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1 / 107 DEPLOIEMENT DES RESEAUX TRES HAUT DEBIT SUR L’ENSEMBLE DU TERRITOIRE NATIONAL RAPPORT D’ÉTUDE TECHNOLOGIES ET COUTS DE DEPLOIEMENT MECANISMES DE SOUTIEN POSSIBLES Etude réalisée pour le compte de la DATAR Par les cabinets TACTIS et SEBAN & ASSOCIES Avec le soutien du CETE de l'Ouest A la demande du Ministre de l’Espace Rural et de l’Aménagement du Territoire Janvier 2010

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DEPLOIEMENT DES RESEAUX

TRES HAUT DEBIT

SUR L’ENSEMBLE DU TERRITOIRE

NATIONAL

RAPPORT D’ÉTUDE

TECHNOLOGIES ET COUTS DE DEPLOIEMENT

MECANISMES DE SOUTIEN POSSIBLES

Etude réalisée pour le compte de la DATAR

Par les cabinets TACTIS et SEBAN & ASSOCIES

Avec le soutien du CETE de l'Ouest

A la demande du Ministre de l’Espace Rural et

de l’Aménagement du Territoire

Janvier 2010

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Résumé

Le déploiement du très haut débit constitue un enjeu économique majeur pour le

développement de la société de l'information, l'attractivité des territoires, les entreprises de

travaux publics, les équipementiers télécoms, les opérateurs et les fournisseurs de services à

valeur ajoutée, et toutes les entreprises et organisations utilisatrices.

Dans le cadre de la stratégie de Lisbonne visant au développement de l'économie de la

connaissance, les enjeux liés au développement du très haut débit peuvent justifier une

intervention vigoureuse des pouvoirs publics au cours des prochaines années, aux niveaux

communautaire, national et territorial, comme l’indiquent les lignes directrices adoptées par la

Commission.

Le très haut débit peut être fourni de plusieurs manières complémentaires :

- par déploiement de nouveaux réseaux tout optique jusqu'aux abonnés ; ces réseaux

permettent d'acheminer plusieurs centaines de mégabits par seconde, de manière

symétrique en voies montante et descendante ;

- par modernisation des réseaux cuivre téléphonique et coaxial existants ; cette

modernisation permet d'écouler plusieurs dizaines de mégabits par seconde en voie

descendante, et quelques mégabits en voie montante ;

- et par les technologies hertziennes de nouvelle génération ; chaque station de base a une

capacité de plusieurs centaines de mégabits, mais le débit est partagé entre les usagers

desservis par la station de base mobile.

Le tableau ci-dessous présente les coûts de déploiement pour différents niveaux de couverture :

Taux de couverture et technologies utilisées Coût

total

dont

financement

public

80% de la population et des entreprises

couverts en fibre optique à l’abonné (FTTH) 15 Mds€ 6 Mds€

100% de la population et des entreprises

couverts dont 80% en FTTH et 5% par

équipement des sous-répartiteurs et 15% en

4G/LTE (mobile de prochaine génération)

18 Mds€ 8 Mds€

100 % de la population et des entreprises

couverts en fibre optique à l’abonné 30 Mds€ 15Mds€

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La rentabilité du très haut débit et notamment de la fibre optique est obérée par la perspective

d'une concurrence durable avec le réseau cuivre téléphonique existant et les offres haut débit

que supporte ce dernier. Ceci explique que dans plusieurs pays soit considérée l’hypothèse d’une

séparation structurelle de l'opérateur historique entre l’infrastructure passive et les autres

activités. Cette séparation structurelle permet au propriétaire de l’infrastructure de financer la

transition vers le très haut débit en y réinvestissant les revenus du monopole de la boucle locale

téléphonique en cuivre, tout en prévenant les distorsions de concurrence entre opérateurs

utilisateurs de la boucle.

Compte-tenu de la structure de marché actuelle, les opérateurs de télécommunication ne

peuvent équilibrer les coûts liés à un déploiement du très haut débit sur l’ensemble du territoire

national. Le besoin de financement public est de l'ordre de 8 milliards d’euros pour couvrir tout le

territoire en très haut débit. La couverture en fibre optique serait complétée en zone rurale par

l'équipement des sous répartiteurs et le déploiement des technologies hertziennes de prochaine

génération. A ces 8 milliards de financement public, s’ajoutent des possibilités de soutien en

termes d’autres interventions publiques (capital public, prêts bonifiés et garanties d’emprunt) qui

peuvent prendre des formes et montants très variés.

L’intervention publique viserait d’une part à dynamiser le déploiement de la fibre dans les zones

où les réseaux peuvent être rentables et d’autre part à permettre son déploiement dans les zones

non rentables pour les acteurs privés.

La modulation du financement public permettrait d’établir une forme de péréquation entre les

zones. L’Etat pourrait intervenir aux côtés de collectivités, dans le cadre de délégations de services

publics (DSP) ou de partenariats public privé (PPP). Dans ce type de montage, la participation

publique est souvent accordée en contrepartie d’un Service d’Intérêt Economique Général (SIEG)

et de la propriété des réseaux à terme, s'assimilant donc à un investissement public direct offrant

une rentabilité différée.

Si un fonds de soutien au très haut débit était créé, il pourrait intervenir en capital, en prêts à taux

bonifiés et en financement de DSP ou PPP en fonction de la nature des projets qui lui seraient

soumis. Le besoin d’investissements publics est de l’ordre de 500 millions d’euros par an sur 15

ans. Le fonds de soutien pourrait être abondé pour partie par le grand emprunt et pour partie par

une taxe opportuniste, par exemple de la même manière qu’a été alimenté le fonds national de

développement des adductions d'eau.

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Sommaire

I- INTRODUCTION............................................................................................. 6

II- RÉSEAUX ET TECHNOLOGIES TRÈS HAUT DÉBIT ............................................. 8

A) LES RESEAUX TELEPHONIQUE ET CABLE MODERNISES ...................................................... 9

B) LES RESEAUX TOUT OPTIQUE ................................................................................... 10

C) LES TECHNOLOGIES HERTZIENNES ............................................................................. 11

III- COUTS DE DÉPLOIEMENT DU TRÈS HAUT DÉBIT .......................................... 12

A) RESEAU TOUT OPTIQUE : TRENTE MILLIARDS D’EUROS .................................................. 12

B) COMPARAISON AVEC LE RESEAU TELEPHONIQUE.......................................................... 15

C) TECHNOLOGIES TRES HAUT DEBIT ALTERNATIVES ......................................................... 17

D) SYNTHESE DES COUTS DE DEPLOIEMENT..................................................................... 20

IV- EQUILIBRES ÉCONOMIQUES ........................................................................ 21

A) ECONOMIE DE LA BOUCLE LOCALE ............................................................................ 21

B) UN PROBLEME DE RECETTES, PAS DE COUTS ............................................................... 21

C) CAPACITE DE FINANCEMENT DES ACTEURS PRIVES........................................................ 23

V- LE DÉPLOIEMENT DES AUTRES INDUSTRIES DE RÉSEAU .............................. 24

A) OCTROI DE PREROGATIVES DE PUISSANCE PUBLIQUE .................................................... 24

B) OCTROI D’UNE SITUATION DE MONOPOLE OU D’OLIGOPOLE LEGAL.................................. 25

C) MECANISMES DE PEREQUATION............................................................................... 26

D) FACILITES DE FINANCEMENT .................................................................................... 29

E) ATTRIBUTION DES AIDES ET ORGANISATION INSTITUTIONNELLE....................................... 30

F) SYNTHESE ........................................................................................................... 31

VI- LES SOUTIENS POSSIBLES AU DÉPLOIEMENT DU TRÈS HAUT DÉBIT ............. 32

A) STRUCTURATION INDUSTRIELLE DES OPERATEUR DE FIBRE OPTIQUE ................................. 32

B) LES TECHNOLOGIES ALTERNATIVES............................................................................ 38

C) AIDES NON FINANCIERES ........................................................................................ 41

D) AIDES EN CAPITAL ET EN PRET .................................................................................. 44

E) AIDES EN APPORTS PUBLICS..................................................................................... 46

F) BESOIN ET SCENARIO D’INTERVENTION PUBLIQUE……………………………………………………...50

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ANNEXE 1 COUTS DE DEPLOIEMENT DES RESEAUX TRES HAUT DEBIT ................. 53

I- DONNÉES SOURCES..................................................................................... 54

II- DÉFINITION DE L’ÉCHANTILLON................................................................... 54

III- DÉFINITION DES SCÉNARII DE COUVERTURE ............................................... 55

IV- MÉTHODOLOGIE DE MODÉLISATION DU RÉSEAU OPTIQUE A DÉPLOYER .... 56

V- RÉSULTATS DE LA MODÉLISATION............................................................... 58

VI- COÛTS UNITAIRES RETENUS DANS LE MODÈLE ........................................... 59

VII- COMPLÉMENTS DE COUVERTURE A LA DESSERTE FTTH............................... 60

ANNEXE 2 LES MECANISMES DE FINANCEMENT DES INFRASTRUCTURES ............ 63

I- MECANISMES DE PEREQUATION HORIZONTALE EXISTANT ......................... 64

A) ELECTRICITE......................................................................................................... 64

B) GAZ ................................................................................................................... 68

C) COMMUNICATIONS ELECTRONIQUES......................................................................... 68

D) TRANSPORTS AERIENS............................................................................................ 70

E) TRANSPORTS FERROVIAIRES .................................................................................... 71

F) AUTOROUTES ET GRANDS RESEAUX DE TRANSPORTS..................................................... 73

G) POSTE ................................................................................................................ 76

H) EAU ................................................................................................................... 79

I) PRESSE ............................................................................................................... 80

J) AUDIOVISUEL....................................................................................................... 82

II- AUTRES TYPES D’AIDES ENVISAGEABLES POUR LES OPERATEURS ............... 85

A) PRETS A TAUX BONIFIE ........................................................................................... 85

B) GARANTIES D’EMPRUNT......................................................................................... 85

C) GARANTIES D’EMPRUNTS ACCORDEES PAR LES BANQUES AUX ENTREPRISES ...................... 87

D) PARTICIPATION ET DOTATIONS EN FAVEUR D’UN FONDS DE GARANTIE ............................. 88

E) APPORTS EN CAPITAL............................................................................................. 88

ANNEXE 3 ÉLEMENTS CARTOGRAPHIQUES.......................................................... 90

I- ARRONDISSEMENT DE FAIBLE DENSITÉ : RODEZ.......................................... 91

II- ARRONDISSEMENT DE DENSITÉ MOYENNE : SAINT-OMER.......................... 96

III- ARRONDISSEMENT DE DENSITÉ SUPÉRIEURE À LA MOYENNE : ETAMPES . 101

IV- IMBRICATION DES ZONES RENTABLES ET NON RENTABLES ....................... 106

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I- INTRODUCTION

Le soutien au déploiement des réseaux très haut débit sur le territoire national est

perçu comme un enjeu stratégique par les pouvoirs publics pour plusieurs

raisons principales :

- Le déploiement des réseaux de fibre optique, et plus généralement des réseaux

très haut débit, suppose des opérations de génie civil, de tirage de câble puis

d’installation dans les immeubles et les logements. Elles représentent plus de la

moitié du coût de déploiement du très haut débit et sont génératrices de

croissance et d’emplois, moyennement qualifiés, non délocalisables.

- Le développement du marché entrainera un besoin d’équipement en

équipements actifs de nouvelle génération, de transmission sur les réseaux

d’accès fixe et mobile ou d’équipement des ménages en terminaux mobiles ou

« box » optiques. Des équipementiers peuvent bénéficier d’un marché national

dynamique et précoce pour initier des chaines de production leur permettant de

se renforcer ensuite à l’international.

- Le développement rapide d’un marché national du très haut débit peut, de

même, favoriser le développement d’entreprises innovantes sur de nouveaux

services ou la constitution d’une base de savoir faire susceptible d’essaimer à

l’international. Les Etats-Unis, menant une politique volontariste sur Internet au

milieu des années 90, alors que la France pensait encore disposer d’une avance

sur les services télématiques d’ancienne génération, servent ici de référence.

- Les technologies de l’information et de la communication permettent de gains

de productivité importants et sont génératrices du quart de la croissance des

pays les plus avancés. Le passage au très haut débit, en permettant

l’hébergement et la maintenance de données et surtout d’applications

distantes, favorisera la compétitivité des petites et moyennes entreprises

françaises.

- Plus largement, l’amélioration de la connectivité participe du développement de

l’économie de la connaissance et s’inscrit dans la stratégie de Lisbonne. Les

applications en devenir liées à l’enseignement, à la médecine, à la sureté, à la

gestion de l’espace publique, à la domotique, supposent le déploiement de

réseaux à large bande, plus performants et fiables que les réseaux haut débit

existants.

- Finalement, une politique publique volontariste menée dès le début du cycle

d’investissement vers le très haut débit est susceptible d’anticiper et de limiter

les disparités territoriales, évitant ainsi l’apparition d’une fracture numérique

pérenne entre des grandes villes dotées de moyens de télécommunications

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performants et de zones moins denses structurellement en retard par rapport

aux standards internationaux.

Le présent rapport vise à éclairer les décisions qui pourraient être prises pour

favoriser le déploiement des réseaux très haut débit. Dans un premier temps, les

technologies pertinentes sont identifiées ainsi leurs coûts de déploiement respectifs

et le besoin de financement public attaché. Des scénarios de référence sont

proposés pour leurs articulations possibles dans le temps et sur le territoire. Ensuite,

le rapport rappelle les principaux mécanismes de soutien et de péréquation

historiquement mis en œuvre pour le déploiement des grandes infrastructures,

notamment pour l’eau, l’électricité ou le rail. La dernière partie propose différents

mécanismes de soutien et de péréquation envisageables pour favoriser le

développement du très haut débit, de manière la plus homogène possible, sur le

territoire national.

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II- RESEAUX ET TECHNOLOGIES TRES HAUT DEBIT

Il n’existe pas de définition normalisée du terme très haut débit. Les liaisons

classiques dites à haut débit fournies actuellement par les opérateurs aux abonnés

résidentiels culminent à 20 Mbits sur les réseaux fixes, ce qui fixe donc une limite

basse pour le très haut débit. Les attentes portent en outre sur une meilleure

résilience des futurs réseaux vis-à-vis des perturbations extérieures, une plus grande

symétrie des capacités de transmission entre l’abonné et le cœur de réseau et un

temps de latence, c'est-à-dire de traversée du réseau,

inférieur à celui des réseaux actuels.

Les usages et applications du très haut débit

résidentiel sont encore largement inconnus. A moyen

terme, les réseaux très haut débit se distingueront des

précédents par leur capacité à véhiculer plusieurs flux

audiovisuels haute définition simultanément et à permettre une quasi instantanéité

de transmission entre l’abonné et le réseau, ce qui permet d’accéder à des

applications ou des données stockées sur des serveurs distants, par exemple une

vidéothèque, avec le même confort que si elle demeurait chez l’abonné.

Le niveau d’exigence vis-à-vis du très haut débit sera probablement évolutif dans le

temps en fonction des usages, et donc sa définition. A ce jour, l’Autorité de

régulation a retenu un débit minimal de 50 Mbits. Dans ce document, nous

considérons qu’un réseau très haut débit doit être capable d’acheminer 30 Mbits

vers chaque abonné, soit deux flux audiovisuels haute définition, disposer d’un canal

montant à haut débit et avoir un temps de traversée du réseau court permettant

ainsi l’hébergement et l’utilisation d’applications distantes sans délais de latence

perceptible par l’utilisateur.

En suivant ces critères, il existe trois principales technologies industrielle candidates

pour véhiculer, à grande échelle, des offres très haut débit au cours de la prochaine

décennie : la modernisation des réseaux historiques du téléphone et du câble, le

déploiement des nouveaux réseaux intégralement en fibre optique jusqu’aux

abonnés et les technologies mobiles hertziennes de quatrième génération, dites LTE

ou 4G. Ces trois technologies sont détaillées dans le présent rapport.

D'autres solutions peuvent exister ou être en cours de développement. Parmi celles-

ci, on peut citer le satellite et les boucles locales en Wi-Fi, WiMax et courant

porteurs en ligne (CPL). Il s'agit de technologies plutôt adaptées à la distribution du

haut débit que du très haut débit au sens de la définition précédente. Elles

pourraient être mises en œuvre de manière ponctuelle ou transitoire. Leur succès

commercial dépendra en outre de l'intégration de ces technologies dans les gammes

d'offres commerciales des grands opérateurs, ce qui n'est pas le cas à ce jour.

Le très haut débit permet d'acheminer

plusieurs chaînes haute définition et de

travailler avec des données et applications

hébergées par des serveurs distants

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A) LES RE SEA UX T EL EPHO NI Q UE ET C ABL E MODER NI SE S

Les offres d’accès haut débit se sont développées sur des réseaux de

communications électroniques préexistants. La très grande majorité des accès haut

débit est fournie sur la paire de cuivre téléphonique, initialement dédiée à

l’acheminement de la voix. Le réseau câblé, conçu pour diffuser des services

audiovisuels, est également en mesure de supporter des accès haut débit, même si

sa part de marché effective reste faible en France.

Pour permettre la fourniture de connectivité sur les réseaux métalliques, les

opérateurs ont dû procéder au cours de la dernière décennie à une première mise à

niveau. Il s’agissait pour le cuivre téléphonique d’installer des équipements de

transmission dans les répartiteurs, et de relier ceux-ci aux réseaux centraux par des

réseaux à très haute capacité en fibre optique. Pour le câble, cela suppose de passer

d’un mode de diffusion analogique à un mode de diffusion numérique, nécessitant là

aussi le déploiement de fibre optique pour

interconnecter les plaques câblées aux réseaux

mondiaux de données.

Les réseaux métalliques peuvent être modernisés une

nouvelle fois pour supporter des débits plus élevés,

pouvant être qualifiés de très haut débit au regard de

la définition précédente. La modernisation a pour

objectif de remplacer, sur le segment de desserte des abonnés constitutif d’une

boucle locale, une partie du métal, cuivre téléphonique ou câble coaxial, par de la

fibre optique. Le lien métallique est maintenu sur les dernières centaines de mètres

uniquement, alors qu’il véhiculait précédemment le signal sur plusieurs kilomètres.

L’affaiblissement du signal étant moindre sur la partie métallique, le débit est plus

élevé.

La boucle locale téléphonique peut ainsi être modernisée en substituant le câble de

transport métallique entre les répartiteurs et les sous-répartiteurs, qui sont des

armoires de rue concentrant les lignes, par des liens optiques, puis à installer les

équipements de transmission très haut débit à ce niveau. Le débit réellement

disponible pour les abonnés sera alors fonction de la longueur résiduelle de la ligne

téléphonique en cuivre.

Malheureusement, cette longueur résiduelle a tendance à être courte en zone

urbaine dense, mais reste relativement longue en zone rurale. La modernisation du

réseau téléphonique peut permettre de fournir de manière relativement homogène

sur le territoire, une connectivité à haut débit à quelques Mbits. Elle ne permettra

pas, en revanche, sauf à réinvestir très lourdement, de fournir en milieu rural des

accès très haut débit aussi performants que ceux qui commencent à être déployés

en zone urbaine.

Le réaménagement du réseau

téléphonique permettra de monter un peu

en débit, mais ne permettra pas de fournir

du très haut débit de manière homogène,

notamment en zones rurales

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Par ailleurs, le principal câblo-opérateur a lancé un plan modernisation de son

réseau qui consiste, de la même façon, à réduire la longueur de la boucle métallique

en apportant la fibre jusqu’au dernier amplificateur. On parle de technologie FTTLA

(Fibre To The Last Amplifier). La boucle locale métallique résiduelle est d’une

longueur nettement inférieure à celle de la sous-boucle locale téléphonique,

permettant d’atteindre un débit de l’ordre 100 Mbits, donc réellement à très haut

débit. Les réseaux câblés ne couvrent qu’une dizaine de millions de ménages, situés

en zone urbaine.

B) LES RE SEA UX T O UT OPT I Q UE

A long terme, la création d’une boucle locale fibre jusqu’aux domiciles et aux

entreprises, selon une technologie dite FTTH (acronyme de l’anglais Fibre To The

Home) est la seule manière d’amener une offre de très haut débit filaire avec des

performances homogènes sur tout le territoire national. Techniquement, le réseau

est intégralement en fibre optique, du répartiteur jusqu’à l’abonné. Le faible

affaiblissement du signal transmis sur une fibre, par rapport au métal, permet de

proposer un débit homogène, indépendant de la

distance au répartiteur. Dans le présent rapport, nous

qualifions ces réseaux de « tout optique ».

On distingue deux sous familles de boucle locale en

fibre optique. La technologie PON (acronyme de

l’anglais Passive Optical Network) est la plus répandue

à l’échelle mondiale pour la clientèle résidentielle. Elle consiste à amener une seule

fibre entre le répartiteur et les immeubles ou groupes de logement et à utiliser un

coupleur optique passif pour diviser le débit de cette fibre entre les abonnés

desservis. Cette technique est économe en fibre, mais un peu complexe et donc

coûteuse au niveau électronique, pour synchroniser les flux de plusieurs utilisateurs

sur une même fibre.

La technologie alternative, dite Point à Point, consiste à tirer une fibre dédiée, par

logement, entre l’abonné et le répartiteur. Il s’agit de la technologie la plus

répandue pour les entreprises. Elle est recommandée et généralement mise en

œuvre dans le cadre des projets publics, car la cohabitation de plusieurs opérateurs

sur le même réseau est plus facile à organiser qu’avec la technologie PON. La

technologie Point à Point est en revanche plus coûteuse, surtout si les points de

concentration regroupent plusieurs milliers de lignes. Le diamètre des câbles de fibre

qui en sortent est alors important et ils peuvent être difficiles à déployer dans le

génie civil existant ou sur les appuis aériens.

Les principaux opérateurs ont commencé à déployer des réseaux tout optique,

concurrents les uns des autres, dans les plus grandes agglomérations. Cette

multiplication des déploiements est intrinsèquement peu rentable. Pour rentabiliser

le déploiement de ces réseaux en zone de faible densité, un partage des coûts entre

A long terme, les réseaux seront

intégralement en fibre optique. Ces

réseaux sont dits FTTH (acronyme

de l’anglais Fibre To The Home)

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opérateurs est indispensable. Le fait que les opérateurs soient concurrents et leurs

différences de capacité de financement, de position sur le marché, et donc de

stratégie, rend difficile la conclusion spontanée d’accords de coinvestissement. Au-

delà de la zone urbaine rassemblant une quinzaine de millions de ménages, aucune

perspective de déploiement tout optique sur fonds privés n’existe à ce jour.

C) LES T ECH NOL OG IES HERT Z IEN NES

Plusieurs technologies hertziennes sont utilisées pour fournir des accès haut débit.

Les technologies satellitaires sont intrinsèquement limitées par les délais de

traversée du réseau et la bande passante disponible, partagée en un grand nombre

d’utilisateurs potentiels. Les technologies terrestres permettent en théorie de

fournir des accès haut débit de relativement bonne qualité. En France, l’utilisation

de la téléphonie mobile de troisième génération (3G) pour le transfert de données a

connu une explosion au cours de la dernière année, avec la généralisation des

smartphones, comme l’i-phone, et des clefs 3G pour

ordinateurs portables. Les performances restent

cependant en deçà de celles des réseaux filaires haut

débit actuels.

Les industriels fondent de grands espoirs dans la 4G

(ou LTE) évoquée plus haut. Cette technologie pourrait

en particulier être utilisée dans la bande spectrale

libérée par l’extinction de la diffusion analogique de la télévision, communément

appelée « dividende numérique », qui est bien adaptée à une transmission à longue

distance, donc à l’aménagement du territoire. Le débit maximal théorique serait de

300 Mbits en voie descendante par site, en supposant qu’un même opérateur

occupe l’intégralité du dividende numérique.

Le fait de devoir partager le débit à chaque instant entre les différents utilisateurs de

la station de base est une contrainte forte. Fournir une connexion permanente à

30 Mbits à tous les ménages par l’intermédiaire du LTE supposerait de multiplier par

trente le nombre actuel de stations de base. Dit autrement, le LTE ne permet de

fournir du très haut débit que si moins d’un ménage sur trente l’exploite au

maximum de ses capacités à l’heure de pointe.

En pratique, le LTE offrira du haut débit de bonne qualité au regard des standards

actuels, mais en excluant la diffusion audiovisuelle haute définition, qui est

l'application la plus gourmande en bande passante. Le LTE sera performant pour la

desserte très haut débit des habitats les plus isolés, où il n’y aura que quelques

dizaines de ménages abonnés et actifs par station de base.

Les technologies LTE ou 4G déployées dans

la bande de fréquences du dividende

numérique permettront de fournir du très

haut débit en zone rurale, à l'exception de

la diffusion audiovisuelle haute définition

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III- COUTS DE DEPLOIEMENT DU TRES HAUT DEBIT

A) RESE AU T O UT OPT I QUE : T RENT E M IL L IAR D S D ’EURO S

Les coûts d’investissement pour construire un réseau tout optique portent sur les

postes suivants : la construction des locaux techniques des opérateurs et des points

de brassage de la fibre, le tirage de la fibre dans les fourreaux existants ou sur des

appuis aériens, de manière marginale la construction de nouvelles tranchées,

l’adduction des bâtiments et, finalement, le déploiement de la fibre dans les

colonnes montantes jusqu’aux paliers ou, pour le tissu

pavillonnaire, jusqu’à la dernière chambre de tirage ou

le dernier appui aérien.

La fourniture de services suppose ensuite la réalisation

du raccordement client. Pour les logements neufs, ce

raccordement est à la charge du propriétaire. Pour les

logements anciens, le coût de construction est actuellement supporté par les

opérateurs qui peuvent le répercuter partiellement sur leurs clients finals. La

dépense correspondante n’est engagée que lorsqu’un client s’abonne à la fibre

optique. Les opérateurs considèrent cette dépense comme une charge récurrente

plutôt que comme un investissement de premier établissement du réseau.

