELLO

Il est digne, il est digne de votre valeur.

DON GIOVANNI

Ah quel plat savoureux ! Ah quel plat savoureux, savou-

reux, savoureux !

LEPORELLO (à part)

Ah, quel appétit de barbare ! Quels morceaux de géant !

Je suis près de défaillir. Je suis près de défaillir.

DON GIOVANNI (à part)

À la vue de ces morceaux, il est près de défaillir,

Il est près de défaillir.

241

SECOND ACTE SCÈNE XIII

LEPORELLO

Ah che barbaro appetito! Che bocconi da gigante!

DON GIOVANNI

Nel veder i miei bocconi gli par proprio,

Gli par proprio di svenir,

LEPORELLO

Ah che barbaro appetito!

DON GIOVANNI

Gli par proprio di svenir,

LEPORELLO

Che bocconi da gigante!

DON GIOVANNI

Gli par proprio di svenir,

Gli par proprio di svenir,

Gli par proprio di svenir!

LEPORELLO

Mi par proprio di svenir,

Mi par proprio di svenir!

DON GIOVANNI

Piatto.

LEPORELLO

Servo.

Evvivano i “Litiganti.”

DON GIOVANNI

Versa il vino!

(Leporello versa il vino nel bicchiere.)

Eccellente marzimino!

MOZART DON GIOVANNI

242

LEPORELLO

Ah, quel appétit de barbare ! Quels morceaux de géant !

DON GIOVANNI

À la vue de ces morceaux, il est près de défaillir,

Il est près de défaillir.

LEPORELLO

Ah, quel appétit de barbare !

DON GIOVANNI

Il est près de défaillir.

LEPORELLO

Quels morceaux de géant !

DON GIOVANNI

Il est près de défaillir.

Il est près de défaillir,

Il est près de défaillir !

LEPORELLO

Je suis près de défaillir.

Je suis près de défaillir.

DON GIOVANNI

Assiette.

LEPORELLO

À votre service.

Vive Les Plaideurs.

DON GIOVANNI

Verse le vin !

(Leporello verse du vin dans le verre.)

Excellent Marzemino !

243

SECOND ACTE SCÈNE XIII

Leporello cangia il piatto a Don Giovanni e mangia in fretta.

LEPORELLO (a parte)

Questo pezzo di fagiano piano piano piano piano piano vo’

inghiottir.

DON GIOVANNI (a parte)

Sta mangiando, quel marrano; fingerò di non capir.

LEPORELLO

Questa poi la conosco pur troppo...

DON GIOVANNI (senza guardarlo)

Leporello!

LEPORELLO (colla bocca piena)

Padron mio...

DON GIOVANNI

Parla schietto, parla schietto mascalzone!

LEPORELLO

Non mi lascia una flussione le parole proferir.

DON GIOVANNI

Mentre io mangio, fischia un poco.

LEPORELLO

Non so far!

DON GIOVANNI (s’accorge che mangia)

Cos’è?

LEPORELLO

Scusate, scusate; sì eccellente è il vostro cuoco,

MOZART DON GIOVANNI

244

Leporello change l’assiette de Don Giovanni et mange à la hâte.

LEPORELLO (à part)

Ce morceau de faisan, en douce, en douce, en douce, je

vais l’engloutir.

DON GIOVANNI (à part)

Voilà qu’il mange, ce renégat ; faisons semblant de ne rien voir.

LEPORELLO

Celle-là, je ne la connais que trop...

DON GIOVANNI (sans le regarder)

Leporello !

LEPORELLO (la bouche pleine)

Mon maître...

DON GIOVANNI

Articule, articule, malotru !

LEPORELLO

Une fluxion m’empêche de bien prononcer les mots.

DON GIOVANNI

Pendant que je mange, siffle un peu.

LEPORELLO

Je ne sais pas faire !

DON GIOVANNI (s’aperçoit qu’il mange)

Alors ?

LEPORELLO

Excusez, excusez ; votre cuisinier est si excellent,

245

SECOND ACTE SCÈNE XIII

Sì eccellente, sì eccellente è il vostro cuoco,

Che lo volli anch’io provar,

Che lo volli anch’io provar.

DON GIOVANNI

Sì eccellente è il cuoco

Mio,

LEPORELLO

Eccellente,

DON GIOVANNI

Che lo volle

Anch’ei provar.

LEPORELLO

Che lo volli ch’io provar.

SCENA XIV

DONNA ELVIRA (entra disperata)

L’ultima prova dell’amor mio ancor vogl’io fare con te.

Più non rammento gl’inganni tuoi, gl’inganni tuoi,

Pietade io sento...

DON GIOVANNI (sorgendo) E LEPORELLO

Cos’è? cos’è?

DONNA ELVIRA (s’inginocchia)

Da te non chiede quest’alma oppressa

Della sua fede qualche mercé.

DON GIOVANNI

Mi meraviglio! Cosa volete? cosa volete?

MOZART DON GIOVANNI

246

Votre cuisinier est si excellent, si excellent,

Que j’ai voulu goûter aussi,

Que j’ai voulu goûter aussi.

DON GIOVANNI

Mon cuisinier est si

Excellent,

LEPORELLO

Si

Excellent,

DON GIOVANNI

Qu’il a voulu

Goûter aussi.

LEPORELLO

Qu’il a voulu goûter aussi.

SCÈNE XIV

DONNA ELVIRA (entre, au désespoir)

Je veux te donner encore la dernière preuve de mon amour.

J’oublie tes tromperies, tes tromperies,

Je ressens de la pitié...

DON GIOVANNI (se levant) & LEPORELLO

Qu’y a-t-il ? Qu’y a-t-il ?

DONNA ELVIRA (s’agenouille)

Mon âme oppressée ne te demande

Aucun merci pour sa fidélité.

DON GIOVANNI

Je suis surpris ! Que voulez-vous ? que voulez-vous ?

247

SECOND ACTE SCÈNE XIV

Se non sorgete non resto in piè,

(S’inginocchia.)

Non resto in piè!

DONNA ELVIRA

Ah non deridere gli affanni miei.

LEPORELLO (fra sé)

Quasi da

Piangere mi fa costei.

DON GIOVANNI (sorgendo fa sorgere Donna Elvira)

Io te deridere?

DONNA ELVIRA

Ah non deridere...

LEPORELLO

Quasi da

Piangere

Mi fa costei.

DONNA ELVIRA

Ah non deridere...

DON GIOVANNI (con affettata tenerezza)

Io te deridere?

Cieli! Perchè?

Che vuoi, mio bene!

DONNA ELVIRA

Che vita cangi.

DON GIOVANNI

Brava!

MOZART DON GIOVANNI

248

Relevez-vous ou je m’abaisse,

(S’agenouille.)

Je m’abaisse !

DONNA ELVIRA

Ah ne vous moquez pas de mes tourments.

LEPORELLO (à part)

Elle me

Fait presque pleurer.

DON GIOVANNI (se relevant et relevant Donna Elvira)

Moi me moquer de toi ?

DONNA ELVIRA

Ah ne te moque pas...

LEPORELLO

Elle

Me fait

Presque pleurer.

DONNA ELVIRA

Ah ne te moque pas...

DON GIOVANNI (avec une tendresse affectée)

Moi, me moquer de toi ?

Ciel ! pourquoi ?

Que veux-tu, mon trésor !

DONNA ELVIRA

Que tu changes de vie.

DON GIOVANNI

Bravo !

249

SECOND ACTE SCÈNE XIV

DONNA ELVIRA

Cor perfido!

DON GIOVANNI

Brava!

DONNA ELVIRA

Cor perfido!

Cor perfido!

LEPORELLO

Cor perfido!

DON GIOVANNI

Lascia ch’io mangi, lascia ch’io mangi;

(Torna a sedere a mangiare.)

E se ti piace, mangia con me.

DONNA ELVIRA

Restati,

Barbaro! Nel lezzo immondo,

Esempio orribile d’iniquità!

LEPORELLO

Se non si muove del suo dolore,

Di sasso ha il core, o cor non ha!

DON GIOVANNI (bevendo)

Vivan le femmine, viva il buon vino,

Sostegno e gloria d’umanità,

Sostegno e gloria d’umanità,

DONNA ELVIRA

Restati

MOZART DON GIOVANNI

250

DONNA ELVIRA

Cœur perfide !

DON GIOVANNI

Bravo !

DONNA ELVIRA

Cœur perfide !

Cœur perfide !

LEPORELLO

Cœur perfide !

DON GIOVANNI

Laisse-moi manger, laisse-moi manger ;

(Il retourne s’asseoir à table.)

Et s’il te plaît, mange avec moi.

DONNA ELVIRA

Reste donc,

Barbare ! Dans la fange immonde,

Horrible exemple d’infamie !

LEPORELLO

S’il ne s’émeut pas de sa douleur,

Il a un cœur de pierre, ou pas de cœur du tout !

DON GIOVANNI (buvant)

Vivent les femmes, vive le bon vin,

Soutien et gloire de l’humanité,

Soutien et gloire de l’humanité.

DONNA ELVIRA

Reste donc

251

SECOND ACTE SCÈNE XIV

Barbaro nel lezzo immondo,

Restati, barbaro, nel lezzo immondo,

Esempio orribile d’iniquità,

LEPORELLO

Se non si muove del suo dolore,

Di sasso ha il core, di sasso ha il core,

O cor non ha,

DON GIOVANNI

Vivan le femmine,

Viva il buon vino, vivan le femmine,

Viva il buon vino sostegno e gloria d’umanità,

Sostegno e gloria d’umanità,

Sostegno e gloria d’umanità, d’umanità

D’umanità, sostegno e gloria d’umanità!

DONNA ELVIRA

Esempio orribile d’iniquità, d’iniquità, d’iniquità,

Esempio orribile d’iniquità!

(Sorte.)

LEPORELLO

Di sasso ha il core, o cor non ha, o cor non ha, o cor non ha,

Di sasso ha il core, o cor non ha!

DONNA ELVIRA (rientra e fugge dall’altre parte)

Ah!

DON GIOVANNI

Che grido è

Questo mai! Che grido, che grido è questo mai!

LEPORELLO

Che grido è questo mai! Che grido è questo mai!

MOZART DON GIOVANNI

252

Barbare ! Dans la fange immonde,

Reste donc, barbare, dans la fange immonde,

Horrible exemple d’infamie.

LEPORELLO

S’il ne s’émeut pas de sa douleur,

Il a un cœur de pierre, il a un cœur de pierre

Ou pas de cœur du tout !

DON GIOVANNI

Vivent les femmes,

Vive le bon vin, vivent les femmes,

Vive le bon vin, soutien et gloire de l’humanité,

Soutien et gloire de l’humanité,

Soutien et gloire de l’humanité, de l’humanité

De l’humanité, soutien et gloire de l’humanité !

DONNA ELVIRA

Exemple horrible d’infamie, d’infamie, d’infamie,

Exemple horrible d’infamie !

(Elle sort.)

LEPORELLO

Il a un cœur de pierre, ou pas de cœur du tout, du tout,

Il a un cœur de pierre, ou pas de cœur du tout !

DONNA ELVIRA (rentre et s’enfuit de l’autre côté)

Ah !

DON GIOVANNI

Quel est donc

Ce cri ! Quel est donc ce cri, ce cri !

LEPORELLO

Quel est donc ce cri ! Quel est donc ce cri !

253

SECOND ACTE SCÈNE XIV

DON GIOVANNI

Va’ a veder, va’ a veder che cosa è stato!

Leporello sorte e prima di tornare, mette un grido.

LEPORELLO

Ah!

DON GIOVANNI

Che grido indiavolato! Che grido indiavolato!

(Leporello entra spaventato e chiude l’uscio.)

