À BOUT DE SOUFFLE: LES ÉNERGIES ALTERNATIVES EN ZONE URBAINE
Dominée: À bout de souffle, T2 (Romantica) (French...
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MayaBanks
DOMINÉEÀBOUTDESOUFFLE–2
Traduitdel’anglais(États-Unis)parLaurianeCrettenand
MILADYROMANTICA
Prologue
Il prit l’ascenseur qui allait directement du hall à son appartement, en priant tout du long pourqu’Evangelinedaigneleregarderouécoutercequ’ilavaitàdire.S’ilvousplaît, faitesqu’ellesoitdouce,généreuseet indulgenteunedernière fois,et jamaisplus
ellen’auraàdouterdemoi.Dèsquelesportesdel’ascenseurs’ouvrirent,ilseprécipitadansl’appartementencriantsonnom.Il
grimaçaenconstatantledésordredanslacuisine.Lanourritureétaitrépanduesurlesolaveclespoêlesetlescasseroles.Quandilpassadanslesalonpourallerdanslachambre,ilvitlespetits-fourséparpillésdanslapièce
etlesbouteillesbriséesquiavaientlaisséd’énormestachessursesmeublesetsurletapis.Neleuraccordantpasdavantaged’attention,ilfitirruptiondanslachambre,prêtàsupplier,àgenoux
pourqu’elle luipardonne. Il avaitbeaucoupdechoses à expliquer, et cettediscussion soulèveraitdesquestionsauxquellesiln’étaitpasprêtàrépondresansavoirpeurdelafairefuir.Sicen’étaitpasdéjàfait.MaisEvangelineétaitintrouvable.Touslesbijouxqu’illuiavaitofferts,ycomprisceuxqu’elleavait
portéscesoir-là,étaientéparpilléssurlelit,etlesrestesdelarobequ’elleportaitenlambeauxsurlesol.Il passa dans le dressing, qui était plein à l’exception de quelques jeans et hauts et deux paires de
chaussures.Détailnonnégligeable,sonpetitsacdevoyagemanquait.Iltombaàgenoux,lapoitrineserréecommesiunpoidsénormes’étaitabattusurlui.Sonpirecauchemars’étaitréalisé.Elleétaitpartie.Ill’avaitfaitfuir.Ill’avaittraitéedemanièreabjecte.Iln’avaitpasressentipareilleafflictiondepuissonenfance.Maisaujourd’hui,c’étaitsafaute.Ilavait
commis l’impensable.Ce n’était pas lui, la victime.MaisEvangeline. Son ange innocent dont le seulcrimeétaitdel’aimeretdevouloirprendresoindelui.Etill’avaitremerciéed’unefaçonabjecte,enluijetantsonoffrandeàlafigure.Ilenfouitsonvisageentresesmains,unedouleuratroceluidéchirantlesentrailles.—J’aitoutgâché,Ange.Maisjevienstechercher.Jenet’abandonneraijamais.Jemebattraipourtoi
jusqu’àmon dernier soupir. Je ne peux pas vivre sans toi,murmura-t-il. Tu es ce quim’est arrivé demieuxdepuisquej’aivulejour.Monseulrayondesoleil.»Jenepeuxpasvivresanstoi.Tuesmaraisondevivre.Ilfautqueturentres,parcequesanstoi,je
n’ai…jenesuis…rien.
Chapitrepremier
—Trouvez-la,ordonnasèchementDrake, l’œilhagard–celafaisaitplusieursnuitsqu’ilnedormaitpas.C’estvotreuniquepriorité,votreseulemission.Trouvez-la,etramenez-la-moi.Ilavaitrassemblésessentinelles.Sesseulsamis,sesfrères,sesassociés, lesseulshommesàqui il
étaitprêtàconfiersavie–etcelled’Evangeline.Les seuls devant qui il osait semontrer sous un jour vulnérable. Il n’avait plus goût à rien depuis
qu’elle était partie. Cela lui était égal demontrer sa faiblesse. De renoncer à la volonté d’acier quil’avaitfaittenirtoutesavie.Ilssavaienttousqu’Evangelineétaitunique.Indispensable.Ilsl’aimaientetlarespectaient.Ilsn’avaientdéjàpasl’habituded’éprouvercessentiments,maisilétaitencoreplusrarequ’uneseulefemmeleurinspirelesdeuxàlafois.D’oùleurcolère.Contrelui.—Putain,Drake!sifflaMaddoxentresesdents.Commenttuaspufaireça?Ildevaityavoirunautre
moyen.—Iln’yavaitpasd’autremoyenettulesais!grondaDrake.Rongé par la fureur et l’impuissance, Drake n’était plus un homme, debout face à ses frères, les
suppliantdel’aider,maisunecoquillevide.Seshommeséchangèrentdes regards.Certainscompatissants,d’autres résignéscar ilscomprenaient
queDrakeavaitraison,etd’autresencorefurieuxqu’Evangelineaitététraitée–trahie–sicruellement.«Salope.Mêmepascapabledesucerconvenablement.Tunevauxrienendehorsdelachambreà
coucher.»Sesparolescruelles leheurtèrentdeplein fouet, et le souvenirdeschoses impardonnablesqu’il lui
avaitditesrefitbrutalementsurface.ToutçapourconvaincrecesorduresdeLuconiqu’ellen’étaitrienpourlui.Alorsqu’elleétaittout.Etvoilàqu’elles’étaitvolatilisée!Ilnepouvaitpasluienvouloir.Ill’avaitanéantie.L’avaitmiseenpiècesparsesparolestranchantes.
Etbonsang,cequ’illuiavaitfaitsubirphysiquement…Oui,ilétaitseulresponsable.Silas,demarbre,avaitgardé lesilence jusque-là,maismêmes’ilavait l’habitudedene jamaisrien
laisserparaître,sesyeuxtrahissaientsapensée.—Elleneméritaitpasça,affirma-t-ilcalmement.Silas n’avait jamais besoin d’élever la voix pour se faire entendre.Quand il prenait la parole, les
autrescessaientinstinctivementdeparlerpourl’écouter.Ilinspiraitlerespect.—Non,eneffet,réponditDraked’unevoixrauque.Tucroisquejenelesaispas?Ilnesepassepas
unenuitsansquejelarevoie,brisée,désespérée,enlarmes.Pire,jemerappelleàquelpointelleaeupeurdemoi.Desonhumiliation.Elleétaitintimementconvaincuequejepensaischaqueinsulte,chaquemotquej’aipuluicrierpourm’assurerquecesenfoirésnesedoutentjamaisdecequ’ellereprésentaitpourmoi.Jamaisjen’oublierai.Aussilongtempsquejevivrai,jamaisjen’oublieraicettenuit-là.Sontonétaitdevenuvirulent,safureurpalpable.—Ellepourraitêtren’importeoù.Seule.Terrifiée.Sesparentsn’ontpaseudenouvellesd’elle.Etces
garcesqu’elleconsidèrecommesesmeilleuresamies…Ilsetutets’efforçaderetrouversonsang-froid.
C’étaitlepremierendroitoùMaddoxetluiavaientcherchéEvangeline.Maissesamiesn’avaientpaseudenouvellesnonplus. Ilsétaientsur lepointdepartir,quandLanaavaitcédé,admettanten larmesqu’Evangelineavaitappelécejour-là,lejouroùelleavaitprévudeleurrendrevisite.Pourfairelapaix.Stephluiavaitditdenepasvenir.Laculpabilitéavaitassombrilesyeuxdetoutesses«amies».Drake avait alors compris qu’elle n’avait pasplanifié sa surprise, elle ne lui avait pasmenti pour
jouerl’hôtessepourlui.Blesséeparlerejetdesesamies,elles’étaittournéeverslaseulechosevraiedans sa vie. Elle avait cherché son approbation, dont elle avait tant besoin, parce qu’elle n’avaitpersonned’autre.MaddoxsesentaitaussicoupablequeDrake:s’ilétaitmontéavecEvangeline,commeàsonhabitude,
ilauraitsuquesesamiesn’étaientpaslàetn’auraitpashésitéàl’emmenerailleurspourlasoirée.Ilnes’étaitpasattenduàcequ’elles’échappeetretournechezDrakepourluifairelasurprise.Pourluifairesavoir qu’il comptait pour elle.Elle avait tout risqué pour lui et il l’avait remerciée par une trahisonabjecte,d’unetelleviolencequ’ilavaitdétruitunechosesibelleetinnocentequ’ilnepouvaitypensersansdevenirfou.Justiceseraclalagorgeetsepassalamaindanslescheveux,hésitant,commes’ilavaitpeurd’énerver
Drakedavantages’ildisaitcequ’ilavaitàdire.—Çavapeut-êtreteparaîtrefou,Drake.Maisécoute-moi,d’accord?Drakesoupiraavecimpatience.Chaqueminutepasséedanssonbureauàparlerd’Evangelineétaitune
minutedeplusqu’ellepassaitDieusaitoùdanslarue,seule,dévastée,pensantqu’ill’avaittrahie.—Faisvite,ditsèchementDrake.Pendantqu’onesticiàdiscuter,elleestdehors,danslefroid,seule,
affamée,sansrien.Rongéparlechagrin,ilfutforcédes’asseoirdanssonfauteuil,aurisquedes’effondrer.Ilsepassales
mains sur le visage, sans voir les expressions choquées de ses hommes et les regards gênés qu’ilséchangèrent.—Jecroisquetut’yesmalpris,expliquacalmementJustice.Drakelevalatête,unemouerageuseauxlèvres.LesautresdévisageaientJustice,interloqués.Ildevait
avoirperdulatête,pourcontrarierDrake,remettreenquestionsonjugement.—Écoute-moi,répétaJustice.Tul’asprotégée,cachée,depeurqu’onseserved’ellecontretoi.C’est
pourçaquetuasdûfairecequetuasfaitquandtut’esretrouvéaupieddumur.L’expressionsinistredeSilaslaissaplaceaudégoûtqueluiinspiraitcequeDrakeavaitété«obligé»
defairepourprotégerEvangeline.—Aulieudelacacher,delagardersecrète,jecroisquetudevraisofficialiservotrerelation.Crier
hautetfortquetuesavecelle.—Tuesfou?s’indignaDrake,lavoixrauque.Tuveuxqu’ellesefassevioler,torturer,tuer?Justice leva la main pour exhorter Drake à l’écouter. Les autres se turent également, soudain très
curieuxdesavoiroùJusticevoulaitenvenir.—Non,tunelacachespas.Tufaisd’elletareine.Tufaissavoiraumondeentierqu’elleestàtoiet
quetutuerasquiconquelaregardedetravers,lamenace,ouessaiedeseservird’ellepourt’atteindre.Penses-y,Drake.Tuesl’hommeleplusredoutédelaville.Tupensesvraimentquetesopposantsserontassezstupidespours’enprendreàcequetuasdepluscher?—Iln’apastort,renchéritSilas,surprenanttoutlemondeenprenantainsilaparole.Ondoublerait,
tripleraitledispositifdesécurité,maiscequilaprotégeralemieux,c’esttonnom.Penses-y,Drake.As-tudéjàannoncépubliquementtarelationavecunefemme,oufaitcomprendrequeceluiquiluiferadumalconnaîtraunemortlenteetdouloureuse?Drakegrognaavecimpatience.
—Unegarderapprochée,mêmedevotreniveau,nesuffirapasàlaprotégerd’unsniper,d’unebombe,oud’unhommedéterminéàluicolleruneballeenpleinerue.MaddoxjuraetjetaunregarddedégoûtàDrake.—Tuperdstoutdiscernementettouterationalitéquandonparled’Evangeline.Tesennemisn’auraient
aucun intérêt à la tuer, si ce n’est t’énerver et te donner des envies demeurtre.Commanditer lamortd’Evangelinereviendraitàsignersonproprearrêtdemort,ilfaudraitêtrestupide.Leseulmoyendeseservird’ellepourt’atteindreseraitdelaprendrevivanteetdelamaintenirenviepourt’extorquerjenesaisquoienéchangedesalibération.Mais,pourarriverjusqu’àelle,ilfaudraitpasseràtraverssagarderapprochée,etceseraitmissionimpossible.—JamaisnousnelaisserionsquiquecesoitapprocherEvangeline,intervintJusticeendésignantles
autreshommesrassemblésdanslapièce.Elleseraitsurveilléevingt-quatreheuressurvingt-quatre,septjourssurseptdèsqu’ellequitteraittonappartement.EtquandEvangelineettoiseriezdesortie,unegarderapprochéevousprotégeraittouslesdeuxetsurveilleraitvosmoindresfaitsetgestes.— Il n’y a qu’en privé que vous n’auriez pas de service de sécurité. Tu as un système de sécurité
infailliblechez toi.Enappuyant surunsimplebouton, tout l’immeuble severrouilleet tuasunepiècesécuriséeinviolable,àl’épreuvedesexplosifs,luirappelaSilas.Etjesaisdequoijeparle,parcequec’estmoiquiaifaitl’installation.—Jeneveuxpasqu’ellesesenteprisonnière.Drakeangoissait.—Ceseraitcommeavant,lerassuraJax,quiprenaitlaparolepourlapremièrefois.Evangelinen’est
jamaisalléenullepartsansl’undenous.Celanesemblaitpasladéranger.Ellenousappréciait,même.Oui,ellenousappréciait…Ilse tut, lavoixnouéeparcequiressemblaitàdesregretsoudesremords,commesiDrakel’avait
délibérémenttenueéloignéed’eux.Et,àenjugerparlesvisagesdeseshommes,ilsluienvoulaient.SeshommesadoraientEvangeline,alorsqu’ilsn’appréciaientaucunefemme.Etvoilàqu’ilsdevaient
affronter lapertedesaconfianceaumême titrequeDrake. Ilnepouvait se résoudreàêtre jaloux.Laseuleémotionqu’ilpouvait ressentir était la culpabilité, car à causedecequ’il avait fait,Evangelineavaitperdudesgensqu’elleavaitfiniparconsidérercommesesamis,qu’elleavaitprissoussonaile,etauxquelsavaitdonnélesentimentqu’ilscomptaientpourelle.—Jesuisleseulàporterlaresponsabilitédecequ’asubiEvangeline,ditDrakeàvoixbasse.Etvous
savezaussi bienquemoiqu’ellen’a aucun instinctdevengeance en elle.Elle est douceparnature etjamaisjen’aiconnuuncœuraussipurethonnêtequelesien.Ellenevousdétesterapas.Justemoi.C’estmacroix.Aucundevousnesouffriraàcausedemonarroganceetdemastupidité.Ilmarquaunepause et baissa la tête, pensif ; tantde choses sebousculaientdans sonesprit…Bon
sang,sepouvait-ilquecesoitsisimple?Avait-ilétéidiotdeprotégerainsiEvangeline,parpeur?Non,cen’étaitqu’unepartieduproblème.Parégoïsme,iln’avaitvoululapartageravecpersonne,pasmêmesesfrères,mêmesic’étaitnécessaire.Ilétaitlas.—Tuasraison…Mince,vousaveztousraison.J’auraisdûypenser.Il avait parlé avec autodérision.Lui qui était toujoursmaître de toute situation.Lui qui envisageait
touteslespossibilités.Evangelineavaitbouleversésaviesoigneusementorganisée,etdèsqu’ils’agissaitd’elle,iln’avaitpaslesidéesclaires.S’ilnesereprenaitpastrèsvite,ilsallaienttouslepayerdeleurvie.Silas s’éclaircit lavoix,etune foisencore, les têtes se tournèrent, surprises. Il avaitdéjàbrisé son
silenceunefois,etilsemblaitavoirquelquechoseàajouter.
—Iln’yapasqueçaquetuas…pasbienfait,dit-il,rectifiantcequ’ilavaitétésurlepointdedire.Malgrécela,lesmotsflottaientdanslapiècecommes’illesavaitbeletbienprononcés.Iln’yapasqueçaquetuasfoiré.SonregardcroisaceluideDrakesansciller.Silasn’avaitpaspeurdeDrake.Cedernierleconsidérait
commeunégaldans tous lessensdu terme. Ilétait toutaussi létalque lui,sicen’estplus.Non,Silasn’avaitpaspeurdelui,etDrakelerespectaitpourcela.Le silence se fit dans la pièce ; tous attendaient, impatients, impressionnés par le culot de Silas à
suggérer que Drake avait eu tort sur beaucoup de choses. Personne, pas même les hommes les plusprochesdeDrake,n’osaitpareillechose.—Tunel’asjamaisrassuréequantàsaplacedanstonmonde,danstavie,ditSilasavecsoncalme
habituel.—Biensûrquesi.La réponse de Drake fut brutale, mais la nuance défensive dans sa propre voix lui déplut. La
culpabilité.ParcequeSilasavaittouchéunpointsensible.—Tularetrouvaisaprèsletravailettupartaisavantqu’elleneseréveille.Tuenvoyaisl’undenous
labaladeroùelleavaitbesoind’aller,s’occuperd’elle.C’étaittonjob,Drake.C’esttanana,ettuneluiasdonnéaucuneraisondecroirequ’elleestplusqu’unsimplecorpspourréchauffertonlit,unesoumiseàtadomination.Ellen’existequ’àtaconvenance.LarageaveuglapresqueDrake,etlaseulechosequileretintdesejetersursonhommedemain–ce
seraitlabatailledesavie,carDrakeetSilassevalaient,quoiqueDrakesoupçonnâtfortementqueSilasauraitl’avantage–futqueSilasavaitmarquéunvraipoint.—Si tu la trouves, sielle t’écoute, sielle tepardonneoudumoins te laisseunechancede réparer
l’horribleinjusticequiluiaétéfaite,ilvafalloirquetuprouves,pardesactesetnondesmots,qu’elleestplusàtesyeuxqu’unesimpleconquêtequiréchauffetonlitpourquelquesnuitsetquetucongédierasavecuncadeaucoûteuxpourlaremercierpoursontemps.—Tusaispertinemmentqu’elledétestequejeluioffrequoiquecesoit.Quecesoientcadeaux,bijoux,
oufringues.—Ettusaispourquoi?l’interrompitMaddox,leregardpénétrant.—Parcequ’ellenevoulaitquemoi.Soudain,ilcompritoùSilasvoulaitenvenir.Ilfermalesyeux:toutétaitclairàprésent.Evangelinene
voulaitquelui.Sontemps.Soncœur.Laseulechosequ’ilneluiavaitpasdonnée,qu’ilnepouvaitpasluidonner.Maiscelanevoulaitpasdirequ’ilnepouvaitpas luimontrerqu’elleétait toutpour lui etpasserplusdetempsavecelleaulieudelafourgueràundeseshommeschaquejour.Iljuraetsepassalamainsurlevisage.— Il existe d’autresmoyensde la blesser pourm’atteindre.Ses amies,même si elles l’ont rejetée.
Personned’autren’estaucourant.Safamille,sonpèreetsamère,pourquielleferaittout.Ilfaudralesprotégeraussi,carsiquelqu’unkidnappaitsesamiesousafamille,Evangelineseraitdésemparéeetmesupplieraitdefairecequejepeuxpourlesretrouver.Ilgrimaçaetfermalesyeux.—Etjenepourraisjamaisrienluirefuser,saufsicelalamettaitendanger.Sonbonheurprimesurtout
leresteetsiquelqu’unenlevaitceuxquiluisontchers,jeseraisimpuissantcarjenepourraisplusjamaisregarderEvangelinedanslesyeuxsijenefaisaisrien,sijerefusaisdecéderauchantage,chosequejen’auraisjamaisconsidéréeparlepassé.Certainsdeseshommesparurentabasourdisetneprirentpaslapeinedecacherleurstupeur,mêmesi
ceuxquileconnaissaientlemieuxnesemblèrentnullementsurpris.Dansleursyeuxbrillaientuncertain
respect,etladéterminationdemettreEvangeline–etceuxqu’elleaimait–ensécurité.Hatcherchangeadeposition,visiblementmalàl’aise.Ilouvritlaboucheàplusieursreprisesavantde
larefermer,leslèvresserrées,commes’ilseretenaitd’exprimersespensées.—Àquoipenses-tu,Hatch?exigeadesavoirDrake.L’intéressésoupira.—Punaise.Neleprendspasmal.J’apprécieEvangeline.Elleestgentille.Tropgentilleetinnocente
même,etjeneveuxpasplusquetoiqu’elleseretrouvedansl’embarrasàcausedenousetsoitblesséeoutuée.—Mais?l’exhortaDrake,sachantqueHatchernevoulaitpasseulementlouerlesvertusd’Evangeline.Lemalaisedujeunehommes’intensifiaetlasueurperlasursonfront.—Écoute-moi,marmonna-t-il,répétantlarequêteprononcéeparJusticequelquesinstantsauparavant.
Tuesdéjàdedans jusqu’aucouavecelle.Tun’avais jamaisenvisagéde rester si longtempsavecunefemme,encoremoinsd’enfairepubliquementtareine.Peut-être…peut-êtrequec’estmieuxcommeça.—Comment,«commeça»?Derage,lavoixdeDrakeclaquadansl’aircommeunfouet.Ilsavaitparfaitementoùsonhommede
mainvoulaitenvenir,ets’ilavaitraison,ilfaudraitqueSilas,MaddoxetJusticeleretiennentdeletuer.—Defaireunecoupurenette,clarifiaHatcher,intransigeant.Ilyaeucésureetilvautmieuxnepas
revenirdessus.Elleterendvulnérable.Tunelevoispas,maisnoussi,ettuvastefairetuer,etnousfairetueraussi,peut-être.Tuvastoutperdreàcaused’elle.Ilyeutdesréactionsmitigées,desexpressionséberluéesauxregardsglacials,puislafurieabsoluede
Justice,Maddox,Silas,Hartley, JaxetThane, trahiepar leursvisages, leursyeux, lapositionde leursmâchoires.—Tufaisdéjà,ouprévoisdefaire,desconcessionsque tune teserais jamaisautoriséesavant.Tu
devraispeut-êtresongeràlalaisserpartirplutôtqued’enfairetareine.Débarrasse-toid’elle,arrêtetout,etfaissavoirquec’estfini,quetun’asaucuneaffectionpourelle.C’estcequetuastoujoursfait.C’estce que tu viens de faire. Ne reviens pas sur ta décision. Tu n’as jamais été aussi impliquéémotionnellement avec une femme, et tu n’as jamais retourné toute une ville pour une femme qui n’amanifestementaucuneenviequetulatrouves.Situveuxqu’ellesoitensécurité,c’estlemeilleurmoyen,parcequetoutlemondeval’oublier,surtoutaprèsquetul’asdémoliedevantlesLuconi.Maist’afficheravecelle?Ceseraitlajeterdanslagueuleduloup,ettulesais.DrakejetaàHatcherunregardsiglacialquelatempératuredelapiècedescenditenflèche.Lesautres
étaientmalàl’aise:ilssavaientqueHatch,quellesquesoientsesintentions,venaitdefaireunfauxpas.IlneconnaissaitpasEvangeline,n’avaitpasséquequelquesinstantsensaprésence,tandisquelesautresl’avaient beaucoup fréquentée, comprenaient l’obsession de Drake, et savaient qu’il ne la laisseraitjamaispartir.—Evangelineestmavie,ditDrake,horsdelui.Sijelaperds,jesuismort.Situosesencoresuggérer
que jemedébarrassed’elle, je t’ouvreendeuxàmainsnues.Tuparlerasd’elleet t’adresserasàelleavecunrespectabsolu.Tulatraiterasaveclaplusgrandedéférence.Evangelineserataprioriténuméroun.Noussatisferonssesmoindresbesoins,etferonsdemêmepoursafamilleetsesamies.»Sonbonheur,sasécurité,sonconfort,passentavanttout,etjeveux,non,j’exigequechacundemes
alliésjuredelaprotégeretsoitprêtàdonnersaviepourelle,commeilleferaitpourmoi.Ets’ilfautchoisirentreEvangelineetmoiunjour,laquestionneseposepas.IlfautsauverEvangelineàtoutprixetjevouscharge,mesfrères,d’assurersasécuritéetsonbien-êtresijenesuispluslàpourlefaire.Ellenedoitjamaismanquerderien.Compris?Les yeux deHatcher trahirent sa surprise face à la véhémence deDrake.Après un long silence, il
parvintenfinàprononcerun«oui»rauqueaccompagnéd’unmouvementsecdelatête.SiDrakedevaitsefierauxexpressionsdeseshommes, ilétaitévidentqu’iln’étaitpasleseulàvouloirpunirHatcherpoursa«contribution».Ilfaudraitqu’ilsesouviennedenejamaisconfierEvangelineàHatcheràmoinsqu’ilnesoitaccompagné.Pasavantd’êtresûrqu’ilétaitparfaitementloyalenversEvangeline.Drake en avait eu assez. Cela le rendait malade qu’un de ses hommes ait pu suggérer qu’il laisse
Evangelinepenserqu’ils’étaitdésintéresséetdébarrasséd’elle.Têtebaissée,illeurfitsignedepartir.Malgrécela,lorsqu’ilrelevalatête,Maddox,SilasetJustice
étaientencorelà,àleregarder,l’airgrave.Lesilences’étira,puisMaddoxpritlaparole.—C’estlabonne.Drakenefitpassemblantdenepascomprendre.IlsavaitpertinemmentcequeMaddoxvoulaitdire.
Drake avait toujours fui l’engagement comme la peste. Il n’avait jamais fait confiance à personne –surtoutpasàunefemme–,àl’exceptiondeceuxquiétaientrassemblésencetinstantdanssonbureau.Ilavait juré de ne jamais s’impliquer émotionnellement, pas seulement parce qu’il n’avait pas encorerencontré de femme qui provoque chez lui un émoi suffisant,mais à cause du danger qu’elle courraitsimplementensemontrantàsonbras.Maisaujourd’hui?Oui,Evangelineétaitlabonne.Néanmoins,au lieuderépondresimplementà laquestionpar«oui»oupar«non», il regardases
hommes,lesyeuxpleinsdedéterminationetd’unfeuinhabituel.—Jamaisjenelalaisseraipartir.Mêmes’ilfautquejel’attachetouslessoirsàmonlit.Sielleveut
partirunjour,ilfaudraqu’ellemepersuadequejenesuispasceluiqu’elleveut,quelemodedeviequej’exigeneluiconvientpas,etqu’ellen’estpasheureuse.Maisj’aibienl’intentiondeluioffrirlaviedontellerêve.—Jamaistuneretrouverasunefemmecommeelle,ditSilascommes’ilréfutaitl’idéequ’Evangeline
parteunjour.Pourtant,ilyavaitautrechosedansleregardpénétrantdeSilas.Peut-êtrecherchait-ilàsavoiràquel
point Drake tenait à Evangeline. Silas semblait si sûr d’Evangeline, si persuadé qu’elle allait luipardonner.Peut-êtreavait-ilpeurqueDrakelatrahisseunenouvellefois?—Non,affirmaDrake.Iln’enexistepas.Onnegoûteàcetteperfectionqu’unefoisdanssavie,etsi
onest tropstupidepournepass’accrocheràunesi joliechoseetsedémenerpour lagarder,onnelaméritepas.IlplantasesyeuxdansceuxdeSilas,lacolèreetladéterminationbouillonnantdanssesveines.Ilne
devait rienàpersonne,etpourtant, toutça–Evangelineetcequ’elle représentaitpour lui–était tropimportantpourrisquerdeleperdreenneparlantpasfranchement.Ilnedevaityavoiraucundoute,ouilne pourrait être certain de leur engagement total dans sa recherche. Il observaMaddox et Justice, lesincluanteuxaussidanssadéclarationenflammée.—Mettez-vous ça dans le crâne. Evangeline est tout pour moi. Drake Donovan n’existe pas sans
Evangeline.Sijamaisilluiarrivaitquelquechose,jen’ysurvivraispas.Surtoutsic’estparmafaute.Jen’auraispluslaforcedevivre.Ellemedonneunbut.Uneraisondevivre,demeleverlematin.Onnes’enremetpascommeça,quandlalumièrequiilluminaitvotrevies’éteint.Seshommessemblaientabasourdis,nonparsessentimentsenversEvangeline,carilslespartageaient
à un certain degré, mais parce qu’il venait de leur dévoiler son âme. La compréhension remplaçarapidementlasurprise,etSilasadressaunbrefsignedetêteàDrake,commesatisfaitquecedernieraitréussiletestauquelill’avaitsoumisàsoninsu.Trèsbien.Drakelesavaittouchés,etétaitcertainqu’ilsdonneraientleursviespourEvangeline.Ilsla
protégeraientdetoutemenacecarilssavaientques’illuiarrivaitquelquechose,ilsperdraientégalementDrake.—Nouslaprotégerons–etteprotégerons–aupérildenotrevie,juraSilas.MaddoxetJusticefirentéchoàsonsermentavecdétermination.Ilsétaienttouspartisderienetavaientgravileséchelons.Ilsavaientdespassésnébuleux,rienneleur
avaitétédonné.Toutcequ’ilsavaient,ilss’étaientbattuspourl’avoir.Ilsformaientunefamille,liéslesunsauxautresparunengagementpluspuissantquelesliensdusang.Etpourlapremièrefois,ilsallaientélargirleurcerclepouryinclure…unefemme.CelledeDrake.
Aucunnes’étaitjamaisliésuffisammentlongtempsàunefemmepourquecelasoitconsidérécommeunsemblantderelation.Ilssatisfaisaientleursbesoins,s’assuranttoujoursquelafemmeétaitsatisfaiteenretour, et ils étaient généreuxquand ils les quittaient.Mais aucunen’avait jamaismenacédebriser lacarapacequienserraitleurscœurs.Jusqu’àmaintenant.Jusqu’àEvangeline.CertainsdeseshommesenviaientDrake,d’autresleplaignaient,cardésormais,ilavaitbeaucoupplus
à perdre. Avant, il n’avait à s’inquiéter que de lui-même et de ses frères. Il était craint et vénéré.Personnen’osaits’enprendreàlui.Maisàprésent,Drakeavaitunefaiblessequipourraitbiencausersaperte.Sonabsencede faiblesseétait la raisonpour laquellesesennemisnepouvaients’attaquerà lui.CarDraken’avaitriennipersonnequiluitienneàcœur.Maismaintenant?Ilavaitcettefemmequiétaittoutpourlui.EtmalheuràceluiquitoucheraitàEvangeline,carDrakeseferaitangevengeuroudémonvenudroit des enferspour sevengerpersonnellementdequiconque lui ferait du tort.Pourune fois, iln’enverrait pas Silas à leurs trousses. Ce serait trop personnel. Drake était prêt à réduire enmiettesquiconqueferaitdumalàsonEvangeline.
Chapitre2
—MonsieurDonovan!MonsieurDonovan!Irrité par cette intrusion malvenue alors qu’il se dirigeait vers l’ascenseur, Drake grogna. Il était
3heuresdumatin,seshommeset luiavaientpassélavilleaupeignefin,maislajournéederecherches’étaitencoreunefoisrévéléeinfructueuse.Ilseretournaversleportier,quis’arrêtanetenvoyantl’humeurmassacrantedeDrake.— Quoi que ce soit, ça peut attendre, déclara Drake, dos à l’ascenseur dont les portes s’étaient
ouvertes.Qu’onnemedérangepas.Un instant, le portier sembla indécis, partagé.Drake se retourna avecunemouededégoût etmonta
dansl’ascenseur.Leportiersejetaenavantettenditlamainpourempêcherlesportesdesefermer.—C’estàproposd’Evangeline,enfin,jeveuxdire,MlleHawthorn.Enentendantsonnom,Drakesortitdel’ascenseuretempoignal’hommeparlecoldesaveste.—Quoi,Evangeline?grondaDrake.Tusaisquelquechose?Levisagedel’hommeviraaugrisetilbaissalesyeux,l’aircoupable.Pourquoi?Certes,cefameuxsoir,leportieravaitvuDrakequitterlebâtimentseulementquelquesminutesaprèsy
êtreentréaveclesLuconi.Drakesoupira.Quelidiot!LeportieravaitdûvoirEvangelinepartir.Etdansquelétatelleétait.LeportieraimaitbeaucoupEvangeline.Ilavaittoujourseuunmotgentilpourelle,etréciproquement.
Ilss’appréciaientl’unl’autre,maisDraken’yavaitjamaisprêtéattentioncarEvangelineétaitainsiavectousceuxqu’ellerencontrait.Maissi…Il futsaisid’effroiet resserrasonemprisesur lavestede l’hommeavantde le libérer,cequi le fit
tituber.Drake n’avait jamais pensé à l’interroger. Il s’était lancé tête baissée à la recherche d’Evangeline,
avaitretournélaville,commepossédé.Etsilaréponseavaitétélàtoutcetempsetqu’Evangelinesoitrestée seule, désespérée, affamée et dévastée pendant queDrake perdait son temps à courir après defaussespistes?—Voustenezàelle?demandaleportiersuruntonpresqueaccusateur.Ohoui,cethommesavaitquelquechoseetilenvoulaitàDrakepourcequ’ilavaitfaitàEvangeline.Il
fallait queDrakemarche sur desœufs : s’il lui donnait une seule raison de penser qu’il avait blesséEvangelineintentionnellement, ilne tireraitaucuneinformationdecethommequela jeunefemmeavaitprissoussonaile.Commeellesavaitsibienlefaire.—Beaucoup,ditDraked’unevoixdouceetsinistre.Voussavezoùelleest?—Jel’aivuecettenuit-là,ditleportierd’untonamer.Sesyeuxétaientaccusateurs,commes’iltenaitDrakepourresponsabledudépartd’Evangeline.Cequi
étaittotalementvrai.Maisquesavaitcethommeexactement?Savait-iloùsetrouvaitEvangeline?—Ilyaeuunterriblemalentendu.Drakeavaitlagorgenouée,deselivrerainsiàunparfaitétranger.MaispourEvangeline,pourlatenir
denouveaudanssesbras,ilferaitn’importequoi.—Etcen’étaitpaslafauted’Evangeline.Ellen’étaitpascenséeêtrelà.
Savoixtrahissaitsadouleur,etilauraitjuréqueleregardduportiers’étaitradouci.—Ellevousavaitpréparéunesurprise.Etensuite,elleétaitdévastée.Jevoulaisl’aider.J’aiessayé.
Maisellem’aditquesijel’aidais,jemeretrouveraisàlaporte,commeelle.Draketressaillit.Lechagrinluienserradouloureusementlapoitrine,luicoupantlesouffle.Leportier
avait tenté d’aider Evangeline, qui avait refusé de peur que Drake le licencie s’il le découvrait. Uninstant,ilavaitespéréqu’ilpourraitluiapporterdesréponses.LuidireoùtrouverEvangeline.L’hommesepassalamaindanslescheveux,l’airlasetincertain.—QueDieumepardonnesijemetrompe.Qu’ellemepardonnesijemetrompe.—Quoi?Quesavez-vous?Ilavaittoutel’attentiondeDrake,quiavaitdécidédechangerdetactiquepuisqu’ilsavaitàprésentque
l’hommeétaitpartagé.IncertaindesintentionsdeDrakevis-à-visd’Evangeline,ilrenâclaitàluidonnerdesinformationsquil’aideraientàlaretrouver.ÀmoinsqueDrakepuisseleconvaincrequ’ilfaisaitcequ’il fallait, qu’il ne trahirait pas Evangeline en lui disant ce qu’il savait, il n’obtiendrait pas cesinformations,mêmeenmenaçantdelelicencier.—Ilesttrèsimportantquejelaretrouve,ditDrakeavecdouceur.Jenesuisquel’ombredemoi-même
sanselle.Jedoisimplorersonpardon,maisjenepeuxpaslefaireavantdelatrouveretdelarameneràlamaison,àsaplace.LeportierdévisageaDrake,etsaméfiances’estompa.—Voussavez,monsieurDonovan,jepensequejevouscrois.—J’espèreseulementqu’elleaussi.Leportiersoupira.—Je l’aimisedansuntaxiet l’aienvoyéedansunhôtel tenuparmasœuràBrooklyn.Evangeline.
Enfin,MlleHawthorn.—Nevousinquiétezpas,lerassuraDrake.Jecomprendsqu’elleestspécialepourvous,commepour
noustous.Vousneluimanquezpasderespectenl’appelantEvangeline.Jepensemêmequ’elleinsistaitpourquevouslefassiez.Unsourireapparutsurleslèvresduportier.—Çaoui,monsieurDonovan.Çaoui.—Bien, revenons-en à l’hôtel où vous l’avez envoyée, repritDrake en s’efforçant demodérer son
impatience.—Ellen’avaitnullepartoùaller.Pasd’argent.Ellen’avait riend’autrequequelquesvêtementsde
rechange.Jenepouvaispaslalaisserpartircommeça,sansunendroitoùseréfugier.—Vousavezfaitcequ’ilfallait,etvousaveztoutemagratitudepourvousêtreassurédesasécurité.
Vousserezrécompensé.Àcesmots,levisagedel’hommesedurcit.—Marécompenseseradelavoirici,ensécurité,etheureuse.Drakefronçalessourcils.—Maiscelafaitdéjàcinqjours.VoussavezsiEvangelineestencorelà-bas?Elleesttropfièrepour
accepterlacharité.Elleneresteraitjamaisdansunendroitqu’ellenepourraitpayerdesaproprepoche.—Masœurl’aengagéecommefemmedeménage,mêmesiEvangelineaétéhonnêteendisanttoutde
suite qu’elle ne comptait pas rester longtemps. Seulement jusqu’à ce qu’elle ait assez d’argent pourpasseràautrechose.LesangdeDrakeseglaça.«Passeràautrechose.»Bonsang.Ilavaitbienfaillilaperdrepourde
bon.Encorefallait-ilqu’elleysoittoujours.—Elleprendsonservicedansuneheure,indiqualeportieravantderegarderDrake,mentonlevé,les
yeuxenfusion.Nemefaitespasregretterd’avoirtrahisaconfiance,monsieur.Jeneferaijamaisrienquipuissefairedumalàcettejeunedame.Elleadéjàbienassezsouffert.— Là-dessus, nous sommes d’accord, dit Drake en posant sa main sur l’épaule du portier.Merci.
Jamais jenepourraivousremercierdevotregentillesseenversEvangelinequandelleenavait leplusbesoin,etdem’avoiraidéàlaretrouverpourarrangerleschoses,mêmesiDieusaitquejeneleméritepas.—Ramenez-laàlamaison,monsieurDonovan.Cen’estpaspareilsanselleici.Sesmots touchèrentDrakeenpleincœur, car ils étaientparfaitementvrais.Tout étaitdifférent sans
Evangeline.Ilfaillitsortirdel’immeubleencourantaprèsavoirobtenuduportierlenometl’adressedel’hôtel;
maisilfallaitqu’ilsedouche,sechange,etappelleSilasetMaddox.C’étaientceuxquiappréciaientleplus Evangeline, qui la recherchaient le plus activement.Maddox se sentait encore coupable d’avoirlaisséEvangelines’échapper,etSilas…Drakenesavaitpasexactementquellienl’unissaitàEvangeline,maisc’étaitl’amitiélaplusimprobablequiluiaitétédonnédevoir.Une chose était sûre : Silas était très protecteur enversEvangeline, etEvangeline l’était tout autant
enversSilas, s’en prenant à quiconque osait dire dumal de lui. Il serait normal queMaddox et Silasl’accompagnentpourramenerEvangelineàlamaison,etassurersasécurité–etcelledeDrake.Silasjuradanssabarbequandlavoiturequ’ilpartageaitavecDrakeetMaddoxs’arrêtadevantl’hôtel
délabré,cinqminutesaprèsledébutduserviced’Evangeline.Drakeluiadressaunregardinterrogateur,maisSilasneluioffritaucuneexplication,seulementunair
renfrognéquisereflétaitsurlevisagedeMaddox.Celalesrévoltaitqu’Evangelineaitvécuettravailléicipendantqu’ilspassaientlavilleaupeignefinpourlaretrouver.Néanmoins,leportieravaitétéassezattentionnépourtrouveràEvangelineunendroitoùaller.Cequi
luivalaitlagratitudeéternelledeDrake.—Attendez-moiici,ordonnaDrakeenouvrantlaportière.J’espèredetoutmoncœurêtrecapablede
laconvaincredereveniravecmoi.
Chapitre3
Evangelineplongealaserpillièredansleseaud’eausavonneuse,l’essoraenlapressantdetoutessesforces,puisvaquaàlatâchelaborieusedunettoyagedelaréception.Commeellenedevaitpasperdredetempsnigênerlesalléesetvenuesdesclients,leménagedevait
êtrefaità4heuresdumatinchaquejour.Elleavaitmalaudos,lespiedsenflés,etsesyeuxlabrûlaientàcause des torrents de larmes qu’elle versait chaque nuit, allongée sur son lit de camp, incapable detrouverlesommeil.Ellesavaitqu’elleavaitmauvaisemineetquesesmouvementsétaientsemblablesàceuxd’unrobot.Si
ellen’avaitpas ressentiunedouleuraussiatrocedans lapoitrine,à l’endroitducœur,elleaurait juréqu’elleétaitmorteetn’étaitplusqu’unzombiesuivantsaroutinejournalière.Plusquequelquesjours.Ellen’avaitbesoinquedequelquesjourspourrassemblerassezd’argentet
acheterunbilletd’avionpourrentrerchezsesparents.Ellen’étaitpasétrangèreaudurlabeur.Mêmes’ilfallaitqu’ellecumuledeux,troisemplois,elleferaitcequ’ilfaudraitpouraidersesparents,etcelaauraitl’avantagedenepasluilaisserletempsdepenserà…Unfrisson laparcourut et sesyeux labrûlèrent, commesionyavaitverséde l’acide.Non,ellene
pleurerait pas ici. Elle laissait son chagrin la dévorer seulement la nuit, dans le noir, où personne nepouvaitlavoirnil’entendre.Dequisemoquait-elle?EllenecesseraitjamaisdepenseràDrakeetàsatrahisonabjecte.Mettrede
ladistanceentreeuxneserviraitàrien.SoncœurresteraitpourtoujoursàNewYork.Avecunhommequin’avaitnicœur,niâme,niaucunecapacitéàaimer.Qu’allait-ellefaire?Pourquoin’avait-ellepasécoutésesamies?Pourquoiavait-elleétésinaïve?À
causedesaproprestupidité,elleavaitperdunonseulementDrake,maisaussisesmeilleuresamies.Elleaurait toutdonnépourêtreà l’appartement,en trainde s’épancheretde s’excuserde lesavoir
trahies.Maisellenevoulaitpasquelesgensquil’aimaientlavoientauplusbas.Elle avait quelques jours pour rassembler ses économies et rentrer chez ses parents, dans l’espoir
d’oubliercequeDrake luiavait fait.Sinon,elle serait incapablede retrouver sa famille sansquesonabattementselisedanssesyeuxetdanssonlangagecorporel.Latristessel’envahitdenouveau:elleseberçaitd’illusions.QuelquesjourspouroublierDrake?Elle
neseraitjamaislibéréedel’impactqueDrakeavaiteusursavie,sibrèvequ’aitétéleurliaison.Mais elle pouvait aumoins se jurer deneplus jamais aimer de tout son cœur et de toute son âme.
Commentlepourrait-elle,alorsqueDrakeenposséderaittoujoursdesfragments?La lassitude l’envahitetellechancela,enproieàune infinie tristessequi laprivadesa force.Elle
agrippa le manche du balai pour ne pas s’effondrer au sol, pour ne pas céder au désespoir qui luidéchiraitlecœur.Tremblantcommeunefeuille,ellerestadeboutlà,àrespirerlentement,agrippéeaubalaicommeelle
s’agrippaità lavie.Puisellefit l’erreurdelever lesyeuxetdevint livide.Siellen’avaitpasserrélemanchesifermement,elleseseraitécroulée.Drakepassalaportedel’hôteletnetrouvapasderéceptionnistedegarde.Ilentenditlesondiscretde
l’eauetleclaquementd’uneserpillièresurlesol,etsetournainstinctivementpourchercherlasourcedu
bruit.Evangeline.Son pouls s’emballa. Elle s’avachit, agrippée aumanche de son balai, etDrake se nourrit de cette
vision comme un affamé. Ses genoux flageolaient et ses mains… bon sang, ses mains tremblaient demanièreincontrôlable.Unebouleseformadanssagorge,etilnefutcapablequed’absorberlalumièredesavie.Evangeline.Sonange.Ill’avaitretrouvée.Enfin.Lorsqu’elle leva la têteetque leurs regardsse trouvèrent, lapeurqu’ilperçutdans lesyeuxaffolés
d’Evangeline, et le pas en arrière qu’elle fit aussitôt, comme un animal prêt à fuir un prédateur, luiretournèrentleventre.Drake, les yeux en feu, les narines dilatées sous le coup de l’émotion, retenait les larmes qui
menaçaient de l’engloutir.Car ces beauxyeuxqui l’avaient autrefois regardé avec amour et confianceétaientàprésentemplisdeterreuretd’appréhension,et,pire:dehonte.Ilneméritaitpasdevivreaprèscequ’illuiavaitfait.Ne lui laissantpas le tempsde trouveruneéchappatoire, il fonditsurellecommeleprédateurqu’il
était.Seulement, ledétachementfroidquiétaitcommeunesecondepeauchezluiquandils’apprêtaitàattaquer avait cédé saplace à lapanique totale. Il nepouvait pas laperdre.Pas encore.Cesderniersjoursavaientétéunenfer.Jamaisilnevoulaitrevivreça.Mains–tremblantes–enavant,commepourapaiserunanimalsauvageprisaupiègeessayantàtout
prixdes’échapper,ilavança.—Evangeline,dit-il,lavoixrauque.S’ilteplaît,bébé,neparspas.Parpitié.J’aitantdechosesàte
dire.Àt’expliquer.Ilm’afalludesjourspourtetrouver.Lespiresdemavie.S’ilteplaît,tunesaispascequej’aitraversé.Unemouedédaigneuseauxlèvres,Evangelinerivasurluiunregardbrillantdelarmesquinetombaient
pas,danslequelselisaientcolèreetdésarroi.Ellesemblaitsifragile,épuisée.Ilavaitl’impressiondel’avoir déjà perdue,même si elle se tenait à quelquesmètres de lui, presque assezprès pour qu’il latouche.Quelquespaset…—Cequetuastraversé?murmura-t-elle.Cequetuastraversé?Savoixdevinthystérique,etleslarmesbaignaientàprésentsesjouesblêmes.Bonsang,elleétaitsi
pâle, lesombressoussesyeux ressemblaientàdescontusions,etelleavaitperdudupoidsdurantcesquelquesjoursoùill’avaitsicruellementabandonnée.Ellesemblait…abattue.Lesyeuxfermés,ils’arrêta,espérantqu’ellenereculeraitpas,qu’elletendraitlamainversluimalgré
lahainequ’elleluiportaitavecautantdepassionqu’ellel’avaitaimé.Ilvoulaitretrouvercetamour.Ilétaitàdeuxdoigtsdelasupplier.Personnenel’avaitjamaisaiméavantEvangeline.Elle,sigénéreuseetaimante,indifférenteàsonargent,àsonpouvoir,auxcadeauxdontill’avaitcouverte.Ellen’avaitvouluqueluietlaseulechosequ’ilnepouvaitluioffrir:sonamour.Etsaconfiance.Àprésent,iln’avaitaucunespoirderetrouverl’unoul’autre.—Ange,murmura-t-ild’unevoixbrisée.Tuastouteslesraisonsdemedétester.Cequej’aifaitest
impardonnable.Maisjen’avaispaslechoix.S’ilteplaît,laisse-moiunechancedet’expliquer.Siaprèsça,tumedétestestoujours,situveuxquejesortedetavie,jetelaisseraipartir.Celametuera,maisjetejurequejetelaisseraipartiretquetunemanquerasplusjamaisderien,quejefassepartiedetavieounon.Tun’aurasplusjamaisàtravaillerdanscesconditions.Tuserasàl’abrifinancièrement.Jem’ensuisdéjàassuré,mêmesijesaisquecen’estpascequetuveuxdemoi.Jesaisquetunevoulaisque…moi.Donne-moiunechance,Ange.Je t’enprie,donne-moiunechanced’arranger leschoses.Jenedouteraijamaisdetoi, jen’ai jamaisdoutédetoi.Maisjeferaiensortequetun’aiesplusjamaisderaisonde
douterdemoi.—«Pute.»«Salope.»Avecunedouleurinfinie,Evangelineluirenvoyaitlesmotsquiavaientdétruitsaconfianceenelle,lui
transperçantlecœuràsontour.Drakemanquadeperdretoutcontrôle.Cequ’illuiavaitfaitcesoir-là,quiluisemblaitdéjàloin,étaitbienpirequecequesonex,Eddie,lui
avait infligé.Cetteprisedeconsciencelebouleversait. Il l’avaitbrisée,avaitdétruitquelquechosedebeauetd’innocent.—Voilàcequej’étaispourtoi,Drake.Elleparlaittoujoursàvoixbasse,lecorpssecouédesanglots.—Non!hurla-t-il.La fureur brute perceptible dans sa voix fit tressaillirEvangeline, dont les yeux s’écarquillèrent de
peur,d’incertitude,dedouleur.Unedouleurqu’ilcomprenaitbien,carilvivaitenenferdepuislesoiroùill’avaittrahie.Maisl’angoissedeDraken’étaitriencomparéeàlasouffranced’Evangeline.Iln’avaitplus que dégoût pour lui-même : il s’était juré de ne jamais lui faire de mal, et il avait brisé cettepromesseaussisûrementqu’ilavaitbriséEvangeline.— Jamais, dit-il brutalement. C’étaient des mensonges, Ange. Une mise en scène abjecte, mais
nécessaire. Si seulement je pouvais revenir en arrière et effacer cette journée. J’aurais tout fait pourt’épargner ça.Dansmonarrogance, jepensaispouvoir assurer ta sécurité et tegarder à l’écartde cetaspectdemavie.Jevaisdevoirvivreaveccetteerreurtoutemavie.Jesaisquetunepourrasjamaismepardonner, mais je t’en supplie. Laisse-moi t’expliquer le monde dans lequel je vis. Unmonde danslequel je n’aurais jamais dû te laisser entrer, mais j’ai été incapable de me refuser ta douceur et talumière.Ange,tuétais–tues–laseulechosebiendansmavie,etjen’aipaspumerésoudreàtelaisserpartir,mêmesic’étaitcequ’ilyavaitdemieuxàfaire.Ilfallaitquejet’aie.J’avaisbesoindetoi.J’aitoujoursbesoindetoi.Elle fronça les sourcils, déroutée par lesmots si chargés en émotion et en haine de lui-même.Elle
semblait analyser chaque mot, son visage changeant au gré de ses déclarations contradictoires. Il nesavaitmêmepassicequ’ilavaitditavaitdusens.Maisilétaitprêtàtoutpourqu’ellerentreaveclui.— Nécessaires ?Nécessaires ? répéta-t-elle, le visage déformé par la douleur. Était-il vraiment
nécessairedem’humilierdevantceshommes,demerabaisseretdem’avilir,demedonnerl’impressiond’êtreuneputeinsignifiante?Chaquemotqu’ilavaitprononcécesoir-làsemblaitgravédanslamémoired’Evangeline,quilesavait
absorbés,et,pire,lesavaitcrus.Nereconnaissantpassapropresavoix,Drakegrogna telunanimalblessé,pleurant lapertedeson
partenaire. C’était exactement ce qu’il ressentait, mais il était loin d’être aussi meurtri que l’êtremagnifiquequisetenaitsiprèsdelui,etluisemblaitpourtantsiloin.Evangeline secoua la tête, enfouit son visage dans ses mains, puis ses genoux cédèrent et elle
s’effondrasurlesol.Drakesautapar-dessusleseaud’eaupouressayerdelarattraper,maisilétaittroptard.Ilselaissatomberàgenouxdevantelle,passasesbrasautourd’elle,passantoutreaumouvementdereculd’Evangeline.Ilserrasoncorpstremblantcontrelesien,sejurantdenejamaislalaisserpartir.—Monange,dit-ild’unevoixétranglée.Mondouxangeinnocent.S’ilteplaît,laisse-moit’emmener
loindetoutça.Laisse-moit’expliquer.Donne-moiunechancedetoutarranger.Donne-toiàmoi.Jejurequejeneteferaiplusjamaisdemal.Tum’esbientropprécieuse.Elles’effondracontrelui,lecorpssecouédesanglots,ungémissementtorturééchappantàseslèvres.
SeslarmescoulèrentdanslecoudeDrake,dontlecœursebrisaitunpeuplusàchaquesangloterratiquedesonange.Malgrétout,ilpritsaréactionpourunconsentement.Oupeut-êtren’avait-ellepluslaforce
desebattre.Quoiqu’ilensoit,Drakedevaitenprofitertantqu’ellebaissaitlagarde,cariln’auraitpeut-être plus cette chance. Priant qu’elle pardonne un nouveau péché sur la liste interminable de sestransgressions, il la prit dans ses bras, se leva, et la porta du hall de l’hôtelmiteux à la voiture quil’attendait.Maddox et Silasmontaient la garde. Quand ils virent Evangeline dans les bras deDrake,Maddox
murmura « Dieu merci », ce qui était exactement ce que Drake ressentait. Silas sembla soulagé, et,l’espace d’un instant, un feu s’embrasa dans ses yeux quand ils se posèrent sur la frêle silhouette quisanglotait dans les bras deDrake. Il lança à ce dernier un regard accusateur,mais Drake ignora sonhommedemain.L’importantétaitd’avoir récupéréEvangelineetd’avoirunechancedes’expliqueretd’effacertoutlemalqu’illuiavaitfait.Drakeseglissaà l’arrièredelavoiture,serrant toujoursfermementEvangeline, toujourssecouéede
sanglots silencieux,contre son torse.Maddoxprit rapidementplacederrière levolant tandisqueSilass’installaitsurlesiègepassager.MaddoxlançaunregardinterrogateuràDrake,luidemandantsansmotdireoùildésiraitemmenerEvangeline.—LeConquistador,indiquacalmementDrake.Demandequelepenthousesoitprêtàmonarrivée.Il était hors de question qu’il ramène Evangeline dans l’appartement où il avait commis cette
abomination contre elle. Pas encore. Peut-être même jamais. Silas hocha la tête, comprenant etapprouvantsonchoix.Drakefronçalessourcilsenétreignantlecorpsfrêled’Evangelinecontrelui.Ilsn’avaientétéséparés
quequelquesjours,etpourtantilsentaitsafragilité,samaigreur.Levidedanssesyeuxhantés.Avait-elleseulementmangé?Ilconnaissaitlaréponse.Personnen’avaitétélàpours’occuperd’elle.Ellen’avaiteupersonne vers qui se tourner, ni les femmes qu’elle avait considérées comme ses amies pendant silongtemps,nisesparents,carelleétaittropfièrepourleurmontrercombienelleétaitmalheureuse.Elle avait beaucoup maigri, comme lui pendant leur séparation qui lui avait semblé interminable.
Chaqueminute,chaqueheure,chaquejouravaitétéunenfer–qu’ilavaitmérité.Maispourlapremièrefois depuis longtemps, il se laissa aller à l’espoir et sentit la chaleur du soleil qui l’avait fui depuisqu’elleétaitpartie.Etcen’étaitpastoutcequi luiavaitétéarraché: ilavaitperdutoutcequ’ilavaitconsidéré comme acquis. Son rire, sa joie des choses simples, son altruisme, sa générosité innée, sabonté et son innocence qui avaient affecté tous ceux qu’elle avait rencontrés. Ses hommes avaient étéaussi déterminés à la retrouver que lui, et à présent qu’il tenait son miracle dans ses bras, il feraitexactementcedontseshommesetluiavaientdiscuté.Ilcesseraitdelacacher,depeurqu’onseserved’ellepourleparalyser,etsonempireavec.Ilallait
faired’ellesareine,et ilallait fairesavoirà toute lavillequ’ilnefallaitpass’enprendreàelle,carceuxquioseraientdevraientaffronterlecourrouxdeDrakeDonovanettoutesonarméedefrères.Onmurmurait lenomdeDrakesurun tonrespectueuxetcraintif.Sion touchaitneserait-cequ’àun
cheveu de la tête d’Evangeline, la fureur de Drake ne connaîtrait pas de limites. Il s’occuperaitpersonnellementdequiconqueposeraitlamainsurelle.Evangelinese tortilladanssesbrasetessayade lerepousser, lesyeuxpleinsde larmes,craintifset
anxieux.—Oùm’emmènes-tu?demanda-t-elle.Çanet’apassuffidem’humilier?Tuveuxquelemondeentier
sachequetuveuxtedébarrasserdemoipourdebon?Maddox, sentant la résignation et l’abattement dans la voix d’Evangeline, jura violemment, et, les
mainsagrippéessurlevolant,ilpritunvirageunpeutropvite;EvangelinebringuebalacontreletorsedeDrake,quipassasesbrasautourd’ellepourlamaintenircontrelui.LecorpspuissantdeSilassecrispa,dégageantdesvaguesde rage. Il se retournapour regarderEvangelinepar-dessussonépaule, lesyeux
étrangementtendres.—Jamaisjenepermettraiunechosepareille,Evangeline.En entendant le serment de Silas, elle s’immobilisa et le regarda avant de se tourner vers Drake,
déboussolée.Drakegrognaetl’enlaçatendrement.Ilcaressasescheveuxenbatailleetinhalaladouceurdesonparfum,odeurqu’ilsavouraitetchérissait
chaquesoiraucoucheretregrettaitamèrementquandilquittaitlelitaumatin.— Je te dois des explications,Ange, dit-il d’une voix tourmentée. J’espère que ton cœur généreux
sauramepardonner.Maisjamaisjenemedébarrasseraidetoi.Tuesancréedansmoncœuretmonâme.Teperdremelesaarrachés,etjeviensseulementdelesretrouver.—«Pute…salope…»,murmura-t-elle,sanglotantdeplusbelle.—Non!grognaDrake.Bébé,non!Jamais.MonDieu.Silasledévisageait,choqué,presqueaffligé.Puissonexpressionsefitassassine.Ilfallutunmomentà
DrakepourserendrecomptequeMaddoxavaitarrêtélavoitureetquelesdeuxhommeslefixaientavecrage.—Dis-moiquetuneluiaspasditceschoses,ditSilas,menaçant.—Putain,juraMaddox.Bordel,Drake!Ellet’acru!Elletecroitencore.—Commentas-tupu?demandaSilasd’untonaccusateur.Jesavaisquecequetuavaiseuàfaireétait
moche,maisbonsang,Drake…Tuesallétroploin!Drakefermalesyeux,berçantEvangeline,toujoursenlarmes.—Avance,ordonna-t-ild’unevoixrauque.Amène-nousàl’hôtelpourquejepuissem’expliquer.Silassecoualatête,lacolèrecédantlaplaceauchagrindanssesyeux.—Certainstortsnepeuventjamaisêtreréparés.Certainsmotsnepeuventjamaisêtreeffacés.Surtout
quandilsontprisracine.—Non!niaDrake.Ellevamecroire.Quoiqu’ilm’encoûte,jevaisfairecequ’ilfautpourméritersa
confiance.SilasetMaddoxéchangèrentdesregardsinquiets.Empreintsdedoute.L’euphoriequeDrakeressentait
d’avoir retrouvéEvangeline fut peu à peu remplacée par l’effroi. Car il n’avait fait que lamoitié ducheminenlarécupérant.Encorefallait-illaconvaincrederester.
Chapitre4
Evangelineserésigna:ellen’avaitd’autrechoixqued’affronterDrake.Ilneluilaissaitpasd’autrepossibilité.Elles’envoulaitd’êtreunepleurnicheuse,denepasêtreunefemmeforte–quiluicracheraitàlafigure,luidonneraituncoupdegenoudanslesparties,etluidiraitcequ’ellepensaitaujustedelanécessairedestructiondel’êtreaimé.Direqu’illacroyaitassezdésespéréepouravalercessottises.Nécessaire,moncul.Non.«Candide»étaitlemotleplusappropriépourladéfinir.Candide.Naïve. Enmanque d’affection. Impulsive – trop impulsive. Trop stupide, aussi. Pour n’en
nommer que quelques-uns. Et dire qu’elle s’était félicitée d’avoir prétendument retenu la leçon aprèsEddie,d’avoirgrandiensagesse.EllesedégageadesbrasdeDrakeetsedétourna,incapabledeleregarderdepeurdevoirsapropre
idiotieserefléterdanssesyeux.Leregardperduau-dehors,ellejuradeneplusverseruneseulelarmepourDrakeDonovan.Elle ne supportait pas qu’il la touche, car cela lui rappelait toutes ces nuits où ces mains avaient
couvertchaquecentimètrecarrédesoncorps,ettoutleplaisirqu’illuiavaitdonné.Elle donnerait tout pour pouvoir lui botter les fesses. Pour être une de ces femmes qui savent se
défendre. Ces femmes que les hommes respectent car ils savent qu’ils ne resteront pas impunis s’ilsjouentavec leurssentiments.Ellen’avaitmêmepas représentéundéfipourDrake ;elleavaitprotestépourlaforme,bienconscientequ’elleallaitcéderetdonneràDraketoutcequ’ilvoudrait.Elle se mordit la lèvre, déçue d’elle-même : elle n’arrivait même pas à trouver le courage de
l’assommeravecsesmots.Ellefermalesyeux,lasse.Envérité,toutcequ’ellevoulait,c’était…Qu’onlalaissetranquille.Elleauraitvouluêtrecapabledeseréfugierdansunendroittranquille,loin
desregardsindiscrets,pourpouvoirpansersesblessuresetoublierl’existencemêmedeDrakeDonovan.Puismourird’unemortdiscrète,quoiqu’ellesesoitdéjàsentiepartirdenombreusesfoisaucoursdesquelquesjoursquis’étaientécoulésdepuisquelerideaus’étaitlevé.Ellevoulaitrentrerchezelle.Elleavaittantbesoind’êtredanslesbrasdesamèrequ’elleensouffrait
physiquement.Ç’avaitétéuneerreurdevenirici,depenserqu’unefilleaussimaladroitequ’ellepouvaitdépassersonmodedeviecampagnard,voires’intégrerdansunevillegrouillantdecitadinssophistiqués.Pireencore,elles’étaitconvaincuequelesdifférencesentreDrakeetellen’étaientpasimportantes.
Qu’elleétaitcapabledesedéfendredanssonmondedangereux.Desatisfaireunhommeaussiexigentquelui.Qu’ilpourraitêtreheureuxaveclatimideEvangeline,sipeusophistiquée.Bonsang,ilfallaitqu’ellechangededisque.Toutcelaétaitrisible,pitoyable.Elles’envoulaitd’avoir
étésiprésomptueuse.Samèrel’avaittoujoursdit:siquelquechoseesttropbeaupourêtrevrai,c’estquecen’estpasvrai.Oùétait cettepépitede sagessequandEvangelineavait étécatapultéedans lemonde flamboyantde
Drake?Auboutducompte,ellenepouvait s’enprendrequ’àelle-même.Elleavaitportédesœillèressans
rechigner.Ellen’avaitpasvouluconnaîtreladurevérité.Elleavaitététropoccupéeàs’immergerdanslecontedeféesqu’elles’étaitinventépourseposerlesquestionsimportantes,pourremettresonpropre
jugementenquestion,decraintequesonfantasmesebriseets’effondreautourd’elle.Eddie, son ex, avait raison sur une chose, même si elle avait peine à le reconnaître : elle faisait
l’autruche,enfouissaitsatêtedanslesableàlamoindreadversité.Seulement,Evangelinenevoyaitpaspourquoi elle devrait rougir de cette comparaison. Car qui embrassait l’adversité ? Certainement paselle.Ladouleurneluiréussissaitpas–quecesoitlasienneoucelledesautres.Aufond,elleauraitaimépouvoir revivrecettesoirée. Justecinqminutes.Avec lapresciencedece
qu’ilallaitseproduireplutôtqued’êtresicruellementprisedecourt.ElleauraittoutdonnépourremettreDrakeDonovanàsaplace.Cettepenséeluifitchaudaucœur:Drakehumiliéparunefemme.C’étaituneimageréconfortante.Ses
associéspliésendeuxderirependantqu’Evangelineluicasseraitlenez.Avantdeluiasseneruncoupdegenoudanslespartiesquileferaitchanteravecunevoixdefaussetpendantdessemaines.Elleposasonfrontcontrelavitredelavoitureetfermalesyeux.Unnouveautorrentdelarmesinonda
sesjoues.Merde!Quelétaitl’intérêtdetoutça?Pourquoiétait-ilvenulachercher?Etpourquoidiableclamait-ilquece
qu’ilavait faitétait«nécessaire»?Personnen’avaitbraquéunearmesur la tempedeDrakepour leforceràrabaisserEvangeline,etpourtantilsemblaitvouloirsepositionnerenvictime.Elle secoua la tête. Hors de question. Elle refusait d’entrer dans son petit jeu et de lui donner
l’absolutiondontilavaitmanifestementtantbesoin,àenjugerparsonattitudeetsondiscours.Iln’auraitqu’àfairesapaixavecDieu–mêmesi,commeiln’avaitpasd’âme,ilétaitpeuprobable
qu’ilcroieenunêtresupérieur.Elleluijetaunregardencoinavecdégoût.Selontoutevraisemblance,ilseprenaitpourDieu.Ellefutprisedepaniquequandlavoitures’arrêtadevantunprestigieuxhôtelnew-yorkais.L’idéeque
Draketraîneunefemmeenuniformedeservicedanscetétablissementchicétaitloufoque.Ils’attireraitcertainement des regards désolés.Un hommede son rang, prêt à tout pour fraterniser avec les petitesgens.—Ange?L’injonction hésitante de Drake la tira de son amère rêverie. Elle se tourna, en prenant garde à
maintenirleplusdedistancepossibleentreeux.La fureur qu’elle avait enfin trouvé le courage d’exprimer se dissipa dès que leurs regards se
croisèrent.L’airhantéet…dévastédeDrakelafittressaillir.Ellefermalesyeuxavantquesarésolutionnefaiblissedavantage.Qu’est-cequiclochaitchezelle?Elleavaitlapossibilitédelebriserverbalement,commeill’avait
fait.Deledétruirecommeluil’avaitdétruite.Deluidonnerunaperçudecequeçafaisaitdesubir…Lahaine.Elle enfouit son visage entre ses mains, le corps secoué d’un violent frisson. Non. Voilà qu’elle
agissaitcommelui.Desmainshésitantes remontèrent le longde sesbras, comme siDrake avait peurqu’elle le rejette.
Maisnel’avait-ilpasdéjàrejetée?Elledétestait lesjeuxpsychologiques.Pourquoiluicouriraprès?Pourquoisetrouvait-elledanscettevoiture?Ils’étaitdésintéresséd’elle.Illeluiavaitclairementfaitcomprendre.Alorspourquois’adonneràcettefarce?Elleavaitatrocementmalàlatête,maispasautantqu’aucœur.—Queveux-tu,Drake?demanda-t-elleàvoixbasse.Quefaudra-t-ilpourquetumelaissesenpaix?
Ce n’est pas trop demander, si ? J’ai accepté le fait dem’être totalement trompée sur toi,mais je nepensais pasm’être trompée à ce point. Je ne pensais pas que tu prendrais plaisir àme faire souffrir
autant.Lesyeuxembuésdelarmes,ellecroisasonregarddésespéré,décidéeàtenirbon.— Je comprends que tu en as fini avecmoi. Tu as été on ne peut plus clair.Mais vas-tu vraiment
encorem’humilier juste parce que tu le peux ? Pour pouvoir abuser encore demoi, physiquement etémotionnellement?Elleétait si emportéepar sonplaidoyerpassionnéqu’il lui fallutquelques secondespour se rendre
comptequeSilasetMaddoxétaientsortisdevoiture,lalaissantseuleavecDrake.Ellen’auraitpasdûprendrecelacommeunenouvelletrahison,etpourtant.Celan’auraitpasdûluifairemal.Etpourtant.LeshommesdeDrakeneluidevaientrien.C’étaitàluiqu’ilsétaientfidèles.Quiétait-elle,sicen’étaituneautreconquêteaveclaquelleDrakes’étaitamusé?Lentement,commes’ilcraignaitd’êtrerejeté,Draketenditlamainpourluisaisirlementonetlaforcer
àsoutenirsonregardaulieudebaisserlesyeuxdedésespoir.—Ange,écoute-moi.Jet’enprie.Ellese figea ; jamaisellen’avaitvucette facettedeDrake. Ilétaithumble.Bouleversé,même.Bon
sang,ilsemblaitêtreàdeuxdoigtsdelasupplier.Ilpassatendrementsonpoucesurlajoued’Evangeline,sesyeuxhumidesaffichantlamêmeémotion
quiluiserraitlagorge.—Queveux-tu?murmura-t-elle,lavoixbriséeparlechagrin.—Toi.Jeteveuxtoi.Seulementtoi.Toujourstoi.Elle tressaillit et aurait reculé siDraken’avait pasposé samain sur son épaulepour la retenir.Sa
respirationhoqueta,commesisespoumonsrefusaientdecoopéreretderespirerpourelle.—Non,nebougepas.Écoute.Écoute-moi.Ellesemorditlalèvre,refusantdeverseruneautrelarme.—J’aitantdechosesàtedire.Tantdechosesàt’expliquer.Jeneméritepastacompréhension,nita
compassion,maissic’étaitpossible,jeseraisàgenouxdevanttoiencemomentmême,àtesupplierdeme donner une chance de rectifier les choses.Monte avecmoi pour qu’on puisse parler. Pour que jepuissetedonnercequiauraitdéjàdûêtreàtoi–cequiterevientdepleindroitett’atoujoursappartenu.Je sais que je ne suis pas digne de ta considération. J’en suis conscient. Mais laisse-moi au moinst’expliquer,essayerdetefairecomprendre.Jepeuxtedonnermaparole:situmedétestesencoreetsituneveuxplusjamaismerevoiraprèsquejet’auraiexpliquétoutcequetuasbesoindesavoir,alors…Savoixsebrisaetilenlevasamaindel’épauled’Evangelinepourlapasserdanssescheveux.C’est
alorsqu’ellevitunerévélationsisurprenantedanssesyeuxqu’elledutreteniruncridesurprise.Ilavaitpeur.—Alorsquoi?demanda-t-elleàvoixbasse,leslèvrestremblantes.—Jetelaisseraipartir.Ilprononçacesmotsd’unevoixéteinte,commesionvenaitdelecondamneràlapeinedemort.Elle
necomprenaitplusrien.—Tum’asdéjàlaisséepartir.—Non!— Si. Oh si, tu m’as laissée, Drake, contra Evangeline, étourdie par la rage qui coulait dans ses
veines.Elle luiadressaunregardméprisant,exprimantcequ’ellepensaitdesesadieux.Puisellesecouala
tête.—Non,jecroisquecen’estpastoutàfaitjuste.Tunem’aspaslaisséepartir.Laisserquelqu’unpartir
impliqueunactedebonté.Unactenoble.Tum’asjetéedehorscommeunemalpropre!
Drakefermabrièvementlesyeuxavantdesereconcentrersursonvisage.—Jetedoisuneexplication.—C’estunpeutardpourypenser,répliqua-t-elleavecdédain.Ilsecoualatête.—Ange,jet’enprie.Entreavecmoi.Laisse-moit’expliquer.Donne-moicinqminutes.Situneveux
plusjamaisentendreparlerdemoiaprèscescinqminutes,jedemanderaiàMaddoxdeteconduireoùtuvoudras,maissûrementpasdanscetrouàratsmiteuxoùjet’aitrouvée.Savoixétaitfermeetdanssesyeuxbrûlaitunfeuardent.Elleretintsarespirationlorsqu’ilsepencha
verselle.LesyeuxdeDrakeexprimaientunefaimbestiale;sonpoulss’emballa.—J’ai juréde teprotégeretdeprendresoinde toi,que jefassepartiede tavieounon,et je tiens
toujoursparole.Tuseraslibredefairecequetuvoudras,ettuserasdispenséedelamoindrecorvéedansleslieuxoùjenesuispascertainquetuserasensécurité.Elletentadesourirefaceàl’ironiedesesparoles,maiscommentl’aurait-ellepualorsqu’elleétaiten
proieàunetelledétresse?DrakeDonovantenaittoujoursparole.Faux.Nonseulementilavaittrahisespromesses,mais il lui avaitmenti. Tout le temps qu’ils avaient passé ensemble.Tout cela n’était quemensonge,rienn’avaitétéréel.Saufsonamourpourlui.Et il étaitbienconnuque l’amourà sensuniqueétaitvouéà l’échec. Jamais sonamourpour luine
suffiraitàcompenserlefaitqu’ilnel’aimaitpasetnel’aimeraitjamais.—Ange,tumebriseslecœur,affirma-t-il,lavoixbriséeparl’émotion.—Alorsnoussommesquittes,murmura-t-elle.
Chapitre5
Drakesavaitqu’ilétaitlâchederepoussersaconversationavecEvangeline,maisilnesavaittoujourspasexactementcequ’ilvoulait luidirenicomment le luiavouer. Il avaitconsacré toutes ses forcesàretrouversonange,etchassétouteautrepenséedesonesprit.Ilrefusaitdesongeràlapossibilitéquesesrecherchesn’aboutissentpas:c’étaitsonpirecauchemar.Pourtant,avoirretrouvésaprécieuseEvangelinen’étaitpasaussiimportantqued’obtenirsonpardon.
Ilneseraitpasaiséderegagnersaconfiance,etilsavaitqu’ildevaitêtreprudent.Iln’avaitpasledroitàl’erreur:aupremierfauxpas,ilperdraitEvangelinepourtoujours.Tul’aspeut-êtredéjàperdue.Elle était là physiquement.Mais émotionnellement, elle était loin d’être avec lui. Réservée, sur la
défensive,ellesemblaitdéterminéeànepasluidonnerlepouvoirdelafairedenouveausouffrir.Ilfaisaitlescentpasdevantlaportedelasalledebainsdesasuited’hôtelenattendantqu’Evangeline
sortede ladouche. Il lui avaitpréparédesvêtementspouréviterqu’elle se sentevulnérableouà sondésavantagequandils’expliquerait–ouessaieraittantbienquemal.Ilfallaitqu’ellel’écoute.Evangelinen’étaitpascommetouteslesfemmesqu’ilavaitconnues.Ellene
manipulaitpasleshommes–nipersonned’autre–pardeslarmes,elleneboudaitpasetnerefusaitpassonpardonseulementpourpunirlesautres.Néanmoins,toutlemondeavaitseslimites,etilespéraitdetoutsoncœurnepasêtrealléau-delàde
toutespoirderédemption.N’avoirpasinfligédedommagesirréversiblesàsoncœuraimantetgénéreux.Il était suffisamment dur et cynique pour eux deux. L’idée qu’elle puisse devenir comme lui – dure,méfianteetsuspicieuse–lerendaitmalade.Tunelaméritespas.Hatcheravaitpeut-êtreraison,si tordusoitsonraisonnement.Pourlapremièrefois,Drakeselaissa
envahirparledoute.Avait-iltortdesebattrepourEvangeline?Defairevolte-faceetdevouloirfaired’ellesareineetsaprotégée?CarilétaitbienconnuqueDrakeneconnaîtraitaucunreposavantd’avoirfaitpayeràceluiquiaurait
osés’enprendreàcequ’ilavaitdepluscher.Drakedétruiraitquiconquelèveraitlamainsursonange.Ilrendrait au centuple chaque marque, égratignure, blessure ou menace infligée à Evangeline, avant decondamnerlecoupableàuneagonielenteetdouloureuse.Agacé,ilsecoualatêtepourchasserledoute.Hatcheravaitdelachanced’avoirencorel’usagedeses
membresaprèsavoiroséévoquerenprésencedeDrakedepareillesinepties–quelesautresn’avaientpassembléappréciernonplus.Drakepivota sur lui-mêmeenentendant laporte s’ouvrir, et il retint son souffle lorsqueEvangeline
apparut.Elleagrippait si fermement lecadrequesesarticulationsétaientblanchescommede lacraie.Ses cheveux mouillés encadraient son visage et tombaient sur ses épaules, et quand elle vit qu’il laregardait, elle enroula ses bras autour de son ventre dans une attitude protectrice, comme pour sesoustraireàsonregardinsistant.Elleportaitunjeanetuntee-shirtàmancheslongues,etilremarquaqu’elleavaitremisseschaussettes
et ses chaussures, prête à s’enfuir à toutmoment. Ses yeux expressifs trahissaient sonmalaise et sonindécision, et après avoirbrièvement croisé le regarddeDrake, elledétourna lesyeux, refusantde le
regarder.Ilsoupiraetlaissatomberlamainquifourrageaitdanssescheveuxlelongdesoncorps.—Tuveuxbienm’écouter,Ange?demanda-t-ilavecdouceur.Medonnerunechancedem’expliquer?Ellehaussauneépauleetsemorditnerveusementlalèvre.—Jenevoispascequetupeuxavoiràmedire,soupira-t-elle.Tuasététrèsclairsurlaplacequeje
tiens,ouplutôtnetienspas,danstavie.Enrediscuternepeutêtrebénéfiquepourpersonne.Incapable de rester plus longtemps à distance, il s’approcha d’elle avant qu’elle ne puisse même
exprimersasurprise.Ilposasamainsursajoueetcaressasapeaudouce.—C’étaitunmensonge.Toutçan’étaitqu’unmensonge.Bonsang,Ange.Tun’étaispascenséeêtrelà.
Jenesavaispasquetuétaislà,sinonjen’auraisjamaisramenéceshommescheznous.J’aiétéprisaudépourvuetj’aidûagirvitepourquetunedeviennespasunecible.Elleluilançaunregardacerbeetsceptique.Ilnepouvaitpasluienvouloir.Drakesoupiraetpritlesdeuxmainsd’Evangelineentrelessiennes.Puisilreculajusqu’aulitets’assit
aubord,obligeantlajeunefemmeàenfaireautant.Elle était complètement raide, chaquemuscle de son corps semblant protester contre sa proximité.
Dommage,cariln’allaitpluslalâcher.Quoiqu’illuiencoûte,quelquesoitletempsquecelaprendrait,il la récupérerait. En attendant, il rêverait du jour où elle viendrait se blottir contre lui, les yeuxdébordantsd’amour,commeellel’avaitfaitsisouventavantcettesoiréedramatique.Pourtant,Draken’étaitpas l’homme lepluspatientaumonde.Aucontraire. Il étaitmême incapable
d’attendresansagir.Quandilvoulaitquelquechose,c’étaitàlui.Point.Ilabattaittouslesobstaclesquisedressaiententre
luietcequ’ildésirait.Aujourd’hui,pourlapremièrefois,ildevaitexercerunminimumdepatience.Cars’ilnelefaisaitpas,ilrisquaitdeperdretoutcequicomptaitpourlui.Etildétestaitça.DétestaitdenepasêtreaulitavecEvangeline,soncorpsnucouvrantlesiendanslaréaffirmationdesadomination…maispas seulement.C’était la femmequ’il chérissait leplusdans savie. Jamais iln’avait ressenti cebesoinetcetteenviedeprotégerunefemme.Ilfallaitqu’ilsoitauxpetitssoinsavecelle.Illuidevaitbiença,ettellementplusencore.Elleméritait
d’êtretraitéecommeuntrésorinfinimentprécieux.Ilsavaitqu’elleétaitforte,bienqu’ellesoutiennelecontraire.Cen’étaitpasunepetitechosefragile,maiscelanevoulaitpasdirequ’ilavaitledroitdelamalmener.Deprendresaforcepouracquise.Ellenes’étaitpeut-êtrepas–encore–brisée,maiscelanevoulaitpasdirequ’ellen’étaitpaspasséetoutprès.Jamaisiln’oublieraitcettevisiond’elledansl’hôteloùelletravaillait:elleavaitsembléàlalimitedupointderupture.Parsafaute.Drakenepouvaits’enprendrequ’àlui-même.Il luiavait trouvéunecertainefragilité,qu’ellen’avaitpasquandilsétaientensemble. Ilnepouvait
décemmentpasignorersavulnérabilitéetavancercommesiderienn’était.Elleauraittoujourssonsoutien,etjamaisilneprésumeraitdesonétatd’esprit,desonamour-propre,
nidecequ’ilsepassaitdanssatête,surtoutquandils’agissaitdecequ’ellepensaitdeluietdesaplacedanssavie.—J’aifaitunegraveerreur,admitDrake.Elleclignadesyeux:manifestement,ellenes’attendaitpasàcequ’ilavouesafaute.Iln’avaitaucun
malàcomprendresasurprise:Draken’étaitpasdugenreàreconnaîtrel’échec.D’ordinaire,ilétaittropsûrdeluipoursesoucierdecequelesautrespensaient.—Ange,j’aimaintsennemisimpitoyables.Deshommesquiseserviraientdetouslesmoyensàleur
disposition pour s’en prendre à moi. Je les ai longtemps frustrés car je n’avais aucune faiblesse àexploiter.Rienquimetiennesuffisammentàcœurpourquejefassedesconcessionsoucèdeauchantage.
Ilinspiraungrandcoupetlaregardadroitdanslesyeux.—Jusqu’àtoi.Elleécarquillalesyeuxetsemorditlalèvre,perdue.Ilvoyaitlesengrenagesdesonesprittournerà
pleinrégimealorsqu’elleessayaitd’évaluersasincérité.Ilvoulaitlatoucher,laprendredanssesbrasetprouvercequ’ilaffirmait,maisilnelepouvaitpas.