Le principal poste de coût de construction, représentant plus de quatre vingt

pourcents du total, est le déploiement du réseau horizontal entre les locaux

techniques des opérateurs et les logements. Ce coût reste raisonnable en zone

urbaine, de quelques centaines d’euros par prise. En revanche en zone rurale, il est

fréquent de devoir

parcourir plusieurs

centaines de mètres,

voire plusieurs

kilomètres, pour

desservir le hameau

suivant. Les coûts de

construction sont alors

de plusieurs milliers

d’euros par abonné

potentiel.

Au total, la desserte de l’intégralité des bâtiments en France, à l’exception des

bâtiments uniques isolés, tels que les hangars agricoles, suppose de déployer un

réseau d’environ 1 100 000 kilomètres, répartis comme suit : 500 000 kilomètres

pour desservir la population vivant en zone urbaine et périurbaine, représentant

quatre vingt pourcents des ménages ; 300 000 kilomètres supplémentaires pour

Les coûts de déploiement du FTTH sont

inversement proportionnels à la densité de

logements. En zone rurale, le coût est de

plusieurs milliers d'euros par ménage

0

50

100

150

200

250

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%

Taux de couverture des foyers

Mètre linéaire du réseau horizontal par prise

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atteindre un taux de couverture de quatre vingt quinze pourcents de la population ;

300 000 kilomètres supplémentaires pour desservir les cinq derniers pourcents,

habitant pour l’essentiel en hameaux de moins de cinq logements.

Linéaire optique nécessaire pour un arrondissement représentatif

Le déploiement s’effectue en zone urbaine dense, pour

l’essentiel, dans des fourreaux existants, qui

représentent 300 000 milles kilomètres de linéaire, et

sur réseaux aériens moyenne tension, basse tension,

sur des appuis télécom existants ou en façade pour un

linéaire trois à quatre fois supérieur. La moitié des

ménages vit dans une zone où les réseaux sont enterrés et l’autre moitié avec une

desserte aérienne. Les trois quarts du réseau optique à créer pour couvrir la France

entière seraient déployés en aérien.

Taux de couverture : 50% Taux de couverture : 80%

Taux de couverture : 95% Taux de couverture : 100%

Trente milliards d'euros pour couvrir

intégralement la France en fibre optique,

quinze milliards pour couvrir quatre-vingts

pour cent de la population

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Au sein de la dernière tranche, les cinq derniers pourcents de couverture coûtent

7 milliards d’euros. Le coût de construction d’un réseau couvrant quatre vingt quinze

pourcents de la population est donc de 23 milliards d’euros.

Dans la durée, les opérateurs du réseau optique auront à supporter des charges

récurrentes, qui ne font pas partie du périmètre du présent modèle et sont encore

largement inconnues à ce stade, faute de recul. Les trois principaux postes de

charges récurrentes sont les suivants :

- Le coût de construction supporté par les opérateurs pour le raccordement final

d’un logement situé dans un immeuble collectif est actuellement de l’ordre de

deux cents euros par abonné. Le coût de raccordement des pavillons devrait

être sensiblement plus élevé. Avec un million de clients raccordés par an, le coût

annuel serait de 300 millions d’euros. Il n’est pas impossible que, dans la durée,

le législateur transfère cette charge de construction du réseau intérieur aux

propriétaires, comme cela s’est fait pour les autres réseaux. Cette responsabilité

a d’ailleurs déjà été transférée aux promoteurs pour les immeubles neufs.

Couverture 20% 40% 60% 80% 100%

Coût de la tranche (Mds€) 1,5 2,5 4 7 15

Coût cumulé (Mds€) 1,5 4 8 15 30

0

5

10

15

20

25

30

35

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%

Mil

liar

ds

Taux de couverture des foyers

Coût du déploiement d'une boucle locale optique(en milliards d'euros constants)

15 / 107

- Le coût de location du génie civil de l’opérateur historique dans les zones où les

réseaux sont enterrés est plus difficile à estimer. Aujourd’hui, la charge annuelle

de ce génie civil, telle qu’elle apparaît dans la comptabilité de l’opérateur,

recouvre son amortissement et la rémunération du capital immobilisé, pour un

montant de l’ordre du milliard d’euros. Au-delà de cette valorisation comptable,

pour déterminer un coût de location de ce génie civil, deux variables sont

déterminantes : la répartition de la charge du génie civil entre le cuivre

téléphonique et la fibre d’une part et, d’autre part, l’amortissement progressif

des investissements réalisés il y a quarante ans, qui devrait réduire

sensiblement les dotations annuelles aux amortissements à recouvrer par

l’intermédiaire d’un tarif de location. Les recettes annuelles que tirera

l’opérateur historique de l’occupation de son génie civil par les réseaux tout

optique devraient varier progressivement de quelques dizaines millions d’euros

en 2010, puisque peu de réseaux sont déployés, à une somme de l'ordre de 500

millions d’euros en 2030, en supposant que la contribution du cuivre sera alors

négligeable.

- Enfin, les coûts de maintenance des réseaux en fibre optique sont largement

inconnus à ce jour. Le coût de maintenance des réseaux optiques de collecte est

de l’ordre de 20 centimes d’euros par mètre et par an. La boucle locale fibre

sera vraisemblablement plus coûteuse à entretenir, car davantage déployée en

aérien et dans les logements et parties communes, donc plus exposées aux

intempéries d’une part et aux erreurs de manipulation d’autre part. Là encore,

les coûts évolueront avec les déploiements, passant de quelques millions

d’euros en 2010 à peut être 600 millions d’euros à long terme, soit deux

pourcents du coût d’investissement.

Au total, la valeur actuelle nette, à un taux de dix pourcents, de ces différentes

charges récurrentes est de l’ordre de 6 milliards d’euros, avec une hypothèse de

construction régulière du réseau optique sur trois décennies, et une bascule de

l’intégralité des abonnés du cuivre vers la fibre optique sur la même période.

B) COMPA RA ISO N AV EC L E RE SEA U T EL EPHO NI QUE

La boucle locale téléphonique a été construite dans les années soixante dix et quatre

vingt sous l’impulsion de l’Etat. Le cycle d’investissement a duré une vingtaine

d’année et a culminé à plus de 2 milliards d’euros par an à la fin des années soixante

dix. Depuis une décennie, le rythme d’investissement est relativement stable, à

moins de 500 millions d’euros par an. Ces investissements couvrent la desserte des

constructions neuves et le maintien à niveau du réseau. L’investissement cumulé sur

la période de construction proprement dite est de 33 milliards, exprimés en euros

constants.

16 / 107

0

500

1000

1500

2000

2500

1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000

Investissements annuels dans la boucle locale cuivre(en millions d'euros constants)

Les ordres de grandeurs sont relativement proches de ceux anticipés précédemment

pour la construction à neuf d’une boucle locale optique desservant tous les foyers.

La répartition des masses est néanmoins un peu différente. Pour la boucle locale

cuivre, la moitié des investissements a porté sur la création de génie civil, qui existe

aujourd’hui et n’est plus à reconstruire. A l’inverse, la

création de normes de sécurité et environnementales

et l’augmentation du coût du travail faiblement

qualifié renchérissent les coûts de déploiements

actuels par rapports aux coûts de déploiements des

années soixante dix.

Le déploiement de la boucle locale cuivre s’est étalé sur plus de vingt ans, et ce en

situation de monopole, avec une pression politique constante et une forte demande

du marché, les abonnés s’inscrivant plusieurs mois, voire années à l’avance pour être

raccordés au réseau. Il est peu probable que le déploiement de la boucle locale

optique se déroule sur une échelle de temps plus courte, car le contexte est

aujourd’hui moins favorable.

Il convient néanmoins de rappeler que la moitié des investissements sont suffisants

pour raccorder quatre vingt pourcents de la population. Un objectif ambitieux pour

la fibre, au moins autant que l’était le plan de rattrapage pour le téléphone,

consisterait à souhaiter le déploiement de la fibre optique pour quatre vingt

pourcents des ménages en dix ans, puis à finir la couverture au cours des dix années

suivantes. Peut être serait-il plus réaliste d’imaginer un cycle un peu plus long, d'une

trentaine d'années, vu l’existence de technologies concurrentes.

Il a fallu vingt ans pour déployer la boucle

locale cuivre téléphonique. Elle a coûté

trente trois milliards, en euros constants

17 / 107

C) TECHNOL O GIE S T RE S H AU T DEBIT AL T ERN AT IV E S

Compte tenu des masses financières et de l’échelle de temps nécessaire à la

construction d’un réseau tout optique, la question se pose de la mise en œuvre de

technologies alternatives, de manière transitoire ou avec l’objectif de se substituer

de manière durable à une boucle locale optique qui ne serait jamais déployée dans

certaines zones. La présente section vise à donner quelques ordres de grandeur sur

leurs coûts de déploiement.

La modernisation de la boucle locale cuivre

La première étape de la modernisation de boucle locale cuivre pour fournir du très

haut débit suppose d’installer de la fibre entre les répartiteurs et les sous

répartiteurs, puis d’installer des équipements actifs à coté des sous répartiteurs. Il y

a environ cent mille sous répartiteurs en France.

Exemple de réseau de desserte de sous répartiteurs cuivre

Deux scénarii peuvent être envisagés : soit l’équipement de tous les sous

répartiteurs, soit l’équipement d’une fraction d’entre eux. Un scénario possible,

étudié par l’opérateur historique, consiste à équiper un tiers des sous répartiteurs,

ceux étant éloignés de leur répartiteur de plus de deux kilomètres. Ces sous

répartiteurs concentrent en effet la majorité des lignes longues ne supportant

actuellement pas des débits élevés.

Le coût de desserte optique des seuls sous

répartiteurs situés à plus de deux kilomètres de leur

répartiteur de rattachement couterait de l’ordre de 1,5

milliards d’euros et la desserte optique de tous les

sous répartiteurs environ 2,5 milliards d’euros. Le coût de déploiement n’est pas

proportionnel au nombre de sous répartiteurs concernés, car l’équipement d’un plus

grand nombre d’entre eux permet d’optimiser les trajets de desserte, et donc de

réduire la longueur moyenne de fibre par sous répartiteur.

Le réaménagement de la boucle locale

cuivre de l’opérateur historique est une

option moins coûteuse qu'un déploiement

tout optique FTTH ...

18 / 107

Les coûts de reconfiguration et d’installation de locaux destinés à accueillir les

équipements actifs ont été en moyenne de l’ordre de 60 000 euros par sous

répartiteur, au vu des quelques centaines de premiers sites réalisés par France

Télécom. Ces coûts peuvent encore être optimisés à mesure que le processus sera

industrialisé. L’opérateur historique néerlandais, qui a lancé un plan d’équipement

de plusieurs dizaines de milliers de sous répartiteurs, supporte un coût inférieur à 30

000 euros par site, chiffre que nous retiendrons ici dans la perspective d’un plan

d’envergure nationale permettant de diminuer les

coûts unitaires de production.

Au total, le coût d’équipement d’un plan de montée en

débit par reconfiguration et équipement des sous

répartiteurs est compris entre 3 milliards d'euros pour

équiper le tiers des sous répartiteurs et 5 milliards

d'euros pour en équiper la totalité. Pour compléter un

plan de déploiement fibre couvrant quatre vingt pourcents des ménages, le coût

serait de l'ordre de 3 milliards d'euros.

0%

20%

40%

60%

80%

100%

0 10 20 30 40 50 60 70 80

Affaiblissement en dB

Affaiblissement des lignes téléphoniques et impact de l'opticalisation des sous-répartiteurs à plus de 2 km du NRA de rattachement

Proportion des lignes (en Y) situées à moins de X dB du répartiteur

En pointi llé, après réaménagement de 35 000 sous répartiteurs

Il convient néanmoins de rappeler que l’équipement des sous répartiteurs ne

permet pas de fournir des services très haut débit à l’ensemble des ménages de la

zone. En effet, en zone rurale, le quart des lignes environ est situé à plus d’un

kilomètre du sous répartiteur de rattachement. Ces lignes peuvent disposer d’un

service haut débit de bonne qualité, mais pas de services très haut débit au sens de

la présente étude. En particulier, la diffusion simultanée de deux flux audiovisuels

haute définition n’est pas garantie et le débit ne peut pas être symétrique.

... mais celle-ci n'est performante qu'en

zone urbaine dense (moins que la fibre

toutefois). En zone rurale, même

réaménagée, la boucle locale téléphonique

n'est pas adaptée pour fournir du très haut

débit

19 / 107

Dans un scénario où quatre vingt

pourcents de la couverture serait assurée

en fibre optique, la couverture

additionnelle apportée par les sous

répartiteurs est faible, de l'ordre du quart

des ménages non couvert en fibre. La plus

grande partie des ménages couverts en

fibre sont en zones urbaine ou en bourg,

proches de répartiteurs. A contrario, les

ménages non desservis en fibre sont

éloignés de leur sous répartiteur et son

équipement ne permet pas d'apporter le

très haut débit. L'équipement des sous

répartiteurs et le déploiement de fibre jusqu'à l'abonné sont donc des technologies

essentiellement concurrentes et non complémentaires. Leurs zones de pertinence

technologique et économique se recouvrent largement mais ne se complètent pas.

L’étape suivante consiste à créer de nouveaux sous répartiteurs, pour que chaque

abonné soit situé à moins d’un kilomètre de son sous répartiteur de rattachement,

celui-ci étant raccordé en fibre et hébergeant des équipements très haut débit. Les

points figurant sur la carte ci-dessus représentent les nouveaux sous répartiteurs à

créer. Chacun ne dessert que quelques dizaines de lignes.

Nous estimons que le nombre de sous répartiteurs devrait être triplé pour atteindre

cet objectif en milieu rural. Les coûts de déploiement représenteraient environ le

tiers du coût de déploiement d’un réseau tout optique, soit 5 milliards d’euros pour

couvrir les vingt pourcents de ménages situés dans les zones les moins denses. Le

tableau ci-dessous présente une synthèse du nombre de sous répartiteurs à équiper

en fonction des objectifs de couverture, et hors déploiement fibre.

Objectif Nombre

de sous répartiteurs

Couverture des zones blanche ADSL 8 000

2 Mbits pour tous 35 000

Très haut débit sur cuivre pour 85% des ménages 100 000

Très haut débit pour tous 300 000 (création)

SOUS-REPARTITEURS A CREER EN ZONE RURALE

20 / 107

Les réseaux hertziens de prochaine génération

Les fréquences du dividende numérique libérées par le passage à la télévision

numérique terrestre sont en passe d’être réallouées aux services de

télécommunication, pour y déployer des réseaux mobiles de nouvelle génération,

susceptibles de véhiculer des services très haut débit. Ainsi qu’exposé

précédemment, le service très haut débit ne peut être

fourni effectivement que si peu d’usagers sollicitent

simultanément le réseau, ce qui exclut a priori la

diffusion audiovisuelle.

Les fréquences du dividende numérique sont proches

des fréquences des réseaux de deuxième génération.

Les opérateurs déploieront donc leurs équipements

sur les mêmes pylônes et appuis aériens, déjà construits et alimentés en énergie. En

revanche, la fourniture de services très haut débit supposera probablement le

remplacement des liens de raccordements de ces pylônes aux grands réseaux

nationaux. La plupart des stations de base, en zone rurale, sont raccordées en

faisceau hertzien ou par une liaison louée sur cuivre. Ces liens devraient être

remplacés par de la fibre optique.

Le coût de déploiement d’un réseau optique de collecte vers les dix sept milles

pylônes nécessaires pour la France coûterait environ 3 milliards d’euros. S’y ajoute le

coût des stations de base. Le coût d’un déploiement complet est donc compris entre

4 et 5 milliards d’euros. Dans la durée, la dépense réelle sera supérieure, car il sera

nécessaire de densifier le réseau pour supporter la charge de trafic dans les grandes

villes. La moitié de cette somme, soit environ 2 milliards d’euros, serait nécessaire

pour couvrir les vingt pourcents de ménages situés dans les zones les moins denses.

D) SY NT HE SE DES COUT S DE DEPL OIEME NT .

Scénario Couverture Coût

80% FTTH* + 5% SR** 85% 17 Mds€

80% FTTH + 5% SR + 15% LTE*** ≈ 100% 18 Mds€

80% FTTH + 20% SR ≈ 100% 22 Mds€

100 % FTTH ≈ 100% 30 Mds€

* FTTH : déploiement d'un réseau tout optique jusqu'aux abonnés finals

** SR : montée en débit par équipement de la sous boucle locale cuivre

*** LTE : réseau hertzien de prochaine génération, dits 4G

Les équipements des réseaux hertziens de

nouvelle génération (dits LTE ou 4G) seront

déployés sur les sites 2G et 3G existants.

Les déploiements seront donc peu coûteux

pour les opérateurs

21 / 107

Les scénarii présentés ci-dessus sont optimaux, en

supposant un coinvestissement des opérateurs. En

pratique, les investissements seront en partie

concurrents et redondants. Par exemple, les

opérateurs alternatifs pourraient déployer un réseau

tout optique couvrant les quatre cinquièmes du

territoire les plus denses, auxquels l’opérateur

historique répondrait en modernisant son cuivre. Dans

le même temps, trois licences mobiles de nouvelle

génération seraient attribuées, avec de fortes obligations de déploiement. Le coût

complet du déploiement du très haut débit serait alors plus proche de 40 milliards

d’euros.

IV- EQUILIBRES ECONOMIQUES

A) ECONO MIE DE L A BOU CL E L OCAL E

Il n’est pas inutile, avant d’étudier les conditions de rentabilité des futures boucles

locales optiques, de rappeler les ordres de grandeurs économiques attachés à la

boucle locale du cuivre téléphonique et la ventilation des coûts et revenus

correspondants.

Le coût de construction de la boucle locale cuivre a été, en euros constants, de 33

milliards. Avec un taux d’actualisation de l’ordre dix pourcents et un taux de progrès

technique négatif de deux pourcents, la somme de la dotation aux amortissements

et de la rémunération du capital représente entre 2 et 3 milliards par an. S’y ajoutent

environ 600 millions d’euros de coût d’exploitation et une contribution aux coûts

communs de l’entreprise. Le coût complet de la boucle locale cuivre est donc

légèrement supérieur à 3 milliards d’euros par an.

Les revenus des services de télécommunications sur réseaux fixes sont de 16

milliards d’euros par an, dont environ la moitié pour la téléphonie et un peu plus du

tiers pour le haut débit, le reste étant composé des liaisons louées et des services à

valeur ajoutée. L’autorité de régulation estime que les revenus correspondant à

l’accès, donc à la boucle locale dont l’utilisation est ouverte aux concurrents de

l’opérateur historique, représente un chiffre d’affaire annuel de 6 milliards d’euros.

B) UN PROBL E ME DE RECET T ES , P A S DE CO UT S

Construire et exploiter la boucle locale cuivre est une activité rentable. De la même

manière, construire et exploiter une boucle locale optique qui serait en monopole

sur le territoire serait une activité extrêmement rentable, même en rémunérant à

Un déploiement très haut débit

incluant de la fibre optique (FTTH), le

réaménagement de plusieurs dizaines de

milliers de sous répartiteurs cuivre et de la

4G dans le dividende numérique coûterait

18 milliards d'euros

22 / 107

dix pourcents les capitaux immobilisés. Engager une dépense de 30 milliards d’euros

pour un revenu récurrent de 6 milliards ne pose pas de problème de rentabilité ni de

mobilisation des capitaux. Les ordres de grandeurs sont équivalents à ceux engagés

dans les autoroutes, avec une rentabilité supérieure et un risque moindre.

La principale fragilité de la rentabilité de la future boucle locale optique résulte de

son absence de monopole, car elle sera en concurrence avec la boucle locale cuivre,

la diffusion audiovisuelle hertzienne terrestre et satellitaire et les réseaux mobile de

3G et bientôt 4G. Cette boucle locale sera sous utilisée au début de son exploitation,

et sans doute pour une durée relativement longue. Il convient de rappeler qu’en dix

ans, il n’y a que dix huit millions d’abonnement haut

débit, soit moins de deux tiers des lignes actives. La

migration vers le très haut débit ne sera pas

instantanée.

Le problème est aggravé par le fait que la plus grande

partie des ménages et entreprises, environ les trois

quarts, sont abonnés aux services de l’opérateur

historique. La moitié des ménages n’a jamais eu d’autres fournisseurs de services.

Les opérateurs alternatifs ont intérêt à voir se déployer ou à déployer eux-mêmes

une boucle locale concurrente de celle de France Télécom, mais leur capacité à le

faire de manière rentable est obérée par leur relativement faible nombre d’abonnés.

Leurs projets de déploiements sont structurellement cantonnés à la zone urbaine en

l’absence de coinvestissement de la part de France Télécom.

Or l’opérateur historique n’a aucun intérêt à voir se déployer une boucle locale

concurrente de la sienne. Même si une boucle locale devait être déployée à grande

échelle, il n’est pas évident que France Télécom accepte de la cofinancer. Les

chiffrages précédents montrent que la modernisation de son réseau cuivre lui

coûterait moins cher, sur une grande partie du territoire, que le tiers du coût de

construction d’une boucle locale optique. D’ailleurs, les services pouvant être fournis

via un réseau tout optique ne devant pas être, au moins pendant quelques années,

radicalement différents de ceux pouvant être fournis

sur une boucle locale cuivre modernisée, cela tend à

conforter une posture attentiste de l’opérateur

historique.

Le propos n’est bien évidemment pas de considérer

que tel ou tel acteur aurait un comportement plus

vertueux qu’un autre. Le problème fondamental est

que la boucle locale cuivre a pu être déployée relativement facilement parce qu’elle

était en monopole et que, tant que celle-ci ne sera pas démontée, la boucle locale

optique sera en concurrence et donc moins facile à financer et à déployer. Une

activité de construction et de gestion d’autoroute est en général rentable. En

revanche, peu d’industriels prendraient le risque de construire une nouvelle

autoroute parallèle à une autoroute existante et non saturée, et encore moins le

gestionnaire de celle-ci.

... mais les futures boucles locales optiques

seront concurrencées par la boucle locale

cuivre de l'opérateur historique. Celle-ci

captera durablement la plus grande partie

des dépenses télécoms des ménages

Les revenus de la boucle locale sont de six

milliards d'euros par an. Le déploiement

d'une nouvelle boucle locale très haut

débit pour vingt à trente milliards d'euros

ne devrait donc pas être un problème ...

23 / 107

C) CAP ACIT E DE F I N AN CEME NT DE S A CT EUR S PRIV E S

Les opérateurs alternatifs construisent en zone très dense des boucles locales

optiques dont le coût est compris entre deux cent et deux cent cinquante euros par

prise. L’équation économique intègre les revenus qu’ils tireront de la

commercialisation de la partie terminale du réseau, dans les immeubles, auprès des

autres opérateurs ainsi que les économies de location de la boucle locale cuivre

auprès de l’opérateur historique. En zone moins dense, leur disposition à payer est

plus faible, car leur part de marché est inférieure et les

coûts de raccordement des clients vraisemblablement

plus élevés dans le tissu pavillonnaire.

Prenons ici l’hypothèse que les deux principaux

opérateurs alternatifs du haut débit ont chacun une

disposition à payer de cent cinquante euros par prise.

Considérons ensuite l’hypothèse, non fondée à ce

stade, que l’opérateur historique est prêt à financer la construction d’une boucle

locale optique pour un montant équivalent pour l’utiliser plutôt que de moderniser

son réseau cuivre. La disposition à payer des autres opérateurs est négligeable,

compte tenu de leurs parts de marché. La communauté des opérateurs est donc

disposée à payer environ 500 euros par prise.

0 €

1 000 €

2 000 €

3 000 €

4 000 €

5 000 €

6 000 €

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%

Taux de couverture des foyers

Coût par prise du déploiement d'une boucle locale optique

(en euros constants)

Leur disposition à payer pour couvrir quatre vingt pourcents des ménages, soit vingt

trois millions de prises, serait de l’ordre de 11,5 milliards d’euros, à comparer à un

coût de construction de 15 milliards d’euros. Le plan d’affaire de construction du

réseau n’est pas trop déséquilibré. Un étalement du paiement des opérateurs, par

exemple au moyen d’un prêt à taux bonifié ou d’une garantie d’emprunt, peut

Les opérateurs privés pourraient couvrir

en fibre, sur fonds propres, environ

la moitié des ménages. Au delà, des

apports publics seront nécessaires

24 / 107

suffire à couvrir une large partie de cette première zone, peut être la moitié des

ménages français.

Pour les vingt pourcents les moins denses en revanche, l’équation économique est

inverse. La disposition à payer des opérateurs est inférieure à six milliards d’euros,

alors que le coût de construction est de 15 milliards également. Le besoin de

financement public est évident. La mise en place de mécanismes de péréquation

entre les deux zones, les quatre vingt pourcents les plus denses et le vingt pourcents

les moins denses ne serait pas opérants, la première zone ne pouvant déjà être

qu’en partie couverte en saturant la disposition à payer des opérateurs. Un

financement public externe prélevé soit sur le consommateur d’autres segments du

marché, soit sur le contribuable, est nécessaire.

V- LE DEPLOIEMENT DES AUTRES INDUSTRIES DE RESEAU

Le déploiement des autres infrastructures de réseau a presque toujours bénéficié de

facilités accordées par les pouvoirs publics, qu’il s’agisse de mécanismes non

financiers facilitant leur implantation puis leur commercialisation ou de mécanismes

de péréquation horizontale assurant une solidarité territoriale pour le déploiement

des infrastructures.

A) OCT ROI DE PREROG AT IV E S DE P UI SS A NCE PUBL I QUE

Tous les opérateurs déployant des infrastructures ont bénéficié de prérogatives

exorbitantes du droit commun. L’exemple-type est le régime de l’article 12 de la loi

du 15 juin 1906 sur les distributions d’énergie, qui permet l’octroi, après enquête

publique, de servitudes d’implantation des lignes électriques sur les propriétés

privées, toujours en vigueur aujourd’hui. Des mécanismes similaires existent aussi

pour l’installation d’oléoducs et de gazoducs.

