DEuclide à Legendre, autour du 5 ème Postulat III - Legendre, un géomètre entêté

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D’Euclide à Legendre, autour du 5 ème Postulat III - Legendre, un géomètre entêté PUC -SP. Juin 2006 Autour du 5 ème Postulat Présentation de MichelHENRY, IREM de Besançon (Fra nce)

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D’Euclide à Legendre, autour du 5ème Postulat

III - Legendre, un géomètre entêté

PUC-SP. Juin 2006 Autour du 5ème Postulat Présentation de Michel HENRY, IREM de Besançon (France)

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD1 - Legendre mathématicien et pédagogueAdrien-Marie Legendre (1752 - 1833), professeur à l’École Militaire et à l’École Normale supérieure, a produit des travaux en mécanique, analyse (méthode des moindres carrés) et théorie des nombres (loi de réciprocité quadratique dan son Essai sur la théorie des nombres en 1830).

Pédagogue, entre 1794 et 1823 il publie 12 éditions de ses Éléments de géométrie (30 éditions en anglais), dans lesquels il tente de simplifier et de moderniser les Éléments d’Euclide.

D’éditions en éditions, il prétend démontrer le 5ème Postulat, en inventant des « preuves » qu’il juge ensuite insuffisantes, malgré leur originalité et leur élégance. Ainsi, dans l’avertissement à sa 12ème édition (1823), il écrit :« La démonstration de la théorie des parallèles, telle qu’elle avait été présentée dans la 3e édition de cet ouvrage et dans les éditions suivantes jusqu’à la 8e inclusivement, n’étant pas à l’abri de toute objection, on s’était déterminé dans la 9e édition à rétablir cette théorie à-peu-près sur la même base qu’Euclide. Des réflexions ultérieures faites sur le même objet, dont on donnera le développement dans la note II, ont fait découvrir deux nouvelles manières de démontrer le théorème sur les trois angles du triangle, sans le secours d’aucun postulatum. »

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD2 - La « démonstration » de la 3ème édition (1800)Excluant l’hypothèse de l’angle obtus du rectangle de Saccheri (conduisant à une géométrie sphérique), Legendre suppose que l’on peut prolonger une droite à l’infini. Sa stratégie est d’étudier la somme des angles d’un triangle.

Il démontre d’abord un lemme de géométrie absolue (donné pour 2 angles dans les Éléments d’Euclide, prop. 17), connu comme théorème de Legendre:

La somme des trois angles d’un triangle ne peut être plus grande que deux angles droits.

Soit ABC un triangle dont la somme des trois angles est plus grande que deux droits. Sur AC prenez CE = AC, faites l'angle ECD = CAB (prop. 23), le côté CD = AB.

Le triangle CDE est égal au triangle BAC (prop. 4). Comme A, C, E sont alignés,

ABC > BCD et AC > BD (prop. 25). Soit AC–BD = d > 0.

On recommence cette construction n fois jusqu’en P et Q, suffisamment pour que AP–BQ = nd > 2AB (où BQ est la longueur de la ligne brisée obtenue).

On aurait AP > AB+BQ+QP, contraire à l’inégalité triangulaire (prop. 20). L’hypothèse est donc absurde.

A

B

C

D

E

F

G

H

I P

Q

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD2 - La « démonstration » de la 3ème éditionDans un deuxième temps, Legendre « démontre » le théorème :

Dans tout triangle, la somme des trois angles est égale à deux angles droits.Soit ABC un triangle dont la somme des angles vaut 2d – z, l’angle a en A étant le plus petit (donc a < 2d/3). Soit D le point tel que BCD = ABC et CBD = ACB.

Les triangles ABC et DCB sont égaux (prop. 26).

Par D, point intérieur à l’angle en A, on mène une droite quelconque qui rencontre (AB) en F et (AC) en E

(C’est cette hypothèse qui porte en elle le 5e Postulat, puisqu’il découle du théorème. Legendre obtient l’axiome équivalent : d’un point intérieur à un angle moindre que 2/3 d’un droit, il passe une droite qui rencontre les deux côtés de l’angle).