Leporello, che cos’è? che cos’è? che cos’è?

LEPORELLO

Ah signor... per carità!... non andate fuor di qua!...

L’uom... di... sasso... l’uomo... bianco...

Ah padrone!... io gelo... io manco...

Se vedeste che figura!...

Se sentiste come fa: ta ta ta ta!

DON GIOVANNI

Non capisco niente affatto:

LEPORELLO

Ta ta ta ta!

DON GIOVANNI

Tu sei matto in verità, in verità, in verità.

Si sente battere alla porta.

LEPORELLO

Ah sentite!

DON GIOVANNI

Qualcun batte! Apri...

MOZART DON GIOVANNI

254

DON GIOVANNI

Va voir, va voir ce qui arrive !

Leporello sort et avant de revenir, pousse un cri.

LEPORELLO

Ah !

DON GIOVANNI

Quel cri d’enfer ! Quel cri d’enfer !

(Leporello entre épouvanté et ferme les issues.)

Leporello, que se passe-t-il ? que se passe-t-il ?

LEPORELLO

Ah seigneur... de grâce... ne sortez pas d’ici !...

L’homme... de... pierre... l’homme... blanc...

Ah maître !... je suis glacé... je manque...

Si vous voyiez quelle figure !...

Si vous entendiez ce qu’il fait : ta ta ta ta !

DON GIOVANNI

Je ne comprends rien du tout :

LEPORELLO

Ta ta ta !

DON GIOVANNI

En vérité, tu es fou, vraiment, vraiment.

On entend frapper à la porte.

LEPORELLO

Ah écoutez !

DON GIOVANNI

Quelqu’un frappe ! Ouvre...

255

SECOND ACTE SCÈNE XIV

LEPORELLO (tremando)

Io tremo...

DON GIOVANNI

Apri, dico!

LEPORELLO

Ah...

DON GIOVANNI

Apri!

LEPORELLO

Ah...

DON GIOVANNI

Matto! Per togliermi d’intrico

Ad aprir io stesso andrò, io stesso andrò.

(Piglia lume e va per aprire.)

LEPORELLO

Non vo’ più veder l’amico;

Pian pianin m’asconderò, m’asconderò.

(S’asconde sotto la tavola.)

(Don Giovanni apre.)

SCENA XV

IL COMMENDATORE

Don Giovanni, a cenar teco m’invitasti, e son venuto!

DON GIOVANNI

Non l’avrei giammai creduto, ma farò quel che potrò!

Leporello, un’ altra cena fa che subito si porti!

MOZART DON GIOVANNI

256

LEPORELLO (tremblant)

J’ai peur...

DON GIOVANNI

Ouvre, te dis-je !

LEPORELLO

Ah...

DON GIOVANNI

Ouvre !

LEPORELLO

Ah...

DON GIOVANNI

Fou ! Pour tirer ça au clair

Je vais ouvrir moi-même, moi-même.

(Il prend un flambeau et va ouvrir.)

LEPORELLO

Je ne veux plus voir le camarade ;

En douce, je vais me cacher, je vais me cacher.

(Il se cache sous la table.)

(Don Giovanni ouvre.)

SCÈNE XV

LE COMMANDEUR

Don Giovanni, tu m’as invité à dîner avec toi, et je suis venu !

DON GIOVANNI

Jamais je ne l’aurais cru, mais je ferai mon possible !

Leporello, fais apporter tout de suite un autre couvert !

257

SECOND ACTE SCÈNE XV

LEPORELLO (mezzo fuori col capo della mensa)

Ah padron! ah padron! ah padron siam tutti morti!

(Con molti atti di paura esce e va per partire.)

DON GIOVANNI

Vanne dico...

IL COMMENDATORE

Ferma un po’. Non si pasce di cibo mortale chi si pasce di

cibo celeste.

Altre cure più gravi di queste, altra brama quaggiù mi

guidò!

LEPORELLO

La terzana

D’avere mi sembra

DON GIOVANNI

Parla dunque:

LEPORELLO

E le membra fermar più

Non so.

DON GIOVANNI

Che chiedi,

LEPORELLO

La terzena d’avere

Mi sembra,

DON GIOVANNI

Che vuoi?

LEPORELLO

E le membra fermar più non

MOZART DON GIOVANNI

258

LEPORELLO (sortant la tête à moitié de sous la table)

Ah maître! ah maître! ah maître nous sommes tous morts !

(Il sort avec beaucoup de gestes de frayeur et s’apprête à partir. )

DON GIOVANNI

Va te dis-je...

LE COMMANDEUR

Arrête un peu. Il ne se nourrit pas de nourritures terrestres

celui qui se nourrit de nourritures célestes.

D’autres soins, plus graves que ceux-là, d’autres volontés

m’ont mené ici bas !

LEPORELLO

Je crois

Que j’ai la fièvre

DON GIOVANNI

Parle donc :

LEPORELLO

Et je ne peux m’arrêter

De trembler.

DON GIOVANNI

Que demandes-tu,

LEPORELLO

Je crois

Que j’ai la fièvre

DON GIOVANNI

Que veux-tu ?

LEPORELLO

Et je ne peux m’arrêter

259

SECOND ACTE SCÈNE XV

So.

IL COMMENDATORE

Parlo,

Ascolta, più tempo non ho.

DON GIOVANNI

Parla, parla, ascoltando ti sto.

IL COMMENDATORE

Tu m’invitasti a cena, il tuo dover or sai;

Rispondimi, rispondimi: verrai tu a cenar meco?

LEPORELLO (da lontano, tremando)

Oibò, oibò! tempo non ha, scusate.

DON GIOVANNI

A torto di viltate tacciato mai sarò!

IL COMMENDATORE

Risolvi:

DON GIOVANNI

Ho già risolto.

IL COMMENDATORE

Verrai?

LEPORELLO (a Don Giovanni)

Dite di no! dite di no!

DON GIOVANNI

Ho fermo il cuore in petto: non ho timor, verrò!

MOZART DON GIOVANNI

260

De trembler.

LE COMMANDEUR

Je parle,

Écoute, je n’ai plus le temps.

DON GIOVANNI

Parle, parle, je t’écoute

LE COMMANDEUR

Tu m’as invité à dîner, tu connais maintenant ton devoir ;

Réponds-moi, réponds-moi : viendras-tu dîner avec moi ?

LEPORELLO (de loin, tremblant)

Ah non, ah non ! il n’a pas le temps, excusez !

DON GIOVANNI

Jamais on ne m’accusera de lâcheté !

LE COMMANDEUR

Décide-toi :

DON GIOVANNI

J’ai déjà décidé.

LE COMMANDEUR

Tu viendras ?

LEPORELLO (à Don Giovanni)

Dites non ! dites non !

DON GIOVANNI

Mon cœur est solide dans ma poitrine : je n’ai pas peur,

je viendrai !

261

SECOND ACTE SCÈNE XV

IL COMMENDATORE

Dammi la mano in pegno!

DON GIOVANNI

Eccola!

(Grida forte.)

Oimè!

IL COMMENDATORE

Cos’hai?

DON GIOVANNI

Che gelo è questo mai?

IL COMMENDATORE

Pentiti, cangia vita: è l’ultimo momento!

DON GIOVANNI (vuol sciogliersi, ma invano)

No no, ch’io non mi pento vanne lontan da me!

IL COMMENDATORE

Pentiti, scellerato!

DON GIOVANNI

No, vecchio infatuato!

IL COMMENDATORE

Pentiti!

DON GIOVANNI

No!

IL COMMENDATORE

Pentiti!

MOZART DON GIOVANNI

262

LE COMMANDEUR

En gage, donne moi ta main !

DON GIOVANNI

La voici !

(Il pousse un cri violent.)

Hélas !

LE COMMANDEUR

Qu’as-tu ?

DON GIOVANNI

Quel est ce froid ?

LE COMMANDEUR

Repens-toi, change de vie : c’est le dernier moment !

DON GIOVANNI (voulant se dégager, en vain)

Non non, je ne me repens pas, éloigne-toi de moi !

LE COMMANDEUR

Repens-toi, scélérat !

DON GIOVANNI

Non, vieux fat !

LE COMMANDEUR

Repens-toi !

DON GIOVANNI

Non !

LE COMMANDEUR

Repens-toi !

263

SECOND ACTE SCÈNE XV

DON GIOVANNI

No!

IL COMMENDATORE

Sì!

DON GIOVANNI

No!

IL COMMENDATORE

Sì!

DON GIOVANNI

No!

LEPORELLO

Sì!

Sì!

IL COMMENDATORE

Sì!

DON GIOVANNI

No! No!

IL COMMENDATORE

Ah tempo più non v’è!

(Parte.)

Foco da diverse parti, tremuoto.

DON GIOVANNI

Da qual tremore insolito... Sento assalir gli spiriti...

Donde escono quei vortici di foco pien d’orror!

MOZART DON GIOVANNI

264

DON GIOVANNI

Non !

LE COMMANDEUR

Si !

DON GIOVANNI

Non !

LE COMMANDEUR

Si !

DON GIOVANNI

Non !

LEPORELLO

Si !

Si !

LE COMMANDEUR

Sì !

DON GIOVANNI

Non ! Non !

LE COMMANDEUR

Ah, le temps est écoulé !

(Il sort.)

Feu de plusieurs côtés, tremblement de terre.

DON GIOVANNI

Quel étrange frisson assaille mes esprits...

D’où sortent ces tourbillons de feu et d’horreur ?

265

SECOND ACTE SCÈNE XV

CORO (di sotterra, con voci cupe)

Tutto a tue colpe è poco.

Vieni: c’è un mal peggior!

DON GIOVANNI

Chi l’anima mi lacera! Chi m’agita le viscere?

Che strazio, ohimè, che smania! Che inferno,

LEPORELLO

Che ceffo disperato!

Che gesti da dannato!

Che gridi, che lamenti!

DON GIOVANNI

Che terror!

LEPORELLO

Come mi fa terror, mi fa terror!

CORO

Tutto a tue colpe

È poco

DON GIOVANNI

Chi l’anima mi lacera!

LEPORELLO

Che ceffo

Disperato!

CORO

Vieni: c’è un mal peggior!

DON GIOVANNI

Chi ma’agita le viscere!

MOZART DON GIOVANNI

266

CHŒUR (de sous la terre, aux voix sombres)

C’est peu pour toutes tes fautes.

Viens : voici un mal plus grand !

DON GIOVANNI

Qui déchire mon âme ? Qui secoue mes entrailles ?

Quelle torture, hélas, quel tourment ! Quel enfer,

LEPORELLO

Quelle mine désespérée !

Quels gestes de damné !

Quels cris, quelles lamentations !

DON GIOVANNI

Quelle terreur !

LEPORELLO

Je suis terrifie, terrifié !

CHŒUR

Pour toutes tes fautes

C’est peu.

DON GIOVANNI

Qui déchire mon âme !

LEPORELLO

Quelle mine de

Désespoir !

CHŒUR

Viens : voici un mal plus grand !

DON GIOVANNI

Qui secoue mes entrailles !

267

SECOND ACTE SCÈNE XV

Che strazio, oimè, che smania!

LEPORELLO

Che gesti da dannato

Che gridi,

LEPORELLO

Che

Lamenti!

DON GIOVANNI

Ah!

LEPORELLO

Che

Gridi, che lamenti!

Come mi fa terror!

CORO

Vieni! Vieni!

Vieni: c’è un mal peggior!

DON GIOVANNI

Che inferno! Che terror!

(Il foco cresce; si sprofonda.)

DON GIOVANNI

Ah!

(Resta inghiotitto dalla terra.)

LEPORELLO

Ah!

MOZART DON GIOVANNI

268

Quelle torture, hélas, quel tourment !

