DIPLÔME EN OSTÉOPATHIE (D.O.) Ostéopathie …€¦ · présenté et soutenu publiquement le...

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en partenariat avec le Federal European Register of Osteopaths PROMOTION 2015 Mémoire n° présenté et soutenu publiquement le ………..……… à Paris par Mlle Souterbicq Duchez Mathilde, née le 22 août 1992. à Bordeaux (33) Pour l’obtention du DIPLÔME EN OSTÉOPATHIE (D.O.) Ostéopathie viscérale : Origines, évolution des concepts et pratiques Maître de mémoire : M. ISLE DE BEAUCHAINE Olivier Co-tuteur : Membres du jury : Président : Assesseurs :

Transcript of DIPLÔME EN OSTÉOPATHIE (D.O.) Ostéopathie …€¦ · présenté et soutenu publiquement le...

en partenariat avec le

Federal European Register of Osteopaths

PROMOTION 2015 Mémoire n°

présenté et soutenu publiquement le ………..……… à Paris

par Mlle Souterbicq Duchez Mathilde, née le 22 août 1992. à Bordeaux (33)

Pour l’obtention du

DIPLÔME EN OSTÉOPATHIE (D.O.)

Ostéopathie viscérale :

Origines, évolution des concepts et pratiques

Maître de mémoire : M. ISLE DE BEAUCHAINE Olivier Co-tuteur :

Membres du jury :

Président :

Assesseurs :

Remerciements

Tout d'abord, je remercie Olivier De Beauchaine pour avoir accepté

d'être mon directeur de mémoire.

Je remercie également tous ceux qui ont accepté de répondre à mes

questions, qui m’ont guidé dans ce travail, parmi eux : Hakim

Mhadhbi, Fabrice Bedin, Amélie Foucault, Maximilien Depetris,

Jean-François Bodinier.

Par ailleurs, je remercie grandement Clara B. et Catherine S., pour

leurs relectures.

Enfin je remercie tous ceux qui m'ont soutenu, aussi bien sur le plan

matériel qu’affectif, au cours de la réalisation de ce mémoire, mais

aussi de mes études.

Table des matières INTRODUCTION............................................................................................................. 1

-I- MATÉRIEL ET MÉTHODE ................................................................................... 5

1. CRITÈRES D'INCLUSION............................................................................................... 6

2. CRITÈRES D'EXCLUSION.............................................................................................. 7

-II- RÉSULTATS.............................................................................................................. 9

1. OUVRAGES S’ INTÉRESSANT SPÉCIFIQUEMENT À L’OSTÉOPATHIE VISCÉRALE........... 9 2. TEXTES FONDATEURS ET ÉCRITS FAISANT RÉFÉRENCE AUX TEXTES FONDATEURS. 10

3. MÉMOIRES LIÉS À L’OSTÉOPATHIE VISCÉRALE......................................................... 14 4. OUVRAGES GÉNÉRAUX SUR L’OSTÉOPATHIE (HISTOIRE, CONCEPTS…)................... 16 5. TRAITÉS DE PRATIQUE OSTÉOPATHIQUE ET RECUEILS DE TECHNIQUES................... 18 6. DIVERS...................................................................................................................... 19

-III- DISCUSSION.......................................................................................................... 21

1. L'OSTÉOPATHIE VISCÉRALE ET LES FONDATEURS.................................................... 21

a. Andrew Taylor Still .............................................................................................. 21 b. Phillip Carl McConnell23 ..................................................................................... 26

c. John Martin Littlejohn.......................................................................................... 27 d. William Garner Sutherland.................................................................................. 28

2. AUTRES ORIGINES DE L'OSTÉOPATHIE VISCÉRALE.................................................... 30

a. Martel Thure Emil Brandt (1819-1895) et Henri Stapfer .................................... 30

b. Frantz Glénard (1848-1920)................................................................................ 33 c. Le courant « Barral .............................................................................................. 34

3. AUTRES APPROCHES VISCÉRALES............................................................................. 37 a. Les points réflexes de Chapman........................................................................... 37 b. Les chaînes viscérales: la méthode Busquet ........................................................ 39

c. Les techniques lymphatiques ................................................................................ 41 4. L’ OSTÉOPATHIE VISCÉRALE AUJOURD’HUI............................................................... 43

-IV- CONCLUSION ....................................................................................................... 47

BIBLIOGRAPHIE.......................................................................................................... 51

1

Introduction

À l’Institut Dauphine d’Ostéopathie, après avoir étudié pendant deux ans la

sémiologie, nous étudions les manipulations viscérales, ainsi que différentes

approches ostéo-articulaires de l’ostéopathie. Les approches viscérales enseignées

sont aussi bien mécaniques que fonctionnelles (ou dites de type « Barral »).

Cependant, les concepts de l’ostéopathie, ni même son histoire, sont très peu

enseignés, aucune matière n’y est dédiée. Le « viscéral » a sa place dans un

certain nombre de formations en ostéopathie sans pour autant que l’on s’étende

sur son origine.

Le structurel, le TOG ou les fascias sont associés aux grands noms de

l’ostéopathie comme A. T. Still, R. Becker1, ou encore le crânien à Sutherland2.

Le viscéral est enseigné, mais peu sont en mesure de citer les noms de celui ou de

ceux qui ont fondé, développé, décrit, conceptualisé la pratique viscérale en

ostéopathie.

Autant il est possible de trouver des écrits ou mémoires sur les concepts généraux

de l’ostéopathie, sur l’ostéopathie crânienne, sur les tentatives d’explication des

mécanismes d'action du thrust (aussi appelées manipulations à haute vélocité et

basse amplitude), autant on ne trouve pas ou peu de mémoire sur l’origine du

viscéral en ostéopathie3. Au mieux, on pourra parcourir des travaux sur l’influence

des pratiques viscérales dans la prise en charge d’une pathologie ou d’un

symptôme4.

Et bien que l'on puisse s'intéresser à l'efficacité des traitements ostéopathiques des

viscères, la justification scientifique du mode d'action des techniques ne fait pas

toujours consensus. Est-ce un lien neurologique viscéro-viscéral, viscéro-

somatique ou des liens « anatomo-mécaniques » qui justifient notre traitement des

organes ?

1. R. Becker, La vie en mouvement, Sully 2012, R. Becker, L’immobilité de la vie, Sully 2013 2. W. G. Sutherland, The Cranial Bowl. Free Press Company, Mankato Mn, 1939, traduit en français : H. Magoun, Textes

fondateurs de l'ostéopathie dans le champ crânien, Sully, Vannes, 2002 3 Du moins au sein de l'IDO ou de l'ESO qui propose un aperçu des mémoires qui y sont issus : Historique des mémoires

de l'Ecole Supérieure d'Ostéopathie, disponible sur http://bibliotheque.eso-suposteo.fr:81/ListRecord.htm, consulté le 30 avril 2015

4 Ibid., http://bibliotheque.eso-suposteo.fr:81/ListRecord.htm, consulté le 30 avril 2015

2

L'ostéopathie dans le champ viscéral reposerait sur des bases empiriques

l'exposant à des critiques.

D'un point de vue diagnostic, la précision de la palpation viscérale est susceptible

d'être remise en question puisque l'anatomie de l'appareil digestif de chacun peut

être soumise à diverses variations, le situs inversus5 est un exemple extrême,

frappant bien que peu fréquent. Par ailleurs, dans une même journée, la

physiologie de nos organes, notamment digestifs, subit de nombreuses influences

(hormonales, neurovégétatives, mécaniques…). Notre activité digestive, rythmée

par nos habitudes hygiéno-diététiques, induit des modifications chimiques mais

aussi mécaniques de nos organes. Un estomac, un intestin grêle ou un colon

n'auront pas la même texture ou le même volume selon que l’on est à jeun ou que

l’on est rassasié et l'activité péristaltique du tube digestif différera. Comment

repérer alors un tissu qui est en perpétuelle adaptation ? Et comment discerner un

viscère dysfonctionnel s'il n'existe qu'une constance relative concernant sa

structure et sa fonction ?

Certaines techniques consistent même à tester et traiter des organes intra-

thoraciques6 et donc à percevoir des tissus mous à travers du tissu ostéo-

cartilagineux. Peut-on parler alors de palpation ? Ou seulement de visualisation

anatomique ? Dans ce cas, comment justifier une méthode thérapeutique basée sur

une visualisation ?

La palpation viscérale semble donc être moins évidente que la palpation ostéo-

articulaire aussi bien d'un point de vue positionnel que du point de vue de la

mobilité.

Pour ce qui est de l’enseignement, la place de l’ostéopathie viscérale est encore

une fois incertaine. Toutes les écoles ne l’enseignent pas, tandis que certaines

écoles l’enseignent mais sous des intitulés de matière quelque peu dissimulés.

Tandis que sur le plan juridique, les divers décrets concernant la pratique

ostéopathique ne mentionnent pas l’approche viscérale, sans pour autant

explicitement la bannir.

5. http://www.em-consulte.com/en/article/101622 consulté le 1e 12 avril 2015 : «Le situs inversus est une anomalie congénitale rare souvent révélée dans l'enfance. Chez les adultes ayant des douleurs abdominales aiguës, il est important de connaître cette inversion des organes pour le diagnostic et en cas de chirurgie . »

6. J-P. Barral, P. Mercier, Le thorax, Manipulations viscérales, Ed. Sully, décembre 2005

3

Comparée à d'autres disciplines ostéopathiques comme les manipulations ostéo-

articulaires structurelles, l’approche viscérale est mal connue des patients. En

effet, malgré la progression de la connaissance de l’ostéopathie par le grand

public, les idées reçues semblent tenir bon et si l'on se base sur les motifs de

consultation, ceux-ci restent principalement centrés sur l’appareil locomoteur.

D'un point de vue linguistique, l'étymologie du mot « ostéopathie » [du grec

ὀστέον / ostéon : os et πάθος / pathos : maladie], laisse penser que c'est une

discipline qui s’intéresse principalement au traitement des os, des articulations, de

l'appareil locomoteur… mais certainement pas des viscères.

On peut donc s’interroger sur la place du champ viscéral à la naissance de

l'ostéopathie ; Andrew Taylor Still, fondateur de cette pratique et et à l’origine de

son nom, pratiquait-il des manipulations viscérales ? Qu'en fut-il de ses disciples ?

De plus, la définition de l'ostéopathie viscérale elle-même n'est pas arrêtée

puisque tous les ouvrages ne la définissent pas de la même manière, et les auteurs

ne donne pas les mêmes anthologies de techniques, mélangeant parfois techniques

ostéo-articulaires, fasciales et viscérales (au sens strict). La confusion entre

dysfonction viscérale (au sens ostéopathique) et dysfonctionnement viscéral (au

sens physiologique) n'est pas rare. On peut alors se demander si le « viscéral »

consiste-en la manipulation directe des viscères ou en un traitement ostéopathique

(quel qu'il soit) destiné à rétablir la physiologie des organes.

Il semble que l'approche viscérale ostéopathique relève donc une part d’ombre. Ce

qui n'est pas sans faire écho au flou qui entoure parfois l'ostéopathie au sens large.

L'ostéopathie viscérale serait une mise en abyme de l’ostéopathie elle-même,

tiraillée entre passé et futur, entre ésotérisme et scientisme, entre divergences

internes et critiques externes.

Face à ces incertitudes et contradictions, nous avons cherché à retracer l'évolution

de cette discipline ostéopathique, espérant notamment mieux comprendre sa

situation actuelle. Dans cette idée, notre travail a consisté à rassembler un

florilège bibliographique des écrits concernant cette pratique et des concepts qui

l'entourent.

4

Dans un premier temps, nous verrons les moyens que nous avons mis en œuvre

pour notre étude bibliographique. Dans un second temps, nous exposerons les

résultats de cette recherche. Enfin, nous essaierons de faire une synthèse de

l'historique de l'ostéopathie viscérale de sa naissance jusqu'à nos jours.

5

-I- Matériel et Méthode

Constatant que nous savions peu sur les origines de l'ostéopathie viscérale, il nous

a semblé pertinent d'étudier la littérature existante sur le sujet.

Cependant, nous n'avons trouvé aucun ouvrage consacré exclusivement à l'histoire

du viscéral, ni même à sa seule théorie.

Nous nous sommes donc tournés vers des ouvrages qui abordaient l'histoire du

viscéral sans pour autant y être dédiés.

Une des premières difficultés fut de définir l'ostéopathie viscérale car la confusion

entre manipulation directe des viscères et intention de rétablir la fonction d'un

viscère par une action ostéopathique est aisée.

L'idéal aurait été de pouvoir totalement séparer ces deux approches de la

thérapeutique viscérale mais certains auteurs participent à ce flou en évitant de

prendre une position tranchée sur le sujet.