Comme les sommes des angles des triangles FBD et DCE n’excèdent pas 2d, on obtient que la somme des angles du triangle AEF est inférieure ou égale à 2d – 2z.

On recommence n fois cette construction de telle sorte que 2nz > 2d.

La somme des angles du grand triangle ainsi obtenu, égale à 2d –  2nz serait négative! L’hypothèse est donc absurde, la somme des angles d’un triangle ne peut être ni plus grande, ni plus petite que 2 angles droits.

AB

CD

E

F

a

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD3 - La 11ème éditionJusqu’à la 8ème édition de ses Éléments de géométrie, Legendre donne sa « démonstration » du 5ème Postulat.

On a dû lui faire des critiques et de la 9ème édition à la 11ème, il abandonne son beau théorème pour une autre présentation de la théorie des parallèles.

Têtu, il admet le 5ème Postulat comme une évidence.

Celle-ci semble être conséquence de l’égalité des angles droits, le 4ème

postulat d’Euclide que Legendre prétend aussi démontrer !

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD3 - La 11ème éditionLegendre commence donc par « démontrer » l’égalité des angles droits.

PROPOSITION PREMIÈRETHÉORÈME

Par un point pris sur une droite on peut élever une perpendiculaire sur cette droite, et on n’en peut élever qu’une.« En effet, supposons qu’une droite AM d’abord couchée sur AC, tourne autour du point A : elle formera deux angles adjacents, MAC, MAB, dont l’un, MAC, d’abord très petit, ira toujours en croissant, et dont l’autre, MAB, d’abord plus grand que MAC, ira constamment en décroissant jusqu’à zéro.

L’angle MAC, d’abord plus petit que MAB, deviendra donc plus grand que cet angle; par conséquent, il y aura une position AM” de la droite mobile où ces deux angles seront égaux, et il est évident qu’il n’y en aura qu’une seule ».

Corollaire : Tous les angles droits sont égaux.Sinon, par superposition de deux côtés de manière que les sommets coïncident, on pourrait, du sommet commun, élever deux perpendiculaires à cette droite.

M

M’’

M’

BA C

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD3 - La 11ème éditionLegendre présente ensuite sa THÉORIE DES PARALLÈLES :

PROPOSITION XXI

Deux droites AC, BD, perpendiculaires à une même droite CD, sont parallèles(C’est une forme de la proposition 27 d’Euclide, valable en géométrie absolue).

L’argument de Legendre : « Car, si elles se rencontraient en un point M, par exemple, on pourrait de ce point abaisser deux perpendiculaires sur CD. »

L’énoncé de Proclus - Playfair en découle immédiatement :

PROPOSITION XXI

Par un point on peut mener une parallèle à une droite.« Du point A abaissez AB perpendiculaire à BC, et au même point, menez AD perpendiculaire à AB, les deux droites AD et BC, étant toutes deux perpendiculaires à AB, seront parallèles ». Legendre ajoute, comme à regret : « On admettra en second lieu, comme une proposition évidente, que par un point on ne peut mener qu’une seule parallèle à une droite », admettant ainsi « comme une proposition évidente » le 5ème Postulat.

A

B C

D

A

B

MC

D

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD4 - La 12ème édition, note II: retour sur le passéLegendre y présente « une nouvelle manière de démontrer le théorème sur les trois angles du triangle ». Il s’explique dans une note II, avec une belle lucidité :

« .... , nous avons fait voir que toute la difficulté se réduisait à construire un triangle qui contînt au moins deux fois le triangle donné ; mais la solution que nous avons donnée de ce problème, en apparence très simple, suppose que par un point donné dans un angle moindre que deux tiers d’angle droit, on peut toujours faire passer une ligne droite qui rencontre à-la-fois les deux côtés de l’angle.

Nous avions ainsi beaucoup approché de notre but, mais nous ne l’avions pas atteint entièrement, puisque notre démonstration dépendait d’un postulatum qui à toute force pouvait être nié. C’est cette considération qui nous a fait revenir, dans la 9e édition, à la simple marche d’Euclide, en renvoyant aux notes pour la démonstration rigoureuse.

