Derniers titres - Numilog

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Derniers titres déjà parus

PAUL BERNA LA DERNIÈRE AUBE CH. GRENIER ET W. CAMUS CHEYENNES 6112 PIERRE PELOT LE PAIN PERDU LUCE FILLOL MARIA DE AMOREIRA CHRISTIAN GRENIER LE SATELLITE VENU D'AILLEURS JAA TER HAAR LE CAUCHEMAR DE LA NUIT HÉLÈNE VALLÉE LE MAITRE DE SEIJALA PIERRE PELOT JE SUIS LA MAUVAISE HERBE... W. CAMUS ET CH. GRENIER UNE SQUAW DANS LES ÉTOILES YVON MAUFFRET LE CHEMIN DU LARGE SERGE DUROUSSEAU LE MEXICAIN JOHN BRANFIELD LA CITADELLE INTERDITE WILLIAM CAMUS OPÉRATION CLIK-CLAK ANNE PI ERJEAN PAUL ET LOUISE JACQUELINE CERVON LA JARRE PERCÉE PIERRE PELOT LES NEIGES DU COUCOU W. PRIBIL et E. PICHLER ET LE DÉSERT REFLEURIRA... MAURICE VAUTHIER SANTOS JAN TERLOUW MICHEL ALKI ZEI LA GUERRE DE PETROS HARRY MAZER SEULS DANS LA TOURMENTE LUCIEN TOUATI ...ET PUIS JE SUIS PARTI D'ORAN MICHEL GRIMAUD UNE CHASSE EN ÉTÉ CHARLES GRENIER LE SOLEIL VA MOURIR JACQUELINE CERVON LA GRIFFE DU FAUVE JEAN-CLAUDE ALAIN LES ENFANTS DE DUBLIN

grand angle

William Camus

Le poulet

éditions g.p. paris

DU MEME AUTEUR dans la même collection

OPÉRATION CLIK CLAK avec la collaboration de Christian Grenier

CHEYENNES 6112 UNE SQUAW DANS LES ÉTOILES dans la collection Olympic

LE FAISEUR DE PLUIE (Sélection J.L.P. - Jeunes, Lectures, Promotion)

OUTI TANKA, JEUNE BISON L'OR DES FOUS

CE SACRÉ FARWEST dans la collection Super 1000

LORSQUE VINRENT LES VISAGES PALES VERS LES TERRES DE GRAND MÈRE

(Sélection J.L.P. 1976 - Jeunes, Lectures, Promotion) dans la collection Spirale LES AUBES ROUGES

La Loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et ? de l'Article 41, d'une part, que les « copies ou reproductions stric- tement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite » (alinéa 1 de l'Article 40).

Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les Articles 425 et suivants du Code Pénal.

© 1977 - Editions G.P.. Paris ISBN 2-261-00253-X

Je tiens spécialement à remercier les ser- vices de Police judiciaire et de la Brigade des mineurs qui m' ont si aimablement délivré la documentation utile à la rédaction de ce livre.

J'adresse aussi toute ma reconnaissance à Mme et M. B... sans lesquels cet ouvrage n'aurait jamais vu le jour.

CHAPITRE PREMIER

ÇA N'A PAS COMMENCE

P PONTAULT !... Seine-et-Marne... Code postal : 77340 !

L'O.C.I.L., l' ensemble d' habitations, lance ses tours de béton blafard vers le ciel. Un ciel pas très bleu, qui en a honte, et qui se cache derrière une écharpe grise de nuages. Le centre commercial de l'O.C.I.L. Un mou- choir de poche où les magasins se serrent les uns contre les autres. Un univers réduit, pour Lilliputiens. Un sac dans lequel on a fourré l'essentiel. Un endroit pratique mais sans vie. Des passants..., rien que des passants. Des heures de pointe. Animation éphémère, de dix heures à midi et demi, de seize à dix-neuf heures... et c'est tout ! Après... le vide. Un vide fonctionnel quand le centre commercial a rempli son rôle.

Rythme des ensembles modernes. Frac- tions de vie sporadiques. Temps morts où le vent fait voler les vieux papiers.

L'opticien, le libraire, le charcutier, le bou- langer, le magasin de vêtements de sport, le bureau de tabac...

Jean Morel jette ses deux francs sur le marbre. Les pièces tintinnabulent pour atti- rer l'attention du patron.