Bien que notre sujet concerne la manipulation des viscères au sens strict, nous

n'avons pu exclure ces auteurs car leur témoignage fait partie intégrante de la

complexité qui entoure l'approche ostéopathique viscérale.

Par ailleurs, la confusion peut être plus grande encore quand il existe un mélange

entre traitement de pathologies ou de symptômes viscéraux par une approche

viscérale au sens strict, traitement de pathologies ou de symptômes viscéraux par

un abord autre que viscéral direct, et manipulations des viscères que ce soit afin

de lever une dysfonction viscérale ou d'agir sur un autre système.

6

1. Critères d'inclusion

Nous avons inclus les ouvrages répertoriant spécifiquement des techniques

ostéopathiques viscérales puisqu’ils permettent de se faire une idée des différentes

techniques existantes.

De plus, certains de ces ouvrages contiennent des présentations générales sur

l’ostéopathie viscérale, ses concepts et/ou son histoire.

Il nous a aussi semblé intéressant d’inclure les recueils des différents types de

techniques ostéopathiques afin d’avoir une idée de la place que l’ostéopathie

viscérale y occupe.

Par ailleurs, les ouvrages concernant l’histoire de l’ostéopathie en général ont été

intégrés dans le but d’y trouver d’éventuelles informations concernant plus

particulièrement l’approche viscérale.

Nous nous sommes également intéressés aux textes fondateurs de l’ostéopathie en

vue de s’interroger sur la place qu’a pu y occuper le traitement des viscères.

De même concernant les essais et autres productions s’intéressant aux concepts

ostéopathiques, nous avons voulu les confronter à notre sujet de manière à voir si

l’ostéopathie viscérale trouvait sa place au sein de ces concepts.

Enfin, ont également été consultés des travaux que l’on pourrait qualifier de

"vulgarisation" ostéopathique, nous donnant un aperçu de la vision des différentes

approches ostéopathiques qui y est proposé.

7

2. Critères d'exclusion Nous avons exclu les ouvrages écrits dans d’autres langues que le français et

l’anglais.

Ont également été exclus certains ouvrages, dont la pertinence n'était pas remise

en cause, mais qui ne furent pas disponibles, ou, en tout cas que nous n'avons pu

nous procurer par les moyens qui furent les nôtres.

Ouvrages ayant été exclus :

BEAL MC., “Viscerosomatic reflexes and the somatic dysfunction : a

model”, JAOA clinical practice, 1997, pp. 792-809.

BEAUME S., Dictionnaire de médecine ostéopathique, Elsevier Masson, 2014

BUSQUET L., BUSQUET-VANDERHEYDEN M., Les chaînes physiologiques -

Tome VII - La chaîne viscérale Abdomen, pelvis : Description et traitement, Ed.

Busquet, 2008

COMEAUX Z., « Somatic dysfunction – a reflection on the scope of osteopatic

practice », AAO journal volume 15 – n°4, 2005

FINET G. & WILLIAME C., Ostéopathie viscérale – Un espace de discussion

avec le monde médical, 2012

FINET G. & WILLIAME C., Biométrique de la dynamique viscérale et nouvelles

normalisa, Ed. Broché, paru en septembre 1999

FINET G., WILLIAME C., Biométrie de la dynamique viscérale et nouvelles

normalisations ostéopathiques, Ed. Roger Jollois, 1992

FRAIKIN A., BAILLIERE J-B & fils., Déséquilibre du ventre et nevropathies

consécutives, traitement par les agents physiques, 1914

8

GHANEM M., FIALAIX L., ASLOUM B., Peut-on tout soigner par l'ostéopathie

?, Ed. Hachette, 2008

HORTOLAND J-P, Encyclopédie d’ostéopathie cranio-viscérale, Tome 3, DL,

2005

MACH-HOUTY A., L’ostéopathie, preuve à l’appui, Ed. Frison-Roche, 2014

MCCONNEL C. P., Clinical Osteopathy, A. T. Still Research Institute, 1917

PINSAULT N., MONVOISIN R., Tout ce que vous n’avez jamais voulu savoir

sur les thérapies manuelles, PUG, 2014

9

-II- Résultats

1. Ouvrages s’intéressant spécifiquement à

l’ostéopathie viscérale

BARRAL J-P., MERCIER P., Manipulations viscérales, Ed. Maloine, 1983

BARRAL J-P., MERCIER P., Manipulations viscérales, Ed. Frison-Roche, 1994-

1995

BARRAL J-P., MERCIER P., Manipulations viscérales, tome 1, Ed. Elsevier,

2004

Ces ouvrages offrent des rappels d’anatomie et de physiologies liées à la sphère

viscérale, ils posent les principes de l'approche ostéopathique viscérale par Jean

Pierre Barral et proposent des tests et techniques destinés au système digestif.

BARRAL J-P., MERCIER P., Manipulations viscérales, tome 2, Ed. Elsevier,

2004

Ce tome 2 est orienté vers la clinique et le diagnostique manuel de la sphère

viscérale que ce soit sur le plan médical ou ostéopathique, par ailleurs l'approche

de la sphère viscérale y est élargie à la rate et au pancréas.

BARRAL J-P., MERCIER P., Manipulations uro-génitales, Maloine, 1984

BARRAL J-P., LIGNER B., PAOLETTI S., PRAT. D., ROMMEVEAUX L.,

TRIANA D., Nouvelles Techniques uro-génitales, Verlaque, 1993

Les deux parutions s'inscrivent dans la continuité des différents volumes de

Manipulations viscérales, mais s'intéressent spécifiquement aux sphères

urologique et gynécologique.

BARRAL J-P., MERCIER P., Manipulations de la prostate, décembre 2004

Ce volume est dédié à la prise en charge viscérale de la prostate, il se compose de

rappels anatomiques, de tests et de techniques, toujours dans l'esprit de l'approche

ostéopathique développée par Jean Pierre Barral.

10

BARRAL J-P., MERCIER P., Le thorax, Manipulations viscérales, Ed. Sully,

décembre 2005

Comme son nom l'indique, ce livre s'intéresse particulièrement à l'approche des

organes intra-thoraciques (poumons, coeur, œsophage, trachée…), il s'inscrit dans

la continuité des ouvrages Le thorax et de Manipulations viscérales.

BARRAL J-P. CROIBIER A., Manipulations vasculaires viscérales, Ed. Elsevier,

2009

Jean Pierre Barral suggère un abord ostéopathique des structures vasculaires dans

un but de repérage anatomique mais également à visée thérapeutique.

BUTTET-MIQUEL B., Ostéopathie viscérale : recueil des techniques palpatoires

et diagnostiques selon Frantz Glénard, juin 2010

Cet ouvrage propose une présentation de la vie et de l’œuvre de Frantz Glénard

par l'explication d'expérimentations biographiques ainsi que par la description des

techniques de palpation viscérale développées par ce dernier.

CURTIL P., METRA A., Traité pratique d’ostéopathie viscérale, Ed. Frison-

Roche, 3ème éd. 2005

Curtil et Metra soumettent une synthèse de techniques viscérales ostéopathiques

issues de différents concepts.

HEBGEN E., Checklists d’ostéopathie viscérale, Maloine, 2011

Cet ouvrage propose de brefs rappels historiques sur l'évolution du viscéral et

offre un panel de techniques viscérales ostéopathiques.

HEBGEN E., Ostéopathie viscérale : Principes et techniques, préface de W.

Langer, traduction de M. Boghossian, Ed. Maloine, 11 janvier 2006

Eric Hebgen présente quatre courants en ostéopathie viscérale ; celui de Jean-

Pierre Barral, celui de Finet et Williame, celui de Kuchera et enfin les réflexes

Chapman.

11

LOSSING K. Visceral manipulation, in Fondations of Osteopathic Medecine,

2010

Fondations of Osteopathic Medecine réunit des données d'anatomie, de

physiologie, de sémiologie médicale et présente différentes disciplines

ostéopathiques. Parmi ces disciplines, nous nous sommes intéressés à la partie

concernant l'ostéopathie viscérale.

STONE C., Visceral and obstetric osteopathy, Elsevier, 2007

Cet ouvrage se compose de rappels anatomiques et physiologiques, de données

biomécaniques et neurologiques sur lesquelles s'appuie l'ostéopathie ainsi que de

descriptions de tests et techniques dirigées vers les sphères viscérale et

obstétrique.

12

2. Textes fondateurs et écrits faisant référence

aux textes fondateurs

HEMATY F., Ce que l’on sait de John Martin Littlejohn 1865-1947, disponible

sur le site : http://www.approche-tissulaire.fr/les-premiers/50-osteopathie/les-

fondateurs/les-pionniers/56-source-jml-fr, consulté le 23 février 2015

LITTLEJOHN J. M., Évolution et futur de l’ostéopathie, Discours prononcé

devant la Convention de l’Association des Ostéopathes Réunis, 12 octobre 1934,

disponible sur le site : http://www.approche-tissulaire.fr/les-premiers/50-

osteopathie/les-fondateurs/les-pionniers/56-source-jml-fr, consulté le 23 février

2015

LITTLEJOHN J. M., Ostéopathie, science biologique, disponible sur le site :

http://www.approche-tissulaire.fr/les-premiers/50-osteopathie/les-fondateurs/les-

pionniers/56-source-jml-fr, consulté le 23 février 2015

LITTLEJOHN J. M., Principes de l’ostéopathie, disponible sur le site :

http://www.approche-tissulaire.fr/les-premiers/50-osteopathie/les-fondateurs/les-

pionniers/56-source-jml-fr, consulté le 23 février 2015

LITTLEJOHN J. M., Une vue nouvelle de la science de la thérapeutique,

Discours donné devant la Société des Sciences de Londres, le 17 juin 1900,

disponible sur le site : http://www.approche-tissulaire.fr/les-premiers/50-

osteopathie/les-fondateurs/les-pionniers/56-source-jml-fr, consulté le 23 février

2015

Ces textes expriment la vision que portait Littlejohn sur l'ostéopathie de son

époque, celui-ci se basant principalement sur les données de physiologie et de

neurologie qui lui étaient accessibles.

SCHUSTER R. G., The Legacy of Carl Phillip McConnell, D.O., M.D., American

Academy of Osteopathy Convocation 21-25 March 2012 Louisville, Kentucky,

disponible sur le site :

http://files.academyofosteopathy.org/convo/2012Handouts/Schuster_AAO-

Convocation2012Lecture.pdf, consulté le 4 avril 2015

Ce texte se compose d'extraits d'écrits de Carl Phillip McConnell.

13

STILL A.T., Ostéopathie : recherche et pratique, Ed. Sully, 2001, trad. TRICOT

P.

Ostéopathie : recherche et pratique retrace des expériences thérapeutiques de la

vie d'Andrew Taylor Still.

STILL A.T., La philosophie et les principes mécaniques de l'ostéopathie, Ed.

Frison Roche, 2001

Dans cette publication, Still présente les concepts qu'il a développés en s'appuyant

sur des exemples pratiques issue de son expérience.

STILL A.T., Philosophie de l'ostéopathie, traduction P. Tricot, Ed. Sully, 2003

Cet ouvrage concerne principalement l'exposé des concepts développés par

l'auteur.

TRICOT P., Le 22 juin 1874, disponible sur le site : http://www.approche-

tissulaire.fr/images/stories/fichiers_pdf/pt_22juin.pdf, consulté le 24 février 2015

Ce texte s’interroge sur les origines de l'ostéopathie et ses potentielles influences

et revient sur les événements de la vie d'Andrew Taylor Still liés à la naissance de

cette thérapie manuelle.

14

3. Mémoires liés à l’ostéopathie viscérale

BOSCHER C., Affinités entre diagnostique ostéopathique viscéral et médecine

traditionnelle chinoise, Mémoire de fin d'études pour l’obtention du Diplôme

d’Ostéopathe FERO, Paris, 2012

L'auteur compare la médecine chinoise et l'approche viscérale ostéopathique à

visée diagnostique en mettant en valeur leurs points communs.

BOUSCARLE C., Approche comparée des pratiques viscérales ostéopathique et

médicale, Mémoire de fin d'études pour l’obtention du Diplôme d’Ostéopathe

FERO, Paris, 2013

C. Bouscarle compare les approches viscérales médicale et ostéopathique, révélant

leurs similitudes et leurs différences.

CARON C., Hyperexcitabilité neuromusculaire et racine du mésentère chez la

femme, mémoire de fin d'études pour le pour l’obtention du Diplôme d’Ostéopathe

FERO, Paris, 2011

Ce mémoire étudie les liens entre racine du mésentère et fonctionnement

neuromusculaire c'est à dire plus largement entre système viscéral et système

neuro-musculo-squelettique, chez une population donnée, ici la population

féminine.