En examinant les choses avec plus d’attention nous sommes resté convaincu que pour démontrer complètement notre postulatum il fallait déduire de la définition de la ligne droite une propriété caractéristique de cette ligne qui exclût toute ressemblance avec la forme d’une hyperbole comprise entre ses deux asymptotes ».

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD4 - La 12ème édition, note II: le postulatum justifié

Legendre tente alors de « démontrer son postulatum », et aboutit aux mêmes considérations métaphysiques qu’Omar Al-Khayyam et que Saccheri :

Soit BAC un angle donné, et M un point donné au dedans de cet angle; divisez l'angle BAC en deux également par la droite AD, et du point M menez MP perpendiculaire sur AD : je dis que la droite MP prolongée dans un sens et dans l'autre, rencontrera nécessairement les deux côtés de l'angle BAC.

« Car si elle rencontre un des côtés de cet angle, elle rencontrera l'autre, tout étant égal des deux côtés à partir du point P ; si elle ne rencontrait pas un côté, elle ne rencontrerait pas l'autre par la même raison ; ainsi, dans ce dernier cas elle devrait être renfermée tout entière dans l'espace compris entre les côtés de l'angle BAC ; or, il répugne à la nature de la ligne droite qu'une telle ligne, indéfiniment prolongée, puisse être enfermée dans un angle.En effet, toute ligne droite AB tracée sur un plan, et indéfiniment prolongée dans les deux sens , divise ce plan en deux parties qui étant superposées coïncident dans toute leur étendue et sont parfaitement égales »… Or un « espace angulaire n'est pas la moitié de tout le plan ; donc la ligne droite qu'on suppose partager en deux portions l'espace angulaire, ne pourra partager qu'en deux parties inégales la totalité du plan, ce qui est contraire à la nature de la ligne droite ».

A

B

C

M

D

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD5 - La 12ème édition, introduction du Livre IUn avertissement donne le ton : « On a inséré une des démonstrations [du 5ème Postulat] dans le texte de cette édition, …, qui ne semble pas plus difficile à comprendre que celle qui avait été donnée dans les éditions précédentes, depuis la 3e jusqu’à la 8e ».

Legendre ajoute dans la note II: « Nous laissons aux géomètres à décider si cette démonstration ne mériterait pas d'être admise dans les élémens, de préférence à toute autre, pour rétablir la marche d'Euclide devenue entièrement rigoureuse par la suppression de son Postulatum. »

Le Livre I commence par 20 définitions des objets de base données en Principes, dont celle de la Géométrie :« La Géométrie est une science qui a pour objet la mesure de l’étendue ».

Puis Legendre explique, entre autres mots et symboles, ce qu’est un axiome : « une proposition évidente par elle-même ».

Il donne alors la liste de ses axiomes qui lui paraissent suffisants pour engendrer toute la géométrie euclidienne.

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD5 - La 12ème édition, introduction du Livre ILes 5 axiomes de la géométrie de Legendre :

1. Deux quantités égales à une troisième sont égales entre elles. (Première notion commune chez Euclide).

2. Le tout est plus grand que sa partie (9ème notion commune).3. Le tout est égal à la somme des parties dans lesquelles il a été divisé.4. D'un point à un autre on ne peut mener qu'une seule ligne droite.

(Première demande d’Euclide).5. Deux grandeurs, ligne, surface ou solide, sont égales, lorsque étant

placées l'une sur l’autre elles coïncident dans toute leur étendue. (8ème notion commune).

Les « démonstrations » des autres demandes euclidiennes font l’objet des premières propositions, la 5ème sera l’objet de la proposition 19 :

Proposition première : Les angles droits sont tous égaux entre eux. (4ème demande).

Proposition 3 : Deux lignes droites qui ont deux points communs coïncident l’une avec l’autre dans toute leur étendue, et ne forment qu’une seule et même ligne droite. (2ème et 6ème demandes).

