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16 au 18 décembre 2003

Conférence internationale, Paris, France

Déf is et opportuni tésau n iveau secondai re

LES RÉFORMES DE L’ENSEIGNEMENTTECHNIQUE ET DE LA FORMATIONPROFESSIONNELLE DANS L’ÉCONOMIEDE LA CONNAISSANCE

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© CIEP - novembre 2004Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays

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Nous avons le plaisir de vous présenter les Actesde la conférence, Enseignement technique et formationprofessionnelle dans l’économie de la connaissance– Défis et opportunités au niveau secondaire, qui s’est tenuedu 16 au 18 décembre 2003 au Centre international d’étudespédagogiques (CIEP) à Sèvres – France.

L’idée de cette conférence nous est venue à l’automne2002 et le partenariat entre le CIEP et la Banque mondialea été confirmé lors d’une réunion de travail conjointe qui s’esttenue à Washington en décembre de la même année.Ce projet a bénéficié, tant pour sa conception que pour saréalisation, non seulement du soutien des deux institutionsinitiatrices (Banque mondiale et CIEP) mais aussi de celui dela Fondation européenne pour la formation (ETF / Turin), del’UNESCO et des ministères français de l’Éducation (MJENR)et des Affaires étrangères (MAE).

La conférence a réuni environ 120 participants, enprovenance de 30 pays et de 10 organisations internationales ;parmi eux, des représentants de ministères de l’Education,de la Formation professionnelle, du Travail ; plusieursdirecteurs, des secrétaires d’Etat ou vice-ministres ; desmembres de fédérations d’employeurs et de syndicats ; desuniversitaires.

Ce fut, nous semble-t-il, un évènement novateur. Il lefut par le choix des thèmes, notamment la considération queméritent l’enseignement technique et la formation profession-nelle et la réflexion sur leur fonction comme instrument depolitique socioéconomique pour des secteurs ou des groupessociaux oubliés (secteur rural, secteur informel, populationsexclues,…). Il le fut aussi par la méthodologie mise en œuvre.De ce point de vue, deux aspects méritent d’être soulignés.

Le premier concerne la sélectivité. Le comité de pilotagede la conférence, composé de représentants des six institu-tions partenaires, a été très exigeant sur certains points : nousavons été sélectifs en matière de qualité des intervenantsinvités, ainsi que pour le choix des pays dont la participationa donné lieu à débats et a dû être approuvée par au moinsdeux des institutions membres du comité. Le résultat en aété un haut niveau des exposés et une forte implication desparticipants.

Nous avons par contre refusé toute sélectivité, au senshabituel du terme, sur des critères idéologiques institutionnelsou sur des critères de niveau socioéconomique des paysparticipants : de ce double point de vue nous avons jeté unlarge filet dans toutes les directions.

Le premier effort a eu pour résultat une « confrontationconstructive » d’idées et a permis à l’auditoire de prendrela mesure de la complexité du thème. Le second effort s’esttraduit par une réelle authenticité dans les échanges entre pays.

Cela permet d’expliquer l’exceptionnelle assiduité desparticipants qui ont manifestement apprécié de pouvoirdialoguer les uns avec les autres. Nous avons pu en prendreconscience par des retours informels et certains détailsanecdotiques tel le fait que personne ne soit absent durantun atelier en fin d’après-midi malgré le beau temps et laproximité de Paris. Ce fut aussi une surprise d’entendre unDirecteur de département ETFP d’un pays européen en voied’adhésion (et aujourd’hui pays membre de l’Union) déclarerà l’issue d’un atelier : « j’ai été étonné de constater que nousavons à faire face à des problèmes de même type que descollègues d’Afrique sub-saharienne ». Naturellement, il étaitclair que cette personnalité connaissait les différences entre lesdeux pays, mais elle a grandement apprécié cette opportunitéd’un dialogue authentique.

La conférence a donc permis de mettre en évidence quel’enseignement technique et la formation professionnellerestent des sujets importants et pourtant délaissés, particuliè-rement au niveau secondaire, et d’aborder des thèmes tropsouvent oubliés.

Répondant au vœu de nombreux participants, le CIEPa assuré un premier suivi de la conférence en mettant sur sonsite web les présentations « power point » laissées par lesintervenants. Nous avons aujourd’hui, comme deuxièmeréalisation, le plaisir d’éditer les Actes de la conférence.

Le dialogue devrait se poursuivre à travers plusieursprojets qui sont à l’étude : un forum de discussion ; unenouvelle conférence ciblée sur les formations supérieurestechnologiques courtes ; une autre sur l’enseignementtechnique et la formation professionnelle en Afriquesub-saharienne. Les contacts entre les partenaires de cettepremière conférence se poursuivent en ce sens.

Pour terminer, nous voudrions remercier lesintervenants pour la haute qualité de leur contribution,les participants pour la part active qu’ils ont prise dans lesdébats et pour la richesse de leurs apports, nos distinguéscollègues du comité de pilotage pour leur implication dansce projet et leur contribution stimulante, ainsi que lescollègues de nos groupes d’appui au sein de nos institutionsrespectives, pour la qualité de leurs conseils sur le fond, laforme et le choix des participants.

PréfaceJacques MazeranDirecteur du département de l’ingénierie éducative – Centre international d’études pédagogiques – Sèvres

Francis SteierÉconomiste principal en éducation – Banque mondiale

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Pays représentésau cours de la conférence :

Allemagne

Bosnie Herzégovine

Brésil

Cameroun

Chili

Colombie

Egypte

Hongrie

Ile Maurice

Liban

Madagascar

Mali

Maroc

Mexique

Nigéria

Norvège

Ouzbékistan

Pologne

République de Corée

Fédération de Russie

Sénégal

Soudan

Autorité palestinienne

Thaïlande

Tunisie

Turquie

Vietnam

Yémen

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J. Mazeran Centre international d’études pédagogiques

F. Steier Banque mondiale

C. Duc Ministère de la Jeunesse, de l’Education nationale et de la RechercheDirection de l’enseignement scolaire

W. Iwamoto UNESCODirection de l’enseignement secondaire, technique et professionnel

JY. de Longueau Ministère de la Jeunesse, de l’Education nationale et de la RechercheDélégation aux relations internationales et à la coopération

D. Maroger Ministère des Affaires étrangères Direction du développement et de la coopération technique

JR. Masson Fondation européenne pour la formation

Au sein des deux institutions initiatrices, la Banque mondiale et le CIEP,deux commissions de suivi ont animé la réflexion et la mise en œuvre.

Nous tenons à les remercier pour leurs apports précieux.

Nous tenons également à exprimer notre gratitude particulière aux deux « grands témoins », MM. AndréGauron et John Middleton, qui ont suivi avec attention tous les exposés, débats et ateliers et qui ont su en tirer lesenseignements dans une remarquable synthèse, présentée en séance terminale et qui fut appréciée de tous.

Nous remercions aussi :F. Divisia du MJENR – Délégation aux relations internationales et à la coopérationA. Metayer du ministère des Affaires étrangères – Direction du développement et de la coopération techniqueM. Nozawa de l’UNESCO.

Enfin, l’élaboration et la mise en forme de ces Actes sont l’oeuvre de Candice Chenu et de Jérôme Champlois,que nous remercions ici particulièrement.

Comité de pilotage

JM. Moreno

M. Mertaugh

T. Linden

GJ. Kim

M. PanotD. Hou

L. OumeddourS. Ha

S. DumontD. Fretwell

C. ChenuW. Experton

etA. Dar

E. VérinE. Cuadra

AM. VailléA. Van Adams

A. NugueJ.Salmi

CIEPBanque mondiale

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Note de lecture et site Internet

1) En ce qui concerne les exposés

Il ne s’agit pas d’articles élaborés en vue d’unepublication scientifique, mais de transcriptions deprésentations orales, souvent appuyées sur desdiaporamas (PowerPoint).

Aussi dans certains cas, le conférencier a eurecours à des formules résumées ou elliptiques quenous avons préféré laisser dans leur formeoriginelle.

Et dans tous les cas, le rapprochement avecles figures, les diagrammes ou statistiques s’avèresouhaitable.

2) En ce qui concerne les débats,questions et réponses

Nous avons choisi de ne pas apporter demodifications importantes à la transcription si ce n’estdans la structure et les regroupements opérés afin deproposer un classement par thème. Cet effort declassification nous a paru indispensable. Nous nepouvions pas nous contenter de restituer une simple listechronologique de questions et d’échanges quelquefoisconfus bien que toujours vivants et souvent passionnés.

Il est cependant bon de noter qu’il nous a été parfoisdifficile de procéder, lors de ces échanges,à l’identificationdes intervenants : rares sont ceux qui se présentent avantde prendre la parole. Nous avons néanmoins, chaque fois

que nous le pouvions, révélé l’identité des participantsaux débats – la mention « intervenant non identifié »étant réservée à ceux pour qui nous n’avonsmalheureusement pas pu le faire.

Il se peut que certaines phrases

puissent

paraître au lecteur un peu lourdes ou même

de compréhensiondifficile.Cela tient à

notre parti pris de rendre compte de la

manière la plus vivante possiblede ce qui

s’est réellement dit.

http://www.ciep.fr/etfp/index.htm

A CET EFFET A ÉTÉ CRÉÉ UN ESPACEINTERNET CONSACRÉ À LA CONFÉRENCE.

Figurent sur cet espace :

le programme détaillé de la conférence,

les profils et expériences des intervenants,

es résumés des interventions,

les Actes (version Pdf),

les documents PowerPoint diffusés lors des présentations.

A n g l a i sE s p a g n o lF r a n ç a i s

Nous pensons

ainsi avoir mieux

respecté l’esprit

et la qualité de

cette conférence.

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PRÉFACE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

PAYS REPRÉSENTÉS AU COURS DE LA CONFÉRENCE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

COMITÉ DE PILOTAGE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

NOTE DE LECTURE ET SITE INTERNET . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

OUVERTURE DE LA CONFÉRENCE : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

M. Albert Prévos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17Directeur – Centre international d’études pédagogiques

M. Xavier Darcos. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18Ministre délégué à l’enseignement scolaire, France

M. Peter de Rooij . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21Directeur – Fondation européenne pour la formation

M. John Daniel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23Sous directeur général pour l’éducation – UNESCO

M. Jean-François Rischard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24Vice président pour l’Europe – Banque mondiale

M. Serge Tomasi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29Sous directeur général du développement socialet de la coopération éducative – Ministère des Affaires étrangères, France

Pour le Comité de pilotage de la conférence : M. Francis Steier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30Économiste principal en éducation – Banque mondiale

Séance 1 : ETFP ET DÉFIS MONDIAUX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

> ETFP : histoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35M. Jacques Mazeran – CIEP

> L’importance de la formation professionnelle dans les stratégiesde préparation à l’économie et à la société de la connaissance . . . . . . . . . . . . . . . . 41M. Peter de Rooij – ETF

> Enseignement secondaire : préparer les jeunespour le marché du travail dans l’économie de la connaissance . . . . . . . . . . . . . . . . 45M. David Fretwell – Banque mondiale

Débat avec la salle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

SOMMAIRE

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Séance 2 : ATTENTES ET PROBLÉMATIQUESDES PAYS PARTICIPANTS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

> Rapport d’atelier A . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59> Rapport d’atelier B . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60> Rapport d’atelier C . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61> Rapport d’atelier D . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62

Débat avec la salle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

Séance 3 : OBJECTIFS DE L’ETFP (1ère partie) : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

> Développement des compétences en Afrique sub-saharienne . . . . . . 69M. Arvil Van Adams – Banque mondiale

> La situation de l’enseignement techniqueet de la formation professionnelle en Afrique francophone . . . . . . . . . 73M. David Atchoarena – IIPE, UNESCO

> Former pour l’emploi dans le secteur informel :une question oubliée ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77M. Fred Fluitman – OIT

Débat avec la salle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83

Séance 4 : OBJECTIFS DE L’ETFP (2e partie) : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89

> La dimension sociale de l’ETFP :les normes juridiques du Conseil de l’Europeet son action en faveur des communautés Roms . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91Mme Olöf Olafsdottir – Conseil de l’Europe

> Les enjeux de la formation professionnelle agricole :exemple de l’Afrique de l’Ouest . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97M. Alain Maragnani – Ministère de l’Agriculture, France

Débat avec la salle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103

Séance 5 : L’ETFP DANS SES RELATIONSAVEC L’ENSEIGNEMENT SECONDAIRE . . . . . . . . . . . . . . . . . 111

> Les liens entre l’enseignement général et l’ETFP :fondements communs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113M. Wataru Iwamoto – UNESCO

> L’ETFP au Nigéria : problèmes et stratégies de réformes . . . . . . . . . . . 117M. Nuru A. Yakubu – National Board for Technical Education, Nigéria

> CommentairesM. Phillip McKenzie – OCDE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123

Débat avec la salle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127

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Séance 6 : L’ETFP DANS LE CONTEXTE DE L’ÉDUCATIONTOUT AU LONG DE LA VIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133

> L’éducation tout au long de la vie :un cadre pour le développementde l’ETFP en Amérique Latine ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135M. William Experton – Banque mondiale

> L’apprentissage tout au long de la vieet l’enseignement professionnel :l’expérience des pays candidats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139M. Jean-Raymond Masson – ETF

Débat avec la salle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143

Séance 7 : RÔLES DE L’ETAT ET AUTRES ACTEURSÉCONOMIQUES ET SOCIAUX . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147

> L’économie politique des réformesde l’enseignement secondaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 149M. Ernesto Cuadra – Banque mondiale

> Les structures socio-économiques de l’ETFPet la réforme finlandaise . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151M.Kari Pitkänen – National Board of Education, Finlande

> Rôle des instituts de recherche publicsdans le pilotage et la gestion de l’ETFP :le cas de la Corée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155M. Sung-Joon Paik – KRIVET, Corée

Débat avec la salle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159

Tables Rondes : EXPÉRIENCESDE LA TUNISIE ET DU CHILI . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163

TUNISIE> La réforme de la formation professionnelle en Tunisie

Opportunités et défis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165M. Moncef Ben Saïd – Ministère de l’éducation et de la formation, Tunisie

> Éducation, entreprises et mutationséconomiques et technologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173Mme Turkia Tlemceni – UTICA, Tunisie

CHILI> La réforme de L’ETFP au Chili . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

M. Pedro Montt – Ministère de l’Education, Chili

> Expérience du secteur de la production agricoleet agro-industrielle au Chili . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181M. Juan Guido Vidal – SOCODER, Chili

> Commentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185M. William Experton – Banque mondiale

Débat avec la salle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187

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Séance 8 : MISE EN OEUVRE ET ORGANISATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193

DE L’ETFP

> Orientation professionnelle et politique publique :combler l’écart . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 195M. Richard Sweet – OCDE

> Coopération européennne en matière d’ETFP . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201M. John Mc Carthy – Commission européenne

> Vers la construction de nouveaux diplômesd’enseignement professionnelà référentiels communs internationaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205M. George Asséraf – Ministère de la Jeunesse,de l’Éducation nationale et de la Recherche

Débat avec la salle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211

Séance 9 : ÉCHANGES D’EXPÉRIENCESET DE BONNES PRATIQUES ENTRE LES PAYS . . . . . 215

> Rapport d’atelier A : coopération / partenariat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217> Rapport d’atelier B : cohérence des formations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 219> Rapport d’atelier C : oubliés, exclus et minorités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 221> Rapport d’atelier D : réformes, management,

ressources humaines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 223

Synthèse et perspective . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 225

> M. André GauronConseiller – maître à la Cour des Comptes,Président du Haut Conseil « éducation, économique, emploi », France

> M. John MiddletonConseiller principal auprès du vice-président de la Banque mondiale,Professeur de politiques éducatives, Université de Hawaï

CLÔTURE DE CONFÉRENCE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 241

> M. Jean Paul de Gaudemar,Directeur de l’enseignement scolaire – Ministère de la Jeunesse, de l’Éducationnationale et de la Recherche, France

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OUVERTURE DE LACONFÉRENCE

M. Albert Prévos,

Directeur – Centre international d’études pédagogiques

M. Xavier Darcos,

Ministre délégué à l’enseignement scolaire, France

M. Peter de Rooij,

Directeur – Fondation européenne pour la formation

M. John Daniel,

Sous directeur général pour l’éducation – UNESCO

M. Jean François Rischard,

Vice président pour l’Europe – Banque mondiale

M. Serge Tomasi,

Sous directeur général du développement

social et de la coopération éducative – Ministère des Affaires étrangères, France

M. Francis Steier,Économiste principal en éducation – Banque mondiale

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« Mesdames et Messieurs les Ministres,Monsieur le Président,Mesdames et Messieurs les Directeurs Généraux et Directeurs,chers Collègues, chers Amis,

C’est une grande joie et un grand honneur pour moi de vous accueillir aujourd’hui à Sèvres.Le Centre international d’études pédagogiques est heureux et fier d’avoir contribué à organiser cetteconférence internationale sur l’enseignement technique et la formation professionnelle, dont le principea été retenu il y a un an, jour pour jour, dans les locaux de la Banque mondiale, à l’occasion d’une missioneffectuée à Washington par J. Mazeran et moi-même – Jamil Salmi et John Middleton ont à cet égard,dès ce premier jour, joué un rôle décisif, qu’ils me permettront de saluer aujourd’hui, un rôle d’impulsion,poursuivi ici avec détermination par Francis Steier. S’est depuis instauré entre nous un partenariat sansfaille, symbolisé par la présence à cette tribune de M. Jean-François Rischard, vice-président pour l’Europede la Banque mondiale, que je remercie vivement d’être avec nous aujourd’hui.

Mais si cette manifestation a pu voir le jour, c’est parce que des partenaires prestigieux, actifs etconvaincus, sont venus nous rejoindre dans la préparation et la réalisation de cette conférence. Qu’il me soitpermis de remercier ici - l’UNESCO et de saluer la présence de M. John Daniel ;- la Fondation européenne de Turin, dont le directeur, M. Peter de Rooj, nous fait le plaisir d’être avec nous ;- le ministère des Affaires étrangères, très présent dans la préparation de cette opération, et je remercie

M. Serge Tomasi de représenter ici M. Claude Blanchemaison, directeur général de la coopérationinternationale et du développement ;

- le ministère de la Jeunesse, de l’Education nationale et de la Recherche, à travers l’Inspection générale, quia notamment coordonné le numéro spécial de notre revue, la Revue internationale de Sèvres, que noussortons à l’occasion de cette conférence et que vous trouverez sur vos tables, la Direction de l’enseignementscolaire et la Direction des relations internationales et de la coopération, ministère représenté ici à son plushaut niveau, puisque M. Xavier Darcos, ministre de l’enseignement scolaire a bien voulu accepter de nousfaire l’honneur d’ouvrir cette conférence.

Nous vous accueillons, chers Amis, dans un bâtiment chargé d’histoire, que vous aurez, je l’espère, letemps de visiter. Il en a le charme mais il en porte aussi quelquefois les stigmates, je dirais les traces, sousforme de murs défraîchis ou de sols irréguliers. Avec l’aide très bienveillante de notre ministère de tutelle,nous avons entrepris de remettre tout cela en état mais je sollicite par avance votre indulgence, en vousdisant, et j’arrêterai là ce propos d’accueil, que tous les personnels du Centre international etparticulièrement l’équipe réunie autour de Jacques Mazeran, ont, je crois, beaucoup travaillé pour prépareret donner du contenu à cette conférence et sont à votre disposition, et je m’y inclus, durant ces trois jours,pour faciliter votre séjour, le rendre agréable et propice à l’étude, en vous permettant de consacrer toutevotre attention à vos travaux.

Merci. »

Albert Prévos, Directeur – Centre international d’études pédagogiques

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« Mesdames et Messieurs, chers Amis,

Je suis très heureux et très honoré d'ouvrir cette conférence internationale et de souhaiter la bienvenueà tous dans ce Centre international d'études pédagogiques. Je sais les fonctions éminentes, qui sont lesvôtres, au sein des systèmes d’éducation de vos pays respectifs, et je tiens à saluer tout particulièrementMadame la Ministre de l'emploi et de la formation professionnelle du Mali, Monsieur le Ministre del'enseignement technique du Yémen, Monsieur le Ministre de l'éducation et de l'enseignement supérieurde l'autorité Palestinienne, Monsieur le Secrétaire d'Etat à l'éducation de Turquie, Monsieur le Secrétaired'Etat à la formation professionnelle de Tunisie, et Madame la Secrétaire générale du ministère de l'éducationde Madagascar.

Je vous suis donc reconnaissant d'avoir pris de votre temps pour venir à Paris et durant ces trois joursde venir faire part de vos expériences, de vos actions, de confronter vos points de vue, vos analyseset de mettre en commun les bonnes idées et les bonnes pratiques. Je voudrais remercier de leur présenceJean-François Rischard, Vice-président de la Banque mondiale pour l'Europe, Monsieur Peter de Rooij,Directeur de la Fondation européenne pour la formation, Monsieur John Daniel, avec qui nous avons déjàtravaillé, Sous-directeur pour l'éducation de l'UNESCO, sans oublier les deux personnalités qui serontles grands témoins de cette conférence Monsieur John Middleton, Conseiller principal auprès duvice-président de la Banque mondiale et Monsieur André Gauron, Président du Haut Comité « éducation,économie, emploi » et je remercie également mon ami Albert Prévos, Directeur du CIEP, de nous accueillir.

J'adresse mes salutations aux Directeurs d'administration centrale des divers ministères françaisconcernés et notamment je salue la présence de Serge Tomasi, qui représente ici la Direction générale de lacoopération internationale et du développement au ministère des Affaires étrangères. Je remercie aussi,car c'est toujours une tâche, toute l'équipe du CIEP autour de mon cher ami Prévos, qui a assumé cettepréparation avec compétence et efficacité.

Mon propos, Mesdames et Messieurs, n'est évidement pas d'esquisser une problématique universellede l'enseignement technique et professionnel qui rejoindrait les réflexions ou les préoccupations de chacund'entre-vous. Vous présentez à divers titres, des pays trop différents pour que l'on puisse mettre en avantbeaucoup de dénominateurs communs. Je n'ai pas l'intention non plus, je vous rassure, de retracer l'histoirede cet enseignement en France. Je crois cependant qu'il n'est pas inutile pour la suite de vos débats, derappeler dans quel esprit la France a voulu depuis ces vingt dernières années faire évoluer son système deformation professionnelle, et en particulier son système de formation professionnelle initiale. Et puis je feraiensuite quelques observations sur l'enjeu de cette conférence, dont nous attendons tous beaucoup. On nepeut, je crois, parler de l'enseignement technique et professionnel en France sans rappeler au préalable queles principales réformes de notre système éducatif depuis vingt ans, ont obéi au fond à deux grandespriorités, partagées d'ailleurs par bien des pays : offrir aux jeunes la meilleure égalité des chances et accroîtreleur niveau de qualification, afin de répondre au mieux aux nouvelles exigences de l'économie et à l'évolutionrapide des techniques. Ces deux priorités sont étroitement liées, puisque c'est de la réussite professionnelledes hommes et des femmes qui la composent que dépend la réussite d'une nation. Tout ceci s'est traduitchez nous par un slogan célèbre, qui était de porter 80 % d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat et defaire acquérir à 100 % de celle-ci une qualification quelle qu'elle soit. Pour atteindre cet objectif, la France aconsenti un effort énorme, dont trois simples chiffres donnent l'ampleur : de 1960 à 1995, le nombre desétudiants français a été multiplié par sept, celui des lycéens par cinq. S’il y a trente ans, un lycéen sur dix aobtenu le baccalauréat, ils sont aujourd'hui plus de six sur dix. Parallèlement à cet accroissement du niveaud'études, les paliers d'orientation précoce ont été peu à peu supprimés. Aujourd'hui quasiment tous lesjeunes français suivent jusqu'à l'âge de seize ans – terme de la scolarité obligatoire – une formation continueet ce n'est qu'à la fin de la classe de troisième que ceux qui le souhaitent peuvent s'orienter vers la voieprofessionnelle. Ils ont alors le choix entre le lycée professionnel, où ils sont sous statut scolaire, etl'apprentissage, qui est une formation en alternance entre l'école et l'entreprise, où ils sont sous contrat detravail. On compte 700 000 lycéens professionnels et 360 000 apprentis. A la fin de la classe de seconde, ceux

Xavier Darcos, Ministre délégué à l’enseignement scolaire, France

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qui n'ont pas emprunté la voie professionnelle se déterminent entre la voie générale et la voie technologique.Disons un mot de la voie technologique, car celle-ci est une spécificité française, je crois. Elle a pour but nonde déboucher directement sur la vie active, mais de former le bachelier en vue d'une poursuite dansl'enseignement technologique supérieur court où il peut éventuellement préparer un brevet de techniciensupérieur (BTS) ou un diplôme universitaire de technologie (DUT).

Je centrerai mon propos sur la formation professionnelle initiale maintenant. Celle-ci contribuefortement à l'amélioration du niveau de formation des jeunes français en prenant en charge, et le chiffre estimportant, près de 40 % d'une classe d'âge, en les préparant sans doute mieux qu'auparavant à la sociétéincertaine dans laquelle nous sommes entrés. Tout ceci n'a pu se faire qu'au prix d'importantes évolutionsqui n'ont toutefois jamais fait oublier un grand principe auquel tous les Français sont attachés. Ce principeest que l'Education nationale a pour but de former de futurs travailleurs, mais aussi des individusresponsables, éclairés, aptes à prendre toute leur part dans une démocratie vivante. La dimension économisteva de pair avec la dimension humaniste. Nous pensons donc que l'école ne doit pas viser prioritairement,dans la définition de ses missions et de ses apprentissages, l'efficacité productive ; ce serait contraire à sonrôle qui est avant tout de délivrer une formation générale. Ce serait en outre inefficace au plan économiquepuisque nous savons tous que, même si la formation doit tenir compte des besoins immédiats du mondeproductif, elle doit plus encore, dans un monde en constante évolution, assurer l'adaptabilité des personnesà moyen terme. Il nous appartient de former des jeunes et non de les formater. Pour en revenir aux évolutionsque j'évoquais plus haut, il faut d'abord souligner l'apparition de nouveaux diplômes qui ont complètementtransformé l'architecture de notre formation professionnelle initiale. Pendant longtemps, n'ont existé que lecertificat d'aptitude professionnelle, le CAP, et le brevet d'études professionnelles, le BEP. Ainsi la création en1985 du baccalauréat professionnel a-t-elle été un événement, puisqu'il accroissait considérablement leniveau d'études des élèves, il contribuait à donner à la voie professionnelle une dignité égale à celle desautres voies. Le baccalauréat professionnel connaît un très grand succès, et il permet d'ailleurs actuellementencore une bonne insertion dans le marché du travail. Nous avons depuis poursuivi résolument lavalorisation de la voie professionnelle en l'ouvrant notamment à l'enseignement supérieur. Voici trois ans,ont été créé la licence professionnelle, bac + 3, ainsi que le lycée des métiers, dont l'un des objectifs est derenforcer les liens entre l'enseignement secondaire et l'université. La poursuite d'études des apprentis aégalement été favorisée et chaque année, désormais, plus de 5 000 titres d'ingénieurs sont délivrés par la voiede l'apprentissage. Les évolutions qui ont concerné la manière d'obtenir les diplômes n'ont pas été moinsimportantes. Comme vous le savez, nous sommes un pays dont une des traditions est de donner beaucoupde préséance à la formation initiale, ce qui explique pourquoi nous avons tant de grandes écoles, pourquoinous attachons tant de prix, peut-être trop de prix, aux titres et même aux lieux où sont décernés ces titres.En France, on est "ancien élève de l'école de" à vie. Mais, Dieu merci, nos mentalités sont en train d'évoluer.L'évolution rapide des techniques, les remises à niveau qu'elles imposent, nous ont rapidement appris àaccorder une large part à la formation continue tout autant qu'aux acquis de l'expérience professionnelle.Nous sommes donc parvenus aujourd'hui, je crois, à mettre en place des parcours à la fois plus souples, pluscohérents, qui permettent à chacun, tout au long de sa vie et en fonction de son itinéraire professionnel,d'accéder à des niveaux de qualification supérieure validés par l'Éducation nationale.

La dernière évolution est peut-être la plus marquante, il s'agit du rapprochement de l'école et de l'entre-prise. Pendant très longtemps en France, pour des raisons essentiellement idéologiques, le monde de l'éduca-tion et le monde du travail se sont ignorés. Les professeurs et les patrons ne se parlaient pas. Mais là aussi lesmentalités changent, malgré les résistances, parce que les attitudes face à l'emploi ne sont plus les mêmes.Angoissés par la menace du chômage, les jeunes et leurs familles demandent à l'école qu'elle prépare autantque possible à l'insertion professionnelle. La nécessité d'un partenariat solide et durable entre l'école etl'entreprise s'impose toujours davantage et devient de plus en plus évidente. Cette nécessité, nous en avonstiré les conséquences : aujourd'hui tout l'appareil de la formation professionnelle initiale reposesur une étroite collaboration entre le monde professionnel et les établissements. Les entreprises ont compriscombien il était crucial de participer très directement à l'oeuvre commune de formation. Malgré lescontraintes de compétitivité, de rentabilité, qui sont celles d'une entreprise, toutes se sont engagées dansdes actions permettant de faciliter l'entrée des jeunes sur le marché de l'emploi, de mieux définir les compé-tences et les connaissances exigées par la pratique professionnelle ou encore de faire découvrir auxélèves leur univers et leur réalité. Il y a quinze jours encore, je refondais une convention entre le MEDEF, quiestl'organisation patronale française, et les établissements scolaires du second degré. Ce dernier point me parait

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absolument essentiel. Malgré tous nos efforts, beaucoup trop de jeunes ne connaissent pas l'univers del'entreprise, ils n'en connaissent pas la réalité, ils n'ont donc pas toutes les cartes en main pour décider lemoment venu de leur orientation, ils risquent de passer à côté de telle ou telle voie, qui aurait parfaitementcorrespondu à leurs dons, à leurs aptitudes et qui les aurait conduit à la réussite. Ceci est particulièrementvrai pour certains de nos élèves qui rejettent un enseignement trop général, celui qu'ils reçoivent au collège,et qui se retrouvent vers quinze ans en grave situation d'échec. Nous travaillons actuellement pour leurpermettre, s'ils le souhaitent, d'alterner leurs études avec des petites séquences en entreprise où ils pourrontfaire d'autres expériences, découvrir d'autres possibilités et retrouver par là une estime de soi. Nous croyonsbeaucoup en ces dispositifs d'alternance et nous pensons qu'ils contribueront à enrayer un phénomène trèspréoccupant, peut-être le plus préoccupant que la France ait à connaître, à savoir que chaque année 60 000jeunes quittent notre système éducatif sans aucune qualification. Il est donc indispensable de continuer àrapprocher le monde scolaire du monde économique dans l'intérêt des jeunes, dans l'intérêt aussi desentreprises, qui dans bien des secteurs ne parviennent pas à recruter. Nous avons donc aujourd'hui enFrance paradoxalement des jeunes sans métier et des métiers sans jeunes, ce qui montre donc que pourremédier à cette situation, notre tâche reste immense.

Bref, voilà ce qu’a été, dans ses grandes lignes, l'expérience française de ces vingt dernières années. Jecrois qu'il était utile de l'évoquer, parce qu'elle est ancienne, parce qu'elle permet de porter un regardcritique sur une longue durée, parce qu'elle offre un paysage assez finement diversifié, je le crois, et qu'enfinelle présente des exemples de partenariat réussi avec le secteur des entreprises. Mais pour autant la Francen'a pas de modèle à proposer, ne fusse que parce qu'elle remet assez régulièrement en question son propremodèle, ses contenus, ses programmes, voire les finalités de son enseignement, et qu'elle fait évoluer sonprocessus de formation et de validation. La France n'a pas de certitude mais au contraire la volontépermanente d'adapter le système aux besoins (aux besoins de l'économie, aux besoins de la société). Voilàpourquoi d'ailleurs nous venons de lancer un grand débat national sur l'avenir de l'école auquel s'associenttous les Français et dont le but est de définir les grands objectifs de notre pays à l'horizon de quinze ou vingtans et qui fixera en quelque sorte la ligne d'horizon de l'école de la nation.

En outre, le triple phénomène de globalisation, d'accélération technologique et d'accès généralisé àl'information et à la communication nous impose de nouvelles approches sur les questions de formation, en terme

- de méthode,- de support pédagogique,- de formation des maîtres,- de financement – car tous ces objets ont des coûts,- de réponse au marché de l'emploi,- de rôle respectif des acteurs – qu'il s'agisse de l'Etat, des entreprises ou des collectivités.

La France comme tous ses partenaires tant en Europe que dans le monde est confrontée elle aussi à cesnouveaux questionnements. Notre pays est donc partie prenante de la réflexion en cours, pour s'adapter àun monde en évolution profonde, nous n'avons pas de solution miracle à proposer mais nous abordons lesgraves défis qui se posent à nous avec humilité certes, mais aussi avec la volonté d'apporter des réponsesrapides et efficaces car l'avenir en dépend. C'est à ce titre que cette conférence me parait venir à point etqu'elle nous éclairera. Cette conférence offre enfin l'opportunité d'affirmer l'importance de la formationprofessionnelle et de l'enseignement technique à l'heure où ils sont parfois l'objet d'une certaine désaffectionchez les jeunes, lutter contre l'échec scolaire, rendre plus flexible les parcours, valoriser les talents, les acquis,les expériences, organiser la mobilité. Voilà autant de défis qui se posent aux réformes de l'enseignementtechnique et de la formation professionnelle. La France est aussi comme acteur important de l'aide publiqueau développement, attentive aux problématiques de réformes éducatives qui entrent dans ce champ. Nousapportons notre contribution sous de multiples formes à cette coopération en étant bien conscient desenjeux économiques, sociaux et culturels qui lui sont liés, nous disposons d'une expérience et d'un savoirfaire qui nous permettent d'apporter des appuis significatifs à un nombre de pays partenaires, dont certainssont représentés ici, nous sommes donc prêts à poursuivre dans cette voie en cherchant plus d'efficacité, enjoignant nos efforts à ceux d'autres pays, notamment les pays européens. Pour cela, nous avons besoin d'êtreà l'écoute des autres, à l'écoute de ce qui se passe dans le monde. Cette conférence, j'en suis convaincu,devrait nous éclairer et devrait donc y contribuer.

Je vous remercie. »

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Peter de Rooij, Directeur – Fondation européenne pour la formation

« Cher Ministre, cher Directeur du CIEP, Excellences, Mesdames et Messieurs, chers Collègues,

C’est pour moi un honneur et un réel plaisir de pouvoir représenter la Fondation européenne pour laformation dans ces lieux historiques où, pendant de nombreux siècles déjà, je pense, des personnesexpérimentées et très qualifiées ont livré de beaux ouvrages, et j’ai le sentiment que cette tradition estperpétrée grâce aux activités qui sont aujourd’hui réunies dans cet édifice. Le CIEP jouit d’une tradition dequalité et la Fondation européenne pour la formation est ravie de pouvoir collaborer avec cet organismedepuis de nombreuses années déjà. Le fait de pouvoir accompagner cette judicieuse collaboration d’uneconférence également organisée par la Banque mondiale représente un vrai défi et un honneur. Nous avonsdes attentes communes : une conférence à niveau international où tous les continents du globe sontreprésentés, en prenant conscience- qu’il n’y a pas de meilleures pratiques universelles à proprement parler et qu’il est nécessaire de se pencher

sur chaque regroupement de pays, voire même sur chaque pays individuellement pour une approche surmesure,

- mais que, quoi qu’il en soit, nous sommes à même de trouver des principes de base communs pour ce quiest de l’enseignement technique et de la formation professionnelle.

Je pense que cette conférence pourrait nous apporter :- de bonnes pratiques que nous pourrions partager et qui pourraient être une source d’information et

d’inspiration pour d’autres régions,- un échange de points de vue,- un partage des compétences ;et qu’il existe bel et bien un grand nombre de principes communs.

On trouve tout d’abord le principe élémentaire selon lequel toutes les parties prenantes, legouvernement, les partenaires sociaux et les administrations locales devraient travailler ensemble dans ledomaine de la formation technique et professionnelle. L’apprentissage tout au long de la vie constitue unprincipe directeur et je pense que les conséquences pour la formation technique et professionnelle duniveau secondaire devraient également être abordées car elles existent. Bien sûr, un autre des principescommuns stipule que nous devons faire preuve de transparence par rapport à l’offre et à la demande etpenser aux types de structures de soutien existantes ou à mettre en place pour aider, conseiller et orienter lesjeunes gens et les adultes à se faire une place sur le marché du travail ou au sein du système de formation.Naturellement, le rôle des professeurs reste un problème à caractère universel et il est bon de partager nonseulement les expériences positives de solutions destinées à l’enseignement technique et professionnel, maisaussi les expériences de formation de professeurs, qui ont été préparés, suivant la philosophie del’apprentissage tout au long de la vie, à une manière entièrement nouvelle de faire leur travail. Et pour finir,et ce n'est pas le moins important, comment éviter les postes sans avenir, comment créer une flexibilité aussibien horizontale que verticale dans les systèmes afin d’éviter l’abandon et l’exclusion sociale. Je pense quec’est ce qui est en jeu à l’heure où nous parlons de principes communs.

La Fondation européenne pour la formation, en tant qu’agence de l’Union Européenne, travaille avecquarante pays en dehors de l’UE ; en ex-URSS et ex-Yougoslavie, en Albanie, dans les pays d’Afrique duNord et du Moyen-Orient, et pour finir, dans les dix pays qui deviendront bientôt membres de l’UnionEuropéenne. Tous ces pays ont subi des transformations et leurs systèmes d’enseignement et de formationrisquent gros en ce qui concerne leur restructuration, ce pourquoi la Fondation européenne pour laformation contribue activement depuis presque dix ans maintenant à ce processus de changement et deréorganisation.

Nous allons surtout nous pencher sur l’enseignement secondaire et notamment la partie techniqueet professionnelle. Je pense que le secondaire – nous le voyons de plus en plus – occupe une place décisivedans l’ensemble du système éducatif et de formation car c’est à ce niveau qu’une préparation concrète à lavie et à une carrière devrait se faire. Un bon départ, que ce soit une préparation à des études supérieures, à un

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premier emploi, ou le premier pas sur le marché du travail, est en jeu lorsque l’on parle de l'enseignementsecondaire. Mais comme l’indiquait tout à l’heure le ministre, l’enseignement secondaire est souvent lié à unpourcentage et à des risques élevés d’abandon ; le chômage et l’exclusion sociale vont souvent de pair, et ilnous faut trouver des mécanismes, des filets de sécurité pour éviter cela. Comment y parvenir est la questionprincipale qui se posera au cours de notre conférence aujourd’hui et demain. Comment agir, et surtout quelrôle la formation technique et professionnelle pourrait-elle jouer à un niveau secondaire, pour rendrel’enseignement secondaire plus accessible, plus attrayant pour les jeunes et plus efficace dans ce qu’il apporteà la société et au marché du travail dans l'ensemble, mais aussi comment le rendre flexible et adaptable auxchangements par rapport aux exigences du monde du travail et de la société en général.

J’espère que cette conférence nous apportera de nouveaux points de vue sur les moyens de partagerles meilleures pratiques, de créer une synergie entre les diverses organisations représentées ici, et aussi entreles participants pris individuellement – je pense que cela sera une expérience enrichissante qui permettra deconsolider nos compétences. Le but de cette conférence est à mon avis de trouver une base pour encoreaméliorer le secondaire, notamment dans la branche technique et professionnelle, et ceux qui enbénéficieront seront en fin de compte des jeunes gens qui auront alors de meilleures chances, à la fois surle marché du travail et en société. L’enseignement secondaire pourra réellement y contribuer, et, de cettemanière, et selon moi c’est aussi simple que cela, il pourra aussi contribuer à créer un monde meilleur, et c’estce que nous aborderons aujourd’hui, demain et après-demain. Je souhaite que ce soit un succès.

Merci. »

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« Monsieur le Ministre, Monsieur le Directeur, Excellences, chers Collègues,

J’ai le plaisir de vous saluer au nom de l’UNESCO et vous dire combien l’UNESCO est contente departiciper à l’organisation de cette conférence, et j´apprécie d’ailleurs le travail d’équipe dont ont fait preuveles partenaires dans la préparation de ces assises.

Au cours de la conférence générale de l’UNESCO qui s’est tenue en octobre, on a clairement puconstater que nos 190 États-membres attachent une grande importance à l’enseignement technique et à laformation professionnelle. Depuis le forum de Dakar en 2000, l’UNESCO se concentre principalement surla campagne mondiale pour atteindre « l’Education pour Tous ». Mais le fait que celle-ci soit devenue unepriorité claire et ancrée a engendré deux conséquences distinctes.

- La première est la prise de conscience par nos Etats membres et notre personnel du besoin d’utiliser,le plus efficacement possible, les ressources consacrées à des objectifs autres que la campagne surl’Éducation pour Tous à strictement parler, tels que l’enseignement supérieur et l’enseignementsecondaire ainsi que l'enseignement technique et la formation professionnelle.

- La deuxième est la suivante : comme de plus en plus de pays perçoivent désormais la possibilitéd’accéder à un enseignement primaire universel, ils commencent à réaliser l’importance des défisauxquels ils devront faire face au niveau du secondaire et particulièrement au niveau del’enseignement technique et de la formation professionnelle.

Or il n’est pas facile de relever ces types de défis car, peut-être plus que tous les autres aspects del’éducation, l’enseignement technique et la formation professionnelle doivent refléter la réalité sociale etéconomique du pays et y être bien intégrés. Ceci a bien été compris par les participants au sommet mondialsur la société de l’information qui s’est tenu à Genève la semaine dernière. Nous parlons d’une économie dela connaissance mais cette formule a une signification différente selon les pays, et c’est ce que doit exprimerl’enseignement technique et la formation professionnelle pour arrêter le phénomène qui consiste à formerdes menuisiers dans des pays où l’on ne trouve pas de bois.

Donc au nom de l’UNESCO, j’ai le plaisir de vous souhaiter une très bonne conférence. D’ailleurs,au cours de ces assises, vous allez pouvoir apprendre certaines choses sur nos activités propres à l’UNESCOdans le domaine, non seulement au sein de notre siège à Paris, mais aussi dans nos bureaux hors siège et nosInstituts.

Je vous remercie. »

John Daniel, Sous directeur général pour l´éducation – UNESCO

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« Monsieur le Ministre, chers Invités, Amis et Collègues,

Je suis ravi de pouvoir participer à l’ouverture de cette conférence passionnante sur la réforme dessystèmes d’enseignement technique et de formation professionnelle (ETFP).

Cette conférence est intéressante à mes yeux car elle traite de la réforme de l’ETFP non pas en tant quetelle mais dans le contexte d’un des phénomènes les plus importants de notre temps – celui de l’apparitiond’un nouveau paradigme d’économie basée sur la connaissance. Des changements de paradigmes d’une telleampleur n’ont pas lieu tous les jours, il ne fait aucun doute que nous sommes engagés dans un telchangement à l’heure actuelle, et je suis convaincu que cela ne fait que commencer – dans un livre que j’aiécrit récemment, j’ai estimé que 80 % de la nouvelle économie mondiale, qui est à l’origine de ce changementde paradigme, reste à venir.

Cette conférence vient donc à point nommé. Pour de nombreux pays, si ce n’est pour la plupart, il vautmieux repenser l’ETFP maintenant, alors que ce paradigme continue à prendre forme, plutôt que de seréveiller dans vingt ans et se rendre compte qu’on a raté le coche.

Dans les minutes à venir, j’essaierai de tirer au clair trois points différents :

• Ce que la nouvelle économie mondiale signifie en termes d’importance de l’éducation en général

• Les raisons pour lesquelles l’ETFP forme un secteur d’une importance toute particulière qui a besoin nonseulement d’être repensé mais aussi « boosté »

• Comment une conférence comme celle-ci est susceptible de contribuer à tout cela

La nouvelle économie mondiale et l’importancede l’éducation en général

La nouvelle économie mondiale dans laquelle nous nous engageons est mue par deux moteurs différents :révolution économique et révolution technologique.

Avec la révolution économique, nous sommes passés de 1,5 milliards d’habitants dans des pays quimenaient une politique orientée vers le marché il y a trente ans de cela à 6 milliards aujourd’hui dansla même situation – seuls Cuba et la Corée du Nord suivent encore la voie de la planification centralisée.

La révolution technologique se concentre sur des télécommunications et des sciences de l’information demoins en moins coûteuses. Contrairement à d’autres révolutions technologiques antérieures qui visaient àtransformer matières premières ou énergie, celle-ci tend à transformer le temps et la distance – et c’est làqu’elle va beaucoup plus loin dans la structure de la société. En outre, elle fait de la connaissance le facteurde production le plus important, plus important que le capital, que les matières premières ou que la maind’œuvre stricto sensu.

Que l’on aime cela ou pas, cette nouvelle économie mondiale – avec ces deux révolutions comme forcemotrice – transforme la manière dont tout se fait. Elle crée de nouveaux produits, de nouveaux marchés, denouveaux services, de nouvelles formes d’organisation et même de nouveaux moyens d’interaction – sansparler des nouvelles méthodes d’enseignement et d’apprentissage. C’est un aspect extrêmement positif,partagé par tous les pays, riches comme pauvres.

Mais cette nouvelle économie mondiale a aussi des côtés stressants car elle change les règles en profondeur :

• C’est une économie qui avance rapidement, la première règle du jeu est donc de faire preuve de souplesse.

• C’est une économie hautement transnationale où il faut maîtriser les réseaux entre les frontières.

• C’est une économie ultra compétitive qui exige une fiabilité à 100 %. Si vous n’êtes fiable qu’à 99 %seulement, votre clientèle se dirigera vers quelqu’un d’autre.

Jean-François RischardVice président pour l’Europe – Banque mondiale

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• C’est une économie à forte intensité de connaissances où vous devez être capable d’apprendreconstamment de nouvelles ruses au risque de vous laisser distancer.

En plus des distinctions habituelles entre pays riches et pauvres, il existe maintenant d’autresdistinctions : pays rapides et pays lents ; pays qui se connectent grâce à des réseaux et ceux qui restent isolés ;pays très fiables et ceux qui ne le sont pas ; pays qui continuent à apprendre et pays qui stagnent.

Ces nouvelles règles engendrent des tensions car la nouvelle économie mondiale récompense les pays et les acteurs qui remplissent ces quatre conditions avec succès, mais pénalise ceux qui n’y parviennent pas.On observe nettement cela dans le bilan des années 90 :

• Les pays riches dont la population approchait un milliard avaient un taux de croissance de 2 % parpersonne en moyenne pendant cette décennie.

• Le taux de croissance dans 30 pays pauvres regroupant 3 milliards d’habitants était de 5 % par personne,soit 2,5 fois plus rapide que les pays riches. Ce sont ces pays qui se sont ouverts et qui ont mené une bonnepolitique, y compris dans le secteur de l’éducation – en bref, ces pays sont ceux qui ont adopté le plusfacilement ce nouveau paradigme d’économie basée sur la connaissance. Il se trouve que c’est ce groupe depays qui a réussi à réduire considérablement la pauvreté.

• Plus de cent pays pauvres regroupant 2 milliards d’habitants connaissaient un taux de croissance de – 1 % par personne. Il y avait de nombreuses raisons à cela, l’une d’entre elles étant que ces pays, d’unemanière générale, ne réussissaient pas très bien à suivre ces quatre nouvelles règles de l’économie mondiale.La pauvreté a augmenté dans ces pays-là.

Le groupe du milieu est intéressant car il semble progresser par bonds dans de nombreux domaines.Prenons un exemple : alors que le pourcentage de population active travaillant dans l’industrie auxEtats-Unis et dans d’autres pays riches est passé de 20 % en 1900 à 40 % en 1950, et à bien moins de 20 %en 2000, ce groupe du milieu semble progresser plus rapidement dans le secteur tertiaire et échapper aumouvement ascendant et descendant de l’emploi industriel qui se produisait dans les pays riches il y a desdizaines d’années. En d’autres termes, ces pays semblent sur le point de passer directement d’une agriculturedominante à une économie beaucoup plus équilibrée, avec un secteur tertiaire très fort.

Quoi qu’il en soit, ce que je tiens à souligner, c’est que dans ce contexte de nouvelle économiemondiale, il est clair que les secteurs de l’éducation sont devenus un facteur essentiel à la réussite ou àl’échec d’un pays donné.

Ceci s’applique à la fois aux aspects quantitatif et qualitatif du secteur de l’éducation. Des étudesmontrent que les pays ne décollent pas si leur population a passé moins de 6 ans à l’école en moyenne. Ellesmontrent également qu’une année supplémentaire passée à l’école engendre une augmentation de 0,4 % dutaux de croissance d’un pays et que, si on fait avancer le pays sur l’échelle de résultats scientifiques d’unécart-type, le taux de croissance augmentera de 1 %. Il y a également des éléments de preuve basésdirectement sur les pays : bien que la Corée et le Ghana aient eu le même PIB par personne il y a quaranteans de cela, le PIB de la Corée par tête est aujourd’hui vingt fois supérieur à celui du Ghana, en partie grâceà la qualité supérieure de son système éducatif, classé parmi les meilleurs au monde selon les résultats del’enquête OCDE/PISA.

L’éducation est donc clairement l’un des secteurs les plus cruciaux de tous, pour ne pas dire le pluscrucial. Tout d’abord, parce que la réussite dans la nouvelle économie mondiale dépend principalement de laqualité et de la quantité de l’enseignement, beaucoup plus qu’avant. Je crois vous avoir donné une idée desraisons.

Mais il y a d’autres raisons qui font qu’on élève l’éducation à un niveau hautement prioritaire dans letravail de développement.

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En effet, une deuxième raison est la suivante : l’éducation est aussi l’une des manières les plus efficacesde combattre la pauvreté et les inégalités. Elle est étroitement liée à la santé, à notre inclination à sepréoccuper de l’environnement et même à la stabilisation de la population.

J’ajouterais même une troisième raison : l’éducation est essentielle à la construction de sociétésréellement démocratiques. On pourrait rétorquer que l’éducation est une sorte de droit universel carelle procure, comme l’a fait remarquer le lauréat du prix Nobel Amartya Sen, la force essentielleet individuelle qui permet de réfléchir, de faire des choix et de s’orienter vers une vie meilleure. Avec presqueun milliard de personnes encore analphabètes, nous sommes loin d’avoir atteint ce droit universel.

C’est en prenant conscience de ces trois raisons et de l'importance accrue qu’elles ont donnéà l’éducation que la Banque mondiale (qui joue un rôle dans l’éducation depuis son premier prêt à caractèreéducatif à la Tunisie en 1966) a récemment triplé ses prêts destinés à l’enseignement, passant de 700 millionsde dollars en 1999/2000 à quelques 2,1 milliards aujourd’hui (environ 15 % de l’ensemble des prêts),devenant ainsi la plus importante source unique de financement de l’éducation au monde pour les pays endéveloppement. C’est aussi pour cela que le gouvernement hollandais a décidé il y a quelques moisde consacrer la plus grande partie de son aide bilatérale à l’éducation (15 %.) Pour les mêmes raisons,la Norvège a aussi décidé de donner la plus grande priorité à l’aide à l’éducation. Et c’est ce qui fait quecertains des Objectifs de Développement du Millénaire (ODM) concernent l’éducation et que l’on s’intéresseautant à l’initiative appelée l’éducation pour tous, dont le but est de parvenir à ce que le plus grand nombred’enfants dans le monde entier terminent l’école primaire.

Quelques mots maintenant sur la manière dont l’ETFP vient s’intégrer à tout cela.

L’enseignement technique et la formation professionnelle

Je pense qu’il est juste de dire que la Banque mondiale et les professions travaillant pour ledéveloppement en général ont prêté beaucoup d’attention aux ODM et aux objectifs qu’ils se sont fixésconcernant l’éducation de base – et pas assez à l’enseignement secondaire et tertiaire. Dans mon institution,nous sommes en train de redresser la balance ; au cours des douze derniers mois, trois rapports importantsont été rédigés sur : la réforme de l’enseignement du troisième cycle, le rôle de la science et de la technologieet, pour finir, l’apprentissage tout au long de la vie.

Nous commençons donc à voir l’éducation sous un jour différent, plus holistique, ce qui est une bonnenouvelle. Mais à l’intérieur même de cette réflexion plus holistique, il existe de bonnes raisons de seconcentrer sur le rôle particulier de l’ETFP. Cela s’applique autant à mon institution qu’aux professionstravaillant pour le développement dans leur ensemble.

En effet, il y a tout un travail de réflexion à mener sur ce sous-secteur. L’ETFP est dans de nombreuxpays considéré comme le parent pauvre du système éducatif (comme un système où se retrouvent ceuxqui ont échoué dans la branche générale) – alors qu’en fait il est certain de jouer un rôle nouveau et bienplus important à l’avenir.

De manière traditionnelle, on donnait deux raisons pour expliquer l'importance du système d’ETFP :

• Le système d’enseignement secondaire et l’ETFP en particulier ont souvent été décrits à juste titrecomme une importante passerelle entre l’éducation de base et les besoins de l’économie.

• L’existence même de l’ETFP encourage les parents à faire suivre à leurs enfants la totalité du cursusscolaire de base.

Mais je pense que cette nouvelle économie mondiale – et le paradigme de l’économie basée sur laconnaissance qui l’accompagne – donne diverses et plus fortes nouvelles raisons aux pays de repenser etd'encourager leur système d’ETFP :

• Pour commencer, les systèmes d’ETFP ne représentent pas uniquement un intermédiaire importantentre l’éducation de base et l’économie, ils pourraient aussi être à la source de nouvelles armées de

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travailleurs, essentiels à l’économie de la connaissance. Peter Drucker, le patriarche de la nouvelle économiemondiale, appelle ces travailleurs les « travailleurs de la connaissance ». Il ne s’agit pas de diplômés oud’étudiants en thèse mais bien des personnes qui réparent les ordinateurs, les manipulateurs d'équipementsradiologiques, les électriciens, les réparateurs d'appareils ménagers, les mécaniciens, les assistantsd’imprimerie, le personnel de maisons de soins, les agents de contrôle de la qualité de l’eau, et j’en passe.En y réfléchissant bien, trois systèmes peuvent mener aux métiers de ces travailleurs de la connaissanceindispensables : le système d’ETFP, le second cycle de l’enseignement secondaire et le premier cyclede l’enseignement supérieur (IUT en France, lycées techniques en Irlande, « community college » auxEtats-Unis, etc.) Si l’on voit plus loin, il est clair que ces trois systèmes devraient être reliés entre eux et que lesystème d’ETFP devrait bénéficier de ces liens et par-là même ne plus avoir le rôle du parent pauvre qu’onaurait pu lui attribuer (on m'a dit que ces connexions auraient commencé à s’établir en France, en Tunisie,au Chili…)

• Deuxième nouvelle raison de s’intéresser de près à l’ETFP : les systèmes d’ETFP peuvent constituer unpivot et une plate-forme de base à l’apprentissage tout au long de la vie et à un concept qui lui estétroitement lié, le concept d’aptitude au travail – ‘employability’ en anglais – différent du travail enlui-même. Vu sous cet angle, les systèmes d’ETFP devraient être reconsidérés, de manière à englober nonseulement l’apprentissage d’une compétence professionnelle particulière mais une formation plusgénérale (navigation informatique de base, connaissances basiques des mathématiques, du travaild’équipe…) qui permettront de maintenir l’apprentissage tout au long de la vie et l’aptitude au travailau-delà des compétences restreintes jusqu’alors enseignées.

• Troisième nouvelle raison : l’ETFP est aussi un sous-secteur du système éducatif où l’apprentissageà distance peut contenir des applications des plus simples et rentables, et qui encouragent l’apprentissage.Cela fait dix ans que je suis fan de l’enseignement à distance, et certaines des premières applications quej’ai pu voir étaient justement dans le domaine de l’ETFP. Non seulement pour l’ETFP même maiségalement pour les professeurs y enseignant.

• Quatrième nouvelle raison : les systèmes d’ETFP constituent une excellente plate-forme à la poursuited’initiatives sociales urgentes telles que les brillantes « écoles de la deuxième chance » à Marseille etdésormais dans d’autres villes. Les enfants qui ont abandonné l’école et risqueraient de grossir les rangs degangs ou de groupes criminels peuvent acquérir rapidement des compétences techniques avec des résultatsremarquables dans la recherche d’emplois correspondant à ces compétences. Ces écoles peuvent paraîtrechères, mais elles reviennent beaucoup moins cher à la société que l’autre alternative possible.

• Cinquième raison de voir l’ETFP sous un nouveau jour : l’accréditation des compétences. Il se trouve queje crois beaucoup en l’accréditation, et si le monde développait ces systèmes d’accréditation centrés sur lescompétences et non pas sur les diplômes, cela donnerait une nouvelle raison d’être aux bons systèmesd’ETFP et pas n’importe lesquels.

Je pourrais continuer encore longtemps, même sans être un expert sur le sujet de l’ETFP. Mais je pensem’y connaître un peu sur la nouvelle économie mondiale et sur le paradigme de l’économie basée sur laconnaissance, et pour moi l’ETFP a un rôle essentiel à y jouer.

En tout cas, il ne fait aucun doute que les systèmes d’ETFP doivent être repensés sous une toute autrelumière – et je pense que c’est sur cela que cette conférence porte. Je suis impatient de voir l’évolution duprocessus.

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Pour terminer, quelques mots sur la conférence elle-même

De même que la réflexion sur le contexte de l’ETFP, cette conférence est innovatrice en soi. Elle a étéorganisée en association avec la Fondation européenne pour la formation, l’UNESCO, le Centreinternational d’études pédagogiques (CIEP), les ministères français de l’Éducation et des Affaires étrangères,notre propre Banque mondiale et beaucoup d’autres. Il n’est pas toujours facile d’organiser de tellesassociations et conférences, mais leur philosophie partenariale finit toujours par payer – à vrai dire,les partenariats de développement constituent la voie du futur.

C’est également un partenariat novateur dans le sens où ses participants viennent de pays du mondeentier, dont le niveau de vie est parfois très différent. Les pays dont ils sont originaires ont des expériencesdiverses de l’ETFP, avec seulement 3 % de la tranche d’âge dans l’ETFP au Yémen contre 80 % apparemmenten Ouzbékistan.

Pour finir, les participants viennent de milieux différents : ministères, syndicats patronaux et ouvriers,milieu universitaire ou encore organismes internationaux.

Cela promet un dialogue passionnant et un riche échange de points de vue, d’expérienceset d’ambitions. J’espère que l’une des conséquences de cette conférence sera la mise en place de mécanismeset de pistes solides de suivi, y compris la propagation, voire même la création d’un réseau d’échange.Je dis cela car le sujet d’aujourd’hui – la réflexion sur l’ETFP d’un point de vue totalement nouveau et quiévolue rapidement – est un sujet trop important pour se limiter à une seule conférence, même si celle-cis’avère être passionnante.

Monsieur le Président, merci. »

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« Monsieur le Ministre,Mesdames et Messieurs les Ministres de pays partenaires et amis,Mesdames et Messieurs les Représentants des organisations internationales et de la Commission européenne,Monsieur le Directeur du CIEP, Mesdames et Messieurs, chers Collègues,

Le ministère des Affaires étrangères est heureux d'apporter son concours à l'initiative prise en commun parla Banque mondiale, le Centre international d’études pédagogiques de Sèvres, l'UNESCO et la Fondation deTurin, pour réunir pendant ces trois jours les représentants des administrations et institutions de paysengagés dans des réformes, des politiques nationales d'enseignement technique et de formationprofessionnelle. Le sujet dont vous allez débattre durant ces trois jours est capital pour la mobilisation de lacommunauté internationale, pour mettre fin à ce que j'appellerai le désamour entre les bailleurs de fonds etl'enseignement technique et la formation professionnelle. En effet, durant la décennie 90, beaucoup debailleurs de fonds ont stoppé tout soutien à l'enseignement technique secondaire, d'autres ont choisi de seconcentrer essentiellement à l'appui à l'enseignement technique universitaire ou à la formationprofessionnelle continue. Les explications sont nombreuses. Parmi elles je citerai des problèmesd'inadéquation de l'offre de formation à la demande économique, les coûts unitaires élevés et la question dufinancement, le déphasage croissant entre l'offre de formation et la structure économique de certains paysen développement, d'abord marqués par l'extension du secteur informel. Mais aujourd'hui les chosesbougent. Certains pays émergents, dont les représentants sont parmi nous, ont fait la démonstration qu'undispositif adapté d'enseignement technique et de formation professionnelle pouvait être un poumon del'investissement et de la croissance économique. La communauté internationale lors du Sommet duMillénaire, s'est rassemblée autour d'objectifs ambitieux dans l'Éducation pour Tous. Chacun aujourd'hui,sur la base de nombreuses études empiriques et d'analyses théoriques, s'accordent à penser quel'accumulation de capital humain est un facteur clé de la croissance économique et que l'accès à uneéducation de base de qualité et la formation tout au long de la vie sont des vecteurs importants des stratégiesde réduction de la pauvreté et des inégalités, mais aussi pour la promotion de droits humains essentiels.Vous le savez, la France préside actuellement une importante initiative multilatérale, initiative Éducationpour Tous – procédure accélérée ou « fast track » – qui a pour ambition d'accélérer le processus descolarisation en vue d'atteindre en 2015 l'objectif d'une scolarisation primaire universelle. Mais les progrèsaccomplis en matière de scolarisation primaire posent avec d'autant plus d'acuité la question du devenir desélèves n'ayant achevé ainsi que le primaire complet. Nous savons bien qu'il ne sera pas possible dans denombreux pays, d'accueillir l'ensemble d'une classe d'âge dans l'enseignement secondaire général, souventorienté vers la préparation de l'accès à l'université. Ce n'est d'ailleurs pas souhaitable pour des raisonséconomiques, financières et sociales. A l'opposé, nous ne saurions nous résoudre à voir les enfants ayantachevé avec succès leur cycle primaire, sortir brutalement du système scolaire avec les risques de retombéedans des processus d'exclusion, d'exploitation, de plongée sans filet dans la trappe à pauvreté. Entre ces deuxextrêmes il y a certainement place pour des systèmes d'enseignement post-primaire, d'enseignementtechnique et de formation professionnelle, facilitant l'insertion par l'emploi des nouvelles générations, etrépondant mieux encore aux besoins d'économie peu structurée. En raison des questionnements évoquésci-dessus, et suite à une évaluation de long terme de notre coopération dans le secteur de l'enseignementtechnique et de la formation professionnelle, qui vient d'être finalisée, la direction du développement et dela coopération technique a mis en place un groupe de réflexion, qui a pour mandat de proposer, d'ici l'étéprochain, de nouvelles orientations stratégiques pour notre coopération dans le domaine de l'enseignementtechnique et de la formation professionnelle. Ce séminaire constitue pour nous une occasion exceptionnellede faire l’écho de vos commentaires sur les différents aspects de cette thématique, de tirer un certain nombred'enseignements ayant valeur d'exemples et reproductibles, au moins en partie, dans d'autres payset de comparer les approches et réflexions de la Banque mondiale, de l'UNESCO, de la Commissioneuropéenne et de la Fondation de Turin, dont je salue à nouveau tous les représentants. Vos réactions etréflexions sont donc très attendues et nous porterons une attention toute particulière à vos propositions.Nous avons besoin de vous pour progresser et nous voulons progresser pour mieux coopérer et mieuxéchanger. Je vous souhaite à mon tour un excellent séjour à Sèvres et plein succès pour vos travaux.

Merci. »

Serge Tomasi, Sous-directeur du développement social et de la coopération éducative – Ministère des Affaires étrangères, France

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Francis Steier, Économiste principal en éducation – Banque mondiale

« Monsieur le Ministre,Mesdames, Messieurs,

J’aimerais vous faire une très brève introduction à cette conférence. En quatre points :

Tout d'abord, un « tour guidé » des séances plénières et des ateliers, en particulier des thématiquesretenues.

La séance 1 va placer l'enseignement technique et la formation professionnelle (ETFP) dans sescontextes – historique d'abord, contemporain ensuite. Elle sera suivie de deux séances qui vont passer enrevue, sur un plan conceptuel et sur un plan pratique, les diverses visions des objectifs de l'ETFP dans lemonde. La séance plénière suivante sera consacrée au positionnement de l'ETFP dans le contexte del'enseignement général. Elle sera suivie de 2 séances – une plaçant l'ETFP dans le contexte de l'éducationtout au long de la vie, l’autre s'intéressant au rôle de l'Etat et des autres acteurs socio-économiques. A la finde la deuxième journée, une table ronde présentera les expériences intéressantes de la Tunisie et du Chili, etenfin la dernière séance plénière, celle du jeudi matin, portera sur quelques thématiques bien ciblées. Ellesera suivie d'ateliers puis de la conclusion de nos « grands témoins », comme nous les appelons, messieursGauron (Cour des Comptes) et Middleton (Banque mondiale).

Il y aura bien sûr des chevauchements entre les thématiques, mais c'est normal.

Deuxièmement, l'esprit dans lequel nous avons conçu, au comité de pilotage, cette conférence.Nous avons souhaité d’une part une confrontation constructive d'idées, et d’autre part la participationactive de tous aux débats. Cette dernière aura lieu dans la période des « Questions et Réponses »bien entendu, et surtout lors des ateliers.

C'est d'ailleurs dans cet esprit, et c'est mon troisième point, que nous avons conçu les ateliers.Il y en aura deux : le premier cet après-midi et l'autre jeudi matin. Dans les premiers ateliers, dès cetaprès-midi, nous allons vous demander de bien vouloir vous répartir comme vous voulez. Nous vousdemandons simplement de vous répartir de façon équilibrée parmi les quatre groupes. Là, on vousdemandera de faire plusieurs choses, d'abord un très bref tour de table où vous allez surtout parler del'expérience de votre pays en ce qui concerne l'ETFP sous tous ses volets – y compris l'expérience de l'aidebilatérale et multilatérale dont votre pays a bénéficié. Vous pourrez d’ailleurs la commenter tout à faitlibrement – ce sera intéressant (!). Puis vous nous ferez des recommandations sur vos attentes par rapportaux études de cas que vous allez proposer pour l'atelier de jeudi matin. Il s'agira de choisir les payset les thématiques correspondantes pour que ceux-ci bénéficient d'une assistance technique « gratuite »de la part des participants de l'atelier. C'est un programme ambitieux, mais qui vaut la peine d’être tenté.

Enfin un mot sur les défis propres au déroulement de cette conférence.Vous connaissez sans doute l'histoire d’Einstein, qui à la fin du deuxième semestre d’un cours qu’il

enseigne à l’université, donne à son assistant le sujet de l’examen de fin d'année pour ses étudiants, afin quecelui-ci en fasse le tirage.

L'assistant s'en va, et revient au bout de cinq minutes, complètement affolé.- « Professeur », dit-il, « vous vous êtes trompé, on ne peut pas distribuer cet examen ».- Einstein lui demande : « Et pourquoi donc ? ».- L’assistant explique : « C'est le même que le semestre dernier, ce sont les mêmes questions ! »- Et Einstein de lui répondre : « Ça, ce n'est pas un problème. Ce sont les mêmes questions,

certes, mais les réponses ont changé … »

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Ici, nous sommes dans un sujet où non seulement les réponses changent, mais les questions changentaussi. Donc nous avons un défi particulier, et j’aimerais demander aux intervenants et aux participantsd’avoir une certaine discipline. Les intervenants d'abord : à partir de maintenant, nous allons vous demander– et nous demandons aux présidents de séances d'être très stricts – de limiter vos interventions àvingt minutes. Les participants, surtout dans les ateliers, vu les thématiques que nous allons aborder, nousavons un risque de « partir dans tous les sens » et donc nous allons demander aux présidents d'ateliersd'avoir la discipline de ramener les intervenants dans le droit chemin …

…sans créer d'incident diplomatique, bien sûr !

Merci. »

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Séance 1 :ETFP ET DÉFIS MONDIAUX

l’ETFP : histoiresM. Jacques Mazeran – CIEP

L’importance de la formation professionnelle dans les stratégiesde préparation à l’économie et la société de la connaissance

M. Peter de Rooij – ETF

Enseignement secondaire : préparer les jeunespour le marché du travail dans l’économie de la connaissance

M. David Fretwell – Banque mondiale

Débat avec la salle

Mohamed ELSAIDPrésident de séance

EGYPTE

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Au commencement était la formation professionnelle :apprendre à utiliser l’outil et chercher à le perfectionnerétait une fonction première à l’aube de la société humaine.

Par la suite, l’organisation sociale et l’évolution destechniques ont rendu nécessaire la maîtrise, la maintenan-ce et l’amélioration des savoir-faire. A ce titre, acquérir lacompétence a « valeur sociale » et est vecteurd’intégration : passer d’apprenti à compagnon assure unemploi, un revenu, un statut ; passer de compagnon àmaître consacre une reconnaissance sociale fondée sur lesavoir-faire et le savoir enseigner.

Avec le progrès des sciences et des techniques, le savoir-faire ne suffit plus, il faut plus de savoir ; il faut d’abordapprendre et ensuite se former. La formation profession-nelle doit faire une place croissante à la formation généra-le ; l’enseignement technique naît de ce besoin.

Avec l’explosion des nouvelles technologies, la mondiali-sation, l’information généralisée, mais aussi avec lesdramatiques déséquilibres planétaires, économiques,sociaux, culturels, apparaissent de nouvelles probléma-tiques : comment former ? comment préparer à l’emploi ?quel emploi ? pour quelle durée ? avec quels moyens ? etquelles méthodes ?

De nouveaux doutes émergent aussi : quels seront lesemplois de demain ? y aura-t-il emploi pour tous ? quellessont les clés du développement ? ce concept a-t-il partoutle même sens ? Former les hommes reste un enjeupremier des sociétés : d’abord donner à chacun lesmoyens de vivre (et parfois de survivre) ; ensuite des’adapter au changement ; d’être aussi des citoyensresponsables ; enfin de trouver une place dans la sociétédu savoir.

Introduction

Mesdames et Messieurs,

Après les exposés que vous avez entendus tout à l'heure et qui ont tous plus ou moins abordé les questions historiques, je ne vais pas avoir la prétention de vous infliger un cours d'histoire surtout en quelques minutes.Mon objectif, en tant que l'un des initiateurs de cette conférence, est beaucoup plus simple, beaucoup plus modeste.Mon propos n'est que celui d'une ouverture : essayer d'inscrire notre réflexion et nos débats dans une perspective qui sesouvienne du passé et, peut-être, y puiser quelques éléments qui seraient d'actualité.

ETFP : histoires

I. Au commencement était la formation professionnelle…

Pour débuter, vous me permettrez de paraphraserla parole divine en disant que, au commencement étaitla formation professionnelle. L'historien, Leroi-Gourhan, montre bien comment le comportement despremiers anthropiens au niveau du langage et au niveaude l'outil n'était pas différent au fond de celui dutechnicien d'aujourd'hui pour assurer le progrès destechniques. C'est l'association du langage et de l'outilqui a permis le transfert des savoir-faire et des acquis.

Le même historien nous montre que, quelquesdizaines de milliers d’années plus tard, il y a seulement

2000 ans, le développement des techniques en Chine,pays dont nous savons combien il était en avance sur lereste de l'humanité à ce moment là, était lié directement,presque mécaniquement, au développement deséchanges et des voies de communication ainsi qu’à lamobilité des artisans. Et il nous dit que, lorsque les lettrésprenaient le pouvoir, s'installait en Chine une période destagnation, mais que lorsque les empereurs, la dynastieHan en particulier, soutenaient l'artisanat, l'agriculture,la pharmacie et que les lettrés, car il y avait en mêmetemps des travaux intellectuels, venaient les appuyer,alors, et je cite, « les inventions surgissaient de toute part ».

Résumé

J. MazeranDirecteur du département

ingénierie éducativeCentre international

d’études pédagogiques

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Mille ans plus tard, en Europe, au Moyen Age, leconstat est de la même nature. A côté des étudesnobles, réservées à une toute petite fraction de lasociété, le progrès des techniques est encore assurédans cette Europe du Moyen Age par les artisans,par les commerçants, par les banquiers, par les

architectes, par les artistes qui ne cessent desillonner le continent et de circuler en allantchercher, à côté, les nouvelles techniques, lesnouveaux savoirs, qu’ils importent dans leur pays etqui, ainsi, après avoir enrichi leurs savoir-faire,transfèrent à leurs élèves leurs compétences.

L'artisanat est longtemps resté le premierproducteur de technologie et de savoir-faire. Mêmela médecine à l'époque progressera à travers sestâtonnements et à travers ses expériences concrètes.Apprendre le métier est à la fois une source derevenus et un moyen d'insertion sociale. Enseignerles techniques du métier confère unereconnaissance sociale. On peut dire que c'est toutle schéma, dans cette époque du Moyen Age, de larelation de maître à compagnon, de compagnon àapprenti, qui forme la trame de cet embryon deformation professionnelle.

Le dynamisme des sociétés apparaît donc lié àcette époque là, à leur aptitude à ouvrir des contacts,à favoriser des échanges, ce qui permet d'innover etde transférer les connaissances acquises. Je voudraisjuste souligner que c'est donc la profession, ce sontles professionnels, qui sont à l'origine, à la base, dece qui devait devenir ce que nous appelonsaujourd'hui la formation professionnelle. Laformation professionnelle n'est pas venue parl'école, elle est venue de la profession.

II. Une formation issue des métiers

Mais bientôt, vers la fin du XVIIIe siècle, onvoit apparaître la nécessité d'organiser ce transfert.Des écoles privées se créent un peu partout enEurope en fonction des besoins locaux, de ce qu'ilfaut bien appeler à l'époque des « entrepreneurs ».Dans diverses régions de France, d'Allemagne etd'Angleterre, les exemples d'écoles qui se créent àcôté d’entreprises et/ou de manufacturesfoisonnent. On voit aussi apparaître des écolespubliques à l'initiative de groupements, decollectivités ou de l'Etat.

Mais déjà, tout de suite, naît une controverse.Je vais vous citer une histoire que j'ai trouvée unpeu piquante : le 15 septembre 1793, un décret prispar le gouvernement révolutionnaire français,ordonne qu'au-dessus de l'enseignement primaire,il y ait trois degrés d'instruction. « Le premier pourles connaissances indispensables aux artistes etouvriers de tous genres, le second pour lesconnaissances ultérieures nécessaires à ceux qui sedestinent aux autres professions de la société, letroisième pour les objets d'instruction dont l'étudedifficile n'est pas à la portée de tous les hommes ».Beau programme ! Mais le décret est tellementcritiqué qu'il est rapporté le lendemain. Noussommes en France ! et l'argument est donné par leconventionnel Cambon, qui dit « on veut nous faire

croire qu'on ne peut bien faire un soulier quele compas à la main et dans une académie, alors queles souliers doivent être faits dans la boutique ducordonnier ». Le ton est donné, la controverse necessera pas, on pourrait même croire si on en jugepar ce qui se passe encore de nos jours, quelle estl'âme de la formation professionnelle.

Tout le XIXe siècle voit fleurir des écolesnouvelles qui se cherchent et dont lesdénominations montrent toutes les hésitations.Nous avons alors des écoles industrielles, des écolescommerciales, des écoles primaires supérieures, desclasses d'enseignement intermédiaire, des institutsprofessionnels et même des « écoles réelles » !

Il faut attendre 1885 pour qu'une nouvelleexpression apparaisse, l'expression « enseignementtechnique », qui sera acceptée et généralisée ;l'enseignement technique étant alors défini par lerapporteur du projet, un certain Monsieur Tresca,comme « l'enseignement qui est plus spécialementdirigé vers les besoins de la profession industrielleou commerciale à laquelle l'élève se destine ». Jetrouve que la définition est intéressante dans lamesure où elle met au cœur du processus l'élève etla finalité professionnelle. On est bien déjà avecl’optique de l'employabilité.

III. Apparition d’écoles et émergence d’une controverse

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Tous les débats de cette époque montrent que deuxproblèmes majeurs sont déjà bel et bien posés.

a) Un problème technique : Quel contenu pourcette formation ? Quelle est la proportiond'enseignement général ? A partir de quel niveaufaut-il le faire ?

b) Une problématique socio-économique majeure :A quoi prépare cette formation ? A qui est-elledestinée ? Faut-il qu'elle s'ouvre vers le haut ?Est-ce qu'on doit faire des passerelles ?

Toute la fin du XIX e siècle est parcourue par cesproblématiques.

Sur l'histoire ancienne je n'irai pas au-delà.Je vais parler un tout petit peu du XXe siècle, parceque c’est le moment où tous les pays européenss'organisent pour donner à cet enseignementtechnique un développement extrêmementimportant. Alors, bien sûr, les modalités diffèrent. EnAngleterre, ce sont les entreprises qui ont la hautemain sur la formation professionnelle et c'est lalégislation qui vient après. En France, naturellement,c'est le contraire : c'est l'Etat qui organise, quistructure, qui forme les enseignants et au fil dutemps, comme le disait le Ministre tout à l'heure,l'enseignement technique va se rapprocher des

entreprises. En Allemagne, le célèbre système dualassocie dès l'origine les deux acteurs. Mais il s'agittoujours depuis le début du XXe siècle, dans nos pays,de prendre en compte le fait que le progrès techniquese traduit par un essor technologique qui impose auxentreprises des besoins accrus en techniciens dequalité. Les modalités sont différentes, mais ce que jeveux dire, c'est qu'il est clair que, dans ce XXe siècleen Europe, on voit une formation professionnelle dequalité diversifiée qui se multiplie et se développeavec des doses variables de formation générale.

IV. Diversification de la formation professionnelle

Il me parait important de souligner à ceniveau là que l'enseignement technique est vérita-blement un facteur essentiel de développement.Vous aurez remarqué que j'entretiens moi aussil'ambiguïté, je dis enseignement technique mais jesous-entends enseignement technique et formationprofessionnelle. Mais comme je ne veux pas rentrerdans trop de détails, je dis simplement que l’onconstate dans cette Europe du XXe siècle, que l'en-seignement technique est un facteur essentiel dedéveloppement et on peut remarquer quatre points :

a) D'abord, je veux le souligner, il fournira desgénérations de créateurs, de chefs de PME, et ilfavorisera l'innovation. Je connais personnelle-ment un nombre important de chefs d'entrepri-ses dans ma région d'origine, qui sont sortis dulycée technique, avec un brevet de dessinateur,avec un brevet professionnel et qui ont créé desentreprises prospères.

b) Cet enseignement technique élargira l'accès àdes niveaux de formation plus élevés pour unplus grand nombre. Effectivement, un nombrecroissant d'élèves accèdent à des nouveauxniveaux. Il faut se souvenir comme le disait leMinistre tout à l'heure, qu'en France on arriveramême à créer un Bac Professionnel. Dans mon

pays, c'est une vraie révolution ! Il faut se souve-nir aussi que s'ouvrent en France, en Allemagne,au Canada des filières d'enseignement supérieurtechnologique court qui sont véritablementtoujours des filières à succès parce qu'ellesouvrent réellement sur l'entreprise.

c) Grâce à cet enseignement technique on voitapparaître de nouvelles voies de reconnaissancesociale.

d) Et enfin, mais ce n'est pas forcément le moinsimportant, il sera un élément important de soli-darité citoyenne parce qu’il est un facteur clé dudéveloppement des classes moyennes.

Je vous propose pour se rendre compte, et pourfinaliser l’étude rapide de cet enseignement, deregarder ce qu’il se passait au tournant du siècle enFrance, en 2000-2001, en terminale (dernière classedu secondaire) pour les trois ordres d'enseignement(l'enseignement classique général, l'enseigne-menttechnologique, cet enseignement un peuparticulier que vous a défini le Ministre tout àl'heure comme étant une spécificité française,et l'enseignement professionnel, c'est-à-dire prépa-rant vraiment àla profession) et ceci en fonction dequatre catégories :

V. L’enseignement technique et la formation professionnellecomme facteur de développement

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• catégorie A : les ouvriers,

• catégorie B : les employés, les commerçants, lesartisans, les professions intermédiaires (les classesmoyennes pour faire vite),

• la catégorie C : les professions libérales et lescadres supérieurs,

• la catégorie D : le reste (agriculteurs, retraités,chômeurs…).

