D�ficit cong�nital en facteur VIIB: � propos d?une observation

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ARTICLE ORIGINAL

Déficit congénital en facteur VII :à propos d’une observation

The constitutional deficiency in factor VII:about one case

Z. Imane *, A. Mdaghri-Alaoui, S. Hamdani,L. el Harim-Lamdouar, N. Lamdouar-BouazzaouiService de néonatologie, hôpital d’Enfants de Rabat, Rabat, Maroc

Reçu le 26 septembre 2003 ; accepté le 4 novembre 2003

MOTS CLÉSDéficit ;Facteur VII ;Nouveau-né ;Hémorragie

KEYWORDSFactor VII;Deficiency;Newborn;Hemorrhagic syndrome

Résumé Le facteur VII ou proconvertine est un facteur de la coagulation vitamino-K-dépendant qui intervient dans la voie exogène de la coagulation. Le déficit constitution-nel en facteur VII est une maladie héréditaire de transmission autosomique récessive, trèsrare. Nous rapportons l’observation d’un nouveau-né issu de parents consanguins dupremier degré, et admis à j2 de vie pour syndrome hémorragique à type d’épistaxis demoyenne abondance. Le bilan biologique montre un temps de céphaline–kaolin (TCK)allongé avec un taux de prothrombine bas. Un bilan de la coagulation montre un déficitisolé en facteur VII évalué à 12 %. L’évolution de notre patiente a été marquée par lasurvenue d’une hémorragie cérébrale, malgré les mesures thérapeutiques. À traverscette observation, nous voudrions mettre l’accent sur les particularités cliniques, biolo-giques et thérapeutiques de cette affection exceptionnelle en période néonatale, ainsique sur les aspects évolutifs de ce déficit chez notre patiente.© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract The constitutional deficiency in factor VII is a hereditary disease of recessiveautosomic transmission. its incidence is estimated at 1/500 000 to 1/1 000 000 in thegeneral population. We report a case about factor VII deficiency in newborn reveled inj0+2 of life for hemorrhagic syndrome. An assessment of coagulation makes showed adeficiency in factor VII evaluated with 12%. We would like to describe the clinical,biological and therapeutic characteristics of this exceptionally obvious affection innewborn period.© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (Z. Imane).

Journal de pédiatrie et de puériculture 17 (2004) 139–142

www.elsevier.com/locate/pedpue

© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.doi: 10.1016/S0987-7983(03)00111-7

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Introduction

Le facteur VII ou proconvertine est une glycopro-téine plasmatique synthétisée par le foie en pré-sence de la vitamine K1.Le déficit en facteur VII ou maladie d’Alexander

est une affection très rare, se manifestant par unsyndrome hémorragique d’expression variable pou-vant aller du simple épistaxis à l’hémorragie céré-brale chez le nouveau-né [1,2]. L’originalité denotre observation est dans la révélation néonataled’un déficit en facteur VII par un syndrome hémor-ragique sévère.

Observation

O.R., nouveau-né de sexe féminin, fille unique deparents consanguins au premier degré, est admise àj2 de vie pour épistaxis de moyenne abondance.Elle est issue d’une grossesse non suivie, avec

une mère âgée de 17 ans, G1P1, avec accouche-ment médicalisé à terme par voie basse à la mater-nité. Le poids de naissance (PN) est de 2900 g,l’Apgar à la naissance à 10/10. Elle a reçu de lavitamine K1 en salle de naissance, a été mise ausein, et était bien portante jusqu’à j2 où elle aprésenté un épistaxis de moyenne abondance, cequi a motivé son hospitalisation dans notre service.L’examen clinique à l’admission retrouve un

nouveau-né conscient, tonique, réactif présentantun ictère cutanéomuqueux d’intensité modérée surfond de pâleur, avec stigmates d’épistaxis actif,avec un bon état hémodynamique et respiratoire.Le reste de l’examen somatique est sans particula-rité.En résumé, il s’agit donc d’un nouveau-né à

terme, de parents consanguins au premier degré,ayant présenté à j2 de vie un épistaxis de moyenneabondance, et chez lequel l’examen retrouve unictère cutanéomuqueux sur fond de pâleur.Les diagnostics à évoquer sont : une incompati-

bilité sanguine fœtomaternelle, un trouble de l’hé-mostase comme la maladie hémorragique dunouveau-né ou un déficit congénital en facteur decoagulation, ou encore une infection maternofœ-tale.Un bilan biologique initial met en évidence :• une anémie à 9,6 g dl–1 hypochrome microcy-taire, une thrombopénie à 80 000 mm3–1 ;

• une protéine C-réactive (CRP) à 125 mg l–1 ;• une bilirubinémie totale à 105 mg l–1 avecbilirubine indirecte à 100 mg l–1 ;

• un taux de prothrombine (TP) à 27 % et untemps de céphaline activée (TCA) iso et untaux de fibrinogène normal.