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD6 - La 12ème édition, structure du Livre IIl est utile de donner un aperçu de la progression du Livre I, pour bien situer la démonstration que donne Legendre du 5ème Postulat (prop. 19) :

Propositions 2 à 5 : propriétés des angles formés par deux droites sécantes

Prop. 6, 7 et 11 : les 3 cas d’égalité des triangles

Prop. 8 : inégalité triangulaire

Prop. 9, 10 et 14 : inégalités de côtés et d’angles dans les triangles

Prop. 12 et 13 : angles et côtés d’un triangle isocèle

Prop. 15 : unicité de la perpendiculaire issue d’un point à une droite

Prop. 16 et 17 : longueurs des obliques issues des points d’une perpendiculaire à une droite, médiatrice d’un segment

Prop. 18 : cas d’égalité des triangles rectangles

Prop. 19 : « Dans tout triangle, la somme des trois angles est égale à deux droits ».

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD7 - La 12ème édition, théorie des parallèles

La suite de la proposition 19 constitue la théorie des parallèles de Legendre. Le Livre I se termine par les propriétés du parallélogramme (prop. 28 à 31).

De la propriété de la somme des angles d’un triangle, Legendre déduit rapidement le 5ème Postulat (propositions 21 à 23).

Proposition 21 : Si deux lignes droites AB, CD, sont perpendiculaires à une troisième FG, ces deux lignes seront parallèles…Preuve : Car si elles se rencontraient en un point O, il y aurait deux perpendiculaires OF, OG, abaissées d’un même point O sur une même ligne FG, ce qui est impossible (prop.15).

Proposition 22 : Si deux lignes droites AB, CD, font avec une troisième EF, deux angles intérieurs BEF, DFE, dont la somme soit égale à deux angles droits, les lignes AB, CD, seront parallèles.

Preuve résumée : Si les angles BEF, DFE sont droits, la prop. 21 conclut. Sinon, du point F, on abaisse la perpendiculaire FG à AB (prop. 15). Dans le triangle FGE, rectangle en G, la somme des angles aigus vaut un droit (corollaire de la prop.19), et comme BEF + EFD = 2 droits, il reste que DFG vaut 1 droit. Les droites AB et CD sont donc perpendiculaires à FG, ce qui montre qu’elles sont parallèles (prop. 21).

Remarque : C’est la proposition 28 d’Euclide qui ne nécessite pas le 5ème Postulat !

AB E

CD F

G

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD7 - La 12ème édition, théorie des parallèlesLegendre peut alors conclure:Proposition 23 : Si deux lignes droites AB, CD, font avec une troisième EF, deux angles intérieur d’un même côté, dont la somme soit plus petite ou plus grande que deux angles droits, les lignes AB, CD, prolongées suffisamment, devront se rencontrer. (5ème demande d’Euclide).Preuve en images animées :

M

M sur EB, AMF=MFG car supp à MEF+EFM

N

Soit MN = MF, EMF = MFN+MNF (19) donc MFN = 1/2 MFG

E

FC

A

D

B

AB et CD coupées par EF, avec BEF+EFD < 2 droits

G

FG telle que AEF=EFGDonc FG // AB (22) et D est entre ces droites

Z

NFP = 1/4 MFG … n fois Z sur AB t.q. MFZ = (1–1/2n)MFG MFZ > MFD, FD est dans le triangle MFZ et coupe donc AB.

P

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD8 - La belle « démonstration » (prop. 19)Donnons enfin la démonstration ingénieuse de Legendre. Chercher l’erreur !Dans tout triangle, la somme des trois angles est égale à deux droits.Preuve en images animées : soit un triangle ABC, d’angles , , tels que :AB ≥ AC ≥ BC, d’où  ≥   ≥  (prop. 14). ++ = ?Soit I1 le milieu de [BC] et K1 sur (AB) tel que AK1 = AI1. K1 est entre A et B et AK1 > AB/2, car dans le triangle ABC, la médiane AI1 est plus petite que le plus grand côté AB (prop. 16).

