Dictionnaire Étymologique de la Langue Grecque - Émile Boisacq

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DICTIONNAIRE ETYMOLOGIQUEDE LA

LANGUE GRECQUE

Tous

droits rservs-

'^(i>&2d

DICTIONNAIRE TYxMOLOGIQUEDE LA

LANGUE GRECQUETUDIE DANS SES RAPPORTS

AVEC LES AUTRES LANGUES INDO-EUROPENNES

PAR

EMILE BOISACQPROFESSEUR A L'UNIVERSIT DE BRUXELLES

330-3r

HEIDELBERaCARL WINTER'sUNIVERSITTSBUCHHANDLUNG191611,

PARISLIBRAIRIEC.

KLINCKSIECK11

RUE DE LILLE,

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2010 with funding fromUniversity of Ottawa

http://www.archive.org/details/dictionnairetyOObois

Mt^TTI^oH

111

f-(^v.-i !>/->

Avant-propos.Leet

prsent ouvrage est n du vif attrait que m'inspira

de bonne heure l'tude des origines du vocabulaire hellnique,dj je rvais de l'crire; ou du moins d'en jeter les bases, quand M. W. Prellwitz publia, en 1892, un Etymologisches Worterbuch (1er griechisclien Spraclie qui semblait devoir, pour un temps et dans une certaine mesure, satisfaire la demande du public rudit. Puis, des annes passrent, que

je dus consacrer des disciplines qui m'loignaient de la linguistique

indo-europenne, je veuxet ce fut

dire

la

philologie latine

et l'archologie classique,

en 1903 seulement que je

pus soumettre des juges trop bienveillants un manuscrit qui,au surplus, a totalement disparu dansprisl'actuelles

dveloppements qu'atentative faite pour

dictionnaire.

Une premireet

publier ce livre choua contre des difficults d'ordre matriel.

Je

laisse

aux linguistes comptents

impartiaux

le

soin de

dire si la seconde a russi.

Tout au moins, l'opportunit depas contestable.

pareil lexique ne paratsicle l'normeintitul

Nous rencontrons au dbut du ouvrage en quatre volumes que Lo Meyer aet ni

Hand-

iuch der griechisclien Etymologie (1901-02), tant pas un manuel, car ce livre ne contient

qui n'est pourrgles ni pr-

ceptes, et n'est pas autre chose qu'un dictionnaire bizarrement

ordonn et aussi peu tymologique que possible: la plupart des mots y sont suivis de la mention dunkel ou unerklrtou etymologiseh nicht verstndlich, alors que des solutionsdfinitives

un

grand

ou du moins satisfaisantes ont t trouves pour nombre d'entre eux; mais Lo Meyer, qui avait

VIpubli entre 1860 et 1880 d'utiles travaux de philologie compare, avait renonc suivre le mouvement des gnrationsplus jeunes et prsentait au public un manuscrit qui,

part

quelques retouches,critique accueillitterdis de porter

datait

de trente ans au moins

et

que

la

avec une dfaveur non dissimule.

Je m'in-

un jugement sur

la

deuxime dition de VEty(1905),

niologischestout

Worterbuchelle

de M. Prellwitztrsutile:

parce qu^dirai-je

prendre

m'a t

tout

au moins

que cette rdition ne m'a pas un instant dtourn du soin de publier, avec le franais comme langue vhiculaire, ce lexique, qui vaudra tout de mme par ses indications bibliographiques.

Dansprovinces

le

de l'hellnisme^),

domaine de l'tymologie comme dans les autres les vues se sont profondment

modifies depuis l'important ouvrage de Georg Curtius, Gmndzuge der griecMschen Etymologie, 5 dition (1879). Un principefrent

dominepas

la

nogrammaire:seule,

les

lois

phontiques ne souftend nivelerlesles

d'exception;

l'analogiequ'elle

paradigmes,les

en

mme temps

rajeunit

langues etle

soutient

dans leur marche volutive continue;

spora-

discher Lautvvandel,

quoi Curtiusn'est

consacrait la moiti dele gal-

son

livre,;

a vcu;

il

au pouvoir de personne de

vaniserles

d'autre part, on ne peut gure songer encore grouper mots sous des racines ranges dans un ordre donn, ainsi que le fit Curtius; la forme que nous attribuons aux racinesest

mobile

et

fugace;

il

n'estil

pas de thorie qui ne vienne

les modifier

peu ou prou;le

fut

mme

question de les oublierla scolastique; l'heure

tout jamais dansactuelleest

campo-santo de

aux

bases

monosyllabiques

ou

disyllabiques,

lgres

ou lourdes,

mais osons dire que

celles-ci

ne sont endoute et

core qu'un pis-aller, que des hypothses,

utiles sans

mme

lgantes,

mais elles-mmes apparemment condamnesles

voluer suivant

progrs de l'analyse phontique.