8

DEPETRIS N., Mesure de la variation du seuil de la douleur à la pression des

muscles paravertébraux dorsaux moyens après une technique ostéopathique sur

l'estomac, mémoire de fin d'études pour le pour l’obtention du Diplôme

d’Ostéopathe, Paris, 2002

Constitué d'une étude clinique, ce mémoire vise à mettre en valeur l'influence

d'une technique viscérale sur le système musculo-squelettique rachidien.

ODEYER F., Réflexions sur la prise en charge ostéopathique des lithiases

vésiculaires chroniques à partir de données physiologiques nouvelles, mémoire de

fin d'études pour le pour l’obtention du Diplôme d’Ostéopathe FERO, Paris, 2011

Ce travail s'intéresse aux possibilités thérapeutiques de l'ostéopathe face aux

lithiases biliaires.

15

PERRIGUEY E., L'influence des viscères sur la posture, mémoire de fin d'études

pour le pour l’obtention du Diplôme d’Ostéopathe FERO, Paris, 2012

Ce mémoire s'interroge sur l'influence viscérale posturale et amorce une

démonstration de cette influence par une étude clinique.

16

4. Ouvrages généraux sur l’ostéopathie

(histoire, concepts…)

ABEHSERA A. Traité de médecine ostéopathique, Histoire et principes de

l'ostéopathie à ses débuts, Bruxelles, Ed. OMC, coll. SBORTM, 1986, préface du

Professeur Pierre Cornillot Doyen de la Faculté de Médecine de Bobigny

Université Paris Nord

Cet ouvrage retrace l'évolution de l'ostéopathie en s'intéressant à ses origines et

ses fondateurs.

Educational Council of Osteopathic Medecine (ECOP), Gossary of Osteopathic

Terminology, Glossaire de Terminologie Ostéopathique, Version révisée le 29

novembre 2001, Traduction de Laurence Deora DO. MRO (F) pour l’Académie

d’Ostéopathie de France, Relecture et correction : Pierre Tricot DO. MRO (F),

Didier Le Floch DO. MRO (F)

Ce glossaire rassemble les principales définitions de mots faisant référence plus

ou moins directe à l'ostéopathie, ses techniques, ses concepts.

ECKERT M., Le concept de globalité en ostéopathie, Collection Ostéopathie,

Editions De Boeck, 2013

Ce travail, s'inscrivant dans la continuité du mémoire de fin d'études de l'auteure,

est une réflexion sur le principe de globalité et sa place dans le concept

ostéopathique.

FOSSUM C. Histoire et évolution des techniques ostéopathiques 1re partie,

Apostill n°16, 2005, p.27-33

FOSSUM C. Histoire et évolution des techniques ostéopathiques 2e partie,

Apostill n°17 , 2005, p.29-36

Ces deux écrits constituent un travail historique sur les différentes approches

ostéopathiques et leurs évolutions.

17

GUEULLETTE J-M., L'ostéopathie une autre médecine, Collection "Essais",

PUR 2014

J-M Gueullette propose une réflexion sur la place de l'ostéopathie en la comparant

à la médecine « classique ». Il revient sur les atouts de l'ostéopathie et les

réticences auxquelles elle doit faire face, tout en analysant les paradoxes qui

l'entourent.

LE CORRE F., TOFFALONI S., L'ostéopathie, Ed. PUF, 3ème éd. (5 octobre

2007), collection : Que sais-je ?

F. Le Corre, médecin formé aux thérapies manuelles auprès de Robert Maigne et

S. Toffaloni, également médecin ostéopathe, décrivent les fondements et principes

de l'ostéopathie ainsi que les principaux types de techniques et des

indications/contre-indications thérapeutiques.

LE DRESSAY C., L'ostéopathie pour tous, Ed. Sully, février 2005

Sous forme d'une bande dessinée, l'auteur livre les clefs pour comprendre les

principes théoriques et pratiques de l'ostéopathie.

ROULIER G., L'ostéopathie - Deux mains pour vous guérir : origine, histoire,

principes et techniques, indications thérapeutiques, Dangles, 2010

Ce livre retrace l'histoire de l'ostéopathie, présente les différentes techniques dont

elle se compose et donne un aperçu de l'étendu de son champs d'action.

SANDOZ T., Histoires parallèles de la médecine Des fleurs de Bach à

l'ostéopathie, Ed. Du Seuil, 2005

Cet ouvrage retrace l'histoire des médecines dites « alternatives » et de certaines

thérapies paramédicales, il abord notamment l'histoire des thérapies manuelles

incluant celle de l'ostéopathie. Emile Thure Brandt comme Jean Pierre Barral y

sont cités.

18

5. Traités de pratique ostéopathique et recueils

de techniques

CHANTEPIE A., Ostéopathie clinique et pratique, Broché, 2010

Cette publication constitue un recueil de techniques ostéopathiques qui y sont

décrites et illustrées.

CHAUFFOUR P., Le lien mécanique ostéopathique : théorie et pratique, Ed.

Sully, 2003

CHAUFFOUR P., PRAT E., MICHAUD J., Le lien mécanique ostéopathique :

Artères et système neuro-végétatif, Ed. Sully, 2009

Les deux ouvrages proposent une méthode ostéopathique constituée d'un

ensemble de techniques spécifiques permettant d'examiner l'ensemble corps et de

hiérarchiser les lésions. D'un point de vue thérapeutique, le principal type de

technique décrite est celui du « recoil ».

10

NICHOLAS A. S., NICHOLAS E. A., Atlas des techniques ostéopathiques, Ed.

Maloine, 2011

L'Atlas des techniques ostéopathiques rassemble près de 350 techniques

ostéopathiques de différents types et notamment des techniques viscérales et

lymphatiques.

19

6. Divers

BAUGAS E., Profil et motivations des patients consultant en ostéopathie, Thèse

pour le Diplôme d'Etat de Docteur en Médecine, Université de Nantes, 2013

Cette thèse s'attache à étudier les caractéristiques socio-démmographiques des

consultants en ostéopathie ainsi que les raisons les motivant à consulter.

BUSQUET L., BUSUET-VANDERHEYDEN M., Les chaînes physiologiques -

Tome VI - La chaîne viscérale Thorax - Gorge - Bouche Description et traitement,

Ed. Busquet, 2010

Ce tome s'intéresse aux chaînes musculaires et posturales en lien avec les viscères

du thorax, du cou et de la sphère orale.

DEBOUTE O., L'ostéopathie viscérale au service des cervicalgies, IPEO,

disponible sur http://www.itmp.fr/wp-content/uploads/deboute.pdf

L'auteur aborde les relations entre viscères et rachis cervical, distinguant des

relations mécaniques, posturales, neurologiques réflexes et fluidiques.

GEHIN A., Concept de tenségrité en ostéopathie : application pratique,

Sauramps Médical, 2010

L'auteur expose le concept de tenségrité et les applications que l'on peut en faire

en ostéopathie.

HEUTY F. Diagnostic d'une douleur projetée en ostéopathie, mémoire de fin

d'études pour le pour l’obtention du Diplôme d’Ostéopathe, CSOF

Ce mémoire s'intéresse aux douleurs projettées et à leur diagnostic en ostéopathie,

s'appuyant sur des justifications neuro-physiologiques. Il aborde notamment les

douleurs projetées viscérales et les interaction entre viscères et système neuro-

musculaire.

KORR I., Bases phisiologiques de l’ostéopathie, Ed. Frison Roche, 1982

Irvin Korr s'intéresse à l'explication neuro-physiologique du diagnostic et de

l'action ostéopathiques.

20

PAOLETTI S., Les fascias : rôle des tissus dans la mécanique humaine, Ed.

Sully, 2009

Cet ouvrage est dédié aux fascias, il propose des rappels d'anatomie et de

physiologie ainsi que des données cliniques. Il abord le lien étroit qu'il existe entre

les organes du corps humain et l'ensemble du tissu conjonctif et des tissus de

soutien.

21

-III- Discussion

1. L'ostéopathie viscérale et les fondateurs

a. Andrew Taylor Still

«Se couper de Still, du tronc commun, c'est donc amputer son ostéopathie

d'immenses pans de pratique.»7

Fondateur de l'ostéopathie, Andrew Taylor Still, grandit en Virginie puis dans le

Missouri (États-Unis), notamment sous l'influence de son père, Abraham Still,

pasteur et médecin.

Suite à la Guerre de Sécession, à laquelle Still participe en tant que médecin, et à

la perte de plusieurs être chers qui succombent à la méningite, il est amené à

fortement remettre en question la médecine américaine de son époque. Cette

profonde réflexion est nourrie par certaines expériences thérapeutiques, la plus

connue étant celle de 1874, lorsqu'il soigne un enfant atteint de dysenterie8. Cette

expérience participe à la "révélation" de l'ostéopathie, thérapeutique qu'il

développera jusqu'à sa mort, publiant quatre ouvrages9 et créant The American

School of Osteopathy à Kirksville.

Il est évident que l'influence de Still dans l'histoire de l'ostéopathie est

incontournable. Il nous a donc semblé essentiel d'étudier ses écrits afin de pouvoir

estimer la place que l'ostéopathie viscérale pouvait y occuper.

Tout d'abord, lorsque l'on lit A. T. Still, on est frappé par le peu de techniques

décrites dans ses ouvrages que ce soit concernant l'appareil locomoteur ou d'autres

systèmes. Il paraît dont difficile de vraiment définir le genre d'ostéopathie que

celui-ci pratiquait.

Ces écrits constituent un partage de concepts personnels concernant la vie, la

santé, le soin, la médecine ainsi que d'anecdotes autobiographiques ayant pu

influencer sa pensée.

7 ABEHSERA A. Traité de médecine ostéopathique, Histoire et principes de l'ostéopathie à ses débuts, Bruxelles, Ed. OMC, coll. SBORTM, 1986, p.3

8 TRICOT P., Andrew Taylor Still le fondateur, http://www.approche-tissulaire.fr/les-premiers/50-osteopathie/les-fondateurs/les-pionniers/443-source-ats-fr consulté le 26 avril 2015

9 STILL A.T., Autobiographie, Ed. Sully, 2008, trad. TRICOT P. STILL A.T., Philosophie de l'ostéopathie, traduction P. Tricot, Ed. Sully, 2003 STILL A.T., La philosophie et les principes mécaniques de l'ostéopathie, Ed. Frison Roche, 2001 STILL A. T., Ostéopathie recherche et pratique, Ed. Sully, 2001, trad. TRICOT P.

22

Pourtant, Still fait constamment référence à des pathologies, la plupart de ces

pathologies étant des pathologies organiques, souvent viscérales.

Si l'on se fie à son livre Ostéopathie : recherche et pratique10, on peut déjà

recenser les pathologies (ou parfois sphères d'intervention dirons-nous plutôt)

suivantes :

Maladies du cuir chevelu

Éruptions de la face

Maladies de l’œil ;

(Larmoiement, Ptérygion, Blépharite

granuleuse,

Astigmatisme, Strabisme, Cataracte)

Maladies de la gorge et du cou

Maladies du larynx

Maladies du pharynx

Amygdalite aiguë

Amygdalite chronique

Dépôts sur les amygdales

Goitre

Goitre exophtalmique

Calculs biliaires

Constipation

Diarrhée

Dysenterie

Appendicite

Thyroïdite

Myxœdème

Prévention et éradication des maladies

des poumons

Maladies des poumons

Pneumonie

Tuberculose pulmonaire

Asthme

Maladies du cœur

Hoquet

Digestion

Dyspepsie

Maladies du foie

Ver solitaire

Maladies du rein

Tumeurs abdominales et autres

Hernie

Par les pathologies qu'il cite mais aussi par l'anatomie qu'il décrit, le « vieux

docteur » insiste fréquemment sur l'importance des viscères.

10 STILL A. T., Ostéopathie recherche et pratique, Ed. Sully, 2001, trad. TRICOT P

23

En parallèle, on peut noter, et ce à plusieurs reprises, qu'il évoque les viscères en

indiquant que l'approche ostéo-articulaire semble suffire à les soigner.11 Parfois

même, il va jusqu'à fortement déconseiller l'abord viscéral.12

A première vue, Still ne semble pas ou peu pratiquer l'ostéopathie viscérale au

sens strict mais plutôt une ostéopathie musculo-squelettique s'intéressant à

restaurer la santé des viscères en améliorant leur vascularisation.

Pourtant, malgré le peu de techniques décrites explicitement et le fait que Still

semble s'intéresser tout particulièrement à la manipulation ostéo-articulaire, on

peut trouver, dans Ostéopathie recherche et pratique ainsi que dans La

philosophie et les principes mécaniques de l'ostéopathie, quelques descriptions de

techniques viscérales.