LEPORELLO

Quels gestes de damné !

Quels cris,

LEPORELLO

Quelles

Lamentations !

DON GIOVANNI

Ah !

LEPORELLO

Quels

Cris, quelles lamentations !

Je suis terrifié !

CHŒUR

Viens ! Viens !

Viens : voici un mal plus grand !

DON GIOVANNI

Quel enfer ! Quelle terreur !

(Le feu grandit, Don Giovanni s’enfonce dans le sol.)

DON GIOVANNI

Ah !

(Il est englouti par la terre.)

LEPORELLO

Ah !

269

SECOND ACTE SCÈNE XV

SCENA ULTIMA

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO

E MASETTO (con ministri di giustizia)

Ah, dove è il perfido, dov’è l’indegno?

Tutto il mio sdegno sfogar io vo’, sfogar io vo’.

DONNA ANNA

Solo mirandolo stretto in catene, alle mie pene alma darò.

LEPORELLO

Più non sperate... di ritrovarlo... più non cercate:

Lontano andò, lontano andò.

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Cos’è?

Favella! Cos’è? favella!

Via presto, sbrigati...

LEPORELLO

Venne un colosso... venne un colosso... Ma

Se non

Posso... Ma se...

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Via presto, sbrigati!

LEPORELLO

... Non posso, ma se non posso,

Ma se non posso, ma se non posso...

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Presto! favella! sbrigati!

MOZART DON GIOVANNI

270

DERNIÈRE SCÈNE

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO

& MASETTO (avec des officiers de justice)

Ah, où est le perfide, où est l’infâme ?

Je vais faire éclater ma colère.

DONNA ANNA

Le voir chargé de chaînes apaiserait toutes mes peines.

LEPORELLO

N’espérez plus... le retrouver... ne cherchez plus :

Il est parti loin, il est parti loin.

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Comment ?

Parle ! Comment ? parle !

Allez vite, dépêche-toi...

LEPORELLO

Un colosse est venu... un colosse est venu... Mais

Si je ne

Peux... Mais si...

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Allez vite, dépêche-toi !

LEPORELLO

... Je ne peux pas, mais si je ne peux pas,

Mais si je ne peux pas, mais si je ne peux pas...

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Vite ! parle ! dépêche-toi !

271

SECOND ACTE DERNIÈRE SCÈNE

LEPORELLO

Tra fumo e foco... badate un poco... l’uomo di sasso...

Fermate il passo... giusto là sotto... diede il gran botto...

Giusto là il diavolo, se ’l trangugiò.

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO

E MASETTO

Stelle! che sento!

LEPORELLO

Vero è l’evento!

DONNA ELVIRA

Ah certo è

L’ombra che m’incontrò,

DONNA ANNA

Ah certo è l’ombra che l’incontro,

ZERLINA E DON OTTAVIO

Ah certo è l’ombra,

MASETTO

Ah

Certo è

L’ombra, è

L’ombra che l’incontrò,

Ah certo è l’ombra, ah certo è l’ombra che l’incontro!

DONNA ANNA, ZERLINA, DON OTTAVIO

Ah, certo è

L’ombra che l’incontrò.

Ah certo è l’ombra, ah certo è l’ombra che l’incontro!

DONNA ELVIRA

Ah, certo è

MOZART DON GIOVANNI

272

LEPORELLO

Dans la fumée et le feu... écoutez un peu... l’homme de pierre...

Arrêtez-vous... juste là-dessous... il a frappé un grand coup...

Juste là, le diable se l’est englouti.

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA, DON OTTAVIO

& MASETTO

Ciel ! qu’entends-je !

LEPORELLO

La chose est vraie !

DONNA ELVIRA

Ah c’est sûrement

L’ombre que j’ai rencontrée,

DONNA ANNA

Ah c’est sûrement l’ombre qu’elle a rencontrée,

ZERLINA & DON OTTAVIO

Ah, c’est sûrement l’ombre,

MASETTO

Ah

C’est sûrement

L’ombre, c’est

L’ombre qu’elle a rencontrée,

Ah c’est sûrement l’ombre, l’ombre qu’elle a rencontrée !

DONNA ANNA, ZERLINA & DON OTTAVIO

Ah, c’est sûrement

L’ombre qu’elle a rencontrée

Ah c’est sûrement l’ombre, l’ombre qu’elle a rencontrée !

DONNA ELVIRA

Ah, c’est sûrement

273

SECOND ACTE DERNIÈRE SCÈNE

L’ombra che m’incontrò.

Ah certo è l’ombra, ah certo, ah certo è l’ombra che

m’ i n c o n t r o !

DON OTTAVIO

Or che tutti, o mio tesoro, vendicati siam dal cielo,

Porgi, porgi a me un ristoro: non mi far languire ancor.

DONNA ANNA

Lascia, o caro, un anno ancora allo sfogo del mio cor.

DON OTTAVIO

Al desio di chi

M’adora

DONNA ANNA

Al

Desio di chi

T’adora

DON OTTAVIO

Ceder

Deve un fido amor,

DONNA ANNA

Ceder deve un fido amor;

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Ceder deve, ceder deve un fido amor.

DONNA ANNA

Al desio di chi

T’adora

DON OTTAVIO

Al

MOZART DON GIOVANNI

274

L’ombre que j’ai rencontrée.

Ah c’est sûrement l’ombre, sûrement l’ombre que j’ai

r e n c o n t r é e !

DON OTTAVIO

Mon amour, maintenant que le ciel nous a tous vengés,

Donne-moi consolation : ne me fais pas languir encore.

DONNA ANNA

Ô cher, laisse encore une année à mon cœur pour s’épancher.

DON OTTAVIO

Au désir de qui

M’adore

DONNA ANNA

Au

Désir de qui

T’adore

DON OTTAVIO

Doit

Céder un fidèle amour,

DONNA ANNA

Doit céder un fidèle amour ;

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Doit céder, doit céder un fidèle amour.

DONNA ANNA

Au désir de qui

T’adore

DON OTTAVIO

Au

275

SECOND ACTE DERNIÈRE SCÈNE

Desio di chi

M’adora

DONNA ANNA

Ceder

Deve un fido

Amor,

DON OTTAVIO

Ceder

Deve un fido amor,

DONNA ANNA E DON OTTAVIO

Ceder deve, ceder deve un fido amor,

Un fido, un fido amor.

DONNA ELVIRA

Io men vado in un ritiro a finir la vita mia.

ZERLINA

Noi, Masetto, a casa andiamo, a cenar in compagnia.

MASETTO

Noi, Zerlina, a casa andiamo, a cenar in compagnia.

LEPORELLO

Ed io vado all’osteria a trovar padron miglior.

ZERLINA, MASETTO E LEPORELLO

Resti dunque quel birbon

Con Proserpina e Pluton, con Proserpina e Pluton.

E noi tutti, o buona gente, ripetiam allegramente

L’antichissima canzon, l’antichissima canzon:

DONNA ANNA E DONNA ELVIRA

Questo è il fin di chi fa mal, di chi fa mal,

MOZART DON GIOVANNI

276

Désir de qui

M’adore

DONNA ANNA

Doit

Céder un fidèle

Amour,

DON OTTAVIO

Doit

Céder un fidèle amour,

DONNA ANNA & DON OTTAVIO

Doit céder, doit céder un fidèle amour,

Un fidèle, un fidèle amour.

DONNA ELVIRA

Moi je vais finir ma vie en un lieu retiré.

ZERLINA

Nous, Masetto, allons à la maison, pour dîner ensemble.

MASETTO

Nous, Zerlina, allons à la maison, pour dîner ensemble.

LEPORELLO

Et moi, à l’auberge, pour trouver un meilleur maître.

ZERLINA, MASETTO & LEPORELLO

Que cette canaille reste donc

Avec Proserpine et Pluton, Proserpine et Pluton.

Et nous tous, ô bonnes gens, répétons allègrement,

La très ancienne chanson, la très ancienne chanson :

DONNA ANNA ET DONNA ELVIRA

Ainsi finissent les méchants, les méchants,

277

SECOND ACTE DERNIÈRE SCÈNE

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO, MASETTO

E LEPORELLO

Questo è il fin!

ZERLINA

Questo è il fin di chi fa mal, di chi fa mal,

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA E DON OTTAVIO

Questo è il

Fin! Questo è il fin di chi fa mal, di chi fa mal!

MASETTO E LEPORELLO

Questo è il fin di chi fa mal,

Di chi fa mal, di chi fa mal!

TUTTI

Questo è il fin di chi fa mal, di chi fa mal!

E de’ perfidi la morte

Alla vita è sempre, è sempre ugual, è sempre ugual!

E de’ perfidi la morte

Alla vita è sempre, è sempre, è sempre ugual,

Alla vita è sempre ugual, alla vita è sempre ugual,

È sempre ugual, è sempre ugual, è sempre ugual!

Fine dell’opera

MOZART DON GIOVANNI

278

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, DON OTTAVIO, MASETTO

& LEPORELLO

Ainsi finissent !

ZERLINA

Ainsi finissent les méchants, les méchants,

DONNA ANNA, DONNA ELVIRA, ZERLINA & DON OTTAVIO

Ainsi

Finissent ! Ainsi finissent les méchants, les méchants !

MASETTO & LEPORELLO

Ainsi finissent les méchants,

Les méchants, les méchants !

TOUS

Ainsi finissent les méchants, les méchants !

Et la mort des trompeurs

À leur vie toujours ressemble, toujours, toujours ressemble !

Et la mort des trompeurs

À leur vie toujours ressemble, toujours, toujours ressemble !

À leur vie toujours ressemble,

Toujours ressemble, toujours ressemble !

Fin de l’opéra

Traduction française : Jean Spenlehauer

279

SECOND ACTE DERNIÈRE SCÈNE

CAHIER de LECTURES

Molière

Un cœur à aimer toute la terre

Ivan Nagel

L’incarnation du bonheur

André Tubeuf

La chasse & la fuite

Alfred de Musset

Sérénade de Don Juan

Lorenzo Da Ponte

Don Juan n’eut aucun succès

E.T.A. Hoffmann

Don Juan

Jean Genet

Parmi les morts

Alexandre Blok

Les pas du Commandeur

Charles Baudelaire

Don Juan aux enfers

Quand on fait ricocher une pierre à la surface de l’eau,

elle y court un certain temps en bonds légers, mais au

dernier, elle plonge d’un coup dans l’abîme : Don Giovanni

danse de même au-dessus de l’abîme, tout à l’allégresse du

court délai qui lui est accordé.

SOREN KIERKEGAARD

(1813-1855)

’ ’

283

MOLIÈRE

Un cœur à aimer toute la terr e

DOM JUAN (à Sganarelle)

Quoi ? tu veux qu’on se lie à demeurer au premier objet

qui nous prend, qu’on renonce au monde pour lui, et qu’on

n’ait plus d’yeux pour personne ? La belle chose de vouloir se

piquer d’un faux honneur d’être fidèle, de s’ensevelir pour

toujours dans une passion, et d’être mort dès sa jeunesse, à

toutes les autres beautés qui nous peuvent frapper les yeux :

non, non, la constance n’est bonne que pour des ridicules,

toutes les belles ont droit de nous charmer, et l’avantage d’être

rencontrée la première, ne doit point dérober aux autres les

justes prétentions qu’elles ont toutes sur nos coeurs. Pour moi,

la beauté me ravit partout, où je la trouve ; et je cède facile-

ment à cette douce violence, dont elle nous entraîne ; j’ai beau

être engagé, l’amour que j’ai pour une belle, n’engage point

mon âme à faire injustice aux autres ; je conserve des yeux

pour voir le mérite de toutes, et rends à chacune les hom-

mages, et les tributs où la nature nous oblige. Quoi qu’il en

TITRE COURANT

MOLIÈRE

soit, je ne puis refuser mon coeur à tout ce que je vois d’ai-

mable, et dès qu’un beau visage me le demande, si j’en avais

dix mille, je les donnerais tous. Les inclinations naissantes

après tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de

l’amour est dans le changement. On goûte une douceur extrê-

me à réduire par cent hommages le coeur d’une jeune beauté,

à voir de jour en jour les petits progrès qu’on y fait ; à com-

battre par des transports, par des larmes, et des soupirs, l’in-

nocente pudeur d’une âme, qui a peine à rendre les armes, à

forcer pied à pied toutes les petites résistances qu’elle nous

oppose, à vaincre les scrupules, dont elle se fait un honneur,

et la mener doucement, où nous avons envie de la faire venir.