[Cf. support de présentation PowerPoint]

Je citerai simplement deux chiffres :

1) Comparaison entre les enfants d’ouvriers et lesenfants des cadres supérieurs- 15 % des élèves des enseignements classiques

sont des fils d’ouvriers alors qu'ils sont 38 %dans les enseignements professionnels.

- 30 % des élèves des filières classiques sont des filsde cadres supérieurs et de profession libérale alorsqu’ils ne sont que 5 % dans l'enseignementprofessionnel.

La proportion est totalement inversée. Il y a doncbien là matière à réflexion…

2) Concernant les boursiersJe vous donne un autre chiffre, celui des

boursiers. Dans l'ensemble du cycle secondaire enFrance, enseignement technique, enseignementprofessionnel, enseignement technologique etclassique, en moyenne, un élève sur quatre enFrance est boursier de l'Etat. Mais, dansl'enseignement classique on est à 16 % ; dansl'enseignement professionnel on est à 37 %. On peutdonc dire que les clivages sociaux sont inscrits dansles trois ordres d'enseignement.

Les filières classiques sont beaucoup plus prestigieuses et iln'est donc pas étonnant que les strates de la société seretrouvent dans l'enseignement et que cela nourrisseéventuellement les vieux fantasmes culturels de la sociétéfrançaise. Mais il n'en reste pas moins et je veux lesouligner, que l'enseignement technique et la formationprofessionnelle jouent un rôle important comme ascenseursocial pourvu qu'ils sachent rester ouverts.

La nouvelle révolution technologique est là,incontestablement accompagnée d'une explosiondes moyens d'information et de communication.C'est ce qui a été défini comme l'économie de laconnaissance, c'est ce qui pose de nouveaux défis ànotre société humaine. Je vais donc maintenantpour ouvrir la suite, me contenter de poser desquestions sans chercher à apporter de réponses.

Quelques perspectives : des études, dont il serarendu compte ici, des réformes en cours dont nousparlerons, des écrits d'experts, montrent que deuxtendances sembleraient se manifester. D’abord unetendance à la diversification des solutions : serait-ce la fin des dogmatismes ? Est ce qu'il n'y auraitplus de voie royale, qui pourrait être proposée àtous ? Ensuite la prise en compte des situationsparticulières, culturelles, sociologiques, écono-miques : n'y aurait-il plus de modèle ?

Et toujours les deux grandes questions, qui sont làdans toutes nos sociétés :

• Quels équilibres va-t-on donner dans cet enseigne-ment technique et cette formation professionnelle

entre savoir-faire d'un coté et savoir être del'autre ? Est ce qu'on va privilégier les compétencestechniques ou est-ce qu'il faut privilégier les clés del'adaptabilité et de la citoyenneté ?

• Quelle place pour cette formation dans la société ? Quelle fonction sociale ? Quel prix la société est-elle prête à payer ? Et quel est celui qu'elle peutpayer ? Et sous quelle forme ? Faut-il verser dansle pessimisme et se dire que devant la crise géné-ralisée de l'emploi, la raréfaction relative desressources et la brutalité des déséquilibres plané-taires, nous devrions estimer qu'il n'y a pas desolution, ou bien peut-on parier sur les troisgrandes tendances qui apparaissent dans la RevueInternationale de Sèvres n°34, qui vous a étéremise sous la plume d'Anne-Marie Bardy :- la généralisation des enseignements technolo-

giques, c'est-à-dire en fait une alliance accrueentre les compétences professionnelles, la vraieformation professionnelle et la formation généra-le, ce que nous avons peut-être essayé de faire enFrance avec l'enseignement technologique ;

VI. Et demain ?

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- la reconnaissance des diplômes et des qualifica-tions aux niveaux local, national, régional,parce qu'on a besoin de nouvelles synergies entreEtats, entreprises, collectivités et groupementsdivers ;

- et puis, effectivement, ce que je viens d'évoquer,ces rapprochements et ces changements d'échelle.

Est-ce que l'éducation tout au long de la vie va êtrenotre solution ? La formation continue joue depuis

vingt ans dans de nombreux pays un rôle majeur,c'est connu. De nouveaux processus sont mis enplace, comme la validation des acquis de l'expérien-ce notamment. Mais il faut aujourd'hui aller plusloin dans ce domaine. Nous savons tous que cetteéducation tout au long de la vie, ce « lifelong lear-ning », est la clé de l'avenir. Mais restons lucides,sur le fait que cela ne saurait éclipser les questionsfondamentales qui se posent au niveau de lajeunesse.

Notre voeu et notre espoir en tant qu'organisateurs qui avons le plaisir de vous accueillir, est que cetteconférence contribue à apporter des éléments de réponse.

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Au cours de la conférence réunissant les décideurs etorganisée conjointement par la Banque mondiale et laFondation européenne de Turin en 2000 pour les paysdu MEDA, ont été soulevés des défis essentiels pourl’avenir des systèmes d’éducation et de formation.Ces défis portent sur le développement de nouvellescompétences, la formation des professeurs, l’introduc-tion de financements plus conséquents, la participationdes parties prenantes et la mise en place d’une gestionstratégique des systèmes.

De nombreux changements ont eu lieu depuis 2000 :la mondialisation occupe une place de plus en plusimportante, les technologies de l’information et de lacommunication (TIC) ne cessent de se développer et lavaleur de l’éducation et de l’investissement dans lecapital humain et social est davantage reconnue.Dans ce contexte, les objectifs de Lisbonne fournissentdes lignes directrices claires pour la préparation de l’UEà une économie et une société basées sur la connaissan-ce. L’enseignement et la formation jouent un rôlefondamental dans cette stratégie. Des objectifs précis et

des procédures ont d’ailleurs été élaborés par le biais del’apprentissage tout au long de la vie :- objectifs concrets concernant le programme d’ensei-

gnement et de formation,- buts à atteindre pour la formation professionnelle

dans le cadre de la déclaration de Copenhague,- lignes directrices européennes pour l’emploi.

Selon un rapport provisoire récent sur Lisbonne et uncompte rendu d’un groupe de travail de niveauélevé sur les questions de l’emploi, la situation estdécevante et des discussions sur les mesures correctivesà prendre sont en cours parmi les Etats membres.Cependant, le travail progresse concernantles procédures européennes relatant les questions clésportant sur la formation professionnelle – et laFondation européenne de Turin contribue à ce travail,au même titre que les pays adhérents et candidats.En outre, la Fondation européenne de Turin préparela stratégie « wider Europe » (Europe élargie) enpromouvant le message de l’UE sur les questionsafférentes à la formation professionnelle.

Introduction, la conférence de Turin de l’an 2000

Tout d’abord, je voudrais vous rappeler la conférence organisée en l’an 2000 par la Fondation européenne pourla formation et par la Banque mondiale. Elle se concentrait sur les connaissances et les compétences pour ledéveloppement. Cette conférence qui a eu lieu à Turin avait pour sujet les pays du MEDA dans lesquels un importantsoutien italien et un grand nombre d’experts français étaient impliqués. Lors de cette conférence qui a eu lieu il y a troisans et demi, nous avions déjà repéré la nécessité de profonds changements dans le domaine de l’enseignementsecondaire. En premier lieu, nous avions alors déjà reconnu qu’il était nécessaire de faire participer toutes les partiesprenantes. Nous avions aussi reconnu la puissance des cursus scolaires à stimuler le potentiel, les capacités ainsi queles attitudes d’un individu afin que ce dernier puisse acquérir des compétences tout au long de sa vie. Le troisièmeélément était le suivant : il est nécessaire qu’il y ait davantage de liaisons verticales et horizontales, davantage de voiesafin que les jeunes puissent éviter les impasses. En outre, nous avions aussi reconnu que les gouvernements devaient seconcentrer sur les éléments stratégiques de la gestion du système et que la décentralisation, la déconcentration, le faitd’amener l’enseignement et la formation vers les régions et de créer un droit de propriété dans les régions pourl’enseignement et la formation représentaient un sujet important. Enfin et surtout, les enseignants et la formation desenseignants constituent un élément important du succès du système et les enseignants ne poussent pas sur des arbres.C’est pourquoi nous devons aussi travailler sur la revitalisation des perspectives de formation des enseignants.

L’importance de la formation professionnelledans les stratégies de préparation à l’économie

et à la société de la connaissanceP. de Rooij

DirecteurFondation européenne

de TurinRésumé

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A partir de là, nous avons été les témoins denombreux changements, de l’augmentation dunombre des défis de la mondialisation et del’accroissement de la concurrence entre différentspays et régions du monde. Ces modifications sontcertainement stimulées par les nombreusesévolutions et nouvelles opportunités qu’offrent lestechnologies de l’information et de lacommunication (TIC). L’enseignement et laformation en ont tiré un profit considérable.

La valeur de l’enseignement et de la formation estreconnue, en particulier celle de l’apprentissage toutau long de la vie. Il est reconnu que ledéveloppement économique, la croissance, lacohésion sociale, l’emploi, le développementdurable, la réduction de la pauvreté ainsi que ledéveloppement individuel dépendent del’enseignement et de la formation. On reconnaît deplus en plus qu’un investissement en capital humainrapporte plus qu’un investissement physique. Ceciest maintenant un fait établi mais au début de ladécennie, cela n’était pas le cas.

Il y a actuellement un intérêt mondial nonseulement pour l’enseignement en général mais aussiet en particulier pour l’enseignement secondaire.

Il est donc nécessaire d’améliorer la qualité de cetenseignement secondaire et je pense qu’un grandnombre de pays partenaires avec lesquels laFondation européenne pour la formation travaille sesont activement engagés dans la restructurationinspirée par les exemples des pays voisins. Les régionsavec lesquelles nous travaillons sont les anciens payscommunistes, l’ex-Yougoslavie, l’Europe Centrale etl’Europe de l’Est, l’ancienne Union Soviétique ainsique des pays d’Afrique du Nord et du Proche Orient.

Au sein de l’Union Européenne, depuis l’an 2000,nous avons aussi vu un intérêt politique très marquépour l’enseignement et la formation en particulier,ce qui est bien différent de la situation d’avant 2000.Cette tendance a commencé à Lisbonne lorsque leschefs de gouvernement se sont rassemblés enmars 2000 pour créer ce que l’on appelle maintenantle mouvement Lisbonne 2000, et ont déclaré ce quisuit : « L’UE devrait devenir l’économie basée sur laconnaissance la plus concurrentielle et la plusdynamique du monde. Elle devrait être capable decroître de façon durable tout en créant davantaged’emplois, de meilleurs emplois et une plus fortecohésion sociale. » La composante sociale est loind’être négligeable. Qui plus est, ce ne sont pas que

des mots : il y a un grand nombre d’actions déjàentreprises. Je voudrais d’ailleurs partager certainsdes éléments qui accompagnent cette importantedéclaration.

Trois piliers soutiennent la forte politique qui endécoule en Europe :

a) Le premier objectif réside dans la préparation dela transition vers une économie compétitive etdynamique basée sur la connaissance grâce à unesérie de mesures concrètes. Il faut en premier lieuouvrir la société de l’information à autant depersonnes que possible, puis établir une zoneeuropéenne de recherche et d’innovation, créer unenvironnement adapté au lancement de PME dontla croissance est plus rapide au niveau del’économie et des emplois sur le marché du travail,et enfin et surtout, il y a la réforme vers un marchéinterne opérationnel à 100 %, le tout étant soutenupar le développement de mesures liées àl’enseignement et à la formation.

b) Le second pilier se concentre sur la modernisationdu modèle social européen, l’investissement dansla population et dans la construction active d’unétat providence. L’enseignement et la formationsont bien sûr des priorités essentielles afind’établir cette société basée sur la connaissance. Lerésultat de tout cela : des emplois plus nombreuxet de meilleure qualité, le développement d’unepolitique d’emploi active au travers de tous typesde mesures, une guerre contre le chômage (maisje pense que cela faisait partie du raisonnement)et aussi une modernisation des systèmeseuropéens chargés de la protection sociale, lapromotion et la lutte contre l’exclusion sociale.

c) Ces objectifs sont désormais soutenus par ce quidoit être considéré comme un troisième pilier :la méthode de coordination dite ouverte. Avecquinze et bientôt vingt-cinq Etats membres au seinl’Union Européenne ayant leurs propresresponsabilités et leur propre autonomie, il y adésormais une méthode qui respecte lesresponsabilités des États membres et stimuleral’intégration, la collaboration, le partage desméthodes et l’expertise d’une façon transparenteet coordonnée.

Accompagner ceci est le rôle accru de l’apprentissagetout au long de la vie qui a été adopté lors du mêmesommet comme étant un sujet essentiel pour l’UnionEuropéenne.

I. La stratégie de Lisbonne

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Un rapport sera publié, et nous en avons déjàl’ébauche. Il indique qu’après trois ans, l’UnionEuropéenne est à la traîne ; il donne l’impressionnégative que les objectifs fixés pour 2010 ne serontpas atteints si nous n’accélérons pas les choses.Certains États membres ont une opinion différente ;mais la Commission européenne a le sentiment quenous devons réellement passer à la vitesse supérieuresi nous voulons y arriver. Il faut que nous nous

concentrions bien plus sur les réformes et il devrait yavoir bien plus de cohérence et des approches plusdétaillées là où l’enseignement tout au long de la vie aété mis en place. Enfin et surtout, un groupe de travail,présidé par l’ancien premier ministre néerlandais,M. Kok, a indiqué que l’investissement dans le capitalhumain devrait être plus important dans chaque Étatmembre et que toutes les parties prenantes devraientêtre mobilisées sans quoi cela ne fonctionnerait pas.

Au sein du cadre d’enseignement tout au longde la vie, la philosophie de l’enseignement et de laformation en Europe est devenue plus concrète parl’intermédiaire de cibles et de critères ayant pourbut de nous amener à une situation spécifique avecdes niveaux de référence (benchmarks) fixés àl’année 2010. Les États membres (mais aussi lesfuturs États membres) ont réfléchi en profondeur etse sont consultés au sujet de la communication del’UE concernant l’apprentissage tout au long de lavie après son adoption en 2001. Puis, en 2002, lorsdu sommet de Barcelone, ils se sont engagés à fairedes systèmes de formation et d’enseignementeuropéens une référence mondiale en matière dequalité. Le procédé que l’on appelle maintenant« enseignement et formation 2010 » était lancé. Aumême moment, une résolution a été adoptée par leConseil pour lancer le processus de vérificationrégulière lors de l’application de stratégies etd’actions d’enseignement tout au long de la vie.

On trouve un certain nombre de critères dansle processus d’« enseignement et de formation2010 ». Parmi eux, le niveau d’abandon des étudesdevrait diminuer, le pourcentage de personnes quiétudient les mathématiques et les sciences au niveausecondaire ou supérieur devrait augmenter, lepourcentage de personnes ayant terminé leurenseignement secondaire et supérieur à vingt-deuxans devrait augmenter, etc. Les autres critères àconsidérer sont le niveau d’alphabétisation, qui estsoutenu par les études PISA de l’OCDE, laparticipation des adultes à l’enseignement et à laformation, et enfin et surtout le pourcentage du PIBdépensé publiquement pour l’enseignement et laformation.

Il y a ensuite le processus Copenhague lancéen automne 2002. Il se concentre en particulier surl'enseignement et la formation professionnelle.

Il s’agit d’une stratégie visant à améliorer lesperformances générales, la qualité, l’attrait del'enseignement et la formation professionnelle dansles États membres de l’Union Européenne. Elleaméliore aussi la transparence afin que les citoyenssachent où faire tel type d’études, elle assureégalement une qualité plus élevée pour toutes lesmesures développées à un niveau très pratique. Ilexiste une structure de transparence qui donnera lapossibilité d’étudier dans différents pays et dedévelopper un système de transfert de crédits quipermettra d’obtenir son diplôme dans différents paysde l’Union Européenne. La qualité sera égalementaméliorée.

Ensuite, bien sûr, la pertinence politique del’enseignement et de la formation en Europe dépendfortement de ce que nous appelons la StratégieEuropéenne pour l’Emploi, la guerre contre lechômage, la manière énergique avec laquellel’Europe essaye de stimuler l’inclusion sociale.De plus, la progression est contrôlée à l’aide desstatistiques, il y a une augmentation des différentesmesures d’emploi actif et les différents Étatsmembres de l’Union Européenne partagentfortement leurs expériences de bonnes pratiques.Chaque année, et la prochaine fois ce sera auprintemps sous la présidence de l’Irlande, unrapport nous dit quels ont été les progrès effectuéset il est clair, au vu de tous les documents et enparticulier des documents de politiques différentes,que l’enseignement et la formation professionnellejouent un rôle essentiel. L’emploi, la compétitivité etl’inclusion sociale dépendent aussi fortement d’uneapplication réussie de l’augmentation de la qualitéde la transparence dans le domaine del’enseignement et de la formation en ce qui concerneson lien avec le marché du travail. Sur une échellelocale, régionale et nationale, les parties prenantessont et devraient être de plus en plus impliquées.

II. Le cadre politique européen en matière d’apprentissage tout au long de la vie et d’enseignement et de formation professionnelle

III. L’ébauche du rapport intermédiaire

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Sur quoi devons-nous nous concentrer pourcette conférence ? Tout d’abord, nous devrionsapprofondir les questions qui sont déjà à l’ordre dujour d’un grand nombre de personnes lors desconférences auxquelles vous avez participé au coursdes deux dernières années.

Dans le cadre de l’enseignement tout au longde la vie, nous devrions penser à la relation entrel’enseignement secondaire en général etl’enseignement professionnel et technique au niveaudu secondaire en particulier. Je pense que c’est undéfi important à la fois pour les jeunes et pour lesadultes. Comment aborder ce problème decompétitivité, d’inclusion et de cohésion sociale, c’estun tout autre problème.

Un enseignement secondaire professionnel etune formation technique pourraient jouer un trèsgrand rôle pour éviter des pourcentages élevés

d’abandons et je pense que nous pourrionsdévelopper des idées pour améliorer la mise enpratique de tels enseignements.

Ensuite, il y a le nouveau modèle de gouverne-ment : comment financer, comment impliquerdes acteurs extérieurs aux gouvernements dans parexemple, le financement et la gestion des systèmes àun niveau national et régional ? Et comment parta-ger les bénéfices du développement avec le reste dumonde ? Ceci fera partie de notre contribution.Puis il y aura l’approche « sur mesure ». Qu’est-cequi est vraiment nécessaire dans chaque région etcomment pourrions-nous nous en rendre compte enappliquant des concepts généraux à des situationsspécifiques ?

Voilà des questions que je voudrais partager avecvous et sur lesquelles nous devrions nous concentrer.

V. Questions essentielles pour la conférence

Au sein de l’Union Européenne, il y a beaucoupde prévenance et partager cette expertise et lesbonnes pratiques qui vont avec est l’un des rôlesimportants de la Fondation européenne pour laformation. Nous pensons fortement que la seulefaçon pour que cela puisse fonctionner est d’utiliserdes approches sur mesure dans chaque pays et peut-être même dans chaque région. Dans cette optique,nous avons développé cela avec des pays enindividuel depuis les dix dernières années.

Lors d’une importante conférence que nousavons organisée il y a un mois à Turin, il a été concluque l’expertise et l’expérience méritent d'êtrepartagées au sein de l’Union Européenne entre tousles pays partenaires et aussi d’utiliser tout cela pouraugmenter la conscience collective, et de créer unesynergie parmi les nombreux partenaires dans lespays impliqués, car les pays partenaires sont vraimentcapables d’apprendre les uns des autres. Il y a unprocessus d’enseignement et une amélioration mais

aussi de l’inspiration, et ce, en particulier quandles pays que l’on cite comme exemple ne diffèrentpas énormément de vous sur les plans historiquesou culturels.

De plus, les organisations donatrices devraienttravailler en étroite collaboration et éviter tous typesde conflits. Nous en sommes fermement convaincuset ceci a été confirmé lors de notre conférence et jepense que nous avons là ce que nous appelons unapprentissage politique. Toutes les parties prenantes,les niveaux national et régional, l’enseignement,l’emploi et les organisations internationalesdevraient développer tous ensemble une approchesur mesure et créer un système d’enseignement et deformation rattaché à la situation spécifique d’unpays, et ceci est un processus d’apprentissage delongue haleine. L'apprentissage politique crée lapropriété, la durabilité du processus de réforme et,par là même, renforce aussi la capacité derestructurations.

IV. L’approche de la Fondation européenne pour la formation

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Résumé

D. FretwellLead employment and training specialist

Banque mondiale

I. L’articulation entre l’enseignement secondaireet la société de la connaissance

Il existe une articulation évidente entre la société de laconnaissance et le capital humain, lui-même indirecte-ment relié à l’enseignement secondaire. On ne peutdésormais plus négliger les données du marché pourprendre les décisions adéquates au niveau du secondaire.

Cependant comment obtenir des informations fiables etsurtout comment les utiliser judicieusement ? C’est à cegenre de questions que cet exposé nous invite à réfléchirtout en pointant du doigt qu’il convient d’être vigilantpuisqu’il n’existe pas de solution clé en main.

Introduction

On m’a spécifiquement demandé d’aborder le sujet de l’articulation avec le marché du travail. Je ne vais donc pastraiter des problèmes de financement, d’effectifs, d’accès et d’équité dans l’enseignement secondaire. Certainespersonnes dans cette salle prennent des décisions majeures sur les programmes qu’ils vont lancer, sur le typed’équipement qu’ils vont acheter et sur le type d’enseignants nécessaires. Tout comme un grand nombre d’entrevous, j’ai travaillé en tant qu’enseignant dans la formation professionnelle et j’ai également été directeur. J’ai dûprendre ce genre de décisions : commencer un programme ou en arrêter un. J’ai de plus travaillé au niveau nationalet au niveau de l’état et je vois un bon nombre d’amis dans cette salle qui savent ce que fermer un programme,commencer un programme et faire ces investissements signifient. C’est ce dont je vais parler ce matin.

Lorsque vous faites ce type d’investissement, vous utilisez de l’argent public et vous engagez les jeunes à poursuivredans une certaine voie. Ce sont des décisions importantes et je voudrais aborder trois thèmes qui y sont apparentés.

- Nous avons déjà parlé longuement du premier de ces thèmes : les articulations entre l’économie de la connaissanceet le capital humain. Je ne m’y attarderai donc pas.

- Ensuite, je voudrais parler de certains problèmes techniques concernant la façon dont vous pouvez obtenir dansvos pays des informations fiables sur le marché du travail afin de prendre des décisions. Au bout du compte, vousdevrez en effet prendre une décision, que vous ayez ou non de bonnes informations.

- Enfin, je voudrais parler de la manière d’appliquer les informations recueillies à l’environnement del’enseignement secondaire. Veuillez noter que le thème de ma présentation est « l’enseignement secondaire et lasociété de la connaissance ». J’ai utilisé ces termes de façon délibérée parce que je ne pense pas que nous puissionsou devrions séparer le planning du secondaire de celui de l’enseignement général ; le terme de société de laconnaissance inclut les aspects économiques et sociaux du développement, comme Peter De Rooij vient de lesouligner, et pas seulement les aspects économiques.

Enseignement secondaire :préparer les jeunes pour le marché du travail

dans l’économie de la connaissance

Si l’on observe le premier thème, à savoirl'articulation entre l’enseignement secondaire et lasociété de la connaissance, il est essentiel de « penser defaçon globale mais d’agir de façon locale ». C’est ce que,je pense, disait Peter [de Rooij], mais commentconcrétiser ces belles idées ?

Beaucoup de définitions circulent à proposde l’expression « société de la connaissance ».Un grand nombre d’entre elles ne traite que des questionsde haute technologie mais je pense qu’une définitionplus large s’impose. Une définition pourrait être« une économie qui utilise sa connaissance de façon

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efficace pour se développer sur le plan économique etsocial ». Une fois de plus, Peter a effleuré cettedéfinition. Si une société doit accomplir cet objectif,elle doit puiser dans les connaissances étrangères,adapter celles-ci ainsi créer que une connaissancelocale pour des besoins spécifiques. Hier soir je suisrentré à minuit d’un merveilleux dîner sur les ChampsElysées et j’ai allumé la télévision sur un programmede la BBC. C’était un programme intéressant surl’utilisation de la technologie en Inde où des « centresde la connaissance » avaient été créés dans des zonesrurales où il n’y avait ni électricité ni téléphone maisoù ils avaient pu installer des ordinateurs grâce àl’énergie solaire. La communauté exploitait desinformations météorologiques à l’aide des ordinateurset pouvait dire aux pêcheurs « ne partez pas, uncyclone arrive ». Ils accédaient au prix du grain pourque les villageois sachent à quel intermédiaire levendre pour un maximum de bénéfices. Ainsi,l’économie de la connaissance peut s’appliquer àl’agriculture rurale ; elle n’est pas réservée aux pays lesplus développés ni aux secteurs de haute technologie.

L’OCDE dispose de données intéressantes quimontrent la croissance du PIB mondial par habitantet selon la population. On peut graphiquement voirune explosion causée par la révolution industrielle etl’économie de la connaissance. Ce qui s’est passé dansles 100 ou 150 dernières années est très intéressantmais l’un des problèmes constatés est la différencede croissance. Celle-ci est très préoccupante.Jean-François Rischard [Banque mondiale] ad’ailleurs mentionné ce problème comme étant unecause de l'écart de la pauvreté. Vous pouvez voir [cf.PowerPoint] que les Etats-Unis et l’EuropeOccidentale avancent mais que l’Amérique Latine,l’Asie et d’autres pays sont à la traîne en dernièreposition. Il y a donc une division croissante sur lesplans de la connaissance, du numérique et de lapauvreté.

Un autre tableau montre la différence decroissance du PIB à cause du capital physique ethumain en Corée et la différence attribuée à laconnaissance. Le tableau du Ghana est plat mais pascelui de la Corée. Il y a donc des différencessignificatives. Nous avons là l’exemple de deuxéconomies qui sont parties sensiblement du mêmepoint en 1960 pour diverger radicalement. Il existecependant d’autres exemples qui donnent des indicessur les énergies motrices du PIB par habitant. LaTurquie en est un exemple intéressant. Vous voyez enmauve [cf. PowerPoint] la population en âge detravailler en pourcentage de la population totale. Sivous regardez la Turquie, sa population est très jeune,ce qui est bien différent de l’Europe et ce qui expliquela progression du pays actuellement. Mais si vous

examinez le niveau de l'emploi par rapport à lapopulation en âge de travailler, la tendance est négativecar le pourcentage réel de personnes actives dans lapopulation active n’est que de 47 %. Alors la Turquiedispose d’un potentiel de population active nonutilisé. C’est vraiment intéressant lorsque vousregardez comment les différents facteurs interagissent.Le message est le suivant : le travail, la productivité etleurs interactions sur la population active représententune grande part de la croissance générale du PIB.

Il existe plusieurs sources de tendances à proposde la population active mondiale. Si vous regardez lesdonnées de l’OIT, la productivité par personne estgénéralement en hausse dans certains pays en voie dedéveloppement mais pas dans tous. Le nouveaurapport sur l’emploi de l’OIT indique que laproductivité, la diffusion des TIC, un environnementéconomique d’habilitation et une croissance dusecteur tertiaire sont des tendances essentielles.L’emploi dans l’agriculture est en baisse ; et laproductivité est plus élevée dans les pays en voie dedéveloppement. Mais le rapport 1/650 représente la productivité par travailleur aux Etats-Unis parrapport au Vietnam. Si vous pouviez faire avancerla productivité au Vietnam, pensez simplementcomment vous pourriez attaquer la pauvreté et créerdes revenus. L’OIT est une très bonne source dedonnées sur ce qui se passe au niveau mondial sur lemarché du travail.

Une autre de ces sources est la Banquemondiale. L’Institut de la Banque mondiale a desindicateurs provenant de plusieurs sources pour tousles pays qui siègent ici. J’ai juste choisi quelquesindicateurs de développement humain [cf.PowerPoint]. Regardons par exemple les inscriptionspour l’enseignement secondaire. Elles représententseulement 35 % en Afrique ce qui est fort éloigné desautres pays. De même des écarts considérables existententre les pays en ce qui concernent la partie technico-professionnelle de la population active ainsi que lesordinateurs et les téléphones par millier de personnes.

L’OIT dispose aussi de très bonnes sources dedonnées sur le chômage des jeunes dans deséconomies de transition sélectionnées, dontl’Europe centrale et l’Europe de l’Est. La Pologne etla Slovaquie ont un des taux de chômage des jeunesles plus élevés mais la situation est plus positive enHongrie. Une partie de cette différence vient destendances du développement économique maisil est intéressant de noter quel pays a transformé sonsystème d’enseignement secondaire depuis 1990(Hongrie), et les pays qui ne l’ont pas fait (Pologneet Slovaquie).

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La réforme en Pologne s'est arrêtée ; laSlovaquie n’a pas vraiment changé ses programmespour le secondaire. Il y a toujours un millier despécialités pour l’enseignement secondaire. Unecentaine rien que pour l’électronique, et on peut sedemander si cela prépare vraiment les jeunes à unenseignement tout au long de la vie et à entrer dansune économie et un marché du travail en cours dechangement. Il y a également d’importantesdifférences concernant le chômage des jeunes dansd’autres pays pour diverses raisons. En Asie, lesPhilippines sont un cas déviant, mais pourquoi ?En Amérique Latine, la Colombie est le cas déviant,pourquoi ?

Si vous regardez les données, il est clair quedans la même région, il y a des tendances très diffé-rentes. Si vous examinez les informations avec

précision, vous trouvez souvent des idées quipeuvent expliquer ces différences. En bref, l’éduca-tion a un rôle catalyseur, plus d’enseignementcontribue à la croissance du PIB, des retours plusimportants vers des niveaux d’enseignement plusélevés apparaissent, la participation accrue destravailleurs à l’enseignement continu est importanteainsi que la mondialisation de l’enseignement. Sivous achetez des actions, certaines des actions quirapportent le plus en ce moment sont celles descompagnies d’enseignement internationales, d’aprèsun récent article du journal The Herald. Le rôle dela formation en entreprise et l’utilisation des TICsont également une tendance qui se dégage.

II. Comment obtenir des informations utiles sur le marché du travail

Maintenant, changeons de sujet et quittonscette discussion sur des données générales et destendances mondiales pour parler de votre pays,comment prendre des décisions et où obtenir desinformations sur le marché du travail afin decommencer et d’arrêter des programmes, de définirdes normes d’occupation, d’obtenir des normes deformation, et d’évaluer l’impact de la formation.Concentrons-nous sur le problème suivant :comment déterminer s’il faut commencer ou arrêterles programmes de formation professionnellesélectionnés ? Regardons certaines des sourcesspécifiques. Nous avons déjà parlé des sourcesinternationales y compris celles de la Banquemondiale, de l’OIT et de l’OCDE (cette dernièretend à souligner les données provenant des pays deniveau supérieur).

• Des données provenant d’entreprises nationales.Vous avez tous ces données sous une forme ouune autre (au moins pour le secteur formel del'économie). Vous pouvez dire quelles entreprisessont en croissance dans l’économie. Cependant,cela ne vous apprendra peut-être pas ce qui sepasse au sein de l’entreprise en termes decompétences professionnelles spécifiques mais aumoins vous savez quelles sont les tendancesd’emploi générales. Certains pays ont des étudesmodèles qui fournissent des profils professionnelspar secteur. Le problème est que si vous essayez defaire un recensement de toutes les entreprises, celacoûte très cher.

• Ensuite, les données de recensement. Ces donnéessont fournies environ tous les 10 ans et lespersonnes indiquent leur emploi, ce qui peut nepas être très précis.

• Sécurité sociale. Ces données peuvent êtreimportantes parce qu’elles incluent les taux demortalité et de retraite qui peuvent directementvous donner des signes sur la demande pourcertaines occupations.

• Études qualitatives à moyen terme : elles sontutilisées dans un grand nombre de pays comme laSuède, la Hongrie et la Pologne et elles sont liées àune partie du travail que l’OIT effectue sur les« études informatrices essentielles ». Ces étudespeuvent fournir des données qualitatives mais cene sont pas des données quantitatives fiables sur lelong terme.

• Banques d’emploi du service de l’emploi : cessources de données sont quelquefois utiliséesabusivement ou mal utilisées à cause de la faiblepénétration des services d’emploi publics dans lemarché du travail (environ un tiers des emploissur le marché du travail apparaissent dans leservice de l’emploi, et ce dans le meilleur des cas),et les données reflètent souvent les emplois en basde l'échelle sur le marché du travail. Les donnéessont volatiles et portent sur un court terme, maiselles peuvent être utiles si on les analyse avec soin.

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• Comités consultatifs des employeurs : ce sont lescomités de partenaires sociaux dont parlait Peter.Je pense qu’ils fournissent de bonnes données surle contenu des programmes scolaires, mais j’émetsune réserve quant à l’utilisation de leurs donnéespour obtenir des tendances sur le long termeconcernant la demande professionnelle. Desrecherches montrent que les employeurs nepeuvent pas prédire plus de 6 ou 12 mois à l'avanceet, de plus, les employeurs ne savent pas réellementce qui va se passer sur le marché du travail. Si nouspassons quatre ans à développer un programmescolaire et que vous l’appliquez pendant quatreans, nous devons être prudents avant de prendredes décisions basées sur des données provenant dequelques employeurs seulement. Je travaillaispour Ford Motor Company et Western Electric etnous avions deux types de formations que nousappelions « juste à temps » et « juste assez ». Ellesétaient de courte durée et très succinctes parceque nous ne voulions pas que les ouvriers partent

chez General Motors ou dans d’autres entreprisesd’électricité. En bref, les employeurs, et c’est bienlégitime, ont en tête leurs intérêts propres maisl’objectif n’est peut-être pas le même que pourun établissement secondaire car ce dernier tentede préparer les jeunes à l’apprentissage tout aulong de la vie.

• Études de suivi des diplômés : combien deministères représentés dans cette salle ont desétudes de suivi régulières et nationales de leursdiplômés de l’enseignement secondaire ? Deuxmains. Dois-je en dire plus ? C’est une importantesource de données mais elle ne devrait pas êtreune source majeure pour la prise de décision.Attendre de découvrir que les diplômés qui ontinvesti quatre ans de leur vie dans un établissementsecondaire mais n’arrivent toujours pas à trouverdu travail ou à avoir accès à une formation post-secondaire est une façon tardive de prendre desdécisions majeures concernant les plannings.

III. Comment utiliser les données recueillies

Passons maintenant au troisième thème : commentappliquer et utiliser les données citées précédem-ment (internationales, nationales et locales) dansune situation pratique ? Imaginez que vous êtesdirecteur d’école ou fonctionnaire du ministère etque vous empruntez de l’argent à la Banquemondiale, que vous recevez de l’argent de l’UEou bien que vous demandez des fonds d’investisse-ment à votre ministre des finances. Qu’allez-vousfaire ? Vous êtes convaincu de l’articulation entreles inscriptions dans l’enseignement secondaireet le PIB par habitant, et du fait que si vousinvestissez dans l’enseignement secondaire, le PIBva augmenter. Le Brésil est un excellent exempledu retour aux études [cf. PowerPoint]. Les donnéesmontrent des retours plus importants alors que leniveau d’instruction augmente grâce à une demandeen personnel plus instruit dans l’économie de laconnaissance.

La première question qui se pose est lasuivante : quelles sont les alternatives pourl’enseignement secondaire ? Etablir une plate-forme vers l’apprentissage tout au long de la viedont Peter parlait, une entrée vers un enseignementpost-secondaire, une entrée sur le marché dutravail ou bien une combinaison des troisalternatives. Les choix sont de nos joursprobablement bien différents d’il y a vingt ans, enparticulier si votre pays participe à l’économie

mondiale de la connaissance et veut y êtrecompétitif. Lorsque vous avez entre 60 et 100 %d’inscriptions dans l’enseignement secondaire etque l’économie de la connaissance commence àavoir un réel impact sur l’économie de votre pays,il est peut-être temps de vous demander sil’enseignement secondaire satisfait les objectifscités plus haut. C’est le problème essentiel et,comme Peter et d’autres l’ont dit, la réponse seradifférente suivant les pays.

Il y a une étude très intéressante effectuée parl’OCDE. Elle s’intéresse aux compétences généralesnécessaires pour fonctionner correctement dansune économie de la connaissance. Trois zonesmajeures de compétence ont été identifiées : enpremier, agir de façon autonome, défendre et fairevaloir ses droits, prendre des décisions ; en second,utiliser des outils de façon interactive, y comprisdes connaissances de base, des TIC et des langues ;en troisième, fonctionner dans une sociétéhétérogène. C’était une étude approfondiefournissant d’excellentes idées pour les décideursqui essayent de déterminer les objectifs majeurs del’enseignement secondaire, ce qui est la transitionessentielle des jeunes vers leurs responsabilitésd’adultes et vers le monde du travail.

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Comment insérer ces idées de l’OCDE, et lestendances du marché national du travail dans lesdécisions concernant le contenu de l’enseignementsecondaire ? Quelles sont les compétences généraleset professionnelles qui devraient être fournies ? Lespays en sont à différents niveaux de décision. Si vousallez au Royaume-Uni, vous verrez quel’enseignement professionnel au niveau dusecondaire n’est pas vraiment mis en valeur, laplupart des programmes sont concentrés surl’enseignement en général mais il y a des discussionsvisant à ajouter des compétences techniques (TIC)aux compétences basiques.

D’autre part, en Ouzbékistan, comme nousl’avons entendu il y a quelques minutes, 80 % del’enseignement secondaire est concentré sur laformation professionnelle spécialisée. La Slovaquiea une approche similaire mais la Hongrie a retardéles programmes professionnels jusqu’à l’enseigne-ment supérieur et les a rendus plus généraux (envi-ron 20 larges domaines). Alors où vous situez-vouspar rapport à ce continuum et où voulez-vous êtreà l’avenir ?

Il est peut-être nécessaire que nous regar-dions un exemple spécifique qui illustre commentl’enseignement général et l’enseignement profes-sionnel pourraient co-exister au niveau dusecondaire [cf. PowerPoint]. Disons que nousregardons le domaine professionnel de « l’électrici-té et de l’électronique » et que vous sentez qu’il y aune demande croissante pour ces professions dansvotre pays et que vous voulez y étendre lesprogrammes dans les établissements secondaires.

Enseignez-vous aux jeunes à devenir assem-bleur en électronique, réparateur d’appareils entous genres ou à occuper des postes spécifiques dece secteur d’emplois ? Ou voulez-vous enseigner lescompétences essentielles qui donneraient auxdiplômés la possibilité d’obtenir ce premier emploien tant que réparateur d’appareils en tous genresou assembleur en électronique tout en leur fournis-sant en même temps les compétences pour conti-nuer vers le post-secondaire ou même l’universitéafin de devenir technicien ou ingénieur ? C’est unedécision qu’un grand nombre d’entre vous doitprendre. Vous avez découvert qu’il existe dans votrepays des secteurs de croissance dans lesquels certai-nes professions spécifiques sont prédominantes.Quel impact ceci va-t-il avoir sur vos programmespour le secondaire ? En Slovaquie, en électronique,il existe 104 spécialités pour les diplômés dans cedomaine. Si vous allez dans un autre pays, disons laHongrie, il y a généralement un secteur électro-nique qui comporte les compétences essentielles.Une différence majeure. Et je pense que c’est làqu’un grand nombre d’entre vous se situe, à essayerde décider ce qu’ils doivent faire des informationsconcernant le marché du travail, et comment lesconvertir en une décision concrète. Enfin commentassurer que les étudiants (dans l'enseignementgénéral et professionnel) aient à la fois la mêmeformation de base (cf. étude de l’OCDE),qu’ils disposent d’une plate-forme vers un appren-tissage tout au long de la vie et participent à uneéconomie de la connaissance en cours d’évolutionet de croissance ?

Pour résumer, je vais évoquer à nouveau les questions de base dont nous avons parlé. Comment obtenirdes informations sur les tendances internationales, nationales et locales du marché du travail ? Commentutiliser les informations pour prendre des décisions demain lorsque vous investirez dans l’enseignementsecondaire ? Dans quels programmes investir ? C’est ce que nous essayons de résoudre. Les alternatives quevous sélectionnerez engageront des ressources publiques importantes, et le temps et les ressources desjeunes. Votre objectif est-il l’emploi immédiat sur le court terme ou bien est-il de fournir aux jeunes une plate-forme vers l’apprentissage tout au long de la vie, y compris des emplois et/ou une entrée vers l’enseignement etla formation post-secondaires ? Les choix que vous effectuerez affecteront les individus, la société etl’économie pendant des années.

Conclusion

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DÉBAT AVEC LA SALLE (1)1) L’élaboration de programmes

en fonction des données du marché du travail

2) Passerelles entre les filières

3) Secteur privé et formation professionnelle

4) Problèmes particuliers rencontrés en Afrique

5) Introduire la technologie comme disciplinedans l’enseignement général / Améliorer l’informationsur les systèmes d’orientation professionnelle et les filières

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1) L’élaboration de programmes en fonction des données du marché du travail

Origine de la question

Abdul-Majid ABDUL GHANI du LibanChef de projet de l’enseignement technique

Détail« Nous travaillons dans des pays qui ont développéleurs systèmes et qui ont la possibilité de retransmettreou de convertir directement leurs données dansdes programmes. Mais dans les pays en voie dedéveloppement, le temps que nous mettions au point les programmes, les données du marché du travail,en particulier avec l’arrivée de la théorie de l’économiede la connaissance, ne sont parfois plus valables.Ainsi, comment élaborer un système basé sur lesdonnées qui n’évolue pas avec les programmes,car généralement, il faut bien trois ou quatre ans pourdévelopper un programme basé sur les données,lesquelles se périment entre temps, ce qui pose problèmecar les informations qui nous étaient nécessaires quatreans plus tôt ne le sont plus aujourd’hui. »

Réponse« Tout d’abord, il est nécessaire de recourir à des sourcesde données multiples. Ensuite, certaines enquêtesqualitatives intéressantes pouvant être effectuées tous les6 mois à l’aide de techniques avancées et adaptées dansde nombreux pays peuvent permettrent d’identifier lesdifférentes tendances lorsque les données effectives sontdifficiles à obtenir. Je pense aussi que ce message se réduitau dernier tableau que j’ai présenté. Imaginez que vousapprenez à quelqu’un à faire de l’assemblage électroniquelorsque vous êtes à Casablanca et que Thompsondéménage, alors vous avez un problème. Si vousenseignez des compétences essentielles communes auxassembleurs électroniques, aux techniciens électroniquesde réparation (et il risque d’y en avoir pas mal) et d’autresfonctions de base, et que le marché évolue, ça ne sera pasun souci majeur pour les diplômés du secondaire. »

2) Passerelles entre les filières

Origine de la question

Abdul-Majid ABDUL GHANI du LibanChef de projet de l’enseignement technique

Détail« Quelqu’un a mentionné qu’il ne fallait pas barrerla route à ceux qui viennent de l’enseignementprofessionnel. C’est toujours une expressionanthropogénique, les passerelles entre l’enseignementprofessionnel, technique, supérieur ou général. Vosenfants doivent-ils tous suivre des études supérieures ?Les passerelles doivent-elles rester ouvertes pour quetous les jeunes qui sortent de la filière professionnellepuissent passer à une filière technique avant de se lancerdans une filière de l’enseignement supérieur ? Ne faut-ilpas plusieurs courants capables d’identifier lesdifférentes compétences ? »

Réponse a

« Vous avez raison, il existe un socle commun decompétences et des personnes veulent changer de voie.J’espère qu’à l’avenir les éducateurs professionnelsse rassembleront pour dire : « Vous savez, j’ai apprisla loi d’Ohm ; je sais souder, nom d’un chien !Reconnaissez-moi cette capacité et laissez-moi continuerà étudier pour devenir technicien ». Cela devrait se passerainsi, mais malheureusement ce n’est pas le cas pourde nombreux pays. »

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DÉBAT SÉANCE (1)

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Réponse b« Je suis d’accord avec vous sur le fait que tous les élèvesne devraient pas aller à l’université, mais je pense qu’ilest très difficile pour les adolescents âgés de 12 à 16 ansde savoir exactement ce qu’ils sont capables de faire ouce qui les intéresse. Dès lors – et c’est souvent le cas dansles pays que vous connaissez bien – s’ils prennent lamauvaise décision dès le départ, ils ne devraient pas êtrepunis pour cela et être obligés de tout recommencer. End’autres termes, si, après deux ans d’enseignement et deformation professionnelle, on change d’avis pourquelque raison que ce soit car on se sent capable desuivre un type d’apprentissage plus général et théorique,il devrait exister la possibilité de se diriger vers cettefilière ou vice-versa, sinon l’ennui se crée, les jeunesquittent l’école et ne peuvent plus y entrer à nouveau.A mon avis, c’est ce qui est important. Il ne devrait pas yavoir ce que j’appelle des « impasses ». Chaque voie surlaquelle vous vous engagez devrait vous donner lapossibilité de déboucher sur un autre chemin, et c’estpeut-être ce que l’on appelle la répartition.

S’il y a parmi nous des Australiens, sachez qu’ils utilisentce système avec succès. Ils appellent cela le « transfert endouceur ». Ils disposent d’un système d’Etat et d’unsystème universitaire, et vous pouvez passer de l’un àl’autre sans difficultés. »

Réponse c« Aujourd’hui nous avons des exemples de systèmes quisont en train de se flexibiliser et de permettre despasserelles. Il y a dans un certain nombre de paysactuellement des réformes en cours, on en parlera ici, oùl’on est en train de travailler sur des choses très concrètescomme par exemple la « modularisation » ou encore lacréation de sas qui permettent de changer de filière.Ce thème de la flexibilisation me parait un thème tout àfait central. Il est bien évident que l’on ne peut pas toutflexibiliser et que cette flexibilisation doit être organisée :elle n’est pas automatique. Il y a d’ailleurs des processusqui existent dont on peut peut-être discuter entre nous.

Je voulais simplement apporter un supplémentd’information à ce que David a présenté. Il est toujourspossible, même dans un pays en développement, mêmequand on a des contraintes budgétaires, de savoir un peula réponse du marché du travail. Je me souviens d’uneexpérience à laquelle ont participé quelques amis auMaroc. On se demandait quelle était la situation descentres de formation professionnelle par rapport aumarché du travail. On n’avait pas de données. Qu’est-cequ’on a fait ? On a simplement demandé aux chefs desétablissements de formation professionnelle d’envoyerune lettre aux familles des diplômés. Tout le monde nousdisait : vous n’aurez aucune réponse. La moitié des élèvesont répondu. On leur a demandé : Dans quelle entreprisetravaillez-vous ? Qu’est-ce que vous faites ? Commentvous êtes-vous insérés dans le marché du travail ? Toutcela tenait sur une page. Mais le plus important n’étaitpas l’information statistique, bien sûr c’était intéressantmais cela n’est rien comparé au changement decomportement que cela a créé dans l’établissement. End’autres termes, à partir du moment où l’on sait où sontles diplômés, les professeurs possèdent un fichierd’entreprises ; dès lors qu’ils ont un fichier d’entreprises,ils peuvent entrer en relation avec un environnementd’entreprises et commencer à se poser les vraiesquestions. » In

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3) Secteur privé et formation professionnelle

Origine de la question

Yoro FALL du SénégalPrésident directeur général du CNES(syndicat patronal du Sénégal)

Détail« Je salue l’ensemble des communications qui ont étéfaites, mais je ne sens pas les préoccupations du secteurprivé. Vous avez énuméré un certain nombre deproblèmes mais surtout un certain nombre de dogmes,que sont le marché de l’emploi, le financement de laformation, mais nous sentons que l’enseignementtechnique est un peu plus privilégié que la formationprofessionnelle, alors qu’au niveau du secteur privéaujourd’hui, ce que nous poussons, ce sur quoi nousnous battons, c’est qu’on mette un peu plus d’accent sur la formation professionnelle. Aujourd’hui la préoccupation du chef d’entreprise c’est tout demême de créer les conditions de croissance pour pouvoirpromouvoir la promotion interne de l’entreprise,mais par ailleurs prendre en compte aussi dansl’environnement tout ce qui peut nous permettred’arriver, avec le minimum d’investissement sur lecapital humain, à avoir une productivité la plus accruepossible. »

Réponse« A mon avis, dans l’idée d’un apprentissage tout au longde la vie, il faut faire la différence entre la formationinitiale qui permet à chacun de trouver d’abord unemploi – et où le gouvernement, je pense, a un rôleimportant à jouer – et l’apprentissage des adultes, pourqui ce n’est pas la même chose, car eux essaientd’améliorer ou de mettre à jour leurs connaissances etcompétences pour se donner plus de chances sur lemarché du travail. Dans ce cas, mon opinion est quel’investissement privé d’un particulier ou d’uneentreprise intéressée par des employés plus compétentset mieux formés présente une grande différence. Mais dupoint de vue européen, et j’en suis convaincu, uneformation initiale qui permette à tous d’atteindre uncertain niveau leur offrant la possibilité de trouver unpremier emploi, est à mes yeux une responsabilitépublique importante. Je pense que toute la différence estlà, et que plus tard – et cela n’est pas encore biendéveloppé dans beaucoup de pays, y compris lesnouveaux arrivants – le besoin d’un investissement privése fait sentir, particulièrement lorsqu’il s’agit departiculiers qui augmentent leurs chances de trouver unemploi, mais également pour des entreprises quirecherchent, comment dire, des personnes dont lesaptitudes sont supérieures et différentes. »

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4) Problèmes particuliers rencontrés en Afrique

Origine de la question

Ahmadu Rufai MOHAMMED du NigeriaMembre de la commission nationalepour l’éducation technique

Détail« Je travaille avec la Commission nationale pourl’éducation technique à temps partiel et je suis aussi uningénieur. D’après les exposés que j’ai pu entendre, jepense qu’il y a peu d’études réalisées sur l’Afrique, car lesdonnées exposées ici ne prennent pas beaucoup encompte un certain nombre de points, et je peux vousdire de mon point de vue général que l’Afrique souffrede problèmes spécifiques. Je citerai le Nigeria d’où je suisoriginaire. Les changements politiques ont bouleverséles politiques mises en place. Lorsqu’un nouveau régimes’installe, la ligne d’action du régime précédent estperturbée. Comment pouvons-nous remédier à cela ?Si un cadre général fixant les normes minimales ets’appliquant à tous est mis en place au traversd’organismes tels que la Banque mondiale et l’Unesco etéventuellement adapté sous forme de traité à signer,alors peut-être que quelques gouvernements de la régionseront obligés de se maintenir au-dessus de ces normes.Certains régimes du secteur de l’éducation actuel nedestinent qu’un faible pourcentage de leur budgetannuel à l’engagement de dépenses et, même lorsqu’ils lefont, la priorité est donnée aux diplômés d’université età l’enseignement supérieur, comme c’est d’ailleurs le casau Nigéria aujourd’hui. C’est pourquoi nous avonsbesoin de ce type de guidage. Par conséquent, ce que jesuggère est d’essayer, avec d’autres pays voisins, demettre en place un cadre international pour un cursuspouvant s’adapter à chaque pays et à son contexte : saculture, son environnement et le reste y seraientrépertoriés, y compris le budget. »

Réponse« Les données provenant de l’OIT en particulier ainsi queles indicateurs de la Banque mondiale décomposentl’Afrique en de nombreux pays, et les données relevéessont souvent faibles. Mais vous avez raison quant àl’économie politique du changement, il me semblequ’une séance est organisée sur ce thème, et je suisconscient de ce qu’il se passe, c’est quelque chose qu’onne peut contrôler. Cela affecte l’emploi, les informationssur le marché du travail, tout. Je crois qu’une réunion yest consacrée cet après-midi. Selon moi, les objectifsgénéraux déjà cités concernant l’Education pour Tous etles objectifs de développement du Millénaire constituentune approche internationale, et chacun des pays présentsdans cette pièce y a adhéré pour pouvoir démarrer avecun minimum. Ce que j’ai mentionné en dernier sont lesnormes de compétence. Nous parlons de l’enseignementprofessionnel, le mouvement le plus répandu dans lemonde entier, qui comme vous le savez, élabore desnormes professionnelles à la fois pour le secondaire et letertiaire, et soutient cette articulation qui a été soulevée.C’est une initiative majeure de l’Union Européenne, nousla finançons, nous avons des gens sur le terrain, laTurquie a adopté les normes professionnelles. Mais celadoit être volontaire, je ne pense pas que quiconque puissel’imposer. »

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Demande de précisions supplémentaires« Mais êtes-vous d’accord avec le monsieur du Nigeriasur le fait que l’Afrique ait besoin d’un travail plusélaboré sur la formation professionnelle ? »

Complément de réponse

« Absolument, et une des séances traite de ce sujet. J’aioccupé un poste dans la formation professionnellependant deux ans au Kenya auprès du ministère et j’aitravaillé dans plusieurs pays d’Afrique. Vous avez tout àfait raison, à mon avis on peut dire la même chose pourchaque groupe de pays dans la région. Je n’y ai pas faitallusion sur les diapositives, mais Peter de Rooij l’amentionné, ainsi que Jacques. Chaque pays est différentet il en est de même des régions à l’intérieur de ces pays.On retrouve donc la formule « Think global, Act local ».Mais comment trouver le bon équilibre ? »

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5) Introduire la technologie comme disciplinedans l’enseignement général / Améliorer l’informationsur les systèmes d’orientation professionnelle et les filières

Origine de la question

Rahdi MHIRI de TunisieProfesseur de la faculté des sciences de Tunis

Détail« Je suis professeur d’université et je participe à cetteconférence avec la délégation tunisienne. J’anime, en Tunisieaussi, un groupe de réflexion sur l’enseignementtechnologique au niveau du secondaire avec l’articulation dela formation professionnelle. J’aimerais en fait ajouterquelques réflexions sur ces thématiques. Je pense que l’undes points importants qu’il faudrait peut-être souligner estde repenser le statut de l’enseignement technologique ou dela technologie dans les programmes d’une manièregénérale. Même dans les filières générales on constatefortement qu’il y a des disciplines et des modesd’enseignement qui sont restés les mêmes et la technologien’a pas sa position dans cet enseignement. Or, la technologiedevient de plus en plus un outil pour sensibiliser l’élève à laformation professionnelle et à la carrière professionnelle etelle permettrait de lui donner les outils de base pours’adapter rapidement à une profession. Et là donc ce qu’ondéfend c’est une idée de la technologie pour tous ; comme

différentes disciplines habituelles d’histoire, degéographie, de mathématiques, la technologie devraitprendre une position meilleure dans le cursus à tous lesniveaux. La deuxième réflexion qu’il serait intéressant desoulever est le besoin d’un système d’information au niveaudu système d’éducation et de formation professionnelle quipermettrait à l’élève et aux parents de comprendre lessystèmes d’orientation et les filières qui lui sont présentésainsi que les parcours qui lui sont ouverts. Ceci est un pointfaible qui fait énormément de dégâts à tous les niveaux. Onassiste de plus en plus à des parcours où les élèves passentpar des voies générales, finissent même leurs étudesd’enseignement supérieur pour arriver sur une position dechômage pratiquement, alors qu’avec un meilleur systèmed’information ils auraient pu choisir la bonne voie qui leurgarantirait un avenir et une carrière professionnellebeaucoup plus intéressante et avec moins de dégâts en coursde route. »

Réponse a

« Je suis entièrement d’accord avec vous et comme nousl’avons déjà souligné, les conseils et l’orientation sont trèsimportants. On peut y accéder par l’emploi lui-même, trèssouvent les services de recrutement vous aident à trouvervotre chemin à l’intérieur des structures complexes dumarché du travail, mais les écoles et les instituts deformation disposent souvent, eux aussi, de servicesd’information, non seulement pour les élèves maiségalement pour leurs parents, qui permettent d’en savoirplus sur les possibilités que l’on peut rencontrer. Si vousétiez dans une situation difficile et que vous souhaitiezchanger cette situation, il conviendrait en premier lieu derépondre à la question : quel changement serait adéquat ? Jepense donc que, de ce point de vue, une partie du systèmed’enseignement professionnel et de la formation techniquedevrait être incorporée à cette infrastructure de conseil etd’orientation. Pour moi, cela est essentiel. Notre société secomplique de jour en jour, les différentes optionsdisponibles ne cessent de croître et, selon moi, c’est ce dontun grand nombre d’élèves et de parents ont besoin. De plus,je suis d’avis qu’il est extrêmement important que ce quej’appelle « les mathématiques et les sciences », que vousdésignez sous le terme « technologie », doivent fairepartie intégrante de la formation chez le plus grand

nombre possible de jeunes, car ils permettraientcertainement d’ouvrir beaucoup d’autres portes quiautrement resteraient fermées. Ainsi, la société de laconnaissance est constamment dans le besoin, je ne nie pascela. Je n’ai pas de recette à vous donner pour y pallier maisla sensibilisation peut être une autre option – de même quede parvenir à trouver des professeurs capables de faire desmathématiques et des sciences des matières plusattrayantes. »

Réponse b« L’OCDE, la Banque mondiale et l’Union Européenne sesont réunies afin de mener des monographies surl’orientation professionnelle dans 44 pays, auxquelles laTurquie, le Chili et l’Afrique du Sud ont participé. Je pensepouvoir vous en fournir des copies si vous le souhaitez. Unautre point est que les bases du cursus concernant le savoirêtre devient un élément de l’enseignement secondaire debase, ce qui est également le cas des compétences en TIC,qui font partie de l’enseignement général des compétencesessentielles. C’est un mouvement croissant. »

Peter de Rooij

David Fretwell

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Séance 2 :ATTENTES ET PROBLÉMATIQUES

DES PAYS PARTICIPANTS / RAPPORTS D’ATELIERS

Débat avec la salle

Mamadou SAGNANEPrésident de séance

SÉNÉGAL

Les nombreux participants ont été répartis en 4 ateliers

afin de pouvoir échanger, en groupe restreint, sur leurs

attentes concernant cette conférence.

Vous trouverez ci-après les rapports de synthèse de chaque

atelier. Ils furent présentés en séance plénière.

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« La composition du groupe était très diverse et trèsriche. Des pays de différents continents, de différentsmilieux, de différentes situations économiques, de diffé-rentes situations politiques, de même que des organisa-tions internationales étaient représentés. Des points de vueet des problèmes très différents ont ainsi été soulevés. Il estd’ailleurs peut-être surprenant de savoir qu’à la fin de laséance, il existait un certain nombre de problèmescommuns. Malgré les différences, il semble que nouspartagions réellement beaucoup de choses. Ceci sembleêtre une bonne base pour une conclusion, et même s’iln’est peut-être pas sage de commencer par les conclusions,il n’est sans doute pas mauvais que la conclusion révèleque les espoirs et les attentes de cette conférence soient depréparer le terrain pour une coopération qui soit meilleureet plus proche, et qui permette également de s’attaquer àdes problèmes particuliers.

En conséquence les problèmes communs constituentune bonne base de départ pour une identificationadéquate des problèmes pour lesquels une coopérationserait judicieuse.

L’une des choses qui était vraiment évidente, et que leprésident de notre atelier, Jean-Raymond Masson de laFondation européenne pour la formation, a rappelée, carce n’est dans les faits pas forcément aussi évident, est l’im-portance de l’ETFP. Tous les pays représentés à cet atelieront déclaré que c’était important. C’est un problème quiconcerne les responsables politiques de l’éducation maisqui s’inscrit aussi dans le contexte plus large du marchédu travail et de l’emploi. Le développement économiqueest en effet une question importante et les pays dansleur ensemble sont dès lors concernés par l’évolutionet l’amélioration du secteur de l’éducation, de l’enseigne-ment technique et de la formation professionnelle.

1) La politiqueLa plupart des problèmes se situe au niveau de la poli-

tique. Cette politique s’inscrit souvent dans des contextestrès différents.

a) Le contexte de l’économie : certains pays ne se sontpas développés de façon dynamique et les problèmesliés à une situation évoluant très rapidement y sontprésents – y compris le problème du rattrapage du retarden matière de fourniture de données et d’information.D’autres pays sont en récession, posant d’autres typesde problèmes avec la hausse du chômage et de piètresperspectives d’avenir.

b) Le contexte du marché du travail dans certains pays entermes d’emploi et de chômage dans certains secteursest préoccupant.

c) Dans d’autres pays l’économie informelle joue un rôle

très important, ce qui suppose des défis spécifiquespour l’enseignement et la formation professionnelle.Comment fournir quelque chose de structuré à quelquechose d’informel et de non maîtrisé ? Comment déve-lopper des partenariats ? Qui sont les partenaires del’économie informelle ? Quel type d’enseignement et deformation professionnelle devrait être développé poursatisfaire aux besoins d’une économie dans laquelle lesecteur informel constituerait environ 80 % ?

d) Il y a aussi les aspects du développement régional etdes différences régionales, en particulier dans les paysplus grands comme la Chine…

e) Mais il existe aussi le problème de l’échelle individuelle,c’est-à-dire les attentes individuelles et les attentes desfamilles, ainsi que le rôle de conseil et d’orientation.Comment informer les individus au sujet des perspecti-ves en matière d’enseignement et de formation profes-sionnelle ?

2) L’informationC’est un autre ensemble de questions et de problèmes.

L’information au sens de la recherche, de la fourniture dedonnées, de la coopération internationale comme sourced’informations pour une politique informée, de mêmeque l’information, non seulement sur l’EFP, mais aussi surle soutien, l’assistance, l’aide au développement, lesprogrammes et les systèmes internationaux.

3) La faisabilitéEnfin, il existe nombre de questions concernant la

réalisation. Le problème du financement qui mène à l’in-frastructure, l’équipement, etc. est probablement le plusimportant et le plus délicat. Il y a le problème duprogramme, des cursus, des programmes de cours, dessystèmes d’examens, des diplômes, de la reconnaissancedes diplômes et aussi de la reconnaissance de l’enseigne-ment informel et de l’expérience pratique.

4) Les ressources humainesUne autre question concerne les ressources humaines et

non seulement les enseignants – mais aussi les compétencesparticulières des enseignants, telles que l’élaboration desprogrammes d’enseignement, l’évaluation, la notation,les examens – et aussi les directeurs, les administrateurs etles responsables. Il semble que, dans certains pays,la réponse au besoin de réforme du secteur del’enseignement et de la formation professionnelle soit dechanger d’administration. Dans certains pays, plus d’unministère est responsable de l’enseignement et de laformation professionnelle ; cela n’est certainement pasla meilleure façon de répondre à cette question.

Je voulais parler du partenariat et de ses problèmesmais je dois m’arrêter là. »

RAPPORT DE L’ATELIER A

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RAPPORT DE L’ATELIER B

« Nous avons aussi eu un groupe de personnes trèsdivers, provenant de tous les continents, ainsi quedifférentes agences gouvernementales et différentesinstitutions internationales ; ce fut une discussion trèsanimée. Comme notre collègue du Chili l’a dit à la fin de laséance « C’est la première fois que je participe à une telleconférence, mais les problèmes sont tous identiques.J’entends parler de tous les problèmes auxquels noussommes confrontés au Chili ».

Reprenons les sept problèmes que nous avons traités :

1) La formation des enseignantsLe premier problème débattu, et qui a occupé la plupart

de notre temps, concernait la formation des enseignants.Les questions soulevées étaient très intéressantes et laterminologie représentait vraiment les conceptions quenous avions, puisque les gens demandaient « Est-ce quenous recherchons des formateurs ou est-ce que nousrecherchons des enseignants ? S’agit-il de la mêmepersonne ou devrions-nous disposer d’un formateur etd’un enseignant ? » pour la formation professionnelle.Les questions soulevées étaient :Comment formons-nous ces formateurs /enseignants ?Comment pouvons-nous nous assurer qu’ils mettentà jour leurs compétences par rapport aux évolutionspermanentes qui interviennent sur le marché du travail ?Voilà plus ou moins les problèmes dont nous avonsdiscuté concernant la formation des formateurs /enseignants.

2) L’élaboration du programmed’enseignementLe second problème dont nous avons discuté concer-

nait l’élaboration du programme d’enseignement.Nous avons surtout tenté de répondre à la question « Quelmodèle est-il le bon modèle ? ». Il y avait commeun consensus entre les participants du groupe à proposdu fait qu’il devenait de plus en plus évident queles gouvernements ne pouvaient pas suivre les développe-ments du marché du travail et que ce que nous devionsfaire était de donner une sorte de formation généralebasique que les gens pourraient utiliser comme base dansle secteur privé. La question « Comment pouvons-nousmaintenir l’équilibre entre une spécialisation et ce type deformation générale ? » a été posée.

3) Les Technologies de l’information etde la Communication (TIC)Le troisième problème dont nous avons parlé était

celui des TIC. Il existait de toute évidence deux domainesprincipaux en matière de TIC :

a) Comment pouvons-nous nous assurer que les TICdeviennent partie intégrante aussi bien dans l’enseigne-ment général que dans la formation professionnelle etl’enseignement technique ?

b) Comment pouvons-nous nous assurer que noussommes aussi compétitifs que les autres dans ce secteurdes TIC et comment un pays peut-il jouer un rôleprépondérant dans les TIC ?

Ce sont manifestement deux problèmes différents ici.

4) Les langues étrangèresLa quatrième chose dont nous avons parlé était le

problème des langues étrangères. Alors que l’on parletoujours des langues étrangères dans le contexte de l’ensei-gnement général, on en fait moins souvent référence dansle domaine de la formation professionnelle. Nous savonsque, dans de nombreux cas, l’information et la technologiesont disponibles en langues étrangères, donc l’enseigne-ment et l’apprentissage des langues étrangères dans lesecteur de l’ETFP sont plutôt essentiels. Alors, commentdevrions-nous organiser cela ?

5) Le partenariat public-privéLe problème numéro cinq était celui du partenariat

public-privé. Tout le monde s’accordait à dire que lespartenariats public-privé avaient de l’avenir, mais la ques-tion qui a été soulevée était la suivante : quelle est la bonneformule pour disposer de ce partenariat ? Nous avons un peu entendu parler d’une expérience qui sedéroulait au Sénégal et qui, je pense, va être présentéedemain. Il y a des pays qui ont choisi d’accorder dessubventions aux entreprises et d’autres pays qui ont choisid’établir des fonds de formation professionnelle ou desfonds de développement des compétences etc., donc undes sujets qui a été soulevé était « Quelle est la bonneapproche dans la recherche d’une bonne formule pour cepartenariat public-privé ? ».

6) La mobilité de la population activeLe problème numéro six était celui de la mobilité de la

population active. De nos jours, le monde devenant quoti-diennement de plus en plus petit, et particulièrementà l’échelle régionale, nous avons une grande mobilité entreles pays. Comment devrions-nous, si effectivement nousle devons, prendre cela en compte lorsque l’on met enplace les politiques de formation professionnelle dansles pays individuels ? Considérons-nous les besoins dela région ? Nous avons, par exemple, des pays quideviendront membres de la CE dans quelques mois etainsi de suite.

7) Les normes de compétences nationalesLe dernier problème dont nous avons parlé était celui

des normes de compétences nationales. Quel est le bonéquilibre à maintenir entre les systèmes globaux ouinternationaux de normes de compétences et un systèmenational de normes de compétences et commentgarantissons-nous le partenariat avec le secteur privé dansce processus ? »

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RAPPORT DE L’ATELIER C

« Comme déjà beaucoup de choses ont été dites, cela vanous permettre de ne pas avoir à les répéter. Dans notregroupe nous avons été frappés par le fait que l’état deréforme du système de formation professionnelle a étédécrit absolument partout. Cet état est à mettre en regarddes changements économiques mondiaux dont il a étéquestion ce matin.

1) État de réforme et diversité des acteursIl prend place dans un éclatement des pourvoyeurs de

la formation et des institutions gestionnaires de cetteformation ; il y a même un pays où vingt deux ministèressont concernés par la réforme de la formation. On endéduit donc un problème de management de la réforme etde management du nouveau système. Il ainsi été noté lanécessité de définir une stratégie, une politique sectoriellede la formation professionnelle en partenariat avec tousles acteurs du système : les pouvoirs publics, les acteursprivés, les employeurs et les salariés.

2) Partir de la demandeDans cette redéfinition de la formation professionnelle,

tout le monde a noté qu’il convenait également de passerd’une logique de l’offre à une logique de la demande.Les programmes tout faits qui sont proposés sont peuadaptés à la demande économique alors qu’il est nécessaired’adapter la formation aux besoins du marché. A partir delà, un certain nombre de questions sur « Commentanalyser les besoins du marché ? » au niveau global et auniveau local se profilent et plusieurs pays ont d’ailleurs ditqu’ils espéraient pouvoir trouver des réponses à ce genrede questions au cours de cette conférence.

Dans la mise en oeuvre des réformes de la formationprofessionnelle, il n’y a pas de solution unique, il n’y aurapas de miracle pendant cette conférence, toutes lessolutions doivent être trouvées en fonction des situationssocio-économiques de chaque pays.

3) Liens et passerellesJe vous passe très rapidement les différents points qui

ont été évoqués et qui seront forcément l’objet dediscussions pendant les trois jours :- Les relations entre l’enseignement technique et ses

passerelles avec l’enseignement secondaire : qu’est-cequ’il faut faire ?

- Les passerelles avec l’enseignement technique supérieur- Les relations entre l’enseignement technique et la

formation professionnelle

- La réforme de l’apprentissage qui correspond comme onle sait à la majorité de l’emploi dans certains paysd’Afrique sub-saharienne. Ceci est également à mettre enrelation avec, à la fois la massification de l’éducation etl’accroissement de la population.

4) Modes d’apprentissage et qualitéEn termes pédagogiques, l’approche par compétence

a l’air d’être une solution dont tout le monde parle, qui esttrès souvent reprise, de même que les notions d’alternanceou de système dual, tout en disant qu’il n’est pas questionde copier ce qui existe mais toujours d’adapter.

Le problème de la qualité du système et de la qualité desformations a été cité.

5) Gestion des ressources humaineset financementEvidemment quand on parle réformes, on parle aussi

gestion des personnes qui agissent dans cette réforme.La question se pose donc en terme de nombre et decompétences des personnes intervenant dans les systèmesde formation professionnelle. On a ainsi été amené à parlerd’optimisation de la gestion de ces ressources humaines.

Bien entendu, le financement, et cela déjà été dit, estl’une des questions majeures avec le co-financement ou lepartenariat sur le financement.

ConclusionEn ce qui concerne les attentes de ce groupe vis-à-vis

de cette conférence, chaque pays a dit souhaiter apprendre de l’expérience des autres et expliquer vraiment à quelle étape de sa transformation et de sa réformeil en est ; ce qui, garantit au moins à cette conférence uneparticipation active.

Au ministère des Affaires étrangères, comme MonsieurTomasi vous l’a dit ce matin, une évaluation de vingt huitprojets de formation professionnelle a été effectuée et l’onretrouve, parmi les thèmes qui étaient évoqués ce matin, trèslargement ce qui est ressorti de cette évaluation. »

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Les représentants de quatorze pays et de cinq organisationsinternationales ont assisté aux travaux de cet atelier.

1) Problématiques exposéesPratiquement tous les pays participants ont établi un

diagnostic suffisamment approfondi de la situation dece secteur ou disposent d’éléments d’analyse leur permettantd’élaborer et de mettre en œuvre des plans d’actionssusceptibles d’améliorer l’efficacité des dispositifs d’ETFPen place.

Les problématiques exposées sont aussi nombreuses quevariées. Elles comprennent beaucoup d’éléments communsmais aussi des situations spécifiques à certains pays.

a) les éléments communs- L’ETFP relève généralement d’un même ministère, celui

en charge de l’éducation et/ou de l’emploi mais il existedes situations où la formation professionnelle est placéesous tutelle d’autres départements ministériels ; il couvre,outre l’enseignement technique, la formation initiale et laformation continue.

- Des déséquilibres sont signalés entre les filières de l’ETFPet celles de l’enseignement général. Ce dernier drainel’essentiel des flux et est considéré comme la voie royale deréussite aux dépens de la formation professionnelle oùl’orientation se fait par l’échec.

- Les formations dispensées sont très peu adaptées auxréalités économiques et sociales du pays et répondent peuaux besoins des individus en terme d’insertionprofessionnelle et de promotion sociale.

- Les équipements techniques et pédagogiques utilisés parles établissements de formation sont généralementobsolètes.

- Les programmes de formation sont pour la plupartdépassés et rarement actualisés.

- Les formateurs ont un faible niveau de formation et dequalification.

- Il y a une absence de visibilité pour élaborer une stratégiede développement de l’ETFP ; cette situation estessentiellement due à la méconnaissance de la demandedes secteurs d’activité économique et à la faible implicationdes partenaires sociaux et des acteurs concernés dans lepilotage du système

- Difficulté à mettre en cohérence les politiques deformation professionnelle et d’emploi, etc.

b) les situations spécifiques- Certains pays réfléchissent aux possibilités de mieux

répartir l’effort de formation entre l’entreprise et l’école ;ils souhaitent être aidés dans l’élaboration d’une stratégiedans ce domaine par les pays développés ayant uneexpérience dans ce domaine.

- D’autres pensent que pour la mise en place d’un système

homogène, il est important de bien articuler les sous-systèmes d’éducation et de formation et de créer despasserelles entre l’enseignement général et l’enseignementtechnique d’une part, et entre l’enseignement secondaireet l’enseignement supérieur d’autre part, à la conditionque ces passerelles permettent l’accès à des formationsvalorisantes et répondent aux besoins des individus.

- Dans d’autres pays fournisseurs de matières premières etoù les industries de transformation sont quasi inexistantes,les lauréats de l’ETFP n’ont aucune possibilités de s’insérerdans la vie active et encore moins d’acquérir uneexpérience leur permettant de maîtriser les technologies.Ces lauréats alimentent pour la plupart les marchés dutravail des pays développés en compétences ou s’oriententvers le secteur informel.

- La fracture entre les pays en voie de développement et lespays dont les systèmes d’éducation et de formationévoluent rapidement ne cesse de s’accélérer selon certainsparticipants et il sera difficile de combler l’écart.

2) Expérience en assistance techniqueinternationaleLes pays participants à cet atelier ont tous une pratique

de la coopération internationale, dans un cadre bilatéralou multilatéral. Les principaux pays et organismesintervenant dans le champ de l’ETFP sont : la France,l’Allemagne, le Japon, le Canada, l’Union Européenne, laBanque mondiale, la Banque Africaine de Développement,la Banque Asiatique de développement...

Cette coopération s’effectue à travers le montage deprojets visant à améliorer l’organisation et lefonctionnement des dispositifs ETFP en place. La plupartdes projets ont obtenu de bons résultats, certains enrevanche ont eu des résultats médiocres et de tellesconceptions devraient être améliorées à l’avenir.

Le souhait des participants est de mettre en œuvre desprocessus de réformes dans le cadre de stratégies adaptéesaux réalités économiques et sociales des pays concernés,élaborées avec l’appui d’une assistance techniqueinternationale connaissant suffisamment les pays enquestion. Ils souhaitent également être les principauxacteurs des projets susceptibles d’être montés dans cecadre, et bénéficier d’un appui technique en mesure deleur permettre une meilleure appropriation. Ils insistentsur la viabilité et la durabilité des effets de ces projets, bienaprès leur achèvement.

En outre, ils souhaiteraient être appuyés en vue dedégager des solutions acceptables de diversification au planinterne et externe de sources de financement garantissantle fonctionnement harmonieux et le développement desdispositifs d’ETFP mis en place.

RAPPORT DE L’ATELIER D

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DÉBAT AVEC LA SALLE (2)1) Un bon modèle de conférence / Le nécessaire développement

de l’information, de la concertation et du partenariatpour l’ETFP

2) Critique des recommandations de la Banque mondiale

3) En attente de recommandations de la part de participantsdu secteur privé

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Détail« Je voudrais dire quelque chose en ce qui concernele développement de l’information et de la concertationainsi que sur le développement du partenariat pourpromouvoir l’enseignement technique et la formationprofessionnelle, et ce plus particulièrement dans les paysen voie de développement. Je crois que, d’après le modèlequi a été initié ici à Sèvres, il serait bon que laBanque mondiale et les autres bailleurs puissent

également organiser ce type d’interventions ou au moinsla préparation à la mobilisation, à la sensibilisation et àl’information au cours de leurs interventions dans lesdifférents pays. En d’autres termes, il serait souhaitable qu’ilspuissent copier le modèle que nous avons ici à Sèvres : nousavons l’occasion de rassembler tous les partis pour un débatlarge et une concertation large sur le thème qui estdéveloppé. »

Origine du commentaire

Waly N’DIAYE DJAJI du SénégalSecrétaire national aux revendications générales du CSA (syndicat de travailleurs)

Origine du commentaire

Waly N’DIAYE DJAJI du SénégalSecrétaire national aux revendications générales du CSA (syndicat de travailleurs)

2) Critique des recommandations de la Banque mondiale

Détail« Il y a un deuxième point sur lequel je voulais revenir. Dansl’atelier auquel j’ai participé, nous avons interpellé la Banquemondiale aussi par rapport à sa politique d’éducation bienque cela ne soit pas ressorti dans le rapport. Toutle monde reconnaît, on l’a dit, le rôle de l’école et del’éducation et de la formation dans le développementde l’économie et le développement global en général,mais malheureusement les recommandations de laBanque mondiale dans ses politiques avec les pays en voie de

développement sont souvent de mettre moins d’argent auniveau du système éducatif. Il y a des directives budgétairesqui ne permettent pas à ces pays là d’aller dans le sens voulu,particulièrement vers l’enseignement technique et vers laformation professionnelle. Je ne sais pas si c’est un oubli,mais en tout cas c’est une préoccupation majeure dansnos pays. »

1) Un bon modèle de conférence / Le nécessaire développementde l’information, de la concertation et du partenariat pour l’ETFP

Origine de la question non identifiée

3) En attente de recommandations de la part de participants du secteur privé

Détail« Je souhaiterais découvrir combien de personnes présentesdans ce hall représentent le marché du travail et le secteurprivé. Nous aimerions, en fait, entendre leur opinionquant au type de produits ou de diplômés que nous créons,parce que nous n’en parlons toujours que d’un côté et qu’ils’agit toujours, comme quelqu’un l’a remarqué, des mêmesproblèmes. »

DÉBAT SÉANCE (2)

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Yoro

Fall

*du

Sén

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Réponse a

« Je pense que c’est une question qui est assez bienposée. Je suis représentant du patronat au Sénégal eteffectivement la demande est intéressanteaujourd’hui. Dans mon pays et dans monentreprise, pour 15 % d’encadrement j’ai besoin de45 % d’exécutif, et quand je dis exécutif, c’estvraiment la partie la plus active de l’entreprise. Dansce domaine particulier, c’est vrai, ma préoccupationest la formation mais surtout la pérennité de laformation. Aujourd’hui je la paye de ma proprepoche, c’est-à-dire que le gouvernement ne m’aidepas à former et en même temps je suis aussi dansle piège de la formation d’un employé sur lequelje mets beaucoup d’argent mais qui demain peutêtre débauché pour aller chez le concurrent. Alorsje crois qu’effectivement dans un endroit commecelui ci où il y a les institutions, les Etats, je dois fairesavoir que quand je forme pour moi, je n’ai aucune

responsabilité sur la mobilité de ce personnel, alors que quand les Etats participent je crois qu’ilsrenforcent un peu la demande au niveau local. Dansce processus nous avons tous à y gagner. Il fautsavoir qu’au Sénégal quand le secteur privé ademandé à ce qu’il y ait une mobilisation nousavons demandé aux bailleurs de fonds depromouvoir le processus sur une période donnée(aujourd’hui c’est trois ans) durant laquelle nousallons contribuer à 25 % dans la formation et nonplus à 100 %. Mais après on va mettre en place unfinancement directement par les impôts que nousallons verser et sur lesquels, après la périoded’incubation, nous pourrons éventuellementmobiliser les ressources à partir du gouvernementpour pouvoir former des Sénégalais qui pourront semouvoir dans le domaine industriel sans que celane porte préjudice à mon exploitation. »

* Président directeur général du CNES (syndicat patronal)

Réponse b« Je voudrais simplement apporter une brèveréponse à la personne qui a posé des questions àpropos du secteur privé. Je crois qu’une erreur debase a été commise, peut-être, mais je ne le sais pas,par les organisateurs, en ne reconnaissantprobablement pas que les utilisateurs finaux desproduits devraient être impliqués. Mais pourcertaines raisons, il se trouve que je suis un hommedu secteur privé.