11. STILL A. T., Ostéopathie recherche et pratique, Ed. Sully,2001, trad. TRICOT P., p. 87 : Still écrit à propos du poumon : « J’ai accordé au poumon toute mon attention, l’examinant et le traitant comme une partie de la machine de vie. J’ai suivi cette piste pendant plusieurs années. Au début, je fus très déçu en découvrant que quand j’avais correctement ajusté l’épine dorsale et les côtés, la pathologie disparaissait, et que mon patient atteint de pleurésie ou de pneumonie guérissait sans la moindre goutte ou dose de médicament ; j’étais surpris, déçu et content d’avoir découvert qu’une fois tous les os bien en place et les jointures parfaitement articulées, l’ensemble du corps agissait comme une machine capable de fabriquer et d’employer toutes les substances nécessaires pour se réparer et se maintenir en bonne santé. » 12. Ibid., p. 136 : « Pendant trente ans, j'ai démontré que les pathologies intestinales dépendent largement de la correction de la colonne vertébrale. Il est inutile de tracasser les intestins par des tractions, des pressions ou des frottements ; il suffit de les dégager doucement du bassin lorsque le patient est dans la position genoux-poitrine. En dehors de cela, vous risquez de mal faire et d'augmenter les ravages de l'inflammation. »

24

Ainsi, Andrew Taylor Still ne se contentait pas d'investiguer articulations, muscles

et fascias mais testait directement l'appareil digestif13. Ceci le menant à traiter

grâce à des manipulations viscérales. Il soignait alors les patients présentant des

signes fonctionnels comme la constipation14 ou la dyspepsie15 mais aussi des

pathologies telles qu 'une atteinte de la vésicule biliaire (lithiases biliaires16) ou

même l'appendicite17. On peut signaler qu'il pratiquait même des touchers

vaginaux chez les femmes en cas de « ménopause difficile »18.

13 STILL A.T., La philosophie et les principes mécaniques de l'ostéopathie, Ed. Frison Roche, 2001, p. 138 : « Nous explorerons du rectum à l'intestin grêle, ainsi que le gros intestin, l'estomac et la gorge, afin d'avoir une connaissance pratique de la position normale des différentes parties du tractus gastro-intestinal. […] L'ostéopathe doit, s'il veut réussir dans son traitement, connaître parfaitement tout le système digestif. » 14 STILL A. T., Ostéopathie recherche et pratique, Ed. Sully,2001, trad. TRICOT P., p. 132 : « Mon patient étant dans cette position, je peux avec mes deux mains atteindre le dessous de l'abdomen et doucement, tirer le contenu de l'abdomen et du bassin vers le haut et l'avant, vers le nombril, ce qui soulage un bassin encombré et gêné. Je fais cela avec le plat des mains, je dis bien le plat de mes mains. Ne touchez pas l'abdomen avec l'extrémité des doigts, jamais. Vous risqueriez de meurtrir un rein, l'uretère, la rate, le péritoine, l'épiploon ou le foie ; tous pourraient être blessés par une manipulation brutale. » 15 Ibid., p. 126 : « Faites ensuite allonger votre patient sur le côté droit et tirez l'estomac vers le côté gauche, afin de soulager le plexus solaire de toute obstruction de la circulation nerveuse et sanguine consécutive à une pression de l'estomac ou des intestins. […] Une fois tout cela rétabli, la digestion redevient normale et tous les symptômes communs à la dyspepsie disparaissent. » 16 Ibid., p. 129 : « Lorsque je suis appelé auprès d'un patient souffrant de ces douleurs au côté droit, dans la région de la vésicule biliaire, je fais coucher le malade sur le dos, je fléchis ses genoux et les amène assez haut pour relâcher les muscles abdominaux de façon à me permettre d'explorer la région du conduit biliaire et d'y rechercher toute substance étrangère. […] Assis à gauche du patient, élevez votre coude vers son épaule droite, posez la main doucement, sur le côté du patient, en étendant les doigts à environ sept centimètres sous le nombril. Souvenez-vous de ce que je vous dis : aucun de vos doigts ne doit fourrager, mais ressentir doucement la région du conduit biliaire. Ensuite, le petit doigt droit posé en arrière de la grosseur, poussez-la, du canal biliaire vers la gauche, lentement et doucement, en maintenant le petit doigt fermement posé. Posez ensuite l'annulaire à côté de l'auriculaire, et maintenez-le fermement en place. Puis le majeur, en le maintenant fermement un moment. A ce moment-là, posez l'index pour soutenir, fermement mais doucement, derrière la grosseur, chaque doigt venant à son tour renforcer le premier. Soyez patient, bougez lentement, et donnez au canal biliaire le temps de se dilater. A ce moment-là la grosseur disparaîtra, à peu près au moment où elle gagnera l'intestin. »

17 Ibid., p. 138 : « Je place le patient dans position genoux-poitrine. Puis je pose les mains à plat sur la partie inférieure de l'abdomen et, avec une pression douce, je tire les intestins, le caecul et toutes les structures de cette région vers le diaphragme. Je tire et presse doucement vers le haut tout le contenu de la partie inférieure de l'abdomen, pour le retirer de l'état de compression dans lequel il se trouve dans le bassin. Pendant que la patient est dans la position genoux-poitrine, je procède à la correction de l'ensemble de la colonne vertébrale, selon la méthode que j'ai déjà indiquée. » 18 Ibid., p. 179 : « Introduisez deux doigts dans le vagin et, les parties molles des doigts faisant faces au rectum, écartez les doigts jusqu'à ce qu'il y ait une légère pression de chaque côté, puis passez les doigts de la partie antérieure de l'ouverture vaginale à la partie postérieure. Faites cela pour libérer les glandes de Bartholin et donner liberté et vitalité à l'approvisionnement nerveux et sanguin du pelvis. »

25

Par ailleurs, A. T. Still souligne constamment l'importance de la circulation

artérielle19, veineuse ainsi que lymphatique. La plupart des techniques, quelques

soient les structures sur lesquelles elles agissent, semblent destinées à lever les

obstructions pouvant altérer la physiologie circulatoire.

Nous noterons que d''autres auteurs confirment la pratique viscérale du Dr Still et

son intérêt pour les systèmes circulatoires, comme ici Eric Hebgen : «A. T. Still

(1828-1917) traitait déjà dès la fin du 19ème siècle des maladies des organes

internes par l'intermédiaire de la circulation du sang et de la lymphe. Partant de

l'anatomie, il décrit dans ses livres des traitements qui sont censés améliorer la

circulation artérielle et veineuse d'un organe; Par ailleurs, dans les premières

années de l'ostéopathie, il décrit des techniques de pompage pour la lymphe et de

traitement du système nerveux végétatif.»20

Selon Fossum également, qui publie, dans le n° 16 d'Apostill, un article

concernant l’Histoire et évolution des techniques ostéopathiques, Still pratiqua

notamment des techniques viscérales, entre 1890 et 191721. Fossum tente de

retracer une chronologie des techniques ostéopathiques :

«Années 1890 : utilisation de la manipulation ostéopathique en direction des lésions

ostéopathiques.

1905 : Les techniques de tissus mous prennent en compte les tissus somatiques et viscéraux.

1915 : Developpement des traitements pour mobiliser les fluides corporels et la lymphe

Années 1920 : Strain ligamentaire articulaires

Concept de mouvement crânien

Années 1930 : Réflexe de Chapman

Techniques crâniennes

Années 1950 : Muscle Energy Techniques

Techniques fonctionnelles

Relâchement myofascial

Années 1960 : Counterstrain ».

19 STILL A.T., La philosophie et les principes mécaniques de l'ostéopathie, Ed. Frison Roche, 2001, p. 42 : «Les artères nourrissent et les veines commencent le travail de rénovation. La loi de l'artère et la veine est universelle dans tout être vivant et l'ostéopathe doit le savoir et s'u conformer sinon il n'obtiendra jamais de guérison.»

20 HEBGEN E., CHECKLISTS en ostéopathie viscérale, Ed. Maloine, 2011, p. 3

21 FOSSUM C. Histoire et évolution des techniques ostéopathiques 1re partie, Apostill n°16, 2005, p.27-33 (p. 28)

26

Il continue ce travail historique dans l'Apostill n°17 où il confirme à nouveau la

place que prenait le viscéral dans la pratique de Still, de même que ces disciples :

« La manipulation des viscères et des tissus associés n'est pas une invention

récente, bien au contraire. Traditionnellement elle était pratiquée par de

nombreux grands praticiens et enseignants aux débuts de l'ostéopathie : Andrew

Taylor Still, Carl P. McDonnell, Charles Hazzard, Martin Young et William G.

Sutherland. »22

b. Phillip Carl McConnell23 Parmi les élèves de Still, Carl Phillip McConnell D.O, décrit comme « un penseur

scientifique, réservé, aimant, clair-voyant »24 par George M. Laughlin D.O, fut un

fervent supporter de l'approche viscérale ostéopathique.

A l'époque les techniques viscérales étaient principalement évoquées sous le nom

de «ventral technics» (techniques ventrales)25. McConnell considérait que ces

techniques faisaient partie intégrante de l'ostéopathie et que celle-ci ne pouvait

s'en dissocier sans porter atteinte au principe de globalité (qui, sans être

revendiqué aussi ouvertement qu'il ne l'est actuellement par les ostéopathes, était

déjà présent).26

22 FOSSUM C. Histoire et évolution des techniques ostéopathiques 2e partie, Apostill n°17 , 2005, p.34 23 http://www.osteopathie-schule.de/pdfs/ori/publikationen/VOSDArtikel-MCConnell.pdf, consulté le 24 avril 2015, trad.

Lena Jankielewicz 24 SCHUSTER R. G., The Legacy of Carl Phillip McConnell, D.O., M.D., American Academy of Osteopathy Convocation 21-25 March 2012 Louisville, Kentucky, disponible sur le site http://files.academyofosteopathy.org/convo/2012Handouts/Schuster_AAO-Convocation2012Lecture.pdf, consulté le 4 avril 2015 : « Throughout the history of osteopathy, the one outstanding man next to A. T. Still, was and is, Carl P. McConnell – a quiet, lovable, clear-minded, scientific thinker, with a rare understanding of the human body » (« A travers l'histoire de l'ostéopathie, l'homme exceptionnel aux côtés d'A. T. Still, fut et est, Carl P. McConnell – un penseur scientifique, réservé, aimant, clair-voyant, doté d'une rare compréhension du corps humain « ), citation de George M. Laughlin D.O. 25 FOSSUM C. Histoire et évolution des techniques ostéopathiques 2e partie, Apostill n°17 , 2005, p.34 : « Cette approche était couramment répertoriée sous le terme « Techniques Ventrales » dans les premiers temps de l'ostéopathie » 26 SCHUSTER R. G., The Legacy of Carl Phillip McConnell, D.O., M.D., American Academy of Osteopathy Convocation 21-25 March 2012 Louisville, Kentucky, disponible sur le site http://files.academyofosteopathy.org/convo/2012Handouts/Schuster_AAO-Convocation2012Lecture.pdf, consulté le 4 avril 2015, «Thus in practice to technically ignore the ventral plane is exceedingly shortsighted» (Ainsi, en pratique ignorer le plan ventral est extrêmement réducteur) «Those who overlook ventral technic are practicing a greatly limited osteopathy. In fact, confining osteopathic ajustment to the posterior plane (no matter how fundamental spinal therapy is) means the neglect of essential factors that even enter into vertebral and pelvic pathology.» (Ceux qui négligent les techniques ventrales pratiquent une ostéopathie bien limitée. De fait, restreindre l'ajustement ostéopathique au plan postérieur (peu importe combien la thérapie vertébrale est fondamentale) veut dire la négligence de facteurs essentiels qui font partie intégrante de la pathologie vertébrale et pelvienne) Ventral Technic, 1936 Composite lesions

27

C. P. McConnell fut à l'origine d'un ouvrage intitulé « Clinical Osteopathy »

(Ostéopathie clinique) publié en 1917 par l'A. T. Still Research Institute27.

Malheureusement, nous n'avons pu nous procurer cet ouvrage car il ne semble pas

avoir été édité en France, le manque de temps ne nous a pas permis de le faire

parvenir des États-Unis.

c. John Martin Littlejohn

«Le système nerveux sympathique : un médiateur entre les activités somatiques et

les activités viscérales»28

Émigré aux Etats-Unis d'origine anglo-saxonne, Littlejohn rencontre Andrew

Taylor Still en 1892. Suite à cette rencontre il se forme à l'ostéopathie alors même

qu'il avait d'ores et déjà étudié la littérature, la théologie, le droit, la philosophie et

été diplômé de médecine29. Cette longue expérience universitaire lui vaut de

devenir professeur de physiologie au sein du collège ostéopathique de Kirksville.