1)

Voy.

mon

article

neiien

Foi'schimg, publi

par

Die griechische Sprache im Lichte der Die Geistesicifiseuschaften, 1913 14,

Heft

35.

vuIl

partie

de ces mmes progrs, une du vocabulaire grec qui continue de nous chapper, etest

pourtant,

eu dpit

les tentatives

l'indo-europen ont chou.

de toute sorte qui ont t faites pour y voir de Il tait au demeurant peu logiquele

de penser que toutlange;

vocabulaire hellnique pt tre d'origine

indo-europenne; aucune langue europenne n'est pure de mle

latin,

qui n'est ni la plus claire ni la

mieux connue

des langues, contient une certaine proportion d'trusque; pourquoi le grec aurait-il chapp tout contact avec les idiomesvoisins, d'autant

que

les

Hellnes ne sont pas des autochtones

en Grce?

Ils

ont travers d'autres contres avant d'atteindrela

aux rivages de

mer Ege

et

de

la

mer Ionienne,ils

et

ici

mme

ils

ont

d dloger oule

s'assimiler

d'autres populations

qui ne parlaient aucun idiome indo-europen;

ont

notamment

rencontr danset

sud dede

la presqu'le la

balkanique une faunela

une

flore diffrenteset,

flore et

de

faune de l'Europeont probablement,

centrale,

dans

la majorit des cas,

ils

en les modifiant peine, conserv aux animaux et aux plantesqu'ils

dcouvraient les noms queor,

leur avaient octroys leurs

prdcesseurs;

que savons-nous des langues que parlaientrien:le

ceux-ci?

Autant dire

nom

des Plasges a la valeur

d'un

X

algbrique;

Lemnos a

fourni une inscription en langue

inconnue;

Praisos (Crte),

des dbris d'un idiome ignor, en

caractres grecs; Cypre a us d'un syllabaire aujourd'hui dchiffr pour noter une langue dont le fond nous chappe,les

et

du second millnaire ant- chrtien ont jusqu'ici farouchement dfendu leur secret.crtoisdits

monuments

minoens

En

Asie mineure,or,le

trois

langues ont vcu cte cte avec

le

grec;

phrygien, pour tre indo europen, n'en est pas;

moins peu prs inconnuhypothses

le

carien

et

le

lydien appartien-

nent vraisemblablement unles les

autre groupe linguistique,le sont

mais

moins hardies

encore trop.

Quant

l'influence smitique, au rebours de ce que certains ont cru,elle

a t trs faible et s'est borne l'adoption par les Grecs,les

avec

noms des

lettres

de l'alphabet,

de quelques termesde M. H.Griechlsclien (1895),

commerciaux, en nombre vraiment

restreint; le livre

Lewy, Die

semitlscheji

Fremdworter im

VIII

procde d'une conception surannesmitiquequi

et

n'est

qu'un

effort

la-

borieux et sincre, mais plutt malheureux pour expliquer parle

ce

n'est

pas smitique

le

moins du monde.ait influ sur

Enfin,le

rien ne

permet de croire que l'gyptien

grec l'poque ancienne, et quant aux langues de la pnin-

sule des Balkans, le macdonien, dont on n'a

que des gloses,la sienne,

a subi l'influence grecque pluttle

qu'il n'a

impos

et

tbrace,

dont on sait tout au plus qu'il est indo-europen,la

ne nous a rien laiss qui autorise

moindre conclusion.

L'ono-

mastique ou tude des noms propres a tout au moins prouv

que

la

plupart

des noms de lieux de la Grce sont rebelles des concidences avec les finales

l'tymologie hellnique;queles

de noms de lieux du sud de l'Asie mineure feraient supposerles

populations

des deux rives

de

la

mer Ege^).

et

des

parlaient

une

mme

langue l'poque de l'invasion des

Hellnes, mais on ne peut actuellement aller au del

Tout

ce qu'on peut et qu'on doit affirmer, c'est que les Grecs ontcharri

avec eux un grand nombre de mots emprunts auxils

populations qu'ils ont traverses ou absorbes ou dont

ont

subi l'action eux-mmes, et les mots gen ou mditerranen

sont

commodes pour^).

caractriser ces vocables, sans qu'il faille

s'extnuer leur trouver un tymon que l'avenir rendra peuttre ridicule11

n'importe.le

Le

derniertout

tiers

de sicle a t fcond,le

et,

malgr

respect

relatif

et

scepticisme que ren-

contrent auprs de certain public et en divers pays les tudeshellniques,rien

nesi

fait

prvoir que

le

travail

de mise aude la

point connatra dela

tt

un ralentissement.et

L'application del'tude

mthode comparative a rajeuni

fortifi

langue.

On

est loin

en

effet,

et

fort

heureusement, du temps

1) Sur certaines de ces questions voy. notamment P.Kretschmer, Einleitung in die Geschichte der p-iechischen Sprache (1896), Aiig. Fick, Vorgriechische Ortanamen als Quelle fur die Vorgeschichte Griechenlands (1905) et Hattiden und Danubier in Griechenland

(1*908).