Premièrement, je suis passé par ce système d’éduca-tion ; deuxièmement, je suis impliqué dans lesecteur privé depuis ces vingt sept dernières annéesau point d’être président de la Chambre decommerce nationale de mon pays, le Nigeria ; ettroisièmement, je suis l’employeur des produits deces gens dans certaines de mes sociétés. Cependant,je suis venu ici en ma qualité de membre du Conseilnational de l’enseignement technique.Une chose est claire, Monsieur le Président,au Nigeria nous avons un problème singulier.Et la singularité de ce problème est la suivante :jusqu’aux années 1980-1983 peut-être, le programme

d’enseignement polytechnique et technique étaittrès bon et les entreprises et organisationsattendaient que les produits soient finis en faisant laqueue, alors que maintenant, les produits desuniversités font le tour, passant de portes en portes,à la recherche d’un emploi, parce que beaucoupd’investisseurs n’ont pas la patience d’attendre deles reformer de façon à ce qu’ils conviennent à leursorganisations. En interne, avec le temps, les pouvoirsqui existaient ont pu transformer la situation detelle façon que le programme d’enseignementtechnique et professionnel a été dilué. Vousdécouvrirez que les diplômés qui arrivent, mêmeavec la réforme qui est en cours actuellement, nesont ni ceci, ni cela. Donc, le secteur privé ne lestrouve pas utiles et le gouvernement ne sait qu’enfaire. Donc, je pense qu’à l’avenir, pour les ateliersde cette nature, des efforts particuliers pourraientêtre faits pour inviter des fabricants ainsi qued’autres employeurs à participer, et vous entendrezla même réaction que la mienne. »

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* Membre du Conseil national de l’enseignement technique

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Réponse c« Je suis tout à fait d'accord, Nous, les producteurssavons que nous avons besoin de personneshonnêtes, ayant une éthique professionnelle, et del’expérience. Ce sont trois éléments qui sont àla base d'une série d'autres facteurs, et lesformateurs doivent les garantir par le biais dela formation. Notre participation, en ce quiconcerne le Chili est fondée sur les programmesque nous avons pu développer avec l'Etat etavec les réseaux qui regroupent : les organisations

paysannes, les entreprises qui apportent une valeursupplémentaire au produit agricole, les universitéset les centres de formation technique. C'est enpartant de là que l'on engendre une masse critique,et nous avons besoin de plus d’interventions pourapporter plus de clarté à ces questions. Je crois quece sujet est un sujet qui implique tout le monde,d'où l'importance de la création de réseaux. »

Juan

Gu

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hili

* Responsable du plan d’action du réseau d’articulation et d’amélioration de l’édu-cation technique et professionnelle pour l’agriculture et le secteur agro-industriel

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Séance 3 :OBJECTIFS DE L’ETFP

1ÈRE PARTIE

Développement des compétences en Afrique sub-saharienneM. Arvil Van Adams – Banque mondiale

La situation de l’enseignement technique et de la formationprofessionnelle en Afrique francophone

M. David Atchoarena – IIPE, UNESCO

Former pour l’emploi dans le secteur informel :une question oubliée ?M. Fred Fluitman – OIT

Débat avec la salle

Ivone Maria Elias MOYERAPrésidente de séance

BRÉSIL

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Une décennie après la publication en 1991 du rapportde la Banque mondiale sur l’enseignement technique etla formation professionnelle, a été finalisée pourl’Afrique sub-saharienne une nouvelle étude mettant àjour les données contenues dans le précédent rapportde la Banque.

Cette nouvelle étude mérite d’être présentée. Sont ainsipassés en revue au sein de cet exposé :- cinq découvertes importantes de l’étude,- sept actions pour la réforme,- ainsi que les rôles que les gouvernements africains, les

employeurs et les donateurs devraient jouer afin demener à bien une telle réforme.

Introduction

Je remercie les organisateurs de cette conférence de leur invitation à partager avec les autres participants lesconclusions d’une étude sur deux années concernant l’enseignement technique et la formation professionnelle (ETFP)en Afrique sub-saharienne 1. Le dernier grand rapport sur l’ETFP par la Banque mondiale a conduit à la publication, en1991, d’un document d'orientation sur le sujet 2. L’étude qui nous intéresse aujourd’hui a été menée explicitement dansle but d’examiner ce qui s’est passé depuis la publication du document d'orientation et de déterminer quelles seraientles leçons à tirer de cette expérience pour développer les compétences en Afrique sub-saharienne.

Cette étude a été dirigée par la Banque mondiale en association avec l’Institut international de planification del’éducation de l’UNESCO (IIPE), le Centre de formation de l’OIT de Turin et l’Association allemande pour la formationdes adultes. Quatorze études thématiques de référence, couvrant 20 pays et 70 monographies, ont été préparées. Je meréjouis de la présence, aujourd’hui, de représentants de deux de ces partenaires : Fred Fluitman de l’OIT et DavidAtchoarena de l’IIPE. Nous sommes reconnaissants envers le ministère norvégien des Affaires étrangères et le ministèrebritannique du Développement international, ainsi que la Banque mondiale, pour le financement de cette étude.

Les conclusions que je vous présente aujourd’hui ont tout d’abord été étudiées avec les contributeurs de l’ETFPà Edimbourg dans le cadre d’un atelier avec le Groupe de travail international pour la coopération surle développement des compétences, puis avec un groupe de décideurs africains, de chercheurs et d’administrateurs de programmes pour l’ETFP à Turin, organisé par le Centre de formation de l’OIT de Turin. Les échos des deuxgroupes ont permis d’affiner les principaux messages de cette étude. Les premières conclusions ont également étéintégrées aux programmes de formation des équipes éducatives de la Banque mondiale dans le Sussex.

La responsabilité du rapport final incombe à Richard Johanson et à moi-même, en tant que co-auteurs de SkillsDevelopment in Sub-Saharan Africa (développement des compétences en Afrique sub-saharienne). Le livre du mêmetitre, publié par la Banque mondiale, sera disponible en mars 2004 en anglais et une version française en juillet. Noussommes reconnaissants envers la Direction suisse du développement et de la coopération d’avoir financé la publicationde la version française.

A. Van AdamsLead sector specialist for social protection, African Region

Banque mondiale

Résumé

Développement des Compétencesen Afrique sub-saharienne

1Johanson, Richard et Arvil V. Adams. 2004. Skills Development in Sub-Saharan Africa (Développement des compétences en

Afrique sub-saharienne). Washington : Banque mondiale.

2Banque mondiale. 1991. Vocational and Technical Education and Training : A World Bank Policy Paper (Enseignement et

formation techniques et professionnels : un document d'orientation de la Banque mondiale). Washington : Banque mondiale

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Je souhaite préciser que cette étude n’est pas effectuée dans l’optique de servir de document d'orientation et n’estpar conséquent pas normative. Il s’agit plutôt d’un ensemble de connaissances, d’une tentative de faire le bilan del’expérience sub-saharienne de ces dix dernières années en matière d’enseignement technique et de formationprofessionnelle, de faire la synthèse et d’en tirer des leçons qui peuvent s’appliquer dans certains pays. L’environnementafricain en matière de compétences est unique, ainsi que nous avons pu le constater ce matin grâce à l’étude de quelquestableaux de David Fretwell. Il s’agit d’un environnement à croissance économique faible, avec une stagnation del’emploi dans le secteur formel et un taux élevé d’activité dans le secteur informel. Le problème le plus important restepeut-être celui du VIH/SIDA et ses conséquences sur les compétences de la population active. Cette maladie et sesrépercussions doivent être prises en considération dans toute discussion sur le thème de la formation.

La différence entre notre exposé et ceux que vous entendrez aujourd’hui et demain est qu’il est centré sur lescompétences au cours du cycle de vie. Nous ne nous restreignons pas aux conclusions permettant de mettre en placeune formation initiale ou pré-emploi. Nous nous intéressons à la formation pré-résidentielle ou résidentielle. Ensuite,nous nous intéressons aux fournisseurs tant du secteur privé que du secteur public. Les questions qui se posent enAfrique en ce qui concerne le développement des compétences sont des questions familières dans d’autres régions. Cesquestions incluent les problèmes de mauvaise qualité, d’inefficacité relative à l’utilisation des ressources, de rigidité entermes d’absence de réaction à l’économie de marché, d’insuffisance ou de manque de financement de la formation et,dans de nombreux cas, d’inégalité d’accès de divers groupes. Ce sont des problèmes que nous avons rencontrés dans lespays de cette région.

Notre concentration sur le développement des compétences est motivée par la reconnaissance que le niveau et ladistribution des compétences au sein de la population active ont des répercussions sur la productivité, les revenus et lebien-être des individus et des foyers. Ce développement est important dans la réduction de la pauvreté. De façonsimilaire, il est essentiel à la rentabilité des entreprises, à l’incitation aux investissements de capitaux et à la créationd’emplois. De manière globale, le développement des compétences contribue à une plus grande mobilité de l'emploi età la capacité des économies à s’adapter aux nouvelles technologies et à s’accroître. Nous préférons parler dedéveloppement des compétences plutôt que d’ETFP dans notre exposé, ceci afin d’insister sur l’importance des résultatsde la formation plutôt que, tout simplement, des contributions à ce processus.

Vous pouvez retrouver les 14 études thématiques surlesquelles nous basons nos conclusions sur le sitewww.worldbank.org/sp en cliquant sur Labor Markets(Marchés du travail) puis sur Vocational Education andTraining (Enseignement et formation professionnelle). Deces études, nous avons tiré ce que nous pensons être lesconclusions les plus significatives.

Nous commençons par la nature du marché pour ledéveloppement des compétences en Afrique. En moyenne,d’un pays à l’autre, en excluant des pays comme l’Afriquedu Sud et l’Ile Maurice, environ 85 % des emplois sontsitués dans le secteur informel. Une majorité d’entre euxse situent dans le domaine de l’agriculture de subsistance.Pourtant, l’essentiel de la formation offerte par le secteurpublic concerne les 15 % d’emplois que l’on trouve dansle secteur formel. L’adaptation du marché pour toucher lesecteur informel et y augmenter la productivité est peut-être l’outil le plus important permettant une réductionde la pauvreté en région africaine.

Parmi les autres conclusions, il y a une bonne etune mauvaise nouvelle. La bonne nouvelle, c’est quenous avons constaté un certain nombre de réformes de

l’ETFP, ces dix dernières années, qui ont bon espoird’aboutir. La mauvaise nouvelle, et le message à l’atten-tion du secteur public, c’est que la réforme de l’ETFPpublic reste un défi. Bon nombre des critiques dusecteur public, en 1991, qui lui reprochaient de ne pasêtre en phase avec la demande du marché, sa bassequalité et l’inefficacité de son offre, sont encore d’ac-tualité aujourd’hui. Réformer l’ETFP public demeureun défi, mais il existe des exemples prometteurs que jevais vous présenter dans un instant.

Une autre conclusion, que nous estimons êtreimportante pour les gouvernements qui luttentfinancièrement pour proposer à la population activeune formation de qualité, est le fait qu’une source nongouvernementale de formation permette dans la plupartdes pays de procurer des compétences et ce, de manièresignificative. Ceci n’est pas reconnu dans bon nombrede pays, parce que les données permettant de serendre compte de l’étendue réelle de la formationnon gouvernementale dans les entreprises, dans lesorganisations non gouvernementales et dans les institu-tions privées, ne sont pas disponibles. Nous constatonsqu’il existe en moyenne deux centres de formation non

I. Conclusions importantes

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Si nous devions rédiger une liste de mesures,dans cette étude, afin de pouvoir dire aux clients :« voici des éléments que vous devriez prendre enconsidération », nous en choisirions sept.

Au sommet de cette liste, en première positiondans le processus de réforme, nous définirions le rôlepropre des gouvernements en ce qui concerne laformation.

En second point, nous transposerions le cadrede ce plan pour l’ETFP dans une législation qui codi-fierait les rôles et les responsabilités de tous les parte-naires engagés dans le développement des compéten-ces. La législation donne aux partenaires les pleinspouvoirs pour jouer leur rôle respectif et permet dedéfinir ce qui est attendu de chacun d’entre eux.

Troisièmement, je dirai que le développementdes compétences est un processus de marché qui estsoumis aux forces régulatrices de l’offre et de lademande. Créer des institutions qui soutiennent cemarché est important pour s’assurer que les partici-pants disposent de l’information nécessaire à unebonne prise de décision en matière de formation, àune mise en place et à une application appropriéesdes réglementations relatives à la protection desconsommateurs, à la mise en place de normespermettant de garantir la qualité des offres, à laconception de cadres de financement efficaces etsurtout, à la surveillance et à l’évaluation des résultatsdans l’optique de la conception d’une politique.

Quatrièmement, comme je l’ai indiqué aupara-vant, l’un des instruments de réforme les plus impor-tants est le choix du financement du système deformation. Ceci se divise en deux points : comment,d’une part, générer les moyens de financement et,d’autre part, comment affecter les ressources. Ladiversification des moyens de financement est essen-

tielle, car les gouvernements n’ont pas la possibilité definancer toutes les compétences nécessaires dans uneéconomie de marché moderne. La manière dont vousaffectez les ressources peut également faire une gran-de différence. Se concentrer sur l’impact de l’affecta-tion du budget plutôt que sur les revenus peut avoirun effet sur les incitations à l’obtention de résultats.

Cinquièmement et sixièmement, les réformesde gestion de la formation, tant au niveau des systè-mes que de celui des fournisseurs individuels, sontimportantes. Rassembler les employeurs, les employéset le gouvernement au sein d’organismes nationauxde formation conduit à une meilleure utilisation desressources publiques et à une meilleure conceptiondes politiques de formation que si le gouvernementseul avait la charge de cette tâche. Décentraliser aubénéfice des formateurs individuels les décisionsconcernant les cours offerts, les méthodes d’enseigne-ment, les effectifs, le recouvrement des frais et l’affec-tation des revenus, puis la désignation de responsa-bles de ces institutions, lesquels auraient laresponsabilité des résultats, peut avoir des répercus-sions sur les incitations pour délivrer, au meilleurprix, des personnes ayant les compétences requisessur le marché du travail.

Enfin, nous devrions faire état de la promotionde la qualité dans le développement des compétences.Aborder la question de la qualité est essentiel à laréforme du développement des compétences.Ceci découle des conclusions que nous avons tirées etqui nous amènent à dire que bien que les capacités deformation non gouvernementale soient considérables,leur qualité varie de manière significative. Mettreen place des institutions permettant de garantirla qualité a son importance lorsqu’il s’agitd’obtenir les meilleurs résultats possibles, en termede formation, d’un partenariat entre les secteurspublic et privé.

gouvernementaux pour un centre gouvernemental.Il n’est pas possible de débattre des réformes àmoins d’apporter une contribution non gouverne-mentale à ce dialogue, puisque dans la plupartdes cas, c’est un partenaire majoritaire dans leprocessus de formation.

Enfin, l’outil de réforme le plus significatifque nous rencontrons est la manière dont les payschoisissent de diriger ou de gérer le système deformation et son financement. J’en dirai un peuplus dans les remarques qui vont suivre.

II. Réformes clé

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En mettant en œuvre le plan de réformes, mesremarques se concentrent sur les responsabilités des gouvernements, des employeurs et descontributeurs. Du point de vue des gouvernements,ceux-ci ont une grande responsabilité : cellede l’adaptation des politiques. Il s’agit toutd’abord, d’adapter les politiques pour promouvoir laconcurrence sur le marché des compétences, puis deréglementer de manière appropriée afin de protégerles consommateurs sans créer de barrières à denouvelles opportunités. Les gouvernements ont uneresponsabilité évidente dans la promotion de l’accèsà la formation, de même qu’à l’éducation, pour tous.Et lorsque les marchés cessent de fonctionnercorrectement, les gouvernements peuvent jouerun rôle quant à l’offre et au financement, ceci afind’améliorer les performances du marché.

Nous avons tout particulièrement étudié laformation en entreprise et ce que les employeurspeuvent faire – et bien faire. Trois élémentspermettent de savoir si l’entreprise va assurer uneformation. Premier point, la taille : les grandesentreprises vont assurer une formation, tandis queles petites entreprises ne le feront pas de manièreaussi fréquente. Deuxième point : le niveau descompétences au sein de la masse salariale del’entreprise fait la différence. Les employés ayantreçu une éducation sont formés plus souvent queceux qui n’en ont pas reçu. Ceci peut avoir uneimportance capitale lorsqu’il s’agit d’aborder laquestion de l’équité. Troisième point : nous avonsconstaté que les employeurs qui utilisent lesnouvelles technologies, qui reçoivent desinvestissements directs de l’étranger et qui sontexportateurs, ont plus tendance à assurer uneformation.

Dans ce contexte, on devrait encourager lesentreprises à faire ce que bon leur semble dans uneéconomie de marché, en terme de développement

des compétences, et laisser les gouvernementscombler les lacunes, en particulier lorsqu’il s’agitd’assurer l’équité de l’accès, de régler les défaillancesdu marché et de mettre en place des institutions desoutien des marchés de formation efficaces. A leurtour, les entreprises peuvent être des sourcesefficaces en termes de moyens de formation, definancement, mais aussi de bons partenaires en cequi concerne la gouvernance des systèmes deformation.

Je suis d’accord avec l’un des intervenants quis’est exprimé plus tôt aujourd’hui lorsqu’il disaitqu’il fallait adapter le processus de réforme aucontexte du pays. Définir un programme deréformes requiert l’étude de chaque pays et desforces régulatrices de l’offre et de la demande dechacun des marchés. Ce qui revient à dire que vousdevez étudier le contexte économique particulierd’un pays, les performances de son système deformation et ses partenaires, avant de mettre enplace un programme de réformes.

Enfin, en ce qui concerne les pays en voie dedéveloppement, il y a la question de savoir ce que lescontributeurs peuvent faire pour promouvoir laréforme en termes de moyens de formation et definancement. Les contributeurs se sont déjà engagésà faciliter l’accès des programmes pilotes deformation au secteur informel et ceci devraitcontinuer. Les contributeurs doivent reconnaîtreque le processus de réforme de l’ETFP requiert unengagement à long terme et qu’il aboutit rarementdans les trois à quatre années que durentgénéralement les projets des contributeurs. Soutenirles réformes de financement et de gestion de laformation peut se révéler crucial en ce qui concernel’incitation à la performance. Et enfin, lescontributeurs peuvent continuer à accroître lacapacité de réformes et de gestion des systèmes deformation.

C’est une brève synthèse d’une étude à plus grande échelle du développement des compétences enAfrique sub-saharienne que je vous ai présentée. J’espère que vous lirez tous le livre lorsqu’il sera publié etque vous explorerez les indications plus complexes et nuancées qu’il vous proposera pour améliorer l’ETFP.

III. Rôles et responsabilités des partenaires

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L’enseignement technique et professionnel en Afriquefrancophone représente le plus souvent un secteur assezmarginal au sein du système éducatif. Les moyens quilui sont accordés, aussi bien par les Etats que par lacommunauté internationale, sont relativement faibles.

Au cours des années 90, les pays africains francophonesont réformé leur système de formation professionnellepour le rapprocher du monde du travail et desentreprises. De nouveaux types d’institutions et dedispositifs sont apparus associant non seulement lespouvoirs publics mais également des représentants dupatronat. L’ouverture au secteur privé s’est par ailleursamplifiée. Le partenariat est ainsi devenu un facteurimportant de l’évolution du système.Dans une région où la majorité des emplois est fourniepar le secteur informel et le milieu rural, les politiquesde formation doivent tenir compte des microentreprises et de l’auto emploi et proposer des réponses

adaptées aux besoins spécifiques des populations.Certain pays sont parvenus à engager un partenariatdynamique avec le secteur informel.

Aujourd’hui, le secteur de l’enseignement technique etde la formation professionnelle est fragmenté en unemultitude de projets, souvent cloisonnés, appuyés pardifférentes coopérations. Dans ces conditions,l’aménagement d’un véritable système national devientdifficile.

Pour ces pays, attirer davantage de ressources pour laformation professionnelle implique une réflexion sur laplace de la préparation à l’emploi dans les Stratégies deRéduction de la Pauvreté et de l’Éducation pour Tous.Un des enjeux est de parvenir à une meilleure prise encompte des besoins de qualification des exclus dans lecadre du suivi de Dakar.

Introduction

Dans un monde où la demande d’éducation s’exprime de plus en plus en termes de qualifications et decompétences reconnues par le marché du travail, l’enseignement technique apparaît véritablement comme unecomposante stratégique des politiques éducatives. Cette évolution affecte, de façon plus ou moins marquée, tous lespays y compris les économies à faible revenu d’Afrique sub-saharienne.

Ce texte retrace les points forts de deux études de l’IIEP (Institut international de planification de l’éducation),l’une sur l’évolution des systèmes et des politiques publiques de la formation professionnelle en Afrique sub-saharienneet l’autre sur l’évolution du secteur privé de l’enseignement technique et professionnel (voir références). Ces études ontété réalisées dans le cadre de la préparation du document de la Banque mondiale sur le développement des compétencesen Afrique. On insistera sur la situation des pays francophones qui est distincte par rapport au reste du continent.

D. AtchoarenaSpécialiste principal du programme

IIPE/UNESCORésumé

La situation de l’enseignement techniqueet de la formation professionnelle

en Afrique francophone

Les systèmes de l’enseignement technique etprofessionnel dans la sous région représentent unsecteur assez marginal au sein des systèmes éducatifs,c'est-à-dire un faible pourcentage des effectifs du cyclesecondaire. Si on rapporte ce pourcentage, compte tenudu faible taux de scolarisation dans l’enseignementsecondaire, à la taille d’une génération, on se rendcompte que seule une faible minorité d’une classe d’âgea accès à l’enseignement technique et professionnel.

Dans la plupart des pays, la priorité aujourd’huiest donnée à ce qu’on pourrait appeler l’après Dakar,c'est-à-dire au développement de l’éducation pour tous ;et par conséquent, les moyens qui sont accordés àl’enseignement technique et la formationprofessionnelle, aussi bien par les États que par lacommunauté internationale, sont relativement faibles.

I. Le contexte

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Au cours des années 90, des évolutions ont étéobservées dans ce secteur. La sous région a connuune ère de réformes. En premier lieu, le documentde politique générale de la Banque mondiale en1991, donnait la priorité au développement de laformation dans les entreprises et recommandaitégalement l’instauration d’un marché de laformation, c'est-à-dire la diversification de l’offre deformation professionnelle. En second lieu, du côtéfrancophone, les Assises francophones de laformation professionnelle organisées à Bamako en

1998, ont apporté des réflexions nouvelles,notamment en ce qui concerne la relation entrel’éducation de base, la formation professionnelle etle développement des partenariats avec lesentreprises.

En fait, il ressort du document de la Banquemondiale comme des attentes de Bamako que lepartenariat et la redéfinition du rôle de l’Etatconstituent le cœur de la réforme.

Le thème du partenariat ressort, d’unemanière très forte, des différents rapports desgroupes de travail présentés aujourd’hui. C’est doncune problématique qui n’est pas spécifique àl’Afrique sub-saharienne mais pertinente à l’échelleinternationale. Dans l’ensemble des régions, lepartenariat apparaît comme un facteur importantd’évolution du système et du pilotage des systèmesde formation professionnelle. Cette évolution doitêtre mise en relation avec celle du rôle de l’Etat,notamment dans des contextes de crise etd’ajustement structurel. Ceux-ci ont desconséquences fortes sur le système éducatif engénéral, et aussi en relation avec le systèmed’enseignement technique et professionnel. D’unefaçon générale, au cours des années 90, lesdiscussions sur l’éducation et les réformes dessystèmes éducatifs ont été largement dominées pardes préoccupations d’ordre économique. Ladécentralisation, l’autonomie croissante desétablissements et les liaisons plus étroites avec lesemployeurs illustrent les formes variées que prend lepartenariat.

On observe au moins cinq tendances fortes enmatière de construction de partenariats en Afriquesub-saharienne :

• le rapprochement avec les entreprises ; c’est unélément fondateur de la réforme ;

• la rénovation des systèmes de qualification. Onretrouve cette évolution surtout dans les pays nonfrancophones (à l’exception de l’île Maurice).Cette rénovation n’a pas la même importance danstous les pays. En Afrique du Sud ou au Botswana,la réforme du secteur dans son ensemble semet en place autour d’un système national dequalification ;

• la mise en place des observatoires de l’emploi et dela formation ;

• la réforme du système de financement commelevier de changement ;

• l’ouverture au secteur privé, c’est notamment lecas au Mali et au Sénégal.

L’Afrique francophone présente d’une part,des montages institutionnels très différents selon lespays par rapport à la répartition des responsabilitésen matière d’enseignement technique et d’autrepart, une instabilité institutionnelle car les tutelleschangent rapidement. Le cas du Sénégal est parfoisévoqué pour illustrer cette tendance qui pose unproblème de continuité dans la mise en place despolitiques et dans la prise en charge de la réforme.

On peut distinguer trois grands typesd’organisation du secteur : les pays dans lesquels leministère de l’Éducation est en charge del’enseignement technique et professionnel ; c’estactuellement le cas du Sénégal. D’autres pays ontmis en place des ministères spécifiques commeMadagascar ou le Togo. Un troisième typecorrespond à des situations hybrides dans lesquellesles responsabilités sont partagées entre le ministèrede l’Education et le ministère du Travail ; c’est lecas aujourd’hui du Mali avec la mise en placerécente d’un ministère délégué pour la formationprofessionnelle. Dans cet exemple, des problèmes decoordination intersectorielle peuvent apparaître.

L’élément important à retenir dans ce paysage est la diversification et la complexification del’environnement institutionnel de l’enseignementtechnique et professionnel. De nouveaux typesd’institutions apparaissent associant non seulement

II. Le partenariat dans l’enseignement techniqueet la formation professionnelle

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les pouvoirs publics mais également desreprésentants du patronat, tels que le Conseilnational pour la formation professionnelle ettechnique à Madagascar. Ces institutions ont parfoisune fonction spécialisée comme les Fonds pour lefinancement de la formation ou les observatoires del’emploi et de la formation.

Dans les pays non francophones, ce type departenariat apparaît comme mode principal dedéveloppement et de régulation du système,notamment à travers la mise en place d’agencesnationales pour la formation professionnelleauxquelles sont souvent rattachés les Fonds pour lefinancement. Ce contexte rappelle, dans une certainemesure, le modèle latino américain où la formationprofessionnelle est déléguée à des organes souventtripartites, extérieurs au système éducatif.

Un autre élément important intervient dansce contexte, c’est celui de la relation avec le secteurinformel qui représente l’essentiel du marché dutravail, en termes de pourcentage de l’emploi urbain.Cette situation pose un problème d’adéquationde l’offre de formation professionnelle auxcaractéristiques du marché de l’emploi informel. Enoutre, l’importance du monde rural demeure uneréalité forte en Afrique sub-saharienne à laquelle laformation doit s’adapter. Il y a donc nécessité de

reconnaître les besoins spécifiques des populationsrurales et des actifs du secteur informel.

Bien qu’il existe des difficultés pour engager unpartenariat avec le secteur informel, certains pays ysont parvenus. On peut citer, à titre d’exemple, le casdu Mali où progressivement une structuration s’estopérée au sein du secteur informel, ce qui a permisd’engager de manière institutionnelle, un dialogueentre les représentants du secteur public et ceux del’informel pour développer une politique deformation. Ces évolutions rencontrent toutefoiscertaines résistances. Au sein du système scolaire, lesecteur informel est souvent dénoncé comme unsecteur d’exploitation de la force de travail juvénile.Des résistances existent aussi au sein du secteur de laformation professionnelle qui privilégiegénéralement les formations de plus haut niveau.Enfin, certaines agences de coopération hésitentencore à intervenir auprès d’un secteur dont ellesperçoivent mal les contours.

C’est dans ce cadre, qu’apparaît progressive-ment une dichotomie entre le schéma des pays franco-phones qui est resté, malgré tout, très prochede l’organisation classique autour des ministères del’Éducation et celui observé dans les autres pays de larégion où émergent de nouveaux dispositifs institution-nels accordant une large place aux partenaires sociaux.

III. La réforme des systèmes

L’enseignement technique et la formationprofessionnelle dans les pays francophones s’estconstruit à l’image du système français des années60. Cependant, le processus de transfert de ce modèlea été interrompu. En effet, les évolutions profondesde l’enseignement technique et professionnel qui onteu lieu pendant trente ans en France, telles que laconstruction de filières de formations, la rénovationdes diplômes, le développement de l’alternance, onteu peu d’écho en Afrique francophone. Ainsi, s’estopérée une déconnexion entre les deux zones. Onpeut s’interroger, bien sûr, sur les raisons de cettesituation paradoxale dans un contexte où la France aapporté un appui important à l’évolution de cessystèmes pendant des décennies.

On observe, aujourd’hui, dans de nombreuxpays une guerre des modèles qui conduit à unefragmentation du système d’enseignement techniqueet de formation professionnelle en une multitude deprojets, souvent cloisonnés, appuyés par différentescoopérations. Cette réalité rend difficile

l’aménagement d’un véritable système national.Une des difficultés de l’aide est aussi d’adapter

les réponses au contexte. Selon les pays, les environ-nements socio-économiques sont très différents etdonc les solutions doivent être diversifiées. Aprèsune phase dans laquelle les établissements bénéfi-ciaient beaucoup d’appuis extérieurs (équipement,formateurs, etc.), la tendance actuelle semble privilé-gier l’action en amont sur la stratégie, le partenariatet le renforcement des capacités institutionnelles.

Dans tous les pays, notamment les pays à faiblerevenu, deux cadres stratégiques majeurs ont été desleviers pour la réforme de systèmes éducatifs. Il s’agitde la réduction de la pauvreté avec les documents deStratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP) et lastratégie d’Education pour Tous (EPT) dans le cadredu suivi de Dakar et des plans d’actions nationaux.

La problématique consiste donc à s’interrogerégalement sur l’articulation entre la réformede l’enseignement technique et de la formation

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professionnelle, en particulier pour les bas niveauxde qualification, et ces cadres stratégiques(DSRP et plan d’action EPT) qui mobilisent des

financements et des efforts considérables au niveaunational et international.

Conclusion

En conséquence, pour des pays à faible revenu, attirer davantage de ressources pour la formationprofessionnelle implique une réflexion sur la place de la préparation à l’emploi dans les Stratégies deRéduction de la Pauvreté et de l’Éducation pour Tous. C’est dans cet esprit que l’UNESCO a lancé en 2003dans quelques pays un programme pilote visant à définir, dans les plans d’action nationaux d’éducationpour tous, un volet sur la formation professionnelle et l’insertion des groupes défavorisés. A terme, cetteinitiative devrait contribuer à une meilleure prise en compte des besoins de qualification des exclus dans lecadre du suivi de Dakar.

RéférencesDavid Atchoarena, André Delluc. Revisiting technical and vocational education in sub-Saharan Africa. 2002. IIEP,UNESCO publishing.David Atchoarena, Paul Esquieu. Private Vocational Education in sub-Saharan Africa. 2002. IIEP, UNESCO publishing

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Cet exposé, issu en partie d’une étude récente surl’éducation et la formation professionnelle en Afriquesub-saharienne, laisse supposer que, jusqu’à présent, laformation de la majorité des personnes forcées par lescirconstances à travailler dans le secteur informel a étéen grande partie ignorée par les pouvoirs publics, alorsqu’une telle formation devrait représenter à la fois undéfi et une opportunité à ne pas manquer.

Sont donc ici présentés :- quelques leçons importantes à retenir concernantle développement des qualifications dans le secteurinformel,- certains éléments constitutifs d’un agenda alternatifqui semble s’être perdu,- et enfin les raisons qui pourront néanmoins être avan-cées pour ne pas appliquer de telles recommandations.

Introduction

Mesdames et Messieurs, bonsoir.

Je m’appelle Fred Fluitman et je travaille pour l’OIT. L’OIT est une agence spécialisée des Nations unies qui s’intéresseau monde du travail. Comme on le dit de nos jours, nous oeuvrons pour « un travail décent pour tous », ce qui englobeles emplois tout d’abord, mais aussi le respect des droits sur le lieu de travail, une protection sociale minimale et undialogue social efficace. Voilà l’objet de l’OIT et je ne développerai pas davantage, puisque je pense que vous le savez déjà.

Pour cette présentation tardive, je ne me sens pas comme étant un clone mais quelque peu dans la peau duconventionnel Cambon, cité ce matin par notre hôte M. Mazeran, parce que je m’apprête à vous parler essentiellementdes gens qui ne mangent pas de gâteau ; vous savez le gâteau que Marie-Antoinette mangeait. Je vais vous parleressentiellement de certains pays plutôt que d’autres, particulièrement des pays dont M. Rischard (vice-président pourl’Europe – Banque mondiale) a parlé ce matin, et qui n’ont pas bien réussi. Si je m’apprête à vous parler du secteurinformel, c’est bien parce que c’est dans ces pays que ce secteur se concentre, même s’il existe par ailleurs dans tousles autres pays.

Thèmes abordés

Je vous parlerai de formation plutôt que d’éducation, c’est-à-dire que je vous parlerai de formation aprèsl’éducation. Je ne vous dirai pas que nous, à l’OIT, ne reconnaissons pas la contribution cruciale de l’éducation de basepour tous mais je vous parlerai de la formation comme étant bien distincte de l’éducation. C’est ce qui intervient aprèsl’éducation de base, que ce soit immédiatement ou peut-être bien plus tard.

Je vous parlerai du travail plutôt que de l’emploi. Je vous parlerai du travail dans le secteur informel plutôt que del’emploi dans le secteur informel. Il existe ici une légère distinction et si vous souhaitez qu’un philosophe vous leprouve, je vous donnerai son nom plus tard.

Je vous parlerai de l’acquisition des qualifications dont les gens ont besoin pour gagner leur vie. Je vous parleraidu travail et des gens qui travaillent dans le secteur informel.

Je vous présenterai un agenda que vous connaissez probablement bien ou que vous avez peut-être déjà connu,« démodé », quelque chose dont nous avons fini de débattre il y a 10 ans. Je crains, cependant, que cet agenda ait quelque

Résumé

F. FluitmanManager – Employment and skills development program

Organisation international du travail

Former pour l’emploi dans le secteurinformel : une question oubliée ?

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peu été oublié, ou perdu, si effectivement, sa non réalisation soit une chose sur laquelle nous puissions nous fonder.

Avant que je commence, juste un avertissement en cette heure tardive : il y aura forcément des répétitions, maiscela ne nous fera aucun mal et il y aura forcément des manques de nuance. J’espère que ceci vous maintiendraéveillés.

Ce que je m’apprête à vous dire est principalement, mais pas exclusivement, basé sur une réelle reconsidérationde l’éducation et de la formation professionnelle en Afrique sub-saharienne, dans le contexte de cet effort récentdont vous avez entendu parler ce matin, et dans lequel nous, à l’OIT, avions le plaisir d’être partenaires, entre autres,de la Banque mondiale et de l’UNESCO.

I. Hypothèses / Présupposés

Ayant parlé de tout cela, j’aimerais commencer ensuggérant que nous nous entendions sur un certainnombre de points, sur lesquels nous n’avons pas besoind’être forcément d’accord. En d’autres termes,j’aimerais commencer en avançant qu’il existe certaineschoses au sujet desquelles je ne débattrai pas avec vousà ce stade. Je les mentionnerai simplement comme sielles constituaient des axiomes.

L’Afrique ne va pas bien. Elle continue d’affronterun grand nombre de problèmes de développementcomplexes et souvent liés. La pauvreté est généralisée etceci est directement lié à ce que la plupart des gens fontpour gagner leur vie et à la façon dont ils le font. Dufait qu’il y ait beaucoup plus de personnes à la recherche

d’un emploi que d’emplois salariés, beaucoup depersonnes finissent par travailler indépendamment ausein de micro entreprise. En réalité, la majorité dela population active travaille dans ce qui estcommunément appelé « le secteur informel ». Le secteurinformel ou « économie informelle », y comprisl’agriculture de subsistance, va continuer pendantles années à venir. Elle existe depuis de nombreusesannées et elle ne disparaîtra pas de sitôt.Je considère en outre qu’il existe des raisonset des possibilités suffisantes pour améliorer lesconditions de ceux qui travaillent dans ce secteurinformel. Et la formation, finalement, peut représenterun outil efficace pour ce faire.

II. Utilité de la formation dans le secteur informel

a) La première question qui doit être poséelorsque nous disons « formation » est la suivante :« à l’attention de qui ? ». Visualisons, nommonset pointons du doigt les personnes à former.

b) Pourquoi devrions-nous former ces gens ? Pourquoila formation existe-t-elle en premier lieu commeoutil faisant partie de notre kit de développement ?

Je vais tenter d’avancer une certaine logique ici.

Les compétences que les hommes et les femmespossèdent, ont un impact, dans une plus large ou dansune moindre mesure, sur ce qu’ils font pour gagner leurvie. Nous sommes d’accord ?

Les compétences que les hommes et les femmespossèdent, ont un impact sur ce qu’ils produisent etcomment ils le produisent… de même que sur laquantité et la qualité de leurs produits. Nous sommesd’accord ?

Les compétences que les hommes et les femmespossèdent se traduisent en production et en revenus et

peuvent, de ce fait, jouer un rôle dans la lutte contre lapauvreté généralisée. Voyez-vous le lien ?

Les compétences que les hommes et les femmespossèdent se manifestent dans la productivité,l’innovation, la sécurité et la santé au travail et dans ladiversification des produits.

En d’autres termes, il apparaît que la formationou le développement des compétences, quel qu’en soitle nom, pourrait faire des merveilles pour les gens quitravaillent, y compris pour ceux qui travaillent dans lesecteur informel. En effet, à partir de l’observation dece qui se passe dans le secteur informel, il apparaît queles compétences utiles sont souvent rares. Laproductivité et la qualité sont typiquement faibles.L’innovation est limitée. Il semble que tout le mondeproduise la même chose. Il existe un grand nombre depratiques à risques et d’accidents et, en conséquence,les gens gagnent très peu d’argent.

Des études, bien qu’elles ne soient pas trèsnombreuses, révèlent nettement qu’un grand nombredes personnes qui travaillent dans ce secteur informel

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III. Négligence de cette formation par les gouvernementsmalgré son utilité avérée

Alors que certains efforts sont réalisés,aboutissant ça et là à des agendas de formationdifférents, on constate peu de signes d’une réalisationsérieuse, considérable, systématique et soutenue d’untel agenda. On en discute, mais rien n’est fait. Il existepeut-être quelques exceptions mais, dans l’ensemble, cen’est pas réalisé. La formation pour le travail dans lesecteur informel reste, en grande partie, un phénomènemarginal, offert, en particulier par différentes ONG, àun nombre restreint de bénéficiaires.

Un certain nombre de gouvernements que je suistout à fait prêt à citer, par exemple le Mali, mais il y en a d’autres en Afrique et dans d’autres parties du monde,qui n’étaient au début pas convaincus, semblentmaintenant avoir changé d’avis et pensent que c’est unebonne idée tant que quelqu’un d’autre s’en chargeet tant que les contributeurs règlent l’addition. Commeje l’ai dit auparavant, il existe des exceptions, maistrès peu.

Dans l’ensemble, ceux qui devraient s’enpréoccuper semblent avoir perdu de vue ce qui devaitêtre fait et avoir perdu de vue leur agenda. Voilà ce querenferme cet agenda perdu. Revenons au sous-titre decette conférence, pour ceux qui sont à la recherche dedéfis et d’opportunités, que dîtes-vous de plus deformation pour les femmes et les hommes quitravaillent dans le secteur informel ? N’est-ce pas undéfi évident, une opportunité évidente ?

Qu’avons-nous appris au sujet de la formationpour le travail dans le secteur informel ? Comme je l’aidit, certaines études ont été réalisées et nous avonsobservé les économies des pays en voie dedéveloppement pendant un certain temps. Nous avonsappris qu’il était important de disposer d’une éducationde base de bonne qualité pour tous ; c’est notre pointde départ. Nous avons aussi appris à quel point lesinstitutions d’éducation et de formationprofessionnelle formelles manquaient de pertinence etd’efficacité. Elles forment, elles continuent de former,et je vous prie par avance de m’excuser pour monmanque de nuance, elles continuent de former, dans denombreux pays, à des métiers qui n’existent pas.Et elles ne sont même pas bonnes à cela non plus.

Il apparaît que les gouvernements jouent un rôlerestreint en tant que fournisseurs de formation. Seul unnombre marginal de personnes est concerné parl’intervention du gouvernement. Alors, où ces gens dusecteur informel apprennent-ils leurs compétences ? Ilsne vendent pas seulement des cigarettes, une cigarette àla fois. Ils ne sont pas seulement des représentants decommerce. Ils sont producteurs de produits en bois ouen métal, de produits alimentaires, etc., et ils sontprestataires de toutes sortes de services. Oùapprennent-ils leurs compétences ? Ils apprennent leurscompétences de l’intérieur, sur le tas. La plupart dutemps il s’agit de jeunes qui deviennent des apprentistraditionnels. Je ne parle pas du type d’apprentissagequi a été apporté par la loi, je parle du typed’apprentissage traditionnel qui semble avoir toujoursété présent ici. Dans un pays tel que le Nigeria, nous neparlons pas seulement du quelque millier de personnesque le gouvernement peut prendre en charge dans lesinstitutions, nous parlons de centaines de milliers,peut-être même d’un million ou plus de jeunes qui sontformés à l’heure où nous parlons. Maintenant, vouspourriez me dire « il s’agit de travail d’enfants.C’est de l’exploitation et non de la formation ». Mais, etnous devrions aussi probablement demander à nosamis Nigérians ou Ouest Africains présents parmi nous,parce que c’est plus particulièrement le cas en Afriquede l’Ouest, je vous assure qu’il s’agit de formation etque ceci est perçu comme de la formation. Ce n’est pasdu travail d’enfants et les études le démontrent, parceque ceci intervient après l’éducation de base et les élèvesqui quittent l’école ont généralement 15 ans ou plus. Jene dis pas qu’il n’existe pas de travail d’enfants là-bas, jedis que les apprentis traditionnels en Afrique de l’Ouestont plus de 15 ans et généralement plus de 18 ans. Ilexiste des contrats, parfois des contrats écrits. C’est aufond une institution très formelle. La seule chose estque le gouvernement ne réussit à entrer nulle part.

souhaitent une formation d’un certain type ou d’unautre et, en outre, que beaucoup de gens sont désireuxet capables de payer pour cela. Subsistent ainsi peu debonnes raisons pour ne pas penser à la formation dansle secteur informel. Il convient donc d’agir en

conséquence. Il existe en effet peu de raisons valablespour ne pas penser aux gens qui travaillent dans lesecteur informel comme étant votre groupe cibleprioritaire, puisqu’ils représentent une majoritéparticulièrement importante.

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Un gouvernement pourrait vouloir entrer etc’est peut-être quelque chose que nous devrionsexaminer et dont nous devrions discuter. Laquestion, bien sûr, est que je ne pense pas que cesoit facile pour un gouvernement de prendre cecià sa charge simplement alors que nous parlons depeut-être plus d’un million de jeunes, formés parun système qui semble, en quelque sorte, produiredes compétences utiles. En effet, tous ces produitsdans le secteur informel ne sont pas inutiles ou depiètre qualité. Bien sûr que non ! Ils sont achetés etils sont utilisés et achetés à nouveau.

Il existe des fournisseurs de formation privésautres que les maîtres d’apprentissage et ils jouentleur rôle et sont importants, mais ils ont aussi leurslimites, limites dont nous avons déjà entenduparler. Comme je l’ai dit, il existe un besoin, mais ilexiste aussi une demande, et troisièmement,je dirais qu’il existe une possibilité de fournir descompétences aux gens qui travaillent dans lesecteur informel. Non, je n’ai pas parlé de la forma-tion au pré emploi ; je parle de la formation desgens qui travaillent.

IV. Éléments constitutifs d’un agenda approprié

Quels sont les éléments d’un agenda deformation alternatif ? Je suggérerais que nousremuions, que nous réorientions et que nousfaisions nôtre les systèmes ; que nous pensions à lesdéplacer, pas nécessairement de zéro à cent, maisplus près d’un côté ou plus près d’un autre ; quenous pensions à déplacer les systèmes de formationdans des pays dans lesquels beaucoup de personnestravaillent dans le secteur informel. En d’autrestermes, il faudrait éventuellement penser à passer :- de la préparation des jeunes à un emploi salarié à

la préparation à un travail indépendant,- d’un intérêt exclusif pour la formation de pré

emploi à la concentration sur une formationrésidentielle,

- d’une formation en institution à une formationen alternance,

- d’un apprentissage unique à un apprentissagetout au long de la vie. Oui, un apprentissage toutau long de la vie dans le secteur informel.

Il convient en effet ainsi de passer de systèmesétant au départ exclusifs et limités seulement à unepoignée à des systèmes accessibles à tous. Pour cefaire il faudrait que nous pensions égalementà passer :

- d’un système fondé sur la profession à un systèmefondé sur les problèmes,

- du seulement technique vers le global en termede problèmes que rencontrent les gens sur leurlieu de travail,

- d’un système dirigé par le formateur à un systèmedirigé par l’apprenti,

- d’un système longue durée à un système àcourt terme,

- de la formation théorique à la formationpratique.

- d’un système centralisé à un système collectif,- d’un système autonome à une partie d’un

ensemble plus vaste de mesures qui devront peut-être être prises, parmi lesquelles certaines ont déjàété mentionnées.

Nous parlons d’un type de formationcomplètement différent, pour une clientèle trèsdifférente et bien plus importante. Il s’agit en faitd’un changement de paradigme.

V. Causes éventuelles de l’absence d’élaboration de tels agendas

Alors, pourquoi ces agendas ne sont-ils pasréalisés ?

a) Le contexte n’est pas propiceGuerres, conflits, famine et autres raisons

contextuelles devraient être sérieusement pris encompte. Un gouvernement qui peut ne pas êtreintéressé par le développement humain, il en existe

peu, mais ils sont là ! Dit d’une autre façon, certainsgouvernements, comme le formule le PNUD,s’intéressent plus au développement humain qued’autres.

b) Une vision floue des réalités du marchédu travail

Je ne crois pas que l’on puisse attribuer cela

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au manque d’information concernant le marchédu travail, qui constitue pourtant un sérieuxproblème. Les gens connaissent leur marché dutravail, même sans toutes les statistiques et il sepeut qu’ils aient une image rose ou floue de cesréalités du marché du travail.

c) Une perspective minimaliste de la formationLes gens qui importent, croient que la

formation peut seulement faire beaucoup ets’adresse seulement aux gens qui finiront dans desentreprises multinationales en tant que techniciensde laboratoire, par exemple. Il y a aussi la perspec-tive minimaliste du rôle du gouvernement dans la

formation : « laissons le secteur privé s’occuper detout ». Je pense qu’il apparaît comme évident, àpartir de ce que je dis, que le gouvernement doit, àmon avis, jouer un rôle. Peut-être que l’agendan’est pas réalisé parce que les formateurs et autrespersonnes responsables ont une perception élitistedes besoins de la formation : « je ne vais pasformer ces artisans analphabètes avec leurs mainssales, dans le secteur informel ». Il existe unediscussion faite de « nous » et « d’eux », ce qui esttrès courant dans ce contexte. Le mépris pour lesecteur informel est présent, que nous le voulionsou non.

Conclusion

Bien sûr, l’agenda alternatif complet que je viens de vous proposer peut ne pas être bon, et vouspouvez faire des commentaires substantiels à ce sujet et dire que vous pensez que cela ne fonctionnerajamais. Ceci peut être une raison supplémentaire pour ne pas commencer sa réalisation ou pour ne pas luidonner une chance. Les rigidités de réorientation des systèmes actuels, du fait des contraintes des ressources,de la mauvaise répartition des ressources ou de la résistance au changement parmi les acteurs clés,constituent un autre problème.

Il existe probablement seulement quelques pays, et je ne veux offenser personne, où toutes ces raisonspour ne pas agir s’appliquent, mais il existe de nombreux exemples de gouvernements s’attaquant à de telsobstacles. Alors, si vous me le demandiez, je vous dirais que les gouvernements devraient être sérieux ausujet du développement et accepter le défi et utiliser chaque opportunité pour recentrer les systèmes deformation sur les gens qui travaillent dans le secteur informel.

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DÉBAT AVEC LA SALLE (3)1) Financement de la formation dans le secteur informel

2) Age requis pour entamer une formation professionnelle

3) Ne pas oublier la formation des patrons et des femmes

4) L’impact des syndicats professionnels

5) L’appui possible du secteur privé à la formationdans le secteur informel

6) A propos du secteur informel en Europe

7) Comment pousser les gouvernements à s’intéresser au secteur informel ?

8) Il ne faut pas oublier que le secteur informelest fortement hétérogène

9) Comment doivent se différencier l’enseignementtechnique et la formation professionnelle?

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2) Age requis pour entamer une formation professionnelle

Origine de la question non identifiée

Détail« Je voudrais simplement poser une question très courte.On a parlé des problèmes d’apprentissage, de formation,d’enseignement technique sans se préoccuper desproblèmes d’âge. Alors je voudrais demander notammentau représentant de l’OIT ce que l’on doit faire avec les

enfants qui sortent de l’école primaire : À quel âgecommence-t-on à s’intéresser à la formation ? Entre la sortiedu primaire et le moment où on pense qu’ils sont assez mûrspour pouvoir rentrer dans le système d’apprentissage on enfait quoi ? On les laisse dans la rue ? »

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1) Financement de la formation dans le secteur informel

Origine de la question non identifiée

Détail« Je tenais tout d’abord à remercier Monsieur Fluitmanpour son exposé. Je me demande si le secteur informelest prêt à assurer le financement des formations.Je ne pense pas que les stagiaires aient assez d’argentpour se les payer et en plus – et je parle ici de mon pays,

je ne sais pas si c’est le cas pour les autres – je n’aipas l’impression que les hommes d’affaires du secteurinformel soient disposés à prendre en charge laformation des travailleurs. »

Fred

Flu

itm

an

Réponse« C’est une question claire, et je vais m’efforcer de vousdonner une réponse claire. Je pense que si, ils le sont, et jevais citer deux exemples, mais pour un autre type deformation. NB : je fais allusion à la formation qui apportequelque chose, c’est-à-dire celle d’une personne sur lelieu de travail.

a) Supposez que vous vous présentiez à une personne surson lieu de travail comme un formateur et que vous luidisiez : « Pourquoi vous ne le faites pas de manièredifférente ? Vous pourriez couper votre bout de tissudifféremment et économiser du tissu : plus deproductivité, plus de revenus. Vous pourriez le couperde cette façon, ce qui vous éviterait de vous blesseraux doigts et de laisser des tâches de sang dessus, lerendant ainsi inutilisable ». Je ne parle pas ici depersonnes qui suivent des cours pendant deux ans, un anou même six mois. Ce dont je parle, c’est d’un paradigme

d’apprentissage très différent qui apporte aux gens lescompétences, qui instille des compétences. Les gens sontprêts à payer s’ils savent que cela va les aider.

b) L’apprentissage traditionnel, c’est la formationd’induction et cela concerne les jeunes gens qui débutent.De grosses sommes y sont consacrées en Afriqueoccidentale : des jeunes qui viennent de famillesdéfavorisées, qui paient en liquide, en nature et en gin(l’alcool) au début et à la fin de leur apprentissage.Il y a donc des preuves accablantes qui montrent bienque ce sont les pauvres qui paient pour être formés alorsque les moins pauvres reçoivent des bourses dugouvernement pour des formations qui n’aboutissentpas. C’est le monde à l’envers, comme on dit, mais peut-être pas dans votre pays. Nous avons ici surtout traité desréalités africaines, et malheureusement ce sont biencelles-là, les réalités. »

DÉBAT SÉANCE (3)

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Fred

Flu

itm

an

Réponse a« Premièrement, les enfants en Afrique commencentl’école assez tard. Ils sont beaucoup à y aller aujourd’hui,quoique tardivement. Or, un grand nombre d’entre euxquittent l’école car ils redoublent fréquemment entrequatorze et dix-sept ans. Pas forcément dans les pays quevous connaissez, mais au cours des enquêtes effectuées,nous nous sommes aperçus que de toute façon, ceux quis’orientent vers un apprentissage traditionnel – et il estquestion ici d’institutions formelles, d’un engagementformel et non pas de cas exceptionnels – ne sont pas desenfants. Je suis le premier, en tant que représentant del’OIT, à protester contre le travail des enfants et c’est ceque je fais, ayant voyagé à d’autres endroits du globe oùla main d’œuvre enfantine est un problème bien plusgrave que le débat sur les différentes formesd’apprentissage, je pense ici à l’Asie méridionale. Mais enAfrique, le type d’apprentissage traditionnel auquel jefais référence et qui est très présent n’est pas un problèmede travail des enfants.

Et maintenant que faire des enfants qui traînent dans larue ? Je ne sais pas. Il s’agit de former des personnes, ycompris des jeunes gens, au travail de manière àaccroître leur productivité, leur garantir une plus grandesécurité et améliorer la qualité de leur produit.Je ne pense pas que cette politique active du marchéde l’emploi à laquelle vous pensez – la formationd’adolescents oisifs – s’avère très efficace. Je dirais que,si vous avez assez d’argent pour financer ce typede formation, alors vous devriez plutôt investir dansla qualité de l’éducation, pour que nos enfants puissentrester plus longtemps à l’école. L’enseignement estmoins cher que la formation, et ce que je propose pource groupe cible particulier est de se concentrer sur ceuxqui ont décidé de la voie dans laquelle ils vont s’engageret de l’endroit, de l’environnement dans lequel ilsdevront travailler. »

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Réponse b« Si vous me le permettez, j’aimerais rajouter une chose àcette réponse : je pense que la première option consiste àconsidérer a posteriori les études elles-mêmes, commentmaintenir les élèves à l’école plutôt que d’avoir à traiterdu problème une fois qu’ils l’ont quittée. Qu’est-ce quin’allait pas, pourquoi ne sont-ils pas à l’école ?

Deuxièmement, quelle place occupe l’enseignement nonformel ? Si le modèle du système de fournitured’éducation formelle ne fonctionne pas, quel est le rôlede l’éducation non formelle auprès des enfants ? On nepeut pas suivre une formation tout au long de la vie sansavoir les bases de la scolarisation précoce. Les donnéesnous montrent clairement que ceux qui ne commencentpas l’école très jeunes acquièrent moins de connaissancesdurant leur vie que les autres. Ainsi, si vous n’essayez pas

de résoudre le problème de l’enseignement, vous engagez en conséquence un coût sur toute la durée de vie. Vousdésirez sûrement parvenir à un système offrant lapossibilité de réintégrer le système scolaire lorsque vousêtes adulte ou d’autres mécanismes au travers desystèmes non formels afin que le choix que vous faites àun jeune âge ne vous condamne pas à une vie oùl’enseignement est exclu.

En ce qui concerne l’impact des programmes deformation sur les jeunes qui quittent prématurément lesystème éducatif, je vous conseillerais vivement de lesexaminer de près et de voir quels bienfaits ils procurentprécisément sur la vie et les revenus de ces individus. Jepense que vous seriez surpris de constater que les effetssont bien moindres que ce à quoi on s’attendrait. »

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Réponse c« Un complément de réponse par rapport à votreremarque. Je crois que ce qu’il faut peut-être rappelerégalement, c’est que dans un certain nombre deprogrammes d’appui à la formation dans le secteurinformel en direction des apprentis du secteur informel,ces programmes ne sont pas uniquement desprogrammes de nature professionnelle. C’est-à-direqu’ils passent par l’introduction d’une alternance, lesjeunes vont également passer des séquences de formationdans des centres, et ce temps est consacré aussi bien à des

contenus théoriques à caractère professionnel qu’à unrenforcement des compétences de base. Finalement ona ainsi à la fois un effet et une dimension de formationprofessionnelle et on a aussi, à travers ces programmes, etpar exemple le cas du Mali en offre une illustration, undéveloppement de l’enseignement général et desconnaissances de base de ces jeunes qui sont entrés dansle monde du travail très tôt. »

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4) L’impact des syndicats professionnels

Origine du commentaire non identifié

Détail« Je voulais apporter quelques contributions concernant lesdeux études qui ont été faites par le monsieur de la Banquemondiale (Arvil van Adams) et le monsieur de l’UNESCO(David Atchoarena.) Il s’agit, pour prendre une nouvelledimension, de la contribution des syndicats professionnels.Nous nous sommes rendu compte au Sénégal qu’il s’agissaitd’acteurs assez actifs pour être un réceptacle sur la formationprofessionnelle à l’intérieur de l’entreprise. La dimension

qu’ils apportent au processus est tellement importante qu’ilconvient aujourd’hui de les prendre en considération.

Autrement, cette formation professionnelle risque, quandelle est rejetée à l’intérieur de l’entreprise, de ne pas avoir unpoids assez important ; et ce d’autant plus que nous allonsvers un contenu du métier et que dans ce contenu du métiernous pensons qu’il y a quelque chose à élaborer. »

Origine du commentaire non identifié

Détail« Je voudrais raconter une anecdote par rapport à ladéclaration de monsieur Fluitman. Au Sénégal on a vécudes cas très intéressants. Le secteur informel représenteeffectivement aujourd’hui une tranche assez importanteet à un moment précis on a été interpellé au niveau dupatronat pour ce qu’on pouvait apporter dans le secteurde la réparation automobile, dans les ouvragesmétalliques, donc la soudure, et dans les réparationsd’électroménagers. Nous avons demandé par exempleà deux concessionnaires, tels que Renault et Citroënde voir ce qu’ils pouvaient faire. Après cinq ou six moisde discussions avec la coopération, ils ont mis

à la disposition des écoles de formation des véhiculesdidactiques. Il s’agissait de nouveaux modèles avec toutce qu’il y a comme gadgets ou comme innovationstechnologiques. Le secteur informel, qui aujourd’huireprésente peut-être plus de 70 % de l’intervention surles véhicules automobiles – tout le monde ne peut pasaller chez le concessionnaire pour réparer car cela coûtetrès cher, a ainsi pu se former. Il s’agissait donc d’uneexpérience intéressante pour les 2 parties. Ce fut le mêmecas avec Air Liquide et avec Samsung dans la réparationde l’électroménager. »

5) L’appui possible du secteur privé à la formation dans le secteur informel

6) A propos du secteur informel en Europe

Origine de la question non identifiée

Détail« Rapidement, une question à Fred. Je pense que lesecteur informel ne constitue pas seulement un souci

pour l’Afrique, il pose également problème en Europeavec le profil démographique qu’on y trouve. Je viens

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3) Ne pas oublier la formation des patrons et des femmes

Origine du commentaire non identifié

Détail« Il convient de ne pas négliger la formation des patrons.Il est possible que les programmes conçus pour lesapprentis traditionnels soient plus fructueux, et à monavis l’exemple du Togo nous montre que si vous donnezen même temps la possibilité aux patrons et aux maîtresd’être formés d’une manière ou d’une autre – peut-êtreque vous n’appelez pas cela formation – et d’acquérir

une nouvelle technologie, conception ou des nouvellestechniques, vous vous apercevrez que des projets réussispermettent d’instruire à la fois l’apprenti et le maître.Soit dit en passant, ce n’est pas seulement des jeuneshommes dont nous parlons, mais également desfemmes, dont un grand nombre suit un apprentissage.

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juste de rentrer d’une conférence en Sicile et il existe unsecteur non formel dans le sud de l’Italie. Mais est-ceque ce type de formation représente aussi un moyen deramener le secteur informel de l’économie vers le secteurformel ? Exclure les éléments dissuasifs pour que les entreprises puissent réellement augmenter leurproductivité en sous-traitant. Comme le disait un

Français par ici, « j’aimerais avoir une entreprise sansemployés, juste avec une bonne équipe de direction, uneimportante capitalisation et fonctionnant entièrementen sous-traitance. » On a besoin pour cela que lesentreprises informelles avancent dans le secteur formel.Est-ce réaliste ?

Origine de la question non identifiée

Détail« Je crois que la description de l’économie informelle quevous avez faite est très juste et s’applique aussi à ce quel’on appelle les pays à revenu intermédiaire et à la régionque je connais bien, au Moyen-Orient et en Afrique duNord. Toutefois, lorsque vous essayez d’appréhender lesraisons pour lesquelles ce changement n’a pas lieu,certaines questions sur l’économie politique sont trèsclaires. Ces personnes n’ont qu’un faible poids électoral,on ne tient pas compte de ce qu’ils ont à dire et il n’y aaucune incitation pour que les gouvernements amorcent ce changement. C’est un de mes arguments.

Le deuxième : les gouvernements ne peuvent toutsimplement pas, avec les instruments dont ils disposentà ce jour, pourvoir le type de formation dont noussommes en train de parler, par exemple apprendre à untailleur comment augmenter sa productivité. C’estquelque chose qui doit passer par la sous-traitance. Laquestion que je me pose est la suivante : qu’est-ce qui,à votre avis, peut décider les gouvernements à agir et àfaire les démarches nécessaires pour prendre en charge lesecteur informel ? »

7) Comment pousser les gouvernements à s’intéresser au secteur informel ?

Réponse« Je crois que nous ne parlons pas de la même chose.A mon avis, pour le secteur informel en Italie ou enEurope, on parle d’un processus « d’informalisation ».Peut-être que la flexibilisation du marché du travail estallée trop loin ou que le coût de la sécurité sociale esttrop élevé. On parle d’informalisation, d’économie clan-destine et je ne sais quoi d’autre. Dans le contexte del’Afrique, en Asie méridionale ou dans les pays indiens,

on évoque l’économie qui a toujours existé. Ce à quoivous faites allusion, c’est l’économie initiale, dontl’implant formel a été rejeté ou considéré comme ayantatteint ses limites. Dès lors, nous nous exprimons sur despoints de départ essentiellement différents, et en effetje ne pense pas que j’appliquerais le conseil que j’ai donnéau contexte italien. » Fr

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Réponse« C’est une question compliquée. C’est une questiond’équité, d’économie politique, absolument. Mais ce quipousserait les gouvernements à agir est le fait queces gouvernements sont en définitive constitués d’êtreshumains, de fonctionnaires qui ont des enfants, neveux,nièces ou parents dans ce même secteur informel. Je croisque ce qui les déciderait, ce serait notamment des projetsqui leur montreraient que les choses peuvent marcher.Par exemple, dans un cadre décentralisé, je pense qu’il fautpermettre aux directeurs d’organismes de formation

qui ne fonctionnent pas très bien d’ouvrir leur porteà de nouveaux clients, et, si cela marche, si cela permetd’apporter de nouvelles ressources à ces établissements àun niveau local, cela engendrera du mouvement. Destémoignages montrent que ce genre de procédé permetde servir de nouveaux clients. Mais je comprends toutà fait votre point de vue, il est tout d’abord essentiel quele gouvernement commence par joindre l’acte à la parolecar il a beau prôner l’équité, son argent finit toujoursautre part. »

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8) Il ne faut pas oublier que le secteur informel est fortement hétérogène

Origine du commentaire non identifié

Détail« Je souhaiterais intervenir en vue de nous aider àreconnaître que toutes les économies informelles, toutesles sociétés informelles, ne sont pas les mêmes. Encommençant à faire la différence analytique en se basantsur la taille de l’entreprise, on a ce qu’on pourrait appelerle secteur de subsistance : celles comptant généralementmoins de dix employés, souvent des travailleurs familiauxnon rémunérés, et dont un membre de la familleest propriétaire. Les chances d’expansion et de créationd’emploi à long terme sont beaucoup plus mincesdans ce type d’affaire – dans les faits, non pas sur desprésomptions de ma part – et se distinguent desentreprises qui à un moment donné parviennent à un

effectif de 10 à 50, voire une centaine d’employés. Si vousvoulez vraiment créer des emplois, si vous cherchez àatteindre un objectif de croissance dans l’économieinformelle, alors il vous faut faire la distinction entre lesfirmes de subsistance, qui relèvent principalement d’unequestion d’équité, de celles qui sont improductives carelles n’ont pas un accès adéquat à la technologie ou à uncapital suffisant ou à une assistance commerciale ouencore à des compétences. Il faut donc bien différencier, àl’intérieur de l’économie informelle, les entreprisespourvues des capacités nécessaires pour pouvoirs’agrandir de celles qui, au fond, subsistent. »

9) Comment doivent se différencier l’enseignement techniqueet la formation professionnelle?

Origine de la question non identifiée

Détail« Merci à vous, monsieur le Président, et aux membresd’honneur. Un grand merci également à Monsieur FredFluitman de l’OIT. J’ai trois questions à poser : Qui suivraune formation ? Pourquoi formons-nous les individus ?Et la formation, qu’est-ce que cela veut dire ? Ces troisquestions sont très importantes car la plupart des pays

font la confusion entre l’enseignement technique etles centres techniques et professionnels. Je veux savoiren sortant de cette conférence comment faire la différenceentre les centres d’enseignement technique et lescentres de formation professionnelle. Y a-t-il unerecommandation à l’issue de cette conférence ? »

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Séance 4 :OBJECTIFS DE L’ETFP

2E PARTIE

La dimension sociale de l’ETFP :les normes juridiques du Conseil de l’Europe

et son action en faveur des communautés Roms en EuropeM me Olöf Olafsdottir – Conseil de l’Europe

Les enjeux de la formationprofessionnelle agricole : exemple

de l’Afrique de l’Ouest francophoneM. Alain Maragnani – Ministère de l’Agriculture, France

Débat avec la salle

M’Bodji DIALLOPrésidente de séance

MALI

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Résumé

O. OLAFSDOTTIRChef du service de l’éducation

scolaire et extra-scolaireConseil de l’Europe

Il existe des normes au Conseil de l'Europe pour fairevaloir la dimension sociale de l’enseignement et de laformation technique et professionnelle (la CharteSociale européenne, les Recommandations du Comitédes ministres). L’action du Conseil de l’Europe dans

le domaine de l’ETFP en faveur de certains groupessociaux ou minorités tels que les communautés Romset Tsiganes en constitue d’ailleurs une illustrationprobante.

Mesdames, Messieurs,

C’est avec plaisir que je me trouve parmi vous aujourd’hui pour parler de la dimension sociale de la formationtechnique et professionnelle, en tant que représentante du Conseil de l’Europe. Je voudrais remercier les organisateursde m’avoir invitée à participer à cette conférence. Des contacts existent déjà entre le Conseil de l’Europe et la Banquemondiale au sujet des projets concernant les Roms/Tsiganes et notamment au sujet de la Décennie pour les Roms, quisera lancée en 2005.

Pour ceux et celles qui ne connaissent pas le Conseil de l’Europe, je voudrais rappeler qu’il s’agit d’une organisationpaneuropéenne fondée en 1949, dont le siège se trouve à Strasbourg. Elle rassemble aujourd’hui 45 Etats membres et800 millions d’Européens autour d’objectifs politiques communs, reposant sur les valeurs de la démocratie, des droitsde l’Homme et de l’Etat de droit.

Mon intervention sera marquée par le fait que j’ai longtemps travaillé à la Direction des Droits de l’Homme duConseil de l’Europe. Le droit à l’instruction figure dans le premier protocole (1952) à la Convention européenne desDroits de l’Homme (CEDH), et la Charte Sociale européenne garantit le droit à l’éducation et à la formationprofessionnelle.Il faut dire d’emblée que la question de la formation technique et professionnelle n’a pas été l’objet d’une attentionspéciale de la Direction de l’Education du Conseil de l’Europe où je travaille actuellement. Nos priorités sont desactivités à long terme concernant les politiques nationales générales en matière d’éducation, la formation desenseignants et l’éducation pour favoriser le plurilinguisme. Nous menons également des projets à plus court terme,comme l’éducation à la citoyenneté démocratique, l’éducation des enfants Roms/Tsiganes et l’enseignement del’histoire, y compris l’éducation interculturelle et le dialogue interreligieux pour favoriser la mémoire et lamultiperspectivité. Dans le domaine de l’éducation supérieure, la reconnaissance des qualifications universitaires est unsujet d’attention constante, tout comme la dimension sociale de l’éducation supérieure, comprenant la responsabilitépublique pour ce type d’éducation et la gouvernance démocratique des institutions éducatives.

Cependant, l’importance qu’accorde le Conseil de l’Europe dans son ensemble à la formation professionnelle apparaîtclairement à travers la jurisprudence du Comité européen des Droits sociaux, chargé de contrôler le respect des droitscontenus dans la Charte sociale européenne et la Charte sociale européenne révisée. Par ailleurs, l’action que mène leConseil de l’Europe en faveur des communautés Roms depuis une vingtaine d’années, place l’éducation et la formationprofessionnelle au premier rang. Ce sont ces deux sujets que je vais présenter ici.

La dimension sociale de l’ETFP : les normesjuridiques du Conseil de l’Europe et son action en

faveur des communautés Roms en Europe

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Le droit à la formation professionnelle estintimement lié au droit au travail, droit qui est sansaucun doute le plus fondamental de la Chartesociale européenne. La Charte est un instrumentcontraignant qui consacre un large éventail dedroits économiques et sociaux, elle complète laConvention européenne des Droits de l’Hommequi garantit des droits civils et politiques.

La Charte fut ouverte à la signature en 1961et elle est entrée en vigueur en 1965. Elle énoncedes droits et libertés et établit un système decontrôle. Le respect des engagements énoncés dansla Charte est par conséquent soumis au contrôle duComité européen des Droits sociaux, composé detreize membres indépendants. Ce Comité statue endroit sur la conformité ou non des situations natio-nales des Etats avec les dispositions qu’ils ontacceptées de la Charte ou de la Charte révisée, surla base de rapports nationaux, soumis à des inter-valles réguliers. Tous les Etats membres ont signé laCharte ou la Charte révisée et seul quelques uns nel’ont pas ratifiée.

La Charte a fait l’objet d’une révision récenteet la Charte sociale européenne révisée de 1996,entrée en vigueur en 1999, remplace progressive-ment le traité initial de 1961. Par ailleurs, un systè-me de réclamations collectives est entré en vigueuren 1998.

Les droits garantis par la Charte concernenttous les individus dans leur vie quotidienne. Ils’agit notamment du droit au logement, à la santé,à l’éducation, à l’emploi, à la protection sociale, et àla non-discrimination. Trois articles ont trait ànotre sujet : l’article 1, paragraphe 4 de la Chartedéfinit la formation professionnelle comme moyenpour garantir l’exercice effectif du droit au travail ;l’article 9 établit un droit à l’orientation profes-sionnelle, et l’article 10 un droit à la formationprofessionnelle. Il fut d’ailleurs la première disposi-tion d’un traité international à garantir le droit à laformation professionnelle.

Le Comité européen des Droits sociaux atoujours accordé une grande importance à laformation professionnelle. Il a estimé qu’elle étaitessentielle non seulement parce qu’elle permetd’intégrer les jeunes à la vie active et de mainteniret d’améliorer sans cesse les qualifications de l’en-semble de la main-d’œuvre, mais égalementparce qu’elle joue un rôle central à l’égard denombreux aspects du développement personnel et

de l’intégration sociale. Elle représente le lien leplus direct entre l’enseignement et le monde dutravail.

Cependant, le Comité est conscient que laformation professionnelle a tendance à échapper àune définition précise et universellementapplicable. Les traditions et les systèmes nationauxà l’égard de l’enseignement et, notamment, de laformation professionnelle sont très différents. Deplus, le Comité a souligné à plusieurs reprises que laformation professionnelle va au-delà de laformation initiale des jeunes qui leur permetd’acquérir une qualification professionnelle pourun métier particulier. Il s’agit également de laformation professionnelle « complémentaire » ou« continue » de travailleurs qui exercent déjà uneprofession, du recyclage de travailleurs qui ontbesoin d’une nouvelle activité, de la « formation dumarché du travail » pour la main-d’œuvre auchômage. Toutes ces questions se posent avec uneforce particulière lorsqu’on examine la situationdes Roms/Tsiganes dans les Etats membres.

Parmi les problèmes soulevés par le Comitéeuropéen des Droits sociaux par rapport à laformation professionnelle, les suivants peuvent êtresoulignés :

• Inégalité de traitement des étrangersressortissants des autres Parties contractantes parrapport à l’accès à la formation professionnelle etau droit à d’éventuelles mesures supplémentaires,telles que des allocations, des bourses ou des prêts.Dans certains Etats, des conditionsdiscriminatoires de durée de résidence oud’emploi ont été fortement critiquées par leComité ;

• Le manque d’information sur l’organisation géné-rale de la formation professionnelle, notammentl’existence d’un cadre législatif clair, le rôle respec-tivement joué par les établissements d’enseigne-ment technique et professionnel et les entreprises,les effectifs du personnel enseignant et des élèves,la répartition des efforts de formation entre lesdifférents secteurs de l’économie, la participationdes partenaires sociaux à la définition et au contrôledes politiques de formation professionnelle… ;

• Dans certains Etats, le manque de consultationdes organisations professionnelles d’employeurset de travailleurs dans l’élaboration et à la mise enœuvre de la formation professionnelle.

I. La Charte sociale européenne (révisée)

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Les conclusions du Comité européen des Droitssociaux au sujet des rapports nationaux donnentdes informations détaillées sur toutes ces questionset bien d’autres.

S’agissant du financement de la formationprofessionnelle, le Comité estime qu’il peut provenirdes sources publiques ou privées. Sans entrer dansle contenu didactique et pédagogique, le Comité aobservé que la « complémentarité de l’école et del’entreprise dans le processus de formation » estprimordiale.

En ce qui concerne les systèmes d’apprentis-sage, le Comité veille particulièrement à la possibi-lité pour les intéressés d’obtenir une place enapprentissage, la proportion de personnes – ycompris la proportion équilibrée ou non desgarçons et des filles – qui entrent en formation etqui achèvent leur apprentissage, et la couverturegéographique de ces systèmes.

Quant à la formation professionnelle desadultes, le Comité accorde une attentionparticulière aux mesures visant certains groupescibles, notamment les chômeurs de longue durée,les jeunes, les femmes et les travailleurs migrants.

Ce qu’il est important de noter, c’est que, pourle Comité des Droits sociaux, les services del’emploi, de l’orientation et de la formationprofessionnelle ne sont pas seulement des piliers dela politique dans son ensemble, mais créent aussides droits individuels qui doivent être garantisindépendamment de la situation de l’emploi.

Toutes les questions énumérées ci-dessus seposent avec une acuité encore plus importantelorsque l’on examine la situation des Roms/Tsiganesdans les Etats membres.

II. L’action du Conseil de l’Europe en faveur des Roms / Tsiganes

Développer une démarche européenne avecles Roms/Tsiganes, c’est en toute logique répondreau fait qu’ils forment en Europe la minorité la plusimportante en termes numériques, quelques10 millions. Leurs communautés sont présentesdans toute l’Europe. Le rejet, sous diverses formes,reste un élément dominant entre les Roms/Tsiganeset leur environnement immédiat. L’analphabétismeou le semi-analphabétisme est un lourd handicapqui maintient les Roms dans un cercle vicieux depauvreté et d’exclusion sociale.

Ces communautés sont confrontés à unesituation économique des plus difficiles dans laplupart des Etats membres du Conseil de l’Europeet, en particulier, dans les pays d’Europe centrale etorientale, où ils ont été parmi les plus touchés par latransition vers l’économie de marché. La situationde nombreuses communautés romani/tsiganes enEurope occidentale n’est cependant souvent guèremeilleure que dans les nouveaux Etats membres.

Parmi les multiples causes de cet état de faitsont la disparition des métiers traditionnels desRoms/Tsiganes suite à l’industrialisation et àl’urbanisation des sociétés européennes ; deslacunes profondes dans le domaine de l’éducationet de la formation professionnelle ; le manque dequalifications sur un marché de travail de plus enplus compétitif.

Il en résulte un taux de chômageextrêmement élevé parmi les communautésRoms/Tsiganes, dans certaines communautés, onatteint des taux de chômage records de 80-90 % dugroupe concerné ; les femmes et les jeunes sontparticulièrement touchés par le chômage. Une largeproportion des Roms/Tsiganes vit sous le seuil de lapauvreté et leur situation ne fait qu’empirer. Laspirale de l’exclusion et de la marginalisationaugmente, la perte des valeurs, le recours à la petitedélinquance pour survivre, la détérioration desrelations intercommunautaires. A long terme, celareprésente une menace pour la cohésion sociale desEtats membres. L’amélioration de leur situation,notamment en termes d’emploi, reste parconséquent un grand défi pour l’Europe dans sonensemble.

Depuis de nombreuses années, le Conseil del’Europe tente de trouver des solutions à cet état defait. L’Assemblée parlementaire (représentants desparlements nationaux) et le Comité des ministres(représentants des gouvernements) ont adoptéplusieurs textes contenant des propositions visant à remédier aux problèmes économiqueset d’emploi des Roms/Tsiganes. L’un des textesle plus importants est la Recommandation n°R(2000) 4 sur l’Education des enfants roms/tsiganes enEurope, qui souligne que l’égalité des chancesdans le domaine de l’éducation est une condition

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absolue pour remédier à la position défavorisée desRoms/Tsiganes.

Un projet visant à mettre en œuvre cetteRecommandation est actuellement en cours à laDirection de l’Education du Conseil de l’Europe. Sonobjectif n’est pas de se substituer aux Etats, mais destimuler les initiatives nationales, encourager lesmesures novatrices, coopérer avec les autresinstitutions internationales et les ONG actives dansle domaine.

Le Conseil de l’Europe a déjà une longueexpérience dans le travail sur et avec lescommunautés rom/tsiganes (premier séminaire deformation des enseignants organisé en 1983). Ils’agit, bien entendu, de favoriser l’accès à l’éducation,et en particulier à l’éducation secondaire etsupérieure, afin de permettre l’émergence d’unejeune génération de Roms/Tsiganes bien formés etcompétitifs sur le marché du travail. En parallèle, ilest nécessaire de favoriser l’accès des jeunesRoms/Tsiganes à la formation professionnelle et àl’apprentissage, dans des professions pour lesquellesil existe un marché localement. Des recueils debonnes pratiques seront publiés, ainsi que des guideset du matériel pédagogique pour les enseignants. Laformation professionnelle du personnel éducatif,initiale et continue, est essentielle dans ce projet. Ils’agit notamment de former des médiateurs et desformateurs roms, de leur donner une formationprofessionnelle qualifiante et reconnue, et de formerdes personnes à la démarche interculturelle. LeConseil de l’Europe poursuivra ce projet sans douteencore plusieurs années, mais nos moyens financierssont limités ; il est donc à espérer que les institutionscomme la Banque mondiale puissent nous soutenirdans notre action et l’amplifier. Pour toutes cesmesures, il est important de tenir compte de laculture des Roms dans les programmes scolaires,recruter du personnel dans les communautés roms,et adopter une approche novatrice de l’éducationpost-scolaire et de la formation professionnelle desadultes et pourquoi pas dans le secteur informel.

La multiplicité des causes de la marginalisationdes Roms/Tsiganes requiert évidemment de recher-cher des solutions complexes et d’agir en synergieentre toutes les parties concernées : administrationde l’Etat, autorités locales, entreprises, institutionsfinancières, ONG et syndicats. Des politiques globales innovatrices et proactives devraient êtreadoptées par les Etats membres.

Parmi les actions développées et les pistesélaborées dans de différents pays, les suivantespeuvent être cités :

• Offrir des cours d’alphabétisation ;

• Fournir une formation professionnelle initiale ouune nouvelle formation adaptée et offrant desdébouchés sur le marché du travail ;

• Relancer les métiers et qualifications traditionnellesdes Roms/Tsiganes dans la mesure où desdébouchés sur le marché existent ;

• Mettre sur pied un système d’écoles-ateliers et depépinières d’entreprises, dans lesquelles lespersonnes au chômage peuvent bénéficier d’uneformation dans un domaine particulier(apprentissage d’un métier, formation à la gestiond’entreprises, à l’étude du marché) tout enbénéficiant d’un petit soutien financier ;

• Opter pour des quotas ou places réservées pour lesminorités, et notamment les Roms/Tsiganes dansles établissements de formation professionnelle etdans les établissement d’enseignement supérieur ;

• Créer des systèmes de bourses pour jeunesRoms/Tsiganes afin de leur permettre d’entrer enformation professionnelle/apprentissage et/ouéducation supérieure ;

• Inciter les employeurs à employer des Romsnotamment en leur donnant des avantages ;

• Fournir des informations, une assistance et desconseils sur la formation professionnelle.

