Des applications pour informer et éduquer

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GRANDE DISTRIBUTION Regard d’expert par Bertrand GUÉLY ©FFANG-DREAMSTIME.COM 30 vegetable.fr • n o 340 / janvier 2017  Des applications dédiées, un nouveau moyen d’apporter au consommateur les informations et la culture f & l qui lui manquent aujourd’hui ? Pour éduquer 1 T’as besoin de quelque chose mon frère ? Nous ne ferons pas, à part pour quelques femmes de médecin désœuvrées et quelques têtes (hipsters) à claques (vous savez, ceux qui coupent une par- tie de leurs cheveux pour se les coller sur le menton et mélangent hardiment les fringues foncées avec des chaussures pointues marron), nous ne ferons pas des consommateurs des spécialistes de la nutrition. Nous avons tort de nous obstiner à essayer de faire, en quelques samedis après-midi, de Madame Michu un dis- ciple du Docteur Dukan. Par contre, nous pouvons travailler des associa- tions entre un besoin basique de notre corps et l’espèce disponible à ce moment la plus apte à le combler. Un peu à la façon des astuces de grand-mères, l’application indiquerait par exemple qu’il y a plus de vitamine C dans la goyave et la papaye que dans les sempiternelles oranges (même si c’est moins simple à presser au petit déjeuner...), qu’on peut faire le plein de vitamine A avec des f & l plutôt qu’avec des aliments d’origine animale... En plus d’élargir les asso- ciations espèce/apport/bienfait atten- dues, nous pourrions aussi contester les plus galvaudées (ex. un jus d’orange ABC pasteurisé, c’est léger en vitamines!). Bien sûr, cela déplairait aux nutritionnistes érudits qui, tel un médecin avec son patient, se plaisent parfois à compliquer, cela ne ferait pas forcément l’affaire des contrôleurs de la DGCCRF qui frétillent dès qu’ils découvrent une mention obligatoire manquante sur un balisage, mais bon, si tous les distributeurs avaient bastonné avec constance un message simple et récurrent comme celui de Leclerc « Leclerc, les prix » plutôt que d’enfumer les consommateurs avec des concepts marketing fumeux venus des pays scandinaves, certains d’entre eux ne seraient pas en déficit d’image. Des applications pour informer et éduquer ET SI ON TROUVAIT LE MOYEN VIA DES APPLICATIONS, D’INFORMER ET D’ÉDUQUER MME MICHU ? SI LE SMARTPHONE ARRIVAIT À FAIRE CE QUE LA FILIÈRE SE LAMENTE DE NE PAS RÉUSSIR DEPUIS DES ANNÉES ? IMAGINONS DES APPLICATIONS GRATUITES POUR SIMPLIFIER LES ACHATS FACE À L’ÉTAL. APRÈS LES APPLICATIONS INFORMATIVES LE MOIS DERNIER, NOUS SUGGÉRONS ICI DES APPLICATIONS AXÉES SUR L’ÉDUCATION DU CONSOMMATEUR.

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GRANDE DISTRIBUTION Regard d’expert

par Bertrand GUÉLY

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DREA

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IME.

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30 • vegetable.fr • no 340 / janvier 2017

Le smartphone au secours du rayon f & l

 Des applications dédiées,

un nouveau moyen d’apporter

au consommateur les informations et la culture f & l qui lui manquent

aujourd’hui ?”

Pour éduquer

1 T’as besoin de quelque chose mon frère ? Nous ne ferons pas, à part pour quelques femmes de médecin désœuvrées et quelques têtes (hipsters) à claques (vous savez, ceux qui coupent une par-tie de leurs cheveux pour se les coller sur le menton et mélangent hardiment les fringues foncées avec des chaussures pointues marron), nous ne ferons pas des consommateurs des spécialistes de la nutrition. Nous avons tort de nous obstiner à essayer de faire, en quelques samedis après-midi, de Madame Michu un dis-ciple du Docteur Dukan. Par contre, nous pouvons travailler des associa-tions entre un besoin basique de notre corps et l’espèce disponible à ce moment la plus apte à le combler. Un peu à la façon des astuces de grand-mères, l’application indiquerait par exemple qu’il y a plus de vitamine C dans la

goyave et la papaye que dans les sempiternelles oranges (même si c’est moins simple à presser au petit déjeuner...), qu’on peut faire le plein de vitamine A avec des f & l

plutôt qu’avec des aliments d’origine animale... En plus d’élargir les asso-ciations espèce/apport/bienfait atten-dues, nous pourrions aussi contester

les plus galvaudées (ex. un jus d’orange ABC pasteurisé, c’est léger en vitamines!).Bien sûr, cela déplairait aux nutritionnistes érudits qui, tel un médecin avec son patient, se plaisent parfois à compliquer, cela ne ferait pas forcément l’affaire des contrôleurs de la DGCCRF qui frétillent dès qu’ils découvrent une mention obligatoire manquante sur un balisage, mais bon, si tous les distributeurs avaient bastonné avec constance un message simple et récurrent comme celui de Leclerc « Leclerc, les prix » plutôt que d’enfumer les consommateurs avec des concepts marketing fumeux venus des pays scandinaves, certains d’entre eux ne seraient pas en déficit d’image.