Ellenelecroyaitpas,etilnepouvaitpasluienvouloir.D’autantquesoncaractèreréservéetsafroideurétaientdevenussamarquedefabriqueaufildesans.Ilpassaunemaindanssescheveuxébouriffés.—Jem’ysuismalpris.Jet’aicachée,jenet’aipasditàquelpointtucomptespourmoi.—Pourquoi?Jenecomprendspas.Ilsoupira.—Parcequesimesennemisavaientappriscequetuesàmesyeux,ilss’enseraientprisàtoi.Etune
foisqu’ilst’auraientmislamaindessus,ilsseseraientservisdetoipourmefairetomber.Ilst’auraientmenacée,et,Ange,jepeuxt’assurerqueleursmenacesnesontpasdesparolesenl’air.Sijenem’étaispaspliéàleursexigences,ilst’auraientfaitatrocementsouffriretauraientfinipartetuer.—Maisjenesuispersonne,dit-elled’unevoixaiguë.Çan’aaucunsens.Jesuisjuste…Jesuisjuste
ta…—Neledispas,l’interrompit-ilsèchement.Quoiquetupenses,nedisrien.Cesontdesconneries.Si
tupensesquetun’espasimportantepourmoi,alorsj’aipéchécarj’auraisdûtelemontrer.Tuauraisdûsavoirquetuesspéciale.Passeulementpourmoi,maispourmeshommes.Pournoustous.Ellesecoualatête,muette,tandisqu’elleabsorbaitsadéclarationenflammée.—Jet’aidonctenueàl’abridesregards,poursuivit-ilavecdégoût.J’étaisarrogant.Jepensaisqueje
pouvaistegarderpourmoipourgarantirtasécurité.Quemesennemisnesauraientjamaisquetuexistais.C’étaitstupide.Mince,j’auraisdûfairepreuvedebonsens!—Alors leshommesque tuasramenéschez toipour ta réuniond’affairesquandj’étaiscenséeêtre
ailleurs,cesonttesennemis?demanda-t-elle,sceptique.Ilhochalatête,etellefronçalessourcils.— Pourquoi amener ces hommes chez toi, dans ce cas ? Pourquoi prendre un tel risque s’ils te
détestent ? Et pourquoi ne m’as-tu pas dit que tu ne voulais pas que je sois là au lieu de taire leproblème?Si tum’avaisditqueçapouvaitêtredangereux, jenem’enserais jamaismêlée. Jenemeseraispasridiculiséeainsi.La douleur assombrit son regard et ses joues s’empourprèrent. Elle détourna la tête, refusant de le
regarderpluslongtemps.Ill’attrapaparlementonpourlaforceràleverlesyeuxverslui.—Tun’asrienfaitdemal,Ange.Jesuisseulresponsabledecequ’ils’estpassécesoir-là.Tuasfait
quelquechosede très spécialpourmoi,mais jenepouvaispas laisser lesLuconi suspecterceque tureprésentaisàmesyeux, savoirque tuétaisdavantagequ’unesimplemaîtresse temporairecommeuneautre.Il se renfrogna en repensant à cette soirée, à l’humiliation qu’il lui avait fait subir. À l’expression
d’Evangeline,àsonabattementetàseslarmes.Auxchosesabjectesqu’ilavaitditesetfaites.—Toutcelaétaitunmensonge,murmura-t-il. J’aidû jouer lacomédiedemavieet convaincreces
hommesquetun’étaisrienpourmoi.Evangeline,ilfallaitqu’ilslecroient,cars’ilss’étaientdoutésqueje faisais semblant, ils s’en seraient pris à toi. Et si je t’avais laissée jouer à l’hôtesse, il aurait étéimpossiblequ’ilsnedevinentpaslavéritéaprèscinqminutesentacompagnie.—Quellevérité?
—Ce que tu représentes pourmoi, souffla-t-il. Je ne pouvais pas prendre ce risque.Une gaffe, unmomentd’inattentionoùjet’auraisregardéeavecfierté,oumonindulgencequandtumesouris.J’auraisété comme un livre ouvert, Ange. Et tu aurais payé le prix fort pour mon manque de maîtrise en taprésence.—Donctut’enesprisàmoiavantqu’ilslepuissent,dit-elle,laminegrave.Drakefermalesyeux,affligé.—J’étaisaupieddumur.Jesavaiscequidevaitêtrefait,etcelamerendaitmalade.Devoirprétendre
d’êtreaussiinsensible,quetun’étaisrienpourmoi.Bonsang,cequejet’aifait,cequejet’aidit…Jen’enpensaispasunmot,Evangeline!Ellel’étudiasansriendireensemordillantlalèvre.Elleétaitcalmeetpensive,maissondéchirement
selisaitsursonvisage.—Jenesaispascequejedoiscroire,finit-ellepardire.Ilyatropdechosesquejenecomprends
pas.Tu dis que c’était une erreur deme garder secrète.Mais si ton affection pourmoimemettait endanger,quepouvais-tufaired’autre?Puiselleécarquillalesyeuxetsabouches’arrondit.—Oh,murmura-t-elle.Oublie.Jecomprends.—Qu’est-cequetucomprends?SonairsoudainrésignéneplaisaitpasàDrake.—Tun’auraisjamaisdûavoiruneliaisonavecmoi,dit-elledoucement.C’estcequetuessaiesdeme
dire.—Non!hurla-t-ilpresque.Evangelineserecroquevillaetleregardaavecméfiance.Ilpritsamaintremblanteentrelessiennes.—Jen’auraisjamaisdûtegardersecrète,affirma-t-ilavecferveur.Jen’auraisjamaisdûminimiser
tonimportancepourmoi.Ellepenchalatêtesurlecôté,plusdéboussoléeencore.—Mais…tuviensdedirequesitun’avaispasfaitça,onseseraitservidemoipourtefairedumal.Ilserralesdentsetlaregardasansciller.—Cequej’auraisdûfaire,etcequej’ail’intentiondefaireàpartird’aujourd’hui,c’estfairesavoir
quetuesmareine.Manana.Lapersonnelaplusimportantedemavie.Toutlemondesauraquejemevengeraisiontoucheàuncheveudetatête.Tasécuritéserarenforcée,maistuconnaisbienleshommesquiteprotégeront,tuesàl’aiseaveceux.Elle devint livide tout à coup, donnant l’impression que ses yeux étaient immenses. Elle ouvrit la
bouchemaisaucunsonn’ensortit,etpendantunmoment,ellerestasimplementassiselààledévisager,bouchebée.Puisellefinitparsecouerlatêtecommepourchassersaconfusion.—Nousnesommespasensemble,Drake,dit-elletimidement.—Biensûrquesi,répliqua-t-il.Jet’aifaitfuir,Ange.Cesoir-là,jesuisretournéàmonappartement
aussi vite que possible sans éveiller de soupçons car je voulais tout t’expliquer et te supplier demepardonner.Quand j’ai vu que tu étais partie, je suis devenu fou. J’ai passé ces cinq derniers jours àretourner lavilleentièrepour te trouver.Et tues là.Si tupensesque jevais te laisserpartir sansmebattre comme un diable, tu as perdu la tête. Ta place est avec moi, tu m’appartiens, comme jet’appartiens.Cequ’ils’estpassécesoir-lànesereproduirajamais.Celan’auraitjamaisdûseproduire,maisdanslefeudel’action,c’estlaseulechosequim’estvenueàl’espritpourassurertasécurité.—Quemedemandes-tuexactement,Drake?Ellen’étaittoujourspasconvaincue.—Avecletemps,tout.Maispourl’instant,jeprendraicequetuesprêteàmedonner,dumomentque
tumedonnesunechancedemefairepardonneretdeteprouvercombientuesimportantepourmoi.—Tuveuxquenousreprenionsleschoseslàoùnouslesavonslaissées?Quenousfassionscommesi
cettesoiréen’avaitjamaisexisté?Iltressaillit.— Je nem’attends évidemment pas à ce que ce soit si facile. J’ai beaucoup de choses àme faire
pardonner.Tum’asdonnétaconfiance,etjedoislaregagner.Tum’asofferttasoumission,et,pourquetutesoumettesànouveau,jedoistedonnerlesentimentd’êtrechérieetensécurité.Maisjeteveuxavecmoi,Ange.Enpermanence.Unefoisquetoutlemondesauraquituespourmoi,jenetelaisseraijamaisallerseulenullepart.Evangelinefermalonguementlesyeux,sesdoigtsexsanguesnouéssursesgenoux.Sonindécisionétait
tangible.—Jenesaispascequejedoisfaire,finit-ellepardireaveclassitude.—Queveux-tu,Ange?demandaDrakeavecdouceur.Oubliecequetudoisfaire.Queveux-tufaire?Elletournalatêteetsonregardbaignédelarmescroisalesien.—Jeveuxqueleschosesredeviennentcommeavant.Seslèvrestremblaient.—C’estpossible.—Çaal’airfacile,àt’entendre,grimaça-t-elle.—Pourquoiest-cequeçaneleseraitpas?J’aifaituneterribleerreur,monange.Uneerreurqueje
n’oublieraipasdesitôt,quejeregretteraitoutemavie,maisquejenereferaijamaisplus.Jenevaisplustenter de camoufler ta présence ni ton importance dansma vie. Laisse-moi une chance de temontrerl’existencequenouspouvonsavoirensemble.Nerenoncepasànous.Illasuppliaitpresque,luiquiauraitpréférés’étoufferplutôtquedesupplierquiquecesoit.Maissise
mettreàgenouxetserendrecomplètementvulnérabledevantellepouvaitlaconvaincredeluilaisseruneautrechance,illeferaitsanshésiter.Qu’étaitsafiertés’ilperdaitlaseulechosequicomptaitpourlui?Unelarmeroulasurlajoued’Evangelineetellepoussaunsoupirpournepaséclaterensanglots.Illa
serracontrelui,etsebalançad’avantenarrière,embrassantsescheveuxmouillés.—Donne-moi–donne-nous–uneautrechance,Ange,murmura-t-il. Jeme feraipardonner, je te le
jure.Elle releva lentement la tête pour le regarder dans les yeux. La peur luisait dans son regard,
l’inquiétudecreusaitsonfront.— Mais si tu voulais que personne ne soit au courant de mon existence avant… qu’est-ce qui a
changé?Sionpouvaitseservirdemoicontretoiavant,est-cequeceneserapasencoreplusprobableaujourd’hui?Jeneveuxpasqu’onseservedemoipourtedétruire,Drake.Il inspira et, voyant le visage d’Evangeline se brouiller devant ses yeux, il se rendit compte qu’il
retenaitsarespirationmalgrélui.Ilexpirapuislapritdenouveaudanssesbras,incapabledesupporterlepeudedistancequ’elleavaitmiseentreeux.—Disonsseulementqu’onferapasserunmessageonnepeutplusclair,ditDraked’unairgrave.Si
quiconqueoseneserait-cequeteregarderdetravers,ilestmort.J’aidesennemis,jetel’aidit.Maisonme craint. Je n’ai pas la réputation d’être indulgent. Mes hommes feront savoir qu’il faudrait êtresuicidairepourseservirdetoipourm’atteindre.Celadit,tasécuritéserarenforcéeettuserastoujoursescortéequandtuneseraspasavecmoi.Ilfutsaisid’unepeurpaniquequiluinoualesentrailles.Etsiellenevoulaitpasdugenredeviequ’il
luioffrait?Elleseraitcommeenchaînée.
Certes,elleaurait toutleluxeettouteslescommoditésqu’onpouvaitimaginer.Elleseraitchoyéeetgâtée,sesbesoinspasseraientavanttout.Laseulechosequ’ellen’auraitpasserait…saliberté.Siellerestaitaveclui,elleseraitconsignéeàuneviesoushautesurveillance.Personnenepourraitl’approcherlibrement.Combiende tempspourrait-ellevivredanscescirconstances suffocantes?Combiende tempsavant
qu’ellese rebellecontrecesmesuresdeprotectionextrêmes?Peudegensseraientprêtsàs’enfermerdansunevéritableprison,siluxueusesoit-elle.—Sauras-tumepardonner,Ange,avecletemps?demanda-t-ildoucement.Medonneras-tuunechance
demeracheter?Deteprouverquejamaisplusjeneteferaisubircequejet’aifaitcesoir-là?Jesaisquec’estbeaucoupdemander.Jenet’envoudraispassitunevoulaisplusjamaisentendreparlerdemoi,maisjeneveuxpasvivresanstoi.Tueslaseulechosebiendansmavie.Lemeilleurdemoi-même,etj’aibienfaillitoutdétruiredansmacraintequ’onseservedetoipourm’atteindre.Jenelesupporteraispass’ilt’arrivaitquelquechoseàcausedemoi.Etjevaisfairetoutcequiestenmonpouvoirpourteprotégerdessalaudsquifontpeudecasdemaltraiterunefemmepouratteindreleurbut.Chacundemeshommesestdévouéà taprotectionet à ta sécurité. Ils sontprêts àdonner leursviespour teprotéger.J’espèrequetun’endoutespas.Jetiensàtoicommeàlaprunelledemesyeuxetjeferaitoutcequiestenmonpouvoirpourtegarder.Evangelineétaitabasourdie.Sontiraillementselisaitdanssesyeuxorageux.Elleavaitpeur.Ilvoulut
proférerunflotdejuronsàfairepâlirleplusinsensibledeshommes,maisilnevoulaitpaslafairefuir.—Alorson…seremetensemble?demanda-t-elled’unevoixétranglée.Nousreprenons làoùnous
noussommesarrêtés?—Non,dit-ilavecleplusgrandsérieux.Nousrepartonsdezéro.Unnouveaudépart,enmieuxcette
fois. J’ai beaucoup de choses à me faire pardonner, je ne vais pas prétendre le contraire. Toi, enrevanche, tu n’as pas besoin de changer quoi que ce soit. Tu n’as rien fait demal.Tum’as donné uncadeaudonttousleshommesrêvent,etàpartird’aujourd’hui,jevaischériretprotégerceprésentcommeilsedoit.Situdisouietacceptesderesteravecmoi.—Oh,Drake,jenesaispasquoidire.Sesyeuxs’embuèrentdelarmesetilleschassadesajouedèsqu’ellessemirentàrouler.—Tumerendaistellementheureuse.Etjevoulaisterendreheureux.Toutétait…parfait.Etpuis…—Chut,monange,susurra-t-ilenlaprenantdanssesbras.Toutredeviendraparfait.Jetelepromets.
Jenem’attendspasàcequetumepardonnesouquetuoubliesdesitôt.Toutcequejedemande,c’estdemelaisserunechancedeteprouverquejepeuxêtrel’hommequetumérites.Disouietnousavanceronsau jour le jour, et je te promets que chaque jour sera meilleur que le précédent. Je sais que nousrencontreronsquelquesobstaclesenchemin,maisjeteprometsquecequ’ils’estpassécesoir-lànesereproduirajamais.Jedonneraistoutpourrevenirenarrièreetqueçanesoitjamaisarrivé.Elleposasonfrontcontrelesien,lesyeuxfermés,s’efforçantderetenirleslarmesquicoulaientsur
sesjoues.—Jeveuxtoutça–et je teveux, toi,murmura-t-elle, l’émotionperceptibledanssavoix.Mais j’ai
peur,Drake.Tuastantdepouvoirsurmoi.Tuaslepouvoirdemerendretrèsheureuse,maistuasaussilepouvoirdemedétruirecommepersonne.Jecroisquejenesurvivraispasunedeuxièmefoisàtantdesouffrance.Jemesensvulnérableavectoi,etmonbonheurnedépendquedetoi,et…çafaitpeur,trèspeur.Tucomprends?Jet’imaginemalimpuissant,àlamercidequelqu’und’autre.—Jecomprends,murmura-t-il.Jecomprendsbienmieuxquetunelepensesparcequetumetiensau
creuxdetamain,ettuasautantdepouvoirsurmoiquej’enaisurtoi.Et,jedoistel’avouer,çacraint.Jedétestemesentiraussiimpuissant.Jen’aijamaisétédépendantd’uneautrepersonnedetoutemavie.J’ai
toujoursétéauxcommandesetpourtant,quandjesuisavectoi,j’ail’impressiondeneriencontrôler.J’ail’impression de traverser un champ de mines : un seul faux pas et je détruis une chose infinimentprécieuse.C’estcequej’aifaillifaire.J’aicausébeaucoupdedommages,etjen’ensuispasfier.Crois-moi,Ange. Jene l’oublierai jamais. Jenemepardonnerai jamaiscequ’il s’estpassécesoir-là. Ilvafalloir que je vive avec pour le restant demes jours. Je n’ai pas mangé, pas dormi, je n’ai été quel’ombredemoi-mêmecescinqderniersjours,etmahaineenversmoi-mêmearongémonâmejusqu’àcequ’iln’enrestepresqueplusrien.—Drake,non, s’écria-t-elle.Çasuffit.Tais-toi !Tunepeuxpas te torturerainsi.Celan’estbonni
pourtoinipourmoi.Sinousvoulonsqueçamarche,nousdevonsmettretoutçaderrièrenousetavancer.Siturestesbloquédanslepassé,celanousdétruiratouslesdeux.Sijepeuxpardonner,tudoisenêtrecapableaussi.Drake inspira profondément et son pouls s’emballa tandis que les mots d’Evangeline perçaient sa
colèreetsonchagrin.Lesmainstremblantes,ill’attrapaparlesépaulesetlatiraàlui,nezcontrenez.—Tulepensesvraiment,Evangeline?Es-tuentraindedirecequejepense?Tumedonnesuneautre
chance?Son cœur battait bien trop vite ; il crut qu’il allait éclater, qu’il allait faire une crise cardiaque. Il
tremblait de tout son corps tandis que, le regard plongé dans le sien, il cherchait la confirmation del’espoirquis’étaitinsidieusementfaufilédanssesveines.Elle déglutit et il vit combien c’était difficile pour elle.Ce n’était pas une décision à prendre à la
légère.Puisellehochalentementlatête.—J’aibesoindetel’entendredireàvoixhaute,dit-ild’unevoixrauque.Jedoisêtresûr.—Oui,souffla-t-elle.Jevaiste–nous–donneruneautrechance.Jevaisêtrehonnête:jesuismorte
depeur.Maisjesuisprêteàessayer.En proie à un bonheur insoutenable, Drake l’étreignit étroitement, s’agrippant à elle de toutes ses
forces.L’émotionétait tellequ’unnœudseformadanssagorge, l’empêchantd’articulersespenséesetses émotions ; il se contentadoncde la serrer contre lui pour la couvrir debaisers et de caresses enremerciantlecielquecettefemmesibelle,sidouceetsigénéreuseexiste.Ilnelaméritaitpas,certes,maisilétaithorsdequestionqu’ilrenonceàelle.Elleluiétaitdevenue
vitale.Aussinécessairequel’air.Iln’imaginaitplussaviesanselleetn’avaitaucuneenviederetourneràl’existenceaustèreetstérilequ’ilmenaitavantqu’Evangelinenedébarquedanssavie.Pendantdelonguesminutes,ilsecontentadel’enlacer,incapabledeformerunsemblantdephrase.À
contrecœur, il finit par desserrer son étreinte et déposa un baiser sur ses lèvres avant de prendre sesmainsdanslessiennes.—Ilfautquejesachesituveuxretournervivredansmonappartementounon.Ceseraitparfaitement
compréhensible que tu ne le veuilles pas. Je ne veux pas ramener demauvais souvenirs à la surface.Néanmoins,sinouschoisissonsdevivredansuneautredemesrésidences,ilmefautunesemainepoursécuriserleslieuxetyfairelesmêmesinstallationsquedansmonappartementactuel.Enattendantquelestravauxsoientfinisetlarésidencesécurisée,nouspouvonschangerd’hôteltouslesjourspournepasresteraumêmeendroit.—Celanemedérangepasderetournerdanstonappartement.Il scruta sonattitude, sonexpression, sesyeux, à la recherchede tout signed’hésitationoudepeur.
Maisilnevitrien.—Tuessûre?Ellehochalatête.—C’estinsensédedépenserdutempsetdel’argentpouréquiperunautreappartementalorsquetuen
asunparfaitementapproprié.—Alorsrentronsàlamaison,dit-ildoucement,maintendue.Aprèsunelégèrehésitation,elleglissasadoucepaumedanslasienne.—Tuneleregretteraspas,Evangeline,dit-ilavecleplusgrandsérieux.Ellesondasonregardquelquessecondespuisserradoucementsamain.Aprèsavoirhésitéuninstant,
elleexpiradoucement,etsesyeuxs’attendrirent.L’espoirgagnaDrake.Puiselles’humectaleslèvresetprononçalesmotslesplusdouxqu’illuiaitétédonnéd’entendre.—Jetecrois,Drake.Jetecrois.
Chapitre6
EvangelineavaitlesnerfsàvifquandilsarrivèrentchezDrake.Bienqu’elleaitacceptéderevenirlà,celanevoulaitpasdirequ’elleétaitsereineàl’idéedepasserlesportesdulieuquil’avaitvuehumiliée.Pournerienarranger,àpeinefurent-ilsentrésdanslehallqu’Edwardseprécipitaverselle,levisage
débordantd’empathieetd’inquiétude.Ellegrimaça;elleauraitvouluquelesols’ouvresoussespiedspourl’avalertoutentière.DrakeavaitdûsentirsonmalaiseetavertirEdwardd’unregard,carleportiers’arrêtanetettournales
talonspours’affairerderrièresonbureau.Lorsqu’ilsarrivèrentà l’ascenseur,Evangeline tremblait,auborddel’hyperventilation.Elleserrasesbrasautourdesatailleetbaissalatête.Elleavaitleslarmesauxyeux,maiselleavait
subitropd’humiliationspourfondreencoreenlarmesdevantDrake.Celui-cine luimitaucunepressionetnefitpascasdesadéfaillanceproche,cequiétait toutàson
honneur.Au lieu de cela, ilsmontèrent jusqu’au dernier étage en silence.Drake passa un bras autourd’elle,laserrantfermementcontrelui,sachaleurcorporelleréchauffantsapeauglacée.Était-ceunebêtise,d’acceptercettefolieaprèscequ’illuiavaitfait?Têtetoujoursbaissée,ellesortitdel’ascenseuretpénétradansl’appartementdeDrake.Àsagrande
surprise,illastoppasurlepalierpourl’enlacer.—Dieumerci,tuesderetour,murmura-t-il.Jet’aitrouvéeàtemps.Elleposasonfrontcontresontorsepourabsorbersachaleurcommeunedroguéeenmanque.Drake
passasamaindanssondosavantdes’écarteràcontrecœuretde la saisirpar lementonpourqu’ellecroisesonregard.—Va t’asseoir dans le salon pendant que je te prépare àmanger. Tu n’as pas pris soin de toi, la
réprimanda-t-il.Tuasperdudupoids.—J’avaisjustementquelqueskilosentrop,dit-ellesèchement.Ilfronçalessourcils.—Tuétaisparfaite.Allez,viens,quejepuisseprendresoindemonange.Tuvasmangerettereposer,
comptesurmoi.Ellefronçalessourcilsàsontour.—Tunedoispasallerautravail?Tuesdéjàenretard.Jepeuxmedébrouillertouteseule.Il lui lança un regard réprobateur, puis la conduisit dans le salon pour l’installer sur le canapé,
emmitoufléedansunecouverture.Ils’assuraqu’elleétaitbieninstallée,puisluiintimadenepasmêmesongeràselever.— Je reviens dans quelquesminutes, et nous prendrons le petit déjeuner ensemble. Puis nous irons
nouscoucherpournousreposer.Jen’aipasdormidepuislesoiroùtuespartie,dit-ilavecunepointedetristessedanslavoix.Ettoinonplus,ondirait.Ellerougitd’unaircoupablemaisnelecontreditpas.Aprèsunedernièrecaresse,iltournalestalonsetdisparutdanslacuisine,laissantEvangelines’affaler
surlecanapé.Ellefermalesyeux,soudainlasse.Ilavaitraisonsurunpoint.Ellen’avaitpasdormi.Dutout.Elleétaitrestéeallongéedanssonpetitlitàessayerd’oublier.Chaquenuit,cesquelquesheuresderépit durant lesquelles elle aurait pu échapper à sa douleur et à son chagrin, elle les avait passées à
essuyerseslarmes,lesyeuxgonflés,ensedemandantsanscessepourquoi.Elle resserra la couverture autour d’elle, inhalant le parfum puissant de Drake, qui imprimait sa
présenceen tout lieu. Il avaitbeauêtredansuneautrepièce,elle sentait saprésenceaccablante.Celan’auraitpasdûlaréconforter,etpourtant…Cescinqderniersjoursavaientétélespiresdesavie.Ellenevoulaitplusjamaisvivreça.Mêmesi
accepterqueDrakereviennedanssaviedevaitfaired’elleuneidiote,elleavaitbesoindelui.Ellenesesentaitensécuritéqu’aveclui–cequiétaitabsurde,puisquec’étaitluiquil’avaitdétruite.Ellefutsaisied’unmalaiseenrepensantàsonexplication,à la justificationdesesactes.Dansquoi
Draketrempait-il,au juste,pouravoir tantd’ennemiset inspirerassezdehainepourqu’ilspuissentseservird’ellepours’enprendreàlui?Ellen’étaitpasstupide.EllesavaitparfaitementqueDraken’étaitpasuncitoyenmodèle.Maisellene
pouvaitimaginerqu’ilsoitimpliquédansquoiquecesoitderéellementabominable.Envérité,ellenevoulaitpassavoir.Lebonheurrésidaitparfoisdansl’ignorance,etdumomentqu’elle
nesavaitpasexactementcommentilgagnaitsavie,ellenepouvaitpasporterdejugement.Sipréférerdevivredansl’ignorancefaisaitd’elleunemauvaisepersonne,ilfaudraitqu’elleapprenneàvivreavec.Ou peut-être avait-elle seulement besoin de temps pour trouver le courage de l’interroger sur ses
pratiques.Maisilétaitencoretroptôt.Leurrelationétaitsifragile.Lemomentvenu,elleaborderaitlesujetpuisdécideraitsiellepouvaitvivreounonaveccequ’elleauraitdécouvert.Oh,maman,papa.Quem’arrive-t-il?Cen’estpascommeçaquevousm’avezélevée…Ils auraient honte s’ils savaient qu’elle occultait ainsi samoralité, ne serait-ce que temporairement.
Loind’ellel’enviedelesdécevoir.C’étaientlesmeilleursparentsaumonde,etilsluiavaientapprisàfairecequ’ilfallait,peuimportelesacrifice.—Ange.LavoixdeDrake la tiradeson introspectionetelleouvrit lesyeux. Ilportaitunplateauavecdeux
assiettes.—Redresse-toi,bébé.Ilfautquetumanges,puisquetutereposes.Nousavonstouslesdeuxbesoinde
nousreposer,etjenepeuxrêvermieuxpourcefairequ’avectoidansmesbras.Ledouxfumetdesespréparations fitgrondersonestomacaprèsdes jourspasséssansmanger.Elle
n’enavaiteunilaforcenilavolonté.Soudain,uneétrangechaleurl’envahit;ellesemitàtrembler,lasueurperlasursonfront.Sonestomacseretourna.—Jenesuispassûredepouvoir,dit-elleensetenantleventred’unemain.Ellesesentaitnauséeuse,faible;bientôt,ellefutprisedetremblementsincontrôlables.Drakejuraetposapromptementleplateausurlapetitetableavantdeseglissersurlecanapéàcôté
d’ellepourlaprendredanssesbras.—Penche-toienavantetbaisselatête,dit-ilavecdouceur.Respireprofondément.Inspireparlenez,
expireparlabouche.Jevaistechercherdelasoupe.Tupensesquetupourraslamanger?Ellehochapiteusement la tête, sonembarrasgrandissantdeminute enminute.Ellepassaitpourune
idioteincapabledesurvivresanssonhomme.Drake restaassisà sescôtésquelques instantsà lui caresser ledos,puis il luimassadoucement la
nuque.—Çavaallerpendantquejevaistechercherunesoupe?demanda-t-ilàvoixbasse.—O-Oui.Ildéposaunlégerbaisersurlesommetdesoncrâneetdisparutdanslacuisine,pourrevenirquelques
minutesplustardavecunetassefumante.Illaplaçaentresespaumesetluiintimadeboire.Leliquidechaudglissadélicieusementdanssagorgejusqu’àsonestomac,dénouantlatension.Ellese
détenditetparvintàboirelamoitiédubreuvage,avantdeposerlatassesurlatablebasse.—Tuenaseuassez?demandaDraked’untonbourru.Ellehochalatête;latensionrevintsoudaindanssesmuscles.—Alorsallonstemettreaulit,dit-ilenselevant.Elledéglutit,nerveuse,puisopina.Drakefitglissersesmainssoussoncorpsetlasoulevaducanapé.
Elleatterritcontresontorseavecunbruitsourd,etilrestauninstantsansbouger,seslèvrespresséessursonfront.EllesentitDrakefrissonneretcompritqu’ilétaitaussiaffectéqu’elle.Aussinerveux.Soncœurseserraquandellevitlavulnérabilitéaufonddesesyeux;elleposaunemainsursajoue,le
forçantàlaregarder.—Tum’astellementmanqué,murmura-t-elle.LesyeuxdeDrakes’embrasèrent,traduisantsonprofondsoulagement.—Tum’asmanquéaussi,Ange,murmura-t-il.Jamaisplusjenetelaisseraipartir.TandisqueDrakelaportaitjusqu’àlachambre,ellelaissasesmotspassionnésrésonnerenelle.Les
pensait-ilvraiment?Ous’était-illaisséemporter?Ellenevoulaitpastoutgâcherenluidemandantdeclarifier les choses.Elle avait peurde ceque celapouvait signifier.Le fantasmeétait préférable à laréalitémêmesiellesavaitquece fantasmefinissait toujourspar laisserplaceà ladouloureusevérité.Pour l’instant, avant demieux comprendre sa relation avecDrake et où ils en étaient, elle choisit decroirequ’ilpensaitchacundecesmotsetqu’elleétaitchèreàsoncœur,qu’illachérissaitetvoulait…l’éternité.Leconcepts’évanouitdanssespensées.Elleavaitmêmedumalàl’imaginer,àcausedel’espoirqu’il
lui inspirait : car si ce n’était qu’un rêve, cela la détruirait. Pour une fois, elle ne considérerait pasl’avenir avec le pragmatisme que ses parents lui avaient inculqué. Elle n’essaierait pas de prédirel’avenirnidepenseràl’éventualitéd’uneséparation.Aulieudeça,ellechoisitdevivredansl’instantprésent.Aujourlejour.Defantasmeenrêve.Quandviendraitlemomentdefairefaceàladurevérité,ellechériraitlesbonssouvenirsdutempspasséavecDrakepourlerestedesavie.Carunechoseétaitsûre.Elleavaitbeausepenserpragmatiqueetsavoirquepersonnen’étaitleseulet
l’uniquedanslaviedequelqu’un,ellesavaitsansaucundoutepossiblequ’iln’yauraitjamaispersonnecommeDrakepourelle.Personneneluiarriveraitàlacheville.Drakelaconnaissaitparcœur,peut-êtremêmemieuxqu’elleseconnaissaitelle-même. Il savaitcedontelleavaitbesoinetypourvoyaitavantmêmequ’ellenepuisseenressentirlemanque.Drakeétait sonâmesœur,decellesqu’onnecroisequ’une foisdans savie.Ellenevoulaitpas se
contenterd’unsecondchoix.Jamais.Sielledevaitêtreprivéedesamoitié,cellequiluiétaitdestinée,alorsellechoisiraituneviedesolitudeetchérirait lessouvenirsduseulhommecapablededéchiffrersoncœuretsonâme.Elles’efforçadesereprendre,agacéequesesdoutesgâchentsesretrouvaillesavecDrake.Personne
n’étaitparfait.CequeDrakeavaitfaitétaithorrible.Elleavaitétéhumiliée,dévastée,illuiavaitarrachélecœur.Maissielledevaitlecroire,bienqu’ilneluiaitdonnéaucuneraisondelefaire,sesactes,bienqu’extrêmes,étaientjustifiés.Elleavaitbienvusonexpressionquandilavaitadmissapeurqu’onseserved’ellepourl’affaiblir.
Comme si l’idée qu’on lui fasse du mal l’anéantissait autant qu’il l’avait anéantie par ses actes.Evangelinen’était pas la seule à souffrir de cequ’il s’était passé ce soir-là.Drake avait semblé si…abattu,quandill’avaitsuppliéedelecomprendre,deluipardonner.Sonestomacsenoua,carellen’avaitfaitnil’unnil’autre.Pasencore.Elleavaitencoretroppeurde
lui faire confiance, de se rendre vulnérable une nouvelle fois et de s’exposer à la souffrance et à la
trahison.Elledevaitseprotéger.OhDrake,jesuisdésolée.Elleavaitlesyeuxhumides,maisrefusaitdegâchercemomentenlaissantlibrecoursàseslarmes.Drake s’étaitmisànudevantelle. Il s’étaitmisà sespieds, etunhommecomme luin’étaitpasdu
genreàserabaisserdevantquiconque,hommeoufemme.Pourtant,c’étaitexactementcequ’ilavaitfait.Ilavait toutrisqué,dontsafierté,pourarrangerleschosesavecelle.Enretour,elleneluiavaitdonnéqueméfiance.Nipitié,nicompréhension,nipardon.Lapaix l’envahitquandelledécidade réparer les tortsentreeuxà la toutepremièreoccasion.Elle
attendraitlemomentparfaitetdonneraitàDrakecequ’illuiavaitoffert.Ellemettraitsonâmeànuetsedévoileraitautantqu’ils’étaitdévoilépourqu’ilssoientsurunpiedd’égalité.Sielledécouvraitqu’elleavaittort–surDrake,surleurrelation,surtout–,alorsellen’auraitaucun
regret à avoir. Si elle ne pouvait contrôler les actes, décisions, pensées ou sentiments deDrake, ellepouvaitcontrôlerlessiens,etenuseravecamour.L’espoir lui réchauffa le cœur, gonflé d’un désir que seul Drake pouvait satisfaire. Cinq jours, ce
n’étaitpas si long, etpourtant, elle avait eu l’impressiondepasseruneéternitéde solitude,unevie àpleurercequ’elleavaitperdu.Elleavait–ilsavaient–unesecondechance.Lachancederéparerleurstortsetdes’offrirunnouveaudépart.EllecomptaitbienprofiterdecetteoccasionetmontreràDrakecombienelletenaitàlui.—Tusemblesêtreàdeskilomètresd’ici,murmuraDrakeenl’allongeantsurlelit.Ellerougit,maisilneleluireprochapas,etneluidemandapasàquoiellepensait.Non,ilentreprit
plutôtdeladéshabiller,marquantdespausespourembrasseretcaresserchaquenouvellezonedepeauexposée.Quandilseredressapourretirersespropresvêtements,elleétaitàboutdesouffle,animéed’unbesoindésespérécommeellen’enavaitjamaisconnu.Elledévora lecorpsmusclédeDrakedesyeux,ses largesépaules, son torsepuissant.Samâchoire
ciselée,sesyeuxbrûlantdumêmedésirqu’elle.Sesjouess’embrasèrentetunevaguedechaleurdéferlaenellelorsqu’elleaperçutsonsexeenérection.Il étaitdur,protubérant, lesveinesgonflées, l’érection le faisantpointervers lehaut, àplat sur son
ventremusclé.Songlandétaithumide,etelleseléchaleslèvressansmêmes’enrendrecompte.Avecunrâle rauque, il ferma lesyeux,son torsesesoulevant rapidementcommes’ilessayaitdese
maîtriser.—Tumetues,Ange.Sais-tuquecescinqderniersjoursontétéuneéternitésanstoi?Ellesouritenentendantcesmots,refletdesesproprespensées.—Etquejem’allongeaisicichaquenuitàmelanguirdetoi,quetumemanquaisàchaqueseconde?
murmura-t-ilavantdes’allongerprèsd’elle.Quejenetrouvaispaslesommeilcarjemedemandaisoùtuétais,situétaisensécurité.Jenevoyaisquetonvisage.J’avaispeurquetunemepardonnespas,queturefusesdemedonneruneautrechance.Jenesuispasentiersanstoi,Ange.Cescinqjoursl’ontprouvésansl’ombred’undoute.Ellesetournasurlecôté,blottietoutcontrelui,etposasondoigtentraversdeseslèvrespourstopper
leflotdereproches.—Chut,monamour.Tun’espasleseulànepasavoirpudormirdelanuit.Jerestaiséveillée,jete
voulaisprèsdemoi,tedésirais,tumemanquaistellement.Jem’endormaisenpleurstouslessoirs.Iltressaillitetfermalesyeux.Lechagrinetleregretselisaientsursonvisage.—Jen’aipasditçapourtefaireculpabiliser,murmura-t-elle.Seulementpourtefairesavoirquenous
avons tous les deux souffert.Que nous avons tous les deux eu nos peines.Mais nous avons une autrechanceàprésent.Faisonsensortequecesoitparfaitcettefois.
—Jeneteméritepas.Tuestropdouce,tropinnocente,tropcompatissante,tropaimante.Jeneméritepastonpardonettonamour,maisbonsang,j’enaibesoin.J’aibesoindetoi.—Etmoidetoi,dit-elleavantdel’embrasser.Fais-moil’amour,Drake.Fais-moioublierlasolitude
decescinqderniersjours.J’aitellementbesoindetoi.Ilroulasurelle,leregardbrûlant.Ilsemitàcalifourchonsurelle,lesavant-brasposésdechaquecôté
desatête,leregardrivésurlesienjusqu’àcequ’elles’ynoie.Puisilsepenchaetpritseslèvresdansleplustendredesbaisers.—Tuessûre?demanda-t-ild’unevoixtendue.—S’ilteplaît,supplia-t-elledoucement.Ilfittairesasuppliqued’unbaiseretfittournersalanguedanssabouche,lagoûta,faisantl’amouràsa
langueaveclasienne.—Tun’aurasjamaisbesoindesupplierpourquoiquecesoit,jura-t-il.Toutcequej’aiestàtoi.Lecœurd’Evangelineseserra.Ilsemblaitsisérieux,commes’ilfaisaitunvœupourl’éternité.Elle
passasesbrasautourdesoncoupourluirendresonbaiser.—Alorsjeteveux.Maintenant.Dépêche-toi.—Tun’espasprêtepourmoi,dit-il.Jeneveuxpastefairemal.Ellesecoualatête.Elleétaitprête.Plusqueprête.Elleavaitbesoinqu’illapossède.Qu’ilreprenne
possession de son corps de la plus primitive des manières dont un homme pouvait revendiquer unefemme.—Jesuisprête,insista-t-elle.S’ilteplaît,Drake.Tuasditquejen’auraisjamaisàsupplier.Elle écarta les cuisses, s’offrant à lui, puis elle enroula ses jambes autour de la taille deDrake, et
sentitsonsexeenérectioneffleurersonintimité.Les traitsdeDrakeétaient tendus, ilétaitclairqu’il luttait :devait-ilcéderàsa requêteouexercer
davantagederetenue,depeurdeluifairemal?Sesinstinctsfinirentparprendreledessussurleresteetilsepositionnaàsonouverture,puis,aprèsunelégèrehésitation,lesyeuxrivéssursonvisage,ildonnaunpuissantcoupdereins.Evangeline cria etDrake enfouit son visage dans son cou tandis qu’il faisait onduler son corps, le
soufflecourt.Elleplantasesonglesdanssesépaulesetfermalesyeux.Sapossessionétaitsibelle.C’étaitcommerevenirchezsoi.Aprèstantdechagrin,dedésespoir,detristesse,elleétaitrevenuelà
où elle voulait être, avec l’homme avec qui elle voulait être. Elle ne pouvait demander plus que cetinstant,icietmaintenant.—Pourquoipleures-tu,Ange?Elleclignadesyeux ;Drakeavait redressé la têtepour la regarder, l’air inquiet.Ellenes’étaitpas
renducomptequ’ellepleurait.Pourtant,deslarmesroulaienteffectivementsursesjoues.Elleluiadressaunsourirefébrile.—Jesuisheureuse.Tunesaispasàquelpointcescinqderniers joursontétéhorribles.Jepensais
t’avoirperdupourtoujours.LaculpabilitéassombritleregarddeDrakeetildétournabrièvementlatêtepoursereprendreavantde
braquer de nouveau ses yeux sur ceux d’Evangeline. Il se retira lentement, et elle gémit en le sentantglisser contre sa chair sensible. Puis il donna un autre coup de reins, s’enfouissant en elle aussiprofondémentquepossible.—Jamaisplus,jura-t-ilensoutenantsonregard.Lemondeentiersauracequetureprésentespourmoi.
S’enprendreàtoi,ceseralamortassurée.Ellerésistaaumalaisequimenaçaitdes’emparerd’elle,déterminéequ’elleétaitànelaisserplaceà
riend’autrequ’àl’instantprésentetàlamerveilleusesensationdefamiliaritéqu’elleressentaitdansles
brasdeDrake.—Aime-moi,murmura-t-elleensecambrantcontrelui,enréclamantdavantage.Iln’yavaitaucunetracedel’amantdominateurqu’Evangelineenétaitvenueàdésirerardemmentau
cours de leur liaison.C’était un hommequi lui faisait l’amour avec révérence. Il y avait tendresse etregret dans chaque baiser et chaque caresse. C’était une facette deDrake qu’elle n’avait jamais vue.Certes, il avait su se montrer doux et aimant dans l’intimité, il ne faisait pas toujours étalage de sadomination,maiselledécouvraitlàuncôtésensibledeDrakequil’émouvaitauxlarmes.Elle brûlait de retrouver sa domination – elle en avait besoin – et pourtant, elle se rendit compte
qu’elle avait également besoin de cette tendresse depuis cette affreuse soirée, qui avait développé unmanqueaccrudeconfianceenelle.ElleavaitbesoindecesdeuxfacettesdeDrake:desabrutalitéetdesatendresse.Elleavaitbesoindeson…amour.Pouvait-ellel’espérer?Elle s’efforça de se sortir cette pensée déconcertante de l’esprit et s’abandonna complètement à la
beautédeleursébats,remettantsoncœur,soncorpsetsonâmeauplaisirpuissantquigrandissaitenelle,jusqu’àcequ’ellenepuisseplustenir.—Drake!—Jetetiens,bébé,luisusurra-t-il.Jouisavecmoi.Laisse-toialler.Il donna un puissant coup de reins, faisant onduler ses hanches jusqu’à être tout entier en elle.
L’euphorieinondaitsesveines,levisagedeDrakesetroubla.Evangelineperdittoutcontrôle,submergée,àboutdesouffle.Drake poussa un râle et la serra étroitement dans ses bras. Il donna un dernier coup de reins, puis
enfouitsonvisagedanssoncoutandisqu’ilssombraienttousdeuxdansl’oubli.Il resta longuementallongésurelle,puis il roulasur lecôtésans la lâcher,de tellesortequ’ellese
retrouvaau-dessus.Illaissasesmainslargesetpuissantesparcourirsacolonnevertébrale,etelleblottitsonvisagecontresontorse,embrassantsapeauhumidedesueur.—Nemelaisseplus,murmura-t-elledoucement.Drake resserra son étreinte autour d’elle et elle sentit son corps puissant trembler, trahissant son
émotion.—Non,Ange.J’aitropbesoindetoi.
Chapitre7
Auréveil,Evangelineétaitblottiedans lachaleuret leconfortdebraspuissants, solidementancréecontreuncorpsmusclé.Illuifallutquelquesinstantspourmettredel’ordredanssesidées.Ellen’étaitplussurlepetitlitdecampdansledébarrasdel’hôtelqu’onavaittransforméenchambrepourelle.Ellen’étaitplusaccabléeparlasolitudeetlechagrin.Lentement, lesévénementsde laveille lui revinrentenmémoire.Drakequiapparaissaità l’hôteloù
elle travaillait, la ramenait à lamaison, lui faisait l’amour. Puis ils avaient dormi quelques heures etpasséunesoiréetranquilleàregarderdesfilms.Ilsavaientcommandéàmangeretelles’étaitendormiedanssesbrassurlecanapé–c’étaitladernièrechosedontellesesouvenait.Manifestement,ill’avaitportéedanslelitsansqu’elleseréveille.Lavivelumièredusoleilquifiltraitàtraverslesstoresl’éblouit.Elles’alarma:ilfaisaittropjour.
Elleseredressaprécipitammentpourregarderl’heuresurlatabledechevetdeDrake.Oh, flûte. Il ne s’était pas réveillé. Il était presque 9 heures et, d’ordinaire, il était parti depuis
longtempsàcetteheure.LesbrasdeDrakes’enroulèrentautourdesa taillepour la ramenercontresoncorpsdélicieusement
chaud.—Rendors-toi,marmonna-t-il.Ellecontemplasonvisageetsesyeuxencorefermésnonsansinquiétude.Elletouchasonépaulepour
obtenirsonattention.Ilouvritparesseusementlespaupièresetlaregarda,lesyeuxbrûlantsdedésir.—Ilestpresque9heures,dit-elleavecinsistance.Ilcontinuadelaregarderparesseusement,sansréagir.Puisilsourit.—Jesaisquelleheureilest.—Maistuesenretard!—C’estmoi lepatron, j’ai ledroitd’êtreen retardà l’occasion.Et il se trouvequ’aujourd’hui, je
préfèrepasserlamatinéeaulitavecmapetiteamiepuisl’emmenerdéjeunerdansunbonrestaurant.Pourlerestedelajournée,nousverrons,maisjesuissûrquejepeuxtrouverunmoyendem’occuper.Le sous-entendu sexuel la fit frémir.Drake tira le drap qu’elle tenait contre ses seins pour le faire
glisserjusqu’àsataille,révélantsestétons.—Voilàunebellemanièredeseréveiller,dit-ild’unevoixsoyeuse.Ilsepenchaenavantetrefermaseslèvresautourdesontéton.Elleretintsonsouffleetfrissonnasous
lacaressedesabouche.Sestétonssemirentinstantanémentàpointeretsonsexepalpitadedésir.—Grimpe-moidessus,grogna-t-il.Maintenant.Oh,commeelleaimaitlecommandementdanssavoix!Elleseréjouitintérieurementquesonamant
dominateurn’aitpasdisparupourdebon.Obéissante,ellesedressasur lesgenouxetpassasa jambeau-dessusdeDrakepour lechevaucher.
Ellesedandinajusqu’àcequesonsexedéjàrigidesedressecontresonentrejambe.—Tuesprêtepourmoi?demanda-t-il.—Oui.Oh,oui,dit-elle,lesoufflecourt.—Montre-moi.Unpeutimidement,elleglissasamainentreeuxpoursefrayeruncheminentresesplisetsetoucher.
ElleinséraundoigtenellepourlemouilleravantdeletendreàDrakepourqu’ill’inspecte.—Laquestion,c’est:est-cequetuesprêtpourmoi?demanda-t-ellehardiment,lesyeuxbrillants.Amuséparsonimpudence,ilseredressapoursucersondoigt.—Délicieux,ronronna-t-il.Jesuisplusqueprêtpourmachérie.Prends-moi,Ange.Prendstonhomme
etchevauche-lesansrelâche.Nefaispreuved’aucunepitié.—Oh,jen’avaispasl’intentiondeteménager,souffla-t-elle.Tum’astellementmanqué,Drake.Jene
suisentièrequequandjesuisavectoi.Enréponseàsadéclarationpassionnée, il tira la têted’Evangelineà luietécrasases lèvressur les
siennes,dévorantsabouchedansunbaiserquiluicoupalesouffle.Sesmainssefirentpossessivessursoncorps,caressantesetenveloppantes,commes’ilredécouvraitchaquecentimètrecarrédesapeau.Lesbrasd’Evangelinesemirentàtremblerquandellesepenchapourposersespaumesàplatsurses
épaules.Quandellevoulutlepositionneràsonentrée,ill’enempêcha.—Laisse-moifaire.Accroche-toiàmoi.Jenetelaisseraipastomber,bébé.Jeprendraitoujourssoin
detoi.Elleobtempéraetsecambrapourqu’ilpuisseplacersonglandàl’entréedesonvagin.Elleretintson
soufflelorsqu’illapénétradequelquescentimètresàpeine,sanss’aventurerplusloin.Ilretirasamainetposasesdeuxbraslelongdesoncorpssurlelitavantdeleververselledesyeuxlourdsdedésir.— Je suis tout à toi, ronronna-t-il. Prends-moi brutalement. Prends-moi avec douceur et lenteur.
Montre-moitabeautéetdonne-moitonplaisir.Incapabled’attendrepluslongtemps,elleselaissaglissersurluid’uncoup,etlasensationsubitede
plénitudequil’envahitalorsqu’ildistendaitsachairluicoupalesouffle.—Nemelaissepastefairemal,ordonna-t-il.—Tunemeferasjamaismal.Ellesepenchapour l’embrassersanscesserd’alleretvenirsur lui,palpitantautourdesonmembre
gonflé.Ellecontractasesmuscles internes,ondulantautourde lui.LegémissementdeplaisirdeDrake,son
désir pur alimentèrent la confiance d’Evangeline. Avoir un certain pouvoir sur son amant dominateurl’excitait.Prenantsoncourageàdeuxmains,ellesemitàondulersensuellementcontrelui,sesoulevantet se cambrant jusqu’à ce qu’il soit presque libéré de son étau avant de redescendre pour le prendreentièrementenelle.Agrippantlesdrapssifortquesesarticulationsdevinrentexsangues,Drakesoulevaleshanchespour
venir à sa rencontre. Puis, comme s’il était incapable de contrôler son envie de la toucher ou de ladominer,ilposasesmainssurseshanchesetyplantasesdoigtspourlatirerbrutalementverslebas.—Tuessibelle,putain,dit-il,lavoixéraillée.Jenetelaisseraiplusjamais,Evangeline.J’espèrede
toutmoncœurquetuesavecmoi,parcequejenepeuxpastelaisserpartir.J’aibesoindetoi.Lecœurserré,leslarmesauxyeux,EvangelineregardaDrakeavectendresse,leursvisagesàquelques
centimètresl’undel’autre.—Moiaussi,j’aibesoindetoi,Drake.Jenevaisnullepart.Tantquetuveuxdemoi,jesuisàtoi.UnéclatdesatisfactionsemitàbrillersauvagementdanslesyeuxdeDrake.—Embrasse-moi,ordonna-t-il.EllepassasalanguesurleslèvresdeDrakepourqu’illesouvre,puiselles’aventuraau-delàpourle
goûter,absorbersonessence.UnedesmainsdeDrakequittasahanchepours’emmêlersansménagementdanssescheveux,lamaintenantfermementcontresaboucheafinqu’ellenepuissepluss’échapper.—Tuesparfaite,dit-ild’unevoixétranglée.Jeneteméritepas.Pasaprèstoutcequej’aifait,mais
bonsang,jenepeuxpastelaisserpartir.Jemerattraperai,Ange.Jetelejure.
—C’estdéjàfait,murmura-t-elle.Tuesvenumechercher.Soudain, il lafit roulerpour lacloueraumatelas.Il lapénétra toutentier, luiécartantdavantageles
jambes,ladévoilantcomplètement.Elleétaittouteàlui.—Jenetiendraipaslongtemps,lâcha-t-il,lesdentsserrées.Ettoi,bébé?Jeteveuxavecmoi.Ellecaressasamâchoirepuissante.—Jesuisavectoi,Drake.Net’arrêtepas.Ilfermalesyeuxetprituneprofondeinspiration,profondémentplongéenelle.Puisilsemitàalleret
veniravecardeur,lesondelachaircontrelachairrésonnantdanslapièce.Tous lesmusclesdesoncorpssecontractèrent,prêtspour l’orgasmequimontaitenelleavecforce.
Ellefermalesyeux,maisilluiordonnadelesouvrir,etelleobéit,pourplongersonregarddanscelui,intense,deDrake,luiaussiauborddel’extase.—Maintenant,haleta-t-il.Jouisavecmoi.Laisse-toialler.Maintenant!Illapilonnasisauvagementquelatêted’Evangelineheurtalatêtedelit.Frémissante,elleneputplus
seretenir:ellelaissaéchapperlecriquinedemandaitqu’àsortiretlemondeexplosaautourd’elle.Elleétaitàboutdeforces,l’euphorieremplissantsesveines,sesmusclestotalementrelâchés.Un plaisir doux, indescriptible, la transporta vague après vague. Elle volait, flottait, légère comme
l’air.Deslarmes,nondetristessemaisdejoie,roulèrentsursesjoues.—Ne pleure pas,murmuraDrake en embrassant ses larmes pour les chasser.Ne pleure plus,mon
amour.— C’est plus fort que moi, souffla-t-elle d’une voix tremblante. C’était si beau. Je suis tellement
heureuse,Drake.Alorsquejenepensaisplusjamaisconnaîtrelebonheur.Sa déclaration sincère sembla torturer Drake, qui la prit tendrement dans ses bras sans cesser de
chasserseslarmesdesesbaisers.—Leschosesserontdifférentesàpartirdemaintenant,Ange,dit-ilaveclaplusgrandesincérité.Jete
lejure.Tuesmaseulepriorité.Tonbonheurettasécuritépassentavanttouteautrechose.Meshommesetmoiallonsnousenassurer.Avecletemps,tumeferasdenouveauconfiance.Laisse-moiunechance.—Oh,maisDrake,jetefaisconfiance,dit-elleenposantsamainsursajoue.Tupeuxmecroiresur
parole.Jet’aidéjàpardonné.Nenousappesantissonspassurlepassé,etconcentrons-noussurl’avenir.Visiblementbouleversé,Drakelaissatombersonfrontcontreceluid’Evangeline,lesoufflecourt.Les
paupièrescloses,ill’embrassatendrement.—Jeneteméritepas,répéta-t-ild’unairdésolé.Maisjeseraisperdusijetelaissaispartir.—Jenetelaisseraispasfaire.J’aibesoindetoi,Drake.Jenepeuxpasvivresanstoi.Jeneveuxpas
vivresanstoi.Illaserracontreluidetoutessesforces,tremblantdetoutsoncorps.—Dieumerci,murmura-t-il.Dieumerci.Ilsrestèrentainsienlacésquelquesinstants,puisDrakeroulasurlecôtésanslalâcher,desortequ’ils
restèrentfaceàface.—Jepasselajournéeavectoi,annonça-t-il.Evangelineneputcontenirsasurprise.Ellepensaitquemalgrésonretard,ilserendraitquandmêmeà
sontravail.—Jet’emmènedéjeuner,puisonpourraitallerfaireuntourdecalècheàCentralPark,puisquelques
courses.J’aimeraisquetucuisinespourmoicesoir,qu’onpasselasoiréeici.Ellerougitdeplaisir.—Tuasenviedequelquechoseenparticulier?Ill’embrassa.
—Surprends-moi.Sonespritsemitaussitôtàtourneràpleinrégime.Lesquellesdesesspécialitésneluiavait-ellepas
encorepréparées?—Demain,jedoisretournertravailler,maisjedemanderaiàundemeshommesdet’accompagneroù
quetuveuillesaller.Evangeline prit peur soudain. Elle n’était pas encore prête à affronter les hommes deDrake. Cette
simplepenséelamortifiait.— Peut-être une autre fois, murmura-t-elle. Je préférerais rester à l’appartement et me détendre,
demain.Ill’embrassaunedernièrefoisavantdesortirdulit.—Commetuveux,bébé.Tun’asqu’àdemander.Elleeutdespapillonsdansleventreenentendantlatendresseetl’affectiondanslavoixdeDrake.Etil
nedisaitpasçapourluifaireplaisir.Iln’étaitpascegenred’homme.Ilétaitdirect,presquetrop,quitteàvexer ses interlocuteurs. Et chacune de ses déclarations depuis qu’il l’avait retrouvée avait étéprofondémentsincère.Draken’avaitpasbesoindedébiterdesplatitudesnideflatterl’egodequiconquepourlepersuaderde
se plier à sa volonté. Avec lui, c’était à prendre ou à laisser. Elle admirait son honnêteté même si,parfois,c’étaitpénible.Aumoins,ellesavaitàquois’enteniraveclui.Pasbesoindesedemanders’ilvoulaitvraimentqu’ellefassepartiedesavie.Elleavaitencoredumalàcomprendrequ’entretouteslesfemmes–plusbelles,plussophistiquées,et
bienplusexpérimentéesqu’elle–ilaitjetésondévolusurelle.Sansréfléchir,sansfaux-semblants,sanstournerautourdupot.Ilprenaitcequ’ilvoulaitetn’acceptaitaucunrefus.Endépitdesesinstinctsféministes,elleseréjouissaitdesadomination,desonautorité,dufaitqu’il
menaitladanseetvoulaitqu’ellelelaisseprendresoind’elle.Ellepréféraitdeloinêtreuneprincessechérieetchoyéeplutôtqu’unecasse-piedsrefusantàDrakede
contrôler sonexistence. Il luidonnait la sensationd’être la seule femmeaumondeà sesyeux, laplusbelle de toutes.Evangeline lui appartenait corps et âme, etmalgré toutes les femmes queDrake avaitconnues,c’étaitellequiétaitdanssonlit.Celavoulaitbiendirequelquechose,non?Cetteconfianceenelle toutenouvelle laboostaitcommejamais.Pourautant,ellenedevaitpasêtre
trop arrogante. Il n’était pas exclu qu’elle soit seulement un défi pour lui, un divertissement. Drakepouvaitselasserd’elle,commeils’étaitlassédesautres,enmald’unnouveaudéfiàrelever.Ellesemorditlalèvre,enproieàunecertainedétresse.Arrête,Evangeline!Pourl’amourduciel,reprends-toiunpeu.SiDrakeétait réellement investidans leur relation, sonmanqued’assuranceetde confianceenelle
finiraitparlefairefuir.Etnonl’inverse.Ilt’achoisie.Ilauraitpuavoirn’importequellefemmeetpourtant,ilt’arepéréesurunecaméra
desurveillanceett’achoisie.Cen’étaitpasanodin.Bienqu’Evangelinen’aitpaspassébeaucoupdetempsdansleclubdeDrake,ellen’étaitpasaveugle.
Elleavaitbienvul’éventaildesomptueusescréaturesquipeuplait l’endroit,detoutestailles,origines,carrures;certainespetitesetpulpeuses,d’autresgrandesavecdesjambesàtomberetunsourireultra-bright, sans parler de leurs chevelures, de leurs peaux, de leurs vêtements et de leur maquillageimpeccable.Pourtant,pourune raisonqui lui échappait,Drakeavait jeté sondévolu sur elle et l’avaitpossédée
quelques minutes seulement après leur première rencontre. Elle secoua la tête. Ce genre de chosesn’arrivaitpasàunefillecommeelle,venued’untroupauméduMississippi.Elleétaitmaladroite,timide
et extrêmement prude, raison pour laquelle elle n’avait perdu que récemment sa virginité – avec unhomme qui n’était pas pour elle. Et naïve de surcroît. Elle devait être la fille la plus crédule de laplanète.AlorsquediableDrakeluitrouvait-il?—Evangeline,qu’est-cequinevapas?demandabrusquementDrake.Ellerougitqu’illasurprenneainsiperduedanssespensées.Horsdequestionqu’elleconfieàDrake
cequioccupait sonesprit,malgré sapropensionà toujoursdire lavérité, sigênante soit elle.Pour lapremière fois, elleallait luimentir, alorsqu’elleavaitpromisdene jamais le faire.Mais lavériténeferait que le mettre en colère et gâcherait ce qui avait été une matinée parfaite. Ce n’était pasdommageable:elleneletrahissaitpas,ellenementaitpassurunechosevitale.Malgrétout,celanelaréconfortapas.Elledétestaitmentir.—Jemedemandaiscequej’allaispouvoirfaireàmangercesoir,dit-elleaveclégèreté.Elle rougit de plus belle sous le regard intense deDrake, qui n’avalait pas son excuse pathétique.
Pourtant,àsagrandesurprise,iln’exigeaaucuneexplication.—Allonsprendreunedouche,puisnousironsmanger.Ensuite,jet’emmènefairecetourencalèche.Ellesoupiradebonheur.—Voilàquis’annoncecommeunejournéeparfaite.
Chapitre8
—TucompteslaisserEvangelinesortirdel’appartementunjour?demandaMaddoxd’untonsec.Drakelevabrusquementlatêtepourétudierseshommes;ilsavaienttousaufonddesyeuxlaquestion
queMaddoxavaitformulée.Questionquisortaitdenullepartetn’avaitrienàvoiraveclesaffairesdontils discutaient. D’ailleurs, ses affaires personnelles n’étaient pas ouvertes à la discussion. Il fallaitmanifestementqu’ilclarifiecepoint.—Dequoituparles?JenevoispasenquoimarelationavecEvangelineteregarde.Sontonétaitglacial,toutcommesonexpressionalorsqu’iljaugeaitseshommes.Ladésapprobationse
lisaitdansleursyeux,cequilemettaithorsdelui.Ilétaittentédelescorrigerunàun.Ilétaitdansdesalesdrapss’ilssemettaientàjugersonintimité.—Oh,jenesaispas.Voyons.Ellen’apasmisunpieddehorsdepuisquetul’asretrouvée.Personne
nel’avue.Tudevaisofficialiservotrerelation,maisellesefaitencoreplusrarequ’avant.IlyavaitunecritiqueimplicitedanslavoixdeMaddox.CommesiDrakelacachaitintentionnellement.— Elle est libre d’aller et venir comme bon lui semble, répondit Drake avec froideur. Elle est
conscientedelanécessitéd’unesécuritérenforcée,etellel’accepte.Jeluiaiproposéquel’undevousl’accompagneoùelleveut,maisjusqu’àprésentellearefusé,ellepréfèreresteràlamaison.—Bonsang,elleestsûrementmortedehonte,ditJusticeavecdégoût.Elleignorecequenoussavons
detoutecetteaffaire,mêmesielledoitsoupçonnerquenoussommesdans laconfidencedesmoindresdétails.C’estcompréhensible,qu’ellenesoitpaspresséed’affronterlejugementdesautres.—Quiaditqu’elleseraitjugée?demandaSilas,furieux.Justiceluilançaunregardimpatient.—Evangelineasafierté.Jenedispasquenouslajugerons.Ellen’arienfaitdemal,insista-t-ilavec
unregardsanséquivoqueàl’intentiondeDrake,quimontralesdents.Maisellenesaitpascequenousenpensons,cequenoussavons,nidequelcôténoussommes.Ilyadeforteschancespourqu’ellenousévite.Jeneluienveuxpas.Jeferaislamêmechoseàsaplace.Danssonesprit,elles’estsuffisammentcouvertedehonte.—Putain,grognaMaddox.Jerefusedelalaissercroireça.Silaslevalamainpourlefairetaire.—Jevaism’occuperd’Evangeline.Drakefusillasonhommedemainduregard.—Ahoui?Silassoutintsonregardsansciller.—Oui.Jeluiassureraiquequellesquesoientlesconneriesqu’ellesepasseenboucledanslatête,ce
nesont,justement,quedesconneries.Nousavionsunaccord,mangerensembleunefoisparsemaine.Jevaisdoncacheteràmangeretallercheztoidemainpourluiremettrelesidéesenplace.Horsdequestionqu’ellesecachedehontepourunehistoiredanslaquelleelleétaitinnocente.Drakeétaitàdeuxdoigtsdeperdresonsang-froid.SeullefaitdesavoirqueSilasétaitd’uneloyautéà
touteépreuveluipermitdecontrôlersacolèrefaceà lacondamnationdanssavoix.Draken’avaitpasbesoinqueseshommesluirappellentsonerreur;ils’envoulaitsuffisammentcommeça.Saragelequittaaussivitequ’elleétaitapparue.IlappréciaitlerespectdeSilasenversEvangeline,et
le fait qu’il prenne sa défense. D’habitude, cette bienveillance se limitait au cercle restreint de seshommesdemain.OfficialisersarelationterrifiaitDrake–uneémotionquiluiétaitétrangère.Néanmoins,sielledevait
être rendue publique, il avait besoin de la loyauté inconditionnelle de chacun de ses hommes enversEvangeline,carilcomptaitsureuxautantquesurlui-mêmepourassurersasécuritévingt-quatreheuressurvingt-quatre.LaconclusiondeJusticeétaitcorrecte.Drakes’envoulaitdenepasyavoirsongé,mais ilsemblait
hautementprobablequ’Evangelinesoitmortifiéeà l’idéed’affronter seshommes.Cette soirée-làavaitétéhumiliantepourlajeunefemme.Ilétaitévidentqu’ellen’auraitaucuneenviedeseretrouverfaceàdeshommesquienconnaissaienttouslesdétails.IlavaitégalementraisonsurEvangeline:elleétaitfière.C’étaitl’unedeschosesqueDrakeadmirait
lepluschezelle.—Silasaraison,concédaDrake.IlfautapaiserlestensionsetmettreEvangelineàl’aise.Jerefuse
qu’ellesesentemalàl’aiseenprésencedeceuxàquijeconfiesavie.Ilmarquaunepauseetadressaunregardd’acieràchacundeseshommes.—Cependant,unefoisqueSilasauramis leschosesauclair,cettesoiréenedevraêtreabordéeen
aucun cas en présence d’Evangeline.Àmoins qu’elle n’en parle, ce doit être oublié, et si elle devaitaborderlesujet,vousnedirezrienquipuisselacontrarieroulagênerdequelquemanièrequecesoit.J’aibienfailliladétruireenessayantdelagarderhorsduradardesLuconi,etjen’autoriserairienquipuisselafairedavantagesouffrir.Maddoxgrognadedégoût.—Tunousprendspourqui?Evangelineestunefemmedouce.Bientropinnocenteetcompatissante
pour son bien. Lui faire dumal, ce serait comme frapper un chiot. Seul un connard fini essaierait del’humilier.—Jeveuxseulementm’assurerquenous sommes tous sur lamême longueurd’onde,dit calmement
Drake.Jenelalaisseraipaspartir,cequiveutdirequ’elleferapartiedenosviesquotidiennes.PlustôtSilasauracalmélestroublesetmisEvangelineàl’aise,plusvitecettesoiréeseraoubliée.—Jem’enoccupedèsdemain,réaffirmaSilas.Drakeopina.—Jecomptesurtoi.Maddox,tudevraispeut-êtrefairesortirEvangelineaprès-demain.Qu’elleaille
fairedescourses.Elleaimecuisineretavoirlasensationqu’elleapporteunecontribution,qu’ellevautquelquechose.Jeneluienlèveraipasça.Vas-yavecJustice.Elleabesoindeseréhabitueràêtreavecvoussansqu’ilyaitaucunegêne.—Ellepeutcuisinerpourmoiquandelleveut,ditJustice.Sijesuissage,jepeuxpeut-êtreespérerune
invitationàdîner!Drake leva lesyeuxauciel tandisque lesautresrenchérissaient, louantses talentsculinaireset leur
envie d’être également invités à dîner. Drake n’était pas stupide : ses hommes n’appréciaient passeulementlestalentsdecuisinièredelajeunefemme.S’ilnefaisaitpasattentionetperdaitEvangelineunenouvellefois,ilsn’hésiteraientpasàlacouvrird’attentionspoursefaireuneplacedanssoncœur.Ilseraitalorsobligédesévir.Drakeselaissaretombercontreledossierdesachaiseets’adressaàSilas.—Jeveuxêtreaucourantdetoutcequisepasse.CommemarelationavecEvangelinevaêtrerendue
publique,jeveuxquetoutlemondesoitsurlequi-vive,etêtreinformédetoutemenacepossibleavantqu’ellenesoitproférée.—Jesuisdéjàdessus,réponditSilas,imperturbable.J’aidesyeuxetdesoreillespartout.Siquelqu’un
prépareuncoup,jelesaurai.Dumomentqu’onnelaissepasEvangelineseule,notammentenville,elleseraensécurité.Drakefronçalessourcils.— Elle ne sortira jamais en ville sans être escortée. Elle n’ira nulle part sans protection, et des
sentinellesserontpostéesàl’appartementquandelleseraseuleenjournée.—Tu sais, lemeilleurmoyen pour accréditer les rumeurs de ton attachement sérieux àEvangeline
seraitdetemontreràunévénementavecelleàtonbras,indiquaHartley.Tun’esjamaisalléaccompagnéàaucuneréception.Tujouestoujoursleloupsolitaireinaccessible,lesraresfoisoùtuparaisensociété.Jepensequecela ferait sensation.Sème la rumeurd’une relationsérieuseavecEvangeline,et toute lavilleenparlera.Drakeseraiditetserralesdents.L’idéedeseservird’Evangelineoudel’exhibercommeunanimalde
foirepoursefairecomprendreluidéplaisait.Celadit,Hartleyn’avaitpastort:s’ilvoulaitfairesavoiràtous qu’Evangeline était sa reine et que quiconque l’ennuyait connaîtrait unemort atroce, il devait enapporterunepreuveconcrète.Desactesdevaientconfirmersespropos.Ce qui impliquait une soirée en société, à côtoyer des gens qu’il méprisait ou inversement, qui
cherchaientsonappuiousonsoutienfinancier,ousimplementdesgensqu’il trouvaitennuyeuxet faux.Aucundecesscénariosn’étaittrèsexcitant.EtexposerEvangelineàuntelniddevipèresluilaissaitungoût amer. Elle neméritait pas d’être raillée et tyrannisée, et elle neméritait certainement pas d’êtretourmentéeetpersécutéepoursonabsencedestatutsocial.Il aimait et respectait sa fraîcheur et le fait qu’elle n’était pas rongée, comme tant d’autres, par la
cupidité et l’ambition. Elle était authentique, et, un mois auparavant, il n’aurait pas cru qu’une tellepersonnepuisseexister,àpartdansunmondeoùtoutétaittropbeaupourêtrevrai.Ilétaitdevenucyniqueetdésabusédèssonplusjeuneâge–iln’avaitpaseulechoix.Evangelineétaituneboufféed’airfrais.Jamaisiln’avaitrencontréquelqu’uncommeelle.Elleluifaisaitcroireàlabontédanslemonde,mêmeenquantitélimitée.Elleétaitl’incarnationdesonsurnom:unange.Essentiellementbonneetincapabledetromperieoude
trahison.Bonsang.Ilsecomportaitcommeunadolescentamoureuxquiauraitignorécommentfonctionnelemonderéel.C’étaitEvangelinequinecomprenaitpaslanatureperfidedel’humanité,etilétaitdudevoirdeDrake
delaprotégerdeceuxquiferaientpeudecasdeladétruireetdeprofiterd’elle.Il grimaça intérieurement. On aurait pu croire qu’il critiquait Evangeline. Comme si elle était bête
commesespieds,alorsqueriennepouvaitêtremoinsvrai.Cen’étaitpasqu’ellen’avaitpasdeprisesurla réalité – elle en avait fait l’expérience directe avec son premier amant et à présent avec Drake,l’homme qui avait juré de ne jamais lui faire de mal. Seulement, elle était immensément douce etchoisissaitdevoirlebonchezlesautres,jamaislemauvais,àmoinsdenepasavoird’autrechoix.Soncœurétaittroptendre,etc’étaitpourcelaqu’elleavaitbesoindequelqu’unpourlaprotégerdeceuxquiprofiteraientdesoncœurgénéreux.—Certainsd’entrevousnousaccompagneront,ordonnaDrake.J’ytiens.Jeneveuxpaslajeteraux
loups, car vous et moi savons qu’ils s’en donneront à cœur joie. Elle sera encadrée par un grouped’hommesetmoi-mêmeenpermanenceetpersonne,jedisbienpersonne,nepasseraàtraversvouspourl’atteindreetluibourrerlecrânedeconneries,ouluidonnerlesentimentdenepasêtreàsaplace.Sinon,vouspouvezdireadieuàvoscouilles.—C’estdesfemmesquetuvasdevoirteméfier.Bienplusquedeshommes,déclaraMaddox.Dèsque
lesfemmesquetuasquittéesoupurementetsimplementrejetéeslaverrontàtonbras,alorsqu’aucune
femmen’estjamaisàtonbras,ellesvontsortirlesgriffespouressayerdelaréduireenpièces.Lesautreshochèrentgravementlatête.— Raison pour laquelle vous allez former une barrière impénétrable autour d’elle et chasserez
quiconqueessaieradel’atteindre,ditDrakeavecemphase.Zandergrogna.—Merde.Çaveutdirequ’ilvafalloirquejemetteunfoutucostume?Thanericana.—Sinousdevonssouffrir,toiaussi.—Cen’estpasuneblague,intervintDrake,demarbre.IlfautprotégerEvangelineàtoutprix.Jerefuse
qu’elle soit de nouveau malmenée ou humiliée. Si quelqu’un vous échappe, c’est à moi que vousrépondrez.C’estcompris?—Evangelinenousappartient,boss,réponditJustice.Enfin,ellevousappartient,maisparprocuration,
ellenousappartient.Ilfaudraitmepassersurlecorpspourl’atteindre.Drake étudia ses hommes. Justice disait vrai.Evangeline leur appartenait effectivement à tous.Elle
étaitl’uned’entreeux,cequivoulaitdirequ’ilslaprotégeraienttouscommeilsseprotégeaientlesunslesautres.D’unhochementdetête,DrakeacceptalapromessedeseshommesdeprotégerEvangeline.Latension
qui luinouait les entraillesdepuisqu’il avaitdécidéd’officialiser sa relationavec la jeune femmesedissipa,etilsedétenditpourlapremièrefoisdepuisqu’Evangelinel’avaitquitté.Ilpouvaitcomptersurseshommes–sesfrères.Lacrèmedelacrème.Ilavaittouteconfianceeneuxet
remettait lavied’Evangelineentre leursmains. Il savaitque lesmotsde Justicen’étaientpasquedesparoles en l’air. Tous donneraient leurs vies pour Evangeline, comme ils la donneraient pour lui. Cegenredeloyauténes’achetaitpas.Elleseméritaitetdevaitêtrerendue:Drakeferaittoutpoureux,etilslesavaient.—Jevaispassermesinvitationsenrevue.Ilyenatoujoursunepilesurmonbureau.Jevaischoisir
celle qui nous garantira le plus de publicité et nous mettra en scène pour qu’on ne puisse pas seméprendre.Après cette soirée, tout lemonde saura qu’Evangelinem’appartient et qu’elle est sousmaprotectionabsolue.SilastransperçaDrakeduregard,commepourdéchiffrersespensées.—C’esttoutcequec’est?Unemiseenscène?demanda-t-il,menaçant.LestraitsdeDrakedevinrentglacialsetilsoutintleregarddeSilasaveclamêmeintensité.—Elleestàmoietc’esttoutcequetuasbesoindesavoir.Cequ’ilyaentreEvangelineetmoiest
entrenous,cen’estpasouvertàladiscussionniàl’analyse.Silas pinça les lèvresmais n’insista pas.Maddox ne semblait pas non plus ravi de la réponse de
Drake,maiscommeSilas,illaissacouler.—Bien,sic’esttoutcedontnousavionsàdiscuter,çasuffitpouraujourd’hui,annonçaDrake.Jereste
à la maison ce soir, donc j’ai besoin que Zander, Hartley et toi, vous assuriez.Maddox, s’il y a unproblème,appelle-moi.Nousn’avonspasprévudesortir,maisjepeuxtoujoursl’emmeneravecmoisivousavezbesoinquejevienne.
Chapitre9
Agitéeet tendue,Evangeline faisait lescentpasdans le salondeDrake.Elleétait àdeuxdoigtsdedevenircomplètementzinzinàcausedel’isolementqu’elles’étaitimposécesderniersjours.Ellevoulaitsortir,prendrel’air,allermarcher,n’importequoi.Maispourcefaire,elleavaitbesoind’uneéquipedesécuritécomposéedeshommesdeDrake,alorsquel’idéedelesaffronterlamortifiait.Ellen’avaitaucuneraisond’êtrehonteuse.Ellen’étaitpasfautive,maisellenesupportaitpasl’idée
d’affronterleursregardsensachantqu’ilsétaientaucourantdel’humiliationqu’elleavaitvécue.Qu’elledécèleun jugementoude lacompassiondans leursyeux,cette situation lamettaitprofondémentmalàl’aise.Avec un soupir, elle se laissa tomber sur le canapé. Il fallait qu’elle trouve quelque chose pour
s’occuper.Personnenepouvaitrestersansrienfaire.Ellerépugnaitàsedirequ’elleétaitdevenueunedecesfemmesquin’avaientpasdeviepropre,nevivantqu’àtraversleurhomme.Cen’étaitpasuneabrutiefinie,maiscen’étaitpasécritsursonvisage.Dieusavaitqu’ellenesecomportaitpascommeunefemmeindépendanteetautonome.Était-elle folle d’accepter si facilement que Drake revienne dans sa vie ? Il restait beaucoup de
questionssansréponsedanssonesprit–desquestionsauxquellesellen’étaitpascertainedevouloirderéponse–maisenmême temps,une inquiétude la tiraillait.Ellenepouvaitpasvivredans l’ignoranceindéfiniment,si?Elle ne pouvait pas vivre sa vie avec la tête dans le sable, comme une lâche.Bientôt, elle devrait
affronterDrakeetluiposerlesquestionsquilarongeaient.Mêmesicelaimpliquaitdeleperdre.Accabléeparlechagrin,ellefermalesyeux.Non,ellen’iraitpasjusque-là.Ildevaitbienyavoirune
explication parfaitement raisonnable pour expliquer que Drake se drape dans un tel secret, mette enœuvredetellesmesuresdesécurité,etfassepreuved’untelexcèsdezèleausujetdesasécurité.Commeledisaitsouventsamère,ilvautmieuxnepasallerau-devantdesennuis.Une sonnerie la tira brusquement de ses pensées. Elle se leva d’un bond pour se précipiter à
l’interphone.—Oui?Savoixétaittremblante;elleprituneprofondeinspirationpourcalmersesnerfs.—Mademoiselle Hawthorn – Evangeline, dit Edward d’une voix amicale. Vous avez de la visite.
Dois-jelefairemonterouluidirequevousnerecevezpasdevisiteurs?Son pouls s’emballa. Qui donc pouvait lui rendre visite ? Eddy n’était pas si stupide. Non, ce ne
pouvaitpasêtrelui.—Quiest-ce?demanda-t-elle,surladéfensive.—IlseprénommeSilas.IltravailleavecM.Donovan,commevousdevezlesavoir.Sonventresenoua.Ellen’étaitpasencoreprêteàaffronterundeshommesdeDrake.Quefaisait-il
ici ?Elle était à deuxdoigts dedire àEdwardqu’elle était indisposée, quand elle sedit qu’il fallaitqu’ellecessed’êtresilâche.Épaulesredressées,elleinspiraunboncoupavantderépondre:—Faites-lemonter,Edward,etmerci.—Avecplaisir,Evangeline,dit-ilchaleureusement.
Ellefitlescentpas,agitée,enattendantquel’ascenseurarrive.Jusqu’àcequ’elleprenneconsciencequ’elle se tenait juste devant les portes,montrant par là à quel point cette visite inattendue la rendaitnerveuse.Elleseprécipitaalorsdanslesalon,allumalatélévision,ets’installadanslecanapécommesielle avait passé la journée à se détendre sans se soucier de rien. Elle n’avait aucune envie que leshommesdeDrakelavoientcommeunefaiblefemme.Ellesecrispaquandlesportesdel’ascenseurs’ouvrirent,maisfitdesonmieuxpoursedétendreavant
deselever,unsourireaccueillantsurlevisage.Elleavaitl’impressiond’avoirlestraitsfigésdansuneexpressionfausse.Ilnerestaitplusqu’àespérerqueSilasnevoiepasquecen’étaitqu’unefaçade.Quandelle fit le tourducanapépour l’accueillir,elle fut surprisede le trouver lesbraschargésde
sacs remplis de nourriture. Perplexe, elle se précipita pour le débarrasser de ceux du dessus avec unregardinterrogateur.—C’estenquelhonneur?Ilposalessacssurl’îlotcentraldelacuisineavantdeladébarrasserdeceuxqu’elleportait.Puisil
sortitlesrécipientsunàunpourlesalignersurlecomptoir,commeunbuffet.—Nous étions convenus demanger ensemble une fois par semaine, expliqua-t-il calmement. Tu as
oublié?Ellerougit,lesjouesenfeu,etdétournaleregard.—Non,souffla-t-elle.C’estjustequejecroyais…—Tucroyaisquoi?demanda-t-ilsansdétour.Ellehumectaseslèvressèchesetsetrémoussa,tordantsesdoigtsavecnervosité.—Jen’étaispascertainequetuvoudraisencorevenirmangeravecmoi,murmura-t-elle.Silaslaissaéchapperunflotdejurons,lafaisanttressaillir.Puisiltenditlamainpourprendreunedes
siennesentresespaumes.—Regarde-moi,Evangeline.Cen’étaitpasunerequête,onnepouvaits’yméprendre:c’étaitunordre.Àcontrecœur,ellelevala
têtepourleregarderdanslesyeux,etlacolèrenoirequ’elleylutfaillitlafairedéguerpir.Ilavaitl’air…dangereux.Etétaitextrêmementfurieux.—Écoute-moi, Evangeline, et écoute-moi bien, parce que je ne vais le dire qu’une fois, et tu vas
retenircequejetedis,oujetejurequejemettraimamenacedetefesseràexécution.Elleavalasasalive,lesyeuxécarquillés,paniquée.—Tun’asrien faitdemal,dit-il, incisif.Tun’espasàblâmerpourcequ’ils’estpassécesoir-là.