Un fonds européen (PAKIV) existe pour lesRoms pour développer les projets économiquesroms, incluant des projets générateurs de revenus etl’accès à la formation professionnelle. Par ailleurs,plusieurs séminaires régionaux de formation ont étéorganisées en Europe du sud-est, visant à mettre enplace un réseau régional pour les demandeursd’emploi et d’organiser des ateliers locaux deformation professionnelle. Enfin, la Banque deDéveloppement du Conseil de l’Europe considèrel’amélioration des conditions de vie de la minoritéRom comme une importante priorité et s’y investitpleinement. Mais le problème est tellement vaste quecela ne suffit absolument pas.

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Pour conclure, je voudrais souligner qu’enprenant l’exemple des Roms/Tsiganes, je suis certaineque nous sommes au cœur des questions politiques,sociales et culturelles fondamentales de l’Europeactuelle, et nous sommes au cœur de la mise en œuvredes instruments qui forment la base de la protectiondes droits de la personne humaine au Conseil del’Europe (Convention européenne des Droits del’Homme, Convention-cadre européenne pour laprotection des minorités nationales et la Charte socialeeuropéenne). Les organisations internationalesdoivent joindre leur forces pour enfin permettre auxRoms/Tsiganes d’accéder à leurs droits.

Ce n’est pas une question marginale pour despopulations trop souvent considérées commemarginales. Le travail pour et avec les Roms nouspermettra peut être à tous d’appréhender nosméthodes d’enseignement d’un point de vue différent

en alliant flexibilité et innovation. On a beaucoupparlé, au cours de cette conférence des réformesnécessaires pour la formation professionnelle. LeComité du pilotage du Projet Education des enfantsroms/tsiganes a souligné que l’éducation desRoms/Tsiganes doit être reconnue comme la sourced’un renouveau nécessaire dans le domaine del’Education, et qu’un renouvellement des approchespédagogiques, y compris dans le domaine de laformation professionnelle, peut et doit être un deseffets du Projet.

L’éducation et la formation des Roms/Tsiganesest un défi, mais sans doute aussi une opportunitépour l’avenir de l’Europe. Il dépend de nous devaloriser leur présence et de positiver l’existence de ces communautés, passer d’un « problèmed’intégration sociale » à un « modèle d’intégrationeuropéenne ».

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Les enjeux de la formationprofessionnelle agricole : exemple

de l’Afrique de l’Ouest francophone1

A. MaragnaniInspecteur de l’enseignement

agricole chargé de missionde coopération internationale

Ministère de l’Agriculture

Les évolutions du milieu rural des pays d’Afrique sub-saharienne n’ont jamais été aussi rapides : la très forte croissancedémographique de ces pays pose avec acuité les questions d’accès au foncier, d’augmentation de la productivité, dedurabilité des systèmes de production agricole et d’insertion professionnelle des nouvelles générations. A ces questionsdéjà difficiles à résoudre, s’ajoute une « mondialisation » économique qui déstabilise les marchés, les circuits économiqueset les sociétés rurales.

Quand les savoirs et les pratiques sont transmis quasi uniquement par apprentissage familial, ils évoluent lentementet deviennent rapidement obsolètes dans un contexte en mutation rapide. Pour gérer de façon autonome, pour décider etmettre en œuvre les évolutions qu’ils jugent nécessaires, il faut que les populations rurales aient à leur disposition les outilsqui leur permettent d’accéder à l’information et à l’analyse de leur situation. En conséquence, il faut aujourd’hui imaginertout à la fois des dispositifs d’alphabétisation de masse et de formation professionnelle des populations rurales dans uneexigence générale de coûts maîtrisés.

Dans un environnement devenu très instable, il faut trouver des solutions à des situations qu’aucune société rurale n’ajamais eu à résoudre dans un laps de temps aussi court, ce qui ne sera d’évidence possible qu’avec la décentralisationdes décisions, l’autonomie de gestion, la maîtrise par les populations rurales de leur propre développement en relationétroite avec des politiques nationales de développement rural et éducatives…

Résumé

Demeurés longtemps pertinents, les systèmes traditionnels de production agricole en Afrique de l’Ouestfrancophone manifestent aujourd’hui des signes d'obsolescence de plus en plus marqués avec la montée rapidedes densités de population consécutive, à la fois, à la croissance généralisée de la population (de 28 millions en1960 à 58 en 1990), à l’extension des bassins de concentration liée à l'urbanisation accélérée (de 12 % en 1960,à 32 % en 1990), à la raréfaction des zones de colonisation agraire (diminution des superficies disponibles,tensions socio-politiques et monétarisation du foncier).

Pour assurer le développement humain des Nations, notamment en Afrique de l’Ouest, l'éducationprofessionnelle de base constitue une nécessité pour accroître la production et la productivité en agriculture,si l'on ne veut pas voir croître le nombre des exclus et leur marginalisation dans une économie mondiale entransformation rapide. Si un effort rigoureux n'est pas accompli pour conjurer ce risque, certains pays, voirecertaines sous régions, seront en passe de constituer des poches de misère, de désespoir ou de violence que detoute évidence la seule assistance humanitaire ne saurait résorber.

1Cet article a été écrit avec Pierre DEBOUVRY et Martin WEISS. Il a été présenté au séminaire de l’UNESCO et de la FAO

« Education for rural people : targeting the poor » (Rome. 12/13 décembre 2002) et à la Conférence internationale du CIEP

sur « Les réformes de l’enseignement technique et de la formation professionnelle dans l’économie de la connaissance

– Défis et opportunités au niveau secondaire » (Paris. 16-18 décembre 2003).

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I. De nouveaux enjeux de développement agricole

En Afrique subsaharienne2, l’agriculture produitl’essentiel des denrées alimentaires consommées, ellereprésente 34 % du PIB et 40 % de la totalité desexportations de marchandises, elle est le principalemployeur de main d’œuvre (70 %) et donc unesource essentielle de revenus pour les populations.L’agriculture est aussi la principale source de matièrespremières pour l’industrie et le principal acheteurd’outils simples et de services (transports)…

Ces éléments soulignent, s’il en était besoin,l’importance de la définition de politiquesnationales agricoles dans ces pays.

Or, demeurés longtemps pertinents, les systèmestraditionnels de production agricole en Afrique del’Ouest francophone manifestent aujourd’hui dessignes d'obsolescence de plus en plus marqués avecla montée rapide des densités de populationconsécutive, à la fois à la croissance généralisée de lapopulation (de 28 millions en 1960 à 58 en 1990),l’extension des bassins de concentration liée àl'urbanisation accélérée (de 12 % en 1960, à 32 % en1990), la raréfaction des zones de colonisation agraire(diminution des superficies disponibles, tensionssocio-politiques et monétarisation du foncier). Enpleine transition démographique, la population del'Afrique de l'Ouest francophone va, selon toutevraisemblance, encore connaître de profondesévolutions dans les prochaines décennies (prévisiond’une population de 130 millions, urbanisée à 54 %en 2020). L’intensité et la durée des croissancesdémographique et urbaine de l’Afrique de l’Ouest en

fait une remarquable illustration des enjeux dusecteur agricole des pays en voie de développement.Avec une population qui aura, en moins de 70 ans(1930 / 2000) sextuplé et passé d’une urbanisation demoins de 5 % à près de 50 %, elle aussi connu deprofondes évolutions en termes de rapportscommunautés humaines / espaces, rapports entreruraux et urbains, ainsi qu’entre générationsinduisant de multiples enjeux.

Le développement agricole de l’Afrique del’Ouest doit faire face à des enjeux majeurs, enjeux àpartir desquels doit se poser la question du rôle desformations professionnelles agricoles.

1. Premier enjeu : la productivité des sols.Avec l’augmentation des densités rurales, les

jachères naturelles de longue durée, qui étaient labase traditionnelle de la gestion de la fertilité des sols,ne sont plus praticables et les parcelles cultivées sontde plus en plus contiguës. Il en résulte unappauvrissement des sols et un risque accrud’infestation des cultures par des parasites générantune tendance à la baisse des rendements.

Par exemple, au Burkina-Faso, la populationdouble quasiment tous les trente ans, passant de2 800 000 personnes en 1960 à 8 680 000 en 1990.Les projections prévoient 16 330 000 d’habitants en2020. La densité de population en milieu rural estpassée dans le même temps de 13.8 hbts/km2 à 33.7.Elle sera de 47.3 en 2020.

Dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest,les systèmes d’enseignement technique agricole misen place après les indépendances pour former lescadres du développement agricole sont en criseprofonde. Ces dernières années, de nouveauxacteurs de la formation sont apparus en milieurural, ONG, organisations paysannes ouvillageoises, organismes privés, mettant en œuvrede nouveaux dispositifs de formation bien insérésdans le milieu local, mais ceux-ci sont souventatomisées et peu ou pas intégrés dans des politiquesnationales.

Une réflexion sur la place, le rôle, l’organisationdes dispositifs de formation en milieu rural apparaîtaujourd’hui indispensable à un moment où lesorganismes internationaux réaffirment l’exigencede ressources humaines compétentes, pérennes,bien organisées et bien équipées tant au niveaupublic que privé et professionnel. Une analyse desenjeux du développement rural est indispensablepour déterminer des axes de développement desformations professionnelles agricoles.

2 FAO. 21ème Conférence régionale pour l’Afrique. « Aide publique et développement agricole en Afrique ». Yaoundé.

21-25 février 2000.

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2. Deuxième enjeu : la productivité du travailagricole.

La croissance urbaine se traduit par une évolutiondu ratio population urbaine / population rurale. Dansle cas du Burkina-Faso, la population urbaine a connula progression suivante : 55 000 (1930), 526 000(1960), 1 952 000 (1990), 6 900 000 (prévision 2020)correspondant à une évolution du ratio urbain / ruralde 1/50 à 1/ 2,4 ! L’urbanisation accélérée, lastagnation de l’agriculture et la mondialisation deséchanges se traduisent par une forte poussée desimportations céréalières. Au Burkina-Faso elles ontconnu, selon la FAO, l’évolution suivante : 9 503 T(1961), 104 086 T ( 1990), 202 113 T (1998).

Face aux perspectives de croissance despopulations urbaines et d’évolution du ratio urbain /rural, il conviendrait, si l’on veut maintenir le niveaud’autosuffisance alimentaire initial, que l’excédentmoyen commercialisé par chaque producteuragricole s’accroisse de manière significative(doublement ou triplement) dans les vingtprochaines années.

3. Troisième enjeu : la productivité du capitalen agriculture.

L’accroissement de la productivité du sol et dutravail nécessite un recours accru à l'outillage agricoleet au cheptel. Ces deux éléments du capitald’exploitation ne se développeront que s’ilspermettent, en termes d’avantages comparatifs, unerentabilité minimale vis à vis d’un investissement ensecteur urbain.

La productivité du capital en agriculture pose laquestion de la capacité des producteurs à défendreleurs intérêts au travers de leurs organisationsprofessionnelles aujourd’hui émergentes.

4. Quatrième enjeu : la maîtrise de la gestionde l’espace rural.

La non-reconstitution de la flore et de la faune parle raccourcissement des temps de jachère entraîneégalement des phénomènes érosifs et unappauvrissement général de la biodiversité. Cesphénomènes peuvent être accentués par un recours,sans précaution, à la mécanisation requerrantl’essouchement des parcelles cultivées et à des

produits chimiques (engrais, pesticides, etc…)pouvant être polluants.

Pratiques culturales inadaptées au nouveaucontexte et mouvements de populations génèrentun phénomène visible d’anthropisation de l’espacepar la destruction massive et incontrôlée de sesressources naturelles.

Ce phénomène s'accompagne de profondestransformations en matière de gestion du foncieragricole. De communautaire non aliénable le foncierévolue très rapidement, par sa parcellisation et saprivatisation, vers un marché pouvant générer des« paysans sans terre ». La plupart des États conscientsde cette situation de transition sont en traind'élaborer une nouvelle législation foncière. Il estimportant que la profession participe à ce travaild'élaboration d'un nouveau droit foncier laconcernant directement.

5. Cinquième enjeu : l’insertion professionnelledes nouvelles générations.

Directement liée à la forte pousséedémographique de ses quarante dernières années, laforte proportion de jeunes (50 % de moins de 17 ans)induit la question de leur insertion professionnelle.Sachant que le secteur rural représente de 60 à 90 %des emplois et auto emplois selon les pays, une bonnepartie de la cohorte des 19-24 ans, dont les effectifsdoubleront dans les 20/25 prochaines années, devras’installer en milieu rural.

6. Sixième enjeu : l’accès aux marchésinternationaux.

Une partie importante des économies agricolesdes pays d’Afrique de l’Ouest est largement inséréedans les échanges internationaux, celle des culturesde rente développées avec la colonisation. EnAfrique subsaharienne 70 % des recettesd’exportation de produits agricoles et alimentairesproviennent de 9 produits (café, cacao, banane,arachide, coton, caoutchouc, thé, sucre et tabac)3.Or « le marché mondial ne fonctionne pas de façonlibérale loyale »4 avec les restrictions d’accès auxmarchés des pays développés (barrières nontarifaires), le subventionnement par ces derniersdes exportations de leurs produits agricoles etalimentaires.

3 Haut Conseil de la Coopération Internationale. « Les priorités de la coopération pour l’Afrique subsaharienne

et le Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique (NEPAD) ». Rapport. Avril 2002.4 Idem.

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Les systèmes de formation, mis en place aulendemain des indépendances, ont privilégié lesformations longues, diplômantes, orientées vers lesecteur « moderne » (secteur d’Etat et des grandesentreprises publiques ou para publiques), afin deformer les personnels nécessaires à la création del’appareil d’Etat ainsi qu’à l’encadrement descultures de rente pour développer les exportations.

La crise des années quatre vingt dix, a entraînél’arrêt des recrutements dans la fonction publique,et a profondément perturbé le fonctionnement del’enseignement agricole dont les débouchés étaientquasi exclusivement orientés vers ce secteur : arrêtou diminution des recrutements d’élèves, déflationdu corps enseignant, absence de rénovation desprogrammes, infrastructures et équipements envoie de délabrement, absence de relations avec lademande et la recherche agronomique... en fait ils’agit généralement d’une crise d’inadaptation deces systèmes aux enjeux actuels du développementrural des pays d’Afrique de l’Ouest.

Aujourd'hui l'enseignement supérieuragronomique, pour répondre aux délicats besoinsd'insertion des nouveaux bacheliers, agénéralement retrouvé ses flux d'antan, voire plus.L'enseignement technique agricole tente, avec plus

ou moins de succès selon les pays, de se reconvertirdans la formation des producteurs mais se heurte àdes contenus d'enseignement et des méthodespédagogiques inadaptés. Quant à la formationprofessionnelle de base, elle a tout simplementdisparu, ou quasiment ; elle doit être refondée aussibien en termes de programmes (objectifs,contenus, volume, durée et articulations avec lessavoirs locaux) que de dispositifs (niveaux,modalités de fonctionnement, situationsd’apprentissage, moyens) capables d’atteindre unemasse critique dans un public disparate.

Ces dix dernières années, de nouveaux acteursde la formation sont certes apparus en milieu rural(ONG, organisations paysannes ou villageoises,organismes privés…) mettant en œuvre denouveaux dispositifs de formation : formationprofessionnelle continue des producteurs, desresponsables de groupements de commercialisa-tion, de crédit, appui à l’installation des jeunes…Si ces nouveaux dispositifs de formation sontgénéralement caractérisés par l’importance de leurinsertion dans le milieu local et l’utilisation deméthodes d’éducation actives et participatives tellela formation par alternance, cette recherched’adaptation aux enjeux du développement ruralse heurte néanmoins à certaines limites :

Face à la volatilité des prix de leurs produits, àl’irrégularité des achats, les producteurs etproductrices, s’interrogent et cherchent, parfoisdésespérément, des solutions 5.

L’augmentation constante des importationsalimentaires, notamment céréalières, concurrencedangereusement les produits locaux et obère lesperspectives de développement des exportationsagricoles. Il est important que la profession participeà l'élaboration de ces stratégies d’importations et aucontrôle des quantités effectivement importées.

La spécificité de l’histoire agraire africaine,induite par les dynamiques de ses histoiresdémographique, urbaine et coloniale, réside dansl’accumulation des enjeux à relever sur une périodehistorique très courte.

Directement liées aux évolutions démographiqueset à l’extension du système marchand, les conditionsd'exercice du métier d'agriculteur changeront de plusen plus rapidement au cours des trente prochainesannées. Ces profondes transformations seront, selontoute vraisemblance, trop rapides pour les rythmesd'auto-adaptation des savoirs des agriculteurs etagricultrices fondés sur des démarchesexpérimentales empiriques. Leur cadence deproduction de nouveaux « savoirs, savoir-faire, savoirêtre » n'est pas suffisante, d'autant plus que la grandemajorité d'entre eux est analphabète, pour répondredans les délais aux différents enjeux évoqués.

Il leur faut nécessairement un apport deconnaissances complémentaires pour leur permettre,notamment aux nouvelles générations, de suivrele rythme imposé par les évolutions en cours.

II. Des formations qui ne répondent pas aux enjeux actuelsdu développement agricole

5 Lors d’un atelier d’analyse des besoins de formation, à Bouaflé (Côte d’Ivoire), un thème revenait comme un leitmotiv

dans les différents groupes d’acteurs : « Peut-on avoir des explications sur la sécurité des débouchés? ».

INFPA/CNEARC/ENESAD/ENFA/ANADER. « Projet d’appui à la Valorisation des Ressources Humaines du Secteur

Agricole – Atelier de Bouaflé – 7/9 juillet 1999 ».

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Les contradictions mises en évidence entre lesenjeux du développement agricole et les dispositifsactuels de formation induisent un certain nombred’orientations :

1. L’exigence d’une formation de base de qualitéassurant l’alphabétisation du plus grand nombre.L’éducation de base est un droit mais aussi unecondition de la croissance agricole comme dudéveloppement des espaces, des individus et dessociétés qui constituent le monde rural à conditionqu'elle atteigne une masse critique.

2. La mise en place de dispositifs de formationextrêmement diversifiés pour répondre tout à la foisà l’exigence d’une formation de masse pour despublics alphabétisés ou non, extrêmementhétérogènes (agriculteurs et agricultrices, jeunesadultes, agents de développement), selon desmodalités adaptées à chacun de ces publics et auxsituations locales particulières (apprentissage,formation technique, formation professionnellecontinue, formation alternée...).

3. Compte tenu de l'ampleur des questions àrésoudre (diversité des publics, formation de masse,adaptation des formations aux conditions locales,gestion prévisionnelle rigoureuse des ressourceshumaines et des fonds publics, coûts maîtrisés...)seules des interventions d'origines diversifiéessemblent aujourd'hui susceptibles de répondre à cedéfi : interventions de l'Etat, d'organisations nongouvernementales, d'associations de parents, degroupements de base, d'organismes professionnels...

4. Dans un contexte d'extrême difficulté à mobiliser lesressources financières, il n'est pas envisageable de

mettre en place un dispositif « classique »d'enseignement technique agricole. Si un certainnombre de « centres » peuvent être réhabilités pour unpublic restreint (conseillers agricoles, techniciensd’organisations professionnelles, d’entreprises) pour lagrande majorité des nouvelles générations il faudraimaginer de compléter l'œuvre éducative, entreprisedans la famille, le milieu social et éventuellement l'écoleprimaire, en offrant, notamment aux jeunes en coursd'installation, des possibilités d'accès à desconnaissances qui viendront compléter les acquis del'apprentissage familial et social et leur permettront deconstruire les nouveaux savoirs et pratiques y afférents.

5. Avec la multiplication des organismes deformation, des intervenants, comme des formesd'intervention, se pose le problème de la cohérenceglobale du dispositif de formation agricole. Le rôlede la puissance publique est d’assurer cettecohérence par la définition des orientations généralesde la politique éducative, la garantie de l'accessibilitéau savoir pour tous, l’agrément des organismes deformation et des cursus, l’évaluation de la qualité desformations dispensées et la collation des diplômes.

6. Il est également indispensable de redéfinir lesobjectifs et les contenus des programmes.Déterminés pour la formation des cadres de l'Etat,construits par juxtaposition de disciplinesscientifiques, ils ne correspondent pas à l'exercice desmétiers et activités professionnelles qui impliquentune approche transversale et intégrée des différentschamps disciplinaires.

7. Il faut repenser les méthodes pédagogiques, cardans un cadre de publics hétérogènes, d’opérateursmultiples et d’adaptation aux métiers, il serait

• L’insuffisance de l’éducation de base quiconditionne à la fois la formation professionnelledes agriculteurs et leur capacité à gérer lesresponsabilités et les activités économiques etsocio-politiques transférées ;

• La mise en œuvre d’actions restreintes pour despublics « ciblés » (responsables de groupementspaysans, jeunes « déscolarisés » de retour auvillage, conseillers…) qui s'intègrent difficilementdans les dispositifs de formation « de masse » despolitiques agricoles ;

• L'absence de coordination de ces actions dans lecadre d’une politique agricole nationale,l’insuffisance de capitalisation, la faiblesse de

l'évaluation globale des actions ; Pour assurer ledéveloppement humain des Nations, notammenten Afrique de l’Ouest, l'éducation professionnellede base constitue une nécessité si l'on ne veut pasvoir croître le nombre des exclus et leurmarginalisation dans une économie mondiale entransformation rapide. Si un effort rigoureux n'estpas accompli pour conjurer ce risque, certainspays, voire certaines sous régions, seront en passede constituer des poches de misère, de désespoirou de violence que de toute évidence la seuleassistance humanitaire ne saurait résorber.

III. Quelles orientations pour l’avenir ?

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absurde de prôner une pédagogie unique. Lesméthodes pédagogiques doivent, à chaque fois, êtreadaptées à des publics différenciés, à des objectifsprofessionnels, à des situations d’apprentissagediversifiées, à des moyens et des supports permettantd’atteindre les plus larges publics.

8. Enfin, ces dispositifs de formation professionnellene sauraient bien évidemment se réduire aux seulesformations « agricoles », même si la majeure partiede la population du milieu rural est composée deproducteurs et productrices agricoles. Trois élémentscomplémentaires sont à prendre en compte :

• En Afrique de l’Ouest, il n’existe pas de « frontière »stricte entre production agricole, transformation etcommercialisation des produits agricoles etalimentaires, mais aussi avec l’artisanat local et les

services… La survie de l’ensemble d’une unitéfamiliale repose sur une diversité et unecomplémentarité d’activités diversifiées.

• Le développement du secteur agricole ne peuts’effectuer qu’en parallèle avec le développementdes activités d’aval et d’amont (fournitures,stockage, transformation, distribution…), commede l’ensemble des services (santé, éducation,commerce, transport, artisanat…) qui participentau maintien de la population en zone rurale.

• Enfin, il faut préparer l’ensemble des populationsrurales à être les acteurs de leur développement, àprendre en charge leur avenir, et à se constituer enpartenaires et interlocuteurs des différents agentséconomiques et des représentants de l’Etat.

Autres informations. Documents sur le thème de l’exposé :AGRIDOC n°3. Juin 2002. « Les formations professionnelles rurales » http://www.agridoc.com/resdoc/revuethem/revue_3.htm AGROPOLIS.Articles, études de cas, conférences… sur le site : http://www.agropolis.fr/formation/biblio.Debouvrry, P, Granie,.AM, Maragnani,.A, Metge, J. 2003. « Formations rurales à l’international : Méthodes et outils ». Educagri Editions.FAO. « Education for rural people: Targeting the poor » Informations sur le site http://www.rdfs.net/news/news/0302ne/0302ne_unesco_en.htm Maragnani,A.(sous la direction de).2000.« Ingénierie des dispositifs de formation à l’international – Quelle démarche ? Quelle organisation? Quelle offre ? ». Educagri Editions.

Références

• DEBOUVRY Pierre, MARAGNANI Alain. « En France,

quelles expériences et quelles réflexions sur les dispositifs de formation en milieu rural a l'international ? ». FAO. 2001. :

http://www.fao.org/sd/2001/KN0301_fr.htm.

• DEBOUVRY.Pierre. « Enjeux et contraintes de la formation professionnelle agricole en Afrique de l’Ouest francophone à

l’horizon 2025 ». AGRIDOC n°3. Juin 2002.

http://www.agridoc.com/resdoc/revuethem/revue_3.htm

• DESCOMBES.Alain, MARAGNANI.Alain, MARTIN.Gilles.

« De l’enseignement technique agricole aux formations professionnelles rurales : exemple de l’Afrique de l’Ouest ».

AGRIDOC n°3. Juin 2002.

http://www.agridoc.com/resdoc/revuethem/revue_3.htm

• FAULIAU Christian. « La formation agricole en Afrique de l’Ouest et Centrale : un oubli inquiétant d’un enjeu majeur ».

AGRIDOC n°3. Juin 2002.

http://www.agridoc.com/resdoc/revuethem/revue_3.htm

• FAO. « Difficultés et chances de l’enseignement et de la formation agricoles pour la décennie 1990 et au delà ». 1997.

http://www.fao.org/sd/Frdirect/Exref003.htm.

• FAO. « Issues and opportunities for agricultural education and training in the 1990s and beyond ». 1997.

http://www.fao.org/sd/Frdirect/Exref003.htm.

• GASPERINI Lavinia. « From agricultural education to education for rural development and food security: All for

education and food for all ». FAO.

http://www.fao.org/sd/EXdirect/EXre0028.htm.

• WEISS.Martin. « Appui méthodologique à la création d’un dispositif de formation professionnelle pour des activités

émergentes en Amazonie Brésilienne ». AGRIDOC n°3. Juin 2002.

http://www.agridoc.com/resdoc/revuethem/revue_3.htm

La question du développement rural et de la sécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest doit donc seraisonner en tenant compte tout à la fois :• De l’importance du secteur agricole dans les enjeux nationaux de développement,• Du rôle de la formation agricole dans les politiques agricoles nationales ;• Des spécificités et des complémentarités entre les différents dispositifs de formation en milieu rural

(éducation de base, secondaire générale et technique, supérieure, formation professionnelle continue…).

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DÉBAT AVEC LA SALLE (4)Questions à l’attention d’Olöf Olafsdottir du Conseil de l’Europe

1) L’éducation des nomades

2) Problèmes d’identification et de classification des emplois

Questions à l’attention d’Alain Maragnanidu ministère français de l’Agriculture1) De quel ministère doit dépendre l’enseignement agricole?

2) Faut-il davantage prioriser la formation agricole initialeou continue ?

3) Malgré l’exode rural, il ne faut pas négliger l’enseignementagricole en Afrique

4) Où est passé le poids politique du monde rural ?

5) Existe-t-il en Afrique des associations de producteurspour l’enseignement agricole ?

Questions / commentaires à l’attentiondes deux intervenants de la séance1) Concernant les droits de l’enfant…

2) Concernant la lutte contre la pauvreté,la combinaison alphabétisation / formation professionnelleet le travail des enfants

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1) L’éducation des nomades

2) Problèmes d’identification et de classification des emplois

Origine de la question

Nuru Alhaji YAKUBU du NigériaSecrétaire général du Conseil national de l’enseignementtechnique. Ministère de l’Education.

Détail« Ma question touche au thème des tsiganes et à un autreterme qui est nouveau pour moi, les Roms en Europe. Jesuis originaire du Nigeria. Il existe un groupe auxcaractéristiques semblables qu’on appelle les nomadeset les pêcheurs migrants. Voici ce que nous avons fait :une commission établie dans notre pays, la Commissionnationale pour l'éducation des nomades, gère leurformation dans tout le pays. Mais le vrai problème estle suivant (et j’aimerais savoir si le Conseil de l’Europe pense la même chose) : par la nature même de leur vocation,

ils se déplacent d’un point à un autre et il est extrêmementdifficile de suivre l’éducation des enfants en particulier.Ils s’occupent du bétail et sont en mouvement. Pendant lasaison des pluies, ils vont vers le nord du pays ; et quandarrive la saison sèche, ils émigrent massivement vers le sud.Je me demande si vous auriez éventuellement mis en placecertaines expérimentations pour lesquelles vous auriez puvous assurer que les enfants continuaient à suivre unenseignement régulier. »

Origine de la question

Cameroun / Intervenant non identifié

Détail« Cette question s’adresse à la personne qui a parlé de ladimension sociale de l'emploi. C'est une bonneintervention qui nous a permis de comprendre que ledroit à l'emploi est soutenu d'abord par un droit à laformation professionnelle. Dans nos pays, il y a unedifficulté, il y a évidemment un problème d'informationentre l'entreprise et les centres de formation d'unepart ; mais de manière plus globale il y a un problème

d'information sur le marché de l'emploi. Nous avonsdonc des problèmes d'identification du marché del'emploi, et de classification même des emplois. C'estpourquoi à ce niveau nous souhaitons, et c'est l'une desattentes de notre participation à cette conférence, qu'onpuisse nous accompagner dans l'identification et laclassification des emplois pour pouvoir harmoniser laformation et l'emploi. »

Après réponse« Vous demandiez si nous avions en Europe unecommission ou un autre organisme pour l’éducation desnomades car vous aviez le même problème avec le peuplenomade. Il est entièrement vrai que le plus gros problèmequant à l’éducation des Roms est bien sûr le fait qu’ilssoient en mouvement constant. C’est le cas en Europeoccidentale ; en Europe de l’est, ils restaient autrefois aumême endroit mais ils se déplacent maintenant à causede l’ouverture sur l’ouest après la chute du mur de Berlin.Même s’ils étaient pour la plupart sédentaires avant cette

période, leur éducation posait déjà problème ; ce n’estdonc pas aussi simple qu’il le paraît, et maintenant ils nepeuvent pas rester à un endroit fixe car ils n’ont pas detravail. Ils essaient de trouver de quoi vivre du côtéouest de l’Europe. Ce que j’essayais de dire, c’est queje pense que lorsque l’on traite de l’éducation oude l’alphabétisation de ces personnes, il nous fautfaire preuve d’une innovation et d’une flexibilitéconsidérables. Des expériences très intéressantes ont étévécues, en France aussi je crois, quoique je n’en sois pas

Questions à l’attention d’Olöf Olafsdottir du Conseil de l’Europe

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DÉBAT SÉANCE (4)

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absolument certaine, où les professeurs s’établissaientdans les zones où les Roms s’arrêtaient et éduquaientleurs enfants. Cela peut être une possibilité. Il estimportant de respecter leur mode de vie et leur culture.Si vous ne faites que les pousser à y renoncer : « vousdevez devenir un peuple sédentaire et faire ce que nousvous dirons de faire », ça ne marchera pas. Nous devonsrester flexibles et ouverts. Je voudrais juste rajouter,puisque vous parliez des commissions qui existent enEurope, qu’elles sont légèrement différentes, mais quebeaucoup d’efforts sont faits par certains Etats membrestels que la Roumanie et la Hongrie. Ces deux paysconnaissent énormément de problèmes avec le peupleRom et font vraiment beaucoup d’efforts pour leur

fournir une éducation et les aider à entrer dans la vieactive.Cela pourrait être un bon exemple pour vous et unmodèle intéressant.

Maintenant, je ne sais pas si c'était véritablement unequestion, je crois que c'était une suggestion à laformation professionnelle. Le fait qu'on est pas vraimentinformé sur ce qui existe a été évoqué. Je vous ai dit quele droit d'être informé et orienté était aussi un fait eteffectivement je pense que dans beaucoup de pays il y ades lacunes à ce propos. Il faudrait peut-être insisterbeaucoup plus sur ce sujet. Comment peut-on établir unvéritable système d'information sur ce qui existe ? » O

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Questions à l’attention d’Alain Maragnani du ministère français de l’Agriculture

1) De quel ministère doit dépendre l’enseignement agricole?

Origine de la question a

David Fretwell de la Banque mondialeLead employment and training specialist

Détail« Tout d’abord, je suis ravi que vous fassiez partie de ceprogramme car, souvent, les besoins de la formationagricole sont négligés, considérés comme différents,l’agriculture étant traitée, pour les raisons que vous avezcitées, comme l’un des secteurs économiques demoindre importance. L’un des motifs, bien sûr, est queles autorités en principe responsables de l’éducation etde la formation ne prennent pas de mesures concernant

la formation agricole, c’est une sorte de « chasse gardée »comme on dit en France, notamment par le ministèrede l’Agriculture. Est-ce une mauvaise chose, etpensez-vous, par conséquent, qu’il serait peut-êtrepréférable d’éliminer la discrimination en confiantla formation – y compris agricole – à une seule autoritéà l’échelle nationale ? »

Origine de la question b

Nuru Alhaji YAKUBU du NigériaSecrétaire Général du Conseil national de l’enseignementtechnique. Ministère de l’Education.

Détail« Nous souffrons du même problème que celui qui a étésoulevé par le précédent intervenant. La formationagricole dans ce domaine n’est pas considérée commeune vocation vu que presque tout le monde y travaille :75 % de nos citoyens prennent part à l’agriculture d’unemanière ou d’une autre. Le problème est que laformation agricole est administrée par le ministèrede l’Agriculture alors que la formation d’enseignementtechnique et professionnel dépend du ministère de

l’Éducation. Même si nous disposons d’une agence – pourlaquelle je travaille – chargée d’élaborer le cursus et laformation…c’est vrai que personne ne la considèrecomme faisant partie de l’éducation technique etprofessionnelle. Que faut-il faire ? Nous essayons d’agirsur plusieurs fronts afin que cette formation bénéficiedu même traitement que les autres. Cela dit, dans lesfaits, peu de choses sont réalisées dans ce sens. »

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2) Faut-il davantage prioriser la formation agricole initiale ou continue ?

Origine de la question

David Fretwell de la Banque mondialeLead employment and training specialist

Détail« Afin d’obtenir le plus grand impact possible, étantdonné que vous ne pouvez pas tout faire pour toutle monde en même temps, pencheriez-vous pourla formation préalable à l’emploi dans le domaine de

l’agriculture ou seriez-vous plutôt pour la formationprofessionnelle d’agriculteurs occupant déjà un emploien Afrique occidentale ? »

3) Malgré l’exode rural, il ne faut pas négliger l’enseignement agricole en Afrique

Origine de la question

Cameroun / Intervenant non identifié

Détail« Je suis d'accord avec celui qui est intervenu pour direque, de manière absolue, la population au niveau dumonde rural s’accroît. Normalement on devrait avoirune densité beaucoup plus importante mais la réalité esttout autre, puisque la densité signifie le nombre depersonnes par kilomètre carré ; mais, avec la nonproductivité des sols, la conséquence est que la majoritéde la population rurale a aujourd'hui migré vers lescentres urbains. De ce fait la densité au lieu d'être

croissante devient de plus en plus faible et les zonesjachères dont vous avez parlé risquent de revenir. Au lieude diminuer, cette période de jachère risque de croître.Nous attendons de cette conférence de pouvoir êtreaccompagnés dans le développement de l'éducationet de la formation professionnelle dans le domaineagricole, d'autant plus que ce domaine constitueévidemment l'essentiel dans notre pays. »

4) Où est passé le poids politique du monde rural ?

Origine de la question non identifiée

Détail« Rapidement, une question sur l’agriculture, et plusparticulièrement sur la voix politique. On ne peut pas sefier au transfert ville / campagne du Sénégal au coursdes dernières années si on le compare avec la transitionsemblable qui a eu lieu en Europe pendant plus de200 ans. Comme nous le savons, la voix politique du milieu rural en France est très forte et parfoisproblématique. Il y a cent ans de cela, en Suède, lorsquele droit de vote fut accordé à tout le monde, les Suédoisinitièrent des cercles d’études dans les régions rurales

pour s’assurer que les agriculteurs étaient au courant duprocessus politique. Si vous vous rendez en Amérique duNord et que vous comparez la proportion de changementdu milieu urbain vers le milieu rural au cours ducentenaire, vous constaterez qu’elle se rapprochebeaucoup de celle du Sénégal. Mais la voix politique ruraleexiste toujours. Ma question est donc la suivante :Qu’est-il arrivé à la voix politique, car c’est cette dernièrequi permettrait de faire avancer les choses ? Où est-elle ? »

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5) Existe-t-il en Afrique des associations de producteurs pour l’enseignement agricole ?

Origine de la question non identifiée

Détail« Au cours de l’histoire, dans la formation agricole enEurope, et on le voit maintenant dans la formationagricole en Amérique Latine, on constate dansles productions les plus innovantes et souvent dansles productions qui sont exportatrices, un très grandrôle des associations de producteurs et des syndicats de

producteurs qui tendent à s’organiser eux-mêmes pourl’apprentissage du métier et pour qualifier les jeunes quis’engagent dans la profession agricole. Je voudrais savoirsi vous avez également repéré en Afrique ce phénomèned’association des producteurs et si cela permet desupporter un apprentissage des jeunes ? »

Après réponse« Vous avez posé beaucoup de questions et je ne saissi je pourrai répondre à toutes et puis d'abord je n'aipas nécessairement la réponse non plus.L'un d'entre vous a dit, et c'est vrai, qu’on ne fait pastoujours attention aux paysans, car à priori tout le mondefait de l'agriculture, donc ils savent faire. C'est vrai, ilssavent faire, mais le monde change à une vitesse telleque ce n'est plus possible qu'ils puissent s'adapter avecsimplement les connaissances transmises par les parents.C'est cela la nouveauté. Donc l'école est vraiment uneimpérieuse nécessité pour leur permettre de prendre enmain leur destin dans un monde qui va extrêmementvite, avec des questions que jamais aucun pays, aucuncontinent n'a eu à régler dans le passé. C'est la raisonpour laquelle je plaide beaucoup pour que la formationagricole soit prise en compte.

Faut-il que ce soit dans un ministère de l'agriculture oudans un autre ministère ? J'avoue que je ne sais pas, car ily a des traditions dans chacun des pays. Je connais descas où cela n'a pas marché trop mal. Le cas de la France,par exemple, le fait qu'il existe un ministère del'Agriculture qui s'occupe de tout l'enseignement agricolen'a pas trop mal marché, même plutôt bien me semble-t-il compte tenu de la puissance exportatrice que noussommes devenus, et une partie de cette puissanceexportatrice est due justement à la formation. Mais je nesais pas si c'est la solution. Il y a peut-être d'autressolutions. En revanche ce qui importe, que ce soit dansun ministère de l'Éducation ou dans un ministèrede l'Agriculture, c'est que l’on pose les questions deszones rurales spécifiquement et qu'effectivementles ministères travaillent ensemble pour résoudre lesquestions spécifiques du monde rural. Cela ne se résoutpas tout à fait de la même manière que dans la ville.

En plus l'effort en zone rurale est si grand, qu'il ne faut

pas s'imaginer, et je ne pense pas que ce soit possible danscertains pays, de mettre des écoles partout avec desprofesseurs partout. A l'avenir ce seront peut-être lesprofesseurs ou les enseignants qui devront aller vers lespaysans. Pour mettre en place ce dispositif le coût seraittellement élevé, compte tenu des chiffres que nous avonsvus, qu'il faut trouver des solutions à coûts maîtrisés.Sinon, on ne fera toujours que pour une minorité. Or, laquestion qui est posée, c'est la formation de masse.La formation de masse a un coût ; il faut essayer detrouver des formations, des méthodes à coûts limités.

Référence à la « chasse gardée » : chaque peuple al'intelligence de trouver des questions aux problèmesqu'il rencontre. Je ne peux parler que de la manière dontcela s'est passé en France. Par rapport au Sénégal. Leschiffres que j'ai donné sont bien sûr des chiffresnationaux, et donc il y a certainement des différencesrégion par région. Ce qui est vrai, c'est que l'exode ruralcontinue. Malgré le fait que l'exode rural globalementcontinue, la population globalement en zone ruralecontinue d’augmenter. Il est très important de fixer lespopulations en zone rurale, d'abord parce qu'en règlegénérale, les gens préfèrent vivre en zone où ils sont nés,et ils ne vont vers la ville que contraints et forcés pourdes questions économiques et sociales. Je reviens deLuanda : c'est dramatique cette ville ! L'Angola est un casun peu particulier en raison des 30 ans de guerre, etc.Maintenant il y a la paix, mais si on n'arrive pas très viteà fixer les populations rurales, je ne sais pas comment desvilles comme celle-là vont devenir gérables, c'estimpossible. Demain c'est l'explosion sociale ! C'est doncdans l'intérêt de tout le monde que ces populationsrurales, qui tiennent souvent beaucoup à la terre de leursancêtres, restent en milieu rural avec, bien sûr, lesconditions minimales qui feront qu'elles resteront.

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Il est bien évident aussi que la politique agricole et ruralesera d’autant plus importante que le poids politique desmilieux agricoles se confortera et sera mieux pris encompte par le biais des associations, des syndicats, desgroupements paysans, etc.

Concernant le rôle des associations de production dansla formation, je voudrais dire qu’il est vraiqu'actuellement en Afrique de l'Ouest des associationsde producteurs se développent et commencent à avoir

une certaine importance y compris politique, c'est vraiaussi qu'elles se préoccupent de la formation de leursmembres, mais là encore, l'importance du travail à faireest telle, que je ne suis pas sûr qu'elles puissent tout faire.Aujourd'hui elles sont surtout préoccupées, et c'est biennormal, par déjà former les responsables des groupementset ceux qui prennent des responsabilités dans legroupement. Ils ont leur rôle à jouer aussi, mais avecd'autres certainement, dans l'ensemble de cet effort. »

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Questions / commentaires à l’attention des deux intervenants de la séance

1) Concernant les droits de l’enfant…

Origine de la question / remarque

Ernest TSIKEL’IANKINA de MadagascarDirecteur général de l’enseignement technique et de laformation professionnelle

Détail« A Madagascar on a adopté un système d'éducationfondamentale de neuf ans mais on n'a pas pu atteindrecet objectif rapidement. Il y a un non achèvement del'école et les élèves retournent donc vite à la campagne ettravaillent. Est-ce que cette étude tient compte de ce

contexte, parce qu'il y a un risque de retour àl'analphabétisme ? Je crois que la solution est de donnerune formation professionnelle complémentaire à cesélèves afin qu'ils puissent donc travailler rationnellementpour le développement du pays. »

2) Concernant la lutte contre la pauvreté, la combinaisonalphabétisation / formation professionnelle et le travail des enfants

Origine de la question / remarque non identifiée

Détail« Juste quelques remarques.- Je pense qu'aujourd'hui il y a un programme de luttecontre la pauvreté qui est mis en place en Afrique del'Ouest. On n’en a pas beaucoup parlé, mais sur ceprogramme je crois qu'aujourd'hui il y a un voletimportant qui est affecté à la formation professionnellepour essayer d'améliorer quand même l’accès descouches défavorisées à un métier. Je pense que dans ladimension sociale de l'enseignement technique et laformation professionnelle c'est quelque chose dont ilfaut tenir compte.- Nous venons aussi de nous apercevoir au Sénégal que,dans le milieu rural il y avait un intérêt à combinerl'alphabétisation à la formation professionnelle,et aujourd'hui dans certains milieux ruraux on a fait accéder à une très forte alphabétisation en encadrant les

groupements de femmes ou d'enfants pour faire del'horticulture, du jardinage, etc. Malheureusement il n'ya pas assez de formateurs et les programmes ne sont pastoujours très bien définis.- Maintenant nous parlons d’un élément important :le travail des enfants. Je crois qu'hier on a brossé un peule sujet mais il est certain qu'aujourd'hui pour peu quedans le monde rural on fasse travailler des enfants endessous d'un certain âge, c'est un scandale dans les paysoccidentaux, alors que les réalités sont tout autres. Alorsquand on parle de formation professionnelle etd'intégration dans ces milieux je pense qu'il faut allerjusqu'au bout et parler éventuellement de ces enfantsque l'on ne peut pas laisser dans la rue parce qu'ils nesont pas à l'école : il faut quand même les former. »

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Réponse a« Le travail de l'enfant. Je voudrais vous raconter unepetite histoire. Ce n'est pas seulement en Afrique que l'onrencontre ce problème là. Je suis d'un pays qui a pendanttrès longtemps dialogué avec le Comité de la chartesociale sur le travail des enfants et je viens de l'Islande, lepays le plus au nord de l'Europe. Nous sommes très peunombreux et il y avait une tradition du travail saisonnierdes enfants. Moi-même j'ai travaillé dans le poissonquand j'étais petite (j'avais 12 - 13 ans) et c'était considérécomme tout à fait normal, c'était pour gagner de l'argentde poche. Le Comité des droits sociaux a regardé celacomme une atteinte terrible aux droits de l'enfant.Il y a eu un dialogue et finalement l'Islande a été obligéed'accepter qu'il était interdit pour les enfants de travailleravant un certain âge. Mais c'est pour vous dire qu'il y ades situations dans certains pays où cela existe et oùc'est considéré comme tout à fait normal et ce mêmesi ce sont des pays très développés ou très occidentaux. »

Réponse b« Il y a effectivement, en Afrique, un programme de luttecontre la pauvreté très important et là encore je reviens audébut de mon intervention, n'oubliez pas l'agriculture.L'expérience passée montre que, bien des fois, la lutte contrela pauvreté s'est préoccupée davantage des populationsurbaines et qu’on a parfois un peu oublié les populationsrurales. Je plaide vraiment pour que dans la lutte contre lapauvreté les populations rurales aient toute leur placecompte tenu des défis absolument extraordinaires que cespopulations vont avoir à relever dans les années à venir. »

Réponse c« Quelle est la meilleure formule d'un module deformation et comment le mettre en oeuvre au niveauintellectuel ?Je m'explique. On ne peut pas construire des écoles partout.

Alors que faut-il faire ? Il faut faire venir les enseignants. C'estexactement ce que je vous disais par rapport aux Romstsiganes. Les enseignants doivent aller vers eux.Apparemment je suis très branchée sur mon proprepays, bien que je l'ai quitté à l'âge de 20 ans, maisje me rappelle très bien que, quand j'étais petite et pendanttrès longtemps, il y avait une forme d'école itinérante.Il y avait des professeurs qui venaient et quirassemblaient les enfants dans les zones rurales et leurenseignaient. Cela fonctionnait très bien. Pourquoine pas faire comme cela ? Pourquoi doit-on toujours construire de magnifiques maisons, des écoles ? Pourquoine pas faire des choses simples ? Cela rejoint ce qui été dithier sur la formation de secteurs non formels. Je ne voispas pourquoi on ne pourrait faire ainsi. Je trouve que ceserait absolument génial. »

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Clôture de séance« A mon avis, nous avons tous nos RomsTsiganes. Au Mali aussi nous avons unepopulation nomade vers le nord et à unmoment donné on avait essayé de fairesuivre les élèves par les enseignants, maisj'avoue que cela fut une expérience trèsdifficile car les enseignants ne sont pastoujours préparés à cela et finalement nousavons été obligés d'arrêter. On a vu aussi quedans cette population les enfants restentsans enseignement, donc il y a peut-être lieude revoir tout cela et de reposer le problème.A mon avis, ces questions sont tellementimportantes et tellement difficiles àrésoudre, qu'on ne peut les résoudre qu'aucas par cas. Dans ce type de réunion, noussortons avec de grandes orientations quenous devons adapter à nos différentessituations. »

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Séance 5 :L’ETFP DANS SES RELATIONS

AVEC L’ENSEIGNEMENT SECONDAIRE

Les liens entre l’enseignement général et l’ETFP :fondements communs

M. Wataru Iwamoto – UNESCO

L’ETFP au Nigéria :problèmes et stratégies de réformes

M. Nuru A. Yakubu

National board of technical education, Nigéria

CommentairesM. Phillip McKenzie – OCDE

Débat avec la salle

Zayer EL MAJIDPrésident de séance

MAROC

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Résumé

W. IwamotoDirecteur de la division de l’enseignement secondaire,

technique et professionnelUNESCO

Le Forum mondial sur l’éducation qui s’est tenu àDakar en avril 2000 et ses activités de « suivi » mirenten relief la nécessité de mieux relier l’enseignementsecondaire général (ESG) et l’ETFP, dans le cadredes efforts faits pour atteindre un enseignement dequalité pour tous.

Le nombre des jeunes finissant leurs études primairescroît, ce qui est une conséquence du processusde l’Education pour Tous. Ils ont alors la possibilitéde faire des études plus longues, ce qui les prépareraà la vie et au travail. Néanmoins, l’ESG, dans laplupart des pays, est conçue pour préparer les jeunesà des études universitaires plutôt qu’au mondedu travail, même si en réalité, la plupart d’entre

eux ne seront pas diplômés de l’enseignement postsecondaire.

L’ETFP est donc plus que jamais mis au défi decontribuer à réduire les disparités entrel’enseignement du niveau secondaire et les exigencesdu monde du travail.

Cette présentation fournit :- une vue d’ensemble des points et défis qui attendent

l’enseignement du niveau secondaire- la stratégie recentrée de l’UNESCO pour stimuler

la réforme de l’éducation afin que les jeunes genssoient mieux préparés pour la vie et le travail dans lasociété du savoir.

Introduction

C'est un grand honneur pour moi de parler des relations entre l'enseignement secondaire général et l'enseignementtechnique et professionnel. Avant de commencer, je voudrais adresser au CIEP et à la Banque mondiale toutes mesfélicitations pour le grand succès de cette conférence. En tant que membre du Comité de pilotage je me réjouispleinement du débat actif d'hier et d'aujourd'hui et j’espère que cela va continuer jusqu’à demain.

Tout d´abord, je voudrais en préambule signaler deux points :- Premier point : on parle beaucoup de l'apprentissage tout au long de la vie. Comme vous le savez cette notion a été

créée par un fonctionnaire de l'UNESCO dans les années 60. Néanmoins, la notion de l'apprentissage tout aulong de la vie a repris son importance à la fin des années 90, lorsque la Commission internationale surl’éducation du XXI e siècle ou « Commission Delors » a indiqué les 4 fameux piliers de l’éducation : apprendreà connaître, apprendre à faire, apprendre à vivre ensemble et apprendre à être (Rapport « L’Education, un trésorcaché dedans » 1996).Le pilier important dans le contexte de cette conférence est « apprendre à savoir ». Le progrès technique et leschangements s’accélèrent, donc l'enseignant n'est plus ce qu'il était il y a un siècle : les étudiants ne doivent pas savoirtout mémoriser mais doivent savoir comment apprendre à savoir ; ceci aboutit aussi au problème de l'entreprenariatau sein de l'enseignement secondaire, technique et professionnel.

- Deuxième point : comment concevoir l'éducation de base ? On associe souvent l'éducation de base à l'enseignementprimaire. Mais pour nous cette définition est trop étroite. Si l'enseignement de base donne la faculté d'apprendre àsavoir, c'est-à-dire d'apprendre par soi-même, cela doit inclure le premier cycle de l'enseignement secondaire.

Les liens entre l’enseignement général et l’ETFP :fondements communs

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En plus des objectifs à atteindre, qui comprennentune éducation primaire universelle, l’égalité des sexes etl’augmentation du taux d’alphabétisation, le Forummondial sur l’éducation de Dakar s’est également fixécomme but de répondre aux besoins de formation detous les adolescents et adultes grâce à l’accès équitableaux programmes adéquats d’apprentissage et de savoirêtre. Il est très difficile de définir le savoir être, et je nedésire pas entamer de discussion théologique là-dessus.Par exemple, le rapport mondial de suivi de l’EPT2003-2004, « Le pari de l´égalité » explique que le savoirêtre comprend des compétences générales telles que lanégociation et la résolution des problèmes ainsi que lesaptitudes liées aux moyens d’existence.

Ce but ne concerne pas seulement l’enseignementtechnique et la formation professionnelle mais faitégalement allusion à l’accès aux possibilitésd’apprentissage pour les jeunes en vue d’approfondir lesavoir et de développer les valeurs, les attitudes et lescompétences qui leur permettront d’exploiter leurscapacités à travailler et à participer pleinement à lasociété. Le développement des compétences liées autravail devrait jouer un rôle majeur et faire partieintégrante des programmes d’éducation.

Le Forum de Dakar et ses activités de suivi ontdonné lieu à de nouveaux défis et opportunités pourl’enseignement secondaire. Grâce au processus de l’EPT,un nombre croissant de jeunes terminent leurs étudesprimaires et ont par conséquent la possibilité de faire desétudes plus longues. Ces jeunes gens, qui ont acquiscompréhension de l’écrit et culture mathématique, ontbesoin de débouchés pour pouvoir satisfaire leursaspirations. Dans cet objectif, la signification, le but et lecontenu de l’éducation post-primaire, regroupant à lafois le secondaire général et le technique et professionnel,devraient être redéfinis. L’enseignement secondairegénéral est souvent conçu pour préparer les jeunes à desétudes supérieures, attachant une importanceparticulière aux matières académiques. Hier, unintervenant soulignait l’importance de l’enseignementsecondaire ; c’est quelquefois le moment pour les jeunesde décider vers quelle branche ils vont s’orienter et,comme vous en avez tous fait l’expérience, c’est unepériode très instable d’un point de vue intellectuel,psychologique et physique. Sommes-nous à même denous concentrer uniquement sur des matièresacadémiques à ce moment-là ? Cela suffit-il ?

Les insuffisances actuelles de l’enseignementsecondaire général sont les suivantes :- manque d’objectifs professionnels réalistes- fort accent mis sur les matières académiques- faible statut et peu d’importance attachée aux

compétences professionnelles pratiques - articulation fragile avec les exigences du marché du travail

voire avec les besoins sociaux.

En réalité, il est peu probable que la vaste majorité des adolescents ayant obtenu un diplôme secondairepoursuivent des études supérieures, préférant entrerdans le monde du travail. Il leur faudrait acquérir les connaissances, compétences et dispositionsrequises pour avoir un bagage lors de la recherched’emploi et de l’intégration sociale, ce qui n’estsouvent pas le cas – nombre d’entre eux n’ont pas les

I. Enseignement technique et formation professionnelle (ETFP)et mouvement de l’ Éducation pour Tous (EPT)

II. Les lacunes des systèmes d’enseignement secondaire général (ESG)et d’enseignement technique et de formation professionnelle (ETFP)

Je voudrais que vous preniez en compte ces 2 points qui constituent la « basso ostinato » de mon intervention.

Bien que les efforts nationaux et internationaux déployés en vue d’obtenir l’éducation pour tous mettent souvent enlumière l’enseignement primaire universel, le Forum mondial sur l’éducation qui s’est tenu à Dakar en 2000 a permis devoir sous un nouveau jour le rôle que l’enseignement secondaire général (ESG) et l’enseignement technique et laformation professionnelle (ETFP) devraient jouer dans le cadre des efforts faits pour atteindre un enseignement dequalité pour tous. L’EPT (éducation pour tous) constitue une priorité majeure au sein de la communauté internationale.Je souhaiterais commencer en traitant brièvement de la façon dont l’ETFP au niveau secondaire peut contribuer aumouvement de l’EPT. Je me pencherai dans un deuxième temps sur les lacunes de l’ESG et de l’ETFP actuels, quiamènent à constater l’urgence du besoin d’une relation nouvelle et plus proche entre ces deux enseignements.Je conclurai mon exposé en communiquant quelques idées pour de nouvelles orientations ainsi que l’approche adoptéepar l’UNESCO pour contribuer aux réformes politiques.

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outils adéquats pour entrer dans le monde dutravail.

D’autre part, l’ETFP est plus que jamais mis audéfi de contribuer à réduire les disparités entre l’en-seignement du niveau secondaire et les exigences dumonde du travail. L’ETFP a souvent subi les consé-quences du faible statut qu’on lui attribue. Il n’occu-pe qu’une petite part dans le nombre total d’inscrip-tions en secondaire, en particulier dans les pays endéveloppement, dû en partie au coût élevé de l’édu-cation technique et professionnelle. Les compétencestechniques à l’intérieur d’un domaine limité peuventaisément devenir obsolètes. On attire souvent l’atten-tion sur le peu de cours traitant des sciences humai-nes, de l’esthétique et des études sociales. Il est néces-saire, pour pouvoir s’attaquer à ce problème, deréformer l’ETFP existant et le rendre plus efficace etaccessible. Pour y parvenir, il est impératif que lesavoir et les compétences spécifiques convergent.Davantage d’opportunités d’apprentissage futur

devraient se présenter pour les diplômés de l’ETFP.En ce qui concerne l’éducation secondaire générale,une des options disponibles est d’intégrer l’aspectprofessionnel à certaines des matières enseignées.Nous devrions également apporter une base deconnaissances dans un groupe de compétences géné-rales essentielles. En plus de la réforme portant surchacun des courants, il devrait exister des transitionsbidirectionnelles sans failles entre le secondaire géné-ral et la branche technique et professionnelle. Ce queje propose, par conséquent, c’est non seulement laréforme de l’ESG et de l’ETFP existant mais aussiune sorte de va-et-vient entre les deux.

Le problème est donc de savoir commentenglober les fondements et l’articulation entre l’ESGet l’ETFP. Il nous faut en outre d'une part établir desrapports mutuels entre les deux et d'autre partétablir des compétences génériques essentielles tellesque les aptitudes à communiquer, le travail d’équipeet l’esprit d’entreprise.

III. Approche de l’UNESCO

Les actes de l’UNESCO dans le domaine del’ESG et de l’ETFP visent à soutenir la réforme despolitiques dans ses Etats membres. Comme vous lesavez, l’UNESCO se compose de 190 pays, chacunavec un contexte local individuel. L’UNESCO joueun rôle de normalisation, par exemple pour ledéveloppement et la promotion de documentsnormatifs, comme les Recommandations révisées(2001), concernant l’enseignement technique etprofessionnel.

L’UNESCO fait l’effort d’identifier denouvelles tendances et priorités et des défisnovateurs pour l’enseignement secondaire tout enencourageant le dialogue sur les politiques parmiles décideurs. Nous pouvons citer comme exemplela fonction de secrétariat occupée par notre sectionau sein du Groupe consultatif interagences sur laréforme de l’enseignement secondaire et des affairesde jeunesse depuis 1999.

Nous développons et diffusons aussi desdocuments normatifs. Pas plus tard que la semainedernière, je me trouvais au Nigeria, où je présidaisun séminaire sous-régional sur « l’évangélisation »de la Recommandation révisée concernantl’enseignement technique et professionnel ; ceciconstitue également l’un des rôles de l’UNESCO.

D’autres rôles consistent à tester, innover etmener des projets pilotes, à diffuser et faire partagerdiverses informations, notamment au moyen deréseaux internationaux tels que l’UNEVOC.Le centre UNEVOC situé à Bonn représente unnoyau de ce Réseau. De plus, nous apportons uneassistance technique pour des réformes dans l’undes Etats membres à la demande. Je citerai commeexemple le Projet Nigérian de l’UNESCOconcernant la revitalisation de l’ETFP, que leDr Nuru A. Yakubu abordera une fois mon exposéterminé.

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Résumé

Cet exposé présente un bref état des lieux du secteurde l’ETFP au Nigéria en précisant ses origines, sonévolution, sa structure actuelle, son statut et sesfonctions. Bien que ce secteur soit limité par l’existencede diplômes et de certificats de niveau inférieur audiplôme de fin de secondaire, il bénéficie d’un systèmed’évaluation très stable conçu pour assurer la qualitépar l’intermédiaire de validations périodiques desprogrammes. Cependant, comme pour des systèmessemblables dans d’autres pays, il souffre d’un manquede prestige vis-à-vis du public, d’un faible financementet d’un manque important en personnel et enéquipement.

Cet exposé aborde plusieurs questions soulevées dansle cadre de la réorientation de l’ETFP et propose desstratégies pour y répondre :- l’assurance qualité,

- l’accessibilité de l’ETFP,- l’impact des technologies de l’information et de lacommunication (TIC),- l’impact de la mondialisation,- l’éducation tout au long de la vie,- les ressources humaines,- le besoin en orientation professionnelle et en conseil,- le financement de l’ETFP.

Au Nigéria l’analyse de ces sujets montre que les plansprécédents de revitalisation du secteur ont été rendusobsolètes par le faible financement de l’ETFP, l’impactde la mondialisation ainsi que le changement globaldu paysage suite aux nouvelles TIC et à la libéralisationdu marché. Cela a donc rendu nécessaire l’élaborationd’un nouveau plan cadre de revitalisation dont la miseen place a partiellement commencé.

Préambule

J’aimerais commencer en exprimant la reconnaissance du Nigeria et en particulier de son Conseil nationald’enseignement technique envers l’UNESCO, la Banque mondiale, la Fondation de Turin, les ministères de l’éducationet des Affaires étrangères ainsi que les autres sponsors de cette conférence ; en particulier l’UNESCO et, plusspécialement, M. Wataru Iwamoto et son groupe. Comme il l’a dit précédemment, nous avions, pas plus tard que lasemaine dernière, le privilège d’accueillir un atelier de discussions d’une sous-région ayant pour sujet lesrecommandations révisées sur l’enseignement technique et professionnel et les conclusions de l’OIT sur l’enseignementet la formation technique et professionnelle. Nous avions environ vingt participants représentant onze pays d’Afriqueoccidentale et cela nous a donné l’opportunité d’examiner ce que nous faisions dans la sous-région d’Afriqueoccidentale.

Cela dit, c’est un vrai privilège pour moi d’aborder, lors de cette importante réunion, les efforts que nous avons effectuésau Nigeria pour revitaliser notre enseignement technique et professionnel.

Le Nigeria est un pays très complexe. Je commencerai donc avec une petite présentation sur ce qu’est vraimentle Nigeria.

N. A. YakubuExecutive secretary

National boardof technical education,

Nigeria

L’ETFP au Nigéria : problèmeset stratégies de réformes

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Le Nigeria est un pays qui comprend138 millions d’habitants. Cette population croît àun taux annuel d’environ 2,8 %. Si ce taux semaintient, la population aura doublé d’ici 2030-2035. Nous avons une superficie d’environ unmillion de km2, un PIB de seulement 43,4 milliardsde dollars et un PIB par habitant de 327 dollars. Lesprincipales activités économiques sont l’agriculturequi contribue à 37,4 % du PIB, l’industrie à 28,8 %et le secteur manufacturier à 4,2 %. La populationactive est peu élevée.

Le budget alloué à l’éducation est plutôtfaible, si l’on ne compte que le budget fédéral. Au

Nigeria, le système gouvernemental est celui d’unerépublique fédérale qui comprend 36 états avec774 autorités gouvernementales locales. Je parle icide la part du gouvernement fédéral dans le totalpour l’Education, ce qui représente 5,6 %. C’est eneffet très faible.

Par ailleurs nous avons environ 250 entitésethniques au Nigeria.

Je pense donc que vous vous faites maintenantune idée de la complexité du pays.

A l’instar de la plupart des autres pays afri-cains, le développement historique a suivi celui dupouvoir colonial, le Royaume-Uni dans le cas duNigeria. La première institution technique du pays aété établie en 1946, le Yaba Higher College. Unecommission a été établie en 1960, la CommissionAshby, pour examiner le système d’éducation dupays. Cette commission a conclu qu’il y avait un trèsfort penchant pour la littérature traditionnelle et lessujets académiques, ce qui entraînait un manque derespect des manuels et des réalisations techniques.Elle a recommandé un développement stratégique

de l’enseignement technique et professionnel.Puis nous avons eu un troisième plan de développe-ment national en 1975, qui a révélé que nous avionsun surplus de diplômés académiques et littérairesau Nigeria, mais une profonde pénurie de techni-ciens. Ceci a finalement entraîné la mise en placede la structure où je travaille maintenant : le Conseilnational de l’enseignement technique. Il a pourmandat de coordonner le développement de l’ensei-gnement technique et la formation professionnellehors des universités du Nigeria.

I. Présentation succincte du Nigéria

II. Histoire de l’ ETFP dans le pays

Notre système éducatif est très complexecomme représenté sur le schéma [cf. PowerPoint].Celui-ci reproduit tout le système éducatif du payset intègre l’enseignement technique et professionnelau Nigeria. Comme vous pouvez le voir, nous avonsà gauche le système éducatif formel et à droite lesystème non formel ainsi que les âges s’y rapportantet la durée des différents programmes de formationaux différents niveaux.

L’enseignement formel commence par six ansd’enseignement primaire suivi par trois ansd’enseignement secondaire junior. Ces neuf annéesreprésentent l’enseignement minimal obligatoirepour les enfants nigérians. Ensuite, au niveausecondaire senior, ils ont le choix : soit ils optentpour l’enseignement général, c’est-à-dire l’écolesecondaire senior, soit pour les lycées techniques

(technical colleges). Ceux qui sont incapables d’allerdans le secteur formel peuvent profiter deformations dans ce que nous appelons les BESTCentres (Basic Engineering and Skills Training) où ilspeuvent obtenir une qualification comme parexemple des diplômes de métier (trade testcertificates) de niveaux un à trois. A partir des lycéestechniques il existe maintenant une articulationcomplète des qualifications. Ils peuvent aller àl’université, à l’Institut Polytechnique ou dans desétablissements d’enseignement supérieur pourobtenir des licences universitaires, des diplômesnationaux et nationaux supérieurs dans les InstitutsPolytechniques et le Certificat d’éducation duNigeria (Nigeria Certificate of Education) dans lesétablissements d’enseignement supérieur. Ilspeuvent également s’inscrire pour obtenir desqualifications professionnelles.

III. Complexité du système éducatif

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Ensuite, voici quelques données pour toutreplacer dans son contexte. Sur les quatre dernièresannées, la moitié supérieure vous donne lesinscriptions totales pour les écoles primaires, lessix premières années obligatoires au Nigeria, unchiffre de 19,3 millions et il y a également le tauxannuel d’inscriptions : chaque année, près de4,5 millions de personnes rejoignent le systèmeéducatif primaire. Avec le nouveau lancement del’enseignement universel de base il y a trois ans etdemi, les données n’apparaissent pas encore maisnous attendons une explosion des inscriptions etsorties des écoles primaires.

Nous avons ensuite des données concernantl’enseignement secondaire. Il y a environ 1 milliond’inscriptions annuelles pour le niveau secondairejunior au Nigeria. Au niveau senior, l’année dernière,nous avions environ 790 000 personnes. Mais si vouscomparez ceci avec les inscriptions dans les lycéestechniques, ce que vous pouvez voir actuellement surla diapositive, vous verrez que les inscriptionsannuelles en 2001 étaient de 32 000 contre presque800 000 au deuxième cycle du secondaire del’enseignement général, et c’est un des problèmesmajeurs que nous avons.

Le tableau suivant fournit également desdonnées sur les taux de passage de l’enseignementprimaire au premier cycle de l’enseignementsecondaire ainsi que le taux d’inscription brut audeuxième cycle du secondaire.

Que nous disent ces chiffres sur le systèmeéducatif du Nigeria ? Tous les ans, 4,5 millions

d’élèves entrent à l’école primaire et 44 % sont desfilles, ce qui est plutôt bien pour un pays comme leNigeria. Environ 1 million, dont presque 44 % sontdes filles, entrent au premier cycle du secondaire.Environ 800 000 élèves, dont 45 % de filles, entrentau deuxième cycle du secondaire. Mais, quand onpasse aux lycées techniques où l’on effectue uneformation technique et professionnelle, il n’y a que30 000 inscrits par an et seul un tiers d’entre euxsont des femmes. Cependant, si vous prenez cesinscriptions comme pourcentage des inscriptionsdans les écoles du second cycle du secondaire, vousvoyez que cela ne représente que 4,2 % du nombretotal d’inscriptions dans ces établissements. Celane représente même pas 2 % de l’enseignementsecondaire général.

Alors, ce que cela signifie vraiment, c’estqu’avec un taux de passage entre la dernière annéedu primaire et le premier cycle du secondairede 38,8 % et un taux d’achèvement d’environ 55 %,1,5 millions d’écoliers du primaire quittent l’écolechaque année et sont incapables de suivre uneformation dans le premier cycle du secondaire.Au niveau des écoles secondaires, cela signifie qu’avecun taux de scolarisation brut pour le second cycle dusecondaire de 28,8 %, environ 2 millions d’élèvesadmissibles sont incapables d’entrer dans des écolessecondaires de second cycle. Le problème est que lamajorité d’entre eux vont se retrouver dans la filièrede l’enseignement technique et professionnelinformel.

Je reviendrai plus tard sur ces chiffres.

IV. Quelques chiffres

Au Nigeria, nous avons également différentstypes propriétés d’institutions y compris le secteurprivé. La diapositive suivante indique le nombred’institutions et leur type. Vous pouvez voir que lesPolytechniques sont essentiellement des institu-tions techniques tertiaires. Nous avons aussi ce quenous appelons des « Instituts Monotechniques »qui sont en fait des lycées polytechniques qui neforment que dans un seul domaine, comme parexemple les lycées d’agriculture. Ils sont classifiéscomme monotechniques et ils font partie de cegroupe. Nous avons ensuite les lycées techniques

qui sont au fond les lycées secondaires senior oùl’on peut suivre un enseignement technique etprofessionnel.

La diapositive suivante montre l’ampleur del’enseignement technique et professionnel qui estlié au tableau que je vous décrivais plus tôt, à savoirles centres professionnels ou BEST, les lycées tech-niques où les artisans et les maîtres artisans sontformés, les instituts polytechniques et même lesystème d’apprentissage.

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En résumé, comment gérons-nous tout ceci ?Nous avons une administration centrale de

l’enseignement technique et professionnel qui suitles recommandations de l’UNESCO. Je travaillepour une agence qui existe depuis 26 ans1 et qui ales responsabilités suivantes : développement desprogrammes scolaires, démarche qualité,canalisation de l’aide externe pour les lycéespolytechniques, etc.

Les problèmes majeurs sont :- Le faible statut de l’ETFP auquel a fait allusion

M. Iwamoto lors de sa présentation- Le faible nombre d’inscriptions dans le secondaire- Le problème de la pertinence des programmes

scolaires pour les besoins du marché y compris lamondialisation

- Un déséquilibre des sexes au niveau des lycéestechniques

- Des effectifs inadéquats- Le fait que la filière informelle soit si importante

et si peu contrôlée actuellement- Le manque d’autoévaluation au sein des

institutions- Le problème du financement insuffisant qui

apparaît aussi, à mon avis, dans des pays plusavancés.

Les stratégies de réforme que nous avonsadoptées comprennent :- La révision des programmes scolaires- La garantie de la convergence des connaissances et

des aptitudes techniques générales polyvalentes, cequi est l’une des recommandations majeures quiont été acceptées et que nous avons déjà mises enoeuvre grâce à un projet que nous entreprenonsactuellement ; je vais en parler brièvement

- La disposition d’une articulation horizontale etverticale.

Ce que nous avons fait pour résoudre leproblème de l’articulation verticale en particulier aété d’introduire certains aspects de l’enseignementgénéral dans les programmes de l’enseignementtechnique et professionnel. Ce que nous essayons

de faire et qui a été accepté, c’est d’attaquer leproblème de la mauvaise opinion en ajoutant un« complément » aux lycées techniques au niveau dusecond cycle de l’enseignement secondaire. Ainsi,nous avons maintenant des « lycées scientifiqueset techniques » qui acceptent les étudiants aupremier cycle du secondaire [cf. PowerPoint].

Dans ces lycées scientifiques et techniques,nous avons un premier cycle ainsi que deux axesdifférents : le lycée scientifique (deuxième cycle) etle lycée technique. Il est déjà évident actuellementque les inscriptions dans les lycées ayant adoptécette structure ont déjà commencé à augmenter.

En vue d’intégrer certains aspects de notreformation professionnelle à l’enseignementsecondaire général, le Conseil national del’éducation du Nigeria vient juste d’adopterl’introduction de modules de métiers au sein del’enseignement secondaire général, et nous devrionspeut-être en discuter, afin que les étudiantspuissent, même après avoir terminé leurenseignement secondaire, garder leurs crédits dansle but d’obtenir des qualifications pour exercer unmétier. Ils peuvent terminer ces modules dans leslycées techniques et recevoir des diplômes demétiers. Je pense que c’est une des réformes quidevrait fonctionner, particulièrement dans les paysen voie de développement.

Je vais maintenant passer à un projet trèsimportant : le projet de l’UNESCO de Revitalisationdu Nigeria. Au retour du gouvernementdémocratique il y a environ quatre ans, le Présidentayant pris connaissance de tout cela, a écrit audirecteur général de l’UNESCO pour demander del’assistance. L’UNESCO a envoyé des experts, dontle Dr. Hashim Abdul-Wahab, un consultant ETFPtrès expérimenté et nous avons conçu un projetnigérian, et je souligne bien ceci, un projet nigérian.Un des objectifs principaux était de réformer lesprogrammes scolaires et de former le personnel carà ce moment-là, une partie du personnel n’avait passuivi de formation depuis plus de dix ou quinze ans.

V. Problèmes relevés et réformes appropriées

1 la centralisation de la coordination de l’ETFP existe depuis 26 ans au Nigeria.

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Jusqu’à présent, nous avons été capablesd’établir dans cet important pays six centresde développement du personnel, un dans chacunedes zones géopolitiques – ces zones géopolitiquesexistent aussi pour former un équilibre – et jusquelà, plus de 2 200 personnes ont été forméessur une période de deux ans. Nous avonsrévisé 24 programmes scolaires en ingénierieet autres domaines apparentés, à la fois au niveau

de l’enseignement technique et de l’enseignementprofessionnel. Nous avons tenu deux ateliers deformation pour former les principaux formateursdes centres de développement du personnel, puis ily a seulement deux mois, nous avons organisé unatelier de conseil et d’orientation et avons préparédes manuels scolaires. Nous nous préparonsdans ce projet à une révision des programmescommerciaux en février de l’année prochaine.

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Introduction

Merci aux organisateurs d’avoir invité l’OCDE à participer à cette conférence. Ces dernières années, des organisationsinternationales telles que l’UNESCO, la Banque mondiale et l’OCDE ont déployé des efforts considérables pour mieuxcoordonner notre travail sur l’enseignement secondaire et par là-même réduire le double emploi et développer dessynergies. Des pays du monde entier font face aux mêmes défis en ce qui concerne les réformes de l’enseignementsecondaire, et la présente conférence constitue une étape importante dans la consolidation de la collaborationinternationale.

L’appariement de ces deux présentations a été réalisé avec le plus grand soin. M. Iwamoto a présenté un vaste cadreinternational sur l’analyse des liens entre l’ETFP (Enseignement Technique et Formation Professionnelle) etl’enseignement général, et M. Yakubu a ensuite exposé une analyse approfondie des défis politiques de l’ETFP dans unpays en particulier, le Nigeria.

Pour préparer le terrain, M. Iwamoto a réfléchi surles faiblesses généralement imputées à l’enseignementtechnique et la formation professionnelle, notammentsur le fait que son statut est bien souvent peu élevé etqu’on le considère communément comme un cursustrop limité à la base pour répondre à des besoins à longterme. A noter également qu’il a souligné certaines faillesdes programmes généraux de l’enseignement secondaire.Les réunions des stratèges et praticiens de l’ETFP sontsouvent très autocritiques par rapport au domaine danslequel ils travaillent. Il faut reconnaître cependant que lesdéfis visant à améliorer l’enseignement secondaire vontplus loin que l’ETFP et doivent également englober l’en-seignement secondaire général, qui, après tout, représentel’élément le plus complet du secondaire dans la plupartdes pays.

Comme vous le savez sûrement, l’OCDE a menéune enquête de grande ampleur en 2000 sur les compé-tences des élèves de 15 ans portant sur les acquis enlecture, les mathématiques et les sciences : l’enquêtePISA. Une critique que l’on retrouve souvent dans lesquestionnaires des étudiants est un sentiment général dedésillusion et de détachement de l'ensemble des jeunesdu secondaire, et pas seulement dans les cursus qualifiés

de techniques et professionnels. M. Iwamoto s’est, detoute évidence, attaché à traiter les besoins de tous lesjeunes fréquentant le secondaire, sans se limiter à labranche technique ou professionnelle.

M. Iwamoto a passé en revue un ambitieuxprogramme de réforme de l’enseignement secondaire eta fait savoir de quelle manière l’UNESCO pensait agirpour que ce programme soit soutenu dans les Etatsmembres et pour que les actions pouvant être menéesdans les capitales nationales prennent plus de valeur. Enespérant ne pas être trop présomptueux, je souhaiteraisfaire deux commentaires du point de vue d’un autreorganisme international.

Tout d’abord, en ce qui concerne la normalisation àlaquelle la présentation fait allusion, il est absolumentessentiel d’améliorer tous ensemble la base de donnéesinternationales sur les procédés éducatifs, coûts etrésultats pédagogiques. Rien n’occupe autant l’esprit d’unMinistre que les données dures correspondant à ce queses étudiants apprennent en comparaison à d’autres pays,leur destination à long terme sur le marché du travail etdans la vie adulte de manière plus générale, ainsi que laconstatation des coûts de différents types de programmes

I. Liens entre l’enseignement général et l’ETFP

P. McKenziePrincipal administrator, Directorate for education

OCDE

Commentaires

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éducatifs. Les résultats du PISA ont été assez frap-pants à cet égard. Parmi les pays ayant obtenu lesmeilleurs résultats, certains faisaient partie de ceuxqui dépensaient le moins pour les écoles, alors qued’autres où les élèves réussissaient moins bien figu-raient parmi les plus chers. L’information compara-tive et les résultats permettront de soulever des ques-tions stimulantes et éventuellement des réponses

politiques, et l’UNESCO est le mieux placé pouraider à renforcer la base de données internationales.En second lieu, le programme de l’UNESCO et detous les groupes participant à la réforme sur l’ensei-gnement secondaire est très ambitieux et ne peutaboutir que si les pays mettent effectivement leursressources à disposition de manière à mettre enapplication le mandat auquel ils ont consenti.

L’exposé de M. Yakubu sur le Nigeria nous arappelé l’importance des problèmes auxquels denombreux pays doivent faire face pour pouvoiratteindre les objectifs de l’Education pour tous.Les 4,5 millions d’inscrits par an à l’école primairedépassent le chiffre correspondant à l’ensemble dusystème éducatif dans beaucoup d’autres pays. Lefait que seulement 25 % environ des élèves qui vontà l’école primaire continuent dans le secondairemontre les très grandes difficultés à procurer unescolarité et à la rendre accessible et adéquate. Mêmeparmi les enfants qui terminent l’école primaire,40 % seulement entrent dans le premier cycle dusecondaire, ce qui semble indiquer qu’un nombreremarquable d’élèves ont la capacité et l’envie depoursuivre leur scolarité, mais qu’il n’y a passuffisamment de places pour eux. Ceci représenteun souci majeur pour le Nigeria et la communautéinternationale.

Un point intéressant qui ressort de la présen-tation de M. Yakubu est l’accent qu’il met sur laformation de reconversion et le perfectionnementprofessionnel des professeurs de l’ETFP au Nigeria.L’expérience au niveau international nous montreque ces importantes réformes, dont nous avonsgrand besoin, s’avéreront fructueuses à conditionque le corps enseignant soit prêt à changer, qu'ildéveloppe un sentiment d’appartenance vis à vis dela réforme à travers sa participation à l’élaborationdes politiques et qu'il déploie les compétencesnécessaires à établir de nouveaux programmesscolaires. L’importance attachée au perfectionne-ment du personnel et à son évaluation semble êtreun point fort au Nigeria.

II. Défis et réformes de l’ETFP au Nigeria

Aucune des deux présentations n’a insisté surce que je considère comme deux forces potentiellesdes programmes de l’ETFP. La première est leuraptitude à rendre l’école plus intéressante pour lesjeunes élèves et à parvenir à un apprentissage plusapprofondi en intégrant les connaissances appliquéesau côté conceptuel et théorique. Nous savons, grâceaux recherches sur le choix scolaire des adolescents,que les perspectives d’emploi à long termeconstituent un facteur déterminant dans leurdécision et celle de leurs parents, mais nous savonsaussi que les jeunes sont motivés par des domaines etméthodes d’enseignement qui correspondent à leursbesoins et suscitent leur intérêt. Les programmes del’ETFP ont beaucoup à apporter de ce point de vue.