Le bilan bactériologique est revenu négatif(ponction lombaire et hémoculture).Le groupage sanguin est A rhésus+, avec test de

Coombs direct négatif. Le groupage sanguin chez lamaman est A rhésus+.L’échographie transfontanellaire (ETF) est nor-

male.Le diagnostic d’une infection maternofœtale

avec maladie hémorragique est retenu. Lenouveau-né est mis sous biantibiothérapie (C3G+

aminoside) avec de la vitamine K1 à dose curative.L’évolution est marquée par la persistance du

syndrome hémorragique et le TP reste bas, le tauxd’hémoglobine étant passé à 5,6 g dl–1, ce qui anécessité des transfusions de culots globulaires etdu plasma frais congelé (PFC).Devant ce tableau clinique, un dosage des fac-

teurs de coagulation est réalisé et met en évidenceun déficit isolé en facteur VII estimé à 13 % (nor-male : 70–100 %). Le dosage des facteurs de coagu-lation chez les parents montre un déficit en facteurVII chez la mère à 42 % et chez le père à 54 %.Par ailleurs, la patiente a présenté au cours de

son hospitalisation, un tableau neurologique fait decrises convulsives tonicocloniques avec des mouve-ments de mâchonnement, et une fixité du regard.L’examen clinique retrouve une hypotonie généra-lisée avec bombement de la fontanelle antérieuredans un contexte apyrétique, avec une pâleur cuta-néomuqueuse intense. L’ETF, complétée par unetomodensitométrie cérébrale, met en évidence unehémorragie ventriculaire avec hématomes céré-braux.La patiente est alors transfusée par du PFC et des

culots globulaires. Cela permet d’arrêter l’hémor-ragie sans pouvoir éviter une hydrocéphalie quadri-ventriculaire active, nécessitant une dérivationventriculopéritonéale.En conclusion : c’est un déficit en facteur VII

découvert en période néonatale chez unnouveau-né de parents consanguins présentant ledéficit à l’état hétérozygote et il est compliquéd’une hémorragie cérébrale avec une hydrocépha-lie quadriventriculaire séquellaire.

Commentaires

Le déficit congénital ou héréditaire en facteur VIIest très rare. Son incidence est estimée à1/500 000 à 1/1 000 000. En revanche, une per-sonne sur 500 peut être porteuse du gène défec-tueux localisé sur le chromosome 1 [3]. Le déficiten facteur VII constitue l’une des très rares causesdes syndromes hémorragiques de l’enfant [2]. C’estune maladie héréditaire de transmission autosomi-

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que récessive, d’où sa fréquence dans les mariagesconsanguins, ce qui est le cas de notre patienteissue d’un mariage consanguin au premier degré.

Rappel physiologique (Fig. 1)

Le facteur VII ou proconvertine est une glycopro-téine du sang synthétisée par le foie qui joue unrôle dans la réaction en cascade de la coagulation.Le facteur VII activé par la thromboplastine tissu-laire, active à son tour le facteur X et le facteur IX,ce qui permet au processus de la coagulation de sepoursuivre [4].En présence d’un déficit en facteur VII, la pro-

téine se trouve à des taux inférieurs à la normale.Parfois, le facteur VII est totalement absent.Il existe deux types de déficits en facteur VII

[5,6] :• un déficit congénital transmis par les parents ;• un déficit acquis secondaire à d’autres affec-tions (hépatopathies, affections malignes, cer-tains médicaments...).Le déficit en facteur VII se traduit par un syn-

drome hémorragique qui reste le maître symptômeet s’observe chez les sujets homozygotes (commec’est le cas de notre patiente).Un sujet hétérozygote n’en est que très rare-

ment affecté (c’est le cas des parents de notrepatiente qui n’ont jamais présenté de syndromehémorragique) [5,7].La sévérité du saignement est variable et ne

semble pas liée à l’importance du déficit [1]. Tou-tefois, certains auteurs signalent que plus le fac-teur VII est bas, plus les saignements sont graves,[1] ainsi :

• plus de 20 % de la normale : les saignementssont discrets ;

• 5 à 20 % de la normale : les saignements sontmodérés. Notre patiente se situe dans cettecatégorie, mais paradoxalement, elle a pré-senté un tableau sévère, confirmant ainsi lefait que la sévérité du saignement ne semblepas liée à l’importance du déficit ;