Mais lorsqu’on en est maître une fois, il n’y a plus rien à dire,

ni rien à souhaiter, tout le beau de la passion est fini, et nous

nous endormons dans la tranquillité d’un tel amour ; si

quelque objet nouveau ne vient réveiller nos désirs, et pré-

senter à notre coeur les charmes attrayants d’une conquête à

faire. Enfin, il n’est rien de si doux, que de triompher de la

résistance d’une belle personne ; et j’ai sur ce sujet l’ambition

des conquérants, qui volent perpétuellement de victoire en

victoire, et ne peuvent se résoudre à borner leurs souhaits. Il

n’est rien qui puisse arrêter l’impétuosité de mes désirs, je me

sens un coeur à aimer toute la terre; et comme Alexandre, je

souhaiterais qu’il y eût d’autres mondes, pour y pouvoir

étendre mes conquêtes amoureuses.

Extrait de Dom Juan , acte I, scène 2 (1665)

285

IVAN NAGEL

L’INCARNATION DU BONHEUR

Don Giovanni va en enfer – parce que jusqu’à la fin il

lance à la face du ciel la devise des opéras bouffes de Mozart :

« Le ciel, c’est les autres. » Il ne connaît que les hommes, il

est assoiffé de les voir, de les sentir, de les toucher. Comme mû

par le génie déchaîné du buffa, il cherche la présence d’autrui

la plus pleine, la plus proche, à savoir celle des femmes.

Certes, ses ardeurs supposent souffrance, lutte et mort d’au-

trui ; et son dialogue avec le Convive de pierre fait finalement

éclater souffrance, lutte et mort en ce gigantesque rictus d’ago-

nie que ni drame ni musique ne donnent généralement à voir,

mais seulement les cauchemars. Cependant, des Noces à Don

Giovanni, la cohérence et l’élan expressif des personnages,

leur présence sans réserve dans les ensembles n’ont en rien

diminué. Le Dramma giocoso (Mozart dans son catalogue le

dénomma « opera buffa ») déborde, autant que la Commedia

per musica, d’un bonheur sonore. Oui, il constitue la tentative

d’un bonheur immanent au terrestre. Que le héros le prenne

IVAN NAGEL

au sens littéral ou fondamental, qu’importe. Car le principe

fondamental de Don Giovanni est le littéral ; son bonheur –

comme Kierkegaard l’a compris n’est pas la femme ni toutes

les femmes, mais chaque femme. Au milieu de la structure de

la comédie s’entrouvre un paradoxe déconcertant : Don Gio-

vanni traque le bonheur d’autrui, non par avidité, jalousie ou

misanthropie, mais parce qu’il est l’incarnation du bonheur.

Extrait de Autonomie et grâce. Sur les opéras de Mozart

Traduit de l’allemand par Anne-Marie Lang

© Éditions de l’Aube, 1990

287

ANDRÉ TUBEUF

LA CHASSE & LA FUITE

Don Juan, visiblement, n’aime pas les livres. Le seul qu’ i l

traîne avec lui, ou plutôt fait porter par son valet, est un livre

aux pages blanches : et ce qu’il y écrit, ce sont ses a v e n t u r e s,

épisodes d’une vie supposée, d’une vie amoureuse, et où un

nom de plus inscrit figure une place forte conquise, une vertu

convertie. Pascal n’avait pas encore écrit son étude sur le diver-

tissement quand Tirso de Molina, le premier, fixa les traits du

Séducteur de Séville. Mais ce sont Les Pensées de Pascal que

Don Juan pourrait avoir comme livre de chevet, comme bré-

viaire, comme bible – s’il pouvait lire. À quoi se résume le mal-

heur de l’homme selon Pa s c a l ? À ce qu’il ne peut se tenir seul

et tranquille dans une chambre. Sa propre société ne l’assomme

pas seulement, elle l’inquiète. Il faudra bien qu’il s’en délivre

par quelque chose qui l’agite : une meute qui passe sous sa

fenêtre, un manège qui tourne dans la rue, même une mouche

qui bourdonne dans sa chambre. En chasse, alors ! Mais pour

quoi faire ? Pas pour prendre. Pour s’étourdir, pour s’oublier,

pour tuer le temps, faute de pouvoir se tuer soi-même – ce pour

quoi on ne s’aime pas assez. Préférer la chasse à la prise, telle

est la leçon que Pascal tire de l’examen de ce divertissement qui

nous chasse nous-mêmes sur les chemins, gibier plutôt que

chasseurs, et sûrement victimes avant de jouer nous-mêmes au

b o u r r e a u ; et c’est une leçon nihiliste. À quoi mènent, en effet,

tant d’efforts ? Christophe Colomb ambitionnait de révéler et

d’imposer à la ferveur des hommes une figure neuve du monde ;

les Croisés allaient délivrer Constantinople, ou Jérusalem ;

même Don Quichotte, avec sa Rossinante et ses moulins à vent,

pouvait espérer retrouver un jour son preux entre les preux,

Amadis de Gaule, son modèle. Qui chasse ne cherche rien qu’ à

fuir en avant. Sûrement il tuera son lièvre, ou son perdreau.

Sûrement il ne fera pas grâce à la victime, si elle le regarde avec

ses yeux suppliants, soudain humains, comme dans les contes

du folklore. Et sûrement il ne mangera pas de gibier, ni ce soir

ni demain. Ainsi Don Juan court ce qui reste à courir dans ce

monde sans aventure : les femmes.

Ce n’est honorable ni pour lui, ni pour elles. L’Occident –

Denis de Rougemont l’a assez montré dans son illustre essai

L’Amour et l’Occident – a formé sa spiritualité, il l’a fixée et

sublimée autour de la figure des femmes, créatures plus faibles

et plus gracieuses, offertes à la convoitise du soudard et du

pillard. La courtoisie consiste précisément à respecter ce que la

Nature a fait sans force (la force, elle, se faisant respecter d’elle-

même). Intouchable, insensible même, doit être la femme.

Q u’elle reste sourde aux déclarations, qu’elle refuse jusqu’à son

oreille. Ainsi l’amant rebuffé s’en ira courir l’aventure ; au

r e t o u r, après sept ans d’épreuve, on l’entendra peut-être, faute

de l’exaucer déjà. Mais comment supporter cette présence de la

femme, l’intouchable, dans une Espagne, et une France, et une

Allemagne, désormais redevenues provinces, où il n’y a plus

rien à faire, de tout le jour, que passer et repasser sur la place

(comme au prélude de Carmen en cette même Séville), guettant

une œillade, assiégeant les vertus ? Depuis qu’on ne se bat plus

contre les infidèles, il n’y a plus que les femmes qui soient, der-

rière balcons et jalousies, places fortes.Un barbon, Bartolo, dans

cette même Séville, croira toujours tenir les clés d’une place

forte, dans Le Barbier q u’on sait. Et Don Juan, désoeuvré, chasse

en ville : et ce qu’il chasse l’ennuie autant que ce qu’il fuit.

Extrait de L’Offrande musicale, Collections Bouquins

© Robert Laffont, 2007

ANDRÉ TUBEUF

289

ALFRED DE MUSSET

SÉRÉNADE de DON JUAN

Vous souvient-il, lecteur, de cette sérénade

Que don Juan, déguisé, chante sous un balcon ?

– Une mélancolique et piteuse chanson,

Respirant la douleur, l’amour et la tristesse.

Mais l’accompagnement parle d’un autre ton.

Comme il est vif, joyeux ! avec quelle prestesse

Il sautille ! – On dirait que la chanson caresse

Et couvre de langueur le perfide instrument,

Tandis que l’air moqueur de l’accompagnement

Tourne en dérision la chanson elle-même,

Et semble la railler d’aller si tristement.

Tout cela cependant fait un plaisir extrême. –

C’est que tout en est vrai, – c’est qu’on trompe et qu’on aime ;

C’est qu’on pleure en riant ; – c’est qu’on est innocent

Et coupable à la fois ; – c’est qu’on se croit parjure

Lorsqu’on n’est qu’abusé ; c’est qu’on verse le sang

Avec des mains sans tache, et que notre nature

A de mal et de bien pétri sa créature:

Tel est le monde, hélas !...

Extrait de Namouna , Chant 1, Strophe 13 (1832)

290

LORENZO DA PONTE

Don Juan n’eut aucun succès

Je pensai qu’il fallait réveiller ma muse endormie, que ces

deux récents échecs avaient paralysée. Les trois maestri

Martini, Mozart et Salieri m’en fournirent l’occasion en venant

simultanément me demander un libretto. Je les aimais et les

appréciais également tous les trois. J’espérais, avec leur aide,

me relever de mes dernières chutes. Je n’entrevoyais d’autre

moyen de les contenter en même temps que de composer trois

drames à la fois. Salieri ne me demandait pas une pièce origi-

nale. Il avait écrit à Paris la musique de l’opéra Tarare ; il

désirait adapter cette musique à des paroles italiennes. Ce

n’était donc qu’une traduction libre qu’il lui fallait. Quant à

Mozart et Martini, ils s’en remettaient à moi pour le choix du

sujet. Je destinai Don Juan au premier qui en fut ravi, et

L’Arbre de Dianeà Martini, comme sujet mythologique en har-

monie avec son talent, si plein de cette douce mélodie dont

plus d’un compositeur a le sentiment inné, mais que de rares

exceptions seules savent traduire.

291

Mes trois sujets arrêtés, je me présentai à l’empereur et lui

exprimai mon intention de les faire marcher de front. Il se

r é c r i a : « Vous échouerez », me dit-il. « Peut-être, mais j’es-

sayerai. J’écrirai pour Mozart la nuit en lisant quelques pages

d e L’ E n f e r de Dante ; le matin pour Martini en lisant Pétrarque

et le soir pour Salieri avec l’aide du Tasse. J’étais content de ma

comparaison, et à peine rentré chez moi, je me mis à l’œuvre.

Je m’asseyais devant ma table de travail vers l’heure de

minuit : une bouteille d’excellent vin de Tokay était à ma

droite, mon écritoire devant moi, une tabatière pleine de tabac

de Séville à ma gauche. En ce temps-là, une jeune et belle

personne de seize ans, que je ne n’aurais voulu aimer que

comme un père, habitait avec ma mère dans ma maison.

[...]

C’est ainsi qu’entre le vin de Tokay, le tabac de Séville, la

sonnette sur ma table et la belle Allemande semblable à la

plus jeune des muses, j’écrivis la première nuit pour Mozart

les deux premières scènes de Don Juan , deux actes de L’Arbre

de Diane, plus de la moitié du premier acte de Tarare, titre

que je changeait en celui d’Assur. Dans la matinée, je portais

mon travail aux trois compositeurs qui n’en pouvaient croire

leurs yeux. En soixante-trois jours, Don Juan et L’Arbre de

Diane étaient terminés.

[...]