D’autre part, l’ETFP offre un potentiel considérablelorsqu’il s’agit de promouvoir l’insertion sociale.Nous n’ignorons pas que les taux de participationdans l’éducation diffèrent selon le milieu social, lesexe et le lieu, mais l’ETFP a tendance à réunir unecatégorie d’élèves plus vaste que d’autres systèmesscolaires secondaires. D’un point de vue stratégique,ce critère est significatif pour juger de sa valeur.

Malgré tout, le potentiel de l’ETFP n’est pastoujours mis en pratique et les deux présentations seveulent clairement en faveur d’une réforme.

III. Le potentiel de l’ETFP

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Les deux exposés se sont prononcés, et ce, jepense, à juste titre, en faveur d’une approche plusunie, intégrée et flexible de l’enseignementsecondaire qui rapproche les points forts del’enseignement général et de l’ETFP et les rendaccessibles à tous les jeunes. Il reste cependant desdéfis considérables à affronter dans ce processus deréforme.

L’un des risques encourus par l’ETFP est deperdre son caractère distinctif. La vraie valeur del’enseignement technique et de la formationprofessionnelle repose dans ses liens avec le marchéde l’emploi et avec les employeurs et le monde dutravail – bien que ces liens soient sous-développés àcertains endroits, il faut en convenir. Le danger d’uneapproche plus intégrée de l’enseignement secondaireest que l’éthique académique qui domine déjà dansl’enseignement général vienne également régirl’ETFP. C’est une des raisons pour laquelle quelquespays s’efforcent de conserver leur propre systèmed’apprentissage, car leurs rapports avec le lieu detravail semblent plus solides. Comme M. Yakubu l’aremarqué dans le cas du Nigeria, les programmes enmilieu de travail doivent faire partie du dosage despolitiques.

Le deuxième défi porte sur la modularisationdu cursus et la flexibilité des passerelles reliantl’enseignement général et les branches de l’ETFP. Ilest très difficile d’argumenter contre les avantages

que peuvent procurer la modularisation et laflexibilité, mais en pratique, ils requièrent beaucoupd’efforts pour bien fonctionner. L’un des dangersd’une approche trop modulaire est la fragmentationdans les programmes des étudiants, le risque qu’ilsne parviennent pas à établir un ensemble cohérentde compétences. En outre, étant donné que lamodularisation donne naissance à différents pointsde décision, il se peut que les élèves les moins attachésà l’éducation abandonnent leurs études. Un systèmed’enseignement secondaire caractérisé par laflexibilité et le libre choix des étudiants nécessitebeaucoup de ressources consacrées au conseil et àl’orientation ainsi qu’à l’encadrement des décisionsdes élèves, en vue de fonctionner plus efficacement.

Troisièmement, il convient d’aborder laquestion des compétences des professeurs. Les paysde l’OCDE qui ont eu le plus de succès dans ledéveloppement d’une approche plus intégrée del’enseignement secondaire sont ceux qui ontlargement investi dans les mises à jour et lesapprofondissements des connaissances desprofesseurs et qui se sont assurés que ces derniersétaient des partenaires authentiques du processusde réforme.

Je souhaiterais conclure en remerciant lesauteurs de ces deux présentations stimulantes quiont permis d’ouvrir le débat sur d’importantesquestions.

IV. Futures orientations possibles

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DÉBAT AVEC LA SALLE (5)1) Comment revaloriser l’ETFP ?

2) Pourquoi ne pas avoir une réflexion plus globale ?

3) Ressources humaines pour conduire les réformes

4) Inadaptation des stratégies des institutions portéessur l’enseignement et non sur la formation

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1) Comment revaloriser l’ETFP ?

Origine de la question

Vivekanund SEWRAJ de l’Île MauriceDirecteur de la technologie au ministère de l’éducationet de la recherche scientifique

Détail« A l’Île Maurice, nous connaissons un problème similaire àcelui auquel je crois comprendre que vous êtes confrontésau Nigeria, notamment quand vous avez énoncé le mauvaisstatut de l’ETFP. J’ai l’impression, au vu des chiffres quevous avez communiqués, qu’après une admission annuellede 4,5 millions d’élèves dans le primaire, il existe un grandnombre d’abandons ; ensuite, j’ai l’impression que seulsceux qui sont faibles sur le plan scolaire optent pour l’option

technique. Nous connaissons un problème similaire. Seuls les plus faibles, ceux qui échouent dans le système généralchoisissent la voie professionnelle et technique. J’aiégalement l’impression que dans les pays du nord, enEurope par exemple, ce n’est pas le cas. En ce qui meconcerne, j’aimerais savoir comment vous abordez ce sujet ?Comment les plus doués peuvent-ils également se dirigervers la voie technique ? »

Nu

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kubu

Réponse a« Je suis tout à fait d’accord avec l’intervenant de l’ÎleMaurice. Je crois que, du fait d’antécédents historiquessimilaires, l’évolution et les problèmes sont identiques.C’est la grande question et je souhaite avoir une réponse :comment attirer les jeunes les plus doués versl’enseignement technique et professionnel ? Si j’avais laréponse à cette question, je serais l’homme le plusheureux de la terre ! Puisque l’on y a fait allusion, ceproblème existe depuis quarante ou cinquante ans et l’onn’a pas été capable d’y trouver une solution. Mais ce quenous avons tenté de faire, au Nigeria, c’est de convertirles établissements techniques qui jusqu’ici nedispensaient un enseignement secondaire que duranttrois années, en leur permettant d’allonger cette durée à

six années. Nous les appelons collèges scientifiques ettechniques. Ces collèges scientifiques sont très populairesau Nigeria. Tous les parents veulent que leurs enfantssuivent un enseignement scientifique. Alors, on leur dit :« d’accord, inscrivez-vous dans un collège scientifique ettechnique » puis l’on espère que durant les trois premièresannées les étudiants y trouveront un attrait, ainsi queM. McKenzie l’a indiqué. L’un des éléments sur lequelnous n’avons vraiment pas insisté, c’est l’attrait de l’ETFPen soi, et nous estimons qu’au cours de ces trois annéespassées de l’autre côté, il est probable que de plus en plusd’étudiants fassent le choix de se tourner vers l’enseignementtechnique et la formation professionnelle. »

Réponse b« En ce qui concerne le fait d’attirer plus d’étudiantsdoués dans l’ETFP, vous avez raison. En général, dans lemonde, les programmes de l’enseignement technique etprofessionnel ont un statut moins important que lesprogrammes de l’enseignement académique. Et ce statuts’est en fait amoindri, à l’exception des pays où il n’existequ’un petit système universitaire. Les deux exemples que

j’ai donnés, la Norvège et l’Autriche je crois, ont pris des mesures pertinentes dans ce domaine, au sens où ils ontessayé de construire des passerelles entre les programmesde l’enseignement technique et professionnel dansles écoles et l’enseignement supérieur. L’une des critiquesles plus virulentes à l’encontre des programmesde l’enseignement technique et professionnel dans

DÉBAT SÉANCE (5)

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2) Pourquoi ne pas avoir une réflexion plus globale ?

Origine de la question

Abdulwahab AL AKIL du YémenVice ministre de l’enseignement techniqueet de la formation professionnelle

Détail« Tout d’abord, une remarque que j’ai essayé de présenterhier dans les ateliers. Dans les pays du tiers-monde,l’enseignement technique, ou ETFP, est peu importanten termes de capacité, comparativement au nombre trèsimportant d’élèves et de jeunes qui s’inscrivent dansl’enseignement secondaire. M. le Président, qu’allons-nous faire du reste si des centaines de milliers d’élèves del’enseignement secondaire ont un très mauvais niveau,alors que nous évoquons ici le cas de tout au plus 10 à15 % d’une cohorte ? C’est un élément sur lequel nousdevons vraiment revenir et nous devons dire pourquoil’on continue d’insister et de renforcer cette séparationentre enseignement général et ETFP ? Nous parlons dedéveloppement des résultats humains, nous parlons decentaines de milliers de personnes et seul un nombrerestreint d’entre elles – si nous réformons le secteur de laformation technique – occupera des emplois sûrs. Qu’enest-il du reste ? Que va-t-il leur arriver ? C’est d’autantplus le cas lorsque nous sommes en présence d’ungouvernement qui possède un certain nombre deministères chargés des divers types d’enseignements, carchacun de ces ministères ne s’occupe que de sondomaine de travail propre et ce, indépendamment lesuns des autres. Au Yémen, par exemple, il y a environ4 millions d’élèves dans le système d’enseignementnational. Ne seront-ils plus que dix, douze, quinze oumême cent mille dans quelques années ? Mais alors,qu’en est-il du reste ? Il faut que tous puissent bénéficierdu développement de leurs compétences et faire leur vie,travailler et gagner leur vie. Aussi, devons-nous, en tantque représentants des organisations internationales,commencer à penser à changer d’attitude et de point de

vue vis-à-vis de cette question. C’est un premier point.Le deuxième point, bien sûr, c’est que nous sommes icien présence de l’OIT, de la Banque mondiale, del’UNESCO et d’autres organisations, et que personnen’a encore abordé ou tenté d’aborder le problème de lapopulation et de son accroissement. Chaqueorganisation traite encore une fois de ses propresproblèmes. Nous ne considérons pas encorevéritablement l’accroissement de population commel’un des problèmes majeurs auxquels doivent faire faceles programmes de développement. Vous savez, lorsquedans les pays du tiers-monde cet accroissement est del’ordre de 3 % à 3,5 % ou que sais-je, ou de 2,5 % auNigeria, ce problème est un obstacle majeur. Pourquoine l’évoquons-nous donc tout simplement pas ? Toutesces organisations forment presque une seule et mêmefamille et en tant que tel, elles devraient véritablementaborder ce problème, mettre en place différentsprogrammes et mettre en place un accord général ouune politique générale afin d’aborder cette question, cequi permettrait de résoudre ou faciliterait la résolutiond’autres problèmes, tels que l’enseignement en généralet la formation de la population active. »

le secondaire est que ces derniers ouvrent les portesvers de très courtes carrières. Les données montrent que lesrésultats d’une entrée précoce dans le monde du travailsont plutôt bons, mais que les revenus ne sont pas siimportants que cela et que l’évolution de carrière n’estpas si bonne que cela pour les personnes ayant reçu cetype d’enseignement secondaire. Aussi l’approcheautrichienne et norvégienne est-elle de s’assurer quel’enseignement général occupe une place suffisamment

importante dans les programmes techniques, afin depouvoir créer une passerelle vers l’enseignementsupérieur et y être reconnu. Et de façon intéressante, l’onconstate une poussée générale, je crois, des programmesde l’enseignement technique et professionnel versl’enseignement supérieur, dans lequel, en fait, ceux-ciprofitent d’un statut beaucoup plus élevé que lesprogrammes de l’enseignement général. »

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3) Ressources humaines pour conduire les réformes

Origine de la question a

David Fretwell Banque mondiale

Détail« Question concernant les syndicats d’enseignants.Personne n’a abordé le sujet et je souhaite connaîtrevotre sentiment et savoir comment vous pourriez utiliserles syndicats d’enseignants pour encourager – et nondécourager – ce type de réforme. Le commentaire de

M. McKenzie en ce qui concerne la résistance desprofesseurs très spécialisés dans l’enseignementtechnique à un élargissement de leurs horizons, n’estqu’un petit échantillon du problème. »

Origine de la question b

Ministère du travail français

Détail« Je représente ici plutôt le secteur travail emploi duMinistère du Travail français. Je voulais remercier lesdeux derniers intervenants M. Yakubu et M. McKenziepour avoir abordé la question des formateurs et desenseignants, donc quelque part la question de lapédagogie. Nous sommes ici dans un CentreInternational d’Etudes Pédagogiques. Je crois que l’onparle beaucoup de réformes, de systèmes, de difficultés,de problèmes, mais il faut aborder la question desressources humaines pour conduire les réformes.Effectivement si les formateurs, les responsables del’action pédagogique, les cadres de la formationprofessionnelle ne sont pas mobilisés, on a peu de chancede conduire ces projets et ces réformes très ambitieuses.Ma question est une question tournée un peu vers lesbailleurs de fonds : Est-ce qu’on a vraiment le sentimentque cette question des ressources humaines, c’est-à-diredu recrutement, du profil des formateurs, de leur rôle,de leur mission, est mise en avant ? On va parler demain,

je crois, de la question de l’orientation professionnellealors qu’il ne serait pas raisonnable de proposer dessystèmes d’orientation professionnelle. En revanche ilfaut sans doute que les formateurs soient les premiersagents d’information et de conseil auprès de leursdifférents publics sur les possibilités d’emploi, surpourquoi aller plutôt dans tel cycle que dans tel autre.Donc la question de la qualité des formateurs, de leurrôle, de leur mission, de leur rémunération, de leurrecrutement, de leur évolution de carrière, de leurperfectionnement me semble être absolument au coeurde tous ces débats. Peut-être oublie-t-on, de temps entemps, un petit peu cette dimension humaine dessystèmes de formation professionnelle. Voilà, c’était justeune remarque, et un grand merci aux deux précédentsorateurs pour avoir abordé ce point qui me tient à cœur,comme certains le savent dans la salle, dont la FondationEuropéenne de Turin avec qui j’en avais déjà parlé. »

Réponses« Pour des raisons historiques, là encore, et du fait de ladiscrimination dans le travail et parce qu’autrefois,tout le monde rejoignait l’administration coloniale,les gens pensaient que ce qu’ils devaient faire, c’était allerà l’université, passer un diplôme en arts ou en musique,

mais pas en ingénierie, parce que les ingénieurs devaienttravailler avec leurs mains, dans la saleté. Aussi lesconditions d’exercice des enseignants de la formationprofessionnelle et technique étaient moins attrayantes.Nous nous attaquons actuellement à ce problème. »

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4) Inadaptation des stratégies des institutionsportées sur l’enseignement et non sur la formation

Origine de la question

Fred FluitmanOIT

Détail « Les deux intervenants sont issus d’institutions dont lenom comporte la mention « enseignement » et de monpoint de vue, ils ont en effet plus parlé d’enseignementque de formation. Dans les deux exposés, je n’ai pasimmédiatement perçu le lien avec le monde réel dutravail, en particulier dans le cas du Nigeria. Et je suisd’accord avec ce qui a été dit auparavant, à savoir que sivous avez 30.000 inscriptions dans l’enseignementtechnique et la formation professionnelle d’une part,et d’autre part, vous avez 3 millions de personnes quichaque année « vont quelque part » et que cela ne vousconcerne pas, permettez-moi de vous dire que je penseque les stratégies que vous proposez sont totalement

inadéquates. Avec tout le respect que je vous dois, c’estun coup d’épée dans l’eau ! Vous évoquez une réformedu programme, or ce n’est pas la solution à ce problèmeparticulier, je pense. Vous nous ressortez cette histoire deprofessionnalisation. C’est ce sur quoi je veux préciserma question. L’UNESCO a pour les études et enquêtesun très grand respect et cela a démontré à de nombreusesreprises que la professionnalisation ne marche pas. Lesenseignants n’en veulent pas, les étudiants n’en veulentpas, les parents n’en veulent pas, cela coûte trop cher etc’est inefficace. Permettez-moi de vous dire que ce sontlà cinq bonnes raisons pour ne pas recourir de nouveauà la professionnalisation. J’en terminerai là. »

Réponse a« Pourquoi sommes-nous inquiets, pourquoi continuons-nous à mettre du vieux vin dans la même bouteille pourensuite tenter de la réintroduire sur le marché ? Et bien làencore, avec tout le respect que je vous dois, je souhaiterevenir sur votre commentaire, en particulier lorsque vousdites : « les parents n’en veulent pas, les étudiants n’enveulent pas ». Mais la question que j’aimerais poser, c’est :le pays en a-t-il besoin ? Oui, au Nigeria, nous en avonsbesoin ! Et dans chaque pays en voie de développement !Comment satisfaire à ce besoin ? Grâce à la main d’œuvreétrangère. Si vous allez au Nigeria aujourd’hui, vousconstaterez que la majorité de nos besoins sont satisfaitsen faisant appel à des techniciens étrangers, qui doiventvenir dans notre pays parce que notre système ne proposepas cette formation.

Je crois donc que ce besoin est justifié et qu’il est bien réel.Si vous étudiez les pays qui ont transformé leur économieau cours des 25-30 dernières années, vous constaterez queceux-ci l’ont fait avec succès. Si vous prenez le cas de laCorée, entre 1965 et 2000, et que vous considérezl’évolution de la taille du secteur de l’enseignementtechnique et professionnel, il est passé de moins de 20 % àpresque 50 % aujourd’hui. Et dans tous les paysdéveloppés, vous constaterez que le pourcentage d’élèvesdans le niveau secondaire supérieur qui suivent unenseignement technique et professionnel est d’au moins30 % en France, en Allemagne, en Grande-Bretagne, auxEtats-Unis… Partout… Mais le nôtre est de moins de 1 %. »

Réponse b« Lorsque j’ai évoqué la professionnalisation dans mesremarques, j’ai émis un certain nombre de réserves.Comme vous l’avez mentionné, tenir compte du nombred’heures disponibles, de la qualité des enseignants et de lademande des parents pour décider de la professionnalisa-tion des sujets ne constitue pas une solution. En revanche,une combinaison des sujets pourrait l’être. Par exemple, si

vous étudiez l’environnement ou la pollution, vousapprendrez comment la technologie pourra vous venir enaide ou vous ferez des travaux pratiques, en demandantaux enfants ou aux jeunes étudiants d’utiliser ce type dematériel. Et bien cela rendra l’ETFP ou l’enseignement dessciences plus attractif. »

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Réponse c« Je suis d’accord avec la critique : une trop grande placeest accordée à la professionnalisation. Mais je suiségalement d’accord avec la réponse apportée parM. Iwamoto, lorsqu’il dit, si j’ai bien compris les diversexposés, que l’on s’efforce de rassembler les forces del’enseignement académique et professionnel dans unesorte de programme qui concernerait un plus grandnombre d’étudiants. Cela ne signifie pas nécessairementintégrer plus de matières traditionnelles dans lesprogrammes professionnels, mais offrir la possibilité aux

jeunes de toutes les filières de passer du temps sur un lieude travail, de bénéficier d’une application concrète desprogrammes, de pouvoir travailler à mi-temps durant lesétudes, et ainsi de suite. Je crois qu’en termes deprogramme d’apprentissage tout au long de la vie et detype de requêtes de l’économie de la connaissance, si vousne transmettez pas cette base générale de confiance etd’enseignement professionnel à un plus grand nombre dejeunes, vous devrez faire face à de nombreux problèmessociaux et économiques dans le futur. »

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Séance 6 :ETFP DANS LE CONTEXTE DE L’ÉDUCATION

TOUT AU LONG DE LA VIE

L’éducation tout au long de la vie :un cadre pour le développement de l’ETFP en Amérique Latine ?

M. William Experton – Banque mondiale

L’apprentissage tout au long de la vieet l’enseignement professionnel : l’expérience des pays candidats

M. Jean-Raymond Masson – ETF

Débat avec la salle

Zayer EL MAJIDPrésident de séance

MAROC

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La demande de travailleurs qualifiés est élevée car lesnouvelles technologies requièrent davantage de compé-tences et que d’une manière générale ces travailleurs sontplus aptes à s'adapter au changement. Or, dans lesannées 1990, la région Amérique Latine et Caraïbes secaractérisait par une croissance de la productivité relative-ment faible en raison d'un déficit en main d'oeuvre quali-fiée et en technologie.

Le retard éducatif y est particulièrement important enmatière d'enseignement secondaire et tertiaire. Qui plusest, le développement éducatif est fortement déséquilibré.Cela résulte : de la demande croissante en travailleurséduqués liée au mode d'intégration des pays d'AmériqueLatine dans l'économie mondiale de la connaissance ; etde la forte inégalité en Amérique Latine.

Cela dit, le déclin des salaires et des taux de rentabilité del'enseignement secondaire pourrait indiquer qu'en plusdes problèmes d'accès se pose un sérieux problème dequalité. La formation technique et professionnelle donton attend qu'elle permette un accès au marché du travailpour les étudiants de faible revenu est ainsi au centre dela controverse.

Dès lors que penser de la formation tout au long de lavie : est-elle juste un beau concept, une mode des paysles plus avancés ou peut-elle offrir un cadre utilepouvant aider les décideurs à construire des politiquesrépondant aux défis de la société de la connaissance ?L’exposé mettra en valeur les conclusions principales dedifférentes études de cas conduites en Amérique Latine.

Introduction

Mes chers collègues,

Le philosophe français Alain, qui aimait beaucoup nous rappeler à la modestie disait que « si vous vous asseyezsur un siège, et que sur ce siège il y a une épingle qui vous pique, vous aurez beaucoup de difficultés à avoir unraisonnement logique ». J’espère donc que, vue l’heure tardive, votre estomac ne vous rappellera pas à d’autres prioritéset que vous pourrez continuer à écouter cette présentation avec un peu de pensée logique. C’est le seul souhait que jeformule pour ma présentation.

L’éducation tout au long de la vie :un cadre pour le développementde l’ETFP en Amérique Latine ?

I. Paradoxes éducatifs en Amérique latine

On a beaucoup parlé de formation tout au long dela vie ; l’UNESCO nous a rappelé avoir promulgué ceconcept inventé dans les années 60 ; on l’a vu avoir beau-coup de succès auprès de l’OCDE, et on voit les paysdéveloppés mettre en œuvre des politiques très ambitieu-ses en matière d’apprentissage tout au long de la vie.

La question que nous nous sommes posée et que jesouhaite poser de façon très simple est la suivante : est-ceque ce concept est adapté à la réalité des pays d’AmériqueLatine ?

Je dois faire tout de suite une petite distinction :

quand on parle d’Amérique Latine, on parle de pays àmoyen revenu, c’est-à-dire de pays qui vont de 2 000à 8 000 USD par tête ; or, si je prends le cas du Nigeriaqui nous a été présenté, où le revenu était de 370 USDpar habitant, il est évident qu’il faut être prudent quandon essaye de reproduire des leçons de paysà pays.

En Amérique Latine, on s’aperçoit qu’il y aune énorme demande de travailleurs qualifiés et onva essayer de voir comment se caractérise cettedemande. Mais à côté de cette demande trèsforte de travailleurs qualifiés, on s’aperçoit aussi que

W. ExpertonCountry sector leader, Latin America and Caribbean

Banque mondialeRésumé

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II. Amérique latine et politique éducative

Quelles conséquences ceci a-t-il en matièrede politique éducative ? Je vais m’appuyer surquelques notions économiques. On s’aperçoitque la rentabilité de l’enseignement supérieur est

beaucoup plus grande en Amérique Latine quela rentabilité de l’enseignement secondaire. Onparlede rentabilité privée, mais il faut bien se rendrecompte que dans des pays où nous avons tout à la

l’Amérique Latine, a un très fort déficit en matièreéducative. Est-ce que les principes de l’éducationpermanente, de la formation tout au long dela vie permettent de combler cette brèche enqualifications ? C’est là la question.

Si on observe l’Amérique Latine on s’aperçoitque les deux dernières décennies en matière decroissance de la productivité ont été deux décenniesperdues. La productivité est essentiellement deux choses : c’est d’abord l’appropriation detechnologies, ce que l’on observe par l’augmentationde l’intensité capitalistique dans les organisationsproductives, dans les entreprises ; deuxièmement,c’est la mise au travail de gens plus qualifiés, et cecion le mesure tout simplement à travers le nombred’années d’éducation des travailleurs employés dansces entreprises. On s’aperçoit que le résultat enAmérique Latine est extrêmement décevant puisquel’Amérique Latine est, après l’Afrique sub-saharienne, la région du monde où la croissance dela productivité a été la plus faible. Que s’est-il passé ?

Un phénomène très important s’est produitau cours des dix ou quinze dernières années : on aeu une augmentation très forte des salaires despersonnes ayant une formation de niveau supérieur,en fait des gens qui sont sortis de l’université. Aumême moment on a vu, en contraste, une stagnationou une détérioration des salaires des gens quisortaient de l’enseignement secondaire. Si on essayede le voir en graphe, par exemple en Colombie, c’esttrès caractéristique. Sur la gauche vous voyez ce quis’est passé dans l’enseignement supérieur, sur ladroite ce qui s’est passé dans l’enseignementsecondaire. Dans l’enseignement supérieur, vousvoyez quelque chose qui semble contredire les loisdu marché. En gris clair, l’augmentation desdiplômés de l’enseignement supérieur, qui estrelativement forte, donc on pourrait se dire que sion augmente de nombre de diplômés, les salairesvont tendre à baisser. Et bien, non, si vous regardezla courbe en noir, vous vous apercevez queles salaires ont explosé. Inversement, dansl’enseignement secondaire, en se souvenant, bienentendu, que tous ces pays ont investi en matièred’accès à l’enseignement secondaire, on voit lenombre de diplômés de l’enseignement secondaireaugmenter – la ligne grise – mais en même temps

le salaire relatif de ces diplômés sur le marché dutravail est lui en train de baisser. Est ce que c’est unproblème de qualité, ou est ce autre chose ?

C’est véritablement un problème qui a desconséquences très importantes car non seulementcela va expliquer une partie de la participation desfamilles et des élèves à l’enseignement secondaire,mais aussi le désir d’investissement du secteur privédans l’enseignement. On s’aperçoit par exemple,dans tous les pays d’Amérique Latine, qu’il y aénormément d’argent qui s’investit dansl’enseignement supérieur parce que cela paye, et qu’àcôté de cela il y a très peu d’argent qui s’investit dansl’enseignement secondaire. Donc on a ce qu’onappelle, comme mon ami Arvil Van Adams pourraitnous le dire, un « market failure ».

Qu’est ce qui provoque le changementactuellement dans les pays d’Amérique Latine ? Ona fait des recherches et on s’est aperçu que l’influencevenait de l’extérieur, venait des entreprises quiétaient orientées vers l’exportation, donc venait duphénomène d’intégration très forte de tous les paysd’Amérique Latine dans l’économie mondiale ;et que c’est cette demande des entreprises quitirait la demande de main d’œuvre qualifiée etparticulièrement la demande de diplômés del’enseignement supérieur.

En face de ceci on a un énorme problème quiest le déficit en matière d’éducation de la zoneAmérique Latine. Si on compare l’Amérique Latineau reste du monde et si on essaye de mettre enparallèle le nombre d’années d’éducation de la forcede travail avec leur niveau de revenu, les paysd’Amérique Latine ont en moyenne une force detravail qui a seulement 5,8 années d’éducation, moinsque le nombre d’années pour finir l’école primaire. Etsi on met cela par rapport à leur niveau de revenu, ons’aperçoit qu’il y a une brèche : normalement, si onmettait cela sur une courbe, les pays d’AmériqueLatine devraient avoir 1,5 année de plus d’éducation.Donc en gros, en rapportant revenus et niveaux deformation, on devrait avoir sept années d’éducationdans la force de travail. Le déficit est essentiellementdans l’enseignement secondaire et vous pouvez voirque tous les pays d’Amérique Latine forment un bloctrès en deçà de la courbe.

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fois un enseignement secondaire public et un fortsecteur d’enseignement privé, cela veut dire quepour les familles, mettre des enfants dansl’enseignement secondaire demande uninvestissement. Or, il y a le coût d’opportunité :lorsque les enfants ne travaillent pas, et notammentdans le cas des enfants de familles pauvres, ils nepeuvent pas contribuer à la famille, donc il y a là un« investissement/temps » et puis il y a aussi, en outre,le fait de devoir quelquefois payer pour être éduqué ;si la rentabilité de cet enseignement secondaire estfaible, vous comprenez bien que vous avez une trèsforte chance que les enfants l’abandonnent avant lafin. Et c’est bien connu, on le voit même en France,et dans tous les pays où dans l’enseignementprofessionnel, on voit des enfants qui un an avantd’obtenir leur diplôme abandonnent. Pourquoiabandonne-t-il ? Parce qu’il a trouvé un job ! Il avaitbesoin du job, il voulait gagner de l’argent ! Donc ily a là des phénomènes très importants.

Cela veut dire qu’en termes de politiqueéducative, vous ne pouvez pas seulement agir surl’offre de formation, c’est-à-dire construire uneécole (bien sûr, il en faut davantage), mais vousdevez aussi agir sur la demande d’éducation. Je suis

un très fervent supporter – parce que ce n’est pas faitdans les pays d’Amérique Latine – des bourses dansl’enseignement secondaire, d’un appui à lademande ; si on n’aide pas les familles de bas revenusà accéder à l’enseignement secondaire, elles nepourront pas y arriver. Donc il faut à la fois desmesures au niveau de l’offre et des mesures pour lademande.

Et puis il faudra bien corriger des iniquitésfondamentales des politiques éducatives. EnAmérique Latine comme en Afrique, pour qui sontles bourses ? Les bourses sont pour les élèves de l’éliteet pour l’enseignement supérieur, c’est-à-dire quel’Etat fait exactement ce qu’il ne devrait pas faire : ilfaut sans doute des bourses dans l’enseignementsupérieur, mais il faut des bourses ciblées ; et s’il fautdes bourses, il faudrait que ces bourses soient desbourses uniquement concentrées sur les élèves debas revenus dans l’enseignement supérieur, et sur laformation des enseignants, car si on n’aide pasl’enseignement supérieur à former les enseignants,on y arrivera jamais dans l’enseignement secondaire.

Voilà quelques exemples de changements quidevraient se faire dans les politiques éducatives.

III. Où en est l’enseignement professionnel en Amérique latine ?

L’enseignement professionnel se trouve aucentre de la controverse. L’enseignement profes-sionnel en Amérique Latine est un enseignementqui a été créé dans les années 60-70 et qui aeu son heure de gloire. Ce sont de très bonnesinstitutions, qui ont été essentiellement crééespour répondre, à un moment donné, à une demandede main-d’œuvre qualifiée de niveau secondaire.Et maintenant elles sont prises en tenaille entre,d’une part, le facteur politique, c’est-à-dire que leshommes politiques demandent à cet enseignementprofessionnel de faire tout, et notamment des’occuper de tous les enfants qui échouent dansl’enseignement général, donc d’avoir un rôle social(et en même temps on dit à cet enseignementprofessionnel, vous n’êtes pas au niveau !) et,d’autre part, le fait que la demande du marchés’adresse aux techniciens supérieurs alors que tousces établissements ne sont pas équipés pour répon-dre à cette demande dans l’enseignement supérieur.Ils sont donc dans la pire situation.

Nous sommes allés voir dans certains pays, àtravers des études de cas, où était la demande deformation. On s’est aperçu de caractéristiques quisont très proches des pays développés. On s’estaperçu que la demande de formation des adultes

était très forte dans tous les pays, que ces gens làcherchaient véritablement de la formation pourtrouver un emploi et pas du tout par fantaisie. Làoù la demande était la plus forte, c’est entre l’âge de25 et 35 ans, c’est-à-dire l’âge où les personnespeuvent être les plus productives. La demande deformation, c’est-à-dire celle qui traduit une volontéréelle de se former provient de gens ayant enmajorité un niveau secondaire de formation, et cettedemande n’existait pas parmi les gens qui n’avaientque le niveau primaire. Ce qui nous fait dire que sion veut faire de la formation tout au long de la vie,il va bien falloir amener tous ces gens au niveausecondaire.

Ils avaient aussi une très forte demande decertifications de leurs compétences. Qu’est-ce quecherchent les employeurs ? Les employeurs veulentdes jeunes formés avec une formation de base deniveau secondaire ; et cela nous a étonnés car c’estune caractéristique de la demande que l’on trouvedans les pays les plus développés. En AmériqueLatine si vous avez seulement le niveaud’enseignement primaire, vous avez accès au secteurinformel, vous n’avez pas accès au secteur formel.Cela se voit dans les chiffres et quand on interrogeles employeurs. On s’est aperçu aussi que les

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IV. Quel est le coût d’un sous investissement au bon niveau d’éducation ?

On a fait certains calculs dans le cas duMexique et les chiffres sont impressionnants. Endépit de l’investissement éducatif très fort d’un paysqui appartient maintenant à l’OCDE, on s’aperçoitque le nombre d’adultes sans formation de niveausecondaire ne fait qu’augmenter, soit 45 millions depersonnes dans la force de travail, et ceci représente75 % des adultes de plus de quinze ans. On vaprobablement retrouver le même type de chiffresquand on va présenter cet après-midi le cas duChili.

On s’est aperçu aussi que, dans la plupart despays, les formations privées en matièreprofessionnelle sont très développées. Hier, nousavions une intervention qui disait qu’au Brésil laformation publique était très insuffisante. C’est vraique la formation publique financée par le public nereprésente que 13 % des étudiants, tout le reste estfinancé par le privé. On peut voir ceci comme unebouteille à moitié vide ou à moitié pleine, mais jedirai que là on a quelque chose d’intéressant, on aun pays vivant, on a une demande forte, et unecréation d’offre de formation également forte.

Tout le problème tient en ce que nous disaithier Arvil Van Adams : quel est le rôle de l’Etat ?Comment, par une bonne gouvernance, va-t-il fairepour que ce marché (parce que c’est bien unmarché) reste équitable pour l’ensemble de lapopulation ? On a vu aussi que, malheureusement,les formations pour adultes financées par l’Etat,comme les formations pour adultes financées parles entreprises, ne corrigent pas les inégalitésfondamentales si elles ont été créées par l’éducation.Plus vous êtes éduqués, plus votre opportunité derecevoir de la formation tout au long de la vie estgrande, et cela se voit dans les chiffres. Plus la firmeest importante, plus les entreprises sont grosses, ontdu succès, sont exportatrices, font du profit, et plusles salariés de ces entreprises auront droit à uneformation. Il y a tout un problème de « commentorganiser les incitatifs fiscaux » de façon à aller versles petites et moyennes entreprises. On s’est aperçuaussi que les individus ont très peu de possibilité decertifier leurs compétences. Donc les inégalités sereproduisent, même au long de la vie.

Conclusion

Je crois que tous ces pays ont besoin de construire un cadre mieux organisé pour la formation tout aulong de la vie et je propose simplement quelques grandes orientations sachant qu’on pourrait en proposerdavantage. Elles ont déjà été évoquées par tous les intervenants précédents.

- Je suis tout à fait d’accord avec mon collègue de l’UNESCO : je crois qu’il faut s’attacher à l’objectifque tous les élèves aient les compétences génériques, qu’ici j’appelle les fondations, pour pouvoirêtre employable ou pour pouvoir être formé tout au long de la vie. Si ces compétencesne sont pas là, cela ne pourra pas se passer. Je dis souvent à mes collègues que quand on visite une école,on s’aperçoit très vite quelles sont les compétences qui manquent.

- Visitez une école secondaire et essayez de demander combien de temps les élèves passent à travailleren équipe ? C’est pourtant ce que demandent les employeurs, une forte capacité à travailler en équipe ; voustrouverez un résultat voisin de zéro. Ce qui est fait dans l’enseignement primaire n’est pas fait dansl’enseignement secondaire. On voit les enfants travailler en équipe quand ils sont dans le primaire, on nele voit pas dans l’enseignement secondaire.

- Enfin développer la capacité à être autonome pour apprendre et aller chercher l’information. Combiend’écoles secondaires le font ? Très peu. C’est pourtant des capacités qui doivent être apprises au niveaude l’enseignement secondaire.

employeurs formaient pour des tâches, desqualifications spécifiques, mais aussi formaient pourdes qualifications générales. Il y avait probablementun déficit dans le secteur éducatif et ilscompensaient ce déficit en donnant une formation

générale à leurs employés. Souvent ils faisaient ceteffort de formation par-dessus l’effort qu’ils faisaientdéjà en matière de paiement de la taxe à la formationprofessionnelle.

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J.R. MassonConseiller spécial

Fondation européenne de Turin

L’éducation et la formation tout au long de la vie sontmaintenant au centre des politiques conduites parl’Union Européenne dans les domaines de l’éducation,de la formation et de l’emploi. Les actions dans cesdomaines s’inscrivent dans le cadre de la stratégie deLisbonne et en relation avec le processus deCopenhague, celui concernant la mise en œuvre durapport sur les objectifs 2010, et les lignes directricespour l’emploi.

Dans l’ensemble des pays de l’Union et des payscandidats, des stratégies visant à l’apprentissage toutau long de la vie sont en préparation, et la question estde savoir si ces démarches vont être suffisammentambitieuses et systémiques ou encore adaptées auxobjectifs fixés dans la stratégie de Lisbonne.

L’enseignement secondaire en particulier avec lesdifférentes filières de formation technique etprofessionnelles qu’il recouvre est directementconcerné par les changements en cours et envisagés.Ses relations avec l’enseignement supérieur et encoreplus avec la formation continue en particulier sur lelieu de travail sont au cœur d’enjeux essentiels qu’ils’agît de bien identifier et de traiter en conséquence.

Ces questions se posent dans les pays de l’Union et lespays candidats, mais aussi dans tous les pays du mondedès lors qu’ils sont engagés dans les processus deglobalisation et de préparation à l’économie de laconnaissance. Néanmoins, les questions se posent dansdes termes spécifiques et appellent des réponsesvariables selon les pays et les régions concernés.

Introduction : L’importance de l’apprentissage tout au long de la vie

La question aujourd’hui est certainement de continuer à parler de l’apprentissage tout au long de la vie, mais surtout dele préparer, de le mettre en œuvre, de le faire. Je cite simplement deux chiffres : dans un pays comme la France, commele disait hier le M le Ministre Darcos, il y a encore soixante mille jeunes chaque année qui quittent le système scolairesans qualification. Par ailleurs si l’on observe la question de l’accès à la formation continue en France, on constate queles chances d’accès vont de un à dix sinon plus, selon les catégories sociales, alors que la loi sur la Formation permanentedate de plus de 30 ans.

Je vais vous parler de ces questions-là, dans le contexte, évidemment, des pays candidats et de l’élargissement de l’Unioneuropéenne, mais je pense que les messages que je vais essayer de faire passer sont intéressants pour tous les pays icireprésentés. D’abord parce qu’en matière de politique de formation, les expériences des uns ont toujours une valeurpour les autres. Ensuite parce que les séances d’hier ont montré à quel point les problèmes des systèmes d’éducationet de formation face aux enjeux de la mondialisation se posaient souvent dans des mêmes termes. Enfin la séance d’hiera clairement démontré combien l’apprentissage tout au long de la vie pouvait être un message fort pour les paysen développement y compris dans le cadre de l’économie informelle, même si les solutions étaient radicalementdifférentes. Il est ainsi clair, comme je l’ai trouvé récemment dans un document du BIT, que l’apprentissage tout au longde la vie est une question de survie pour tous les pays.

L’apprentissage tout au long de la vieet l’enseignement professionnel :l’expérience des pays candidats

Résumé

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Il y a maintenant autour de « l’apprentissagetout au long de la vie », une abondante littérature,une large panoplie de textes fondateurs qui ont étéproduits au niveau européen depuis les années 1980et surtout depuis 2000 après le Conseil de Lisbonne,mais aussi par l’UNESCO, l’OCDE, la BanqueMondiale ou le BIT, et tous convergentsensiblement sur les mêmes idées. Au niveaueuropéen, l’apprentissage tout au long de la vierecouvre aujourd’hui un cadre d’action politiqueavec des objectifs spécifiques (les objectifs deLisbonne), une méthode de travail qui est laméthode de coordination ouverte avec aussi desindicateurs de suivi et des niveaux européens deréférence (benchmarks).

La communication de la Commission surl’apprentissage tout au long de la vie identifiesix messages clefs, comme les éléments fondateursdes stratégies à mettre en place. Il s’agît (1)d’organiser le partage des rôles et desresponsabilités, (2) de mettre l’accent sur lademande, (3) de disposer de ressources adéquates,(4) de faciliter l’accès pour tous, (5) de promouvoirune culture de l’apprentissage, et (6) de rechercher

la qualité et l’excellence. La communicationintroduit aussi six priorités d’action qui sont :- la valorisation des apprentissages qu’ils soient

formels, non formels ou informels- les systèmes d’information,de conseil et d’orientation - l’investissement de temps et d’argent,- la nécessité de rapprocher l’offre de la demande,- le développement des compétences de base,- La mise en œuvre des pédagogies adaptées.

Et peut-être, ce qui est la clé dans tout cela,c’est que ce message de l’apprentissage tout au longde la vie, nous concerne tous, des plus jeunes auxplus vieux, dans toutes les catégories de lapopulation, y compris les Roms d’Europe Centraleet d’autres. Il concerne aussi ceux qui sont dansl’économie informelle, et il vaut tout au long de lavie, comme le dit la communication, « du berceaujusqu’au tombeau », mais aussi tout « au large » dela vie, c’est-à-dire à la fois dans les activités à l’école,dans l’entreprise, dans la vie quotidienne. Et enfin,c’est un message qui s’adresse à tous les acteurs, quece soit l’Etat, les partenaires sociaux, les employeurs,les syndicats, les ONG, les collectivités locales etbien sûr, les individus eux-mêmes.

I. Le contexte européen

Je m’appuie sur les conclusions d’un rapportétabli par la Fondation européenne pour laFormation sur la situation des pays candidats aprèstreize années de réformes et de coopération dans ledomaine de la formation professionnelle. Commevous pourrez le lire dans ce rapport, la situation estextrêmement différente selon les pays en ce quiconcerne les réformes entreprises et les performan-ces atteintes. Beaucoup a été fait, mais beaucoupreste à faire. Un aspect important à noter, ce sontles grandes et graves inégalités à l’intérieur dechaque pays, graves inégalités dans l’accès à l’em-ploi, bien sûr, l’accès à la formation et surtout l’ac-cès à la formation continue, avec des différencesconsidérables entre les régions, selon qu’elles sontrurales ou urbaines ou qu’elles sont touchées parles restructurations industrielles, entre les groupessociaux, les riches et les pauvres, les plus éduqués etles moins éduqués, les jeunes et les moins jeunes.Ces inégalités dans l’accès à la formation sont plusimportantes qu’elles ne le sont actuellement enEurope avant élargissement et donc, l’Europe, unefois élargie, va avoir à lutter de façon plus forte

contre des inégalités plus grandes que celles qu’ellerecouvre actuellement.

J’en viens à des éléments plus récents issus del’examen des rapports que chaque pays a produitau début de l’été 2003 à propos des progrès enmatière de formation et d’éducation tout au longde la vie, depuis deux ans, depuis la résolutiondu Conseil. Les conclusions sont que beaucoupd’initiatives ont été lancées, mais la plupart sonttrop récentes pour en apprécier les effets. Beaucoupde travail se fait au niveau national et au niveaulocal et des stratégies sont en préparation. Ce quiapparaît nettement, c’est un déséquilibre dans cesstratégies, ainsi que dans les actions mises en place,entre ce qui relève du système formel de l’éduca-tion qui recueille l’essentiel des actions et des finan-cements, et le reste. Le reste, c’est-à-dire, ce qui sepasse dans l’entreprise et auprès des chômeurs. Ilapparaît, en revanche, l’idée que le système éducatifest en mesure de se substituer à ses partenaires, dèslors que ces derniers ne sont pas prêts à assumerleurs charges. Et là, il y a là peut-être des risques.

II. La situation des pays adhérents et candidats

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Qu’est ce qui importe maintenant, dès lors quel’Europe insiste auprès de tous ses pays membressur la nécessité de bâtir de véritables stratégies ?Sans doute, d’abord, de penser que la formation,l’éducation, l’apprentissage tout au long de la vie, nesont pas une fin en soi, mais des objectifs au servicede causes plus générales que sont l’emploi,l’employabilité , l’inclusion sociale, la citoyenneté etle développement personnel. Ensuite, de bienprendre en compte les disparités importantes enmatière d’accès à l’éducation et à la formation, que jerappelais à l’instant. Il importe aussi d’adopter unevue globale, et de bien prendre en compte tous leséléments, qu’ils concernent l’enseignement généralou l’enseignement technique et professionnel, ycompris l’apprentissage, regarder la question deschômeurs, la question des actifs, la question desinactifs etc., sachant que c’est la qualité du maillon leplus faible de la chaîne qui déterminera la qualité del’ensemble.

Il faut ensuite se demander comment exercerla responsabilité dans l’élaboration de la stratégie. Laréponse n’est pas évidente. Ce n’est certainement pasun seul acteur qui peut le faire. La solution est plutôtdu côté d’un partage des responsabilités à organiser

entre différents acteurs avec des rôles différents, etdes partenariats à établir autour d’un concept quireste à définir en commun. A partir de cela, il fautêtre capable aussi d’établir des priorités, d’y consacrerles moyens nécessaires et de s’y tenir dans le cadre deplans à moyen terme. Certaines actions ont unevaleur plus importante, plus systémique que d’autres.Par exemple, la question de la reconnaissance desqualifications acquises par l’expérience et enparticulier sur le lieu de travail, est certainement unenjeu clé pour la formation tout au long de la vie.Elle appelle la mise en œuvre de systèmes nationauxde qualification capables de traiter sur un piedd’égalité les apprentissages formels et lesapprentissages non formels et informels. Lamodernisation des systèmes d’orientation et deconseil, et leur articulation sur le système éducatif eten même temps sur le marché du travail et lesbureaux de l’emploi, est aussi un aspect clé de toutestratégie cohérente en vue de l’apprentissage tout aulong de la vie, de même que tout ce qui peutcontribuer à mieux articuler systèmes formels et nonformels, formation initiale et continue, éducation etemploi. Ceci suppose certainement d’accroître lesfinancements et tout au moins de les accorder auxpriorités recensées.

III. La question des stratégies d’apprentissage tout au long de la vie

Les questions précédentes amènent à se pencherde façon plus spécifique sur l’enseignement secondairedans la mesure du rôle majeur qu’il joue dans les payscandidats et de l’attention prioritaire qui lui est portéepar les gouvernements. C’est dans l’enseignementsecondaire en effet que se situe la majeure partie dusystème de formation professionnelle. La question estde savoir quel rôle spécifique il peut et doit jouer dansce contexte, comment il doit évoluer, comment il peut

traiter les difficultés particulières qu’il rencontre dufait du manque de moyens pour les équipementstechniques et pour la formation des enseignants, de lalongueur et de la complexité des processus visant àmoderniser les curricula en fonction des besoins dumarché du travail et de la société dans son ensemble,du désintérêt des élèves pour ses filières dans la plupartdes pays, et encore de la rupture des liens avec lesentreprises.

IV. Apprentissage tout au long de la vie, formation professionnelleet enseignement secondaire

Beaucoup d’actions sont engagées autour dudéveloppement des compétences-clés, avec unaccent mis sur l’apprentissage de l’informatique etde l’usage d’Internet, le développement des languesétrangères, l’entreprenariat. Ces actions sont de plusen plus souvent décidées au niveau local dans lecontexte de partenariat entre les acteurs concernés.Les régions mises en place dans certains pays jouent

un rôle considérable. Cependant, les financementsmis en jeu restent limités dans la plupart des pays,même si, dans certains d’entre eux, se manifeste lacapacité de redéployer des fonds afin de traiter desquestions prioritaires, comme la Hongrie l’amontré en augmentant, l’année dernière, de 50 %les salaires des enseignants.

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On a déjà des indications qui viennent du cadreeuropéen, avec le processus de Copenhague, leprocessus des objectifs éducation et formation 2010,les indicateurs, les niveaux européens de référence.Tout ceci constitue déjà un cadre pertinent pouravancer. Mais il faut peut-être être un peu plusspécifique : Premièrement, je crois qu’on ne peut pastransformer, on ne peut pas moderniser la formationprofessionnelle dans l’enseignement secondaire sansregarder l’ensemble des filières de l’enseignementsecondaire dans le cadre d’une vision d’ensemble etd’une stratégie globale traitant de l’ensemble desbesoins de qualification. Deuxièmement, ladiversification des filières est aussi essentielle afin defaire face à des situations différentes et d’assurer laréussite de tous les élèves. Il convient de ce point devue, de ne pas ignorer l’apprentissage en tant quecapacité d’accueil au niveau de l’enseignementsecondaire, alternative à l’enseignement traditionneldans les écoles. Il faut aussi s’efforcer que l’orientationvers l’enseignement professionnel puisse résulter d’unchoix positif. Tout ceci suppose d’améliorer la qualitéde l’enseignement, d’avoir des équipementsperformants et de revaloriser la condition et laformation des professeurs.

Quand on observe dans les pays candidats les tauxde chômage, en fonction de la qualification deschômeurs, on s’aperçoit, que le taux est bien inférieurs’il concerne des jeunes titulaires de diplômes del’enseignement supérieur par rapport à des jeunes quisortent de l’enseignement secondaire. Mais cet écart,qui est naturel dans tous les pays du monde, estbeaucoup plus fort dans les pays candidats qu’il nel’est dans les pays de l’Union. Ce qui veut dire qu’il y aactuellement, sans doute compte tenu de la mauvaisequalité de l’enseignement professionnel secondaire,une incitation extrêmement forte à ne pas y aller, pouraller plutôt dans l’enseignement supérieur et ensuitetrouver un emploi. La préparation à l’économie et à lasociété de la connaissance, dans la mesure où elles fontappel à des qualifications surtout de niveau moyen etsupérieur, exige de briser ce cercle vicieux et des’attaquer sérieusement à la qualité de l’enseignementprofessionnel au niveau secondaire.

Enfin, je voudrais revenir sur l’idée qu’au sein del’enseignement secondaire, on doit s’attacher àpréparer aussi ce qui se passera après l’enseignement.Donc, la situation de l’emploi, mais aussi la capacité àcontinuer d’apprendre dans un contexte différent.Ceci suppose, de regarder de près l’articulation entre

formation initiale et formation continue. D’abord,pour dire qu’il faut améliorer la situation de laformation continue en s’attaquant à ses contenus etses méthodes et veiller à en assurer la qualité et unemeilleure adéquation aux besoins du marché dutravail et des individus ; il faut ensuite développer lesméthodes de validation des acquis et dereconnaissance des qualifications venant del’expérience de façon à permettre aux adultes dereprendre une formation, d’obtenir un diplôme et demieux se réinsérer dans le marché du travail. Mais ilfaut peut-être aller encore plus loin et se poser laquestion justement du partage des rôles entreformation initiale et formation continue.

Je voudrais terminer là-dessus justement en faisantréférence au débat sur l’école qui se dérouleactuellement en France, et s’articule sur certainesquestions clés qui ont fait l’objet de documentspréparatoires. Je vous lis simplement quelques phrasesde la fiche numéro quatre sur les missions de l’école, laquestion étant « Faut-il partager autrementl’éducation entre jeunesse et âge adulte et impliquerdavantage le monde du travail ? Voici simplementquelques mots, tirés au hasard de ce texte. D’abord,« la formation ne peut être réservée à la premièrepartie de la vie. Deuxième idée, « la formationcontinuée, au-delà de la formation initiale, n’a pasencore acquis un crédit suffisant dans notre pays. Plusloin, « plusieurs raisons plaident, cependant, en faveurd’un nouveau partage entre formation initiale etformation continue, nouveau partage qui supposeraitune réelle promotion de cette dernière.

Je termine avec ce paragraphe « une sortie plusprécoce du système éducatif, en cas de difficultésscolaires, à la condition qu’une véritable formationultérieure puisse prendre le relais après un passagedans le monde du travail, peut, au final, être préférablepour l’individu concerné. Il importe peut-êtredavantage d’obtenir un niveau de qualification peuélevé, mais suffisant pour espérer tirer profit d’uneformation ultérieure, que d’accumuler du retardscolaire et de prolonger le temps passé dans des étudesgénérales incertaines. Je ne dis pas que ceci est lasolution, je dis qu’en tout cas, c’est une façon de poserle problème qui, sans doute, regarde bien entendu lespays de l’Union européenne mais aussi les payscandidats et d’autres encore. Il y a là une piste nouvelle,en tout cas, qu’il me paraissait intéressant d’évoquerdans le débat.

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DÉBAT AVEC LA SALLE (6)1) Problème des populations autochtones en Amérique Latine

2) Décentralisation / Dette extérieure / Condition de travaildes enseignants en Amérique Latine

3) L’enseignement privé en Amérique Latine

4) Le statut du formateur

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Origine de la remarque

Soledad PEREZ de l’université de GenèveMaître d’enseignement et de recherche en éducation comparée

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1) Problème des populations autochtones en Amérique Latine

Détail« J’aimerais apporter quelques commentaires à l’exposéde M. Experton par rapport à l’Amérique Latine et ceux-ci seront peut-être des commentaires complémentaires.Je dirais qu’en Amérique Latine il y a différents contextessociopolitiques et économiques avec pour certains paysd’Amérique Latine un pourcentage non négligeablede peuples autochtones qui posent un véritable défi aux

systèmes éducatifs nationaux : c’est la question deslangues vernaculaires de ces populations autochtones.On sait, grâce aux études internationales, et je meréfèrerai notamment aux indicateurs de l’OXTAM, quele problème de la transition de l’école primaire à l’écolesecondaire pose justement beaucoup de problèmes pources adolescents. »

2) Décentralisation / Dette extérieure / Condition de travaildes enseignants en Amérique Latine

Détail« Mon second commentaire est qu’il faudrait seposer des questions sur les implications des politiques publiques de décentralisation sur les systèmes éducatifsnationaux, régionaux et locaux en Amérique Latine,avec comme constat que dans certains pays d’AmériqueLatine ils ont posés beaucoup de problèmes. Je diraiaussi qu’au niveau économique il faut se rappeler quebeaucoup de pays d’Amérique Latine ont une detteextérieure assez importante qu’ils sont en trainde renégocier, et je terminerai au niveau des conditions

de travail des enseignants que ce soit les enseignants duprimaire, du secondaire général, du secondairetechnique ou même des enseignants du tertiaire pourdire qu’il y a différentes situations au niveau descontextes nationaux en Amérique Latine. J’ai travaillémoi-même dans plusieurs pays d’Amérique Latine oùdes collègues enseignants universitaires gagnaient àpeine 300 dollars par mois et devaient avoir au moinstrois ou quatre occupations de travail pour subvenir àleurs besoins. »

Origine de la remarque

Soledad PEREZ de l’université de GenèveMaître d’enseignement et de recherche en éducation comparée

Will

iam

Exp

erto

nRéponse« Je suis d’accord avec votre remarque. Bien sûr quandon fait une présentation on essaye de présenter lestendances fortes et on néglige complètement lesparticularismes et l’importance des populationsindigènes. Je n’y répondrai pas, mais ce que je voudraissimplement, si cet après-midi on a le temps sur le cas du

Chili, c’est que nos amis chiliens nous disent un peu cequ’ils ont fait par exemple pour la population Mapuche.Il y a des choses très intéressantes qui ont été faites pourcette population Mapuche au Chili à travers l’intégrationdans le curriculum de leur culture. Je pense que c’est unevoie à suivre. »

DÉBAT SÉANCE (6)

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Réponse« Là aussi vous avez tout à fait raison. J’ai commencé macarrière dans la décentralisation dont je suis un fanatique.Ce que je constate en Amérique Latine, c’est que lapolitique de décentralisation est très loin des objectifsd’équité en matière de financement et cela me poseproblème. La décentralisation en Amérique Latine est unjeu politique. Si vous regardez comment sont financésles Etats au Mexique, vous vous apercevez dedifférences absolument gigantesques. Ce qui m’amèneà dire que je n’aime pas trop la décentralisation telle qu’elleest mise en place en Amérique Latine et que quand jeparle de décentralisation ce qui m’intéresse beaucoup plus

est de savoir si l’école est capable de prendre des décisionsautonomes. Cela me parait plus important que tous leursjeux politiques.

La dette extérieure : oui, c’est absolument terrible.On a des pays comme la Jamaïque où la dette extérieurecorrespond à 150 % du produit national brut. Donc mêmeles projets d’éducation de la Banque mondiale sont obligésde s’arrêter parce qu’ils ne peuvent pas les mettreen oeuvre, ils n’ont pas assez de cash. Où est la solution ?Je ne sais pas. »

Will

iam

Exp

erto

n

3) L’enseignement privé en Amérique Latine

Origine de la remarque

William ExpertonIntervenant de la séance

u Détail « Je prends acte de l’existence de l’enseignement privécomme partenaire en Amérique Latine et je ne juge pas desavoir si privé ou public est le meilleur, ce que je dissimplement c’est que l’Etat a la responsabilité de mettre enplace des règles du jeu qui permettent l’équité. Juste un petitexemple : Je le prends d’une ville d’Amérique Latine. Il s’agitde Santa Fé en Argentine je crois, où j’interviewaisdes parents d’élèves et leur demandais ce qu’il c’était passépour leur fille :

« Elle vient de terminer l’enseignement secondaire »,« C’est bien »« Mais oui, mais elle cherche un emploi et elle ne trouve pasd’emploi »« Qu’est ce qu’elle a fait ? »« Elle est allée payer pour de l’enseignement privé dans ledomaine de l’informatique en plus de l’enseignementsecondaire qu’elle avait reçu ».

Cela pose un problème car dans le curriculum del’enseignement secondaire en Argentine à ce moment là il

n’y avait pas les conditions pour développer des connaissances en informatique qui étaient nécessaires pourque cette fille ait une place de caissière dans le supermarché.C’était cela l’histoire. Je crois que, si cette fille vachercher dans l’enseignement privé un complémentde connaissances dans l’informatique, l’important c’est quece soit certifié. Car si ce n’est pas certifié, cela va poser unautre problème d’équité. Il y a une réforme que j’aimebeaucoup dans l’enseignement, dans ce qu’a faitrécemment la Communauté Economique Européenne,c’est le passeport informatique. Je trouve le passeport informatique formidable. Pourquoi ? Parce qu’on peutapprendre l’informatique de différentes manières, on peutmême apprendre l’informatique chez soi. Il y a beaucoupd’enfants – quand vous faites une école secondaire enAmérique Latine – qui ne jouent pas de l’ordinateurà l’école, mais ils ont l’ordinateur chez eux. Le problème,c’est qu’ils n’arrivent pas à certifier cette compétence quiest demandée par les employeurs. Donc je trouve quele passeport informatique est très bien et ce n’est pas cher. »

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Origine de la question

Waly N’DIAYE DJAJI du SénégalSecrétaire national aux revendicationsgénérales du CSA (syndicat de travailleurs)

Détail« Je m’interroge pour savoir qui va faire la formation ?on ne s’est pas vraiment posé la question. La réflexiondevrait s’appesantir un peu sur le statut de l’enseignantest la formation des ressources humaines. C’estincontournable car il est illusoire de penser qu’unenseignant peut dispenser une formation de qualité sil’on n’a pas réfléchi à la manière d’assurer de bonnesconditions de travail et d’existence. Je le dis parce queje suis ressortissant d’un pays qui est un payssous-développé où, avec la Banque mondiale, onest entrain de mettre en oeuvre un programme appelé« programme sénégalais de l’éducation et de laformation » basé sur dix ans qui met l’accentexclusivement sur ce qu’on appelle l’éducation de baseou l’enseignement élémentaire. Les enseignants pource type d’éducation ont un statut précaire et n’ont

souvent pas reçu de formation adéquate. Le statut deces enseignants nous préoccupe d’autant plusqu’aujourd’hui, avec le slogan « l’éducation tout au longde la vie », on a l’impression qu’au lieu de « former »,on a tout simplement « formaté » les étudiants. Onmet l’accent sur l’éducation de base et il appartientmaintenant à l’élève de se débrouiller pour le reste dela vie. De même c’est aux gens qui doivent l’accueillir làoù il doit travailler de prendre le produit qui est formatéet d’essayer enfin de mettre ce qu’ils veulent à l’intérieur.

Donc l’enseignant devient presque secondaire et cela estinquiétant. A mon avis c’est un peu illusoire de penserqu’on peut réussir cette entreprise là sans mettre l’accentsur le statut et les conditions de travail et d’existence deces ressources humaines. »

Jean

-Ray

mon

dM

asso

n

Réponse« Juste un mot en réponse à la question du Sénégalconcernant les enseignants et les formateurs. C’est en effetune question fondamentale. Si je m’en tiens simplementaux cas des pays candidats que je connais le mieux, lesenseignants ont vu leur statut se dégrader depuis dix,quinze ans. C’est-à-dire que l’irruption dans l’économiede marché a fait en sorte que le statut s’est dégradé, lesalaire moyen des enseignants dans la plupart des pays esten dessous de la moyenne nationale et être enseignant n’estplus du tout une profession attirante, ce qui pose unredoutable défi pour la modernisation de ces systèmespour tout ce qu’on veut faire en matière de formation,apprentissage, éducation tout au long de la vie. C’est pourcela que j’ai salué l’exemple de la Hongrie ; je crois quela Pologne s’engage également dans la même voie ; d’autrespays commencent. Une première chose à faire, c’est dedonner au moins aux enseignants un salaire qui

corresponde à un statut déjà revalorisé, c’est une premièrecondition. La formation est aussi une conditionfondamentale.

Les formateurs par rapport aux enseignants, c’est un autresujet sur lequel on pourrait parler longuement. Je croiseffectivement qu’il y a une spécificité du formateur deformation continue par rapport à l’enseignant. Mais làencore c’est un processus assez lent, il faut commencerpeut-être à intéresser les écoles professionnelles au publicdes adultes pour les amener à prendre conscience desspécificités de ces publics d’adultes et petit à petit mettreen place des actions de formation adaptée pour arriver àobtenir de véritables formateurs de formateurs prêts àassumer tous ces défis. Je crois que ceci se met en placedéjà dans certains pays mais effectivement c’est un axeimportant qu’il faut développer vigoureusement. »

4) Le statut du formateur

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Séance 7 :RÔLES DE L’ETAT ET AUTRES

ACTEURS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX

L’économie politique des réformes de l’enseignement secondaireM. Ernesto Cuadra – Banque mondiale

Les structures socio-économiques de l’ETFP et la réforme finlandaiseM. Kari Pitkänen – National Board of Education, Finlande

Rôle des instituts de recherche publics dans le pilotage et la gestion de l’ETFP : le cas de la CoréeM. Sung-Joon Paik – KRIVET, Corée

Débat avec la salle

Salih CELYK Président de séance

TURQUIE

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E. Cuadra Lead education specialist

Education departmentBanque mondiale

Pour des raisons techniques, la transcription de laprésentation faite par M. E. Cuadra n’a pas pu êtrevalidée par son auteur. De manière à ne pas priver l’édition de ces Actes

d’une contribution importante à nos yeux, le texte quisuit a été élaboré à partir de cette transcription par nossoins ; nous espérons être restés fidèles à l’esprit dela présentation de M. Cuadra.

L’économie politique des réformesde l’enseignement secondaire

I. Types de réforme dans l’enseignement secondaire et résistances

Il existe 3 grands types de réforme dansl’enseignement secondaire :- Les réformes visant à élargir l’accès,- Les réformes concernant le contenu

des programmes,- Les réformes s’attaquant aux systèmes

de gestion.

Si les réformes de premier type nerencontrent guère de résistance, les réformes detroisième type apparaissent en revanche commeles plus difficiles à faire accepter :

1) Les premières se présentent comme socialementnécessaires. Personne n’oserait les critiquer.2) Les réformes de deuxième type, quant à elles,présentent davantage de résistances. Rares sont, eneffet, les personnes qui comprennent les buts réelsde ce type de réformes.3) Enfin, dans les réformes de type 3, lesbénéficiaires sont dilués, les perdants s’identifientfacilement par eux-mêmes et les résultats ne se fontsentir qu’à moyen ou long terme. On comprendainsi mieux pourquoi elles engendrent encoredavantage de résistances que les précédentes.

II. L’adhésion des personnes

Une réforme ne se réduit pas à un aspecttechnique. Il est essentiel de fédérer les partiesprenantes autour du projet. C’est pourquoila dimension politique doit être prise enconsidération dès le début.

Seulement on peut être amené à se poser laquestion suivante : comment communiquer etrassembler autour d’un projet quand, bien souvent,les experts eux-mêmes ne sont pas d’accord entreeux ?

Cela est d’autant plus délicat que si ungroupe de personnes s’opposent à un aspectdu projet, ils essaieront de faire capoter l’ensembledu projet. Il faut donc clairement identifier les

zones d’accord et tenter de diluer les autres aspects.

Promouvoir l’adhésion du public à desréformes de l’enseignement secondaire n’est certespas une tâche facile. Ces réformes sont risquées etpeu rentables pour les politiciens. Donc, avantd’aller voir un ministre ou un membre du congrèsavec une proposition de réforme, il est préférablede savoir qui est qui, qui soutient quoi, et de reliersi possible la réforme à des perspectives plus largesen dehors du secteur de l’éducation. De même, sivous pouvez identifier des zones à faible risque etgarantir l’apport de résultats rapides, alors vousaurez plus de chances de figurer dans le pland’actions politique.

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III. Les différentes phases d’une réforme

IV. Les stratégies

Une réforme se déroule suivant 4 grandes phases :1) L’acceptation dans le planning politique2) La conception3) L’obtention des autorisations législatives4) La mise en oeuvre

On retrouve au sein de chacune de ces phases cequi a été dit précédemment : gagner le soutien despersonnes concernées est primordial.

1) Coupler une réforme non désirée à une réformeacceptée de tous.

Il sera plus facile de faire passer des mesures,pour par exemple accroître l’efficience, si celles-cisont combinées avec des mesures visant parexemple à élargir l’accès.

2) Présenter des compensationsDe même, présenter des compensations telles

que des ordinateurs, une rémunération plusattractive, de plus grandes possibilités de carrières,etc. permet d’assouplir l’opposition.

3) Identifier des gains rapidesCela permet de convaincre plus aisément les

parties prenantes.

4) Remplir les conditions préalablesIl faut également disposer de bases de données

fiables et d’un bon système de recherche et ce à lafois pour concevoir la réforme mais aussi pouridentifier les alliés et les ennemis potentiels.

On arrive donc à la conclusion suivante : il n’y aura plus d’approche « big bang ». Plus le projet deréforme sera modeste, plus grandes seront les possibilités de succès. Une longue et soigneuse préparationest en effet nécessaire pour faire accepter le projet. Il faut être modeste, savoir piloter et surtout identifier etcomprendre les différents liens possibles.

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Les structures socio-économiquesde l’ETFP et la réforme finlandaise

K. PitkänenDirecteur général adjoint

National board of educationFinlande

En Finlande, l’ETFP fut centralisé dans les années 70 sousl’autorité du Ministère de l’Education. La réforme del’ETFP en 1980 unifia, densifia et élargit le réseau del’ETFP à l’ensemble du pays. L’ETFP était perçu commeun élément fort dans la promotion du développementrégional. La priorité de l’ETFP était de satisfaire lesbesoins du marché du travail. Ceci a permis de mobiliserl’intérêt des organisations d’employeurs et d’employésautour de la situation et du développement de l’ETFP.

Dans les années 90, la structure institutionnelle del’ETFP fut radicalement rénovée. De petites écolesd’ETFP furent fondues pour former de grandsconsortiums régionaux d’ETFP. L’Etat transféra alors lesinstitutions ETFP aux autorités locales. Un ETFP demeilleur niveau (niveau universitaire) se transforma enenseignement polytechnique, en parallèle des universités.

L’ETFP secondaire supérieur est actuellement constitué

d’un cycle de 3 ans. Sont inclus dans celui-ci : une demiannée d’apprentissage et des tests de démonstrations de4 à 10 compétences. Ces tests de compétences sontélaborés avec les représentants des organisationsd’employeurs et d’employés du secteur d’activité enquestion.

Dans les années 90, un système de qualification pouradultes, basé sur les compétences, fut développé et utilisé.Les comités tripartites de formation (32) et qualification(170) participent au développement de l’ETFP pour les« jeunes » et les adultes par l’intermédiaire du contrôlequalité et de l’évaluation du devenir de l’ETFP.

Dans cette présentation, l’accent est mis sur les structuressocio-économiques qui sont supposées avoir maintenula dynamique de l’ETFP, avec la pression qu’exercela popularité de l’Education générale et supérieure.

I. Scolarité obligatoire depuis 1921 avec structure parallèle du système

Les réformes du système éducatif finlandaissont étroitement liées au développement del’économie nationale, à l’infrastructure de la sociétéet à la politique sociale générale. Au début desannées 1950, l’économie nationale correspondait à cellede la Suède dans les années 1910. A cet égard, laFinlande pouvait être classée parmi les pays endéveloppement dans les années 1940 et au début desannées 1950. Traditionnellement, les Finlandaisappréciaient l’éducation ; le taux d’alphabétisme,

par exemple, était très élevé pendant l’indépendance dela nation (à partir de 1917). L’éducation de base estobligatoire depuis 1921. Dans les années 1950 et 1960,nous nous sommes dotés d’un système d’enseignementgénéral parallèle. Les élèves étaient répartis dans l’unedes deux voies à l’âge de 11 ou 12 ans. L’organisme pourl’éducation et la formation professionnelles (EFP) étaitassez sous-développé, et les inscriptions à l’universitérelativement limitées.

II. La croissance régulière de l’économie engendredes demandes de modification du système

Entre 1950 et 1970, la Finlande a connu unecroissance constante de l’économie nationale.Dans les années 1960, l’atmosphère politique et lasituation économique ont favorisé la demande

de réforme totale de la structure du système éducatifde base. De plus, la construction de « l’État Providence »nordique était déjà entamée.

Résumé

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Les opinions politiques furent fortement influencéespar l’idée que les dépenses sociales étaient considéréescomme un facteur de consommation croissantefavorisant la croissance économique. On défendaitgénéralement l’idée que les investissements dansles personnes étaient les meilleurs. Ceci était liéau désir des parents de donner à leurs enfants plus

d'éducation, désir reflété par des demandes sanscesse grandissantes pour un cursus académique.En outre, dans le cadre des organismes d’employeurset d’employés, il était entendu qu’une main-d’œuvremieux instruite était nécessaire au développementcommercial et industriel.

III. Le système éducatif développé comme un tout depuis 1968

L’idée de base de la réforme était la créationd’un système scolaire polyvalent. En 1968, leparlement promulgua une loi sur la base dusystème éducatif. L’école polyvalente allaitfinalement être divisée en 9 années d’étude (de 7 à16 ans) pour tous avec un soutien d’éducationspécialisée pour les élèves en difficulté.L’application de la nouvelle structure fut initiée en1972. Sa direction revenait strictement àl’administration centrale mais les autorités locales(environ 500 municipalités) jouissaient d’unehaute responsabilité dans l’application de laréforme du réseau scolaire local et autresconditions locales. La réforme obtint le soutiend'importants encouragements financiers de l’état,de la réforme de la formation des enseignants etd’une participation intensive des professeurs auprocessus de planification de l’éducation.

Au début des années 1970, l’éducationdépendait entièrement du Ministère del’éducation. Cette centralisation a été renforcéegrâce à l’affirmation des potentialités de l’ancienneagence centrale – la Direction générale del’enseignement – et par la création d’une nouvelleagence centrale, la Direction générale del’enseignement professionnel, qui a hérité del'enseignement professionnel et de sesétablissements en provenance de différentsministères.

La réforme de l’école polyvalente, d’unedurée d’application de dix ans, a été suivie par lapréparation de la réforme du lycée. Plusieursprojets et propositions furent soumis dans le butde rénover entièrement la structure de l’éducationpost-polyvalente en abolissant les frontières quiséparent l’enseignement général et professionnel.Ce type de réforme ne s’est pas concrétisé étantdonné que l’enseignement dispensé au lycée seterminant par un examen donnant droit àl’inscription universitaire, avait beaucoup de succèsauprès des familles et des politiciens.

Le gouvernement prit en 1978 une décisioncapitale concernant le renouvellement del’enseignement dispensé au lycée, avec les objectifssuivants :• Accentuer le caractère compétitif de l’ETFP par

rapport au lycée général ;

• se concentrer sur les besoins du marché du travaillors du développement de l’ETFP ;

• disposer d’assez de places pour accueillir tout lemonde au lycée ;

• dispenser des cours d’enseignement professionnelpour tous au lycée et au sein des études post-lycéennes ;

• investir pour l’essor de l’ETFP ;

• accroître les capacités de l’ETFP grâce à desmesures temporaires et au financement à 100 %par l'Etat, des régions en développement ;

• réformer la formation des professeurs d’ETFP ;

• transformer la structure de l’ETFP dans sesgrandes lignes ; et

• organiser un enseignement spécialisé et deréadaptation au sein de l’ETFP.

Les objectifs politiques ont pour la plupart étéatteints, quoique le lycée général ait gagné enpopularité et en nombre. La période de mise enoeuvre de la réforme du secondaire s’est étalée sur dixans et a été achevée en 1992. La même année, environ93 % des jeunes sortant de l’école polyvalenteenchaînaient leurs études au lycée. Environ 53 %accédaient au lycée général, 37 % continuaienten ETFP et les 3 % restants faisaient uneannée supplémentaire – la « dixième année » – dansleur école.

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IV. Le processus de réforme se poursuit face à des problèmes déjà envisagés

La création d’un réseau d’écoles polytech-niques (30) qui s’étend à tout le pays, ainsi que lamodernisation du réseau institutionnel de l’ETFP,liée à la passation des institutions d’ETFP de l’étatvers les autorités locales et régionales, furent lesréformes principales des années 1990. Plus de60 % des groupes d’âge ont désormais accès à l’en-seignement supérieur en institut polytechnique ouà l’université. Au lieu de petites écoles d’ETFPspécialisées, on trouve actuellement une majoritéd’institutions et d’établissements polytechniques

regroupant plusieurs matières, appartenant à etrégies par les autorités locales (la municipalité).

La Finlande doit faire face à beaucoup deproblèmes dans les années à venir. Comme dansbeaucoup d’autres pays d’Europe, la populationvieillit. Le manque de main-d’œuvre représenterabientôt une difficulté concrète. L’immigration àl’intérieur du pays est un motif de préoccupation.Le temps passé dans l'enseignement supérieurdevrait être réduit.

V. La confiance en l’éducation confirmée comme le meilleur investissement

La Finlande a obtenu un des classements lesplus élevés selon des études au niveau internatio-nal sur le potentiel économique des nations et surles aboutissements du système éducatif. Nousavons été assez modestes à la lumière de ces études,tout en étant conscients que la situation pourraitmême changer très rapidement. Nous gardons àl’esprit l’expérience vécue au début des années1990 lorsque l’économie nationale et publiquede la Finlande s’était effondrée en deux ans,déclenchant des conséquences catastrophiques.

La Finlande est membre de l’UE depuis 1995 et lesrevenus par habitant équivalent à présent auniveau moyen des pays membres de l'Union.

Citoyens et politiciens continuent à pencheren faveur de l’éducation et de la science, auxquellesils attachent toujours une grande importance. Onpense généralement que la croissance du capitalhumain est le principe fondamental du développe-ment positif du pays.

Dans l’ensemble, les réformes ont inspiré degrands progrès dans le niveau d’éducation de lanation. En 1974, environ 900 000 personnes sur les4,6 millions d’habitants étaient en possession d’unbaccalauréat ou d’un diplôme universitaire. En1989, sur 5 millions d’habitants, 2 millions avaientatteint ce niveau.

En même temps, avec les réformes de l’écolepolyvalente et du lycée, le réseau et le nombred’universités se sont étendus à tout le pays. Ceci apu apporter un développement économique positifdans les régions accueillant les universités.

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Rôle des instituts de recherche publicsdans le pilotage et la gestion de l’ETFP :

le cas de la Corée S. J. Paik

Senior researcherKorea Research Institue for Vocational Education

& Training (KRIVET) – Corée

En Corée, la demande de développement des compétencesprofessionnelles a nécessité de repenser les relations entre lesdifférents acteurs – notamment les ministères impliqués. Lacréation d’une agence indépendante chargée de la coordina-tion, le KRIVET, a permis d’apporter des améliorationsimportantes par ses recherches et études sur : le développe-ment des ressources humaines, la mise en place d’un système

de qualification, la coordination des instituts et des program-mes, la publication de résultats d’évaluation, des outils pourl’information et l’orientation professionnelle, etc.

Le KRIVET a cependant quelques défis à relever mais resteune structure très efficace pour la politique d’ETFP en Corée.Ne pourrait-il pas être un exemple pour d’autres pays ?

I. Principaux éléments à la base de la création du KRIVET

a) Besoin d’un nouvel instrument politiqueDû à l’essor de l’économie basée sur la

connaissance et au vieillissement de la population,la demande de développement de compétencesprofessionnelles tout au long de la vie n’a cessé decroître. Au début des années 1990, plus de100.000 diplômés du secondaire sont entrés sur lemarché du travail sans une préparation adéquateet, comme le tableau le montre, le taux de partici-pation des adultes en formation continue dansl’ETFP était très bas par rapport à d’autres paysdéveloppés.

Face aux changements des compétences

requises au sein de divers secteurs industriels,il a fallu restructurer les systèmes d’enseignementet de formation professionnels. Il est devenunécessaire d’élaborer un système garantissant desarticulations entre l’école et le marché de l’emploi,entre l’enseignement professionnel et le systèmescolaire normal et la formation d’adultes sur lemarché du travail, et enfin entre les qualificationsacadémiques et professionnelles. On se méfiait de l’ETFP et de l’enseignement dans le milieudes affaires.

Je souhaiterais également évoquer la crise

Avant de commencer mon exposé, j’aimeraisapporter une petite correction au commentairede M. Nuru Yakubu sur la Corée. Le taux deformation professionnelle en Corée n’atteint pas« presque 50 % aujourd’hui » comme il l’a cité.Au début des années 1990, le gouvernement coréenavait prévu d’augmenter le pourcentage deformation professionnelle jusqu’à 50 %, mais dû àla demande sociale pour un enseignementsupérieur et au changement de la structureindustrielle en Corée, le gouvernement a adoptéune autre politique. On compte actuellement 32 %de lycées professionnels.

Je reviens maintenant à ma présentation.

Je tenais tout d’abord à remercier lesorganisateurs de cette conférence de m’avoir invitéet de m’avoir donné la chance de m’exprimer sur lestatut de mon institut, l’Institut coréen de recherchepour l’éducation et la formation professionnelle,comme instrument dans la politique de l’ETFP. Jevais d’abord aborder brièvement avec vous lesraisons qui ont poussé à la création du KRIVET etje poursuivrai avec la gouvernance et le financementde cet institut. J’expliquerai ensuite les fonctionsprincipales du KRIVET, son rapport avec lagouvernance et la gestion de l’ETFP et les défis etopportunités qui peuvent survenir. Je termineraiavec les leçons qui ont pu en être tirées.

Résumé

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monétaire étrangère que nous avons connue en1997. Ce ne fut pas une raison directe de la créa-tion du KRIVET mais elle a certainement contri-

bué à promouvoir le développement des compé-tences en Corée et à accélérer la réforme de l’ETFPet notamment la mise en œuvre du KRIVET.

b) Trois alternativesAfin de faire face à ces changements et ces

alternances, le gouvernement coréen a identifiétrois options :

La première consistait à fusionner les différentsorganismes politiques en regroupant deux ou troisministères apparentés en un seul ministère commec’est le cas au Royaume-Uni, où l’on peut traiterdirectement des questions politiques sur le systèmed’apprentissage tout au long de la vie, la transitionde l’école à l’emploi et l'articulation entre les qualifi-cations académiques et professionnelles.

La deuxième possibilité était de créer denouvelles agences pour que le gouvernement puisseutiliser les instituts de recherche financés pardes fonds publics pour faire le lien, coordonner et

intégrer indirectement les différentes politiquesconcernant l’ETFP.

Le partenariat avec le secteur privé constituaitune troisième option. Cela signifiait impliquer lesecteur productif, les ONG et les organisations de lasociété civile.

Le gouvernement coréen a opté pour laseconde alternative en raison de conflits d’intérêts.Un désaccord et une compétition non négligeablespour l’hégémonie dans la formulation et la miseen oeuvre des politiques opposaient les ministèresconcernés. A cela s’ajoutait le manque de maturitédes ONG et de la société civile ainsi que le manqued’implication de la part de nombreuses partiesprenantes, en particulier dans le milieu des affaires.

b) Gouvernance et financement du KRIVETPendant ses deux premières années d’exis-

tence, le KRIVET était sous la surveillance duConseil d’administration du KRIVET, comprenantdes représentants de huit ministères différents, desétablissements proposant l’ETFP et des syndicatsouvriers. Cette catégorie d’adhérents reflétait bienles intentions du gouvernement de coordonner lapolitique parmi les différents ministères et partiesprenantes. A cette époque, le ministère del’Education apportait environ 82 % du budget,y compris les dépenses du personnel, et le ministère du Travail 16 %.