Pour les réseaux de télécommunications, tous les opérateurs disposent désormais,

d’un droit de passage sur le domaine public routier, étendu récemment au domaine

public non routier. Les opérateurs bénéficient aussi de

la possibilité d’obtenir l’octroi de servitudes sur les

propriétés privées, mais cela est très peu utilisé par les

opérateurs en pratique.

Les câblo-opérateurs ont par ailleurs longtemps

bénéficié d’une servitude leur permettant d’installer

leurs réseaux à l’intérieur des immeubles collectifs, leur épargnant ainsi l’octroi

d’une autorisation expresse de l’assemblée générale des copropriétaires.

En l’occurrence, pour le très haut débit, la loi de modernisation de l’économie du 4

août 2008 a, d’une part, modifié le régime des immeubles en copropriété des

Tous les opérateurs d'infrastructures,

y compris télécoms, disposent de droits

de passage sur le domaine public

25 / 107

immeubles bâtis, en réservant des règles de majorité assouplies pour l’installation de

réseaux optiques internes et, d’autre part, institué un « droit à la fibre » pour tout

occupant d’un logement souhaitant être raccordé en très haut débit. Ces deux

dispositifs ne concernent toutefois que l’intérieur des immeubles collectifs, et

s’inscrivent dans le cadre plus large de mutualisation de la partie terminale des

réseaux optiques, le plus souvent verticale (à l’intérieur des immeubles). Aucun

mécanisme similaire n’a toutefois été prévu pour le déploiement de la partie

horizontale des réseaux.

B) OCT ROI D ’U NE SIT U AT IO N DE MO NOPOL E O U D ’OL I G OPOL E L EGAL

Il s’agit d’une voie permettant de faciliter le déploiement d’une infrastructure, les

pouvoirs publics accordant un droit exclusif de fourniture du service qui lui est

associé. Ce monopole permet en principe à l’opérateur de fixer ses prix en fonction

du seul consentement à payer de ses clients et non d’offres concurrentes.

Cette liberté tarifaire est totale dès lors qu’aucun service substituable à celui fourni

par le monopole n’existe. L’exemple-type est le service téléphonique avant

l’apparition du mobile, ou encore la fourniture d’électricité en France avant sa

libéralisation.

Cette liberté est moindre en revanche si le consommateur peut s’affranchir de la

prestation du monopole. Typiquement, la SNCF doit prendre en compte la

concurrence du transport aérien, pour certaines

liaisons TGV, et du transport routier, notamment pour

le fret.

Des mécanismes de modérations tarifaires sont

souvent mis en place, par exemple par des procédures

d’homologation des hausses par les pouvoirs publics.

Dans la durée, ceux-ci s’avèrent en général moins

contraignants et moins aléatoires que la pression tarifaire d’un marché

concurrentiel.

Enfin, le monopole tend à l’uniformité tarifaire sur sa zone d’emprise, que celle soit

imposée ou non par la puissance publique. En l’absence d’obligation légale, il est

parfois plus simple, voire plus économe, de procéder à une forme de péréquation

interne que de tenter d’identifier les coûts de chaque unité produite pour élaborer

des tarifs différenciés.

Mais le monopole est généralement contraint à l’uniformité tarifaire par la

puissance publique, qui lui impose de fournir un tarif identique quelle que soit la

localisation de sa délivrance. C’est dans ce cadre que sont mis en place les

mécanismes de péréquation.

Enfin, l’octroi de ressources rares à un nombre limité d’acteurs permet aussi

d’imposer des contraintes de couverture. L’exemple-type est fourni par les licences

La plupart des grandes infrastructures ont

été déployées par un monopole, libre de

fixer des tarifs suffisamment élevés pour

équilibrer ses coûts. Ce ne sera pas le cas

pour la fibre optique

26 / 107

de téléphonie mobile, leurs détenteurs, membres d’une forme d’oligopole légal,

sont soumis à des obligations de couverture de l’ensemble du territoire. En

revanche, l’oligopole exclut tout mécanisme de contrôle et de péréquation tarifaire,

ses étant réputés concurrents.

C) MECAN I SME S DE PERE QU A T ION

La logique de péréquation

La plupart des grandes infrastructures de réseaux ont été financées par le

mécanisme dit de la péréquation horizontale (ou géographique), qui suppose pour

simplifier, que les recettes tirées de l’exploitation d’une infrastructure dans les zones

plus denses d’un territoire viennent financer le déploiement de cette infrastructure,

et dans certains cas le déficit de son exploitation, dans les zones moins rentables.

Cette logique a gouverné la construction de la plupart des grandes infrastructures de

réseaux, qu’elles aient été déployées dans un cadre national, régional ou local, qui a

été confiée généralement à un opérateur économique disposant, sur un territoire

donné, d’un monopole de fourniture du service. Cette même logique a aussi été

appliquée à d’autres secteurs n’impliquant pas la construction d’une infrastructure,

toujours pour garantir la fourniture d’un service dans

une zone que l’initiative privée ne couvrirait pas

spontanément.

Dans la mise en place d’un mécanisme de péréquation,

la structuration du marché est déterminante. Elle

permet d’abord de circonscrire l’assiette d’un éventuel

prélèvement au niveau matériel et géographique. Elle peut aussi servir à segmenter

verticalement un même secteur pour limiter l’intensité concurrentielle à certaines

prestations, de sorte que d’autres puissent permettre aux opérateurs protégés de

réaliser cette péréquation dans leur comptabilité interne.

En fonction de la structuration du marché, la péréquation est interne ou externe. Au

niveau national, l’octroi par la puissance publique d’un monopole à un opérateur

unique et verticalement intégré conduit celui-ci à réaliser cette péréquation au sein

de sa propre comptabilité, sans autre mécanisme de redistribution externe.

L’exemple-type de la péréquation interne est celui du réseau téléphonique avant la

libéralisation. Le système coopératif mis en place entre les entreprises de presse, au

sein des Nouvelles messageries de la presse parisienne, réalise également une

péréquation entre la distribution des magazines, activité rentable, et celle de la

presse quotidienne nationale, qui ne l’est pas. Ce système coopératif a ses limites,

car il repose sur le volontariat : un éditeur de magazines peut, s’il ne souhaite pas

supporter indirectement le coût de la presse quotidienne nationale, s’adresser à un

distributeur dont l’activité repose uniquement sur les magazines.

En monopole, les mécanismes de

péréquation tarifaire sont internalisés par

l'entreprise soumise à une obligation de

tarification homogène sur le territoire

27 / 107

En revanche, dès lors qu’un marché est structuré, horizontalement et/ou

verticalement, sur une base infranationale, des mécanismes de redistribution

externes sont souvent institués, bien qu’ils ne soient pas exclusifs de péréquation

interne sur certains segments. Dans ce schéma, tous les opérateurs locaux sont

censés, en fonction de leurs capacités financières, contribuer à un fonds de

péréquation pour financer l’investissement ou l’exploitation des opérateurs locaux

devant supporter des charges particulières.

Un mécanisme de ce type a été mise en œuvre pour favoriser le déploiement des

réseaux de distribution d’électricité, dont les communes (souvent réunies dans le

cadre de syndicats) ont la charge. Les concessionnaires de ces réseaux sont soumis à

un prélèvement proportionnel au nombre de kilowatts heure fournis abondant le

Fonds d’amortissement des charges de l’électricité

(FACE), dont les recettes sont ensuite redistribuées au

niveau national, puis départemental, pour assurer la

couverture des zones rurales.

Pour le déploiement des réseaux de distribution d’eau,

un mécanisme similaire a été mis en place via le Fonds

national d’adduction en eau (FNDAE), comme pour

celui des autoroutes. Ces deux mécanismes ont été

aujourd’hui abandonnés.

Enfin, lorsque la péréquation intra-sectorielle s’est révélée insuffisante à couvrir un

besoin de financement, des ressources opportunistes extra-sectorielles ont pu être

utilisées pour abonder ces fonds : les recettes du PMU pour le FNDAE, ou encore la

part des recettes des radars automatiques allouée à l’Agence française de

financement des infrastructures de France (AFTIF), affectée notamment aux lignes à

grande vitesse. Les recettes fiscales non-affectées permettent quant à elles de

financer, à travers le budget de l’Etat certaines infrastructures routières, là encore

dans un souci d’aménagement du territoire.

Les opérateurs déployant ces réseaux ont aussi bénéficié, en plus de subventions,

d’outils de financement spécifiques : avances remboursables pour le réseau

téléphonique et les réseaux d’adduction d’eaux, des prêts à taux bonifiés et

l’émission d’emprunts obligataires (pour les autoroutes notamment).

L’impact de la libéralisation

La libéralisation d’un secteur remet généralement à plat ces modalités de

financement. Sa structuration historique éclate, au niveau horizontal comme

vertical, en imposant a minima une adaptation des mécanismes historiques de

péréquation, sinon leur suppression.

Trois options sont ouvertes pour perpétuer le financement des missions de service

public datant du monopole : la sanctuarisation d’un secteur réservé dont les acteurs

pratiquent toujours une péréquation interne, leur prise en charge par la

Les fonds de péréquation ou de soutien

sont en revanche nécessaires et

généralisés lorsqu'il n'existe pas de

monopole national, par exemple pour la

distribution électrique ou pour la

distribution d'eau

28 / 107

communauté des acteurs du secteur et leur fiscalisation, en faisant porter cette

charge sur les consommateurs.

On retrouve notamment des secteurs réservés dans les transports ferroviaires, les

services postaux et l’électricité. Pour les transports ferroviaires, l’infrastructure a été

dissociée dès 1997 de l’exploitation, avec la création

de Réseau ferré de France (RFF), ce qui a permis une

libéralisation progressive et limitée à certains

segments : fret et transport international de

voyageurs, avec possibilité de cabotage à l’intérieur

d’un même Etat sont ou seront très prochainement

ouverts à la concurrence, mais le transport régional demeure soumis à un monopole

d’exploitation.

Par ailleurs, au niveau régional, les dépenses d’infrastructures sont prises en charge

par l’Etat, par RFF et par la Région. La séparation structurelle fut ici le préalable à la

libéralisation.

Dans le secteur postal, La Poste bénéficie d’un secteur réservé (pour les courriers et

colis les plus légers) uniquement à titre transitoire, la libéralisation totale étant

prévue en 2011.

Pour l’électricité, la distribution demeure un secteur réservé, car il n’existera

toujours, même si Electricité réseau de distribution France (ERDF) vient à être mise

en concurrence, qu’un exploitant du réseau. De même, le transport est aussi confié

uniquement à Réseau de transport d’électricité (RTE). Les tarifs de ces deux

segments demeurent réglementés par le biais du Tarif d’utilisation des réseaux

publics d’électricité (TURPE), dont la fixation résulte

notamment d’une péréquation interne. Un Fonds de

péréquation de l’électricité (FPE) destiné à compenser

les charges d’exploitation des distributeurs non

nationalisés a par ailleurs été mis en place ; il est

alimenté par ERDF.

Ensuite, la prise en charge du financement des

missions de service public historiquement attachées au

monopole par les acteurs d’un marché libéralisé, c’est

la logique du service universel. Si ces missions ont un coût, les ressources dégagées

sont attribuées aux acteurs acceptant de continuer à les exécuter.

Le service universel a été mis en place dans le secteur des communications

électroniques, et le sera probablement dans le secteur postal une fois la

libéralisation achevée. Le service universel est conçu comme un service de base

fourni à partir d’une infrastructure pour l'essentiel déjà existante. En France, le coût

net du service universel des communications électroniques est faible : 880 000 euros

en 2007. Le mécanisme de service universel pourrait être peu opérant pour soutenir

le déploiement d'une nouvelle infrastructure filaire. Dans les pays où le réseau

Les fonds de péréquation peuvent être

abondés par une taxe prélevée sur les

consommateurs (électricité), sur les

opérateurs (service téléphonique)

ou par un financement extra-sectoriel

(PMU pour l'eau, budget général pour la

presse, la route ou le rail ...)

Dans les secteurs libéralisés, la tendance

est à la fiscalisation des mécanismes de

péréquation

29 / 107

cuivre est peu développé, le service universel téléphonique est le plus souvent fourni

par voie hertzienne.

Enfin, la répercussion directe sur le consommateur de charges auparavant

supportées par les opérateurs est également pratiquée. En effet, pour la production

d’électricité, les obligations tarifaires pesant sur la production fournie par EDF sont

désormais, compte tenu de l’ouverture à la concurrence de ce segment, répercutées

sur le consommateur final par le biais de la contribution pour le service public de

l’électricité (CSPE). En outre, les coûts des extensions et du branchement liés au

raccordement d’un nouvel usager au réseau de distribution ne sont pris en compte

qu’à 40% par le TURPE, de sorte que là encore les 60% restant de ces deux postes

sont pris en charge directement par la collectivité concédante et l’usager.

Ces différents mécanismes montrent que la libéralisation complique le financement

du maintien, sur la totalité du territoire, d’un niveau de service homogène. Si la

garantie d’un service universel de base peut, dans une certaine mesure, être

supportée uniquement par les acteurs du marché, aller au-delà implique de

mobiliser des financements complémentaires ou de sanctuariser des secteurs

réservés à un monopole, légal ou de fait.

Pour les communications électroniques, donc le très haut débit, le marché n’est

structuré horizontalement ou verticalement que par les logiques propres des

opérateurs privés, non un cadre réglementaire particulier. Le financement du très

haut débit sur le territoire implique nécessairement la combinaison de plusieurs

mécanismes, que ce soit l’octroi de versements compensatoires pour déploiement

de services d’intérêt économique général, de participations en capital ou de facilités

de financement tel que les prêts à taux bonifiés.

D) FA CIL IT ES DE F IN A NCE MENT

En complément des mécanismes de péréquation horizontale, de nombreux modes

de financement autres que l’aide directe aux opérateurs déployant les

infrastructures ont été utilisés. Ils ont déjà été

partiellement évoqués plus haut, et fournissent des

outils pertinents permettant de répondre, dans

certains cas, à des besoins de financement qu’il n’est

pas forcément nécessaire de satisfaire par le biais

d’aides directes.

Ces outils tels que les avances remboursables, les prêts

à taux bonifiés ou les garanties d’emprunt ont

récemment été remis au gout du jour par la crise

financière de l’automne 2008. L’émission d’un grand emprunt national pour financer

des projets d’infrastructures s’inscrit d’ailleurs dans cette logique, et les collectivités

utilisent d’ailleurs souvent la possibilité d’accorder des garanties d’emprunt.

L'octroi de prêts à taux bonifiés ou de

garanties d'emprunts sont des outils

efficaces pour alléger la charge financière

d'une infrastructure en construction,

n'ayant pas encore beaucoup de clients

et donc de recettes

30 / 107

Ces outils offrant une réelle souplesse. L’État l’a d’ailleurs récemment prouvé en

accordant sa garantie et, via la Caisse des dépôts, des prêts à des conditions

préférentielles, dans le cadre de la loi de la loi du 17 février 2009 pour l’accélération

des programmes d’investissement et de construction publics et privés. L’usage

combiné de ces outils est nécessaire au vu des importants besoins de financement

nécessaires à la construction d’un réseau très haut débit fixe à l’échelle nationale.

Si ces facilités de financement ne sont pas octroyées dans le cadre de contrats

publics, elles devront être liées à des contreparties pour leur bénéficiaire, comme

par exemple une obligation d’ouverture et de neutralité des infrastructures

déployées, à même de favoriser la concurrence sur le marché de détail.

E) AT T RIBUT IO N DES A IDE S E T ORG AN IS AT IO N IN ST IT UT ION NEL L E

Dans chacun des secteurs analysés, un maître d’ouvrage public a été clairement

identifié dès l’origine pour piloter et planifier le déploiement de l’infrastructure : les

communes pour la distribution d’électricité et l’eau, la région pour les transports

ferroviaires locaux, l’Etat pour les autoroutes, les liaisons aériennes, la production et

le transport d’électricité. Cet élément est essentiel pour asseoir un mécanisme de

financement du déploiement et des déséquilibres des charges d’exploitation, car la

maîtrise d’ouvrage unique facilite la récolte des fonds et leur redistribution.

Pour le très haut débit, la désignation d’un échelon unique pour assurer la maîtrise

d’ouvrage de projets portés par les collectivités et/ou l’Etat n’apparaît pas

essentielle. L’article L.1425-1 du code général des collectivités territoriales, voté en

2004, institue un service public local facultatif dont tous les échelons (Commune,

Département, Région) peuvent devenir autorité organisatrice. Au vu de la centaine

de projets lancés depuis, cette souplesse n’a jamais conduit à des duplications de

réseaux publics, mais a au contraire permis des interventions complémentaires. Les

collectivités ont très majoritairement respecté l’obligation légale de cohérence de

leurs actions. Pour le très haut débit, cette complémentarité peut être confortée par

l’élaboration concertée de schémas directeurs d’aménagement, comme cela sera vu

plus loin. Désigner a posteriori un échelon unique risque de perturber l’équilibre des

projets déjà lancés, alors même que le très haut débit implique une mobilisation de

tous ces échelons.

Ensuite, la redistribution des fonds, prélevés en principe sur les recettes tirées des

zones rentables, s’organise à l’échelon national dans un premier temps, puis local

dans un second temps. Sur ce point, le mécanisme du FACE paraît robuste et il

permet une répartition des recettes auprès des collectivités sous l’égide de l’Etat. La

décentralisation pourrait justifier une augmentation du pouvoir des collectivités,

mais seul l’Etat est légitime à assurer, par la redistribution, une véritable solidarité

nationale entre zones urbaines et rurales.

31 / 107

F) SY NT HE SE

Intrasectoriel Extrasectoriel

Fonds d'amortissement des

charges d'électrification

(FACE)

Distributeurs

(kWh)350 M€ Subvention

Autorités

organisatrices

(communes)

Fonds de péréquation de

l 'électricité (FPE)

Distributeurs

(recette nettes)7 M€ Subvention

Distributeurs

non

nationalisés

Contribution au service

public de l 'électricité (CSPE)

Consommateurs

(kWh)1 400 M€ Subvention EDF

Eau FNDAE (supprimé en 2005)

Distributeurs

(m³ d'eau

distribués)

Prélèvement

des recettes

PMU

175 M€

Subventions

Prêts à taux

réduits

Autorités

organisatrices

(communes)

Transport

aérien

Fonds de pérequation des

transports aériens (FPTA)

Supprimé en 1999

Transporteurs

(nombre de

passagers)

150 M€ SubventionExploitants des

l ignes

PosteFonds postal national de

péréquation territoriale

Contributeur

(abattement

fiscalité locale)

140 M€ La Poste

Audiovisuel

public

Compensation de la

suppression partielle de la

publicité

Chaînes

hertziennes

nationales

Opérateurs

télécom350 M€ Subvention

France

Télévisions

Télécom Fonds de service universel

Opérateurs

(chiffre

d'affaires)

22 M€ Subvention

Opérateur(s)

désigné(s) par

appel d'offres

Routes

nationales

Entretien du réseau routier

national non concédé

Budget général

Etat1 025 M€

Investis-

sements

directs

Secteur du BTP

Bénéficiaires de

l 'aide

Montant

annuel

collecté

Electricité

Type de prélèvement,

contributeurs et assietteSecteurs Nom

Forme de

l 'aide

32 / 107

VI- LES SOUTIENS POSSIBLES AU DEPLOIEMENT DU TRES HAUT DEBIT

A) ST RUCT URAT IO N IN DU ST RI EL L E DES O PERAT E UR DE F IBRE OP T I QUE

Nous distinguerons dans cette partie concurrence par les infrastructures et

concurrence par les services. On parle de concurrence par les infrastructures lorsque

deux réseaux au moins ont été déployés sur la même zone, par exemple le câble et

le réseau téléphonique. Lorsqu'il y a un seul réseau en monopole, il peut néanmoins

exister une concurrence par les services. Plusieurs

fournisseurs utilisent le même réseau pour proposer

leurs services. Le marché de l'ADSL est organisé de

cette manière.

Pour la fibre optique, une notion de concurrence par

les réseaux pourrait être introduite, intermédiaire

entre la concurrence par les infrastructures et la

concurrence par les services. Il s'agit d'un déploiement de réseaux et de câbles

optiques dans lesquels chaque opérateur disposerait du droit d'usage de long terme

d'une partie des fibres. Il n'y aurait pas duplication d'infrastructures lourdes, comme

les tranchées. Chaque opérateur disposant de ses fibres, il n'aurait pas être, à la

différence de l’ADSL, durablement locataire des lignes d'un concurrent, ce qui

diminue le besoin de régulation et assainit les conditions de marché sur le long

terme.

Les infrastructures de réseaux sont souvent perçues comme étant des monopoles

naturels. Les études économiques et l'expérience ont montré que la situation n'était

pas aussi simple. Le coût de construction de l'infrastructure est évidemment moins

élevé si un seul réseau est déployé que si plusieurs opérateurs construisent chacun

leur infrastructure, multipliant les réseaux et les investissements.

Cette notion s'applique à presque toute

industrie. Par exemple, il serait moins coûteux

de n'avoir en France qu'une seule chaîne de

production de voitures que d'avoir plusieurs

industries concurrentes. Ce modèle de

production a d'ailleurs historiquement été

retenu en Europe de l'est. L'expérience a

montré, pour l'industrie automobile, que le

marché fonctionnait de manière plus

satisfaisante en concurrence qu'en monopole.

De même, le dégroupage, impliquant la Nombre d’opérateurs

1 2 3 4

Niveau des tarifs

Il est possible d'organiser une concurrence

par les services entre plusieurs opérateurs,

même si l'infrastructure sous jacente est

unique. Ainsi, il y a plusieurs opérateurs

ADSL mais une seule boucle locale cuivre

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duplication des réseaux de collecte, a probablement conduit à un marché du haut

débit plus satisfaisant que si l'opérateur historique était resté en monopole.

Il existe en effet une autre variable à prendre en compte : la pression concurrentielle

du marché, d'autant plus importante que le nombre d'industriels est élevé. Cette

pression concurrentielle tend à diminuer les prix et stimuler l'innovation, chaque

industriel cherchant à prendre l'avantage sur ces concurrents. Le schéma ci-contre

présente une vision simplifiée de ces deux dynamiques.

Pour une boucle locale fixe, la question de l'organisation industrielle optimale

dépend de la densité. Dans les zones denses de la plupart des pays, deux boucles

locales concurrentes ont été déployées, le téléphone et le câble. Les pays où le taux

de pénétration du haut débit est le plus élevé sont ceux où la concurrence entre ces

deux réseaux a été la plus vive, comme aux Pays Bas.

La boucle locale optique n'est donc vraisemblablement pas un monopole naturel en

ville dense, typiquement sur l'emprise actuelle du câble en France. Si le câblo-

opérateur et tous les opérateurs alternatifs fusionnaient, ils auraient les moyens de

développer un réseau tout optique sur une large partie de la zone d'emprise du

câble. Ce réseau aurait un concurrent : le réseau très haut débit qu'y déploierait

vraisemblablement l'opérateur historique. Une telle

concentration du marché n'est toutefois pas

souhaitable pour le dynamisme du marché de

télécommunications dans son ensemble.

En revanche, dans les zones moins denses, l’équilibre

économique du déploiement du très haut débit parait

fragile voire impossible si plusieurs infrastructures

concurrentes devaient se déployer simultanément. En

l’état actuel de la connaissance des coûts de

déploiement et de la disposition à payer des ménages, la zone la moins dense,

typiquement la zone rurale hébergeant vingt pourcents de la population, constitue

vraisemblablement une zone de monopole naturel du très haut débit filaire. Sur les

zones les plus rurales, il n'est pas exclu que le très haut débit hertzien soit également

un monopole naturel. Le schéma ci-dessous synthétise le propos en matière

d'organisation industrielle optimale pour le déploiement du très haut débit, selon les

principes économiques exposés précédemment.

Taux de couverture

Types de zones

Organisation optimale

Grandes villes Urbain dense RuralPériurbain et petites villes

20 % 40 % 80 %60 % 100 %

Concurrence MonopolePas de certitude économique

En zone rurale, l’optimum économique et social consisterait à ne construire qu’une

seule boucle locale optique, ouverte à tous les opérateurs et neutre, afin de

minimiser les investissements et de maintenir un certain degré de concurrence sur le

marché de détail auprès des clients finals. L’exemple du haut débit sur la paire de

En zones périurbaines et rurales,

il ne serait pas raisonnable de déployer

plusieurs boucles locales optiques

concurrentes. Des mécanismes de

coinvestissement ou de partage

(dégroupage) d'une infrastructure

unique devront être privilégiés

34 / 107

cuivre, caractérisé par la compétition fondée sur le dégroupage, a montré que

l’intensité concurrentielle résultant de l’usage d’une seule boucle locale passive

partagée était satisfaisante, à condition toutefois d’une régulation contraignante

pour son détenteur. Les opérateurs se font concurrence sur les services, en utilisant

tous la même infrastructure en monopole.

Poursuivant cette logique, il est tentant de penser que la constitution d’un

monopole de réseau filaire très haut débit couvrant quatre vingt pourcents des

ménages résidant à l'extérieur des plus grandes agglomérations constituerait une

réponse adaptée. La création d’un tel acteur permettrait à la fois d'accélérer la

couverture en fibre optique et de limiter les mouvements de concentration

spontanés du secteur autour de deux acteurs, comme précédemment évoqué.

L'opérateur historique, intégré ou structurellement séparé

Il s’agit de demander à l’opérateur historique de faire migrer son réseau vers la fibre

optique, en finançant cette mutation par la rente de monopole du cuivre et en tant

que de besoin des financements publics. Dans la mesure où la rente de situation du

cuivre serait prélevée, en partie, sur les opérateurs concurrents par le maintien du

tarif du dégroupage au dessus des coûts du cuivre seul, des gages devraient leur être

donnés sur la neutralité du nouveau réseau vis à vis de l’ensemble des opérateurs,

de fait financeurs. Ces gages peuvent être gradués :

- maintien d'un opérateur historique verticalement intégré, mais régulation

asymétrique des réseaux optiques qu'il déploie, permettant leur dégroupage et

leur utilisation par les opérateurs concurrents. En droit européen, le régulateur

peut avoir des difficultés à réguler et à spécifier les caractéristiques d'une

infrastructure qui n'existe pas encore. Si cette voie devait être retenue, les

pouvoirs de l'Autorité de régulation en matière de régulation et de dégroupage

des réseaux optiques déployés par France Télécom devraient probablement être

renforcés par voie législative.