A la suite de conflits entre Still et Littlejohn, ce dernier quitte Kiksville et crée en

1900 l'Americian College of Osteopathy, Medicine and Surgery de Chicago.

Puis, après son retour au Royaume-Uni en 1907, il fonde en 1917 la première

école européenne d'ostéopathie à Londres ; la British School of Osteopathy.

Nous n'avons pu trouver de traces éventuelles attestant d'une pratique de

l'ostéopathie viscérale par Littlejohn. Mais celui-ci s'intéressa fortement à la

physiologie et à la neurologie. Cet intérêt a permis d'apporter des justifications,

plus poussées que celle proposées par ses prédécesseurs, au traitement

ostéopathique, et ce, notamment par la connaissance du système nerveux

autonome et par conséquent des interactions entre viscères et appareil musculo-

squelettique (tout particulièrement rachidien)30. Serge Paoletti dit même de lui que

« c'est lui qui est à l'origine du concept somato-viscéral et viscéro-somatique »31.

27 http://digitalcommons.pcom.edu/classic_med_works/1/ consulté le 24 avril 2015 28 KORR I., Bases physiologiques de l’ostéopathie, Ed. Frison Roche, 1982, p. 149 29 http://www.efo.eu/portal/index.php?option=com_content&view=article&id=68&Itemid=74 consulté le 12 avril 2015 30 BECKERT M., Le concept de globalité en ostéopathie, Collection Ostéopathie, Editions De Boeck, 2013, p. 38 31 PAOLETTI S., Sur les traces de John Martin Littlejohn, Apostill n°4, octobre 1999, p. 11, cité dans : ECKERT M., Le

concept de globalité en ostéopathie, Collection Ostéopathie, Editions De Boeck, 2013, p

28

d. William Garner Sutherland

William Garner Sutherland (1873-1954)32 , fut à l'origine de l'ostéopathie

crânienne.

Imprimeur puis journaliste, cet américain, originaire du Middle West, se forme à

l'ostéopathie auprès d'A. T. Still à Kirksville de 1898 jusqu'à l'obtention de son

diplôme en 1900. Au cours de ses études, il s’interroge sur l'anatomie du crâne et

sur son éventuelle mobilité.

Suite à de longues années de recherches ainsi que d'expérimentations sur son

propre crâne, il publie The Cranian Bowl (La Boule Crânienne)33 en 1939. Il y

décrit les cinq pilliers fondamentaux34 de l'ostéopathie crânienne qui sont les

suivants :

- motilité du Système Nerveux Central (SNC) : il existerait un mouvement

d'expansion/rétraction cellulaire du SNC

- fluctuation du Liquide Céphalo-Rachidien (LCR)

- propriétés des Membranes de Tensions Réciproche (MTR) : il existe une

continuité entre les méninges et les fascias du corps

- lien entre la Dure-Mère et le sacrum : il existe un mouvement involontaire du

sacrum

- mobilité des os du crâne.

Bien que Sutherland soit principalement connu pour le rôle qu'il a tenu dans le

développement de l'ostéopathie crânienne, il pratiquait d'autres disciplines

ostéopathiques dont l'ostéopathie viscérale fait partie35. En effet, on peut par

exemple trouver traces d'une technique de « giration du foie » dont il fit des

démonstrations36.

32 http://www.approche-tissulaire.fr/les-pionniers/48-source-ats consulté le 24 avril 2015 33 et 34 BEL F., Cours de techniques crâniennes, IFCO, 2014-2015 35 SUTHERLAND W. G., Enseignements dans la science de l'ostéopathie, Sutherland Cranial Searchings Foundation,

2002, trad. EPINASSE V., relus et corrigé par TRICOT P. et ROONSMANS D., p. 207-216 36SUTHERLAND W. G., Enseignements dans la science de l'ostéopathie, Sutherland Cranial Searchings Foundation,

2002, trad. EPINASSE V., relus et corrigé par TRICOT P. et ROONSMANS D., p. 278

29

De plus, les concepts crâniens qu'il décrit, furent repris et mis en relation avec la

sphère viscérale par Jean-Pierre Barral, et ce plusieurs années plus tard. Nous

reviendrons sur ce point ultérieurement concernant l'approche viscérale

développée par Jean-Pierre Barral.

30

2. Autres origines de l'ostéopathie viscérale

"Notre nature est dans le mouvement, le repos entier est dans la mort"37 Blaise

Pascal

a. Martel Thure Emil Brandt (1819-1895) et Henri Stapfer

«Chaque organe du corps possède un volume et un emplacement que l'expérience

nous enseigne comme étant normaux, et chaque déviation à partir de cette norme

apprise peut être acceptée comme preuve de maladie.» J. Mackensie38

Thure Brandt étudie tout d'abord au sein d'une école de masseurs en Suède. On

peut penser qu'il fut fortement influencé par Per Henrik Ling (1776-1839)39 connu

pour être à l'origine de ce qu'on appelle la «gymnastique suédoise». D'après

certains auteurs, ce dernier s'intéressa également à la sphère viscérale40.

Brandt aurait également été influencé par la famille Sénépart41, d'origine flamande,

installée à Charleroi. L'un des membres de la famille, sage-femme, aurait pratiqué

et enseigné à ses proches des techniques par toucher vaginal et toucher rectal

visant à éviter les hémorragies gynécologiques. D'après André Brunel, Thure

Brandt aurait été en relation avec l'un des Sénépart42.

A l'ouverture de son cabinet, sa patientèle se compose principalement de femmes.

37 BRUNEL A., Introduction à l'étude de l'ostéopathie gynécologique, La méthode de Thure Brandt, Ed. André Brunel, 1982, p. 21 38 Ibid., p. 41 39 SANDOZ T., Histoires parallèles de la médecine des fleurs de Bach à l'ostéopathie, Ed. Du Seuil, 2005, p. 192 40 BUTTET-MIQUEL B., Ostéopathie viscérale : recueil des techniques palpatoires et diagnostiques selon Frantz Glénard, juin 2010, p.12 : « Ling (1779-1830) créateur de la gymnastique dite suédoise, pratiqua des manipulations viscérales » 41 Ibid., p. 13 42 BRUNEL A., Introduction à l'étude de l'ostéopathie gynécologique, La méthode de Thure Brandt, Ed. André Brunel, 1982, p. 65

31

Ceci peut expliquer qu'il s'intéressa essentiellement aux maladies gynécologiques

comme l'indique le nom de son ouvrage principal : Traitement des maladies des

femmes43.

Dans ces écrits, Brandt décrit des massages ou plutôt des manipulations

gynécologiques telles que la «Réduction de l'utérus retroversé»44, l'« Elévation de

l'utérus »45, le «Massage de l'utérus»46 ou encore la correction des « Utérus déviés

et fixés »47. Il fut réputé comme étant capable de soigner les prolapsus génitaux48.

Il semblerait que certaines de ces techniques soient encore utilisées aujourd'hui49.

Bien qu’il se soit grandement intéressé à la sphère gynécologique, il élargit son

champs d'action à d'autres sphères viscérales. Ainsi en 1872, il traite un « rein

flottant »50.

Et rappelons que c'est la réduction d'un prolapsus rectal en 184751 sur un militaire

qui l'incite à élargir son champs thérapeutique aux manipulations plutôt que de se

cantonner à la gymnastique ou au massage tel qu'on lui a enseigné. Il décrit plus

tard une technique d'élévation du rectum dans Traitement des maladies des

femmes52, bien que celle-ci ne soit pas réservée exclusivement aux femmes. On

trouve également dans ce livre un traitement destiné à modérer l'« l'inflammation

du caecum »53.

Les techniques que l'auteur décrit, sont un mélange de gymnastique, de massage et

de manipulations des organes par pression, vibration, élévation… Il pensait que

par ces moyens, il pouvait redonner aux organes leur place et réguler les pertes

sanguines lors d'anomalies de cycle menstruel chez les femmes.

43..BRANDT T., Traitement des maladies des femmes, Ed. Avenir des Sciences, 1991 44 Ibid, p. 56 45 Ibid, p. 72 46 Ibid, p. 93 47 Ibid, p. 159

48 BRUNEL A., Introduction à l'étude de l'ostéopathie gynécologique, La méthode de Thure Brandt, Ed. André Brunel, 1982, p. 33 : « En 1870, c'est la première guérison d'une descente du vagin. »

49 HEBGEN E., Checklists d’ostéopathie viscérale, Maloine, 2011, p. 3 : « On lui doit la dénomination d'une technique de repositionnement pour le prolapsus utérin qui est encore utilisée aujourd'hui avec succès. » 50 BRUNEL A., Introduction à l'étude de l'ostéopathie gynécologique, La méthode de Thure Brandt, Ed. André Brunel, 1982, p. 33 51 BRUNEL A., Introduction à l'étude de l'ostéopathie gynécologique, La méthode de Thure Brandt, Ed. André Brunel, 1982, p. 29

52 BRANDT T., Traitement des maladies des femmes, Ed. Avenir des Sciences, 1991, p. 87

53 Ibid., p. 214-216 : «Le traitement vise d'abord la disparition de la sensibilité, le rétablissement des fonctions péristaltiques caecales, et le retour à une vie active. Je commence le massage à gauche pour faire descendre les matières fécales stagnantes. Puis, remontant, je gagne le coude des colons transverse et descendant et j'approche graduelleemnt, d'une main légère la région affectée, sans y toucher le premier jour. De cette façon on arrive assez vite à agir sur le caecum et le colon ascendant. […] On exécutera la gymnastique appropriée. Les mouvements des muscles dorsaux troublant la régularité des selles seront évités. On les provoquera quotidiennement par un moyen inoffensif, tel que les lavements.» […]

32

Durant sa carrière, Thure Brandt enseigne sa pratique à Henri Stapfer, médecin

gynécologue français 54. Stapfer passionné par ce qu'il apprend, perfectionne la

méthode55, publiant à son tour à partir de 191256.

Malgré les efforts de Stapfer, il semble que l'arrivée de la première guerre

mondiale (1914-1918) engendre un désintérêt vis à vis des travaux de Brandt et

Stapfer57.

En parallèle, d'autres s'étaient intéressés à l'emploi du massage destiné aux

organes, comme Heinrich Roeder (1866-1918), médecin allemand. Il propose un

«massage de l'amygdale» au début du XXème siècle mais celui-ci ne rencontrera

que peu de succès58.

Bien que le couple T. Brandt et H. Stapfer n'aient pas de poins communs avec A.

T. Still au départ, il existe de nombreuses similitudes dans leurs écrits.

André Brunel décrit ainsi les liens qui les unissent : «En effet, tout chez eux rappelle les

idées maîtresses et originales d'Andrew Taylor Still, le fondateur de l'ostéopathie. A la fin de

siècle dernier, pendant que Still jetait les bases de la doctrine et de la philosophie ostéopathique

aux U.S.A, Thure Brandt et Stapfer, dans notre vieille Europe, voyaient sensiblement les mêmes

choses, mais sur un plan viscéral et plus particulièrement gynécologique. […] Pendant que

l'Américain installait le RAISONNEMENT OSTEOPATHIQUE (ce qui n'existe pas dans

l'Allopathie…), le Suédois, issu de la lignée de Per Henrik Ling, un autre Suédois, puis le

Français, cheminaient dans la même direction, mais sans élargir le concept ; sans le cadrer dans

une synthèse générale, sans bâtir un corps de doctrine. Mais si la notion de « structure » chère à

Still n'est pas aussi poussée et généralisée (ce dernier a surtout privilégié le domaine pariétal et

son influence sur les vaisseaux et les viscères), par contre, chez Thure Brandt et Stapfer, que

d'apports enrichissants en ce qui concerne la vie des structures viscérales du bas-ventre, le rôle de

la circulation (bien qu'il y ait la « règle de l'artère » de Still) et ses rapports avec les tissus.

D'autre part, notre triade préférée de « FORME-STRUCTURE-FONCTION » se retrouve dans

leurs écrits. En résumé, nous considérons Thure Brandt et Stapfer comme les promoteurs de

l'Ostéopathie viscérale, au même titre que Still pour l'Ostéopathie générale et William Garner

Sutherland pour l'Ostéopathie crânienne.». […]59.