2) Cf., dans le beau livre rcent dAnt. Meillet, Aperu d'une histoire de la langue grecque (1913), le chap. III de la premire partie, intitul: Le grec et les langues voisines.

o Gottfried Hermaim prononait l'excommimication majeurecontreces

philologues qui ad Brachnianas et Ulphilam con-

fugiunt atque ex paucis non satis cognitaruni linguarum vestigiis

quae GraecorumEtl'on

et

Latinorum verborum

vis sit

explanare

conantnr.

peut dire aujourd'hui a priori que toute

tude applique la langue grecque et qui, systmatiquement,ignore la philologie compare et ses rsultats essentiels,doit

renoncer tablir des conclusions d'une porte durable et

dgager des principes d'ordre rellement scientifiqueil

^).

Maisles lin-

serait singulirement injuste

de mconnatre ce quela

guistes

eux-mmes doivent des

mthode critico-pbilologiqueenfait, le

entendue dans son senscombinaison

strict;

salut est

dans

la

deux mthodes,les

et

s'il

n'est

pas donn

beaucoup d'rudits deousimultanment,il

employer avec succs tour tourindniable

est

que

plusieurs

des plus

beaux

livres publis depuis vingt ans leur doivent et leur soli-

dit et leur action sur les savants contemporains.1) Pour l'histoire de la langue grecque voy. J. Wackernagel dans Die Kultiir der Gegenwart de Paul Hinneberg, tome I (Leipzig, Teubner, 2e d. 1907), P. Kretschmer dans VEinleitung in die Altertumsicissenschaft de A. Gercke et Ed. Norden, tome I (Leipzig, Teubner, 1910; 2e d. 1912), 0. Hoffmann, Geschichte der grie-

chischen Spraclie, I (Leipzig, Gosclien, 1911),cit d'Ant. Meillet.

enfin le livre pr-

Pour

la dialectologie

voy. A. Tiiumb,

Handbuch

der griechischen Dialekte (leidelherg, C.Winter, 1909) etC. D.Buck, Introduction, fo the study of the Greek dialects (Boston etc. Ginn&Co. 1910). Pour la grammaire (phontique et morphologie) voy. G. Meyer, Griechische Grainmatik, 3. Aufl. (Leipzig 1896), H. Hirt, Handbuch der griechischen Laut- und Formenlehre (Heidelberg-, C.Winter,

2.

Aufl. 1912), K. Brugmann, Griechische Grammatik, 4e d. procure par A. Thumb (Miinchen 1913). Pour la grammaire compare des langues indo-europennes voy. Ant. Meillet, Introduction Vtude

comparative des langues indo-europen7ies, 3e d. (Paris 1912) ou Meillet-Printz, Einfuhrung in die vergleichende Grammatik der indogermanischen Sprachen (Leipzig- und Berlin 1909), K. Brugmann, Kurze vergleichende Grammatik der indogermanischen Sprachen (Strassburg 1904) ou Abrg de grammaire comjyare des langues indo-europennes (Paris 1905), Grundriss der vergleichenden Grammatik der indogermanischeii Sprachen, 2. Aufl. (Strassburg1897 sqq).

XCharge d'un enseignementphilologietrs

lourd,

qui

n'a

avec

la

grecque

et la linguistique

indo-europenne que des

rajjports fortuits, je n'ai

pu consacrer ce dictionnaire qu'unet

temps hach de besognes professionnelles,

d'un faible rende-

ment

scientifique.

J'ai

en outre t

le

plus souvent rduit

n'user que des ressources de

mace

propre bibliothque.excuseretlesle

On voudralong temps

bien ds

lors,

pour n'tre point cruel,

qu'a

exig

l'impression

de

livre

lacunes

que des

spcialistes

pourraient

constater dans

l'information bibliogra-

phique,

si

tant est que l'onet

trouve

glaner

dans

la

masse

de programmespas mis dansle

de dissertations inaugurales qui ne sontet que,

commerce

seules,

quelques grandes

bibliothques universitaires de l'Allemagne possdent au complet.

Peut-tre

me

sera-t-il

donn un jour deJe ne dirai pas

faire plus etj'ai

mieux.

Aux

heures

de fatigue ou de dpression,l'intrt

pourtant

trouv du rconfort.

que tmoignaient

cette entreprise ceux qui ne sontVictor

plus,

mes anciens matres

Hermann Osthoff, ainsi que le regrett Flix Solmsen; il est un nom qui s'impose ici: M. Ant. Meillet, professeur au Collge de France, qui me lie une amiti de plusHenryet

de

vingt

annes,

m'a

donnet

les

preuves

d'un

dvouementlui

qu'apprcieront tous ceux qui savent quel labeursesfaite

imposentexception

tudes

personnelles

quel fruit

il

en retire;

des dernires feuilles,qu'ilfaille

que

je n'aiil

pu

lui

communiquer,lire

sans

dire

pourquoi,etil

s'est

astreint

une

preuve de tout l'ouvrage

n'est

pour ainsi dire pas unetelle

page

([ui

ne

lui

ait

suggr

telle

remarque prcieuse,tmraire.gratitude.Qu'il

rectification utile ou indispensable, ou l'expression d'un doute

rflchi

propos d'uneici

affirmation

veuille

trouver

l'expression de toute

ma

Les sons de la langue grecque dans leurs rapports avec ceux de l'indo-europen commun.a