- séparation fonctionnelle du réseau de boucle locale ou de sous boucle locale au

sein de l’opérateur historique garantissant une non discrimination en matière

d’approvisionnement des opérateurs de services ; cette option ne garantit

toutefois pas que les caractéristiques structurelles du réseau déployé par

l’opérateur historique n’avantagent pas, de manière décisive, sa propre activité

sur le marché de détail au détriment de celle de ses concurrents ;

- séparation structurelle, avec ouverture du capital et des organes de décision de

l’entité créée à des investisseurs neutres, voire plus directement aux

concurrents de l’opérateur historique ; il s’agit vraisemblablement d’une

opération positive à moyen terme pour l’ensemble des acteurs, opérateur

historique et ses actionnaires compris, mais risquée à long terme pour France

Télécom qui y perd sa base arrière de monopole verticalement intégré sur le

marché fixe français ; de fait, l’opérateur historique s’est toujours opposé à une

telle scission ;

35 / 107

La solution la plus efficace serait que

l'opérateur historique déploie les futures

boucles locales optiques, en finançant ces

investissements par la rente de monopole

de la boucle locale cuivre

Une séparation structurelle a été systématiquement mise en œuvre en Europe pour

les réseaux électriques. En France, une séparation à été mise en œuvre pour le rail,

plutôt sur un modèle fonctionnel dans la mesure où RFF sous-traite la totalité des

opérations d’exploitation et de maintenance à la SNCF. Les détracteurs de la

séparation fonctionnelle estiment qu’il est très difficile, dans le secteur des

télécommunications, de dissocier réseaux et services.

Cette difficulté tend à s'amoindrir si la disjonction

s’opère entre infrastructures passives d’une part et

réseau activé et services d’autre part.

Au Royaume-Uni, la construction d'un réseau très haut

débit fixe est mise en œuvre par la division Open

Reach de British Telecom, dans le cadre d’une

séparation fonctionnelle. Le problème du financement croisé entre le cuivre et

l’optique s’y pose de manière moins aigue qu’en France, car le dégroupage est moins

utilisé. Le principal opérateur alternatif y est le câblo-opérateur, qui n’utilise pas le

réseau de l’opérateur historique du téléphone. L’entité « réseau » étant quasiment

en monopole sur son segment de marché, elle n’a que peu d’intérêt, dans la durée, à

améliorer ses performances, tant en termes de coûts que de qualité de service, et

doit être régulée durablement.

En France, il semble difficile de contraindre l’opérateur historique à une séparation

structurelle s’il n’est en est pas lui-même moteur. France Télécom pourrait arguer

d’une inégalité de traitement par rapport à ses concurrents directs, Telefonica et

Deutsche Telekom, qui sont, et resteront probablement, verticalement intégrés,

alors qu’il serait fragilisé par une telle opération.

Création d’une société de coinvestissement

Ce scénario consiste en la création d'une société projet, en charge de la construction

d'un réseau passif très haut débit, dont les opérateurs seraient clients et, dans la

mesure du possible, actionnaires. Une telle société peut être mise en place de

manière spontanée par les opérateurs pour couvrir les zones dans lesquelles

l’investissement privé est rentable, à condition de le mutualiser. Les estimations

précédentes laissent penser que les trois ou quatre

principaux opérateurs pourraient coinvestir dans un

réseau couvrant environ la moitié des ménages.

A ce stade, les opérateurs ne semblent pas s’engager

spontanément dans la constitution d’une telle société.

Il convient de noter que les opérateurs possédant une

boucle locale y ont objectivement peu intérêts, surtout

s’ils estiment que le blocage des projets de coinvestissement leur permettra de faire

perdurer leur oligopole sur la boucle locale :

- soit parce que l’absence de projet de coinvestissement bloque les initiatives de

l’Etat et évite donc une accélération du déploiement de la fibre ;

De même, les opérateurs de boucles

locales n'ont que peu d'intérêt à participer

à une société de coinvestissement

déployant un réseau de fibre optique

venant concurrencer leurs réseaux existant

36 / 107

- soit parce que l’Etat, pour accélérer le déploiement de la fibre, n’aurait d’autre

solution que de négocier un plan d’investissement avec l’opérateur historique.

Dès lors les moyens dont disposent les pouvoirs publics impulser la création d’une

société en charge de la construction de la boucle locale optique sont peu nombreux.

Deux scénarii polaires peuvent être envisagés.

Le scénario maximaliste consisterait pour l’Etat à se désengager progressivement de

l’opérateur historique, en ce qu’il n’est plus un outil permettant de mettre en œuvre

la politique industrielle souhaitée pour le très haut débit, et à s’engager

massivement dans la création d’une nouvelle structure en charge du déploiement de

la fibre optique. La valeur des parts détenue par l’Etat dans l’opérateur historique

est comprise entre 10 et 15 milliards d’euros. En attirants des fonds d’investissement

privés et en levant de la dette, l’Etat aurait donc, à budget constant, largement les

moyens de déployer un réseau fibre d’ampleur nationale.

Ce scénario est moins satisfaisant que la séparation structurelle, à la fois pour l’Etat

et pour l’opérateur historique. En effet, le nouveau réseau optique et le réseau

cuivre potentiellement modernisé seraient en concurrence sur le long terme, ce qui

obérerait leur rentabilité. Par ailleurs, les conséquences politiques et sociales d’une

telle décision sont difficiles à anticiper en France.

Un scénario maximaliste de ce type a été retenu par le gouvernement australien qui

a annoncé en 2009 la création d’une société commune à l’échelle nationale chargée

de la construction d’un réseau très haut débit couvrant quatre vingt dix pourcents de

la population d’ici huit ans. L’Etat et les collectivités locales détiendront la majorité

des capitaux pendant la phase de construction, avant de les céder au secteur privé

une fois le réseau rentable. Cette initiative, repoussoir pour l'opérateur historique,

pourrait l'amener à accepter une séparation structurelle pour pouvoir bénéficier du

programme d'aides gouvernemental.

Un scénario minimaliste consisterait à constituer une

société de coinvestissement à l’ambition mesurée,

susceptible de construire une boucle locale optique

desservant quelques millions de ménages uniquement.

Un tel scénario pourrait soit être accepté comme un

moindre mal par l’opérateur historique soit être mis en

œuvre en s’appuyant uniquement sur les opérateurs

alternatifs. L’ampleur du projet est suffisamment faible

pour ne pas mettre en danger la viabilité de l’opérateur historique, même si celui-ci

n’y participe pas.

Pour couvrir quatre millions de ménages, l’apport par l’Etat de 500 millions d’euros

en capital et d’environ 1 milliard en prêts bonifié à un taux de quatre pourcents

permet d’équilibrer le plan d’affaire d’une société projet montée avec des

investisseurs privés, même dans l'hypothèse où seuls les opérateurs alternatifs

étaient clients du réseau. Néanmoins, ici encore, la rentabilité et donc la capacité de

A terme, il pourra exister une tension entre

la politique industrielle de l'Etat tendant à

favoriser le déploiement des réseaux de

fibre optique et sa politique patrimoniale

tendant à préserver la situation de France

Télécom sur la boucle locale ...

37 / 107

couverture du territoire est structurellement dégradée par la concurrence

potentielle avec le réseau de l’opérateur historique.

Organisation de monopoles locaux

Dans l’hypothèse où il serait impossible d’arriver à une structuration industrielle

satisfaisante pour la construction du réseau optique, une version dégradée

consisterait à tenter d’établir, de fait, des situations de monopoles locaux limitant la

duplication des réseaux.

Ces monopoles locaux pourraient se constituer spontanément, si chaque opérateur

se déployait sur une zone et louait le réseau déployé pas ses concurrents sur les

autres territoires. En pratique, les opérateurs semblent tous déployer dans les

mêmes zones. Aucun accord n'a pu encore être trouvé en matière d'architecture de

réseau permettant de garantir que le réseau déployé par chaque opérateur dans sa

zone serait effectivement utilisable par ses concurrents.

L'émergence de monopoles locaux peut éventuellement être facilitée par

l’organisation d’appels d’offres régionaux. Le lauréat bénéficierait d’avantages qui

rendraient ensuite difficile la construction d’un réseau concurrent par un autre

opérateur, dès lors contraint de louer le premier réseau construit. En échange des

avantages accordés, le lauréat se verrait imposer des obligations de couverture et

d’ouverture de son réseau aux opérateurs concurrents, comme c’est le cas pour les

réseaux d’initiative publique déployés depuis 2004 par les collectivités. Le niveau

d’aide publique sera proportionnel aux surcoûts imposés au lauréat. Un mode de

fonctionnement sous forme de guichet où le premier opérateur déployant dans une

zone pourrait solliciter et bénéficier d'une aide que n'obtiendraient pas les suivants

pourrait aboutir au même résultat.

Dans une approche maximaliste, les pouvoirs publics interviennent massivement en

capital ou autres formes de financement dans la société lauréate. Le cas le plus

extrême est l’organisation d’un contrat de partenariat

dans lequel les pouvoirs publics financent l’intégralité

de la construction du réseau et perçoivent l’intégralité

des recettes potentielles.

Economiquement, ce scénario n’est pas aberrant

puisqu’il revient à faire porter le risque commercial au

capital public, dont le taux de rémunération est moins

élevé que ce que demanderait un actionnaire privé

pour un risque équivalent. En fait, il s’agit sous un autre habillage, d’un scénario

proche du projet mis en œuvre par le gouvernement australien. Il s’agit

intrinsèquement d’une renationalisation des réseaux. Compte tenu des montants en

jeu, la séparation structurelle de l’opérateur historique, voire sa renationalisation,

paraitrait plus efficace et sensiblement plus économe en argent public.

Dans une approche minimaliste, les aides accordées sont des apports en capital, en

prêts bonifiés ou en garantie d’emprunt, accordées à l’opérateur lauréat. Au premier

... dès lors, l'émergence de réseaux FTTH

semi publics, concurrents du réseau cuivre

historique, déployés dans le cadre de

partenariats public privé et cofinancés

par les collectivités, voire par l'Etat lui

même, n'est pas exclue

38 / 107

abord, cela permet de mettre sur un pied d’égalité les opérateurs alternatifs et

l’opérateur historique dans le processus d’attribution de ces contrats, ce dernier

disposant déjà de capitaux publics et donc d’une quasi garantie d’emprunt.

En fait, la situation n’est pas symétrique. L’opérateur historique peut soumissionner

en étant quasiment certain de louer le réseau qu’il construira, à moyen terme, à ses

concurrents. A l’inverse, ceux-ci ne peuvent être certains que l’opérateur historique

ne préférera pas moderniser son réseau cuivre plutôt que de louer le réseau tout

optique construit par un ou plusieurs opérateurs alternatifs. Ce scénario minimaliste

revient donc à confier pour l’essentiel la construction du réseau fibre à l’opérateur

historique. Celui-ci n’ayant que peu à gagner, à obtenir des aides en capital ou en

garantie d’emprunt dont il dispose déjà, les résultats des appels d’offres pourraient

être décevants.

B) LES T ECH NOL OG IES AL T ER NAT IV ES

Comme cela a été vu précédemment, le principal obstacle au déploiement de la

boucle locale optique résulte de sa concurrence avec le réseau cuivre modernisé de

l’opérateur historique et, dans une moindre mesure, avec les technologies

hertziennes de quatrième génération.

L’optimum économique, pour la zone de monopole naturel, serait de confier le

déploiement de ces différentes technologies à une seule et même structure, chargée

de fournir des offres de gros non discriminatoires à tous les opérateurs. Cette

structure pourrait être la filiale de l’opérateur historique en charge des réseaux en

cas de séparation structurelle, ou une nouvelle société en charge du très haut débit.

Les arbitrages entre le déploiement des différentes technologies suivant les zones

pourraient être internalisés, réduisant les risques de concurrence intermodale et

favorisant les complémentarités géographiques.

La constitution d’une telle structure globale est loin d'être garantie et la question se

pose de la régulation de la concurrence ou des complémentarités entre les futurs

réseaux optiques, le réseau cuivre modernisé et les futurs réseaux hertziens.

Le réseau cuivre téléphonique

La modernisation du réseau métallique permet une augmentation significative de la

qualité de service à un coût moindre que celui d’un réseau tout optique, dans un

délai plus court. Cette modernisation tend à exclure le déploiement, sur la même

emprise, d’un réseau tout optique. Les financements publics de la modernisation du

réseau téléphonique devraient donc se concentrer sur

les zones pour lesquelles le déploiement d’un réseau

optique n’est pas envisagé au cours de la prochaine

décennie.

Par ailleurs, les réseaux tout optiques seront en partie

déployés dans les fourreaux de France Télécom, qui

Il sera nécessaire de veiller à ce que les prix

pratiqués pour la location de fourreaux et

les concours publics mobilisés ne

découragent pas les déploiements fibre

39 / 107

accueillent déjà le réseau téléphonique. Il conviendra de s’assurer que le tarif

d’occupation appliqué à la fibre optique ne la désavantage pas vis-à-vis du cuivre. Ce

tarif est actuellement fondé sur une clef d’allocation technique, proportionnelle à la

surface des câbles optiques déployés. Il n’est pas évident que la même formule soit

appliquée de manière non discriminatoire pour les câbles en cuivre.

Une tarification alternative pourrait être envisagée, fondée sur une clef d’allocation

économique. Les redevances d’occupation de la fibre et du cuivre seraient fixées en

fonction du nombre de clients ou du chiffre d’affaires généré par chaque

technologie. Le choix d’une clef d’allocation économique a le double mérite de

faciliter au démarrage le déploiement de la fibre optique et d’éviter ensuite les

effets de cliquet, lors de la réduction du nombre d’abonnés cuivre, puis lors du

démontage du réseau téléphonique, d’ici une à deux décennies.

Enfin, il pourrait être tentant d’imposer un péage sur le cuivre, pénalisant les

opérateurs et les abonnés l’utilisant, afin de les inciter à basculer sur des liaisons

optiques. Les recettes du péage pourraient être réallouées à la construction du

réseau optique. Le Royaume Uni a ainsi récemment mis en place une taxe sur les

abonnés haut débit. Il n’est pourtant pas conseillé de taxer spécifiquement un bien

ou un service dont on veut développer l’usage. Or le taux de pénétration du haut

débit est en France encore bien inférieur à celui des pays les plus avancés, et

notamment ceux du nord de l’Europe.

De la même manière, il pourrait être envisagé d’augmenter le tarif du dégroupage

pour inciter les opérateurs alternatifs à déployer des réseaux optiques. Comme nous

l’avons vu précédemment, le principal frein au déploiement des réseaux optiques

par les opérateurs alternatifs provient du refus de l’opérateur historique de

participer à des projets de coinvestissement. Augmenter le tarif du dégroupage

n’aurait donc que peu d’incidence. En outre, la démarche consistant à augmenter la

rente de monopole cuivre de l’opérateur historique en conséquence de son refus de

déployer des boucles locales optiques paraitrait étrange, voire contestable.

Les technologies hertziennes

Les technologies hertziennes de nouvelle génération déployées dans la bande du

dividende numérique seront susceptibles de supporter

des offres haut débit de bonne qualité et, sous réserve

de faible densité de population, des offres très haut

débit, diffusion audiovisuelle haute définition exclue.

Les technologies hertziennes sont moins perturbatrices

pour le déploiement de la fibre que la modernisation

du réseau cuivre, et paraissent plus complémentaires que concurrentes de la fibre

optique. Leur performance est en effet inversement proportionnelle à la densité, le

débit d’une station de base étant partagé entre les utilisateurs à un instant donné :

- en zone relativement dense, les technologies hertziennes ne pourront pas

déstabiliser durablement le marché du très haut débit filaire, car le réseau

Les fréquences du dividende numérique

représentent un enjeu majeur pour

l'aménagement du territoire et le très haut

débit en zones rurales

40 / 107

hertzien ne pourrait supporter un grand nombre d’abonnés consommant

beaucoup de débit ; la densification du réseau y est en outre devenue difficile

compte tenu de l’aversion des riverains à l’implantation de nouvelles antennes ;

- en zone rurale, les technologies hertziennes peuvent a priori supporter des

services très haut débit performants ; dans ces zones, au-delà de quatre vingt

pourcents de couverture, la fibre optique ne peut se déployer sans concours

publics massif ; le risque de dissuasion par l'hertzien de l’investissement privé

dans la fibre optique n’existe donc pas.

Il semblerait dès lors naturel que les pouvoirs publics intègrent largement le

déploiement des futures technologies hertziennes dans leur vision du déploiement

du très haut débit sur le territoire national. L’enjeu du futur appel d’offre pour

l’attribution du dividende numérique pourrait autant être la couverture du territoire

que l’augmentation de l’intensité concurrentielle et du débit en zone dense.

Un scénario consisterait à réserver au sein du dividende numérique un lot de

fréquences pour l'aménagement du territoire. Son attribution serait conditionnée à

une obligation de couverture de la totalité du territoire et à la formulation d'une

offre de gros permettant à tous les opérateurs de fournir leurs services haut débit

sur ce réseau.

Ces offres de bande passantes en gros sont techniquement possibles, et sont

classiquement appelées offres de roaming data ou offres d’accès Full MVNO data.

L’opérateur en charge du déploiement n’aurait pas le droit de commercialiser les

accès sur le marché de détail, afin de ne pas entrer en concurrence avec ses clients

opérateurs.

Il serait ainsi possible de structurer le très haut débit hertzien en zone rurale en

monopole de fait, en échange d’obligations de couverture et d’ouverture du réseau

élevées. Ce qui apparait aujourd’hui difficile à réaliser, en matière de structuration

industrielle, pour les réseaux fixes peut être mis en

place pour les réseaux mobiles de prochaine

génération en bande basse, et pour la zone rurale.

La question d’un éventuel allotissement du dividende

numérique non pas en bande de fréquences mais de

manière géographique pourrait se poser. Il pourrait

s’agir d’un allotissement régional ou d’une

segmentation entre zones urbaines et zones rurales. L’expérience de la dernière

décennie a montré que l’allotissement géographique des fréquences conduisait

systématiquement à un échec industriel. L’attribution d'un lot de fréquences destiné

à l'aménagement du territoire mais couvrant l'intégralité du territoire national parait

préférable. Un autre lot pourrait être mis aux enchères, sans être assorti

d'obligations de couverture contraignantes.

Un lot de fréquences pourrait ainsi

être attribué sous conditions de

couverture quasi intégrale du territoire et

d’offre de gros ouverte à tous les

opérateurs de détail

41 / 107

C) A IDE S NO N FI NA N CIERE S

Planification territoriale

La mise en place de schémas directeurs d’aménagement numérique à l’échelle

départementale ou régionale, telle que prévue par la relative à la lutte contre la

fracture numérique déposée par le sénateur Pintat devraient permettre aux

pouvoirs publics de formaliser leurs prévisions et attentes en matière de

déploiement haut et très haut débit sur le territoire. La circulaire du Premier

ministre du 31 juillet 2009 anticipe ce mouvement, en demandant d’ores et déjà aux

préfets de susciter l’élaboration de documents de planification stratégique. Il existe

deux échelles pertinentes pour développer une vision territoriale du développement

des réseaux très haut débit.

L'échelle de la région ou du département est nécessaire pour identifier les zones où

une initiative privée est probable et celles dans lesquelles une intervention publique

sera nécessaire pour favoriser le déploiement du réseau. Il sera utile d'élaborer une

stratégie territoriale visant à privilégier, zone par zone, le soutien au déploiement

des réseaux fibre, le soutien à la modernisation du réseau cuivre ou le soutien au

déploiement des réseaux hertziens de nouvelle génération. De manière plus

opérationnelle, une analyse régionale ou départementale devrait permettre

d'identifier les barreaux interurbains sur lesquels les opérateurs ne disposent pas de

fibre optique disponible et le cas échéant d'y planifier la pose de fourreaux ou de

fibres en attente lors des opérations d'enfouissements de lignes aériennes ou de

réfection de voiries interurbaines.

Compte tenu des échelles de temps prévisionnel du déploiement du très haut débit,

l’horizon de ces schémas devrait être compris entre dix et vingt ans, avec une

réactualisation périodique. Ce type de documents pourrait, à terme, être repris et

constituer une annexe des schémas de cohérence territoriale.

En aval, une réflexion à une échelle plus fine, typiquement à la maille de la

commune, de la communauté de communes ou de l'agglomération, peut également

s'avérer nécessaire pour préparer le déploiement des réseaux optiques. A cette

échelle, il est possible grâce à des schémas d’ingénierie très haut débit d'identifier à

la maille de la rue l'existence de fourreaux disponibles ou saturés, dans le cadre du

droit d’information dont disposent désormais les collectivités, et d'identifier les

secteurs où les réseaux sont aériens, sur poteaux ou en façade. Instauré un lien

entre ces schémas directeurs et les opérations et règles d’urbanisme serait ainsi

naturel.

Opérations et règles d'urbanisme

Des infrastructures tels que des fourreaux et des chambres de tirage peuvent être

déployées en attente, c'est à dire en avance de phase par rapport à l'arrivée

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effective des réseaux très haut débit. Ces infrastructures permettent une diminution

ultérieure des coûts de déploiements.

Les opportunités de pose d'infrastructures en attente sont liées aux travaux de

grande ampleur, typiquement l'effacement du réseau électrique sur l'ensemble d'un

quartier, une opération de renouvellement urbain ou l'enfouissement d'une ligne

électrique interurbaine. En revanche, hors cas particulier, la pose des segments de

quelques dizaines ou centaine de mètres de fourreaux est inutile car ils s'avéreront

difficiles à gérer et vraisemblablement inexploitables par les opérateurs.

Dans le passé, les réseaux du téléphone et du câble ont en grande partie été

déployés en façade. Le réseau téléphonique français est encore pour un quart

enterré et pour trois quarts aérien. Les plans locaux d’urbanisme interdisent

aujourd’hui souvent ce mode de déploiement. Surtout, en l'absence de servitude de

passage, le réseau ne peut être déployé en façade qu'après les accords formels de

tous les bailleurs et copropriétés de la rue, ce qui est long et coûteux, voire

impossible.

A droit et pratiques constantes, la fibre ne sera donc probablement pas déployée

dans les rues où les réseaux sont actuellement déployés en façade. Pour lever ce

blocage, l'instauration de servitudes de passage par les pouvoirs publics peut être

nécessaire.

Les maires disposent aujourd'hui de la faculté d'instaurer une servitude sur le

domaine privé, mais sont fort logiquement réticents à l'utiliser. Une certaine forme

d'automaticité, l'instauration d'un droit de recours des opérateurs ou un transfert de

responsabilité subsidiaire vers le préfet pourrait permettre de faciliter

l'établissement de ce type de servitudes.

Par ailleurs, le déploiement des réseaux optiques suppose l'installation de points de

mutualisation, qui constituent en général des points de brassage dans le réseau.

Pour les premiers déploiements dans les plus grandes agglomérations, ces points de

mutualisation ont été installés soit dans les immeubles de grande taille soit dans des

locaux privés spécifiquement achetés à cet effet.

Aucun de ces deux modes de déploiement n'est soutenable à grande échelle et en

zone de moindre densité. Il sera donc probablement nécessaire d'installer des

armoires de brassage et de mutualisation sur le domaine public. Ces armoires auront

vraisemblablement des caractéristiques proches des sous répartiteurs

téléphoniques, qui sont des armoires de brassage du

cuivre, occupant environ un mètre carré au sol et

permettant de desservir entre deux et cinq cents

ménages.

En vertu de l’article L.113-3 du code de la voirie

routière, les ouvrages de télécommunications

disposent simplement d’une possibilité, mais non d'un

droit, d’occupation au sol de la voirie. Le gestionnaire de la voirie, dans la majorité

Il sera probablement nécessaire de

déployer des armoires de mutualisation et

de brassage de la fibre optique sur le

domaine public. Un dialogue entre

collectivités et opérateurs serait utile

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des cas la Commune, dispose du pouvoir de refuser une implantation. Les maires

sont en général hostiles à l'installation d'équipements sur le domaine public, qui

risque d'en rendre plus difficile l'entretien ou de gêner la circulation piétonne.

L'instauration d'un droit d'occupation du domaine public, en surface, au bénéfice

des opérateurs paraitrait disproportionnée. Il pourrait en revanche être demandé

que, dans le cadre de l’élaboration des schémas directeurs, les gestionnaires de

voirie (communes et intercommunalités principalement) identifient les

emplacements possibles d’implantation de SRO, permettant ainsi aux opérateurs de

les intégrer dans leurs plans de déploiement.

Cette identification permettra de préparer avec le ou les opérateurs, dans le cadre

de l’élaboration des schémas directeurs :

- l'établissement de servitudes de passage sur le domaine privé dans certaines

rues pour le déploiement de réseaux en façade ou la programmation

d’opérations d'enfouissement coordonné des réseaux existants et futurs ;

- l'identification d'emplacements dans lesquels les opérateurs seraient

susceptibles d'installer, sur le domaine public, des armoires de brassage de la

fibre optique permettant la mutualisation du réseau.

A terme, il paraitrait relativement naturel d'annexer au plan local d'urbanisme un

document graphique, réalisé dans le cadre de l’élaboration d’un schéma directeur

d’agglomération, localisant les éventuelles servitudes de passage en façade et les

lieux d'implantation privilégiés des futures armoires de brassage de la fibre optique.

Commande publique

Le levier de la commande publique a été utilisé à plusieurs reprises pour faciliter le

déploiement des réseaux, en France et à l'étranger. Les collectivités peuvent par

exemple passer un marché pour faire raccorder une partie des bâtiments publics à

un réseau très haut débit. Le réseau ainsi construit peut ensuite être réutilisés par

les opérateurs pour desservir, à coût incrémental, les logements situés à proximité.