C’estDrakeleseulresponsable,maisilafaitlaseulechosequ’ilpouvaitfairepourteprotégerdansunesituationimpossible.Ilignoraittotalementquetuseraislà.S’ill’avaitsu,iln’auraitjamaisramenéceshommes.Ils’enveut,et jenepeuxpasdirequejesoistrèscontentdeluinonplus.Maiscrois-moi, ils’enmordlesdoigtsetpersonnenel’apuniplusqu’ilnes’estpunilui-mêmepourcequ’ilt’afait.—Ilm’aexpliqué,murmuraEvangeline.Jenecomprendspastout,maisiladitlamêmechosequetoi.—Maintenant, tu veux peut-êtrem’expliquer pourquoi tu penses que les autres gars oumoi-même
pourrionstetenirresponsableoupenserdumaldetoi,alorsquec’esttoiquiasétéblesséeethumiliée?Ellesemorditlalèvre,déterminéeànepaspleurer.Elleavaitassezpleuré.Terminé.Ilétaittempsde
releverlatêteetd’êtreforte.Elleétaitd’uneautretrempe.Commentpouvait-ellesemontrerdigned’unhommecommeDrakesiellefaisaitsapleurnicheuseenpermanence?Commeellenerépondaitpastoutdesuite,Silassoupiraetserrasamainpourlaréconforter.—LesgarsetmoisoutenonsDrake.Inconditionnellement.Nousdonnerionstousnotreviepourluisans
hésiter,etilferaitlamêmechosepournous.Cetteloyautéetcetteprotections’étendentàtoi,etquiplusest,notreprotectionn’estpasliéeàtarelationavecDrake.Plusmaintenant.S’ildevaitsepasserquelque
choseentreDrakeettoi,notreloyautéenverstoines’envoleraitpas.Situasbesoindequoiquecesoit,jeveuxquetunouscontactes,etsitunepeuxpasterésoudreàlefaire,jeveuxquetumecontactes.Pourtoutetn’importequoi.Compris?Elleledévisagea,incrédule.—Maisjenesuispersonne!Ettunemeconnaismêmepassibienqueça.Taloyautéréside,àraison,
auprèsdeDrake.— Voilà, tu m’énerves encore plus, grogna-t-il. Ça me ferait mal de laisser une femme innocente
souffrir alorsqu’ellen’a rien faitdeplusqued’êtreunebellepersonne.Et si celadoitmecoûtermarelation avec Drake, qu’il en soit ainsi. J’ai l’habitude d’être un loup solitaire et de ne répondre àpersonne.Allez,mettonsfinàcetteconversationridicule.Ledînervarefroidir.Troubléeparsadéclarationemphatique,elleallasortirplusieursassiettesduplacardetdesustensiles
dutiroir.Quandellerevintàl’îlot,Silasétaitentraind’ouvrirlesrécipients.—Jenesavaispasdequoi tuavaisenvie,donc j’aiprisunassortiment. J’ai tous tesplats thaïset
chinois préférés, et des trucs à grignoter : ailes de poulet, bâtonnets au fromage, sauce aux épinards,nachos,deuxsortesdenuggets,etquelquesautrestrucsquej’aiprispourquetugoûtes.Elleeutl’eauàlaboucheetsonventresemitàgargouiller.—Ça a l’air délicieux, souffla-t-elle avant de lever la tête pour le regarder avec reconnaissance.
Merci,Silas.Çametoucheénormément.Sonexpressions’adoucit.—La semaine prochaine, je prendrai des plats à découvrir. Aujourd’hui, je voulais t’apporter des
chosesquejesavaisquetuaimerais.—J’aihâte,dit-elleentoutehonnêteté.Jedétesteresterenferméeici.Jedeviensfolle.Ilfronçalessourcils.—Alorsilestpeut-êtretempsquetucessesdeteterrerdansl’appartementetquetusortesunpeu.Tu
n’asaucuneraisond’êtrehonteuseavecmoi,niaveclesautreshommesdeDrake.Noussavonstousqu’ilaétécon.Etriendetoutçan’étaittafaute.Demainmatin,Maddoxetd’autresvontvenirtechercherpourallerfairequelquescourses.—Pourquoi?demanda-t-elle,encoreplustroublée.Jen’aibesoinderien.Ilritdoucementetelleleregarda,ébahie:Silasn’étaitpasunhommequiavaittendanceàrire.Cela
changeaitsestraitsdutoutautout;ilsemblaitplusjeuneetétaittrèsséduisant.—Quiaditqu’ilfallaitavoirbesoindequelquechosepourallerfairedesemplettes?C’estfaitpour
s’amuser,sij’encroislesfemmes.—J’imaginequejepourraiscommencermescoursesdeNoël,songea-t-elle.Mêmesiellesedemandaitcommentelleallaits’ensortir,avecsonapportlimité,maintenantqu’elle
avaitunelisteplussubstantielledepersonnesàquioffrirdescadeaux.Silasne laquittaitpasduregard,commes’il lisaitenellecommedansun livreouvert.Quand ilse
levabrusquementpourallerouvrirletiroiroùelleavaitrangélescartesdecréditetleliquidequ’illuiavaitdonnés,elleserenditcomptequec’étaitexactementcequ’ilavaitfait.Ilavaitludanssespenséescommesielless’affichaientenlettresgéantesau-dessusdesatête.—Tuasoubliétonargentettescartesdecrédit?demanda-t-il.Ellesecoualatête,penaude.—Alorstusaisquetudoist’enservir,insista-t-il.—Cen’estpasfacilepourmoi,Silas,soupira-t-elle.Jedétestel’idéed’êtreunefemmeentretenueet
denerienfaire.L’expressiondeSilasseradoucitetilfermaletiroiravantdeserasseoir.
— Je comprends la fierté, Evangeline. Et je la respecte. Drake a plus d’argent qu’il ne peut endépenserendixvies.Lepeuquetudépenserasneluimanquerapas.Maiss’ilsaitqueturefusesdeteservir de son argent ou de ses cartes de crédit, il ne sera pas content. Il se sent déjà suffisammentcoupablepourcequ’ilt’estarrivécesoir-làetpoursonrôledanscettehistoireatroce.Vas-tuencorelepunirenrefusantleschosesqu’ilveuttedonner?Elleleregardabouchebée.Iln’avaitpastort.Ellen’avaitaucuneenviedepunirDrakedavantage.Ils
avaienttousdeuxsuffisammentsouffert,etellenedésiraitqu’unechose:tournerlapageetoubliercettesoirée.—C’estsiimportantqueçapourlui?demanda-t-elledoucement.—Çaneleseraitpaspourtoi?Siquelqu’unàquitutiensrefusaitd’acceptertoutcequetuluidonnes,
çanetedérangeraitpas?Ellesemorditlalèvreethochalatêtelentement.—JesaisdesourcesûrequeDrakevat’inviteràuneréception,unsoir,bientôt.Tupourraispeut-être
profiterde lasortieshoppingdemainpour t’acheterune robeetdeschaussuresadaptées.Drakeestunpersonnagetrèsimportantdanslescerclesdanslesquelsilévolue,etmêmes’ilpréféreraitsecouperlalangueplutôtquedetedirecommentt’habiller,jeteconnaissuffisammentpoursavoirquetuesfièreetquetuvoudraisqueDrakesoitfierdetoi.Evangelinefittournersesméninges.—Uneréception?Quelleréception?—Jenesaispasquelleinvitationiladécidéd’accepter,réponditSilas.Maisceserapourfairepasser
unmessage.Unmessagequineprêterapasàconfusion.Ilveutquelemondesachequetuesàlui.Alorsmets-les tousKO.Achète une robe canon pour que tous les hommes de l’assemblée soient jaloux deDrake,unerobequiluidonneraenviedetetouchertoutelasoirée.Evangelineéclataderire.—Tuastantconfianceenmoiqueça?UnelueuramuséeilluminaleregardsombredeSilas.—Évidemment.—D’accord.JeneveuxpasfairehonteàDrake.Puis-jecomptersurMaddoxet lesautrespourme
donnerhonnêtementleuravissurunerobeetdeschaussures?—Laisse-moileurenparler.Jeneveuxpasentendredirequetuasrefuséqu’ilst’achètentcedonttu
asbesoin.Compris,Evangeline?Ellesoupira.—Oui,j’aicompris.Bon,onpeutmangeravantquecesoitfroid?Silasluiadressaunregardsanséquivoque:ilsavaitqu’ellechangeaitintentionnellementdesujet.Elle
n’était pas stupide.Oui, Silas avait été très gentil avec elle,mais elle savait très bien que si elle luidésobéissaitoul’énervaitdequelquemanièrequecesoit,elleseretrouveraitentraversdesesgenouxavecsamainsursesfessesenunefractiondeseconde.
Chapitre10
Uneheure après le départ deSilas, dans la salle de bains,Evangeline essayait de se décider entreaccueillirDrakedansunnégligésexyourenonceràtoutvêtementpourl’attendrenuedanslesalon.Depuisqu’elleétaitrevenue,lerituelquotidienvoulantqu’elleattendesonretouravaitétémisdecôté,
etDrakeneluiavaitrienditàcesujet.Ils’étaitmontré,pourtoutdire,extrêmementprudent.Commes’ilavaitpeurdelaperdres’ildisaitunmotoufaisaitungestedetravers.Elleenavaitassez.Laseulefaçondemettrecettehorriblesoiréederrièreeuxpourdebonétaitqueles
choses reviennent à lanormaleaussivitequepossible.Elle étaitprête à faire tout cequi était en sonpouvoir pour lui faire savoir qu’elle n’avait pas l’intention de partir et qu’il ne la perdrait que s’ilchoisissaitdemettrefinàleurrelation.Àcompterdecesoir.Ellepassa lepetitboutdedentelle soyeusequiavait laprétentiondepasserpourunenuisette,puis
décidadenepass’embêter.EllevoulaitlesyeuxdeDrakesurelledèsqu’ilsortiraitdel’ascenseur.Passurcequ’elleporterait.Ellevoulaitluifaireplaisir,maisplusquetout,ellevoulaitleretrouver.Fort,arrogant,complètement
dominateur.Etpuissant.Elle frissonnaenpensant à sesmains sur elle, au claquementducuir sur sapeau.Sabouche sur la
sienne.Sursesseins,entresesjambes.Lesyeuxfermésalorsqu’elles’immergeaitdanssonfantasme,ellelaissalenégligétomberàsespieds
etfitunpasdecôté.Puisellesebrossalescheveuxpourobtenirunematièrebrillantetombantencascadedanssondos.Sachantqu’ellen’avaitplusquequelquesminutesavantl’arrivéedeDrake,elleseprécipitadansle
salonets’agenouillasur le tapisfaceà l’ascenseurpourêtre lapremièrechosequ’ilverraitquandlesportess’ouvriraient.L’excitation lui enflamma la peau, ses sens étaient prêts à s’embraser. Son pouls s’emballa et sa
respirationsefiterratique.Puiselleretintsonsoufflequandlesportesdel’ascenseurs’ouvrirent.Ellelevaavidementlesyeuxpourleregarder.Ellesondasonexpressionàlarecherchededésapprobationoud’unsignequ’elleavaitfaituneerreurenchoisissantdel’accueillirainsi.Quandellevitlefeus’embraserdanssesyeuxàl’instantoùillesposasurelle,lesoufflecoincédans
sapoitrines’échappaenfin.Ellesoupiradesoulagementalorsmêmequ’unefolleexcitations’emparaitd’elle.Drakeavaitattenduavecimpatiencequel’ascenseurarriveaudernierétage.Mêmes’ilétaitpartidu
travailbienplustôtqued’ordinaire,ilavaitl’impressionquecelafaisaituneéternitéqu’ilavaitlaisséEvangelineaulitcematin-là.Ildevenaitdeplusenplusdurdequitterlachaleurdesoncorpschaquejour.Chaquematin,quandilse
réveillait,elleétaitenrouléedemanièrepossessiveautourdelui,latêtenichéedanslecreuxdesonbras,sachevelureétaléesursontorse.Lorsquelesportesdel’ascenseurs’ouvrirent,ileutlesoufflecoupé.Evangeline.
Ellel’attendait.Nue,dansladoucelueurdeslumièresdusalonquilafaisaitbrillercommeunange.Elleétaitàgenouxsurletapisdansunepositiond’asservissement,latêtelégèrementpenchée;maisellesoutenaithardimentsonregard,unelueurdedésirdanslesyeux.Quand il décela l’incertitude qui venait assombrir son regard, il se mit en mouvement. Hors de
question qu’elle ressente une quelconque peur ou incertitude alors qu’elle lui offrait un cadeau siprécieux.Ils’agenouillafaceàellepourprendresonvisageentresesmainsetécraserseslèvressurlessiennes.—C’estcequetouthommerêvedetrouverquandilrentreàlamaison,murmura-t-ilsansquitterses
lèvres.Ellelevatimidementlesyeuxversluiquandilrelâchasabouche.—J’espéraisqueçanetedérangeraitpas.Je…jevoulaisjuste…Ellesetutetbaissalatête,visiblementmalàl’aise.Illaforçaàleregarderdanslesyeux.—Quevoulais-tu,Ange?demanda-t-ildoucement.—Jeteveux,dit-ellesincèrement.Jeveuxqueleschosesredeviennentcommeavant…Ellerougitetdétournadenouveauleregard.—Sachequejetedonneraitoutcequetuveux,Ange.—Jeneveuxquetoi,murmura-t-elle.Commeavant.Tadomination.Sesmotsannihilèrenttoutcontrôleenlui.Uncontrôlequ’iln’avaitpaseuconscienced’exercerdepuis
leretourd’Evangeline.Pourtant,ildevaitbienreconnaîtresaprésence.Ilavaiteupeurdelapoussertropfort, trop loin, tropvite.De laperdre.Etpourtantelleétait là,àgenoux, implorant toutendouceurcequ’ilvoulaittantluidonner.Illasoulevadanssesbraspourlaporterjusquedanslachambre,oùillaposadélicatementsurlelit.
Pendantdelonguessecondes,ilsedressaau-dessusd’elleàcontemplersonsibeaucorps.Etl’invitationtorridedanssesyeux.Ilétaitchezlui.Jamais iln’avait ressentiunechosepareille. Ilnes’était jamaissentichez luinullepart.Jusqu’àce
jour.Grâceàsonange.Peuimportaitoùilshabitaient.Dumomentqu’elleétaitlàtouslesjoursquandilrentrait,ilauraitlasensationd’avoirunvraichez-lui.—Àquoitupenses?demanda-t-elledoucement.—Àlachancequej’ai.Àtabeauté.Quej’aiterriblementenviedetefairel’amour.Lentement,ellesedressasurlesgenouxsurlematelas.—Alorsprends-moi,Drake.Fais-moitienne.Cesoir,jeveuxêtretoutcequetuveux,toutcedonttu
asbesoin.Justepourtoi.Rienquepourtoi.Enproieàuneémotioninconnue,ilfutàcourtdemots,hypnotiséparcettevisionsublimedecellequi
luiappartenait.—Queveux-tucesoir,Drake?luisouffla-t-elleàl’oreille.Les lèvresd’Evangelineeffleurèrent soncou, justeendessousde sonoreille,puiselledescendit le
longdesamâchoirejusqu’àseslèvres.Ilplongeasesdoigtsdanssonépaissechevelurepourl’ancrercontreluietlarespireràchaquesouffle.—Fais-moil’amour,souffla-t-il.Cesoir,jesuisàtoi,faisdemoicequetuveux.Jesuisàtesordres.—Alorsdéshabille-toipourmoi,dit-elled’unevoixdouce.Captivé par la séductrice face à lui, il se plia volontiers à son ordre. Il se départit de sa veste de
costumepuisretirasachemisedesonpantalon.Enquelquessecondes,seschaussuresetchaussettesseretrouvèrentausol,suiviesdeprèsparlerestedesesvêtementsetsous-vêtements.Elleavaitlesyeuxrivéssursonsexeenérectionetilfaillitjouirinstantanémentquandelleseléchales
lèvresenpensantàlasuite.—Jesuistoutàtoi,Ange.Dis-moi,maintenantquetum’as,quevas-tufairedetonhomme?—Parlernefaitpaspartiedemespriorités.Jepensaisplutôttemontrercequej’avaisentête…Illaissaéchapperunrâledesatisfactionquandelledardasalanguepourléchersonglanddéjàhumide.
Ellefittournersalangue,s’attardasursachairsensible,jusqu’àcequ’ilsoitdressé,désireuxdebaisersabouche.Evangelinelepritavidementdanssabouche,sepliantàsarequêtemuette.Sesjouessegonflèrentet
s’aplatirent comme elle exerçait plus de pression et le prenait plus loin dans sa gorge. Il poussa ungrognementdeprotestationquandellelelaissasortirdesabouche.Puisellel’attrapapourletirersurlelit.Il s’allongea et elle l’enfourcha aussitôt. Son pénis était positionné entre les cuisses d’Evangeline,
dressécontrelapeautendredesonventre.Ilposasesmainssurseshanches,enfonçantsesdoigtsdanssachairpourl’inciteràlechevaucher.Ellesedressatelleunedéesseau-dessusdeluipendantqu’elleplaçaitsonglandcontresonsexe.Ils
retinrent tous les deux leur souffle lorsque sa chair se contracta autour de son pénis et commença àl’aspirerplusavant.Elle ferma lesyeuxetagrippasesépaulespourse tenir,puisellese laissaglissersur lui, l’invitant
danssachaleuraccueillante.Son corps l’enveloppait, il sentait chaque centimètre carré de sa peau soyeuse. Ses cheveux lui
chatouillaientlapeauetilpassasamaindanssesmèchesfines,tirantsonvisageàluipourl’embrasser.Leurs langues se rencontrèrent et se battirent en duel, s’affrontant et roulant, léchant, suçant. Ils
respiraient lemêmeair.Drakenegoûtaitetnesentaitplusqu’elle. Jamais iln’avaitconnuplusdoucesensationquelacaressedesonange.Elle sedétachade luiet, tête renverséeenarrière, semitàonduler sauvagement. Il ladévoraitdes
yeux;sesseinsrebondissaientdevantsonvisage,sescheveuxs’agitaientfollementautourdesesépaules,etilsentaitsonétroitessealorsqu’ellesesoulevaitetselaissaitglissersurlui.—Regarde-moi,Ange,dit-ilsèchement.(Elleobéit.)Regarde-moiquandtujouis.Vois-moi.Rienque
moi.Toutenprononçantcesmots,ilrepritlecontrôle:ilattrapaseshanchesetsecambrapourlapénétrer
plusprofondément.Elleplantasesmainssursontorsepourseretenir,doigtsécartés.—Lâche-toi.Donne-moitout.Ellesecontractaviolemmentautourde luiet soncorps toutentier frémit.Uncri luiéchappaetelle
n’eutbientôtpluslaforcedesupportersonproprepoids:elles’écroulasurluialorsqu’ilsevidaitenelle.Elle se pelotonna tout contre lui, parfaitement détendue. Il enroula ses bras autour d’elle, l’ancrant
contresontorse,etenfouitsonvisagedanssescheveux.—Jenesaispascequej’aifaitpourtemériter,Evangeline,maisjenetelaisseraiplusjamaispartir.Ellerestalonguementsansbouger,leurscorpstoujoursintimementunis,avantdereleverlatêtepourle
regarder.—Jet’aipréparéàdîner,dit-elletimidement.Tuveuxmangeraulitoudanslacuisine?LecœurdeDrakepalpitaétrangementdanssapoitrine,etilfutincapablederépondresur-le-champ.—Ilestencoretôt,finit-ilpardireauboutdequelquesinstants.Habillons-nousetmangeonsdansla
cuisine.Ensuite,onpeutregarderunfilmdanslesalon.—Çamesembleparfait,dit-elleavecunsourire.Illuidonnaunetapeaffectueusesurlesfessespuisroulasurlecôté,l’entraînantaveclui.
—Prendsunedoucheavecmoipuisjet’aideraiàmettrelatable.—Hmm,cen’estpasunedécisionfacile,plaisanta-t-elle.Tumegâtestellement,Drake.Ilredevintsérieuxetécartaunemèchedecheveuxdesajoue.—Passuffisamment,Ange.Vraimentpassuffisamment.
Chapitre11
EvangelineétaitassiseenfacedeDrakeàl’îlotdelacuisine,etl’observaitdégusteravecplaisirledînerqu’elleavaitpréparé.Elleavait rougi,malà l’aise,quand ilavait louéseseffortsaveceffusionaprèsavoirgoûtéchacundesplats.Quandelleavaitessayédebalayersescomplimentsenexpliquantquecen’étaitqu’unsimplerepas,
composédepouletrôti,rizauxherbes,gratindepommesdeterreetlégumes,ill’avaitréprimandée:iln’yavaitriendesimpleàcequ’elleaitcuisinéunmerveilleuxrepaspourlui.Dans ces moments-là, Evangeline osait s’aventurer en territoire inconnu et rêvait de cuisiner pour
Draketouslessoirs.Qu’ilsoitaccueilliparlesfumetsd’unrepasfaitmaisonetqu’elleluifassegoûterdenouvellesrecettes.Ilétaitvaindesedirequ’elledevaitvivredansl’instantetnepassefairedumalensupposantqu’elle
avaitunavenir.Ellevivaitunrêveéveillé,etelleétaitdéterminéeàenprofiterafindepouvoirchérircessouvenirssiunjourDrakenevoulaitplusd’elle,carceseraittoutcequ’illuiresterait.—Silasm’aditqueMaddoxm’emmèneraitfairedushoppingdemain,ditEvangelineaveclégèreté.Il
a parlé d’une réception à laquelle tu voulaism’emmener etm’a dit que je devrais acheter une tenueadaptée à l’événement.Mais il ne savait paspour lequel tu t’étais décidé, donc il n’apas sumedireexactementcequiseraitleplusapproprié.Drakeclignadesyeux,pensif.Puisilattrapalaserviettequ’ilavaitabandonnéeenarrivant.Ilensortit
troiscartonsd’invitation,tousadressésàluipersonnellement,etlesposasurlebarpourqu’Evangelinepuisselesconsulter.—J’airéduitlechoixàtroispossibilités,dit-il.Jepensaistelaisserchoisircelleoùtupréfèresaller.Evangelinepritlesinvitationsjolimentcalligraphiéesetleslutavecattention.—Jeporteraiunsmokingnoir,doncn’hésitepasàachetercequiiraselontoiavecmatenue.Evangelinemontralecartonannonçantunesoiréequiseraituncoupd’envoidelasaisondesfêtesà
CarnegieHall.—J’adorelesfêtes,dit-elleavecunecertainemélancolie.C’estpourquoiexactement,celui-là?Drakejetauncoupd’œilàl’invitationavantdelaluirendre.—C’estungaladebienfaisancepourleNYPD.Lesrecettesserontreverséesàuneassociationpour
lesveuvesetenfantsdepolicierstuésdansl’exercicedeleursfonctions,ainsiqu’àuneautreassociationqui apporte une aide financière aux agents blessés en service et à leurs familles, le temps qu’ils serétablissentetreprennentleursfonctions.Ellelevalesyeuxverslui,surprise.—Tufaisdesdonsàcesdeuxassociations?Son cœur fit un bond : il lui offrait l’occasion parfaite de lui poser les questions qu’elle s’était
jusqu’alorsabstenued’aborder.Àprésentquel’occasionseprésentait,elleétaitnerveuse,redoutantsesréponses.Ilhochalatêted’unairdétaché.—Je faisdesdons àun certainnombrede causes locales. J’ai touteune équipequi supervisemes
fonds et les associations auxquelles donner. Elle s’assure qu’elles sont légales et que les fonds sontdistribuéscommeannoncé.
—Tuvassouventàcesréceptionsoutunefaisquesignerunchèque?demanda-t-elle.Drakeeutl’airmomentanémentmalàl’aise.— J’y vais rarement. Je laisse mon personnel s’occuper des demandes de dons et j’ai monté une
structured’oùprovientl’argent.—Maisj’imaginequetoutlemondesaitquetuespropriétairedecettestructure?insistaEvangeline.
Sinon,pourquoit’inviteraient-ilspersonnellement?Elleretournachaquecartonpourfaireapparaîtrelenometl’adressedeDrake.Ilhochalatête.—Alorspourquoiyvas-tu,ouplutôt,pourquoiyallons-nous,sicen’estpasdansteshabitudes?—Jeveuxqu’ontevoieàmonbras,dit-il,possessif.Jepréfèreteprévenir,Ange.Touslesregards
serontbraquéssurnous.Primo, jememontrerarementàcesréceptions,etsecundo, jen’yvais jamaisavecunefemmeàmonbras.Tuvasfairesensation.Elleécarquillalesyeux,paniquée.— Je ne veux pas que tu t’inquiètes. Mes hommes viendront avec nous et nous protégeront en
permanence.Personnenepourrat’atteindre.Personneneteparleraàmoinsquejenel’inviteàlefaire.C’était l’occasion rêvée.Elleavait laquestion sur leboutde la langue ;pourtant, elle semordit la
lèvre,nevoulantpasgâcherunesoiréesiintime,siparfaite.—Ange,quelquechosetegêne?demandaDrake,quiladévisageait.Ellefermalesyeuxuninstantets’humectaleslèvres.—C’esttrèsdangereux,cequetufais?murmura-t-elle.Lasécuritéétaitdéjàrenforcéeavant…quand
nousnoussommesrencontrésjeveuxdire.Etmaintenant,depuiscettesoirée…Elledéglutit,etavantdeperdretoutsoncourage,elleselança.—Tuasditquetuavaisfaitcequetuasfaitcesoir-làpourmeprotéger.Parcequeselontoi,cela
m’auraitmiseendangersiquelqu’unsavaitcequejereprésentaispourtoi.Etmaintenant,tuaschangéd’avis,ettuveuxquetoutlemondesoitaucourantdenotreunion.Tuprétendsqueceseralemeilleurmoyend’assurermasécurité.Quesitoutlemondesaitàquelpointjecomptepourtoi,personnen’oseramefairedumal.Etpourtant, tuas triplé ledispositifdesécurité. Jenepeuxpasquitter l’appartementsans une armée d’hommes à mes côtés. Qu’est-ce que tu fais dans la vie, Drake ? Je sais que tu espropriétaire d’un club et d’un immeuble entier àManhattan, que tu loues demanière sélective à desentreprises.Tueségalementpropriétairedecetimmeuble,non?demanda-t-ellenonsanshésitation.Ilhochabrièvementlatête.—Cela n’explique pas pourquoi tu as besoin d’autant d’agents de sécurité.Que fais-tu d’autre, au
juste?Elleétaitnerveuse.Leregardqu’ilposasurelleétaitlourdd’avertissements.—Neposepasdequestionssitun’espasprêteàentendrelesréponses,Ange.Tun’aspasbesoinde
tesoucierdecequejefaisnidesavoiravecquijetravaille.Celanet’affecterajamais.Toutcesurquoitudoisteconcentrer,c’estmefaireplaisiret,enretour,jetegâteraietmettrailemondeàtespieds.Elleouvritlabouchepourrépondre,maisiltenditlamainpar-dessusl’îlotpourlaposersurlasienne.—Oublie,Ange.Tupeuxfaireçapourmoi?Ilavaitpresque l’air…vulnérable. Ilyavaitdanssesyeuxunappelqui la touchaitauplusprofond
d’elle-même.—Oui,Drake.Jepeuxfaireçapourtoi.Àcetinstant,ellecompritlaportéedeladécisionqu’ellevenaitdeprendre.Elleauraitdûsesentir
coupable. Elle n’avait pas été élevée ainsi, et pourtant elle ne ressentit que soulagement en voyantl’approbationdanslesyeuxdeDrake.Ilétaitheureuxqu’ellenelechâtiepaspourlesréponsesqu’ilne
pouvaitluidonner.Ilselevaetfitletourdelatablepourlaprendredanssesbras.Ilposaseslèvressurlessiennesdans
leplusdouxdesbaisers.—Alorsj’emmènemonangeàCarnegieHall?demanda-t-ilenpressantseslèvrescontresonfront.Ellesourit.—Çameferaitplaisir,Drake.Etc’estpourunebonnecause.Illuirenditsonsourire.Puisillasoulevaetlaportadanslachambre.—Danscecas, je feraiundon importanten tonnomenplusdecelui faitparmonorganisation.Tu
serastrèsdemandée,Ange.Ilsvonttoussebattrepouravoirtonattention.EllegloussapendantqueDrakelalâchaitsurlelit.—Jen’yseraispaspourgrand-chose,dit-elle.C’esttonargentquilesintéresse.Ill’embrassaavectendresse.—C’est làque tuas tort,Ange.Personnenepeut resterplusdequelquessecondesprèsde toisans
tomberamoureux.Tousmeshommessontdéjààtespieds.—Etsijenevoulaisqu’unseulhommeàmespieds?souffla-t-elle.LesyeuxdeDrakes’embrasèrent,etilladéshabilladesesmainsdoucesetaimantes.—Jepensequ’onpeutdirequ’ilestdéjààtespieds,etpasseulement…Puis il lui fit l’amour, longuement, avec tendresse.Encore et encore, jusqu’auxpremières lueurs de
l’aube,ill’emmenaauseptièmecieletellesutsansl’ombred’undoutequequoiqu’ilarrive,elleavaitprislabonnedécisionenneforçantpasDrakeàrépondre.Peut-êtrecelascellait-ilsondestinetpeut-êtreplongerait-elleavecluilemomentvenu,maisellene
pouvaitserésoudreàregretterunseulinstantdutempspasséavecDrake.Illuiavaitpromisqu’illaprotégeraitaupérildesavie.Queseshommeslaprotégeraientaupérilde
leursviesetqu’aucunedesestransactionsd’affairesnel’affecterait.Etellelecroyait.Parcequ’ellel’aimait.
Chapitre12
Seréveillantdoucement,Evangelineserenditcomptequ’elleétaitaffaléesurDrake,totalementnue,etplus faibleque jamais tant il lui avait fait l’amourpendant lanuit.Ellepoussaun soupird’aiseet, enréponse,ilfitglissersamainlelongdesacolonnevertébrale,puissursonbras.—Monangevabien?Ellefrottasonvisagecontresontorse.Elleauraitronronnésiellel’avaitpu.—Mmm-hmm.LeriredeDrakefitvibrersontorsecontresajoue,puisill’embrassatendrement.—Ilfautquej’ailleàladouche,bébé.Jesuisenretard,etj’aiuneréunionimportante.Maddoxm’a
déjàappelépourmedirequ’ilseralàdansuneheurepourt’emmenerfairelesboutiques.—J’adoremeréveillerprèsdetoi,murmura-t-elle.—Jem’enréjouis,puisqueçavaêtrelecastouslesjours,dit-ilenluipinçantaffectueusementlenez.Ilseredressamaisl’invitaàsemettreàl’aisesouslescouvertures,qu’iltirasurelle.Illaregardaun
instantet,àlasurprised’Evangeline,ileutl’airgêné.Puisellecompritqu’ilessayaitdeluidirequelquechose.—Quepenserais-tudefairevenir tesparentspourThanksgiving?demanda-t-ilàvoixbasse.Ça te
feraitplaisir?Tupensesqu’ilsenseraientheureux?Elles’assitsubitementdanslelit,bouchebée.Puisellesejetaàsoncouencriantdejoie,siexcitée
qu’ellelefitbasculersurlematelas.Illaserracontreluienriantalorsqu’ellelecouvraitdebaisers.—C’estun«oui»?demanda-t-ilentredeuxbisous.—OhmonDieu,oui!Oui,oui,oui!Oh,Drake,tuessérieux?Elleleregarda,priantensilencequ’illesoit.— Je n’oserais pas plaisanter sur un sujet si important pour toi, répliqua-t-il. Ils temanquent. Ton
visages’illuminequand ilsappellent,et tues tristequandtuparlesd’eux.J’ai lesmoyensde les fairevenir tevoir, et jene seraispasunhommesi jene faisaispas toutcequiest enmonpouvoirpour terendreheureuse.—Oh,Drake.Tuessimerveilleux,dit-elle,auborddeslarmes.Jenesaispascommentteremercier.
Tunesaispascequeçareprésentepourmoidelesrevoir.Tuasdéjàtantfaitpoureux,etvoilàquetulesfaisvenir.Elleneputplustenir:leslarmesroulèrentsursesjoues.Drakelesessuyaavecdouceuretl’attiradans
sesbras,laberçantcontresontorse.—Jeveuxrencontrerceuxquicomptenttantpourtoiquetuasmistoutetavieentreparenthèsespour
lesaider.Ilsdoiventt’êtretrèschers.Etcommetum’eschère,jepensequetesparentsetmoiauronsaumoinsunechoseencommun.Elle enfouit son visage contre son torse pour étouffer ses sanglots ; mais ses épaules tremblaient,
trahissantsonémotion.ElleenroulasesbrasautourducoudeDrake.—Tuesl’hommeleplusmerveilleuxdumonde,DrakeDonovan,sanglota-t-elle.—Non,contra-t-ild’unevoixdure.Nel’oubliejamais,Ange.Jenesuispasunhommebien.Jesuis
égoïsteetpossessifetjeferaicequ’ilfautpourterendreheureusepourqueturestesavecmoi.Celanefaitpasdemoiquelqu’undebien.Celafaitdemoiunsalaudintéressé.
Elleluisouritàtraversseslarmes.Sesmanièresbourruesnelatrompaientpas.—Oh, j’ai hâte de leur annoncer la nouvelle !On peut les appeler ce soir quand tu rentreras à la
maison?Sonenthousiasmelefitsourire.Ill’embrassaunenouvellefoisavantdelaborderdanslelit.—Profitedetajournéeshopping.Jet’emmènedînercesoir,etensuiteonappelleratesparents,situ
veux.Jevaisprendredesdispositionspourleurtransportjusqu’àl’aéroportetlesferaivenirdansmonavion.JeleurréserveraiunechambresurTimesSquare,saufsitupréfèresqu’ilslogenticiavecnous?Illaregardad’unairinterrogateur,etellepritconsciencedecequ’ilfaisaitpourelle.Iln’avaitaucune
enviequedeuxétrangersenvahissentsonintimité,etpourtantildonnaitdesapersonnepourleuroffrir,àelleetàsesparents,unThanksgivingmémorable.— Je pense qu’ils adoreraient loger à Times Square, répondit Evangeline avec détachement. Nous
pouvons toujours les inviter à dîner et je pourrai passer la journée avec eux pendant que tu seras autravail.Drakeparutsoulagé.Ill’embrassaunedernièrefoisavantd’allersedoucher.—Jevaistoutarranger.Jeneregarderaipasàladépensepourm’assurerdeleurconfortabsolu.Evangelineselaissatombersurl’oreilleretfermalesyeux,profitantdel’instant.Toutétaitabsolument
parfait.Elleavaitleslarmesauxyeuxàlaperspectivedevoirsesparentspourlapremièrefoisdepuisdeuxlonguesannées.IlsallaientadorerDrake.Commentpouvait-ilenêtreautrementalorsqu’ildéployaitautantd’efforts
pourrendreleurfilleheureuse?Elle serra sesbrasautourde soncorpset s’assoupit.Drake la réveillad’unbaiserpour luidireau
revoiretl’informerqueMaddoxarriveraitunedemi-heureplustard.Commeelle se redressait pourpasserunbras autourde son cou et l’embrasser, le drapglissa à sa
taille.—Ah,Ange,tumedonnestellementenviederesteràlamaisonetd’envoyerletravailaudiable,dit-
il,dépité.—Merciinfiniment,Drake.C’estleplusbeaucadeauqu’onm’aitfait.—Tuasjusqu’àcesoirpourréfléchiràdesmanièrescréativesd’exprimertagratitude,lataquina-t-il.Elleplissalesyeuxetluiadressaunsouriremalicieux.—Oh,necroispasquejeneseraipastrès,trèscréative.— J’ai hâte, murmura-t-il avec un dernier baiser, avant de lui donner une tape affectueuse sur le
derrière.TuferaismieuxdesortirdulitpourqueMaddoxnevoiepascequemoiseulailedroitdevoir.—Commesituavaisdusouciàtefairesurcepoint,dit-elleenlevantlesyeuxauciel.—Tunecroispasquetousleshommesquitravaillentpourmoiseraientprêtsàtoutpourtevoirtoute
nue?s’étonna-t-il.Ellegrognaetenfouitsonvisagedansl’oreiller.—Bonsang,Drake.Arrête!Jenepourraipluslesregarderenfacemaintenant.Avecunpetitrire,ilquittalachambreavecundernieraurevoir.Evangelinerestaallongéequelquesinstants,àsavourersonenthousiasme.Ilfallaitqu’elleserendeà
l’évidence : elle était amoureuse deDrake.Avec du recul, elle se rendit compte qu’elle était tombéeamoureusedeluidèslepremiersoir.C’estpourquoielleavaitétésidévastéequandellel’avaitquitté.Refusantdepasserunesecondedeplusàrevivrelasoiréelaplusatrocedesavie,elleseglissahors
dulitetpritunedoucherapide.Elles’habillademanièredécontractée,enjeanetpulllâche,etsebrossarapidementlescheveux.Puiselleserenditcomptequ’elleétaitaffamée,aprèsavoirpassélanuitentièreàfairel’amouravec
Drake.Avecunpeudechance,Maddoxet celuiqui l’accompagnait envirée shoppingne seraientpaspressés.Oupeut-êtrepourrait-ellelesacheteravecunpetitdéjeuner.Certaine qu’elle pourrait les amadouer avec un petit déjeuner fait maison, elle rassembla les
ingrédientset,quelquesminutesplustardàpeine,ellemaniaitpoêlesetcasseroles.Quinzeminutesplustard,EdwardsonnapourluifairesavoirqueMaddoxétaitentraindemonter.Peu
detempsaprès,Maddoxpassalatêteparlaportedelacuisine.—Jet’ensupplie,dis-moiqu’ilyenaassezpourmoi,lançaMaddoxengrognant.—Oublie-le,ditJusticeenpoussantMaddoxpourpasser.Jet’aimeplusquelui,doncc’estmoiqu’il
fautnourrir.Evangelineéclataderire,amusée.—Asseyez-vous.Touslesdeux.Vousêtestoutseuls?—JaxetHartleymontentlagardeenbas,l’informaMaddox.—Nousavonsletempsdemanger?demanda-t-elleavecinquiétude.—Chérie,situenasfaitassezpournous,tupeuxprendretoutletempsquetuveux,déclaraJustice.Ellesourit.—Donnez-moicinqminutesetjevoussers.Lesdeuxhommess’assirentsurdestabourets,l’airsiimpatientqu’elleneputs’empêcherderire.Elle
servit lesomelettes, lesgalettesdepommede terre, le jambonet lebaconfrit.Puiselleouvrit le fourpourjeterunœilauxbiscuitsfaitsmaisonetdécidaquelacuissonétaitparfaite.Ellelestiradufouravantd’enmettreplusieursdanslesassiettesdeJusticeetMaddox.Puiselleplaça
lesassiettesdevanteux.Leurréactionlafitsourire.—Jesuismortetjesuisauparadis,soufflaMaddox.Evangelines’installasuruntabouretenfacedeluietpicorasonrepas.C’étaitlapremièrefoisqu’elle
revoyait Maddox depuis la fameuse soirée. Avait-il eu des ennuis parce qu’elle l’avait semé àl’appartementdesesamies?Soudain, elle n’avait plus si faim.Elle poussa sa nourriture dans son assiette avec sa fourchette en
attendantquelesdeuxhommesaientfini.—Evangeline,qu’est-cequinevapas?demandaMaddoxàvoixbasse.Ellesursauta,surpriseparsaperspicacité.EllejetaunbrefregardàJustice,gênéeàl’idéed’aborder
lesujetdevantlui.Quellenefutpassasurprisequandilselevapourallerposersonassiettevidedansl’évier,avantd’allerd’unpasnonchalantdanslesalon,disantqu’illesyattendrait!EllejetaunregardnerveuxàMaddox,espérantqu’ilaccepteraitson«rien»pourtouteréponse.Manqué.Il lui fit les gros yeux avant de contourner l’îlot pour la rejoindre et prendre samain. Il fronça les
sourcilsensentantcombienelletremblait.—Qu’est-cequitedérange?—Jesuisdésolée,souffla-t-elle.Ellebaissalatête,incapabledesoutenirsonregard.—Pourquoi,putain?Sonexplosiondecolère la fit tressaillir, et elle essayadedégager samainde la sienne.Mais il la
serraplusfortencore,avantdetouchertendrementsajouepourlaforceràleverlesyeuxverslui.—Evangeline?Pourquoiaurais-tuàêtredésolée?Ilyavaitundésarroietunétonnementsincèresdanssontonetsonexpression.Elleavaitlevisageenfeuets’envoulaitd’avoirabordélesujetalorsquecen’étaitmanifestementpas
lapeine.
Elleinspiraprofondémentetseconcentrasurunpointau-dessusdesonépauledroite.—Jesuisdésoléed’êtrepartieendoucecommejel’aifaitcesoir-là,murmura-t-elle.J’espèrequetu
mepardonnerasetquetun’aspaseud’ennuisàcausedecequej’aifait.Ilfutbouchebéedestupéfaction;puissonregardsefitorageux.Elleserecroquevilla,maisilpénétra
davantagesonespacepersonnelenposantsesdeuxmainssursesépaules.—Regarde-moi,Evangeline,ordonna-t-ild’untonféroce.Ilattenditqu’ellecroisesonregardetsesyeuxs’adoucirent.—Tun’asbesoindet’excuserpourrien,putaindemerde.Dis-moiquetunem’aspasévité toutce
tempsparcequetuavaispeurquejesoisencolèrecontretoi.Ellehaussalesépaules.—Jenesavaispastrop.C’étaithorrible.J’aimeraisquecettesoiréen’aitjamaisexisté.Àsonplusgranddésarroi,dechaudes larmessemirentàroulersurses joues.Maddoxencadrason
visagedesesdeuxmainspourchasserleslarmes.—Écoute-moi,mabelle.Personne,pasund’entrenous,n’estencolèrecontretoi.Nousétionsfurieux
contreDrake pour ce qu’il a fait,même si nous comprenons ses raisons.Mais jamais cela ne t’a faitbaisserdansnotreestime.Tuneméritaisabsolumentpascequ’ils’estpassécettenuit-là,etpersonnenelesaitmieuxqueDrake.Ilaétéinsupportablejusqu’aujouroùilt’aretrouvéeett’aramenéeàlamaison.Mais,écoute-moi,mabelle.S’iln’étaitpaspartiàtarecherche,s’iln’avaitpasdécidéderesserrerlesrangsautourdetoi,alorsl’und’entrenousl’auraitfait.Tucomprends?Nousnelaisseronsjamaisrient’arriver.Elleétaitsouslechoc.—Mais,Maddox,tumeconnaisàpeine!JenevauxpaslapeinequetugâchestarelationavecDrake.—Conneries,dit-ilgrossièrement.TuestoutpourDrake,maispasseulement.Tuesimportantepour
nous.Tuesimportantepourmoi.Jen’aijamaiseudesœur,etjementiraissijedisaisquejenetevoisque comme une petite sœur, car je suis presque sûr que mes pensées ne pourraient être considéréescommefraternellesetjedoutequ’ellessoientlégalesentrefrèresetsœurs.Maissij’avaiseuunepetitesœur,j’aimeàpenserqu’elleauraitétécommetoi.Evangelinepleuraitàchaudeslarmes.EllesejetaaucoudeMaddox.—Merci,murmura-t-elled’unevoixétranglée.Tunesaispascequeçareprésentepourmoi.Jen’ai
jamaiseupersonned’autredansmaviequemesparentsetmesamies,etmaintenant…ehbien,jelesaiperdues.Seslèvressemirentàtremblerlorsqu’elleprononçacesmots.—Tunousas,nous,Evangeline,ditMaddoxavecdouceur.Et je suispresquesûrqueSilasa réglé
toutescesconneriesquit’occupaientl’esprithier.Illaregardaitdroitdanslesyeuxetellerougitdeplusbelle.—Tusaiscequ’ilm’adit?laissa-t-elleéchapper.Ilpartitd’unpetitrire.—Paslesmotsexacts,ilnenousapasrejouélascène.Cen’estpaslestyledeSilas.Jecroisqueses
motsexactsontété :«Jevais luidirequequellesquesoient lesconneriesqu’ellesepasseenboucledanslatête,cenesont,justement,quedesconneries.»Evangelinegrognaplaintivement.—Ila raison,bébé,ditMaddox.Tucroyaisdurcommeferàdesconneriesetcen’estpasbien.Je
veuxquenouspassionsunaccord:tuarrêtesdecroireàtoutça.Compris?Ellesoupira.—Oui,c’estcompris.
Illuisourit,satisfait.—Jeteretrouveenfin.Bon,tuesprêteàallerfairelesboutiques?—OhmonDieu,dit-elle,paniquéesoudain.Jenesaispasdutoutcequejesuiscenséeacheter!Drake
m’emmèneàungaladebienfaisancedelapoliceàCarnegieHall.Iladitqu’ilporteraitunsmokingnoiretquejepouvaisportercequejeveux,maisjeneveuxpasmeplanter,Maddox,dit-elleenl’implorantduregard.Ilnevajamaisàcesréceptions,ilmel’aditlui-même.Maislà,nonseulementilveutyaller,maisilveutquejevienneaveclui.Etsijeluifaisaishonte?—Holà,mabelle,ditMaddox.Primo,tuneluiferasjamaishonte.Drakesefoutdecequelesautres
pensentde lui,etcrois-moi, siquelqu’unessayaitdediredumalde toiensaprésence, il réduiraitcesalaudenpiècesàmainsnues.S’ilpeutl’atteindreavantmoi,biensûr.Secundo,ilsetrouvequej’aitrèsbongoûtenmatièredemodeféminineetjesaiscequivaàunebellefemmecommetoi.Jenetelaisseraipasacheterquoiquecesoitquinetefassepasresplendir.D’accord?Elleleserradenouveaudanssesbras.—Tueslemeilleur,Maddox.Jen’aijamaiseudefrère,maissij’enavaisun,jevoudraisqu’ilsoit
commetoi.Ill’embrassasurlesommetducrâneetpassasamaindanssondos.—Ah,Evangeline,tumetues.TuétaiscenséedirequesiDrakesortaitdetavieunjour,tunepourrais
plusmequitter.Elleéclataderireetluidonnauncoupdepoingamicaldansleventre.—Onvafairelesboutiquesouonpasselamatinéeàpapoter?criaJusticedepuislesalon.—Je crois qu’il faut qu’ony aille,marmonnaMaddox.Prends unmanteau, d’accord ? Il fait froid
dehorsaujourd’hui.Evangeline se précipita dans l’entrée pour prendre unmanteau dans le placard près de l’ascenseur.
Justiceleluipritdesmainsetleluitenditpourqu’ellepuisseglissersesbrasdanslesmanches,lorsquel’interphonesonna.EllefronçalessourcilsetsetournaversMaddoxetJustice.—Vousattendezquelqu’und’autre?—J’imaginequeçaveutdirequetun’attendspersonne?demandaMaddox,sursesgardes.Ellesecoualatêteetappuyasurleboutonpourrépondre.—Evangeline,vousavezdelavisite,ditEdward.—Quiest-ce?demandaEvangelineavecunregardnerveuxendirectiondeMaddox.—Elless’appellentLana,Nikki,etSteph,réponditEdward,deplusenplusmalàl’aise.Ellesdisent
êtrevosamies.Dois-jelesfairemonter,ouleurdirequevousn’êtespasdisponiblepourlemoment?Ellen’enrevenaitpas.Souslechoc,ellesetournaversMaddox,lesuppliantduregarddeluidirece
qu’elledevaitfaire.Lafureurselisaitsursonvisage.—Cesonttesanciennesamies?cracha-t-il.Ellehochalatêtesansunmot.Quefaisaient-ellesici?Lanaluiavaitclairementfaitcomprendreque
Stephn’étaitpaslaseuleàenvouloiràEvangeline.—Tuveux lesvoir,Evangeline?demanda Justice avecdouceur.Si tun’enaspas envie,dis-le, et
Maddoxetmoitedébarrasseronsd’elles.Tuneseraspasobligéedelesvoir.Jetelejure.Ellesetorditlesdoigtsavecnervosité.—Jenesaispas,murmura-t-elle.—C’esttadécision,renchéritMaddox.Justiceetmoiseronslà.Tun’auraspasàlesaffronterseule.
Nouspouvonsnousdébarrasserd’ellesàtoutmoment.Tun’asqu’àledire,etnousleferons.Elledéglutitpéniblement,appuyadenouveausurleboutonethésita,cherchantMaddoxduregardpour
serassurer.Puiselledit:—Faites-lesmonter,Edward.Maddoxjuraetattrapalamaind’Evangeline.—Jen’aimepastevoirsipâle,sieffrayéeparcesgarces,mabelle.Vat’asseoirdanslesalonetmets-
toiàl’aise.Justiceetmoiallonsavoirunepetitediscussionavecelles.—Neleurfaitespaspeur,souffla-t-elle.—Commeellestefontpeur,tuveuxdire?ditJusticesansménagement.Tuneleurdoisrienaprèsce
qu’ellest’ontfait.Ellesemorditlalèvreetserenditdanslesalon,penaude.EllelaissaMaddoxl’aideràs’installerdans
undesfauteuils,puisill’attrapaparlesépaulesetlaregardadanslesyeux.—Ellestedisentunmotdetraversetellesdégagentavecl’instructiondenejamaisrevenir.Elle hocha la tête, puis noua fermement ses mains sur ses genoux en essayant de se calmer pour
l’affrontementquil’attendait.Maddoxs’éloignaetelleguettanerveusementlebruitdel’ascenseur.Quelquesinstantsplustard,elle
l’entenditarriver,puiselleentenditJusticeetMaddoxéchangeràvoixbasse,maisellen’arrivaitpasàdistinguercequ’ilsdisaient.Bientôt,elleneputplussupporterd’attendreetelleselevad’unbondpoursetournerversl’entrée,oùsesamies,bouchebée,fixaientJusticeetMaddox,quiavaientdesexpressionssinistressurlevisage.—Evangeline?ditStephens’approchant.Lesdeuxfemmessedévisagèrentlonguement,puisStephpoussauncrietcourutversEvangeline.Une
secondeplustard,celle-ciseretrouvaitdanslesbrasdeSteph,quisanglotaitsursonépaule.— Je suis désolée, Vangie, répéta-t-elle en boucle. J’ai été une vraie garce avec toi. Je t’en prie,
pardonne-moi.PuisLanaetNikkisejoignirentàl’embrassade.Sesamiesl’étreignirentetpleurèrentsursonépaule.
Déroutée,EvangelineregardaJusticeetMaddoxpar-dessuslesépaulesdesesamies,pourlesappeleràl’aide.Maddox finit par intervenir, et prit Nikki et Lana par le bras tandis que Justice s’occupait deSteph,etlesdeuxhommesemmenèrentlestroisfemmesdanslesalonpourlesasseoir.—Onne te laisse pas seule,ma belle, ne t’inquiète pas, ditMaddox à voix basse en passant près
d’Evangelinepourretourneràlacuisine.Justiceétaitdeboutaumilieudusalon,lesbrascroiséssursonlargetorse,remplissantàmerveilleson
rôledegardeducorps,tandisqueMaddoxjouaitàl’hôteparfaitetservaitàboireàtoutlemonde.Puisils’assitjusteàcôtéd’Evangelineetdardasonregardsurlesfemmesdanslesalon.—Evangeline?murmuraLana.Ques’est-ilpasséavecDrake?Tuestoujoursaveclui?Quisontces
hommes?—NoustravaillonspourDrake,ditJustice.Etbiensûrqu’elleestencoreaveclui.—Oh,lâchaNikki,lesyeuxgrandscommedessoucoupes.C’estjustequenousétionsinquiètes.Ilest
venutechercherlelendemaindetonappeletilaparléàLana.Ilétaittrèsencolèrecontrenous.Maisnousnesavionspascequ’ils’étaitpassé.Nousl’ignoronstoujours,etnousvoulionsvenirnousexcuserenpersonne.Nousavonsétéhorriblesavectoi,dit-elle,lavoixbriséealorsqu’unelarmeroulaitsursajoue.— Peux-tu nous pardonner, Vangie ? implora Steph. J’ai été la pire de toutes et je suis vraiment
désolée.Tusaisquejet’aimeetquej’avaisjustepeurqu’onprofitedetoi.—C’estmarrant,c’estaussimoninquiétude,ditMaddoxd’unevoixdurecommel’acier.Lana,NikkietStephconsidérèrentMaddoxaveccirconspection.PuisStephsetournaversEvangeline,
etsavoixdevintunesupplique.
—Tunecroispasqu’onessaiedeprofiterdetoi,Vangie?Jet’enprie,dis-moiquetunelepensespas.Evangelinesecoualatête,confuse.—Jenesaispasquoipenser,répondit-elleentoutehonnêteté.Maddoxpassasonbrasautourd’elleensignedesoutien.Elleleregardaavecreconnaissance.—Quefaites-vousici?demandaEvangelinedansunmurmure.Pourquoinepasêtrevenuesplustôt?
Quandj’avaisb-besoindevous.Savoixsebrisaetellesetut,refusantdefondreenlarmes.EllesentaitlacolèredeMaddox,maiselle
posasamainsursacuissepourl’empêcherdemettresesamiesdehors.LanabonditducanapépoursemettreàgenouxdevantEvangeline.Elleenroulasesmainsautourdes
siennesetlaregardad’unairimplorant.—Noust’aimons,Vangie.Nousavonsfaituneerreur.Nousétionsinquiètespourtoietvexéesquetu
nenousécoutespas,maiscelanenousdonnaitpasledroitdenouscomportercommenousl’avonsfait.Tudemandessinousprofitonsdetoimaintenant.Etlaréponseestnon,maisavant,nousteconsidérionscommeacquise.Voilànotrepéché,mabelle.Tupeuxnouspardonner?Peut-onrepartirdezéro?—Oh,Lana,ditEvangelineensepenchantpourétreindrelajeunefemme.Biensûrquenouspouvons
prendreunnouveaudépart.Jevousaimetoujoursdetoutmoncœur,etvousm’avezterriblementmanqué.Puis soudain, Nikki et Steph se précipitèrent et les quatre femmes s’étreignirent et s’excusèrent.
Pendantuneheure,ellesbavardèrent,lesfillesracontèrentàEvangelinelesdernièresnouvellesdubaroùelleavaittravailléavecellespendantsilongtemps.Sachant qu’elle avait certainement déjà dépassé les limites de la patience de Justice et Maddox,
Evangelines’excusaauprèsdesesamiesendisantqu’elleétaitenretardpourunrendez-vousetqu’ellespouvaientreveniruneautrefois.JusticelesraccompagnaenbastandisqueMaddoxrestaitavecEvangeline.Dèsqu’ellesfurentparties,
elleselaissatombersursonfauteuil.Elleavaitl’impressiond’êtrepasséesousunsemi-remorque.—Çava,bébé?demandaMaddox.Çafaisaitbeaucoupd’uncoup.—Mercid’avoirétélà.Jenesaispascommentjem’enseraissortiesij’avaisétéseule.Ellepassaitpourunepetitechoseimpuissante,maiselleétaittropreconnaissantedenepasavoirété
seulepoursesoucierdesapparences.—Promets-moiquetuneleslaisseraspasentreràmoinsqu’ilyaitquelqu’unavectoi,ditsèchement
Maddox.Evangelineleregardaaveccirconspection.Ilsoupira.—Tuestropdouceetconfiante,majolie.Jetrouveletimingdeleurvenueunpeususpect.Siellesse
sont renseignées surDrake, cequi est probable, elles saventque tu as trouvéunhommeplein aux as.Enfin,iladéjàpayéleurloyer,quisaitsiellesnesontpasàlarecherched’unautrecoupdemain?—Quoi?demandaEvangeline,sidéréeparcequ’ilsuggérait.Tupensesqu’ellesfaisaientsemblant?ElleétaitsiatterréequeMaddoxsemblaregrettersesparoles.Celadit,ilnelesretirapasnonplus.Se
pouvait-ilqu’ilaitraison?Elleenfouitsonvisagedanssesmainsetpoussaunsoupirdedétresse.—Eh,majolie,ditMaddox,lavoixpleinederegrets.N’accordepastropdepoidsàcequejedis.Je
suisunmecméfiant.C’estmonjob.Surtoutencequiconcernelesgensquiveulentfaireami-amiavectoi.Ellespourraientêtresincères.Toutcequejedis,c’estqu’ilfautyallerdoucementetfaireattention.Surveilletesarrières,etcommejel’aidéjàdit,n’acceptepasdelesvoiràmoinsquel’und’entrenoussoitavectoi,d’accord?—D’accord,dit-elled’unevoixtremblante.
Illapritparlamainpourl’aideràserelever.—Viens,jevaistecherchertonmanteauetonyva.Drakeveutquetusoisderetourpourdînercesoir.—Tusais,tun’espaslegrosdurpourlequeltuveuxtefairepasser,letaquina-t-elle.Illuiadressaunregardfaussementféroceetluifitlesgrosyeux.—Situlerépètesàquiquecesoit,c’estmoi,pasSilas,quitemettrailafessée.
Chapitre13
Drakearrivachezluipeuaprès17heuresettrouvaMaddoxdanslehall.Ilsentitaussitôtsonhumeurmassacranteetsetendit,sondantlevisagedesonhommepoursavoircequin’allaitpas.—Evangelineaeuunedurejournée,expliquaMaddoxàvoixbasse.—Putain,ques’est-ilpassé?demandaDrake,soudainalarmé.Pourquoinesuis-jemisaucourantque
maintenant?—SesamiessesontpointéesaumomentoùJusticeetmoiallionspartiravecellepourallerfaireles
boutiques. Nous sommes restés avec elle et elles sont montées, en pleurs, à faire tout un foin, et às’excuserd’avoirétédesgarces.Drakeplissalesyeux.—Ettun’ycroispas.Maddoxsecoualatête.—Non,jen’ycroispas.J’aicontrariéEvangelineenledisant,maisj’essayaisseulementdeluidire
quejenevoulaispasqu’ellefassevenirsescopinessansqu’undenoussoitlà.—Dansquelétatest-elle?—Ça a l’air d’aller. Justice et moi l’avons distraite et on a passé un bonmoment. Quand je l’ai
laissée,ilyaunedemi-heure,elleallaitsedoucheretsechangerpourallerdîneravectoi.Ellesemblaitdétendueetdebonnehumeur,maisquandtoutçaestarrivé,çal’aheurtéedepleinfouetetlaisséesurlecul.—Merde,juraDrake.Elleneméritepasça.— Là-dessus, on est d’accord. Écoute, je vais garder un œil sur ses amies pour voir ce qu’elles
fabriquent. J’ai appelé Silas il y a quelques minutes pour qu’il garde l’œil ouvert. Si elles mijotentquelquechose,Silaslesaura.Onnepeutpasluicachergrand-chose.Drakehochalatête.—J’apprécie,mec.Elleaassezsouffertcommeçaparmafaute,etjerefusequedesgarcesintéressées
quiseserventd’ellepourm’atteindreluifassentdumal.—Rends-laheureuse,ditMaddoxsansdétour.—Jevais essayer, ça c’est sûr, rétorquaDrake.Bonne find’après-midi, etmerci d’avoir pris soin
d’Evangelineaujourd’hui.Maddoxsourit.—Avecplaisir.J’aieudroitàunpetitdéjeunerenéchange.C’étaienttouslesremerciementsqu’ilme
fallait.Maddox le salua puis quitta le bâtiment d’un pas nonchalant, laissant Drake prendre l’ascenseur
jusqu’àsonappartement.SavoirquesesanciennescolocatairesavaientfaitpleurerEvangelinelemettaitenrogne.Maddoxl’avaitbienprévenuqu’ildevraitseméfierdesfemmes,seulementiln’avaitpaspenséqueceseraientsespropresamiesquiessaieraientdeladétruire.Ilauraitdûlevoirvenirets’assurerquecela ne deviendrait jamais un problème. Mais il avait laissé tomber quand il avait cru qu’elles nefaisaientpluspartiedutableau.Ilnecommettraitplusjamaislamêmeerreur.Sitôt entré dans l’appartement, il cherchaEvangelinedu regard.Son sangne fit qu’un tour quand il
l’entendit prononcer son nom alors qu’elle entrait dans le salon. Elle mettait la paire de boucles
d’oreilles en diamants qu’il lui avait offerte et portait une robe de cocktail sexy et féminine qui luiarrivaitauxgenoux.Piedsnus,elleseprécipitaverslui,unsourireaccueillantauxlèvres.—Jesavaisbienquej’avaisentendul’ascenseur,dit-elle,essoufflée.Jenesavaispastropàquelle
heureturentrais.Désoléedenepasavoirétélàpourt’accueillirdignement.Pardon?—Définis«dignement».Parcequedelàoùjemetrouve,lavueestplutôtagréable.Fautquejete
dise,bébé.Cetterobe?Ellen’existeraplusdèsquenousrentreronsàlamaisontoutàl’heure.Ellepassasesbrasautourdesoncouetfrissonnadélicatementcontrelui.—Suis-je répréhensible si jedisque j’ai soudainhâteque ledîner soit finipourqu’on rentre à la
maison?demanda-t-elledansunsouffle.Ilsouritetcapturaseslèvresdansunlongettendrebaiser.—T’ai-jeditquej’adorelesfemmesrépréhensibles?Sonexpressionsetroublaetellesemorditlalèvre.Ilplissalesyeux.—Qu’est-cequinevapas,Ange?demanda-t-ildurement.—J’aiquelquechoseàtedire,répondit-elleàvoixbasse.MesamiesSteph,NikkietLanasontvenues
aujourd’hui.C’étaitunchoc.Jenesavaispasqu’ellesallaientvenir.Ilsedétenditetlaserracontrelui,avantdelaguiderverslecanapé.—Maddoxm’aracontécequ’ils’estpassé.Tuvasbien?Ellehochalentementlatête.—Çava.Sur lemoment, j’aiétéprisecomplètementparsurpriseetnesavaispasdu toutcomment
réagir.—Quetedittoninstinct?demanda-t-ilenlaregardantdanslesyeux.Saquestionsemblalasurprendre.Elleréfléchituninstantavantdepousserunsoupir.—Honnêtement,jenesaispas.Jepensequec’estencoretroptôt.Jecroisquej’aibesoindetemps
pourmedécider.Ilhochalatête.—C’estbien.Celanefaitpasdetoiunemauvaisepersonnederéservertonjugementjusqu’àcequetu
aiesplusdepreuves.Çafaitdetoiunepersonneintelligente.Soncomplimentlafitrougir.Ill’embrassasurleboutdunez.—Laisse-moidixminutespourmechangeretjesuisprêtàpartirsitul’es.—J’aijustebesoindemettremeschaussures.—ZanderetHartleynousaccompagnerontaurestaurant,dit-ilensedirigeantverslachambre.Nous
mangeronsseuls,maisilsserontassisnonloin.Illeditsuruntondécontractémaisnonsansguettersaréaction.Ellefronçalégèrementlessourcils,
sonfrontseplissantd’inquiétude.—Lamenacequipèsesurtoiestdoncsigrande?Ils’arrêtaetl’attiracontrelui.—Cequim’inquièteleplus,c’estqu’ilyaitunemenacequipèsesurtoi.C’estpourquoij’insistepour
quetusoisprotégéeàtoutmomentetquetuaiestoujoursuneescortequandtuquittesl’appartement.Ellesemblaitperdue.—Pourquoimemenacerait-on?—Parcequetucomptesénormémentpourmoi,toutlemondepeutlevoir.Jeneveuxpastefairepeur,
Ange,etjeneveuxpastedonnerderaisonsdenepasvouloirêtreavecmoi,maisjenetementiraipas.Tuesendangerdusimplefaitd’êtreavecmoi.
Ilportalamaind’Evangelineàsaboucheetembrassasapaumeavectendresse.—Jenelaisseraipersonnetefairedumal.Jeprotègeetchériscequim’appartient.Tum’appartiens
maintenant,Ange.Tuescequej’aidepluscher.Sadéclarationsemblalastupéfier,tantetsibienqueleslarmesbrillèrentdanssesyeux.—Oh,Drake,finit-elleparmurmurer.Jenesaispasquoidire.—Disquenousenvalonslapeine.Qu’êtreavecmoivautdesacrifiertaroutineetd’avoirtoujours
avectoiquelqu’unquitesuitcommetonombre.Ellejetasesbrasautourdesoncouetsehissasurlapointedespieds.—Oh,Drake,nelesais-tupas?Tuvauxlapeinedetoutendurer.Iln’yarienquejeneferaipaspour
êtreavectoi.Dumomentquetuveuxdemoi,jesuisàtoi.Sadouceurtransperçasonâmeetl’inondadelumière.Certainespartiesdeluiquis’étaientglacéesde
nepasavoirététouchéesdepuislongtempsreprirentvieàsoncontactets’épanouirentcommedesfleursdeschamps.Illaserratoutcontrelui,savourantlefaitdetenirunechosesiprécieusedanssesbrasetcontresoncœur.Que ferait-il sans elle ?Comment avait été sa vie aride avant qu’elle débarque dans sonmonde et
chambouletout?Ilnesupportaitpasl’idéedelaperdre.Sielledevaitjamaisêtreblesséeparsafaute,ilneconnaîtraitpasdereposjusqu’àcequechaquecoupableenpaieleprixdusang.Illafits’asseoirsurlelit,perchéesurlebord,puisilpritleschaussuresqu’elletenaitdanslamain
pourlesluienfiler.Puisill’embrassaencoreavantdeseredresser.—Jerevienstoutdesuite.Nebougepas.Ils’engouffradansledressingetpassaundesesonéreuxcostumes.Aprèsavoirenfilélesmocassins
italiensrangésauboutdudressing,ilrevintchercherEvangeline.—Tuesprête,Ange?—Oùva-t-ondîner?Ouplutôt,queva-t-onmangercesoir?demanda-t-elle tandisqu’il l’escortait
jusqu’àl’ascenseur.—Desfruitsdemer,répondit-il.DansunexcellentrestaurantduMidtown.Undemespréférés.J’yai
uneréservationpermanentepourquenousn’ayonspasàattendre.—J’adorelescrevettes,commenta-t-elleensouriant.—Parcequetuenesune,dit-ilenluidonnantunpetitcoupsurlementon,poingfermé.Quandilsarrivèrentdanslehall,ZanderetHartleylesattendaientpourlesescorterjusqu’àlavoiture.
Lesdeuxhommesseglissèrentsurlessiègesavant,Hartleyauvolant.DrakeaidaEvangelineàs’installeràl’arrièreavantdes’asseoiràcôtéd’elle.—Bonsoir,Zander.Hartley,lessaluagentimentEvangeline.—Bonsoir,Evangeline,réponditZander.Tuaspasséunebonnejournée,mabelle?Ellesourit.—Oui.Ettoi?—Çaauraitpuêtremieuxsionavaitétéinvitésaupetitdéjeuner,réponditsèchementHartley.Evangelinerougit,maisleplaisirluisaitdanssesyeux.—Etsijevousyconviaistouslaprochainefois?—Marchéconclu,ditaussitôtZander.—Onpourraitcroirequetunenourrispasteshommes,ditEvangelineàDrakepourletaquiner.Elleselovacontreluietilpassasonbrasautourdesesépaules.—C’estjustequ’ilssaventreconnaîtrelaqualité.Etilssontjalouxquejet’aievuelepremier.—Cen’estpasfaux,commentaHartley.Ils naviguèrent à travers la circulation en un temps record et, à peine quelques minutes plus tard,
Hartleysegaradevantlerestaurant.Zandersortitd’unbondpourouvrirlaportièreàDrake,quisortit,ettenditlamainàEvangelinepourl’aideràdescendre.Ellen’avaitpasfaitdeuxpasquelemondeautourd’elleexplosadansunemyriadedeflashs.Drake
proféraunflotde jurons, reprisparZander.Evangeline tituba,maisZanderetDrakeétaient làpour lasoutenir.—Retirezceputaind’appareilphotodesonvisage,ordonnaDrake.Oujevousjurequevousallezle
bouffer.Il y eut du chahut,mais Drake tira Evangeline à l’intérieur du restaurant en vitesse pour quitter le
trottoir, où ils étaient exposés. Le maître d’hôtel semblait atterré et escorta immédiatement Drake etEvangelineàunetabledanslefond,sanscesserdes’excuser.—Ques’est-ilpassé?demandaEvangeline,déboussolée,quandelles’assitenfinsursachaise.—Desphotographes,crachaDrake.—Ilstetraquent?Ileutl’airaffligé,maishochalatête.—Ceserapiremaintenantquej’aiétévuavectoi.Evangelineétaitdévastée.—Jesuisdésolée,Drake.Jeneveuxpasêtreunproblèmepourtoi.Ilpritsamainpar-dessuslatablepourlaporteràsabouche.— Chut. Tu n’es pas un problème. Ce sera pénible, Ange. Ce sont des sangsues, et ils sont
impitoyables.Quandilssemettentunossousladent,ilsrefusentdelelâcher.Ilsnoussuivrontpartout.—Jem’enfiche,siffla-t-elle.Ilsnemeferontjamaisregretterd’êtreavectoi.DesflammesdansèrentdanslesyeuxdeDrake.—Ilsnenousembêterontpasici.Notretableestprivéeetici,nousnepouvonspasêtrephotographiés
depuislarue.—Alorsprofitonsdenotresoiréeetoublionscessangsues,dit-elle.J’aihâtederentreràlamaison
pourappelermesparents.Oh,Drake.IlsvontêtresiheureuxdevenirenvillepourThanksgiving.—Jediraisquetoiaussi,tuenesheureuse.—Tuessibonavecmoi,Drake.Jamaisjen’oublieraitoutcequetuasfaitpourmoi.Un serveur apparut et Drake commanda pour eux deux, optant pour un plateau de dégustation de
crevettespourEvangeline.Aprèslesavoirservistousdeuxenvin,leserveurdisparutpourleslaisserenprivé.Evangelinesetortillasursachaise.—Tucroisquej’aibienfaitdelaissermesamiesentrerdansnotreappartement?Maddoxainsisté
pourquejenelesfassejamaisvenirquandjesuisseule.—Evangeline,tun’aspasbesoindemapermissionpourinviterquiquecesoitcheznous,dit-ilavec
douceur.C’estautantcheztoiquechezmoi.J’espèrequec’estcommeçaquetulevois.Jepensequetuasbienfaitde lesécouteretdenepasavoirpriscequ’elles t’ontditpourargentcomptant.Et jesuisd’accordavecMaddox,tunedevraislaissermonterpersonneàmoinsquemoiouundemeshommesnesoitprésent.Jepréfèreneprendreaucunrisque.Evangelinesoupira.—Ellesvontpenserquejesuisrancunièreetsanspitié.Jen’étaispascommeçaavant.—Jepensequ’ellesvontréfléchirà leurproprerôledans toutçaetserendrecompteque tucrains
d’êtredenouveaublessée.Personnenepeutt’envouloirdenepasacceptertoutdesuiteleursexcusesouleurenviequevousrepreniezoùvousvousétiezarrêtées.Jepensequecen’estpluspossible.Tropdechosesontchangé,Ange.
—Tuasraison,biensûr,soupira-t-elle.—Moientoutcas,jeneregrettepas,dit-il,impénitent.Cequ’ellesontperdu,jel’aigagné.—Toiseulpeuxmedonner le sentimentd’avoir faitcequ’il fallait,dit-elleensouriant. Jedevrais
davantagem’inspirerdetoi.Mesamiesm’onttoujourstrouvéetropgentille,tropindulgente.Ellesvontrapidementchangerd’avisquandellesferontlesfraisdemanouvellenaturedeméchantefillesanspitié.— Je t’adore enméchante fille, déclaraDrake avec un sourire ravageur. N’hésite pas à être aussi
vilainequetuvoudrascesoirquandjet’enlèveraicetterobe.Ellehaussaunsourcil.— Je croyais que c’était ton job de me faire marcher au pas. Vous vous laissez aller, monsieur
Donovan.Jecommenceàpenserquevousfantasmezàl’idéedemevoirendominatriceetjedoisvousledire,vousmedécevez.Iléclataderire,unelueuramuséedanslesyeux.—Ainsi,jemanqueàmesdevoirs.C’estcequetuveuxdire,monange?Elles’assitbiensagementsursachaise,lesmainsposéessursesgenoux,lesyeuxrivéssurlui.Puis
ellesepenchapourquesonmurmurenepuisseêtreentendupard’autres.—Tum’astraitéecommesij’étaisenverre.Jenevaispasmebriser,Drake.Jeveuxtadomination.
J’en ai besoin. Je neme rappellemême pas la dernière fois où tum’as fouettée ou fessée. Tu as étédélicieusementtendre,etnepensepasquejen’aipasappréciétonrespect,maiscequejedésire,c’estqueleschosesredeviennentcommeavant.Oun’est-cepascequetuveux?Elles’étaitrenduecomplètementvulnérableenluirévélantsessecretsetsesdésirs.Ellesemorditla
lèvrepournepasqu’elletremble,depeurd’êtrealléetroploinetquesacritiquel’aitmisencolère.—Moncherange.LetondeDrakeétaittendre,sesyeuxpleinsdedésiretd’approbation.Aucunsigned’agacement,au
grandsoulagementd’Evangeline.—T’es-tusentienégligée?N’ai-jepasfaitcequ’ilfautpourterendreheureuse?Ellerougitetbaissalatête,mortifiée.—Oh,Drake,non!Loindelà.—Jetetaquine,monange,dit-ilenluicaressantlajoue.Regarde-moi,Evangeline.L’autoritédanssavoixlafitdélicieusementfrissonner.Elleavaitlachairdepoule,etlapeaudeson
visagefourmillaitsouslesdoigtsdeDrake.—Negardejamaistespensées,tesbesoinsoutesdésirspourtoi.Tuasraison.J’aiétédélicatavec
toicesdernierstemps.J’ensuisdésolé.Jenepouvaissupporterl’idéedetepunirtropdurementoudefairequoiquecesoitquitemettraitmalàl’aise.C’esttoutnouveaupourmoi,Ange.Jenemesuisjamaisinquiétédecequ’unefemmepouvaitpenserdemoi.Maistoi,tumetiensàcœur.Toi,jeneveuxpasteperdre.Etj’aidéjàtellementfaitd’erreursavectoi,j’aifailliteperdre.Depuis,j’aipeurd’avoirététropprudentavectoi,etjem’enexcuse.—Tunevaspasmeperdre,Drake,dit-elledoucement.Cettefois,cefutellequitenditlamainpar-dessuslatablepourprendrelasienne.—Jeveuxêtrelafemmequetuveuxquejesois.Jeveuxtonautorité.Jeneveuxpaschangerquinice
quetues,carceneseraitplusréel.J’aibesoindetoi,murmura-t-elle.Quandetcommetumeveux.Tellequetuasbesoindemoi.Jeveuxêtrecellequiterendheureux.C’estimportantpourmoi.Ellelesuppliaitduregard,etceluideDrakes’adoucit.Samainquittasonvisagepourvenirsenouer
auxsiennessurlatable.— Je t’ai dit un jour que tu n’aurais jamais àme supplier, Ange. C’est toujours vrai. Quoi que tu
veuilles,c’estàtoi.Jesuisàtoi.Tucomprends?Oui,tum’appartiensetjesuisunhommetrèspossessif,
maisje t’appartiens,Ange,et tuesaussiunefemmetrèspossessive.J’aimeça.Jedois te ledire,celam’excitequ’unefemmesoitsipossessiveenversmoi,luiconfia-t-ilensouriant,unelueurmalignedanslesyeux.Ellerougit,lesjouesenfeu,maisnedétournapasleregarddehonte.Iln’yavaitaucunblâmedansses
paroles.Aucuneréprimande.— D’accord, j’admets que je botterais les fesses de toute garce qui te regarderait de trop près,
marmonna-t-elle.CelafitrireDrake.—Alorsnoussommesquittes,parcequejebotteraislesfessesdetouthommequiteregarderaitunpeu
troplongtemps.Mêmesijecomprendslebesoindetecontemplersansvergogne.Ellepouffa.—Tun’espascroyable,Drake.Jenecomprendraijamaiscequetuvoisenmoi;maisjenemeplains
pas.Illuifitlesgrosyeuxetsecoualatête.—Ça,çavautunefessée,Ange.Netedépréciepas.Jerefusedetelaisserfaire.Troublée,ellenesutquoirépondre,etrestadoncmuette.Maiscelaluiréchauffalecœurdevoirqu’il
étaitsidéterminéànepaslalaisserserabaisser.Ilsepenchaau-dessusdelatable.—Tueslaplusbellefemmequej’aiejamaisconnue,murmura-t-ild’unevoixrauque.Situpensesque
jediscegenredechosesàtouteslesfemmesquejerencontre,tutetrompeslourdement.Elle gigota sur sa chaise. Le dîner ne serait-il jamais servi ? La tension sexuelle était à couper au
couteau.Ellemouraitd’enviedesesoustraireauxregardsdesautrespourretournerà l’appartementetauxpromessesdeDrake.Illadévisageaetsourit,commes’ilsavaitexactementcequ’elleétaitentraindepenser.Cequiétait
certainementlecas.Ilsavaittout.Le serveur choisit cet instant précis pour arriver à la table et Evangeline faillit soupirer de
soulagement.Lesplatssentaientdivinementbonmaisellen’avaitd’yeuxquepourDrake.—Mange,bébé,ditDrakeavecunsourire.Jem’occuperaidesbesoinsdemonangeplustard.Promis.Ellesoupiraetbaissalesyeuxsursonassiette.Lasoiréeallaitêtrelongue.
Chapitre14
Le trajetdu retourse fitprincipalementdans le silence.Evangelineétait lovéecontreDrake, la têteposéesursonépaule,àcontemplerleslumièresscintillantesdelaville.Cen’étaitpasunsilencepesant,maisagréable.Elle aimait qu’ils soient si à l’aise l’un avec l’autre.Qui aurait pensé, quelques semaines plus tôt,
quandelleétaitalléeàl’ImpulsepourmontreràEddieceàquoiilavaitrenoncé,qu’elleseretrouveraitlàoùelleenétait?Sa mère avait toujours dit que la vie était pleine de surprises et qu’elle n’était pas censée être
prévisible.ElleavaitapprisàEvangelinedèssonplusjeuneâgeàprofiterdechaquejourcommed’uncadeaucarlelendemainétaitincertain.ElletournalepoignetdeDrakeversellepourregarderl’heuresursamontre.—Toutvabien?murmura-t-il.Tuasunautrerendez-vous?Sontontaquinlafitsourireavecimpertinence.—Ilsetrouvequej’aiunrendez-vousgalantavecunbeaugossequej’airencontréàl’Impulse.Jelui
aiditquejesortiraisendouceàminuitpourleretrouver.Drakeluidonnaunetapesurlafesseavectantdeforcequelefeudansasursapeau,luiarrachantun
gémissement.—Jedevraispeut-êtret’attacheraulitcettenuit.—Mmm,peut-êtrequetudevrais.Aprèstout,jepeuxêtreunevilainefille,tuterappelles?—Jecroisqueturéclameslacravache.—Bah,évidemment,dit-elleenlevantlesyeuxauciel.Enfin,quefaut-ilfairepourêtrepuniedenos
jours?Tuteramollisavecl’âge,Drake.Situnefaispasattention,tunepourrasplussuivreetjeseraiobligéedetemettreaurancart.Ceseraitlafindetacarrièred’étalon.Ils’étrangladerirepuistoussa.—C’estuneexpressiondechez toi ?Parceque jene saisabsolumentpasdequoi tuparles.Petite
insolente.Ellerit.—Mettre au rancart est une façon polie de dire que tu ne peux plus suivre. En d’autres termes, tu
deviensunvieilhommeetjevaisdevoirtrouverquelqu’und’autrepoursatisfairemesbesoins.—J’aiunerecommandation,sijamais,intervintZanderdepuislesiègeavant.Evangelineportasamainàsabouche,mortifiée,etplongeapresqueentreDrakeet lesiègepourse
cacher.Drakefutsecouéderire.—Tuasoubliéquenousn’étionspasseulsdanslavoiture,Ange?Zandernefaisaitquerentrerdans
tonpetitjeu.—Jepeuxallermeterrerdansuntrouetmourir?grogna-t-elle.—C’estleprixàpayerquandonjoueàlamaligne,dit-il,contentdelui.Etj’aihâtedetemettrela
fesséequandnousarriveronsàlamaison.—Je regardais l’heuresur tamontreparceque jevoulaisvoir s’ilétait trop tardpourappelermes
parentsquandonrentrera,expliqua-t-elle,soucieuse.Ilestuneheureplustôtchezeux,doncilsdevraient
êtreencoredebout,siçanetedérangepasquejelesappellecesoir.Illaserracontreluietl’embrassasurlefront.—Biensûrqueçanemedérangepasquetulesappelles,bébé.Jesaisquetuesimpatientedeleur
annoncer la nouvelle. Et je pourrais rester avec toi pendant que tu les appelles, si tu n’y vois pasd’objections?Ensuite, tupourrasexprimertagratitudedemanièretrèscréative,dit-il,avecunsouriremalicieuxetunelueurdiaboliquedanslesyeux.—J’essaieraid’écourterl’appel,murmura-t-elle.—Iln’yapaslefeu,ditDrakeentoutedécontraction.Nousavonstoutelanuit,Ange.Etjecompte
profiterdechaqueseconde.Jepensequeceseraitunebonneidéequeturestesàlamaisondemainetquetufasseslagrassematinée.J’ailesentimentquetunepourraspasfairegrand-chosed’autrequandj’enauraifiniavectoi.Elleledéfiaduregard,lèvrespincées.—Nefaitespasdepromessesquevousnepourrezpastenir,MonsieurleGrosDur.Jusqu’àprésent,je
voisbeaucoupdeparolesmaispasbeaucoupd’action,doncj’espèrequevousallezconfirmervosdires.Ilhaussaunsourcil.—Ondiraitbienqueledéfiestlancé.Ellehaussanonchalammentlesépaules.—Ilvafalloirquetuassures.Jemedemandecequetouscesphotographesdetabloïdspenseraientdu
grandDrakeDonovansionapprenaitqu’ilnesatisfaitpassanana.—Jecroisquetuascrééunmonstre,Drake,ditHartley.Evangelinegrognadenouveau.—Silence!Vousnepouvezpasaumoinsfairesemblantdenepasentendrecequenousdisons?Jene
displusrien.Ellejetaunregardnoiràl’avantdelavoiture,oùHartleyetZanderétaienttousdeuxécroulésderire.