C

A B

• (C1AK1) = (BAI1) (1er cas d’égalité, prop.6), d’où C1K1= BI1= CI1 et AK1C1=AI1B et AC1K1=ABI1=

• (B1C1K1 )  = (ACI1 ) (car B1K1 = AK1 = AI1 et C1K1B1 = AI1C car supp à AK1C1 et AI1B) d’où B1C1 = AC ≤ AB = AC1 ≤ AB1, de plus,

K1C1B1 = I1CA =  et C1B1K1=CAI1 = D’où 1 = AC1K1+K1C1B1 =  +

et = CAI1 + I1AB =  1 + 1,

donc  +  + =  1 + 1 + et comme B1C1 ≤ AC1, 1 ≤  1, et donc 1 ≤   /2 

C1

B1

K1

I1

Soit C1 sur (AI1) tel que AC1 = AB et B1 sur (AB) tel que AB1 = 2AK1. On a donc AB1 > AB. Soient , , AB1C1.

On montre que 1+1+1 = ++avec AB1 ≥ AC1 ≥ B1C1 et que de plus que 1 ≤

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD8 - La belle « démonstration » (prop. 19)

C

A B

C1

K1 B1

I1

B2

C2I2

K2

C3

K3

3

I3

On a donc obtenu 1+1+1 = ++1+1 = avec AB1 ≥ AC1 ≥ B1C1 et 1 ≤ [et aussi aire(ABC) = aire(ACI1) + aire(AI1B) = aire(B1K1C1) + aire(AK1C1) = aire(AB1C1)]

Soit à nouveau I2 le milieu de [B1C1] et K2 sur (AB1) tel que AK2 = AI2. K1 est entre A et B1.Soit C2 sur (AI2) tel que AC2 = AB1 et B2 sur (AB1) tel que AB2 = 2AK2. Soient , , A21C2. On obtient de même :

2 + 2 + 2 = 1 + 1+ 1 = + + avec AB2 ≥ AC2 ≥ B2C2 , 2 ≤ 1/2 = et2+2 = 1[On a encore : aire(AB2C2) =  aire(AB1C1)= aire(ABC)].Même construction pour obtenir le triangle AB3C3, avec

3 +3+3 = ++ AB3 ≥ AC3 ≥ B3C3 et 3 ≤ /23,de plus 3+3 = 2[ainsi que aire(AB3C3) =  aire(ABC)]

Et ainsi de suite, on obtient le triangle ABnCn, avec

n +n+n = ++ ABn ≥ ACn ≥ BnCn, n ≤ /2, n+n = n–1 [aire(ABnCn) =  aire(ABC])

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Les Éléments de Géométrie de LegendreD8 - La belle « démonstration » (prop. 19)

On a finalement pour tout n un triangle ABnCn tel que n+ n+ n =  +  + avec

ABn ≥ ACn ≥ BnCn, n≤ n≤ n, n ≤ netn+ n = n–1[Et aire(ABnCn) =  aire(ABC) !]

n

n

nBn

Cn dn

A

xn

Soit xn l’angle extérieur en Cn au triangle ABnCn : n = 2 droits –xn.

On a donc  +  +   = n+ n+ n =  n–1+ 2 droits – xn 

Quand n ∞, n 0 et la droite dn qui porte (ACn) tend à se confondre avec (AB), et xn 0.

A la limite, on a donc  +  +   = 2 droits. C.Q.F.D.

Legendre présente ainsi son raisonnement : Mais on peut concevoir que le triangle ABnCn varie dans ses angles et ses côtés, de manière à représenter les triangles successifs qui naissent ultérieurement de la même construction et s’approchent de plus en plus de la limite où les angles n et n seraient nuls. Dans cette limite la droite ACndn se confondant avec ABn, les trois points A, Cn, Bn, finissent par être exactement en ligne droite ; alors les angles n et xn deviennent nuls en même temps que n, et la quantité 2D +n + n – xn, qui mesure la somme des trois angles du triangle ACnBn, se réduit à 2D, donc dans tout triangle la somme des trois angles est égale à deux angles droits.

Mais « à la limite », le triangle ABnCn s’aplatit et son aire tend donc vers 0. Pourtant elle est constante, égale à l’aire du triangle donné ABC ! Legendre ne semble pas avoir remarqué ce « détail » qui laisse planer un doute certain sur son raisonnement.