— Ah ! bonjour, monsieur Morel. Des Gauloises filtre ?

— Oui, comme toujours. Le paquet bleu disparaît dans la poche de

Morel. — Bonne journée ! — Vous aussi ! ... La librairie. La collection des livres du

commandant Cousteau. Sur l'un d'eux, l'au- teur dans sa combinaison de plongée en plas- tique, palmes aux pieds, lunettes étanches sur les yeux... Un Martien !

Morel sourit. Jean Morel... Un homme comme les autres.

Pas de menton carré, pas d'œil de lynx, pas de muscles hypertrophiés, pas de super- cerveau...

... Seulement un automatique sous l' ais- selle gauche dans son holster de cuir noir.

Un flic. Un inspecteur. Un « agent de Police

judiciaire », comme disent les règlements du ministère de l'Intérieur. Oui, Morel, un gars normal, marié, deux

enfants. Le Français moyen, sans signe par- ticulier. Mais un inspecteur avec son 7,65 sous le

bras. Un policier. Plus spécialement chargé des mineurs. Un pétard à la James Bond avec sept balles

dans le chargeur... pour s'occuper des jeunes délinquants, est-ce bien utile ? Bah ! Sait-on jamais... Et puis, c'est le règlement.

— Salut, poulet ! Morel s'arrête, se retourne. — Bonjour, Pilule. Pilule est là, dans son vieux jean, encastré

sous la voûte qui sépare le libraire du char- cutier. Un Pilule de dix-huit ans, long comme une planche, avec un visage tout piqueté de taches de son... Une planche avec des noeuds !

Un jeune gars affublé d'un sobriquet. Un caractère déjà bien forgé. Une planche avec des nœuds, rêche, sèche.

Pilule ! Ce surnom lui a été donné par des copains.

Avant, ils l'appelaient Pierrot. Avant qu'ils se soient aperçus que Pierrot rêvait et contait ses rêves à sa façon. Il voyait un monde comme il n'en existe pas. Comme il ne peut en exister. Alors, les autres lui ont dit tant

de fois : « Tu nous dores la pilule », que le sobriquet lui est resté.

Aujourd'hui, personne ne sait plus com- ment s'appelle réellement Pilule. A part l'inspecteur Morel, qui a sur lui un dossier classé aux archives du commissariat de Pontault.

A moins que lui aussi n'ait oublié, ou qu'il ne fasse semblant. — Ça boume, poulet ? — Oui, ça boume. Morel sort ses cigarettes de sa poche et

entreprend d'ouvrir le paquet... Morel sait par expérience qu'avec Pilule il

faut adopter certaines attitudes et employer un certain vocabulaire. User de son argot. Sinon, Pilule vous traite de bêcheur et il n'écoute plus. Et un jeune qui n'écoute plus parce qu'on n'a pas su se mettre à sa portée, c'est un échec pour l'inspecteur Morel.

De plus, il faut bien le dire, Pilule est un cas.

Si Morel l'autorise à l'appeler « poulet », c'est qu'il a toujours su que Pilule en avait besoin, pour s'affirmer. Oser dire poulet à un inspecteur, ça vous pose, ça réconforte, ça vous prouve qu'on a assez de culot pour affronter la vie. Qu'on a du cran, qu'on n'est pas un dégonflé... Après un an de sana, utile à neutraliser un début de tuberculose, il faut

se prouver qu'on a repris des forces, qu'on est armé pour se faire une place dans la société. Et même, si tout va bien, une place au soleil ! Pourquoi pas ?

Morel tend son paquet. — Tu en veux une toute roulée ? — Très peu pour moi. Je ne fume que des

anglaises. Ces saloperies de Gauloises me font tousser.

— Le mieux serait de ne pas fumer du tout..., rapport à tes poumons...

Pilule est d'une susceptibilité effrayante. — Qu'est-ce qu'ils ont, mes poumons ? Et

puis, vous fumez bien, vous ! — D'accord, tu as raison. Pilule extirpe un paquet de Player's d'une

de ses poches, s'en visse une au coin de la bouche.

— Alors, poulet, on est sur la grosse affaire ? Ça barde en ce moment à la télé, la drogue à Orly, les hold-up avec prises d'otages...