Je n’avais pas à Prague assisté à la représentation de Don

Juan , mais Mozart n’avait pas tardé à m’instruire qu’il avait

fait merveille. L’impresario Guardassoni m’avait également

écrit à ce sujet : « Vive Da Po n t e ! vive Mozart ! les imprésari,

ainsi que les artistes, doivent les bénir. Tant qu’ils vivront, la

misère n’osera plus approcher des théâtres. »

L’empereur me fit appeler, et, avec les plus gracieux

éloges, me fit un nouveau don de cent sequins en me disant

qu’il brûlait du désir d’entendre Don Juan . J’écrivis à Mozart,

qui accourut et donna les partitions au copiste, lequel s’em-

pressa de les distribuer. Le départ prochain de Joseph II en

DON JUAN N’EUT AUCUN SUCCÈS

hâta la mise en scène et, le dirai-je ? DON JUAN N’EUT AUCUN

SUCCÈS ! Tout le monde, Mozart seul excepté, s’imagina que la

pièce avait besoin d’être retouchée. Nous y fîmes des addi-

tions, nous changeâmes divers morceaux ; une seconde fois :

DON JUAN N’EUT AUCUN SUCCÈS ! Ce qui n’empêcha pas l’em-

pereur de dire : « Cette œuvre est divine, elle est peut-être

encore plus belle que Les Noces de Figaro : mais ce n’est pas

un morceau pour mes Viennois. » Je répétai ces paroles à

Mozart qui, sans se déconcerter, me répondit : « Laissons leur

le temps de le goûter. » Il ne s’est pas trompé. D’après son

conseil, je cherchai à faire jouer Don Juan le plus souvent

possible ; à chaque représentation, le succès grandissait. Peu

à peu, les Viennois s’habituèrent à savourer ce morceau et à

l’apprécier, et finirent par le goûter au point d’élever Don Juan

au rang des chefs-d’œuvre dramatiques.

Extrait des Mémoires (1749-1838)

Traduction de Roger Vèze, 1931

© Éditions d’Aujourd’hui, Collection Les Introuvables, 1983

LORENZO DA PONTE

293

E.T.A. HOFFMANN

DON JUAN

I. Aventure romanesque d’un voyageur enthousiaste

Une sonnerie stridente et le cri retentissant : « Le spec -

tacle commence ! » me réveillèrent du doux sommeil dans

lequel j’étais enseveli. Des basses se répondaient en bourdon-

nant... un coup de timbale... des éclats de trompette, un la pur

soutenu par le hautbois... les violons qui s’accordent... Je me

frotte les yeux. Est-ce que le Diable, qui toujours veille, m’au-

rait... dans quelque ivresse ? Non ! je me trouve bien dans la

chambre de l’hôtel où je suis descendu hier soir, à moitié

éreinté. Juste au-dessus de mon nez pend précisément la

houppe brillante d’un cordon de sonnette : je le tire violem-

ment, le garçon paraît.

– Mais, au nom du ciel, que signifie cette musique con-

fuse que j’entends juste à côté ? Donne-t-on donc un concert

dans la maison ?

– Votre Excellence (j’avais bu du champagne au dîner de

la table d’hôte !)... Votre Excellence ne sait peut-être pas

encore que cet hôtel est attenant au théâtre. Cette porte de

tapisserie donne sur un petit corridor qui vous mène directe-

ment au no 23 ; c’est la loge des étrangers.

294

– Comment !... un théâtre ?... une loge pour les étrangers ? . . .

– Oui, la petite loge des étrangers, pour deux personnes,

trois au plus, mais réservée aux personnes de distinction

comme vous ; toute tapissée de vert, avec une grille sur le

devant, tout contre la scène ! S’il plaît à Votre Excellence...

Nous donnons aujourd’hui le Don Juan du célèbre M. Mozart,

de Vienne. Nous porterons sur la note le prix de la loge, un

thaler huit groschen.

Il ouvrait déjà la loge en prononçant ces derniers mots, tant

au seul nom de Don Juan j’avais mis de précipitation à gagner

le corridor par la porte dérobée. La salle était spacieuse, pour

une ville de second ordre, décorée avec beaucoup de goût, et

brillamment éclairée. Loges et parterre étaient combles.

Les premiers accords de l’ouverture me convainquirent

qu’un orchestre tout à fait excellent, pour peu que les chan-

teurs fussent bons, allait me procurer la plus exquise jouis-

sance de ce chef-d’œuvre.

Dès le premier andante, les terreurs de l’effroyable regno

al pianto des Enfers me saisissent... les frissonnants pressen-

timents de l’horreur me pénètrent l’âme. Puis résonne à mes

oreilles, comme un cri de joie sacrilège, la fanfare triomphale

de la septième mesure de l’allégro... Je vois des profondeurs

de la nuit ces démons enflammés menacer de leurs griffes

flamboyantes des groupes qui dansent gaiement sur une mince

voûte, au-dessus des abîmes sans fond. Le conflit du genre

humain avec les horribles puissances inconnues qui l’assiè-

gent en guettant sa chute se présente dans toute sa lumière

aux yeux de mon esprit.

Enfin la tempête se calme, le rideau se lève. Transi, plein

d’humeur, Leporello, enveloppé de son manteau, fait les cents

pas dans la nuit sombre, devant le pavillon.

– Notte e giorno faticar !

Q u o i ! de l’italien ? De l’italien dans cette ville allemande ?

Ah che piacere !je vais donc entendre tous les récitatifs, tout

l’opéra, tel que le maître génial l’a conçu et élaboré !

E.T.A. HOFFMANN

295

Voici Don Juan qui s’élance hors du pavillon ; et voici der-

rière lui, Donna Anna qui retient énergiquement le criminel par

son manteau... Ah ! quelle ex p r e s s i o n ! Elle pourrait être plus

grande, plus svelte, plus majestueuse dans sa démarche, mais

quelle tête ! Des yeux d’où l’amour, la colère, la haine, le déses-

poir lancent, comme d’un foyer unique, des éclairs de feu gré-

geois, étincelants, qui pénètrent et consument inex t i n g u i b l e-

ment le plus profond de l’âme ! Les tresses dénouées de la

sombre chevelure roulent en boucles ondoyantes le long du cou.

Le blanc vêtement de nuit découvre traîtreusement des charmes

que l’on ne surprend jamais sans danger... Déchiré par l’hor-

rible crime, son sein se soulève en violentes palpitations...

Et puis, quelle voix !

– Non sperar se non m’uccidi...

À travers la tempête des instruments, ces accents, qui

brillent encore comme autant d’éclairs, semblent coulés dans

un métal céleste. En vain Don Juan cherche à s’arracher à ses

mains... Mais le veut-il vraiment ? Pourquoi de son poing

vigoureux ne repousse-t-il pas cette femme, pourquoi ne

s’échappe-t-il pas ? Son crime lui a-t-il ôté la force d’agir ? À

moins que le combat de haine et d’amour qui se livre en son

cœur ne l’ait soudain privé de son énergie et de son courage ?

Le vieux père a expié de sa vie la folie qui l’a conduit à atta-

quer dans l’obscurité ce robuste adversaire. Don Juan et

Leporello, dialoguant en récitatif, s’avancent vers la rampe. Don

Juan défait son manteau, et apparaît superbement vêtu de

velours rouge tailladé et brodé d’argent. C’est une forte, superbe

f i g u r e : le visage, d’une beauté virile, le nez ferme, les yeux

pénétrants, les lèvres délicatement dessinées. L’étrange jeu

d’un muscle du front, juste au-dessus des sourcils, donne pen-

dant une seconde à sa physionomie quelque chose de méphis-

tophélique qui sans ravir au visage la beauté éveille pourtant

une involontaire horreur. On le croirait doué de la puissance

fascinatrice que possède le serpent à sonnettes ; il semble que

les femmes sur qui il a jeté les yeux ne puissent plus se détacher

DON JUAN

296

de lui, et doivent forcément, soumises à son sinistre pouvoir, con-

sommer elles-mêmes leur perte. Long et maigre, dans son habit

rayé de rouge et de blanc, son petit manteau rouge, son chapeau

blanc orné d’une plume rouge elle aussi, Leporello trottine

autour de lui. Les traits de son visage expriment un singulier

mélange de bonhomie, de friponnerie, de convoitise et d’impu-

dence ironique. Avec ses cheveux et sa barbe grise, ses sourcils

noirs font un étrange contraste. On voit tout de suite que le

vieux coquin mérite bien d’être le valet complice de Don Juan.

Ils ont fui heureusement par-dessus le mur... Des flam-

beaux... Donna Anna et Don Ottavio paraissent. Celui-ci est

coquet, propret petit jeune homme de vingt et un ans tout au

plus. En qualité de fiancé d’Anna, il était vraisemblablement

logé dans la maison pour qu’on ait pu l’appeler si vite. Au pre-

mier bruit – qu’il a dû entendre – il aurait pu accourir et peut-

être sauver le père; mais il lui fallait d’abord s’ajuster ; et sur-

tout il ne doit pas volontiers s’exposer à sortir la nuit...

– Ma qual mai s’offre, o Dei, spettacolo funesto agl’ occhi miei !

Les accents effroyables et déchirants de ce récitatif et du duo

suivant expriment plus que le désespoir inspiré par un crime

affreux. L’odieux attentat de Don Juan, qui ne fut pour elle qu’ u n e

menace, même s’il cause la mort de son père, ne peut suffire

à arracher de tels accents à son cœur angoissé. Un combat

funeste, mortel, tout au fond de l’âme, peut seul les faire retentir.

Voici la longue et maigre Donna Elvira, splendide encore

des restes manifestes d’une grande beauté aujourd’hui flétrie.

Elle invective le traître Don Juan : – Tu nido d’inganni...

Mais juste au moment où le compatissant Leporello

remarque fort judicieusement : Parla come un libro stampato,

je crus sentir la présence de quelqu’un à côté de moi, ou plu-

tôt derrière moi.

On avait pu aisément ouvrir la porte de la loge et s’y glis-

ser à mon insu. – Ce fut pour moi comme un coup de poignard

dans le cœur. J’étais si heureux de me trouver seul dans cette

loge, libre d’étreindre de toutes mes fibres sensitives, pa-

E.T.A. HOFFMANN

297

reilles aux tentacules d’un poulpe, ce chef-d’œuvre si parfai-

tement interprété, afin de le faire pénétrer parfaitement en

moi ! Un seul mot (qui risquait par-dessus le marché d’être

une sottise) m’aurait arraché d’une si douloureuse façon à ce

moment sublime d’enthousiasme poétique et musical ! Je réso-

lus donc de ne faire aucune attention à mon voisin, et, com-

plètement enfoncé dans la représentation, d’éviter tout mot,

tout regard. La tête appuyée sur ma main, tournant le dos au

nouveau venu, je rivais mes yeux sur la scène.

La suite de la représentation répondait à son remarquable

début. La petite, l’appétissante, l’amoureuse Zerlina console

avec des accents et des manières toutes gracieuses cet excel-

lent maladroit de Masetto. Don Juan laisse voir à nu le fond

ulcéré de son âme, son mépris pour la canaille qui l’entoure,

tout juste bonne à satisfaire en lui le désir de séduire et de

corrompre. C’était l’air impétueux Fin ch’han dal vino... Le

muscle de son front soulignait tout ceci plus énergiquement

encore qu’auparavant.

Mais voici que les masques paraissent. Leur trio est une

prière qui monte au ciel en un pur et brillant rayon. Maintenant

la toile de fond se lève. Quelle gaieté soudain : les verres

r é s o n n e n t ; les paysans et toutes sortes de masques conviés à

la fête de Don Juan tourbillonnent en foule joyeuse... Mais sur-

viennent les trois conjurés, prêts à la vengeance. Tout prend un

air plus solennel, jusqu’au moment où la danse reprend...