QuandDrakesejoignitàeux,elleluidonnauncoupdecoudedansleventre,lefaisantgrogner.—Monangedevientimpertinent,dit-ilnonsansappréciation.Çameplaît.EllecontinuaderegardertouràtourDrakeetleshommesàl’avant,leslèvresscellées.Heureusement
pourelle,ilsarrivèrentdevantl’immeublequelquesminutesplustard.EllerefusadecroiserleregarddeZanderoudeHartleyquandilsleurouvrirentlesportières.—Nesoispastropdureavecluicesoir,s’écriaZanderalorsqu’EvangelineetDrakepénétraientdans
lebâtiment.Elle mit ses deux mains sur ses oreilles, mais cela n’empêcha pas les rires des deux hommes de
l’atteindre.Dans l’ascenseur, Drake laissa passer quelques étages avant d’appuyer sur le bouton « Stop » ;
l’ascenseurs’arrêtaentredeuxétages.—Drake?demanda-t-elle,sursesgardes.Qu’est-cequetufais?—Nousavonsquelquesminutesavantd’appeler tesparents,dit-ild’unevoix rauque, empreintede
désir.Jebandecommeuntaureaudepuisledébutdelasoirée.Tun’asqu’àrespirerpourquejebande.Enlèvetaculotte.Elleécarquillalesyeux,stupéfaite.—Qu’est-cequejeviensdetedire?demanda-t-ild’unevoixdevelours.Ellepassasamainsoussarobeetfitglissersaculotteendentelle le longdesesjambesjusqu’àce
qu’elletombeàsespieds.—Maintenantouvremabraguetteetsorsmabiteparl’ouverture.Lesmainstremblantes,elledéfitlentementsabraguette.Sonsexe,enérection,surgitdanssamain.
—Remontetarobeàtatailleettiens-labien,ditDrake,leregardbrûlant.Dèsqu’elleeutobéi,ilpassasesmainssoussesfessesetlahissacontrelui.Illafitreculerjusqu’àce
quesesépaulesheurtentlaparoidel’ascenseur,puisilpositionnasonsexecontrelesien.—Tu es prête pourmoi,Ange ?Tupeuxmeprendre dans cette position ?Nousn’avonsquedeux
minutesavantquelasécuritéouvrelesportesaprèsledéclenchementdel’alarme.Ounouspouvonsallerauboutetjepeuxappuyersurleboutonpourmonter.Ellen’avaitaucuneintentiondefairedurercetinstantpourquesonéquipedesécuritélestrouvenuset
dans une position compromettante, qu’elle soit prête ou pas. L’excitation monta en elle au lieu del’humiliation qu’elle s’attendait à ressentir, le risque d’être surprise décupla son désir au lieu del’amoindrir.—Oui,siffla-t-elle.S’ilteplaît,Drake.Prends-moi.D’unpuissantcoupdereins,illapénétradetoutesalongueur.Lescrisd’Evangelinerésonnèrentdans
l’ascenseur.Bonsang, ilétaitencoreplusénormedanscetteposition.Elle le sentaitpulseretpalpiterdanschaquepartiedesonintimité.—Passetesjambesautourdemoiettiens-toi,grogna-t-il.Elleenroulasesjambesautourdesataille,nouaseschevillesdanssondos,etagrippasesépaulesdes
deuxmainsalorsqu’il semettaità lapilonner.Elle laissa tombersa têteenarrièrecontre laparoidel’ascenseuretfermalesyeuxtandisqu’ilallaitetvenaitdanslachaleurdesonsexemouillé.—Sibelle,putain,ditDrake,lesdentsserrées.Jen’aijamaisrienvud’aussibeaudetoutemavie.—Alorstunedoisjamaisregarderdansunmiroir,dit-elleentredeuxhalètements.—Jenevaispastenirlongtemps.Tuyesbientôt,Ange?Sonsexesecontractaitdéjàautourdesonérection.—Presque,parvint-elleàarticuler.C’esttoutproche.S’ilteplaît.J’aibesoin…Puisilabandonnatoutcontrôle.Ilallaetvintenelleavecdepuissantscoupsdereins,s’enfonçanttout
entier en elle, encore et encore jusqu’à ce que lemonde se brouille et que lesmurs semblent tournerautourd’elle.EllepoussauncriaumomentmêmeoùlapremièrevaguedejouissancedeDrakedéferlaenelle.Il
enfouit son visage dans son cou sans cesser de faire onduler ses hanches, jusqu’à ce que, enfin, il lapénètred’uncouppourresterenelle,immobilealorsquesasemencel’emplissait,jetaprèsjet.La poitrine d’Evangeline se souleva d’épuisement, elle inspirait bruyamment des goulées d’air,
toujoursplaquéecontrelemur,lesexedeDrakeprofondémentenfoncéenelle.Il tendit lamainpour appuyer sur leboutonet remettre l’ascenseur enmarche. Ils firent le restede
l’ascension en silence, toujours intimement connectés, les jambes d’Evangeline autour des hanches deDrake.Lorsque laportede l’ascenseur s’ouvrit, il la soulevadans sesbras et entradans l’appartement, la
serrantcontrelui,toujoursenelle.—Waouhmarmonna-t-elle.Ilritdoucement.—C’étaitbon?—Mmm-hmm.—Tufaismoinslamaligne,hein?—Oui.Ileutunautrepetitrireetlaportadanslasalledebains,oùillaposasurlemeubleàcôtédel’évier.Il
fitcoulerl’eaudeladouche,puislesdéshabillatouslesdeuxavantdelaportersouslejetd’eauchaude,oùilentrepritdelaverchaquecentimètrecarrédesoncorpshypersensible.
Quand ileut finide les rincer tous lesdeux, il la sortitde ladoucheet l’enrouladansuneservietteavantdel’embrassersurlesommetducrâne.—Allonsappelertesparentsetensuite,monange,jevaispunirmatrèsvilainefille.
Chapitre15
Avecunsoupirheureux,EvangelineselaissaallerdanslesbrasdeDrakeaprèsavoirmisfinàl’appelavecsesparents.—Ilssemblaiententhousiastes,fitremarquerDrake.—Oh,ilslesont,dit-elleEtmoiaussi,Drake!Jen’arrivetoujourspasàcroiretoutlemalquetute
donnespourlesfairevenirpourThanksgiving.Merci.Illuisouritchaleureusement.— Ce n’est pas grand-chose, Ange. Comment pourrais-je ne pas faire une chose qui te rend si
heureuse?Etjel’admets,j’aihâtedelesrencontrer.—Euxaussisontimpatientsdeterencontrer,admitEvangeline.Jetepréviens.Ilsvontcertainementte
poserunmilliarddequestions.Monpèrevatecuisinersurtesintentionsenverssapetitefille,etmamèrenevapasnousquitterdesyeux.SondépitsemblaamuserDrake.—Jepensequejepeuxsurvivreàunpetitinterrogatoire.Net’inquiètepas,Ange.Toutvatrèsbiense
passer.Elleseblottittoutcontreluietenfouitsonvisagecontresontorse.— Bon, dis-moi. Est-ce que j’ai été très vilaine, et quelle est ma punition ? demanda-t-elle
innocemment.—Elleseralàd’unmomentàl’autre.Elles’écartadeluipoursondersonregard.—Qu’est-cequiseralàd’unmomentàl’autre?Ilsourit.—Tapunition.Marécompense.Tarécompense,aussi.—Qu’est-cequec’est?demanda-t-elle.Ilcapturaunedesesmainspourlaporteràsabouche,etembrassasapaumeouverte.—TutesouviensdeManuel?Uneétrangechaleurruisseladanssesveinesetellefrémitmalgréelle.Ellehochalatête,pascertaine
depouvoirs’exprimerverbalement.—Ilnous rendvisitece soir. Jeveuxque tu sois trèsgentilleetque tuobéissesàmesordres sans
hésitation.—Jamaisjeneteferaishontedevantunautrehomme,souffla-t-elle.—Jelesaisbien,Ange.Allez,vadanslachambretepréparer.Maisdépêche-toi.Ilserabientôtlàet
jeveuxquetusoisiciàgenouxquandilarrivera.Elleselevaaussitôtetseprécipitadanslasalledebainspoursebrosserlesdentsetlescheveuxetse
rafraîchirlevisage.SoucieusedesinstructionsdeDrake,ellenes’accordaquequelquesminutesavantderetournerenvitessedanslesalonpoursemettrefaceàluietattendresesordres.Iln’yavaitqu’approbationdanssesyeuxquandilcontemplasoncorpsnu.—Vatemettreàgenouxaumilieudutapisdanslesalon,ordonna-t-ild’unevoixrauque.Manuelest
dansl’ascenseur.Obéissante,ellesepositionnaselonsesordres,àgenouxfaceàl’entrée:elleseraitlapremièrechose
queManuelverraitquandlesportess’ouvriraient.Elledéglutitnerveusement,essayantdeserappelertoutcequ’ellepouvaitdecettenuit-là.Toutn’avait
été qu’un nuage de plaisir. Elle se souvenait à peine du visage deManuel ou de son allure. Elle serappelaitvaguementqu’ildevaitavoirl’âgedeDrake,oupeut-êtreunpeuplus.C’étaitunhommeséduisantavecdescheveuxcourtspoivreetsel.Justecequ’ilfallaitpourluidonner
unairdistingué.Ils’exprimaitbienetavaitétépleindesollicitudeenversEvangeline.Maisellen’avaiteud’yeuxquepourDrakeetsonplaisir.Qu’avait-ilentêtepourcesoir?Voudrait-il laregarderêtredominéeparunautrehommecommela
foisprécédente,ouvoudrait-ilparticiperdavantagecettefois-ci?Lesportess’ouvrirentetManuellavitinstantanément.Ledésirdansadanssesyeuxnoirsalorsqu’il
entraitdansl’appartement.Drakeselevaducanapépourl’accueillir,etlesdeuxhommesseserrèrentlamain.—Evangeline,tutesouviensdeManuel,ditDrake.—Oui,soufflaEvangeline,surletondelasoumission.J’espèrequevousallezbien,monsieur.— Tu as une soumise si douce et respectueuse, dit Manuel en dévorant Evangeline des yeux. Je
considèrequej’aibeaucoupdechance,quetupartagesceprésentavecmoi.—Elleestàtoicesoir,ditDrakeentoutesimplicité.Jeregarderaietparticiperai,maisc’esttoiquila
dirigeras,pasmoi.Commelapremièrefois,laseulechosequetunepeuxpasfaire,c’estl’embrassersurlabouche.Toutleresteestpermis.—Quellessontseslimites?demandaManuelsansdétour.—Ellen’enapas.Manuelhaussaunsourcil,surpris.—C’estàtonappréciationetjetefaisconfiancepoursavoirquandtuvastroploin.Etcommejete
faisconfiance,Evangelineteferaconfianceelleaussi.Ellesaitquejamaisjenelaisseraipersonneluifairedumal.Manuel se tourna vers Evangeline, dont le pouls accéléra soudain. Ses narines se dilatèrent en
expulsantl’aircoincédanssacagethoracique.—Dis-moi,Evangeline.Tuaimesquandc’estbrutal?Peux-tutoutsupporter?Jen’aiaucuneenviede
tefairemal.Jeveuxquecesoitaussibonpourtoiqueçal’estpourDrakeetmoi.—Jeveuxtoutcequevouschoisirezdemefaire,dit-elleensoutenantsonregardsansciller.Jeveux
quecesoitréel.Jen’aimepaslasimulation.LafiertébrilladanslesyeuxdeDrake,cequiluiinsufflauneincroyableconfianceenelle.—Alorstoietmoiallonsbiennousentendre,ditManuelensouriant.Jen’aimepaslesjeuxnonplus.
Maiscommecen’estquenotredeuxièmefoisensembleetquec’estmoiquiseraiauxcommandesetnonDrake,jeveuxquetutrouvesunsafewordquetuprononcerass’ilfautquejem’arrête.—Jen’auraipasbesoinquevousvousarrêtiez,dit-ellecalmement.Drakelesaurabienavantmoi.Il
nevouslaisserapasallertroploin.Jeluifaisentièrementconfiance.—C’estvraimentunprécieuxcadeaupourundominantquesasoumiseluiaccordeunetelleconfiance.
Drakeadelachance.—C’estmoiquiaidelachance,murmura-t-elle.Drakes’avançaetposasamainsursajoue.—Nousneseronsjamaisd’accordsurcepoint,monange.Jesaistrèsbienquiestlepluschanceuxde
nousdeux.Maistuasraison.Jenelaisseraijamaispersonneallertroploinavectoiettefairedumal.Mais si jamais, pour quelque raison que ce soit, tu veux que Manuel arrête, tu n’as qu’à le dire.D’accord?
—Oui,chuchota-t-elle.DrakeseretournaversManuel.—Elleestàtoi.Manuelrestauninstantsurplaceàlaregarder,sonregardaffamédévorantlecorpsnud’Evangelinedu
regard.Elle frissonna, ses tétonssedressèrent, sonvaginsecontractaet sonclitoris semitàpalpiter.Elleétaitexcitée.PlusexcitéequelapremièrefoisqueDrakeavaitinvitéManuel,carelleconnaissaitàprésentlesplaisirsquil’attendaient.Lapremièrefois,elleavaitéténerveuseetincertaine,inquiètequeDrakesoitencolèresielleprenaitduplaisiravecunautrehomme.Maisils’étaitréjouidelavoirréagirauxcaressesd’unhommequ’ilavaitsélectionnépourelleet,voyantcela,elles’étaitdétendueets’étaitlaisséealler,senoyantdansl’extasedécadentequeManuel–etDrake–luiavaitdonnée.À en juger par la lueur de désir dans les yeux deManuel, elle n’avait vu que la partie visible de
l’iceberg.Elleavaitlesentimentquecettepremièrenuitavaitétéunesortedetest,qu’elleavaitréussi,etquecesoir,iln’yauraitplusaucuneretenue.Elleavaithâte.Manuelouvritsabraguetteettirasonénormeérectiondesonpantalon.Ilsemassalesexepourqu’il
devienneplusrigideencore,puisilserapprochad’elle,sonmembredansantdélicieusementjustedevantsabouche.—Sucemabite,Evangeline,dit-il enusantd’un langageobscènepour l’exciter. J’espèreque tues
prête, parce que je vais te faire une gorge profonde. Je vais te baiser la bouche jusqu’à ce que tu negoûtesetnesentesplusquemoi.Maisd’abord,jevaisdemanderàDrakedet’attacher,parcequejeteveuxtotalementàmamercipourpouvoirexercermavolontésurtoi,ettunepourrasrienfairesicen’estprendrecequejetedonne.Ellegémit,lecorpsfourmillantalorsqueledésirmontaitenelle.Inconsciemment,ellesecambra,les
seinsenavant,lestétonssidursquec’enétaitpresquedouloureux.TandisqueManuelrestaitdeboutlà,àpassersamaindehautenbassursaverge,lanarguantpresque,
Drake lui tira sansménagement les bras dans le dos pour lui attacher les poignets. Puis, à son grandétonnement,ill’attrapaparlescheveuxpourluitirerlatêteenarrière,avantdeposersesmainssursestempespourlatenirfermementenplace.Manuelplaçasespiedsdechaquecôtédesescuisses.—Ouvre,ordonnaManuel.Elleobéit instantanémentet il glissa son sexe sur sa langue, allant etvenant avecungrognementde
satisfaction.—Tiens-la,ordonna-t-ilsèchementàDrake.Cefuttoutl’avertissementqu’elleeutavantqu’ils’enfonced’uncoupjusqu’aufonddesagorge.Son
membreétaitsilargequ’ellenepouvaitplusrespirer.Illuifallutfaireappelàtoutesadisciplinepournepass’étoufferetrejetercetteinvasion,maiselleseforçaàsedétendreetselaissaallerentrelesmainsdeDrake.Elleluifaisaitconfiance.Ilallaitprendresoind’elle.Manuelmarquaunepauseetbaissalesyeuxavecunsouriretendreauxlèvres:ilavaitremarquéson
mouvementpresqueimperceptible.Ilsoupira.—C’enestunequejepourraistepiquer,monami,dit-ilàDrake.Jamaisjen’aiététentéderavirla
femme d’un autre homme, mais je te la prendrais sans jamais avoir de remords. C’est un trésorinestimable.— Tu peux toujours essayer, dit Drake d’un ton glacial. Je tuerai l’homme qui essaiera de me la
prendre.—C’estbiennormal.Jeferaispareilàtaplace.Manuelavaitprononcécesderniersmotsavectristesse.Ilcaressalajoued’Evangelineavectendresse
toutenreprenantsonva-et-vientpluslentement,allantplusloinàchaquecoupdebassin.— Tu as ce dont rêve tout homme comme nous. J’espère que tu le sais et que tu la protèges en
conséquence.LesexedeManuelquittalabouched’Evangeline;Manuellaissasonglandposécontreseslèvreset
baissa la tête vers elle, avec dans les yeux une lueur de désir, teintée de tout autre chose… De latristesse?S’oubliantuninstant, impulsivequ’elleétait,Evangelineneputretenir laquestionqui luibrûlait les
lèvres.— Vous avez perdu quelqu’un d’important pour vous, Manuel ? demanda-t-elle d’une voix douce.
N’avez-vouspasdefemmepoursatisfairevosbesoins?Dèsqu’elleeutposélaquestion,ellerougitdehonte,pleinederemords.Elleleregarda,horrifiée.—Jesuisdésolée.Jevousenprie,pardonnez-moi,Manuel.EllesetournaversDrake,paniquée.—Pardonne-moi, Drake. J’ai dépassé les limites. Je n’aurais rien dû dire. Je n’ai pas à poser de
questions. Il est demon devoir de satisfaire vos besoins et d’obéir à vos ordres, d’être ce que vousvoulez.Pasd’êtreindiscrète.Jevousenprie,pardonnez-moi,répéta-t-elle,bouleversée.—Evangeline,regarde-moi,ditManueld’unevoixtendremaisferme.Elle levacraintivement lesyeuxvers lui,dévastéeà lapenséede l’avoirdéçumais surtoutd’avoir
déçuDrake.—Ne fais pas cette tête,ma douceEvangeline, dit-il avec un sourire tendre.Comment pourrais-je
reprocherquoiquecesoitàunefemmequiresplenditavecautantdebeautéetdecompassion.Tuasuncœurgénéreux,quienveloppetouteslespersonnesquit’entourent.Oui,j’aiperduquelqu’un,etnon,jen’aipasdefemmefixe.Jen’enveuxplus.Pasdepuis…Ilsetut,laminesombre.—Celafaisaitlongtempsquepersonnenem’avaittouchéenpleincœurcommetul’asfait.C’estpour
çaquej’aitaquinéDrakeenluidisantquesinousn’étionspassibonsamis,jet’enlèveraissansuneoncedeculpabilitéouderemords.Maistoncœurestauprèsdelui.C’estévident.Tuneserasjamaisheureuseavecunautrehomme.—Non,murmura-t-elle.JeneseraiheureuseavecDrake.Drake, tremblant, lui empoignaplus fermement les cheveux. Il caressa sa chevelure, puis se pencha
pourl’embrassersurlesommetducrâne.EvangelineregardaManueldanslesyeuxsansciller.— Je sais que ton cœur appartient à une autre, comme lemien appartient àDrake,mais j’aimerais
beaucoupêtrecellequit’offreaumoinsunenuitdepaix.Etdeplaisir.Prends-moi,Manuel.Cen’estpasgravedefairecommesi.Faisdemoicequetuveux.Faiscequetuveuxavecmoi.Jenevaispasmebriser.Jepeuxprendretoutcequetumedonnes.Jeleveuxettuenasbesoin.Laisse-moit’apporterduréconfortcesoir.—Jamais jen’essaieraide tebriser,mamignonne,ditManuelavecaffectionet respect. Jeveux te
donnerduplaisir,et,l’espaced’uninstant,jeveuxretrouverlalumière.IlfitglissersavergeaufonddesagorgetandisqueDrakemaintenaitEvangelineenplace,bienquece
nesoitpasnécessaire.Mêmesicettenuitétaitpourelle,àl’instigationdeDrake,ellesentaitqueManuelavaitdésespérémentbesoinderéconfort.Etelledésiraitplusquetoutchasserlesombresdesyeuxdecethomme.Consciencieuse,ellenebougeapasquandManuels’arrêta, logéprofondémentdanssagorge, la tête
renverséeenarrière,leplaisirgravésursestraitssensuels.
—Quedirais-tusinous teprenions tous lesdeux,Drakeetmoi,et tepossédions,encoreetencore,toutelanuit?demandaManuel,lavoixlourdededésir.Ellefrissonnadélicatement.Unevaguededésirsoudaineetviolentedéferlaenelle,laforçantàfermer
lesyeux.Manueleutunpetitrire.—Jecroisquenousavonsnotreréponse,Drake.—Eneffet,murmuraDrakeenembrassantEvangelinedanslecoutandisquesesdoigtss’emmêlaient
danssescheveux.Monangepeut toutaccepteret jeveuxluidonnerlemonde.Cesoir,cen’estquelacerisesurlegâteau.Ellegémit,absorbantsesmotsdouxcommeunedroguéeenmanque.ManuelseretiraetEvangelinesetournalégèrementpourleverlesyeuxversDrake.Ellesavaitqu’elle
désobéissait.Qu’elledevaitrépondreàManuel.Qu’elledevaitseconcentrersurManuel.Maisellenepouvaitretenirlesmotsquiplanaientsurseslèvres.—Nelesais-tupas,Drake?Tuestoutmonmonde.Lefeudanssesyeuxsetransformaenbrasieretilécrasaseslèvressurlessiennes,dévorasabouche,
semoquantquelesexed’unautrehommeviennejustedelaquitter.Étrangement,cen’enétaitqueplustorride:sonclitorissemitàpalpiteretsestétonssedressèrent.—Tuasencorelebancàfessée?demandaManuelàDrake.DrakeopinaetquittaEvangeline,qui ressentitcruellement l’absencedesachaleur.Manuel la saisit
parlementon,laforçantàleregarder.— Je voulais te fouetter ce soir,murmura-t-il.Marquer ta si belle peau.T’emmener au-delà de tes
limites.Tepousserà tonpointderupture.Mais jen’aipas lecœurde le faire.Unbancà fesséeademultiplesutilisations,commetuvasbientôtledécouvrir.Lalueurdanssesyeuxluipromettaitdesplaisirsindicibles.Elleeneutlachairdepoule.Drakerevintuninstantplustard,poussantunappareilquiressemblaitàunesortedeselleàl’envers
surdespiedsenbois.Letoutétaitrembourré,bienloindestréteauxenboispleinsd’échardesquesonpère avait dans son magasin avant de se blesser. C’était visiblement un instrument fait pour êtreconfortable.Etcoquin.Lacourbedelasellequidevaitrecevoirleventredelapersonneétaitencuir,épaisetlisse.Ilyavait
des anneaux en métal en bas des pieds avant et arrière de l’appareil, et elle se demanda à quoi ilspouvaientbienservir.Manuel fut très attentionnéquand il l’aida à se lever et retira les liens autourde sespoignets. Il la
stabilisauninstantpours’assurerqu’elletenaitbiensursespieds,puisil laissasonbrasautourd’ellepour lacaresser,ne faisantquedécupler sonplaisir.Pourdeshommesaussi rudesetdominateursqueManueletDrake,ilsétaientextrêmementdouxavecelle,latraitantcommeduverrefilésusceptibledesecasser s’ils le manipulaient avec trop peu de précaution. Cela la laissait perplexe, car ces hommesprenaientsansaucunscrupule,sansdemander.Ilssecontentaientdeposséder.Manuelpritsonseinaucreuxdesapaumeetfitroulersontétonsoussonpoucejusqu’àcequecette
sensationexquiselafassepresquehaleter.Puisilglissasonautremainsursonventre,puisplusbas,etplongeasesdoigtsentresesplissensibles,caressantsachair.Ildécrivitdescerclesautourdesonclitoris, lefit roulerentresesdoigts,enprenantgardeànepas
tropappuyer,ànepasluifairemal.Puisilfitglissersonmajeurenelleetpénétrasonvagin.Ellesemitsurlapointedespieds,grimaçantdeplaisir.Elleétaitdéjàauborddel’extasealorsqu’il
l’avaitàpeinetouchée!Illapénétraplusprofondément,titillantprécautionneusementsonpointG,etellefaillit jouir sur-le-champ.Ses jambes tremblaient, sesgenouxsedérobèrent, et, s’ilne l’avait retenue,
elleseseraiteffondrée.—Doucement,mamignonne,dit-il.Nousavonstoutelanuitdevantnous.Nulbesoindeseprécipiter.Ses deux mains quittèrent le corps d’Evangeline, qui poussa un soupir de protestation. Manuel rit
doucementpuislaguidaverslebancàfesséequeDrakeavaitinstalléaumilieudusalon.D’oùavait-ilsorticetengin?Ellenel’avaitjamaisvu.Quecachait-ild’autredanscetappartement?LesyeuxdeDrakebrûlaientdedésiralorsqu’ilcontemplaitsoncorpsnuetlesmainspossessivesde
Manuel posées sur sa peau.Approbation et désir luisaient dans ses yeuxnoirs, tirant àEvangeline unfrissongrisant.Ellesesentaitsûred’elle.Sexy.Désirable,même.SesyeuxtrouvèrentceuxdeDrakeetelleluiadressaunsouriremystérieuxetsensuelquiluipromettait
lemonde,messagequ’ilreçutcinqsurcinq.Il fit un bref signe de tête à Manuel et, soudain, elle se retrouva positionnée sur le ventre sur le
somptueuxcuirdubanc.ManuelluiécartalesjambespendantqueDrakefaisaitdemêmeavecsesbras.Ilsluiattachèrentleschevillesetlespoignetsauxétrangesanneauxsurlesquelselles’étaitinterrogée.Àprésent qu’elle comprenait leur utilité, l’excitation fit accélérer son rythme cardiaque : elle étaitimpuissante,soumiseàtoutcequ’ilschoisiraientdeluifaire.Elleétaitimpatiente.Manuel lui caressa le derrière, tâta sa peau, lui écarta les fesses, laissant l’air frais effleurer ses
partiesintimesàprésentexposées.—Jeveuxd’abordprendretachatte,ronronna-t-il.Puisjevaisbaisercejolipetitcul.Etpendantque
jetebaiserai–etjevaisteprendresansménagement,Evangeline–tuvassucerDrake.Tun’aspasledroitdejouiravantdenousfairetouslesdeuxéjaculer.Situmedésobéis,jereviendraisurmadécisionde ne pas marquer ta magnifique peau et ferai en sorte que tu ne puisses pas t’asseoir pendant unesemaine.Elles’avachit, lesmusclesencompote.Ellefermalesyeux,assaillieparcette imageprovocante,et
avala sa salive. Elle ne voulait pas de pitié. Elle voulait tout. Sans ménagement. Sans retenue. Ellevoulaitladouleurquisetransformaitenunplaisirdesplusexquis.Ellesetrémoussa,impatientequ’ilscommencent.Onl’empoignaparlescheveux,etaudébut,ellenesutdires’ils’agissaitdelamaindeDrakeoude
celle deManuel ; c’était celle deManuel, qui la tira violemment en arrière pour lamettre face à unénormepénisenérection.Drake.Ellegémitetseléchaleslèvresenattendantlasuite.LerâledeDrakenoyalesien.—Tumetues,Ange.—Ouvre,ordonnaManuel,savoixclaquantdansl’aircommeunfouet.Toutsignedel’amanttendreavaitdisparupourlaisserplaceàunmâledominant,féroceetautoritaire.Obéissante, elleouvrit laboucheetDrake s’enfonçaà l’intérieur, l’emplissantde songoût familier.
Ellelécha,fittournersalangueautourdesonglandetlelongdesonmembrealorsqu’ils’enfonçaitdanssagorge.Ellegonflalesjouespourlerecevoir,etl’étaudelamainseresserradanssescheveux.—Voilà,grognaManuel.Prends-le.Avale-letoutentier.Commetuvasm’avalermoi.Commeauparavant,iln’yeutpasd’avertissement,pasdepréambulenidepréliminaire.Illapénétra
d’un puissant coup de reins et elle poussa un cri, étouffé par le sexe de Drake. Bon sang, c’étaitdouloureux…Unedouleurdélicieuseetdécadentequiétait labienvenue.Elleétait tendue,pasencoretotalementprêteàlerecevoir,cequilarendaitplusétroiteencore.—Çafaitmal,mamignonne?demandaManueld’unevoixsoyeuse.
—Mmmm.Un riremontade lapoitrinedeManuel etvibracontre ses fessespuisqu’il étaitplaquécontreelle,
enfouiauplusprofonddesonintimité.—Cen’estqueledébut,luimurmuraManueldansl’oreille.Jevaistefaireencoreplusmal,maisjete
jurequetuvasadorerchaqueseconde.Oh oui. Elle adorerait. Cela ne faisait aucun doute. La douleur liée à l’interdit était une sensation
grisante et euphorisante comme jamais elle n’en avait connu dans sa vie. Jamais elle n’aurait penséapprécierl’infimelimiteentre«trop»et«pasassez».Quand il lapénétraunenouvelle fois, elle se tendit, chacundesesmuscles secontractantalorsque
l’orgasmemontaitenelle,menaçantd’éclatermalgréelle.Manuel se retirade soncorps endolori etDrakeplongeadans lesprofondeursde sagorge.Manuel
abattitsamainsursonculd’uncoupcinglantquilatiradel’euphoriebrumeusequil’enveloppait.—Nejouispas,dit-ildurement.Outuaurasdroitàpirequemamain.Ellerespiratantbienquemalpar lenez, luttantpourfairepasser l’airautourdusexedeDrake,qui
n’avaitpasbougé.Ellecommençaàsedébattre,maisManuelcinglaviolemmentsonautrefesse.— Encaisse. Tu n’as pas le contrôle. Nous faisons de toi ce que nous voulons. Tout ce que nous
voulons,Evangeline.Tucomprends?Ellehochalatête,ouessayadumoins.Ellefermalesyeuxetfitsonpossiblepoursedétendre.Pour
faireredescendresonextasetouteproche,mêmesisoncorpsfourmillaitcommesielleavaitreçuunchocélectrique.Puis Drake se mit à lui baiser la bouche, prenant sa bouche comme si c’était son sexe. Manuel
l’empoignapar lescheveuxpour tirersa têteenarrière,demanièrequ’Evangelinenepuisseéchapperauxva-et-vientastreignantsdeDrake.PuisManuel appliquaungel frais à la jointure de ses fesses et pressa sonpouce à l’intérieur pour
lubrifiersonorifice.—Pastrop,dit-il,unsouriredanslavoix.Jeveuxquetulesentesquandjeteprendslecul.Commesiellen’allaitpaslesentir.Commeprécédemment, il ne lui donnapas le tempsde se préparer ni de s’ajuster. Il était sur elle,
agrippait toujours fermement ses cheveux tandis que, de l’autre, il lui écartait les fesses avant des’introduiredansl’étroitorifice.Elleouvritgrandlesyeux,souslechoc,sachantqu’ilétaitàpeineàl’entrée–etpourtant,elleavait
l’impressionqu’illuiavaitmisunebattedebase-balldanslefondement.Bordel.Ellenesurvivraitjamais.—Prends-moi,dit-ildurement.Toutentier,Evangeline.Prends-moimaintenant.Ildonnauncoupdereins,l’ouvrantsanspitiéd’unmouvementbrutal,s’enfonçantsiprofondémenten
ellequeseshanchesaplatirentlerebondidesesfesses.Elle était complètement remplie.Drake dans sa bouche, sa gorge, etManuel dans son cul. Prise au
piègeentredeuxmâlesalphadominants.Leparadis.Se souvenant de la directive de Manuel – elle ne devait pas jouir avant eux –, elle entreprit de
s’occuper de Drake, le comblant à l’aide de sa langue, l’aspirant dans sa bouche jusqu’à ce qu’ill’empoigneparlescheveuxpourlateniralorsqu’illuiprenaitlaboucheparà-coups.—Voilàunegentillefille,ronronnaManuel.Tananaveutjouir,Drake.—Oui,c’estbienvrai.Etelleaététrès,trèsgentille,doncjepensequenouspouvonsluidonnerce
qu’elleveut,ditDraked’unevoixrauqueetsoyeusequifitfrissonnerEvangelinedeplaisir.Sansunmotdeplus,leshommesadoptèrentunrythmeimplacable;Evangelineétaitàboutdesouffle,
dansunétatsecond,toutelapiècesebrouillaautourd’elle.Sonorgasmeexplosa,ilsedéployacommelesdouxpétalesd’uneroseenété,maisellelerepoussapourseconsacrertoutentièreàdonnerautantdeplaisiràDrakequ’elleallaitenrecevoir.LemembredeManuelsegonfladefaçonincroyable,sescoupsdereinssefirentpuissants,frénétiques,
seshanchesclaquaientbruyammentcontresesfesses.Sesmainsagrippaientsonbassin,laserrantsifortqu’elle porterait la trace de ses doigts pendant des jours. Puis, avec un cri, il s’arracha à elle, cetteabsencesoudainedesalargeprésencelafaisantgémir.Drakeseretiraégalementdesabouche,etellesentitdeuxjetsdespermel’éclabousserenhauteten
basdudos.C’étaitlasensationlaplusdélicieusementobscènequ’elleaitjamaisconnue.Quiauraitcruqu’elle,quin’avaitaucuneexpériencesexuellequelquesmoisauparavant,feraitunplanàtroisdécadentavecdeuxdeshommeslesplusséduisantsqu’elleaitjamaisrencontrés?Etl’und’euxluiappartenait.Elle retint son souffle quand elle sentit le bout dur de…quelque chose… titiller son sexe, puis les
doigts deManuel qui caressaient lentement son clitoris palpitant. Elle écarquilla les yeux, stupéfaite,quand l’objet se glissa en elle, gros et dur ; elle comprit que ce devait être un vibromasseur ou ungodemiché,quelquesoitlenomdecesex-toy.—Que veux-tu, Evangeline ? Que ce soit lent et doux, ou rapide et brutal ? demandaManuel en
s’immobilisant.—Lentetdouxavectamain.Rapideetbrutalavecle…Elles’étrangla,nesachantpasexactementcedontilseservait.Manueleutunpetitrire.—Gode,Evangeline.Tuasungodedanslachatte.Ettesdésirssontdesordres.Ilsemitàlacaresserlentementetavecdouceur,commeellel’avaitdemandé,puisfitalleretvenirle
godemichésansménagementenelle,luitirantuncrideplaisiralorsquesoncorpssetendaitcontrelesliensquilaretenaientcaptive.Drake semit àgenouxdevant elle, lesmains emmêléesdans ses cheveux, et lui redressa lementon
pour l’embrasser. Ilglissa sa languedans sabouche, lagoûta, ladévora. Il avala sescris, inspira sessoufflesetluidonnalessiens.Etquandellejouit,ellecriadeplaisirdanssabouche,lesonétoufféparsalangueetseslèvres.Ellesemitàtrembler,commeparcouruededéchargesélectriques,quandManuelretiralegodedeson
vagin encore saisi de spasmes. Ses parois s’agrippaient à l’objet, ne voulant pas se départir de cettesensation exquise de satiété.Mais ce n’était rien comparé à l’authentique : elle voulait les queues deManueletDrake.Profondémentenelle.Éjaculantenelle.Lamarquant,lapossédant,prenantpossessiond’elle.TandisqueDrakecontinuaitdelacouvrirdebaisersetdecaresses,Manuellalibéradesesentraves.
Elleselaissaallersurlebanc,tropengourdiepourbouger.Heureusementpourelle,ellen’eutpasàlefaire.Drake la prit dans ses bras et alla s’asseoir sur le canapé, l’installant sur ses genoux. Manuel
réapparut,unverreàlamain,etleportaauxlèvresd’Evangeline.—Bois, dit-il avec douceur.Tudois avoir soif.Nous devons prendre soin de notre dame, ce soir.
Nousnevoudrionspasqu’elles’épuise.Ellesouritetleregardaàtraverssescils.—Aucunechancequecelaarrive.
EllebutgoulûmentsousleregardfascinédeDrake,ébahideressentirunetelleexcitationsimplementenlaregardantboire.Toutenelleéveillaitsondésir.Ilsavaitqu’ilavaitdusouciàsefaire,maispourlapremièrefoisdesavie,ils’enfichaitcommedel’anquarante.Parfois,celanedérangeaitpasunhommed’êtreattrapépourdebonet troussécommeunedindede
Noël.Quelhommeavaitlachanced’avoirunefemmecommesonange?ElleavaitsentiledésespoiretlasolitudedeManueletavaitréagicommeilauraitvouluqu’ellelefasse.Aveccompassion,etunetelledouceur…Ilétaitencore tôtet iln’avaitnullementépuisésonpropredésird’Evangeline.D’aucunsauraientpu
direqu’ilétaitperturbé,nonseulementdepermettremaisdedemanderàunautrehommedesoumettreetdebaisersafemme.Celaluiétaitégal.Celafaisaitbienlongtempsqu’ilnecherchaitplusd’excusesoud’explicationspour justifier lesbesoinset lesdésirs sombresqui l’animaient. Il était certaineschosesqu’ondevaitaccepter,etcelle-cienfaisaitpartie.Permettre à un autre homme de toucher samaîtresse, sous sa surveillance, ne diminuait en rien sa
possessivitéquantàEvangeline.Aucontraire,cela le rendaitencorepluspossessif,car il savaitqu’ilavaitdelachanced’avoirtrouvéunefemmequilecomprenait.Unefemmequisepliaitvolontiersàsestraverssexuels.Quiyprenaitmêmeautantdeplaisirquelui.EtilsavaitqueManueln’étaitpasencoresatisfait.Ilneleseraitpasnonplusquandlanuitseraitfinie,
maisc’étaittoutceàquoisonamiauraitdroit.Unenuit.Jamaisunarrangementrégulier.Seulementàladiscrétionetàl’enviedeDrake.Les deuxhommes avaient une chose en commun : l’envie de faire plaisir àEvangeline et de lui en
donner.La faire jouir encore et encore, l’entendre gémir de plaisir, crier d’extase, et voir la lueur desatisfactiondanssesbeauxyeuxbleusvoilésdepassion.DrakeéchangeaunregardavecManuel,quihochasimplementlatête.Lemomentétaitvenu.Manuel
tendit lamainàEvangeline,quiglissa sesdoigtsdans sapaumepourqu’il l’aideà se lever. Il laissacourirsesmainssursoncorps,encaressachaquecourbe,avecuneattentiontouteparticulièrepoursesseinsrebondisetsesfesses,avantdeplongerentresescuisses.Lesyeuxd’Evangelinesevoilèrent,sespupillessedilatèrentalorsquelapassionl’enivrait.—Retourne-toi,ordonnaManuel,lalibérantdesonemprise.Obéissante,ellefitcequ’ildisait,puisManuella tiracontreluietreculajusqu’aucanapé.Ils’assit
maisposaunemainfermecontreledosd’Evangelinepourluiordonnerderesterlàoùelleétait.Drakelui jeta le lubrifiant etManuel en couvrit généreusement sa verge, allant et venant avec samain pourbanderautantqueDrake.C’étaitEvangelinequiavaitceteffetsurlui.Saqueueétaitdressée,àplatcontresonventre.Ilétaitsur
lepointd’explosertantilavaitenvied’êtreenelle,etdesavoirquelesexedeManuelluirempliraitlecul,larendantparfaitementétroite,fitdéjàjaillirunpeudefluidedesonpropresexe.—Assieds-toisurmoi,ditManuelavecunecertainetensiondanslavoix.Reculedoucement.Jevais
teguider.Posetesmainssurtesfessesetécarte-lespourmoi.Lerosemontaauvisaged’Evangeline,delabasedesoncoujusqu’auxjoues.Maisunefoisencore,
elle fit ce qu’on lui ordonnait de faire. Drake ressentit un vif élan de fierté : sa concubine était sifantastique.Saconcubine.Elleluiappartenait,àluietàluiseul,etl’officialisationdeleurrelationfaillitlefaire
tomberàgenoux.Luiquin’avaitjamaisclaméqu’uneautrefemmeétaitsienne.Luiquin’avaitjamaiseupersonne,àpartsesfrères.Personneàquiiltienne.Personnequitienneàlui.C’était à la fois une leçon d’humilité et une source d’adrénaline. Une révélation renversante qu’il
n’auraitjamaiscruepossible.Maisseshommessavaientqu’ilmarqueraitsonterritoire.Ilétaitévident
auxyeuxdetousqueDrakeétaitbeletbienprisaupiège,etcelaluiétaitbienégalquetoutlemondelesache.Drake avait été réticent à officialiser sa relation, comme l’avaient proposé ses frères.Hésitant. Et,
oui… terrifié.Lui qui ne craignait rien ni personne.Pourtant, une femme fragile lui fichait la trouille.Deuxmoisplustôt,ilauraitriaunezdeceluiquiauraitsuggéréqu’unetentatriceblondeauxyeuxbleuslemettraitàgenoux.Enapparence,c’étaitluiledominant,luiquiavaitlecontrôle,maisilconnaissaitlavérité.Iln’avaitaucuncontrôledanssarelationavecEvangeline.Ilremueraitcieletterrepourlarendreheureuse,feraittoutpourlagarder.Danslesfaits,ilétaitàsamerci.IlregardaEvangelinesuivrelesordresdeManueletlelaisserluiattraperleshanchespourl’asseoir
sursesgenoux.Elleglissasesmainssursesfessesavechésitation,puisellelesécarta,lesoufflecourt,levisagetoujoursempourpré,enproieàunecertaineincertitude.Elleavaitbeauêtregênéeetmanquerdeconfianceenelle,elleobéissaitauxordres.Pourlui.Alors
qu’elleselaissaitguiderparlesmainsfermesdeManuel,elleplantasesyeuxdansceuxdeDrakesanssourciller,commepourluidire:«C’estpourtoi.Rienquepourtoi.Toujourspourtoi.»Sapoitrinesecomprimapresquedouloureusementetilfaillittrahirsonémotionenselamassantpour
chasser cet inconfort passager. Puis elle ferma les yeux, le front creusé, le souffle saccadé, alors queManuellapénétrait.—Ouvrelesyeux,Ange.Regarde-moi.Nevoisquemoi.Elleobéitaussitôt,etilseperditdanslabrumequidansaitdanssonregard,danslebleudesesyeux
plusbrillant,l’invitantàs’yperdre.Ilétaitdéjàperdusansespoirderevenirenarrière.Iln’enavaitaucuneenvie.EllepoussaungémissementquandManuellatirad’uncoupverslebas,lapénétranttoutentier.Ilse
laissatomberenarrièrecontrelecanapé,lesdoigtsplantésdansleshanchesd’Evangeline.Iltenditlesjambespourécartercellesdelajeunefemme,detellesortequesonvaginétaitouvertetoffertàlavuedeDrake.Manuel se laissa glisser sur le canapé pour qu’Evangeline se retrouve perchée au bord du coussin,
danslapositionparfaitepourDrake.Ilnebougeaplus,l’orificed’Evangelinelargementdistenduautourdesonsexe.Ilsemblaitpresqueimpossiblequ’ellepuisselerecevoir.Lapositionrendaitl’accèsàsonvaginsiétroitqueDrakedevraitmanœuvrerpourentrer.Lasimplepenséedeson intimitéessayantderepousserson invasionetde l’étroitessedesesparois
autour de son sexe l’excitait au plus haut point, et davantage de fluide s’échappa de son gland. Il nepouvait y avoir sensation plus incroyable que celle de ses parois velouteuses autour de son sexe,contractéesetrésistantesalorsqu’illapénétrait.Bordel,s’ilparvenaitàs’enfoncer toutentierenelle, iléjaculeraitendeuxsecondes. Ilne tiendrait
jamais,luiquiétaitpourtantconnupoursoncontrôleetsadiscipline.Seulement,iln’enavaitpasavecEvangeline.Ellelemettaitdanstoussesétats,iln’avaitplusaucunemaîtrisedesajouissance.Mais il comptait bien profiter de chaque minute – ou plutôt seconde – passée en elle, son vagin
absorbantchaquegouttedesonsperme.Etcettefois-ci,iln’allaitpasseretirer.EtManuelnonplus.Ilsallaientl’inonderdespermejusqu’àcequ’ilcoulesursescuisses,tracevisibledeleurpossession.Evangelineneditpasunmot.ElleétaittropdisciplinéeetdéterminéepourdécevoirDrakeenminant
sonautorité.Maisc’étaitdanssesyeuxaussiclairquesiellel’avaitdemandéàvoixhaute.S’ilteplaît.Commes’ilpouvaitluirefuserquoiquecesoit.—Ouvre-laplusgrand,ordonnaDrakeàManuel.Evangelineécarquillalesyeuxet lesbaissamachinalementverssescuissesdéjàlargementécartées,
commesiellesedemandaitcequeManuelpouvaitouvrirdavantage.Les yeux de Drake étaient rivés sur son sexe à présent grand ouvert ; les lèvres roses, enflées,
appelaientsacaresse.Ilvoulaitlatoucher,lagoûter,maisilauraittoutletempspourçaplustard.Dansl’immédiat,saqueueallaitexploseràlasimplepenséedecetétaudélicieusementétroitquin’attendaitquelui.Lachairsoyeuseluisaitd’humidité,larendantaccueillante.Elleétaitmouillée.Trèsmouillée.Malgré
cela, ça n’allait pas être facile de pénétrer en elle. Il allait devoir y aller doucement au risque de ladéchirer,etiln’avaitaucuneenviedeluifairemal.Ilyavait ladouleurquiétaitaussiduplaisir, et ladouleur toutcourt. Jamais ilne lui feraitmalen
satisfaisantsespropresdésirségoïstes.Ilsepositionnaentresesjambesécartées,empoignantsonsexeenérectiond’unemain.Ilfitglisserson
glandcontreseslèvres,chatouillantsonclitorispuistitillantsonouverture.Ellegémitéperdumentet,malgrélaprisefermedeManuelsurseshanches,ellelessoulevacommesi
ellevoulaitprendreDrakeenelle.Ilfinitparenfoncersonglanddanssontrouétroitetavançaavecunepressionconstante.Souslechoc,elleouvritgrandlesyeux,embrumésdedésir.Elletrouvasonregardetileutl’impressionderecevoirunélectrochoc.Sesyeuxdisaienttout.Prends-moi.Jesuistienne.Çaoui,elleétaitàlui.Il la pénétra sansménagement avec un grognement, suant et jurant alors que le corps d’Evangeline
résistaitàsaprogression,seserrantautourdeluicommepourlerepousser.Lesvolontéss’affrontaientdanscecorpsà corps.LedésirdeDrakecontre lesdéfensesnaturellesd’Evangeline. Il allaitgagner.Évidemment.Pasquestionqu’ilensoitautrement.Les dents serrées, il se retira à peine avant de donner un violent coup de reins, la pénétrant
profondément. Cela déclencha un chœur de gémissements et de soupirs, mélange de réactionsd’Evangeline,deManuel,etdelui-mêmealorsqu’ilsétaienttoustroisauxprisesaveclafrontièreténueentreladouleurgrisanteetleplusdouxdesplaisirs.Dèsqu’ilfutentièrementenelle,lesparoisdesonvaginpalpitèrentautourdesonsexe,crispé,encore
plusmouillécommeelleétaitauborddel’extase.—Jouis,Ange,murmura-t-il.Jouisautantquetuveux.Ellepoussauncridestupeur,etsoncorpsentraenéruptionautourdelui,secouédespasmes,mouillé
ets’accrochantdésespérémentàsaqueue.Ildutserrerlesdentspournepasjouiraussi.Manuelgrognaetjura, ses mains bougeant sans cesse sur les hanches d’Evangeline alors qu’il tentait de prendre lecontrôle.Drakesemitàlapilonner.Ildonnaitdepuissantscoupsdereins,labaisantalorsqu’ellejouissait,puis
illasentitremueretsecrisperalorsqu’elleatteignaitl’orgasmepourladeuxièmefois.—Bordel,marmonnaManuel.Elleétait sauvageentreeuxdeux,donnaitdes ruades, semouvait sans réfléchir, sa têtesebalançant
d’avantenarrière,aucombledel’extase.Ellen’avaitplusaucuncontrôlesursoncorps.C’étaitàDrakedelepiloter.Des’enoccuper.Etc’estbiencequ’ilavaitl’intentiondefaire.Il lui donna un autre orgasme, puisManuel ne put plus tenir : il semit à soulever ses hanches, la
pilonnantdederrièrependantqueDrakelaprenaitpar-devant.Manuels’écroulasurlecanapé,soutenantencoreEvangelinepourDrake,commeunsacrificepaïen.Ileffleuralecoud’Evangelinedesaboucheetécartasescheveuxtrempésdesachairtendrepourlacouvrirdebaisers.MaisDraken’enavaitpasfini.
—Encoreun.Donne-m’enencoreun,ordonna-t-il.Jouispourmoi,Ange.—Jenepeuxpas,haleta-t-elle.—Si,tupeux.Malgrésondéni,ilsentitseschairsonduleretsutqu’ilnepourraitplustenirlongtemps.Maisilétait
déterminé à lui donner un plaisir suprême avant cela. Il ralentit donc la cadence, renonçant au rythmebrutalqu’ilavaitadopté,etlapénétraavecunelenteurinfinie.Putain,c’étaitsibon.Lasueurperlaitsursonfrontettoutsonvisageétaitcrispésousl’effort,untourmentdélicieuxléchantsonsexedesabaseàsongland.—Drake!cria-t-elle.Impuissante,elleagitalesmainsdanslesairs,commesiellenesavaitpasquoifaire.—Accroche-toiàmoi,bébé,dit-ild’unevoixrauque.Allons-yensemble.Toietmoi.Jouisavecmoi.
Maintenant.Elleplantasesdoigtsdanssesépaules,s’agrippantà luide toutessesforces,etDrakes’enfonçaen
elle,jusqu’àcequesestesticulestouchentsesfesses.Unefois.Deuxfois.Autroisièmecoupdereins,ilfutbaignéparlavaguechaudedel’orgasmed’Evangeline,cequidéclenchalesien.Ilsemitàallerplusfort,laremplissantdesasemencejusqu’àcequ’ellecouledesonsexe.Ildonnaunderniercoupdereinsetrestaenelle,sonsexepalpitant,expulsantcequiluisemblaêtre
deslitresdespermeenelle.Exténuée,elleselaissatombercontreletorsedeManuel,paupièrescloses.Subjuguéparcettevision,ilembrassasespaupièrespuissonnezetenfinsabouche,secollantàelle,
toujours en sandwich entre eux deux. Son torse se gonflait, la pressant davantage contre Manuel, etpersonneneditmot,nevoulantpasbriserlabrumesensuellequilesenveloppait.—Waouh,marmonna-t-elle,lesyeuxsemi-ouverts.Jecroisquevousm’aveztuée,maisjen’imagine
pasplusbellemort.C’était…incroyable.ManuelluimordillalecouetDrakeembrassasabouchesidélicieuse.—Contentqueça t’ait plu,Ange,mais je t’assure, tout leplaisir était pournous.Tunous asoffert
quelque chose de très précieux ce soir et ne crois pas que nous ne le savons pas, ou que nousl’oublierons.—Jamais,renchéritManueld’unevoixgrave.Tuesunefemmeàpart,Evangeline,etDrakedevrait
s’estimerheureuxde t’avoirvueet revendiquée lepremier, sinon tu seraisdansmon lit encemomentmême.Evangeline eut un sourire en coin, enivrée, ivre de plaisir. Elle ne réagit pas à la déclaration de
Manuel,dontDrakesavaitqu’elleétaitsincère–Manueln’étaitpasdugenreàdiredeschosesqu’ilnepensaitpas–,maisseconcentrasurDrake,amouretaffectionaufonddesyeux.Elletenditlamainpourlaposersursamâchoire,caressantsapeaurêchedesesdoigtsdesoie.—Jepeuxprendreunedoucheavantqu’onrecommence?Ilmesemblemerappeleravoirentenduque
nousavionstoutelanuit,etsijecalculebien,nousavonsencoredenombreusesheuresdevantnous.
Chapitre16
Evangelinefaisaitlescentpasdanslesalon.CesoiravaitlieulegaladebienfaisanceàCarnegieHall,et,bienqu’ellesachecequ’elleallaitporter,ellenesavaitabsolumentpascommentelleallaitsecoifferet semaquiller. Drake l’avait prévenue qu’il y aurait desmédias et des photographes partout, et ellen’avaitaucuneenviedeluifairehonteenayantl’airdelapauvrepetitecampagnardegauchequ’elleétait.Ellepritsontéléphoneportableettrouvalecouraged’appelerSilas.Ellefaillitraccrocheraumoment
mêmeoùlatonalitérésonna,maisseforçaàporterletéléphoneàsonoreille.—Evangeline?dit-ilàladeuxièmesonnerie.Toutvabien?—Oui.Non.Enfin,toutvabien.C’estjusteque…Ellesoupiraetselaissatombersurlecanapé.—Tuesàl’appartement?—Oui,répondit-elleplatement.—Jesuisàcinqminutes.J’arrivetoutdesuite.Ilmitfinà l’appelet lesilencesefitdans lecombiné.D’accord.Telleétait ladécisiondeSilas.Il
allait la trouver bien stupide quand il saurait pourquoi elle l’avait appelé. Elle poussa un soupir dedésarroiets’affalasurlecanapé.Ce fut à cet endroitmêmequeSilas la trouvaexactementquatreminutesplus tardquand il déboula
dansl’appartement.—Quesepasse-t-il?demanda-t-ilbrusquementens’asseyantàcôtéd’elle.—Tuvasmeprendrepouruneidiote,marmonna-t-elle.Il se contenta de la regarder, attendant manifestement qu’elle développe. Elle se redressa avec un
soupir.—Cesoir,Drakem’emmèneaugaladebienfaisanceàCarnegieHall.—Oui,et…?—J’ailarobeetleschaussures.Maisj’aibesoind’aidepourlacoiffureetlemaquillage.Jeneveux
pasfairehonteàDrakenimeridiculiser,expliqua-t-elle,deplusenplusnerveuse.Iladitqu’ilyauraitdesphotographesetdescaméraspartout.Silas,qu’est-cequejedoisfaire?Jen’aipasmaplacedansuneréceptionpareille.Jen’auraisjamaisdûaccepterd’yaller.Silaspinçaleslèvres.—Foutaises.Tuseraslaplusbellefemmedel’assemblée.Jetelegarantis.—J’imaginequetun’espasmamarrainelaféeetquetun’aspasdebaguettemagiquecachéequelque
part,dit-elle,abattue.LeslèvresdeSilasfurentsecouéesd’unpetitticavantdesefendred’unsourireauthentique.Ellefutsi
surprise qu’elle ne put que le fixer du regard, fascinée. Silas était toujours si sérieux etmaussade. Ilsouriaitsirarementqu’elleétaitabsolumentsubjuguéeàchacundesessourires.—Jen’aipeut-êtrepasdebaguettemagique,maisj’aidelaressource,dit-ilavecunemouearrogante.
Tupeuxêtreprêteàpartirdanscombiendetemps?—Pouralleroù?s’étonna-t-elle.—Je t’emmène te faire coiffer etmaquiller.Puis je te ramènerai ici envitessepourque tupuisses
t’habilleretêtreprêtequandDrakerentreradutravail.
—Tuconnaisquelqu’unquipeutmecoifferetmemaquiller?demanda-t-elleavecméfiance.—Queveux-tuque je tedise, je suisun touche-à-tout.Maintenant,bouge tes fessesetva t’habiller
pourqu’onpuisseyaller.Jevaisappelerpourqu’ilspuissentteprendretoutdesuite.Quatre heures plus tard, Silas et elle étaient de retour à l’appartement. Evangeline était glamour,
méconnaissable, grâce à un styliste qui tenait un salon huppé où les rendez-vous se prenaient dessemaines à l’avance. Silas, en revanche, avait manifestement ses entrées, car la personne qui l’avaitcoiffée et maquillée avait annulé tous ses rendez-vous de l’après-midi pour accéder à sa requête ets’occuperd’Evangeline.En sortant de l’ascenseur, elle s’arrêta dans l’entrée pour se regarder dans le miroir et fronça les
sourcils.—Cen’estpasmoi,dit-elle,inquiète.Ondiraitunepouledeluxe.Silaslatransperçadesonregardd’acier.—Je te jure,Evangeline. Je laisse passer pour cette fois,mais la prochaine, c’est la fessée.Tu es
sublime. Maintenant, va mettre ta robe et tes chaussures et viens me montrer le résultat. Tu as cinqminutes,alorsons’active.Ellesejetadanssesbrasetl’étreignit.Ilreculaentitubant,perplexe.—Merci,murmura-t-elle.Tues lemeilleur,Silas. Jenesaispasceque je ferais sans toi.Tues le
meilleuramiquej’aiejamaiseu.Il passa timidement ses bras autour d’elle et la serra contre lui, même s’il était manifestement
embarrasséparsonélansoudaind’affection.—Avecplaisir,Evangeline,dit-il chaleureusement.Maintenant,va te changerpourque jepuisse te
direcequej’enpense.Elleseprécipitadanslachambre,sortitlarobedudressing,etdézippalahousseavecprécaution.En
faisantattentionànepasaltérer sacoiffureetànepasmettredemaquillagesur la robe,elle l’enfila,avantdeserendrecomptequ’ellenepourraitpaslafermerelle-même.Tenantlecorsagecontresapoitrine,elleprit leschaussuresetlesenfila,avantd’enadmirerl’éclat.
Ellesecontempladanslemiroiretseditqu’auboutducompte,ellen’étaitpassimal.Lemaquilleurluiavaitdemandédequelle couleur étaient la robeet les chaussures et avaitutilisédes tonsbronzepourdonnerunéclatdoréàsapeau.La robe était d’un doré foncé brillant qui faisait ressortir lesmèches blondes de sa chevelure. De
petitesboucles tombaientdans soncouet encadraient sonvisage.Se souvenantde lapaired’énormesbouclesd’oreillesendiamantsqueDrake luiavaitofferte,ellealla lachercherdanssaboîteàbijouxavantdeprendrelecollierendiamantenformedegouttequiétaitplusgrosquesonpouce.Ellemitlesbouclesd’oreillesetpassalecollierpourqu’ilpendesursoncorsage.Puiselleregarda
sonpoignetnuethaussalesépaules.Pourquoipas?Aprèstout,ellen’avaitpassouventl’occasiondeporter lesonéreuxbijouxdontDrake lacouvrait.Siellene lesmettaitpascesoir,ellene lesmettraitjamais.ElleétaitunrefletdeDrakeetellevoulaitlerendrefier.S’ilétaitvraiqu’iln’étaitjamaisalléàune
réception publique avec une femme à son bras, cette soirée n’en était que plus épique pour elle.Elleattachalebraceletendiamantsàsonpoignet,satisfaitedurésultatfinal.Sestalonsrésonnantsurlesolenmarbre,elleretournadanslesalonaupasdecourse,tenanttoujours
sarobed’unemain.—J’aibesoind’aide,dit-elle,àboutdesouffle.TupeuxremontermafermetureÉclair?— Je devrais être sanctifié pour ça, marmonna Silas. Il y a des limites à ce qu’un homme peut
supporter,bordel.
Elleleregardasanscomprendre.Illevalesyeuxaucieletlafitpivoterpourfermersarobe.—Tunesaisvraimentpasqueleffettufaisauxhommes?Ellerougitjusqu’àlaracinedesescheveux.—Désolée,marmonna-t-elle.Jen’aipasréfléchi.—Jetetaquine,Evangeline.Jesuiscontentquetusoisassezàl’aiseavecmoipour,primo,m’appeler
parcequetun’avaispersonnepourtecoifferettemaquiller,etsecundo,medemanderdefermertarobe.Je t’ai suffisamment fréquentée pour savoir que tu n’accordes pas ta confiance facilement, et je suishonorédecompterparmicesraresprivilégiés.Illafitpivoterdansl’autresensetfitquelquespasenarrièrepourlacontemplerdelatêteauxpieds.—Tournelentementpourquejevoietout,luiconseilla-t-il.Elletournalentementsurelle-mêmeetritcommelarobebrillaitdanslalumière.—J’aivraimentl’impressiond’êtreCendrillon,dit-elleavecunlargesourire.—Tuesunique,Evangeline,ditsincèrementSilas.Ettrèsbelle.JesuiscontentdeveniravecDrakeet
toicesoir.Jeseraiceluiquimarmonnera«jetel’avaisdit»toutelasoiréependantquedeshommesseridiculiserontpourteplaire.—Maisc’estvrai!s’exclamaEvangeline.J’avaisoubliéquetuvenais.Jesuistellementcontente.Je
mesensbienmieuxdesavoirquetuseraslà.Ellelepritunenouvellefoisdanssesbrasetillatintavecprécautionparlesépaulespourqu’ellene
ruinepassacoiffureetsonmaquillage.Puis,àsagrandesurprise,ilpenchalatêtepourl’embrassersurlajoue.—Il fautque j’aillemechangersi jeveuxêtreà l’heurepourvousaccompagneraugala.Nelaisse
monterpersonned’autrequeDrakeouundesgars.C’estcompris?—Oui,monseigneuretmaître,plaisantaEvangelined’unevoixtraînante.LeregarddeSilass’embrasa.—Sinousétionsdansmonlit,tusauraisquec’estcequejesuisettuneplaisanteraispasavecça.Elleeutdespapillonsdansleventre,maisrefusadeselaisserdécontenancer.—Dehors, ordonna-t-elle.Tuessaies seulementdemedéstabiliser. J’ai cequ’il faut enmatièrede
seigneuretmaîtreenl’état,mercibien.Silasluidécochaunclind’œilavantderegagnerl’ascenseurd’unpasnonchalant.—Àtoutàl’heure,poupée.Neruinepasmonœuvred’art.Evangelinesemitenquêtedesontéléphone,espérantqueDrakeluiauraitenvoyéunmessagepourlui
dire à quelle heure il rentrait.N’y trouvant aucune notification, elle semordit la lèvre et hésita à luiécrireunmessage.Ils n’avaient jamais discuté de la possibilité ou non de lui écrire ou de l’appeler quand il était au
travail. Elle avait pris sur elle de ne jamais le faire parce qu’elle ne voulait pas le distraire ou ledéranger.Maislescoupless’envoyaienttoutletempsdesmessages.Audébut,elleavaiteudesraisonsde douter de sa place dans la vie deDrake,mais il lui avait clairement fait comprendre depuis leurréconciliationqu’iln’avaitpasl’intentiondelalaisserpartir.—Arrêtedefairetapoulemouillée,marmonna-t-elle.Elle aurait pu demander à Silas si c’était une bonne idée, mais elle n’y avait pensé qu’après son
départ.Navréeparsalâcheté,elletapauncourtSMSetappuyasur«Envoyer»avantdepouvoirchangerd’avis.
Salut.J’espèrequetuaspasséunebonnejournéeautravail.Jemedemandejusteàquelleheureturentres.Jesuisprête,jet’attends.Bisousbisous.Evangeline
Lefeuluimontaauxjoues.Ellesesentaitcomplètementstupide.C’étaitquoice«bisousbisous»?
Ellesecroyaitaulycéeouquoi?Sontéléphonesonnaetellesedépêchadetapersoncodepourlirelaréponse.
Je rentre dans quinze minutes. Bonne journée. Sera encore meilleure quand jeretrouveraimonange.Bisousbisousàtoiaussi.D.
Unmilliondepapillonsprirentleurenvoldanssapoitrineetellesentitunsourires’esquissersurses
lèvres.Lasoirées’annonçaitidyllique.ElleadoraitNoël.Leschants,lesdécorationsetleslumières.UnesoiréeàCarnegieHallpourledébutdesfêtesdefind’année:ellenepouvaitrêvermieux.EtyêtreaubrasdeDrake?S’aventureroùaucuneautrefemmen’étaitalléeavantelle?Un gloussement lui échappa quand elle réfléchit à la direction que prenaient ses pensées. Puis elle
poussaunsoupirsongeur.Drakeensmoking,elleàsonbraspourquelemondeentierlavoie.Laperfectionabsolue.
Chapitre17
Drake serra lamain d’Evangeline quand la voiture s’arrêta derrière d’autres véhicules attendant dedéposerleurspassagerssurletapisrougedevantCarnegieHall.—Tuessplendide,bébé,dit-ild’unevoixchaleureuse.Elle avait les yeux rivés sur lamassedegensqui sepressaient à l’entrée et sur les caméras et les
photographes.Lesflashscrépitaientparvaguesàmesurequelesgenssortaientdevoiture.DouxJésus.Drakel’avaitprévenue,certes,maisellenes’étaitpasattendueàcela.C’étaitcommes’ilsétaientdescélébritésouquelquechosedanslegenre.—Respire,Ange,murmuraDrake.Maddox,Silasetmoisommestousavectoi.Ilnet’arriverarien.Je
telepromets.Elle avala la boule qui lui serrait la gorgemais elle revint aussitôt lorsque la voiture avança : ils
étaientlesprochainsàdescendre.Laportières’ouvritetDrakesortit,assombrissantuninstantl’intérieurde la cabine de son imposante silhouette. Instantanément,Maddox et Silas se flanquèrent à ses côtéstandisqu’iltendaitlamainàEvangeline.Il l’aida à sortir de voiture et elle se retrouva debout à côté de lui dans l’air frais de la nuit.Elle
frissonna, éblouie et hébétée par le flot de lumières crues et les flashs des appareils photo venant dequarantedirectionsdifférentes.ElletressaillitquandlesgenssemirentàhurlerdesquestionsàDrake.Maddoxattrapal’autremain
d’Evangeline et la serra pour la rassurer. Il la bloqua entreDrake et lui pour la protéger, Silas justedevantelle.Ilsformaientainsiunebarrièreimpénétrableautourd’ellepourcontrerquiconquevoudraitl’atteindre.—Souris,luiglissaMaddoxàl’oreille.Tuasl’airterrifié.Fais-leurunsourireàtomberparterreet
montre-leurtesbeauxyeuxbleus.Elleeutl’impressiond’êtreunrobotprogrammépourobéiràlavoix.Elleaffichaunsilargesourire
qu’elleeutl’impressionquesesjouessefendaient.Elles’efforçadesedétendreetdefairecommesiellepassaitleplusbeaumomentdesavie,entouteinsouciance.Elleseforçamêmeàregarderdirectementcertainsappareilsphotoavecunsourireéclatant.QuandilseurentfinileurtourdepisteetqueDrakeeutessuyédelamaindesdemandesd’interview,il
latiradanslebâtimentetelles’avachitdèslesportesfranchies.—C’estdingue!souffla-t-elle.—Viens,allonscherchernosplaces.Plusvitenousseronsassis,plusvitenoussortironsdelalignede
tir,ditDrake.—Çava,poupée?demandaSilasàvoixbasselorsqu’ilss’assirentdansunelogeprivéeau-dessusde
la scène. Tu as besoin d’aller te rafraîchir avant que ça commence ? Maddox et moi pouvonst’accompagnerauxtoilettespourdames.Reconnaissante de pouvoir se reprendre et vérifier sonmaquillage pour s’assurer qu’il n’avait pas
coulé,ellehochalatêteetseleva.Drakeluiattrapalamainetlaportaàsabouchepourdéposerundouxbaiseraucreuxdesapaume.—Reviensvite,Ange.ElleluiadressaunsourireradieuxavantdeprendrelebrastendudeSilaspourselaisserguiderhors
delasalle,àtraverslehall,jusqu’auxtoilettes.—Noust’attendonsici,ditMaddox.Nemetspastroplongtemps.Personnen’entreraaprèstoi,maisil
sepeutqu’ilyaitdéjàdespersonnesàl’intérieur.Faiscequetuasàfaire,vitefaitbienfait,d’accord?—Compris,dit-elleavecunsourirereconnaissant.Elleentradanslestoilettesetallaseposterdevantlemiroirpourvérifiersonmaquillage.Ellepritun
mouchoir pour tamponner les coins de ses yeux avant de remettre dugloss à lèvres.Elle entendit unechasse d’eau et, suivant le conseil deMaddox, elle se retournait vers la porte pour sortir, quand unegrandebruneéléganteseplantadevantelle.—Excusez-moi,soufflaEvangelineencontournantl’autrefemme.—Oh,vousdevezêtreladernièreconquêtedeDrake,ditlafemmed’untonmoqueur.Lagrossièretédel’inconnueinterloquaEvangeline.—Pardon?Labrunesourit.—Profitez-entantqueçadure,mabelle.Etcroyez-moi,çanedurerapas.Drakenerestejamaisavec
lamêmefemmeplusdequelquessemaines.Maislesavantagessontincroyables.Etentrevousetmoi,sijamaisilinviteManuel?Soyezprêteàpasseruntrèsbonmoment,ronronna-t-elle.SesmotstranspercèrentEvangelinecommedeslamesacérées.Ellefutprisedenausées,maiselleétait
tropfièrepourselaisserabattreainsi.Elleserepritetregardal’inconnuedehaut.—J’ignoredequoivousvoulezparler.QuiestManuel?Leriretintinnabulantdel’autrefemmeétaitabrasifetagaçant.—Oh,c’estunamideDrake.Ilspartagentlesmêmespenchants,sivousvoyezcequejeveuxdire.Et
lehasardfaitqu’ilspartagentaussileursconquêtesparfois.Evangelineluttacontrelasueurfroidequimenaçaitdeperlersursonfront.Ohnon,ellen’allaitpas
laissercettefemmeladémolirainsi.Ellelaregardad’unairméprisant.—VousneconnaissezpastrèsbienDrake,n’est-cepas?lança-t-elleavecdédain.—Assezbien,sedéfenditlafemmeenriant.—Non,crachaEvangeline.Vousne leconnaissezpas.Sinon,voussauriezqueDrakeestunhomme
extrêmement possessif qui n’a pas l’habitude de partager ce qui lui appartient. S’il vous a partagée,j’imaginequecelaimpliquequ’ilnevousconsidéraitpascommetelle.EtsivousconnaissezDrakeaussibienquevous ledites,alorsvouscomprenezaussi la significationdemaprésenceà sonbrasce soir.Maintenant,sivousvoulezbienm’excuser,leshommesdeDrakem’attendentdevant.Maisjedoutequevouslesayezdéjàrencontrés,n’est-cepas?Levisagepâleeteffarédelafemmefutladernièrechosequ’Evangelinevitavantdepasserlaporte.Elleauraitdû triompher intérieurementd’avoirgagnécontrecetteméchantegarcequiessayaitde la
remettreàsaplace,maiselleavaitjusteenviedepleurer.SilasetMaddoxsentirentimmédiatementladétressed’Evangelineetexigèrentdesavoircequin’allait
pas.—Rien,répondit-ellesèchement.Raccompagnez-moijusteàmonsiège,s’ilvousplaît.Elleavançad’unpasraide,sanssesoucierqu’ilslasuiventoupas.Ilsl’escortèrentjusqu’àlalogeet
elleseglissaàcôtédeDrake,lecœurbattantlachamade.Ducoindel’œil,ellevitDrakeladévisagercurieusementavantdesetournerbrusquementversMaddoxetSilas.Heureusement, les lumières se tamisèrent et les applaudissements retentirent : le concert débutait.
Quandlamusiquecommença,Evangelineputenfinmettreladéplaisanterencontreauxtoilettesderrièreelle.Temporairementdumoins.Lasymphonieétaitmagiqueetelleenadorachaquenote.
DrakeobservaitEvangeline,quis’imprégnaitde lamusique, l’airparfaitementenchanté.Ilse tournaversSilas etMaddox, assis juste derrière eux, et haussaun sourcil interrogateur.Quelque chose avaitcontrariéEvangeline,etilvoulaitsavoirquiétaitresponsable.Silassortitsontéléphoneet luifitsignequ’il luienvoyaitunmessage.Quelquessecondesplustard,
Drakeregardasontéléphone,sursilencieux,etdutsemordrelalèvrepourseretenirdejurer.Putaindemerde.
Tutesouviensdelafolleavecquituascouchél’annéedernière?Unegrandebrunequis’appelleLisa?ElleétaitauxtoilettesavecEvangeline,etquandEvangelineestsortie,elleétaittoutepâle.JesuissûrqueLisaluiaracontédessaloperies.
Drakeserralesdents,furieux.IlessayadeserappelercombiendetempsilétaitrestéavecLisa.Ça
n’avaitpasduré.Ilneserappelaitmêmepluscequ’ilsavaientfaitensemble.Pourtant,celanevoulaitpasdirequ’ellen’avaitpasremplilatêted’Evangelinedepoisonetgâchétoutesasoiréeparlamêmeoccasion.Bordel.Quand les lumières se rallumèrentà la finduconcert, leprésidentduconseildesdeuxassociations
pour lesquelles on amassait des fonds s’avança sur la scène pour prononcer son discours destiné àsolliciterautantdedonsquepossible.MaisDrakeenavait euassez, il refusaitde torturerEvangelinepluslongtempsquenécessaire.—Vachercherlavoiture,ordonna-t-ilàMaddox.Nouspartons.Evangelinesetournaverslui.—C’estfini?murmura-t-elle.—Lemeilleurestpassé.Leresten’estquediscoursetappelsauxdons.Puisquej’aidéjàfaitundon
entonnometaunomdemonorganisation,nousn’avonspasbesoinderester.Ellehocha la têteavec raideuravantdeconcentrerdenouveausonattention sur la scène.Quelques
instants plus tard, Silas tapota l’épaule de Drake pour lui indiquer queMaddox les attendait devant.Drake attrapa Evangeline par le bras et fit courir ses doigts sur sa peau pour lui prendre lamain. Ill’attiracontreluietpassasonbrasautourdesataillepourquitterlaloge.Silasaffichaituneminegrave,mais,surtout,l’inquiétudeselisaitdanssesyeuxtandisqu’ilobservait
l’airmaussaded’Evangeline.Dèsqu’ilsfurentsortis,Silassepostadevantellepourlaprotégerdesphotographesetdescaméras.
Quelqu’un lui hurla qu’elle était la dernière « pouf » de Drake ; Evangeline tressaillit, mortifiée,visiblementauborddeslarmes.Silasgrognaetfrappal’hommequiavaitcrié,etceladégénéra.DrakesoulevaEvangelineetplongea
dans la voiture, s’étalant de tout son long sur la banquette arrière.Dès queSilas prit place à l’avant,Maddoxdémarraentrombe.—Putain,ils’estpasséquoi?demandaMaddox.—Unconnardqui a injuriéEvangeline, grognaSilas.Tu feraismieuxd’appeler ton avocat demain
matin,Drake.Cesalaudl’amérité,maiscelaneveutpasdirequ’ilnevapasessayerdenouspoursuivreenjustice.—S’ilessaie,onluirendraunepetitevisite,aveclesgars,intervintMaddox,menaçant.—Çasuffit,ordonnaDrake.Evangeline était suffisamment paniquée. Elle n’avait nul besoin de découvrir cet aspect sordide du
mondedeDrake.
Illaberçatendrementcontresontorseencaressantsonbraspourlarassurer.Ildéposaundouxbaiserdanssachevelure.—Çava,Ange?murmura-t-il.Elle hocha la tête avec raideur, et il jura dans sa barbe.Quoi que cette folle lui ait dit, cela avait
profondémentaffectéEvangeline.—Posez-nousàlamaison,ordonnaDrake.SilassetournalégèrementsursonsiègepourregarderEvangeline.—Çava,poupée?demanda-t-ilavecdouceur.Drake eut l’impression de prendre un coup de poing dans le ventre quand les yeux d’Evangeline
débordèrent de larmes. Elle détourna vivement la tête pour dissimuler sa détresse aux deux hommes.Drakelaserratoutcontreluietcalasatêtesoussonmenton;lerestedutrajetsefitdanslesilence.Lorsqu’ilsarrivèrentenbasde l’immeuble,Silassortitetouvrit laportièrepouraiderEvangelineà
descendre.Drakesortitderrièreelleetpassasonbrasautourdesesépaules.—Mercipourtout,Silas,dit-elled’unepetitevoix.Aumoinsjefaisaisillusioncesoir,grâceàtoi.Silassaisitsonmentonaucreuxdesapaume.—Tunefaisaispasseulementillusion,Evangeline.Tuasbeaucoupplusdeclassequ’elle;cettetarée
net’arrivepasàlacheville.Ellerougitetdétournalatête.—Bonnenuit,Maddox,lança-t-elleensedirigeantversl’entrée.Drake la rattrapa au pas de course et la prit par la main en montant dans l’ascenseur. Une fois à
l’intérieur,illaserracontrelui,lementonsursoncrâne.—Ques’est-ilpassécesoir,Evangeline?Elle se crispa et enfouit son visage contre son torse. Il la laissa éluder la question le temps de la
montée.Ilsenparleraientunefoisqu’ilsseraientrentrés,et,avecunpeudechance,ilpourraitréparerlesdégâtsquiavaientétécausés.Lorsquelesportesdel’ascenseurs’ouvrirent,Evangelineessayadesesoustraireàl’étreintedeDrake
pourentrerdans l’appartement,mais ilgardasamain fermementdans la sienneet laconduisitdans lesalon,oùillapoussagentimentsurlecanapéavantdes’asseoiràcôtéd’elle,demanièreàluifaireface.—Quet’aditcettesalopedanslestoilettes,Evangeline?Il savait qu’il était sévère, mais il voulait à tout prix qu’Evangeline lui dise ce que cette garce
sournoiseavaitfait.Evangelineétaitmortifiée,ellerefusaitdecroisersonregard.Ilnevoulaitpasdecelanonplus.Ilposa
undoigtsursajouepourlaforceràleregarder.Ilsoupira.—Ange, tu sais qu’il y a eu d’autres femmes avant toi, dit-il avec douceur. Je n’ai jamais dit que
j’étaisunsaint,maisjepeuxtejurerqu’iln’yenapaseud’autresdepuisquejet’airencontrée.Jen’aimêmepasregardéuneautrefemme.Commentlepourrais-je?Tueslaseulequejeveux.Fait incroyable, c’était vrai. Depuis l’instant où Evangeline avait débarqué dans sa vie, les autres
femmesavaienttoutbonnementcesséd’existerpourlui.Evangelinedétournalesyeuxpourlesriversursesdoigts,qu’ellenecessaitdetordre.—Cen’estpasça,dit-elleàvoixbasse.—Alorsdequois’agit-il?—C’estcequ’elleadit,s’étranglaEvangeline.Elleadit…Ellefermalesyeuxetils’inquiétadevoirdeslarmesybrilleravantquesespaupièress’abaissent.À cet instant,Drake voulut traquer cette satanée garce et la détruire verbalement comme elle avait
manifestement détruit Evangeline. Quoi qu’elle ait dit, elle l’avait vraiment déstabilisée, l’avait faitdouterd’elle-mêmeetavaitmisuncoupàsaconfianceenelle.Etmerde.—Ellem’aditdeprofitertantqueçadurait.Quetunerestaisjamaislongtempsavecunefemme.QuandDrakevoulutprendrelaparole,ellel’interrompitd’ungestedelamain.—Cen’estpasça.Enfin, jesuispeut-êtrenaïve,commeonmelerappellesanscesse,mais jesais
reconnaîtreunefemmejalouseetsournoisequandj’envois–etenentends–une.Sesmotsétaientamersetcela rappelaàDrake l’Evangelinequ’ilavait rencontréepour lapremière
fois au club. L’Evangeline qui ne savait pas où était sa place dans lemonde, incertaine de sa proprevaleur.Ilavaitenviedecognerlesmurs.—EllesavaitpourManuel,ditpéniblementEvangeline.Ellem’ademandésituavaisinvitéManuelet
n’apasarrêtédedirequec’étaitsibon,quevoussaviezvousoccuperd’unefemmetouslesdeux.Etpourune fois, j’ai su trouverune répliqueacerbe.Pourune fois, jeme suisdéfendueet je l’ai remiseà saplace.Drakefronçalessourcils,perplexe.—Alorsqu’est-ceque…?Leslarmesbrillaientdanslesyeuxd’Evangeline,menaçantdetomber.—Jenesuispasfièredecequej’aidit,maisjenementiraipas:surlemoment,c’étaitbonparceque
pourunefois,jen’avaispasl’impressiond’êtreunelâcheouunevictime.Mais…—Maisquoi?l’encouragea-t-il.—MonDieu,murmura-t-elle.C’étaitunmensonge.C’étaitunpurmensongeetçafaitmal.Drakeétaitdeplusenplusfrustré.—Qu’est-cequiétaitunmensonge?—Jeluiaiditqu’ilétaitévidentqu’elleneteconnaissaitpasaussibienqu’ellelepensaitparcequetu
nepartageraisjamaisquelquechosequetuconsidèrescommetien,etlefaitquetul’avaispartagée,elle,montraitquetunelaconsidéraispascommetelle.Puisjeluiaiditquepuisqu’elleteconnaissaitsibien,elledevaitsavoirquetun’apparaissaisjamaisenpublicavecunefemmeàtonbrasetquesij’étaisàtescôtésàunévénementsimédiatisé,cen’étaitpaspourrien.—Tantmieux,bébé,ditDrakeavecdouceur,fierd’elle,fierqu’ellesesoitdéfendueainsi.Pourtant,ellesemblaitdépitée.Et…triste.Pourquoi?Elle levasesyeuxbrillantsde larmesvers lui.Desyeux inanimésqui luicoupèrent lesouffle :elle
semblaitsimalheureuseetsirésignéeàlafois.—Mais tum’aspartagéeavecManuel,murmura-t-elle.Toutcomme tuasmanifestementpartagé tes
autresconquêtesaveclui.Cequejepensaisêtrespécialn’étaitenréalitéqu’unechosequetuasfaitedesdizainesdefoisparlepassé.Jepensaisfairequelquechoseseulementpourtoi.Jevoulaisfairequelquechosequisoitjustepourtoi.Pourtonplaisir.Ilnes’agissaitpasdemoi.Çaadûtefairebienrire,quejepense fairequelquechosed’uniquepour toi.C’étaithumiliantdevoircetteexpressionentenduesur levisagehorribledecettefemme.Elleétaitsicontented’elleetsûrequejeseraisbientôtremplacée,quejen’étaisriend’autrequ’unenouvelleconquêtedansunelonguelistedefemmesavecquitucouches.Drake faillit exploser. Ce ne fut qu’au prix d’un effort incommensurable qu’il parvint à garder son
sang-froid,carsacolèreauraiteupourseuleffetdeterrifierEvangeline,etc’étaitbienladernièrechosequ’ilvoulait.PasEvangeline.Ilcultivaitunedosesainedepeurchezlesautres,mêmechezlesfemmesqu’ilavaitfréquentées.Iln’avaitaucunproblèmeàfairesavoirà tousqu’ils lepaieraientchers’ils ledoublaient.Mais plutôtmourir que de faire peur àEvangeline. Il voulait sa confiance.Sa foi absoluequ’ilneluiferaitjamaisdemal.