• 1 à 5 % de la normale : les saignements sontimportants.Les saignements les plus fréquents sont ceux

après extraction dentaire, épistaxis et les hémarth-roses [2].Du point de vue symptomatique, on distingue

quatre formes cliniques de la maladie [1] :• une forme grave à la naissance (le cas de notrepatiente) et la première enfance : caractéri-sée par l’hémorragie à la chute du cordon (nonsignalée chez notre patiente) et par l’hémorra-gie intracrânienne : il faut noter que lesnouveau-nés sont exposés à un important ris-que d’hémorragie intracrânienne. Selon certai-nes études, un nouveau-né sur six atteint de cedéficit présentera un saignement intracrânien.Peu d’observations d’hémorragies cérébralesliées au déficit en facteur VII ont été rappor-tées ;

• une forme grave avec un début dès ladeuxième enfance : c’est une hémorragie lorsde la chute des dents de lait ou à la puberté,qui se traduit par des ménorragies foudroyan-tes ;

• une forme légère avec un début tardif parfois àl’âge adulte avec des saignements pathologi-ques après un traumatisme ou après une inter-vention chirurgicale ;

• une forme presque asymptomatique décou-verte lors d’une enquête génétique ou d’unbilan préopératoire.Le diagnostic positif repose sur des éléments

biologiques [5–7] :• un temps de Quick allongé évoquant une ano-malie de la voie exogène ;

• un TCK normal assurant une intégrité de la voieendogène.La confirmation est apportée par le dosage des

facteurs de coagulation (VII, II, X et fibrinogène).L’enquête familiale est nécessaire, notamment

le dosage du facteur VII chez les parents et lafratrie du sujet atteint.Le traitement repose sur des mesures symptoma-

tiques indiquées lors d’un saignement aigu, etconsiste en :

• l’administration du plasma frais congelé à rai-son de 10 à 15 ml/kg, qui peut être efficace,mais qui présente certains inconvénients : lePFC renferme relativement peu de facteur VII,et il faut en administrer beaucoup pour fournir

Figure 1 Rappel physiologique.

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la quantité requise de facteur VII, sans comp-ter le risque de transmission des virus (hépatiteà virus B [HVB], hépatite à virus C [HVC]) ;

• l’administration du concentré PPSB de moinsen moins utilisé du fait du risque élevé decomplications thromboemboliques [6] ;

• l’administration de concentré de facteur VII,en sachant que 0,5 U/kg fait augmenter le tauxde proconvertine de 1 % (non disponible dansnotre contexte).Un traitement prophylactique au long cours en

cas de saignements graves et répétitifs peut êtrenécessaire à raison de deux injections par semainede concentré de facteur VI [1].Une prophylaxie périopératoire reste indiquée

en :• préopératoire : 20 U/kg dans le dessein d’at-teindre un taux à 40 % ;

• et en postopératoire : 5 à 10 U/kg par huitheures pendant 5 à 10 jours en vue de mainte-nir un taux à 20 %.

Conclusion

Le déficit en facteur VII est une affection hérédi-taire rare. Toutefois, dans sa forme grave, elle peutmettre en jeu le pronostic fonctionnel, voire vital.Le pronostic de la maladie reste lié au risque desurvenue d’hémorragies graves, notamment céré-brales survenant en période néonatale comme c’estle cas de notre patiente.

Il est nécessaire de faire un conseil génétiquechez les parents consanguins d’un malade atteintd’un déficit en facteur VII.Une aménorrhée thérapeutique peut être indi-

quée à la puberté lorsque le déficit reconnu dansl’enfance est sévère, et c’est le cas chez notrepatiente. Enfin, une collaboration interdiscipli-naire est impérative entre : obstétricien, pédiatre,biologiste et généticien pour une meilleure prise encharge.

Références

[1] Regragui W, et al. Déficit congénital en facteur VII : àpropos d’un cas. Maroc médical 1999 septembre 1999;tome 21(no 3).

[2] el Harim Lamdouar L, et al. Déficit congénital en facteurVII : à propos de deux cas. Maghreb médicales novembre1982(no 14):44–6.

[3] Arrifin H. Neonatal intracranial hemorrhage secondary tocongenital factor VII deficiency: two case reports. Am JHematology 1997;54:263–6.

[4] Levy G. Notion de physiologie et d’exploration del’hémostase. Encycl Med Chir (Elsevier SAS Paris),Anesthésie–Réanimation 1995:1–5 36-657-K-10.

[5] Guillain MC. Déficits constitutionnels des facteurs II, V,VIIou X. Encycl Med Chir (Elsevier SAS Paris), Hématologie1988:1–7 13021-C-10.

[6] Yatim A. Déficit congénital en facteur VII [thèse]. Rabat :Faculté de médecine de Rabat. 1993.

[7] Bauer KA. Treatmant of factor VII deficiency with recom-binant factor VIIa. Haemostasis 1996;2(suppl):155–8.

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