Au stade actuel de développement du marché du très haut débit, ce levier est

vraisemblablement inefficace. Les opérateurs concentrent leurs investissements

dans les plus grandes villes afin d'y éviter une préemption du marché par leurs

concurrents. Ils n'investiraient pas pour équiper en fibre des logements situés en

zone peu dense, même si ceux étaient à proximité immédiate de réseaux optiques

existants et donc très peu coûteux à raccorder.

Enfin, le parc de logements sociaux est en général dense, car formé d’immeubles de

grande taille. Il est donc rentable pour les opérateurs d'y déployer de la fibre

optique. Les collectivités disposant d'un parc de plusieurs milliers de logements

sociaux sur leur territoire peuvent organiser un appel d'offres groupé, visant à

sélectionner un opérateur en charge de l'équipement en fibre de ce patrimoine. Si le

parc est conséquent et relativement proche des réseaux existants, les opérateurs ne

demanderont pas de compensation financière. L'opérateur lauréat pourra, après

44 / 107

avoir déployé son réseau, desservir plus facilement le parc immobilier privé

environnant.

D) A IDE S E N C AP IT AL ET E N P RET

La prise de participations minoritaires au capital de société

Le projet de la ville d'Amsterdam, validé par la Commission européenne, a illustré

l’utilité, pour les pouvoirs publics, d’intervenir en tant qu’actionnaire minoritaire

d’une société constituée avec des investisseurs

privés et qui a pour objet d’établir et de déployer

une boucle locale optique mise disposition de tous

les opérateurs.

Une prise de participation publique au capital d'une

société n'entre en effet pas dans le champ des aides

d'Etat, ce qui évite un risque de veto

communautaire. Les lignes directrices publiées par la

Commission européenne en septembre 2009 en

matière d'aides au déploiement du très haut débit l’ont confirmé. En outre, elles

autorisent d'autres modes d'intervention, même en zone relativement dense,

comme cela sera vu plus loin.

Le principal intérêt d'une prise de participation en capital est de procurer aux

pouvoirs publics une position d'observation sur l'économie et la dynamique de

déploiement du très haut débit ainsi qu'une certaine influence sur la gouvernance

du projet. Le coût d'intervention est nul puisque le capital public immobilisé est

réputé à un taux normal, identique à celui des actionnaires privés.

Au regard des incertitudes actuelles sur le développement du très haut débit, la

participation publique au capital de sociétés en charge du déploiement de réseaux

passifs de fibre est une approche raisonnable. Si ces premiers déploiements

s'avèrent rentables, les bénéfices réalisés par les pouvoirs publics pourront être

réinvestis en financements dans les zones plus rurales. Surtout, les pouvoirs publics

auront eu une place leur permettant de monter en compétence et en connaissance

sur l'économie du très haut débit, avant de basculer vers une logique de partenariat

public-privé.

L'Etat est d'ores et déjà actionnaire de l'opérateur historique, détenant le quart de

son capital. Cette participation ne semble toutefois pas décisive pour amener France

Télécom à déployer un réseau optique neutre et ouvert à tous les opérateurs sur

une large partie du territoire. Dans l'hypothèse de la création d'une autre structure,

trois voies permettent d’envisager une prise de participation minoritaire des

pouvoirs publics dans une société privée :

- A l’occasion de la discussion de la proposition de loi relative à la fracture

numérique déposée par le Sénateur Pintat, un amendement autorisant la prise

Une prise de participation publique

minoritaire au capital d'un opérateur

déployant de la fibre optique fournit un bon

poste d'observation avant, le cas échéant,

d'intervenir en aides compensatoires de

services d’intérêt économique général.

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de participations minoritaires de collectivités au capital de sociétés ayant pour

objet de déployer des infrastructures et réseaux très haut débit a été adopté. La

collectivité se comporte alors comme un investisseur avisé, mais participe à la

gouvernance de la société et à l'élaboration de son plan de déploiement.

- L'Etat est susceptible de prendre une participation minoritaire dans une société

de droit privé. L'Etat intervient relativement fréquemment sous cette forme,

pour stabiliser une société ou s'assurer un certain contrôle sur une activité jugée

stratégique. Les modalités fixées par les statuts ou le pacte d'actionnaire jouent

un rôle déterminant pour la définition des objectifs du projet et de sa

gouvernance.

- La notion de partenariats publics privés institutionnels permet à une collectivité

ou à l’Etat de prendre une participation au capital d'une société ad hoc retenue

à l’issue d’une procédure de mise en concurrence, pour établir et exploiter un

réseau. Dans ce schéma, les pouvoirs publics octroient en général une

participation, permettant d'équilibrer le plan d'affaire et d'atteindre les objectifs

de l'appel d'offre initial. En contrepartie, ils disposent d'un double contrôle

contractuel et capitalistique sur la société. Ce mode d’intervention a été jugé

compatible avec le droit communautaire de la commande publique par une

communication de la Commission européenne de février 2008, mais il reste

encore à intégrer pleinement dans le droit français. Le régime des contrats de

partenariats exclut en effet expressément une prise de participation de la

personne publique dans le capital de la société lauréate. Ensuite, dans une

délégation de service public, cela serait envisageable, a priori, si la prise de

participation minoritaire d’une collectivité au capital d’une société ayant pour

objet de déployer un réseau très haut débit, évoquée ci-dessus, était

définitivement entérinée par le législateur. Cela est enfin en tout état de cause

possible pour une société d’économie mixte à capital public majoritaire, mais

une telle opération a moins d’attrait pour un opérateur privé.

Pour l'opérateur privé, le principal avantage d'ouvrir son capital aux pouvoirs publics

est de bénéficier d'une garantie implicite ou explicite de la dette de la société projet.

Si plusieurs investisseurs privés sont présents, chacun peut être suffisamment

minoritaire pour ne pas avoir à consolider les résultats et la dette de la société

projet. Dans cette hypothèse toutefois, la garantie publique peut être interprétée

comme une aide d'Etat. Alternativement, l'octroi direct

d'un prêt peut être envisagé, par exemple dans le

cadre d'un futur grand emprunt national. Le coût pour

les pouvoirs publics est plus élevé que le simple octroi

d'une garantie d'emprunt.

Le schéma ci-contre illustre l'effet levier d'un emprunt

à taux faible. Nous reprenons l'hypothèse de la partie

II, en supposant que la disposition cumulée des trois

L'opérateur privé obtient une garantie de

la dette du projet par les pouvoirs publics

et donc un abaissement de son taux

d'emprunt. L’effet levier sur l'équilibre

économique et donc l'extension possible

des déploiements est important

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principaux opérateurs à investir est de 450 euros par prise. Avec un taux de

rentabilité interne de 10%, ce qui est classique pour un opérateur, cette dépense est

équivalente à un coût de location de 4,5 euros par mois et par prise.

Chaque que opérateur louerait le réseau construit par une société projet à un tarif

de 1,5 euros par prise, soit 180 millions d’euros par an si la société a construit dix

millions de prises. A titre de comparaison, les opérateurs alternatifs verseront en

2010 environ 1 milliards d’euros à France Télécom au titre du dégroupage.

La société projet dispose d'un capital propre rémunéré à 10% et de quatre fois plus

de dette à 4%. Son taux de rentabilité interne est donc de l'ordre de 5%. Cette

société peut construire de manière rentable des prises coûtant jusqu'à 660 euros.

L'effet levier de la dette à faible taux sur le coût des prises pouvant être construites

est donc de l'ordre de 45%. En investissant de manière coordonnée dans le réseau,

les trois opérateurs auraient été capables de couvrir 9 millions de ménages. En

levant de la dette à faible taux, garantie par l'Etat, ils peuvent couvrir jusqu'à 14

millions de ménages.

E) A IDE S E N APPORT S P UBL IC S

Les concours financiers éventuellement apportés par les pouvoirs publics recouvrent

une large gamme de modes d'intervention. Il peut d’abord s'agir d'aides directes aux

entreprises. Dans ce cas, les aides peuvent avoir une

rentabilité indirecte sur l'emploi ou, d'un point de vue

financier, sur les recettes fiscales. Dans le cadre du

déploiement des réseaux d’initiative publique de

l’article L.1425-1 du code général des collectivités

territoriales, les aides ont pour l'essentiel été

attribuées dans le cadre de délégations de service public ou de contrats de

partenariats, formes qui donnent aux personnes publiques de véritables

contreparties patrimoniales au versement de leurs concours financiers. Le maître

Disposition à investir

450 €

Location4,5 € par

mois

Possibilité de construire

660 €Avec TRI

10%Avec TRI

5%

+ 45 %

Des apports publics (DSP, PPP, marchés

de travaux) seront indispensables pour

déployer le très haut débit en dehors

des centres urbains

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d'ouvrage public perçoit l'intégralité des recettes commerciales en contrat de

partenariat et une partie de celles-ci en concession, par l'intermédiaire de clauses de

retour à meilleure fortune. En outre, il sera au terme du contrat propriétaire du

réseau et pourra l'exploiter. D'un point de vue économique, ces aides s'apparentent

alors à un investissement public direct à rentabilité différée.

Les lignes directrices de la Commission européenne de septembre 2009 ont confirmé

la possibilité d’accorder, aux opérateurs déployant des réseaux d’initiative publique

à très haut débit, des versements ayant pour objet de compenser les surcoûts

induits par les missions de service public qui leur sont imposées. La Commission a

ainsi affirmé que, à l’instar du haut débit, l’établissement et l’exploitation de réseaux

très haut débit constitue bien un service d’intérêt économique général (SIEG).

L’octroi de compensations déterminées dans les conditions prévues par l’arrêt

Altmark de la Cour de justice des communautés européennes de 2003 est donc

possible.

Ces lignes directrices précisent toutefois, en fonction des territoires concernés, les

précautions à prendre avant de décider de lancer un projet soutenu par des fonds

publics. Sur les zones blanches, qui ne verront a priori, aucun réseau être

spontanément déployé par l’initiative privée, les règles d’intervention demeurent

souples.

Sur les zones grises (au moins un réseau très haut débit projeté par les opérateurs

privés) ou noires (au moins deux), il sera au préalable nécessaire de demander aux

opérateurs leurs projets de déploiement sur les trois ans à venir, calendrier et plan

de financement à l’appui. En outre, une démonstration des insuffisances de la seule

initiative privée, en termes de niveau de concurrence, de services et de tarifs, est

requise.

Cela autorise, comme la Commission l’a fait pour le Département des Hauts-de-

Seine, une intervention publique couvrant également la zone 1 circonscrite par

l’ARCEP et organisant une péréquation interne entre zones rentables et non

rentables.

Au vu du coût de déploiement d’un réseau optique sur certains territoires, on peut

s’interroger, pour respecter les lignes directrices et le principe d’universalité de

couverture induit par la notion de SIEG, sur l’existence d’une obligation de desserte,

par une même technologie, de l’intégralité du ressort territorial de la collectivité qui

agit.

Sur ce point, il n’existe pas de principe intangible. Si la notion de SIEG induit, en

matière d’industrie de réseaux, une couverture territoriale étendue, justement pour

permettre la péréquation tarifaire, elle n’impose pas une logique de « tout ou rien ».

En matière de haut débit, la Commission a par exemple qualifié de SIEG les projets

du Département des Pyrénées-Atlantiques et du Syndicat mixte Dorsal, en Limousin,

alors qu’ils n’offraient pas un accès haut débit identique sur l’ensemble des zones

rurales couvertes.

48 / 107

Pour le très haut débit, un équilibre à la fois territorial et financier devra être

recherché pour tout projet ayant comme ambition de couvrir des agglomérations et

des zones rurales, afin d’assurer un minimum de péréquation. Cela étant, il est

possible de justifier de traiter différemment certaines zones au vu des coûts induits

par leur desserte optique, par exemple en leur offrant dans un premier temps une

modernisation de la boucle locale en cuivre ou une couverture hertzienne. L’échelle

de temps de construction d’une boucle locale s’étalant sur dix à vingt ans, il serait

économiquement aberrant de n’autoriser l’octroi d’aides que pour les projets

assurant une couverture complète et immédiate du territoire.

Enfin, la Commission européenne requiert que tout réseau établi grâce à des fonds

publics soit ouvert à tous les opérateurs, en insistant notamment sur le caractère

vertueux de la mise à disposition de fibres nues, sans toutefois l’imposer. En droit

français, cela ne pose pas de difficultés pour les collectivités, l’article L.1425-1 du

code général des collectivités privilégiant l’intervention sur le marché de gros. En

revanche, pour des aides qui seraient attribuées directement par l’Etat aux

opérateurs, une réflexion sur le support juridique des contreparties imposées sera

nécessaire.

En tout état de cause, une politique ambitieuse de soutien de l'Etat et/ou des

collectivités au très haut débit devrait faire l’objet d’une notification, à la

Commission européenne, d’un régime d’aide spécifique prenant en compte ces

lignes directrices. Une telle notification assurera la sécurité juridique de la politique

gouvernementale et permettra de faire l'économie d’une notification particulière de

chaque projet, à la fois longue et lourde pour les autorités qui les portent.

Dans tous les scénarii précédemment évoqués, sauf peut être la séparation

structurelle de l’opérateur historique, le besoin de financement public pour le

déploiement du très haut débit filaire en zone rurale est irréductible. Les aides visant

à un aménagement numérique du territoire sont actuellement apportées par les

collectivités territoriales avec des financements européens. Les sources de

financement sont donc pour l'essentiel les impôts locaux, fonciers et la taxe

professionnelle. Il s'agit d'un prélèvement sur une base large, ce qui est

économiquement efficace.

Dans l'hypothèse où les pouvoirs publics souhaiteraient se doter d'un fond de

péréquation venant compléter ou abonder l'action des collectivités, la présente

partie s’attache à proposer des mécanismes et la structuration institutionnelle

envisageables pour la collecte et l’attribution des financements.

Sources de financement

La source de financement la plus efficace, ainsi qu'évoquée précédemment, est le

budget général des collectivités ou de l'Etat. A titre d'exemple, le seul

réinvestissement par l'Etat des dividendes qu'il perçoit en tant qu'actionnaire de

l'opérateur historique lui permettrait de financer, en vingt ans, le déploiement de la

boucle locale optique sur l'ensemble du territoire.

49 / 107

L'instauration de nouvelles taxes sur les acteurs des communications électroniques

est aussi évoquée de manière récurrente, notamment pour financer le déploiement

de la fibre optique. Le secteur des télécommunications, au sens large, compte une

multiplicité d'industriels et d'acteurs : opérateurs, équipementiers, entreprises de

génie civil, fournisseurs de contenus et de services et,

bien évidemment, les clients, résidentiels et

professionnels.

Lever un impôt supplémentaire sur des biens ou

services dont les producteurs et fournisseurs sont en

concurrence à l'échelle mondiale, ou qui peuvent être

délocalisées dans un autre pays, peut être contreproductif. Il semble donc difficile

d'instaurer une taxe sur les équipementiers ou sur les éditeurs de services en ligne.

Une exception serait toutefois justifiée pour les jeux en ligne, pour lesquels une

réglementation plus stricte peut imposer aux acteurs actifs sur le marché français

une présence nationale permettant une taxation spécifique. Les entreprises de jeux

en ligne sont des bénéficiaires potentiels du déploiement du très haut débit et

pourraient être imposés à ce titre.

Ensuite, les opérateurs, les entreprises de génie civil et les clients finals seront les

principaux bénéficiaires du remplacement des réseaux cuivre par les réseaux

optiques. Un prélèvement spécifique pourrait être imposé aux opérateurs, sur le

modèle de la taxe finançant le service public audiovisuel. Un impôt nouveau sur les

entreprises de génie civil n'est pas évident à cibler, car toutes ne sont pas actives

dans le domaine du déploiement des réseaux.

Enfin, sur le modèle du Royaume-Uni précédemment évoqué, ou encore de la

contribution au service public de l’électricité, il est possible de taxer les clients finals

en prélevant une somme de quelques euros par mois sur les consommateurs de

service haut débit, ou plus généralement aux consommateurs de services de

communications électroniques, en incluant éventuellement les abonnements à la

téléphonie mobile. Compte tenu de la généralisation et du caractère quasi

indispensable des services télécoms, un tel prélèvement serait proche d'un impôt

obligatoire.

Le besoin de financement public est d'environ 500 millions d'euros sur les vingt

prochaines années avec un déploiement utilisant les technologies alternatives à la

fibre pour les zones les plus rurales. Les fonds de l’Etat viendraient en complément

des investissements des collectivités, qui s'élèvent en moyenne à 200 millions

d’euros par an sur les dernières années. Un plan de financement possible pourrait

être le suivant.

Investissements des collectivités(niveau actuel +50%)

Subvention Etat fondée sur une taxe opportuniste

(jeux en ligne)

Investissement rentable de l’Etaten capital et en prêts bonifiés

Fond national d’aménagement numérique

Le besoin de financement est relativement

modeste, de quelques centaines de

millions par an. Il peut être couvert par une

taxe opportuniste

Financement Etat

(taxe opportuniste)

Fonds national d’aménagement numérique

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La participation de l'Etat pourrait, alternativement, être remplacée par l'octroi d'un

crédit d'impôt proportionnel aux investissements réalisés par les opérateurs pour

déployer du très haut débit en zone peu dense. Un mécanisme similaire existe déjà

pour les câbles sous marins. Les différentes sources de financement de l’Etat, en

capital en prêts et sous toutes formes de concours, pourraient être gérées par le

fonds national d’aménagement numérique institué par la proposition de loi du

Sénateur Pintat. Ensuite, il reviendrait à ce fonds d’accorder différents types d’aides

en fonction des projets et des territoires concernés.

Structuration institutionnelle

La diversité des acteurs publics intéressés, l’Etat et tous les échelons de collectivités,

implique une structure institutionnelle d'allocation des concours financiers proche

de celle mise en place pour le déploiement du réseau de distribution électrique

(FACE) ou pour les réseaux d’assainissement (FNDAE). Une déconcentration de la

prise de décision pourrait aussi être organisée, mais ne saurait se traduire par une

tutelle entre collectivités, ce qui milite pour réserver à l’Etat, par le biais du préfet de

région, au moins un rôle d’arbitre en cas de difficulté.

La présence de certains opérateurs au comité de gestion de ce fonds ne parait pas

indispensable, d'autant plus qu'ils pourraient être bénéficiaires des fonds accordés.

En revanche, il paraitrait utile, au moins les premières années, que le fonds s'appuie

sur un conseil scientifique indépendant des opérateurs et permettant de garantir

que les réseaux financés seront bien utilisables par tous les opérateurs très haut

débit pour fournir leurs services. Compte tenu des difficultés rencontrées ces deux

dernières années par les opérateurs pour s’entendre sur des principes communs de

mutualisation, une action énergique de l’Etat sur ce point devient indispensable, au

risque de voir se déployer des réseaux n’étant utilisables que par leur propriétaire.

F) BESOI N ET SCE N ARIO D ’ I N T ERV ENT ION PUBL I Q UE

Le besoin de financement public dépendra de l'ambition fixée pour les

déploiements. Dans cette partie, nous ferons l'hypothèse d'un objectif de couverture

en fibre de quatre-vingts pourcents des ménages et entreprises. Les derniers vingt

pourcents sont couverts par les technologies alternatives d'équipement de la sous

boucle locale cuivre et de réseaux hertziens de prochaine génération.

L'investissement total est de l'ordre de 18 milliards d’euros, dont 15 milliards pour la

fibre. La capacité de financement du secteur privé est estimée à 450 euros par prise

optique, soit 150 euros par opérateurs avec trois opérateurs cofinanceurs ou clients

de l'infrastructure. En revanche, la capacité de financement pour l'équipement en

débit de la sous boucle est quasi nul. Finalement, nous faisons l'hypothèse que le

secteur privé prendra en charge intégralement les coûts de déploiement des réseaux

51 / 107

0

200

400

600

800

1000

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1400

2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 2026 2027 2028 2029

Cycle d’investissement et interventions publiques annuelles en millions d’euros

Financements publics

Capital public et prêts

Acteurs privés

mobile hertzien de prochaine génération. Des obligations de couverture ambitieuses

peuvent être fixées lors de l'attribution de la licence.

Le besoin total de financement est d'environ 8

milliards d'euros. Les pouvoirs publics peuvent en

outre accorder des prêts à taux bonifiés, des apports

en capital ou des garanties d'emprunts pour accélérer

les déploiements. Le volume de capitaux publics

octroyés sous forme de prêts dépend en grande partie du montage. Si l'Etat

proposait des prêts à maturité longue, une quinzaine d'années, à un taux bonifié

attractif pour les opérateurs, y compris l'opérateur historique, le besoin total

pourrait être de l'ordre de 8 milliards d'euros également. Ce volume peut être

diminué si une partie des prêts sont remplacés par des garanties d'emprunts. Le

graphique ci-après représente la ventilation des coûts et besoins en capital, prêts et

financements, sous hypothèse que les opérateurs couvrent quatre vingt pourcents

de leurs dépense avec des prêts à taux bonifiés.

En pointillé, la dépense d’un réseau intégralement en fibre optique, soit 15 Mds€, essentiellement en subvention

Couverturecumulée

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %

Capitaux privé

Capital public et prêts bonifiés

Financements publics

1,5 Mds€

2,5 Mds€

4 Mds€

7 Mds €

3 Mds€

Coûts, et interventions publiques par tranche

4,5 Mds€

Fibre jusqu’à l’abonné

Il parait raisonnable d'envisager un cycle d'investissement sur une vingtaine

d'années, soit sur une échelle de temps comparable à celle qui a été nécessaire pour

déployer le réseau téléphonique. Un tel cycle d'investissement est en outre

compatible avec les délais de lancement des projets par l’initiative privée ou

publique ainsi qu’avec les capacités de financement de tous les principaux

opérateurs. Un cycle d'investissement plus rapide pourrait être risqué en termes

industriels et entrainer une consolidation du marché, les acteurs les plus petits

n'étant pas en mesure de suivre le rythme.

En retenant un cycle d'investissement en cloche, identique à celui de la boucle locale

cuivre, nous pouvons estimer le besoin de financement annuel. Le graphique ci-

contre n'a qu'une valeur

illustrative. Le profil

d'investissement réel dépendra

des dispositifs de soutien publics

mis en place, de l'appétence des

consommateurs pour les services

à très haut débit et de la capacité

des opérateurs à monétiser ces

services.

Les besoins de financements publics sont inférieurs à 500 millions d'euros par an. En

anticipant une légère augmentation des financements octroyés par les collectivités

Le besoin de financement public est de

8 milliards d'euros sur la durée du cycle

d'investissement

52 / 107

sur la période, le besoin de financements de l'État est de l'ordre de 200 millions

d’euros par an. Ce besoin de financement pourrait être couvert par le budget

général ou :

- par un financement extra-sectoriel, prenant par exemple la forme d’une taxe sur

les jeux en lignes ; actuellement, les jeux d’argents rapporte 5 milliards par an à

l’État ; le potentiel de croissance de l’offre légale en ligne est encore inconnu ;

- par un financement intra-sectoriel, prenant vraisemblablement la forme d’une

nouvelle taxe sur les opérateurs ; le niveau en serait légèrement inférieur à celui

de la taxe finançant la suppression partielle de la publicité sur France Télévision.

Le besoin d’intervention en capital et prêts à taux

bonifiés est du même ordre de grandeur, soit 500

millions par an. Il convient de noter que ces apports en

capital et en dette ne correspondent pas à des

dépenses réelles, le capital pouvant être rémunéré à

dix pour cent et la dette être proposée à un taux

légèrement supérieur à celui auquel l'Etat emprunte pour ses propres besoins. Les

intérêts du capital et de la dette publique pourraient rapporter un à deux milliards

d’euros sur la période. Le plan de financement public global pourrait être le suivant.

Investissements des collectivités(niveau actuel +50%)

300 M€ / an

Subvention Etat(taxe opportuniste)

200 M€ / an

Investissement rentable de l’Etaten capital et en prêts bonifiés

< 500 M€ / an

Fond national d’aménagement numérique

Le besoin de financement public est de

l'ordre de 500 M€ par an. Des prêts ou

dotations en capital pourraient être

accordés pour un volume équivalent.

Financement Etat

(taxe opportuniste)

Fonds national d’aménagement numérique

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ANNEXE 1

COUTS DE DEPLOIEMENT DES RESEAUX TRES HAUT DEBIT

54 / 107

I- DONNEES SOURCES

Nous avons utilisé la base de données géographique BD TOPO de l’IGN et

notamment aux couches suivantes :

- Voirie : typologie et nature de revêtement

- Bâtiments : polygone et hauteur

- Limites administratives

Ces informations constituent un ensemble de 18,3 millions de bâtiments et de 2,7

millions de km de routes à l’échelle nationale. Il s’agit des briques élémentaires de la

base pour la constitution du modèle de coût d’une boucle locale optique. Par

ailleurs, nous avons utilisé la base de données IRIS sur les logements afin de qualifier

les bâtiments entre pavillons et immeubles.

II- DEFINITION DE L’ECHANTILLON

Au vu du nombre conséquent d’éléments à traiter, nous avons procédé à un

échantillonnage représentatif d’environ 10% de la France métropolitaine. Le niveau

d’analyse a été fixé à la maille de l’arrondissement. On rappelle que

l’arrondissement est une subdivision territoriale des départements français. On

compte 329 arrondissements en France métropolitaine. Quatre critères ont été

retenus pour s’assurer de la représentativité des arrondissements retenus :

- Le linéaire moyen de voirie par logement sur l’arrondissement

- Le taux de logement en habitat collectif sur l’arrondissement

- La densité de logements au km² de l’arrondissement

- La déclivité de l’arrondissement (différence d'altitude en son sein)

Le choix des arrondissements représentatifs doit donc permettre à la fois de

respecter critère par critère la moyenne de ces différents paramètres à l’échelle

nationale, mais aussi de pouvoir disposer d’une diversité de cas (urbain dense,

périurbain, rurbain, rural, montagneux,…). Les 30 arrondissements retenus sont les

suivants :

55 / 107

Ces 30 arrondissements regroupent 300 900 km de voirie et 2,07 millions de

bâtiments, représentant près de 3,1 millions de logements. Un arrondissement a été

analysé dans chaque région.