Sesmainstremblaientsouslecoupdelafureur.PascontreEvangeline.JamaiscontreEvangeline.Ilcomprenait parfaitement la source de sa contrariétémaintenant qu’elle lui avait avoué toute l’histoire.Commentexpliquerladifférenceentreelleettouteslesfemmesqu’ilavaitconnues?Déjàqu’iln’étaitpassûrdepouvoirsel’expliqueràlui-même…Ilsaisitlesmainsd’Evangeline,lesdénoua,etentrelaçasesdoigtsauxsiens.—Ange,regarde-moi.S’ill’avaitditsuruntontendre,c’étaitbienunordre.Àcontrecœuretavecunbondegrédegêne,ellelevalatêtejusqu’àcequesesyeuxtristessoientrivés
surlessiens.—Situpensesquecequej’aiavectoietcequejeressenspourtoinediffèreenriendecequej’aieu
ouressentiavectouteautrefemme,tuastort.Oui,Manuelaparticipé,àl’occasion,àmesébatsavecuneautrefemme,mêmesiçaaétéassezrare.Ladifférence,c’estqu’aucuneautrefemmen’ajamaisfaitunechoseaussidésintéresséequedemedemandercequejevoulaisetd’exprimersondésirdefairequelquechoserienquepourmoi.Ellesnepensaientqu’àelles.Àleursdésirs, leursbesoins.Ellessefoutaientdesmiens.IlestarrivéqueManuelparticipe,oui,parcequec’estquelquechosequej’aime,maisc’étaitsouventà lademandedemesconquêtes,et, crois-moi, leurattentionétait toujourscentréesurManuel.Ellesnepensaientpasunesecondeàmoi,nem’accordaientpasunregard.Monnomn’étaitpassurleurslèvres.Ellesnecherchaientpasmonapprobationnimapermission.Ellesnemettaientjamaisleurplaisirdecôtépourlaisserplaceaumien,etellesnesesontassurémentpasinquiétéesdesavoirsi,enprenantduplaisiravecunautrehomme,ellesm’avaientd’unecertainemanièretrahi.Ilrespiraungrandcoup,laissantsesmotss’insinuerenelle.Ellesemblasurpriseetpenchalatêtesur
lecôté.—Tueslaseuleàavoirfaitça,Ange.Laseuleàmel’avoiroffertencadeau,sanspenseruneseule
foisàtoi-même.Situcroisqueçaneveutriendirepourmoi,quetun’espasàpart,quetuesjusteuneautre de mes conquêtes, alors c’est que je fais tout de travers, et nous avons besoin de discutersérieusement.L’airchoqué, les jouesrouges, lesyeuxécarquillés,Evangelinescrutasonexpressioncommesielle
essayaitd’évaluersasincérité.—Et tusaisquoi,Ange?Tuasvu justeendisantque jenepartagerais jamaisceque jeconsidère
commemien,etnon,jen’aijamaisconsidérécesfemmescommemiennes.Toi,enrevanche,tuesmienneà touségards.Tum’appartiens. Je tepossède.Et jamais jene te laisseraipartir. Je saisqueçaparaîtcontradictoirepuisqueManuelestvenu–deuxfois–etque tuascouchéavec luisurmonordre,maisAnge,jen’étaispasentraindepartager,expliqua-t-ildoucementendesserrantsonétreintesursesmainspourprendresajoueaucreuxdesapaume.C’étaittoiquipartageaisquelquechosed’infinimentprécieuxavecmoi.Pourmoi.Etcrois-moiquandjetedisquecelaterenduniqueàmesyeux.—Oh,dit-elledansunsouffle,laboucheencœur.Jen’avaisjamaisvuçacommeça.—C’estunfait,ditfermementDrake.Jesuisdésoléqu’ellet’aitblessée.Jesuisencoreplusdésolé
qu’ellet’aitfaitdouter,neserait-cequ’uneseconde,detaplacedansmavie.Maisbébé,sic’étaituneautre femme à ta place qui se demandait ce qu’elle valait pourmoi, je l’aurais déjàmise dehors, caraucuneautrefemmenecompteàmesyeux.Levisaged’Evangelinesefroissa,lesregretsetexcusesvoilantsonregard.—Jesuistellementdésolée,Drake.Ilposaundoigtentraversdeseslèvresavantqu’ellenepuisseallerplusloin.—Net’excusepasd’êtreunêtrehumainetd’avoirdessentiments.Pasàmoi.Jamais.Maisàpartir
d’aujourd’hui, si tu entends des saloperies qui te contrarient, tu viensme voir pour que j’arrange les
chosesavantqu’ellesneprennentracinedanstonesprit.D’accord?Elleopina,bienquel’inquiétudehantâtencoresonregard.—Maintenant,viensparicietembrasse-moi,dit-ilàvoixbasse.Ellesepenchaaussitôtverslui;iladoraitqu’elleobéissesanshésitationniquestion.Siadorablement
soumise.Siparfaite.Ettouteàlui.Ildévorasabouche,fourrantsalangueenellecommeilmouraitd’envied’enfoncersonmembredans
sajoliepetitechatte.Ungémissementmontadesapoitrineetluiéchappa.—Aulit.Maintenant.C’étaient les seulsmots qu’il pouvait prononcer,mais ils traduisirent parfaitement sa volonté. Sans
attendrequ’elleselève,il lapritdanssesbrasetalladanslachambrepourprouversesdirespardesactes.Aprèscesoir,ilvoulaitqu’ellen’aitplusaucundoutequantàsaplacedanssavie.Danssoncœur.Etdanssonâme.
Chapitre18
EvangelinesetenaitsurletarmacàcôtédeDrake,attendantimpatiemmentquel’avionviennesegarerauterminal.Ellen’arrivaitpasàcroirequ’elleétaitsurlepointdevoirsesparentspourlapremièrefoisdepuisqu’elleavaitdéménagéenville,depuisuneéternitéluisemblait-il.Elle serra lamain deDrake si fort qu’elle devait être exsangue,mais il se contenta de lui sourire
tendrementetserrasamainenretour.—Levoilà,dit-ilenmontrantlepetitavionquiapprochait.—Çaalors,Drake.C’esteux!s’écria-t-elle.Lamétéon’étaitpasidéale.Unfrontfroidétaitarrivésubitement,déversantuneneigeàmoitiéfondue
surlavilledepuisdeuxjours.Cejour-là,ilsavaientdroitàuncrachinglacial,contrelequelleparapluiequeDraketenaitau-dessusdesatêtenepouvaitpasgrand-chose.Evangelinetremblaitdespiedsàlatête,maisleventetlapluienel’atteignaientpas.Elleétaittropheureusedevoirsonpèreetsamère.L’avions’arrêtaàquelquesmètresetelleretintsonsouffleenattendantquelaportes’ouvre.Quandsa
mère apparut en haut de l’escalier, Evangeline ne put plus tenir. Elle s’échappa des bras deDrake etcourutenbasdelarampepourattendresamère,aidéedanssadescentepardeuxassistants.Puisellefutdanssesbras.—Maman!Surlesjouesd’Evangeline,leslarmessemêlaientàprésentàlapluieetàlaneigeglaciale.—Monbébé,répétasamère,encoreetencore.Laisse-moiteregarder.ElletintEvangelineàboutdebraspourl’inspecterdelatêteauxpieds.—Oh,machérie,tuesabsolumentmagnifique,commenta-t-elled’unevoixétranglée.—Oùestpapa?—Ilsprennentsachaiseroulanteetleportentdansl’escalier.Tiens,levoilà.Evangelinesehissasurlapointedespiedspourvoirdeuxhommescréerunechaiseavecleursbras
poursonpèreetleporterprécautionneusementdansl’escalier.Enbas,onl’installaconfortablementdanssonfauteuil.—Viensfaireuncâlinàtonpère,mafille,dit-ild’untonbourru.Evangelinejetasesbrasautourdesoncouet leserradetoutessesforces.Leslarmestroublaientsa
vision,maiscen’étaitpasgrave.Riennecomptaitexcepté leurprésenceici :ellepouvait lesprendredanssesbrasetleurdirequ’ellelesaimaitenpersonne.—Ange,ma chérie. Je suis désolé de vous interrompre,mais tes parents sont en train de se faire
tremperet tu aspasséunedemi-heure sous lapluie à les attendre.Tuvas tombermalade.Allonsà lavoiture.Evangeline s’écarta de son père, honteuse d’avoir été si impolie envers Drake. Elle avait même
presqueoubliéqu’ilétaitlàetnel’avaitpasprésentéàsesparents.—Maman,papa,jeveuxvousprésenterunhommetrèsspécial.ElleattrapaDrakeparlamainpourletirerdanslecercle.—VoiciDrakeDonovan.Drake,jeteprésentemonpèreetmamère.Drakesepenchapourembrassersamèresurlajoue.—MadameHawthorn,c’estunplaisirdevousrencontrerenfinenpersonne.Jesaismaintenantd’où
Evangelinetientnonseulementsonespritetsonintelligence,maisaussisabeauté.Si jedoismefieràcettevisionpoursavoircequim’attenddanstrenteans,j’aibeaucoupdechance.Samèredevintécarlate.— Oh, n’importe quoi, dit-elle, momentanément trop troublée pour répondre. Et je vous en prie,
appelez-moi Brenda. Vous faites partie de la famille, après tout, et « madame Hawthorn », ça faitbeaucouptropguindé.—Toutleplaisirestpourmoi,Brenda,réponditDrakeavantdesetournerpourtendrelamainaupère
d’Evangeline.Honorédefairevotreconnaissance,monsieur.J’ai tellemententenduparlerdevousquej’ail’impressiondevousconnaître.—Grant,ditsonpèredesagrossevoix.Etjesuiségalementravidevousrencontrer,Drake.Jevous
suistrèsreconnaissantdeveillersurmapetitefille.L’inquiétudedelasavoirsiloinetdansunesigrandevillenousadonnébiendesinsomnies.Evangelineestuneprovincialedansl’âmeetelleesttropcandideetsensiblepoursonbien.—Noussommesd’accord,ditDrake.Maiscesontcesmêmesqualitésqui la rendentunique.Jene
changeraisrienchezelle.—Ilferal’affaire,Brenda,ditlepèred’Evangelineavecunhochementdetêteapprobateur.Jedirais
quenotrepetitefilleestentredetrèsbonnesmains.— Venez. La voiture est garée juste là. Il faut vous mettre au sec. Nous allons vous laisser vous
installeràvotrehôteletvousreposerunpeu,puisEvangelineetmoiviendronsvouschercherpourdîner.Ils gagnèrent en vitesse le monospace adapté aux fauteuils roulants que Drake avait loué pour ses
parentspendantleurséjour,fourniavecchauffeuretassistant.Drakeaidalesdeuxfemmesàmonterenvoiture pendant que les assistants faisaientmonter son père avant de charger les bagages à l’arrière.Drakes’installaàcôtéd’EvangelineetilsprirentladirectiondeTimesSquare,oùDrakeavaitréservéunesuiteauMarriott.—Tout est si grand ici,Evangeline, s’exclama samère.Etma parole, toutes ces lumières.Tout le
mondeestsipressé,c’estsianimé.Evangelinesourit.—AttendsdevoirTimesSquare,maman.C’estdingue,là-bas.Sesparentspoussèrentdes«oh»etdes«ah»duranttoutletrajet,maisquandsamèreaperçutTimes
Square,ellefutbouchebée.—Çaalors,maparole!Commentfontlesgenspourdormirlanuitavectoutcetapage?Drakes’esclaffa.—Leschambressontéquipéesdestoresoccultantspourque les lumièresnevousréveillentpas.Si
vousavezbesoindequoiquecesoitpendantvotreséjour,prévenezlaconciergerie,ilsvousfournironttout ce que vous voudrez. Evangeline vous a donné nos deux numéros de portable. N’hésitez pas àm’appelerpourquoiquecesoit,dejourcommedenuit.—Vousêtesunjeunehommecharmant,Drake,ditlamèred’Evangelineenluitapotantaffectueusement
lebras.Vosparentsdoiventêtrefiers.Drakesecrispalégèrement,sonregarddevintglacial,sonsouriren’atteignantpassesyeux.—J’aiperdumesparentsilyalongtemps.—Oh,jesuisdésoléedel’apprendre,réponditlamèred’Evangeline,peinée.Pardond’avoirabordé
lesujet.— Il n’y a pas de mal, Brenda, dit Drake avec davantage de chaleur dans la voix. C’était il y a
longtemps.Jen’étaisqu’unenfant.Jemesouviensàpeined’eux.Evangeline savait que c’était un mensonge. Les souvenirs qu’il avait d’eux n’étaient pas de bons
souvenirs.La relation qu’elle entretenait avec ses parents avait décontenancéDrake au début. Il avaitmême été en colère car il pensait qu’ils profitaient d’elle, parce qu’elle travaillait sans relâche pourpourvoiràleursbesoins.Cen’étaitqueplustardqu’ilavaitcommencéàcomprendrelesabyssesdesondévouementenverssesparents.Etinversement.Ilétaitévidentqu’iln’avaitjamaiseucegenrederelationaveclesgensquiluiavaientdonnélavie,et
elleavaitlecœurgrospourlejeunegarçonforcédeforgersapropredestinée.Commeavaientdûlefaireses hommes de main. C’était la seule chose qu’ils avaient tous en commun : des passés troubles etdifficiles.Ilsn’avaientpucompterquesureux-mêmes,etpersonned’autre.—Alors,quefaisons-nouspourThanksgiving,Evangeline?demandasamèrequandilsdescendirent
devoitureaupieddel’hôtel.Evangelinesourit.—Jecuisinepournous touschezDrake. J’adoreraisque tuviennesm’aiderpourqu’onse fasseun
grandfestincommeaubonvieuxtemps.—Oh,ceserait fantastique,machérie.Biensûrque jeviendrai t’aider.Ceserasiamusantdenous
retrouver toutes les deux dans la cuisine. C’est une cuisinière hors pair, Drake, vous n’êtes pasd’accord?—Ohsi,madame,répondit-il.Ellemegâterégulièrementdepetitsplatsfaitsmaison.Sijenefaispas
attention,jevaisdevoirrefairetoutemagarde-robe.Evangelinepouffa.Cethommeétaitbâticommeunearmoireàglace.Iln’avaitpasuncentimètrecarré
dechairentropsurlecorps–ellelesavait,puisqu’elleconnaissaitsoncorpsparcœur.Une fois ses parents enregistrés et leurs bagagesmontés dans la chambre, Evangeline les étreignit
aprèsleuravoirdonnél’ordredesereposeravantdîner,puis,aprèsavoirfixéuneheurederendez-vous,Drakeetelleprirentcongé.Evangelinedutuserdetoutesaretenuepournepasresteravecsesparentsdansleurchambred’hôtel.
Maisilsavaientbeletbienbesoindesereposer.Ilsavaientl’airtousdeuxépuisésetelleétaitinquiètepoursonpère.Iln’avaitpasl’habitudedevoyageretdefaireautantd’efforts.Sielleétaitrestée,nisonpèrenisamèreneseseraitreposé.Ilsseraienttousrestésdeboutpourpapoter.Drakeavaitdûsentirsaréticenceàpartir,car il lapritpar lamainet la tiracontresonflanctandis
qu’ilsregagnaientl’ascenseur.— Tu auras l’occasion de leur rendre visite plein de fois avant qu’ils ne repartent, dit-il pour la
réconforterenl’embrassantsurlatempe.—Jesais.C’estjustequec’estdurdelesquitterneserait-cequequelquesheuresalorsquejeneles
aipasvusdepuissilongtemps,dit-elleavecmélancolie.—Ilsontl’aird’êtredesgensmerveilleux.Commeleurfille.—C’esttoiquiesmerveilleux,Drake.Merciencoreinfinimentd’avoirorganisétoutça.C’estleplus
beaucadeauqu’onm’aitjamaisfait.Ellepassasesbrasautourdesoncouaumomentoùlesportesdel’ascenseursefermaient.Ilsfilèrent
verslerez-de-chaussée,etelletiraDrakeversellepourposerseslèvressurlessiennes.Ils étaient toujours connectés quand l’ascenseur ralentit. Evangeline s’écarta à contrecœur, les
paupièreslourdes.Ilssortirentdel’ascenseurpuisquittèrentl’hôtelparunepetiterueadjacenteoùJaxetThanelesattendaientdansunevoiturepourlesramenerchezDrake.—TupensesqueçadérangeraitMaddoxd’allerfairelescoursesavecmamèreetmoidemainmatin?
demandaEvangelinealorsqu’ilsseglissaientàl’intérieur.J’aibesoind’alleràl’épicerieachetertoutcequ’il faut pour Thanksgiving. Je me disais qu’elle pourrait venir avec moi, et papa pourrait rester àl’appartementenattendantqu’onrentre.
—Jepensaisprendremajournéedemain,jetiendraicompagnieàtonpère.J’aidonctoutelafindesemainesanstravailler,aveclejourférié.—Çanetedérangepas?—Biensûrquenon,çanemedérangepasdepasserdutempsavectonpère,Evangeline.Vapasserdu
tempsavectamaman.J’appelleraiMaddoxpourluidemanderdevenirtechercherdemainmatin.Avecunsoupird’aise,elleseblottitdanslesbrasdeDrake.Pendantlescinqjoursàvenir,elleaurait
les trois personnes les plus importantes du monde pour elle toute seule. La vie était absolument…parfaite.
Chapitre19
FidèleàlapromessedeDrake,MaddoxarrivalelendemainavecSilaspouremmenerEvangelineetsamèrefairelescourses.Evangelineétaitraviequesamèrepuisserencontrerlesdeuxhommesdesquelsellesesentaitleplusproche,mêmesielleavaitlesentimentqu’ilsnesauraientpasvraimentcommentsecomporteravecsamère.Etelle leur réservaitunesacréesurprise :ellevoulait inviterMaddoxetSilasà fêterThanksgiving
aveceux.ElleenavaitparlélematinmêmeàDrake,qui,quoiquesurpris,avaitacceptésansrechigner.Aucontraire,ilavaiteul’aircontentqu’elleaitpenséàlesinclure.Maddox et Silas étaient présentement dans le salon avecDrake et son père pendant qu’Evangeline
préparaitunpetitdéjeunerrapideetquesamèreétaitdanslasalledebains.—Maddox?Silas?appela-t-elle.Ilsapparurentdanslacuisinequelquessecondesplustardetelleleuradressaunsourireaccueillant.—Vousvoulezbienm’aideràmettrelatable?J’enaifaitassezpourtoutlemonde.Celaneprendra
pastroplongtempsetensuitenouspourronsallerfairelescourses,lalisteestprête.Maddoxhumal’airavecappréciation.Puisilserrasonpoingsurlapoitrinedansungestethéâtral.—Veux-tum’épouser,Evangeline?Laisse-moit’emmenerloind’ici.Enéchange,jenetedemanderais
qu’uneseulechose:cuisinerpourmoi.Enfin,ça,etcoucheravecmoi,biensûr.Situcuisinespourmoitouslesjours,jeferaiensortequetunemanquesjamaisderienpourlerestantdetavie.Silaslevalesyeuxaucieletsortitlesassiettesduplacard.Toutsourires,Evangelineenvoyaunbaiser
àMaddox.—Enréalité,lavraieraisonpourlaquellejevousaiappelésici,c’estquej’aiunedemandeunpeu
spéciale.LesdeuxhommessetournèrentverselleetSilassondasonvisageduregard.—Toutvabien,poupée?demanda-t-il,visiblementinquiet.— Oh, oui, tout va très bien. Je voulais vous demander si vous me feriez l’honneur de passer
ThanksgivingavecDrake,mesparents,etmoi.Maddoxeutl’airsciéetl’expressiondeSilassefigea.—Thanksgivingestunmomentàpartagerenfamille,poursuivit-elle.Etjevousconsidèrecommedes
membresdemafamille,touslesdeux.Çameferaitvraimentplaisirquevousveniez.Sivousn’avezriendeprévu.—Jeseraishonoréd’acceptertoninvitation,déclaraMaddoxd’untonsolennel.Silassepenchapourdéposerunlégerbaisersursajoue.—Jeserailà,poupée.Etmercipourl’invitation.Çametouchebeaucoup.Ellesourit,soulagéedelesvoirheureuxqu’elleaitpenséàeux.—Asseyez-vous.JevaischercherpapaetDrake,etonpasseàtable.Lepetitdéjeunerfutaniméetagréable,maislorsquelamèred’Evangelinecompritquesafilleetelle
allaientêtreescortéesparSilasetMaddoxpourallerfairelescourses,elledevinthystérique.—DouxJésus,Evangeline?Lavilleest-ellesidangereusequenousayonsbesoind’êtreescortéespar
cesdeuxtrèsbeauxjeuneshommes?Evangelines’étranglaenbuvantquandellevitlecoudeMaddoxvireraurougeetSilassetortillersur
sachaise.—Tuas raison, ils sont trèsbeaux,maman,n’est-cepas?ditEvangeline, lesyeuxpétillants.Mais
réfléchis.AvecdesgardescommeMaddoxetSilasàtescôtés,toutlemondevasedemanderquitues,situescélèbreouquoi.J’auraispeut-êtredûdemanderàZanderouJaxdeveniraussi,songea-t-elle.—Tuesunecoquine,moncherange,ditDrakeàvoixbassepourqu’elleseulel’entende.Ilavaitdesyeuxrieursetdissimulasonsourirederrièresonverre.—Mais oui, tu as raison ! s’exclama samère.Oh, n’est-ce pas excitant,Grant ?Attends que je le
raconte à tout le monde chez nous. Ils ne me croiront pas, évidemment. Tu prendras des photos,Evangeline,s’ilteplaît?L’expressionetlavoixdesamèreavaientrevêtutantd’espoirqu’Evangelinefaillitéclaterderire.—Bienentendu,maman.Jeprendraitouteslesphotosquetuveux.Jesuissûrequecelanedérangera
pasMaddox et Silas, n’est-ce pas ? dit-elle gentiment, avec un regard innocent à l’intention des deuxintéressés.Silasseraclalagorgeavantderegardersamère,lasincéritégravéesursestraits.— Ce serait mon privilège d’escorter la mère d’Evangeline en ville. Evangeline est une femme
sublime et extraordinaire, et l’une des personnes les plus compatissantes et aimantes que j’aie jamaisrencontrées.Jenepeuxquetirerlaconclusionqu’elletientçadesamère.Pourlegrandplaisird’Evangeline,samèrerougitjusqu’àlaracinedesescheveux,puiss’éventadela
mainàtoutevitesse.—OhmonDieu!Evangeline,quefais-tuavectouscesbeauxjeuneshommes?Lajeunefemmes’étranglaetDrakeserrasamainsouslatable,levisagesecouédetics:ilseretenait
derirefaceàl’airmortifiédesacompagne.MaddoxeutunsourireencoinetSilasaffichaluiaussiunsourireamusé.—Ellen’enfaitpasassez,ditMaddoxavecunecertainemorosité.Jepourraismangersespetitsplats
touslesjours.—Tuaurastoutpleindepetitsplatsdemamèreetmoidemain,ditEvangelined’untontranchant.Tu
vascomaterpendantdesjoursaprèsça.—J’aihâte,réponditMaddoxd’unairsongeur.—Tuesprêteàyaller,maman?demandaEvangeline.Lalistedescoursesestprête.Maddox,Silaset
toiavezdesdemandesspécialespourlerepasdedemain?—Crois-moi.Onmangeratoutcequetumettrassurlatable,poupée,juraSilas.—C’estbienvrai,renchéritMaddox.—Alorsallons-y!ditgaiementsamère.Jenemesouvienspasdeladernièrefoisoùunesortieau
supermarchéaétéaussiexcitante.Jecompteprofiterdechaqueseconde.EvangelineselevadetablemaisfutrattrapéeparlamaindeDrake,quilatirasursesgenoux.—Tun’oubliesrien,Ange?murmura-t-il.Ellefutperdued’abord;ellenesavaitpasdequoiilparlait.Puiselleaperçutlalueurdiaboliquedans
sesyeux.—Monbaiserd’aurevoir,peut-être?luisouffla-t-il.Ellerougitmaisfutsecrètementraviequecelaneledérangepasdel’embrasserdevantsesparentsou
seshommes.Ellesepenchaetl’embrassaavectendresse,passantsalanguesurlescontoursdesabouchejusqu’àcequ’ilentrouvreleslèvrespourlalaisserpasser.Ilétaitsidélicieux.Elleauraitvoulurestersursesgenouxetpasserl’heurequisuivaitànerienfaire
d’autrequel’embrasser.—Vas-ydoucementavecmeshommes,d’accord,Ange?dit-il,amusé.
—Tumefaispasserpourunefauteusedetroubles.—Maisdelameilleureespèce,murmura-t-il.Ellel’embrassaunedernièrefoisavantd’allercherchersonsac.—Toutlemondeestprêt?ThanksgivingfutlaplusmerveilleusedesfêtesdetoutesaviepourEvangeline.Samèreetelleavaient
commencéàcuisinerlematinetilsavaientmangépeuaprès14heurescetaprès-midi-là.Audébut,samèreavaitétéconsternéequandDrakeleuravaitditdenepass’occuperdelavaisselle,
maisquandilleuravaitassuréquesonservicedeménages’enoccuperait,samèreavaitbienvitechangéd’avisetétaitrestéevolontiersàl’écartdelapiledepoêles,casseroles,rôtissoires,verres,assiettesetautresustensilesdecuisine.C’étaitcesoir-làqu’elleavaitfaituncommentaireinnocentquiavaitdonnéuneidéeàEvangeline.Sa
mèreluiavaitdemandésiellecomptaitmettrelesapinlelendemain–unetraditionfamiliale,d’aussiloinqu’Evangelines’ensouvienne.Plus elle y pensait, plus l’idée prenait racine, sans qu’elle sache trop quel était le point de vue de
Drakesur laquestion–ilnesemblaitpasêtredugenreàs’enthousiasmerpour lesdécorations,quellequesoitl’occasion.Avant de se coucher le soir de Thanksgiving, elle appela Maddox en toute discrétion pour lui
communiquersademande.Quandlesparentsd’EvangelinearrivèrentchezDrake levendredimatin, ilsétaientaccompagnésde
tous ses hommes. Quand ils sortirent de l’ascenseur, les bras chargés de boîtes, de sacs, et clou duspectacle,dusapindeNoëldetroismètresdehaut,DrakefutébahietcherchaEvangelineduregarddanslafoulequipeuplaitsonappartement.Ellesouritmaisavaitlesnerfsenpelote.Elleespéraitvraimentqueçan’allaitpasmaltourner.Lerejoignant,ellepassasesbrasautourdesatailleetluisourit.—Surprise,souffla-t-elle.EtjoyeuxNoël.C’estunetraditiondansmafamille,d’installerlesapinde
NoëllelendemaindeThanksgivingetdelelaisserjusqu’aunouvelan.J’espèrequeçanetedérangepas.Jevoulaisfairequelquechosedespécialpourtoipendantqu’ilssontencorelàpournousaideràdécoreretpourprofiterunpeudusapin.—Tuasfaitçapourmoi?demanda-t-ilsuruntonindéchiffrable.Ellehochalatête.—Çateplaît?Illaserracontreluietl’embrassaavecferveur.—J’adore.Merci.—Evangeline,machérie,venezdoncaideràdécorerlesapin,Drakeettoi!s’écriasamèredepuis
l’autreboutdelapièce.Cesjeuneshommessesontsurpassés.Nousdevonsavoirquinzemillelumièresàmettresurcesapin!EvangelinesetournaversDrake,quihochalatête;ellel’attrapaparlamainetletirajusqu’ausapin,
oùsamèresortaitdesdécorationsdeleurscartons.— Ton père et moi t’avons apporté quelque chose, dit sa mère en prenant une boîte abîmée
qu’Evangelinen’avaitpasremarquéejusqu’àprésent.Ellepassa samain sur lepaquetuséavecamouravantde l’ouvrir.Elle retint son souffle et eut les
larmesauxyeuxendécouvrantsoncontenu.—Oh,maman.—J’ai apportédesdécorationsdu sapin familial, jeme suisdit que tuvoudrais les avoirpour ton
propresapin,ditsamère,lesyeuxtoutaussibrillants.Pourcertaines,c’esttoiquilesasfaitesquandtuétaisàl’école.Et ilyenaunepourchaqueNoëlquetuasfêté,depuistonpremier.J’aiaussiapportéplusieursdécorationsfaitespartagrand-mèreaufildesans.Jesaisquetulesadoresetquetuytiens.Evangelines’assitsur lecanapéàcôtédesamèreet lapritdanssesbras.Puis lesdeuxfemmesse
mirentàexaminerchaqueornement.—Merci,ditEvangelinedansunsouffle.Jelesadore,maman.—Maisderien,machérie.Jen’arrivepasàcroirequetuesuneadulteetquetuastaproprevie.Je
saisquenousneledisonspasassez,maistonpèreetmoisommestrèsfiersdetoi.Personnenepourraitêtreplusfierdesonenfant.Avantdevenirterendrevisite,jemefaisaisdusoucietjeregrettaistellementquetuaiesdûarrêterl’écoleetdéménagerenvillepournousaideràsubvenirànosbesoins.—Non,maman!—Allons,intimasamèreenposantsamainsurcelled’Evangeline.Laisse-moifinir.EvangelineremarquaalorsqueDrake,SilasetMaddoxétaienttousentraind’écoutercequesamère
disait,quoiquediscrètement.—Commejeledisais,j’avaisbeaucoupderegretsetjem’inquiétaisénormémentdetesavoirseule
ici.Avecseulementquelquesamies,avaléeparunevilleremplied’étrangers.Maisunefoisquejesuisarrivéeicietquejet’aivue,jemesuisrenducomptequej’avaistortdevouloirquetoutçadisparaisse.Parce que si tu n’avais pas emménagé ici, tu n’aurais pas rencontré Drake et tu ne serais pas aussiheureusequetuenasl’air.Jamaisjenevoudraist’enlevertoutça.—Vous avez raison sur une chose,Brenda, intervintDrake d’un air sombre. J’ai beau détester les
raisonsquiontamenéEvangelineàNewYork,jenepeux,commevous,merésoudreàlesregretter;carsanscescirconstancesparticulières,ellenesetiendraitpasdansmonappartementaujourd’hui.Elleneseraitpasàmoi.Etàprésentqu’elleestlà,lafaçondontelleyestarrivéeimportepeu.SesmotsfirentàEvangelinel’effetd’uncoupdepoing.Ellesesentitaccabléeparsesparoleset la
sincéritéqu’elleydécelait.Elleleregarda,abasourdie.Sa mère et son père échangèrent des sourires contents en voyant la réaction d’Evangeline face à
l’énormitédeladéclarationpassionnéedeDrake.—Nousavonsaccrochéleslumières,madameHawthorn,ditJaxdepuissonpostedevantlesapin.Si
vousnousditescequivaoù,nousallonsnousoccuperduresteenvitesse.Evangeline se leva, les genoux tremblants, incapable de retenir son large sourire, plus éclatant que
jamais.—Jevousproposeàtousunmarché,dit-elled’unevoixfortepoursefaireentendre.Sivouspendez
lesdécorationscommemamèrevousl’indique,jeprépareundéjeunerpourtoutlemonde.Unchœurd’acclamationss’éleva,puiscefutlacoursepourvoirquiallaitaccrocherlesornementsle
plusvite.Drakeretournas’asseoirprèsdupèred’Evangeline,etilsseplongèrentdansuneconversationpendant qu’Evangeline se tenait dans l’encadrement de la porte de la cuisine pour avoir une vued’ensembledel’appartementbondéetdesquinzemillelumièresquifaisaientscintillerleursapin.Soncœursegonfladebonheur.C’étaitsafamilleàprésent.Elleregardaleshommessetaquinerles
unslesautres,mêmes’ilsétaienttoustrèsrespectueuxdevantsamère.Elleauraitputouslesembrasserpourlesremercierd’êtresiattentionnésenversellependantsonséjour.Ellesetamponnalecoindel’œilpourempêchertoutelarmedecouler.—Evangeline?Çava?luidemandaSilas.Ellese tournavers lui ;uneexpression inquièteassombrissait sonbeauvisage.Elle luiadressason
deuxièmepluslargesouriredelajournée.—Jevaisplusquebien,souffla-t-elle.Regardeautourdetoi,Silas.C’estnotrefamille.Qu’est-cequi
pourrait être mieux qu’une famille rassemblée pour décorer un sapin de Noël et partager un repasensemble?Silassourit,chosequ’ilsemblaitfairedeplusenplusavecellecesdernierstemps.—C’esttoi,poupée.C’esttoiquiasfaitdenousunefamille.
Chapitre20
Il était tard lorsque Drake et Evangeline rentrèrent à l’appartement après avoir raccompagné sesparentsàl’hôtel.Elleredoutaitdéjàlelendemain,quandilsprendraientl’avionpourrentrer.Ausortirdel’ascenseur,Drakeattrapaetenserralepoignetd’Evangelineentresesdoigts, l’arrêtant
net.—Vadans la chambre, déshabille-toi, et attends-moi sur le lit.Allonge-toi sur ledos, lesbras au-
dessusdelatête, lesjambesécartéespourquejevoiecequim’appartientàl’instantoùjepasserai laportedelasalledebains.Elleeutlabouchesècheetavalalaboulequiluiserraitlagorge.Savoixétaitsisexy.Graveetrauque.
Cesimplesoneutlemêmeeffetqu’unecaressesursapeau.—Jetedonnecinqminutes,laprévint-il.Elleseraitprêteentroispourlui.Elletournalestalonsetseprécipitadanslachambre,sedéshabillantdéjàenpassantlaporte.Ellejeta
sarobeetseschaussuresdansuncoinetrampasurlescouvertures,oùelles’allongeasurledos.Puisellelevalesbrasau-dessusdesatête,poséssurl’oreiller.Elleétaitdansunétat rêveuretd’excitation intense, tous ses sensenéveil.Dans l’expectative.Son
poulss’animaàl’instantoùellesentitsaprésence.Avantmêmequ’ilsetrahissed’unson,ellesutqu’ilétaitlà.Sespaupièrespapillonnèrentparesseusement,etelleposasonregardsurDrake,deboutprèsdulit.Il
la contemplait, une douce expression sur le visage, l’affection irradiant de ses yeux noirs.Un frissondécadentlaparcourut.C’étaitdanscesmoments-là,commeilyenavaiteuplusieursdurantcesderniersjours,quesesactes,sesmots,sescaresses,luimurmuraientqu’ilpouvaitl’aimer.Elle devait seulement se montrer patiente. Drake n’était pas homme à dévoiler sa vulnérabilité à
quiconque, surtout à une femme. Tout ce qu’elle avait à faire en attendant, c’était luimontrer qu’ellen’allaitnullepart.Qu’ellel’aimaitinconditionnellement.L’attenteenvaudraitlapeine.Ellen’endoutaitpas.Ellen’avaitplusdepenséesinsidieuses,quiébranlaientsaconfianceenelleetluifaisaientcraindre
pour l’avenir et le temps que Drake et elle passeraient ensemble. Il n’avait rien fait pour lui laisserpenserqu’ilselassaitd’elle.Aucontraire.Àchaquejourquipassait,ilsemblaitaccepterpleinementlerôledeplusenplusimportantqu’ellejouaitdanssavie.—Àquoipenses-tu,Ange?murmuraDrakeenfaisantcourirsamainsursapeau.Toutsoncorpsétaitdouloureusementenéveil.Elletremblaitetfrémissaitd’undésirpresqueviolent.Il
yavaitunetelleintensitédanslesyeuxdeDrake,cesoir.Commes’ilétaitarrivéàunedécisioncapitale.Ellevoulaitl’interrogersurlaquestion,maisqu’était-ellecenséedire?Qu’ellesentaitunchangement
en lui,danssespriorités,qu’il la faisaitdésormaispasseravant tout?C’étaitune trèsbonnefaçondes’exposer à une humiliation abjecte si elle avait tort. Non, elle ne devait pas essayer de le forcer às’engager.Ceseraitlapiredeserreurs.—Jepensaisàlachancequej’avais,murmura-t-ellebienqu’elleaitlagorgenouée.CeThanksgiving
aétéleplusbeaudemavie.C’étaitextraordinaire,Drake.Nousétionscommeunegrandefamille.Mesparents.Teshommes.Etnous…
LesouriredeDrakerépanditsachaleurdansdespartiesd’elle-mêmequin’avaientpasreçudechaleurdepuistrèslongtemps.Sesyeuxétaientdessoleils,sonregardardentsursoncorps.D’ordinaire,lesyeuxdeDrakeet sonexpressionétaient si sombres.Ombreux.Douleurspasséeset souvenirsdouloureuxsetapissaientsouslasurface.Maiscesoir,sesyeuxn’étaientplusnoirsmaismarrondoré.Elleétaitfascinéeparceregardd’or.Hypnotiséeparlesmoucheturescouleurbronzedesesyeux.Il jeta ses habits sur le côté et grimpa sur le lit, lentement, planant au-dessus d’elle, planté sur ses
coudespournepas l’écraser soussonpoids.Elle laissaéchapperungémissementquandsoncorpssepressacontrelesien.Machinalement,elles’adaptaàlui.Douceurcontreacier.Illaregarda,sesyeuxbrillantstoujoursemplisdefeuetdemystère.—Tusaisàquoijepensais?dit-ild’unevoixrauque,passantsespoucessursesjoues,repoussantde
petitesmèchesdecheveuxderrièresesoreilles.—Quoi?demanda-t-elle.—Quej’aibesoin,enviedeteremercierpourleplusbeauThanksgivingqu’onm’aitjamaisoffert.Ilétaitsirévérencieuxetsincèrequ’elleeneutleslarmesauxyeux.—J’en suis ravie,Drake, s’étrangla-t-elle. Jeveuxque tu soisheureux.Mêmesi cen’estpasavec
moi.Elles’envoulutd’avoir laissésesdoutesremonterà lasurface.Surtoutmaintenant,alorsqueDrake
mettaitsonâmeànupourelle–mêmes’ilnesedévoilaitpasencoreentièrement.—Cen’estpascequejevoulaisdire,sereprit-elle.Jetejurequejenecherchepasàtefairedire
quoiquecesoit,Drake.Jelepensais.Jeveuxquetusoisheureux.Coûtequecoûte.J’espèreêtrecellequiferatonbonheur.Detoutmoncœur.Maissicen’estpasmoi,jeveuxquetusachesqu’ilyadesgensquit’aimentettiennentàtoi.Passeulementmoi.Drakesecoualatête,réellementperplexe.—Tunecroispassérieusementquejevaismettreuntermeàcequenousavons,Ange?Ellesourit.—Non.J’essayaisseulementd’exprimerceque je ressens,et,parfois,celanesepassepascomme
prévu,dit-elleavecregret.Illuirenditsonsourireetravitseslèvresdansunbaiserlongettendrequiluidonnadenouveauenvie
depleurer.—Personnen’ajamaiscuisinéunrepasdefêtepourmoi.Cetteconfessionetsesramificationssemblèrentlemettremalàl’aise.—Personnen’ajamaisdemandéàmesfrèresdepartagerunrepascommetul’asfait.Etpourtant,tuas
cuisinénonseulementpourmoi,maisaussipoureux.Mince,ilsontdécoréunputaindesapindeNoëldansmonsalonpourtoi,lâcha-t-il,admiratif.Jetejure,Ange.Tuesunmiracle.J’auraisdûlesavoir,quenousétionstousfichus, lejouroùtulesastousgavésdecupcakesdansmonbureau.Jen’ai jamaisvumeshommes réagir ainsi àune femmede toutemavie. Jamais jen’ai eude femmedansmavieaussilongtempsquetoi,corrigea-t-il.Unefoisencore,ilparuttroublé,commesicetteprisedeconscienceleperturbait,commes’ilnesavait
pasquoifairedecesrévélationsàmesurequ’ellesluivenaient.— Ils t’adorent, Ange. Et ils te sont loyaux. Tout autant qu’ils me sont loyaux. Tu nous as tous
transformés.Parfoisilsnesaventpasplusquemoiquoifairedetoi.Tulessurprendspartonacceptationinconditionnelle.Toutcommetumesurprends…—Drake,arrête,lesuppliaEvangeline.Tuvasmefairepleurer!Il souritet l’embrassasur les joues, lespaupières, lecoindesyeux,commes’ileffaçaitdes larmes
invisibles.
—Celanemedérangepasquetupleurestantquetuesheureuse.Maissijamaisquoiquecesoitterendaitmalheureuse,ilfautquetusachesquejeremueraiscieletterrepourqueturetrouveslesourire.Ellel’attrapaparlatailleetapposasajouecontresontorse.—Jelesais,Drake.Ettusais,tumerendsimmensémentheureuse.Lesoulagementselisaitdanssesyeux.—Tum’envoisravi.Jenesaispascequejeferaissanstoi.Jeneveuxmêmepasypenser.—Alorsn’ypensonspas,murmuraEvangeline.—C’estlameilleureidéequisoit,répondit-ilàvoixbasse.Ill’embrassaencore,passasalanguelelongdesalèvreinférieureavantdelafaireglisseraucoinde
sabouchepourlongersalèvresupérieure.Dansunsoupir,ellesedétenditetouvritlabouchepourlui,écartantleslèvresalorsqu’ilyglissaitsalanguepourlafairedanseraveclasienne.Lorsqu’ils’écarta,sesyeuxdebraiseluisaientavecintensitéetconviction.—Merci,monange.Dem’avoirdonné…del’espoir.Dem’avoirmontrécequ’unevraiefêteavec…
unefamille…pouvaitêtre.Jen’oublieraijamaisceThanksgiving.Detoutemavie.Çavalait–tuvaux–plusquetoutaumonde.—Fais-moil’amour.Elleétaitsoudainimpatientedelesentirsurelle,enelle,desentirsachaleur.—Oh,c’estcequejevaisfaire,dit-ilàvoixbasse,avecrespect.Ill’embrassaunefois,deuxfois,puisunetroisièmefois.—Notre relation – sexuelle y compris – est basée sur ta soumission etma dominance et certaines
pratiquesysontfavorables.Maiscesoir,jevaistefairel’amour.Cesoir,aucunepratiquedévianten’asaplacedansnotrechambre.C’estjustetoietmoi,moiquit’aime.Quitemontremonamour.Elleeutlesoufflecoupé.Mesurait-illaportéedesesparoles?Draken’étaitpasdugenreàdiredes
chosesqu’ilnepensaitpasdanslefeudel’action.Ilavaitétéàdeuxdoigtsdedirelesmotsdontellerêvait.Pourl’instant,c’étaitplusquesuffisant.Il
voulaitluimontrersonamour.Sonamourétaittoutcequ’ellevoulait.Riend’autre.Pourtoujours.Il prit son temps. Jamais il ne s’était montré aussi patient ni n’avait fait preuve d’autant de
déterminationàattendrequ’ilssoienttousdeuxivresdeplaisir.Ilembrassaetléchachaquecentimètrecarrédesoncorps,s’attardantparticulièrementsursesseinsetentresesjambes.Elleétaitfollededésir,soupirait,secambrait,gémissait,soncorpspulsait,etellemontaitencoreet
sanscesseversl’extase.Pendantpresqueuneheure,illacaressaetlacajola,l’embrassaetlalécha,luimurmuradesmotsdouxqu’ellemémorisaetgravadanssoncœur,pournejamaislesoublier.Chaque fois qu’elle le suppliait de venir en elle pour leur accorder ce qu’ils voulaient tant, il se
contentaitdesourireetignoraitsasupplique,préférantl’amenerplusloinencoredansleplaisir.Elle sanglotait presque, ivred’uneextase abrutissante, quandenfin, il lui écarta les cuissespour se
positionnerentreelles.—Regarde-moi,Ange,dit-il,lavoixpleinedetendresse.Ellerivasonregardausien,oùluisaitunesatisfactionsanségale.—Prends-moi,murmura-t-elle.Prends-moitoutentière.Ils’enfonçaprofondémentenelle,larapiditéetlapuissancedesapossessionluicoupantlesouffle.Il
étaitloin.Tellementplusloinqu’ilnel’avaitétéauparavant.Ilsemblaitaussidéterminéqu’ellel’étaitdeprendrechaquecentimètre.Ellenepouvaitrienluirefuser.Ellelevalesjambes,lesenroulaautourdesatailleetsoulevaleshanchespourquel’angledesapénétrationsoitencoremeilleur.Ilhésitaunefractiondesecondeavantdes’enfoncerencore,toutentierenelle.Savisionsetroublaetellesutqu’ellen’allaitpasteniruneminutedeplus.Elleétaittropprochede
l’orgasme.Tropexcitée.Elleavaittropbesoindelui.—Drake!cria-t-elle.S’ilteplaît.Net’arrêtepas.Pasmaintenant!—Non,Ange.Jamais,jura-t-il.Ilplongeaenavant,semoulantcontresoncorps.Ellel’enserraentresesbrasetsesjambes,fondant
contrelui,lecorpsmalléableetsouple,àl’écoutedusien.Lapremièrevaguedesonorgasmel’ébranlaauplusprofondd’elle-même.Danscesmoments-là,c’est
àpeinesielleétaitconscientecarleplaisir,aussitranchantqu’unelame,luitransperçaitlecorpspouratteindresonâme.Ses paupières papillonnèrent, ses pupilles se contractèrent. Elle essaya de se concentrer sur
l’expressionsauvagedeDrake,surlapossessionsiévidentesursestraits,maisellenetenaitplus.Chaque muscle, chaque terminaison nerveuse de son corps se crispa à l’extrême. Elle se dressa,
torturée,tentantdes’agripperàDrakedetoutessesforces.Ellepleurait.Elleserenditvaguementcomptequ’ellepleurait,suppliaitetimplorait.PuislabouchedeDraketrouvalasienneetilfittairesongémissementquiseperditdanslanuit.Lemondeautourd’elleexplosa,cacophoniedecouleursetdesensations.Tantdeplaisir.Ils’immisça
danssoncorps,inondasesveines,imprégnachaquecentimètrecarrédesonêtre.Ellenepouvaitplusrespirer,Drakerespirapourelle.Ilavalaitsonairetluioffraitlesien.Riennelui
avait jamais semblé aussi intime, aussi bon. Jamais elle n’avait ressenti ce genre d’amour pour unhomme.Etcelan’arriveraitjamaisplus.Qu’aurait-ellefaitsiellen’avaitjamaisrencontréDrake?Savieseraitbienvidesanslui.Elleferma
les yeux de toutes ses forces, sentit de chaudes larmes rouler sur ses joues, et elle retint son sanglot,serrantDrakecontreelledanscetaprèsexplosif.Illaissatombersoncorpslourdsurelle,haletant,peinantàretrouversonsouffle.Ilenfouitsonvisage
danssescheveuxetlaserradanssesbrassiétroitementqu’ilrecouvraittoutesapeaudelasienne.—Jamaisjen’aieuchoseplusdoucedemavie,parvint-ilàarticuler.Nemequitteplusjamais.Tues
laplusbellechosequej’aiejamaispossédée,Ange.Nemequitteplus.S’ilteplaît,nemequittepas.Ellefutchoquéed’entendrelavulnérabilitédanssavoix.Choquéequ’il lalaisseenêtretémoin.Ou
peut-êtrenesavait-ilpascequ’ildisait.Pourautant,sesparoles,sasuppliquepassionnée,latouchèrentenpleincœur.—Jenetequitteraipas,dit-elletendrement.Jamais,Drake,monchéri.Jeseraitoujourslà.Tantquetu
veuxdemoi,jesuisàtoi.Ill’écrasacontrelui,laserrantsifortqu’ellenepouvaitplusrespirer.—J’aibesoindetoi,Ange.J’aitantbesoindetoi.Ilavaitparlésidoucementqu’ellecrutd’abordavoir imaginésesparoles.Unfrissoneuphorique la
parcourut,etunsentimentdepaixl’envahit.Peut-êtrebienquelescontesdeféesdevenaientréalité,aprèstout.
Chapitre21
EvangelineétaitallongéedanslesbrasdeDrake,siheureusequ’elleenétaitamorphedebonheur.Elleétaitétenduesurlui,leursjambesentremêléesaveclesdrapsetcouvertures.Elleavaitbienessayédechangerdeposition,maisl’étreintedeDrakes’étaitresserréeautourd’elleet
ilavaitsimplementmurmuré:—Nebougepas,Ange.Evangeline caressa paresseusement le corps de Drake, laissant ses doigts effleurer ses muscles et
glisserentrelespoilsclairsemésdesontorseetlaligneplusdensequidescendaitenvolutesjusqu’àsonnombril.Cethommeétaitundieu.Unebêtesexyetformidable.Aucunhommeneluiarrivaitàlacheville.Etil
étaittoutàelle.Ellesouritavecsatisfactionetrestaallongéelà,àsavourerl’intimitédeleurétreinte.PuisdessouvenirsdeThanksgivingluirevinrentàl’espritetellesesouvintdelaréponsecrispéede
Drakeàsamèrequandelleavaitditquesesparentsdevaientêtrefiersdelui.Etdesesremerciementsémuspourlaplusbellefêtequ’onluiaitjamaisofferte.Elleserappelaitd’ailleursque,latoutepremièrefois où elle avait cuisiné pour lui, il avait dit une chose déconcertante, à savoir que personne n’avaitjamaisriencuisinépourlui.Ildevaitparlerdesavied’adulte.Samèreavaitbiendûcuisinerpourluiquandilétaitpetit,non?Unemainglaciale lui enserra le cœur : elle sentait queDraken’avait pas euune enfanceheureuse.
C’était d’ailleurs leurs passés loin d’être idéaux qui liaient les hommes deDrake les uns aux autres.Aucunn’avait réellementparlédesonpassé,aucunn’avaitmêmementionnéavoirunefamille.Aucuneréférenceàleurenfance.Rien.Elle se détachade son torse pour le regarder dans les yeux, sondant son regardpour savoir si elle
devaitlaissertomberouaborderlesujetuneautrefois.Commeellenetrouvaquechaleurettendressedanssesyeux,ellesemorditlalèvreetposalaquestion
quilataraudait.—Drake?Jepeuxteposerunequestion?demanda-t-elleavechésitation.Ilplissalesyeux,sanscolèreaucune.Ilsemblaitseulement…préoccupé.—Biensûr.Qu’ya-t-il,Ange?—Jevoulaisensavoirplussur…ehbien…toi.Tonpassé,avoua-t-elle,nerveuse.Les lèvres deDrake se pincèrent et ses yeux devinrent glacials. Elle n’était pas certaine qu’il soit
mêmeconscientduchangementd’expressionsursestraits,carilétaitévidentqu’ilprenaitsurluipournepass’énerver.—Quoi,monpassé?demanda-t-ild’untonneutre.Ellesoupiraets’assitprèsdeluisansquittersonvisageduregardpourpouvoirmesurersesréactions.—Tu n’en parles jamais. De ton enfance. Tes parents. Tu étaismal à l’aise quandmamère les a
mentionnés.Etjecomprendsbienquecen’estpeut-êtrepasunechosedonttuasenviedediscuter,Drake.Sic’estlecas,jelaisseraitomber.Maisj’ailesentimentquecelaatoujoursuneemprisesurtoid’unecertainemanière.Quecelate…blesseencore.Etjeferaistoutpourquetunesouffresplus.—Celanesertàrienderessasserlepassé,dit-il,laminesombre.C’estlepassé.Ças’estpasséilya
longtempsetcelanenousaffecteaucunement,toietmoi.Ellesecoualatête.— Tu as tort, contra-t-elle avec douceur en se penchant pour le serrer contre elle. Cela t’affecte
encore,ettoutcequit’affectem’affecte,moi.Ilsoupiraetellelesentitsecrispersoussesmains.Puisilsedétenditetenroulasesbrasautourd’elle
ens’asseyantdanslelit,l’attirantcontresontorse.—Queveux-tusavoir?demanda-t-il,visiblementmalàl’aise.—Seulement ce que tu es prêt à partager. Je ne te demanderai jamais plus que ce que tu es prêt à
donner.Ilsoupiraunenouvellefoisetdemeurasilencieuxuninstant.—Mesparentsn’étaientpasexactementdesmodèles.Rienàvoiraveclestiens.Savoixétaitsimélancolique.Celaluidonnaitenviedeleprendredanssesbras.—C’étaient des escrocs, qui donnaient dans le trafic de drogues, intéressés par l’argent facile. Ils
faisaienttoutcequ’ilspouvaientfairepournepasavoiràbosser.Unenfantestladernièrechosequ’ilsvoulaient,etd’ailleursmamèrevoulaitavorter,maismonpères’estrenducomptequejepouvais leurservirdevacheàlait.Bonsalimentaires.Chèquedel’Étattouslesmois.Toutcequ’ilsavaientàfaire,c’étaitmegarderetfaireensortequejeresteenvie.Monconfortetmonbonheurn’étaientpassurleurlistedepriorités.Unecertainedésolationsepeignitsursestraits,maisilserepritvite,commedéterminéàneplusles
laisseravoird’emprisesurlui.—Oh,Drake,dit-elleavecunsouriretriste.Illuisouritavantdel’attirerversluipourl’embrassersurlatempe.—Tuestropsensible,monange.J’aisurvécu.—Maisàquoias-tusurvécu?insista-t-elle.Personnenedevraitavoiràsurvivreàsonenfance.—Non,maisc’estlecasdebeaucoup.—C’étaitsiterrible,Drake?demanda-t-elleavecangoisse.Ilavalasasalive.— C’était atroce, admit-il. Je n’étais qu’un enfant qui ne comprenait pas pourquoi ses parents le
détestaient ni pourquoi ils le toléraient, d’ailleurs. Je priais pour que l’État vienne faire une visitesurprise etm’emmène loin d’eux. J’ai essayé dem’enfuir plus d’une fois.Chaque fois,monpèrem’atrouvé,m’atabassé,traînéàlamaison,etenfermédansunplacardpendantdesjours.UncridestupeuréchappaàEvangeline.Elleportalamainàsabouchepourétouffersoncrihorrifié.Drakehaussalessourcils.—Cen’était paspire. Jepréférais êtredans leplacardplutôtquedans leurspattes.S’ils étaient à
courtdedroguesoudenourriture,çasegâtaitsalement.Ilsétaientenmanqueet ilss’enprenaientàlasourcede leurmalheur.Moi.Alors j’aiapprisàdisparaître,àêtre trèsdiscret,à resterdans l’ombre.Ironiedusort,c’estprobablementmonpèrequim’asauvé.Mamère,commeje l’aidit,auraitpréféréavorter, et elle a développé une méchante addiction aux antalgiques suite à la césarienne d’urgencequ’elleasubielorsdemanaissance.Monpèreluirappelaitentouteoccasionques’ilssedébarrassaientde la « petite bête », comme elle aimait m’appeler, elle serait obligée de se trouver un travail pourfinancersonaddiction.Evangelineétait tropbouleverséepourexprimer lemilliondepenséesqui sebousculaientdans son
crâne.Elleétaittrophorrifiéeetatterréeparl’attitudepitoyabledel’humanité.Iln’avaitétéqu’unenfant.Un enfant qui n’avait pas demandé à naître. Sesmains tremblaient et elle les baissa pour les cacher,serrantlespoings.
—Celanesertàrienderessassertoutemonenfance,dit-ild’unevoixdouce.Commes’ilessayaitdelaprotéger,elle,de l’atrocitédesonpassé.Neserait-cequepourcela,elle
avaitenviedepleurer.N’avait-iljamaiseupersonnepourprendresoindelui?—Queleurest-ilarrivé?Commentas-tufinipart’échapper?Ilgrimaça.—Monpères’estfaitdescendreparundealeràquiildevaitunetonnedefric.Jemerépète,cen’était
paslepèrenilemaridel’année,maisilaaumoinsessayédes’occuperdemoi.Quandiln’étaitpasentraindemetabasser,ajouta-t-ilsèchement.Etilaessayédes’occuperdemamèrecommeillepouvait.En lui fournissant les friandisesde sonchoix.Cequi a eupour résultat de lui créeruneardoisequ’iln’aurait jamais pu rembourser. Ils sont venus le chercher unenuit où j’étais dans le placard.Une foisencore, le placard m’a certainement sauvé la vie, parce que s’ils avaient su que j’étais là, soit ilsm’auraient tué pour se faire comprendre, soit ilsm’auraient enlevé, sans savoir quemes parents n’enavaientrienàfoutredemoietqu’ilsn’auraientrienfaitpourmerécupérer.—Ettamère?demanda-t-elleàvoixbasse.Celalarendaitmalade,maiselleespéraitquecettefemmeavaitconnuunemortlenteetdouloureuse.—Ilsontvitecomprisquelemeilleurmoyendelafairesouffrirétaitdenepaslatuer,delalaisserà
sonexistencepathétique.Sansmonpère,ellen’avaitaucuneaide,aucunsoutien,etétaitausuppliceàcausedumanque.Ilssesontmoquésd’elleetluiontditdebienprofiterdesonsevrage.Drakepritunedesmainsd’Evangelinepournouersesdoigtsauxsiens.—Deux joursplus tard,elle s’est suicidée. Jeme rappellem’être tenuau-dessusdesa tombepour
jurerquesavieneseraitpaslamienne.Jamais.Jevoulaismieux.J’avaisonzeansetj’étaispetitpourmonâgeàcausedelamalnutritionetdelamaltraitance.Maisjeplanifiaisdéjàmonavenir.Onapprendàsedébrouilleretonsaitcequ’ilfautfairepoursurvivre,quandongranditentourédedealersetdegangs.—Personnenes’estoccupédetoiàlamortdetamère?demandaEvangeline,ahurie.Drakehaussalesépaules.—Quelqu’un l’aurait certainement fait.Auminimum, j’aurais été placé et baladéde foyer en foyer
jusqu’àmesdix-huit ans.Mais cen’étaitpasuneoptionpourmoi.Àonzeans, j’étaisobsédéparuneseulechose:simespropresparentsnepouvaientpasm’aimer,commentquelqu’und’autrelepourrait?Elleneputplusretenirleslarmes,quiroulèrentsursesjoues.Ellelefixaduregard,lavuetrouble,
puissejetaàsoncoupourleserrercontreelleetcontresoncœurquibattaitdemanièreerratique.—Jet’aime,moi,DrakeDonovan,murmura-t-elleavecardeur.Jet’aimeraitoujours.Tun’aurasplus
jamaisàêtreseulettuaurastoujoursunepersonnequit’aimeauprèsdetoi.Ileutl’airchoqué,commesic’étaitbienladernièrechosequ’ils’attendaitàentendredesabouche.
Ellen’avaitpasvoululedireainsi.Pasmaintenant.Pasencore.Maisc’étaitlemomentidéaletellenepouvait pas le laisser poursuivre sans lui faire savoir qu’elle l’aimait et qu’elle ferait tout pour lui.Aucunsacrificen’étaittropgrand.—Ange,murmura-t-ild’unevoixbrisée.Je…jenesaispasquoidire.Tunesaispasàquelpointce
cadeauestprécieux.Jeneleméritepas.Elleposasondoigtentraversdeseslèvres.—Tais-toi,ordonna-t-elle.Nedisjamaisquetuneleméritespas.Ettun’aspasàdirequoiquece
soit.Tudoisseulementécouter.Je t’aime,Drake.Complètement, inconditionnellement,sansretenue.Jet’aime.Ill’enserradanssesbras,enfouitsonvisagedanssescheveux.Soncorpstoutentiertremblaitsousla
puissancedesonémotionetellesecontentadeleserrercontreelle,decaressersondosetsesépaules,toutenluisusurrantsonamouraucreuxdel’oreille.
Chapitre22
Pour une fois, Evangeline avait hâte de faire cette virée shopping, bien qu’elle soit déçue que niMaddoxniSilasnesoientlibrespourl’accompagner.Elleavaitprisl’habitudedecomptersureuxetleursolide compagnie. Elle devait avouer qu’elle était plus proche d’eux deux que des autres hommes deDrake,mêmes’ilsétaienttouschaleureuxetamicauxavecelle.Toutefois,mêmel’absencedeMaddoxetSilasneparvenaitpasàsapersonenthousiasme.Elleallait
acheterlescadeauxdeNoëldeDrake.ElleavaitprisleliquideetlescartesdecréditqueSilasluiavaitdonnésilyavaituneéternité,etellesourit,n’ayantaucunremordsdeseservirdel’argentdeDrakepourluiachetersonproprecadeau.Aujourd’hui,elleallaits’amuser.—Yo,Evangeline,tueslà?appelaZanderdepuisl’entrée.Ellefourraleliquideetlescartesdanssonsacàmainetellesedépêchad’alleraccueillirZander,un
sourire aux lèvres. Elle fut surprise quand elle vit les deux autres hommes de Drake quil’accompagnaient.Thaneet…Mince.Elleétaitincapabledesesouvenirdunomdel’autrehommeetcelaparaîtraitbienimpolidesaparts’ils’enrendaitcompte.Ellesesouvenaitdelui,biensûr.Ilétaitplusdiscretquelesautres,maistrèsgentiletprévenantenvers
elle.SonnomressemblaitàceluideHartley.Flûte!—Salut,amour,lançaZanderenlaprenantdanssesbraspourl’embrassersurlajoue.—Salut,Zander,dit-elleavecchaleuravantdetournersurelle-même.Bonjour,Thane.Puis elle se tourna vers le troisième homme et, Dieu merci, son nom lui revint à l’esprit au bon
moment.—Hatcher.Commentvas-tu?L’intéressé sembla surpris qu’elle s’adresse ainsi à lui ; peut-être avait-il pensé qu’elle ne se
souviendrait pas de lui, puisqu’ils n’avaient pas passé beaucoup de temps ensemble. Il sembla ravi,cependant,etluiadressaunlargesourire.—Bonjour,Evangeline.Tu es prête à aller faire les boutiques ? dit-il en lui offrant sonbras alors
qu’ilssedirigeaienttousversl’ascenseur.—Oui,etj’aidésespérémentbesoindevotreaideàtous,dit-elled’unevoixtraînante.Thanepartitd’unpetitrire;Evangelinesetournaverslui.—Qu’ya-t-ildesidrôle?demanda-t-elle.—Rien,mabelle.C’est justeque çamechatouille quand j’entends ton adorable accent traînant du
Sud,dit-ilensouriant.—C’est l’hôpital qui se fout de la charité !On n’est pas censés se serrer les coudes, en tant que
sudistescoincésdanscettegrandeméchanteville?HatcheretZanderéclatèrentderireàleurtourtandisqueThanelevaitlamainensignedepaix.—Allons,mabelle,tusaisquejeplaisante.Jedoisadmettrequej’ailemaldupayschaquefoisque
jet’écouteparler.Savoixse fitplusgraveet, l’espaced’un instant,ellecrutqu’ilavaitvraiment lemaldupays. Ily
avaitdanssesyeuxunelueurquilarendittriste.
—CerepasdeThanksgivingquetuascuisiném’arappelélacuisinedemamère,expliquaThane.Lemeilleurrepasquej’aiemangédepuisquej’aiquittélamaisonilyabienlongtemps.—Alorsilfautquejet’inviteàmangerplussouvent,affirmaEvangeline.LacuisineduSudestunmust
etonnepeutl’oublierunefoisqu’onyagoûté.C’estunpéché,c’estsûr.ZanderjetaunregardnoiràThaneavantdesecouerlatêteàl’intentiondeHatcher.—Tucroiscetenjôleur,quiréussitàsefaireinvitersanseffort?EvangelinedressafièrementlementonetglissasonbrassousceluideThane.—VousferiezmieuxdeprendreexemplesurunvraigentlemanduSud,vousautres,dit-elleavecun
reniflementbiensenti.Ilssaventcequiestimportantauxyeuxd’unefemme.—EtunedameduSudsaitcequiestimportantpourleventred’unhommeduSud,ditThane,lesyeux
pétillants.C’estpourquoitouteslesmeilleuresfemmesduSudsaventcuisiner.Ellessavents’occuperdeleurshommes,dit-ilavecmélancolie.Hatcher etZander levèrent les yeux au ciel avec répugnance,maisThane leur adressaun regard en
coin.— C’est ça, levez les yeux au ciel. Attendez que je dîne avec Evangeline et que je déguste sa
merveilleusecuisinependantquevousmangerezdestacosouuneautremerdedanslegenredecellequevousbouffeztouslesjours.—Dis-moi,Thane,d’oùviens-tuexactement?demandaEvangelinelorsqu’ill’aidaàmonterdansla
voiture.—M-I-crooked-letter-crooked-letter-I-crooked-letter-crooked-letter-I…—Humpback-humpback-I1,compléta-t-elle,lesyeuxpétillants.—C’estquoicecharabia?marmonnaZander.—IlvientduMississippi,réponditEvangeline,toutsourires.Commemoi!—Ettulesaisgrâceàcettechansonbizarre?Zandersemblaitabasourdi,etillesregardacommes’ilsavaienttouslesdeuxperdul’esprit.Thaneet
elleéclatèrentderire.—Dequel endroit viens-tu,Thane?demandaEvangeline.Moi, jeviensduSud.Unepetiteville à
cinquantekilomètresaunorddelacôte.—JeviensdelarégiondeJackson,ditThane,laconique.Thaneneparlaitpasbeaucoupdesonpassé,àl’instardesautreshommesdeDrake.Ilsfaisaienttous
commes’iln’avaitjamaisexistéoucommes’ilétaitsimplementdéplaisant.Peut-êtremêmelesdeux.— Et si nous allions déjeuner avant de commencer le shopping ? proposa Hatcher en souriant
gentimentàEvangeline.—Oh,jepeuxchoisir?—Çadépend,ditZanderenlaregardantdetravers.—Steakdewagyu?l’amadoua-t-elle.—J’ensuis,annonçaThane.—Putainoui,moiaussi!s’exclamaaussitôtHatcher.—Tuesbattu,ditEvangelineàZanderavecsuffisance.Ilpouffa.—Commesij’allaisdirenonàunsteakdewagyu.Unedemi-heureplus tard,Evangeline se retrouvadonc assise à tabledansun coindu restaurant où
Justicel’avaitemmenéemangercesavoureuxsteak.—Suis-jeunemauvaisepersonnesijedisquejepourraismangerçaquotidiennementpourlerestant
demesjours?demanda-t-elleunefoislescommandespassées.
—Non,réponditZander.C’estbon.Pourquoimangerdelamerdequandonpeutavoirlemeilleur?Ellelevalesyeuxauciel.—Onnepeutpastoussepermettredemangerçaunefoisparmois,alorstouslesjours…—Jecroisquetun’asplusbesoindet’inquiéterpourça,ditThane.Sicelaterendaitheureuse,Drake
embaucheraitlechefdecerestaurantpourqu’ilcuisinetouslesjourspourtoiàl’appartement.—Oh,bonDieu,grimaça-t-elle.Vousferiezmieuxdenepasleluisuggérer,mêmeenplaisantant.Je
seraismortedehonte.Zandersecoualatêteavecunpetitrire.—Unhommepourraitfairepirepoursacompagne.—Jevaisaupetitcoinmerafraîchiravantquelesplatsarrivent,annonçaEvangelineenselevantde
table.Leshommesfroncèrentlessourcils,etlorsqueThanevoulutseleverpourl’accompagner,Hatcher,qui
étaitauboutdelatable,seglissahorsdesachaise.—Jel’accompagne.Elleseretintdeleverlesyeuxauciel.Aprèstout,Drakel’avaitprévenuequeleschosesallaientêtre
ainsi désormais.Ce n’était pas sa faute si elle avaitmomentanément oublié.La journée semblait si…normale.Commes’ilsn’étaientqu’ungrouped’amissortisdéjeuneretfairelesboutiques.Seulement,àencroireDrake–etMaddoxetSilas–,elleétaitconstammentendangerquandelleétaitseule.Cetteseulepenséesuffità réprimer touteprotestationdesapart.Drakene luidemandaitpasgrand-
chose, et il avait été si généreuxavecellequ’ellenepouvaitpaspiquerunecrise et se comporter enenfantrécalcitrante.—Merci,Hatcher,dit-elleenluisouriant.Ill’accompagnadanslehallsombredurestaurantetmontraleboutducouloir.—Lestoilettespourdamessonttoutaufond.Jeresteicietnelaissepasserpersonne.Lagravitédesontonlafitfrissonner,maiselleneréponditpas,etneposapasnonpluslaquestion
qu’ellemouraitd’enviedeposer–pensait-ilqueledangerguettaitvraimentàtouslescoins,ouDrakelaprotégeait-ilàl’excès?Elle se rua aux toilettes, ne voulant pas s’attarder plus longtemps qu’il ne le fallait. Sa dernière
expériencedansdestoilettespubliquesavaitététotalementdésastreuse,quandcettegrandebrunel’avaitréduite en miettes avec ses griffes acérées. Pas littéralement, bien sûr. Elle avait réussi à lui mettrequelquescoups,maisEvangelineaussi.Avec le recul, elle était fière de ne pas avoir laissé paraître son désarroi. Elle lui avait envoyé
quelquesremarquesacerbesdesoncruquiavaientatteintleurcible,àenjugerparlapâleurdelafemmeetlaragequiavaitéclosdanssesyeux.MaiselleétaitrestéesansvoixquandEvangelineluiavaitditqueDrakenepartageaitpascellesqui
luiappartenaient,etqu’ils’affichaitavecelle,cequiallaitàl’encontredeseshabitudes,luiquin’avaitjamaisde«salope»àsonbras,selonl’expressiondeseshommes.Ellegrimaçaenpensantàl’usagequecesderniersfaisaientdecemotpourdécrirelesfemmes.C’était
loind’êtreflatteur,etsiellen’étaitpascertainequ’ilsnelesmettaientpastoutesdanslamêmecatégorie,elle leur en ferait voir de toutes les couleurs pour les punir de parler des femmes de manière sipéjorative.Ellefitsonaffaire,selavalesmains,puisretoucharapidementsonmaquillage.Elleclignadesyeuxen
voyantlafemmequiluirendaitsonregarddanslemiroir.Elles’immobilisa,etl’examinadeplusprès,avantdeserendrecomptequec’étaitsonproprereflet.Elle avait tant changé depuis qu’elle avait rencontré Drake et avait été aspirée dans son monde.
Oubliés,lesvieillesfripes,sescheveuxtoujoursnouésenchignonflou,etlestraitsquelconquesdesonvisage.Ellesemblaitêtre…àsaplace.Ici.DanslemondedeDrake.Elleétaitdignedes’afficheràsonbras.
Depuis quand était-elle passée de la jeune fille de la campagne gauche et naïve à cette femmeexpérimentéeetraffinée?Ellesetrouvaitpresque…jolie.Elleportaunemainà sabouche, à sesyeux, sur son fardàpaupièresde luxe.Sonmaquillageétait
subtiletélégant,luiconférantunebeauténaturelle.Songlossàlèvresétaitsimplemaisbrillant,cequesoncôtéfillesavaitapprécier.Quellefemmen’aimaitpasleschosesquibrillent?Mêmeellenepouvaitprétendre le contraire. Elle n’avait aucun mal à admettre ses prédilections féminines car Drake lesappréciaittoutes.Illuiavaitconfiéàplusieursreprisesqu’ilaimaitsoncôté«fille»etqu’ilfallaitêtreunefemmeforteetsûred’ellepourassumersaféminitésanssesoucierd’êtrepriseausérieuxparlerestedumonde.Elle sourit. Si Drake appréciait, c’était lui-même qu’il devait remercier pour cette métamorphose.
Parcequec’étaitluiquiluiavaitdonnéconfianceenelle.Serendantcomptequesiellenesedépêchaitpasunpeu,sonsteakallaitêtreservietrefroidirait,elle
finitdesesécherlesmainsetsortitdanslecouloirsombre.Presqueaussitôt,ellepercutaquelqu’unets’excusaenmarmonnant.Quandelleserenditcomptequec’étaitunhomme,alorsquelestoilettespourhommesétaientde l’autrecôté,elle fut sur sesgardes ; ellevoulutcontourner l’individupourpouvoirappelerHatcherencasdebesoin.Maisunefoisencore,illuibloqualepassageensedécalantsurlecôté.Cefaisant,ilouvritunpande
savestepourrévélerunbadgeaccrochéàlaceinturedesonpantalon.Elleaperçutégalementl’énormepistoletdanssonétui.Lapeurluiglaçalesang.Ellefutprisedevertiges.—Quevoulez-vous?dit-elled’unepetitevoix.—MademoiselleHawthorn,dit l’hommeàvoixbasse.Pourriez-vousm’accorderun instant?Cene
serapaslong,jevouslepromets.Maisc’estuneaffairetrèsimportante.Uneaffairecriminelle.
1.ChansonpourapprendreauxenfantsdusuddesÉtats-Unisàépelerlemot«Mississippi».
Chapitre23
—Quemevoulez-vous?parvint-elleàarticuler.Il lui adressa un regard impatient suggérant qu’il ne croyait pas une seconde à son petit numéro.
Seulement,cen’enétaitpasun!Quepouvaitluivouloirlapolice?—DrakeDonovanestvotrepetitami,n’est-cepas?Unfrissonglacialluiparcourutl’échine,puissondosseraiditetelledressalementond’unairdedéfi.—Jenevoispasenquoimavieprivéevousregarde,etelleneconstitueaucunementune«affairede
police».—Êtes-vousaufaitdetoutessesactivités?demandalepolicier,laminegrave.—C’est unhommed’affaires, rétorquaEvangeline. Il se trouvequ’il possèdeplusieurs clubs.L’un
d’euxestl’Impulse.Vousenavezpeut-êtreentenduparler.Lepoliciersecoualatête.—Vousêtestropnaïve,mademoiselleHawthorn.Ilestliéaucrimeorganisé,etdirigeuneorganisation
criminelle. Les hommes qui vous escortent ? Tous des hommes de main de son organisation. Il a lamainmisesurbeaucoupdechosespasclairesdanstoutelaville.Ilvousentraîneradanssachute.Vouslesavez,n’est-cepas?Sijevousgarantissaisuneprotectionpolicière,seriez-vousprêteàcoopéreravecnousetànousfournirdesinformationspertinentespournotreenquête?Elleétaitbouchebée,horrifiée.—Vousêtesdingue?explosa-t-elle.Non,jenevaispasl’espionnerpourvous,nipourquiquecesoit
d’autred’ailleurs.C’estunhommebien.Pourquoineconcentrez-vouspasvoseffortssurl’arrestationdesvraiscriminelsdecetteville?demanda-t-ellesèchement.Ilsecoualatêteavecregretavantdeplongerlamaindanssapochepourensortirsacarte.—Sijamaisvouschangezd’avis,sivousavezbesoind’aide,ousivousdécouvrezquelquechoseque
jedevraissavoir,n’hésitezpasàmecontacter.J’assureraivotresécurité.Elleluiarrachalacartedesmains,nonparcequ’elleavaitl’intentiondel’utiliserunjour,maisparce
queDrakedevaitsavoirquiserenseignaitsurlui.—Drakeassureparfaitementmasécurité.Maintenant,sivousvoulezbienm’excuser,mondéjeunerest
entrainderefroidir.Ellelebousculapourpasseret,cettefois-ci,illalaissapartir.Elleremontalecouloird’unpasraide
pourretournerdanslerestaurant,cherchantHatcherdesyeux.Ilétaitnonloin,entraindeconsultersontéléphone,maissemitaugarde-à-vousquandillavitetfourrasontéléphonedanssapoche.—Toutvabien?demanda-t-ilvivementenladévisageantavecattention.—Çava,répondit-elled’untonsec.Allonsmangeravantqueçarefroidisse.N’attendantpassonaccordousondésaccord,elle regagna leur tableavec raideuren faisantdeson
mieuxpourdissimulersatension.Heureusementpourelle,lesplatsn’étaientpasencorearrivés.ZanderetThanel’observèrentaveccuriositémaisleserveurapparutavecleursassiettesavantqu’ilsnepuissentlaquestionner.C’était tout aussi bien, car elle avait besoin de temps pour se calmer et trouver le meilleur plan
d’action plutôt que d’agir sans réfléchir.Mais plus le repas avançait, plus sa fureur et son inquiétudegrandissaient.Ellenepouvaitpasallerfairelesboutiquescommes’ilnes’étaitrienpassé.Ilfallaitque
Drakesacheimmédiatementqu’ilfaisaitmanifestementl’objetd’uneenquêtedepolice.Maispourquelleraison?Ellerepensaàlafoisoùelleluiavaitdemandécequ’ilfaisaitexactement;illuiavaitgentimentdit
d’oublier.Pourlui.Etelleavaitaccepté.Elleétaitàprésentsincèrementraviequ’ilnesesoitpasconfiéàelle,carsaconscienceétaittranquille:ellenepouvaitpasdireàlapolicequelquechosequ’ellenesavaitpas.Quand ils eurent finidemanger, elle considéra sesoptions,maiscette fois-ci, ellen’éprouvaaucun
remordsà l’idéede tromper leshommesdeDrake.Elleadressaun regardsuppliantàZander. Il avaitbeauêtreplusbourruque les autres, elle savaitqu’il ferait cequ’elle luidemanderait sanshésitation.Surtoutsielleluifaisaitcomprendrequ’elleavaitbesoind’avertirDrake.— J’ai peur de ne pas me sentir d’aplomb pour aller faire les boutiques finalement, dit-elle en
repoussantsonsteak,qu’elleavaitàpeinetouché.J’aimalauventreetjecommenceàavoirmalàlatête.Cen’est sûrement rien,mais jepréfère rentrerm’allonger.Onpeutpeut-être aller faire les coursesunautrejourdanslasemaine?—Tuasbesoind’unmédecin?s’enquitThane.Ellesourit,ignorantleregardpénétrantdeHatcher.—Non,biensûrquenon.J’aijustebesoindem’allonger.Peut-êtredefaireunepetitesieste.—Allons-y.Faisvenirlavoiture,Thane,ditZanderaprèsavoirjetéplusieursbilletssurlatable.ThaneetHatchersortirentpendantqueZanderpassaitunbrasautourdesépaulesd’Evangelinepourla
guider jusqu’à l’entrée. Quelques minutes plus tard, ils étaient dans la voiture, en route pourl’appartementdeDrake.Leshommesladévisagèrentpendantletrajetretour,maiselleignoraleursregardsinsistants,préférant
seconcentrersurlepaysagedéfilantdel’autrecôtédelavitre.Quandilsarrivèrentenbasdel’immeuble,elleposasamainsurlebrasdeZander.—Tum’accompagnes?Vousn’avezpastousbesoindevenir.Aprèstout,jevaisjustemecoucher.LefrontdeZandersecreusa,commes’ilétaitloindes’attendreàcettedemande.—Biensûr.Vouspouvezyaller,vousdeux,dit-ilàThaneetHatcher.J’appelleraiunevoiturequandje
seraiprêtàpartir.IlaidaEvangelineàdescendredevoitureetl’escortaàl’intérieurdubâtiment.Ellejetauncoupd’œil
par-dessussonépaulepours’assurerquelavoitures’éloignaitet,dèsqu’ilsfurentàl’intérieur,ellesetournafaceàZander,uneexpressionpressantesurlevisage.—Zander,ilfautquetum’emmènesvoirDrake.Toutdesuite.Ilécarquillalesyeux,souslechoc.—Quoi?Quesepasse-t-il,Evangeline?Etjetejure,situréponds«rien»,jet’étrangle.— Je ne vais pas répondre « rien », dit-elle calmement. Ce que je vais dire, c’est qu’il est très
importantquejevoisDrakeimmédiatement,et tunepeuxpasleprévenirdemavenue.Jemefichedesavoir s’il est occupé, ce qu’il fait, avec qui il est. Tum’emmènes le voir sur-le-champ pour que jepuisseluiparler.Son ton pressant fit effet : l’inquiétude se peignit sur le visage de Zander. Il sortit son portable et
appela son chauffeur ou celui de Drake, supposa-t-elle. Sa directive fut brève et efficace : venir lechercheràl’appartementdeDrakeaussivitequepossible.DrakeraccrochalecombinéaprèssaconversationavecHatcher,lestraitsfigés.Unflicavaitapproché
Evangelineaurestaurantoùseshommesl’avaientemmenéemanger.Ilsavaientparlédanslehallpendantuncertaintempsavantqu’ellen’ailleretrouverlesautres.