— Tu parles d'une grosse affaire. Pour ma part, elle se résume à huit vélomoteurs volés en quinze jours. Une misère. Pas de quoi faire un western et avoir sa photo dans le journal.

Pilule fait sa gueule en coin. — Les vélos..., encore des jeunes, hein,

poulet ? — Sans doute.

Une lueur mauvaise apparaît dans les yeux gris de Pilule.

— C'est ça, je ne vous le fais pas dire ! C'est encore ces bon Dieu de jeunes qui fou- tent la merde partout, qui braquent les rentières, qui attaquent les banques, qui fauchent les vélos..., tout, quoi !

Morel reste calme, il a l'habitude. — Entre nous, tu as déjà entendu parler

d'un grand-père qui volait des vélomoteurs ? Prompt à s'emporter, Pilule sait aussi être

juste, à sa manière. — C'est vrai ! Mais, à part ça, faut admet-

tre que les jeunes vous les avez dans votre collimateur, à la maison poulaga. Aussitôt qu'il y a une connerie de faite, vous gueulez tous : « C'est les jeunes ! » Selon vous, la jeunesse, c'est la plaie du monde, hein, poulet ?

— J'ai pas dit ça. Cependant, il y a les statistiques...

— Oh ! vous, les flics, sans les statistiques on se demande ce que vous deviendriez. Moi, tout con comme je suis, je vais vous le dire d'où vient le mal. Démolissez les barrières que vous dressez entre les jeunes et vous et pas mal de choses s'arrangeront d'elles- mêmes. C'est pas en braillant constamment contre les jeunes, en leur collant tout sur le dos que vous arriverez à un résultat. Ça les

braque, poulet, ça les braque. Et puis, on dirait vraiment que vous les avez en grippe, les moins de vingt ans. Et merde, vous ne les loupez pas !

— Tu dis des conneries grosses comme toi, Pilule. La jeunesse, au départ, on n'a rien contre.

— Ça ne vous a pas empêché de m'épin- gler le jour où j'ai emprunté une tire, histoire de faire une balade en Capri. Une Ford Capri ! Une bagnole que je ne pourrai peut- être jamais me payer en bossant toute ma vie comme un dingue.

— Cette voiture, tu l'avais volée, Pilule. Et c'était mon devoir de policier de t'arrêter.

— Pour une balade, c'est plutôt sec ! — Non pas pour une balade. Pour un vol

de voiture, c'est différent. Mon vieux, si tu es décidé à piquer tout ce que tu ne pourras jamais t'offrir, tu n'es pas sorti de l'auberge. Mieux vaut te mettre ça dans la tête dès maintenant.

Pilule hausse une épaule. — N'empêche que j'ai eu droit à tout le

répertoire de la flicaille. La garde à vue, la ceinture et les lacets de chaussures au ves- tiaire, le juge pour enfants... et tout le tou- tim, quoi ! Tenez, aujourd'hui, je peux vous le dire, quand je me suis retrouvé devant le juge, j'ai pensé : « Cet inspecteur Morel,

c'est quand même une belle vache ! » Et savez-vous pourquoi j'ai dit ça ? Non, bien sûr ! Eh bien, c'est du fait que vous nous dites toujours : « Vous, les jeunes, on veut vous aider. » Au lieu de cela, vous m'avez gâté, hein, poulet ?

Morel allume sa deuxième cigarette du matin. — Oui, je t'ai gâté. Car ce que tu ne sais

pas c'est qu'après t'avoir entendu, après avoir tapé ta déclaration, après t'avoir fourré dans le placard, je me suis quand même rendu compte que tu n'étais pas un type absolument pourri. Alors j'ai complété mon rapport avec mes impressions personnelles...

— Une page à faire chialer un magistrat, en sorte ? — Peut-être. Toujours est-il que c'est

grâce en grande partie à cette page d'écriture que tu es ici en ce moment devant moi, en train de fumer des anglaises, au lieu de moisir en tôle à réfléchir sur tes balades en voiture.

Pilule a sursauté. — C'est vrai, poulet ? Vous avez réelle-

ment intercédé pour moi ? — C'est comme je te le dis. Pilule plante son regard dans celui de

l'inspecteur. Son instinct lui dit que Morel ne ment pas.