Voici Zerlina sauvée, et, dans le puissant et foudroyant

finale, Don Juan qui se jette hardiment, l’épée haute, contre

ses ennemis. Il fait sauter des mains du fiancé son acier de

parade, et se fraie un passage à travers la vile canaille qu’il

bouscule comme fit le vaillant Roland triomphant de l’armée

du tyran Cimosco, si bien que tous culbutent pêle-mêle le plus

comiquement du monde...

J’avais déjà cru sentir plusieurs fois, tout contre moi, une

légère, une chaude haleine, et distinguer le bruissement d’une

étoffe de soie : cela me fit bien supposer le voisinage d’une

DON JUAN

298

f e m m e ; mais, tout plongé dans le monde de poésie que m’ o u-

vrait l’opéra, je n’y prêtais pas attention. La toile étant mainte-

nant tombée, je voulus examiner ma voisine... Non ! aucun mot

ne pourrait dire quelle fut ma stupéfaction : Donna Anna, en

costume, telle absolument que je venais de la voir sur le théâtre,

se tenait auprès de moi, ses yeux pleins d’expression appuyant

sur moi le regard le plus troublant. Sans voix aucune, je la

regardai fixe m e n t : sa bouche (il me parut ainsi) se crispa en un

léger et ironique sourire, où je me vis moi-même et quelle sotte

figure je faisais. Je sentais la nécessité de lui parler, et pourtant

je ne pouvais remuer ma langue paralysée par l’étonnement et

même, je devrais bien le dire, par une sorte d’effroi.

Enfin, enfin ces paroles m’échappèrent :

– Comment est-ce possible, comment pouvez-vous être ici ?

À quoi elle répondit aussitôt dans le plus pur toscan que, si

je ne comprenais ni ne parlais l’italien, elle était obligée de se

refuser le plaisir de m’ e n t r e t e n i r, ne parlant elle-même d’autre

langue que celle-là... Comme un chant résonnaient les douces

paroles. En même temps, l’expression de son œil d’un bleu

sombre s’accentua, et chaque éclair qui en jaillissait versait un

torrent de flammes dans mon être, dont toutes les pulsations

s’accéléraient, dont toutes tressaillaient. C’était Donna Anna

sans aucun doute... Examiner la possibilité qu’elle pût être tout

ensemble sur scène et dans ma loge ne me vint même pas à

l’esprit. De même que les rêves heureux combinent ensemble

les choses les plus étranges, de même qu’une foi pieuse com-

prend l’inaccessible et l’associe sans hésiter aux phénomènes

s o i -disant naturels de la vie, ainsi tombai-je aussi auprès de

cette merveilleuse femme, dans une sorte de somnambulisme,

où je reconnus les secrètes relations qui m’attachaient à elle,

relations si intimes que, dès son apparition sur le théâtre, elle-

même n’avait pu détourner ses yeux de moi...

Avec quel bonheur je te redirais ici, mon cher Théodore,

chaque mot de la remarquable conversation qui commença

entre la signora et moi : mais hélas ! quand je veux transcrire

E.T.A. HOFFMANN

299

en allemand ce qu’elle dit, je trouve chaque mot froid et terne,

chaque phrase lourde, alors qu’elle s’exprimait avec tant de

légèreté et de charme en toscan.

Tandis qu’elle parlait de Don Juan et de son rôle, il me

semblait que la profondeur de ce chef-d’œuvre se dévoilait à

moi pour la première fois, que j’y pouvais enfin regarder clai-

rement, percevoir à plein les fantastiques apparitions d’un

monde inconnu. Elle disait que toute sa vie était musique, et

que souvent en chantant elle croyait saisir mille choses enfer-

mées mystérieusement au fond d’elle-même, de celles que

nulle parole ne saurait exprimer.

– Oui, poursuivit-elle l’œil étincelant et en élevant la voix,

je comprends fugitivement ces secrets, mais tout reste froid et

mort autour de moi, et lorsqu’on applaudit un trille difficile,

une fioriture réussie, des mains de glace étreignent mon cœur

brûlant ! Mais toi... tu me comprends ? Car je sais que pour

toi aussi s’est ouvert le merveilleux, le romantique royaume

que peuple la céleste magie des sons.

– Comment, toi, charmante et merveilleuse femme... toi...

tu me connais donc ?

– Oui ! À travers le rôle de... dans ton dernier opéra. Ce

rôle où s’exprime le magique délire de l’amour, l’ardeur infi-

nie du désir, ne l’as-tu pas tiré de tes entrailles ? Je t’ai com-

pris : ton âme s’est révélée à moi à travers ces harmonies. –

Oui (ici elle dit mon prénom), oui je t’ai chanté et je me suis

retrouvée dans tes mélodies !

La cloche du théâtre se fit entendre. Une rapide pâleur

décolora la figure non fardée de Donna Anna ; elle appuya

sa main sur son cœur, comme si elle ressentait une soudaine

d o u l e u r, et sur ces mots prononcés à voix basse : « M a lh e u r-

euse Anna, c’est maintenant qu’arrivent tes plus terribles

m o m e n t s ! . . . », elle disparut de la loge.

Le premier acte m’avait enthousiasmé, mais après cette

merveilleuse aventure, la musique agit sur moi d’une bien

autre et extraordinaire manière. Il semblait que l’accomplis-

DON JUAN

300

sement, dès longtemps promis, des plus beaux rêves venus

d’un autre monde dût réellement se produire dans ma vie ; il

semblait que les plus secrets pressentiments de mon âme

enthousiasmée eussent pris corps sous forme de sons et dus-

sent se façonner étrangement pour la plus merveilleuse révé-

lation. Dans la scène de Donna Anna, je me sentis frémir sous

une douce et chaude haleine qui glissait autour de moi, m’en-

veloppant d’une délicieuse ivresse ; involontairement mes

yeux se fermèrent ; un ardent baiser semblait brûler mes

lèvres : mais ce baiser était comme le son longuement soute-

nu d’un désir éternellement altéré.

Voici le finale commencé, dans sa gaieté effrontée : Già la

mensa e preparata ! Don Juan, attablé, caresse deux jeunes

filles et fait sauter bouchon sur bouchon, libérant les esprits

pétillants hermétiquement enfermés dans leur étroite prison.

La salle est peu profonde, avec une grande fenêtre gothique à

l’arrière-plan, par laquelle on aperçoit au loin la nuit. Déjà,

pendant qu’Elvire rappelle à l’infidèle tous ses serments, des

éclairs sillonnent les ténèbres, et l’on entend le sourd gronde-

ment de l’orage qui se rapproche. Enfin voici les formidables

coups à la porte. Elvire, les jeunes filles s’enfuient ; et, aux

effrayants accords venus du monde souterrain, on voit entrer

le terrible colosse de marbre, auprès duquel Don Juan n’est

plus qu’un pygmée. Le sol frémit sous les pas tonnants du

géant. Don Juan crie à travers la tempête, le tonnerre, les hur-

lements des démons, son terrible « No ! » L’heure de la mort

est arrivée. La statue s’enfonce, une épaisse vapeur obscurcit

la salle du festin, envahie par d’effroyables fantômes. Don

Juan, que l’on aperçoit par intervalles luttant contre les

démons, se tord dans les angoisses de l’enfer. Une explosion

comme si des milliers d’éclairs éclataient ensemble !... Don

Juan, les démons, tout a disparu, on ne sait comment !

Leporello gît évanoui dans un coin de la salle.

Quel effet bienfaisant apporte maintenant l’apparition des

autres personnages, qui cherchent en vain Don Juan dérobé à

E.T.A. HOFFMANN

301

la vengeance terrestre par les puissances souterraines. Il

semble que de ce moment seulement, l’on échappe au cercle

terrible des esprits infernaux. Donna Anna m’apparut toute

changée : une pâleur mortelle recouvrait son visage ; ses yeux

étaient éteints, sa voix tremblante et inégale. Mais dans son

petit duetto avec son suave fiancé – qui sitôt dispensé par le

ciel de sa dangereuse besogne de vengeur ne songe plus qu’à

la noce –, elle produisit en effet qui déchirait le cœur.

Le chœur fugué avait superbement couronné l’œuvre

entière et je me hâtais, vu l’état des plus exaltés où je me trou-

vais, de regagner ma chambre, quand le garçon vint me pré-

venir que le souper était servi ; je le suivis machinalement. Il

y avait brillante société à cause de la foire, et la représenta-

tion de Don Juan était le sujet de toutes les conversations. On

prisait généralement les artistes italiens et l’énergie de leur

jeu : pourtant, de petites remarques jetées par-ci par-là d’un

air malin, montraient que personne n’avait seulement soup-

çonné les sens secret de l’opéra des opéras. Don Ottavio avait

beaucoup plu. Donna Anna avait semblé trop passionnée à

l’un des interlocuteurs : il fallait, disait-il, se modérer un peu

plus sur scène, et éviter les excès d’émotion. Le récit par

Donna Anna de l’attentat de Don Juan l’avait absolument

consterné. Là-dessus, il prit une prise de tabac et jeta un

regard indescriptible de sotte malice à son voisin, qui avança

que l’Italienne était du reste une fort belle femme, mais par

trop insoucieuse de ses vêtements et de sa toilette; ainsi, dans

cette scène, une boucle de cheveux s’était déroulée et avait

mis dans l’ombre le demi-profil de son visage ! Ici un autre se

mit à fredonner : « Fin ch’han dal vino... », sur quoi une dame

opina qu’elle était bien peu satisfaite de Don Juan : cet Italien

était beaucoup trop sombre, beaucoup trop grave ; il n’avait

absolument pas su rendre le caractère frivole et gai du rôle...

Seule l’explosion finale eut tous les suffrages.

Écœuré par ce verbiage, je me sauvai dans ma chambre.

DON JUAN

302

II. Dans la loge des étrangers, n o 23

J’étais si oppressé, si à l’étroit, dans ma chambre étouffante !

À minuit, il me sembla entendre ta voix, mon cher Theodor ;

tu prononçais nettement mon nom, et un frôlement d’étoffe sem-

blait venir de la porte dérobée... Qui me retient de visiter une

fois encore le lieu de ma merveilleuse aventure ? Peut-être te

v e r r a i s-je, et Elle, qui remplit tout mon être ! Il est bien facile

d’y apporter la petite table... deux bougies... l’écritoire !

Le garçon me cherche avec le punch commandé, et trouve la

chambre vide, la porte de tapisserie ouverte... Il me suit jusque

dans la loge, et m’ examine d’un œil indécis. Sur mon signe, il

place la boisson sur la table et s’éloigne, une question sur la

langue, non sans se retourner une dernière fois pour me consi-

d é r e r. Je m’accoude à la balustrade de la loge en lui tournant le

dos, et je contemple la salle déserte, dont l’architecture, magi-

quement éclairée par mes deux bougies, s’élance en perspec-

tives merveilleuses d’un style étrange et féerique. Le courant

d’air qui traverse la salle agite le rideau... S’il allait se lever ? si

Donna Anna allait paraître, angoissée par de hideux fantômes ?

– Donna Anna ! ai-je crié malgré moi.

Mon cri expire dans l’espace désert, mais les esprits des ins-

truments de l’orchestre se réveillent... un son vibre dans l’air et

semble murmurer le nom de mon adorée ! Je ne puis me défendre

d’un secret effroi, mais ce frisson apaise salutairement mes nerfs.

[...] Deux heures sonnent... Une tiède haleine électrique

glisse vers moi et m’enveloppe... Je respire l’odeur subtile du fin

parfum italien qui m’avait révélé la présence de ma voisine lors

de la représentation du soir. Un sentiment de lourdeur me sai-

sit, que seule la musique, il me semble, serait capable d’ex p r i-

m e r. Un air plus vif traverse la salle... Les cordes du piano fré-

missent dans la fosse d’orchestre... Ciel ! comme venue du loin-

tain, portée sur les ailes vibrant en crescendo d’un orchestre

aérien, je crois entendre la voix de Donna Anna :

– Non mi dir bell’ idol mio !...[...]