En 1999, le gouvernement a restructuré lesystème de gouvernance et de financement des43 instituts de recherche financés par l’état en les

plaçant sous le contrôle de 5 conseils appartenantau bureau du Premier Ministre afin de réduire leplus possible l’influence émanant des ministèresafférents et de rendre ces instituts plus autonomes.

Le Conseil coréen des instituts de rechercheshumanitaires et sociales s’est vu confier lasupervision du KRIVET en 1999 ; environ 70 % dubudget KRIVET provenait directement duministère de la planification et du budget.

Ce diagramme représente les nouveauxsystèmes. Le conseil est responsable de neuf institutsde recherche financés par l’état parmi lesquels leKRIVET. Ce dernier occupe quatre fonctionsprincipales.

II. Création et gouvernance du KRIVET

a) Création du KRIVETEn février 1996, le Comité présidentiel chargé

de la réforme de l'éducation a proposé de fonder leKRIVET, et l’année suivante au mois de mars, les

ministères de l’Education et du Travail ont établiconjointement le KRIVET, institut de recherche quia vu le jour à Séoul en octobre 1997.

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a) Recherches sur la politique de l’ETFP et du DRHEn prenant part au développement du plan de

DRH et à son évaluation, le KRIVET a facilité lesdébats stratégiques et le dialogue sur le DRH parmidifférentes parties prenantes. Le KRIVET développedes agendas politiques en organisant des réseaux au

sein des instituts de recherches financés par l'état,qu’il aborde lors de réunions ministérielles duDRH. Une autre tâche du KRIVET consiste àénoncer les alternatives politiques pour l’ETFPet le DRH et à les recommander au gouvernement.

b) Recherches et projets concernant le système de qualificationEn ce qui concerne les qualifications,

le KRIVET s’efforce désormais d’introduire lesniveaux de compétence coréens en tantqu’instrument politique permettant de relierétroitement l’industrie, l’ETFP et les qualifications.Le KRIVET essaie d’encourager la participationdirecte des secteurs industriels à l’analyse d’emploiset à l’identification des compétences etconnaissances requises pour pouvoir exercer ces

professions, et aussi de développer les normes decompétences coréennes. Nous menons à présentune étude pilote sur le développement des normesde compétence coréennes dans les domaines de laconstruction et de l’architecture d’intérieur. LeKRIVET prévoit également de lancer une structurecoréenne de qualifications liée aux qualificationsprofessionnelles et académiques et s’alignant surcelles-ci à la fois verticalement et horizontalement.

c) Contrôle et évaluation des instituts et programmes de l’ETFPLe KRIVET conçoit les plans d’évaluation de

l’ETFP en rapprochant les différentes partiesprenantes telles que les centres d’ETFP et lesministères ou employeurs concernés, et fait l’esti-mation d’institutions et de programmes de l’ETFP,dont il communique les résultats au gouverne-ment. En se basant sur ces résultats, le gouverne-ment met plus d’argent à la disposition des établis-

sements proposant l’ETFP pour intensifier laconcurrence entre ces derniers. Le KRIVET publiedes rapports d’évaluation contenant les résultats,les classements et les notes des différents établisse-ments d’ETFP. Il y a un an, le ministère duTravail a rendu leur classement public, disponibledans les offices de travail et, depuis cette année,sur « HRDNet ».

d) Service d’information et d’orientation professionnelleEn proposant un service d’information et

d’orientation professionnelle, le KRIVET aideétudiants, stagiaires et employés à prendre desdécisions mûrement réfléchies sur le déroulementde leurs études et de leur carrière tout au longde leur vie. Pour vous donner un exemple desouvrages que nous publions, je citerai « The futureworld of work » (Le futur monde du travail), unebrochure d’information semestrielle sur l’ensei-gnement supérieur et sur l’emploi préparée en

collaboration avec les ministères de l’Educationet du Travail. « The future world of work » est laversion coréenne de « Job Future » (Perspectivesd’emploi) au Canada.

De plus, le KRIVET a activement participéaux activités de coopération internationales, etnotamment aux programmes de formation et derecherche en partenariat au niveau international.

III. Fonctions principales du KRIVET

Le KRIVET mène des recherches sur le DRH(développement des ressources humaines) àl’échelle nationale et régionale ainsi que sur l’édu-cation et la formation professionnelle, l’apprentis-sage en ligne et les systèmes de qualification. LeKRIVET élabore aussi des programmes et descursus pour l’ETFP, évalue les établissements et lesprogrammes de l’ETFP et propose des servicesd’information et d’orientation professionnelle.Grâce à ces différentes fonctions, le KRIVET

apporte sa contribution à la constitution et la révi-sion des lois et des réglementations, encourage lesréseaux et la coopération entre les parties prenan-tes, et, pour finir, introduit une base objective pourle changement et le perfectionnement des méca-nismes de financement. Ainsi, tous ces effortscontribuent à améliorer la gouvernance et lagestion de l’ETFP. Je vous donnerai plus d’explica-tions dans quelques minutes.

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DÉBAT AVEC LA SALLE (7)1) À propos du cas finlandais

2) À propos de l’institut de recherche KRIVET

3) Réforme : comment modifier les comportements ?

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1) À propos du cas finlandais

Origine de la série de questions non identifiée

DétailPour Kari Pitkänen« Trois questions très brèves à propos du cas finlandais.- Premièrement, je voudrais simplement connaître lapart de financement pour les deux systèmes del’enseignement supérieur, l’éducation générale etl’éducation professionnelle.

- Deuxièmement, si vous pouviez nous donner quelquesdétails sur la participation du secteur privé dansce système

- Enfin, si vous pouviez parler un peu plus du rôle et de lastructure des comités consultatifs que vous avez cités. »

2) À propos de l’institut de recherche KRIVET

Réponse« Juste une réponse très brève, seulement des chiffres.Vous voulez dire, dans le secteur universitaire et dans lesecteur polytechnique, quelle est la répartition dufinancement de ce système de comités ? Dans le secteuruniversitaire 65 % et dans le secteur polytechnique 35 %.J’avais des illustrations au sujet de la participation dusecteur privé dans l’éducation. Vous parlez du niveausecondaire. On dépense plus d’argent dans le secteurprofessionnel, on dépense beaucoup plus dans ce secteurparce que les dépenses moyennes par étudiant sontcomparativement deux fois plus élevées que dans lesystème général. Toujours concernant la participation dusecteur privé, nous avons ce comité de formation, danslequel les organisations représentant diverses branchesdes secteurs privés sont membres à l’échelle nationale.

Mais au niveau secondaire, celui de l’écoleprofessionnelle, nous disposons d’un système danslequel trois années sont nécessaires pour sortir diplômé

du secteur professionnel. Sur trois années, six mois sontutilisés pour la formation sur le lieu de travail.Ainsi, dans chaque localité, dans chaque région,les institutions professionnelles doivent entretenir de trèsbonnes relations avec les industries et le commerce, demanière à placer leurs étudiants pour qu’ils apprennentsur le terrain. Le secteur privé ne finance pas l’éducationet la formation professionnelle des jeunes mais, bien sûr,il fait beaucoup d’efforts pour organiser la formation surle lieu de travail. L’éducation est gratuite en Finlandeà tous les niveaux, excepté celui de l’éducation pouradultes. »

Origine de la question non identifiée

DétailPour Sung-Joon Paik« Soyez franc et dîtes-nous exactement comment vousmesurez le succès de votre expérience de six ans, en

pourcentage ? 10 %, 20 % ? Soyez sincère parce que,dans une de vos diapositives, vous avez déclaré qu’il existaitencore une grande influence des deux ministères. »

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en

RéponseIl est très difficile d’estimer le taux de succès de laréalisation du KRIVET, mais je dirais que le KRIVET nousa donné l’opportunité de distinguer et de différencier cequi fonctionnait et ce qui ne fonctionnait pas, ainsi que cequi fonctionnait mieux et de quelles façons, lorsque legouvernement essayait de coordonner et d’intégrer lespolitiques liées à l’ETFP entre les ministères. En ce sens,

je dirais que le KRIVET a rendu possible la préparationdu terrain pour l’intégration de la politiquegouvernementale. Nous leur avons donné la possibilité dediscuter ensemble des mêmes problèmes et de suggérerdes solutions communes. Je dirais que ceci constitue lesprémices. Nous pourrons obtenir des résultats plusconcrets avec cinq ou six années d’expérience en plus. » W

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DÉBAT SÉANCE (7)

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3) Réforme : comment modifier les comportements ?

Réponse« Comment réformez-vous les gens ? Je ne peux pasvraiment répondre à cela. Mais comment vous y prenez-vous pour que les gens se comportent différemment ?Manifestement, il existe une abondante littérature ausujet de la gestion du changement et, si je peuximproviser les principes de base concernant la façon des’y prendre pour faire en sorte que les gens se comportentdifféremment, je dirais que la première chose est dedisposer d’un commandement clair et d’une vision clairede la direction que vous voulez prendre, de façon à ceque les gens sachent vers où ils doivent se diriger. Uncommandement puissant signifie de ne jamais cesser defaire passer le même message encore et encore, de façon àmaintenir les gens sur la bonne voie. Et la dernière choseest de disposer d’un très bon système d’incitations. Une

incitation ne signifie pas seulement de l’argent, uneincitation signifie la modification des conditions detravail des gens, de façon à les rendre beaucoup plusattirantes. La Finlande est un très bon exemple dans ledomaine des enseignants ; dans la façon dont ils ontchangé leur profession d’enseignants. Aujourd’hui, enFinlande, si je comprends bien, pour chaque posted’enseignant à pourvoir, dix candidats se présentent.C’est une profession très attirante. Donc, adoptez deslignes claires pour votre responsabilité, de manière à ceque ces incitations possèdent ces trois dimensions. Etenfin, la formation. Vous devez disposer d’un système dedéveloppement professionnel très bien développé, defaçon à offrir aux gens les outils dont ils ont besoin pourexercer leur profession différemment. »

Origine de la question non identifiée

DétailPour Ernesto Cuadra« Vous effleurez un vrai problème de vie dans une

réforme. Que faire lorsqu’une réforme entreprend deréformer des personnes travaillant avec leurs ministres ? »

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Tables rondes :LES CAS DE LA TUNISIE ET DU CHILI

TUNISIELa réforme de la formation professionnelle

en Tunisie – Opportunités et défisM. Ben Saïd – Ministère tunisien de l’éducation et de la formation

Éducation, entreprises et mutationséconomiques et technologiques

M.me Turkia Tlemceni / Goaïed – UTICA

CHILILa réforme de l’ETFP au Chili

M. Pedro Montt – Ministère de l’éducation

Expérience du secteur de la production agricoleet agro-industrielle au Chili

M. Juan Guido Vidal Acuña – SOCODER

CommentaireM. William Experton – Banque mondiale

Débat avec la salle

André KOMENANPrésident de séance

BANQUE AFRICAINE DE DÉVELOPPEMENT

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Conçue pour soutenir une politique de restructurationdes entreprises industrielles dans un premier temps et del’ensemble de l’économie par la suite, le programme de mise àniveau de la formation et de l’emploi (MANFORME), seprésente comme une réforme dont la mise en œuvre a étérendue nécessaire par l’adhésion de la Tunisie, en 1995, à lazone de libre échange avec l’Union Européenne. Elle a, de cefait, bénéficié d’un appui financier et/ou technique soutenusde la Banque mondiale, de l’Union européenne, de l’AFD, duFADES,de l’Allemagne,de la Belgique,du Canada et du Japon.

Pilotée par la demande de l’économie en compétences,le nouveau système de formation professionnelle se définitcomme un déterminant de la compétitivité des entreprises,de la promotion de l’investissement privé, surtout étranger,

et par conséquent de la création d’emplois. L’impératifd’employabilité des jeunes diplômés s’est traduit au niveaude l’ingénierie pédagogique par l’adoption de l’approchepar compétences, et au niveau des modes de formation parune option forte pour l’apprentissage et la formationen alternance. L’implantation de la démarche qualité dansl’ensemble des structures en charge de la FP doit assurerla pérennisation des acquis de la réforme grâce à un modèlede gestion décentralisée, interactive et redevable des centresde formation professionnelle.

La principale originalité de cette réforme réside en fait dansl’option prise du partenariat avec les branchesprofessionnelles comme cadre systématique pour sa mise enoeuvre.

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs,

C’est un plaisir pour moi que de prendre part à cette réflexion sur la modernisation de la formationprofessionnelle en vue de son inscription dans la logique de l’économie basée sur la connaissance.

C’est aussi un grand honneur pour moi de pouvoir m’adresser à cette honorable assistance pour présenter, avectoute la modestie que cela requiert, une expérience qui est encore en pleine mise en oeuvre et qui fait face encore à ungrand nombre de défis.

Il s’agit d’une expérience qui, en matière d’investissements dans le savoir, a bénéficié d’un grand appui tant dela part des partenaires sociaux et des pouvoirs publics tunisiens, que de la part de la communauté internationale audouble plan bilatéral et multilatéral.

Mesdames et Messieurs,

En Tunisie, le vocable « Formation Professionnelle » couvre ce qui correspond en France à trois champsd’action différents à savoir :

• L’enseignement secondaire technique et professionnel dispensés dans les lycées• L’apprentissage pratiqué notamment avec les CFAI, les CIFA et les CFA• La formation professionnelle pour les employés en exercice

Il englobe de ce fait toutes les voies qui mènent à l’acquisition d’une première qualification menant à unemploi, c’est le cas de la Formation Professionnelle Initiale (FPI), ainsi que celles qui permettent la préservation del’emploi grâce au maintien de la qualification ou à son amélioration et c’est le cas de la Formation ProfessionnelleContinue (FPC).

Je me propose dans ce qui suit de vous présenter successivement et brièvement le contexte de cette réforme ensuite sa structure, que nous qualifions de cadre logique et qui permet aux différents intervenants de parler le

La réforme de la formation professionnelle en TunisieOpportunités et défis

Résumé

M. B. SaïdSecrétaire d’Etat à la formation professionnelle

Ministère de l’éducation et de la formation – Tunisie

TUNISIE

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Ne pas négliger la communication entre les partenairespour mener à bien une réforme

La vision d’une fonction globale centrée sur laqualification et l’emploi n’est pas ancienne en Tunisie.Elle ne date en fait que d’une dizaine d’années, l’année1993 constituant un jalon important dans l’émergencede cette vision qui sera développée plus loin.

Avant les années 90, le paysage tunisien de laformation était complètement différent.

D’abord, et en terme d’éducation scolaire, il n’yavait pas de scolarité obligatoire bien que les enfantsétaient pratiquement tous scolarisés à 6 ans aussi biengarçons que filles. Cependant le cycle primaire aussibien que les autres cycles scolaires connaissaient destaux de déperdition élevés et sortaient un grandnombre de jeunes, évidemment sans qualificationprofessionnelle, mais surtout avec un niveau scolaireincertain et souvent très faible. En même temps, il yavait, au niveau des collèges et des lycées, unenseignement dit professionnel et technique qui étaitcependant marginalisé, car basé sur la récupération desabandons scolaires ; il produisait des profils sansrelation avec les besoins des entreprises.

En parallèle, un noyau de formationprofessionnelle positionné pour accueillir quelquesabandons scolaires, relevait du ministère des affairessociales.

Les deux systèmes, aussi bien celui géré par leministère de l’éducation que celui géré par le ministèredes affaires sociales, se caractérisaient par des tauxd’insertion extrêmement faibles qui ne dépassaient pas40 % quelques années après l’obtention du diplôme.De plus, les diplômes délivrés par les centres relevantdes affaires sociales n’étaient reconnus ni par lesemployeurs ni même par leur ministère de tutelle.

Telle était la situation de l’EnseignementTechnique et de la Formation Professionnelle (ETFP)en Tunisie dans les années 80.

C’est dans le large contexte des réformes qu’aconnu la Tunisie depuis 1987 que la problématique dela formation professionnelle a été posée, analysée etproposée pour une réforme.

même langage et à chacun de se positionner parrapport aux objectifs de la stratégie tunisiennede mise à niveau de la formation professionnelle

connue sous le sigle MANFORME, Mise à Niveau dela Formation et de l’Emploi.

Cadre logique de la réforme

Grâce à cette dynamique de réforme, il a étépossible de clarifier une vision, et donc de changer leparadigme sur lequel reposait la formationprofessionnelle et surtout intégrer sa réforme dans uneaction de refondation très large qui a touchénotamment trois sphères :

La sphère de l’économie avec la libéralisation del’économie (Investissement en 1987, Commerceintérieur en 1989, Commerce extérieur en 1990,adhésion au Gatt en 1993 avant la création de l’OMC,négociation avec l’UE depuis 1994 et accord de miseen place d’une zone de libre échange avec l’UE dontles dispositions ont été appliquées par la Tunisiedepuis 1996, privatisation des entreprises publiquesopérant dans le secteur concurrentiel, etc..).

La sphère de l’emploi avec la priorité donnée àl’emploi qui a permis dans une première étape lamaîtrise du chômage, notamment celui des jeunes,puis sa réduction. En effet le lien stratégique entre la

formation professionnelle et l’emploi tenait àl’hypothèse de perte d’emplois, de fragilisation dumarché de l’emploi due aux conséquences de larestructuration des entreprises. Il faut ajouter à cela,que la situation démographique dans le pays étaittelle que la pression sur le marché de l’emploi aatteint son maximum à la fin des années 1990 et setrouve appelée à durer probablement jusqu’aumilieu de la fin de la première décennie du présentsiècle. Malgré les hautes performances de lapolitique démographique de la Tunisie – le tauxd’accroissement démographique étant prochede 1 % – la pression sur le marché du travail est encoreélevée du fait de la croissance de la population activenée dans les années 70 et 80. D’où la priorité touteparticulière accordée dans la politique dedéveloppement de la Tunisie au dossier de l’emploiet d’où le lien fonctionnel qui a été établi en 1990entre la formation professionnelle et l’emploi, scellépar la création d’un ministère de la FormationProfessionnelle et de l’Emploi.

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La sphère éducative avec la réforme de l’éducationqui a permis l’instauration depuis 1991 d’unenseignement de base de 9 ans (jusqu’à l’âge de16 ans) et qui a été rendu obligatoire à partirde 2002 ainsi que la suppression, au niveau desétablissements scolaires, de l’enseignementtechnique et professionnel.

Une nouvelle fonction appelée « FormationProfessionnelle » est ainsi apparue. Placée sous la tutelled’un nouveau ministère chargé à la fois de la Formationet l’Emploi, cette fonction se devait de remplacer enmieux ce qui existait au niveau des établissementsscolaires d’une part, et des centres relevant des affairessociales d’autre part. Ce remplacement a eu lieu à partirdes structures existantes essentiellement au niveau duministère des affaires sociales, sans déstabilisation, maisnéanmoins en rupture totale avec la logique qui sous-tendait leur fonctionnement, ainsi que leurpositionnement par rapport à l’économie et parrapport à l’éducation.

Le premier changement majeur dans le cadrelogique de la formation professionnelle a touché lesmécanismes de pilotage qui entraînaient la formation.Ce système tournait le dos à l’entreprise et se contentaitd’offrir des formations définies par les formateurs, sansméthodologie précise, souvent dans le cadre del’assistance technique internationale.L’option pour un nouveau mode de pilotage par lesbesoins de l’économie a engendré une actionstructurante fondamentale pour la réforme de laformation professionnelle. Il a fallu rechercher,apprendre, adapter et parfois créer les outils de ce typede pilotage. Toute une panoplie d’outils et deméthodologies a ainsi été rendue disponible par lenouveau système. Parmi ces outils, il y a lieu dementionner en premier, le partenariat public-privéentre les nouvelles structures de formationprofessionnelle et les entreprises représentées par leursbranches professionnelles, du fait qu’il conditionne enbonne partie le bon fonctionnement des autres outilsde pilotage par la demande Mis en place dès lespremières étapes de la réforme, ce partenariat réel etcontractuel, a permis le co-pilotage des projets, asurtout favorisé la mise au point et la mise en œuvredes outils d’expression et de collecte des besoins desentreprises, ainsi que la mise en œuvre de la formationavec l’entreprise et la transformation du mode degestion des centres de formation. D’un fonctionnementde type scolaire, ces centres devaient se transformeren entreprises de formation, opérant dans un marchéconcurrentiel et soucieuses de leur part de marché.

Le deuxième changement majeur dans le cadrelogique de la formation avait trait aux relations entre

la formation professionnelle et les politiques depromotion de l’emploi.

Au début de la réforme et au moment où sediscutaient l’opportunité et la faisabilité d’un pilotagede la formation par la demande économique, s’estposée la question piège de la demande sociale qued’aucun associait et confondait implicitement avec« pilotage de la formation par l’offre ». En posant cettequestion, on voulait sous-entendre l’existence d’unecontradiction entre la demande économique et lademande sociale.

Ce mythe de la contradiction entre demandeéconomique et demande sociale a été rapidementdépassé. Les études réalisées dans la première phase dela réforme ont clairement établi que le pilotage parl’offre, qui était antérieurement pratiqué, est en faitantisocial parce que plutôt producteur de chômage etde désillusion pour les jeunes. Par contre, le pilotagepar la demande économique comporte une dimensionsociale importante puisqu’il permet l’insertion etl’évolution de carrière.

L’équation du social et de l’économique étantposée, la dimension emploi de la formationprofessionnelle était de ce fait essentielle. C’est elle quiconforte le pilotage par la demande économique.

Il est apparu ensuite que la formation avecl’entreprise, appelée apprentissage ou formation enalternance, constitue le point de jonction entre lebesoin de l’entreprise et l’aide à l’insertion. Ce mode deformation a été retenu comme mode dominant.

Le troisième changement majeur concernaitl’articulation entre l’éducation scolaire et la formationprofessionnelle. La formation professionnelle n’étaitplus une destination fatale pour des jeunes en difficultéscolaire. Parce qu’il est contradictoire d’admettre, d’unepart, que les ressources humaines de l’entrepriseconstituent son premier facteur de compétitivitéet d’accepter, d’autre part, que ces ressourceshumaines soient constituées de personnes dépourvuesdes compétences génériques de base nécessairesà l’adaptabilité en cours d’emploi. Il a été ainsi admisdès le départ que la formation professionnelledevait s’adosser à un socle éducatif de base solide dufait du nouveau contexte économique et technologique.

La nouvelle formation professionnelle a été ainsipositionnée en tant que cycle post-enseignement debase (post collège pour utiliser la terminologiefrançaise). A l’entrée de la formation professionnelle,les jeunes doivent maîtriser les compétences de basenécessaires à la vie en société d’un côté et permettantl’acquisition d’une qualification structurée utilisable

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Caractéristiques de la réforme de la formation professionnelle

Comme expliqué précédemment, la réforme de laformation professionnelle a bénéficié d’un nouveaucadre logique. Mais elle a bénéficié aussi de la mise enœuvre d’outils innovants pour l’époque comme laplanification stratégique, la planification participativepar objectif et la démarche qualité. L’analyse dufonctionnement du système de formation par les« processus » a été entamée dès 1996, soit 5 ans avantque l’ISO ne retienne cette méthode comme base pourla norme d’organisation ISO 9000 version 2000.

Le fait d’opter pour le pilotage par la demandeéconomique a permis d’identifier le client, ses attentesainsi que les indicateurs permettant le suivi de leurssatisfactions. L’usage des outils innovants précités s’enest trouvée facilité.

Les composantes de la réforme n’étaient pas toutesconnues avec précision au moment de son lancement.Une démarche empirique a prévalu pour la plupart deces composantes. Une phase expérimentale et derecherche de bonnes pratiques initiait le processus. Elleétait suivie ensuite d’une phase pilote où le test se fait àl’échelle réelle et dont l’objectif est de régler lesparamètres de mise en œuvre. Venait ensuite, etseulement ensuite, une phase de généralisation qui étaitelle-même graduelle.

C’est ainsi que le progrès dans la définition etsurtout dans l’implantation de la réforme a connu cinqpaliers correspondants chacun à un niveau d’objectifs

par une spirale qui évolue autour d’un axe vertical deprogrès et un axe horizontal de retour d’expérience.

Chaque palier contribue à une maîtrise d’outilsou à une croissance du dispositif, parce que lasatisfaction du besoin se déroule sur deux niveaux : unniveau qualitatif de profils et un niveau quantitatifd’effectifs. Au niveau de chaque palier, le retourd’expérience a permis de définir par ajustementl’objectif de la phase suivante, en même temps qu’unemise au point des outils et méthodologies acquises lorsdes phases précédentes.

Une démarche participative a été égalementintroduite à toutes les étapes de la réforme. Laplanification par objectif (PPO) est systématiquementutilisée ; elle associe toutes les parties concernées parchaque projet dans sa définition opérationnelle.

Enfin, la conception de la réforme a procédéd’une démarche systémique compte tenu de lacomplexité des relations qui existent entre les élémentsqui interviennent dans la gestion et dans la mise enœuvre de la formation. La réforme a ainsi ciblé aumoins 8 axes principaux de manière coordonnée ettenant compte des interactions entre ces axes.

Je vais essayer de les passer en revue en soulignantles principaux acquis mais aussi des principaux défisqui restent à lever.

Des acquis…, mais encore des défis

L’avancée s’est faite simultanément sur pratiquementtous les axes, quoique à des vitesses différentes, comptetenu de la nature des activités et des spécificités desparties prenantes. Après 10 ans de réforme, des acquiscertains ont été obtenus sur tous les axes. Cependant, desdéfis subsistent encore et nécessitent des effortsopérationnels pour être relevés.

4.1 - Sur l’axe du partenariat, les branchesprofessionnelles tunisiennes sont aujourd’huihabituées à être co-maître d’ouvrage avec lesstructures en charge de la formation pour tous lesprojets de création ou de restructurationdes centres de formation professionnelle.Elles ont appris ensuite, à être co-pilote du

dans l’immédiat (insertion) et dans le futur (évolutionde carrière). Mais il ne s’agissait pas de transformer laformation professionnelle en cycle sélectif à l’entrée quiserait fermé à un grand nombre de jeunes. La solutionétait à rechercher dans l’enseignement de base lui-même. A cet effet, une action profonde en profondeur aété menée dès 1991, renforcée et élargie par la loi de2002, pour asseoir un enseignement de base de 9 ans

utilisant des méthodes pédagogiques rénovées et ayantpour objectif de garantir une qualité d’apprentissagepour le plus grand nombre. La Tunisie s’est jointe auprogramme international d’évaluation des qualitésd’apprentissage, PISA, pour étalonner sonenseignement de base par rapport aux bonnespratiques internationales.

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fonctionnement de ces centres. Dans ce domaine,les bonnes pratiques des branches professionnellesfrançaises, a été déterminant dans la réussite decet axe.

Cependant et malgré cette réussite, la pérennité deces acquis, n’est pas encore assurée. Il n’est pasencore évident d’obtenir pour tous les secteurs,l’engagement effectif requis pour assurer unpilotage concerté et un partage total de laresponsabilité dans le respect des exigences de lacompétitivité des entreprises et celle del’employabilité des jeunes. Le mode de financementde ce partenariat constitue encore un pointd’achoppement. Là également, les bonnes pratiquesdes branches professionnelles françaises sont entrain d’être testées

4.2 - Sur l’axe de l’ingénierie, l’avancée a été aussi netteet déterminante. Avant la réforme, la Tunisie n’avaitaucun savoir-faire formalisé dans ce domaine.Aujourd’hui, le Centre National de Formation desFormateurs et d’Ingénierie de la Formation(CENAFFIF) peut se prévaloir de la maîtrise d’unepanoplie complète en matière d’ingénierie de laformation depuis l’aide à la formulation d’un besoinen compétences, jusqu’à l’audit d’un centre deformation en passant par l’élaboration deprogrammes d’études, et de divers guidespédagogiques d’organisation et d’évaluation, ainsique la formation des formateurs, la formation et lecoaching des équipes de management, et laformation des tuteurs en entreprises.

Le processus complet de l’ingénierie a été ainsidéfini, testé, validé et formalisé dans ce qui estappelée Approche par Compétences (APC).

C’est le secteur public des formations industriellesqui en a bénéficié en premier. Les secteurs del’hôtellerie et de l’agriculture viennent de luiemboîter le pas. L’extension de l’usage de cesbonnes pratiques au secteur privé de la formationreste encore au stade de projet. Il demeure un défique la structure en charge de la formation se doitde relever.

Le changement du statut juridique du CENAFFIFintervenu en ce mois de décembre 2003 est denature à lui faciliter la tâche. Ce dernier se doitaussi d’assurer la réactivité du système de suivides besoins en compétences des entrepriseset notamment des PME. Pour concrétisercette démarche, un nouvel outil est en coursde finalisation. Désigné par l’expression« Répertoire des Compétences » dont le démarrage

est prévu pour le premier trimestre 2004.

4.3 - En parallèle, avec la mise au point et la maîtrisedes outils de l’ingénierie de la formation selonl’APC, le CENAFFIF s’et attelé à maîtriser lapédagogie de l’alternance et à la diffuser auprèsdes formateurs des centres de formation. Au fur età mesure des projets de création ou derestructuration, des actions d’envergure en matièrede formation sont assurées au personnelpédagogique et de gestion de centres de formationconcernés.

Mais la tâche est loin d’être achevée : les besoinsen formation augmentent au fur et à mesure quela réforme s’approfondit et s’étend. Aujourd’hui, àtitre d’exemple, la formation à distance n’est pasencore maîtrisée. Cette semaine, une équipe deformateurs visitent le réseau de formation del’UIMM de la région parisienne et de laBourgogne, pour prendre connaissance desbonnes pratiques françaises en matière deformation individualisée (IFTI).Cette action a été possible grâce à l’appui del’Institut Français de Coopération relevant duministère des Affaires Etrangères et au partenariatsolide mis en place depuis plusieurs années entrela branche professionnelle française de lamétallurgie et l’UIMM et ses homologuestunisiens affiliés à l’UTICA (Union Tunisienne del’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat).

4.4 - Au niveau de la gestion des centres de formation,les apports majeurs de la réforme ont trait aupassage d’une gestion centralisée à Tunis à unegestion décentralisée vers le centre de formation,avec comme corollaire la dotation des centresd’une organisation leur permettant d’assumerréellement leurs responsabilités et de rendrecompte de leurs résultats. L’objectif visé étant deconférer aux centres l’agilité nécessaire au suivi des besoins de l’économie et à l’adaptationcontinue des formations à ces besoins. Cela s’esttraduit par une organisation du centre deformation selon un modèle d’entreprise et doncun mode de gestion avec obligation de résultat.C’est probablement l’axe de la réforme qui anécessité le plus de temps et d’effort, et nous n’ensommes encore, en terme de mise en œuvre, qu’audébut du processus.Comment gérer un bien public, rendant unservice public, selon un mode de gestion efficient,reposant sur des critères d’efficacité similaires àceux d’une gestion d’entreprise privée ?L’expérience internationale n’est pas riche en lamatière ; c’est une opération complexe de

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rénovation de services publics. Là encore, lesressources du partenariat entre branchesprofessionnelles tunisiennes et françaises ont étéprécieuses pour identifier des voies passantes.L’implantation de la démarche qualité a été unmoyen efficace pour baliser le terrain devant cechantier de renouveau de service public aumoyen de la formalisation d’un RéférentielNational de la Qualité de la FormationProfessionnelle (RNQFP). Ce chantier est loind’être achevé ; nous comptons sur l’extension del’implantation de la démarche qualité pourpérenniser les acquis de la réforme aussi bien auniveau des structures opérationnelles de laformation professionnelle que celles de l’appui àces structures.

4.5 - En matière de capacité d’accueil, le dispositifhérité en 1993 pouvait, pour une tranched’âge (16 ans) constituée de près de200 000 jeunes, accueillir 7 500 jeunes, dontl’insertion était par ailleurs difficile, leurformation n’étant pas conçue en fonction desbesoins de l’économie. Alors qu’aujourd’hui, prèsde 45 000 jeunes, dont au moins 35 % de filles,sont en formation professionnelle au niveau del’ouvrier qualifié, celui du technicien et celui dutechnicien supérieur, avec un niveau decompétences répondant à la réalité des besoinsdes entreprises. Près de la moitié de ces apprenantssont dans la formation avec l’entreprise. Lesprojets en cours ou planifiés porteront cet effectifà près de 100 000 jeunes en 2006.

L’image de marque de la formation profession-nelle a été totalement rénovée grâce surtout àl’amélioration du taux d’insertion des diplôméset aux campagnes de communication faitesautour des centres restructurés.

Là aussi des défis importants restent à relever,surtout pour accompagner le doublement dela capacité d’accueil notamment en matièrede mobilisation des entreprises partenairescapables d’exprimer une offre globale deformation de l’ordre de 50 000 postes deformation en entreprise d’ici 2006/2007, avantl’échéance finale de la « dé-protection » del’économie de 2008.

Cela nécessite aussi la mise en place d’un systèmeperformant d’information/orientation scolaireà l’amont de la formation professionnelle, et

l’ouverture de perspectives à l’aval de laformation, par la réforme des formations detechniciens supérieurs vers plus de formationavec l’entreprise et la création de filières deformation d’ingénieurs par l’apprentissage.

4.6 - Les institutions de tutelle et de pilotage ont étéciblées aussi par la stratégie de réforme.Leur capacité de réalisation aussi bien en termed’identification de grands projets que de maîtrised’ouvrage, a été largement renforcée. En terme devolume financier engagé annuellement, cettecapacité a été décuplée. La capacité d’ingénierie aété créée et rendue opérationnelle. Il en est demême de la capacité d’intermédiation et depromotion de la formation continue.Mais après une dizaine d’années de réforme etl’émergence de centres de formationprofessionnelle autonomes et redevables, cesinstitutions sous tutelle sont entrain de connaîtreune nouvelle réforme pour les transformer enstructures d’appui et de services aux centres deformation. Nous comptons sur l’implantation dela démarche qualité dans ces institutions pourencadrer et appuyer cette mutation.

4.7 - La réglementation a été à la fois le point dedémarrage de la réforme et bénéficiaire de cettemême réforme en terme de retour d’expériences.L’expérience tunisienne a montré qu’une réformepeut être enclenchée par un changement deréglementation ; mais cette réglementation doitêtre assez souple pour permettre des innovationsqui ne pourraient pas être prévues avant ledémarrage de la mise en œuvre de la réforme.Elle doit aussi bénéficier du retour d’expériencespour une mise à jour et un déclenchement d’unecouche de réformes plus approfondies.

La loi d’orientation de la formationprofessionnelle de 1993 a permis la mise en placed’un système de formation professionnellereconnu et a permis l’engagement de réformespédagogiques et organisationnelles dont lescontours étaient à peine connus en 1993.Aujourd’hui, l’arsenal juridique est interpellésur la recherche d’un mode de financementcohérent avec les réformes organisationnellesdéjà engagées sur l’amélioration de lagouvernance du système. L’économie construitesur les connaissances ouvre de nouvellesperspectives que le système réglementaire se doitd’anticiper.

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4.8 - La pérennisation des bonnes pratiques degouvernance et le positionnement de la formationprofessionnelle comme levier de l’économie baséesur les connaissances sont des objectifs de laréforme dans sa phase actuelle. La culture del’évaluation est en cours d’implantation, enmême temps que la démarche normalisation –

certification. Le processus d’amélioration continuea été ainsi lancé.

Néanmoins, des défis persistent notamment enmatière de diffusion de bonnes pratiques à la totalité du système éducation – formation.

De nouveaux défis pour la formation professionnelle :

Conclusion

L’économie basée sur la connaissance est denature à poser de nouveaux défis à la formationprofessionnelle au moins aussi complexes que ceuxposés par la mondialisation de l’économie. Dans cedomaine, et sur certains axes, la Tunisie a anticipé cesdéfis.

Le développement de l’esprit entrepreneurial chezles apprenants, a bénéficié d’une attention particulière.Déjà, au milieu des années 90, des actions ponctuellesde formation à la création d’entreprises étaientdevenues régulières et structurées. C’était leprojet Création d’Entreprises et de Formationd’Entrepreneurs (CEFE).A partir de l’année 2001, lescompétences entrepreneuriales ont commencé à êtreintroduites dans les programmes de formation, c’est leprojet Formation aux Compétences Entrepreneuriales.Il va permettre de réviser tous les programmes deformation pour assurer l’intégration des compétencesentrepreneuriales dans tous les curriculums.

Les technologies de l’information et de lacommunication ont été aussi introduites et diffuséessur une large échelle dans tous les centres de formationen tant qu’outil pédagogique ou en tant qu’objet de laformation. Elles sont appelées à se développerdavantage avec l’émergence des outils de la formation àdistance.

Les innovations dans la gestion des ressourceshumaines des entreprises, constituent un défi pourl’économie et pour la formation. Le Centre National deFormation de Formateurs et d’Ingénierie de laFormation (CENAFFIF) est entrain de finaliser unnouveau projet de technopole dédié à la gestion desressources humaines et à l’ingénierie de la formation :FORMAPOLE.

La question-clé qui se pose au stade actuel de la mise en œuvre de MANFORME est bien de savoir si la stratégieva atteindre ses objectifs à l’échéance indiquée et si la réforme a bien atteint un point de non retour.

La réponse à la première question est oui si le processus de mise à niveau des entreprises réussit parallèlement àatteindre ses objectifs de compétitivité, de croissance et d’emploi, si l’entreprise accepte d’être entreprise formatriceet si les flux de jeunes à travers les filières post-enseignement de base étaient soumis à un système de régulationrationnelle, c'est-à-dire compatible avec les exigences à long terme du marché du travail.

Quant à la deuxième question, elle admet également une réponse affirmative dans la mesure où l’implantationde la démarche qualité réussirait à consolider les acquis de la réforme et à les pérenniser.

De ces conditionnalités se décline un ensemble de mesures d’accompagnement dont la prise àtemps sera déterminante pour gagner le pari de MANFORME

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Le savoir engendre des rendements croissants etrepousse les limites de la croissance ; l’accélération duprogrès technologique et le renforcement constant de laconcurrence rendent l’éducation et la formationpermanente indispensables. Pour un pays tel que laTunisie, l’explosion du savoir est source d’espoir. Eneffet, les inégalités du futur seront tributairesessentiellement des inégalités face au savoir ; celles-ciseront de plus en plus cruciales car l’écart se creuseraplus rapidement. Inversement, lorsqu’on parvient àasseoir au sein de la société civile une tradition de savoiret de formation tout au long de la vie, il est certain qu’onlui donne toutes les chances d’améliorer son niveau devie beaucoup plus vite et de manière irréversible.Le premier utilisateur des futurs diplômés étantincontestablement l’entreprise,il en résulte un impératifincontournable : traiter l’investissement physique etl’investissement immatériel au minimum sur un planégal. L’entreprise constitue une cellule essentielle dans ledéveloppement de l’économie et un facteur privilégié deproduction de croissance, elle est aussi interpellée pourune participation plus active dans le domaine de la

formation, en donnant en son sein même, lecomplément nécessaire à la formation théorique desjeunes ; il va de soi que la formation résidentielle ne peutêtre suffisante face aux mutations continues des modeset des moyens de production. L’éducation, la formation,et l’investissement dans le savoir constituent les facteurs clés pour ledéveloppement de l’entreprise, compte tenu del’accélération des mutations d’un monde en perpétuelchangement, de la multitude des défis, et durenforcement de la compétition pour la conquête desmarchés. L’approche des responsables d’entreprises : enfait, la rentabilité de l’entreprise est liée à la capacité deses ressources humaines quel que soit l’investissementmatériel consenti ; la gestion optimale des équipements,la productivité, la créativité et la plus-value, ne peuventêtre assurés que par des compétences humaines.L’innovation et la modernisation de l’Éducation setraduisent par une refonte des mécanismes enpartenariat entre secteur public et privé, ceci afind’atteindre une formation dans les secteurs répondantréellement aux besoins de l’entreprise d’aujourd’hui.

Éducation, entreprise et mutationséconomiques et technologiques

Résumé

T. TlemceniGoaïed

Membre du Conseil d’administrationUTICA – Tunisie

Contexte général

Par les mutations des processus de production(sauts technologiques), de création et de diffusion desconnaissances (nouveaux moyens de communication),les changements fulgurants des principes commerciaux(commerce électronique), accompagnés par uneconcurrence mondiale aiguë, et un déplacement spatialdes investissements (et donc de l’Emploi), on constateune déconnexion entre le système éducatif et le marchédu travail, surtout si les mutations ne sont pasaccompagnées par les réformes adéquates quis’imposent.

Ces mutations que vit l’humanité, multiples,profondes et rapides, posent aux systèmes éducatifs des

contraintes sérieuses (dues surtout aux lourdeurs dessystèmes éducatifs) et exigent de ces derniers unevéritable refonte, et une adaptation rapide, devantrépondre à de nouvelles données économiques, socialeset politiques.

Ce déplacement spatial croissant de l’Emploi dansle monde, met en cause les appareils rigides d’éducation– formation, incapables de s’y adapter rapidement, etrend caduques les projections à terme des besoinsd’emploi : les besoins du marché de l’Emploi tendent àse bouleverser aussi bien en termes qualitatifs quequantitatifs.

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Historique

Il me semble réellement inutile de soulignerencore l’importance de l’investissement que nousaccordons dans les compétences de l’Homme pourdoter nos entreprises, et par résultante notre économie,des atouts nécessaires pour renforcer notrecompétitivité, en vue d’une promotion durable etconstante de notre pays. En effet, la force d’uneéconomie se juge à présent sur la base de la qualitédes ressources humaines, sur les capacités àmaîtriser les technologies de pointe et les nouvellesconnaissances scientifiques.

Depuis notre indépendance, nous avons investidans l’enseignement pour lutter contre le sousdéveloppement, s’orienter progressivement vers uneautonomie économique, et mener les actionsnécessaires pour atteindre un développement

économique et social sur une base solide. Depuis 1987,la nouvelle orientation économique a consolidé cettedémarche, donnant expressément un égal accès ausavoir à tout citoyen, convaincus que « l’école est la sourcede l’authenticité et la clef de la modernité… »C’est dans cet esprit et depuis 88, que s’inscrit laréforme éducative : une manière de rénover la missionde l’École en lui assignant comme devoir, de former lescompétences nécessaires pouvant répondre auxmutations mondiales. L’objectif visé consiste àaméliorer les qualifications des Ressources Humaineset à assurer rapidement, leur adaptation aux mutationsprofondes que connaît la scène internationale.« Ceux qui attendent que les mutations surviennentpour former, ensuite, les jeunes en vue de s’y adapter,se placent, à notre sens, à la traîne du mouvementuniversel »

Description des compétences requises :

Les compétences du 21ème siècle contraignent à lamaîtrise des technologies de pointe et impliquent unecapacité d’adaptation rapide aux nouvellesperturbations économiques et financières. Notreépoque devient plutôt marquée par une évolution dusavoir « en grappe » à un rythme de plus en plus rapide.Les inventions s’imbriquant l’une dans l’autre,remettent en cause le cloisonnement des spécialités, leprogrès du savoir devant favoriser et élargir le champdu savoir dans d’autres disciplines.

Par ailleurs, la viabilité du savoir acquis estraccourcie par le fait de la rapidité croissante del’évolution de ce savoir qui se déprécie en un laps detemps de plus en plus court, remettant en cause lecloisonnement entre le champ du savoir (école dansson sens large) et le champ du savoir-faire et du savoir-être (héritages culturels, habitudes et sociétés).

Ces changements dans la nature et le rythmed’évolution du savoir posent donc aux systèmeséducatifs de nouveaux problèmes : diversité,actualisation continue des options de spécialisation,recyclage et alternance entre l’école et le métier.L’école d’aujourd’hui ne se limite plus à dispenser toute

la masse de connaissances, (à part ce que j’appellerai le« Kit minimum nécessaire »), mais elle s’efforce surtoutde doter les jeunes d’instruments leur permettantd’auto-acquérir des connaissances de façonpermanente, en utilisant la formation à distance, et ens’adaptant aisément aux nouvelles donnéeséconomiques et sociales.Ici nous résumerons en soulignant que l’école doit plusque jamais faire parvenir à « une tête bien faite et nonbien pleine », entre autre à travers les nouveaux moyenssans cesse plus performants mis à la disposition dumonde, comme la télé-formation, télé-enseignement,etc. … Cela implique par ailleurs, qu’il faut donner auxjeunes, les moyens pour parvenir à une capacitéd’innover, d’actualiser, reconvertir et adapter leursconnaissances, avoir une agilité et une ouvertured’esprit leur permettant de mieux juger, synthétiser,analyser, prendre des décisions, et auto-développer sanscesse son savoir être, son intelligence, ses compétenceset ses connaissances au fur et à mesure des mutations etchangements régionaux qu’ils devront maîtriserentièrement.

Moyens

Comment mettre en place une politiquesectorielle et sociale en insistant notamment sur lavalorisation des Ressources Humaines afin de relever lesdéfis futurs, particulièrement dans le domaine de lamaîtrise des technologies à travers le renforcement des

programmes d’éducation, de formation professionnelle,d’enseignement supérieur, et de recherche scientifique ?

Des mesures multiples et audacieuses ont étémises en œuvre, notamment rendant obligatoirel’enseignement de base sur neuf ans, et donnant le

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moyen aux jeunes d’accéder à un savoir minimal debase. Compte tenu de ces réformes, tous les jeunes, quelque soit leur sexe et leur milieu social, ont vu s’ouvrirdevant eux les portes du savoir et de la connaissance.Les programmes ont été remaniés, les sectionsdiversifiées, et les filières de formation professionnelleenrichies et remodelées selon l’approche parcompétence ; il faut souligner par ailleurs, que cedomaine est désormais entièrement intégré dans lesystème éducatif national.

La rénovation a eu pour pivot central uneinterdépendance de tous les niveaux actuels et de toutesorte de formation générale, technique ouprofessionnelle ; les cloisonnements se sont estompéspour disparaître totalement, laissant place à un systèmede formation global et intégré, ceci grâce aux systèmesde passerelles multiples, de sanctions par paliers decompétences, de possible retour à l’enseignement aprèsune formation pratique, de formation et éducation toutau long de la vie, etc.

Défis

Bien entendu, de telles réalisations constituent unesource de fierté et un réel facteur d’espoir pour l’avenir ;mais elles nous obligent à considérer les moyens deconsolider ces acquis et de faire face aux défis permanentsqui surviennent Ces défis découlent de la forte compétitiondans ce monde où le profit devient l’unique devise, et oùles grands groupes dominent le paysage économique etfinancier. Nous nous efforçons d’approfondir les réformespour nous assurer une économie performante et ouvertesur l’extérieur, avec une large diversification du tissuindustriel, et une main d’œuvre répondant à de nouveauxmétiers. Notre pari sur les compétences est devenu plusque jamais un enjeu primordial, conscients que nous neparviendrons à réussir la transition de notre économie et àrelever les défis de l’ouverture que par une compétitivitésolide, avec une maîtrise optimale de gestion de nosressources humaines, et un personnel compétent, organiséet motivé.

Dans ce contexte, il semble important d’évoquer laconsultation nationale autour de « l’école de demain »,

mobilisant tous les acteurs de la société civile autour de cethème vital pour l’avenir des jeunes et de la Tunisie.

D’une part, associé pour la conception, l’évaluation et lesuivi général des programmes, le citoyen évolue enacteur volontairement conscient et solidairementresponsable dans la consolidation de la société civile. Laparticipation des personnes aux comités de réflexion etaux prises de décision rend les différents intervenantssolidaires et conscients des responsabilités à assumer.

D’autre part, les forces vives du pays participent etréfléchissent ensemble pour rendre des propositionstendant à hisser le système de l’Éducation à un niveaului permettant de répondre aux impératifs vécus dela modernité. Cette démarche permet de renforcerla solidarité et la mobilisation nationale autour d’unprojet d’avenir ambitieux, source de fierté.

Levier de qualité : le partenariat

Dans un souci de coller au plus près à la réalitédu monde de la production, il était pertinent deprendre en compte l’avis des entreprises pour lesgrandes lignes des futures orientations. La formationa adopté sans complexe, une « démarche client »

L’innovation et la modernisation du secteur dela formation se traduisent en Tunisie par une refontedes mécanismes en partenariat entre secteur publicet privé, ceci afin d’atteindre une formation dans lessecteurs répondant réellement aux besoins del’entreprise d’aujourd’hui, avec une mise à jour descompétences acquises entre l’école et les entreprisesen constante évolution.Actuellement, la Tunisie peut faire face aux besoinsd’une économie évoluée, intégrée dans son

environnement régional et international, mettantsur le marché de l’emploi des compétences capablesde s’adapter aux changements et aptes à utiliser lesmoyens de production modernes.Parallèlement, et grâce à l’adhésion soutenue desentreprises, une véritable culture de la qualité s’estinstaurée avec le programme de mise à niveauglobale. Cette démarche a donné en Tunisie unavantage supplémentaire pour les investissementsaussi bien tunisiens qu’étrangers, puisqu’elle met àleur disposition des ressources humainescompétentes et qualifiées, avec des aptitudes pourcontribuer à l’amélioration de la productivitérenforçant la compétitivité des entreprises dans dessecteurs à forte valeur ajoutée.

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De même, ce secteur de la production est interpellépour une participation plus active dans le domainede la formation, en donnant au sein même del’entreprise, le complément nécessaire à la formationthéorique des jeunes pour mieux leur assurer desqualifications et des compétences actualisées.

Il va de soi que la formation résidentielle ne peut êtresuffisante face aux mutations continues des modes et

des moyens de production ; en accueillant les jeunesdans leurs entreprises, ces dernières participentvolontairement à la construction d’une société dusavoir et de « l’employabilité » dans ce monde où leschangements ont un rôle déterminant.

Développement des compétences et apprentissage tout au de la vie

Au travers d’incitations diverses et definancement, l’appui à la formation continue etl’adaptation des enseignants permettent une mise àjour des compétences, afin de mieux répondre auxnouveaux programmes et aux besoins du marché del’emploi. Dans ce domaine, en Tunisie où « le savoirconstitue l’arme de l’avenir et la richesse consisteen l’Homme », les projections tendent à généraliserla formation tout au long de la vie.

Cette mise à niveau permanente desRessources Humaines, au travers d’une mise à jourpermanente des connaissances tout au long de la vie,devient le moyen stratégique primordial pour doter

notre économie d’une compétitivité réelle, d’uneflexibilité et une réactivité sans cesse renforcées etd’une réelle condition de stabilité sociale durable.

La mission première d’une entreprise étant decréer par sa capacité d’innovation et de réactivitéune valeur ajoutée à sa production et ses services envue de satisfaire ses clients, la formation continuepourra donc la doter de moyens efficaces pourtraduire cette préoccupation en termesd’organisation et de redéploiement de sescompétences individuelles et collectives en harmonieavec sa stratégie d’entreprise.

Conclusion

La stratégie qui consiste à offrir à tous, la possibilité d’apprendre tout au long de la vie apparaît comme unmoyen non seulement d’anticiper les changements économiques et sociaux, mais aussi et surtout,d’en tirer parti.

L’apprentissage à vie va bien au-delà d’une seconde chance de reprendre des études ou de suivre uneformation à l’âge adulte. Elle repose sur l’idée que chacun doit être en mesure d’apprendre tout au long de sonexistence, d’avoir le goût de le faire et d’y être activement encouragé. Cette conception de l’apprentissagerecouvre le développement personnel sous toutes ses facettes :

aussi bien formelles (à l’école et dans les centres de formation professionnelle) qu’informelles (c’est-à-dire chez soi, au travail, et dans la vie de tous les jours)

L’apprentissage à vie est considéré comme une composante fondamentale de la politique de l’emploi et decompétitivité de l’entreprise, tant nous constatons une relation forte entre la formation et la croissance, aussibien des individus que de l’économie en général.

La globalisation nous interpelle sur les problèmes de fond qu’elle implique du point de vue de l’évolution,avec la coordination vitale qu’elle nécessite pour une large redistribution de ses fruits. La promotion del’économie ne suffit pas à relever les défis de la globalisation, si cette promotion n’englobe pas en même tempsune réelle évolution sociale et humaine, regroupant toutes les populations et les régions du pays, afin d’engénéraliser les acquis.

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Quelques données

• Le Chili est un pays relativement petit(environ 15 M. d’habitants) avec, dans le cadrede l’Amérique Latine, un taux d’accroissementde sa population relativement bas (1,13 %) etdes standards de vie plutôt élevés ; en moyen-ne, la durée de scolarité pour les plus de 15 ans

est de 10,5 ans et le revenu annuel par tête estde l’ordre de 4 000 USD.

• Le pays est caractérisé par de grandes inégalités :la distribution statistique des revenus est l’unedes pires du continent et même du monde.C’est un grand problème.

« Je voudrais en premier lieu remercier les organisateurs de ce séminaire de nous avoir offert l’opportunitéde découvrir autant d’expériences variées qui nous obligent à nous questionner fortement sur ce que nousfaisons nous-mêmes au Chili ».

- Enseignement de base : 8 ans- Enseignement secondaire : 4 années dont les

2 dernières organisées en deux voies : laformation « humaniste et scientifique » et laformation « technico-professionnelle », lesdeux ayant un important noyau de formationgénérale constituant une base possible depasserelle.

- Enseignement supérieur : 3 grands typesd’institutions ; les Centres de formation

technique (CFT) qui devraient être unprolongement naturel de la formationtechnique secondaire ; les Institutsprofessionnels et les Universités.

Actuellement, sur une tranche d’âge,50 % seulement terminent leurs étudessecondaires ; nous avons pour objectifde porter à 12 ans la durée de scolaritépour tous.

Les réformes

L’effort actuel en formation techniqueprend racine dans une réforme lancée dans lesannées 90 qui s’est attaquée, l’un après l’autre,aux niveaux successifs du système : éducation debase en 1992, enseignement secondaire à partirde 1995, enseignement supérieur en 1998 et noustentons actuellement de relever le défi de la

formation tout au long de la vie en cherchantà « articuler » le secteur éducatif et le secteurproductif. Il s’agit d’efforts considérables pourle pays qui a triplé ses investissements dansl’éducation dans la dernière décade, avec l’appuide la Banque mondiale.

P. MonttDirecteur de la division éducation générale

Ministère de l’éducation – CHILI

Pour des raisons techniques, la transcription de laprésentation faite par M. P. Montt n’a pas pu être validéepar son auteur.De manière à ne pas priver l’édition de ces Actes d’une

contribution importante à nos yeux, le texte qui suit aété élaboré à partir de cette transcription par nos soins ;nous espérons être resté fidèles à l’esprit de laprésentation de M. Montt.

La réforme de l’ETFPau Chili

Structure du système éducatif

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Les grands axes de la politique du Chili

- créer les conditions d’un développementsusceptible d’offrir des opportunités àl’ensemble de la population,

- pour cela, créer les conditions d’une synergieentre système éducatif et système productif,

- afin de relever le défi redoutable des récentsaccords de libre échange assumés parle Chili, non seulement sur le continent, maisavec les Etats-Unis, l’Europe et la Corée, entreautres.

Quatre grands défis

Je vais surtout me référer au dernier qui estpour nous le plus novateur du point de vue del’expérience de notre système éducatif tout endonnant quelques éléments sur les autres axes denotre politique pour la formation technique.• D’abord, augmenter le nombre de techniciens

supérieurs. En effet, le nombre d’élèves del’enseignement technique secondaire est passéde 29 % du total des inscrits à ce niveau, en1980, à 46 % aujourd’hui. Cependant, durantla dernière décade, le nombre des inscrits dansles institutions formant des technicienssupérieurs, les CFT, a chuté de 30 %, passant de77 000 étudiants à 55 000, ce qui signifie que demoins en moins d’élèves issus du secondairevont dans ce secteur d’études.

• Ensuite, élever la qualité de l’enseignementtechnique. D’une part, les CFT, pourtant partiede l’enseignement supérieur, sont de faiblequalité au regard des exigences de la société dela connaissance. Mais en même temps, il nousfaut améliorer la qualité du système scolaire ;

nous disposons de nombreux éléments decomparaison internationale qui nous montrentque nous avons beaucoup à faire au regard dece qui devrait être.

• Egalement, augmenter les possibilités d’accès etde réussite des jeunes les plus pauvres àl’enseignement technique supérieur ; d’où unepolitique récente d’ouverture, de bourses et desoutiens divers aux groupes les plus défavorisésde notre population.

• Enfin, viser, à travers le programme soutenupar la Banque mondiale, un objectif encoreplus ambitieux qui est de « structurerl’enseignement technique dans un systèmed’apprentissage permanent et tout au long dela vie ». Pour cela nous recherchons des voiesnouvelles pour une intégration verticale desformations techniques (du secondaire ausupérieur) et la mise en place de passerellesentre les diverses formes de formation (systèmeformel, formation professionnelle continue,acquis de l’expérience...).

Cela suppose de nouvelles exigences pour l’éducation et, particulièrement, pour l’enseignementtechnique.

Ce que nous mettons en place

Nous allons essayer de vous montrer dansles quelques diapos qui suivent comment nouspensons le système et où nous en sommes,sachant que le concept d’éducation tout au longde la vie est totalement novateur pour nous et,certainement, pour toute l’Amérique Latine.• D’abord, créer les conditions d’une

« articulation » entre les acteurs du système,le monde du travail, celui de la formationcontinue, celui de l’éducation formelle.

A l’intérieur même du système éducatif,« articuler » le secondaire, général et technique,avec le supérieur technique. En même temps,très importante pour nous est la nécessité demise à niveau des adultes : un pourcentage élevéde la population adulte n’est pas allé au boutdes études secondaires (45 % des plus de 15 ansn’ont pas 12 ans de scolarité, ce qui estnotre objectif). Il faut donc progresser dansce domaine.

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• Quels sont nos instruments pour développercette politique ?

- créer un système fondé sur les compétencesprofessionnelles ;

- définir des profils professionnels permettant deregrouper les spécialités ;

- « modulariser » les curricula tant dans lesecondaire que dans le supérieur ;

- dessiner des « itinéraires de formation »qui permettent, par des mécanismesd’évaluation et de validation, de certifier descompétences d’origines diverses ;

- mettre en place un système d’information etd’orientation sur les professions permettant auxjeunes et aux adultes de faire des choixpertinents d’insertion professionnelle ;

- améliorer les bases (maîtrise du langage,mathématiques, connaissances essentielles entechnologie), particulièrement pour les plus de15 ans ;

- mettre en place un système d’assurance qualité detoute la formation technique.

• Où en sommes-nous ?- Dans les années 80, nous avons fait un effort

important qui se poursuit : au niveau secondaire,l’enseignement est organisé dans une logique decompétences, les curricula sont découpés enmodules et nous disposons de « profilsprofessionnels » correspondant chacun à unregroupement de spécialités (avant 1980, nousavions plus de 400 spécialités de formationtechnique ; il n’existe plus que 46 spécialitéscorrespondant à 13 familles professionnelles).

- Nous devons installer un pont vers l’enseignementsupérieur technique pour les élèves qui ont une

formation générale mais qui ne vont pasnécessairement accéder à l’université, aux I.P. niaux CFT et qui n’accèderont pas davantage à unemploi. Il faut aussi organiser une continuité entrele secondaire technico-professionnel et lesupérieur technique. Enfin, dans le cas des adultes,nous sommes en train de tester un schéma descompétences de base, un nouveau cadrecurriculaire et, pour ce qui concerne la formationtechnique, nous mettons en place un système demodules qui est équivalent à celui del’enseignement secondaire.

- Pour l’enseignement technique supérieur, noussommes en train de dessiner un système à base decompétences, des « profils professionnels », unemodularisation des curricula et des « itinérairesde formation ».

- De même, pour ce que nous appelons lesystème non formel, nous mettons en placedepuis 2 ans, un processus basé sur unréférentiel de compétences pour la formationcontinue des adultes, dans le but depermettre un passage entre le système nonformel et le formel. En même temps, nouspréparons un système de certification descompétences, ouvert aux entreprises mêmes,et qui peut être validé dans le système formel.

- Enfin, tout ce dispositif d’« articulation »repose sur un système d’informationqui est en cours de définition et sur lepilotage d’un système d’assurance etd’amélioration continue de la qualité quiconcernera aussi bien les établissementsd’enseignement secondaire que supérieur.

Stratégies

Pour terminer, nous utilisons les stratégiessuivantes :- Création de « réseaux de formation », structu-

res associant entreprise, institutions de forma-tion continue, établissements d’enseignementsupérieur et secondaire, qui définissent les« itinéraires de formation » et les passerelles del’un à l’autre.

- Dans le domaine des adultes, mise en place desystèmes de mise à niveau des études par desmodalités flexibles permettant l’accès à laformation pour des populations qui ne lepouvaient pas.

- Dans le domaine de la formation profession-nelle continue, mise en place d’incitations

économiques et non économiques à la modu-larisation des formations et à la certification.

- Enfin, en ce qui concerne l’amélioration dusystème d’orientation, élever la qualité desbureaux locaux d’information, améliorerle système de conseil et d’orientation au seindes écoles et construire un système d’assurancequalité pour l’enseignement technique.

Pour tout cela, nous avons un programmed’environ 150 M. USD sur 6 ans : en gros 50 M.pour les réseaux, encore 50 M. pour les modali-tés flexibles de mise à niveau de la populationadulte et le reste pour toutes les autres actionsprévues dans ce dispositif.

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J. G. Vidal 1

Responsable du plan d’action du réseau d’articulation de l’éducation techniqueet professionnelle pour l’agriculture et le secteur agro-industriel

Ancien dirigeant de la société SOCODER.www.socoder.cl

[email protected]

Salutations et remerciementsMes salutations cordiales à tous les participants.Mes remerciements au gouvernement français et en particulier à Monsieur Mazeran qui a invité le secteurde la production.

IntroductionIl est important de préciser que ma présence ici correspond à un travail de groupe que nous menons surl’information et l’articulation entre le secteur public et le secteur privé par rapport à l’éducation techniqueet la formation professionnelle.

Expérience du secteur de la productionagricole et agro-industrielle au Chili Constats

et attentes pour l’ETFP dans le secondaireDépartement de Ñuble, Région de BIO – BIO.

La zone du centre méridional du Chili secaractérise par ses activités forestière, agricoleet d’élevage, parmi lesquelles on peut soulignercomme secteur d’exportation, les produits forestierset le bois ; nous prévoyons comme alternative pour

l’exportation, l’horticulture, les fruits et la viande.A noter aussi l’existence de produits traditionnelstels que le blé, l’avoine et les pommes de terre.(Source INE recensement agricole 1997 www.ine.cl)

Caractéristiques de la zone du Centre méridional du Chili

Répartition de la propriété agricole au Chili :

17 700 000 Total

88 500 0,5Sans activité

9 699 600 54,8Grand

3 911 700 22,1Moyen

3 469 200 19,6Petit exploitant

531 000 3,0Agriculteur de Subsistance

Nombre d’HectaresPourcentageType d’agriculteur

Source : élaborée par l’ODEPA du recensement agricole, INE 1997. (www.odepa.cl).

1 Avec l’aide de Guido Guttiérez Gonzales, ingénieur agronome.

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Implications

Les producteurs ont pris en compte les besoinset les insuffisances de leurs systèmes de productionau vu des exigences de leurs partenairescommerciaux, que l’on peut résumer de la façonsuivante : standards de qualité, sécurité alimentaire,innovation technologique, médecine du travail etsécurité sociale, droit d’association, volumes,exigences d’infrastructure de production, stock,transport et logistique portuaire, connaissance desmarchés cibles, entre autres.

Auparavant, le contexte était différent, lesproducteurs chiliens étaient habitués à utiliser unsystème primaire, aux cultures très traditionnelles,

s’adressant en grande majorité à un marché intérieurou à faibles niveaux de transformation.

Faire face au nouveau contexte les a forcésà développer un processus d’innovationtechnologique, une restructuration des systèmesde production et de gestion, à atteindre certainsniveaux associatifs et à concevoir des stratégiesde développement concurrentiel, ce qui a modifiéles demandes par rapport aux capacités techniqueset professionnelles aussi bien du point de vue desproducteurs que de celui des équipes techniques quiproposent leur services dans le secteur et qu’il fautadapter ou modifier.

Le contexte après l’ouverture commerciale du Chili

A partir des années 1980, le Chili a lancé unepolitique d’ouverture commerciale, mettant en oeuvredes traités de coopération économique avec divers pays

d’Amérique Latine et ultérieurement des traités delibre échange avec le Mexique, le Canada, l’UnionEuropéenne, les Etats Unis et la Corée du Sud.

Nous avons mis en place des réseaux formés pardes chefs d’entreprise, des universités, des instituts deformation technique supérieure, et des écolessecondaires technico-professionnelles, ce qui nouspermet de participer aux décisions en ce qui concerneles exigences dans des domaines comme l’éducationtechnique et la formation professionnelle.

Nous avons collaboré avec le secteur public afind’établir des priorités en stratégie de développementde la production territoriale, en accord avec les axes destratégie de développement que le Chili s’est fixé.(www.agricultura.gob.cl document Una Política deEstado para la Agricultura Chilena periodo 2000– 2010 – « Une Politique de l’Etat pour l’AgricultureChilienne période 2000 – 2010 »).

Nous sommes en train de concevoir desstructures de formation technique, pour les cycles

du secondaire, et de formation professionnellequi nous permettront de mettre en place despaliers pour accéder et sortir à différents niveauxde la formation. Ils garantiront aux jeunes un espaceà partir duquel sera déterminée leur aptitudeà reprendre le travail, à poursuivre leurs études,ou à rechercher un emploi ou à prendre des décisionsen fonction de leur situation personnelle ou deleurs attentes.

Nous mettons en place des alternatives deformation professionnelle qui incluent desmécanismes de qualification et des diplômes quireprésentent une réponse aux besoins actuellementfixés par le marché.

Comment aborde t-on ce sujet ?

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Objectif de notre RÉSEAU.

Le Réseau Articulation Agricole et Agro-industrielle de la VIII Région de Bio – Bio,se propose de créer un système de formation continue,permanente et articulée dans le domaine de laformation technique agricole et agro-industriellerépondant aux nécessités de développement de laproduction régionale et nationale, fondée sur ladurabilité environnementale et sur l’équité sociale.

Délivrer un diplôme et valider les compétencesprofessionnelles permettra aux personnes, à partir deleur niveau d’études ou à partir de leur aptitudesprofessionnelles, de s’insérer dans le marché du travailou d’accéder à d’autres niveaux de formation technique.

Résultats escomptés :

Premièrement, un diplôme de compétences dans lesecteur est très important étant donné qu’il amélioreralas aptitudes professionnelles, il représentera un certaindegré de fiabilité pour le chef d’entreprise vis-à-vis d’unemployé ou d’un technicien qui offre la garantied’améliorer la productivité.

Deuxièmement, intégrer un système d’éducationformel, va déboucher sur plus de qualificationet de spécialisation pour les techniciens et lesprofessionnels, ce qui aura un impact direct sur laproductivité et la rentabilité de notre secteur.

ATOUTS ACTUELLEMENT ENTRE NOS MAINS

Nous possédons une longue expérience d’échangeentre le système éducatif et le secteur de la production ;cela fait plus de 30 ans que des élèves font des stages,que les étudiants suivant une formation technique sontaccueillis par des entreprises pour des périodes de deuxou trois mois.

Nos écoles techniques peuvent être dirigées oureprésentées au sein de la direction ou des différentsconseils par des chefs d’entreprise du secteur.

Sur la question agricole nous participons à desréajustements face aux nouveaux impératifs afin de lespartager avec les enseignants.

Nous travaillons avec des organisations de producteurset des chefs d’entreprise et, vu les caractéristiques desnouveaux marchés, nous avons dû faire des alliances etavons développé et renforcé l’associativité.

Nous sommes très motivés et l’engagement du secteurpublic et du secteur privé nous a permis d’atteindre despoints de convergence.

Nous pouvons tirer profit des capacités, desconnaissances locales, et évidemment de la continuitépolitique concernant des sujets comme l’éducation,l’agriculture et les marchés.

Comment répondre à la rapidité des évolutionstechnologiques ?Comment éviter de devenir obsolètes alors que leschangements technologiques sont plus rapides quenotre capacité d’adaptation ?

Comment répondre aux attentes des gens ? Unepersonne qui se forme, qui crée plus de productivité,a aussi besoin d’une reconnaissance socioéconomique.

Nous voulons savoir si les chefs d’entreprise serontdisposés à motiver de façon appropriée.

Comment obtenir une évaluation à la hausse desnouvelles aptitudes professionnelles tout enmaintenant un équilibre convenable (chefd’entreprise / employé) ?

Comment maintenir la participation du secteur dela production si elle dépend des succès que le secteurde la production concède à ces programmes ?

Le secteur de la production exige de nos jours desrésultats rapides : améliorer la rentabilité, obtenirdes succès et faire des projets à long terme.

Les difficultés et les défis

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Premièrement, on a souligné l’importance de lacontinuité et de la progressivité dans les politiques.Cela paraît facile mais c’est en réalité très durà réaliser. Cela veut dire en effet, pour un pays,d’avoir la capacité de faire des choix et demaintenir ensuite les priorités. Je vais vousraconter une histoire : quand la Banquemondiale a commencé à travailler avec leChili, au début des années 90, on y est alléen essayant de « vendre » à peu près tout ce qu’onsavait faire.Les Chiliens nous ont dit : « Pas question ! Nous, cequ’on veut faire, c’est l’école de base. Et dans l’écolede base, on veut se concentrer sur les écolesprimaires rurales les plus pauvres parce que c’est

là que sont les problèmes et on veut commencerpar là où sont les problèmes. Après seulement on

parlera de l’enseignement secondaire et plustard encore on parlera de l’enseignementtertiaire ». Et c’est exactement ce qu’ils ont faitdepuis, dans une parfaite continuité.Cette idée de continuité s’inscrit aussidans un cercle vertueux entre croissance

et investissement dans l’éducation. C’est trèsimportant parce que s’il n’y a pas l’argent,il n’y a pas d’investissement dans l’éducation.C’est pourquoi je soulignerai plus loin cettecorrespondance entre capacité d’action auniveau économique et capacité d’action auniveau de l’éducation.

La deuxième caractéristique, qui définit aussil’attitude tunisienne qui a procédé par expériencepilote puis qui a généralisé, c’est qu’onretrouve cette même prudence chez lesChiliens. Les Chiliens aussi ont procédé parétape en tirant chaque fois profit del’expérimentation.Ils sont partis de l’expérience sur le terrain etde l’évaluation rigoureuse de ces expériencesavant de généraliser. J’aurai pour seule preuve lefait que les Chiliens ont attendu presque huit ansavant de se lancer dans le changement du

curriculum. Avant cela ils se sont dits que le plusimportant est de savoir ce qu’il se passe dans la

salle de classe, d’avoir le soutien desprofesseurs, de changer les pratiqueset seulement après d’envisager de selancer dans les contenus, parce que lescontenus, c’est beaucoup plus difficile.Et pour chaque réalisation, avant d’aller plus

avant, ils ont procédé à une évaluation.Je peux vous assurer que le changement dans la salle de classe se voit au Chili. C’est laseconde leçon.

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La troisième leçon, c’est que, comme en Tunisie,les Chiliens ont la capacité de mobiliser à la foisle secteur public et le secteur privé. Et ilsle font avec une réelle facilité, différantpeut-être en cela de la Tunisie. Ils ont desformules de financement extrêmementflexibles. Au Chili on finance l’enseigne-ment qu’il soit privé ou qu’il soit public,avec une formule de financement à l’élève et lesChiliens payent à l’élève, que l’école soit publiqueou qu’elle soit privée. L’école est donc obligéeà un certain résultat et cela assure une certaine

équité ainsi qu’une certaine efficacité. Cette leçonde financement apprise de longue date se retro-

uve dans leurs projets ultérieurs : chaquefois qu’ils vont devoir financer quelquechose de beaucoup plus complexe, parexemple des réseaux, ils vont avoir cettefacilité, cette agilité à pouvoir financer surrésultat, ce qu’ils font depuis déjà des

décennies. Bien sûr avec cette facilité à commu-niquer avec le secteur privé, le partenariat avecles secteurs professionnels est absolument naturelau Chili.

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W. ExpertonCountry sector leader, Latin America and CaribbeanBanque mondiale

Mesdames, messieurs,C’est un honneur pour moi que de commenter l’expérience chilienne. D’autant qu’il est très intéressantde constater, après avoir entendu les deux présentations (Tunisie et Chili), qu’il y a beaucoup d’axes deconvergence et vous verrez que les commentaires se rejoignent en beaucoup de points même si ces payssont très loin l’un de l’autre.

Commentaire

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La quatrième leçon (et je crois bien que je n’aijamais vu cela ailleurs) concerne la parfaitecompréhension entre ceux qui ont lacharge de planifier l’éducation et ceux quiont la charge de l’économie. Le ministèrede l’Education et le ministère d’Hacienda(ministère de l’Economie) sont situés, àSantiago, à côté du Palais de la Monedaqui est bien connu, tristement connu pour ceuxqui ont vu les images de télévision. Ce qui frappequand on est bailleur de fonds et que l’on va àune réunion au ministère d’Hacienda, c’est qu’on

y entend le même discours qu’au ministère del’Education. On n’est pas là avec quelqu’un qui

vous dit : « le ministère de l’Education n’ycomprend rien ; ou demande beaucoupplus d’argent qu’il ne faut ! ». Non, lesdeux sont sur la même longueurd’onde. Et je peux vous dire que celaest exceptionnel. On a aussi, bien sûr,

parallèlement, un ministère de l’Éducationqui ne se plaint pas de l’argent que lui donnele ministère de l’Economie ; tout cela fonctionnetrès bien.

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Ce qui précède est en outre très important pour macinquième leçon. En effet, quand il s’est agide construire un cadre pour l’apprentissagetout au long de la vie, le défi, pourle ministère de l’Education mais aussi pourles autres ministères, était de casser lesbarrières institutionnelles. Il a fallu élargir cecadre de l’éducation formelle pour aller versles autres formes d’éducation, y compris informelle,donc faire entrer de nouveaux partenaires et créerde nouvelles correspondances qu’on a appeléeshorizontales et verticales. Il y avait même un défautde communication entre le niveau secondaire et leniveau supérieur et je me souviens de réunions oùil y avait véritablement tension entre ces deux

niveaux ; et ce qu’ont réussi à faire nos amischiliens, c’est de repousser ces barrières, de les

bousculer. Ceci n’est possible que lorsqu’il ya un accord au niveau des ministères.Il faut atteindre cette parfaite communica-tion au plus haut niveau de l’Etat car c’est làqu’on atteint la parfaite intégration des poli-tiques (le projet dont on vient de vous

parler est monté jusqu’au Président et c’est làoù les décisions furent prises). On le retrouvemaintenant dans l’approche systémique qu’ontchoisit les Chiliens et le développement deces réseaux décentralisés qui reproduisentcette communication institutionnelle au niveaudes Régions.

Commentaire du Président de Séance :

Permettez moi de conclure en insistantsur un point. C’est celui de la capacitéà garder un cap politiquement et àinscrire l’action éducative dans la durée.Cela ressort de toutes les interventionsde l’après-midi : il faut d’abord unmessage clair, une direction claire mais il

faut aussi cette capacité – sur deuxdécennies pratiquement dans le casde la Tunisie et, semble-t-il, tout autantpour le Chili – à garder cet axe là endépit de toutes les pressions qui nemanquent pas de survenir, de droiteet de gauche.

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Ma conclusion est que s’il y a eu hier des réflexions concernant le fait que la Banque mondiale vien-drait toujours en donneuse de leçons, je peux vous dire que, dans ce cas, c’est la Banque mondialequi est en train d’apprendre, et elle est en train d’apprendre très vite.

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DÉBAT TABLES RONDESCommentaire général : partenariat avec d’autres pays

Questions à l’attention de nos amis Tunisiens1) Concernant la planification des ressources humaines /

la formation professionnelle en milieu rural /la législation / les formations diplômantes de personnelen service / le partenariat public/privé

2) Risques soulevés par une formation professionnelle conçueexclusivement en fonction des contraintes du marché

3) Impact de la réforme sur le secteur informel

Question à l’attention de nos amis Chiliens concernantle concept de passerelle entre les diverses formes de formation

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1) Concernant la planification des ressources humaines / la formation professionnelle enmilieu rural / la législation / les formations diplômantesde personnel en service / le partenariat public-privé

Origine de la question

Yoro FALL du SénégalPrésident directeur général du CNES (syndicat patronal)

Détail« Ma question est posée aux amis tunisiens. Je suisépaté par ce qu’ils ont démontré mais j’aurais unesérie de questions.- Je voudrais demander comment en Tunisie vousgérez en aval la planification des ressources humainesnotamment la partie insertion, le suivi et l’évaluationdes impacts ; et de façon subsidiaire, commentfonctionne l’harmonie du couple enseignementtechnique et formation professionnelle par rapportau ministère de l’emploi et du travail. On n’en a pasbeaucoup parlé, vous avez plus parlé de votreministère, donc je voudrais savoir comment cela sesitue après.- De même vous n’avez pas parlé de la formationprofessionnelle agricole en milieu rural. Est ce qu’il

y en a ? Pourrait-on avoir quelques élémentslà-dessus ? - Une autre question : vous avez parlé de la législation dans votre schéma. Je voudrais savoir dans quellespécificité vous avez été obligés de légiférer dans votreprocessus.- De même, si la formation professionnelle comprenddes modules courts et spécifiques de programmepour le recyclage des personnels en service afin deleur permettre des promotions internes, y a-t-il dansce cas des certificats ou des diplômes homologuésdélivrés en conséquence ?- Enfin, une dernière question pour Madame : Quelleest la parité secteur privé, secteur public dans lepartenariat que vous avez décrit tout à l’heure ? »

Commentaire général : partenariat avec d’autres pays

Questions à l’attention de nos amis Tunisiens

Origine du commentaire

Jean NJOYA du CamerounSous-directeur de la formation professionnelleau ministère de l’emploi,du travail et de la prévoyance

Détail« Je crois comprendre que les conditions de réussite dansces deux modèles de réforme sont dues au partenariatavec un pays qui constitue presque une locomotive,comme dans l’exemple de la Tunisie – qui a l’Union

Européenne, une zone économique – et dans le cas duChili – qui a les Etats-Unis . Les pays avancés de la zonesont donc un peu à la base de l’apprentissage descompétences économiques générales. »

DÉBAT TABLES RONDES

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2) Risques soulevés par une formation professionnelle conçueexclusivement en fonction des contraintes du marché

Origine de la question

Waly N’DIAYE DJAJI du SénégalSecrétaire national aux revendications générales du CSA(syndicat de travailleurs)

Détail« Je voudrais également revenir au cas tunisien qui medonne vraiment des soucis. Dans l’économie de laconnaissance il est tout à fait normal que l’on puisseapprofondir la réflexion autour de la trilogie, emploi,formation professionnelle et entreprise. Mais je croisqu’une formation professionnelle qui est exclusivementorientée par l’entreprise présente des risques assezimportants dans le sens de ce qui a été dit cematin, le voeu qui exprimait donc de vouloir élargirl’enseignement technique et professionnel dans tous lespays du monde. Ce voeu là risque d’être complètementdévoyé. A ce rythme, dans une économie évidemmentlibérale où tout est basé sur la productivité,la compétitivité, la logique de profit à moindre coût,dans un tel contexte on risque de ne pas atteindre le

développement durable. Surtout pour nos pays en voiede développement avec les ajustements structurels quel’on connaît, l’entreprise n’appartient pratiquement plusaux nationaux, la plupart des entreprises appartiennentà des multinationales extérieures. Si on développe doncla formation professionnelle exclusivement pour lesintérêts de cette entreprise, on risque d’oublier les autressecteurs qui devraient être aussi développés dans lecadre de l’élargissement, de l’enseignement technique etde la formation professionnelle. On risque donc de nepas atteindre le développement humain durable qui estsouhaité dans nos pays.C’est le problème que me pose le diagramme qui a étéprésenté tout à l’heure par la Tunisie. »

3) Impact de la réforme sur le secteur informel

Origine de la question

Jean NJOYA du CamerounSous-directeur de la formation professionnelle au ministèrede l’emploi, du travail et de la prévoyance

Détail« Je voudrais maintenant comprendre l’impact de laréforme sur le secteur informel très développé enAfrique au sud du Sahara, et la prise en compte de la

notion d’assurance qualité ; je ne sais pas si cela afonctionné pour ce secteur. »

Moncef Ben Saïd

Réponse a« La question du patronat sénégalais nécessite uneconférence. Ces cinq questions se réfèrent à des points queje n’ai pas développés dans ma présentation, parce que jen’ai pas tout développé. J’ai sélectionné quelquesindicateurs de la marche d’une réforme qui dure depuis10 ans à peine : sa logique, sa traçabilité. Le ministrefrançais de l’Education disait hier matin que cela va faire

vingt ans depuis que la France a mis au point sa réformed’enseignement technique et professionnel pour atteindreles performances qu’il avait présentées dans sondiscours. Nous sommes réellement à mi-parcours dansl’accomplissement d’une réforme ambitieuse mais qui al’ambition des défis que nos pays africains, aspirant àl’émergence économique, à l’ouverture sur l’économie

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internationale, exigent. Nous n’avons pas d’autre choix quede faire un pari sur les opportunités de l’ouvertureéconomique et de la mondialisation.