54 BUTTET-MIQUEL B., Ostéopathie viscérale : recueil des techniques palpatoires et diagnostiques selon Frantz Glénard, juin 2010, p.13

55 HEBGEN E., Checklists d’ostéopathie viscérale, Maloine, 2011, p. 3

56 BRUNEL A., Introduction à l'étude de l'ostéopathie gynécologique, La méthode de Thure Brandt, Ed. André Brunel, 1982, p. 66

57 Ibid.

58 SANDOZ T., Histoires parallèles de la médecine des fleurs de Bach à l'ostéopathie, Ed. Du Seuil, 2005, p. 193

59 BRUNEL A., Introduction à l'étude de l'ostéopathie gynécologique, La méthode de Thure Brandt, Ed. André Brunel, 1982, p. 21

33

Il est difficile alors de savoir quelle est la part d'enseignement héritée de chacun

au court de l'évolution de l'ostéopathie viscérale. Mais il semble évident que

l'héritage de Still a été mélé au cours de l'histoire à d'autres influences dont celle

de Thure Brandt et Stapfer est non négligeable.

b. Frantz Glénard (1848-1920)

Médecin français, Frantz Glénard est à l'origine de nombreuses des techniques

manuelles de diagnostic viscéral. Celui-ci fut aidé de son fils Roger à qui l'on doit

une biographie de son père.

Glénard est connu pour avoir été le premier à décrire les ptoses viscérales, il dédie

un ouvrage complet à ce travail60. Il s'intéresse également aux pathologies du foie,

décrivant ce qu'il appelle l'«hépatisme». Par ailleurs, il émet l'idée que les viscères

se manifestent différemment à la palpation selon qu'ils sont en état de santé ou en

état pathologique, faisant ainsi de la palpation le cœur de ses outils diagnostics.

Malgré le nombre de techniques diagnostiques décrites par Glénard, il se cantonna

à une approche manuelle diagnostique et non thérapeutique61. Pour autant, il

s’interrogea sur les traitements possibles pour les ptoses viscérales notamment et

inventa à la suite une sangle abdominale visant à corriger une ptose de l'intestin

grêle. Celle-ci permettait selon lui de diminuer les contraintes engendrées sur les

organes environnant et d'aider au bon fonctionnement du diaphragme62.

Sensiblement à la même époque, Claude Sigaud (1862-1921), médecin lyonnais,

repris la trouvaille d'Avenbrugger, médecin autrichien du XVIIIème siècle, en

s'intéressant à la percussion abdominale63. Encore une fois, ses travaux se firent

dans un but diagnostic seulement et il ne développa aucune approche manuelle à

visée thérapeutique.

60 GLENARD F., Les ptoses viscérales, Ed. Alcan, 1899

61 Ibid., p. 23

62 Ibid., p. 44

63Ibid., p. 23

34

c. Le courant « Barral

Kinésithérapeute puis ostéopathe, Jean-Pierre Barral s'est formé à l'European

School of Osteopathy de Maidstone au Royaume-Uni obtenant son diplôme en

197464. A cette époque l'ESO de Maidstone ne dispensait pas de cours

d'ostéopathie viscérale.

Mais en tant que kinésithérapeute, J-P. Barral travailla au sein d'un service

hospitalier de pneumologie à Grenoble65, ce qui participa à le sensibiliser à

l'importance des viscères et aux conséquences fonctionnelles des troubles

organiques.

C'est l'un de ses patients réguliers qui l'incite à s'intéresser d'avantage à

l'interrelation entre viscères et rachis, lui racontant que ses rachialgies avaient été

nettement améliorée par une sorte de manipulation abdominale. Barral constata

que l'amélioration de la symptomatologie s'était accompagné d'une amélioration

tissulaire qu'il retrouva à la palpation.

L'ostéopathe français commence alors l'expérimentation de manipulations

gastriques sur plusieurs de ses patients, ceux-ci se concluant par de bons résultats

cliniques.

En parallèle, il s'intéresse au diagnostic thermique manuel66 remarquant qu'il existe

souvent une modification de la température et de la texture tissulaires sur les

zones corporelles ayant, par exemple, subit des chirurgies.

Barral confronte ses intuitions cliniques à l'imagerie médicale grâce au Dr Serge,

à Grenoble67. L'échographie et l'amplificateur de brillance le confortent dans son

travail puisqu'il observe des changements au niveau des viscères avant et après

manipulation68.

64.. «How Did Visceral Manipulation Begin?» disponible sur le site : http://www.barralinstitute.com/about/vm.php consulté le 30 avril 2015 65 Ibid.

66 «A propos de Jean-Pierre Barral, «Le diagnostic thermique manuel »», disponible sur http://www.formation-osteo.com/formation_osteopathie/jean_pierre_barral_osteopathe.aspx, consulté le 30 avril 2015

67 «A propos de Jean-Pierre Barral, Un pionnier des manipulations viscérales », disponible sur http://www.formation-osteo.com/formation_osteopathie/jean_pierre_barral_osteopathe.aspx, consulté le 30 avril 2015

68 BARRAL J-P., MERCIER P., Manipulations uro-génitales, Maloine, 1984, p. 20 : « Nous avons pu aussi trouver que les techniques d'induction avaient un grand effet sur l'utérus et ses attaches qui, nous le verrons, ont toutes des fibres musculaires contractiles. Nous avons pu voir sous amplification de brillance un utérus retroversé se corriger d'un trentaine de degrés. Nous savons bien que ces trente degrés ont rapidement été reperdus, mais nous avons eu la preuve que le simple fait de poser la main sur un petit bassin pouvait mobiliser un organe. »

35

En 1985, J.P Barral se lance dans l'enseignement de l'ostéopathie viscérale aux

Etats-Unis grâce à l'Upledger Institut, il fondera ensuite, avec certains des

membres de l'Upledger Institut, le Barral Institut. Cette démarche permet alors de

former des ostéopathes du monde entier qui enseigneront, en partie, à leur tour, sa

méthode.

Jean-Pierre Barral revendique l'approche viscérale comme étant la recherche de

l'altération de mobilité des organes et le traitement de ceux-ci dans le but de

restaurer cette mobilité.

Par ailleurs, Barral fait une critique de la vision mécaniste ostéopathique lui

reprochant de se cantonner souvent à la manipulation du rachis en se basant sur

des liens somato-somatiques en négligeant l'influence viscérale69.

Selon Barral les mouvements des viscères sont sous influence de trois systèmes :

- le système nerveux central (SNC)

- le système nerveux autonome (SNA)

- le système respiratoire primaire (MRP).

Le premier système est responsable de la motricité, c'est à dire de la mobilité

volontaire de l'appareil locomoteur. Celle-ci engendre une mobilité viscérale

secondaire passive, sorte d'adaptation mécanique à la contraction musculaire et au

déplacement des segments osseux.

Pour ce qui est du système nerveux autonome, il est responsable d'une mobilité

relevant de l'automatisme, de contractions musculaires involontaires de la part du

sujet. On distingue :

- le mouvement diaphragmatique70, sorte de pompage respiratoire au rythme de 12

cycles par minute, entraîne des mouvements de glissement entre les organes par

pression/décompression,

- le mouvement cardiaque71 (70 battement par minute en moyenne) qui engendre

des sortes de vibrations sur les poumons et aux organes abdominaux au travers du

diaphragme,

- le péristaltisme72 qui correspond à l'action des muscles lisses des organes

digestifs permettant le brassage et l'avancé du bol alimentaire.

69 SANDOZ T., Histoires parallèles de la médecine Des fleurs de Bach à l'ostéopathie, Ed. Du Seuil, 2005, p. 219

70 BARRAL J-P., MERCIER P., Manipulations viscérales, tome 1, Ed. Elsevier, 2004, p. 17-18 71 Ibid., p. 18 72 Ibid., p. 19

36

Mais la grande nouveauté de l'approche viscérale de Barral est la description de la

«motilité». La motilité est définie comme une « mobilité vécue, active, qui résulte

d'une faculté motrice intrinsèque »73, celle-ci étant non-visible mais perceptible

par une palpation aguerrie.

J-P. Barral et, son collègue et ami, Pierre Mercier reconnaissent que la motilité,

qu'ils ont pourtant pu observer à l'imagerie médicale, ne trouve pas d'explication

scientifique. Ils proposent donc deux théories pouvant être, selon eux, des

explications potentielles du phénomène de motilité.

La première, appelée «théorie crânienne», concerne le mouvement respiratoire

primaire (MRP) évoqué précédemment, elle se base notamment sur les travaux de

John Edwin Upledger. La fluctuation du liquide céphalo-rachidien correspond à la

circulation de ce liquide par variation de pressions (le liquide céphalo-rachidien se

déplace des zones de haute pression vers les zones de basse pression) contrôlée

par des barorécepteurs et des mécano-récepteurs situés à proximité des méninges.

Ce mouvement se ferait selon un rythme d' « inspir », actif, et d' « expir », passif,

à une fréquence de 8 à 10 cycles par minute, et il impliquerait une mobilité ostéo-

articulaire (par exemple un mouvement de rotation externe des os pairs lors de

l'inspir). L'hypothèse de Barral est donc de penser que cette mobilité influence

celle des viscères dont la motilité obéirait au rythme d'inspir/expir.

La deuxième s'intéresse à l'embryologie se basant sur l'idée qu'il existe une

mémoire cellulaire. Ainsi les organes reproduiraient les mouvements subit

pendant la vie embryonnaire selon des axes similaires74.

73 BARRAL J-P., MERCIER P., Manipulations viscérales, tome 1, Ed. Elsevier, 2004, p. 19

74 Ibid., p. 21

37

3. Autres approches viscérales

a. Les points réflexes de Chapman

Ces points réflexes portent le nom de Frank Chapman, ostéopathe D.O puisqu'ils

sont issus de sa pratique depuis les années 193075, mais ils ont notamment été

décrits par Charles Owen, lui aussi ostéopathe D.O, qui repris le flambeau et

s'intéressa tout particulièrement aux réflexes concernant les dysfonctionnements

endocriniens et par conséquent, aux organes tels que les ovaires, la thyroïde ou les

glandes surrénales76.

La méthode Chapman consiste à repérer des anomalies, décrites comme des «

points », des nodules, ou encore des « contractions gangliformes » dans les tissus

mous superficiels, c'est à dire au niveau des fascias. Ces points sont appelés «

réflexes » car leur présence signerait un dysfonctionnement voire une atteinte

anatomique d'un viscère et non du tissu où est localisé le point réflexe. Ces

« nodules » peuvent se situer sur le plan antérieur, au niveau du thorax

principalement (espaces intercostaux et sternum), au niveau pelvien, ainsi que sur

le plan postérieur principalement le long du rachis (muscles paravertébraux,

apophyses transverses et épineuses). Chaque organe est en lien avec des points

réflexes qui sont bilatéraux le plus souvent.

A la palpation ces points peuvent être perçu comme une densité et/ou une tension,

ils sont parfois décrits comme donnant une sensation « de plaque ou de corde dans

les tissus impliqués »77. D'après Hebgen, les points situés antérieurement sont à

traiter en priorité.

Notons que, d'après Bruno Conjeaud, ostéopathe qui participa au développement

de la méthode, retrouva à la dissection des sortes de nodules au niveau des fascias

intercostaux78.

75 STONE C., Visceral and obstetric osteopathy, Elsevier, 2007, p. 51

76 Ibid. p. 51

77 Educational Council of Osteopathic Medecine (ECOP), Glossaire de Terminologie Ostéopathique, Version révisée le 29 novembre 2001, Traduction de Laurence Deora DO. MRO (F) pour l’Académie d’Ostéopathie de France, Relecture et correction : Pierre Tricot DO. MRO (F), Didier Le Floch DO. MRO (F)

78 CONJEAUD B., Les points de Chapman, disponible sur le site : http://www.syndromedurdc.info/points_de_chapman.php, consulté le 12 avril 2015

38

Considérée comme faisant partie de l'ostéopathie viscérale, cette méthode est

principalement décrite pour sa visée diagnostique. Elle permet de trouver la «

dysfonction clé »79 et d'orienter le traitement viscéral vers le ou les organes en

dysfonction.

Pour autant, Chapman développa également une technique thérapeutique visant à

la correction de ces zones réflexes. Celle-ci consiste en une sorte de massage

circulaire doux, respectant autant que possible la règle de non-douleur. Ce

traitement se fait jusqu'à normalisation tissulaire du point, normalisation qui se

traduit par une baisse de la nociception locale et une modification de la

consistance du point80. La méthode Chapman serait donc au viscéral ce que les

points trigger sont à l’appareil musculo-squelettique. Certains auteurs comme

Travell81, considèrent même les réflexes Chapman comme appartenant aux points

trigger.

L'hypothèse de Chapman était de penser que cette normalisation s'accompagnait

d'un drainage du viscère en dysfonction et donc d'un rétablissement ou en tout cas

d'une amélioration de la physiologie de l'organe. Cette répercussion sur les

organes s'expliquerait par une influence lymphatique et/ou neurovégétative du

traitement. Certains vont même jusqu'à dire que le concept de Chapman se base

sur le réflexe viscéro-somatique.