Des applications pour informer et éduquer

ET SI ON TROUVAIT LE MOYEN VIA DES APPLICATIONS, D’INFORMER ET D’ÉDUQUER MME MICHU ? SI LE SMARTPHONE ARRIVAIT À FAIRE CE QUE LA FILIÈRE SE LAMENTE DE NE PAS RÉUSSIR DEPUIS DES ANNÉES ? IMAGINONS DES APPLICATIONS GRATUITES POUR SIMPLIFIER LES ACHATS FACE À L’ÉTAL. APRÈS LES APPLICATIONS INFORMATIVES LE MOIS DERNIER, NOUS SUGGÉRONS ICI DES APPLICATIONS AXÉES SUR L’ÉDUCATION DU CONSOMMATEUR.

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Impossible n’est pas f & l !Compte-tenu de la multitude d’applications diverses et variées qui existe, il est probable que certaines de celles dont j’ai rêvé existent déjà, peut-être seulement sous une forme un peu différente. Il convient alors de mieux en faire la promotion.

Par ailleurs, il est inévitable de devoir faire face a priori à certaines impossibilités techniques. Ces difficultés ne doivent pas être des freins dans la capacité à innover car ne pas s’attaquer au « ça n’est pas possible ! » asséné avec toutes nos certitudes bien françaises condamne à une approche timorée à la Tim Cook, qui consiste à s’éloigner peu à peu des vraies ruptures auxquelles nous avait habitués le regretté Steve Jobs.

Enfin, je suis conscient qu’il y a quelque chose d’un peu désespérant dans le fait de devoir passer par des applications pour tenter d’apporter des choses qu’on peine à distiller par ailleurs à Madame Michu mais, bon, modernité oblige !

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Le mois prochain : Les vertus de la simplicité

2 T’as le look logo ! La multiplication des certifi-cations/labels/marques en tous genres perturbe plus qu’elle n’oriente et n’apporte vraiment pas grand chose. Les consommateurs, au-delà de l’aspect plus ou moins réussi du logo, ne savent quasiment jamais ce qu’il représente. On peut envisager une application sous forme de tableau comparatif qui pourrait indiquer les principales caractéristiques sur le plan social, environnemental, sélectif et qua-litatif et, surtout, permettrait de tordre le cou à un certain nombre d’idées fausses. Non, un produit Bio n’est pas forcément gustativement meilleur, non l’Agriculture Raisonnée n’est pas un concept de Luc Ferry, oui les produits de certains sont surtout une accessoirisation mar-keting, oui certaines bonnes bouilles de batra-ciens permettent aux distributeurs en déficit d’image de bon citoyen de s’en acheter une à moindre coût. On peut aussi envisager des clés d’entrée permettant au consommateur d’aller à l’essentiel : si je veux que les producteurs soient mieux rémunérés, je choisis le commerce équi-table Max Havelaar, si je veux moins de résidus de pesticides chimiques, je choisis le bio, si je veux du goût, je choisis le Label Rouge, si je veux que le produit vienne de là où on est censé le cultiver, je choisis les I.G.P.

3 D’où c’est de saison ? À défaut d’arriver à expliquer au consomma-teur que l’espèce concernée est forcément de saison quelque part, que le fameux bilan car-bone – que personne ne sait d’ailleurs bien réellement calculer/expliquer – d’un pro-duit importé par bateau n’est pas forcément moins bon qu’un produit local stocké x mois en chambre U.L.O., que les produits importés créent aussi des emplois et facilitent la séden-tarisation de certaines populations, que la France est aussi bien contente d’exporter une partie de ses f & l... On peut au moins essayer de déculpabiliser certains clients mondialistes et dire que c’est la saison de la cerise au Chili en décembre, que le plaisir de man-ger passe aussi par la diversité et le chan-gement...

4 Où sont les fermes ? Avec leurs gestes plein de charme... Pour éviter tous les intermédiaires amateurs surfant avec plus ou moins de sérieux sur l’intérêt pour le local, une application recensant et localisant les pro-ducteurs dans moins de x kilomètres, s’étant signalés comme tel, avec éven-tuellement la possibilité d’aller les visiter pour acheter, pourrait servir aux vrais branchés local.

5 J’apprends à lire avec BalisorÀ défaut de pouvoir les sim-plifier – nous sommes en France – il me semble intéres-sant d’apprendre à Madame Michu à lire et à traduire les balisages. J’imagine, la faisabilité technique restant à vérifier, le scan de l’étiquette et la « traduction » sur la base de blocs de mots-clés. Cette application aurait plusieurs objec-tifs : traduction en termes intelligibles (ex. acide ascorbique devient jus de citron), explica-tion des concepts (ex. : donner des A.J.R. plus qu’une simple traduction des abréviations), comment se mesure le calibre, quelques infos pour étonner (ex. : qui sait qu’il faut plus d’un

an en production avant de pouvoir récolter un ananas ?)...