Sonsangseglaçadanssesveinesàl’idéequ’Evangelinepuisseletrahir.Avait-ilpusetromperdelasortesursoncompte?Il fit lescentpasdanssonbureau,puisseposta faceà la fenêtrepourcontempler lesgratte-cielde
Manhattan, ruminantdespenséesnoires.Devait-il semerde fausses informationspourvoir cequ’il sepasserait?Luidonnerjustecequ’illuifallaitdepreuvespourqu’ilsache,silesflicsvenaientfouiner,qu’elleétaitlaseuleàavoirpuleurtransmettrel’information?Ilavaitlanausée.Elleluiavaitditqu’ellel’aimaitetilavaitététropépoustouflé,trop…émuparses
motsferventsetl’amourqu’ilavaitvudanssesyeuxpourfaireautrechosequelaprendredanssesbrasetlaserrercontrelui,decraintedeserendrecompte,s’illalâchait,quetoutçan’avaitétéqu’unrêve.Leplusmerveilleuxdesrêves,maisunrêvetoutdemême.Illibéraunviolentflotdejuronsquiauraitfaitrougiruncharretier.Bordel.Quedevait-ilfairedecetteinformationselonlaquelleEvangelineavaitparléàunpolicier?Elle avait essayé de lui soutirer des réponses un soir, qui lui semblait déjà bien loin ; il lui avait
demandéd’oublier,ditquecelanel’affecteraitjamais,nelatoucheraitjamais.Ilavaitcruqu’elleavaitabandonné et en avait été soulagé, mais était-ce vraiment le cas ? Avait-il éveillé ses soupçons,suffisammentpourqu’ellesetourneverslapolice?Ilseretournaetjetasontéléphoneàtraverslapièce.Ilsebrisaàl’impact,etDrakelaissalespièces
irrécupérableséparpilléessurlesol.Ilauraitdûêtreencolère.Entraindepréparersavengeance.Maisilneressentaitque…douleur.Une
douleurinfinie,insoutenable,accablante.Les yeux fermés, il se massa la nuque, en proie soudain à une certaine lassitude. Il ne pouvait se
résoudreàlapunir,àlamettredehors.Pouvait-illuienvouloirpourcequ’ellepouvaitpenseralorsqu’ilneluiavaitjamaisoffertsaconfiance?Jamaisparlédelaviequ’ilmenaitquandiln’étaitpasavecelle?Ilconnaissaitsuffisammentlesfemmespoursavoirquepeuauraientétéaussiconciliantesqu’Evangelineavaitsemblél’être.Ilnesavaitpasquoifaire.Néanmoins,ilnepouvaitresteravecunefemmequiavaitl’intentiondeles
balancerauxflics,sesfrèresetlui.Iltenditlamainversletéléphonefixeposésursonbureau,notantmentalementd’envoyersonassistant
lui acheter un nouveau téléphone portable. Il était sur le point de décrocher le combiné pour appelerEvangelinelorsquelaportedubureaus’ouvrit.Illevalatête,prêtàgronderquiconqueosaitledérangeralorsqu’ilavaitclairementordonnéqu’onle
laissetranquille,quandilvitquisetenaitdansl’encadrementdelaporte.Evangeline?Il lâcha le téléphone et fit le tour de son bureau pour la rejoindre. Elle était pâle et visiblement
secouée.—Evangeline,qu’est-cequinevapas?demanda-t-ilvivement.Mêmes’ilétaitfaceàunetraîtressesupposée,soninquiétudepourellegommamomentanémenttoute
autreémotion.Ellesemblaitapeurée.Terrifiée,même.Elletremblaitdetoussesmembres.Ellen’étaitjamaisvenuedansl’undesesbureaux,àl’exceptiondeceluiduclub.Bienqu’ilneluien
ait jamais interdit l’accès, c’était un accord tacite entre eux qu’elle reste à l’écart de son travail.Pourquoibrisercetaccordmaintenant?Puisilplissalesyeux,leregardassassin.—Oùsontleshommesquisontcensésteprotéger?demanda-t-ild’unevoixmenaçante.—Z-Zanderestvenuavecmoi,bégaya-t-elle.Jesuisdésolée,Drake.Jeneveuxpastedéranger,mais
ilfallaitquejevienneimmédiatement,doncjeluiaidemandédem’amener.S’ilteplaît,neluienveuxpas.Jeneluiaipaslaissélechoix.Jesuisdésoléededébarquercommeça,maisilfallaitquejeteparle.Déroutéparsapanique,Drakelaguidaverslecanapédevantsonbureau.—Cen’estrien,Evangeline,dit-ild’unevoixapaisante.Assieds-toi.Ilpritsesmainsdanslessiennes:ellesétaientglacialesettremblaientdemanièreincontrôlable.Une
fois installé à côté d’elle, il étudia ses traits de plus près. Sa colère et son instinct protecteur seréveillèrentquandilserenditcompted’àquelpointelleétaitpâle,apeurée,etsecouée.Ilmitsafureurdelasavoirdemècheaveclapolicemomentanémentdecôté.—Quelqu’unaessayédetefairedumal?Ont’amenacée?—Non,murmura-t-elle,presquedansunsanglot.Maisquelqu’unàl’intentiondetefairedumal.Ileutunmouvementde recul, surpris,carc’étaitbien ladernièrechosequ’il s’attendaitàentendre.
Certaind’avoirmalcompris, ilposasesdeuxmainssursesépauleset la forçaà le regarderdans lesyeux.—Dequoiparles-tu?Raconte-moitoutcequ’ils’estpassé,etsurtout,dis-moipourquoitupensesque
quelqu’unmeveutdumal.Elle prit une profonde inspiration pour se calmer. Lorsqu’elle releva les yeux vers lui, les larmes
brillaientsursescils.—Zander,Thane etHatcher devaientm’emmener faire des courses aujourd’hui,mais nous sommes
d’abordallésmanger.Pendantquenousattendionsnosplats,jesuisalléeauxtoilettes,etquandj’ensuisressortie,unhommebloquaitlecouloir.Quandj’aivoululecontourner,ilarefusédemelaisserpasser.Ilm’amontré…ilm’amontrésonbadgeetilportaitunpistoletaussi.Puisilm’aappeléemademoiselleHawthorn et m’a dit qu’il avait besoin de me parler d’une affaire de police. J’étais perdue. Enfin,pourquoilapoliceauraitbesoindes’entreteniravecmoi?dit-elleavecincrédulité.Oh,Drakesavaittrèsbienpourquoi.Lessalauds.Seservird’unefemmeinnocentepourl’atteindre.Celan’auraitpasdûlesurprendre.Plusriennele
surprenait.—Quandjeluiaidemandécequ’ilvoulait,iladitquetuétaismon«petitami».Jeluiairéponduque
jenevoyaispasenquoimavieprivéeregardaitlapolice.Bienenvoyé.—Puisilm’aditquejen’étaispasaucourantdetoutestesactivités.Ellesecoualatête.Lacolèresuccédaàlatristessedanssesyeux.— Je lui ai expliqué que tu avais plusieurs entreprises. Ilm’a répondu que j’étais naïve et que tu
m’entraîneraisdanstachute.Puis…Savoixsebrisaetelletressaillit.Ellesefrottalesbrascommesielleavaitfroid.—Puisquoi,Ange?demanda-t-ilavecdouceur.—Ilm’adonnéça.Elle plongea la main dans son sac pour en sortir une carte de visite, qu’elle lui tendit avec une
expressiondedégoût,commesiellenesupportaitpasdelatoucher.—Ilademandésijeseraisprêteàluidonnerdesinformationssurtoi.Sijevoulaisbient’espionner.
Jeluiaidit«non».Jamais.Ilm’apromisuneprotectionpolicièreenéchange.Dérisionetmépristransparaissaientdanssavoix.— Comme si tu pouvais me faire du mal, bouillonna-t-elle. Je lui ai dit que tu étais parfaitement
capabled’assurermasécurité.Et je l’aipriédedégagerdemoncheminetdemelaisser tranquille.Jesavaisquejedevaisvenirteprévenir.Aprèsdéjeuner, j’aidoncprétenduquej’étaismaladeetditaux
autres que je n’étais pas d’attaque pour aller faire les boutiques. Ensuite, j’ai demandé à Zander dem’accompagneràl’appartement,maisdèsqu’onaétéseuls,jeluiaidemandédem’amenerici.Auprèsdetoi.Elleleregardaavecinquiétude,commesiellecraignaitqu’illatraitedementeuse,oupire.Luiétait
complètementsidéréparcequ’ellevenaitdeluiapprendre.Uneétrangechaleurenvahitsapoitrine.Ilnesavaitpasquoifairedesadéclaration.Pourquoil’avait-elleprévenu?Ilfutsaisidehonteensesouvenantdelacolèreetdusentimentdetrahisonqu’ilavaitressentisavant
qu’ellen’arrive.Ilavaitdoutéd’elleetdesaloyautéalorsqu’elles’étaitfaitunsangd’encrepourlui.—Pourquoim’as-tuprévenu,Ange?demanda-t-ildansunmurmure.Jesaisquetuastessoupçons.Et
non,jenesuispasunhommebien.Alorspourquoimepréveniraulieudelesaideràmefaireenfermer?Ilsutqu’ilavaitfaituneterribleerreurdejugementquandilvitsaréaction.Choquée,bouchebée,elle
leregardaitfixement,complètementmuette.Commesiellen’arrivaitpasàcroirequ’ilaitpuposerunetellequestion.Qu’ilregrettaitamèrementd’avoirposée.— Jamais je ne te trahirais, Drake, dit-elle d’une toute petite voix. Jamais. Je suis à toi. Je
t’appartiens.Etcelaveutdirequetuastoutcequejesuisettoutcequej’ai.Maloyauté.Maconfiance.Monamour.Elleselevabrusquementetsedétournadelui.Undésagréablesentimentdepaniqueluirampasousla
peau, commeunemyriaded’araignées– il auraitpréférédevéritables araignées à cettepeurpanique.Allait-illaperdreparcequ’iln’avaitpaseufoienelle?Puiselleseretourna,colèreetdéterminationaufonddesyeux.—Tuastort,Drake.Tuesunhommebien.Jemefichedecequedisentoupensentlesautres.Ilsnete
connaissentpas.Moisi.Ettuesunhommebien.Elleagitasamaindansl’air,faisantdansersesdoigtsdélicats.—Peux-tutemontrerimpitoyable,arrogantetexigeant?Absolument.Tuesdéterminéetimplacable.
Maiscenesontpasdemauvaistraitsdecaractère.Ilsontfaitdetoil’hommequetuesaujourd’hui,etj’aimebeaucoupl’hommequetues.Jemeréveillechaquematinenmedemandantsitoutçan’estqu’unrêve,parcequecesibelhommequipourraitavoirtouteslesfemmesqu’ilveutm’achoisie,moi.Leslarmesbrillaientdanssesyeux.Elleétaitentraindeluioffrirsoncœur.Ilnesavaitpasquoidire.
Cette femme douce, généreuse et aimante, qui le défendait bec et ongles alors que lui tirait desconclusionshâtivessansmêmeavoirsaversiondesfaits,venaitdeluidonnerunebelleleçon.— Et tu as été si patient avec moi, reprit-elle, la voix serrée par l’émotion et les larmes qu’elle
s’efforçaitderetenir.Tuastoujoursprisletempsdem’apprendrecequitefaitplaisir,ettumefaisdixfoisplusplaisirenretour.J’espèrejusteque…Ellesedétournapoursereprendre,courageuse,avantdeluifairedenouveauface.— J’espère juste que tu ne vas pas te réveiller un jour,me regarder, et te dire : «Mais à quoi je
pensais?»Ellevintsemettreàgenouxdevantluietpritsesmainsdanslessiennes.—Jenetedemandequ’unechose,Drake,murmura-t-elle.Sicelaarriveunjour,situtelassesdemoi
etquetuneveuillesplusdemoi,toutcequejedemande,c’estquetuneregrettespasletempsquenousauronspasséensemble.Parceque jeneregretterai rien.Jechériraichaquesouvenir,chaqueminute,etjamais je ne regretterai une seule seconde.Tout ce que je te demande, c’est que tu fasses pareil et tesouviennesdemoiavectendresse.Drakesesentitbienpetit.Ilétaitentotaleadmirationfaceàlafemmeagenouilléedevantlui.Sagorge
seserradouloureusement:c’estluiquiauraitdûêtreàgenouxdevantelle.Ill’attiradanssesbraspourl’enlacerétroitement,lesempêchantpresquederespirer.Non,jamaisilne
selasseraitd’elle,elleétaitsidoucedanssesbras.—Bonsang,souffla-t-il.Tunecomprendspas,n’est-cepas?Iln’yaurajamaisd’autrefemmequetoi,
Ange.Jamaisjenepourraismedemanderàquoijepensaisenmeréveillantavectoilovéecontremoi,sidouceetinnocente.Laseulechosequejepeuxpenserenmeréveillantprèsdetoi,c’estquejamaisjenetelaisseraipartir.Ellesefigeaentresesbras.Elleétaitsi immobilequ’iln’étaitpascertainqu’ellerespireencore.Il
desserra sonétreinte et elle s’écartapour le regarder, les traits figés.Elle avait au fonddesyeuxunelueur d’espoir qui le toucha enplein cœur.Presque comme si elle avait peur de douter de lui.Oudeconfirmercequ’ilavaitdit.Elles’humectaleslèvresetfinitparmurmurerd’unepetitevoix:—Jamais?—Jamais.Elles’avachit,lesfessessurlestalonsetlesépaulesaffaissées.Puiselleenfouitsonvisageentreses
mains,maiscelan’empêchapasDrakedevoirleslarmescoulersursesjoues.—Nepleurepas,Ange,dit-ild’unevoixapaisanteenl’attirantdenouveaudanssesbras.Jamais.Je
veuxquetusoisheureuse.Enpermanence.—OhDrake, ne le sais-tu pas ?Tu viens de faire demoi la personne la plus heureuse aumonde,
sanglota-t-elle.J’aieutellementpeurpourtoiaujourd’hui.J’aiencorepeur,corrigea-t-elle.Quevas-tufaire?—Net’inquiètepas,Ange,dit-il,apaisant,enl’embrassantsurlefront.Tupeuxfaireçapourmoi?Il
n’yariendenouveau,jet’assure.Lesflicsonttoujoursfouinédansmesaffaires.Parléauxgensavecquijetravailleoum’associe.Ilsn’ontjamaisriendénichésurmoi.Ilsnetrouverontjamais.Ellesemorditlalèvre,jusqu’àcequ’ill’enempêcheavecsonpouce.—Tuessûr?Tudevraispeut-êtreappeler tonavocat.Cen’est sûrementpas légal,deharceler les
gensquiteconnaissentpourleurdemanderdet’espionner.Ildutseretenirdesourirefaceàsoninnocence.—Malheureusement,monange,ilsonttoutàfaitledroitd’interrogerquiilsveulent.Tut’enestrès
biensortie.Jesuisfierdetafaçondetecomporter.Çan’apasdûêtrefacile.Jesuisdésoléqueçatesoitarrivé.Tupeuxêtresûrequeçanesereproduirapas.— Je me fiche de moi, dit-elle avec impatience. Ce qui m’inquiète, c’est que ce flic avait l’air
affreusementdéterminéàtrouverquelquechose,n’importequoi,surtoi.Jecroisqu’ilsefichemêmedesavoirsiceseraitvrai.SontoncinglantfitpresquesourireDrake.— Pourquoi aurais-je besoin d’un avocat alors que tu es là pour me défendre et me protéger ?
Apparemment,jen’aibesoinquedetoi,monangechéri.—J’espèrequec’estvrai,dit-elleavecleplusgrandsérieux.Parcequemoiaussijen’aibesoinque
detoi,Drake.
Chapitre24
LessemainesprécédantNoëlfurentmagiquespourEvangeline.SiDrakeavait toujoursétéaimantettendre avec elle, unedifférence significative s’était opéréedans son attitude. Il était plusdémonstratifavecelleetn’avaitaucunmalàlacouvrird’affection,quecesoitenprivéouenpublic.Seshommess’étaientmoquésdeluiàcesujet,maisDrakeavaitacceptésanssourcillerenleurdisant
gaiementqu’ilspourraientparlerquandilsauraient trouvéunefemmecommeelle. Ilsn’avaientpassurépondreàça,etlesmoqueriesavaientvitecessé.Illuifitlasurprised’untrajetenavionpourqu’ilsaillentvoirsesparentsjusteavantNoël,mêmes’il
avait insisté pour qu’ils reviennent en ville afin qu’ils puissent passer le réveillon et le jour deNoëlensemble,envain.Ilsavaientpassétroisjoursmerveilleuxavecsafamille,maisc’étaitlecadeauqueDrakeavaitoffertà
sesparentspourNoëlquil’avaitsoufflée–toutcommeeux.LaveilledeleurretouràNewYork,DrakeavaitemmenéEvangelineetsesparentsdevantunesuperbe
maison,dansleurville,etleuravaitannoncéqu’elleétaitàeux.Elleavaitétécomplètementrénovéeetadaptéepourlefauteuilroulant,etl’anciennecuisineavaitété
remplacéeparunecuisinedecompétition,avecdel’électroménageretdesmatériauxhautdegamme.Samèreavaitpleurédejoie.Mêmesonpèreavaitététrèsému.MaisDrakenes’étaitpasarrêtélà.Ilavaitfaitmieux.Nonseulementlamaisonétaitfournieavecune
femmedechambrequivenaitfaireleménagetroisfoisparsemaine,maisDrakeremitaussiàBrendalesclésd’unminivanflambantneufpourquesonépouxnesoitpastoujoursobligéderesteràlamaison.La mère d’Evangeline avait serré Drake dans ses bras au moins une centaine de fois, et s’était
confondue en remerciements, non seulement pour sa générosité,mais également parce qu’il rendait sapetitefillesiheureuse.EtilsuffisaitderegarderEvangelinepourvoirqu’ellerayonnaitdebonheur.Unbonheurqueseuleunepersonnetrèsamoureusepouvaitéprouver.Et pour exprimer comme il se devait sa gratitude pour tout ce qu’il avait fait pour sa famille,
Evangelineluiavaitfaitl’amourcommeunediablesseàborddesonjetpendanttoutletrajetduretourjusqu’à NewYork. Il lui avait dit en plaisantant lorsqu’ils étaientmontés dans la voiture à l’arrivéequ’ellel’avaitépuiséetqu’ilseraitincapabledesortirdulitpourfêterNoëlavecelle.S’il ne pouvait pas sortir du lit, lui avait-elle sérieusement répondu, alors elle n’aurait pas d’autre
choixquede l’y rejoindre,etpuisqu’elle s’ennuieraitàmourir, il faudraitqu’elle trouvedesmanièrescréativesdesedistraire.Ilyavaitpiremanièredepasserlesfêtes,avait-ilconclu.LaveilledeNoël,ilfaisaitfroid,unventfraisbalayaitlesrues,maisiln’yavaitpasunnuagedansle
ciel,àlagrandedéceptiond’Evangeline.Aprèstout,qu’étaitNoëlsansneige?CelafitrireDrake,quiluiditquelamétéoprévoyaitdelaneigedanslasoirée.Evangelines’affairaencuisinetoutelamatinéeenprévisiondel’arrivéedeshommesdeDrakepour
unréveillondeNoëlanticipécetaprès-midi-là.Elleleuravaitachetédescadeauxàtous,déjàdisposésaupieddusapin.Toutprèsdeladouzainedecadeauxqu’elleavaitachetésàDrake.Drakeavaitentretenulesecretausujetducadeauqu’ilallaitluioffrir,allantmêmejusqu’ànemettre
aucunprésentportantsonnomsouslesapin.Ellefaisaitlamouechaquefoisqu’elleregardaitlesapin,maisDrakesecontentaitderire.
Il la trouvaen traindemanierunedesesnombreusespoêlesdevant les fourneauxetpassasesbrasautour de sa taille pour l’attirer contre son torse. Il fit planer ses lèvres le long de son cou, puis luimordillalapeaujustesousl’oreille.—Tevoilà,murmura-t-il.Tucomptespasserlajournéeici?Jecommenceàmesentirnégligé.— Pauvre bébé, dit-elle, feignant la compassion. Tu ne te plaindras plus tout à l’heure, quand tu
goûterascequejesuisentraindepréparer.Ilhumal’airensouriant.—Çasentdivinementbon.Qu’est-cequec’est?Çan’apas l’air traditionnel.Cesontdesfiletsde
poissonetdescrevetteslà-bas?Ellesourit.—Oui.Jefaisunrepasdechezmoipourleréveillon.Demain,jerenonceàladindefarcieetjefais
unecôtedebœufrôtieavecdedélicieuxaccompagnementsetunebisquedehomardenentrée.Ilgrogna.—Bonsang.Jevaisdevoirengageruncoachpersonnel.J’aidûprendredixkilosdepuisquejet’ai
rencontréeetquetuascommencéàmenourrir.Elletournalatêteversluipourleregarder,sourcilshaussés.—Etoùsontlesdixkilosquetuaspris?Parcequejenelesvoisnullepart.Ilfitsemblantd’yréfléchir.—Ehbien,j’imaginequenosébatsdéchaînéstouslesjourscompensentlescaloriesquejeconsomme.
Tesatisfaireestuneactivitéastreignante.—Jepeuxtoujoursrefrénermonappétit.Jenevoudraispasquetusouffresinutilement.—Essaie, grogna-t-il. Si jemeurs, jemourrai heureux.Bien nourri et sexuellement rassasié par la
femmelaplusbelle,laplussexyetlaplusdésirabledelaplanète.—Waouh,murmura-t-elle.Tun’espastropsubjectif?Illuidonnaunetapetaquinesurlesfesses,maisavecunmordantquifitpalpitersonsang.—Jenesuispassubjectif.Jesuisunhommedegoût.Jeveuxlemeilleur.Raisonpourlaquellejet’ai
attendue.Elleétaitsansvoix,auborddeslarmes.Maisellerefusaitdegâcherl’humeurlégèreetdésinvolteen
fondantenlarmesdanssesbras.Ilsoupiraenfeignantl’exaspération.—Quandvais-jeenfinpouvoirtecomplimentersansquetutemettesàpleurer?lagronda-t-il.—Jamais,marmonna-t-elle.Ilvafalloirt’yfaire.—Ondiraitbienquejen’aipaslechoix.L’interphoneretentitetDrakepoussaunsoupirexaspéré.—Onnepeutplusêtretranquille.—Nesoispasimpolietantisocialavecnosinvités,luireprocha-t-elle.Celalefitrire.—Chérie,jesuistoujoursimpolietantisocial.Ilsmeferaientinternersijenel’étaisplus.Oualorsils
penseraientquej’aiétéenlevépardesextraterrestres.Elle luidonnauncoup taquin,puis il s’éloignapouraller répondre.Quelques instantsplus tard, les
hommes de Drake entrèrent en nombre dans l’appartement, les bras chargés de paquets aux couleurschatoyantesqu’ilsempilèrentaussitôtsouslesapin.Puis,commeonpouvaits’yattendre,ilssepressèrenttousdanslacuisineaveclamêmequestionsur
leslèvres:qu’yavait-ilàmanger?Evangelineavaitdresséunetabledefêteets’étaitassuréequ’ilyavaitassezdechaisespourtoutle
monde.Deuxheuresaprès l’arrivéedeshommesdeDrake,elleannonçaque ledînerétait serviet lesregarda tous se rassembler autour de la table avec satisfaction. Drake s’assit au bout de la table,EvangelineàsadroiteetSilasàsagauche.Lesautresprirentplacedechaquecôtédelatable,etMaddoxs’installaàl’autrebout,enfacedeDrake.—Avantdecommencer,jevoudraisremercierEvangelinedes’êtredonnétantdemalpourpréparer
unsibonrepaspournoustous,ditDrakeenposantsurelleunregardfier.—Untoast,ditSilasenlevantsonverredevin.ÀEvangeline.L’unedespersonneslesplusdouces,
gentillesetgénéreusesqu’ilm’aitétédonnédeconnaîtreetquia,irréfutablement,uncœurgroscommeça.—Jeveuxbientrinqueràça,ditMaddoxenlevantsonverreenretour.—Moiaussi,ditDrakeenpenchantsonverreendirectiond’Evangeline.Etnet’avisepasdepleurer.Elleéclataderirecarsinon,justement,elleallaitsemettreàpleurer.Ellelevasonverreetbalayadu
regardl’assembléeexclusivementmasculine.—Merciàtousd’êtrevenusetderendrecettefêtesispéciale.La tables’anima tandisque tous trinquaientpuisdescendaient leursverresdevin.Evangelineservit
ses plats – filets de poisson-chat grillés, crevettes frites, langoustines à l’étouffée et légumes, et, lemeilleurpourlafin:sespetitspainsmaison.Dès que le premier homme eut croqué dans un pain encore tout chaud, il laissa échapper un
gémissement.—OhmonDieu,ditHartleyavecuneexpressiondepurbonheursurlevisage.C’estlemeilleurtruc
quej’aimangédetoutemavie.Curieuxfaceàsaréaction,lesautresattrapèrenttousleurspainsenmêmetempsetdesgémissements,
soupirsetexclamationsdebonheurretentirentautourdelatable.—Bordel,Drake,seplaignitJustice.Pourquoic’esttoiquil’aseueenpremier?Jeseraissonesclave
àvieneserait-cequepoursespetitspains.—Ilfaudraquejem’ensouvienne,ditEvangelineavecespièglerie.Maintenant, jesauraiquoifaire
quandj’auraibesoind’unefaveur.Remuerunpetitpainmaisonsoustonnez.—Chérie,mêmepasbesoindeleremuer,ditJaxavecsonplusbeauregarddechienbattu.Iltesuffit
dedirelesmots«petitspains»etjesuisàtonservice.—Bandedecrétins,ditDrake.Laissez-latranquille.D’ailleurs,laissezmespetitspainstranquilles.Il
vaudraitmieuxqu’ilenrestepourmoiougareàvosfesses.Silas,quiavaitgardélesilencependantqu’ilmâchouillaitsonpain,considéraDrakeetditd’unevoix
parfaitementposée:—Ilva falloirmepasser sur lecorps.Cespetitspainsvalentbienquelquesannéesdeprisonpour
meurtre.LaminedéconfitedeDrakefitéclaterEvangelinederire.Lerestedelatroupesemitàrireàsontour
faceàl’expressiontoujoursimpassibledeSilas.—Vousêtestrop,ditEvangelineensecouantlatête.Ilsmangèrent,appréciantd’être tousensemble,et lesmoquerieset railleries sepoursuivirentdurant
toutlerepas.Voilààquoidevaitressemblerunegrandefamille,seditEvangeline.Elleadoreraitavoirunegrandefamille,unjour.Autantd’enfantsquepossible.Ellenesavaitpasquel
étaitlepointdevuedeDrakesurlaquestionnimêmes’ilvoulaitdesenfants,maiselleespéraitdetoutcœurqueoui.Ilferaitunsibonpère.Illesprotégeraitelleetsesenfantsaupérildesavie.Drake passa sa main sous la table pour serrer la sienne. Son sourire était chaleureux et plein…
d’amour?Evangelinesavaitqu’il tenaitsincèrementàelle.Peut-êtremêmequ’il l’aimaitsanspouvoir
encoresel’avouer.Celadit,elleavaittoutsontemps.Elleattendraitpourtoujourss’illefallait.Luietsonamourenvalaientlapeine.Aprèsmanger,ilsserendirenttousenfileindiennedanslesalon,oùunedisputeéclatapoursavoirqui
allaitfairelePèreNoël.Evangelineétaitsidéréedevoircesgrandscostaudssebattrepoursavoirquiallaitfaireladistribution
descadeaux.Silasfinitparmettrefinaudébatenannonçantqueceseraitluiquiferaitladistribution,etEvangelinecrutquelesautresallaientfaireuneapoplexie–à l’imagedeJustice,quiconsidéraitSilascommes’ilavaitdeuxtêtes–envoyantqueSilasseproposaitdesonproprechefpourunetellemission.Maiscelui-cisecontentadesourireetdemandaàEvangelinedes’asseoirsurlecanapépourqu’ilpuisseluidonnersescadeaux.—Attends,quoi?demanda-t-elle,ébahie.Jen’airienàdéballer.Tuescenséfairepasserlescadeaux
quejevousaiachetés.Silassecoualatête,toutcommelesautres.Maddoxluifitlesgrosyeux.—Donc, tu penses que tu peuxnous acheter des cadeaux à tousmais nous n’avons pas le droit de
t’avoirprisquelquechose?demandaSilas.Ellerougit.—Vousn’étiezpascenséssavoirquejevousavaisachetéquoiquecesoit–jusqu’àmaintenant.—Nousnelesavionspas,répondit-ilsèchement.Noussommesvenustedonnertescadeaux.—Onadescadeaux?intervintZander,lavoixpleined’espoir.Ellepouffa:onauraitditunpetitgarçontoutexcitélematindeNoël.D’ailleurs,leshommesavaient
touslesourireetsemblaientimpatientsdevoircequ’elleallaitleuroffrir.Elleétaitcontented’avoirfaitdesfoliesetdeleuravoirachetéplusieurscadeauxchacun.—J’espèrejustequevouslesaimerez,murmura-t-elle,embarrassée.—Nousaimonstoutcequetunousdonnes,ditMaddox,réprobateur.Silas commença à distribuer leurs cadeaux à chacun, et les hommes déchirèrent promptement leurs
paquets,aussiexcitésquedesenfants.Ellelesobserva,tropcaptivéeparlessouriresetlesréactionsàce qu’elle leur avait acheté pour prêter attention à ses propres cadeaux. C’était un Noël qu’ellen’oublierait jamais. Elle coula un regard versDrake pour voir sa réaction.C’était leur premierNoëlensemble et ils l’avaient d’abord partagé avec la famille d’Evangeline, etmaintenant celle deDrake.Ensuite?IlscélébreraientleurpropreNoël,enprivé.Maispourlemoment,elleprofitaitdel’instant.Drakeluisouritetarticulaun«merci».Elleluiadressaunlargesourireenretour,luifaisantsavoir
quetoutleplaisirétaitpourelle.Quelidiot.Ilavaitfaitbienpluspourellequetoutcequ’ellepourraitjamaisfairepourlui.Chacun des hommes vint faire un câlin et un bisou à Evangeline, et la remercia pour les présents
qu’elle lui avait offerts. Ensuite, bien sûr, ils l’exhortèrent à ouvrir les siens et elle se lança avecenthousiasme,déchirantlepapierdanssahâtedevoircequisetrouvaitàl’intérieur.Leshommeslataquinaient,maiselletrouvachaleuretaffectionsurchacundeleursvisages.Àlafindelasoirée,Evangelinefuttristedelesvoirpartir,mêmesielleavaithâtededécouvrirce
queDrakeavaitprévu.Ilavaitditqu’ilvoulaitqu’ilss’offrentleurscadeauxauréveillonplutôtquelematindeNoël,maispasplus.Etcommeellen’avaitvuaucuncadeauportantsonnomsouslesapin,ellen’avaitaucuneidéedecequ’ilallaitluioffrir.Après tout cequ’il avait fait pour sesparents, il devait savoirqu’ellen’avait besoinde rien. Il lui
avaitdéjàdonnétoutcequ’elleauraitpudemander.Sielleneluiavaitpasdéjàditqu’ellel’aimait,ilaurait su qu’elle lui vouait un amour inconditionnel quand il avait offert à ses parents la maisonspécialementrénovéeselonlesbesoinsdesonpère.
Aprèsavoirditaurevoiràtoutlemonde,EvangelineselaissatombersurlecanapépourcontemplerlesflammesdelacheminéeélectriquedeDrake.Puis,sesouvenantdel’annoncemétéo,elleselevaetseprécipitaverslafenêtredansl’espoird’apercevoirquelquesfloconsdeneige.Cequ’ellevitdehorslafitcrierdejoie.—Drake,regarde!Ilneige!Desvraisgrosfloconsdeneige!Drakelarejoignitdanslesalonetpassasesbrasautourdesataille.Ilsouritetl’embrassasurlefront.—Jevoisça,Ange.TonNoëlest-ildoncparfait?Elleseretournadanssonétreinteetpassasesbrasautourdesoncou.—C’esttoiquirendsmonNoëlparfait,Drake.Jepeuxvivresanslaneige.Jenepeuxpasvivresans
toi.Ill’embrassatendrement,langoureusement.—Vienst’asseoirsurlecanapéetlaisse-moiallercherchertescadeaux.Ellefuttoutexcitéeetsautillaitpresqueenretournants’asseoir.Unsourireentenduauxlèvres,Drake
disparut dans la chambrepour en ressortir quelques instants après, les bras chargés depaquets. Il lesdéposasouslesapinavantd’allerenchercherd’autres.Maislorsqu’ilsedirigeaverslachambrepourlatroisièmefois,lamâchoired’Evangelinesedécrocha.—Drake!Combiendecadeauxm’as-tuachetés?Ilsouritendéposantlatroisièmefournéedepaquetssouslesapinavantderetournerunefoisencore
dans la chambre. Elle allait le tuer. Elle n’avait pas besoin de tout ça ! Pourtant, se remémorant saréactionquandelleavaitrésistéauxcadeauxqu’illuiavaitachetésaudébutdeleurrelation,ellegardasesobjectionspourelle,refusantdegâcherlafête.S’ilaimaitluioffrirdeschoses,ellen’allaitpaslepriverdeceplaisir.Enfin,aprèslequatrièmevoyage,ils’approchaducanapéetluitenditlamain.Ellelelaissalaguider
jusqu’ausapin,aupiedduquelilss’assirent.Oh,çaallaitêtretellementamusant!Ils ouvrirent leurs cadeaux à tour de rôle, chacun exprimant à l’autre l’intention derrière chaque
présent.Drake semblait franchement ravi par cequ’elle avait choisi pour lui, et elle se rendit comptequ’elleavaitappréhendésaréaction.Maistoutsemblaitluiplaire.Ce grand déballage de cadeaux semblait le déconcerter. Le cœur d’Evangeline se serra quand elle
songeaquepersonnen’avaitjamaisdûluioffrirdecadeauxdeNoël,oud’anniversaire.Siçanetenaitqu’àelle,elleluioffriraitbonheuretjoiepourlerestantdesesjours.Ilsavaientouverttousleurscadeaux.Ouc’étaitdumoinscequ’ellepensait.Quandellevoulutselever
pourramasserlesmorceauxdepapierétalésautourd’eux,ill’attrapaparlamainetlatiraverslesol;seulement,cettefois,ill’assitsursesgenoux,unbraspasséfermementautourd’elle.—J’aiunderniercadeaupourtoi,dit-ild’unevoixrauque.—Oh,Drake,tun’auraispasdû.Tum’asdéjàachetétoutunmagasin!Illuitendituncadeaucarrédetaillemoyenne,savammentemballé,avecunénormenœudensatin.Il
étaitpresquetropbeaupourl’ouvrir.—Vas-y,insistaDrake.Ouvre.Lesmainstremblantes,elleretiralerubanavecdélicatesseavantdedéchirerlepapier.Àl’intérieur
de laboîtese trouvaituneautreboîte.Elle lasortitpuisentrepritde l’ouvrir.Quandelledécouvritunpetitécrinàbijouxdanslasecondeboîte,elleeutlesoufflecoupé.Ses doigtsmaladroits ripèrent sur le haut de l’écrin quand elle essaya de l’ouvrir.Drake l’aida en
faisant basculer le couvercle pour révéler une magnifique bague et son énorme solitaire. Elle levaaussitôt les yeux vers lui, l’interrogeant du regard. Elle ne voulait pas tirer de conclusion hâtive etpotentiellements’humilier,mais,monDieu,ellenepouvaitplusrespirer!
Ilpritlabaguedansl’écrinetlaluipassaàl’annulairegauche.Lesyeuxd’Evangelineseremplirentdelarmesetsesnarinessedilatèrentcommeellefaisaitsonpossiblepourmaîtrisersesémotions.Puisilposaunemainsoussonmentonetlaregardadroitdanslesyeux.— Veux-tu m’épouser, Ange ? demanda-t-il solennellement. Seras-tu mienne, légalement, pour le
restantdenosjours?—Oh,Drake,souffla-t-elle,tremblante.Tuessûr?Tuveuxvraimentm’épouser?—Jamaisjen’aiétéaussisûrdequoiquecesoitdansmavie,jura-t-il.Tueslaseulefemmequeje
veux–etvoudraijamais–pourépouse.Jeveuxfairedetoilamèredemesenfants.Etvieilliravectoi.Disoui,Ange.Jeneveuxpasattendre.Jeveuxquetusoismienneetquelemondeentierlesache.Ellesejetaàsoncouetleserracontreelledetoutessesforces,lecœurbattantàunevitessefolle,si
vitequ’elleavaitlatêtequitournait.—Oui!MonDieu,oui!Jet’aimetellement,Drake.Jen’aimeraijamaispersonned’autrequetoi.Rien
neme rendrait plus heureuse que de devenir ta femme et de porter tes enfants. J’en veux unemaisonpleine,dit-elleavecenthousiasme.Combienenveux-tu?Ilsourit,lesyeuxemplisd’unesatisfactionabsolue.Ilavaitl’air…heureux.—Je tedonneraiautantd’enfantsque tuenvoudras,Ange.Avec toipourmère, jen’aurai jamaisà
avoirpeurquenosenfantsconnaissentlegenred’enfancequej’aieu.Il hésita, son regard s’assombrit un instant. Puis il la regarda de nouveau, l’air si déterminé et…
aimant…qu’elleeneutlesoufflecoupé.—Avant toi, j’auraisditquejamais jenememarierais.Quejen’aurais jamaisd’enfants.Lerisque
étaittropgrand.Jenevoulaispasquemonenfantaitlegenredemèrequej’aieu.Puisjet’airencontrée,ettoutachangé.Jenesavaispasquelesfemmescommetoiexistaient,dit-ilavecadmirationetrespect.Maisheureusement,ellesexistent.Etheureusement,jet’aitrouvée.—Oh,Drake, répéta-t-elle encore, comme si c’étaient les deux seulsmots qu’elle était capable de
prononcer.Tumerendssiheureuse.Tueslapreuvevivantequelesrêvespeuventdevenirréalité.Tuasréalisétousmesrêves.Commentnepast’aimer?Commentnepast’épouser?Commentvouloirunautrehommequetoicommepèrepourmesenfants?—Etsinousallionsaulitnousentraîneràfaireunbébé?dit-il,unelueurmalicieuseaufonddesyeux.
Je voulais faire l’échange des cadeaux ce soir car je voulais que nous passions notre premier Noëlensembleaulit,àfairel’amourensachantque,dèsquepossible,tuseraisàmoidetouteslesmanièresenvisageablesauxyeuxdeDieuetdeshommes.—Jecroisquetun’aspasbesoind’entraînementdanscedomaine,dit-elleavecunsourirecharmeur.
Maisjesuistoutàfaitd’accordpourfaireungalopd’essai.Tusais,justepourêtresûrsque,quandnousdécideronsdefaireunenfant,nousleferonsbien.
Chapitre25
—Allez,faisvoirlabague,ditMaddoxenentrantdansl’appartementauxcôtésdeSilas.Jetejure,Draket’agardéebienàl’abridepuisqu’ilafaitsademandeàNoël.Jecommençaisàmedemandersinousallionsterevoir,jusqu’àcequ’ilfinisseparnousdirequetuvenaisauclubfêterlenouvelanavecnous.Evangeline rougit,mais elle souriait jusqu’auxoreilles lorsqu’elle tendit lamainpour que les deux
hommesvoientl’énormediamantquiscintillaitàsondoigt.Lapierreétaitsiimposanteetcertainementsidémesurément chère qu’elle vivait dans la peur de la perdre. Elle ne la retirait jamais. Sous aucunprétexte.Maddoxpoussaunsifflementd’admiration.—Drake fait les choses bien quand il se lance enfin. Je ne pensais pas voir ce jour arriver,mais
mince,tevoilà.LafuturemadameDrakeDonovan.—Félicitations,poupée,ditSilasdesontoncalme.—Merciàvousdeux,dit-elleenlesprenanttouràtourdanssesbras.Vousêtesprêtsàyaller?Je
doisadmettrequ’aprèsavoirpassélasemaineenferméeiciavecDrake,jecommenceàdevenirunpeufolle.Jesuisprêteàsortiretàvoirdesvraisgens!Maddoxricana.—Votrecarrosseestavancé,madame.Etpuis-jemepermettredevousdirequevousêtessplendide,
cesoir?Jesuistentédetedemanderd’allertechanger,parcequequandDrakevaposerlesyeuxsurtoi,ilvacertainementmedemanderdeterameneràlamaison.Silas pressa ses lèvres l’une contre l’autre pour se retenir de rire, mais reconnut avec regret que
Maddoxavaitcertainementraison.—C’estluiquiaachetécefichutruc,iln’auraqu’àprendresurlui,marmonna-t-elle.—Jecomprendsbienpourquoiill’aacheté,observaSilas.Maisj’imaginequ’ilpensaitàluiquandil
l’aachetépourtoi.Etpasàlademi-douzained’autreshommesquiapprécientunejoliefemmequandilsenvoientune.—Allons-yavantquel’undevousdécidedemeforceràmechanger,dit-ellenonsansunecertaine
exaspération.Lanuitétaittombéeletempsquelavoitured’Evangeline,MaddoxetSilasarriveauclub.Ilspassèrent
devantl’entrée,où,malgrélefroidetlesbourrasques,unelonguefiles’étendaitjusqu’aucoindelarue.—Waouh,lafêtebatsonplein!s’exclama-t-elle.— C’est la plus grosse soirée de l’année pour le club, répondit Maddox. Et ça peut facilement
dégénérer.Drakeengagetoujoursdesgaillardsenpluspourleréveillondujourdel’an.Ellefitlagrimace.—Çamerappellelapremièrefoisoùjesuisvenueici.Silasserrasamaindanslasienne.—N’ypensemêmepas,cesoir.Cesoir,turesplendisettut’amuses.Elleluisourit.—Oh,ne t’inquiètepas. Jen’aipasun seul regret concernant cette soirée-là, si cen’estdenepas
avoir frappéEddiemoi-même.C’est laseulechosequiauraitpu rendrecettesoiréeencoremeilleure.
C’estlesoiroùj’airencontréDrake.Maddoxsourit.—C’estvrai.Etjedoist’avouerquecettesoiréefigureparmimespréféréeségalement.Ilssegarèrentàl’arrière,àcôtédel’élégantevoituredeDrake.SilasaidaEvangelineàdescendredu
véhicule,puislesdeuxhommesl’encadrèrentpourentrerdanslebâtiment.Ilsfurentsaluésparplusieursemployésdel’établissementenserendantdanslebureaudeDrake.Sachantqu’ilavaitdéjàcertainementrepérésaprésence,ellesouritetenvoyaunbaiserendirectiondubureau.—Tuesunevraieallumeuse,commentaMaddoxenriant.—Moi?dit-elleinnocemment.—Tuesbienpourlui,ditSilasavecsérieux.Surprise, elle haussa un sourcil, mais ne dit rien. Ilsmontèrent en ascenseur, et lorsque les portes
s’ouvrirent,elleeutunsentimentdedéjà-vu.Ellefutramenéeenarrière,àlapremièrefoisoùelleavaitpriscetascenseur,aucombledel’embarrasetdelapeur,pourseretrouverfaceàuneforcedelanature:DrakeDonovan.Ellesoupiraavecbonheur.Tantdechosesavaientchangédepuis.Quiauraitcruquelafemmequiavait
pénétré à l’Impulse d’un pas si hésitant cette première fois y reviendrait en tant que future épouse deDrake?Ils n’avaient pas fait trois pas queDrake sematérialisa à ses côtés, une expression comique sur le
visagelorsqu’ilvitsarobe.—Mince.Cetteroben’étaitpasvraimentfaitepourquetulaportesici,s’étrangla-t-il.Elletournasurelle-même,mainstendues,paumesverslehaut.—Tun’aimespas?—Tusaisbienquej’adore,grogna-t-il.Cequinemeplaîtpas,c’estquemeshommestevoientdans
cettetenue.—Onsurvivra,ditJusticed’unevoixtraînantederrièrelui.—Oh,jem’endoute,marmonnaDrake,avantd’embrasserEvangelinesurlabouche.Tum’asmanqué,
luisouffla-t-ilàvoixbasse.L’euphoriepétilladanssesveinescommeunsodaqu’onauraitsecoué.—Toiaussi,tum’asmanqué,répondit-elle,lavoixrauque,avantdesetournerverslesautres.Oùest
lechampagne?Onnepeutpasfêterlanouvelleannéesanschampagne!—S’ilteplaît,ditJaxens’avançant,uneflûtedechampagneàlamain.Drake la guida jusqu’à sonbureau, où il s’assit dans son fauteuil et l’attira sur ses genoux.Elle se
détenditcontreluietsirotaledélicieuxbreuvage.—Bon,quivadanseravecmoicesoir?demanda-t-ellemalicieusement.L’étreintedeDrakeseresserrasursataille.—Jeseraileseulhommeavecquitudanseras.—Oh,allons,Drake,dit-elleenfaisantlamoue.Tuleslaisserasbientousavoirunedanseavecmoià
notremariage.Sonregardseradoucitalorsmêmequedesflammess’yembrasaient.—Ilsaurontdroitàuneminutechacunàlaréception.—Tuessigénéreux,mec,ditZanderdesavoixtraînante.Turetireslafemmelaplusjolieetlaplus
doucedumarchéettunousaccordesuneminutepourdanseravecelle.Sympa.—Tais-toioutuperdssespetitsplatsaussi,ditDrakeenleregardantd’unœilmauvais.—Jemetais,jemetais,ditZanderenlevantlesmainsensignedecapitulation.Pendantlesheuresquisuivirent,l’atmosphèrefutfestivedanslebureau.Leshommesremplissaientle
verre d’Evangeline de champagne, jusqu’à ce qu’elle ait la tête qui tourne. Elle riait, souriait etplaisantait de tout et de rien,mais cela ne semblait pas déranger les hommes.Drake avait le sourire,allantmêmejusqu’àdirequ’elleétaitmignonnequandelleétaitsoûle.—Jenesuispassoûle!s’exclama-t-elle.—Jen’enseraispassisûreàtaplace,ricanaMaddox.Jediraisquetuesbienpompette.Elle plissa les yeux ; seul problème,Maddox s’en retrouvamultiplié par trois.Décidant de ne pas
partagercetteinformationaveclui,ellesecontentadel’ignorer.—Eh,lecompteàreboursacommencé,annonçaHartley.Plusquetrentesecondesavantminuit.EvangelinepritDrakeparlamainetluilançaunsourireéclatant.—Çavaêtrelaplusbelleannéedetoutemavie,murmura-t-elle.LesyeuxdeDrakepétillèrentetilpritsonvisageentresesmains,l’attirantversluipourl’embrasser
avecardeur.Derrièreeux,leshommessemirentàcompter.—Huit,sept,six,cinq…Ilsdescendirentjusqu’àunetlapistededanseencontrebasexplosaàl’instantmêmeoùlesportesdu
bureau de Drake s’ouvraient à la volée. Des hommes portant des fusils d’assaut se précipitèrent àl’intérieurenhurlantàtoutlemondedesemettreàterre.Drakeselevad’unbond,poussantEvangelinederrièresondosalorsqu’onpointaitdeuxarmessurlui.—Àterre!aboyaundeshommes.PolicedeNewYork!Nousavonsunmandatdeperquisition.—Quoi?grondaDrake.Evangeline dut plaquer samain contre sa bouche pour ne pas crier,mais lorsque les deux hommes
attrapèrentDrake,quin’avaitpasobéiàleurordredesemettreàterre,ellesejetasureux,larageauventre.—Laissez-le tranquille !hurla-t-elle.Qu’est-cequevous lui faites?Vousnepouvezpasdébarquer
commeçadanssapropriétéprivée,lemenaceravecdesarmes,etlemalmenerainsi!D’autreshommesétaiententraindemaîtriserSilasetMaddox,bienquedifficilement.Etlorsquel’un
des policiers s’en prit à Evangeline, Drake explosa de rage. Pourtant, ce fut un policier, le chef desopérations,visiblement,quiordonnaauxhommesdelalâcher.—Laissez-la tranquille,aboyaleflic.Elleestavecnous.Elleestréglo.Laissez-laetoccupez-vous
desautres.Lepolicierlâchalebrasd’Evangeline,lafaisanttituber,soncerveauembuéparl’alcoolessayantde
comprendrecequelepoliciervenaitdedire.Bonsang,ildonnaitl’impression…OhmonDieu,ilavaitinsinué que…Non. Elle refusait de se laisser faire. Elle ne laisserait pasDrake penser qu’elle étaitimpliquéedanstoutça.Horrifiée,elleregardaleshommessefairemenotteretplaquerausolalorsqu’ellerestaitdeboutau
milieudelapièce,épargnéeparlespoliciers.Pourquiseprenaient-ils?Était-ceunevengeanceparcequ’elleavaitrefusédelesaideràfairetomberDrake?Ilsl’impliquaientquandmême?Pourquoi?Quelintérêtavaient-ilsàlabernersicruellement?LeurhainedeDrakeétait-ellesifortepourqu’ilsveuillentluiretirertoutcequiluitenaitàcœur?Non, Drake ne les croirait jamais. Il croyait en elle. Pourtant, lorsqu’elle riva sur lui un regard
implorant,ellenelutdanssesyeuxquedelarageetlesentimentd’êtretrahi.Illatransperçaitduregard,commesiellen’étaitrien.Commesielleétaitlemalincarné.Danssafureur,ellesejetasurl’agentleplusproche.—Arrêtez!hurla-t-elle.Sortez!J’appellesonavocatsur-le-champ.Jevousjurequ’onvavousfoutre
unprocèsaucul.Àvoustous!
— Reculez, ordonna l’un des policiers d’une voix glaciale. Nous avons un mandat légal pourperquisitionner les bureaux d’un certain Drake Donovan à l’Impulse et pour confisquer tout ce quipourraitêtreutileànotreenquête.—Foutaises!hurla-t-elle.Jevaisvousfairedémettredevosfonctions!Samèreluiauraitlavélaboucheausavonsielleavaitentendulesmotsqu’ellehurlaitdanssarage.
Maiscelaluiétaitégal.Ellesebattaitpoursavie.Bonsang,Drakeladétestait.C’étaitévidentdanssamanièredelafixerfroidementduregard.Pendant une heure insoutenable, les policiers retournèrent toutes les affaires de Drake pendant
qu’Evangeline restait debout là, en larmes. Jamais elle ne s’était sentie aussi impuissante qu’en cetinstant.Ellevoyaitsavieluifilerentrelesmains.Lespoliciersnetrouvantmanifestementpascequ’ilscherchaient,lelieutenantmitfinàlaperquisition.
Ils libérèrent Drake et ses hommes avant de conseiller à Drake de ne pas quitter la ville dans lesprochainsjours,disantqu’ilslerecontacteraientpourl’interrogerunefoisqu’ilsauraientanalysétouteslespreuvesqu’ilsavaientcontrelui.C’était ridicule. Elle n’avait certes pas de diplôme de droit,mais ce n’était pas comme ça que la
policemenaituneenquête.Ilsnedébarquaientpasainsiavecunmandatdeperquisitionavantderévélerleur jeuendisantàDrakeexactementcequ’ilscomptaient faire, alorsqu’ilsn’avaient rien trouvé.Leprenaient-ilspourunidiot?Àmoinsquetoutçanesoitqu’unemiseenscènepourlefairepaniqueretlepousseràcommettreuneerreurafinqu’illesmènedroitàcequ’ilscherchaient.Sic’était lameilleure tactiquequ’ilspouvaient trouverpourfaire tomberDrake,c’étaientdes idiots
incompétents. Jamais Drake ne se laisserait berner par un procédé aussi absurde. Quelle banded’amateurs.Etelleétait censéese sentirensécuritéalorsquedeshommescommeeuxprotégeaient lavilledanslaquelleellevivait?Tandisquelespolicierspassaientlaporte,dontlesmorceauxbriséss’étalaientsurlesol,Evangeline
traversalapiècepourseblottircontreletorsedeDrake,bouleverséeparl’humiliationqu’ilsvenaientdeluifairesubir.Lesjouesbaignéesdelarmes,ellelevalesyeuxverssonvisageglacial.—OhmonDieu,Drake,quevoulaient-ils?—Àtoidemeledire,cracha-t-ilavecfroideur.Il la repoussa violemment, la faisant trébucher duhaut de ses talons.Elle serait tombée siSilas ne
l’avaitpasrattrapée.Illaremitsurpied,l’airtrèsinquiet.—Çava,Evangeline?LaréactiondeSilasnefitqu’accroîtrelafureurdeDrake.— Sors, ordonna-t-il. Dégage d’ici. Je te jure, si je te revois un jour, je te ferai mettre dehors et
demanderaiuneordonnancerestrictivepourquetunepuissesplust’approcheràmoinsdecentmètresdemoi.Jamais.—Drake!s’écria-t-elle.Evangelinesentitsoudainlefroidfigersapeau,sonsang,soncœur.—Oh,Drake,nefaispasça.Jet’enprie.Écoute-moi.Jesaisquetuesencolère,maistoutçan’était
qu’uncoupmonté.Tunelevoisdoncpas?—Uncoupmonté?Oui,j’imaginequec’estexactementça,dit-ilavecamertume.Tuastrèsbienjoué
ton rôle, Evangeline. Je me dois de te féliciter. Dis-moi, ça t’a procuré un sentiment de victoiresupplémentaire,desavoirquetuétaisalléeplusloinqu’aucuneautrefemme?—Putain,çasuffit,Drake!intervintMaddox.Drakes’enpritàsonhomme.
—Resteendehorsdeça.Vousautresaussi.Puis il se retourna vers Evangeline, avec tant de haine dans les yeux qu’elle se rendit compte de
combienilétaitfutiledepenserqu’ilpouvaitl’aimer.—Leprixdelatrahison,c’esttout,dit-il,savoixdevenantplusglacialeàchacundesesmots.Jeveux
que tuparteset jeneveuxplus tevoirni àmonappartement,ni auclub,nidansaucundemesautresétablissements.EtEvangeline, tuneveuxpas savoir cequi arrive auxgensquine respectentpasmesinstructions.Savoixn’étaitplusqu’unemenace,maiscelanel’atteignaitplus,elleétaitau-delàdelafierté.Sielle
leperdait,elleperdaittout.Ellesemitàgenouxdevantlui,lesuppliantdel’écouter.Delacroire.—Drake,s’ilteplaît.Ilfautquetum’écoutes.Jenet’aijamaistrahi.Pasunefois.J’aitoujourseufoi
entoi.J’aitoujourscruentoi.Jen’aijamaisdoutédetoi.Maintenant,jetedemandedefairepareilpourmoi. Je te suppliedeme faireconfiance.Decroireenmoi jusqu’àceque jepuisse teprouverque jen’avaisrienàvoiravecça.Drake tressaillit. Silas et Maddox grimacèrent, les yeux débordants de compassion – et de colère
contreDrake.—Jesuisàgenoux,Drake.Jem’étaisjurédenejamaisrevivrel’humiliationquej’airessentielesoir
oùtum’asrabaisséedanstonappartement,maislà, jen’aiplusaucunefierté.Jen’aiplusriensi tunecroispasenmoi.S’il teplaît,dis-moique tumecrois. Justecette fois,Drake. Je te jureque jene tedonneraiplusjamaisaucuneraisondedouterdemoi.L’espace d’un instant, elle crut qu’elle avait réussi à le convaincre. Elle n’avait pas le courage de
regarderseshommes.Ilsvenaientd’êtrehumiliésetsi,commeDrake,ils latenaientpourresponsable,ellenetrouveraitaucunsoutienauprèsd’eux.SilasetMaddox,aumoins,semblaientluiaccorderlebénéficedudoute.— Écoute-la, Drake. Ne sois pas stupide, dit Silas avec un juron. Regarde-la, bordel. Elle est à
genoux,entraindetesupplier.Est-cevraimentcequetuveuxdelafemmequetuvasépouser?Sesparoleseurentl’effetd’uncoupdefouetsurDrake.Sonexpressionsefitimpitoyableetsiglaciale
qu’ellenereconnutmêmeplusl’hommequisetenaitdevantelle,quilaregardaitdehautcommesiellen’étaitrien.—Non, cracha-t-il. Tu as raison. Elle n’a rien de la femme que je veux épouser. J’attends dema
femmequ’ellesoitd’uneloyautésansbornesenversmoietmeshommes.Pasqu’ellemeséduiseavecdesmensongesafindedonnerdesinformationsàlapolice.Evangeline blêmit. La vie quitta son corps et elle s’avachit, ses genoux n’ayant plus la force de la
soutenir.Elle écouta distraitementDrake, qui semblait à des kilomètres, aboyer l’ordre à quelqu’un –qui?–delafairedisparaîtredesavue.Delajeterdehors.Delafairesortirdesaviepourtoujours.—Jax,Hatcher,faites-lasortir.PuisqueSilasetMaddoxontvisiblementdumalàexécutermesordres.—Vouslatouchez,vousêtesmorts,sifflaSilasdanslesilencedelapièce.Écartez-vousd’elle.Tout
desuite.Puis, tout en douceur, comme s’il ne venait pas demenacer de tuer ses propres frères, Silas aida
Evangeline à se relever. Un autre juron lui échappa quand elle trébucha, incapable d’ordonner à sesjambesdelaporter.Ilsupportasonpoids,latenantcontrelui,etavançajusqu’àl’ascenseur.Lecorpsd’Evangelineétait
secouédesanglotssilencieux,etelleavaitlatêteetlesépaulesbaissées,abattue.Arrivédansl’ascenseur,SilasseretournapourlanceràDrakeunregardfroid,sanspitié.—Regardecequetuasfait,Drake.Regardebiencequetuasdétruit.Jetesouhaiteraisbienunebonne
continuation,maistuviensdebousillertoutesteschancesd’êtreheureux.Maddox gagna l’ascenseur à grandes enjambées et tendit la main pour empêcher les portes de se
fermer.— Mets-la en sécurité et prends soin d’elle, dit-il à Silas à voix basse. Je vais rester ici pour
découvrircequ’ilsepasseetquinousatrahis.Çasentpasbon,toutça.EvangelinelevalatêteetregardaMaddoxd’unairahuri.Iltressaillitquandilcroisasonregardetune
colèrenoireenfladanssesyeux.—TuasentenduDrake,dit-elle.C’estmoiquivousaitrahis.Tous.—Cesontdesconneriesetnouslesavonstouslesdeux,s’emportaMaddox.—Maispaslui,dit-elle,lesjouesbaignéesdelarmes,lavoixbriséeparlechagrin.Etilnelesaura
jamais.—Evangeline,regarde-moi.Maddoxavaitutiliséuntonqu’elleneluiconnaissaitpas:inflexible,dominateur,percutant,commeun
fild’acier.Elleneputqueluiobéir.—Il sauraquecen’étaitpas toi.Mais j’aipeurquece soit trop tardmaintenant. Ilne t’apascrue
quandc’étaitcrucial.Quandjeluiapporteraidespreuvesirréfutablesdetoninnocence,ilsauraqu’ilafaitlapireerreurdesavie.Etildevravivreaveclesconséquencespourlerestantdesesjours.—Prendssoindelui,Maddox.S’ilteplaît.Pourmoi.Quelqu’unchercheàluifairedumal.Àdétruire
sa vie, et les vôtres. Ils lui ontmenti àmon sujet. Ce ne sont pas des policiers honorables. Ils vontcontournerlaloipourcoincerDrake.S’ilteplaît,protège-le.—Putaindemerde,juraSilasavecrage.Jenepeuxplussupporterçauneminutedeplus.Laisse-nous
partir,Maddox.Avantque j’y retourneetque jedescendeDrakepourque les flicsn’aientplusàs’ensoucier. Ce fils de pute vient de la détruire de la plus cruelle desmanières, alors qu’il venait de lademanderenmariage,etellenoussuppliedeprendresoindeluietdeleprotéger?Jevoudraisletuerdemespropresmains.—C’esttonfrère,Silas.S’ilteplaît.Laisse-moipartir.Onabesoindetoiici.Juste…Ellefonditdenouveauenlarmes.Maddoxtenditlamainpourcaressersescheveuxet,l’espaced’une
seconde,elleauraitjurévoirunelarmebrilleraucoindesonœil.Maisnon,cedevaitêtrelerefletdesespropreslarmes.— Prends soin de toi, Evangeline. Jusqu’à ce qu’on se retrouve. Et on se retrouvera. Tu as mon
numéro.Situasbesoindequoiquecesoit,appelle-moi.Sijedécouvrequetuétaisdanslebesoinetquetunem’aspasappelé,jeseraifurieux.Compris?Ellehochala tête,simalheureusequ’elleneressentaitplusquelapeineaccablantequi inondaitson
âme.—Prendssoind’elle,Silas.—Tupeuxcomptersurmoi.Surveilletesarrières.Jusqu’àcequ’onsached’oùvientlafuite,surveille
tesarrières.—Toiaussi,etceuxd’Evangeline.C’estuneciblevulnérable,jusqu’àcequelecélibatdeDrakese
sache,etceseraitbienqu’onlefassesavoirrapidement,siçapeutlaprotéger.Evangelinetressaillitavantdes’immobilisertotalementcontreSilas.Combiendetempspouvait-elle
encoreresterlàetteniralorsquetoutesavievenaitdes’écroulerautourd’elle?Et,mêmesicelapartaitd’unebonneintention,voilàqueSilasetMaddoxparlaientdefairefuiterl’annoncedesaséparationavecDrakecommesicen’étaitriendeplusqu’unbulletinmétéo.Maddoxluiadressaundernierregardd’excusesavantdel’embrassertendrementsurlajoue.—Àbientôt,mabelle.Tupeuxcompterlà-dessus.Jevienstevoirdèsquejepeux.
Elleneréponditpas.Ilpartaitduprincipequ’elleavaitquelquepartoùaller.Quec’étaitfacilepourelle de se trouver un hôtel ou un appartement à louer. Difficile de faire l’un ou l’autre alors qu’ellen’avaitniargent,nitravail,niaucunespoird’avoirl’unoul’autre.Les portes de l’ascenseur s’ouvrirent ; elle ne s’était même pas rendu compte qu’elles s’étaient
fermées,niqu’ilsétaientdescendusjusqu’aurez-de-chaussée.Leclubétaitdésert,certainementvidéparladescentedepolice.Desconfettisetunassortimentdedéchets,verres,languesdebelle-mère,chapeauxdefêteetautresobjetsétaientéparpilléssurlesol.Onauraitditqu’unebombeavaitexplosé.Elleétaitdanslemêmeétatémotionnel.Elleétaitdévastée.Silasétaitentraindedonnerdesinstructionsdanssontéléphone,maisellesedéconnectadetout.Le
troubéantdanssoncœurs’ouvraitdavantage,peuàpeu,abyssequil’aspireraitbientôttoutentière.Illuitardait que le voile de noirceur, d’oubli, se saisisse d’elle, pour être dans un lieu où elle ne pourraitpenser, ne pourrait réfléchir, et n’aurait pas à revivre cette nouvelle scène d’humiliation oùDrake ladénonçaitdevantseshommes.Silasl’escortasurleparkingdederrière,quiétaitàprésentpresqueentièrementdésertàl’exception
delavoituredeDrakeetd’uneoudeuxautresquidevaientapparteniràseshommes.Unevoiturepassa,sesphareséclairantEvangeline,dontleregardétaittoujoursperdudanslevide;elleétaitencoresouslechoc.Il ne faudrait plus longtemps avant que la torpeur la submerge et qu’elle puisse s’échapper dans
l’oubli,neserait-cequequelquetemps.Celaluiétaitbienégalqu’ilfassefroid,qu’ellen’aitnullepartoùaller,etpasd’argentpourtrouverunrefuge.Ceschoses-lànecomptaientquepourceuxquiavaient…de l’espoir. Un avenir, ou l’espoir d’en avoir un. Comme elle en avait eu un avec Drake. Pendantquelquesmois, elle avait su ceque c’était quede toucher le soleil.Elle s’était projetéedansun futurcorrespondantàtoutcedontelleavaitrêvé.Elleauraitdûsavoirqu’àunmomentdonné,toutluiseraitcruellementarraché.Pourtant,elleavaitvoulucroirelapromessequeDrakeluiavaitfaite.Unepromessequ’ilavaitbriséenonpasune,maisdeuxfois,delapluscruelledesmanières.—Evangeline,ditSilas,latirantdutrounoirdesespenséesquimenaçaitdel’avaler.Elleposasonregarddistantsurlui,etfutsurprisedetrouverdanssesyeuxuneinquiétuderéelle.Et
uneragesauvagequitourbillonnaittelleunetornade.—Monchauffeurvat’emmenerloind’ici.Oùveux-tualler?Un sanglot lui échappa, atroce son rauque et bestial. Les larmes coulaient sans interruption sur ses
joues.Ellevoulutrire,maissavaitquesielleselaissaitaller,jamaisellenepourraits’arrêter.Elleferaitunecrisedenerfs,sansaucunespoirdepouvoirsereprendre.Silasposasamainsursajoue,lesyeuxemplisdetristesse.Etdepitié.Bonsang,iln’yavaitpaspire.
Ellenesavaitpascequ’ellepréféraitentrelacolèreetlahainedeceuxquipensaientqu’ellelesavaittrahis,oulapitiédeceuxquilacroyaientinnocente.—Evangeline,écoute-moi.Drakeatort.Complètementtort.Jenecroispasunesecondequetunousas
trahis,etlesautresnonplus.Etquandilauraeuletempsdesecalmeretd’yréfléchir,illesauraaussi.—C’esttroptard,dit-elle,complètementbrisée,abattue,avectantdedétressedanslavoixqu’onn’y
décelaitplusaucuneenviedevivre.Ilm’aclairementprouvéqu’iln’avaitpasdesentimentspourmoi,quejenesuisriend’autrepourluiqu’unobjet,unjouetaveclequelilpeutjouerquandils’ennuie.Ilnemefaitpasconfiance,alorsquejeluiaiparlédupolicierquim’avaitabordéeetluiaijuréquejamaisjeneletrahirais.Ellefermalesyeuxuninstantpourpareràladouleuràprésentphysiquedelamigraine,quimenaçait
depuis que la police avait fait irruption dans le bureau deDrake. Elle porta unemain à son front en
gémissant, les yeux encore fermés alors qu’elle continuait de déverser tout ce qu’elle avait envie dehurleràDrake.—Jenepeuxpasvivreavecunhommequinemefaitpasconfianceetmanqueàcepointderespectet
deconsidérationpourmoi.Unhommequim’humiliedevanttousseshommesetmepousseàlesupplieràgenouxetrefused’écoutercequej’aiàdire.Plutôtmourirquederetourneraveclui.Ilm’aréduiteaunéantetj’aiétébienstupidedemelaisserfaire.Stupidedel’avoiraiméetd’avoirpenséquemonamourétaitsuffisantpournousdeux,ouqu’ilm’aimeraitunjour.» Il n’a pas de cœur. Est incapable d’aimer. Sonmépris enversmoi et son refus d’écouter ce que
j’avaisàdire,demelaissermedéfendre,ontprouvésansl’ombred’undoutequ’ilnem’aimepasetnem’aimerajamais.ElleplantapourlapremièrefoissesyeuxdansceuxdeSilas,sacolèreprenantlepassursonapathie
pendantuncourtinstant.Ilserraitlesdentsenécoutantattentivementsoncripassionné.—N’importequellefemmepourraitreprendrelerôlequej’avaisdanssavie,dit-elleamèrement.Car
aucune n’aura jamais ce qui compte vraiment. Son cœur. Son amour. Sa confiance. Son pouvoir et sarichessesuffisentpeut-êtreàd’autres.Maispasàmoi,murmura-t-elle.Celanemesuffirajamais.La douleur qui luimartelait le crâne la rendaitmalade. Silas restait là pendant qu’elle s’épanchait,
attendantqu’elleluidiseoùellevoulaitaller.Enenfer.Elleyétaitdéjà.—Jedétestesonargent.Jedétestesonpouvoir.Jedétestequ’ilpensequ’ilatoujoursétéunmonstre,
etavantaujourd’hui,jenel’auraisjamaiscruetn’auraislaissépersonnelecroire.Maiscequ’ilvientdefaire…Elleinspiraungrandcoupalorsqued’autreslarmesluimontaientauxyeux.—Cequ’ilvientdefairen’estpasseulementlapreuvequ’ilnem’aimepasetn’apasconfianceen
moi.C’estaussilapreuvequej’avaistortleconcernant.Quejenepeuxpasluifaireconfiance.Quejen’aurais jamaisdû luidonnerceque j’avaisdepluscher :moncœur,monamour,maconfianceetmaloyauté.Jeluiaitoutdonné.Etcelan’étaitrienpourlui.Elles’effondraensanglots,couvrantsonvisagedesdeuxmains.Lapeineluidonnalanauséeetelle
eutunhaut-le-cœur,tentantdésespérémentd’empêcherlechampagneàprésentâcredeluiremonterdanslagorge.—Evangeline,tuveuxallerquelquepartpourlanuit?demandaSilas.Cheztesamies,peut-être?—Oh, ça non, répondit-elle, horrifiée. Pour qu’elles sachent qu’elles avaient raison et que j’étais
stupide?Encoreunefois?Sonœiltressautaetelleposasamainàplatsursonfrontpourcalmerleshaut-le-cœur.—Jen’ainullepartoùaller,Silas.Tudevraislesavoir.JenedépendsquedeDrake.J’aibienappris
laleçon,quoiquecruellement:jamaisplusjenecompteraisurunhomme.LechagrinsereflétaitdanslesyeuxdeSilas.Puisillavitgrimacerquandlespharesdelavoiturequi
approchaitl’éblouirent.Ilplissalesyeux,cherchantlasourcedesoninconfort.—Evangeline,çanevapas?Veux-tuquejet’emmèneàl’hôpital?Tuesmalade?Malade?Elleeutenvied’éclaterderire.Elleavaitmalàl’âme.Ellenepourraitjamaispenseràcette
nuitsanssesentirmal,etellen’allaitpasl’oublierdesitôt.—Maldetête,marmonna-t-elle.Çamedonnelanausée.Net’inquiètepaspourmoi,Silas.Mercipour
lavoiture.Jevaistrouveroùjeveuxaller,maislaisse-moifaireuntoursiçanetedérangepas.Jusqu’àcequejesachecequejeveuxfaireetoùjeveuxaller.Etsilechauffeurlalaissaitfaire,elleresteraitdanslavoituretoutelanuitetlaisseraitlavillel’avaler
toutentière.Silas jura, l’expressionsiassassinequ’ilétaitdifficilede le regardersansavoiràcraindrepoursa
vie. Silas s’était toujoursmontré doux et attentionné avec elle,mais ce soir, elle découvrit ce qu’ellen’avaitjamaissuvoirenDrakeavant.Unmonstre.—Jevaist’emmenerdansmonimmeuble,Evangeline.Net’inquiètepas,poupée.Siçatemetmalà
l’aisederesteravecmoi,tupeuxallerdansundesdeuxappartementsvoisins,quejegardevacantspourêtretranquille.Ellefronçalessourcils;unnouvelélandedouleurluitransperçalecrâne.—Tupossèdestonpropreimmeuble?Ilhochalatête.—Jemesuisréservéledernierétage.Plustard,jelerénoveraientièrementpourenfaireunimmense
appartement.Jen’aipasencoreeuletempsdelefaire.Jelouelesbiensdesquatreétagesinférieurs.Tupeuxresteravecmoiouallerdansundesappartementsvoisins.Commetupréfères.Ellebaissalatête,honteuse.—Evangeline,nebaissepaslatêtedehontedevantmoi.Laragepointaitderrièresesmots,etilserraitlesdents.—Queveux-tuque je ressente,Silas?Dis-moi. Ilnemereste rien.Pasmêmemafierté. J’aiaussi
abandonnéçapourlui.Ilm’ajetéecommeunevieillechaussette,etmaseulesolutionestd’allerchezundeshommesquitravaillentpourlui,commeunepauvrepetitechose?C’estpeut-êtrecequejesuis.Unepetitechosepathétique.Maiscelaneveutpasdirequeçameplaît,niquejel’accepte.Sijenevauxrien,c’estparcequ’ilafaitdemoicequejesuis.Silastremblaitderage–cequin’étaitpaspeudirepourunemontagnedemusclesdeplusd’unmètre
quatre-vingts.—Jetejure,jevaisletuer.—Jen’envauxpaslapeine,Silas.Laissetomber,dit-elleaveclassitude.—Foutaises!Tuvauxbienmieuxqueça.Tuméritesbienplus.Tucroisquejevaisresterlàsansrien
faire?Horsdequestion.C’estcompris,Evangeline?Çanevapassepassercommeça!Il rugissaitpresqueetuneautreauraitétémortedepeur.Maisellesavaitqu’iln’étaitpasencolère
contreelle,etcelaluidonnaitenviedepleurer–encore.—Jet’emmènechezmoi,dit-ilenlaconduisantàlavoiture.Cesoir,tudorsàlamaison.Demain,jete
donnelesclésd’undesappartementsvoisins.Ilssontdéjàmeublés.J’appelleraiMaddoxpourluidiredepasserteprendredesaffaireschezDrake.Ellepâlit.—Non!Tul’asentendu,Silas.Etmêmes’ilnem’avaitpasditquelecoûtdelatrahison,c’esttout,je
refusedeprendreuneseulechosequ’ilapayée.—Alors j’irai t’acheter quelque chose à temettre demainmatin, dit-il sur un ton la défiant de le
contredire.—Seulementsituveuxbienquejeterembourse,etaveccelaentête,j’apprécieraisquetuchoisisses
desaffairespeuchèresetmeprennesseulementquelquesjeans,quelquestee-shirts,etéventuellementunmanteau.—Jet’achèteraicequimesembleappropriéetnousparleronsremboursementuneautrefois,dit-ilen
claquantlaportière,avantdefaireletourdelavoiturepourentrerdel’autrecôté.Nousn’endiscuteronspascesoiralorsquetuesàbout,qu’onvientdetebriserlecœuretquetun’arrêtespasdepleurer.Surce,ilordonnaauchauffeurdelesconduireàsonappartement,etlavoituresillonnalesruesfroides
etventeusesdeNewYorkence1erjanvier.Bellemanièredefêterlanouvelleannée.
Chapitre26
Evangeline se réveilla avec une migraine, la vue si trouble qu’elle peinait à distinguer ce quil’entourait.Elleavaitlabouchesècheetlagorgeenflée,sirêchequ’elleavaitdumalàavalersasalive.Elle avait insisté pour dormir sur le canapé du salon, refusant que Silas abandonne son lit, et par
extensionsonespaceprivéetson intimité,auxquels il tenaitdurcommefer. Ilavaiteu l’airdéterminéquandil luiavaitditqu’ilallaitcampersursespositions,maiselleavaitrefusétoutdegoetpeut-êtreavait-ilcédéenvoyantqu’elleétaitàdeuxdoigtsdeperdresonsang-froid,quinetenaitqu’àunfil,mêmesicelaneleravissaitpas.Ellel’entenditdanslacuisinedupetitappartement.L’odeurducaféentraindepasserluichatouillales
narines,mais cela lui retourna aussitôt l’estomac et son front semit à perler de sueur, sa peaudevintmoiteetcollante.La douleur était omniprésente.Elle avait l’impression qu’on lui enfonçait un éclat de verre dans le
crânechaquefoisqu’elleclignaitdesyeux.Ellen’avaitpas l’impressiond’avoirfait lemoindrebruit,pourtant,soudain,Silassepenchaau-dessusd’elle,soucieux.—Evangeline?Çava?Ellen’essayamêmepasdeluimentir.Ellesecoualatêteetregrettaaussitôtcegeste,quoiqueinfime.
Elleporta lamainà saboucheen sentant sonestomac se soulever, etSilas laprit dans sesbraspourl’emmenerenvitessedanslasalledebains,oùill’installadevantlestoilettes.—Respire,dit-ilàvoixbasse.Tatêtetefaitencoremal?Elleopina,pluslentementcettefois.—C’esthorrible,Silas,murmura-t-elle.—Jevais techercherunmédocdèsque jeseraisûrque tune le rendraspas,dit-il, laminegrave.
Ensuite,jeveuxquetut’allongessurlecanapéetquetutereposes.LemédicamentvacertainementdemettreKO.—Qu’est-cequec’est?demanda-t-ellecraintivement.—Riendeméchant.Desantidouleursqu’onm’aprescrits.J’aisouventdesmigrainesdébilitantes.Je
suisobligéd’enprendrepoursoulagerladouleur.Fais-moiconfiance.Tutesentirasbienmieuxdansunedemi-heure.Ensuite,situtesensd’attaque,jet’emmènedansl’appartementd’àcôté.Elledutseforcerànepasbaisserlatête,maisaprèsl’avertissementdeSilaslaveille,ellen’avaitpas
laforcementaled’affrontersacolèresielleaffichaitlahontequ’elleressentait.—Merci,murmura-t-elle.Jeneresteraipaslongtemps.Justeunjouroudeux,letempsdedéciderce
quejevaisfaire.Illuifitlesgrosyeux,commeelles’yattendait.—Turestesaussilongtempsquetuveux.C’estcompris?—Oui,souffla-t-elle,lasse.Situveux.Jen’aipaslaforcedemedisputeravectoidansl’immédiat.Sonexpressions’adoucit.—Jen’aiaucuneenviedemedisputeravectoi,mabelle.Tuascontrôlélanausée?Tucroisquetu
peuxretourner t’allongersur lecanapé?Jevaisallerchercher lesmédicamentset tepréparerquelquechoseàmanger.Elle le suivit jusqu’au salon et se laissa tomber sur le canapé pendant qu’il allait chercher le
médicament.Ilrevintquelquesinstantsplustardavecunverredelaitetuncachetpourelle.Quandelleeutfinileverre,illeluirepritdesmains.—Allonge-toi. Je vais te préparer quelque chose àmanger.Ne t’inquiète pas.Ce ne sera pas trop
lourd.Jesaisquetuesencorepatraque.—Merci,murmura-t-elle,lesyeuxfermés.—Avecplaisir,mabelle.Elles’assoupitjusqu’àcequeSilasreviennedanslesalonavecdeuxassiettes.Ils’assitsurlecanapé
àcôtéd’elleetl’aidaàs’asseoiravantdeluitendreuneassiette.—Tutesensmieux?—Flotteuse,marmonna-t-elle.—«Flotteuse»?C’estunvraimot,ça?—C’estcommeçaquejemesens.Commesilemondeflottaitautourdemoi.Ilrit.—Ah, jevois.Oui, je croisque le cachet fait effet.Essaiedemangerquelquechose.Si tu te sens
mieuxaprèslepetitdéjeuner,jet’emmèneàcôtéavantd’allerautravail.Ellesecrispaetfermalesyeuxàcettemention.Drake.Ilserait là,autravail,certainement.Unjour
commeunautre.Iln’avaitcertainementpaspassélanuitéveillé,commeelle,submergéparlechagrin.—RemercieMaddoxpourmoiquandtuleverras,dit-elle.Pourtout.Jevousdoisdesremerciementsà
tous les deux. D’avoir étémes amis. On n’en a jamais trop,mais apparemment j’en aimoins que lamoyenne.—Pourcequiestdesamis,jepréfèrelaqualitéàlaquantité.—Bienvu,concéda-t-elle.Elle baissa les yeux sur son petit déjeuner à peine entamé et, à son grand désarroi, des larmes
s’écrasèrentsursonassiette.Ellenes’étaitmêmepasrenducomptequ’elles’étaitremiseàpleurer.—Oh,non,poupée,ditSilas,levisagetorturé.Ilfautquetuarrêtesdepleurer,oùtunevasjamaiste
débarrasserdecettemigraine.—Jes-sais,s’étrangla-t-elle.Jenev-veuxpasp-pleurer,maisc’estplusfortquemoi.Oh,Silas,que
vais-jefaire?demanda-t-elleavectristesse.Quevais-jefaire?Ill’attiradanssesbrasetelleenfouitsonvisagedanssoncoualorsquelessanglotsredoublaient,la
faisant trembler tout entière.Pendant cequi luiparutuneéternité, elle resta assise là,blottiedans sesbras,àpleurer toutes les larmesdesoncorps.Quandseshorribles râlessecalmèrentenfin,elle restamollementavachiecontreSilas,simalheureusequ’elleauraitvoulumourir.—Tun’enmourraspas,mabelle,ditSilasavecempathie,luifaisantcomprendrequ’elleavaitpenséà
voixhaute.Çateparaîtinsurmontabledansl’immédiat,maisavecletempsçapassera,commelereste.—J’adoraiscetteexpression,dit-elledoucement.—Plusmaintenant?Ellesecoualatête.—Çane passera jamais, Silas.Onne se remet pas d’une chose pareille.Rien ne sera plus jamais
pareil.—Drakevasesortirlatêteduculetserendrecomptequ’ilafaituneterribleerreur,ditSilas,même
s’ilsemblaitagacéqueDrakeaitpucroireuneseulesecondetoutesceshorribleschosessurelle.—Commetul’asdit,sijamaisçaarrive,ceseratroptard.Ilnem’apascruequandc’étaitimportant.
Iln’avaitaucunefoienmoi.S’ilnecroitpasenmoi,commentpuis-jeêtreaveclui?Jeneveuxpasquelesautres leconvainquentque je suis innocente. Ildevrait le savoir,Silas. Ildevraitenavoir l’intimeconviction.Jeneluiaijamaisdonnéderaisondedouterdemoi.J’aitoujoursétéhonnêteettransparente
avecluietpourtant,iln’ajamaiscruenmoicommejecroyaisenlui.Elle secoua tristement la tête et ferma les yeux. Comment avait-elle pu se tromper à ce point sur
l’hommequ’elle avait aimé ?Qu’elle aimait encore,malgré elle ?L’amour ne cessait pas d’un coup,commeonactionneuninterrupteur.Elleauraitdûledétester.Lemépriseretlehaïrdetoutesonâme.Etpourtantellesouffrait.Ellesaignait.Ellepleurait.—Jecomprends,mabelle.C’estun sacrébordel, et jedéteste tevoir simalheureuse.Personnene
mériteça,surtoutpastoi.Lesilencesefitetillaserracontreluiquelquesinstants.Puislecachetfittotalementeffet:Evangeline
avait les paupières lourdes. Quand il sentit qu’elle était complètement détendue, il s’écartaprécautionneusementetposadélicatementsatêtesuruncoussin.—Repose-toiunpeu,chuchota-t-il.Jeteferaivisiterl’appartementàtonréveil.Drakesetenaitàlafenêtresurplombantlaruequifaisaitfaceàl’entréedel’Impulse,broyantdunoir
encontemplant lamorneetgrisematinéehivernale.Lamétéoétait enparfait accordavec sonhumeur,commesielleavaitétéfaitesurmesurepourlui,semblantlecondamneràuneviedegrisailleglaciale.Latrahisond’Evangelinel’avaitdévasté.Ilnes’enremettraitjamais,sonâmeétaitterniepourtoujours.— Pourquoi l’as-tu fait, Ange ?murmura-t-il, les yeux fermés pour contrer la douleur. Je t’ai tout
donné.Maisçan’apassuffi.Pourquoi?Ilenrevenaittoujoursaumêmepoint.Sisespropresparentsnepouvaientl’aimer,commentpouvait-il
s’attendreàcequequelqu’und’autrelepuisseunjour?Ilavaitsaréponse:c’étaitimpossible.Jamaisilnereferaitl’erreurd’essayerdesefaireaimer.Unbruitàsaporte lefitpivoter,uneexpressionsinistresur levisagepouravertirquiconqueentrait
sansautorisationqu’iln’étaitpaslebienvenu.Seshommesentrèrentunparundanslapièce.Inquiétude,préoccupation,colère,rage…toutescesémotionsselisaientsurleursvisages.Laseuleexpressionquetousavaientencommunétaitlejugement.Celanefitquenoircirsonhumeur,alorsqu’ilpensaitquec’étaitimpossible.—Qu’est-cequevousvoulez?demanda-t-ild’untoninflexibleetglacial.Aucunn’essayademasquersondégoûtfaceàlui.—Tupensesvraimentqu’Evangelinenousadénoncésauxflics?demandaJax.Tupeuxmeregarder
danslesyeuxetmedirequetucroiscesconneries?—Vousétiezlà.Vousavezvucequej’aivu.Cequevousnesavezpas,c’estqu’elleaétéapprochée
par les flics quand elle est allée déjeuner avec Zander, Thane et Hatcher. Et oui, j’en ai la preuve,puisquec’estellequimel’adit.AprèsqueHatcherm’aappelé,bienentendu.—MaisellenesavaitpasqueHatchert’avaitappelé,crachaThane,manifestementencolèrequeson
déjeuneravecEvangelineservedebased’accusationcontreelle.—Quetudis.—Tuas,àtoitoutseul,bousilléleplusprécieuxcadeauquipuisseêtrefaitàunhomme,uncadeau
quetuneretrouverasjamais,s’emportaZander.Ettusaisquoi?Jen’aiaucunecompassionpourtoi.Tuméritesdecreverseul,envieuxcyniquequipensequepersonneneluiestloyal.Punaise.Jenepensaispasvoirunjourundemesfrèrestraiterunefemmedecettemanière,surtoutpasunefemmeaussispécialequ’Evangeline.— Tu as perdu tout mon respect, renchérit Hartley. Je ne te pensais pas capable de traiter aussi
cruellementunefemmeinnocente,franche,belleetloyale,quiesttoutcequenousavonsdebiendanscemondepourri,etcertainementlaseulechosebiendanstaviemisérable.Tumerendsmalade,putain.