III- DEFINITION DES SCENARII DE COUVERTURE

Quatre scénarii de couverture du territoire national ont été définis dont les taux

respectifs de couverture sont les suivants : 50%, 80%, 95%, et 100%.A chacun de ces

différents scénarii, ont été attribués les taux de couverture précis pour chacun des

arrondissements de l’échantillon. Ainsi, à titre d’exemple :

- pour assurer une couverture nationale de 50%, il faut couvrir à hauteur de 16%

l’arrondissement de Vesoul et à 67% l’arrondissement d’Aix-en-Provence ;

- pour assurer une couverture nationale de 80%, il faut couvrir à hauteur de 48%

l’arrondissement de Rodez et à 96% l’arrondissement de Strasbourg-Campagne ;

- pour assurer une couverture nationale de 95%, il faut couvrir à hauteur de 86%

l’arrondissement d’Ajaccio et à 99% l’arrondissement de Sarcelles-

Montmorency ;

La couverture par arrondissement est alors la suivante :

Taux de couverture : 50% Taux de couverture : 80%

56 / 107

IV- METHODOLOGIE DE MODELISATION DU RESEAU OPTIQUE A DEPLOYER

Constitution des zones de bâti

A partir des bâtiments issus de la BD TOPO, il est procédé à un regroupement des

bâtiments dont les centroïdes sont distants de moins de 50 mètres les uns des

autres, cela permet de constituer des zones de bâtis comme l’illustre l’exemple

suivant :

Définition des catégories des zones de bâti

Une fois les zones de bâti constituées, elles se voient attribuer le nombre de

bâtiments rattachés à cette zone. Trois types de zones de bâti sont alors définis :

Catégorie de bâti Caractéristiques Exemple cartographique

Bourg Supérieur à 100

bâtiments

Hameau

Supérieur à 5 bâtiments

et inférieur ou égal à 100

bâtiments

Isolé Inférieur ou égal à 5

bâtiments

57 / 107

Définition des itinéraires de raccordement des zones de bâti

On prend l’hypothèse que le réseau en étoile part des répartiteurs téléphoniques

existants. Un algorithme dit de plus court chemin est alors mis en place par palier

successif :

- Niveau 1 : Des NRA aux bâtis de type « Bourg »

- Niveau 2 : Des NRA ou des bâtis de type « Bourg » aux bâtis de type « Hameau »

- Niveau 3 : Des bâtis de type « Bourg » ou « Hameau » aux bâtis de type « Isolé »

Enfin, la voirie interne des zones de bâti est

prise en compte pour assurer la desserte fine

des habitations. Par la suite, nous procédons à

une suppression des doublons entre les

différents tronçons pour identifier les linéaires

des tronçons nécessaires au raccordement des

différents bâtis.

Ces tronçons sont distingués entre ceux permettant de raccorder une zone de bâti à

un NRA ou une autre zone de bâti, ces tronçons sont dits « extra-zone », et ceux

assurant l’irrigation d’une zone de bâti, ces tronçons sont dits « intra-zone ».

58 / 107

V- RESULTATS DE LA MODELISATION

L’algorithme mis en œuvre fournit les résultats bruts suivants sur les trente

arrondissements :

Taux de

couverture 50% 80% 95% 100%

Linéaire intra-

zone 28 660 km 54 980 km 73 930 km 86 360 km

Linéaire extra-

zone 130 km 9 090 km 32 620 km 55 200 km

Linéaire total 28 790 km 64 070 km 106 550 km 141 560 km

Des retraitements de plusieurs types sont réalisés pour optimiser le tracé du réseau

optique :

- Le réseau optique raccorde des bâtiments qui ne disposent pas de lignes

téléphoniques filaires, voire d’électricité, à l’exemple du hameau de Girolata en

Corse-du-Sud, ou de nombreux gites de montagne voire de fermes ou bâtiments

en ruine.

- Le réseau optique suit la voirie ce qui n’est pas toujours pertinent en zone

montagneuse ou rurale, puisque le réseau électrique moyenne tension peut

être amené à passer à travers champs notamment lorsque la route s’avère

sinueuse.

Par la suite, nous procédons à une extrapolation pour évaluer le linéaire global

nécessaire pour desservir l’ensemble du territoire métropolitain. Les résultats issus

de l’extrapolation sont les suivants :

Taux de

couverture 50% 80% 95% 100%

Linéaire total 250 000 km 500 000 km 800 000 km 1 100 000 km

Les résultats sont présentés en annexe 3 pour quelques arrondissements

représentatifs des différents cas de figure.

59 / 107

VI- COUTS UNITAIRES RETENUS DANS LE MODELE

Coût Poste Commentaire

Locaux

techniques 50 € par prise

Possibilité de réutiliser les locaux

techniques actuels de France Télécom

(répartiteurs) mais nécessité de

reconstruire des points de flexibilité (sous

répartiteurs) intermédiaires

Déploiement

horizontal 25 € par mètre

Estimation haute, les coûts de déploiement

en fourreaux existants (350 000 km) et en

aériens étant d’ores et déjà inférieurs. La

répartition prise en compte est la suivante :

Aérien68%

Fourreaux24%

Génie civil8%

L’estimation intègre une « provision » pour

la construction de 80 000 de nouvelles

tranchées.

Coût Poste Commentaire

Adduction

d’immeuble

500 € par

immeuble

Coût constaté en zone très dense pour les

immeubles raccordés à un réseau de génie

civil existant. Pas encore de recul sur le

coût d’une adduction en façade.

Colonne

montante 80 € par prise

Fortes divergences d’évaluation des coûts

entre les opérateurs à ce jour. L’estimation

intègre d’une part une certaine

industrialisation et d‘autre part une

augmentation probable des coûts constatés

pour les petits immeubles.

60 / 107

VI- COMPLEMENTS DE COUVERTURE A LA DESSERTE FTTH

Dans le cadre des scénarios de couverture à 80% et 95%, les compléments de

couverture par des technologies alternatives à la fibre optique jusqu’au domicile ont

fait l’objet d’une analyse approfondie :

- Sous-répartiteur

- 4G/LTE

- Combinaison du sous-répartiteur et de la 4G/LTE

Localisation des sous répartiteurs

Selon nos estimations, les 1 523

répartiteurs présents sur les

arrondissements comprennent de

l’ordre de 9 800 sous-répartiteurs.

Cette estimation est réalisée à

partir de l’analyse des 8 000 sous-

répartiteurs éligibles à l’offre NRA

Zone d’Ombre. En effet, nous

constatons un impact de la taille du

NRA d’origine sur la taille moyenne

des sous-répartiteurs et donc le

nombre de sous-répartiteurs comme l’illustre le schéma suivant. Ainsi, nous pouvons

disposer d’une estimation fine du nombre de sous-répartiteurs par zone d’emprise

de répartiteurs. En fonction des typologies de bâti de chacune des communes des

arrondissements, nous estimons la localisation des sous-répartiteurs par type de

bâti, et donc simulons cette localisation. Sur les 30 arrondissements de l’échantillon,

les 9 800 sous-répartiteurs se répartiraient ainsi :

Ces données semblent compatibles avec le document sur la mise en œuvre de

l’accès à la sous-boucle locale publié par l’ARCEP le 23 octobre et soumis issus de sa

consultation publique.

Localisation des points hauts

Notre analyse s’appuie sur la base nationale exhaustive de l’Agence Nationale des

Fréquences sur les points hauts de téléphonie mobile (1G, 2G, 3G). Ainsi, nous

dénombrons 40 774 sites dont 4 673 sites sur les 30 arrondissements de l’analyse.

L'équipement de la moitié des points hauts est nécessaire pour couvrir l'ensemble

de la zone en bande 800 MHz. L'équipement du tiers des points hauts suffit à

équiper la seule zone rurale.

Inférieur à 30 dB58%

Entre 30 et 42 dB22%

Entre 42 et 53 dB6%

Supérieur à 53 dB14%

Répartition des sous-répartiteurs en fonction de leur éloignement au répartiteur d'origine

61 / 107

Scénarii étudiés et résultats

A partir des réseaux fibre optique nécessaires pour desservir respectivement 80% et

95% du territoire des arrondissements, il s’agit de déployer de la fibre :

- En scénario 1, pour raccorder les sous-répartiteurs

- En scénario 2, pour raccorder les points hauts

- En scénario 3, pour raccorder les sous-répartiteurs et les points hauts

Seuls les sous-répartiteurs et points hauts utiles à la desserte de ces bâtis sont pris

en compte. Ainsi, les sous-répartiteurs ou sites mobiles n’assurant que la desserte de

zones déjà intégralement couvertes en FTTH sont écartés de la suite de l’analyse.

Dans le cas d’une couverture de 80%, on constate que 75% des sous-répartiteurs

sont utiles à une couverture des zones de bâtis non couvertes en fibre optique. Pour

une couverture de 95%, ce taux diminue à 70% des sous-répartiteurs (6 800 sous-

répartiteurs). Ce sont donc respectivement de l’ordre de 75 000 sous-répartiteurs et

70 000 sous-répartiteurs qu’il serait nécessaire de raccorder pour couvrir l’ensemble

des bâtis du territoire national. En se limitant aux seuls sous répartiteurs desservant

plus de dix lignes non équipées en fibre optique, ce chiffre descend à 50 000 sous

répartiteurs à équiper. Le tableau suivant présente le linéaire de réseau à déployer

pour les différents scénarii de déploiement.

Couverture FTTH 80% 95%

FTTH seul 500 000 km 800 000 km

FTTH + SR 520 000 km 803 000 km

FTTH + LTE 515 000 km 805 000 km

FTTH + SR + LTE 530 000 km 805 000 km

Le linéaire de réseau incrémental à déployer est faible, pour deux raisons. Un

déploiement fibre avec une couverture de quatre vingt pourcents est déjà très

capillaire, ainsi que le montrent les cartes présentées ci-avant. Par ailleurs, les sous

répartiteurs et dans une moindre mesure les points hauts sont situés à proximité des

zones bâties denses, typiquement plus proches de bourgs que des hameaux isolés.

Ils sont donc proches des réseaux fibre déployés.

Si l’on considère que le très haut débit nécessite un service de type TVHD, un

affaiblissement de 30 dB en ADSL constitue la limite maximum. Dès lors, sur la base

de notre échantillon, il semble que le raccordement des sous-répartiteurs par

rapport au scénario de couverture à 80% ne permette d’atteindre qu’une couverture

de 25% des foyers non éligibles au FTTH, soit 5% des foyers. Ainsi, les sous-

répartiteurs se trouvant majoritairement dans des zones déjà couvertes en FTTH,

leur apport marginal en termes de couverture très haut débit s’avère faible.

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En moyenne deux cents foyers par station de base LTE seraient non couverts en fibre

ou en VDSL. Compte tenu de la capacité de diffusion hertzienne il n’est pas

envisageable de proposer à ces ménages de services audiovisuel haute définition par

l'intermédiaire du LTE. En revanche, le LTE permet en milieu rural de proposer des

services de connectivité haut débit, voire très haut débit, plus performants que ceux

qui peuvent être acheminés par le cuivre téléphonique.

Coût de déploiement des compléments

Nous avons pris en compte les coûts unitaires suivants :

- 25 € du ml pour le déploiement du réseau optique

- 30 000 € pour l’implantation d’une armoire de rue au niveau du sous-répartiteur

- 70 000 € pour l’adduction et l’équipement actif sur chaque point haut

Le déploiement complémentaire au niveau des sous-répartiteurs et points hauts est

compris entre 1,9 et 3,5 milliards d’euros :

Taux de couverture FTTH 80% 95%

Extensions sous-répartiteurs 2,8 Mds € 2,2 Mds €

Extensions points hauts 2,2 Mds € 1,9 Mds €

Extensions sous-répartiteurs

et points hauts 3,5 Mds € 2,8 Mds €

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ANNEXE 2

LES MECANISMES DE FINANCEMENT

DES INFRASTRUCTURES DE RESEAUX

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I- MECANISMES DE PEREQUATION HORIZONTALE EXISTANT

La péréquation horizontale (ou géographique) suppose pour simplifier, dans les

industries de réseaux, que les recettes tirées de l’exploitation d’une infrastructure

dans les zones plus denses d’un territoire viennent financer le déploiement de cette

infrastructure, et dans certains cas le déficit de son exploitation, dans les zones

moins rentables.

Cette logique a gouverné la construction de la plupart des grandes infrastructures de

réseaux, qu’elles aient été déployées dans un cadre national, régional ou local, qui a

été confiée généralement à un opérateur économique disposant sur un territoire

donné d’un monopole de fourniture du service. Cette même logique a aussi été

appliquée à d’autres secteurs n’impliquant pas la construction d’une infrastructure,

toujours pour garantir la fourniture d’un service dans une zone que l’initiative privée

ne couvrirait pas spontanément.

La libéralisation des industries de réseaux a souvent remis en cause ce principe de

péréquation « interne » à l’opérateur disposant d’un monopole, tout en prévoyant

généralement des financements alternatifs permettant de maintenir la présence de

services dans des zones moins attractives pour l’initiative privée.

Les développements qui suivent recensent les différents mécanismes de

péréquation mis en place dans la plupart des industries de réseaux, mais aussi dans

d’autres secteurs caractérisés par de fortes contraintes d’aménagement du

territoire, pour les confronter au déploiement de réseaux très haut débit. Seront

successivement présentés : l’électricité, le gaz, l’eau, les communications

électroniques, les transports ferroviaires, les services postaux, la presse écrite et

l’audiovisuel.

A) EL ECT RIC IT E

Il existe deux mécanismes de péréquation horizontale permettant le développement

du réseau électrique en prenant en considération des impératifs d’aménagement du

territoire, le Fonds d’amortissement des charges d’électrification (FACE), créé par la

loi de finances du 31 décembre 1936, et le Fonds de péréquation de l’électricité

(FPE), créé par la loi du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l’électricité et du gaz.

Ensuite, un troisième mécanisme a été mis en place par la loi du 3 janvier 2003 sur

les marchés de l’électricité et du gaz, la compensation des charges du service public

de l’électricité (CSPE), mais qui ne constitue pas un véritable mécanisme de

péréquation horizontale.

65 / 107

Le FACE

Le FACE a pour vocation de verser des subventions aux collectivités maîtres

d’ouvrage des travaux d’électrification rurale. Il a permis la diffusion des réseaux

électriques dans les zones rurales en permettant aux collectivités concédantes

d’alléger leurs charges d’emprunt contractés pour l’édification des réseaux. Il

intervient également pour le financement de l’extension des réseaux, le

renforcement anticipé d’ouvrages de distribution endommagés par les intempéries,

l’amélioration esthétique des réseaux, la préservation de l’environnement et la

maîtrise de la consommation d’énergie.

Ce fonds est alimenté par une contribution annuelle des gestionnaires de réseaux

publics de distribution (ERDF et les distributeurs non nationalisés), en fonction des

kilowattheures distribués en basse tension. ERDF supporte 95% du total. Le montant

de cette contribution est fixé chaque année par arrêté conjoint des ministres chargés

du budget et de l’énergie.

Les aides du FACE sont ventilées chaque année entre les départements par les

ministres chargés du budget et de l’énergie, après avis du conseil du FACE, en

fonction des besoins évalués. Chaque département répartit sa dotation entre les

différentes collectivités concernées qui réalisent les travaux.

Le taux d’aide unique du FACE est de 65% du montant TTC des travaux aidés. Ceux-ci

doivent correspondre à l’un des cinq programmes du FACE (principal,

environnement, sécurisation, sites isolés, intempéries).

Le conseil du FACE, qui administre le fonds, est composé de quinze membres

désignés par arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture et de l’énergie

pour trois ans renouvelables et comprend cinq représentants de l’Etat, un

représentant des conseils généraux, quatre représentants des collectivités

électrifiées, trois représentants d’EDF, un représentant des organisations agricoles,

et un représentant des régies ou sociétés coopératives d'intérêt collectif agricole

d'électricité. Le directeur est nommé par le Président d’EDF parmi les représentants

de cette entreprise, après agrément du ministre chargé de l’électricité.

Le fonds est géré sous la forme d’un compte spécial tenu dans les comptes d’EDF.

Son action représente une somme annuelle de l’ordre de 350 millions d’euros.

Le FPE

Contrairement au FACE, le FPE n’a pas vocation à intervenir en matière

d’investissement. Son rôle est toutefois important dans le développement du réseau

électrique et pour l’aménagement du territoire.

Ce fonds a été créé afin de compenser les charges supplémentaires ou déficits

d’exploitation des distributeurs non nationalisés. Son objet a été considérablement

élargi par la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement

du service public de l’électricité. Le FPE intervient désormais pour compenser les

charges découlant des missions de service public portant sur le réseau public de

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distribution. Ces charges sont constituées par les pertes liées aux caractéristiques du

réseau exploité et aux conditions tarifaires réglementées (en cas d’un faible nombre

de clients disséminés dans un habitat dispersé, par exemple), ou par la participation

à l’aménagement du territoire. Depuis 2000, les distributeurs d’électricité sont en

effet investis de missions de service public tenant à la desserte rationnelle du

territoire national et au raccordement de tous aux réseaux publics dans des

conditions non discriminatoires.

Le FPE est alimenté par des prélèvements sur les recettes des organismes de

distribution bénéficiaires. La formule de péréquation réactualisée dans le décret du

14 janvier 2004 est fondée, pour chaque gestionnaire de réseau de distribution, sur

l'écart entre l'évaluation des recettes liées à l'exploitation des réseaux, nette des

reversements aux gestionnaires de réseaux amonts, et l'évaluation des charges

d'exploitation de ces réseaux. Le profil de charges repose sur une formule normative

basée sur les caractéristiques du réseau (longueur de lignes et nombre de postes) et

de la clientèle (nombre d'abonnements). Les distributeurs déficitaires ne contribuent

pas au fonds mais en perçoivent des subventions. En pratique, seul ERDF abonde ce

fonds, dont les subsides bénéficient aux distributeurs non nationalisés.

Le FPE est administré par un conseil, qui fixe les modalités selon lesquelles les

gestionnaires des réseaux publics de distribution d’électricité adressent les

renseignements nécessaires à l’établissement de la péréquation. Ce conseil est

composé de douze membres, dont trois représentants de l’Etat, trois représentants

d’EDF, trois représentants des distributeurs non nationalisés et deux représentants

des autorités concédantes de la distribution publique d’électricité. Il est en outre

présidé par un conseiller d’Etat. Ces membres sont nommés pour trois ans par arrêté

du ministre chargé de l’énergie. Leur mandat est renouvelable.

La CSPE

A la différence du FACE et du FPE qui vise à construire, entretenir et équilibrer

l’exploitation des réseaux de distributions, la CSPE a pour objet de compenser les

surcoûts imposés aux producteurs d’électricité par les contraintes de tarification du

service public de l’électricité.

Précisément, il compense aux opérateurs qui les supportent les surcoûts liés :

- aux politiques de soutien à la cogénération et aux énergies renouvelables,

- à la production dans les zones non interconnectées au réseau électrique

métropolitain continental, dus à la péréquation tarifaire nationale (Corse,

départements d'outre-mer, Mayotte, Saint-Pierre et Miquelon et les îles

bretonnes de Molène, d'Ouessant et de Sein),

- à la mise en œuvre de la tarification spéciale « produit de première nécessité »

et du dispositif institué en faveur des personnes en situation de précarité,

- une partie des charges liées au tarif réglementé transitoire d’ajustement du

marché (TaRTAM), mis en place pour permettre aux grands comptes ayant

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renoncé au tarif réglementé de bénéficier d’un tarif à mi-chemin entre les prix

du marché et le tarif réglementé.

EDF, pour l'essentiel, Electricité de Mayotte (EDM) et les entreprises locales de

distribution (ELD) supportent de telles charges, évaluées chaque année par la

Commission de régulation de l’énergie.

Les contributeurs de ce prélèvement assis sur les KWh consommée, qui constitue un

impôt, sont les consommateurs finals ; il est recouvré, selon les cas, par leurs

fournisseurs d’électricité ou les gestionnaires du réseau de transport ou de

distribution, qui les reversent ensuite à la Caisse des dépôts. La Commission de

régulation de l’électricité (CRE) et la Caisse des dépôts versent enfin le produit de ce

prélèvement aux fournisseurs d’électricité supportant ces charges de service public.

Intérêts et limites pour le très haut débit

Les logiques de péréquation du FACE et du FPE sont aussi valables dans leurs

principes pour le très haut débit, mais le contexte concurrentiel du secteur implique

une réflexion propre.

Pour leur financement, le FACE comme le FPE reposent sur l’existence de

distributeurs locaux en situation de monopole (ERDF sur 95 % du territoire et les

distributeurs non nationalisés pour le reste).

Or face à la multiplicité des exploitants de réseaux, le financement de la couverture

territoriale par les seuls opérateurs de communications électroniques sera

insuffisant. A titre d’exemple, le nouveau prélèvement imposé aux opérateurs de

communications électroniques pour financer la suppression de la télévision sur les

chaînes de service public devrait rapporter 347 millions d’euros pour 2009, chiffre

conséquent mais sans doute juste au vu de l’objectif.

Par ailleurs, le FACE comme le FPE fournissent un mécanisme institutionnel

intéressant, car il permet une redistribution nationale et départementale des fonds

en s’appuyant sur la compétence obligatoire des communes en matière de

distribution d’électricité.

Enfin, la CSPE illustre la tendance forte des industries de réseaux libéralisées à faire

peser sur l’utilisateur final des charges auparavant assumées par l’opérateur en

situation de monopole, ce qui revient de fait à fiscaliser le financement des

contraintes de service public. C’est le choix fait par les britanniques pour financer le

déploiement du haut débit, et celui également préconisé par le rapport du Conseil

économique, social et environnemental de février 2009. Pour le très haut débit, un

mécanisme de ce type pourrait par exemple s’articuler avec un prélèvement portant

sur les opérateurs.

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B) GAZ

Mécanisme

Il n’existe pas de mécanisme de péréquation géographique dans le secteur du

transport et de la distribution du gaz, mais uniquement une péréquation dite sociale,

afin de compenser les charges de service public relatives à la mise en œuvre du tarif

spécial de solidarité dont doivent bénéficier les particuliers les plus défavorisés. Ce

système a été instauré par la loi du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie.

Ces charges sont calculées sur la base d’une comptabilité tenue par les fournisseurs

qui les supportent, selon des règles établies par la CRE. La CRE peut faire contrôler

cette comptabilité par un organisme indépendant, aux frais de l’opérateur.

Les différents fournisseurs doivent contribuer à un compte géré par la Caisse des

dépôts et consignations, au pro rata de la quantité de gaz vendue aux

consommateurs finals. Le montant global de ces contributions est calculé de façon à

couvrir l’ensemble des charges entrainées par l’application du tarif de solidarité,

ainsi que les frais de gestion exposés. Les fournisseurs pour lesquels le montant de la

contribution due est supérieur au coût des charges qu’ils supportent ne versent que

la différence, deux fois par an. La Caisse des dépôts et consignations reverse selon la

même périodicité la compensation aux fournisseurs dont les charges de service

public ont excédé le montant de la contribution due. Ce mécanisme est l’équivalent

de la CSPE évoquée ci-avant.

Intérêts et limites pour le très haut débit

Les remarques relatives à la CSPE valent également ici.

C) COMM UN IC AT IO NS EL ECT RONI QUE S

Mécanisme

Avant la libéralisation du secteur, l’opérateur historique pratiquait une péréquation

géographique consistant à facturer les communications téléphoniques, aux usagers

des zones densément peuplées, à un coût supérieur au coût de revient afin de

pouvoir proposer un tarif identique aux usagers des zones les moins favorisées, dont

le raccordement était nettement plus onéreux. Il assurait ainsi une mission de

service public national dans un cadre de monopole de fourniture du service.

Avec la libéralisation, la notion de service universel a été substituée, sous l’influence

communautaire, à celle de service public. Ce service universel, accessible en tout

point du territoire, doit assurer l’acheminement des communications téléphoniques,

des communications par télécopie et des communications de données à des débits

69 / 107

suffisants pour permettre l’accès à Internet, en provenance ou à destination des

points d’abonnement, ainsi que l’acheminement gratuit des appels d’urgence.

Les directives communautaires ont laissé une certaine marge aux Etats-membres

pour déterminer les conditions de fourniture de service (par un ou plusieurs

opérateurs, sur une base géographique nationale ou infranationale) et de son

financement.

En France, France Télécom en a toujours eu la charge et se voit compenser des

surcoûts induits par l’exécution de cette mission de service universel par le Fond du

service universel des communications électroniques (FSU).

Le FSU est alimenté par l’ensemble des exploitants de réseaux ouverts au public et

les fournisseurs de services de communications électroniques au public. La

contribution de chacun de ces opérateurs est calculée au pro rata de son chiffre

d’affaires réalisé au titre des services de communications électroniques, à

l’exception des prestations d’interconnexion, d’accès ou autres prestations réalisées

pour le compte d’opérateurs tiers, ainsi que de l’acheminement et la diffusion de

services de radio et de télévision et l’exploitation d’antennes collectives.

Il s’agit, par ailleurs, de contributions nettes : l’opérateur en charge du service

universel n’est pas conduit à verser des sommes d’argent pour les récupérer par la

suite.

Les ressources du Fonds sont ensuite réparties entre les prestataires de service

universel (actuellement, France Télécom). L’ARCEP a évalué le coût de la

péréquation géographique pour 2007 à 880 983 euros, pour un total du coût des

obligations de service universel de 43 941 496 euros, auquel il est retranché 21 082

405 euros d’avantages immatériels. Le coût net de l’ensemble des obligations de

service universel est ainsi évalué à 22 859 091 euros pour 2007, contre 125 millions

d’euros en 2002.

La gestion comptable et financière du fonds est assurée par la Caisse des dépôts et

consignations dans un compte spécifique. Les frais de gestion exposés sont imputés

sur le fonds.