E.T.A. HOFFMANN

III. Conversation de midi à la table d’hôte

en manière d’épilogue

Un homme entendu (tapotant bruyamment le couvercle de sa

tabatière) :

– Il était fatal que nous ne puissions plus de sitôt entendre

un seul opéra comme il faut ! Voilà où mène cette manie

de tout exagérer !

Une figure de mulâtre :

– Oui, oui! Je le lui ai assez souvent dit! Le rôle de Donna

Anna l’épuisait toujours !... Hier encore, elle était comme

possédée. Tout l’entracte elle l’a passé étendue sans connai-

sance, et dans la scène du second acte, elle a eu jusqu’à

des attaques de nerfs...

Un insignifiant :

– Eh bien !...

La figure de mulâtre :

– Parfaitement des attaques de nerfs, et si violentes qu’il

n’y a pas eu moyen de la transporter hors du théâtre.

Moi :

–Pour l’amour du ciel ! J’espère que tout cela n’aura pas de

suites trop graves ? Nous réentendrons bientôt la signora ?

L’homme entendu à la tabatière (prenant une prise):

– Difficilement, car la signora est morte cette nuit, sur le

coup de deux heures.

Extrait des Fantaisies dans la manière de Callot. Don Juan

Traduction française de Henri de Curzon

© Éditions Phébus, 1979

DON JUAN

JEAN GENET

Parmi les morts

Dans les villes actuelles, le seul lieu – hélas encore vers

la périphérie – où un théâtre pourrait être construit, c’est le

cimetière. Le choix servira aussi bien le cimetière que le

théâtre. L’architecte de théâtre ne pourra pas supporter les

niaises constructions où les familles enferment leurs morts.

Raser les chapelles. Peut-être conserver quelques ruines :

un morceau de colonne, un fronton, une aile d’ange, une urne

cassée, pour indiquer qu’une indignation vengeresse a voulu ce

premier drame afin que la végétation, peut-être aussi une

herbe forte, nées dans l’ensemble des corps pourrissant, égali-

sent le champ des morts. Si un emplacement est réservé pour

le théâtre, le public devra passer par des chemins (pour y venir

et s’en aller) qui longeront les tombes. Qu’on songe à ce que

serait la sortie des spectateurs après le Don Juan de Mozart,

s’en allant parmi les morts couchés dans la terre, avant de ren-

trer dans la vie profane. Les conversations ni le silence ne

seraient les mêmes qu’à la sortie d’un théâtre parigot.

La mort serait à la fois plus légère et plus grave.

Il y a d’autres raisons. Elles sont plus subtiles. C’est à

vous de les découvrir en vous sans les définir ni les nommer.

Extrait de L’Etrange Mot d’... in Œuvres complètes, tome IV

© Gallimard, 1968

304

305

ALEXANDRE BLOK

Les pas du Commandeur

À W.A. Zorgenfrei

À l’entrée un rideau épais et lourd,

Au carreau de la nuit – la brume.

Que fais-tu de ta vaine liberté,

Toi, Don Juan, qui as connu la peur ?

L’alcôve luxueuse est vide et froide,

Dorment les serviteurs, la nuit est sourde.

D’un pays bienheureux, inconnu, lointain

Parvient le chant d’un coq.

Mais ce chant bienheureux n’atteint pas l’infidèle.

Car sont comptés les instants de sa vie.

Donna Anna repose, les deux mains sur le cœur,

Donna Anna se plonge dans les songes...

Quels sont ces traits qui se figent, cruels,

Dans les reflets des miroirs ?

Anna, vous est-il doux de dormir dans la tombe ?

Et ces songes d’ailleurs, sont-ils doux ?

La vie est vide, folle, et insondable !

Viens ferrailler, ô vieux destin !

Mais en réponse – triomphante, enamourée –

La trompe sonne dans la brume.

Éclaboussant la nuit de feu, s’élance

Le moteur silencieux et noir, tel un hibou.

D’un pas silencieux, d’un pas pesant,

Le Commandeur entre dans la maison.

La porte est grande ouverte. Dans le frimas intense,

Comme une horloge rauque de la nuit –

L’horloge sonne : « Tu m’as convié à dîner.

Je suis venu. Toi tu es prêt ? »

Point de réponse à la question brutale,

Point de réponse – le silence.

Terrible est l’aube dans la riche alcôve,

Dorment les serviteurs, la nuit est blême.

L’aube est étrange et l’aube est froide,

La nuit vers l’aube va troublée.

Fille de la lumière ! Où es-tu, donna Anna ?

Anna ? Anna ? – Que le silence.

Et seule, dans la brume menaçante,

Sonne l’horloge une dernière fois.

À l’heure de ta mort, Anna se lèvera.

Anna se lèvera à l’heure de la mort.

1910-1912

ALEXANDRE BLOK

307

CHARLES BAUDELAIRE

DON JUAN aux ENFERS

Quand Don Juan descendit vers l’onde souterraine

Et lorsqu’il eut donné son obole à Charon,

Un sombre mendiant, l’œil fier comme Antisthène,

D’un bras vengeur et fort saisit chaque aviron.

Montrant leurs seins pendants et leurs robes ouvertes,

Des femmes se tordaient sous le noir firmament,

Et, comme un grand troupeau de victimes offertes,

Derrière lui traînaient un long mugissement.

Sganarelle en riant lui réclamait ses gages,

Tandis que Don Luis avec un doigt tremblant

Montrait à tous les morts errant sur les rivages

Le fils audacieux qui railla son front blanc.

Frissonnant sous son deuil, la chaste et maigre Elvire,

Près de l’époux perfide et qui fut son amant,

Semblait lui réclamer un suprême sourire

Où brillât la douceur de son premier serment.

Tout droit dans son armure, un grand homme de pierre

Se tenait à la barre et coupait le flot noir ;

Mais le calme héros, courbé sur sa rapière,

Regardait le sillage et ne daignait rien voir.

Extrait des Fleurs du mal (Spleen et idéal, XV), 1857

CARNET de NOTES

Wolfgang Amadeus Mozart

Repères biographiques

& Notice bibliographique

Don Giovanni

Orientations discographiques

WOLFGANG AMADEUS MOZART REPÈRES BIOGRAPHIQUES

310

H I S T O I R E M O Z A RT

1756.

Début de la guerre de Sept Ans

opposant les principales

puissances européennes

sur le vieux continent,

en Amérique du Nord et

aux Indes. L’Autriche y est

alliée à la France.

1762.

Avènement de Catherine II

de Russie.

1763.

Le Traité de Paris termine

la guerre de Sept Ans.

La France abandonne

notamment le Canada.

1756.

Naissance le 27 janvier

à Salzbourg.

1759.

Premiers essais musicaux sur

le clavier du clavecin de sa

sœur Maria Anna et premières

manifestations de ses talents :

oreille, mémoire, concentration.

Son père Leopold se charge de

son éducation musicale.

1762.

Munich et Vienne : première

des tournées que le père de

Mozart organise pour exposer

les dons de son enfant prodige.

Compose ses premières pièces

pour clavecin.

1763.

Début d’une tournée de trois

années : Allemagne, Belgique,

France (il séjourne et se produit

à Lyon en août 1766),

Angleterre, Hollande, Suisse.

1765.

Compose sa première

symphonie (K. 16).

1768.

Création à Vienne de Bastien

et Bastienne. (K. 50).

LETTRES, ARTS

& SCIENCES

MOZART & SON TEMPS

311

M U S I Q U E

1757.

Mort de Domenico Scarlatti.

1759.

Mort de Haendel.

1761.

Premiers quatuors de

Luigi Boccherini.

1762.

Gluck, Orfeo ed Euridice.

1764.

Mort de Rameau.

1767.

Mort de Telemann.

Rousseau publie son

Dictionnaire de la musique.

1756.

À Lyon, inauguration d’un

nouvel opéra conçu par

l’architecte Soufflot.

1762.

Rousseau, Le Contrat social

et Émile ou de l’éducation.

1763.

Mort de Marivaux.

1764.

Voltaire,

Dictionnaire philosophique.

1768.

Naissance de Chateaubriand.

WOLFGANG AMADEUS MOZART REPÈRES BIOGRAPHIQUES

312

H I S T O I R E M O Z A RT

1769.

Naissance de Bonaparte.

1770.

Mariage de Marie-Antoinette,

fille de l’impératrice

Marie-Thérèse d’Autriche

avec le Dauphin de France,

futur Louis XVI.

1773.

Interdiction de l’ordre des

Jésuites dans l’empire autrichien.

1774.

Avènement de Louis XVI

en France.

1776.

Déclaration d’indépendance

des États-Unis d’Amérique.

1769.

Début du premier voyage

en Italie.

1770.

Création de Mitridate,

re di Ponto (K 87) à Milan.

1772.

Élection de Colloredo au titre de

p r i n c e-archevêque de Salzbourg .

Création de Lucio Silla

(K. 135) au Teatro Regio Ducal

de Milan.

1773.

Retour à Salzbourg.

1775.

Compose ses cinq concertos

pour violons.

1777.

Démission du poste de

Konzermeister qu’il occupait

à Salzbourg au service du

prince-archevêque Colloredo.

LETTRES, ARTS

& SCIENCES

MOZART & SON TEMPS

313

M U S I Q U E

1770.

Naissance de Beethoven.

1774.

Gluck, Iphigénie en Aulide.

1775.

Premier oratorio de Haydn,

Il Ritorno di Tobia.

1776-78.

Construction de la Scala

de Milan.

1770-85.

Sturm und Drang en Allemagne.

1770.

Cugnot réalise la première

voiture automobile à vapeur.

1772.

Achèvement de la rédaction

de L’Encyclopédie.

1773.

Diderot, Paradoxe

sur le comédien.

1774.

Goethe, Les Souffrances

du jeune Werther.

1775.

Fragonard, La Fête à Saint-C l o u d .

Beaumarchais, Le Barbier

de Séville.

WOLFGANG AMADEUS MOZART REPÈRES BIOGRAPHIQUES

314

H I S T O I R E M O Z A RT

1780.

Mort de l’impératrice

Marie-Thérèse d’Autriche.

Avènement de Joseph II.

1781.

Réformes de Joseph II :

abolition du servage,

Édit de tolérance, interdiction

de tous les ordres religieux

hormis ceux pratiquant

l’enseignement et la charité.

1778.

Séjour à Paris avec sa mère,

qui y meurt le 3 juillet.

Symphonie no31 “Paris”

(K. 297), Concerto pour flûte

et harpe (K. 299 ).

Sonates nos

8 et 11,

“Marche turque”.

1779.

Reprend son service auprès

de Colloredo.

1781.

Création d’Idoménéeau

Cuvilliès-Theater de Munich.

Sérénade pour 13 instruments

à vent “Gran Partita” (K. 361).

Rupture définitive avec

Colloredo.

1782.

Création de L’Enlèvement au

sérail au Burgtheater de Vienne.

Épouse Constance Weber,

le 4 août.

1783.

Grand Messe en ut mineur

(K. 427).

1784.

Devient franc-maçon.

LETTRES, ARTS

& SCIENCES

MOZART & SON TEMPS

315

M U S I Q U E

1782.

Paisiello, Le Barbier de Séville.

1783.

Antonio Salieri, Les Danaïdes.

1778.

Mort de Voltaire.

1781.

Kant, Critique de la raison pure.

1782.

Laclos, Les Liaisons dangereuses.

1783.