—Laissez tomber, rugitDrake.Ellevous tient touspar les couilles et vousne levoyezmêmepas.Dégagezdemonbureauetnerevenezpasavantquejesacheoùestvotreloyauté.Auprèsdevotrefrère?Oudelafemmequil’avendu,etvoustousavec?—Tul’asdétruite,ditcalmementMaddox,prenantlaparolepourlapremièrefoisdepuisqu’ilsétaient
tousentrésdanslapièce.Ilétaitrestéenretrait,sonanimositéetsaragetangibles.—Elleétaitàgenoux,entraindetesupplier,putaindemerde.Ettul’asréduiteenmorceaux,nelui
laissantaucunedignité,aucunefierté,etelles’enfichaitparcequetoutcequ’ellevoulait,c’étaitquetul’écoutes.Quetuluilaissesunechance.Quetuaiesenellelamêmefoiqu’elleavaitentoi.Uncertainmalaisesemêlaauxregardsnoirsetfurieuxdeseshommes.Desregardsquiledéclaraient
touscoupable.Lui.Alorsquecen’étaitpasluiquilesavaitvendusàlapolice.Etpourtant,ilsétaientlà,visiblementgênésparl’imaged’Evangelineàgenouxpourlesupplierdeluilaissersachance.Bonsang.Toutçaétaitsitroublepourlui.Lemondes’étaiteffondréautourdeluiquandilavaitcomprisqueson
angel’avaittrahi.Queluiavait-ilditexactement?Ilnelesavaitpas.Ils’enmoquait.Ilsavaitseulementqu’ildevaits’éloignerd’elleavantdes’effondrertotalementetdeseridiculiserdavantage.Une vague image d’elle à genoux, mains tendues vers lui alors qu’il reculait, le visage tordu de
douleur,lesjouesbaignéesdelarmes.Jet’enprie.C’étaientlesseulsmotsdontilsesouvenait.Lebourdonnementétaittropassourdissantdanssoncrâne,
ladouleurtropaccablantedanssoncœur.Iln’enattendaitpasmoinsdesautres.Maispasdesonange.Etilétaitfurieuxdel’avoirlaisséeallerau-delàdesacarapacepourluidévoilersoncœuretsonâmepourqu’ellefassecequejamaispersonnen’avaitpufaireavantelle.Ledétruire.—Tuastort,cettefois,Drake,ditJusticeaveccolère,crispé,presquecommes’ilprenaitsurluipour
nepassejetersurDrake.Jen’ai jamaisremistonjugementenquestion.N’aijamaisdoutédetoi.J’aitoujourssuivitonexemplesansréfléchir.Maistuviensd’orchestrerlapirebêtisedetavie,sansparlerdufaitquetuascommisunpéchéimpardonnablecontreunefemmequit’aimeplusqu’ellenetientàsafiertéouàquoiquecesoitd’autreaumonde.Tuascomplètementdétruitune femmebiendont leseulpéchéétaitdet’aimersansconditions.Dequid’autrepeux-tudireunechosepareille?Quid’autre t’aaiméainsi?Quellefemmeaacceptéleboncommelemauvaissansjamaistequitter,t’atoujoursdéfendu,s’est toujoursbattuepour toi et a refuséde laisser sapeurde tonmondeetde lavieque tumènes lapousseràtequitter?Elleseraitrestéeàtescôtésett’auraitaimépourtoujours,maistuviensdegâcherlaplusbellechosequi tesoit jamaisarrivée.Toutçaparceque tuesunconnard insensiblequine l’amêmepaslaisséesedéfendre.Tuneluiaspasdemandéuneseulefoissiellet’avaittrahie.Tuassupposéetl’asjugée,l’ascondamnéeetdéclaréecoupable,sansluilaisserlamoindrechancedes’expliquer.Sesyeuxlançaientdeséclairsetsespoingsétaientserréslelongdesoncorps.Lesautressemblaient
entièrementd’accordaveclediscoursexplosifdeJustice.—Puis tu l’as jetée à la rue sans rien.Sans le jobni l’appartementqu’elle aquittéspour toi.Elle
travaillaitsansrelâchepoursubvenirauxbesoinsdesafamille,etjamaisellenes’estplainteuneseulefois.Tucroisqu’ellevas’ensortircomment,maintenantquetul’asrenduecomplètementdépendantedetoi?Tuasbrisétoutestespromesses,lesprincipesmêmedenotremodedevie,enrefusantlecadeaudesasoumissionetenlalaissantsedébrouillerseule.Justice le considéra avec dégoût, puis il secoua la tête et s’humecta les lèvres comme pour se
débarrasserd’ungoûtâcredanssabouche.
—Tusaisquoi?Vatefairevoir.Audiabletoutça,ettadécisiondelamettreàlarueaprèsluiavoirpris tant de choses qu’elle ne sera plus jamais entière. Jeme casse. Je ne peux pas te supporter uneminutedeplus.Justicetournalestalonsetsortitdubureausansregarderenarrière.Lesautresseretournèrentsymboliquement,et,commeJustice,ilssortirent.Drake s’effondra sur son fauteuil et laissa sa tête tomber entre sesmains.Avaient-ils tous perdu la
tête?Ilsdéfendaientunefemmequiavaitessayédetouslesfairetomber?Étaient-ilsprêtsàfairedelaprisonparcequ’ilsl’appréciaient,quec’étaitunebonnecuisinièrequiétaitgentilleaveceux?Il eut soudainunmauvaispressentiment. Jamais iln’avaitdoutéde ses instincts. Ilsne l’induisaient
jamaisenerreur.Mais…etsi…Ets’ilsavaientraison?S’ilavaitfaituneerreurterrible,impardonnable?Maiss’ilsavaienttort,alorsilsperdraienttoutcepourquoiilsavaienttravaillédur.EtEvangeline?Laquestions’insinuadanssonesprit.N’avait-ellepasdéjàtoutperdu?Etluiaussi,d’ailleurs?Ilregardaautourdelui,l’empirequ’ilavait
bâti à la sueur de son front. Tout cela avait-il encore du sens s’il ne pouvait plus le partager avecEvangeline?Siellenevivaitplusàsescôtés?Non,ilétaitmieuxsanslesmensonges,latromperie,latrahison…Pourtant,lapetitevoixtenacequinecessaitdelefairedouterdeluisemanifestaencore.Etsiellen’avaitpasmenti,trompé,trahi?Etsi…Etsielleétaitinnocenteetqu’ilavaitfaitlapireerreurdesavie?
Chapitre27
Evangelineentraentoutehâtedansl’appartementqueSilasluiprêtaitetposalepetitsacplastiquesurle bar de laminuscule cuisine. Pour l’instant, elle le laissa de côté, pas encore prête à affronter lespossiblesconséquencesdecequ’ilallaitrévéler.SilasavaitachetédesprovisionsquandilétaitsortichercherdesvêtementspourEvangeline,maisla
seuleperspectivedemanger lui nouait l’estomac. Ignorer cette possibilité plus longtempsn’était doncpeut-êtrepaslameilleureidée,mêmesic’étaitprécisémentcequ’ellefaisaitdepuisdeuxjours.Ilfallaitqu’ellesache.C’étaitunenécessité.Autantêtrefixéetoutdesuite.Desdoigtsglacés luienserrant lecœur,elle ramassa lesaccommes’ilallait lamordreet se rendit
danslasalledebains.Ellesortitletestdegrossessedel’emballageetlutlesinstructions.Çaavaitl’airsimple.Fairepipisurlebâtonetattendrequelquesminutesquelerésultats’affiche.Après s’êtrepliée à laprocédure, elle se lava lesmains et posa lebâtonnet sur lemeuble.Elle se
contempladanslemiroir;ellen’avaitpasl’aird’êtreenceinte,maiscelaétaitinvisibleàcestade.Enparlantdeça,ellenesavaitmêmepasdecombiendesemaineselleétaitenceinte,siellel’étaitvraiment.Ellenepouvaitpasenêtreàplusdetroismois,puisqu’ellen’étaitpasavecDrakeavant.Ses règlesn’avaient jamaisété régulières,doncellenesavait jamaisvraimentquand lesprochaines
allaientarriver.D’ailleurs,elleallaitcertainementlesavoirlasemainesuivante,alorspourquoiétait-ellelàcommeuneidioteàfaireuntestdegrossesse?Prenait-ellesesdésirspourdesréalités?AprèsavoirperduDrake,s’accrochait-elleàl’espoirdegarderunepartiedelui?Unbébé?Leurenfant?Cen’étaitvraimentpaslemomentd’êtreenceinte,maisenmêmetemps,l’espoirétaitsivifque,sielle
n’était pas enceinte, elle pleurerait non seulement la perte de Drakemais aussi celle d’un enfant quin’auraitjamaisexisté.Dequoisetorturerplusquederaison.Ellefermalesyeux,attrapalebâtonnet,etinspiraungrandcoupparlenezpoursecalmer.Puiselle
trouvaenfinlecouraged’ouvrirlesyeuxpourregarderlerésultat.Illuifallutquelquessecondespourchasserleslarmesquiluitroublaientlavue,puisellelevit.Sous
sesyeuxluisaitunsigne«+»rose.Sesjambesflageolèrentetellechancela,manquantdes’effondrersurlesoldelasalledebains.Son
cœurexplosadejoiealorsmêmequ’unimmensechagrinlasubmergeait.Elleselaissaglisserverslesol,serrasesgenouxcontresapoitrine,etsebalançalentementd’avanten
arrière.Deslarmesdetristesseetdejoieroulèrentsursesjoues,etellesourit.Unbébé.LefilsoulafilledeDrake.Unepetitepartiedeluiquivivraitàtraverselle.Sonhéritage.Àpeineeut-elle le tempsdese laisserenvahirparcespensées joyeusesetapaisantesque laréalité
s’invitaàlafête,etavecellelechagrinetledésespoir.Ellen’avaitplusaucuneraisonderesterenville.LaseulechosebienqueDrakeavaitfaiteétaitd’avoirdéposéunegrossesommed’argentsurlecomptedesesparents,enplusdeleuravoirachetéunemaisonetunenouvellevoiture,quilesavaitlibérésdeleursdettesetleurpermettraitdevivreconfortablementlerestantdeleursjours.Cequivoulaitdirequ’ellen’avaitplusbesoindetrouverdutravailpoursubvenirauxbesoinsdeses
parentschéris.Ellepouvait reprendre lesétudes,commeelleavait toujoursvoulu le faire.S’instruire.
Obtenirundiplômeetêtrecapabledesubveniràsesbesoinsetàceuxdesonenfant.Ellepouvaitrentrerchezelleetavoirlesoutiendesdeuxpersonnesquil’aimaientleplusaumonde.
Ilsl’aideraient,etunefoisquelebébéseraitné,Evangelinepourraits’inscriredansuneécoleetcomptersurl’aidedesesparentspours’occuperdeluiquandelleseraitencours.Ilsn’auraientjamaishonted’elle,surtouts’ilsconnaissaientlavérité,maiselleneleurconfieraitpas
ce qui avaitmis un terme à sa relation avecDrake. Si elle le leur disait, ils poseraient les questionsinévitablesquilesconduiraientàdesconclusionssuspectes.MalgrécequeDrakeavaitfait,etmêmes’ilneluiavaitpasaccordésaconfianceetsonamour,ellerefusaitqu’ilpassepouruncriminelauxyeuxdesesparents.D’ailleurs,ellenesavaitpascequ’il faisaitexactement,ellenepouvaitdoncsavoiraveccertitudesisesaffairesétaientillégalesounon.Etcelanel’affectaitplus,carellenefaisaitpluspartiedesavie.Honteetculpabilité lasubmergèrentsoudain,alorsmêmequ’elles’envoulaitde leséprouver.Dans
d’autrescirconstances, jamaisellen’auraitsongéàcacherunenfantàsonpère.MaisDrake lui faisaitpeur.Sonpouvoir,sonargentetsesrelationslaterrifiaient.Carellesavaitqu’il insisterait,àcausedesonenfance,pourfairepartiedelaviedesonenfant.Sic’étaittoutcequ’ildemandait,elleiraitlevoirlelendemainpourluiannoncersonimminentepaternité.Néanmoins, la peur que la haine qu’il éprouvait en son endroit le pousse à lui prendre son enfant
l’empêchaitd’allerlevoirpourluiavouercesecret.Elleavaitdesdécisionsàprendre,etelledevait lesprendrerapidement.Lesyeuxfermés,elleposa
sonfrontcontresesgenouxetsavouraunmomentcalmeetintimeavecsonenfant,luipromettantdansunmurmurequ’ellel’aimaitdéjàdetoutsoncœuretqu’elleveilleraittoujourssurlui.Ellesebalançaensilence,sansaucunenotiondutempsquipassait.Ellenepouvaitpasresterlà.Carunefoisencore,elleétaitdépendanted’unhomme–àladifférence
près qu’elle n’était pas en couple avec Silas. Ce qui, en un sens, était pire, car elle profitait de sagénérositésansrienluidonnerenretour.Elleattrapasontéléphoneposésurlemeuble,ouvritsonnavigateur,ettapadanslabarrederecherche
le nomd’une compagnie aérienne qui proposait des vols directs pour une ville à seulement cinquantekilomètresdechezelle.Lebilletétaitcher,puisquec’étaitundépartdedernièreminute,maistantpis.Elleseserviraitd’une
descartesdecréditqueDrake luiavaitdonnées.Lemoinsqu’ilpuisse faireétaitde la renvoyerchezelle.Ceseraientlescinqcentsdollarslesmieuxdépensésdesonexistence,carcelalaferaitsortirdesaviepourtoujours.Elle regarda l’heureetcalculacombiende temps il lui fallaitpourallerà l’aéroport–ellepourrait
égalementseservirdelacartedeDrakepourpayerletaxi–àtempspours’enregistreretembarquer,etelleserenditcomptequesielleréservaitetpartaitdanslademi-heurequisuivait,ellepourraitprendreundesvolsdirectsdusoir.Ellepritlacartedecréditdanssonsacetentralesnumérospourvaliderlatransaction.Aprèsavoir
consultésesmailspouravoirlaconfirmation,lenuméroduvol,etl’heured’arrivée,elleappelasamère.Elle n’avait aucun intérêt à lui cacher quoi que ce soit. Elle comprendrait de toute façon quand
Evangelineluidiraitqu’ellerentraitcesoir-là.Seulement,ellenes’étaitpasattendueàpleurertoutesleslarmesde soncorpsau téléphone.Résultat, il fallutbienvingtminutesàEvangelinepourexpliquer lasituation à samère.Quand elle raccrocha enfin, il ne lui restait plus que dixminutes pour prendre laroute. Elle éclata de rire. Ce n’était pas comme si elle avait des bagages à faire. Elle prendraitsimplement les jeanset tee-shirtsqueSilas luiavaitachetés. Ils tiendraientaisémentdansunbagageàmain.
Aprèsavoirjetéletestdegrossessedanslapoubelledestoilettes,ellefourralepeud’affairesqu’elleavaitdansunsacdesport trouvédansunplacard.Puis,commeSilasetMaddoxavaientété sigentilsavecelle,elleleurlaissaunmotpourlesremercierpourleuramitiéetleuraffection.Elleexpliquaqu’ilétaitpréférablequ’elletournelapageetquitteNewYork,etterminalalettreendisantqu’ilsétaientsesdeuxmeilleurssouvenirsdelaville.Cequiétaitunebientristeconclusion,aprèsavoirvécuiciaussilongtemps.Avecunlongsoupir,elleallaàlaporteetsortit,regardantl’appartementunedernièrefoisdepuisle
seuilcommepours’assurerqu’ellen’avaitrienoublié.Ellefaillitéclaterderire,et l’auraitfaitsisoncœurn’avaitpasétééparpilléenmillemorceauxsurlesol.C’étaitlaseulechosequ’ellelaisseraitderrièreelle.Soncœur.IldemeureraitauprèsdeDrakeDonovan.Ellen’essayamêmepasdeseconvaincreducontraire.
Chapitre28
C’est à peine si Drake quitta la solitude de son bureau pendant trois jours, choisissant même d’ydormirlanuit.Cen’étaitpascommes’ilarrivaitàdormir,detoutefaçon.Ilrestaitallongé,éveillé,bienaprèslafermetureduclub,jusqu’àl’aube,àréfléchir…rêver…d’unange.Sonange.Tout lemonde l’évitait, pour différentes raisons. Les employés du club le fuyaient comme la peste
parcequ’ilarracheraitlatêteàquiconqueosaitpénétrerdanssonrepaire.Etsonbureauavaittoutd’unrepaire,avecseslumièrestamisées,presqueéteintes,etlecanapéfroisséparlesnuitsqu’ilpassaitàseretourner,àlarecherchedusommeil.Iln’arrivaitpasàserésoudreàrentrerchez lui. Ilnepouvaitmêmepassongeràdormirdans le lit
qu’ilavaitpartagéavecEvangeline.L’idéed’êtresanselledanscetendroitquiavaitétésonchez-elleetqu’elleavaittransforméenfoyerétaitrépugnante.Il avait beau se répéter sans cesse qu’elle neméritait pas le respect qu’il lui accordait, ou plutôt,
accordaitàsonsouvenir,ilnepouvaitfaireautrechosequecequ’ilfaisaitactuellement.Vivre.Respirer.Exister.Minuteaprèsminute.Heureaprèsheure.Jouraprèsjour.C’était une existence misérable, qu’il ne souhaitait à personne, pas même à son pire ennemi ; et
pourtantcettevoixtenacequisemoquaitdeluietluichuchotaitqu’ilétaitàdeuxdoigtsdeperdrelatêteluirappelaitsanscessequ’ilétaitseulresponsable.C’étaitluiquiavaitchasséEvangeline.Ilauraitpul’écouter.Auraitpuluidonnerunechancedes’expliquer.Maisiln’enavaitrienfait,etilenpayaitleprix.Saportes’ouvritetilseretourna,prêtàinjurierl’intrus,quandilvitquec’étaitSilas,qu’iln’avaitpas
vuetdontiln’avaiteuaucunenouvelledepuislanuitoùilavaitemmenéEvangelineloinduclub.Ilbrûlaitd’enviedeluidemandercommentelleallait.Cequ’ellefaisait.Oùelleétait.Est-cequ’elle
allaitbien?Silasavaitlamâchoirecontractée,signedesacolère,etsesyeux,rivéssurDrake,étaientsiglacials
quecelui-cipouvaitpresquesentirlefroidsursapeau.—Silas,lesalua-t-ild’untonsec.Silasleconsidéraavecdégoût.—Encoreterréiciàressasserl’histoirefoireusequetut’esconvaincudecroire,jevois.—Necommencepas,l’avertitDrake.Jenesuispasd’humeuràcequ’onmecherche.Surtoutsitune
peuxpasalleraubout.—Jevaislaisserpasser,maisseulementparcequejesaisquequandlavéritééclatera,tuvasramper
ventre à terre et nous supplier de te pardonner.Maisma patience a des limites. Neme cherche pas,Drake.Jetejure,jepourraistetuerpourcequetuasfaitàEvangeline.Drakegrogna,retroussantleslèvrespourmontrerlesdents,telunprédateur.—Tuessipersuadéqu’ellenenousapasbalancés.Jemedemandepourquoi?Peut-êtreparcequ’il
faudrait que vous admettiez ce que j’ai déjà reconnu ? Que je me suis fait berner par une femmemagnifique à l’air innocent, dont les grands yeux bleus lui donnaient l’apparence de l’ange qu’elleincarnait?Silassecoualatêteavecunairdedégoût.—Tumerendsmalade.Ettudisn’importequoi,alorsferme-la.Jeteledis,Drake.Tuvasregretterce
quetuasfait.Situavaisunpeudebonsens,tuseraisàgenouxentraindelasupplierdetepardonneravantquelavéritén’éclate.Caràcemoment-là,ellen’enaurarienàfaire,parcequetunel’auraspascruequandilétaitcrucialquetulacroies.LesmotsdeSilas alarmèrentDrake : ils étaient pleinsde conviction, alors queSilas était l’undes
hommes les plus méfiants qui soient. Et ce n’était pas le seul. Si Silas avait été le seul à défendreEvangeline,ilauraitpupasseroutre.Maistousseshommes?L’indécisionle tourmentait,c’étaitunsentimentauquel iln’étaitpashabitué.Ilétaitdécidéentoutes
choses, ne remettait jamais ses actes en question, et pourtant, quelque chose clochait dans toute cettehistoire.Ilselaissatomberdanssachaise,accablédechagrinenpensantàtoutcequ’ilavaiteuetperduilyavaitseulementtroispetitsjours–uneéternité.MêmesiEvangelinel’avaittrahi,pouvait-ilvraimentluienvouloir?Lesflicsluiavaientcertainement
bourré lecrâned’inepties,et ilétaitcertainqu’ilsn’avaientépargnéaucundétail,allantmêmejusqu’àembellirsespéchés–alorsqu’ilavaitétémuetcommeunecarpe,avaitrefusédeluiconfierquoiquecesoit,de lui faireconfiance, luiavaitdemandéd’oublieretde regarderdans ladirectionopposée.Elleavaitdûimaginertoutessortesdecrimeshorribles,encouragéeparlatendanceausecretdeDrakeetlefaitqu’ilévitaitlesujetchaquefoisqu’ellelequestionnait.Evangeline,quise tenaitdans la lumière,quidéfendait lebien,n’avaitpeut-êtrepasétécapable,en
sonâmeetconscience,delaisserDrakeresterimpunipoursescrimes.Etn’était-cepassabontéinnée,sadouceur,qu’ilaimaitlepluschezelle?Cequil’avaitattiréchezelle?Voilàqu’illapunissaitpourcesmêmesqualités.Silasjuraviolemment.—Merde, Drake. Tu es malheureux. Elle est malheureuse. Pourquoi vous infliger ça ? Est-ce par
fierté?Parceque si c’est le cas, c’estvraiment tropcon.Evangelinen’apas laissé sa fierté l’arrêterquandelleétaitàgenouxpourtesupplierdelacroire.Chacundesesmotsétaitpareilàunefléchetteempoisonnéequiletouchaitenpleincœur.Ilentrouvrit
les lèvres, une question sur le bout de la langue, brûlant d’être posée, d’être libérée. Sa volontés’effritait,safiertésepréparaitàprendreuncoup.—Tu penses vraiment qu’elle n’avait rien à voir avec tout ça ? demandaDrake, laissant le doute
s’exprimerpourlapremièrefois.Avant que Silas ne puisse répondre, les portes s’ouvrirent à la volée et ses hommes affluèrent en
masse.Leurfureurélectrisaitl’air.—Pasmaintenant,bonsang!rugitDrake,déversantsureuxtoutesarageetsonimpuissance.Dégagez
demonbureauetnerevenezpasavantquejevousappelle.Cen’étaitpas lemoment. Ilavaitbesoinde réponsesde lapartdeSilas.Desa logique froide,non
entravéeparl’émotion.Ilsetournaverslui,cherchantsonsoutienetsacompréhension,maisn’obtintnil’unnil’autre.Unhomme–Hatcher?–futpousséenavant,trébuchaettombaàgenoux.Ilavaitdéjàunœilaubeurre
noir,seslèvresétaientfendues,etsonnezsemblaitavoirétépulvérisé.—Voilàtontraître,ditMaddoxd’untonglacial,lavoixrempliedehaine,lacolèreluisantdansses
yeux.Cen’étaitpasEvangeline.Nouslesavionstous.Nousn’avonspasdoutéd’elleuneseuleseconde.Pourquoinepeux-tupasdiredemême,toi,sonmâlealpha,l’hommeenquielleavaitconfianceetqu’elleaimaitmalgrésespéchés,l’hommequ’elleallaitépouser?Drakeplissalesyeux,etunbourdonnementassourdissantretentitdanssesoreilles.Soncœurbattaitsi
fortdanssapoitrinequ’ilsesentaitétourdi.—Quelqu’unvoudrait-ilmedirecequ’ilsepasseici?PourquoiHatcherest-ilétalésurlesoldemon
bureauetaccusédetraîtrise?JusticeregardaDrakeavecunairdedégoût,toutcommeThane,Maddox,Hartley,Zander,Jax,etSilas.—Tudoutesdelaculpabilitéd’undeteshommes,undetesemployés,alorsquetuaspenduhautet
courtlafemmequit’aimedetoutesonâmesansautreformedeprocès?Qu’est-cequitournepasrondcheztoi,mec?—Arrêtedefairechieretdis-moicequ’ilsepasse!hurlaDrake.— C’était Hatcher, l’indic, dit froidement Thane. Il était avec nous le jour où nous sommes allés
déjeuner avec Evangeline, tu te rappelles ? C’est aussi lui qui t’a appelé par la suite pour te direqu’Evangelineavaitfaitdesmessesbassesavecunflic.Sacréecoïncidence,tunetrouvespas?Ilatoutarrangé.IlleurajetéEvangelineenpâture,etquandelleacrachéauvisageduflicetrefusédeluidonnerdesinfossurtoi,ilssontpassésauplanB.L’estomacdeDrakesesouleva.Lasueursemitàperlersursonfront,etilsefrottalesmainssurle
pantalondansungesterépétitif.Oh,bonDieu.Qu’avait-ilfait?— Le plan B, expliqua Zander, c’était que Hatcher continue à donner des infos aux flics tout en
préparantuncoupmontépourimpliquerEvangelineafinqueluipuissecontinueràmouchardersansêtresoupçonné.Dis-moi,Drake.Connards ou pas, clean ou ripoux, combien de flics auraient balancé unetaupecommeça,aubeaumilieud’uneopération?Avantdelalaisseràunemortcertaine,aveclesgensqu’elleauraittrahis?Bonsang,mec,sers-toidetoncerveauunpeu.Cettehistoiresentaitl’embrouilleàpleinnezettuesleseulànepasl’avoirvu.Drake se leva d’un bond, se dressa au-dessus de son bureau, et fusilla du regardHatcher, qui était
toujoursàgenouxparterre.—C’esttoiquiastenduunpiègeàEvangeline,petitemerde?Hatcherrestaparfaitementimmobileetsilencieux,leregardfixésurunpointauloin,lesdentsserrées,
lestraitsmenaçants.Drakepâlitensesouvenantd’uneautrepersonneàgenouxdevantlui,ilyavaitàpeinequelquesjours.
Evangeline.Sessanglots.Sessupplications.Lesuppliantdel’écouter.Delacroire.Elleavait toujourscruenlui,nepouvait-ilpasluirendrelapareille?Illuiavaittournéledosàlapremièreoccasionquis’étaitprésentéeaprèsqu’elleluiavaitpardonné
leschosesindiciblesqu’illuiavaitfaites.Accablédechagrin,noyédanssesregrets,ilsentitsesgenouxsedérober.Ilselaissaretombersurle
fauteuiletenfouitsonvisageentresesmains.—Qu’est-cequej’aifait?MonDieu,qu’est-cequej’aifait?répéta-t-ild’unevoixrauque,torturée,
nouéeparl’émotion.Ilnevoyaitplusqu’Evangeline,àgenouxdanscettemêmepièce,entraindelesuppliersansrelâche.«Jet’enprie,écoute-moi.»— Elle ne me pardonnera jamais, et je ne mérite pas moins, dit-il, ravagé par le chagrin et la
culpabilité.—Queveux-tufairedecetenfoiré?demandacalmementMaddox.Drakeconcentrasonattentionsurletraître.Nonseulementilavaittrahisespropresfrères,leshommes
avecqui il travaillait et à qui il avait promis sa loyauté,mais pire, il avait trahi la femmedeDrake.Evangeline,quiétaitcomplètementinnocente,laseuleàl’êtreentreeuxtous.Hatchers’étaitservid’ellepoursatisfairesaproprecupiditéetsonambition.Sonmobile importaitpeupourDrake.Iln’étaitplusrienpourlui.—Débarrasse-toidelui,ordonna-t-ilàSilas.Qu’ilcomprennebiencequ’onfaitdestraîtres.Pourlapremièrefois,Hatchereutl’airmortdetrouille,etDrakenepouvaitpasleluireprocher.Silas
étaitimpressionnantetterrifiant,mêmedanssesmeilleursjours.MaisEvangelineetluiétaientproches.Silaslaportaitdanssoncœur.Iln’auraitaucunepitiéenversHatcher.—Sortez-led’ici,ditDrakeenfaisantsigneàMaddoxdes’enoccuper.J’aibesoindem’entretenir
avecSilas.—EtEvangeline?demandaJustice,lesbrascroiséssurlapoitrine.Jetejure,Drake,unseulfauxpas
etj’interviens.Tul’aslaisséesansrien,maisj’irailatrouveretlatraiteraiavectoutlerespectqu’ellemérite,etellen’auraplusaucunsouciàsefairedesavie.Drakesoupira,las.—Jecomprends,Justice.Jenecomprendsquetropbien,crois-moi.J’aimerdé.J’étaissurlepointde
m’enrendrecomptequandvousavezdébarquéiciaveccetenfoirédeHatcher.Cinqminutesplustard,vousnem’auriezpastrouvéicicarjeseraispartilaretrouver.Jesaisquej’aiétéleroidesconsetjesaisquevouslasoutenieztous,contrairementàmoi.Jesuisplusdésoléquetunepeuxl’imaginer.J’enpaieraileprixtoutemavie.—Laissetomber,mec,ditdurementMaddox.Tunet’excusespasauprèsdelabonnepersonne.Nous
nesommespasEvangeline,etc’estdevantellequ’ilfautallert’agenouillerpourimplorersonpardon.Drakedéglutit.—Sic’estcequ’ilfautfairepourlaretrouver,alorsjeresteraiàgenouxpourl’éternité.—Ça,jeveuxbienpayerpourlevoir,ditZander.Viens,Maddox.Sortonslespoubellespendantque
lepatronparleavecSilas,mêmesijeseraisaussiprêtàpayerpourassisteràcetteconversationàcœurouvert.Imagine,notreSilasquijouelesthérapeutesdecouple.SilasjetaunregardassassinàZander.Onracontaitquecertains,confrontésauregardnoiretintimidant
deSilas,avaientdéjàmouilléleurpantalon.—Jevoussuggèrededéguerpiravantquejedécidequec’estàvousquejeveuxdonneruneleçon,dit
Silassuruntonàglacerlesang.Àen jugerpar lemalaise sur levisagede seshommes,Drake sutque son regardavaitmisdans le
mille.Dèsque lesautresfurentpartis,Drakese tournaversSilas,désespéré, lesyeuxaussividesqueson
cœur.—Ilfautquejelatrouve,Silas.Toietmoinoussavonsquejeneméritepasunetroisièmechanceavec
elle.Pasaprèsavoirautantmerdé,maisjedoisessayer.Jenevaispaslaissertombernilalaisserpartir,mêmesijel’aijetéedehors.Unetraînéeacideluibrûlaitlagorgeetl’estomac,calcinantsesorganesvitauxetsonâmeperdue.—Jenepeuxpasvivresanselle.Cestroisjoursontétéunenfer.Cematin,jemesuisditquejem’en
foutais,qu’ellem’aittrahioupas.J’étaisprêtàtoutpourlaretrouveretluipromettren’importequoipourqu’ellerevienne.Mêmesiçaveutdirearrêterlesconneries.Silassembla lutterpendantde longsmoments.UneéternitépourDrake,quirestaitplanté là,àpeine
capablederespirer,étoufféparlechagrin.Silasfinitparluiadresserunregardqu’ilnepouvaitpasnepascomprendre.C’était l’expressionla
plussérieusedeSilas,cellequiindiquaitqu’ilneplaisantaitpasetn’hésiteraitpasàs’enprendreàvoussivousneteniezpasparole.—Tugâchesteschancesencoreunefois,Drake,etceneserapastoiniJusticequiinterviendrezpour
vous occuper d’Evangeline. Tu vois ce que je veux dire ? Je serai là pour elle, pour subvenir à sesbesoins,aussi longtempsqu’elleaurabesoindemoi,et jedécrocherai la lunepourelle.Jenedevraisrientedire.Jenedevraispast’aider.EtsiEvangelinenesouffraitpasautantquetoi,jetediraisd’allertefairevoirettelaisseraistemorfondredanslemalheurquetuascréé.
Drakegrimaça.—Elleestdansl’appartementàcôtédumien,finitparavouerSilas.Celuidedroite.Negâchepastout
unenouvellefois,Drake.C’estleseulavertissementquetuauras.—J’apprécie.Mercid’avoirétélàpourEvangeline,d’avoirprissoind’elleaprèsquejel’aidétruite.
Elleabesoindegenscommetoidanssavie.Pourlasauverdesgenscommemoi,dit-ilavectristesse.—Voilàledoubledelaclé,ditSilasenlejetantsurlebureaudeDrake.J’espèreêtretontémoin,si
elleesttoujoursd’accordpourt’épouser.—Jenevoudraispasquecesoitunautre,soufflaDrake.Etellenonplus.Silasluiadressaunpetitsourireensedirigeantversl’ascenseur.—Soisbonavecelle.—Jeleserai,murmuraDrakeenfermantlesyeux.MonDieu,donnez-moiunedernièrechancedelarendreheureuseetjejurequejamaisplusjenela
décevrai.
Chapitre29
Drake pénétra dans l’immeuble tranquille de Silas, le tee-shirt trempé de sueurmalgré le froid quirégnaitàl’extérieur.Peudechosesluifaisaientvraimentpeurdanslavie.Ilnecraignaitrien,pasmêmelamort.Lamortn’étaitqu’unefinensoi.Lafind’unebelleépopée,oubien…unraccourciàtraversunpaysageimprévuquivousfaisaitfairefausseroute.MaislaperspectivedeperdreEvangelinepourdebon?Celaleterrifiait.Sesmains tremblaientquandilsortitde l’ascenseuraudernierétage,etchaquepasverssaporteau
boutducouloirsemblaits’étirersurunkilomètre.Ilsongeaàfrapper–ilpasseraitpourunmalotrus’ilne le faisaitpas–maiss’ilannonçait sonarrivée, ilyavaitdeschancespourqu’ellene le laissepasentrer.Serait-ilmoinsimpolidefrapperd’abord,puisdeseservirdelacléqueSilasluiavaitdonnéesielle
nerépondaitpas?Ilneserappelaitpassilesportesavaientdesverrousdansl’immeuble.Certainement.Silasprenaitsoindeses locataires.Celadit, ilétaiten traindecommencer lesrénovationsdudernierétage;lesverrouspouvaientneplusêtreprésents.Quoiqu’ilensoit,ilfrapperaitplutôtquedefaireirruptiondansl’appartement,decraintedeluifaire
peur.Aprèsça?Ilavanceraitàtâtons.Ils’arrêtadevantlaporteetposasamainàplatsurlebois,avantd’yapposersonfront.—Jet’enprie,parle-moiEvangeline,souffla-t-il.S’ilteplaît,soislafemmemagnifique,généreuseet
aimantequetuastoujoursétéetdonne-moilachancequej’airefusédetedonner.Jeneleméritepas,maisjet’ensupplie,commetum’assupplié.Ilfallaitqu’ilcesse,carilsedamnaitunpeuplusàchaquemotquiquittaitseslèvres.Seredressantde
toute sa hauteur, il frappa à la porte d’un coup sec, et attendit, retenant son souffle, chaque secondes’étirantéternellement.Son cœur se serra quand il frappa une seconde fois et n’eut aucune réponse. Était-elle en train de
dormir?Silasavaitditqu’elleétaitéperduededouleur.Bouleversée.IlavaitmêmeappeléDrakesurlecheminpourleprévenirqu’ilavaitdûluidonnerunmédicamentpourapaisersonmaldetête.Encoreunpéchépourternirsonâmedéjànoire.Inquietqu’ellepuisseêtretrèsmalade,iln’hésitaqu’unefractiondesecondeavantdesortirlaclépour
laglisserdanslaserrure.Unsouffled’airbalayaseslèvresquandlaportes’ouvrit,nonverrouilléedel’intérieur.Ilentraetappeladoucement:—Evangeline?Ange,bébé,c’estmoi,Drake.Tueslà?Seullesilencel’accueillit.Ils’aventuraplusloin,maisl’appartementétaitimmaculé,commetousles
appartements de Silas. Rien n’indiquait qu’elle était même venue ici. Il s’en mordit les doigts.Évidemment:ill’avaitdépouilléedetout.Sesvêtements,sesaffaires.Ill’avaitmisedehorssansrien.Il fit rapidement le tour du petit appartement, et un sentiment demalaise s’installa au creux de son
ventrequandsafouilles’avéravaine.C’étaitcommesiellen’avaitjamaismislespiedsici.Pourquoi?Danslacuisine,ilfinitpartrouverunmotsurleréfrigérateur.Ilseprécipitaetl’arrachapourlireson
écrituresoignée.IlétaitadresséàSilasetMaddox.
Merci infinimentpour tout,à tous lesdeux.J’aidécidédequitter laville.Ceserait tropdouloureuxpourmoiderestericipluslongtemps.VousêtesmonmeilleursouvenirdeNewYork.
Avectoutemonaffection,Evangeline
Drakefroissalalettreetrefitletourdel’appartementàlarecherched’ilnesavaitquoi.Unindicesur
l’endroitoùelleétaitallée?Danslasalledebains, il trouvalepremiersigned’uneprésencerécente.Justeunmouchoir,toutfroisséetsec,quoiqu’ilavaitdûêtretrempé.Avait-ellepleuréici,etessuyéseslarmesaveccemouchoir?Ilfermalesyeuxetprituneprofondeinspirationpourretenirsespropreslarmes.Ilsursautaquandson
téléphone sonna, et l’attrapa machinalement pour l’éteindre, mais son pouls s’emballa quand il vits’affichersurl’écranlenomdel’appelant:lamèred’Evangeline.—Brenda,commentallez-vous?lasalua-t-il.Commesitoutallaitbien.Commesilemondenes’étaitpaseffondréautourdelui.Ellereniflaetilentenditunpetitsanglotdanssavoix.—Drake?Evangelineestavecvous?Drakesefigea,sonsangseglaçadanssesveines.—Non,dit-illentement.Ellen’estpasavecmoi.J’espéraisquevouspourriezmedireoùjepeuxla
trouver.—Elleprenaitunvolpourrentreràlamaison!s’écria-t-elle.Ellem’aappeléecematinpourmedire
qu’elleprenaitunavionenfind’après-midietelleauraitdûarriverilyaunedemi-heure!Ellen’étaitpasdansl’avion.Ellen’estpasmontée.Qu’est-ilarrivéàmafille?—Jevaisledécouvrir,Brenda.Jevousjurequejevaislaretrouver.Vouspouvezmedirequoiquece
soitpourm’aider?—Vousm’aviezpromis,rageaBrenda.Vousm’avezjuréquevouslaprotégeriezetquevousveilleriez
surmonbébé,maisquandellem’aappelée,vousauriezdûentendrecombienelleétaitbouleversée.Elleavaitlecœurbrisé!Elleaditquevousaviezrompuetqu’ellerentraitàlamaison.Commeellen’estpasmontéedansl’avion,j’espéraisquevousvousétiezréconciliés.—Brenda,écoutez-moi,ditDrakeavecgravité.J’aifaitunechoseterribleàvotrefille.Jeneluiai
pas fait confiancecomme j’auraisdû.Enconséquence,nousnous sommesdisputés, etoui,nousavonsrompu.Maisj’étaisencheminpourl’endroitoùellerésidaitpourm’excuseretimplorersonpardon.Ellen’a rien fait demal, si ce n’estm’accorder une confiance absolue alors que je ne lui rendais pas lapareille.L’émotionluinouaitlagorge,ilavaittantdemalàparlerquec’étaitunmiraclequ’ellelecomprenne.
Lui-mêmesetrouvaitconfus.—L’aimez-vous?demandaBrendasuruntonaccusateur.Parcequesivousnel’aimezpas,laissez-la
partir,Drake.Mêmesiellesouffrelemartyreencemomentmême,ellen’ensouffriraitquedavantagesielles’impliquaitencoreplusavecvous,ousiellevousépousait,alorsquevousnel’aimezpas.—Jel’aimedetoutmonêtreetavectoutcequej’ai.Toutluiappartient.Moncœur,monâme,mavie.
Sielleveutdemoi,jepasseraimavieàleluiprouver.Ilyeutunlongsilence,puisBrendarepritlaparole,plusapaiséequeprécédemment.— Retrouvez ma fille, Drake. Et quand vous l’aurez trouvée, je veux lui parler. Je suis folle
d’inquiétude,etsonpèreaussi.S’ilvousplaît,trouvez-la,etdites-nousqu’ellevabien.—Jevouslepromets.
Ilraccrochaetglissasonportabledanssapoche.—MonDieu.Oùes-tu,Ange?sedemanda-t-il,angoissé.IlreplongealamaindanssapochepourprendresontéléphoneetdemanderàSilass’ilavaituneidée
del’endroitoùellepouvaitêtre,quandilaperçutquelquechoseducoindel’œildanslapoubelle.Ilsefigea,lesoufflecoupé.Ilsemitàtremblerviolemment,lesyeuxrivéssurlepetitobjet,paralysé
parlapeur.C’étaitimpossible.Non?Sortantdesatranse,ilsejetasurlapoubellepourconsulterlafenêtrederésultatdutestdegrossesse.
Sesgenouxsedérobèrentpresqueaussitôt,lefaisantchanceler.C’étaitfaible,maisunpetitsigne«+»roseétaitencorevisible.Evangelineestenceinte?Uneautrepeurlesaisit,siviolentequ’ildutseretenircontrelemeublepournepastomber.Ilavaitété
infectavecelle.Luiavaitditdeshorreurs.Avaitfaitdeschosesatroces.Elleétaitseule,désespérée,sansargent ni endroit où aller. Cela ne laissait pas beaucoup d’options à une mère célibataire. Non, ellen’allaitquandmêmepas…Ilsecoualatête,encolèrecontrelui-mêmedesupposerpareillechosealorsqu’elles’étaitmontrée,
encore et toujours, loyale et digne de confiance. Il était impossible qu’elle avorte. Il avait vu sonexpressionhorrifiéequandil luiavaitditquesamèreavaitvouluavorteret l’auraitfaitsiellen’avaitpasvulesavantagesd’avoirunenfant.Pourautant,Evangelineavaitdisparualorsque, selonsamère,elleauraitdéjàdûatterriretêtreen
cheminpourlamaisondesesparents.Il n’y avait pas un instant à perdre. Vite. Il fallait quadriller la ville, explorer toutes les options,
rappeler toutes les faveurs qu’on lui devait. Et il fallait faire savoir que si on avait fait du mal àEvangeline,Drakepoursuivraitetdétruiraitleresponsableettoutepersonnequiauraitlaisséfairesansintervenir.Iloffriraitégalementunegénéreuserécompenseàtoutepersonnequilaluiramèneraitsaineetsauve.Il attrapa son téléphone tout en quittant l’appartement pour se précipiter chez Silas. Il avait la clé.
Evangelineétaitpeut-êtrevenueici.Silasavaitditqu’elleavaitdormichezluilapremièrenuit.Ilentra,frustrédenepasavoireuSilasautéléphonedupremiercoup.Ilcrialenomd’Evangelineet
alladepièceenpièce,sanssuccès.Il serait plus logiquequ’il reste ici, le dernier endroit oùEvangeline avait été avant de partir pour
l’aéroport plus tôt dans la journée. Il allait dire à tous ses hommes de venir chez Silas. Il écrivit unmessageleurdemandantdeleretrouverici,etlesderniersmotsdesonmessagelerendirentmalade.
Dépêchez-vous.Evangelinen’apeut-êtreplusbeaucoupdetemps.
Chapitre30
—Evangelineadisparu,annonçaDrakequandtousseshommesfurentrassemblésdansl’appartementdeSilas.Des«bordel»et«que s’est-ilpassé» retentirentenchœur.Drake leva lamainpourdemander le
silence,laminegrave,ladéterminationflambantdanssesyeux.—De ce que nous savons, c’est le dernier endroit où elle a été en contact avec quelqu’un. Elle a
appelésamèredepuisl’appartementdeSilascematinpourluidirequ’elleprendraitunavionatterrissantpeuaprès18heures,heureducentre.Ellen’estjamaismontéeàborddecetavion,expliquaDrakeavectristesse.UnautreflotdejuronsretentitetSilasetMaddoxéchangèrentdesregardsfurieuxetimpuissants.—Jen’auraispasdûlalaisserseule,regrettaSilas.Drakebalayalaculpabilitédesonhomme.—Ilyaautrechosequevousdevezsavoir.Ilbranditletestdegrossesse.Lastupéfactionsepeignitsurlevisagedeseshommes.—Elleestenceinte.Demoi,ajouta-t-ilinutilement.Elleadûfaireletestcematin.Avantd’appelersa
mère.C’estcertainementcequil’apousséeàpartir.—Alorsqueluiest-ilarrivé,bordel?demandaMaddox,lespoingsserrés.Sielleaappelésamèreet
luiaditqu’elleprenaituncertainvol,elleavaitdetouteévidencel’intentiondeprendrecetavion.Ellen’inquiéteraitpassesparentsainsi.—Jesais,ditcalmementDrake.Cequiveutdirequ’ilyaunebonneraisonpourqu’ellenel’aitpas
pris.Leshommeséchangèrentdesregards,enproieàlapeuretàl’incertitude.—Jevaisregarderlavidéosurveillanceàpartirdecematin,quandjel’aivuepourladernièrefois,
ditSilas,laminegrave.Passûrdetrouverquoiquecesoit,maiss’illuiestarrivéquelquechose,onleverrapeut-être.Sinon…Drakerefusaitdeconsidérerl’autreoption.Sansunebonnebasedetravail, impossibledesavoiroù
Evangeline pouvait être. Ses ennemis étaient nombreux et n’importe qui aurait pu chercher à atteindreDrakelàoùçafaisaitmal.Personnen’avaiteuletempsdedécouvrirqu’ilsavaientrompuouqu’ellenesignifiaitplusrienpourlui.Enapparencedumoins.Carelleétaittout…—Fais-le,ordonnaDrake.Nousn’avonspasbeaucoupdetemps.Chaquesecondequipassesansla
trouver…Ilsetut,refusantd’exprimercettepossibilité.—Personnen’auraitintérêtàlatuer,ditJusticeavecunepointed’incertitudedanslavoix,commes’il
essayaitdes’enpersuader.Pass’ilsontuneonced’intelligence.Sielleaétéenlevée,ilsvontseservird’ellepourt’extorquerquelquechose,Drake.Del’argent.Dupouvoir.Uneprotection.Pour autant, tous savaient que l’argent était la seule possibilité, car Drake ne protégerait et ne
s’associeraitjamaisavecquelqu’unquiauraiteffrayéEvangelineouposélesmainssurelle.Silasétaitsursonordinateuràl’autreboutdusalon,entraindetaperunesériedecommandes.Aubout
dequelquesinstants,ilappelaDrake.Ilmontraitl’écran,diviséensixplansdecaméra.—Là,c’estquand j’aiquitté l’appartementcematin,Evangelineétaitencoredanssonappartement,
dit-il.Sinousvoyonsquelqu’un,nouspouvonszoomeretsuivresontrajetjusqu’auboutdelarue.J’aidescamérasdanstoutl’immeubleetdanslarue,danslesdeuxdirections.Sansmot dire, Drake regarda Silasmonter en voiture sur l’écran, puis ils firent défiler une heure.
Aucunsigned’Evangeline.—Lavoilà,ditSilasenzoomantsurlacaméraducouloir,devantsonappartement.Elle ne portait qu’un petit sac. Ses cheveux étaient relevés en queue-de-cheval et elle était pâle,
visiblementbouleversée.Ilslaretrouvèrentquandellesortitdel’ascenseuretquittal’immeubled’unbonpas.Lacaméradelaruelaretrouvadehors.Devant l’immeuble,elle regardadans lesdeuxdirections,hésitante.Puisellepartitàdroite,vers le
coin de la rue. Avait-elle hélé un taxi ? Si Silas pouvait relever tout signe permettant d’identifier levéhiculedanslequelelleétaitmontée,ilspourraienttraquerlechauffeuretsavoiroùill’avaitemmenée.SilasjuraetDrakeseconcentrasurlavidéo.Elleétaitpresquearrivéeauboutdelaruequanduneberlinenoires’arrêtaàsahauteurens’ébranlant,
commesielleallaittropvite.Evangelinereculaetcommençaàfaireletourduvéhiculequandunhommeensurgitetsejetasurelle.Ellesedébattitviolemment,etlesangdeDrakesefigealorsquel’hommelafrappaàlatêteavecla
crossed’unpistolet.Elleperditconnaissanceetl’hommelajetapresqueàl’arrièredelavoitureavantqu’elleneredémarreentrombe.Lascèneneduraitquequelquessecondes,maisDrakeserepassaitchaqueimageauralentidansson
esprit.Chaquesecondedel’effroid’Evangeline,salutte,etl’hommequilafrappaitavantdel’enlever.—Filsdepute,sifflaMaddox.Allez,Silas.Usedetamagie.Jeveuxcefilsdeputeetjeleveuxtout
desuite.Drakepenchalatêtepar-dessusl’épauledeSilasetluiditd’unevoixglaciale:—Jemefichedecequ’ilfautfaire,quitudoissucer,oucequetudoispirater.Trouvequil’aenlevée.
Çafaitplusieursheuresqu’elleestentresesmains.—Donne-moicinqminutes,réponditSilassansquitterl’écrandesyeux.Sesmainsvolèrentsurleclavierpourzoomersurlavoiture.Drake ferma lesyeux, lapeurauventre.La froideurduprédateurs’emparade lui. Ilavaitenviede
tuer.Soninstinctnedemandaitqu’àêtrelibérépourfairecoulerlesangdeceluiquiavaitfaitdumalàEvangeline.Etàsonenfant.Drakefitalorsunechosequ’ilnes’étaitjamaiscrucapabledefaire.Ilpria.Faitesquel’enfantaillebien.Qu’ilssoienttouslesdeuxsainsetsaufs.Siunseuldoitêtresauvé,
quecesoitEvangeline.Je lesveux tous lesdeux,mais,monDieu, ilyaurad’autresenfants. Iln’yaurajamaisd’autreEvangeline.—Jel’ai,ditSilasrageusement.Putaindebordeldemerde!C’estCharlieMcDuff.Lesautresjurèrentàleurtour.—McDuff?Cetocardenmaldecélébrité?demandaDrake,incrédule,avantdeplisserlesyeux.Tu
pensesquesonpèreaquelquechoseàvoirlà-dedans?J’aidumalàcroirequ’ilauraitlescouillesdemonterçatoutseul.Ilestsoitcomplètementdébile,soittoutàfaitdésespéré.Silassecoualatête.—Impossible,mec.Sonvieuxade la jugeote. Il a évincéCharliede l’affaire familiale ilyabien
longtemps. Il était trop instableet soupeau lait.Etparfaitementdébile,bien sûr. Jepariequ’il fait çapourprouveràpapaetaurestedumondequec’estunvraimec.Ilestprêtàtout.Ilvoudracertainement
del’argentetuneplaceauseindetonorganisation.QuandBrianacoupélesponts,ilafaitçabien.Illuia dit de se trouver un boulot parce qu’il ne supportait plus cette feignasse. Pire, sa mère n’est pasintervenuecommeàsonhabitude.Etc’est le filsà samaman.D’habitude,quandsonvieuxs’énervait,mamanintervenait,apaisaitlesesprits,etconvainquaitlepèrededonnerunedernièrechanceau«petit».Onditquemêmeelleétaitfurieuseaprèssadernièrebourdeetacoupélespontscommelepère.Jepensedoncqu’ilestdésespéré.Enfin,stupideaussi,maisilagitendésespoirdecause.—Punaise,marmonnaDrake.Il s’accordaunmoment pourmettre de l’ordre dans ses pensées,malgré la terreur qui lui nouait le
ventre.Leshommesdésespérésfaisaientdeschosesdésespéréesetétaientgrandementimprévisibles.IlfinitparreleverlesyeuxversSilasetseshommes.— Appelez le père. Il faut qu’il sache que je serai clément s’il n’a rien à voir avec la dernière
conneriedesonfils.S’ilpeutm’aideràretrouvercepetitcon,jeseraiencoreplusindulgent.Toutcequicompte,c’estrécupérerEvangeline.Maiss’ilestimpliqué,s’ilnecoopèrepas,toutelafamilleserendracoupabledesonenlèvement.Silashochalatête.—TusaisqueCharlieabossépourlesLuconiunmoment,l’informaMaddox.Ilyaunan.Uneautre
tentativepourprouverqu’ilenavaitdansleslip.—Oùveux-tuenvenir?demandaDrakeavecunecertaineimpatience.— Il a passé pas mal de temps avec eux, voilà, dit Maddox, tout aussi impatient. Les Luconi
connaissentunpeuseshabitudes,enfinj’imagine.IlsontcherchétonsoutiendansleurrachatdesVanucci.Ilsferontcertainementtoutcequ’ilfautpourgagnertonappui.Passeunmarchéaveceux:s’ilst’aidentàretrouverEvangeline,tulessoutiens.Sinon,ilssedébrouillentseuls.Drake fixa son homme du regard pendant un long moment, calculant les implications de l’idée de
Maddox. Si les Luconi l’aidaient à retrouver Evangeline, il était prêt à tout en échange.Même à lessoutenirdanscetteaffairederachat,mêmes’ilavaitprévudelaisserlesdeuxfamilless’affronteretsedétruiremutuellement.Bonsang,cen’étaitpasrien.Celaaugmentaitlamenace,passeulementcontreEvangelineetlui,mais
contrechacundeseshommes.IlsdeviendraientlesciblesdesVanuccietdetousleurssoutiens.—Tuterendscomptedecequetudis?demandaDrakeàMaddox.Vousvousrendeztouscomptede
cequeçaimplique?—Oui,réponditZander.Ettoi?Tuesprêtàprendrecerisque?—Commentnepasleprendresic’estpourrécupérerEvangeline?—Alorsjecroisquenousavonsnotreréponse,ditJax.Un par un, ses hommes donnèrent leur accord et déclarèrent qu’ils acceptaient le risque que cela
impliquait.DrakesetournaversMaddox.—Appelle.IlfautquejeparleàMcDuff.Qu’ilssachentquenousn’avonspasd’accordàmoinsqu’ils
nousrendentEvangeline.Saineetsauve.
Chapitre31
—Tuessûrqu’onpeutfaireconfianceauxLuconi?demandaDraked’unairgrave.Luietseshommesétaiententraindesepositionnerdevantl’unedesboucheriestenuesparlesMcDuff.
Ilétaitappropriéqu’ilspossèdentdesboucheriesfamiliales,puisqu’ilsn’étaienteux-mêmesguèreplusquedesbouchers.Maddoxhaussalesépaules.LuietSilasavaientinsistépourêtreplacésavecDrake,certainementpour
lesurveilleretl’empêcherdeperdresonsang-froidplusquepourl’assister.Lesautreshommess’étaientmisenbinômes,et,étonnamment,l’aînéetleaderattitrédesLuconiavaitenvoyécertainsdeseshommesassisterDrakepourfairetomberCharlieMcDuff.— Ils ont très envie de voir Charlie tomber, ditMaddox pendant qu’ils attendaient le feu vert. Le
timingestparfait,nonpasqu’ilpuisseyavoirunbonmomentpourqu’Evangelinesefasseenlever.Maddoxserenfrogna,lesyeuxnoirsderage,avantdepoursuivre.— Il se trouve que lesVanucci ont attaqué les Luconi il y a une semaine, et les Luconi veulent se
venger.C’estlégitime.DrakeetSilassetournèrentversMaddox,perplexes.Maddoxsoupira.—C’estassez terrifiant,etaprèsenavoirentenduparler, jesuisplutôtcontentquenousaidions les
LuconiàdescendrelesVanuccipourdebon.LesLuconiontbeaunepasêtredesscouts,jamaisilsn’ontfaitcegenred’horreurs,àmaconnaissance.Ilsontunesortedecode,quiexclutlesfemmesetlesenfants.LesVanuccinemanquerontàpersonne.Cenesontquedesraclures.—Raconte,aboyaDrake.—JacquesVanucciaciblélapetite-filledel’aînédesLuconi.Ellen’avaitquevingtans,putain.Jeune,
innocente,d’unegrandebeauté.LesLuconinesontpasdessalauds.Ilsprotègentleursfemmes.Ellesnesavent rien de leurs affaires. Dans cette famille, les femmes sont chéries et protégées par tous leshommes.Merde.Maddoxavaitparlédelapetite-filledeLuconiaupassé.Drakeavaitunmauvaispressentiment.Maddoxsoupiraetcontinua.—Cen’étaitpasjoli.Ilacourtisélajeunefillepensantdesmois.Luiafaitcroirequ’ilsvivaientune
versionmodernedeRoméoetJuliette.Deuxpersonnesinterditesl’uneàl’autreàcausedeleursfamillesrivales. Il lui a raconté je ne sais quelles conneries, qu’il était amoureux d’elle, voulait l’épouser etl’emmenerloindeleursfamillespourqu’ilspuissentvivreheureux.Iladel’argent.Illuiaditqu’ellenemanqueraitjamaisderien.» Elle a résisté, au début. Elle voulait finir ses études et passer son diplôme,mais ce salaud était
tenace. Elle a fini par accepter, a laissé un mot à ses parents relatant ce conte sordide et est alléeretrouversonpetitcopain.Maddoxsecoualatête.—Jesuissûrquevousdevinezcequiasuivi.Ill’aviolée.Alaisséseshommesluipasserdessus.Ila
toutfilmé,etfinalement,ill’atuéeetaenvoyélavidéoàl’aînédesLuconiendisantqu’aucunLuconi,homme,femmeouenfant,n’étaitàl’abri.Luconiadéclarélaguerre,etildésiraitvivementt’avoirpourallié.Celal’asurprisaudébut,quetuveuillesrécupérerEvangeline,puisqu’ilacruàtapetitemiseen
scènepourfairecroirequ’ellen’étaitrienpourtoi,maisquandjeluiaiditqu’ilsavaientkidnappéunefemmeenceinte,ça l’aénervé. IldétesteCharlieMcDuff.Aditquec’étaitunemauvaisegraine.Qu’ilavaitungoûttropprononcépourlaviolenceetdétestaitlesfemmes.Jecomprendspourquoiiln’apasfaitlongfeuchezeux.Levieilhommem’aditqueCharlieétaitdéjàsurlebillot,puisilaessayédecoincersapetite-fillede seizeans. Je suis surprisqu’ilne soitpas sixpieds sous terre,pour êtrehonnête. Jepensequec’estseulementparcequelesLuconinevoulaientpasrisquerdedéclencheruneguerreaveclesMcDuff,avecl’attaqueimminentecontrelesVanucci.Maisapparemment,personnen’avuCharlieenpublicdepuisdesmois,après laracléequ’ilaprisequandilsontenlevésessalespattesde lapetite-fille.Drakefitunemouededégoût.—Bonsang,souffla-t-il.EtEvangelineseretrouveaumilieudecejoyeuxbordel.Uneinnocenteprise
entredesfactionsenguerre,etelleestentrelesmainsdeMcDuffencemomentmême!Ilfrappaletableaudebordduplatdelamain,déchiréparunsentimentd’impuissance.—Qu’attendons-nous?siffla-t-il.Chaqueminutepasséeànerienfaireestuneminutedeplusoùelle
estàsamerci.—Gardelatêtefroide,Drake,murmuraSilas.Tusaisqu’ilfautfaireçadanslesrègles.Uneerreur,et
Evangelinelepaiedesavie.McDuffest taréet trèsinstable.S’ilpensequeleschosesnevontpassepassercommeprévu,illatuera.Iln’arienàperdre.Le téléphone de Drake sonna. Il se tendit. Ils attendaient un appel de Charlie. Drake pensait qu’il
appelleraitbienplustôtpourcommuniquersesexigences.Chaqueminutequiétaitpasséesansnouvellesavait meurtri son cœur un peu plus. Pourquoi avait-il attendu ? Avait-il pris son temps et abuséd’Evangelineavantd’appelerDrake?Il ne reconnut pas le numéro ; d’habitude il laissait ce genre d’appel aller sur sa messagerie et
rappelaitplustardounerappelaitpas.Cettefois-ci,ilréponditàladeuxièmesonnerie.—Donovan.—Drake Donovan, dit CharlieMcDuff avec suffisance. Je crois que j’ai quelque chose qui vous
appartient.—Eneffet,ditDrakeavecunedouceurmenaçante.CharliesemblareleverlamenacedanslavoixdeDrake,cariln’étaitplusaussisuffisantniconfiant
lorsqu’il reprit laparole.Ilsemblait tendu,ébranlé.Et instable,cequiétait inquiétant.Voire terrifiant.DrakedevaitmarchersurdesœufsetnedonneraucuneraisonàcethommedefairedumalàEvangeline.—Sivousvoulezlarevoirvivante,vousferezexactementcequejedis.Vousavezdeuxheurespour
acheverlatransaction,pasunedeplus.—Quevoulez-vous?demandaDraked’untonsec.—Vingtmillions,cenedoitpasêtregrand-chosepourunhommecommevous,ditCharlied’unevoix
unpeuplusassuréeàl’annoncedumontant.Jesuistrèsgénéreux.Jesaisquevouspourriezm’endonnerplussansmêmequeçavousmanque.Maisjesaisêtreraisonnable.JevaisvousenvoyerlesinstructionsdevirementetlenumérodecompteparSMS.Commejel’aidit,silesfondsnesontpassurmoncomptedanslesdeuxprochainesheures,votrechèreettendreestmorte.Maispasavantquej’aieprofitéd’elle.Elleestplutôtjolie,maisjen’enattendaispasmoinsdevous,Donovan.—Laissez-moiclarifierunechose,Charlie,ditDrakesansprendrelapeinedemasquersarépugnance
enverscevilpersonnage.Vousconnaissezmaréputation.Voussavezquejeneplaisantepas.Voussavezquequandjefaisunepromesse,jepréfèremourirquedelabriser.Alorssachezceci:sivoustouchezEvangeline, si vous lui faites dumal, si vous lui faites peur, si elle a lemoindre bleu ou lamoindreégratignurequandjelaretrouve,vousêtesunhommemort.Mettezçasurvotrecompteenbanque.
Ilyeutunelonguepause.—Faiteslevirementetvousn’aurezpasàvousinquiéterdel’étatdevotrenana.Puislalignefutcoupée.Quelquessecondesplustard,un«bip»alertaDrakedel’arrivéedumessage
aveclenumérodecompte.IlvoulaitlapeaudeMcDuff.Cethommeallaitmourir,mêmesiDrakeavaitdonnél’impressionqu’il
s’entireraits’illuirendaitEvangelinesaineetsauve.Ilavaitsignésonarrêtdemortàlasecondeoùilavaitposésesmainssurcequiluiappartenait.—Nousavonsdeuxheures,maisjeneluifaispasconfiance,ditDrake,lesdentsserrées.Jerefusede
lalaisseravecluiuneminutedeplus.Ilnesaitpasquenoussommeslà.Ilpensequejesuisentraindemedémenerenville,pasquejesuisdevantsafoutueboucherieàBrooklyn.Jen’attendspasunesecondedeplus.Avecousansvous,j’yvais.—PourfairetuerEvangeline?LeregardfurieuxdeMaddoxtransperçaDrake.Sonhommedemainbouillonnaitderage,lesmuscles
contractés,telunanimalprêtàlanceruneattaquemortelle.—Noussommespresqueenposition,ditMaddoxenapposantsamaincontresonoreillette.Allons-y.
Ilfautquenoustrouvionslameilleureentréedececôté.Lesautressontentraindesemettreenplace.Jaxestpartienreconnaissancepourqu’onsacheàquois’entenir.—A-t-illocaliséEvangeline?demandaDrake.L’a-t-ilvue?Est-cequ’ellevabien?—McDuffl’aattachéeàunechaisedansunepièceaufond,oùlaviandeestpendue.Ilditqueçaavait
l’air d’aller, qu’elle était justemorte de trouille et se les gelait. Ce salaud l’amise dans la chambrefroideetn’arrêtepasde luidirequ’il l’aemmenéeiciparceque,avec lesbroyeursd’os,personnenetrouverajamaistracedesoncorps.Qu’illaréduiraenpetitsmorceauxetladonneraàmangerauxbuses.—C’estunhommemort,ditDraked’unevoixpresquetropbassepourqu’onl’entende.—Ohoui,juraMaddox.Les hommes sortirent furtivement de la voiture. Reconnaissant d’avoir le couvert de la nuit, Drake
progressa rapidement à l’ombre du bâtiment avec ses hommes. Il y avait une fenêtre qui, si leurreconnaissancedubâtimentétaitcorrecte,setrouvaitnonloindelachambrefroideoùEvangelineétaitretenueprisonnière.Silasfitunpasenarrièrepuiscourutsurlemur,attrapalereborddelafenêtre,etsehissahabilement.
Ilfitbougerlechâssisunmoment,jusqu’àcequelavitresesoulèveavecungrincementretentissant.Il se figea, tout comme Maddox et Drake, et attendit de longues secondes pour voir s’ils étaient
repérés.Commepersonnenesemontra,ilssoupirèrenttoustroisdesoulagement.Maddoxparlaàvoixbassedanslemicro,informantlesautresqu’ilsentraientetqu’ilsdevaientfairedemême.L’idée était d’encercler la chambre froide et de prévoir la meilleure attaque, celle qui permettrait
qu’aucunmalnesoitfaitàEvangelineetéviteraitqu’ellesoitprisedanslestirscroisés.Silasseglissaàl’intérieurdubâtiment,pritquelquesinstantspours’assurerqu’ilsn’avaientpasété
repérés,puissepenchaparlafenêtrepourfairesigneàDrakeetMaddoxdegrimper.—Viens,ditMaddoxenfaisantlacourteéchelleàDrake.Jevaistefairemonter.Drakeposasonpiedsur lesmainsdeMaddoxet sauta,propulsé le longdumuravec l’aidedeson
compagnon,pourattraperleborddelafenêtre.Ilsehissaàl’intérieur,puisSilasetluisepenchèrentparlafenêtre,mainstendues,pourattrapercelles
deMaddox.Quelquessecondesplustard, ils letirèrentàtraverslafenêtre,qu’ilsrefermèrentderrièrelui.Àprésentqu’ilsétaientdanslebâtimentoùEvangelineétaitdétenue,Drakedutprendresurluipourne
passeprécipiterdansl’autrepièceetdescendrecesmalfratsunàun.Ilétaitsur lesnerfs.Ilauraitpu
affrontertrentehommesettouslesdémoliràmainsnues.Ilsseglissèrentdanslecouloir,prenantgardeànepastrahirleurprésenceparlemoindregeste.Drake
avait confiance en ses hommes. Il leur confierait sa vie. Cela dit, l’enjeu n’avait jamais été aussiimportant.IlssebattaientpourlavietoutentièredeDrake.Evangeline.Auboutducouloir,oùSilass’étaitglisséàpasfurtifs,ilyeutunbruitétouffé,puisuncorpsheurtale
solsansqu’unseulcoupdefeusoittiré.SilasfitsigneàMaddox,quitiralecorpsinertedanslapiècequ’ilsvenaientdequitter.—Allons-y, soufflaMaddoxd’unairgrave.Justiceditque lesesprits s’échauffentdans lachambre
froide.McDuffesthorsdelui.LecœurdeDrakefitunbond,etilstournèrenttoustroisauboutducouloiravantdesemettreàcourir.
Il y avait quatre entrées pour pénétrer dans la chambre froide. Après s’être débarrassés des gardessurveillantcesentrées,Drakeetseshommessetapirentprèsdesportespourpasserenrevuelenombred’hommesarmésàl’intérieurdelapièce.Drakejura intérieurementquandilvitquetoutes lesarmesétaientdirigéesversEvangeline.McDuff
étaitdeboutdevantelle,entraindelanarguer.Ellerefusaitdecroisersonregard.Elleétaitpâle.Troppâle.Sescheveuxétaientemmêlésetdestraînéesd’unrougevifmaculaientuncôtédesoncrâne,mêléesaublonddorédesachevelure.Avachiesurlachaise,elleavaitlatêtebaissée,mentonposésurlapoitrine,sescheveuxtombantsur
sesjoues.Drakeeutl’impressiond’avoirprisuncoupdecouteaudanslecœurquandilvitleslarmesquibaignaientsapeausipâle.—JetiensDrakeparlescouilles,fanfaronnaMcDuff.Ilestbienbêtes’ilpensequejevaislelaisser
s’entirerpourvingtmillions.Pourlapremièrefois,Evangelinelevalatête,mêmesisonregardétaitconfusettroublealorsqu’elle
regardaitdansladirectiondeMcDuff.—C’estvousquiêtesbienbête,dit-elled’unevoixmorne,sansaucuneémotion.Elles’adressaitàMcDuffcommes’ilétaitsimpled’esprit.LecœurdeDrakefaillitcesserdebattre
quandilentenditlasuite.—Ilnetientpasàmoi,dit-elled’unevoixsourde.Ilneferarienpourmesecourir.Ilnevousdonnera
pascequevousvoulez.Ilnecéderapasauchantage.Quanda-t-iljamaiscédéauchantage?Vousêtesencoreplusdébilequejelepensaissivousimaginezlemettreàgenouxpourl’unedesesputainsdontilneveutplusentendreparler.Vousn’avezpaseuventdelanouvelle?Sadéclarationétaitpleinedesarcasme,etelleregardaitMcDuffcommesielleledéfiaitdefairele
pire,carlepireavaitdéjàétéfait.L’impuissancequ’ilentendit–ressentit–danschacundesesmotsmitleslarmesauxyeuxdeDrake.L’incertitude passa sur le visage de McDuff, vite remplacée par la rage. Hors de lui, il gifla
Evangeline,dontlatêtepartitenarrière.Sescheveuxenbataillecouvraientsonvisage,maisDrakevitlesangquicoulaitdesonnezetdesabouche,etsejetaenavant.SilasetMaddoxbondirentpourleplaquerausol.—Non! sifflaSilas.Nousaussi,nous rêvonsde le truciderpourcequ’ilvientde faire,maisnous
devons faire ça bien et nous en tenir au plan, sinon il va descendre Evangeline. Reprends-toi, mec.Réfléchis,pourl’amourduciel.Réfléchis!Drakesedébarrassad’eux.Ilétaitenproieàunefureurtellequ’iln’enavaitjamaisconnu.Attendre
queseshommesaientsoigneusementfaitletourdubâtimentetbarrétoutesleséchappatoirespossiblespours’assurerdelasécuritéd’Evangelineétaitunenfer.Drakeavaitditquesicesalaudlablessait,ille
tuerait.Merde.Evangelineavaitétéblessée.Physiquementetémotionnellement.McDuffl’avaitfrappée,faitsaigner,
pasunefois,maisdeux.EtDieuseulsavaitcequ’elleavaitenduréavantqu’ilarriveavecseshommes.Ildutarrêterd’ypenser,desetorturerenpensantàtoutcequesonangeavaitsubi,ouilallaitdevenirfou.Maddox leva lamain, écouta dans son oreillette unmoment, puis il se tourna versDrake, les yeux
brillants,lecorpstenduetirradiantderage.—Onyva.
Chapitre32
Evangelineétaitavachiesurlachaise,lescordesluimordantlespoignetsetleschevilles.Sonvisagebourdonnaitdedouleuràcauseducoupquel’hommevenaitdeluiassener,maisc’étaitsoncrânequilafaisaitleplussouffrir.Elleavaitprisunsalecoupquiluiavaitfaitperdreconnaissancequandelles’étaitdébattuecontrel’hommeessayantdelafairemonterenvoiture.Elleallaitmourir.Lechagrinlasubmergea,carelleneseraitpaslaseuleàmourir.Sonprécieuxbébé
allaitmouriravecelle.Drakeneviendraitjamaislachercher,nedonneraitpasuncentimepourelle,etencoremoinslesvingtmillionsquecetaréavaitexigés.Sachantqu’elleallaitmourir,ellen’avaitaucuneenviedeprolongerlechagrinetladouleur.Audébut,
elleavaitpenséfairetoutcequ’ilfaudraitpourresterenvie.Sebattrepoursonenfant.Puiselleavaitcompris,quandl’hommel’avaitamenéeici,dansunlieuquisentaitlesangetlamort,etl’avaitinforméequ’il allait ladécouperenpetitsmorceauxpourqu’onnepuisse jamais retrouver soncorps,etencoremoinsl’identifier,siDrakeneluiviraitpascetargent.—Ilm’a jetéedehors,vousne le saviezpas ? semoqua-t-elle, les lèvres enflées,douloureuses. Il
pensequejelesaitrahis,luietseshommes,endonnantdesinformationsauxflics.Maintenant,dites-moi.VouspensezqueDrakeferaquoi,danscettesituation?Vouspensezvraimentqu’ilvavousdonnervingtmillionsdedollarspourmesauverlavie?Vousrecevrezcertainementunecartederemerciementsdesapartaprèsmamort.—Laferme!ragea-t-ilenseretournantpourlafrapperencore.Maisquelquechoseretintsamain.Puislapièceexplosa,théâtredetouteslesviolences.Tirs.Crisde
douleur.Jurons.Ellefermalesyeux,priantpourconnaîtreunemortrapide.Oh,Drake,jet’aitantaimé.Jamaisjenet’auraistrahi.Pourquoinepouvais-tupasmecroire?Tu
neconnaîtrasjamaistonenfant.Le chagrin l’étouffait, les larmes lui brûlaient les yeux. Elle ferma les paupières et baissa la tête,
vaincue,alorsquelemondedevenaitfouautourd’elle.Elle tressaillit quand des mains effleurèrent ses liens. Puis la voix d’un homme résonna dans son
oreille.—Nemerésistepas,Evangeline.J’aibesoinquetucoopèresetquetufassesexactementcequejete
dis.Compris?Unéland’adrénalineluiinondalesveines.Elleouvritlesyeuxet,àsongrandétonnement,reconnutles
hommesdeDrake.Partout.Ilssebattaientsauvagement,desexpressionsassassinessurlevisage.Ébahie,elleaperçut…Drake.Implacable,ilsefrayaituncheminentredeuxhommesarmésquineparvinrentpasàentraversafureur.Quefaisait-il ici?Peut-êtreavait-elleperdu lesderniersvestigesdesaraison,auxquelselles’était
accrochéetoute la journée.Oupeut-êtrequ’elleétaitmorteetquececiétaitunesortederêveaprès lamort.Elleneressentaitaucunedouleuretn’opposaaucunerésistanceautoucherdélicatdeSilastandisqu’ilcoupaitlescordesàsespoignetsetàseschevilles.—FaitessortirEvangelined’ici!aboyaDrakesansregarderdanssadirection.Assurez-vousqu’elle
vabienetfaites-lasoigner.Cesalaudestàmoi.Sesmots firent frissonnerEvangeline, qui regarda froidementDrake fondre sur l’hommequi l’avait
enlevée. Puis des bras familiers la soulevèrent et elle ferma les yeux, pour faire blocage à l’horribleréalitédanslaquelleDrakepouvaitmourir.Elles’assoupit,seretranchantdansunlieuoùellenepouvaitplusressentirnidouleurnichagrin.Rien.Elleaccueillitl’oubliàbrasouvertsets’abandonnaauvidequil’enveloppaitdesonapaisanteétreinte.Evangeline dans ses bras, Silas quitta rapidement la pièce, flanqué de Maddox et Justice, qui la
dévisageaient,l’airinquiet.—RestezavecDrake,ordonnaSilas.Couvrez-le.Surveillez sesarrières.Assurez-vousqu’il est en
sécuritéàtoutmoment.— Je reste avec toi, répliquaMaddox, têtu. Avec l’aide des hommes de Luconi, nous avons déjà
éliminétoutemenace.IlnerestequeMcDuff,etDrakeaétéclair:McDuffestàlui.SilasportaEvangelinejusqu’àlavoiturequilesattendaitetseglissasurlesiègearrière.Elleavaitles
yeuxfermés,sansqu’ilsachesic’étaitpourseprotégerouparcequ’elleétaitinconsciente.Ill’examinaattentivement,àlarecherched’uneblessure,maisilnevitquelesangséchésursatempe,
lamarquededoigtssursonvisage,etlesangquiavaitcoulédesonnezetdesabouchequandcepetitcon l’avait frappée.La rage s’emparade lui, il avait presqueenviededésobéir àDrake et d’aller sevengerdeMcDufflui-même.C’étaitluiquiauraitdûs’enoccuper.PasDrake.C’étaitSilas,sonnettoyeur.Sonhommedemain.Son
seul devoir était de protégerDrake et de s’assurer que riennevenaitmenacer ses intérêts ni le vasteempire qu’il partageait avec ses frères. C’était lui qui lançait les menaces. C’était son rôle. Etaujourd’hui,plusquejamais,c’étaituneaffairepersonnelle,alorsquesatâcheavaitsisouventétéfroideetimpersonnelle.Justeunboulot.Riendeplus.Unmalnécessaire.Mais…Evangelineavaitdavantagebesoindeluidansl’immédiat.Etsielleavaitétésienne,luiaussi
auraitvouludescendrelui-mêmel’hommequil’avaitterrorisée,menacée,frappée.—Emmenez-nousàlacliniquedeDrake,ordonnaSilasauchauffeur.Drakejaugeaduregardl’hommepathétiquequ’iltenaitparlecol.LevisagedeMcDuffétaitenflé,en
sang, et il savait qu’il allaitmourir, cela se voyait dans ses yeux. Il neméritait pas unemort rapide,clémente.Non,ilméritaitdesouffrir,deconnaîtrelesortquil’attendait.Malgrétout,Draken’enavaitnile temps ni l’envie. Sa seule priorité était de venger Evangeline avant de la retrouver le plus vitepossible.Ilavaitétésiaveuglépar larageetsondésirdefairepayersonbourreauqu’ilavaitocculté tout le
reste. Il le regrettaitàprésent,carc’était luiquiauraitdûemmenerEvangeline loind’ici, laconsoler,subvenir à sesbesoins, pasunde seshommes.Considérerait-elle cela commeunnouveau rejet ?Unenouvellepreuvequ’ellen’étaitrienpourlui?—Parpitié,bredouillaMcDuff.Jeferain’importequoi.Nemetuezpas.—C’estçaquemananat’adit?Ellet’asuppliédenepaslestuer,elleetsonenfant?LesyeuxdeMcDuffseremplirentd’horreur,etcelâchesemitàpleurer.L’odeurâcredel’ammoniac
s’élevasoudain,etDrakeetseshommesconsidérèrentMcDuffavecdégoût.Ilétaitentraindesepisserdessus.— Je ne savais pas qu’elle était enceinte ! hurlaMcDuff. Je vous le jure. Je ne savais pas ! Je ne
voulaispasluifairedemal.—Ahoui?demandaDraked’untonimplacable.Tunel’aspasfrappéeenpleinetêtequandtul’as
enlevéedanslarue?Jenet’aipasvulagifler?McDuffpleuraitetbredouillaitpourdebonmaintenant,etDrakeavaitbeauavoirenviedeprolonger
l’agoniedecemoins-que-rien,ilvoulaitàtoutprixretrouverEvangelinepours’assurerqu’elle–etleurenfant–allaitbien.En un tournemain, ce fut terminé.McDuff s’avachit, et Drake le laissa tomber au sol, avant de se
retourneraussitôtpouraboyerdesordresàseshommes.IltrouvaJusticeetl’interrogead’unhaussementdesourcils.—SilasetMaddoxl’ontemmenéeàlaclinique.Valaretrouver,Drake.Nousallonssécuriserlazone
etnettoyerleslieux.Zander l’attendait dehors pour le conduire àEvangeline,maisDrake tendit lesmains pour qu’il lui
donnelesclésdevoiture.—TurestesicipoursuperviserlenettoyageavecJustice.Jeconduis.ZanderpenchalatêtesurlecôtéetdévisageaDrakeuninstant.—Tuesenétatdeconduire,mec?Tuaseuunedurejournée.—Pasautantqu’elle,rétorqua-t-il.Donne-moicesputainsdeclés.Zanderlesluidonnasansautrecommentaire.Cependant, alors qu’il s’apprêtait àmonter dans la voiture,Drake fut stoppénet par la question de
Zander.—Tuescontent?Personnen’aposélaquestion.Maistuescontentpourlebébé?Ilyavaitunavertissement tacitedanslaquestiondeZander :siDrakelaissaitentendrequ’iln’était
pasheureuxqu’Evangelinesoitenceinte, seshommesseproposeraientpours’occuperd’elleetdesonenfant.Ilfaudraitluipassersurlecorps.—Jesuisplusheureuxquetunepourraisl’imaginer,ditDraked’untonégal.Maismapriorité,c’est
Evangeline, et m’assurer qu’elle n’est pas blessée. J’espère de tout mon cœur qu’elle pardonneral’impardonnable.Zandergrimaçaethochalatête.—C’estunefemmebien,Drake.Lameilleure.—Oui,jesais.Àlaclinique,DraketrouvaMaddoxetSilasentraindefairelescentpasdevantlasalled’examen.En
levoyant,ilssefigèrenttouslesdeux.—Commentva-t-elle?s’enquitDrake.Lapeuretl’inquiétudepulsaientdanssesveines.Silashaussalesépaules.—Onne saitpas encore.Elle est restée inconsciente tout le trajet.Elle aouvert lesyeuxquand le
docteurestarrivé,maisc’étaitcommesi…jesaispas,mec.Elleétait làmaisellen’étaitpas là.Ellen’étaitpasconscientedecequil’entourait.Siellesavaitquinousétions,ellenel’apasmontré.Ellen’apasditunmotdepuisquenousavonsquittélaboucheriepourl’amenerici.—Bonsang,pestaDrakeenmettantsonpoingcontrelemur.Voussavezsilebébévabien?—Non,désolé,réponditMaddoxàvoixbasse.Nousavonsprévenulemédecin,etiladitqu’ilferait
uneprisedesangpourvérifierson tauxdeHCGpourconfirmersielleestbienenceinte,commenousn’avonsqu’untestdegrossesseachetéenpharmacieàmoitiéeffacé.Drakesefigea.Celaneluiétaitpasvenuàl’espritqu’ellepuissenepasêtreenceinte.Dèsqu’ilavait
vu le test, l’enfant était devenu bien réel pour lui. L’idée de perdreEvangeline ou leur bébé lui étaitinsupportable.Sielleperdaitleurenfant,elleneluipardonneraitjamais.Elleneluipardonneraitpeut-êtrejamais,qu’ilyaitunbébéoupas,etquipouvaitleluireprocher?