Ces hypothèses sont critiquées et ne font pas consensus ce qui peut expliquer que

la méthode Chapman est revendiquée par les ostéopathes plutôt en tant que

méthode diagnostique, qu'en tant que méthode thérapeutique actuellement.

Enfin d'après Hebgen, la résistance des points réflexes au traitement manuel est un

argument en faveur d'une atteinte organique du viscère.

79 NICHOLAS A. S., NICHOLAS E. A., Atlas des techniques ostéopathiques, Ed. Maloine, 2011, p 397

80 CONJEAUD B., Les points de Chapman, disponible sur le site : http://www.syndromedurdc.info/points_de_chapman.php, consulté le 12 avril 2015

81 STONE C., Visceral and obstetric osteopathy, Elsevier, 2007, p. 51 et 54

39

b. Les chaînes viscérales: la méthode Busquet

«Chaque geste est un mot du corps dont les phrases sont des postures» Joseph

Messinger82

En 2004 et 2008, Michèle Vanderheyden-Busquet et Léopold Busquet publient les

premières éditions de deux ouvrages s'intéressant à des «chaînes viscérales» dans

la collection «Les chaînes physiologiques». Tous deux issus d'une formation en

kinésithérapie, ils se sont formés par la suite en ostéopathie.

Leur travail, inspiré en partie par les travaux de Mézières, Godelieve Struyf-

Denys, Phillipe Souchard, Suzanne Piret ou encore Marie-Madeleine Bézier83,

repose sur l'idée que les «chaînes musculaires sont ces chaînes dynamiques sur

lesquelles repose [...] le fonctionnement même de tout corps humain»84. A ces

chaînes dynamiques, ils opposent des chaînes statiques regroupées en trois

principaux types :

- la chaîne statique viscérale

- la chaîne neuro-vasculaire

- la chaîne musculo-squelettique85.

Ces différentes chaînes n'ont pas pour but de segmenter le corps humain mais au

contraire de considérer que les différents systèmes s'articulent, d'une certaine

manière, les uns avec les autres86.

Cette conception apporte une grande importance à l'influence que les viscères

peuvent avoir sur le système musculo-squelettique, ceci étant justifié par une

relation de « contenu-contenant »87 en lien étroit avec la continuité du tissu

conjonctif. Ainsi au niveau thoracique il existe une continuité entre cage

thoracique, ostéo-cartilagineuse, et viscères via les membranes séreuses que

constituent la plèvre et le péricarde. Cette relation anatomique explique les

retentissements possibles des troubles viscéraux sur l'appareil locomoteur,

entraînant dans la durée des modifications des chaînes musculaires par adaptation

posturale88.

82 BUSQUET-VANDERHEYDEN M., Les chaines physiologiques La chaine viscérale Thorax-gorge-bouche, Ed. Busquet, 2008, p. 142

83BUSQUET L., interviewé par Sophie Conrad dans « Kineactu » n°1339, jeudi 14 novembre 2013, http://www.methode-busquet.com/wp-content/uploads/2015/01/je-defends-le-systeme-du-corps.pdf, consulté le 23 avril 2014

84 Ibid., p. 10 85Ibid. 86 Ibid., p. 11 « On voit qu'il ne s'agit plus seulement ici de muscles mais de rapports de contiguité opératoires entre les muscles et les viscères, le système neurologique et le système sanguin, le système osseux et le système articulaire. » 87Ibid., p. 13 88BUSQUET L., interviwé par Sophie Conrad dans « Kineactu » n°1339, jeudi 14 novembre 2013, http://www.methode-

busquet.com/wp-content/uploads/2015/01/je-defends-le-systeme-du-corps.pdf, consulté le 23 avril 2014

40

Par exemple, les auteurs développent ainsi l'idée que certaines scolioses peuvent

avoir pour origine un dysfonctionnement hépatique89.

La méthode Busquet consiste à inclure dans la consultation ostéopathique

l'examen des chaînes musculaires (celles en dysfonction sont dites

« surprogrammées »), une investigation rigoureuse de la statique du sujet ainsi

que des tests dynamiques.

Le traitement est dit s'intéressant aussi bien aux sphères thoracique, musculaire,

viscérale, rachidienne et crânienne90 mais la plupart des techniques à visée

thérapeutique décrites consistent principalement en des postures et manipulations

visant au relâchement des chaînes musculaires. Les muscles concernés peuvent

être des muscles en étroit lien avec les viscères comme par exemple les muscles

constricteurs du pharynx91 mais on ne trouve pas de manipulation au sens strict.

Dans le volume destiné à La chaine viscérale Thorax-gorge-bouche, on trouve la

description de la « Posture longitudinale de la chaîne viscérale sus-mésocolique-

thorax-gorge-palais »92 qui vise notamment au traitement du médiastin.

Bien qu'on ne puisse classer la méthode Busquet comme faisant partie intégrante

de l'ostéopathie viscérale, cette méthode a le mérite d'intégrer la sphère viscérale

dans l'approche des chaînes musculaires et posturales, donnant alors à l'influence

de nos organes sur l'appareil locomoteur toute son importance.

89Ibid., p. 96

90BUSQUET-VANDERHEYDEN M., Les chaines physiologiques La chaine viscérale Thorax-gorge-bouche, Ed. Busquet, 2008, p. 199

91Ibid., p.287 92Ibid., p. 293

41

c. Les techniques lymphatiques

Techniques référencées93, elles sont souvent incluses comme sous partie de

l'ostéopathie viscérale puisqu'elles partagent les mêmes principes de base. Les

techniques ostéopathiques ayant un effet sur le système lymphatiques sont

multiples mais il semblerait que certaines techniques aient des conséquences

lymphatiques plus importante que d'autres. On ne peut pas dégager un type de

techniques mais plutôt diverses techniques ayant des effets sur le système

lymphatiques.

Certaines techniques viscérales sont donc considérées comme lymphatiques. C'est

le cas de techniques sur les tissus mous ; de techniques dites myo-fasciale, sur les

membranes interosseuses ou de techniques ligamentaires.

L'intérêt ostéopathique pour le système lymphatique est en étroit lien avec l'intérêt

ostéopathique pour le système artério-veineux, il rejoint la règle de l'Artère et la

philosophie de Still.94

Une des techniques lymphatiques les plus connues est celle de la pompe

lymphatique de C. Earl Miller, ostéopathe D.O issu de l'école de Chicago aux

Etats-Unis, qu'il décrit dans les années 1920. Selon Miller (puis selon son fils qui

participa à faire connaître ses travaux), cette technique de pompage thoracique

permettait d'obtenir des résultats sur diverses pathologies telles que la paralysie de

Bell, la sclérose en plaques ou la maladie de Parkinson95.

Les techniques lymphatiques les plus proches des techniques viscérales à

proprement parlé sont les techniques visant à stimuler le débit lymphatique. Elles

consistent le plus souvent en une manœuvre de glissement ou de vibration à viser

drainante. Celles-ci sont soumises à controverse concernant les patients atteints de

cancer, certains considérant qu'elles risquent de favoriser la progression tumorale,

d'autres considérant l'inverse.

Il existe également des techniques de pompage intrinsèque ou extrinsèque comme

les techniques sur le diaphragme ou sur les membranes interosseuses. Celles ci

pourraient être comparé aux techniques ligamentaires viscérales et techniques sur

les dédoublements péritonéaux.

93 Fondations of Osteopathic Medicine

94 NICHOLAS A. S., NICHOLAS E. A., Atlas des techniques ostéopathiques, Ed. Maloine, 2011, p 413 95Ibid.

42

D'après l'Atlas des techniques ostéopathiques96 les indications aux techniques

lymphatiques sont les suivantes :

- congestion lymphatique/oedème et douleurs consécutives

- insuffisance cardiaque (modérée)

- infections respiratoires

- asthme, bronchopneumopathie cronique obstructive

Tandis que les contre-indications sont celles-ci :

- ganglion lymphatique avec induration aigue

- fracture, luxation, ostéoporose (selon le type de technique)

- friabilité de l'organe

- hépatite aiguë

- cancer.

96 NICHOLAS A. S., NICHOLAS E. A., Atlas des techniques ostéopathiques, Ed. Maloine, 2011

43

4. L’ostéopathie viscérale aujourd’hui

Les auteurs comme E. Hebgen ou P. Curtil et A. Metra ont publié des ouvrages

tentant de référencer les techniques viscérales existantes.

On peut alors distinguer différents types de techniques utilisées et enseignées

actuellement.

Il existe des techniques fonctionnelles (parfois appelées indirectes) et des

techniques structurelles (parfois appelées techniques directes)97.

Les techniques fonctionnelles comprennent principalement les techniques de

déroulement fascial abdominal, qui consistent à suivre le mouvement imprimé par

les tissus du patient, et les techniques dites d'induction qui consistent à induire le

viscère dans le mouvement qui lui est facilité98. Tandis que, les techniques

structurelles correspondent à des techniques en traction, pression, vibrations ou

aux techniques d'étirements des ligaments viscéraux.

Notons que les techniques en induction sont principalement héritées des travaux

de Jean-Pierre Barral99.

Les techniques structurelles semblent plutôt héritées de l'ostéopathie Stillienne ou

des travaux de T. Brandt et des méthodes de palpation diagnostiques de F.

Glénard.

L'ostéopathie viscérale possède donc des références bibliographiques qui lui sont

entièrement dédiées.

97 CURTIL P., METRA A., Traité pratique d’ostéopathie viscérale, Ed. Frison-Roche, 3ème éd. 2005, p. 3 98 Ibid., p. 195-196

99 BARRAL J-P., MERCIER P., Manipulations viscérales, Tome 2, Ed. Elsevier, 2004, p. 32-33

100 NICHOLAS A. S., NICHOLAS E. A., Atlas des techniques ostéopathiques, Ed. Maloine, 2011

101 ROULIER G., L'ostéopathie - Deux mains pour vous guérir : origine, histoire, principes et techniques, indications thérapeutiques, Dangles, 2010

102 CHANTEPIE A., Ostéopathie clinique et pratique, Broché, 2010

103 LE CORRE F., TOFFALONI S., L'ostéopathie, Ed. PUF, 3ème éd. (5 octobre 2007), collection : Que sais-je ?

44

Dans certains ouvrages généraux concernant l'ostéopathie, que ce soit pratique ou

théorique, l'approche viscérale trouve une place. C'est le cas dans l'Atlas des

techniques ostéopathiques100 d'A. et E. Nicholas ou dans l'ouvrage de G. Roulier101.

En revanche, on ne trouve pas de description de techniques viscérales dans

Ostéopathie clinique et pratique102 d'André Chantepie, malgré une énumération de

pathologies ou signes fonctionnels liés aux viscères. Mais certains textes tels que

celui dédié à l'ostéopathie dans la collection « Que sais-je ?103», ne mentionne pas

l'approche viscérale, ayant tendance à cantonner l'ostéopathie à la sphère

locomotrice.

Malgré le chemin parcouru au fil de l'histoire, il semble donc que la pratique

ostéopathique viscérale ait encore à faire ses preuves auprès de certains.

Ou peut-être paraît-elle encore trop complexe, trop mystérieuse pour que certains

se risquent à y faire référence ?

Ces dernières années, on peut trouver plusieurs études qui ont été menées, tantôt

par des étudiants ostéopathes dans le cadre de leur mémoire de fin d'étude, tantôt

par des professionnels, cherchant à démontrer l'efficacité des manipulations

viscérales104.

Certains encore se sont efforcés de comparer cette pratique à d'autres comme la

médecine chinoise105 ou la médecine classique occidentale106.

104 DEPETRIS N., Mesure de la variation du seuil de la douleur à la pression des muscles paravertébraux dorsaux moyens après une technique ostéopathique sur l'estomac, mémoire de fin d'études pour le pour l’obtention du Diplôme d’Ostéopathe, Paris, 2002

DEBOUTE O., L'ostéopathie viscérale au service des cervicalgies, IPEO, disponible sur http://www.itmp.fr/wp-content/uploads/deboute.pdf

105 BOSCHER C., Affinités entre diagnostique ostéopathique viscéral et médecine traditionnelle chinoise, Mémoire de fin d'études pour l’obtention du Diplôme d’Ostéopathe FERO, Paris, 2012

106 BOUSCARLE C., Approche comparée des pratiques viscérales ostéopathique et médicale, Mémoire de fin d'études pour l’obtention du Diplôme d’Ostéopathe FERO, Paris, 2013

107 http://bibliotheque.eso-suposteo.fr:81/Main.htm consulté le 15 mail 2015

108 MAZZONI P., Effets viscéro-somatiques de la technique viscérale globale abdominale : étude contrôlée randomisée chez les patients présentant des troubles fonctionnels intestinaux et des lombalgies, 2014 DE OLIVEIRA C., Incidence d'une technique viscérale de la racine du mésentère sur la posture. Essai clinique randomisé, 2014 MARCHAND F., Ostéopathie et douleurs provoquées par la pose d'un DIU. Evaluation de l'action préventive d'une technique spécifique ostéopathique viscérale sur la diminution des douleurs causées par un dispositif intra-utérin : essai clinique randomisé, 2013 SAPIN P-F., Influence posturale d'une technique viscérale chez les colopathes, 2013

45

Si l'on recense les mémoires s'intéressant strictement aux conséquences de la

manipulation, répertoriés sur le site107 de l'Ecole Supérieur d'Ostéopathie de

Champs sur Marne (77), on en trouve 8108. Bien sûr, il n'existe pas de règle de

proportionnalité quant à la place de mémoires sur ce sujet au sein des différentes

écoles en ostéopathie mais on peut imaginer que les étudiants de l'ESO ou de

l'IDO n'ont pas été les seuls à s'y intéresser.