Sur la question de l’impact des politiques, nous avons enTunisie développé, dans le cadre de la stratégie, un systèmede suivi et d’évaluation d’impacts, auquel la Banquemondiale était fortement associée et qui a motivéénormément les observateurs et les experts de la Banquemondiale, qui consiste à analyser le processus d’insertiondes jeunes issus de la formation initiale. Pendant trente mois,cette méthodologie a été créée de toutes pièces.La Banque mondiale organise en janvier prochain au Marocun séminaire élargi pour former les cadres de l’éducation, del’enseignement technique et de la formation professionnelleà la méthodologie de l’évaluation d’impact. Nous seronsreprésentés dans ce séminaire et nous présenterons lesproblèmes que pose la mise en oeuvre de ce typeméthodologie suite à une série courte de deux observations.Nous avons évalué les résultats d’une première promotionavant projet, la promotion qui a quitté les centres deformation professionnelle en 1996, la promotion qui a quittéen 1998 et nous nous préparons pour évaluer la promotionde 2000.

C’est assez complexe surtout la question méthodologiquequi pose de vrais problèmes y compris aux scientifiques etaux chercheurs. Donc voici un outil qui s’inscrit dans ce quenous appelons l’observatoire national des emplois et desqualifications et qui est en phase de mise au point, deperfectionnement, de développement. Il est loin d’être toutà fait opérationnel, mais je vous invite à jeter un coup d’oeilsur la configuration et le degré d’avancement des travauxdans le cadre de l’observatoire. C’est un outil indispensableau pilotage par la demande de l’économie. C’est un outil quiest en train de faire ses preuves et qui pose énormément deproblèmes, je dirais, méthodologiques. La formationcontinue dans notre modèle tunisien de formationprofessionnelle n’existe pas à elle seule, elle n’est pasindividualisable en ce sens où c’est la continuation logiquede la formation initiale. C’est une activité, une fonction quipermet de donner des opportunités de promotionprofessionnelle à des personnes qui sont en situation detravail. La formation initiale, elle, s’adresse à des personnesqui demandent du travail pour la première fois. Lesdeux fonctions ne peuvent plus, dans un système intégré,dans un système piloté par la demande, être géréesindépendamment l’une de l’autre. C’est vrai que dans lasituation actuelle, dans le système hérité, elles sont séparéesmais elles ne peuvent plus souffrir la survie des frontièresqui ont longtemps handicapé l’épanouissement de laformation continue au profit du maximum de personnesdans les entreprises, de consolidation des postes d’emploidans les entreprises qui sont appelées à se restructurer. Laquestion de la qualité de la formation se pose de la mêmemanière et repose sur les mêmes référentiels. A partir dumoment où on note au niveau de la formalisation des

qualifications pour l’élaboration et l’évaluation descompétences, la problématique de la qualité est la même.Pour la formation initiale et pour la formation continue, elleest strictement la même. Ce sont les modalités de diffusionde ces compétences qui diffèrent de la gestion de laformation initiale qui se vend par profil intégré et de laformation continue qui se vend par compétence ou pargroupe de compétences. L’essentiel, c’est de maîtriser lagestion des compétences en centre mais aussi en entreprise.Il faut absolument que la gestion des ressources humainesdans les entreprises obéisse à cette logique de compétence sinous voulons que les deux systèmes parlent le mêmelangage. L’offre de formation et la demande de formationdoivent s’acheminer vers un langage commun qui est celuides compétences. L’articulation avec les outils de l’emploi :nous avons en Tunisie un système très développé demécanismes d’aide à l’insertion par lequel l’Etat intervientpour réguler le marché du travail. Tous ces instruments sontpilotés par la demande et le père de ces instruments, queconnaît particulièrement monsieur Experton ici présentdepuis le temps qu’il travaille sur la Tunisie, s’appelle le FIAP,le Fond d’insertion et d’adaptation professionnelle, qui adonné naissance à l’idée même de formation conçue à partird’une demande expresse de l’entreprise. Elle est financéepour être effectivement une réponse à une formation à lacarte, une formation légère, peu coûteuse. C’est uninstrument qui a essaimé et qui a donné lieu à toute unefamille d’instruments : un grand nombre d’instrumentsd’aide à l’emploi qui sont ciblés, qui sont spécifiques, quiciblent différentes catégories de demandeurs d’emploi. C’estvrai je n’en ai pas parlé probablement parce que récemmentla formation professionnelle a de nouveau été séparée del’emploi au niveau de la politique : elle a rejoint l’éducation.En Tunisie la formation professionnelle est aujourd’huipartie intégrante du système éducatif dans le cadre duministère de l’Education et de la Formation mais lesmécanismes d’emploi, d’aide à l’insertion continuent àfonctionner dans la même logique, logique de demandeéconomique. La formation initiale est considérée comme leprincipal programme d’emploi, appuyé par l’Etat.

Le dispositif législatif : c’est un outil par lequel on formaliseun système qui par ailleurs est informel ou qui n’est pas unsystème du tout. C’est vrai qu’il y a une activité de formationprofessionnelle qui porte, probablement dans un payscomme le nôtre, sur des centaines de milliers de jeunes quisubissent des apprentissages informels, non contrôlés, nonévaluables, mais néanmoins très importants. Le grosavantage de ces systèmes formels est qu’ils ne coûtent rienau budget de l’Etat, ils sont pris en charge par l’entreprisedirectement sans poser de problème, et sont directementpointés sur le marché du travail et sur l’insertion. J’ai reçurécemment le ministre d’un pays africain ami, un payspourtant où la population n’est pas très nombreuse,qui me disait que 800 000 jeunes sont en apprentissage dansles entreprises et les familles, les ménages payent le coût

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de la formation en entreprise dans un système informel, oùil n’y a pas de diplômes, les diplômes ne sont pas reconnus.Nous avons en Tunisie un reliquat de système informel,mais celui qui nous préoccupe le plus, c’est le système quiappuie directement la compétitivité de l’entreprise.

Donc je réponds à la question de notre ami du patronatsénégalais, le risque de dérapage par la demande et dequitter le domaine du développement durable, je crois quej’y ai fait allusion dans ma présentation, à propos de lapolémique entre la demande sociale et la demandeéconomique.

L’autre grand challenge aujourd’hui de nos économies quis’ouvrent à l’économie mondiale, est qu’elles doivent fairepreuve d’efficacité. Pour survivre elles n’ont pas d’autrechoix que d’aider les entreprises à gagner le pari de lacompétitivité, préserver leurs parts de marché du pays,c’est l’unique moyen d’aider l’économie à créer des

emplois, à toujours créer des emplois, à préserver lesemplois existants, il faut toujours gagner et conserver desmarchés. Le rôle, la gestion des ressources humaines, lapréparation du capital humain, tout ceci est déterminantpour gagner le pari de la compétitivité de nos entreprises,parce que c’est dans nos entreprises que nos jeunes serontemployés et la demande d’emploi de nos jeunes est encoredans une phase de croissance malgré les succès et lesperformance des politiques démographiques de nos pays.Ce n’est pas un choix, c’est une fatalité. Notre PrésidentBen Ali, lorsqu’il a signé l’accord de libre échange, qui adonné le feu vert pour que le programme de mise à niveaude la formation professionnelle soit le premier à démarrer,avait dit « c’est un choix difficile, mais je le ferais encore sij’avais à le faire ». C’est un Président qui attacheénormément d’importance à la solidarité nationale : il enfait un axe fondamental et prioritaire de la politique dedéveloppement du pays. »

Réponse b« Vous m’avez posé une question sur la parité dansle partenariat entre public et privé. Si vous parlez de toutce qui est gestion des centres, il y a une formation de conseilconsultatif qui est à 50 % / 50 %. Mais en fait ce n’est pas leproblème même de la parité qui se pose dans le fond mêmedu partenariat, parce que nous avons des intérêts communs,nous ciblons quelque chose qui intéresse l’entreprise et quele secteur privé essaye d’appuyer pour arriver à promouvoirnotre économie. Notre objectif est que nos entreprisesrestent compétitives et là je répète un peu ce que ditmonsieur le ministre, donc pour qu’elles restentcompétitives on doit continuer à piloter avec le secteurpublic toutes les grandes orientations en matière deformation et nous sommes tenus à un résultat,nous sommes solidairement responsables pour arriveraux objectifs ciblés. Donc une seule personne peut changer

peut-être un point de vue totalement. Si sa proposition estjudicieuse, personne dans le secteur public ne dira non et side notre côté nous avons quelquefois des idées qui necollent pas tout à fait avec une réalité du terrain, celase négocie constamment ; donc il n’y a pas de problèmede parité.Pour le problème du risque, j’appuie encore ce que ditmonsieur le ministre. En fait au début nous avons eu aussice questionnement mais nous l’avons dépassé très vite car,à quoi sert-il d’être frileux ? De toutes les façons si on necrée pas des richesses on ne pourra rien distribuer. Pourcréer les richesses il faut avoir le courage, bien sûr calculé,d’avancer sur une stratégie qui nous semble très claire touten s’arrêtant en cours de route pour faire des évaluations etessayer d’adapter, de réaménager ou de perfectionnercertaines choses. »

Turkia Tlemceni

Réponse c« Juste quelques mots pour compléter le message quis’adresse à la pensée syndicaliste. Il n’y a pas de syndicalistestunisiens dans cette salle, mais s’ils étaient présents ils vousauraient dit que lors de l’engagement de la réforme quenous avions présentée cet après-midi, une déclarationnationale a été faite et signée par le gouvernement, par lepatronat (Président de l’UTICA), par les syndicats(Secrétaire général de la centrale syndicale), par les partis

politiques – et là c’est une charte pour l’emploi issue d’uneconférence nationale pour l’emploi et qui avait pour axemajeur, bien entendu l’employabilité. Nous sommes tousunis pour la compétitivité de nos entreprises, l’objectif étantl’emploi. C’est un choix politique national, sociétal, surlequel s’est appuyée une réforme qui se situe au coeur de lapolitique économique et sociale du pays. Ce n’est pas unchoix arbitraire. »

Moncef Ben Saïd

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Question à l’attention de nos amis Chiliens concernant le concept de passerelle entre les diverses formesde formation

Origine de la question

Gustavo FLORES FERNANDEZ du MexiqueDirecteur de la division formation professionnelle au sein du Collège national d’enseignementtechnique et professionnel

u Détail« Je m’adresse à mes collègues chiliens : je souhaiteraisqu’ils approfondissent davantage ce concept de « passe-relle des systèmes éducatifs ». Vont-ils l’inclure dans l’enseignement secondaire, dans l’enseignement supérieur

ou s’agit il d’une activité hors cursus, s’inscrit-elle dansun système formel ou répond-elle à une démarche auto-didacte, comment l’envisagent-ils ? »

Réponse« Je vais essayer d’être très rapide et direct.Premièrement il faut reconnaître qu’en écoutant le point devue des autres intervenants sur ce qui est en train de se faire,l’idée d’une réforme à long terme, d’accumuler desdonnées, d’un laboratoire, d’un pilotage systématique etd’une continuité politique, tout ceci représente une cléimportante.Deuxièmement, outre la question sur les partenaires quinous ont poussés comme des locomotives, le facteur décisifest évidemment l’ouverture commerciale étant donnéqu’elle contraint le pays et qu’elle influence tous sessystèmes. Elle présente des avantages et des inconvénients.Les avantages peuvent être l’accès à de nouveaux marchés.L’inconvénient est qu’elle met en évidence les faiblessesstructurelles du pays, entre autres, le système éducatif.Nous sommes actuellement obligés de travailler ensemble :Etat et chef d’entreprise, car le produit que nous mettonssur le marché mondial est le Chili.

La troisième idée importante, est bien entendu, le partenariatavec le secteur de la production, que j’ai déjà signalé. Sur laquestion des passerelles nous sommes justement dans laphase de conception. Le secteur de la production devrait,et c’est le but, pouvoir certifier les compétencesconformément à l’expérience des personnes adultes quifont partie du monde professionnel et ces compétencesdevraient être reconnues par l’octroi d’un diplôme. On esten train d’étudier un mécanisme qui permettrait auxentreprises elles-mêmes de s’en charger et d’obtenir unereconnaissance officielle de l’État. Par conséquent ce seraitl’Etat qui délivrerait ce diplôme et comme nous avonsl’intention de le faire pour la filière technique du secondcycle du secondaire, nous mettrons en place des modulesafin d’établir des homologations qui permettront dereconnaître les compétences et probablement ensuite lesspécialisations. Voilà l’autre concept en jeu dans cet effortpour proposer des passerelles entre l’enseignement formelet non formel. »

Pedro Montt

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Séance 8 :MISE EN OEUVRE

ET ORGANISATION DE L’ETFP

Orientation professionnelle et politique publique :combler l’écart

M. Richard Sweet – OCDE

Coopération européennne en matière d’ETFPM. John Mc Carthy – Commission européenne

Vers la construction de nouveaux diplômes d’enseignementprofessionnel à référentiels communs internationaux

M. George Asséraf – Ministère de la jeunesse,

de l’éducation nationale et de la recherche

FRANCE

Débat avec la salle

Josiane RABETOKOTANYPrésidente de séance

MADAGASCAR

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Les pays de l’OCDE attachent une importance grandis-sante à l’éducation tout au long de la vie et aux poli-tiques actives d’emploi comme instruments de la crois-sance économique et de l’équité sociale. Des systèmesd’information et d’orientation efficaces sont essentielspour appuyer la mise en place de ces politiques et chaquecitoyen a besoin de développer des capacités de gestionpersonnelle de sa carrière.

Cependant, il existe un fossé important entre ces objec-tifs et les capacités des systèmes d’orientation profession-nelle nationaux. L’accès à ces services est limité, en parti-culier pour les adultes. Trop souvent, ces services neparviennent pas à développer la capacité des individus àgérer leur propre carrière mais ils se concentrent sur laprise de décision immédiate. Les systèmes de formationet de qualification pour le personnel de ces services sontsouvent inadaptés. La coordination entre les principauxministères et les autres partenaires est faible. Les infor-

mations de base sur les coûts, les bénéfices, les clients etles résultats sont insuffisantes pour permettre un pilo-tage correct des services par les décideurs politiques. Deplus, il est fait une utilisation insuffisante des technolo-gies de la communication et de l’information ainsi qued’autres moyens permettant de satisfaire les besoins desclients à des coûts minimum.

Fondée sur une étude de l’OCDE conduite sur 14 pays,cette présentation explore de quelle manière l’écart entreles services d’orientation professionnelle et les politiquespubliques peut être réduit. Elle plaide pour uneamélioration de la coordination au niveau national, uneplus grande attention portée sur la recherche et la collectede données, le développement de programmes deformation spécialisés pour le personnel chargé del’orientation et la mise en place d’organisationsd’orientation professionnelle adaptées.

Préambule

Je vous remercie de m’inviter à cette réunion dela Banque mondiale. C’est extrêmement gratifiant d’êt-re convié à un tel rassemblement, car au cours de cesdeux dernières années, l’OCDE, la Commission

européenne et la Banque mondiale ont travaillé enétroite collaboration sur la question de l’orientationprofessionnelle et de ses liens avec la politiquepublique.

I. Présentation succincte des modalités de l’étude

Je souhaite vous parler d’une analyse des liensentre l’orientation professionnelle et la politiquepublique que nous avons commencée à l’OCDE début2001. Nous avons pris en compte quatorze pays. Onzed’entre eux étaient des pays européens (l’Autriche,la République tchèque, le Danemark, la Finlande,l’Allemagne, L’Irlande, les Pays-Bas, la Norvège,l’Espagne et le Royaume-Uni), auxquels s’ajoutentl’Australie, le Canada et la Corée. Cette étude vientde se terminer et sera publiée en février 2004 1.La première mesure méthodologique consistaità demander à chacun des pays participants de remplir

un questionnaire national très détaillé qui portait surcertains aspects de leur système d’orientationprofessionnelle et sur leur politique d’orientationprofessionnelle. Ce questionnaire a été pour certainspays difficile à compléter, car dans de nombreux cas, lesdonnées que nous demandions n’étaient toutsimplement pas disponibles. A titre d’exemple, certainspays avaient très peu d’informations portant surle financement, sur l’orientation professionnelle de la force de travail ou sur la recherche etles connaissances initiales. Cela explique en soil’importance de l’écart qui existe entre l’orientation

Résumé

Orientation professionnelleet politique publique : combler l’écart

R. SweetAnalyste principal

OCDE

1 OCDE (2004) Orientation professionnelle et politique publique : comment combler l’écart, Paris.

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professionnelle et la politique publique, dans le casoù les responsables des politiques publiques n’ontpas les informations qui leur permettront dediriger leur système.

En plus de ce questionnaire national, chaquepays recevait la visite d’une petite équipe d’experts,constituée d’un représentant du secrétariat del’OCDE et généralement, d’un autre expertindépendant. En principe, ces visites duraient unesemaine, mais dans le cas des pays les plus grands àsystème fédéral, comme le Canada, l’Espagne oul’Australie, les visites avaient tendance à durer unesemaine et demie. Lors de ces visites, nous avonsrencontré des décideurs politiques clé, nous avonsvisité des programmes sur le terrain, discuté avecdes représentants des associations d’orientationprofessionnelle, avec des personnes chargées de laformation des conseillers d’orientation et avec deschercheurs. A la suite de chaque visite, un brefrapport était rédigé sur le pays concerné, lequelportait sur deux points : tout d’abord il décrivait lanature des systèmes d’orientation professionnelledu pays afin que cela puisse profiter aux autres paysmembres de l’OCDE ; ensuite, il exposait nosrecommandations concernant ce que chacun despays pouvaient faire pour améliorer son systèmed’orientation professionnelle.

Nous avons également commandé huitétudes à des experts, en association avec laCommission européenne. Elles portaient surdes thèmes tels que l'usage des technologies del’information et de la communication dansl’orientation professionnelle, l’assurance qualité,les qualifications, la formation et la coordinationdes services au niveau local. L’un des autres atoutsde cette étude a été une coopération internationaleconsidérable. Parallèlement à notre examen, tantla Banque mondiale que la Commission européenneont mené des études importantes en utilisantle même questionnaire de base pour collecterdes données. Nous avons travaillé en étroitecollaboration avec la plus importante associationinternationale représentant les conseillers d’orien-tation : l’association internationale d’orientationscolaire et professionnelle. Celle-ci a pris part à laconception de l’étude, ainsi qu’à toutes nosréunions de comité de pilotage et elle a participéà la révision du plan du rapport final. Nous avonségalement travaillé en étroite collaboration avecla Fondation canadienne pour l’avancement dela carrière, laquelle a organisé deux réunionsinternationales d’importance, au cours de notrepériode d’étude, sur l’orientation professionnelle etla politique publique.

II. Orientation professionnelle et atteinte des objectifs politiques en matièred’emploi et d’apprentissage tout au long de la vie

La question clé autour de laquelle tournaitnotre étude était à peu près celle-ci : « Commentl’organisation, la gestion et la mise en œuvre del’orientation professionnelle peut-elle contribuer àces deux éléments : d’une part, les politiques enfaveur de l’apprentissage tout au long de la vie ;d’autre part, les politiques actives d’emploi ? »

Les attentes en matière d’orientationprofessionnelle existent depuis longtemps et sontplutôt traditionnelles : il s’agit d’améliorerl’efficience du marché du travail en contribuant àfaciliter la correspondance entre l’offre et lademande ; d’améliorer l’efficience des systèmesd’éducation en contribuant à la réduction des tauxd’abandon et en s’assurant que les jeuness’inscrivent dans les cours appropriés ; de plus, lespays de l’OCDE croient fermement quel’orientation professionnelle a un grand rôle àjouer dans la promotion de l’équité, dans l’aide àl’intégration des immigrés et des réfugiés, parexemple, ou pour contribuer à augmenter la

participation des femmes dans la force de travail.Ce sont les principales raisons pour lesquelles, danstous les pays, l’orientation professionnelle estfinancée essentiellement par les deniers publics.Des arguments théoriques probants et des donnéesissues du terrain, allant dans le même sens, laissentpenser que l’orientation professionnelle pourraiten effet faciliter l’atteinte des objectifs de tellespolitiques publiques. Les objectifs ont été fixés il ya bien longtemps, mais nous voulions aller au-delàde ces derniers pour voir comment l’orientationprofessionnelle pouvait contribuer à atteindre lesobjectifs plus récents de politiques publiques despays de l’OCDE : les politiques en faveur del’apprentissage tout au long de la vie et les politiquesactives d’emploi.

Pourquoi le thème de l’apprentissage tout aulong de la vie est-il l’élément central de cette étude ?Les questions clé n’étaient pas nécessairement deconnaître l’efficacité de l’orientation professionnel-le, ou quelles sont ses répercussions, mais plutôt :

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III. Pénurie de conseil en orientation dans l’enseignement professionnel

Si nous considérons le modèle traditionneld’orientation professionnelle, nous remarquonsqu’elle est fournie aux jeunes à la fin de leur scola-rité obligatoire, ou que c’est quelque chose qui estfourni aux personnes sans emploi. Les conséquen-ces en sont qu’il existe des écarts considérablesentre les services. Si nous examinons la manièredont cette orientation a été fournie traditionnelle-ment dans l’enseignement professionnel et tech-nique secondaire du second cycle, nous constatonsque cela a été fait de deux manières, l’une positiveet l’autre négative.

Tout d’abord, nous constatons que dans denombreux pays où le choix d’une filière profes-sionnelle se fait très tôt, les jeunes ont le choixentre un nombre très large de filières profession-nelles très spécifiques et étroitement définies ;c’est le cas, par exemple, en Allemagne et enAutriche, où parfois, un choix doit être fait dèsl’âge de quatorze ans. Ce que les pays ont tendan-ce à faire, c’est mettre l’accent sur l’orientationprofessionnelle et l’insérer à la fin de la scolaritéobligatoire pour l’oublier par la suite. Nous cons-

tatons alors une autre relation entre orientationprofessionnelle et formation professionnelle :souvent, dans l’enseignement secondaire dusecond cycle, il n’y a tout simplement pas d’orien-tation professionnelle. Dans l’enseignementsecondaire du second cycle de nombreux pays – etnous avons des éléments le confirmant – l’orienta-tion professionnelle est insérée dans l’enseigne-ment général ou académique, mais pas dans l’en-seignement professionnel, sur la simple hypothèseque les jeunes des filières professionnelles ont faitun choix et qu’ils n’ont donc pas besoin d’aide.Comme chacun le sait, les jeunes changent d’aviset s’ils le font, ils ont bien sûr besoin d’aide. Sivous organisez les filières professionnelles defaçon plus souple, en partant, par exemple, d’undomaine initial large comme celui de la construc-tion et que vous devez par la suite faire un choixentre des options spécifiques comme la peinture,la menuiserie ou la maçonnerie, alors les choix sefont dans la filière professionnelle ; et si lesparcours de formation sont assouplis de façon à cequ’il soit plus facile de passer de la filière généraleà la filière

« Si, en tant que responsable des politiques, vousavez sérieusement l’intention de mettre en œuvredes stratégies en faveur de l’apprentissage tout aulong de la vie et des stratégies actives d’emploi,alors à quoi devraient ressembler vos servicesd’orientation professionnelle ? »

Aussi, pourquoi l’apprentissage tout au longde la vie constitue-t-il un point clé ? L’apprentissagetout au long de la vie, dans le contexte de l’OCDE,implique non seulement de s’assurer que les adultespeuvent reprendre plus efficacement et plussouvent une formation au cours de leur vie active,mais cela implique également une approche parti-culière de la formation initiale, qui est l’un despoints centraux de cette réunion. Dans le contextede l’apprentissage tout au long de la vie, nous esti-mons que les individus devraient avoir un plusgrand contrôle sur le moment, la nature et la locali-sation de leur propre apprentissage. Cela impliquela construction de parcours plus souples de forma-tion initiale, et qui donnent aux jeunes un pluslarge choix quant aux modalités d’apprentissage etau contenu de ce dernier. S’impliquer dans l’ap-prentissage tout au long de la vie suppose le déve-loppement, au cours de la formation initiale, nonseulement du type de compétences professionnellesnécessaires à l’exercice de certaines professions dès

la sortie de l’école, mais aussi le développementchez les jeunes de la capacité à gérer leur propreapprentissage et leur propre carrière.

Dans ce contexte de formation initiale, notreétude des systèmes d’orientation professionnelleposait des questions telles que :

• Dans quelle mesure l’orientation professionnellepeut-elle aider à la construction de parcours plussouples de formation initiale ?

• Dans quelle mesure cela contribue-t-il à un largechoix des individus quant à la nature de leurapprentissage ?

• Dans quelle mesure cela développe-t-il chez lesjeunes la capacité à gérer et à planifier leur proprecarrière, la capacité à prendre des décisions et lacapacité à gérer leur propre apprentissage ?

Si nous devions en arriver à tirer uneconclusion importante de cette étude, ce serait que,dans la plupart des pays de l’OCDE, la manière dontest organisée, gérée et fournie l’orientationprofessionnelle ne semble pas adaptée pour organiseret soutenir les politiques en faveur de l’apprentissagetout au long de la vie et l’employabilité active.

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professionnelle ou de la filière académique à la filiè-re professionnelle, alors là aussi, la nécessité d’uneorientation professionnelle intégrée dans les

programmes d’enseignement professionnel est plusqu’évidente.

IV. Carences des systèmes d’orientation professionnelle et recommandations

Il existe un certain nombre de carencesévidentes en matière d’orientation professionnelle :le fait qu’elle soit étroitement centrée sur desgroupes particuliers et le fait qu’elle soitgénéralement fournie lors d’entretiens individuelspersonnalisés, ce qui la rend extrêmement coûteuseà fournir à l’ensemble des jeunes et en limite l’accès.

A la lumière de ces carences et suite à notreétude, nous considérons trois points importants :

- Tout d’abord, l’orientation professionnelledans la plupart des pays de l’OCDE doit êtrerecentrée, en ne se contentant pas simplementd’aider les populations à faire des choix et à prendredes décisions de manière immédiate, mais en lesaidant également à développer la capacité à gérerleur propre carrière.

- Un accès plus large est également nécessaire.Il existe d’énormes lacunes dans chacun des pays del’OCDE. Les services pour adultes sont limités et lesservices aux personnes approchant de l’âge de laretraite sont pratiquement inexistants. Souvent,ainsi que je l’ai indiqué précédemment, lesétablissements scolaires des filières académiques ougénérales bénéficient d’un meilleur service que ceuxdes filières professionnelles. Si l’on veutvéritablement que l’orientation professionnellepuisse atteindre les objectifs nationaux del’apprentissage tout au long de la vie, il est essentielqu’un plus grand nombre de groupes ciblés y aientaccès sur l’ensemble du cycle de vie, et ce, sans quecela soit un énorme fardeau pour les dépensespubliques. Si l’orientation professionnelle persistaità être fournie par des services individuelspersonnalisés coûteux, sous la forme d’entretiensindividuels, alors un accès plus large seraitinévitablement synonyme d’augmentation desdépenses publiques.

- Aussi, nous pensons que le troisièmeélément à mettre en place dans les pays de l’OCDEest l’adoption de méthodes de transmission deconseil en orientation professionnelle beaucoupplus diversifiées et plus souples.

Nous estimons qu’il existe quatre mesures cléque les responsables des politiques publiques des

pays de l’OCDE doivent prendre en compte s’ilsveulent renforcer les liens existants entre leursystème d’orientation professionnelle et leurcapacité à concevoir des politiques en faveur del’apprentissage tout au long de la vie :

• La première consiste à modifier les prioritésd’allocation des ressources.

• La seconde est la réorganisation du systèmed’orientation professionnelle.

• La troisième est la modification des modalités dequalification et de formation.

• Et la quatrième est l’amélioration de la directionstratégique.

a) En ce qui concerne l’allocation desressources, nous estimons que les suppositions quiguident l’allocation des ressources devraientreposer sur le fait que tout le monde a besoin decompétences pour gérer sa propre carrière et quetout le monde a besoin d’une information qui soitde qualité et objective quant à son orientation,mais que seules certaines personnes ont besoind’un service personnalisé et d’être guidé pas à pas.Aussi l’allocation des ressources devrait-elle êtreréservée en priorité aux activités et aux ressourcesqui favorisent le développement des compétencesd’autogestion des carrières, tels les ateliersd’éducation à l’orientation, et devrait-on intégrercette éducation à l’orientation dans les programmesd’enseignement. De même, devrait-on mettre enplace des systèmes et des moyens qui permettentune prise de décision en connaissance de cause, etsurtout, mieux informer en termes d’orientation,tant dans les deux types de filières d’enseignementque sur le marché du travail.

Parmi les éléments qui, selon nous, devraientconstituer des priorités, citons l’intégration del’éducation à l’orientation dans les programmesd’enseignement, les ressources mises à dispositionde ces programmes, la mise en place de réseaux de conseillers spécialisés dans l’orientation profes-sionnelle, la mise à disposition de ressources en libre-service, les technologies de l’informationet de la communication, la mise en place deservices d’assistance téléphonique et une meilleureinformation d’orientation professionnelle. La prio-rité ne doit pas être donnée, en termes d’allocation

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Pour en savoir plus 2

Je terminerai en disant que vous pouvezretrouver toutes les informations relatives à cetexamen, hormis le rapport final, sur le site créé pourcelle-ci : http://www.oecd.org/edu/careerguidance,sur lequel vous retrouverez l’ensemble des

questionnaires nationaux complétés par lesquatorze pays, les notes résumant nos conclusionsrelatives à chacun de ces pays, les conclusions desexperts et bien d’autres éléments d’informationsupplémentaires.

des ressources, aux entretiens personnalisésindividuels.

b) L’orientation éducative et professionnelleest généralement une activité à temps partiel dansla plupart des pays de l’OCDE. C’est plus rarementune activité à part entière et il y a un manque dedispositifs de formation et de qualification dansl’orientation éducative et professionnelle au niveautertiaire. Nous pensons qu’il existe un certainnombre de manières dont on pourrait réorganiserl’orientation professionnelle. Celles-ci incluent lacréation de postes de conseillers spécialisés dansl’orientation professionnelle, plutôt que d’ajoutercette fonction à celle d’enseignant ou de conseillerd’éducation ; la mise en place de structuresprofessionnelles plus différenciées et faisant plusamplement appel à des assistants ; enfin il s’agit de confier l’orientation professionnelle à desorganisations spécialisées dans ce domaine plutôtqu’à d’autres types d’organisations telles que lesservices publics de l’emploi et les services depsychologie scolaire.

c) Nous pensons que les modalités de quali-fication et de formation doivent être sensiblementaméliorées. Pour l’instant, la formation est souventbrève, souvent limitée, et trop souvent, les paysestiment qu’une formation psychologique oupédagogique suffit à l’exercice de l’activité deconseiller d’orientation professionnelle. C’estcomme si l’on pensait qu’être diplômé en biologiesuffisait à l’exercice de la médecine et que vouspouvez apprendre la médecine sur le tas et à l’aidede cours in situ. C’est généralement le type demodèle présent dans de nombreux pays. Dans bonnombre de pays de l’Est, en Espagne et auLuxembourg, les conseillers d’orientation profes-sionnelle sont souvent recrutés parce qu’ils sont

qualifiés en psychologie, mais ils ne suivent pasune formation spécialisée en orientation profes-sionnelle. Nous estimons que cela constitue unebarrière fondamentale à l’application des poli-tiques publiques. Ces pays devraient mettre enplace un système de qualifications spécialisées desconseillers d’orientation professionnelle, compre-nant une formation spécialisée qui leur est propre,et cesser de supposer que la psychologie ou lapédagogie à elles seules sont une base suffisantepour l’exercice de la fonction de conseillerd’orientation professionnelle.

d) La quatrième mesure nécessaire estl’amélioration de la direction stratégique, avecune meilleure coordination et une meilleureplanification, et avec l’implication des partiesprenantes clé – les ministres de l’éducation et dutravail en particulier – mais aussi des principauxgroupes de conseillers spécialisés dans l’orientationprofessionnelle, des employeurs et des syndicats.

Une autre mesure importante est aussil’amélioration de la récolte des faits et des données– à la fois les données administratives concernantl’identité des clients et les services auxquels ils ontrecours, mais aussi des stratégies nationales derecherche plus efficaces, afin de mieux maîtrisercertains éléments comme le coût des servicescomparativement aux résultats. Dans plusieurspays, une législation plus forte de spécification desdroits à l’orientation professionnelle est nécessaire.Une utilisation plus répandue des normes de qualitéest essentielle à une amélioration de la directionstratégique. En particulier, les consommateurs, lesutilisateurs finaux des services d’orientationprofessionnelle, doivent avoir un plus grand rôledans la manière dont les services sont fournis.

2 La Fondation européenne de Turin a réalisé une étude similaire sur l’orientation professionnelle

dans les 11 pays entrants et pays candidats. Ce travail est librement disponible.

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L’une des tâches essentielles des Etats membres del’Union Européenne et des pays y entrant est d’adapterles systèmes d’enseignement et de formation en Europeafin qu’ils deviennent une référence mondiale àl’horizon 2010.

Les pays s’investissent et travaillent ensemble pour yparvenir mais aussi pour contribuer à l’objectif des chefsde gouvernement qui est de faire de l’Europe, à l’horizon2010, la société fondée sur la connaissance la pluscompétitive et la plus intégrative socialement.

Actuellement, la coopération européenne vise aurenforcement de la dimension européenne de l’ETFP

afin de faciliter et de promouvoir :- la mobilité,- la reconnaissance des compétences et des qualifica-

tions,- la validation des apprentissages non formels et

informels,- le renforcement de l’information et de l’orientation

afin de favoriser la mobilité de fonction et la mobilitégéographique,

- l’assurance de la qualité- et l’apprentissage des professeurs et des formateurs.

Coopération européenneen matière d’ETFP

I. Objectifs de la coopération européenne dans le domaine de l’éducation et dela formation professionnelle

La coopération européenne dans le domaine del’éducation et de la formation professionnelle reçoit ence moment une grande attention, principalement –mais pas entièrement – du fait d’une décision des chefsde gouvernements européens datant de l’an 2000 ayantpour objectif de faire de l’Europe la société fondée surla connaissance la plus compétitive et la plusdynamique du monde, de même qu’une sociétésocialement cohésive. Cette décision a desrépercussions évidentes sur les systèmes éducatifs etde formation et sur l’adaptation de ces systèmes, dansle but de contribuer aux objectifs économiques etsociaux que l’on s’est fixés pour l’an 2010. Une telleadaptation est liée à la volonté de faire du systèmeeuropéen d’éducation et de formation professionnelleune référence mondiale d’ici à 2010. Ce sont des idéaux,des ambitions et des objectifs nobles qui ne sontpourtant pas évidents à réaliser et à aborder, puisquedans le contexte de l'Union Européenne élargie à25 Etats membres l’année prochaine, les domaines del’éducation et de la formation sont de la responsabilitédes nations. Beaucoup doit donc être fait au niveau de

la communauté européenne, mais sur la seule base duvolontariat et de la coopération.

Pourquoi l’Union Européenne suit-elle cettepolitique ? Nous le faisons dans le contexte de décisionsqui sont prises par les chefs de gouvernements, maisnous le faisons également pour les citoyens européens.En fin de compte, les personnes qui jugeront de laréussite de cette politique seront les citoyens eux-mêmes. Nous les aidons à jouer un rôle actif dans lessociétés dans lesquelles ils vivent, à les rendresusceptibles d'être employé, à accroître le nombred’embauches, à passer d’un emploi à un autre, à évoluerde l’enseignement à la formation, et ce, librement. Cesont des défis véritablement énormes, tant pour lescitoyens que pour les systèmes, étant donné que lesvingt-cinq pays ont des systèmes éducatifs et deformation différents, des normes de qualificationdifférentes et des structures de qualification différentes.C’est un véritable défi auquel l’Europe devra faire facedans les années à venir et je ne suis pas persuadé quenous y parviendrons d’ici à 2010.

Résumé

J. Mc CarthyCommission européenne

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II. Approche et pilotage

Les principes de la coopération européennedans ce domaine sont axés sur une coopérationvolontaire, la transparence et la confiancemutuelle. Il s’agit essentiellement d’une approcheascendante. Les états sont invités à participer, maistous les pays ne s’intéressent pas forcément àchacun des domaines de participation parce queceux-ci ne constituent pas nécessairement unepriorité au niveau national. Cependant, nousenvisageons la participation de partenaires– sociaux, en particulier – adéquats mais aussid’autres organisations non gouvernementales qui yont un intérêt. Pour que cela soit une réussite enEurope, nous devons mettre en place des groupes

de travail techniques, constitués de représentantsdes gouvernements, de partenaires sociaux etd’autres acteurs concernés, qui agissent auniveau européen. Cependant, il doit y avoir unecoordination au niveau national, pour faire ensorte que les représentants qui travaillent au niveaueuropéen n’aillent pas au-delà des attentes réellesau niveau national. Il est important d’éviter que lespopulations disent : « En fait, ce sont les européensqui décident pour nous de ce qui se passe dansnotre propre pays ». Il vaut mieux qu’ils disent :« notre pays contribue au développement européenactuel, quel qu’il soit ».

III. Priorités

Les priorités en matière de coopération dansles domaines de l’éducation et de la formationprofessionnelle sont au nombre de sept et elles ontété décidées par le Conseil des ministres européensde l’éducation et de la formation professionnelle.Les deux premières, « la transparence » et« l’assurance qualité » ont déjà fait l’objet detravaux préliminaires au cours des cinq dernièresannées. Les travaux sont, dans ce domaine,largement avancés, en comparaison avec les autresdomaines. Je souhaite vous présenter brièvementchacun de ces domaines et vous donner quelquesidées permettant de les faire progresser.

Le domaine de la transparence desqualifications est très important pour la mobilitédes étudiants et des travailleurs, afin que lesemployeurs puissent véritablement se rendrecompte des compétences qui ont été accréditéespar les qualifications obtenues. Pour l’instant, en cequi concerne la transparence au niveau européen,existe un ensemble d’actions non coordonnéesentre-elles et disparates. Par exemple, dans ledomaine de l’enseignement supérieur, existe unsupplément au diplôme ; dans le domaine del’éducation et de la formation professionnelle,existe un supplément au certificat. Cependant nousdevons intégrer l’ensemble de ces actions au seind’une structure commune. Cela dit, afin d’assurerune mise en place dans l'UE, une coordinationappropriée est nécessaire au niveau national. Auniveau communautaire, la commission fournira lessoutiens financiers et le système d’informationpermettant de concrétiser cet objectif.

Les travaux dans le domaine de l’assurance

qualité ont débuté en 1997-1998 par l’étude de cequi existait dans les différents pays en termes denormes et de règles et de leur application, de mêmequ’en termes de forces et faiblesses de chaquesystème. A partir de cette étude, on a développéune série de critères que l’on pourrait appeler des« méta-critères » ou « critères de tronc commun »et de là, nous en arrivons maintenant à ce que l’onpourrait appeler un « cadre commun d’assurancequalité ». Ce cadre comprend quatre élémentsétroitement liés : un modèle, une méthodologied’autoévaluation pour laquelle un modèle de lignesdirectrices a déjà été préparé, un système decontrôle qui implique en général une surveillanceet des retours externes (système dans lequelles partenaires sociaux sont principalementimpliqués) et enfin, un outil de mesure permettantd’élaborer des indicateurs de référence communs,ceci dans le but de comparer, de contrasteret de mettre à l’essai des systèmes d’éducationet de formation professionnelle dans les Etatsmembres. Vous pouvez retrouver tous lesdétails concernant ceci sur le site Internethttp://europa.eu.int/comm/education/policies/2010/et_2010_en.html

Dans le domaine du transfert de crédits, lestravaux n’ont commencé au sein des Etatsmembres qu’au cours de ces 12 derniers mois ; aussin’en sommes-nous qu’aux prémices. Nous essayonsde développer une interprétation commune desbases pour un crédit d’enseignement et deformation professionnelle et de se mettre d’accordsur des niveaux de référence communs. Lespremières mesures seront prises dans lessix prochains mois, afin de tenter d’établir des liens

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entre un crédit dans l’enseignement supérieur etun crédit dans l’enseignement et la formationprofessionnelle. Je crois que c’est un pas significatifen avant, parce qu’en fin de compte, noussouhaitons avoir un système de passerelles entre lesdivers niveaux d’éducation et de formation quifacilite un apprentissage des citoyens tout au longde leur vie.

Les travaux concernant la validation desapprentissages non formels et informels sontégalement très récents et là encore, nous n’ensommes qu’aux prémices de notre objectif, qui estle développement de principes communs et la priseen compte des différentes perspectives et desdifférents besoins. Bien sûr, les perspectives del’utilisateur ou du consommateur sont trèsdifférentes de celles des autorités de formation oudes institutions d’assurance qualité. Mettre encommun les différentes perspectives sera un défisignificatif. Une partie de ce travail sera de fairel’inventaire, au niveau européen, des apprentissagesnon formels et informels, lequel guidera le groupedans ses travaux.

Richard Sweet a déjà fait référence àl’orientation tout au long de la vie. Ce sujet devientune priorité politique importante en Europe.Ce sera le sujet d’une résolution du Conseil desministres de l’éducation qui se tiendra en mai 2004,en lien très étroit avec les travaux de l’OCDE, duCEDEFOP, de la Fondation européenne pour laformation et de la Banque mondiale. Leurs étudesconcluent que les objectifs politiques en matièred’orientation sont mal définis, mal articulés et fontl’objet d’une communication déficiente et qu’ilexiste très peu de moyens au niveau national, aussibien pour coordonner ce que vous pourriez appelerdes « sous-systèmes d’orientation », que pourdévelopper des politiques communes. L’OCDE etla Commission travaillent conjointement à laréalisation d’un guide sur les politiques, pour aiderles responsables des politiques.

Le groupe d’experts de la Commissioneuropéenne sur l’orientation tout au long de la vies’est dit tout particulièrement inquiet en ce quiconcerne l’orientation professionnelle dans l’EFP.Un exemple en est la politique d’investissementefficient aussi bien pour l’enseignement généralque pour l’enseignement et la formationprofessionnelle, sujet d’un document publié par laCommission en mars 2003. L’efficience d’unl’investissement dans le domaine de l’enseignementet de la formation se caractérise par la

correspondance entre les choix de cours despopulations et les cours proposés. Elle a pourconséquences une plus grande motivation desétudiants, un meilleur climat d’apprentissage, demeilleurs taux d’achèvement des études et moinsd’abandon en cours de stage. Les préoccupationsdu groupe d’experts portent ici sur le fait quechaque système d’éducation et de formationdevrait avoir un service d’orientation pourconcourir à l’efficience des investissements. Nousnous préoccupons également du fait que, etje crois que l’expérience française en la matièrele confirmera, l’attirance pour l’EFP et lesopportunités de carrière qui en découlentdevraient être mises en valeur. Ceci parce que danscertains pays, l’EFP est considérée comme uneseconde option ou mal vue, alors qu’en fait, l’EFPdevrait être le premier choix de ceux qui veulent s’yengager. Nous nous inquiétons également despossibilités de progression de carrière de la main-d’œuvre par l’EFP, de même que dudéveloppement de l’offre d’orientation sur le lieude travail. En ce qui concerne le développement dela main d’œuvre ou le développement économiqueet social, nous devons envisager un renforcementde l’offre d’orientation sur le lieu de travail.

Dans le domaine des qualifications et descompétences sectorielles, l’on s’intéresse auxsolutions d’éducation et de formation qui sontdéveloppées par des secteurs et des branchesd’activité économiques, en dehors de tout systèmenational de qualifications. Dans ce domaine, unestratégie en quatre points a été adoptée, mais làencore, nous n’en sommes qu’aux prémices. Lapremière mesure est un exercice de typologie, quipermettra de voir ce qui existe réellement ; puisl’utilisation de programmes de l’UE pour soutenirle développement des qualifications et descompétences sectorielles ; ensuite, l’établissementd’un lien entre les structures et les initiativesexistantes ; enfin, une attention particulière doitêtre accordée à certains secteurs. Il faut mettre toutcela au point de manière intégrée.

Le dernier domaine est celui des compétenceset des qualifications des enseignants et desformateurs. Un cadre d’assurance qualité pourl’EFP a des répercussions sur les compétences et lesqualifications des enseignants et des formateurs,lesquelles sont considérées comme descontributions et des éléments dans la procédured’assurance qualité. Les travaux progressent dansce domaine.

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Conclusion

En résumé, les travaux des différents groupes de travail techniques de l’EFP au niveau européen sont àdes stades d’avancement différents. De manière générale, les groupes de travail techniques sont constitués dereprésentants des gouvernements, ainsi que des ministères chargés de l’enseignement général, del’enseignement technique et de la formation professionnelle, mais aussi de partenaires sociaux qui jouent unrôle prépondérant dans ces groupes. Certaines ONG sont également impliquées lorsque cela est nécessaire.Dans le cas de l’orientation tout au long de la vie, par exemple, l’Association Européenne des Parentsd’Elèves (EPA), le Forum européen de la jeunesse et l’Association Européenne des Consommateurs sontreprésentés dans les discussions sur les politiques et systèmes futurs d’orientation tout au long de la vie.

Pour plus d’informations, référez-vous aux six communautés virtuelles existantes pour chacun desdomaines suivants : assurance qualité, transfert de crédits, transparence, orientation, qualificationssectorielles et validation des apprentissages non formels et informels, que vous retrouverez surle site Internet du CEDEFOP. Ces communautés virtuelles vous permettront d’accéder aux travaux détaillésde chacun des groupes de travail techniques et des groupes d’experts mis en place pour faire progresser lespriorités de l’EFP exposées précédemment.

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L’objectif majeur des processus (Bologne, Bruges) vise, audelà de la mobilité des étudiants, des enseignants et deschercheurs, à promouvoir l’employabilité des citoyenseuropéens et la compétitivité du système européend’enseignement supérieur.

L’employabilité des citoyens signifie leur capacité à trouver(retrouver) grâce à leur diplôme ou grâce à leurqualification, voire à leur expérience, un emploi sur unmarché du travail intégrant la dimension européenne decette ambition, c’est-à-dire un marché du travail européen.

S’agissant de l’enseignement et de la formation profes-sionnels, toutes les réponses établies par les systèmeséducatifs nationaux sur la définition des profils profes-

sionnels (contenu des métiers ou des qualifications) sontconçues en fonction d’un marché du travail national.En quoi cette base nationale est-elle une garantie dereconnaissance et donc d’employabilité internationale,quels que soient les contenus de formation, l’organisationdes enseignements et des examens, les modalités d’évalua-tion, la qualité et les performances du système éducatif ?

Il est donc pertinent de considérer, dans le respectstrict du principe de subsidiarité, que les diplômesrépondant à une ambition d’employabilité européennedoivent contenir une partie professionnelle communeen termes de référentiels professionnels communs.C’est ce à quoi s’est attaché le projet pilote européende « professionnalisation durable ».

Vers la construction de nouveaux diplômesd’enseignement professionnel à référentiels

communs internationaux

I. Partenaires du projet

Il s’agit d’un projet qui s’intitule « professionnalisa-tion durable ». C’était le souhait du ministre français quia lancé cette initiative lors de la présidence française enl’an 2000 : il s’agissait de Jean-Luc Mélenchon, qui étaitministre délégué à l'enseignement professionnel. La prési-dence française était donc à l’initiative de ce projet. Il yavait un certain nombre de partenaires, qui étaient nonseulement des pays Etats membres, comme l’Espagne, laGrèce, l’Italie, le Royaume Uni, la Belgique, les Pays-Bas,mais aussi des pays qui étaient candidats et qui rentrerontdans le cadre communautaire au 1er mai 2004, comme laHongrie et la République Tchèque. Nous avons eu des

observateurs qui ont travaillé sur la construction de ceprojet et aujourd’hui, certains d’entre eux ne sont plusobservateurs dans la deuxième phase et poursuitede ce projet mais acteurs. La Commission européennea été associée étroitement à ce travail, à la fois parcequ’elle l’a suivi très attentivement et qu’elle l’a, en partie,financé. Ont été également associés le CEDEFOP et laFondation de Turin. Ils ont été associés à nos travaux etleurs réflexions ont été à chaque fois, je dirais,les bienvenues et l’aide qu’ils nous ont apportée aété précieuse pour mener l’exercice au bout.

Résumé

G. AssérafInspecteur général

Ministère de la Jeunesse, de l’Éducationnationale et de la Recherche

FRANCE

Introduction

Pour rebondir sur ce qu’ont dit mes deux collègues précédents, je vais parler de deux points en particulier.

Notre collègue de la Commission, monsieur McCarthy, a parlé de coopération dans l’Union Européenne et monsieurSweet a également évoqué ce sujet dans le cadre de l’orientation. Ce dont je vais vous parler est un exemple de cettecoopération lancé il y a maintenant trois années. Plus généralement la question que l’on se pose est celle des diplômes.Comme monsieur Sweet l’a souligné, à juste titre, lorsque l’on exerce une activité professionnelle, on doit être considérécomme un professionnel et donc des référents, en terme de diplômes ou en en terme de diplômes spécialisés, doiventexister. C’est également ce dont je vais vous parler.

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II. Problématique

La question que l’on s’est posée au départétait d’une certaine manière celle de la mobilitépuisque le constat que l’on faisait, et que l’on faitencore aujourd’hui, est que la mobilité est assezréduite pour les travailleurs. On essaie de lapromouvoir pour les étudiants, mais, en ce quiconcerne les gens qui travaillent, mes collèguesl’ont dit, cette mobilité reste assez modeste. Donc,la question que l’on s’est posée en matièred’enseignement et de formation professionnelle est :« quels sont les objectifs que l’on doit s’assigner,non seulement, en tant que pays, mais en tantqu’Union Européenne ? », l’idée étant de disposerdes qualifications nécessaires pour le maintiende la compétitivité, ce qui constitue une exigencepour les entreprises, tout en favorisant laprofessionnalisation et la mobilité des travailleurs,ce qui constitue une exigence pour les travailleurs.Puis, et je suis heureux de l’avoir entendu, notrecollègue McCarthy l’a évoqué, dans l’UnionEuropéenne et notamment dans les processus quisont mis en œuvre pour structurer l’espace del’enseignement et de la formation professionnelle,que ce soit pour l’enseignement supérieur avec leprocessus dit de Bologne, ou pour l’enseignementtechnique et la formation professionnelle avec leprocessus de Bruges, l’un des objectifs majeursréside dans l’employabilité du citoyen européen etc’est là que le problème se pose.

Les qualifications que nous devons préparer– ces qualifications qui vont nous permettrede rechercher cette employabilité – doivent êtreadaptées aux besoins – aux besoins des entreprises,aux besoins immédiats et aux besoins futurs. Ellesdoivent être lisibles par les uns et par les autres,elles doivent également être attractives pour les

étudiants et elles doivent être attractives pourles travailleurs, puisqu’on ne parle pas seulementde formation initiale mais aussi de formationcontinue ou de formation tout au long de la vie.

Or il existe aujourd’hui un paradoxe surlequel on va buter systématiquement et quin’apparaît pas, malheureusement je trouve, dans laplupart des débats. Le paradoxe est le suivant : c’estque dans chaque pays, tous nos diplômes, enparticulier nos diplômes professionnels, sontfondés sur les besoins d’un marché du travailnational, et vous savez que lorsque l’on construitdes diplômes d’enseignement professionnel, onpart d’une qualification professionnelle, d’unmétier ou d’une activité pour lesquels on veutconstruire un cursus diplômant. Il y a toujours unréférent professionnel qui est au coeur et au départde la construction des diplômes. Or nous sommesdans une logique où les diplômes sont fondés surles besoins d’un marché du travail national, leprofil professionnel est national. Dans l’UnionEuropéenne, les diplômes que nous devonsconstruire doivent être fondés sur les besoins d’unmarché du travail européen. C’est-à-dire que leréférent professionnel ou profil professionnel surlequel nous devons construire le diplôme doit êtreinternational. C’est un vrai paradoxe, parcequ’aujourd’hui, il n’y a pas d’initiative, à part celle-là, qui essaie de construire ce pont entre le nationalet l’international. Les travaux qui sont très précieuxet qui sont engagés par la Commission et les Etatsmembres, comme l’a souligné notre collègue, sontdes travaux qui nous éclairent sur un certainnombre de points, sur un certain nombre depratiques, mais hormis les travaux sectoriels, etcelui-là en est un, ils ne dépassent pas ce paradoxe.

III. Résultats

Construire des diplômes communs, puisque c’étaitnotre ambition, qu’est-ce que cela veut dire ?

Techniquement, on nous disait que c’étaittotalement impossible. On nous avait mis en garde,y compris la Commission, malgré l’enthousiasmede certains fervents supporters au sein de cetteCommission, en nous disant que la disparité dessystèmes éducatifs nationaux était trop grandepour arriver à une construction commune. Puis,aujourd’hui, les résultats de ce projet vont nouspermettre de dire que, s’il y a une volonté politique,alors, techniquement, cela est possible.

Quels sont ces résultats ? Nous avons construità l’issue des travaux, une méthode commune quipermet d’élaborer des référentiels de diplômes ; cetteméthode est transposable à tous les niveaux et à tousles secteurs, et au travers de cette méthode, nousavons fait apparaître un modèle d’analyse del’activité professionnelle, un modèle de descriptiondes compétences et un modèle d’élaboration desobjectifs de certification. Ce projet a aussi permisd’élaborer une architecture commune de diplômes,sur laquelle les neuf pays partenaires se sont engagésdans ce cadre expérimental. Puis nous n’avonspas seulement réalisé une méthode, nous avons

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IV. A propos de la méthode commune d’élaboration de diplômes

Pourquoi qualifie-t-on cette méthode de commune ?

Parce qu’elle a associé différentes délégationsde différents pays et qu’à l’intérieur de chacune desdélégations, nous avons associé des professionnelsde la branche concernée, nous avons associé desinstitutionnels, c’est-à-dire des gens qui, au sein deleurs institutions, qu’elles soient publiques ou non,écrivent des référentiels professionnels, écriventdes diplômes professionnels. Nous avons associéaussi des experts de la branche ou desdeux branches concernées et nous avons associédes chercheurs parce qu’il était assez précieux pournous de pouvoir formaliser un certain nombre denos travaux. Cette méthode communed’élaboration est fondée sur la description. Ladifficulté que l’on rencontre quand on veutconstruire un schéma commun est une difficultéconceptuelle : sur quelle définition se mettred’accord quand on parle de compétences ? Qu’est-ce que ça veut dire pour les uns, qu’est-ce que çaveut dire pour les autres ? Donc, nous avonscontourné cette difficulté sur la base d’uneapproche descriptive, je l’éclaircirai un petit peuplus loin.

Cette méthode est consensuelle, c’est-à-direqu’à chacune des étapes, nous avons eu unconsensus et qu’il n’a jamais été question demajorité ou de minorité. Il a toujours été questionque l’adhésion soit totale pour les uns et pour lesautres, ce qui a été le cas. Puis, cette méthode, jedirais, est initiée au départ par une demande de laprofession. Vous avez un secteur d’activité qui abesoin de qualifications, et ce secteur d’activité,comme on le voit aujourd’hui dans un certainnombre de domaines, au niveau européen, dit :« nous exprimons un certain nombre de besoinsen matière de qualifications qui ne soient pas deniveau national, mais qui soient internationales etdonc, comment répondez-vous, vous, systèmeéducatif, à ces besoins que nous avons ? ». Il y adonc une demande de la profession. Il y a desbesoins du marché du travail qui sont à l’initiativedu diplôme alors que l’on a rencontré des pays oùcela n’était pas à l’initiative du marché du travail :cela sortait de l’initiative de formateurs oud’acteurs qui ne sont pas en relation avec le marchédu travail. Ici, il y a une relation directe avec lemarché du travail.

V. Au sujet de l’architecture des référentiels de diplômes

L’architecture du référentiel est un desrésultats. Je vais vous la présenter. Il y a dans cettearchitecture deux parties :

A) Une partie commune, c’est-à-dire unepartie normative entre les différents Etats qui s’yengagent.

1) Dans cette partie commune, il y a ce quel’on appelle le profil professionnel, qui comprenddes activités clés et des tâches clés, j’y reviendrairapidement par la suite, mais disons que c’est ce quipermet d’identifier assez vite quelles sont les activitésque l’on va exercer et ce qu’il y a à faire dans cesactivités, c’est-à-dire quelles sont les tâches qu’il fautréaliser. Qu’on le fasse ou non, peu importe,l’important est de se demander ce qu’il y a à faire ?

Donc le volet 1 de ce profil professionnel réside dansles activités et les tâches clés.

2) Le volet 2 contient ce que nous avonsappelé le « référentiel des compétences », on al’habitude quand on écrit des compétences, de leslier, d’une certaine manière, soit à une activitéprofessionnelle, soit à certaines ressources. Ici noussommes allés au-delà des écritures traditionnellesqui étaient, je dirais, les écritures de chacun despartenaires, nous sommes allés au-delà puisquenous avons constitué un référentiel en tant que tel,qui articule des compétences professionnelles àdes ressources.

Que sont ces ressources ? Ces ressources,ce sont ce que vous donne l’entreprise pourexprimer ces compétences. Si vous êtes informaticien,

écrit deux diplômes qui sont des diplômescommuns « responsable de l’hébergement » et« technicien de logistique », qui sont des niveauxpost-bac pour la France ou post-secondaire plus

deux années pour certains de nos partenaires et cesdiplômes commencent à être mis en œuvre dansplusieurs pays, vous le verrez plus loin, dansmon exposé.

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l’entreprise vous donne des machines, desordinateurs, un certain nombre de logiciels et vousdit de travailler là-dessus. Et bien, c’est par rapportà ces ressources que vous allez exprimer cescompétences. Vous ne pouvez pas les exprimer endehors d’un contexte professionnel et en dehorsd’éléments que vous donne l’entreprise. Mais lesressources sont aussi vos ressources personnelles,vous avez une formation initiale ou une formationcontinue, ou une expérience personnelle, ce sontvos ressources propres et ce sont elles qui sont enlien avec les compétences que vous allez pouvoirexprimer.

Vous avez également des exigencesprofessionnelles et ces exigences professionnellessont en lien avec vos compétences, c’est ce quel’entreprise attend de vous : la performance. Il nes’agit pas seulement de faire, il s’agit de faire entemps et heures, bien, etc. Il y a des exigences quisont exprimées par l’entreprise.

Cet ensemble permet d’écrire des compétencesprofessionnelles en relation avec ces ressourceset ces exigences.

3) Puis le troisième volet de cette partiecommune est celui qui concerne les objectifsde la certification. Vous savez, mais ce n’estmalheureusement pas partagé, que pour un certainnombre de pays, nous considérons que le seulmoyen de vérifier que quelqu’un maîtrise bien descompétences professionnelles est de certifier cequ’il en est de sa maîtrise du métier. C’est ce quenous appelons la certification. Pour certains pays,si l’on suit une formation, alors on maîtrise unmétier. Pour nous en France, on considère que,dans l’enseignement professionnel, ça ne suffit pas,loin de là, il faut pouvoir vérifier que l’on maîtrisebien le métier.

Mais entendons-nous bien à propos decertification. Il y a trois dimensions dans lacertification :

Qu’est-ce que l’on vérifie ? C’est l’ambitionque l’on se donne.

Comment le fait-on ? C’est de compétencenationale, c’est-à-dire que l’on reste chacun avecses règles : est-ce que c’est une épreuve écrite,une épreuve orale, une épreuve en situationprofessionnelle, la vérification d’un certain nombrede choses qui sont accomplies ?

Et puis, qui le fait ? Cela reste encorede compétence nationale mais, pour certainsc’est du ressort du ministère de l’Education,pour d’autres du ressort d’un autre ministère,pour d’autres encore du ressort des organismesaccrédités pour cela.

B) La deuxième partie de l’architecturedu référentiel du diplôme européen concerneles modes d’accès au diplôme.

Il s’agit de modes d’accès par la formationqu’il s’agisse d’objectifs de formation, de contenusde formation ou d’organisation des enseignements.Cela reste de compétence nationale etl’organisation incombe, je dirais, au systèmetraditionnel. Il en est de même des acquisitions parl’expérience et des objectifs de validation des acquisnon formels et informels : ils restent aussi decompétence nationale. Les modes de validation dela formation ou de validation des acquis qui,comme en France, sont des modes réglementés,sont de compétence nationale. Cela dit, il existe, enréalité, un lien dans la construction de ce modèle etdans la construction du diplôme entre les partiescommunes et les parties nationales. On peut suivrece lien de manière très étroite, on peut distendre celien et en rester très éloigné, peu importe, le lien estpossible, c’est-à-dire que l’on peut, avec ce modèle,faire de la validation des acquis pour remonter àun profil professionnel et redescendre à undiplôme. Le chemin est construit, je dirais, dans lesdeux sens.

Voilà ; je n’ai malheureusement pas le tempsde vous présenter le modèle en tant que tel. Ce queje veux dire, c’est que le modèle existe. Il a permisde construire deux diplômes. Aujourd’hui, lemodèle est utilisé pour construire trois nouveauxdiplômes et est en train d’intéresser trois ou quatrebranches d’activités au niveau européen. C’est doncun modèle qui commence à se concrétiser. Il y ades groupes de travail qui démarrent et l’intérêt dece modèle, c’est qu’il permet, à un moment donné,de faire le lien entre les différents éléments qui sontissus des travaux communautaires. En particulier,on a évoqué la question de la transparence, on aévoqué la question de la qualité, on a évoqué laquestion du transfert des crédits. Ce modèlepermet de dire sur un schéma reflétantl’architecture des diplômes : « la transparence vients’inscrire à cet endroit et nous éclaire sur tel point »ou « voilà les éléments que ce schéma apporte à lanotion de qualité ». La qualité, vous l’avez dit, estun certain nombre de critères que l’on peutobserver, mais pour nous la qualité, c’est aussi lamanière dont on construit la certification. C’est-à-dire que, si on a de bonnes personnes pour formeret pour certifier, mais si l’on ne sait pas ce que l’oncertifie, alors la qualité a peu de sens ; et la qualitédoit comprendre, non seulement, ce que l’on veutcertifier, mais elle doit comprendre aussi la façondont on forme le certificateur et ce modèle permet

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d’écrire le profil professionnel du certificateur, puisles objectifs à certifier pour certifier le certificateur,puis la formation qui s’en déduit ou qui est en lienavec ce certificateur. Enfin, pour les unités detransfert de crédits, ce modèle est construit de

manière à ce que les objectifs de certifications’inscrivent au sein de blocs professionnelscohérents correspondant à un même métier etpouvant être transférés et produits dans desendroits différents.

Conclusion

C’est le recul qui nous a permis d’identifier tous ces éléments, mais il y a une chose qui est très importante,me semble-t-il : c’est que ce modèle qui commence à fonctionner avec d’autres pays, puisque de nouveauxpartenaires entrent, y compris les partenaires des pays candidats, est certes un modèle qui permet de fabriquerdes diplômes communs, mais c’est avant tout un modèle qui permet de fabriquer des diplômes tout court.C’est-à-dire que si l’on souhaite organiser ou réorganiser sa formation professionnelle et si l’on souhaiteinscrire un schéma de construction de diplômes au sein d’un secteur ou d’un service du ministère oud’une politique du ministère en matière de formation professionnelle, ce schéma a un mérite :il est extrêmement structurant. Il est clair pour les professionnels. Il est très clair pour les étudiants qui peuvent,en une page et demie, lire de quoi il s’agit et quel type d’activité ils auront une fois le diplôme acquis.Il permet à un service public ou à une initiative publique ou privée de structurer et d’articuler un ensembled’éléments qui composent le diplôme.

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DÉBAT AVEC LA SALLE (8)1) Problème de coopération entre le ministère du travail

et le ministère de l’éducation

2) Au sujet de l’orientation professionnelle

3) Rapport de la Banque mondiale

4) L’intérêt de distinguer l’information et le conseil

5) L’importance du rôle de formateur

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1) Problème de coopération entre le ministèredu travail et le ministère de l’éducation

2) Au sujet de l’orientation professionnelle

Origine du commentaire

David Fretwell de la Banque mondialeLead employment and training specialist

u Détail« Juste une remarque suite à la discussion sur la fonctionde conseil. Comme vous l’avez indiqué, la Banquemondiale a repris l’étude faite par l’OCDE sur sept pays envoie de développement allant des Philippines, au Chili,en passant par l’Afrique du Sud et d’autres pays dans cetterégion. Ce fut intéressant de suivre les discussionsconcernant les priorités clés dans les pays développés et deconstater que certaines d’entre-elles étaient analogues àcelles des pays en voie de développement. Mais je pensequ’il y a un problème spécifique aux pays en voie de

développement, qui sont de plus en plus intéressés par cesujet. Ceci concerne la coopération entre les acteurs clés,en particulier le ministère de l’Education et le ministère duTravail, dont aucun n’est capable de rassembler cetteinformation car il y a un problème de coopération et, enfait, de leadership. Je crois qu’il y a des exemples telsque la Roumanie où il existe un protocole entre lesministères afin d’organiser l’information concernantl’offre et la demande. »

Origine du commentaire

David Fretwell de la Banque mondialeLead employment and training specialist

u Détail« L’autre problème que vous avez énoncé concernel’accent mis sur la psychologie et la formation d’équipesadéquate en matière d’orientation, pour passer dutête-à-tête, qui n’est pas abordable, à une diffusion pluslarge de l’information destinée à l’auto-évaluation. LaTurquie en est un exemple : elle possède dans une desuniversités, un nouveau système de formation à la

fonction de conseiller d’orientation. Le dernier pointà relever est, je pense, l’intégration dans les cursusscolaires. C’est le cas dans des pays tels qu’en Afriquedu Sud où le savoir être est un sujet dans lesécoles, ou encore en Hongrie où la composante dela planification de carrière nécessaire au développementde ces compétences est intégrée. »

3) Le rapport de la Banque mondiale

Origine du commentaire

David Fretwell de la Banque mondialeLead employment and training specialist

u Détail« Ceux qui souhaitent recevoir la synthèse sur les paysen voie de développement peuvent consulter le sitede la Banque mondiale, section enseignement et

apprentissage tout au long de la vie. Vous y trouverez les sept monographies. Nous ne vendons pas les rapports. »

DÉBAT SÉANCE (8)

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4) L’intérêt de distinguer l’information et le conseil

u Détail « D’abord une petite remarque sur coopérations entre lesministères : je voudrais mentionner, même si c’est unpetit peu pour mémoire parce que le dispositif a évolué,que nous avions créé dans les années 90 ce qu’onappelait les centres inter-institutionnels de bilan decompétences qui regroupaient les compétencesdu ministère de l’Éducation, de l’AFPA et de l’ANPE,ce qui est suffisamment rare pour être souligné. Ce n’était

pas le but de mon intervention, je voulais demander aupremier orateur si dans le fond vous n’avez pas intérêt àdistinguer plus précisément la fonction d’informationsur les métiers dans les systèmes d’information, de lafonction du conseil, qui est vraiment, je crois, un autremétier. Je dis cela puisque j’ai géré pendant deux ans ceréseau de centre de bilan de compétences. »

Origine de la question

Maurice MEZEL du ministère français des Affaires sociales, du travail et de la solidaritéDirecteur du développement de la coopération multilatérale

u Réponse« C’est vraiment dommage que la France n’ait pasparticipé à notre étude parce que je pense que lesinitiatives que vous avez prises ici dans le bilan descompétences ainsi que la manière dont les informationsconcernant les carrières sont organisées et diffusées, sont

vraiment impressionnantes. Il y a très peu de pays quiont un tel système en place particulièrement destinéà l’information sur les carrières, qui soit aussicohérent et qui résulte d’une bonne coopération entreles ministères du travail et de l’éducation. » R

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Origine du complément non identifiée

u Détail« En fait il y a un moyen d’obtenir l’ébauche de notrerapport final, qui est en fait le rapport final lui-même, etcela gratuitement sur un site canadien. Si vous souhaitezrecevoir une notification de la date de parution par

courriel afin de l’acheter, donnez-moi votre carte de visite à la sortie. De même, si vous me donnez votrecarte, je vous enverrai aussi l’adresse du site à partirduquel vous pouvez télécharger notre rapport final. »

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Origine de la question

Maurice MEZEL du ministère français des Affaires sociales, du travail et de la solidaritéDirecteur du développement de la coopération multilatérale

u Réponse« En ce qui concerne la question de la formation desenseignants et de l’orientation professionnelle. Dans denombreux pays, on croit que les enseignants peuvent etdoivent faire de l’orientation professionnelle, et je pensequ’il y a là un rôle important dans la formation desenseignants pour ceux qui sont chargés, au sein desécoles, de coordonner le cursus et les programmes basés

sur les expériences. Mais, je ne pense pas que ce type deformation soit suffisant. Il est nécessaire d’avoir desagences spécialisées qui travaillent en coopération avecles écoles, et qui disposent de personnes travaillant avecelles ayant leurs propres qualifications en matière deformation spécialisée dans le domaine de l’orientationprofessionnelle. »

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5) L’importance du rôle de formateur

u Détail « La deuxième question se réfère à la remarque queje faisais hier, sur l’importance à mon sens du rôle desformateurs et du recrutement, de la valorisation de lafonction des formateurs en général, savoir sur quoi lepremier orateur se fonde quand il dit – même si c’est unpeu paradoxal par rapport à ma remarque précédente– que ces fonctions d’information et de conseil ne sontpas dans le référentiel de compétences du métier

d’enseignant ou de formateur. Je pense que si on intègre àla fois les questions de coût, parce que tout ceci a un coût,mais aussi peut-être l’objectif de rapprocher lesenseignants des milieux professionnels, il faut peut-êtrequ’il reste quelque chose de la fonction information,conseil, orientation professionnelle dans les missions desformateurs. »

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Séance 9 :ÉCHANGES D’EXPERIENCES

ET DE BONNES PRATIQUES ENTRE LES PAYS

Les participants se sont répartis en atelier afin de pouvoir échanger,en groupe restreint, sur des thèmes abordés lors de la conférence touten faisant profiter les autres de leurs expériences.

Cette répartition en atelier s’est effectuée en fonction des intérêts etaffinités de chacun pour les thématiques suivantes :

- coopération, partenariat- cohérence des formations- oubliés, exclus et minorités- réformes, management, ressources humaines.

Vous trouverez ci-après les rapports de synthèse issus de chacun de cesateliers thématiques.Ils furent présentés en séance plénière.

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« De nombreux pays de différentes partiesdu monde étaient représentés : pays d’Afrique,d’Europe, d’Asie et d’Amérique Latine. Nous avonsdiscuté de la question des partenariats et étionscensés identifier les problèmes et proposerdes solutions. La tâche était probablement tropdifficile car nous avons discuté de beaucoup deformes différentes de partenariats sans identifierbeaucoup de problèmes dans le développementde ces partenariats. Peut-être que la premièrerecommandation concernant les partenariats est« n’en parlez pas trop, agissez ».

Une conclusion générale à propos despartenariats est qu’il devrait s’agir d’un partenariatdont la base est égalitaire. Un partenaire ne devraitpas être plus important que l’autre et il estimportant de trouver des objectifs communs et deparler la même langue. Nous pensons que c’est unedes choses les plus importantes lorsque l’ondémarre un partenariat, et ce partenariat devraittenter de viser des situations de « gagnant-gagnant ».

En parlant des objectifs, nombre departenariats tendent à se concentrer sur la façond’obtenir des financements supplémentaires de lapart de l’autre partenaire et ce n’est peut-être pasla meilleure façon de procéder. Il est peut-être plusimportant de s’entendre sur un ensemblecommun d’objectifs.

Nous avons identifié cinq types différents departenariats :

1) Le premier concerne la coopérationinternationale. Dans tous les pays dans lesquelsla coopération de contributeurs existe, celle-ciconstitue une part importante des processus deréformes et il est important que lescontributeurs se coordonnent entre eux et avecles pays impliqués. Il n’existe pas de modèleunique et tout ceci a déjà été dit très souvent.Un exemple de ce type de coopération decontributeurs a été donné par le Maroc, qui aadapté le système français pour la formation desenseignants et des formateurs à la situationlocale et a aussi utilisé les expériences belges etcanadiennes, tout en se concentrant sur laconstruction de son propre modèle. L’échange

des meilleures pratiques a aussi été mentionné,par exemple, pour la Fédération de Russie où laquestion de la construction des nouveauxpartenariats sociaux et du nouveau dialoguesocial a été alimentée par la bonne pratique despays de l’Union Européenne. Une autrecontribution était celle du Vietnam, qui estencore à la recherche d’une plus grandecoopération, mais il a présenté un agenda trèsclair sur les problèmes pour lesquels ilsouhaiterait ardemment recevoir encore plus desoutien.La coopération internationale. Nous la connaissons tous.

2) Puis, nous avons la coopération public-public.Les exemples cités ici traitaient en particulierde la coopération entre les ministères. Nouspensons qu’il s’agit toujours d’un problèmedélicat dans de nombreux pays ; il ne s’agit pasdu gouvernement, mais dans de nombreux paysil est important d’essayer de « sortir » de sonministère pour coopérer avec les autresministères et trouver un agenda commun.

3) Le partenariat le plus populaire est lepartenariat public-privé. Nous avons de bonsexemples de partenariats menés par desentreprises ou des employeurs et de partenariatsmenés par le gouvernement. Au Sénégal, unexemple de partenariat mené par les employeursa été cité, dans lequel les employeurspossédaient leur propre système de formationqui n’était pas vraiment rentable, ni efficace etils ont cherché une coopération avec leministère du travail et de l’emploi. Ils ont réussià développer un système de formationcommun, dans lequel tous deux investissent desfonds pour la formation de jeunes. EnThaïlande, il existait un partenariat public-privépuissant, mené par les employeurs.

On a fait référence aux partenariats menés parle gouvernement, en particulier dans lesanciennes économies centralisées comme laRussie, l’Ouzbékistan ou le Vietnam, danslesquelles il existait des partenariats dits public-public entre les entreprises publiques et lesystème éducatif, mais ces partenariats ont été

RAPPORT DE L’ATELIER A

coopération / partenariat

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rompus après les transformations qui ont eu lieudans ces pays.

Maintenant, le gouvernement essaie de stimulerla création de nouveaux partenariats, à la fois àun niveau gouvernemental et entre les écoles etles entreprises. Les exemples de partenariatssociaux et relatifs à la façon d’établir un dialoguesocial ont été mentionnés. L’établissement d’undialogue tripartite n’est pas une question demois, mais plutôt une question de nombreuses,nombreuses années avant que cela ne commencevraiment à fonctionner.

Nous avons identifié les relations école-entreprise qui se sont développées. Le dialogueconcerne souvent les compétences requises parles sociétés et la façon dont le système éducatifpeut fournir les bons diplômés et vous verrez,de ce fait, se développer des stages, des échangesd’enseignants, etc., dans un certain nombrede pays.

Un autre aspect dans nombre de pays étaitl’établissement de fonds de formation et, là,nous avons eu un exemple moins heureux et unexemple plus heureux. Le bon exemple étaitcelui du Chili où 1 % des salaires de l’entreprise,était versé à un fonds de formation, grâce auquel25 % des employés avaient accès à la formation.Ceci a très bien fonctionné, bien que tous lesfonds n’aient pas été dépensés. Au Nigeria, lesemployeurs contribuent aussi à un fonds deformation, mais le fonds est géré par le

gouvernement et les partenaires sociaux nes’impliquent apparemment pas dans la gestiondes fonds de formation. C’est un problème pourlequel les pratiques de différents pays pourraientêtre échangées, de façon à aider les pays àapprendre les uns des autres. Un autre exempleintéressant était celui du Mali, où il existait despartenariats public-privé établis au travers d’uneunité de formation intermédiaire, en charged’identifier les besoins de compétences dessociétés et de discuter avec les instituts éducatifsde la façon de s’attaquer à cela et de définir desprogrammes de formation.

4) Le quatrième partenariat est le partenariatprivé-privé, cité en particulier en Tunisieoù ceci s’est traduit par une coopérationentre les Chambres de commerce allemandeet française avec la Tunisie, ou parl’intermédiaire de sociétés étrangères quicoopèrent avec ales sociétés locales et quifournissent la formation.

5) Enfin, une question importante a été soulevée.Qu’en est-il des partenariats avec le secteurinformel ? Nous avions une contribution duSénégal où le secteur privé a établi un certainnombre de programmes de formation pourle secteur informel, par exemple pour lesconcessionnaires automobiles, le secteur desarticles ménagers, le secteur de la soudureet il existait également d’autres bons exemplesau Mali.

La dernière contribution a été très importante, porteuse d’un message critique. L’assertion était quela coopération de contributeurs était la forme de partenariat la plus onéreuse et probablement la moinsdurable. Les partenariats menés par l’Etat sont, à un niveau intermédiaire, modestement coûteux mais,probablement aussi, modestement durables, cependant il a été dit que les partenariats menés par lacollectivité n’étaient pas aussi onéreux et certainement les plus durables.

Cela donne à réfléchir. »

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« Dans un premier temps, nous nous sommesintéressés à découvrir les spécificités des modes deformation des différents pays qui étaient présentsau niveau de cet atelier. Donc, il y a eu un tour detable pour décrire rapidement les différentssystèmes. Il en est ressorti que très souvent cessystèmes de formation sont à dominante deformation générale, que l’espace réservé àl’enseignement technique et à la formationprofessionnelle restait relativement réduit et qu’il yavait un manque de visibilité dans certains systèmespour dégager ces deux aspects.

Le deuxième point auquel nous nous sommesintéressés dans cet atelier est une problématiquequi concerne un certain nombre de pays où l’onvoulait voir la formation professionnelle commeétant une formation qui pourrait être donnée auxélèves quittant l’école à un niveau primaire,c’est-à-dire très tôt. Là, il y a eu un certain nombrede réflexions et il en est ressorti que la formationprofessionnelle au stade actuel a besoin d’unminimum de formation de base incontournable.L’idée était donc d’imposer ou de renforcer cettenécessité d’une formation minimale.

Le troisième point qui a été soulevé estla spécification et les articulations à développer età voir entre les trois types de formations qui sedégagent au niveau des différents systèmes,notamment au niveau du secondaire : à savoir laformation générale, la formation technique outechnologique et la formation professionnelle.Ceci est un peu le centre, si vous voulez, ou un despoints-clés des travaux de cet atelier. Il y a eu uncertain nombre de commentaires et d’exemples desolutions qui sont en cours de développement,notamment au Mexique où l’on voit un peu laredistribution des enseignements dans ces troismodes et où l’on converge vers l’injection ou lerenforcement des parties manquantes dans chacunde ces trois modes. La formation générale doit deplus en plus inclure des éléments de formationtechnique ou professionnelle et la formationtechnique ou professionnelle doit encore renforcerl’aspect de formation générale pour permettre unearticulation et une cohérence sur ces trois modes.