Intérêts et limites pour le très haut débit

Tout d’abord, le champ du service universel qui résulte de la directive 2002/22/CE ne

devrait pas être substantiellement modifié par le prochain « paquet télécom » pour

y intégrer l’accès à des services très haut débit. Le projet de nouvel article 4.2 de la

directive 2002/22/CE prévoit en effet que le raccordement au titre du service

universel offre « des débits de données suffisants pour permettre un accès

fonctionnel à Internet, compte tenu des technologies les plus couramment utilisées

par la majorité des abonnés et de la faisabilité du point de vue techniques », ce qui

exclut de fait un raccordement à un réseau très haut débit. Le mécanisme de

financement du service universel ne pourra donc pas être utilisé pour le

déploiement des réseaux de très haut débit.

70 / 107

Par ailleurs, le service universel est financé par la communauté des opérateurs. Or

faire reposer la couverture du territoire en réseaux très haut débit uniquement sur

le secteur serait difficile, au moins dans un premier temps, comme cela a été vu ci-

avant. Le service universel implique également la désignation d’un opérateur

assurant sa fourniture, en pratique l’opérateur historique. Si le financement des

missions de service universel de l’opérateur historique a pu, non sans difficultés

d’ailleurs, être pris en charge par la communauté des opérateurs, cela tient au fait

que le réseau était construit. Le coût net du service universel supporté par les

concurrents de France Télécom était seulement de 22 millions d’euros en 2007, sans

commune mesure avec l’effort d’investissement requis par le très haut débit, de

l’ordre de 500 millions d’euros par an.

D) TRA NSPORT S AERIE N S

Mécanisme

La loi de finances pour 1995 et la loi d’orientation pour l’aménagement et le

développement du territoire du 4 février 1995 ont institué un Fonds de péréquation

des transports aériens (FPTA) afin d’assurer l’équilibre des dessertes aériennes

réalisées dans l’intérêt de l’aménagement du territoire. Il s’agissait de contribuer à

maintenir l’existence de dessertes aériennes non rentables en compensant les

pertes subies par certains opérateurs par des contributions des autres opérateurs du

marché intérieur. Ce dispositif, d’origine communautaire, a été modifié par la loi de

finances pour 1999, qui l’a renommé « Fonds d’intervention pour les aéroports et le

transport aérien » (FIATA). Son fonctionnement et son objet même ont été

largement modifiés en 2005, mais l’étude de ce fonds dans sa forme initiale

demeure intéressante.

Le champ d’application de ce fonds s’étendait aux liaisons intérieures de la France

continentale, aux liaisons intérieures de la Corse et aux liaisons intérieures aux

départements d’outre-mer. Le trafic devait être compris entre 10.000 et 150.000

passagers annuels, aucun des aéroports reliés ne devait dépasser un trafic annuel

total de 1,5 million de passagers et il ne devait pas y avoir d’acheminement alternatif

pour que ces liaisons soient éligibles à la compensation. Un transporteur ne pouvait

être subventionné que s’il offrait un programme minimal de deux allers et retours

quotidiens 220 jours par an et maximal de 21 allers et retours par semaine.

La collectivité intéressée par une liaison lançait une procédure d’appel d’offres et

formulait une demande de participation du fonds auprès du ministre chargé de

l’aviation civile. Un représentant de ce ministère assistait à la procédure de sélection

de la meilleure offre. A l’issue de la procédure, une convention tripartite de

délégation de service public était conclue entre l’Etat, la collectivité et le

transporteur aérien. La collectivité participait à la compensation financière. Le fonds

de péréquation des transports aériens prenait en charge de 70 à 80% de la

compensation (60% à 70% si la collectivité imposait une obligation tarifaire), dans la

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limite de 50% des recettes réalisées sur la liaison. Ces compensations ne devaient

pas introduire de distorsions de concurrence entre les transporteurs.

Les compensations versées par le fonds faisaient l’objet de règlements sous forme

d’acomptes et de soldes de régularisation au vu des résultats réels du transporteur

sur cette liaison, dans la limite du montant demandé pour chaque année

d’exploitation lors de l’appel d’offres.

Le FPTA, compte spécial du trésor, était alimenté par une taxe de péréquation due

par les entreprises de transport aérien sur le nombre de passagers embarquant dans

les aéroports de France continentale (donc hors Corse), quelle que soit leur

destination. Le montant de cette taxe était d’abord de 4 francs, avant d’être

progressivement réduit à 1 franc. Lors de la création du FIATA en 1999, cette taxe a

été remplacée par une taxe de l’aviation civile, toujours en vigueur, mais affectée à

d’autres usages.

Ces deux fonds successifs étaient gérés par un comité de gestion de quatorze puis

treize membres (quatre parlementaires, trois représentants des différentes

collectivités locales, six représentants de l’Etat en ce qui concerne le FPTA), présidé

par le ministre en charge de l’aviation civile. Le comité devait se réunir au moins une

fois par an. La direction des transports aériens en assurait le secrétariat.

Intérêts et limites pour le très haut débit

Bien que ce mécanisme soit aujourd’hui supprimé, il fournit une analogie

intéressante : il allouait à une multiplicité de transport des fonds réunis pour assurer

des contraintes d’aménagement du territoire dans un secteur libéralisé.

La désignation des transporteurs par appel d’offres limite toutefois l’analogie avec

les communications électroniques, car elle accordait une exclusivité au transporteur,

en lui accordant ainsi un monopole de fait sur la liaison concernée, comme cela se

rencontre dans les secteurs postaux et ferroviaires qui seront vus ci-après.

E) TRA NSPORT S FERROV I AIRE S

Mécanisme

L’organisation du transport ferroviaire français autour du monopole de la SNCF

institué par la loi d’orientation des transports intérieurs (LOTI) de 1982 n’a pendant

longtemps pas justifié de mettre en place une péréquation objective et

transparente, celle-ci étant réalisée au sein de la comptabilité de l’opérateur public.

L’Etat accordait en outre des contributions à la SNCF pour financer le coût des

dessertes régionales.

La directive 91/440, les trois « paquets ferroviaires » successifs de 1998/2001,

2002/2004 et 2004/2007 – la transposition du dernier paquet faisant l’objet du

projet de loi relatif à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires texte

en cours de discussion au Parlement –, et le règlement communautaire 1370/2007

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dit « obligations de service public » ( OSP ) ont amené les autorités françaises à

réfléchir progressivement aux mécanismes permettant de continuer à financer, une

fois le secteur libéralisé, l’entretien des infrastructures et l’exploitation des services

les moins rentables.

Le financement de l’aménagement du territoire est – et sera probablement – assuré

par plusieurs biais, directement liés à la structure de la libéralisation qui distingue

d’une part l’infrastructure et les services et, d’autre part, au sein de ceux-ci, les

services internationaux, nationaux et régionaux.

En premier lieu, les services de transport ferroviaire régionaux ne sont pas ouverts à

la concurrence, excluant ainsi tout écrémage des segments rentables de cette

activité.

En effet, le règlement OSP ne remet pas en cause la possibilité des Régions

d’attribuer un contrat de service public à un seul opérateur, sans même qu’elles

soient tenues de mettre en concurrence ce contrat. Des discussions sont toutefois

en cours pour permettre aux Régions d’avoir d’autres interlocuteurs que la SNCF,

mais les exploitants des services régionaux disposeront toujours d’un monopole

local, et pourront dans ce cadre bénéficier de compensations de charge de service

public destinées à couvrir les tarifs et l’achat de matériels roulant. La régionalisation

des transports ferroviaires, amorcée dés 1997 et généralisée en 2001, est donc

définitivement consacré par le règlement OSP.

Ensuite, là-encore dans le cadre de cette régionalisation, l’entretien et la

régénération des voies sont traités dans le cadre des contrats de plan Etat Région

(CPER), en partenariat avec Réseau ferré de France (RFF). Ces investissements sont

donc pris en charge par les Régions, l’Etat et RFF, la répartition faisant l’objet de

négociations au cas par cas. Par ailleurs, le coût des redevances d’accès au réseau de

RFF pour les transports régionaux est pris en charge par l’Etat, et non les Régions,

depuis un décret de novembre 2008.

En second lieu, l’ouverture à la concurrence ne concerne que le fret et les services

internationaux de transports de voyageurs, qui ont toutefois la possibilité, à titre

accessoire, de faire du « cabotage » au sein d’un même Etat-membre. L’accès des

transporteurs au réseau de RFF n’est toutefois pas absolu, celui-ci pouvant être

limité pour tenir compte de l’équilibre économique des contrats de service public. En

clair, une Région pourrait demander au régulateur ferroviaire de s’opposer à ce

qu’un opérateur international obère, en faisant du « cabotage », l’équilibre

économique et financier de son contrat de service public.

Surtout, la directive 2007/58 autorise, à son article 3 septies, la perception, auprès

des opérateurs ferroviaires, de redevances destinées à compenser des obligations de

service public imposées à un autre opérateur dans le cadre d’un contrat de service

public. Le texte en cours de discussion au Parlement ne prévoit toutefois pas la mise

en place d’un tel mécanisme en droit français.

73 / 107

Intérêts et limites pour le très haut débit

Le financement des missions d’aménagement territoire remplies par les transports

ferroviaires présente une différence essentielle avec les communications

électroniques : les secteurs les moins rentables ne sont pas véritablement ouverts à

la concurrence car, sur le transport régional, l’opérateur est assuré de conserver une

position monopolistique, qu’il ait été désigné ou pas à la suite d’une mise en

concurrence. Cet opérateur dispose donc d’un « secteur réservé »– à l’instar de La

Poste jusqu’en 2011 comme cela sera vu ci-après –. Cela limite l’écrémage des

segments les plus rentables, ce qui est impossible pour les communications

électroniques, les directives du « paquet télécom » ne prévoyant pas de telles

exceptions.

En outre, le financement de ces missions s’articule autour de la séparation

structurelle mise en place en 1997, ce qui permet de dissocier les dépenses

d’investissement portant sur les infrastructures, de celles d’exploitation, qui

couvrent à la fois le financement des tarifs préférentiels et du matériel roulant. En

matière de communications électroniques, il n’est pas certain qu’un financement

des déficits d’exploitation soit nécessaire pour le très haut débit, le besoin de

financement portant quasi-exclusivement sur les dépenses de premier établissement

du réseau. Et sur ce point, le mécanisme tripartite mis en place entre RFF, l’Etat et

les collectivités fournit un exemple intéressant de coopération de ces deux derniers

avec un opérateur de réseau. Cela étant, renvoyer aux CPER le soin de déterminer

les parts respectives de chacun est ici impossible. En effet, seul l’Etat sera toujours

présent en matière de communications électroniques, alors que d’autres

collectivités que la Région interviennent en matière de communications

électroniques et que, par définition, il existe une multiplicité d’opérateurs

susceptibles de recevoir des subsides.

F) AUT OROUT E S ET GR AN D S RESE AUX DE T R A NS PORT S

Modes de financement de la construction des autoroutes

L’Etat a contribué au financement du réseau autoroutier par l’intermédiaire de la

Caisse nationale des autoroutes (CNA), établissement public administratif créé en

1963. Plus précisément, cet établissement a pour mission de procurer aux sociétés

concessionnaires d'autoroutes les ressources destinées au financement de la

construction ou de l'aménagement des autoroutes donnant lieu à la perception de

péages.

Pour ce faire, la Caisse émet des emprunts sur les marchés français et

internationaux. Elle contracte également des emprunts auprès de certains

établissements financiers. L’établissement répartit le produit de ces emprunts entre

les collectivités ou sociétés ayant reçu la concession de la construction ou de

l’exploitation d’autoroutes.

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La CNA est administrée par un conseil de huit membres (cinq représentants de l’Etat,

le Commissaire général du Plan, le directeur général de la Caisse des dépôts et

consignations, un président de société d’économie mixte concessionnaire

d’autoroutes (SEMCA)).

Les ressources de la CNA comprennent le produit des emprunts émis, les sommes

versées par les concessionnaires en vue d’assurer le service de ces emprunts et de

couvrir les frais de fonctionnement de la caisse, ainsi que des ressources de

trésorerie.

Le produit des emprunts est mis à disposition des concessionnaires d’autoroutes.

Par ailleurs, la construction des autoroutes a également été facilitée par le

mécanisme dit de « l’adossement ». Celui-ci consistait à financer la construction des

nouvelles liaisons grâce au produit des péages perçus sur les usagers des autoroutes

les plus anciennes d’un même concessionnaire. En effet, une prolongation de la

durée du contrat était accordée l’exploitant s’il finançait la construction de

l’extension de son réseau par le produit des péages de ses sections en activité.

Il a été mis fin à ce système en 2001.

Le rôle de l’AFIFT

L’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFIFT) a été

créée en 2004 à l’initiative du Comité interministériel d’aménagement et de

développement du territoire (CIADT) du 18 décembre 2003, afin de permettre une

capacité d’intervention publique dans les grands projets d’infrastructures

ferroviaires, fluviales, maritimes et routières. Les trois quarts de ces projets à réaliser

d’ici 2025 sont non routiers et représentent un coût prévisionnel de 25 milliards

d’euros.

Il s’agit d’un établissement public administratif dont la vocation est d’affecter ses

ressources aux investissements dans ces grandes infrastructures de transport. Ses

moyens d’action sont notamment le versement de subventions d’investissement,

des avances remboursables non rémunérées, l’apport de fonds de concours et la

participation au financement des investissements prévus par des contrats de

partenariat. L’AFIFT est placée sous la tutelle du ministre chargé des transports.

L’établissement est administré par un conseil de douze membres comprenant six

représentants de l’Etat, deux parlementaires, deux élus locaux et deux personnalités

qualifiées. A l’exception des représentants de l’Etat, ces membres sont nommés par

décret pour une durée de trois ans renouvelable.

A l’origine, les ressources de l’AFIFT provenaient essentiellement des dividendes

versées à l’Etat par les SEMCA. L’exploitation du secteur autoroutier, désormais

globalement rentable, permettait ainsi de financer la construction de nouvelles

infrastructures, notamment ferroviaires.

Lorsque la totalité des SEMCA a été privatisée (en 2005), l’agence a été privée de ce

financement, qui a été remplacé par d’autres ressources routières, telles que la taxe

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d’aménagement du territoire, calculée en fonction du nombre de kilomètres

parcourus par les usagers, des redevances d’occupation domaniale, ou une fraction

du produit des amendes de radars automatiques. En outre, un quart environ du

produit de la privatisation des autoroutes a été affecté à l’AFIFT, soit 4 milliards

d’euros.

Selon le rapport Carrez sur le projet de loi de finances pour 2009, cette dernière

ressource devrait très rapidement être épuisée, et les autres ressources ne suffisent

pas à faire face aux besoins de l’AFIFT. C’est pourquoi la loi de finances pour 2009 a

prévu une augmentation de l’affectation à l’AFIFT du produit des amendes de radars

automatiques, en valeur relative. Par ailleurs, l’agence bénéficie de dotations

directes de l’Etat : en 2009, une subvention budgétaire de 1,2 milliards d’euros sera

versée à l’AFIFT.

Les SEMCA

L’équilibre des trésoreries des SEMCA a longtemps été assuré par une péréquation

de leurs ressources. Ce système a permis l’entretien et le développement des

autoroutes françaises, tout en exerçant une attraction sur les investisseurs privés,

ainsi incités à contribuer à l’édification du réseau.

Un établissement public administratif dénommé « Autoroutes de France » (AdF)

avait pour mission d’assurer une péréquation des résultats financiers des SEMCA, ce

qui permettait d’assurer l’exploitation des autoroutes les moins rentables. L’Etat a

transféré à cet établissement, à sa création en 1982, les créances qu’il détenait sur

les SEMCA, telles que des avances budgétaires, les garanties d’emprunt et les

apports en nature que la loi l’autorise à leur octroyer pour favoriser la construction

des infrastructures autoroutières.

En contrepartie, AdF percevait les excédents de trésorerie des SEMCA bénéficiaires.

L’établissement public disposait de la faculté de consentir aux SEMCA des apports en

fonds propres, notamment sous la forme de prises de participations et d’avances

d’actionnaires, lorsque cela était nécessaire.

Autoroutes de France était administré par un conseil d’administration de vingt

membres (un président désigné par décret parmi les membres du Conseil d’Etat, de

la Cour des comptes ou de l’Inspection générale des finances, dix représentants de

l’Etat, deux parlementaires, six représentants des collectivités territoriales

actionnaires et un représentant des présidents des SEMCA). La Caisse des dépôts et

consignations assurait la gestion de l’établissement sous le contrôle du conseil

d’administration, qui remboursait chaque année les dépenses afférentes à celle-ci.

Lorsque le cumul des déficits de trésorerie des SEMCA dépassait les ressources

procurées par les excédents, AdF était autorisé à recourir à l’emprunt pour financer

les besoins complémentaires (ce fut le cas en 1986 et 1987).

Outre les sommes versées par les SEMCA, les ressources de l’établissement

comprenaient les produits d’avances et les dotations reçues de l’Etat, ainsi que les

produits d’emprunts.

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Critiqué par la Cour des comptes pour l’opacité de gestion qu’il engendrait dans un

contexte de plus grande ouverture aux capitaux privés des SEMCA, AdF a été dissout

par la loi de finances pour 2009. En effet, son existence ne se justifiait plus dès lors

que les SEMCA ont été privatisées.

Intérêts et limites pour le très haut débit

Au-delà de son intérêt historique, le cas des autoroutes est instructif à deux titres.

D’abord, rien n’empêche de multiplier les mécanismes pour financer la construction

et l’exploitation d’une infrastructure. Fonds obtenus par la CNA sur les marchés

internationaux et ensuite prêtés aux concessionnaires, garanties d’emprunt,

péréquation de charges d’exploitation, adossement etc. ont été utilisés ici. Seul

l’adossement est aujourd’hui prohibé par le droit communautaire, tous les autres

étant encore juridiquement viables.

Ensuite, l’assèchement rapide des sources de financement de l’AFIFT souligne la

nécessité de sanctuariser, dès l’origine, les ressources d’un éventuel fonds de

couverture du territoire en très haut débit, par le biais de prélèvements spécifiques

et/ou de l’affectation de recettes pérennes. A défaut, son fonctionnement dépendra

d’éléments conjoncturels, alors qu’il aura pour ambition de répondre à une logique

de long terme.

G) POST E

Mécanisme

Le secteur postal traverse actuellement une phase de transition. Aujourd’hui, dans le

cadre de la loi relative à la régulation des activités postales du 20 mai 2005, La Poste

continue à bénéficier d’un monopole sur un certain nombre de prestations, le «

secteur réservé », pour lui permettre de financer ses activités de service universel.

L’ouverture totale à la concurrence, prévue pour le 1er janvier 2011 au plus tard par

la troisième directive postale 2008/06, condamne toutefois ce secteur réservé. Le

financement du service universel sera alors assuré par le biais du Fonds

compensation du service postal universel, abondé par les différents opérateurs

postaux. Bien que le principe de ce Fonds soit déjà posé par l’article L.2 du code des

postes et des communications électroniques, le législateur sera très probablement

amené à intervenir de nouveau.

Le mécanisme actuel présenté ci-après est donc seulement transitoire.

Dans le cadre de la loi du 20 mai 2005, La Poste contribue au moyen de son réseau

de points de contacts et de bureaux de poste, au maillage territorial du pays,

notamment en zones rurales ou montagnardes. Un Fonds postal national de

péréquation territoriale, a été créé pour isoler, dans la comptabilité de La Poste, les

ressources affectées au financement de ses missions en matière d’aménagement du

territoire et de service universel.

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Le mécanisme prévoit que La Poste, l’Association des maires de France et l’Etat

concluent un contrat pluriannuel de présence postale territoriale, qui fixe les lignes

directrices du Fonds postal national de péréquation territoriale pour sa période

d’application. Le dernier contrat en date a été conclu pour la période 2008/2010 le

19 novembre 2007.

L’obligation de présence territoriale de La Poste s’exprime sous deux formes dans ce

contrat :

- D’une part, au titre de sa mission d’aménagement territoire, l’objectif étant

d’empêcher que, sauf circonstances exceptionnelles, plus de 10% de la

population d’un département se trouve éloignée de plus de 5 kilomètres ou de

plus de 20 minutes de trajet automobile, d’un point de contact de son réseau ;

- D’autre part, en tant qu’opérateur en charge du service universel, elle doit

garantir qu’au moins 99% de la population nationale et au moins 95 % de la

population de chaque département doivent être à moins de 10 kilomètres d’un

point de contact et toutes les communes de plus de 10 000 habitants disposent

d’au moins un bureau de Poste par tranche de 20 000 habitants. Cet objectif est

moins contraignant que celui résultant de sa mission d’aménagement du

territoire.

La ressource du fonds est principalement constituée de l’abattement de fiscalité

locale dont La Poste bénéficie depuis 1990. Les bases d’imposition de

l’établissement public font en effet l’objet d’un abattement égal à 85% de leur

montant, en raison des contraintes de desserte de l’ensemble du territoire national

et de la participation à l’aménagement du territoire qui lui incombent. Cet

abattement n’est pas compensé par l’Etat auprès des collectivités territoriales.

Alimenté par le produit de cet abattement, le montant de ce fonds est actuellement

de l’ordre de 130 à 140 millions d’euros par an.

Le contrat de présence territoriale constate l’évolution du montant des ressources

du fonds et en établit une prévision sur la période d’application.

La répartition entre les départements se fait selon deux critères : 70 % de

l’enveloppe est répartie au prorata du nombre de points de contacts au sein des

zones dites prioritaires : zones rurales y compris les zones de revitalisation rurales,

zones de montagnes et zones urbaines sensibles ; les 30 % restant de l’enveloppe est

répartie, pour chaque département, en fonction de nombre d’habitant de chaque

zone prioritaire, auxquelles est attribué un « coefficient de handicap » fonction

d’isolement du degré géographique ou économique.

Ce contrat détermine également les modalités de répartition du financement dans

les départements, avec le concours des commissions départementales de la

présence postale territoriale (CDPPT).

Les CDPPT regroupent, dans chaque département, quatre conseillers municipaux,

deux conseillers généraux et deux conseillers régionaux. Elles ont pour rôle de

donner un avis sur le projet de maillage des points de contact de La Poste dans le

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département, de proposer la répartition de la dotation départementale du Fonds

postal national de péréquation territoriale, d’être informée par La Poste des projets

d’évolution des points de contact et de consulter toute personne susceptible

d’apporter des informations utiles à l’accomplissement de ces missions.

Au total, la répartition du fonds est effectuée en priorité au profit des communes

situées en zones de revitalisation rurale, en zones de montagne et en zones urbaines

sensibles.

A l’avenir, dans le cadre de la transposition de la directive 2008/06, le financement

du service universel et des autres missions de service public confiées à La Poste

devront obligatoirement être dissociés. Selon cette directive, les ressources du

Fonds de compensation du service universel ne peuvent qu’être affectées au

financement de celui-ci, dont le périmètre exclut les missions de service public

traditionnellement confiées à La Poste (accessibilité bancaire, aménagement du

territoire, transport de la presse). Il est donc probable qu’un ou plusieurs

conventionnements particuliers entre l’Etat et La Poste viennent compléter, pour les

missions de service public, le mécanisme de financement propre au service

universel.

Intérêts et limites pour le très haut débit

En dépit des limites de l’analogie, le secteur postal préfigure la distorsion existant en

matière de communications électroniques entre les obligations issues du service

universel et un objectif national plus ambitieux. De fait, rien n’interdit à un Etat-

membre d’aller au-delà du service universel, mais il lui faudra alors respecter les

règles particulières applicables au régime des aides d’Etat.

Ainsi, tout objectif supérieur à celui contenu dans les directives du « paquet

télécom » pour le très haut débit devra tenir du régime propre des aides d’Etat. Or si

en matière postale il est évident que seule La Poste sera en mesure de réaliser ces

missions, ce qui facilitera leur prise en charge par le biais d’une relation directe avec

l’Etat respectant les principes posés par l’arrêt Altmark de la Cour de justice des

Communautés européennes, il en sera différemment en matière de

communications, compte tenu de la multiplicité à la fois des autorités organisatrices

et des bénéficiaires des aides. Une notification à la Commission européenne

Bruxelles du régime mis en place sera très probablement nécessaire.

Enfin, l’attribution des aides en fonction des « handicaps » de chaque territoire

montre également que l’élaboration de critères d’éligibilité au bénéfice de certains

financements particuliers est possible en matière d’industrie de réseaux. A ce

propos, la loi relative à la lutte contre la fracture numérique votée par le Sénat en

première lecture le 20 juillet dernier renvoie d’ailleurs à l’ARCEP le soin de

circonscrire ces zones.

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H) EAU

Mécanisme

Jusqu’à sa suppression par la loi de finances pour 2005, il existait dans le secteur de

la distribution d’eau un fonds national pour le développement des adductions d’eau

(FNDAE). Ce fonds, créé en 1954, avait pour vocation d’aider par dotation les

communes rurales pour leurs travaux d’alimentation en eau potable et

d’assainissement. Jusqu’en 1995, il pouvait également accorder des prêts à taux

réduit à ces communes maîtres d’ouvrages dans ce domaine.

Ce fonds était alimenté par une redevance sur le volume des consommations d’eau

potable distribuée, par le produit des annuités versées des prêts qu’il consentait

(lorsqu’il en avait encore la compétence), et par toutes recettes ou dotations

affectées, au titre desquelles un prélèvement sur les recettes du Pari mutuel.

Le FNDAE était géré par le ministère chargé de l’agriculture. Celui-ci était assisté

d’un comité consultatif de seize membres ainsi répartis : quatre parlementaires, un

représentant du Conseil économique et social, cinq représentants des collectivités

territoriales, quatre représentants de l’Etat, un représentant de la FNCCR, et qui

était présidé par un conseiller d’Etat.

La redevance était due par les services de distribution d’eau potable, quel que soit le

mode d’exploitation, en fonction du volume d’eau consommée. Les directions

départementales de l’équipement (DDE) et les directions départementales de

l’agriculture et de la forêt (DDAF) exerçaient le contrôle du recouvrement des

redevances, dont étaient chargés les distributeurs à titre gratuit. Après

recouvrement, le distributeur disposait d’un délai d’un mois pour verser au Trésor le

montant des redevances perçues. Le redevable de la redevance était le distributeur

et non l’usager ; la répercussion du coût de celle-ci sur le consommateur n’était donc

pas obligatoire.