On constate qu'il existe une réelle volonté visant à délimiter le champ d'action de

l'ostéopathie en général et de l'ostéopathie viscérale en particulier, de mieux

définir cette dernière et de la faire connaître.

Pourtant du point de vue de la loi, l'avenir de l'ostéopathie viscérale laisse moins

de place à l'optimisme. L'article 3 de l'arrêté du 12 décembre 2014 relatif à la

formation en ostéopathie semble à nouveau rappeler que cette pratique n'est pas

reconnue en tant que pratique ostéopathique par l’État puisqu'elle est à nouveau

l'exclue du programme de formation. En effet, il y est mentionné que «Tout

enseignement relatif à une approche viscérale ou cranio-sacrée, à des pratiques

se rapportant à la sphère urogénitale ainsi qu'à une pratique de l'ostéopathie chez

la femme enceinte est strictement exclu de la formation (1).»109.

Cette mention était déjà présente dans les textes de 2007 110.

Pour ce qui est de l'encadrement des pratiques ostéopathiques, la version

consolidée au 3 mai 2015 du décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 relatif aux actes

et aux conditions d'exercice de l'ostéopathie, confirme que l'ostéopathie est

reconnue par la loi comme s'intéressant à « prévenir ou [...] remédier à des

troubles fonctionnels du corps humain, à l'exclusion des pathologies

organiques », les manipulations sont réduites à la sphère musculo-squelettique et

myofasciale. Tandis que les « manipulations gynéco-obstétricales » et « touchers

pelviens » sont strictement interdits.

109 Article 3, Arrêté du 12 décembre 2014, relatif à la formation en ostéopathie, disponible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexteArticle.do;jsessionid=770864D2FDB8C4C6DFC30DB11729F55F.tpdila24v_2?idArticle=JORFARTI000001690499&cidTexte=JORFTEXT000000273294&dateTexte=29990101&categorieLien=id consulté le 12 avril 2015

110 Article 3, Arrêté du 25 mars 2007 relatif à la formation en ostéopathie, disponible sur : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexteArticle.do;jsessionid=770864D2FDB8C4C6DFC30DB11729F55F.tpdila24v_2?idArticle=LEGIARTI000006261751&cidTexte=LEGITEXT000029580041&dateTexte=20150503, consulté le 12 avril 2015

46

Dans la législation, la place de l'ostéopathie viscérale paraît floue puisque sa

pratique (par manipulation externe) n'est pas strictement prohibée mais elle n'entre

pas non plus officiellement dans le champ de compétence de l'ostéopathe. Cette

situation est le lot commun des ostéopathes exclusifs depuis la reconnaissance de

l'ostéopathie mais les nouveaux textes laissent peu espérer quant à une évolution

de cet aspect juridique.

47

-IV- Conclusion

L'ostéopathie viscérale, nous l'avons vu, prend racine à la naissance même de

l'ostéopathie. Andrew Taylor Still en personne pratiquait des manipulations

viscérales dès la fin du XIXème siècle. Cette pratique ainsi que l'intérêt du

« Vieux Docteur » pour les sphères viscérale et circulatoire ont été transmis à ces

disciples puisque Carl P. McConnel ou William Garner Sutherland ont également

exercé des techniques viscérales.

Par ailleurs, c'est avec John Martin Littlejohn que l'ostéopathie intègre la

physiologie à son raisonnement et entame une réflexion sur le système nerveux

autonome et sur les liens neurologiques unissant le rachis et les viscères, réflexion

qui est d'ailleurs toujours d'actualité.

En parallèle de ces origines presque purement américaines, une nouvelle approche

de la santé des viscères voit le jour outre atlantique. D'autres thérapeutes,

européens cette fois-ci, s'intéressent au diagnostic, et pour certains même, au

traitement manuel des organes.

Thure Brandt, en Suède, épaulé ensuite par Henri Stapfer en France, développe

nombre de manipulations principalement orientées vers le système gynécologique

des années 1847 à l'aube de la guerre de 1914-1918.

Tandis qu'en France encore, Frantz Glénard révèle l'importance de la palpation

abdominale dans le diagnostic des pathologies viscérales au monde médical du

début du XXème siècle. C'est grâce à ce médecin français, que l'on appréhende

aujourd'hui les ptoses viscérales.

On remarque qu'il existe une sorte de « creux historique » entre le début du

XXème siècle et les années 1970-80, marquées par les travaux de Jean-Pierre

Barral. Ce « vide » peut s'expliquer par les événements historiques qui se sont

succédés durant ces années, en Europe principalement mais aussi aux Etats-Unis.

L'enchaînement de deux guerres mondiales révolutionne l'occident. La guerre a

laissé peu de place au développement de l'ostéopathie, tandis qu'au lendemain de

la guerre, l'urgence est à la reconstruction matérielle et politique.

Notons également, que les sciences et la médecine ont évolué en partie au service

de cette même guerre. L'allopathie, qui n'est plus celle critiquée par Still à la fin

48

du XIXème siècle, est en plein essor, pouvant faire ombre aux thérapies

manuelles.

Malgré tout, les ostéopathes continuent d'exister et certains parviennent à innover,

comme aux Etats-Unis où Chapman développe sa méthode de points réflexes dans

les années 1930.

37 A partir des années 1970-1980, Jean-Pierre Barral réussit à remettre la pratique

ostéopathique viscérale au goût du jour. Il introduit une nouvelle conception de

l'approche ostéopathique des viscères en s'appuyant sur les nouveaux atouts de la

médecine, et tout particulièrement l'imagerie médicale.

Cependant, malgré les expérimentations de Barral et de ses confrères ostéopathes,

le concept de motilité et la pratique viscérale de manière plus générale comportent

encore des incertitudes. L'empirisme met en valeur les effets positifs

thérapeutiques mais on ne trouve que peu de justifications scientifiques

consensuelles pour expliquer ces effets. Il paraît donc essentiel de mettre à

l'épreuve l'efficacité de l'ostéopathie viscérale ainsi que les hypothèses

d'explications physiologiques en les confrontant aux avancées scientifiques et à la

rigueur de la recherche clinique médicale.

Depuis les années 2000 environ, ostéopathes aguerris et étudiants ostéopathes

tentent de multiplier les recherches cliniques, en respectant autant que faire ce

peut la rigueur scientifique, afin de délimiter le champ de compétence de

l'ostéopathie viscérale mais aussi de l'ostéopathie de manière générale.

Par ailleurs, depuis quelques années, nos viscères semblent au cœur des

préoccupations. Parfois tabou, notre ventre a subit les influences de la mode au

court du temps. Notre société moderne accorde une place très importante à

l'apparence physique et au fait de « prendre soin de soi », expression martelée par

les magazines féminins. On a vu fleurir diverses théories sur la nutrition et la

diététique, celles-ci se livrant concurrence et s’entourant de produits dérivés ne

sont pas sans semer quelques confusions auprès du grand public.

Certains troubles digestifs semblent aussi en vogue ; en quelques années

l'intolérance au lactose et au gluten sont devenues des stars médiatiques. Notre

alimentation semble poser problème et les aliments en passe d'être remis en

question un à un.

49

Sans conteste notre hygiène de vie et notre alimentation influence notre santé et

notre bien-être. Dans son livre Soulagez vos maux de vendre grâce à

l'automassage111, Eric Florin affirme que « 7 personnes sur 10 souffrent de

troubles digestifs »112.

D'autre part, de nombreuses pathologies que l'on pensait bien éloignées de notre

système digestif sont mises en relation avec nos viscères. Ainsi, l'autisme pourrait

être lié à une bactérie abritée au sein de nos intestins113 ou la dépression serait, en

réalité, dépendante de notre microbiote intestinal114.

La recherche scientifique s'intéresse donc de plus en plus à l'influence du système

digestif sur les autres systèmes formant le corps humain.

Du point de vue des neurosciences, l'intestin suscite à nouveau un intérêt

grandissant. Comme le décrit Francisca Flory Gomez115, notre système digestif

possède son propre système nerveux autonome.

Cet intérêt du monde scientifique pour nos organes digestifs pourrait être un

moyen de stimuler la recherche en ostéopathie en s'enrichissant des avancées

récentes.

La sphère viscérale, qui avait attiré l'attention des ostéopathes de la première

heure, Andrew Taylor Still en tête, auraient-elle encore des surprises à nous

réserver ?

111 FLORIN E., Soulagez vos maux de vendre grâce à l'automassage, Ed. J. Lyon, 2011 112 Ibid., p. 27

113 « L'énigme de l'autisme : la piste bactérienne », diffusé sur Arte le vendredi 27 mars 2015, disponible sur http://www.arte.tv/guide/fr/044582-000/l-enigme-de-l-autisme consulté le 1 mail 2015

114 « Dépression : une inflammation cérébrale qui pourrait venir de l'intestin », Science et Avenir n°817, mars 2015, résumé disponible sur http://www.sciencesetavenir.fr/sante/20150323.OBS5305/depression-une-inflammation-cerebrale-qui-pourrait-venir-de-l-intestin.html consulté le 1 mai 2015

115 JOLY GOMEZ F., L'intestin notre deuxième cerveau, Ed. Marabout, 2014, p. 51

50

Mais, ces découvertes scientifiques et les préoccupations du grand public

concernant la santé et en particulier la sphère digestive, suffiront-elles à soutenir

les ostéopathes pour faire évoluer le cadre législatif de l'ostéopathie ?

Si la loi a évolué très récemment concernant les modalités de formation des

ostéopathes, le cadre juridique de l’ostéopathie viscérale reste inchangé, la sphère

viscérale n’étant pas reconnu comme relevant du champ de compétence de

l’ostéopathe. et est exclu du programme officiel de formation.

51

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Ouvrages issus des cours

BEAUVALOT G., 2012-2013, PCEO3, Cours de neurophysiologie et

neuropathologie

BEDIN F., BODINIER J-F., 2012-2014, PCEO4 et CSO, cours

pratique de viscéral

BEL F., 2010-2011, PCEO1, cours de Concept ostéopathique

BOULLAY E., 2012-2013, PCEO3, cours de Neuro anatomie

DEPETRIS M., FOUCAULT A., 2015, CSO, cours pratique de

viscéral

58

Résumé

Ce mémoire s'efforce de retracer l'évolution de l'approche viscérale en

ostéopathie, de la naissance de l'ostéopathie jusqu'à nos jours, en se

basant sur les données bibliographiques disponibles actuellement.

Ainsi, le but de ce travail est de s’interroger sur la place que la

pratique viscérale a pu tenir au cours de l'histoire des thérapies

manuelles et de l'ostéopathie tout particulièrement, afin,

éventuellement, de mieux comprendre sa situation actuelle, qui n'est

pas sans complexité.

En effet, bien que, l'intérêt que porte les ostéopathes à cette discipline

semble bien réel et, les contextes sociologique et scientifique

potentiellement favorables, du point de vue de la loi, la pratique

viscérale ostéopathique ne trouve toujours pas sa place.

Mots clés : manipulations viscérales, histoire de l'ostéopathie, Jean-

Pierre Barral, Andrew Taylor Still

Abstract

This work strives to tell the evolution of visceral osteopathic

approach, from the birth of osteopathy to nowadays, basing on

currently open bibliographic data.

In this way, the aim of this work is to wonder about the place that

visceral practice could have occupied through the history of manual

therapies and osteopathy in particular, in order to, potentially, better

understand its actual situation, which is not without complexity.

In fact, although, the interest that osteopaths show in this discipline

seems real and, sociological and scientific circumstances potentially in

favour, technically in the law, visceral osteopathic still doesn’t find its

place.

Keywords : visceral manipulation, history of osteopathy, Jean-Pierre

Barral, Andrew Taylor Still