—Depuiscombiendetempsest-ellerevenueàelle?ditDraked’unepetitevoix.Ilfautquejelavoie.— Je ne vois pas pourquoi tu ne pourrais pas entrer, commenta Silas. Maddox et moi voulions
seulementluilaisserautantd’intimitéquepossible.N’en demandant pas davantage, Drake ouvrit la porte et s’arrêta net en voyant le visage livide
d’Evangeline.Elleétaitallongéesurunlit,barrièresrelevées,couverted’undrapléger.Elleportaitunebloused’hôpitaletavaitlespaupièrescloses.Lemédecinsetenaitprèsdulit,oùilconsultaitdesrésultatsd’analyse.IllevalatêteenvoyantDrake.—Commentva-t-elle?—Ça ira, l’apaisa lemédecin. Elle a juste été un peu amochée. Elle va avoir un bonmal de tête
pendantquelquesjours,maisàpartça,toutvabien.—Lebébé?s’enquitDrake,lapeurauventre.Lemédecinsourit.—Les résultats d’analyse sont normaux. Son taux deHCGest normal pour une femme à six à huit
semaines de grossesse. Elle ne s’est pas encore réveillée pour que je puisse la questionner sur sonderniercyclemenstruel,maisjepensequelagrossessen’estpastrèsavancée.La tension qui contractait lesmuscles deDrake s’apaisa quelque peu et ses épaules s’affaissèrent,
soulagéqu’ilétaitdesavoirqu’Evangelineetleurenfantallaients’ensortir.—Jepeuxlarameneràlamaison?Lemédecinfronçalessourcils.—Sonétatd’inconscienceprolongéeestinquiétant,maisvulescirconstances,iln’estpassurprenant.
Elleasubiuneexpériencetraumatique,etparfoisnotrecerveauagitpournousprotéger.Jenem’opposepasàcequevouslarameniezàlamaison,puisquevousn’aurezqu’àlafairemonteraudernierétagedel’immeuble;cependant,jevoudraisvenirl’examineraumoinsunefoisparjour,etappelez-moisivousavezdesquestionsoudesinquiétudesconcernantsonétat.Jeveuxêtreprévenusur-le-champsisonétatdesantéévolue.Pattyvousdonneraunelistedesignesàguetter,etsiellemontreundessymptômesdelaliste,vousdevrezimmédiatementlaramenericioul’emmeneràl’hôpitalleplusproche.—Merci,ditDrakesincèrement. Jevaisprendre soind’elleetm’assurerqu’elle se repose jusqu’à
êtrecomplètementrétablie.Lemédecinsourit.—Jen’endoutepas.Et,Drake?Félicitations.Vousferezunexcellentpère.ÀlagrandesurprisedeDrake,quandilseretournaversEvangeline,elleavaitlesyeuxouverts,rivés
surleplafondau-dessusd’elle.Ilseprécipitaàsonchevetetentrelaçasesdoigtsauxsiens.—Ange?Bébé,jesuislà.Tuesensécuritémaintenant.Vousêtestouslesdeuxensécurité.Plusrien
nepeuttefairedemal.Ledocteurditquetupeuxrentreràlamaisonavecmoi.Tuveuxbien?Maisellenefitpasmined’avoirentenduunseulmot.Commesiellenel’avaitmêmepasremarqué.
Son regard fixeétait sidistantqueDrakeeutunmauvaispressentiment. Il jetaun regarddésespéréaumédecin,quigrimaçaavantdevérifierlessignesvitauxd’Evangeline.BonDieu, était-ce sa faute ?Drake était-il responsable ?Elle n’était plus qu’une coquille vide. Si
fragile,àdeuxdoigtsdesebriser.Oupeut-êtrequ’elles’étaitdéjàbrisée,etqu’ilnecontemplaitquecequ’ilrestaitdesoncorpsmorcelé.Illapritdanssesbras,lesyeuxfermés,etpressaseslèvrescontresachevelure.—Reviens-moi,Ange,supplia-t-il.Reviensàlamaison.Toutvabien.Nemequittepas.Jet’aime.Je
suisdésolédenepastel’avoirdit,maisj’avaispeur.Tellementpeur.Maistum’asdonnéducourage.Tum’as rendu fort. Tum’as donné la force d’affronter le pire, car avec toi, je peux tout surmonter. Dumomentquetuesavecmoi,monamour.Dumomentquenoussommesensemble.
—Jeveuxrentreràlamaison,ditEvangelined’unepetitevoixéteinte.Chezmesparents.Drakesefigea,partagéentrejubilationqu’ellesoitéveilléeetaitretrouvél’usagedelaparole,etle
désespoirqueluiinspiraientsesmots.Lagorgenouée,ilreculalentementpourvérifierqu’elleétaitbienconsciente.Sesyeuxétaientternes,
sanscetétincellementquiladéfinissait.Sonvisageétaitneutre,inexpressif.Elleauraittoutaussibienpuêtreentraindediscuterdelamétéo:ellen’avaitaucuneémotion,nicolère,nipassion,nicouleursursesjoues.—Ange, je t’enprie, dit-il d’unevoix rauque.Laisse-moi une chancede t’expliquer. Il y a tant de
chosespourlesquellesjedoistedemanderpardon,tantdechosesquejedoisrectifier.Jet’enprie,rentreàlamaisonavecmoi.Laisse-moim’occuperdetoietlaisse-moit’expliquer,m’excuser.Jesaisquejeneméritepastadouceur,talumière,tonamour,maisAnge,jet’ensupplie.Donne-moiunedernièrechance.Jetejurequetuneleregretteraspascettefois.Àl’apathiesuccédalapaniquesursonvisage.Ellecommençaàsedébattre,jusqu’àcequ’illalâche
enfin.—Jeveuxrentrerchezmoi,répéta-t-elle,toujourssurlemêmeton.Éteintetterne.Commesesyeux.Sonlangagecorporel.Sonexpression.Ellecherchalemédecinduregard,lesuppliantdelasoutenir.«Ausecours.»Ilfallaitêtredemarbre
pournepasréagiraudésespoirquiselisaitdanssesyeux.MaislemédecingardalesilenceetdévisageaEvangeline,lessourcilslégèrementfroncés.Drakefermalesyeux,essayantenvainderavalerlenœudquimenaçaitdeluivolersonsouffle.Ilétait
auborddeslarmesetclignafurieusementdesyeux,refusantdecraquer.Sijamaisilrenonçaitaucontrôledesonsang-froid,ils’effondreraitetsebriseraitenmillemorceaux.—Ange,murmura-t-il. Rentre à lamaison avecmoi. Chez nous.Accorde-moi ça aujourd’hui et je
n’exigeraijamaisplusriendetoi.Parpitié,laisse-moimeracheter.Jenepeuxpasvivresanstoi.Jeneveuxpasvivresanstoi.Sanstoi…Ilsetut,refusantd’exprimerlaréalitédecequ’ilétait,ouplutôtn’étaitpas,sanselle.Ilnepouvait
imaginersaviesanselle.Ilaimaittoutchezelle.Ilaimaitlechaosqu’elleavaitsemédanssaroutinesiorganisée. Il était si facile de l’aimer, impossible de ne pas l’aimer. Tous ceux qu’elle rencontraittombaientsoussoncharme,grâceàquelquessouriresinnocentsetquelquesmotsgentils.Siseulementilavaitprisconsciencedesonamourpourelleplustôt.Siseulementilluiavaitaccordésaconfianceaussifacilement.Oh,cen’étaitpascommes’ilvenaittoutjustedetomberamoureuxd’elle.Seulement,ilavaitbêtement
refuséd’admettrelavérité:qu’ilétaittombééperdumentamoureuxd’elleàlasecondeoùceravissantangeblondauxyeuxbleusétaitentréd’unpashésitantdanssonclub.Sonsortavaitétéscellélorsdeleurpremierbaiser.Ungestepossessif,symbolique.Etilavaitencoreetencoregâchécequ’ilavaitdeplusbeaudanssavie.—Sanstoi,jenesuispasentier,dit-ilpéniblement.—Jeveuxrentreràlamaison.Mamanm’attend.Elles’agitapourlapremièrefois,sesyeuxetsavoixtrahissantsapaniqueetsondésespoir.Sesdoigts
se tordaient sur le drap fin qui couvrait ses jambes, son émoi émanant d’elle par vagues presquetangibles. Il sentaitsadétresse,soncorps toutentier tremblait, lesombressemêlantauxbleussursonvisagelarendaientsivulnérable,terrifiéeet…abattue.Celalerendaitfurieux.Sonange,abattue?C’étaitunetigresse,quidansl’immédiatressemblaitàun
chaton maltraité, recroquevillée sur le lit, se faisant toute petite, restant loin de lui comme s’il étaitresponsabledesamaltraitance.
Maisn’était-cepaslavérité?Ilavaitenviedevomir.Ilavaitenviedetaperdanslesmurs.Ilavaitenviedepleurerpourtoutcequ’il
avaitfait–ettoutcequiluiglissaitentrelesdoigts.Lemédecinl’avertitd’unregard,sepenchaendirectiond’Evangeline,puissecoualatête.Lemessage
étaitclair.Laissez-la.Elleestfragile.Nelapoussezpas.Laissez-luiletempsdeguérir.Laissez-lapartir.—J’enverraimonrapportavecelle.Ilfautqu’ellesefasseexaminerlà-basdèsquepossible,déclara
lemédecinàvoixbasse.Detouteévidence,lemédecinpensaitqu’ilvalaitmieuxnepasforcerlajeunefemme.Celapourrait
luifaireperdrelepeudecontrôlequiluirestait,etauquelelles’accrochaitcommeàunebouée.Iln’avaitpasbesoindeledire.Celaselisaitsursonvisage.Pris depanique,Drake semit à trembler de tout son corps.La laisser partir ?Cela lui briserait le
cœur,maisc’étaitunchâtimentmérité.C’étaitluiquil’avaitconduiteici.Ellenelefuyaitpas.C’étaitluiquil’avaitrepousséesanshésitationniremords–surlemoment.Ilregrettaittellement.Maisilétaittroptard.Ilavaiteuleplusprécieuxcadeauquelaviepuisseoffrir–leplusbeaucadeaudesavie–etill’avaitcruellementrejeté.Ill’avaitrejetéeetavaitrejetétoutcequ’elleluiavaitdonné,sansjamaisriendemanderenretour.Sauf…laseulechosequ’iln’avaitpasétéprêtàoffrir.Saconfiance.Safoiabsolueenelle.Cettefoi
indéfectibleetinconditionnellequ’elleavaitenlui.Ilétaitlepiredesmonstres.Commesonpèreetsamère.Ilnes’étaitpasélevéau-dessusdesonpassé.Ilenétaitdevenul’incarnation.Evangelineregardafrénétiquementautourd’elle,leslarmesauxyeux,audésespoir.Drakecaressatendrementsescheveuxemmêlés.Puisilsepencha,incapablederésisteràl’enviede
poser ses lèvres contre sa chevelure d’or. C’était une bénédiction. Un geste de regret. De chagrin.D’excuses.Etd’amour.Unamoursifortarrivétroptard.Ilneluiavaitpasdonnécedontelleavaiteuleplusbesoin.Saconfiance,safoi,sonamour.Maisaumoinspouvait-illuidonnerceci.—Jevais te ramenerchez toi,Ange.Ne t’inquiètepas.Jevaism’occuperde tout.Repose-toietne
pensequ’àteremettred’aplombetàoubliertoutça.Oh,bonsang,faitesqu’ellenem’oubliepas,moi.Il refusait d’y songer, d’imaginer sa vie sans sa lumière pour bannir les ombres qui peuplaient les
tréfondsdesonâmedepuistroplongtemps.D’unecertainemanière,ilnesavaitcomment,elledevaitluirevenir.Ilrefusaitdeconsidérertouteautreoption.Sinon,ils’effondreraitpourdebon.Elle sedétenditunpeu,mêmesiuncertain troubleassombrissait encore son regard.Commesi elle
doutaitqu’illuidiselavérité.Maiscommentleluireprocher,alorsqu’ils’étaitmontrésiimpitoyable?Sentantqu’ilsombraitpetitàpetit,illapritdanssesbras,laserranttendrementcontresoncœur–qui
lui appartenait. Il était à elle. Il enfouit son visage dans ses cheveux,mouillant quelquesmèches deslarmesquicoulaientsurlestraitstorturésdesonvisage.Ilpleuraitensilence,camouflantsonchagrinetsondésarroidanssacheveluresoyeuse.Ange,monamour.Telaisserpartirestlachoselaplusdurequ’ilm’aitétédonnédevivre.Oùquetu
ailles, prendsmon cœur.Mon âme. Tout enmoi. Je serai toujours avec toi. Tu hanterasmes rêveschaquenuit, chaqueheurede la journée,et jepriepourqu’un jour tu reviennes làoùest taplace.Auprèsdemoi.D’icilà,jeneseraijamaisentier.Tuesmamoitié.Lemeilleurenmoi.Laseulechosebienquej’aiejamaistouchée,aimée,serréecontremoncœur.Sanstoi,jesuisperdu.Pouvait-on vivre avec unemoitié de cœur et une âme brisée, ternie par une vie de péchés ? Elle
méritaittellementplusquecequ’illuiavaitdonné.Elleméritaitplusquel’hommequ’ilétait.Etpourtant,ellel’avaitchoisi,etill’avaitcruellementtrahie.Infinimenttriste,ilcontemplaEvangeline,quipendait
mollementdanssesbras.Cen’étaitpasvrai.Onn’avaitpasbesoind’uncœurpourvivre,carlesienluiavait été arraché le jour où Evangeline était entrée dans sa vie et le lui avait volé. Jamais il ne lerécupérerait, jamais il ne se sentirait vraiment vivant, jusqu’à ce que – àmoins que –Evangeline luirevienne.Soncœurvivaitenelle,faisaitpartied’elle,depuisquelquesmois,et ilnevoulaitpaslerécupérer.
Pasàmoinsqu’ilvienneavecelle.
Chapitre33
Evangeline regarda le paysage sans le voir alors que l’avion atterrissait dans le petit aéroportmunicipal qui se trouvait à une demi-heure seulement de sa ville natale. De l’autre côté de l’allée,MaddoxétaitassisfaceàSilasetl’observaitensilence,l’airsoucieux.Ilenétaitainsidepuisqu’ilsavaientdécollédeNewYork,maiselleavaitrefusédecroisersonregard
detoutletrajet,préférantfairesemblantdedormirouregarderparlehublot.Néanmoins,ellevoyaitlesdeux hommes du coin de l’œil, et ils n’avaient pas l’air content. Non, ils étaient même absolumentfurieux.Celaauraitpul’agacer;aprèstout,pourquoiétaient-ilsfurieux?Pourautant,laréelleinquiétudequi
selisaitdansleursyeuxétaitplusforteencorequelacolèrequetrahissaientleursmâchoirescontractées.Ils se relayaientpour la surveiller, lamettantmalà l’aise.À laseule forcedesavolonté,elleétait
parvenueàresterstoïqueetenapparenceinconscientedeleursregardsinsistants.Ellesavaitqu’ilsétaientencolèrecontreDrake,etcelaauraitdûluiréchaufferlecœurdesavoirque
leurfoienelleétaitsiinébranlable.Maiselleneressentaitqu’unetristesseaccablanteàl’idéequeceshommes aient en elle une confiance absolue et n’aient pas douté d’elle une seconde, alors queDrake,l’homme qu’elle aimait, l’homme dont elle pensait qu’il l’aimaitmême s’il n’avait pas prononcé cesmots,l’hommeavecquielleavaitprévudepassersavieetd’avoirdesenfants,l’avaitjugéeenunéclairavantdelamettredehors.Avecunefureurfroide,unregardglacialetimpénétrablequinelavoyaitpas.Non,ill’avaitexcluedesaviesanshésiter.Ellebaissalesyeuxsursonventreplat,oùson–leur–enfantétaitniché,sansquesaprésencesevoie
encore,etellefermalesyeux.Aumoinsunepartiedesonrêveperdurerait.Elleporteraitsonenfant,unseul,etn’auraitriend’autredelui.Ellen’auraitpassonamour.Enfin,ellen’avaitjamaiseusonamour.Seulementl’idéefollequ’ill’aimaitmaisétaittropdominant,tropstoïque,tropréservépourleluidire.Elleavaitpenséqu’illuiavaitprouvésonamourdetouteslesmanièresquicomptaient,etparcequ’elleavaitcruqu’ill’aimait,lesmotsn’avaientpasétéimportantsàsesyeux.Seulscomptaientsesactes.Maistoutcelan’avaitétéqu’unrêve,etellenepouvaits’enprendrequ’àelle-mêmedes’êtreimmergéedansunmondeimaginaire,d’avoirignoréladureréalité,denepasavoirvulavéritéavantqu’ilnesoittroptardpoursepréserverd’unanéantissementtotal.Ellesoupiradesoulagementquandl’avionsedirigeaverslepetitbâtimentoùsesparentsl’attendaient
pourlarameneràlamaison.Pourvuqu’elletiennelecoup,aumoinsjusqu’àcequeSilasetMaddoxluiaient dit au revoir et soient remontés dans l’avion pour rentrer à New York. Alors seulement, elles’autoriseraitàpleurerdanslesbrasdesamère.Ellenes’humilieraitpasdavantageencraquantdevantleshommesdeDrake.Safiertéavaitdéjàétéirrémédiablementabîméequandelles’étaitmiseàgenouxdevantlui,devantseshommes,pourlesupplierdelacroire,del’écouter.Elleavaittantsupplié,maissessuppliquesétaienttombéesdansl’oreilled’unsourd.C’étaitcommesielleparlaitàunestatuedepierre,cequeDrakeétaitdevenuàl’instantoùlepolicierl’avaitfaussementdénoncée.Elleavaitleslarmesauxyeuxmaisserralesdents,refusantdecraquerdevantSilasetMaddox.—Evangeline,ditMaddoxàvoixbasse,maussade.Elletournalatête,sonregardpassantbrièvementsursonvisageavantdefixerunpointau-dessusde
sonépaule.
—Noussommesarrivés,mabelle.Tesparentst’attendentdehors.Lorsqu’ellevoulutselever,Silasapparut,etenroulasamainsoussoncoudepourl’aideràselever.
Maddoxetluil’aidèrentàdescendrel’escalierquiavaitétéapposécontrelaportedel’avion.Sesparentsne se tenaientqu’àquelquesmètresde là,maisMaddox leur fit signede leur laisser, à
Evangeline,Silasetlui,quelquesinstants.Sonpèrehochalatêtedepuissonfauteuilroulant,leslèvrespincéesalorsqu’ilinspectaitl’apparencedesafille.Ellesavaitqu’elleétaitenpiteuxétat,maispourquoimentiretmasquerlessignesdesonabattement?
Elleauraitde toute façon ruinésonmaquillageet sacoiffureen fondanten larmesdans lesbrasdesamère.Maddoxpritunedesesmainsdanslessiennes,etpoussaunsoupirtriste,cequilasurprit.—Evangeline,regarde-moi,dit-ildoucement.Ellefermalesyeux,auborddeslarmes.Ohnon.Ellenepouvaitpasfaireça.—Bébé,regarde-moi,s’ilteplaît?Tunepeuxmêmepasmeregarder?Es-tudoncsiencolèrecontre
nousaussi?Sesparolestrahissaientpeineetregrets,expriméssurletondel’excuse.Elleouvritlesyeuxettrouva
aussitôtsonregard.—Non!s’écria-t-elle.EllesetournaversSilaspourvoirsiluiaussipensaitqu’elleétaitencolèrecontrelui.Sonexpression
était indéchiffrable. À l’exception… de ses yeux. Ils semblaient affligés. À vif. À nu. Lui qui étaittoujourssiimpénétrable…Ellen’enrevenaitpas.—C’estdifficile,s’étranglaEvangelineenserrantlamaindeMaddox.—Jesais,chuchota-t-il.Viensmefaireuncâlin.Tesparentsonthâtedeteretrouverettamèreveutte
chouchouter.Evangelinese jetadans lesbrasdeMaddox,etmalgrésonsermentdenepaspleurer,elleversade
chaudeslarmesdanslesbrasdeMaddox.— Silas et toi êtesmes amis les plus chers,murmura-t-elle. Je ne vous oublierai jamais, ni votre
gentillesse.Etvotresoutien.C’esttoutpourmoi.Maddoxdéposaunbaiseraffectueuxsurlesommetdesoncrâneetrecula.Puisilpassasondoigtsur
sajouehumide,etécartaunemèchedecheveuxmouilléedesonvisage.—Tuesunefemmeremarquable,Evangeline.Jesuisheureuxdet’avoirconnue.Elleluiadressaunsourirefébrileavantqu’ilnelapousseendirectiondeSilas.—Ilyaquelqu’und’autrequivoudraittedireaurevoir,luisoufflaMaddox.Evangelineavançapasàpas,hésitante.PuisSilasécarta lesbrasetellese jetacontre lui.Sesbras
l’enserrèrentcommeunétau,tremblants.—Tuvastellementmemanquer,s’étrangla-t-elle.—Tuvasmemanquer,poupée,dit-il,lavoixserréeparl’émotion.Prendssoindetoietdupetit.Puisils’écartaetluisoulevalementonpourqu’elleleregardedanslesyeux.— Si jamais tu as besoin de quelque chose, si tu veux entendre la voix d’un ami ou que tu as
simplementbesoindeparler,tuasmonnuméro.Compris?Ellehochalatête,incapablederetenirleslarmesquiruisselaientsursonvisage.Ellebaissalesyeux
etl’éclatdelabagueendiamantqueDrakeluiavaitdonnéeaccrochasonregardavantdedevenirfloucommeleslarmesinondaientsesyeux.Sa bague de fiançailles. Le dernier objet qui la liait à Drake. Elle l’avait complètement oubliée.
Lentement,elle laretiradesondoigt.Ellen’enavaitpasbesoin.Elleavaitsonbébé,etc’était leseulsouvenirdeDrakedontelleavaitbesoin.
ElletenditlabagueàSilas,etluiditd’unevoixbrisée:—RendsçaàDrakepourmoi,s’ilteplaît.—Unmessage?demanda-t-ilavecdouceur.Ellesecoualatête.—Iln’yarienàdire,dit-elleavectristesse.—Prendssoindetoi,poupée.Maddoxetmoinesommesqu’àuncoupdefild’ici.Souviens-t’en.Elles’efforçadesouriretantbienquemal,maissoncœursebrisaitenmillemorceaux.—Maddoxettoiferiezmieuxdeprendresoindevous,sermonna-t-elle.EtdeDrake.Prenezsoinde
luiaussi.C’étaitdouloureuxdeprononcersonnom.Commeuncoupquiluifaisaitperdrel’équilibre.Maddox
passasamainsoussonbrasetlacalasoussonépaule.—Allez,mabelle.Tesparentst’attendent.Bienqu’ellesesoitjurédenepass’effondreravantqueMaddoxetSilassoientpartis,elleéclataen
sanglotsàl’instantoùsamèretenditlesbrasverselle.
Chapitre34
Evangelinecontemplalacuisinedesamèreavecrépugnance.Onauraitditqu’unetempêteétaitpasséeparlà.Casseroles,poêles,saladiers,paquetsouverts,cartonsetsachetsvidesétaientéparpillésunpeupartout.Unboutduplandetravailétaitcouvertdefarineetlaplaquedecuissonavaitbienbesoind’êtrerécurée.Elleavaithâtedes’ymettre.Riendemieuxpoursedébarrasserdelafrustrationaccumuléequedes’attaqueràdescouchesdegraisseetderestesdenourriture.Un peu perplexe, son père avait fait remarquer qu’elle avait suffisamment cuisiné pour faire des
réserves pour l’invasion des zombies. Et il n’avait pas tort. Elle avait cuisiné, stocké, et congelésuffisammentderepaspourqu’ilstiennenttoutleprintempsetunepartiedel’été.Avecunsoupir,elledécidaqueçasuffisait. Ilyavaitune limiteàcequ’ellepouvaitcuisineravant
d’arriverauboutdesprovisionsqu’elleavaitachetéesàpeinequelquesjoursauparavant.Elles’assitsurletabouretàl’îlotpoursereposeruninstantetpassamachinalementsamainsursonventreencoreplat.Comme elle s’y attendait, enmême temps que l’élan d’amour et de joie qu’elle ressentait toujours
quand elle pensait à son bébé vint une vague de chagrin si puissante que si elle n’avait pas été déjàassise,elleseseraitécrouléedanslachaiselaplusproche.Celafaisaitunmois.Unmois!Elleavait l’impressionquec’étaithier.Ellenedormaitpas.Etbien
qu’elle ait passé ces quatre dernières semaines à cuisiner comme une obsédée, elle ne supportait pasl’idéedeconsommerunseuldesesplats.Et chaque jour, sa conscience était tourmentée. Il fallait qu’elle dise àDrake qu’elle était enceinte.
Touts’étaitdéroulésivite.Elleavaitétépersuadéequ’elleallaitmourir,et,uneminuteaprès,Drakeetses hommes étaient apparus comme des anges vengeurs et… ? La suite était floue. Il y avait eu unmédecin.Drakequi luiparlait, lesyeuxnoirsde…quoi,aujuste?Elle tentadeserappeler,mais toutétaitconfus.Illuiavaitparléavecsérieuxetpassion,maislesimplefaitdeleregarderluiavaittranspercélecœur,
etlaseulechosesurlaquelleelleavaitpuseconcentrer,lesseulsmotsqu’elleavaitpuprononcer,c’étaitqu’ellevoulaitrentrerchezelle.Oùelleseraitensécurité.Pouréchapperàladouleur.C’étaitstupide.Commesiellepourraitunjouréchapperàladouleurd’avoirperduDrake.Néanmoins,
elledevaitluidirequ’ilallaitêtrepère.Quoiqu’ilpensed’elle,mêmes’ilnel’aimaitpas,ilméritaitdelesavoir,etellen’étaitpassivindicativequ’elletentedel’empêcherdevoirsonenfant.Cequ’ilferaitdecettenouvelledépendaitdelui,maiselleluidirait.Celaletoucherait-ilseulement?Croirait-ilquec’étaitbienlui,lepère?Ilavaitsipeuconfianceen
ellequ’iln’étaitpasinvraisemblabledepenserqu’ilnieraitquec’étaitsonenfant.Ilyavaitdestestsdepaternité,biensûr,maiselleneleforceraitpasàacceptersonenfant.S’ilnevoulaitrienavoiràfaireaveceux,ellerefusaitdeluiimposerunenfantqu’ilnedésireraitpas.JamaisellenelaisseraitsonbébéconnaîtrelamêmeenfancequeDrake.Délaissé.Nondésiré.Peut-êtreaprèssonrendez-vouschezlemédecin.Soncœurbonditdanssapoitrineàl’idéed’allervoir
l’obstétricienquesamèreavait trouvé.Etsielleavait imaginé le testdegrossessepositif?Etsielleavaitsidésespérémentvouluêtreenceintequ’elleaitrefouléunrésultatnégatif?Non.Quandelleétaitrentrée, elle était allée faire des examens rapides chez le médecin de famille, qui avait confirmé sagrossesse mais lui avait conseillé de prendre rendez-vous avec un gynécologue-obstétricien. Et le
spécialisten’avaitpaseuderendez-vouslibreavantcettedate.Aprèslerendez-vous,elleprendraitdesdécisionsfermesconcernantsonaveniraulieuderesterdans
leflou.Ellegrimaça:toutecettesituationn’étaitpasjustepoursesparents.Samère la surveillait et s’inquiétait.Elle rôdait, anxieuse, veillant sur elle à tourde rôle avec son
père.Maisilsnelapoussaientpas,nelapressaientpas,et,plusimportantencore,samèreneparlaitninesecomportaitaveccondescendanceenversEvangeline.Elleneluidonnaitpasdepetitetapesurlatêteenluidisantquetoutiraitbien,queletempsguérissaittout,etelleneluirebattaitpaslesoreillesavecd’autresclichéssurlechagrind’amour.ElledittrèshonnêtementàEvangelinequebiensûr,ellesouffrait,etbiensûr,elleétaitdévastée.Elle
aimaitDrakeetl’amournedisparaissaitpascommeça,enuneheure,unjour,unesemaineouunmois.Ceseraitunprocessuslentet toutcequ’ellepouvaitfaire,c’étaityallerunjouraprèsl’autresansjamaisregarderplusloinniseforceràoublierunhommequ’elleaimaitdetoutsoncœuretdetoutesonâme.Elleadoraitsamèreetsasagesseinfinie.Unesagessequeseuleunemèrepossède,glanéependantdes
annéesd’expérienceetaffûtéeparl’amourqu’elleressentpourl’enfantqu’elleaportépendantneufmois,puisnourripendantsesannéesd’apprentissage.Peuimportaitqu’Evangelinesoituneadulte.Onn’étaitjamaistropgrandpouravoirbesoindesamaman.SamèreavaitcalmementditàEvangelinequ’elleavaitbesoindetempspourfairesondeuil.Quede
biendesmanières,c’étaitlamêmechosequelamortd’unêtrecher,maisenpire,carcettepersonneétaitencorevivante,quelquepart,maisonnepouvait la toucherqu’avec lesyeux.Au figuré.Avec lamortvenait l’irrévocabilité. La conscience que vous aviez perdu cette personne pour toujours.Dans le casd’Evangeline,elleavaitbeauêtredévastéeetnepasvouloirrécupérerDrake,ellel’aimaitencore,illuimanquait, et au plus profond de son cœur, elle avait encore une faible lueur d’espoir que les chosess’arrangentetqu’ilspuissentseretrouver.Chaquejourpasséloindeluiétaitdoncunnouvelenfer.Evangelineétaitadmirativedevoirquesamèrelaconnaissaitsibien,combienelleétaitintuitive,car
elleavaitvutoutjuste.Oui,Evangelineavaitl’espoirsecret–etbiennaïf–que,parmiracle,Drakeetellevivraient heureux jusqu’à la finde leurs jours et que son enfant aurait sonpère.Et chaquematin,quand elle se réveillait seule dans un lit vide et queDrake luimanquait, elle enfouissait sa tête dansl’oreilleretpleurait.AgacéequeDrakeoccupetoutessespensées,etmalgréseseffortspourl’enbanniretsedistraireavec
desmarathonsencuisine–envain–,elleseleva,jetaletorchonsurlequelelles’étaitessuyélesmains,etattaqualeménage,aprèsavoirrangéledernierdesrepaspréparésdanslecongélateurdéjàsurchargé.Ellenettoya,frotta,astiquaetpassalaserpillièrejusqu’àcequelacuisinebrilledemillefeux.Quand
elleeutfini,elles’appuyauninstantcontrelebalaiet,d’unsouffle,chassaunemèchedecheveuxdesesyeuxpour inspecter son travail.Sesparents, commed’habitude, l’évitaientquandelle entraitdansunefrénésiegastronomique,sachantquec’étaitsamanièreàelled’affrontersonchagrin.Sansgranderéussite.—Jepeuxentrer?demandasamèredepuislaporte.Evangelinetournasurelle-même,unsourireauthentiqueauxlèvres.—Maparole,tun’aspaschômé!Evangelinevidal’eausaledansl’évieravantd’étendrelaserpillièresousleporchedederrièrepour
la faire sécher.Quand elle revint, elle alla tout droit vers samère et la serra dans ses bras. Samèrel’étreignit,mais,lorsqu’elles’écarta,ellesemblaitperplexe.—Evangeline,qu’est-cequinevapas,chérie?Evangelinesourit,malgréleslarmesquibrillaientdéjàdanssesyeux.—Rien.Jevoulaisjustequetusachesquejet’aimeetquejesuisinfinimentreconnaissantedevous
avoir,papaettoi.Jenesaispascommentj’auraisfaitsansvous.Lesyeuxdesamèreseradoucirentetsonvisages’illuminad’amouretdetendresse.—Oh,machérie,moiaussi,jet’aime.Jen’aimepastevoiraussimal.Iln’yariendeplusfrustrant
pourunparentquedevoirsonenfantsouffrirsansrienpouvoiryfaire.—Tuyfais,maman.Tasimpleprésencemeréconforte.Papaettoiavezétémerveilleux.Ellesoupiraetparcourutlacuisineàprésentimmaculéedesyeux.—Jepensequ’ilfautvraimentquejeterendetacuisine.Samèreéclataderire.—Jenesaispas.C’estplutôtagréabledesavoirqu’onn’apasbesoindecuisinerpourlessixmoisà
venir.Evangelineluiadressaunsouriretriste.—J’imaginequeçavautmieuxquelaméthodeclichépourseremettred’unchagrind’amour:manger
unkilodechocolatparjourenregardantdesfilmstristes.Samèrelevalesyeuxauciel.—Jet’ailaisséefairecequetuvoulaisdanslacuisineparcequeçanefaitdemalàpersonne,maisje
vais te mettre la fessée si tu prends de mauvaises habitudes. Aucun homme ne vaut ce niveaud’autodestruction.Etpuis,ilfautquetupensesàtonenfant,maintenant,dit-elleavecdouceurenattrapantlamaind’Evangeline,qu’elleserrapourlaréconforter.Ellesepritàimaginersonenfant.UnpetitgarçonquiressembleraittraitpourtraitàDrake.Unepetite
filleavecsescheveuxblondsetlesyeuxnoirsdesonpère.Ouunefilleauxcheveuxetauxyeuxnoirs.Elleseraitsibelle.— En parlant de ça, poursuivit sa mère comme si elle n’avait pas remarqué le silence soudain
d’Evangeline–orsamèrevoyaittoujourstout–,tuterappellesquetuasrendez-vouschezlemédecindemainà13heures?Commesiellepouvaitoublier.Celafaisaitunesemainequ’ellenepensaitqu’àça.Ellehochalatête.—Tuvienstoujoursavecmoi?Elleavaitbeauavoiressayédeledireavecdésinvolture,l’angoisseétaitperceptibledanssavoix.Sa
mèrelapritdanssesbras.—Jenemanqueraisçapourrienaumonde,machérie.Tuportesmonpetit-filsoumapetite-fille!J’ai
hâtedeconnaîtreletermeapproximatifpourquenouspuissionsnousorganiser.Etj’aidéjàcommencéàcoudrepourlebébé.Descouleursneutres,biensûr,avantdesavoircequec’est.Evangeline sourit, tout excitée. C’était la première fois depuis longtemps qu’elle éprouvait un
sentimentpositifaussigrisant.Ellevoulaitlegarderaucreuxd’elle-mêmeetnejamaislelâcher.—Oh, j’ai hâte ! Jen’arrivepas à savoir si jeveuxungarçonouune fille.Franchement, çam’est
égal!Jel’aimedéjàtellement,dit-elleavecpassion.J’aihâtederencontrermonbébéetdelatenirdansmesbras.Samèresourit,lesyeuxpétillantsdemalice.—Tuviensdedire«la».Espères-tusecrètementquec’estunefille?Evangelinerit.— Non. Franchement, je m’en fiche. J’alterne entre « il » et « elle » pour ne pas donner plus
d’importanceàl’unouàl’autre.—Brenda!Oùêtes-vousdonc,touteslesdeux?appelasonpèredepuislesalon.Samèreplaquasamaincontresabouche.—Oups!Jemesuistellementlaisséprendrequej’aicomplètementoubliépourquoij’étaisvenueici.
Tonpèrem’envoietekidnapper.Illanceunfilmetveutquenousleregardionstousensemble.Evangelinepassasonbrassousceluidesamèreetleserraavecaffection.—Alorsallonsnousasseoiravecpapapourluitenirunpeucompagnie.
Chapitre35
Evangelineneditpasunmotsurlecheminduretourducabinetmédical.Sielleavaitétéeuphoriquequandl’obstétricienavaitprescrituneéchographievaginalepourdéterminerletermeetqu’elleavaitvuetentendulebattementdecœurdesonbébé,latristesses’étaitemparéed’ellequandelleavaitquittélacliniqueavecsamère.LeschosesauraientétésidifférentessiDrakeetelleavaientencoreétéensemble.Surlepointdese
marier.Attendantunbébé.Ilseraitvenuaurendez-vousavecelleetilsauraientpartagélajoiedevoirleurenfantpour lapremière fois.Au lieudecela, elle étaitunedecesmèrescélibatairesquidoiventendurerleurgrossessesanslesoutiend’unpartenaire.Elleregardaaveuglémentparlafenêtre,leslarmesauxyeux.Ilétaittempsqu’ellearrêtedepleureret
qu’ellesereprenne.Qu’elleacceptelaréalité.Drakeétaitunfantasme.Unrêveimpossibleparcequ’ilnepouvaitpasluifaireconfiance,croireenelle,etellenepouvaitpasêtreavecunhommequiavaitsipeufoienelle.Sonbébéetelleméritaientmieux.Elle se frotta le ventre, encore émerveillée par les images sur l’écran à l’échographie. Il fallait se
réjouiretprofiter,etellerefusaitdelaisserDrakeDonovanluigâcherceplaisir.Unenfantétaitsourcedecélébration,etellerefusaitqu’unseuldoutesubsiste:cetenfantétaitaiméetelleledésiraitdetoutsoncœur.Samèresegaradansl’alléeetjetaunregardpresquenerveuxàEvangeline,quil’interrogeaduregard.
Pourquoisamèrelaregardait-elleainsi?Maissonexpressiondisparutaussivitequ’elleétaitvenue,etquandsamèreluisouritgaiement,Evangelinesedemandasiellen’avaitpastoutimaginé.—Allonsmontrerl’échographieàtonpère!Lecœurd’Evangelineseserraetelleplaqualesimagescontresapoitrine,lecœurbattant.Ellesourit
àsamèreetlesdeuxfemmessortirentdevoiture.Samèreentralapremièredanslamaisonet,àlagrandesurprised’Evangeline,ellealladroitdanssa
chambre,laissantsafilleplantéedansl’entrée,confuse.Ellesecoualatête,necomprenantpasl’attitudeétrange de samère, puis elle se dirigea vers le salon pour trouver son père et partager les dernièresnouvelles.Maislorsqu’elleentradanslesalon,elles’arrêtanet,souslechoc,leregardrivésurl’hommequise
tenaitàl’autreboutdelapièce,lesmainsdanslespoches,entraindecontemplerlejardinparlafenêtred’unairsongeur.Puisilseretournaetleursregardssecroisèrent.Drake.Son ventre se serra. Que faisait-il ici ? Elle retint son souffle : ses yeux d’ordinaire inexpressifs,
indéchiffrables, reflétaient une vulnérabilité à vif. Il semblait… tourmenté. Il avait le teint terne et onaurait dit qu’il n’avait pas dormi ni mangé depuis des semaines. Il avait l’apparence de ce qu’elleéprouvait.Quefaisait-ilici?Elle ouvrit la bouche pour parler,mais elle en était incapable. Elle se retrouva donc à le fixer du
regard,bouchebée,lecœurenlambeaux.—Jevoulaisêtrelààl’heurepourlerendez-vous,dit-ild’unevoixrauque.Maisl’avionn’apaspu
décolleràcausedelaglace.Jesuisdésolé.Jesuisvenuaussivitequej’aipu.
—Tusais?Elleétaitsouslechoc.Drake,lui,semblaconfus.—Ange,jelesaisdepuislejouroùtul’asappris,dit-ilavecdouceur.Tutesouviensdujouroùnous
t’avonssauvéedetonravisseur,tuterappellesquenousétionsinquietsqu’ilsoitarrivéquelquechoseaubébé?Ellesecoualatête.—Jenemerappellepasgrand-chosedecettejournée,murmura-t-elle.Ellelevalesyeuxverslui,lecœurlourd.—C’estpourçaquetueslà?Àcausedubébé?Iljuraettraversalapiècecommepourvenirlaprendredanssesbras,maishésitaquandilarrivaàsa
hauteur,commes’ilavaitpeurqu’ellelerejette.—Jem’inquiètepourlebébé,oui.Maisjem’inquièteplusencorepourtoi.Jesuisiciparcequejene
peuxpasvivresanstoi.Jesuisiciparcequej’aitantdechosesàtedire,Ange.Avantqu’ellenepuisserépondreàsadéclaration,ilsemitpéniblementàgenouxdevantelle,pritses
mainsdanslessiennes,etlevaverselleunregardsuppliant.—Jetesupplied’écoutercequej’aiàdire.Jet’enprie.Evangelinen’enrevenaitpas.Drake,vulnérable,lestraitshagards,adoptaitunepositiondesoumission
et d’humilité. Les larmes lui nouèrent la gorge, tandis que la douleur et le chagrin avec lesquels elles’était efforcée de faire la paix refaisaient surface etmenaçaient de se libérer, commeun barrage quicède.— Tu as refusé de m’écouter, dit-elle avec difficulté. Je t’ai supplié à genoux, et tu ne m’as pas
écoutée. Tu as refusé deme laisser une chance. Pourquoi devrais-je te laisser la tienne ? Je t’ai toutdonné,Drake.Tout.Masoumission.Monamour.Maconfiance.Maloyauté.Et tum’astoutrenvoyéenpleinefigure.Commesituattendaisquej’échoue.Tuvoulaisquej’échoue.Etquandtuascruquec’étaitarrivé,tuétaisimpatientdemejeterdehors.Tusaiscequej’airessenti?Elleétaitàboutdesouffle,enlarmesbienmalgréelle.Ellelesessuyadureversdelamainetdétourna
leregard,incapabledesoutenirsonregardimplorantuneminutedeplus.—Tuasraison,dit-ilsuruntoncalmeetabattuqu’elleneluiconnaissaitpas.Elleposadenouveaulesyeuxsurlui;ellen’arrivaitpasàcroirequ’iladmettaitqu’elleavaitraisonet
qu’ilavaiteutotalementtort.Ilresserrasonétreinteautourdesesmainscommes’ilavaitpeurqu’elleluifileentrelesdoigts.Ill’avaitdéjàperdue,etpasparcequ’ill’avaitlaisséepartir.Ill’avaitcruellementéjectéedesavie.—Pourquoies-tuvenuàmarescousse,Drake?demanda-t-elle,faisantfidesonaveu.Pourquoiavoir
prislapeinedemesauverdesgriffesdecethommeaffreux?Jepensaisquetuauraisétéheureuxd’êtredébarrassédemoi.Le visage deDrake vira du blanc au gris, couleur de son chagrin et de ses regrets. Il semblait tant
regretter qu’il étaitmêmepénible de le regarder.Lorsqu’il reprit la parole, il revint à son aveu, à saprécédenteaccusation.— Je sais que je nemérite rien venant de toi,Ange. Pasmême un regard, et certainement pas ton
amour.Mais je te supplie, comme tum’as supplié, dem’écouter. Si après, tu ne veuxplus jamaismerevoir,jepartirai.Maistoietnotreenfantserezàl’abri.Toujours.Elle déglutitmais ne répondit pas – elle ne lui dit pas « non » non plus. Elle ne dit rien. Elle se
contentadelefixerduregard,fébrile.—Tu as raison, j’attendais que tu échoues, dit-il en grimaçant. Je t’ai dit un jour quemes propres
parentsnem’aimaientpas,alorscommentquelqu’und’autrepouvaitm’aimer?Tupensespeut-êtreque
cesontdesinepties,maisc’estvrai.Personnenem’ajamaisaimé,etpuistoi…Ilsetutetavalasasalive,etellefutstupéfaitedevoirunelarmeaucoindesonœil.—Puisjet’airencontréeettum’asmontré,davantagequetunel’asdit,quetum’aimais.Chaquejour.
Danschaqueacte,chaquegeste,chaqueregard.Tum’asmontrécequec’est,l’amour.Etjet’aimontrécequecen’étaitpas,dit-ilàregret.Jen’arrivaispasàcroirequetum’aimais.Moi.Pasmonargent.Pasmonpouvoir.Tum’aimais,moi, l’homme,et tuvoulaisseulementmonamourenretour.Pas leschosesquejepouvaist’acheternilemodedeviequejepouvaist’offrir.Tuastoléréceschoses,parcequecelaimpliquaitlavieavecmoi.Unsourireamusédansasurseslèvresàcettepensée.—Tumefaisaispeur,monange.Jen’avaispasderéponsepourtoi.Jenesavaispasquoifairedetoi.
Alorsquec’étaitsisimple.Tunevoulaisquemonamour,etc’étaitlaseulechosequejenepouvaispastedonner.Elleinspira,lapoitrineserrée.—Jenepensaispaspouvoirtedonnermonamour,souffla-t-il.Maisj’avaistort.Jet’aiaiméedèsle
début.Jenelesavaispas.Commentlepouvais-je?Jen’avaisjamaisressentid’amourdansmavie.Jesavaisseulementque,quandj’étaisavectoi,monmondes’illuminait.Jen’étaisheureuxqu’avectoi.Jevoulaisfairetoutcequiétaitenmonpouvoirpourterendreheureuse.Je…t’aimais.Elle le regardaavec tristesse, secouant la têteavantmêmequ’il arriveauboutdesadéclaration. Il
serrasesmainsentrelessiennespourluidemanderdelelaisserfinir.—J’étaissipersuadéquepersonnenepourraitjamaism’aimerquejen’aireconnul’amourquetrop
tard.Quandj’aicruquetum’avaistrahi,j’étaisdévasté.J’étaissimalheureuxquejemesuisemportéetaiditetfaitdeschoseshorribles,méprisables.J’airéagicommeunanimalblesséetj’aivouluresterseulpourmemorfondreetpleurerlapertedecequej’avaiseudeplusbeaudansmavie.Ilsetutuninstantetrespiraungrandcoup.—Les jours passant, j’ai commencé à réfléchir : était-ce si grave si tum’avais trahi ?Était-ce un
crimesiimpardonnable,vutoutcequejetecachais?J’exigeaisuneconfianceaveugledetapartenneterévélantriendecettepartiedemavie.Qu’étais-tucenséepenser?Jesuissûrquetuimaginaislepire.Ettoi, étant celle que tu es, si bonne et innocente, tu n’aurais pas été capable de vivre avec ce genred’homme.Alorspourquoinepasfairecequ’ilfallaitetmepiéger?—MaisDrake,jenet’aipaspiégé!Ilserradenouveausesmainsdanslessiennes.—Jesais,Ange,jesais.Cequejeveuxdire,c’estquetum’astellementmanqué,etquejet’aimais
tant,quej’étaisprêtàtepardonnermêmesitul’avaisfait.Etpuis…etpuisj’aicommencéàrepenseràdeschoses.Et j’aidouté. Je trouvaisdifficile à croireque tupuisses faireunechose si contraire à tanatureaimanteetloyale.J’étaisauplusmal,jeremettaischaqueaspectdemavieenquestion.Quandlevéritabletraîtreaétédémasqué,j’avaisdéjàprisladécisiondeteretrouver,d’implorertonpardon,etdefairetoutcequ’ilfaudraitpourterécupérer.Ilfermalesyeux.Leslarmesroulèrentsursesjoues.—Parcequejemesuisrenducomptequejet’aimais.Jet’aimedetoutmonêtre.Avectoutcequej’ai.
Lejourdetadisparition,j’aiditàtamèrequejet’aimaisetquequoiqu’ilarrive,jeteretrouveraisetteprotégerais.Quejamaisplusjenetelaisseraispartir.Evangelinesecontentadeledévisager,tropdéstabiliséepourcomprendrecequ’ildisait.—Tun’avaispastoustesespritsquandnoust’avonsamenéeàmaclinique,soupiraDrake.Tusavaisà
peineoùtutetrouvais.Jet’aisuppliée.Jet’aiditquejevousaimais,toietnotreenfant.Jenedemandaisqu’àteramenercheznousetàpassermavieàréparermeserreurs.Maistoutcequetuasdit,c’estquetu
voulais rentrer à lamaison. Chez tes parents. Tu étais si fragile, j’aurais fait n’importe quoi pour terendreheureuse.Alorsjet’ailaisséepartir.Ilsetut,lavoixétranglée,etdétournalatête.Elleeutmalgrétoutletempsdevoirsontourment.Tout
cequ’elleavaitressentisereflétaitdanssesyeux.— Mais je suis resté en contact avec tes parents, tous les jours. Cherchant la moindre miette
d’information.Jedévoraischaquepetitdétailcommeunhommeaffamé.Jenepouvaispasresterloindetoipluslongtemps,Ange.Jesuismalheureuxsanstoi,etjepensequetuesmalheureusesansmoi.Nousnesommesentiersquelorsquenoussommesensemble.Jesaisque j’aibeaucoupdechosesàmefairepardonner.Jepasseraimavieentièreàmeracheteretàexpiermespéchés.Maisjet’enprie,laisse-moilachancedeterendreheureuse.Jesaisquejelepeux,Evangeline.Siseulementtumedonneslachancequejen’aipassut’accorder.Lesgenouxd’Evangelinemenaçaientdesedérober.LesmainstoujoursenserréesparcellesdeDrake,
elle se laissa lentement glisser vers le sol. Alarmé, Drake se leva, la prit dans ses bras, et la portajusqu’aucanapéoùilladéposacommesielleétaitlachoselaplusprécieuseaumonde.Puisils’assitàcôtéd’elle,demanièreàluifaireface.Elle se sentait étourdie et faible, son cœurbattait si fort que tout se troublait autourd’elle.Elle ne
voyaitplusquelebeauvisagedeDrake,ravagéparlesémotionsqu’elle-mêmeressentait.Pouvait-ellelecroire?Luifaireconfiance?—Dis-moiuneseulechose,Ange,implora-t-il.Ilsetutetileffleurasajoue.Quandilleretira,sondoigtétaithumide;ellenes’étaitpasrenducompte
queleslarmescoulaientsansretenuesursesjoues.—Est-cequetum’aimesencore,ouai-jetuétoutesleschancesquetum’aimesdenouveauunjour?Ellebaissalatête.Seslarmess’écrasèrentsursesmainsnouéessursesgenoux.Commelesilencese
prolongeait,letondeDrakesefitplusdésespéréencore.—Ange?Savoixsebrisaetelleleregardaàtraverssescils;unesouffranceindicibles’étiraitsursestraits,et
ilfaisaitsoudainbeaucoupplusquesestrente-sixans.—J’aipeur,avoua-t-elled’unevoixenrouée.J’aipeurde t’aimer,Drake.Tuas tantdepouvoirsur
moi.Tuaslepouvoirdemerendreplusheureusequejamais,maisaussidemedétruire.Celameterrifie.—Oh,machérie,dit-il, lecœur lourd.Ne le sais-tupas?Tuas lemêmepouvoir surmoi. Jen’ai
jamaisétéaussimalheureuxquelemoisdernier,etavantquetuledises,jesaisquec’estmafaute.Jelesais.Mais tum’asapprisquelquechosed’important :cen’estpasgraved’êtrevulnérable.D’aimeretd’êtreaimé.Tum’asapprisqu’aimerestlaplusbellechosequisoit.Jenepeuxpasvivresanstonamour.Jeneveuxpas.Etjetejurequetunevivrasjamaissanslemien.—Tum’aimesvraiment?Elleétaitencoresursesgardes,avaitpeurdecroire,defaireconfianceaprèstantdesouffrance.—Cequejet’aifaitmebriselecœur.Quetupuissesdouterdetoutl’amourquej’aipourtoi.Mais
est-cequejet’aime?Jet’adore.Jet’aimeplusquetout.Tueslaseulepersonnequej’aiejamaisaimée.J’aiconfianceenmesfrères.J’aiunlienindéfectibleaveceux.Jeleurdonneraismavie.Maistoi,Ange,tuesmavie.Monmonde.Maraisondevivre.Ilposasamainsursonabdomen,caressantsonventre.—Toietnotreenfant,dit-ild’unevoixrauque.Jet’enprie,rentreàlamaisonavecmoi.Toietlebébé.
Laisse-moi vous aimer, vous chérir, vous protéger.Ou, si tu ne supportes pas de vivre en ville, nousdéménageronsici.L’endroitoùnousvivonsm’estbienégaltantquejesuisavectoi.Ellereculalatête,surprise,lesyeuxécarquillés.
—Tupourraisvivreici,prèsdechezmesparents?Ilhochalatête,levisagesérieux,laminegrave.Elleeut labouchesèchesoudain,et s’humecta les lèvres.Elle tremblait.Soncorps réagissaitenfin.
Elledevaitrêver.C’étaitimpossible.Elleétaitdansunrêve.Ellefermalesyeux.Cen’estpasréel.—Ouvrelesyeux,Ange.Regarde-moi.Vois-moi.Voismonamourpourtoi.Jet’assurequec’estbien
réel.Jesuisréel.Ellenes’étaitpasrenducomptequ’elleavaitpenséàvoixhaute.—Toutcequetuasàfaire,c’esttendrelamainetprendrecequetuveux.C’estàtoi.Jesuisàtoi.Elle tendit lebras avechésitation, samain tremblait tellementqu’elle tressautait dans les airs.Elle
passasesdoigtssursabarbedetroisjoursetcaressasesjouesavecémerveillement.Sepouvait-ilquecesoit si simple?L’aimait-ilvraiment, etpouvaient-ils avoir ensemble laviedont elle avait tant rêvé?Pourlaquelleelleavaittantpleurélanuit,pensantqu’ellel’avaitperdue?—Disoui,murmura-t-il.Embrasse-moietdisoui.Elleledévisagealonguement,sondantsonregard.Ellen’ydécelaquevéritéetsincérité.Nisecrets,ni
mensonges,nitromperies.Ellerassemblasoncourageautourd’elleets’endrapa,tenantbon.Elleduts’yreprendreàplusieursfois,maisellefinitparêtrecapabledeledire.—Oui.Elle avait parlé si doucement qu’elle ne fut pas certaine qu’il l’ait entendue. Puis une étincelle
s’allumadanssesyeux,etellesutqu’il l’avaitentendue.Ellesedressaetpressases lèvrescontre lessiennestoutendélicatesse.Ilgrognapuispritsonvisageentresesmainsavectendresse,etl’embrassaavecautantdedouceur.Ellegoûtaleseldeslarmesqu’ilsversaienttouslesdeux.Drakeposasonfrontcontrelesienetferma
lesyeux.—Jet’aime,Ange.Hier,aujourd’hui,pourtoujours.—Moiaussi,jet’aime,dit-elle,lagorgenouée.Ilplongealamaindanssapochepourentirerlabaguequ’elleluiavaitrendueparlebiaisdeSilas.
Lesmainstremblantes,illuipassal’anneauaudoigt,poussantunsoupirdesoulagementlorsqu’ilfutenplace.—Je la trimballedansmapochedepuisqueSilasme l’a rendue, luiconfia-t-il. J’enaiétémalade
quandilmel’adonnée,etjen’aicesséd’espérerquelejourviendraitoùjeterepasseraiscettebagueaudoigt.Jure-moiquetunel’enlèverasplusjamais.Pourlapremièrefois,ellesourit,etilsemblastupéfait.Ilposasesmainssursonvisage,entraçales
contours,caressaseslèvresetsesjoues.—Jetelejure.—Humhum.Quelqu’unse raclait lagorgedepuis laporte. Ils se retournèrent tous lesdeuxpour trouver lamère
d’Evangeline,deboutderrièrelefauteuildesonmari,sesyeuxbleusluisantsdelarmes.—Çaveutdirequ’onaunmariageàorganiser?demandasonpèred’untonbourru.—Oui,mêmesijecomptel’épouserleplusvitepossiblepourqu’ellenechangepasd’avis,ditDrake
d’untonlaissantentendrequ’ilneplaisantaitpas.BrendaHawthornsourit.—Jecroisqueçapeutsefaire.Félicitations,machérie,dit-elleàEvangeline.Jesuissiheureuseque
vousvoussoyezréconciliés.Celanousdésolait,tonpèreetmoi,detevoirsimalheureuse.PuiselleconsidéraDrakeavecgravité.
—Rendez-laheureuse, jeunehomme.Dieuvous a accordéunenouvelle chancede faire les chosesbien.Profitez-en.Les yeux deDrake étaient humides alors qu’il regardait tour à tour Evangeline et samère. Il serra
Evangelinecontrelui,commes’ilrefusaitdelalaisserpartir.—Jesuisbienconscientd’êtrel’hommelepluschanceuxaumondeetdenepasmériterEvangeline,
maisvouspouvezêtresûrequemaintenantquejel’airécupérée,jenelalaisseraiplusjamaispartir,etjepasseraimavieentièreàfairetoutcequ’ilfautpourlarendreheureuse.Vousavezmaparole.PuisilsouritàEvangeline,lesyeuxdébordantsdejoieetdesoulagement.Laréserveetl’airsombre
quihantaientd’ordinaireson regardavaient totalementdisparu.Lesombress’étaientenvolées. Ilavaitl’air…heureux.Aussiheureuxqu’ellel’étaitd’avoirvulavéritéetlasincéritédanssesparolesetsesactes.—Et,ajouta-t-ilavecunregardentenduendirectiondesesparents,ons’engageàvousdonnerautant
depetits-enfantsquepossible.
Épilogue
Lavieilleégliseblanchieàlachauxdelapetitevillenataled’Evangelineavaitététransforméeenunédificesortitoutdroitd’uncontedefées.Draken’avaitpaslésinésurlesmoyensdanssadéterminationàlui offrir lemariage de ses rêves.L’intérieur était décoré d’un côté à l’autre d’élégantes cascades defleurs,dontcertainesavaientétéimportéesparaviondesquatrecoinsdupays.Ilyavaitdesmilliersdelumièresscintillantes,hommageàl’amourd’EvangelinepourNoël,mêmesic’étaitdéjàpassé,etellesétaientenrouléesautourdecompositionsetstratégiquementplacéespourmettrelesfleursenvaleur.Ironiedusort,cen’étaitpasEvangelinequiavaitsupervisénimêmechoisiladécoration,lesfleurs,ni
quoi que ce soit en rapport avec la cérémonie. Drake lui avait dit avec fermeté que sa mère et luis’occuperaientdetoutetqu’ilvoulaitseulementqu’ellesereposeetprennesoind’elleetdeleurenfant.À saplusgrande surprise, leshommesdeDrake avaient tousparticipé activement à lapréparation.
Silasavaitpersonnellementsupervisélescompositionsflorales.L’hommedemaindeDrakeavaitmaintstalentscachés.Ilavaitmanifestementlesensdel’artetdeladécoration.Aprèstout,c’étaitluiquiavaitemmené Evangeline se faire coiffer etmaquiller pour le gala de bienfaisance, et qui avait donné sesinstructionsaumaquilleursurlerenduqu’ilsouhaitait.Pourlemariage,ilenfutdemême.SilasavaitfaitvenirlemêmemaquilleurdeNewYorkdanscette
zoneruraleduMississippipourcoifferetmaquillerEvangelinepourlegrandjour.Assise dans une toute petite pièce réservée à lamariée, près de l’entrée de l’église, en face de la
garderie, Evangeline contemplait son reflet dans le miroir d’un œil critique. Oh, elle ne s’était pashabillée ni n’avait été coiffée etmaquillée ici.Unprofessionnel avait passépresquedeuxheures à lacoifferetà lamaquillerdans lamaisondesesparents,etunefoisqu’ilavaitétésatisfaitqu’ellesoit,selon ses propres mots « la perfection absolue », elle avait été conduite à l’église en voiture,accompagnéedeSilasetMaddox.Ellefutescortéeenhâtejusquedanslapetitepiècedel’églisepoursereposer–ordredeSilas–etpourfairedesretouchessinécessaireavantd’êtreconvoquéedevantl’autel.Quandlemomentfutvenu,onfrappadoucementàsaporte.Elleeutdespapillonsdansleventre,qui
voletaientdansunecacophonienerveuse.Samèreattrapasamainetlaserraentrelessiennes,deslarmesbrillantdanssesyeuxattendris.—CedoitêtreSilas,mapuce.Tonpèreattenddansl’entrée.Tuesprête?Evangelinedéglutitnerveusement,maiselleétaitsiheureuseetimpatientequ’elleeutl’impressionque
son sourire pouvait éclipser le soleil tant il rayonnait.Elle hocha la tête, la bouche soudain sèche, lecorpssecouéde frissonsd’excitation,puisellese levagracieusement–dumoins,aussigracieusementquepossible–avecl’aidedesamère.—Evangeline,ditSilasavecchaleurquandelleouvritlaporte.Tuessublime,mabelle.Ellebattitdescilspourchasserseslarmes,etlavoixdeSilaspritletondelaréprimandealorsqu’il
luitapotaitlecoindesyeuxaveclepouce.—Pasdeçalejourdetonmariage.Tonstylisteamisdeuxheuresàtepréparer.Jet’assurequeDrake
vatousnousdécapitersijeluidisquelacérémonieestrepousséeparcequetudoisterefairemaquiller.Evangelineéclataderirepuis,suruncoupdetête,jetasesbrasautourdeSilaspourleserrercontre
elle.—Tuesvraimentmonamilepluscher,chuchota-t-ellecontresontorse.
Silas l’étreignitaffectueusementet l’embrassasur le front.Puis il la fitpivoteret l’aidaàserendredansl’entrée,oùsonpèrel’attendaitdanssonfauteuilroulant.Drakeconsultasamontre,sourcilsfroncésavecimpatience.Iltapaitdupieddroit,lesonétoufféparle
tapisquirecouvraitlesalléesdel’église.L’église.Ce sacrilège le fit grimacer intérieurement. Lui et ses hommes dans une église ? Ils avaient de la
chancequelebâtimentnesesoitpasenvoléquandilsavaientpassélesportes,etqu’aucund’entreeuxn’aitétéfrappéparlafoudre.Quellevisionextraordinairedevoirsesfrèresdansuneéglise.Avecleurscostumesdemarque.Même
les plus rebelles,Zander et Jax, qui se fichaient de ce que les autres pensaient, s’étaientmis sur leurtrente et un pour l’occasion.Aucun n’avait voulu vexerEvangeline, non pas à cause d’une éventuellemenacedeDrakeoudeSilas,maisparcequ’ilsl’adoraienttousetqu’ilss’enseraientvouludeluicausertoutedétresse.Ilyavaitpeudemonde.Enréalité,lesseulespersonnesquiassistaientàlacérémonieendehorsdes
hommesdeDrakeétaient lesparentsd’Evangeline,unoudeuxprochesquihabitaient toujourslapetiteville,etdeuxdames,amiesprochesdeBrenda,qu’Evangelineappelaitsestantes.DanscettepetitevilleduSud, lesamisprochesétaient traitéscommedesmembresde lafamille.Drake l’avaitvitecompris.EvangelineavaitadoptélamêmepolitiqueconcernantDrakeetseshommes.Ellelesconsidéraitcommesafamille.Etmauditsoitceluiquis’enprendraitàsafamille.Lesbancsdel’égliseétaientséparésendeuxcôtés,pourlafamilleetlesamisdumariéetceuxdela
mariée.Seshommesétantlesseulsinvités–oupresque–,ilss’étaientinstalléssurunemêmelignedesdeuxcôtésdel’archeminutieusementdécorée,symboledesoutienpourEvangelineetlui.Autantdeseshommess’étaientinstallésducôtéd’Evangelinequedusien,deleurproprechef,sansmêmequeDrakeaiteuàleleurdemander.Maddoxfitunpasenavant.PostéjustederrièreDrake,ilétaitàl’endroitoùSilassetiendraitquandil
auraitfinid’aiderEvangelineetsonpèreàremonterl’allée.—Aucundoute?luisouffla-t-ilàl’oreille.—Çanon!Drakegrimaça,gênédes’êtreainsiemporté,etcoulaunregardaupasteur,quiavaitl’airdetrouverça
drôle,pours’excuser.Maddox,lui,éclataderire.—C’estbiencequejepensais.Drake se renfrogna. Pourquoi avoir posé la question, dans ce cas ? Néanmoins, il ne daigna pas
répondreàlamoqueriedesonhomme.Ilconsultadenouveausamontre.Qu’est-cequiprenaitautantdetemps?Evangelineétaitprêtequandelleétaitarrivéeàl’église.Unedemi-heures’étaitécouléedepuis.Lasueurperlasursonfront.Etsielleavaitdesdoutes?Ilseretourna,aveclafermeintentiond’aller
trouverEvangelinepourlapresserdansl’allée–audiablelesconvenancesetlescérémonies–,lorsquelamusiqueretentit soudaindans l’église.Laportedufonds’ouvritpour révéler lamèred’Evangeline,escortéeparSilas.Attendezuneminute.Silasdevaitpousserlefauteuildupèred’Evangelinepourqu’ellepuisseêtreà
sonbras.S’ilescortaitBrenda,quiallaits’assurerqu’Evangelineetsonpèreremonteraientl’alléesansaccroc?Bon sang, il allait aller la chercher lui-mêmes’il le fallait. Il étaithorsdequestionqu’ilprenne le
risque qu’elle ait le temps de revenir sur sa décision. La seule idée d’arriver si près et qu’elle nel’épousepas?Cettepenséeluiétaitinsupportable.
SilasaidaBrendaàs’asseoiretdéposaunbaiserdepureformesursa joue.Brendasouritaugrandgaillardetilséchangèrentquelquesmots.Drakefronçalessourcils:s’ilyavaitquelquechoseàdiresurEvangeline,c’étaitàluiqu’ilfallaitledire.PasàSilas.Pasàundeseshommes.Puis Silas se retourna, croisa le regard de Drake, et, avec un sourire décontracté aux lèvres, il
redescenditl’alléeenvitesseetdisparutderrièrelaportefermée.Àpeinetrentesecondesplustard,lamusiquechangea.Cen’étaitpas lamarchenuptiale traditionnelle,mais l’hymneà la joie,unechansonqu’Evangelineadoraitetdontelleavaitditqu’elleétaitlaplusreprésentativedeleurunion.Drakeétaitd’accord.Ladoubleportes’ouvritengrand,etDrakelavit.Ileutlesoufflecoupéetchancela,obligédefaireunpasdecôtépournepass’humilierentombantà
genoux.Maisbonsang.Jamaisiln’avaitvuunechoseplusbellequelafemmequ’ilaimaitdrapéedanslaplusélégantedesrobesblanches.Ellescintillaitdespiedsà la tête,paréedesesbijoux.Sachevelureblondetombaitencascadedanssondos,détachée,pasunemèchedetravers.Ellen’avaitpasdevoilequiluidissimulaitlevisage,etilenétaitextrêmementreconnaissant.Elleaffichaitunsourireradieuxquiilluminatoutel’église.C’étaitcommesionavaitenlevéletoitet
quelesrayonsdusoleilleséclairaient.UntelamouretuntelbonheurbrillaientdanssesyeuxbleuvifqueDrakedutravalerlenœudquimenaçaitdel’étouffer.Elle avançait au bras de son père, Silas poussant avec précaution le fauteuil roulant au rythme
d’Evangeline.Levisagedesonpèreirradiaitdefierté,torsebombé,têtehaute,maisdanssesyeuxluisaitunavertissementlimpide.Jevousdonnecequej’aidepluscheraumonde.Rendez-laheureuseouvousaurezaffaireàmoi.Sonpèren’avait aucun souci à se faire à ce sujet, car siEvangelinen’était pasheureuse,Drake en
souffrait.Point.Sonbonheurétaitlesien.Sonmalheurétaitlesien.Et,siDieulevoulait,jamaisplusilsneconnaîtraientlechagrin.TantqueDrakeavaitEvangeline,iln’imaginaitpasressentirlevidequesavietoutentièreavaitétéavantelle.PlusilsserapprochaientdeDrake,pluscedernieravaitenviedelarejoindre,delasouleverdansses
bras et de la traîner devant le pasteur pour qu’elle devienne sienne le plus rapidement possible.Légalement,s’entend.Carelleétaitdéjàsienne,etpersonnen’ypouvaitrienchanger.Lemariage,ouplutôtl’acteofficieldumariage,avaittoujoursétévidedesenspourDrake.Jusqu’àce
jour.Danssonesprit,unmorceaudepapieretunepromessedevantDieunereprésentaientrien.Pourtant,ils’étaitétonnammentretrouvéinsistantsurlesujet.Evangelineluiavaitditques’ilnevoulaitpassemarier,sicelalemettaitmalàl’aise,ilsn’étaientpas
obligésdelefaire.Sonamourluisuffisait.Non.Ilavaitfailliexploserquandelleavaitditça.Sapremièreréactionavaitétédeluidirequ’ilsallaient
semarier,quecen’étaitpasseulementimportant,c’étaittoutpourlui.Puissasecondepenséeluiavaitdonné des sueurs froides et il avait exigé de savoir si elle avait des regrets. Ne voulait-elle pas semarier?Ilrepoussacesmomentsdedésespoiretseconcentrasur lavisionquis’offraità lui.Bonsang,elle
étaitsibelle.Etelleluiappartenait.Toutentière.Silasfitralentiretstopperlefauteuil,etEvangelinesetourna,accordantuninstanttoutesonattentionà
sonpère.Deslarmesbrillaientdanslesyeuxduvieilhomme,etDrakeeutsoudainunaperçudufutur.LuiàlaplacedeGrantHawthorn,donnantleurfilleenmariage.C’étaitunesensationquilerendithumbleetleterrifiaàlafois.Donnerleurfilleenmariage?Etpuisquoiencore.Leurfillenesemarierait jamais–nin’auraitde
petitscopains.Celaluiconvenaitparfaitementqueseshommesdemainsoientlesseulsmâlesdanslaviede sa fille – ou de ses filles, un jour, peut-être. Etmême eux ne seraient là que pour les protéger. Ilfrissonna en pensant à l’éventualité d’avoir plusieurs filles. Presque aussitôt, il imagina une demi-douzainedefilles,dessosiesminiaturesd’Evangeline.Ilsentitlesangquittersonvisageetsesgenouxs’affaiblirent.Sixpetitsanges?Ilseraitdansdebeauxdraps…etivredebonheur.Evangeline embrassa son père et il serra samain avant de poser une nouvelle fois son regard sur
Drake.Les hommes échangèrent des hochements de tête qui voulaient tout dire. Ils avaient un accord.Drakecomprenaitparfaitementlapositiondel’autrehomme.Silaspoussalefauteuilroulantpourleplacerauboutd’unbanc,àcôtédeBrendaHawthorn,puisil
pritEvangelineparlamainetlaconduisitlentementjusqu’àl’autel,oùilplaçalamaindelajeunefemmedanscelledeDrake.—Prendsbiensoind’elle,ditSilas,laminegrave.—Toujours,juraDrake.PuisSilasdisparutetiln’yeutplusqueDrakeetEvangeline.Laminusculemaindesacompagnedans
lasienne.Lesautress’évanouirent.SeuleEvangelineexistaitpourlui.Personned’autrenecomptait.Illaregardaavidement,tellementsoulagéquecejourarriveenfin,mêmesicelanefaisaitquedeuxsemainesquesonangeluiavaitpardonné.Cesdeuxsemaines–etlesquatrequiavaientprécédé–semblaientavoirduréuneéternité.Àprésent,laseuleéternitéqu’ilenvisageaitétaitcellequ’ilcomptaitpasseravecsafemme.—Drake,murmura-t-elleentirantgentimentsursamain.Ilfronçalessourcils,certainquecelan’étaitpasprévudanslacérémonie.Elleluisourit,luicoupant
lesouffle.—Lepasteurattend.Ah,mince.Illacontemplaitetremerciaitlecielavecunetelleferveur,qu’ilétaitrestéplantélàcommeunidiot,
bouchebée,aulieudesetenirprêtpourlacérémonie.Enfin…Quipouvaitleluireprocher?Ilépousaitlafemmelaplusdouce,laplusbelledumonde–àl’intérieurcommeàl’extérieur.Sicelanevalaitpasquelquesinstantsdecontemplationbéate,ilnesavaitpascequ’ilfallait.—Onnepeutpaslaisserfaireça,murmura-t-ilenresserrantsaprisesursamain,avantdelaporterà
sa bouche pour déposer un baiser dans sa paume, même si ce n’était pas prévu non plus dans lacérémonie.Jet’aime,Ange.Jet’aimetellement.Mercidem’aimer.Lesourired’Evangelineluiréchauffalecœur.Ellen’avaitpasl’aircontrariéqu’ilaittransgresséles
convenances,niquelepasteurattende,uneexpressiond’exaspérationamuséesurlevisage.—Moiaussi,jet’aime,Drake.Allez,tunecroispasqu’onaassezattenducommeça?Ilesttempsde
nousmarier.Oh oui, il était plus que temps. Plus il faisait traîner les choses, plus il devrait attendre avant de
l’attirerdanslachambrenuptialepourluifairel’amourjusqu’àenperdrelaraison.Commesielledevinaitladirectiondesespensées,Evangelinesourit,lesyeuxpleinsdemalice.Bon
sang, il n’avait soudain plus aucun souvenir des détails de la cérémonie alors qu’ils avaient fait unerépétitionlaveilleausoir.Commes’ilavaitbesoinqu’onluidisecommentfairepourquelafemmequ’ilaimaitluiappartienne!Seulement,sonespritétaitmaintenantpeupléd’imagesd’Evangeline–safemme– dans ses bras, dans son lit, enroulée affectueusement autour de lui pendant qu’il lui faisait l’amourautant de fois que c’était humainement possible. Et même après les avoir épuisés tous les deux, ilpenseraitencoreàluifairel’amouretàprévoirlemomentoùilpourraitdenouveaupénétrersoncorps.Etpuisflûte,ilallaitpeut-êtrepasserlerestedesavieavecsonsexeplongédanssachairtendre.Ily
avaitpiremanièred’occuperlesannéesqu’ilavaitencoredevantlui.Iln’avaitjamaiscruauparadisetàl’enfer,maisenpeudetemps,Evangelineluiavaitprouvéqueles
deuxexistaient.Car,quandilétaitavecelle?C’étaitleparadis.Etsanselle…unvéritableenfer.Etsileparadis lesattendait,Evangelineet lui, après leurdernier jour surTerre? Il serait ravid’yêtreà sescôtés.Lesangesvenaientduparadis,etEvangelineétaitleplusdouxdesanges.Draken’avaitrienfaitpour
mériterlarédemption,nimêmeunaperçuduparadis,etpourtant,danslesbrasd’Evangeline,ilavaitétéplusprochedecettebontéqu’aucunhommenepouvaitl’espérer.Evangelinetiraunefoisencoresursamainetilsortitdesatranse,clignantdesyeux,confus.Leregard
delajeunefemmeétaitrieur,commesiellesemoquaitdelui.—Jecroisquec’estlàquetum’embrasses,murmura-t-elle.L’embrasser ? Ils enétaientdéjàà lameilleurepartiede tout ce truc?Ohoui !L’embrasser, ça, il
pouvait. Il comptait le faire souvent. Avec le moment où le pasteur les déclarerait mari et femme,l’embrasserétaitlemeilleurmomentdelacérémonie.Avecune révérence infinie, il fit glisser ses doigts et ses paumes sur sonvisage, caressa ses joues
roses, toucha la rondeur de ses lèvres, et saisit son menton dans sa main avant de se pencher pourcapturersabouche,frissonnantquandellesoupiradebonheur.Peuimportait lenombredefoisqu’il l’embrassait–et iln’avaitpasfaitgrand-chosed’autredepuis
leursretrouvailles–,c’étaittoujourscommelapremièrefois.Jamaisilneselasseraitdesapeau.Desachaleuretdesonamour.Sonbaiser s’intensifia, il la sentit se laisser aller contre lui, s’abandonna à sonbesoind’être aussi
proched’ellequepossible.Autourdelui,detrèsloin,ilentenditdesriresamusés,mêmetaquins,maisils’enfichait:ilavaitcequ’ilaimaitleplusaumondedanssesbras.Ets’ilneseméprenaitpas,etilavaitétéattentiflorsdelarépétition,embrasserlamariéevenaitaprès
que lepasteur les avait déclarésmari et femme.Cequivoulait direqu’il embrassait son épouse.Sonange.Lamèredesonenfantetdesnombreuxautresqu’ilavaitpromisdeluidonner.—Àmoi,murmura-t-ilavantdeplongersalanguedanssabouche,sanssesoucierdeceuxquiseraient
témoinsdesadéclarationpassionnée.—Àtoi,répondit-elle.Pourtoujours,Drake.Jet’aimeraitoujoursetseraitoujoursàtoi.Ilfermalesyeux,auborddeslarmes.Ill’aimaittant.Plusqu’ilseseraitcrucapabled’aimerunêtre
vivant. Il avait cru qu’il était impossible de l’aimer. Et pourtant, cette femme, qu’il venait d’épouser,l’aimaitsansconditions.Ellen’avaitjamaisdoutédeluietelleavaitpardonnél’impensablenonpasune,maisdeuxfois.Ilabandonnal’espoirdecontenir l’émotionqui lesubmergeaitetenfouitsonvisagedanssasublime
chevelure.Ilinspira,inhalantsipuissammentsonparfumqu’ildevintpartieintégrantedelui-même.—Moiaussi,jet’aime,Ange,dit-il,lavoixrauque.Jet’aimeraitoujours.Tueslafemmedemavie.Elles’écartaetposaunemainsursajoue,l’airinquiet.—Drake,monchéri,qu’est-cequinevapas?Ellesondasonvisage,voyantcertainementleslarmesbrillerdanssesyeux.Autrefois,ilauraitpréféré
mourirquedelaisseruneautrepersonnevoirunequelconquefaiblesseenlui.MaisEvangeline?Ilsavaitqu’ilseraittoujoursensécuritéavecelle.—Riendu tout, répondit-ilen luisouriant.Si jenem’abuse, lacérémonieest terminée,et tuesma
femme,madameDonovan.Ilétaitridiculementheureuxd’entendresonnomdefamilleassociéàEvangeline,etàenjugerparla
joiesoudainequiilluminasesyeux,iln’étaitpasleseulàéprouvercetteférocesatisfaction.
—Cequiveutdire,poursuivit-ilenlaprenantparlamainpourseprépareràremonterl’alléeavecelle,sonépouse,qu’ilesttempsquej’emmènemafemmeenlunedemiel.Des éclats de rire retentirent dans l’église et il s’émerveilla de la beauté de ce son insouciant. Ils
avaientàpeinefait troispasquel’euphoriedeDrakeprit ledessus.Cettefemmeaimanteetgénéreuseétaitsonépouse!Illasoulevadanssesbrasetlaportadansl’allée;maisilnes’arrêtapasàlaporte,nepritpasletempsderemercierleursinvités,nid’attendrequeseshommeslesrattrapent.Ilsecontentadelaporterjusqu’àlavoiturequilesattendait,etilfitl’amouràMmeEvangelineDonovansurlechemindel’aéroport.
LesouvragesdeMayaBanksfigurentrégulièrementsurleslistesdesbest-sellersduNewYorkTimesetdeUSAToday, aussi bien en romance érotique, contemporaine et suspense, qu’en romance historique.MayavitauTexasavecsonmarietsestroisenfants,deschatsetunchien.C’estunelectricederomancepassionnée,quiadorecommuniquersursescoupsdecœuravecsesfanssurlesréseauxsociaux.
Dumêmeauteur,chezMiladyRomantica:
Àcorpsperdus:1.Succomber
2.S’abandonner3.Posséder
Àfleurdepeau:
1.Rush2.Fever3.Fire
Àboutdesouffle:
1.Maîtrisée2.Dominée3.Capturée
ChezMilady,enpoche:
KGI:
1.Ensursis2.SecondeChance3.Mémoirevolée
4.Murmuresnocturnes5.Sansrépit6.Sanspitié
7.Souscontrôle8.HauteTension9.Silencebrisé
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MiladyestunlabeldeséditionsBragelonneTitreoriginal:DominatedCopyright©2016MayaBanksPubliéavecl’accorddeBerkleyPublishingGroup,unlabeldePenguinGroup(USA)LLC,unedivisiondePenguinRandomHouse.Tousdroitsréservés.©Bragelonne2017,pourlaprésentetraductionPhotographiedecouverture:©ShutterstockL’œuvreprésentesurlefichierquevousvenezd’acquérirestprotégéeparledroitd’auteur.Toutecopieou utilisation autre que personnelle constituera une contrefaçon et sera susceptible d’entraîner despoursuitescivilesetpénales.ISBN:978-2-8205-2874-2Bragelonne–Milady60-62,rued’Hauteville–75010ParisE-mail:[email protected]:www.milady.fr
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