L’autre point qui a été soulevé est l’accès àl’enseignement supérieur pour chacun de ces troismodes. Les éléments de réponse qui ont été avancésse basaient sur la mondialisation, la certification etla standardisation pour retrouver les compétencesacquises dans les différents modes et permettre unaccès à l’université sur des bases assez claires.

Un autre point a également été discuté : il s’agitde l’élaboration des programmes, notammentpour tout ce qui est formation professionnelle etformation technologique. On a dégagé la nécessitéd’impliquer les différents partenaires, et enparticulier le monde professionnel, dansl’élaboration de ces programmes. Ceci est devenuune nécessité incontournable, le mondeprofessionnel a son mot à dire et là on a eu uneréflexion autour de la présentation de GeorgeAsséraf. Il y a beaucoup de gens qui auraientsouhaité avoir plus de détails sur cette présentation.

L’une des petites questions soulevées aussi, c’est :comment impliquer le monde professionnel quandil s’agit de professionnels dont les niveaux sont trèslimités eux-mêmes et qu’ils ne peuvent pascontribuer à ces discussions et à cet échange pourdévelopper ces programmes ?

Un autre point a aussi été discuté : il s’agit de lacohérence, la cohérence régionale des formations.On sent de plus en plus le besoin de former des gensnon pas pour le pays même, mais pour unenvironnement. Le cas a été présenté au niveau desformations de l’Europe, mais il a été aussi rediscutépar notre collègue palestinien qui s’intéresse à lazone de son voisinage pour le marché de l’emploi,c’est également la même chose pour lespays d’Afrique du Nord qui ont de plus enplus d’attachement vers l’Europe. Dans ledéveloppement de ces programmes il y a donc unbesoin de tenir compte de l’environnement et duvoisinage dans lequel on travaille. L’une desréflexions avancées par le collègue marocain est queles pays de l’Afrique du Nord reprennenthabituellement des modes et des modèles deformation qui sont déjà en cours, notammenten France. Maintenant la France, elle, rejoint une

RAPPORT DE L’ATELIER B

cohérence des formations

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dimension européenne et il est nécessaireque ces pays-là aussi anticipent et se mettent surcette voie.

Un autre aspect a également été bien discutédurant cet atelier : il s’agit de la validation desacquis de l’expérience. Il y a l’expérience française,mais on a aussi eu les informations concernantl’expérience de la Corée, où il y a eu dans les années1970 un grand effort pour permettre auxprofessionnels et aux gens du monde professionnelde continuer leurs études et d’arriver jusqu’auniveau du bac. Ce sont les entreprises elles-mêmesqui ont été impliquées dans ce processus demanière très positive. Actuellement on arrive ainsien Corée à 90 % d’une tranche d’âge qui varégulièrement atteindre le niveau du bac sansproblème. Le processus de la validation des acquisse poursuit au niveau du monde professionnel.C’est un système qui se développe fortement là-bas.

Par la suite, on a eu à discuter du problème dereconnaissance des diplômes étrangers. Dansbeaucoup de pays, il y a des jeunes qui vont dansd’autres pays pour achever leur formation.L’équivalence ou la reconnaissance de cesformations et de ces apprentissages posentproblème.

Un dernier point enfin a été relevé : dansbeaucoup de pays, les structures qui enclenchentdes transformations, des innovations et deschangements pédagogiques au niveau de laformation professionnelle se trouvent rapidementdéséquilibrés suite à des changements politiques.Il est donc recommandé et même nécessaire destabiliser ces structures en dépit des changementspolitiques. »

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« Les participants de cet atelier venaient depays comme le Chili, la Colombie, l’Espagne,la Hongrie, la France, le Mali, la Pologne etd’institutions comme La Banque mondiale ou bienla Fondation européenne pour la formation,des ministères français des Affaires étrangères et del’Agriculture. C’est donc une diversitéd’expériences, d’individus, d’institutions et decontextes qui ont permis d’enrichir nos débatsquant à cet atelier : « Oubliés, exclus et minorités ».

Au niveau de l’identification desproblématiques, nous avons relevé que l’exclusionsociale est un problème très large qui est au cœurde nos sociétés. D’une part, il existe unedéstructuration économique et sociale qui met decôté des parts énormes de population dansbeaucoup de pays, d’autre part, il y a un risqued’exclusion qui est lié à la problématique de lapauvreté. En effet, nous avons constaté dans uncertain nombre de pays qu’il existe des contextessocio-politiques qui changent. Il y a par exemplel’introduction de l’économie de marché dans despays de l’Est, il y a des nouveaux métiers quiapparaissent, il y a des contextes économiquesdifficiles avec des entreprises qui ferment, il y a,notamment dans les pays du Sud, une agriculturequi cherche à se développer et, enfin, des ressourcesfinancières et budgétaires qui sont quelquefoisrares et insuffisantes. Enfin, ce phénomène derisque d’exclusion d’une plus ou moins grandepartie des populations nous a permis de déceler unconcept important à nos yeux, qui est celui dela vulnérabilité sociale et économique despopulations dans des contextes nationaux,régionaux et locaux diversifiés. En effet, ce conceptde vulnérabilité sociale représente à nos yeux unefragilisation des populations, tant au niveau socio-politique et économique qu’au niveau individuel,avec notamment la perte de repèrespsychologiques, par exemple due à la perted’emploi ou même le manque de qualification. Ona aussi relevé un niveau géographique, par exempleau Mali, où il y a une grande difficulté d’accès danscertaines régions à des centres de formation.

Concernant les questions que nous noussommes posées, elles sont de l’ordre de cinq avec

notamment une question pour l’identification despublics cibles.

1) Qui sont ces personnes vulnérables,difficilement accessibles ?

2) Comment peut-on les identifier du point de vuede tous les acteurs du monde de l’éducationnotamment ?

3) Quelles sont les pratiques des systèmes éducatifsformels qui finalement encouragent l’exclusionde ces populations ?

4) Comment peut-on assurer des dispositifséducatifs variés avec des acteurs divers, commepar exemple les familles, les ONG ou même desassociations, tout en assurant finalement lacohérence éducative et sociale de nos sociétés ?

5) Comment peut-on prendre en compte le coûtsocial de l’exclusion tout en sachant que ce coût,évidemment, est déterminé par un certainnombre de facteurs, comme par exemple lesimportations, l’exode rural, les conflits sociaux.

Nos propositions et nos éléments de réponse sontde l’ordre de trois.

1) Premièrement, nous souhaiterions proposerqu’il y ait des formations non stigmatisées pourfaire face, par exemple, à des caractéristiquescomme le nomadisme ou bien l’analphabétismede certaines populations. Nous nous sommesen défitive demandé s’il ne fallait pas repenserune alphabétisation fonctionnelle pour faire lesliens entre l’éducation et le travail.

2) Il nous a paru aussi important de changer cetteimage de la formation professionnelle ettechnique grâce au dialogue qui devraits’instituer de manière plus importante entre lesdifférents acteurs de la société. Dans ce sens,nous avons relevé que le rôle des entreprisesétait fondamental ainsi que le rôle des Etats etdes organisations internationales. On a mêmepensé qu’il serait important d’accorder desbourses aux plus jeunes et aux adultes les plusdémunis mais aussi d’essayer de concevoir desformations de formateurs dans les languesvernaculaires.

RAPPORT DE L’ATELIER C

oubliés, exclus et minorités

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3) Ensuite nous nous sommes finalementdemandé s’il fallait reconceptualiser le conceptde qualité de l’éducation et de la formation nonélitistes. En effet, nos systèmes éducatifs ontpour objectif actuel de former très souvent

l’élite aux dépens du plus grand nombred’enfants, de jeunes et d’adultes. Cette nouvelleapproche permettrait évidemment de diminuerle coût social de l’exclusion.

En conclusion, nous avons décidé de dire que l’exclusion sociale était un problème qui se situe aucœur de nos sociétés et que, finalement, la formation technique et professionnelle n’était pas la réponse autraitement de l’exclusion de ces différentes catégories de population. »

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« Notre atelier a traité de la gestion de la réformeet nous avons eu une discussion plutôt longue à cesujet. Nous avons discuté des expériences d’aumoins dix pays assis autour de notre table etcertaines suggestions ont été émises.

1) Les points délicatsTout d’abord, la réforme, de par sa nature, estune révolution culturelle. Or s’il s’agit d’unerévolution culturelle, ceci signifie que leprocessus sera extrêmement difficile. La questionde la gestion de la réforme apparaît donc commeparaphrasée : elle s’interprète comme étant lagestion des risques auxquels on doit faire facependant la réalisation de la réforme. Ceci noussoustrait des problèmes relatifs à la date, à lavitesse et à l’ordre de la réforme.

Les deux problèmes clés soulevés pendant ladiscussion sur la réalisation de la réforme sont :- la résistance, rencontrée dans la réalisation de

la réforme, provenant des différentes partiesprenantes

- les ressources necessaires pour réaliser laréforme adéquate. Lorsque nous parlons derésistance, nous incluons les enseignants, lesministères, les syndicats et même les deuxclients de l’ETFP que sont les stagiaires et lesemployeurs. Nous devons prendre bonne notede cette source de résistance particulière.

Ensuite, en termes de ressources, le problèmequi a été soulevé ici est le problème dufinancement puisque la réforme est unprocessus onéreux. Nous avons besoin debeaucoup de ressources pendant une longuepériode : il existe donc aussi une question dedurabilité.

2) Comment procéder ?Les idées qui sont ressorties autour de la table,pour s’attaquer à ces problèmes particuliers, sontles suivantes :

Concernant la résistance,on a insisté sur le fait qu’il devrait y avoir unecertaine clarté et une convergence dans la visionde la réforme. Ceci a d’ailleurs été mis en lumière

dans les présentations de nos collègues hier, pourlesquels un objectif macro-économique d’unpays prenant en considération sondéveloppement économique, l’ouverture del’économie et le fait de s’attaquer au problèmede la compétitivité signifie en principe :- l’amélioration de la qualité des employés et destravailleurs de façon à être plus compétitif,- puis l’identification des secteurs spécifiques.Nous avons besoin de cette clarté particulière etde cette convergence de vision et nous devonsimpliquer les parties prenantes, non seulementdans la planification, mais aussi dans laréalisation elle-même, en s’assurant que nouscommuniquions efficacement sur les gains et lesbénéfices de la réforme.

Nous devons aussi être très francs concernantles coûts. Cela dit, les bénéfices doivent êtresoulignés puisque généralement nousentreprenons une réforme parce que noussavons que les bénéfices compenseront les coûts.Donc nous devons communiquer avec les partiesprenantes, en se concentrant sur les bénéfices etensuite nous devons créer les passerelles et lesarticulations avec diverses institutions etpartenaires dans le processus de réforme. Enparticulier dans le cadre institutionnel, lesministères du gouvernement peuvent êtretouchés, de même que le secteur privé et lessyndicats.

Mes collègues autour de la table ont égalementrelevé l’existence d’un besoin d’engagementpolitique au plus haut niveau dans ce processusde réforme. Même lorsque des changementsinterviennent dans le gouvernementcet engagement devrait pouvoir se refléter dansla stabilité de la politique. Les partenairessociaux engagés dans le processus de réformedevraient rester les mêmes même lors d’unchangement de gouvernement.

Concernant le besoin de ressources,nous devons bien évidemment déterminer lecoût de notre réforme. Cela dit lors de nosconversations avec les parties prenantes, si noussommes capables de communiquer efficacement

RAPPORT DE L’ATELIER D

réformes, management, ressources humaines

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sur les gains et sur les bénéfices du processus deréforme, il est probable que ces dernières soientplus enclines à contribuer et que leurscontributions soient plus importantes, si etlorsqu’elles pourront le faire.

3) Que faut-il communiquer à nos collectivités ?L’une des choses les plus importantes quenous devons communiquer est le problème degouvernance et de responsabilité. Lorsque nousparlons de gouvernance et de responsabilité,nous parlons de résultats et ceci peut en fait êtreabordé à deux niveaux : le niveau macro et leniveau micro.Au niveau macro, nous parlons du résultatprincipal du processus de réforme. Ceci serapporte principalement au développementéconomique et aux profits sociaux au sein de lasociété. Au niveau micro, nous parlons directe-ment d’institutions de formation étant respon-sables quant à leurs résultats.

Ensuite, nous devons communiquer effectivementla vision et le contexte de la réforme à la collectivi-té. Encore une fois, ceci se rapporte au raisonnementmacro-économique pour une réforme et aux gains etbénéfices qu’elle génère.

Un autre message à communiquer est celui de lanécessaire contribution de la collectivité auprocessus de réforme. Nous devons mesurer savolonté de contribuer au processus de réforme enlui faisant peut-être prendre en charge certains descoûts du processus.

En conclusion :- le processus de réforme est un processus extrêmement difficile et complexe,- nous devons nous adresser aux nombreuses parties prenantes et les impliquer dans le processus,- il s’agit d’une révolution culturelle en soi, et ceci implique de rompre les barrières, aussi bien du coté de la

demande, que du coté de l’offre dans le secteur.

Dans ce contexte, nous avons besoin, pour réussir, de temps, de continuité, de soutien et de stabilité politique. »

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André Gauron,

Conseiller – maître à la Cour des Comptes,

Président du Haut Conseil « éducation, économie, emploi », France

John Middleton,

Conseiller principal auprès du vice-président de la Banque mondiale,

Professeur de politiques éducatives, Université de Hawaï.

SYNTHÈSEET PERSPECTIVE

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1) AVANT-PROPOS

A) IntroductionPar André Gauron

La formation technique et professionnelle a longtemps occupé une place marginale dans les dispositifsd'éducation attachés aux formations générales, scientifiques ou littéraires. La préparation à la vie professionnelleest d'autant mieux considérée qu'elle vise à des emplois hautement qualifiés. Pour les premiers niveaux dequalification, la professionnalisation est généralement considérée comme une voie que le jeune emprunte pardéfaut. Cette vision est en train de changer. Dans nos pays comme dans les vôtres, la préparation à la vieprofessionnelle constitue pour le système éducatif un objectif aussi important que l'épanouissement individuel, laculture et la citoyenneté. Plus important encore, sa prise en compte devient un levier, pour non seulement mieuxadapter cette formation aux besoins des économies mais, en amont, pour repenser l'éducation de base et luipermettre de répondre pleinement à son objectif premier : permettre à chacun d'acquérir et de s'approprier lesocle de connaissances de base pour devenir autonome tout au long de sa vie.

La tenue de ce séminaire, et il faut en remercier vivement des organisateurs, et en premier lieu Albert Prévos etJacques Mazeran pour le CIEP qui nous accueille dans ses locaux, et Francis Steier pour la Banque Mondiale,témoigne de cette évolution. Les débats de ces deux jours et demi ont mis en lumière que cette perception del'importance de la formation professionnelle fait l'objet d'un assez large consensus aujourd'hui entre bailleurs, eten premier lieu entre la coopération française et la Banque mondiale, et les gouvernements que vous représentez.Les réformes engagées au cours de la dernière décennie, fondées souvent sur des approches très différentes,du fait des résultats contrastés obtenus et encore insuffisants dans de nombreux cas, ont contribuéau rapprochement des points de vue. Le pragmatisme l'a progressivement emporté sur l'idéologie comme ena témoigné nos discussions. Et je pense que nous devons nous en réjouir pour l'avenir.

En demandant à John Middleton et à moi même, c'est à dire à un représentant de la Banque mondiale et de lacoopération française, d'élaborer la synthèse et de présenter ensemble les conclusions de nos travaux, lesorganisateurs ont fait un pari raisonné. Ils ont vu juste. Pour ma part, je me félicite de l'opportunité qui m'a étédonnée de travailler avec John. Le consensus dont je parlais à l'instant a été au delà de ce que les organisateurspouvaient espérer au départ puisqu'il a abouti à une présentation commune à deux voix, même si nous le faisonschacun dans la langue qui nous est la plus familière, à l'image finalement de nos débats.

Si on veut mesurer le chemin parcouru en quelques années, il suffit de se souvenir que lors de l'adoption par laconférence du millénaire du programme de « l'éducation pour tous », la formation technique et professionnellen'y a pas trouvé place. Or, comment lutter efficacement contre la pauvreté si on ne donne pas à chacun, homme etfemme, des savoirs professionnels indispensables pour accroître leur productivité et la qualité de leurs activités.Cela ne vaut pas seulement pour le secteur moderne, mais plus encore pour le secteur dit informel, les activitésartisanales et rurales qui dans les pays les moins développés représentent encore jusqu'à 90 %de l'(auto)emploi. La place de la formation technique et professionnelle est ici inséparable de l'idée que nous nousfaisons du développement. Les économistes, qui lisent le développement à l'aune de ce qui se mesure, et donc dece qui s'évalue monétairement, ont été conduit à l'identifier avec la croissance du secteur moderne,de plus en plus engagé dans la mondialisation. Mais si on veut bien faire un retour sur l'histoire économique despays industrialisés, il ne vous échappera pas que le secteur moderne ne s'est pas construit sous le seul effet de larévolution technologique et de l'extension des échanges. Il a pris appui sur une lente mais décisive transformationdu secteur dit informel. Les historiens ont montré que l'amélioration de la productivité du monde agricole a étéune condition du développement industriel. Elle a permis à la fois d'accroître le revenu des paysans, donc leurdemande de biens industriels, et de nourrir la population croissante qui allait vers les villes.

Les conditions sont aujourd'hui différentes et ce n'est pas l'objet de ce séminaire de débattre de ces questions.Mais pour le dire en un mot, ce n'est pas le seul libre-échange qui permettra aux pays pauvres de sortir du nondéveloppement comme on l'entend dire trop souvent – ce qui ne veut pas dire que le libre-échange maîtrisé n'est

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pas une condition nécessaire au développement de ces pays – mais un progrès général de la productivité de tousles secteurs. Sans cette conviction, la réintégration de la formation technique et professionnelle au sein du systèmeéducatif, et, en premier lieu, le consensus désormais général pour accorder une attention soutenue à la formationde toutes celles et de tous ceux qui sont actifs dans le secteur informel et le milieu rural, n'aurait pasde raison d'être.

Telles sont les considérations générales que je souhaitais faire en avant propos à la présentation des conclusionsde nos travaux, en renouvelant encore mes remerciements aux organisateurs pour leur initiative.

On m’a souvent demandé quelles étaient les différences entre 2003 et 1991, année au cours de laquellela Banque Mondiale avait publié son document d’orientation sur l’ETFP. Je souhaiterais vous faire partagercertains des changements que j’ai pu constater.

Voici le premier : depuis trois ans, je suis le premier à prendre la parole au cours des nombreuses réunionstenues avec des contributeurs, ministres et autres, c’est donc une nouveauté pour moi de pouvoir écouter etformer ma propre opinion pour ensuite l’exprimer vers la fin de la rencontre.

Mais plus sérieusement, voici quelques-uns des points qui ont changé.Ils font tous partie du dialogue de cette semaine et portent tous sur la nature du débat.

1) Je pense que le débat sur l’ETFP se poursuit, il demeure nécessaire et sain, mais diffère beaucoup de ceuxentamés il y a de cela plus de dix ans. Par exemple, chacun d’entre nous reconnaît que les relations économiquesinternationales sont étroitement liées avec la manière dont l’ETFP devrait être gérée, tous pays confondus.Personne n’en a fait mention en 1998, je peux vous l’assurer, ce qui fait que nous parlons maintenant de relierl’ETFP à une politique économique, sociale et pédagogique plus large. Il y a plus de dix ans, l’ETFP était un petitsecteur isolé dont un nombre réduit seulement se préoccupait. Il s’agit donc là d’un changement majeur.

2) Je me souviens des paroles de ministres de l’éducation de pays anonymes m’affirmant que les écoles netravailleraient jamais avec des entreprises. Les entreprises étaient « impropres » par rapport aux écoles quiétaient « pures », et pourtant tout le monde ici parle de partenariat entre employeurs et établissements scolaires.Ce changement est le bienvenu selon moi.

3) Je pense aussi que l’approche du partenariat montre un sentiment quasi général que l’ETFP devrait être fondéesur la demande et non pas sur l’offre. Ce que cela signifie diffère à présent pour chaque pays, mais il y a d’aprèsmoi un consensus général orienté vers la considération de la demande pour déterminer de quelle manière agirdans le sous-secteur.

4) Si l’on examine les rapports des quatre derniers groupes de travail, le point de vue commun est que les stratégiesnationales pour le développement des compétences ont besoin d’être vastes et d’inclure toutes les partiesprenantes : le public, les organisations non gouvernementales, les employeurs, syndicats ouvriers, etc. Ceciconstitue un changement réel et positif.

5) A mon avis, il fut un temps où les enseignants dans les établissements d’enseignement généralet d’enseignement professionnel étaient ennemis. Désormais nous acceptons tous le fait que l’éducationgénérale et le développement des compétences se complètent l’un l’autre – et nous avons pu nettement nous enapercevoir au cours des discussions menées tout au long de la semaine.

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B) Changements constatés depuis le rapportde la Banque mondiale de 1991 sur l’ETFPPar John Middleton

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On compte donc cinq changements, ce qui, je pense, signifie que l’on se trouve face à un débat beaucoup plusavancé. Nous avons traité un large éventail de questions ensemble, ce pourquoi il n’est pas nécessaire d’y revenir etde les redéfinir, nous avons désormais la belle occasion de faire un grand pas en avant. André et moi-mêmeespérons que notre synthèse y contribuera.

Je dois préciser qu’il a été très difficile d’englober toutes les conversations riches auxquelles nous avons pu assisterau cours des deux derniers jours, je vous présente donc mes excuses à l’avance dans le cas ou votre idée favorite nese trouverait pas parmi les points abordés ici.

1) Nous allons d’abord identifier des hypothèses essentielles qui selon nous sous-tendent la plupart desdiscussions conduites cette semaine.

2) Nous examinerons ensuite les différentes composantes de la réforme de l’éducation et de la formationprofessionnelle mises en avant lors de nos discussions.

3) Puis nous identifierons certains problèmes restés sans réponse – s’il existait une réponse à chaque problème,il n’y aurait pas matière à débattre, mais en l’occurrence il y a encore beaucoup de choses à prendre enconsidération.

4) Enfin, pour finir, nous analyserons les prochaines étapes.

2) HYPOTHÈSE FONDAMENTALESPar John Middleton

Voici quelques hypothèses fondamentales.

La mondialisation entraîne le changement, et la plus grande partie provient de l’« économie de la connaissance »,partout, aussi bien dans le secteur formel qu’informel.

Les compétences occupent une place importante par rapport à la productivité, la croissance et l’équité. Celapeut nous sembler évident, mais certaines personnes restent à convaincre. Je pense que c’est ce que nous supposonstous. Les compétences sont requises de diverses manières dans la vie d’une personne.

Les compétences professionnelles deviennent de plus en plus des compétences générales – il y a en cela uneconvergence – d’où la question que l’on se pose « que sont les compétences professionnelles ? » dans n’importequelle circonstance. Les parcours verticaux et horizontaux sont essentiels à l’apprentissage tout au long de la vie età la flexibilité de la population active, et encouragent les parents et les professeurs à emprunter une voied’enseignement particulière, y compris l’ETFP.

Tout ce qui suit suppose que ces hypothèses sont raisonnables et que nous y adhérons tous. Nous pouvonsy revenir, ou traiter de toute autre partie.

Ma première observation concernant cette hypothèse est la diversité des impacts provoqués par lamondialisation. Je reviens aux paroles de Jean François Rischard à ce sujet, faisant remarquer que trentepays étaient en croissance contre cent en non croissance, ce qui montre bien que jusqu’à présent certains paysbénéficient d’une implication et d’une participation des plus actives au sein d’une économie mondialiséetandis que d’autres n’en profitent pas encore. On remarque donc bien une nette distinction lorsque l’on se penchesur l’ETFP.

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C) Objectifs de la synthèsePar John Middleton

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Ci-dessous figurent quelques moyens par lesquels, d’après les discussions qui se sont tenues cette semaine, lamondialisation semble affecter le développement des compétences :

• relations économiques transfrontalières• rythme rapide de changement• restructuration du gouvernement et de l’industrie• chômage (surtout chez les jeunes)• avancée du secteur tertiaire• disparition des spécialisations professionnelles restreintes.

Ceux-ci semblent avoir des implications stratégiques très étendues quant au développement des compétences,qui semblent fonctionner quelle que soit la manière dont vous vous y prenez.

Ces développements doivent intervenir à travers les marchés et la mondialisation de l’économie. L’accent estmis sur la productivité, ce qui n’est pas si simple car l’ETFP a toujours eu, et a encore aujourd’hui, de nombreuxobjectifs sociaux qui ne sont pas, eux, liés au rendement, mais, à l’intérieur d’une économie concurrentielle, celui-ci est probablement le plus important.

Dans une société où la compétition est rude, la formation doit être flexible et disponible sous de nombreusesformes – il ne s’agit pas d’un système unique, public, par exemple, à même de répondre à la demande. Lescompétences générales deviennent essentielles, nous parlerons de cela plus en détail tout à l’heure. Nous sommesdésormais en présence de nouvelles compétences professionnelles, qui ont été citées cette semaine : connaissancesinformatiques, maîtrise de langues étrangères, travail en équipe, etc. Il existe plusieurs listes de ce que l’on appellesouvent les « nouvelles compétences » ou encore le « savoir être » – quel que soit leur nom, nous sommes plutôtd’accord sur ce qu’elles représentent.

L’orientation professionnelle dans un régime de marché devient un moyen indispensable de relier l’offre et lademande de formation et de compétences.

L’apprentissage tout au long de la vie avec comme objectif l’adaptation au changement semble préoccuper laplupart des individus. Nous l’avons entendu, des pays tels que le Chili, la Tunisie ou encore la Finlande essaientd’agir en ce sens, et cela semble logique : si un changement rapide provoque un changement économique rapidequi à son tour provoque un changement rapide et le développement des compétences, si vous arrivez avec vosconnaissances générales et que vous devez vous adapter à de nouveaux emplois et postes toute votre vie, alors vousavez besoin d’un apprentissage tout au long de la vie. Il n’y a pas d’autre moyen, et je pense par conséquent quec’est un objectif important qui nous fait face.

3) LES DIFFERENTES COMPOSANTES DE LA REFORMEDE L’EDUCATION ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLEPar André Gauron

Le second point de nos conclusions a pour objet de préciser les composantes de la réforme de l’éducation etde la formation professionnelles. Nous en avons retenu quatre : le contexte, ou plutôt les contextes, les conditionsde la réussite, les leçons que nous tirons des réformes de la dernière décennie, enfin, la question de l’enseignementsecondaire.

Parlons d’abord des contextes de la réforme. Ceux-ci se présentent en effet différemment selon qu’il s’agit depays à fort ou à faible potentiel de croissance.Les premiers sont déjà partie prenante de la globalisation et très intégrés aux marchés mondiaux ; ils ont souvent

A) Des contextes différents selon le potentiel de croissance

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des gouvernements stables capables de mettre en œuvre des politiques de réforme sur une longue durée, et mêmesi les gouvernements changent, il existe un consensus suffisamment large dans ces pays pour poursuivre l'actionen faveur d'une réforme du système éducatif. Ces pays disposent en outre d'un enseignement de base primaire etpost-primaire relativement solide avec un taux de scolarisation déjà élevé. Enfin, ces pays disposent, je dirais toutsimplement, d'un Etat (ou de fortes institutions) qui permet de gérer les réformes, de recouvrer l'impôt et donc dedégager les ressources budgétaires nécessaires à leur financement.

Les pays à faible potentiel de croissance sont des pays dont le secteur moderne est non seulement stagnantmais de faible ampleur. Dans de nombreux pays, les emplois de ce secteur ont eu tendance à reculer au cours de ladernière décennie. Bien que ces économies soient elles-mêmes déjà soumises aux effets de la globalisation, lessecteurs informel et agricole y sont importants, et représentent souvent plus de 80 % du PNB et 90 % de l’emploi.Ce sont des pays qui traversent régulièrement des crises politiques et économiques qui empêchent la continuité del'action et la gouvernance y est faible ; enfin, ces pays n'ont pas réussi à consolider la scolarisation de base : nonseulement le niveau d'éducation primaire d’une majorité des jeunes reste faible mais une grande partie d’entreeux abandonnent avant la fin du primaire. Ces pays se trouvent ainsi dans un cercle vicieux : non seulement leurfaible potentiel de croissance les prive des ressources budgétaires indispensables au financement (public et privé)des systèmes éducatifs, mais, de plus, la faible gouvernance ne leur permet pas d’engager les réformes qui leurpermettraient d’améliorer le potentiel de croissance du pays. Pour ces pays, l’amélioration du niveau d’éducationet des compétences professionnelles est une condition nécessaire pour accroître la production et les revenus, maisles économistes s’accordent aujourd’hui à reconnaître que ce n’est pas l’éducation et la formation professionnellesqui créent l’emploi.

Parler d’une économie politique des réformes est ambitieux dans la mesure où les experts sont rarementd'accord entre eux, moins d’ailleurs sur le diagnostic, comme on l’a vu au cours de cette conférence, que sur lessolutions. Ceci rend la tâche des gouvernements plus complexe en les obligeant à prendre parti dans les débatscontradictoires des économistes. De plus, c’est là où les réformes sont le plus nécessaires qu’elles bénéficientsouvent du soutien le plus faible de la part de la population, soutien d'autant plus faible que le débat démocratiqueest lui-même plus déficient. Enfin, les préoccupations des gouvernements ne peuvent s’abstraire du temps courtde la vie politique alors qu’il faudrait inscrire les réformes dans des politiques de long terme.

Comment alors réussir les réformes ? Le débat a mis en lumière plusieurs conditions. Il faut en premier lieu,renforcer les liens avec les secteurs extérieurs au système éducatif. On l'a dit, l'éducation renvoie aux conditionsgénérales du développement. Sa mission n’est pas seulement culturelle et citoyenne ; elle doit aussi permettreà chacun de se procurer un revenu décent par son travail. Sa dimension professionnelle renvoie ainsi aux besoinsdes secteurs économiques. Comment les prendre en compte si ce n’est en s’appuyant sur les organisationsprofessionnelles. Il ne suffit pas de dire qu'il faut développer le partenariat avec ceux-ci, encore faut-il avoir en facede soi des interlocuteurs organisés au niveau des professions, au niveau des producteurs dans le monde agricole, eton sait bien que dans un certain nombre de pays, ces organisations sont plutôt en devenir qu’une réalité.

Il faut aussi, et c'est un point sur lequel on a beaucoup insisté avant-hier, disposer de bons indicateurs, passimplement les indicateurs qui sont disponibles mais pas toujours pertinents. Il faut donc constituer la based'informations et les quelques indicateurs qui sont adéquats pour pouvoir suivre la mise en place des réformes eten évaluer les résultats. Dès la conception des réformes, il est nécessaire de prévoir un dispositif de suivi etd’évaluation des actions entreprises. Il faut aussi, évidemment, limiter les risques sociaux et politiques inhérents àtout changement. Ceci a été dit tout à l'heure dans un des ateliers, c'est évidemment une question importantepour les responsables politiques. Faire des réformes, c'est bien, à condition qu'elles ne mettent pas le pays dans larue. Et je pense ici particulièrement à la question centrale mais délicate du financement privé de l’enseignement.

L’équité qui voudrait que l’on fasse payer davantage ceux à qui la formation bénéficiera le plus en termes derevenus – donc plus l’enseignement supérieur que la formation professionnelle – est de ce point de vue souvent

B) L’économie politique des réformes

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difficile à faire admettre. Mais à l’inverse, les résistances ne doivent pas faire renoncer les gouvernements àréformer. Elles invitent au dialogue démocratique : il faut développer des consultations et procéder de façonprogressive à partir souvent de débuts modestes. Il ne faut donc pas juger la réforme sur ses débuts, mais sur sadurée et sur sa capacité à développer et à élargir ses actions.

De nos trois jours de réunion, quelles sont les leçons que nous pouvons tirer ? Là encore nous distingueronsles leçons dans les deux cas de figure que nous avons retenus.

Pour les pays à fort potentiel de croissance, la mise en œuvre des réformes des systèmes éducatifs ne semblepas avoir été freinée par les crises économiques que ces pays ont pu connaître dans la décennie quatre vingt dix.Dans certains cas, je pense à la Thaïlande par exemple, la crise a au contraire renforcé l’adhésion à la réforme. Ilreste nécessaire de consolider les acquis. Ces pays disposent déjà d'une éducation de base d’un niveau correct,mais il faut continuer à dégager les ressources nécessaires pour financer l'éducation de base. Il faut élargir lesecteur de l'éducation avec l'objectif qui a été fixé dans le programme de l'éducation pour tous. Enfin, l’éducationde base ne doit pas viser seulement l’immédiat, soit préparer aux études secondaire voire supérieures soit laformation à un emploi ; elle doit s’inscrire dans la perspective du développement des compétences tout au long dela vie. Il ne faut pas viser seulement la profession que les jeunes exerceront en sortant de l'école, mais leurs donnerles connaissances pour qu'ils puissent continuer à se former et à développer leurs compétences tout au long de lavie. Cette formation – puisqu'on veut une formation qui soit davantage orientée vers le marché – doit s'appuyersur le secteur privé, le partenariat et viser le développement de la carrière professionnelle.

Dans ces pays, on remarque que les efforts se sont étalés sur une très longue période, dix ans, trente ans.Evidemment cela représente un investissement dans la durée tout à fait considérable et une capacité – on yreviendra – pour les bailleurs internationaux, de pouvoir maintenir leur effort sur une aussi longue période. Cesprogrammes ne se sont pas développés en une seule fois ; ils ont progressé par étape. A chaque étape, les résultatsdoivent être évalués de façon à éventuellement réorienter les dispositifs. L'ensemble des acteurs doit participer àces réformes et à leur évaluation et utiliser en retour des phénomènes de feedback. A chaque fois, il faut sedemander si les objectifs prévus ont été atteints mais aussi si les objectifs retenus étaient pertinents. Il faut pouvoirdisposer de moyens pour financer les politiques et gérer les réformes. Enfin, il faut échanger sur les pratiques defaçon à gagner du temps, mais il faut aussi être capable de s'adapter. Autrement dit on n'apporte pas des réformescousues main, il faut prendre des idées et pouvoir ensuite les retranscrire dans le contexte local.Pour les pays à faible potentiel de croissance, la situation est beaucoup plus complexe. Je retiens ce quia été dit hier ou avant-hier par un des intervenants. Dans les réformes mises en oeuvre dansles années 90, il y a des promesses mais il y a aussi des obstacles. Le problème de ces pays c'est d'identifiercorrectement ces derniers de façon à pouvoir les lever un à un et transformer les promesses que l'on voit sedessiner en des conditions de succès durable. On peut dire, parce que beaucoup de monographies le montrent,qu'il faut passer d'expériences pilotes à quelque chose qui pourrait ressembler à une politique plus globale. Je croisque dans un certain nombre de pays, notamment dans l'Afrique sub-saharienne, mais pas seulement, l’enjeu estd’être capable de passer de la micro performance à la macro performance. Ceci me conduit à soulignertrois préalables.

En premier lieu, l’éducation et la formation professionnelles doivent avoir pour objectif d’augmenter laproductivité dans le secteur informel. Il faut évidemment aussi l'augmenter dans le secteur moderne. Mais il nefaut pas oublier que le secteur informel, s'il ne veut pas être déstructuré par des importations qui souvent amènentdes produits moins chers que ceux fabriqués localement, doit être capable de se mesurer à cette compétition. Il luifaut par conséquent, augmenter sa productivité, augmenter la qualité de ses services et de ses productions defaçon à pouvoir lui aussi abaisser ses prix ou justifier d’une meilleure qualité aux yeux du consommateur local. Lepremier enjeu est ici de remédier à la faiblesse de l'éducation de base et d’accroître la scolarisation.

Second point, la question de la langue, question qui a été peu abordée au cours de ces débats. Dans quellelangue doit se faire l'apprentissage et la formation technique ? Dans les langues locales ou bien dans des langues

C) Des leçons contrastées

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internationales qui permettent de lire les notices, de dialoguer avec les entreprises mondiales, d'être présentdans la compétition internationale. Cela veut dire l'anglais, le français, l'espagnol, peut-être d'autres langues, cen'est pas limitatif. On voit bien que l'une des difficultés dans un certain nombre de pays, c'est quel'enseignement et l'apprentissage se font dans des langues vernaculaires qui limitent la capacité d’intégration àl’économie moderne.

En troisième lieu, l'inefficacité de l'allocation des ressources budgétaires constitue un obstacle audéveloppement de la formation technique et professionnelle qu’il faut lever. Le reproche unanime fait à ce secteurest son coût élevé par rapport à d'autres formes d'enseignement. Il ne suffit pas de se dire qu’il faut augmenter etdiversifier les ressources affectées au secteur de la formation technique et de la formation professionnelle alors queles ressources disponibles sont limitées et le resteront. La réponse est aussi dans la recherche de solutions à coûtsbeaucoup plus faibles. Une meilleure gestion des établissements, une meilleure adaptation des cursus, une plusgrande ouverture vers le marché contribueraient à réduire les coûts. Mais, il faut aussi chercher des solutions, etcertaines expériences montrent que ces solutions existent, à travers des formes d'apprentissage qui permettent deréduire très sensiblement le coût des formations et donc de les rendre plus accessibles au plus grand nombre. Jepense par exemple à la coopération suisse ou allemande en matière d'apprentissage dual. Ce sont des expériencesqui méritent une plus grande attention de la part des gouvernements et des responsables de l’enseignementtechnique.

Ces préalables rappelés, quels sont les points dont les débats ont montré qu’ils faisaient l’objet d’un accordentre nous ? Nous avons identifié cinq points :

1 ) D'abord il faut que les réformes soient orientées, je ne dirai pas par le marché, mais vers le marché. Leur cibleest le développement des compétences qui sont utiles pour les entreprises et qui sont donc utiles pour accroîtrela présence de ces entreprises sur les marchés, pour réduire leurs prix et augmenter leurs parts de marché.

2 ) Les gouvernements, plutôt que de se poser en offreurs de formation, doivent se concentrer sur la définition desrègles. De ce point de vue, et c'est aussi un point sur lequel on a peu débattu, il faut sans doute fixer un cadre àl'apprentissage dans la réforme de la formation professionnelle. Les monographies, je pense notamment àcelles réalisées dans le cadre du travail de l'IIPE, montrent que selon les pays un tel cadre n’existe pas toujours,et évidemment, les résultats s’en ressentent. Il y a une responsabilité gouvernementale importante dans cedomaine.

3 ) Le secteur privé, les partenaires privés, doivent être pleinement impliqués et s’impliquer dans la gestion de laformation professionnelle. La question qui se pose, c'est à quel niveau ? Dans l'Afrique sub-saharienne, on acréé beaucoup d'offices nationaux de la formation professionnelle qui gèrent de la formation continue auniveau national. Les partenaires sociaux y sont associés. Mais ils participent rarement à la définition descertifications. Est ce qu'il ne faut pas descendre à un niveau plus bas, au niveau des établissements, de laconception des programmes, de l'ouverture des filières ?

4 ) Par ailleurs, le secteur privé de formation est appelé à avoir une place croissante, mais là où le marché estinsuffisant, là où il est défaillant, des financements publics et une offre publique restent nécessaires pourcorriger le marché. On voit bien que le secteur privé en matière de formation par exemple s'est beaucoupinvesti sur le tertiaire et a délaissé le secteur de l'industrie, qui est beaucoup plus coûteux parce qu'il nécessitedes équipements qui le sont. Comme les ressources budgétaires ne permettent pas d'entretenir les équipements,ce secteur se retrouve aujourd’hui avec des équipements obsolètes, ce qui accentue la difficulté de la formationprofessionnelle dans le secteur industriel.

5 ) Enfin, la question des institutions capables de conduire le changement est capitale. Dans tous les pays, lepilotage de la formation professionnelle et de l'enseignement technique se trouve dispersé entre un grandnombre d'administrations. Est ce qu'il faut une administration leader et laquelle ? Est ce qu'il ne faut pas plutôtréunir les différentes administrations dans une agence qui les coordonnera ? Quelqu'un a dit dans un atelier, etcela a été repris dans le compte rendu, que dans tous les cas la réforme doit être soutenue à un haut niveau

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gouvernemental. Ce n’est qu’à ce niveau gouvernemental qu'on peut imposer la coordination. La formationprofessionnelle ne peut pas être simplement l’affaire du ministère de l'Education ou d’un ministère qui lui estdédié, dit de l'enseignement technique et de la formation professionnelle, mais en réalité proche de celui del’éducation. Les ministères en charge de l'artisanat, de l'industrie, de l'agriculture, de l'emploi…, doivent êtreétroitement associés.

Notre sentiment, à John et à moi-même, est que l’enseignement secondaire est un élément de la réforme, maisil n'est pas la question centrale de la réforme. Je crois que c'est un point qui peut encore faire débat entre nous. Laformation professionnelle initiale ne doit pas être conçue comme une composante de second ordre, en fait un« parent pauvre » de l’enseignement secondaire. Là encore, il faut distinguer entre pays à fort ou faible potentiel decroissance et niveau de scolarisation primaire. La transplantation dans les pays à faible niveau de scolarisation desmodèles des pays industrialisés qui a largement prévalu dans la conception de la coopération française s’estrévélée inadaptée et explique nombre des déboires rencontrés dans l’Afrique sub-saharienne. Il y a d'autres formesd'apprentissage, d'autres formes de formation que l'enseignement secondaire. Il y a eu un temps où la priorité enFrance consistait à assurer une bonne éducation de base et a laissé à l’apprentissage « sur le tas » le soin d’apporterles connaissances et les compétences professionnelles. Du passé, il y a toujours des leçons à prendre !

A l’époque, la formation technique et professionnelle ne se positionnait pas au sein de l’enseignementsecondaire, elle ne se voulait pas une alternative, une « deuxième chance » donnée à ceux qui ne parvenaient pas àsuivre la filière noble qui du primaire est supposée conduire au secondaire puis dans l’enseignement supérieur.Elle se voulait un approfondissement professionnel de l’enseignement de base, un premier apprentissage d’unmétier. Son objectif premier n’était pas l’obtention d’un diplôme mais d’une qualification reconnue dans lemonde du travail que le diplôme vient certifier. J’insiste sur le mot « reconnue ». Car une qualification qui ne l’estpas n’a pas de valeur sociale. La redécouverte de l’importance de l’apprentissage se situe dans cette perspective.L’apprentissage doit être conçu, non comme une formation secondaire bis, mais comme le terme professionnel del’éducation de base. Disons le autrement, il ne devrait pas y avoir d’éducation de base – d’enseignement primaire – quine comprenne une part de formation professionnelle.

La flexibilité est l’un des maîtres mot d’aujourd’hui supposé répondre à tous les besoins du marché. Mais, onle sait bien, c'est toujours quelque chose qui est plus facile à dire qu'à mettre en œuvre : il faut gérer des classes, desfilières, des enseignants. L’adaptation est un art difficile qu’il faut exercer avec beaucoup de conviction sans se fairetrop d'illusions sur la vitesse de changement possible. Il faut donc, autant que faire ce peut, rechercher dessolutions alternatives. Bien sûr il faut prévoir des allers-retours entre la formation académique et l’expériencepratique. Se pose aussi la question qui a donné lieu à un débat un peu vif : est ce qu'on peut, est ce qu'il fautprofessionnaliser les curriculums ? Est ce que ça marche ? Ce n'est pas en changeant les noms que l'on répond àcette question, mais en analysant les métiers, les fonctions au sein des organisations du travail.

Je voudrais, en conclusion des leçons que nous avons tirées ensemble des réformes de la décennie écoulée,revenir sur la remarque d'un délégué du Sénégal. Il nous disait : « le problème que nous avons avec notre école,c'est que, dans le fonds, les parents ne voient pas l'intérêt d'envoyer leurs enfants à l'école pour rester paysan ouartisan. Ils les envoient à l'école pour qu'ils deviennent fonctionnaire et pourquoi pas ministre ». Et il concluait endisant, que « convaincre les parents de l'importance de l'école nous oblige à une véritable révolution culturelledans l'idée que l'on se fait de l'école ». Dans les pays francophones, la conception de l'école qui a dominé aulendemain de l'indépendance, et qui reste largement vivace, est une conception élitiste qui visait à former descadres nationaux dont ces pays avaient besoin. Il s'agissait alors de former des ingénieurs et des cadresadministratifs qui exerceraient dans les administrations et les entreprises publiques.

D) Le positionnement de la formationtechnique et professionnellepar rapport à l'enseignement secondaire

Conclusion : une nécessaire révolution culturelle

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Les écoles, les lycées, les universités que la Coopération française a aidé à construire et à développer ont plutôtbien répondu à cet objectif. La formation technique et professionnelle resta à l'écart, d'autant plus qu'à l'époque laFrance elle-même y attachait encore peu d'importance. Quelques établissements d'enseignement technique ontété construits et équipés mais les besoins du secteur privé, qu'il soit moderne ou informel, urbain ou rural, sontrestés largement ignorés. L'apprentissage, qui jouait pourtant un rôle important en France, le fut plus encore.

Ce n'est qu'à la fin des années quatre vingt que la coopération française a entrepris de faire évoluerl'enseignement technique vers la formation professionnelle et de l'ouvrir de la formation initiale vers la formationcontinue tout en restant tournée vers le seul secteur moderne. L'arrêt de l'embauche dans le secteur public qui aaccompagné les politiques d'ajustement structurel et les privatisations des entreprises publiques a accentué laprise de conscience d'une révision en profondeur des présupposés qui ont guidé la politique éducative aulendemain de l'indépendance. Le mot de révolution culturelle n’est pas trop fort. Mais on le voit, elle ne vaut passeulement pour les pays africains. Elle vaut aussi pour les bailleurs de fonds que nous sommes. Et ce constat nousimpose de faire preuve de beaucoup de modestie et d'humilité.

4) PROBLEMES RESTES SANS REPONSEPar John Middleton

Je viens de me souvenir d’une chose dont je voulais vous parler au début de mon intervention, je vais donc le diredeux, voire trois fois pour que ce soit bien clair. Les pays à forte croissance et ceux à faible croissance ne constituent pasdes catégories absolues. Bien sûr, de nombreux pays sont en phase de transition d’un statut vers l’autre à différentsstades. C’est ce dispositif ou mécanisme que nous avons choisi pour essayer de rassembler les leçons retenues au cours decette conférence, qui concernait des pays très variés. Dès lors, si vous pensez que votre pays ne devrait ni être cataloguédans les pays à forte croissance ni dans ceux à faible croissance, vous avez probablement raison ! Ce n’est peut-être pasun débat utile mais au moins il nous a permis de trouver un principe d’organisation pour certaines idées qu’il n’étaitpas facile de regrouper. Désolé si je n’ai pas mentionné cela plus tôt.

Il est intéressant de voir comment, alors que l’on se rapproche de la conclusion, on est de moins en moins sûrde quoi que ce soit. Les questions restées sans réponse nécessitent vraisemblablement un travail beaucoup plusapprofondi, mais commençons d’abord ce travail par quelques observations.

Nous avons entendu trois arguments constituant des problèmes non résolus au cours des discussions.

Le premier est la question du rééquilibrage de l’éducation secondaire et tertiaire, principalement abordéependant l’exposé sur l’Amérique latine, où, comme nous avons pu le constater, le barème des salaires et d’autresfacteurs montrent que les systèmes ne sont pas en équilibre par rapport au marché – mais les mêmes difficultésexistent aussi dans d’autres pays à forte croissance.Cet exemple montre bien les raisons pour lesquelles la réforme de l’ETFP devrait faire partie d’une réforme de lapolitique éducative et de l’investissement plus vaste, car il n’y a pas que les instituts professionnels qui comptent,mais bien un système plus étendu.

Nous avons pu retenir, au cours des divers exposés présentés par la Tunisie, le Chili et la Finlande, combienil est important de posséder des systèmes de décision qui fonctionnent à partir d’une évaluation sous une formeou une autre.

Nous l’avons déjà évoqué mais nous avons aussi entendu des collègues faire remarquer, alors qu’ils appliquentdes réformes ou du moins qu’ils s’efforcent d’y parvenir, qu’ils s’avancent en territoire inconnu et qu’unenouvelle sorte de mécanisme doit être développée. C’est un domaine dans lequel il reste sans doute beaucoupde travail à faire.

A) Les pays à forte croissance

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Pour finir, différentes manières de relier la formation initiale à l’apprentissage tout au long de la vie ont étéabordées. Il en est ressorti que des parcours horizontaux et verticaux constituent un moyen d’y arriver. Plusieursintervenants ont cité l’orientation professionnelle comme option, et certains se sont également exprimés sur laplanification, la répartition par niveaux et l’affectation des étudiants d’une filière vers une autre comme une autresolution possible. Si l’on se base sur les discussions qui ont eu lieu ici, je ne pense pas que nous avons une idéeclaire sur la manière d’y arriver, et de ce fait, pour les pays qui sont sur le point de mettre en pratique l’apprentissagetout au long de la vie, cela nécessitera des efforts supplémentaires.

Comme vous vous y attendiez sûrement, il semble y avoir davantage de difficultés dans les pays à faiblecroissance. Ce n’est pas forcément vrai à mon avis, mais je pense que cela reflète la tendance des discussions de lasemaine. Dans de nombreux pays à faible revenu, l’environnement politique est instable. C’est comme l’histoirede la poule et de l’œuf : qu’est-ce qui vient en premier ? La faible croissance, le manque de stabilité ? – Le manquede stabilité puis la faible croissance ? Cela importe peu. Ce qui compte, c’est de savoir comment fonctionner dansde tels environnements. Un groupe de travail s’est exprimé il y a une heure sur la continuité des partenairessociaux, même en cas d’instabilité du gouvernement. Peut-être est-ce ce type de solution ou de stratégie que nousdevrions chercher à obtenir.

L’apprentissage tout au long de la vie. Le stéréotype du pays à faible croissance est un pays avec une base faibled’enseignement général – comment aborder l’apprentissage à vie dans ces conditions ? La branche de l’ETFP peutformer une passerelle nécessaire entre un niveau bas d’éducation de base et une formation tout au long de la vie,que l’on ait un emploi ou non. D’un autre côté, elle peut entraîner trop de coûts et de difficultés, et donc, une foisencore, c’est un problème pour lequel on n’a pas trouvé de solution.

Nous avons eu d’innombrables conversations sur le secteur informel. Une partie pense que les ressourcesdevraient y être transférées presque immédiatement et d'autres ont eu des questions à poser. Je pense que lebesoin est probablement clair ; le moyen reste encore à débattre, mais il nous faut agir en tant que communauté.Nous ne pouvons pas laisser traîner cela pendant encore dix ou vingt ans, même si c’est néanmoins ce qui pourraitmalheureusement se produire.

Les marchés devraient-ils remplacer la planification ? Ceci est ma manière d'exprimer ce que j'ai crucomprendre. Les suppositions et les mouvements d'ordre général chez les familles et les individus consistent àchoisir, en se basant nous l'espérons, sur des bonnes informations sur le marché, une orientation et un conseildans des domaines variés, si possible. Cela diffère grandement de la manière dont l’éducation et le développementfurent initiés il y a maintenant quarante ans. A l’époque, le gouvernement planifiait. Je pense que, dans denombreux cas, nous nous trouvons coincés entre ces deux choix. Il est possible qu’il ne s’agisse pas d’un choixmais de la somme des deux, je n’en sais rien, mais je suis d’avis que si l’on se penche sur les objectifs des réformesdans n’importe quel endroit, alors une deuxième question que l’on doit se poser est « comment y arriver ? »« Devons nous laisser fonctionner les marchés et compenser leurs failles et suivre ce chemin, ou bien essayer detout planifier et contrôler ? » Ceci reste pour moi un souci important.

On a parlé tout à l’heure du rôle des gouvernements dans la réglementation et le financement, mais moinsdans l’enseignement lui-même... il est possible que ce soit un bon principe de base, mais je pense que danscertains cas les gouvernements doivent mettre davantage de fonds à disposition. J’ignore réellement sur quelscritères ils se basent pour parvenir à ces décisions et à mon avis, bien que beaucoup d’entre nous penchent d’uncôté ou de l’autre selon nos instincts, en tant que problème politique, cela nécessite un travail plus en profondeur,et surtout une plus grande expérience sur le terrain.

B) Les pays à faible croissance

C) Le rôle du gouvernement

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Enfin, en ce qui concerne la question « pourquoi les parents n’envoient-ils pas leurs enfants dansdes écoles professionnelles ? » nous voyons que divers moyens sont déployés pour les rendre plus attrayantes, parexemple en en faisant des écoles « scientifiques et techniques », de sorte que les parents y voient le début d’unecarrière scientifique pour leurs enfants. Cela a été cité pendant cette conférence. On entend dire que nous pouvonsgénéraliser certaines compétences pour éventuellement les rendre plus intéressantes. Beaucoup peut être fait auniveau des relations publiques mais l’on se demande parfois si cela peut réellement devenir attrayant à moins quecette éducation ou formation n’aboutisse sur de bons salaires. D’après moi, la manière d’aborder ce problèmepeut s’avérer épineuse.

Tous ces facteurs ne constituent pas forcément une liste exhaustive et nous espérons pouvoir en parler plus en détail.

Assez curieusement, André et moi-même n’avons guère entendu de discussions sur le financement, cepourquoi nous souhaitons lancer quelques questions dans l’espoir que celles-ci encourageront des échanges ici-même ou bien plus tard, lorsque vous rentrerez chez vous ou que vous reparlerez avec vos collègues.

Observation : les financements publics pour l’enseignement et la formation ne sont pas bien déterminés parl’équité et des objectifs efficients, phénomène où « toutes les institutions professionnelles reçoivent le budget del’année précédente ». Si le budget du gouvernement augmente de 3 %, il en va de même du leur. S’il baisse de 6 %alors le budget de ces établissements baissera en conséquence. C’est le cas dans de nombreux endroits, qu’ilsconnaissent une forte ou une faible croissance, et pourtant, lorsqu’on observe l’efficacité avec laquelle les ressourcesont été utilisées, la difficulté à joindre l’allocation des ressources à ces objectifs constitue, de notre point de vue, unobstacle au bon financement.

Un autre argument pouvant être discuté, et à cause duquel la Banque Mondiale a été critiquée, affirme que« l’ETFP largement financé par l’état est peu rentable ». Les raisons et excuses ne manquent pas, mais vous vousen apercevez cependant quand vous allez d’un endroit à un autre. Que peut-on faire ? Nous avons observé qu’unestratégie nationale devrait prendre en compte tout type de financement et pas seulement le budget de l’état afind’avoir une vue globale des possibilités. De plus, et on revient à l’époque d’avant les années quatre-vingt dix, lesgouvernements peuvent ainsi être rassurés en sachant qu’ils n’ont pas à s’occuper de tout dans le domaine publicet que le développement des compétences se produit malgré tout. Cela permet non seulement d’éviter desdoublons, mais aussi de réaliser qu’il existe des partenaires faisant leur part du travail. Ce facteur peut souventcontribuer à prendre des décisions concernant les financements.

Nous avons ensuite proposé d’étudier des alternatives possibles aux stratégies coûteuses et essayé de voir sielles pouvaient être plus rentables. Il y a encore beaucoup à dire sur les financements mais étant donné que celan’a pas été un sujet de conversation très important, nous avons pensé qu’il serait bon d’apporter au moinsquelques propositions là-dessus. »

D) La revalorisation de l’ETFP

E) Le financement

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5) LES PROCHAINES ETAPESPar John Middleton

L’étape suivante consiste à débattre sur ces conclusions, mais nous supposons que ce sera le cas de toute façon.Que pourrait-il se passer au terme de cette conférence ? Certains collègues nous ont fait savoir qu’elle leur abeaucoup plu et qu’ils en ont tiré un grand bénéfice, et que ce serait une bonne idée d’en organiser plus souvent.Dans cette optique, voici quelques sujets aptes à susciter la coopération des contributeurs et de leurs clients, quipourraient se prêter à des conférences et agir à leur tour.

Il faudrait commencer par intégrer l’assistance de l’extérieur à la structure de réforme et de politique d’unpays. On appelle cela « l’approche sectorielle aux institutions pour le financement du développement » et celasignifie tout simplement que, au lieu que ce soit le Ministre de l’éducation ou le Secrétaire permanent, au lieu des’occuper indépendamment de 14 contributeurs avec 14 obligations différentes de reddition des comptes,14 systèmes de surveillance différents, etc., les contributeurs travaillent avec le gouvernement à travers ses propressystèmes et structures afin de réduire les coûts de transaction et de confier au gouvernement le contrôle strict de lacoordination de l’assistance par des contributeurs. Cela vaut peut-être la peine d’être mentionné par rapport àl’ETFP, et devient de plus en plus courant dans d’autres formes de financement à l’éducation.

Nous avons entendu, il me semble, que le secteur agricole a été négligé pendant trop longtemps. Nous disionsen 1991 « Non, nous ne savons rien à ce sujet, nous ne pouvons rien dire ». Dans l’étude sur l’Afrique menée par laBanque Mondiale, nous retrouvons le même fossé. Je n’ai pas le souvenir d’avoir appris beaucoup sur lescompétences agricoles ces dernières années. Peut-être devrions-nous nous réunir avec nos collègues de l’OAA, nosamis des associations agricoles et autres pour voir ce qui se passe et si des actions peuvent être engagées, car dansde nombreux endroits, comme cela a été signalé, 75 à 80 % des personnes qui travaillent dans l’agriculturearrivent à peine à gagner leur vie. Comment pouvons-nous ignorer cela ? Nous pourrions envisager de faire pourle secteur informel plus qu’il n’a été fait jusqu’ici. Encore une fois, je pense que les contributeurs ont d’autresintérêts dans ce type de travail. Pour être honnête, l’organisation où je travaillais avant n’est pas calée dans cedomaine ; elle est trop grande et trop maladroite. Peut-être qu’une aide fondée sur des subventions apportées pardes organisations bilatérales serait un bon sujet à aborder avec sérieux.

Certains pensent que les réformes de l’ETFP devraient disparaître et que nous devrions nous limiter à laréforme de l’enseignement et de la formation. Un grand nombre des conversations qui ont eu lieu cette semainesuivaient cette direction car c’est comme ça que l’envisagent de nombreux pays. Nous devrions peut-être êtreclairs à ce sujet et voir si c’est un bon moyen d’avancer à l’avenir. Par ailleurs – une conférence là-dessus n’est pasnécessaire, nous pourrions nous mettre d’accord dès maintenant – l’échange d’expérience qui a lieu ici devraitprobablement continuer. Je sais que nombre d’entre vous en ont tiré profit, et moi aussi, c’est donc quelque choseque nous pourrions envisager. Ma propre expérience m’interdit d’être trop ambitieux à ce sujet car il y en abeaucoup parmi vous que cela n’intéresse pas, ça leur donnerait trop de mal. Mais même si la moitié seulementdes pays et organisations ici présentes souhaitaient faire part de leur expérience, échanger des documents oucorrespondre entre eux, cela serait très utile. Il existe peut-être déjà un système semblable, par exemple un siteInternet, et si ce n’est pas le cas, ce serait une option à envisager.

A) L’approche sectorielle

B) Le secteur agricole et le secteur informel

C) La poursuite des échanges entre pays sur l’ETFP

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Qu’est-ce que les contributeurs devraient faire ? L’exposé portait sur les pays jusqu’à maintenant, vous nousexcuserez donc d’avoir attendu la fin pour parler des contributeurs. Et bien, ils devraient subventionner de bonneschoses comme les changements politiques, la mise en place de réformes, la recherche et le déploiement. La BanqueMondiale devrait faire de même, ce qu’elle n’a pas fait ces dernières années. Je pense donc que, à condition que legouvernement bénéficie d’une bonne structure et sache ce qu’il veut faire, le contributeur devrait soutenir chacunde ces points de manière flexible, surtout s’ils prennent en compte évaluation et apprentissage. A mon avis lescontributeurs doivent faire, et ce dans chaque pays, ce que nous essayons de faire ici : entretenir un bon dialogue ettraiter des expériences et des choix en profondeur.

Pour finir, et cela, je dois dire, est plutôt simple à faire, les contributeurs devraient faire tout leur possible pours’engager à long terme, car nous savons que ces réformes prennent du temps. Mais nous savons aussi que lescontributeurs ne le feront que s’ils peuvent s’engager sur des résultats et pas seulement sur des promesses, cela vadans les deux sens. Je pense que lorsque les contributeurs s’impliquent à long terme, c’est parce qu’ils y voient unsuccès et qu’ils sont contents de pouvoir soutenir ce succès. On en revient encore aux questions sur la réforme :« Pouvez-vous évaluer ? », « Pouvez-vous démontrer que vous êtes en train d’arriver à faire ce que vous vouliez,que vous faites les bons changements dans votre stratégie initiale ? » et ainsi de suite.

D) Le rôle des contributeurs

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CLÔTURE DE LACONFÉRENCE

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« Mesdames et Messieurs, chers Collègues,

Merci de me donner cette occasion de réagir à ce qui a été dit à la lueur notamment de ce que sont mes responsabilitésactuelles au sein du ministère de l'Éducation nationale français. En tant que directeur de l'enseignement scolaire, il se trouveque j'ai la charge de tout ce que l'on pourrait appeler la formation de base incluant la formation technique et professionnelle.Ainsi, à travers les responsabilités qui sont les miennes, on voit apparaître un choix fait par notre pays de bien poser laquestion de l'enseignement technique et de la formation professionnelle dans une relation institutionnelle directe et étroiteavec la formation de base.

Mais, avant de revenir sur quelques uns des points très importants soulignés par les deux rapporteurs, permettez moi deremercier ceux qui sont à l'origine de ce colloque. Je voudrais tout d'abord remercier la Banque Mondiale qui nous a incitésà l'organiser ici et cette incitation extérieure est très importante pour nous non seulement à cause du caractère extrêmementprestigieux du partenaire que constitue la Banque Mondiale, mais également en raison de la question traitée lors de cesjournées. Question de la plus haute actualité et essentielle pour tous les pays, quel que soit leur niveau de développement.

Je remercie également le CIEP d'avoir été le support et le magnifique organisateur de ce colloque. Au-delà de la qualitéde l'organisation, je crois traduire le sentiment général en soulignant le caractère extrêmement positif des échanges qui ontpermis aux diverses expériences de se confronter pour le meilleur profit de tous les participants. Je crois que tous ceux quiconnaissent le domaine de l'enseignement technique et professionnel savent à quel point c'est un domaine qui incite àl'humilité, tant il est en permanence remis en question. Pour ma part, j'ai souvent l'occasion de m'en rendre compte ; j'aisouvenir d'une conférence importante qui s'était tenue à Séoul il y a quatre ans sous l'égide de l'UNESCO, qui était consacréeà l'enseignement technique et professionnel. Il était extrêmement passionnant d'entendre une centaine de pays présenter lescaractéristiques de leur système de formation qui, à travers l'extraordinaire diversité des expériences présentées parfois à desannées-lumières les unes des autres, faisaient néanmoins apparaître des problèmes souvent communs. Et pour être lereprésentant de la France au sein de la conférence des directeurs généraux de la formation professionnelle en Europe, j'aiplusieurs fois par an l'occasion de voir à quel point ces problèmes donnent lieu à des échanges d'une extraordinaire richesse,non seulement entre pays qui constituent aujourd'hui l'Union Européenne mais, ce qui est encore plus intéressant depuismaintenant deux ans, avec les 10 pays qui vont rejoindre l'Union dans quelques mois. Si on peut penser qu'on està l'intérieur d'un groupe de pays relativement homogène, je peux vous dire cependant à quel point les disparitésy sont importantes. Et j'ajouterais que, même à l'intérieur d'un pays comme la France, je dirais volontiers que,selon la région où on se situe, des questions tout à fait essentielles ne se posent pas non plus du tout dans les mêmes termes.Je pense par exemple à une question essentielle évoquée aujourd'hui, le partenariat.

Bref, c'est une façon de vous dire à quel point je crois que ce qui a été dit ici démontre que l'enseignement technique etprofessionnel est sans cesse à réinventer ; c'est bien la raison pour laquelle toute expérience, où qu'elle se situe dans lemonde, est intéressante pour tout autre pays.

Merci encore une fois aux orateurs du colloque de nous l'avoir rappelé et d'en avoir fait la démonstration pendantces trois jours.

Avant de revenir sur quelques éléments essentiels des rapporteurs, je voudrais ici vous dire l'écho que cela soulève dansun pays comme le nôtre et peut-être la façon dont celui-ci tente d'apporter des réponses aux questions posées et peut par là

Clôture de la conférenceJ.P. de Gaudemar

Directeur de l’enseignement scolaire,

Ministère de la Jeunesse, de l’Éducation nationale

et de la Recherche, France

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même, envisager de travailler avec d'autres pays. Je le disd'autant plus volontiers que la façon dont nous travaillonsen France nous vaut de très nombreuses sollicitations.Nous sommes très souvent appelés dans de nombreux payspour exposer ce que nous faisons, c'est ainsi la preuve quela coopération internationale dans ce domaine prend desformes extrêmement diverses, extrêmement riches.

1) Corrélation entre la formation de baseet l’enseignement technique etprofessionnel

Le premier point que je relèverai, c'est celui quiconcerne la formation de base. Les rapporteurs ontlonguement insisté sur le fait qu'il faut absolument penserl'enseignement technique et professionnel d'abord à partirde la qualité de la formation de base, des apprentissagesfondamentaux, au point d'ailleurs que John Middletondisait à l'instant qu’il faut cesser de parler d'une réforme dusystème de l'enseignement technique et professionnel, maisbien l'englober dans une réflexion sur le système éducatiftout entier. Je partage complètement ce point de vue parceque, à quelque stade de développement qu'on se situe, c'estd'abord la qualité de formation de base qui est interrogée.Pour revenir à la situation d'un pays comme la France, maisce que je dis vaut au moins pour tous les autres payseuropéens, la première des questions que nous nousposons, c'est celle de la qualité de cette formation de basesans laquelle tous les autres apprentissages sont en réalité,non pas inutiles, mais en tout cas peu assurés ou malassurés. A chaque grande étape de notre travail ou del'évolution de notre système, nous nous sommes toujoursinterrogés sur la solidité de cette formation de base, neserait-ce qu'à travers le contenu qu'il faut lui donner. Pourprendre un exemple très récent et relativement banal,lorsqu'il y a deux ans nous avons fait évoluer ce que nousappelons le CAP, le Certificat d'Aptitude Professionnelle,qui est notre premier niveau de compétence, notrepremière qualification professionnelle, nous nous sommeslonguement interrogés sur la question de savoir s'il fallaitou non introduire l'enseignement obligatoire d'une langueétrangère, ce qui n'existait pas précédemment. Nous avonstranché en faveur de ce choix, ce qui n'a pas été sanssoulever un certain nombre de difficultés. La qualité de laformation de base est, par là même, la qualité del'articulation entre cet enseignement général de base et lapartie proprement professionnelle de cet enseignement.Nous avions d'ailleurs suggéré il y a quelques années unconcept pour bien désigner cette nécessaire articulation, ceque nous appelions l'enseignement professionnel intégré.Nous voulions dire par là que, d'abord, il s'agissait de bienpenser l'intégration de l'enseignement général dans lapartie du système éducatif consacrée à l'enseignementtechnologique et professionnel. C'était une façon de dire,qu’on ne peut pas penser l'un sans l'autre.

Mais l'enseignement professionnel intégré, cela voulait direaussi que, à l'intérieur des formations dites professionnellesou technologiques, il fallait en permanence penser àl'équilibre entre les enseignements généraux et lesenseignements proprement professionnels. Il y avaitégalement une troisième dimension sur laquelle jereviendrai, qui était celle de l'articulation entre ce que danscette formation professionnelle le système éducatif peutapporter, d'une part, et, d'autre part, ce que son partenariatavec le monde professionnel doit apporter et qu'il peut seulapporter. Dans ce domaine, l'Ecole ne peut pas touttransmettre et notre pays s'est, il y a longtemps, convaincuà travers d'ailleurs une pluralité de formes,qu'il fallait absolument ce troisième type d'intégration quifait qu'un certain type de professionnalité ne peuts'acquérir que dans l'entreprise à travers des séquences deformation dans le monde professionnel en articulationavec l'apport du monde éducatif.Ce point relatif à la qualité de la formation de baseest effectivement un point essentiel qu'il faut chaque foisrappeler.

2) La diversité des voies d’accèsà la qualification professionnelle

Deuxième grande idée que j'ai retenue et qui me paraittrès importante : la qualification professionnelle peuts'acquérir par une grande diversité de voies. Cette idée n'apas été reconnue tout de suite et on peut lire l'histoire dessystèmes d'enseignement technique et professionnel desdifférents pays, à la lueur de la façon dont elle s'est installée.Pour ma part je vois au moins quatre grandes voies aveclesquelles il faut constituer un système, et une des questionsest celle de savoir le type d'équilibre que l'on entretientavec ces différentes voies. Pour les évoquer rapidement, jeciterai d'abord la formation initiale sous statut scolaire –qui est souvent la seule à laquelle on pense, en tous cas dansun pays de traditions comme la France – mais aussi laformation professionnelle sous contrat de travail – ce qu'ilest convenu d'appeler l'apprentissage – la formationcontinue, celle qui survient après ou pendant la vie active,ou enfin, dans un grand nombre de pays aujourd'hui, ceque l'on peut appeler la validation des acquis del'expérience. Actuellement, il n'y a plus de systèmesd'éducation, a fortiori de systèmes de formation techniqueet professionnelle, qui ne se posent d'emblée la question del'articulation entre ces quatre modes. On pourrait d'ailleursindiquer, je crois, que cela a été aussi évoqué pendant vostravaux, que l'émergence, la généralisation et l'abaissementdu coût des technologies de l'information et de lacommunication, tend par certains côtés à brouiller un peules frontières, je veux dire par là à dissiper des séparationsqui pouvaient apparaître comme solidement établies, enfavorisant ce qu'il est convenu parfois d'appeler desformations en alternance, qu'elles soient initiales ou soient

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initiales ou continues, sous statut scolaire ou souscontrat de travail, qui mêlent pour partie des formationsen établissement scolaire ou supérieur, et des formationspendant le temps de travail. Je prendrai ici un exemple quiest propre à la France, nous avons en ce moment un granddébat national sur l'avenir de l'École, une des questions estde savoir si on doit modifier l'âge de fin de scolaritéobligatoire. En France, comme dans beaucoup de pays, lafin de la scolarité obligatoire est à 16 ans. Si on regarde nosstatistiques, l'âge moyen réel statistique de fin d'études sesitue plutôt à 19 ans. Nous savons aujourd'hui quel'espérance de vie scolaire, pour employer un concept unpeu audacieux, d'un enfant qui rentre à l'école maternelleaujourd'hui à 3 ans est de 19 ans. Statistiquement il a toutesles chances de faire des études jusqu'à 22 ans. Toutnaturellement, dans un tel contexte, un certain nombred'acteurs sociaux, les syndicats par exemple, nous disent,qu'il faut rallonger la durée institutionnelle de scolaritéobligatoire et la porter à 18 ans. L'argument ne manquepas d'un certain bon sens, mais en même temps il soulèvedes questions essentielles, notamment celle de savoir s'ilvaut mieux penser les choses en terme de scolaritéobligatoire jusqu'à 18 ans avec ce que cela signifie de garderdes jeunes deux ans de plus dans le système scolaire audébut de leur carrière, même si statistiquement c'estdéjà réalisé, ou bien s'il faut poser le problème en d'autrestermes, à savoir un système de droits permettantde garantir à tout individu quittant l'école sansqualification professionnelle un capital d'années d'étudessupplémentaires. Ceci est un vrai débat et qui pourraitconcerner tout autre pays que la France. Cette pluralité desvoies d'accès à la formation pose la question de la flexibilitéde l'organisation dans le temps de vie d'un individu dece que doit être son parcours de formation. Cette questionse pose certes davantage pour l'enseignement techniqueet professionnel, mais elle pourrait sans doute tout aussiêtre posée pour n'importe quel parcours de formation.

3) La pluralité des acteurs concernés et ladiversité des configurations possibles

Troisième grande idée : la pluralité des acteursconcernés. Un des problèmes essentiels dans tous les paysdu monde aujourd'hui, c'est celui du jeu des acteursconcernés. Il s'agit de ceux qui ont la responsabilité d'offrirun enseignement à vocation technique et professionnelle.Je dirais assez volontiers que c'est un jeu qui se dérouleavec quatre types d'acteurs : l'État, les deux grandescatégories d'acteurs sociaux que sont les employeurs d'unepart et les représentants des salariés d'autre part, et enfinun quatrième acteur de plus en plus présent, très présentdans de nombreux pays ayant choisi une formed'organisation institutionnelle décentralisée, je veux parlerdes collectivités locales. Ce qui est très intéressant,à y réfléchir d'un peu plus près, c'est de voir que ce

rectangle de quatre catégories d'acteurs est un rectangle àgéométrie variable, dont le poids respectif évolue dans letemps, dans l'espace, dans l'histoire et selon les choixpolitiques faits par les pays. Il est sans doute vraisemblablequ'à des moments qui sont ceux de la constitution d'unsystème éducatif de base, notamment pour les paysémergents en train de se doter d'un système, le rôlerégulateur de l'instance politique de l'Etat est sans douteessentiel, surtout lorsque le partenariat reflétant l'état dedéveloppement du tissu économique est souvent encoredans des formes embryonnaires, avec peu de capacitésd'intervention dans le système de formation. Et puisviennent d'autres états pour qui le centre de gravité de cerectangle se déplace. Dans un pays comme la Franceaujourd'hui, il est clair que le centre de gravité se déplacevers les relations entre partenaires sociaux d'une part etd'autre part entre Etat et collectivités locales, dans undouble mouvement de décentralisation institutionnelle etde réappropriation par les acteurs sociaux de la définitionmême des compétences et des modes d'accès. Il y a là uneanalyse extrêmement intéressante de la diversité desmodèles. Je crois que la France apporte un certain nombrede réponses comme d'autres pays apportent d'autres typesde réponses, et il est important que l'on puisse de ce pointde vue évaluer, en quelque sorte apprécier, connaître toutsimplement d'abord, la diversité de ces modes de réponse.

4) La notion de qualification dans uncontexte international

Quatrième réflexion : Tout ce qui a été dit ici, et là encorevu sous cet angle extrêmement enrichissant que constituel'approche internationale, nous interroge sur la notion dequalification, de « skill » en anglais. Que met-on derrière cettenotion et en particulier la manière dont cette notion,apparemment banale, peut recouvrir des chosesextrêmement différentes et significatives du type de systèmede formation, du type de choix institutionnel ? J'aborderaivolontiers, peut-être par déformation d'économiste, cettequestion là à travers une analogie qui est celle de savoir quelleest au fond la nature de la monnaie que procure sur le marchédu travail le système de formation aux personnes qui enbénéficient ? Ce que j'appellerai la « qualification monnaie »ou la « monnaie qualification ». On voit bien que l'une desquestions essentielles qui est posée, c'est celle de savoir :Quelle est la nature de cette monnaie ? A quelle échellefonctionne-t-elle ? Est-ce une monnaie purement locale,ne valant que pour l'échelle d'une entreprise donnée ? Est-ce une monnaie régionale ne fonctionnant qu'à l'échelled'un territoire restreint ? Est-ce une monnaie nationale,légitimée, reconnue par l'Etat ? Est-ce aujourd'hui à l'heurede la constitution d'entités internationales ousupranationales une monnaie à valeur internationale ?Si on y regarde de près, j'ai envie de dire que c'est tout celaà la fois. Un des éléments qui distingue les choix faits en

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matière de systèmes de formation technique etprofessionnelle, c'est notamment le type de réponse quel'on veut donner, avec des évolutions aujourd'hui qui sontextrêmement importantes. Dans la plupart des payseuropéens s'est installé, après la deuxième guerre mondiale,un système de qualification qui s'est en fait imposé auxentreprises comme une norme de référence exogène, selonlaquelle les entreprises bâtissaient par exemple leur systèmede rémunération ou leur système d'organisationhiérarchique. De ce point de vue, la qualification étaitpensée à travers des grilles d'analyse collective du travail.Aujourd'hui, dans un grand nombre de pays, on assiste àdes changements importants qui sont dus d'ailleurs auxdéplacements que j'évoquais tout à l'heure, dans lesrelations entre Etat et collectivités locales voire entrepartenaires sociaux, où la qualification est de plus en pluspensée comme une production endogène à l'entreprise.C'est ce qu'en Europe on appelle actuellement le débat surles compétences qui est une forme de qualification, maisune qualification contingente à une entreprise donnée etqui par là même se situe dans une perspective davantagecentrée sur l'individualisation. C'est une façon deconsidérer le salarié dans une entreprise, comme nonseulement le salarié de son entreprise, mais d'une certainemanière, à travers cette notion de la qualification, commeresponsable ainsi que tous les autres salariés, de laperformance de l'entreprise. Cela dessine une relation toutà fait nouvelle entre cette notion de qualification et aumoins trois types d'éléments : la stratégie d'entreprise, lesmodalités d'organisation du travail et les modes de gestionde l'emploi et notamment la gestion de la mobilité.

5) L’importance de la coopérationinternationale dans ce domaine

Enfin dernière remarque : les exposés des rapporteursont mis l'accent sur l’importance de la coopérationinternationale. Pour des raisons évidentes qui tiennent à ceque dans un domaine qui est celui dont nous parlons avec

l’extraordinaire complexité des questions qu’il pose, ycompris celle des questions financières, il est importantd’ouvrir les yeux, d’ouvrir les portes, d’ouvrir les fenêtres,de voir ce qui se fait partout ailleurs. Mais au-delà de cettenécessité et de cet échange d’expériences entre différentspays, il y a une autre raison, conséquence directe de ce quel’on peut appeler la mondialisation de l'économie, qui estcelle de l’échelle à laquelle se constitue et fonctionnedésormais une grande partie des marchés du travail, c’est-à-dire l’échelle internationale. On ne peut plus aujourd’huipenser l’avenir de nos systèmes de formation en Europepar exemple, sans se poser sérieusement la question de ceque j’appelais tout à l’heure une monnaie qualification dedimension au moins européenne sinon internationale. Demême que l’on a créé l’Euro, l’enjeu c’est celui des Euroqualifications. C’est un sujet délicat car, vous le savez,l’éducation reste, dans l’ensemble européen, unecompétence d’Etat, mais pour autant on voit se dessinerpetit à petit l’émergence d’un système coopératif, tout aumoins un système d’harmonisation dont l’enseignementsupérieur a donné le signal depuis maintenant plusieursannées et qui est en train de devenir réalité à travers lesystème dit « licence, master, doctorat ». Ma convictionpersonnelle est que ce mouvement d’harmonisation est unmouvement qu’il faut mettre en marche dans le systèmequi précède l’enseignement supérieur, et particulièrementdans le système de l’enseignement technique etprofessionnel. Ce qui me réjouit beaucoup, c’est que ce quiest depuis longtemps une conviction personnelle est entrain de devenir une réalité et surtout une convictionpartagée par pratiquement aujourd’hui tous les payseuropéens et quand on sort de l’Europe, qu'on échangeavec d'autres pays, je pense notamment aux nombreux paysméditerranéens mais aussi à d'autres pays dans d'autresparties du monde, on sent cette même appétence pour dessystèmes de formation débouchant sur des qualificationsreconnues à l’échelle internationale, ce qui est après tout laconséquence parfaitement logique de cette globalisation etune façon extrêmement positive de répondre à bien desaspects par ailleurs inquiétants de la même globalisation.

Voilà Mesdames et Messieurs, chers collègues, quelques observations qui m’ont été inspirées par la qualité des deuxrapports que nous avons entendus, et plus généralement par la qualité des travaux que vous avez conduits pendant cestrois jours. Encore merci à vous tous de vos contributions, de tout ce que vous avez apporté. Bon retour et bonne chance àvous mêmes et aux systèmes éducatifs de vos différents pays. Merci de votre attention. »

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Centre international d’études pédagogiques Département de l’ingénierie éducative

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