Les aides financières du FNDAE étaient réparties par département sous forme de

dotations affectées à l’eau et à l’assainissement. Le département fixait la répartition

de ces dotations entre les communes rurales et leurs groupements qui réalisaient

des travaux d’alimentation en eau potable et d’assainissement. En 1997, l’aide du

fonds a été étendue aux travaux de maîtrise des pollutions d’origine agricole.

En 2004, le montant de cette taxe était de 21,34 euros pour 1.000 m³ d’eau

consommée.

Depuis 2005, les Agences de l’eau prennent en charge le financement des

investissements des communes rurales relatifs à l’eau potable et à l’assainissement.

Une majoration des redevances dues aux agences a été opérée (de l’ordre de 31

euros pour 1.000 m³ d’eau prélevée en 2005 contre 17 euros en 2004).

80 / 107

Intérêts et limites pour le très haut débit

Au-delà de la multiplicité des sources de financement, dont l’utilité a été soulignée

pour le financement des infrastructures autoroutières, on observera l’existence d’un

prélèvement opportuniste portant notamment sur les recettes du pari mutuel. Pour

le très haut débit, au vu de ce précédent, un prélèvement sur les recettes futures

des jeux en lignes n’apparaît pas si incongru.

I ) PRESSE

Le secteur de la presse constitue l’un des secteurs les plus aidés par l’Etat ; il existe

près de 18 mécanismes de soutiens, directs et indirects (exemption fiscales et

sociales, tarifs préférentiels de La Poste).

Dans ce cadre, deux grands mécanismes participent d’une mission d’intérêt général :

les aides à la diffusion et les aides à la pluralité des titres nationaux et locaux.

Au titre de la diffusion, on mentionnera l’aide à la distribution de la presse

quotidienne régionale et les tarifs postaux préférentiels accordés aux entreprises de

presse, et de la pluralité des titres locaux, le Fonds d’aide aux quotidiens régionaux,

départementaux et locaux d’information politique et générale à faibles ressources

de petites annonces.

L’aide à la distribution de la presse nationale quotidienne et généraliste

Pour mémoire, en vertu de la loi Bichet du 2 avril 1947, les quotidiens nationaux

d’information politique et générale sont distribués selon deux modes : soit

directement par l’éditeur du titre, par ses propres moyens, soit par le groupage,

dans le cadre de sociétés coopératives regroupant plusieurs éditeurs. Dans ce

dernier cas, ces sociétés coopératives peuvent sous-traiter la distribution à une

société commerciale, à condition d’en détenir conjointement le contrôle. Il existe

une seule société de ce type chargée de la diffusion de la presse quotidienne

nationale : les Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP). Les autres

coopératives, à savoir les Messageries lyonnaises de presse (MLP) et la Société

auxiliaire pour l’exploitation et le transport de la presse (TP), ne distribuent pas la

presse quotidienne nationale.

Les NMPP supportent des contraintes logistiques et d’urgence spécifiquement

attachées à cette activité exercée sur l’ensemble du territoire national, et pratiquent

de ce fait des tarifs de diffusion élevés. Elles exercent historiquement une forme de

péréquation interne entre la distribution de la presse nationale, déficitaire, et celle

de la presse magazine, rentable. Cela étant, les éditeurs de magazines sont libres de

supporter ces charges ou pas, car à défaut ils peuvent s’adresser aux messageries ne

distribuant que des magazines. La chute du nombre d’exemplaires vendus par les

quotidiens nationaux ne leur permettant plus de supporter de tels tarifs, le

gouvernement a décidé en 2002 de prendre en partie en charge ces coûts de

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diffusion. Cette aide annuelle est accordée à chaque éditeur en fonction du nombre

de titres vendus.

L’aide au transport postal de la presse

La presse a toujours historiquement bénéficié de tarifs privilégiés de la part de

l’opérateur postal. Au cours des vingt cinq dernières années, ces tarifs résultaient

d’accord tripartites conclus entre l’Etat, les représentants de la presse et La Poste, et

participaient des missions de service public de celle-ci.

La libéralisation du secteur postal a conduit ces trois acteurs à remettre à plat ce

mécanisme, pour le maintenir une fois le marché postal ouvert à la concurrence.

Ces tarifs spécifiques appliqués à la presse sont prévus à l’article R.1-1 du code des

postes et des communications électronique et intégrés dans le champ du service

universel postal. Ils font l’objet d’une compensation particulière prise en charge

intégralement par l’Etat.

Les accords dits « Schwartz » de 2008 prévoient ainsi l’octroi d’une subvention

annuelle de l’Etat à La Poste sur la période 2009/2015 (à hauteur de 242 millions

d’euros jusqu’en 2011, puis 232 millions d’euros en 2012 pour parvenir à 180

millions d’euros en 2015), ainsi qu’une augmentation progressive des tarifs de

transport de la presse. Cette subvention se décompose en :

- une aide au pluralisme pour la diffusion de la presse d’information politique et

générale, se traduisant par une minoration de la facture des éditeurs pour le

transport des titres de la presse d’information politique et générale. Cette aide

est gérée directement par la direction du développement des médias.

- une aide à la distribution en zones peu denses, compensant une partie des

surcoûts liés à l’acheminement dans les zones considérées et permettant ainsi le

maintien d’un tarif égal sur tout le territoire, est versée à l’opérateur postal.

Cette aide est gérée directement par la direction générale des entreprises.

Cela étant, à l’avenir, ces tarifs préférentiels ne seront pas financés par le fonds de

service universel, car la directive postale 2008/06 ne permet plus d’affecter ses

ressources, qui seront prélevées sur la communauté des opérateurs, à de telles

dépenses. Ils seront donc directement compensés par l’Etat.

Le fonds d’aide aux quotidiens régionaux et locaux d’information

Instituée en 1989 (décret n° 89-528 du 28 juillet 1989 modifié), cette aide est

réservée aux quotidiens de langue française d’information politique et générale à

diffusion régionale, départementale ou locale, et dont les recettes de petites

annonces n’excèdent pas 5 % de leurs recettes publicitaires totales. En 1997, le

bénéfice de ce fonds d’aide a été élargi aux quotidiens d’information politique et

générale à diffusion régionale, départementale ou locale dont les recettes de petites

annonces n’excèdent pas 15 % de leurs recettes publicitaires totales et dont la

diffusion est assurée à plus de 25 % par voie d’abonnement postal.

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Intérêts et limites pour le très haut débit

Les différents mécanismes d’aides présentés ci-dessus sont d’un intérêt limité pour

le très haut débit, pour deux raisons.

En premier lieu, l’empilement des différents régimes résulte des réponses données

par l’Etat aux difficultés successives rencontrées par le secteur de la presse écrite, et

non de l’ouverture à la concurrence d’un secteur auparavant sous régime de

monopole.

En second lieu, il n’existe pas de prélèvements dont le produit est affecté,

directement ou indirectement, à alimenter ces différentes aides. En effet, les

ressources nécessaires sont inscrites chaque année dans la loi de finances, et sont

ensuite redistribuées, pour la plupart, directement par la Direction du

développement des médias en fonction des règles d’éligibilité posées par décret.

Dans ces conditions, l’analogie avec le très haut débit est limitée, car il semble

préférable d’identifier, a minima sur le moyen terme, des recettes pérennes, qui

seront ensuite affectées par une entité qui devrait idéalement regrouper l’Etat et les

collectivités.

J) AUD IOV IS UEL

Mécanisme

Il ne s’agit pas à proprement parler d’un mécanisme de péréquation horizontale. Il

est toutefois pertinent de le présenter, car il repose pour partie sur le chiffre

d’affaires des opérateurs de communications électroniques.

La suppression partielle de la publicité dans l’audiovisuel public a entrainé un

manque à gagner du groupe France Télévisions estimé pour 2009 à 450 millions

d’euros par la Commission pour la nouvelle télévision publique. Afin de compenser

ces pertes, la loi de finances pour 2009 a prévu une dotation budgétaire de 450

millions au groupe télévisuel. Une programmation pluriannuelle prévoit en outre

une augmentation de ces crédits de 1,75% par an, entraînant une hausse de 7,9

millions d’euros en 2010, puis 8,1 millions d’euros en 2011, des crédits du

programme budgétaire 313 « Contribution au financement de l’audiovisuel public »

de la mission « Médias ».

La préoccupation de préserver les finances publiques a conduit le législateur à

instaurer deux taxes destinées à couvrir ces dotations. La loi relative à la

communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision en date

du 5 mars 2009 créé ainsi une nouvelle taxe sur la publicité diffusée sur les chaînes

de télévision et une taxe sur les services fournis par les opérateurs de

communications électroniques.

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• Taxe sur la publicité diffusée sur les chaînes de télévision

La taxe sur la publicité diffusée est désormais due par les différentes chaînes de

télévision dont le siège est en France, qu’elles soient diffusées sur le réseau hertzien

analogique ou numérique, ou par d’autres moyens (câble, satellite).

La taxe est assise sur le montant des sommes versées par les annonceurs à ces

télévisions ou à leurs régisseurs pour la diffusion de leurs messages publicitaires,

soustraction faite du montant de la TVA. Les recettes publicitaires des sites internet

de ces chaines ne sont pas concernées, contrairement aux sommes versées dans le

cadre de parrainages d’émissions.

Le taux de cette taxe est de 3% du montant des versements annuels, avec un

abattement de 11 millions d’euros sur l’assiette. La taxe est calculée pour chaque

service de télévision, ce qui signifie que les différentes chaines d’un même groupe

(M6 et W9, par exemple) paieront séparément. Ceci est avantageux pour les

groupes, dans la mesure où l’abattement de 11 millions d’euros s’appliquera pour

chaque chaîne. En outre, pour les chaînes diffusées autrement que par voie

hertzienne terrestre en mode analogique (télévision numérique terrestre (TNT),

câble, satellite…), le taux de la taxe est fixé à 1,5% pour 2009, 2% pour 2010 et 2,5%

pour 2011.

Il existe enfin un mécanisme de plafonnement du montant de la taxe, celui-ci ne

pouvant excéder la moitié la moitié de la différence entre les recettes publicitaires

constatées pour une année n et les recettes perçues en 2008. Un taux minimal de

1,5% de taxation des recettes publicitaires est toutefois applicable, en tout état de

cause.

Les rapporteurs du projet de loi ont insisté sur le manque de dynamisme du produit

de cette taxe et son caractère aléatoire. Ce produit, estimé en prévision à un

montant compris entre 60 et 70 millions d’euros pour 2009 est, en outre, insuffisant

pour compenser les dotations de l’Etat au groupe France Télévisions (Rapport Morin-

Desailly et Thiollière pour le Sénat en date du 6 janvier 2009).

• Taxe sur les opérateurs de communications électroniques

La loi du 5 mars 2009 créé également une taxe due par tout opérateur de

communications électroniques qui fournit un service en France et qui a fait l’objet

d’une déclaration préalable auprès de l’ARCEP. Il s’agit principalement des

opérateurs de téléphonie et des fournisseurs d’accès à internet.

L’assiette de cette taxe est constituée du montant, hors TVA, des abonnements et

autres sommes acquittées par les usagers à ces exploitants. En sont néanmoins

exclus les montants correspondant aux prestations d’interconnexion et d’accès au

réseau, aux prestations de diffusion ou de transport des services de communication

audiovisuelle (télévision par ADSL, par exemple) ou aux prestations de services

universels de renseignement téléphonique. Les dotations aux amortissements, dont

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la durée est d’au moins dix ans, afférentes aux matériels et équipements nécessaires

aux infrastructures et réseaux de communications électroniques, sont déduites de

l’assiette de la taxe.

Ces sommes sont taxées selon un taux de 0,9%, avec un abattement de 5 millions

d’euros.

Le Conseil constitutionnel s’est prononcé dans le sens de la constitutionnalité de

cette taxe, en considérant qu’il était loisible au législateur de compenser les

dotations budgétaires de l’Etat en instituant une nouvelle imposition pour financer

cette charge. Le juge constitutionnel a également considéré qu’il n’existait pas

d’obstacle à ce que la taxe soit assise sur les recettes des opérateurs de

communications électroniques, alors même qu’ils n’interviennent pas directement

dans le secteur audiovisuel.

Selon le rapport Morin-Desailly et Thiollière précité, le produit de cette taxe est

évalué à 347 millions d’euros pour 2009.

Intérêts et limites pour le très haut débit

La mise en place d’un tel mode de financement fournirait sans doute une source

conséquente et solide de financement d’un éventuel fonds national d’aménagement

numérique. C’est d’ailleurs la proposition du rapport du Conseil économique, social

et environnemental de février 2009 sur la couverture numérique des territoires,

reprise et quelques peu amendée par le sénateur Pintat dans sa proposition de loi

pour lutter contre la fracture numérique discutée au Sénat en juillet dernier.

Le CESE propose qu’un fonds national similaire au FACE soit alimenté par des

prélèvements sur les abonnements aux services de communications électroniques

(téléphonie fixe, ADSL et mobile), le taux (0,50 euros/mois) étant le cas échéant

modulé en fonction de la qualité de service. Ce fonds national serait complété par

des fonds régionaux alimentés par les collectivités (régions ou syndicat mixtes

régionaux), leurs contributions étant proportionnelles à leur population (10

euros/h/an).

A la suite de la discussion de la proposition de loi du Sénateur Pintat en première

lecture au Sénat le 20 juillet dernier, la création d’un Fonds national d’aménagement

numérique a été décidée, qui sera administré conjointement par l’Etat et les

collectivités sur un mode proche de celui du FACE présenté ci-avant. En revanche,

aucune source de financement n’a été instituée, le sujet étant renvoyé à la

discussion devant l’Assemblée nationale.

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II- AUTRES TYPES D’AIDES ENVISAGEABLES POUR LES OPERATEURS

Le Code général des collectivités territoriales (CGCT) et quelques autres dispositifs

légaux, souvent inspirés d’outils utilisés par l’Etat, offrent un certain nombre de

possibilités d’interventions économiques des collectivités territoriales pour favoriser

le développement économique local et l’aménagement du territoire. Ces différentes

aides pourraient être adaptées ou inspirer des solutions pour favoriser le

développement privé du réseau à très haut débit dans les zones géographiquement

peu rentables.

A) PRET S A T A UX BO NI FIE

Mécanisme

Les différentes collectivités territoriales peuvent accorder des prêts à des entreprises

dont l’activité revêt un intérêt économique local, à des conditions plus favorables

que celles offertes par le marché. Un arrêté ministériel a néanmoins fixé un taux

minimum de crédit des collectivités territoriales, calculé selon une moyenne de trois

taux. La région seule a compétence pour définir le régime et décider de l’octroi des

aides. Les départements, les communes et leurs groupements peuvent toutefois

participer au financement de ces aides dans le cadre d’une convention passée avec

la région. Ces collectivités ont même la possibilité de mettre en œuvre ces aides en

cas d’accord avec la région.

Intérêts et limites pour le très haut débit

Il s’agit sans nul doute d’un outil intéressant, mais il doit pouvoir être complété par

d’autres mécanismes, le cas échéant alternatif. L’idée serait qu’un éventuel fonds

national d’aménagement numérique puisse, au coté d’autres dispositifs de soutien

(subventions, garanties d’emprunts etc.) soit en mesure d’accorder de tels prêts à

taux bonifiés.

B) GAR ANT IES D ’E MPRU NT

Mécanisme

Les différentes collectivités territoriales (et leurs établissements publics) ont la

possibilité de garantir les emprunts obtenus par une entreprise auprès d’un

établissement de crédit, dans les conditions prévues aux articles L.2251-1 et suivants

du code général des collectivités territoriales.

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La garantie d’emprunt consiste en un engagement de rembourser le prêt contracté

par une tierce personne auprès d’un établissement de crédit. Il prend la forme d’un

contrat distinct du contrat principal de prêt et comporte souvent une clause dite de

« remboursement à la première demande ». Le garant peut moduler son

engagement au moment de la conclusion de son contrat de garantie.

Un établissement de crédit sera particulièrement réceptif à une demande de prêt

assortie d’une garantie d’une collectivité publique, dont la solvabilité est

généralement incontestable. Partant, les conditions d’octroi du prêt seront plus

avantageuses pour l’emprunteur que celles qui sont normalement consenties sur les

marchés financiers.

La Commission européenne a énoncé, dans une communication de mars 2000, les

conditions dans lesquelles une garantie d’emprunt d’une collectivité est conforme

au droit communautaire. Ce sera le cas si cette garantie ne porte pas sur plus de 80%

du prêt, si l’entreprise aurait obtenu le prêt au prix du marché sans elle (ce qui

suppose nécessairement que celle-ci ne soit pas en difficulté financière), et si la

garantie est rémunérée par l’emprunteur au prix du marché.

En droit interne, il est nécessaire que l’opération réponde à un intérêt général

économique. La collectivité publique ne peut en outre accorder sa garantie que pour

autant qu’elle n’ait pas atteint un plafond au-delà duquel sa propre capacité à

garantir se bloque. Le CGCT impose ainsi un plafonnement en valeur absolue de la

capacité à garantir de la collectivité et la division des risques qu’elle prend.

A ce titre, le montant total des annuités garanties au profit d’un même débiteur ne

peut dépasser 10% de la capacité à garantir de la collectivité. La garantie publique

(une ou plusieurs collectivités ensemble) ne peut porter au plus que sur 50% des

sommes empruntées, ce qui contraint le prêteur à trouver une autre garantie.

Cette quotité peut être portée à 80% lorsque la garantie bénéficie à des entreprises

chargées d’une mission d’aménagement. La garantie peut même être totale lorsque

l’opération projetée concerne la construction de logements réalisés par des

organismes d’habitations à loyer modéré ou des sociétés d’économie mixte.

L’assemblée délibérante de la collectivité est seule compétente pour accorder une

garantie d’emprunt. Chaque élu doit avoir été précisément informé des conditions

du contrat, à peine de nullité de l’opération.

La défaillance de l’emprunteur rend la collectivité garante débitrice à sa place.

Lorsqu’il existe plusieurs garants, le prêteur peut choisir de n’en poursuivre qu’un,

qui pourra se retourner contre les autres.

Ce mécanisme rencontre un grand succès, mais n’est pas dépourvu de tout risque

pour les finances locales.

Par ailleurs, il convient de préciser que la garantie qu’accorde la collectivité dans le

cadre, par exemple, d’une délégation de service public, n’est pas soumise à ce

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régime particulier, au motif qu’elle s’inscrit dans le cadre de l’exécution d’un service

public et non d’une simple opération d’intérêt général.

Intérêts et limites pour le très haut débit

Le mécanisme de la garantie d’emprunt constitue également un outil, peu coûteux

mais sans doute insuffisant à lui seul, qui permettrait de faciliter le déploiement de

réseaux très haut débit. Ce mécanisme n’a pas été utilisé pour faciliter le

financement des réseaux de collecte déployé sous l’empire de l’article L.1425-1 du

code général des collectivités territoriales depuis 2004, les soutiens financiers se

limitant à l’octroi de subventions. D’ailleurs, à droit constant, une collectivité

pourrait d’ailleurs accorder sa garantie d’emprunt à son délégataire de service

public, le cas échéant en complément d’une subvention, à condition de la valoriser

en tant qu’aide publique.

Un mécanisme de financement du déploiement des réseaux très haut débit pourrait

prévoir d’adosser des garanties d’emprunt à un fonds spécifique (le Fonds national

d’aménagement numérique), qui serait utilisé tantôt pour financer les déploiements

sous forme de subventions, accorder des prêts à taux bonifiés ou de simples

garanties d’emprunts.

A cet égard, dans le cadre de l’article 6 de la loi sur l’accélération des programmes

d’investissement du 4 février 2009, le Gouvernement a mis en place un fonds de

garantie de 10 milliards destiné à faciliter le montage financier des contrats publics

de l’Etat, des collectivités et de leurs établissements publics. Sont éligibles un certain

nombre de projets, faisant l’objet de contrats de partenariats, de concession de

travaux de l’Etat et délégations de service public des collectivités, que l’Etat juge «

prioritaires ». Cette garantie, rémunérée, est accordée aux prêts et titres de

créances finançant les entreprises titulaires de ces contrats, et ne peut dépasser 80%

de la dette adossée au projet. C’est un Comité de garantie, associé à la Mission

d’appui à la réalisation des contrats de partenariats, qui est chargé de les accorder.

Une adaptation de ce mécanisme au déploiement des réseaux très haut débit serait

possible, et sûrement pertinente.

C) PRISE E N CH AR GE DES CO MMI S SIO N S DE G AR ANT IES D ’EMP RU NT S

ACCOR DEE S P AR L E S B A NQ UES A UX E NT REPRI SE S

Mécanisme

Cette solution présente moins de risques pour les collectivités que les garanties

d’emprunt. Il s’agit pour la personne publique de s’acquitter des commissions dues

par une entreprise aux établissements de crédits qui ont garanti son emprunt. Cette

aide ne peut pas être cumulée avec une garantie ou un cautionnement de la

collectivité portant sur le même emprunt. Elle s’inscrit dans le cadre d’une

convention générale passée entre la collectivité territoriale, le prêteur et le garant.

Cette convention définit la nature des opérations, les catégories d’emprunteur

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éligibles, le taux de prise en charge des commissions, la durée d’application et les

modalités de renouvellement de l’engagement. L’assemblée délibérante de la

collectivité fixe un montant maximal de dépenses annuelles.

Intérêts et limites pour le très haut débit

Il s’agit là encore d’un outil intéressant, mais qui serait en soi largement insuffisant.

Il pourrait toutefois répondre, dans certains cas, à une logique de certains projets

lancée par l’initiative privée, et donc en dehors du champ d’un service public.

D) PART IC IP AT IO N AU C APIT A L DE SOCIET E S DE GAR A NT IE ET DOT AT IO NS

EN F AV EUR D ’U N FO ND S D E G ARA NT IE

Mécanismes

Les collectivités territoriales ont encore la possibilité d’entrer dans le capital d’un

établissement de crédit revêtant la forme de sociétés anonymes ayant pour objet

exclusif de garantir les concours financiers à des entreprises nouvellement créées.

Ceci est subordonné à l’entrée de sociétés commerciales dont au moins un

établissement de crédit dans le capital de cette société. La participation publique

totale ne peut excéder 50% des participations. Une convention lie la collectivité et la

société à laquelle elle participe. Ces établissements de crédits peuvent ainsi garantir

les emprunts des entreprises, ce qui présente moins de risque qu’une garantie

directe de la collectivité.

Intérêts et limites pour le très haut débit

Ce mécanisme, ouvert aux collectivités depuis 2003, de participer aux fonds

commun de placement n’a pas rencontré un véritable succès. Il n’en reste pas

moins, comme cela a été évoqué à propos des garanties d’emprunt, qu’il s’agit pour

le très haut débit d’un outil utile.

La mise en place d’un fonds d’aménagement numérique, auquel participeraient

l’Etat et les collectivités, permettrait de prévoir dans les missions de celui-ci l’octroi

de telles garanties.

E) APPORT S EN C APIT AL

Mécanismes

Les communes et départements n’ont en principe pas le droit de participer au

capital de sociétés commerciales n’ayant pas pour objet d’exploiter les services

collectifs ou des activités d’intérêt général, telles que des sociétés d’économie mixte

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locales. Les collectivités peuvent toutefois déroger à cette interdiction lorsqu’elles y

ont été autorisées par décret en Conseil d’Etat.

Des dérogations sectorielles existent, notamment en faveur des sociétés de garantie

(voir ci-dessus), mais aussi pour les sociétés anonymes d’habitation à loyer modéré

et les sociétés locales d’exploitation du câble créées dans le cadre du Plan Câble.

Par ailleurs, les collectivités ont le droit de participer indirectement au capital de

sociétés par l’intermédiaire de sociétés d’économie mixte locale.

Enfin, les régions ont compétence pour participer au capital des sociétés de

développement régional (ou interrégional), qui ont pour vocation de mettre en

valeur des territoires défavorisés. Ces sociétés contribuent au développement

économique local par des prises de participation, crédits et cautions, en tant

qu’institutions financières investies d’une mission d’intérêt général. Elles jouissent

d’avantages tels que des exonérations fiscales.

Intérêts et limites pour le très haut débit

En matière d’aménagement numérique, peu de sociétés d’économie mixte locales

ont été créées pour établir et exploiter des réseaux d’initiative publique,

principalement à cause du manque de souplesse du droit de la commande publique

à l’égard de ces structures, qui doivent être mises en concurrence par leurs

collectivités actionnaires comme tout opérateur lambda. Il n’en reste pas moins que

la participation au capital d’une société demeure pour une collectivité, quel que soit

son niveau, un mode de partenariat pertinent avec les personnes privées. C’est

d’ailleurs, dans d’autres pays européens, un mode privilégié, y compris par le biais

de prises de participation minoritaires des collectivités.

Dans la foulée du plan France Numérique 2012, le gouvernement a d’ailleurs déposé

au Sénat un amendement, dans le cadre de la discussion de la loi relative à la lutte

contre la fracture numérique le 20 juillet dernier, permettant la prise de

participation minoritaire des collectivités au capital de sociétés ayant pour objet le

déploiement de réseaux très haut débit. Ce texte a été adopté et sera discuté à

l’automne à l’Assemblée nationale. Dans l’hypothèse ou ce texte serait promulgué,

ces sociétés pourraient bénéficier, à condition d’en remplir bien entendu les critères

d’éligibilité, les diverses aides que pourrait octroyer un fonds national

d’aménagement numérique.

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ANNEXE 3

ÉLEMENTS CARTOGRAPHIQUES

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I- ARRONDISSEMENT DE FAIBLE DENSITE : RODEZ

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II- ARRONDISSEMENT DE DENSITE MOYENNE : SAINT-OMER

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III- ARRONDISSEMENT DE DENSITE SUPERIEURE A LA MOYENNE : ETAMPES

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IV- IMBRICATION DES ZONES RENTABLES ET NON RENTABLES