Naissance de Stendhal.

1784.

B e a u m a rchais, Le Mariage

de Fig a r o .

WOLFGANG AMADEUS MOZART REPÈRES BIOGRAPHIQUES

316

H I S T O I R E M O Z A RT

1785-1786.

En France, l’Affaire du collier

compromet Marie-Antoinette.

1786.

Mort de Frédéric II de Prusse.

1789.

Prise de la Bastille.

Déclaration des Droits

de l’homme et du citoyen.

1785.

Concertos pour piano nos

20

& 21 (K. 466 et 467).

Musique funèbre maçonnique

(K. 477).

1786.

Création des Noces de Figaro au

Burgtheater de Vienne (K. 492).

Symphonie no38, “Prague” .

1787.

Séjourne à Prague pour

les représentations des

Noces de Figaro.

Reçoit le jeune Beethoven

à Vienne au mois d’avril.

Mort de son père le 28 mai.

Sérénade no13, “Une petite

musique de nuit”.

Création de Don Giovanni

(K. 52) au Gräflich Nostitzsches

National-Theater de Prague.

Nommé compositeur de

la chambre par Joseph II.

1788.

Débuts des années de pauvreté

et de maladie. Trois dernières

symphonies : nos

39, 40 & 41,

“Jupiter” (K. 543, 550 et 551).

1789.

Quintette pour clarinette

et cordes(K. 581 ).

LETTRES, ARTS

& SCIENCES

MOZART & SON TEMPS

317

M U S I Q U E

1786.

Naissance de Carl-Maria

von Weber.

1787.

Création à Paris de Tarare de

Salieri (livret de Beaumarchais)

qui sera repris à Vienne

l’année suivante, sous le titre

Assur et avec un livret adapté

par Da Ponte.

1785.

David, Le Serment des Horaces.

Watt invente la machine

à vapeur.

1787.

Goethe, Faust.

Schiller, Don Carlos.

WOLFGANG AMADEUS MOZART REPÈRES BIOGRAPHIQUES

318

H I S T O I R E M O Z A RT

1790.

Mort à Vienne de l’empereur

Joseph II.

Avènement de Leopold II.

1791.

Leopold II est couronné roi

de Bohême et de Hongrie.

Tentative de fuite à l’étranger

du roi Louis XVI, qui est arrêté

à Varennes.

1790.

Création de Cosi fan tutte ( K. 588)

au Burgtheater de Vienne.

1791.

Création du 27e

concerto pour

piano (K. 595) à Vienne,

Mozart est au clavier.

Composition en trois semaines

et création de La Clémence

de Titus (K. 621) au National

Theater de Prague.

Création de La Flûte enchantée

(K. 620) au Theater an der

Wien de Vienne.

Concerto pour clarinette

(K. 622) et Requiem (K. 626)

qui demeure inachevé.

Mozart meurt le 5 décembre

à Vienne. Il est enterré dans

la fosse commune.

LETTRES, ARTS

& SCIENCES

MOZART & SON TEMPS

319

M U S I Q U E

1790-95.

Haydn, Douze Symphonies

londoniennes.

1790.

Naissance de Lamartine.

1791.

Sade, Justine ou les Malheurs

de la vertu.

WOLFGANG AMADEUS MOZART NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE

320

Correspondance

W.A. MOZART. Lettres des jours ordinaires (1756-1791),

établi par Anne Paradis, Fayard, 2005.

Sur le compositeur

JEAN-VICTOR HOCQUARD. Mozart, l’amour, la mort.

Libraire Séguier / Archimbaud, 1987.

H.C ROBBINS LANDON. 1791 – La dernière année de Mozart.

Éditions Jean-Claude Lattès, 1988.

JEAN & BRIGITTE MASSIN. Mozart. Fayard, 1990.

ALFRED EINSTEIN. Mozart, l’homme et l’œuvre. Gallimard, 1991.

THÉODORE DE WYZEWA & GEORGES DE SAINT-FOIX.

Mozart, sa vie musicale et son œuvre.

Robert Laffont, Collection Bouquins (2 volumes), 1991.

NORBERT ELIAS. Mozart, sociologie d’un génie. Seuil, 1991.

PHILIPPE SOLLERS. Mystérieux Mozart. Plon, 2001.

ANDRÉ TUBEUF. Mozart, Chemins et chants.

Actes Sud / Classica, 2005.

COLLECTIF sous la direction de BERTRAND DERMONCOURT.

Tout Mozart. Robert Laffont, Collection Bouquins, 2005.

MICHEL PAROUTY. Mozart, aimé des dieux. Gallimard,

Collection Découvertes, 2006.

DANIEL ELOUARD. Un autre Mozart. Desclée de Brouwer, 2008.

Sur l’œuvre lyrique

Sous la direction de BRIGITTE MASSIN. Guide des opéras de Mozart.

Fayard, 1991.

IVAN NAGEL. Autonomie et grâce, Sur les opéras de Mozart.

Éditions de l’Aube, 1990.

RÉMY STRICKER. Mozart et ses opéras, Fiction et vérité.

Gallimard, Collection Tel, 1991.

DON GIOVANNI NOTICE BIBLIOGRAPHIQUE

321

Sur Don Giovanni

Don Giovanni. L’Avant-Scène / Opéra, nos

24 (1979, réédition 1989)

& 172 (1996).

CHARLES GOUNOD. Le Don Juan de Mozart (1882).

Librairie Séguier/Garamont-Archimbaud, 1984.

JEAN-VICTOR HOCQUARD. Le Don Giovanni de Mozart. Aubier, 1992.

Sur le mythe de Don Juan

Don Juan. Revue Obliques nos

1-2 (1981).

JEAN ROUSSET. Le mythe de Don Juan. Armand Colin, 1976.

COLLECTIF sous la direction de PIERRE BRUNEL.

Dictionnaire de Don Juan.

Robert Laffont, Collection Bouquins, 1999.

DON GIOVANNI ORIENTATIONS DISCOGRAPHIQUES

322

DIMITRI MITROPOULOS

Orchestre philharmonique de Vienne. Chœur de l’Opéra de Vienne

Cesare Siepi (Don Giovanni), Gottlob Frick (Le Commandeur),

Elisabeth Grümmer (Donna Anna), Léopold Simoneau

(Don Ottavio), Lisa della Casa (Donna Elvira), Fernando Corena

(Leporello), Walter Berry (Masetto), Rita Streich (Zerlina)

Enregistrement public. Festival de Salzbourg – 1956

Sony Classical– 1994

CARLO MARIA GIULINI

Orchestre & Chœur Philharmonia de Londres

Eberhard Waechter (Don Giovanni), Gottlob Frick

(Le Commandeur), Joan Sutherland (Donna Anna), Luigi Alva

(Don Ottavio), Elisabeth Schwarzkopf (Donna Elvira),

Giuseppe Taddei (Leporello), Piero Cappuccilli (Masetto),

Graziella Sciutti (Zerlina)

EMI – 1959

GEORG SOLTI

Orchestre philharmonique de Londres. London Opera Chorus

Bernd Weikl (Don Giovanni), Kurt Moll (Le Commandeur),

Margaret Price (Donna Anna), Stuart Burrows (Don Ottavio),

Sylvia Sass (Donna Elvira), Gabriel Bacquier (Leporello),

Alfred Skramek (Masetto), Lucia Popp (Zerlina)

Decca – 1979

RENÉ JACOBS

Orchestre baroque de Fribourg. Chœur de chambre du RIAS de Berlin

Johannes Weisser (Don Giovanni), Alessandro Guerzoni

(Le Commandeur), Olga Pasichnyk (Donna Anna),

Kenneth Tarver (Don Ottavio), Alexandrina Pendatchanska

(Donna Elvira), Lorenzo Regazzo (Leporello), Nikolay Borchev

(Masetto), Sunhae Im (Zerlina)

Harmonia Mundi – 2007

NOTES

COLLECTION OPÉRA de LYON

BÉLA BARTÓK Le Château de Barbe-Bleue, 2007

LUDWIG VAN BEETHOVEN Fidelio, 2003

ALBAN BERG Wozzeck, 2003

Lulu, 2009

GEORGES BIZET Djamileh, 2007

BENJAMIN BRITTEN Curlew River, 2008

Le Songe d’une nuit d’été, 2008

Mort à Venise, 2009

EMMANUEL CHABRIER Le Roi malgré lui, 2005, 2009

DIMITRI CHOSTAKOVITCH Moscou, quartier des cerises, 2004

CLAUDE DEBUSSY Pelléas et Mélisande, 2004

PASCAL DUSAPIN Faustus, The last night, 2006

PETER EÖTVÖS Lady Sarashina, 2008

GEORGE GERSHWIN Porgy and Bess, 2008

PHILIP GLASS Dans la colonie pénitentiaire, 2008

GE O R G- FR I E D R I C H HA E N D E L Alcina, 2006

HANS WERNER HENZE L’Upupa & le triomphe de l’amour filial, 2 0 0 5

TOSHIO HOSOKAWA Hanjo, 2008

LEOS JANÁCEK Jenufa, 2005

Kátia Kabanová, 2005

L’Affaire Makropoulos, 2005

FRANZ LEHÁR La Veuve joyeuse, 2006

MICHAËL LEVINAS Les Nègres, 2004

FRANK MARTIN Le Vin herbé, 2008

CLAUDIO MONTEVERDI L’Orfeo, 2004

Le Couronnement de Poppée, 2005

COLLECTION OPÉRA de LYON

WO L F GA N G AM A D E U S MO Z A RT La Flûte enchantée, 2004

Cosi fan tutte, 2006

Les Noces de Figaro, 2007

La Clémence de Titus, 2008

JACQUES OFFENBACH Les Contes d’Hoffmann, 2005

La Vie parisienne, 2007

FRANCIS POULENC La Voix humaine, 2007

GIACOMO PUCCINI Il Tabarro, 2007

SERGE PROKOFIEV Le Joueur, 2009

JEAN-PHILIPPE RAMEAU Les Boréades, 2004

SALVATORE SCIARRINO Luci mie traditrici, 2007

JOHANN STRAUSS La Chauve-Souris, 2008

RICHARD STRAUSS Ariane à Naxos, 2005

IGOR STRAVINSKY The Rake’s Progress, 2007

TAN DUN Tea, 2004

PIOTR ILLITCH TCHAÏKOVSKI Mazeppa, 2006

Eugène Onéguine, 2007

La Dame de pique, 2008

GIUSEPPE VERDI Falstaff, 2004

La Traviata, 2009

RICHARD WAGNER Lohengrin, 2006

Siegfried, 2007

KURT WEILL Le Vol de Lindbergh,

Les Sept Péchés capitaux, 2006

ALEXANDER VON ZEMLINSKY Une tragédie florentine, 2007

Pour la présente édition

© Opéra national de Lyon, 2009

Chargé d’édition

Jean Spenlehauer

Conception & Réalisation

Brigitte Rax / Clémence Hiver

Impression

Imprimerie Lussaud

Opéra national de Lyon

Saison 2009/10

Directeur général

Serge Dorny

OPÉRA NATIONAL DE LYON

Place de la Comédie

69001 Lyon

Renseignements & Réservation

0.826.305.325 (0,15 e/ m n )

www.opera-lyon.com

L’Opéra national de Lyon est conventionné par le ministère de la Culture et

de la Communication, la Ville de Lyon, le conseil régional Rhône-Alpes

et le conseil général du Rhône.

ISBN 978-2-84956-040-0

Dépôt légal : octobre 2009

ACHEVÉ d’IMPRIMER

en cet automne 2009 pour les représentations

de Don Giovanni à l’Opéra national de Lyon

dans une mise en scène d’Adrian Noble

& sous la direction musicale de

Christopher Moulds