Un poulet pas comme les autres ? Ce Morel ne ressemble décidément pas à

l'idée que Pilule se faisait d'un flic. Oh ! ce n'est pas qu'il soit prêt à encenser tous les policiers de la terre, y compris Morel. Mais peut-être après tout qu'il y en a des bons et des mauvais. Les sensibles et ceux à la matraque, le tout venant. Ceux qui appli- quent la loi avec des œillères et ceux qui l'interprètent. Les cons et les intelligents. Les gueulards tout à trac et les calmes...

Un même moule, bien sûr. Mais d'où sor- tiraient des vaches et des pas trop vaches... Voire des pas vaches du tout, plus rarement. Des raisonneurs à l'emporte-pièce et des raisonnés.

Pilule n'en est pas encore à penser qu'il puisse en exister de franchement bons. Pour lui, un poulet ne peut être entièrement bon. Parce qu'un poulet c'est avant tout un pou- let. Un type à part. Une exception... Un fonctionnaire !... A la rigueur, Pilule com- prendrait mieux un douanier, bien qu'il n'ait jamais assimilé le rôle exact de cette profession.

— Qu'est-ce que tu voulais dire tout à l'heure avec ton histoire de barrière entre les jeunes et les adultes ?

Pilule arrache la dernière Player's de son paquet.

— Ben, des tas de trucs. Des barrières, c'est des barrières. Des machines qui nous séparent.

— Quoi encore ? — Par exemple, ce ton de bonne sœur que

prennent la plupart du temps les vieux pour nous parler. Et puis, ce qu'ils peuvent faire et pas nous, parce qu'on est soi-disant encore trop jeunes. Aussi tous ces prêchi-prêcha sur le respect, comme si nous seuls devions en avoir et pas eux.

Jean Morel jette son mégot et reprend une Gauloise. Il pense qu'il fume trop. Beaucoup trop. Un sourire secret plisse le coin de ses yeux.

— Dis-moi, Pilule, j'ai l'impression que tu es beaucoup plus vieux qu'il n'y paraît. Tu ne crois pas qu'il serait temps de cesser de jouer au jeune martyr ? En outre, au sujet de tes barrières, ça te gênerait de me tutoyer ?

Pilule hésite, feint l'indifférence, et lâche : — J'aimerais. — Alors, c'est dit ! Nous aurons au moins

démoli cette barrière-là. Morel tend la main. Pilule vient y caler ses

doigts osseux. Les regards se soudent. — Merde ! fait Pilule. Si on m'avait dit qu'un jour... — Tout arrive. Tu vois...

— Oui, mais ça veut pas dire que j'ai changé d'idée sur les flics !

— Bien sûr, bien sûr. Tu ne veux toujours pas fumer une de mes Gauloises ?

— Pour une fois... Et puis, j'ai plus d'an- glaises.

Le bout des cigarettes rougeoie. Ce ne sont plus les cigarettes qu'on fumait

chacun de son côté. Ce ne sont plus les mêmes, et le tabac n'y est pour rien.

— Au fait, Pilule, qu'est-ce que tu fabri- ques au centre commercial de l'O.C.I.L. à neuf heures du matin ? Tu ne travailles pas ?

— Au chômage ! Compression de person- nel pour raisons économiques, qu'ils ont dit.

— C'est moche, non ? — Bah ! vous... tu sais, poulet... Au fait,

je peux continuer à t'appeler poulet ? — Ça ne me dérange pas. Au contraire,

j'aime bien. Pilule avale sa salive. — Pour en revenir à mon boulot, tu sais,

en fin de compte, c'est pas la catastrophe. J'ai droit à 90 % de mon salaire. C'est la belle vie ! Les vacances ! Aux frais de la société de consommation.

Morel fait celui qui s'en moque aussi. Il a parcouru trop de chemin en un petit quart d'heure pour tout flanquer par terre en jouant les réformateurs. Puisque Pilule

Le Poulet, c'est ainsi que Pilule appelle l'inspecteur Jean Morel. Pilule est un jeune au bord de la délinquance. Jean Morel est un policier consciencieux. Trop peut-être? Ou pas assez ? Claude Morel est son fils, un garçon bien, selon les normes de la société. Claude se rend à un festival pop... Il en revient contestataire... Et un corps étranger se glisse dans la machine familiale si bien huilée ! Alors c'est le drame, imprévisible, horrible, dans toute son ampleur !

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